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CONTRIBUTIONS

A LA

GEOLOGIE DES PAYS-BAS.

PAR

Dr. j. Lorié.

B^fctiolhCGk

Instituut voor aardwetenschappen
Budapestiaan 4
3584 CD Utreol
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LES HAUTES TOURBIÈRES AU NORD DU RHIN.

Extrait des Archives Teyler,-Série II, T. VI, Quatrième Partie.

BiBLîOTHSSK Difl .
MJKSUNîVHRSîtlff
UTRECHT

HAARLEM,
LES HÉRITIERS LOOSJES.
1895.

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TABLE DES MATIERES.

Contributions à la Géologie des Pays-Bas VI.
Les hautes Tourbières au nord du Rliin par Dr. J.
Lorié.

Première Partie. Les Tourbières du Versant occidental du Plateau de Drenthe.

L Haute Tourbière de Drachten..............................Pag. 2.

IL Haute Tourbière de Rottevalle............................. „ 8.

IIL Haute Tourbière de Zevenhuizen.............!............. „ 10.

IV. Haute Tourbière de Wijnjeterp-Gorredijk................... „ 13.

V. Haute Tourbière de Smilde................................ „ 16.

VJ. Haute Tourbière de Makkinga............................. „ 25.

VIL Haute Tourbière de Fj-ederiksoord.......................... „ 27.

VIIL Haute Tourbière de Koekange............................... „ 29.

Seconde Partie. Les Tourbières des deux Côtés du Vecht.

IX. Haute Tourbière de Hoogeveen —Coevorden.................. „ 31.

X. Haute Tourbière de Staphorst.............................. „ 41.

XL Haute Tourbière de Hardenberg-Almeloo......................48.

XIL Haute Tourbière de Radewijk-Wilsum.................... „ 50.

Xm. Haute Tourbière, dite „Syen-Venue"........................ „ 53.

Troisième Partie. Les Tourbières du Versant oriental du Plateau de Drenthe.

XIV. Haute Tourbière de Schoonoord............................Pag. 54.

XV. Terrain entre l'Eems et le Vecht.

A. Voisinage de l'Eems à Rheine.......................... „ 61.

B. Environs de Salzbergen et d'Emsbüren.................. „ 62.

C. Environs de Lingen et de Lohne........................ „ 68.

D. Environs de Schüttorf et de Nordhorn................... „ 64.

E. Environs de Neuenhaus................................ „ 66.

XVI. Haute Tourbière de Bourtange.

1. Bord oriental et Rive gauche de l'Eems.

A. Environs de Meppen...................,.............. ■ • » 68.

B. Environs de Wesuwe.................................. » 69.

C. Environs d'Altenberge.................................. » 70.

D. Environs de Rhede.................................... » 71.

E. Niveaux relatifs du Sous Sol de la Tourbière................73.

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2. Bord occident:!], le long du Hondsrug.

A. Environs d'Emblicheim et de Schoonebeek............Pag. 76.

B. Environs de Dalen.................................. „ 78.

G. Le Hondsrug....................................... „ 80.

D. Haute Tourbière de Winschoten..................... „ 85.

3 Pays de Westerv^olde.

A. Environs de Ter-Apel et de Sellingen................ „ 88.

B Fnvirons de Vlachtwediîe et d'0nstv\re(3de............. „ 94.

C. Environs de Bourtange et de Bellingwolde............ „ 96.

D. Récapitulation. Considérations générales et climatologiques.

Blytt............................................ „ 99.

Quatrième Partie. Les petites hautes Toui'bières (ie rOverijsel.

XVII. Haute Tourbière de Nijvardal........................... „ 103.

XVIIL Haute Tourbière de Rijssen............................ „ 105.

XIX. Haute Tourbière de Diepenheim........................ „ 107.

XX. Haute Tourbière de Gronau............................. „ 108.

XXI. Haute Tourbière de Haaksbergen....................... „ 110.

Cinquième Partie. Les Tourbières du Sud-est de la Gueldre et de la
Province d'Utrecht.

XXIL Haute Tourbière de Zwillbroek.......................... „ 112.

XXIII. Haute Tourbière, dite „Kloosterveen".................... „ 115.

XXIV. Haute Tourbière, dite „Witte Veen"..................... „ 116.

XXV. Haute Tourbière, dite „Korenbarger Veen"............... „ 117.

XXVI. Tourbière noire ou „Zwarte Veen"...................... „ 119.

XXVII. Haute Tourbière de Soest.............................. „ 123.

XXVIIL Récapitulation......................................... „ 1:^5.

Sixième Partie. Aperçu de la Littérature géologique sur les hautes Tourbières.

1. Staring..................................................Pag. 128.

2. Lorié...................................................... „ 131.

3. Borgman.................................................. „ 182.

4. Grisebach................................................. „ 133.

5. Lesquereux............................................... „ 134.

6. Pokorny................................................. „ 134.

7. Senft..................................................... „ 134.

8. Kutzen.................................................. „ 135.

9. Nöggerath............................................... „ 136.

10. Jentzsch................................................. „ 136.

11. Schacht.................................................. „ 137.

12. Früh.................................................... „ 138.

13. Früh..................................................... 138

.14. Fischer-Benzon........................................... „ 138

15. Sitensky................................................. „ 140.

16. Primics................................................... „ 142.

17. Résumé.................................................. „ 144.

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CONTRIBUTIONS

À I.A

GÉOLOG-IE DES PAYS-BAS.

PAR

DR. J. LORIÉ.

VI.

LES HAUTES TOURBIÈRES AU NORD DU RHIN.

Le 24 Juin 1890 nous fîmes avec feu M. H. Hartogh Heys van
Zouteveen une excursion en voiture dans les environs de la ville
d'Assen. Nous visitâmes en quelques points le bord de la vaste
tourbière de Smilde, qui s'étend jusque près de la ville et nous
remarquâmes que la tourbe y est toujours à un niveau plus bas
que le sol sableux voisin. Cette observation, faite en passant, nous
engagea à faire une série de recherches cette année et les trois sui-
vantes, ayant pour but de nous éclaircir sur cette question : la haute
tourbière est-elle toujours plus basse que le sol sableux voisin et
est-ce-là la cause unique de sa formation dans tel ou tel endroit
et non dans un autre?

Nous voulons dans ce traité examiner les hautes tourbières de
notre pays, au nord du Rhin, en allant du N. au S. et nous ver-
rons que les conditions physiques et géologiques varient passable-
ment d'une tourbière à l'autre. Nous allons nous occuper exclu-
sivement de ces dernières et non des détails botaniques, fort
intéressants aussi, mais qui ont jusqu'ici été traités de préférence
par les différents savants.

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Z CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS.

Première Partie.

Les Tourbières du Versant occidental du Plateau de Drenthe.

I. HAUTE TOURBIÈRE DE DRACHTEN.

Drachten, un des villages les plus connus de la Frise, est situé
sur une des limites naturelles de la tourbière, dont nous allons
nous occuper, et à laquelle il donnera son nom.

Cette limite est un dos de Diluvium Scandinave, très peu apparent.
La surface n'y est généralement que du sable et ce n'est qu'occa-
sionnellement que des cailloux de silex ou de granit révêlent le
gravier du sous-sol. Ainsi nous avons observé au S. de Drachten,
dans un nouveau fossé, l'argile à blocaux jaune-grisâtre, cachée
sous 2 d.M. de sable fin.

En suivant le dos vers le sud, on aperçoit près de la barrière
sur la chaussée une légère inclinaison du sol vers la vallée de
r„Oude-Dreit," ruisseau très insignifiant. La présence d'un terrain
plus bas, d'un chenal, se révèle princiiDalernent par la contraste
que forment les bonnes prairies avec le bois ou les terres cultivées
des deux côtés. Le sol y est du sable fin avec quelques parcelles
de tourbe de marais; il a une très légère pente de l'E. à l'O.

Quant au sol à l'est du dos sus-nommé, il est impossible d'y voir
mie difï'érence de niveau ; pourtant à environ 600 M. de la chaussée,
près du petit canal de r„Overste-Wijk," on y creuse 2 d.M. de
tourbe, qui avait été autrefois recouverte de sable et un peu plus
loin au nord, on en enlève jusqu'à 5 d.M. Ici elle constitue encore
la surface naturelle du sol, d'oii l'on peut déduire une élévation un
peu plus grande du dos de Drachten, par rapport au sous-sql de
la tourbière.

Plus à l'est, ce sous-sol se relève de nouveau, vers le canal du
„Nieuwe-Vaart" et on y reconnaît facilement l'argile à blocaux.
Cette pente du sol à l'ouest est le plus sensible prés du petit
canal de „Selmiens-Wijk," dirigé au N.E., auquel aboutissent plu-
sieurs canaux latéraux du „Zuider-Dwarsvaart"; la différence de
niveau y a été évaluée à 1 M.

Au nord du village de Drachten, on ne peut non plus observer
directement une différence de niveau entre le sol du dos et le sous-
sol de la tourbière entamée. Les traces du Diluvium Scandinave

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3 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

y sont également peu apparentes ; on en observe de temps à autre
le long de la route de „Groninger-Opende," dite „Folgora-Laan."
D'abord ce ne sont que des morceaux isolés de silex, devenant
bientôt plus nombreux, associés à d'autres de granit; ensuite on
voit apparaître quelques restes de l'argile à blocaux, qui deviennent
de plus en plas fréquents. De même que plus au sud, le sol monte
très légèrement à l'est jusqu'aux restes de la tourbière, qui con-
stituent des champs cultivés. Ici encore on a recouvert de
t 1 d.M.
de sable les restes de la couche de tourbe.

On observe la même pente, e. a. au S.O. du petit village de
Kottevalle, là, où la route en briques devient route de gravier, le
long de la chaussée qui conduit au village, ainsi que le long de
quelques petits canaux (wijken). Dans le village même, cette pente
est accentuée par une petite écluse avec une chute d'eau d'environ
1 M. vers les prairies basses de l'ouest. D'ici à Drogeham, on aper-
çoit à plusieurs reprises le Diluvium Scandinave à la surface, les
champs labourés montrent du sable avec des morceaux de silex,
de granit et de quartzite. A mi-chemin dans le hameau de Blauw-
huis, on traverse une dépression très distincte, accentuée par l'étang
„Wijde Pet," allongé du N.E. au S.O. La profondeur n'en dépasse
guère 1 M. ; on y voit presque partout croître des roseaux, de sorte
qu'il pourrait se remplir de tourbe au bout d'un certain nombre
d'années. Cette dépression est probablement un des centres, où a
commencé le développement de la haute tourbière, dont on trouve
encore, près des bords, quelques restes de | M. d'épaisseur.

Au-delà de cette dépression, le terrain monte de nouveau; une
petite colline y forme un bout de la limite naturelle de la tour-
bière et produit l'anse très distincte, figurée sur la carte géologique,
au hameau de „Vierhuizen." Ici, comme à Roode-Schuur, à Sur-
huisterveen, etc. le Diluvium Scandinave se montre à tout moment
(la carte géologique ne donne que du Diluvium sableux), mais ne
se compose que de sable avec une multitude de petits cailloux,
principalement des silex.

La pente occidentale de la colline porte une petite tourbière
locale, qui n'atteint pas la chaussée. Elle est situé entre Vierhuizen
et Hamshorn (au S. de Drogeham) et n'est probablement qu'une
marmite de géant de grande dimension.

Buweklooster paraît être situé sur une autre petite colline, que
coupe la route. La pente générale de cette partie de la haute tour-
bière au nord est facile à observer, d'abord au commencement de

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4 CONTRIBUTIONS A LA OEOLOOIE DES PAYS-BAS.

la chaussée d'Augustinusga, ensuite le long du „Turflaan," petite
route de sable, qui va de cette chaussée au S. vers Koode-Schuur
(on y voit les prés faire place aux pâturages et ceux-ci aux terres
labourables), puis dans la petite écluse de Roode-Schuur, avec une
chute de 1—1,5 M.

Quant aux restes de l'ancienne tourbière, j'en ai trouvé un tout
près et à l'O. du pont de Buwetille (entre Roode-Schuur et De
Jirden); il avait encore une épaisseur de 1,75 M. Tout près et au
N.O. de Surhnisterveen, j'en ai vu un autre, enlevé en partie,
converti en prairie et figurant sur la carte géologique. Le sous-sol
du premier fragment est très ondulé; tantôt c'est du sable assez
sec, tantôt un étang. Il en est de même dans le hameau de De
Jirden et dans le village de Surhuisterveen.

Au nord du premier, on observe d'abord la pente orientale de
la colline de Vierhuizen, avec son reste de tourbière entamée; sa
pente méridionale forme en même temps la rive du „Wijde Pet "

A Surhuisterveen, la pente générale est aussi à l'est. On la voit
d'abord dans le canal de navigation oriental, qui débouche dans
POude-Vaart et dont le niveau est de 0,4 M. — A. P. (Frieslands
Boezem). A l'autre côté du village aboutit le canal occidental, avec
un niveau de 1 M. + A. P. en moyenne (Water van Surhuisterveen),
et en suivant ce canal à l'ouest on le voit former une coupure de plus
en plus profonde dans le sol, qui montre à plusieurs reprises dans
les fossés l'argile à blocaux sableuse. A De Jirden le sous-sol de la
haute tourbière est encore au-dessus du niveau du canal, à Sur-
huisterveen, il est en-dessous.

Pourtant, d'ici à Opende (en Groningue), le sol monte de nouveau,
pour baisser ensuite à l'E., après avoir atteint son point culminant.
Il en est précisément de même au S. et surtout au S.E., vers la
vallée de r„Oude-Dwarsdiep."

Cet angle de la haute tourbière, dont le sous-sol est encore le
Diluvium Scandinave, argileux et assez riche en erratiques, gros
et petits, offre une bonne occasion d'étudier la transformation gra-
duelle de la bruyère ordinaire en tourbière. En plusieurs endroits,
la première est visiblement plus élevée et passe en tourbe de gazon,
qui est exploitée en son entier ou bien dans les parties les plus
épaisses seules. Ces dernières ne sont que les marmites de géant
bien connues, isolées sur la bruyère sableuse, mais reliées de plus
en plus par la tourbe de gazon près de la tourbière continue.

On arrive ainsi dans la prolongation de la vallée sus-nommée

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5 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

de r„Oude-Dwarsdiep/' où la haute tourbière est encore dans son
état original, tantôt bruyère, tantôt prairie, assez bien drainée.
Elle ne porte d'abord que des bruyères, mais en devenant plus
basse et plus humide, il y apparaît des joncs, qui deviennent de
plus en plus abondants; il s'y joint des herbes, les bruyères dis-
paraissent graduellement et les joncs suivent leur exemple. L'abon-
dance des joncs dans les prairies n'est pourtant pas seulement une
indication de l'humidité relative, mais aussi du soin que le paysan
prend de sa propriété. On remarque facilement une grande diffé-
rence à cet égard entre les parcelles voisines; la profondeur et
l'entretien des fossés et par conséquent le drainage plus ou moins
bien réglé, y jouent un grand rôle. Du reste c'est déjà Staring qui
(„Sol des Pays-Bas", I, pag. 50) a relevé, que „nulle part la transition
ne s'observe plus clairement qu'entre Marum et Opende, oùr„Oude-
Diep" (ce doit être Oude-Dwarsdiep) a sa som-ce dans la tourbière.
Ici, le passage de la haute tourbière à celle de marais est presque
imperceptible."

Il est assez probable que la tourbe de marais de cette vallée est
aussi en continuité directe avec la haute tourbe de De Wilp (Ze-
venhuizen); ce n'est pourtant qu'une continuité secondaire et de
peu d'importance et c'est à la haute tourbière de Drachten, qu'ap-
partient à bon droit la vallée de Marum comme chenal de drainage.

Tout près d'ici l'épaisseur minime de la tourbière a donné lieu
à une vaine exploitation. Les petits canaux ramifiés à l'ouest de
Trimunt paraissent n'avoir jamais été employés, puisqu'ils ont été
creusés dans une tourbe à gazon. Ils ont un aspect entièrement
différent de tous les autres.

Entre la borne 13 de la frontière friso—groningoise et le vil-
lage de Drachten, le sol baisse continuellement; d'abord il forme
principalement du terrain labouré avec quelques prairies, ces der-
nières deviennent de plus en plus fréquentes et finissent par
occuper la surface entière. Celle-ci est partout du sable, sous-sol
de l'ancienne tourbière.

Le long du canal d'Ureterp, le sol n'est également que du sable,
qui repose sur de l'argile à blocaux ordinaire; on observe e. a. le
long du canal et à côté des fossés plusieurs gros erratiques, qui
diminuent en nombre et disparaissent entièrement à Dalen ; ici le
canal a été creusé entièrement dans le Diluvium sableux, qui
s'épaissit donc de l'E. à l'O. Quant à la tourbe, elle n'a été enlevée
qu'incomplètement le long du canal; on en voit des restes à chaque

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6 CONTRIBUTIONS A LA «ÉOLOGIE DES PAYS-BAS.

moment, ainsi que dans le hameau de Selmien, entre Ureterp et
Beetsterzwaag, où la partie inférieure en a été convertie en prairie
et ressemble fort à la tourbe de marais. Des restes épars nous
rappellent l'état primitif et nous apprennent qu'il y a au moins
4 d.M. d'enlevés.

Entre Ureterp et Olterterp, le sous-sol est partout encore le Dilu-
vium sableux sans aucun caillou; plus loin au S. le Diluvium
Scandinave incontestable revient à la surface et y constitue un dos
très apparent, avec des dunes et des marmites de géant, et parallèle
à la vallée du Koningsdiep.

Nous sommes donc revenu ici à notre point de départ, la petite
vallée de r„Oude Dreit."

Avant de résumer les différentes observations que nous avons
faites dans cette haute tourbière et sur ses limites, nous voulons
mentionner ce qu'en dit la carte du „Waterstaat."

La partie septentrionale correspond assez bien au „Waterschap
der Compagnons van Surhuisterveen", dont le niveau de l'eau est
en moyenne à 1 M. •+- A. P. Au sud se trouve une autre partie,
dont la moitié occidentale correspond au „Water van Rottevalle
(laagste pand)," d'un niveau de 0.50 M. — A. P., et la moitié
orientale au „Water van Rottevalle (bovenste pand)," dont le
niveau de l'eau n'est pas indiqué sur la carte du Waterstaat, mais
qui est naturellement plus élevé que le précédent.

La partie méridionale de l'ancienne tourbière est partagée entre
trois „Waterschap." Celui de l'ouest s'appelle „Noorder-en Zuider-
Dwarsvaart" et a un niveau de 1,75 M. + A. P.; celui du N.E.
s'appelle „Compagnons-Dwarsvaart" et est plus élevé (sans chiffre
indiqué), et celui du S.E. s'appelle „Ureterper-Vaart" et a un
niveau de 2,8 M. -i- A. P.

On peut en conclure qu'il y a deux parties plus élevées,
séparées par une partie plus basse, que la partie septentripnale
est moins élevée que la méridionale, qui monte de l'O. à l'E.
et au S.E.

Résumons maintenant nos propres observations. Le sous-sol de
notre
haute tourbière est le Diluvium Scandinave dans les parties
orientale et septentrionale et assez près du dos de Drachten et du
terrain élevé d'Ureterp. C'est le Diluvium sableux, mince vers les
bords, plus épais au milieu, e. a. à Dalen.

Les terrains voisins sont en partie plus élevés et constituent ainsi
une limite naturelle pour la tourbière. C'est d'abord le dos de

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CONTRIBUTIONS A LA OEOLOGIE DES PAYS-BAS. 7

Drachten, qui est du moins un peu plus élevé que le sol avoisinant
de l'E., jusqu'au „Dwarsvaart.

Ensuite nous avons la colline bien prononcée de Vierhuizen et
la colline plus petite de Buweklooster ; puis, le vaste terrain entre
Surhuisterveen et la vallée de l'Oude-Dwarsdiep et finalement les
environs de Friesche-Palen, Ureterp et Olterterp.

La pente du sous-sol est en général à l'ouest; mais au nord de
Surhuisterveen elle est à l'est et au nord, à cause de la colline de
Vierhuizen.

Les terrains plus élevés, que nous venons de mentionner, sont
séparés par des intervalles plus bas qui ont pu fonctionner comme
centres de la formation de la tourbe. Ce sont: la dépression en-
tre Surhuisterveen et Blauwhuis, accentuée dans l'étang „Wijde
Pet," la vallée peu profonde de l'Oude-Dreit et la partie supé-
rieure de la vallée de l'Oude-Dwarsdiep. Or, ces deux premières
se dirigent à l'O., ce qui est aussi la pente générale du sol;
la dernière, au contraire à TE, donc en sens inverse, puisque
nous sommes ici tout près du bord septentrional du plateau de
Drenthe. A cette exception près, le sous-sol a une pente très
faible du S.E. au N.O., ce qui produit un sol humide, propre à
la formation d'une haute tourbière. Les dépressions sus-nommées,
ainsi que les marmites de géant, que nous avons citées à plusieurs
reprises, ont favorisé sans doute le développement de la haute
tourbière, quoique la pente générale, trop faible pour laisser
s'écouler à la surface l'eau de pluie, ait été la principale cause
de son grand développement.

La limite septentrionale du plateau de Drenthe étant irrégulière,
notre haute tourbière se trouve en partie sur une protubérance de
cette limite La conséquence en est que le sous-sol de cette partie
baisse des trois côtés, par conséquent aussi à l'est, tandisque la
pente de la plus grande partie est à l'ouest. Cet état du sol a causé
aussi un écoulement des eaux de fonte quaternaires au nord-est,
et par conséquent la formation d'un chenal beaucoup trop large
pour les besoins actuels. Comme de coutume, ce chenal (Oude-
Dwarsdiep) s'est rempli de tourbe de marais, qui s'est couverte peu
à peu d'une haute tourbière dans sa partie supérieure.

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8 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

II. HAUTE TOURBIÈRE DE ROTTEVALLE.

Nous venons de mentionner ce village, situé sur le bord de l'an-
cienne haute tourbière de Drachten. Or, la carte géologique en
représente une autre, à quelque distance à l'ouest, entièrement
enlevée et entourée principalement de Diluvium sableux, excepté
au sud-ouest, où s'observe la tourbe basse. Cette dernière a été
enlevée à son tour en partie, comme la haute tourbe l'a été en
son entier, et a été remplacée par mi étang „De Leijen." Le Dilu-
vium Scandinave ne figure sur la carte que plus au sud ; cependant
nous avons vu près de Drachten qu'il n'arrive pas directement à
la surface, mais reste caché sous 2—3 d.M. de sable fin, faisant
partie du terme géologique hétérogène du Zanddiluvium. Il en
est précisément de même en quelques points le long de la chaussée
de Drachten à Nyega, où nous avons observé l'argile à blocaux
ordinaire sous mie mince couche de sable, ainsi qu'au nord de
cette chaussée, le long de r„Opeinder-Vaart" et dans plusieurs
fossés du „Zv\^artveen" (tourbière noire), la partie méridionale de
notre tourbière. Près de ce canal, l'argile contient même un grand
nombre d'erratiques. Si donc le dos de Drachten a le droit de
figurer comme Diluviuui Scandinave sur la carte, il en est parfai-
tement de même d'une bonne partie du terrain jusqu'à la tourbière,
qui nous occupe, et de son sous-sol.

Le canal sus-nommé passe tout près de la limite méridionale de
ce „Zwartveen", avant d'aboutir à l'étang „De Leijen " Elle coïn-
cide assez bien avec une petite route „Voormalige Leidijk" et
avec UD abaissement très visible du sol, au bord d'une terrasse
de quelques décimètres de hauteur. On peut la tracer facilement
sur la carte en réunissant les extrémités des fossés larges et étroits,
qui aboutissent au lac et on conçoit facilement qu'il se soit formé
autrefois une tourbière en bas de cette petite terrasse, où Le sol
doit naturellement être plus humide.

De quelle manière cette terrasse s'est elle formée? Nous croyons
devoir la considérer comme le produit de l'érosion d'un ruisseau
de fonte de la glace quaternaire pendant son retrait. Après avoir
pris comme tels les vallées de la Linde, du Tjonger et du Konings-
diep, il n'est que conséquent d'y joindre les tourbières basses allon-
gées, bordées de Zanddiluvium, entre Bergum et Suameer et entre
Buitenpost et Augustinusga, et il est naturel que de temps à autre
on y rencontre un bout de rive plus raide qu'ailleurs.

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9 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Entre ce bord de la terrasse et le lac on observe dans les fossés
et à fleur d'eau d'abord l'argile à ^blocaux, ensuite le sable fin,
appelé Zanddiluvium, et finalement la tourbe basse des environs
du lac.

Vers le nord-est nous n'avons plus observé ce bord de terrasse,
mais bien une pente très distincte vers le N.O. Il en a été de même
dans la vaste prairie, appelée „Het Bildt," à l'ouest de Rottevalle,
oil nous avons trouvé quelques faibles traces de rancienne tourbière
et à plusieurs reprises l'argile à blocaux. La pente du sol au N.O.
y est aussi démontrée par la présence d'un fossé en cul-de-sac,
dirigé vers le S.E., ayant probablement servi autrefois au transport
de la tourbe.

La partie septentrionale de notre haute tourbière porte sur la carte
topographique le nom de „Witveen" (tourbière blanche), dû aux
sphagnes moi'tes. Or, cette ancienne tourbière est traversée en sa
longueur par un fossé semblable, se terminant en cul-de-sac au
N.E. En raisonnant d'après le dessin de la carte topographique,
qui montre des prairies sur le sol de l'ancien Witveen (du moins
avec peu d'exceptions), mais des terrains labourés (donc plus secs)
ver FO., le N. et l'E., on tirerait la conclusion que le sol y con-
stitue un ancien chenal relativement court et large, allant du N.N.E.
au S.S.O. L'eau de fonte glaciaire aurait donc coulé dans cette
direction et aurait fait une courbe vers l'O. ou le N.O., en produi-
sant ainsi la terrasse du „Zwartveen." Dans le terrain du „Wit-
v^een," nous n'avons pas pu faire d'observations directes, vu le peu
de temps que nous avions à notre disposition. Il y avait tant de
fossés, de bosquets, de haies, etc., qu'il était impossible d'avoir une
vue tant soit peu satisfaisante sur cette contrée, de sorte que nous
devons nous contenter des conclusions tirées de l'examen des cartes.

En somme, une pente au S.O. et à l'O. est très distincte; on
voit facilement que le village de Rottevalle est situé plus haut.
Cette pejTite fait descendre le sol assez bas à l'O., pour qu'il s'y
développe une tourbière basse, sur le bord de laquelle s'est dé-
veloppée une tourbière haute, qui s'est étendue graduellement sur
le terrain avoisinant. Au S.E. elle s'est étendue jusqu'à la terrasse
sus-mentionnée, au N.E. jusque dans un ancien chenal d'érosion
quaternaire. Elle s'est donc étendue jusqu'à ce que le sol est devenu
trop sec ou bien trop humide. Le premier cas se présente au S.,
à TE., au N. et au N.O , le second au S.O.

Il faut relever encore que le bord septentrional de notre tour-

2

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10 CONTRIBUTIONS A LA «ÉOLOGIE DES PAYS-BAS.

bière se trouve assez près de la partie la plus basse de la tourbière
de Drachten et qu'il y a peut-être un rapport quelconque entre
les deux dépressions.

III. HAUTE TOURBli]RE DE ZEVENHUIZEN.

C'est à peu près au centre de cette tourbière qu'est situé le village
de Zevenhuizen, qui lui prête son nom. Commençons l'examen des
limites à l'extrémité S.O., danè le village de Bakkeveen. Les en-
virons en sont plus élevés que la haute tourbière, p. e. le long du
canal dit „Friesche Palen-Vaart." A peu de distance du village,
on voit pourtant le sol baisser assez vite vers la vallée du „Ko-
ningsdiep." A côté de la tourbe de marais ordinaire s'est déve-
loppée une haute tourbière, étroite d'abord, (sur les rives de la
vallée), mais s'élargissant et s'épaississant en amont jusqu'à ce
qu'elle remplit la vallée entière. Elle constitue en cet endroit le
court rejeton, qu'indique Staring sur sa carte géologique, qui est
traversé par un canal, le „Lange-Wijk" et repose, vers De Wilp,
sur l'argile à blocaux, gris-blanchâtre, pauvre en erratiques et dans
laquelle on voit plusieurs marmites de géant.

Le sol avoisinant, constitué par le môme Diluvium, se relève de
l'autre côté de la vallée au-dessus de la tourbière et baisse visible-
ment à l'ouest, ainsi que l'indique le courant du canal, de sorte
qu'au nord du „Kromhoeksterbrug" la différence de niveau est
devenue invisible et que la tourbière y touche à sa fin. Nous avons
trouvé, pour l'épaisseur de la tourbe, 1 M. dans le fossé de la limite
provinciale et, plus près du canal même, 4 et 2 d M. Dans cette
contrée il nous a paru, que la limite de la haute tourbière devra
être avancée vers le canal et vers l'O, de sorte qu'il y a proba-
blement une continuité accidentelle, ou plutôt secondaire, avec celle
de Drachten; la chaussée de „Friesche Païen" à Marum eiï Gro-
ningue e. a. passe en partie sur la haute tourbière, qui repose
sur l'argile à blocaux. Elle s'étend jusqu'à la colonie de „Trimunt,"
où elle est marécageuse en partie, exploitée comme tourbière ou
bien cultivée de blé sarrasin, etc. Cette colonie est une colline de
Diluvium Scandinave assez étendue, portant aussi des sables mo-
biles et entourée de la haute tourbière.

En allant plus loin, au N.E., on observe encore, près de De Haar
(au S.O. de Marum) une rive plus élevée, (jui porte quelques tour-

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11 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

bières locales. Il n'est pourtant pas facile d'y indiquer partout la
limite de la tourbière, parce qu'on y améliore en plusieurs points
le sol cultive au moyen des abatis floconneux de la tourbière (turf-
strooisel), ce qui fait penser d'abord que c'est la tourbe primitive
Le Diluvium Scandinave y est representé, près de la crête, par
l'argile à blocaux.

En dépit de cette rive ostensible, l'eau dans le canal, dit „Ak-
kermans-Wijk" a, dans une écluse, une chute de 0,5 M. du S. au
N. La cause de cette contradiction est pourtant bien simple, le
canal traversant un dos sableux peu large, pour déboucher ensuite
dans une vallée plus profonde, celle de r„Oude-Dwarsdiep," dans
laquelle est bâti le village de Marum.

