-ocr page 1-

A A. oet.

692

r

fl

-ocr page 2-
-ocr page 3-

LE PEINTRE

AMATEUR
ET CURIEUX ,

o u

DESCRIPTION GFNE'RALE
des Tableaux des plus habiles JldaU
très, qui font l'ornement des Egli-
fes
, Couvents , Abbayes^ ^ Prieurés
ér Cabinets particuliers dans téten^
due des Pays-Bas Autrichiens.,

Ouvrage très-utile.
Par G, P, Menfaert^ Peintre,

PREMIERE PARTIE,

'Contenant le Brabant et la
Seigneurie de Malines.

Avti

''Mobama f^.jprtvUege

-ocr page 4-

PREFACE

^ Je

crois que le public ne mê défap^
prouvera pas d'avoir entrepris cet
•vrage , qui contient le fenfeignement
de tout ce que mus avons dé plus pré-
cieux é" àe pins rare en Peinture &
en Sculpture dans plujïeufs Villes des
Pays-has , pHncipalenieni Its Tableaux
originaux de
(^intin Matfys, de
François Floris, de Bernard van Or-
ley ,
M. Goxie ^ af'Otto Venius ,
de Rubens , de van Dyck , & de plu-
fieurs autres célébrer Peintres, dont les
ouvrages foM aujourd'hui Pornemen^
de nos Eglifes -, Abbajes & Monaf-
ieres , qui font comme autant dé
chefs-d'œuvre de ces grands Aîahres ^
ijui , pour ainfi dire , a l'envi les uns
des autres, Je font difputé la gloire dê

-ocr page 5-

P R Ë F A tî Ë.

^'mMortalifer far leurs travaux , noà
feulement dans la vue d'exciter après
leur mort la curiofité de ceux qui satta-^
chent k la cmjîdération des plus exceU
iens onv'ra'ges , mais encore pour don-^
ner aux jeunes Amateurs de ïàrt la no^
hle émulation de les imiter a force d'étu-
de & de travail y & fi rendre far là
fuite aujjî célébrés queuXk Jamais toc-
cafion de s^avancer ne nous feut étrè
flus favorable , i^yant le bonheur d'a^
voir f our VroteBeur tllluflre Princé
CHJKLÈS - ALEXANDRE
DE LORRAINE, qui 'a l'imita^
iion du fiu Roi LOUIS XIV, dè
glorieufe mémoîrî ^ daigne honorer dé
fa hien-veillance ious ceux qui fe dif-
tinguent dans les beaux arts, é" '^ui^
acquièrent quelque réfutation', ^uet
puiffant aitrait foUr faire renaître dans
le cœut des jeunes éle-Ves tenvie de fe
jîgnaiet, & de parvenir a ce dégré de
perfeBion fi dèfirable dans
Un art qui
paroiffoit languir , mais qui reprend
une nouvelle force fous le gouverne-
ment
d'nn F rime fi bon ér fi généreux s.

-ocr page 6-

PRÉFACÉ.

-Avec quelle ardeur, avec quel em*
prejjement ne voit-on pas aujourd'hui
des perfomes de la première difiinBioîi
faire me recherche exaBe é" curieufé
des plus heaûx morceaux de nos anciens
■Maîtres y pour en enrichir (^ décorer
leurs galeries & leurs cabinets^

Combien iAmateurs , qui n éparg-
nent rien pour fe procurer une ample
colle£iion des Tableaux les plus rares^ ér
iqui ont là. politejje la générofitè
d'en faciliter la vùé a tous ceux que
la curiofité de les examiner conduit
thez, eux ! ^uel avantage potir ceux
qui font projejfion de cet àrt, de pou-
"^oir fans ûne recherche pénible de mo-
dèles anciens , remarquer dans la beau-
té des pièces expofees a leurs yeux y
ce qui manque a leur pinceau , pour
atteindre a la perfe5}io?t des ouvra-
ges de ces grands Peintres , c^ notam-
ment de ceux que je viens de citer, que
leurs talens fupérieurs élèvent au-def-
fus des autres^

En un mot pour faciliter a tous jeu-*
nts Ekvés U connéijfancc des diffé-

-ocr page 7-

P R E F A C Ë;

Rentes -parties, qui entrent dans^ la com^
fofition, é^ qui en font comme la bafë
fondamentale , je leur expliquerai a la.
fin de ce volume en quoi confifle l'en^
tenâement du clair-obfcur, l'oppofitiof^
des couleurs , les forces quelles doi-
'vent avoir , & ce que mus appelions
Ordonnance ; toutes régies é" princi-
pes effentiels que le fameux Kuhens
nous A latffês comme autant de lumie-
tes néceffaires pour nous conduire a
cette haute ferfeBion j a laquelle il
e(l parvenu^ Trieuréux mille foiè
heureux ^ fi j'ai le bonheitr de leur
faire comprendre ces maximes ; parce
qu'après leur en avoir donné la défini-
tion d^ tintelligence le mieux qu'il me
fera pofjible ^ j'aurai la fatisfaBion de
les avoir mis a portée de devenir un
jour aujjî bons compoftteurs & defjî-
mteurs , que les grands Jldattres dont
je vais faire mention dans ce traitée

-ocr page 8-

LE P E I A'T Px. E

AMATEUR

ET CURIEUX.

I^efcription des frmclfmx Tahlcm^
& Cabmets qui Je voyent dans Li
^ille de Bruxelles & dms quelques
endroits moijim.

I-aChapelleôùEglisëdedie'e a
Notre-Dame
, dite des Victoires i

sur le sabloni

C~^Ette Eglife mérite par k beauté
^ la régularité de fon Arçhî-'
teCturc lattentiôn des Curieux de
mcme que deux Chapelles qui fonc

A

-ocr page 9-

^î, LE PEINTRE
à côté du Chœur , dont l'une efb
dédiée à Ste. Urfule , & l'autre à
St. Marcou ; elles font à peu près
uniformes pour le deffein j celle de
Ste, Urfule, qui eft à gauche, eft re-
vêtue de marbre blanc & noir : on
y voit le Maufolée de la famille dn
Prince de la Tour & Taftis, très-
artiftement taillé & fculpté par
le célébré
Cofjns : les trois ver-,
tus Théologales qui font dans les
niches au bas du Dôme , font du
deffein & de l'ordonnance de van
Delen^ Sculpteur rerîomméj la qua-
trième figure qui repréfente la Vé~
rité , eft auffi. du même Sculpteur :
les Anges qui font pofés fur la cor-
niche du Dôme , font de la main du
fameux ^enoy , ainfi que la repré-
fcntation de Ste. Urlule que Ton
voit en marbre blanc dans la Ni-
che du maître-Autel de cette Cha-
pelle. L'on y admire pareillement
un Génie de la main de
Gripello,
En entrant dans cette même Cha-
pelle > à gauche , vis-à-vis le grand

-ocr page 10-

MATEUR tr CURIEUX. %
Maufolée , on en voit un autre de
la même famille. Dans la Chapelle
de St. Marcou , à gauche , font
plufieurs figures de Saints , mais
inférieures en beauté & fculptures
à celles de la Chapelle de Stc. Ur-
fuie. Cette demiere eft cependant
embellie de Reliques &c ornemens
divers ; dans la Sacriftie font plu-
fieurs portraits de la famille du Prin-
ce de la Tour &
TalTis, peints par
'vmder Meyn : le Chrift que l'on y
voit en ivoire eft de l'ouvrage de van-
Bevere , moîx:eau très - curieux
d'une feule piece. Le Tableau que
l'on voyoit autrefois à côté de cette
Chapelle , peint par
Crajer ,
qui repréfente plufieurs portraits ,
grands comme nature , accompa-
gnés de la Ste. Vierge , eftpréfen-
tement pofé au-deffus des ftalles du
Chœur, à droite, ainfi que celui qui
repréfente le trépas de la Ste. Vierge >
peint par
M, Coxte , qui étoit ci-
devant à côté de la Chapelle de
Ste. Urfule. Sur une des portes d en-

A ij

-ocr page 11-

4 LE PEINTRE.
trée de ladite Eglifè , on voit il»
Tableau peint par
A. SdUert, qui'
repré/ènte la Proceffion inftituée en
l'année 1615, par l'Infante Ifabelle,
en mémoire de ce quEile avoic
abatu l'Oifeau que le grand Serm.ent
avoit coutume de tirer tous les ans
iur le clocher de cette Eglife , &
pour la même occafion Elle dota
le mariage de douze Filles ou Pu-
celles, lelquelles pour obtenir leur
dot, font dans l'obligation d'affifter
& accompagner cette Proceffion
pendant deux années de fuite, vêtues
en blanc, & leurs tctes couronnées
de fleurs. Les abus qui fe font
gliffés dans le choix de ces Filles ,
& le mauvais ufàge que quelques-
unes ont faites du don de leur Bien-
faitrice , ont obligé les Direéleurs
d'y faire quelque changement, l'on
ne peut pas dire que cette fonda-
tion s'eft éclipfée, mais qu'elle eft
tellement changée que cen'eftplus
auj ourd'hui qu'une e^ece de mémoi-
le annuelle de fa premiere inftitu-

-ocr page 12-

AMATEUR ET CURIEUX. 5
tvon. Cette Princeffe paroît dans ce
tableau accompagnée de toute fa
Cour, des douze Pucelles , de la
Garde-Noble , des Hallebardiers ,
du grand Serment , d'un con-
cours innombrable de Peuple.

Sur une autre porte d'entrée,
vis-à-vis , eft le même Serment, qui
fait la parade après avoir tiré Toi-
feau,- ce tableau eft peint par le
mcme
A. SalUçrt. -

On voit fur l'Autel du Serment,
à la droite , prèa la derniere colon-
ne en entrant par le grand portail >
un Tableau avec deux battàns >
peint par F.
Floris , dans lequel on.
remarque des contours fi coulans
bc fi délicats , que
Rapbaël mcme
les aurolt adopté pour être de la
façon : il repréfente le dernier Ju-
gement , & fur les battans la cliû-
te des Anges.

Dans la premiere Chapelle , à
gauche , eft la Décolation de Ste.
Barbe , peinte par
§mllin le Jeu-
ne,
On y Yoit en olitre à côté

-ocr page 13-

6 LE PEINTRE
un tableau qui a fervi autrefois
pour le maître - Autel ; c eft un
Chrift fur la Croix, la Ste. Vier-
ge , la îkladeleine , & St. Jean
font au bas j le tout peint par
de
Clerck^

Le tableau de la fecqnde Cha-
pelle repréfente une Annonciation,
& celui de la troifième , un St.
Hubert, peint par
va^ Noort ; on
en voit encore un autre > qui eft
la Fuite en Egypte, peint par
Coût-
fieres.
Sur l'Autel, dans la quatriè-
îï^e Chapellç, eft une Ste. IVîiide-
leine peinte par
va». Schoor , &
l'autre côté , dans la premiere
Chapelle Saint Eloy , peint par
Got-
î dans la deuxième un Chrift j
dans la troifième la Madeleine re-
penti-i, d'après Kuhetis î & dans la
derniere, le martyre des Saints Crif-
pin & Crilpiiiien , peint par M^
/Cçrtens^

-ocr page 14-

amateur et curieux. 7

L'Eglise bes Carmes'
t) e' c H A u s s e' s.

On voit fur le maître-Autel de
cette Eglife TAffomption de la Ste.
Vierge , les douze Apôtres au bas»
en admiration , & deux Femmes
qui tiennent le linceul parfémé
de fleurs , le tout fuperbement
compofé , & hardiment peint par
Kuhem. Sur l'Autel de Ste. Thé^
refe, qui efl à gauche en entrant,
eft un autre tableau du même Maî-
tre , qui repréfente cette Sainte à
genoux devant le Sauveur : entre
elle & le Seigneur , font deux Sé-
raphins , dont un tient en fa main
une Flcche ardente pour enflam-
mer fon cœur d'un amour tout di-
vin.

Autour de cette F.glife on voit
Fix grands tableaux , & deux à
chaque côté de l'Autel , ce qui
fait en tout dix , mais ce ne
fonc que des copie,s d'après Ku-

-ocr page 15-

è l e p e in r r e
èem : les originaux ayant péris îc
quatrième Février 1731 , par les
flammes qui confumereiit le Palais
du Prince à Bruxelles^ Voici leurs
reprcfentations : en entrant à droi-
te 5 le premier eft la Manne qui
tombe dans le défcrt. Le deuxiè-
me l'Amour Divin. Le troifîème
les quatre Dofteurs. Le quatriè-
me le Triomphe de l'Eglife. Le
cinquième la vieille Loi qui cède
à la Nouvelle.

A gauche çn entrant, le premier
repréfente le Prophète Elie & un
Séraphin qui lui apporte du pain. Le
deuxième le Grand Prôtre Melchife-
dech qui vient à la rencontre d'Abra-
ham. Le troifîème les quatre Evan-
géliftes, Le quatrième le Triomphe
de la Religion Le cinquième une
allégorie du tems. ( La Religion &
mérérie.)

-ocr page 16-

A ma te ur et curie ux. 9

L'Eglise Paroissiale de Saint
Jacques , dite Coudenbergh. •

Cette Eglile eft defTervie par des
Chanoines Réguliers de l'Ordre de
St. Auguftin. On dit qu'elle a ferxi
autrefois de Chapelle à la Cour 5 on
çoblerve encore' aniourd'hui dans
le Chœur un fiége pour Iç Prince.
On y voit le Maufolée taillé en
marbre blanc & noir , de P^rançois j
Fils de l'Empereur Maximilien. Le
tableau die l'Autel repréfente Notre-
Seigneur crucifiéj la Ste. Vierge,.
St. Jean la Madeleine , font ail
bas de la Croix ,, peint par
de
Clerck. On voit au-deffiis des ftal-
les des Chanoines, quatre tableaux
qui méritent l'attention des Con-
noiffeurs. Le premier fur la gau-
che eft peint par P.
Chamfa^ne , ÔC
repréfente la Décollation de St. Paul
Le deuxième St. Jacques qui bat les
Sarrafms, peint, comme on le croit,
p?.r le mcme. Sur la gauche, le pre--

-ocr page 17-

ÏO LE PEINTRE-
raier repréfente St. Augulim ou Toile
Lege, par
frimo Gentil. Le deuxiè-
me k Cérémonie de St, Auguftin
lorfqu'il reçoit la Mître , on le croit
du même Maître. Dans la Chapelle
de Notre-Dame deBois-le-Duc, qui
ejft à gauche > on voit une Image mi-
iraculeufe de la Ste. Vierge, que les
Habitaas de Bois-le-Duc y ont mis
en dépôt depuis plus de cent ans.

A côté de l'Autel, à droite , on
remarque un tableau qui pafTe pour
un des chef-d'œuvres de
Kubens ;
il repréfente la Ste. Vierge afTifè,
qui ïevcts d'une Chafuble le Car-
dinal Ildefonce
î l'on y voit auffi
quatre Vierges, fi gracieulèment
peintes , que la vue en eft frappée
d'admiration ; liir le haut de ce ta-
bleau eft une Gloire où trois An-
ges fe tiennent par la main, quoi-
que de près les couleurs paroiiîènt
dans plufîeurs endroits être empâ-
tées , & dans d'autres aflèzlegeres &
tranfparentes, il ne laiffè pas pour ce-
la de paroitre en fa diltance très-fini i

-ocr page 18-

ama teur et curie ux. 11
tout y eft animé, auffi. je dois avouer
que je n'ai jamais rien vu de plus beau,
de plus tendre, ni de plus délicat. Ge
tableau fe femioit autrefois avec
deux battans ; il y a plus de quaran-
te ans qu'on les a fciés en deux
dans leur épaiffeur, deforte que les
portraits de l'Archiduc Albert & de
l'Infante Ifabelle , qui étoient peints
fîir les dehors , font pofés de-
puis ce tems à côté du tableau. Ces
portraits font grands comme nature.
On voit l'Archiduc , qui eft à la gau-
che , à génoux , & à côté de lui St.
Jacques, un morceau d'architeéfure,
un rideau rouge & un Ciel éloigné,
fervent de fond. L'Archiduchefîc
eft de même à génoux , & derriere
elle eft Ste. Elifabeth. Le fond eft à
peu près dans le même goût.

La Sainte Famille qu'on voit à
l'oppofite étoit peinte fur le revers
de ces portraits : les deux morceaux
ont été joints avec tant d'adreffe,
qu'on a de la peine à s'en apper-
CÊVoir, Daus ce tableau h Sainto

-ocr page 19-

ï2 LE PEINTRE
Vierge eft alTife tenant l'Enfant Je-
, fus fur fon giron 5 Ste. Anne ell: à
côté d'elle tenant le petit St. Jean
debout : de l'autre eft St. Jofèph qui
préfente une branche de pommier
à l'Enfant Jefus ; trois Anges paroif-
fent entre lès branches du pommier,
lequel eft entourré d'un rideau de
couleur jaunâtre. Le principal ta-
bleau eft en eftampe , gravée par
Irl. Jp^ithdûuc j G Jrlarrewyn eft
celui qui a gravé les deux Portraits.
Je ne penfc pas qu'il y .en ait une
de la Sainte Famille. On affore que;
ces tableaux- font les derniers que
Kuhens a peints ; en effet il eft
mort peu de tems après d'une goutte
remontée.

Le long de la Nef, fous les fenê-
tres , on voit la Paffion de Notre-
vSeigneur en fix morceaux , peints
par .... Au bout de l'autre nef,
fur la droite , eft le Cœur de Saint
Roch î l'on voit fur l'Autel le ta^
bleau de ce Saint qui affifte des Pef-
tiferç^ : c'eft une copie de l'ori-

-ocr page 20-

JMA TÊ UR ET CVRIE UX. ï ^
ginal qui eft à Aloft dans l'Eglife de
St. Martin ; leftampe de ce Tableau
a été gravée par P.
Pmtius : ce
Chœur eft de plus embelli par dix:
autres Tableaux , dont neuf font de
la main de J.
Teyjfms , le dernier
par
Gouthier.

Après avoir vu & examiné dans
cette Eglife ce qu'il y a de beau Ôc _
de remarquable , je jugai à propos
d'aller vifiter l'Eglife des Carméli-
tes 5 proche la porte de Namur.

L'Eglise des Carmelites
D e' c h a u s s e' e s.

Le Tableau du maitre-Autel re-
préfente la vSainte Famille > peint
par
Coehergen. vSur la droite de
l'Autel on voit un Tableau de moin-
dre grandeur , par
T. vm LO0.

Au-deffiis de ces Tableaux , on
voit les portraits de l'Archiduc Al-
bert & d'Ifabelle , qu'on tient pour
être peints par P.
Kubem. Dans les
•quatre Chapelles, qui font au long

-ocr page 21-

£4 LE PEINTRE
de cette Eglife , on voit quatre Ta-
bleaux peints par le même
va^ Loo.
Le premier fur la gauche repréfente
l'Annonciation. Le fécond la NaiiTan-
ce de Notre-Sauveur. Le troifième la
vSainte Famille , & le quatrième
l'AfTomption de la Ste. Vierge.

Cette Eglife a , dit-.on , été
bâtie par les ordres de l'Archiduc Al-
bert & d'Ifabelle, fous la diredion de

Cocherge^:, dont les ouvrages font
foi qu'il étoit auffi expert Architecte
que bon Peintre ; en effet cette Egli-
fe, le Palais d'îfabelle, & la Cha^
pelle deMontaigu , fontcomme au-
tant de preuves de fon grand génie ,
Se de fes rares talens.

Cette Chapelle de Montaigu efl
bâtie fur le modèle de St. Pierre à Ro-
me. Les Tableaux que l'on y voit font
de la main de T.
-vnn L ; ils re-
préfentent la Vie de la Ste. Vier-
ge : ce Peintre demeuroit chez
Coeberge pour travailler à la peintu-
re , tandis que ce dernier s'occu-
poit à larchiteaure
î car il avoit

-ocr page 22-

AMATEUR ET CURIEUX.
engagé ledit van Lûo pour la fomme
de cent piftoles par an , outre fa,
dépenfe & fa nourriture.

Ce Peintre donnoit beaucoup de
force à fes ouvrages , il a^^oit aife^
de facilité dans fa compofition,
deiïinoit bien , & ne drapoit pas •
mal : il peignoit très-hatdlment î
mais il me femble qu'il n'avoit pas
ce coloris délicat, ni ces réverbé-
rations de jours qu'on trouve dans
'R.ubem & dans quelques autres ^
ce qui rend fes ouvrages maffifs :
malgré ce défaut il doit tenir rang
parmi les plus habiles Peintres. Il a
longtems étudié en Italie fur les dcC-
feins de
M. Angelo. Un particulier
qui s'étoit approché de moi & avec
lequel j'avois déjà entamé la con-
verfation, me dit qu il y. avoit une
piece dans la Chapelle de Notre-
Dame de Sept-Dauleurs à St. Gery,
peinte fur panneau par
W^. Coeher-
g^n , où le bleu domine de telle
forte , qu'il y avoit employé , avec
fix autres Tableaux qui font expo-

-ocr page 23-

i6 LE PEÏNTRÈ

fés dans la même Chapelle , pout?
fèize cens florins d'outre-mer > en-
fuite il me fit remarquer que les
ouvrages peints fur panneaux pa-
roiffoient toujours plus frais & plus
éclatans , que ceux peints fur toile j
■ comme, me dit-il, on en peut faire la
difFérence entre celui de la Cathédra-
le d'Anvers, peint par le même
Coe~
berge
, qui me femble bien moins
éclatant que celui de St. Gcry, Je lui
répondis qu'il me paroîfToit être plus
porté pour le panneau que pour là
toile ; que cependant j'avois enten-^
du railonner à ce fujet divers par-
ticuliers , qui en examinant une pie-
ce , fè difbient ,
cejl bien dommage
quelle ejî femte fur bois
, fi elle étoit
ptr toile , fon frix ferait du. double^
Il me répondit que des difèours de
cette nature étoient adez fréquens
parmi les Brocanteurs & même par-
mi quelques Peintres, qui préten-
dent que la toile eil moins coûteufe-^ ,
& qu'on peut la manier dans-le la^^
boratoire avec plus d'aifànce -, d'ail-
leurs

-ocr page 24-

AMATEUR ET CURIEUX, if

leurs que les Tableaux fur toiles
font plus faciles à tranfporter hors
pays î que d'autres, fous cou-

du

leur qu'un tableau eft fur panneau, le
décrient pour Tavoir à meilleur mar-
ché ; & que comme des Connoif-
feurs de cette efpece n'ont en vue que
leurs' intérêts particuliers , on leur
pafTe cette fupercherie , mais que l'on
fait bien à quoi s'en tenir. Comme ce
Monfieur étoit grand parleur j il me
conta tout de fuite ce qui étoit arri-
vé à un de fes Amis , amateur des
Tableaux Italiens , qui après avoir
acheté , me dit-il, dans une Ville *
non loin de Bruxelles , une Made-
• laine peinte par le
Corregio , avoit
mis fa marque fur le revers du Ta-
bleau avec fon crayon , & avoit
chargé le Vendeur , qu'il connoit-
foit de longue main > de le. lui en-
voyer chez lui 5 mais que le Mar-
chand qui avoit eu la fabtilité de
lui fubftituer une copie au lieu de
l'original, la lui avoit adreflee chez
lui, & que fon Ami ayant décou-

B

-ocr page 25-

LE PEINTRE

vert la fourberie fit tant de bruit s
.qu'enfin après bien desi tracaflèries ,
le Marchand lui remit l'original 5
qu'enfuite ayant fait accord enfern-
lîle pour la copie , il en avoit fait
,préfent à la Chapelle de la Made-
leine , & que l'original étoit acluel-
iement dans une des chambres de
l'Hôpital de cette Ville. Je lui de-
mandai s'il croyoit cette copie affez
bonne pour palTer pour l'original ?
Non afliirement, me dit-il, elle ref-
femble fort peu au coloris de l'origi-
nal , mais le deffein en eft affez bien
fuivi. Entrons, lui dis-je, pour un mo^
ment en matière : fnppofons que le
coloris , le deflèin, la paffion & la*
vigueur, euITent été très-corre6le-
mentfuivis, & très-exaftement exé-
cutés. Dans cette copie, croyez-vous
que celui qui l'a vendu ait pé-
ché contre la probité ? Je croîs
qu'oui, me dit-il, parcequ'il favoit
diitinguer l'un d'avec l'autre , ainfi
il ne pouvoit faire cette fourberie
fans ctre coupable : il eit vrai, con-

-ocr page 26-

AMATEUR ET CVRIBVX. 19
tmua-t-il , qu'un Connoiffeur
peut fe tromper lui-même , & que
dans le tems qu'il croit tenir un. bon
original , il ne tient tout au plus
qu'une bonne copie.

Vitjfuri raconte que Kafhael fut
trompé par une copie » peinte par
Jules Romain » d'après fon propre
ouvrage. Quand une pareille chofe
arrive , & qu'on l'achete pour ta-
bleau , je n'y trouve pas grand mal.
On trouve auffi des copies qui ont
été retouchées par TAuteur même,
ces fortes de copies paffent fouvent
pour des originaux.

Je me rappelle d avoir vu à An-
vers , chez feu Monfieur de Wit,
-lin. tableau du même fiijet de la Ste.
Famille , tout pareil à celui qu'on
voit dans l'Eglife de St. Jacques de
cette Ville , enforte qu'on auroit
bien de la peine à diftinguer la copie
d'avec l'original. Il eft encore d'une
autre forte de copies, qui font par-
faitement bien imitées, & que nous
eftimons avec quelqu'efpece de jufti-

B i)

-ocr page 27-

20 LE P El NT R Ê

ce , non pas à la vérité autant que
ies originaux, parce que nous de-
vons toujours diftinguer l'un d'avec
Tautre , mais par rapport à la beauté
de l'ouvrage.

On trouve auffi des copies qui>
font faites par des Apprentifs
î cel-
les-ci pour l'ordinaire 5 font ou mau-
vaifès, ou médiocrement pafTables.

Il y en a d'autres faites par des
gens capables & expérimentés , lef-
quelles, Il le caprice ne s'en mêle ,
valent quelquefois prefqu'autant que
les originaux j d'autres , qui retou-
chées par l'Auteur qui a fait l'origi-
nal , trompent bien des Connoif-
feurs j or comme les tableaux fer-
vent ordinairement pour l'embellif^
fement des falons- & des cabinets,
ou uniquement pour contenter la
vue , de même que la m.ufique nous
fert à contenter l'ouie , il me pa-
roît que ia vue ne fera pas moins
fatisfaite par une bonne copie que
par un original. Je crois même.qu'une
bonne copie vaut fouvent mieux

-ocr page 28-

AMATEUR ET CURIEUX. îî
qu'un mauvais original
î ainfi je
trouve qu'un honnête homme qui a
du goût pour la peinture peut,
n étant pas fort riche , fe fervir de
ces fortes de tableaux pour éviter
la trop grande dcpenfe > laquelle
dans bien des occafions excède de
beaucoup la faculté des Amateurs.

Il eft tems de finir cette longue
^ ennuyeufe digreffion , qui m'au-
roit conduite encore plus loin , fi
j'euffe continué d'écouter mon cau-
feur : je le quittai civilement, & »
peine fus-je ibrd de fEglife des
Carmelites, que je rencontrai un de
mes amis afTez bon Connoifleur, en
tableaux, auquel chemin faifant > dc
en parlant de choies & d'autres je
lui demandai s'il étoit curieux de voir
dans l'Eglife des Annonciades » pro^
che la porte de Louvain , le tableau
de
Kuhens , dont l'eftampe, gravée
par
Boljwert, porte ces mots au bas,
& frocedentes Adorâverunt eum , il
me dit qu'il avoit une parfaite con-
jncifFance de ce tableau , ^ qii^

-ocr page 29-

22 L E P E I N T R E
pour me le prouver , il m'en fe-
roit la defcription , fans être obli-
gé d'entrer dans cette Eglifè
î en
effet il me dit qu'il fe reffouve-
lîoit que le Mage qui eft iîir le
devant de ce tableau a fon génou
. droit plus bas iiif le fond que
le pied gauche, qui devroit natu-
rellement avancer. Il eft vrai, lui
dis-je, que j'ai vu autrefois ce ta-
bleau fans faire attention à cette fau-
te j quoiquegroffière, &qui fuivant
moi, ne peut trouver d'autre excu-
fe , fmon celle générale , que l'ou-
vrage de l'homme n eft pas toujours
parfait j -en effet , fi l'on examine
de près ceux des pins habiles Maî-
tres , on trouvera afïèz commune^
ment quelque chofe à redire j û
ce n'eft pas contre le deffein ou con-
tre la compofition > ce fera con-
tre fâ dijftribution des ombres , ou
de quelqu autre partie de la pein-
ture.

Comme il n'y avoit dans cette Eglife
desAnnonciadesquecé feul tableau

-ocr page 30-

AMATEUR ET CURIEUX.
avoir , lequel favois d-devant
examiné, nous n'y entrâmes point,
mais mon Ami , avant de me quit-
ter , me donna rendez-vous au len-
demain matin pour m'accompagnes
dans ma curie iife recherche > em
l'Eglife de Ste. Catherine > près dur
Rivage, où efFetSlivement je le trou-
vai à Theure indiquée convenue la^
vcilie entre nous.

L'Eglise de Sainte catherinei

On voit fur le maitre-Autel un ta-
.:bleau peint par
Gafpard de Crayer^ qui
repréfente la Patrone de cette Egli-
fe , élevée dans une gloire majef-
tueufe , occupée à contempler la
Sainte Trinité , environnée de la
Ste. Vierge , de St. Jofeph , de St.
Jean , &c. Au bas du même ta-
bleau paroiffent plufieurs autres
Saints.

Au-devant de l'Autel, fur la gau-
che 'du Chœur, eft le tableau des
quatre Couronjics ou du Mar-

-ocr page 31-

54 L B PEINTRE
tyre des quatre Saints , peint par
ô. de Crayer. C'eft un chef-d'œu-
vre de ce Maître , tous les objets y
font fi naturels, que la vue en eft frap-
pée d'admiration
î il eft aifé de voir
que ces Martyrs étoient des Artifans
^ des Manœuvres , par les différens
outils qiai font repréfentés fur ce ta-
bleau , & par les habillemens dont ils
font vctus. Une efpece de Couvreur
qui eft à peu près au milieu, & qui
fait la pièce principale du tableau
eft admirable , il a les yeux élèves
vers le Ciel, foutenant de la main
droite un bout de draperie bleu , &
quelques linges. Le quatrième des
Martyrs eft à la gauche , accompa-
gné d'un Bourreau , deux autres
Bourreaux font à la droite ^ dont
v^n eft à genou , & l'autre près un
jTailleur de pierre. Le Tyran Dio~
"clétian , fuivi de quelques Soldats ,
eft affis & paroît commander l'exé-
cution. Un des Soldats porte les
Symboles de la Monarchie Rom.ai-
■fie i ce tableau eft terminé par uqg

-ocr page 32-

aa^ta teur -et cur îeux.
Gloire dans laquelle font trois An-
ges qui femblent encourager ces
Saints Martyrs dans leurs fouffran-
ces. Les Connoifleurs trouveront
dans cette piece de quoi fatisfaire
leur vue ; les objets tant mobiles
qu'immobiles, font peints avec tant
d'art, & fi naturellement deffinés,
qu'on doit avec raifon placer ce
Maître parmi nos plus grands Pein-
tres.

Du côté droit de cet Autel, on
'voit un tableau de moindre gran-
deur , peint par
OBa.vio van Veen.
Il repréfente l'enfévelifTement de
Notre-Seiraeur , & eft très - bien
deffiné.

Dans un petit Chœur , flir la gau-
che , eft repréfentée la Vie de la Ste.
Vierge , par ... . Au bout de la
Nef droite , quand on entre par le
grand portail , eft l'Autel des Bate-
liers , dont le tableau , peint par
C.
Schut
, repréfente une Gloire dans
laquelle paroît la Ste. Trinité & plu-
CieursAngestrès-délicaternentpeints,

-ocr page 33-

LE PEINTRE
Le principal objet de cette Gloire
eft Ste. Afine , Patrone des Bate-
liers j elle paroît implorer la Ste.
Trinité en faveur de quelques Mate-
lots qui femblent être en danger
de périr. Comme nous étions à
portée de St. Gery, jengagai mon
Ami d'y entrer pour voir le tableau
de
l^€ncejlas Coebergen.

L'Eglise de Saint Gery.

Quand on entre dans cette Eglî-
iè par le petit portail à gauche , Ton
voit au-deflus de ce portail un grand
& beau Payfage , peint par vande
Venne , garni de petites figures, pein-
tes par
Bout 7 c'eft une fort belle piece.
Dans le Chœur de Notre-Dame de
Sept-Douleurs > Ton y voit fur l'Au-
tel le tableau dont j'ai ci-devant fait
..mention , peint par
W^. Coebergen ,
lequel repréfente l'enféveliflement
de Notre-Seigneur. Entre les colon-
.nes dudit Autel font expofés fix ta-
bleaux ,
qui repréfeateni; avec ce-

-ocr page 34-

uiafateur et curieux. 27
lui du maître-Autel, qui fait la piece
principale , les Sept-Doiileurs de k
Sainte Mere de Dieu : les fix pre-
mières pieces ont environ quatre
pieds de large fur trois d'hauteur
chacune , & font toutes peintes pac-
T. Lapremiere reprcfente la^

Circoncifion de Notre-Seigneur j la
fécondé, la Fuite en Egypte ; la troi-
fîème, Notre-vSeigneur entre les Doc-
teurs
5 la quatrième, le Portement de
la Croix
5 la cinquième > Notre-
Seigneur à la Croix entre les Lar-
rons , la Sainte Vierge , la Ma-
deleine, St. Jean & plufieurs Sol-
dats au bas j la fixième > Notre^
Seigneur qu'on defcend de la Croix.
Ces fept pieces ont coûtées, comme
on l'a avancé ci-devant, en feul ou-
tre-mer employé par le Peintre, feizc
cens florins ; ce qui fe trouve con-
firmé par le Livre de la Confrairie,
dans lequel il eft fait mention de
cette dépenfe extraordinaire-

Dans le grand Chœur , fur l'Au-
tel , eil la derniere Cciie de ÎN'otre™

-ocr page 35-

âS LE PEINTRE
Seigneur, peinte par J. van Wingefe.
Il y a tout lieu de croire que ce grand
Peintre a étudié les ouvrages de Ra-
phaël 5 car les Tiens , de mcme que
ceux
de Coxie , à qui il ne cède en
rien , paroiflent être au même ni-
veau. Le fond de ce tableau reprc-
fente un falon peint par
de Vries..

Conire la premiere colonne, à
gauche, eft l'Autel de Sainte Anne ,
le tableau qui repréfenîe cette Sain-
te eft peint très-gracieufement par
G. de Craycr : Ste. Anne y eft accom-
pagnée de la Sainte Vierge encore
enfant.

Dans la nef, à gauche , on voit
fur l'Autel de la fécondé Chapelle la
Dérlfion de Notre-Seigneur par les
Juife , peinte par M.
Coxie ; fur la
droite , dans la premiere Chapelle ,
on voit (lir l'Autel la Naiffance
de Notre-Seigneur , peinte par
Bernard van OrUy , dit Bernard,
de Bruxelles , ( ce Peintre a été
Difciple de
Kaphael dVrbino , & a
fait à deux différentes fois le voya-

-ocr page 36-

JMA TE UR ET CURIEUX. 29.
ge de Rome ; il étoit pour lors em-
ployé à rexccution des cartons ou
defîèins
de Kaphaéï , qu'on travail-
loit de fon tems à Bruxelles en ta-
pifïèrie. ) Ce tableau eft affez go-
thique.

L epitaphe de ce Peintre eft dans
cette Chapelle, au-devant de laquel-
le font enfçvelis P.
va^t Orlay , pere

dcRJchard, ^Jean njanOriay. Le
tableau de Chapelle repréfente
une Ste. Famille, peinte par Dume^
ni. On voit fur l'Autel de St. Sébaf-
tien, qui eft à la derniere colonne fuç
la droite , le Martyre de ce vSaint,
On doute s'il eft de la main de M»^
Coxie ou d'un de fes Difciples.

L'Eglise des Riches Claires.

Cette Eglife n'eft pas des plus gran-
des , mais bâtie affez régulièrement
& à la Romaine. La niche eft de mar-
bre blanc & noir. Le maître-Autel
qui s'y voit eft de l'ordonnance de
D. 'vm Heil. Le tableau d'Autel

-ocr page 37-

go LE PEINTRE

repréfcnte renféveliiTement de No^
tre-Seigneur, peint par
Volders.

