' " · " ·· -τ.ιΓ^ '
(?<CMOLOGÎSCH
: iTiTUUÏDiîR
RiJvwUr-iÎVERSlTEIT
UTRECHT
■EXUBRc/·
■ghoogewe™
-ocr page 2-Ref
LCi
Ζψα
-ocr page 3-d
-ocr page 4-Qui apprend à les
^^VRAGE TRES UTILE AUX ORATEURS,
Poëtes, Peintres, Sculpteurs, Graveurs, & ge-
neralement à toutes fortes de Curieux
*'Khie Jsf" augmentée d''m grand nombre de Figures
avec des moralités, tirées la fhf^'art de
César RIPA./
Par J. B. de l'Academie Françoiiê,
Τ ο M Ε Ρ R Ε M I Ε R.
ADRIAN BRAAKMAN,dans le Beurs ftraat, prés
'"^Dimà l'Enfeignede la Ville d'Amfterdara. 1658.
Ε Recéuil de toutes fortes de Fi-
gures , d'Images & d'Emblè-
mes, imprimé tant de fois & beaucoup
augmenté dans cette Nouvelle Edition,
eft tiré des plus célébrés Auteurs de l'An-
tiquité, tant Grecs que Latins, qui ifc
font fort appliquez à cette Science & y
ont parfaitement bien réÎiffi. Pour s'y
attacher après eux avec fuccez, on ne
peut mieux faire que de les prendre pour
Guides, & de fe former fur de fi bous
Originaux & de iî excellcns Modèle?.
Aufli celui qui a fait ceReçiicil lésa tou-
jours eû devant les yeux & les a heureu-
sement imitez.
Les Images que l'Efprit invente foiit
les Simboles de nos penfces. Elles ap-
partiennent proprement aux Peintres &
autres femblables Ouvriers , qui par les
Couleurs & les Ombrages ont trouvé Tad -
mirable fecret de donner im Corps ù
nos penfées & de les rendre vifibles. ' ;
Les Anciens ont fort aimé ces ibrtés
d'Images,.témoin tant de diverfes pei.n^
* 2, ' turcs
tares qu'ils ont fait de leurs Dieux, &
•par lefquelles , comme par autant de
Voiles ingénieufement inventez, ils ont
enveloppé & caché tous les fccrcts de la
Nature 8c de la Philoibphie, & même
tous les ^iiftéres de la Théologie 6c de
la Religion.
C'eit de cette Source féconde que les
Poètes ont puifé toutes leurs Fables & les
explications qu'ils en ont données. Par
l'Image de Saturne , pour exemple, ils
ont voulu repréfenter le Temps qui dé-
vore fes propres Enfans , qui font les
Jours, les Mois & les Années. Parcel-
le de Jupiter Foudroyant, ils onteûdei·
fein de fignifier cette partie du Ciel où
fc forment la plûpart des Météores. Par
celle de Venus, ils ont eû intention d'ex-
primer rUnion de la première Matière
avec la Forme» d'où n;iiilênt la beauté
& la perfcétion de tous les Etres creéz,
& ainfi d'une infinité d'autres qu'il feroit
trop long de rapporter ici.
il y a une efpéce d'images qui com-
prend les chofcs qui font en l'Homme
même & qui en font inféparables, tel-
les que font fes Penfées, fss habitudes &
iis Vertus, qui font fort-à-propos peintes
fous la Figure Humaine, puifque l'Hom-
me
PREFACE,
mm, félon Ariftote, la mefure de tou-
tes chofes, fa forme extérieure doitauffi
être regardée comme la mefure desqua-
litez de fon Ame.
Ceux qui ont donné les Régies de
cette Science, en attribuent l'invention
aux Egiptiens, Se la regardent comme
une marque & un eftèt de l'abondance
deleurDoétrine Se de leur Sageflè.
Le defir de s'éclaircir des véritez ca-
chées Ibus ces miftérieufes Images fit ail-
ler Pitagore au fond de l'Egypte, d'où
étant retourné trés-habile & trés-fçavant
-il b'aquit tellement Teftime & la vénéfa-
tion de fes Concitoyens, qu'on changea
fa Maifon en un Temple qui fut folem-
nellement coniàcré à fon admirable Gé-
nie. Platon tira de ces Figures Hiéro-
ghfiques la meilleure partie de fa Doc-
trine. Et pour dire infiniment plus,
les Saints Prophètes envelopérent d'E-
nigmes leurs ucrez Oracles, & Jefus-
Chrift lui-même cacha fous des Simili-
tudes Se des Paraboles la plûpart des di-
vins fécrets de fa Ste. Religion & de fon
Royaume célefte.
Après cela il ne faut pas douter, que
l'Invention des Images nefoit, non-feu-
lement trés-ingénieufe & trés-agréable,
* 3 mais
niais encore fort-avantageufe & fort-uti-
le & très digne de la ciiriofîté de toutes
les Perfonnes fpirituelles & qui aiment
les belles choies.
Elles trouveront dans ce Receiiil une
grande quantité de Figures & d'Emblè-
mes de tout ce qu'on peut imaginer,
avec des explications & des Moralitez
rrés-belles Se trés-folides, dont on eft re-
devable à des Auteurs fort-fçavans& fort-
célébres. De-ibrte qu'on peut; dire que
les Lefteurs qui fçauront faire quelque
réflexion iur ce Livre & le bien goûter
y trouveront, non-feulement dequoi di-
vertir leur Efprit, mais auffi dequoi
l'inftruire , & y verront mille choies
fort-propres à rendre leur Imagination
belle , vive & féconde , à leur inipirer
même l'amour de la Vertu & la haine
du Vice, 8c à bien régler leurs mœurs
& toute leur conduite.
Si le Public en fait le même jugement,
& y prend quelque plaifir, le Libraire
fe croira bien recon^enfé de fes foinsôc
de fes peines, & il fera même par-là en-
gagé à donner, le plutôt qu'il fera poffi-
ble, une fuite de ce Livre, qui ne fera
pas inoins agréable ni moins utile que ce
qui va paroître à préiênt.
TA-
-ocr page 9-TABLE
AcoHtnmmce.
AEle vertueux.
■Afrique, Voyez quatre^arties dn Monde.
519
320
3ZI
4XX
14
Ame-
Age de Ρ Homme en général.
Age d'Or.
Age d'Argent. '
Age d'Airain.
Age de Fer.
Agriculture.
Aide.
Atr, voyez Elemm,
Altimétrie.
Ame (ourtoife.
Ame hien-hiureufe.
TABLE.
Amérique, voyez Quatre Parties dtiMon-
de.
Amitié'. g & 415
Ambition. 4721
AMOURS DIl^ERS. 400
Amour de Vertu. 40Z
Amour de la Gloire. 405
Amour Dompté. 400
Amour de la Tatrie, ip, 404
Amour Mondain. 409
ayimour (chaflete' d''Q^mour.) 410
fiAmour de foy-même. 411
Amour Divin. 17
Amour Vertueux. Ij
Amour de Renommée. 424
Amour du Prochain. 42^
Amour envers Dieu. 42,^
-- Çhariotd^Amour 41 j
Août, voyez douz^e Mois de tAnnée.
Architecture tJMilitaire. . ' 525
Architeciure. f^f
Ariflocratie, voyez gouvernement.
aAritmétique. j^Z
-ocr page 11-TABLE.
Arrogance. 47^
<i^rtifice, 2,5
voyez. Quatre Tarties du Monde.
Affidmté. 2.7
Atouchement, voyez cinq Sens.
Avarice. 31 474
Avril, voyez Doftze Mois.
Aumône. s
zyiurore.
zAutorite'. 28
Automne, voyez Quatre Saifins de l'Annee.
Adoption. I.
b.
"Béatitudes, voyez Béatitudes.
'Bemgnite'. 38
Bon-Augure. 41
40
Bienfait. V. 5-37
c.
Calliope, voyez Mufis.
-ocr page 12-τ A Β L Ε.
Calomnie. 47^
Cekrité ou Fitejfe. 45*4
Chariot ^Amour voyez Amours Divers
Chafteté. 43 & 433
La Feue. 329
LOuïe. 330
V Odorat. 331
Le Goût. 332
Çlemence. 434
C/w, voyez Neuf Mufes.
Colérique^ VoyeZ Quatre Comflextons.
Çomedie. 477
Commandement fur foj-même. 434
Commerce de la Vie Humaine. 435·
Compajfm. 43 j
Comflexions de l'homme, voyez Quatre
. complextons.
(on cor de. 45· ^437
Concorde invincible. 347
Concorde Militaire.
Caw-
-ocr page 13-TABLE.
Confiance. ,
Comoi^ance, 49
Confeil. 49
Confideration.
Confcience.
Contentement.
Contrariété'. 477
Converfation. 5*4 .
Converfion.
Corografhie.
Cofmographie.
Counoifie.
Cupâtté. ^ 379
57
D.
Bccembre, voyez Donz^e Mois,
Démocratie voyez Çouvernemens.
Defejpoir. 4^ ^
Defir envevs Dieu.
tyi/Cagnanime & Genereux. 440
I>efiin voyez, fi>rt.
T^etraïlton. '
Î>evotion. 439
T^ialebUane.
-ocr page 14-TABLE.
χ
Dignité. Diligence. Otfcordc. Difimion. ΌίβίηΕίίοη du bien Divinité. Docilité. DoElrine. Domination. Douleur. Doute. tJMars. Avril. tyi€ay. fuin. Juillet. Août. Septembre. OÎlobre. Novembre. Décembre. fanvier. Février. |
60 67 φ" άη mal. 6X 437 294 Z97 298 3oz |
Eau, voyCiElemer.s
Economie.
EdtKiitisK.
70
439
Ega-
EleBion. 440
Elemens, Qmtre Elemens.
VAir.
UEau. z66
La Terre. 2.67
Le Feu. a68
Elocjuence. 71
Envie. 485
Epargne ^•^lO'^^Varfmixme.
S^Hinoxe dtiTrintemps. / voyez mjft ^IZ
Eqmnoxe de Ρ Automne, f Solfiice. 514
Equité. 441
Erreur. 74
Erato, voya Neuf Mufes.
EJperance. 76
8tude. 75
£fî<?', voyez Quatre Saifons.
Eternité. 77
Etoufement de mauvaifes Penfées. 44Z
Surope, voyez Quatre Parties du Monde.
Euterpe voyez Neuf zJ^ufis.
Exercice. 78
Exil. 80
-ocr page 16-τ A Β L Ε.
Fantâfie. f. 559
Faveur. ■ Sz
Faùfeté d''Amour voyez Amours divers-
Fécondité. ■ 84
Félicité tJMondaine. · 486
Férocité. ^ 485
Feu voyez Eleniens.
Février voyez Oouzjs Mois.
Fidélité. 90
Flaterie. 9°
Flegmatique voyez Quatre Complexionsde
Ρ Homme.
Force 94
Force d'Amour par tSpCer & par
Force d'Efprit & de Corps. 35-4
Force & Prudence, enfemble. ^^^
Fourberie. 484
Foy
-ocr page 17-92-
Toj Chrétienne.
Foy (atholiûifie.
Foy d'Amitié'.
Fragilité..
Fraude.
Fureur.
Fureur Toëtique.
Fureur extrême.
Fureur indomptable.
Generoβte'.
Çenie.
géographie.
Gloire.
Gloire des Princes.
Gloutonnerie.
(joût, voyez (jnq Sens,
Gouvernemens.
Arifiocratie.
Démocratie.
tJM^onarchie.
Gouvernement de la République.
Cjrace de Dieu.
Crace Divine,
grammaire.
Gratitude .pu Reconnoifance.
Grâce.
Gravure.
Gravité. -
444
445
443
485
358
3^9
560
361
98
514
100
101
487
395
395
396
397
446
lOZ
445
104
lOf
544
540
106
h.
TABLE.
Harmonie. Herefie. Hidrografhie. Hifocrifie. Htfloire. Homicide. Honneur. Honnêteté. Horographie. Hojpitalite'. Huit Béatitudes. Humanité'. Humilité. Hiver, voyez jQ»atreSaifom. |
107 ^ 5*19 487 109 489 110 m & 448 |
faElance. |
490 |
fanvier voyez Ώού^ Mois. | |
Iconographie. | |
idolâtrie. |
489 |
fûne. |
453 |
Ignorance. |
491 |
Imagination. |
116 |
Impieté. |
493 |
Impreffion. |
545 |
Inclination. |
113 & 17 |
In- |
τ A BLE.
Inconflance.
Indocilité.
Induflrie.
Infamie.
Injure.
Injufiice.
Innocence.
Infpiration.
Inflmil ISlamrsL
InfimSlion.
IntelleÎl.
Intelligence.
Invention.
Invocation.
Ire.
Irréfolntion,
546
340
341
34a
34?
Ivrognerie. ,
^ïiice.
^fijce inviolable.
fufiice Rigoureufe.
fnfltce Dtvine,
nj
49a
550
490
494
494
449
452
118
450
450
119
ito
49^
493
u
547
iz5
izf & 18
Li-
l'arçin.
LaJJîtude.
Libéralité'.
TABLE.
Libéralité.
Liberté.
Libre Arbitre,
Logique,
e.
454
124
127
127
129
4f4
455
455·
495
Loyauté.
Loy CAmnique,
Loy Naturelle.
Luxure.
J\dagnanimité.
Magnificence,
Malignité.
Ma^uetude.
Mariage.
Mars, vojeLDcuiie Mois,
Mathématique. 156 &
Matin^yoytlQ^dtreParties âu fo^r,
May, voyçz DouneMois.
Medecine. 158
Medifance. . 4,97
Mélancolique, voyez Quatre Compl^ix^ions,
Melpomene, voyez T^uf
Mémoire, ' 139
Me-
456
496
134
135
TABLE.
Memoin des bien-faits re^us. 144
Metafhifique. 149
MiAy, voyez Quatre Qumkn du Mon-
de.
Midy, voyez Quatre Parties du Jour,
Mifere du Monde. 458
Mifmcorde. 149
Modefiie.
Mois de Ρ Année, voyez Douae Mois.
Monarchie, voyez Gouvernemens.
Mort. |
15-2 |
Mufis, voyez Neuf Mufis. |
15-4 xir J20 |
MuRque. | |
N. | |
Nature. |
156 |
Neceffité. |
157 |
N^ufMufes. |
363 |
Folimnie. |
364 |
Erat.0. | |
Terpftcore, |
366 |
ZJranie, |
367 |
Calio^e. | |
Clio. |
568 |
Euterpe, |
369 |
Thalte, |
370 |
Meldomsne. |
370 |
miejfe. |
ij8 |
Non- |
5!!^nchalance
l^emhre, yo^tlOouz.e Mois.
Nm y voyez, ^atre Parties àufotir.
Oheïjfance. \6z & 460
Obfiiiiation. 499
Occafion. 460
Occident voycijQuatre^miersdiiMûii de.
Ooîohre, voyez, Dohz^ Mois.
Odorat, voyez Cinq Sens.
Oeuvre i^€anifefle, 164
Oeuvre Parfaite. 165
Ofmcs. 497
Opinion. 498
Oraifon. 166 & 461
Orgueil iniiipportable. 498
Orient, voyez Quatre Qmrtierj du Monde.
175
46Z & 21
500
178
iko
POr-
Ormne é^L^mour.
Oubli ^liAmour.
Oui'e, voyez Cin^ Sens.
Paix
Pardon.
l'arefe.
Parfimonie ou Epargne,
Pajfm d'Amour.
TABLE.
T^atlence.
Pmvrete.
Pèche'.
Peine perdue'.
Peinture.
Penitence.
Tenitence,
Perfidie.
Penh
PerfeStion.
Perfeverance.
'PerJpeSive.
Perfuafion.
Philofophie.
Pieté.
"Plaifr oti Vobfte'.
Plmimetrie.
Poème Liriqne.
'Poème He-ro'ique.
Poeme Tafloral.
• Poeme Satirique.
Poefie.
Poefie en général.
Polimme, voyez Neuf iJH^fis
Pratique.
PredeflinAtion.
Prééminence de %ang.
Prelature.
"Principe,
> χδ?
499
463
yoo
187
190
2.00
189
191
αοΐ
IÇl
514
m
374
374
105 &
372-
2,05·
197
199
%οη
54?
Pré-
TABLE.
Principe^ _
Prévoyance.
Printemps j VoyeZ Quatre faifons.
Trix.
Prodigalité'.
Promcfe.
Prudence. αίο
Padicite'. 2il
Pm^ance.
Ql
Quatre Ages, voyez (tAges.
Quatre Complexions de Phomme·.
Le (olerique.
Le Sanguin.
Le Flegmatique.
Le Mélancolique.
Quatre Elemens, voyelz Elemens.
Quatre "Parties du Monde,
PtAfe.
L'iAfrique.
L'Europe.
UiiAmerique.
Quatre Parties du Jour.
Le Matin.
Le Midy,
Le Soir.
La Nuit.
Qmtre Saifons de ΐAnnée.
Le "Printemps.
5-45
209
αιο
fox
m
é- 464
& 462
536
334
334
336
337
338
- 270
270
272
^73
• ^75
509
5Ί0
510
5"
277
277
«
Quatre ganter s du tJyKonde. zSi
Le Septentrion. iS6
Quatre Vents.;: 29O
Le Kent D'Orient. 291
Le Vent d'Occident.
Le Vent de 'Bife. 295
R.
Raifon άΈβαΐ.:. ■ ' ■ αΐ4
Rébellion. 215
Reconciliation. 2,17
Reformàtion.. llo & 466
'Religion. 219
Remarques jur let Cinq Sens de la IS^atu-
re. 525
Renommée peinte k Pordinaire. 377
Renommée bonne. 378
Repentance. 22î.
-ocr page 26-TABLE.
Refiitution. 466
Rome la Sainte. 468
Rameur oh Difcorde. 222,
s..
Saifins,, voyez Quatre Satfins dePAnnee.
Sagefe.. 228
SageJIe, voyez vraje Sagejfe.
Sanguin, voyez Quatre Complexions.
225
225
224
502
.229
f49
f4o
230
m
232
' 4^9
Sin-
J
Santé.
Sàpience Divine.
SapieKce..
Scandale,.
Science.
Scrupule de Confàence!. Χ.ΚΙΓ,
Sculpture.
Secret ou Silence.
Sens, voyez Ctw^ Sens.
Septembre, yojei Douz^e Mois.
Septentrion , voyez Quatre quartiers dk
tj^tonde.
Servitude.,
Seureté.
Sévérité.
Silence, voyez Secrox- -
Simmetne,
Simonie. . .
Sifnplicits^·
-ocr page 27-Sincérité d'Ame. 469
Soin. 256
SQïr , voyez Quatre Parties du Jour.
Solflue d'Efié. Ί ^ ^ , :
Solmcedmyver. >yoycz αφ Ε fmnoxes.
J
Sort ou Defiin. 158
Splendeur de T^om. ' 239
SuBiîance. ■ ■ · 471
Smerflition. 504
t.
Tremperance. 041
'tentation. joj
'^erre, voyez Elemens.
'^erpjteore , voyez Neuf AÎufes.
voyez mffi Neuf Mufes.
'^^eologie. ' 242
jjrannie. ·' 5Ό6
y.
248
-ocr page 28-507-
χ > If
Veugemce. ^ent, voyez Quatre Vents. Vertu invincible. Vertu de Corps & de Couragf. Vertu Hero'ique. Veuë^ voyez Cinq Senf^. Vie (ourte. Vie longue. Vie AUive. Vie Humaine. Vie inquiette. Vie Contemplative. Vtce. Vigilance. Virginité'. ' Volonté'. Volupté', voyez ΤΙαίβ·. . Vrrnie, voyoZ Neuf Mufii. |
M9 m 380 & 385 386 389 fo8 470 |
a63
C A-
Fem-
Robc
^ίίϋΙαΛ^Ι^^Ι verte en broderie d'or, & dont la
Téteeft ornée d'une Couronne de
Ée^·^ diveries fleurs.
-------- ------- Ei'e tiei^t d'une
iTiiiin urie corne d'Amalthée pleine
toutes iortes de fruits & de fleurs, & de l'au-
tre quantité d'épics de pluOeurs efpeces de grains
"icicz & confondus, dont une partie tombe à
terre.
Cette repréfentation eft trés-jufte & trés-naï-
On la dépeint belle & aimable, parce-qu'en
t^flet elle l'eft autant que l'Indigence foncontrai-
•e, eft de fa nature defagréable & odieufe à tour
2e monde.
On lui donne une Couronne de fleurs, par-
« que les fleurs produtfent les fruits qui la for-
"Knt, & que la joye & les plaiiîrs font fescoin-
Pagnes inféparables.
-Les couleurs verte & jaune doré qui éclatent
'111· là Robe lui conviennent fort-bien, puÎs-que
/ Pari. A l'une
ψ'ί-
Ta^, Χ .
-ocr page 31-l'une fait efpérer une belie année, & l'autre une
bonne recoite degrgins& détruits, en qaoicon-
iifte l'abondance.
, Pour la corne d'Amalthee, dont les IV^tho-
logiftes font fi fouvent mention dans leurs Ecrits,
elle a toujours paiTc pour unfymbole de l'Abon-
dance , comme le foiu ailèz connoître ces Vers
du 9 Liv. des Metamorphofes d'Ovide, où il
eft dit,:
Et de fleurs de fruits les NyrK^hes la com-
blèrent ,
Puis aux Dieux Immortels elles la confacre'rent.
mmm^MMm ^mmmmmmmm
y Ν la peut repréfenter fous la figure d'une
_ ''Dame illuilre, le vifage de laquelle a je
ne içay quoy de viril & d'heroïque. La Cou-
ronne qu'elle porte eft de fia or, & fon habille-
ment de pluiîeurs couleurs. Elle tiint une lime
de la main droite, avec ces mots à l'entour,
Detrahit ATQjjΕ POLIT; & de la gau-
che une guirla\ide faite de laurier,· de lierre ôcde
mvrthe, où pcirdent deux pommes de grenade.
Sa C;;haire eil parlèinée de feuillages & de fruits
de divers aibres, comme-ck.,cedre, de cyprès,
de chefne, & d'olivier. Son ordinaire iejoureii:
en un lieu diampeitre, où elle eft ainfe à l'om-
bre, ayant à fcs pieds quantité de livres, parmy
leiquels un iîngc le joue.
Son âge rnûr & fa beauté mâle montrent qu'a-
vec un e'îprir iblide & an profond jugement, el-
le poiltdc une parraitecoiiuoiiFâuce des bonnes
cho-
-ocr page 32-chofes. La raifonerieiî, qu'elle les conçoit en lu
la plus calme de fa vie, pourn'cltrefujet-
ny aux legéretez de la jeuneiic, nyaux pefan-
teurs du deruier âge.
Sa Couronne eit d'or, pour nous donner à en-
tendre qu'un Académicien qui veut faire d'excel-
lentes prodû6tions, & les appuyer de fortes pen-
l'-'cs, dont l'arfenal ou le magazin cfl; dans la
telle, comme en la partie inteikâivc de nof-
're efprit, les doit raf&ner plus d'une fois, à h
ifauiere de l'or, & les mettre pour cet effet à
toutes fortes d'épreuves.
Par les différentes couleurs de fa Robe, eil
inarquée la diveriité des Sciences, qui font trait-
t^es dans une favantc Académie.
Elle tient à la main une lime , pour montrer
^ue comme par le moyen de cet outiî, plus on
^iminuë du ter & des autres métaux, plus ils fc
^éroaillent & fenetroycnt.. Ainiî les Pieces d'A-
cademie fe poliflent & s'achèvent à force de les ■
Corriger, & d'en ofter lesfuperfluitcz; tellement
Mue pour les réduire au point où il faut qu'elles
^oient, il clt néceffiiirc à un bon Académicien de
Jfs foûmettre à la cenfure des plus habiles, & de
î'efoudre à dire avec Cvide.
Suivant les femimens divers,
Di ceux qu!. font en qaelqiie cfl une,
Je jeray fajjér pâr leur Itme,
. Jujqrt'aKX moindres mots de mes vers.
, Sa guirlande eit compofée de myrthe, de !au-
'^'er, & de lierre; parce-que par ces trois plan-
tes, qu'on peut à bon droit appeler Poétiques ,
tpnt lignifiées les diverles fortes de Poefies qui
fleuriilènt dans une Académie. Mais le myrtlie
particulièrement, comme confacré à l'Amour,
A 2 iert
icrt aufl'i à couromier les Poëies amoureux ; Ce
qui fait dire à Nicandre, que Venus en eut une
guirlande, quand elle aflifta-au jugement de Pa-
ris; & à Virgile,
Q/ià la Mere d'Amour le myrthe efl agréable.
Quaiit au laurier & au lierre, tous les Poètes
en eftoient indifféremment couronnez; Horace
le témoigne par ces vers.
Des doÎles fronts le lierre eil le prix.
Et en un autre endroit parlant du laurier il en
dit de mefme :
Vie-ii Me'potneae .1 le chef rrienvironne
De la Delphique couronne.
Le lierre néanmoins me lemble plus propre
aux Poètes Dithyrambiques , ainii appeliez, à
caufe des vers qn'ik avoient coullunie de clian-
tcr à l'honneur de Bacclius,
Qui fe plaifi à mefler aux raifns le lierre.
L'on peut dire pareillement que le laurier ne
convient pas ii bien aux autres Poètes qu'il fait ,
aux Epiques, qui fe propoiènt pour but de dé-
crire les faits héroïques des grands Guerriers &
des Empereurs, qu'on a de tout temps couron-
nez de branches de cet arbre glorieux, & invin-
cible à la foudre. C'eil pour cela qu'i\.pollou
aans le premier des Metamorphoics le deitine
piour marque d'honneur aux Conqnerans, & qu'il
s'en couronne luy-mefme, comme le Pere des
Poètes, auiquels il fait part de fon feucelcfte,
& de ceitc divine fureur dont il anime leurs pen-
fées.
Les pommes de grenade font des figures de
l'anion mutuelle qu'il y doit avoir entre les Aca-
démiciens. Car, iëlon Pierius, elîes lignifient
kîîc comi-agnic de plulieurs homn:ies joints cn-
fem-
-ocr page 34-Vemble, & qui fe maintiennent par leur bonne
intelligence. Auifi eftoient-elles anciennement
^tdiées à Junon, à qui l'on donnoit une grenade
" la main, avec l'épithétedeConjervaince, com-
ice il fe voit dans le revers de quelques ancien-
nes Médailles, où l'on peut lire ces mots, J υ ν ο
9 ο Ν s Ε R ν A τ RI χ , à caufe que cette Deïté
Prefidoit à l'union & à lu coniervatiou des peu-
ples. .
En la Chaire où l'Académie eft afllfe, fe vo-
yant gravées des branches de cedre, de cyprez&
de cheiiie, parce-qiie ces arbres ,que l-ierius appelle
incorruptibles, fout des hiéroglyphes de réternitc.
-A- quoy doivent butter principalement les vrais
Académiciens, & ne rien dire, s'il eft poffible,
S|ui ne foit dig^ie du cedre ^ comme dit Perfe,
Pilifqu'ils font véritablement du nombre de
ceux,
Dont les vers qu'Apollon femhle avoir fait exprès,
SeKtenttoâjaurs le cedre ^ jantais le cyprcs.
Car bien que le dernier de ces arbres foit appel-
le fatal &.funefte, il ne laiffe pas d'eftre exempt
'is corruption , & d'auiii longue durée que le
^hefne, qui fervoit encore de prix à la vertu dis
Vainqueurs. Témoin l'Empereur Domiticn qui
^'oulut qu'ils en receuiTent une Couronne aux
Jeux folemnels, qu'il fonda lay-mefme au Ca-
Pitole. Mais l'olivier particulièrement, qui fé-
lon Platon pour eftre oléagineux & plein de cha-
leur, fe conferve toujours verd coirime le lau-
rier, le cyprès & le lierre, me femble recom-
lîiandable par deiïùs tous, & fort propre à ΓΛ-
cadémie. Si vous m'en demandez la raifon,. je
Vous répondray que cette plante eft dcdiéeà Mi-
nerve,
A 3 Sans
-ocr page 35-SiiKS qm vous κε pouvet^rieK dire niricnfaire.
Et par confequent, qu'un Acadéinicien qui a ce
favorable génie que nul ne peut donner, & qui
iiaitl avec nous, ne doir pas laiffer de faire la
cour à cette Reine des belles penfées, ni de cul-
tiver fes hautes connoifiances à foice de veilles,
dont l'olivier eft le fymbole. Ce qui lui reuÎ-
lîra, jc m'aiïcure, fi heureufement, qu'on ne luy
reprocherai jamais d'avoir perdu fa peine ny fon
huile. Car le fruit de tes travaux ne luy fera
pgs moins duax, que i'eft naturellement au gouii:
cette précieuie liqueur que l'on tire des olives.
Et comme elle a cela de propre d'exempter les
corps de pourriture ; ainil par le moyen de l'eftu-
-tie les ouvrages de l'eiprit fe confervent incor-
ruptibles contre Jes injures des années.
L'Académie eft aiTife en un lieu champcftre à
l'ombre des arbres, en memoire de ce qu'elle
fe tint premièrement à la campagne , en une
raaiibn qu'avoit prés d'Athenes un de fes prin-
cipaux Citoyens, qu'on appelloit Academus. Ce
fut de luy qu'elle prit le nom qui luy eft de-
meuré depuis ; eiiant bien certain que toutes les
Sedes de ce temps - là prirent le leur , ou
des couftumes, ou des lieux , oui des noms
propres ; comme celle des Cyniques , des
Feripateticiens, des Stoïciens, & ainfi des au-
tres. C'eftoit donc en la métairie de ce Héros
Athenien, où le divin Platon & fes Difciples
s'aiTembloient ordinairement avec delîèin, com-
me dit Horace,
D''exterminer la faî^jfcté
Pour le falut des Réput/Uques,
Et de chercher la ■vérité
Dedans les Bois Académiques.
Et
-ocr page 36-Et parce que la leâure des livres eft l'ordinai-
re exercice de l'Académie, on luy en donne plu-
fieiirs, & c'eii: auffi par cette raifon qu'on peint
3 ies cotez un finge, animal ingcnienx, & qui
chez les Egyptiens eiloit une figure myftique des
Lettres & des Sciences; c'eftpourquoy ils lecon-
wcroient à Mercure, pour les avoir toutes inven-
tées.
Τ Ou τ ce que les aâions vertueurss ont de
plus grand & de plus ilîuftre, dl compris
•^ans ce tableau. C'ell la peinture d'un iiomme,
•î'-ii n'a rien que d'extraordinaire en qui la fleur
de l'âge, la beauté, l'agrément, & lesjuliespro-
Ppttions de toutes les parties du corps font le
chef-d'œuvre de la nature. 11 a fur la telle une
^ouronne de rayons, comme celle d'Apollon,
^ une guirlande d'amaranthe. Sous le Manteau
impérial, qu'il porte retrouiTé fur fes cpàuîcs,
« qui eft tiilù de i5n or, éclaîcnt pareillement
armes dorées. Dans la tefte d-'uneftroyablc
fepent qu'il vient de combattre, il enfonce de
« main droite-le fer d'une lance, & tient un li-
^'re avec la gauche, foulant de l'un de fes pieds
ime telk de mort.
. Par cet emblème il eft montré, que la prin-
cipale de toutes les afitions humaines eft celle qui
rait par les armes, & par l'eftude des bonnes
■Lettres. Or parce qu'au rapport d'Ariftote, c'eft
cn.la fleur de fon âge que l'homme s'acquiert la
■''taye connoiffauce des vertus ; pour cette mef-
A
me
-ocr page 37-jne raifon une parfaite virilité s'attribue à ce Hé-
ros que nous dépeignons. Quant aux avantages
de la taille, de l'agrément, & de la beauté qui
fe remarquent par tout ibn corps, ils ibntàrnon^
avis des· lignes évidens & des conjectures indu-
bitables des belles qualitez de Γοπ ame. Arillote
le témoigiré ainfi, quand il dit que l'extérieur cil:
un indice certain de l'intérieur; & tel eil enco-
re le fentimeut de Virgile, lorfqu'il nous dit,
Q^e hi vert fi de ['ame éclate davr^tage.
Quand elle rejaiEit des traits d'un beau viÇage^
La Couronne refplendiiTante qui luy environ-
ne la telle, lignifie que comme par la force de
fes rayons le ibleil éclaire tous les lieux par où.
il pail'è ; ainfi une aâion vertueufe ne fe peut car
cher, & rend fon Auteur iiluftre, en quelque
part du monde qu'elle foit faite.
La vertu la plus haute ^ £5" la fins eflime'e ^
Ffi celle par qui Γ homme accroijl fa renommée^
Par fes propres exploits,, l^c.
A la Couronne de noitre Héros ii'efl: pas join-
te fans raifon une guirlande d'amaranthe, à eau-
fe que cette fleur ne perd jamais fa naturelle beau-
té , & que la rigueur de l'hy ver, quelque violen-
te qu'elle foit, n'elt pas capable de luy nuire,,
ny de ternir tant foit peu l'éclat de ià vive cou-
leur. Le vertueux tout de mefnie ne dégénère
jamais de ces nobles qualitex qui le mettent dans
l'eftime des honnelles gens. Au contraire quand
il n'eft plus au monde, fes belles aâions l'y font
revivre, &,conferTent précieufement fa mémoi-
re, pour la rendre vénérable aux fiécles à-ve-
nir.
Les'grandes preuves de fa vertu font figurées
par les armes qu'on luy donne; parce-qu'enquel-
que temps que ce Ibit, il les employe à combat-
tre le vice fon ennemy, qui eft ce venimeux fer-
Pent, auquel il e'crazc la teile. Par où il eft en-
core montré, qu'il faut fçavoir joindre l'eiîet à
'a volonté en matière de vertu, fuifqu'H efivéri-
^able qu'elle conjifte en PaiÎso:^, ζίΤ que c'ej} une Mal-
^^^Jfe incorruptible ^ qui ne peut fouffrir les approches
Amant, s'il ft'esl généreux honniKjîe hom-
La riche tiiTure de fon Manteau Impérial nous
cnfeigne, ce me femblc, qu'il eft difficile que
perfonnesde baffe naitiàncc, & qui vivent rné-
cai«quement, puiffeat faire des actions iUuftres,
Puifqu'àvray dire elles ne font communes qa'aas
grands courages, & à ceux qu'un génie particu-
'"^r a fcparez des ames vulgaires.
Et parce que l'exercice des Lettres n'efl; pas
^uins capable d'immortaliier un homme, que
cclay des Armes, c'eft pour cela qu'on luy fait
tenir un livre de la main gauche, & une teile
mort fous le pied, pour nous apprendre que
"^eux qui excellent en l'une & en l'autre de ces
^obies ProfeiTions ne voyent jamais le fleuve
*l'oubly,
Et que malgré Caron^qm lespretiddansfa Barque^
Leurnnn'^ kurvertti triomphent de la Ρ arque.
VOI c y la peinture de l'Amitié, qu'Arifto-
te définit une mutuelle correjpondûKce d'a£ec-
e»tre des per(ô?i;ies de mejme humeuriS T'^i
>'■'pyopcfcfit tofijiMU la raijan-jf U VertuptjMrgutde'.
A f Είίϋ
-ocr page 39-Elle eft fimplement veftuë d'une Robe blanche;
& peu s'en iaut que ion épaule gauche ne foit
auffi nue que ia belle gorge, qu'elle a toute dc-
courte. Sa guirlande eft de téiiilles de myrthe
& de fleurs de grenadiers entrelaffées, avec ces
mois au deflùs, H y ε m s et ^st as, qui fi-
gniiieat Î'Hyver cif ΓΕβο. De ià main droite
die montre fon' cœur, où font écrites ces paro-
les en lettres d'or, L ο ν g ε et P r g ρ ε , loin
isf près ^ & celles-cv au bas de fa Robe, M ο p. s
ET VI τ A , ία Mort y la Vie. Elle fe plaift à
la nudité de fes pieds, & empoigne avec la main
gauche un ormeau fec , environné d'un fep de
vigne.
La livrée de l'Amitié fincere eft toujours blan-
che, & fon habillement iiins parure, pour une
marque de fa franchife, qui ne peut fouflrir ny
artifice ny dt%uifement.
Les différentes Devifes qui fe lifent for icm
corps, & qui en font comme l'ame, iîgnifient
qu'un parfait amy prés ou loin de laperfonne ai-
mée, en eft en tout temps inféparable : car quel-
que grand que ibit le changement de la fortune,
ou bonne ou maavaife, il eft trés-coutent de vi-
vre & de mourir pour les intérefts d'une %'éritablc
aiFedion. Que s'il arrive qu'elle foit feinte, il
ne faut que le moindre revers pour la fiire fon-
dre tout à l'inftant, comme la neige au foleil.
Quant à faguirlande faite de myrthe & de fleurs
de grenadier, elle eft un fymbole de l'union des
volontez, le fruit defquelles, quelque caché qu'il
foit au dedans, ne laiiie pas de paroiftre enfin ;
n'eilaîît pas polîlble qu'il ne s'en exhale de bon-
nes odeurs, par les exemples & les aâions ho-
norabîes de ceux qui les cueillent. En quoy tou-
tesfoi.s
-ocr page 40-tesfois il ne faut pas qu'il y ait aucune marque
<^''oftentation ny de pompeafe apparence. Car
on ne peut mettre en doute, que l'une & l'autre
ne foient bien ibuvent les marques de la flatte-
rie iaplusfervile,comme cellc-cy eftafleurémcnt
contraire à une amitié fans fard, & Γυη irrécon-
ciliable ennemie.
On peint encore cette Vertu nue par les pieds '
parce qu'il η'ι,ίΐ: point d'incommodité qu'elle n'en
dure pour le fen'ice de Ton amy ; & on luy flii
pareillement enbraiier un ormeau fec, entouré
d'un fep de vigne , afin de donner à connoiitre
Pat là, que l'Amitié ne doit pas m.oins paroiftre
les difgraces que dans lesfuccés favorables,
^ qu'il n'elt point d'amy 11 peu utile, quinepuif-
en,quelque façon trouver dequoy s'acquitter
"ies courtoifies & deseSêtsde bienveillance qu'on
^^y témoigne au befoin.
C'est un Cupidon affis j le flambeau duquel
ne.paroift point, & qui foule aux pieds fon
Arc & fes flèches. Il tient de la main droite un
horloge de fable, & de la gauche l'oi leau comimu-
nément appel lé petit plongeon, qui eft extrême-
ment maigre & décharné.
Le temps & la pauvreté font les deux chofes
'es plus capables d'éteindre l'Amour. C'eiÎpour
cela qu'on luy met à la main un horloge, qui
^ft le vray fymbole du temps, quim.odérclesin-
guiétudes de l'efprit, & les palfions de l'ame.
Mais ri remédie fur tout à celle d'Amour, à cau-
Λ 6 fe
fe qu'ayant pour but la j ouiiTance d'une belle Maî-
treflè, il faut ncceliaircment que fa beauté ν cnaiit
à fe changer par la révolution des ans, le delir
fe change auffi, & que l'ame fe tourne à d'autres
La pauvreté produit encore le mcfitic effet ; &
l'expérience nous montre, qu'il n'eft point d'A-
nv.r.it que la mifere ne dompte, après que pour af-
ibuvir fcs folles aileâionsil a perdu là jeuneilè,
& diffipé ià meilleure fubftance. Ce pauvre A-
mour que nous décrivons icy en fcrt d'exemple
par le chetif oifeau qu'il a fur le poing : c'eft une
manière de plongeon, que les Grecs appellent
Kiy-ίλος qui félon Suidas cft fi chetif, que n'ayant
pas la force de fe faire un nid, il eft contraint
d'aller couver dans celuy des autres oiièaux.
Aux deux remèdes d'Amour que nous venons
de doEn.er, le fevere Cratés, Philofophe The-
bain, enajoûteun troifiéme, qui eftkdéfefpoir.
Mais bien qu'en eifet quelques Amans ayent vou-
lu recourir à luy, après n'avoir pûjouïr delà cho-
fe aimée ; fi eil-ce qu'ils n'ont pas elle fi foibles
d'efprit, que de fe précipiter à la mort toutes les
fois qu'ils l'ont invoquée. C'eft le reproche que
fait Amariilis à fcn Myrtille, lorfque l'oyant par-
ler de mourir pour mettre fin à fes peines, elle
luy répond,
Ce fi en vain qu^un Amant ^ar unefatife enviey
S'arme contre fa ν te'.
Et iiienfa paffim Uveutfairefin port
Des écuetis de la mort ;
InfiMlequ'ilefl^ ildé-r/ientfafenfe'e
: infcKjce,
D^une boucha
Et trahit fin amour, krfquepHr en guérir
a dit qiitl veut moKnr.
Voiîà
-ocr page 42-ν oilà ce qu'il en femble au Cavalier Guarini, la
Peufée duquel approche fort de cellc-cy d.a Taflb
<ians fon Aminte,
Le difiours de la mort efl celuy d'm Amant ;
Et toutesfois Γ effet s'en enfuit rarement.
Il n'efl donc pasbefoin de réduire l'Amour au
défefpoir, qui eft le pire de tous les maux, puif-
que nous avons montré que le temps & la pauvre-
té fuffifent pour le dompter, & le mettre à la rai-
son , quelque mauvais qu'il puifie eftre.
Β i'î. fii ils iii iiî; ilîi · ίί^ i-î?, · iîîi · fife
AMOUR VERTUEUX VI.
IL eit icy figuré par un Enfant qui a des aifles
au dos, quatre guirlandes de laurier, l'une
l'ur la tefte, & les trois autres en fes deux mains.
Cela veut dire, fi je ne me trompe, qu'entre
tûnt d'Amours de nature différente, que les Poè-
tes ont pris plaifir à nous dépeindre, il ne s'en trou-
ve point de plus excellent, nydéplus illuftreque,
celuy de la Vertu. Aufli eft-ii vray qu'elle a de
t"nerveilleux charmes, & un empire abfolu fur
toutes les chofes dn monde. Les guirlandes qu'el-
le porte font les vrayes marques de cette haute
prééminence, qui luy eft légitimement deuë. Et
comme le laurier qui en eft la glorieufematiere,
'^e perd jamais fa verdure ; ainli peut-on aiièu-
ter, que l'Amour de certe Reine eft incorrupii-
oîe & fans bornes, auffibien que la Couronne de
ft tefte, qui lignifie l'éternité par ià figure iphc-
tiq^ic.
ï Ih
■ ÀM
-ocr page 43-li'a
ci:
CE τ τ Ε nouveauté n'eft pas bien grande,
de voir la peinture d'un enfant, à qui un·
Dauphin fait le mefme office fiir la mer, que le.
Cheval rend à l'homme fur la terre. L'ancien-
ne Hiftoire nous en fournit d'affez curieux exem-
ples. Témoin celuy que Solin rapporte dans
fon Livre , içavoir , qu'auprès d'Hippone il fe
trouva un de ces animaux ii amy de l'homme,
& fi apprivoifé , qu'il s'en alloit fort fouvent
au prochain rivage , où il tendoit l'échine aux
uns, & fe laiiToit manier aux autres. Ce que
le mefme Auteur dit eftre arrivé à Flavianus
Proconlul d'Afrique , auquel il prit fantaiiie un
jour de le frotter de quelques onguents ; mais
parce-que la fenteur en eftoit trop forte, le pau-
vre Dauphin faillit d'en mourir, & fut plufieurs
mois fans revenir à la rive. J'omets qu'au
temps de l'Empereur Auguile il y en eut un au-
tre ii privé , qu'un petit garçon ayant pris l'af-
feurance de luy donner du pain , il lui apprit
auiïï à monter fur luy, & fut porté de Bajes
à Pouzzol : ce qui continua juiques à la mort
de l'enfant, qui fut fuivie de celle du Dauphin,
au grand eftonnement de ceux qui le virent.
Ces deux exemples prouvent aiTcz bien à mon
avis ce que je prétens par cette figure, qui eil
d'en faire l'emblème d'une ame courtoife, ou,
fi vous voulez , ofïicieuie & bien née. Toute,
la raifon que j'en puis donner eft, que le
Dauphin aime l'homme, & qu'il le careiie, par
2·
Omr'tc/sii.et.^raûtaiÎ?--. ^ . . 8
-ocr page 45-^iitind plûtoft que par intéreft, ny pour aucun
bien qu'il en reçoive. Pierius le croit ainfi,
lors qu'alléguant à ce propos le jugement qu'en
fait nn Ancien ; Phtarque , dit - il, admire à
"on droit ce généreux naturel que les Dauphins
ont pour les hommes. Car ce lieil ny pour la
'nourriture qu'ils les aiment.^ comr»e font les Chiens
y les Chevaux, ny par attire neceffné ; 'ou pour
avoir eflé délivrez, de leur joug , comme Con pour-
TBit dire des Elephans , des Lions., ^ des Panthe-
, raais par je ne fçai quelle tendrejfi qui les y
porte , Ççf qui leur efi ordinaire. Puilqu'ils tien-
nent donc de leur propre nature ces bons mou-
vçmens qu'ils ont pour les créatures raifonna-
b'es , ils m.éritent bien fans douté d'eftre le
fymbole des courages nobles, qui font nez pour
obliger autruy. A quoy certes ne les pouife
pas tant la recompenfe qu'ils en attendent, que
leur inclination propre, qui fe porte d'elle - mef-
me à des aâions oiEcieufes & charitables.
AGRICULTURE. VIII.
CEux qui s'étudient à peindre l'AgricultU'
re , luy font d'ordinaire un vifage cham-
peltre , mais qui n'en eft pas moins agréable,
tel que celuy de la Déeffe Cerés. Ils luy don-
nent pour habillement une Robe verte, & la
couronnent d'une guirlande d'épics. Avec ce-
la ils luy font tenir de la main gauche la figure
du Zodiaque,, & de la droite un arbrifleau,
qu'elle regarde fixement, parce-qu'il commen-
ce à, fleurir ,· outre qu'à fes pieds cfl remarqua-
ble le coutre d'une charac. Par
Par fa Robe verte eit fignifice l'efperance, fans
laquelle il ne fe trouveroit jamais perfonne qui
vouluft s'employer à labourer ny à cultiver la
terre.
La couronne d'épics luy efl: donnée avec rai-
fon, comme la principale iîn de cet art, qui
eft de faire multiplier les grains pour la nour-
riture des hommes.
Par l'arbre fleury fur qui elle porte fa main
. & fes yeux , eft marqué l'amour extrême du
Laboureur envers fes plantes, qui pour recom-
pcnfe du foin qu'il en a, luy promettent des
fruits , enfuite des fleurs qu'elles eftalent.
Les douze Signes du Zodiaque marquent la
diveriité du temps & des faifons de l'année; à
quoy le Laboureur doit prendre garde fur tou-
tes chofes.
Quant au coutre de la charuë , ce n'efl: pas
iàns raifon qu'il eft mis au bas de cette peintu-
re , puis-qu'il eil l'outil le plus neceilàire au
Laboureur.
Je rapporteray à ce propos qu'il fe trouve
des Médailles de l'Empereur Gordien, au re-
vers defquelles le foin de l'Agriculture eit re-
préfenté par une Femme qui des deux bras qu'el-
le cftend montre un lion & un taureau couchez
à fes pieds ; où il faut remarquer que le lioii
fe prend icy pour la terre, parce qu'il cii con-
iiicré à la Déeiîè Cybéle, & le taureau pour le
Laboureur, à caufe que cet animal infatigable
y eft extrêmement propre.
JMOUR
-ocr page 47-COmme tous les autres Amours ne font
rien en comparaifon de celuy - cy , U ne
iauc pas s'étonner s'il eft directement oppofé à
l'Amour prophane , & fi on le peint d'une ma-
nière bien differerste : car il n'eft pas nud com'
nie luy , mais veftu modeiîement ; & s'il avoit
à paroiftre enfant, ce ne feroit que par fa pu-
re innocence. Il a quant au refte les yeux éle-
ve2 au Ciel, des ailles au dos, le facré Nonj
de Jésus fur fa poitrine , un Calice en une
main , & en l'autre un cœur, embrafé, & par le
inilieu percé d'une fie'che.
Cet emblème eil lî clair de luy - mefme, qu'il
n'a pas befoin d'une longue explication. Celuy
qu'il repréiènte a les yeux fixez en haut, parce
qae la beauté des chofes celeftes luy fait dé-
daigner l'amour des créatures mortelles.
ϋυη habillement ell fimple , à caufe qu'il eft
mortel ennemy du luxe ; & qu'ayant fait vœa
de fouler aux pieds les vanitez de la terre, il ne
veut pas que fa confcience luy reproche d'avoir
moins de foin des ornemens de l'ame que de
ceux du corps. AuiFi eft-ce pour cela qu'à l'i-
mitation de faint Paul il le mprtific ; & que pour
chaftier fa moleiTe, il a recours aux difciplines
& aux cilices.
Ses ailles miftérieufes font les figures de iès
hautes penfées , qui l'élevent à la contempla-
tion des chofes divines. C'eft où il afpire feu-
lement 5 & où la Foy luy fait croire ce que la
cario-
-ocr page 48-curioiitc luy defend d'entreprendre. Je veux
dire par là qu'il mefure fon vol par fa foiblei^
fc , de peur que voulant fonder trop avant l'im-
pénétrable luiMÎére du grand Soleil de Juilice,
il ne s'expofe au hasard d'une chute plus dan-
géreufe que celle d'Icare.,
L'adorable Nom de Jésus qu'il a devant
luy , ne fe peut mieux appeller qu'un caradére
facré , qui luy donne autant d'amour pour le
Ciel, qu'il a d'averiîon & de haine pour la Ter-
re. Que fi l'Enfer mefme l'attaque, ce Nom
venerable , qui fait trembler les Démons, luy
fert d'un rempart d'airain , & d'un celefte Ραί-
ladiu-ûÎ , qui eft à l'épreuve de leurs armes.
Par le Calice qu'il porte , où fe voit la fain-
te Hoftie couronnée de rayons, qui·fe formenî
de fa propre clarté , nous fommes tous confïr-
mei dans cette doârine falutaire , qu'il cft im-
polîlble que noftre amour envers le fouverain
Créateur , arrive jamais au point où il faut qu'il
foit, pour eiire parfait , s'il n'eit appuyé d'une
ferme foy , qui eil un don de Dieu, & une lu-
mière infufe , par qui nous croyons indubita-
blement les chofes où les raifons humaines ne
peuvent atteindre.
Enfin, le cœur plein de flamme & percé d'u-
ne flèche , iTiontre que l'Amour celefte cft de
la nature du diamant, qui s'épure dans le feu,
& qu'il fe raffine par la patience , comme l'or
par la coupelle ; qu'au refte celuy qui en a le
cœur bleûe , le porte à la main ; c'eft a dire
qvi'il ne, dément jamais fcs penfées par les dé-
guifemens & les artifices des Aixians du monde,
qui ne s'attachent d'inclination qu'à des objets
périiîables.
, Ν îe repréfente par un vigoureux & jeune
' guerrier , qui fe tient debout entre une
grande flamme de feu, & une épaiffeexhaiaifon
lùmée, vers laquelle il tourne les yeux avec
Une mine reiblue, & une afllirance inébranlable.
En ia main droite il porte une Couronne d'her-
be, & à la gauche il en tient une autre de chefne.
il ell arme à l'antique, pour les raifons que nous
dirons cy-aprés; & bien qu'il doive appréhender
apparemment, citant fur le bord d'un précipice
profond, iieft-ce qu'avec le mefme courage qu'il
témoigne avoir à méprifer ce danger, il marche
iur les piques, & foule aux pieds les épées
nues.
Cet Amour eil peint jeune & robiifte; parce-
Çju'il fe renouvelle & fe renforce à mefure que la
Perfonne vieillit : les autres tout au contraire di-
minuent à la fin, & paiTent de la careiTe au dé-
dain. Témoin l'Amour c^u'un Cavalier a pour
une Dame, ou un Courtilan pour fa fortune, ou
un Capitaine pour la gloire, ou un Marchand pour
les biens du monde. Quelque pafîîon qui les en-
traine après ces vains & ridicules amufemens, elle
n'cft j amais fi forte que le temps n'eu vienne à bout,
& qu'il n'en voye la fin auffi-bien que le commen-
cement. Mais l'expérience montre tous lesjours
qu'il ne peut détruire l'Amour dont nous par-
lons , non pas mefme par la mort, puiique c'eft
par elle que ceux qui fe facriiient pour la Pa-
trie s'ouvrent un chemin à l'immortalité. Ce
n'eft
-ocr page 50-n'eit donc pas fans fujet que pour la fervirauprix
de leur lang, tant de grands courages en cher-
chent fi palfionnéinent les occafions dans les païs
cftrangers. Que fi par le fort des armes ils s'eit
retirent la vie fauve, après la glorieufe fatisfac-
iion qu'ils ont de s'eilre portez en gens de bien
pour la défenfe de leurs foyers, de quel deiir ne
brûknt-ils point d'y retourner pour en revoir ia
fume'e? Certainement celle d'Ithaque plaifoit fi
fort à Ulyiiè, qu'il fe l'imaginoit plus agréable
que n'eft une belle nuée qui environne le Soleil
qui fe couche; & quelque petit que fût fon vil-
lage, il n'en eftimoit pas moins les mazures,
qu'Agamemnon prifoit les murailles de la gran-
de ville de Mycenes. Aufll fçait-on bien que les
hommes aiment leur pays, plÛLoft à caufe qu'ils
y font nez, que pour la grandeur & la fertilité-
qui luy donnent de l'etlime.
Sans mentir Pairnatal a des douceurs extrêmes ^^
Et défend aux mortels de s'oublier eux-mefmes.
Ce que les peuples les plus barbares ayant toujours
reconnu, ne pouvant étouffer tout à fait les lènti-
inens que la nature leur en a donnez , nous
pouvons dire véritablement avec un ancien Poète.,
Qu^ aimer un pays efiranger
Plus que celuy de fa naiffance ,
C'efi avoir peu de conmifiance,
EtPeJprit^ ou faible^ ouleger.
Noftre guerrier porte en fes mains deux mar-
ques d'honneur bien fignalées & dignes de luy.
La première eft une Couronne de gramen^ ou
d'herbe fimple, que les Anciens avoient accouf-
tumé de donner à celuy de leurs citoyens, qui par
quelque adion extraordinaire avoit délivré leur
ville de la violence des ennemis qui te tcnoient
alilé-
-ocr page 51-affiêgée. Cette Couronne, que l'on ne prifoit
pas moins que fi elle euft efté de fin or, outou-
brillante de pierreries, & qui iè faifoitordinai-
rement de la première herbe que l'on trou voit
<lans l'enclos de la place qui avoit efté aiîîegée,
fat siQ grand Capitaine Fabius un prix illuftre de
ia valeur, qu'il reçut folemnellement de tout le
corps du Sénat, après qu'en la fécondé guerre des
Carthaginois contre les Romains, il les eat con-
traint de lever honteufement le fiége,qu'ils avoi'ent
^is devant la capitale ville du monde. Pour la
niefme fin encore s'il arrivoit que dans la mêlée
quelqu'un des leurs fauvât la vie à un citoyen,
ils luy donnoient une Couronne de chefne. A quoy
je veux croire que cet arbre eftoit particuliére-
lïieiît deftiné, à caufè que les Anciens l'avoieut en
grande vène'ration , & que les glands qu'il produit
leur fervoient de nourritiire ordinaire. Plutar-
Slue néanmoins ne demeure pas d'accord de cet-
te raiibn, qui eft rapportée par Aule-Gelle, &
Cil allègue quelques autres, qu'il dit eftre plus
vray-femblables. Mais quoy qu'il en foit, il eil
tres-certain que ces deux Couronnes eftoient le
prix honorable de ceux qui avoient bien fervy
leur Patrie, l'amour de laquelle ne peut regarder
la confervation de tout le public, qu'elle ne
comprenne celle de chaque citoyen en parri-
culieV.