En continuant notre examen à. l'est, nous arrivons à la belle
ferme „De Linde," située tout près de la limite et sur la crête
étroite de la rive; le sol sableux descend au N. ainsi qu'au S. et
reste visible dans quelques fossés de la tourbière. La surface de
celle-ci est assez convexe, la tourbe augmente donc rapidement en
épaisseur. Nous observons la même particularité — synclinale visible
des surfaces sableuse et tourbeuse — dans la tourbière de AVijnje-
terp, qui montre le mieux la convexité bien connue.

En suivant le canal, dit „Jonkers-Vaart," l'argile à blocaux se
montre à plusieurs reprises coninie sous-sol, ainsi qu'à Zevenhui-
zen. L'eau du canal coule à l'E., donc dans une direction opposée
à celle des canaux que nous venons de mentionner. Cet état de
choses n'a pourtant pas l'importance que nous y attachons habi-
tuellement, car nous nous trouvons non-seulement sur la pente
occidentale du plateau de Drenthe, mais aussi tout près de sa
pente septentrionale et près d'un centre de commerce important,
la ville de Groningue. Ces deux circonstances ont dû peser lourd
dans la balance pour décider la direction de descente dans la bâsse
plaine, contre nature, il est vrai, puisqui la pente du sous-sol . est
la môme que dans les autres tourbières analogues, savoir du N.E.
au S.O.

La rive septentrionale de la tourbière garde le même aspect, tout
à Nuis qu'à Oldebert, où son caractère de dos plus élevé saute
aux yeux à cause du voisinage de la vallée vivante de r„Oude-
Dwarsdiep" au nord. Près de ces villages, le Diluvium Scandinave
est probablement caché sous du sable fin; on n'en observe que de
rares traces. Ces relations de niveau sont plus ostensibles encore
dans le village de „De Leek," sur la frontière des provinces de

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12 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Drenthe et de Groningue et à la base de la pente septentrionale,
relativement raide, du plateau de Drenthe. Elle est accentuée dans
trois écluses,' l'une près de l'autre, établissant la communication
entre les canaux de la tourbière et ceux de la basse plaine de la
Groningue.

De l'autre côté de ce village on observe un rejeton de la couche
de tourbe basse, dont une grande partie a été détruite par les
vagues de la mer. Une autre partie a été enlevée par l'homme et
très souvent la nature a continué son travail, en réunissant et agran-
dissant les trous creusés pour y faire naître des étangs et des lacs
Telle est l'origine du lac „De Leyen," dont nous venons de parler,
ainsi que du „Lac de De Leek," qui se trouve assez près du village
du même nom et est entouré partout de la basse tourbe.

La partie voisine (N.E.) de la haute tourbière commencé par
deux racines, séparées par un dos très prononcé de Diluvium
Scandinave, qui se continue dans le sous-sol de la tourbière, comme
le prouvent nombre d'erratiques sur les bords du canal. Ce dos
n'est à son tour qu'un rejeton de la bruyère de Rodenetde „Ten-
Heyl." qui descend en pente plus graduelle vers De Leek et
d'une manière plus sensible à l'ouest, pour disparaître sous la
tourbière.

Au commencement la tourbe y est mince, comme le démontrent
les monceaux coniformes de tourbes de gazon ; plus à l'ouest, on
y voit bientôt les monceaux rectangulaires de tourbes ordinaires
et en même temps la surface y devient plus élevée, conséquence
de la convexité bien-connue. De l'autre côté, par conséquent à l'E.
et au S.O. du village de Roden, on observe également des tour-
bières en exploitation. Ce ne sont d'abord que quelques marmites
de géant, mais il y en a aussi de plus grande dimension, qui ne
sont autre chose que les commencements peu profonds des vallées
qui convergent vers Roden. Il y a ici une faible crête de séparation
entre les bassins hydrographiques des ruisseaux, qui coulenli vers
Groningue („Peizer-Diep") et vers Akkrum en Frise (haute tour-
bière de Zevenhuizen et „Koiiings-Diep").

Nous avons suivi les contours de la haute tourbière de Zeven-
huizen, dont la constitution est assez simple. Ainsi que plusieurs
autres, elle se trouve sur la pente occidentale du plateau de
Drenthe et dans uue dépression dirigée du N.E. au S.O., qui est
assez large en proportion de sa longueur. Le fait qu'elle commence
par deux racines, séparées par une crête ostensible, n'est nullement

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13 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

surprenant et s'observe aussi ailleurs. Les rives plus élevées en sont
en général bien visibles; tantôt la pente en est plus forte, tantôt
moins. Elle débouche dans la vallée du Konings-Diep près de Bak-
keveen ; ses relations avec la haute tourbière de Drachten et peut-
être avec celle de Haulerwijk ne sont qu'accidentelles. Staring (1. c.
pag. 188) ne parle de cette tourbière qu'en passant, pour men-
tionner que „la quantité de sapins et de chênes qui gisent pêle-
mêle, est étonnante, telle même que leur valeur comme com-
bustible égale peut-être celle de la tourbe". C'était „au sud de
Marum, où le Jonkers-Vaart rencontre le canal de Bakkeveen et
de Drachten (Friesche Païen-Vaart), donc près du hameau de
De Wilp".

IV. HAUTE TOURBliiRE DE WIJN.JETIiRP-GORREDIJK.

Nous sommes arrivé à l'examen d'une des tourbières les plus sim-
ples et se prêtant par consequent parfaitement à une comparaison
avec les autres. Les villages nommés dans le titre s'y trouvent
aux deux extrémités; nous voulons commencer par le premier
pour faire le tour de notre tourbière.

La carte géologique nous montre qu'elle est dirigée du N.E.
au S.O. et nous donne une idée suffisante de l'allure générale du
terrain.

L'extrémité supérieure s'étend plus loin au N.E. ; elle coupe
même le canal dit „Compagnons-Vaart" et la chaussée parallèle
de Donkerbroek, au-delà de laquelle la tourbe n'est qu'une
couche peu épaisse et peu large, qui s'éteint bientôt contre la
bruyère sableuse un peu plus élevée. Tout près et à l'O. du canal
quelques restes de la tourbière originale ont encore une épaisseur
de 1 M. ; le sous-sol immédiat y est du Diluvium sableux, gris-
bleuâtre, peu épais, car l'argile à blocaux ordinaire se rencontre déjà
dans les „Wijken" (canaux latéraux). C'est surtout dans cette
partie qu'on peut parfaitement observer la convexité, à laquelle
les dilférents auteurs font continuellement allusion et qui fait
paraître l'église de Wijnjeterp sensiblement plus basse. Elle cause
aussi les pentes synclinales des surfaces tourbeuse et sableuse, non
loin de la chaussée de Donkerbroek à Hornsterzwaag, et donne
ainsi naissauce à un marais en miniature, plein de joncs et
d'Eriophorum. Cette convexité est produite par la pente relative-

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14 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

ment raicle de la rive et du sous-sol, puis par la rapidité avec
laquelle la tourbe augmente en épaisseur. La rive gauche est donc
distincte en ce point et montre encore dans les fossés l'argile à
blocaux sous le sable.

Tout près de Donkerbroek débouche la prolongation maréca-
geuse du rejeton de la haute tourbière de Haulerwijk, dans la
vallée du Tjonger. Le dos intermédiaire s'élargit par conséquent ;
il constitue généralement une bruyère à pente bien visible, se di-
rigeant vers la petite rivière, et montre à tout moment l'argile à
blocaux, surtout dans le sol du nouveau canal. La route, dite
„Binnenweg", d'Oudehorne par Jubbega à Hornsterzwaag, suit à
peu près la crête du dos entre la vallée de la haute tourbière et
celle du Tjonger; tantôt elle se trouve sur la rive de l'une, tantôt
sur celle de l'autre. Entre les hameaux de Jubbega et de Schurega,
la chaussée passe sur la haute tourbière, qui a donc ici plus
d'étendue que sur la carte géologique. Celle-ci, il est vrai, indi-
que en cet endroit une petite tourbière isolée, qui, en réalité, est
plus étendue et en connexion avec la tourbière principale, jus-
qu'au delà de la route, dite „Bruggelaan", de Gorredijk à Oude-
berkoop. A. la hauteur de l'écluse de Jubbega, dans le canal dii
Tjonger, elle est aussi en continuité avec la tourbière de marais
de la vallée et repose sur une pente assez distincte.

Pour nous elle a aussi un intérêt tout particulier, puisque c'est ici
que nous avons observé pour la première fois des sables mobiles bien
reconnaissables, entièrement entourés de la haute tourbière, sans con-
tinuité par conséquent avec ceux de la bruyère sableuse voisine,
ce qui nous prouve qu'il s'y est formé de la haute tourbe après
le déplacement du sable par le vent. Il n'y a aucune raison pour
admettre en ceci une limite de temps dans le passé: nous en
avons donc conclu qu'il s'est formé des sables mobiles sur les
terrains des hautes tourbières, antérieurement à celles-ci, hypo-
thèse qui sera fort utile par la suite. Elle forme un pendant inté-
ressant à la relation qui existe entre les dunes et les basses tour-
bières (Contributions V), oii nous avons trouvé exactement la
même chose. Il existe des dunes (intérieures), qui sont plus an-
ciennes que les basses tourbières continues et qui se trouvent
immédiatement à côté des dunes (maritianes) plus récentes. Souvent
on en peut reconnaître la plus grande ancienneté aux formes
moins raides; souvent aussi l'aspect est tout à fait le même, puis-,
qu'elles sont restées ou revenues en mouvement, et elles peuvent

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CONTRIBUTIONS A LA OEOLOGIE DES PAYS-BAS. 15

alors très bien servir à obsei'ver les passages graduels du caractère
juvénile dans celui sénile.

D'autres sables mobiles séparent parfois les deux hautes tour-
bières l'une de l'autre, ainsi que la latérale des marais du Tjonger,
sur le „Bruggelaan," p. e. On observe aussi facilement la pente
de la vallée de la haute tourbière, vers Gorredijk, dont la crête
se trouve un peu au sud du Binnenweg. Ici la tourbe repose gé-
néralement sur l'argile à blocaux, qui est couverte-plus près de
Gorredijk du L)iluviuni sableux. Dans ce village même nous l'avons
observée à une profendeur de 1—2 M., lors de la construction
d'une nouvelle écluse; elle y était bleu-grisâtre et contenait peu
de cailloux. Près du hameau d'Oudehorne la tourbière est encore
intacte sur plusieurs points, tant comme bruyère originale que
comme prairie ou terrain cultivé ; ailleurs on y creuse de la tourbe,
plus près de G. elle a entièrement disparu. Le sous-sol en est du
Diluvium sableux, épais d'environ 2 M. tout près du Oompagnons-
brug (chaussée Gorredijk-Oudeberkoop et Schoterlands-Compag-
nonsvaart), où il repose sur l'argile à blocaux avec plusieurs cail-
loux de granit.

En s'approchant de Gorredijk, on voit le terrain baisser lente-
ment vers le N.0. ou vers l'axe de la vallée. Les fossés y sont
barrés à plusieurs endroits et montrent dans leurs versants d'abord
des restes de tourbe haute, ensuite du sable et au-delà du canal
„Dwarsvaart," de la basse tourbe ordinaire. Dans l'axe de notre
vallée la basse tourbe succède également à la haute tourbière,
mais il n'est plus possible de dire si à l'origine elles ont été en
continuité directe ou bien séparées par une zone neutre de,Zand-
diluvium, comme le figure la carte géologique. Cette condition
n'est ni impossible, ni improbable; elle se présente souvent]dans la
réalité, mais de l'autre côté ce Zanddiluvium est aussi la surface
de la haute tourbière complètement enlevée. Or, on ne peut pas
constater facilement si, dans une parcelle quelconque, on a affaire
au Zanddiluvium original, qui est toujours resté nu ou qui l'est
devenu après avoir été couvert de tourbe. En tout cas, les deux
tourbières se trouvent dans la prolongation l'une de l'autre et
constituent une seule dépression inclinée, large et courte en côm-
paraison avec les deux vallées vivantes qui lui sont parallèles.
L'une est celle du „Konings-Diep" et se trouve au nord, l'autre
est celle du „Tjonger" et se trouve au sud; nous ferons encore
plus d'une fois allusion à une pareille disposition du terrain.

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16 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Près du village même de Gorredijk la pente de la vallée vers
le S.O. est encore perceptible; il en est de môme de la pente de la
rive droite vers Lippenhuizen. Çà et là on découvre encore quelques
restes de la haute tourbe dans les fossés, surtout au milieu, mais
généralement la surface ne présente que du sable.

En amont la rive droite est encore un peu plus élevée et montre
distinctement le Diluvium Scandinave; la route dite „Buitenweg",
p. e., n'est que le sol primitif, l'argile à blocaux ou un sable plus
ou moins graveleux. De même que sur le côté opposé, la pente
de la rive septentrionale de la haute tourbière est plus raide en
amont, p. e. à Wijujeterp, qu'en aval. L'apparition et l'augmen-
tation du Diluvium sableux en sens inverse est probablement
d'accord avec ce phénomème ; à mesure que la rapidité et la force
du courant d'eau érodant diminuaient, la déposition du sable devait
naturellement augmenter.

La haute tourbière, que nous venons d'étudier, est donc une des
plus simples; elle doit son origine à une cause unique, l'érosion
d'un chenal large et court dans l'argile à blocaux, produit par les
eaux de fonte du glacier quaternaire.

V. HAUTE T0URBIÎÎ]RE DE SMILDE.

C'est une des plus étendues des Pays-Bas; elle atteint presque
la ville d'Assen à l'est et le village de Donkerbroek à l'ouest; au
sud elle s'étend jusqu' à la hauteur de Beilen. Elle montre distinc-
tement sa composition de 3 ou 4 membres primitivement indé-
pendants, qui se sont confondus plus tard et qui sont encore
reconnaissables dans les rejetons de la masse principale.

Commençons notre exposé par la rive droite ou septentrionale
et à la ville d'Assen, située sur la pente de la petite vallée de
r„Anrijper-Diep", confluent de la „Drenthsche-Aa". Le canal de
Smilde y envoie une branche vers le nord, du nom de „Noi'ger-
Vaart", dirigée vers le „Huis ter Heide" et ici, de même que vers
le hameau de „Ter-Aard", au N. de la ville, on observe sans trop
de peine une inclinaison imprévue du sol vers le nord, très visible
dans l'écluse au commencement du canal de Veenhuizen, qui se
dirige à l'ouest. Cette partie de notre haute tourbière forme aussi
une courbe du Norger-Vaart, par Ter-Aard à Assen, et c'est proba-
blement entre ce hameau et celui 4® „Zeyerveen" que passe la faible

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17 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

la crête du sous-sol cachée sous la tourbe très mince. Nous avons
à nous représenter ici une dépression à pente très faible, qui s'est
remplie peu à peu de tourbe, jusqu'à ce que celle-ci ait débordé
en s'étendant sur le sol humide. L'épaisseur peu considérable en
est démontrée par quelques fossés, qui montrent l'argile à blocaux
à 2—3 d. M. de profondeur.

La lisière de la haute tourbière a aussi enveloppé quelques mar-
mites de géant, qui sont redevenues visibles âpres l'éloignement
de la tourbe plus épaisse qu'elles renfermaient. La bruyère sableuse
en contient également, e. a. tout près de la route de Norg.

La faiblesse de la pente des deux côtés de la crête sus-nommée
est aussi cause de la largeur de la zone de tourbe à gazon, qui
la borde et qui s'incline de même vers le nord.

Passons à la colonie de „Veenhuizen" et à la rive gauche du
„Peizer-Diep". Dans cette colonie, la tourbe a presque disparu,
sauf quelques restes épars; le sous-sol y est presque toujours le
Diluvium Scandinave bien reconnaissable. La pente opposée, ou
centrifuge, dont nous venons de parler, s'y observe le long d'un
petit canal (Zesde-Wijk), qui passe tout près du „3e Gesticht" et
se dirige vers le N.E., pour se terminer entre deux digues non-
loin de la vallée du Peizer-Diep. Ici l'eau est élevée d'environ
Va M. au-dessus du sol voisin, tandisque au S.O., on la voit peu
à peu devenir égale au sol et s'y enfoncer ensuite, de 1—2 d.M.
La pente générale de la tourbière à l'ouest y est ostensible et
accentuée à son tour dans les écluses du canal principal, qui longe
les deux églises. Ainsi, dans cette direction, on trouve à l'écluse 2
une chute d'eau d'environ 2 M. et à l'écluse 3, une de l M.

Passons au hameau de „Boven-Haulerwijk,'' bâti à l'extrémité
supérieure du canal de „ EJaulerwijk," dont l'eau s'écoule à Fouest,
comme le fait déjà présumer le nom de „Beneden-Haulerwijk" sur
le même canal. Au nord du premier commence une zone de Dilu-
vium Scandinave, plus élevée que les deux hautes tourbières qu'elle
sépare. La crête, que nous avons mentionnée près de Norg et de
Veenhuizen, est sortie de dessous sa couverture de tourbe, mais
la différence de niveau y est considérablement exagérée par les
dunes assez elévées. En se plaçant sur une d'elles, on reçoit une
aussi vive impression que sur le rejeton de Langeveen (près de
Hardenberg) du plateau d'Uelsen. De chaque côté on voit la tour-
bière brun-foncé, morne et parfaitement plate, à l'exception de quel-
ques monceaux de toui'be. Au milieu s'étend la longue zone de dunes,

o
o

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18 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

K en partie mobiles encore et blanches, en partie couvertes d'un peu
végétation. En tout cas, il y a beaucoup de variation, tant dans
i le niveau que dans la couleur du sol, variation qui ne laisse pas

^ - de contraster vivement avec la monotonie de la haute tourbière.

" Tantôt ses rejetons s'étendent entre les dunes, tantôt les sables

mobiles envahissent çà et là la tourbière et entourent aussi
f quelques tourbières de panne. La chaîne de dunes, avec des restes

peu importants de la surface diluviale primitive, s'étend jusqu'au
village de Bakkeveen, qui a été bâti sur le Diluvium, montrant
parfois de l'argile à blocaux bien reconnaissable, surtout dans les
fossés des nouvelles cultures de l'ancien château.

L'extrémité orientale du rejeton de Haulerwijk a comme sous-
sol presque exclusivement le Diluvium Scandinave, avec plusieurs
marmites de géant, remplies de tourbe ou d'eau. L'une d'elles est
de très grande taille et porte le nom de „Ganze-Meer." La tourbe
mince touche ici à sa fin et recouvre plusieurs petites dunes nive-
lées, qui viennent parfois à la surface et portent alors de petites
fermes. On peut, sans trop de peine, suivre les vestiges de la couche
de tourbe jusque bien au-delà des limites de la carte et tout près
du canal „Compagnons-Vaart," près de Donkerbroek. La haute
tourbière se rétrécit en rejeton, baisse lentement et se change en
une tourbière de marais allongée, avec des prairies, qui forme une
des vallées latérales de celle du Tjonger vers Hornsterzwaag. Ce
rejeton est assez parallèle à la haute tourbière de Wijnjeterp-Gor-
redijk et s'en approche beaucoup; mais d'après notre examen et les
informations obtenues, il n'y a pas de continuité entre elles.

La limite méridionale de la tourbière de Haulerwijk est parallèle
à la route de Donkerbroek à Haule, qui suit le Diluvium sableux
avec plusieurs sables mobiles; les étangs du „Malle-Meer," du
„Hauler-Poel," etc. ne sont encore ici que des vestiges d'une tour-
bière enlevée. Les traces du Diluvium Scandinave dans le sous-sol
et à la lisière sont distinctes; elles disparaissent au sud sous le
sable fin, en partie mobile, du village de Haule. Celui-ci se trouve
plus bas que la surface graveleuse près de la tourbière ; nous avons
donc ici de nouveau un sol incliné, sableux et sec, entre une haute
tourbière et une vallée vivante, comme nous l'observerons encore
tant de fois,

Le Tjonger prend sa source, tout près et au S.E. de Haule; sa
vallée de tourbe de marais se rétrécit graduellement dans la haute
tourbière. L'une comme l'autre sont employées comme prairies, ce

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CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS.

qui rend le passage plus graduel encore. La différence est pourtant
visible et on arrive facilement à la conclusion, que la dernière
empiète peu à peu la vallée, de haut en bas et des rives à l'axe,
par conséquent du terrain plus sec à celui plus humide. La surface
y est un peu plus basse que le Diluvium, qui la borde et qui monte
faiblement du S. au N. ; par conséquent le sous-sol de la haute
tourbière au N. de Haule est plus élevé que celui du S.

Nous avons maintenant contourné le rejeton de Haulerwijk et
nous sommes arrivé tout près d'un point que nous avons déjà
visité, savoir l'écluse 3 du canal de Veenhuizen à Haulerwijk. La
surface de cette partie de la haute tourbière baisse sensiblement à
l'ouest, vers la vallée du Tjonger; à l'est et au sud elle conserve
à peu près le même niveau.

La zone sableuse de Fochteloo sépare la haute tourbière de la
vallée tourbeuse du „Groote-Diep," confluent du Tjonger. A son
extrémité N.E., cette zone est visiblement plus élevée que la haute
tourbière, mais elle baisse graduellement vers le S.

Tout près de Fochteloo, nous avons visité un bois fossile, enterré
sous la tourbe; il est à une distance d'environ 400 M. à l'est du
point, où la route dite „Mardijk" aboutit à la route de Fochteloo.
Le bois a environ 300 M. de longueur et autant de largeur ; autre-
fois on n'y voyait qu'une bruyère marécageuse, mais la surface
s'en est abaissée par suite du drainage et de la culture du blé
sarrasin, pour laquelle les paysans brûlent la surface de temps à
autre. La conséquence fut que les arbres devinrent visibles et débou-
tent maintenant le sol de 1—4 d.M. ce sont presque tous des chênes
avec quelques trembles. La plupart ont été rompus j^rès du sol, pro-
bablement après leur mort et gisent presque toujours du S.O. au
N.E. ; ils ont un diamètre de 4-6, parfois de 8 d.M. Quelques-uns
sont tombés en leur entier, dans toutes les directions, mais souvent
vers le S. ou le S.O. ; leur diamètre est plus considérable, très sou-
vent il monte à 1, parfois à 2 M. D'après mon guide „Dorp-
rigter" le plus gros a eu une circonférence de 36 pieds, soit un dia-
mètre de 3—4 mètres; aussi selon lui tous les arbres sont enra-
cinés dans le sous-sol D'après mes propres observations cependant
ils le sont à quelque distance au-dessus, dans la tourbe, dont
l'épaisseur ne dépasse pas 1 M. Ce sous-sol est encore l'argile à
blocaux, couverte d'un peu de sable.

M. van Cappelle, de Sneek, a donné dans la Nouvelle Gazette
de Rotterdam du 17 octobre 1890, une description de ce bois,

19

il

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CONTRIBUTIONS A LA OÉOLC

qui rend le passage plus graduel eue
visible et on arrive facilement à 1
empiète peu à peu la vallée, de hau
par conséquent du terrain plus sec à
y est un peu plus basse que le Diluvi
faiblement du S. au N. ; par conséquent le sous-sol de la haute
tourbière au N. de Haule est plus élevé que celui du S.

Nous avons maintenant contourné le rejeton de Haulerwijk et
nous sommes arrivé tout près d'un point que nous avons déjà
visité, savoir l'écluse 3 du canal de Veenhuizen à Haulerwijk. La
surface de cette partie de la haute tourbière baisse sensiblement à
l'ouest, vers la vallée du Tjonger; à l'est et au sud elle conserve
à peu près le même niveau.

La zone sableuse de Fochteloo sépare la haute tourbière de la
vallée tourbeuse du „Groote-Diep," confluent du Tjonger. A son
extrémité N.E., cette zone est visiblement plus élevée que la haute
tourbière, mais elle baisse graduellement vers le S.

Tout près de Fochteloo, nous avons visité un bois fossile, enterré
sous la tourbe; il est à une distance d'environ 400 M. à l'est du
pohit, où la route dite „Mardijk" aboutit à la route de Fochteloo.
Le bois a environ 300 M. de longueur et autant de largeur ; autre-
fois on n'y voyait qu'une bruyère marécageuse, mais la surface
s'en est abaissée par suite du drainage et de la culture du blé
sarrasin, pour laquelle les paysans brûlent la surface de temps à
autre. La conséquence fut que les arbres devinrent visibles et débou-
tent maintenant le sol de 1—4 d.M. ce sont presque tous des chênes
avec quelques trembles. La plupart ont été rompus près du sol, pro-
bablement après leur mort et gisent presque toujours du S.O. au
N.E. ; ils ont un diamètre de 4-6, parfois de 8 d.M. Quelques-uns
sont tombés en leur entier, dans toutes les directions, mais souvent
vers le S. ou le S.O. ; leur diamètre est plus considérable, très sou-
vent il monte à 1, parfois à 2 M. D'après mon guide „Dorp-
rigter" le plus gros a eu une circonférence de 36 pieds, soit un dia-
mètre de 3—4 mètres; aussi selon lui tous les arbres sont enra-
cinés dans le sous-sol D'après mes propres observations cependant
ils le sont à quelque distance au-dessus, dans la tourbe, dont
l'épaisseur ne dépasse pas 1 M. Ce sous-sol est encore l'argile à
blocaux, couverte d'un peu de sable.

M. van Cappelle, de Sneek, a donné dans la Nouvelle Gazette
de Rotterdam du 17 octobre 1890, une description de ce bois,

3^'

'^Tx./^^d' -- TT c- ■

Men schrijft ons uit Oostenvolde: ' '

De gevouden steenmassa in liet Weperyeld blgkt,
nu men bij wijze van "werkverscliatfing met de
delverij is aangevangen, nog belangrijker te zyn
dan men aanvankelijk dacht. Uit eene kleine op-
pervlakte is reeds 350 H. L. grindsteen losgemaakt.
Tot op eene diepte van 3 Meter heeft men den steen
opgegraven. De steen is met leem vermengd. Op
enkele plaatsen treft men een zuiver steenlooze witte
zandlaag er tusschen. Het opdelven gaat moeilijk en
moet met een breeklep geschieden.

Toór beoefenaars der geologie zou een onderzoek in
dit veld wellicht zijn nut kunnen hebben.

--------- -- -X

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20 CONTRIBUTIONS A LA «ÉOLOGIE DES PAYS-BAS.

qui a été la cause de notre visite, l'année suivante. Ses observations
different en quelques points des nôtres. Selon lui, les arbres
sont tous des chênes, dont la plupart sont couchés dans la direc-
tion du N.E. La tourbière est mise en culture depuis trente ans,
la foret est connue depuis dix ans. Le sous-sol n'est pas l'argile
à blocaux, mais un gravier sableux, reposant sur une argile stra-
tifiée (d'ordinaire l'argile à blocaux véritable est plus ou moins
décomposée vers le haut et est devenue plus sableuse). Le bois
s'est développé dans un lieu bas, bordé, tant à l'ouest qu'à l'est,
par des hauteurs sableuses.

Du reste, le bois fossile de Focliteloo n'est pas une découverte
des dernières années. Staring (1. c. pag. 188) en parle déjà avant
1856 dans ces termes: „Un bois de chênes colossaux est venu à la
lumière, il y a deux ou trois ans, dans la tourbière de Fochtelou,
vis à vis d'Oosterwolde. La couche de tourbe peu épaisse s'est
amincie par suite d'incendies, nécessites par la culture du blé
sarrasin. Ils y gisent par centaines à côté des lourds tronçons.
Plus au sud du bois de hêtre en grande quantité est venu à
la lumière."

Un peu plus loin (pag. 197) il fait observer (pie c'est une erreur
de croire que les troncs soient toujours couches dans la menie
direction, et mentionne spécialement la tourbière de Focliteloo, où
ils sont couchés dans toutes les directions. Celle du N.E. n'est
même pas la prépondérante et ]>lusieurs auteurs donnent des
directions assez divergentes.

Revenons à nos propres observations ! La surface de la tourbière
baisse visiblement à l'ouest et entoure çà et là un ancien sable
mobile.

Comme nous l'avons observé aussi ailleurs, la limite de la tour-
bière n'est pas une ligne simple, mais des langues de tourbe se
prolongent parfois jusqu'à la tourbe de marais de la vallée du
Groote-Diep. Le long de la route de Focliteloo des parties plus
élevées de sable alternent donc avec des parties plus basses de
tourbe. Le sous-sol y est partout du Diluvium Scandinave, caché
sous une mince couche de sable et contenant nombre d'erratiques.
Sur bien de points, il est impossible de remarquer une différence
de niveau entre les champs sableux à côté de la route et la haute

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CONTlilBUTIOWS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. 21

tourbière à l'est; pourtant plus au sud, près du canal, le terrain
monte plus visiblement, de sorte qu'il semble que la route de Foch-
teloo à traversé une dépression peu profonde.

Le long du ,,Compagnons-Vaart", à partir de la vallée du Groote-
Diep, le terrain monte sensiblement de l'O. à l'E.; on en voit la
preuve dans les écluses. Cette pente visible d'un côté et celle de
la vallée du Tjonger de l'autre rend probable l'existence à Foch-
teloo d'un chenal extrêmement large en proportion de sa profondeur,
rempli dans sa j^artie supérieure d'une haute tourbière et drainé
à sa partie inférieure par la vallée transversale dti Groote-Diep.

Le long du canal précite la bruyère sableuse du sud est sensi-
blement plus élevée que la surface de la tourbière; il y a donc
ici de nouveau un bout de rive gauche plus élevée.

Sur la frontière des provinces de Frise et de Drenthe, la hausse
du terrain est démontrée à la rencontre du Compagnonsvaart et
d
'un canal latéral „Witte-Wijk" du Canal de Smilde, dont le iii-
veau est plus élevé de 1,5 M. (11,70—10,25 M ). Pendant de longues
années des querelles inter-provinciales ont empêché d'y établir
Line écluse, que le bon-sens exigeait, jusqu'à ce que celui-ci
ait tini par triompher. En suivant ce beau canal vers le S. E.,
on voit que le sous-sol est partout l'argile à blocaux plus ou moins
sableuse gris-clair.

Ija carte géologique fait voir dans cette contrée deux protubéran-
ces de notre haute tourbière. La première est dirigée au S. ().,
dans la direction du hameau de Doldersum, non-loin de Frederiks-
oord. Ce que nous avons pu y observer de tourbe n'était que peu
de chose, quelques décimètres tout au plus; probablement il y en
a eu davantage autrefois. Des deux côtés, au S. 15. et au N. (3.,
les rives sableuses sont un peu plus élevées, de sorte qu' on est
ici réellement en présence d'un chenal de profondeur minimale.
La petite tourbière, entamée en grande partie, se prolonge aussi plus
loin que sur la carte géologique. lîlle est en continuité avec la
petite tourbière entamée et isolée (selon la carte) et on peut suivre
la tourbe jusqu' au-delà du point, où la frontière provinciale feit
un angle droit, du S. 0. au N. 0. Elle est traversée dans sa lon-
gueur par cette frontière, appelée „Friesche-Scheid", formée par
un fossé rectiligne, de 3 M. de largeur, dirige au S. 0. et prolongé
jusqu' à un ruisseau latéral du „Vledder-Diep", qu'il faut consi-
dérer comme le prolongement de notre rejeton tourbeux. Les bords
de ce ruisseau se composent souvent de tourbe, qui est pourtant

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22 CONTRIBUTIONS A LA «ÉOLOGIE DES PAYS-BAS.

iiiteiTODcipue à plusieurs reprises par d'anciens sables mobiles et
touche à sa fin.