L'Eglise des Soefrs Noires,

Cette Chapelle fut bâtie après
le bombardement de Bruxelles dans
tin goût moderne i le tableau d'Au-
tel reprélènte Notre-Seigneur atta-
ché à la Croix , la Ste. Vierge,
vS. Jean , & la Madeleine au bas ,
dans une extrême détrefTe j on y
voit en outre quelques Soldats qui
fe retirent avec des échelles & au-
tres inftrumens de la Paffion. Ce
tableau eft peint par
J, OrUy,
& doit pailer pour une de fes meil-
leures pieces > quoique moderne e lie
ne doit pas céder aux anciennes.
Ce Peintre eft né à Bruxelles l'an
î 66 5 , le 4 Janvier. Son pere,
Pierre
van OrUy
, qui étoit Peintre en pay-
fage , le fit éleve de fon frere , Re-
ligieux Récollct, qui pour lors tra-
vailloit avec quelque fuccès dans
la peinture , comme on en peut ju-

-ocr page 38-

yAMA TE UR ET eu RIE UX. 3 î

ger par les trois tableaux que nous
avons de lui dans TEglife de ces
Pères , au-deffiis du portail. Notre
jeune Peintre fit en peu de terns des
progrès dans fon art & par une
étude continuelle , il parvint à une
iiïédTode facile & prompte dans le
defîèin & dans la compofition. Il
drappoit largement Ôc naturelle-
ment , & comme il étoit infatiga-
ble dans le travail , il nous a laiiïc
quantité d'ouvrages qui ornent &
décorent aujourd'hui prefque toutes
les Eglifes rétablies après le bombar^
demeijt 5 l'on en voit dans les cham-
^bres des Corps des Métiers , dans
îes Abbayes d'Affiigem , Grimber-
gue , & en plufieurs autres en-
droits.

U a auffi beaucoup travaillé aux
patrons pour les Manufaéluricrs en
tapifferie. Ce travail a été la caufe
qu'il eft tombé de fon coloris natu-
rel, qui étoit affcz délicat, & qu'il
â donné dans le goût des couleurs
burlefques. 11 a joui de fon vivant

-ocr page 39-

LE P E 1 N T R Ë

d une fortune alTez confîdérabîe ;
& a laifîe à fès héritiers , après la
mort, de très-bonnes rentes en biens
fonds.

Il a fait plufieurs patrons de def-
feins pour vSon Alteffe le Prince
Electeur de Cologne , pour Mon-
feigneur van Sufteren, Evêque de
Brages, dont quelques-uns repré-
fentent la Vie de Notre-Seigneur ;
d'autres les Miracles de Moïfe j d'au-
tres les pîaifirs des Dieux, &c. Il fai-
foit ordinairement fes modèles ou eP-
quilTes fur papier bleu, contournés à
la plume , lavés à l'encre de Ja Chi-
ne , & rehaufïes en blanc avec
grande promptitude 6c correétion.
Ce Peintre a eu un frere appellé Jl?-
chard, né l'an 1663 , qui fut aufTi
l'éleve du même oncle Récollet.
Celui-ci donnoit dans la mignatu-
re ; il kvoit à l'encre de la Chine
fur papier blanc d'une grande pro-
preté. Il a laiiïe de ia compofi-
tion quatre - vingt - fix deffeins de
. l'hifcoire de Thélémaque, dont rien

ne

-ocr page 40-

^MA te UR et curie UX. 3 g
peut approcher pour les rares
perlpedives & corps d'Architec-
ture.

Noiis avons de lui un autre ouvrage
qui contient foixante-huit deffeins >
reprcfentans raccroiffement de Ro-
me.
Picart, le Romain , qui pour
iors étoit à Bruxelles , a reffcé huit
jours entiers à les examiner , & lui
a témoigné beaucoup d'empreffe-
meiit pour l'engager à les faire
graver*

Il a en outre deffiné le Ponti-
ficat Romain , qui a été gravé de-
puis par
Bertheram ^ plus il a com-
pofé l'hiftoire du Juif Jofeph, auffi
gravée par le meme. On voit en-
core aujourd'hui une grande quan-
tité d'eftampes j que ce Peintre a
gravé à l'eau - forte , & qui font
très - eftimées des amateurs. Ces
deux freres font morts garçons ;
favoir,
K:ichard le 6. Juin 1732.,
^Jean le xi Février 1735 > tous
<ieux âgés à peu près de 70 à
^s 3 ils font enterrés à Saint Gefy j

C

-ocr page 41-

34 LE PEINTRE
comme nous lavons dit ci-de*
vant.

L'Eglise des R. R. P. P,
grands Carmes.

Le maître-Autel de cette Eglifè
eft d'une compofition tout-à-fait
particulière. L'orgue forme le haut
du frontiipice de cet Autel , où
l'on voit une image de Notre-Da-
me de Naples au milieu, foute-
nue par deux Chérubins ; au-def'
ius des deux portes qui font entre
les piedeftaux font pofées les figu-
res d'Enoch & d'Elie, plus haut
font deux balcons, où dans le fond
font placés deux tableaux peints par
^• J^^^ir^ns, qui repréfentent des
E^nfans qui levent un rideau, der-
rière lequel on voit une autre co-
lonnade qui forme le corps avan-
cé de cet Autel : autour du fron-
tiipice , font quelques Séraphins
avec des inftrumens de mufique s
cet Autel eft de l'inveation de K

-ocr page 42-

AMATEUR ET CURIEUX.
frbmggeM d'Anvers : encore que
ces R. P^ le croyent de la compoû-
tion d'un de leurs Freres , il eft cer- '
tain qu'il mérite l'attention des Cu-
rieux par la beauté de fa ftru6lu-
rs 5 dans laquelle les trois arts
fe trouvent réunis enfemble avec
beaucoup de goût & de difceme-
ment. Entre les fenêtres du Chœur
on voit trois tableaux repréfentans
la Vie du Prophète Elie , peints
par
V.JanJfens j vis-à-vis font deux
autres grands tableaux , dont le
premier peint pair
J. van Helmont,
Se le fond par de Mondt, repré-
fente le facrifice de ce St. Pro-
phète i S>C le iècond, le dernier
Jugement , de la compofition
de
Italien.

Dans la boifèrie des ftalles des
Religieux, font plufieurs petits ta-
bleaux ovales qui repréfentent, à
demi-corps , quelques Saints de
cet ordre , ils font tous peints par
f^, J(mjfens.

f Au bout de. la croix de cette

C ij

-ocr page 43-

36 LE PEINTRE
Eglife, fur k droite , on volt fuf
l'Autel un tableau peint par^. 'uan.
OrUy, qui repréfente la Ste. Vier-
ge ayant l'Enfant Jefus fur fes gé-
noux 5 laquelle donne le fcapu-
laire à quelques Religieux de cet
ordre.

Le tableau de l'Autel de Saint
Charles "Borromée eft une des meil-
leurs pieces de
V, Jmjfens, il re-
préfente un grouppe de gens pefti-
fcrés j & ce même Saint qui im-
plore pour eux la miféricorde de
la Mere de Dieu. A peu de di£^
tance de cet Autel eft un grand
tableau de la Ste. Vierge, &: de quel-
ques Religieux de l'ordre j peint
par ^uillm.

Au-deiïus de la porte, fur la
gauche, eft un tableau peint par
j. tîelmont, qui repréfente le St.
Pere 3 diftribuant des Indulgences
à ces R. R. P. P. Religieux.

La Chaire de vérité , du defTein
de
Plumier , eft très - bien exécu-
fée
3 ôc mérite peine detre

-ocr page 44-

AMATErrR ET CURIEUX.
Dans là nef, à droite , on voit un
tableau , peint par
 OrUy j

qui repréfente te Prophète Elie,
^ le Corbeau qui lui apporte du
pain.

Celui qui fuit, eft de la com-
polition de
V. H. Janpns, Jefus,
Marie & Jofeph , en font le fu-
iet ; ces deux tableaux y font po-
fés d'ancienne date.

On a commencé depuis quel-
ques 'années à garnir le refte des
deux nefs de plufieurs tableaux
nouveaux , mais il refte encore
quelques places en réferve pour y
recevoir les offrandes des parti-
culiers , qui voudront concourir
à rembelifTement de ce Temple.

Dans la même nef, eft un ta-
bhau nouvellement en place, qui
repréfente l'Annonciation dela Ste*
Vierge, peint par
v^^ der Voort,
d'Anvers, • _ ^

Celui qui fuit, eft le Mariage de
la Ste. Vierge, peint par
M. de
Haefe , éleve & héritier de J. 'van

-ocr page 45-

L E P ET N r R B
Orlaj
fon oncle , après la mort
duquel, il fit le voyage d'Italie, où
il fe forma, principalement à Ro-
me, pendant fept années de fiiite
fous les plus fameux Maîtres. -

Dans la même Eglife , à côté
<îu grand portail, eft un très-grand
tableau qui couvre le mur contre
lequel il eft pofé jufqu a la voû-
te , ce tableau peint par y^'a/^
Si-
mons
, eft la préfentation de l'En-
fant Jefus au Temple, par la Ste.
iVierge.

Celui de TAfTomption de la Ste.
Vierge qui eft de l'autre côté, &
de même grandeur, eft peint par
le même
Simom^ peintre fort en-
tendu dans la perfpedive Se-qui
travaille d'une grande facilité.

On voit auffi dans ladite Eglife
quelques Autels & autres ouvra-
ges de l'ordonnance de fon pere,
qui font d'un très -bon goût ; fa
îïiere , morte depuis peu d'années
peignoir des tableaux d'un goût

grotefque &fortplaifans. LaMa^

-ocr page 46-

AMATEUR ETCÛRIEVX.
^eleine qui fuit ce tableau eft pein-
te par
Max. de Haefe , ainfi qu'un
autre tableau de la Purification,
qui eft auprès.

Cette Eglife eft une des plus
belles , tant pour l'architedure,
que pour les ornemens, elle a été
entièrement rebâtie après le bom-
bardement.

Mon defTein , en fortant de ce
Couvent , étant de me rendre à
l'Eglife de St. Jean 6c ayant paiïe
devant la fontaine du petit Man-
neke, je dois faire obferver à mes
Le6leurs que cette figure de fonte,
que l'on dit être du fameux ^enoy
le pere , eft regardée de tous les
ConnoifTeurs, comme une piece
unique & achevée.

L'E GLisE DE ST. JEAN.

L'on voit dans cette Eglifè deux
tableaux d'Autels, peints parj.
de
Hondt
, fils de de Hondt, qui etoit
cleve de Teniers , qui réyffif

-ocr page 47-

'4 0 L E P E I N T M M
foit fi bien de fon vivant dans
les repréfentations de batailles : ces
deux tableaux ont pour fujet,
Tun la Fuite en Egypte j l'autre
une Reine de France à génoux qui
préfènte
fon Enfant à St. Léonard.

Ce Peintre eft mort fort jeune j
il exéeutoit bien & promettoit
beaucoup 5 fa trop grande afTidui-
té au travail le rendit éthique. îl
a auffi beaucoup travaillé pour les
Manufaéluriers en tapi{reries.

Il y a de plus dans cette Egli-
iè quatre copies d après
Lucas Jor-
ditns, qui font difïërens fujets de
la PafTion de Notrc-Seigneur.

Dans la nef , à puche , on y
voit une bonne copie d'après Ku-
hens, qui porte ces mots, reddite
qus ftmt Cdfaris Càijari.

Au bout de la même nef eft une
autre copie d'après le tableau ori-
ginal de
G. de Crayer , qui eft dans
la Chapelle de St. Jean de Latran,
près les R. P. Auguftins, lequel re-
préfente la Décollation de ce Saint»

-ocr page 48-

jÊAfJTEUR ET CURIEUX. 4$
Vis-à-vis de cette copie on en
voit une autre d'après J. van Djck^
qui repréfente le Seigneur mort*
accompagné de la Ste. Vierge &
de quelques Séraphins qui paroif-
fent en grande trifteffe. On voit
de plus entre les fenêtres des nefs
de ladite Eglifé plufieurs tableaux
alTez bien peints.

L'Eglise DES R. R. P. P. DE
la Socie'te' de Jésus,

Sur le maître- Autel de ces
R. Pcres , on y voit commune-
lïient ôc alternativement trois dif-^
férens grands tableaux , dont l'un

C5 , -

repréfente l'Adoration des Rois
Mages , peint par
Abraham Blom-
maert
j l'autre la Naiffance de Nô-
tre-Seigneur 5 par
Coutfters j le
troifième, les Miracles de Saint
François Xavier , peint par -Ev
§uillw.

Ce même Saint eft repréfente
dans un autre tableau, attaché k

-ocr page 49-

4<2 LE PEINTRE
la colonne la plus proche de l'An-
td, à dîoite j de l'autre côté ell:
celui de Saint Ignace, tous deux
<3e grandeur naturelle, peints par
K.ubem : nous les avons en eftam-
pes gravées par
Bolfwert. Saint
François Xavier y paroît revêtu
d'une aube, dont les plis font fi
naturels qu'on ne peut s'empccher
d'y reconnoître la main de ce cé-
lébré Peintre.

Sur l'Autel de la Chapelle de la
Sodalité des Confeillers , eft le ta-
bleau de la Vifitation de Ste. Eli-
fabeth , peint par
J. Livens , éleve
de
Kynhram, On voit devant le
Jubé un fort joli tableau , peint
par
Igmce de Hondt, qui repré-
sente le Préfet de la Sodalité de la
Jeuneffe, & la Magiftrature prof-
ternée devant l'Enfant Jejfiis : dans
îa boifèrie qui regne autour de cet-
te Chapelle ,11 y a huit tableaux
peints par
V. H. JanJfens , qui
font des fujets de la Vie de la Ste.
Vierge.

-ocr page 50-

MATEUR ET CURIEUX. 43
Dans celle de la Sodalité des Ma-
Tiés le tableau de l'Autel eft TAn-
nonciation, peint par
G. de Crayer:
cette Chapelle eft boifée & ornée
de fept tableaux , dont il y en a
cinq peints par moi
G. F. Menjkerty
les deux autres par H. vm el-
le
, lefquels repréfentent auffi dif-
férens fujets de l'hiftoire de la Ste.
Vierge. La Sodalité des Etudians
eft anfFi très - proprement ornée ,
on y voit dans la boiferie fix ta-
tableaux peints par
M, de Hae~
fe y
fur les mêmes fujets que les
précédents.

L'E g l i s e d e ' N g t r e - D a m é
de la Chapelle.

Le tableau du maître-Autel qnj.
repréfente l'Affomption de la Std.
Vierge , n'eft qu unç copie d'aprèis
Kuhens ; celui fur l'Autel de St.
Laurent, où eft repréfenté le Mar-
tyre de ce Saint , eft peint par
JanJfem ; on le croit un de fès

-ocr page 51-

le peintre

derniers ouvrages : il y avoit au-
trefois fur ces Autels deux ex-
cellentes pièces , peintes par Ku-
hens , qui ont été vendues au Prin-
ce Palatin, & qui fe voyent aduel-
lement à Manheim,

Dans le Chœur de Ste. Doro-
^ée , on y voit fiir l'Autel le ta-
bleau de cette Sainte, peint par
J, van T>fl.elen. Sous les croifées
de cette Chapelle font cinq ta-
bleaux de payfàgesî favoir-, trois
d'un côte & deux d'un autre,peints
par
AJfelmx 3ç J, Artok..

Sur l'Autel de St. Charles Bor^
romée, on voit le tableau de c@
«Saint , qui doqne le Viatique aux
malades peftiferés .
î on croit ce
tableau original
de Crayer.

Il y a fjx Chapelles le long - de
la nef, à chacun des deux, côtés dç
cette Eglife : dans la première à
gauche, on n'y remarquey^ rien de
curieux, non,plus que daiîsia fé-
conde. Le tableau d'Aute} de la
trpifième repréfente Ja Réfurreç-

-ocr page 52-

AMATEUR ETcuriellx.
tldn de Notre-Seigneur , peint paf
de Clerck j à côté de l'Autel on
voit une très belle pièce > peinte par
S chut} elle repréfente la Ste. Vier-
ge entourée d'une guirlande de
fleurs & de petits enfans- Dans la
quatrième on voit le Portement de
la Croix, du deffein du même
àe
Clerck, & à côté une très-belle
piece , peinte par
A, SdUert ^ qui
repréfente l'Enfant Jefus tenant
quelques inftrumens de la Paffion,
Dans la cinquième , le tableau d'Au-
tel repréfente l'Apparition du vSau-
veur à la Ste. Vierge : il eft peint
par
G. de Crayer. Celui de la fixiè-
me, peint par
Volders , repréfente
Ste. Aya qui implore la Ste. Trinité.

On voit à la dernière Colonne j-
toujours à gauche, une Ste. Famil-,
le , peinte par
de Clerck.

Dans la première Chapelle, en
defcendant vers le grand portail-,
le tableau d'Autel repréfente un
Chrift, mort fur les génoux de la

Ste,

Vierge

qui eft accompagnée

-ocr page 53-

t e peintre
de St. Jean , de la Madeleine , de
Nicodcme & d'autres perfonnages>
qui y font très-artiftement peints
par
G. de Crayer. Dans la fécon-
dé > qui eft la Chapelle des Tan-
neurs , on y voit le Martyre de
leur Patron , par
de Clerck j ce
tableau & les volets qui font peints
par le mcme , méritent l'attention
des Curieux.

Dans la fliivante , le tableau
d'Autel repréfente Notre-Seigneur
au Jardin des Olives , il eil peint
par
Bernard: vis-à-vis de l'Autel
on voit l'Epitaphe de
Jeun Breu-
gel
& de Âlarie Coucke , dont 4e
tableau repréfente la tradition des
Clefs à St. Pierre , ce tableau eft
peint par
Kubem , on le voit en
eftampe , gravée par P.
de Jode.
Dans les deux; Chapelles fuivantes
les tableaux y font peints par
de
Clerck.

Dans les côtés qui forment la
croix ,de l'Eglifè, on voit quatre
tableaux ^ dont l'un repréfente le

-ocr page 54-

AMATEUR ET curieux. 47
meurtre d'Abel par Caïn , l'autre
une femme, connue fous le nom
de Catherine, qui remet la coups
avec les Hofties percées de coups
de coûteaux par les Juifs j c eft une
partie de l'hiftoire du très-Saint
Sacrement de Miracle , ces deux
table-^.ux font peints par
du Châtel
Se les autres par 'N. W^ouùers :
la Sacriftie de cette EgUfe a été re-
bâtie depuis peu d'années dans un
très-bon goût, fon plafond eft peint
en détrempe par
Sevin^ ouvrage
qui mérite l'attention des curieux-
Au long de la grande nef font
placées les figures en pierre de
Notre-^.Seigneur , de la Ste. Vier-
ge & des douze Apôtres : St. Pier-
re ôt St. Jacques font de la main
de
Fiderbe y St. Mathieu a été
fculpté par ^enoy , quelques-unes
par-
Dettes ; mais pour les autres 9
on ignore les noms de ceux pas
qui elles ont été faites.

-ocr page 55-

LE PEINTRE

48

L'E G L I S E DES R. R, P. P^
C A P U G I N Si

Le tableau du maître-Autel re-^
préfente Notre-Seigneur mort,
pofé fur les génoux de la Ste. Vier-
ge , où
K.ubens a mis toute fon at^
tention pouf exprimer dans les
figures qui y font repréfentées, tout
ce que la paffion j la douleur &
la trifteffe ont de plus caradèri-
fé î la Ste* Vierge fiir - tout y eft
peinte d'une manière fi affligeante
& fi pathétique, qu'il eft comme
impoffible de ne pas s'attrifter avec
elle en la regardant dans cet état
de langueur & de foufFrance : oiï
voit ime eftampe de ce tableau,
gravée par
P. Pomus, & une autre
par X
J. Boljwert. A côté de
l'Autel, fur la droite , font trois
Saints de cet ordre , peints par
Backereel : fur la gauche , on voit
trois autres Saints, aufTi de leuc
ordre, peints par le même.

-ocr page 56-

AMATEUR ET CURIEUX. 49
Vers le milieu de cette Egliiè
font deux petits Autels , dont les
tableaux repréfententJ'unSt. Fran-
çois , & lautre St. Antoine de Pa-
doue ) grands comme nature, peints
par
A. vm Dyck. Le St. François
dans une attitude contemplati-
ve , ayant la tête & les yeux clé-
vés vers le Ciel , les deux bras
baifles , les mains ouvertes. Le
St. Antoine tient l'Enfant Jefiis fur
fes deux mains regardant le Ciel.

De chaque côté de cette Egli-
fe, il y a trois petits Chœurs î dans
le premier, à gauche , le tableau
d'Autel eft peint par
Antoine vm
tieuvel.mûf de Gand, & difciple
de
Crayer j ce tableau repréfente
le martyre de Ste. Aurélie.

Dans le deuxième, on y voit le
martyre de Ste. Dorothée, peint pai-
van Daelen.

Le troiiième, repréfente Ste. Béa-
trix devant la Ste. Vierge , l'En-
fant Jefus
Se autres Saintes j le tout
peint paw
BachreeL

D

-ocr page 57-

go LÉ PEINTRE

Dans le premier, à droite, le
tableau repréfente le martyre de
St, Benoît, peint ^ztTyffens. Ceft
une très-belle piece.

Dans le deuxième , on y voit
St. Gregoire devant la Ste. Vier-
ge, peint par
Schut,

Et dans le troifième, le marty-
îe de St. Bafile , peint par
Wil-
lebors.
Ces tableaux ont été donné
en préfent à ces Religieux par feu
Monfeigneur le Due d'Aremberg ,
lequel â employé de fon tems les
meilleurs Maîtres à les compofer,
& qui tous ont travaillé à l'envî
les
uns des autres à faire de leur
mieux.

Siu: les murs de cette Eglife ^
entre les arcades des Choeurs, ou
Chapelles, on voit plufieurs Saints
de cet Ordre j peints dans des at-
titudes de pénitence , par
Backe-
r^f/. Plus deux autres Saints? fa-
voir, St. Agapitus , à gauche ,
à droite St. Fulgentius > par
G. df
Qrajcr,

-ocr page 58-

j^aîa te tjr et curie xix. ^
Au-defllis du portail, cft la De-
rîfion des Juifs vis-à-vis de Notre-
Seigneur. On croît ce tableau de
la main de
G. Segers.

Dans le Chœur de.s ces Peres,
qui eft derriere le maître - Autel,
on voit deux grands tableaux , l'un
peint par
T. var^ Loo, l'autre
par
van Veen,

Dans la Sacriilîe ëft un très-beau
tableau
d'Oc^a'vw njAn. Veen , qui
repréfente la Ste. Vierge , l'Enfant
Jefus, & quelques Saints. Ste. Ca-
therine eft à génoux devant le pe-
tit Jefus. Ce tableau avec celui de
ia Cène, dans la Cathédrale d'An-
■^'ers, peuvent à jufte titre pafTer
pour les deux chef-d'œuvres de ce
Maître.

On voit auiïi uri Chrift en yvoîre
d'environ deux pieds de hauteur,
du defTein du célébré ^em^k

D i)

-ocr page 59-

jz LE ? E I NT R E

La Chapelle de St. GillaiNs
dam la Irîmte-rue.

L on y voit tin tableau peint p-ar
G. de Crayer, lequel repréfente un
Saint qui guérit un malade. Ce
tableau méïite quelqu'attention,

L'Eglise des Religieuses de
St. Pierre , de l'ordrs
de St. attgustin.

On voit fur le maître-Autel us
très-beau tableau du
mcmc. Crayer y
qui repréfente la Ste. Vierge affifc
fous un dais ou rideau , l'Enfant
Je(us fur fes genoux, accompagné
de St. Auguftin, de St. Pierre , &
autres Saints; le tout très-délica-
tement peint, & qui ne doit cé-
der à aucun grand Maître.

Sur l'un des deux petits Autels ,
on voit la Converfion de St. Paul,
dont les figures font peintes par le
même
de Crayer j elles ont environ

-ocr page 60-

_ AMATEUR ETCURÎEUX. ^f
trois pieds de hautetir : le fond du
tableau a été fait par J.
Artois.

L'on y voit aulTmn autre tableau,
qui repréfente le Chrift mort, peint
par quelque Maître dont on a de
la peine à reconnoîtrc les traits.

Ayant vu & examiné dans ce
quartier ce qu il y a de plus re-
marquable , je fis l'heureufe ren-
contre de deux grands amateurs
de la peinture , & très - bons
Connoifïèurs. Notre entretien rou-
la fiir les ouvrages des célébrés
Peintres , que je venais de confi-
dérer avec grande attention dans
P^ufieurs Eglifes de cette Ville, &
étant infenîiblement tombé fiir les
excellens morceaux qui font l'or-
nement & la richeffe des cabinets
de nombre de Curieux, l'un de ces
Meffieurs nous dit, que les meil-
leurs pièces de celui de feu M.
«^e Fraula , étoient pafTccs chez
l'Etranger. Je le lài, lui dis - je
î
mais ce qui m etonne le plus, c'eft
qu'y ayant dans cette Ville nombre

-ocr page 61-

g4 le te [nt re
de perfonnes très en état d'acîic-
tcr ce qui fe préfente de plus beau.
& de plus rare en peinture, je ne
puis comprendre comment elles
<3nt pû kiffer aller au-dehors une
colledion de tableaux , aufli belle
^ auffî. recherchée qu'étoit celle
<^udit Sieur Fraula. Vous ignorez
fans doute, me répondit-il, que
ks amateurs de cette efpece étoient
très-rares en ce tems, ou du moins
que la plus grande partie n'ache-?
toit pour lorfque dans la vue d'y
gagner gros, & excepté le Prince
de K.ttbemfrê , le Comte de hm-
^Oy , M. Kobyns , M. PUttebeurs,
le vSr. de Griek , & quelqu'autres ,
le refte penfoit plutôt à fon intérêt
particulier, qu a ûtisfaire fon en-
"^ie ou fa curiofité,: il vouloit mê-
,me nous perfLiader que la peinture
& la fculpture ne flattoient plus
les perfonnes du premier & fé-
cond ordre , qui par leur naif-
lance & par leur richeffe de-
vpient être les premiers à foutenir

-ocr page 62-

u^MATEUR ET CURIEUX,
les beaux arts. Doucement, s'il vous
plaît, Monfieur , lui dis - je à mon
tour, vous allez un peu trop vite
dans vos' obfervations : convenez
plutôt que fans le grand nombre
d'Amateurs que nous avons dan$\
cette Ville , & que je lui nommai j
nous n'aurions pas la connoifiTancc
de plufieurs beaux ouvrages qu'ils
ont pris foin de conferver 6c de re-
chercher à grands frais : quant k
moi je vous foutiens que le goût
pour les fciences & les beaux arts,
n'a iamais plus fleuri chez aucune au-
tre Nation, que parmi la nôtre, prin-
cipalement depuis que nous avons
le bonheur d'avoir pour Gouver-
neur de nos Pays-Bas j un Prince
qui en eft devenu le Protedeur , &:
qui les cultive lui-même avec tant
d'amour. Ces Meffiem^s arrivés près
de leur logis me quittèrent, & moi
je rentrai dans ma maifon , où je
me mis à faire la defcription des
plus beaux tableaux qui font dans
les Cabinets de quelques vSeigneurs

-ocr page 63-

LE PEINTRE
& Particuliers de cette Ville de
Bruxelles.

Je commence par celui de Son
Aiteiïè le Prince de Ligne. On y
voit deux grandes pieces de
hucas
Jordms
; l'une repréfente le Triom-
phe de Bacchus & d'Ariane , &
l'autre le Combat de Turnus &
d'Enée î ce font deux chef-d œu-
vres 5 qu'on eilime au moins trois
mille piftoles.

Ce Prince pofTéde plufieurs au-
tres tableaux de prix, tant Italiens
que Flamands, dans lefquels l'A-
mateur reconnoîtra le pinceau des
plus habiles Maîtres. Entr'autres
raretés, on y admire une Caflette
d'un pied & demi de largeur , fîir un
pied d'épaifTeur, d'une feule piece
de Lapis ; l'on y voit aufîi un Bu-
reau de la même pierre , duquel
les corniches & autres extrémités
font garnies de plaques d'argent.
Ce Bureau , quoique Gothique, eft
très-curieux ^ d'un prix inefti-
mable.

-ocr page 64-

AMATEUR ET CUR lEUX. jy

Le Cabinet de Son AltefTe le
Duc d'Aremberg eft orné de ce que
nous avons de plus rare de nos an-
ciens Maîtres.

Son Excellence le Comte de
Callenberg, qui à jufte titre pafTe
pour un Seigneur des plus curieux
en tableaux , en pofféde plufieurs
qui font des plus beaux & des plus
rares , entr'autres celui de Loth àc
de fès deux filles , peint par le Che-
valier
'vm de W^erf, duquel il l'a
acheté : il a aufTi un triomphe de
Mer, très - délicatement peint, &
dune compofition riche & libre ,
par
Frdncks i c eft la meilleure pie-
ce de ce Peintre. On admire en-
core chez lui plufieurs autres ta-
bleaux de
Breugel, de Breda , &
de njun Kejfel. Ce Seigneur pofTc-
de encore plufieurs raretés , parmi
lefquelles font douze feuilles de
Lacques des Indes, & deux gar-
des-robes de la même fabrique.
Son Salon eft des plus fuperbes &
des plus curieux.

-ocr page 65-

LE PEINTRE

La belle ôc riche colledion des
tableaux du Prince de Rubempré,
cil une des plus brillante de cette
Ville ; on y voit des
K.uhens, des
uafz Dyck, des Breugcl, des Brou-
^ver
, des Temers , & autres ea
quantité î il en elt de même de fa
colleclion en Eftampes & en Mé-
daillés, tant antiques que modernes j
il en poilede un nombre infini &
des plus rares.

Mr. le Comte de Ribaucourt
eonfèrve foigneufement un grand
tableau, peint par
van Dyck , où
font repréfentés fept portraits ou
figures , dans des attitudes très-
gracieufes; la principale eft un pe-
re de famille, qui tenant une gui-
taiTe, femble très-attentif à l'ac-
corder î la fécondé , une mc-
rc qui a fon plus jeune enfant
flir fes genoux, & qui paroîtprê-
ter l'oreille aux fons de cette gui-
tarre j les autres figures font des
Enfans qu^i jouent & s'amufent en-
fèmble, mais le tout en eftfi vrai

-ocr page 66-

A MA TEUR ET CUR lEUX, 59
& fi naturel qu'on ne peut rien
voir au monde de plus parfait.

Chez M. le Baron de Celles ,
on voit deux portraits , peints
par
Kuhens, l'un d'un Homme qui
tient un faucon flir fa main droite ,
& l'autre d'une Femme fmgulière-
ment vêtue j tous deux admirable-
ment bien exprimés rendus.

Mr. le Chevalier Anmfet, Re-
ceveur des Domaines de Sa Maj.
Impériale & Royale ApoJftolique,
a un très-beau tableau, peint par
P. P.
Kubem , qui repréfente en
grandeur naturelle
Kube»s lui-mc-
îTie & fon frere.

La colleftion de feu M. le Comte
de Fraula, duquel nous avons ci-de-
vant parlé , étoit très - remarqua-
ble , très - riche & très - curieufe j
on a pu voir par le Catalogue im-
primé, & qui a été rendu public,
en quoi elle confiftoit ; tout ce que
je puis dire de certain eft que la
vente qui a été faite de cette
yiche colleélion a pafle quarante-

-ocr page 67-

6o LE F E I N T R' E
mille florins, indépendamment de
ceux que Meffieurs Tes fils , depuis
ïa mort avoient mis en rjéfervc
chez Mr. ' le Comte de Fraula
leur fi-ere. L'un de ces Meffieurs,
cjui demeure vis - à - vis Mr. le
Marquis de Wemmel ^ polTede
■plufieurs excellentes pieces de Ku-
he>ts, & de 'van Dyck , deux pe-
tits tableaux de
Breugel , qui font
au mieux finis , deux
Kymhrant,
plufieurs de Brouwer, un de Fetti,
un à'AuguJlm Carats , 6<rc. Le
Cabinet de M.
Senfem a auffi
pafle pour avoir été très - confidé-
rable j la plus grande partie des ta-
bleaux qui le compofoient a auffi
été vendue après fa mort.

Mr. de Griek , de fon vivant,
homme très - curieux pour tout cc
qu'il y avoit de plus rare, avoit
auffi une très-belle colleélion en
tableaux : je jne fouviens d'avoir
'i'û chez lui un plafond peint fur
toile , par Kf{hens , où les fignes
4u Zodiaque étoient repréicntés

-ocr page 68-

AMATEUR ETCURIEUX. 6î
par des enfans très-artiftement ex-
primés î comme auffi un Emaùs,
par
C, Cotti ; un payfagc repré-

fentant le délusje de Deucalion,
<—

peint par Kubem j des payfa-
ges , par
'va» Uden , & plufieurs
autres, très-belles & rares pie-
ces , fur tout la mort de
Didon,
par le Chevalier 'va» de W^erf^, très-
richement compofée. Sa colle6lion
de Médailles étoit très - curieufe j le
Bureau de la Reine Chrifline de
Suede , étoit auffi compté parmi
fes plus belles curiofités, dont la
plus grande partie a pafle dans le
Cabinet de Son Alteiïè Royale le
Duc
Charles pe Lorraine , no-
tre très - Augufte Prince & Gou-
verneur , qui depuis ce tems
a complété fon Cabinet de tout
ce qu'on peut simaginer de plus
rare & de plus curieux.

Son Excellence le Comte de
Cobenzl , Miniftre de Sa Majefté,
outre un Cabinet orné de quan-
tité de tableaux de prix, poflcde

-ocr page 69-

ê'i l é f e i n t r e
encore la plus belle & la plus
ample colleélion en deflèins des
plus habiles Peintres & Graveurs i
tant anciens que modernes.

Le Cabinet de feu Mr. Robyns ,
qui étoit grand amateur con-
noilTeur ^ a été difperfé & vendu
en partie après fa mort. Mr. Remy
a fait paflèr en France im St. Se-
baftien , peint par
van Dyck ; on
le voit en eftampe, gravée par Fî?/-
iermans junior. Ce St. Sebafticn elt
préfentement dans le Cabinet dit
Marquis
la Lyve.

Un autre tableau du même va;^
Dyck 5 qui repréfente Surge , tollé
grabatum
, qui eft une des meilleu-'
tes pièces de ce grand Peintre, 6C
qu'on voit en Eftampe, gravée par
P' de Jode , eft préfentement dans
le Cabinet de Mr. le Chevalier'de
Verhulft , qui poffcde plufieurs au-
tres beaux Se rares tableaux j en-
tr autres , deux de P^/X W^ouwer-
mms , trois Breugel de Velours, un
^ André Oftade^ un d'Jm. BrëuweVi

-ocr page 70-

AMATEUR ET CURIEUX.
îin par Carolo Dolée , trois de
^Berchem , quatorze de D. Tenter s j
le portrait de Kymbrafît, peint par
lui-même , & que nous avons en
eftampe, gravée par P. La»», troig
tableaux de P.
Neefi , un Carel
dti Jardm
j un par AJfeljn , dit
Crabbitie , un Nkolas PouJJî^ , un
de
Paid Bril, deux par Cujp , deux
de
D. Kyckaert j quatre par 'va^
def J^euien
, cinq de Huyjmans j
iin Sneyers, un Alichel Ange, fli-
jet de bataille , un
Kottenhaemer,
un Fetti ) un van Baelen , un Ber^
tolet Flemael
, cinq de van Uden,
un de P. Gyjfens, un de C. Schut ^
plufieurs de Alichau , Tilbourgh ^
de Feyt, de Gryef ^ de B. Pieters,
^ plufieurs autres , dont le détail
feroit trop long à d'écrire j de lor-
te qu'on peut dire à l'honneur de
ce vrai Amateur , dont le bon goût
& les nobles connoiflances dans la
peinture, 8c dans les beaux aits,
lèmblent fe renouvelier chaque
jour ; qu'il pofTcde aduellement

-ocr page 71-

^ PEINTRE
une des plus belles , & des plus ri-
ches collerions qu'il y ait dans
cette Ville.

Mr. le Baron de Boohneim, â
aulTi une très-belle colledion de
tableaux de nos plus grands Maî-
tres, bien quelle ne foit pas
encore tout - à - fait achevée , fes
commencemens annoncent ce qu'el-
le deviendra par la fuite , puif-
qu'aétiiellemenr on voit chez lui
des
Kuhvm , des van Dyck , des
Tenter s, & plufieurs autres , tant
Hollandois , qu'Italiens, entr'autres
la Devideufè de
G. Dou , très-
belle pièce de cabinet j plus un
très-beau portrait de
Kymbrant, une
très-belle pièce de P. W^ouwer-
tnans, un beau TV. Berchem , un

Breugel de Velours ^ un à'Ojlade
une très-belle piece de P. Verone-
fe j qui repréfente la Nativité de
Notre-Seigneur.

Monfeigneur le Nonce Crivelli,
qui depuis fept à huit ans eft parti
pour Vienne, 6c qui eft aduelle-

ment

-ocr page 72-

AMA TE UR ET CURJÈ UX. 6$
înent Cardinal , avoir auffi une
très-belle colle6lion de tableaux ^
dont la plus grande partie a pafïe
avec lui à Vienne» entre les pie-
ces rares que j'y ai remarqué , je
me rapelle celle qui repréfentoit la
Magiftrature d'Anvers
î cette piece
quoiqu'un peu plus qu'ébauchée
avoit 5 félon mon avis, autant de
mérite qu'aucun des ouvrages les
plus finis, tant pour ce qui re-
garde la compofition, l'oppoiition
des couleurs, les teintes, que pour
les attitudes, grouppes & airs de
têtes.

M. Arts d'Opdorp , Tréforier de
cette Ville , eft auffi grand ama-
teur , pofTéde plufieurs belles &
rares pieces , entr'autres un ma-
gnifique Chrift 5 en yvoire > par
le fameux ..... plufieurs ta-
bleaux , de
Tenîers, de "vm Bden ,
de
Michm^ de Gryeft, &Cc. &C
une très-belle efquiffe , par rua^
Dyck, qui repréfente la Fuite ea
Egypte.

