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PAR
Bibîiotheek
Instituut voor aardwetenschappen
BiJdapestiaan 4
3584 CD Utreoht
4
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V.
LES DUNES INTÉRIEURES, LES TOURBIÈRES BASSES ET LES
OSCILLATIONS DU SOL.
Extrait des Archives Teyler, Série II, T. III, Cinquième Partie.
BIBLIOTHEgK DER
MjKSUNfVî^RSlTEit
UTRECHT
II A A R L E M,
LES HÉRITIERS LOOSJES.
1890.
Contributions à la Géologie des Pays-Bas. V. Les Dunes intérieures, les Tourbières
basses et les 0.scillalions du Sol par Dr. J. LoRn't;.
Introduction. Littérature des Dunes intérieures....................Pag. 1.
Chapitre 1. Nos propres Observations dans les Dunes internes................» 9.
A. Les Dunes au nord du Vieux-Rhin.
Noordvidjk et Noordwijkerhout.
Collines de Rijnsburg, Poelgeest et Leide....................................» 10.
Warmond—Sassenheim..................................................................» "11.
Voorhout-Drechsberg—Kronestein..............................................)) 12.
Hillegont—Heemstede—Harlem.............................................» 14.
Bloemendaal—Zandpoort—Velsen..................................................» 16.
Castricu m —Heemskerk..................................................................» 17.
Limmen—Alkmaar—St. Paneras..................................................» 18.
B. Les Dunes au sud du Vieux-Rhin..................................................» 20.
Wassenaar—La Haye.................................................................))
La Haye—Loosduinen....................................................................» 21.
Voorschoten—Riiswijk—Monster....................................................» 23.
Chapitre IL Hypothèse de la Formation des Dunes intérieures et des
A. Les Dunes et les Vallées.................................
B. Rapport entre la Zone de Sable et les grandes Tourbières..........» 34.
C. Les Environs de Delft......................................................................» 36.
E. Naissance des Cordons littoraux......................................................» 40.
F. Comparaison du „Haff" de Hollande avec quelques autres..........» 43.
Chapitre III. L'Abaissement du Sol et les Tourbières..............................» 47.
A. L'Abaissement du Sol pendant la Période du Zanddiluvium----
B. Les Tourbières des Pays-Bas et de la Belgique............................» 49.
C. L'Abaissement du Sol dans les Temps historiques........................» 53.
D. L'Abaissement du Sol dans les Temps préhistoriques..................» 60.
-ocr page 3-E. Forêts et Tourbières submergées dans le N. 0. de l'Allemagne
et de la France.......................................... Pag. 61.
Chapitre IV. Formation des grandes Tourbières.................... » 65.
A. Hypothèses des différents Auteurs.........................
B. La Tourbe plus ancienne et plus profonde de la Hollande..... » 69.
C. Formation des deux Couches de Tourbe, Emersion temporaire du
Sol et Conséquence de celle-ci.............................. » 71.
D. Appendice. Aperçu des Forages de Zoetermeer, Leide, Vogelen-
zang, Harlem et Overveen................................. » 78.
-ocr page 4-CONTRIBUTIONS
A LA
PAR
V0-
1.ES DUNES INTÉRIEURES, LES TOUPBIKRES BASSES .ET
LES OSCILLATIONS DU SOL.
Introduction. Littérature des Dunes intérieures.
Les paysages les plus pittoresques de notre patrie se trouvent dans
nos provinces orientales d'Utrecht, de la Gueldre et de l'Ovei'ijsel et dans
la partie occidentale des deux provinces de la Hollande Septentrionale
et Méridionale. La cause de ce phénomène est la môme: ,,un sol sableux
et onduleux, qui est plus propre à la culture des forêts qu'à celle du
blé ou des prairies. Le pays entre Harlem et La Haye que nous avons
en vue, est célèbre et par ses forets et ses maisons de campagne, et
par la culture des oignons à fleurs, qui ne se pratique qu'exception-
nellement dans d'autres parties des Pays-Bas.
Celui qui visite cette contrée, est aussitôt frappé par le contraste des
deux éléments du paysage. D'un côté les parties sèches et sableuses,
portant les forêts et les champs d'oignons à fleurs, et de l'aiiti-e des
prairies étendues assez fertiles, semblables à celles de nos provinces
basses. Elles sont à peu près horizontales et ont souvent été confondues
avec les petites vallées dans les dunes (pannes) dont elles dilfèrent pour-
') Les Contributions I, II, III font partie des Archives Teyler, Série II, Torno
11, 111, 4885 ot 1887, et les Contributions IV du Bulletin de la Société bclye de
Géologie, de Paléonlologie et dTIydrologie. Tome HI. Année 1880.
1
-ocr page 5-d2 CONTRIBUTIONS A tA CxÉOLOGIH: DËS PAYS-BAS.
tant considérablement. Elles sont beaucoup plus longues et s'ouvrent
généralement d'un côté dans les vastes prairies de la Hollande et
séparent ainsi les dunes maritimes, qui longent la côte des dunes inté-
rieures („Zeeduinen" et „Binnenduinen"). De temps à autre, ces deux
espèces de dunes se confondent, tandisqu'ailleurs elles sont nettement
séparées. Les ,,Didnpannen', vallées dans les dunes maritimes, au con-
traire, sont partout entourées de dunes.
Voyons ce (jue les dilférents auteurs qui s'en sont occupés ont remarqué
sur leur aspect et ce qu'ils ont pensé de leur mode de formation. En
vérité ce n'est que très peu de chose.
L Le Francq van Berkhey. Réponse à la Question : ,,Quels sont les
moyens de mettre en culture avec le plus de profit nos champs, tant
élevés que bas, chacun d'après sa nature? (holl.). Mémoires de la Société
hollandaise des Sciences de Harlem. VIIL 1765.
L'auteur a observé qu'on „trouve au milieu de nos dunes des vallées
entières. J'en ai vu dans lesquelles le bétail broutait et qui eussent pu
devenir un très bon terrain, si elles avaient été préparées convenablement."
IL Le Francq van Berkhey. Histoire naturelle des Pays-Bas. (holl.).
Vol. H. Amsterdam. 1771.
11 y parle seulement des sablières près de Voorhout, Katwijk-sur-Rhin,
Wassenaar, Hillegom dans les ,,dunes intérieure.s." 11 fait aussi mention
des différentes couches de sable, contenant parfois de la tourbe, à Voor-
hout, Lisse et Noordwijkerhout.
m. J. A. De Luc. Lettres physiques et morales. IL 1771. Pag. 207.
11 remarque qu'on rencontre en Hollande à une distance considérable
de la mer des dunes, comme à Lisse, Hillegom, Hiiis-ten-Deyl, cïtc.
qu'il faut probablement attribuer à un déplacement par le vent.
IV. Même ouvrage. V. 1779. Pag. 311.
11 y dit que: „le canal de Harlem à Leide va au travers des dunes
à Vogelenzang et passe par une petite vallée qui s'élargit et s'ouvre
dans la plaine de Leide. Là,, le terrain devient plus bas, de sorte qu'on
a besoin de mouhns à épuisement." Il a ainsi remarqué très distincte-
tement le point caractéristique de nos vallées dunaires, mais ne paraît
pas avoir continué ses observations.
V. Rapport général de la Commission de Surintendance, sur rExamen
des Dunes, (holl.). Vol. L État actuel des Dunes de la Hollande. 1798.
Pag. 64. Pendant les inspections, il a été remarqué qu'il existe on
Hollande, parallèles aux bancs de sable de la côte, trois chaînes de
dunes séparées par de vastes plaines cultivées. Pour cette raison on
distingue des dunes antérieures, moyennes et postérieures.
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CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS.
Pag. 80. A l'extrémité méridionale d'Egmond, les dunes s'élargissent.
Près du „Vogelwater", non loin d'Egmond, des vallées de dilférente
grandeur commencent et se suivent sans interruption. En plusieurs endroits
la vue n'est interrompue ni devant, ni derrière. Au devant, il n'y a des
hauteurs qu'à Castricum.
Pag. 89. Pans les ,,Heerenduinen" (dunes des seigneurs) à Bloemendaal,
derrière les hauteurs et près, de la mer, il y a des plaines vertes et
couvertes d'herbe.
Pag. 96. Près de Vogelenzang il y a dans les dunes une grande plaine,
traversée par un petit ruisseau, qui contient de l'eau même en été et
se jette dans le canal de Leide. Du „Paardenkerkhof' (ferme) jusqu'à
Noordwijkerhout, il n'y a que des terrains plats, longs de 1100 ,,roe(im"
(une ,,roede" d'Amster-dam = 4,5 M., de Rijnland = 5 M.), donc =
4950 —■ 5500 mètres. Ils ressemblent aux vallées de Heemskerk et de
Castricum.
Pag. 98. Nous fûmes étonnés de voir une grande plaine, longue de
700 roeden (— 3150 — 3500 M.) avec des champs verdoyants.
Pag. 99. Près de Noordvvijkerliout, les dunes se rétrécissent tout à
coup jusqu'à Katwijk.
Pag. 100. A Katwijk, les dunes s'élargissent considérablement jusqu'à
700 roeden.
Scheveningue et ont une largeur de 600
Pag. 102. Près de Wassenaar, il y a des terrains nivelés qui ont été
mis en culture.
Pag. 110. Il y a des dunes intérieures à Eikenduinen et Loosduinen,
derrièi'e lesquelles un ruisseau coule à travers les prairies.
VI. Mi'e I). T. Gevers. Traité sur la possibilité de rendre accessibles les
Vallées dans les Dunes sur les côtes de la Hollande. (holL). Amsterdam. 1826.
Nous croyions trouver quelque chose sur notre sujet dans ce traité,
à en juger d'après le titre; mais l'auteur ne s'y occupe que des petites
vallées en cul-de-sac dans les dunes maritimes (pannes), auxquelles la
question avait rapport. Il conclut que les dunes de Katwijk doivent
leur origine à l'action de la mer, puisqu'on trouve sous elles l'argile
Iluviatile du Rhin. Il est convaincu en outre que les vallées dont il parle
ont été formées par l'érosion du vent (ce qui est aussi notre opinion),
d'autant plus que toutes ont une direction du S.O. au N.E. et sont le
plus bas du côté S.O. (vent prépondérant). Il mentionne en passant le
„Zegveld", vallée entre les dunes maritimes et cehes de Noordwijk-Binnen.
,,C'est une longue zone de prairies avec des ,,watergangs", des fossés et
des habitations." Cette vallée est pourtant dilférente des autres et appar-
tient à celles qui nous occupent.
1*
-ocr page 7-CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '357
II traite également du „Breesaap", grande vallée près de Velsen et
actuellement coupée par le canal maritime d'Amsterdam. Elle était déjà
cultivée en 1728 et suffisamment drainée par un ruisseau qui coule
dans la mer.
VIT. F. Arends. Histoire physique des Côtes de la Mer du Nord.
Groningue 1835. (Traduction hollandaise de l'allemand par Westerholf.)
Vol. I. Pag. 48.
Les dunes qui sont l'une à côté de l'autre forment deux ou trois
rangées, et s'élèvent de 20 à 30, rarement de 50 pieds au-dessus de la
plage; les rangées alternent avec des vallées riantes.
Annotations de Westerholf, pag. 414.
Le nombre des rangées proprement dites monte jusqu'à cinq, dont trois
constituent les chaînes principales. Les dunes intérieures ne se trouvent
pas partout, mais seulement à certains endroits, comme à Castricum,
Harlem, Bennebroek, Hillegom, Lisse, Voorhout, Noordwijk et Wassenaar.
Vin. W. Van den Hull. Sur l'Oiigine et l'Histoire des Dunes hollan-
daises. Harlem. 1838. (holl.).
Ce travail contient le plus de détails sur notre sujet, mais porte
partout les traces du peu d'expérience de l'auteur dans les sciences natu-
relles. Le noyau de son raisonnement sur la matière qui nous occupe
est le suivant.
,,La Mer du Nord a la forme d'un entonnoir, de sorte que l'eau s'y
élève par les tempêtes du nord et s'élèverait davantage encore, si le
Pas de Calais était fermé. C'était le cas plusieurs siècles avant notre
ère. Le niveau y était probablement plus élevé par suite des rivières
qui y jettent leurs eaux, auxquelles se joignent celles de la Baltique.
Par chaque tempête, l'eau de la mer jetait sur la côte du sable qui
était refoulé par l'eau douce de ces rivières et la suite de ces luttes
répétées fut la formation d'une immense digue de sable. Celle-ci jétait
partiellement bouleversée du côté extérieur par la mer pendant la|tem-
pête et du côté intérieur par l'eau des rivières après que la nature
eut reconquis son calme ordinaire. Elle s'étendait de Calais jusqu'au
Cap Skagen, à une distance notable de la côte actuelle."
,,Une grande inondation, probablement le Déluge Cymbrique, causa
la rupture de cette langue de terre et la formation du Pas de Calais.
Le niveau de la Mer du Nord baissa en conséquence, les parties les
plus élevées du banc sortirent des eaux et bientôt le vent y éleva des
dunes. Une autre conséquence fut que le lac d'eau douce derrière cette
digue y ouvrit bientôt une brèche, par laquelle le superllu s'écoula tout
à coup, jusqu'à ce que l'équilibre hydrostatique fut rétabli."
A IL
7
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '5
Van den Hull admet (sans aucune preuve) que „la rupture de la
langue de terre anglo-gauloise eut lieu dans les temps historiques et que
les Carthaginois et les Grecs en profitèrent pour leur commerce d'étain
et de succin. Selon lui, Pytheas de Massilia, contemporain d'Alexandre
le Grand, fut un des premiers navigateurs qui passèrent par la nouvelle
l oute maritime. Treviranus aurait fixé la date de ce déluge en 340 av. C."
,,La première rupture du banc de sable aurait eu lieu près de Katwijk ;
du temps de l'arrivée des Romains il y en avait 2 ou 3. Les dunes
ne se foiinèrent qu'un peu plus tard, puisque leurs chroniqueurs, qui
observaient très bien, n'en parlent point."
„Par suite de l'érosion marine et de l'action du vent, la rangée se
déplaça continuellement vers l'intérieur."
„Les dunes de la Hollande sont très larges à Harlem et à Zandvoort,
ce qui s'explique par la position de ces deux endroits à mi-chemin
entre le Helder et la Meuse, de sorte que les vents du S.O., ainsi que
ceux du N.E., y apportent du sable de la moitié de la chanie. Quant
à l'existence de différentes chaînes de dunes, ce n'est qu'un phénomène
secondaire. Toute la masse de sable entre la Mer du Nord et la ligne
Heemstede—Bennebroek—Hillegom a jadis formé un entier avant l'en-
lèvement d'une grande quantité de sable par l'homme."
,,En 860 eut heu un grand déluge, par suite duqueH'embouchure du
Rhin à Katwijk fut fermée, toute la Hollande, Utrecht et la Betuwe
furent inondées et à Katwijk, le Rhin se fraya un nouveau cours à
Vlaardingen d'un côté et à Egmond et à Petten dans la Hollande Sep-
tentrionale de l'autre. Il croit pouvoir démontrer par des arguments
historiques et archéologiques que cette rivière a coulé entre les dunes
maritimes et les dunes internes de Lisse, Hillegom, Bennebroek et Heem-
stede. Le château do Brederode aurait été un bureau de douane fortifié."
Nous croyons pouvoir quitter ici l'aperçu de cette publication que nous
n'avons mentionnée que parce que l'auteur est le seul qui se soit occupé
(malheureusement avec peu de succès) en détail de la formation des dunes
internes et des longues vallées qui les accompagnent. L'absence totale
d'argile lluviatile dans les deux vallées qui se touchent à Vogelenzang
près de Harlem, eût déjà suffi à rejeter l'hypothèse de cette rivière;
le château de Brederode est aussi situé dans une autre vallée latérale
des dunes et eût été tout à fait impropre à servir de douane.
IX. F. W. Conrad : „Sur les Dunes et les Plages" (holl.) (Contributions
diverses. La Haye. 1849.), ne parle presque pas des dunes internes. Il
les distingue pourtant des vraies dunes maritimes et les croit „formées
par des tempêtes et des déluges." C'est donc bien peu de chose. Selon
d6 CONTRIBUTIONS A tA CxÉOLOGIH: DËS PAYS-BAS.
son opinion, la fermeture de la bouche du Rhin de Katwijk aurait pro-
pablement eu lieu eu 860.
X. Staring, dans son principal ouvrage ,,Le Sol des Pays-Bas" (holl.)
ne fait que toucher à la question. B a pourtant senti la difficulté, mais
ne voit pas de moyen de la résoudre. '
Dans le premier volume, pag. 312—314, il remarque ce qui suit.
,,La forme des dunes entre Flarlem et Warmond près de Leide est
très remarquable et n'est pas encore suffisamment expliquée. Une séiie
ininterrompue de terres sableuses {geestgronden), qui forment de hautes
dunes à Heemstede, Bennebroek et Hillegom, est indépendante et séparée
des dunes maritimes par une zone de terres basses et tourbeuses. Elles
y sont attachées seulement à Vogelenzang par les dunes que coupent
le canal et le chemin de fer. Une répétition du même phénomène sur
une échelle diminuée, s'observe à Noordwijkerhout et à Noordwijk, où
les dunes intérieures sont séparées des dunes maritimes par des terres
plates. Il est difficile de.se représenter la formation des plaines entre
les dunes internes et les maritimes. Elles sont trop étendues pour être
considérées comme des dépressions ordinaires (pannes), qui ne sont autre
chose qu'un terrain plus égal, qui a perdu par dispersion les collines qui
le recouvraient autrefois. Le sous-sol de ces plaines est le même sable
qui se trouve sous les dunes, mais il est situé trop bas pour qu'on
puisse croire à une dispersion de dunes qui l'auraient recouvert. On a
bien pensé autrefois à une érosion par un bras du Rhin qui aurait
cotdé par Noordwijkerhout, Vogelenzang, Overveen et Brederode, mais
la marque caractéristique d'un pareil lit de rivière, l'argile fluviatile, y
manque totalement. Le sable n'y est recouvert que par de la tourbe
et on ne trouve de l'argile que près de Voorhout dans le voisinage
immédiat de celle du Vieux Rhin, et près de Harlem, où elle est cer-
tainement en rapport avec l'Y ou le Lac de Harlem. Une tradition, po-
pulaire veut qu'une grande partie des terres de la plaine basse ait été
mise dans son état actuel par le transport du sable, mais ce n'est qu'une
explication tout à fait arbitraire. Ce désablement n'aurait pu avoir eu
lieu sur une pareille échelle, et d'ailleurs on n'enlève jamais le sable
jusqu'à une profondeur semblable à la base de la couche de tourbe.
Aussi faut-il se demander ce que serait devenu tout ce sable? Harlem
et Leide n'ont pas été notablement rehaussées et Amsterdam a emprunté
l'immense quantité de sable employée pour ses rues et ses digues, à
's Graveland et Naarden. L'explication la plus naturelle nous paraît être
de considérer la dune intérieure entre Harlem et Warmond comme
originale et indépendante et non en rapport avec les dunes maritimes.
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-ocr page 10-CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '7
Elle peut être comparée aux dunes de l'Eyerland, qui étaient séparées
autrefois de celles du Tessel par une plaine de sable, ou bien aux dunes
de Huisduinen qui étaient coupées de celles de Callantsoog. On trouve
d'ailleurs sur le „Koegras" de petites collines de sable, semblables aux
dunes internes."
Nous pouvons souscrire à tout ce que dit Staring sur notre matière ;
il a très bien senti le caractère différent des grandes vallées à côté
des dunes maritimes et des pannes; mais il n'a pas étendu assez loin
ses observations et n'est pas arrivé à un résultat suffisant, ce qui eût
été le cas peut-être, s'il avait compris dans la comparaison les dunes
du „Huis-ten-Deyl" et de Wassenaar, comme l'avait déjà fait Le Francq
van Berkhey (l.c.) dans le siècle précédent.
Ceci est d'autant plus remarquable, que dans un travail antérieur:
XL ,,L'Abaissement du Sol des Pays-Bas, jugé d'un point de vue géolo- '
gique." dans les ,,Rapports et Communications de l'Academie royale des
Sciences"; 1855 (holl.) il a presque touché à la solution proposée par nous.
En parlant (pag. 156) de l'ancienne plage élevée (de sable marin formant
le sous-sol des dunes intérieures), il dit littéralement : ,,Pour en expliquer
la formation, il faudra admettre pour les environs de Noordwijk et de
Harlem, qu'autrefois les dunes intérieures actuelles étaient les dunes
extérieures ou marines, et que les dunes extérieures qui recouvrent
maintenant ces plages, n'existaient pas, ou plutôt qu'elles reposaient
d'autant plus loin vers l'ouest dans la mer, qu'elles laissaient derrière
elles de l'espace pour une anse, dans laquelle l'eau de la mer pouvait
couler librement."
Nous relevons le fait que ce passage se ti'ouve dans un travail anté-
rieur au S. d. P. B. et que Staring n'a donc pas élaboré cette idée,
mais l'a laissée tomber probablement. ,
Xn. M. Winkler : „Considérations géologiques sur l'Origine du Zanddi-
*
hivium, du Sable Campinien et des Dunes maritimes des Pays-Bas."
Archives du Musée Teyler. V. 1878. n'ajoute rien de nouveau à la question
dans son traité, qui est en partie une traduction fragmentaire de l'ouvrage
de Staring. Il embrouille même les choses en confondant les pannes et
les vallées, que Staring tient nettement séparées, preuve qu'il ne les a
jamais bien observées, quoique habitant dans leur voisinage, à Harlem.
Il dit httéralement : „Aux endroits les plus lai'ges, la chaîne des dunes
est formée de plusieurs rangées de ces colhnes, qui s'attachent les unes
aux autres, laissant entre elles des vallons plus au moins spatieux, qui
portent en néerlandais le nom de ,,duinpannen"
Nous insistons sur l'inexactitude de cette assertion : les vallées décrites
-ocr page 11-CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '361
sont tout autre chose que les vallons en cul-de-sac, nommés: „duin-
pannen" et ont une origine toute différente.
XIII. M. Seelheim, géologue indépendant à Utrecht, a publié en 1885
un petit traité amusant dans les ,,'Verhandlungen des naturhistorischen
Vereins der Rheinlande und Westfalens, XLIL" II est intitulé :,,Beitrag
zur Entstehungsgeschichte der Niederlande.'^ Nous croyons qu'il suffira
de reproduire la marche des idées comme nous l'avons fait en 1887
(Contributions II, pag. 7) à propos d'un autre traité plus curieux encore,
1. Le delta quaternaire du Rhin (Diluvium rhénan de Staring) s'est
formé en 40 jours par le Déluge de Noé. — 2. Bientôt après, il se
forma la côte primaire de la Hollande sous l'inlluence du courant du
flux, venant de la Manche, côte derrière laquelle s'étendait un „Haff." —
3. Les dunes maritimes ne sont pas mentionnées par Pline, par consé-
quent elles n'existaient pas. — 4, La bande sableuse qui accompagne
nos côtes n'est pas composée de couches alternantes de sable et d'argile. —
5. Elle n'a pas été formée par conséquent par la sédimentation ordi-
naire, mais tout d'un coup. — 6. La chaîne de dunes de nos côtes a
été dispersée en un temps très court et a formé cette bande de sable. —
7. Les plus violentes tempêtes de nos jours sont incapables de produire
un effet aussi grandiose. — 8. C'est une tempête extraordinaire qui l'a
fait : le Déluge Cymbrique. — 9. Il a eu lieu en l'an 113 avant notre ère ;
les dunes maritimes ne s'étaient pas encore reformées lors de l'arrivée
des Romains, et il est bien naturel que Pline n'en parle pas. —10. La
cause de ce déluge fut une éruption volcanique et un tremblement de
terre en Islande. — 11. Une preuve indirecte de cette éruption se trouve
dans la mythologie Scandinave, VEdda. — 12. Une preuve directe en
sont les lits coquillers élevés de la Suéde et de la Norvège méridionale,
ahisi que les scories de fer (ijzerslakken) à grandes cavités, que la mer
jette de temps à autre sur les côtes. — 13. Une conséquence dQ ce
déluge est l'abaissement de la Hollande occidentale, attendu que le s^ble
a sous l'eau un équilibre différent de celui qu'il a dans l'air et se dis-
perse horizontalement.
Avant de partir de ce curiosum scientiae, nous voulons relever son
analogie avec le traité de Van den Hull (VIII), qui a été pourtant écrit
il y a un demi-siècle et par un auteur qui ne paraît s'être jamais occupé
de la science géologique.
A' '
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CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '9
Ohapitro L Nos propres Observations dans les Dunes intérieures.
A. LES DUNES AU NORD DU VIEUX-RHIN.
N 0 0 r d w ij k et N o o r d w ij k e r li o ii t.
Nous préféi'ous ne pas poursuivre notre examen des dunes d'un bout
à l'antre, mais commencer à un point où le phénomène se présente
dans toute sa clarté, et ensuite le comparer avec les antres .points.
Nous partons donc du village de Noordwijk situé non loin de la ville
de Leide. Un peu au N. E. de ce village apparaissent de petites dunes,
qu'on peut suivi-e sur une distance de 7 ou 8 K.M., dans cette même
direction; elles constituent une zone d'environ 1 K.M. de largeur et se
confondent finalement avec la masse des dunes maritimes près de la
fei'me de ,,Ruigenhoek." Le village de Noordwijkerhout est situé au
milieu de cette chaîne, dont la limite orientale est très nette et facile
à suivre, à cause de la différence de niveau. Elle coïncide assez préci-
sément avec le „Kerkweg" et le ,,Heerenweg" (comp. la carte topo-
graphique du Ministère de la Guerre, échelle 1 : 50 000). Il en est de
même de la limite occidentale du côté de la vallée du ,,Noordzijder-
Polder," qui ne devient indistincte que vers le nord. Près de la métairie
de „Sasbergen" la vallée finit et le terrain s'égalise avec les dunes.
D'al)ord la surface devient onduleuse et on y voit bientôt apparaître de
])e1ites dunes qui s'agrandissent vei's le nord-est. La limite septentrionale
de la vallée est par conséquent plus ou moins arbitraire. Sa limite
occidentale est à son tour très nette et ne donne lieu qu'à robservatioii,
que la pente raide des dunes externes i)asse par une pente plus douce
dans la vallée proprement dite, ce que prouvent aussi les fossés trans-
vei\saux, qui forment plusieurs petites chutes d'eau de 1—2 d.M.
Les dunes précitées du „Noordwijkerhoutsche-Geest," sont plus basses
que les dunes maritimes et que celles de Hillegom ; elles disparaissent
un peu avant Noordwijk. Le terrain élevé pourtant se continue encore
dans la même direction au-delà de ce village. D'abord la limite entre
le teiTain sableux élevé, servant à la culture des pommes de terre ou
des oignons à fleurs, et les prairies dans les vallées est encore facile à
suivre ; mais elle devient de plus en plus indistincte et par conséquent
])lus ou moins arbitraire. A l'est nous avons pris pour limite la ,,Maan-
dagsche-Wetei'ing," puisqu'une rive est distinctement un peu plus hante
que l'autre ; à l'ouest, c'est le prolongement de la „Woensdagsche-
Weleriiig" qui actuellement ne sert plus an drainage du ,,Noordwijker-
46 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS.
Polder." Nous avons aussi pris la ferme de „Bouwlust" au sud de Noordwlik
comme élément de la limite, puisque le terrain descend de nouveau vers
les dunes externes. Les fermes de „Westerwijk" et „De Krom" sont
de nouveau plus élevées et entourées de champs labourés; elles forment
une colline basse et isolée. Une autre colline, plus petite encoi'e, se
trouve entre ,,de Krom" et le canal de Katwijk, où se termine le pro-
longement démembré du ,,Noordwijkerhoutsche-Geest."
La vallée de Noordwijk ce rétrécit considérablement près du village,
le pied des dunes l'ayant fermée pre.sque complètement, probablement
par suite de la dispersion du sable. La ,,Woensdagsche-Wetering" n'y
a conservé qu'un passage très étroit, et la plus grande quantité de l'eau
s'écoule maintenant dans un nouveau canal à travers le village de
Noordwijk vers le S.E.
Collines de R ij ]i s b u r g, P o e 1 g e e s t et Ij e i d e.
Les deux petites collines sus-mentionnées sont séparées par le canal
de Noordwijk de la ,,Colline de Rijnsburg." I.e sol de celle-ci descend
presque irïiperceptiblement de dilférents côtés, et on pourrait en tirer
la limite aussi bien à une centaine de mètres en-deçà qu'au-delà.
Pourtant il y a encoi'e ici une différence d'aspect entre les champs
labourés dépourvus généralement de fossés et les pâturages qui en
})0.ssèdent toujours. Cette hauteur est coupée par le ,,Nouveau-Canal"
et en partie par le Vieux-Rhin, et porte les villages de Katwijk, Rijns-
burg et Valkenburg. Les tei'res de la rive gauche de cette rivière obli-
térée sont en partie beaucoup plus basses. On y remarque aussi les
maisons de campagne d'Eudegeest et de Rijngeest sur la chaussée
d'Oegstgeest. Celle-ci passe de l'autre côté du Nouveau-Canal pai- une
petite hauteur ti'ès prononcée, naturelle du moins en partie et couroiïuée
par une petite église.
A une distance de 1,5 K.M. à l'est de cette chaussée se trouve! un
])etit terrain peu élevé portant le beau château de Poelgeest.
p]nsuite il y a dans le voisinage immédiat une troisième éminence
bien marquée, qui est occupée pour la majeure partie par la ville de
lieide elle-même. C'est ce qui explique pourquoi, en 1574, lors de, la
délivrance du siège espagnol, les vaisseaux des gueux de mer purént
arriver à travers les prairies inondées jusqu'à la ville et dans ses canaux,
tandisque la ville elle-même ne fut pas inondée.
•
Bt'ij-Sfan.-Jtjiif^.s
«
M
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '364
W a l'm 0 n d—S a s s e n h e i m.
Le beau village de Warrnond est le centre d'une nouvelle eminence
assez indistincte; on peut cependant avec quelque peine en tracer les
limites par les moyens précités, les fossés y sont rares et profonds.
Cette hauteur a une direction du N.E. au S.O. ; dans sa prolongation
on voit celle de Poelgeest.
La chaussée de Sassenheim suit la hauteur de ce village, qui com-
mence au pont de la .,Dinsdagsche-Wetering" et se termine environ à
r„Akkervoor(lsche-Laan." Elle a une forme beaucoup plus allongée que
la hauteur de Warmoml et est un peu plus apparente; pourtant il est
parfois assez difficile d'en tracei- la limite, qui reste par conséquent un peu
arbitraire en quelques points. On peut la suivre à l'aide de la carte topo-
graphique, de fossés et de très petites digues parallèles à la chaussée, etc.
La hauteur de Sassenheim n'est séparée que par une bande étroite
de terre plus basse de cette partie de la Hollande Méridionale qui appar-
tient au „PolderlancV (pays des polders). Il faut nettement distinguer,
avec M. Beekman, auteur de ,,La Lutte pour l'Exi.stence" et „La Néer-
lande conmie Pays des Polders," entre polders et dessèchements. Dans
la contrée qui nous occupe, les premiers sont tourbeux ou sableux et leur
niveau n'est pas très bas ; les derniers sont argileux et situés bien plus
au-dessous du niveau de la mer. Tout près de Sassenheim est un petit
dessèchement appelé à tort „Lisser-Poel-Polder." Le niveau du sol y est
de 4 M. — A. P. et composé d'argile marine; nous y avons trouvé en
abondance la coquiUe marine: Scrobicularia piperita, à laquelle se
joignent le Cardium edule et le Mytilus edulis et quelques individus de
la Mactra solida et de la 'rellina Balthica. C'est donc une faune semblable
à celle des eaux de la Zélande à fond argileux. Çà et là, le sol portait
encore des restes de la couche de tourbe qui l'avait recouvert autrefois
et qui a été enlevée par l'homme et par les vagues. La conséquence en
a été que les polders se sont convei'tis en lacs ou en étangs, et ceux-ci
à leur tour à l'aide de fortes pompes d'épuisement en dessèchements.