Nous n'avons donc eu affaire ici qu'à un rejeton assez accidentel
de la haute tourbière, qui se continue dans une autre direction.

L'autre protubérance de la haute tourbière de Smilde se trouve
dans le voisinage, au S. E. et se dirige au S. S. 0. Elle est traversée
dans sa longueur par le canal de Smilde (Drenthsche-Hoofdvaart),
qui suit plus loin la vallée de r„Oude-Smildervaart" et ensuite
celle du „Beiler-Stroom". Le rejeton tourbeux, que nous avons ici
en vue, n'est eircore que la partie supérieure d'une vallée latérale
du dernier ruisseau.

Le canal de Smilde, dont nous avons parlé à plusieurs reprises,
aboutit à la ville d'Assen. A partir d'ici, il est creusé dans la
haute tourbe, qui repose presque exclusivement sur l'argile à
blocaux jaune-clair, parfois sur du sable fin. Sur tout ce trajet,
d'Assen à la première écluse (Veenesluis), long de 20 K.M., il a
un seul niveau ; la direction (N E. — S. 0.) est donc perpendicu-
laire à la pente du sol (N. 0.). Or, au „Veenesluis", il y a une
chute de 1,75 M. et 2 K.M. plus loin seulement (Haarsluis) il y
en a une seconde égale, preuves d'une autre pente du plateau de
Drenthe (vers le S. 0,), indiquée déjà par notre rejeton. Quant
aux terrains, qui le bordent au N. 0. et au S. E., une hausse du
sol dans la dernière direction est très visible vis-à-vis de la barrière
au N. E. du Veenesluis ; pourtant les sables mobiles sont encore
en jeu. Il en est de même de l'autre côté du canal, mais en sens
contraire, p.e. entre l'écluse et Diever, où la vallée avec des prairies,
branche de celle du Beiler-Stroom, saute aux yeux. Il en est
encore de même plus en amont, derrière l'école de Hooger-Smilde,
vis-à-vis du canal de Beilen. Nous pouvons donc considérer comme
démontrée la présence d'un chenal peu profond, rempli de tourbe
(enlevée de nouveau pour la plus grande partie).

Les deux rejetons du sud-ouest de la grande tourbière jouent
un rôle analogue. Ce sont tous les deux des chenaux peu profonds
et peu importants, qui se pî'olongent dans deux vallées de ruis-
seaux également insignifiants et confluents, l'un du Vledder-Diep
ou Steenwijker-Aa, l'autre du Beiler-Stroom ou Oudo-Hoofdvaart.
Ni l'un ni l'autre ne doivent être considérés comme le prolongement
de la masse principale de la haute tourbière de Smilde; tous les
deux sont des appendices assez accidentels.

A l'est de cette partie de la haute tourbière les sables mobiles

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23 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

prennent un certain développement et, comme d'ordinaire, les
deux terrains empiètent l'un sur l'autre sans régularité. Le sous-
sol est le Diluvium Scandinave, qui vient à la surface plus au
nord-est et constitue une zone de séparation plus élevée que la
haute tourbière et qu'une vallée latérale du Beiler-Stroom. Celle-ci
est basse et humide et en disproportion ostensible avec le mince
filet d'eau qu'elle renferme.

Entre les deux canaux (Beiler-Vaart et Oranje-Kanaal) la position
plus élevée du Diluvium n'est pas très frappante ; la pente générale
de la tourbière à l'ouest, vers le Canal de Smilde, est au con-
traire bien prononcée. Les marmites de géant n'y font pas défaut,
on en observe aussi bien sur la bruyère sableuse que dans le bord
de la haute tourbière même.

L'inclinaison du Diluvium vers la haute tourbière est encore
accentuée dans la première écluse du Canal-Orange, tout près de
celui de Smilde; selon la carte du Waterstaat il y a une chute
d'eau de 1,8 M. A côté de ce canal l'argile à blocaux, gris-
blanchâtre, draguée, se montre partout et contient un grand nombre
des petits erratiques ordinaires

Vers le nord, un canal latéral à celui de Smilde coule assez
parallèlement au Canal-Orange. C'est le „Suermondts-Wijk" que
longe la route de Hooghalen et dont le niveau est de 1,3 M. plus
haut que celui du Canal de Smilde. La pente de la tourbière y
est à peine visible et ce n'est que vers la fin de ce „Wijk", dont
le sous-sol est presque toujours l'argile à blocaux, que la surface
de la haute tourbière monte un peu plus. Elle passe presque
imperceptiblement dans la bruyère sableuse, dont la pente devient
bientôt plus forte. On y observe aussi plusieurs sables mobiles,
ainsi que des dépressions circulaires, remplies d'eau. Ici encore,
l'aire de la haute tourbière, d'après la carte géologique, devra
être étendu de quelques centaines de mètres à l'est, à l'exception
d'une courbe autour du hameau de „Witten", près d'Assen. La
rive gauche, plus élevée, est donc visible sur la route de Hoog-
halen; mais plus au nord elle disparaît sous la tourbe, qui in-
cline à l'est, par conséquent -en sens inverse, vers la vallée
tourbeuse de r„Anrijper-Diep", colossale de nouveau en propor-
tion du filet d'eau insignifiant. Les deux terrains sont même
en continuité sur une certaine étendue au sud de „De Haar" ; plus
près de ce hameau ils sont séparés par le Diluvium et les
sables mobiles. De l'autre côté le même phénomène se répète, la

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24 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

tourbière y envoie un rejeton qui descend au N. E., vers la même
vallée, sans l'atteindre toutefois. Nous avons donc ici une autre
analogie avec les glaciers, qui, en croissant, envoient parfois des
rejetons dans des vallées, où ils n'ont rien à faire, et cela par-
dessus la crête de séparation des bassins hydrographiques.

A Witten le Diluvium Scandinave est bien développé, mais la
position élevée des terres est due principalement aux sables mobi-
les, autour desquels la limite réelle de la haute tourbière fait une
courbe et rejoint celle de la carte au nord du hameau. Dans cette
courbe les relations normales se rétablissent et avec elles la pente
de la tourbière au S. 0., ce qui met de nouveau à découvert la
crête de separation.

Nous sommes revenu à la ville d'Assen, point de départ de notre
tournée. Abstraction faite de la transgression, peu importante, des
crêtes par la tourbière, nous avons vu qu'elle est bordée sur toute
sa limite septentrionale, d'Assen à Veenhuizen, Bakkeveen et
Dunrswoude, par une rive plus élevée de Diluvium Scandinave,
couronée parfois de sables mobiles. Il en est de même sur la rive
orientale, plus ou moins parallèle au Canal de Smilde, et sur les
parties méridionale et moyenne de la limite occidentale, à Nieuw-
Appelscha et Weper. La tourbière baisse en général à l'ouest, sui-
vant la pente générale du plateau de Drenthe. Cette pente est le
plus ostensible: 1". à Donkerbroek, où un rejeton prend la forme
d'un chenal distinct et débouche, entre liornsterswaag et Makkinga,
latéralement dans la vallée du Tjonger; 2". au commencement du
Tjonger même. Comme d'ordinaire cette rivière a érodé une vallée
assez profonde et draine facilement ses deux rives. Or, ce drainage
est cause que sa rive droite ou septentrionale (Haule) n'a pas été
envahie par la haute tourbière, quoique la pente du sous-sol de
celle-ci se continue régulièrement vers la rivière. Quant à la rive
gauche, à Weper, elle est plus élevée que la haute tourbière et
offre un obstacle plus naturel encore à son extension. i

TjCS environs de Fochteloo paraissent être situés dans un chenal
très large et peu profond, qui s'est partagé en deux autour des
hautes terres d'Oosterwolde, pour former les deux vallées du
„Kleine-Diep" et du „Groote-Diep", qui débouchent également dans
le Tjonger. C'est la vallée du Groote-Diep, qui a drainé, tant bien
que mal, sa rive droite, portant le village de Fochteloo et a ainsi
élevé un obstacle à l'extension de la haute tourbière, analogue à
celui de Haule. Le chenal de Fochteloo—Groote-Diep est la pro-

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25 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

longation de la haute tourbière à gauche, celui de Haulerwijk—
Hornsterzwaag à droite, celui du Tjonger au milieu ; la vallée de
cette rivière est par conséquent la continuation directe de la haute
tourbière et son principal chenal de drainage naturel, sinon l'unique.

Certes, sous un point de vue, la haute tourbière de Smilde ne
nous a pas occasionné de difficultés; partout nous avons vu clai-
rement pourquoi elle ne s'est pas étendue plus loin. Si elle avait
été abandonnée à l'état sauvage, elle aurait certainement empiété sur
les vallées du Tjonger, du Groote-Diep et de l'Anrijper-Diep, qui
sont des vallées bien prononcées et non des terrains sableux presque
horizontaux, paraissant prédisposés il porter des hautes tourbières
importantes. Nous en signalerons, e. a. à Nieuw-Iieusen et près
d'Almeloo.

VI. HAUTE TOURBIÈRE DE MAKKINGA.

Le village de Makkinga est bâti sur un terrain peu élevé de
Diluvium Scandinave (argile à blocaux), à côté de la vallée tour-
beuse du Tjonger. Le même sol s'y étend le long de la vallée,
tant au nord-est qu'au sud-ouest, et est facile à observer; il est
caché parfois sous quelques décimètres de sable, parfois sous du
sable mouvant.

A 3 K.M. au sud du village est situé le hameau de Tronde,
dont les alentours diffèrent sur la carte géologique de ce qu'ils
sont en réalité. Elle fait voir du Diluvium sableux et une tour-
bière de marais, réunissant les vallées de la Linde et du Tjonger ;
le Diluvium Scandinave n'y est représenté que plus à l'est; la
haute tourbière et le sable mouvant font entièrement défaut,
quoique ces deux terrains y soient faciles à observer.

Commençons par la doi-disante tourbière de marais entre les
deux vallées. C'est un terrain trempé, employé à la culture du
foin. Il baisse presque imperceptiblement au nord, débouche dans
la vallée marécageuse du Tjonger et est limité au sud pas les
terres sableuses du hameau de Veeneburen. Il est coupé par la
chaussée de Makkinga à Oosterwolde et 2 K.M. plus au sud par
une digue de sable, appelée „Veenebuurster-Dijk". Or, en suivant
ces deux routes, on voit facilement la position plus élevée des
deux rives à l'ouest et à l'est, formées d'argile à blocaux, cachée
sous 1—2 d.M. de sable, qui forme eu plusieurs points de petites

4

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26 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

dunes. Le long de cette digue on voit aussi, que le terrain n'est
qu'une haute tourbière, presque plate, avec une pente impercep-
tible au nord. Au sud, au hameau de Veeneburen, on voit la
haute tourbière se rétrécir, devenir plus sèche et passer par la
tourbe de gazon, pour se changer en bruyère ordinaire.

Non loin du hameau se trouve un étang assez étendu (4—500
M. en diamètre), appelé „Stobbepoel." L'origine n'en est pas équi-
voque; comme on y observe des îlots et çà et là des rives de
tourbe, ce n'est qu'une partie d'une haute tourbière enlevée. Des
restes assez importants se continuent au sud, jusqu'aux tourbières
de marais de la vallée de la Linde, que coupe la chaussée d'Elsloo
à Makkinga. A l'est de l'étang se trouve un terrain étendu d'an-
ciens sables mobiles, mis en culture et portant le nom de „Tron-
derhaar;" à l'ouest est un terrain également élevé, mais composé
de Diluvium Scandinave. C'est le hameau de Tronde, tout près
duquel nous avons observé un troisième terrain tourbeux, assez
compacte, traversé par la route de sable de Tronde (Elsloo) à
Twytel (Gorredijk). Il est orienté du S.O. au N.E., parallèlement
à la vallée de la Linde; mais il est bordé au S.O., ainsi qu'au S.,
par des terrains sableux élevés, sables mobiles en 23artie. Au S.O.
il n'est donc pas en continuité avec la vallée de la Linde, comme
nous l'avions cru d'abord; mais il l'est de l'autre côté, autour de
Tronde et du Stobbepoel.

Entre Veeneburen et cet étang on observe une faible crête de
partage entre le Tjonger et la Linde. Il s'y trouve, ainsi que sur
les deux rives des prairies de Veeneburen, à Langedijk et dans
les prairies du Kleine-Diep, appelées „ Appelscha-Maden," un
mélange assez chaotique de parties basses et tourbeuses, souvent
en continuité entre elles, et de parties plus élevées. Celles-ci sont
les inégalités primitives du paysage morainique ou bien des sables
mobiles. Il est donc assez probable que nos trois hautes tourbières
sont en continuité entre elles et avec les tourbières de marais du
Tjonger, de la Linde et du Kleine-Diep. Ce n'est pourtant qu'une
continuité secondaire et accidentelle, résultant du mélange de nombre
de petites tourbières locales. On pourrait appeler ce terrain en son
entier une „haute tourbière dispersée". Elle se trouve sur un petit
plateau mal drainé, entre les sources de plusieurs ruisseaux.

Dans Staring (1. c. pag. 91) nous avons trouvé un passage, oii il
pi'étend que les hautes tourbières de Smilde, Zevenhuizen, Drachten,
Wijnjeterp et Makkinga ont autrefois formé un entier. Il aurait

i ^ j"

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27 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

été limité par la ligne „Diever, Beilen, Assen, Norg, Roden, De
Leek, Marum, Surhuisterveen, Rottevalle, Drachten, Henirik, Nije-
berkoop et Noordwolde".

Or, nous avons vu qu'en maint endroit les limites de la haute
tourbière sont plus étendues que celles de la carte géologique.
Cependant nous sommes convaincu qu'ici Staring s'est laissé en-
traîner par son imagination, surtout quand il écrit „qu'elle n'a jm
„avoir été coupée qu'en un seul endroit, par les terres un peu plus
„élevées de l'ancienne route de poste de Beetsterzwaag par Ureterp
„à Marum". Il relève pourtant que les vallées (Konings-Diep et
Tjonger) l'avaient partagée en plusieurs promontoires dirigés à
"l'ouest. „La plupart ne portent plus de tourbière actuellement,
„mais il est plus que probable" (nous sommes d'avis contraire)
„qu'ils en ont été couverts autrefois".

VIL HAUTE TOURBIÈRE DE FREDERIKSOORD.

Nous avons donné ce nom à la haute tourbière au N". de Steen-
wijk, dont la majeure partie a été enlevée et mise en culture.

On peut commencer l'examen des relations topographiques à la
station de Peperga, sur la chaussée de Steenwijk. De là à la colonie
agricole de Willemsoord, on ne remarque ni tourbe, ni vallée, ni
ruisseau, mais bien une colline de Diluvium Scandinave, qui porte
cette colonie et dont la surface descend par une bruyère vers les
prairies de la vallée de la Linde, qui se continuent dans celles d'un
petit confluent, le „Schipsloot".'La colline de Willemsoord nous
présente quelques marmites de géant, remplies de tourbe et l'argile
à blocaux, bien reconnaissable, mise au jour dans un petit canal,
le „Kolonie-Weg-Vaartje", qui se continue dans le „Kolonie-Vaart",
canal plus large et mieux navigable, creusé jadis pour le trans-
port de la tourbe. Partout le long de ce canal on observe facile-
ment la pente du terrain vers le N.O. ; cette pente est naturelle-
ment plus ostensible en certains endroits qu'en d'autres.

On peut très bien suivre un des restes de la tourbière au village de
Finkega. On y observe déjà de la tourbe à une faible distance au
N.O. de la chaussée et tout près du village, de sorte qu'il est assez
probable que la tourbe de marais de la vallée de la Linde a été
en continuité directe avec celle du versant du plateau, peut être
dans une dépression transversale. On la voit aussi au S.E. du

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28 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

village, où on la creuse encore actuellement. En avançant dans
la même direction, on voit distinctement le terrain monter; il se
compose encore de tourbe noire, ayant probablement constitué
autrefois le fond de la haute tourbière. Plus loin cette tourbe
fait place à la tourbe brune ordinaire de nos hautes tourbières,
tantôt prairie, tantôt bruyère originale. Elle entoure quelques
terrains sableux un peu élevés, que nous tenons pour d'anciens
sables mouvants, dénudés par le temps. Quant au sous-sol, il vient
à la surface à Noordwolde, etc. ; ce n'est que le Diluvium sableux
ordinaire (comme l'indique aussi la carte géologique), qui disparaît
sous la tourbière, du moins à la base de la pente ; plus haut on
voit dans les fossés des traces de moins en moins équivoques du*
Diluvium Scandinave. D'abord on a de la peine à se convaincre
que le sable y est réellement l'argile à blocaux, très maigre en
eflet et presque privée de cailloux ; mais en s'avançant, on la voit
devenir de plus en plus typique, plus argileuse et parfois riche en
cailloux. Dans le „Kolonie-Vaart" elle est gris-clair et caractéris-
tique, à la surface de la prairie adjacente elle est modifiée et plus
sableuse.

Le long de ce canal on observe aussi plusieurs restes de la
haute tourbière primitive et quelques anciennes dunes, en partie
encore mobiles, e. a. près du pont de la chaussée de Noordwolde
à Frederiksoord. Au delà de ce pont la tourbière est plus intacte
et plus étendue à l'est que sur la carte. D'après nos observations,
la limite fait une courbe entre Vledder et Doldersum, s'approche
de la maison de campagne de „Boschlust", suit, avec quelques
ondulations, la route extérieure (N.O.) de la Colonie 7 et forme
une anse jusqu'à^ 2—3 K.M. de la colonie de „Zorgvlied," pour
s'approcher de plus en plus de la chaussée et l'atteindre à 1—2
K.M. à l'ouest du village de Beuil. Au S.E. de ce village la
tourbière est sensiblement rétrécie par quelques sables mobiles,
portant la ferme de la „Snelshutte", non-loin de la Colonie 7.

En somme, la haute tourbière de Frederiksoord est située sur
un des rejetons de Diluvium Scandinave, qui s'étendent depuis
le plateau de Drenthe et sont séparés par de petites rivières et
des ruisseaux, coulant dans des vallées relativement larges. Or, le
rejeton qui nous intéresse ici se trouve entre les vallées de la
Linde et du Steenwijker-Aa; sa crête passe un peu au N. de
Frederiksoord, qui se trouve déjà sur la pente se dirigeant vers
le dernier ruisseau. Vledder et Doldersum, au contraire, sont bâtis

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29 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

à peu près sur la crête même. La pente dirigée vers la haute
tourbière porte quantité de marmites de géant, remplies de tourbe
OU d'eau, rarement vides. Au N., ainsi qu'au S.O. de Doldersum,
les sables mouvants prennent un grand développe]nent et consti-
tuent la limite naturelle de la tourbière, dont le passage à la
bruyère est tantôt graduel, tantôt plus abrupt, suivant la pente
du terrain. Dans le premier cas, il y a une zone plus ou moins
large de tourbe de gazon ; dans l'autre, on voit dans les fossés la
tourbe atteindre une épaisseur d'un mètre et davantage tout près
de la bruyère sableuse.

Les causes de la naissance de la haute tourbière en cette localité
sont simples.

Nous avons affaire à une pente très faible, formée en haut de
l'argile à blocaux, en bas du Diluvium sableux. Or, le niveau de
l'eau souterraine était très élevé sur cette pente (comme d'ordinaire),
ce qui a rendu le sol humide et propre à porter une haute tour-
bière. A la base, le sol était suffisamment drainé par les vallées
du Schipsloot et de la Linde; au sommet, il était plus sec par
suite de l'infiltration de l'eau de pluie. Les nombreuses marmites
de géant ont donné naissance à un grand nombre de centres; les
sables mobiles plus anciens ont constitué des limites naturelles,
quoique accidentelles en plusieurs endroits. Peut-être la partie
nord-est, près de Beuil, doit être considérée comme produite dans
un chenal d'érosion.

VIII. HAUTE TOURBIÉÎRE DE KOEKANGE.

Nous voulons terminer l'examen des hautes tourbières du versant
occidental du plateau de Drenthe par la plus méridionale et une
des plus petites. Elle est située près du village de Koekange, sur
le chemin de fer de Meppel à Assen, le point de départ le plus
commode pour en faire l'examen.

En son entier elle a une direction du N.E. au S.O., parallèle
à la vallée du „Wold-Aa", qui se trouve sensiblement plus basse,
surtout à la hauteur du village de Ruinen, près du sommet de
la haute tourbière. Elle a ici une grande analogie avec le sommet
de la haute tourbière de Hoogeveen, en ce qu'on peut y observer
des chenaux parallèles, remplis de tourbe, qui se confondent vers
le bas. Ils sont séparés par des rejetons du Diluvium Scandinave,

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30 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

facilement reconnaissable, qui se continue dans le sous-sol de la
tourbière et montre à plusieurs reprises l'argile à blocaux. Ces
rejetons sont assez larges pour porter une ou deux fermes et
montrent, ainsi que la bruyère continue, quelques marmites de
géant, remplies de tourbe. Le chemin de fer suit un de ces rejetons,
auquel la tourbe succède de nouveau au S. Or, ce terrain d'alter-
nance est ostensiblement plus élevé que la vallée de r„Oude-Diep"
et la tourbière est dans un même rapport avec les deux vallées
qui l'accompagnent.

Comme d'ordinaire, la surface descend graduellement du N.E
au S.O ; mais on ne peut suivre la tourbe que jusqu'à la route
du hameau de „Weerwille'', où elle est encore présente en grande
partie. Au-delà de cette route, au contraire, nous n'en avons
observé que des traces et elle paraît y avoir été enlevée complè-
tement, comme dans les autres tourbières de la Frise. Le sous-sol
est partout du sable, probablement en couche assez mince. Il n'y
a donc pas moyen de distinguer sur le sol, si la haute tourbière s'est
arrêtée entre les routes de Weerwille et de Koekange, comme le
figure la carte, ou bien si elle s'est continuée jusqu'à la vallée
marécageuse du „Koekanger-Aa", ce que nous ne croyons nullement
improbable. Nous en avons du moins trouvé quelques traces tout
près de la gare de Koekange.

La pente de la tourbière n'est plus visible près de ce village
et la vallée oblitérée du milieu est arrivée au même niveau que
les vallées encore vivantes des deux côtés. C'est cette association,
qui donne à notre tourbière une autre analogie avec celle de
Hoogeveen, qui est également flanquée à des distances variables
de deux vallées vivantes, celle de l'Oude-Diep à droite et celle du
„Loo-Diep" ou „Geeser-Stroom" à gauche.

Les relations topographiques sont peu equivoques. Nous avons
affaire à un chenal, à une vallée large et courte, creusée par l'eau
de fonte de la glace quaternaire et qui n'a eu qu'une existence
éphémère. Non drainée par un ruisseau, elle est devenue maréca-
geuse et il s'y est facilement formé une haute tourbière.

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31 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Seconde Partie.

Les Tourbières des deux Côtés du Vecht.

IX. HAUTE TOURBIÈRE DE HOOGEVEEN-COEVORDEN.

Une très grande partie de cette vaste tourbière est déjà en exploi-
tation et le combustible en a été transporté, tant par les canaux
de Hoogeveen que par ceux du Dedemsvaart. Ses contoui's sont
suflisamment représentés sur la carte géologique, qui nous montre
d'un coup d'oeil, que la tourbière se compose d'une masse centrale
et de plusieurs promontoires. Commençons par celui, qui se dirige
au N.E. dans le voisinage de Westerbork en Drenthe. En suivant
la chaussée depuis ce village à Zweeloo, on voit le terrain monter
assez rapidement et on se trouve bientôt au milieu de trois vallées
de ruisseaux, le „Beiler-Stroom" à l'ouest et au nord, le „Drosten-
Diep" à l'est et r„Oude-Diep" au sud-ouest; la haute tourbière
se trouve au sud. Près des bornes kilométriques 24 et 25 de
cette chaussée on observe plusieurs de ces petites dépressions plus
ou moins circulaires, ou marmites de géant, remplies d'eau ou de
tourbe.

La haute tourbière commence bien plus près de chaussée que
ne le figure la carte géologique ; on y voit d'abord un archipel de
petites bosses de bruyère, entourées d'une boue tourbeuse, le tout
plus bas que la bruyère sableuse, voisine. Ensuite la tourbière,n'est
pas immédiatement continue, mais elle est partagée en quelques
racines, séparées par de petits dos sableux, qui se partagent au
sud en îlots et finissent par disparaître sous la tourbe. Il y a par
conséquent un petit nombre de chenaux qui se réunissent au S.S.O.
en un seul plus large, contrastant avec la bruyère sableuse de l'est
et de l'ouest, e. a. sur la ligne Mantinge—Meppen.

On observe assez souvent une sorte de passage graduel de la
bruyère tourbeuse à la bruyère sableuse; la tourbe s'amincit et
passe par une tourbe de gazon
{plaggenturf, plaggenveen) à la terre
végétale ordinaire.

Le sous-sol de cette tourbière (Witteveen, Groote-Veld) nous est
montré d'abord par un îlot de sable, portant quelques erratiques
scandinaves de 2—3 d.M., situé à quelque distance -au nord de la
route de Mantinge à Gees. Il est naturellement un peu plus élevé
que la tourbe environnante, mais plus bas que la tourbe des bords.

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32 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Cela nous prouve que la concavité de la surface de cette tourbière,
que l'on observe aussi plus au nord, est originelle et non pas uni-
quement la conséquence du drainage par le canal dit „Middelraai."
On pourrait considérer le Witteveen comme une haute tourbière
non adulte, qui ne s'est pas encore émancipée du relief concave
du sous-sol et qui serait probablement devenue convexe avec le
temps, ainsi que les autres tourbières.

Le sous-sol, qu'on aperçoit également le long du Middelraai, est
l'argile à blocaux ordinaire, sableuse et blanchâtre, ne paraissant
contenir que peu d'erratiques.

Nous voulons maintenant suivre le bord occidental de la racine
(Witteveen) et de la masse principale.

Nous sommes bientôt frappés du développement des sables mo-
biles, autour du hameau de Mantinge et plus au sud. Comme cela
arrive très souvent dans nos hautes tourbières — et pour de bonnes
raisons —, la route du Middelraai (Mantinge—Hoogeveen) suit ces
sables mobiles et ne passe que de temps à autre sur un petit
terrain de tourbe.

Ils sont encore mobiles en partie, aussi bien sur les bords de la
tourbière (à Mantinge) qu'au milieu (près du canal), où on les
voit reposer parfois sur la tourbe elle-même. Il s'en présente aussi
d'autres plus anciens; le canal sus-nommé en traverse une petite
colline, au nord de Nieuwer-Oord, au point où il se réunit à la
„Verlengde-Hoogeveensche-Vaart."

Le vilage de Hoogeveen est situé sur le ruisseau de TOude-Diep,
qui coule du N E. au S.O. dans une vallée sensiblement plus basse
que la haute tourbière, qui a par conséquent la même pente. Les
prairies de la vallée touchent à d'autres sur les restes de la haute
tourbière, qui ont été probablement conservés, le sous-sol étant situé
trop bas pour un drainage facile. A quelque distance au N.E. de
Hoogeveen la tourbe a cependant tout à fait disparu et le ^ous-
sol est à nu. D'abord c'est du Diluvium sableux, mais bientôt on
voit apparaître plusieurs cailloux et de temps à autre un erratique
peu volumineux de granit ou de diorite. Plus loin encore, dans
la même direction (N E.) vers les hameaux de „Stadtery" et de
„Stuifzand". (sable mouvant), le sol mônte à vue d'oeil et le sable
fait place à la tourbière originale, à mesure qu'on s'éloigne du
centre de population. Le sous-sol est devenu visible dans les canaux ;
c'est toujours l'argile à blocaux, recouverte d'une mince couche
de sable.

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33 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

La tourbière est séparée de la vallée de l'Oude-Diep par une
bruyère sableuse ordinaire, qui se trouve au même niveau que le
sous-sol de la tourbière adjacente ; nous n'avons du moins pu observer
aucune différence.

Tout près de Hoogeveen, le sous-sol baisse à l'ouest (comme
nous venons de le dire) ; mais nous avons affaire ici à une vallée
de ruisseau bien prononcée; au sud de Hoogeveen, au contraire,
on observe une rive, qui devient de plus en plus prononcée à
mesure qu'on s'avance vers le sud. C'est la vaste colline de Zuid-
wolde, composée entièrement de Diluvium Scandinave et portant
des sables mobiles sur sa pente. La partie la plus élevée n'en porte
point, quoiqu'elle soit naturellement plus sèche et cela pour une
cause bien simple: l'eau de pluie à lavé le sable fin de haut en
bas et n'a laissé en arrière que du sable graveleux, qui résiste
facilement au vent. Il en est de môme de toutes les collines de
notre Diluvium, p,e. la Veluwe, oii les parties les plus élevées ne
portent point de sables mobiles.

Au sud de Hoogeveen, le long du „Zuidwolder-Sloot", le sous-sol
de la tourbière est encore l'argile à blocaux. Plus loin la limite
de la tourbière est de 1—1,5 K.M. plus étendue que sur la carte
géologique et tombe dans la prolongation de celle au S. de Hoo-
geveen. Elle passe ainsi tout près de l'école au S.E. de Linde (au
S. de Zuidwolde), située sur le Diluvium de la colline, et se courbe
ensuite au S.O. vers le hameau de Nolde et la vallée du Reest.

0]i peut ûûvQ encore quelques observations isolées dans cette
contrée. D'abord on voit plusieurs petites tourbières locales dans
.des marmites de géant. Dans la vallée du Reest on rencontre un
assemblage assez bizarre de petits îlots peu élevés de Diluvium
sableux, épargnés par l'érosion, de terrains de tourbe de marais de
la vallée et de lambeaux de tourbe haute, qui a empiété sur la
vallée. Ces derniers sont généralement couverts de bruyère et le
sol y a une couleur brune; ils ont été plus étendus autrefois, car
on y creuse encore actuellement de la tourbe, mais il est fort
difficile de distinguer les parcelles de tourbe de marais de celles
de haute tourbe entamée, toutes les deux ayant été converties en
prairie. De temps à autre (p. e. entre les bornes kilométriques 6
et 6Va de la chaussée de Zuidwolde à Dedemsvaart) on retrouve
les troncs d'arbre habituels.