E

-ocr page 73-

U L E P E I N T K E

M. Francolet 5 Négociant, con-
ferve très -foigneufement une piece
excellente , peinte par
Berchem,
qui repréfente une Cafcade Italien-
ne , au naturel
î il a auffi une Ado-
ration des trois Rois, peinte par
Kubem : cette piece étoit autrefois
enfumée & négligée dans un coin de
FEglife de Ste. Gudule , de forte
qu'on avoit de la peine à recon-
noître fa beauté, raifon pour la-
quelle , elle a été vendue à très-
modique prix.

M. le Chanoine Wouters , Bi-
bliothécaire de Sa Majefté, a une
très-nombreufe colleftion , en def-
feins Se en eftampes des plus habi-
les Maîtres i ainfi que M. l'Avocat
Gorgeret,qui pofféde auffi ce qu'il
y a des plus curieux en ce genre.

M. de Haefe , le Peintre , a auffi
plufieurs beaux tableaux, entr'au-
très , quatre pièces, peintes par
Bênedette de CaftigUone , qui méri-
tent l'attention des Curieux, & qui
font de grande valeur.

-ocr page 74-

AMATEUR ET CURIEÛX. 6f
Mrs. Borremans , Blocqiieau éc
Van Cutfem , tous trois amateurs
coonoilTeurs, ont auffi des pie-
ces de cabinet, très-rares & très-
curieufes.

M: Reps, qui fe fait diftîngiiei?
parmi les Connoifleurs dans fon
choix, a auffi un très-beau cabinet*
Mrs. Dannoit & Turck, Négo-
cians , ont chacun leur cabinet ,
dans lefquels on y voit des
Kukens »
des va^ Djck , des Temers , des
Breugels , de autres peintures de
grand prix.

M. Platteborfe , mort depuis un
an ou environ, âvoit un très-riche
Cabinet, ainfi que M. Cofter.

M. Bergé , fameux Scul'pteur »
qui étoit de fociété avec M, Mef-
traeten , pofTcdoient à eux deux
plufieurs bons tableaux, entr'au-
tres un Payfage de Kube^s ilequoi
lors de la vente de leur Cabinet a
paffé entre les mains du Sr. le Mer-
re, de Gand , Amateur 3c Coa-
ïLoijGTeur.

E il

-ocr page 75-

m LE PEINTRE

Mr. Orion, Négociant, qui de-
puis quelques années s'eft appliqué
à former une txès-belle colledion^
continue avec emprejOTement d'em-
bellir fon Cabinet de tout ce que
nous avons de plus rare & de plus
curieux de nos anciens Maîtres.

M. Disbeeq, qui a auffi le même
goût pour la peinture, & qui d'ail-
leurs l'a profeffée, eft grand Connoif'
feur, & pofféde plufieurS beaux ta-
bleaux , qui méritent l'attention des
Curieux.

Je ne puis pas non plus omet-
tre ici les noms de ceux, qui com-
me lui, s'attachent à la recherche
des plus excellentes pîeces en pein-
ture , fculpture & gravure , qui
ont déjà par devers eux plufieurs
rares morceaux, tels que Mrs. Frickx
& Léonard, Libraires ; Hofmans,
Receveur de cette Ville
î T'-Sas,
Joaillier de Son AltefTe Royale ;
Brouwer , du Trez, Jacobs > van
de Motten, Vigoureux , Maillard >
Donckers, Martin, Vliger, de Wals,
Parys, Kaft, &c.

-ocr page 76-

AMATEUR ET CURIEUX, 69

Mad. la Veuve Regaus, à aufïi
un très-beau Cabinet, orné de ta-
bleaux de
Kubem , de 'va» Dyck y
àe P, yérof^e/e,
de Temers, Sc au-
tres excellens Maîtres , tant art-
dens que modernes.

C'eft au jugement de mes Lec-
teurs que je fbumets le détail des
tableaux de Cabinets , que je viens
de leur faire ici, & pour lequel
j'ai interrompu de quelques mo-
mens ma defcription générale. Ceux
qui ont quelque connoifTance de la
peinture, verront que je n'y ai point
altéré la vérité, ni cherché à flatter
l'amour propre de l'un , préféra-
.blement à l'autre, & que tous ceux
que j'ai nommés & défignés , ci-
deffiis font réellement pofTefTeurs
des rares morceaux que j'annonce ,
ou l'étoient il y a peu de tems : fi
j'en ai omis quelques-uns , c'efl fau-
te d'en avoir eu une parfaite con-
noifTance ; c'eft pourquoi j'efpere
qu'ils voudront bien m'excufer , &
ne point prendre pour oi^bli, cc

-ocr page 77-

■JG ' L E F E I N r R E
qui n'eft que l'effet d'une ignoran-
ce involontaire , malgré les recher-
ches exades que j'en ai faites, &
les foins que je me fuis donné pour
ne rien pafTer d'effèntiel.

Je reviens à la fuite de nos Egli^
fes ôc Couvens de cette Ville.

L'Eglise Collégiale
de S t e. G u d u l e.

On voit for le maître-Autel un
grand tableau de la Refùrreélion
de Notre - Seigneur , peint par J.
Mille : cet Autel a été changé de-
puis fept à huit ans ; celui qui fub-
fifte aujourd'hui eft de l'ordonnan-
ce de
P, de Domkers, Le bas de
cet Autel , jufquà l'architrave eft
de marbre ÎDlanc 3 le tableau qui
traitoit le même fojet que deffus ,
& qui étoit avant celui-ci, fur l'an-
cien Autel, n'ayant pas alors la pro-
portion nécelTaire, fut placé dans
la Chapelle de la Ste. Vierge, vis-
à-vis de l'Autel ; il eft peint par
Oclmj'iQ 'vm Vecn^

-ocr page 78-

AMATEUR ET CURIEUX. 71'

Au milieu du Chœur eft ie mau-
folée du Duc de Brabant. C'eft
une table foûtenuë par des patres
de lion, fur laquelle eft couché ua
grand lion de fonte, doré au feu,
que l'on dit pefer fix mille livres
ou environ.

Jean Second, Duc de Brabant,
a été mis fous cette tombe, l'an
1318, Se depuis, en 1431, An-
toine , fils de Philippe le Bon.

Sur la main gauche du Chœur »
eft le maufolée fous lequel l'Archir
duc Erneft a été enféveli l'an 1595.
L'on a tenu dans ce Chœur plufieurs
affemblées de l'Ordre de la Toifon
d'Or j la première s'eft faite foUs le
Regne de Philippe le Bon, Fonda-
teur dudit Ordre , Tan 143 5
5 la
fécondé , fous celui de Philippe le
Beau en i-^oi ; & la troifièm,e,
fous Charles V. l'an 1516. L'on
voit encore aujourd'hui, peintes fur
les doffiers des formes des Cha-
noines , les armories des Chevaliers
qui ont aiTiftés aux auguftes céré-
înonies dudit Ordre.

-ocr page 79-

72 LE PEINTRE

Dans le circuit du Chœur, à h
Chapelle de la Madeleine, on voit
fur l'Autel cette Sainte pénitente ,
peinte par P.
ChampAgne, Peintre
de Bruxelles.

Au-deflbus des fenêtres de cet-
te même Chapelle , on voit quatre
tableaux, peints par
'van Clef, na-
tif de Gand, qui fut éleve de
Cray en
il a fait de très-beaux morceaux,
comme on le verra dans la deP
cription des tableaux de Gand,
Ces quatre tableaux repréfentent,
favoir , le premier , la Vifitation
de Ste. Elifabeth j le fécond, une
Ste. Généalogie j le troifième , St,
Jean-Baptifte qui prêche dans le
défert j & le quatrième, le Baptê-
me de Jefus-Chrift. Les couleurs
de ces tableaux font un peu ter-
nies.

Vis-à-vîs de cette Chapelle ell
le Tabernacle au-deffijs duquel eft
la Sainte Vierge , fculptée par H,
^uenoy.

Plus bas î en tirant vers le mi-^

-ocr page 80-

AMATEUR ET CURIEUX. 7g
di, on voit une image de la Sain-
te Vierge , dire de Confolation ,
qui eft une copie du tableau qu'on
voit à Rome, qu'on dit avoir été
peint par
Saim iLuc.

Au Chœur de la Sainte Vierge,
l'Autel eft de marbre blanc & noir;
quoique d'une archite6hire alTez
fimple, il eft très-bien entendu , &
exécuté fiiivant les réglés Corin-
thienes , par
A. Voorfpoel , qui a
été éleve de H. ^enoj. Le ta-
bleau de l'Autel repréfente l'Af-
fomption de la Ste. Vierge, peinte
par P.
Champagne, très-bien delTi-
né d'une riche compofition. Ce
Peintre fut autrefois mandé par
Louis XIV. pour peindre un ciel
de lit, dans lequel il a repréfente
quelques Anges ou petits Amours,
'qu'il a exprimé avec tant d'art 6c
de délicateffe, que la Reine , pour
qui ce lit étoit deftiné, en a été
très-fatisfaite.

Dans le même Chœur, au-def-
fous des croifées> on y voit neuf

-ocr page 81-

74 LE PEINTRE
tableaux ou payfages , ornés de pe-
tites figures , très-bien peintes par
J. Artois , L. Affchelmx, van Heil,
èc le neuvième , par A. Cof^e»^,
On y voit de plus deux tombeaux,
dont celui ftir la droite , de k fa-
mille des Comtes d'Ifenbourg , eft
^du deffein du fameux
Voorfpoely
Sculpteurs & lautre fur la gauche,
de la famille de Philippes - Jean
d'Ennetieres , lequel a été fculpté
par
njan Delen.

A côté de l'entrée du Chœur &
de celle du circuit, on voit lepi-
taphe de la famille de Pierre Ja-
cobs, au - deffus de laquelle eft un
Saint Pierre, à demi-corps, priant
le Seigneur , ce tableau eft peint
par
G. de Crajer.

Les quatre fenêtres de ce même
Chœur, font peintes par
A, Die-
pe^heek î elles repréfentent les Saints
Myftères de la Vierge , & les por-
traits de quelques Monarques bien-
faiteurs de ce riche Temple.

Sur la première croifée eft

-ocr page 82-

AMATEUR ET CUR lEUX. 7 J
préfentation de la Vierge au Tem-
pie , ^ le portrait de l'Empereur
Ferdinand ; la fécondé , fur un des
côtés, repréiènte le Mariage de la
Sainte Vierge, ô^ fur l'autre l'Em-
pereur Léopold î fur la troifième^
on y voit rAnnondation , & au
bas les portraits de TArchiduc Al-
bert & de l'Infante Ifabelle ; la qua-
trième , repréfente la Vifitation,
au bas l'Archiduc Léopold.

A l'entrée du Choeur du très-
Saint Sacrement de Miracles , on
voit fur le premier Autel , ce fa-
meux tableau, peint par
Kubem,
repréfentant le Sauveur qui donne
les ciefs à Saint Pierre , en préfen-
çe de trois autres Apôtres : pièce
admirable tant pour la compofition,
pour le coloris les beaux carac-
tères de têtes
î cet Autel eft le
lieu de la fepulture , marquée &C
deftinée pour la famille des Vicom-
tes de Bruxelles & de Tervure 1
on a refufe pour ladite pièce quatre
piilie florins, par ce refus3 le tg-

-ocr page 83-

L t PEINTRE
bleaii eli relié depuis au même eiî-
droit où on le voit.

DeJriere cet Autel eft un autre
tableau , peint par
B. vm Orlay, qui
repréfente un Chrift mort, la Sain-
te Vierge le foutient, la Madelei-
ne fe baifle pour l'adorer j & eri
Farrofant de fes larmes, elle em-
braffe la main droite du Sauveur 5
Saint Jean &: cinq autres figures,
y paroilTent dans une douleur ex-
trême. Le fond de ce tableaù eft
doré, & peint par tout par-defTus
la dorure j il y a des parties dans
cette pièce qui font de toute beau-
,té, entr'autres la Tête d'une des
femmes qu ori voit au - defTus dé
celle du Sauveur. Car û tout étoit
traité à proportion j on le pren-
droit plutôt pour être de Raphaël »
que de
Bermrd vm Orlay. Les bat-
tans qui ont fervis autrefois à cet-
te pièce , font pofes fous ce ta-
bleau dans la boiferie qui fert de
doffier à un banc pour les Mar-

guillerSi

-ocr page 84-

AMATEUR ET eu RI EUX. 77

Le tableau du petit-Autel plus
avant j peint par
AI. Coxie, repré- '
fente un Ecce Homo ; encore plus
avant eft un autre tableau, peint
par le mcme , qui repréfènte le La-
zare reffiifdté : les battans de ce
tableau fur lefquels on voit plu-
fieurs portraits , font pofés au-def-
fous du grand & principal tableau.

Celui de l'Autel du Saint Sacre-
ment de Miracles , eft aufTi peint
par
M. Coxie : il repréfènte la der-
nière Cène. Entre les quatre co-
lonnes de cet Autel , font pofes
les battans de ce tableau , dont
l'un repréfente le Jardin des Oli-
viers , & l'autre le Sauveur qui la-
ve les pieds à fes Apôtres.

Le Tabernacle du même Autel j
eft tout d'argent maffif. A la fête
de Tous-les-Saints , cet Autel eft
paré d'une prodigieufe quantité de
Reliq\ies , Ô<: d'autres raretés pré-
cieufes, defquelles on a <ionné au
public la defcription dans un petit
Uvre imprimé.

-ocr page 85-

7S L Z ? E INTR E

Les vitres de cette Chapelle ,
peintes par
Kûgiers, ont été faites
des libéralités des Empereurs , Rois
& Reines ci-après i favoir , la pre-
mière > quand on entre dans ce
Chœur, par Jean Roi de Portugal}
la fécondé , par Marie , Reine
d'Hongrie j la troifième, par Fran-
çois 1, Roi de France j la qua-^
trième , par Ferdinand, frere de
Charles V? Se h cinquième, par
l'Empereur Charles V.

Sur la gauche de cette Chapelle,
on voit trois Sépultures bien or-
données en marbre 5 la première
eft du deffein de Baurchiet j la fé-
condé de
Kockx, la troifième
du mcme.

Dans le circuit, au-defTus d'un
confelfional, il y a un tableau de
i'Enféveliflement de Notre-Seigneur j
peint par
G- de Crayer , ainfi qu'un
Chrill; , peint par le même. Au-
deffus d'un autre confeffional, eil
un tableau peint par
M. Coxie , qui
repréfente la dernière Cène 5 Se à

-ocr page 86-

AMATEUR ET CURIEUX, y9
i'oppoflte contre le Chœur , une
Epitaphe de la famille de Robert
Bourgoîgne.

On voit au bout de la nef, à
gauche, quand on entre par le grand
portail, contre la colonne au coin
pour aller au Chapitre , une Epita-
phe de la famille de Maria-Anna
Schotti on Schotten, au-deflus de
laquelle eft le portrait de cette Da-
me , vêtue en noir à l'Eipagnole ,
avec un rabat ou fraiiè, ayant les
deux mains jointes ; c'eft un de^
chef-d'œuvres
^Antoine van Dyck
car quoique ce tableau foit fale , &
plein de pouiTiere, il ne laifle pas'
que de paroître aux Curieux un
lïiorceau digne de leur attention
de mcme que les vingt tableaux,
que les Evêques, Abbés & Abbef-
fes de ce Pays ont donnés à
ccizo
Collégiale l'an 17x0 , à roccafion
d'un Jubilé, ordonné en cette an-
née. Comme ils repréfentent en dé-
tail Thiftoire du très-Saint Sacre-
iTient de îiliracles , je les expliquerai

-ocr page 87-

So LE PEINTRE
fuivant les événemens qui font ar-
rivés à cefujet, & en mêmetems
les plus belles piecesqu'on voit dans
les Chapelles devant lefquelles ces
tableaux font expofés.

Le premier tableau repréfente Jo-
nathas , qui engage Jean de Lou-
vain à lui livrer un Ciboire & des
Hofties confacrées, moyennant la
formue de foixante pieces d'or,
(qu'on eftimoit alors huit florins
fix deniers chaque j argent fort;)
ce tableau eft peint par
J. Hèl-

Dans la Chapelle , au-devant de
laquelle il eft placé, on voit fur l'Au-
tel la Chûte
des Anges rébelles, pein-
te par
Bernard y 6c au-deffous de
la croilee, une copie d'après
Ga/~
fârd de Crayer
, du tableau qui re-
préfente Sainte Appoline : il y en
a encore un autre de
vSainte Ca-
therine , peint par
J. Teyjfens.

Le deuxième tableau, au-defllis
de la feconde Chapelle, repréfën-
te le vol que ledit Jean de Lou-

vain

-ocr page 88-

AMA TE UR ETCVRIE VX. S t
Vain fit du Ciboire dans la Chapelle
de Sainte Catherine j il eft peint
par
va^ der Heyden. Dans la Cha-
pelle , for l'Autel j eft un très-beau
tableau, peint par
G. de Crayer j
qui reprcfente le Sauveur debout,
tenant la Croix du bras gauche, &
ia main droite for la poitrine : on
voit quatre péniteiîs profternés à
fes' pieds.

Le fojet du troifième tableau ,
^ft le facrilege que commirent les
Juifs après qu'ils eurent en leur pou-
voir les Hofties confacrées : ce ta-
bleau eft peint par
J. ojan Melmont,
Dans la Chapelle il n'y a rien de
remarquable, ainfi que dans les au-
tres qui foivent.

Le quatrième tableau qui reprc-
fente le meurtre du Juif Jonathas >
eft peint par
van der Heyden.

Dans le cinquième tableau, on
y voit la Veuve Jonathas & fon
fils, qui remettent le Saint Ciboi-
re aux Juifs de cette Ville: ce ta^
bleau eft peint par
Kerckx,

F

-ocr page 89-

LE PEINTRE
Le fixième tableau repréfente la,
îliite du facrilége, commis par les
Juifs fur les Holties confacrées : ce
tableau eft de la main de
J. Jrîel-^
mont»

Dans le feptième, pemt pae
Kerckx , on y voit les Juifs, qui,
confternés de leur crime , enga--
gent une femme , nommée Cathe--
rine, de porter à Cologne le Ci-
boire , & les Hofties poignardées.

Le huitième tableau, peint par
Eykem, eft l'infpiration qu'eut cet-^
te femme de remettre le Saint Ci-
boire entre les mains de fon curé 6t
confefTeur. ■

Dans la Chapelle , derriere ce
tableau j & qui eft la huitième,
on
voit fur TAutel une excellente pie-
ce , peinte par
Ai. de Haèfe , la-
quelle repréfente la Purification de
la Sainte Vierge.

Le fujet du neuvième tableau eft
Catherine , qui remet entre les
mains de fon curé le vSaint Ciboire :
cette piece eft peinte par
C. Eykens.

-ocr page 90-

ÂÀ^ATEUR ET CURIEUX. %

Le dixième fait voir les Juifs ar-
ïêtés, & conduits prifonniers fui^
la Steene - poort 3 ce tableau efi
peint par
'van der J-Ieyden.

Dans la Chapelle de Saint Mar-
cou, la première quand on entre
par la nef, à gauche, on voit à
l'oppolîte de l'Autel un très-beau
tableau , peint par le vieux
de
Clerck
, qui repréfènte le Seigneur
entre des petits Enfans , & fous la
fenêtre un autre de
J. van der Hey~
den
, dont le fujet eft St; Marcou,
qui fait l'Aumône aux pauvres.

Le onzième tableau repréfenté
ie jugement ou la condamnation
des Juifs coupables > il eft peint par
C.
Eykem. Dans la Chapelle on
voit fur l' Autel un Exorcifte, de la
compofîtion de
Eyfem.

Le douzième eft rexécutiori des
Juifs, près la grofle Tour , commu-
nément appellée Wollendries-tho-
ten : ce tableau eft peint par Ji
irîelmom.

Dans la Chapelle , on voit fur
F ij

-ocr page 91-

% le peintre
TAutel Jefas-Chrift portant fà
•Croix, la Sainte Vierge , St. Jean,
Ste. Véronique, & les autres figures
qui y font peintes, y font rcpré-
fentées dans des attitudes tout-à-
fait dolentes : il eft de la main d©
van V^een.

Le treizième tableau, peint par
vm Or/^j?, repréfente la Proceffion
ou Tranfiation des Hofties poignar-
dées , de l'Eglife de la Chapelle ,
à celle de Sainte Gudule.

Dans les Chapelles qui iuivent
il n'y a rien qui mérite l'attention
des curieux, fi-non dans la fixiè-
me, où on voit fur le frontifpiee
d'un petit Autel de marbre blanc
& noir deux enfans, peints par H,
^emy i le tableau de l'Autel elt
peint par
Eyfem.

Le quatorzième tableau, peint par
njm der Heyden, repréfente la vifioiï
d'un jeune homme, qui avoit une
dévotion toute particulière pour le
très-Saint Sacrement.

Dans la feptième Chapelle, de

-ocr page 92-

AMATEUR ET CURIEUX.
ce même côté, il y a fur l'Autel
■Qn tableau , peint par
G. de Crayer ;
je ne fçaurois pofitivement dire
quel en eft le fujet : on y voit au-
bas quelques portraits » & dans le
haut un ciel ouvert.

Le quinzième tableau reprélente
le même jeune homme, dont je
viens de parler, lequel on interroge
touchant la clarté qu'il avoit vu ,
& la voix qu'il avoit entendue : ce
■ tableau eft peint par
J. Helmont.

Le feizième, qui eft du même
Auteur, eft la Proceflion annuelle
qui fe fait du vSaint Sacrement de
Miracles le premier Dimanche après
le 13 Juillet.

Le dix-fcptième , encore du mê-
me , repréfènte la tranflation des
Hofties miraculeufes du lieu où
elles avoient été mifes durant les
révolutions, pour les expofer dans
leur place ordinaire.

Dans la Chapelle fuivante, qui
eft la huitième, on voit fur l'Autel
Saint Jean dans l'ifie de Patmos :

-ocr page 93-

B6 LE PEINTRE
ce tableau eft peint par M. Coxte.

Le dix-huitième tableau repré-
fente l'exporition du Saint Sacre-
ment de Mracles fur l'Autel que
Ton éleve au-devant du Chœur le
premier Dimanche après le 13 Juil-
let de chaque année ; plulîeurs af-
fligés paroilTent profternés devant
cet Autel, & femblent implorer le
Tout-Puiflànt pour être foulagés
guéris de leurs maux : ce tableau
eft peint par
Jacques de Koore.

Le dix-neuvième, peint par Af.
Cortens, Prctre , repréfènte l'Ar-
chiduc Albert l'Infante Ifabelle,
à genoux, au-devant du très-Saint
Sacrement , auquel ils paroiflfent
offrir de magnifiques prcfens.

Le fujet du vingtième & dernier
tableau , peint par
C. Eykens , eft
le pieux êc riche préfent, qu'a fait
un Prince Cardinal, d'une baluftra-
de d'argent maffif , pour orner
l'Autel du Saint Sacrement de Mi-
racles , c'eft-à-dire, celui dont nous
venons de parlçr.

-ocr page 94-

AMATEUR ET CURIEUX. 87

Tous ces tableaux , comme il
a été dit ci - devant, ont été of-
ferts l'an
17%o, à Toccafion du Ju-
bilé qui fut célébré cette année,
A côté de chaque portail & aux
environs, font fix tableaux, dont
le premier repréfente Monfeigneur
l'Archevêque J. Boonen , qui pofe
une Hoftie à la Sainte Croix, don-
née en préfent par l'Archiduc Al-
bert l
'Infante Ifabelle ; la hau-
teur de cette Croix eft de quatorze
pouces 5 fur deux de large & un
demi d'épatflèur, quand à la lon-
gueur de la piece de travers , elle
cil de fept pouces : ce tableau eft
peint par
E. Pery,.

Le deuxième , peint par Eyfen ,
fair voir TArchiduc Albert &
fante Ifabelle qui accompagnent
la ProcefTion du très-Saint Sacre-
ment. Ce Prince y avoit une fi
grande dévotion , qu'il quitta les
Sieges d'Oftende & d'Hulil en
Flandre, pour fè rendre à Bruxel-
les «au jour indiqué pour cette Fête.

-ocr page 95-

S8 LE PEINTRE

Le troifième tableau, peint pat
7.
Thibaut , eft le triomphe de
rEuchariftie,

Le quatrième reptéfente le Prê-
tre Néhémias 5 qui ordonne aux
enfans des Prêtres d'aller chercher
le feu facré de l'Autel qu'ils avoient
caché avant d'être conduits prifon-
niers en Perfe
î mais comme au-
lieu de ce feu, ils ne trouvèrent
qu'une eau graffe , il leur
fit de
cette eau arrofèr le bois qui de-
Voit fervir à l'holocaufte , lequel
prit feu lorfque les rayons du fo-
îeil vinrent à donner defïùs : ce ta-
bleau eft peint par
Kerckx.

Le cinquième , du môme Au-
teur , eft l'apparition des trois An-
ges à Abraham,

Le fui et du fixième eft Jean
d'Autriche , qui après avoir rem-
porté une grande Viéloire fur fes
Ennemis, fait lever le fiége de
Valenciennes, précifem^ent le jour
de la fête du très-Saint Sacremient :
ce tableau eft peint par P.
deHmdt,

-ocr page 96-

AMATEUR ET CURIEUX. 89

On voit aux deux dernières co-
lonnes de la grande nef deux Au-
tels , l'un déâé à Sainte Gudule,
& l'autre'à Sainte Hélene ; dont
les tableaux ont été peints par M,
Coxie.

Contre les colonnes ou piliers
de la nef , font pofées les figures
de Notre - Seigneur , de la Sainte
Vierge , & des douze Apôtres ,
chacune d
'environ dix pieds d'hau-
teur , exécutées par M. §^enoy,
Fiderhe , vm Delem , Denes &
^lilm : ces Maîtres ayant tous été
employés en même tems à la re-
préfentation de ces figures , l'envie
que chacun eut de fiirpaffer fon
camarade , a produit des morceaux
dans lefquels on découvre des coups
de cifeaux admirables.

Le grand vitrage , qui paroît au-
deffus du grand portail, eft peint
par
Jacques de Vrim, autrement
dit
FLoris : il repréfente le dernier
Jugement
5 à l'égard des deux fe-
Actres qui font aux deux bouts de

-ocr page 97-

^o LÉ PEINTRE
la croix , elles font peintes par K»-
giers.

L'E g l i s e des R. R. p. P,
Dominicains.

Cette Eglife, ainfl que le Cou-
Vent ont été rebâtis depuis le bom-
bardement. On voit dans fes baffes
nefs les quinze myjftères du Rofai-
re, en quinze grands tableaux ,
peints par quelques PeinDres mo'
dernes.

Ceux du couronnement d'épine
de Notre-Seigneur, & de la Puri-
, fication , font peints par moi
G. P.
jMenfaert
, & celui du couronne-
ment de la Sainte Vierge, par
E,
Pery
j il y en a encore plufieurs au-
tres , dont cinq par
J. B. Tibaut,
deux par C. Grange, deux par Dis-
heeq,
deux par Zelharjl, & un par....

Au-deffus de l'entrée du Chœur
on voit un tableau , peint par
Cd-
■leau.
Dans le Chœur, il y a fur le
maître - Autel î qui eft de l'inverr

-ocr page 98-

AMA TEUR ET CURIE UX. 91
tion de 'vm Nerve», un grand &
très-beau tableau, peint par F". H.
Janjfens , qui repréfente le Duc de
Cleves dangereufement malade , &:
guéri miraculeufement par Tinter-
cefTion de Saint Vincent Ferrier:
on eftime ce tableau pour un des
meilleurs de ce Peintre; il eft ri-
chement compofé. & d'un très-
grand goût.

Dans la boifèrie qui regne au-
tour du CHœur , il y a cinq grands
tableaux qui reprçfentent les cinq
myftères de la Vie de Notre-Sei-
gneur ; celui de fa Circoncifion, &
celui de la Purification de la Sainte
Vierge
î font àc^ean van OrUy, 8>C
ont fervi de Patron pour la tapif'
lerie , que l'on a faite fur les def-
feins de ces deux tableaux.

Les deux autres qui font fur
la gauche, repréfentent, l'un la
Fuite en Egypte, & l'autre le Sei-
gneur & Saint Jofeph qui travail-
lent à la charpente , & plus loin
la Sainte Vierge occupée au méiia-

-ocr page 99-

LE PEINTRE
ge : ces deux derniers font de Jea^
Mille : le cinquième, peint par M,
de Maefe
, repréfente les noces de
Cana en Galilée.

Dans la même boiferie, devant
le Jubé , on voit quatre tableaux
peints par
G, de Crajer î l'un eft St.
Jean l'Evangélifte, l'autre St. Jean-
Baptiftej
le troifième, la Madelei-
ne , le quatrième , St. Pierre :
des deux côtés de l'Autel, font deux
beaux maufolées , celui 'de k droi-
te eft de la famille de Coxie , &
l'autre de la famille de van Caver-
fon j tous deux fculptéspar
Aiichel
van der J^oort, le Vieux
; fur cha-
cun de
CCS maufolées , on voit les
portraits en buftes & en marbre
blanc de ceux qui les ont £iits po-
fer ; à chaque côté font deux figu-
res afTifes, auffi de marbre blanc,
qui repréfentent la Force &: la Vi-
gilance avec quelques attributs.
Ces deux pièces méritent l'atten-
tion des Connoiffeurs : plus bas ,
fur la gauche a il y a un autre mau-

-ocr page 100-

AMATEUR ET euRimx, 93
'folée de marbre de k famille d'Aï-
verado ; on y TOit une figure
accompagnée d'un jeune enfant :
cette figure qui repréfente la
prévoyance , eft appuyée fur le
coude droit, tenant dans la main
gauche un miroir: elle ^.étcfculp-
tée par
J- de Kinder.

La Sacriftie de ces Peres méri-
te auffi quelqu'attention : depuis
quelques années elle eft boifée ÔC
embellie de tableaux peints par
J, Mille. Les fonds ou payfages
par
A. Coffens , repréfentent des
fujets du nouveau Teftament. Dans
le Réfe6loire de ces Peres , qui eft
auffi boifé , il y a quatre tableaux
peints par
J. vm Orlay j l'un eft la
Vifitation de Sainte Elifabeth 5 l'au-
tre le refus qu'on fait à la Sainte
Vierge , & à Saint Jofeph de l'hof-
pitalité î le troifième , la Naiflance
de Notre-Seigneur, le quatriè-
me , l'adoration des Rois Mages.

Au milieu, ou à k place ordi-
naire du Prieur,
on voit un Chrift

-ocr page 101-

p4 LE PEINTRE
attaché à la Croix : c'eft une co-
pie d'après
Kubens.

Sur la gauche, il y a une autre
piece, peinte par F'.
H, Janjfem ,
alors très-avancé en âge.

De l'autre côté eft un autre ta-
bleau , peint par le même, qui re-
prcfente la Sainte Vierge , Saint
Thomas d'Aquin , & deux Séra-
phins : c'eft une des meilleures pie-
ces en grand de ce Peintre , la-
quelle mérite
l'attention des Cu-
rieux.

La Chapelle Royale,
et Espagnole.

Cette Chapelle eft une des plus
belles qu'on puiffe voir dans ce
Pays: l'Autel eft d'un grand goût,*
la niche de cette Chapelle lert de
fond à cet Autel , qui eft garni
dun rideau, au-deflus duquel eft
une Couronne foutenuë par deux
Séraphins 5 plus bas font quelques
Anges qui foutiennent le rideau,-

-ocr page 102-

AMATEUR ET CmiBVZ
Autel & le Tabernacle fontpo-
fés en avant de cet ouvrage , cc
qui forme un coup-d'oeil charmante
On voit dans cette même Cha-
pelle quatre tableaux peints par
J. van Orlay , qui reprcfentent
quelques lujets miraculeux de la
Sainte Vierge j au-deflus font les
quinze myftères du Rofaire en Ca-
mayeu, peints par le même
va^z Or-
Uy
: dans les deux niches au-def-
fus des portes, à côté de l'Autel,
font deux figures des Saints Pro-
phètes Ifaie & Jérémie, lefquelles
j'ai peint iiir bois.

Cette Chapelle a été reconllrui'
te à neuf aux frais du Roi d'Eipa-
gnej fous la direélion du fameux
Archite6le & Sculpteur njan Ner^
ven. Au - defîùs du Jubé , dans
une niche, eft la ftatuë de Saint.
Jacques
, par le même vm Ner*
'ven.

-ocr page 103-

ç6 L E P E I NTR E

La Chapelle de Saint Eloy,

Sur TAutel, qui eft de l'ordon^
nance du même van Nerve^ , eft
tin tableau peint par
J. 'van Orky,
qui repréfènte le Patron de cette
Chapelle & Confrérie : on le re-
garde comme une des bonnes pie-
ces de ce Peintre.

L'Eglise des Religieuses de

B e' t h a n i e.

Le tableau du maître-Autel eft
ie Lazare relTufcité : ce tableau efl:
très-bien peint & au naturel, par
G. de Crayer. Sm la gauche , on
voit une Ste. Famille, qu'on croit
être du même Peintre : un peu plus
avant, il y a un autre tableau qui
reprélènte Sainte Cécile , accompa-
gnée de plufieurs Anges qui tien-
nent des inftrumens de mufique :
ce tableau eft de la compofition
de
J, van Orlaj.

Dans

-ocr page 104-

AMATEUR ETCVRÏEirX. çf
Dans le petit Chœur, à gauche »
on voit k poutre où les Saintes
Hofties poignardées ont été te-
nues cachées pendant fix ans. Le
tableau d'Autel, peint par E/fe/z ^
repréfente une partie de cette hif-
toire.

L'Eglise de St. Nicolas.

Cette Eglife a été entièrement
ruinée par le bombardement,
par la chûte de k tour de ladite
Eglife, for laquelle il y avoit un
des beaux Carillons du pays; ce
dernier accident arriva en 1714
le Juillet, & caufa beaucoup
d'effroi aux Habitans de k Vil-
le , principalement à ceux qui
étoient voilins de cette Eîçlife. On
imputa ce malheur au Sr. de Bruyn >
pour lors Contrôleur de cette Vil-
le , qui avoit foutenu contre le fen-
timent de plufieurs habiles Archi-
tedes, que les fondemens
Se une
partie de la vieille tour, quoique

G

-ocr page 105-

5>8 LE PEINTRE
prefque confommés par h feu du
bombardement, étoient encore en
ctat de foutenir le poids de Tou-
vrage, qu'on étoit dans le deflein
dy conftruire.

. Avant le bombardement , oa
voyoit dans cette Eglife un luper-
be tableau , peint par
B^ubens , qui
repréfentoit Job fîir fon fumier.

Le tableau du maître-Autel ;
qu'on y voit à préfènt , repréfen-
te la Cananée, guérie par le Sau-
veur j il eft peint par
J. Helmont :
cet Autel, de l'ordonnance de 'uan
IS^erven , a été depuis peu rétabli
par
M. P. Donckers, & la fculp-
ture par iV,
'van JHons.

L'Autel de la Ste. Vierge eft de
l'ordonnance de N. Simons. On voit
deux tableaux dans cette Chapelle,
qui font pofés entre les colonnes ;
dont celui à gauche , peint par
Smejers , représente Jofué qui com-
bat les Amalécites, pendant qu'Aron
& Hur, fbutiennent les bras de
Moïfe j ôc l'autre, les trois fléaux

-ocr page 106-

AMATÊUR ET CURIEUX. 99
du Seigneur, defquels le Roi Da-
vid clioifît celui de la Pefle ; ce
dernier eft peint par K H.Janf-
fens.

Sur l'Autel des fidèles Trépaffés »
on voit Saint Pierre dans les fers,
délivré par l'Ange. Le tableau de
cet Autel eft peint par^. vm Or-
Uy,

A l'Autel de Saint Roch, celui
de ce Saint, qui guérit un peftife-
ré, eft de la main de V^^Jrî.Janf-
fens.

L'on voit tout proche deux
troncs pour les pauvres, attachés à
deux colonnes , au-defTus defquels
font deux tableaux , peints par njan
OrUy , dont l'un repréfente le
Purgatoire, & l'autre le bon Paf-
teur.

G ij

-ocr page 107-

300 L E PE l NT RE

L'E G LI s e D E s R, R. P. P,
R e' C O L L e T s.

Cette Eglife a fubit la même rai-
ne que celle de St. Nicolas, lors
du bombardement, mais elle a été
rebâtie en peu de tems. Les ta-
bleaux qu'on y voit entre les fenê-
tres, font peints par un de leurs
freres, nommé
Vmnemâeckers, na-
tif d'Anvers , on le nommoit auffi
communément frere
Kuhem, par-
ce qu'il dit un jour , que
'Kubem
l'avoit précédé , mais qu'il le M-
vroit de bien près. Il y avoit au-
trefois dans cette Eglife quelques
tableaux , peints par Frere
njan Or-
Uy
5 qui étoit Oncle de Jean Se de
Kichard vm Orlay. On eftime fort
dans cet Ordre les ouvrages de
cet habile Religieux.

-ocr page 108-

AMATEUR ET CURIEUX. loi

L'E g l i s e des R. R. P. P,
Augustin s.

Cette Eglifè , une des plus bel-
les de cette Ville, eft de l'ordon-
nance de
W^encejléis Coeberge. On
voit à côté de l'Autel, deux grands
tableaux
5 celui fur la droite, peint
par
E. ^uilin-y repréfente le Patron
de ces Révérends Peres , affis fous
un dais , & quelques Peres de cet
Ordre qui demandent au Saint
Evêque les réglés de leur inftitu-
tion.