Passons maintenant au côté occidental de Sassenheim par r„Allée
de Teylingen." On voit la route descendre pour se relever presque
aussitôt après qu'on a passé par un petit pont sur le „Molensloot."
H traverse le „Beekpolder" qui est bordé en pai'tie par une hauteur
peu étendue, mais très prononcée, portant la ruine du château de
Teylingen, ainsi que de véritables dunes. Vers le sud-ouest, on voit
la hauteur se perdre dans les prairies environnantes avant le „Zahd-
sloot" et derrière celui-ci apparaît une autre élévation plus petite encore
d12 CONTRIBUTIONS A tA CxÉOLOGIH: DËS PAYS-BAS.
et dépourvue de dunes, mais située dans le prolongement de celle de
Teylingen. L'îlot de terre labourée dans la mer des prairies est facile à
distinguer, quoique les limites indiquées sur notre carte soient néces-
sairement un peu arbitraires. De l'autre côté de l'îlot de Teylingen,
mais à une plus grande distance vers le N.E., on en découvre un sem-
blable, plus petit encore» mais portant de petites dunes. Il se trouve
au S.O. du village de Lisse et à l'O. de la ruine du château de Deveren.
Ces trois îlots vont donc ensemble, et on peut les comparer à l'îlot
allongé de Sassenheim, qui n'a pas été démembré.
Voor ho ut — Drechsberg — Kronestein.
Le chemin de fer hollandais et le canal de Harlem—Leide sont
parallèles sur une certaine étendue et sont situés dans une prairie basse
dont le sol est sableux ou tourbeux. Cette prairie communique près du
j ; séminaire de Voorhout avec celle de Leide et est bordée par la hauteur
|f»et les dunes du „Noordwijkerhoutsche-Geest" et de l'autre côté (S.E.)
par celle que nous venons de nommer. La dernière est séparée à son
tour par le „Mattiger-Polder" de l'îlot de Teylingen et des deux autres,
qui appartiennent à la même rangée. Il nous a paru que le séminaire
de Voorhout est bâti à peu près sur l'extrémité occidentale de cette
hauteur; la limite est encore ici arbitraire pour les raisons connues.
Le village de Voorhout pourtant y appartient sans contredit, ce qu'on
voit aussitôt à l'aspect du sol. Les dunes n'y apparaissent que tout
près de l'auberge de „Drechsberg" sur la route de Sassenheim à la
station de Pietgijzenbrug. Il paraît pourtant qu'il y en a eu autrefois
plus près de Voorhout, car Le Francq van Berkhey (1. c. I, pag. 38 et
41) parle des dunes et des sablières de Voorhout et donne même une
coupe du terrain. On voit aussi la route sus-nommée se baisser assez
notablement des deux côtés de Drechsberg pour entrer dans une des
zones de prairies. Les dunes manquent parfois dans cette rangée ; mais
quand on a acquis un peu d'expérience de cette contrée, on peut très
facilement distinguer le sol qui en a porté autrefois de celui qui ne l'a
jamais fait. Le premier est presque toujours terre labourée, le second,
prairie. Staring a donc parfaitement raison en s'opposant à cette hypo-
thèse, que les longues vallées entre les dunes ne sont que des désable-
ments grandioses.
Près de la ferme de „Coehoorn," le sable qui fut tiré d'un fossé était
riche en coquilles marines, absolument les mêmes que celles du sable
provenant du canal de H.—L. C'étaient Cardium edule, Mactra sub-
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CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '13
truncata et -solida et 2'ellina Balthica en profusion avec quelques Mactra
stuUorum, Tellina tenuis et -fabula. C'est donc la même faune qui vit
encore de nos jours sur la plage voisine et qui est bien plus riche que
celle de l'argile du „Lisser-Polder." Les Scrobicularia piperita et les
Mytilus edulis y font complètement défaut, Cardium edule, le plébéien
de nos mollusques, est la seule coquille commune aux deux endroits.
D'ailleurs, on pouvait s'attendre à cette différence, les eaux à fond vaseux
ou argileux ayant toujours une faune dillérente de celles à fond sableux.
Il nous paraît par conséquent peu probable que les Mactra solida et les
Littorina littorea qu'on a rencontrées dans le sable marin sous l'argile
du ,,Haarlemmermeerpolder" y soient tombées de vaisseaux chargés de
coquilles, comme le veut Staring (B. v. N. I, Pag. 299). Ces coquiUes
y sont probablement ,,in situ" et non accidentelles. D'ailleurs, au com-
mencement de 1887 on a trouvé dans le sable sous les dunes de Were-
steyn, tout près de Hillegom, plusieurs vertèbres de baleine intactes et
accompagnés des coquilles marines ordinaires. L'explication donnée par
Staring serait une absurdité pour elles.
Les dunes sont très apparentes près de la ferme sus-nommée (Coe-
hoorn), ahisi que près du château de ,,Keukenhof." C'est ici que la
zone s'élargit considérablement; les dunes deviennent plus nombreuses
et plus hautes, surtout autour du village de Hillegom. Environ à mi-
chemin entre ce village et Sassenheim, on observe une élévation peu
étendue, mais assez prononcée; c'est celle du village de Lisse.
Pour nous résumer, nous pouvons distinguer dans cette contrée cinq
zones parallèles, toutes dirigées du N.E. au S.O. et d'autant plus pro-
noncées et plus élevées (en partie à cause des dunes) qu'on s'approche
de la mer. Ce sont: 1°. Warmond—Poelgeest; 2°. Lisse—Sassenheim;
3°. Huis-Spekken—Teylingen; 4°. Keukenhof—Voorhout; 5°. Noordwij-
kerhout—Noordwijk. Les bandes 2, 3 et 4 se réunissent vers le N.E.
et constituent ensemble celle de Hillegom—Bennebroek. La limite occi-
dentale de celle-ci avec la vallée du canal est facile à suivre; elle est
coupée par le chemin de fer tout près de la halte de Hillegom m erbeek,
suit une direction vers le N.E., passe tout près de l'église catholique
de Vogelenzang et de la maison de campagne de ,,Kuilenburg" et Qnit
un peu au-delà du bassin de la conduite d'eau d'Amsterdam, en même
temps que la vallée de Vogelenzang. La chaussée de ce village à Zand-
voort est en grande partie identique à cette limite, comme c'est le cas
de tant de routes ailleurs.
Le bassin sus-nommé {De Kom) se trouve dans les dunes maritimes
qui bordent la vallée de l'autre côté jusqu'à „Het Huis Vogelenzang,"
46 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS.
Oil elles sont pourtant peu apparentes. Il nous a paru que cette limite
était interrompue près du ..Schulpweg" ou ,,Margrietlaan," de sorte qu'il
y aurait là un passage transversal de la vallée de Vogelenzang dans
celle du ,,Zilk." Ce passage pourrait cependant être artificiel et la
conséquence d'un désablement de dunes très basses.
En continuant la promenade vers le sud, on passe par une zone de
(lunes assez étroite, qui porte une série de grandes fermes, dont le
bétail trouve son pâturage dans les deux vallées qui la bordent. Ce sont
,.Vaartwel," ,,Druivestein," ,.Kronestein," etc. Le bord occidental de la
vallée de ,,Zilk" est très prononcé, ainsi que les deux rives de notre
îlot de Kronestein. Celui-ci se perd entre la halte de Hillegommerbeek
et Halfweg, mais réapparait près du „Huis-ter-Lugt," bâti sur la pointe
d'un petit îlot qui porte de petites dunes. Cet îlot n'a qu'une longueur
de i,5 à 2 K.M. et à son extrémité méridionale les deux vallées se
confondent définitivement en une seule, après avoir communiqué une ou
deux fois. La rive occidentale de cette large vallée est formée par les dunes
internes de Noordwijkerhout, que nous avons décrites ci-dessus.
H ill ego m — Heemstede — Harlem.
Nous avons vu (pie le village de Lisse est bâti sur une hauteur,
semblable à celle de Sassenheim et dépourvue également de dunes, et
(pie c'est tout près de cette hauteur que la zone des dunes internes
de Keukenhof s'élargit considérablement. Son bord oriental est dans le
prolongement de la hauteur de Lisse et coïncide à peu près avec la
chaussée, en passant par Hillegom, Werestein et Bennebroek. La rive
est très prononcée surtout près de la colonne mihaire 30,5 entre Lisse
et Hillegom ; d'un côté de la chaussée s'élèvent des dunes assez con-
sidérables, de l'autre côté on voit les^ prairies se baisser rapidement
vers l'ancien Lac de Harlem, ce qu'on observe encore plusieurs fois'
avant d'arriver à Hillegom. Ce village est bâti dans les dunes et par
conséquent sur un terrain très accidenté. Au delà de Werestein, les
dunes apparaissent pour la première fois du côté oriental de la chaussée
et atteignent une hauteur de plusieurs mètres ; plus loin on coupe trans-
versalement la chaîne près de l'auberge de „Oud Berg-en-Dal" et on se
trouve bientôt sur la rive orientale d'une nouvelle grande vallée, qui com-
mence dans le voisinage immédiat de cette auberge. Cette rive n'est pas
identique au pied des dunes internes, mais en est séparée par une zone
intermédiaire de terres élevées plates, comme l'indique notre carte. Cette
vallée est traversée dans sa longueur par le canal de Harlem à Leide
if la
-ocr page 18-CONTRIBUTIONS A ].A GÉOLOGIE DES PAYS-BAS 15
qui fait ici un détour sensible, li-averse les dunes de Vogelenzang et
arrive ainsi dans la grande vallée de ce village à Noordwijk. Le chemin
de fer fait de même et passe de l'autre côté du canal, mais conserve
natin-ellement une direction plus droite.
En suivant cette ,,Vallée de Harlem" on la chaussée occidentale de
Hillegom, on a des dunes élevées et de nombreuses maisons de campagne
à sa droite, une zone intermédiaire de teiTes élevées ou bien la vallée
elle-même à sa gauche. Les dunes se terminent à „Oud-Berkenrode,"
pour réapparaître dans le célèbre ,,Bois de Harlem" ; elles s'étendent par
conséquent jusque dans le voisinage immédiat de cette ville. La chaussée
de Bennebroek suit d'abord le pied oriental des dunes internes à peu
])rès jusqu'à Heemstede, où la chaîne se rétrécit graduellement pour se
terminer au point sus-nommé et pour être remplacée par une bande
de teiTain élevé horizontal. La ville elle-même est bâtie en partie sur
cette zone élevée qu'on peut suivre sans trop de difficulté jusqu'au-delà
du village de Schooten, situé au nord de la ville. Nous voyons encoi'e
ici des champs labourés à côté de la chaussée, auxquels se joignent à
quelque distance des prairies; mais l'inclinaison y est si faible, que les
teiTains passent imperceptiblement l'un dans l'autre; la limite y est
])ar conséquent de nouveau un peu arbitraire. Nous avons admis que
l'extrémité septentrionale de la langue de terre de Harlem se ti'ouvo à
mi-chemin entre Schooten et Zandpoort ; des nivellements précis la dépla-
ceront vi-aisemblablement dans l'une ou l'autre direction, ce qui ne
modifie pas essentiellement notre i-aisonnement. Enti-e Schooten et Harlem
nous avons obsei'vé des dunes rudimentaii*es dans le ,,Bois do Schooten."
llevenons une dernière fois à Vogelenzang pour tracer la rive occidentale
de la Vallée de Harlem. Elle est extrêmement nette aux maisons de
campagne de „Woestduui," de ,,Boekenrode" et d',,Oosterduin," le pied
des dunes s'avançant jusqu'à la vallée elle-même. Cette limite n'est
pourtant pas la rive originale de la vallée, ])uisque tout près de la
station de Vogelenzang. les dunes reposent sui' de la tourbe et non sur
du sable marin, preuve que la vallée y a été auti'efois plus lai'ge et
i'em})lie de tourbe qui a été recouvei te en partie par les dunes déplacées
vers l'est. A „Oosterduin" donc, au sud du village d'Overveen, on voit
de nouveau apparaître ime zone intei'médiaire de tej-rain élevé que nous
avons suivie jusqu'au canal maritime d'IJmuiden. Elle conserve à peu
près la même largeur jusqu'à Zandpoort, où elle devient très prononcée ;
le sol des praiiies descend rapidement veis les terres d'intérieur, les
polders. On y voit dans les pi'airies des barrièi'es auxquelles succèdent
bientôt des fossés, le moyen ordinaii'e dans nos tei res basses de séparei-
46 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS.
les parcelles. Nous nous sommes servi de ce changement pour tirer la
limite des deux terrains, comme nous l'avons aussi fait entre Warmond
et Rijnsburg (fossés secs et humides). Le sous-sol de cette partie de la
Hollande est encore du sable marin ; on en voit la preuve dans les
monceaux de sable l'etirés du canal d'Amsterdam à IJmuiden et qui
sont pleins de coquilles de Mactra.
fcr
I f; ^
- y n
Bloemendaal — Zandpoort — Velsen.
La chaussée de Zandpoort à Bloemendaal est en général élevée et
suit la pente des dunes, qui sont boisées en cette contrée et ornées de
très belles maisons de campagne. C'est pour cette raison qu'elles portent
le nom de „Heerenduinen" (dunes des seigneurs). Elles ne sont que des
dunes intérieures très hautes, séparées des vi'aies dunes maritimes par
une vallée éti'oite, mais extrêmement pittoresque, qui commence à ,,Duin-
en-Daal" et dans laquelle on trouve en outre l'hôtel de ,,Zomerzoi'g,"
la maison des aliénés de „Meerenberg" et la l'uine du château de Bre-
dei'ode. Ici cette vallée se courbe vers l'orient et s'ouvj'e dans la zone
des terres sableuses élevées au nord de Zandpooii. C'est pour cette
raison que nous lui avons donné, ainsi qu'aux deux suivantes, sur notre
carte une couleur différente de celle des autres vallées qui aboutissent
directement dans les terres basses. La rive gauche de la vallée de Bi'e-
dej'ode est donc formée par les dunes maritimes et par un petit rejeton,
pi'ès de ,,Duin-en-Kruidbe]'g" qui suit une direction oi'ientale.
Ce rejeton est séparé pai' une vallée étroite et peu pi'ofonde d'une
])etite chaîne pareille portant la ferme de ,,Auspiciis-et-Telis" et les
maisons de campagne de ,,Rozenheek" et ,,Rozenstein," qui bordent la
chaussée de Zandpoort—Velzen. Les petites dunes qu'on y voit consti-
tuent un petit groupe séparé des dunes maritimes par la tej're élevée ^
du ,,Huis-te-Velzen." Une troisième vallée, plus courte enco^T., mais
un peu plus large et également peu profonde, sépare à son tour cè groupe
de petites dunes internes des dunes de Velzen, qui appartiennent aux
dunes maritimes, mais ressemblent davantage aux dunes intérieures par
leur hauteur moins considérable et leur situation orientale avancée. L'état
des choses est un peu autre dans cette l'égion de dunes que vers le
sud et ce sont des nivellements précis qui devront l'éclaircir davantage.
Le mieux sera probablement de comparer ces trois vallées aux parties
supérieures des autres, où la différence entre le sol de la vallée et la
zone intermédiaire élevée, mais sans dunes, tend à s'effacei\
A l'ouest de la station de Velzen, les dunes ont un aspect assez
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46 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS.
diffèrent. Au lieu de collines irrégulières plus ou moins élevées, on n'en
voit que de très petites, ou bien le terrain est seulement ondulé ou
même à peu près horizontal et employé comme prairie. Cotte prairie,
appelée: ,,De Heide" (la bruyère) est élevée, sèche et aride; elle est
séparée par des dunes assez élevées d'un terrain semblable, appartenant
à la plaine ,,Rreesaap," qui est maintenant coupée en deux par le canal
d'TJmuiden. En étudiant la carte topographique, nous avions cru d'abord
avoir devant nous un bout de vallée semblable aux autres, mais en
parcourant la vallée, nous avons obtenu la conviction que c'était tout
autre chose. En allant des écluses d'IJmuiden à Breesaperhof et de là
au pont de Velsen, nous avons vu un sol élevé sec, entièrement dépourvu
d'eau et dont les prairies étaient assez mauvaises. Le niveau du sol y
était de 2 M. au moins au-dessus de celui du canal ; le ,,Breesaap" en
son entier a fait sur nous l'impression d'être une panne très étendue,
mais non une partie de vallée dunaire. Nous verrons plus tard pourquoi
nous sommes revenu à la première opinion. '
C asti'ic uni — tleemskork.
On observe encore des phénomènes semblables au nord du canal
maritime d'Amsterdam. Nous avons vu dans l'introduction que quelques
anciens auteurs ont remarqué une chaîne de dunes intérieures près du
village de Castricum. Elle s'étend entre les vihages d'Egmond-Binnen
et de Heemskerk, où elle est reliée aux dunes maritimes. Il nous a
paru cependant que la réunion méridionale n'est que la suite du dépla-
cement secondaire des dunes maritimes vers l'intérieur, et que la longue
vallée dunaire a eu son embouchure dans la plaine à l'ouest du village
de Heemskerk. Elle aurait par èonséquent son commencement au sud-
ouest d'Egmond-Binnen près de la métairie de ,,Vogelwater." Le terrain
y est élevé et sec, se compose de prés et de champs labourés, dans les-
quels on voit plusieurs petites dunes. Son caractère de vallée devient
plus clair près de la métairie suivante, la ,,Schaapherderswoning." Les
deux rangées de dunes sont ici réunies par une petite chaîne transver-
sale, qui isole la partie supérieure de la vallée. La ferme suivante porte
le nom de „Commissarishuis" et est bâtie à l'extrémité méridionale
d'une plaine très étendue, cultivée en partie de pommes de terre et
de seigle et limitée également par une petite chaîne de dunes transver-
sales. La partie septentrionale de la vallée entière est drainée par un
ruisseau qu'on a conduit dans un canal à travers des dunes internes
jusqu'à Bakkum, où il se déverse dans les canaux de la plaine par un
ARCHIVES III. 3
d8 CONTRIBUTIONS A tA CxÉOLOGIH: DËS PAYS-BAS.
syphon, avec une différence de niveau que nous avons évahiée à deux
mètres. Ce canal transversal draine en même temps la partie méridionale
de la vallée; pourtant le premier ruisseau nous paraît être le plus naturel,
puisqu'il contient beaucoup plus d'eau que le second. Celui-ci nous paraît
être forcé de couler dans une direction opposée à la pente naturelle du
sol, pente très faible du reste, de sorte qu'une partie de l'eau s'infiltre.
Cette partie de la vallée est plus aride, couverte en partie de petites
dunes et ne constitue que des pâturages arides pour les brebis et les
lapins qui y pullulent. La plaine suivante, le „Watervlak" est maréca-
geuse, moins à cause de sa situation basse que du drainage imparfait;
la dernière partie de la vallée près de la ferme de „Kruisberg" est la
plus fertile et la mieux cultivée; elle est séparée par des dunes peu
élevées de la plaine de Heemskerk. On peut pourtant suivre les traces
de la vallée encore au-delà de ces dunes. La zone de terrain sableux
horizontal, qui touche aux dunes maritimes, s'incline un peu vers l'est
(comme on peut le voir-aux fossés transversaux), pour se relever en-
suite jusqu'à la chaussée de Beverwijk à Noorddorp et Castricum et c'elle-ci
se trouve sur le prolongement peu élevé des dunes intérieures de Castri-
cum. Cette observation est pour nous une preuve .suffisante que la vaUée
entière a eu à l'origine son ouverture vers le sud et une inclinaison
opposée à celles de Harlem et de Bloemendaal. Ce dos sableux de la
chaussée s'incline aussi vers l'est et porte les châteaux d'Assumburg et
de Marquette, derrière lesquels la pente est très marquée, comme nous
l'avons vu ailleurs à plusieurs reprises. Cette même pente plus forte
s'observe aussi à 600 mètres de Castricum sur la chaussée de Limmen
et d'Alkmaar; nous ne l'avons pas poursuivie plus loin vers le nord.
En un point la lande (geestgrond) de Heemskerk offre une différence
avec les terrains semblables, situés plus vers le sud. Tout près de ce
village se trouve de la tourbe, épaisse de 3 mètres et couverte dej 1,5 M.,
de sable. D'après les informations obtenues, cette tourbe n'est pourtant
que locale et indépendante des grandes tourbières; nous la réverrons
encore à deux autres endroits. Avant de partir de cette vallée, nous
voulons encore faire remarquer qu'elle n'est pas droite comme les autres,
mais distinctement serpente. La vallée de Brederode forme plus ou moins
un passage aux vallées droites, puisqu'elle change une fois de direction.
Limmen —■ Alkmaar — St. Paneras.
En allant de Castricum à Alkniaar par Limmen, nous voyons le
terrain descendre d'abord — comme nous venons de le dire — puis se
\ f*' ''.'ï
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '19
relever. La chaussée entière de Limmen à Heilo et Alkmaar suit de
nouveau un de ces dos sableux, que nous avons remarqués tant de fois
et dont le paysage diffère ostensiblement de celui de la plaine plus basse,
qui les environne. La chaussée toutefois n'en constitue pas la partie
la plus élevée : c'est une route sableuse à un demi-kilomètre à l'ouest,
appelée ,,Hooge-Weg" (haute route). La hmite occidentale du dos s'ob-
serve e, a. fort bien près de la borne kilométrique 49 du chemin de
fer, ainsi que près de l'église cathohque de Heilo. La hmite orientale
est plus facile à constater : on n'a qu'à tirer une hgne par les différentes
fermes à côté de la chaussée, qui sont toutes bâties à l'endroit où la
pente commence. Un peu au sud de Heilo, à côté de la ,,Bullaan", nous
avons vu une petite tourbière; la tourbe y était couverte de 1 M. de
sable et un peu au nord de ce village, dans le Bois de Heilo, nous avons
remarqué des dunes, petites en effet, mais reconnaissables. Le Bois
d'Alkmaar, au contraire n'en possède pas; le sol y est parfaitement égal
La partie occidentale de la ville elle-même, comprenant la grande église,
est bâtie à l'extrémité septentrionale du dos, tandis que le reste est tout
à fait à côté.
Tout près et à l'est de la ville se trouve le petit village d'Oudorp,
bâti à l'extrémité méridionale, étroite et basse d'un nouveau dos sableux,
qui s'étend jusqu'au village de St. Paneras à l'autre extrémité. Ce dos
est coupé par le chemin de fer du Helder et est en général très facile
à distinguer du pays environnant. Il augmente en largeur et en hauteur
à mesure qu'on s'avance vers le nord ; les tbssés manquent sur toute
son étendue et les prés y sont une grande exception. Près du chemin
de fer, la partie centrale est plus élevée que le reste; le sol y est
ondulé, et dans une petite sablière on aperçoit même des couches
inclinées de à 25° vers le N.N.O., preuve qu'il y a réellement de
petites dunes. Encore ici, nous avons trouvé un petit gisement de tourbe,
à côté de r„Achterweg" et du chemin de fer. La tourbe était couverte
d'environ 1 M. de sable et avait une épaisseur d'un mètre et demi.
La présence de la tourbe à une faible profondeur sous le sable dans
ces trois localités, Heemskerk, Heilo et St. Paneras, quoique très locale,
nous fait hésiter à considérer cette lande, du moins en son entier, comme
identique aux terrains semblables que nous avons décrits. Toutefois ces
gisements se trouvent tout près de la limite de ces terrains et il pourrait
très bien que ce ne soient que des tourbières formées dans des vahées,
qui ont été recouvertes ensuite de sable, déplacé soit par le vent comme
nous l'avons remarqué près de La Haye et de Vogt3lenzang (pag. 22 et
15), soit par l'eau des hautes murées. Or, il est connu qu'il ya2ou3
3*
-ocr page 23-i
20 CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS.
siècles (Staring) les environs d'Alkmaar et de Harlem étaient inondés par
la mer à chaque haute marée. L'eau de la mer venait de l'est et devait
par conséquent laver les dos sableux de ce côté et en étendre le sable
sur le terrain adjacent plus bas. La présence de la tourbe sous le même
sable que celui des landes, n'est donc pas encore une preuve absolue
de son âge plus reculé. Le sable qui la recouvre peut être du sable
remanié. Ce n'est que par la comparaison d'observations continuées, et
surtout d'un grand nombre de forages peu profonds et de nivellements,
que cette question pourra être tranchée.
B, Les dunes au sud du Vieux-Rhin.
Wassenaar — La Haye.
Comme nous l'avons vu, la hauteur de Katwijk — Rijnsburg — En-
degeest constitue en partie la rive droite du Vieux-Rhiu. Le pays de
l'autre côté de cette rivière oblitérée, au sud du village de Valkenburg,
est très bas et se relève vers les dunes maritimes au sud de Katwijk.
On peut facilement suivre cette hmite jusqu'à Waalsdorp près de La
Haye; mais près du village de Wassenaar, on voit un changement dans
le paysage. La plaine étendue s'y rétrécit considérablement et fait place
à une vallée étroite, drainée par la ,,Kas-Waterhig." La maison de cam-
pagne de ,,I)uinrel", près de Wassenaar, se trouve a son embouchure;
le champ de courses de „Clingendaal" a son origine près des dunes de
Waalsdorp. Sa rive droite ou du S.E. est formée par la chaîne de dunes
de Wassenaar, portant e. a. le beau château de Oud-Wassenaar et appelées
,,Binnen-Klingen." Les dunes elles-mêmes cessent à 1—2 K.M. de dis-
tance du village de Wassenaar et se continuent dans une zone de
terrain élevé.
A l'est des dunes précitées on découvre une seconde vallée également
étroite et longue, drainée par la ,,Zijl-Watering," On peut la suivre jusqu'à
peu de distance de La Haye, à ,,Weltevreden" et à ,,Clingendaal", où
la configuration du terrain devient indistincte. Sa rive droite est con-
stituée par une seconde chaîne de dunes intérieures, que suit la grande
chaussée de Leide à La Haye et qui porte une série de célèbres maisons
de campagne. La première est ,,Huis ten Deyl", tout près et au S.E,
de Wassenaar, qui est entourée de véritables dunes très apparentes ;
d'autres sont Backershagen, Raaphorst, Groot-Hoefijzer et Beukenhorst.
On y voit les dunes à chaque moment près de la chaussée, la zone
n'ayant qu'une largeur de 1—IV2 K.M. au plus. Elle touche à son tour
aux prairies basses, sableuses et tourbeuses, que traverse le chemin de
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CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '21
fer hollandais, et se termine à „Âmmonshoogte", pour réapparaître dans
la zone étroite de terrain élevé de la chaussée de Wassenaar, tout près
de La Haye. Cette élévation est séparée par une étroite vallée tourbeuse
du ,,Bois de La Haye", qui constitue un îlot avec des dunes bien appa-
rentes. Il se trouve également dans la prolongation des dunes de Raap-
horst — Huis ten Deyl, mais en est séparé par une vallée transversale
ou plutôt oblique.
La Haye — Loosduinen.
Au sud-ouest de La Haye, un peu au-delà du village de Loosduinen,
les dunes se voient tout près de la chaussée; mais elles s'en éloignent
graduellement dans la direction de la ville. Ces dunes ne sont encore
que des dunes internes, peu élevées à Loosduinen, davantage prés de la
ville, derrière lesquelles on découvre une vallée et des prairies, consti-
tuant le ,,Segbroek." Cette vallée est drainée par le ruisseau ,,De Beek"
qui coule vers la ville. La rive droite est en général très. prononcée,
parfois presque verticale, haute d'un mètre, et porte des fermes et quelques
maisons de campagne, comme „Meerenbosch, Groenendaal, Wildehoef,
Dalenberg." ,,Ockenburg" est situé dans les mêmes dunes internes plus
près de la chaussée. La rive gauche est encore trè^ visible, mais elle
n'est plus originale par suite du déplacement des dunes maritimes vers
l'intérieur. Près de ,,Hanenburg" on voit la véritable vallée se rétrécir
et se terminer près de l'ancienne pompe à épuisement ; on peut en suivre
pourtant les traces jusqu'à Zorgvliet, mais sa surface a été haussée
considérablement par le déplacement des dunes maritimes. Il paraît aussi
que les dunes internes s'y sont étendues en sens inverse, protégées
contre les vents de l'ouest par les dunes maritimes, ce qui est un
phénomène aussi curieux qu'inattendu. Tout près de „Hanenburg,"
qui est encore situé dans la véritable vallée, on en voit apparaître de
très petites. Leur zone s'élargit, elles deviennent plus hautes à mesure
qu'on s'avance vers le nord-est et finalement elles se confondent avec
les dunes maritimes déplacées.
Au sud-est de ces dunes internes, on observe de nouveau une zone
de terrain égal, qui porte la chaussée de Loosduinen à La Haye et
descend au S.E. Ainsi que de l'autre côté de la ville, les inégalités du
sol redeviennent indistinctes dans son voisinage immédiat. Le terrain de
„Zorgvliet" est composé en son entier de dunes maritimes qui ont ainsi
en cet endroit une largeur exceptionnelle. Il est donc clair qu'elles ont
comblé la vallée de „Segbroek", dont le niveau descend au N.E. De
. . ■■ IV.
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS.
même que plusieurs autres, elle s'est remplie de tourbe dans sa partie
la plus basse, et cette tourbe a été recouverte ensuite de dunes. C'est
ce qui explique la présence de cette roche sous les dunes dans les déter-
rements du nouveau parc de Scheveningue et à Vogelenzang et de celle
qu'on voit sur la plage près des jetées de Loosduinen. Elle peut s'être
formée dans une autre vallée semblable, qui se serait trouvée encore plus
à l'ouest et qui aurait été enterrée en son entier.
Elle pourrait aussi avoir une autre origine plus locale encore. Tout
près du village de Loosduinen, il y a une sabhère dans les dunes, où
l'on trouve de la tourbe comprimée, qui contient une quantité notable
de fragments de bouleaux, etc. La couche n'a que 2 d.M. d'épaisseur
et se trouve en moyenne à 1,5 M. + A.P. Elle est sensiblement
ondulée et repose sur du sable de dunes, qui contient quelques petites
lentilles de tourbe qui renferme à son tour des lentilles de sable. Son
origine est claire: ce n'est qu'une petite tourbière formée dans une
paime. De pareilles tourbières sont probablement assez nombreuses ; et
quand la mer entame ces dunes, des morceaux de tourbe tombent sur
la plage, sont roulés, entraînés par le reflux et jetés de nouveau sur
la côte. La simple mention de morceaux roulés de tourbe sur la plage
n'est donc nullement une preuve de la présence d'une couche continue
servant de base aux dunes.
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La vallée de Loosduinan est probablement la continuation directe de
celle de Clingendaal—'Duinrel ; elle n'a été divisée en deux que par l'ex-
tension anormale des dunes maritimes vers l'intérieur entre Zorgvliet et
Waalsdorp, qui portent une partie de la ville de La Haye. Ce n'est
pourtant pas la partie la plus ancienne de la ville, comme l'on s'y atten-
drait; mais au contraire la plus récente, la partie nommeé ,,quartier
indien", formée par les rues de Banka, de Célèbes, de Sumatra, de
Sunda, de Malakka. La zone suivante, portant la Place 181iB et la
Place Prince-Henri, est encore assez élevée; la troisième zone portant le
Jardin Zöologique, la Caserne-Orange et les écuries royales, est plus basse.