Le précipice qui fe voit ouvert aux pieds du
Soldat que nous dépeignons, avecleiqucls il fou-
le fans crainte toutes fortes d'armes, nous avertit
^ti'un vray citoyen n'apprchende jamais aucun
danger pour l'amour de ili Patrie. En cela fem-
blable au renommé Curtius Chevalier Romain,
& au valeureux Anchur, fils de Mydas Roy de
Phry-
-ocr page 52-Phrygic, qui pour fauvcr leur païs des contagieu-
fes exhalailbiis qui fortoient d'un gouffre épou-
ventablc, s'y précipitèrent volontairement. Ce
qui montre aiîez combien doit eilre recomman-
dable aux courages nobles le fervice de leur pa-
trie; & qu'avec beaucoup de raifon Neftor dans
Homere, pour mieux encourager les Troyens à
combattre les Grecs, leur dit ces paroles,
Courage Com])agnons, fuivei vofire dejlin ;
Attaquez, les Vaifieaux de ce Peuple mutin,
Et que pas un de vous lâchement ne s'cfionae
Des aUeintes de ]Msrs, ny des traits de Bellonne'.
SauveT^vofirePaisparun dernier e^ort,
Vous ne ffaurie^mourir d'une plus belle mort.
Le fage Licurgue, grand Legiflateur & grand
Roy tout enfemble , ordonna pour cet effet,
qu'on n'euit à graver fur les tombeaux les noms
d'aucuns citoyens, que de ceux-là feulement qui
fcroient morts pour la dcfenfe de leur païs. Ce
qu'il fît fans doute, pour apprendre aux autres à
les imiter ; comme s'il cuti voulu dire, que dans
un Eftat bien policé, les valeureux &fîdelles com-
patriotes effoient feuls dignes de la mémoire des
hommes.
Par ces exemples il eitaifé de juger, que l'habit
de Soldat eft tort convenable au bon citoyen,
puifque pour défendre le lieu de fa naiffance, il
fait toujours gloire de mourir cotu-ageufement,
& les armes à la main. Cette vérité ne fe peut ca-
cher, cftantfi vifibledans l'Hiftoire, où tant que
les belles aâionsauront lieu, on remarquera par
deifus les plus grands noms ceux de ces braves
Romains, Decius, Horace, Fabius, &ainiides
autres ; & parmy les Grecs celuy de Grillus,fîls de
Zenophon, Philofophe /Athénien,qui durant un fa-
crifi-
-ocr page 53-ecifice où il préfidoit, ayant appris que ce valeu-
reux jeune homme qu'il croyoit Iny devoir fiir-
vivre, eftoit mort en combattant pourfon Pays,,
'-e remit à l'heure mefme fur la telte, & fe tour-
nant vers le MeiTager qui luy avoit apporté de fi
runeftes nouvelles: Voilà, àtit-W^mesvœux exau-
'■ viens d'obtenir ce que fay toujours demm-
^^ aux Dieux, ff avoir qtfils me donnaient un fils
mourufi pour fa Patrie, es' m» pas qpii vefcpifl
^ longues années^ pais qii'on ne ffaà s''il efi bon ou
'"''Mauvais de vivre long-temps.
■ ^mêmMmm^êmm^ÊMM
AME BIENHEUREUSE. XL
ENcore quel'Ame, comme difent les Théo-
logiens, n'ait rien de corporel, & qu'elle foit
^ine fubitance immortelle, l'homme néanmoins
attaché aux fens du corps, fe la figure en l'ima-
Smation le mieux qu'il iu peut comprendre , &
comme on a accoutumé de repréfenter Dieu & les
"^"gss. Il ne faut donc pas trouver eftrange, fi
Pour en laifler à l'efprit une véritable idée, nous
faifons ainfi la peinture.
^ G'eft une jeune âile, en qui la grâce & la beau-
té font également jointes eniemble. Elle a une
cftoile Car la teilc, des aifles au dos, levifage
couvert d'un voile iranfparent, & une Robe écla-
tante, & fort deliée.
On la peint belle, parce qu'elle eft faite à l'i-
i«age de Dieu fon Créateur, fource inépuifable
Qe beauté, de grâce, & de perfeaion.
Le voile qu'on luy met fur levifage, nous fait
f eînarquer avec S. Augaltin, qii'elÎe ejt une fréftance
invi-
-ocr page 54-invijible aux yeux humains^ une forme fuhftam-
îiille du corp, ok elle ne faroifl foifit ^ ne [e
tomprend que par certaines aÛims exte'rteurei.
L'éclat delà Robe cil une marque de la gran-
de pureté par laquelle elle eft en Ibn luftre, & un
ligne myfterieuï de la perfeêtion de fon ef-
fence.
L'i\ilre qui brille deiTus fa tefte fignifie fon im-
mortalité , que les Egyptiens dépeignoient par
une eitoille, comme il le voit dans Pierius en les
iigures hicroglifiques.liv.44.
Quant à fes aifles, il n'y a perfonne qui ne les
prenne avec raifon pour des effets de là vîtefle
incroyable dans les fondions fpirituelles, & qui
par elles n'entende fes deux plus nobles puiiTan-
ces, qui font l'Entendement & la Volonté.
Ê^M&mMM&ÊMMMmÊMm
/^N le repréfente par une Femme agréable,
qui paroift ingénieufe à fa mine, & qui eft
veltue d'une Robe verte. Elle tient en fa mai»
droite trois fortes d'outils, qui font un marteau,
un burin, & un pinceau ; & s'appuye de la gau-
che contre un pieu enfoncé dans la terre, fer-
vant d'eiknçon à une jeune plante, qui l'envi-
ronne depuis le bas jufques en haut.
L'agrément qui fe remarque dans le vif^e de
cette témme, montre aflez combien charmantes
font les merveilles de l'Art, ~ & cé que peut u»
excellent ouvrage; foit pour attirer les yeux d'un
chacun, foit pour mettre fon Autheur dans l'ap-
probation & dans l'eitime de tout le monde.
Sa Robe de couleur verte lignifie, qu'en
quelque profeillon que ce foit, les meilleurs
<-)uvriers ne s'eûudieiit à perfeaionner la Natu-
^ par le moyen de F Art, qu'àcaufedel'eipé-
rance qu'ils ont, ou d'en tirer de la gloire, oa
d'en avoir du profit. Car il efl: indrbitrible que
l'h-onnenr & Fintéreft font deux Démons ex-
trêmement puiiTans, pour aiguifer l'efprit de
l'homme, & le faire réiiffir dans les ouvrages
les plus difficiles.
Les trois outils qu'elle tient en main, font
icy mis comme les plus ordinaires & les plus,
propres à imiter la Nature , principalement
dans les Ouvrages où l'on fe ièrt du burin & du
pinceau, par lefquels les Peintres & les excel-
lens Sculpteurs revivent après leur mort.
Et parce qu'il y a certaines chofes, où l'Art
ne travaille pas tant à imiter la Nature en les
produétions, qu'à fuppléer à fes défauts, com-
me il fe voit en l'Agriculture ; c'eft pour ce-
la qu'on peint cette femme appuyée contre un
pieu planté dans la terre, parce que le pieu qui
eft droit, fait que l'arbriilèau tortu & encore
tendre , fe redreiTe par la force de l'Art, à
mefure qu'il prend accroilTement.
SA peinture eft celle d'un Homme de beau
vifage , & l'habillement duquel eft femé
d'une riche broderie. Il tient la main droite
appuyée fur une viz iàns fin, & de la droite il
/. Part. Β montre
montre une ruche pleine de mouches à miel,
dont les unes s'attachent au defiùs, & les au-
tres s'envolent.
Il eit vêtu noblement &artiftement, parce-
que l'Art cil iî noble de foy , qu'on le peut
nommer une féconde nature.
Il s'appuyt,· de la main droite ilir une viz,
pour montrer que l'induftric humaine a inventé
des machines, & des inflrumens , par l'aide
defquels on peut fans aucun efîbrt faire des
choies qui ne femblent pas croyables. C'ell:
pour cela qu'en un vers qu'Arifte aprisplaifir
de citer en iês Mécaniques le Poëte A.ntiphoa
nous enfeigne, que par le moyen de l'Art nous
venons à bout quelquefois de certaines entre-
prifes , qui femblent direélement oppofées à
la nature de la chofe melme à laquelle nous
travaillons. Ce que nous aurions fujet de
mettre en doute, li pour le prouver nous n'a-
vions l'expérience , qui nous fait voir qu'en
nos bâtimens ordinaires il feroit comme im-
poffible d'enlever les plus groiTes pierres, fans
la machine vulgairement appellée grue.
Par la ruche qu'il montre, quieit pleine de
mouches à miel, nous eft declarée leur mer-
veilleufe induftrie, qui fait dire au plus iage de
tous les hommes; Va-fen à Γ abeille, qui t'ap-
prendra combien elle efi diligeftte isf laborieiife
en fin ouvrage-, & au Prince des Poètes Latins,
que ces merveilleux animaux , quelques pC'
tits qu'ils foient, ne laiiTent pas d'être grands
en leur conduite, ayant leurs chefs, leurs or^'-
dres, leur police, & leur œconomie d'où ft
forme entr'eux une efpéce de Royauté.
C'E s τ le tableau d'une Vieille , qui tient
des deux mains un horloge de fable, &
prés de laquelle fe voit un écueil environné
d'un rameau de lierre.
L'empire du temps qui travaille continuel le-
iTient à nôtre ruine, noas eil marqué par la
vieilleiîe de cette femme. Elle tient pour cet
effet un horloge de fable, qui a befoin de fon
afllduité, foit qu'il le faille tourner ou le remuer
fouvent, de crainte qu'il ne s'arrefte.
à L'égard de l'écueil que le lierre environne,
cela veut dire, que ceux qui s'attachent au fer-
vice des Grands, &qui leur rendent les aflidui-
tez & les devoirs à quoy ils font obligez, mon-
tent peu à peu comme le lierre, tant qu'ils les
ont pour fapport ; mais que leur appuy eil rare- '
ment fans quelques écucils.
mMM&^A&mMMÊMÊMM
CE τ τ Ε figure de l'Allrologie eft tirée de
la defcription que plufieursexcellcns Poè-
tes tn ont faite. Elle a un habillement bleu,
des ailles au dos, un compas en la main droi-
te, & en la gauche un globe celeiie.
Elle eitveiluë de bleu, pour nous apprendre
qu'elle a pourety et la contemplation des cieux
Β i &dcs
& des étoiles, qui leur fervent d'ornement;
aufli en eft-elle couronnée.
On la peint avec un globe&un compas à la
main, parce qu'elle s'étudie à mefurer les cieux,
& à conliderer leurs mquvemens, &leurjuile
lymmetrie. Le mefrhe nous eft lignifié par fes
aifles, à caufe que cette Science acela de pro-
pre , d'élever l'eiprit aux connoilîànces les plus
loiiiibles & Jes plus hautes.
Quelques-uns encore luy donnent un fce-
ptre, afin de faire voir par là, que les Aflres ont
un empire puifl'ant fur tous les corps fiiblunai-
res; & d'autres metient un aigle à fes coftez,
pour montrer qu'à l'imitation de ce Roy des
oifèaux, qui regarde le foleil fixement, ΓΑ-
ftrologie eil fi clair-voyante, que dans l'obfcu-
rité mefiïïe el le fe fait des lumières, pour péné-
trer jufques dans les Cieux.
JE ne penfe pas que la Puiiîànce ou l'Autho-
rité fe puiiîe mieux peindre qu'en ce por-
trait, qui la repréfente comme une Dame
vénérable, afllfe dans un magnifique thrône,
& veftuë d'une belle robe, couverte de pierre-
ries : avec deux clefs .en la main droite , un
iceptre en la gauche, & à iès coftez un dou-
ble trophée d'armes & de livres.
On k peint-âgée, parce qu'au dire de Cice-
ron, u-ae Vieiilejje honorable eftfipkme d'authori-
té, qiielle farpefe de beaucoup tous Jes autres
plfà'
J
-ocr page 60-ï C ο Ν ο L. ο G I Ε. 29
plaifirs de la vie comme étant la fource de lapruden-
^^ & de la fagejfe : d'où il s'eniuit auflï, que
ies jeunes doivent obeïr, & les vieillards doi-
vent commander.
Elle eft affile en un thrône, à caufe que cette
^iiion , propre aux vSouvcrains, & aux pre-
niiers Magiftrats, eft une marque d'authorité,
^ de tranquilité d'eiprit. Cxti pourquoi les
Juges qui ont puifiance d'abfoudre & de con-
'iamner, ne le peuvent faire félon les loix,
^'ils ne font affis.
Son habillement efl: plein d'éclat & de pom-
Ρε , pour montrer la grande prééminence
Wont fur les autres les peïibnnes de condition
^ d'authorité.
Les clefs fignifient cette mefme puiflance,
^ particulièrement la ipirituelle ; comme il
^ous eft déclaré par ces paroles de Jefus-Chrift,
Parlant à faint Pierre, Jetedo-meraylesdefs d.n
^^yaume des deux ^ mferalie'toutce quetulie-
^ as fur la terre, tout ce que tu délieras y fera
Pareilleraentdélté..
Or ce qu'elle hau-iTela main droite, comme
'1 elle vouloir élever au Ciel les clefs qu'elle
p^nt, eft pour nous apprendre comme dit S.
que toute pmffance vient de Dieu-, & par
•^onftquent, que tous ceux qui rélevent de cel-
^ d'autriry, font obligez de ia rcconnoître, &
^es'yaiTujettir.
Quant au fceptre qu'elle porte , c'eft une
parque de la puiiTanee temporelle, comme
armes qui le voyent à fes cotés en font une
; & les livres un ligne exprés de l'authori-
des Ecritures.
Β 3 AV-
-ocr page 61-3ο I C Ο Ν Ο L Ο G î Ε.
Aurore, xvil
ε τ τ ε belle fourriere du jour, à qui l'on
donne des ailles comme à la Renommée,
fe fait remarquer par le vermillon de fes joues,
& par ià Robe de coulear jaune.
ille tient un flambeau d'une main, & fe-
mc des fleurs de l'autre, rendant l'air ferain
à fon arrivée, qui cependantréjoiiit la Terre
& les plantes, qu'elle arrofe de iès larmes.
Ses aifles fignrent la merveilleufe viteiTede
fon mouvement, qui difparoifl: auffi-toft. Car
de la mefme façon que la nuit luy quitte ik
place, il faut qu'elle cède la fienne au Soleil,
qui par fes rayons naiffans efface toutes les au-
tres lumières.
Le rouge & le jaune luy conviennent ex-
trêmement bien, à caufe qu'à fon lever elle
peint tout l'hori'zon de ces couleurs, comme
il fe remarque en divers endroits d'Homerc,
où il dit :
Que d'un teint de faffran elle fembk voilée.
A quoy fe rapportent les vers de Virgile,
IJ Aurore cependant de jame çolorée.
Sort de l'onde auirée.
Et ceux-cy d'Ovide,
Cephale fi eut ([ue le De il in,
Moiffrme les plus belles chofes,
Et de vint le honteux butin,
De la Deefie au teint de rofes.
Elle porte un flambeau allumé, à caufC)
corn-
-ocr page 62-comme j'ay dit, qu'auiTi-toil qu'elle feleve,
cet endroit du Ciel où elle paroiit, brille d'une
agre'able clarté.
Touchant les fleurs qu'elle féme, cela fi-
griifie que celles dont laTerre s'émaille , doi-
vent leur épanoulilement & leur fraifchcur à
rofée, que les Poètes ont feint naiftre di5
"Aurore, & diftiller de iès yeax, comme des
perles liquides.
Quelques-uns encore l'ont peinte affife far
Cheval Pegaiè , pour montrer avec com-
°ien de vifteïiè elle vole dans le Ciel ; ou
peut-être, parce qu'elle aime les Mufes, &
que les Poëtes qui en font inipirez font de plus
plies produâions d'efprit au matin, que tout
refte de la journée.
tiiâââââ^yyiâ-ââsyiâââ
C'EsT: une Vieille effroyable à voir , pour
eftre extrêmement laide, palle, déchar-
mélancolique, & monftrueufe par tout
!5 <^orps. La violence de la douleur qu'elle
^^nt luy fait porter l'une de fes mains fur fon
^^ntre, qui eft plus gros que celuy d'un hy-
"•Opique. Elle femble cependant dévorer des
y^wx une bourfe , qu'elle tient eftroitement
de l'autre, & n'a pour toute compa-
iJ^'e qu'un loup affamé, auffi maigre qu'elle,
^ gui ne bouge de fes coftez.
^ L'Avance , mortelle cnnemJe des vertus
^^^orales & Chreiiiennes , eit une exceffivc
Β 4., con^
convoiiifc d'avoir da bien, qui dans le cœur
de cekiy qu'elle poiïëde, engendre la haine ,
la cruauté, la difcorde, l'ingratitude, & la
trahiibn. Aufli a-t-on accouftumé delà pein-
dre vieille, non feulement à caufe delà puil-
fânce qu'elle a fur les vieillards, mais pour
faire voir encore, qu'elle eft l'ancienne mere
de toutes fortes de fourberies & de malices.
Le vi&ge pafle efl un effet de la malignité
de fon envie, qui la ronge & labourelle fans
ceiTe; parce-que dans le comble mefme de
iês richeffes il eft impoffible de luy oiler de
l'efprit, que la fortune de fon prochain ne ibit
meilleure que la fienne. Difons encore, que
fl quelque chofe fait pâlir un homme avare,
c'elt l'apprchenfion qu'il a que fon bien ne di-
minue, ce qui luy donne fi fort l'allarme,
qu'il ne rencontre jamais une parfaite aifeu-
rance en autruy, tant s'en faut qu'il la puiiiê
trouver en foy-mefme.
L'on ajoufte icy, qu'avec beaucoup de rai-
fon cet infatiable appétit des biens du monde
eii; comparé au mal d'un hydropique. Car
comme celuy-cy ne fait que s'alterer davan-
tage à force de boire; l'Avare de mefme fem-
blable à Tantale, ne peut efleindre l'ardente
ibif qu'il a des richeiTes , & fe croit pauvre
dans l'abondance.
Noftre-vieille Harpie ne tourne les yeuX
que fur ili bourfe ; à caufe que repréfentant
l'Avarice, elle prend plus de plaifir à regar-
der fon argent, qu'à l'employer aux choië»
utiles & néceiFaires.
On luy donne un Loup qui l'accompagne
pour
-ocr page 64-Psur montrer que l'homme avare ne tourne
fe penfées qu'aux moyens d'attraper le bien
d'antruy, foit par des rufcs couvertes, ibitpar
Qe manifeiks rapines. En cela lembîable à ce.
glouton &ini;«iable animal, qui ne fe conten-
tant pas de la proye qu'il aiaite,talchedeilir-
prendre ou les Bergers ou les Cliiens, & n'a j a-
inaisde repos , qu'il n'ait eftranglé t-out ce qu'il
y a de Brebis dans une Bergerie, tant il a peur de-
n'avoir pas dequoy fe fouler.
BEAUTE DE FEMME XIX.
ELle eft peinte nuë,. avec une guirlande
de lys & de violettes, un dara en une
lîiain, en l'autre un. miroir, & un Dragon,
épouventable fous elle.
On la Couronne de lys, à caufe que cette,
fleur naturellement blanche, agrcable·', & fer-
me en fes feuilles, eil un ancien hieroglypiie de
la beauté; bien que toutefois elle fe pallé plus
vifte que ne font les violettes·,, qui pour cela'
font jointes à fa guirlande.
Le Dard dont elle bleiie les cœurs· , ne fait
d'abord qu'une kgére. playe ,. qui s'accroift
Néanmoins infenfiblement, parce-que la flè-
che s'enfonce fi avant peu à peu qu'il eft dif-
ficile de la tirer. Par où il ell démontré, que.
les bleiEires d'amour. Cèmblent douces au com-
mencement, mais que le temps les envenime,.
'St les rend quelquefois incarables, tant' s'en
faut qu'il les guériiïe.
Β f Quant.
-ocr page 65- -ocr page 66-Quant au miroir qu'elle tient en fa rnain,
c'eft la beauté mefme ; où plus un Amant fc
regarde, & plus il ie plaitl à aimer l'objet qui
luy eû reprétènté, fi bien que le plailir qu'il y
prend luy en fait défirer la jouiflance.
Le Dragon fur qui elle eft afiife, apprend
aux Amans à fe tenir fur leurs gardes ; parce-
qu'où la beauté fe rencontre, c'eft -là qu'or-
dinairement l'excesde l'amour fe meile au ve-
nin de lajaloufic.
Je ne parle point de fa nudité, qui veut
dire que les femmes, quelque mine qu'elles
faiïènt, fe piquent fi fort des beautei du corps,
que pour les faire admirer, les moins honnef-
tesd'entr'elles, commue dit un Ancien Poëte,
en cftalleroient volontiers toutes les parties, fi
elles n'eiloient retenues par la honte, ou par
la timidité qui eft naturelle à leur Sexe.
L n'eil: pas m.oins difficile de la peindre que
_de la regarder, fans eftr«ébloay des rayons
qui l'environnent. Et bien qu'elle n'écoute
pas volontiers les louanges que luy donne la
Renommée, qui n'en peut parler affet digne-
ment , l'une & l'autre néanmoins ont la tef-
te enveloppée d'un nuage.. Elle tient au ref-
te un lys d'une iriain, & de l'autre un compas
& une boule.
Elle cache fa tefte dans les nuës, parce qu'il
n'eil rien de û cbfcur à l'efprit humain, ny rien
de-
-ocr page 67-«îequoy [a. langue des hommes puifle par-
ler plus diiFicilement que de la. Beauté. Que
s'il la faur définir par métaphore , elle u'eil
autre chofe,. félon les Platoniciens, qu'une
lumière rerplendiflàme, la fource de laquelle
ell la face de Dieu. Car la première de toutes
les Beautez, n'eft qu'une mefme chofe avec luy:
tellement que fi les mortels fe haiardent d'en
parler, tout ce qu'ils en difent, ils le tiennent
de fa grâce particulière, & de fa profonde fa-
pience, qui leur en communique l'idée. Mais
coiDîTie ceux qui iè regardent dans un miroir,
ii'en font pas plûtoii: éloignez qu'ils perdent le
ibuvenir de ce qu'ils ont veu ; ainfi tant que nous
Heconfiderons la Beauté que dans les chofes
mortelles, nous ne pouvons pas nous élever
commΛe il faut à la contemplation de cette pu-
re & lîmple clarté, d'où procèdent toutes les
autres lumières.
Jiieii ne fe voit en aucun Ueu^
Qui ne fait formé d'une idée ^
Qu'engendre l'amour du grand Dieu,
Par qui la raifoii efi guidée.
Le lys fleuriiTant qu'elle mêleparmy fes ra-
yons , fignifie une égalecorrefpondance de li-
iiéamens & de couleurs ; ce qui nous eft encore
dém.ontré par le compas & le globe qu'elle tient
de l'autre main.Car la vraye Beauté, de quelque
nature qu'elle foit, a fes proportions & lés me-
fores , qui s'ajuftent au temps & au lieu.
Ibnt fujettes à l'œil, ou qui luy plaifent en
quelque forte; foit par la fymmetrie des fi-
gures , foit par la délicateflè des traits, foit
par l'agréable mélange des couleurs & des
ombrages qui les réhauiTent., Le temps tout
de mefme réglant comme il faut les tons, les·
mefures & les cadences, en forme une dou-
ce harmonie, qui fait que ces chofes & au-
tres fembJabks eilant bien ajuiiées plaifent
merveilleufement, & font à bon droit ap-
pellées Belles. Davantage , comme par la
fubtilité de fon odeur , le lys chatouille les
fens, & réveille les eiprits ; la Beauté de
xnefme incite les cœurs à aimer les chofes
qui tiennent de ià. nature, & qui font aimables
d'elles-mefmes..
CE τ τ Ε figure ne fc peut mieux expli-
quer que de l'union mutuelle qu'il y doit
avoir entre deux, perfonnes mariées. Elle re-
prélènte une Femme agréiable, couroiiuée de
feuilles de ·νί§ηε & d'ormeau , entrelacées
pefle-mefle. Le bras gauche qu'elle tend ,
femble démontrer quelque aâion officieufe ;
comme le droit fignifie ià merveilleuie ten-
dreflè envers un Alcion, qu'elle tient eilroite-
Jiient ferré contre fa belle gorge.
Sa guirlande eft un fymboled'amour,pour
la grande fympathie qu'il y a naturellement
entre !a vigne & l'ormeau,
Doii^
-ocr page 69-Dont la forte union par l'Amour enchaifiiée.
Semble les avoir joint fous le jou^ d'Hyménée.
Quant à l'Alcion qu'elle eftreint contre ion
fein, c'eitune allufion à la fable d'Alcione fem-
me de Ceix, Roy de Thrace, qui eut tant
d'amour pour fon mary, qu'ayant feeu la vé-
rité du fonge qu'elle avoit fait de fa mort, ar-
rivée fur la mer , elle s'y précipita de regret
qu'elle en eut. Ce qui donna fujet aux An-
ciens Poètes de femdre qu'elle avoit eilé trans-
formée en cet Oifeau qui porte fon nom ; &
ce qui a fait dire depuis à M. Malherbe.
Ainfi fptt four de au réconfort,
Quand elle eut trouvé fur le bord
La perte qti'elîe avoit fonge'e,
Celle de qui les paffions.
Firent voir à la mer Ege'e
Le premier nid des Aidons.
Ce n'cft donc pas fans raiiôn que l'ingé-
Rieux Ovide s'eft avifé d'une fi belle Méta-
lïiorphofe, afin d'obliger plus fort les fem-
tties à l'amour de leurs maris. Car à vray
dire, la femelle de l'Alcion aime tellement
le iîen, qu'au rapport de Plutarque, s'il arri-
ve que la foibleffe de l'âge le rende pefante au
Vol, elle le porte fur fes épaules : elle le nour-
rit &le foulage; elle prend la meilleure part
de fes maux, à luy tient compagnie jufques.
à la mort.
BENI-
-ocr page 70-CE τ τ Ε belle Dame, dont le vifage eft fi
charmant, a toutes les marques d'une
Pariaite Bénignité. Ses cheveux blonds font
ornez d'une Couronne d'or , l'éclat de la-
quelle fe redouble par-celuy d'un beau Soleil,
qui rayonne fur fa teiîe. Elle eil habillée d'u-
ne riche Robe, &de la faÇonqu'elle tient les
bras ouverts, il femble qu'elle ne demande pas
mieux que d'accueillir favorablement tout le
monde. En fa main droite elle porte une bran-
che de pin, ayant une Chaire à fon cofté gau-
che , & un Eléphant derrière elle.
Avant qu'expliquer cette figure, il eit à pro-
pos que nous donnions la définition de la ver-
tu qu'elle repréfente. La Bénignité n'eft donc
autre choie, félon Ariilote, i^^me affeiiion,
ou fi l'on veut, une inclination ^ qui porte «atu-
reHement une perfonne ge'mreufe ϋ ma^anime,
àeflimerVhonneur qu'elle reçoitdeshonnejlcsgens,
Îsf particulièrement de ceux qui luy font inférieurs.
Par où l'on peut voir, qu'à proprement par-
ler, cette vertu n'appartient qu'aux ames gé-
néreuiès, qui ont toutes les bonnes qualitez
neceiiàires à la bien cultiver. Or comme il eit
véritable que l'honneur eft immédiatement
l'objet de la Bénignité, il s'enfuit de là, qu'el-
le eft la plus noble vertu que puiiîe avoir un gé-
néreux Prince.
De ce queje viens de dire eft une preuve biea
niani-
-ocr page 71-manifefte rextréipé douceur qui fe remarque
dans le vifage dg'cette Dame, qui n'a les bras
ouverts que pour donner un libre accès à ceux
qui l'abordent, & leur témoigner par fon aâion
combien elle mérite d'eftre aimée : auifi eit-el-
lefi aimable,
Qu'on dit que fa beauté \ qui n'a point defareille^
ï^eut enchanter les cœurs d'amouri^ de merveilie.
Et parce que fa grande modeftie eft accompa-
gnée d'une majeité Royale, elle a pour cet ef-
tet une Couronne d'or for la tefte,
Ce n'eft pas encore fans un myftére particulier
qu'elle tient en fa main droite un rameau de pin,
vray fymbole de Bénignité. Car bien que cet
arbrefoithaut, & fon ombre fort grande, les
plantes qui font en bas n'en reçoivent que de
l'utilité, comme le remarque Theophrafte.
Ce qui nous apprend , qu'un homme de
haute naiffance & d'illuike tige , n'eft ja-
mais nuilible à ceux qui font au delTous de luy,
^ quefaproteàionleureft comme un ombre,
pour les mettre à couvert de la violence des mé-
chans.
L'on ajoute icy pour unautre fymbole de la
Bénignité des Princes & des Seigneurs, le plus
grand & le plus noble de tous les animaux, qui
eftl'Elephant: Dequoy les les Naturaliftes at-
tribuent la caufe à ce qu'il n'a point de fiel : mais
l'on peut dire de plus avec Pline, que cet ani-
mal a de merveilleufes lumières d'efprit ,& des
fcntiniens qui approchent fort de ceux des créa-
tures humaines. Cette preuve que l'on en
donne n'eft pas des moindres ; fçavoir, que
ii dans quelque defert il rencontre une per-
fonne
-ocr page 72-fonne égarée,, pour ne la point eftrayerils'effi·
écarte d'abord, puis pour luy donner courage,
ilmarcliedevant, &luyfertde guide, jufques·
à ce qu'il l'ait remife peu à peu dans le grand
chemin. Après une aâion fi remarquable ,,
que peut-on dire autre chofe, finon que c'eft un.
prodigieux efiet de labonté de cet animal, qui
pouvant nuire ne le veut pas, & ne fe plaifl: qu'à
faire du bien ? De ce mefme naturel font les
bons Princes, quipar une inclination généreu-
fe affilient leurs pauvres fujets les- redreffent
quand ils fe font égarez, & leur donnent des
azyles falutaires.contre les perfécutions de ceux
qui les veulent opprimer. Que fi l'on feuillette
bien l'ancienae Hftoire, l'on y trouvera fans
doute, que par des aâions de clémence & de.
bonté, les Aléxandres.& les· Céfars ont plus.
Guëilly de lauriers, que par leurs plus mémo-
rables faits d'armes.
CE τ τ Ε Nymphe, ou plûtofl; cette DeéiTe,:
vetluë d'une Robe de gaze d'or , & cou-
ronnée d'une guirlande de rue, a les yeux fixes
au ciel, un Pélican entre fes bras, & à fes
codez un arbr« verdoyant , planté fur le
bord d'une rivière..
La bonté en l'homme £Ît un mélange de
plufieurs bonnes qualitez, comme celles-cy;
lafoy, lajuftice, l'intégrité, la patience, &
ainii des autres-
Sa
-ocr page 73-Sa Robe eft tiiTuë d'or, à caufe que c'eftlc
meilleur de tous les métaux. Et pour la même
raiibn encore le Poète Horace donne à la mé-
diocrité l'epithéte parce qu'il eit véri-
table que par fon moyen la Bonté fe communi-
que à toutes les cliofes d'icy bas.
Sa guirlande faite de rué, montre qu'elle n'a
pas moins de force à exterminer les mauvaifes
penfées, qui luy font fans ceiTe la guerre, que
cette herbe a de vertu contre les enchantemens
& les charmes des malins Efprits, qui la fuyent
naturellement, & l'ont en horreur. Davanta-
ge, comme ce n'eft pas la moindre de fes qua-
lités que d'éteindre peu à peu l'Amour propha-
ne ; la vraye Bonté de même a cela de propre
de fouler aux pieds tous fes intérefts, &d'affu-
jettir à la raifon l'amour de foy-même , qui
trouble ordinairement l'harmonie des autres
vertus.
Elle tourne les yeux vers le Ciel, pour ne
yoir point les vanitez de la Terre. Car les ob-
jets de baiTelTe & de fragilité ne luy font pas
moins odieux, que la contemplation des cho-
fes divines luy eil agréable.
Le Pélican qu'elle tient entre fes bras, eft
une figure de fon ardente charité; car elle re-
tranche de fa propre nourriture, pour en faire
part aux pauvres; à l'imitation de cet oiièaufe-
courable, qui pour empefcher que £ès petits ne
meurent de faim, ie perce le flanc à coups de
bec, & les nourrit du fang qu'il en fait for-
tir.
L'arbre qu'on a peint prés d'elle a un fens al-
légorique & myflérieux, tiré des termes exprés
du
-ocr page 74-du Royal Prophète, lorfque parlant de l'hom-
me julle & qui fuit la Loy de Dieu, il le compa-
re à un arbre qu'on a planté fur le bord d'un
clair ruïiTeau.
veïd,
Ous peignons icy le bon Augure fous
. la forme d'un jeune homme vertu de
', ayant fur la tête une e'toile, & un cygne
entre fes bras.
La couleur verte eft un fymbole de l'efperan-
ce, & par conféquent du bon augure, à càufe
que la verdure de la Terre nous promet abon-
damment des biens & de fruits.
L'étoile qui brille fur fa tête luy convient
fort bien, parce que les anciens Augures mar-
quoienr toujours les heureux iliccés, comme
il fe voit dans Pierius en fes Figures hiérogly-
phiques lîv. I.
Quant au cygne, il n'y a eeluy qui'ne Içacfic
bien, qu'il étoit autrefois de bon augure, tant
pour Ibn extrême blancheur , que pour être
confacré à la Déeiîè Venus; ce qui fait dire à
Virgile,
Tu feux voir, fi tu veux, àam le vague de Îaif
Doutée cygnes voler.
Au contraire de ce queje viens de dire, l'on
peut peindre le mauvais Augure en foible Vieil-
lard, vêtu de couleur de feiiille-morte,
faire tenir en main une belette, yajoûtant,
l'on veut, une corneille, qui prenne fon v:ol
du côté gauche. ■
La couleur de fon habit montre , que le
mauvais Augure fe tire ordinairement d'une
înauvaife caufe, qui ne peut produire un bon
^ffet; comme il fe voit aux feuilles des arbres,
ne perdent jamais leur couleur ; que le tronc
n'ait perdu fa vertu.
Λ l'égard de la belette & de la corneille, on
a toûjours tenu ces deux animaux pour être de
mauvais augure. Alciat le remarque en un
Que toujours la belette εβ de mauvaisprefaÏe,
Lors que dam ton chemin elle s'ouvre unpajfage,
Et Virgile en fes Eclogues affeure le mefme de
fe corneille, qu'il appelle fatale,
Du creux d'un chefne vieux maintesfois Is cor-
neille
Apre'dit ce malheur, i^c.
A toutes ces chofes fe rapporte à peu prés la
Médaille de l'Empereur Adrien, repréfentant
homme debout, qui regarde voler un oi-
ièau, & qui tient d'une main lebafton Augu-
J'ai , apellé Lituus, que la plupart des anciens
Auteurs, & particulièrement Ciceron & Au-
Is-Gclle ont décrit aiîez au long.
IL n'y eut jamais de beauté plus grande ny
. plus modefte que celle-cy. Elle tient un
foiiet d'une main, & de l'autre un crible, d'où
s'écoule de l'eau. Sa Robe blanche reifem-
Dle à peu prés à celle d'une Veftale; fur la cein-
ture
tiire de laquelle, qui eft en forme de bande aiTeï
large, font éarits ces mots tirez dcfaintPaul·,
CaJHgo corpus meum, c'eft à dire, je chaitie mon
cbrps ; & à fes pieds fe voit un Cupidon vaincu,
aveclesyeut bandez, & l'Arc tout rompu.
Cette figure de la Chafteté ne peut mieux
eftre expliquée que par la définition qu'en don-
ne le grand Saint Thomas , quand il dit,
qu'une fi belle vertu, qui prend fon nom du
chafdment de la chair , purifie la perfunne
qui la poiTéde, & la nettoye de toutes fortes
d'impuretez & d'ordures.
Elle tient pour cet efiet une difcipline ,
dont elle chattie fon corps, qui eil la Devife
écrite fur fa ceinture.
Par le crible qu'elle porte,ileft démontré,
que l'eau qu'on y répand n'en fort pas plus
promptemént, que les mauvaifes penfées s'é-
coulent vifte de ion ame ; & par le Cupidon
qu'elle foule aux pieds, fe voit clairement que
la concupiicence quelque forte qu'on fe la fi-
gure, ne peur avoir aucun empire fur elle.
A cette peinture de la Chafteté l'on en peut
ajouter une autre, qui la repréfente veftuë de
blanc, félonTibulle,
Pource que les Dieux Immortels,
Çlui font ennemis des ordures,
N'aiment à voir fur leurs Autels,
Que des chofes chaftes pures.
Son vifage eft voilé, à caufe , dit S. Gré-
goire , que c'eft le propre des Ames pudiques
d'empefcher foigneufement que le vice n'en-
tre chez elles par les yeux, & de les détour-
aer pour cet eftet des objets deshonneftes.
Le Sceptre qu'on luyfait tenir, fignifiequc
^ "Omme chafte a tant de pouvoir fur foy,
qu'encore que la chair foit mortelle ennemie
l'efprit/ellene peutxaéanmoins le vaincre,
silluy refifte..
C'eft pour la meime raifon encore, que Îa
^nafteté femble marcher ici, de la façon qu'el-
eft peinte ; afin de montrer à ceux qui la
|;"ériirent, combien il leur importe de tenir
I ame. eu aâion, & de ne point s'avilir dans
® vice des fainéans, qui eft la fourcede tous
maux de la vie : Mais il l'eftfur toutdela
plus ardente de toutes les paffions, puis qu'aP
leurément, comme dit Ovide,
CMpido» a point d'Arc ^pointée traits ,,ρίϋί
de flame,
Pour celuy qui bannit l'oijivet/ de famé.
Quant aux Tourterelles, je trouve qu'elles
Conviennent fort bien à la vertu que nous décri-
ions, dont cet Oifeau eft à bon droit le fymbole;
P^fce qu'ayant une fois perdu ià compagne, il
'l'en veut point avoir d'autre, & qu'il paife le
i^^fte de fa vie dans une folitude continuelle.
CELERITE ou VITESSE. XXVI.
La defcription de cette peinture eft tirée de
^ Pierius en fes figures hiéroglyphiques, où
ii dépeint la Viteffe telle qu'on la voit icy ; à
|Çavoj.r la foudre à la main, unEpervier prés
Pcûitefte, & un Dauphin à fes pieds. Dequoy
Je ne m'amuferay point à rendre d'autres raiibns
les feuls effets de l'expérience, qui nous
montre l'extrême promptitude de ces trois
chofes ; car il eft certain qu'après celle de la
foudre, quin'efl;pas imaginable, il n'eftpoint
d'oifeau en l'air qui égale levolderépervier,
ny point de poiiTon dans l'eau qui nage ii ville
que le Dauphin.
ÊMMÊMÊMMMk&mmmûê,
CONCORDE. XXV II.
C'EsT une jeune Fille veiluë à l'antique,
& couronnée d'une guirlande de fleurs &
de iruits. De Ja main droite elle foûtient un
baffin avec un cœur au dedans, & de la gauche
unfaifccau de verges.
La Concorde, qui ne ie peut mieux définir,
qu'une mutuelle union de volontex entre plu-
iieurs, marque l'abondance de toutes chofes
par fa guirlande de fleurs & de fruits. Elle eft
veftué à l'antique, parce qu'en effet dans la na-
ture des chofes, il n'y a rien de iî ancien qu'elle-
même. AulTi eft-il vray que les Poètes luy
donnent la gloire d'avoir fçeu démefler l£
chaos, avant que le monde en fût tiré.
Le cœur qu'elle porte , qui fe tient ferm^
deffus fa poitrine, fignifie que les intentions des
gens paifibles ne chancellent jamais, & qu'eO
leur afllete elles font inébranlables.
Le mefine eft repréfenté par le faifceau de
verges, chacune deiquelles eft foible de fôy >
mais toutes enfemble font grandement fortes:
c'eft pourquoi Salomon dit, Qu'un triple cwdovt
fe rompt dtfficileryient ; & l'Hiftorien Salufle, qu^
par la Concorde les petites choies s'accroiflent,
comme au contraire par la Difcorde les pluî
grandes s'anéantiiTent.
Il fe voit une ancienne Médaille de l'Empe-
reur Nerva, où l'union des armées eftrepré-
^ntée par une temme , qui foûtient du bras
^roit une proue de navire, & une enfeigne de
guerre, où font entrelacées deux mains l'une
^ans l'autre , avec ce mot, Concordia
^ x e,r c I τ υ ϋ m.
J'omets qu'en d'autres Médailles pour
'îiontrer l'union desvolontez entre plufieurs,
luy fait tenir d'une main deux cornes d'a-
bondance jointes enièmbk, & de l'autre un
^afe plein de feu. Cequifignifie, que la Con-
corde naift de l'Amour mutuel, quifecompa-
à bon droit au feu matériel, pour être un
de la'chaleur intérieure de l'âme.
Quelques-uns ont ajoûté aux cornes d'abon-
"^nce, des pommes de grenade, comme il fe
^marque en plufieurs Médailles de Fauiiine ;
^ d'autres des corneilles, à la loiiange deP
Quelles on peut dire avec Alciat,
ρ Qu'à leur fideiitéleiir Amour efl mie.
comme les grenades font compofées de plu-
J^ieurs grains attachez enfemble ; la Concorde
de meGne fe forme d'une égale rencontre
^ intentions & de volontez unies.
Il ne faut pas.oublier icy, que lors qu'elle eft
^rrivée au point d'être invincible, elle nous eft
gurée par un Gcrion qui atroisvifages, une
couronne d'or fur la telle, fixbras, & autant
Jambes; outre qu'avec trois de fes mains il
lent une lance, mre épée nue , &unfccptre;
& qu'il appuyé les trois autres fur un efçu. Cela
néanmoins ne doit point s'entendre de ce fa-
buleux Gerion, qui eut trois corps, à ce que
l'on dit, & qui fut mis à mort par Hercule; mais
bien de trois freres ainli appeliez, & qui n'ef-
toient qu'une mefme chofe, par la bonne in-
telligence avec laquelle ils vivoient enfem-
ble.
IL feroit difficile d'en faire un tableau plus
naturel que celuy-cy, repréfentant une Fem-
me qui regarde fixement un Navire , & qui le
foûtient des deux mains.
Comme la Confiance préfuppoiè la con-
noiiTance de quelque danger prochain, & le
moyen de l'éviter, qui fout deux qualités iànà
lelquclles elle changeroitfoneftre &fonnom;
c'eil à caufe de cela qu'elle eft peinte avec un
Vaiilèau entre fes mains : car bien-que la mer
foit fi à craindre, que le feul mouvement de
fes vagues e'pouyante l'homme ; néanmoins
nous voyons par expérience, qu'à la faveur
d'un fimple Navire il ofe bien fe fier à
barbare Element, dont on ne içauroit s'im^'
giner l^i vaile eftenduë, & ne trembler paS;
à moins que d'eftre plus infenfible que le®
ccueils qui s'y trouvent. Cela fait dire au pW®
excellent des Poètes Lyriques.
Qu'il fallait que celuy portafl armé le feif
De trois ràmparts à'airain.^
■Qui le premier de tous fur la Mer inconstante
Mit fa barque flottante.
■ÊSMmmm&m^ÊMm
CONNOJSSANC Ε XXIX.
Ε
Lle tient un flambeau en une main, &
_j en l'autre un Livre ouvert, qu'elle regar-
de attentivement.
Le flambeau allumé fignifie, que comme
les yeux du Corps ont befoin de la lumière
pour voir ; ceux de l'Ame tout de mefme, pour
•s'acquérir la connoiffance des efpéces intelli-
gibles , doivent recourir à l'inftrumcnt exté:-
rieur des Sens, & particulièrement à celuy de
Ja veuë: car c'eft la maxime d'Ariftote, qu'il
n'y a rien dans l'Entendement qui n'ait efté
ipremiérement dans les Sens ; ce qui nous eft
auffi marqué par le Livre ouvert, eitant certaiH
que pour connoiilre les chofes., il faut nécef-
Virement les voir, -ou les avoir Jeués.
CONSEIL. XXX.
IL nouseftreprefenté par un Vieillard, vef·
tu d'une longue Robe d'écarlatc. Il porte à
l^^n tou une chaifne d'or, où pend un cœur pour
Médaille;un livre en fa main droite,& un Hibou
la gauctie.Le Confeil^ dit Aùi\ote,efluf2e meu-
délibération., qui je fait des chofes qu^on examine
'^'Veçpudeme^i^ où l'on fe fropfe une fin uitk.On
C le
le peint en Vieillard, parce qu'il n'ell jamais
fi bon, que lorfqu'il nous eft donné par des
perfonnes âgées, en qui la Théorie des Scien-
ces & la pratique des chofes du Monde font
jointes enlemble. C'eft pour cela que le ju-
dicieux Homere fait âge de trois cens ans le
prudent Neâor Confeiller d'Agamemnon, &
qu'en un autre endroit de fon Iliade, il l'intro-
duit encourageant au combat les Soldats Grecs,
aufquels il promet de les aflîilcr de fon con-
feil, & non de fes forces, qu'il avoue n'eftre
propres qu'à la Jeunelïè encore verte & bouil-
lante. A quoy fe rapportent pareillement ces
mots de Plutarque, qu'il n'ell point de ville
plus beureuiè que celle où les jeunes gens ne
prennent les armes que par le confeil des Vieil-
lards ; parce que les uns font propres à l'exé-
cution , & les autres au commandement.
La Robe longue de .couleur rouge fiei
parfaitement bien au Coniêiller , foit parce-
qu'il en paroift plus grave, foit à caufe que
la pourpre a efté de tout temps la livrée
-des Senateurs, l'éclat de laquelle ks femble
exhorter à ne manquer jamais d'ardeur ny
de zélé, quand il eil queftion d'affilier de
leur confeil ks ignorans qui en ont bs'
foin.
Il porte fon cœur pendu au cou , parce-
qu'au rapport de Pierius, cette noble partie
de noftre corps, qui vit la première, & meufi
la dernière, eit un fymbole du bon confeil)
que Platon appelle une chofe réligieufe ^
facrée.
Le Livre qu'il tient en la main droite, nouj
appren''
-ocr page 84-apprend combien il importe au Se'nateur d'é-
tudier les Ouvrages des Sçavans hommes,
pour s'acquérir la connoiffance de la Mora-
le & de Ja Politique, puifque de l'étude de la
fageflè dépend la folidité du confeil.
Pour cette mefme raifon il tient de l'autre
ipain unChat-huant,que les Anciens ont con-
ûcré à la DéeffeMinerve. Cet Oifeau,com-
me difent les Naturaliftes, cherche à repaiC-
tre de nuit, & voit clair dans les tcnébres.
Par où les grands Princes & leurs Miniftres
font avertis d'employer leurs foins & leurs
veilles à la commune confervation des peu-
ples , méditant la nuit ce qu'il faut réfoudre
•le jour; à quoy Γεφηΐ eft grandement pro-
pre durant le lîlence & l'obtcurité, donc le
Ghat-huant eft un Hiéroglyphe.
Peut-être cncor-e que par cet Oifeau, qui
<Aerche de nuit ce dequoy il abefoin, il nous
eft déclaré, que les bonnes délibérations
^u'on a prifes en veillant, ne doivent point
cftre éventées ; mais qu'en quelque temps que
ce foit il les faut tenir fecrettes : ce que les
anciens Romains ne purent mieux témoigner
que par le myftérieux Temple de Confus, Dieu
Confeil, qu'ilsvoulurent pour cet effet eftrc
bâty fous terre, au pied du xnont Palatin.
C
ISiâ®
CONSTANCE. XXXI:
Ε qu'il y a de plus iblide en elle eft com-
pris dans là peinture de cette Femme.Elle
G ζ empoi-
Can^rcùmc^ , g 2r .
CiTnsbmce,, ^ χ
. s.
Ta^-St
empoigne une co'.omne de la main gauche; & M
iémbk qu'elle le veuille brûler exprés la droite,
dont , elle tient une épée nuëiùr un grand Vafe
de feu.
La Conftance eii une ferme réicjlution de re-
fîikr aux douleurs du Corps-, & de témoigner
autant de vertu qu'il en faut pour ne fe point laif-
fer vaincre ny aux inquiétudes de l'Eiprit, ny
aux paflîons de l'Ame, ny aux difgraces delà
Fortune. Ce qu'elle portela main iùr une co-
lomne ell pour mieux s'affermir en fon affiette,
iùivant ce proverbe; Qui biexs'appuyé^ .tombe
rarement. En effet, eftre confiant, n'eft autre
chofe que fe montrer ferme & inébranlable en
toutes les raifons qui pouffent l'Entendement à
quelque réfolution.
Quant à répéequ'elletient nuë au milieu du
feu, celafignifie, que ny le fcr ny la flamme
n'étonnent jamais un Courage Armé de Con-
fiance : car tant qu'il α pour rempart une lî forte
vertu, il peut dire hardiment avec Enéedans
"Virgile,
Îour moy le mauvais fort ne change point ds
face.
Et je ne voy jamais de nouveûe difgrace ;
Parce que des malheurs dont je fufs menacé^
Je croy fouffrir les coups avant qu'eflre bleffe'.
A
-ocr page 87-^MimmmÊMÊ^mm&m
CONSCIENCE. XXXiI.
"C Lle regatde fisement un cœur qu'eile
XI tient entre ies mains, aa ddliis duquel
font écrites ces paroles-en lettres d'or, gi-
^ïiA xiNESTS, comme qui diroit, la
PiOpre Conleience; fe trouvant au rdlc bien
peine de fe voir pied nud entre «n Pré
^fné de fleurs, & un Champ tout plein d'e'-
Pines.
^ Confcience ne pouvant mieux cftre
définie qu'une feerctte connoiffance qu'ont
hymnes de leurs aélions, &de leurs plus
l^crettcs penfées; ce n'eft pas fans fuj et qu'on
r(tpréiènte icy regardant un cœur, pour
•^outrer par là,
Qu» ml ne feuffe cacher à foy-mefme.
xuc fi de quelque cottd qu'elle fe tourne, el-
n'y voit que fleurs & qu'opines, c'eft pour
ïious-iâpprendre, qu^l y a-parmy nous deux
^heinins fort difterens; l'un bon, & l'autre
^aavais, où félon que nôtre Ame fe trouve
®'%ofécau bien ou au mal, elle évite le pré-
'^'Pice, ou tombe dedans.
G 3
CON-
-ocr page 88-Lle paroifl; icy fous la forme d'un jeu-
ne Homme de fort bonne mine , & d'un-·
viiàge riant. II porte un habillement vert, une
guirlande de laurier fur la tefte, &enlamaitt
gauche un Caducée, à l'entour duquel font en-
trelacez en lieu de Serpens, deux rameaux
differens, l'un de myrthe, & l'autre de gre-
nadier , avec deux langues humaines au def-
fus.
En la pofture où il eft, il femble voi loir
accueillir quelqu'un, tenant pour cet eiFet le'
bras gauche ouvert, &en la.main droite un.
rouleau, où font écrits ces deux mots,
yô//, c'eft - à - dire, malheur à celuy qui eft
feul.
La Converiâtion, que l'on peut appeller à
bon droit,la chofe du monde la plus agréable &
la plus douce, eft un commerce de perfon-
nes qui s'entr'aiment, & qui fe voyent foU"
vent
Voilà pourquoy elle eiî icy figurée par les·
deux branches de myrthe & de grenadier en-
trelacées , parce-qu'il faut de néceffité qu'une
vraye Converiâtion ait pour fondement l'u-
nion & l'amitié mutuelle. Nous en avons un
exemple en ces deux plantes, qui s'aiment fi
fort, que leurs racines bien qu'éloignées s'ap-
prochent, & fe vont joindre naturellement-
Ce qui ne peut tourner qu'à la honte de ccs
Thi-
-ocr page 89-Thimons, ennemis des hommes, qui en ab-
«orrent la converfation, & qui appellent for-
ce d'efprit leur humeur réveuic, accouftumée
^ ne voir perfonne.
La langue qui eft au-deflus de ces deux
plantes fignifie , que la Nature l'a donnée à
j-'homme pour exprimer ies penfe'cs dans les
Donnes compagnies, & s'entretenir avec les
Perfonnes de fa connoiifance, fuit pour inC·
iiUire, foit pour eftre infiniit.
Lu courtoiiîc qui fe remarque dans cc
Tableau, montre que le bon accueil , l'hon-
'^teté & les complimens Ibnt ordinaires à
^^ux, donc la ConverCition eft vertueufe, &
<îu'on les trouve toûjours en eilat d'accueillir
Civilement les. honneftes gens.
Auiïï ces deux mots, fiU , tireï de Sa-
lomon en fes PiOverbesde'clarent affez qu'il.
Jî'eft pas moins mauvais & déplaifant d'eftre
l^ul, qu'il eft bon & agréable de voir des
Sommes qui vivent en frères par la converia-
ïion qu'ils ont enfemblc-
C'E s τ la figure d'une Vieille mélancoli-
que , qui fur un banc où elle eft aflîfe,
tient de la main gauche un foliet, & de la
droite une plume , dont elle corrige un li-
vre.
Elle.eft peinte vieille&defagréable, pourfai-
C 4, te.
re voir que comme la Corredion efl: un aéïe
de prudence en ccluy qui la fait; auflleft-elle
ûnfujetdG mécontentement à celuy qui l:i re-
çoit: car à moins que d'avoir une extraordinai'·
re vertu, il ert difficile à unEfprit, quelque doux
& fouple qu'il foit, de mortifier l'amour de foy-
mefme jufques à ce point, que de voir fans au-
cun deplaiiir palfer par la, lime, fes propres Ou-
vrages , & mutiler les membres d'unCorps qu'il
coniïdére comme (à Créature, bien-que toute-
fois cela ne fe faiïè que pour luy donner une
meilleure forme.
Pour cette mefmc raifbn elle eil peinte le
fouet en une main, & la plume en l'autre; par-
ce qu'à le prendre en général, on n'ufe orûi'
uairement de corredtion qu'aux- manquemens
que font les hommes ; ou danslavoye de l'ac-
tion , ou dans celle de la contemplation.
La bonne mine, &.la.majeflc de cette Da-
me, en qui les dons du Corps, de l'Ame
de la Fortune s'accordent enfemblc par une
merveille extraordinaire, montrent aux moins
clair-voyans combien puiiTaut efl: l'empire de la
Courtoiiie, ou.de la Générofité..
La Couronne & le Manteau Royal qu'elle
porte, femé d'PIermines, font les précieufes
marques de fa grandeur & de la magnificence.