Le tableau à gauche, peint par
njm der Jrîeyden , le V^ieux, repré-
fente le Sauveur, Saint Auguftin,
& plufieurs autres figures , qui pa-
roiffent implorer le fecours du
Tout-Puiffant j à côté de ce tableau
eft l'Elévation de Notre - Seigneur
fur la Croix : cette piece pafTe pour
une très-bonne copie d'après ojari-
Dyck : vis-à-vis , on voit la defcen-
te de la Croix ; c'eft de même une
copie d'après Knhm.

-ocr page 109-

102 L^E PEINTRE

Devant la tribune de Ste. Apo-
line, eft un très-beau tableau de
cette Sainte , peinte par
G. de
Crayer.

De l'autre côté eft Saint Nicolas
de Tollentin, qui fait des aumô-
nes aux Pauvres
î ce tableau eft
peint par
de Clerck , le T^ieux.

Dans les deux petites nefs, on
voit entre les fenêtres quelques
Saints de leur Ordre , peints par vm
der Heyden : au-deffiis des Con-
feffionaux, fur la droite , il y a trois
tableaux, peints par 'ua/^ lîeil, qui
repréfentent le martyre de Sainte
Apoline.

Sur la gauche, on voit trois autres
tableaux , dont le premier & lè troi-
fîème font des copies d'après ^or^
daens î celui du milieu eft peint par
J. Artois-, la Chaire de vérité eft
faite par
de Vos , le Vieux , fameux
Sculpteur. Affez près de Ce Cou-
vent, èft la Chapelle de Saint Jean
de Latran.

1

J

toi

-ocr page 110-

AMATEUR ET CURIEUX, 105

La Chapelle de St. Jeaîî
deLatran.

. On voit fur l'Autel un beau ta*
bleau , peint par
Gaffard de Crayer^
qui repréfente le martyre de Saint
Jean-Baptifte : ce tableau fe ferme
avec deux battans , fur lefquels on
voit des portraits , que l'on croit
être la repréièntation de ceux qui
ont fait peindre cette piece.

L'E glise du grand

b e g g u i n a g e.

Cette Eglife peut - être mife au
rang des plus grandes Se des plus
belles de cette Ville
î elle a été bâ-
tie fous la direélion de
W^encejlas
Coeherge
, Architede de renom.
Le tableau qui étoit autrefois fur le
maître-Autel, eft à préfent placé
au - deflus du grand portail : c'eft
une très-bonne piece, peint par K
'va}} Loû î elle repréfente rAffomp--

-ocr page 111-

I04 L E P E I NT RE
tion de la Ste. Vierge. Depuis peu
l'on a conftrait un autre^ Autel de
lordonnance de
ISIicoUsvanMons,
c'ell: au dire des connoiffeurs, un
morceau achevé, dont la fculpture
eft très-belle. Dans le Chœur,
ftir la gauche, on voit fur TAutel
un tableau, peint par le même van
'Loo, qui repréfente une Sainte Fa-
mille , compofée de la Ste. Vier-
ge , de TEnfant Jefus , de plu-
lîeurs autres Saints.

Dans une Chapelle , fur la droi-
te, efl: un beau tableau au-devant
de l'Autel, qui repréfente un Cru-
cifix, la Sainte Vierge, Saint Jean,
& la Madeleine au bas : ce ta-
bleau eft de
Gaffard de Cray er.

A côté de l'Autel, fous la croi-
fée , à droite , elt un très-beau Pay-
fage , peint par^.
Artois. A l'op-
pofite, on en voit un autre, par
le même.

Sur la droite dans la croix de
cette Eglife , on voit un Chrift
mort, peint par le même. Il eft à

-ocr page 112-

AMA TEUR ET CURIEUX. 105:
croire que ce tableau a fervi pour
l'Autel qui eft tout proche , fur
lequel eft une petite image. Il pa-
roît même que cette méthode fc
pratique dans quelques Eglifes , où
l'on lubftituë , par un goût baroque
6c mal entendu, plufieurs quolifi-
chets entafTés les uns fur les autres,
aux plus excellens morceaux de
nos grands Maîtres, qui ont pris
tant de ioins à nous repréfènter
avec force élégance les plus
Saints Myftères de notre Religion.
Près de ce tableau de la mort de
Notre - Seigneur , eft celui de fon
Enfeveliflement : ce dernier eft peint ^
par
OBavio vm Veen. Dans la pe-
tite nef, à droite, eft l'Adoration
des trois Mages : ouvrage de T^
•vm 1^00.

Au-deflùs de la porte de la Sa-
criftie eft un Chrift mort, ap-
puyé fur les génoux de la Sainte
Vierge : ce tableau eft peint par
G. de Crayer.

Vis-à-vis s on voit la Reiùrrec-

-ocr page 113-

■ïo6 L E PEINTRE
tion de Notre-Seigneur, peinte pac
M. de Haefe ; 6c dans k nef, à
-gauche. Saint Pierre dans les fers,
par T.
va^ L>oo.

L'Eglise Paroissiale,
dite de Finisterre.

Cette Eglife n'efi: bâtie que de-
puis 40 ans; elle eft très-belle
richement ornée. Le maître-Autel
a été conftruit en forme de tom-
beau , fîir lequel deux Chérubins
paroiflènt foutenir le Tabernacle ;
la niche de l'Eglife forme le refte
de cet Autel, au milieu duquel
eft placée une image de la Sainte
Vierge , entourée d'une gloire &
de plufieurs Anges.

Au bout des deux petites nefs,
font deux Autels , fiir l'un defquels,
à droite , eft le tableau de Saint
Jofeph & de l'Enfant Jefus au-
deffiis la Sainte Trinité , & un Sé-
raphin , qui tient quelques fymbo-
les de la Paflloa de Notre-Seigneur:

-ocr page 114-

AMATEUR ET CURIEUX. 107
c'eft une très-bonne piece, peinte
par
'van Triock, Sur l'autre Autel,
à gauche, eft la repréfentation de
Sainte Anne ; morceau de Sculp-
ture très-bien exécuté.

Les deux balTes nefs font boi-
fées j. l'on a pofé dans cette boife-
rie plufieurs tableaux, qui repré-
fentent la Yie de Notre - Seigneur
& de la Sainte Vierge ; ils ont été
peints par
'va^t T>ifi, Don Anîho-
nio
, &c. Les Médailles qu'on voit
au-defîus des formes du Chœur,
font peintes par
J. van der Hey-
den.

La chaire de Vérité, nouvelle-
ment conftruite & placée dans cet-
te Eglife , eft un morceau digne de
l'attention des Curieux.

L'E G L I s E DES R. R. p. p.

Minimes.

Cette Eglife eft bâtie depuis cin-
quante ans ou environ. Le Duc Ema-
nuel de Baviere, Gouverneur des

-ocr page 115-

lo8 L E T E I N T R E

Pays - Bas , y a pofé la première
pierre
î elle eft d'une belle & foli-
de arehiteélure à la Romaine. Le
maître - Autel, qui eft du dernier
goût , a été exécuté par un Frere
-des grands Carmes ; quelques uns le
croyent du P. de
Aî. Doncker. Le
tableau qui repréfente le martyre
de Saint Etienne , eft peint par
Jean 'vm OrUy, ainfi que celui de
la Confrérie de TAnge Gardien
î
celui de Saint François de Paule,
cft peint par
Jean hivem. Les con-
feffionaux font de
Plumier.

Dans la Chapelle de Saint Fran-
çois de Sales : ce Saint eft peint
fur l'Autel dans un tableau ^^LtEraf-
me ^ilin. Dans leur Chapitre , on
voit fur l'Autel, la copie de ce fa-
meux Crucifix , peint par
Giotto,
qui coûta la vie à fon modele,
lorfque ce Teintre peignit ce ta-
bleau. Vis-à-vis de cet Autel, on
voit un Ange Gardien, qui conduit
le jeune Comte d'Enguien & fà
fœur par la main. Il eft peint par
G^ de Cr^yer,

-ocr page 116-

AMA TE UR ETCmiE UX. lo^

L'E glise des Alexiens»
autrement dits Cellebroeders,

Dans leur Chapelle fur l'Autel,
«ft un très-beau tableau, peint pac
le même
de Crayer. Ces freres ont
depuis peu orné leur Refeftoire
avec de très-beaux tableaux, peints
par
Jl<f, de Haefe.

^'Eglise des R. R. P. P. Cor-
deliers
, dits Bogards.

Cette Eglifè n'eft pas des plus
grandes, mais elle eft très-propre-
ment ornée j tant en tableaux qu'en
boifèrie , en dorure & fculpture.

Entre les croifées des petites
nefs 5 ainfi qu'au - defïus des arca-
des de la grande , font placés plu-
fieurs bons tableaux de
Afaximîl. de
Haefe,
lefqucls rcpréfèntent diffé-
rens fujets du nouveau Teftament.

A côté du maître-Autel, il y a
quatre grands tableaux, dont deux

-ocr page 117-

110 L Ê P E I N T R E
font peints par Emamel de Pery î
le premier eft la Naiffance de laSte.
Vierge j &C le fécond, fon Affomp-
tion î les deux autres, peints par
Eykens, le jeune ^ repréfëntent, lun
le Mariage de la Ste. Vierge , ^
l'autre fa Préfentation au Temple.
Plus bas , dans la boiferie , font
quatre tableaux , dont deux de
moyenne grandeur & deux plus
petits, l'un eft la derniere Cène de
Notre-Seigneur, & l'autre la ren-
contre de Melcliifédec & d'Abra-
ham î les deux plus petits repréfen-
tent l'un le Seigneur avec îès Di-
iciples à Emaùs, ou Fraélio Panis ;
& l'autre David & Abiathar. Ces
quatres pieces font peintes par
Grange.

L'Eglise de Messieurs de
l'Ordre de St. Bruno,

Sur le maître-Autel on voit un
très-beau tableau , peint par
Kji~
hens j qui repréfente rAffomptioiv

-ocr page 118-

AMATEUR ET CURIEUX, mî
de la Sainte Vierge. Il en paroît
une eftampe , gravée par W^ith^
doeckx.

Sur l'un des petits Autels eft un
tableau de
Gafpard de Crayer, dans
le goût de
-vm Dyck j où Ton voit
le Chrift mort iur les génoux de
Dieu le Pere , le Saint Efprit au~
defllis î bc fur la droite un Sé-
raphin qui foutient la main du Sau-
veur.

De l'autre côté , elt une Sain-!
te Famille , que l'on croit être pein-
te par
Jean vm Eyck.

Sur les deux Autels > qui font
dans l'Eglife en avant, il y a deux
tableaux , peints par
Sebafitum
Franckx -,
dont l'un repréfente la
Fuite en Egypte , 6c l'autre la
Transfiguration de Notre-Seigneur.

L'E GLisE de Ste. Marie
Madeleine.

Avant le bombardement de
Bruxelles, il y avoitfur la tour de

-ocr page 119-

ÏI2 LE P E I isr T R E
cette l'Eglife un. petit Carillon fofC
eftimé, parcequ'il étoit de l'ouvra-
ge
d'Emoll î mais un certain jour,
qui étoit la fête de Saint Aubert,
Patron des Boulangers , il arri-
va que le Carilloneur ayant joué
un air, fiir lequel on avoit chan-
fonné un des Doyens de ce mctier ;
le Carilloneur fat totalement diP
& depuis cette époque ce
Carillon eft tombé en dis-

le maître-Autel de ladite
eft un tableau, peint par
K H. Janffens, qui repréfente la
Madeleine aux pieds du Sauveur.
Le même
Jmjfens a peint fur l'Au-
tel des Boulangers , leur Patron qui
diftribue du pain aux Pauvres.

Du côté droit de cet Autel, on
voit encore du même Peintre , le
martyre de Sainte Agathe j tableau
qui eft du goût de bien des Ama-
teurs.

Dans la nef, à droite, fùr l'Au-
tel de Sainte Barbe, eft le tableau

de

gracie
même
crédit.

Sur
Eglife

-ocr page 120-

AMATEUR ET CURIEUX. lïg
de fon martyre, peint par Jacques
njân Helmonî.
Nons en avons 1 ef-
tampe , gravée à l'eau forte par
imn Dyck.

Sur la gauche de cet Autel eft
la Madeleine , copiée d'après le
Coregio. Cette copie a été donnée
en préfent à cette Eglife par le Sr»
Lemmens , de fon vivant grand
Amateur de tableaux : l'original de
ce tableau a été
vendu en 1743 >
au Ciiré de l'Hôpital , qui par
fon teftament en a fait don au
même Hôpital > avec quatre autres
tableaux , repréfentans les quatre
Do(5leurs de l'Eglife. Ils fe voyent
encore aujourd'hui dans cet Hô-
pital.

Cette Eglife de la Madeleine eft
à préfent très-ornée & très-riche-
ment parée , tant par les libérali-
tés d'une Demoifelîe du voifmage,
que par les foins & le grand zèle
du Reclcur qui la dirige.

É

H

-ocr page 121-

ÏI4 L B ? E I N T R E

L'Eglise des Brigittines.

On voit fur l'Autel mi très-beau
tableau, peint par Ï^.M.JanJfem^
qui repréfente le Chrift mort fur
les génoUx de la Vierge : la Patro-
ne de ces Religieufes eft repréfen-
tée à genou , au côté droit du
Chrift 5 dont elle paroît embraflèr
la main droite. Les Amateurs di-
fent que c'eft la meilleure piece de
ce Peintre
î pour moi , je préfère
celle des Dominicains.

La Chapelle de Saint
Corneille.

Le tableau qui eft au-devant de
l'Autel dans cette Chapelle , repré-
fente le martyre de ce Saint : il
eft peint par
J. van Orlay^

-ocr page 122-

AMATEUR ET CURIEUX. 11 j

L'Eglise des Religieuses de
J e'r i c h o.

Dans cette Eglifè il n'y a rien de
particulier à voir, finon à Tentrée
une ftatuë, faite par le fameux:
Sculpteur
de Vos j laquelle repré-
fente la Vierge afîife tenant TEn-
fant Jefus. Les ConnoilTears trou-
vent que cette piece eft faire avec
beaucoup d'entendement & d'art.

La Chapelle de Sainte
Anne.

Dans une niche , au - deffiis de
la porte d'entrée , eft un grouppe
de la Patrone de cette Chapelle >
& de la Sainte Vierge , fait par
le fameux
H. §}uenoy. Suivant le
fentiment des Connoiflèurs, c'eft
une des plus belles ftatuës qu'on
puiffè voir dans les Pays-Bas. Le
tableau, qui a fervi autrefois fur
l'Autel,
eft à gauche dans la Cha-

H ij

-ocr page 123-

ti6 LE PEINTRE
pelle : il eft peint par Neefs. A cô-
té de cette piece, on voit un Pur-
gatoire , peint par y.
va^ der îiey-
den.
Les deux tableaux des petits
Autels font peints par le même
der Heyden. Sous les croifées , on
voit l'Adoration des Rois & la Pu-
rification de la Sainte
Vierge , par
moi
G. P. Menfâert. Plus avant un
beau Payfage , peint çar J^omper^,
l£>C garni de figures par
de Clerck.

La Chapelle du Comte
de Salazar.

Cette Chapelle a été fort embel-
lie Fan 1718. Dans la boifèrie qui
regne autour , on voit fix petits
tableaux, dont les trois premiers,
à droite , onc été peints par
V^ H.
^anjfem: ils repréfentent une par-
tie de l'hiftoire des Hofties poignar-
dées par les Juifs ; & les trois au-
tres , à gauche , la iiiite de la mê-
me hiftoire. Les figures du premier
•de ces trois derniers tabjeaux, font

-ocr page 124-

AMATEUR ET CURIEUX. UT

peintes par f. Eykens, le fond
par L.
I^amberti : les deux autres
fuivans, font en entier A
qJ. 'vm
Helmont.

Au-deiïus de cette boiferie , il y
a encore trois autres tableaux de
la même hiftoire , mais beaucoup
plus grands que ceux dont nous
venons de parler : ceux - ci font
peints par
Callem. Le tableau d'Au-
tel qui repréfente la Sainte Trinité ,
cft peint par G. de Crayer,

L'E GLISE DU PETIT
B E G G U I N A G E.

Le tableau du maître - Autcî ;
dont le fiijet eft la Naiflance du
Sauveur. Eft à ce que l'on croit ^
de
van Oort.

Cette Eglifè eft paffablement
garnie de tableaux de
Jean vm
der îieyde^.

-ocr page 125-

ïiS LE PEINTRE

L'Eglise de Monte-Serrato,

Le Chrift mort, de J, van Or^
lay ,
fert de tableau an maître-Au-
tel C'eft îe feul qu'il y ait à re-^
marquer dans cette Eglife.

L'E G LI s .e des Religieuses.
Capucines.

La Naiflànce de Notre-Scigneur
repréfentée fur leur Autel, efl de
Alarco-Antonio Gârlhâldo. Il n'y z
que ce tableau à voir.

L'EGLisE desBenedictines
Angloises.

Sur le grand Autel eft le tableau
de l'Affomption de la Sainte Vier-
ge, peint par
Geeraers, d'Anvers,

-ocr page 126-

AMATEUR ET CURIEUX. 119

L'Eglise des Religieuses
de l'Ordre de St. Augustin ,
dite Berlâimont.

On voit à droite en entrant dans
cette Eglife, la Sainte Vierge &
Sainte Anne , toutes deux peintes
par
T. Komhuts. Plus loin un An-
ge Gardien , par
Janjfens. Quane
au tableau d'Autel, peint par
der Meyden , il repréfente l'Epipha-
nie 5 c'eft un affez beau morceau.

L'Eglise des Religieuses
de Sainte Gertrude.

Le tableau du maître-Autel eft
l'Affomption de la Sainte Vierge,
peint par
V. Janjfens,

L'Eglise des Religieuses
Urselines.

Le tableau de l'Autel, qui eft de
Coetfiers, repréfente le msirtyre de
leur Patrone,

-ocr page 127-

120 LE PEINTRE

L'Eglise des Religieuses
de Sainte Elisabeth,
autrement S i o n.

Le tableau d'Autel repréfente le
mariage de la Vierge avec Saint
Jofeph- On le voit aulTi en eftampe^
gravée par J,
A. Bolfwert. Quelques-
uns penfent que ce tableau n'elî
pas de la main de Kuhm. Je le crois
auffî. A gauche, contre le mur »
il y a une Epitaphe, au haut de
laquelle le tableau rcprefente Saine
Andrc crucifié. Il eft du defreiii
de
de Clerck. Dans une Chapel-
le, on voit fiir l'Autel une Sainte
Famille , peinte par
G. de Crayer ^
c eft une très-belle piece.

M

-ocr page 128-

AMA TEUR ET CUR lEVX. 121

DefcrlpioB de tHkel-de-Ville , d"
des tableaux què ton y conferve
actuellement ; des Jkperbes Cham-
bres des Etats du Brabant ; des
magnifiques tapîjferies dont elles
font décorées , des autres rare-
tés que Pon feut y voir.

Avant d'entrer dans rintérienr de
cc vafte Edifice , l'on doit remar^
quer piufieurs belles & grandes
Maifons, qui forment la place de-
vant laquelle il a été élevé, prin-
cipalement celle du Roi, commu-
nément appellée Broodthuys, com-
me auffi les riches façades ou fron-
tiipices de piufieurs Bâtimens , ap-
partenans à difFérens corps de Mé-
tiers de la Ville : la fculpture & la
dorure dont ils font ornés , tant
aux dehors qu'en dedans , méri-
tent l'attention des Curieux. L'on
y voit des Chambres d'Affemblées
d'une grandeur admirable pour la
magnificence defquelles l
'on n'a

-ocr page 129-

Î52 LE PEINTRE
rien épargné Meffieurs les Doyens
ie font un vrai plaifir de les faire
voir aux Etrangers, qui tous n'en
fortent que comblés de leurs poli-
teflès & de leur attention toute
particulière à ne rien laifiuèr échap-
per de tout ce qui mérite d etre
remarqué. Plufieurs de ces belles
Chambres font garnies d'excellens
tableaux, defqucls cependant je ne
ferai mention, qu'après avoir parlé
de ceux que j'ai vu dans THotel-
de Ville, qui ne font malheureu-
fement que les trifces relies des an-
ciens tableaux , que l'on y admi-
roit avant les révolutions & les
guerres des Pays-Bas, & furtout
avant le bombardement de cette
Ville, arrivé en 1695 / lequel a
détruit par les fiâmes, ce que l'on
y confervoit de nos anciens & fa-
meux Maîtres. On regrette encore
aujourd'hui une piece de
van Dyck ,
laquelle repréfentoit le Magiftrat
afTemblé, piece d'autant plus admi-
rable , qu'oa la confidcroit non-

-ocr page 130-

ama teur et curieux. i ig
îèulement comme un chef-d'œuvre ,
mais eflcore comme ie feul. de tous
les plus excellens tableaux qu'on
eut vu jufqu'alors : on prétend que
refquifTe de cette piece étqit de la
façon de
J.. Sdl&rt, Peintre très-
renommé pour la compofition, &
que
njm I)yck fit préfent d'un fou-
verain d'or à l'éieve de
SdUrt,
lorfqu'il lui porta cette efquifTc.
La Chambre du Collège eft garnie
des quelques figures ou emblemes
fur la Juftice. Dans la Tréforerie,
on voit la Reine , peinte à Che-
val , auffi. grande que nature , de
la compofition de
J. Mile ; ainfî
que le portrait de Philippe II, pat
J. njm Orlay.

L'Appartement des Etats eft com-
pofé de quatre pieces, non com-
pris la Salle des Huifficrs, le Gref-
fe & quelqu'autres médiocres en
réierve.

La première & la principale pie-
ce , qu'on nomme vulgairement la
Chambre des Etats, & qui eft cel-

i-i

9i<

-ocr page 131-

124 le peintre

le où s'affemblent Mefficurs des
Etats , eft de la derniere magnifi-
cence. Le Dais du Souverain , qui
cfl: d'un velour cramoifi , garai de
galons & franges d'or, efl fuperbe.
Le Plafond, peint par
Victor Ho~
norius J-anJfe
/is , repréfènte l'Aflèm-
blée des Dieux : cette piece eft d'u-
ne grande & très-riche ordonnan-
ce , très-bien colorée, deffinée &
d'un entendement parfait. Bien
qu'il fe foit furpaffé lui-même dans
cet ouvrage , il ne mérite pas moins
par ce feul trait , d'être mis au
rang de nos grands Maîtres j aufli
les fruits de fon application à ce
travail , ont été fix mille florins
de récompenfe , & en outre la
proteélion de nos Seigneurs des
Etats.

La gorge de ce Plafond eft or-
née de fculpture de dorure en
plein : entre les fenêtres de cette
Chambre, on voit les trois Chef-
Villes du Brabant : la muraille qui
eft à
l'oppofite des croifées , eft

-ocr page 132-

AMATEUR ET CURIEUX. ît^

.garnie de très-belles & riches ta-
pifleries. A chaque côté du Dais ,
on voit deux grands Miroirs qui
montent depuis le lambris jufqu'à
la corniche, ce qui fait un effet
admirable. Devant ces belles gla-
ces font pofées deux tables, com-
pofées de Gips , qui imitent par-
faitement bien le marbre i elles
font de l'invention de deux Ita-
liens , qui ont eu Tadreiïè d'y gra-
ver parfaitement defiiis les Provin-
ces-Unies.

Les trois pieces de tapifferie de
cette Sale font de toute beauté j
elles repréfèntent l'inauguration de
Charles-Quint ; l'abdication de fes
Etats , la joyeufe entrée de Phi-
lippe le Bon 5 elles ont été faites"
6c exécutées fur les delTeins du
même
"^mjfens , par L. Leyr/iers ,
fameux TapifTier de cette Ville :
l'harmonie & la douceur qu'on
y
remarque dans les couleurs font fi
admirables , qu'on les confiderc
comme un chef-d'œuvre de ce Miu-

-ocr page 133-

116 L E PEINTRE
tre : la Cheminée eft revêtue d'un
marbre blanc. Le tableau , qui
eft au devant, repréfente la Pucel-
le de Brabant, qui reconnoit Char-
les VI pour fon Souverain Seigneur
& Maître : le portrait de llmpératri-
ce-Reine qui eft placé fous le Dais,
( imprime du relpeét, j il eft peint
par le Sr. Doffj.

Dans la fécondé Sale, nommée
la Chambre des Conférences , on
y voit quatre grandes pieces de ta-
pifîèrie , qui font des fiijets pris de
rhiftoire de Clovis , exécutés fîir
les defîeins de
Charles le Brun : le
tableau de Cheminée , repréfente
Maximilien d'Autriche & Marie de
Bourgogne , Héritiere des dix-fept
Provinces.

Les tapifTeries de la troifième Sa-
le , repréfentent la fiiite de la mê-
me hiftoire ; elles confiftenr en deux
pieces.

Dans la quatrième, on voit un
Plafond repréfentant les trois Mem-
bres d@s Etats, très - bien exécuté

-ocr page 134-

AMATEUR ET CURIEUX. 127
par le même Janjfens : le tableau
de Cheminée repréfente Godefroy
III, ou Godefroy le Barbu dans
fon berceau d'argent, fufpendu à
un arbre au milieu de fon Armée.
L'on dit que fes Soldats animés à
la vue d'un tel fpeélacle, après trois
jours de combat, remportèrent une
Vidtoire complété fur les Princes
de Grimberghe fur les Seigneurs
de Malines.

Dans la Galerie qui conduit à
ces Sales , on y voit fix portraits des
Ducs de Brabant -, favoir, celui de
Philippe le Beau ; celui de Charles
V 5 de Philippe , fon Fils 3 de l'Ar-
chiduc Albert & l'Infante Ifabelle j
de Philippe IV, & de Charles II;
tous peints par C.
Grange,

Dans la Chambre du Greffe ,
dont l'entrée n'eft permife qu'à
Gens très-connus ou de la premiè-
re diftinélion , on y voit un admi-
rable Plafond emblématique, peint
par y.
van Orlay , qui rcpréfèntc
les quatre Chef-Villes du Bra-

-ocr page 135-

Î28 le peintre
bant ou de petits Amours, avec des'
cordons entrelaïïes , fou tiennent
les armoiries des trois premières
Villes , paroiflent écarter la qua-
trième.

Les glaces , la fculpture & la
dorure n'ont point été épargnées
dans cet Appartement, tout y a
été employé avec art & jugement,
auffi ne peut-on rien voir de plus
grand, de plus noble & de plus
magnifique dans tout les Pays-Bas.

Comme éleve du célébré Janf-
fens
, dont je viens de citer les ou-
vrages , & notamment le plafond
qu'il a peint dans la Chambre des
Etats î je me fais un , vrai plaifir ,
autant par devoir que par recon-
noiffancc du foin qu'il a pris de moi,
de faire connoître à fond au Lec-
teur ce digne Peintre,
qui a ra-
mafle dans tous fes difFérens ta-
bleaux , ce qui peut rendre un
homme recommandable dans les
applications diverfes de fon travail j
.tel a été ce génie fuperieur qu'on

pour-

-ocr page 136-

AMATEUR ET CURIEUX, iig
potirroit nommer un fécond de
Crayer^ par . la force &[ le charme
de fcs ouvrages , qui font tant
d'honneur aujourd'hui à ceux de
fa patrie qui fuivent le même
art.

Vi^or Monorius Jmjfem , naquit
à Bruxelles l'an fon pere »

Tailleur de profeffion, ayant re-
marque en lui de l'inclination pour
le deilèin , le mit chez
Volders,
éleve de Crayer , Peintre renom-
mé pour l'hiftoire & le portrait i
pendant le cours de huit ans qu'il
refta fous la direction de ce Maî-
tre, il donna des marques par fes
applications au travail > que foii
génie ne fe bornoit pas à copier.
Il compofoit & travailloit palfa-
blement bien. Quand l'envie de
voyager lui prit: il fe préfènta à
Son Alteffe le Duc d'Holftein, qui
ctoitpour lors fur fon départ pour
l'Allemagne , & comme il étoit
d'une figure prévenante, bon Def-
fmateur & Peintre , ce Seigneur le

î

-ocr page 137-

îgo LE PEINTRE
yetint en cette qualité , avec des ap-
pointemens de quatre cens florins
par an : durant les quatres années
qu'il a refcé au fervice de ce Sei-
gneur, il a travaillé avec affidui-
té j à tout ce qui pouvoit le per-
fe6lionner dans fon art. Il fréquen-
toit les Académies & les Maîtres
de réputation, qui charmés de la
propreté de fes deiïëins , le conful-
toient affez fouvent : mais comme
il ne trouvoit dans leurs ouvra-
ges qu'une légère teinture de ce
qu'il cherchoit, & que, comme je
viens de le dire , ion ambition le
portoit à la perfedion, il foîlicita
fon congé 5 le Duc généreux &
bienfaifant, le lui accorda, & Thon-
nora de Lettres de recommanda-
tion pour Rome , en le gratifiant
d'une fomme confidérable pour les
frais de fon Voyage. Arrivé dans
cette Capitale , il s'appliqua à étu-
dier les ouvrages des grands Maî-
tres & à fuivre exaélement leurs
traces. Les R. R. Peres de la So-

É

-ocr page 138-

amatevr et cùriêuz 131
cîété de Jefiis , le chargèrent de
l'exécution d'une pièce d'Autel ,
deftinée pour la fuperbe Eglife
qu'ils ont à Naples j plufieurs Maî-
tres chefcherent à captiver fon ami-
tié, entr'autres le nommé Temfèf"
te, fameux Peintre en payfage &
pour les animaux , avec lequel il à
travaillé plufieurs années, A la fin ^
las de ce genre de vie , ou plutôt
ennuyé de ne point revoir fà pa-
trie j il partit de Rome , traverfa
la France & revint à Bruxelles,
où il débuta avec honneur dans
cette Ville. Quand il ne nous ref-
teroit' de fes ouvrages , que le Pla^
fond ci-devant cité , il mérite rang
parmi nos plus célébrés Maîtres >
comme je l'ai dit ci-deflus. Sa répu-
tation étoit florilTante , lorfqu'il
époufa la fille de
M, Porter, pour
lors Receveur de cette Ville. Cet-
te époufe extrêmement belle, avoit
l'humeur douce, mais d'ailleurs elle
étoit peu ménagere , enforte que
fon efprit joueux & délicat appor-

-ocr page 139-

ï3a LE PEINTRE
terent quelques petites altérations
dans leurs affaires dorneJftiques j après
la mort de cette femme , il fit
un fécond voyage à Vienne , où
fon talent fupérieur ayant été con-
nu , il fut employé à la Cour ; il
eut l'honneur d'enfèigner le defîèin
à l'Impératrice-Douariere Eleonore.
Cette Princefîè à fon départ le com-
bla de préfens , l'honora du titre de
Gentilhomme, Se lui donna des Let-
tres de recommandation pour l'An-
gleterre , mais qui ne produifirent
point l'effet qu'il en ^ttendoit. Après
deux ans de féjour en cette Vil-
le , il revint encore à Bruxelles où
il continuai de travailler heureufe?
ment , & à la fatisfaélion d'un
chacun jufqu'à la fin de fa carrière
arrivée l'an 1736 , âgé pour lor§
de foixante-douze ans. Il fut enterré
fomptueufement dans l'Eglife ParoilP-
fîale de St. Gery, après avoir été
de fon vivant comblé d'honneurs,
& après fa mort regrette des Sa-
vans 3 pleuré de
fes amis de fes

-ocr page 140-

AMATEUR ET CURIEUX, igg
proches , pour fes rares qualités :
fa fille aînée, mariée à M. Duclia-
tel 5 mourut peu de tems après
fon pere j Jean Janffens fils aîné a
fubi le même fort, il faifoit aflèz
bien ic portrait j fon frere nommé
Laurent, travailloit aux payfages ôc
aux ruines Romaines, l'un & l'autre
ont donnés des morceaux qui méri-
tent l'eftime des ConnoiiTeurs. Le
plus jeune des trois j après avoir
luté contre plufieurs arts , prit en-
fin le parti des armes, & entra
comme Volontaire dans les Gardes
Walonnes : il vint dire à fon pere,
en lui demandant fa bénédiâion,
qu'il étoit engagé ; le pcre la lui
donna en proférant ces paroles,
mon fils 5 fatisfaite 'votre obligation ,
feut-ètre cfue dans cet état vous de-
%/iendrez, plus Jage ^ plus modéré ^
allez, en paix.

Je reviens aux maifons fur la
place de l'Hôtel-de-Ville, qui ap-
partiennent à differens corps de
métiers, pour en faire remarqué'

-ocr page 141-

J34 > ^ ^ PEINTRE
au Leéleuf, autant qu'il eft en mon
pouvoir , toutes les beautés du
dehors, tcait ce qu elles ont en
dedans de Curieux en tableaux des
plus grands Maîtres > tant anciens
que modernes.

dite le

des Aîerciers

La façade 'de cette maifon efî
d'une très-belle architecture , les
figures qui font au-devant font
de la main du célébré
de Vos ^
Sculpteur de cette Ville. Sous les
fenêtres du premier étage , on
voit des bas-reliefs, bien exécutés ,
dans lefquels font repréfentés des
enfans qui s'occupent à diverfes
chofes. Dans la chambre où les
Doyens & Anciens de ce corps s'a A
femblent, on y voit fept tableaux
de l'hiftoire de Jofeph , peints par
Jmjfens, par Vân OrUy & par Hel~
mont.
On reconnoît en confidcrant
ces pieces ? que ces trois Maîtres

-ocr page 142-

AMATEUR ET CUtlEJJX. 135^
ont travaillés a l'envi l'un de l'au-
tre , la piece de cheminée , de
vm
Orky
, eft Saint Nicolas, Patron de
ceux de ce métier.

. Alatfon- des Bateliers^ autrement
dite le, Cornet.

Sa façade eft auffi très-belle,
mais d'un goût fingulier, elle re-
prcfente la poupe d'un Vaiïîeau ,
artiftement exécutée , mais fa fculp-
ture eft de beaucoup inférieure à
celle précédente : on voit dans la
chambre de ce métier fix tableaux j
favoir, trois dont les fujets font
tirés du vieux Teftament, qui font,
la conftruclion de l'Arche par Noe ;
la retraite des Animaux dans l'Ar-
che , & les Holocauftes de ce St.
Patriarche.

Les trois autres font pris du nou-
veau Teftament, l'un rcpréfentele
Seigneur qui fe fépare du tumul-
te & qui s'embarque ; l'autre > le
Seigneur qui étant fur la barque

-ocr page 143-

1^6 L E P E I NT R E
difTipe h tempête -, & le troifièmc
le naufrage de Saint Paul. Ils mé'
ritent tous les fix quelqu'attention
des Amateurs. La piece qui eft au-
devant de la cheminée, repréfen-
te quelques Doyens ou Anciens de
ce métier.

La Jldaifon du Serment de Sdnt
autrement dite
la Trouve,

La façade de cette maifon n'eft
pas moins belle que la précéden-
te : tous les ornemens qui la dé-
corent font faits par
de Vos , le
'vieux.
Elle eft ornée en dehors de
quatre figures entre les fenêtres
du deuxième étage, & de quatre
autres figures eu termes, au
troi-
fième. La Louve qui nourrit Re-
mus & Romulus, efl faite par le
même
de Vos elle eft digne de
l'attention des Curieux.

Cette maifon fut confommée en
partie par le feu, peu de tems av^t

-ocr page 144-

AMATEUR ET curieux. 137
le bombardement de cette Ville ;
mais à peine fut elle rebâtie qti el-
le fut entièrement confomméepar
les flammes de ce bombardement :
en mémoire de ce malheur, ils
ont fait pofer fur le frontifpice de
la façade, l'infcription fuivante:

StUpes
qUoD
tertio
CInIs
gLorlosIor
eXUrgo
phsenIX sUM.

I^a, jMaifon des Hdenuifiers, é'
Cuvilliers , autrement dite
le Sac,

La chambre de ce métier elt pro-
prement boifée , elle contient fept
tableaux par
E. Pery, dont les fu~
jets ont été tirés de l'hiftoire de
Tobie. La piece de cheminée eft
l'Apparitiou du Sauveur à Sgjnt

-ocr page 145-

LE PEINT RE

Thomas : elle mérite l'attention des
Amateurs,

La Jlddfon du corps des Greffiers ,
autrement dite la brouette.

L'iiiftoire de Jacob , en fix ta-
bleaux , peints par
van Orlay &
njan Helmont ^
ornent cette cham-
bre. Le bas de la cheminée eil ci-
felé en cuivre rouge j doré par le
fameux Orfèvre & Cifeleur
la
Nûût: cette chambre , quoique pe-
tite , eft une des plus jolie des
corps de métiers.

La Aîaifon des Botdangers\ autre-
ment dite leK-oi d ÉJfagne.

Cette maifon eft une des plus
belles de cette place , tant pour
i'architeélure que pour l'ornement
quon>lui a donné de fix figures
taillées en pierre, par le fameux
Cefyns , Sculpteur de Bruxelles :
le bâtiment fe
termine en dôme.