Vient ensuite une quatrième zone qui est de nouveau plus élevée et
qui porte la partie la plus ancienne de La Haye, le „Plein," ,,Binnenhof,"
Le signe de A.P., dont nous nous servirons encore souvent, signifie : „Amster-
darmch Peil''' ou „Nioeati cVAmiterdam,''^ c'est la hauteur de la haute marée
moyenne à Amsterdam, avant la fermeture de l'Y. Or, la différence entre la haute
et la basse marée n'y était que de 22 c.M ; elle n'est actuellement que de 24 c.M.
à Muiden et de 45 c.M. à Durgerdim, situés des deu-K côtés de la ville, de sorte
qu'on peut accepter sans trop d'inexactitude, le niveau d'Amsterdam comme le
niveau mjyen de la mer.
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '23
,,Buitenhof," la Maison de Ville, le „Vijverberg" et la Grande Eglise.
Cette partie ne se prolonge pas bien loin au-delà de la Maison de Ville ;
on peut en observer encore très distinctement les limites dans quelques
vieilles rues, qui descendent assez rapidement: ,,Gedempte Spui, Spui-
straat, Veenestraat, Jan Hendrikstraat, Assendelftstraat, Lage Westeinde,
Slijkeinde, Breedstraat, Prinsenstraat, Molenstraat, Noordeinde et Willem-
straat." Elle est située dans Ie prolongement du Bois de La Haye; une
cinquième zone lui succède vers la gare du chemin de fer hollandais;
elle est la plus basse de toutes et repose sur un sol tourbeux. C'est
dans celte partie aussi que les maisons sont bâties sur pilotis.
Voorschoten. — Rijswijk. — Monster.
Au-delà de cette partie basse, traversée longitudinalement par le chemin
de fer de La Haye à Leide, et transversalement par ceux de Delft
(hollandais) et de Voorburg (rhénan), se trouve de nouveau une zone élevée
qui constitue la rive droite de la vallée de La Haye. Elle est parallèle
aux autres, mais ne possède pas de dunes et est ainsi un pendant do
celle de Sassenheim. Elle porte également une chaussée et les villages
de Rijswijk, Voorburg, Veur et de Voorschoten, qui est situé près de son
extrémité. Ses rives sont tantôt assez bien prononcées, tantôt presque
effacées, comme nous l'avons vu à plusieurs reprises dans les zones
semblables.
En suivant la chaussée de Leide à Voorburg, on voit le terrain s'élèver
à environ 2 K.M. au sud de l'auberge ,.De Vink" et un peu avant la
fabrique d'argenterie de M. Van Kempen. D'abord, les limites de la zone
élevée sont distinctes des deux côtés; le village de Voorschoten est bâti
sur une éminence prononcée. Au-delà du village la limite orientale n'est
pas très visible; nous l'avons tirée sur les points où se trouvent des
barrages dans les fossés; la différence de l'eau y est de 2—3, même
5 d.M. Il en est de même de la limite occidentale, où la pente est très
faible et se continue encore au-delà du chemin de fer. Nous l'avons
pourtant tirée non loin de la chaussée et avons laissé les campagnes de
„Rozenburg, Duivenvoorde et Noorthey" dans la vallée, dont la partie
la plus profonde, au-delà du chemin de fer, est remplie de tourbe. Un peu
avant Veur, le canal de Leide forme la limite naturelle; les prairies du
côté oriental sont notablement plus basses que celles du côté occidental,
et il en est de même jusque tout près de Rijswijk. Du côté occidental
de la zone, c'est le ,,Broeksloot" qui nous rend le même service; tout
près de la gare de Voorburg, la différence de niveau entre les deux
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '24
terrains est très visible. On l'observe facilement en suivant la chaussée
dite ,,Laan van Nieuwe-Oosteinde" qui conduit de Voorburg au Bois
de La Haye. Les fossés y ont une différence d'im mètre tout près du
village, et on voit le teri-ain descendre, devenir tourbeux et se relever
de nouveau tout près du bois. Entre Voorburg et llijswijk, la zone est
très prononcée aussi; la surface y est parfois ondulée, peut-être par la
présence de dunes rudimentaires.
En suivant la limite occidentale, on la voit distinctement, grâce à
l'eau des fossés, près de l'église catholique de Rijswijk, ainsi que près
du chemin de fer de La Haye à Delft. Elle coupe le ,,Leiweg" (qui
conduit à Eikenduinen) tout près de la chaussée de Monster, passe par
la barrière à l'est de Poeldijk, un peu au nord de ce village, tourne au
nord, puis à l'ouest et ensuite au nord-est, pour rejoindre la limite
occidentale de la vallée à 2,5 K.M. au nord-est du village de Monster.
Cette limite est à peu près parallèle à la chaussée de La Haye et en est
éloignée d'iui demi kilomètre; elle passe derrière les maisons de cam-
pagne (le ,,Madestein et Krayestein," est très apparante au sud de Loos-
duinen et d'Eikenduinen où elle touche aux métairies de ,,Hoogwerf,
Vredenburg et Haagwoning," traverse La Haye dans la direction de la
gare du chemin de fer rhénan et se continue, comme limite des dunes,
du Bois au ,,Huis-ten-Deyl."
C. environs de delft.
Nous avons d'abord essayé de tracer la limite orientale de la zone
élevée Monster — Rijswijk de la manière ordinaire, en faisant le long
des routes des courses, interrompues par de nombreuses petites ex-
cursions latérales, mais sans résultat appréciable. Elle était impercep-
tible à l'exception d'un petit trajet entre le village de Wateringen et
le hameau de Kwintsheul, oii elle était très nette. Nous ne savions à
quoi attribuer cette exception, jusqu'à ce que l'idée nous vint de nous
servir de la carte du „Water^staat." Celle-ci montre tous les polders,
grands et petits, et indique pour chacun le niveau de l'eau dans les
fossés en été {„Zomerpeil." Z. P.). Or, ce niveau étant en moyenne de
0,5 M. au-dessous du sol, nous pouvions facilement nous faire une idée
de la surface. Le terrain était composé pour la plus grande partie de
sable et d'argile, la tourbe n'y jouait qu'un rôle secondaire d'après la
carte géologique, et pendant nos excursions nous vîmes qu'en réalité son
territoire était plus restreint encore. Pour faire voir d'un coup d'œil la
configuration du sol, nous n'avons pas haché sur notre carte tout le
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CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '25
terrain qui est au-dessous de A. P., et nous avons indiqué par quatre
teintes de plus en plus foncées les terrains entre 0 et 0,5 M. — A. P.,
entre 0,5 M. et 1 M. — A. P., entre 1 et 1,5 M. — A. P. et au-dessous
de 1,5 M. — A. P. A la première catégorie appartient la majeure
partie du „Westland," les environs de Monster, de Poeldijk, de Naald-
wijk et de 's Gravesande. Ce dernier village est une des plus anciennes
localités habitées de la Hollande Méridionale; la cause en est claire
maintenant, surtout si nous acceptons un abaissement du sol de 2 M.
ou davantage depuis le dixième siècle.
La seconde catégorie embrasse un terrain d'étendue égale, principale-
ment entre Delft, Wateringen et Rijswijk et entièrement couvert d'argile,
qui ne couvre qu'une petite partie du terrain précédent. Le niveau des
fossés y est de 0,95 M. — A.P., de sorte que la hauteur du sol y varie
entre 0,40 M. et 0,50 M. — A. P. Nous avons suivi aussi exactement
que possible les contours des différents polders, en les arrondissant
toutefois, puisqu'ils sont artificiels en partie. La limite coïncide e.a. avec
la chaussée de Delft à La Haye (jusqu'au Hoornbrug) et avec celle de
Wateringen à Kwintsheul. Nous y avons incorporé un peu arbitrairement
la partie nord-ouest de la viUe de Delft, puisque c'est la plus ancienne
et qu'elle a été à l'origine probablement un peu plus élevée que le reste.
On y trouve la Maison de ViUe, la vieille Eghse et la Cour des Princes.
Ce terrain renferme aussi la continuation de la zone élevée de Voor-
schoten—Rijswijk entre ce village et Kwintsheul, où elle s'élève de nouveau
au-dessus de A.P. Il s'y joint un petit territoire en arc de cercle autour
du village de Naaldwijk, entouré en partie par le terrain plus élevé et
en partie par celui-ci et le terrain de la catégorie suivante. Les deux
extrémités de ce terrain en demi-lune sont de sable, la partie moyenne,
d'argile, d'après la carte géologique. Cette partie est en même temps
la plus profonde (— 0,25 M. et — 0,50 M. contre — 0,05 M. et —
0,20 M. A.P.), ce qui exphque la différence de surface.
Le troisième territoire, entre — 0,50 M. et — 1 M. A.P. est plus
démembré encore. Il se compose: 1®. de la partie méridionale de la
vallée de La Haye, le „Dijkpolder, Uithofspolder," etc. Nous avons vu
ci-dessus que sa limite avec la zone élevée est facile à suivre et forme
une ligne courbée près de Poeldijk. La partie entre Kwintsheul,
Honselerdijk, Naaldwijk et De Lier. Vers l'est et vers le sud, cette partie
touche aux terrains plus bas et c'est sur la ligne de séparation qu'a été bâti
le village de De Lier ; vers le nord et vers l'ouest, elle touche aux terrains
plus élevés. 3®. Une bande autour de la ville de Delft, qui élargit la
langue de terre qui porte la ville et s'étend de Delfgauw^ à Den Hoorn.
archives iii. 4
-ocr page 29-I
26 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS.
\ -
Une bande semblable à l'ouest de cette langue et qui s'étend de
Den Hoorn au nord.
Le quatrième tei'ritoire, entre 1 M. et 1,50 M. — A.P. se compose
aussi de plusieurs parties isolées: 1®. La plus grande, entre De Lier,
Maassluis, Maasland et St Maartensrecht, est limitée vers l'ouest par la
digue de la Meuse et par le terrain plus élevé qui porte la ville de
Maassluis; sur sa limite orientale se trouvent les villages de Maasland
et de St. Maartensrecht, 2®. Une partie qui remplit un angle du terrain
de la catégorie précédente, à l'est de De Lier. 3®. Une partie au nord-
ouest de Den Hoorn, qui s'attache à la langue de terre de Delft, élargie
déjà par la catégorie précédente, de même que: 4®. au nord de Delft,
près de Reineveld et 5^. à l'est de la ville et au nord-est de Delfgauw.
6®. Une petite partie entièrement isolée et entourée des terrains de la
première catégorie à l'est et au sud-est de 's Gravesande. D'après la
carte géologique, cette catégorie entière se compose d'argile marine.
Le cinquième territoire est de nouveau uni, mais a une forme très
irrégulière; il remplit les espaces vides entre les précédents et disparaît
vers l'est et le nord sous les grandes tourbières. Il est limité d'abord
par la digue de la Meuse entre Schiedam, Vlaardingen et Maassluis,
suit les terrains précédents jusqu'à Kwintsheul et Wateringen, où est sa
limite septentrionale et environne les terrains plus élevés autour de Delft.
Il contient les villages de Kethel, Schipluiden et Pijnacker, et est en
partie argileux, en partie tourbeux. Près de Wateringen se trouve un
dessèchement profond de 2 M. par rapport au terrain environnant, de
sorte que nous avons dans ce chiffre une indication de la puissance de
la tourbe qui occupe une partie notable de ce territoire. Près de Schiedam,
elle atteint même une puissance de 7 mètres et davantage, et y est en
partie couverte d'une couche d'argile peu épaisse. Nous avons observé
en 1888, tout près de la gare de Schiedam, ainsi qu'à 1,5 K.M. à
l'ouest de la ville, des compressions intéressantes de tourbe, causées par
la construction de la digue du chemin de fer au „Hoek-van-Holland"
Le niveau du sol s'y était élevé en petites collines allongées, hautes de
1—2 M. et traversées de crevasses, dans lesquelles on voyait la tourbe,
couverte de 2—4 d.M. d'argile marine ; cette couche superficielle d'argile
s'étend probablement jusqu'à Vlaardingen et Maassluis. D'ailleurs, les
relations entre les deux roches sont assez compliquées ; nous avons observé
en plusieurs endroits l'argije là où la carte indique la tourbe, de sorte
que l'argile de Schiedam et de De Lier est en continuité directe avex celle
de Delft. Elle est mainte fois interrompue par la tourbe, de sorte que
les deux substances forment probablement des îlots l'une dans l'autre et,
I
-ocr page 30-CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 27
selon quelques informations obtenues, il paraît en être de même dans
le sens vertical. 11 n'est donc pas question d'un territoire compact de
tourbe, comme l'indique Staring sur sa carte.
La surface du sol est en même temps assez inégale ; tantôt les prairies
sont plus élevées et parfois remplacées par des champs labourés, tantôt
elles sont très basses par rapport à l'eau des fossés, la différence peut
dépasser 5 d.M. Les premières sont argileuses, les secondes, tourbeuses
ou argileuses; l'explication la plus rationelle nous paraît d'y voirl'eflet
des inondations de la mer. Elle formait autrefois un réseau de criques
dans la tourbe et épargnait des îlots qu'elle recouvrait d'argile. Depuis
la construction des digues, ces criques devinrent eaux stagnantes et ne
tardèrent pas à se remplir de tourbe, dont la surface redevint parfois
égale aux îlots les plus bas couverts d'argile, tandis que d'autres restèrent
plus élevés.
On voit de ces îlots argileux très distincts de leur entourage argileux,
entre autres dans le „Harnasch-Polder", entre Delft et Wateringen.
En considéi'ant le territoire entier comme tourbeux, il doit naturellement
avoir eu une profondeur assez considérable (de 2 à 7 mètres) avant la
formation de cette roche. Nous reviendrons là-dessus en traitant de
l'origine probable des bandes sableuses et des vallées longitudinales.
Chapitre IL Hypothèse de la Formation des Dunes intérieures et des
A. les dunes et les vallées.
C'est cette zone de sable marin et de dunes, que nous venons de
déci'ire, qui forme une partie de la limite occidentale des tourbièi'es
hollandaises et les sépare de la Mer du Nord. Elle a 8 à 10 K.M. de
largeur; les dunes en occupent peut-être la moitié, et Staring a donc
eu bien tort de la colorer sur sa carte en son entier comme „duinen
en geestgronden" (dunes et landes), tandis qu'il distingue très bien en
d'autres endroits un ,,ancien sable marin" du „sable des dunes." Nous
avons vu ci-dessus combien ce sable est rempli de coquilles marines
(dragages du canal Harlem-Leide), ce qui ne sera certainement pas resté
inconnu à Staring.
La carte géologique indique encore quelques tourbières basses à Harlem,
Vogelenzang, Piet-Gijzenbrug et La Haye. Nous ne nous en occuperons
pas, puisqu'elles ne remplissent que des dépressions et tendent ainsi à
4"
-ocr page 31-CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '28
niveler la surface inégale du sol des vallées. Celles-ci sont plus ou moins,
mais pas complètement, parallèles à la côte actuelle. En allant du nord
au sud et de l'est à l'ouest, nous avons d'abord la longue vallée élevée
de Castricum, qui se distingue des autres par sa direction sinueuse et
est séparée du pays bas par des dunes larges et hautes, nommées „Ko-
ningsduin." Au sud du canal maritime d'Amsterdam, nous avons la
zone élevée de Schooten—Haarlem—Bennebroek, séparée par une
longue vallée tourbeuse de la zone élevée Zandpoort—Bloemendaal—
Overveen. Celle-ci (Heerenduinen) se confond vers le sud avec les
dunes maritimes, dont elle est séparée vers le nord par la vallée de
Brederode, qui a en partie la direction générale (N.N.E. — S.S.O.) et en
partie la direction N.E. — S.O., ainsi que les deux petites vallées entre
Zandpoort et Velsen. Toutes les quatre ont ceci de commun, qu'elles
s'ouvrent vers le nord. On observe justement le contraire de l'autre côté
de Vogelenzang; la longue vallée que parcourt le chemin de fer jusqu'à
Voorhout, s'ouvre vers le sud, ainsi que la vallée parallèle „Zilk" et
celle de Noordwijk. Celle-ci est la plus typique, et comme elle n'est pas
trop longue et à la fois assez large, on peut l'embrasser d'un coup
d'oeil en grimpant successivement sur 3 ou 4 hautes dunes. C'est elle
qui nous a mené à une explication théorique de ce phénomène si inté-
ressant. Nous faisons abstraction pour le moment des valleés de Tey-
lingen—Sassenheim, puisqu'elles sont ouvertes des deux côtés.
Au-delà du Vieux-Rhin, le phénomène se produit de nouveau en sens
inverse. La zone élevée de Voorschoten—Rijswijk borde la vallée de
La Haye, qui est parallèle aux deux vallées beaucoup plus étroites de
Wassenaar. Strictement, ce n'est que la vallée occidentale de Wassenaar
(Kas-Watering) qui est fermée à son extrémité méridionale ; les trois vallées
parallèles appartiennent pourtant à un même système, auquel se joint le
„Segbroek" ou la vallée de Loosduinen. Celle-ci est également fermée vers
le sud; mais elle l'est aussi vers le nord, ce qui n'est pourtant qu'un
phénomène secondaire, conséquence du déplacement des dunes, tant vers
l'est que vers l'ouest, comme nous l'avons vu ci-dessus. Elle est en outre
draineé et descend vers le nord.
La zone sableuse éleveé ,,Rijswijk—Voorschoten" trouve son analogie
dans les éminences de Warmond et de Sassenheim, qui ne portent non
plus des dunes. Au milieu des deux derniers groupes se trouve la hau-
teur de Rijnsburg, qui a une forme très irrégulière et à laquelle se
joignent celles de la ville de Leide même, de Poelgeest et celles entre
Katwijk et Noordwijk.
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... .
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '29
Tâchons maintenant d'exphqiier la formation des zones parallèles.
D'abord, nous avons vu que Staring s'est opposé vivement et avec raison
à l'hypothèse du désablement par l'homme. I.e phénomène est pour cela
beaucoup trop étendu et trop régulier. Encore de nos jours on enlève du
sable, tantôt ci, tantôt là, mais sans régularité. Quoiqu'il ne s'exprime
pas distinctement dans ce cens, on peut bien admetti'e qu'il considère
comme tout à fait impossible que le sable de la dune maritime ait fait un
saut au delà des différentes valleés et ait formé de nouvelles dunes internes.
Il propose même de considérer la dernière ,,comme originale et indé-
pendante," et était ainsi dans la bonne voie, qu'il n'a pourtant pas
suivie plus loin. Sa conclusion est, qu'il ne veut voir dans les vallées
allongées ni désablements causés par le vent ou par l'homme, ni lits
de rivières, en quoi il a parfaitement raison. Elle est donc entièrement
négative.
Revenons maintenant a la vallée de Noordwijk. Celle-ci est assez large
en raison de sa longueur, monte régulièrement vers le nord et les deux
côtés qui sont nettement marqués, et fait en son entier l'impression de
n'être qu'une vahée d'érosion. L'idée nous en est venue après l'avoir
traversée quelquefois, et elle est parcourue en effet par un petit ruisseau,
preuve en tout cas de sa pente vers l'embouchure. Il est également clair
que ce n'est pas ce ruisseau („Woensdagsche" et ,,Donderdagsche Wete-
ring") qui a pu produire l'érosion ; il est pour cela beaucoup trop faible
et ne fait que drainer une vallée déjà prête. Tout au plus pourrait-il
entraîner un peu de sable pendant l'hiver et approfondir impercepti-
blement son lit. Ensuite, le terrain entier des dunes est post-diluvien
et ce n'est que dans l'époque diluvienne que le creusement des vallées
s'est opéré sur une grande échelle. Ainsi que Staring, nous ne croyons
non plus à un bras du Rhin comme cause d'érosion, la vallée étant
justement inclinée vers le bras oblitéré de cette rivière.
Il nous reste pourtant un agent érodant suffisamment puissant et qui
travaille encore de nos jours : c'est l'eau marine qui s'étend sur la plage
pendant le Ilux et s'en retire pendant le reflux. On n'a qu'à étudier les
cartes topographiques de nos îles frisonnes et groningoises pour y trouver
un assez grand nombre de ces „Geulen," „Slenken" ou „Balgen^\ qui
ressemblent à des lits de rivière profonds et larges mais courts. Pendant
la marée, la mer entre d'abord dans ces Slônken, qui débordent bientôt,
et en peu de temps toute la plaine sableuse du „Wad" est couverte
d'eau. Le reflux venant, le même phénomène se produit en sens inverse,
et ce sont ces canaux qui conservent le plus longtemps leur eau; les
plus grands ne se dessèchent jamais et servent de ports aux îles de
30 CONTRIBUTIONS A LA OÉOL^'GIE DES PAYS-BAS.
Terschelling, Schiermonnikoog, etc. Staring donne une description animée
du changement de scène rapide de terre ferme en mer agitée (B. v. N.
1, pag. 230), description que M. Winkler a transportée dans ses „Consi-
dérations géologiques." Encore de nos jours, la mer pourrait entrer
pendant le Ilux dans le „Noordzijder-Polder" (vallée de Noordwijk), si
elle n'en était pas empêchée par la chaîne de dunes. Le terrain entier
n'y est pas suffisamment élévé (quelques décimètres au-dessus de A. P.)
pour l'empêchej'. Il en est de même pour les autres vallées près de
Sassenheim et de Warmond qui lui sont parallèles.
Or, il y a entre nos îles septentrionales des passe-bouque (zeegaten)
qui servent au passage de l'eau des „Wadden" d'où elle s'étend laté-
ralement avec une assez grande vitesse et on se demande naturellement :
„Où était la communication avec la Mer du Nord qui servait d'entrée
et de sortie à l'eau des marées? Il ne faut pas chercher trop loin notre
passebouque oblitéré, car trois vallées tout à fait semblables à celles
de Noordwijk s'étendent en sens inverse, vers La Haye, et il doit donc
se trouver entre Noordwijk et Wassenaar.
Les éminences autour de Rijnsburg et celle qui porte la ville de Leide,
nous paraissent être des banc de sable qui se sont formés plus tard et
ont contribué peut-être à l'obstruction du passe-bouque.
Celles de Sassenheim, de Warmond et de Voorschoten—Rijswijk sont
parallèles aux vallées et probablement plus anciennes; elles étaient
inondées régulièrement à chaque marée, à cause de leur hauteur peu
considérable.
De même qu'aujourd'hui sur nos Wadden, plusieurs parties de ces
bancs de sable étaient un peu plus élevées que les autres dans le temps
où s'opéraient les phénomènes qui nous occupent. L'eau du Ilux en
montant dans les Sle7iken peut y apporter du sable dans des conditions
favorables, qu'elle dépose naturellement, quand sa vitesse devient insuf-
fisante pour le tenir en suspension. C'est ce qui arrive quand elle s'étend
sur le Wad. Les Wadden de nos jours sont à peu près stables; mais
on peut se les représenter dans des conditions qui les font accroître,
aussi bien que dans celles qui les font diminuer. 11 arrivera un moment
où le Wad ne sera inondé que pendant les très hautes marées et il
pourra alors s'y former des dunes qui croîtront peu à peu au dépens
du sable que le Ilux jette sur la plage ordinaire. Nous voulons donc
considérer avec Staring nos dunes intérieures comme ,,originales et
indépendantes" ; mais nous irons plus loin et préciserons davantage.
Nous considérons la rangée de dunes la plus intérieure, celle de Voor-
hout—Hillegom—Bennebroek—Heemstede—Harlem et de Ten Deyl--
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CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 31
Raaphorst, au sud du Vieux-Rhin, comme la plus ancienne. Ensuite se
seraient formées celles de Noordwijkerhout et de Kronestein (îlot au S.O.
de Vogelenzang) et la rangée de Wassenaar—Clingendaal, puis d'autres
rangées plus occidentales qu'il est impossible de distinguer, puisqu'elles
ont été recouvertes par les dunes maritimes actuelles pendant leur dépla-
cement vers l'intérieur, déplacement qui a heureusement cessé depuis
assez longtemps.
La plus haute antiquité des dunes intérieures explique très bien le
fait rélevé par Staring que le sable qui compose celles entre Harlem et
Warmond (B. v. N. L pag. 323) ne contient point de calcaire, tandis que
celui des dunes extérieures en contient, en partie à l'état de débris de
coquilles. L'eau de pluie a eu le temps de dissoudre le calcaire en s'infd-
trant dans le sable dès dunes intérieures plus anciennes, et n'y est pas
encore parvenu dans le sable des dunes maritimes plus récentes. Cette
eau de pluie contient en même temps de l'oxygène qui détruit, en
l'oxydant, peu à peu l'humus du sable des dunes. Cette oxydation est
facilitée par la rapidité avec laquelle l'eau de pluie s'infiltre et le sable
se dessèche.
Il en est ici précisément comme du sable de nos bruyères arides;
l'absence d'une croûte humifère plus ou moins considérable ne peut pas
être invoquée contre l'hypothèse de la présence de forêts dans les temps
passés. L'humus a été oxydé (ou brûlé) et le calcaire a été dissous et
transporté plus bas. Il est donc assez probable que les dunes intérieures
ont porté autrefois des forêts étendues et que ce sont ces forêts qui leur
ont fait conserver leur forme originale et les ont protégées contre la
destruction par les tempêtes. Du moins l'absence d'une terre végétale
assez épaisse ne peut pas prouver le contraire.
Revenons maintenant aux vallées dunaires. Il y en a encore plus au
nord, celle de Vogelenzang—Harlem et les petites vallées entre Bloemeri-
daal et Velsen. Il est clair qu'elles ne peuvent être expliquées par le
passe-bouque de Leide, puisqu'elles en sont trop éloignées et s'ouvrent
vers le nord. Peut-être y-a-t-il eu un passe-bouque près de Velsen ou
de Beverwijk, ou encore plus au nord, qui n'a pas laissé de traces aussi
distinctes que celui dont nous venons de parler. On pourrait mettre
aussi ce passe-bouque en rapport avec la vallée dunaire derrière Cas-
tricum qui est beaucoup moins distincte que les autres et a eu son ouver-
ture vers le sud, ainsi près de Heemskerk, du moins d'après ce que
nous avons pu en voir. La topographie originale était rendue très indis-
tincte en cet endroit par le déplacement du sable des dunes vers l'intérieur.
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '32
C'est dans l'été de 1888 que nous avons été assez heureux de voir
une double rangée de dunes avec une longue vallée intermédiaire en train
de formation. En faisant une excursion dans l'île de ,,Voorne en Putten,"
qui porte Brielle et Hellevoetsluis, nous avons aussi visité la plage du
Haringvliet entre Rockanje et Oostvoorne.
Près du premier village, les dunes ordinaires se sont déplacées nota-
blement vers l'intérieur sur le polder „Stuifakker" ; mais c'est un phé-
nomène connu qui ne nous intéresse pas ici. En allant de Rockanje
vers le N.N.O., on traverse d'abord des dunes assez petites, puis une
étroite rangée de dunes principales, assez élevées. Derrière elles s'étend
une plage excessivement large, formant le bout de l'estuaire du Haring-
vliet. Cette plage porte le nom caractéristique de ,.(rroene simnc?" (plage
verte) et on y voit paître des vaches et des chevaux. On peut y dis-
tinguer trois zones parallèles: la première commence au pied des dunes
principales et a une largeur d'environ 300 M., c'était le pâturage
proprement dit, quoique assez maigre. Le sol y était très plat et n'était
inondé que rarement ; il s'y trouvait des flaques d'eau parfaitement douce,
soit eau de pluie, soit eau des dunes. Cette longue vallée suit le pied des
dunes jusqu'à l'embouchure de la Meuse de Brielle, d'où l'eau des hautes
marées peut y entrer. La seconde zone est constituée par des dunes
véritables quoique rudimentaires ; elles ont une hauteur de 0,5 à 1
M. et sont couvertes d'ammophile clairsemée; elles sont donc déjà
en état de se maintenir pendant les tempêtes de l'hiver. Nous avons
trouvé pour cette zone une largeur de 550 à 600 M, Ensuite vient la
plage véritable ordinaire, qui n'avait qu'une largeur de 20 M., du
moins au moment de notre visite.
Nous avons donc ici une preuve irréfutable que dans des conditions
favorables il peut se former sur une large plage une nouvelle rangée
de dunes, séparée de la première par un terrain plat, plus; bas, qui
reste en communication avec la mer et constitue une vallée inondée de
temps à autre.
Un phénomène parfaitement analogue, mais de date plus réculée, s'est
produit dans l'île de Goeree, dans les environs du village d'Oudorp.
Ce village est entouré de terres sableuses sèches à peu près horizontales,
cultivées depuis longtemps pour la majeure partie. Vers l'ouest, elles
touchent à des prairies communales étendues, plus ou moins distincte-
ment ondulées et portant le nom de ,,West-Duinen" (dunes occidentales).
Il en est absolument de même vers l'est, où ces prairies portent le nom
de ,,Middel-Duinen" et de „Oost-Duinen" (dunes du milieu et orientales).
On les reconnaît au premier abord comme de véritables dunes, quoique
A.
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te
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CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '33
peu élevées et couvertes presque partout d'assez bons pâturages. Elles
ressemblent beaucoup au petit îlot de dunes intérieures dans la vallée
(le Vogelenzang-Voorhout, qui porte les métairies de Kronestein, Groene-
Tuin, etc. Or, en faisant quelques courses dans les environs d'Ouddorp,
on voit, avec un peu d'expérience, que ces terrains ne sont que des
dunes intérieures nivelées; de temps à autre on rencontre des parcelles,
qui ont davantage conservé leur forme naturelle. L'homme, en s'y éta-
blissant, a fait des champs cultivés d'une partie de ces petites dunes,
qui n'atteignent souvent qu'un mètre ou un demi-mètre de hauteur, et
a laissé les autres dans l'état de prairies. Cette chaîne de dunes ancietmes
a une direction du S. 0. au N. E. I.a limite orientale en est ondulée et
les sépare d'un terrain horizontal sableux, qui descend graduellement
et disparaît sous l'argile des polders de l'île de Goeree, réunie depuis
le siècle passé à celle d'Overllakkee. La partie septentrionale, ou plutôt
du N.E., de ces dunes, se confond avec les dunes maritimes ordinaires,
qu'on peut suivre vers l'ouest, où elles s'éloignent des dunes intérieures
en laissant entre elles une vallée dunaire, couverte d'argile marine,
grasse vers l'ouest, plus sableuse vers l'est. Cette vallée est divisée par
deux digues transversales en trois polders d'âge dilïerent: le ,,Oude-
Nieuwlandsche-Polder", le ,,Nieuvven-Oord-Polder" et le ,,West-Nieuw-
landsche-Polder." La forme actueUe n'en est point originale; car nous
avons trouvé sur une ancierme carte le premier polder beaucoup plus
large, le pied intérieur des dunes maritimes d'alors correspondant assez
bien avec la limite de la plage actuelle. On sait donc que les dunes se
sont déplacées notablement vers l'intérieur dans les deux derniei's siècles.
Il en est de même de la limite occidentale ; la courbure méridionale du
pied intérieur des dunes maritimes actuelles est relativement récente,
puisque l'argile marine contenant beaucoup de coquilles mortes de la
Scrobicularia piperita est visible sur la plage ouverte de la Mer du Nord,
où certainement elle ne se déposerait pas aujourd'hui.
L'histoire géologique de cette île est donc probablement la suivante.