Nous avons par conséquent constaté que le bord occidental de
la haute tourbière est limité par un terrain plus élevé au nord et

5

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34 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

au sud, par un terrain plus bas (vallée de l'Oude-Diep, près de
Hoogeveen) et par un terrain de niveau égal, à l'est de cette vallée
et au N.E. de Hoogeveen. Nous observerons des différences tout à
fait semblables sur le bord oriental, que nous avons quitté sur la
route de Mantinge à Gees, où nous allons reprendre nos observations.

Le sol sableux y est visiblement plus élevé et porte quelques
dépressions circulaires de tourbe, ainsi qu'à l'ouest du pont sur le
„Geeser-Stroom." Ici la limite de la haute tourbière est encore
assez éloignée de la vallée de ce ruisseau et ne l'atteint probable-
ment qu'au point, où il s'infléchit de l'O.S.O. au S. La haute tour-
bière possède donc d'abord une rive plus élevée, à laquelle succède
plus au sud une vallée plus basse, comme de l'autre côté.

La chaussée de Hoogeveen à Coevorden passe le long du „Canal
de Drenthe," presque entièrement sur la haute tourbière jusqu'au
hameau de Zwinderen. Le „Geeser-Veld," au nord du canal, est
donc une haute tourbière encore sauvage ou seulement cultivée de
blé sarrasin, dont le sous-sol n'est encore que l'argile à blocaux
gris-blanchâtre ordinaire, avec une quantité assez considérable de
cailloux de quartz blanc. Le Diluvium vient à la surface à la
troisième barrière et y constitue un îlot dans la tourbière, à l'ouest
du hameau de Zwindei'en, qui est lui-même situé sur un autre
îlot, isolé par la vallée du Loo-Diep ou Geeser-Stroom, de la bruyère
sableuse continue de Gees. Or, cette colline, nommée „Kleine-Esch",
est un bout de rive plus élevée de la haute tourbière (Zwindersche
Veld), qui touche plus au sud à la vallée tourbeuse du Loo-Diep.
Le Diluvium sableux de la carte géologique devra être converti
par conséquent en haute tourbière, A l'O.S.O. de Dalen et à
l'O.N.O. de Coevorden la réalité est aussi fort différente du figuré
de la carte, où les localités de „Vossebelt" et de „Steenwijks-
moer" sont situées sur la „haute tourbière entamée" et sur le
„Diluvium sableux". On s'attendrait donc à y trouver un terrain
bas et marécageux, du sable horizontal et des prairies. Or, il
en est en partie ainsi, notamment dans la région appelée „Zaad-
venen". Peut-être est-ce de la tourbe de marais (ou de vallée),
peut-être une haute tourbière, dont on a enlevé la partie supé-
rieure. Pourtant en suivant, à partir du pont 4 du canal de
Coevorden à Slagharen (Lutter-Hoofdwijk), d'abord le „Wijk"
de Steenwijksmoer à l'O.N.O., puis une route de sable au N.E.
dans la direction de Dalen, on' quitte bientôt la tourbe pour
le sable et le terrain monte visiblement. On se trouve sur une

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35 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

colline allongée, dont la surface est d'abord plus élevée que
celle de la haute tourbière à l'ouest; plus loin elle est ondulée
et tantôt plus basse, tantôt égale, tantôt de nouveau plus élevée.
Il y a même quelques bras de tourbe, qui croisent la route et
réunissent ainsi celle du versant sud-est à la haute tourbière, de
la même manière que nous l'avons observé à Schoonebeek. Or,
cette colline, qui s'élève aussi ostensiblement au-dessus des environs
plats de Coevorden, n'est pas composée de Diluvium sableux
seulement ; car on y découvre près des maisons plusieurs erratiques
scandinaves, que les habitants ont trouvés dans le sol. Près de la
ferme de „Hooge Ilaar" les erratiques gisent en profusion dans la
bruyère, qui s'élève de 1—1,5 M. au-dessus de la haute tourbière.

D'ailleurs les noms de „Hooge Haar" et de „Ballast" (un hameau)
ne font nullement penser à une tourbière, mais bien à un terrain
sableux élevé.

Examinons maintenant la lisière méridionale de notre haute
tourbière entre Coevorden et Ommen, qui est assez parallèle au
cours du Vecht. Nous voulons ajouter à cet examen quelques
petites observations isolées, quoiqu'elles n'aient pas strictement
rapport au même sujet.

Le long de la limite orientale de la tourbière nous avons surtout
constaté une rive plus élevée, excepté à son point de contact avec
la vallée marécageuse du Loo-Diep (Geeser-Stroom). Nous verrons
qu'il en est bien autrement le long du bord méridional, que le
terrain sableux adjacent est toujours plus bas (à l'exception des
sables mobiles) et qu'il est la prolongation de la pente générale
de la tourbière vers le Vecht.

Dans nos courses à l'est et au sud de Coevorden nous n'avons
pu constater que vers Gramsbergen la présence d'argile fluviatile.
Pour la déposer, l'eau du Vecht a donc dû monter dans la vallée
fort large de son confluent le „Petit-Vecht", phénomène qui arrive
d'ailleurs assez fréquemment. Et là même, où nous avons pu con-
stater ce dépôt, il était loin d'y couvrir toute la zone i-elativement
large de la carte. En réalité cette zone constitue un lit entièrement
sableux, dans lequel le Vecht a érodé son lit actuel, plus étroit
et très sinueux, en épargnant certaines parties de l'ancien, qui ne
sont que les
„esschen" actuelles (petites collines cultivées). C'est
entre ces esschen que l'argile s'est déposée en réalité. On peut
fort bien suivre les différentes phases de ce phénomène ens'éloig-

nant du Vecht vers le N. ou vers le S. C'est tout près de la

5:1:

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36 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

rivière que les esschen sont le plus élevées par rapport aux intervalles
qui les séparent ; mais on voit diminuer sensiblement cette ditFérence
de iiiveau, qui disj^araît entièrement à une distance de 1—2 K.M.,
où l'on se trouve sur la bruyère plane.

Le Dedems-Vaart coupe, tout près de la rivière, une de ces
„esschen" et entre ensuite dans un terrain parfaitement plat, sans
pente visible, qui nous a paru être le lit d'un bras oblitéré du
Vecht, représenté actuellement plus ou moins par le ruisseau „De
Ziele", qui s'élargit plus loin dans les „Collendoorner-Kolken" et
se continue sous le nom de „Molengoot." C'est une eau presque
stagnante, qui est en communication avec le Vecht actuel tout près
de Hardenberg.

A la bifurcation des chaussées de Hardenberg à Ommen et au
Dedems-Vaart on observe facilement la rive de la vallée actuelle
du Vecht, et en allant plus à l'O.N.O. on voit apparaître bientôt
des sables mobiles peu élevés, qui augmentent graduellement en
nombre. Il en est de môme des flaques d'eau, avec lesquelles
ils alternent et qui sont la conséquence naturelle du déplacement
du sable et du drainage superficiel obstrué. D'abord ces flaques
d'eau ont un fond blanc de sable, qui est par conséquent encore
en mouvement dans les temps de sécheresse. On en rencontre
ensuite, qiii ont un fond noir de boue ou d'une mince couche
de tourbe et qui ne se dessèchent donc plus aussi complètement.
En augmentant en nombre, elles tendent et réussissent à se con-
fondre; la couche de tourbe qui s'y est formée croît en épais-
seur; les sables mobiles s'effacent graduellement et ne constituent
que des îlots dans la tourbe continue, qui deviennent de plus
en plus rares ou sont cachés sous la tourbe qui les a envahis.
On est ainsi parti du sable continu pour passer par des îlots de
tourbe, entourés de sable, aux îlots de sable, entourés de tourbe, et
finalement à la tourbe continue sans sable. Une limite nette entre
les deux roches est donc très difficile à tracer; en tout cas^celle
de la carte de Staring est trop étroite et devra être avancée d'en-
viron 1 K.M. au sud. Les colonies de „Rheezerveen" et de „Heem-
serveen" ne se trouvent point sur le Diluvium sableux, mais sur
la lisière de la tourbe, qui a été enlevée en grande partie. Les
terrains cultivés de ces deux colonies sont en partie du sable,
— il est vrai — ; mais en regardant de plus près on voit à plu-
sieurs reprises, qu'un champ de sable est cultivé^ et que dans un
autre, immédiatement à côté, on creuse de la tourbe. Ce n'est

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37 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

donc que du sable que l'homme y a mis expressément pour
améliorer le sol.

En faisant cette promenade on n'aperçoit pas la pente du
terrain, d'abord parcequ'elle est fort faible et ensuite parceque
les sables mobiles empêchent de bien distinguer les petites diffé-
rences de niveau. Pourtant, en regardant de temps à autre la tour
de Heemse, on acquiert la conviction que le terrain monte réel-
lement. Abstraction faite do la vallée proprement dite, facile à
distinguer et humide, le terrain le
plus près du Vecht est donc le
plus aride et l'humidité du sol augmente à vue d'oeil, à mesure
que le terrain monte. Cette contradiction apparente s'explique,
comme en tant d'autres endroits, par le drainage devenant de plus
en plus difficile à cause de l'éloignement croissant de la vallée
relativement profonde. L'eau souterraine y a une pente plus forte
que le sol; leur différence de niveau, nulle dans la vallée même,
plus grande au sommet du versant visible de cette vallée, diminue
de plus en plus vers la tourbière. Ceci explique aussi pourquoi les
dunes sont plus petites près de la haute tourbière et souvent si
petites, que la tourbe a pu les masquer en les envahissant.

Nous avons aussi examiné la lisière méridionale de la tourbière
près de la chaussée d'Ommen à l'Ommerschans. Ommen se trouve
sur les bords du Vecht et a été bâtie sur une de ces collines peu
élevées
(esschen), dont nous venons d'indiquer l'origine. La hauteur
d'Ommen est bordée d'un côté par le Vecht actuel et des autres
par un ancien lit, plus ou moins marécageux et formant des prai-
ries argileuses. C'est probablement à cette situation que la petite
ville doit sa fondation, puisqu'elle était ainsi facile à défendre et
se trouvait en même temps sur le bord d'une rivière navigable.
Il en est précisément de même de la petite ville de Hardenberg,
bâtie sur un îlot, qui est entouré par le Vecht actuel et un ancien lit
très reconnaissable, utilisé par le ruisseau de Radewijk, qui s'y divise.
Le bras droit conserve le même nom; celui de gauche prend le
nom de „Slotgraven" et est actuellement plus ou moins isolé.

A Ommen, de même qu'à Hardenberg, la différence de niveau
entre les îlots épargnés et les chenaux qui les séparent
{esachen et
prairies) diminue à mesure qu'on s'éloigne de la rivière, pour de-
venir nulle près de l'ancienne route de Zwolle. Les prairies près
de la rivière sont encore argileuses ; celles qui en sont plus éloignées
sont sableuses et par conséquent comparables aux prairies dans
les anciens chenaux plus en amont, p.e. au delà de Gramsbergen.

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38 CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE T)\iS PAYS-BAS.

Ils ont tons été érodés par une eau plus vive que le Vecht tout
près d'Ommen, les uns en aval par l'ancien Vecht plus puissant,
les autres en amont par le Vecht d'aujourd'hui.

L'ancienne route de Zwolle est la limite des derniers effets do
l'érosion fluviatile et par conséquent la zone la plus aride du
versant de la haute tourbière. On y voit aussi appai-aître des
dunes importantes, qui sont en partie boisées et occupent une
zone de largeur variable (1 — 2 K.M.).

D'après la carte géologique cette zone est bornée au nord par
une zone de tourbe entamée. La tourbe y est présente en effet;
mais le figuré de la carte est trop schématique. On y voit une
bruyère horizontale et marécageuse, avec des flaques d'eau et des
monceaux de tourbe. La majeure partie, de forme conoïde, ne
contient que des tourbes de gazon ; quelques-uns, de forme pyrami-
dale allongée, contiennent des tourbes véritables, provenant d'une
couche plus épaisse des petites dépressions locales.

La bruyère tourbeuse se continue encore plus à l'ouest de cette
route, à en juger d'après les nombreux monceaux de tourbe et
les noms de „LIet Veen" et „Het kleine Veen" au S. de Nieuw-
Ijcusen. En somme ce n'est pas un ancien chenal mais plutôt
une bruyère plate et mal drainée, limitée au sud et au nord par
une zone de dunes.

Cette dernière est indiquée sur la carte géologique comme Di-
luvium sableux horizontal, quoiqu'une chaîne de collines y soit
figurée très distinctement. Elles sont fort apparentes et rangées
de l'O.S.O. à, l'E.N.E., une partie en a été mise en culture (co-
lonie de „Withaar"). L'existence de ces dunes est due peut-être à
la zone suivante plus basse, qui constitue un véritable chenal
d'érosion peu profond. Cette zone paraît avoir possédé une couche
de tourbe plus épaisse que la précédente; elle a du moins été
mise en communication par un petit canal avec le réseau du
Dedems-Vaart.

Au nord de cette zone tourbeuse se trouve une deuxième zone
sableuse, plus large que la première mais dépourvue de dunes.
Elle est moins aride et porte aussi quelques marques d'érosion
sous forme de petites prairies ou de petits marais tourbeux, qui
sont en miniature ce que la dépression tourbeuse adjacente, que
nous venons de quitter, est en grand. Cette bruyère, appelée
„Ommer-Veld", n'est j)as non plus sableuse en son entier mais
couverte en partie, d'une mince couche de tourbe'de gazon.

'i
I!

k
1

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39 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

En résumé nous pouvons distinguer dans ce promontoire de la
haute tourbière, entre le Vecht et l'Ommerschans, deux zones
moyennes d'un caractère bien prononcé et deux zones latérales
d'un caractère mixte. L'une des deux premières est très aride et
porte des dunes (Withaar); la seconde se trouve au nord de la
première, porte réellement une tourbière continue plus basse et
représente un ancien chenal d'érosion: r„Oude-Ve'en''.

Elle est bornée, à son tour, au nord par la première des deux
zones latérales (Ommer-Veld), qui est
])lus sableuse, tandisque la
seconde zone latérale, qui se trouve au sud de la première zone
moyenne, est
plus tourbeuse (Zuid-Ommer-Veld). Au fond elles ne
diffèrent guère et montrent toutes deux de la tourbe de gazon
et des dépressions locales remplies de tourbe plus épaisse, alternant
parfois avec de petites dunes.

Plus à l'ouest on voit ces différences de niveau aller en s'amoin-
drissant, d'où il résulte une prairie humide, étendue, formée de
sable fin ou de tourbe de gazon. En étudiant la carte du Water-
staat on voit, que le niveau n'est pas partout égal et qu'on peut
plus ou moins bien suivi'e les zones alternativement plus élevées
et plus basses. Ainsi sur la route de sable de Nieuw-Leusen, près
du Dedems-Vaart, à Oud-Leusen, près du Vecht, la première (aride)
est représentée par le chiffre de 4,65 M. -h A.P., la seconde (tour-
beuse) par le chiffre de 3,4 M., la première latérale (plus sableuse)
par le chiffre de 3,7 M., la seconde (plus tourbeuse) par le chiffre
de 4 M. Sur la route de sable, dite „Dedemsweg", de Ruitenveen,
au nord, à Engeland, au sud, ces chiffres sont de 2,3, de 2,25, de
2,4 et de 2,2 M.; on voit donc que les différences s'effacent gra-
duellement.

En même temps, de l'est à l'ouest, les relations du Vecht et
du sous-sol de la haute tourbière se modifient. Entre Hardenberg
et Ommen le dernier baisse graduellement vers la rivière, comme
nous l'avons vu (pag. 37) ; tandis qu'il monte à la hauteur du
village de Dalfsen, etc., tout près duquel on voit les chiffres de
3 et de 3,4 M. -i- A.P., et les chiffres inférieurs de 2 et de 2,2 M.

A.P., plus près de Nieuw-Leusen. Le long de ce dernier village
coule un ruisseau, le „Hermelijn Tolgracht", qui s'efiPorce de drainer
un terrain très etendu. Il est l'axe d'un chenal très large et peu
profond, qui contraste fort avec le chenal étroit et plus profond
du Vecht. La cause de ce contraste est bien simple; le Vecht est
une rivière très active encore, tandis que le terrain de Nieuw-

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40 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Leusen est probablement la partie inférieure du lit d'un cours d'eau
de l'époque glaciaire.

Le long du Dedemsweg, dont nous venous de parler, le terrain,
appelé „Dalfser-Veld," est généralement très mouillé, quoiqu'il
contienne quelques parties plus élevées. Èn approchant du „Hes-
senweg", le sol devient bruyère et monte sur le dos, qui partage
cette vallée de* celle du Vecht En somme, tout le terrain à l'E.
et au S E. de Nieuw-Leusen est très propre à porter une haute
tourbière et nous ne comprenons pas trop pourquoi il n'en a pas
été ainsi. Peut-être la haute tourbière se serait étendue bien au-
delà de ses limites occidentales actuelles, si elle en avait eu le
temps et si l'homme n'était pas intervenu en défrichant la surface.
C'est une difficulté à résoudre.

ii^i

mi-
m-

Staring pourtant (1. c. pag. 49) est d'avis contraire et prétend
que le „Leusener-Veld" en question est une haute tourbière enlevée.
„Le hameau de Nieuw-Leusen a aussi l'apparence d'une colonie de
tourbière" (nous n'avons pas fait cette observation) „et la tourbière
de marais passe à l'ouest en tourbière basse." Ceci est vrai, mais
ne prouve nullement qu'il y ait eu autrefois une
haute tourbière.
Plus loin (pag. 189) il parle encore de la haute tourbière, dont
nous venons de parler, pour donner quelques détails sur le bois
fossile. „On rencontre des tronçons de sapins près de Zuidwolde.
„Le bois fossile se trouve en grande quantité dans le „Hollandsche
„Veld" (au centre de la tourbière) „et sur la limite des provinces
„de la Drenthe et de l'Overijsel" (un peu plus au sud); mais la
„quantité en est énorme au sud de Westerbork (racine de la
„tourbière), on y trouve partout, en creusant les canaux secon-
„daires, une couche régulière de troncs épais. Dans les tourbières
„du Dedems-Vaart, il est plus rare, mais on l'y trouve régulière-
„ment, quand la tourbe est éloignée jusqu'au sous-sol. Près de
„rOmmerschans on emploie les tronçons des sapins, munis de longues
„racines, comme palissades des pâturages."

En récapitulant ce que nous avons observé pendant l'étude de
cette tourbière, nous avons vu qu'elle commence au nord par un
chenal d'érosion très prononcé, qui s'élargit rapidement au sud.
Le long de ce chenal les rives sont toujours plus élevées, et il en
est généralement de même le long de la masse principale de la
tourbière.

-ocr page 46-

41 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Des deux côtés la tourbière est accompagnée d'une vallée de
ruisseau: l'Oude-Diep à l'ouest et le Geeser-Stroom à l'est; elle
s'est étendue par-dessus la crête de séparation et a atteint les deux
vallées vivantes. Il en résulte en ces endroits une pente centrifuge
et une continuité de la haute tourbière et de la tourbière de marais
des vallées, ainsi cju'un terrain sans pente, peu étendu, qui con-
stitue une transition à la rive normale plus élevée.

Le chenal d'érosion, qui est actuellement rempli de la haute
tourbière, s'élargit de haut en bas et s'infléchit, pour devenir parallèle
au cours du Vecht actuel. Le chenal montre en bas un partage en
plusieurs chenaux, qui portent actuellement les trois rejetons au
nord d'Ommen et se prolongent encore à une certaine distance,
pour disparaître sur le Leusener Veld.

Le long du cours du Vecht une rive plus élevée manque entiè-
rement; le sous-sol de la tourbière baisse vers la rivière, qui y a
érodé un lit profond. De là provient un drainage radical des
rives et une sécheresse du sol, qui empêche la tourbière de s'éten-
dre et a fait naître un ensemble important de sables mobiles.

X. HAUTE TOURBliîRE DE STAPHORST.

Nous avons quitté la limite occidentale de la haute tourbière de
Hoogeveen—Dedemsvaart à la vallée du Reest; comme elle est
en même temps en rapport intime avec la tourbière de Staphorst,
nous la reprenons ici.

Près de Kruizinga's-Wijk la vallée du Reest se sépare de la
haute tourbière par une zone sableuse de largeur peu variable.
D'ici à Oosterhuis la différence de niveau entre le Zanddiluvium
horizontal et les prairies tourbeuses de la vallée est assez apparente,
pour qu'on puisse la considérer comme étant la cause de la séche-
resse de cette zone sableuse, qui est du reste suffisamment prouvée
par le développement des sables mobiles.

La route que nous avons suivie jusqu'ici (Balkbrug—Kievits-
haar—Staphorst) coupe celle d'Avereest à Dedemsvaart (pont 6),
qui suit également un terrain de dunes et descend visiblement,
pour arriver sur le Diluvium sableux horizontal près du canal
Ce sont donc les sables mobiles, qui entourent en partie le rejeton
d'Avereest de la haute tourbière de Dedemsvaart. Ils nous expli-
quent pourquoi la tourbière de Staphorst ne s'est pas étendue plus

6

-ocr page 47-

42 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

à l'est pour se confondre avec sa voisine, ce qui eût été assez naturel.

Ici encore la haute tourbière s'étend en réalité bien plus loin
que ne le figure la carte géologique, surtout au nord et au nord-
est, quoiqu'elle y soit interrompue à plusieurs reprises par des
dunes ; les deux terrains y sont enchevêtrés de la manière connue.
Les colonies de „Kievitshaar" et de „De Punt" se trouvent tout
près de ces dunes et la tourbière s'étend de la première colonie
aux hameaux de „Yhorst" et de „Klein-Oever," sur le Reest. En
allant p. e. du dernier à Kievitshaar on quitte la vallée, dont les
rives sont assez raides. La route monte sensiblement, traverse une
zone assez étroite de terres cultivées et à une distance de moins
de 1 K.M. du Reest on se trouve déjà sur la haute tourbière. Ce
n'est d'abord qu'une tourbe de gazon, au lieu du Diluvium sableux,
qu'y dessine la carte géologique. La couche de tourbe devient
graduellement plus épaisse et entoure plusieurs petites collines de
sable. La cause du développement de la tourbe est facile à con-
cevoir ; c'est la difïiculté du drainage, augmentant avec l'éloigne-
ment du Reest. Le nom de Kievitshaar est lui-même déjà une
preuve de l'humidité d'un certain terrain; le nom de „Zwarte-
Veen", entre Yhorst et Staphorst, n'a certainement pas rapport à
un terrain de Diluvium sableux.

La petite colonie „De Puntlanden", entre Kievitshaar et „De
Hulst", sur le Dedems-Vaart, se trouve sur la haute tourbière en-
tamée, mais assez près d'un terrain de sables mobiles, devenus
tranquilles en partie depuis longtemps et plus ou moins envahie
par la haute tourbière.

La carte géologique figure, à l'est de Staphorst et de Rouveen, un
terrain de „tourbière entamée," sur la limite orientale duquel se
trouve une petite route, portant le nom de „Leidijk" et formant
la limite entre la „Staphorster-Esch" à l'ouest et „De Punthorst"
à l'est. Or, la première est une vaste colline élevée et cultivée, qui
nous a paru n'avoir jamais porté de la tourbe; les informations
prises auprès de quelques paysans ont confirmé cette supposition.
(Staring dit pourtant. Le. pag. 49, de ce terrain, qu'il est terre
labourée, „établie sur du
„dalgroncV^ (sol de vallée) ou sous-sol de
la haute tourbière; près des maisons de Rouveen (et de Staphorst)
le sol a l'apparence de tourbe de marais, mais est également du
dalgrond, d'après la tradition, et plus à l'ouest, les prairies passent
en tourbières basses").

Le terrain en question est vraisemblablement une colline de

f.-
[v

's

-ocr page 48-

43 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

sable mobile, nivelée et cultivée depuis de longues années, comme
nous en avons observé e. a. près de Rhede, non loin de l'Eems.
Le point d'intersection de ce Leidijk et du chemin de fer se trouve
sur la limite méridionale, qui sépare la haute tourbière du Zand-
diluvium plat, qu'on voit facilement descendre vers le Dedems-
Vaart; quelques rejetons de la tourbière s'avancent encore davantage
vers le sud.

Le centre de la haute tourbière est donc le terrain, appelé De
Punthorst, la tourbe y a en plusieurs endroits une épaisseur de
6 d.M., e. a. près du chemin de fer. Le sous-sol est partout le
Diluvium sableux, déplacé parfois par le vent; nulle part nous
n'avons observé de trace du Diluvium graveleux.

Il est donc facile à concevoir, pourquoi il s'est formé en cet
endroit une haute tourbière. On a affaire à une plaine de Diluvium
sableux, peu inclinée et insufïisamiment drainée. Dans un temps
de sécheresse il s'y est formé un amas de sables mobiles et les
dépressions, qui en sont résultées, ont fonctionné comme autant de
centres de la tourbière

XI. HAUTE TOURBIÈRE DE H.ARDENBERG—ALMELOO.

Cette vaste tourbière est sous plusieurs rapports un image spé-
culaire de celle de Hoogeveen—Coevorden. Elle se trouve de
l'autre - côté du Vecht et offre, outre plusieurs analogies, quelques
contrastes que nous allons examiner.

De même que sur la rive gauche, le sol s'élève à mesure qu'on
s'éloigne de la rivière, p.e. sur la chaussée de Hardenberg à
Uelsen. A l'est du pont 7, sur le canal d'Overijsel, on remarque
facilement une de ces dépressions sinueuses, portant une prairie,
dépressions qui ne sont que des lits de cours d'eau oblitérés;
celle-ci montre même quelques bifurcations à l'est, en amont par
conséquent. A la i-edoute du „Veenebrugger-Schans" la chaussée
descend, pour remonter à une distance de moins d'un kilomètre;
elle a traversé une langue de haute tourbière et se trouve sur le
versant du plateau d'Uelsen. La tourbe s'est formée ici dans un
chenal d'érosion fort apparent, qui relie la petite tourbière du
nord, „Oldeveen", à la masse principale. A l'ouest elle est bordée
par la rive du chenal précité et au sud par la pente du plateau,
La limite orientale est moins distincte; la tourbière passe dans

et

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44 CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE T)\iS PAYS-BAS.

les terrains bas et humides de la petite vallée du „Welle-Beek",
confluent du ruisseau de Radewijk. Très probablement l'Oldeveen
s'est formé dans une partie du chenal d'un cours d'eau, qui longeait
le versant septentrional du plateau. Ce courant était d'abord à
peu près parallèle au Vecht supérieur d'aujourd'hui et faisait une
courbe de l'O. au S. 0., précisément comme le fait la rivière à
Gramsbergen. Une partie de cette eau de fonte de la glace quater-
naire a diminué lentement et a creusé un chenal plus profond,
qui est encore employé pour le drainage local au moyen du
ruisseau de Radewijk. Ce ruisseau, en érodant sa propre vallée, a
donné naissance aux sables mobiles qui l'accompagnent et a rendu
la séparation de cette tourbière et de la suivante encore plus
sensible que ne le font les dunes entre celles de Staphorst et de
Dedemsvaart. Les cours d'eau, qLii ont créé les dépressions des
deux tourbières, se sont déjà séparés à l'est de l'Oldeveen; car le
terrain sableux, plat au nord du „Stobbehaar" (ensemble des dunes
au nord de l'Oldeveen), est plus élevé que la tourbière. H y a
donc ici ime pente visible du N. au S., comme il y en a une
autre du S. au N. entre la rive droite de la vallée de Eadewijk
et la tourbière voisine.

En regardant la carte géologique, on voit que la partie nord-est
de notre haute tourbière se divise en trois bras parallèles, séparés
par deux promontoires de Diluvium sableux, ceux de „Sibculoo"
et de . „Langeveen", d'après les hameaux qu'ils portent à leur
extrémité.

Examinons maintenant ces deux promontoires, qui sont bien plus
intéressants que ne le ferait croire la carte géologique. En quittant
la chaussée de Hardenberg à Uelsen et en prenant le chemin de
sable du „Balderhaar'', au S. S. E., on voit facilement la position
plus basse de la haute tourbière à droite, qui monte lentement le
long de la route, ainsi que le terrain sableux lui-même. La diffé-
rence de niveau est exagérée — il est vrai — par les sables mobiles
du chemin ; néanmoins elle existe ostensiblement. A Balderhaar
commence le rejeton de Sibculoo, qui est également plus élevé que
les deux tourbières adjacentes; la différence de-niveau atteint parfois
plusieurs mètres. Ainsi que l'on pouvait s'y attendre, ce rejeton
est composé en son entier de Diluvium graveleux fort caractéris-
tique (l'argile à blocaux y est même visible en plusieurs endroits)
flanqué d'un côté ou des deux par des sables mobiles, plus ou
moins nivelés par la pluie et la culture. Il ne constitue pourtant

r f '

-ocr page 50-

45 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

pas un dos continn, mais se compose de collines allongées, séparées
par des bras de tourbe. La première colline, portant le moulin à
vent, commence au S. 0 du hameau de „Kloosterhaar", qui est
encore situé sur le promontoire de Balderhaar. Le bras de tourbe,
qui sépare l'îlot du promontoire, sert au 'passage d'un canal latéral
(„ Molluiks-Vaart") du grand canal d'Overijsel. Une écluse avec
une chute d'environ 2 M., prouve la pente générale à l'ouest.

Le second îlot est plus long; il porte à son extrémité le hameau
de Sibculoo, avec quelques restes (cimetière) d'un ancien couvent.
A quelque distance du village de Vroomshoop on observe un
troisième îlot, avec de l'argile à blocaux bien reconnaissable, qui
sort à peine de la tourbe. Un peu plus loin encore il y en a un
quatrième, entièrement caché, dont la présence se révèle par des
fossés ; l'argile à blocaux gris-verdâtre, contenant un grand nombre
d'erratiques cristallins et plusieurs cailloux de quartz, y est mise
à découvert.

La colline de Sibculoo est très prononcée et s'élève de plusieurs
mètres au-dessus de la tourbière, qui l'environne de trois côtés.
A côté des dunes inévitables on y remarque les effets de l'érosion ;
la surface y est très ondulée et quelques chenaux se dirigent vers
la tourbière, qui y remonte à son tour.

La colline du moulin à vent (première dans cette série) est reliée
au rejeton de Langeveen par une bonne route („Groene Dijk"),
qui traverse la tourbière adjacente. On y remarque parfaitement
la position beaucoup plus basse de celle-ci et son épaisseur plus
considérable au milieu qu'aux bords, conséquence naturelle du
remplissage d'un chenal d'érosion. On peut très bien aussi observer
la convexité de la surface d'une rive à l'autre, relief qui est très
inégal dans les différentes tourbières.