-ocr page 146-

AMA TEUR ET CURIEUX. 13 9
. Dans la chambre de ce métier, on
voit fèpt tableaux repréfeatans la
vigne de Nabothj Notre-Seîgneur
à Emaùs ; le Roi Roboam qui
caflè la loi, là met en pieces, 5c
la condamne au feu; le Roi Mel-
chifedec qui vient à la rencontre
d'Abraham
î le rapt des Filles de
Siton par les Benjamites
5 le Sei-
gneur nourrifîànt cinq mille hom-
mes avec cinq pains & deux poif^
fons î & le dernier, Ruth & Boax :
tous exécutés & peints par
V. H,
JanJfenj, avec une précifion admi-
rable.

I^a Jiddfon du KoL

Cette maifon outre difFérens
tribunaux, renferme trois Serments ;
favoir, le grand Serment, celui des
Efcrimeurs , & le Serment des Ca-
lovriens,

La fale ou chambre du grand
Serment eft au premier étage, el-
le eft ornée de fept grands tableaux.

-ocr page 147-

140 LE PEINTRE
très-bien excciités par Janffens $C
par vaft Orlay : le premier peint
par
Janjfem , repréfente Saul, que
l'on propofe pour Roi d'îfraël ; le
deuxième , par
vm OrUy, repré-
iènte le moment où Saul eft recon-
nu des Anciens & du Peuple pour
Roi î le troifième , par
Jmffem,
Abigaël qui vient à la rencontre
du Roi David î le quatrième , le
Roi David qui danfe devant l'Arche
du Seigneur j le cinquième, la Rei-
ne de Saba ; le fîxième le premier
Jugement de Salomon ; & le feptiè-
me, qui eft devant la cheminée,
reprc/ènte les Chefs-Doyens de ce
Serment , qui étoient de fervice
îorique cette chambre fut embel-
lie. Les portraits de l'Archiduc Al-
bert & de l'infante Ifabelle, font
placés au - deilîis du buffet , dans
lequel on conferve des couppes
très-rares, ôc autres pieccs curieu-
iès d'Orféverie , prefentées ôc don-
nées par les Souverains & Princes,
qui ont
honorés de leur préfence,

-ocr page 148-

AMATEUR ET eu RI EUT. 14^

les feftins & affembiées de ce Ser-
ment. C'eft dans cette chambre
que la Nobleffe tient fon concert
de mufique.

La fale au-delTus eft occupée part
le Serment deâ Éfcrimeurs , elle
eft ornée de plufienrs beaux ta-
bleaux , & en outre de fculpture
& de dorure j 6n y voit le triom-
phe de David , par y.
Melmont ;
deux autres fiijets de Thiftoire de
ce Roi Prophète ,. par
J. Mille j
& un Chrift à la croix, par K H,
Janjfens : ces tableaux méritent
l'attention des Curieux. Les autres
pieces font des portraits des Chefs-
Doyens de ce Serment.

Vis - à - vis eft la fale des Calo-
vriens , laquelle eft ornée de trois
tableaux , & de quelques portraits
des Chefs-Doyens. Ces trois ta-
bleaux font de
van OrUy j ils re-
préfentent, l'un le Sauveur à la
croix î l'autre Saint Chriftophe i ÔC
le troifième Sainte Barbe.

-ocr page 149-

L E P E INTRE

L^ Aîdfon du Corps de métier
des Tailleurs*

Cette maifon eft d'une belle ar-
chite6hire, & l'édifice affez Ipa-
cieux. La chambre d'afïèmblée eft
ornée de trois belles pieces de
ViBor Honoy-ius Janjfem > qui re-
préfentent le couronnement de la
Sainte Vierge j le martyre de Saint
Boniface j & le troifième, qui fait
le tableau de la cheminée. Sainte
Barbe.

he grand Bâtiment,

Ce bâtiment par fa longueur forme
à peu près le quart ducarré de la pla-
ce, il eft conftruit à la moderne & di-
vifé en fept maifons , dont quatre
font au corps des métiers 5 favoir ,
des quau-e Couronnés, des Char-
.pentiers, des Meuniers & des Tan-
neurs. Les trois autres appartien-
nent à des particuliers.

-ocr page 150-

AMATEUR ETCURI'EVX. Ï43

Les bulles des anciens Ducs &
Ducheffès du Brabant, font placés
fur des confoles le long du pre-
mier éta^e font l'ornement de

o

ce bâtiment.

JHalfûfi des Charf entier s, autrement
dite le Pot d'Etain.

Dans la chambre de ce métier j
on voit rhiftoire de la Sainte Vier-
ge &c celle de Saint Jofeph , Pa-
tron des Charpentiers : elle confifte
en huit pieces , dont fix pary. van
Melmont, & deux par J. van Or-
lay.

La maifon des quatre Couronnés,
autrement dite la Montagne, celle
des Meuniers, nommé le Mouli-
net , & celle des Tanneurs N^. 5 ,
font contiguës à celles ci-devant
défignées.

La chicane des anciens Dc5yens,
a fait évanouir toutes les raretés
qu'on admiroit autrefois dans ces
trois chambres.

-ocr page 151-

144 L E p E r N T R E

La renommée, piece admirable j
fculptée par
le Vieux de Vos, quoi-
que fervant aujourd'hui d'enfeigne
à un Caffé , eft digne de
l'atten-
tion des Connoiffeurs.

'La Jldaifon des Brajfeurs,

La façade de cette maifon a
beaucoup de rapport à un Arc de
Triomphe. Il y a environ huit ans
que les Doyens de ce métier, pour
donner des preuves de leur zèle >
de leur attachement à leur Pa-
trie & au Gouvernement , ont fait
placer la ftatuë équeftre de Son
Altefle Royale le Prince
Charles
Duc de Lorraine et de Bar.
Cette piece , battue au marteau,
cft de cuivre doré , & très-bien
exécutée par
Â. Simons. , Orfè-
vre de Bruxelles.

. Lâ grande chambre d'aflèmbléc
de cette maifon eft ornée de cinq
tableaux; favoir, deux peints par
i/ar. Orlay , & deux par C. Ejkem,

qui

-ocr page 152-

AMATEUR ET CURIEUX. 145-
qui repréfèntent les quatre parties
du monde j & le cinquième de
V.
H. Janjfem ,
le portrait de Jean le
Bon, Duc de Brabant, bienfaiteur
du corps de ce métier.

ha, Adaifon des Bouchers^ dite
le Cigne.

La façade de cette maifon, efl
félon moi, la plus belle de la pla-
ce : on voit au - deffiis de la cor-
niche, trois ftatuëSj faites par 7.
de Kinder, & deux enfans au-def^
fus du balcon.

On admire dans leuf cham-
bre d'affemblée un fuperbe pla-
fond , exécuté & peint par
Se-
'vin , très - habile Maître dans ce
genre , dans l'architedure & dans
les ornémens : elle eft, de plus, or-
née de quatre tableaux , peints pat
Cadefchim, Milanois j ils repréCèn-
tent Notre-Seigneur parmi les Doc-
teurs j les Noces de Cana î les
Vendeurs chafTés du Temple j âc

K

-ocr page 153-

LE PEINTRK
la Madeleine aux pieds du Sau-
veur.

N'ayant plus rien à voir fur cet-
te place , qui put contenter ma
curiofîté, un ami me conduifît à
la maifon du corps des Poiiïbn-
niers.

La Jlddfon des Poijfonmers,

Cette maifon eft placée près de la
Poiffbnnerie , eft occupée en
bas par un Marchand de Vin, le-
quel fe fait un efpece de devoir de
montrer aux Amateurs toutes les
beautés qui font dans la chambre
d'affemblée de ce corps. On y voit
entr'autres une très - belle piece ,
peinte par
G. de Crdyer , qui repré-
fente Notre - Seigneur apparoiffant
à Saint Pierre , après fa réfurrec-
tion ; ce Saint Apôtre ^ qui eft à
la droite de Natre-Seigneur, tient
d'une main un gros Cabillau; fes
compagnons paroiffent attentifs
aux ordres du Sauveur. Cette pie-

-ocr page 154-

AMA TEUR ET CURIE UX. 1
ce eft digne de toute rattention des
ConnoifTeurs ; fi le Peintre a péché
en quelque partie de ce tableau,
c'eft dans la repréfentation de c6
Cabillau, qui à dire le vrai, n eft
pas un poifTon que Ton pêche
que l'on trouve dans la mer de
Judée.

On voit en oUtré dans cette beU
le chambre cinq autres tableaux,
peints par
van Orlay , très-bien
exécutés î fàvoir, deux à coté de
la piece de
Crayer, dont l'un re-
préfente le Seigneur qui ordonne à
St. Pierre dé prendre hors la bouche
du poiiîbn qu'il tient une piece d'aiv
gent pour payer le tribut î l'autre
Pafce Oves. La Sainte Famille eft
la piece de cheminée de cette
chambre, 5c fur le retour éft St. Pier-
ïe en prifon, & St. Pierre délivré.

On voit fous le tableau de Crajef
une fontaine d'un goût fingulier ôC
tout-à-fait curieufe; elle a été or--
donnée 6c exécutée en marbre par
le fameux Chevalier
Grifello , les

K ij

-ocr page 155-

14S LE PEINTRE
figures en font admirables, certes
les ConnoifTeurs y découvriront
des coups de cileaux expreflifs &C
hardis.

A côté de cette merveilleufe
fontaine , on voit deux pieces
de fculpture de TV.
Bergé, de
cette Ville
î elles repréfentent le
Menfonge puni dans Ananias, ôc
le martyre de Saint Pierre. Ces
deux morceaux font très-bien exé-
cutés , & ne doivent rien céder
aux plus habiles Maîtres.

Cette chambre eft en outre or-
née des glaces, de luftres, de fculp-
tures & de dorures : en un mot,
ce corps de métier eft riche en
vafès d'argent & autres pieces eu-
tteufes d'orféverie.

-ocr page 156-

AMATEUR ET CURIEUX. 149

2ldaifon du Serment , ou le Jardm
des j4rbalètriers , fous le titre
de St. George,'

Dans la chambre de ce Serment,
on voit cinq tableaux, peints -par
y. M.JanJJem , qui repréfentent la
vie & le martyre de Saint Geor-
ge i il y a de plus quatre autres
pieces, qui ne font autres que des
allufions fur le même Serment.

Je quittai en cet endroit mon
ami, & m'en allai feul vifiter la Sa-
le du Concert , qui n'en efl pas
éloignée, je la trouvai d'un très-
bon goût & très-bien décorée.

Cette Sale eft bien propre à fa-
tisfaire louïe des Auditeurs par la
charmante mufique , que l'on y
fait exécuter de tems à autre.

Après être forti de cette Sale du
Concert, je revins chez moi, &:
le lendemain matin, je me mis en
route pour aller confîdérer exa-
miner les plus beaux tableaux 5 qu#

-ocr page 157-

ïfo LE PEINTRE
l'on remarque dans quelques Ab^
bayes , fuuées aux environs de
Bruxelles , auquel examen , j'aî
employé quelques femaines à aller
te venir d'un endroit à l'autre. La
première Abbaye, par où j'ai com-
mencé a éti

L'Abbaye de Grimberghe.

Sur le maître-Autel de cette Egli-
fe, on voit la réfurreélion de Nô-
tre-Seigneur , peinte par
de Crayer î
Notre - Seigneur flagellé & tenant
un rofèau dans ies mains, auffi du
même Peintre » eft un tableau qui
mérite l'attention des Curieux, il
eft dans l'appartement de M. l'Ab-
bé, au - devant d'un petit Autel
qu'il y a fait dreffer»

Dans la chambre du Chapitre,
on voit du même Peintre , le por^
tement de Croix deNotre-Seigneur,
Cette chambre eft boifée & ornée
de cinq autres tableaux de J. vm
OrUy, ^ de vm Helmonf^

-ocr page 158-

AMATEUR ET CURIEUX, tgt

Abbaye de Dilighem.

Il y a fur l'Autel de cette Eglife
un très-beau tableau, qui repré-
fente la nativité de Notre-Seigneur,
de
T, vm Loo. Les Moines de cet-
te Abbaye regrettent encore aujour-
d'hui le refus qu'ils firent à ce
Peintre, qui leur avoit ofïèrt de
travailler fa vie durant pour eux,
moyennant fà nourriture &:fon en-
tretien. Ce refus eft caufe que nous
avons perdu beaucoup d'ouvrages ,
que cet habile ôc expert Maître
nous auroit laifle.

Dans la croix de cette Eglifè, à
droite , on voit fur l'Autel le mar-
tyre de Saint Blaife : cette piece
eft belle , d'une fraîcheur admira-
ble , & peinte au naturel par
G. de
frayer.

LAlTomption de la Sainte Vier-
ge , peinte par
JanJjfem, eft la pie-
çe de l'Autel qui eft fur la gauche.

Dans le réfedloire de cette Ab^

-ocr page 159-

15a L E P E I N T R E
baye , on voit l'Adoration des Rois
Mages, par^.
van Orlay, Maximt-
lien de Haefe
, fon neveu , y a
peint , depuis quelque tems , un
tableau qui repréfente le portement
de la Croix. Dans une des cham-
bres de cette Abbaye, Fon y con-
ierve les defïèins des trois pieces
de tapiflèries, qu'on voit dans la
chambre des Etats, à l'Hôtel-de-
Ville.

Abeaye d'Afflighem,

Sur le maître-Autel de cette Ab-
baye , on voit un beau tableau du
portement de la Croix , Chef-d'œu-
vre de
Kubem , les figures y font
peintes plus grandes que nature,
elles font admirables ; en un mot ,
toutes les parties de ce tableau font
'fi frappantes & fi brillantes , que
le fpeâateur eft furpris de rencon-
trer tant de beautés enfembledans
une feule piece, qui a été peinte,
dans cette Abbaye en feize jours de

-ocr page 160-

jîmateur et curieux. 155
tems , & de laquelle cependant il
a reçu de falaire feize cent florins.
Nous en avons une eftampe gra-
vée par
P. Fontius.

Dans .la boiferie , qui regne à
côté de l'Autel , il y a quatre ta-
bleaux de
van Orlay , qui font peints
avec beaucoup de force & d'en-
tendement.

Dans le Chœur , à droite , oa
voit un tableau qui repréfènte l'En-
fant Je fus fur i les génoux de la
Sainte Vierge, qui eft accompagnée
de plufieurs Saints & Saintes, en-
trautres de Saint Benoît: le tout
eft admirablement bien exécuté &
gracieufement peint par G.
de
Crayer.

Dans une petite Chapelle, en
forme de Dôme, on voit une pie-
ce de
j4, van Dyck , & une au-
tre de
Smeyers, de Malinei. Sur
l'Autel il y a une figure en mar-
bre, du defTein de
Af. Dehauxy
&C une autre figure auffi de mar-
bre du même Maître. Sur
l'Autel

-ocr page 161-

154 le peintre
& dans la petite Chapelle qui efl à
gauche, les tableaux qu'on y voit
font de
Smeyers.

Quand on entre dans le Chœur,
on voit à main droite, au-deffiis de
la porte, Saint Martin à cheval : ce
tableau eft peint par
de Çrayer. Dans
la croix du même côté eft le mar-
tyre de Saint Etienne , par
Kabens,
Quelques-uns croyent que ce n'eft
qu'une copie d'après ce Maître.

Dans la grande nef iîtr les cha-
piteaux des colonnes , font repré-
fentes les quatres Douleurs de TE-
glife , très-bien exécutés par
Afaes,

Dans le réfectoire , on voit un
grand tableau d'une riche compo-
fition, peint par
G. de Crayer, dans
le goût du
Titien, on confidérc
beaucoup cette piece,d'autant mieux
que KMbem la trouvoit clefon goût
î
on dit qu'en la voyant il proféra;
ces paroles ,
que Crayer avait très-
bien chànté , farceque Crayer en F/a-"
mand fignifie le Cocq qui chante
: el-
le repréfeute le Roi Gatidula devant

-ocr page 162-

AMATEUR ET CURIEUX, îg^
Saint Benoît. Dans une des cham-
bres de cette Abbaye, l'on y voit
un des chef - d'œu vres de
Kuhens,
on le croit une efquiiTe faite à
defîèin, d'être pofce à roppofite de
celle de
Crayer : mais cela n'a pas
eu de fuite. On en ignore la rai-
fon, on a préfenté f dit-on, J
ûx
mille florins pour cette piece. Dans
une autre chambre, on voit le cru-
cifiement de Saint Pierre. Que l'on,
croit être un original du
Tmtoret.

L'Eglise Paroissiale de Saint
Pierre , a Anderlecht ,
cuve & territoire de Bruxelles,

On admire dans cette Eglifè un
tableau, expofé à gauche en en-
trant , qui eft d'une beauté furpre-
nante, il eft peint par
G, de Cra-^
yer
î il y a repréfenté la Sainte
Vierge ajTife fous un dais , elle eft
entourée de Saint Pierre & d'au-
tres Saints qui paroiffent au-deflous ,
daas des attitudes admirables.

-ocr page 163-

IJ^ L E T E I N T R E

On découvre dans cette piece la
même ordonnance qu'on
Voit ré-
gner dans celles des Réligieufes de
Saint Pierre de cette Ville î à Stee-
nufïèi, Village à trois lieues d'ici >
à l'Hôpital d'Aloft & au Béguina-
ge de Gand. Sur la droite de cet
Autel eft répitaphe en marbre noi-
re de M.Maillard, Chanoine, dont-
le tableau qui repréfènte l'Epipha-
Bie eft de la main de
de Clerck.

Vis-à-vis, on confidére avec
quelqu'attention Ste. Cécile, pein-
te par
J14. Cortens, dont nous avons
ci-devant parlé, il étoit Prêtre à
Bruxelles, mais Peintre, Amateur
& Connoifïèur en eftampes. Il avoit
employé une partie de ïbn revenu
à rendre fa colle6Hon d'eftampes
complette, après quoi il la vendit à
S. ExcelL le Nonce Crivelli, depuis
Cardinal. M. Cortens mourut peu
de tems après j on y voit dans le
Chœur de la Chapelle de St. Yvo,
un très-beau tableau, peint parQ-^-
yeïi le fond par
J^ Artois ^ de un

-ocr page 164-

AMATEXm ET CURIEUX. ïgf
autre de Volders, à droite dans la
croix de cette Eglifè, qui repréfen-
te Saint Roch , Saint Chriftophe >
Saint Sebaftien Saint Antoine.

L'A bbaye de forest.

Sur le maître-Autel „ on. voit une
très-belle piece , richement com-
pofée par
G. de Crayer, & dans
les ftalles font pofés les douze Apô-
tres , peints par
AI. de Haefe.

L'E g l i s e d u P r i e u r e' d e
Groenendal.

Le tableau du maître-Autel re-
préfente l'Epiphanie j ce tableau eft
très-bien entendu , Ôc peint avec
beaucoup de force par
de Mol, éle-
ve de
Kube^s. Les tableaux des
Autels qui font à l'entrée du Chœur,
par
G. de Crayer , ont aufli beau-
coup de mérite.

-ocr page 165-

jj§ L E P E ï N t R Ë

L'Eglisé de la Paroisse Dë

St. Quintin , dit Lennik*

On voit dans cette Eglile deux
belles pieces , peintes par
G, de
Crayer : celle du maître - Autel re-
préfente Notre-Seigneur en Croix,
la Sainte Vierge ^ Saint Jean, la
Madeleine au bas , & quelques
Soldats j le tout dune compofi-
tion riche & aifée. L'autre qui eft
à droite du Chœur , repréfente le
martyre du Patron de cette Eglifè,

Dans l'Eglise de Scharebeek.

Sur l'Autel eft un très - beau ta*
bleau , peint par
Crayer,

Dans l'Eglife dédié à Notre-Da^
me de Lacken j on y voit une Fui-
te en Egypte , peinte par le même
Crayer* Sur l'Autel de Saint Yvo ,
eft le tableau de ce' Saint occupé
à conduire fa charrue.

Cette Egliiè eft aulTi çmbelie d©

-ocr page 166-

AMATEVR MT CURIEUX. TJfp
plufieurs bonnes pieces , peintes pat
éie Hondt & van Heil, qui repré-
fentent les Miracles de la Ste.Vierge.

L'A bbayè de Nïnove.

L'Eglife de cette Abbaye eft une
des plus belles du Pays-Bas, tant
pour larchitedlure que pour les or-
némens , & les tableaux, qui font
pofés dans la boîferie qui règne
tout le long de deux petites nefs,
dans laquelle boiferie Ton en voit
deux peints par
Smeyers deMali-
nes, deux autres par
J. JHilé de
Bruxelles , deux par
de Uondt de
la même Ville , & deux par un
Frere de cette Abbaye j fur l'Autei
de la Ste. Trinité eft une piece re-
préfentant la redemption des Cap-
tifs par les R, R. P. P. de la Ste.
Trinité , peinte par
van OrUy,
Le grand Autel & les deux Confeï-
fionaux , font de l'ordonnance de
TV.
Simons , Peintre & Architecle.

La Chaire de yérité, exécutée par.

-ocr page 167-

i5o LE P E I NT R E
JH. Berge , eft un ouvrage qui me^^
rite quelqu'attention.

Rouge-Cloitre Prieuré*.

Le réfeéloire de ce Prieuré eft
embelli par ,fept grands très-
beaux payfages, dont il y en a qua-
tre par
J. Artois ^ deux par njan
âer Venne
, & le feptième par vm
HeiL
Sur les entre-deux des fenê-
tres , on voit huit tableaux, dont
le premier repréfente le bon Paf-
teur î le deuxième, Saint Auguflin ;
ôc les fix fiiivans , des Evoques de
Prélats de l'Ordre de Saint Augu-
llin.

T E R V U R E.

De tout tems ce Château à fer-
vi de Maifon de Campagne à nos
très-Illuftres Princes & Souverains,
Son AltefTe Royale le Duc
Char-
les de Lorraine
, qui y va quel-
quefois prendre le plaiiir de la chaf-

fe

-ocr page 168-

\ amatevr et curieux,
fc a fait faire à ce Château des
cmbelliffemens augmentations
de bâtimens confidérables , qui le
rendent aujourd'hui le plus brillant
féjour qui foit aux environs de
Bruxelles, On y voit auffi plufieurs
rares belles pieces des Maîtres les
plus renommés : dans une des Anti-
chambres de ce Château, il en eft
une entr autres qu? l'on croit de vm
Dyck, laquelle ïepréfente Samfon &
Dalila i on Ta en eftampe, gravée par
JLmkerken 5 on y admire encore une
autre piece de
Mmper , dont les
figures font de
Breugel de Velour,

On y voit aufli le portrait d'An-
ne van Savelthem , peint par A, ^an
Djck, elle eft repréfentée dans ce
tableau entourée de plufieurs chiens
de rinfante îfabelle , dont elle ayoit
le foin, le nom de chacun de ces
chiens eft écrit au bas : ce tableau
fait le pendant de celui de Samfon.
Au-deffus de la porte de la Sale à
manger eft une Allégorie , peinte
dans le goût de P.
Vêromfe : on

L

-ocr page 169-

iôq. l e p e i n t ré •

Voit en outre deux tableaux de Sfra^t-
ger
i un autre de Alom-per & Breugel ^

de Velour j deux par Sneyers , dont
Vun eft un fujet de Cuifme, dans ^

lequel on voit un chien , un chat
des fruits î & l'autre plufieurs
oifeaux au naturel. Trois pieces,
peintes par
A. Sallaert, font pofées il!

entre la cheminée & les fenêtres,,
l'une eft tout-à-f^it fmgulière. I'

Voici le fujet : un BraflTeur d'A-
vergeni, Village entre Tervure & ^^^
Bruxelles , ayant fait deux braffins
d'affez mauvaife bierre, fur lefquels |

il n'étoit pas douteux qu'il devoit
perdre confidérablement , donna
à connoître un jour cet incident à
un homme qui étoit à boire chez
lui : cet homme lui dit, qu'il avoit
un fecret immanquable pour lui fai-
re trouver le débit de fes " deux
braffins, mais qu'il lui falloir une
rcconipenfè proportionnée aux pei-
nes , & aux foins qu'il devoit pren-
dre pour y réuffir ; ils firent ac-
cord du prix. Peu de jours après.

-ocr page 170-

amateur et curieux,
notre homme fit diftribuer par-
tout des billets, par lefquels il an-
nonçoit qu'à certain jour fixé, loa
verroit un particulier marcher fur
les eaux du .grand étang d'Aver-
gem, fmguliérement équipé : tout
le monde fut curieux devoir un tel
prodige , il y vint, dit - on , plus
d'un tiets des Habttans de Bruxel-
les. Le Brafïeur qui étoit far le bord
de cet Etang avec toute fa bierrc >
eut de la peine à rafraichir tout lé
inonde qui entroit chez lui en
grande foule , deforte que fes deux
bralTins debierre furent bientôt con-
fommés ; mais Thoninie en queftion
ne parut point fur les eaux , il s'éP
quiva furtivement , & laiffa tout
le monde dans une furprife telle
qu'on peut fe l'imaginer*

Les deux autres tableaux repré-
fentent les cinq Serments , qui font
la proceffion ou cavalcade généra^
le. Six tableaux , peints par
Eda >
font pofcs. au-deiïiis d'une de ces
pieces j fur la porte on voit un ma-

L ij

-ocr page 171-

j64 LE PEÎNT RE
gnifique banquet, peint par de Clerck i
à côté, l'on voit un triomphe de
Neptune , par
Kotte?jhaemer-, plus
bas, le Jugement de Paris, pawaf^
Baelen j & plufieurs autres rares pie-
ces de P.
Breugel, àQBeukelaer ^
Dans la Sale à manger eft le por-
trait en buftc & en marbre blanc ^
du premier Duc de l'Ordre-Theu-
tonique, taillé par le faïneux Z)^'/-
'vaux. Dans un parterre , près de cet-
te Sale , font cinq grouppes d'en-
fans 5 auffi en marbre blanc, dont
quatre par le meme
Dehaux, qui
repréfentent les quatre Saifons le
cinquième un Génie de la guerre,
par un Hollandois dont on ignore
le nom.

Outre tous les beaux magni-
fiques tableaux , dont je viens
de donner le détail, l'on en peut
voir encore un nombre confidé-
rable d'autres dans Son Palais à
Bruxelles j entr'autres le fuperbe
tableau de Kuben'Sy qui repréfente
une Sainte Généalogie : un autre

-ocr page 172-

amateur et curieux. i6f
dm même Peintre, qui a pour iù-
jet une chafle au Lion : plufieurs
portraits de la Maifon de Lorrain
ne, & nombre d'autres beaux ta-
bleaux de difFérens Maîtres.

L'on y voit en outre les princi-
pales Planches, gravées d'après les
ouvrages & les defTeins de
Kubem >
par les meilleurs Graveurs de ce
tems,

La nouvelle Chapelle de la Cour ,
eft richement ornée & d'un très-bon
goût ; elle eft de l'ordonnance de
M. Faulte. Le plafoiid, qui repré-
fènte Saint Charles Borromée, Pa-
tron de Son Alteffe Royale, a été
peint par
Meylhrock, natif de Bru-
ges ; ce Saint y eft rcpréfenté don-
nant Iç Viatique aux Peftiferés ,
pendant que des Anges paroiffent
punir des fléaux de la Pefte les Ha--
bitans de la Ville de Marfeille.

Les difFérens changemens & aug-
înentations c-onfidcrables en bâti-
mens, que Son AltefTe Royale 3
fait faire
à Son Palais à Bruxelles,

-ocr page 173-

l66 LE PEINTRE
à Temire , & au Château de Ma-^
rimont, les rendent aujourd'hui les
féjours les plus commodes , les
plus brillants , & les plus fomp^
tueux qu'il y ait aux Pays-Bas.

LA VILLE DE VILVORDE.

Sur l'Autel de l'Hôpital, on voit
ïin tableau, peint par
A. vm Dyck,
qui repréfente la Sainte Vierge ,
ayant l'enfant Jefus fur fes génqux,
lequel femble s'incliner pour em-
brafïèr Saint François de Padouë ,
qui eft à genoux devant lui dans
une humble attitude j le fond de
cette piece eft un ciel ombragé de
nuées. Les Religieufes de cet Hô-
pital , affiirent qu'on leur a offert
de ce tableau fix mille florins. Le
telle mérite pe^ l'attentiou des Coi;^
iioifTeursi

-ocr page 174-

JiMA TE UR ET CVRIEUX. 167

LA VILLE DE M ALINES.

L'E GLISE CATH e'D RALE DE
Saint Rombault.

Dans le Chœur du très-Saint Sa-
crement ,. on voit fur l'Autel la
Ccne deNotre-Seigneur , peinte par
K^ubens : ce tableau e/t en eftam*
pe gravée par
Pontius. A chaque
côté de l'Autel font deu^c autres
tableaux , peints par le meme , dont
l'un représente le Seigneur qui la^
ve les pieds à fes Apôtres ,
l'autre l'entrée dans Jerufalem. Il
y a en outre dans la même Cha-
pelle un grand tableau, peint par

Blommaert, qui repréfente Dieu
le Pere dans une gloire, ÔC au-
defTous Notre-Seigneur & la Sain^
te Vierge.

Dans la Chapelle des Peintres ell
ûn tableau peint par
J. Janjfem ^
dans lequel on voit Saint Luc, pei-
gnant h Sainte Vierge avec • l'Eiii^

-ocr page 175-

1(58 L M PEINTRE
fant Jéfus : les battans de ce ta-^
bleau repréfehtent d'un côté Saint
Jean dans la chaudière d'huiîe, &
de l'autre le même Saint dans l'Ifle
de Patmos. Lorfque les battans en
font fermés > le dehors préfènte
Saint Luc & Saint Jean, occupés
à écrire leurs Evangiles,

L'e glise collegiale de
Notre-Dame.

Sur l'Autel des PoifTonniers efl
un très-beau tableau peint par
bens, qui repréfente la pêche de
Saint Pierre , & Notre - Seigneur
dans une chalouppe. Le battant de
ce tableau, du côté droit> repré-
fente Saint Pierre & d'autres Apô-
tres aufll occupés à la pêche, &
qui trouvent dans un poifTon de •
quoi payer le tribut. L'autre à gau-^
che , repréfente l'Ange Condu&ur
du jeune Tobie qui prend un poiA
fon fur le bord de la rivière. Les
battans en étant fermés, on voiç

-ocr page 176-

amateur etcvrjeux, 169
deiïus Saint Pierre & Saint André»
Sur la table dudit Autel font trois
petits tableaux, peints par le mê-
me
Kubem, l'un repréfènte Saint
Pierre qui enfonce dans la mer.
Celui du milieu efl: un Crucifix >
& l'autre le Prophète Jonas. Le ta-
bleau principal a
été gravé par Bol-
Jwert.

Sur le maître-Autel, on y voit
un tableau, peint par
E. ^illiny
qui repréfènte la derniere Cène.
Derriere ledit Autel, il y a un grand
& beau p^ylàge, peint par C lîujsr-
mans, dit de Malines. Vis-à-vis ce
tableau , on voit un Chrift mort,
la Sainte Vierge & Saint Jean à cô-
té : le tout par
njm Hoeck.

Au-defîus du portail, vers le
nord , on voit la Vierge des Sept-
Douleurs, accompagnée de deux An-
ges , elle a été peinte par T.
bmts. Du CQté de la grande porte dg
cette Eglife , il y a de cc même Man
tre, un tableau qui repréfènte No-
tre-Seigneur qu'on porte au Sé-
pulchre.

-ocr page 177-

IJO l e f e i n t r e

L'E glise Paroissiale
de Saint Jean.

Sur le maître - Autel, l'on voit
cette fameufe Adocation des Ma-
ges , peinte par
Kuhem -, fur le de-
vant de laquelle eft un Roi l'en^
cenfoir à la main : il y a une eflam^
pe de ce tableau, gravée par
Vof-
termans.
En dedans fur le battant
de ce tableau , efl d'un côté la dé-
collation de Saint Jean-Baptille, &
de l'autre Saint Jean dans la chau-r
dièré j flir les dehors de ces
mêmes battans, c'eft - à - dire, lor A
qu'ils font fermés , l'on voit d'un
côté Saint Jean dans Tlfle de Pat-
mos , écrivant TApocalypfe , & de
l'autre le Baptême de Notre - Sei-
gneur. Sur la table de cet Autel,
il y a trois petits tableaux , peints
par le même , dont celui fur la
gauche repréfente la Naiffance du
Sauveur : au milieu eft un Cruci-
fix, & fur la droite la Réflirrec^
tion de Now-Seigneur,

-ocr page 178-

amateur et curieux. 171

Dans le tems que j examinois ces
tableaux avec attention , un Pre^
tre s'approcha de moi, & me dit,
après nous être falués de part
d'autre, que fi j'étois Curieux , il
me feroit voir la quittance de la
fomme payée pour le tableau de
l'Adoration des Mages , écrite de
la main de
'Kubens, laquelle effec-
tivement il me montra & que je
trouvai monter à quatorze cens flo^
rins.

Dans une Chapelle, tirant vers
le nord ^ on voit un tableau de
Saint Roch affiflant quelques mal-
heureux affligés delà Peite : ce ta-
bleau eft peint par L, Sur
les battans, on y a peint la tenta-r
tion de Saint Antoine d'un côté, &
de l'autre Saint Sébaftien, & fur
l'extérieur de ces mêmes battans j
Saint Chriftophe & Saint Adrien,
Il y a encore du même Maître ,
dans la Chapelle du Saint Efprit,
"tin tableau des ^dçs des Apôtrçs,

-ocr page 179-

Î72 le peintre

L'E glise Paroissiale
Ste.' Catherine.

Sur le maîcre-Autel, eft un ta-
bleau peint par
Erafme ^uillm,
qui repréfente la NaîfTance de No-
tre - Seigneur j on a placé tout
proche trois petits tableaux , qui
étoient ci-devant fur la table dç
l'Autel 5 dont Fun repréfente le
corps de Sainte Catherine, tranP
porté par les Anges' fur le Mont
Sinai ; l'autre un Crucifix j & le
dernier, le martyre de Saint Lau-
rent : tous trois peints par le mê-
me §luill'm,

SuiT l'Autel de la Sainte Vierge,
le tableau repréfente l'Adoration
des Rois Mages, artiftement peint
par
2l4oreelJe : cette piece eft admi^
rable.

On voit fur l'Autel de Saint Lau-
rent , le martyre de Saint Jean dans
la chaudière ; 6c à côté de ce ta-
bleau , celui de St. Laurent, peint
par L. Frapçoi^,

-ocr page 180-

J mate UR et curie UX. i
Dans la Chapelle de Saîiit Jo-
feph, le tableau repréfente Jeftis ,
Marie & Joféph, peints par
J. Jor-
daens.

L'E G L I s E D E S R. R. P. p.
Re'COLLET s.

Sur le maître-Autel eil: un très-
beau tableau , peint par
A, -và^
Dyck^ qui reprcfènte Notre-Sei-
gneur crucifié entre les deux lar-
rons î au bas, on voit la Sainte
Vierge, la Madelaine, Saint Jean,
quelques Soldats.
Sur l'Autel de Saint Bonaventii-
re , eft le tableau de ce Saint, qui
reçoit la Communion de la maia
d'un Ange : il eft peint par le mc-
me
vnn Dyck,

Siir celui de Saint Antoine de
Padoue , eft le tableau de ce Saint >
fenânt une Hoftie confacrce dans
fa main , devant laquelle un ane
combe à génoux pour Fadorer.-

-ocr page 181-

174 L É p È I isr r É. Ê

L'E G L i s E D E s R. R. P. Pi
Dominicains,

On voit dans cette Eglife un beau
tableau , peint par
G. de Crayer,
qui repréfente Saint Dominique re-
çevant le Refaire.

Le tableau du maître-Autel, peint
par
J. Smeyers, Peintre habile , &
qui travailloit avec beaucoup de
réputation, repréfente une Sainte
Allégorie ; les figures font Saint
Pierre, Saint Paul , & Saint Do-^
-minique.

L'E G L I s E DES R. R. p. p.

Capucins.

Le grand tableau du maître-Au-
tel eft Notre-Seigneur attaché à la
croix î au bas de laquelle font la
Madeleine & Saint François : le
tout peint par
G, de Crayer*

-ocr page 182-

jimateur et curieux, ly^

L'E G L I s E D E s R. R. P. p,
A U G U s T I N s.

On y voit lur le devant de TAu-
tel la Madeleine , qui lave les pieds
de Notre - Seigneur-, étant à table
chez Simon le Lépreux.

Devant le Chœur, il y a deux
petits Autels, fur l'un defquels eft un
tableau qui reprélente la Purifica-
tion de la Sainte Vierge : il eft peint
par C.
Schut*

Sur l'autre, eft la Sainte Vicr^
ge, l'Enfant Jefus , Sainte Cathe-
rine , Sainte Apoline , & Sainte
Marguerite : toutes ces figures font
peintes par
Kuhem. Nous en avons
une eftampe , gravée par
P, de
Jode.

L'E G L IS E DES R, R. p. p.

Carmes Dechause's»

L'on voit dans leur Eglife ua
tableau, qui tient une partie de h

-ocr page 183-

176 l è p e i n t r é
largeur de la grande nef, & dij^
autres moyens tableaux -, qui re-
pré/èntent les hiHoires des Peres
de cet Ordre , dont la plus grande
partie efl de la compojition de L,
François»

L'Eglise des Religieuses
de l'Oudre de St. Benoit,
dites M tr y s e n.

Le tableau d'Autel repréfente la
Sainte Vierge & l'Enfant Jefus,
accompagnés de quelques Saints
de cet Ordre : le tout peint par
Gdffârd de Crajcr.