Dans l'embouchure immense du Rhin et de la Meuse il s'est formé un
banc de sable, peut-être autour d'un noyau de l'ancien terrain des
tourbières ou de sa base. Il s'y forma peu à peu une chaîne de dunes
peu élevées, et la plage s'avança assez rapidement vers le nord-ouest
par de nouveaux dépôts de sable, jusqu'à ce qu'il y apparut une seconde
chaîne de dunes dans une direction qui se rapprochait davantage de
l'O—E. Cette chaîne se confondit aussitôt ou plus tard avec les dunes
plus anciennes un peu à l'E. du point actuel de réunion. La crique
intermc^diaire fut peu à peu remplie d'ai-gile marine ut l'homme en isola
5
-ocr page 37-34 CONTRIBUTIONS A LA OÉOL^'GIE DES PAYS-BAS.
successivement par des digues les parties les plus élevées. Dans les
points sus-nommés, les dunes maritimes plus récentes se sont ensuite
déplacées vers l'intérieur. Peut-être verra-t-on plus tard se former une
troisième rangée de dunes sur l'énorme plage de l'extrémité S.O,, appelée
,,Springer", où les dunes extérieures actuelles continuent à s'allonger à
vue d'œil vers le S.O. de même que l'extrémité de cette plage.
mi
La petite carte (Pl. I) d'une partie de l'ancienne île de Goeree a besoin
d'explication. La partie colorée en vert y représente, comme ailleurs,
les parties les plus basses, les polders. Ici, tout ce terrain est couvert
d'argile et par conséquent la limite y est à l'est d'Ouddorp plus natu-
relle qu'en beaucoup d'autres endroits. Sur la côte du Haringvliet, notre
carte ne représente pas l'état actuel des choses, mais celui d'il y a
environ deux siècles. Ainsi la ligne continue CD signifie l'ancienne côte, la
ligne pointillée intérieure la côte actuelle ; le pied interne des dunes actuelles
correspond précisément avec le „Nieuwlandsche-Dijk," de sorte que les
deux ,,Wetering" (fossés de drainage, en flamand: „Watergang") sep-
tentrionales ont disparu aujourd'hui; ce n'est que la troisième qui fonc-
tionne encore. La partie au nord de cette digue devrait donc être colorée
en brun pour représenter les relations actuelles.
I' i,.
B. rapport entre la zone de sable et les grandes
tourbières.
ï:
y '11
fy'4
ISSÜ
Pour compléter notre hypothèse, il nous faut reculer encore davantage
dans le passé et répondre à la question : quelle est l'origine de ce banc
de sable, de ce „Wad" ancien, qui porte les dunes intérieures? Une
difficulté qu'il faut écarter en même temps est l'origine de la zone
tourbeuse de la Hollande Septentrionale et de la Hollande Méridionale.
La tourbe ne se forme qu'exceptionnellement dans l'eau un peu saumâtre,
jamais dans l'eau marine. Or, elle a dans notre contrée une épaisseur
de 4—5 M. et repose sur le Zanddiluvium (Diluvium sableux) dans le
voisinage du Vecht, ou sur l'argile marine, ou sur le sable marin alluvial
plus vers l'occident. Cette couche de tourbe passé-t-elle par dessous notre
zone sableuse ou bien est elle plus récente ? Dans ce cas-ci, le sable marin
qui porte les dunes serait identique à celui que recouvre l'argile marine
sous la tourbe. Le premier cas se présente dans la Flandre belge ; quant aux
dunes que nous avons en vue, nous sommes du second avis. Nous avons
examiné les roches et les rapports des forages de Vogelenzang, d'Over-
veen et de Leide (comp. l'appendice), où la tourbe n'est pas présente.
A Harlem dans deux (orages, on a traversé de la tourbe, de la surface à
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '35
4,30 M. — A. P., mais c'était dans la partie orientale de la ville où l'on
est sur la lisière de la grande zone des tourbières. Le centre, portant
la maison de ville èt la grande église, repose sur la zone sableuse. Ces
deux forages représentent donc un cas neutre.
Il est connu que la mer jette souvent de gros blocs de tourbe sur la
plage de Scheveningue, etc., ce qui prouve certainement que cette roche
se trouve quelque part dans la mer, mais non que c'est une partie des
grandes tourbières, recouverte par du sable à coquilles marines. Staring
cite pourtant quelques faits, qui paraissent d'abord prouver la plus haute
antiquité de la tourbe.
Dans son „Sol des Pays-Bas" I, pag. 68, il parle de la sablière de la
maison de campagne ,,Rusthoek" à Loosduinen, où se trouve une épaisse
couche de tourbe, contenant une énorme quantité de bois." Ce n'est
pourtant que de la tourbe recouverte par une dime, comme on en voit
près de Scheveningue et près de Vogelenzang. La dune intérieure s'est
déplacée un peu vers l'eist comme on peut aussi le voir à Hillegom
(Werestein) où elle a recouvert une petite route mac-adam ; le sable
marin à coquilles reste hors de question. Ensuite, il parle (pag. 324)
de tourbe près de Voorhout et de V^^assenaar, dans laquelle des osse-
ments de chevaux et de boeufs et même un arc en bois de frêne auraient
été trouvés. 11 n'en indique pas le point précis ni la profondeur, mais
il dit littéralement: „Ceci sei't de nouveau de preuve que des déplace-
ments considérables de sable dunaire ont eu lieu dans des temps his-
toriques;" on peut donc admettre que ce n'est ici de nouveau que la
tourbe des vallées dunaires dont il est question. Finalement, il constate
que le sable à coquilles marines sous les dunes est plus ancien que les
grandes tourbières, car à la page précitée on lit. : ,,Les dunes gisent
ainsi souvent sur la tourbe basse. Dans la règle, le sous-sol est pour-
tant du sable marin à coquilles marines non-brisées, c'est à dire l'ancienne
plage sur laquelle les dunes se sont formées. Or, on trouve cette même
2^lage sous la couche de tourbe, et sous l'argile, qui constitue le fond
du Lac de Harlem et d'autres polders (lisez ,,Dessèchements"). Il cite
ensuite le sable marin d'Overveen, de Harlem, de Vogelenzang, de Sas-
senlieim, de Noordwijk, de Katwijk, de La Haye, de Loosduinen, de
Monster et de Bi'ielle, mais il ne songe aucunement à expliquer pourquoi
ce sable se trouve tantôt au niveau de A. P. (à l'ouest), tantôt à 5~"6
M. — A. P. à l'est, ce qui reste cependant un phénomène à expliquer.
M. Beekman, l'auteur de „La Lutte pour l'Existence" dit dans cet
ouvrage (pag. 72) : „En Hollande et dans la province d'Utrecht, la couche
de tourbe est épaisse de 3 M. à 5,5 M. excepté aux hmites près delà
5*
-ocr page 39-36 C0NTR1]ÎUTJ0NS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS.
zone des dunes, où la tourbe disparaît en mince couclie sur le sable.
La question de la plus grande antiquité de notre ancien sable marin
par rapport aux tourbières est ainsi tranchée : il y a donc eu une mer
intérieure, une lagune ou un „Haff" à l'est de la zone sableuse, où la
mer pouvait entrer librement, e. a. par le passe-bouque de Leide, et y
déposer de l'argile marine; le sable marin sous cette ai'gile étant en
continuité directe avec celui sous les dunes. L'eau de ce Haff a eu à peu
près le même niveau (relativement au sol environnant) que la mer
actuelle, qui comme nous avons vu, pourrait entrer dans nos vallées
dunaires pendant les Ilux ordinaires et même couvrir les éminences à
l'exception naturellement des dunes elles mêmes. Nous verrons bientôt
qu'il y a des exceptions à fah-e; mais nous voulons d'abord examiner
une particularité de la zone sableuse, que nous avons décrite pag. 24
et tâcher d'en expliquer l'origine. Ce sont les environs de Delft, où
des phénomènes assez difiei'ents se sont présentés.
C. les environs de delft.
Pendant nos excursions, nous avons suivi la zone sableuse, qui com-
mence pi'ès de Voorschoten et qui porte aussi Voorburg et Rijswijk.
La rive occidentale ressemble aux cas analogues; elle est tantôt plus
distincte, tantôt moins ; mais on peut la tracer assez facilement de Voor-
schoten à Monster. 11 en est de même de la rive orientale de Voorschoten
jusqu'à Voorburg et un peu en delà, où elle se perd, toutefois pour
réapparaître très distinctement sur une courte distance entre Wateringen
et Kwintsheul C'est à l'aide de la carte du Waterstaat et en réunissant
les petits polders en groupes d'après leurs niveaux relatifs que nous
avons pu distinguer deux zones de terrains concentriques, dont le milieu
est plus élevé et qui sont séparées par une troisième zone parallèle plus
profonde, remplie en grande partie de tourbe, qui est recouverte parfois
d'argile plus récente. Ces trois zones sont assez larges en comparaison
de leur longueur, et assez normales sur les zones de la bande sableuse.
L'une est déterminée par la hgne: Rijswijk—Delft, l'autre par la ligne
Poeldijk—De Lier—Maassluis, la partie médiane profonde, par la ligne
Wateringen—Schipluiden—Vlaardingen. Nous faisons abstraction pour
le moment d'inégalités plus petites.
On conçoit que l'explication est la même que pour les zones paral-
lèles à la côte. Nous avons une vallée courte et large, bordée de deux
rives de sable et creusée par le mouvement de Ilux et de reflux dans
le banc de sable que la mer avait déposé elle-même. L'eau de la mer
Écm.
1 '. i
» f
COKTIilEUTIONS A ].A GÉOLOCtIE DES PAYS-BAS. 37
y entrait du sud-est, probablement de l'estuaire, qui formait alors l'embou-
chure du Rhin, de la Meuse et de l'Kscaut réunis, entre Maassluis et Briehe.
La partie médiane est actuellement remplie en partie de tourbe et la surface
en a donc été notablement plus profonde qu'ehe ne l'est aujourd'hui.
Cependant l'eau du flux en arrivant daus la vallée courte et large de
Schipluiden se répandait des deux côtés et y déposait l'argile des envi-
]'ons de Delft et de Wateringen—De Lier; nous la considérons par
conséquent comme équivalent à l'argile bleue des dessèchements (vulgo
„polders"). Staring lui a assigné, sur sa carte géologique, une aire trop
étendue, du moins vei's le nord. D'après lui, le village de Rijswijk, qui
est assez élevé et dont les environs se composent entièrement de sable,
ainsi que la vallée entre ce vihage et La Haye, qui est en partie sableuse,
en partie tourbeuse, se trouvent dans cette limite. Nous avons tracé sur
quelques points la limite du sable et de la tourbe, qui correspond assez
bien avec la ,,Hoefkade", et celle de l'argile et du sable et nous avons
vu qu'il faut reculer celle-ci assez loin vers le sud : elle ne.dépasse que de
500—-600 M. la chaussée de Monster à Rijswijk et occupe ainsi la partie
supérieure de la rive orientale de la vallée de La Haye sur une certaine
étendue. D'ordinaire on voit que l'argile se dépose de préférence dans
l'eau plus profonde qui est la plus tranquille ; l'exception apparente à cette
règle n'est que la conséquence de la rencontre de deux vallées opposées.
L'eau de l'une (Schipluiden) entrait dans l'autre (La Haye) à travers la
ligne de séparation; la première était en communication avec la mer
ouverte par le passe-bouque de Katwijk, l'autre, avec l'estuaire Maas-
sluis—Brielle du Rhin-Meuse et contenait de l'eau plus chargée d'argile,
qu'elle déposait à l'endroit où elle était arrêtée par l'eau montant de
l'autre côté. Nous avons par conséquent dans la partie ,,Wateringen—
Kwintsheul" de la zone sableuse ,,Voorschoten—Monster" une analogie
très intéressante avec ce qu'on appehe en hydraulique „Overlaat" (tra-
verse). C'est une partie d'une digue de rivière à laquelle on a donné
expressément une moindre hauteur qu'au reste, afin que l'eau, en mon-
tant, puisse s'écouler par-dessus la digue dans une direction qui lui est
assignée d'avance. L'avantage en est naturellement que la digue en son
entier est moins exposée à la rupture et que l'inondation n'atteint
qu'une contrée où l'on s'y est préparé d'avance et où l'on y est accou-
tumé depuis une série d'années.
Tout cela pouri-ait encore arriver très facilement de nos jours, si le
pays n'était pas protégé artificiellement contre les inondations de la mer
et des rivières. On peut même supposer une position plus élevée de 1
(à 4,5) M. pour que ces phénomènes arrivent encore assez souvent. C'est
38 CONTRIBUTIONS A LA OÉOL^'GIE DES PAYS-BAS.
aussi cette partie de la Hollande Méridionale, constituant la Wateringue
(waterschap)^) de Delfland qui était difficilement drainée pendant l'hiver,
à cause de l'absence de pompes à épuisement suffisamment puissantes ;
en 1887 on y a remédié en en construisant une dans les dunes de La
Haye. Autrefois l'état des choses était naturellement pis encore et tout
le pays présentait une grande flaque d'eau pendant l'hiver, d'où ne
s'élevaient que les digues des canaux, les routes et les endroits habités
j-ehaussés artificiellement, ainsi que les terrains naturels plus élevés. C'est
pourquoi les premiers endroits habités du temps des comtes de Hollande se
trouvaient à 's Gravesande, Naaldwijk, Rijswijk, etc. Très probablement
la traverse (overlaat) de Wateringen était sous l'eau pendant une partie
notable de l'année et formait une espèce de gué, par lequel on pouvait,
encore passer de Rijswijk à Poeldijk, etc. à travers l'eau peu profonde.
Nous voyons un souvenir de cet état de choses dans les noms de quel-
ques maisons de campagne, situées à côté de cette chaussée et à 2,5
K.M. de Rijswijk. Elles s'appellent ,,De Voorde, Steenvoorde, Over-
voerde, Westervoorde et Nieuwvoorde ;" les deux dernières sont ostensi-
blement récentes et ont été baptisées à l'instar des trois premières. Or,
le mot „Voorde^ signifie ,,gué" et il est plus que probable que la pre-
mière habitation de ce nom a été bâtie sur le point, où l'on devait
traverser l'eau du gué.
liî
D. difficultés a résoudre.
Notre hypothèse de la formation des vallées dunaires explique aussi
pourquoi il nous a été si difficile parfois de bien tracer la limite des
terrains élevés. C'étaient les petits îlots orientaux de Sassenheim, War-
mond, Poelgeest, etc., ainsi que les extrémités inférieures des terrains
élevés, donc des parties qui étaient inondées en général et où l'eau
marine coulait entre des rives submergées. Le sable inondé prend une
pente plus faible que le sable à sec. La même difficulté se présente plus
ou moins de l'autre côté des vallées, à leur commencement, où l'érosion
n'a travaillé que pendant un temps très court de chaque marée et avec
une quantité d'eau plus faible. Aussi la plage nue y était plus souvent
à sec, ce qui favorisait également l'effacement des limites par le dépla-
cement du sable par le vent. Nous avons fait cette observation d'abord
dans le commencement de la vallée de Noordwijk (,,Noordzijder Polder"),
où l'on voit le sol horizontal passer graduellement dans les dunes. Elle nous
!
\
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I 7
h.
Tf,<
') Le mot hollandais ^Watering" correspond à Watergang'' en lïamand.
-ocr page 42-CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '39
conduit aussi à l'iîypothèse la plus simple de celles, que nous avons
essayées pour expliquer des anomalies dans le niveau relatif de certaines
autres vallées dunaires.
Ce sont: Loosduinen—Wassenaar, 2°. Duin-en-Daal—Brederode, 3"^.
Kruisberg—Vogelwater. La première se compose actuellement (pag. 395)
de deux parties: Loosduinen—Zorgvliet et W^aalsdorp—Wassenaar, qui
dans l'origine n'en ont formé qu'une seule, la partie moyenne ayant
été comblée par le déplacement du sable des dunes, sur lequel est bâtie
La Haye. M. Van de Velde, maire de Loosduinen, a eu la complaisance,
à ma prière, d'y déterminer le niveau du sol au sommet (intersection du
ruisseau et de la route de l'hôtel Kijkduin), oii il a trouvé 2,25 M. H- A. P.
et un peu plus près de La Haye, près de l'ancienne machine à épuise-
ment, où il a trouvé 2 M. -h A. P. Or, les marées exceptionnelles
atteignent 3 M. A. P. à Katwijk, de sorte que nous avons ici
encore de la marge pour notre hypothèse de l'eau des marées. Toutefois,
nous croyons que le sol a déjà été un peu haussé par le déplacement
des dunes, qui est très ostensible près de la nouvelle machine à épui-
sement, mais aussi visible ailleurs. La seconde vallée est celle de Bre-
derode, derrière Bloemendaal, près de Harlem. M. Asser, ingénieur du
chemin de fer hollandais, m'a bien obligé en me donnant plusieurs
informations, e. a. le chilfre du niveau naturel de la prairie (maaiveld)
dans le milieu de la petite vallée, à l'endroit où. elle est coupée par le
chemin de fer, non loin de Zandpoort. Ce chiffre est de 3,3 M. et de
3,1 M. pour le point correspondant de la vallée suivante très courte.
Ici donc, le jeu des marées nous met entièrement dans l'embarras; les
marées extraordinaires d'IJmuiden ne montent qu'à 2,6 M. -f- A. P. et
nous n'avons qu'à choisir entre une hausse du sol des vallées et des
dunes en son entier et un déplacement du sable. Comme ce dernier est
prouvé dans d'autres vallées et comme le sol de la vallée sus-nommée
en porte des traces abondantes, nous y avons recours ici.
La troisième vallée, celle de Vogelwater—Kruisberg, derrière Castricum
est dans un état plus défavorable encore. La carte topographique, très
pauvre en cMffi^es topographiques comme toujours, ne nous en dit rien;
mais heureusement pour nous M. Kempees, ingénieur du Waterstaat à
Alkmaar, y a remédié de la manière la plus aimable en déterminant à
notre prière une série de niveaux, partant de l'église catholique de Castri-
cum. La base des dunes du côté intérieur (geestgrond ) ne présente point
de niveaux exagérés; ils sont tout au plus 2 M. 4- A. P. Tout près du
„Vogelwater," il a trouvé 4,75 M. à 5,10 M., tout près du „Kruisberg"
4,05 M. et au milieu, près du „Commissarishuis" et du „Brabandsche
393 CONTRIBUTIONS A LA OÉOL^'GIE DES PAYS-BAS.
Laridbouw", des niveaux bien inférieurs de 3,2 M., 3,5 M. et 3,6 M.
Or, il est clair que nous n'avons pas affaire ici à des désablements
artificiels. Qui aurait eu l'absurdité d'aller creuser du sable pour le
transporter sur des chemins sableux à travers des dunes, composées du
même sable? Nous pouvons donc accepter le chiffre minimal de 3,2 M.
comme base de nos raisonnements, chiffre qui est aussi celui de la vallée
de Brederode. Or, comme celle-ci a eu probablement à l'origine un
niveau inférieur de 1,5 M. à 2 M., nous ne hasardons pas trop en
supposant, que le sol le plus bas de la vallée de Castricum, près du
,,Brabandsche Landbouw" a également été plus bas encore. Il n'y a
aucune des vallées dunaires où la marche du sable des dunes vers les
terres de l'intérieur soit aussi claire et nous nous sommes démandé à
plusieurs reprises pendant nos excursions, si nous avions réellement à
faire à une vallée dunaire ou simplement à une suite de pannes qui
séraient rangées régulièrement.
La vallée de Castricum ayant passé la barrière, nous sommes fort
tenté de laisser passer également le „Breesaap" entre Beverwijk et
IJrnuiden, qui aurait perdu davantage encore son caractère de vallée
dunaire pour se déguiser en panne.
L40
I (
E. naissance des cordons littoraux.
Le point cardinal de l'histoire de nos terres tourbeuses est par con-
séquent la formation de la Nehrung.
D'après ce que nous avons trouvé dans la littérature, les auteurs
distinguent deux espèces de ces étroites langues de terre: l'une est
entièrement libre et souvent peu stable ; l'autre est attachée à la terre
ferme, ou du moins à une île, par un ou deux çôtés et est plus sohde.
Les premières, qui sont le plus développées sur la côte orientale des
Etats-Unis entre Long-Island et La Floride, surtout près du Cap Hatteras,
doivent leur formation, en partie du moins, au sable et à l'argile en
suspension dans l'eau des rivières. Ces matériaux peuvent être transportés
dans des cas favorables jusqu'à ce que l'eau douce, qui Hotte sur l'eau
salée, ait perdu sa vitesse, p. e, en se heurtant à un courant marin
parallèle à la côte. Le banc de sable ainsi formé, pourra s'accroître aussi
du côté de la mer par la déposition de sable marin et la lagune inté-
rieure se comblera peu à peu des sédiments Huviatiles (Leipoldt-Peschel.
Physische Erdkunde). L'autre espèce de Nehrung a toujours un point
d'appui, où commence sa formation, soit un point protubérant de la
côte, soit une île. Derrière ce point, l'eau de la mer sera relativement
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '41
en repos (Keller, Studien über die Gestaltung der Sandküsten, Zeitschrift
für Bauwesen, XXXVI, 1881, Berhn), puisque le courant marin n'entre
pas dans les anses et les baies de la côte. Les ondes montantes jettent
du sable sur la côte, qu'elles s'efforcent de remmener dans leur retour.
Le sable, qui est ainsi en mouvement d'oscihation, est en même temps
pris par le courant de la côte et déposé un peu plus loin, ce qui arrive
naturellement le plus facilement derrière un point protubérant de la
côte, où il se formera un dépôt de sable de plus en plus ahongé, qui
croîtra jusqu'à ce qu'il ait atteint l'autre angle de l'anse.
Le vent, en soufflant obliquement sur la côte, produira également, par
sa composante, un transport de sable parallèle à la côte. Ce transport
sera donc souvent en sens contraire l'été et l'hiver, mais le dernier sera
prépondérant.
D'après Czerny („Die Wirkungen der Winde auf die Gestaltung der
Erde." Ergänzungsheft 48 zu Petermann's Mittheilungen, 1876), les
vagues montantes apportent continuellement du sable sur la côte, qu'ehes
laissent tomber lorsque leur vitesse diminue. C'est ce qui arrive quand
elles se heurtent contre une vague retournante et de cette manière il
pourra se former à une certaine distance de la côte un banc de sable
qui pourra s'élever jusqu'au dessus de l'eau et acquérir des dunes, ahisi
que les Nehrungen.
Ces différentes causes: courants marins (de Ilux et de reflux) paral-
lèles à la côte, et vents, qui la frappent obliquement, sont réprésentées
sur notre côte et elles nous paraissent suffire pour expliquer la formation
de la nehrung. Ce qui nous semble le plus probable, c'est qu'elle a com-
mencé sur la côte française, p. e. à Sangatte et s'est prolongée peu à
peu jusqu'à ce qu'elle ait atteint l'île de Tessel, pour être rompue
ensuite en plusieurs endroits, e. a. à Katwijk et y former le passe-bouque
de Leide.
M. Winkler de Harlem a aussi tâché dans ses ,,Considérations géolo-
giques, etc." de rendre compte de la formation de la nehrung de notre
côte occidentale. Il l'explique comme si c'était une nehrung libre — pour
ainsi dire — produite par la rencontre de l'eau fluviatile et d'un courant
marin. Il insiste (1. c. pag. 60) sur ce fait, qu'on voit encore les
nehrung se former en plusieurs endroits sous nos yeux, mais pourtant
il rattache la formation de la nôti'e à l'époque diluviale, attendu que
notre Rhin actuel ne transporte plus de sable aussi loin dans la mer.
Ensuite il la fait commencer à un point avancé de la côte de Flandre,
près d'Ostende et la considère donc en même temps comme nehrung
non-libre (en forme de péninsule). Nous avons déjà démontré ailleurs
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '42
(Contributions 111, pag. 151), que s'il était prouvé que le sable de notre
nebrung est identique à celui du Zanddiluvium, il ne s'en suit nullement
que la formation en ait eu lieu en même temps, mais que ce ne serait
qu'un même matériel, remanié une fois de plus. M. Winkler n'a donc
lait nullement avancer la question.
Nous avons été assez heureux pour pouvoir observer la formation
d'une nehrung en miniature, mais dans une eau stagnante. Dans l'été de
1889, en faisant des excursions dans le Diluvium de la province de Drenthe,
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nous arrivâmes à une de ces llaques
d'eau assez nombreuses, qui ne sont que
des dépressions, remplies originellement
de tourbe que l'homme a enlevée ensuite
plus ou moins complètement. On la voit
figurée sur la carte topographique sous
le nom de ,,Mijnders-Veen" ou de
,,Zwarte Water" (eau noire) tout près
de la route de sable de Rolde (près
d'Assen) à Borger. C'est probablement
une seule dépression assez étendue, mais
dont la tourbe n'a été enlevée que
partiellement et très irrégulièrement,
de sorte qu'il y existe maintenant
dans un terrain marécageux trois étangs
séparés, dont les niveaux paraissent mê-
me différer un peu. C'est dans le coin
N.E. de l'une d'elles — donc exposé au
vent prédominant — que nous décou-
vrîmes la première nehrung A. La cour-
be extérieure est le rivage élevé com-
posé en partie de tourbe, en partie de très petites dunes, hautes de
Vs —2 M. La courbe ondulée intérieure représente le rivage lors de
notre visite; les deux extrémités en sont réunies par une petite bande
de sable, dirigée du N. 60° 0. au S. 60° E., en forme de deux courbes
presque droites, et longue de 20 M., large de 6 d.M.; la plus grande
largeur de la lagune était de 2 M. A une faible distance, dans le coin
S.E. de l'étang, s'en trouvait une semblable, (Urigée précisément du N.
au S., longue de 18 M., également large de 6 tl.M., qui isolait une
lagune dont la largeur maximale ne mesurait que 1,5 M. Nous croyons
que l'explication en est assez simple. Le vent remue le fond sableux de
l'eau et les vagues, qui montent sur la plage faibleuient inclinée, se heur-
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-ocr page 46-CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 43
tent contre l'eau qui retourne. Il en résulte que l'eau est tranquille de
temps en temps sur la même ligne et laisse tomber le sable en suspension.
L'influence de courants est exclue absolument, le seul agent imagi-
nable est donc le vent.
F. Comparaison du Haff de Hollande avec quelques autres.
C'est en première ligne le »Kurische Haff" de la Prusse Orientale à
à l'embouchure de la Memel, qui se prête à une comparaison détaillée.
11 a été décrit par M. Berendt dans les ,,Schriften der physikalischen-
oekonomischen Gesellschaft zu Königsberg, IX, 2. 1868", sous le titre
de: „Geologie des Kurischen Haffs."
C'est une eau très peu profonde, séparée de la Baltique par une
Nehrung, qui porte de très hautes dunes. Il contient de l'eau douce et
n'a été qu'en partie comblé par les terrains de transport de la Memel —
sable et argile — et par des tourbières. Ces formations récentes ne
s'étendent nulle part jusqu'à la nehrung, ce qui est par conséquent un
premier point de différence. M. B. considère celle-ci — et non le versant
du plateau de l'intérieur — comme la veritable prolongation de la côte
de la Baltique; l'ancienne argile à blocaux en constitue le sous-sol,
ainsi que celui du haff, des formations alluviales et de l'argile à blocaux
supérieure du plateau voisin. Une partie de cette dernière doit avoir
disparu par conséquent, selon M. B., par suite de l'érosion de la Memel
e. a. et de la Baltique, procédé qui nous est resté encore un peu obscur
à cause de la présence des deux ou trois îlots de l'argile à blocaux in-
férieure, qui sont devenus les noyaux de la nouvelle nehrung. La con-
séquence de cette érosion fut une lagune, plus grande que la lagune
actuelle et séparée de la Baltique par les îlots précités; l'auteur lui
donne le nom, de „lagune de Tilsit". Or, cette lagune ne saurait être com-
parée avec la nôtre, attendu qu'elle est antérieure à la déposition du
„Haidesa?id'\ formation sableuse, identique à notre Diluvium sableux.
M. Berendt suppose ensuite que cette érosion a été simultanée à une
hausse du sol assez considérable, jusqu'à 23 M. au-dessus du niveau
actuel de la mer, une érosion fluviatile de l'argile à blocaux par la Memel
(1. c. pag. 57) ayant été constatée jusqu'à cette profondeur au-dessous
de la mer. Ce point doit donc avoir été plus élevé ; mais nous ne voyons
pas qu'il soit nécessaire d'introduire pour cela une oscillation du sol.
M. Berendt était encore en 1869 partisan de l'hypothèse de Lyell et
devait naturellement supposer cette hausse du sol. Dès qu'on accepte
l'hypothèse glaciahste actuelle de TorelL, etc., on peut laisser tomber
■■ 1 '
44 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS.
celle de la hausse du sol avant la formation du premier haff de Tilsit.
Nous différons ensuite de l'auteur allemand dans l'explication de
l'origine du Haidesand. M. B. le considère (1869) en son entier comme
dépôt marin, ainsi qu'autrefois nos confrères belges; nous ne voyons
là (en grande partie) qu'un simple dépôt fluviatile, très étendu en
vérité, et qui a son faciès marin distinct (Système Eemien). La consé-
quence en est que, selon nous, une submersion au-dessous du niveau de
la mer est superflue pour expliquer les dépôts de Haidesand ; ils ont pu
se former sur un sol à sec, inondé par les fleuves qui apportent le sable,
donc la Memel, e. a. Il en est de même quand on considère ce dépôt
comme un produit des eaux de fonte du manteau de glace quaternaire.
M. B. accepte ensuite une première période d'abaissement du sol, qui
devait naturellement faciliter la déposition du sable dans le cours infé-
rieur de la rivière et sur la côte voisine ; cette baisse aurait atteint de
10 à 14 M. au-dessous du niveau actuel de la mer; d'après notre
manière de voir un chiffre plus petit aurait suffi. La lagune fut trans-
formée on golfe, les noyaux du cordon furent entièrement submergés
et ne formèrent qu'une barre devant le Golfe de Tilsit. Nous parallé-
lisons cet état de choses avec la fin de notre première époque d'abais-
sement, lorsque la nehrung de nos provinces marines commença à se
former. Notre sable marin ancien de la Hollande Méridionale et Sep-
tentrionale était déposé à ce moment.
Cette première baisse du sol fut suivie d'une seconde hausse jusqu'à
un minimum de B M., chiffre qui s'accorde mieux avec le nôtre (4—5 M.);
le principal argument de M. B. est un versant marin escarpé, maintenant
submergé et qui a une hauteur de 2,2 M. A mesure que le terrain
vint à sec, il se couvrit de ibrêts et de tourbières, qui s'épaissirent gradu-
ehement. On y trouve actuellement des troncs d'arbres debout — tout
comme chez nous —, mais à plusieurs pieds au-dessous de la surface
actuelle de l'eau. Une conséquence de cette hausse fut l'apparition du
cordon au-dessus du niveau de la mer. Il était probablement encore
partagé en plusieurs ilôts par des passe-bouque et se couvrit bientôt
de dunes et celles-ci à leur tour de forêts. Selon M. Berendt, les dunes
de la nehrung n'ont pas subi de changements importants jusqu'au temps
de Frédéric le Grand, lorsque le déboisement par l'homme eut lieu sur
une grande échelle. La conséquence naturelle fut leur déplacement vers
l'est et l'enterrement de plusieurs villages.
Nous sommes arrivé ici à la seconde époque de baisse du sol, identique à
la nôtre, et dont toute notre période historique fait partie. Comme nous
l'avons accepté pour notre patrie, elle serait à peu près égale à la hausse pré-
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CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 45
céderite, selon M. Berendt d'au moins 3 M. Les preuves de cette baisse
sont en partie les mêmes que celles de la hausse, c'est à dire l'état des
tourbières, et en partie des données historiques, qui manquent chez nous.