Elleeftveftue de blanc, pour taire voir que
comme, cette couleur, eii fimple, nette & fans
fard.,.
-ocr page 91-fard, elle de mefme eft fans artifice quand elle
donne, & fans efperance d'autre intéreft que de
la fatisfaâion de faire dubien.
Pour la mefme fin elle ouvre les bras pour
accueillir tout le monde, & répand à pleines
^ains des pièces d'or & des pierreries ; cc qu'el-
fait de fi bonne grâce, qu'elle ne daigne pas
niefme regarder les effets de fa largeile, & fe'
Plaift à les produire iàns en tirer vanité. Par où,
|îje ne me trompe, ilnouseft enfeigné, quela
Généroiitédoit.eilre nommée par excellence,
^a vertu des Princes &-des Héros, parce-qu'ils
^ut dequoy l'exercer, & que lesperfonnes de
'^ur naiflànce fe plaifent, plus incoinparabler
'nent à donnei- qu'à recevoir.
CElle qui la repréfente a fur .fi Robe quan-
tité d'oreilles&dè»Grenouilles, les che-
veux heriiTez, des ailles au dos, les bras eu
haut, & la telle en dehors, comme fi elle vou-
loir guetter de toutes parts.
La Curiofité fe voiticy peinte avec plufieurs
Oî'eilles, parce que celuy qu'elle polléde n'eii
Jamais fans undélir déréglé de vouloir fçavoir
plus qu'il ne doit. Ainfi la décrit S. Bernard en
ion Traité des degrez de laijuperbe, où parlant
des Moines curieux^Ceneflunemarqjie,.dit-i
J'parmy eux tu en vois quelqu^un qui aime à courir·^
ksk
s'i/i aller ta tefie levée, ou ['oreille à l'erte.
Les Grenouilles pareillement eiloient chez
C 5-, les.
les Egyptiens les fymfeoles de la Curiofité, à^
caufe des grands yeux qu'elles ont; lefquels
dit Pierius, mis dans une Lourfe de peau de
Cerf, avec de la ch:ûr de Rofliguol, font
l'homme éveillé, difpos, gaillard, & prompt
à s'enquerir de tout.
Le mefme nous eft encore démontré par
fa tefte à l'évent, par fes cheveux qui fe hé-
riiTent, par fes bras hauffez,, & par. la viteflê
de fes ailles, qui témoignent qu'elle ne fait
qu'aller & venir, pour voir & tureter çà&là,
ce qui fe dit, & qui fe paiTe ; eftant fi amoureu-
fe des nouveauteï, que plus elle en fçait, &
plus elle en veut apprendre.
DESIR EmERS DIEU. XXXVII.
(UiSQjû'iL efl: vray que cette afFeaion
_ n'a rien de charnel ny de terreftre, il eft
bien raifonnable qu'elle paroiiTefousIa figure
d'un iinge. Les ailles qu'il porte fignifient la-
merveilleufe viteflè des dcfirs d'une Ame em-
brasée de l'amour de Dieu ; & la flamme·
qui luy fort du cœur efl: un portrait de celle
que Jesos-Christ s'en vint porter fur laTerrc.
Il tient la main gauche fur fa poitrine, le
bras droit étendu, & la veaë au Ciel, pour
nous a; prendre que noilre cœur, nos/yeux &
nos œuvres ne doivent avoir pour objet que
Dieu feulement.
Cela nous eiî auffi marqué par le Cerf, qui
ic dciàitere dans un ruifieau; ce qui eil une
pea-
-ocr page 93-i.Hii^u^, "Jbialecli^ti/L, , .
-ocr page 94-I C ο Ν ο L ο G I Ε. yç'
penfée prife de David, pour nous faire entcH-
dre qu'un déiîr tel que le iîen , & tel que le
doit avoir une Ame pure, relîèmble à celuy
du Cerfqu'on a couru toute la journée, qui ne
cherche qu'à fe délafler, en éteignant l'ai deur
fie fa foif dans une claire Fontaine.
iîç. <''> Λ- ît; 'f'- -·ν. λ!'-- · A -i^.ife ■
DIALECriQuE. XXXVIII.
ELle eft figurée par un jeune Soldat,
qui fe tient ferme fur fes pieds. 11 a
pour habillement de tefte un heaume avec
deux plumes, l'une blanche,-& l'autre noi-
re, & pour cimier une Lune : de la main-
droite il ferre par le milieu deux dards égaux,,
& qui font pointus par les deux bouts ; & fer-
me le poing du bras gauche , qu'il femble pré-
senter à quelqu'un.
Par ton heaume qui fe prend pour la vi-
gueur de. l'efprit , il eft montré qu'elle eil
particulièrement requife en la Dialeâique :
& parles deux plumes, quelle vent ne les
ébranle pas avec plus de facilité qu'en a cet
Art à foûtenir le vray & le faux par des rai-
fons vray-femblables : ce que iîgoifie encore
la Lune mi fe pour cimier; à raiibn dequoy
Clitoinachus comparoit la Dialeâique à cet
Aftre, pour la diverfité de fes formes.
L'on en peut dire autant du Dard à deux
pointes qu'on luy attribue avec raifon, parce
«î^'eile picque des deux coflex, par la force
de fes argumeus, qu'elle fe plailt à racourcir
C 6 &fer-
& ferrer; ce que le Philofophe Zéiion n'eX'
priinoit pas mal par la figure du poing, ou de^
la main étroitementferinée.
lyiâ^iiyisyiâàMiii'siiiiàifeii:'
CEtLE qui là repréfente eil une Femme,
richement parée, mais qui fléchit pres-
que fous le fardeau qu'elle porte, qui eit une
groilè pierre j enchaliée-dansunebordured'or
& de pieiTcries.
Icy le mot de charge fert d'explication à
celuy de Dignité, puii-que c'en eft une fi pe-
fante que celle des- affaires publiques,, qu'elle
ne peut mieux eftre comparée qu'à la Roche
de Syfiphe; tellement qu'à moins que d'avoir
les épaules d'un Athlas ou d'un Hercule, il
eft difllcile aux plus grands Hommes de ibû-
tenir ces fardeaux ; & on peut bien dire qu'à
ceux qui les portent cour^euièment & lans
en eftre laffez, font légitimement· deuës les.
mes mefmes offrandes &<les mefmes aâions
iie grâces qui fe faiibient aux anciens Héros.-
mmmMm^m^&mm
'Ne merveilleuie vivacrté iè remarque·
_ dans le vifage de cette l^ emme, qui en ià
.«win droite a un rameau de thin, où vole une
A!ieiÎle;«n la gauche un bouquet de feiiilles d'a-
maa-
-ocr page 96-maudier; & à fes pieds un Coq qui grate la terre.
Soit que la définition de la Diligence doive
®ftre tirée de iès Etymologies, ou des diiFerens
effets qu'elle produit, quoi qu'il en foit, elle iè:
prend, à mon avis, pour cette exaâeinduftrie
que nous mettons à faire le choix de ce qui nous
cft le plus convenable dans la conduite de nos
aâions.
Cette vertu, ditCiceron, eft d'autant plus
ïecommandable , qu'elle furpaiTe les autres,
comme les comprenant toutes : c'eft pourquoy
iious devons bien eftre ibigneux de luy feire la
Cour, n'y ayant rien de fi diiEcile, queparfon
lïioyen nous ne puiffions obtenir.
Elle nous eft figurée par l'Abeille qui vole
«^effus le thim, herbe, dit Plutarque,quiii'eil.pas
moins rude qu'elle eft féche,& où néanmoins les
Mouches à miel ne laiflènt pas de trouver un fuc
agréable,qui leur fert plus qu'aucuns autre plan-
te,à faire une précieuft liqueur. Les Hommes
foigneux & diligens les imitent, en ce que par.
leur induftrie ils furmontentcequ'ilyadepliis
rude & de plus diiBcile dans les affaires. Tel-
ment que des épines ils en font des fleurs, comr
me du thim l'Abeille en tire du miel.
Or parce-que la Diligence, félon Saint Tho-
mas , eft quelquefois prife pour le foin mefme,
& qu'il eft nuiiibk d'en trop avoir .; il feut y ap-
porter la modération rcquife, &;fefouvenirde
l'exemple de Protogenés. C'eftoit un des plus
célébrés Peintres de Rhodes, à qui, félon
Pline, le fameux Apellés n'avoit autre chofe
à reprocher, finon qu'il travailloittrop ;. Il m'é-
^ulcroit aulli , concluoit-il, n'eftoit que je
le
-ocr page 97-le furpaiïc en une choie, qui eft, que je fçay
mieux que luy, oiler la main de deflias la toile.
Cette Diligence donc, qui ne pèche point
par excès, mais qui fe halle d'aller douce-
ment , & que plufieurs excellens hommes ont
diverièment repréièntéecomme Augufte par
l'Ecrevice & le Papillon, Vefpaiien par un Dau-
phin à l'entour d'un ancre ; Paul IIÎ. par le
Caméléon attaché à un Dauphin, & le Grand
Duc Cofme par une Tortue fous le voile d'un
navire ; n'eft pas icy figurée mal à propos par
des feuilles d'amandier & de meurier jointes
enfemble: car l'amandier étant celuy de tous
les Arbres qui fleurir le plûtoft, & le meurier
au contraire, celuy qui fleuritle plus tard ; iL"
font liez l'un à l'autre, pour montrer qu'il faut
modérer les foins que l'on fe donne, & tenir
pour iàge & bien avifé celuy qui entre la prom-
ptitude & la tardiyeté fçait tenir un vray mi-
lieu , qui à proprement parler, eft ce qu'on
appelle Diligence.
Le Coq qui fe voit à fes pieds, en eft encore
unfymbole, foitàcaufequecetoifeau , qui eft
grandement folaire, nous annonce le jour, ^
nous éveille au travail; foit parce quedefoy-
mefme il s'y porte ponâuellement, & qu'il
épluche jufques aux moindres grains, & les dif-
cerne d'avec les ordures, ne ceflànt de gratter
la Terre, qu'il n'ait trouvé ce qu'il cherche pour
fa nourriture.
DIS-
-ocr page 98-ί ξ» èîâ ;
DISTINCTION DU BIEN
du mal. XhL
Τ A différence de l'an & de l'autre eft icy
marquée par la figure de cette Femme, qui
etl en la fleur de fon âge,& modeftément velîuë,
tenant un crible de la main droite, & de la gau-
che un rafteau.
Son habillement marque fa grande modéra-
tion, fort convenable à fon âge, qui dans le
lîiilieu de fa courië e£l fans doute plus capable
la vraye raiibn, & de difcerner le bien d'avec
'emal, que ne peuvent eftreny la JeuneiTe, ny
la Vieilkiîè. Laraifoneii, parce-que l'un de
ces deux âges pèche par un excès de paffion, &
l'autre par un deffaut de mémoire & de jogc-
Oîent.
Et dautant que le pfopre du crible eft de fé-
Parer le bon grain d'avec le mauvais ; c'eft pour
<:ela qu'il eft mis icy, comme dans Pierius,
pour le Hierogiyphe d'un homme parfaite-
Qient fage. Car celuy qui ne l'eft pas, ne peut
faire la àftinâion des vices & des vertus, ny
l'echèrcher les fecrets de la Nature, ny purifier
βοη plus fes aâions, & comme dit le Prover-
l^e, les faire paiTer par le crible. Auffi n'e-
ftoit-ce pas fans myftére que les Preftres Egy-
ptiens en prenoient un à la main , toutes les
fois que par de fubtiles conjeâures ils vou-
voient tirer quelque préfage de l'avenir.
Le rafteau qu'elle tient en main a amefme
pro-
-ocr page 99-propriété que le crible; & voilà pourquoy le
Laboureur s'en fert d'ordinaire pour arracher
les herbes nuifibles : ce qui doit apprendre à
l'Homme d'en iaire de meime de fes mauvaiiès
inclinations,& de les retrancher entièrement de
fon Ame, de peur qu'il ne les puiiTe déraci-
ner , fl elles fe tournent une. fois- en habi-
tude.
CE τ τ Ε Femme d%n âge déjà meur, &
modeftementveftuë, aies bras ouverts-,
pour accueillir tous ceux qui méritent de l'abor-
der. Elle tient de la main gauche une manière
de Sceptre,, au deffus duquel eftunSoleil; &
en ibn giron un Livre ouvert ; tandis que d'u»
Ciel agréable & férein il tombe fur elle une
grande quantité de rofée..
La maturité de fon âge montre qu'il faitf
employer beaucoup de temps pour appren-
dre les fecrets & les merveilles de cette
DéelTe : fon habit honnefte , que la mode-
ilie fied toûj oucs bien à fes Favoris : fon Livre
& fes bras ouverts, qu'elle fe communique
libéralement à ceux qui s'en rendent dignes :
& fon Sceptre, où brille un Soleil, que foi»
empire eft de grande eftenduë , ■ & ia lumière
il forte & fl vive, que donnant dans les nua-
ges de l'ignorance, ellelesperceauffi-toft, &
deffait entièrement les monih-es & les chimères
qu'elle produit.
Et dautant que laDoarineoulaScicnceeft
"^ne habitude de l'Entendement Ipeculatif, par
ψιί nous confidérons Sconnoiflonsleschofes
Pi^r leurs Gauiès : quelques autres pour donner à
^onnoiilre cela, fe font avifei de la peindre
des aiiles au chef, un miroir en la main
^roite, & en lagauche une boule fous un trian-
Par les aifles, il eft montré qu'il n'eft point
Science où la contemplation ne puifféék-
]^errEfprit. Par le miroir, que c'eftl'abftra-
"ion qui la forme , parce qu'en matière de
'Concevoir les accidens, le Sens fournit à l'En-
'^ndement des fubftances Ideales, tout de mef-
qu'en veyant dans un miroir la forme acci-
*l«ntelledeschofesexiftentes, l'on en confidé-
l'eifence. Par la boule, que comme en fa Fi-
8«re ronde elle ne peut ibuffHr de contrariété
mouvement, la Science n'en fouffre non
Wus en matière d'opinions. Et par le triangle ;
dans les propofitions il y a trois termes, qui
Pfoduifent la, démonftration de la Science:
ainfi que de trois Angles égaux, une feule
^'gurefe forme.
J'omets qu'il y a d'autres Peintures de cette
PéciFe, qui la repréfentent avec un trepied d'or
^■latefte, &unLivrcen main: peut-être pour
laire voir, qu'encore, que la voix du Maiftre
'Èrvegrandement à l'Ecolier, néanmoins s'il
^ y ajoute la leâure des bons Livres, il peut dif-
ficilement comprendre & retenir cette grande
abondance de chofes, qui engendre la Science
nous à force d'eftudier.
Le trepied d'or eft pareillement un Symbole
de.
-ocr page 101-dececy, foicpourlanobleiTedece métal, qui
fert d'ornement aux plus belles chofes : foit
pour la perfeâion du nombre ternaire, à qui
Ariftote donne l'avantage iùr tous les autres
nombres. La Science de mefme l'emporte
pardeiîùs tout ce qu'il y a de plus exquis en la
Nature : puifque c'eft-elle qui ièrt à perfeétion-
ner noftre Ame, & qui l'éleve à la connoiflànce
des- œyftéres Divins. Dequoy le fage Socrate
nous avertit prudemment dans Plutarqae, où
il dit, que c'eft beaucoup d'en acquérir quelque
échantillonicybas, puifqu'il n'appartient qu'à
Dieu feulement de fçavoir toutes chofes, & de
pénétrer dans la connoiflànce de toutes leurs
Caufes.
Ο
un bail
. Ν le reprefénte par un jeune Garçon ,·
' qui marche dans les tenébres, tenant
un bailon d'une main, & de l'autre une lan-
terne.
Ce que l'on appelle Doute, eft à propre-
ment parler , un embarras d'efprit touchant
ce qu*on ne içait pas , & de corps par con-
féquent, en matière d'agir & de travailler.
On le dépeint jeune, parce qu'en cet âge-
là , le peu de connoiflànce que nous avons de
la vérité, nous met dans l'incertitude de tou--
tes chofes.
Le bafton & la lanterne font des Symboles
de l'expérience & de la raifon, par le moyen
dei-
-ocr page 102- -ocr page 103-defquelies celuy qui doute de ce qu'il doit fai-
peut s'arrefter s'il veut, ou palier outre à la
faveur de ces deux guides.
CE τ τ Ε Dame vénérable & pleine de Ma-
jefté, penche la tefte du cofté gauche, &
OaulFe le bras, comme fi elle témoignoit avoir
pitié de quelqu'un, ayant un plomb en ik main
'iroite, & un Chameau fur fef genoux.
Le plomb qu'elle porte (inftrument aflèz
^onnu dans l'Architeâure , le propre duquel
de fervir de régie au MaiTon pour prendre
^cs dimenfions d'un baftiment, ajufter les pier-
res au niveau, & en applanir les inégalitez)
%nifie que la vraye Difcrétion s'accommode
^ux imperfedions humaines, fans que toute-
fois elle s'écarte jamais de ce qui eft jufte, eftaHt
fondée for l'équité, comme inféparable d'avec
elle.
Outre ce que nous venons de dire; cen'eft
pas fans beaucoup de raifon que ce qui la rend le
plus recommendable, eil iîgpifié par le Cha-
iTieau qu'on luy donne. Car à l'exemple de
?Et animal, qui cil fi prudent, qu'il ne porte
Jamais de fardeau qui foit au-deiTus de fes for-
l'homme avifé n'entreprend rien que bien
3 propos. Aufli eft-il vray, dit Ifidore, que
^'ptLdoit appeller vice tout ce qui manque de
«ifcrétion ; & vertu tout ce qui en a abon-
damment.
68 I C Ο Ν Ο L Ο G I Ε.
âèêiâ^^SilitSiè·!
D I V I Ν IT L\ XLV.
CE τ τ ε Vierge veftue de blanc, qui a du
feu fur la teiie, & en fes mains deux- Glo-
bes d'azur, d'où s'évaporent des flammes, cil
une image de la Divinité,
La blancheur de fon habillement iignifie Î3
pureté de l'eilènce des trois Perfonnes Divines,
objet merveilleux de la Science & de la con-
templation· des Théologiens. Ce qui n'dî
pas mal exprimé par les trois flammes, que
l'on a faites égales pour marquer l'égalité de;
trois Perfonnes Divines ; ou par une feule flam-
me divifée en trois, pouriîgnifier pareillement
î'unité de la Nature , par la iiitinélion des
mefmes Perfonnes dont nous venons de par-
ler.
De plus, la couleur blanche convient par-·
faitcment à la Divinité , parce-que les autres
couleurs n'y ont point de part ; comme dans
les chofcs divines il n'y entre aucune forte de
compofition : dequoy ièrt de preuve la miraciv
leufe Transfiguration qui fe fit fur la Montagne
de Thabor, où-Noftre Seigneur apparut à fes
Difciples avec un habillement plus blanc que la
nége.
Quant aux deux Globes enflammez , leur
Figure ronde eft un Symbole de l'éternité, in'
fêparable de l'EiTence Divine. D'ailleurs, cet^
îe Vierge qui s'efforce de les foûtenir en fe3
deux mains, montre que l'Homme s'ouvre uu
chemin à l'éternité, par fes œuvres méritoires,
® par le mérite de Je sus-Chris t.
L Ό N tient que l'excellent Peintre Zeuxis
a fait le dellèindece Tableau. C'eft un
^ommepdle, mélancolique, &veftii.denoir,
^^Hant en main un flambeau qui vient de s'étein-
& qui fume encore.
Il eil pâle, parce-que cet accident eft une
"es marques deladouleur, qu'il eft difficile de
Cacher fur le vifage, qui eft l'image de l'Ame.
Son habillement noir eft une marque de
^ueil; auffi n'y en a-t'il point de plusfembla-
à l'obfcurité, ou à la privation de cette belle
lumière, quieftlafourcedenoftrejoye, corn-
ue difoit l'aveugle Tobie, quand il racontoit
'es infortunes à ibn Fils.
Le flambeau eteint fignifiequenoftre Ame,
^ui n'eft que feu; félon quelques Philofophes,
s'éteint prefque par la violence des douleurs,
qu'à tout le moins elle n'eft pas li clair-vo-
î'ante, qu'elle puiiredifcernerenfesaôionsce
*3ui luy eft le plus propre & le plus utile : outre
^u'à vray dire, un malheureux qui fe voit per-
sécuté ^e toutes parts, ne fe peut mieux com-
parer qu'à une torche qu'on vient d'éteindre;
alors toute fa flamme fe réfout en fumée,
*^omme tout ce qu'il a de vie ne fert qu'à le tenir
fè^ f b ' ^ ^ rendre fon infortune plus
70 I C Ο Ν Ο L Ο G I Ε.
Ε C Ο NO M !Ε.
VIL
CEt τ ε vénérable Dame ^furlatefteune
Couronne d'Olivier, en fa main gauche
un compas, en la droite une baguette, &àfoïi
côté un timon de navire.
Comme il eft certain qu'à la commune féli-
cité de la vie politique eit requiiè l'union de plu-
fieurs familles, qui vivent fous un mefme or-
dre, & quepour bien fe maintenir, chaque fa-
mille a befoin de Loix particulières,& ψιϊ foien··
plus reiTerrées que les générales. C'eit pour cela
que cette conduite ou ce gouvernement parti-
culier eft appellé Economie, mot tiré du Grec,
pour en rendre l'expreffion plus forte. Et par-
ce-qu'il n'y a point de famille qui ne ibit com-
pofée de Mary, de Femme, dePerc, d'En-
fans, de Maiflre & de Serviteurs, tout cela
nous efl aifei bien démontré dans cette peintu-
re. La baguette iîgnifie l'empire qu'un Mai-
flre a fur fes Valets ; k timon, lefoinqu'uO
vray Pere a fur fes Enfans ; la guirlande d'Oli-
vier, la peine qu'il doit prendre à maintenir la
paix dans ik Maifon ; & le Compas, la pruden-
ce & la modération dont il doituferdans foU
ménage : car il tant qu'il mefure fa dépenfe pat
fon bien, s'il veut bannir l'incommodité de foî»
Logis, & y maintenir le bon ordre.
EGA-
-ocr page 107-I C ο Ν ο L ο G I Ε. ya
EGALITE XLVIII.
^ Lle eft figurée par une Femme demo
^ yen âge , tenant une balance de la main
^foite, & de la gauche le nid d'une Hirondelle.,
donne à manger à fes Petits.
L'explication de cette Figure eft aiTez facile,
ayant perfonne qui uefçache que la balance
^^jours efte' le Symbole de la Juffice, le pro-
-de laquelle eft de peièr equitablement les
'"lions de tout le monde, & de rendre à cha-
''^ce qui luy appartient.
Le mefine nous eft iîgnifié par l'Hirondelle,
^Ue lesEgyptiens ont prite pour un vray Perc de
^lïiille, qui partage également fon bien à fes
■^fifans ; à l'imitation de cet oifeau charitable,
jl'ii fait ^ale la portion de fes Petits, & qui n'o-
jamais rien à l'un pour le donner à l'autre.
^éMàmmMmmmmM
CE n'eft pas fans raifonquepourexprimer
fes divers effets on la peint armée d'un
'horion environné d'une couronne d'or, d'un
^^orcelet, & d'une épéc qu'elle porte à fon
^ofté;outre que de l'un de fes bras, qu'elle a re-
■'•Ouirez jufqaes au coude , elle empoigne la
loudi-e, & que de l'autre elle tient un Livre ou-
^^rt, au-deflus duquel eft une horloge de fable.
On
Ε
On repréfente l'Eloqoeiice, jeune, bellet
& armée, à caufe qu'elle ne fe'propofc poitf
d'autre fin que la periùafion ; dequoy ne pou-
vant venir à bout que par le moyen de fesat'
traits & de fes charmes, on luy en met quantité
fur le vifage., pour montrer par-là que les of
nemens & les grâces des paroles font abfolU"
ment néceiTaires à quiconque veut perfuadef
autruy. Auffi n'eftoit-ce que pour cela qu'an-
ciennement on peignoit jeune & agréable
Dieu Mercure, pour figurer l'Eloquence, qu'
peut agréer diffialement, fi elle n'eil belle, vi'
goureufe, Jeurie, .& pleine deMajefté.
La délicateflî; des paroles aious eft encoi'^
marquée par fes bras nuds.: car fans les fonde-
mens d'une folideDo£i:rine& d'un fort raifoO'
nement, rEloquence feroit defarmée, &
pourroit jamais donner dans lebutoùéllevift'
d'où vient qu'elle & la Perfuaiion font à boii
droit appellces les Créatures de la Doârin^·
Mais parce-que les raitbns que produit laSci^'
ce, ont des diiEcuItez qui empefchent qu'on n^
les entende fi aifément, Tony ajoute pour cs^
cflet les ornemens & les grâces des parole^»
qui les éclaircifient, ·& quiproduifentfouvcO'·
des effets, par le moyendefquelsl'ondévelO'
pe les embarras d'un Efprit défeâueux & gr<^'
fier. Pour cette mefme fin encore.: foitqu'''
s'agiiTe ou d'expliquer par raifonslesmaticf^®
difficiles, ou d'émouvoir les paflîons de l'Aiii^
ou d'arrefter fes mouvemens dérégler; il 4
néccffaire que l'Orateur foit ingénieux à couvr'/
foa Ari d'un agréable mélange de paroles cho''
fies & bien rangées: carquelqueendormyq^j
loit un efprit, elle l'éveillera iàns doute par la.
|ubtilité de fes Argumens, ou l'attirera par la
^ouccur de fon langage ; j ufques-là mefme que
^on aâion & fes paroles comme des foudres
Redoutables étonneront les plus audacieux, &
'^ur feront tomber les Armes des mains.
Sa Couronne d'or eftune maugue de fa gran-
^eautbqrité, par qui elle régne dans le courage
Hommes, eftant véritable, comme dit
flaton, que la dignité de l'Orateur fe trouve
Jointe avec celle des Rois, lorfque par elle H
^rfuade ce qui eftjufte, & qu'il l'employe au
-ïouverne-ment des Eiiats.
Le Livre ouvert, & l'Horloge qu'elle tient
^'ttnemain, enièignent deux choies : l'une,
JÎUe les paroles tiiiiiës avec Art, & animées par
vivacité de l'aâion, ou miles par écrit pour
bien de la Poilerité, font les inilrumens de
''Eloquence: l'autre, qu'il y faut apporter l'or-
requis, & la juile meiiireduTemps, qui
^onne aux périodes le nombre, auftilelagra-
& à tout le corps du difcours l'amedela
Perfuafion.
. Quant à la foudre que Pierius Hv. 3 3. luy at-
tribue, cela fignifie qu'avec la meline facilité
Qu'elle met par terre les plus hautes tours, ΓΕ-
'Oquence abbat l'obftination des ignorans, &
^^ine les opinions qu'ils ont bailles fur de mau-
^^isfoiîdemens.
D
ER-
Part. I.
74 I C Ο Ν Ο L Ο G I Ε.
ΐ'; ΐ!^ -ΐΐ!; ΐ^ί .-i'?- .AV- 0 -Τι^τ- -·.'; -iji· ^^
ERREUR. L.
CE τ homme qui marche à taitoiis, les
yeux bundeî, & un baftoii.à la main, eft
un iymbole de rErreur. Les Stoïciens la dé-
iiniflent un égarement du Chemin; comme aa
contraire s'y tenir dedans fans s'écarter tant foi-
peu,. eil ce qu'on appelle aller droit, & nefs
point fourvoyer.
Ainli pouvons-nous bien dire qu'en toutes
nos adions , foit de l'Eiprit foit du Corps,
Hous ne faifons que voyagœr icy-bas, & que
cette vie n'eft qu'un pellerinagi; en Terre, d'où
nous efperons d'arriver au Ciel. Cecynousefl
enfeigné par l'apparition de Jésus ChrisT
àièsDifciples, enhabitdePellerin; joint qUC
dans le Levitique Dieu commande exprés sfi
peuple d'Ifraél d'aller toujours droit, & den^
s'égarer j amais dμ grand Chemin.
Par le bandeau qui aveugle ce Voyageur,il eft
iignifié qu'il n'eft point d'erreur ou l'Homiiie
ne tombe facilement, depuis que la lumiére<lc
Ton Efprit eftirae fois obfcurcie par les intérei^
du Monde, comme par des nuages épais
par le bafton, que celuy qui felaiiiè conduira
par lavoye-dufens, peut choper à chaque pdS)
s'il n'a pour fideles guides les opérations
lavrayeRaifon.
ES'ït^'
-ocr page 112-I C ο Ν ο L ο G ,1 Ε. η^
^âââââctââ^mâèmâââââ
ESrVDE. LL
PAr la Peinture de ce jeune Homme qui
eft affis, on peut juger aifément de fon in-
clination à l'Eilude. 11 a le vifage pâle, un
habillement modeile, un Livre ouvert, dans
^ equcl il écrit à la clarté d'uneLainpe, & un Coq
a foncofte.
Sa grande jeuneiTe montre que cet âge ro-
oufte cil fort propre àTEitudepourenfouffrir
'afatigue. Son vifage pâle marque, comme
^it Juvenal Sat. f.
^ji il faut veiller la nuit, ^f^paflir fur un Livre.
Son habit modefte,qu'uu Homme de Lettres
ûoit aimer la modération : le Sicge où il eft
^ffis, que le répos & l'afllduitéluyfontnéceC-
jaires: fon attention fur un Livre ouvert, que
"Eftude eil une ardente application à la cori-
^oiiTance des chofes : la Plume dont il écrit,
^u'il faut que par fes Ouvrages il laiffe, s'il eft
^ft polTible, une louable mémoire de foy, com-
^editPerfeSat.i.
fçavoir si'efiant rien, β d''autres ne le fçavmî.
Par la Lampe alumé€,que les vrais Studieux
Saftent plus d'Huile que de Vin : & par le Coq,
■îtie la vigilance leur eft néceflàire pour s'acqué-
de parfaites connoilTances des Arts & des
^•lences.
D 2
Ε S-
-ocr page 113-Ε s Ρ Ε R A NC E. LU.
SA vraye Image eil celle d'une jeune Damei
v-fifruc deverd, couronnée d'une guirlan-
de de iieurs, & qui tient entre fes bras un petit
Amour, àquidledonnelamammelie.
Sa guirlande de fleurs ert un vray Symbole
de l'Etperance, parce-qu'ellesneparoiilèntja-
mais iiir l'Arbre, qu'en mefme temps elles ne
-nous faiTent^ipererÂi fruit.
Quant à l'Amour qu'elle allaite, cela veut
dire que l'un fans l'autre peuvent eftre difficile-
ment de longue durée: car comme on ne fou-
haltejamais d'avoir du mal, il s'enfuit de là que
l'Homme n'afpirequ'au bien, fi au moins du-
rant ià vis il fe propoiê toujours pour guides la
nature & la raifon. Or eft-il qu€ coinme le bien
-n'ellpas difficile à coniîoiftr€,il nous émeut auf-
fi facilement àraimer,& ànous-enpromettre la
poiTeffion: ce qui fait dire à S. Augullin, quePA-
mour fans efferance neJ'tut jamais venir à bout de
fes dejirs.
Quelques autres l'habillent d'une Robe
jaune, toute femée de fleurs, à^:aufequ'elle
réveille & entretient dans nos ames mille dçfirs
qui leur plaifent : tout de mefme qae l'Aurore,
de qui elle porte les couleurs, & à laquelle
les Athéniens la comparent, paroiflànt fiif
l'Horizon , renouvelle toutes chofes avec
jour, & nous faiîefpérer de plus en plus, pa·"
la divci'fité .des agréables objets qu'elle pré-
fente
-ocr page 114-I C ο Ν ο L G G I Ε. ηη
fente à nos y eux ^ J'ajoute à eecy, quedekt'a-
Çon qu'ils en plantent la figure, il femble qu'el-
le marche ilir la· pointe des pieds : par oà ils
veulent montrer fans doiite, que l'Eipérancc
ii'eft jamais bien ferme, & que leschefesque
'lous délirons, nous femblciK îoûjours plus
grandes que celles que nous avons.
âââââjiââHâââââ-ââââ
ETERNITE. LUI.
C"^ Ε τ τ Ε Image de l'Eternifi eft de i'inveîî-
tion de Monfeignsur Barberini Florentin,
^ui dans le Traité qu'il a fait de l'Amour, laré-
Préfente fous la figure d'une belle Dame, de qui
les cheveux épars & de couleur d'or, luy
fombcm fur les épaules , & defccndent aiTez
long.
Avec cela, des deux cofteï oi\ devroient
cftre les hanches, deux demy-cercles prennetit
racine, qui fe pliant, l'un adroit, & l'autre à
gauche, fe rencontrent fur la telle de cette Da-
^ avec une égale jufteiTe en forme de cercle.
Elle a de plus deux boules d'or en fes mains,
91'elle tient hauflees , & le corps couvert
«i'un bel azur femé d'étoiles. Tout cela efl
vray Symbole de V'Eternité < foit que l'on
confidere la figure rc«ide, qui n'a ny commen-
cement ny fini; ou la perfeâion de l'or, qui eft
le plus durable de tous les métaux ; ou la cou-
leur azurée repréfentant le Ciel, qui eil la choie
Monde lamoins corruptible.
D 3 Ce
-ocr page 115-Ce n'eft pas encore fans raifon que dans Pid-
rios elle eft peinte aSlfe far une fphére celefte,
tenant de la main gauche un Soleil, & de la
droite une Lune. Far où il cft déclaré que ces
deux Aftres travaillent fans cefiè à la génération
des chofes d'icy-biis , auiquelles ils donnent
nourriture, Et c'ell: pour cela qu'elle eii aflîiè
fur un Ciel; comme une chofe durable & per-
pétuelle. J'omets qu'il fe voit une Me'daille
de l'Empereur Adrien, où elle foûtient deux
Telles couronnées, avec ces mots, JE tek-
hitas Augusti & qu'ilyenaune fort
ancienne, où elle eft affiièenunThrône, te-
nant une lance d'une main, & de l'autre la figu-
d'un Génie, avec cette infcription , C l ο p.
Sept. Alb. Aug.
EXERCICE. Lir.
Le s divers effets que l'Exercice produit,
nous font démontrez par un j eune Homme
veitu de plulîeurs couleurs, avec les bras nuds,
une horloge à la tefte, un cercle d'or en une
main, & en l'autre un rouleau, où eft écrit ce
mot, Ε Ν c Y c L G ρ I A. Il porte de plus
un chapelet à la ceinture, , & un petit'bout
d'aifle à chaque cofté de fes pieds, à Fetr-
tour deiquels fc voyent quelques pieces d'Ar-
mes , & des outils d'Agriculture luilans &
polis.
L'Exercice eft le travail ordinaire où l'Hom-
me
lïie s'employe pour fe rendre habile en fa pro-
felTion} à quoy il peut arriver dimcilemeut,·
s'il ne met la main à Tceuvre, puiilyj'aa rap-
port d'Ariftote, l'on n'excellejamais en quel-
que Art que ce foie, fi le naturel, le fçaÏoir &
l'exercice n'agifllnu en fernble.
Il oft peint jeune, parcc-qu'il n'y a point d'â-
ge qui pvuiTe mieux reiiiler à la fatigue que ce-
Uty-là. , II eil'veto de pluiieurs couleurs, poin-
montrer qu'il y a divers moyens de s'y adonner;
& lès bras font découverts , afin d'cike plus ;
fouple&plusdifpos.
L'horloge qu'ilafurlateileijgnific, que par
luy nous parvenons àlaconnoi'liànceduvray-,
comiTic par la continuelle aâion des roues d'u-
ne horloge nous di(îinguons1e temps & les heu-
res. Le cercle d'or qu'il tient en main eft une
itiarque de perfeâion; dautant que cette figu-
re eil la plus accomplie de toutes celles de
là Mathématique, & Γ(.>γ, le plus pur de tous
les tnétaux. Le rouleau qu'il porte en la
main droite, avec le mot EncyclopE'
Die, montre l'étroite liaifoii qu'il fait des
Arts & des Sciences , foit pour la guerre ^
foit pour la paix. Tout de mefme que le cha-
pelet qui pend à fa ceinture, nous iigure l'Ex-
ercice ipirituel entre pluiieurs, qu'il y en a qui
qui font autant d'inftrumens au falut, comme
iiiféparables d'avec laReligion.
Que fi l'on ne luy donne qucla moitié d'une,
aifle à chaque pied, c'eft pour faire .voirqu'il
faut néceflairement qu'il foit dans une jufte
modération , fans laquelle, il ne peut eftre
<îue nuifible : car comme l'oilivcté rend
D 4, l'Hom-
l'Homme lafche & indifpofé, ainfi l'Exercice
modéré donne de la vigueur à refprit,& de l'em-
bonpoint au corps, dont il-fortifie la chaleur.
Quant aux divers outils pour le labourage,
qui font à l'entour de luy, exempts de rouille
·& luifans, cela veut dire qu'ils fe pGliiIènt par U
peine que l'on prend à cukiver laTerre&Ies
Plantes : d'où il faut conclure que l'Exercice eft
néceiTaire à l'entreténement de la vie. Aufîi
eft-il dit dans l'Ecriture, que celuy qui labourera
faÎerre^ fera rajfajié de pain.
EXIL. LV.
\
IL eft icy figuré par un Homme veftu en Pè-
lerin, tenant un bourdon de la main droite,,
& un Faucon de la ganche.
II y a deux fortes d'Exil ; l'un particulier, qui
cil marqué par l'équipage d'un Pèlerin, &qui
arrive à cauiè de quelque accident, ouquand
de ià propre volonté l'homme fe bannit de fon
Païs; & l'autre public, loriqu'unCitoyen oa
par fa laute, ou par foupçon eft exilé de fa Pa-
trie pour un temps préfix, oiibica à perpétuité.
Ε X-
-ocr page 118-r^c-. Χ
-ocr page 119-1 C ο Ν ο L ο G I Ε. Sr
EXPERIENCE. LVl-
C'Es Γ une-vieille Femme veftuë de gaze
d'or, qui de la main droite tient un Carré
géométrique, & delà gauche une baguette avec
un rouleau à l'entour , fur lequel font écrits cesr
deux mots, Rerum M-agistra, c'eftà
dire la Maifirejfe· des chofes.. Outre qu'oïl
PW remarquer à fes pieds une pierre de tou-
che , & un vafe, d'où, s'évaporent des fiam-'
mes.
Elle eft'r&préiêntée vieille, parce-que, (è-
ioii Ariftote-, elle eil la Fille du Temps :
Car elle fe produit far l'âge ^.
Et fait far un divers ufaget
Ce que Ρ Art fitjef à fa loy^,
A de flus admirable-en foy γ
S'il avient qti'èlle fe rencontre
Dans le chemin que l'exemple Itiy montre.
Son habillement eft doré, à caufe qu'elle a le
îïiefmeavaiîcage'fur lesSciences, qued'on don-
à. l'or ^ ilir. tous les autres métaux. ■ Ce n'eil
pas auffi fans un'grand myftére.qu'elle tient
en main.:le Carré géométrique; parce-qu'a-
cet inftrument,, en divifàrît fes degrez,,
^ multipliant fes nembres·, l'on.·trouve par
'ine exp'érience infainible-, la hauteur , Is·
P-fofondeur-,. & la--dîiîance.dcs chofes. Ce-
^ui nous eft pareillement déclaré par fa?
^Syette , qui montre qu'elle régente ■ icy:-
D f bas j-
bas, & que fans elle on leroit aveugle dans la
connoilTance des Arts & des aftaires du raon-
de.
Avec tout cela, le feuquiièvcitàfoncoiîé
ne luy eii pas mal convenable, pius-que iàns
luy ,, comme dit Bocace dans fa Généalogie
des Dieux, nous ne fçaurions pas une infinité de
belles chofes,, qpe l'Expérience nous montre ;
car c'eft lay qui contribue à la perfeâion de !'or,
de l'argent, & de tous les autres métaux ; luy
qui dompte le fer & le bronze ; qui fépare le pur
d'avec l'impur ; & qui par d'étranges mcta-
marphofes change k noir en blanc , les herbes
en verre, & le bois en cendre..
Pour ce qui eii de la pierre de touche, e'eil
à fort bon droit qu'elle figure FExperience, en
eftant une infaillible du prix des métaux , &
particuliécement de For...
F AVEU R. LVIL
Ο ϋ R la, faire voiiî aux yeux telle que l'Ef-
__ prit ie l'imagine par fes effetsles Anciens
l'ont reprefentée par un Jeune Homme qui a»
des aiflcs au dos, un bandeau aux yeux,. & les
giedsllir une roue..
Cette peinture qu'ils en ont faite, n'a elle
que pour nous découvrir trois fources, d'où,
procéd.ent, & réjailliffent toutes les faveurs-
Ijix première eft la Vertu, fignifiée par les.aifles,
qu'on.attribue par. métaphore au, vol de l'Er
fgrit-
-ocr page 121-iprit. La fécondé, la Fortune, qui par les ri-
cheiîes qu'elle donne aux Hommes, les fait
combler de faveurs ; bien-que toutefois elle ne
foie qu'une Divinité tabuleufe, à qui nous ne der
vons atrribuër aucun empire fur les chofes d'i-
cy-bas, qui dépendent toutes de la Providence
'divine. Et la troiiiéme, je ne fçay qu'el-
le conjonâure heureufe , qui fe rencontre
entre l'humeur des Grands, &Ies inclinations"
de ceux qu'ils élevent.. Mais quoy qu'il en
foit, les Romains & les Grecs imputoienc
au hazard la plufpart des proipéritez de la Ter-
re, & leur donnoient un bandeau tel qu'il,le
voiticy, àcaufequeceux qui les pofledent en
font le pluS:fouv.ait aveuglez..
EELICITE ETERNELLE. LVIII.
V
Ct'Est l'image d'iine Jeune Fille nue,.
^extrémemeiK belle, refplendiûànt.e, b.
couronnée, de laurier.^ Elle eft aflife fur nn
Giel ctoillé, d'où elle, regarde en haut avec
«n vifiige joyeux , tenant de la. main gaa^
ehe une palme, & de.la droiteuniiammede-
feu.
On là peitît jeune& de belle humeur, par-
ce que la joye, la fanté, les biens incorrupti-
bles, & toutes les grâces particulières qui ac-
compagnent les jeunes gens,. font ink'parahles
d.'avecelle..
Ellaeitjnuë, parce-qu'èlle n'a pointbeiôin de.:
D 0 : fe
^ ICONOLOGIE.
fe couvrir des biens périiTables d^cy-bas, ou
pour s'en parer, ou pourfubvenirauxinconi'
modite'i de la vie., trouvant en-loy-mefme le
comble des vrais contentemens.
Ses. treiTes dorées fontdesfigures d'une pais
immortelle, & pleine de feureté : car il n'y.a
perfonne qui ne Içache que roreiloitunfym-
boled'unionenGcpremierâge où les hommes
vivoient dans l'innocence, fans violer tant fok
peu les loix de la Nature. Le Ciel étoillé-,
que la vraye félicité des Bienheureux n'eft fu-
jette ny au cours des Ailres , ny au mouve-
inens des Saifons : La palme jointe à la cou-
ronne de laurier, qu'on ne peut s'ouvrir une
entrée au Paradis, que par les tribulations^
«fiant certain, comme dit S. Paul, qu'il faut
(ombaitre de borne- fafon- four- recevoir la cou-
ronne de gloire: Et la flamme, ardente, qu'un·
bon Chrétien doit eftre embraïé de l'âmour de
IDieu, & avoir fans ceiTe lés yeux élevez à la
contemplation du Créateur, puifqu'en cela-
conlifte le. plus haut point: de. la.felicité' éteî,-
aelle..
F ECO Ν D l 't: E.. L· JX:.
E:trouve;quecettc peinture neluy canviefii ·
I pas mal, qui efl celle d'une Jeune Eemme,
' eouronnce.de cheneviére.. Elle tient prés de '
û?n.fein,un nidde Chardonnerets, &àfespiedi
iî.,¥oyeiit d'unxolié des petits Lapins·,qui
jûiicat-
-ocr page 123-jouent, & des Pouffins qu'une Poule regar-
de fixement& qui viennent d'eûre éclos.
Le plus grand bien que puifle avoir une
femme mariée, eft celuy delà fécondité,par
qui elle produit des fruits deiîrables qu'on fe
propofe pour fin du mariage. Auffi eft-il vray
qu° la procréation des Entans eil entièrement
néceffaire aux hommes par un inftina déna-
turé , comme il fe voit par l'exemple mefme
des Créatures irraiibnnables car il n'y en a
point qui ne cherchent naturellement d'en-
gendrer félon leur efpece, làns que t©utefois
elles en efpérent aucune utilité.. Or eil-ilque
c'en eft une bien grande, que d'avoir des Enr
fans qui foient gens de bien, comme Arifto-
te le prouve en fa Réthorique. Ce que Pline
encore dit eftre un des plus hauts points de
la félicité humaine, par l'exemple qu'il rap-
porte de Cécilius Métellus la Macédonien,
qui eut quatre fils élevez aux plus haute?
Charges de Rome, comme ayant efté Prér
teurs-, Confuls & Cenfeurs. A qaoy il ajoin
fe, qu'au temps d'Augufle , Caius Crifpinus
fit un facrificefolemnel auCapitole avec neuf
les Enfans, fçavoir, fept garçons & deux
filles, vingt-fept neveux, neuf nieces, & vingtT
neuf petits-neveux.. Je ne parle point ny de
^ornelie, de la.maiibn des Scipions,, d'où
iiâquit Yolufius Satumiusqui fut Cout
fui avec l'Empereur Domitien j. ny de la-
céré des Gracques, à qyi, félon Pline.,
grande Dame ayant un jour fait montre,
«e fes joyaux, elle luy fit vojr douze beaux
garçons qu'elle.avoit,. en lay difant que c'et
toienL-.
-ocr page 124-toient-là iès plus précieux tréfors. Telle-
ment qu'on peut bien aiTeurer que cette féli-
cité des Familles eft 0 grande, qu'elle paiTe
des particuliers à tout le Public. Âuffi ordon-
na-t'on anciennement à Rome, queceluy qui
fe trouveroit avoir plus d'Eofans, auroit plus
d'honneur. & feroit préféré aux autres en la
Dignité Confulaire.
Elle eft couronnée de feuilles dechenevié-
re, parce-que cette herbe, dont la femence.
eft fort menue , & qui multiplie d'elle-mef-
me fans qu'on apporte prefque aucun foin à la
cultiver, devient ii grande & fi forte, qu'elle
■foûtient les oifeaux qui s'y perchent.
Que fi l'on demande pourquoi on luy fait
tenir en main un nid de Chardonnerets, l'on
en trouvera la refponfe dans Pline. Car en ce
mefmeendroit defonLivre, oùilditque plus
un Animal eft grand, moins il eft fécond, com-
me il fe voit par l'exemple des Chameaux, &
des Elephans ; il remarque tout au contraire,
que des œufs du Chardonneret, qui n'eft'qu'uil·
petit oifeau, il s'en écloftjuiques à douze.
Pour cette méfme raifon elle a une Poule à
iès pieds, à caufe que cet oifeau domeftique
eft fi fécond, que d'un feul de fes œufs il c»
fort quelquefois deux Pouflîns ; ce que Pierius
dit avoir veu dans Padôuë ; & Albert le Grand
aiTeure le mefme. Que s'il enfaut croire AriP
tote, il s'eft trouvé des Brebis affez fouvent,
qui ont porté jufques à cinq Agpeauxàlafois.
Et peut-être eftoit-ce pour cela, qu'ancienne-
ment les Femmes en facrifioient deux avec
Icu'r Mere, s'il arrivoit qu'en leur accouche-
ment-
A
-ocr page 125-ment elles euiïènt eû des jumeaux. Mais il arri-
ve quelquefois qu'elles en ont bien davantage , ■
puifqu'Aule-Gelle, Jules Capitolin, Boterus,
& Martin Cromer nous aiTeurent, qu'au Ter-
ritoire de Laurente, une des Efclaves d'Au^
guile accoucha de cinq Enfans malles, qui vé-
curent quelque temps : qu'il en arriva de meP·
iTie à un autre fous l'Empire d'Antonin : que
i'auizyô. nafquirent de la Comteffe Margue-
rite trois cens foixante & quatre Enfans, qui
fiirent toutes baptifés fous les noms de Jean-
ne & d'EIifabet, comme il fe remarque enco-
re aujourd'huy iùr leur tombeau, quieftdans
Wii Monaitére de Religieufes de faint Ber-
nard prés de la Haye en Hollande, où cette
Hiftoire cil écrite au long : & qu'en Craco-
vie l'an ιζόρ. une autre Marguerite, Femme
du Comte Verfaolaiis, accoucha de trente^ik
Enfans.
Pour ce qui efl des Lapins, qui iè voyent à
l'autre cofté de cette figure, c'cll fort à pro-
pos qu'ils y fcnt mis, ces Animaux eftaiit
fi féconds, qu'en allaitant leurs Petits, ils en
produifent d'autres. A quoy fe rapporte lare-
^^arque qu'en fait Valere le Grand, qui dit
IHe dans une certaine Ifle qu'il nomme, ils
rnultipliérent en fi grand nombre que les Ha^
Gitans furent contraints de leur quitter la pla^
ce,, tant ils en eftoient incominodez.
Λ ce que je viens de dire de la Fécondité ,
font conformes à peu.prés deux anciennes Mé-
dailles de Fauftine & de Mamée; en la pre,*
luiére deiquelles elle fe voit repréfentée iùr
Hti lit, avec, des Enians qui fe joiient à J'en-
tour.
-ocr page 126-tour d'elle : & en la fécondé, par une Fem-
me, qui tient d'une main un Enfent, & de l'au^
tre une Corne d'Abondance.-
mmmm&mimê,-&mm
FERMETE'- DE LANGAGE. LX.
peinture eft tirée-de Eierius en
V^fes Figures Hieroglyfiques,.oàilditqus
les Preftres Egyptiens repréfentoient la fer-
meté du difcouri par un Mercure fur une ba'
ïe quarrée, où s'enfonçoient fes deux pieds :.
par où je m'imagine qu'ils ne vouloient mon'
trer autre chofe, finon que le bon raifonne-
ment, fouftenu par un Efprit judicieux & fo"
Hde, peut ÎUbfiiter de foy-meOne, fans avoif
beibin en aucune forte de l'aide des pieds,
ny de celle des mains, pour s'affermir & ft
rendre inébranlable. Et peut-être que pouf
cela mefme au lieu de ba2e, quelques autres
luy cachent les pieds dans un monceau de
pierre, parce-qu'anciennement les paf^ns efl
jettoient pluiîeurs au bas de fa ftatuë, com-
me le remarque Fornutus en fon Livre de
Nature des Dieux.
Quant à fes aifles & à fon Caducée, cela
nous apprend deux chofes; l'une, qu'encore^
que les paroles ibient legéres, & qu'elles fern'
blent voler, fi eil-ce qu'efiant proférées avec
poids & judicieufemt-nt, elles ne laiifent pa*
de faire une forte impreffion dans la mémoi'
re. L'autre^ qu'une/éloquence folidelaitre^
vivre les hommes par le fouvenir de leurs
bdlfS
-ocr page 127-telles adions ; tout de mefme que Mercure
reiTufcitoit les morts par la fecrette vertu
sue ks Anciens attribuoient à fon Cadu-
cée.
FERMETE' D'AMOUR LXI.
ELle eft repréfentée par une Femmeaiîî-
fe, richement veftuë, & qui tient les deux
Plains entrelacées l'une dans l'autre, ayant fur
la teftc deux ancres en forme de croix ; un
■Cœur au milieu , & ces paroles au deiTus
Mens est Firmissima, comme qui
«iiroit, Réfolutionimmuable.
Par le riche habillement dont elle eft pa-
''ée, il eft montré que l'Amour eftant volage
de fa nature,, il faut faire grande eftime delà
Conftance, quand elle s'y trouve jointe. Par
ïes deux ancres liez enfemble, que l'efperan-
Ce fortifiée par la raifon, eft le plus fei-meap-
Puy d'un cœur amoureux : par fes mains en-
trelacées , que la foy doit eftre infëparable
<i'avec la perfonne qui aime: &par fonadion
Pofée, que s'il y peut avoir quelque repos
d'efprit en l'amour, il faut nccefl'airement
qu'il procède d'une ferme réfolution, ou tout
au moins qu'elle en faflè la meilleure partie.
FIDE-
-ocr page 128- -ocr page 129-m&mmmMi^âimmm
F ID ELIT m LXII.
L'On ne peut faire un Tableau pius con-
venable que celuy-cy,quieftd'ûneFem-
me veftuë de blanc, ayant en l'une de fes
mains un cachet, en l'autre une clcf, & âfeS
pieds un Chien.
Cette figure n'a pas befoin d'explication,
puifqu'i! n'y a peribnne qui ne fçsche bien
que le cachet & la clef loiît des fymbolcs
■de Fidélité: aufll a-t'on accouftumé'de s'en
fervir à fceller & à ferrer les chofes que l'on
veut tenir fecrettes.
Pour ce qui eft du Chien , l'expérience
fait voir tous les jours, que c'eft le plus fidè-
le de tous les Animaux, & le plus amy de
l'Homme: témoin celuy de Titus Labienus,
au rapport de Pline, qui ne partit jamais
d'auprès de fon Maiftre, & qui le voyant
précipité dans le Tybre par les degrez Ge-
monins, s'y 'jetta incontinent après luy, <S
le noya enfin à force de nager ά de faire le
plongeon.
c
FLATTERIE LXIII.
'Est une Femme agréablement veilue^
& qui jouë d'une flufte, ayant un Cerf
qui
-ocr page 130-qui dort à fes pieds auprès d'une ruche oa
d'un tronc d'arbre,d'où fortencdes Mouches
à miel.
Cette figure, comme k remarque Pierius,
cft de l'invention d'Orus Apollo. Ils difent
tous deux que le Cerf aime tellement le fon
<Je la flufte, & en cil il fort charmé, qu'eti
l'e'coutant il s'oublie foy-mefme & le laiilè
prendre. Cela nous enièigne que les Ames
^bibles tombent ordinairement dans les piè-
ges des Flateurs, parce qu'ils preilent volon-
tiers l'oreille, & ie plaiiênt qu'on les endor-
ttie de belles paroles ; dequoy toutefois ils ne
ie trouvent pas fi bien, qu'ils n'éprouvent à
la fin que cette douceur, comme celle des
Mouches à miel, eft fuivie d'une dangéreufe
piqueure.
Quelques autres l'habillent d'une couleur
«hangeante , luy faifant tenir une corde d'u-
tie main , & des foufflets de l'autre ; outre
qu'à fes pieds ils mettent un Caméléon. Le
changement des couleurs dont elle eft veftuë,
fignifie ion inconftance & fOn artificieufe ibu-
PleiTe , qui luy fait à tout moment changer
iie difcours & de vifage, pour s'aceommo-
^er au gouit de celuy qui l'écoute ; eilant en
cela fembl Aie au Caméléon , qui pour edre
Peu fanguin , ·& fort timide, change de cou-
leur à tout momenti Par où l'on peut voir
Siue la Flatterie cil: un vice lafohe, qui ne
PoiTéde jainais que le? Ames baffes & fer-
viles.