Les troncs d'arbre habituels y sont présents en quantité modérée
et atteignent souvent la hauteur assez exceptionnelle de Vs M.
Tous sont pointus, ce qui est la conséquence naturelle de l'allure
de la putréfaction, allant de l'extérieur à l'intérieur et augmen-
tant en intensité de bas en haut, à mesure que l'oxygène de
l'air trouve plus farcilement accès. Elle cesse naturellement dès
que le tronc est entièrement enseveli sous la tourbe croissante.
Les racines principales sont toujours horizontales et disposées de
la même manière que celles des sapins, qui restent aussi près de
la surface; nous tenons donc ces arbres pour des
Pinus sylvestris]
les bouleaux, si facilement reconnaissables, manquent entièrement.

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46 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Staring (L c. pag. J90) donne les détails suivants sur le bois
fossile de cette tourbière, près du „Bruine-Haar". „Une grande
„quantité en a été mise au jour par suite des incendies de la
„culture du blé sarrasin. I^e phénomène si rare des troncs déra-
„ cinés a pu y être observé sur une étendue de plusieurs hectares
„près du bord de la tourbière."

Le sous-sol, mis à découvert dans quelques canaux secondaires,
était du sable avec des cailloux de quartz blanc, etc.

Notre tourbière est bordée à l'est par le promontoire de Lange-
veen, mentionné ci-dessus, qui est notablement plus large que celui
de Sibculoo et forme un dos non-interrompu, qui se rétrécit et
s'abaisse graduellement du N. au S. Il s'élève également de plu-
sieurs mètres au-dessus des deux tourbières adjacentes et est com-
posé de Diluvium graveleux facilement reconnaissable, flanqué de
dunes plus ou moins évidentes, qui prennent un développement
important près de la masse principale du plateau de gravier.

En suivant la route de Bruine-Haar à Langeveen, on est frappé
de la différence d'emploi des hautes tourbières des deux côtés de
la frontière. Celle du côté Néerlandais (Bruine-Haars-Venen) n'est
cultivée que çà et là de blé sarrasin, et pour le reste est à l'état
de bruyère. Le contraste, qu'elle offre avec la rive opposée, permet
de la comparer à une rivière gelée ou à un glacier. Tout y est
morne, sur le glacier comme sur la tourbière, et les monceaux de
tourbe pourraient être comparés à des tables de glacier.

Du côté Prussien, au contraire, la tourbière a été mise en cul-
ture; elle porte un assez grand nombre de fermes, de bouquets
d'arbres et des arbres isolés. Tantôt on y voit des prairies ver-
doyantes et des vaches, tantôt des champs labourés avec des gerbes
jaune-clair. L'aspect entier y est gai, varié et plein de vie; de
l'autre côté il est horriblement sombre et monotone. C'est le con-
traste frappant qui existe entre l'oase et le désert, entre la vie et
la mort, dont nous garderons encore longtemps le souvenir, i

Comme nous venons de le dire, le dos de Langeveen est continu
et non-démembré comme celui de Sibculoo. En réalité ceci n'est
qu'une différence de degré ; car la surface du premier est très on-
dulée dans le sens de la longueur (N.-S.), mais les selles restent
toujours au-dessus de la surface de la tourbière, tandis qu'au N.E.
de Sibculoo elles descendent plus bas et ont été envahies en con-
séquence. i

Au N. et au S, de Langeveen la surface de la colline descend

l'vî i

11

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-ocr page 52-

47 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

lentement au S. et on passe imperceptiblement du sol sableux au
soi tourbeux, en prenant la chaussée de Tubbergen. Au point de
contact la tourbe est naturellement mince, ce dont on s'aperçoit
à la présence de deux ou trois gros erratiques, qui regardent à travers.
La pluie a probablement lavé le sable environnant, de sorte qu'ils
ont été mis à nu et la tourbe croissante n'a pas encore eu le temps
de les envahir complètement. La chaussée de Tubbergen passe
d'abord sur la tourbe, mais bientôt („Itterbeeksbrug, Haarsloots-
brug") sur un terrain cultivé, sableux et plus élevé. Ce n'est de
nouveau qu'un sable mouvant ancien, relativement nivelé et en-
touré de la tourbière, qui se termine non loin de là. Elle fait
place à un terrain de Diluvium sableux humide
(broelcgrond), mal
drainé par les ruisseaux de r„Eendebeek" et du „Molenbeek" et
interrompu, au village de Geesteren, par un ensemble de terrains
sableux plus élevés (esschen), qui ne sont que les derniers restes
d'un plateau de Diluvium graveleux. Ici encore nous ne pouvons
pas trop bien concevoir, pourquoi la tourbière n'a pas avancé da-
vantage; le terrain nous y paraissait très propice.

A l'est de Geesteren le Diluvium sableux sépare la haute tour-
bière du plateau de Diluvium graveleux. Il se rétrétit du S. au N.
et finit par disparaître, contrairement au figuré de la carte géolo-
gique, de sorte que, sur la frontière, la tourbière touche directement
à une terrasse de gravier, qui s'abaisse doucement à l'est. Le sol
devient peu à peu humide et se couvre d'une tourbe de gazon,
qui augmente bientôt en épaisseur. Le long de la large route de
sable à l'O.S.O. de Geteloh on voit la surface de la tourbière
descendre lentement; elle est convertie en prairies, interrompues
de temps à autre par des champs cultivés sur d'anciens sables
mobiles. Le sous-sol consiste en Diluvium graveleux près de la borne
91, où elle a une épaisseur de 6—8 d.M On y cultive l'avoine,
la pomme de terre et la fève, et, contre la règle, très peu de blé
sarrasin. Au sud la tourbe s'amincit de nouveau et passe au Di-
luvium sableux, un peu grossier. On y observe encore plusieurs
tourbières locales sur des terrains plus bas, qui auraient réussi
probablement avec le temps à se confondre entre elles et avec la
tourbière principale.

Au N.E. d'Almeloo, en allant de Tubbergen à Mander, le Dilu-
vium graveleux a beaucoup plus d'etendue que ne le figure la carte
géologique. Il comprend non-seulement les collines de Tubbergen
et de Geesteren, mais aussi une grande partie de la bruyère hori-

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48 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

zontale ; l'argile à blocaux n'y est nullement rare à une profondeur
de 1—2 d.M.

Examinons maintenant la limite N. 0, qui offre beaucoup d'ana-
logie avec celle de la tourbière située de l'autre côté du Vecht.

Nous connaissons déjà la pente du sol entre Veenebrugge et
Hardenberg. Or, il en est parfaitement de même près du village
de Brucht sur le Vecht, en aval de H., où la haute tourbière
approche beaucoup la rivière. La pente y est visiblement plus forte
près du Vecht que près de la tourbière, ce qui fait que les „esschen"
se confondent à peu de distance de la rivière et que le ruisseau
de Brucht a érodé un chenal profond.

En longeant le canal d'Overijsel au sud on voit d'abord une
formation de tourbe assez faible, qui devient graduellement plus
forte (jusqu'à 2 M.) ; les prairies sur la tourbe font place à la
bruyère et on est bientôt au milieu d'un désert. La surface baisse
distinctement de l'E. à l'O., comme on doit s'y attendre; le sous-
sol, visible çà et là, n'est que du sable ou parfois de l'argile, mais
sans cailloux.

Le grand village de Den Ham est situé dans une contrée sem-
blable à celle de Geesteren, où il y a une alternance continuelle
entre les terrains bas et marécageux et les terrains plus élevés.
Les cours d'eau, qui ont certainement produit ce résultat, sont
devenus tout à fait rudimentaires ou ont entièrement disparu.
Quelques-unes de ces parcelles plus élevées ne sont pourtant que
d'anciens sables mobiles, e. a.
V„esGh" fort prononcé près du vil-
lage et d'autres „esschen" plus petits. On en observe aussi plus
à l'est et une petite chaîne de dunes apparentes constitue un bout
de limite fort net de la tourbière, qui renferme même quelques
dunes isolées. La pente du sol, du Vecht à la tourbière et à la
colline de Sibculoo, est facile à observer et est en relation directe
avec la nature du sol. De Den Ham à Vroomshoop on voit le
Diluvium sableux devenir lentement plus grossier et contenir
bientôt un grand nombre de grains de quartz de 2 ou 3 m.M.;
de l'autre côté du canal, le changement devient plus intense en-
core: les cailloux augmentent en taille et en nombre jusqu'à la
petite colline d'argile à blocaux, cachée sous la tourbe, que nous
venons de mentionner pag. 209. Le changement le plus ostensible
s'est opéré sur une distance de 500 M. seulement.

Tandisqu'à l'E. de Den Ham la tourbière ne présente pas de
rive naturelle, à l'exception d'un bout de' sable mobile accidentel,

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CONTRIBUTIONS A LA OEOLOGIE DES PAYS-BAS. 49

il en est autrement au sud. Le village de Wierden, près d'Almeloo,
est situé sur le versant méridional d'une colline de Diluvium
graveleux, qui frappe la vue dans une contrée aussi plate. Elle
montre, près de la surface, un sable plus ou moins graveleux,
parfois argileux; nous n'avons pas pu y retrouver l'argile a blo-
caux pendant notre courte visite. En descendant du hameau
de „Hooge Heksel", par la pente orientale, vers le village de
Vriezenveen, on se trouve bientôt sur une bruyère de tourbe,
bordée après quelques centaines de mètres par une seconde col-
line, parallèle à la première et portant la ferme de „De Keizer".
Ce n'est encore qu'un sable mobile, mis en culture et constituant
la limite de la haute tourbière continue de Vriezenveen. Au S. S. E.
on observe une colline tout à fait semblable, portant le nom ca-
ractéristique de „Kieken^e^^", que nous tenons également pour une
dune cultivée. Autour de Vriezenveen on voit la surface de la tourbe
monter (en partie à cause de sa faible convexité) de l'O. à l'E.
et du S. au N. Elle passe au S. insensiblement dans la tourbe de
marais le long de la „Vriezenveensche-Aa" et a donc ici une
limite naturelle, quoique peu distincte. On peut concevoir pourquoi
elle ne s'est pas étendue plus loin; elle est arrêtée par un terrain
trop humide, comme elle l'est en d'autres lieux par un terrain trop
sec,
soit gravier ou dune plus élevée, soit Diluvium sableux plus
bas, mais très bien drainé.

Les îlots sableux ne manquent pas entièrement dans ce bout
de la tourbière; on en voit quelques-uns très bas le long de la
chaussée de Vriezenveen à Almeloo (Kluppelshuizen) ; le plus grand
se trouve même au milieu de la vallée marécageuse de lAa et
porte une campagne du nom de „Meulen6e?^".

D'ici à Almeloo, on ti'averse de nouveau un assemblage chao-
tique
d'esschen plus élevées et sèches et de dépressions humides,
qui communiquent entre elles.

En comparant les deux hautes tourbières, que nous venons de
décrire, nous voyons qu'elles descendent toutes deux d'un plateau
de Diluvium graveleux vers le Diluvium sableux de la large vallée
du Vecht, dont elles sont séparées par des dunes fort développées,
ce qui prouve l'aridité du sol. Tandis que la tourbière septentrionale
ne commence que par un seul chenal d'érosion apparent, il y en
a trois au commencement de la tourbière méridionale. Elles se

7

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50 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

terminent aussi toutes deux en partie vers un terrain marécageux,
qui semble très propice à la formation d'une haute tourbière, celle
du nord vers les prairies de Nieuw-Leusen, celle du sud vers les
terrains marécageux autour de Geesteren. Des études ultérieures
et comparées devront décider, pourquoi ces terrains et d'autres
semblables ne portent pas eux-mêmes une haute tourbière. Peut-
être des oscillations d'humidité annuelles, d'une amplitude trop
grande, en sont-elles la cause.

XII. HAUTE TOURBIÈRE Dl'] RADEWI.IK--WILSUM.

Le ruisseau de Radewijk, que nous avons déjà mentionné ci-
dessus, se jette dans le Vecht à Hardenberg. Il prend sa source
sur le versant septentrional du plateau de gravier d'Uelsen—Oot-
marsum et coule assez parallèlement à la rivière, en amont de
Gramsbergen, dans une bruyère sableuse, qui borde et porte la
haute tourbière et s'incline vers le Vecht. Comme tant d'autres
il s'est creusé une vallée assez profonde, ce qui a favorisé le
développement de sables mobiles sur ses deux rives. Ceux de
gauche limitent la petite tourbière de l'„Oldeveen", dont nous
venons de parler; ceux de droite limitent celle qui nous occupe
en ce moment; ils ont été mis en culture et portent la colonie de
Radewijk. i

On en voit aussi en différents endroits au milieu de la tour-
bière, où ils ont été envahis parfois par la tourbe en croissance;
d'autres viennent à la surface et portent quelques fermes isolées.
Une de ces dunes (en repos actuellement) porte une colonne de
grès, la borne 120, appelée par conséquent par les paysans du
voisinage
„De hooge Steen" (la pierre haute); la borne suivante^
121 porte le nom „De lage Steen" (la pierre basse) et a été posée
sur la haute tourbière même, qui entoure aussi la colline de la
première.

Le sol environnant, ainsi que le sous-sol, est presque exclusive-
ment du sable fin. La couche de Diluvium sableux est pourtant assez
mince et le sable un peu grossier, en rapport avec le Diluvium
graveleux du voisinage. On a creusé quelquefois dans les fossés un
sable contenant plusieurs cailloux de quartz ayant juqu'à 1 c.M. de
diamètre; il en est de même le long du „Zwolsche Weg", entre
le tourbière et Gramsbergen. Au milieu de la tourbière j'ai même

-ocr page 56-

51 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

observé plusieurs erratiques assez volumineux (1—3 d.M.), que l'on
avait trouvés en creusant les fondements d'une ferme.

Le „Zwolsche-Weg" (Laar—Hardenberg) monte lentement de
l'E.N.E. à rO.S.O., perpendiculairement à l'axe de la tourbière et
des prairies basses et marécageuses „LIolthemer-Broek en Veld",
pour arriver sur les
esschen des hameaux de „Den Velde" et „Loozen".
Ces prairies se trouvent dans la prolongation de la tourbière vers
le Vecht et ont de l'analogie avec celles de Nieuw-Leusen. Ici
encore il est facile de concevoir, pourquoi la tourbière de Rade-
wijk ne s'est pas étendue plus au N. et au S., mais non pour-
quoi elle cesse au N.O. L'intervention de l'homme nous paraît
insuffisante pour résoudre cette question.

Le village de Wilsum se trouve sur le versant septentrional du
plateau graveleux d'Uelsen et précisément au sud du village
d'Emblicheim sur le Vecht. Entre ces deux localités est située une
haute tourbière, qui nous a paru s'étendre beaucoup plus loin
que les limites de la carte géologique et qui n'a pas été entière-
ment enlevée.

Le Vecht coule à Emblicheim dans un chenal assez prononcé,
quoique moins qu'à Hardenberg, et bordé d'une vallée de prairies.
A mesure qu'on s'éloigne de la rivière, on voit le sol monter len-
tement; les prairies font place aux champs cultivés et ceux-ci à
la bruyère, qui porte plusieurs sables mobiles. Plus loin, la pente
continue de la même manière, la bruyère devient de plus en plus
humide, la tourbe de gazon y apparaît et augmente lentement
en épaisseur. Elle s'étend à environ 3 K.M. plus au nord que sur
la carte géologique et repose sur un sable, qui est parfois grossier
et riche en cailloux de quartz.

Elle est bordé de sables mobiles, qui portent e. a. le hameau
d'Echteler. En allant d'ici au S.S.O., à l'extrémité orientale de la
colonie de Radewijk, on arrive bientôt sur la haute tourbière
dispersée et ensuite sur la tourbière continue, qui n'est que très
peu entamée. En suivant la frontière au N.O., on arrive sur la
haute tourbière de Radewijk, que nous venons de décrire et qui
est par conséquent en continuité avec celle de Wilsum,

Nous y avons vu combien il faut être prudent en admettant
une discontinuité de la tourbière, causée par du sable mobile. Un
paj^san creusait dans une petite colline de la tourbe, couverte de
2 d.M. de sable; la discontinuité de la tourbière n'était donc
qu'apparante. Une longue bande de sable s'étend, à l'E. de la

r-

-ocr page 57-

52 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

colonie ; c'est un sable mobile facile â constater comme tel. Il sépare
la haute tourbière en deux ; celle du sud est plus basse et convertie
en prairies et en champs; celle du nord est couverte de bruyère
ou sert à la culture du blé sarrasin. Cette différence de niveau
est due probablement à une dépression du sous-sol près de la
colline graveleuse d'Uelseu; car la tourbière du nord n'a qu'une
épaisseur minime près de la route en question.

Peut-être ne sommes-nous pas loin de la vérité en considérant
cette dépression comme un chenal d'érosion, qui se prolonge en
partie dans la petite tourbière de l'Oldeveen et en partie dans la
vallée du ruisseau de Radewijk, rudiment du cours d'eau quater-
naire qui l'a creusée.

La bande de sable, qui porte la route de Radewijk à Wilsum,
se termine à la route d'Emblicheim à Wilsum, où les deux tour-
bières sont donc en continuité.

Au sud, la tourbière s'étend jusque tout près du pied de la
colline de Diluvium graveleux d'Uelsen. A l'est elle est bordée
à peu près par la route droite d'Emblicheim à Neuenhaus, sur
laquelle on observe plusieurs sables mobiles. Ils sont encore par-
tiellement en action et entourent quelques étangs, dans lesquels
se trouvent des îlots de tourbe, jusqu'à 1 M. d'épaisseur. Le sable
de cette route, surtout où elle s'approche de la colline de Diluvium
graveleux, contient un certain nombre de cailloux de quartz de
1—iVs C.M. et forme un passage au Diluvium sableux sans cailloux.

En admettant cette route comme limite orientale de la haute
tourbière, qui s'étend au nord jusque près des champs labourés
du Vecht et au sud jusque près de la colline d'Uelsen, on obtient
un terrain très étendu, concordant assez exactement avec celui qui
est dessiné comme marécageux sur la carte topographique de Papen,
de 1842. En réalité, cette haute tourbière, embrassant celles de
Wilsum et de Radewijk de notre carte géologique, a une surface
d'environ 4000 H.A., les deux terrains sus-nommés, de 900 H.A.,
soit 4V2 fois de moins.

Les causes de la formation d'une haute tourbière dans cette
localité sont simples. Nous avons devant nous une terrasse humide
de Diluvium sableux, bordée par une colline de gravier et par la
vallée du Vecht et ses sables mobiles, qui forment des limites
naturelles à son extension.

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53 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

XIII. HAUTE TOURBIÈRE DITE „SYEN-VENNE."

A une distance notable en amont du Vecht la carte géologique
figure une haute tourbière dégradée, située également sur la rive
gauche et portant le nom de „Syen-Venne" sur la carte topogra-
phique de Papen. Elle est située à quelque distance à l'ouest de
la chaussée, qui relie les petites villes de Bentheim et de Nordhorn ;
mais les premières traces de tourbe s'observent déjà à l'est de cette
chaussée. Le Vecht y coule dans une vallée d'environ 300 M. de
large, dont les' prairies contrastent nettement avec les champs
labourés plus élevés, auxquels succède la bruyère. Comme d'ordi-
naire celle-ci monte lentement à mesure qu'on s'éloigne de la
rivière, devient humide et porte bientôt des parcelles de tourbe de
gazon, qui entoure des dépressions sinueuses, converties parfois en
prairies. Nous avons vu qu'elle repose çà et là sur de la limonite,
compacte vers le bas, désagrégée près de la surface et atteignant
une épaisseur de 2 d.M. La tourbière continue ne commence pour-
tant qu'à quelque distance à l'ouest de la chaussée et est bordée
en quelques endroits de sables mobiles. La tourbe augmente assez
rapidement en épaisseur jusqu'à 1 M. et au-delà et montre dans
toutes les directions des monceaux de tourbe ?èche, ce qui prouve
qu'elle est en pleine exploitation.

Au N. et à rO. la tourbière est bordée par la route de Gilde-
haus à' Brandlecht, sur le Vecht, qui suit en partie des sables
mobiles constituant un bout de limite naturelle.

Plus au nord, vers Brandlecht, la bruyère est généralement
sèche. Parfois elle porte des sables mobiles, accompagnés à leur
tour d'étangs plus ou moins étendus, qui ont causé des tourbières
locales. Les cartes topographiques en montrent quelques-uns, près
du village sus-nommé, qui sont sans aucun rapport avec la
tourbière continue, dont le bord occidental se rapproche du ruis-
seau du „Rammel-Beek" à mesure qu'on avance vers le sud. Il
s'agit pourtant de savoir, si ce ruisseau insignifiant, qui prend sa
source dans le bois de Bentheim, est réellement la cause de la
limite occidentale de la tourbière; mais nous n'avons pas poursuivi
ici nos recherches, à cause du manque de temps et à cause des
cartes trop peu détaillées.

Au sud-est c'est la pente de la montagne „Isterberg", composée de
grès néocomien, qui forme une limite très naturelle de la tourbière.

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54 CONTRIBUTIOlsrs A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS.

Le sons-sol est principalement le Diluvium sableux horizontal,
qui devient graveleux vers ITsterberg. Parfois on le voit plus
ondulé, à cause d'anciens sables mobiles, partiellement nivelés par
la pluie et envahis ensuite par la tourbière.

A l'ouest, vers le Rammel-Beek, on en observe de semblables,
assez insignifiants du reste.

En somme, il n'est pas difficile d'entrevoir pourquoi il s'est
formé ici une haute tourbière. Nous avons un sol sableux, très
faiblement incliné de l'ouest à l'est et insuffisamment drainé.

L'Isterberg au sud, le Vecht à l'est forment des limites naturelles
et peut-être en est-il de même du Rammel-Beek à l'ouest. Ensuite
ce sont les sables mobiles, qui ont contribué à la limiter à l'est et
à l'ouest, en favorisant en même temps la formation de noyaux
de la tourbière dans les dépressions. Il reste encore des questions
de détail à résoudre sur l'extension et les limites, comme cela
est presque toujours le cas. La carte topographique Néerlandaise
est très peu détaillée, puisqu'il s'agit d'un terrain hors des frontières;
la carte Allemande est insuffisante à cause de son échelle trop
petite (0,00001).

14,X ..
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Troisième Partie.

Les Tourbières du Versant oriental du Plateau de Drenthe.

XIV. HAUTE TOURBIÈRE DE SCflOONOORD.

Après avoir examiné les tourbières des versants occidental et
méridional du plateau de Drenthe, nous allons nous occuper de
celles du versant oriental, caractérisé par le célèbre „Hondsrug"
Ce dos allongé présente un contraste frappant quant à la distribu-
tion des hautes tourbières sur ses deux versants. Tandis que sur
son côté oriental s'étend la partie nord de la tourbière de Bourtabge,
la plus étendue de l'Europe, on n'en observe sur son côté oriental
qu'une seule bien plus petite, celle de Schoonoord—Odoorn. En
réalité, on en observe encore une seconde, plus au sud, celle de
Nieuw-Amsterdam ; mais elle n'est pas restée indépendante, elle
s'est confondue avec celle de Bourtange en s'étendant autour et
au-dessus de l'extrémité méridionale du LIondsrug.

Ainsi que la majeure partie de nos hautes tourbières, celle de
Schoonoord possède une extrémité supérieure, deux rives et une

r-.it«

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CONTIÎIBUÏIONS A LA GEOLOGIK DES PAYS-BAS. 55

extrémité infériem-e. On peut facilement étudier la première en
prenant la route de Sleen à Odoorn, qui traverse, au pont 14, le
Canal-Orange, où l'on observe: 1° la descente du Diluvium au
S.O., la position plus basse de la haute tourbière par rapport
au Diluvium, 3° la position plus basse encore des prairies de la
vallée du „Sleener-Stroom" (confluent du „Drosten-Diep"). La pente
générale de la haute tourbière est au N.N.O., celle de la vallée
du Sleener-Stroom au S.S.O. ; tandis que le cours d'eau de la
première est oblitéré depuis longtemps, celui de la seconde sert
encore au drainage des terres environnantes; c'est une vallée vi-
vante, marécageuse et tourbeuse, comme ailleurs.

Les deux rives de la haute tourbière ne dorment pas lieu à beau-
coup d'observations; elles sont toujours plus élevées que la tourbière
même. Le Canal-Orange suivant la rive gauche à quelque distance, on
a, en le longeant, une bonne occasion de s'orienter sur le sous-sol,
qui est toujours l'argile à blocaux, bleu-blanchâtre ou gris-clair-
verdâtre ou bien un sable presque blanc, plus ancien, qui contient
un assez grand nombre de cailloux bien roulés de quartz blanc.
L'épaisseur de la tourbe étant inégale, le sous-sol est ondulé et
vient parfois à la surface en îlots. Un de ces derniers, le
„Bmm-
merslioop^'
a même acquis une certaine célébrité et joue un rôle
dans les légendes de la campagne de Drenthe. C'est une colline
assez frappante de 3—4 M. de hauteur, située sur la ligne „Eksloo-
Westerbork", au milieu de la tourbière. Elle offre une excellente
occasion . de suivre des yeux sur une distance notable les deux
rives, dont les dunes blanchâtres et les „esschen", portant du
seigle jaune-clair, servent de bons points de repaire.

Près de la rive gauche, au hameau de Schoonoord, l'enlèvement
de la tourbe a mis au jour un assez grand nombre de troncs
d'arbres, tous des bouleaux et par conséquent d'épaisseur médiocre.
La pente des deux rives est presque toujours faible. La tourbière
descend du N. au S. vers les prairies situées autour de Westdorp,
non-loin de Borger, dans lesquelles elle passe graduellement, tant
pour le niveau du sol que pour la végétation. La tourbe de marais
de Westdorp se couvre lentement d'une couche de haute tourbe
vers le sud et passe dans cette substance à mesure qu'elle s'épaissit.
Nous avons observé ce passage dans quelques autres, localités en-
core et nous avons vu qu'il ne se fait pas toujours de la même
manière. La haute tourbière non-douteuse ne porte que de la
bruyère
(Galldna vulgaris et Erica tctralix) ; mais en approchant

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56 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

de Westdorp, on voit apparaître des joncs, une herbe très fine (et
des sphagnes), qui sont d'abord très rares, puis augmentent peu
à peu, naturellement aux dépens de la véritable bruj^ère.

Au lieu de continuer à entourer les groupes de plantes sus-
nommées (à l'exception des sphagnes, qui n'augmentent pas), les
bruyères forment bientôt dans l'herbe des îlots, dont l'étendue et
le nombre diminuent peu à peu. Les fossés sont d'abord tout secs,
mais se remplissent ensuite de boue et plus loin d'eau, indice peu
équivoque de la pente du terrain. Comme ils sont barrés à des
distances inégales, ce phénomène se répète plusieurs fois. Quant
aux prairies, on observe un passage tout à fait semblable; on en
voit d'abord une parcelle isolée, mais bientôt davantage avec des
bosses de bruyère, qui deviennent peu à peu plus rares et finissent
par disparaître.

Les champs deviennent graduellement plus humides, comme le
prouvent l'apparition de carices et d'orchidées et la disparition des
vaches, les prairies ayant fait j^lace aux champs de foin.

Nous sommes ici en pleine tourbière de marais et tout près de
quelques ruisseaux, qui se réunissent autour de Westdorp et for-
ment le „Voorste-Uiep", qui coupe le Hondsrug et se jette dans
la Hunse. La dépression ou vallée entièrement fermée de Westdorp
a ainsi un drainage très intéressant à travers son barrage et il est
bien possible qu'il y ait eu autrefois un lac, qui s'est écoulé au
point le plus bas de son bord.

L'origine de la dépression de ce lac est peu douteuse: ce n'est
qu'un intervalle entre deux plis de la surface morainique, une
vallée entre deux ondes. Comme dans la mer, ces vallées n'ont
qu'une longueur limitée; des deux côtés elles cèdent leur place à
d'autres ondes.

Nous avons déjà parlé des sables mobiles d'Odoorn, qui sont
très intéressants à plusieurs points de vue. Ils constituent un vé-
ritable désert à côté de celui de la haute tourbière, qui est pour-
tant bien plus sombre encore. Elle sert à la culture du blé sarrasin
et la surface en est brûlée de temps à autre. Lors de notre visite
il n'y poussait presque pas une seule plante, excepté dans les
fossés; la surface était généralement brune, avec des taches d'un
brun-rougeâtre produites par des mousses, ou d'un gris-clair pro-
duites par les cendres encore présentes.

Le désert des sables mobiles est plus clair et un peu plus gai,
quoique privé presque entièrement de végétation. ^ Le milieu est le

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57 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

plus bas et fournit le sable, qui hausse les dunes aux alentours;
c'est comme un „maalstroom", qui devient de plus en plus profond.
J^e sable, déplacé vers les bords, ensevelit lentement la bruyère;
mais celle-ci reste vainqueur sur une zone limitée, oii la quantité
de sable transporté annuellement n'est pas trop grande. Les tiges
s'allongent simplement à mesure que le sol se hausse et poussent
de nouvelles feuilles. On reconnaît facilement cette zone, dans
laquelle la bruyère peut encore supporter victorieusement la lutte
pour l'existence ; elle attire l'attention par sa teinte claire, produite
par le blanc de la surface et la bruyère d'un vert toujours jeune.
La bruyère plus éloignée des dunes a naturellement une teinte plus
sombre, résultant du sol végétal noir et des buissons plus vieux
et vert-foncé. Le bord du désert s'élève ainsi continuellement, ce
qui arrive d'ailleurs également dans une série de points de l'in-
térieur. CJn certain nombre de bosses de bru3^ère sont restées vi-
vantes et ont arrêté le sable volant entre leurs tiges. Elles atteig-
nent parfois des dimensions considérables, de plusieurs mètres de
largeur et de hauteur. Une photographie de ce paysage ressemble-
rait fort à celle d'une colonie de castors dans un lac.

Pendant nos excursions dans le Brabant et le Limbourg nous
avons fait des observations analogues. Les tourbières y sont éga-
lement accompagnées de sables mobiles, parfois énormes et souvent
il n'est pas possible d'indiquer les creux d'où le sable a été enlevé
par le vent. Or, comme nous avons expliqué les dépressions de
ces tourbières par l'érosion de bras du delta quaternaire de la
Meuse, il ne nous fût pas trop difficile de résoudre cette difficulté.
Pendant les inondations de l'hiver ces bras déposaient du sable
sur le terrain inondé, qui venait à découvert dans les temps de Av^

sécheresse et le sable était facilement soulevé par le vent et arrêté
par la végétation. Il s'opérait ainsi a travers les plantes une espèce
de filtration du mélange d'air et de sable,
filtration qu'on peut Ç^^i^eM.,
comparer à celle de l'eau, qui tient de l'argile en suspension. Cela^^x^y^
peut nous expliquer pourquoi les tourbières basses des rives du ,
Vecht (de Hollande) et du Lek ne contiennent pas d'argile inter-
calée, quoique leur niveau soit assez bas pour avoir permis des
inondations répétées (avant la construction des digues).