On voit encore dans cette Egli-
fè cinq autres tableaux, peints par
T* t>m Thdden , dont l'un repré-
fente la Sainte Vierge & Saint Ber-
nard 5 l'autre , la Sainte Vierge ,
l'Enfant Jefiis , le Roi David , Saint
François de Padoué ,, & d'autres
Saints.

' Les autres font le martyre de
Saint Sébafticn, l'Aiïbmption de la

» Sainte

-ocr page 184-

AMATEUR ET CURIEUX, l^f
Sainte Vierge , & Notre-Seigneur
attaché à la Colonne.

L'EGLisE DES Religieuses

de B e' t h a n i e.

Le grand tableau du maître-Au-
tel repréfente le Couronnement dé
la Sainte Vierge , par
A. Janf-
fens.

On voit dans cette Eglife quatre
tableaux , repréfentans des Saints de
l'Ordre des Chanoines Réguliers'de
St. Benoît, peints par
'L. 'Frmçois,
Entre ces tableaux il y en a un au-
tre qui repréfente les quatres fins
de l'homme.

L'Eglise dite Bleydenbergh ,

ou mont7joyeux.

Le grand tableau de l'Autel a
pour fujet la NaifTance de Notre-
Seigneur , peinte par
G> de Crayer^

M

-ocr page 185-

îyB LE PEINTRÉ
L'E g L I s e CE l'H Ô P I T a L,'

Le tableau d'Autel repréfente \ë
même fujet que celui ci-devant 3 il
eft peint par
Càetjîers.

L'Eglise DES Religieuses
de
S a I N te Claire.

On voit dans cette Eglife iur le
maître-Autel un très-beau tableau ,
peint par
A. Blommaert ^ qui eft
encore le même fiijet que deffiis-
II a été gravé en eftampe par
B,
A. Boljwert. \

L'Eglise des Religieuses
dites L'e'l i e n d a e l.

Sur l'Autel de la Sainte Trini-
té eft le tableau de la Sainte Vier-
ge , accompagnée d'autres Saints
de l'Ordre des Prémontrés : ce ta-
'bleau eft peint par
P. Tyffens.

Au-defliis des deux portes de

-ocr page 186-

amateur et cur ieux. 179
i'Eglife font deux Têtes, lune de
Saint Pierre , & l'autre de Saint
Paul i toutes deux peintes par J.
Jordciens. L'on y voit de plus trois
payfages : l'un peint par L. Aj-
Jchelinx ; l'autre par J. Artois î
le troifième , par vm Aîinderhout :
ce dernier a été retouché par Huys-
mms.

Derriere les orgues , on y voit
un autre payfage , peint par
Eren-
hergh
, & les figures par L. Fran-
çois
: ce tableau repréfente Saint
Norbert qui diftribue fes biens aux
Pauvres.

L'E g L I s e d e S R. R. P. p.

Carmes.

Il n'y à de curieux en tableaux
dans cette Eglife que celui qui re-
préfente la Sainte Famille j lequel
feft peint par
Jacques Jordaens.

M

-ocr page 187-

ito LE PEINTRE

\

L'E glise du grane»
b e' g u i n a g e.

On voit fur le maître-Autel le
tableau de rAflbmption de la Sain-
te Vierge , peinte par
hucas Fran-
çois.
Ces Religieufes en ont plufieurs
autres , peints par
T. Boyermam,
qu'elles poférit alternativement lur
cet Autel fuivant les Saints oti
Saintes du jour.

A côté de cet Autel font deux
tableaux, dont l'un peint par T.
qjm Loo , repréfente TAdoration
des Rois Mages ^ & l'autre la Vi-
fitation de Sainte Elifabeth. Au-
defTus du même Autel , l'on voit
trois grands tableaux de la Palïion
de Notre-Seigneur, peints par y.
Coetfiers^.

. Il y a encore dans cette Eglife
plufieurs autres tableaux fur difFé-
rens fùjets de la Paffion de Notre-
Seigneur; un Saint Charles Borro-
mée peint par
E. ^ilL'm 3 là

-ocr page 188-

amateur et curieux. î8i
Vie de Sainte Thérefè, par Coèu
fiers,

L'Eglise des R. R. P. P. de la
Socie'te' de Jésus.

En entrant dans cette Eglife, on
voit fur la droite fix tableaux, qui
repréfentent la Prédication , & les
Miracles de Saint François Xavier
aux Indes : le premier eft peint
par
Erajme §hillm j le fécond,
par L.
Blendef, natif de Louvain,
le troifième, par le même
lin , mérite quelqu'attention
î le
quatrième & le cinquième , par P.
Ejkens ; le fîxième , par fJ.
Hergoudts. Sur la gauche, il y en
â fept autres, qui font la fuite des
fix premiers, & qui traitent tous
des Miracles de ce Saint: les pre-
mier , fécond & le troifième, font
de
E. §)mllm ; le quatrième dc
le cinquième de Jean Coxie, & le
fixième & feptième de L. Francot,

Pans la Chapelle du Séminaires

-ocr page 189-

i§2 l e f e i n t r e
il y a une très-belle piece, peinte
par
J, Coetfiers ; dont le fujet eft
la Préfentation de la Sainte Vierge
au Temple.

C'eft par cette dernière piece,
que je crois devoir terminer ce
qu'il y a de plus Curieux en ta-*
bleaux dans la Ville de Malines :
le refte méritant peu l'attention des
ConnoifTeurs. '

Je partis le lendemain de cette
Ville,
3c j'arrivai à

L'A VILLE D'ANVERS.

L'E G L I s E DES R. R. p. p.

Augustin s,

A gauche, dans la nef de cette
Eglife, on voit un magnifique ta-
bleau , peint par
van Dyck , qui
repréfente Saint Auguftin en exta-
fe, ayant la tète & les yeux éle-
vés 5 & contemplant le Ciel ouvert :
ce tableau eft peint avec beaucoup
' de force ^ très-bien compofé,en-

-ocr page 190-

amateur et curieux. i%
forte qu'après l'avoir admiré envi-
ron une demie-heure , tantôt exa-
minant la hardielTe du pinceau ,
tantôt la délicateffe du coloris, &
la force & les exprelTions des tê-
tes
6c des grâces dans les petits
amours Divins : j'y aurois employé
encore plus de tems, fi une fon-
nette ne m'eut averti q-u'on alloit
commencer la MefTe à cet Autel.
On a une eftampe de ce tableau ,
gravée par
B. de Jode : quelqu'un
me dit, que
vm Dyck avoit peint
ce Saint Auguftin en capuce blan-
che , ôc que les Peres y ayant
trouvés fort à redire, il avoit çté
obligé de la repeindre en noir.

Il y a fur le maître - Autel une
très-belle piece, peinte par
Kuhens,
dont la compofition eft très-riche.
Ce tableau femble être divifé en
deux parties, dans celle d'enhaut,
on voit la Sainte Vierge alfife ayant
l'Enfant Jefus fur fes génoux,
quelqu'autres Saints autour d'elle.
Sur le bas du même tableau j font

-ocr page 191-

184 LE PEINTRE
debout. Saint Augultin , Saint Lau-
rent , Saint Georges, Saint SébaA
tien, & autres Saints & Saintes 9
le coloris de ce tableau eft encore
brillant & frais , tous les objets
font bien arondis & d'un grand
goût î on s'apperçoit que ce Pein'^
tre l'a entrepris & exécuté avec
une idée vafte & très-bien rendue ,
quoique la brofle à la main : per-
fonne ne poffedoit mieux que
lui l'entendement du clair obfcur
ni ne favoit mieux placer fes
ombres & fes jours dans les en-
droits les plus néceflfàires de fon
ouvrage.

Ceux qui défirent avoir une
plus exacte defcription des atti-
tudes des ' figures qui compofènt
ce tableau, peuvent les voir dans
les eftampes qui en ont été gra^
vées en cuivre & en bois : il y en
a une très - belle en cuivre , par
Sncyers. Celui avec qui j'étois ,
me demanda ce que je penfois du
Sébaftien, que l'on voit fuf

-ocr page 192-

yîMATEVR ET CURIEUX. 18^
le bas de ce tableau, que j'admi-r
rois avec attention , je lui dis > que
c'étoît une des principales parties
qui me plaifoit le plus dans cet ou-
vrage, parceque le jour de cette
figure étant fort grand , à caufe
qu elle y eft repréfentée nue, ôd
qu'étant accompagnée de moindres
lumières des autres figures, qui en
font proches , il avoit eu le fecret
par de grandes parties d'ombres ,
de faire fuir les figures qui forment
la partie d'enHaut, laquelle iàns ce-^
la, étant peinte avec beaucoup de
force, n'auroit jamais parue refter
en place, fur quoi il me répon-
dit , qu'il adoptoit mon fènti-
ment , & qu'il ne doutoit nul-
lement que ce n'eut été aufli l'idée
de l'Auteur. Il m'apprit enfuite ce
que jamais je n'aurois diviné ,
ni apperçu, qui eft, que la poi-
trine de ce Saint Sébaftien avoit
été peinte par
A. vm Dyck, du
tems qu'il n'étoit encore que le di-
fciple de Kuhm j voici comme le

-ocr page 193-

î86 LE PEINTRE
cas arriva , il eft aflez particulier
ponr mériter place en cet endroit,
Kubens étant un jour forti pour
quelques affaires domeftiques, fes
difciples entrèrent dans fon labora-
toire , où après avoir employés
quelque tems à admirer les ouvra-
ges de ce grand Maître ^ ils fe mi-
rent enMte à jouer & badiner en-
tr'eux , ' deforte que la poitrine du
Saint Sébaftien qui n'étoit pas en-
core feiche , fut emportée d'un
coup de chapeau jetté au hazard.
Cette cataftrophe mit fin au jeuî
on penfa férieufement à y remedier,
de crainte que
Kuhem ne vit le
défordre ; car ils étoient tous dans
une appréhenfion mortelle d'être
mis à la porte , enfin après une
courte & prompte réfolution, ils
trouvèrent à propos qu Antoine, fe-
roit celui qui travailleroit à raccom-
der la poitrine du Saint, en effet,
ayant pris la palette & les brofTes
de fon Maître, il la redrefïà fi bien,
que fes
cam^r^des s'imaginerent;

-ocr page 194-

^mjteur et curieux. 187
que Kubem leur Maître n'y fe-
roit aucune attention i mais ils fe
trompèrent , car
Kubens de re-
tour, connut d'abord que quel-
qu'un avoit mis la main à fon ou-
vrage : ayant fait venir fes difci-
ples, il leur demanda pour qu'el-
le raifon quelqu'un d'eux avoit tra-
vaillé à fon tableau , , ils furent
quelque tems en balance s'ils nié-
roient ou avouëroient le fait, mais
la menace fit fon effet, l'on avoua:
enfin , que
van Dyck avoit jetté
fon chapeau deffus, ayant appellé
va^ Dyck feul, au lieu de le gron-
der 5 il lui dit, qu'il lui étoit utile
& même nécefîaire qu'il fit le
voyage d'Italie , l'unique & feule
école de laquelle les plus habiles
hommes étoient fortis , & que s'il
vouloir fuivre fon confeil , qu'il
parviendroit à la dernière per-
fection , fur quoi
-van Dyck lui
dit, qu'il le défiroit, mais que fa
bourfe n'y répondoit pas, & qu'il
çraignoit d'être obligé de vendre

-ocr page 195-

i88 LE PEINTRE

fbn chapeau en chemin. Kuhem
rajfïîira qu'il y mettroit ordre; en
effet, quelques jours après , il lui
fît préfènt d une bourfè remplie de
piftoles, êz il ajouta à ce don un
cheval blanc gris pommelé , fort
beau pour lui fervir à faire fon
voyage : en reconnoiiïànce d'un
tel bienfait
va^ Dyck peignit pour
fon Maître un tableau de chemi-
née , enfuite il penfa à fon voyage
d'Italie , qu'il fit vers l'année 1i ,
âgé alors de vingt-un à vingt-deux
ans. Après cette petite digreffion ,
je reviens aux autres tableaux , qui
me reftoient à voir dans cette Eglife
des Auguftins.

Dans la Chapelle à droite , fur
l'Autel, il y a un tableau de la fa-
çon de
Jacques ^ordaens , c'efl le
martyre de Sainte Apoline, la com-
pofition en eft très-riche , le colo-
ris fort & les exprefTions naturel-
les ; l'on peut dire que c'eft un
des chef-d'œuvres de ce Maître,
l'on en a une eftampe gravée par

-ocr page 196-

. AMA TEUR ET C XJRIE UX. 1S9
JldarinuSé A l'entour des nefs, on
voit la Paffion de Notre-Seigneur j
en figures grandes comme nature >
peintes par plufieurs Maîtres j fa-
voir , par
Backereel, Jôrdaem , Cout-
fiers , Eykens , le vieux , ^mlm
van Orp.

L'on remarque de plus dans le
Couvent de ces Peres un Crucifix
de moienne grandeur , dont va^»
Vyck leur a fait préfent pour /up-
pléer à fon tableau de Saint Au-
guftin j duquel ces Peres paroiP-
foient être mécontens.

L'E G L I s E DES R. R. P. P.

GRANDS CARMES»

On voit dans le Chœur, au-def^
fus de l'Autel , un tableau, peint
par
G. Segers , qui repréfente un
Emblème fpirituel. Sur la gauche
du même Chœur, il y a une Epi-
taphe au-deflus de laquelle , on
voit un portrait , peint par vafz
Djck, En entrant dans ce Chœur ^

-ocr page 197-

ï'go LE PEINTRE
il y a deux Autels, lur celui de îd
dro ite efl un tableau , peint par Ku-
hem , reprcfentant la Sainte Trini-
té , le Chrift eft fiir les génoux de
Dieu le Pere, qui femble montrer
aux Spe6lateurs. fon Fils mort pour
les péchés des hommes. A chaque
côté du Chrift mort, il y a quel-
ques enfans ou génies divins qui
pleurent, ils ont dans leurs mains
les infcrumens de la Paffion 5 No-
tre - Seigneur eft au milieu de cé
tableau couché , mais fi bas placé y
que fon corps y paroît fort en ra-
courci, mais le tout eft peint avec
autant d'art & d'entendement qu'on
en puille voir : nous avons une
eftampe de ce tableau, gravée par
J. S. Bolfwert. Sur l'Autel, à gauche,
on voit un tabieau peint par
OBmjio
-van Veen, qui fut le Maître de P. P,
Kuhem
, il repréfente l'Adoration,
des Mages. A côté de l'Autel" de
Notre - Dame de Naples, fous la
grande fenêtre eft un tableau i
qui repréfente le Jugement tini-

-ocr page 198-

JMATEUR ET CURIEUX. i()r
Verfel, peint par J, de Backer j ce
tableau eft coloré fort agréable-
ment & afïèz bien defTmé. Au-
defîus de la porte des Inclos & de
la Chapelle de Notre-Dame, font
deux tableaux en payfàges , d une
grandeur extraordinaire , les figu-
res font peintes par
Eykens , le
njïeux, & repréfentent le Corbeau
qui nourrit le Prophète Ëlie ; l'au-
tre , du même Auteur , le même
Saint, montant au Ciel.

Dans l'autre bout de la croix de
cette Eglife, eft la Chapelle de k
Sainte Vierge, fort richement gar-
nie , tant en marbre , qu'en bronze
hc en argent. A droite de cette
Chapelle, il y a fur l'Autel de là
Sainte Croix , un petit tableau de
la tête de Notre - Seigneur, lequel
tableau l'on, afliire avoir été trouvé
dans un VaifTeau Turc, & avoir
été donné en préfènt à cette Egli-
fe. Sur la gauche de cette Chapel-
le, il y a un Autel, fiir lequel on
voit un tableau , peint par Ahra^

-ocr page 199-

ipi LE TE I N TR È

ham janjfens, les figures font pïuS
grandes que nature , peintes avec
beaucoup de force d'adreiïe.
L'on a depuis changé cet Autel, &
placé le tableau ailleurs contre la
muraille qui forme le bout de la
croix , où l'on voit encore un au^
tre tableau de moienne grandeur j
qui repréfente la Sainte Vierge ,
Sainte Catherine & l'Enfant Jeflis,
peint par
Thomas W^illehorts, mais
eftimé aulTi beau que s'il étoit de
njan Dyck^ Entre les fenêtres , dans
les deux nefs de cette Eglife, on
voit plufieurs grands tableaux,
peints par difFérens Maîtres -, fa^
voir, par
jFJ. ^anjfem, P. ^nn T^'mt »
Jacques Jordaens ^ & Thyjfens, lef^
quels méritent tous l'admiration pu-
blique.

Au-deflus des deux petits por-
tails font deux tableaux de
A. Janf-^
fens
, dans le goût de Suckaro Dur^
hum.

Avant de finir cet Article , je
crois devoir faire part au Le(5leur,
^ • dg

-ocr page 200-

jiMATE UR ET CVRiEtTZ î i)^
^e ce qui m'a été dit à Anvers j de
particulier touchant la famille de
va^ Dyck t Auteur de cet admira^
ble tableau de St, Auguftin, que je
viens de citer.

L'on rapporte que la mere de
iuaff Djck , étoit fort paffionné®
pour la broderie , qu'elle y excel-
loit àc qu'elle a brodée plufieurs
fujets d'hiftoire, avec un entende-
ment &
une adrefïè fi fiirprenan-
te, qu'ils ont été regardés com-
me autant de chef - d'œuvres, par
les Maîtres dans cette profeffion*
Cette mere défirant donner à fon
fils les premiers documens de la
grammaire ; commença par l'en-
voyer à l'école pour apprendre à
lire & à écrire j comme le pa-
pier , les plumes l'encre étoient
à fa di/pofîtion, il s'amufoit plu-
tôt à faire des figures & autres pe-
tits deffeins , qu'à former des let-
tres. Un jour le Maître ayant me-
nacé du fouet un de fes camarades
î
unn Dyck l'afTura en particulier,

N

-ocr page 201-

13)4 ^ ^ PEINTRE
qu'il ne devoit pas craindre les mê-'
naces du Maître , parcequ'il feroifi
enforte qu'il n'auroit pas la correc-'
tion dont il étoit menacé : com-
ment lui dit fon camarade, ferez-
vous ? je peindrai, dit
van Dyck ,

un vifage fur vos f...... ce

qu'il fit avec tant d'adrefTe, que le
Maître étant venu pour lever le ri-
deau , fe mit tellement à rire qu'il
pardonna au garçon. L'inclination
de
van Dyck devint fi forte pour
le defïein, Se on voy oit en lui de
fi. grandes diipofitions , que fa me-
re lui ayant donné un Maître à
deffinerj il fît dans fes études de fi
grands progrès > qu'il furpaffa en
peu de tems tout fes camarades,
du nombre defquels étoient ceux
qui l'ont .jugés depuis fi capable de
redreflfer la poitrine du Saint Sébaf-
tien , dont nous avons ci - devant
fait mention, réparation qui, com-
me il a été dit , lui mérita avec
les bonnes grâces de fon Maître un
beau 6c magnifique préfent. L'Hif-

-ocr page 202-

AMATEUR ET CURIEUX. 195
toîre rapporte , que ce Peintre s c-
tant arrêté à Savelthem, Paroifîe
éloignée de Bruxelles de deux
lieues , où une jeune fille, d'une
grande beauté , nommée Anna van
Ophem , qui avoit le foin des chiens
de l'Infante Ifabelle, faifoit fa réfi-
dence, il en devint éperduement
amoureux, que pendant le fé-
jour qu'il fit dans cette Paroiffe ,
il y peignit deux tableaux d'Autel
pour l'Eglife de ce lieu j favoir,
celui du maître-Autel, qui repré-
fente la Sainte Famille, dans lequel
il deffina le portrait de fa maîtref-
fe, fous la figure de la Ste. Vier-
ge î & que ce tableau fut empor-
té par des fourageurs François, du
tems des Guerres dans le Pays j que
même ils en avoient fait des facs
pour mettre de l'avoine : & l'autre
tableau , qui eft à la droite du
Chœur , lequel repréfente St. Mar-
^^in à cheval, coupant un morceau
de fon manteau pour le donner aux
Pauvres. Il y a quatre figures re-

N ij

-ocr page 203-

iç6 LE PEINTRE

prcfentces dans ce tableau, Saint
Marrin , fon Compagnon & deux
Pauvres , toutes peintes dans le
goût de fon Maître, tant pour le
coloris que pour le defîein.

Kubens ayant appris , que fon
éleve s'amufoit dans cet endroit,
lui fit dire , que s'il retardoit d a-
vantage fon voyage , qu'il viendroit
lui enfèigner comment on devoit
fe ranger à fon devoir. Aufli les
deux ' tableaux ci - defliis à peine
achevés, il fè hâta de faire route
pour l'Italie.

Un de mes amis d'Anvers , m'a-
yant conduit chez M. de Lunde »
homme très-Curieux en tableaux,
il nous fit voir chez lui dans une
chambre à gauche, qui donne fur
fon jardin, un admirable payfage,'
peint par Kubens , qui repréfente
une vue de la Paroiffe de Laken , à
une demie lieuë de Bruxelles : je fus
frappé de voir la fraicheur & la
beauté des couleurs : encore qu'elles
foient oppofcs les unes aux autres,

É

-ocr page 204-

amateur etcurieux. 197
elles n'empêchent pas que tous les
objets paroiffent refter en leurs pla-
ces , ce qui fait voir que ce Pein-
tre manioit les couleurs comme il
défiroit : ce tableau eft orné de
petites Payfannes & beftiaux, de
la hauteur d'environ un pied & de-
mi. Le propriétaire de ce tableau
nous dit, que
Kubens l'avoit peint
au fujet de quelque démêlé qu'i|
avoit eu avec TV. li^ildem , Peintre
en Payfage , auquel il vouloit faire
connoître, qu'il étoit auffi habile
Maître en payfages qu'en figures.

Je vis de plus dans cette mêrne
chambre quatre portraits, dont l'un
eft coefFé d'un chapeau de paille,
mais de façon que le vifage eft en
réverbération de la clarté du fo-
leil, ce qui paroît il vrai & fi na-
turel , qu'on croit voir la nature
même.

Le fécond de ces portraits re-
préfente une des femmes de
Kubens-,
le troifième & le quatrième, font
de même dans la derniere perfec-

-ocr page 205-

198 L E P E I N T R E
tion, & peiats avec tant de déli-
catefle , que je crois , de n'avoir
rien vû ailleurs de fî parfait. M. _
Lunde nous dit, que fes ancêtres
étant de la famille de
K.uhem , ils
avoient hérités de ces tableaux après
fa mort. Depuis celle de M. de Lun-
de , j'ai fû que le payfage avoit
palTé au plus ancien de la famille.

L'EGLisE des Religieuses

d e l'O rdre de Saint
Dominique.

Le tableau du maître-Autel, peint
par
A. 'van Dyck , repréfente Nô-
tre-Seigneur attaché à la croix >
d'un côté Ton voit Saint Domini-
que , & de l'autre Sainte Rofalie >
au bas de la croix, il y a un pe-
tit Ange affis , tenant un fïambeau
renverfé , emblème de la mort : on
voit ce tableau en eftampe, gravée,
par X
A. Bolfwert : le Chrift elt
très-bien delliné & très-délicate-
ment peint. La paffion de la mort

-ocr page 206-

AMATEUR ET CURIEUX, ipp
efl extremé Tient bien exprimée j de-
forte qu'on ne peut regarder
cg
tableau fans être touché ôc émû de
compaiïion.

Je demandai à voir l'eiquifTe »
ee qui me fut accordé je puis af-
fûter que c'eft une des plus belles,
qu'on puifle voir de cet Auteur.
On nous dit, que
A, vmDyck a voit
fait préfent de ce tableau à l'Egli-
fe , parceque fon pere avoit demeu-
ré dans ce Couvent , qu'il y étoit
mort & enféveli. Après avoir re-
mercié ces Dames : je tournai me$
pas vers les Perçs Dominicains.

L'E G L I s E D E s R. R. p. p.

Dominicains.

En entrant dans cette Eglife, â
droite , entre les fenêtres on voit
deux tableaux , peints par
G. de
Crayer, qui font des fujets relatifs
à cet Ordre 5 dans la nef, à gauche,
font les quinze Myftères, peints pai!
^ifférens Maîtres , les principaux

-ocr page 207-

«00 LE PEINTRE
font l'Annonciatiou de la Sainte
Vierge, peinte par
M. vm Bâelen,
quelques autres par JemJordaens,
& G. Aiofiart
, la flagellation pein-
te par
K.uhens, eft auffi fraiche ôc
aufîi brillante en couleurs , que
fi elle venoit d'être peinte tout re-
çemment. On Ta en ellampe, par
P.
Fontius,

Le portement de la croix eft la
copie du tableau, qui efl: en en-
trant au Chœur
j à la droite, vis-
à-vis de cette nef eft l'Autel du
Rofàire, fiir lequel on voit un ta-
bleau , peint par
Ad, Angelo de Ca~
YOfVAgia, lequel repréfente un fujet
de la Sainte Vierge , Saint Domini-
que & quelques autres : ce tableau
efl fort bien defTiné , mais il a peu
<ie brillant dans le coloris , le fond
qui eft fort noir, fait que les ob-
jets ne reçoivent pas de réverbéra-
tion , ce qui fait que ce tableau
n'eft pas gracieux. On dit, que ces
Peres qui n'en étoient pas fort con-
tens, demandèrent le fentiment de

-ocr page 208-

AMATEU^R ET C URIEUX. 201
K-ubem y qui pour lors travailloit
pour eux au tableau du maître-Au-
tel, & qu'il leur dit, que c'étoit
un très-bon morceau. Il eft a re-
marquer que
njân Djck a peint dans
ce même tableau le portrait du
Donateur, lequel on voit fur la
gauche.

Sur le maître-Autel, qui eft dans
le Chœur , eit un très-beau tableau
peint par
Kubem , il repréfente une
Allégoire Sainte j en voici à-peu-
près le fens, Notfe-Seigneur ayant
la foudre dans la main , femble irri-
té &C vouloir détruire le monde
corrompu ; mais Saint .Dominique
& Saint François, par Tiatercef.
fîon de la Sainte Vierge , retien-
nent la juile vengeance du Seigneur.
Un chacun qui admirera ce tableau
avec atj:ention, avouera que c'eft
une idée auiTi iliblime &: aufTibien
renduë , que jamais homme ait pu
s'imaginer , l'on peut dire que ce
feul tableau fufBt pour juger du
génie de ce grand Maître, il eft

-ocr page 209-

£02 LE PEINTRE
peint avec autant de force que d'é-
légance ; l'entendement du clair ob-
fcur 6c les réverbérations font dans
la dernière perfeétion. L'Autel eft
encore un autre chef-d'œuvre, fur
le frontifpice on voit l'Apôtre vSaint
Paul, fculpté en marbre blanc , par
T^illemfens j les vitres des croifées
font peintes par
A. Dif enbeke, qui
ctoit difciple de
Kubem , elles re-
préfentent la Vie de ce St. Apô-
tre , far dix différentes croifées.

A l'entrée du Chœur , il y a
deux petits Autels , flir celui à droi-
te , l'on voit le portement de la
Croix 3 tableau renommé des Con-
noiffeurs, il eft peint par
'van Dyck,
avec beaucoup de force & de fraî-
cheur , d'un deffein coulant & co-
reâ : on en a une eftampe gravée
par
C. Gdlc.

On aflure, que fi ces Peres avoient
voulu ,
vm Dyck leur auroit peint
les quinze Myftères , dont
il eft
parlé ci-defTus, pour une très-mo-
flique fortune 5 ce qui fait voie

-ocr page 210-

AMATEUR ET CURIEUX. 203
qu'on ne connoHroît pas encore le
grand talent de ce Peintre j on dit
que ce fut peu de tems après fon
retour d'Italie. Sur la gauche, &
à roppofite du tableau de
van Dyck y
oa eo voit un autre petit, qui re-
préfente Saint Dominique , peint
par un Italien dont on ignore le
nom.

Plus avant, à l'Autel du Saint
Sacrement, le tableau repréfènte un
Concile des Sainrs Peres, peint par
Kuhem: bous l'avons en eftampe,
gravée par
F. Snyers.

Dans la croix de l'Eglife, vis-à-
vis l'Autel , on voit un tableau
peint par
Boeyermam , qui repréfen-
te la décollation de St. Paul, très-
bien & très-agréablement peint. On
voit encore contre la muraille de
l'Autel du Rofaire, une piece d'u-
ne grande étendue , peinte par Ku-
kem avec beaucoup de force d>c
4'un grand goût. Enfin, après avoir
examiné ce qui eft à voir de plus
çurieux dans cette Eglife , je pris

il

âi:

-ocr page 211-

204 LE PEINTRE
ma route vers les Révérends Percs
Récollets.

L'E G L I s E D E S R. R. P. P.

Re'COLLET s.

Il y a fur le maître-Autel un ta-
bleau , qui repréfente Notre-Sei-
gneur crucifié entre les deux Lar-
rons , un Soldat qui monte fur l'é-
chelle pour rompre les os au mau-
vais Larron, la Sainte Vierge, Saint
Jean, & la Madeleine font au bas
de la croix , dans des attitudes fi
lênfibles qu'on ne fauroit les regar-
de fans en ctre touché : il y a une
eftampe de ce tableau, gravée par
B. A. Bolfwert. Ces Peres ont aulTi
l'éfquifTe de ce même tableau. Der-
riere cet Autel, dans une petite
Chapelle , l'on voit une Epitaphe
d'un Bourguemaître de cette Ville,
nommé
Kockox ; dont le tableau
repréfènte Saint Thomas revenu de
fon inçrédiilité j fiir les battans font
les portraits de ce Bourguemaître

-ocr page 212-

amateur ETCURimX. lof
te de fa Femme : le tout peint par
Kube/zs très-délicatement, & avec
goût & précifion. De plus on y
voit la defcente de la croix, c'eft
refquiflè de ce fameux tableau,
que Ton voit dans la Cathédrale,
fur l'Autel du Serment des Fufe-
liers. On voit encore dans la mê-
me Chapelle un tableau de moyen-
ne grandeur , qui repréicnte la Sain-
te Vierge , Sainte Catherine &c TEn-
fant Jefus : le tout peint par J. -vm
Djck : il a été gravé par S. A,
Bolfwert.

Dans une autre Chapelle , à gau-
che , eft un Crucifix de hauteur de
trois pieds, peint par
Kubem. A l'en-
trée du Chœur, fur la droite, l'on
voit fur l'Autel un tableau, peint par
le même , lequel repréfente la Com-
munion de Saint François, &c de
plufieurs Religieux î il y a une gloi-
re fur le haut de ce tableau, qui
fait un très-bel effet, c'eft une de
fes meilleures pieces : il fe voit en
cftampe , gravée par
H. Snejers.

-ocr page 213-

LE PEINTRE

A gauche du Choeur, Ton remar-
que un tableau , peint par J. 'um
Dyck , qui repréfente un Chrift
mort fur les génoux de la Sainte
Vierge : ce tableau eft peint avec
beaucoup de force & très-bien def-
liné , l'on peut aifément difcerner
que ce Peintre avoit examiné à fond
les ouvrages du Titien, avant que
d'entreprendre ce tableau : il eft auiTi
gravé par
S. A, Bolfwert.

Dans la croix de l'Eglife eft un
Autel, dont le tableau eft peint par
C.
Schut, c'eft une de fes meilleu-
res pieces. A côté de cet Autel ^
à droite , l'on voit contre la murail-
le un Crucifix , qui eft très-beau,
grand comme nature, peint par Ku-
bens.

Dans le bout de la croix , à droi-
te > l'on voit fur l'Autel le Couron-
nement de la Sainte Vierge, bien
& richement compofé par lemcme.
A droite de cet Autel eft une Epi-
taphe
^Abraham Aïattyfem, dont le
tableau peint par le même , repré^

\

-ocr page 214-

AMATEUR ET CURIEUX, 207 ^'
fente la Sainte Vierge, l'Enfant Je-
fus & Saint François.

Derriere l'Autel de la Ste. Vier-
ge , il y a entre les fenêtres un por-
trait peint par
A. vm Dyck : après
avoir vu admiré ce qu'il y
a
de plus curieux dans cette Eglifè,
je me tranfportai à celle des Reli-
gieufes, dites Façons.

L'EGLisE des Religieuses
dites Façons.

On voit fur le maître-Autel de
cette Eglife, un tableau en ovale,
peint par
Dieu -Donné Delmont ^
qui repréfente l'Adoration des trois
Rois.

Dans un petit Chœur auprès , eft
un très-beau tableau , peint par
A,
njun Dyck
; ce tableau repréfente
la Sainte Vierge tenant l'Enfant Je-
fus fur fes génoux , elle eft accom-
pagnée de Saint Hermanus , de
Saint Jofeph & d'un Ange.

Dans le Chœur, à gauche , on

-ocr page 215-

io§ LE PEINTRE
voit fur l'Autel la Ste. Famille, très-
bien peinte par
G. Zegers, A côté de
l'Autel, il y a quelques buftes de
Saints , peints par
Jean Bockhorfi ,
communément nommé hmgen Jan,
Sur les deux murailles de cette Cha-
pelle font pofés deux grands Payfa-
ges, peints
^2iX:Jean W^ildens ^ 8>C les
figures par le même
Bockhorfi, ils
repréfentent Tun la Fuite en Egypte
î
& Fautre la gloire de quelques
Saints , fervis par des Anges : ces
deux tableaux font des chef-d'œu-
vres , tant pour les payfages , que
pour les figures 5 les coloris font
très-gais, très-brillans, & le tout
au mieux compofè.

Au-deffiis de ces deux tableaux,
l'on en voit deux autres, peints par
G, Zegers, dont les figures font
grandes comme natiire , l'un eft
l'hommage que rendent au Sau-
veur les Pafteurs la nuit de Noël j
& l'autre, l'Ange qui commande à ^
Saint Jofeph de prendre l'Enfant
Jefus , & de fuir avec la Sainte

Vierge

-ocr page 216-

Amateur et curieux, aôiî

Vierge en Egypte : ces deux ta-
bleaux font fort beaux & peints avec
beaucoup de force dans le goût àû

Tableaux de tJiotel-de-Ville.

Dans un grand vSalon, jeremar^
quai fur la cheminée un tableau ^
peint par
A. J-anJfem , qui repré-
îènte lin fleuve ou TEfcaut : ce ta-
bleau ell peint &deffiné d'un grand
goût. Dans une chambre plus
avant, on voit un autre tableau de
cheminée , peint par
F. Snejers, qui
repréfente des animaux & des
fruits. Dans la chambre du Collège
des Meffieurs de cette Ville, l'on
y remarque un beau Plafond , peint
"^zx Jacques de Kore, Dans la Cha-^
pelle, il y en a un autre plus pe-
tit, peint par un Italien, nomm'é
PellegrmL

J'allai enfuite voir h chambre dU
Serment, où étant entré, le Con-
cierge tira un rideau, qui eft ati^

O

-ocr page 217-

ifO LE PEINTRE
devant du tableau, de la cheminëe
peint par
Aéjanjfens. Je lexammaî
& trouvai fort de mon goût , tant
four le coloris, le deflein , que
pour la compofition & lexpreffion
des Phyfionomies
î il repréfente une
Allégorie au fujet du Serment, TU-
nlon qui eft afTife a l'Abondance ; fur
la gauche,
l'Amour & Venus font
devant elle j fur la droite eft la
flaîne qui paroît ne pouvoir fouf-
frir rUnion , qui a aU-deffus d'elle
un Génie qui la couronne. En ou-
vrant le rideau de l'autre côté, je
vis le tableau, peint par
Kubem ,
qui eft à l'oppofite de celui às>Janf-
jens% lequel repréfente le Dieu
Mars, triomphant ôc foulant à fès
pieds deux Efclaves j à côté eft
peint un Génie aîlé qui le couron-'
ne. Le coloris de ce tableau eft ex-
tremément brillant j les aîles du
génie font d'une couleur fi particu-
iière, & Ti belle, que je ne me
fouviens pas d'avoir vû rien de plus
furpréuaot 5
cependant tout y eft

-ocr page 218-

a ma te ur et curie ux. 111
àU naturel. On me dit, que ces
Peintres firent & donnèrent ces deux
tableaux à-peu-près dans le même
tems , pour avoir leurs franchifes ,
ôc que
A.JanJfem avoit déjà acquis
quelque renommée, lorfque
K.uben$
avoit à peine commencé la Tienne ,
en effet, c ctoit
le feul Peintre qui
lui faifoit ombrage j ainfi il n'eft
pas étonnant que ces deux Maîtres
ayent travaillé à l'envie l'un de l'au-
tre , pour faire ces deux cbef-d'œu^
vres î je crois même qu'il eft afîèz
difficile de juger qui dés deux a
remporté le prix j félon mon idée,
fi Ktthem a plus de brillant dans fa
couleur , il me femble que A.Janf^
fens eft plus net ôc plus correél.

L'on voit encore dans cette me-
me chambre un tableau, peint par D^
Te nier s, lequel repréf^nte le Serment
en parade fous les Armes fur la
grande place j il a aufTi peint
Ce
tableau pour fa franchlfe. L'on
peut dire, que c'eft un vrai chef^
d'c€uvre , il eft rempli de nombre dô

O ij

-ocr page 219-

àïi LÈ PEINTRE
figures , dont plufièurs ont et©
peintes au naturel, & qu'on afîu-^
re avoir été très - reffemblantes j il
cil fort correét en defTein > les at-
titudes bien variées & libres, ^
quoique les perfonnages y foyent
pour la plûpart habillés de noir , cela
n empêche pas que le tableau ne
paroifTe fort gai & fort plailant^
Je crois même, que fi Kubem ou
van Dyck , av oient eu à traiter un
pareil fùjet
j ils ne s'en feroient
pas tirés avec plus d'honneur.-
Ces deux derniers tableaux ont été
■Vendus depuis environ fix ans»

L'Eglise Be'guinage.