Davantage, comme on iè fert de fouJSets
pour r'allumer le feu quand il elt éteint, ou
pour
-ocr page 131-pour l'éteindre qnaud il eft allumé; les Fla^
teurs de mefme augmentent Fardeur des ραΓ'
fions avec le doux vent de leurs paroles , fl
on les écoute; ou bien ils étouffent la lumiè-
re de la vérité, en perfuadant le menfonge.
Quant à la corde qu'elle tient en la main
gauche, cela nous apprend, comme dit S·
Auguftin, qu'il n'y a rien qui attache fi forte-
ment les hommes au péché, que la Flatterie!
" car elle fe plaift à certaines chofes, qui quelques
vicieufes qu'elles foient, font louer par cette
maudite engeance ceux qui en font les Auteurs »
tant s'en faut qu'on les eii daigne reprendre.
FÛT CHRESTIENNE, LXIV.
CEsT une Vierge veftuë de blanc, q«î
tient de la main droite une croix & uU
Livre ouvert regardant fixement tous les
deux, & qui femble faire figne de la gauche;
qu'elle porte prés de fon oreille.
Cette adion de la main , & le Livre oU'
vert fignifient qu'il y a deux moyens pou?
s'inftruire en I3 Foy Chreftienne: l'un eft ce-
luy de l'ouye , d'où elle vient, comme dit
Saint Paul au Romains; l'autre, laleéluredeS
Livres Canoniques, qui toutefois, n'a pas tant
de force ; car félon le mefme Apoftre, la pa-
role de Dieu eft de fi grande efficace, qu'el-
le touche au vif, & il n'y a point d'épée qu'
pénétre plus avant. Quelques-uns y ajoutent
use
-ocr page 132-'^'^ebaîe, fur qui elle s'appuye, pour montrer
Psr là qu'elle elt le ferme foûtien des autres.
^ crtus, & que Jesus-Christ eneftla pierre
^ndamentale.
ρ Elle fe voit encore reprefentée dans les
écrits des Anciens Chreftiens, comme Une
•'''une Fille, qui a le viiàge voilé, les épaules
'^"^ës, une Couronne fur la telle, un Sceptre
main, & fous fes pieds deux petits Renards,
Qu'elle foule avec une réfolution invincible.
Elle eii peinte voilée, pour nous appren-
que nous n'avons en ce monde aucune
évidence des Articks de noftre Foy, parce-
'îûe, comme dit S. Paul, nous ne voyons icy
^Ue par énigme, & comme par un miroir. A
•■^ifon dequoy J-esus-Christ aiTeure S. Tho-
JJias, que bien-heureux font ceux qui ontcreu
'ans voir. Ajoutons à cecy, qu'elle a le vifa-
Se voilé, à caufe que l'habitude de la Foy,
^omme le remarquent les Théologiens, procé-
"^e fimplement d'un objet obfcur, & qui mefme
eft invifible & infenfible.
Elle a les épaules découvertes, pour mon-
'rer qu'il faut prêcher l'Evangile en termes in-
telligibles , non pas le pâlier par des enigmes
^ par des paroles obicures, comme font les
Hérétiques.
Et dautant qu'elle gagne tous les jours de
i^ouvelles vi£i:oires fur nos communs ennemis,
^uifont le Monde, le Diable & la Chair.,
c'eft pour cela qu'elle porte une Couronne de
laurier, & un fceptre en la main , pour une
Marque de la grandeur &dela majeftédenof-
ξ^ε fiiinte Foy., qui eft la produâion du Roy
Eternel. Les
Les Renardeaux qu'elle foule aux pieds»
font les Hérétiques, ainii appeliez dans l'E-
criture à caufe de leur malice, en laquelle ϋ
les faut furprendre, comme dit, S. Paul dans
ià I. Epiflre aux Corinthiens.
FORCE. LXV.
Ν la repréfente armée, telle à peu pre's
\^que la DéeiTe Pallas; & de quelque for-
te qu'on la confidére, elle porte la philîono-
raie d'une perfonne robufte : car elle a Is
corps ramaffé, la taille belle, les épaules lar-
ges, les membres nerveux, le teint brun, U5
cheveux rudes, l'œil brillant, & guère fendu-
Elle tient une lance en la main droite , avec
une branche de chefne , & en la gauche ui'
Ecu, au milieu duquel eil peint un Lion qui
combat un Sanglier.
Bien-que les valeureux efforts que l'on fait
pour lutter contre les chofes difficiles, cofl'
viennent à toutes les Vertus particulières, tou-
tefois l'exécution n'en appartient qu'à la For-
ce , dont le propre eil de fouftrir courageuiè-
ment pour l'amour de la Vert-u toutes fortes
d'evénemens & de fortunes contraires. Que fi
on la peint en Femrne, ce n'eft pas que l'oH
prétende qu'elle doive efîre efféminée ; mais
c'efl: plûtoil pour, en accommoder la figure à
la façon de parler.
Ses Armes font des fymboles de la force
de fou Corps.; & le rameau qu'elle tient en
maia,
-ocr page 134-en eft un de celle de fon Efprit. Par
'in elle reiiile aux Armes matérielles, & par
loutre aux ipirituelles , qui font les vices.
Ι^ε qui nous eft démontré par le chefne, ar-
plus fort que les autres, foit à caufe qu'il
roidit contre la violence des vents & des
foit parce-que l'on en fait des machi-
qui durent trés-long - temps : auflî eft-ce
pour cela que les Latins appellent de fon nom
Hommes forts & robuites." La lance qu'el-
le porte iîgnifie que c'eil une diofe natuielle
repoufler la violence qui nous eft faite in-
•"ïftement, & de nous aider pour cet effet des
''^rces que nous avons.
Que s'il en faut croire Pierius, par le com-
bat du Lion & du Sanglier peint en fon Ecu,
^ous font declarées les deux forces du Corps
^ de l'Efprit. Car au lieu que le Sanglier
précipite à chaque rencomre, le Lion au
Contraire ménage fes forces avec adreffe, foit
qu'il attaque , ou qu'il fe défende.
Je diray à ce propos, qu'il me fouvient
"avoir leu dans Orus, que les Egyptiens re-
Ptéfentoient la Force par une Femme de
^ompléxion vigoureuiè, qui avoit fur ia tefte
deux cornes^ d'un Taureau, & à fon cofté
Eléphant avec .fa trompe. En effet, l'ex-
Périence nous montre, qu'il n'y a point d'A-
l^^ftiaux plus forts que ceux - cy ; ce qui fait
^^re au fàge Caton, qu'il n'avoit jamais fou-
«aité les forces de l'un, ny de l'autre en fa
plus verte jeuneiTe.
La mefme démonftrafion nous eft faite en
anciennes Médailles, en la première
dci-
-ocr page 135-aefquellesonvoit une jeune Femme qui a un«
maffiië, pareille à celle d'Hercule ; & en la
fécondé une Amazone armée, qui de la mai»
gauche porte un Ecu où eft dépeint lateftedc
ce généreux Animal ; & de la droite une épée
nue, qui eft environnée d'un Serpent depuis
la garde jufques à la pointe. Ce qui ne peut
mieux s'entendre que de la force du Corps,
de la prudence de l'Ame, & de la grandcui
de courage, qui font des vertus fi excellen-
tes , qu'on a veu fouvent par leur moyen de
iàmples Soldats parvenir aux fouverains hon-
neurs du triomphe, après avoir pafle digne-
ment par toutes les plus hautes Charges de la
Milice.
FORCE D' A MOU R
par Mer ^par l'erré, LXVI.
^^ Ε τ τ Ε peinture d'Amour eft une Co-
V^ pie d'un Emblème d'Alciat, qui en a ti-
ré l'Original d'une Epigramme Grecque, qui
luy fert d'explication , & que j'ay ainii tra-
duite :
Icy l'Amour dépeint fans Arc £5' fans fia0'
beau.
Des cœurs qu'il a bkffeî, veut avoir f»^
offrande ;
Et montre fin pouvoir fur la l'erré £5'
l'Eau,
P<ar-un potfon qu'il tient, ξ^ far unegH'^"
la»de,
U
-ocr page 136-Le meûxie Auteur voulant marquer l'em-
pire de Gupidon, l'éléve fur un chariot tiré par
<ieux Lions ; & en un autre endroit il luy fait
hauffer la main droite vers le Ciel, d'où tom-
bent fous luy confufément des flèches & des
flammes, qui cèdent à la violence des iîennes:
car elles blelTent & brûlent tout enfemble, com-
me difent les Poëtes, fans que Jupiter mei-
rne en foit exempt; tellement qu'on peut di-
Q^un Enfant qui porte des aifles^
Dompte le Pere des Humains,
Puifque pour des beautet, mortelles ^
La foudre luy tombe des mains.
GENEROSITE. LXVII.
S On imageeft celled'unejeuneFillefibel-
le & ii charmante, qu'elle attire à foy les
yeux de tout le monde, Elleeftveituë de gaze
<i'or, s'appuyantde la main gauche fur la telle
«l'un Lion ; & de la droite qu'elle haulîè, elle
^'ent des chaifnes de pierreries & de perles,
avec démonftration d'cri vouloir faire des pré-
iens.
Elle efl: peinte jeune, parce, dit Ariflote,
^ue les j eunes gens ont le courage grand, & par
conféquent généreux & noble ; cequieft enco-
''e fignifié par l'or de fa Robe. Auffi appelle-
t'on généreux, ce qui ne dégénéré point de fa
îiature.
I. Part. Σ Elle
-ocr page 137- -ocr page 138-Elle a le bras droit nud, & feirible vouloir
diftnbuër les riches joyaux qu'elle porte, pour
nous avertir que le propie de cette vertu eft de
ie dépouiller de toutes ibrtes d'intérefts, & de
faire, du bien fans efpérance d'en recevoir en
échange.
Or parce qu'elle fe définit, un Eftreexcel-
lent en la perfonne qui en eft pourveuë, &qui
la tient de ià propre vertu ; pour donnera en-
tendre cela, elle s'appuye fur la tefte d'un Lion,
,qui eft celuy de tous les Animaux qui a plus
de grandeur & de générofité de courage. Car
il eft invincible dans quelque rencontre que ce
foit; & s'il.eft contraint de fe retirer, c'eftde
il bonne grâce, qu'il n'abandonne jamais de
veuë celuy qui le pourfuit.
GENIE. LXriIL
IL y a dans les Ecrits de Vincent Cartarî
quantité d'images du Génie, qu'il a prifes
de Lilius Giraldus : mais celle-cy me plaift
pardelTus toutes, tirée d'une ftatuë de marbre
de bas relief, qui fut trouvée à Rome il y
quelques années. Elle repréfente un Enfant
nud, &'d'un vûage riant; avec une guirlaiide
de pavot fur la telle, des épies en une maui)
& une grappe de raiiîn en l'autre ; à quoy fer*·
d'explication l'Epigramme qui fe voit au dei-
fous, par où il eft montré, '
07ie ία blonde Qerés .Bacchus, ^^leSomrneti
i'mit
-ocr page 139-•Font gonfler aux Mortels mplaijir nompareii·^
S^I avient qu'à leurs dofts fait fuiffamment
tinte
La faveur du Génie.
Et dautant que les Anciens le prenoient
Pour la commune confervation des chofes du
^onde, il ne faut pas s'étonner ii chez eux
'lon-ièulement les Créatures Humaines, mais
■les infenfibles inefmes avoient leur Génie ,
Comme il fe voit par diverfes Médailles qui
îiy attribuent la garde des tréfors & des Gre-
niers.
Mais quant à cct autre Génie qui fe prend
^'ordinaire pour l'inclination que nous. avons
'■> quelque chofe, & pour le plaifir qui en re-
tient on luy peut donner des ailles pour uh
%mbole de la chofe qui nous plaift, & qui
ïious revient toûjours en l'efprit. Par exem-
ple, lî quelqu'un eft porté aux Lettres . qu'on
^'ly mette des Livres en main : fi à la muiique,
^es Luths & autres tels inilrumens : fi à la
guerre, des armes & ainfi du reft^. Par meP-
^e moyen qu'on le couronne de feuilles de
flane, arbre génial, & qui pour n'eftre pas
'Tioins beau que çommodepour la grande om-
'^re qu'il fait, ilitTun des pluï agréablesorne-
^ens de l'Académie d'Athènes.
En quelques Médailles le Génie des Ro-
'îiains eil couronné de laurier, parce-que ce
peuple ne fe plaifoit qu'à la guerre & aux triom-
phes. En d'autres on luy fait porter des épies,
•^es.fleurs, & des branches d'olivier, comme
celles de Tr?yan & Marc Aurele Anto-
'lin. Maisla plus remarquable de toutes eil cel-
E a le
le de Néron,, tenant de la main droite une
coupe à iàcrifier devantun Autel, & de la gau-
che une Corne d'Abondance. Il faut bien croire
que par un excès de flatterie l'on frappa cette
Médaille en fa faveur, puiiqu'il eit certain que
le génie de ce Prince, c'eft à dire ion humeur,
fe poi toit au mal plûtoil qu'au bien, à l'impié-
té non pas à la Religion, & à la ruine des biens
plus volontiers qu'à leur accroiiTement.
gloire, LXIX.
CEtte image eft tirée des anciennes Mé-
dailles, où elle eft peinte de mefmequ'i'
cy : car avec ce que le haut de ion Corps eft
preique tout nud, elle porte une fphére où font
les douîc Signes du Zodiaque, & une petite
figure qui tient une palme d'une main, &
l'autre une guirlande.
Sa nudité fignifie qu'il n'y a jamais de fard
dans les adions glorieufes, parce-qu'clles pS'
roiffent à découvert en quelque temps que c^
foit. La fphére ' qu'elle porte, que les co»'
fidérations d'icy-bas ne l'obligent pas tant ^
des exploits héroïques , que celles du Ciel»
où elle fe promet la recompenfe de fes trs'
vaux : Et l'image qu'elle Ibûtient de la ma'"
droite, ciui eft celle de la Viâoire; qu'ell^^
font toutes deux inféparables, puifque l'une al'
feurément eft l'eflèt de l'autre.
11 y en a qui luy mettent fur la tefte une Cou^
rounc d'or, avec une trompette en la main gs^'
ciie»
-ocr page 141-Che, & en la droite une Corne d'Abondance.
Par la première de ces choies ils prétendent
niontrer que le prix de la Gloire eft toujours
illuftrc, piiifqu'ellepoircdcles plus prccieufcs
marques d'honneur que l'on puillc avoir, qui
font les fceptres & les couronnes. Par la le-
Çonde, que fes hautes entreprifes ne manquent
Jamais d'eitre publiées par la bouche de laRe-
J^ommée : Et par la troifiéme, qu'eftant légi-
time, & fondée fur la Vertu, elle ne peut
manquer de vrais biens, ny d'eftre viétorieu-
le en pluiîeurs façons de la mauvaife for-,
tune. '
^ilâ^âyilljfe'Éîâlââloil^^âaalsè
GLOIRE DES PRINCES. LXX.
L'Invention de cette figure eft prife
d'une des plus belles Médailles de l'Em-
pereur Adrien. Elle a fur la tefte une riche
Couronne d'or, & en tient une autre en la
tftain droite, foûtenant de la gauche une for-
te Pyramide.
La Couronne d'or fignifie la recompenfe que
•■cçoivent les grands Princes des fameufes en-
treprifes qui les occupent fans ceife, & des
pelles aâions qui s'en enfuivent : comme cel-
de Laurier eft un illuftre prix qu'ils don-
nent eux-mefmes pour marque d'honneur à
^eux qui les iliivent dans les occafions de fig-
"aler leur vaillance.
La Pyramide eft pareillement un fymbole de
^'^r Gloire, qui éclate en diveriès façons dans
Ε 3 les
loi I C G Ν Ο L Ο G ί Ε.
les Temples & dans les riches Palais qu'ils font.
baitir avec unemagnificcnce Royale:, car ces
i'uperbes marques de leur grandeur les rendent
recommandables à laPofterité ; ce queténioi-
gnentciipore aujoard'huy ces pr.odigiêufes maf-
les de pierres qui nous fonï reliées des r yranii-
des d'Egypte, que le temps n'a pû démolir, ny
eropefcher qu'elles ne paliént pour des mira-
cles du monde, à la gloire de leurs Auteurs..
Ci'Es τ une jeune Vierge, qui parlesmef'
' veilleux charmes de fa beauté ravit d'a-
mour & d'admiration, tous ceux q.ui la con·'
templent. Une Couronne refplendiffante
forme autour de iîi tefte, dont les cheveux
blonds s'épandent nonchalamment fur ^es
épaules; & de fes deux majns elîe tient une-
Corne d'Abondance, d'où tombent pluiiew'
Ibrtes de biens, qui font marquet par diyerfe^-
enieignes& marques d'honneur. Aiais elleft^
fait paroiftre fur tout par fa nudité, & par l^s-
rayons qui l'environnent depuis la tefte jufque^
aux pieds.
Les beautez qui éclatent fur fonvifage, ίόπ·^
des fymboles de celle de fonAme,;quicftp'i:
re & nette de toutes fortes de taches; ce qu'
procède fur tout de, ces. merveilleux rayo"^
dont elle eil enveloppée, qui eftant élancez
d'en haut, diffipent les nuages épais des vices-
ûa. nudité marque fon innocence, qui n'a pas
■ befoi»
r C ο Ν ο L ο G î È. 103
tiefoin de ces omemens extérieurs,ny de ces vai-
oes parures dont les perfonnes du monde ont
accouftumé de couvrir leurs d'Eiuts.· Et quant
^wx biens qu'elle verfe abondamment, ils ap-
prennent à ceux qui les poiïédent,à reconnoilue
qu'ils viennent dé Dieu, puitqu'i s doivent à fa
ftinte Grâce ks plus hautes Dignitez où ils le
Voyeutéevex.
. d'autres la reprcfentent fous la· forme d'ans
belle Vierge qui tourne les yeux vers le Ciel,
d'où le S. Ëfprit deicend fur elle en forme de
Goloj-nbe. Elk tient d'une main un rameau
, d'olivier, & de l'autre une coupe.
Eilc regarde le Ciel, pour montrer que la
Grâce nous vient de Dieu, & que pour Tobis-
nir il faut ncceirairement queleptcheurfs coa-
vertiffe, & qu'i 1 luy demande pardon de fes fau-
tes. Cette pureté del'ameert figurée par la Co-
lombo, vray iimbole du S Efprit, à qui Ibs
Théologiens atttribuent l'intrifion de la Grâce
dans nos Ames. Ei voila pourquoy il eil dit,
qu'elles s'épand· fur ks Créatures par la pure
libéralité de Dieu, & fans aucuns, mérites qui
ibient en. elles.
Et dautant que rolivier fignific la paix , le
rameau qu'elle tient eft une marque de la
tranquilité que fent le pécheur après qu'il s'elt
réconcilié avec Dieu. Et l'on peut bien dire
^uiïï, que la coupe eft une figure de cette récon-
<-iliation, puiique celuy qui eft en la grâce de
Dieu goufte des douceurs infinies, qui luy font
perdre entièrement la foif qu'il avoiî aupara-
vutjt des clioies du mondé.
Ε 4,
GRJM-
-ocr page 144-104 I C Ο Ν Ο L Ο G I Ε.
grammaire lxxii.
S Es deux principales fins font démontrées
par la peinture de cette Femme, qui tient
de la main gauche un rouleau, où elle eft défi-
nie, un Art qui apprend à parler correâement,
& à prononcer comme il faut ; & de la droite un
vafe plein d'eau, dont elle arrofe une plante ;
quiiignifiequ'ileneilde mefme des jeunes Ei^
prits, & qu'à force d'eftre cultivez commes des
plantes encore tendres, ils portent des fruits
d'une profonde doârine.
D'autres la figurent par unejeune Femme qui
tient une lime d'une main, & de l'autre des ver-
ges , ayant les mammelles découvertes, d'où il
lùrt du lait en abondance.
Sajeuneflè vigoureufe eft un fymbole de l'ac-
croiifement de cet Art qui fe fait à force de
le cultiver & d'en apprendre les régies ; com-
me nous voyons qu'en ce premier âge
corps fe rend fouple peu à peu aux exercices
qu'on luy montre, quand il prend peine aies
acquérir.
La lime qu'elle porte en une main, eft
marque de l'affiduite dont il faut ufer pour re-
trancher ce qu'il y a de groffier & de iuperfl^
dans un Efprit, afin de le rendre fufceptibie
de ces nobles principes, qui luy ouvrent l'en-
trée aux plus hautes connoiiTances ; & les ver-
ges qu'elle tient fignifient que la Grammaire
eft la premiere chofe qu'on enfeigne aux En-
lans, y employant pour cet effet le chafh-
^snt, pour les rendre plus capables de difcipli-
Mais cette Icgére peine ell fuivie enfin d'un
pand plaiiîr, parce qu'elle leur fait goufter avec
^^ temps la merveilleufe douceur des Scien-
, qui eft icy marquée par le lait qui luy fort
mammelles.
^RAriTUDE , ou RECONNOIS-
SAKCE. LXXIIL'
Le naturel de cette Vertu paroiil en troiS;
chofes différentes, qui font une Cigo-
S^it" , un bouquet de fleurs de fèves, & un
tiephant, paroùfe fait remarquer cette Fera-
Wie qui la repréfente.
Par La Cigogne , parce , dit Orus Apol-
lo , qu'il n'y a point d'Animal qui foit plus
reconnoiiTant que celuy-cy, qui foulage con-
tinuellement la vieilleiîè de ceux qui l'ont mis
au monde : car au mefme lieu où il a efté nour-
fy, il leur fait un nid des dépouilles de leurs plu-
iTies inutiles, & leur donne à manger en atten-
dant que leurs bonnes foient revenues, & que
<i'eux - mefmes ils puiffcnt trouver à vivre. A
raifon de cela cet Animal eftoit en grande con-
sidération chez les Egyptiens , & fervoit de
myftérieux ornement aux fccptres des Rois.
Par le rameau de fleurs de fevcs, parce-que
les légumes de cette efpece, comme le remar-
que i^line liv. i8. chap. 14. engraiiïèntleTer-
i^oir où elles viennent, & nous enfeignent
Ε j- pa
^^^ - -
-ocr page 147-par conieqvient, que nous devons toujours-
Gpntribuër par nos foins à la bonne fortune de
ceux qui font caufe de la noftre..
Par l'Eléphant, paree-que cet Animal n'ou-
bliejamais lebienqu'il a receu:, témoin celuy
dont parle Elian., qui voyant fonMaiihe.-mort
par la violence de fes Ennemis, le prit avec fa
trompe, &leporta.dansfon.Etab:c, où il fut
long-temps prés de. luy fans vouloir manger,
avec de li grandes démonftrations de deuil, que-
tous ceux qui le voyoient en eftoient toucheî de
pitié.
GRAVITE. LXXIV.
I Έ s X une Dame honorable , veiluë dff·
_ pourpre, & qui porte au cou en fonne de-
j ο yau une Lettre de cachet. Son vifage ie.tourner
du cofté d'un flambeau allumé qu'elle tient en
fa main gauche, & delà droite elle empoigne la-
tefte d'une petite iiatuë élevée far, un pied-def-
tail.
La Robe de pourpre luy eil convenable,pour
eftreunemarqued'holraeur & de, dignité ,, qui-
donneplusdemajefté&de gravité aux grands
Princes. ■ ■
La Lettre de cachet qu"elle porte aucou,eit·
comme le caractère, de la nobleife, qui la fait
garoiftre plus relevée ; & le flambeau qu'elle^
tientenellunautredefonmérite, qui ne s'ac-
eommodant qu'aux chofes graves & féfieufes»"
fertdeFKnal àtoutlepeu^Me, & luy donne fu£··
luy le me;ine avantage qu'a k Soleil fur les·
raoindies lumitrès. IlMi'
I C ο Ν ο L ο G I Ε. ίο/
ζΐ^ ^iV ί'ΐ- -τ'?, s·^ Λ'ί ,Α'ΐ -iî?-'
HARMONIE. LXXV.
CE Tableau de l'Harmonie fe voit au Pa-
lais du Grand Duc de Tofcane, où elle
^It peinte comme une belle Reine, ayant fur la-
melle une couronne toute brillante de pierreries,
une lyre en une main, & un archet en l'autre.
Pour donner l'explication de la beauté de cet-
te figure , il iùffit de dire en général avec ;es
Poëtes, qu'elle efi: couronnée comme fille du.
Ciel, les charmes de laquelle enchantent 4es
Cœurs, flichiffent les Tygres, & donnent du
mouvement aux chofes inanimées. Témoin la.
lyre d'Orphée, qui par fes mélodieux accords le
rendoit fenfible aux Rochers, & déracinoit les
Arbres. Mais il ne faut pas s'étonner de ces
merveilles de l'Harmonie,puifque fèlon les Py-
thagoriciens il n'y en a point icy-bas qui ne pren-
ne ion origine des Cieux. Nous-mciiiies y par-
ticipons par leur vertu ; & voila pourquoy nous.
Preftons fi volontiers l'oreille à fes agréables
concerts, j ufques-là mefme qu'au dire de quel-
ques-uns, nous nepourrions làns eux ny mettre
d'accord les mouvemens de noflre Ame, ny
trouver lajuilefymmetriedes vertus.
Les Poëtes nous ont caché cette Philofophie ■
ibus l'écorce de la Fable, quand, ils ont teint
qa'après que les Coribantes & les Curettes eu-
rent arraché Jupiter encore enfant des cruel-
mains du vieil Saturne fon pere , ils le
E. 6 me-
mencrem en Crctc pour y eitrenourry, & η
ceiTcrent le long du chemin de le divertir au
foa des cymbales & de quelques autres inftru-
mens d'airain. Si l'on examine bien cette fa-
ble, on trouvera que par Jupiter fe doit en-
tendre moralement laSageife acquife, qui ne
peut jamais prendre nourriture ny accroifle-
ment en nous, fi elle n'eft affiilée de l'Har-
monie de toutes les chofes. Car depuis qu'el-
le s'eft une fois emparée de noftre Ame, elle
en bannit le difcord des habitudes contraires
à la Vertu, dont il femble que nous Ibyons
ks créatures, parce- que les inclinations au
pèche s'engendrent en nous plûtoft que les
aélions vertueufes & loiiables.
De plus, par le mefme Jupiter échapé des
mains de Saturne, s'entend la plus pure par-
tie du Ciel incorruptible, à laquelle ne peut
nuire la violence du temps qui dévore peu à
peuIesEicmens, &coniiime toutes les choies
matérielles. Surquoy je conclus à la loiiange
de l'Harmonie , qu'il s'eft trouvé des Payens
qni ont creu que les Dieux en efloient com-
pofeî, & pareillement de nombres, comme
nous le fommes d'Ame & de Corps; fi bien qu'à
caufe de cela ils écoutoient volontiers la Mu-
iîque, & fe laiiToient fléchir bien fouvent à la
.doiiceur de fes accords raviffans.
///i·-
-ocr page 150-I C ο Ν ο L ο G I Ε. Ι09
HISTOIRE. LXXVL
SA figure reiTemble à peu prés à celle d'un
Ange, à caufc des grandes aifles qui font
attachées à fes épaules: & bien qu'elle regarde
derrière, elle ne laiiTe pas toutefois d'écrire fur
'in grand Livre que Saturne foûtient; &
s'appuye du pied gauche fur une pierre car-
re'e.
L'Hiftoire, qui fait profeiTion d'écrire avec
Ordre ce qui iè pailè dans le Monde, eit peinte
avec des aifles, pour montrer qu'elle publie de
toutes parts les divers événemens avec une in-
croyable viteflè.
Elle tourne pour cet effet les yeux en arriére,
a cauiè qu'elle travaille pour la Poftérité, par
'a deicnption qu'elle fait des chofes palïees,
afin d'en perpéaier le fouvenir : car comme dit
Pétrarque,
dompte les ans, y fes Ecrits font tels,
Que par eux elle rend les hommes immortels.
C'eit pour cela qu'elle s'appuye fur les épau-
les de Saturne, parce-qu'elle rend unjufteté-
lïïoignage du temps, dont elle eft viâorieu-
ft. En un mot, c'eftlaMaiÎLreffedelavie, la
jumiére de la mémoire, l'efprit des aélions, &
'e foûtien de la vérité: car elle ne fe doit ja-
iTiais laifiér corrompre par le menfonge,
^y par fes propres intéreils , mais dire pu-
rement ce qui eft , fans apporter aucun ftu-d
à cet-
-ocr page 151-ΐΓο ICONOLOGIE.
à cette fincérité naïve\ dont fa Robe blanchc
eillefymbole..
ilMlHJlâ
HOSPITALITE. J^'XVII·.
CE τ τ Ε Dame, dont l'âge eft me'dioci-e
le vifage riant, & la beauté lînguliere,
femble vouloir accueillir quelqu'un.à bras ou-
verts. Elle eft veftuëde blanc, & tient de la-
main droite une Corne d'Abondance , d'où
tombent confufément divers fruits, qu'un pe-
tit Enfant femble vouloir cueill irtandis qu'an'
pauvre Pèlerin affis de l'autre cofté implore fon ^
aide.
Elle eiî peinte belle, paree-qu'en effet elle
fe peut dire la chofe du monde la plus charman-'
te, & la plus agréable à Dieu, puifque c'eft par
elle qu'ilfefait connoiftre, comme dit S..Au-'
guftin..
Ellen'eftnyjeune ny vieille, parce-que l'un
de ces âges eft trop adonné aux plaifirs de la vie?-
& l'autre trop fujet à l'avarice : mais elle tient
un milieu entre les deux, à cauferqu'eftantle
fiége de la Vertu, il ne peut mieux convenir
qu'aux charitables aâions qu'elle exerce.
Sa Robe blanche montre la pureté de fon·
Ame , qui eft exempte de corruption, & qui ne
fait rien : par intéreft , mais parun puriélear-
dent envers Dieu..
Les preuves de cette vérité ie manifeftent par
le bien qu'elle fait àrEnfant& au Pèlerin qi"
font
Λ
-ocr page 152-ÎOHt à iès coftez: auffi ne peut-elle avoir deux
plus dignes fujets pour exercer fa charité, l'un,
lie pouvant chercher à vivre à caufe de la foi-
bleiFedefon âgç, ny l'autre en trouver que dif-
ficilement , parce-qu'il eft hors de fon Pais. Par
où l'on peut voir aiTeurément,. que toutes les
^ions d'Hofpitalité, font trés-agréables à
t^ieu, qui pour témoigner le bon gré qu'il en.
i^ait à ceux qui les exercent, Je tiens, leur dit-
li, pour fait à moy-mejme ce que vous avet^fatt.
"ft moindre des miens. Ce. qui nepeut tourner
"ju'à la honte de ces Hommes mal-avifez., com-
me dit S. Jean, qui ont des Maifonsoù les grands.
Narrons zsf les riches font toâpurs les ^ien venus, au,
^'eu qzie Γ entrée en efi defenduë aux gens d'hon-
Keur aux pauvres..
lîi
•^Udié^feieoiô-JwûiUtï^Jûié-tJiU
HV MI L ÎT E. LXX.VIII.
CE t. τ ε Vierge veftue de blanc, porte fa.
tefte baifiee, les bras encroix, une bals
en main, une Couronne fous l'un de fes pieds,
& un Agneau couché auprès d'elle.
L'Humilité eil une des plus excellentes ver-
tus de l'Ame, par laquelle les hommes s'efti-
iTient inférieurs aux autres,& leur obéïfiènt vo-
^ontairementxarc'efl; toûjoursleur intention de
tenir cachez le mieux qu'ils peuvent les dons
que Dieu leur a faits, afin de n'avoir pas fuj et de
s'en glorifier.
Sa. Robe blanche montre , que la pureté de
l'A.
-ocr page 153-l'Ame engendre en l'Homme de bien cette vèr-
tueufeibûmiffion qui luyeft fort ne'ceflàire, &
qui peut fuffire à rendre fes aâions agréables à
Dieu, qui donne fa grâce aux humbles, & s'op-
poiè à la volonté des orgueilleux.
Elle montre par fa teitebaiiîée un aveu qu'el· ,
le tait de fes défauts ^^^loy néanmoins elle ti-
re cet avantage, que plus elle s'^baiiTe, & plus
elle eft élevéè ; parce qu'il eft écrrt dans S. Luc,
qui quiconque s^immiliera, fera exalté. En ce-
la femblable à la baie qu'elle a dans la main, qui
ne bondit jamais fi haut, que lors qu'à force de
bras elle eftjettée contre terre.
Par la Couronne d'or qu'elle foule aux
pieds, il nous eft déclaré, comme le remar-
que S. Bernard dans ion Traité des Degrez de
l'Humilité , que celuy qui poiTéde comme il
faut cette divine'vertu, ne fait point d'eftatny
des richefles, ny des grandeurs de ce Monde.
Témoin Baudouin premier Roy de Jerulalem,.
qui montra véritablement combien il eftoit
humble, quand fe voyant fur le point d'eftre
couronné avec pompe & cérémonie : A Dieu
sieplaife, dit-il, que je parte une Couronne à''of
en ce mefme lieu oàmon Redeni^teurK''cnaporte
qu^ une épines.
Quant à l'Agneau qui eft couché à fes pieds,
c'eft le vray portrait d'une perfonne qui eft
humble & débonnaire, comme il fe ren^arque
en divers endroits de l'Ecriture fainte, où JE-
sus-Chris τ mefine eft appellé de cttnoin
par les Prophètes.
Il fe voit une autre figure de l'Humilité, qui a
la main gauche fur le fein, & la droite étendue,
avec
-ocr page 154-avec les yeux élevez au Qiel. Elle foule aux
pieds une Vipère prefque morte, tout autour
'i'un miroir rompu, auprès duquel il y a la teile
«i'unLionbleiré.
La main qu'elle porte fur ià gorge, montre
^Ue le cœur eft le véritable iîége de l'Humilité;
^ ton bras droit étendu fignïfie qu'elle doit eitre
Patiente, & non pas femblable au Loup, qui
[e couvre de la peau de laBrebis pour dévorer
'^s Agneaux.
Pal· la Vipère il faut entendre la haine & l'en"
^ie; par le miroir, l'amour de foy-inefine ; &
Par le Lion, l'orgueil.
INCLINATION. LXXIX.
S On Image eft celle d'une jeune Femme
veftuë de noir & de blanc. Sur le haut de
^a tefte elle a deux étoiles différentes, fçavoir
cofté droit celle de Jupiter, extrêmement
Claire; & du gauche celle de Saturne, beau-
coup moindre, & qui n'efl: pas fi luifante. Elle
tient en l'une de fts mains un bouquet de roiès,
^ en l'autre des épines outre qu'elle a des aifles
aux pieds.
On la peint jeune, parce qu'elle porte ΓΕΡ·
Pi^it à la haine ou à l'amour des choies bonnes
Pu mauvaifes : car comme ditle Philofophe, les
Jeunes gens fonttoutavec excès, foitqu'ilsai-
•^ent ou qu'ils haïiTcnt. Laraifoneit, par-
ce que l'Inclination ertant un appétit naturel
vers
-ocr page 155-Jniz^nsîa-fice.
.β"·
vers ce qui eftbon ou mauvais deiby, laioî-
bleilè de leur âge tint que n'eilant pas capables
de difcerner l'un d'avec l'autre, ils y courent
avec plus d'ardeur, & ne fuivent que le mou-
vement de leur Nature.
Sa Robe moitié blanche & moitié noire iîg'
nifie le bien & le mal , dont l'un eft défigné ps"
l3lumiére,6c l'autre par robfcurité. Coiiibrinti'
ment à cela ileft dit dans l'Ecriture, que le vefte-
ment de Jesus-Christ fur le Mont de Thabot
eiloit plus blanc que la nége: comme au contrai-
re où il eil parlé du malheureux eftat des Dam-
nez, on les repréfenteavec des vifagesaiireiiX)
& qui font tous noircis de la fumée d'Enfer. ·
Les deux étoilles qu'elle a fur la telle mar-
quent. les Plane'tes de Jupiter §c de Saturne i
dont la première eftauflibenigne de fa nature )
que la fécondé efl: nuifible.
Le bouquet de rofes qu'elle tient en la main
droite , montre qu'une Inclination louable
doit reffembler à ces fleurs fi fort eilim 'es ; c'eft
à dire qu'il-faut qu'elle foit belle, & pleine àe
bonne odeur.Ceque lesEgyptiens donnoient an-
ciennement à connoiftre,, lorfque par une guir-
lande faite de rofes ils figuroient le parfait cer-
cle de la Vertu. Les e'pines fignifient leçon-
traire, & font, comme ditPieriusliv. fo. les
fymboles du Vice.
On luy met au refle des ailles aux pieds, pour
nous apprendre qu'elle fe peut définir., un.moU'
vementibudain qui nous fait aimer ou haïr les
ehofes, félon la fympathie que nOus avons avec
elles ou par nature, ou par compléxiou, o''
j?ar ufage. Mais foit qu'elle nous pouflTe iii'
bie»
-ocr page 157-tien ou au mal, cela ne fe peut néanmoins que
fucceffivement, veu qu'autrement il y auroit
'Je la coutradidion, en ce qu'il .arriveroit qu'en
lïiefme-temps une mefme perfonne voudroit &
fle voudroit pas ; ce qui eft impoflible.
âââHâââââââ^ââââHâii
INCONSTANCE. LXXX.
C'EsT une Femme veiluë de couleur
bleuë, ayant en une main une Lune. &
lous l'un de fes pieds une Ecrevice..
On l'habille de bleu, à caiife de lareiTem-
blance qu'il y a de cette couleur à celle des va-
gues de la Mer, qui font extre'mementincon-
ftantes,, & ibjettes· à de nouvelles altéra-
tions.
. Il en eft de mefme de la Lune, qui décroiil:
infenfiblement, comme leplusmuabledes A-
«res : 4'où vient qu'il eft dit dans l'Ecriture,
que rinf^fé change comme elle, ci qu'il ne de-
meure jamais en un mefme eftat. L'on y pour-
voit ajouter un Chat-huant, oifeau noaurne, fi
peu aflèuré en.ion vol, qu'il ne fçait d'où il
^ient, ny par où il va, comme le remarque le
grand S. Baffle.
Quant à l'Ecrevice,, l'espérience fait voir
^lu'avecune mefme difpofition elle chemine de-
vant & à reculons. En quoy l'imitent à tous
înomens ces Eiprits changeans & irréfolus, qui
^puënt tantoft la contemplation, tantoft l'ac-,
fion, tantoft la guerre, tantoft la paix, au-
JPurd'huyla fcience, demain l'ignorance ; ce
qui
-ocr page 158-qui fait bien voir qu'ils ne fçavent ny ce qu'ils
louent ny ce qu'ils blafment, tant ils font vo-
lages en leurs fentimens. Aufli font-ils repris
à bon droit dans les iàintes Lettres par l'exern'
pie de ce Laboureur mal avifé , qui n'a pa^
plûtoft mis la main à la Charrue, qu'il s'en re-
pent.
D'autres repréfentent l'Inconftance par une
Femmeveftuë de couleur changeante, qui s'ap-
puye des mains fur un rofeau, & des pieds ftr
une boule j ce qui montre aiTez clairement qu^
l'Homme volage n'eft jamais arrefté en fes peii-
fées, & qu'en fes aâions il fuit d'ordinaire leS
chofes les plus muables.
Ajoutons icy que les Anciens ont figuré l'A·'
mour inconftant par le poiflbn appelle Polipe »
parce-qu'il eil femblable au Caméléon, &
prend toutes les couleurs qui luy font oppo-
fées.
L'on en peut dire autant des Amans, que
l'on voit tantoft pailir, & tanroft rougir, leur
paffion eftant une fource d'eipoir & de crainte,
de trifteiTe & dejoye, decolére&dejaloufici
félon qu'elle fe trouve pouiTée par des mouvs-
mens contraires.
IMAGINATION. LXXXL
CEtte Femme qui la repréfente, eft ve-
ftuë d'une Robe de couleur changeante j
& femble eftre toute defolée , de la fa-
çon
Çonqu'elle tient les yeux hauffez vers le Ciel,
^ les mains croifées l'une dans l'autre. Mais
qui la fait remarquer pardeiTus tout, c'eftia
bizarrerie de ik coëfFure; car aux deuxcoftèz
•lefatefte, dont les cheveux font heriiTez, elle
3des aifles comme celles de Mercure, & au
lieu de Couronne, de petites· figures diverfe-
iftent ombragées.
Avant que d'expliquer cette peinture, il faut
'çavoiravecAriftote, que l'Imagination eft un
îHouvement qui fe fait aâuellement par le
Sens ; ou une connciiTance de ce qui a tou-
ché les autres Sens, fçavoir le commun & les
Extérieurs. Ce qu'il déclare encore en un
autre endroit, où la voulant diftinguer, il dit
Qu'elle fe rencontre parfaite ou imparfaite
"ians les Animaux , félon qu'ils font plus ou
iïioins parfaits.
Par fa Robe de diverfes couleurs il eft mon-
tré que la Puiiîânce Imaginative reçoit les eipé-
ces de tous les objets quiluy font préfentezpar
ies Sens extérieurs; comme par fcs yeux éle-
vez au Ciel, avec une action toute penfive, il
cft d .'claré que foit qu'elle dorme ou qu'elle
Veille , elle eft en un mouvement conti-
iiuel , d'ôù luy naiflènt mille inquiétudes
^ mille penfées différentes.
Ses aillerons & fes cheveux heriiîèz fignifient
le mefme, c'eft à dire qu'il nous faut remarquer
la viteiTe , ou la foudaine opération de cette
Puiflànce, foit à recevoir les eipéces, ibitàlcs
rcpréfenter à l'Entendement.
Quant à ih Couronne qui eft en forme de ban-
deau , d''ou s'clévent trois ou quatre petites figu-
res.
res,. cda veut dire, félon les Médecins, quels
Vertu imaginative a fon fiége dans le premier
ventricule du cerveau, & que c'eft le Sens com-
mun qui luy fournitdiverfes eipéces.
L'imagination iè forme donc de cette mef-
me vertu, à qui toutes les autres obéïflènt-
Auffi eil-il vray qu'elle nelaifle pas d'opérer,
quand les Sens extérieurs font oififs, & qu'elle
agit mefme bien fouvent quand nous dormons :
dequoy nous avons pluiîeurs preuves dans les
Auteurs , outre que l'expérience nous le con-
firme.
iNSriNCT NATUREL. LXXXII.
IL eft figuré par unjeune Garçon qui fembl^
courir, ayant le viiàge voilé ^ & en la mai»
droite.l'Heliotrope, ou la fleur du Soleil.
Il eft peint jeune, parce qu'il ne change ja-
mais, & que fa force eft toujours égale. Jl «
le vifage voilé, pour faire voir que la cauiè de
cet Inftinâ eft fi fort cachée , qu'on en peut
donner difficilement des raifons probables, ^
en faire des démonftrations comme des autres
chofes de la Nature. C'eft pour celaqu'Ari-
ftote compare l'Entendement au Soleil, &à«
Sens de la veuë : car comme noftre œil n'eft pas
aiTex fort pour regarder la lumière de ce bel
Aftre; ainfl noftre Entendement eft trop foibl^
pour comprendre tous les fecrets de la Nature,
comme eftant des chofes qui dépendent de la
pre-
-ocr page 161-Pfemiére forme, & que Dieu, quis'épanddc
tous collez, ainfi que le Poète le remarque, a
iniraculeufement crée'es.
il eft repréfenté nud, parce-qu'il opère par
moyen de fa propre forme, fans eftre affiftc
qualitez élémentaires, ny d'aucun artifice
^«érieur; & femble courir, pour fignifier l'in-
tonation & le mouvement qui fe trouvent im-
médiatement en luy-mefme, qui opère fans
^^cun obftacle. De là vient auffi que nous
^^ons de l'amour pour les uns, & de la haine
Pour les autres ; que nous faifons quelquefois
^^ ma.l aux innocens, & du bien à ceux qui en
^ont indignes: jufques-là mefme qu'il'y en a
■î^îe la Fortune a comblefi de richeiïes, & qui
toutefois pour en avoir davantage, nelaiiTent
pas de voler à toutes mains, & fe proilituënt
aôions les plus infâmes ; ce qui foit dit
Néanmoins làns préj udice du franc-arbitre.
intelligence. LXXXIiL
C'Esx une Femme veftuë de gaze d'or, &
couronnée d'une guinande ^ tenant une
'Phére d'une main , & un Serpent de l'au-
ffe.
L'Intelligence, qui peut eftre définie, uns
^^tuelle union que fait noftre efprii aveciachofe
pi"il entendeit vcftuë de gaze d'or , parce
^•"l'elle doit eftre refplendiilànte comme ce mé-
& non pas commune, maisprécieufe, &
tout
-ocr page 162-tout à fait éloignée des notions bailès&vulg^''
les.
Nous pouvons ajouter à cecy la figure de cet'
te haute Intelligence, qui félon les Philofophe'
fait mouvoir les fphéres céleûes: mais noili"^
principal deilèin eftant de traiter des chofesq'''
dépendent des connoiilànces humaines, noU^
ne parlerons que decelle-cy, quiparlalphér^
& le Serpent qu'elle tient en main, nous ap/
prend que pour bien entendre les hautes mati^'
res, il faut premièrement ramper comme ^^
Serpent^ âiler terre à terre dans les princip^^
des jEhofes teryeltres, qui font incomparable'
meiit moins parfaites que les céleftes, & pli'^
conformes par conféquent à la portée de no^
Efprjts.
INVENTION. LXXXIV.
CE τ τ ε Maiftrefiè des Arts eft veilue d'u-
ne Robe blanche, où ces deux mots fo^'
écrits, Non aliunde. Elle a fur la teU'^
deux aillerons, en une main l'image de la N^'
ture, & en l'autre un rouleau, où il eit écrit'
Ad operam.
On la répréfente jeune, parce qu'en ce pr^'
mier âge la chaleur du ûmg fait que les eCptif
s'élevent dans l'Intelleél:, où les inventions!'^
forment par la force du raifonnement.
Elle eft veflaë de blanc, parce-quel'Invei^'
tion doit être pure, &neièpointfetvirdutr^'
vaii
-ocr page 163-^'ail d'autrny, d'où vient qu'il eil: dit,
Q^^Oft ajoute aisément aux chofes inventées.
De manière qu'il faut qu'el le ne d j pende que
fa propre opération, comme le montre le
'îlot, non aliunbe.
_ Les aiflerons qu'elle a fur la tête fignifierit l'e-
ifc'vation de toutes les parties intelleâuelles, à
^ofe qu'étant pouflees par les Sens à l'acquiii-
^'on des chofes que l'on défire fçavoir, elles fe
■"amaiTent enfemble, & font un efibrt pour in-
tenter tout ce qu'ils leur propofent.
Elletient en main l'image de laNature, pour
^^■mtrer par là qu'elle invente toutes chofes.
■'rt parce qu'il ne fert de rien d'avoir une inven-
^Όη,ίϊ l'on ne la met en lumière ; c'eft pour cela
Won luy fait tenir les bras retrouiïè2& à demy
•luds aSnquel'onvoyequ'elleeiltoûjours eii
eitatd 'agir, comme le déclarent ces deux mots
Latins, Ad dp r. ram, qui font dans le rou-
leau qu'elle porte. A quoy l'incite encore l'ef-
Pérance du prix propofé, qui eil un bracelet
qu'on avoit couftume.de donner à ceux qui
pour le bien de la République avoient trouve
^î'ûelque invention ingénieufe & louable.
L'Invention iè voit repréfentce à Florence
^am le Cabinet du Grand Duc Ferdinand ,fous
3 figure d'uneIjelleFemme, quiadesaiflesà
telle comm.e celles de Mercure, & à fes pieds
^'^Ours quiléchefonFaon, pour donner uik;
■"Orme à cette lourde maiTe de chair.
^ On la peut encore repréiènter par une jeune
^Cauté, quitientunfceptre, au deiïùs duquel
^ft une main ouverte, un œil au milieu, &au
®out de cette main deux petites aifies, qui
l^art, /. F reiîcm-
rciiemblent à peu prds à celles du Caduc-'e·
Le fccptre eft une marque de grandeur &
promptitude, comme la main eneftuned'iii'
duHrie à d'art ; tellcmeat que runfoûtenu pi^
l'autre, fait voir que les Princes & les SeigneufS
qui ont de l'Empire fur leurs Sujets, réveille»'^
leur invention, & leur éguifent l'Efprit par le
xtîoyen des recompenfes, qui font de forts ai'
gmÎlonsdelaVertu,
C'eft l'opinion d'Artémidorc, que par li-'^
mains eit fignifié l'Art, qui eft l'eflec de l'In-
vention ; au moiss les Eg)'ptieiis le dc'raop'
iroient ainfi par leurs Figures Hiéroglyphiques·
AuiTi eû-il vray que prefque tous les Arts foi^
mis .en évidence par l'Induifeie de la raaiii'
qu'Ariftotenoûraie pour cet eiict Îhfirmn^^^
des JnfirimeMS.,
Pource qui eft de l'œil, il figure la μυΔαΚ^.
■ qui doit fuivre l'Invention, coinme les aifles q''!
font au boatdefoafceptreiÎgninentîavivacii''
rc(^iuÎ à exécuter beureufemcnt.
Difons enfuite, que par une Image de M*^^
cure qui.tient un Caducée de la main droite, ^
de la gauche iincfluite, les Aucicns ont
les deux fujets principaux , qui font comi''^
ks -fources de l'invention, à fcavoirl'int^fClt
propre, & le plaiiir d'auîruy ; aom l'un eft
primé par le Caducée, parle moyen duqû?'/
comme les Poètes ont feint', Mercure refliJÎ'^''
•toit les Morts; & l'autre par la fluûc, inii^!^'
jmént propre à rijouîr l'Efprit, &. à calmer
njoaveœcns dùéglcÎ.
Achevons ce Tableau de l'Invention pa^c^
iay qui s'en voit encore a<,ijourd'huy
ï C ο Ν ο L ο G ï Ε. 125
eft peinte en jeune Femme nue, hormis
Scelle a fur la telle un morion, uneépceà la
J^iiin , une manière d'ccharpe feinée de
■fleurs & de feuilles, avec ces mots à l'entour,
^ropri o M art r.
Par fa nudité nous apprenons qu'elle s'cn-
E^ndre la pluspart do temps des incommodi-
de la vie: parfonmorion, qu'ellefubOfte
Par fon Efprit, que la prudence fortifie: par
ion épie, qu'elle eft tory ours preftc à défendre
qu'elle a mis au jour aiin que la gloire & le
P'ofit luy en demeurent:: &.parfonécharpefe-
iftée de fleurs, que toute la peine qu'elle prend
^^ inventer d'excellentes chofes, fe fonde for
''efpérance d'en cueillir un jour le fruit, & d'en
^•«repart au Public.
LASSmVDE. LXXXV.
C'E s τ une Femme fort maigre, légère^
mentveiluë , & qui a la gorge décoiiver-
J^· Elle s'appuye deîa main gauche fur un ba-
'On, & tient de la main droite un éventail ·,
'^ont il femble qu'elle s'évente.
La Laffitude dont nous parlons, qui n'eil
l'oint caufée de maladie , mais d'un tropvio-
J^nt exercice, ou d'une faifon trop chaude, cil
Repeinte maigre, parce-que lafanté du corps
y^iiant à s'exhaler par le moyen de la chaleur,
faut néceiîàirement qu'elle fe defleche.
Son habillement & fon fein découvert font
F a des
-des : marques des trop viokntes ardeurs del'E-
iié;.car en ce temp^-Ià Pan a decouftumedc
s'habiller à la legére, afin deferafraîchir, &
,de n'eftre pas fî-toil laiK.
Elle s'appuye, parce qu'elle a befoin de foû-
tien, à caufe qu'elle manque de forces : ce qu'
s'accommode,fiort-bien à -la langueur q^
nous· de'crivons, qui ne procède que defo''
bleffe.
C'eft encore avec raifon qu'elle ièfertd'viii
éventail, qui par l'agitation qu'il fait deTA·'^
échautii.^, en femble produire un autre pH'^
..commode & plus propre à rafraîchir l.e Corp®
humain,
LIBERTE. LXXX'VÎ.
SA figure GÎl celle d'une Femme veftue ^^
blanc, ayant un fceptre en la main droite»
u£i bonnet en la gauche, & un Chat prés d'elle;
Le fceptre iignifie l'Empire de la Liberté»
-qui ne le tient que de foy-mefme, eftant c-onn^
elle eil, une abfoiuë poiîèffion d'Efpr-it , ^
Corps & de commoditez temporelles, qui r-O··!
incitent au bien par divers moyens : fçav^^
rEfprit par une grâce particulière de Dieu,
Corps par l'aide de la vertu, & la richeflè pa» '
direction de la prudence. ' .
Elle eft peinte avec un bonnet en main,
tant-que par utie ancienne couftume les
■inâins le faifoicnt porter aux Efclaves q^^ '
voV
-ocr page 168-l'C ON O'L ΟΤτ ΙΕ. ï^'f
^ouloient affranchir & mettre en, liberté, après
leur avoir raié les cheveux; cérémonie qui fe
™ibit d'ordinaire dans le Temple de la Décffe
Feronia.
pon met nn Chcit à fes pieds parce-qu'il n'y a
Point d'Animal qui aime tant k liberté que ce-
W-là, qui nipaufouftHïeiîâvifluaefottedV
«fe enferffîé : à caafe deqiioy quelques Feuplei,
« partictUiérement lei Bourguignons, Je por-
taient andeniiemenE pouf Dcvift en leurs En-
seignes de guerre,
,J'omets qaeparraypluflewS'MiÎdsillesécla
Liberté ih'en trouve quslqufs-iinei où elle ie
Voit tenant d'une main une mailîje, &derau-
fïe «n bonnet, avec ces mots, L j β ε r τ a s
Auqusti ex se. ec quifignifieunelibe;'-
tji âcquift par la valeur^ commc il fe remarque
«ans la Médaille d'Antonin Heliopbalej où
^ft ajoûté unioug rompit.
LlBERdLll^E. LXXXVII.
CE τ T-Ε Femiîie- qui la repréfente, a les
yeuxunpeuenfoncei, lenezaqnilin, &
1« iront carré. Elle a de plas une Robeblanc'he,
U-n Aigle fur la tefte, un compas en une main,
3vec une Corne d'Abondance renverfée, d'où
r épandent divers joyaux, & autres choies de
Pi^ix, outre qu'elle en tient une autre pleine de
«■uits& de fleurs.
La Libéralité, qui confifte en unedépenfc
F ? hon-
honnefte & modérée., eil, peinte avec des ye^®
cnibncez, & un front carré, par une manière
de reffetriblance ayec le Lion, le plus libérai
de fous les Animraix irraifonnabies.
Un Aigle eft perché fur fa tefte,, pour nous
apprendre que le. plus haut point de cette vertu:
ne conlîlk pas en l'aâion de donner au hasard
aux autres ce qui eft à nous,, mais en l'habitude
& l'intention ; ce qui efi: encore le propre des-
autres vertus. C'eil ainfi que l'Aigle , a'J-
rapport de Fljne , ayant pris quelque gi-
bier, n'en mange pas tant, qu'il n'en laiil^
toujours une partie pour les autres oi-
feaux , comme glorieux qu'il, eft de voif
plufieurs Animaux vivre de la chaiTe qu'il ^
taite.