On trouve des rognons et des troncs d'arbres dans les tourbières qui
ont une épaisseur moyenne de 3 M., ainsi qu'en dehors de la nehrung,
où l'on peut les observer dans des conditions favorables — eau basse et
claire et vent d'est. Certainement l'homme a été témoin de cette époque
entière, car on a trouvé ses traces : foyers dans les tourbières et à
3 M. au-dessous de la mer, accompagnés d'objets travaillés de succin très
nombreux. Pour cette contrée, la baisse s'est continuée jusque dans le
siècle précédent, preuve en est le changement de végétation. Il devint
de plus en plus difficile et enfin impossible de cultiver des chênes, des
frênes et des arbres à fruits aux lieux où ils avaient poussé autrefois
en grande quantité. Nous ne connaissons pas de cas semblables dans
notre patrie ; mais nous ne voyons pas^ là une preuve que la baisse du sol
ait cessé plus tôt. On pourra l'expliquer facilement par l'habileté des
Néerlandais à drainer les terres basses, les moulins à vent étant une
invention hollandaise, qui ne fut appliquée que beaucoup plus tard dans
la Prusse orientale.
Avant de quitter l'ouvrage remarquable de M. Berendt, nous voulons
relever le fait que l'histoire du ,,Kurische Half", comme il l'a tracée, est
presque entièrement parallèle à celle du nôtre, sauf la première partie
et quelques détails, qui sont le conséquence naturelle d'une différence du sol.
Passons au ,,Frische Haff", dont l'histoire géologique a été tracée dans
le même journal de 1880 par M. A. Jentzsch, sous le titre de „Geolo-
gische Skizze des Weichseldelta's." Il diffère en plusieurs points du
,,Kurische Haff." D'abord les formations alluviales en ont comblé une
partie importante et se sont avancées jusqu'à la nehrung; ensuite elles
consistent pour la majeure partie en argile et en sable de la Vistule;
les tourbières n'y occupent qu'un rang secondaire. Tandis que dans le
Kurische Haff la nehrung repose sur quelques noyaux de Diluvium ancien,
la base de la Frische Nehrung est composée de Haidesand (Diluvium
sableux).
Quant à l'origine primitive de la lagune, M. Jentzsch diffère en un
point essentiel de M. Berendt, en ce qu'il considère un effondrement
local le long de failles comme la première cause de sa formation, et non
l'érosion fluviatile. Le principal argument qu'il donne (1. c. pag. 178)
est que la puissance du Diluvium dans le delta de la Vistule se tient
dans les limites ordinaires et est même un peu plus grande qu'ailleurs.
Or, il n'est pas très probable que le „Frische" et le „Kurische Haff,"
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 399
qui sont si semblables, aient eu à l'origine une histoire géologique
tellement différente (abaissement local et érosion fluviatile), et de l'autre
côté M. Berendt nous dit décidément que l'argile à blocaux du delta de
la Memel et de la nehrung est l'argile inférieure. La conséquence en
est que la puissance totale du Diluvium dans le delta de la Memel doit
être bien inférieure à celle du Frische Haff. Enfin, d'après l'explication
de M. Berendt, l'association de la rivière et du haff n'est pas acciden-
telle; d'après cehe de M. Jentzsch, elle l'est bien. M. Jentzsch, pubhant
son traité onze années (1880 et 1869) après M. Berendt, eût bien dû
s'occuper de cette question.
Le Haidesand (Diluvium sableux) n'atteint qu'exceptionnellement une
hauteur de 13 M. au-dessus de la mer; M. Jentzsch accepte par con-
séquent un abaissement du sol sous le niveau actuel qui correspond très
bien au chiffre de M. Berendt (10—-14 M.). Pour nous, cette submer-
sion hypothétique est superflue, comme nous l'avons déjà dit ci-dessus.
De nombreux faits contraignent à admettre ensuite une position plus
élevée qu'aujourd'hui. On a trouvé des urnes payennes, un foyer, etc.,
à 2—4 M. au-dessous de la mer et sous la tourbe, accompagnés des
rognons d'arbres ordinaires. Enfin la surface des terres elle-même, qui
est inférieure au niveau de la mer en plusieurs endroits, nous contraint
d'admettre une nouvelle baisse du sol.
L'ouvrage de Meyn : „Geognostische Beschreibung der Insel Sylt und
ihrer Umgebung" (Abhandlungen der geologischen Specialkarte von
Preussen, 1876), décrit une partie du monde qui présente également
beaucoup d'analogie avec nos provinces marines. L'île de Sylt s'est
étendue jadis beaucoup plus loin vers l'ouest ; une des preuves en est la
présence de dunes maritimes sur le plateau de grès miocène haut de 30 M.,
qu'elles ne pourraient pas atteindre actuellement, la plage étant trop étroite.
La partie méridionale de la longue presqu'île de Hörnum lOst une
plage etendue. sur laquelle les dunes n'apparaissent qu'à une distance
de 2—3 K.M. de la mer; elles sont entièrement couvertes de végétation.
On y observe plusieurs terrasses: d'abord la plage ordinaire, ensuite
une seconde — plage à écume (Schaumstrand) — qui s'élève à iVs M.
au-dessus de la marée ordinaire et qui est couverte d'objets légers, tels
que: coquilles d'huîtres, os de poulpe, bois flottant, lignite, tourbe, etc.,
et une troisième plage qui surpasse la dernière encore de 1 M. et
qui est parfaitement horizontale et parée de pierres plates, que la mer
y a jetées pendant les marées de tempête exceptionnehes. Les pierres
plus ou moins sphériques s'enfoncent bien vite sous le sable, tandis que
les pierres plates dansent facilement sur l'eau et imitent des corps flottants.
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 47
Ces différents étages nous rappellent vivement ceux que nous avons
distingués dans nos dunes intérieures ; l'analogie est rendue encore plus
grande par la découverte faite par Me^m, que ces terrasses pénètrent dans
les dunes et y forment une vallée ramifiée. Meyn avoue qu'il ne saurait
expliquer ce phénomène; nous serions porté à le paralléliser avec celui
de nos vallées dunaires.
Il ne parle nulle part d'une hausse de valeur égale qui aurait pré-
cédé un dernier abaissement, mais bien d'une hausse plus ancienne qu'il
évalue de 30 à 60 M. et qui nous parait être la même que le première
hausse du Kurische Haff', évaluée par Berendt à 23 M. minimum, et
qui expliquerait la profonde érosion fluviatile produite par la Memel.
(pag. 43). Comme nous l'avons déjà répété plusieurs fois, l'hypothèse
de cette hausse nous paraît superflue; nous admettons cependant pour
notre patrie une position bien plus élevée, que nous croyons être originale.
Chapitre III. L'Abaissement du Sol et les Tourbières.
A. L'Abaissement du Sol pendant la Période
du Zanddiluvium.
Nous avons regardé dans iios Contributions lïl le Zanddiluvium (Di-
luvium sableux) en partie comme un dépôt fluviatile, apporté par le
Rhin et la Meuse et localement par d'autres rivières plus petites et des
ruisseaux, qui prennent leur origine dans le Diluvium plus ancien.
L'extrémité de ce dépôt se serait formée dans la Mer du Nord et dans
l'estuaire, qui est devenu plus tard la partie septentrionale de la Vallée
Gueldroise; elle y a enterré une faune marine, assez différente de celle
de nos jours et constituant ie „Système Eemien" de Harting. Comme
cette faune se compose d'espèces qui habitent des profondeurs mini-
males, de quelques mètres tout au plus, sa présence actuelle à des pro-
fondeurs plus considérables dénote naturellement un abaissement graduel
du sol, qui a d'ailleurs déjà eu heu dès la première partie de la période
pliocène. Un cas tout à fait semblable se présente pour les fossiles;
Diestiens et Scaldisiens des forages d'Utrecht, etc. (Contributions I) et
d'Amsterdam (Contr. IV).
Or, la rive de la Mer du Nord Eemienne peut être indiquée avec
quelque précision entre Utrecht et Amsterdam par l'exécution de quelques
forages pour le nouveau canal d'Amsterdam à la Merwede. Nous savons
que le S.E. a été constaté sous Amsterdam ; son absence dans certaines
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '48
localités immédiatement près de la ville peut facilement être expliquée par
une érosion ultérieure, puisqu'il apparaît de nouveau plus loin vers l'E.S.E.
Il a été constaté entre le ,,Oosterspoor\veg" et la Zuiderzee jusqu'à mi-
distance entre les ponts du canal de Muiden et du canal de la Merwede.
Au nord du premier de ces canaux les coquilles se trouvent associées
à de l'argile marine.; au sud, à du sable marin, à une profondeur un
peu plus faible (10—19 contre 15—25 M.). Ce chiffre s'accorde très
bien avec les résultats acquis par les forages de la Vallée Gueldroise
(Contributions III) à l'exception de celui du viaduct du chemin de fer de
l'Etat près de Veenendaal, où le niveau coquiller monte jusqu'à 6 M. — A.P.
Ici nous ne voulons que signaler cette exception pour nous en occuper
plus tard.
La plage Eemienne se trouvait donc à une distance de 2 ou 3 K.M.
au N.O. de la petite ville de Weesp, ce qui nous exphque pourquoi
nous n'avons pu obtenir des renseignements sur les coquilles, ni à W'eesp,
ni à Muiden ou à Naarden. Ces trois localités se trouvaient alors à sec
ainsi qu'Utrecht. Ensuite aucun des forages entre Weesp (ou plutôt
voisinage du Muidertrekvaart) et Utrecht n'a rapporté de coquilles
Eemiennes, coquilles qui ont bien été trouvées par les forages de Harlem,
d'Overveen et de Vogelenzang, à l'ouest et au sud de cette ville et à
20—30 M. — A. P. (Comp. la dernière partie de ce travail). I.a surface
du sol à sec s'étendait ainsi probablement assez loin à l'ouest de la ville
d'Utrecht ; nous ne possédons du moins aucune date relativement aux
coquilles Eemiennes au sud de la ligne Muiden—Vogelenzang. Le village
de Sloten, près d'Amsterdam, où elles n'ont pas été rencontrées non
plus, se trouve sur cette ligne et sur la terre ferme Eemienne.
Toutefois, la même faune a aussi été constatée assez loin vers le
sud, par le forage de Blankenberghe, sur la côte belge et à la profon-
deur de 15 M. — A. P. (Contributions IV. Pag. 52 (18)).
Notre sous-sol s'est même abaissé bien davantage dans la période du
Zanddiluvium. Celui-ci a une épaisseur très considérable et est d'après nous
(en partie) un dépôt Iluviatile, qui ne présente un faciès marin qu'en
quelques localités. Or, nous l'avons suivi jusqu'aux profondeurs sui-
vantes — A. P. : Deventer 73 M., Voorthuizen 63 M. (minimum), Zutfen
100 M., (minimum probable) (Contributions IH, pag. 144 et 145). Ces
dilférentes profondeurs doivent donc avoir été à sec au moment où le
sable s'y déposa, attendu qu'il n'y a aucune trace de fossiles marins.
A Deventer et à Zutfen on n'en a pas trouvé un seul ; à Voorthuizen,
une submersion a eu lieu, pendant laquelle la faune Eemienne s'y
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 49
développa. Il serait du moins très étrange que la mer y eût laissé des
traces dans la zone de 9,5 à 12 M. H- A. P. et qu'elle n'en eût
laissé pas une seule ni en-dessous ni en-dessus. Nous expliquons ce
phénomène en admettant que la mer y est arrivée par l'abaissement
du sol et s'en est retirée par l'alluvionnement, qui faisait plus que con-
trebalancer l'abaissement de l'estuaire. (Comp. „Quelques Considérations
sur le Sable campinien et le Diluvium sableux". Bulletin de la Société
belge de Géologie, de Paléontologie et d'Hydrologie, 1888.)
B. Les Tourbières des Pays-Bas et de la Belgique.
Le Diluvinm sableux, recouvert en partie des formations plus récentes,
ne se montre à la surface qu'exceptionnellement à l'ouest de la ligne
Utrecht—Muiden. Il y disparaît sous les tourbières du Vecht, qui
occupent avec d'autres, très étendues, une large zone dans les deux pro-
vinces de la Hollande Méridionale et Septentrionale. Il en était du moins
ainsi autrefois, car on a en maint endroit enlevé la tourbe et drainé les
lacs et les étangs qui résultaient de l'action de l'homme et de la nature.
Les vagues vinrent facilement à bout d'un matériel aussi peu cohérent
et firent naître successivement la Zuiderzee, l'Y, le Lac de Harlem, etc.
Le fond de ces anciennes tourbières — maintenant dessèchements —
est donc le Zanddiluvium vers l'est, puis l'argile marine bleue très fer-
tile, qui est remplacée à son tour vers l'ouest par du sable marin. Or,
c'est ce sable marin qui, en apparaissant à la surface dans la zone des
dunes, que nous venons de décrire, constitue une difficulté à résoudre.
Il est plus ancien que les tourbières, plus élevé en même temps, et
s'oppose à l'hypothèse d'un simple abaissement continué jusqu'à nos jours.
Selon notre manière de voir, la longue période d'abaissement, qui
date du moins du Pliocène ancien, aurait été interrompue par une pé-
riode d'élévation relativement courte. La zone de sable marin avec ses
dunes et ses vallées longitudinales, l'ancienne „A^e/iî^wn^," .aurait séparé
une lagune, un „Haff" de la mer, dans lequel se déposait l'argile ma-
rine. Le niveau de la mer était à peu près celui de nos jours ou bien
de 1—1,5 M. plus bas, la profondeur moyenne du lac était d'abord de
4—5 M, et fut réduite à 3—4 M. par la déposition de l'argile.
Cette mer intérieure se remplit plus tard de tourbe, ce qui nous force
à admettre une hausse correspondante du sol, évaluée à 5 M. environ.
Nous voulons suivre cette couche de tourbe dans nos provinces maritimes
contributions a la géologie des pays-bas
et nous occuper ensuite des liypothèses plus ou moins plausibles, ima-
ginées pour rendre compte de sa formation.
La Zuiderzee a été rempli probablement de tourbe avant les terribles inon-
dations du moyen âge. Le dernier vestige de son état original est la petite
île de Schokland, dont la surface se compose d'une argile marine récente
de 1—1,5 M. d'épaisseur, reposant sur 6—7 M. de tourbe, sous laquelle
on a constaté du sable, probablement du ,,Zanddiluvium". (Van Dig-
gelen. La Zuiderzee, les „Wadden" frisonnes et la Lauwerzee. Zwolle
4849. holl.).
D'après M. van Bemmelen (,,Contribution à la Connaissance du Sol
alluvial de la Néerlande." Natuurkundige Verhandehngen der Koninklijke
Akademie van Wetenschappen, XXV, 4886), la surface de l'argile bleue
(ancienne argile marine ou sa,umâtre) se trouve en général à 4,3 M. — A.P.
(4—4,8), Elle se retrouve partout dans la formation des tourbières basses
(c'est trop générahsé !), a une épaisseur de 4 à 3 M. et repose sur la
marne sableuse (ancien sable marin). Le golfe de l'Y a donc été rempli
jadis par une couche de tourbe, épaisse d'environ 4 mètres dont la ma-
jeure partie a été enlevée par les vagues.
Ensuite notre couche de tourbe se retrouve en Zéelande. M. Seelheim :
(„Les Forages en Zéelande." Natuurk. Verh. Kon. Akad. XIX, 4879) l'a
constatée par une série de forages dans les directions suivantes : I Bors-
selen—Goes—Stavenisse, entre 2,85 et 4,85, 2,48 et 3,98, 4,63 et 2.63,
4,63 et 3,63, 2,63 et 4,85 M. — A.P. II. Flessingue—Middelbourg—Veere
entre 4,77 et 3,52, 4,5 et 2,5, 2,47 et 3,92 M. — A. P. et III dans son
profil VI près de Borsselen entre 2,25 et 4,25, 2,85 et 3,85, 4,85 et 3,85,
4,85 et 3,35, 3,85 et 4,85, 2,35 et 4,85,2 et 4 M. — A.P. Les extrêmes
des limites supérieure et inférieure sont ainsi de 4,5 et 4,85 M. —A.P., le
dernier chilïre s'accordant très bien avec celui de M. van Bemmelen (4,8 M.
— A.P.) dans le polder de l'Y. Les petits forages, exécutés à Vlake dans
file de Zuid-Beveland (Station du chemin de fer de l'État), à Flessingue
et à Veere ne sortent pas de ces limites; à Vlake seulement la surface
de la tourbe s'élève encore un peu plus haut.
Plusieurs détails intéressants et utiles nous ont été fournis en 4875,
par la thèse de M. G. A. van Geytenbeek, intitulée : „Essai d'un Mé-
moire géologique sur la Province de Zéelande pendant l'Epoque actuelle
(holl)." L'auteur s'occupe spécialement de l'île de Tholen près du Brabant
Septentrional, où il a réuni des données de forages et en a fait exécuter
plusieurs autres pour apprendre l'épaisseur de la couche de tourbe. Nous
lui empruntons les détails suivants. Pag. 24. Dans le polder de Scher-
penisse, sur la côte méridionale do Tholen, la toiu'be (derrie) a une
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CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 51
épaisseur de 3-—3,70 M. et l'argile inférieure (spier) de 2,80—3,20 M.
Là où le sondage ne constate pas la tourbe, on a à faire à une ancienne
crique qui s'est remplie peu à peu de sable ou d'argile.
Pag. 26. La surface de la tourbe {derrie) de la Zéelande se trouve
généralement dans un plan horizontal et toujours au-dessous de la basse
marée. Les chiffres exacts en sont au-dessous de A. P. 1°. Ile de Wal-
cheren, Veere, 2,17 M.; 2°. Ile de Zuid-Beveland, Borsselen 1,92 M.;
Yerseke 1,75 M.; 3°. Ile de Tholen, Scherpenisse 2,03 ; 1,94 ; 2,06 ; 1,96 ;
2,03; 2,08; 2,05; 2,15; 2,10 M. Parfois la surface se trouve bien plus
bas, tout près d'un endroit à surface norniale. M. van Geytenbeek explique
ce fait par l'enlèvement de la tourbe par l'homme, soit pour l'employer
comme combustible, soit pour la brûler et pour extraire des cendres du
sel marin (brûler du sel, selhernen). .r..es cendres lavées furent jetées à
côté et on retrouve encore de nos jours de petits monticules, que les
fabricants de verre achètent volontiers. On en voit e. a. à Zierikzee, à
St. Maartensdijk et Scherperiisse dans l'île de Tholen et dans plusieurs
localités des îles de Zuid-Beveland et de Schouwen, Il y a trois variétés
de cette tourbe: la première est jaune, se compose principalement d'herbe
et de mousse, ne donne point de charbon et brûle très vite en laissant
une cendre jaunâtre. La seconde est noire, contient beaucoup de racines
de roseau et de bois, répand une odeur très désagréable (d'hydrogène
sulfuré), donne plus de chaleur, laisse des charbons et brûle plus long-
temps. La troisième variété enfin est brun-jaunâtre et tient le milieu
entre les deux autres.
Passons maintenant à la terre ferme, à la partie occidentale du Brabant
Septentrional, qui appartient géologiquement à la province de Zéelande.
M. V. Becker (,,Le Bloc erratique d'Oudenbosch et son Entourage."
(holl). — Etudes sur les Terrain littéraire, religieux et politique, 1887) a
trouvé un petit profil tout près du village d'Oudenbosch. Une couche de
tourbe s'y trouve à 0,65 M. au-dessous du sol naturel et a une épaisseur
de 0,75 M.; elle renferme un tronc d'arbre renversé et un autre enraciné
dans le sous-sol. Avant 1828 les hautes marées inondaient les rues. Le
sol, étant rehaussé de 3 mètres et les marées ordinaires montant à
Moerdijk jusqu'à 1,40 M. h- A. P., les plus hautes jusqu'à 3 M. -h A. P.,
nous pouvons admettre que le sol s'y trouvait à peu près à 2,5 M. -i- A. P.
et la base de la tourbe, par conséquent, à 1,90 M. — A. P. Ce
point se trouve tout près de la limite du Zanddiluvium et des terrains
alluviaux.
De la Zéelande, on peut suivre la couche de tourbe dans la Flandre
Occidentale, où elle a été décrite par Belpaire: ,,Mémoire sur les Chan-
7*
-ocr page 55-i
52 CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS.
gements que la Côte d'Anvers à Boulogne a subis, tant à l'Intérieur
qu'à l'Extérieur depuis la Conquête de César jusqu'à nos Jours." (Mé-
moires couronnés en '1826 et 1827 par l'Académie royale des Sciences
et belles Lettres de Bruxelles, VI). Elle y est recouverte dans la règle
d'une argile marine plus récente, ainsi que dans quelques parties de
l'Y et de la Zuiderzee et en Zéelande. Elle se continue jusqu'à Dun-
querque, a une épaisseur de 1—3 M., parfois de 4,5 M, et repose sur
de l'argile bleue ou sur du sable fin. Près d'Ostende on peut la distin-
guer en deux couches, savoir: Vondermoere (tourbe inférieure), masse
solide et noire, mêlée de racines et de feuilles de joncs et la hovenmoere
(tourbe supérieure) qui ne contient pas de joncs, mais des fibres ligneuses,
qui paraissent être des racines de bruyère. On trouve souvent dans la
tourbe des arbres reposant sur le sous-sol; ce sont ordinairement des
chênes, mais aussi des sapins et des hêtres. La tourbe et l'argile, qui la
recouvre, se prolongent parfois sous les dunes et sous la plage ; le même
fait s'observe sur la côte de Walcheren.
Belpaire fils a publié une seconde édition du travail de son père, suivi
d'un autre de sa propre main: ,,Alphonse Belpaire. De la Plaine mari-
time depuis Boulogne jusqu'au Danemark." Anvers 1855. Selon lui,
l'épaisseur de la tourbe et celle de l'argile, qui la recouvre, varient entre
1 et 3 mètres; le niveau de la seconde ne dépasse jamais les hautes
marées. En construisant les écluses maritimes de Heyst, on trouva la
surface de la tourbe égale au zéro d'Ostende (— 2,13 M. A.P.) ; elle
avait une épaisseur moyenne de 1,3 M. et était couverte de 2,7 M.
d'argile, de sorte que la surface du sol reste encore 2 M. sous le niveau
des très hautes marées (4,7 M. au-dessus du zéro d'Ostende). Il nous
donne ensuite quelques renseignements sur les couches alluviales des
environs d'Anvers; l'épaisseur de l'argile et de la tourbe, ainsi que le
niveau de cette dernière au-dessous du niveau moyen de la mer y sont
respectivement de 3 d.M., de? et de 1,7 M. dans le polder Borgerweert,
de 4 d.M., de 1—2 (même 3) M. et de 1,4 M. dans le polder Lillo, où
l'argile atteint une épaisseur de 2,5 M. plus près de l'Escaut, et del M.,
de 1—2 M. et de 0,9 M. dans le polder Ruysbrock près de Boom sur
la Rupel.
Sur la rive gauche de l'Escaut, la tourbe mesure dans la règle 1,4 M. ;
l'argile y est de nouveau lé plus épaisse près de la rivière, ordinaire-
ment de 2,3 M., plus loin elle diminue jusqu'à 9 à 15 d.M.
A Calloo, on retire de la tourbe d'une profondeur de 5 M, ; plus en
aval, elle se trouve à une profondeur plus grande encore. Elle repose sur
de l'argile bleue ou sur du sable, se compose en majeure partie de
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-ocr page 56-CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 53
plantes aquatiques et contient à sa base des troncs d'arbres jetés pêle-
mêle, des bouleaux, du bois blanc (noisetiers?), des sapins, des hêtres,
etc., mais point de chênes. Sa surface est assez égale, balance entre 2 M.
et 2,5 M. sous le niveau moyen de la mer; son épaisseur varie entre
1 et 4 M. et peut atteindre 6 M., quand elle alterne avec de l'argile.
De Laveleye (Affaissement du Sol et Envasement des Fleuves. Bruxelles
1859), fait également observer que sur la rive gauche de l'Escaut, les
polders les plus anciens sont aussi les plus profonds, de sorte qu'il y a
une inchnaison marquée vers l'intérieur du pays. La couche de tourbe
est ti'ès étendue et atteint parfois une épaisseur de 3—4 M. ; elle repose
sur du sable et de l'argile et contient un très grand nombre de troncs
d'arbres, qui sont en partie enracinés dans le sous-sol. Ce sont princi-
palement des sapins, puis des chênes et des noisetiers. La tourbe se
continue encore sous la mer; les paysans en creusèrent en 1823 une
quantité notable dans la plage entre Nieuport et Ostende. La mer aussi
en jette souvent sur la plage de la Flandre, comme sur celle de
Walcheren.
D'après M. Rutot (Le Puits artésien de Blankenberghe. Mémoires de
la Société belge de Géologie, 1888), la'tourbe de Blankenberghe est com-
prise entre les côtes de ~ 1 et de 3 M. (3,13—5,13 M. — A.P.)
et est couverte de 1,7 M. de sable et d'argile.
C. L'Abaissement du sol des Pays-Bas dans les Temps historiques.
On trouve dans la littérature plusieurs données sur cette question,
mais on fera bien d'en isoler celles, qui n'ont rapport qu'à la diminution
des côtes. Cette diminution sera favorisée sans doute par l'abaissement
séculaire, mais n'en est pas une preuve directe.
Examinons d'abord les phénomènes qui ont rapport aux derniers
siècles et qui sont les plus précis. Les observations les plus exactes
sont certainement celles de Venema; les conclusions qu'il en a tirées
ont été combattues par Staring. Elles ont rapport aux niveaux des
polders endigués successivement dans le Dollart et complètent les obser-
vations de l'ingénieur allemand Reinhold pour la Frise Orientale. Des
deux côtés de ce golfe, les polders les plus récents sont aussi les plus
élevés, quoique le niveau de l'argile marine, qui y constitue le sol, ait
probablement été à peu près le même au moment de l'endiguement.
On pourrait même admettre qu'on endigue plus vite de nos jours qu'il
54 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS.
y a deux ou trois siècles, puisque la technique a fait des progrès con-
sidérables, et l'explication la plus naturehe du phénomène est par con-
séquent l'abaissement séculaire du sol. Les chiffres trouvés par Venema
s'accordent assez bien avec ceux de Reinhold ; Staring les a copiés dans
son principal ouvrage et nous reproduisons sa liste en remplaçant par le
niveau d'Amsterdam (A.P.) le niveau de ,.haute mer" (volzee V. Z.),
qui dans le Dollart, surpasse de 1,3 M. le premier. Les nivellements
hollandais ont eu lieu en 1850, les allemands en 1819, et nous obte-
nons ainsi les chiffres suivants pour l'âge des polders, le niveau de 1850
ou 1819, l'abaissement total et l'abaissement armuel.
Jf'--'"
Groningue. Prise Orientale. | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
|
Staring s'est opposé à cette explication, toutefois sans la remplacer
par une autre, satisfaisante. Il convient que l'abaissement du sol (qui
n'est pas engraissé) ne peut pas être expliqué par l'enlèvement des
matières anorganiques des récoltes et admet comme cause unique la
compression naturelle du terrain, dès qu'il est régulièrement drainé.
Certes, cette compression peut amener une descente assez considérable
pour la surface d'une couche de tourbe de quelques mètres d'épaisseur ;
mais elle est beaucoup moins considérable pour l'argile et le sable.
Il fait observer ensuite que les terrains qui bordent les polders les
plus anciens, tant dans la province de Groningue qu'en Frise, ne portent
pas de traces d'un abaissement égal. Pour la partie occidentale de la
Frise, ils ne peuvent guère avoir été plus élevés qu'un demi-mètre au-
dessus de la pleine mer (V. Z. = 1 M. H- A. P. = 1,5 M. -h A. P. et ils
se trouvent actuellement à Va M. au-dessous (= 0,50 M. 4-A. P.) de
sorte que l'abaissement est insignifiant. On peut appliquer des calculs
semblables sur les terrains argileux de la Hollande Septentrionale et de
la Flandre Zéelandaise, où les plus anciens endiguements, qui datent du
: I
') D'après Staring. En réalité c'est 1,30 M. — Voyez'la page précédente.
■i
-ocr page 58-CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 55
treizième siècle, devraient se trouver à environ 5 mètres au-dessous de
la „pleine mer", si l'abaissement s'était continué avec une intensité
égale depuis leur séparation de la mer.
M. Van Geytenbeek a, dans sa thèse sus-mentionnée (pag. 50), fait
des calculs semblables, qui ont aussi principalement rapport aux polders
de l'île de Tholen et dont les résultats en chiffres dilfèrent assez de ceux
de Reiidiold et de Veneina. Il traite la question dans son chapitre IV
„Situation des Polders", dont voici le contenu: „La surface de la terre
dans les différents polders varie de l'un à l'autre et, en considérant les
dates de leurs endiguements, on voit que les polders les plus anciens
sont toujours les plus bas. Il n'y a d'exceptions à cette règle que dans
les polders qui ont été endigués très peu de temps l'un après l'autre,
et on peut expliquer facilement ces petites différences. Il faut en excepter
aussi les bancs de sable plus élevés qui se trouvent parfois au milieu
des polders argileux et ne considérer que la surface moyenne de la glaise.
L'hypothèse de la crue successive du niveau de la mer est rejetée,
justement à cause de la différence des chiffres sus-mentionnés. Il en est
de même de l'hypothèse de Staring sur la compression graduelle de
l'argile par son propre poids et par le labourage. Il est vrai que souvent
la couche d'argile est plus mince dans les anciens polders que dans les
plus récents (comparez le tableau), mais cela s'explique aussi très natu-
rellement par le fait que la mer dépose plus d'argile en cinq siècles
qu'en un seul. Aussi le poids spécifique de l'argile dans les polders d'âge
très différents oscille dans des limites très restreintes et exclut tout à
fait l'idée d'une compression graduelle. La proportion de grains de quartz,
de calcaire et de matières organiques suffit pour expliquer ces oscilla-
tions. L'auteur-arrive à la conclusion qu'il n'y a aucune autre issue que
d'accepter franchement l'affaissement séculaire, et — comme nous venons
de le dire — la moyenne qu'il a calculée diffère notablement de celles
de Reinhold et de Venema, ce qui rend ses calculs d'autant plus inté-
i-essants. Le chiffre, trouvé par Reinhold (Dollart oriental) est de 8,8 m.M.
celui de Venema. (Dollart occidental) de 8 m.M. et celui de M. Van
Geytenbeek de 2,7 m.M. L'auteur rend compte de ce fait en admettant
une intensité de l'affaissement décroissante de l'est à l'ouest.
Pourtant nous ne pouvons passer sous silence, qu'on a parfois exprimé
des doutes sur l'exactitude des observations et des chiffres de cet auteur.
Nous n'avons pu les contrôler et nous les donnons tels qu'ils sont. Il y
a du reste encore d'autres contradictions plus ou moins importantes
dans toute la question, comme nous allons le voir.
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '56
Poids
spécifi-
que.
Année
de
l'endi-
guement.
Affaisse-
ment
total M.
Affaisse-
ment
annuel.
Epais-
seur
de
l'argile.
1874—
année de
l'endi-
guement.
Niveau
actuel par
rapport
à A. P.
NOM DU POLDER.