Le tableau du maître-Autel, qui
eft peint par
A. -vm Dyck , repré-
fenté Notre-vScigneur mort & éten-
du ilir les génoux de la Ste^ Vier-
ge î la Madeleine embraffe la main
droite du Chrift, & Saint Jean eft
derrière elle
î c'eft un des bons
tableaux que l'on puifTe voir de ce

-ocr page 220-

AMATEUR ET CV RI EUX. 215
Maître, tant pour rexpreffion &
îe coloris, que pour le defïein ; il ii

eft certain qu'il inlpire la dévotion :
je crois que c eft un des derniers ou-
vrages qu'il a peint avant de par-
tir pour l'Angleterre.

Sur la droite du Chœur eft une
Epitaphe , dont le tableau repré-
fente un bufte de Saint François ,
ayant les yeux élevés au Ciel, peint
par
G. Ke^y, avec beaucoup de for-
ce : le coloris en eft aulTi frais que
s'il venoit d'être peint.

Devant le Chœur , à gauche , au-,
defllis d'un Confeffional, on voit
une Epitaphe 3 dont îe tableau,
peint par
Jea^ Bockhorft , dit han-
gen Jean
, repréfente la Réfurrec-
tion de Notre - Seigneur j fur l'un
des volets eft l'Annonciation > &
fur l'autre l'Afcenfion : ce tableau
eft d'une grande beauté. L'on voit
fouvent des ouvrages de Kjibens ^
qui ne le iiirpafïènt pas.

Il y a encore autour de cette
Eglife plufieurs tableaux entr'au-

-ocr page 221-

214 ^ ^ PEINTRE
très un peint par
J. Jordaens , qtil
repréfente Notre - Seigneur attaché
à la Croix , Se aux côtés la Sainte
Vierge, Saint Jean & la Madelei-
ne 5 rhorifon dç ce tableau eft fort;
bas,

L'E G LI s E DES R. R. p. P,
Capucins.

Comme j'étois à portée des Ca-^.
pucins , j'entrai dans leur Egiife,
où je vis fur le maître-Autel un ta-»
bleau de
K.ui>em , repréfentant No-
tre-Seigneur attaché à la Croix en-
tre deux Larrons, la Sainte Vierge
à côté de la Croix , Saint Jean, Si.
la Madeleine au bas, & quelques
Soldats : ce tableau eft en eftampe
gravée par
Bolfwert.

Dans la Chapelle de Saint Fran^
^ois eft fur l'Autel un tableau , peint
par le même Maître , lequel repré-.
fente l'Enfant Jefus ; la Sainte Vier-
|;e d'un côté, & Saint François de
l'autre j trçs-bien exprimé, Le point

-ocr page 222-

m

^mjteur eteurifux. 515
du jour vient du milieu de l'Enfant
Jefiis : nous l'avons en eftampe,
gravée par
Vijjcher.

Dans une autre Chapelle, il y a
un Chrift mort, peint par
A. van
Dyck : ce tableau eft très-beau. îl
y a encore dans cette même Cha-»
pelle un autre tableau» peint pas
Backereel, qui rçpréfente un Sain!
de leur Ordre.

o

Di

L'Eglise des Religieuses.
dites Annonciades.

Sortant du Béguinage, je pris à
main gauche pour aller à l'Eglife
des Annonciades, où je vis fur un
petit Autel un tableau , peint par
Kubens , qui repréfente l'enfant Juf-
tus, qui porte fa tcte dans fes mains
î
ces deux figures font fiir le devant
du même tableau, & quelques autres
dans le lointain ; il y a une eftam-
pe de ce tableau, gravée par 7t
IP^ithdoeck. Sur un autre petit Au-
tel, on voit un tableau peint pjir

-ocr page 223-

-aîS L E I NT X E

F. Willehorts BoJJchaerts r ce tableau
repréfente Sainte Véronique & deux
Anges à côté d'elle. Près de cet
Autel î il y a un très-beau Portrait,
peint par
A. vm Djck.

L'E g l i s e des R. R. P. P.
cordeliers.

Sur le grand Autel de cette Egli^
fe eft un beau tableau > peint par
Eykens , le vieux : il reprcfènte St.
Jean au défert
î & fur l'Autel de la
Sainte Croix , un autre de Jean
Bockhorjl j repréfentant Sainte Hé-
lene^

La Maison Professe
des R. R.
p. p. de LA
Socie'te' de Jésus.

Le maître-Autel de leur Eglife efi
de
l'ordonnance dz Kubem, On
en voitauffidans leur CouventleP
<]uifre : ils ont quatre tableaux pour
pUc§r au-dçvant de cet Autel, afin

-ocr page 224-

AMATEUR ETCXJIJWX. ÎI7
d'en changer lelon que les fêtes le
demandent ; l'un repréfcnte Saint
îgnace, délivrant un pofïédé : ce
tableau fe voit en eftampe , gravée
par
Aîar'mus. Le fécond , repréfen-
te Saint François Xavier, qui par
la Puiiïànce de Dieu reflufcite un
mort : compofitions riches & Ipi-
rituelles. Les efquiffes de ces mê-
mes tableaux font attachées aux
colonnes , qui forment la nîche
du milieu de cette Eglife , elles
font fi belles & fi admirables que
je pourrois fans exagérer les met-
tre au niveau des tableaux. On voit
les mêmes tableaujt de Saint îo;na-
ce bc de Saint François Xavier,
dans l'Eglife des R. R. P. P. Jé-
fuites à Gènes. Le troifième tableau
peint par
G. Zegers , repréfente
i'éreâion de la Croix ; & le qua-
trième , l'Affomption de la Sainte
Vierge , il eft de C.
Schut. Ce
Peintre , félon mon fentiment, étoit
très-riche dans fes compofitions,
il entendoit parfaitement le claif^

-ocr page 225-

ÇT^ £ £ PEINTRE

obfcur, car il a fu avec art ména-^
ger de belles lumières fur les ob:^
jets qui avancent le plus , & qui de-
mandent d etre plus fortement frap-
pés. Il a fait un grand nombre de
tableaux > & gravé à l'eau forte une
grande quantité d'eftampes , qui
font fort belles & très-utiles.

Au bout de la nef droite , on voit
fur l'Autel de Saint Jofeph un ta^
bleau , peint par
'Kubem , qui re-
prcfènte la Fuite en Egypte , ou
l'Enfant Jefus efc mené par la Sain-
te Vierge & Saint Jofeph : il efl;
en eftampe, gravée par X Bol-
fwert.

De l'autre côté, il y a un ta-
bleau peint par
G. Zegers, qui re-
préfente la Ste. Vierge ayant l'En-
fant Jefus fur les bras , & un Ange
qui femble infpirer la dévotion à
vSaint Xavier , en lui montrant l'En-
fant Je fus fa Sainte Mere.

Dans la Chapelle dédiée à la
Sainte Vierge, on voit fur l'Autel
un très-beau tableau , peint par Ku^

-ocr page 226-

Jî M AT EUR ET CURIEUX, zrp
hens, il repréfente l'AfTomption do
la Sainte Vierge. Sur la gauche de
ce tableau, il y a un Apôtre qui
leve avec fon dos la pierre du îe-
pulchre , la gloire des Anges eft
très-gracieufe & très-riche : on voi|
ce tableau en eftampe, gravée par-
X
A. Belfwert,

Vis-à-vis ce tableau, au-defîus
d'un Confeffional, il y en a un de
moienne grandeur , peint par
C,
Schm
, dont le fujet eft la Naiffiin-
ce de Notre-Seigneur. Sous lesfe^
nôtres de cette Chapelle, on voit
deux autres tableaux , peints par
G. Zegers : fur la gauche eft une
grande piecc ornée de fleurs pein-
tes par Frere
Zegers,2M milieu def^
quelles eft placée la Sainte Vierge ,
l'Enfant Jefiis & quelques Anges j
qu'on prétend être de la main de
K^ubem.

Il eft aifé de voir par les deffeins
de ces deux dernieres pieces de Ge^
rard Zegers , que ce grand Pein^
tre, pendant fqn féjour en Italie 3

-ocr page 227-

220 LE PEINTRE
avoit étudie & cultivé Jîdanfrêdo %
mais comme il s apperçut que ce
goût déclinoit par les ouvrages gais
libres de
Kuhens, il changea de
•fyftême &c mit toute fon appîica-
'tion à l'imiter, ce qui lui acquît
une affez grande réputation dans
ce tems , cependant fuivant moi,
j'eftime mieux fes ouvrages dans le
goût de
jManfrédo » que dans celui
de
Kubem.

L'on voit encore plufîeurs autres
pieces de Frere
Zegers , le long de
la mm'aille des deux petites nefs
âu-deffas,

Lrf Sodalité Inférieure,

L'Annonciation , par Kubem, eft
la piece de l'Autel : il y a une eftam-
pG de ce tableau, gravée par yJ.
Jiolfwert. Vis-à-vis les fenêtres,
on voit deux grands tableaux, par
T)i€U-T)onné J)elmont, qui font d'u^
fie grande beauté.

Au - deffiis de la porte de' la S^r

-ocr page 228-

amateur et cvê téux. 111
crifïie eft un Chrilt, peint par G^
Zegers.

ha Sodàliîé Supérieure.

Le tableau de l'Autel repréfent©
]a Stc. Vierge , affife entre St. Pier-
re & St. Paul, ayant fur fes génoux
TEnfant Jefus , qui préfènte une
guirlande de fleurs à Sainte Rofàlie :
on a ce tableau en eftampe, gra-
vée par
P. Pontms : le tout eft peint
par
A. Dyck , du tems qu'il
ctoh: encore difciple chez
Kubem, dC
jMembre de cette Sodaliré. A la droi-
te de ce tableau, il y en
û un au-
tre, par le même, qui repréfentei
Hermanus Jofeph à génoux devant
l'Enfant Jefiis, qui eft far les bras
de la Sainte Vierge : cette piece eft
alTez connue par l'eftampe , gtâv'éë
par
P. Pomms : on peut dire que
c eft un chef-d'œuvre, la force
6c
la hardielTe qu'on y remarque font
aflTez connoître, qu'il avoit adop-
té le goût du
Titien.

-ocr page 229-

t22 LÉ P E I N TR Ê

A gauche , eft un autre rableâit
de Saint îgnace j peint par
Gérard
Zegers ^
natif d'Anvers : ce Peintre
après avoir travaillé dans les prin^
cipales Académies de l'Italie , fut
appeilé à Milan par le Cardinal Za-
ipata, qui y faifoit fa réfidence i peu
de jours après y être arrivé , cette
Eminence le préfenta au Roi, qui
le fit travailer dans fon Palais &
dans quelques Eglifes j enfuite Sa
Majefté très-fatislaite de fes ouvrai
ges s lui afligna une penfion & le
décora du titre de Gentilhomme*
A fon retour à Anvers, lieu de û
tia iffance , il y fit bâtir une fuperbe
maifon iur la placé de Meer, la-
quelle on eftime être l'endroit où
il a terminé fa carrière, après avoir
joui de fon vivant d'un haute ré-^
putation.

-ocr page 230-

^AifATEUR ET CURIEUl,

L'Eglise des Religieuses

de sainte the're's e.

Sur le petit Autel, à la droite
de cette Egiife , il y a un très-beau
tableau j peint par
Kuhem, qui re-
préfente Ste. Anne & la Ste, Vierge »
décorée d'un vêtement blanc làlis
V'erdàtre , lequel piaroît jfi naturel «
que la vue en eft frappée Ton a cd
tableau en ellampe, gravée par Ai
Bûljhvert,

La cathedrale d'ahvers.

En entrant par la grande porte ,
On voit à gauche l'Epitaphe du fa-»
meux
^intin Matfjs , attachée au
mur, hc taillée en marbre blanc.
Sur le haut de la table eft fon por-
trait en profil, lur le bas on lit :

Connuhialis Amof
de mulcîbre fecït Apellem,

A la fécondé colonne de la droi>-"

-ocr page 231-

224 le p e i nt r ê
te, eft l'Autel des Pêcheurs, dont
le tableau repréfente la pêche de
Saint Pierre > elle eft peinte par va^i
der Elburght, dit petit Mmske.

A la troiiième colonne, il y a uri
tableau de
W^encejlas Coebergeft, qui
a été peint par lui lorfqu il étoit
à
Naples , il repréfente un Saint Sé-
baftien, Patron du Serment de l'arc :
le Saint eft percé de fléclies par des
Soldats qui font {ur le même ta-
bleau , où au bas , on voit jufqu

demi-corps, deux femmes en pleurs ;
les têtes de ces femmes, à ce qu'on
dit, ayant été volées & retrouvées ,
quelques années après à Rome j
ont été remifes 6c replacées aux
endroits où elles étoient avant*
d'autres afîlirent, (ce que je crois
plus vraifemblable, ) que ces têtes
ont été répeintes par le même
Coe~
hergen
j, étant encore à Naples, après
îe vol de ces têtes. Les contours
des figures font coulants, & le tout
eft pemt avec force & hardieffe j
4eforte qu'on peut dire que ce Pein-
tre

-ocr page 232-

jmateur et curieux. 225
tre a étudié les plus habiles Maîtreé
dltalie.

Les Confrères de ce Serment j
ayant engagé
A. van Dyck, de fai-
re un autre tableau : un jour qu
'il
étoit à l'ouvragé, H reçut la vifi-
te des Chefs - Doyens, qui forma-
lifés de le voir la broffe à la main ,
lui dirent que ce n étoit pas avec
cet inftrument, mais avec le pin-
ceau 5 qu'il devoir travailler à leur
tableau.
Van Djck, d'un ris malin
méprifa leur ignorance, & en fit
le récit à
Kubens , qui ayant vu
la pièce, lui paya la fomme dont
il étoit convenu avec ces Chefs-
Doyens.

A la quatrième colonne, fur l'Au-
tel, on voit un tableau peint par
Otto Venius , qui repréfente Notre-
Sei2:neur au milieu des Pécheurs
convertis*

A la cinquième colonne , on voit
un tableau peint par
Vos , lequel
repréfente Notre-Seigneur qui mul-
tiplie les cinq pains & les deux poif-
fonSo P

-ocr page 233-

22(5 l ê peintre

A la fixième , tin autre , pemt
par
de Kyck, dont le fnjet efi le mar-
tyre de Saint Mathias lapidé. L'on
Toit encore un autre tableau du
mcme Saint, de la main ^Ar^onts ,
de MalineSj où celui-ci lui donne
pour martyre la décollation.

A la feptième, l'Autel eft dédié
à Saint Michel , Patron du Ser-
ment des Maîtres en fait d'Armes,
autrement dit des Efcrimeurs : le
tableau de cet Autel eft la Chute
des Anges, peint par F.
Fioris, Cet-
te Peinture eft fort renommée, tant
pour la beauté de l'ouvrage, que
pour une mouche guêpe , qu'on voit
fur la cuiffe d'un des Anges rébel-
îes j qu'on dit y avoir été peinte
& ajoutée par
fhinûn Matfys, après
fon retour d'Italie. L'hiftoire qu'on
nous a faite à ce fujet , mérite de
trouver place ici : §jf intm qui étoit
Maréchal de profefîion, épris des
charmes de la fille de
Fioris, la
rechercha en mariage, mais il en
fat méprifé , parcequ'elle vouloiî

-ocr page 234-

ylm^ te m et cur le ux,
pour mari un Peintre & non un
MarécliaL §umfm abandonna lj|.<
forge & le marteau, & guidé par
l'amour il fit des progrès fi éton-
nans dans la Peinture , qu'en moins
de quatre ans , qu'il pafla dans les.
plus célébrés Académies de l'Italie,
il fe crut en état de pouvoir fléchir
le cœur de fa maîtreffe : à cet efïèt
il quitta l'Italie , & à fon retour
voulant lui donner des preuves de
fà confiance & de fon favoir faire,
il lui rendit vifite, & fe trouvant
feul dans le laboratoire de
Fions ^
il y peignit cette fameufe Mouche
guêpe, 6c quelques clefs fur îa fer-
rure d'une armoire.
Fions de re-
tour chez lui, fut frappé d'un pa-
reil événement, & ayant queftion-
lié fa fille à ce fujet, elle lui dit
que ^uinîïn étoit venu la voir.
Floris à ces traits connut la force
de l'amour , & confentit, dit - on,
au mariage de fa fille avec cet
amant. Pour moi, je doute de la
réalité de cette hiftoire , que }
q crois

P ij

-ocr page 235-

LE PEINTRÈ
n'avoir été faite que pour rendre'
la mouche guêpe plus recomman-
dable, ce qui me le confirme da-
vantage eft que je me reffouviens
d'avoir lu quelque part, que §>mn-
tin étoit mort plus de quatorze
ans, avant
Fkris.

Dans la Chapelle du Saint Sacre-
ment , on voit 3 tant pour le colo-
ris & l'exprefTion des vifages, que
pour la compofition &c îa délica-
tefTe du pinceau , une très - belle
piece
d'O^aviô vm Veen , qui re-
préfente la derniere Cène ; c'eft un
des meilleurs ouvrages que ce grand
Génie a produits.

A une colonne , près de la Chaire
de vérité , eft une Epitaphe de la
famille de Heemfens : le tableau eit
de H",
vân Baelen , & le payfagé
de
 BreugeL

Dans la fécondé nef , il y a une
autre Epitaphe , auffi attachée à
une colonne, de la famille de Clair-
mont. Le tableau qui repréfente
l'AdoratiQH des trois Rois, eft

-ocr page 236-

AMATEVR ET CURIEUX.
ê^Jlbert Durer 6c de Jofeph njdn.
Cleef.

. Sur l'Autel du vieux Serment de
l'arc, on voit un tableau peint par
Aî. Coxie, autrement nommé le
Kaphaè'l de U Flandre :
ce tableau
eft le martyre^ de Saint Sébaftien,
Derriere les chandelliers , on voit
un Crucifix avec quelques portraits,
par le même
Coxie,

Sur l'Autel du Serment des Fu'
filiers cfl une defcente de la Croix,
par Kubepis. Sur l'un des volets,
on voit Saint Simeon tenant l'En-
fant Jefus fur fes bras, & fur l'au-
tre la Sainte Vierge Se Sainte Eli-
ûbetli y & lorfqu'ils font fermés,
on voit fur leurs revers St. Chrif^
tophe, leur Patron,

On prétend que Kuhens a peint
ce tableau en reconnoiflance d'un
petit coin de leur jardin, qu'ils lui
avoient cédés pour l'embeliifïèment
^ l'agrandifîement de la maifon
qu'il faifoit bâtir alors. Cette mai-
fon fubfifte encore, porte ainâ

-ocr page 237-

230 LE PEINTRE
que la mè" le nom de Kuhfî},
Dans le tems que ce Peintre don-
noit la demiere main à ce tableau,
il reçut la vifite des Chefs-Doyens ,
Se comme les volets, qui devoient
le renfermer, en étoient ouverts, ils
furent furpris de n'y pas voir leur
Patron.
Kubens connut leur embar-
ras , & leur dit, je veux vous met-
tre au fait de l'hiftoire que je trai-
te : Chriftopharus fignifie
Chrif-
tum ferre , ou porter le Chrift : les
figures qui font fur ce tableau
fe
prêtent la main pour décendre le
Chrift de la Croix & le porter. St.
Simeon qui a le Chriit fur fes bras
ie porte , par conféquent il eft Chrif-
tophorus. La Sainte Vierge , en-
ceinte porte le Chrift. . . . îl al-
loit continuer , loriqu'il apperçut
par le morne ïilence de ces Mef-
Îîeurs , qu'ils vouloient autre cho-
fe que des métaphores , c'eft pour-
quoi à fur & à mefiire qu'il fermoit
les volets de fon tableau , comme
ils virent înfenfiblement paroître

-ocr page 238-

AMATEUR ET CURIEUX.
leur bon Patron, de la trifteffe ils
pafférent à la plus grande joye,
principalement lorfqu'ils Tapperçu-
rent en fon entier , & d'une gran-
deur étonnante, ils en refteteiit com-
me pétrifiés j en un mot, très-con-
tens de cette figure Gigaatefque,
fans donner le tems à
K.uhens de
faire lanalyfe de fon ouvrage, ils
fe retirèrent Se le laifTerent dans Té-
toniiement de leur ftupide ignoran-
ce. Aufîi au même inftant il leur
ajouta fur le même tableau deux
autres figures, favoir , un hibou
dans les airs , &C un turbot dans
les eaux : ce furent là les fymboles
qu'il crut devoir donner à des Con-
noifTeurs de cette elpéce , ils fiib-
fiftent & fe voyent encore fur ce
tableau, qui eft un chef-d'œuvre ,
tant pour la compofition des colo-
ris que pour le deflèin. Ce magni-
fique tableau fuffit feul pour faire
connoître à quel point ce grand
homme a poufïe l'art de la Peinture r
on l'a gravé par L. VofierTnafi,

-ocr page 239-

?32 LE PEINTRE

Quelques Critiques débitent qu'iî
a péché fouvent contre le defTein ;
je ne fuis point de leur fentiment j
j'admire au contraire la grande
beauté des contours & des mufcles,
qu'il a toujours fu donner à Tes figu-
res , & j'ajoute que toutes fes attitu-
des font libres & naturelles, fes ex-
prefîions vives, & que nul autre
que lui n'a jamais mieux entendu le
clair - obfcur , tant en particulier
fur chacun des objets , que dans
l'afTemblage fur les grouppes.
Ses comportions font belles &
grandes , fes idées fublimes & no-
bles , & l'éclat de fon coloris
eft merveilleux. Je dois dire enco-
re i que s'il a manqué à quelque
chofe , ça été plutôt par trop de
vivacité & de feu que par le défaut
de favoir exécuter correctement.
En effet on lui a commencer &
achever des pièces de quinze à fei-
ze pieds de hauteur en trois ou
quatre jours : l'on donne même pour
un fait confiant qu'il n'en a em-.

-ocr page 240-

ji m a te ur et cvrie ux. 13 g
ployé que huit au tableau du maî-
tre-Autel de rEelife de St. Michel
à Anvers. Avant que TEglife des Jé-
fuites de la même Ville fat brûlée ,
on y montroit un plafond qu'il avoit
peint en quatre heures de tems ;
c'étoit autant de coups de Maî-
tre , auxquels nul autre avant èc
après lui n'a pu atteindre. Outre
ce talent heureux, il pofledoit en-
core celui des fciences & des belles-
lettres : dans l'an dans l'autre
genre, il a donné à fon Souverain
des preuves authentiques de la fu-
périorité de fon génie.

Ce tableau a été copié par J.
J. um Opftal, pour le Maréchal
de Villeroi, l'an 1704 , & envoyé
en France. On dit que cette co-
pie eft fi régulière & fi bien imi-
tée , qu'elle elt auffi belle que l'ori-
ginal même., ce que je nie abfolu-
ïïient, attendu que les couleurs &
les teintes du tableau original de Ku-
^^^s étant changées par le tems 5
auquel toutes couleurs font tiffij-

m

-ocr page 241-

234 ^ ^ PEINTRE
jetties 5 celles de la copie ayant à
efîiiyer le mcme fort, elles cour-
rent le mcme hazard que les diffé-
rentes pièces qui ont en le malheur
d'éprouver avec le tems un chan-
gement total dans le coloris.

Dans le circuit du Chœur, à
droite , la première Chapelle eft
celle des Tailleurs j dont le tableau
de TAutel repréfente l'Adoration
des trois Rois. Ce tableau eft peint
par P.
va/ï Aiol, l'un des difciples
de Kabcns. Ce Peintre étant encore
jeune paffa en France, où quelques
années après il fut fait Direéleur
de l'Académie Royale de Peinture
& Sculpture.

Vis-à-vis cette Chapelle , on voit
une Epitaphe attachée à une Co-
lonne , elle indiqae la famille de
Moretus. Le tableau peint par Ktt-
hens repréfente la Rcfurreélion de
Notre-Seigneur ; fur l'un des bat-
tans eft Saint Jean , & fur l'autre
Sainte Catherine. Dans le fi-onti-
Ipice on voit le portrait de Mo-

-ocr page 242-

AMATEUR ET CURIEUX. 235-
retus ; il y a une ellampe de ce ta-
bleau , gravée par
S. A. Bolfwert.

A la colonne plus avant, on voir
une autre Epitaphe , peinte par
Jac-
ques de Backer , dont le tableau &
les deux battans repréfentent le
dernier Jugement : ce tableau eft
bien correâ: & bien deffiné.

Dans la Chapelle fuivante , fîir
l'Autel, on voit une copie d'un ta-
bleau d'après
'va^ Dyck , dont l'ori-
ginal eft à Termonde dans l'Eglifè
des Capucins.

Plus avant, dans la Chapelle des
Maîtres d'Ecole , eft ilir l'Autel un
tableau avec deux bartans, qui a
été peint par
F, Francken : il re-
préfente Notre - Seigneur entre les
Doéleurs. Ces DocSeurs font, dit-
on , les portraits au naturel des
plus fameux hérétiques du tems de
la révolution.

Dans la Chapelle des Maçons, le'
tableau d'Autel repréfente un fujet
tiré des Ailes des Apôtres, peint par
Francken , le jeune. On y voit auffi

-ocr page 243-

LE PEINTRE
i'Epitapiie de la famille de Gobau,
attachée à la colonne entre ces deux
dernières Chapelles : le tableau re-
prcfente la Sainte Vierge l'En-
fant Jefus > ^ deux portraits peints
par
B<.ubens.

Dans la Chapelle des Cordonniers
eft le tableau du martyre de Saints
Crifpinien & Créfpin, peint par
A.
Francken , le 'vieux.
On voit auffi.
dans cette même Chapelle une Epi-
taphe très-belle du doâe Seigneur
Gevartius , faite par
Artus
nus
.d'après le deffein de 'Kuhens :
il y a une eltampe de cette Epi-
taphe.

La Chapelle plus avant eft celle
des Marchands de Vin ; le tableau
d'Autel repréfente les Noces de
Cana en Galilce , il eft peint par
M. de Vos.

Comme le grand Autel à deux
faces, on voit fur celle de derrière
un tableau, peint par AbrahAm Mat^
thyjfens.

Pans la Chapelle fuivante, qui

-ocr page 244-

yîMJTEURETCÛRÎËUX. û^f
tft celle des Pelletiers. On y voit
un tableau repîéfentant llncréduli-^
té de Saint Thomas ; far l'un des
battans eft peint le Baptême de Je-
fus-Chrift, & fur l'autre la Dé-^
collation de Saint Jean - Baptifte«
Ces tableaux font peints par
Mar-
tin de Vos
: ce font les meilleurs
qu'il ait jamais fait. L'on voit dans
cette même Chapelle un portrait,
peint par lunetier, qui eft celui du
Chantre Kockx.

Dans h Chapelle des Peintres,
on voit le tableau de Saint Luc j
leur Patron, occupé à peindre la
Sainte Vierge & l'Enfant Jefus 5
il y a deux battans à ce tableau,
dont l'un eft peint par
A. Franc-
ken,
& l'autre par Ocîavio van

Dans la Chapelle fuivante , à
i oppofire des fenêtres , on voit
lin grand tableau, peint par 'E.
§^ïlmiis , qui rèpréfente les trois
Rois.

Plus avant eft la Chapelle des

-ocr page 245-

13^ leveintre
Menuifiers, ,dont le tableau efl la
Prédication de Saint Jean-Baptifte ,
il eft peint par
H. ^an Baelen , le
vieux
i c'eft un des chef - d'œuvres
de ce Peintre.

Dans celle de Saint Antoi-
ne , qui termine le circuit du
Chœur, eft le tableau de ce Saint
& fa tentation au défert; fur les
battans font repréfentés Saint Hu-
bert & Saint Roch : le tout peint
par
AI. de Vos,

Dans la croix de cette Eglife , à
gauche , on voit deux Autels, dont
l'un à droite appartient aux Con-
freres de l'Arbalète j le tableau de
l'Autel repréfente Notre-Seigneur,
Saint Pierre & Saint Paul 5 fur l'un
des battans eft peint le Baptême de
l'Empereur Conftantin , & fur l'au-
tre eft repréfentée la Conftruélion
de
rEgliiè de Saint Pierre à R orne :
quand les battans font fermés, on
voit Saint Georges à Cheval. Sur
les côtés & derrière les chandel-
liers, font encore trois tableaux de

-ocr page 246-

amateur et curieux. 239
moyenne grandeur , peints par le
même : les couleurs en font très-
vives & très-belles. Il paroît que
le Peintre a plus étudié la viva-
cité des couleurs, que leur harmo-
nie 5 lés drapperies font un peu mes-
quines & dans le goût Gothique,
au refte tous les objets font égale-
ment finis.

A gauche , le tableau qui eft au-
devant de l'Autel de la Confrérie
de l'Arbalète Mineure, repréfente
là Décollation de Saint Georges ;
il eft peint par
C. Schut.

Entre ces deux Autels eft la Cha-
pelle de la Circoncifion : le tableau
qui ell: au - devant reprc fente le
Chrift defcendu de la Croix , & po~
fé llir les génoux de la vSainte Vier-
ge ; il eft accompagné de plufieurs
autres figures , comme de Saint
Jean , de la Madeleine, &c. Au cô-
té droit, on voit Saint Jean dans

chaudière d'huile ; à gauche , la
î^ête de Saint Jean-Baptifce fur une
table 4 devant Hérodias qui eft dans

-ocr page 247-

240 LE P E J îsr T R E
l'attitude d'une femme danfantéi
Ce tableau peint par
^uintin Jidat-
fys
, fe fermoit autrefois avec deux
volets, qui font adueilement ôtés
& placés dans les deux ailes de
l'Autel. Encore qu'il y ait près de
x5o ans C^) que cette pièce eft
peinte , les couleurs en font fi bel-
les & fi vives , qu'on croit voir une
mignature ; c eft pourquoi lorfque
les Etrangers ont examiné le Chrif-
topliorus de
Kubens, & le tableau
de
F. Floris , dans lequel, comme
je l'ai dit ci-devant, la Mouche
Guêpe eft peinte fur la cuifle d'un
Ange rebelle, on les mene voir
ce dernier comme une rareté, que
l'on croit digne de leur attention.
Quant à moi je n'y trouve pas l'en-
tendement de peri|)edive aërienne s
celle deperfpeélive &d'archite6lure,
bien obfervé ; je n'y rencontre pas
non-plus l'entendement du clair-ob-

fcut'

( * ) i^Jiinùn tll mort à Anvers l'an 1529«

-ocr page 248-

^ MOTEUR ET CURIEUX. 241
fcur bien exécuré, au contraire fy .
ai découvert des contours fecs , éc
des drapperies confufes , par rap-
port à la grande quantité de plis ;
en un mot, dans cet air gothique
je crois y voir la peinture dans fon
enfance , cependant bien des gens
l'admirent encore aujourd'hui.

Le plafond du Dôme eft peint
par
Corneille Schut : l'AfTomption
de la Sainte Vierge fait le tableau
du maître-Autel, c eft une très-bel-
le piece remplie de morceaux ex-
cellens, pour laquelle KubemTiXQ-
çu feize cens florins de làlaire : on
prétend qu'elle a été peinte & ache-
vée en huit jours.

Sur TAutel de la féconde colon-
ne 5 à gauche , il y a une Sainte
Famille, peinte par
JldichelCoxie^
ou comme je l'ai déjà dit, par le Ra-
phaël de la Flandre
; cette piece eft
admirable , fi belle & fi corre(5le
en toutes fes parties, qu'on peut
à jufte titre placer ce Peintre par-
mi les plus grands hommes de fon

Q.

-ocr page 249-

LE PEINTRE
lîécle, on a vu plufîeurs fois Titt-
hens en admîratioçi devant cette-
pièce , & lorfque quelqu'un lui dr-
foit que ce Peintre avoit voulu co-
pier Raphaël, il leur répondoit le
proverbe flamand ,
Kaepe^ fyn goet
ds die wel gekooekt fyn
j c'eft-à-dire ,
qu'il eft permis de le faire quand
on pille avec bon fens , & dans
le goût que ce Peintre s'y pre~
noir.

Mais quelques Peintres de nos
jours pillent avec fi peu de juge-
ment , qu'ils ne font pas honteux de
placer dans un même tableau des
figures de iV.
Voujfin, de C. le Brun,
de Kubifts, de 'van Dyck, &Cc. ce qui
fait un très - mauvais effet j mal-
gré cela on ne laifle pas de trou-
ver des ignorans qui applaudifïent
ces fortes d'ouvrages ou peintures.

A la troifième colonne eit placé
le tableau de Sainte Catherine en-
tre les Do6leurs
î il eft peint par
P. Eykem-, le "vieux.
La NaifTance de Notre-Seigneur,

-ocr page 250-

AMATEUR ET CURIEUX.
peinte par F, Fioris, eft à rAutel
de la quatrième : ÔC à la cinquiè-
me , on voit Saint Eloy Prêchant;
ce tableau eft peint par
F. Pour-
bus.

Le tableau qui repréfente la Ré-
fiirredlion de Notre-Seigneur, peint
par
M. de Vos , eft à la fixième
colonne : à la feptième , on y
voit le martyre de Saints Cofme
& Damien j peint par
'van Cleef.

L'Autel de la Chapelle de No-
tre-Dame mérite d'être vu , il eft
tout de marbre blanc j on y admi-
re dans les bas réliefs les talens
fupérieurs en ce genre des fameux
ÏP^illemfens & ^Uims. Dieu le Pè-
re & quelques Anges, aufTi de mar-
bre blanc , font fur le frontilpice
de cet Autel.

Sortant de cette Chapelle , on
"V'oit à la quatrième colonne une
Epitaphe de la Famille de Michiel-
fens , peinte par
Kubem ; le tableau
îepréfente un Çhrift mort, où les
%ures , qui font à demi - corps ,

-ocr page 251-

244 L ^ f E I N T R É
fembient fe préparer à l'enfevelif.

Sur un des volets, on a peint
en-dedans la Sainte Vierge & l'En-
fant Jefu^ î & fur l'autre , Saint
Jean l'Evangelifte j en dehors ,
la Sainte Vierge Ôc Notre-Sei-
gneur.

Il y a une antre Epicaphe à k
même colonne j la Sainte Vierge ,
qui tient l'Enfant Jefus fur fes ge-
noux, eit de marbre blanc. L'on
y voit im portrait peint par van.
Dyck, d'après lequel on a gravé
une eflampe.

Saint ïves ou Gommaire eft re-
préfenté fur TAutel des Fcndeurs de
Bois : ce tableau eft marqué
H. B. F.
1607 y Se eft peint par Francken.

Sur f Autel, pltis avant, on voit
la Fuite en Egypte , peinte par:
jMarc-Antome Garibaldo.

Le tableau d'Autel qui eft le der^-
nier dans la fécondé petite nef,
quand on entre par la grande por-
te j eft peint par
G, Afaes : il repré^
fente le martyre de Ste. Lucie,

-ocr page 252-

jamateur et curieux. 245
On voit en outre contre la mu-
faille de îa façade de cette Egîife,
lin tableau peint par
Dieu - Donné
Delmont
, qui repréfènte la Trans-
figuration de Notrc-Seigneur.

La Paroisse i)e Saint
Jacques.

A l'entrée du Chœur, fur l'un
•des deux petits Autels, eft peinte
l'Affomption de la Sainte Vierge,
par
F. Boeyermdm î & fiir l'autre
fon Agonie, par
§uilltn.

Le maître-Autel eft fuperbe , &
conftruit avec beaucoup d'art en
marbre blanc , par les fameux
W^il-
lemfens
& , Sculpteurs. Le

Patron de cette Egliiê , fait le fu-
jet du tableau de cet Autel

Celui de la Chapelle du Saint
Sacrement eft auffi. fait par les mê-
mes Maîtres en marbre blanc : fut
cet Autel eft le tableau des Apô-
tres Saint Pierre & Saint Paul j
toutes ces pieces font comme au-

-ocr page 253-

t E PEINTRE
tant de chef- d'oeuvres, ainiî que
celui qui repréfente la Cène, peint
par
Otto Venius ou van Veen.

On voit fur l'Autel de la pre-
mière Chapelle, derriere celle du
Saint Sacrement, la Sainte Trini-
té 5 peinte par
van Baelen.

Saint Yves , peint par G. Zegers ,
cft dans la fécondé Chapelle j nous
en avons l'eftampe. Vis-à-vis eft
une Epitaphe de la famille de Geen-
fînts, dont le tableau , peint par
Schut > repréfente un ChriH; mort.