Les deux. Cornes d'Abondance qu'elle tient
de la façon que nous avons dite, montrent qu^'
les grandes richeiTes portent un Efprit géné-
reux à faire du bien, non pas tant pour en tirer
vanité, que pour en.affiiler vertueufement ceuX
qufin maπqμent,
Elle eft veftuë de blanc, à caufe qu'elleed
Cins eipéranee d'aucun intéreil, comme cette
couleur eft (impie & iàns artifice.
Ç'eft pour cela mefme qu'on luy met urt·
compas à main., parce-qu'elle n'eft pas moins
judicieuie que iincére en fes largeiîes : car elle'
les mefure par fes commoditez,, & par le méfi'·
tx dsi Pcrfonnes à qui elle les fait..
•''^îâôMeJâôMlâlÉli!!!
IL eft afle^ biçni d^eint dans ce Tableau, qui
, ert eeluy d'un jeune Homme vciiu d'un hn'
^it de diverfes» eouleyrs, avec un c'qtiipagedc
car il a fur la tè'e une Couronne d'or, &
fceptre en main, au-defias duquel eft h Lm-
Grecque Y.
» LslLibre Arbitre, febn S. Thomas, cil une
tiibre Pwiflànce,attribuée à !a Nâî«re inte.ligeii-
!5,î po«r îa plus grande gloire de Dieu, pour
%c éleôion d'une choieplûtoft que d'une a»'
, parmy pluficurs qui contribuent à noftre
^n, A cette difinitioti fe raijporte celle d'Ari-
ffete, qui dit que c'eft une faculté de pouvoir
|lïre diverfes chofes pour arriver à une mefme
Or eiî-il qu'elle n'eft autre quelefouvc-
•■îiin bien, c'eft-à-dire la félicité éternelle, où
^ifcnt toutes les aétions humaines.
ft f\ <1» <1». .■.«> -·;.· . Λ ife -M', i'" --fe
LOGIQ^UK LXXX.IX.
S' Es principales opérations fevoyenticy fous
> la figure d'une jeune Fille, qui a les cheveux
^Pars & affez longs, un bouquet de fleurs en la
^ain droite, avec ces mots au defius, Veruxî
Ï^T F Ai.srM; & en la gauche un Serpent. .
F 4 Son
I
Son teint pâle eit un effet de fes veilles, &
l'étude qu'elle empIoye à s'acquérir cette nobl^
connoiflance ; d'où s'enfuit d'ordinaire q^*^
pour s'y trop adonner, les Hommes de lettre^
Ibni: lùjets aux maladies..
Ses cheveux épars & méfiez montrent
l'Homme qui vaqueà lafpéculationdcsmatiit'
res intcîiigib:es, oublie toutes autres chofe^
pour celle- là,, & qu'il néglige meiine lefoin
fon Corps...
- Les F'ieurs qu'elle porte nous en feignent,
par fon moyen la vérité cil découverte, &
menfonge étoufié ; comme par un effet de na-
ture, de l'herbe nailîènt les fleurs, quilacoti·"
vrent depuis quand elles font grandes.
Le Serpent qu'elle tient nous enfeigne deu''
chofes : la première, que la prudence eil: J'^'
çeffaire à cette Profeffion, veu que le plus gran^
eSbrtde l'humaine, induftrie eil de fçavoir du'
cerner le vray d'avec le faux, & d'opérer feioî^
cette diftinôtion avec une proportion confond®
à la vérité qu'on a reconnue. La fécondé, qu®
la Logique eftprifepourunematiérevenimei^/
ie & inacceiTible par ceux qui n'ont pas l'Efpr''
aiTez fort pour la concevoir, bien que toute^
fois elle leur apprenne le contraire, &qu'el!·*
détruife ceux qui par une témérité trop gran<i^
s'oppofent à fa doàrine.
L'on en fait encore une ièconde peinture»
qiii eil celle d'une jeune Femme veilué
blanc, le viiage de laquelle témoigne uneme·^'
veilleufe vivacité. Elle porte une longue ellocf"
de en la main droite, quatre clous en lagauchi-" ;
un Morion en tête.& pour ciiriier uu Faucon-
, 'LA-
-ocr page 172-rCONOLOGIE. 129
La Logique, par qui l'on confidére h natii-
^^ & la propriété des opérations de l'Entende-
ment, eft peinte avec une eftocadeàlamain,
pour montrer la raerveilleufe fubtilité de ion
^iprit à former divers argumens, qui nous font
^iftinguer le vray d'avec le faux : Et avec uil
^orion en tête, pour marquer la force defes
J[_aiibns, qui laportent aux plus hautes connoiC-
'=inces. Car comme le Faucon fond dans les
luës après l'oiiêau qu'il pourfuit, le Logicien
tout de mefme difpatc hautement des chofes
plus fubîimes, pour les aiîùjettir à fon rai-
sonnement.
Les quatre clous qu'elk· porte figniSent
SU'en chaque figure Syllogiilique il y a quatre
Moyens de découvrir le vray, qui font enfeig-
^ez-par les ProfeiTcurs en-cet Art : Et par fa Ro-
^e blanche, qu'elle ne fepropofe pour but que
vérité; car comme cette couleur eit la plus
Parfaite de toutes, la Logique de mefme eft la
f'^nnoiffance la plus capable d'eflacer les nua-
S'is d'une Ame, afin de luy faire comprendre
vray, pourveu que celuy qui l'entreprend
^'en acquitte en bon Logicien,.& non pas en
'buvais Sophiile.
LOUANGE. XC.
CE t;tî Femme douée de tant de beautez,
& ii proprement veftuc d'uneRobe blanche
la figure-de laLoiiange. Elle porte llir le fein
F s uii
un joyau de jafpeîaifant& de couleur verte , à
la tdie une guirlande de rofes, en la main droi-
te une trompette dont elle ibmie: & de la-
gauche qu'e.k tend , elle fembîe faire lig-
ne , & montrer quelque perfonne en particu-
lier.
On la peint belle, parce-qu'iln'yapointde-
charmes ii agréables quelesiiens, ny point de
concerts fi doux à l'oreille „ que ceux qui fe for-
ment de fes paroles..
Son habit eiî blanc, a caufe que la vrayfe
Louange doit eftre pure, & mortelle ennemie
des artifices de la flaterie; Surquoy il eftà pro-
pos de remarquer, que la Louange humaine
ert de deux fortes. fcavoirou vraye ou fauiiè.
La vraye eil celle qui ie.·donne k'gitimement-
iiux hommes· vertueux ; &iafaufle, celle qui
s'attribue malicieufement aux peifonnes vicieu-
fes. De la premiere doivent eflre honorez"
ceux qui s'en rendent dignes par leurs bonnes
qualitez, qui font rintégrité devie , la dou-
ceur d'E'prit, lafranchifc, lado&ine, laiâ-
gciîe, mais principalement la crainte de Dieur-
la charité envers le prochain, & la pureté de
,cœur:. d'où-vient qu'il eft dit dans l'Ecriture,
ψ'.ε 'l'Homme fage fera comblé de bénédtâunSy
ts' loué de ceux qui le verront. Et en un autre
endroit, qtte la louange n'esl^pdsbienjeante
la bouche du pécheur. A quoy ie rapporte eO'
-, encore le dire duPhilorophe , qii'il yi" eft
moins honteux, d'ejîr-e loué par. des infâmes ^ que/
en Peftoil pour des chafes /eshomcftes. Le j oyai^'
dejaipequipendàfonGou, eftunfymboledel"''' .
feloD les Nuîuraliftcs, qui difcnt que paf
UJ!^-
J
-ocr page 174-Une vertu fpccifiqiie cette pierre rend agréabic.,
^ fait louer celuy q ji la porte.
Et parcc-qu'il n'eft point de fleur ny plus bel-
Jf ny de meilleur odeur que laroiè/onluyen^
"lonne une guirlande, pour démontrei: la Loii-
humaine, qui eil; comme un doux parfum
^ ceux qui la reçoivent. Car comme la^Cou-
''onne ell une. tigure ronde, qui n'a ny com-
'^encement ny tin : ainii la Louange de Dieu,
•^omme eftant éternelle, n'a point de limites,
^uffi eft-ce pour cela que tous les Peuples du
'''^onde, & les Elemeiis, qui ibnt lechet-d'œu-
>re de fes mains, ne celièntdcle louer comme
fouverain Auteur de leur eftre. ^
Le merveilleux fon qu'on entend ibrtir de la ·
^onipette dont elle fonne, iignifielc bruit du-
f^î^m de ces Amesvertueuiès, qui mitiîentdc
J^ftes louanges. C'eftoit pour cela qu'au plus -
"aut du.Temple de Saturne les ancicns. Ro-
'^ains élevoient les figures des Tritons &des
autres Dieux Marins., dont les queues ne pa^
l^^iflbient point, pour montrer par-là que l'Hi-
''oire des événemens paOez ious Ic R.egne de
Saturne eftoit iî connue , qu'il n'y. avoit pas
'^oyen d'en perdre le fouvenir.: comme au con-
'''aire les choies arrivées auparavant, eiloieut
Cachées & enfcvelies dans les tenébres..
fiialite% quififst en autruy.. Et voila pourquof
l'on tient que Catonmcrita.plus de gloire pout
avoir baniiy le vice de Rome, que Scipion pour
avoir vaincu les Charthaginois, veaqu'àpro'
premenfparler, la Loiiange, comme le remat'
que le mefme Philofophe, regarde les aâions.
Or parce-qu'à le prendre en général, ily ^
deux fortes dcloLÎanges diiFérentes, fçavoirla
vraye & la fauiîè;, elles fontauffidiverfemei^-'^
repréientées.
La première eil une Femme qui rient uîie
trompette en la main droite, & en la gauche u»
rameau dOlivier; outre qu'elle a des aiflesau
dos, & qu'elle porte aucouunechaifned'orr
au bout de laquelle pend un cœur en forme
joyau.
Par l a trompette il eft déclaré que ce luy eli
une chofe ordinaire de publier de tous cofte®
'es aâions des geas de bien, afin d'enrendr®
l'efiime univerfellc partoute la Terre... Parl^
rameau d'Olivier qu'on s'efforce en vain às
blafmer ce qui eil louable de ib'y :. car cet ArbrC
& ion fruit font toiijours pris en bonne patt'
Voila pourquoy dans les Saintes Lettres le noiU
de Noilre Seigneur J ε s υ s-C hr i s τ eft
fiiquement comparé à de l'huile répandue; ^
dans les Pfeaumes de David il.eitparléde l'o-'
livier, quifruâifis dam la maifon duSeigneUf-
Auffi eil-il vray-femblable que les Anciens e®
couronnoient Jupiter, parce-qu'ils lecroyoieot
extrêmement bon, & le plus parfait de tous le®
Dieux., ,
Et parce-qne l'Homme de bien eft anime
nuand ou le louë, cela fe démontre par la figi^J®
. rCONOLOGrE. 155
cœur pendu au cou, comme il fe lit dans
^rus Apollo; de mefme que par les aifles
Planches il faut entendre la merveilleufe vî-
^ciTe, & la fincerité de la vraye louange.
Quant à lafaufle, elle eft dépeinte avec un
"3billement bigarre, femé de petites figures
foires, propres à fignifier lesaètions baflès &
afches des gens fans mérite , qui pour eilre
'oiiez, bien qu'indignement, ont accouflumé
Racheter les fufFrages des Flatteurs & des
Sommes mercenaires.
Au contraire de cecy, dans une. certaine
Médaille d'Antinous eft repréfentée de cette
ferte l'illuftte Louange. C'eft un Mercure
^vec des aiflerons à latefte, & des talonniéres
pieds, tenant de la main droite le Cheval
^égafe, & de la gauche un Caducée.
Par ce Courier cekfte, fi forteftimé pour
viteflè & pour fon bien dire., fe doitentenr
■^l'e l'efficace de la parole,qui s'épandde.tous
'^oftcz par la bouche de celuy qui louë. Ce
^ui nous eft encore iîgnifié par les talonniéres
ce Dieu, & parle Cheval Pégafe qu'il mé-
^^ en main: car cela veut dire, que plus on
f^it aller vifte la loiiange des grands Hommes,
Wus elle prend d'accroiflement. Ce. que. le
f'euple Romain voulut autrefois donnera en-
^^ndre par la Médaille qu'il fit battre à l'hon-
Jl^eur de Domitien, où eftoit gravé le mefme
pheval, qui fembloit courir & voler, enfem-
"le..
M AN-
-ocr page 177-154 I C Ο Ν Ο L Ο G I Ε.
MANSUETUDE XCI.
C'EsT une Femme couronncc d'olivierr'
ayant à ion coilé un Eléphant, iùr qii'
elle pofe la main droite.
La Manfuétude, qui félon Ariftotc fetien^
dans les bornes de la.modération, &domP'^
les mouvemens de la colère, ne peut eltrÇ
mieux repréfentée que par rEle:phant liir qii'
elle s'appuye:. auffi a^t'il toujours efté chL''^
les Egyptiens le fymbole de cette vertu; caf
il tient cela de la Nature, de ne combattrejrt'
mais avec des Belles moins fortes queiny, l'f
melme qui luy ibient égales, li elles ne l'ir'
ritent extrêmement, que s'il en rencontre pJU'
iieurs, il fe tire auiii-tofl à l'écart, de fKUf·
qu'il a de leur nuire; joiotque s'il trouve dans
les Deferts quelque Voyageur qui foit égaréi
il ne luy fait aucun mal, & le remet dans foi^'
chemin avec une adreiTe merveilleufe..
C'efl: encore à fort bon droit qu'une guif
lande d'olivier eit le prix de cette vertu ; caf'
ce bel arbre a efté de tout temps une marqu^
de Manfuetude: & voila pourquoy les ancien''
Preitres Egyptiens vouloient que toutes les fi'
;ares de leurs Dieux fuffent iàites de ce. bais·
^ar où ils vouloient dire fans doute, quec'eli
le propre de Dieu de.communiquerfesgraccs
libéralement aux Hommes,, de leur pardon-
ner leurs oftenfcs, & de les traittcravectoii'^
forte de douceur &.dc manfuétude.. A QUf)'
l'oii
-ocr page 178-Ίοβ . Xj é
y
'^Jijî.eut ajouter que l'olivier n'eft pas feule-
^içût pacifique, mais que l'huile, qui en fort
de force contre la fureur ,^ qu'eftant jet-
dans la Mer elle la rend calme & fait
^^Ûèr la violence des vents qui l'agitent..
^lââââsiââââiiâ-âââââ·.
MARIAGE. XCIL
IL ne peut mieux eftre dépeint que par le
Portrait de cetti. Femme richement νeftuë,
^yant fur le cou un joug., uncoin'en une main,
entraves aux pieds, &-une Vipéreau dei-
'Ous.,
Par les entraves & par le joug iiefcde'monr
que. le Mariage eft un aûez pefantfardeau
''Ourles forces de l'Homme, qui fe vend foy-
fe privant de liberté, pour s'obliger
i'ïne Loy perpétuelle ,& fe foûiTKitre le plus
^^ivent aux caprices d'une Femme. Avec tout
f^Ia néanmoins il ne. laiiTc pas d'eilre deiîrar
, , pour plufieurs coniîdérations & partica-
'*^rement pour celle d'avoir des Enfans, qui.
f^Ur l'utilité publique fuccédent aux biens &.
vertus de leurs Pérès..
Elle tient un coin en la main parce-que
f'ar l'ordonnance de Solon on préfenîoit an-
^'^nnement ce fruit dans Athènes aux nou-
^«aux-mariez. Auffi eft-il un fymbole de. fé-
condité & d'amour réciproque, comme il fe
^oit en des Médailles, où on le faitporteraa.
''^■uie Hyménée.
La. Vipère qui eft fous fcs Dieds, m.ontre
. qu'il
qu'il faut qu'une Femme d'honneur rejeté
toutes les penfe'es qui choquent tant foit P^^
la foy promife à Ion Mary , ne faifant p^^-
Gomme la Vipéte, qui par un exc's de vo;
lupté brutale tuë le. Serpent, dans les erabra'·'
ièmens duquel elle eft entrekçée.
ââââââiuiââââ^ââiyiâ^
M ΑΤΉ Ε M ATI QUE. XClU·
C'EsT une Femme d'âge médiocre, co«'
verte d'un voile blanc & tranfpareo''
avec des aiiles à fa tefte, un globe celefte ci'
la main gauche, & en la droite un comp^-'
dont elle trace pliilîeurs figures.
Son âge un peu avancé nous montre qii^
cette Science eftant des plus belles & des pW'
certaines, parce qu'elle n'agit que par ûC'
monitrations, l'on ne doit pas s'étonner s '' j
faut du temps pour l'acquérir. Son habit traiii'
parent, que les preuves qu'elles donnentfo»'
fî claires , qu'on ne les peut mettre en dout^'
Et lesaiflesde fatefte, qu'avec la force defof
cfprit elle s'éleve à la contemplation des
tiéres les plus hautes. Ce qui eil encore à'j'
clarépar le globe celefte. qu'elle, tient ;
parle compas, inftrumentpropre à cetteΡΐ""'
feffion, qui s'étudie à connoiflre les mefut^
& les proportions de toutes choies.
MEP!'
-ocr page 181-I C ο Ν ο L ο G Γ Ε. 137
ΜΕ D ΙΜΑΤΙΟ Ν.. XCIV.
C'EsT un-e'Femmc-d'un âge mear,- &
, d'un vifage modcile.- De la manière
f elle eft affife , elle paroift toute pen-
ayant la joue appuye'e fur fa main gau-
& en la droite un Livre fermé, fans y
®'Jprendre les autres qu'elle a fousfes pieds.
Elle eil peinte grave & modefte, à caufe
pe ces qualitez conviennent fort bien à la pro-
^"ion qu'elle feit de confidérer la fimple ver-
^ des chofes, pour apprendre à^ difcerner le
^ay d'avec le faux-
Son aâion rêveufe eft une marque de la
pavité de fes penfées , qui n'ont pour but que
chofes profitables, que le Sage fe doit pro-
pret , pour agir parfaitement,. & non pas à
Volée.
Les Livres fur lefquels elle s'àppuye font les
ptquesdefa propre opération fondée fur
Ecrits des bons Auteurs, qui contiennent
principes naturels par lefquels Ton proeé-
^ à la recherche de la vérité.
Pour ce qui regarde l'autre Livre qu'elle
i^'^t fermé ,. cela veut, dire qu'elle fait
i^f^erfes réflexions fur la connoilTance des
^"ofes, pour en former de bons fentimens,
ne font pas moins glorieux que profitables.
MEDE^
-ocr page 182-îgS I C ο Ν ο L ο G I Ε.
Ν la repréfeHtê par une Femme âgé'®^»^
__qui % fur la tefie une guirlande de
rier, en la main droite wi Coq, & en la g!"*'
che un bâfton noueux, environné d'un S®""
pent.
La Médecine, qui par les caufes des nj'^^
ladies juge des moyens de les guérir, cil Κ
peinte âgée, peut-eftre pour /accommoder '
l'opinion des Anciens, qui ont creu que
puis qu'un homme avoit palTé quarante a"^^
ce luy efloit une honte d'appeller le Méû*/
ein; préruppofant qu'ayant connoiiTance de
propre complexion, il fe pouvoit guérir î^î.'
meimc en s'abftenatit de ce qu'il connoifl'''
luy eitre nuifible. De-là vient auiïï que
l'Art & l'expérience un vieux Médecin ma·"'
tient en eftat la fanté préfente , & recouvi*^
celle qu'on a perduë.
Elle eft couronnée de laurier , damant
cet arbre fert à plufieurs iTtnladies.
pourquoy le premier jpur de Janvier les
mains donnoient de les feuilles aux nouvea^'
Magiftrats, pour les avertir de conferver Ic·'^
iànté toute l'année.
On luy fait porter un Coq & un Serpent ,Ρ^ζ
ce que ces Animaux, comme le remarque
Pompée, font fort vigilans, & qu'il faut que 'S
Médecins le foient auflî. D'ailleurs c'a e·'
Ο
^ tout temps qu'on a pris le Serpent, pour le
|-yiTibole de la fanté : cat. comme il fe rajeu-
p en quittant fa. vieille peau ; de mefme il
'•^i^ble que. les hommes fe renouvellent en
o^^iniTant de leurs maladies.:
, Et parce-qu'il elil mal-aifé réliffir dans
^ Médecine, cetteLdifficalté fe démontre par
® bafton noueux environne d'un Serpent ,
l'on tient avoir efté la. Devife d'Eicalape.
MEMOIRE. XCVI.
CE n'eftpas fansmyftérc qu'on luy donne-
icy deux vifagcs ,& uncRobe noire,,... arec
l'^e Plume en la luain droite-, & un Livre en
® gauche.
La Mémoire a un double vifage , parcc-
5^'elle eft un don particulier de la Nature,
^^utant plus confidérable, que. par £bn. mo^-
& par les régies de la prudence elle com-
"^nd toutes les chofes paffées & à venir.
-o-, qui coniifte principalement
en la leâure des Livres,
neutre ces chofes il, y en.aqpi mettent un?
pien noir, à fes pieds pour deux raifons aflez
La première, à' caufe que le noir ûg-
y'fie fermeté & longue durée, ce qui appar-
à la Mémoire, le propre de laquelle eft
retenir les formes des fens. La fe-
^Qdfi , parce-que l'expérience continuelle
nous
-ocr page 184-nous fait voir que le Chien eft un Animal qui
fouvient de fort loin: car ίΐ du lieu où il a eu®
nourry on le mène en un Pa:s étranger, ' '
retrouve le chemin de luy.-mefme, &s'enrê'
tourne facilement. Le Chien d'UlyiTe en ftf'
d'exemple, qui après ringtans d'abfence r^'
connut fonMaiftre, quand il retournaen Γοΐτ
Païs.Et peui-eftre êft-cepovir cela que dans P^f
ton le fageSocratejuîeparkChien, qucPhe'
dre avoit appris par cœur toute la Harangu®
que Lyiks avoit compofc'e.
Quelques Anciens 'ontrepréfentée parun^
Femme, d'âge médiocre, la coëfture de
quelle eft enrichie de pierreries & de pcrîe^'
mais ils la rendent fur tout fort remarquable p^^
fôn aaion; car elle fe tire le boutde l'oreill®
avecles deux premiers doigtsde la main droit®'
Par fon âge médiocre il eft déclare , cofflîfl·
ditAriftote, qu'en-la force de leur virilité
hommes retiennent mieux les chofes, ^ qu'ils ti^
font en leurs j eunes ans ny en leur vidllelTe.
lès joyaux qui éclatent fur fon chef, qu'elle f
là fidèle garde des richeflesdeJ'Efprit,
toutes lés chofes qui font repréfentées par Ρ
Sens ; Et par fon oreille où elle porte la mâi»f
je ne Jcay quel refervoir ds la Mémoire, que ftfj
fimbms reclamer en y touchant. Ce qui tait di'^
encore à Virgile dans fa 2,. Eclogue, ,
Quand des grands Rois je chantais la mervet»^^
Le Cynthien me tira par PoretL'e.
Mais comme les uns abondent en me'moii·^'
l'expérience fait voir que les autres n'en oO
point du tout; comme on le raconte d'Atti^^^^
fils d'Herode, auquel il fut impoffible d'appr^'^
l'Alphabet; & pareillement de Corebe,
ρ Margités, & de Melitidés, qui ne fçurent
J^Oiais compter plus avant que le nombre de
'^itjq. Il y en a qui la perdent encore par divers
''rcidens,,comme ;il £è remarque de cet Athé-
'^ti, à qui un coup de pierre receu à la tefte, fit
jj'blier tout ce qu'il avoit appris ; & de MeiTaia
^Orvinus, qui ne fe fouvint plus de fon nom
^Ptés une longuemaladie. A ces exemples j'en
Ppurrois aj oûter d'autres, comme eeluy d'Or-
°'lius PupHius ,-illuilre Grammairien ,& d'Her-
'^ogéne le Sophifte, à qui les mefmes digraces
Arrivèrent : mais il me fuffit de dire que le temps
jious fait tout oublier, puiique c'eil luy qui abo-
à laiongue des déplailîrs, les inimitiez, les
î^fomeiTés, ks amours, & l'amitié meCïie, fi
n'eft cultivée par la converfation, ou par le
^loyen des lettres. Il eft vray qii'il n'y a que trop
faux amis, qui par une malice noire oublient
^ûlontairement ce qu'il faut eftre foigneux de
''^teaiir,& ne retiennent que trop-ce qu'une Ame
■Siinéreufe doit oublier. Cette vérité ne peut
■J^ieux eftre exprimée que par ces Vers de M.
■^ertauld :.
Von ne fe fouvient que àu mal,
U ingratitude régne au Monde,
U if!l are fe grave en me'tal^
Et le bienfait s'écrit fur htide,
ME"
-ocr page 186-142 I C Ο Ν Ο L Ο G I Ε.
MEMOIRE DES BIENEAIIS.
XCVII.
Τ 'Acre me nt & la beauté feremarquef'|
/I j égakmeat dans cette Fille. Elle po^'
te fur là telle une guirlande de genévre, av^
un grand clou à la main, & le tient dcbo'^
entre un Lion & un Aigle.
On la couronne de genévre pour trois f^'*'
fons. La premiere, à caufe que cette
comme dit Pline, ne vieillit point, & ne \
pourrit jamais; & que de melme la ménio'J^
d'un bon office receun'eft point effacée par'
le temps. La fécondé, parce-qu'en quelq''^
faifon que ce foit, iès feuilles ne peuvent to^
ber; ce qui marque la fermeté d'une Ai^
reconnoiiTante. Et la troifiéme, parce
des.grains de genévre diitillez il s'en tire ufl
liqueur qui aide grandement à la memoii·^·,.!
Elle tient un grand clou, pour montrer
ne s'enfonce pas plus avant dans une piece ^
bois, que fait un bien-fait dans le Ibuvei*'
4'une Ame bien née.
Elle eft entre un Lion & un Aigle, par^^'
que ces Animaux ont montré fouvent coiA'
bien ils eftoient reconnoiffans, & ennemis °
-l'ingratitude. Témoin le Lion d'Androdj;.^
rapporté par Aule-Gelle & par Elian, qu' ®^'
fent qu'aux Jeux publics qui furent faits
le grand Cirque de Rome, en lapréfence
Jâ.
-ocr page 188-r^t le Peuple, un fi généreux Animal fauva
L ^ie à cet Efclave, pour recompenfe qu'il
y âvoit tiré une épine du pied, dans une io-
j '' Où il s'eûoit fauvé pour fécoiàer le joug
ion Maifire. Témoin encore cet Aigle
^•^oiinoiffant, qui pour fe revancher de la
^Urriture qu'une fille de Cefleluy avoitdon-
luy fit part depuis de tout le gibier qu'il
^"^^noit; & la voyant morte en fut ii fafché,
[feu la prefence du Peuple il fe jetta dans
«ucher qu'on avoit allumé pour brûler !e
(.^'■ps de cette Fille. Que fi nous confîdérons
fu®, le Lion eft le Roy des Quadrupèdes,
j'^'^Ie celuy des oifeaux , nous conclurons
jHa, qùe plus une perfonne eil noble, &
Ν elle conferve chèrement le fouvenir des
'^nfaits qu'elle a receas.
MERITE, XCVIII.
CE τ Homme fi richementveftu, &qui fe
tp tient debout fur la pointe d'un Rocher,
KPréfente le Mérite, Il a fur la teftc une
j.'^iiromie de laurier, l'un des bras armé, &
^^tre imd, & tient un Livre & un Sceptre.
Mérite, qui,félon S. Thomas,eU une
'^tion vertueufe à qui l'on doit pour recon-
.quelque chofc de haut prix, eû dé-
^fmt fui· mi lieu rud« & iuacccfllble, pour la
J'^alté qu'il y a à le rendre digne de quelque
'ofe. C'ett pour ce fujet que les Poètes
ont
-ocr page 189-ont feint qu'Hercule quitta le chemin le Ρ^''
facile pour iiiivre le plus mal-aifé fur le fo^
met des Montagnes, où ilfemblequelaV^^'
tu fe retire ; par où il mérita d'eftre mis
nombre des plus renommez Héros de ΓΑι^"
quité. ,
Son riche habillement iîgnifie ladifpofit!^
& llhabitude des Vertus, par lefquelles l'Hc"^
me s'habitue à faire des adions honorables
d'immortelle louange. .
Or parce que le Mérite a delà relation
les chofes grandes, on luy donne pour n^'^j
que d'honneur le Sceptre & la Couronne, <3
font des prix légitimement deus aux belles
lions, ainfî qu'il·eftdit.paΓ S. Paul, ψ'οη^'
couronnera que celuy qui aura bien combattu- .
Le Sceptre & le Livre qu'il porte figni^^
deux fortes de mérites, à fçavoir les ^
mes & les Lettres : car par leur moyen l'H^''',,
me fe donne du commandement fur autru)^'
le laurier n'elilant pas moins convenable
C£ τ IΕ -Femme ingénieuiè ne fe fait Ρ
moins remarquer par fon habilleii^'^jj
modefle, que par fa bonne mine. Elle a ^
main droite la meiùre du pied Romain: ei^ jg
gauche l'équiere & le compas, fous les pi^"^^
Carré géométrique, & à collé de fa Robe
■ïeau avec fon plomb. ^^
Par le mot de Mefure, félon iiîdore, fe doit
^^tendre tout ce que l'éteiiduë ,Λα longueur, la
fauteur & l'Efprit limitent. Piufieurs Auteurs,
^^it Polidorë Virgile, l'ont inventée en divers
car illevoitdansEutrope, qu'un certain
'^'donius fut inventeur des meiures & des poids,
temps que Procax régnoit en Albanie, Aza
Judée , & Jéroboam en Jerufakm. Ce
s'entend néanmoins des chofes liquides
^ nienuës ; mais comme les opinions Ibnt
^'ffereotes, Gellius en attribue l'invention à
f^^laméde , & Pline à Fidon Argien, qui fut
dixième Roy des E-li>,ns, enfuite du grand
yercule, qui furpaflà tous les autres Princes
fon temps: ce qui a donné lieu, fi je ne me
Ifompe, à la mefure Fidonnienne, qui eftoit
'aite d'eftain, de fet ■& de femblable matière,
Î^ie le maiteau pouvoit rendre fouple.
Mais parce-que les outils repréfentez en
■ ^^tte figure, font ceux dont on ufc à ine-
•^fcr la Terre , c'efi: dequoy nous parlerons
fstticuliérement. il faut donc fçavoir,que
premier qui s'en fervit à la partager, fut
JJ" certain Egyptien , qu'Herodote aomme
^oibftre , Roy d'Egypte. Celuy - cy a}-ant
l'itribué à chacun de les Vuiïaux une éga-
I portion de Terre, les mit tous à la tail-
® , dont l'impofition fut annuelle. Que
^ il arrivoit par ha'iard, que quelqu'un d'en-
eux euft foufî'ert du dégaft en Ces Ter-
[fs par un débordement d'eau , il luy fai-
loit
rabattre de la ibmme à laquelle il eftoit
^xé, à proportion de la perte qu'il fe trouvoit
^^oir faite. Ainfi la conuoiffance de la Géo.
l Pari. G mév
146 I C Ο Ν Ο L Ο G ί Ε.
metrie vint premièrement d'Egypte, d'où eU^
pafla depuis en Grèce : ce qui fait dire à Car-
dan , que Talés le Milefieii en traça les premie'
res lignes dans Athènes. Voila ce que difent le'
Auteurs, quand ils parlent de cet Art. Ils
confidérent pas néanmoins, que l'origine ei^
eft incomparablement plus ancienne qu'ils
]afont: car, félon Jofephe,Cam premier En'
fantd'Eve, divifa la Terre, à laquelle il vn]^
des bornes, &:bailit la ville d'Enoch, dont
eil: parlé dans l'Ecriture : ce qu'il n'euft pû fti'
re apparemment, iàns aucunes mefures,
fans avoir connoillance de la Géometrie.
Or de touçlcs inftrumens que nous ét^loU^
en cette figure^ il n'y en a pas un qui ne fojî
pris des anciennes Infcriptions. Le premier
le pied Romain, d'où iont tirées les principe'
les mefures, comme l'aune, l'orgie, la p^Î'
chegéom.etrique, & ainfi des autres, dont''
eft parlé au long dans les Ecrits du doâeB·^
dée, d'Habaldus, d'ErmoIaiis Batbarus, ^
de leurs femblables.
La mefure appellée Decempeda^ parce-qu'c''
le eftoit longue de dix pieds, fervoit général^'
ment à tous les Archjteâes & Arpenteurs, poi^^
prendre les dimenfions des Baftimens qu'i'
avoient à faire ; mais les gens de guerre
ufoicnt particulièrement, quand il leur falî^'
camper, foit qu'il fuftqueilion ou dcmefi^,
îe terrein, ou de traçer la largeur d'un foG*^^
ou de faire les plans, ou de régler les
propres à dreflèr des Tentes. Ils avoient p^i·' .
cet effet des Arpenteurs & des Fourriers, 9
marchoieat devant laSoldatefque, &qui
quoici'
-ocr page 192-^i^oient ponétuellemcnt les iogemcns en cha-
S'ic quartier du Camp, comme iônt encore au-
Jourd'huy les Marêcliaux des logis. Ce que je
Pourrois deduire plus au long, li les preuves
^'cn eftoient évidentes dans les Livres de Vege-
deTite-Live, de Caffiodore, de T-urne-
, & dë plufieurs autres.
Pour ce qui eft du niveau, parmy plufieurs
«ircriptionsils'envoitunede Cneus ÔDliitius,
^ù cet iuftrument efl marqué en forme d'un Λ
^iipital, avec fon plomb attaché à i;ne ficelle,
'Jtti tombe au mi Jeu en forme de ligne droi-
Cet inftrument de Géométrie eiloit aux An-
'^'ens un fymbole de Juilice, & nous-mefmes
ufons encore, pour montrer qu'il ne faut
Pas lèulem.cnt eftre juile en lameiiiredes Baf-
^^ens, mais qu'à parler myftiquement les
Sommes font obligez d'obferver exaôlement
^ette égaliié en toutes les aiFaires qu'ils ont à dé-
'Méfier enfemble. Pour cette meiine iin par ia
[^oy de l'Empereur Gratian, euregiilrte dans
'^CodedeTheodofe, l'on s'eil aviie dedon-
Public des mefures & des poids, afin que
^^acun fçache fon compte, & que s'il eft poiii-
^e, il ne fe commette aucune fraude. AuffiS.
•^"homas les eftimoit néceiTaires à la conferva-
l'ondesEftats, & à la fidélité qui fe doit garder
"^^ns le commerce. De- là vient que dans le Le-
^'iique, où Dieu commande -à Moyfe d'exhor-
^^r ibn Peuple à m.aintenir l'équité ; illuy pro-
Pofe les régies de la Juilice naturelle, par ces
f Viroles, ■Vousneferc'irien de frauduleux en vos
^^emens^ en vos régies, en vos poids, ny en vos
G ζ De
-ocr page 193-De cette Mefure matérielle , nous po^^'
vons paiîèr maintenant à la moraie , & di'
re à bon droit, qu'il n'eit point de plus bel'
ie eftude , que celle de la modération
foy-melme , pnifque félon Hefiode,
// ^ί'ίβ rien de fi beau qu'me égalé]ιφψ'
A quoy par manière de fymbole nous poU"
vons bien appliquer les inftrumens de GéO'
métrie, principalement le pied, dont il cil dit
dans Horace :
efibon quechacm àfonpiedfewef0^·
Et pareillement la perche, quifervantà
furer nos Terres, nos PoiTeffions & nos M^''
tairies, qui nous fourniflent dequoy viure ; nouS
apprend par métaphore à mefurer noftrebie'^
par nos rentes, & à fuivre cet avis d'Horace 7
Selon Um revenu modère ta defpenfe.
Cela nous efl: encore démonflré par le ni'
veau, qui eil une figure myftiquede la jufti"^^
& de l'cgalité, qu'il faut que nous obfervioO^
icy-bas. Et comme par le moyeu du plomb
prifeladimenfion de la hauteur, nousdevoo^
de mefme mefurer celle de nos penfées av'C''
prudence & jugement, puifque, comme
Seneque,
L'ouvrage (f ue Γ ottfait fans poids bf fansW·^'
N^efl pas chofe qui dure.
Et que l'expérience nous monftre,
QjiUlfaut toujours avoir pour les charges^^'
fautes., -
Des forces fufffantes.
-ocr page 194-ï C ο Ν ο L ο G I Ε. 149
Il % ί fe ί'5ι ils iîî, ίη · iS, Λ
Μ Ε Τ Α Ρ Η r S I Ε. C.
, Ν la repréfente par ηηε Femme qui a
_' les yeux bandez, une Couronne à la
l^ite, lin tccptre en main, & â iés pieds une
'>orloge & un globe. >
Par le voile de fes yeux il eft fignifu'qii'el-
> les tient fans cefle fermez à lous les ob-
jets qui attirent les Créatures mortelles après
'^s vaiiitez de la Terre.
Par fa couronne & Ton fceptre , qu'elle
Reine de toutes les autres Sciences, qoi
^^acquièrent par la lumière naturelle; & par
''horloge & le globe, que mépriilint tout ce
Î^Ji eft fajet aax révolutions da temps , elle
jje s'employe qu'à la contemplation des cho-^
celeites.
ΛΙ/SERICORDE. CI.
^T Ο u s la dépeignons par une Femmx qui
\ α le teint extrêmement blanc, le nez un
pU aquilin, une guirlande d'Olivier à la tefte,
® bras gauche ouvert, un rameau de cedrc '
^^ la main droite , & à les pieds une cor-
iieille.
La Mifcricorde, qui, félon S.Jean Damafce-
^^icll raSedion d'un cœur rempli de tend relie,
G 3 & qui
& qui prend part à la mifere d'autruy, a le vl&'
ge tel que nous le venons de décrire, parce-qsJ^
telle cii auffi, félon Ariftote , la phyiîono-
mie d'une perfonne qui a de rinclination à
pitié.
La guirlapde d'olivier eft dans les Sainte'
Lettres url iymbole de Mifericorde, comi^^
le la-neau de cedre en eit un autre, ainfî
le remarque Pierius. ^
El le ouvre les bras, parce-qu'à l'exemple
de noilre Seigneur Jesus-Chrisτ, fouf
ce de cette vertu, elleeil toujours preile ài^'
courir lès aiSigez, & à les cmbraiîer dans lapl^J'
for:e violence de leurs miféres.
Quant à la Corneille que l'on a mife à
pieds, il ne faut que lire ce qu'en dit Orus A"
polio, pour apprendre que les Egyptiens revC'
roient particulièrement cet oifeau , à caui^
qu'ils le connoiiïbient enclin à la compaflîoo
pardeffiis tous les autres.
CE τ τ Ε Vierge veftuë de blanc, & coef'
fée d'un fimple couvre-chef, àns avoif
autre ornement qu'une ceinture d'or, tient ^
teile baiiTée, & un fceptre myftérieux à la
avec un œil au delTus.
La Modeftie, quiconfifte principalemê^i·
fuir les extrtinitez, & à fe tenir dans un
milieu, efifimplementcoëftcc, & veftuë d'H'
ne Robe blanche , parce-qu'clle fc cofitcn^
peu, & que fuyant tous excès, elle n'a rieii
il cher, que de conierver dans une vrayc
iiiodération la pureté de Ion Ame.
Cela nous eft figure par fa ceinture d'or,
l'Apoftre nous confeilîe de prendre,c'eit
a dire ielon Eutimius, de mettre à la chaîne nos
PaiSons déréglées & nos lafcivcs convoitifcs ;
' quoy l'on ne peut mieux parvenir, que par
^ine vertueufe Modefiie , & une pare fuicc-
^ité de cœur.
Elle donne des preuves de tous les deux
Par ion action pofée, δε par l'humilité de fes
yeux qu'elle panche en bas à l'imitation des
honneltes Filles, & des devotes Religieufes,
<3ui par ces mafques de foûrtiiffion inféparâ-
^les d'avec elles , montrent véritablemeni
^^ombien elles font foigneufes d'obéïr à ce
Précepte de S. Paul , ^xe vofire Modefiie foii
"lafiifefie à tous les Hommes.
Le fceptre , avec un œil au bout, eft un
Hiéroglyphe de cette vertu, ainfi représentée
parles Prêtres Egiptiens. AuiTi eft-il vray que
qui la pofledc,ales yeux de l'Ame alfe
<^lair-voyans pour s'empêcher de tomber dans
le précipice ; & aflez d'empire fur fes paf-
fions, pour les affiijettir au fceptre de la Rai-
son. Paroù l'on peut voir, que la principale fin
l'Homme modefte fe rapporte à la modé-
i'ation de foy-mcfme.
Or comme il n'eil pas incompatible que les
^'ertus hors de leurs bornes ne deviennent vi-
ces , puifqu'il fe voit par épreuve, que la vail-
lance dégénéré en humeur brutale, la largelTe
^ prodigalité, & la dévotion en hypocriiie,
G 4 quand
quand il y a de l'cxcés il fe peut faire às
melmc qu'une trop grande. Modeftie pai-^
quelquefois pour lâcheté dans le monde;
qui arrive la pîufpart du temps , lori^'^f
l'Homme s'anéancit par manière de dire
force de ne fe connoiiire pas , & de u'o^^l
entreprendre ce deqnoy il pourroit veiiiï/
bout, s'il avoit ua peu meilleure opinion
foy-mefmc : tellement qu'il ne faut pas s^'
tonner ii quelques Anciens Mythologii^^'
ont repréfenté cette forte de molelïè par ufi^
Femme nonchalante, échevelée,mal vefiué'
& couchce par Terre Auffi eft-il vray
les Femmes , à caufe de la foibleiTe de le^''
Sexe , font d'ordinaire plus lâches que
Hommes , quand il eil queftion d'exécuté'
quelques deiîèins d'importance.
CO M M Ε on y arrive par divers raoyer"® >
auffi en peut-on faire la peinture div^f
fe. En celle - cy elle eft repréfentée par uii
iquelete, couvert d'un riche manteau de htO'
catel, dauîant qu'avec l.i mefme main dont eH·^
dépouille de leurs biens les Grands du monde'
elle guérir de leurs maux les miferables.
Elle efl: déguifée d'un beau mafque, par'jf
qu'elle ne fe montre pas à tous avec unif^^'
me vifage ; car prenant à toute m<oment aii'
tant de formes que les Foëtes en donner^··
à Prothée, elle eil douce ans uns, & terrii^l®
au''
-ocr page 199-autres; indifférente aux gens de cœur, &
^ieufe aux Courages lâches. En un mot , tels
font les hommes en leurs humeurs, tels
fe la figarent en leur imagination ; & on
P'^iit bien -dire que leurs opinions font les maf-
S'^es de la Mort: comme dans la vie civile, la
'Religion, la Patrie, l'Honneur, & les Intérefts,
Pi-iblics, font des choies qui les touchent de
fort prés, auffi n'appréhendent-ils point de
^'immoler pour leur détenfe.
On la pourroit couronner encore d'ùne
S'iirlande de laurier, pour montrer que fon
^jïîpire eft univcrfel fur tous les Hommes ; car
fa coutume de traiter cgakment les pau-
vres & les riches, les grands & les petits, les
^orts & les foibles, les ignorans & les dofites ;
^ene fe laiilèr ftéchir ny par prières, ny par rai-
•^ïis; d'avoir les yeux bandez quand elle dé-
"^ochc fes fie'ches; de n'épargner ny âge, ny
Condition ; & de ne refpeéter non plus les fcep-
^es des Princes, que les houlettes des'Bei gers ;
qui ne peut mieux eftre exprimé que par ces.
^auxvers de M. Malherbe, le plus ingénieux
^ ie plus poly de tous nos Poctes Lyriques.
La Mort d''iin coup fatal toutes chofes moifionne·^
EtParrefifiiiverarfi,
Qlti vent que fa rigueur ne connoijfe ferfinne
EH écrit en airain.
Le pauvre en fa Cabane où le chaume le copivre^
Εβ fujet Λ fes loix ;
Et lagarde qui veille aux barrieres du Louvre
N'en défend peint les E.ois.
' G S MU-
-ocr page 200-1J4 I C Ο Ν Ο L Ο G I Ε. ,
MVSIQ_UE. CIV.
CEt te figure n'a pas befoin d'explication
pour eftre entendiic. C'eft une Feiriiii<^
qui regarde fixement un Livre ouvert, qu'elle
tient d'une main, & une plume de l'autre^)
pour corriger ia tablature, ayant pour cet
ef-
iet àfes piedsun luth', une viole, & des flû'
tes, pour eu accorder l'harmonie à celle de
fti voix.
D'autres luy donnent une balance, pouf
inontrer par là, combien la juikflè eft requi"
fe en un concert ; quelques - uns une encIU'
.me , ς]η'ίΐ5 croyent avoir donné commence-
ment i ce bel Art. Car ils diient, que do
ion différent des marteaux Avicenne tira des
çonjeâures des tons & des mefures de
Mulîque.
Il ne faut pas oublier icy , que les Egyp-
tiens la repréfentoient par une langue φ"
avoir quatre dents, comme le remarque Pie-
rias en fes Figures Hiéroglyphiques; & qu'ils
luy faifoient tenir des deux mains la Lyr®
d'Apollon ; outre que pour la rendre pto®
connoifiable , ils luy donnoient une Robe
toute femée d'inilrumens divers, & de
vres de tablature.
Il s'en voit encore à Rome une peinture?
qui eft telle : Sur le bord d'une l-oirtaine
font rangez en rond plufieurs beaux Cygne®'
I C ο Ν ο L ο G I Ε. 15*)
^u milieu defquels elt i cmarquabU un jeune
Garçon qui a des ailles au dos , le vifagé
■^'aiit, & lur la tefte une guirlande de fleur^·.
Ceux qui le voyent jugent auiïï-toft que c'eil
•Zéphyr , qui du vent de ion haleine, dont il
'■ifraîchit l'air d'alentour , femble faire mou-
yoir doucement les plumes des Cygnes ; car
eft vray, comme dit Elian, que cesoilëaux
île chantent jamais qu'en la iàiibn que Zé-
phyr fouffle ; tout de mefme que les Mufi-
ciens font rarement un concert, s'ils n'y font .
pouffez par la douceur des louanges qu'ont
|cur donne, comme par quelque vent agréa-
ble , & fi ce n'eft devant des perfonacs qui
%achent goûter leur harmonie.
Λ cette derniere figure peut eftre jointe,
fort à propos celle d'une T'emme qui joue
^'un Ciiîre, où fe voit une Cigale à la place
,^'une corde qui eft rompue ; outre qu'elle fe
^ait remarquer par un Roffignol qu'elle a-fur
ft teiîe , par un grand vafe plein de vin, qui
^rt à fes pieds, & par une Lyre avec fonaichet-
La Cigale qui eft fur le Ciilre, lignifie la
Mufîque, pour une choie extraordinaire ave-
nue à uii certain Eunomius ; car comme il·
Oiioit un jour de cet inilrum.ent en un deffi
<i'Ariftoxéne & de luy, l'une des cordes s'ef-'
'^nt rompue, une Cigale vola deiTus fortuite-
ment , & Tuppléa par fon chant au manque-
ment de la corde ; ii bien qu'Eunomius de-
meura viâorieax. De forte que .pour mé-
moire d'un événement fi remarquable , les
Grecs luy dreilérent depuis une ftatuë avec'
Ciftreà lamain, otila Cigale eiloitpeinte.
G 6 (^uanc
-ocr page 202-Quant au Roffignol, l'on ne peut do'^l
qu'il ne foit unvray fymboledelaMuiîque? ^
caufc des merveilleux eSets de lîi voix ,
charme ceux qui i'écoutent, & qu'il hauiTe»
baiiTe en toutes les façons imaginables, comn^"
s'il fçavoit parfaitement les régies de ce bel A^^·
Et parce-que la Mufique n'a eite' inventée qu^
pour combattre la mélancolie , elle ne pe»'
avoir de meilleur fécond que le vin qu'on lui
met auprès : car ce luy eft une vertu fpécifiqu^
de faire évanouir les ennuis; joint que s'il^^
bon & délicat, il fortifie la voix; àraifonde-
qupy les Anciens ont eu raifon de mettre BaC'
chus en la compagnie des Mufes.
ί,ί; 'T^ ^T^ ,.ν.
OiôtiuSiêâiô&SMÙÎâ&i^iSôiaûiû
Ν Â ru R Ε, c ν.
Ε
J" Lle fe voit icy reprefentée comme dans
_y une Médaille de l'Empereur Adrien, fça*
voir par la figure d'une Femme nue, qui a du
lait aux mammellcs, & un Vautour'à
main.
La Nature, félon Ariftote, ne pouva""^
mieux eilre définie, Qu'an primipe de mou'Vi'
■ment isf d'altération en ia ckofe okellefetrouVSi
far qui s'engendre tout ce qui efl corruptible, ce
n'eft pas fans raifon qu'elle eft peinte en Femm'^.
nue, car comm.e ce principe fe divilc en aÔ'^
& eu paffif, dont l'un-eft appelle forme, ^
l'autre matière; l'aâif ne peut mieux eftr^·
exprimé que par les raammeHes pleines de lait,
- par- ;
-ocr page 203-I C ο Ν ο L ο G Γ Ε. 214
P^^ce que la forme efl: ce qui entretient les cho-
créées, de même que les tetins delà Fem-
uourriiTejit l'Enfant ; ny le paffif auffi mieux
"<-'montré que par le Vautour , oyfeau fort
Sbuton, eilaiit véritab· e que par la matière qui
^ Êtneut & s'altère au gré de la forme, font dé-
'''lùtes peu à peu toutes les chofes corruptibles.
NECESSITE'. CVI.
Ο Ο υ R la donner à connoiftre par fa plus
-i eiïèntielle partie, on la peint en j eune Fem-
qui tient de la main droite un marteau, &
gauche une poignée de doux.
L'on ufe ordinairement dum.otdeNéceiïï-
) quand une cliofe eft réduite à tel point qu'el-
ne peut eftre autrement ; car alors elle a cet
|i^antage de ne relever.que defoy-mefme, &
^^ ne rèconniftre aucuneLoy ; & parce-que là
Pû elle fe trouve, elle y tient un nœud qu'il eft
'^poflible de dénouer; on la compare pour
^^t effet à celuy qui porte un marteau d une
"^ain, & des doux de l'autre ; à quoy fert de fu-
ce Proverbe, le cloiiefi enfonce, dont on ufe
^■"dinairement, quand il u'eil plus temps de
confeiller d'une affaire, qui fe trouve déjà
faite.
„ Le mot de NécelTitéfe prend encore en no-
'Ire langue pour la Pauvreté , qui violente
'i*ie]querbis fi fort un Efprit, qu'elle luydon-
la géhenne, & le contraint de faux des
chu-
-ocr page 204-chofes à la volée,dont il a tout loiiîir de fe repe"'
tir.^ On la peint maigre & défaite, avec J^s
mairie & les pieds liez contre un écuéil, po^"^
montrer que les plus honneftes gens font inc^'
pables de tout, depuis que cette épine s'attacn®
à eux; ce qui fait dire à faint Grégoire de INf
zianze, qu'elle eft un obftacle à plufieurs acti'
cns, & un voyage qui enempefche beaucoup
d'autres. Elle le peut vanter néanmoins'
comme dit Théocrite à Diophante, de fça^o'f
polir les Efprits groffiers, de réveiller les Af'^
afibupis, &de faire revivre les plus nobles
ventions, guand elles femblent e'nfevelies.
NOBLESSE. CVII.
ELle eft icy peinte en habit long, com;
me elle fe voit en la Médaille de Geta,
elle tient une lance d'une main, & de Vaot!^^
une petite Image de Minerve, avec deux Co"'
ronnes en bas'. Par la Robe longue, ,,
feots "Gentîtehommes pouvoient porter
temps des Romaii», il eit démontré que la g·^'
vité, des mœurs eft bieîiféante aux Ferfon"^^
nobles ; par la lance jointe âîiuiage deM^'
ve, que les Sciences & les Armes esnoblifl':''
l'Homme; & par les deux Couronnes,
biens du Corps, & ceux de l'Ame y contribue|_^
entièrement : à quoy fert beaucoup, fei^n '
Poctes, la Déelié Pallas, pour eltre née û»
cerveau de Jupiter, ce qui doit s'entendre ro.
fliqut-.
-ocr page 205-"'quement du difcours & de l'Intelleâ, par le
'^oyeti dcfquels on peut fe mettre en eftime, &
^ acquérir les qualitez qui font nécciîaires à la
^fayenobleiTe. \
^'autres la peignent avec une cftoillc fur la
'fte, & un fceptre en main , pour donner à
que la Nobleiïè naift de la vertu d'un
^ourage illuftre, & qu'elle fe confervc facile-
"^ent par le moyen des richelTes.
ife iî-s ilÇ, ife ί!^ · m,ί!5, iî?,
l^ONCHALANCE, CVIII.
DN la repréfente par un Femme écheve-
lée, mal-veftuè, & couchée par terre,
elle dort, appuyée fur l'un de fesbras, &
(v^'it de l'autre main une horloge renver-
j. Ses cheveux epars, fon pauvre <5quipage, &
affoupilTement, font voir qu'une perlbnne
; ^nchalante rampe toujours, & que fa fainéan-
''e déplaift à tout le monde.
1 Quant à l'Horloge qu'elle tient de travers,
( <^ont le fable ne peut couler, cela marque le
^ftps perdu ; à quoy l'on peut aj oûter une Tor-
^^ qui fe traîne fur fa Robe,pour une marque de
^ que k parcifeuxcftfi tardif & fi pefant, que
^^i^meditl'Arioftc.
'I ne peut ny marcher, nyfe tenir debout,
de crainte d'agir il fe coucheγα% tout.
Λ I>'autres la peigneotaffifc avec une mine tri-
! la telle panchée, les mains dans fon fein,
li
-ocr page 206-& fes bras croifez. S'il en faut croire Pief^^é
les Egyptiens la repréfentoient ainfi ,
faire connoiftre que l'Homme eftoit
de toutes fortes de bonnes aâions, depuiS q '
par une vie lâcheilfededaroitennemy dut''
. vail. Aiifll eft-il vray , que l'Oifivetc o",
Nonchalance ert une pefte li dangerèuie,
elle ie rencontre, là n'éclate aucun rayon "
fprit, là n'eft conçue la moindre peBÎc^
gloire, & là finalement ne fe remarque ny
ce de vertu , ny ombre d'immortalit y.
peut donc bien dire que les Ames oilives η ο
point de vie , non plus que ces Eaux
cageuiès, qui à force de croupir fe corrOi
pent & deviennent puantes ; & que toutes leij^.^
aâions ne font que pures folies", comw^
crie le plus fage de tous les Hommes. ^
eflet, la faineantife eilantla racine &la lO» ^
de tous les maux de la vie, il s'en peut tirer c
te conféquence, qu'elle eft plus pernicieux q
le vice mefme, à le prendre en général. - -j
vérité ne peut eure mife en doute, iîl'oQ^Ç' ,
coniJdérer, qu'encore-que le vice foie coif"^
naturel à pluiieurs, il n'elî pourtant pas
re à la nature de l'Homme, les mauvaifc^
qii^
clinations duquel font comme des réjettons''
pouift au dehors un mHange d'humeurs c
traires & mal réglées: maisquantalaiaii^i^jj,
tife, c'eftune contagion fatale à la Naur^^
maine de qui elle ell mortelle ennerni^ j
cftant certain que l'aâion & la contemij^" ^
font naturelles à l'Homme, c'ciUÛhaïc^.
contre ia nature, quand il arrive qu'il ne s a
m ny à l'un ny à l'autre. Ainfi d'autant p'^^i
font
-ocr page 207-ICONOLOG^IE. idx
'^nt odieufes & déteilables les chofes contre na-
d'autant plus auffi doit-on fuirl'oiiîyeté
P'ûiOft que le vice; parce qu'elle déi.ruit entié-
la raifonJe Sens, la géiiérofitc, la cour-
, & les autres qualité! qui mettant i'Hom-
'^eeneftime.