La végétation des dunes de l'intérieur a certainement facilité
leur croissance, mais n'est pas strictement nécessaire pour les ex-
pliquer. Dès que le vent a élevé un petit monticule, il s'est fait,
en amont de celui-ci, un creux, dans lequel il se réfléchit et d'où

8

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58 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

il entraîne continuellement des grains de sable, jusqu'à ce que
l'eau souterraine l'en empêche pour toujours. Le monticule au
contraire n'est qu'effleuré par le vent et attaqué par conséquent
à un bien moindre degré.

Puisque nous avons déjà consacré une page aux sables mo-
biles et que ceux-ci jouent un rôle aussi important dans l'étude
de nos hautes tourbières, il nous semble que c'est ici le moment
de placer quelques généralités ayant rapport au même sujet. Elles
sont empruntées au livre important de M. Joseph Wessely, intitulé :
„Der Europäische Flugsand und seine Gultur", Vienne 1873 (le
Sable mobile en Europe et sa Culture).

Le mouvement du sable est le résultat de deux causes : le vent
et la pesanteur., Les particules en étant incohérents, on peut jus-
qu'à un certain degré comparer ce mouvement à celui d'un liquide,
et plutôt à celui des vagues de la mer, qui dépend aussi du vent,
qu'à celui d'une rivière, qui n'est assujetti qu'à la pesanteur. On peut
aussi le comparer à celui de la neige; mais il ne faut pas perdre
de vue la différence considérable des poids spécifiques, celui de la
neige n'étant que de 0,9, celui du quartz, etc. de 2,6 à 2,9. (Nous ajou-
terions la différence de forme extérieure ; les grains de sable étant très
compactes et les flocons de neige offrant une grande surface au vent).

Si la surface du sable était parfaitement plane et le vent par-
faitement horizontal, ce dernier ne produirait aucun effet; en
réalité il n'en est jamais ainsi. Il y a toujours des intervalles entre
les grains de sable et dès qu'ils sont desséchés le vent peut y
pénétret et les détacher l'un de l'autre. Ils commencent à rouler,
se heurtent à d'autres, commencent bientôt à sauter et aident ainsi
à détacher des grains, qui étaient jusqu'ici en repos.

Les plus fins se mettent naturellement les premiers en mouve-
ment et sont portés le plus loin. Quand le veut est faible, le sable
s'élève à peine de la surface et coule plutôt qu'il ne saute; pen-
dant les fortes tempêtes les grains peuvent faire des sauts dd plus
de 20 M. Les nuages de sable sont une très grande exception, ce
qui constitue une différence importante avec la neige.

Le mouvement est généralement ondulé, comme on peut aussi
s'en apercevoir à la surface redevenue calme; les ondes vont per-
pendiculairement à la direction du vent, donc généralement du
N.O. au S.E. ou de l'E. à l'O., puisque les vents d'ouest sont gé-
néral einent accompagnés de pluies et mettent le sable en repos,
plutôt qu'en mouvement. ^

î'i"''-

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59 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Quand le sable coulant rencontre un obstacle le mouvement
s'épuise et les grains s'arrêtent ; c'est le commencement d'une dune.
La pente en est d'abord extrêmement faible ; mais à mesure qu'elle
s'allonge, une quantité croissante de grains s'arrête et la rend plus
forte, jusqu'à ce qu'elle ait atteint 5 à 15°. Le vent adopte lui-
même cette pente, de sorte qu'il peut transporter le sable avec peu
de peine. Du côté opposé abrité contre le vent, le sable n'obéit
qu'à sa propre pesanteur et adopte une pente plus raide qui ne
dépasse qu'exceptionnellement 30°. Les chiffres plus forts de 45°
et 60^, cités par différents auteurs, sont attribués par M. Wessely
à ce que ces auteurs n'ont pas
mesuré mais évalué ces angles.

Les objets solides, les plantes p. e., retiennent le sable et haussent
la dune, jusqu'à ce qu'ils soient entièrement enterrés. Le sommet
de la dune ne croît pas indéfinément, puisqu'il est aussi attaqué
par le vent, plus fort en haut qu'à fleur de terre.

L'irrégularité chaotique des terrains de sable mouvant est dù à
une série de causes, e. a. à la direction différente des vents qui
élèvent des dunes.

Les fortes pluies et les averses agissent naturellement en sens
contraire, en ce qu'elles ramènent le sable de haut en bas et érodent
rapidement des entailles raides et profondes. Le sable, se desséchant
ensuite, dégringole par suite de la pesanteur. La pluie attaque
surtout le sable desséché, puisque l'air, voulant échapper en sens
inverse des gouttes, qui veulent pénétrer, offre un obstacle à ces
dernières.

De l'autre côté l'eau facilite et prépare aussi l'action du* vent en
ce que le sable fraîchement desséché est plus incohérent que celui
qui est sec depuis quelque temps. L'eau, en pénétrant entre les
grains, les éloigne toujours un peu les uns des autres.

M. Wessely n'admet pas de sables mobiles (à l'exception natu-
rellement des dunes maritimes), qui ne soient causés par l'homme.
Nous ne pouvons le suivre à cet égard, d'autant plus qu'il cite
lui-même les trous de laphis comme une des premières causes.
Nous pourrions ajouter les crevasses créées par les averses, les
inondations hivernales dont le sable se dessèche après que l'eau
s'est retirée et qui peut se mettre en mouvement, avant qu'il ait
obtenu une couche protectrice végétale. Actuellement les deux
causes principales en sont les ornières et les sentiers de bétail (les
brebis en première ligne). La pluie et la gelée continuent le travail de
désagrégement, le sol fraîchement dégelé surtout étant très incohérent.

8*

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60 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

XV. TERRAIN ENTRE L'EEMS ET LE VECUT.

La carte géologique de Staring figure le long du cours de l'Eems
une haute tourbière très étendue, dont la partie méridionale a été
entamée. C'est le terrain qui se trouve au sud de la colonie de
Wietmarschen, que nous voulons traiter séparément de la haute
tourbière de Bourtange proprement dite. Commençons par le bord
occidental de l'Eems, pour considérer ensuite le bord oriental du
Vecht. Nous pouvons ajouter quelques autres observations, quoi-
qu'elles ne soient pas en rapport direct avec la description des
hautes tourbières.

A. Voisinage de l'Eems à Rheine.

En amont de la ville de Rheine, près du village d'Emsdetten,
l'Eems touche immédiatement au plateau, dans lequel il a érodé
son lit à une profondeur de 12 M. et dont les pentes ne sont
composées que de sable. A l'ouest la plaine de Diluvium sableux
monte lentement, jusqu'au curieux canal inachevé de Munster au
Vecht, qui est actuellement employé comme prairie et qui est en
plusieurs points en train de se remplir de tourbe.

Près de la grande métairie de Clemenshafen, située sur ce canal,
le sol n'est encore que du sable sans aucun caillou; mais tout
près commence une colline très distincte et allongée, qui s'étend
jusqu'à la chaussée de Rheine à Burgsteinfurt et se relève de
l'autre côté, pour disparaître bientôt sous le Diluvium sableux.
Nous y avons trouvé en profusion des cailloux de quartz, de silex, de
granit et de diorite, jusqu'à de 8 c.M., dont quelques-uns possédaient
des stries glaciaires distinctes. Dans un petit profil, à côté d'un
chemin creux, nous avons vu un sable graveleux bien stratifié;
mais nous n'avons vu nulle part l'argile à blocaux. ,

La colline a une direction du N.O. au S.E., comme tant
d'autres plus au nord et touche presque à la colline de „Thierberg",
de Rheine. Celle-ci, ainsi que la „Waldhîigel" de la rive gauche
et la „Stadtberg", de la rive droite, sont composés d'un calcaire
gris-bleuàtre d'âge turonien.

La base de la Thierberg est encore enveloppée du Diluvium
sableux; plus haut on ne voit que de l'argile, qui contient des
fragments anguleux du calcaire, dont elle est le produit de décom-
position. A mesure qu'on approche du sommet, on voit l'argile

m

Ui^

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61 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

diminuer à son tour, puisqu'elle est lavée à la base. Pendant ma
visite, assez courte du reste, je n'y ai pas trouvé d'erratiques;
peut-être ont-ils disparu, peut-être n'y ont-ils pas été déposés par
la glace quaternaire.

Il en est un peu autrement de la Stadtberg et de la rive droite
de l'Eems, où je n'ai vu à la surface du plateau que le Diluvium
sableux; le calcaire turonien ne se montre que sur la pente vers
la rivière. Tandis que la base seule de la Thierberg est enveloppée
de sable fin, la Stadtberg l'est en son entier. L'origine de la
brèche de l'Eems dans le barrage de calcaire est donc fort simple.
L'eau de fonte de la glace quaternaire a déposé une quantité
énorme de sable fin (Zanddiluvium), qui a enveloppé partiellement
la colline de calcaire. L'Eems a coulé d'abord à la surface de ce
sable et s'y est creusé un chenal, de plus en plus profond d'aval
en amont. A l'endroit où est situé Rheine il a rencontré du
calcaire dur et il n'a pu faire autrement que de continuer son
travail et éroder la matériel compact aussi bien que l'incohérent
(Pl. III, fig. 4). Quant à la troisième colline, la Waldhùgel,
elle présente le même succession de terrains que la Thierberg,
du Diluvium sableux à la base, de l'argile de décomposition au
milieu et la roche nue, désagrégée en haut.

Entre Rheine et Salzbergen se trouve l'ancien couvent de Bent-
lage, dans un entourage boisé et très pittoresque. L'entaille de
l'Eems y est très distincte; nous en avons mesuré la profondeur
de 11 M. Il est évident que ce chiffre ne diffère que très peu de
celui d'Emsdetten (12 M. à peine), quoique la marche régulière
de l'augmentation de la profondeur d'Aschendorf à Bentlage eût
fait attendre un chiffre plus grand. Or, il est clair qu'il n'en peut
pas être ainsi, puisque le chenal n'a pas partout été érodé dans le
sable et que la roche beaucoup plus dure de Rheine a dû agir
comme régulatrice. Elle retarde l'érosion dans le sable, jusqu'à une
certaine distance, tant en aval qu'en amont.

Plus près de Salzbergen, la carte topographique de Papen figure
un terrain boisé et marécageux „Das Bruch''et la carte géologique
de Von Declien un terrain d'argile wealdienne, qui y correspond
assez exactement. Nous n'avons fait que traverser ce bois et y
avons observé une argile jaunâtre avec des erratiques peu nom-
breux. C'était donc l'argile à blocaux réelle; peut-être la carte de
A^on Dechen est-elle incorrecte et l'auteur — ne connaissant pas
l'argile à blocaux lors de la construction de la carte — a-t-il fait

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62 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

de l'argile observée l'argile wealdienne, bien constatée en d'autres
endroits. Peut-être l'argile wealdienne y est-elle présente en réalité
et la partie supérieure a-t-elle été convertie en argile à blocaux.
Nous avons observé le même phénomène dans le bois de Bentheim
et — pour l'argile miocène — à Winterswijk.

B. Environs de Salzbergen et d'Emsbüren

Salzbergen est un petit village près de l'Eems, connu comme
point de jonction des chemins de fer Néerlandais et Prussiens;
Emsbüren se trouve à environ 9 K.M. au N.O., également à une
petite distance de l'Eems.

Entre ces deux villages une colline s'étend du S.E. au N.O.,
direction très fréquente plus au N., tandis que dans les provinces
Néerlandaises voisines cette direction est plus fréquemment du
N. au S.

Elle se compose de Diluvium graveleux, qui est tantôt du sable
et du gravier plus ou moins bien stratifié, tantôt de l'argile à
blocaux plus ou moins modifiée, contenant un grand nombre d'er-
ratiques scandinaves ordinaires. Parfois ils atteignent des dimensions
notables comme ceux dont l'homme préhistorique a construit le
dolmen (Steinbild) de Mehringen, entre EmsbVu^en et l'Eems.

La pente orientale de la colline, que suit le chemin de fer de
Lingen. est très douce et assez humide par conséquent. Elle ne
porte pourtant pas une tourbière véritable, mais seulement un
terrain marécageux, dit „Broekgrond" ou „Bruchboden", qui n'est
pas distingué de la tourbière véritable sur la carte topographique
du Hanovre de Papen, échelle de 1: 100 000, dont nous nous
sommes servis pendant nos excursions.
 j

A Emsbiiren la pente du sol dans la direction de l'Eems est
plus facile à observer; elle est interrompue près de la rivière ^ar
une étroite chaîne de dunes. Les prairies de la vallée sont exclu-
sivement sableuses; le sable en est tantôt déposé, tantôt enlevé par
le courant et n'a rien à faire avec les sables mobiles qui sont tous
en dehors de la vallée, sur la terrasse de Diluvium sableux ordi-
naire. Le village d'Emsbüren même est situé sur le versant occi-
dental de la colline de gravier ; les erratiques n'y sont pas fréquents;
on en observe davantage dans les parties plus élevées, où le sol
environnant a été dénudé par la pluie. i.

-ocr page 68-

63 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

La limite, qui sépare la pente de la colline et la plaine du Vecht,
est facile à tracer ; celle-ci est très marécageuse et en partie couverte
d'eau, déjà près de la chaussée de Salzbergen à Schultorf. Avec
quelque attention on observe une certaine régularité dans les
dépressions; elles sont allongées, larges de 5 à 6 M. en moyenne,
serpentent et ressemblent fort à des fragments de ruisseaux; il
faut donc les considérer comme les traces des cours d'eau, qui ont
autrefois déposé le sable de la plaine. Plusieurs sont moins pro-
fondes que les autres et constituent d'assez bonnes prairies; elles
ont probablement été remplies jadis de tourbe, qui a été enlevée
ensuite par l'homme. C'est à la hauteur d'Emsbûren qu'on observe
les premières hautes tourbières, isolées d'abord, mais se confondant
bientôt vers le nord.

C. Environs de Lingen et de Lohne.

Notre colline se termine à 3 K.M. au N.O. d'Emsbûren, où la
plaine sableuse du Vecht se prolonge sans interruption vers l'Eems.
Elle baisse visiblement et forme quelques terrasses, dont une porte
le village d'Eibergen, dans laquelle un petit profil montre des couches
horizontales de sable blanc, interrompues par un faible lit d'argile.

Ce village est à peu de distance du hameau de Haneken, où
l'Eems est barré à l'entrée des canaux de Nordhorn sur le Vecht
et de Meppen sur l'Eems. Le premier devra alimenter daias l'avenir
le canal Sud-Nord et indirectement les canaux des provinces de
Drenthe et de Groningue, lorsque les hautes tourbières, entièrement
enlevées, ne procureront plus l'eau nécessaire.

A Haneken nous sommes au commencement d'une seconde
colline, également graveleuse, mais moins longue que celle d'Ems-
bûren. Le passage, par lequel l'Eems a pu couler dans la plaine
des hautes tourbières et du Vecht, a une largeur d'environ 5 K.M.
L'espace entre la colline et la rivière est assez étroite ; on y observe,
près du château de Herzford, une terrasse bien distincte, vestige
d'une vallée moins profonde. Les bords de la rivière sont généra-
lement escarpés et très souvent boisés, ce qui, avec les nombreux
détours, rend le paysage très pittoresque.

L'extrémité méridionale de cette colline est profondément coupée
par le canal de Nordhorn, le long duquel on remarque d'abord le
gravier à erratiques, comme sol dragué ; mais peu à peu ils dimi-

-ocr page 69-

64 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

nueiit et sont remplacés par un sable avec des cailloux et ensuite
par du sable seul ou de l'argile grise. Le Diluvium graveleux dis-
paraît donc graduellement dans la profondeur. On le retrouve
encore dans la colonie méridionale du village de Loline dans des
fossés, profonds de 1—1,5 M., qui montrent du gravier et des
erratiques en abondance, couverts par le Diluvium sableux.

Assez près du village on remarque en plusieurs endroits l'argile
à blocaux très distincte; la colline porte aussi des sables mobiles
très développés, e. a. sur la route de Lingen; mais le noyau en
est le Diluvium graveleux, quoique la carte géologique la repré-
sante comme un sable mobile. La colline se termine à 2 K.M. au
nord de Nordloline, près du hameau de Wachendorf, où l'Eems
pourrait donc se déverser dans la plaine des tourbières, après avoir
rempli le chenal, dont nous avons évalué la profondeur à 4 —5 M.

La bruyère à l'ouest de la colline descend très lentement à l'ouest
et au nord-ouest et reste sèche et sableuse jusqu'à la colonie de
Schwarzenpohl, où commence réellement la haute tourbière. On
n'y voit que quelques tourbières isolées de très peu d'importance.
Selon la carte de Papen la limite de la haute tourbière se dirige
au N.E. a Dalum près de l'Eems et suit la rivière au N., à une
distance de 2—4 K.M.

li'

i,:

Ht"

D. Environs de Schüttorf et de Nordhorn.

Nous voulons commencer l'examen des bords du Vecht égale-
ment au village de Salzbergen. Comme nous venons de le voir,
à côté de la colline voisine s'étend une plaine, bordée à l'ouest par
le Vecht, qui n'y a pourtant cjue très peu érodé son lit et con-
traste avec l'Eems à Salzbergen. La cause en est simple: l'Eems,
qui vient des montagnes, est presque indépendante des terrains
voisins, tandis que le Vecht qui n'est pas très éloigné de son origine,
n'est qu'un cours d'eau local.

La bruyère intermédiaire est assez marécageuse; la carte de
Papen y figure un marais du nom de „Samerner-Rott", au sud
et un autre, du nom de „Käse-Venne", au nord du chemin de fer.
Nous n'avons visité que le dernier, qui est drainé au moyen de
fossés et il nous semble assez probable, qu'il ait été autrefois une
tourbière vidée complètement.

flii:

En aval de Schüttorf, à mi-chemin do Nordhorn, le village

mm

-ocr page 70-

CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 65

d'Engden est situé à quelque distance du Vecht, dans la vallée
d'un ruisseau tributaire. Les champs cultivés ne sont encore en
majeure partie que d'anciens sables mobiles, qui s'étendent le long
de la rivière. D'autres alternent avec des dépressions peu étendues
sur la lisière de la haute tourbière, qui coïncide assez bien avec
la route de Nordhorn à Emsbiu'en. On y voit de temps à autre
des restes de la tourbe d'autrefois jusqu'à 1 M. au-dessus des
prairies; ce ne sont cependant que des tourbières locales, peu
étendues, car ailleurs on voit la tourbe s'amincir et disparaître
graduellement. Ces dépressions, dont deux d'assez grande taille
figurent sur les cartes, sont probablement des restes d'anciens cours
d'eau; ils sont parfois sinueux, forment de petites prairies et cau-
sent parfois à leur tour de petits sables mobiles.

A Engden et davantage à Nordhorn on voit que la vallée du
Vecht est plus profonde qu'à Schiittorf ; l'érosion du chenal va donc
en diminuant de bas en haut. On n'y aperçoit pourtant pas encore
les
„esschen^' en forme d'îlots de l'Overijsel; la vallée est simple
encore, ne contient que des prairies et est nettement séparée des
terrains labourés ou de la bruyère d'à côté. Les complications
ne se présentent que bien plus en aval.

La ville de Nordhorn est située en son entier dans la vallée,
qui a une largeur d'environ 1 K.M. et une profondeur évaluée à
2 M.; les rives en sont parfois escarpées. La bruyère voisine monte
lentement, à mesure qu'on s'éloigne , de la rivière et se transforme
graduellement en prairies isolées, qui se confondent peu à peu. En
prenant la chaussée de Lingen on voit à 4 K.M. de Nordhorn le
bord de la tourbière, près d'un petit ruisseau tributaire du „Hol-
liindischer-Graben". La chaussée la longe sur une distance de
2 K.M. et y entre ensuite. D'aboi'd la surface en est solide et dure,
conséquence du drainage par les fossés parallèles à la chaussée ; mais
à une distance d'une centaine de mètres, l'état normal et maréca-
geux s'établit. Elle n'est pas exploitée, car les monceaux de tourbe
ne se montrent qu'à une grande distance au N.E.

Cet angle de la haute tourbière, dans le voisinage de l'écluse II
du Canal Sud-Nord, est remarquable par la grande quantité de
limonite qui y est exploitée régulièrement. Elle ne se trouve que là
oil la couche de tourbe est très mince, de 1—2 d M., et repose
directement sur le sous-sol sableux. J'y ai observé des traces du
Diluvium graveleux, sous forme d'un sable contenant un certain
nombre de cailloux de quartz blanc et de silex jaune.

9

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66 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

La limonite s'étend jusqu'à environ 300 M. à l'est du canal ; à
l'état mouillé elle est entièrement noire et devient brune en séchant.
D'après les ouvriers elle a une épaisseur de 20—25 c M. et repose
directement sur le sable, qui vient à la surface de l'autre côté du
canal. En cet endroit la limite de la tourbière, selon la carte de
Staring, doit être rétrécie de V-—1 K.M.

E. Environs de Neuenhaus.

Le village de Neuenhaus est situé sur la petite rivière du Dinkel,
dans l'angle formé par sa jonction avec le Vecht. La carte géolo-
gique de Staring figure de l'argile de ruisseau dans les deux val-
lées, ainsi que dans celle du „Holländischer-Grabeii", mais nous
n'en avons pu découvrir de trace. Il est vrai que, par suite du
sol bas et humide, quoique sableux, il s'y trouve des prairies étendues
dans des dépressions, qui ne sont rien d'autre que des lits oblitérés
des deux rivières.

Il en est un peu autrement à l'est du Vecht entre les hameaux
de Hohenkörben et de Bimolten, où la carte géologic][ue figure un
terrain en cul de sac, couvert d'argile fluviatile. En allant du
village de Veldhausen (à l'est de Neuenhaus), au S.E., à Bimolten,
on n'aperçoit d'abord que le Diluvium sableux, horizontal, con-
verti presque entièrement en champs labourés. En quittant ce
hameau pour Hohenkörben, situé au N.E., on observe bientôt des
ondulations, des sables mobiles, rentrés en repos depuis longtemps
et alternant avec des prairies dans les dépressions. Elles ne con-
tiennent ni argile, ni haute tourbe proprement dite, mais tout au
plus une couche de tourbe de marais de 1—2 d.M., sur de la
limonite. Ces prairies augmentent en étendue à mesure qu'on
s'éloigne du Vecht; la chaussée en traverse e. a. une zone osten-
sible et longue, à 1—2 K.M. à l'ouest du Canal Sud-Nord. Elle est
parfaitement reconnaissable sur la carte topographique, quoique plus
large en réalité et traversée par un ruisseau latéral du Hollän-
discher-Graben. Au sud ces prairies ne sont pas en continuité
avec la tourbière peu épaisse de Nordhorn; au nord elles se con-
tinuent dans la tourbière de Bourtange.

Elles augmentent en étendue de l'ouest à l'est, contrairement à
leur différence de niveau avec les parties plus élevées. C'est ce
qu'on observe très bien plus près de Veldhausen, où la bruyère cesse

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-ocr page 72-

67 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

et est remplacée par des terres labourées, séparées par des prairies
peu étendues mais bien plus basses. La carte topographique montre
distinctement cette alternance, qui est due au phénomène connu
des sables mobiles; la différence de niveau peut y monter jusqu'à
2 M. On rencontre souvent de la limonite dans ces dépressions,
ainsi que des deux côtés du canal, dans la vallée du Hollfindischer
Graben et de ses affluents.

De l'autre côté du canal s'étend un terrain sableux, sec, plat,
avec des champs cultivés, des bois et quelques sables mobiles. C'est
la colonie de Wietmarschen, qui borde au S. la haute tourbière de
Bourtange. Elle est bordée à l'est par la bruyère ordinaire, sur
laquelle on observe çà et là les différences de niveau que nous
venons de décrire et des sables mobiles distincts. La tourbe n'y est
que sporadique à 5 K.M. à l'est de l'église; elle n'atteint qu'une
épaisseur de 8 c.M. et est indépendante de la haute tourbière de
Bourtange.

Pourquoi la haute tourbière à l'est de Nordhorn n'est-elle pas
en continuité avec celle de Bourtange? C'est une des nombreuses
questions si difficiles à résoudre, que nous avons rencontrées à
plusieurs reprises pendant nos excursions. La haute colline de
Lohne constitue naturellement un obstacle à son extension à cause
de sa sécheresse, et il nous eût paru naturel que la lisière de la
tourbière eût décrit une courbe autour do cette colline, pour re-
joindre la tourbière de Nol'dhorn-Emsbüren. Mais le terrain entre
liOhne et Wietmarschen est très sec et ne porte que quelques tour-
bières locales très peu importantes, tandis qu'au sud et au sud-ouest
de Wietmarschen, jusqu'à la hauteur de Schiittorf et au-delà, la
bruyère est souvent très humide et marécageuse et porte même
une haute tourbière assez étendue, quoique peu épaisse.

Une des causes de ce phénomène est probablement la profon-
deur du canal d'érosion du Vecht, diminuant assez vite d'aval en
amont et entraînant la hausse de la nappe aquifère superficielle.
Cela explique pourquoi le terrain au sud de Wietmarschen est
marécageux, mais non pourquoi la colonie elle-même est relative-
ment sèche. Nous ne voyons d'autre solution que de la considérer
comme un ancien sable mobile de grande étendue, qui aurait été
tellement nivelé par les pluies cjue nous n'avons pu le reconnaître
pendant nos visites, malgré notre expérience en cette matière. De

9*

-ocr page 73-

68 CONTltrBUTlONÖ A LA (lÉOLOUlE DES PAYS-JîAS.

nombreux nivellements pourront contribuer à résoudre cette question.

La tourbière de Bourtange ne s'étend doue pas au sud de Wiet-
marschen et la carte géologique devra être modifiée. N'ayant pas eu
le temps de tracer une autre limite, nous avons donné à la tour-
bière de Norhorn une limite arbitraire, qui n'a d'autre mérite que
de montrer le manque de continuité des deux tourbières et est
entièrement provisoire.

XVI. HAUTE TOURBIERE J)E BOURTANGE.

Nous allons maintenant nous occuper de la haute tourbière la
plus étendue de l'Europe, qui emprunte son nom à une petite
forteresse, fondée en 1593, mais démantelée depuis longtemps.

Nous voulons en examiner successivement:
1°. le bord oriental, le long de l'Eems,

le bord occidental, le long du plateau de Drenthe,
3°. le terrain sableux du pays de Westerwolde, qui divise la tour-
bière en deux bras.

1°. Bord oriental et Rive gauche de VEems.

A. Environs de Meppen.

Au sud de la ville de Meppen, situées sur la Haase, près de son
embouchure dans l'Eems, on observe facilement, le long du chemin
de fer de Lingen, une série de fragments de ruisseaux oblitérés en
forme de dépressions sinueuses, tantôt contenant de l'eau et des
joncs, tantôt converties en prairies. De l'autre côté de la ville, vers
les villages de Versen et de Rühle sur TEems, on observe des
phénomènes semblable;-^, mais plus près do la rivière et en rapport
direct avec elle. Il s'y étend une zone basse de prairies, inondée
chaque hiver et constituant clairement un ancien lit, dont la rivière
pourrait reprendre possession, une année ou l'autre.

Aux environs de Meppen les sables mobiles prennent un déve-
loppement énorme sur la rive gauche de l'Eems. A Versen, ainsi
qu'a Gross-Fullen, ils s'élèvent visiblement au-dessus des terrains
à l'est et à l'ouest; cependant leur surface n'est pas accidentée
comme en d'autres endroits; elle n'est que médiocrement ondulée.

-ocr page 74-

CONTRIlJUTiONS A LA GEOLOUIE DES PAYS-BAS. 60

Le sable en est très fin et ressemble en tout point à celui des
dunes plus typiques, avec lesquelles il est en continuité en plusieurs
endroits La cause de cette différence ostensible n'est pas fort
difficile à découvrir: ce n'est que la conséquence du labourage,
qui fait disparaître peu à peu les petites inégalités. Pendant les
temps de sécheresse le sol est en meme temps protégé par la
végétation contre les attaques du vent, qui ne peut pas créer de
nouvelles inégalités. Or, il est clair que la nature peut en faire
autant en les couvrant de végétation pendant quelques années
humides, et que les pluies finiront par aplanir les inégalités accen-
tuées. Il s'est formé naturellement des dunes antérieures aux hautes
tourbières, partout où il y avait à découvert du sable fin suffisamment
sec, dans l'immense désert situé entre l'Eems et le Plondsrug. Nous
sommes convaincu par conséqueiit que la plus grande partie des
sables fins, qui s'élèvent au-dessus de la surface de ces tourbières,
ne sont que des dunes très anciennes, qui ont été plus ou
moins nivelées.

Revenons à Gross-Fullen ! La présence de nombreux erratiques
dans le village attire l'attention; mais on ne les voit in-situ qu'à
quelque distance à l'ouest, sur la route de la colonie de Tuntel,
qui traverse une colline allongée du N. au S., où l'argile à blocaux
avec de nombreux erratiques se montre dans les fossés. Nous
pouvons admettre que Gross-Fullen est situé sur l'extrémité méri-
dionale d'une troisième colline de Diluvium graveleux, qui con-
stitue la. rive droite du second passage de l'Eems à l'ouest, bordé
au sud par la colline de Haneken—Nordlohne.

Ce passage est notablement plus large que le premier et mesure
17 K.M. ; le sol j monte lentement à l'ouest, les dunes diminuent
en hauteur et disparaissent dans cette direction ; en même temps
le sol devient de plus en plus marécageux, à mesure qu'on approche
de la haute tourbière. Cela vient de ce que le drainage dans la
direction de la profonde vallée de l'Eems est en grande partie
souterrain; les ruisseaux superficiels sont tout à fait insignifiants.

B. E n V i r 0 n s de W e s u w e.

Au N. O. de Gross-Fullen, le terrain monte plus vite, car ce
n'est plus la plaine de Diluvium
sableux, mais une colline de Dilu-
vium
graveleux, à l'extrémité occidentale de laquelle f^e trouve la
colonie de Tuntel-Neu-Versen sur la lisière de la haute tourbière.

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70 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

En suivant la colline jusqu'à Wesuwe on remarque, sur le ver-
sant oriental à 5—6 M. au-dessus de l'Eems, des cours d'eau obli-
térés, en forme de dépressions allongées, sinueuses et plus ou moins
parallèles entre elles. Elles ont toutes une dii-ection du S. au N.,
qui est celle de la colline elle-meme et représentent les étapes
successives du courant, qui s'est retiré de plus en plus vers l'Eems
actuel, en érodant son lit.