Derriere le maître-Autel, eft la
Chapelle de Kuhem, dans laquelle
il a été enterré le 31 Mai 1640.
Sur l'Autel de cette Chapelle eft
un tableau , peint par lui - même,
qui repréfente la Sainte Vierge afTi-
fe ayant l'Enfant Jefus fur iês gé-
nouxî elle eft accompagnée de St.
Jerôme de Saint Georges, qui
font placés fur le devant de ce ta-
bleau. Ce dernier Saint, qui eft à
la gauche, la banniere à la main,
cft le portrait de Kuhem\ qui s'y

-ocr page 254-

AMATEUR ET CURIEUX. 247
cil: peint lui-même, & ce qui eft
encore plus à remarquer, ce font
ies vifages de la Sainte Vierge , Si
de deux autres Saintes qui repré- .
fentent les trois femmes qu'il a
eues. Ce morceau eft unique, & a
cela de fmgulier, que lorfque l'on
en eft éloigné à une certaine di{^
tance, la peinture en paroît fine &
délicate , & que lorf<.]u'on k voit
de près , elle devient groffiere Ô€
rude. On remarque la même clio-
fe dans plufieurs de fes ouvrages,
fur tout dans fes derniers. Nous
avons une Eftampe de ce tableau >
gravée par
F. Fomius,

On conte à ce fu^et un fait ar-
rivé à
D. Teniers j qui eft, qu'un
jour qiie
'Kuhens mettoit la dernie-
re main à une pièce d'Autel, il
pria
Teniers de lui dire ce qu'il
penfoit dé fon ouvrage : celui - ci
répondit qu'il trouvoit ce morceau
parfait j qu'enfuite
Kuhens ayant
pris & paffé la broffe par delTus,
il laifia
Teniers dans le dernier

-ocr page 255-

LE PEINTRE
étonnement : on ajoute que l'ayant
tenu quelque tems à l'écart, il le
ramena une fécondé fois à fon ta-
bleau , & que lui ayant demandé
ce qu'il penfoit alors de l'ouvrage ,
Teniers revenu comme d'une
ce d'extafe , lui dit avec admira-
tion , qu'il n'auroit jamais cru ce
qu'il venoit de voir.

Dans la fécondé Chapelle , on
remarque un tableau peint par J.
Jordaem , qui repréfente la Sainte
Vierge &c plufieurs Saints
î & dans
la Chapelle fuivante la Vifitation
de Sainte Elifabeth : ce tableau eft
peint par
Victor, qui a été difci-
ple de
K-ubens, Sur une des colo-
nés du Chœur eft une Epitaphe,
dont le tableau repréfente un Chrift
mort & pofé fur les genoux de la
^ Sainte Vierge : c eft un des bons
morceaux de C.
Schut. Derrière la
Chaire de Vérité eft la Chapelle de
Saint Roch, dont le tableau d'Au-
tel , qui repréfente ce Saint , eft
peint par
G. Zegers,

-ocr page 256-

AMATEUR ET eu RI EUX, 24??

A la derniere colonne , fur la
droite en entrant , eft TEpitaphe
de H. vm Baclen^ au-devant de
laquelle eft la Réfurreclion de No-
tre-Seigneur, ouvrage de ce Pein-
tre, de même que dans le fronti-
Ipiee fon portrait & celui de fa
femme.

La Paroisse de Saint
Wa l b u r g e.

Comme il me reftoit encore à
voir plufieurs Cabinets , & les Egli-
fes de Saint Walburge , de Saint
André, de Saint Georges, & celle
de l'Abbaye de Saint Michel, j'en-
gageai un de mes amis à venir me
prendre le lendemain de bonne
heure, dans l'endroit où j'étoislo-
gé, Nous nous rendîmes enfemble
à Saint Walburge, où je vis ce fa-
meux tableau de l'Elévation de la
Croix , par
Kuhe^s, Il eft peint aufli
hardiment & auffi artiftement,
qu'on puiflTe fe Timaginer. Tou t pa-

-ocr page 257-

SCÔ LE PEINTRE

y

roit y être en mouvement, toutes
les attitudes des figures qui y font
repréfentées font fimples &c natu-
relles , les effets des palTions y font
auffi vrais èc aufTi bien exprimés
qu'on puiiTe le défirer , ce qui fe
trouve bien rarement dans nos au-
tres Maîtres en peinture. Les cou-
leurs font fraîches & très - vives j
dans plufieurs endroits elles y font
employées fort épaiffes 6c fort grof-
fieres, & dans d'autres fort légè-
res 5 deforte qu'on y voit à tra-
vers le fond du panneau , princi-
palement dans les grandes parties
d'ombre. On pourroit dire qu'il a
badiné avec la brofïe & avec les
couleurs, ce qui toutes-fois fait
connoître fa grande capacité, & le
talent fupérieur qu'il avoit pour les
fortes expreffions. H.
Withdoeck a
gravé l'Eftampe de ce tableau
des deux battans qui le renferment,
îefquels font pofés à chaque côté
de la pièce principale, de façon qu'ils
peuvent être vus en-dedans en-

-ocr page 258-

amatexjretcurieux. 251
dehors en les faifant tourner avec
la main fur une efpece de pivot^j
fur les dehors de ces deux battans
on voit Saint Eloy & Sainte Ca-
therine.

Depuis le changement de cet Au- .
tel, on a vendu trois petites piè-
ces , qui y étoient pofées vers l'an
1736 ou 37; elles repréfentoient,
Tune UQ Chrift en croix ; l'autre la
mort de Saint Walburge
5 & la troi-
fième, des Anges qui enlevent le
corps de ce Saint.
De Koré, Pein-
tre Anverfois, qui demeuroit pour
lors à la Haye, Amateur Con-
noiïTeur, les a achetées pour une
fomme modique.

Dans le meme Chœur , fur la
gauche, eft l'Epitaphe de la famil-
le de
Cockx , dont le tableau efi:
peint par
K.uhens. Vis-à-vis eft cel-
le
âiUovms ou Jrîove, Curé de
cette Eglifeî il étoit Oncle d'Hû-
'uhis ^ Evêque de Malines.

Le tableau .de l'Autel du Saint
Sacrementeftpeint par J.jE. §uillmr,

-ocr page 259-

LE PEINTRE
Après que nous fumes forcis de
î'Eglife, mon ami me fit l'hiftoire
fuivante fur le tableau que je ve-
nois de voir: un jour, me dit-il,
que Kuhefis travailloit au portrait
du Curé, la fille "d'un des Maîtres
de i'Eglife vînt lui faire vifite , &
comme elle refta avec lui jufqua
îa fin de fes ébauches ,
Kubens qui.
étoit galant, la fupplia de lui faire,
l'honneur d'affifter encore le lende-
main à fon travail, à quoi elle con-
fentit : il m'ajouta que
Kuhens qui
avoit trouvé le minois de cette fil-
le gracieux, engagea le Cure de
permettre qu'il fît fon portrait dans
le même terns qu'il travailleroit au
lien, ce qu'il obtint aifément j pour
cet effet il pofa une toile toute
prête derrière le tableau du Curé ,
& le lendemain , lorfque ce Prê-
tre & la fille furent afTemblés chez
lui, il fit le portrait de cette belle,
fans qu'elle s'en apperçut
î auffi fut
elle faifie d'étonnement quand elle
vit £à refTemblaAce parÊiite en me-

-ocr page 260-

AMATEUR ET CURIEUX, afg
me tems que celle du Curé. Elle
revint cependant de fa furprife,
avec un air gracieux , fe voyant û
joliment peinte, elle en témoigna
à Kube^s toute fa reconnoiffance.

Quelques jours après , le Curé
fit voir au Pere de la fille les deux
portraits, & lui demanda s'il con-
noifToit les perfonnages ? Cet hom-
me dans le dernier étonnement, con-
vint que c'étoit le portrait de fa fille ;
enfin le dénouement de cette fcene
galante fut de procurer à
Kuhem
la permifTion de vôir la belle &
de convenir de prix avec le Curé »
le Pere de cette Demoifelle,
pour cette fameufe pièce de TEle-
vation de la Croix de Jefas-Chrift,
laquelle ayant été placée, fut cri-
tiquée , & le Peintre traité de bar-
bouilleur. Cette fille fot quelque
tems fans fréquenter
Kuhem , fuc
quelques petits difFérens furvenus
entr'elle & lui. A la fin, l'indiffé-
rence faifant place au mérite, il de-
vint du coafèntement
eu Pere ,

-ocr page 261-

HJ^ LE PEINTRE
l'époux de cette belle, dont il réta-
blit la réputation , à laquelle elle
fembloit avoir donné quelque at-
teinte par les trop fréquentes vifites
qu'elle lui faifoit dans le commen-
cement de fa connoiffance avec lui,

La Paroisse de Saint
G e orge.

vSur le maître-Autel de cette Egli-
fe eft le martyre de Saint George,
peint par
G. Aîaes.

Dans la Chapelle du Saint Sacre-
ment, on voit la Cene de Notre-
Seigneur, peinte par
de Vos i
& dans celle de Notre-Dame , l'Af-
fomption de la Sainte Vierge, par
y. Tyjfens.

A l'oppofite de l'Autel de la Sain-
te Croix , eft l'Epitaphe de
Jeatt
Breugel de Velour
, avec fon por-
trait j peint par Kuhem. Il 37- a une
Eftampe de cette Epitaphe.

Vis-à-vis la Chaire de Vérité eft
une autre Epitaphe de
Jem Snel-

-ocr page 262-

AMATEUR ET CURIEUX, s^t
iiîis, mort en 1636, âgé de vingt-
quatre ans. Le tableau eft ^Am.uar^
I>yck ; nous l'avons en Eftampe.

La Paroisse de Saint
A n d r e'.

Sur le maître-Autel on voit le'
martyre de Saint André, peint par
Ocidvio 'van Veen,

Dans la Chapelle du Saint Sa-
crement eft la Cène de Nôtre-Sei-
gneur i c'eft un chef-d'œuvre du
'^ieux JEjkens.

Sur l'Autel de l'Ange Gardien,
cet Ange y eft repréienté , peint
par E. ^jiîlUnus,

Sur celui de la Confrérie des Mon-
îioyeurs , on voit une hiftoire ti-
rée des A6les des Apôtres, peint©
par
Martin de Vos.

-ocr page 263-

LE PEINTRE

L'A beaye de Saint-
Michel.

Dans l'Eglife de cette Abbaye,
on voit dans le Chœur fur le maî-
tre-Autel , l'Adoration des Rois Ma-
ges, peinte par : le tableau
eft deffiné avec beaucoup de force,
& achevé d'un grand goûtl

On dit que Kubem, qui a com-
mencé & achève ce tableau en
moins de quatorze jours , a reçu
pour falaire autant de cens florins
qu'il y avoit employé de jours »
mais que l'Abbc qui n'étoit pas con-
tent de voir payer les journées de
K.ubem à un fî haut prix, fe con-
tenta du portrait que
Kubem lui
fit pour l'appaifèr. On voit ce por-
trait fur i'Epitaphe de cet Abbé,
proche le maître-Autel. On aflure
qu'on a offert pour ce .portrait au-
tant de florins que Kube/2s en avoit
reçus pour fon tableau de l'Ado-

ration des Mages.

Dans

-ocr page 264-

jÂMATEURErCURIEUÏ. 1^7
bans ia croix de cette Eglife ^
à gauche , on voit un autre tâ^
blêaa peint par ie même ^
& rc-
préfentant Saint Norbert & quel-
ques autres Saints.: On dit que
bem a peint ce tableau pendant fou
féjour en Italie* ;

Sous ia fenetré , à gâucîie decSÊ
Autel, on voit une Epitaphe , dont
le tableau eft peint par
Simon dâ
Voi
, très-bien &: très-agréablement
coloré. On prétend que
Ktibem di-
fôit ! .j quand . quelqu'un le follici-
toit pour faire fon portrait , que
Simon de J^os s'en acquiteroit mieux
que lui ; ce qui procura à ce der-^
nier beaucoup de pratiques.

A roppofite de cette fenêtre eft
Un tableau 5 peint par E. ^liillin'.
c'eft la plus grande pièce en Pein-
ture que j'aie vue de ma vie/ Ce
tableau a pour fujet,
toile gr ah a--
tum tmm. & ambuU.
Il eft très-bien
^ très-richement compofé.

^ Dans la nef'à droite , on X'oit
^^iriq--tableaux.peints par le même5
^ R

-ocr page 265-

2j8 le P E I NT È n
ils repréfèntent les difFérens marty-
res de plufieurs Réligieux à Gor-
cum.

Mon ami qui avoit une connoiA
fance dans cette Abbaye, deman-
da la permiffion de voir leur Ré-*
feéloire , ce qu'on nous accorda
gracieufement. Nous y vîmes ïèpt
tableaux ^ peints par le même ^/Z-
//>, ils repréfèntent \ divers fujets
de. la Vie de Notre-Seigneur Jefus-
Chrift, convenable dans une pa-
reille Sale à mangen Sur l'un de
ces tableaux on voit le portrait de
ce Peintre j fur un autre celui de
fon beau - frere
D. Teniers. Les
corps d'Architeélures qui font re-
préfentés dans ces fept tableaux,
font fuperbes > très - richement or-
donnés , & fort bien entencius pour
la perlpe£tive. On admire dans les
ouvrages de ce Peintre , que fes
idées étoient plus vaftes que les
toiles fur lefquelles il les exprimoit-
Il eft difficile de trouver cette ri-
chelTe d'ordonnance dans les Pein^

-ocr page 266-

AMATtm-ETcmmxrx.

très anciens & modernes i car pour
ce qui regarde Thiftoire , 'excepté
Kuhens, SalUr't, Schuf & ,

nous voyons peu d'Italiens qui
ayent eû cette facilité dans la com-
pofîtion..

On voit de plus, dans cette mê-
me Abbaye, un :très-beau Cabinet,
qui appartient à M. l'Abbé , dans
lequel font plufieurs rares tableaux?
entr autres une très-belle pièce de
^intin^ un beau portrait par 21»-
hens j d'autres par vm Dyc,k, pan
Breugel de Velour, par Tenter s,

L'Eglise" pe .l'Hôpital.

On voit dans cette
tableaux de Pepyn, dont le prin-
cipal repréfente Sainte Elifabeth qui
exerce fa libéralité envers les Pau-
vres. Quoique ce Peintre foit peu
connu de bien des Auteurs, il ne
laifTe pas d avoir beaucoup de mé-'
rite, & il doit d'autant plus trou-
ver place ici, qu'il étoit éleve de
J^ube?js, R ij

-ocr page 267-

a^o 'LE PEINTRE

La Salle des Pemtres , 0U>

lAcadame,

la principaîe pièce qu'on faîc
voir dans cette Salle, eft une Sain-
te Famille par
Kubem, avec une
pièce de
G, J\doJla.en. On y remar-
que auffii des ouvrages
à^ Jordaens
éc de quelques autres. Cette Aca-
démie eft afîèz fréquentée , & nous
donne dè tems en tems d'habiles
Maîtres.

• Il me refte à vous dire > Amî
Leéleur , que les tableaux dont j'ai
parlé
Ci-devant, qui fe voy oient
dans le Cabinet de M. de Lunde,
font préfentement chez les Demoi-
felles de Lunde.

Le tableau principal de D. Te-
nier s
, que M. Bifthoven confervoit
âvec grand foin, eft préfentement;
dans le Cabinet de M. Bofchaert >
p!ace de Mcir, Outre le rapt des
Sabines, pièce très - curieufe & de
grande valeur, on y voit encore

-ocr page 268-

AMArEVRETCURlEVX. i6l
Un bon morceau ^Ant. van Dyck^
qui repréfente Saint Seballien.

Chez M. Goubouw , on voit
une Charité d'une beauté & d'une
déiicateffe de pinceau furprenante »
par
A. van Dyck, Ce tableau eft en
Eftampe , gravé par
Caukerken,
y a aufTi une Sainte Famille , pein^
te par
Kubens & gravée par Vofier-
mans.

Chez M. Pieters , me de Kie-
dorp 5 eft une Charité Romaine,
très-belle pièce, peinte par Kubens
& gravée par
Boljwert,

Le portrait de Philippe 11, Roi
d'Efpagne, & celui de fon Epou-
fe, tous deux peints de la main de
van Dyck, font honneur à ce Ca-
binet , à celui qui les poffëde,
ainfi qu'un portraiB d'Homme, peint
par
Kubens jufquaux genoux , &
l'efquiiTe d'Arnaud & Armide afiTez
finie pour tenir rang entre, les ta-
bleaux achevés. Le Duc de Riche-
lieu a préfenté pour cette .efquiffe
deux mille florins, Enfuite im des

-ocr page 269-

26 a LE TE J NT RE
meilleurs tableaux de F. Mok , ro-
prcfenmt la Prédication de Saiat
Jean.,

Le Cabinet du Pere de ce M.
Pieters a été partagé en trois par-
tics , dont celuirci pofTéde une , M.
Pieters une , & M- le Baron d'Eyer-
ftyn la troifième : ces deux der-
niers ont Epoufé deux Demoifelles
Pieters , Sœurs de celui dont je
viens de citer le Cabinet.

Le Chanoine P^rysj, qui eft de
la famille de
Kuhem, du côté de
fa troifième femme , pofTéde en-
tr'autres tableaux rares , le portrait
de
Kubem, un autre portrait d'hom-
me , & deux portraits qui repré-
fentent la fécondé & la troifième
femmes de
Kubem , & un Chrift
en croix j le tout de la main de
ce fameux Maître.

Le Chanoine Knyf , très - digne
& grand Amateur, fait voir dans
fon Cabinet un tableau qui reprc-
fente la Femme trouvée en Adul-
îere>.& menée devant le Seigneur :

-ocr page 270-

AMATEUR ETCtJRJEUX.
pièce très-remarquable , peinte par
le même. Il pofféde auffi plufieurs
autres tableaux de
Berchem, de
Teniers , de Sneyders , de ¥jt, de
Brouwer , des deux Berotio 6c d'au-
tres Maîtres très-renommés.

M. Schilders, rue du Lombard ,
pofféde une dés plus belles pièces
de Cabinet, peinte fur cuivre par
njAn Dyck , & repréfentant une
Sainte Famille. Les figures y font
repréfèntées jufqu'aux génoiix , &
d'un tiers de grandeur naturelle.

Chez M, Pitiers, grande rue de
l'Hôpital , on ydit une. Venus &
un Satyre , très - artiftement peints,
fur panneau par le fameux Kubem ;
ainfi qu'une Sainte Famille repré-
fentée en trois portraits , par
A, vân,
Dyck, avec un autre portrait de ce,
dernier.

M. le Baron d'Everftyn , pofféde
plufieurs excellens tableaux j en-
tr'autres un beau
Breugel de Ve-
lûur
, qui repréfente l'Arche de N oc ;
Une Ecurie ou Etable ornée de

-ocr page 271-

£(54 LE PEINTRE'
figures & beftiaux , par Kubem i
deux Enfans de grandeur- naturel-
le , peints par le même j un très-
beau portrait de
van Dyck-, com-
me auffi plufieurs autres pièces &
raretés.

M. J. van Lancker a un des plus
beaux Cabinets du Pays-Bas, con-
tenant un rïombre confidérablG des-
meilleurs tableaux de ^uhens ^ de
'uan Dyck, à'A. Carats, de Kotté^-
haemer i
de plufieurs Ecoliers de
K.uhens , des W^ouwermam, Bour^
guignon , vm der Aleulen, Breugel
de Velour , Ojlade , Browwer , Te^-
nier s, Aîiris, Gérard D ou , du^ Che-
'Valler njan der W^erf ^ Genfale, Tèr^
burgh,
&c. je me fouviendrai tou-
te ma vie de fon tableau
diJ. Ca-
rats
, ainfi que de fon Kottenhae-
mer ^
qui eft une des plus belles
pièces que j aye vu de ce grand
Peintre. Ce Monfr. fe fait un plaifir
de laifTer voir fon Cabinet aux Cu-
rieux 5 qui fans doute y trouvcranc
à contenter leur Curiofité,

-ocr page 272-

amarétjr et curieux.

M. le Bourguemaître Schorel,
qui eft 'grand Amateur > a auffi une
très-belle colleéliôn tant en ta-
bleaux & en defîèins, qu'enEflam^
pes.

M. Geelandt poflede âuiTi une
des plus brillantes collerions > ôC
eft auffi grand Amateur.

M. van Heurck >. Confeiller de
Commerce , eft de même grand
Amateur & Connoiiïèur. Il poffé-
de plufieurs rares tableaux j ainfi
qu'une centaine de planches très-
belles ï gravées par les meilleurs
Maîtres d'après les ouvrages de
K.uhens & de vm Dyck. Et quoi-
qu'il réllde à Bruxelles, fa derne,u-
re à Anvers qui lui appartient, fat
autrefois celle de
J. jordaens. Elle
eft très-richement décorée de plu-
fleurs plafonds & autres ouvrages,
peints de la main de ce Peintre.

M. J. de Wit , Négociant , de
fon vivant très-Curieux , polfedoic
une des plus illuftres Colledions
de tout le Pays-Bas j laquelle a été

-ocr page 273-

L E PEINTRE
vendue après la mort de Ton Epou-s
fe, le 15 Mai 1741. On y compr
toit treize beaux tableaux de
P.
ll^ouwermans ;
plus la famille de
van Laers , peinte par
A. van- Djck s
confiftant en trois figures de gran-
deur naturelle jufqu'aux genoux.
Ce tableau a été acheté par M. van
Loo , Amateur & Marchand de
cette Ville. Il y avoit auffi une
Sainte Généalogie , la mcme qu'on
voit à Bruxelles dans l'Eglife de St.
Jacques, autrement dite de Cou-
denbergh. Cette pièce a été ache-
tée par M. de Bot, Amateur ôc
Marchand de cette Ville. Outre
les tableaux ci - defïùs défignés , il
y en avoit encore plufieurs autres
iufqu^au nombre de 451 5 dont le
Ledeur Curieux peut prendre con-
noifTançe dans le Catalogue im-
primé.

M. Lombaerts , Confeiljer Inti-
me de S. A. le Prince Palatin , a
les mêmes fentimens , & pofîëde
^uffi plufieurs belles pièces
5

-ocr page 274-

AMATEUR ET CURIEUX, léy
tr'autres une très-remarquable, re-^
préfentant une réjouifiTance flaman-
de , d'une compofition très ^ libre ,
très-riche & très-gaie.

Il y a encore en cette Ville nom-?
bre d'autres Amateurs, qui ont de
beaux Cabinets de Peinture, tels
que MefTieurs Kock , Fierens ,
Wichters , & Promme, Sneyers qui
eft mort depuis ans, étoit

auffi grand Amateur, Négociant &
Connoifîèur,

Abeaye de Tongerlo,
dans la Campine,

On voit dans l'Eglife de cette
Abbaye un tableau très-renommé,
qui repréfente la Cène. Les Réli-
gieux de cette Abbaye croyent que
c eft un original de
'Léonard da
^inci i pour moi, je me fouviens
avoir lu dans la vie de ce Peiri-
qu'il a peint ce fujet à frefque
^ans le Réfedoire des R R. P P-,
Dominicains à Milan, J-e
Chgew

-ocr page 275-

Ê68 le peintre

de cette Abbaye eft orné de qua-
tre grands tableaux, peints
lin. Sur un des Autels de cette
Eglife , on voit une très-belle pie-'
ce, peinte par
W^illehors , repréfen-
tant un Ange » la Madelaine ÔC
l'Enfant Prodigue.

Dans^ le Réfedoire font deux ta^
bleaux du même ^jiillin , d'une
grande & belle compofition, tant
pour l'Architedure qui entre dans
ces tableaux, que ce Peintre en-
tendoit dans la dernière perfec-
tion , que pour la perfpeclive ,
les grouppes , & la diftribution
des jours & des ombres. Une au-
tre pièce peinte par
M.Aes j orne
encore cette place. On y voie
aulTi un Chrift qui eft au - deffus
de la porte, qu'on croit de K.//-
hens.

-ocr page 276-

AMATEUR ET CURIEUX.

WilleB.roud, Paroisse
près d'Anvers.

On voir fur le grand Autel une
Sainte Famille , au nombre de la-^^
quelle Ton a mis St. Willebrord
t
Ce tableau eft peint avec beaucoup'
de force &c de goût par W^ille-
^orts Bojfchaerts.

D u F F ^ X , Paroisse '.
à deux lieues d'Anvers.

Le tableau de l'Autel repréfente
l'Affomption de la Sainte Vierge s
peint par le même
Wtllehorts %
c'eft une très-belle pièce.

wlllebroek, Paroisse.

' On y voit fur l'Autel un ouvra-
ge achevé par
Schut, repréfentant
Saint Nicolas qui guérit un ma-
lade. Il eft en Eltampe gravé par
^ithdo.cK

-ocr page 277-

LE PEINTRE ^
LA VILLE DE LIERRÊ.

L'E glisedé Saint

G o m m a i r e.

Sur le maître-Autel eft un ta-
bleau de Notre-Seigneur crucifié
entre les deux Larrons, & plufieurs
autres figures au bas-j le tout peint
avec beaucoup de force par J-Jor-^
daem.

Dans lenceinte du Chœur, à la
Chapelle de Saint Georges, on voit
le tableau du martyre de ce Saint,
peint par
Kubens. Ce tableau {q
couvre de deux battans , fur l'un
defquels a droite eft repréfenté ce
même Saint ayant un dragon fous
fes- pieds 3 & fur l'autre , Sainte
Agnès & fon mouton.

Dans la Chapelle qui fuit far
TAutel eft un tableau qui repré-
fenté Saint François , qui
reçoit
l'Enfant Jefus des mains de la Ste.
Vierge j fur l'un des battans dexc

-ocr page 278-

AÀÎATEVR ET CURIEUX, a^î
tableau , à droite , eft le même
Saint qui reçoit les ftigmates y
fur l'autre à gauche, S te. Claire.

UEglise dite de l'Hermitage.

Sur le maître-Autel de cette Egli-
fe cft un tableau de la Sainte Vier-
ge qui diftribue le Refaire
î il eft
de la main de
Ktihens, mais peint
avec une préciflon une délica-
teiïe de pinceau qui lurpafTe l'ima-
gination.'

L'Eglise des CHARTREtrx.

Sur l'Autel eft le tableau de
l'Adoration des Rois Mages, peint
par
A. Jmjfens.

Sur les deux petits Autels à
côté, on voit deux tableaux, dont
l'un repré fente la Sainte Vierge ;
^ l'autre un Saint à genoux, peints
par G. BackereeL

-ocr page 279-

B P £ I N T R É
LA. VILLE DE LOUVAî^^.

L'Ëglîse de, Saint Pierre^

X

Dans le circuit du Îiaut-Chœur^
tirant vers le midi, on voit, fiii!
i'Autel d'une des Chapelles ce fa-^
meux tableau j peint par ^mtm
Jldatfys i qui repréfente une Généa-
logie Sacrée > pièce d'un beau fini,
^ dont les couleurs fe foutiennent
en beauté è>c en vigueur. Je ne
trouve pas à propos d'en donnée
Un détail, parceque plufieurs Au-
teurs Tont fait avant moi.

,Le tableau de la Chapelle fui-
vante eft peint par
de Crayer, èC
lepréfentè la Sainte Trinité.

Les vertus Théologales paroiin
fent au-deiïbus j l'Amour accompa-
gné de trois Enfans , eft exprimé
avec tant de grâce , que l'œil refte
fixé comme eti admiration.

La Cène , par JmJfem, fait là
pièce d'Autel du Saint
Sacrement.

Dans

-ocr page 280-

^iMJTEUR ET CURIEUX. 27J»
,, uâds la nef à droite , on voit
ïur l'Autel de Saint Charles Borro-
mée un très - beau itidrceaù de G;

Crayeh

ueigli^e i) e l'Abbaye
de Ste; Gerthude.

Le tableaii dd niaîtré-Aùteî re-
préfente Notre-Seigneûr à la croix
entre les deux Larrons j la Sainte
Vierge , Saint Jeàn ôc. la Madelai-
he font
au - deflbus î le tout très-
tichement compofé & peint par
M.Coxie:

On voit dans cëttë Ëglife une
pièce de
Gî, de Crayer , que bieri
des ConndifTeurs ont pris pour ùri
buvrage de-t/^/i
Dyck,

-ocr page 281-

-74 PE î NT k É

L'E GLisE Paroissialê

de saint q^u e n t i n.

Dans îa croix de cette Eglife , à
gauche fur l'Autel, on voit les Pa-
trons contre la Pefte j très-bien
exprimés par
Cfayer,

UE glise Paroissiale
be Saint Jacques*

La piécé de rAiitel dé la Cha-
pelle des Chaffeurs repréfènte Saint
Hubert prolterné devant un Cru^
cifix qu'un cerf porte entre fon
bois. ; le fond & le payfage font
de
J. Artois ; le Cerf & les chiens
font de
Snejers'^ bc Saint Hubert
eft de
Crayer. Ces trois Maîtres,
chacun pour la part qui les regar-
de, ont donné dans cette pièce des
preuves de leur habileté.

-ocr page 282-

amateur et curieux. 275-

L'E g lise des Religieuses
blanciies, de l'o r d r e

de Saint Norbert,

Le tableau d'Autel qui repréfen-
te l'Adoration des Mages, eft unç
très-belle pièce de P. P.
Kuhens.
EUe eft en Eftarnpe , gravée p^K
T^ithdoeçks,

L'E glise bes grands
Carmes,

Sur l'Autel on voit rcpréfentée
Sainte Catherine , tableau d'un^e
compofition riche ôc d'un beau
fini, par
Crayer,

L'Eglise des Carmelites^

On voit fiir les deux petits Au-
tels deux différentes pièces , dont
l'une eft peinte par
Crayer, ôc l'ailr
çre par
T, van LO0.

-ocr page 283-

$ E I N TR É

L'Eglise des Chanojnesses di
l'Ordre de St. Augïistin.

Le tableau d'Autel, peint par T,
'pan Lûo , u^. très -bpn
çeaii.

L'E GLI S E D1 s A F GU s T I N S.

La pièce du maître-Autel repré-
fente, la Ste. Vierge Ibus un daisj.
Saint Auguftîa, Saint Nicolas To-
îentin & Saint Adrien paroifïent
au-defTous dans des attitudes ad-
mirables î le tout peint au naturel
|)ar
G, de ^rayery

L'E g i- i s e d e s J e's u i t e s,

- Sur te maître-Autel eft reprélen^^
'tée la Sainte Vierge accompagnée.
' ^e plufreurs Saints & Saintes, par

En entrant dans cette Eglifè,
fontre la façade fur la gauche, oa

-ocr page 284-

JMATEVR LT CURIEUX. 277
Voit Saint Ives Patron des Piai-
fieurs , peint par
P. P, KubeMs,
Par les attitudes & par des traits
qu'on rerçiarque dans le vifage des
malheureux prpfternés devant ce
Saint. Ce grand Peintre a exprimé
la défolation que la vermine ron-
geante de la chicanne porte dans
ie fein de plufieurs illuftres Fa-
milles,

Les pièces qu'on voit au-deffiis
des chaires de ConfôfTion, ont été
exécutées par T.
vm Lûo , ^tlli»
& Blendef,
çleve de Bartolet de la
Ville de Liège.

L'E qlîse nu grand
^e'guinage.

Le tableau du maître-Autel qui
f-epréfente rAfcenûon de
Notre-
Seigneur, eft peint par Ce-

lui qui eft adroite, Coutjïers,
repréfente la Sainte Famille j & la
pièce à gauche, repréfente une Ste.
ÇQngtégation ; très - belle pradu,ç^

-ocr page 285-

LE PEINTRE
tion de la main de G. de Crayer-^
Les' pièces qui font pofées le
long des deux bafïès-nefs font pein^
tes par difFérens Maîtres , & mé-.
ritent aufTi quelque attention de^
Amateurs Curieux-

Je crois vqus avoir fait obferyera
^mis Lecleufs , le plus qu'il m'a
été ppfTible , les traits les plus dif-
tingués & les plus remarquables
de nos anciens Maîtres ; il ne me
refte plus à préfent que de m ac-:
quitter envers vous de la promefïè
que je vous ai faite dans ma Pré-
face , de vous donner quelques
cclaircifTemens fur les grandes &
belles maximes qu'obfèrvoient nos
anciens dans h compofition, dans
le defTein corre(51;, dans la perfpec-
tive aërienne
Se d'Architeélure ,
ainfî que dans les grâces des têtes ,
dans les cara6leres des vifages, dans
les racourciffemens & contours cou-
l[ans 5 dans le contrafte du corps
des membres. Sans vouloir entres
dans un trop long détail de ce que je

-ocr page 286-

AMATEUR ET CURIEUX. 279
pourrois vous dire à ce fujet, je me
bornerai pour le préfent à vous met-
tre fous les yeux dix régies ou pré^
ceptes efïèntiels, qu'il vous faut ob-
ferver avec grande attention, i On
remarque fouvent que
Kuhens a
compofé des flijets très-riches dans
un feule grouppe > fon idée ne^
toit affurément autre chofè que de
faifir l'occafion d'oppofer un grand
jour à une grande partie d'ombre,
ce qui produit toujours l'effet ma-
gique que l'on voit dans fes ou^
vrages. Tâchez de fiiivre les
proportions prifès fur les antiques ;
par exemple , pour un homme fore
robufte , celles de l'Hercule ;
pour un homme bien dégagé, cel-
les du Gladiateur j ponr un jeune-
homme , celles du Lantin j & pour
les figures des femmes qui doivent
être plus Sveltes & plus déliées,
celles de la Venus de Grèce, de
Flore ou de Minerve, ainfî que de
la Sainte Catherine du §jiemy qu'on
Toit à Rome. Cette figure eft com^

-ocr page 287-

h E PEINTRE
parable en beauté aux antiques?
3®. Songez aufiTi de mettre toute vo^
çre attention à faire vos deffeins cor-
reâ:sî que vos contours foient grands
& coulans
î qu'ils n'aient rien de
retranchés, ou de maniérés, car ce^
la iènt plus le caprice , que la na-
ture qu'il faut toujours imiter. Cet^
te régie doit être pratiquée après la
compofition, 4^.0brervez que vos.
figures foient de grandeur propor^
tionnée félon la diitance. Ilfauç
aulTi quelles foient plus ou moins,
colorées à proportion qu'elles s'é--
loignent ou avancent
î c'eft la ré-i
gle de la perfpe6tive aérienne, de
la dépend le bon ou mauvais efïèt
de votre ouvrage. Quand je dis U
ferfpe^ive aé'riem^ , j'entends par-
ia , que les objets qui avancent,
doivent être plus forts & plus co--
lorés que ceux qui reculent : par
exemple , dans la figure du Sei-
gneur qui donne les clefs à Saint-
Pierre , peinte par
Kubem dans l'Egli-
|e de Sainte Gudy[le à ^ruxçUes a

-ocr page 288-

.dMjrEURETCURIEVX. aSï
Oii y remarque avec plaUîr quelle
grâce ce grand Peintre a donné
au contour du bras de Notre-Sei-
gneur, & qu'elle attention il a eû
au coloris, à l'ombre & au racour-
çifTement ; ainfi que dans le tableau
qui repréfènte le Chrift mort fur.
les génoux de Dieu le Pere, aux
grands Carmes à Anvers. On pra-
tique aifément la perj[pe£live aérien-
ne dans les Payfàges, dans les Eloi-
gnemens , dans TArchite^lure &
autres objets. Chacun connoît ,
pour ainfi dire, cette régie géné-
rale 5 pourquoi donc ne la pas pra-
tiquer dans le tableau d'hiftoire
Je crois que cela vient de ce qu'on
ne la connoît pas, à fond (\
q. n'en-
tends parler ici que de ceux qui
ne la pratiquent pas. Ainfi je don-
ne pour leçon, qu'ils doivent fon-
ger que l'air, qui eft blanc, étant
mêlé avec l'ornbre qui eft entre
l'objet l'œil de celui qui regarde,
fait un mélangé bleuâtre, ou grifà-
îre, d€ même que les objets qu'om

-ocr page 289-

LE PEINTRE
voit dans un lointain de Payfage %
paroiffent bleuâtres, c'eft-à-dire,
plus ou moins que les objets reçoi-
vent d'ombre. Songez aulTi que les
tableaux ou autres ouvrages en Peinr
ture , qui font vus d'une diftance
éloignée, doivent être plus colorés
rouge âtres dans les parties d'om-
bres & de lumière, que ceux qui font
vus de près, 7°. Les couleurs rou-
ges & celles qui en approchent le
plus, que nous nommons rougeâr
très , étant les plus fortes , fqntpaç
conféquent les plus approchantes :
la raifon elt que les particules ,
dont elles font compofces , ne tienr
nent rien de l'air , mais du feu.
Les couleurs bleues, griûtres , blanr
châtres ou jaunâtres, reculent faci-
lement étant tout-'à-fait contraires
aux précédentes^

8^. Donnez des grâces à vos tctes
& à vos attitudes, ielon que les per-
fonnages le demandent,

Choififïèz les caraéleres des vi?
fages, en fpivant les maximes d®

-ocr page 290-

... JMateûrêTcurîeux.

"^tihens, de Crayer àQvan JDyck,
^iii ont toujours imité ce qu'ils
trouvoient de plus beau dans lâ
nature. ^Tâchez de travailler avec
ia plus grande douceur qu'il vous
fera pofTible, & que vos contours
ne foient pas tranchés j & qu'ils ne
î>aroiiïènt pas. 10°. Enfin, donnez du
feu à vos ouvrages le plus que vous
pourrez j & fi vous fuivez ce que
je viens de vous préfcrire , j'ôfe
Vous affurer que
Votis parviendrez
Un jour à cette haute perfedion il
"^^antée dans les ouvrages de nos an-
ciens Maîtres, dont je fouhaite que
"Vous foyez auffi fidèles imitateurs ^
<îiie je cherche moi-même à le de^
"^enir.

Fm du premier Tome.