Or ce ii'eft pas ièiilement au Corps Naturel à
elle en veut, mais encore au Politique,
^'ant bien certain que cette pefte ne dérruit pas
^oins les grands qucles petits, & qu'elle ruine
^''^ίΐΐ-toil les Maifons des Princes, que les Eiiats
f^rticul iers, car coinme dit Catul le,
Elle perd les grands Rois, elle gafle les villes,
■Ei fe-melepoifon des difiordes civiles.
Ce fut auffi pour empefcher les maux qu'elle
d'ordinaire, que durantleRcgne d'Ama-
il fut ordonné, que chaque Citoyen euft à
[Oiïiparoiftre tous les ans devant fon Juge, pour
pV déclarer fur peine de la vie quelle eitoit fa
j'Ofeffion,& à quoy il employoit le temps. So-
en fît de raefme,lorfqu'ayant appris des Peu-
P'es d'Egypte une Loy femblabîe, ill'impofa
2^?uis aux Athéniens; & voulut déplus qu'il
•ill permis à chacun d'accufer en jugement les
pfeiFeux & les fainéans,comme des Perfonnes
Jiciignes de vivre. Ce qui fut encore pratiqué
^fis Rome, où pas un des Citoyens n'ofoit pa-
î,"^,'ftre en public, s'il ne portoit fur luy des en-
'^'gnes de faProfeffion, ou du Meftier dont il
s=»gnoitfavie.·
., Que fi dans les Républiques bien policées on
,,^^oignoit tant defoin&devigi'ance à bannir
^yiOveté, cela ne fe faifoit fans doute que pour
"er les effets d'une fi mauvaifc caufe, &par
con-
-ocr page 208-conféquent pour déraciner les vices du Mo"" „ '
Ces confidérations font affezfortes, ,
avis, pour nous obliger àfuirlevicedel^°"'
chalance, & à l'avoir d'autant plus en ' |
qu'il eii véritable, comme le remarque ArîJ'
te, qu'il n'y a rien d'oififen la Nature.
fe prouve par l'exemple des chofes d'icy-^^y
qui ont toutes leur travail & leur tafche à '
Les Anges mefines n'en font pas exempts ; ^^
ils s'occupent perpétuellement à iervir J
comme font les Cieux à rouler fans ceOC; |
Aitres à communiquer leurs influences,
Elemens à les recevoir, pour en produira "
vers effets. En un mot, il n'eft rien
Monde qui ne s'employe à quelque chofejCO^
me les Oifeaiix à voler, lesPoiiTons àn^^^
les Quadrupèdes à courir, les Reptiles
per, & les Plantes à fe renouveller Nous αζ^
vons donc bien les imiter > nous qui iàr^'^
des Créatures raiibnnables, & ne nous laflè·".'
mais de faire des œuvres utiles. Que fi
travaillons nonchalamment à nôtre iàlut, ^HJ
venons-nous que la punition s'en enfuivr^to
ou tard, & que Tout Ârhre qui ne porte foin^^
bonfl-uit, fera coupe jettéau feu.
OBEISSANCE. ClX·
&
c/C
G Ε τ τ ε Vierge veftuë en religieuic»
dont le vifage eft fortmodefte, "^"'"ji
la main gauche un Crucifix, & de la droite
joug, arec ce mot, Suave.
'^Ti^ln^ i'^TTuruT- "J Otiitr
-ocr page 210-, L'ObéïjQancc eft mife à bon droit au nombre
vertus, puifqu'elk confifte à fçavoirmor-
'«cr fes appétits, & à foûmettre pour un plus
sfand bien fa volonté propre à celle d'autruy :
qu'une perfoîine peut diificilement faire., fi
j'e n'eft portée d'Inclination aux chofesloua-
l'es & vermeufes. Auffi eft-elle peinte avec un
'%e plein de modeftie, àcauicqueceuxqui
ont beaucoup font d'ordinaire plus honne-
ps gens que les autres, & plus enclins à aimer
' raifon, d'où dépend principalement le mo-
^^n de bien obéir.
, Le Crucifix & l'habill ement qui fe porte dans
j? Cloiftre montrent, que pour l'amour de la
'"«ligion, rObéïiTance eft grandement recom-
"^^ndable. Voila pourquoy les Hommes
"Contemplatifs & qui craignent Dieu, difent que
iouf l'Amour d'elle la divine Bonté nousac-
'^Orde trés-volontiers nos prières, &raccom-
f'^iflèment de nos défirs.
Le j oug qu'elle porte avec le moÏ Suave,
•lous apprend qu'il n'y a point d'amertume en
^«tte Vertu. Léon X. eut cette Devife en fa
J^uneiTe, & la retint depuis, quand si fut élevé
Pontificat. Ce qui eft aifé de voir encore
^•îjourd'huy en plufieurs magnifiques Baili-
jî^ens qu'il a laiiTcz dans Rome, & dehors, où
J.® remarque lemefmemot, tiréde ces paroles
f J Ε s υ S-G H RI s τ , Jit^um meum fuave efi,
^eft-à-dire, mon joug eft doux à porter: par
ce Grand Chef de l'Eglifeentendoit parler
Ja»s doute de l'ObéiiTance que doivent les vrais
^dcles à leurs Vicaires légitimes.
On la peut repréfenter encore par une Fem-
me
i64 ι C ο ν ο L ο g ί ε. ^^
me vefiuë deblanc,.qui porte unecroix^Vj
épaules, & qui tourne les yeux vers le '
d'où rejailîiiï'ent plufieurs rayons refplendiiiii
comme des édairs. r
Toutes ces chofes nous font remarq"^^,^
que l'ObeiiTance doit fouler aux pieds les i"'^
refts du Monde, afpirer aux recompenfes ^
rimmortaiité , & fe foûmettre patieirin"'^"
aux Loix & aux Régies qui luy font ii^P^'
fe'es, quoi-qu'elles femblent infupportablcs ^^
Sens.
Quelques-uns ont peint l'ObeïiTance qu "
doit à Dieu, par une Femme honneftem^'g
veftuë, qui regarde attentivement un facriO^ ^
far un Autel, & qui d'une main qu'elle a
pée au fang de la Vidime, fe touche le bout ύ
l'oreille droite. ,
L'explication de cette figure eft tirée de
Bible, où il eft dit, que Moyfe toucha l'exi^ff
mité des oreilles, du Souverain Prcftre Aaro'''
& de fes Enfans, avec les mefmes doigts •î'·^'
avoit trempez dans le iangdelaViâime: P^
où , comme difent les Théologiens ,
fommes inftruits d'eftre obéïflans,
ter ponâaeUement tout ce quiappartient au
crc Culte de Dieu.
c
ê!^ ifei!^ ils ife sis « S!?, iîî. ^
OEUVRE MANIFESTE. CX·
'Est une Femme qui a les deux
ouvertes, avec un œil au milieu "'^Cet'
l'une que de Fautre.
-ocr page 212-Cette figure de l'invention des Anciens, eil
. claire d'clle-mefme. Par les mains s'en-
^Ident les œuvres, dont elles ibnt les princi-
pUx inftrumens, comme par l'œil ell démon-
leur qualité; car il faut qu'elle foit claire, &
pas fcmblable à ! a Lanterne qui luit pour les
''trèsfans s'éclairer elle-méfme ; en cela
,'^Utraire à l'œil, qui s'embellit par fa propre
^■^iére ; ce qui nous déclare, qu'il ne faut point
^^ttre la main à l'œuvre par une efp ce de vai-
gloire, ny pour une fin mécanique, mais
™Ur fe faire du bien à foy, & à fon Prochain.
Ε
OEUF RE PARFAITE. CXI.
, Lle efl: aiïèz remarquable par la peinture'
j^-J/de cette Femme, qui tient un miroir de la
'^ain droite, & de la gauche une équiere, &un
^mpas.
. Le miroir eft tel que noftre Entendement,où
p'^^s faifons naiftre des idées de plafieurs, cho-
que nous ne voyons point, aidei en cela de
dilpofition naturelle, bien que toutefois el-
PuiiTent eftre mifes en œuvre parle moyen
l'Art, & des inftrumens qu'on y emplo-
j, Mais pour bien exécuter ce qu'on a deffigné,
ρ sut fçavoir premièrement quelles qualitez y
jP'it néceiTaires ; à quoy le compas & l'équiére
de beaucoup : car il faut que nous
"Joutions nos forces àladépenferequife, àla
cho-
-ocr page 213-chofe imaginée à la réelle: que fi l'on fait
trement, après s'eltre beaucoup donné de P^ '
ne, l'on trouve à la fin, qu'on ne peut acbe^'^
ce qu'inutilement on a commencé. , „
Que ii au iieu d'une œuvre achevée quelq^i j
en veut repréiènter une qui nepuiiTereiiifif,'
n'a qu'à peindre une Femme étonnée,
garde plulieurs toiles d'araignée, qu'elle
entre fes doigts; car comme ces toiles,
que tifluës avec beaucoup de peine & de lO"' '
font néanmoins trop deliées, &par conCcofi^^-
fi fragiles, qu'il ne faut que la moindre ciio^.
pour tout gafter ; ainfî les Ouvrages vains
n'ont point la raiibnpourvray&iblidefo""
ment, s'ébranlent tout à coup, & ne font P^
plûtoft ébranlez , qu'on les voit portez P^
terre,
ORAISON. CXII.
Ε τ τ Ε Femme veftuë de blanc,
eft fur le déclin de fon âge , repréjè"'
rOraiibn. Elle a les yeux haulTez vers le '
& les bras ouverts, tenant à genoux un
foir, où eft attaché un chapelet, au lie" " '
chaînons qu'on a coûtume d'y mettre. , j
Elle eft veftuë de blanc , parce, dit 5a'
Ambroife , qu'elle doit eftre pure , firoP' '
averts;
pour une marque de la revércnce qui 1
claire & manifefte.
Elle fe tient à genoux, & les bras
Dieu?
-ocr page 214-ν I C ο Ν ο 1. ο G î Ε. i6f
. , & particuiiéremenÎ quand on iuy adreilc
''^^Ique prière.
j Ses yeux qui regardent le Ciel, d'oùs'épan-
. ^îit fur elle des rayons refplendiilàns, mon-
JW, comme dit S.Thomas, que l'Oraifon
élévation d'Eiprit, & une ardeur d'af-
K^tion, par laquelle l'Homme parlant ! ton
, luy fait fes prières, & Iuy découvre les
^'^rets de fon cœur.
L'Encenfoir qu'elle porte eft unvraySym-
j^'e de fon eftre, conformément à ces paroles
^ David , que mon OraiÇon , Seigneur , fait
^"^fie'e vers toy comme Γ encens. Et pour le re-
pd du chapelet, il luy ièrt de chaîne à bon
J^it, parce-qu'il confifte en l'Oraiibn Domi-
ji'^ale, & en la Salutation Angélique , dont
rj^îifutcompofé par noftre Seigneur Jesus-
jV^RiST, & enfeigné aux Apoftres, quand
ρ '>iy demandérentqu'il leur apprift à prier ; &
.®*itre par l'Ange Gabriel, par fainte Eliiabet,
^Par l'Eglife noftre bonne Mére.
. L'Oraifon au refte eft peinte vieille,parce-
cn ce declin-là nous y vaquons plus qu'en .
autre âge, comme eftant plus proches
^iioftre dernière fin.
^Éi iîs «i iSH i!^ Îi^ ^ iîs-ÎJS Sï^ i!» ^
^ RIGI NE D'A MO UR. CXIII.
ÎA naiiTance de cette paffion efticyrepré-
^ fentée fort à propos par une jeune Beauté,
tient d'une main uu miroir rond, qu'elle
op-
-ocr page 215-oppofë aux rayons du Soleil, dont la réfie^'^ ^
allume un flambeau qu'elle porte en
main ; & au deiTous du miroir iê voit un ^
leau , où font écrites ces paroles, SiC
CORDE FACIX AMOR INCENDI^^ '
quifignifient,
Oeft atnfi que Ρ Amour s'allume dans k ccef''·
Bien-que plufieurs s'v'tudient de prouver Ρ
divers exemples, que l'Amour ne s'engef^ _
pas feulement de la veuëmais encore de
parce, difent-ils, qu'il n'eft pas incomp^''^'
que cette paffion ne fe communique par '
oreilles, comme par les yeux, qu'on peut
peller les deux feneftres de l'Ame ; je fuis nei^
moins pour l'un plûtoii que pour l'autre: c^·^
il me femble que pour charmant que foituti'^^
. cit des beautez de quelque Dame, il n'eft
poffible qu'il y fafle une auffi forte impreifi^''^
que celle qui s'y fait d'ordinaire , quandi ^
yeux en font les témoins & les Juges. Je 5
que l'ouïe nous porte à aimer, il ne s'enlui'^Pj^
pourtant qu'elle foit un fujet d'Amour ; car e'
ne fait feulement que frapper l'Imagination ^
merveilles qu'on raconte d'une belle chofe,
lieu que la veuë nous en confirme effëdivein£
la créance. li feroit bien difficile de
cette vérité, quand il n'yenauroitpointQ;3
tre preuve que celle qu'en donne le doâci·'
en fon dixième difcours fur le Banquet de r
ton. G'eft-là qu'il montre qae la
amoureufe procède de la mutuelle reiicon ^
des yeux, & là meiiTie qu'il en donne pluft g
belles raiions, oiije vousrenvoyepourn ^^ ^
pas eianujeux, q^
I c ο Ν ο L ο G î Ε. 109
. Or cette rencontre d'où vient l'Arnoiir, ne
I? peut mieux figurer que par celle duSolei!&
miroir, oppofez l'un à l'autre : où il eft à re-
marquer que ce miroir rond & tranipareiir, dont
"15ft icy queftion, eft de la Nature de ceux que
yécrit Plutarque en la vie deNum.a Potnpilius,
!.^Çond Roy des Romains , où il dit que les
vierges Veftaks s'en fervoient pour recouvrer
feu du Ciel, quand celuy qu'elles gardoient
% Terré venoit à s'éteindre. Archimede, à
^^ que Tondit, en fut inventeur, &s'enfervit
^eureufement contre les Romains au fiége de
"^yracufe, ville de fa naiffance : en quoy l'imi-
^depuis-avec pareil fuccés le Mathématicien
"foculus, qui félon Zonare, par le moyen de
glaces enflammées brûla l'Armée Navale
Vatilianus, qui s'eftoit révolté contre l'Em-
f'sreurAnaftafe.
L'on peut donc bien dire , pour expliquer
^^tte figure que comme des-rayons du miroir,
Sii ibnt les effets de l'Art oppofez à ceux du So-
, s'allume un flambeau : ainfi par la ren-
contre de nos yeux, vrais miroirs de la Nature,
^^ec ceux d'une Beauté, ou d'un Aftre animé,
leur darde là lumière, la flamme d'Amour
Rallume en nos cœurs. Que li nous voyions
Çavoir au vray,comment cela fe peut faire,nous
gavons qu'à lire Ficin, qui nous l'apprendra.
■Les Efprits, dit-il, qui par la chaleur du cœur
^ Engendrent du plus pur fang, font toujours
en nous que l'humeur qui s'en exhale. Or
^^mme cette vapeur de fang, qu'on appelle
^fprit, qui en eft formé, eu telle que le fang
'Îiefine , aiîi envoye-t'elle au dehors des
y. Part, H rayons
rayons qui luy reiTemblent, & qui paiTentpai
les yeux, comme par des feneftres de verre-
Ceiius Rhodiginus nous aflure le mefme,quand
il dit qu'à l'imitation du Soleil, qui eft le coeUf
duMonde, où lifaitfontour, &luycominU"
l'iique fa lumière, noftre cœur par un perpétuel
mouvement agitant le fang qui eit prés de luy î
épand par fon moyen les Efprits dans tous les
Corps. C'eil par ces mefirics Éiprits encore qu'"
darde des étincelles & des rayons fur tous
membres, principalement par les yeux ; c^*·
l'Efprit eftant leger de foy, ce luy eft une choi^
facile de s'élever aux parties du Corps les pW'
hautes, joint que la lumiere éclatte bien pl^^®
abondamment par les yeux: laraifon eft, V^''
ce-qu'ils ont l'avantage d'eftre tranfparens, va-
poreux , refplendiiTans, & pleins d'ctincelles·
Cela eftant, il ne faut pas s'étonner fi les ye"-''
de deux perfonnes qui fe'regardent fixemeo·^'
s'entreblelîènt par les rayons qu'ils fe décO'
chent. Ainfi par des effets merveilleux,
traits aigus <& remplis de flammes percent
brûlent en mefme temps les cœurs des mifer^'
bles Amans. Cette dodrine eft tirée de Pl^'
ton, qui veut que les bleffures d'Amour foief^*·
certains rayons extrêmement fubtils , ^aro^
au cœur, qui eft le fiége d'un fang tres-douX·^
tres-chaud, fi bien que les yeux de l'Objet aii®'^
s'ouvrant un paflàge en ceux de l'Amant, P^'
nétrent dans le profond de fon cœur.
■ Voila leraifonnement du Divin Philofoph^^
aiïèz conforme à l'opinion de l'ancien Po^'
Mufée , qui le premier de tous met dans 1
yeux la fource d'Amour, d'où il dit que
naiii®"
-ocr page 218-"^iiiflancc celle que Lcandre avoit pour He-
ro.
Efi effet les beaux yeux ont des flammes voïaw-
tes,
Ouplûtofi des éclairs pleins de feux l^· de dards,
Qui foui fetiiir au cœur les ardeurs violentes
Des amoureux regards.
Γ)ο cette vérité demeurent d'accord avec
Mufee, tous les autres Poëtes qui ont écrit de
'Amour en diverfes langues ; tellement qu'il
'le me feroit pas difficile de me prévaloir de leur
^uthorité, fî je l'avois entrepris: mais au lieu
m'amufer aux preuves d'une chofe, qui eu
'^fîpeubefoin, & que les Hommes apprénent à
dommage; il eft bien plus à propos que je
'^■Ur confeille de fermer les yeux, que de les
Ouvrir pour des Objets quiles peuvent perdre.
Qu'ils fe fouviennent feulement, que la beauté
la pomme, fi-toft que noftre première Mere
l^uftveuë, attira la commune ruine du Genre
^urnain; qu'on n'euft jamais vû les eaux du
j-iel fe déborder fur la Terre, & faire,un De-
'^ge univerfel, fi les lafcivetez de l'œil n'en
Surent efté la caufe : que ny Themnata la belle
^hiliiline , ny la fameufe Dalila n'euflènt pû
Vaincre Sanfon, que l'on croyoit invincible,
^ '1 ne les euft trop fixement, regardées : que
t'our avoir vû la belle Berzabée dans le Bain, le
plus fage Roy de fon temps fe pervertit. Et que
'^^ûs les yeux de Cléopatre s'alluma l'amour
^"e Marc-Antoine eut pour elle, amour con-
|3gieufe & fatale à ce malheureux Amant au-
ant qu'elle fut glorieufe &profitableauvido-
'^ux Augufte. A tous ces exemples j'en pour-
H 2, rois
rois joindre quantité d'autres, fijen'avoisft''·
deiTcin d'expliquer fuccintement ces fig"^'
res, plûtûft-que de m'arrefter à de longs raifo''"
nemens.
;·>, ffe ii's ί·:'5 .<15, · iîîj ,-·:?,
ON le reprefente par un Enfant couroD'
né de pavots, qui a des ailles,
d'une fontaine, au bord de laquelle font écri^
ces mots, F ο ν s C y ζ i c i, dort nud fur ^
Terre, où il vient de rompre fou Arc & fes
ches. et
Les aifles que nous donnons à cet Enfa''
font des Symboles d'Oubly; qui font voir
l'Amour n'efi: pas toûj ours fi bien imprimé
le fouvenir de ceux qui aiment, qu'il ne s'^'^'
fuye & ne s'envole quand on le fâche. A ^^ ν
toutefois s'oppofent quelques Auteurs ,qui
tiennent que ce n'eftpasluy qui s'enfuit, i",®
plûtoft l'Amant volage. Comme en efÎ^y
pour fuivre les divers mouvemens de fon An^ '
il s'abandonne àPinconilance, ànepeiaft^O
en arrell: fes penfées.
Nous peignons icy l'Amour endorrny, Pf^^
ce-que les Amans n'ont pas plûtoil ^ν^Ψ^ο
Sujet aimé , que les fonâions de leur A^r^
femblent entièrement aiïbupies ; de
qu'autant qu'ils ont efié ardens après la po'ii"^
te de la Beauté defirée, autant deviennent-i'S^.jj
ches,quand ils défefperent de la conqueite qWj^^
s'imaginent de pouvoir faire.
, Le pavot dont cet Enfant efl: couronné, lig-
nifie le fommeil & l'oubly ; car cette Planta
Produit d'ordinaire ces deux eftets en la perfon-
^^e dé ceux qui en ufent par excès. Or eft-il
Wil n'y a cekiy quinefçachebicnquelefom-
'feil & l'oubliance ont une conformité fi gr^n-
qu'ils font comme inféparables. Le Foc-
Euripide nous apprend cette vérité, lorfqu'il
f^int qu'Orefte leur attribue la caufe'du relâche
^ue fa fureur luy a donné, & qu'il en remercie
'Un & l'autre quand il s'écrie,
Seule caufe de mon repos,
Sommeil, à qui je porte envie
0 que tu me viens à propos,
Pour adoucir les ennuis de ma vie!
Et toy, doux Ouhly des malhettrs,
Deite'fage isf vénérable,
0 que tu faà tarir de pleurs.
Et qu'aux Mortels ta mainefcfeconrablel
Or ce qu'il y a de plus remarquable en ces
Vers, c'elt que ce Grand Poète appelle fage&
Vénérable l'oubliance des maia, pour mon-
^fer combien font dignes d'honneur & de véné-
•■ation ces perfonnes généreufes, qui fçavenr
Oublier les paffions déréglées, au contraire de
^ss autres qui s'y abandonnent entièrement ; &
^ui font gloire de leurs fcnfualitez plus que bru-
,, Quant à la fontaine de Cynique, ainfi appel-
as d'une Ville de ce mefme nom, que les Géo-
Si^aphes difent eftre laNatolie , ce n'ell pas fans
^aifon qu'elle eil icy mife pour un Symbole
^ oubly ; car s'il en faut croire Pline,elle avoit la
propriété de faire perdre le fouveiiir de la chofe
H 3 ai-
aimceà tous ceux qui beiivoient de ion eau J
que je tiendrois pour fabuleux, fiPaufeniase^
fes Achaïques n'attribuoit une pareille vert^^
la Rivière Seîiienne.
Quelques-uns voulant fîgniiîer l'oubly a^®
Mères eiivers leurs Enfans, peignentune F^ffl'
me qui porte pendue au cou en ibrme de joyaU»
la pierre que les Grecs appellent Galathits·, &
là main droite an œufd'Auftrache. ^
Cette pierre dont Pline fait mention ,
fort à propos attribuée à la Femme dont nfU
parlons, parce-que félon le mefme Auteur,'
elle a une fecrete propriété d'augmenter le
aux Nourrices, & pareillement de faire pei'"·^®
la mémoire des chofes paiTées. Telleme"''
que par'une façon de parler figurée,
pouvons bien dire des Mères qui oublie^''·
leufs Enfans, qu'elles ont au cou la pierre Gala'
thite.
Pour la meime raiibn encore on les coinP^-'^·'
aux Autruches, qui pour faire éclorre lei'^^
œufsenEfté leseniëveliiTentdans le fable,
un peu après ne fe iouviennent plus de J^'
y avoir mis: ce que -le patient Job remar-
que fort bien , quand il s'écrie. UAutruckJ
hifie fes (εφ à terre ^ ^jf les oublie, auhaia'^^
■lesfouler aaxfieds.
paî^·
-ocr page 222-ICONOLOGÎE.
^slâlâJlllâââsliyiâ^ââââ
PAIX. CXV.
ELle nous eil: reprcfentée par une Fem-
me agréable qui a "fur !a teile une Guirlande
^'olivier, en la main gauche uns Corned'A-
l^ondance, & des épies en la droite.
Il n'eft pas difficile d'expliquer cette figure,
Puiiqu'il n'y a celuy qui ne fçache, que l'oli-
vier & les épies font les vrais Symboles de la
Paix, la Terre ne produifant abondamment
^s olives ny des grains, qu'aux lieux où cette
Dc'eire permet aux Hommns de la cultiver,
Cefl en la Pa'jx que toutes chofes
Succèdent félon ms déjirs ;
Comme au Printemps naijfent les Rofes,
En la Paix naiffent les pÎaiJirs
Elle met les pnmpes aux vi'des^
Donne aux champs les moijfom fertiles
Et de la majefié des Loix
.j^puyant les pouvoirs fupre'mes,
Fait demeurer les Diadèmes
Fermes fur la tefie des Rois.
C'eft pour cela que dans les Fables des Poc-
la Deellè Minerve eil loiiée par Jupiter,pour
inventé l'olivier ; comme Neptune l'eft
^^^Œ, à caufe que ce fut luy qui le premier de
^Us aprit aux Hommes l'Art de dompter les
^hevaux, l'un pour l'ufagc de la Paix, & l'au-
'e pour le foûtien de la Guerre, quifelapro-
P'-3ie pour but ordinairement.
H 4 Et
-ocr page 223-^a.Xic
-ocr page 224-Et parce-que la Paixatoûjourseftélesde''''
ces des Peuples, auffi ont-ils pris plaifir de rc
préfenter divcrfemcnt les biens qu'elle produit·
Si cette vérité n'eftoit afilix forte d'elle-mefin'^ '
-je rapporterois icy quantité de preuves po'^
l'appuyer 5 & les Modernes m'en fourniroii'·^
abondamment. Mais je me tiens à celles
rAntiquité nous en a laiilees. eu plji^'^'^!^.
Médailles , qui fe voyent encore aiijoura'
huy. .
La premifre eilcelle d'Aiigufle, oùeneej_
gravée tenant d'une main une branche d'olivi^'^
parce-qu'elle adoucit les Courages les plus
gres; & de l'autre un flambeau, dont elleb^'^
k un trophée d'Arm.es , pour figniiîer Ρ^Γ
là , qu'elle anéantit toutes les vieilles
mitieT,, fur le point mefme qu'elles ièmblent r^'
naiftre de la cendre de ceux qui les ont fonî^i^'
t^s durant leur vie.
La fécondé eil celle de Philippe, qui luy^ γ'
tenir une lance en main, pour montrer qu'e'*
eiîacquife par la valeur propre, & par lato''''
des Armes.
La troiiiéme eil celle de Vefpaiîen, oùe'l^
iè fait remarquer par un Caducée, & pai''^'^
Corne d'Abondance.
La quatrième eil celle de Titus, qui
préiènte en Femme guerrière , tenant d'ufl^
main une palme, pour recompenfer les vef
tueux ; & de l'autre une Hache d'/^t»^^^'
pour en punir les coupables auffi eft-iî
que l'Efpérance & la crainte font les deux
les du Monde qui peuvent le mieux établn' *
Paix ,· & la conicr^'er parmy les Hommes-
La cinquième eft celle de Sergius Galba, où
fille fe voit affifeenunTrône, pourune mar-
que de fa tranquilité merveilleufe, & appuyée
fi-ir une maiTuë, après s'en eflre fervie comme
Hercule à puiïir l'audace des Méchans, qui ne
iemblent eftre nez que pour troubler le repos
des gens de bien.
La iîxième eft celle de Claudius ,■ reprèièn-
tant une Femme qui s'appuye fur un Caducée
enveloppé d'un effroyable Serpent, & qui ië
Couvre les yeux de l'autre main,, pour ne luy
Voir point répandre fon venin ; où il eft à re-
marquer qu'on luy donne icy fort à propos le
. Caducée, ainfi dit du verbe Latin, caàere, qui
fîgnifie tomber, piircc-que cette Enfeigne de
i'aix ne pariiToit pas plûtoft , qu'elle abatoit
toutes fortes de difcordes & de divifions, de
quelque nature qu'elles fuflent. Que fi elle fe
Voile les yeux, c'cft pour montrer que la Guer-
re qui eft figurée par le Serpent, adesobjetsii
tragiques, qu'ils font horreur la plupart du
femps à quiconque les fçait bien conlidërer : ce
qui fait que le plus illuftre de tous les Poètes
s'écrie à bon droit,
Vien mus donner fitr la "Terre
La Paix que nous demandons·,.
S'il efl vray que de la Guerre
Rien de bon nous n'attendons^
H f
îgS I C ο Ν ο L ο G I Ε.
PMSmONIE, ou EPARGNE. CXVl·
CExte Femme d'un âge viril, &modc-
ftement veiîuë, tient de la main droite uii
"Compas, & de la gauche une bourfe fernie^
pleine d'argent, avec un rouleau, où font éct'-'
tes ces paroles. In melius servat ,
ψάά\ϊθ\ΐ^ε11ο le garde pour le mimx. _ .
Il faut bien que la mode'ration foit le prin·-''
pal but de l'Epargne, puifqu'elleconiîûepr!"'
cipalement à fuïr les dépenfes fuperfluës, eu
tenant dans les bornes d'une jufte médiocrité^
c'eft elleauffi qui des quatre parties de laPr^'
dence, ncceflaires à la confervation desbief^
du monde, en pofîede trois : car félon Plut^'·'
que, elle fçait l'Art d'agir prudemment dai^
le ménage, d'accroiftre fes commoditez,J·^
de les conierver avec honneur. Eichines i^·'
foit à ce propos, que de la façon qu'il vivoitj
n'empruntoit rien à ufure que deiby-meiin'^.^
parce-qu'au lieu de la dépenfe qu'il pouvoit ti^·'
rc, il le refierroit étroitement dans l'uiàgc"
fon bien ; en qnoy véritablement il fe r^S^'
par le confeil d'Ariftote, qui recommandai''^
l'épargne aux Communautez, ou aux
bliques ; 11 faut, diî^l, que chaque Vi'-
fçache premièrement l'Eiîat de fon revefl^i'
puis celuy de fa dépenfe, afin de la retranche'.^
lî elle eil fuperfluc. Car pour fe maintenirr'^
che, il ii'cft pas moins utcciraire d'épargnev^
bi'·"'' '
-ocr page 227-t>ien, que de l'accroiftre par fa propre induftrie.
Λ cet avis d'Ariftote fe rapporte encore celuy de
Séneque, quand il dit, qu'il n'y a point de ri-
cheifes aflez grandes, ny qui foient capables de
ïious aflbuvir, fi pour en ufer comme il faut
tious ne fçavons recourir à l'épargne.
Or ce qu'elle eii peinte en l'âge viril, eil
pour faire voir qu'en ce temps-là l'Homme eil
rendu capable de raifon, & de joindre égale-
ment l'utile à Fhonnefte.
Son habillement efl: fimple & fans aucune pa-
rure , pour montrer qu'elle eft ennemie de tou-
te depenfe fuperfluë: car elle fe plaifl: à profi-
ter de cette leçon de Saint Ambroife, qu'il n'y
a rien fi néceiîaireàlavie, quedebienfçavoir
connoifire ce dequoy elle a befoin.
Le compas qu'el le a en la main droite, figni-
fie l'ordre & la mefureqvi'il faut tenir cntoutes
choies. Car comme cet inftrument de Mathé-
matique ne s'éloigne point de fa circonférence,
l'épargne de mefîne ne fort jamais des limites
de la raiibn, ny de celles desThonnefteté.
Quant à la bourfe .qu'elle porte en l'autre
main, avec ces mots, In melius ser-
V A τ, cela veut dire, que ce nous cil un hon-
tieur beaucoup plus grand de conferver ce
<^ue nous avons, que d'acquérir ce qui nous
manque.
/
H 6 ' Ρ J S~
-ocr page 228-iSo ICONOLOGIE.
Ois!
PASSION D-'JiMOVR. CXVH·
CE τ τ Ε Femme qui tenant d'une mii"^
une baguette, & de l'autre une coupe'
^voit en l'im de fes coftez un monceau de ρΐ^"^'
res, & en l'autre plufieurs Animaux farouches?
tels que font des Lions, des Ours, des S'a»'
gliers, & aurres femblablesquireiivironncnti
cft prife pour'la Paffion d'amour, fous le no"^
de la Magicienne Circé, ii fameuiè dans
Ouvrages des Poètes.
Elle tient une baguette à la main, pour rvoO'
trer qu'elle eft capable de transformer les Hon^"
mes en Beftes, comme il arriva aux ComP^S'
lions d'UlyiTe, fi-to(t que cette Sorcière, dont
pârle Homere, les eut tant foin peu toud"^^
l'un après l'autre.
Dilbns eniuite, que par fa coupe dangéi '^^^'
fe, font defignez les philtres d'amour, qu'il
faut pas moins appréhender que le fuc de ces
Plantes venTmeufes, dont Circé changeoit s"^
pierres & en Beftes ceux à qui elle en donnoif^
boire, comme il eft bien montré par la
defcription que Virgile & Ovide en ont
Par où nous femmes tous avertis, que ce 1 )''
ran de la vie qu'on appelle Amour, aflùjet^i^
ordinairement fous fon empire ceux qui P'®!?'
geT, dans l'oilivetéfe laiilent farprendre lâ-
chement au gouft des chofes plaiiàntes ,
^ni par faut pas objets eiichantent lesSe^^^J,;
et·
-ocr page 229-^ie manière qu'il ne faut pas s'étonner fi
'ar des appas fi dangereux il leur aveugle
'Efprit, & leur ofte entièrement la raiibn;
Car l'expérience fait voir ; qu'il rend leurs in-
clinations brutales, transformant en Ours les
liommes colères, les charnels en Pourceaux,
les envieux en Chiens , les gourmands en
Loups, & ainfi des autres.
PATIENCE, ex VIII.
CE τ τ Ε pauvre Femme, dont les épau-
les foûtiennent un pefant joug , & qui
foate défolée tient les mains jointes, & mar-
che iùr des épines, fignifie la Patience , qui
tie
peut mieux eftre définie, qu'une invincible
^ertu que l'on témoigne à fupporter les dou-
ceurs du Corps, & les travaux de rEfprit, qui
^ont figurez par des épines.
Quant au joug, il démontre le mefme, &
'lous apprend qu'un des principaux effets de la
force eft de fouffrir courageuferiient laj.fervi-
Me quand la néceffité le requiert. A raifon
^cquoyCaton, bien que fort avifé d'ailleurs,
^^t néanmoins taiu pour lâche par les Sages,
Pour s'eftre voulu donner la mort, plûtoil
Sûe de vivre fous l'empire d'un Tyran.
, Quelques-autres la peignent au pied d'un
^Çucil, d'où diftillent peu à peu des goûtes
'^'eau lùr de fortes chaînes, dont elle a les
^i'iins liées.
eft marqué par là, fi je ne me trompe, qu'il
eft
-ocr page 230-eft fort difficile qu'un Homme qui fe doanc
la patience d'attendre, n'ait à la fin un
fuccés ; car quelques perfécutions que foufir'^"
les gens de bien, leur mérite reçoit tort ^^
tard la recompenfe qui leur eft deuë ; ^
le prendre au pire, quand nous ne pourrio»^
en cette vie nous acquérir la liberté délire^?
& quand mefme i] nous feroit impoiTible
parvenir par une longue foufirance, qui
pas moins de pouvoir quelquefois de diflip^^
les ennuis, qu'en a la force de l'eau de con-
fumer celle du fer, fi ne faudroit-il pas t'-"?'
tefois perdre courage , mais nous iôuvei^'-
toûjours de la promeiFe qui nous eft faite pa^
J Ε s υ s-C h R1 s τ, quand il nous recomnia"^
de fur toutes chofes, de pojféder nos amcs en f^'
tience ; auiii a-t'il accoutumé de ne châtier eii
cette vie que ceux qu'il defire recompenfer ^^
Fautre.
Ρ AVV R ΕΤΕ\ CXIX.
CE τ τ Ε forte de Pauvreté dont il cùj^l
queftion, s'entend de celle qui empeic"^
les grands Eiprits de parvenir. Elleeflfigi^'''^
par une Femme mal veftuë, qui a la
droite attache'e à une pierre pelante, & es ^^
gauche des aillerons ouverts, comme γθθ
'attirer en haut.
L'on appelle Î'auvrete' le manquement cC
chofes qui font néceiTaires à l'Homme po'·^
^ ' IcO-
^'entreténemcnt de fa vie, àmeimepourFac-
^(liiition des vertus.
Les aiilcs de la main gauche fignifient l'ex-
j^êiTie deiir qu'ont ordinairement les meilleurs
Efprits de s'élever aux plus hautes connoiffan-
^es; ce qui ne leur feroit pas difficile, fi la Pau-
vreté , qui leur eftun fardeau plus iniùpportable
^ue la pierre de Syfiphe, nelesabaiiîôitàme-
ftre qu'ils penfent prendre leur vol : ce quieil
^^aufe que par une certaine néceffité, qui iem-
^le fatale à plûpart des honneftes gens, ils
^roupiiTent dans la boue, & deviennent le j oiict
^es Ames vulgaires :
Car fans ie revenu Ρ étude les abttfe
EtrEffritnefepaifideschanfoKS de làM-ufi.
FECHE. CXX.
C Ο m m ε il n'eft rien de fi effroyable, que
ce pernicieux ennemy de l'Ame, ce n'eft
Pas fans raifon qu'il eft icy peint fous la for-
'Hc d'un jeune Homme, horrible à voir : car
^vec ce qu'il eft aveugle & tout nud, il a fur
tefte des Couleuvres au lieu de cheveux,
fon cofté gauche un gros Ver qui luy ron-
Se le cœur, & au milieu du Corps deux Ser-
ions qui le tiennent étroitement ièrré : outre
Sic'à voir ià pofture il femble marcher fur des
•"ochers raboteux, & penchans en précipice.
, On repréfente le Péché jeune, & aveugle,
® caufe qu'il eft commis avec imprudence &
yeus fermez, comme n'étant anîre chofe
de
-ocr page 232-de iby-mefme qu'une tranigreffion des
par qui l'homme mal-avifé s'égare du
' chemin de la vertu.
On le peint noir & tout nnd, dautant q^j
ce Monftre difforme, nous dépouillant de
grâce, & du bien le plus folide du inond^J
nous met au hazard d'eftre précipitez dans
abîmes de la mort éternelle, fi nous n'av®"
promptement recours à la contrition & ^
pénitence.
Il eft environné de Serpcns,à caufe que ce 1Γ
ran a accoûtuméd'aflujettir le Pécheur fou^
fervitude du Diable, noftre commun EnncniJ '
qui cherche fans ceiTe à nous féduire par ^
fauiTes apparences, fe promettant toujours J
meime iliccés qu'il eut avec noftre preini'^^
Mére. , .
Quant au Ver qui luy ronge le cœur, c ^ *
ceîuyde laConfcience, où ièlonîes Théol"'
giens, la Conicience mefme qui le bourelle
ceire,& qui par des fynd'refesfecrétes luyi^i^
fentir des foiiets & les flambeaux que les FÇ^'
tes ingénieux ont mis entre les mains des f
ries pour le commun châtiment des méchanS·'
qui font gloire de leurs crimes .
Or comme la punition fuit ordinaireiTiei"^ ^
Péché, je ne penfc pas qu'il foit hors de prop^
d'en faire icy le Tableau, tel que nous l'avo"^
de quelques Anciens. Ilslarepréfeutent doii
par une Femme extrêmement laide, toute dT
chirée, mélancolique aupoffible, quifaitd^^j
tranges grimaces à force de crier, qui tient "
foiiet d'une main, & qui fe foûtenant fur
jambe de bois, femble defcqndre dans
grande Caverne.
ICONOLOGIE. 185-
Entre la pénitence δε la peine il y a cette
iftérence particulière, que la pénitence s'en-
gendre par le confentement de l'Homme qui
fe repent des fautes paiTées;, au lieu que parle
Jugement de Dieu ou des Hommes, la peine
pft impofée aux Pécheurs, iàns quetoutesfbis
'is foieni touchez de leur grand malheur, ny
celuy de fatisfaire à leurs ofFenfes par des
c®avres méritoires..
Pour faire donc voir les circonftances &
'es effets de la Peine, on la peint diflorme,
& en eftat de crier, comme fi elle fe vouloir
porter à la refiftance, ou fe vangcr fi elle pou-
voir , de ceux qui l'ont condamnée.
On liiy donne un foUet à la main , & une
kmbe de bois, pour montrer qu'elle n'agit
Point de la propre volonté, mais par la force
^u'on luy fait; & que par un fecret jugement
^e Dieu les Hommes font fouvent conduits
^u précipice, pour un jufte chaitiment des fau-
tes qu'ils ont commifes» .
Si.
PENITENCE. CXXI.
IL feroit difficile, à mon avis, de la mieux
repréfenter que par cette figure, qui eft cel-
d'une Femme extrêmement iTiaigre, mé-
lancolique, & fort mal veftuë. Elle tient une
'iifcipline en une main, un Poiiïbn en l'autre,
Gril à foncofté, une Croix devant, & les
yeux fixes ax\ Ciel.
La
-ocr page 234- -ocr page 235-La Pénitence, qui eft une douleur des pécher
commis, que l'on reffent plus pour l'ainour a^
Dieu, que pour aucune crainte de la pein^'
contient en C^y trois parties principales, ^^^
font la contrition, la confeflîon, & la fai"^'
fadion. La premie're eft lignifiée par ion vi'
fage blême & mélancolique. La féconde,p^"^
fes yeux élevez aa Ciel, pour un témoign^S^
du pardon qu'elle demande à Dieu. E' ^^
îroiiiéme, par le gril, inftrument proportion'
né à la peiiie temporelle, par qui fc
encore le mérite de cette vertu qui nous
fie. Ajoûtons à cecy, que comme le gril^^'
un milieu entre le' feu & la chofe que
cuit ; la Pénitence de mefme en eft un aitt^
entre les douleurs du pécheur & l'amour
Dieu, qui en eft le motif.
Pour ce qui eft de la difcipline & dupoiuo"
qu'elle tient en fes deux mains, cela iïgn'".^
que la pénitence pour eftre faiutaire, fe
ailiîiibnner avec le jeûne & la contrition.
Par la Croix encore il faut entendre la P^'
tience, & la correâion de foy-mefme, po'^^
la conformité merveilleufe que le pénite"
^'acquiert avec J Ε s υ s-C h R i s τ, en renon-
çant au.x vanitez de la Terre: àquoy ileft^'^'
horté par ces paroles , Qui veut eilre mo"
Difcple, qu'il porte fa Croix, Ss' qu'ilmefui'·"·
I C ο Ν ο L ο G I Ε. 187
PERIL. GXXU. ■
CE υ χ qui fçavent par expérience, com-
bien les dangers de la vie font ordinai,-
■^cs, n'en peuvent avoir éprouvé de plus grands
Su'en éprouve ce jeune Homme que nous;dé-
Peignoas icy. De quelque-coftéqu'il le tour-
ne, il fe voit menacé d'un péril inévitable. .
Loriqu'il foule aux pieds les fleurs & les hér-
ites , il marche Car un Serpent qui luy mord
'il jambe par derrière. Que s'il veut aller
plus outre , il voit d'un coilé un précipice ou-
vert devant ïuy, & de l'autre un furieux tor-
''ent qui l'épouvente. En ces facheuics ei-
'fémitez il n'a pour tout appuy qu'un freile
•Ofeau ; & fi fes yeux fe trouvent effrayez par
''es objets fi faneftes, fés oreilles ne le font
Pas moins par le bruit d'un horrible tonnerre,
5li perce la nue,, & en fait ibrtir peile-mefle
''éclair & la foudre.
Bien que la vie du Jeune ibit auiîî incertai-
que celle du Vieillard, veu que Dieu dit
^^'néralement à tous, T'enei^-vous prefis, pmf-
ψε -pous ne fçave'L· ny le jour, ny Vheure ; il
^Voit néanmoins que le Jeune eft en plus
P^nd danger que le Vieillard, à cauiè que
^ vigueur de fon âge, qui le rend naturelle-
Jfnent hardy, le porte à fe précipiter dans les
'^^'"iîs, fans qu'il femble les appréhender.
La
piqueure que luy fait le Serpent, lorf-
Wil y peniè le moins, & qu'il marche fur les
fleurs
-ocr page 237-fleurs, apprend à l'Homme,qu'au point
s'imagine que la Fortune luy rit le plus
éprouve tout le contraire, & fe voit eU.
moment expofé à quelque avanture trag'1
& inopinée.
Par rofeau qui luy fert d'appuy, ei'
montrée la fragilité de noilre vie,
ment en moment eit agitée de nouvelles te^^
-peftes ; ce qui procède aiTeurément de t
prudence de l'Homme, qui fe fonde la
part du temps fur des choies caduques & R ■
riiîàbles, au lieu de s'appuyer fur celles 1
ont une affiette ferme & folide. ■
En un mot, la foudre qui ménace ce ^
ferable jeune homme,, fert à nous appr^fi"
que nous ne fommes pas feulement ex^l
à un infinité de dangers, &fur laTerre&j^,
l'Onde; mais fujets encore aux influences^*: '
Cieux, félon qu'il plaift à Dieu de les
agir ; car il permet quelquefois que nous 1 ■
yons châtiez pour nos démérites , qui ^ .
caufe des diigraces qui nous arrivent ;
certain, comme dit faint Paul, Que le
engetidre la mort : d'où il faut conclure, ^^^^
les PuiiTances humaines , quelques gJ^'^iaV
qu'elles foient, ne peuvent s'oppofer à cel I
qui a mis des bornes, & donné des Lo'^
toutes les chofes qu'il a créés.
ρΕΓ^'
-ocr page 238-C'EsTuneDame extrêmement belle, &
qui porte au cou une chaîne d'or, ou pend
œil au lieu de joyau. Avec cela elle tient
^ la main droite une régie, un équiere, un
^onib, un miroir, & en la gauche deux Li-
Jes, qui portent pour infcription le nom de
•^tolomée, & de Vitellion.'
Comme cette partie de Mathématique n'eft
î^^s moins charmante que merveilleufe, auffi
^ft-elle repréfentée par une Femme extrême-
ment belle. Et parce-qu'elle tire fon noiri
la veuë, elle porte un œil attaché à un
^Vnon, eftant véritable qu'elle fe fonde en-
'^rement for les efpéces vifibles.
Gela fe démontre encore par les divers inf-
''iiniens· qu'elle porte en fa main, quiibnt
^oir fes différentes opérations. Mais elles iè
P^piarquent fur tout dans le miroir , où il ic
pit refléxion des figures droites : fi bien que par
^ repercufTion des rayons & de la lumière,
' ?ette Science fiiit voir des chofes merveil'eu-
jf^ies, & qui paiîent pour enchantemens dans
Efprit de ceux qui n'en fçavent pas la raifon.
ïS>o I C ο Ν ο L ο G î Ε.
PERFECTION. CXXH^·
Ε' Lle eft figurée par une fort belle Dai"'^^
, veftaë de gaze d'or, qui a le fein àéco^'
vert, & le Corps dans le Zodiaque. Pourei»®
plus libre en fonaâion, elle a les brasretroui-
fezjufqu'au coude, & fait un cercle entier ave
un compas qu'elle tient de la main gauche·
Son habillement eft d'or, à caule que
métal eft le plus parfait de tous : & ià go^ê^
découverte, pour fignifierparlàune des pr'^'
cipales parties de la Perfeâion, qui eft de ao^j'
rirautruy, & d'eftre toujours preft à faire «
bien à fon Prochain ; car aflèurément c'eft 'J"
chofe beaucoup plus parfaite de donner qu^,^
recevoir ; & voilà pôurquoy le fouverain
, teur, qui eftlaPcrfeaionmefme, donne
cefiè, & ne reçoit rien de fes Créatures.
Elle fe fert d'un compas à faire ma ctïà^l
parce-que cette figure eft la plus parfaite de 'î'^
tes celles des Mathématiques. Ce que les
ciens vouloient montrer, félon Pierius, M
qu'après avoir facrifié ils faifoient apporter i
l'Autel un grand Cercle, qu'ils trempoient
k fangdelaviâime, avec beaucoup de veii
ration & de cérémonie : par où ils roarquo' _
la Perfeflion, comme par le cercle du '
^ue, qui eii eft encore le vray fymbole.
PERSUASION cxxv.
IΕ Ν que cette figure femble bizarre, elîc
-O ne laifle pas toutefois de fignifier beau-
^oup de chofes par cette Femme qu'elle re-
fréfente.
Son habillement efl: auffi modefte que ià
'^'^ëffure femble eftrangére, parce qu'une lan-
y eft attachée avec un œil au deflbus.
, Elle eit au refte liée par tout le Corps avec
cordes d'or , & en tient une des deux
pains, à laquelle eft attaché λΐη Animal à
/ois teftes, à fçavoir d'un Chien, d'un Chat,
d'un Singe.
Ce n'eft pas fans raifon, qu'en fa coëiFure
jl' peinte une langue, eftant comme elle eft
j .principal inftrument de la Perfuafion. A
®'fon dequoy les Egyptiens la peignoient,
montrer ce que peut la parole parlafeu-
. 9ide de la Nature.
j Et dautant que l'exercice & l'Art agiiîent
^^fîî beaucoup à la Perfuafion, ils donnoient
Entendre cela par un œil qu'ils faifoient un
fanguin ; car comme le fang eft le iîége
l'AiTie, ainfi que l'ont creu quelques an-
'ens Philofophes ; la parole de mefme l'efi
adions, quand elle fçait Fart de bien
φ primer une penfée: Et comme l'œil fe peut
la fciieftre par où l'Ame voit; la parole
une auffi, par où elle eft veuë des autres.
Les
-ocr page 241-Les cordages d'or qui luy ceignent le corps»
montrent que par la force de réloque»''^
l'Homme peut lier en quelque forte les volo'-^J
tez d'autruy & les tenir en arreil par le
yen de la Perfuafion.
L'Animal à trois tefies fignifie que troi^
chofes fout néceiTaires à celuy qui veut p^''
iùader quelqu'un. La première , de s'jn',
nuer en la bienveillance de fon AuditeiJlJ
ce qui efl: exprimé par le Chien, qui
& careflè pour fes intérefts. La féconde,
le rendre docile, en luy faifant nettein^'^^
comprendre ce qu'il luy veut periuader:
quoy fert d'exemple le Singe , parce <f ■
femble eflre celuy de tous les AnimduX 1
comprend le mieux les penfées des
mes. Et la troifiéme, de le reduire à
attentif, à l'imitation du Chat, qui l'edg^^,^
dement en tout ce qu'il fait. Or ce
tient ferme avec les deux mains la corde a
quelle cet Animal efl: attaché, eft pour
trer que fi l'Orateur ne fçait agir avec ^
conditions que je viens de dire, ou il
gne rien du tout fur l'Efprit de fon A"
ou du moins il n'avance pas bc
teur,
coup.
PIETE. CXXVI·
" ο υ s la repréfentons icy après g
Fe.:
X ciennes Médailles , par une ·*-, jjC!
extrêmement belle, qui a le teint fort c»^ ρ
I C ο Ν ο L ο G I Ε. 19S
yeux à fleur de tefte, lè nez aquilin, des
flammes au lieu de cheveux, des aifles au dos,
Ja main gauche du coilé du cœur, & en la droi-
te une Corne d'Abondance, d'où tombent di-
Verfes chofes qui font utiles à la vie Humaine.
L'on ipeint fon vifage tel que nous venons de le
décrire, parce qu'en effet il efl: ainii dépeint.par
Ceux qui s'entendent à la phyGonomie.
Elle eft veftuë de rouge, comme fœur qu'el-
le efl, & compagne -de la Charité, à qui cette
Couleur eft grandement propre^ pour desrai-
fons qui font coramunes dans les Ecrits des
Rhilofophes Moraux.
Gn luy donne des aifles, pour montrer la
iHerveilleufe viteilè de cette vertu par deilùs
toutes les autres, en ce qu'elle ne ceffe de voler
de Dieu à la Patrie, delaPatrieauxParens, &
desPareHs à nous-.meûnes.
Par les flammes qu'elle a fiir latefte, il eft
déclaré que l'Efprit s'embraze de l'Amour de
t)ieu, plus il s'exerce à la Piété, qui afpire na-
turellement aux chofes'céleftes.
Par lamain gauche qu'elle a iurîe cœur, que
l'Homme doué de cette vertu donne des preu-
ves de fa charité par des œuvres généreufes, &
qui font faites avec fincérité , fans oftentation,
iiy fans défir de vaine gloire. Quelques-uns di-
rent à ce propos, que pour ofter toutes fortes
d'ombrages à la piété d'Enie, Virgile Se les
autres Poètes affùrent que les plus grandes ac-
tions de pieté furent par luy faites durant la
Suit.
Par la Corne d'Abondance,que toutes les fois
<iu'il eft queftioa de faire des œuvres de pieté, il
I. l'art. I ne
ne îaut point^enir compte des richeiTes nio»'
daines, maib en affifter libéralement ceux
l'on fçait en avoir beibin.
Quelques autres nous figurent la Piété P^
une Femme qui tient une Cigogne de la
droite, & de la gauche une Epée, dont
s'appuye lur un Autel, ayant un Eléphant d'ui^
collé, & un Enfant de l'autre.
•. Par la Cigogne eft démontrée la Piété q^
l'Homme doit rendre à fes Pére & Mére ; ^
par l'Enfant, celle qui fe doit à Dieu, à laP^'
trie, & à ceux qui nous ont mis au Monde»
dequoy la Cigogne eft pareillement un vw
fymbole, pour les raifons que nous avens
tes ailleurs.
Or dautant que l'Homme qui poiTéde coî^"
me il faut cette vertu, fe doit expofer à tou
périls pour l'amour de la Religion; c'eft po'J.
cela qu'on luy fait tenir fur un Autel une Ep^
en main.
Pour ce qui regarde l'Eléphant, l'exempj
en eft tiré de Plutarque, qui dit que dans
•Ville de Rome, quelques Enfans ayant par m^'
niére deje i piqué la trompe de cet Anim®'»
il en prit un entre les autres qu'il voulut Iîî^^'
.cer en l'air; mais comme il vit que fes
pagnons, qui le tenoient déjà pour mort,
mirent à crier, il le pofa doucement à terrÇ»
fans luy faire aucun mal, & fe contenta de
peur qu'il luy avoit faite pourpunitiou'^^!^"
audace.
I C ο Ν ο L ο G I Ε. ig,-
fLAlSIR ou rOLXJP'ïm. cxxvn.