1. Poortvliet.....•....... 2. Scherpenisseet Westkerke 3. Oude Land............ 4. Middelland............. 5. Noordpolder........... 6. Uiterst Nieuwland...... 7. St. Annaland.......... 8. Slabbecoorne .......... 9. Pluimpot.............. 10. Stavenisse.............. 11. De Hauwer........... 12. Slikken............... ± 750 -1,10 — 0,26 -f-0,55 + 1,86 0,85 1,74 1,87 1,80 |
0,0029 0,0029 3,22 d- 800 0,00267 2,38 |
On trouve aussi dans la littérature étrangère (E. de Beaumont, Lyell,
De Laveleye, etc.) des données relativement aux environs d'Enkhuizen,
(Holl. Sept.), que le premier paraît avoir empruntées à un auteur hol-
landais du siècle dernier: L'Epie (Ancien Etat et Condition naturelle
actuelle de la Hollande", 1743. holl.). C'est d'abord l'abaissement du niveau
dit ,,MaalpeiV' de certains polders. Ceux-ci, étant drainés par des mou-
lins à épuisement, ont chacun un niveau détérminé de l'eau des fossés,
et dès que l'eau le dépasse, les moulins conmiencent à travailler. Or,
selon L'Epie, ce ,,Maalpeil" a été abaissé successivement d'au moins
1,5 M. dans les environs d'Enkhuizen entre 1451 et 1616, ce qui re-
viendrait à un abaissement annuel de 9,2 M., chiffre qui s'accorde assez
bien avec celui de Reinhold pour le Dollart allemand (8,8 M.). Staring
remarque à ce propos que l'abaissement du sol du Dollart s'étant con-
tinué jusqu'à nos jours (d'après Venema), on devra faire de memepour
la Hollande Septentrionale et les polders en question devraient se trouver
actuellement a 2 M. plus bas qu'en 1616, ce qui n'est certainement pas
le cas. On pourra exphquer en partie ce phénomène par le perfection-
nement des moulins à épuisement, qui enlèvent l'eau des terrains bas
beaucoup plus vite et plus facilement de nos jours qu'autrefois.
Venema cite des abaissements semblables du „MaalpeiV^ dans d'autres
polders de la Hollande Septententrionale, p.e. „Waard en Groet" 15 c.M.
entre 1826 et 1845 ; „Schermer" 35 c.M. après 1632; „Beemster" 15 c.M.
entre 1612 et 1694 et entre 1694 et 1848; „Purmer" 15 c.M. depuis
1627. On remarque tout de suite que ces chiffres diffèrent: pour le
„Schermer" et le ,,Beemster" ils sont le double de celui du ,,Purmer"
et cependant ces trois polders se trouvent dans le voisinage immédiat
l'un de l'autre. Quoi qu'il en soit, il y a des plîénomènes qui n'ont pas
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 57
encore reçu une explication satisfaisante. Il y a des terrains argileux
très anciens, dont le niveau n'a que peu changé, à côté de polders an-
ciens, dont la surface s'est notablement abaissée, non-seulement en
Groningue et en Frise, mais aussi sur la rive gauche de l'Escaut (De
Laveleye) et dans la Flandre Zéelandaise.
Il faudra certainement abandonner l'idée que le sol des Pays-Bas est
descendu en son entier et partout également. Dans les dernières époques
géologiques cet abaissement a certainement été très inégal et parfois un
endroit s'est abaissé et un autre relativement peu éloigné s'est élevé ou
est resté stable, p. e. Arnhem (Pliocène supérieur à 85 M. — A. P.) et
Winterswijk (Miocène supérieur à 35 M. -+- A. P.). Peut-être cette inégalité
s'est elle continuée dans la période actuelle et il nous a semblé d'abord que
ce sont les parties les plus voisines de la mer qui se sont plus ou moins
abaissées, tandis que les terrains plus éloignés de la mer sont restés plus
stables. Nous avons du moins été tenté de tirer cette conclusion générale des
résultats des nouveaux nivellements très exacts, exécutés sous la direction
de M.M. Cohen Stuart, Van de Sande Bakhuijzen et Van 13iesen (Résul-
tats du Nivellement de l'Etat -1875—d885, holl.). C'est surtout la seconde
partie de ce travail qui nous intéresse et qui contient les valeurs des
hauteurs d'un grand nombre de marques fixes. Le premier des chiffres
est la hauteur indiquée précédemment, le second est la hauteur mesurée
nouvellement ; la difféî'ence est positive quand le second chiffre est plus
petit, négative quand il est plus grand. Or, en parcourant les 400 chiffres
(loiuiés dans le tableau, nous avons été frappé du très petit nombre
des différences négatives (9) par rapport aux différences positives (283).
TjO montant de cette différence oscille a,utour de 0,2 M. et ne sort que
rarement des limites de 0,1 à 0,25 M. Les plus grandes différences
ont été constatées le long du Zuiderzée, en Frise et dans la province
de Groningue. I.es plus petites se trouvent dans la Hollande Septentrio-
nale, où les chiffres négatifs tendent encore à les compenser. Un autre
groupe do petits chiffres (0,1 M. ou au-dessous) a été trouvé sur la
ligne ,,Naarden — Vecht — Utrecht," à Kuilenburg, à Asperen — Leer-
dam et à Gorkum.
Or, il est fort naturel que les nivellements récents diffèrent plus ou
moins des nivellements antérieurs, mais il est fort curieux que presque
toutes ces différences soient positives, ce qui ne paraît pas être en faveur
de l'hypothèse de la stabilité absolue du .sol. Toutefois, M. van de Sande Bak-
huijzen nous a fait remarquer que les fautes systématiques ont certainement
joué un rôle dans les anciens nivellements, de sorte qu'il n'est pas permis de
tirer une conclusion de la comparai.soji de ces deux catégories de nivellements.
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '58
Espérons aussi que quelqu'un voudra vérifier tous les chiffres qui
ont rapport à la question de l'affaissement des polders plus ou moins
anciens (niveau actuel, année de l'endiguement, niveau d'épuisement
abaissé ou non, etc.). Peut-être M. Beekman, qui a si bien mérité en
nous faisant mieux connaître le pays des polders, se verra poussé un
jour à entreprendre ce travail peu amusant, il est vrai.
Les traces de l'occupation romaine ont de tout temps joué un role
important dans les discussions sur le mouvement de descente de notre
côte. La principale et la mieux connue est la ruine de la forteresse
appelée ,,Brittenburg" (,,Arx Brittanniae") ; Arends (h c.) en parle assez
en détail. Elle fut découverte pour la première fois à Noël 4520
pendant une forte tempête de l'O. S. 0. (E. S. E. ?). L'eau était fort
basse, de sorte qu'on pouvait y aller à pied; elle se trouvait à 1200—
4300 M. au N. 0. du village de Katwijk et resta à découveit pendant
deux jours entiers. Les murailles avaient encore une hauteur de 2,5 M.
En 4552, la ruine fut visible une seconde fois et avait encore une
hauteur de 6 d.M. En 4562, elle fut visible pendant trois semaines (?),
ensuite en 4570, 1588, 4662, 4666, 4672 et 4696, lorsqu'on en
retira encore des médailles d'Alexandre Sévère et de Septime Sévère
(495—220). Le 27 Octobre 1752 et en 4775 on l'a vue pour la
dernière fois; les murailles avaient entièrement <lisparu et il n'en
restait que les pilotis des fondements. La distance de la côte actuelle
est évaluée par Staring à environ deux kilomètres.
Les gazettes hollandaises du 46 Novembre 1888 mentionnent une marée
exceptionnellement basse du jour précédent. La mer se retira à Katwijk
jusqu'à 4,56 M. — A. P. (la basse marée ordinaire descend jusqu'à
0,72 M. — A. P.), mais on ne put rien découvrir des ruines du Brit-
tenburg. Il en a été de même le 42 Février 4871, lorsque la mer avait
atteint le niveau de 2 M. — A. P. En admettant donc 2 M. — • A.P.
pour niveau minimal actuel, des fondements et 4 M. -H A. P. pour niveau
minimal du temps de la fondation (les marées ordinaires montent à
Katwijk jusqu'à 0,86 M. -r A. P., les marées extraordinaires jusqu'à
3 M.), nous aurions à faire à un abaissement du sol depuis le troisième
siècle de 3 M. minimum.
Le „Rrittenburg" est ainsi bien constaté; il n'en est pas de même
(l'une autre forteresse romaine, la „Tour de Cahgula," qui est beaucoup
plus légendaire. Nous empruntons encore les détails suivants à Arends.
Elle se trouverait à une distance de 2,5 K.M. (une demi-heure) à l'ouest
du Brittenburg. Pendant des marées très bas.ses, les pêcheurs peuvent
•feto s. ' 'Cj- ' „t.,-..M,'
-ocr page 62-CONTIUBUTIONS a la géologie des pays-bas. 59
sentir les murailles au moyen de longs bâtons. La mer y a une pro-
fondeur de 18 mètres et la partie supérieure des murailles a été sentie
à 4,5—5 mètres. On n'en a poui-tant rieh rapporté, ni médailles, ni
pierres avec inscriptions, de sorte que l'opinion, que cette ruine a été un
pliare érigé par Caligula ou bien une tour en l'honneur de sa prétendue
victoii'e sur les Bretons, n'est pas fortement fondée»
Staring ne veut pas admettre ces ruines comme une preuve de rabais-
sement du sol, puisque à Katwijk les marées exceptionnellement basses
descendent jusqu'à 4,5 M. — A.P., donc peu au-dessous de la surface
actuelle des poldei's voisins. H oublie pourtant que les premières habitations
de la Hollande ont toujours été bâties sur les teri-ains les plus élevés et que
les Romains n'auront certainement pas choisi pour bâtir un terrain, qui
serait très bien habitable de nos jours, mais ne l'était assurément pas
dans un temps où les moulins à épuisement étaient encore inconnus
(ils n'ont été introduits qu'en 1452) et où les digues (si les Romains
en ont construit) étaient certainement assez faibles. En outre, le Brit-
tenburg n'est pas un fait isolé, mais un chaînon dans toute une série
de phénomènes.
En Zéelande nous rencontrons un pendant de cette ruine dans le
temple de Néhalennia non loin du village de Domburg. Nous consul-
tons de nouveau Arends pour les détails. Le temple fut découvert le 5
Janvier 1647; en 1705 on put en voir le fondement en son entier
et à 4000—4500 M. à l'ouest du village de Domburg. D'après ses
restes, ce n'était qu'un bâtiment en bois avec un pavé et des fonde-
ments en pierre. Le sol était de la tourbe dans laquelle un grand
nombre de troncs d'arbres étaient enracinés. Les médailles romaines
sont intéressantes à cause de leur date; les plus récentes sont de 270;
depuis lors le temple devint inacessible. Laveleye en conclut que le sol
serait descendu de 6—7 mètres (des plus hautes aux plus basses marées)
en 1470 années, ce qui reviendrait à une descente annuelle de 4-—5
m.M. (l'amplitude ordinaire des marées à Westkapelle dans l'île de
Walcheren est de 3,23 M., celle des marées d'équinoxe est de 5,88 M.).
Les antiquités romaines sus-mentionnées trouvent un pendant dans
celles de la Flandre belge à l'intérieur des dunes. Les tourbières n'y
arrivent pas à la surface du sol comme dans la province de la Hollande
Méridionale, mais sont couvertes d'une couche d'argile marine (remplacée
parfois par du sable) qui a en moyenne de 2 à 3 M. d'épaisseur. Or,
d'après les historiens romains — César, Pline, Strabon — cette partie de la
Flandre Occidentale n'était qu'un terrain marécageux, couvert d'épaisses
forêts. La tourbe y formait par conséquent la surface naturelle du sol
413 CONTRIBUTIONS A LA OÉOL^'GIE DES PAYS-BAS.
et devait se trouver à un niveau plus élevé qu'aujourd'hui. Quand môme
la mer ne pouvait pas inonder cette plaine, puisqu'elle était protégée
par la chaîne des dunes, située plus loin vers l'ouest qu'aujourd'hui, la
tourbe ne pouvait pas avoir le même niveau que de nos jours. 11 n'y
aurait eu alors pas de plaine couverte de forêts, mais un lac d'eau
douce, qui ne pouvait pas se di-ainer, justement à cause de ces mômes
dunes qui le protégeaient contre les inondations de la mer. Or, dans
la partie inférieure de cette argile marine, on a trouvé en plusieurs
endroits des médailles romaines, dont les plus récentes sont do Posthume
en 267 et de Quintillus en 270. L'historien Eumène dit que la mer
n'avait pas encore envahi les marais de la Flandre vers la fin du
troisième siècle (Gosselet). Nous pouvons donc accepter l'an 300 comme
le commencement des inondations en Flandre, causées par une rupture
de la chaîne des dunes et l'alfaissement séculaire.
On a aussi trouvé dans la tourbe même des antiquités gauloises jusqu'à
0,75 M. de profondeiu' et d'autres en pierre polie, qui sont notablement
plus anciennes. A ces trouvailles se joignent plusieurs autres faits, auxquels
il est impossible d'assigner une date quelconque, savoir des traces du ti'avail
de l'homme à une profondeur de plusieurs mètres sous le niveau de la mer.
D. L'Abaissement du sol des Pays-Bas dans les
temps préhistoriques.
D'après Arends, on a creusé en 1817 dans le village d'Usquerd, dans
le nord de la Groningue, un puits d'une profondeur de 6,8 M. On traversa
de la terre végétale, de l'argile, de la tourbe et du sable marin, dans
lequel on rencontra à 6 M. de profondeur des planches de chêne tra-
vaillées, ainsi au-dessous de la tourbe. Le niveau artificiel du sol étant
de 1,96 M. + A. P., les traces d'industrie humaine se sont ainsi trouvées
4,04 M. — A. P.
En 1845 on a trouvé dans l'Eyerland, moitié septentrionale de l'île
de Tessel, de la tourbe à 4 M. de profondeur et dans celle-ci des osse-
ments humains (Arends, Venema).
En 1835 on a trouvé au Helder, à une profondeur de 5 M., des traces
évidentes que le sol y* avait été habité, du bois rude et travaillé et des
coquilles d'œufs. (Acker Stratingh, Venema).
Les faits purement physiques rentrent encore en partie dans la période
historique. Ce sont principalement la présence de forêts submergées et
de couches de tourbe à une profondeur plus -considérable que d'ordi-
naire et recouvertes de dépôts marins.
^é» It
V't:-
contributions a la gé01.0gje des pays-bas. 61
iraprès Venema (L'Abaissement des Côtes septentrionales, holl.) on
trouve dans le Dollart, dans les canaux dits „Dwarsgat" et „Sparregat"
des troncs d'arbres au-dessous des basses marées et en 1833 on en a
retiré trois du fond de la mei- au nord de l'île de Borkum,
Selon le même auteur (Oldambt), la base de la tourbe se trouve à
Nieuwolde dans la Groningue, de 6—7,7 M., à Finsterwolde de 5,8 M.
à 6,4 M. et à Wedde à 5,5 M. au-dessous de A. P. On y trouve des
noisettes et des semences brunes et plates (Iris?).
D'api-ès Van Diggelen (1. c.), le sol des „Wadden" contient aussi des
couclies de tourbe. 11 eii est de même du fond de la mer en dehors
des îles, où il renferme des troncs d'arbres enracinés dans le sol avec
des ossements de cerfs, de cochons, etc.
Ai-ends (1. c.) cite des faits analogues à une distance de 5—7,5 K.M.
au nord de l'île de Tessel, ainsi que dans le banc de sable appelé
,,llaaks" au sud-ouest de cette même île, où les pêcheurs retirent de
la mer des racines et des ti'oncs d'arbres jusqu'à 10 K.M. de la côte.
Il en est de même à l'ouest de Katwijk entre les ruines du ,,Bi'itten-
burg" et de la mystérieuse Tour de Caligula qui se trouverait à 7 K.M.
de dislance de la côte (4,5 K.M. d'après Staring).
E. Forêts et Tourbières submergées dans le N. 0. de
l'Allemagne et de la France.
Les forêts submergées ont de tout temps attiré l'attention. Meyn
(1. c.) en cite plusieurs du fond de la mer peu profonde près de l'île
de Sylt. L'ancienne extension de cette île vers l'ouest est prouvée par
la tourbe sous-marine, appelée „TuuV par les habitants, et dont la
me]' jette des gros morceaux sur la côte pendant les tempêtes. Elle
contient des troncs de chênes, de bouleaux, d'aunes, des cônes de pins,
des noisettes, etc. Tous ces arbres n'ont pu croître que protégés contre
les vents de la mer et sont donc une preuve d'une terre plus ou moins
élevée vers l'ouest, peut-être de dunes. Meyn dit en outre expressément,
ainsi que Berendt et Jentzsch (1. c.), que tel ou tel cas isolé de toui"be
sous-marine pourrait bien être expliqué d'une autre façon, mais que
c'est l'ensemble de tous ces faits qu'il ne faut point perdre de vue et
qu'il est impossible de bien expliquer cet ensemble, sans accepter des
tourbières et des forêts étendues qui furent plus tard submergées.
Ce n'est pas seulement en Angleterre et en France qu'on a constaté
que ces rognons étaient enracinés dans le sable marin sous la tourbe,
mais aussi près de l'île ,,Hallig Oland." Pendant la construction du
port do Husum en Schleswig, on a découvert à 3 M» sous le niveau
de la mer une forêt de bouleaux, enracinés dans le sable sous la
tourbe, et dans ce bois, un tumulus contenant des armes de silex. En
conséquence, Meyn évalue la dernière baisse minimale de cette partie
de l'Europe à 3 M. (Sylt, etc.) jusqu'à 9,5 M. (Bornholm).
De l'autre côté de la péninsule cymbrique, M. Geinitz (Zeits. deutscli.
geol. Ges. 1883) cite des faits analogues. La tombe se prolonge sous
les dunes de Warnemïmde dans le Mecklenbourg et môme dans le fond
de la mer. Celle-ci jette parfois sur la plage de gros morceaux de tourbe,
mesurant plusieurs mètres cubes.
Ils contiennent des troncs de chênes, de bouleaux, de hêtres et de
sapins. Geinitz les considère également comme une preuve de submei-
sion dans un temps géologique relativement récent; il croit même que
ce coin de la Baltique pouri'ait avoir formé un passage à sec entre la
Suède et le nord de l'Allemagne. Cette submersion séculaire est donc
suffisamment prouvée, mais Geinitz la considère comme arrêtée du
moins depuis 1826. Les mesures directes du niveau de la Baltique
entre 1826 et 1879 n'ont constaté aucun changement.
Dans un petit travail plus récent (X Beitrag zur Geognosie Mecklen-
burgs. Archiv für Naturgeschichte Mecklenburgs, 1888) le même auteur
fait mention d'observations très intéressantes faites dans le voisinage
immédiat de la vihe de Rostock. Celle-ci est bâtie dans un angle droit
formé par la rivière de la Warnow, qui n'est pas très large en amont,
mais bien en aval de la ville. Son cours inférieur est en disproportion
avec la quantité d'eau du cours supérieur. Or, celui-ci est en partie
dans un terrain tourbeux couvert de prairies, qui a exactement la même
largeur que le cours inférieur et n'est rien d'autre qu'une ancienne
vallée remphe de tourbe, dans laquelle la rivière a creusé ou conservé
son ht étroit. Or, il a été prouvé par une centaine de forages que cette
tourbe y descend jusqu'à 14 mètres au-dessous du niveau de la Balti-
que, et comme elle n'a pu se former à cette profondeur où l'eau de
la mer aurait entrée libre, il s'en suit qu'elle est la conséquence d'un
abaissement du sol à peu près égal.
De l'autre côté de notre patrie, c'est surtout aux observations de
Chèvrernont dans le golfe Normanno^Breton ou de Saint-Michel que
nous devons une série de faits sur le même sujet. Nous ne voulons
citer que ceux qui permettent d'évaluer en chiffres la dernière submer-
sion séculaire.
On a observé en 1878 sur la côte bretonne du golfe, près du
village de Rochebonne, pendant une marée très basse, plusieurs arbres
CONTlllBUTJONS A LA GÉ0L0G11C DES I'AYS-BAS.
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 63
enracinés dans le sable. L'amplitude des marées d'équinoxe y est de
13 M., de sorte que ce chilîre est le montant de la submersion,
en supposant que le sol de la foret ait été au-dessus des très hautes
marées.
2°. Il est connu par les archives, que dans les temps historiques le
bétail broutait dans les forets submergées de Saint-Ouen, Sainte-Brelade
et Saint-Aubin. Elles forment actuellement des baies sur les côtes occi-
dentales et méridionales de l'île de Jersey et sont couvertes de 10,6 M.
d'eau pendant les hautes marées; l'abaissement séculaire y serait donc
égal à 11 M. en minimum.
3". La forêt de Bricqueville, sur la côte occidentale du Cotentin
(Normandie), est couverte de 6 M. d'eau pendant les hautes marées et
de 14 M. à une plus grande distance de la côte. Les arbres y sont
bien ceitainement enracinés dans le sol, qui est composé de tourbe et
de terre végétale. Ce sont principalement des bouleaux, des chênes et
des châtaigniers.
4°. La forêt de Scissey, dans la baie du Mont Saint-Michel, se trouve
encore en partie sur la plage et dans le marais au sud-ouest de Gran-
ville. Il y avait encore en 550 des couvents, dont le nombre diminuait
pourtant à cause des inondations. Selon Chèvremont, la forêt s'étendait
du côté de la mer jusqu'à une distance de 27 K.M. du Mont Saint-
Michel. On y trouve une série de falaises à une profondeur de 10 M.
au-dessous du niveau de la mer. L'amplitude des marées d'équinoxe
étant de 13 M., la submersion peut être évaluée à 16—17 M.; elle
aura probablement commencé bien avant la date mentionnée.
5°. Près de Granville, à l'entrée de la baie du Mont Saint-Michel, se
trouve l'archipel Cbausey, composé d'une cinquantaine de falaises de
granit, visibles pendant les basses marées. En 550 elles formaient encore
une seule île. On y a découvert plusieurs monuments mégalithiques,
des pierres polies, mais aussi des monnaies gauloises. Jusqu'en 1343
il y avait dans l'île une couvent, qui fut abandonnée bientôt après.
Nous pouvons encore évaluer l'abaissement à 13 mètres.
6°. Sur la côte orientale du Cotentin se trouve le marais de Carentan.
La couche de tourbe y a une épaisseur de 20 M. et est couverte par
du sable marin ou de la tangue (marne sableuse), épaisse de 3 M. On
pourrait donc évaluer à 23 M. la submersion pour ce point de la côte.
Il n'est pourtant pas certain que la tourbe couverte de tangue ait
également cette puissance considérable et qu'elle appartienne on son
entier à un même étage géologique. Le montant de la submersion ne
sera pourtant pas de beaucoup inférieur au chiifre sus-nommé.
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '64
7°. Près fie Dol, sur la baie du Mont Saint-Michel, il y a alternance
de couches marines et d'eau douce. Il y a d'abord la tangue entre
6,9 M. et 4,4 M. au-dessus du-niveau moyen de la mer. Ensuite de
la tourbe jusqu'à 0,35 M. au-dessous de ce niveau, où elle repose sur
des dépôts marins. Cette tourbe contient des troncs de chenes et est
la même que celle de la forêt de Scissey.
En suivant le même calcul, nous aurions ici une submersioti mininuim
de 13 : 2 -h 0,35 M. == 6,85 M. ou 7 M.
8^. En 1846 on trouva, en creusant le port de Saint-Servan près de
Saint-Malo, un cimetière gaulois contenant des ornements et des monnaies.
Il reposait sur un cimetière préhistorique et était couvert de 6 M. d'eau
pendant les hautes marées; ce chilfre indique le minimum de la sub-
mersion dans les temps historiques.
9°. En 1822 on a découvert une chaussée romaine des deux côtés
du Mont-Saint-Michel, pavée de grandes pierres plates et couverte de
3 M. de sable marin. Supposant que le pavé a dépassé de 1 M. le sol
naturel, Chèvremont évalue le minimum de l'abaissement à 4—4,5 M.
Il ne dit pourtant pas que le sable se trouve au niveau des hautes
marées, de sorte que l'abaissement pourrait très bien être évalué à
15 M. p. e.
10°. Le plateau des Ecrehous, au N. 0. de Jersey, a été habité autrefois ;
il est maintenant entièrement sous l'eau, à l'exception (le quelques
ûilaise.s. Il n'a été séparé de Jersey qu'en 1203 et était alors une île
bien peuplée. Pendant les marées basses, on peut y voir les ruines d'une
chapelle et les traces do roues (?) dans les rochers. Cela nous conduirait
à un abaissement du sol de 12—^13 M. on six siècles et demi, clùlfre
exceptionnellement élevé.
11°. Sur la côte septentrionale de la Bretagne ou a découvert près
de Morlaix, dans l'embouchure de la rivière, une fontaine construite en
pierres colossales et à une profondeur de 1 M. sous le niveau (moyen ?)
de la mer. La submersion serait ici égale à 13 : 2 -h 1 = 7—8 M. en
minimum.
M. Noury ajoute, dans sa „Géologie de Jersey," quelques détails à
ceux de Chèvremont sur la foret submergée de la baie de Saint-Ouen,
dont une partie dans le golfe secondaire d'Etacq n'aurait été détruite
qu'en 1356. Pourtant il y avait déjà en 1274 un port à Etacq. ce qui
parait en contradiction avec la présence de la foret. M. Noury écarte
cette contradiction en supposant que la forêt croissait sur une partie
basse de la côte, qui était protégée contre les hautes marées par des
falaises ou des dunes. Elle aurait pu participer de cette manière à l'abais-
s'- f -
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 65
semerit séculaire, jusqu'à ce que la mer rompit la chaîne des dunes et
put détruire la forêt entière pendant une seule tempête.
Le cimetière préhistorique de Saint-Servan et la fontaine en pierres
colossales de Morlaix, cités par Chèvremont, ont leur pendant dans l'île
de Jersey dans le monument mégalithique submergé de la baie de
Saint-AubiiL
D'après M. Noury, la submersion n'aurait commencé que vers l'an
.300 et n'aurait pas été interrompue par une émersion temporaire, sup-
posée par M. Gosselet. Les phénomènes observés à Jei'sey ne fournissent
pas la preuve de cette émersion; au contraire M. Noury laisse la sub-
mersion se continuer jusqu'au quinzième siècle; dès lors le sol serait
resté stable. L'argument principal de M. Noury pour assigner l'année 300
au commencement de la submersion est la trouvaille des monnaies
romaines de la seconde moitié du troisième siècle, que nous avons men-
tionnées, Pag. 60. Pourtant cette date n'est pas le commencement de
la submersion totale, puisque les monnaies, etc. ont été trouvées sur
une couche de tourbe, épaisse de 1 à 2 mètres, dont la base n'a pas
pu avoir été formée à une telle pi'ofondeur. Cette tourbe est en soi déjà
ime -preuve de l'abaissement du sol.
Chapitre VL Formation des grandes Tourbières.
A. Hypothèses des différents xVuteurs.
Depuis un demi-siècle environ, plusieurs auteurs ont tâché de se rendre
compte de la formation de cette couche de tourbe l'elativernent épaisse
et située à un niveau aussi bas. C'est cette dernière circonstance qui
rend la solution du problème assez difficile ; quelques auteurs ont trouvé
qu'il était indispensable de supposer un abaissement du sol, d'autres ont
cru pouvoir se tirer d'affaire d'une autre manière.
Examinons d'abord les hypotlièses des derniers, parmi lesquels se
ti'ouve Staring.
Celle d'Antoine Belpaire date de 1827 (l. c.) et n'e.st citée ici que
comme curiosité historique
Belpaii-e comprend très bien que la tourbe ne pourrait se former dans
une eau profonde de 4,5 M., salée ou non; mais ne connaissant pi-o-
bablement pas les oscillations séculaires du sol, il a recours à un petit
cataclysme. Celui-ci aurait abaissé tout à coup le niveau de la mer,
de sorte que les bancs de sable de la „côte vinrent à sec et rendirent
419 CONTRIBUTIONS A LA OÉOL^'GIE DES PAYS-BAS.
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66
possible la formation des dunes. Celles-ci suffirent à empêcher l'eau de
la mer de recouvrir son ancien lit, do sorte qu'un bassin, rempli en
partie d'eau salée, se sépara de la mer. T/eau s'en évapora et la pluie
lessiva peu à peu le sol (l'auteur ne nous dit pas où restait cette eau
lessivante; d'après nous, il eût facilement pu admettre que le cataclysme
produisit une vallée entièrement sèche et profonde de 4,5 M.). Il se
forma ensuite dans ce bassin des marais et des tourbières qui devinrent
de plus en plus épaisses, jusqu'à ce qu'enfin la mer rompit la ehaine
de dunes, détruisit une partie des tourbières et en recouvrit une autre
(le l'argile marine qui forme actuellement les polders de la Flandre.
Delpaire fils (1. c.) n'a pas voulu rejeter complètement l'hypothèse
insoutenable de son père, mais il a tâché de la rendre plus acceptable
et a fait en même temps des observations intéressantes. Il abandonne
la vallée à sec de son père et suppose un lac d'eau douce séparé de la
mer par la chaîne des dunes et ayant une profondeur d'environ 4 M.
en Flandi'e et de 6 M. en Hollande. Comme il se déchargeait plusieurs
rivières dans ce lac, la chaîne des dunes a dû avoir plusieurs ouvertures,
par lesquelles l'eau douce s'écoulait et l'eau de la mer entrait pendant
le flux. Comme les marées ont une amplitude d'environ 4 M. sur les
côtes de la Belgique, il y avait parfois entre l'eau douce et l'eau do la
mer une diHerence de niveau de 2 M., qui devait naturellement causer
un assez fort courant et un élargissement des passe-bouque et rendait
l'eau intérieure peu à peu saumâtre. Un cas plus fiivorable devait se
présenter, lorsque les ouvertures étaient plus vers le nord, p. e. au Helder,
OTi l'amplitude des marées est très faible. La plus grande difficulté est
d'expliquer la végétation dans ce lac d'eau douce ou saumâtre assez profond.
La seule explication possible ce sont les îles flottantes qui se développent
dans les parties les moins profondes et se déplacent facilement. I]lles
s'agrandissent d'abord par les restes de végétaux, puis par la déposition
de glaise, et peuvent arriver à combler le lac en son entier.
Belpaire cite plusieurs exemples bien constatés de pareilles îles Ilot-
tantes, e. a. une près de Gerdau en Prusse, qui porte un troupeau
d'une centaine de brebis. Dans tout son traité, Belpaire ne se prononce
pourtant jamais contre un affaissement du sol; il évite seulement de
se décider dans tel ou tel sens, de même que lorsqu'il s'agit de savoir
si les arbres à la base de la tourbe sont enracinés dans le sous-sol
ou non. La lecture de ce traité a fait sur nous l'impression qu'Antoine
Belpaire se serait prononcé en faveur de l'abaissement du sol, s'il eût
été libre, mais qu'il a été retenu par piété pour le travail de son père,
qu'il n'a pas voulu désapprouver.
' I'f'i ' «I ^ •
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES l'AYS-BAS, 67
Hoiiri l)ebray(,,Etude géologique et archéologique de quelques Tourbières
du Littoi-al flauiaud ot du Département de la Somme". Paris 1873) est
aussi pai'tisan du lac d'eau douce, séparé de la mer par les dunes, et
qui se sei-ait i-empli peu à peu de tourbe. Il ne fait pourtant que men-
tionner son opinion sans l'appuyer par des arguments, et n'accorde
au lac qu'une pi'ofondeur de 3 M.