Le chenal d'érosion y est devenu moins profond qu'à Lingen
et qu'à Meppen ; nous en évaluons la profondeur à 3 M. Les prai-
ries dans la vallée se composent encore exclusivement de sable;
nous n'y avons trouvé aucune trace d'argile.

La colline elle-même est aussi beaucoup moins élevée que les
précédentes ; nous l'évaluons à 7 M. au-dessus de l'Eems. L'extré-
mité septentrionale est entourée et en partie couverte de sables
mobiles, qui s'étendent à une distance de 5 K.M. environ dans
la direction de Ruitenbroek et tendent à séparer en deux la grande
tourbière de Bourtange. Les noms des hameaux „Die Düne" et
„Dilneburg" (à l'ouest de Haren) montrent que les habitants ne
doutent nullement de l'origine de ces masses de sable. Elles sont
encore en partie mobiles, escarpées par conséquent, et s'élèvent no-
tablement au-dessus de la haute tourbière, p. e. près de Hümmels-
berg entre Haren et Altenberge Le Diluvium graveleux y est en-
tièrement aplani et recouvert de sable mobile ; on peut pourtant en-
core l'observer dans les champs labourés au sud de la propriété de
Dankern. C'est ici le point le plus septentrional, où nous avons
observé le Diluvium graveleux près de l'Eems; dans les environs
de Haren même nous n'en avons pas retrouvé de trace.

A Wilholte nous avons évalué la différence de niveau de la plaine
des tourbières et de l'Eems à 2 M. seulement, de sorte qu'il hxu-
drait peu de chose pour les inonder. ' Il résulte en tout cas de cette
dimunition do différence de niveau entre la plaine adjacente et
l'eau de la rivière (11 M. à. Bentlage, 2 M. à Wilholte), quö la
plaine descend plus que la rivière, qui a beaucoup plus érodé
son lit en haut qu'en bas, ce qui du reste est le cas normal.

C. E n virons d'A 11 e n b e r g e.

Revenons à Haren pour examiner le promontoire de terres éle-
vées, qui s'étend jusqu'à un bras étroit de la haute tourbière, tra-
versé par le ruisseau „Alte Schlot" et par le Canal Sud-Nord.

lt..

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71 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Celui-ci coupe la chaussée de Ter-Apel tout près d'uue glaisière,
OÙ nous avons été très étonné de ne pas trouver l'argile à blo-
caux. C'était au contraire une argile bleu-clair, dépourvue de cail-
loux, venant parfois à la surface et renfermant des nodules mar-
neuses, formées in-situ. Généralement elle était couverte d'un sable
à erratiques jusqu'à 2 d.M., et renfermait une couche de tourbe
presque amorphe. L'argile nous a paru par conséquent être de
l'âge préglacial, .à cause de son analogie avec les argiles sembla-
bles de rOverijsel, surtout de Rijssen.

Le même Diluvium graveleux est aussi présent dans le hameau
d'Altenberge, mais caché à une faible profondeur. A. l'est la route
monte d'environ 1 M. et aussitôt on voit les erratiques réappa-
raître dans les fossés et dans la bruyère, où ils se trouvent en
grand nombre près des fermes. Un des plus grands, caché en partie,
mesurait 10 x 6 x 3 d.M.

Le long du même hameau d'Altenberge la haute tourbière
approche de très près de la route, y a été mise en culture et
a été couverte, dans ce but, du sable creusé en dessous. Celui-ci
contenait un grand nombre de cailloux de granit, de silex et aussi
de quartz blanc de petite taille et d'autres jusqu'à 1 d.M. Le
Diluvium s'enfonce au nord sous la haute tourbière et au sud
sous les sables mobiles, p. e. au petit hameau de „Knuftange", où
le promontoire a son point culminant, ainsi que sa plus grande
largeur (3 K.M.). Au S. 0. il s'étend jusqu'aux hameaux de „Die
Haar" et de „Langenberg". Dans le premier, où nous avons
observé quelques traces douteuses du Diluvium graveleux, le
contraste est très frappant entre le sol sableux élevé et ondulé et
la haute tourbière basse et parfaitement plane. La dernière montre
à l'ouest un certain nombre des troncs d'arbres ordinaires, qui
n'etaient pas enracinés dans le sous-sol (invisible du reste), mais
dans la tourbe même; c'étaient probablement des sapins.

D. Environs de Rhede.

Le village de Rhede, près de l'Eems est à 4 K.M. au N. 0.
du village d'Aschendorf, situé au bord d'un ancien lit de la
rivière, qui était probablement la rivière même lors de la fonda-
tion du village. C'est là que nous avons enfin observé l'argile sur
les rives de l'Eems; partout ailleurs en amont nous n'avons pu
trouver que du sable. Ce n'est qu'ici que le jeu des marées

-ocr page 77-

72 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

se fait sentir et que l'argile peut se déposer pendant le refoule-
ment. Néanmoins il n'y a aucune raison de l'indiquer comme
argile marine, ainsi que le fait Staring; l'eau y est encore parfai-
tement douce et ce n'est que de l'argile fluviatile.véritable.

En traversant le village de Borsum, vis à vis d'Ascliendorf, on
observe une colline étendue, très peu ondulée, assez élevée et entière-
ment cultivée. Vu son étendue, nous l'avions tenue d'abord pour un
monticule de Diluvium graveleux et nous y avons rencontré aussi
quelques erratiques de granit d'environ 1 d.M. Tous servent à indiquer
les limites des champs et comme on n'y voit aucun caillou plus petit,
ils y ont été très probablement apportés à dessein. La colline se
compose exclusivement de sable fin, et chaque fois que nous avons
cru voir un caillou, ce n'était qu'un morceau de poterie, de verre,
de porcelaine ou un fragment d'os. Nous pouvons donc admettre
sans danger, que ce n'est qu'un terrain de sable mobile, nivelé
par une longue culture. Du reste, son passage en dune sauvage
est non-équivoque dans les „Borsumer-Berge", situées un peu plus
loin au nord, dont une partie a été également mise en culture,
mais depuis moins longtemps que le terrain situé tout près de
Borsum.

Depuis le village de Rhede on peut suivre un rejeton de sable
plus élevé à une grande distance au S. S. O. (3 K. M.), jusqu'à la
colonie de Neu-Rhede sur la frontière néerlandaise. Ce n'est pas
seulement un chemin de sable, artificiellement rehaussé sur la haute
tourbière, mais en réalité un dos élevé, tantôt plus large, tantôt
plus étroit et portant des fermes et des champs labourés. Ce
promontoire s'élève en moyenne de 1—2 M. au-dessus de la haute
tourbière et est le plus large et le plus élevé dans la colonie de
Neu-Rhede, oii il porte encore des dunes mobiles.

F. Niveaux relatifs du Sous-sol de la Tourbière;

Examinons maintenant les chiffres, qui peuvent nous donner
une idée exacte du rapport, qui existe entre les pentes de l'Eems
et de la plaine d'ouest, en partie surface naturelle, en partie sous-
sol sableux de la haute tourbière.

L'Eems n'est plus une rivière libre; car pour en régler le cours
et dans l'espoir de la rendre navigable, on l'a barrée en plusieurs
points entre 1819 et 1824. En comparant les niveaux du zéro en

-ocr page 78-

73 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

différents endroits, on peut pourtant se faire une idée assez exacte
de la pente générale de la rivière. Nous devons ces chiffres à
l'obligeance de M. Oppermann
„Rf^gierungs- und Bauratli" à Munster
en Westhpâlie.

Zéro („Emspegel") à Rheine 27,30 M. -h A. P.

à Bentlage 22,70 M.
à Listrup 20,90 M.
à Haneken 18,50 M.
à Lingen 17,10 M.
à Meppen 9,50 M.
à Haren 6,60 M.

La distance en ligne droite de R.—-H. étant d'environ 60 K.M.
et la différence de niveau de 20,70 M., la pente de l'eau est égale
à 0,035%.

M. Oppermann nous a également procuré plusieurs chiffres du
niveau du sol à partir de Maxhafen, extrémité septentrionale du
curieux Canal de Max-Clemens, qui était destiné à réunir la ville de
Munster au Vecht. Maxhafen (métairie) est situé à 9 K.M. à
l'O.S.O. de Rheine et à 47 M. + A.P. Le sol descend successi-
vement cà 40,5, 36,6, 33,8, 32 et 27,8 M. -h A.P., près du Canal
„Eems—Vecht" entre Haneken et Nordhorn. Le travail de M.
Salfeld, de Lingen:
„Geogra2)hische Beschreibung der Moore des
nordwestlichen Deutschlands^',
faisant partie des „Landwirthschaft-
liche Jahrhucher''
de 1883 et 86, Berlin, Paul Pare}^, nous donne
à son tour quelques autres chiffres. Ils ont rapport au sol
sableux à côté des Canaux „Eems—Vecht'' et „Sud-Nord". Nous
descendons le long du premier de 27,8, 26,3 et 23,9 M. + A. P.
à Nordhorn et ensuite au nord, le long du second, par 22,25, 20,
18,75, 17,50, 16,75, 15,75, 13,75 et 12,35 M. -t- A.P. Ce dernier
chiffre est celui du sol près du Canal Sud-Nord à sa jonction au
Canal de Haren à Ruitenbroek De même que nous avons cal-
culé la pente moyenne de l'Eems de Rheine à Haren, nous
voulons calculer celle du sol sableux de Maxhafen à Ruiten-
broek; la distance est seulement un peu plus grande — 70,5 K.M.
contre 60 - et la différence de niveau l'est par conséquent aussi.
Cette dernière est de 47—12,35 = 34,65 M.; le chiffre moyen est
donc de 0,05% et dépasse notablement celui de la pente moyenne
de l'eau, savoir 0,035%,. Même en admettant pour le niveau de

10

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74 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

l'eau à Kheine celui de 30,4 M. (en amont du barrage), nous
n'obtiendrions encore qu'une mo3^emie de 0,04%.

La surface du sol entre l'Eems et le Vecht répond à ce qu'on
en pourrait attendre ; il est en forme de dos, descendant des deux
côtés, la crête étant tantôt un peu plus à l'ouest, tantôt plus à l'est.
Le dernier cas se présente e. a, le long du canal de LIaneken à
Nordhoni, oil les niveaux du sol sont de 23,4, 25,8, 28, 27,8,
27,8, 26,3, 23,9 et 22,5 M., près du Canal Sud-Nord. Le niveau
du sol de la plaine tout près de l'Eems (23,4 M. + A. P.) ne
diffère donc que très peu de celui près du Vecht (22,5 M. + A P.),
ce qui est assez remarquable, attendu que le Vecht est aujourd'hui
une rivière bien plus petite que l'Eems. La „Ruiten-Aa" et sa
vallée sont dans une condition diff'érente; elle coule à un niveau
bien supérieur à celui de l'Eems, ce qui est rendu évident par la
comparaison des niveaux de l'eau dans les différentes sections du
canal de Ruitenbroek à Haren, Le niveau du „Stads-Kanaal" près
de Ter-Apel est de 10,40 M., celui de la section du canal R.—H.
entre la frontière et l'écluse I (prussienne) de 11,40 M. (= dernière
section du canal Sud—Nord), entre les écluses I et II de 10,30 M.,
entre les écluses II et III (à Haren) de 8,30 M , tandis que le zéro
de Haren est égal à 6,60 M., le niveau moyen de l'Eems à 7,30
et le niveau le plus élevé à 10,60 M. Actuellement l'Eems ne
pourrait donc. plus jamais passer de LIaren à la Ruiten-Aa,
abstraction faite naturellement des dunes et des tourbières.

La faible différence de niveau entre le sol de Ter-Apel ou de
Ruitenbroek et la plaine des hautes tourbières a donné lieu autre-
fois à de curieux démêlés entre les habitants des frontières.
M. Oppermann raconte ce qui suit dans son travail „
Uebersicht
der Âbwàsserungsverhàlhiisse in dem Herzogthume Arenherg-Meppen
und den Grafschaften Bentheim und Lingen.''
La ligne de partage
hydrographique entre l'Eems et la Ruiten-Aa passe par Hebeler-
meer, à l'ouest de Ruitenbroek, à l'est de Neusustrunl et de
Neudersum, par Bourtange et ensuite à peu près le long de
la frontière. Une grande partie de l'eau de la tourbière de Bour-
tange s'écoulait dans la Ruiten-Aa, ce qui était plus facile que
dans l'Eems. Par là les prairies de la ^Ruiten-Aa étaient seUsible-
ment endommagées et même les terres argileuses de Bellingwolde.
Pour y remédier, le gouvernement des Pays-Bas fit construire
en 1688, une digue, de Ruitenbroek à Bourtange, qui retint
l'eau de la tourbière. Elle s'écoula ainsi à Bourtange et de la

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75 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

dans l'Eems. Tout cela n'était pas bien réglé, de sorte que les
habitants de Ruitenbroek et de Neurhede furent souvent incom-
modés par l'eau. Il y avait bien près de Ter-Apel un siphon sous
le „Leidijk" pour conduire une partie de l'eau dans laRuiten-Aa;
mais il était insuffisant. Les Allemands y remédièrent en perçant
chaque printemps la digue, même en dépit d'une garde militaire.
Des inondations jusqu'à Bourtange en fin-ent la conséquence et
les Hollandais à leur tour perçèrent le Leidijk à Sellingen (ce doit
être la „Bakovenkade" à Bourtange d'après la carte du Water-
staat), de sorte que l'eau s'écoulait de nouveau par Bourtange et
Neurhede dans l'Eems. Depuis ^1824 l'état des choses est mieux
réglé, mais en hiver il laisse encore beaucoup à désirer.

Résumons maintenant les résultats de nos observations sur le
bord oriental de la haute tourbière de Bourtange. D'abord, il n'est
pas simple, mais fréquemment entrecoupé par des promontoires
considérables de sables mobiles, contenant parfois des noyaux de
Diluvium graveleux, comme à Altenberge. Nous pouvons donc y
supposer un terrain, dès l'origine plus sec que le sous-sol de la
haute tourbière, mais ailleurs, la cause de ces promontoires n'est
pas parfaitement claire. En tout cas, ils sont plus anciens que la
haute tourbière, quoique aj^ant été modifiés plus tard. Peut-être ont
ils pris naissance dans une période de sécheresse précédant la for-
mation de la haute tourbière.

Ensuite nous avons rencontré trois collines très distinctes de
Diluvium graveleux: la première près de Salzbergen, la seconde
près de Lingen et la troisième prés de Meppen. Ce n'est que cette
dernière qui borde immédiatement la haute tourbière et en forme
un bout de rive naturelle, plus élevée. Celle de Lingen en est
séparée par une zone de Diluvium sableux horizontal, tandis que
la première • n'a de haute tourbière dans le voisinage qu'à son
extrémité septentrionale. A l'ouest elle touche à une plaine assez
humide et qui nous a semblé favorable à la formation d'une haute
tourbière, mais elle ne paraît pas en avoir porté. Pourquoi? Nous
nous sonnnes déjà plusieurs fois trouvé en face de cette question et
nous avons dû nous contenter de cette réponse (qui n'est pas une
solution): „la tourbière se serait probablement aussi étendue dans
cette direction ; mais elle n'en a pas eu le temps." Peut-être aussi
l'humidité a-t-elle des os«illations trop grandes. La cause de la li-
mite de la haute tourbière à l'est est évidente au contraire : c'est la
rivière de l'Eems, qui draine ses rives, d'autant plus qu' elle a

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76 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

plus profondément érodé son lit. En général la tourbière s'en ap-
proche davantage au nord qu'au sud; cependant il ne faut pas
prendre seulement en considération le cours actuel, mais aussi les
lits abondonnés, situés plus à l'ouest, qui drainent également. Ce
drainage et l'abaissement du niveau de l'eau souterraine ont aussi
causé l'affaiblissement des ruisseaux à mesure qu'ils s'approchent
de la rivière, ainsi que le développement des sables mobiles. On
croit souvent, et cela paraît assez naturel, que ces sables obstru-
ent le drainage superficiel et favoriseraient le développement de
la tourbière; mais en réalité il n'en est pas ainsi. La tourbière
s'arrête au contraire et les sables mobiles se développent à la suite
d'une même cause, le drainage souterrain dans la direction du
profond chenal de l'Eems.

Nous voyons donc que la tourbière s'est développée sur un ter-
rain à pente très faible, tant au N. que à l'E. Cette pente est trop
faible pour permettre le développement d'un système de drainage
superficiel dans la direction d'nn fleuve, qui n'a guère de rapport
avec cette plaine sableuse.

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2°. Bord occidental, le long du Hondsrug.

A. Environs d'Emblicheim et de Schoonebeek.

Lors de notre visite dans cette contrée, en 1891, on creusait le
Canal Sud-Nord à la hauteur de la route de Koevorden par Schoo-
nebeek à Meppen. La tourbe y a une épaisseur de 2 M., repose sur
du Diluvium sableux sans aucun caillou et est cultivée en grande
partie de blé sarrasin. ■

La colonie de „Ruhler-Twist" emprunte son nom au village de
Riihle, sur l'Eems près de Meppen et constitue l'extrémité allemande
d'une colonie très longue, située sur le territoire néerlandais et com-
posée des villages de „Nieuw-" et d'„Oud-Schoonebeek", s'étendant
— selon la carte géologique — sur une zone de Diluvium sableux
et de tourbe de marais, entourée de haute tourbière. En réalitéjil en
est bien autrement, car la haute tourbière n'y est guère interrompue
du S. au N. que par le ruisseau même. Cependant la tourbe de ma-
rais se trouve tout près du ruisseau, entre les deux villages; mais
elle est bordée au nord par la haute tourbièi-e, qui porte aussi la route

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77 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

et les maisons. En quelques endroits, il vient du sable à la sur-
face, e. a. autour d'une des écoles de Nieuw-Schoonebeek et tout
près de l'église catliolique; mais ce n'est ici encore qu'un îlot
d'ancien sable'mouvant dans la haute tourbe.

Celle-ci n'a pas une épaisseur considérable ; car plusieurs champs
labourés ont été couverts artificiellement avec le sable d'en-dessous,
ce qui a peut-être induit en erreur le correspondant de Staring.
La colonie est bien drainée et il j croit un grand nombre d'arbres,
principalement des bouleaux, mais aussi des chênes, des hêtres
et des sapins

Au sud du ruisseau ne se trouve d'abord que la tourbe; mais
à l'ouest, il apparaît une zone de Diluvium sableux, humide au
commencement et imprégné de limonite prés de la surface, qui
borde un rejeton occidental de la haute tourbière. En le traver-
sant du N. au S. à Klein-Ringe, près du Vecht, en amont d'Em-
blicheim, on voit qu'il est relativement sec et situé sur une pente
faible du „Diep". La tourbe n'a pas été entièrement enlevée, comme
le veut la carte; elle est labourée ou convertie en prairie; on y
creuse aussi
Line bonne quantité de tourbe. Sur la limite méridi-
onale, près du Canal de Koevorden, la tourbière est bordée par
une zone de sables mobiles, sur la crête du terrain, qui descend
d'une manière sensible vers le Vecht.

En aval d'Emblicheim, entre Laar et Koevorden, la bruyère
marécageuse n'est composée que de sable, qui contient pourtant
quelques cailloux de quartz blanc, jusqu'à 1 c.M,, de sorte que le
Diluvium graveleux n'est pas très éloigné.

Le „Schoonebeeker-Diep" sépare donc une partie de la haute tour-
bière de la masse principale; mais il est assez probable que cette
partie a été à l'origine bien plus indépendante encore et que leur
réunion est devenue de plus en plus complète par l'envahissement
graduel de la vallée par la haute tourbière.

En suivant la route de Nieuw-Schoonebeek à Koevorden,
on voit d'abord la haute tourbière s'étendre : en son entier
jusqu'au ruisseau. Il y apparaît ensuite des îlots de sable,
séparés par des rejetons de haute tourbière, qui croisent la route.
Les premiers augmentent, tant en nombre qu'en taille; les derniers
diminuent et finissent par disparaître. Nous ne voyons là encore
que les effets de l'érosion; l'eau, qui s'écoulait de la haute plaine
sableuse vers la dépression du Schoonebeeker-Diep, a creusé quelques
chenaux larges et peu profonds, analogues à ceux de l'„Etten-

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78 CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS.

Zwet" et du „Barger-Beek", qui ont persisté comme ruisseaux.

D'après ce que nous avons pu observer, le sable à la surface
naturelle est rare à l'est de la borne kilométrique 9 (dans Oud-
Schoonebeek). Ainsi les hameaux, appelés „Oosteind" et „Kerkeind"
(avec la vieille église), nous paraissent avoir été bâtis sur le véri-
table Diluvium sableux, qui prend peu à peu le dessus sur la
tourbe, à mesure qu'on avance à l'ouest. Plus près du „Diep", du
sable vient aussi a la surface; on aperçoit déjà de loin le „Wolt-
mans-Belt", couvert d'herbe et situé au milieu de la prairie de
„Kerkeind", mais ce n'est qu'un ancien sable mobile, analogue à
tant d'autres,

A l'ouest de la borne kilométrique 9, près de la barrière, la haute
tourbière continue s'éloigne de la chaussée et les sables mobiles
deviennent plus apparents. Pourtant la tourbe (locale peut-être)
apparaît encore entre les bornes kilométriques 8 et 6 ; mais l'en-
tourage des hameaux de „Vlieghuis" et de „Weyerswold" est du
sable à surface ondulée et assez élevée.

B. Environs de Dalen.

D'ici à Dalen, le sol devrait être couvert de l'argile du Vecht,
d'après la carte géologique; mais nous n'y avons observé qu'un
sol marécageux sableux ou tourbeux, interrompu par d'anciens
sables mobiles, peu étendus et par de hautes tourbières, locales ou
bien en relation av'^ec celle de l'est. En plusieurs points nous avons
observé également la pente du N. au S.

Tout ce terrain, à l'E. et au N.E. de Koevorden, étant maréca-
geux, nous n'avons pu comprendre pourquoi la haute tourbière
ne s'est pas étendue plus loin. Nous rencontrerons encore ^ en
plusieurs endroits des terrains semblables, qui ont attiré l'atten-
tion aussi de Staring. J1 a éprouvé la même difficulté; mais il
a cru la surmonter en admettant qu'il y a eu réellement des hautes
tourbières, dont la tourbe aurait été enlevée par l'homme. Nous
croyons devoir rejeter cette explication gratuite, puisque nous
n'avons retrouvé aucune trace de la tourbière d'autrefois et puis-
que nous avons toujours observé que l'homme enlève la tourbe
assez irrégulièrement et négligemment, excepté quand il creuse
des canaux. Dans ce cas-ci on devrait retrouver les canaux, tombés
parfois en ruine, mais encore facilement reconnaissables.

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79 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

A Schooaebeek, le sous-sol de la haute tourbière n'est que du
sable fin, mais plus près de Dalen, uous avons trouvé une indi-
cation du Diluvium graveleux. C'était près d'un petit caual latéral
(wijk) du „Ruimsloot", au N.E. de Koevorden, oii le sous-sol était
composé de sable avec quelques rares cailloux, en majeure partie
des quartz blancs.

Le village même de Dalen est situé sur une espèce de pro-
montoire méridional du plateau de Drenthe, bordé à l'ouest par
la vallée du „Loo-Diep'' et à l'est par celle du „Drosten-Diep". Dans
les environs immédiats on n'aperçoit que le Diluvium sableux,
cachant probablement à une faible profondeur le Diluvium Scan-
dinave, qui vient à la surface un peu plus au nord. En allant du
village à l'est on traverse d'abord deux petits ruisseaux, appelés
également „Ruimsloot", puis la vallée large et profonde du Dros-
ten-Diep, qui est en disproportion visible avec le ruisseau qui y
coule
actuellement. Elle est couverte de prairies, comme dans la
règle; mais le sol n'est pas tourbeux partout, comme l'indique la
carte géologique; nous n'avons observé que du sable jusqu'à
la .rive droite du ruisseau et de la tourbe sur la rive gauche.

Le sous-sol de la vallée contient en même temps une quantité
notable de limonite, qui est creusée en plusieurs endroits. La
tourbe de marais se continue même au-delà de la limite donnée
par Staring et de la route dite „Dwarsdijk". Ici le terrain monte
lentement et la tourbe de marais de la vallée passe à la haute
tourbière de la manière suivante.

On voit apparaître dans la plaine tourbeuse quelques champs
sableux un peu plus élevés, d'abord prairies, ensuite champs la-
bom'és, qui augmentent en nombre à mesure que le terrain monte.
Bientôt on les voit alterner avec d'autres, qui ne sont visiblement
que de la haute tourbe, mise en culture et qui ne porte dans la
règle que de l'herbe. Les paysans y étaient fort contents d'avoir
les deux sortes de terrain immédiatement à côté l'un de l'autre;
ils nie répondirent à plusieurs reprises qu'il en avait toujours
été ainsi et que les champs sableux n'avaient jamais été couverts
de tourbe, ni n'avaient été tournés expressément. Il n'y avait pas
lieu d'en douter, cette condition se rencontrant en plusieurs autres
endroits, e. a. à Schoonebeek. L'explication est donc la même; ce
n'est que l'effet d'une série de cours d'eau oblitérés, coulant du
plateau de Drenthe vers la vallée du Drosten-Diep.

A Dalerveen le Diluvium Scandinave est caché à une faible

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80 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

profondeur; car on rencontre de temps à autre des erratiques en
creusant des fossés.

Les anciens sables mobiles ne manquent non plus dans cette
contrée; à l'est de Dalerveen on en rencontre un de peu d'étendue
et portant une petite forêt de sapins, entourée de haute tourbière.

-

C. Le Hondsrug.

Le Hondsrug est notablement plus élevé que les hautes tourbières
à l'est et que les tourbières de marais de la vallée de la Hunse.
Au N. 0., il baisse et disparaît sous l'argile marine alluviale; au
S. E. il fait de même sous les hautes tourbières de Nieuw-Amster-
dain et de Nieuw-Dordrecht.

Le village de Nieuw-Amsterdam est bâti des deux côtés du Canal
allongé de Hoogeveen, principalement sur la tourbe, en partie sur
le sous-sol. Celui-ci est exclusivement de l'argile à blocaux géné-
ralement sableuse et presque blanche, contenant souvent de gros
blocs erratiques, d'un demi-mètre et au-delà ; il n'est pas question
encore du Diluvium sableux. Il est clair que la présence d'un
sol peu perméable, tel que l'argile à blocaux, doit avoir facilité
la naissance d'une haute tourbière. A la surface des dos étroits
ou des collines peu étendues cette argile est en général décom-
posée et plus ou moins complètement privée de sa glaise. Dans
les vallées elle est souvent érodée en son entier ou couverte de
sable et ne se trouve intacte qu'à la surface des vastes terrains
horizontaux ou sur les pentes de ces vallées.

A quelque distance au nord du canal et à l'est de N-A. est
situé le village d'Erica, sur un terrain plus élevé, formant l'extré^
mité du Hondsrug ou plutôt de la crête occidentale. A Emmen,
celle-ci est séparée de la crête orientale par un intervalle sableux,
qui disparaît au S E. sous la haute tourbière; les deux crêtes
en font autant à 5 K.M. plus loin environ. C'est une partie de cet
intervalle, qui formait autrefois le
„Barger-Meer"' (lac de Barge),,
drainé actuellement par les canaux dans les tourbières du voisinage.

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En suivant la route qui conduit du canal à Erica, on peut
déjà apercevoir aux arbres le changement du sol; sur la tourbe,
ce sont presque exclusivement des .bouleaux, qui font place en
partie à des sapins, à des chênes et à quelques hêtres sur le sable
du Hondsrug. L'argile à blocaux est tout près de la surface et

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81 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

était employée autrefois dans une briqueterie, tombée actuellement
en décadence. On voit encore des monceaux de cette argile rougeâtre
ou blanchâtre, quoiqu'on se servît dans les dernières années d'un«
argile gris-clair. En la voyant à quelque distance, je la pris d'abord
pour une variété claire de l'argile à poteries ; mais bientôt plusieurs
coquilles marines m'apprenaient que ce n'était encore que l'argile
du Dollart, apportée le long des canaux au point le plus intérieur,
où je l'aie vue pendant mes excursions.

La haute tourbière à l'est du rejeton d'Erica est traversée dans
sa longueur par la dernière section du Canal-Orange ou Canal
allongé de Hoogeveen. Ce canal fait une courbe au N. E. avant
cette jonction et approche de Nieuw-Dordrecht, colonie située dans
la haute tourbière, également de date récente et formant sous plu-
sieurs rapports le pendant de celle d'Erica. Le canal ne traverse
ici que de la tourbe (du moins jusqu'à 2—3 M. de profondeur) ;
aussi la route de N.-D. est-elle construite
sur cette roche et n'est-
elle bordée au commencement que de bouleaux, avec un aune,
un hêtre ou un chêne isolé. Dans la colonie même la route
passe d'abord sur un îlot de sable, avec quelques erratiques et
immédiatement on voit un plus grand nombre de chênes et de
sapins. Le dos sableux continu, rameau oriental du Hondsrug,
montre l'argile à blocaux, facile à reconnaître, tout près de l'église
et porte la route de sable d'Angelsloo et d'Emmen, qui ne
descend plus sur la tourbe. La carte géologique, au contraire
n'y figure qu'un îlot de Diluvium Scandinave à l'est de Nieuw-
Dordrecht et diffère donc de la réalité.

La tourbe du voisinage est noire et. compacte à une profondeur
de quelques décimètres et contient de nombreux morceaux de bois,
des troncs d'arbres à racines tortueuses, tantôt en grand nombre,
tantôt plus isolés. On les reconnaît presque tous pour des bouleaux,
qui croissent facilement sur la tourbe bien drainée.

C'est probablement dans le voisinage de Nieuw-Dordrecht, non
loin de son centre, que la haute tourbière atteint sa plus grande
épaisseur. Nous trouvons là-dessus les données suivantes:

r. Dans „Dr. A. Salfeld, (l. c.). La puissance de la partie
prussienne de la tourbière est en moyenne de 1,5 à 6 M., et
même de 7,5 à 8,4 M., près de Gross-Fullen.

2°. M. Borgman dans sa thèse de 1890, dont nous traiterons plus
tard, donne, page 127, plusieurs chiffres ayant rapport à
V^Emmer-
Erfscheidenveen".
L'épaisseur de 5 M. n'est atteinte qu'une seule fois;

11

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82 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

tandis que le minimum est de 4,5 M. Pag. 146, nous trouvons une
autre liste locale, oscillant entre 4,66 et 5,70 M.