ι Ν la repréiènte par un jeune Garçon,
^ ' qui a les cheveux crépelus & de cou-
leur d'or, une guirlande de inyrthe enrichie
de perles, le Corps à dcmy nud, des aifles
au dos, une harpe en main, des brodequins
d'or, & une Sirène à ies pieds.
Ses cheveux frifez & parfumes;, qui Te cou-
ronnent d'une guirlande de fleurs, font au-
tant de marques de lafciveté , de molleiTe &
de mœurs eliéminées.
Le meiÎTie fe doit entendre de ià guirlande
de myrthe, arbre dédié à Venus, qui en eut
Une couronne , à ce que difent les Poètes,
quand elle fe trouva préfente au Jugement de
i^âris.
Difons cnfuite, que par les ailles qu'il por-
te , il eft démontré qu'il n'y a rien qui yole
plus ville, ny qui s'évanoiiiiîè fi-toft que la
Volupté.
Et par la harpe, quekplaifîr efféminécha-
toliille les feus, comme fait cet inftrument ;
à cauiè dequoy les î'oëtes feignent que par
ion harmonie il plaitl à Venus & à fes Com-
pagnes les Grâces.
Ses brodequins d'or font remarquer pareil-
'ëment un Homme voluptueux, qui montre
Par là qu'il ne tient compte de ce métal, s'il
'l'en aflbuvit fes appétits déiéglez; ce qui iè
peut encore entendre de l'inconlbnce, dont
I ζ les
'^i-ecmineTU:^
-ocr page 246-ï C Ο Ν Ο L Ο G I Έ.
les pieds font quelquefois le fymbole, coin®^
David le démontre par ces paroles, >fies
fefoKtà peine remuez: par où il nous eftenfei-
gnéquele fenfiieliè porte volontiers aux noti-
veautez & aux changemens.
Toutes cesvéritez que j'ay dites font coJH'
prifes dans le feul exemple de .la Sirène·; car
comme elle perd les Mariniers par la douceur
de fon chant, la volupté de mefine parfesap"
pas & fes. charmes ruine miferablement tous
ceux qui lafuivent.
H y en a d'autres qui repréfentertt le plai^
du monde parun beau jeune Garçon, âgé d'ep'
viron dix-feptans. Il porte à la tefte unegu"^'
lande de rofes, & un habillement verd, av^c
quantité.d'hameçons attachez à un filet, &
Arc-en-Ciel, qui aboutit d'une épaule à l'autre-
II eft peint j eune, dautant que cet âge-là pl^^
que tous les autres, eit adonné aux plailirs, po^^
eiire comme un criftal tranfparent, au traver^
duquel toutes les delices-.du Monde paroiiÎ^'^'·
belles.
Son vifage agréable & riant montre
plaifir eft l'effet de la beauté : fa guirlande
roiès coniàcrées à Venus, que les volupté
fenfuelles, quelques douces qu'elles femblÇ"^
ne laiffcnt pas d'eftre frefles & peu durables»
& fon habillement verd, que cette couleur s a '
commode fort bien à l'humeur foJaftre
nés gens, parce qu'eftant plus tempérée q
les jâutrqs, entre le blanc & le noir, ou eo"
l'ol^fcur^ le clair, elle eft celle qui recrée p^^^
la veuë^ ce que les autres couleurs ne P'^'^^-jes
pas fi bien faire , parce-qu'elles tiennei^ L
Quaiît
.extVémitez,
-ocr page 247-Quant aux hameçons, dont il eft parlé cy-
^evant, ce font les ^ivers appas qui fe trouvent
dans les voluptez du monde. Mais ces dou-
ceurs font toujours· mellées de quelque amer-
tume; car il nous arrive enSn que l'Homme
fe fent piqué bien avant des aiguillons de fa
Gonfcience, & qu'il ne peut toutefois te refou-
dre à quitter les voluptez pafl'àgeres, qui font
icy marqSfes par l'Arc-cn-Ciel, parce-qucl-
les s'cviinouiflènt en un inftant, & n'ont riea
de beau que l'apparence.
mmàmàMsmûmmm
ÎRED Ε SÎl NATION. CXXVilL
IL n'eft: point de beauté comparable à cette
Vierge, qui n'a pour cacher fa nudité qu'un·
Voile d'argent , cncore paroift-elle à moitié
îiuë. Elle a les yeux tournez vers le Ciel, qu'el-
le regarde fixement, la main droite iîxr le feia
& ea la gauche une Hermine.
La Prédeftinationeft peintejeune,pouriine
marque de fon éternité, dont parle faintPauî
quand il dit, Qiiavant la création du Mo,de
Dieu nous avoitfrédeftine-L· àeslre Saints.
Elle eit belle, comme eftant la mefure &
l'idée de toute beauté; ce qui fait dire à Saint-
Thomas & à Saint-AuguftinQue la Prédef-
Pinatinn efi la pre'paration de la gracepourlepré-
[ent, de la gloire four le futur.
Le voile qui la couvre eil d'argent, dautant
que c'cit un myilcrc caché non-feulement aux
I 3 iiom-
Hommes, mais encore aux Anges, & à l'E'
glife mefme : à raifon dequoy fiiint Fai'
s'écrie ibuvent à ce propos, Que c^eftunchc
min fi feu battu ^ qu'il efl extrêmement diffi'^''
ie de le trouver.
Son aétion attentive à regarder le Cie'»
montre que k Prédeiliné doic ixiarcher par
voyes que Dieu luy a tracées, comme Je^^^^"
Chrift l'aiTeure luy-melme par cet paroles »
Ils ne pe'riront foint e'teraeUement ^ çjf ferjo'if^^
ne me les oficra de la main, ce qui doit eft^^
entendu des Pr.'deftinez.
Ce qu'elle porte la main fai' fa belle %ot·
ge , iïgtiifie que la Prédeftination doit eftr®
de grande eiBcace, non-feulement en la p"-'
fcience, mais encore en fes moyens, corn"^^
il nous efl: témoigné par ces paroles, Je frr^
^ue vous enfuivret, mes fréce^tes,
mes jugetnens^ zsfc.
Elle tient de plus une Hermine en l'autrs
main, pour une marque de pureté: carcoifl'
me ce petit Animal aime mieux mourir q^c
iè ibiiilier tant foit peu; nous voyons de
me que Dieu oftc la vie au Prédeftin^?
plûtoil que de permettre qu'il fc faliflé àci
ordures de l'oblHnation , conformément ^
ces paroles de l'Ecriture, Il a efiéemj^orté
;peHrque la rmlice ne changèafi fou Entendemei'^·
pre:^'
-ocr page 249-I C ο Ν ο L ο G I Ε. ig,-
ââ^âââiiââââââ^âââii
PREEMINENCE DE RANG. CXXÎX.
ELLEtiouseit icy démontrée par une Fem-
me majeftueufe, qui a iur le haut de la
tefte l'oifeau qu'on appelle Roitelet, & qui de
la main droite s'oppoiè aux efforts d'un Ai-
gle, afin d'empêcher qu'il ne s'élance en haut,
pour ofter à fon Rival la place qu'il a prife.
Le Roitelet, dont ileitparlé dans Ariilote
& dans Pline, eft de cettecipeccd'oifeauxque
Suétone dit avoir préiagé la mort de Céfar :
Car la veille des Ides de Mars il y en eut un
qui efiant volé dans la Cour de Pompée avec
Wn petit rameau de laurier qu'il portoit au bec,
fut mis en pièces par d'autres oifeaux, qui de-
puis le Bois prochain l'avoient toujours pour-
ftivy. Par où l'on peut voir que cet oifeau,
tout petit qu'il eil, ne laiiB pas d'avoir de la _
Prééminenee fur les autres ; ce qui efl: caufe, '
, Comme ^le remarque Ariftote, de l'antipathie
<îu'il y a'entre luy & l'Aigle ; car luy qui eil
grand & fort, ne peut fouffrir qu'une chofe (î
petite & fi foible luy foit comparée ; en quoy l'i-
toitent aflèxibuvent les Hommes ambitieux,
^ui fe voyant bien avec la Fortune, peuvent
à peine endurer que les plus vertueux & les plus
îîobles, qu'ils furpaffent en crédit &enrichef-
ies, aillent du pair avec eux. Mais la préféan-
ce, fi je ne me trompe, ne fe doit point oiler
^ux gens de mérite, bien que la Fortune les trai-
te mal, pour la donner à ceux qui n'en ont
I 4 point
point : & voilà pourquoy l'Aigle eft icy au àct-
îbus duRoite.let, duquel il eft ainemy.^
wwwwwmwwwwwmmww^^
PERSEVERANCE.. CXXX·
ELle efticy peinte de. mefmequ'au palajs
du Cardinal Borgheiè, içavoir en jeune
l' emme, qui tient d'une main une mèche al-
lumée , & de l'autre un Serpent qui mord ^
queûë : ce qui n'eft pas difficile d'expliquer,
puifqu'on fçait aiîez que le mouvement du
temps, que les Egyptiens ont marqué par le Sef
p ent, qui fe plie en cercle, roule fans dilcofl'
tinaer, tout de mefmeque la mèche ne cefî^
de brûler jufqu'au bout.
Elle eft figurée encore par un Enfant éle^®
en l'air, & qui fe tient ferme, d'une iriainàuni^
branche de palme.
Par l'Enfance ibnt marquées les premières
inclinations qu'a l'Efprit au bien, lorfqu'il s'at-
tache à la palme, c'eft à dire à la vertu; car
les branches de cet arbre ont cela de propre,·^®
s'élever au deiîùs du fardeau qu'on leur impo^
pour les abaiflèr. Λ cet effet remarquable,
pareil celuy de la Vertu., qui n'eft jamais lî fort^
que dans lesoccaiions derefifter au vice: ιώ^'*
il faut néceiTairemenique laPerféverance y fc'
jointe; autrement il eft à craindre qiie le ver-
tu'eux qui fe relâche, ne foit comine l'Enfant
dont il eft icy qucftion, qui s'expofe apparern-
ment au hasard d'une cheute mortelle, s'"
abandonne tantfoit peu la branche qu'il
I C ο Ν ο L ο G I Ε. ig,-
PHILOSOPHIE. CXXXI.
Le do<9:e Boëce ayant à décrire la Philo-
fophie, fe iërt d'une invention qui n'eil
pas moins agréable qu'ingénieufe; car il feint
qu'elle-s'apparut un jour à luy fous la forme
d'une Femme beaucoup plus majcftueufe que
ne font pour l'ordinaire les Créatures mortel-
les. Elle avoit les y eux extrêmement vifs & pé-
nétrans, le teint, fort vermeil, & l'embom-
point vigoureux, bien que toutefois elle ièm-
blafl: aiTez âgée. Quant à fa taille , l'on ne pou-
voir la repréfenter au vray ; parce qu'encore
qu'elle furpaiTaft celle, des Hommes, fi eft-ce
que la.pluipart du. tems elle fe déroboit à leurs
yeux par fa hauteur exceffive : tellement qu'a-
prés ravoir bien regardée, l'on trouvôitque
ià tefte fe cachoitjufques aux nuëes, & mefme
qu'elle s'ékvoit pardeiïus le Ciel de la Lune..
Sur le haut de fa,Robe, qui eiloit d'une étoffe
trésdeliée^ fe remarquoit la lettre.®, & fur le,
bord ua.Pi, Grec, Π. Mais c'eltoit de telle
forte, que de la dernière lettre l'on montoit à
la première, par les échelons gravez iiir ià
Robe, depuis la ceinture julques en bas, où
il eit à remarquer encore qu'elletenoit un Scep-
Ue dela,main droite, & de la gauche, des Li-
vres.
Ce que repréfente cette figure, n'eft pas moins
œyftérieux que digne d'eflre confidéré. Ellea le
1 ί vifa-
vifage vénérable, pour montrer que ]a Philofo-
phie mérite qu'on la révéré, eiiant comme el-
le eft, Mére des Arts Libéraux , maiftrelïc
des bonnes mœurs, régie de la vie , iburcô
de tout bien, & guide des Ames vertueufe·
Sa taille ambiguë, tantoii gtande, & tân:
toil petite, fignilie qu'elle embralîè diverfe'
ment la connoiiTance des chofes du Ciel &
de la Terre; jufques-là mefme qu'elle s'élève
quelquefois à la recherche des fujets les plu?
hauts, & qui font incompréhenlibles à 1®'
prit humain : Ce qui fait dire à Boëce, q*^^ ^
ibrce defe hauiTervers le Ciel, elledifparoii'
aux yeux des hommes, qui ne fout pas afl^'^
clair-voyans pour la contempler, ellant biei^
certain que l'elprit humain n'efl pas capable
de concevoir l'ElTence Divine, ny fes myi'^'
rieux feerets, qui font entièrement inconnus
«ux Hommes, comm.e dit S. Grégoire de JSa-
zian'ze.
Sur le bord de fa Robe eft un Θ , & fur le
haut un π, & non pas un Τ, comme quelques-
uns l'ont voulu dire, & comme il eft à propo?
«[ue nous remarquions icy, parce que la figo·'
f cation eft différente, & du tout contraire. Cat
le © chez les Grecs, com.me le.Cparmy
Latins, eil une marque de condamnation, aw
lieu que le Τ eneftuned'abfolution. Cela n'a
pourtant rien de commun en cette figure ou
k e lignifie Théorie , & le π eft le meime
que Pratique, qui font deux parties eiièntieÎ|'^^
à la Philofophie ; Ce qui fait dire à S. Auguft'"'
Q^e Peflude de la Sapience conjijie en ÎaBiotÎ àf
la centem^lation : tellement que l'on peut ap'
pcllcr
-ocr page 253-I C ο Ν ο L ο G î Ε. 205
pcller à bon droit l'une de ces parties aélive,
& l'autre contemplative, qui fe propofe pour
bat la vérité toute pure, & la recherche des
caufes de la Nature.
Que fi la Philofophie tient des Livres en une
main, & un Sceptre en l'autre, c'eft pour mon-
trer que les Hommes de haute naiiïîiuce ne doi-
vent point négligei cette'belle Reine , &que
le confeil des^fages Miniftres eft tout àfaitné-
ccffaire au gouvernement des Eliats. L'Hiftoi-
re remarque à ce propos, que Solon, Lycur-
gue, & Zeleucus, turent Princes & Legiila-
teursenfemble; à fçavoir des Athéniens, des
Lacédémoniens, & de ceux de Locres : & que
les Egyptiens n'élifoient jamais pour Chef que
le plus fage de leursPreftres, ou le plusaguer-
ry de leurs Soldats, afin de maintenir la tran-
quilité publique par la vakur, ou par la bonne
conduite.
fh .·& Sfe Î-% Sfe · fft
POESIE. CXXXII.
TOuTESles Beautez mortelles, quel-
ques grandes qu'elles ibient, n'ont rien
de pareil à celle de cette Déeiîè. Eile aie vi^
fage un peu enflammé, l'aâion d'une perfon-
ne peniive ; une Couronne de laurier fur la tef·
te, les mammelles nues & rebondies ; comme fi
elles eftoientpkinesde lait; une Robe de cou-
leur célefte toute femce d'étoiles, une Lyre en
la main gauche, & en la droite une manière
de hautbois, ou de iluftc.
I- ό La
-ocr page 254-LaPoëÎje, félon Platon, eûà proprement
parler, une cxpi^effion des chofes divines, douC
une fureur celelk embrazel'Entendement.^
On la peintjeime& belle, parce qu'il n'e·*
point d'Homme fi barbare,, ny fi peu fenijbie
qui ne foit charmé de ià douceur, & attiré p^
fon mouvement. ,
Elle eft couronnée de laurier arbre tou-
jours verdoyant, & quinecraint point lai®·?^
drc, parce-que les Mufcs s'affujettiiTent 1®
temps, qui plonge dans Foubly toutes les cho-
fes du, Monde; & que n'eftantjamais ingrates
à ceux qui les fervent, elles leur donnent l'inj'
mortalité pour recompenfe de l'eûime qu'»^
tn ont faite,
jLa Vertu ^ qui de leur efiude
ESI le fruit le plus frécieuXy
Sur tous lej aaes vicieux.
Leur fait hdir ΐingratitude γ
Έλ les agréables chanfons,
Far qui leurs dtsâes Nourrirons..
Sçavenî charmer les defline'es^
Re.cowfenfent un bm accueil
De loûaKges,, que les anne'es
Ne mettent point: dans le Cercueil.
Sa Robe étoilée eft un fymbole de la D''"
vinité, puifque félon les Poètes, ce bel ArS
tire fon origine du Ciel & fes mammell^s
pleines delaitfîgtiifient la fécondité des penfée®
& des inventions, qui font l'ame de la Poéfie.
Elle efl penfive & toute enflammée, P9"·'
faire voir que le Poète a, l'ame toujours plein^
d'unfeuqui luy eftinfpiré d'enhaut, &qui W
échauffe l'imagination, lorfqu'il,écrit fur qw^·'"
^icfujet, ^^
I C ο Ν ο L ο G I Ε. ig,-
On luy fait tenir une Lyre d'une main, & une
Sufte de l'autre; pour fîgnifier le Genre Lyri-
que , & le Paûoral comme le troifiéme, à
içavoir l'Heroïque, k plus haut &leplusno^
ble de tous,, eft marqué par une trompette : &
peut-on bien croire , qu'on s'étudie en vain d'y
exceller, fi l'on n'a ce merveilleux génie que
la Nature nous donne fuivant ce dire ordinaire,
que nous naiiibns Poètes, & foiximes faits Orar
teurs.,
PRATIQUE. CXXXin.
T7 Lle fe prend d'ordinaire pour une choie
qui eft relative & oppofée à la Théorie.
Car comme cette dernière fe régie par l'Art de
taifonner, & par le mouvement de l'Eiprit; la
Pratique de mefme, a pour but les opérations
du Sens, quilapouflènt&lafontagir. L'une
s'attache donç à la contemplation , l'autre à
l'aâion, l'une tient le haut du raifonnement
Humain, & l'autre en eft le fondement.
Pour démontrer ce que nous venons de dire,.
la Pratiqpe eft icy repréfentéevieille, latefte
panchée, un Compas en une main,, un plomb
enl'autre, &fervilementveftuë..
L'âge que nous luy attribiions îuy eft entière-
Bient convenable.. Car comme la JeuneiTe eft:
Ordinairement accompagnée d'efperance, d'A-
siour, de vigueur & de grandeur de courage
ÛÛ.US pouvons dire tout au contraire , que la.
Yieil-
-ocr page 256- -ocr page 257-vieilleflê eft toujours fuivie de pcfanteur ,
nonchalance , de foibleiTe , d'appréhenlion »
& de plufieurs autres maux. A de pareils acci-
dens eft fujette laPratique, parce qu'elle s'ac-
commode à l'ufage, qui pour eftrc vieux p
trompe facilement, eft peu clair-voyant, tou-
jours en doute, & mortel ennemy de ceux
choquent fes fentimens.
Elle a le vifage panché en bas, dautant qu'e^'
le ne regarde que cette partie de l'Univers
i'on foule aux pieds, comme il eft fort bien re-
préfenté par fa Robe fervile ; au lieu que ^
Théorie, comme plus noble qu'elle eft,
s'arrefte point à l'ufage, mais à la feule coO-
noiflânce des chofes fur qui elle fe repoiè ; &
mefme nous eft iignifié par les deux inftrumeo^
qu'elle tient-, qui font le compas & le plomb-
Le compas, comme nous avons dit ailleurs?
eft k fymbole de la Raifon, qui eft néceiTaire 3
la conduite de toutes les adions humaines.
Théorie en tient la pointe enhaut, & la Prati-
que la tient en-bas; parce que par les univerftîs
l'une conclut les particuliers, conclulion vray^
& demonftrative ; au lieu que i'autre tout aU
contraire par les particuliers conclut les unive^
fels ; conclufion qui la plufpart du temps
fauiTe & trompeuit, en la fécondé àtroifi-ff"^
figure, foit dans la négative, ou dans l'aifif
mative.
Quant au plomb qui eft couché par l'une des
pointes du compas ouvert, cela veut direqu^
comme la Théorie fe régie par les choies Q^
Ciel, qui font incorruptibles & immortelli^s,
ainii le fondement de la Pratique eft fur des
tiéres terreftres, qui dans leur eftat piriiTable 6c
fujet à changement, ontbefoinquerHomme
ies fortifie & les appuyé de quelque forme, qui
foie univerfellement reçeuë & pratiquée com-
me une Régie infaillible. CequeProtagoras
Hqus veut peut-citre faire connoilire, quand il
appelle l'Homme, la mefure de toutes les cho-
ies d'icy-bas.
Or ii l'on ne donne à laThéoriequ'un feul
'nftrument, au lieu que la Pratique en a deux,
<îui font le compas & le plomb, c'eft pour mon-
trer que l'une eft feule & indivifible, comme
parfaite en foy-mefme ; & que l'autre ell de
deux fortes, libérale & mécanique. La libé-
rale dans la vie civile le propofe les vertus mo-
rales, qui s'acquièrent par l'ufage; &Iaméear
fiique, les mefures des choies établies du com-
tniui confentement des Hommes dans le com-
îïierce du Monde, foit pour vendre, ou pour
Acheter. D'où il faut conclure que par le com-.
pas & par le plomb fe peuvent entendre deux
différentes fortes de juftice, qu'on appelle dans
^es écoles, Commutative & Diftributive.
îSÎI.-Î's-iiS'
δϊ.ί:δΛώ·0;όί
liââââ·
ρ RELÀtURE. CXXXIV.
Τ Es Egyptiens avoient beaucoup de raifbn
-l_jde reprélenter les Prélats & toutes les au-,
ttes Perfonnes qui font dans lesCharges les plus
^minentes, par cette figure Hiéroglyphique,
ils peigaoienc un Homme , qui en la main
droi-
-ocr page 259-droite avoit une horloge, & en la gauche u^î
Soleil cclipfé, avec ces mots, Nonnifi cumd^'
ficit f^eéîaiorem hahet·. Par où ils vouloient W
îîifier, que comme le Soleil quelque refplei^'
diiTant qu'il foit, n'eft regardé d'aucun q"®
lorfqu'il s'édipfe : ainfi pour Homme de bie»
que foit un Prélat, peu de gens néanmoins^
eonfidérent pour l'imiter , & pour le loué^;
Mais fur tout quand il arrive qu'il s'obfcurcit «
s'édipfe par quelque défaut qu'on y remarqu^'
voila qu'au mefme temps les yeux de tous
tournent vers luy, avec autant de fcandaleq^i®
d'eftonnement : d'où il s'eniûit que les méd'"
fans en font des contes, & s'en eftonnent coffl'
me s'ils voyoientuneéclipfe, ou quelque pro'
dige dans le Monde.
Le mefme nous eft fignifié par l'horlogf
qu'il tient en la main droite : &peut-eftrequ'^
cela ne s'accommode pasmial l'explication q^^
lés feptante Interprétés ont donnée de ce paiia-
ged'Iiài€, J^a^wii fpeciofi fuper Montes pedej
evangeliiiantis bom·; ce qu'ils traduiiènt ainfî»
SicM hora , velficut horologium fmer- Mont^''
Par où ils veulent montrer que les Prélats & les
îuitres Supérieurs les plus qualifiez eftant coiP'
me les horloges du Monde, deiHnez à régler le
mouvement d'autruy, doivent eftre fort mO'
derez en leurs propres aétions, &fe tenir dans
une grande juiîeiTe, puifqu'ils font éclairez de
beaucoup d'yeux, & que la malice des Ho^'
mes va fi avant, qu'ils s'étudient à faire.paiiêr
pour vices jufques aux vertus les plus hautes ·,
qui ne peuvent que difficilement .échaper. à leur
eenfura. -
ρ R
-ocr page 260-ï^&'BÈBÈë
Ρ REVOTANCE\ GXXXV.
CE τ τ Ε Femme à deux tefles,, qui porrc
un Compas en une main, & en l'autre
l'oifeau qu'on, appelle Efmerillon, cft k vray
iymbole de la Prévoyance.
Ses deux telles nous apprennent que la con-
noiiïànce du paffé fert grandement à prévoir l'a-
'ï'enir. Auiîî n'y a-t-il celuy qui ne fçache, que
l'expérience fait les Hommes prudens, & par
conféquent capables à peu prés d'aller au de-
vant des malheurs qui lesmenaçent; car pré-
voir & prévenir un mal, font des effets conve-
nables à la Prudence. C'eft à raifon de cela
<3u'on eilime utile à la vie Humaine la connoif-
iànce de plufieurs Hiiloires, & des fuccés les
plus mémorables avenus de long-temps, par-
ce-qu'elle produit en nous cette force de Pru-
dence, qui eft requiie pour juger deschofesà
Venir. A quoy nous ne pourrions prétendre au-
trement , à moins que d'eftre déceus & blafmez
d'une curioflté ridicule.
aog
nii
Hi
Le compas ouvert montre que pour prévoir
les évenemens, ilfautfçavoirmefurerles qua-
litez, & l'ordre des temps avec un Efprit jur
<iicieux, & un folide raifonnement.
Ρ R /X
-ocr page 261-2IO Ι C Ο Ν Ο L Ο G I Ε.
prix. cxxxvl
Sa figure eft celle d'un Homme vertu àe
blanc, & dont la ceinture eil de fin or; ayan'
de plus une palme en la main droite avec un ra-
meau dechefne, & en la gauche une couronné
& des guirlandes.
Le Prix ou la recompenfe a deux parties
principales, à fçavoir l'honneur & l'utilité, q"'
fonticy diverfementrepréfent^'es, l'une par
cheihe, & l'autre par la palme.
Quant au vertement blanc, & à la ceinturé
d'or, cela démontre la vc'rité, quand elle ε"
fuîvie d'une éminente vertu : car on ne peu*^
qu'injuilement appelîer recompenie , le bieO
qu'on fait à des perfonnes qui en font indignei-
ι. i!?,
PRUDENCE. CXXXVII-
E' Li, Ε eft repréfentée par une Femm^ ^
(deux vifages, qui a fur la tefte un heauin^
doré, environné d'une guirlande de feuilles
Meurier, un Cerf auprès d'elle, un miroir en W
ma main gauche, & en la droite une flèche avec
une Remore tout à l'entour.
La Prudence, félon Ariilote, efttinehâbi-
tûde adive, accompagnée d'une vraye Raifo^
I C ο Ν ο L ο G I Ε. ig,-
^ui agit fur les chofes polîibles ,,pour atteindre
à la félicité de la vie, en iùivant le bien , &fu-
Jant le mal.
Son heaume doré iignifie que l'Homme pru-
dent prévoit l'avenir, & fe dévelope fagement
des embufches de ceux qui luy veulent nuire.
La guirlande de feuilles de Meurier, qu'une;
peribnne avifée ne doit jamais faire les choies
avantle temps, mais bien ks.régler en leur fai-
iôn, & les exécuter avec jugement.
Le Cerf qui rumine, qu'il ne faut jamais en-
treprendre aucune affaire iàns y penfer, afin que
la réfolution en foit meilleure, & le fuccés plus
favorable.
Le miroir qu'elle tient en main, qu'il efl: né-
«eflàire que pour régler fe s adions, l'Homme
prudent examine fes défauts: ce qu'il ne peut
faire fans la connoiilànce de ioy-mefme>
Et par la Remore qui eft autour d'une flèche,
que nous ne devons point tarder à fjiire du bien,
quand nous en fçavans, & lorfque le tem.ps
nous le permet.
C'EsT unejeuneFille vefiuë de blanc, &
qui a fur la tefîe un voile de la mefme cou-
^^Ur, avec un Lys en la main droite, & une Tor-
tue fous l'un de fes pieds.
Sa Robe blanche eft une marque de les cha-,
iîcs intentions: car cette couleur en a toujours
c&é
-ocr page 263-efté une bien expreiîe d'une f? haute vertu
que Salomon enfcigne myftiquement ; quaii" "
nous recommande que nos veftemens foi^nl^
toûjours blancs.
Elle a la telle voilée, pour nousappreno^'^
qu'une honnefle Femme doit tenir cachée ia
feeauté, plûtoft que d'en faire montre: àraiÇ>"
dequoy Tertullien appelle le voile un bouclier
de modeftie & un rempart que l'on ne peut bat'
tre en ruine. Pour celamefme les anciens Ro-
mains vouloient que la Pudicité full toujours
peinte avec le vifage couvert, comme il fe peut
voir en la Médaille de Sabine, Femme de l'Effl'
pereur Adrien; & en celle de Marcia, Otâcu-
la, Severa, avec ce mot, PudiciTI^
A υ G. Les Femmes Juifves eftoient encore,
voilées, & les Chreiliennes auffi, quand elles
faifûient leurs prières dans le Temple, autre-
ment elles n'y pouvoient entrer. Saint
l'ordonna comme cela, & Saint Pierre pareil-
lement, dont le fuccefléur qui fut le Pape
nus, voulut depuis que cette coutume full reii'
gieuiement obfervée. .
Elle tient un lys en la main droite,
que cette fleur, comme le remarque S. Hiero"
rofme contre Jovinien,,. eft un Hiéroglyphe
la Pudicité. Et voila pourquoy dans le Canti-
que des Cantiques il eft dit, que l'Efpoufe celf'
fie prend là nourriture parmy les lys, c'e^'^*
dire en la Compagnie des perfonnes que la Cha-
fteté rend recommendables.
Quant à la Tortue qu'elle foule auxpieaS'
cela veut dire que les Femmes chaftesnedo^
ïeat non plus bouger de leur Maifon, quee^
rc ο Ν ο L ο G I Ε.
animal de delîbus le toid où la Nature l'a ren-
fermé. Cette penfée eft du fameux Sculpteur
Pfaidias, & du Grand Hiilorien Thucydide ,
qui dit, au rapport de Plutarque , qu'il faut
qu'une Femme de bien ait iès promenades bor-
nées dans l'enclos de fon Logis.
CE τ τ Ε j eune Fille armée à peu prés com-
me la Déeffe Pallas, repréfente laRai-
ibn; elle a iur ion haume une riche Couronne
d'or., en la main droite une Epée nue, en la
gaiîche un Lion, à qui elle a mis un frein, &
devant fon eftomach une manière de plaflron,
femé de notes d'Arithmétique.
Cette vertu, que les Théologiens appellent
la plus puiflante force de l'Ame, parce-qu'ellc
commande à l'Homme, & luy donne de vra-
yes Loix, eft peinte jeune & armée, à caufe
qu'elle fubfifte par une extraordinaire vigueur de
fageiTe. Ce que les Anciens nous ont figuré par
les Armes extérieures, principalement par cel-
les de Minerve.
La Couronne d'or nous enfeigne, que la
Raiibn feule eft capable de mettre les bons Cou-
rages fur le théâtre, & dans l'eftimeuniverfel-
ie des Hommes ; car l'or n'a pas de plus grands
avantages furies métaux, qu'ena laRaifonfur
les Puiilàiîccs de l'Ame, qu'elle régie par ik
conduite: aufil a-t-elle fon fiége en la plus no-
te partie du Corps, par
Par fes bras nuds fe doivent entendre les je-
tions, qui font toujours bonnes & fans tache?
quand elles iè laiiïènt guider à h Raiibn. ,,,
L'Epée qu'elle porte nous fait fouvenir, qu »
faut s'en fervir courageufementà exterminer le?
Monftres de l'Ame, c'eil-à-dire les vices qui
îuy font la guerre. Nous avons pour un par»'
exemple dececy Jesus-Christ noftrefouve-
rain Maiftrc, la Doârine duquel n'a point d'au*
îre but que d'arracher les vieux péchez de o^
Ames, & d'en couper la racine par le moyen de
la Raiibn & de fa Grâce.
Le frein dont elle arrefle le Lion, fîgni"^
l'Empire qu'elle afur lespaffions, qui font na-
turellement farouches, & indomptables.
comme par le moyen du chifre on prouve les
chofes reélles: ainfi par la force de laRaiion
l'on s'acquiert la connoiflànce de celles qui re-
gardent uoftie commun bien.
N'Ous la repréfentons par une FemW®
aguerrie, & q'ii cil armée d'un heaume,
d'une cuiraiiè, & d'un cimeterre.
Elle a dcplus une jupe verte, toute fem-^
d'yeux & d'oreilles,une baguette eu la maingaU'
che,& la di oiie appuyée fur la teile d'un Lion.
On ia peint armée, pour montrer, que celuy
qui agit par les Raiibns Politiques, tient toutes
les autres pour indifférentes, pourvû qu'"
puiiTe
-ocr page 267-I C ο Ν ο L ο G I Ε. 272
PuiiTe venir à bout de fes prétendons, &parla
force des Armes faire de nouvelles conqueites.
Sajuppe pleine d'yeux & d'oreilles nous re-
Préfente lajoloufie, qui pour mieux acheminer
fes deiTeins, & retarder ceux des autres, veut
tout voir, &toutouir.
La baguette qu'elle tient eft une marque de
'a domination des Souverains fur leurs Sujets;
bien que toutefois les moindres perfonnes ne
laiiTentpas, mais improprement, d'avoir cer-
taines raifons d Eftat, pour la direâion & la
Conduite de leurs aftaires.
Elle s'appuye fur un Lion , parce-que par
leurs maximes les Grands du Monde cherchent
à affuj étir les plus puiiTans, à l'imitation de cet
impérieux Animal, qui met tous les autres au
<Jeiïbus de iuy ; par où il eft encore montré,
<îue pour la confervation d'un Eftat la vigilance
'ioit eilrejointe à la force.
AV GIR la mine de ce Jeune Homme,
qui regarde derrière luy avec une pofturé
S^i n'eiîpas moins alti ère qu'extravagante, on
J«ge auffi-toft que c'eft un Rebelle.
Il eft armé d'un corcelec & d'un javelot
Wl tient à deux mains ; joint que pour Cimier
porte la figure d'un Chat, & qu'il foule aux
pieds un joug rompu.
On le repréiènte Jeune, parce qu^en cet âge-
ià,
-ocr page 268-là, celuy qui fe porte à la Rebellion fouifre a»'
ficilement l'Empire d'autruy: de manière qi®
le fang qui bout dans fes veines luy fait tout eo^
treprendre iàns rien craindre,, comme
marque-Ariiiotc.
Il ne va jamais fans eftrearmé, à omis
les continuelles appréheniions qu'il a de que''
que furprife, veulent qu'il foit toujours en
ou d'attaquer, ou de ft défendre.
Un Chat luy fert de Cimier, parce-quec^
Animal abhorre naturellement d'eftre fuj^t ^
dans la contrainte. Auffi liions-nous que
Sueves, les Analois, & les anciens Bourgui'
gnons le portoient en leurs Drapeaux, pour uns
marque de liberté. ^
Son aélion dédaigncufe , & fes yeux
tourne derrière laj, montrent le peu de refp^^
que les Rebelles ont accoûiumé de porter a
leurs Seigneurs ; & que depuis qu'ils en vieij'
nent-là, ils ne font j amais en feureté, de que''
ques armes dont ils fe couvrent.
Par le joug qu'il foule aux pieds fe doit et^
tendre la puiilànce des Loix ; & c'eft en ce mel'
me fens que le prend Virgile, lorfque parla"'
dudeftind'Enée, il dit,
fom Je jougdes Loix ilrangeroit les Hoi^^^^'^
Car on peut dire véritablement, que les SU'
jets fout fous le joug de leur Prince ; quefi
Rebeïles tâchent de le fecouer, c'eft leur h^t
meur altiére & ingrate qui lesypouiTe,
les porte au mépris des Loix, fans faire eftat
l'obéiffance qu'ils iont oWigez de rendre ^
leurs Souverains. C'eft donc à bon droit, ψ
pour faire voir icyl'infolencedelaRebellio®^
nous luy mettons un joug ÎÔUS les pieds, qu'el-
le foule par un mépris manifeile.
RECONCILIATION. D'AMOVR. CXLII.
Τ A voicy repréfentée fous la figure d'une
X_y jeune Fille, qui porte à fon cou un beau
làphir, en fa main droite une coupe, tandis
ique de la gauche die tient deux petits Amours.
L'on appelle réconciliation une Amour rc-
nouvellé; ce qui arrive quand on iè remet bien
avec la perfonne aimée; car tout le Monde
fçait qu'un excez d'Amour engendre ibuvent
les foupçons& les injures; àquoyledédain, le
mépris , & le courroux fuccédent pour l'ordi-
naire. Le Poëte Horace a fort bien dit à ce pro-
pos.
<2»'«« ious Us manxqu^Amonrafeme'i^furla
Terre,
La guerre fuit lapaix,i^ la faix fait la guerre.
Toutes ces picoteries font les effets d'une
paflion trop forte;car plus un Amant a d'amour,
& plus il s'offence de la moindre chofe, s'ima-
ginant toûj ours que le fuj et aimé ne répond pas
à fon afFeàion, & qu'il fait tort à fes mérites.
Cependant cet ombrage qu'il fe donne le porte
au dédain pour quelque temps; mais après avoir
bien fâché la chofe aimée il s'en repent à la fin,
il ne peut plus tenir fa colère, il s'accufe foy-
inefme, & délire palliionnément de faire ià
paix, ce qui s'appelle rcconciliation d'Amour.
/. Îart. Κ En-
-ocr page 270-Entre les vrais Arnaizs CAmour fe renoHvell^
Par leur propre querelle.
Le iliphir de couleur cclefte eft un Symbole
de cette Réconciliation, parce-quc félonDif"
coride, il a cette vertu fecréte de remettre en
bonne intelligence ceux qui le portent,
font mal enfemble mais cela tient du riicule,
àiiKinavis, plûtoil que du véritable, iicen'cft
que l'on vueille dire, que les pierreries dont on
fuit préfent aux Dames ne ibnt que trop capa·
bles delesappaifer, quelques fafchces qu'elles
foient; puifque, commeditOvide,
Les dons peuvent fléchir les Dieux Ss'
Hommes.
Auffi par la coupe que tient cette Fille, eft
déiiîontré le merveilleux pouvoir qu'ils ontfu^
une Dame, quelque févère qu'elle foit; car»
elle eft genéreufejufquesau point de les refafer,
du moins en fçaura--elle.du gré; comme au
contraire, iî elle eft d'humeur à les recevoir »
fes interefts propres l'obligeront à faire la paix
avec fon Amant.
Quant aux deux Amours qu'elle tient par lu
main, cela iignific, que les amitiezferenfof'
cent après la Réconciliation; car alors, com-
me dit Plaute, & les Amants, & les Amis fP"Ç
à l'envy à qui fecareiîèra davantage. Ce qu'
fembleroit peu croyable, .ii l'expérience ne
raiFeuroit, outre les exemples que les Acciens
nous en donnent,& particulic'rement Elian,par*
lant de Paufanias & du Poète Agaton,
I C ο Ν ο L ο G I Ε. 219
iâslHâHâsl
RELIGION. CXLIII.
Lle eft figurée par une Femme voilée,
l^qui a du feu en la main gauche, eiiladroi·^
te un Livre & une croix, &à ion cofté un Elé-
phant.
La Religion, félon Saint Thomas, eftmie
vertu morale, par laquelle l'Homme révéré &
honore Dieu intérieurement avec l'Ame , &
extérieurement avec le Corps. Comme les
Hommes, dit Ariftote, y font portez naturel-
lement : aufii eil-ce par elle plus que par la Rai-
fon mefme qu'il diftére des Belles, qui en font
dépourveuës.
Elle a le vifage voilé , parce-qu'iieft vérita-
ble qu'elle atoujours-efté fecréte, &s'eilGon-
ièrvée dans les cérémonies & les figures j com-
me fons des voiles déliez.
La Croix eft la viâorieufe Bannière de la
vraye Religion, que les Chreftiens ontaccpû-
tumé d'avoir en grande vénération, comrne re-
connoifîànt que par elle ils ont eiîé rachetez.
Le Livre qu'elle porte eft celuy des Saintes
Ecritures, par qui elle,s'établit dans les Ames,
& le feu eft un Symbole de la de'votion qu'elle
y allume.
Et dautant que l'Eléphant eft , s'il faut ain.il
dire, le plus Religieux de tous les Animaux,
c'eft pour cela mefme qu'elleenaunàfonco-
fté; ce qui n'eft pas fans une grande raifon,
Κ 2 puif-
puifqu'au rapport de Pline, ce merveilleux
Animal adore le Soleil & les Etoiles, juiques-
là mefme, qu'au point que la nouvelle Lui^
commence à paroiilre il fe va laver dans la Ri"
viére, & ièmbk invoquer le fecours du Ciel
après s'eftre purifié.
λ!?, ÎÎÎ, Îiii «fe i'Ç; iH
REFORMATION. CXLIV.
EL LE -eft peinte en Femme vieille fimpl^-
ment veftuë, & qui tient une petite ferp^
de la main droite, & de la gauche un Làvrc ou-
\'ert, où ces paroles fe voyent écrites.
peremt difcrimine nuUo
Amifia Legts.,
C'eft-à-dire,
Que les Jj)ixfaiispe'r&font toujours Jeffe^d^ëh
Et par les accidens ne fontjamaisperduès.
Èlle eft peinte vieille, parcc-quefélon P^^'
ton, le dernier âge eit le plus propre de tous à
la Refor-mation .& au Gouvernement d'autruy ·
où il eft à remarquer, qu« par le mot de Refoi'
mation nous entendons celle qui fe fait des
mœurs, loriqu'on extermine les mauvaif^s
pour en introduire de bonnes, que lesHomm^
ont quittées peu àpeuparunetroppernicieufe
licence.
Elle eft Amplement veftuë, à caufe que les'ri-
ches habits font d'ordinaire des marques û®
luxe, & quelquefois de débordement.
Quant à la ferpéte qu'elle tient, lacaufc<^||
-ocr page 273-cft affez manifefte : car comme elle fcrt grande-
ment au Jardinier pour couper les branches ili-
perflues, qui oftent aux Arbres leurs force &
leur nourriture ; la Reformation de mefme re-
tranche les abus & les mauvaifescoûtumes de
ceux qui s'emportent dans la licence, ou qui
vont au delà des bornes que- les Loix leur ont
préicrites.
Le Livre qu'elle porte eft celuy des Loix, fé-
lon leiquelles il faut que les Hommes fe règlent,
& qu'ils reforment leii-r vie.. Ce qu'ils ne peu-
vent mieux, faire qu'en obcïiîanc aux faints dé-
crets & aux falutaires inftru£lions de leurs Su-
périeurs, que Dieu a établis pour veiller à km·
conduite.
i5lÇi A iîî, i!?, - .-itî, .<!Ç, Λ i^s iï·-,
REP ENl'ÂNC Ε. CXLV.
Κ 3
CE τ τ Ε figure n'a pas befoin d'explication,
puifqu'en. celle que nous avons-donnée de
laPenitence, fe rencontrent, ou peu s'en faut,
les mefmes chofes que nous pourrions direicy.
L'on fçait bien d'ailleurs que la couronne d'é-
pines, le cilice & lecœur enflammé que porte
ce pécheur repentant, font autant de témoigna-
ges de zélé & de mortification volontaire : car
le regret qu'il a d'avoir oftenfé fon Créateur,
& le fecret remors de la confcience nefefonc
pas moins fentir à l'Ame pénitente , que les épi-
nes au Corps qui en eft piqué..
R U-
-ocr page 274- -ocr page 275-RUMEUR ou DISCORDE. CXLVI.
Ε s Egyptiens repréfentoient Fun & IViUîrc
_^par un Homme armé, qui s'en alloitie-
mant la divifîon de toutes parts, &dardoituii
javelot, comme il fe voit peint icy.
Mais il femb e qu'il feroit mieux d'en tirer îc
Tableau de la defcription que les Poetes en font
d'ordinaire ; car ils l'étaient aux yeux comiK®
•une Fureur fortie d'Enfer, qui a les cheveux
épars, où s'entrelaflent plufieurs Serpens ; une
Robe de diverfes couleurs, & le front ferré de
bandelettes ianglantis.
Ce qu'on appelle Rumeur, Difcorde, ou
Tumulte , eil un mouvement déréglé , qui
procède desvitieufes inclinations de l'Homme·
Car l'on ne peut mettre en doute que l'avarice,
l'ambition , lajaloufie , & l'inégalité qui fe
rencontrent dans la condition & dans les hu-
meurs , n'en foient la première cauiè.
Cela nous eil démontré par les couleurs de fa
Robe, la difiérence defqaelles fignifie celle des
opinions, qui ie rencontrent rarement dans
une mermejuflelTe. De-là vient auffi qu'il n'eft
point de lieu ii folitaire où la Difcorde n'habite.
Ce qui a fait croire à quelques anciens Philolo-
phes, qu'elle eftoit le principe de toutes les cho-
ies naturelles. Mais il faut tenir pour abomi-
nable celle qui tend à la ruine du bien public, &
qui ne s'étudie qu'à faire éclore les pernicieux
deflcins.
-ocr page 276-deifeins qu'elle couve, dont les Serpens qu'el-
le a fur la telle font les Symboles.
La Difiorde aux creitts de cmleuvres,
Pefie fatale aux Potentats,
Ne finit fes tragiques œuvres,
Qu'en la fin mefme des Eflats.
D''ette nâqmt l.i frenéjie,
De la Grèce contre l'Ajie,
Et d'elle prirent le flambeau
Dont ils déjoïérest leur Terre,
Ces deux Frères de qui la guerre
Ne cefja point dans te tombeau.
L'Ariuftte l'appeile à ce propos, un fanglant
boute-fea, & luy fait tenir un iiiiîl en inain,
pour mo'ùtrer que la colére's'enflamme par le
contrafte de deux peribnnes obftinëcs, comme
nous v.oyons que le feu s'allume à force de bat-,
tre le fuiil.
SANTE. CXLVII.
ELle efl repreTenît-e par une Femme qui
e(l en la fleur de fon âge, ayant un Coq en
la main droite, & en la gauche un ballon nou'
eux, où s'entortille un Serpent.
Le Coq cfteonracréàEfculapèinventeurde
la Médecine, pour montrer qu'il faut'de né-
ceffiré qu'un bon Medecin foit vigilant &toû-
jours foigneux de viiîter fes Malades. AulTi eft-
i! vray que cet oifeau folaire, à qui les Anciens
iàcri!ioient comme à quelque Dieu , tant ils
Κ 4 le
le revéroient, eft ]e vray Symbole de la vigi-
lance. Ce fut pour cela que Socrate un pe"
.avant que mourir, lé^gua pai- ion Teiîament fow
Coq à Efculape,. pour apprendre aux Philoso-
phes de ibn temps, dont il eftoit le plus fiig''?
qu'il n'y avoit que les Dieux, deiquels ils te-
noient l'eitre, qui pûilènt guéiir les inquiétu-
des & les langueurs de la vie.
^âââ^yiâMîâiyiââââââ
SJP/ENCE. CXLVIII·
SA iîgure eft celle d'une jeune Fille, qui
dans l'obfcurité de la nait tient de la maia
droite une lampe allumée, & de la gauche nH
grand Livre.
Oa la peint jeune, parce-qu'ells commande
aux Aftres, qui nelapeuventfairevieillir, 0Υ
Juy ofler l'intelligence qu'elle a des fecrets de
Dieu, qui font éternels.
La Lampe allumée fignifîe la lumière de
l'Entendement, qui par une grâce particulière
de Dieu s'allume & s'entretient dansnoftreA-
me, fans jamais diminuer, car c'eft parnoftre
ieuk faute, que l'Entendement perd ià propre
clarté, en fe laiiTant offuiquer par les ténèbres
du vice, qui ne peuvent donner lieu à la Sa-
pience; mais enveloppent l'Elprit d'Erreurs &
de raauvaifes penfées.
Quant au Livre qu'elle porte, e'eftceluydes
Saintes Ecritures, qui eft le ièul où l'on apprend
la parfaite Sapiencc, & toutes les chofes q«ï
font ncceiiaires aufalnt. S
ί c ο Ν ο L ο G I Ε. 225
SAPIENCE DIVINE. CXLIX.
CEtte figure de la Sapience Divine eft:
preique toute tirée des Saintes Lettres.
C'eft une Dame que famodeiiiemerveilleufe
& les regards rendent vénérable. Elleeftve-
ftuë de blanc, & fe tient deboat fur une Pierre
carrée. Elle apour Armes un Corcelet, &un
heaume, dont le Cimier eil un Coq ; un efcu
rond en ià main droite, avec la figure du Saint-
EiJjrit au milieu, & en lagauche le Livre de la
Sapience, d'où pendentfeptfceaux,avecΓΛ^
gneauPàfchal au delTus.
Nous la pofons fur une Pierre carrée , pour,
montrer par là, qu'elle eft toujours ferme &
inébranlable enTes fondemens :. & luy don-
nons de plus une Robe blanche,.parce-que cette
eouleurcomme nous avons dit ailleurs, eil la
plus pure de toutes,, & par conféquentlaplus
agréable à Dieu.
Quant à fes armes, elles .font toutes myfti-
ques : & commcdit la Sapience mefme., extrê-
mement propres à Dieu, Qui prendra pour Cor-
eeletlajf^ice., pour heaume un jugement certain^
is' Γ équité four un écu impénétrable.. Le Cor-,
celet, que les Latins appellent 'thorax, paflbit,
chez eux pour la principale pièce des Armes;,
d'un Homme de.guerre : auffi eft-ce luy qui def-
fend les Parties nobles, &qui convient propre-
nient à la Sapience", dautant qu'il fert de rcmi·
part à l'eftomach. où quelques Anciens l'ont
placée. ' Κ ί Le
Le Coq qu'elle a pour Cimier, figniâerin-
tellïgence & la kîinidre raifonnable, quifeloB
Pîàton, a fon fiége dans la tefte; c'eft pourquoy
Socrate & Pythagese ont parcecoilèaumyft"
quement entendu noftre Ame, qui iêule eft ca-
pable d'une vraye intelligence. Auffi eft-il cer-
tain que le Coq en aune bien plus grande que les
aàcres Animaux; car i! connoiit les Efloilcs,
il regarde le Ciel, ilconiidérelecoursduSo-
lefl,' & par fon chant annonce le jour. Pouf
ces merveilleufes connoiilànces il elloit conla-
cré à Mercure & à Apollon, qui eftoien't les
Dicax des Arts' les plus recommandables : à
qijoy l'on peut ajouter, que dans la Sainte E-
eritnre il eft aflez ibuvent parlé du Coq, par qui
font entendus les Prédicateurs & le Docteurs,
qui chantent & publient dans les Eglifes la Sa-
pknce Divine.
La Colombe qui fe voit peinte fur fon écu,
cft le S. Efprit qui, comme dit·Job, nous ap-
prend la Sapience. Or par cet ccu de fonnc
ïûnde, s'entend l'Universoù ceux qui font
élevez am- Dignite'i les plus hautes doivent s'e-
fladiei à une fage conduite. A quoy les invitent
parîiculiéïemenr ees belles paroles de l'Ecritu-
re , S-il'φ 'Vmj- que vûus aimiez, vos 'ThroÇnes
ÎS' ves Sciptris ., â Rois des peuples, aimei
Sapience., afin-qae'vaus. regniei à jamais, £5'^·
Le Saint Efprit eft. donc mis. icy fortâ propos
dans une figure ronde,- dautant que parluyls
Sapience divine gouverne l'Univers, & qu'il
iflfpire une vràye lumière, & defalutaires i»-
ftruâions à ceux'q^ai en ont la conduite.
Le Livre fermé où pendent des Iccaux, fîg'
liiiîC
-ocr page 280-nifie que les jugemens de la Sapieucc Divine-
font cachez aux Hommes; & qu'à caufe qu'el-
le eft enveloppée de plafieurs nuages, l'aquifi-
fition en ert extrêmement diificile ; voila
pourquoy le plus fage de tous les Hommes la
compare à un tréfor qu'on a caché dans la Ter-
re. Or ce qu'elle eft ;iiniî fcelléé,n'efl pas afin
que les Hommes en ibient privez, mais pour
les induire à.fe l'acquérir par leur induftrie, iàns
que toutefois.ils en deyiemientny plusaltiers.,
ny plus amoureux d'eux-melm'es : d'ail leur^s
robfcufité de la Parole Divînefepeut diremi-
le,· en, ce qu'elle fait éclater davantage là véri-
té, mefme parmy les broiiillards , tandis que
les uns & les autres l'expliquent diverlèment·,
comme le remarquent particulièrement le
grand,S. Grégoire, & S. Auguffin.
L'Agneau Paichal eft mis à Xbrt bon droit iùr
k Livré parce-que fuivant ces paroles de l'Apo-
calypie, Ce mejwejgneauquiaefléimmolé, èfi
undigm fiijet de Vertu, deSapie-ace., de D'i^
vinité. L'autreraiibndl à-l'égard de lacondi-
tion des Créatures.humaines, quinedoiveni
point eftre fuperbes iiy malicieûfes, fi elles as-
pirent à la Sapience ; car elle ne fait fa demeure
que dans les Ames pures & nettes, ayant com»·
me ellé a pour folide fondement la crainte de
Dieu; ce qui nous a eité déclaré par l'exemple
de l'Agneau, qui eft le plus innocent & le plus
craintil'de tous les Animaux de là Terre.
t' i.
Κ 6 S Λ-
-ocr page 281-α3δ ICONOLOGIE.
.■âiaâiilêîsl
SAGESSE HUMAINE. CL.
C'E Ν eft une fàgure bien expreiTc que celle
de ce jeune Garçon ,qui a quatre mains &
quatre oreilles ; un carquois à foncofté,
fa main droite une flûte, inftrument confacré
au Dieu Apollon.
Ce Tableau eft de l'invention des Lacédé-
moniens, qui enontfaitledeflèin, pournous
apprendre que pour avoir de la Science & de la
SageiTe, la contemplation ne fuffit pas, mais
qu'il y faut joindre ne'ceirairementrufage& la
pratique des affaires du Monde, lignifiée paï
les mains ; & auffi écouter volontiers le confeil
d'autruy, ce qui eft marqué par les oreilles ; &
dautant que celafedoitfaireavecune modéra-
tion qui foit telle, que I Homme ne fe laiflê
point chatouiller ny par le fon de fes propres
ioiianges, ny prendre au dcpourvû quand il eft
queftion de fe défendre;c'eft pour cela qu'on lui
fait tenir une fliite iàns enjouér,& des flèches en
un carquois, dont il iè relerve l'ufage au befoiH'
Que s'il faut parler maintenant de lavrayc
Sageflè, je dis qu'elle n'eft pas du nombre de
ces habitudes vertueuiès, qui· s'acquièrent paf
l'ufage & par l'expérience, mais bien un do9
particulier du Saint Efprit, qui communiqué
fes grâces & fes faveurs à qui Itiy plaift. Les An-
ciens mefmes femblent avoir reconnu cette vè-
rii:èj car bien qu'ils r*efuiièntpoim éclairez de-
lA
-ocr page 282-I C ο Ν ο L ο G I Ε. 286
la lumière de noiîre Foy , ils parloicnt néan-
moins de la: Sapience furnaturelle avec beau-
coup de Religion & de revérenee. Ils diibient
à ce propos, qu'elle eftoit un don du Ciel, &
qu'à moins que d'eftre parfait & irre'prochable
en fss aélions, pas un des Mortels ne pouvoit
eftre honoré du glorieux titre de Sage. En effet,
dans toute l'ilncienne Grece, Mere des Scien-
ces & des Vertus, ne retrouvèrent jamais que
fept perfonnes qui méritaiTent ce nom : ce qui
me fait croire, qu'il faut nécefiairement que
cette vertu ait de merveilleux avantages fur tou-
tes les autres. Auffi a-t-elle efté, comme dit
Salomon, avant que les Cieux& la Terre fuP
ient, & s'eft conièrvée de toute éternité dans le
fein du Pére Eternel, d'où félon fes j uiles juge-
mens elle s'épand dans les Ames des Fidèles.