Staring était du même avis, comme nous l'avons déjà dit; il paraît
pourtant avoir hésité parfois et est en contradiction ostensible avec
soi-même. Le point cardinal de la question est pour lui de savoir si les
ti'oncs d'arbres de la base de la tourbe sont enracinés dans le sous-sol
ou non. Il a très bien senti que, s'ils le sont, il est absolument impos-
sible de nier l'abaissement du sol, et il cherche à plusieurs reprises à
prouver que cela n'est qu'en apparence. Pourtant il dit ( B. v. N. L Pag. 70)
qu'après le dessècliement du Lac de Harlem ,,on a trouvé à l'est du
village de Heemstede toute une foi'êt de troncs de bouleaux et de
chênes. Le sol y était de sable, couvert de deux décimètres d'argile
marine et d'un peu de tourbe, dernière trace de la couche de 4 mètres
qui y était auti'efois. Les l'ognons étaient enracinés dans le sable et
les troncs gisaient à côté".
H se prononce dans le même sens à une autre occasion (L'Afiaisse-
ment du Sol en Neéi'lando, considéré du Point de vue de la Géologie
(boll.)". Rappoi'ts et Communications de l'Académie royale des Sciences,
1855), où on lit les mots suivants (Pag. 159): ,,0n ne saurait nier que
les l'ognons sont enracinés dans le sous-sol, qui doit par conséquent
avoir été au niveau de la basse marée ; quand la difierence (de niveau)
est très laible, on pourrait l'expliquer en supposant que les teri'ains
étaient drainés pendant les marées très basses" (au moyen d'écluses
préhistoriques?) ,,on les ti'ouve cependant jusqu'à 4 mètres de profon-
deur, enracinés dans Vargile et le sable, ce qui n'est pas suffisannnent
expliqué pour le moment".
Néamnoins, il répugnait tellement à Staring d'accepter cette oscillation,
qu'il tâche à deux repi'ises et dans le même livre de prouver le con-
traire. Ainsi nous hsons (B. v. N. ]., Pag. 74): ,,0n né peut expliquer
que de deux manières la présence des rognons à une profondeur de
2—3 M. au-dessous de la plus basse marée de la côte voisine. On
peut d'abord admettre que les rognons ne sont enracinés qu'en
apimrence dans le sous-sol, que les arbres ont crû sur la tourbe et
que les rognons se sont enfoncés peu à peu à travers la tourbe, ou
bien que la tourbe a été enlevée par les vagues, comme dans le cas
du Lac de Hai'lem, de sorte que les rognons ne sont empêtrés dans
9*
-ocr page 71-CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '68
le sable de dessous. Une autre explication est que le sol s'est abaissé,
après que les forêts y ont végété". Il rejette complètement cette alter-
native en disant (B. v. N. I. Pag. 365) : „en desséchant le Lac de
Harlem, on a trouvé une forêt submergée dont les arbres paraissaient
être enracinés dans le sable marin qui forme le fond de ce lac et qui
ne peut naturellement pas avoir porté des arbres dans cet état" (c'est
logique!). ,,Le sable marin ou le fond de la mer aurait dû être formé
dans la profondeur et s'être élevé ensuite, puis aurait porté une forêt,
pour descendre finalement encore une fois, explication qui est notable-
ment plus invraisemblable que celle, qui accepte l'enlèvement pai- l'eau
de la tourbe sur laquelle ces arbres ont végété."
De même que Belpaire fils, Staring a i-ecours aux îles llottantes
{drijftillen, kraggen) pour rendre compte du remplissage du lac par la
tourbe. On pourrait admettre en effet qu'il s'en soit formé dans les
parties les moins profondes, p. e. près des rives, dont elles se seraient
détachées, qu'elles auraient ainsi couvert peu à peu les parties plus
profondes; qu'elles auraient augmenté en épaisseur et comblé le lac
entier. Tout cela n'est certainement absolument impossible, mais
bien très improbable. Il devrait se présenter toute une série d'événements
favorables, qu'on n'observe pas dans la réalité.
C'est encore Staring lui-même qui a fourni un sérieux argument
contre sa propre hypothèse en constatant (B. v. N. L Pag. 36) l'absence
de toute végétation et d'îles flottantes dans le Lac de Harlem. Pourtant
ce lac n'était qu'une très petite partie du lac hypothétique situé derrière
les dunes, et la formation des îles flottantes devient naturellement
d'autant plus difficile à mesure que l'eau est plus profonde et sa sur-
face plus étendue et par conséquent plus agitée.
Parmi les auteurs qui admettent un abaissement du sol, nous avons
d'abord Arends (1. c. 1835), dont nous parlerons plus tard, puisqu'il
ne s'est pas occupé spécialement de la question des tourbières. Ensuite
il y a De Hoon, („Mémoire sur les Polders de la Rive gauche de
l'Escaut et du Littoral belge". Mémoires couronnés in 8" de l'Académie
royale de Belgique, 1852), qui a en vue la couche d'argile marine sur
la tourbe plutôt que cette tourbe elle-même.
Le principal défenseur de cette hypothèse est Venema, qui ne donne
pas seulement son opinion, mais l'appuie aussi de bons arguments. Il
ne s'occupe pourtant qu'en seconde hgne de l'épaisse couche de tourbe
et relève spécialement le fait que les arbres de la base étaient réellement
enracinés dans le sous sol, e. a. dans le Lac de Harlem près de Heem-
stede à — 3 M. A. P., et dans le Polder-Sophie près d'Aardenbourg
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 69
dans la Flandi-c hollandaise à 2,7 M. au-dessous de la surface. Il insiste
aussi sur ce que ces rognons d'arbres enracinés détruisent l'hypothèse
des îles llottantes, qui auraient d'ailleurs très bien pu se former dans un
petit lac sans courant, mais non dans le lac situé derrière les dunes, qui
était traversé par les livières et était en communication avec la mer.
De Laveleye aussi (1. c.) ne traite la question des tourbières qu'en
passant. La tourbe a parfois une puissance de 3—4 M. et repose sur
du sable ou de l'ai-gile avec un grand nombre de rognons d'arbres
i-enversés ou encore enracinés dans le sous-sol.
11 en est de même de M. Beekman dans ses deux ouvi-ages bien connus
(,,La Néerlande comme Pays des Polders" et „La Lutte pour l'Existence").
11 mentionne à plusieurs repiises des troncs d'arbres enracinés dans le
sous-sol des tourbières, tant en Zéelande qu'en Hollande et dans la
province de Groningue, jusqu'à 7 M. au-dessous de la basse marée.
C'est suilout dans le second ouvrage qu'il admet l'abaissement séculaire
du sol, toutefois en laissant les îles llottantes contribuer à la formation
de la couche de tourbe. Nous ne voulons pas les exclure entièrement,
mais nous nous 0p]30s0ns seulement à l'hypothèse de Staring, qui leur
a assigné un rôle beaucoup trop impoilant.
B. La Tourbe plus ancienne et pi.us profonde de la Hollande.
Jusqu'ici l'état des clioses n'est pas trop compliqué, quoiqu'il pi'ésente
l)hisieurs difficultés, que nous n'avons pas encore été eu état de résoudre
complètement ; nous les réservons pour plus tard. On aura pourtant
remarqué la présence de traces de végétation des deux côtés des Pays-
]:)as et à une profondeui' bien plus notable que celle dont nous nous
sommes occupé jusqu'ici. M. Geinitz (1. c.) a trouvé, près de Rostock
dans la vallée de la Warnow, de la tourbe à 14 mèti'es au-dessous du
niveau stable de la Baltique, et, dans le golfe Normanno-Breton, Chèvre-
mont a constaté un abaissement assez considérable, au moyen de forêts
submergées et de couches de tourbe à une profondeur de 11 à 17 et
même 23 mètres au-dessous des très hautes marées. On se demande
s'il n'y a pas de cas analogues dans les Pays-Bas. Sauf un passage
de Stai Ing (B. v. N. L Pag. 56), qui rappelle la couche de tourbe
de Schiedam d'une épaisseur anormale de 7 mètres, et l'attribue au
remplissage d'un ancien lit de rivière (la soi-disante Meuse), nous
n'avons dans la littérature liollandaise qu'un seul travail, qui fixe plus
spécialement l'attention sur la tourbe plus profonde. C'est la: „Note
70 C0NT11I13UTJ0NS A LA GÉ0I.0GH2 DES PAYS-BAS.
eu Rapport avec le Forage projeté près d'Amsterdam". (Journal de
l'Institut royal des Ingénieurs (holl.) 1888—1889) de M. Badon Ghyben.
Longtemps auparavant, en 1852, Harting, dans son „Sol sous Amster-
dam", avait déjà foit mention d'une mince couche de tourbe dure et
sèche, plus ou moins mêlée d'argile, qui se l'encontre sous Amsterdam
dans différents forages à 10,4—11,3 M. et a 12—12,9 M. — A. P., et
qui se compose, du moins en partie, de plantes terrestres. M. Badon
Ghyben a suivi cette couche à l'est, où elle est couverte d'abord de
l'argile bleue marine et plus loin, vers le Vecht, de la masse prhicipale
do tourbe, dont elle se distingue souvent. Vei's le nord, cette même
couche a été suivie jusqu'à 18 et 19 M. — A, P.; près de Purmerend
elle paraît se relever ensuite plus loin ; elle descend également vers l'ouest,
où elle a été constatée à 19 M. — A. P. par un foi-age pour les écluses
maritimes d'IJnuiiden. M. Badon Ghyben considèi-e cette couche comme
une ancienne surface de terre ferme (donc une tourbe de marais), qui
constituei-ait la hmite entre le Diluvium sableux et les dépôts alluviaux.
Nous sonunes aussi de cet avis quant au premier point, et en pai'tie
quant au second.
Comme nous avions déjà rassemblé les rapports d'un assez gi'and
nombre de forages dans les deux provinces de Hollande, lors de la
publication du traité sus-nommé, et comme l'épaiseur de la tourbe
plus considérable qu'on ne le croit d'ordinah-e nous avait aussi frappé,
nous avons continué nos recherches dans cette direction et donnons
(Planche II) un tableau d'un certain nombre de ces foi'ages. Comme
c'est la tourbe qui nous intéresse en pi'emière ligne, nous la faisons
ressoi'tir par des lignes plus épaisses, accompagnées de la lettre ,,a", et
représentons l'argile par la letti'e ,,b", le sable par la lettre ,,c" et le
sable blanc ou le sable grossiei- ou graveleux (probablement du Zanddi-
luvium) par la lettre ,,d". Les profondeurs sont réduites à 1 : 200 et
le niveau de comparaison y est toujoui's celui d'Amsterdam (A. P.). La
sui'face de la terre y est généralement au-dessous de A. P., quelquefois
au-dessus.
En examinant ce tableau, ou voit au premier coup d'oeil que la
base de la tourbe est assez souvent très profonde, mais qu'elle ne
dépasse jamais 19 mètres Assurément, si Staring avait connu cette
profondeur, il n'aurait pas fait tant d'effoi'ts pour éviter l'hypothèse de
l'abaissement séculaire. ./
On voit aussi que jamais la tourbe n'est conthuie depuis 19 M. à la
surface, mais qu'elle est hiterrompue une ou plusieurs Ibis jDar des
sédiments d'ai'gile ou de sable. Parfois ces sédiments la ]-emplacent en
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 71
son entier, p. e. à plusieurs endroits le long du chemin de fer de Leide
à VVoerden, par conséquent dans le voisinage d'une rivière, qui est
cependaiit mise hors de fonction de nos jours.
L'épaisseur maximale do la tourbe continue est de 9 M. (50 entre
Zoeterwoude et Koudekerk) et de 10 M. (108 sur l'île de Feyenoord,
vis-à-vis de Rotterdam) et dépasse ainsi notablement la puissance maxi-
ujale de 7 M. près de Schiedam, citée par Staring. La plus grande
profondeur comme est de 19 M. (10, 11 et 14) entre Hoorn et Zaandam
et à IJnuiiden d'après M. B. G., et de 17 M. (15, 18, 98, 99 et 101)
à Velsen, Zeeburg (près d'Amsterdam) et tout près de Schiedam, donc
aux limites septentrionale et méridionale de la grande masse continue
(le tourbe, située entre l'Y et la Meuse et actuellement enlevéie en partie
par l'homme et par l'eau. Dans la Hollande Septentrionale (1—20), elle
alterne plusieurs fois avec des dépôts marins; sous les dunes, elle paraît
manquer ordinairement, nous n'en coimaissons l'existence qu'à IJmuiden
et à Velsen et des traces à Harlem ; elle n'a été con.statée ni à Overveen, ni à
Leide, ni à l'ouest de Maassluis. Dans les premières de ces localités, le sable
marin forme une séparation entre les deux couches ; plus loin vers l'orient
c'est l'argile bleue marine, comme l'a remarqué M. Baden Ghyben (com-
parez les forages 34, 35, 36, 39, 18, 19, 20, 21, 23, 24 et 25). En
d'autres endroits comme entre Leide et Woerden il n'est plus aussi
facile de les séparer.
C. Formation des deux Couches de Tourbe, Emersion temporaire
du Sol et ses Conséquences.
En admettant l'explication de M. Badon Ghyben pour la tourbe
iniériein-e (quoiqu'elle soit souvent plus épaisse qu'il ne dit), le niveau
de H- 19 M, à IJmuiden doit avoir été à sec à une certaine époque, et
la surface de la terre ferme doit s'être étendue à une certaine distance
vers l'ouest. Il est impossible de dire pour le moment si la tourbe, qui
se forma alors, était protégée contre la mer par un cordon littoral et
') Nous voulons ici exprimer notre gratitude envers notre ami M. Molenaar,
ingénieur de la Société d'Exploitation des Chemins de fer de l'Etat, M. Wright,
ingénieur du Chemin de fer Rhénan, M. Asser, ingénieur du Chemin de fer Hol-
landais, M. Kluyt, ingénieur du Canal d'Amsterdam à la Merwede et M. Martini
Buys, ingénieur de la construction du chemin de fer de Rotterdam au „Hoek van
Holland", auxquels nous devons la communication très appréciée des résultats de
toute une série de forages.
425 CONTRIBUTIONS A LA OÉOL^'GIE DES PAYS-BAS.
une chaîne de danes comme ceUe d'aujourd'hui; ce n'est ni impossible,
ni improbable. La base de cette tourbe inférieure est inclinée vers
l'ouest et vers le nord; elle se trouve à 12,5 M. près de Leide et de
Harlem, entre 13 et 15 M. sous Amsterdam meme (Harting), entre 15
et 18 M. sous l'Y près d'Amsterdam et à 19 M. environ sous le pont
(lu chemin de fer de l'Y près de cette ville, près de Hoorn et d'IJmuiden.
A Velsen, la base s'est de nouveau élevée jusqu'à 17 M. La surhice de
ce cône très plat s'est donc couverte de tourbe, ainsi que certaines
parties érodées par les bras du Rhin et soustraites ensuite à l'érosion
en conséquence du déplacement du courant.
L'alfaissement continuant, les parties les plus basses de la Hollande
Septentrionale et de la lisière occidentale de la tourbe furent détruites
par la mer ou couvertes de dépôts marins. En même temps la tourbe
continuait à se former dans les parties plus éloignées de la mer, où
elle pouvait donc devenir de plus en plus épaisse, jusqu'à ce que l'alfais-
sement se ralentit et que le sol devint stationnaire. Alors se forma le
cordon httoral, composé de bancs de sable parallèles, couronnés en partie
de dunes et coupés par le passe-bouque de Leide et d'autres, par k"îs-
quels l'eau de la mer pouvait entrer, déposer de l'argile, en sortir et
entraîner une quantité de tourbe, comme elle le ht plus tard avec le Lac
de Harlem.
Nous insistons sur ce fait que ce n'est pas la présence seule de la
tourbe supérieure, mais bien celle de la chaîne de dunes maritimes
intérieures plus ancienne que cette tourbe, qui nous oblige d'admettre
une émersion temporaire. Cette zone pouvait se former à peu près dans
les conditions actuelles, mais la tourbe plus récente ne pouvait point
prendre naissance dans un lac d'eau saumâtre aussi profond. En outre,
il s'y trouve des troncs d'arbres enracinés dans le sous-sol, qui devait
par conséquent avoir été à sec à une certaine époque, (comp. pag. 67).
Après que ce lac eut existé un certain temps, le mouvement vertical
du sol fut renversé, l'eau devint de moins en moins profonde et hnale-
ment le lac fut de nouveau terre ferme. La tourbe recommença à se
former et la couche augmenta en épaisseur à mesure que le sol baissa
de nouveau. Le Vieux-Rhin et le bras du Rhin de Maassluis-Brielle, etc.
continuèrent à couler entre des rives de tourbe, serpentèrent tantôt
vers le nord, tantôt vers le sud, firent des brèches, qu'ils remplirent
plus tard, etc., de la même manière qu'ils l'avaient fait probablement
avant la hausse passagère du sol.
Plus au nord et à l'est c'est le Vecht d'Utrecht qui a agi de la même
manière. En dilférents endroits (forages 24, 25, 26, 29, 31, 38, 41),
72
1 ;i>" ^ t\ • < v~ • ' I il-'
IliiÉriitaiWttÉUtt
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. 73
nous voyons également la tourbe remplacée en partie par des sédiments
fluviatiles. (Quant à la tourbe très profonde des forages 20 et 30 près
des stations de Loenen—-Vreeland et de Nieowersluis, nous ne croyons
pas qu'il faille la mettre en rapport avec la couche très épaisse du
voisinage d'Amsterdam, qui appartient à l'époque alluviale, sa profon-
deur étant exceptionnelle dans cette contrée; mais nous sommes tenté
de la considérer comme partie du Zanddiluvium).
L'existence de la rivière, qui correspondait au Vieux-Rhin actuel, est
également prouvée par l'absence totale de tourbe dans plusieurs endroits
le long de ses rives. Ce sont autant de fragments de son ancien lit, qui
s'envasait à mesure que le sol baissait et que ses rives étaient exhaus-
sées par la tourbe nouvellement formée et les sédiments déposés par
les inondations. Il ne faut donc pas conclure de ce que la tourbe est
si profonde le long du Vieux—Rhin qu'elle le soit également à une
certaine distance de ses rives; il est fort possible que cette tourbe
profonde ne soit qu'un pendant de celle de la Warnow près de Rostock,
décrite par M. Geinitz (Pag. 62), qui remplit le lit d'une rivière de-
venu trop grand pour la quantité d'eau notablement amoindrie. Ce que
nous avons dit de la tourbe du Vieux-Rhin s'apphque à celle entre
Rotterdam et Maassluis (forages 85—103) et entre Rotterdam et Zwijn-
drecht (104—122) et prouve également l'ancienneté relative de ces bras
du Rhin.
Il est certainement plus difficile de donner une explication satisfaisante
de la profonde couche de tourbe de la Hollande Septentrionale (1—20),
qui est également séparée de la tourbe supérieure par le sable marin et
l'argile bleue. C'est pourquoi nous revenons à nos „Quelques Considé-
rations, etc.", où nous avons esquissé nos idées sur la lutte entre
l'affaissement séculaire du sol des Pays-Bas et la sédimentation fluviatile.
,,Sous la Hollande Méridionale, l'affaissement séculaire n'a prévalu que
plus tard, et sous la Hollande Septentrionale l'affaissement l'a emporté,
en même temps que sous la Vallée Gueldroise, et n'a plus été contre-
balancé à son tour." Nous pouvons maintenant préciser davantage.
Actuellement, nous ne connaissons pas de traces certaines de sédimentation
fluviatile dans le sous-sol de la Hollande Septentrionale au nord de l'Y.
La tourbe inférieure y repose sur du sable blanc, que nous n'avons
pas pu examiner nous-même, mais qui pourrait être en partie du
„Zanddiluvium", apporté par la sédimentation fluviatile du sud ou bien
par le lavage du Diluvium ancien des îles de Tessel, de Wieringen, etc.,
Par la sédim(3niation fluviatile.
10
-ocr page 77-74 CONTRIBUTIONS A LA OÉOL^'GIE DES PAYS-BAS.
et en partie du sable marin alluvial, très ancien. Dans le forage de
Sloten, ce sable marin contient des coquilles récentes et repose sur
le Zanddiluvium fluviatile; dans celui de Diemei-brug il repose siu^ le
faciès marin de ce dernier — le Système Eemien — et passe assez
graduellement dans celui-ci. La base de la tourbe inférieure, donc la
surface de la terre ferme d'alors, se trouve à — 9,5 M. à Diemer-
brug, à 42 M. à Sloten, à 13,5 M. à Zaandam et à 14,7 M. à
Amsterdam (Nouveau Marché), (comp. pag. 70). Il doit donc y avoii'
eu dans ces endroits une émersion temporaire, qui a mis à sec le
fond de la mer, suivie d'un nouvel abaissement pendant lequel se dé-
posèrent le sable marin plus à l'ouest et l'argile bleue ordinaire plus à
l'e-st. Ces deux sédiments forment généralement la base de la couche
épaisse de tourbe supérieure, qui manque pourtant parfois ou est forte-
ment réduite. Ce dernier cas se présente e. a. dans le forage de la gare
de Zaandam, où elle n'a été rencontrée qu'entre — 0,8 et — 1 M.
A.P. D'ici jusqu'à — 10,4 M. (surface de la tourbe inférieure), on n'a
traversé que des dépôts marins.
On pourra expliquer cette irrégularité, et bien d'autres encore, préci-
sément de la même manière que celles le long du Vieux-Rhin et de
l'embouchure de la Meuse. Il y a eu probablement dans cette partie
de la .Hollande, de temps à autre, des irruptions de la mer au travers
de la chaîne des dunes, par lesquelles la tourbe supérieure fut enlevée
çà et là, tandis qu'elle continuait à se former tranquillement ailleurs.
Il en a été de même dans les derniers siècles en Zéelande, où des
îlots de tourbe ont été épargnés par la mer et entourés de criques,
qui se sont envasées ou bien remplies peu à peu de tourbe nouvellement
foi'mée. 11 en a été précisément de même, entre les années 300 et 800
environ, dans la Flandre Occidentale, où la mer a fait irruption à travers
des dunes dans les tourbières, en a érodé une partie en formant des
criques et a couvert le reste d'une couche d'argile marine et de sable
marin. Certes, cette dévastation de la tourbe plus récente a été en général
beaucoup moins intense que celle de la tourbe plus ancienne, inconnue
dans le sous-sol de la Belgique. Aussi les dunes actuehes très récentes
(géologiquement) de la Flandre reposent sur de l'ai'gile et de la tourbe
récentes peu érodées, tandis que celles de la Hollande (Mér. et Sept.),
très anciennes, reposent sur du sable marin ancien, qui ne recouvre que
çà et là des vestiges de la tourbe ancienne, fortement érodée.
Nous ne sommes pourtant pas encore au bout des difficultés à résoudre.
En comparant les profils instructifs de M. B. G. dans son travail sus-
nommé, on remarque que la surface de l'argile bleue est parlbis plus
F«
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 75
clevéo que la ligne de séparation entre les deux couches de tourbe. On
le voit en comparant sur notre planche II les forages 35, 36 et 37, où
ces chiffres sont de — 5,4, de — 5,7 et de — 6,5 M. ; à Vinkeveen,
à l'ouest de Nieuwersluis (124), la surface de la tourbe inférieure est
même de — 7,5 M.
Pourquoi cette tourbe inférieure orientale n'a-t-elle pas été couverte
d'argile marine, quoiqu'elle se trouve à un niveau sulfisamment bas?
Nous pouvons résoudre cette contradiction de deux manièi'es (qui ne
s'excluent pas). D'abord eu supposant que la tourbe supérieure orientale
est en partie aussi ou plus ancienne que l'argile bleue, et a échappé à
l'érosion marhie, de sorte que sa formation s'est continuée tranquillement.
L'état des choses aurait été à cette époque à peu près semblable à
celui de la province de Groningue dans la période historique et avant
la construction des premières digues. Actuellement on y voit, en allant
du sud au nord, d'abord le Zanddiluvium qui disparaît ensuite sous
les tourbières basses. Celles-ci se sont autrefois étendues beaucoup plus
loin vers le nord ; mais elles ont été érodées par les vagues de la mer
et remplacées en grande partie par des sédiments marins, du sable et
surtout de l'argile, qui y a souvent une épaisseur notable. Or, la
tourbe a été érodée, en partie entièrement, en partie à la surface et
recouverte ensuite d'ai'gile, qui lui succède donc aussi bien dans le
sens vertical que dans le sons horizontal. Supposons maintenant une
nouvelle formation de tourbe, aussi bien sur celle qui se trouve actuelle-
ment à la sui'face que sur l'ai'gile marine, et nous aurons au bout de
quelques siècles précisément la même chose qu'actuellement dans la
Hollande Méridionale, dans les endroits où l'homme n'a pas encore
éloigné le précieux combustible.
Pour expliquer les dilférences de niveau sus-meutionnéos, nous pour-
rions aussi avoir i-ecours à l'hypothèse de l'affaissement, inégal à l'ouest
et à l'e-st, que nous avons posée d'abord pour expliquer l'épaisseur du
Zanddiluvium plus giande à l'ouest et sans interposition de couches
marines. (Quelq. Considér., etc.). Elle pourrait en partie aussi expliquer
la profondeur plus grande de la tourbe ancienne à l'ouest. Cette môme
inégalité d'affaissement s'observe aussi du sud au nord. Dans la Flandre
Occidentale, l'argile marine récente atteint la cote de 5 M. (= 2,87 M.
+ A.P.), ce qui n'est jamais le cas en Hollande. Or, pendant les marées
extraordinaii'es, la mer pourrait encore arriver à cette cote, preuve que
le sol y est resté parfaitement stable depuis les dernièi'os grandes
inondations (E. Dupont dans Patria Belgica Partie, Pag. 39), tandis-
que probablement, le sol des Pays-Bas a continué de s'affaisser.
10^
-ocr page 79-CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '76
Enfin, il y a une particularité du relief du sol des Pays-Bas, que
nous croyons pouvoir mettre en rapport direct avec l'élévation tem-
poraire.
Nous avons remarqué (dans nos „Contributions III" et dans nos „Quelques
Considérations", etc.) que nos grandes livières possèdent dilférentes vallées
concentriques. Le Rhin et la Meuse (ainsi que l'Ysel) ont coulé autrefois
dans une vallée très large du Diluvium graveleux, qui est principalement
vallée d'érosion, quoiqu'elle doive probablement une partie de son
relief à l'action de la glace quaternaire. Ces vallées énormes, en dis-
proportion frappante avec la quantité ' minimale d'eau des rivières
actuelles, ont été remplies en grande partie de sable fluviatile, consti-
tuant le Zanddiluvium. Il en est de même de la Vallée Gueldroise,
formée par un bras du Rhin entièrement oblitéré de nos jours.
C'est — selon nous — dans la dernière partie de l'époque diluviale
et à cause de la puissance des rivières plus grande que de nos jours,
qu'elles pouvaient déposer du sable là, où elles ne déposent actuellement
que de l'argile (du moins principalement). Or, on voit que ce vaste lit
de Zanddiluvium a été érodé à son tour et qu'il est couvert d'un troi-
sième dépôt fluviatile : l'argile, que nous voyons encore se former actuel-
lement. Si l'on admet une hausse du sol des Pays-Bas de ± 5 M.,
indispensable pour expliquer la formation des vastes tourbières, la consé-
quence naturelle est un courant accéléré dans les bas-lleuves et par
conséquent une érosion non-seulement de la rivière elle-même, mais aussi
de ses affluents.
Il nous semble naturel de coordonner avec cette élévation du sol la
formation de la vallée secondaire du Rhin dans le Zanddiluvium, p. e.
la Betuwe, de celle de la Meuse inférieure et de celle de l'IJsel. Nous y
joignons les petites vallées des ruisseaux de la Gueldre à l'est de l'IJsel,
ainsi que celles de la Vallée Gueldroise. C'est à cause de cette érosion qu'on
voit dans celle-ci des terrasses et des collines de Zanddiluvium, p. e. à
Hoogland — village qui doit son nom à l'elïet de cette érosion —à Voort-
huizen, au sud d'Amerslbort, et surtout à Baarn. C'est probablement la
position relativement élevée de ce village par rapport à la Vallée de
l'Eem, qui a induit en erreur Staring et lui a fait supposer qu'il avait
affaire à un reste de Diluvium graveleux. Comme nous l'avons dit ailleurs
(Contributions III, pag. 155), c'est une erreur, e. a. puisqu'on a trouvé
sous Baarn la faune marine du Système Eemien, qui est plus récente
que le Diluvium graveleux. i ^
Il existe probablement encore une autre vallée dans le Zanddiluvium,
qui est presque entièrement cachée de nos jours et ne réapparaît que
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 77
graduellement par les dessèchements. Ce sont les tourbières à 1 est du
Vecht d'Utrecht, dont la toui'be a été enlevée pour la plus grande partie.
La conséquence en est une série d'étangs et de petits lacs (plassen),
comme le „Horster-Meer," „Naarder-Meer," etc., qui ont été drainés en
partie. Les dessèchements ainsi formés sont pourtant séparés par des
isthmes de tourbe, portant des maisons et des routes, de sorte qu'il sera
probablement toujours impossible de voir la vallée continue. Le sous-sol
et la l'ive droite ou orientale y sont formés par du Zanddiluvium, ce qui est
assez naturel. 11 en est de même de la rive gauche, cachée sous des restes
de tourbières et sous le Vecht actuel. Celui-ci a déposé (du sable et) de
l'argile le long de ses bords, tantôt sur la tourbe, tantôt directement
sur le sable quaternaire, comme on peut le voir facilement le long du canal
de la Merwede, actuellement en construction, p. e. tout près des villages
de Maarssen, de Breukelen et de Nieuwersluis. Cette présence du sable
sohde (quaternaire ou alluvial) à une très faible profondeur (1,5 M.)
et caché sous un autre matériel solide et relativement sec (ou non-
marécageux) et la présence d'une petite rivière, qui serpente pittores-
quement, est la cause probable de l'érection dans les deux derniers
siècles de cette série de maisons de campagne le long de ses bords
par les riches négociants d'Amsterdam. Nous n'avons encore que com-
mencé nos recherches dans cette région et comptons revenir plus tard
sur ce sujet.
Avant de terminer ce travail, nous voulons examiner s'il est stric-
tement nécessaire d'admettre une hausse temporaire du sol pour ex-
pliquer la formation des tourbièi'es littorales et l'érosion des vallées
fluviales dans le Zanddiluvium. Certes, depuis le commencement du Plio-
cène, notre patrie a subi un affaissement séculaire; le chiffre de 370 M.
(Utrecht) est trop grand pour admettre une autre explication. Pourtant
le montant de l'émersion temporaire — 4 à 5 M. —, dont nous avons
besoin, est beaucoup plus petit, et il nous semble qu'on pourra égale-
ment bien expliquer tous les phénomènes, que nous venons de décrire
dans ce travail, en supposant un abaissement égal de la mer. C'est
surtout l'étude des différentes publications de M. A. Blytt de Christiania
qui nous a fait poser cette altei'native.
Selon lui, les différents phénomènes astronomiques amènent alterna-
tivement une concentration de l'eau des mers vers les pôles et vers
l'équateur. Nous préférons ne pas nous égarer au milieu de questions
aussi compliquées et hypothétiques et dont la solution d'un savant
est souvent diamétralement oppo.sée à celle de l'autre. Nous voulons
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '78
seulement relever: 1° Qu'un abaissement séculaire du sol des Pays-Bas
depuis le commencement du Pliocène est hors de doute; 2° qu'un sol
qui s'affaisse peut aussi se relever ; 3° qu'il est indifférent pour l'histoire
géologique de notre patrie d'admettre un mouvement vertical du sol
dans un sens ou de la mer dans l'autre.
D. Appendice. Aperçu des Forages de Zoetermeer, Leide,
Vogelenzang, Harlem et Overveen.
Forage de Zoetermeer.