Celay-là trouye donc le laUit, qui s'acquiert
la vraye Sapience à force de la chercher, & qui
la fçait difcerner d'avec la fauffe fagefie des
Hommes du Monde.
SCIENCE. CLL
CEtte Femme avec des aifles à la telle ,
un miroir en la main droite, une boule eii
lagauche,. & un Triangle au deiâs, eitlepor-
trait de la Science, que ks Doétes appellent
«ne habitude de rEntendement fpéculatif, par
qui les choies font connues &conlidérées par
leurs caufes.
Elle eil peinte avec des ailles, dautant-gne
pour
-ocr page 283-, iâ
-ocr page 284-pour l'acquérir il faut néceiîairemenî que
prit s'éleve à la contemplation des chofes qu'il
veut apprendre. ' -.
Par le miroir qu'elle porté cil marquée fon
abftraâion, dont .parlent lesPhilofophes; car
par le moyen des accidens que le fens com-
prend, il fournit à .FEntendémént laconnoil-
ihnce des idées & de leur fubftance ; tout de
mefme qu'en voyant dans un miroir la forme
açcidentale des chofes exiftentes, l'on en con-
fidére l'eiTence.
Davantagela bDuIe démontre que la Scien-
ce ne foufire point de contrariété d'opinions,
comme le globe n'en reçoit aucune de mou-
vement ;& le triangle, qu'en toutes propofi-
tî6ns il y a trois termes qui produifent les dé-
liiônftrations & la fcience dés chofes ; de mef-
me que les trois anglesfont une feule figure.
SEeR ET ou S ILE NC E. CLII.
I Ien que ce ne foit pas le propre des Fern-
mes de revérer le SileHce-, fi eft-ce qu'i'
eit icy figuré par une Dame fort grave, &
veftuë de noir. Elle aime bague en fa maiii
dtoite, qn'elk porte à fa bouche , comme ^
elle s'en vouloir fervir pour la cacheter, & à fes
pieds une Grenouille.
Elle efl peinte grave, parce qu'elle le doit
eitre, ny ayant point delegéreté pareille à cel-
le de violer le fecret de fon Amy ; cq qui n'ar-
rive jamais aux Hommes judicieux& fidelte·
Son habillement noir eft un fymbple de conf-
iance & de fermeté, dautant que cette couleur
n'eii prend jamais d'autre.
Ce qu'elle porte un anneau à la bouché, efl;
pour la fceler, c'eil à dire pour ne point fevéler
ion iècret ; ce qui a donné lieu à cette façon
de parler tirée àt^ Gt tes ^ Qu'il faut meitreme
clef à la langue, &c'eft le mefme que s'empef-
cher de trop parler. Le Poëte Sophocle
dit à ce propos, que les Preilrefîès du Tem-
ple de Ceiés avoient la bouche fermée
d'une clef d'or voulant montrer qu'elles ne
revéloient jamais Je fecret de leurs DéefFe :
où il eft à remarquer , que ceux qui parlent
ainfi, font allufion à ces petites clefs· faites
en forme d'aùneau , dont on ufoit anciéonè-
ment à ouvrir ,, fermer & cacheter ce qu'on
vouloir mettre en-.feureté dans la màifon. De
ces anneaux ,.dont it s'en voitpkifiears encoto
aùjourd'huy ,· il· eft fait une.eï.preiïe itentiOQ
dans les Remarques de Lipfe iiir les Annales
de Tacite : & l'on s'en- fervoit pareillement à
cacheter des Lettres-,. comme nôus^iàifons
d'ordinaire. A quoy fe rapporte ce que l'on
dit du grand Aléxandre, à qui quelque Gen-
tilhomme ayant un jour piréfciiff une Lettré
de la part de ià Mere, dans faqulleAntipater
cftoit maltraité, il voulùt-qu'EpHeftiofi ion Fs-
vory en fçeuit le contenu ; mais il ne l'eut pas
plûtoftleuë, qu'ayant tiré de fon doigt la ba-
g-ue quiluy fervoit de cachet, il la luy mitàlii
bouche,pour Je faire fouvenir degarder le filen-
ce. L'Empereur Augufte prit à ' cet effet pour
fa D.vife la figure d'un Sphinx, quiièlonPie-
rii s
-ocr page 286-rius eft k Hiéroglyphe du Secret, comme l'I-
mage d'Harpocrates l'eiloic jadis du Silence.
Elle a pour cette raeiine fin une Grenoiiille à
iès pieds, non pas de celles qui eiiourdiiTent le
Monde au Printemps par le grand bruit qu'el-
les font ; mais bien de ces autres dont parle Pli-
ne , qui font muettes, & qui s'engendrent en
diverfes Contrées de la Terre. Elles fe voyent
fur tout enMacedoine, enAffrique, dans les
Defertsde Syreine, en TheiTalie, au Lac de
Sifendre, & particulie'rement en l'Iile Seriphc,
qui efl: enJa mer Egée; ce qui a donné lieu à ce
Proverbe , R a ν a S i r i λ ρ h a, qui fe dit
proprement de ceux qui font d'une humeur ta-
citurne. Tellement-que c'eftfort à propos que
la Grenouille eft icy mife pour le Symbole du
Silence, & pareillement dans lesDevifesHé-
roïques de Paradin; Car il remarque fort judi-
cieuièment, qu'elle efloit gravée dans le Car
ehet de Mecœnas, que l'Empereur Auguile ai^
ma grandement, pour avpir éprouvé Ibuvent
fa mervei. leufe conftance à ne publier jamais cc
qu'il falloit taire, touchant les affaires de fo»
Eiîat.
S EU RE Τ Ε CLIII.
La Peinture que nous en faifons icy eft co-
piée fur une. Ancienne Médaille de Ma-
crin, où elle efl: repréfentéepar une Femme,
qui de la main droite s'appuye fur unePicquer
& de la gauche fur une Colomne.
L'on
-ocr page 287-L'on appelle Seureté une forced'Efpritiné-
bran lable dans les affaires du Monde, ou fi vous
voulez, une ferme confiance que l'Homme iè
donne, qnand il fe voit à couvert de tout dan-
ger, C'eft pour cela qu'elle eft appuyée iùr une
Colomne, qui èit un Symbole de fermeté,
comme la Picque en efi un autre de comman-
dement & de prééminence.
On la peut encore couronner d'une guirlan-
de de bétoine, à caufe que cette Plantea cela de
propre ; d'aiTeurer ceux qui la portent contre la
moriiire des Serpens^ i^iimaux contagieux &
nuilibles par deiTus tous ks autres. Et voila
pourquoy, fi j,e neme trompe, ceux qui ont ex-
pliqué Théocrite, difent qu'en ces Contrées de
Grèce, où il y avoit le plus de cesvénimeux
Reptiles, les Payfans par maniéiic de precautioa
rempliiibient leurs lits de bétoine.
II fe trouve quelques Médailles où la Seure-
té fa voit à peuprésrepréfentéedemefmeque
nous venons de la décrire; comme en celle ds
l'Empereur Gordien, par une Femme qui iê
tient debout devant un Autel, avec un fceptre à
la main: En celle d'Othon, par une Reine qui
porte une lance & une couronne, avec ces mots,
S ε c υ ri τ a s P. R. Et en celle d'Op. Macrin,
par une autre Femme,qui de lamain droite s'ap^
>uy e fur une MaiTuë, & de la gauche fur un gros
Pilier, avec cette Infcription, Securitas
temporum.. -άα.
I»!
Λ' Ε R-
-ocr page 288-234 IGONOLOGIE.
SERVITUDE. CLIV.
CEtte jeune Fille échevelée, & qu'
eft veftuë d'une Robe courte & de cou-
leur blanche, eft l'image de la Servitude, Elle
a iùr les efpaules un pefant joug, des ailles aux
pieds, &àfon cpfté une Grue, qui tient une
pierre.
La Servitude n'eft autre chofe qu'un eftat de
la Loy des Hommes, par qui, & non par la
Nature, une peribnne eft foûmiiè à l'empiré
d'autruy.
On la peint jeune, afin qu'elle en fuppo!^'^
înieux le travail ; & échevelée , pour inoij."
trer que celuy qui relève d'un autre , doit ei'
tre plus foigneux du fervice de fon Ma'ft"^^
que du fien propre; ce,qui fait dire au Prince
des Philofophes, que le Serviteur eft un i"''
trument aâif, animé, raiibnnable, qui eft «iJ
tout à un autre, & nullement à Iby.
Sa Robe blanche iignifie , qu'Un Serviteai
doit eftre fidelle : & le joiig de fes épaules?
que le devoir l'oblige à le porter patiemment'
& à fe mortifier fans murmure ; car comme dit
Plante,
Εκ tbus évenemens, g» tout tempes en tous Iki^^i
Il doit ff avoir dompter îsffes mains
Son habit court, fes pieds nuds & aillez, ^
les épines qu'elle foule , fignifient qu'encor
qu'on foit de condition fervile, il ne faut p3
laiiTer toutefois de fe re'foudre à fouffrir le"
ifl-
-ocr page 289-incommodiîez qui s'y rencontrent, & de join-
dre la promptitaeiç, à la vigilance, qui eli icy
tnarquéc par la Graë , & recommandée eH
termes exprés par noftre Seigneur Jeiiis-
Ghrirt , quand il dit ^ Que bienheureux [ont
les Serviteurs que leur Maiilre r,e trouve pi-a
*ndormis à fou arrivée.
S IΝ G Ε RJ Τ E\ CLV.
IL ne s'en peut faire de peinture plus naïve
que celle-cy, repréfentant une Fille veftaë
de gaze d'or, & qui tient un cœur en la main
gauche, & en la droite une Colombe.
La Colombe & la Robe d'or figmâent que
la vraye Sincérité n'ert pas capable d'aucanc
feinte ; & le cœur qu'elle porte en fa main,
que FHomme à qui l'înt :grité de fa vie ne
fait rien craindre , tient li fort dans l'indiffé-
rence que fes aâions foieut éclairées,, qu'il
les nianifefte luy - mefme , & met à décou-
vert l'intérieur de ion cœur , fçachant t)ien
qu'il ne pèche que le moins qu'il peut vo-
lontairement , & par une jmalice noire.
(>aelques autres habillent cette vertu d'u-
ne Robe extrêmement déliée, & la.couvrent
d'un voile blanc. Ils veulent de plus, qu'el-
le ait les cheveux efpars à la nonchalance^
le fein découvert,. & un .Caducée ,.'iùr lequel
Wie Colombe eit perchée.
SOI' Ν. C L V I.
IΕ Ν qu'il faiïè ordinairement les ΡεΓΓοπ··
_ nés vieilles & laides, il ne laiiïe pas toute-
fois. de paroiftre icy. également agréable pour ft
Jeuneflê & pour la beauté ; car il ne peut de
meilleure grâce s'élever en haut avec ie& aifles,
ny tenir plus adroitement qu'il fait deux Horloj
ges de fable, tandis qu'il eft animé d'un coile
par le chant du Coq qui eft à fes pieds, &
l'autre par le Soleil qui fort de l'On-
de.
Cette iîgnre eft peinte belle , parce-quc Je
Soin prend rOceaiîon par les cheveux, & qu'il
la retient avec tout ce qu'elle a de beau & de bo»
en iby.
Par les aiilës eft iîgnifiée une extrême vitefl"e j
A quoy l'on ajoûte deux horloges , & un Sole·'
qui ne fe lafie peint en fa courfe, pour montre^·
qu'il ne faut point aller mollement dans
loin des affaires, mais s'y porter de bonneft-
çon, & avec perféverance, fi l'on veut haft^^
le fiiccés.
A cette figure ne s'accommodent pas mal le^
deux fuivantes, qui repréfentent le Soin ou W
Vigilance par deux Femmes de mefme na»^·'
La première tient un Livre en la main droit^'
(Se en la gauche une houfllne & une Lampe a^'
lumée, prés de laquelle eft une Grue qui fe β^^'
tient fur un pied. ^
Β
I C ο Ν ο L ο G I Ε. 294
La Vigi lance de l'Ame efl: icy marquée par le
Livre, parce-que par la ieâure l'Homme iè
rend vigilant, comme par la houffine le Corps
fe réveille de fon aflbupiiiement.
La Lampeallumée montre qu'à la Vigilance
appartient le temps le plus convenable au re^
pos : c'eft pourquoi les anciens Romains ap-
pelloient veilles certaines heures de la nuit, du-
rant lefquelles les Soldats eftoient obligei à fai-
re la fentinelle pour la feureté de l'Armée.
D'ailleurs perfonne n'ignore que la Lampe ne
foit entièrement néceiiàire à ceux qui veulent
donner à l'eftude leurs foins & leurs veilles.
Nous liions à ce propos , que Démofthéne in-
terrogé de ce qu'il avoitfait pouriè rendr-e lî
excellent Orateur, répondit qu'il avoit ufé plus
d'huile que de vin ; entendant parl'unlaVigi-
kncé attachée aux Sciences, & par l'autre l'aP·
ibupiilèment qui naift des délices.
La fécondé fe tient debout avec une clocbet-
t« à la main, & à fes pieds un Lion qui dort les
yeux ouverts.
La cloche convient fort bien à la Vigilance,
parce qu'elle nous invite à nous lever, afin de
vacquer à la Pénitence & au Service Divin.
Quant au Lion, l'onfçaità quel point il eil
ennemy de la pareiïè , puiiqu'au rapport de
Piérius, fes yeux ne font jamais fi bien ouverts
que lors qu'il repofe.
SORT
-ocr page 292-α3δ ICONOLOGIE.
S Ο HT -oii DES TIN. CLVnU
ON le repréfente par une Femme bizar-
re, & quieftveaué d'une Robe de cou-
leur obfcure, tenant une couronne d'or delà
main droite, avec ·ηε bourièpleine d'argent,
& de la. gauche une corde.
La couronne d'or & la corde font des en-
feigties de ce qu'on appelle bon & mauvais
Deffin. De vous dire au refte. s'il en eft un,
ou s'il n'en eit point; c'eft à quoy jemetrou-
verois bien empefché , s'il s'en talloit rapj
porter aux rêveries,des Anciens, qui ont efte
fi fous que.d'y affujettirjupitermeinie. Mai*
fans m'arrefter à ces. fables, qui font chrep
tiennement refiitées par les faints Peres, ''
me iùffit de remarquer en général, que Is
Vulgaire nomme Deilin l'évinement des
choies qui font contre l'intention de l'A-
gent. Ce qui me femble aiTcz bien expri;
mé par cette penfée d'un Auteur Grec , qui
dit , qu'iîTi mjferable ayant pris une corde
pour s'aller pendre , la jetta bien ville com-
me il eut trouvé fortuitement un grand tré-
for en la foife qu'il avoit iaite pour y eftre
enfevely ; mais qu'un peu après celuy qui
avoit caché cet or, ne l'y trouvant plus, s'a-
bandonna lafchement au défefpoir, & fe pendit
de la mefme corde que l'autre y avoit laif-
fée.
SFLBN'
-ocr page 293-'^sit^^f'^nce^ . Ζ^β j, ~l*heâÎû0t^ . 1.S0
-
α3δ ICONOLOGIE.
SPLENDEUR DE NOM..CLriIl
CE τ Homme de bonne mine , de belle
taille, & d'un.âge viril, femble animer
les grands Courages à faire des adions qui
cclattcnt, & qui les mettent dans .une haute;
réputation. 11 e(i: :ve£lu. d'une Robe .tiiTue:
d'or de pourpre, &.couronné d'une guir-
lande A'hiacynthes -rouget; avec cela il porte
au cou une chaîne d'or , & s'appuye de la
main droite fur une maiTuë , tenant de la
gauche une torche allumée.
On le peint agréable , & bien proportionné
de fes membres, parce^qu'au dire de Flaton,
la beauté du ■ Corps elt une marque d'iine
Ame vertueufe; & félon. Ariftote, un indice
vray - femblable que l'intérieur ne dément
point l'extérieur.
Son âge virillîgnifie, que n'ayant ny l'hu-
meur éventée des jeunes Gens , ny la foi-
bleife des Vieillards, il eft en eftat d'exécu-
ter les hautes entreprifes , où par une gran-
deur de courage il iè voit porté , pour s'ac-
quérir de la gloire.
Il eil vertu de drap d'or , à cauiè que ee
métal eft le plus noble de tous, & refplendiC·
fant de ià iTature ; voila pour quoy les anciens
Empereurs enavoient des Robes tiffûës, quatid
ils. vouloient paroiftfe dans les folemnitez pu-
bliques. Témoin le vieux Tarquin, cinquicme
Rof
-ocr page 295-Roy des Romains, qui en porta un lorfque le
premier de tous il fit Ion entrée à Rome parmy
les magnificences & les honneurs duTriomphe.
Mais pour mieux réhauilèr l'éclat de cet or, on
y ajoûtoit de la foye teinte -en pourpre, comme
il le vérifie par les Ecrits de plufieurs Auteurs.
De manière qu'un fi riche habillement n'eftatît
donné d'ordinaire qu'aux Hommes les plus il-
luilres., ce n'eil pas fans raifon que nous en
parons celuy-cy, pour repréfenter la Splendeur
du nom, ou l'éclat de la vraye gloire.
Il eft couronné d'hiacynthes, pour mémoire
de ce qu'Apollon, comme dit Ovide, trans-
forma en cette fleur de coukur de pourpre un
jeune homme de ce nom, qui eftoit doiié d'u-
ne finguliére beauté. Et comme ce mefme Dieu
eil appellé Proteéteur des Mufes & des bons
Efprits; cette fleur aufli eft prife pour un fym-
bolede prudence& de fageflè. Cette guirlande
n'eft donc pas mal convenable aux Hommes il-
luftres, qui fe rendent recommandables par
leurs propres vertus, & par la bonne odeur
qu'ils donnent d'eux. Auffi eft- ce pour cela que
le mefme Poète conclut ainfi la Métamorpho-
iè d'Hiacynthe.
Tu feras toujours en ma bouche ;
£i toujours ma Lyre mes Vers^
Feront connoifire à l'Univers
Combien ton fouvenir me touche.
La chaifiie di or qu'il porte à fon cou, eft une
de ces fameufes marques d'honneur qui fe don-
noient anciennement aux grands Capitaines.
Témoin entre les autres le célébré Guerrier L··
Cicinius Dentatus, Tribun du Peuple,qui aprp
iivoJr
-ocr page 296-■avoir eiié viâorieux en fix-vingt combats, re-
ceut pour digne prix de ià valeur trois de ces
chaifnes, quatre-vingt bracelets, dix-huit lan-
ces, & cent cinquante Couronnés, joint φι'ϋ
fe trouva prëfent au triomphe de neuf Empe-
reur s, à quoy fon courage & fa conduite con-
tribuèrent beaucoup.
II s'appuye de la main droite fur la maiïùë
d'Hercule, parce-que par elle les Anciens iî-
nifioient l'idée de toutes les vertusjointes en-
iëmble.En effet, tous ceux qui afpirent à la gloi-
re, & qui rendent illuftre leur nom , pren-
nent la vertu pour leur unique ilipport , &s'è-
loignent autant qu'ils peuvent des vices, qui
ne font que noircir la réputation.
Quant au flambeau qu'il tient en la main,
fa lumière eil un fymbole de la gloire des juf-
tes, & de rëçlat de leur nom, qui durera fans
fin, & en ce Monde&'en l'autre.; cequeper-
ibnne ne peut mettre en doute , puiiqu'il eft
dit dans les Saintes Lettres, Que lesJufies lui-
ront comme le Soleil dans k Royaume de leur Pere.
TERIPERANCE. CLIX.
TT Lle eft figurée par une Femme modef-
JLj te,· qui de la main droite tientune bridé,
& de la gauche un temps d'horloge, avec un
Eléphant à fon cofté.
On la dépeint avec une bride en une main,&un
îemps en l'autre, pour montrer que le propre de
îaTempérance eft de modérer les pallions dére-
I. Part, L glées:
I C ο Ν ο L ο G I Ε. 299
glées : par où ce me fembîe, eft encore ilgni-
iiée la mefure du mouvement & du repos : car
cette vertu apporte à tous les deux là modéra-
tioti requife, hors de laquelle les chofes qui
vont dans l'excès détrUifent entièrement le fu-
jet où elle s'attachent, comme par leur dé-
bordement les grandes Rivières ravagent tout
ce qu'elles reticontrent.
Pour le regard de l'Eléphant, il eft, felott
Piérius, celuy de tous les Animaux qui s'ac-
commode le mieux à la Tempérance; car de-
puis qu'on l'a une fois accoutumé à un ordinai-
re réglé, il s'y tient toûjours; à quoy fert de
pteuve cet exemple de Plutarque, qui dit qu'en
Syrie un des Valets du grand Seigneur ayant
eu ordre exprés de fon Maiftre de donner à
Chaque jourune certaine mefure de grain à un
Eléphant, ne luy en bailla que la moitié du-
rant quelque temps; mais qu'enfin comme ii
luy voulut donner une fois l'a mefure toute en-
tière, l'Eléphant la fépara en deux avec fa trom-
pe , & n'en mangea qu'une feulement en la pt^'
fencedefonMaiitre, qui parce moyen recon-
nut la fourberie de fon Valet, & n'en fut pa'
moins eftonné que de la Tempérance de cd
ingénieux Animal.
theûloùie. CLX.
C'E s τ une Femme à deux vîfages diflèm-
blables, dont l'Uh qui eft le plus jeune,
contemple te Ciel, & Î'aiUre le plus fiéasi^
garde la Terre, ,
I C ο Ν ο L ο G I Ε. 300
Elle eil affife fur un grand Globe d'azur ièmé
d'étoiles, & tient la main droite appuyée
iur ion beau fein ; mais en rtiefme temps elle
porte en bas la gauche; dont elle empoigne
le bord de fon habillement. Là tout auprès
fe voit une rouë, qui dans les Saintes Let-,
-très eil le vray fymbole de la Theolc-gie;
car comme elle ne touche jamais la Terre
que par la plus baffe partie de fa circonfé-
rence , quand elle vient à s'émouvoir ; le
Théologien de mefme ne fe doit iêrvir du
Sens en fa Profeilion, qu'autant qu'il en peut
eitre aidé pour paiîèr-outre, & non pas pour
s'y plonger trop avant»
Les deux vifages dont elle regarde le Ciel
■& la Terre, montrent, comme dit S. Au-
guftin, que toute la Théologie afpire à coii-
templer Dieu Cins ceffe , & à l'aimer avec
perfévérance. De plus, comme l'un de fe$
vifages ne peut fe hauCTer qu'en mefine temps
l'autre ne s'abaiiTe; ainiî le Théologien ne
doit jamais s'élever fi haut par la force de
fon Efprit , qu'il ne fe fouvienne qu'cftant
Homme, il eft par conféquent fujet à faillir.
L'on peint jeune celuy de ces deux viià-
gçs qui regarde le Ciel , pour inontrer que
les objets d'enhaut font agréables & curieuî,
comme les chofes terreftres & baiîès font en-
nuyeufes & déplaiiàntes»
Elle eft affife fur un Ciel étoîUé, parce
que la Théologie fe propofe pour but la
connoifl'ance de Dieu, autant que la foiblef·
fe humaine luy permet de la comprendre.
La maiiî qu'elle porte vers la Terre , &
L a dont
dont elle tient le bord de fa Robe, iignific
qu'une partie de cette divine Science ne dé-
daigne pas de s'étendre aux choies baiîes,
mais néceiTaires ; & telles font par exemple
celles par qui nous -pouvons régler nos ac-
tions , fuivre les vertus, fuir les vices , &
produire d'autres effets falutaires., où ne pé-
nétrent que les Eiprits qu'il plaifl; à Dieu
d'éclairer & de fortifier de fes grâces.
theorie. CLXI.
ELle eft peinte en jeune Femme qui re-
garde le Ciel, & femble defcendre d'uu
■degré ; ayant les mains jointes , une Robe
-bleue, & fur la teft-e un compas ouvert, dont
les deux pointes ibnt tournées en haut.
La Théorie, qui eil un mot Grec, fignifie
quelque dédudion que ce ibit de la Raiibiî
humaine, fondée fur le fujet des chofes fé-
lon leurs ordres, & fur la connoiiTance des
principes, qui toutefois ne dépendent pas du
Sens, mais bien de l'Entendement ; car ceux
qui dépendent du Sens, font la Pratique. Or
eil-il que cette derniere efloppofée à la Théo-
rie à l'égard des principes, qui ont tous pour
but l'art d'Qpsrer comme il faut, c'efl: à dire
avec mefurf &jufteflè, ainfique le témoigne
Ariiloté au commencement de fa Métaphy-
iîque. La Théorie eil: donc une connoiiîàn-
.ce & une déduâion des principes qui dépen-
dent
dent immédiatement & médiatement de l'in-
telleâ:; & peut-on bien dire que par la côn-
Boiffance qu'elle infpire de l'ordre descaufes,
elle ne donne pas moins de vivacité que de
fuffifance à difcerner & reibudre les choies
propofécs.
Sa Robe bleue montre que comme par la
lumière cette couleur cekile met des limites
à noitre veuë :. ainlî par le moyen du raifon-
ncment,. l'Elprit humain n'a point d'autre but
que Dieu mefme, le fiége duquel eft au Ciel,
lieu propre & proportionné à ia Nature, qui
comprend pelie de toutes les chofes créées.
Son viiàge levé, iîgûifie que tels que font
nos yeux à comparaifon du Soleil & de la-lu-
miére , tel eft auffi noftre Entendement à l'é-
gard des chofes céleftes. Or comme il y a quel-
que reiTerftblance de l'œil avec le Ciel, en ce
que Ton globe eft environné -de fept pell-ieii-
les, qui repréfentent les fept globes 'des Pla-
nettes, & qu'au milieu il y en a un dur & pe-
tit, qui par diverfes reiieâions emprunte fa
clarté des ièpt autres Cercles ; ainfi pouvons-
nous bien direqu'enl'Entendementily aquel-
que reprélentation de Dieu &z de la Divinité, &
qu'elle eft auffi petite que noftre œil, à com-
paraifon de la vafte eftenduë du Ciel.
Le degré par où elle defcend fert à nous
faire fouvenir, que les iùjets intelligibles ont
leur proportion & leur ordre, par qui, com-
me par certains degrez, nous allons des cho-
fes voifines aux plus lointaines, & des baiTes
aux plus hautes : à quoy nous parvenons infen-
fiblcment par le moyen du, temps, fans lequel
L 3 il
I C ο Ν ο L ο G I Ε. 303
il eil iinpoffible à l'Efprit humain de former att-·
cun raiibnnement.
Le compas qu'elle a fur la telle démontre
le mefine que fon vifage à l'égard des chofes.
céleftes.. Car l'expérience fait voir que cet ins-
trument eft le plus propre de tous àmefurer,
& pareillement à former le Cercle, qui eft la
prémiere figure irrationnelle d'où dépendent
les raifons de toutes les chofes, comme de
leur premier & propre principe. Le compas,
convient donc fort bien à la Théorie , puif-
que la connoilïànce humaine confifte à fçavoir
mefurer les chofes , & les ajufter enfemble
avec proportion; c'eil pourquoy les Philofo-
phes, comme le remarque Diogenes Laertius^
furent au commencement appeliez Analo-
giftes.
tutelle. CLXH.
C'E s τ une Femme veftuë de rouge, qui:
de fa main gauche tient un Livre de
contupte audeiTous d'une balance, avec le mot
de Gomputa, & de la gauche le bord de ik
Robe, dentelle femble vouloir couvrir la nu-
dité d'un Enfant qui dort à fes pieds,, audef-
fus duquel fe voit un petit Lézard & un Coq-
de l'autre coité.
Il y a deux fortes de Tutéle, Tune généra-
le, que les-Egyptiens ont dépeinte delà ma-
nière que l'a décrite Orus ApoUo; & l'autre
par-
-ocr page 302-pardcHiiére, qui eit définie me puijjawce que
dome le Droit Civil à ttv homme libre y de pren-
dre la froteâim de celuy qui fi'eji pas en âge de
fe pouvoir défendre.
Elle tient une balance & un Livre , pour
montrer que le Tuteur eft obligé enconfcien-
ce de rendre un fidelle compte du bien des Pu-
pilles; n'y ayant point de Loy qui n'impoiè de
grandes peines à ceux qui les oppriment. Sué-
tC)nelouoit fort à ce propos l'Empereur Gal-
ba , de ce qu'ayant condamné un méchant Tu-
teur à eftre pendu, qui avoit empoilbnné un
Pupille dont il devoit hériter ; comme il fçeut
que pour s'exempter d'une mort fi honteulc
j fe difoii eftrç Citoyen Romain, il luy fit
dreiTer un Gibet blanchy exprés, & plus haut
que l'ordinaire, afin qu'on le pûit voir déplus
loin.
Eile edveftuë de rouge, parce-que dans la
Sainte Ecriture cette couleur eft un fymbole
4'amour & de charité; qualités extrêmement
nécçflaires à ceux qui ont charee des Mineurs.
L'on en peut dire autant de la Vigilance qui eft
icy marquée par le Coq, fans laquelle il eiî diffi-
cile que le Tuteur fe puifle développer de l'emr
barras des affaires, & les mettre au point où fl
les defirc,
IjC ibin qu'elle prend de couvrir l'Enfant qui
eft à fes pieds, eft une marque de ion bon natu-
rel envers luy ; ce que rcpréfente encorç le pe-
tit Lézard qui eft au deiliis, comme ayant cela
de propre, à ce que l'on tient, de veiller à la con-
fervation de l'Homme quand il dort à la Cam-
pag,ne.
L 4 Piîjoiï-
-ocr page 303-J'ajoûtcray icy, que les Curieux de Mtdaili·
les ea peuvent avoir remarqué quelques-unes,
fur ]a matière dont nous parlons; corne celle
que Vefpafien fit battre en fon troiliéme CoU'·
fuîat, avecceraot,tûtela Augusta,
& ces deux autres de Nerva, qui ont pour re^
vers deux petits Enfans, avec cette Infcrip-
tion, Tutela Italij£.
VALEUR. CLXIII.
CE τ Homme qui eft en la virilité de fon.
âge, & veilu de drap d'or, repréfente la,'
vraye Valeur. H tient en lamain uneguirlan·-
de de Laurier; & de la gauche il carelTe un
Lion qui s'appuye fur luy.
La virilité ne s'appelle pas fans caufelefoû-
tien de la Valeur , parce qu'en cet âge-là,
l'Homme eft capable de joindre la force du
Corps à celle de rEfprit: auffi comme l'or
fe rafBne dans les flammes, l'on peut dire de.
mefine que la mauvaife fortune ne fait qu'é-
purer & fortifier un cœur valeureux.
Par le. fceptre qu'il porte, il efl: démontré
que la prééminence eft deuë à bon droit à la
"Valeur ; & par la Couronne de Laurier, arbre
viâorieux, & qui ne perd jamais fa verdure,
qu'il en eft de mefmedes bons Courages, qui
dans les plus grands dangers ne pâlifleiit point,
& font toujours en mefme pofture..
Quant au Lion qu'il careire, & dont il eft
carcf-
-ocr page 304-k
-ocr page 305-carefle, cela fignifie que c'eft le propre d'un
Homme de cœur de fçavoir gagner les volon-
tez, & de s'airujeîtir par la douceur & par
l'accortlfe les Courages les plus barbares, en
les dépouillant de leur fierté naturelle.
ELl ε paroift icy en jeune Fille richement
veftuë, avec un vilage plein de fard,, une
mine affettée, une taiTe fur la tefte , & un
cœur au milieu.
L'on appelle Vanité en une perfonne tout
ce qui n'a point de but parfait, tel que nous
le devons avoir en nos aâions, comme di-
fent les Philofophes. Or parce-que les beaux
habits & la peine que l'on prend à s'ajufteront
une fin peu louable , & qui ne tend vainement
qu'à plaire à autruy pour une chofe vile , &
qui ne fait que paiïèr; c'cfl: fort à propos, à
mon avis, qu'on les met icy pour autant de
marques d'un oigueil extravagant, & d'une
vanité ridicule.
VERGOG NE HO Ν NE S TE. GLXV.
Ous la figurons par une Fille fort agréa-
ble., qui a les yeux panchez en bas. ,
L,f les
les jolies vermeilles, une Robe rouge, une
tefte d'Eléphant pour coëifure, un Faucon en
la main droite, & en la gauche un rouleau, où
font écrits ces deux mots, Dysoria. Procul.
Bien que l'honnefte Vergogne, ou la Pu-
deur , ne paiTe point pour Vertu dans l'efprit
de quelques-uns, elle ne laiiTe pas toutefois
d'eftre fort louée par Ariiiote, qui luy fait tenir
un milieu entre l'effronterie & la ptur ; & la.
définit une eettainefafiberied^Efprii néedera^-
fréhenjion des maux , que mus croyons pouvoir
thocquer mflre honneur ; à quoy s'accommode;
à peu prés le ièntiment de quelques Poètes-
Italiens, qui l'appellent une louable, modeftie;
entre jeunes gensqui de peur qu'ils mt de fai-
re quelque incivilité n'ofent point parler ny pa-
roiftre en compagnie. D'autres la définiiiènt
itne douleur intérieure.^ isî u» fecret refentir que:
vous avûns des chofes mal faites. Mais cette der-
nière forte de Vergogne eft moins louable que:
la première; car l'une fait que l'on s'abftient de;
faillir depeurd'eneftreblafmé, ce qui eft une
démonftration de cette vertu que Saint-Am-
broife appelle compagne de la Pudicité ; aulieui
que l'autre eilen quelque façon l'effet du vice,,
qui eil fuivy delà repentanee.
Or. ce n?eft pas iàns raifon que nous peignons·
l'honnefte Vergogne avec un vifage mo-
defte, &. les yeux baiilèz, puiique ièlon Saint-
Bernard,, elle ajoute beaucoup à la grâce,
rend la perfonne plus aimable :. ce qui fe re-
marque particulièrement dans les yeux ori elle:
a fonifiége, comme dit Ariiiote. Pline néan-
iaolns veutou'elle l'ait dans les joues, à caufe:
dfi-
w.
rCONOLOGrX.
de la rougeur que nous voyons s'y épandre d'or-
dinaire.
Pour cette mefme caufe nous luy donnons
«ne Robe rouge; couleur que ia belle Pythies,,
fàlle d'Ariftote, difoiteftre la mieux féanteauï,
jeunes Filles. C'eftoit le fentiment qu'avaient
encore Caton & Menandre, dont l'unlouoit
plus les jeunes gens quirougiilbient, - que ceuK>
qui devenoient pafles& l'autrfi prenoit la rou-
geur en une perfonne, pour une infaillible mar-
que de piObité..
Elle a pour coëfture Ta telled'un Eléphant·,,
parce qu'au rapport de Pline , c'eil celuy de
tous les x^nimaux qui eft le plus honteux : juP
ques-là mefme, qu'ayant à s'accoupler à ïà;
Femelle , il s'égare dans les Forefts, & cher-
che les lieux qui lui femblent les plusdefërts. Ce
qui nous apprend', commeditPythagore,. âne
faire j amais rien de deshonneôe, & à rougir de,
nos propres fautes plûtoft que de celles d'au^
truy..
A l'Exemple de l'EIephant l'on peut joindre:
eeluy du Faucon, dont le courage eft ii noble
qu'il aime mieux endfirer la faim,, que de iè re-
paiftre de charogne; que s'il s'en va fondre fur
quelque oifeau qu'il manque de prendre , ilfe,
rebute à l'inftant, fi honteux il eft, & l'on a bien;
de la peine à lefaire.reyenitfurlepoingdece-
iuy qui le reclame;.
Or dautant-que tous eKcéè font ordinaire-
înent vicieux, c'eil pour cela, que certefigure:
porte en fa. main gauche oes deoK paroles éCri^
tes,. Dysoria procul, c'eii-à-direcjûenous:
ae,. divans pa^ eflic honteux jufijaes à-cc point ^
L- d- que:
que nous en ayons le courage & les yeux abboi-
tusenfemble; car comme l'on appelle Catejie
un fecrct chagrin, qui nous ofte la hardieflè de
regarder, les perfonnes au vifage : ainfi par le
^ mot de D1 s ο RIΕ s'entend cette lafche vergo-
gne,, qui aboutiiTant à une extrême baiîeiîè de
cœur, empefche que ceux qui en font faifis ne
puijSent faire en public aucune a£lion qui foit
honnefte & louable. Ajoutons à ce propos ,
qu'lfocrate fameux Orateur Athénien,\diroit
de The'opompe & d'Ephore fcs Efcoliers..,
qu'il ufoit du frein pour retenir la hardieflè de
l'un, & de Fefperon pour chalHer l'humeur
trop honteufe de l'autre ; ce qu'il ne faifoit fans
doute qu'avec beaucoup de raifon, puifque l'ex-
périence montre tous les jours qu'il n'y a, com-
ité, l'on dit, que les honteux qui le perdent;
qu'une humeur trop retenue dégénéré quelquer
ibis en fotife ; & que la fortune reiTemble à ces
Pemmes rufées, qui veulent bien qu'il pa-
roifîè qu'on les force ; quoique néanmoins el-
les ne laillènt pas d'en eftrc contentes..
.î'S .-te i!^, .«a
VERITE.. CLXVI.
CE τ τ Ε Beauté toute nue tient de la maia
droite un Soleil qu'elle regarde, de la
gauche un Livre ouvert, avec une branche de
palme, & fous l'un de fes pieds le.Globe du
Monde.
La Vérité eft- uue habitude de FEfprit, difr
poiée.
-ocr page 309-pofée à ne déguifer aucunement les chofes,
ibit qu'il en parle, ou qu'il en écrive; car fans
jamais changer de peni'ée, il foûtientaiTeuré-
mentcequiell, &niecequin'eitpas.
Elle eft.peinte nue, pour montrer que la naï-
veté luy eft naturelle,. & qu'elle n'a pas befoin
d'explication pourfe faireentendre.
Pour montrer auffi combien elle chérit !a
clarté, elle tient & regarde un Soleil, quiefl;
Dieu, fource de toute luiniére, & la meime
Vérité.
Le Livre qu'elle tient ouvert., fignifie que
dans les Ecrits des bons Auteurs qui nous ap-
prennent les Sciences , fe trouve la Vérité des
chofes; & la branche de palme,que la Vérité n'a
pas moins de force à fe roidir contre les efforts
qui s'y oppoiènt, qu'en a la palme à fe relever
plus l'on eiTaye de l'abattre.Ge qui fait dire à Ef-
chinés, qu'une iî puiiiante Reine triomphe de
toutes les-penfées H.umaines;àBachilides,qu'ef-
tant cette Sapience immortelle à qui rien ne
peutrefifter , elle eft plus forte par conféquent
que toutes les chofes du Monde : auffi eft-ce
pour la mefme; raifon qu'elle foule un Globe
de l'un de fes pieds..
il!!
VERTU. CLXVII.
CE τ te jeune Fille qui· ne paroiii: pas
moins agréable que belle, eft la vrayc
Image de la Vertu , qui a des aifles au dos,
une pique en la main droite, en la gauche
une
-ocr page 310-I c Ο Ν Ο L Ο G I Ε.
une couronne de laurier, &:un Soleil au milieu
defonbeaufein.
Elle eû peintejeune, parce qu'elle ne vieiï-
litjamais, &icfortificdejourenjour, car fes
aâions illuflres ckviennent des habitudes, &
durent autant que la vie.
La beauté de fian vifage eft un Symbole de
celle de fon Efprit; & c'eftpourlamefmerai-
fon encore qu'on, kiy donne des aiiles, parce
qu'elle a cela de propre de s'élever par deffus le
Commun, pour prendre part a ces doux plai-
firs qui ne font goûtez que des Hommes extra-
ordinaires.
Par le Soleil qu'elle afurkfein, ileft décla-
ré que comme la lumière de ce grand Aftre
nous vient du Ciel icy-bas ; ainfi la, Vertu qui a
ion fiége dans le cœur, infpire le mouvement
Λ la vigueur à tout noftre Corps, que les Grecs
appellent un petit Monde : de manière que par
cette Vertu, fecretteil ferédiaufl:€& fe fortifie
d'où il s'enlùit que de ii,puii][ànt€sqoaîite2,de.·
lumière, de chaleur & de force, font, feîoii kg
Philoibphes anciens, la meilleure Partie des
plaifirs & des biens que nous pouvons goûter en
cette vie.
Et dautant que le laurier eft toûj ours verd, &
que la foudre ne le peut endommager, nous ea
donnons pour cet eftetune couronne à la Vertu
parce qu'il n'eft point d'Ennemy qui lapuiiTe
vainGre,&: qu'elle ne craint ny les embrazemens,
oy les diigraces, non plus que les autres violen-
ces de la Fortune.
Pour le regard de lapiquequ'elte tient, corn'·
me parmy les Anciens ellceftoit «ijciniwque de
préé,-
-ocr page 311-prééminence & de dignité, elle en eil une auffi;
du pouvoir de la Vertu, & des grands avantages
qu'elle a fur le Vice.
Quelques anciens Empereurs l'oiu ainfi don-
né ■ connoître par les Médailles qu'ils en ont
f -'-s. En celle de Lucius Verus elleeft re-
Tentée par le vaillant Bellérophon, monté
ΐ ^^ · le Cheval Pégafe, & armé d'un javelot
dont il abat la Chimère, c'eft-à-dire la diformi-
té du vice. En celle d'Alexandre, pat une-
Femme armée, qui tient d'une main un Glo-
be, & une Lance de l'autre, pour montrer que
la Vertu s'aiTujeiit tout le Monde:. & en celle,
de Galba & de Domitien, par une Amazone
qui a pour Armes un Corcelet avec une Lanca
& un Cimetére, & fous fes pieds un Morion;
IL fe voit dans Rome au Capitofe une ftatuë
de bron'ic doré, repréiêntant Hercule vertu-,
«de la peau d'un Lion. II tient une maffuë de la.
main droite, & de la gauche trpis Pommes d'or,
cueillies dans le jardin des Hefpérides : par où.
font %nifiées trois fortes de Vertus Héroïques
attribuées à ce Dompteur de Monftres. La
première eft la modération de la colere, laiè-
eonde la Tempérance, & la troiiiéme le géné-
reux mépris, des voluptez & des deliccs du
Monde.. Conformément à cecy l'on a raifoii
dsL dire,, qpe l'Homme eil doLié d'une, VertU;
Ijar.-
-ocr page 312-parfaitement Héroïque, quand il aibûmis à iby
les paffions déréglées, par une fi haute & fi par-
faite Raifon, qu'elle l'éléve au deiïùs de la coi>
dition des Mortels-, &lefend:prefquefembla-
ble aux Anges.
La mafiiië qu'on luy donne efl; raboteufe &
pleine de nœuds, pour montrer par-là les gran-
des difficulté! qui fe préfentent de toutes par aij
ceux qui veulent vivre vertueufement. . Les
-Poètes feignent à ce propos, qu'Hercule enco-
re jeune s'eftant trouvé dans un Lieu defert où
il y avoit deux Chemins, l'un femé de rofes,
:& l'autre d'épines,fut long-temps à délibérer en
foi-même, touchant celuy qu'il devoit prendre,
& choifit enfin le dernier,quelque épineux qu'il
fuft, jugeant bien par-là quex'eiloit celuy de la
Vertu.
Le mefme Hercule eft toujours repréfenté
pour un parfait modèle des plus hautes qualitez
des grands Héros; en la pluipart des anciennes
Médailles ; comme en celle de l'Empereur
Gordien, où il porte la peau d'un Lion en l'un
de fes bras, & en l'autre une maiTaë;. en celle
de Maximin, où il s'appuye.fur la telle d'une
Biche, qui fervit autrefois à exercer fa Vertu;
en celle de Geta., où il eil peint hauflant les bras
pour aiïbmmer le Dragon qui gardoit les Pom-
me? des Hefperides; ôtencelledeTrajan, où
il tient une maiTuë de la main droite, &enîa-
gauche un Lion & un. Sanglier qu'il .mène en
leiTe.
1 C α Ν ο L ο G I Ε.
VIE COVRHE. CLXIX.
ON la repréfente par une Femme, quia*
fur la tefte une guirlande de diverfes feuil-
les, iùr le fein la figure depetit
Animal volatil, en la main droite une branche
deRofîer, aveccesmotsàl'entour.
UN A ÛIES APERIT , CONFICIT UNA DIES,
c'eft-à-dire,
Eïie s'épanouit fe pajfè en un jour ^
& enlagauche le Poiflbn appellé Séche.
L'Homme eft fi amoureux de la vie, qu'à
l'exemple de Théophrafte, il fe fâche de qu'el>
le n'eft auffi longue que celle des Cerfs &des
Corneilles ; alléguant que fi cela eftoit, il en.
fçauroit plus parfaitement les Arts & les Scien-
ces , au lieu qu'il luy faut mourir fur le point
:qu'il commence d'en avoir quelque teinture:
mais Salufte eft bien d'opinion contraire , &
dit que ces plaintes fef&nt en vain, &querii>
duftrie manque à lii Nature humaine plûtoft que
letemps. Par où iÎVeut faire voir, querHon>
me n'en aquetrop, s'il leveutbien employer à
l'aquifition des Difciplines & des Vertus. Ce-
la n'empefche pas toutefois que la vie ne foit
courte en effet, & qu'à la bien confidérer, elle
ne s'évanouïiïe comme un ibnge.
Cette figure eft pour cet eiFet couronnée d'u-
ne guirlande de feuilles, parce-qu'avec la mef-
me facilité que le vent les abat, le moindre
acci»
-ocr page 314- -ocr page 315-I C Ο Ν Ο L Ο G I Ε.
accident nous porte par Terre: tellement que
nous pouvons bien dire, que noftre âge quel-
que verd qu'il foit, perd £à vigueur iniënfible-
ment, comme on voit les feuilles des arbres de-
venir féches en un inftant, & fedépoiiilkrde
leur plus belle verdure.
Par PHemorobion, qui eft une efpecc de
Mouche aiTez grande, & auffi-toft morte que
née, nous eft pareillement fignifie'e la courte
durée de la vie, qui comme dit Antiphon, eft
la prifon d'un feul jour, puifque tous les autres
y font compris.
Cette fragilité des Mortels ne peut mieux
eftre comparée qu'à la Rofe, qui naift la der-
nière des fleurs, & meurt la première ; ce qm
fait dire à un grand Efprit, ayant à confoler fou
amy fur la mort de fa Fille.
Mais elle efioit du Monde, où ksfîus belles chofes
Οίίί le pire défilai ;
Et Rofe elle a vefiu ce que vivent ks Rofes^
Uefpace d'un matiii.
Et ce fut pour la mefme raifon, que le Pape
Léon XI. prit cette fleur pour Devife, avec
ccmot; Sic florui.
Quant à la Sèche qu'elle tient en main,
c'eft pour faire voir avec Ariftote, que com-
me ce Poiilbn ne dure guère, & fe voit tou-
jours guetté, ou par les Pefcheurs, ou par
les autres Poiiïbns, qui luy font une conti-
nuelle guerre pour l'engloutir; l'Homme de
mefme ne peut s'aflïïrer d'eftre long-temps
dans le Monde , 6c devient la proye ou des
autres Hommes, qui s'en défont par divers mo-
yens , ou de la violence du temps qui dévore
tout ;
-ocr page 316-tout; car cormue a fort bien dit M. Malherbe
que je viens de citer.
Le temps d'ut» infcKfible cours
Nous parie àlafiti de nos jours ι
CeB à mflre fage conduite.
Sans murmurer de ce défaut ^
De mus canfoler de fa fuite,
Εκ le ménageant comme il faut.
FIE LONGUE. CLXX>
SA figure eft celle d'une vieille Femme ve-
ituë à l'antique, qui de là main droite s'ap-
puye fur la telle d'un Cerf, & tient de la gauche
une Corneille.
Par ià vieille Robe eft démontrée la révolu-
tion qui s'eil faite de plufieurs années qu'elle a
veuës ; & par le Cerf, fa longue durée ; car
cet Animal, au rapport de Pline, vit plus de
trois cens ans, comme ilfeprouvevray-ièm-
blablement par l'Hiftoire, qui dit qu'Agatho-
cles Tyran de Syracufe eftant àlachailè, tua
an Cerf, qui avoit unCollieroùeftoient écrits
ces mots, Diqmedes Artemides.
Mais nos Annales font foy de bien plus récentç
mémoire ; que Charles fixiéme eflant en la Fo-,
reft de Senlis en prit un autre, dont le Collier de
bronze doré avoit pour infcription ces paroles,
Hoc C^sar me dqnavit; ce qui fait
voir aiTez clairement combien eft,lougue la vie
das Cerfs, foit que la Nature, comme difent
qj-iel»
-ocr page 317-quelques-uns", leur ait appris l'Art de ié
rajeunir, ou quelle melrne ait voulu que par
une grâce particulière leur âge s'étendifl; plus
loin que celuy des Hommes des iîecles moder-
nes.
Mais afin que les feuls Quadrupèdes n'euflent
pas cet avantage, elle a voulu le donner auffi
aux Volatils, principalement à la Corneille,
qui vit encore plus long-temps que ne fait le
Cerf; d'où vient qu'elle eftappelléedes Latins,
'Amofa, & voila pourquoy nous enav(OTsmis
une en la main gauche de cette Figura
IL feroit fuperflu de décrire & d'expliquer
icy cette Figure, puiique j'ay fait l'une Se
l'autre en lacent cinquante-fixiéme, qui a pour
titre le mot de Soin, oùjerenvoyeleLeâeur
pour s'en éclaircir. D'ailleurs; il n'y a celuy
qui ne içachebien, que la Lampe, le Livre &
la Grue font les vrais Symboles de la Vigilan-
ce; &dautantqu'ilyenadepluueurs fortes, il
faut remarquer qu'on en fait auffi divers Ta^
bleaux; & que celle qui a pour but principal,
ou d'attaquer, ou de fe défendre ; eft repréfen'-
tée avec un Serpent en la main droite, &enla
gauche une flèche ^ pour montrer par-là qu'on
s'employe en vain à faire reiiffir une affaire,
quelque foin qu'on y apporte, fi la prudence
n'eft jointe à l'exécution.
FIR-
-ocr page 318-IGONOLOGIE. αβι
VIRGINITE'. CLXXII.
SA figure eft celle d'une belle Fille, veilue
de blanc, couronnée d'une guirlande, &
qui d'une façon agréable s'écreint le milieu du
Corps d'une ceinture de laine blanche.
L'Emeraude, félon Piérius, eft un Sym-
bole de Virginité : auffi fut-elle confacrée : non
pas à Venus la lafcive, mais à la célefte, que
les Anciens croyoient eflre DéeiTe de l'Amour
pure.
Quant à la ceinture que nous donnons,
elle luy convient fort bien, puiiqu'il eû vray
qu'anciennement les jeunes Filles en âvoient
une , qu'il n'eftoit permis à perfonne qu'à
leur Mary de leur ofter la nuit de leurs
nopces , comme le remarquent Feft. Pom-
pée , & le Poëte Catulle dans l'Epithalame de
Manlius & de Julie, où il dit parlant de J,u-
non,
Celle de qui-Vamour efl pure ^
Ne f invoque jamais en vain-,
Lors (lue d^une tremblante waiu
On luf veut ο fier la ceinture.
Or ce que nous avons dit de l'Emeraude iè
doit eatendrepareillement de îaGouleur blan-
che , qui fignifie la pureté des penféés de l'Ame
inféparables d'avec les honneftes aftions du
Corps..
Quelques autres repréfentent la Virginité
, . par
par une belle Fille qui careiTe une Licorne ; cai-
s'il faut tenir pour véritable ce que les Naturali »
ftes ont écrit de cet Animal, ilnefe laiffeja-
mais prendre que par lâ main d'une Vier-
ge.
VOLONTE'. CLXXIII.
T? Lle eft figurée par one Fille aveugle,
jCy qui a des aiiles au dos & aux pieds, une
Robe de couleur changeante, & l'adion d'une
f erfonnc qui marche à taftons.
La Volonté qui commande en Reine à la
,plus noble Partie de l'Homme, s'impoiè des
loix elle-mefine, félon les évenemens ou fa-
vorables ou contraires, que le Sens &laRai-
ibn luy promettent; d'où il s'enfuit que lî elle
eft mal perfiiadée de l'un ou de l'autre, elle
iè trompe eu fes commandemens , & met
€n défordre l'unioa de l'Homme inté-
rieur.
Elle eft peinte aveugle , parce que ne vo-
yant de foy-mefme aucune choie , elle mar-
che à taftons après le Sens, s'il eft foible
ouchancelanr, ou après laRaifon, fielle eft
ferme &folide.
Or parce-qa'elle eft une Puiffance , qui
dans le délîr deSchoiès que l'apparence luy fait
trouver bonnes, n'a rien de certain , &
flotte toûjours entre l'efpoir & la aainte;
e'eft pour cela que nous l'habillons icy bizar-
rement
rement d'une Robe de couleur changean-
te.
Quant aux aifles qu'on îuy donne, il n'eft
pas hors de propos qu'elle en ait aux pieds
comme aux épaules ; pour une marque de
l'inquiétude où elle cil fans ceilê, en travail-
lant à l'eftabliirement de fon repos ^ & dau-
tant qu'après l'avoir long-temps cherché fur
la Terre , elle ne l'y peut trouver , elle faij:
un effort généreux, âi fe guindc vers le Ciel ;
à quoy luy fervent grandement les aiilerons
qu'elle porte aux pieds, par le moyen def·
quels elle fe détache plus aifément de l'embar-
ras des chofes terreftres.
ZELE, CLXXIV.
IL eft icy repréfenté par un Homme habillé
en Preftre, qui de la main droite tient une
difcipline, & de la gauche une Lampe allu-
mée.
Par le Zélé iè doit entendre l'ardent défir
qu'a l'Homme de bien, que les chofes qui ap-
partiennent au Culte Divin foient faites com-
me il faut, &âvec autant de fincéiité que de di-
ligence.
L'on peut s'acquitter de l'un & de l'autre, iî
l'on prend le foin d'inftruire les ignorans, &
de corriger ceux qui faillent ; ce qui nous eft dé-
claré par la Lampe, & par la difcipline que cate
iigure tient eu main·. Neitre Saweur Jésus-
Christ
-ocr page 321-Christ pratiqua parfaitement-ces deux cho-
ies, lorfqu'il chailadu Temple de Jeruiakm
Geuxquidece].ieuiàint& iàcré en faiibient un
Marché public ; & qu'en fuite de cela il fe mit à
les inftruire doublement, & par fes enfeigne-
mens falutaires, & par les miraculeux exemples
de fa vie..
Tm de la premiere Fmk.
■ÊûMàiàMÊùM^ÊiiiiiiàÊiÊù
De l'Imprimerie de Daniel Boui-esteys
DE T-X CoNTiE, fur le Prince-graft proche
la RraiTerie de l'EIephant blanc.
M. DC. XCVIII,