Le village de Zoetermeer est situé à l'E. de La Haye et au N. E.
de Delft, donc au milieu de la région des tourbières basses de la
Hollande Méridionale. Le forage a été décrit dans le ,,Rapport de 1868
sur l'Eau potable" ; la plus grande partie des échantillons des terrains
se trouvent dans le Musée géologique d'Utrecht, où nous avons eu
l'occasion de les examiner. Il pourra donc nous donner une bonne idée
de la succession typique des différentes couches.
La surface du sol, artificiellement rehaussée, est de 3 d M. + A.P. ;
les couches sont les suivantes:
L 0,3 M. H- A.P. — 4,5 M. — A.P. Tourbe, mêlée en haut de débris ;
noire en haut et en bas, brun-foncé et brun-clair au milieu.
IL 4,5—5,3 M. Argile gris-clair, devenant sableuse vers le bas,
calcarifère, contenant beaucoup de diatomées marines vers le
bas et des débris végétaux vers le haut,
IIL 5,3—11,2 M. Sable argileux avec des coquilles marines, Cardium
edule et Scrobicularia piperita.
IV. 11,2—11,7 M. Tourbe noire, un peu argileuse.
V. 11,7—12,8 M. Argile tenace, bleu-grisâtre.
VI. 12,8 —14 M, Tourbe noire, peu cohérente.
VIL 14—24,36 M. Sable bleuâtre, tantôt plus argileux, tantôt moins,
parfois plus grossier ou bien contenant quelques cailloux, p. e.
à 18 M. un quartz roulé de 6x4x2 c.M. Parfois aussi, il
renferme des débris végétaux, probablement des lentilles de
tourbe. On peut considérer tout ce sable comme faisant partie
du Zanddiluvium.
VIII. 24,36—28,4 M. Sable assez ƒ?^, peu différent du précédent, mais
contenant quelques fragments de coquilles marines — Cardium
et Sci'obicularia. Peut-être la mer a-t-elle fait quelques inva-
sions sur le dépôt lluviatile.
CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES. PAYS-BAS. 79
IX. 28,4 — 34,3 M. Sahle plus grossier, plus graveleux, avec des grains
de quartz jusqu'à 7 m.M., des cailloux (jusqu'à 4 c.M.) de quartz,
de grès, de schiste et de silex et quelques traces de coquilles
marines.
Outre des preuves probables du voisinage de la mer, ce forage offre
le phénomène du dédoublement de la tourbe profonde, produit par
une couche d'ai-gile marine, entre 14,7 et 42,8 M. Nous pouvons
l'expliquer en admettant une inondation passagère de la mer, de plus
ou moins longue durée, sans avoir recours à une nouvelle émersion
du sol.
F 0 ]• a g e s de L e i d e.
En 4838 et 39 on a exécuté deux forages, près de la prison mili-
taire dans le voisinage de Leide. Nous n'avons presque rien pu trouver
dans la littérature au sujet de ces forages, si ce n'est les „Notules de
l'Institut royal des Ingénieurs (holl.)" de l'année 4850, qui contiennent
une petite note de Scliretlen sur ce forage avec des détails techniques
et d'autres, très insuffisants, sur les teri^ains rapportés. Staring en dit
aussi quelques mots dans le Vol. II de son ,,Sol des Pays-Bas," pag. 430.
Les échantillons des terrains du premier forage, qui est descendu jusqu'à
70 M,, se trouvent dans le Musée géologique de Leide et ont été examinés
par nous. Le second, tout pi'ès du premier, a atteint la profondeur de
94 M., mais nous n'avons pas pu en retrouver les échantillons.
Parmi les (Quelques détails, dormés par Schretlen et Staring, nous ne
voulons relever que ce qui suit. L'argile marine ou le sable argileux se
coutume jusqu'à 44 M., où connnence le sable, dans lequel les premiers
cailloux se montrent à 31 M. Schretlen fait mention, à la profondeur
de 63 M., ,,d'un vieux morceau d'os, plein de pores." Staring cite de
la môme profondeur ,.la dent d'un cochon de l'époque tertiaire, d'un
Antliracotherium," (genre) ,,dont les restes ont aussi été rencontrés dans
les terrains tertiaires des environs de Mayence." Il en tire la con-
clusion que le sable qui l'entoure et les morceaux de bois qui l'accom-
pagnent ont été amenés par le Rhin. N'ayant pas vu ce fragment d'os
ou de dent et ne sachant pas sur quoi se base cette déterminaison, qui
probablement n'aura pas été faite par Staring lui-même, nous préférons
ne pas nous arrêter plus longtemps à ce forage, mais passer au premier,
moins profond, dont nous avons du moins pu retrouver et examiner les
échantillons. Ils paraissent pourtant avoir été rassemblés un peu irré-
gulièrement, de soi'te que les limites des différentes couches ne sont
80 CONTRIBUTIONS A LA OÉOL^'GIE DES PAYS-BAS.
pas toujours indiquées. La surface du sol étant de 0,45 M. + A. P.,
nous pouvons en reproduire la liste suivante.
L 0,15 -h A. P.—3,20 M. — A. P. ? Probablement du sable marin.
IL 3,20—42,40 M. Argile marine, sableuse.
IIL 12,40—24,85 M. Sable fm, avec des morceaux de bois et quel-
ques cailloux de silex.
IV. 24,85—31,4 M. Sable grossier, avec du gravier et des cailloux
jusqu'à 4—3 c.M. On peut considérer sans danger cette couche
comme appartenant au Zanddiluvium ; il en est peut-être de
même de la précédente.
V. 34,4—56,35 M. Sable, généralement fin, souvent un peu plus
grossier, contenant parfois quelques cailloux de quartz, de
quartzite et de grès, qui peuvent atteindre un diamètre de 3 c.M.
A diverses profondeurs il contenait aussi des morceaux de bois.
VL 56,35—62,45 M. Sable grossier, brun, avec plusieurs cailloux
de silex, de grès et de quartzite de 4—2 c.M.
VIL 62,15—69 M. Sable plus/n, blanchâtre ou brunâtre et argileux,
avec des morceaux de schiste, de bois et d'argile.
En réalité la succession des couches est plus compliquée, d'abord
parceque nous avons condensé la liste assez longue (32 échantillons)
des terrains rapportés et aussi parce qu'il en manque plusieurs. Il est
donc fort possible qu'en réalité il faille dédoubler une couche de sable
fm ou de sable grossier ; mais nous ne croyons pas que la liste détaillée
et absolument exacte diffère essentiellement de celle que nous venons
de donner.
Beaucoup plus tard, il n'y a que quelques années, la municipalité
de Leide a fait exécuter un forage dans la rue dite ,,Zandstraat".
Nous devons la liste des terrains traversés à la complaisance de
M. Knuttel de Leide; elle contient 46 numéros que nous condensons de
la manière suivante:
L 0 (— A.P.) — 42,75 M. Argile marine.
IL 42,75 — 20,5 M. Sable blanc, peu de gravier.
IIL 20,5 — 28,25 M. Sable blanc, plus grossier, avec quelques cailloux.
IV. 28,25 — 32,4 M. Sable blanc, plus fin, avec quelques cailloux.
V. 32,4 — 36,4 M. Sable plus grossier, graveleux.
VL 36,4 — 48,5 M. Sable fia et très fin.
VIL 48,5 — 56,7 M. Sable grossier et très grossier avec des cailloux.
-ocr page 84-434 CONTRIBUTIONS A LA OÉOL^'GIE DES PAYS-BAS.
Forage de Vogelenzang.
Le village de Vogelenzang, dont nous avons parlé à plusieurs i-eprises,
se trouve dans une cliaine de dunes intérieures au sud de Harlem. En
1887 on y a excécuté, près de la maison de campagne de M. Van der
Vliet, un forage de presque 90 M. de profondeur, dont nous avons
examiné les échantillons. Nous les devons à la complaisance de M. Van
den Wall Bake, ingénieur à Amsterdam, qui les a cédés au Musée
géologique d'Utrecht. La hauteur exacte du zéro du forage n'est pas
connue, mais se trouve entre 3 et 4 M. -h A.P., nous admettons le
chilfre de 3,5 M. qui ne difféj-era donc pas beaucoup de la réalité.
Les terrains rapportés sont les suivants:
L 3,5 M. -T- à 3,8 M. — A.P. Sahle quartzeux pi, bigarré-clair;
la partie supérieure est plus ou moins colorée en brun, la
partie inférieure est hyahne et contient des débris de coquilles.
Sable de dune et de plage.
IL 3,8 — 6,5 M. — A.P. Sable quartzeux, /rè, gris-bigarré, un peu
plus grossier que le précédent (diamètres des grains de quartz
respectivement 0,6 et 0,3 m.M.). Débris de coquilles reconnais-
sables, des Carditmi edule, Mactra solida et Tellina Balthica.
TH. 6,5—8,5 M. Sable quartzeux et argileux, beaucoup plus fin
(0,1—-0,2 m.M.) ; quelques feuillets de mica, des piquants do
VEchinocardium cordatum et des débris méconnaissables de
coquilles (Mactra? et Tellina?).
IV. 8,5—23,1 M. Sable quartzeux gris-clair, presque hyalin, plus
lin en haut, plus gtussier en bas. A 20 M. environ (— A. P.)
les grains de quartz ont un diamètre de 0,3—0,5 et môme de
0,7 m.M. La partie supérieur-e contient quelques débris de la
Scrobicularia piperita, de Cardium edule et d'une Mactra.
Nous tirons ici la limite entre l'Alluvium et le Diluvium sableux,
dont la partie supérieure est encore représentée par son faciès marin,
le Système Eemien (comp. Contributions III). La limite n'est pas très
sensible — il est vrai — mais d'abord le sable change plus ou moins
de caractère à ce niveau et les coquilles caractéristiques de ce système
ne montent pas plus haut.
V. 23,1—27,4 M. Sable quartzeux, bigarré-clair, plus grossier quo
le précédent. La plupart des grains de quartz ont un diamètu
de 0,5 m.M., plusieurs d'entre eux même de 1 m.M. Des
h'agments plus ou moins reconnaissables des Ostrea edulis,
sfl®
'm
82 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82
Mijtilus edulis, Cardium edule, C. echinatum, Tapes virgineus,
Cerithium reticulatum et Nassa reticulata.
VI. 27,4—28,9 M. Sable blanc-bigarré, beaucoup plus fm (0,2—0,4
m.M.), rares traces de coquilles (Nassa reticulata, Tapes virgi-
neus). Quelques rares petits cailloux de quartz de quelques
millimètres.
VII. 28,9—34 M. Sable quartzeux plus grossier, à grains incomplète-
ment arrondis, assez argileux. Diamètre des grains de 0,3—0,5
m.M., très souvent de 0,5 et de 0,6 m.M. et même de 1 m.M.
Rares fragments à'Ostrea edulis et une pince de petit crabe.
Base du Système Eemien.
Diluvium sableux lluviatile.
VIII. 34—42 M. Sable bigarré rouge-clair, avec une assez faible pro-
portion de grains de quartz rouge. La dimension des grains est
presque celle du sable précédent, mais ils sont plus arrondis
et de taille moins divergente. La moyenne eu est de 0,5 m.M.
Nulle trace de coquilles.
IX. 42—44,9 M. Sable très argileux, peu bigarré, un peu plus fm
que le précédent; nulle trace de coquilles.
X. 44,9—51,3 M. Argile gris-clair, sableuse vers la base.
XL 51,3—51,8 M. Sable argileux, r-iide, un peu plus fin (0,4—0,5 m.M.)
que IX.
XII. 51,8—52,6 M. Argile gris-clair, tenace, privée de sable.
XIIL 52,6—59,5 M. Sable bigarré rouge-blanchâtre, avec peu de grains
rouges, presque comme VIII et devenant gri.s-blauchâtre vers
la base. Le diamètre des grains de quartz varie de 0,5 et de
0,6 m.M. en haut et en bas, à 0,3 et 0,4 m.M. au milieu.
XIV. 59,5—59,8 M. Argile noire, tenace.
XV. 59,8—60,1 M. Argile gris-clair, un peu sableuse.
X VL 60,1—71,8 M. jSable très fin, gris-clair, micacé. La grande ma-
jorité des grains de quartz ne dépassent pas 0,1 m.M., il y en a
pourtant plusieurs jusqu'à 0,5 et 0,6 m.M. Le sable contient,
vers la base, plusieurs débris végétaux.
XVII. 71,8—76,1 M. Sable bigarré rouge-clair, un peu micacé, non-argi-
leux, plus grossier que le précédent (diamètre0,4 jusqu'à 0,5 m.M.).
XVIII. 76,1—84,7 M. Sable gris-blanchâtre fm (en mayenne 0,3 m.M.),
moins micacé que le précédent, parfois un peu argileux.
Ce forage n'a donc fourni aucune preuve d'une tourbe recouverte par
le sable du cordon littoral ; il n'a traversé que du sable marin appar-
83 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82
tenant à deux étages différents et reposant sur le sable fluviatile ordi-
jiaii-e du Zanddiluvium, qui compose le noyau de nos provinces occi-
dentales. Çà et là, ce sable est interrompu par un lit d'argile. Non plus
qu'à Harlem, nous n'avons une indication du Diluvium graveleux, qui
d'ailieui's devra être rencontré à une profondeur plus notable, d'après les
forages de Diemerbrug et de Sloten pi'ès d'Amsterdam, s'il est représenté
aussi loin à l'ouest.
Forage de Harlem.
C'esl, également gi'âce à M. Van den Wall Bake que Jious sommes en
possession des échantillons d'un forage, exécuté en 1886 dans cette ville
pour la brasserie de M.M. Lans et fils. 11 n'a atteint que la profondeur
de 48,75 M. et n'a ])as été exécuté dans la ville pi'oprement dite, qui
i-epose sui- un banc de sable venant à la suiface, mais dans la partie
orientale, où ce sable s'enfonce sous la couche de tourbe de nos polders
et dessèchements. La hauteur du sol y est de 0,80 M. A. P., les
tei'i'ains travei^sés sont les suivants.
L 0,80 M. -H A.P.—0,80M. — A.P. Probablement du remblai et du
tei'rain remanié, qui n'a pas été conservé.
. H. 0,80—2,40 M. — A. P. Tourbe brun-noirâtre, remaniée, mêlee
d'un peu de sable et de quelques fragments de poterie.
HI. 2,40—3,50 M. Tourbe, bi'un-noirâti'e, non-remaniée.
IV. 3,50 —16,40 M. Sable quartzeux, argileux, bleu-grisâtre, un peu
micacé, avec plusieurs coquilles marine.s, des Cardium edule,
des Hydrobia ulvae et quelques fragments lisses indéterminables.
Alluvium.
V. 16,40 — 29,40 M. Sahle bigarré-clair, un peu grisâtre, un peu
plus grossier que le pi'écédent, quelques feuillets de mica. Les
coquilles marines ne sont encoi'e que rares, à 21 M. et plus bas on
a rencontré le Cardium edule, M?/tilus edulis, Hydrobia ulvae
en compagnie de li'agments du Tapes virgineus et de la Nassa
reticulala, qui sont jJhis caractéilstiques pour le Système Eemien.
Vei's la base de cette couche on a aussi trouvé quelques grains
de silex Elle n'est donc pas très caractéristique et foi'me plutôt
un passage des couches VI à IV, qui le sont en réalité. C'est
principalement la nature du sable (bigarré-clair) et la profon-
deur, qui nous avaient décidé à réunir cette couche au Dilu-
vium sableux.
Nous préférons pourtant ne pas con.sidére)' ce sable en son
entier comme appartenant aux dépôts alluviaux. D'abord il de-
11^
-ocr page 87-84 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82
vient un peu plus grossier vers la base et ensuite les premières
traces de coquilles Eemiennes ne se rencontrent qu'au-dessous
de 21 M. — A.P. C'est pour cette raison que nous tirons à ce
niveau la limite entre l'Alluvium et le Diluvium sableux, quoi-
qu'elle soit peu nette. Il en est de même que sous le village
de Diemerbrug pj'ès d'Amsterdam, où le changement paléonto-
logique des dépôts n'est point accompagné d'une changement
pétrographique (Contrib. IV).
VI. 29,4—34,10 M. Sable bigarré-clair, tantôt plus //i, tantôt plus
grossier (surtout en bas), contenant une série des coquilles
caractéristiques du Système Eemien, quoique pour la plupart
en exemplaires isolés ou à l'état de fragments. Ce sont : Echino-
cardium cordatum, Anomia ephippium, Cardium echinatum,
Tapes virgineus, Venus ovata, Corbula gibba, Thracia papy-
racea, Pholas Candida et Cerithium reticulatum, accompagnés
des Mytilus edulis, Cardium edule, Tellina Balthica, Hydrobia
ulvae et Littorina littorea, qui se rencontrent aussi souvent
seules dans le sable marin récent, et d'une Pecten indétermi-
nable (pusio?)
VII. 34,1—35,60 M. Sable fin, presque incolore, ne contenant que de
très rares grains de quartz rougeâtre ou blanc. Un seul exem-
plaire du Cerithium reticulatum s'y est peut-être égaré pen-
dant le forage, de sorte que la nature marine du sable est
problématique.
VIII. 35,60—47,95 M. Sable fm, un peu plus ^fî'ossier que le précédent,
presque entièrement incolore. Les grains de quartz atteignent un
diamètre de 0,5—0,7 m.M. à la partie supérieure, et de 0,3—0,5
m.M. à la partie inférieure. Le sable contient des traces d'argile,
de mica et de débris de coquilles et est calcarifère, de sorte
qu'il a été déposé peut-être dans le voisinage de la nier. Nous
ne pouvons donc dire avec certitude, ni du sable VII, ni de
VIII, que c'est le Diluvium sableux purement fluviatile. Le
chillre de la profondeur, comparé avec celui du forage de Voge-
lenzang, le rendrait pourtant probable et nous voulons donc tirer
la limite en question au niveau de — 35,6 M.
Forage d'Overveen.
C'est encore la même main qui nous a donné les échantillons de ce
forage, de sorte que nous avons une bonne occasion de le comparer
a.vec les deux précédents. Le forage en question a été exécuté entre
85 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82
Hai-lein et la mer eu 1890 et a atteint la profondeur de 400 M.. Les
terrains ti'aversés sont les suivants :
1. 0,25 M. -h A.P. — 6,25 M. — A.P. Mie fm, bigarré-clair, un peu
rougeâtre, mêlé de débris de coquilles et de quelques coquilles
entières {Mactra, Cardium).
H. 6,25—9,75 M. — A.P. Sahle fin, bigarré-clair grisâtre, pailbis un
peu ai-gileux et contenant quelques coquilles entières (Mactra
solida, Tellina Balthica).
IJ], 9,75—10,75 M. Argile fine, gris-clair.
IV. 10,75—15,25 M. Sable fm, gris-clair, argileux. Quelques feuillets
de mica et beaucoup de petites coquilles (Mactra, Hydrobia ulvae
et des piquants de V Echinocardium cordatum).
V. 15,25—22,75 M. Le même sable, mais plus argileux.
VL 22,75—29 M. Le même sable que IV avec des débris de coquilles
et les piquants sus-nommés.
Nous tirons ici la limite assez naturelle du Système Eemien (Zand-
diluviiun marin) à cause du sable devenant plus grossiei- et plus bigari'é
et des coquilles différentes.
VIL 29— 42,25 M. p^it grossie?;, bigari'é-clair avec quelques petits
cailloux de 2—3, même 5 m,M. de quartz et de lydite. Il con-
tient des débris de coquilles et des exemplaires reconnaissables
de Cerithium reticulatum et à'H;^drobia ulvae avec de petits
fragments cVOstrea et de Mytilus edulis, de Cardium edule et
de Tapes virgineus. Au-dessous de la profondeur de 42 M.
les restes de coquilles manquent absolument et nous y com-
mençons donc le Zanddiluvium Iluviatile.
Vlll. 42,25—55,25 M. Sable bigari'é-clair, assez grossier.
IX. 55,25—75,75 M. Sable fin, bigarré-clair, plus grisâtre, avec un
peu de débris végétaux.
X. 75,75—77 M. Sable fm, très argileux, un peu micacé.
XL 77—79,25 M. Sable grossier, bigarré-clair, argileux, avec quelques
petits cailloux de 3 et 4 m.M.
XII. 79,25 — 82,5 M. Le même sable, mais non-argileux.
XIII. 82,5—83,25 M. Le même sable, mais coloré en noir par de la
terre végétale (non par de la tourbe) et contenant plusieurs
petits débris de bois. C'est donc un fragment d'une ancienne
surface de terre ferme, nouvelle preuve de l'abaissement séculaire.
XIV. 83,25—85,5 M. Le même sable, mais non coloré en noir, très
argileux.
XV. 85,5—86 M. Sable très fin, argileux et micacé, mêlé de débris de bois.
-ocr page 89-86 CONTRIBUTIONS A LA GÉ0L0GJE i)ES I'AYS-BAS.
XYI. 86—88,75 M. Le même sable mais non argileux et moins (in.
XVII. 88,75—89,75 M. Sable fin plus grossier, bigarré-claii"-gi'isâti-e.
XVIII. 89,75—93,25 M. Comme XIV.
XIX. 93,25—98,75 M. Sable fin, tenant le milieu entre XVI et XVll.
XX. 98,75—400 M. Sable médiocrement grossier, connue XI, non-argi-
leux et contenant beaucoup de grains de 2—3 m.M.
Ces ti-ois Ibi'ages présentent donc le même phénomène que ceux
d'Amsterdam, etc. : dépôt lluviatile, recouvert de deux dépôts marins de
nature assez différente. Les limites respectives se trouvent à des niveaux
peu différents, savoir 35,6 M. à Harlem, 42,25 M. à Overveen et 34 M.
à Vogelenzang pour la limite supérieure du Diluvium sableux fluviatile.
Celle du Système Eemien se trouve à 21, à 29 et à 23 M. poui- les
ti'ois mêmes localités. Il y a donc une pente ostensible du dépôt lluviatile
du sud au nord et de l'est à l'ouest, comme nous l'avons déjà observé
ailleurs. Probablement cette pente ce continue l'égulièrement vers le sud,
puisque sous Leide les traces du Système Eemien manquent absolument ;
le dépôt fluviatile n'y a donc été recouvert de la mer que beaucoup plus
tard. Aussi sous Zoetermeer elles ne sont que très douteuses (24,36 —28,4
M.). Peut-être, nous n'avons ici que l'Alluvium marin à une assez
grande profondeur.
La comparaison de ces différents forages donne encore lieu à quelques
observations. Nous admettons la profondeur de--44 M. comme la limite
supérieure du Zanddiluvium lluviatile à Zoetermeer et nous hésitons à
Leide entre le chiffre de —25 M. et — 20,5 M. d'un côté ou de — 42,5
et —42,75 M. de l'autre. Certes, les deux derniers seraient mieux en
rapport avec le chiffre de Zoetermeer. Ce niveau se ti-ouve probablement
à —34 M. à Vogelenzang et à —35,6 M. à Harlem, deux chiffres qui
s'accordent parfaitement entre eux et avec ceux de Leide (20—25 M ).
Ensuite, nous avons tiré la hmite entre le Zanddiluvium marin (Système
Eemien) et l'Alluvium ancien à — 23 M. à Vogelenzang et à 21 M. à
Harlem. Pourtant le Système Eemien bien caractérisé n'y commence qu'à
29,4 M. et la couche entre 16,4 et 29,4 M. ne forme qu'un passage assez
graduel. En admettant la moyenne de ces deux chiffi'es, donc le niveau de
— 21 M. comme limite, nous trouvons que les chiffres de ces deux localités
s'accordent parfaitement. D'autre part, le niveau de^—16,4 M. à Harlem
serait en hai'monie avec ceux d'Amsterdam, de Diemerbrug et de Zaan-
dam, etc. (17,4; 16,7 et 16 M.). Pourtant nous n'y attachons pas trop
440 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82
de valeur, puisque le fond de la mer n'aum certainement pas eù la
forme d'un plan horizontal ou également incliné.
Ensuite, nous voulons aussi relever le fait, que dans le Zanddiluvium
fluviatile du forage de Zoetermeer on rencontre des fragments de coquilles
marines, qu'on pourrait admettre comme témoins du voisinage de la mer,
et qu'il en a été peut-être de même à Harlem. Nous avons observé le
même fait dans les couch.es quaternaires du forage d'Utrecht (Contrib. IV)
et de celui de Sneek (Contrib. II).
Arrivé à la fin de ce travail, j'éprouve le besoin de remercier cha-
leureusement tous ceux, qui ont bien voulu faciliter mes recherches en
me donnant les renseignements nécessaires, ainsi qu'aux Directeurs de
la Fondation Teyler, qui ont si généreusement contribué à la publication
de mon travail.
Je les prie d'accepter mes sincères remerciments!
-ocr page 91-Explication des figures.
Carte d'orientation des dunes intérieures. La couleur brune a rapport aux dunes,
tant marines qu'intérieures; la couleur jaune, aux terrains relativement élevés, mais
horizontaux, bancs de sable ou vallées ; la couleur verte, aux terrains plus bas
et humides, généralement des prairies, très exceptionnellement des terrains cul-
tivés. Les chiffres indiquent la hauteur du sol au-dessus ou au-dessus de A. P.,
justement là, où se trouve le point décimal.
Pour les environs de Delft, consultez la page 25.
-ocr page 92-Tableau d'ensemble des forages de la région des tourbières.
Echelle 1 : 200. Tourbe „a", Argile „b", Sable „c", Sable blanc ou grossier
(Diluvium sableux en partie) „d"-
1—10. Le long du chemin de fer d'Enkhuizen à Hoorn.
I—4. Entre Enkhuizen et Bovencarspel (3800 M.). 1 à 1400, 2 à 1600, 3 à
2890, 4 à 3400 M. d'Enkhuizen.
5-6. Entre Bovencarspel et Hoogcarspel (3700 M.). 5 à 380, 6 à 1780 M. de
Bovencarspel.
7—8. Entre Hoogcarspel et Westwoud (3200 M.). 7 à 430, 8 à 1125 M. de
Hoogcarspel.
9. Entre Westwoud et Blokker (2800 M.), à 315 M. de Westwoud.
10. Entre Blokker et Hoorn (4200 M.), à 300 M. de Hoorn.
II—14. Entre Hoorn et Zaandam (32500 M.).
11. Entre Oosthuizen et Middelie (3000 M.), à 540 M. d'Oosthuizen.
12. Entre Kwadijk et Purmerend (3300 M.), à 385 M. de Kwadijk.
13. Entre Purmerend et Oostzaan (7400 M.), à 2620 M. de Purmerend.
14. Pont du chemin de fer sur le Canal maritime près d'Amsterdam.
15. Idem près de Velsen.
16. Viaduc du chemin de fer dans le „Westerdok" d'Amsterdam.
17—25, Canal de la Merwede entre Amsterdam et Nigtevecht sur le Vecht.
17, 18, 19. Coin de la Zuiderzee à Zeeburg près d'Amsterdam; 20. Etang nommé
„Nieuwe Diep" près de Zeeburg; 21. Diemer-Polder; 22. Canal de Muiden; 23, Ge-
meenschaps-Polder; 24. Aetsveldsche Polder; 25. Nigtevecht.
26—32. Idem entre Nigtevecht et Maarssen sur le Vecht.
26. Nigtevecht ; 27, Oostzijdsche Polder ; 28. Station de Loenen-Vreeland ;
29. Idem ; 30. Station de Nieuwersluis ; 31. Idem de Breukelen ; 32. Mi-chemin
entre les stations de Breukelen et de Maarssen.
33-38. Profil Hoofddorp—Loenen-Vreeland (0. N. 0. — E. S. E.).
33. Hoofddorp dans le Dessèchement du Lac de Harlem ; 34. Kudelstaart ;
35. Uithoorn, entre Harlem et Leide ; 36. Moulin No. 3 près de Mydrecht ;
37. Courbure de la digue du polder au N. E. de Waverveen ; 38. Station de
Loenen-Vreeland.
39—42. Profil Mydrecht—Tienhoven (0. N. 0. — E. S. E.).
39. Mydrecht ; 40. Oudhuizen, Mijdrechter Zuiderpolder ; 41. Canal de la Merwede
entre Nieuwersluis et Breukelen ; 42. Tienhoven.
43—84. Chemin de fer de Leide à Woerden (32 K.M.).
43. Rive orientale' du Vieux Rhin à Leide ; 44. Station des marchandise.? à
Leide ; 45, à 3925 M. de la Station principale de Leide ; 46, à 4073 M. ; 47, à
4480 M.; 48, à 4690 M. Station de Zoeterwoude ; 49, à 910 M. de Z.; 50, à 4435 M.-,
51, à 4760 M. Station de Koudekerk; 52, à 2350 M. de K. ; 53, à 3050 M. ; 54, à
4450 M,; 55, à 5050 M., Station d'Alfen ; 56, à 710 M. d'Alfen ; 57, à 950 M.;
58, à 1000 M. ; 59, à 1170 M. ; 60, à 1500 M. ; 61, à 1550 M. ; 62, à 1600 M. ;
63, à 3370 M.; 64, à 3400 M., Station de Zwammerdam ; 65, à 2330 M. de Z. ;
66, à 3000 M. ; 67, à 3680 M. ; 68, à 4100 M. ; 69, à 4500 M., Station de Bode-
graven ; 70, à 430 M. de B. ; 71, à 700 M.; 72, à 855 M.; 73, à 1660 M.; 74, à
1845 M.; 75, à 1950 M.; 76, à 2040 M.; 77, à 2100 M.; 78, idem; 79, à 2600 M.;
80, à 4500 M. ; 81, à 5200 M. ; 82, à 6600 M. ; 83, à 8050 M. ; 84, à 9300 M. ou
à 300 M. de Woerden.
85 —103. Chemin de fer du „Hoek van Holland" (Maassluis) à Rottei'dam.
85, à 3250 M. à l'ouest de Maassluis; 86. Port [de Maassluis; 87. Boonervliet,
à l'est de Maassluis ; 88, à 2500 M. à l'ouest de Vlaardingen ; 89, à 500 M. ;
90. Station de Vlaardingen; 91 et 92, à 2000 M. à l'est de la Station;
93—97. Poldervaart, à 2000 M. à l'ouest de la Station de Schiedam; 98, à 1250 M.;
99—102. Station de Sclnedam ; 103. Mi-chemin entre les Stations de Schiedam
et de Rotterdam.
104—122, Chemin de fer de l'état de Rotterdam à Zwijndrecht, sur la Vieille
Meuse, vis à vis de Dordrecht.
104. Station centrale de Rotterdam; 105—107. Canal comblé, dit „Binnenrotte"
à Rotterdam ; 108, 109. Station de Marchandises à Feyenoord, vis à vis de Rot-
terdam ; 110, à 1990 M. au nord de la station de Barendrecht ; 111, à 90 M;
112, à 5060 M. au nord de la station de Zwijndrecht ; 113, à 4360 M. ; 114, à
4060 M.; 115, à 1660 M.; 116, à 860 M.; 117, à 160 M. au nord de la station;
118, à 240 M. au sud; 119, à 640 M.; 120, à 1,340 M.; 121, à 1640 M.; 122, à
2140 M. (digue de la Meuse).
123. Forage de Zoetermeer entre La Haye et Gouda.
124. Forage de Vinkeveen à l'ouest de Loenen-Vreeland.
Tous les forages sont traversés de lignes horizontales représentant les niveaux
de A.P. et de 2, 4, etc. mètres au-dessous. Les chiffres à côté des forages indi-
quent le nombre de décimètres qu'il faut ajouter au nombre de mètres entiers
qui est en-dessus, le chiffre o qu'on rencontre parfois indique par conséquent un
nombre de mètres entiers.
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