A. Nieuw-Dordrecht la masse principale de la tourbière de Bour-
tange est en continuité avec la partie de Nieuw-Amsterdam—
Nieuw-Schoonebeek. Nous venons de considérer (pag. 241) cette
partie comme une tourbière isolée à l'origine, qui ne s'est réunie
que plus tard à la masse principale. Ainsi que la haute tourbière
de Hoogeveen elle s'est formée sur la pente méridionale du plateau
de Drenthe, tandis que la masse principale s'est formée sur une
pente au N., beaucoup plus faible.

La position plus élevée des deux crêtes sableuses au-dessus de
la tourbière qui les sépare et qui les environne, saute immédiate-
ment aux yeux. Il en est de même à tout moment le long de
la pente orientale du Hondsrug, et cette différence de niveau
est d'autant plus marquée par l'interposition des tourbières de
marais de la vallée de la Hunse, qui sont plus basses encore.
Elles commencent à 2—3 K.M. au N. du village de Weerdinge,
situé sur la pente très distincte et relativement raide du Hondsrug.
A leur tour ces dernières sont séparées plus loin du Diluvium
Scandinave du Hondsrug par des terrains de Diluvium sableux,
que la carte géologique place en grande partie entre Buinen et
Zuidlaren.

Nous en avons trouvé quatre autres en forme d'îlots plus élevés
au milieu des tourbières de la liunse, entre Gieten et Wildervank.
Les deux plus grands portent même le nom caractéristique de
„Zandvoort" (zand = sable) qui ne paraît pas avoir attiré l'atten-f
tion de Staring. Ils forment un trait d'union entre le Diluviun^
sableux peu développé de la rive gauche de la vallée (versant
du Hondsrug) et celui de la rive droite. Ce dernier (du moins
tout près de la chaussée sus-nommée) est sensiblement plus élevé
que la tourbière de marais, mais constitue une partie de la pente
du sous-sol de la haute tourbière de Wildervank, qui a été en-
levée en son entier. Le sol porte quelques forêts de sapins et est
assez sec, ce qui n'est pas en contradiction avec sa position plus
basse que celle d'mi sol humide; c'est la conséquence naturelle
du voisinage d'une vallée plus profonde encore, vers laquelle

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83 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

s'écoule l'eau souterraine. Nous avons déjà observé ce phénomène
à plusieurs reprises et nous l'observerons bien des fois encore.

Dans la partie septentrionale de la vallée de la Hunse se trouve
le Lac bien connu de Zuidlaren (Zuidlaarder-Meer), qui mérite de
nous arrêter quelques moments, d'abord à cause de son étendue,
ensuite à cause de son voisinage du Hondsrug et de l'hypothèse
peu fondée, à laquelle il a donné heu. En partant du village de
Kropswolde, à l'est de Groningue, qui est situé près de la tourbe
basse, continuation directe de celle des marais de la Hunse, on arrive
bientôt sur le Diluvium sableux ordinaire, à l'ouest du village. Il
est un peu plus élevé et constitue la rive et le fond oriental du
lac, qui est bordé de l'autre côté par la tourbière basse. Quant à la
profondeur, on devine déjà qu'elle doit être minime; car on y voit
pousser des roseaux presque partout, en tiges isolées même tout
près du milieu. Nous en avons mesuré la profondeur sur plusieurs
points, en nous tenant toujours éloigné des roseaux, et nous n'avons
jamais trouvé cette profondeur plus grande que 1,3 M. Le fond
était généralement dur (Zanddiluvium), à l'ouest parfois boueux
(tourbe).

D'après quelques informations obtenues le Lac de Foxhol (Fox-
holster-Meer), situé à quelques kilomètres au nord, est décidément
plus profond ; il est en même temps entièrement entouré de tour-
bière basse.

Or, l'histoire d'une bonne partie des lacs dans les tourbières
basses des Pa3^s-Bas est bien connue. Elles ne doivent leur origine
qu'à l'action de l'homme, continuée par la nature. L'homn^e en-
lève la tourbe plus ou moins., irrégulièrement et négligemment;
d'ordinaire il creuse des trous rectangulaires, en laissant des digues
ou des isthmes plus ou moins larges pour sécher et conserver les
tourbes. Les vagues viennent facilement à bout de ces isthmes
peu solides; les petites flaques d'eau se confondent et les vagues,
devenues plus fortes, entament les rives pour agrandir peu à peu
le lac. Dans une tourbière isolée il en résulterait un étang peu
profond avec un fond de boue, produit de la tourbe désagrégée;
mais dans une tourbière qui est en communication directe avec
la mer (Lac de Harlem), ou qui est traversée par une eau cou-
rante (le
Hunse dans le Lac de Zuidlaren, le Hellingmade dans le
Lac de Foxhol), la boue du fond peut être éloignée et le lac
peut ainsi acquérir une profondeur plus considérable. Nous pou-
vons comparer le Lac de Foxhol (adulte) à quelques autres lacs

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84 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

' / > V 4

voisins, en voie de formation. Ce sont les assemblages de nom-
breuses flaques d'eau rectangulaires de Haren, au sud de Gro-
ningue, et entre Westerbroek et Engelbert à l'ouest de cette ville,
qui pourront produire avec le temps un lac aussi étendu que
celui de Zuidlaren. L'origine de . ces deux lacs rudimentaires étant
évidente et l'histoire de plusieurs des lacs entourés de tourbe étant
bien connue, nous soutenons' qu'il n'y a aucune raison pour assigner
au Lac de Zuidlaren une origine différente. La seule chose un
peu remarquable, c'est que les rives sont en partie du Zanddili-
vium; mais nous n'avons qu'à nous imaginer le Lac de Foxhol
s'agrandissant au sud, pour le voir atteindre également le Zand-
diluvium.

M. Blink a, dans le „Journal de la Société de Géographie^^ de
1891, donné quelques observations sur ce lac dans son petit traité
intitulé:
„Les Tourbières basses dans les Pays-Bas et l'Origine des
Iles flottantes^\
D'après lui, le lac aurait parfois à l'ouest et au
milieu une profondeur d'environ 2 M.; les rives orientales sont con-
tinuellement attaquées par les vents prépondérants de l'ouest, tandis
que les rives occidentales vont en s'étendant dans le lac, par suite
de la végétation de roseaux et de l'apport de la boue par les contre-
courants du fond durant les tempêtes d'ouest. Le lac paraît donc
se déplacer lentement de l'ouest à l'est; il doit très probablement
son origine à la cause que nous avons indiquée : l'homme creusant
et draguant de la tourbe.

La tourbière de la Hunse a donc eu probablement un élargisse-
ment local, convexe à l'est, et la tourbe y a été éloignée gradu-
ellement de la manière que nous venons de décrire.

Nous trouvons cette explication si simple et tellement d'accord
avec ce qu'on voit se passer en d'autres endroits de notre pays,
que nous ne voyons pas la moindre nécessité d'invoquer les eaux
de fonte de la glace Scandinave quaternaire. Les traces de cette .
eau de fonte ne sont nullement absentes en d'autres parties de '
notre Diluvium, mais à Zuidlaren nous nous en passons facilement.

Le sous-sol des „ Veenicolonien" de Stadskanaal—Veendam est par-
tout le Diluvium sableux, du moins pour autant que nous avons
pu l'examiner. A Stadskanaal même nous avons trouvé quelques
cailloux de quartz blanc, d'un centimètre tout au plus, qui nous
indiquent le voisinage d'un Diluvium plus grossier (graveleux),
p. e. la colline d'Onstwedde.

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85 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

A l'ouest ce Zanddiluvium vient à la surface le long de la
vallée de la Hunse, et il en est de même au nord. Nous voyons
sur la carte géologique des vastes territoires de Zanddiluvium à
Hoogezand, Sappemeer, Zuidbroek, Siddeburen, Muntendam et
Meeden, qui s'élèvent sensiblement au-dessus des basses tourbières
et de l'argile marine, qui les a remplacées. Il est en continuité
avec celui de la vallée de la Ruiten-Aa et avec la lisière de la
grande haute tourbière de Bourtange, dont il constitue le sous-sol.

D. Haute Tourbière de Winschoten.

Mentionnons ici quelques observations faites sur une haute tour-
bière peu étendue, tout près de Winschoten.

Cette ville, la plus septentrionale de notre pays, est située sur
une colline très prononcée, appelée „De Garste''; la carte du
„Waterstaat" donne les chiffres inattendus de 3,25 et même de
6,4 M. -H A. P. tout près du chemin de fer et à l'ouest de la ville.
La colline est composée entièrement de Diluvium Scandinave
et la pente du S. et de l'O. est plus prononcée que celle du N.
et de l'E.

Au N. E. s'en étend une autre, moins élevée, allongée du S. O.
au N. E. et portant le village de Beerta. Elle est bordée au N. O.
par une vallée assez longue, mais étroite et pen profonde, dans
laquelle nous avons pu constater de la tourbe, reste d'un rejeton
de la haute tourbière. De l'autre côté s'élève une troisième colline,
portant le village de Finsterwold et, plus près de la ville, le ha-
meau et la métairie de Hardenberg. C'est ici que la colline est
le plus sensible, de même que le Diluvium Scandinave; nous
y avons trouvé dans un trou creusé l'argile à blocaux gris-clair,
contenant plusieurs erratiques de 1—2 d.M., de granit, de gneiss
et de diorite, dont quelques-uns portaient des stries glaciaires mag-
nifiques. Elle était couverte de \ M. de sable et il est assez pro-
bable qu'elle constitue aussi le noyau des autres collines, où elle
n'est pas visible à la surface.

A l'ouest de Hardenberg le sol baisse plus rapidement vers un
terrain bas, ayant constitué autrefois le „Huninga—Meer" (Lac de
Huninga) La carte géologique figure du Diluvium Scandinave
à l'est et au sud, au nord et à l'ouest la haute tourbière, entamée
en partie, et remplit la moitié du lac d'une tourbière basse (ou

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86 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

(le marais). Tout cela n'est nullement impossible ou invraisembable.
La moitié orientale du lac, au contraire, serait couverte d'argile
marine du Dollart, ce qui nous a paru être moins vraisembable.
D'où, serait-elle venue se déposer là?

Toutefois nous avons cru prudent de prendre des informations
précises, qui nous ont été fournies par M. Schippers, professeur
au gymnase de Winschoten, à qui nous témoignons ici notre
reconnaissance. Il nous a fait observer que le dos de Diluvium
Scandinave, qui porte les villages de Finsterwold, Oostwolde
et Midwolde, n'est pas continu, mais qu'il est assez bas des
deux côtés du second village pour que les eaux du Dollai't
aient pu y pénétrer pendant les inondations et y déposer ainsi
de l'argile. En 1545 on y a construit une digue et un moulin à
épuisement; plus tard la digue a été rompue une ou deux fois.
La présence de l'argile marine dans la dépression centrale n'est
donc plus une anomalie, quoique les limites des terrains sur la
carte soient assez invraisemblables et peu propres à élucider l'état
actuel des choses. Du reste la présence d'une digue artificielle ayant
échappé à nos yeux, nous ne pouvons pas en faire un reproche
à Staring.

Le „Huninga-Meer" est donc une dépression bien prononcée à
l'est et au sud, moins au nord et à l'ouest, où elle est bordée par
l'ancienne haute tourbière. Le sous-sol n'est que du sable, avec
(quelques cailloux isolés et n'est probablement qu'un prolongement
direct de celui des collines voisines.

Dans les villages de Finsterwold et d'Oostwolde, la colline s'élève
très sensiblement au-dessus des terrains du nord, les polders du
Dollart. La pente de ce côté est plus raide que celle du sud, qui
s'accentue également à l'ouest jusqu'à Oostwolde, où la colline est le
plus étroit. Au S. E. du village, au „Ringweg" de l'ancien lac,
nous avons observé dans un fossé sec l'argile à blocaux, avec un
caillou de diorite et un de silex noir; tout près de là, une petite
digue dans un fossé contenait quelques cailloux de silex, de gra-
nit et de grès grossier. Plus loin, vers Hardenberg, nous avons
trouvé quelques autres cailloux scandinaves; mais du reste le sol
ne montrait exclusivement que du sable. Nous pouvons considérer
toute la colline de Finsterwold et d'Oostwolde. haute de 2—3 M.,
comme formée de Diluvium Scandinave, dont l'homme a probable-
ment éloigné les cailloux. ^

A Oostwolde la colline est reliée par un bras étroit à celle de

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87 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Midwolde, qui a aussi une pente très distincte au N., vers le
terrain des polders; nous n'y avons vu que du sable, avec des
traces de cailloux scandinaves.

Il y a une quatrième colline, située entre Midwolde et Win-
schoten : celle de Scheemda et de Heiligerlee, qui a également des
contours bizarres. La surface en est ondulée et la partie qui nous inté-
resse le plus, et qui s'appelle „Kloosterholt", porte un ancien couvent
et, sur sa pente occidentale, le beau monument de Heiligerlee. Nous
n'y avons pas trouvé de cailloux scandinaves, comme près du
cimetière de Scheemda. Au dire das paysans la colline de Kloos-
terholt ne contient que de l'argile à poteries.

Entre ces quatre collines, nous avons trouvé du sable avec ou
sans cailloux, parfois argileux, comme dans le bout septentrional
de la colonie „Nysiesoord", où il contenait un assez grand nombre
d'erratiques. Il reposait sur l'argile à poteries jaune-clair ou vert-
grisâtre-clair et était couvert d'un sable sans cailloux, qui portait
à son tour la haute tourbière. L'argile à poteries a une étendue
considérable dans cette contrée; elle a été trouvée à une faible
profondeur dans le bois d'Enumaborg à Midwolde, où elle forme
une colline entière, construite en 1817. Dans la haute tourbière de
Nysiesoord elle forme généralement le sous-sol immédiat et repose
sur un sable, qui contient parfois des cailloux. Quoique la haute
tourbière n'ait pas beaucoup d'étendue, la tourbe y atteint jusqu'à
3,5 M. d'épaisseur, preuve qu'elle se trouve là dans des condi-
tions favorables. Elle est creusée en degrés et contient parfois un
grand nombre de gros troncs d'arbres.

Les conditions qui ont fait naître la haute tourbière de Win-
schoten^ sont bien simples. Nous avons devant nous un groupe de
quatre collines, rangées en cercle, et formant une des bizarreries
du paysage morainique. Le sol de l'espace intermédiaire est l'argile
à poteries imperméable, couverte ou non d'une couche de sable à
blocaux. Il est donc très naturel que ce bassin soit devenu aussi-
tôt un marais et qu'il ait fait naître une tourbière, qui atteignit
une épaisseur considérable en proportion de son étendue, surtout
à Nysiesoord et au sud. Elle se serait ainsi confondue avec les
hautes tourbières de Pekela et aurait obstrué le drainage d'une
partie du terrain, pour former le Lac de Huninga, qui serait ainsi
comparable au „Barger-Meer" à l'extrémité du Hondsrug, près
d'Emmen.

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88 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Récapitulons maintenant ce que nous venons de dire sur la li-
mite occidentale de la haute tourbière de Bourtange. Au sud elle
est très naturelle: c'est la vallée du Vecht, puis celles du „Schoo-
nebeeker-Diep" et du „Drosten-Diep", qui sont, comme de coutume,
plus basses que la haute tourbière et accompagnées d'une zone
sableuse plus sèche, ornée de sables mobiles. Dans la vallée du
S.—D. les sols sont symmétriques jusqu'à un certain degré; on
trouve de la tourbe de marais au milieu, du Diluvium sableux
des deux côtes, avec quelques sables mobiles, puis la haute tour-
bière.

Mais à l'est, cette dernière empiète de plus en plus et finit par
accaparer entièrement les deux autres terrains, bien avant la fron-
tière allemande. Entre Nieuw-Schoonebeek et Nieuw-Dordrecht la
haute tourbière est située sur une pente du N. au S. du plateau
de Drenthe au Schoonebeeker-Diep et sur une pente de l'est à
l'ouest au Drosten-Diep. D'une part ce sont des terrains secs plus
bas, qui en constituent la limite ; d'autre part les terrains secs
plus élevés du Hondsrug agissent de la même manière. C'est
le versant de ce plateau, qui forme la limite naturelle jusqu'à la
hauteur d'Odoorn, où s'introduit de nouveau une vallée plus basse
et marécageuse. Comme toujours la tourbe de marais est en amont
en continuité directe avec la haute tourbière, qui l'envahit peu à
peu; mais en aval il s'introduit de nouveau une zone intermédi-
aire de Diluvium sableux, qui s'élargit très lentement du S. au N.

A la limite septentrionale de notre haute tourbière la tourbe
basse remplace la tourbe de marais de la Hunse. Peut-être aurait
elle été envahie de plus en plus par la haute tourbière, si l'homme
n'était pas intervenu. D'un autre côté la mer a aussi apporté un
obstacle, en enlevant une partie de la tourbe basse et en remplis-
sant ensuite les creux d'argile marine. De même que dans la
vallée de la Hunse des terrains de Diluvium sableux s'interposent
souvent entre les deux espèces de tourbe. i

3°. Pays de Westerwolde,

' ■ 'I

A. Environs de Ter-Apel et de Se Hingen.

La „Ruiten-Aa" est une petite rivière, qui draine la partie S. E.
de la province de Groningue, („Kwartier van
Westenvolde"). Ils'}^
joint une très petite partie de la commune d'Emmen en Drenthe,

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89 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

dont le centre est formé par le village de Roswinkel, et une partie
de la Pr\isse, avec le village de Ruitenbroek. La localité la plus
connue de la partie supérieure de la vallée est Ter-Apel, célèbre
par son ancien couvent. Au S.O. se trouve le village de Roswinkel,
entouré de trois côtés par les hautes tourbières et bâti sur le sable
fin, qui constitue d'ordinaire le Diluvium sableux.

En s'en approchant du S.E., à partir de la tourbière, appelée
„Emmer-Gompascuum'", on voit la tourbe s'amincir et le sol baisser
graduellement, tout en devenant plus sec. De même, en allant de
l'église de R. au S.O., dans les champs cultivés, appelés
„Esch'\
on voit le terrain monter insensiblement et on passe du sable à
la tourbe, mise en culture et autant qu'intacte. De l'autre côté, en
allant de l'église au N.E., le terrain s'abaisse peu à peu et le sol
devient plus humide; on y voit apparaître des fossés; les champs
labourés sont remplacés par des prairies et le sable par de la tourbe
de marais (du moins en plusieurs endroits), épaisse de 2 à 3 d.M.
Le terrain entier constitue une plaine égale sans traces d'érosion,
excepté près du ruisseau du
„3îoersloof\

Le sol est donc du sable fin, contenant parfois une quantité
notable de limonite, ou bien de la tourbe. Dans le village et parfois
à côté des maisons isolées on aperçoit pourtant de nombreux
erratiques de granite, etc., généralement d'un diamètre de 3—5 d.M.
Après plusieurs informations infructueuses, j'ai obtenu le renseig-
nement suivant. Les erratiques ne se trouvent jamais dans le sol
et ne sont pas apportés actuellement; mais il y a cinquante
ans l'état des choses était différent. Il n'y avait pas de canaux,
par lesquels on put amener facilement des briques et d'autres ma-
tériaux de construction ; on né pensait pas à l'introduction de
chaussées; mais en hiver, lorsque les hautes tourbières étaient
trempées et inondées, les fortes gelées établissaient un excellent
moyen de communication. De même qu'aujourd'hui en Russie,
les paysans allaient chercher en traîneaux ce dont ils avaient be-
soin et ils traversaient ainsi les tourbières de Weerdinge, de Val the,
etc. pour transporter depuis le „Hondsrug'' des erratiques, qui ser-
vaient de fondements à leurs maisons. Actuellement, comme on peut
facilement se procurer de bonnes briques, les erratiques sont tom-
bés en désuétude et le souvenir de cette méthode de transport est
en voie de disparaître.

Le hameau de Ter-Apel est situé tout près du long „Stads-Ka-
naal" (canal de la ville) de Groningue, qu'on a prolongé ces der-

12

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90 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

niêres années pour aboutir, ainsi que r„Oranje-Kanaar', au „Ver-
lengde-Hoogeveensche-Vaart". Lors de notre dernière Visite, en
1890, on y construisait dans le premier une écluse, ce qui mit le
sous-sol de la tourbière à découvert. Ce n'était que le Diluvium
sableux, visible jusqu'à 3 M. de profondeur, composé d'un sable
très fin, gris-clair, presque blanchâtre et très compacte à l'état
humide.

Il contenait pourtant quelques petits cailloux sporadiques de
granité, qui augmentaient dans le sous-sol du canal au sud et auxquels
s'en joignaient d'autres de silex, de jusqu'à 2 c.M. de diamètre, et de
quartz. Leur origine s'explique par le voisinage de l'extrémité du
Hondsrug, près du village de Nieuw-Dordrecht, et de la colline
deLindloh (ci-dessous). La tourbe elle-même, près de cette écluse, con-
tenait parfois de la vivianite et probablement de la sphérosidérite,
qui se change en limonite cendreuse dans les tourbes sèches et
les fait fendiller ou désagréger. Nous y avons aussi observé un
certain nombre de troncs d'arbres, qui n'étaient pas enracinés dans
le sous-sol, mais à la limite de la tourbe noire amorphe et de la
tourbe supérieure brune, fibreuse, ou seulement dans cette dernière.

La tourbe noire enveloppait parfois des troncs couchés.. Ce
phénomène des arbres enracinés dans la tourbe même et à difl'é-
rentes hauteurs n'était du reste pas inconnu à Staring. Dans son
ouvrage principal (I, pag. 124) il dit, plus ou moins en passant,
que: „des forêts peuvent prendre naissance sur la tourbière même
„et le feraient sans conteste sur toutes celles qui n'ont pas atteint
„l'épaisseur considérable de 4 M. et davantage. C'est facile à con-
„clure d'après les observations faites dans nos tourbières, oti l'on
„rencontre des troncs enracinés et des restes de broussaille
dans
„la tourbe même,
parfois à une hauteur de 2 M. et davantage. On
„a tâché de faire valoir ce phénomène comme un argument décisif
„contre la thèse, qui prétend que les bois sont les précurseurs des
„hautes tourbières; mais il prouve seulement que, dans un cas
„spécial, un bois s'est formé sur une tourbière. Du reste, on re-
„trouve de la tourbe sur les vestiges de bois semblables et assez géné-
„ralement les tronçons sont enracinés dans le sous-sol."

Nous ajouterons seulement qu'il est prudent de ne pas généra-
liser, puisqu'un phénomène qui se présente
souvent, ne doit pas
nécessairement se présenter
toujours. Il y a quelque différence entre
ces deux termes! ^

Le village de Ruitenbroek est séparé par la haute tourbière de

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91 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Ter-Apel à l'occident et du promontoire de Haren-Altenberge à
l'orient (pag. 71). La haute tourbière de Bourtange est donc de
deux manières en continuité avec celle de l'„Emmer-Compascuum".
Cela est assez clair, plus clair qu'un passage de Staring (1. c.
pag. 90): „Entre Ter-Apel et l'Eems, la haute tourbière de Bour-
„tange est actuellement bordée par les champs de Ruitenbroek,
„mais des restes abondants montrent que les tourbières de Bour-
„tange et d'Emmen, ont
autrefois constitué un grand tout". Nous
prétendons qu'il en était encore ainsi ces dernières années, car
„les champs de Ruitenbroek" sont en partie la haute tourbière
intacte.

Au sud du village se trouve la colonie de Lindloh sur la tour-
bière, qui entoure trois collines, appelées „Schwarzenberg" (mon-
tagne noire). Cette
montagne n'a pourtant que quelques mètres de
hauteur; elle est activement exploitée comme gravière, ce qui fait
qu'elle a été divisée graduellement en trois collines isolées. On y
voit quelques erratiques scandinaves de 3—4 d.M. et d'autres plus
petits; mais la masse principale est du sable grossier, contenant
beaucoup de cailloux et passant souvent en un véritable gravier.
Les cailloux ne dépassent généralement pas 1 c.M.; ce sont des
quartz blancs, des quartzites, des grès, etc. On a donc affaire ici
à un Diluviuni graveleux, entremêlé, stratifié distinctement, mais
irrégulièrement, parfois obliquement, parfois avec des ondulations.
Souvent des masses volumineuses sont cimentée« par de l'alios
brun-foncé ou même noir, ce qui nous paraît être l'origine du nom
de la colline (Schwarzenberg). Ce grès est assez dur et reste tou-
jours à 4 d.M. (au moins) de la surface.

La colline est entourée de la haute tourbière et constitue le
commencement de la séparation des tourbières de Bourtange et
d'Emmen. Elle explique aussi la présence d'un sable avec beau-
coup de cailloux de quartz blanc, etc. dans le sous-sol du Canal
Sud-Nord. Il en est de même des cailloux, dont nous venons de
parler, au sud de Ter-Apel (pag. 90).

Le village même de Ruitenbroek, dans lequel on observe des
erratiques assez gros sous les maisons, est bâti sur une colline
ostensible de sable fin, dans lequel nous n'avons trouvé que des
cailloux sporadiques de quartz blanc, de quartzite et de granit.
D'après les informations obtenues on en rencontre pourtant de
temps à autre de plus grands.

L'entourage de l'ancien couvent de Ter-Apel repose sur le bord

12''=

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92 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

gauche d'une large vallée de prairies, qui sont souvent inondées,
à cause du drainage insuffisant. Au nord ce bord gauche porte
plusieurs terrains cultivés (esschen), qui s'élèvent sensiblement
au-dessus de la haute tourbière de l'ouest, surtout près du moulin
du hameau de Ter-Haar. Il en est de môme en plusieurs autres
endroits le long de la route de Sellingen, etc. ; ces terrains consti-
tuent donc une limite naturelle entre la tourbière et la vallée
proprement dite. Ils sont très distincts à Ter-Wisch et surtout à
Ter-Borg, les deux hameaux suivants. La carte géologique figure
correctement un petit terrain de sable mouvant, tandis que plus
loin, vis-à-vis du village de Sellingen, elle nous présente, comme
Diluvium sableux, deux terrains curieux, allongés du S.O. au N.E.

En les visitant, on voit: 1° à chaque moment l'efiet de l'action
du vent, et 2° que la carte géologique est de nouveau très sché-
matique. En réalité, on observe tant soit peu les deux dos sableux ;
mais le sable n'est point du tout aussi continu, il y a des collines
plus ou moins irrégulières, tantôt en continuité, tantôt séparées
par de petites tourbières. Il en est autrement de la zone intermé-
diaire de la carte, qui se compose principalement de tourbe et ne
renferme que quelques petites collines. En somme, on a aflàire à
un assemblage plus ou moins chaotique de petites dunes et de
dépressions tourbeuses, dont les premières sont en majorité dans
les deux zones latérales de la carte de Staring et très rares dans
la zone du milieu, appelée „Sellinger-Beetse", qui représente peut-
être le lit d'un ancien cours d'eau. Nous n'avons qu'un pas de
plus à faire et à considérer également le dos sus-nommé, qui
accompagne la Ruiten-Aa, comme un chaînon de petites dunes,
qui ont été converties en
esschen, du moins en partie. La position
plus élevée de ce sable par rapport à la tourbière n'est donc point
en contradiction avec la position plus basse du sable horizontal
de Roswinkel; les deux cas ont chacun une série d'analogies.
. ' Revenons un moment encore à la „Sellinger-Beetse".

On y creuse de la tourbe, mais irrégulièrement et en trous qua-
drangulaires, qui se remplissent ensuite d'eau. La formation d'une
tourbe nouvelle y était en pleine activité; ils étaient remplis de
sphagnes, en bouillie épaisse ou en épongp trempée. Les plantes
vivantes s'étendaient sur les bords des trous jusqu'à 2 d.M. au-des-
sus de l'eau. Dans quelques trous peu profonds il croissait des
joncs parmi les toufies épaisses de sphagnes et une herbe très
fine sur les points un peu plus secs. D'autres trous plus profonds

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93 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

paraissaient moins propices aux sphagues; je n'y trouvai que des
PotamjDgeton.

Avant de continuer notre route au nord, nous voulons examiner
quelques points de la vallée de la Ruiten-Aa. Ce ruisseau n'est
que la continuation directe de la „Runde", qui vient de la haute
tourbière et donne deux bras, des noms de „Moersloot" et „Mo-
len-Aa", qui se réunissent au ruisseau principal en amont et en
aval de Ter-Apel. Or, le fond de la large vallée est constitué
par des praires marécageuses, tandis que la Ruiten-Aa et même
la Molen-Aa coulent à un niveau un peu plus élevé sur la rive
gauche de la vallée, donc plus près des terres cultivées. Il en est
de même du ruisseau à la hauteur de Ter-Haar, oîi le fond réel
de la vallée est indiqué par le point de réunion des deux routes
„Middenweg" et „Tusschenweg". Cet état de choses anormal nous
a pourtant paru être à moitié naturel ; peut-etre l'homme, en vou-
lant drainer tant bien que mal le fond de la vallée, a-t-il conduit
l'eau de la Ruiten-Aa dans un ruisseau tributaire, qui coulait à un
niveau un peu plus élevé et en a ainsi fait le ruisseau principal. Le
drainage des prairies de la vallée fut ensuite effectué au moyen
de fossés, qui se déchargent plus en aval dans l'Aa.

Près de Ter-Apel, il faut donc monter un peu pour aller de
l'axe de la vallée au ruisseau et naturellement aussi à l'est, à la
limite de la haute tourbière. Cette limite co'incide assez bien avec
une troisième route, le „Veenweg"; on y observe de nouveau des
sables mobiles, qui, à l'est, sont remplacés graduellement par la
tourbière. C'est une partie de ces sables mobiles, un peu plus
élevée que le reste, qui correspond au
„Doeseberg'- de la carte
topographique. Il y a encore' dans le voisinage de Ter-Apel un
îlot de sable analogue, qui s'élève au-dessus des tourbières; c'est
le
„Schaapsberg'\ figuré sur la carte géologique comme Diluvium
sableux.

Il en est tout autrement du curieux „Hasseherg'', qui s'élève
solitaire au-milieu de la haute tourbière, encore un peu plus élevée
que le Diluvium sableux de la vallée dans le voisinage de Sellin-
gen. Ce monticule appartient au Diluvium Scandinave, ainsi que
l'indique la carte ; on y voit en profusion des erratiques peu volu-
mineux, qui portent parfois de très bonnes stries glaciaires; ce
sont des granites, des gneiss et des quartzites. Sur le côté occidental
un bon profil montre l'argile à blocaux bien développée, à une
profondeur de 1—-2 M.; elle est très sableuse et repose sur un

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94 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

sable.iÎD, micacé. Sous celui-ci on trouve (selon les informations
obtenues) une argile, puis „l'argile à poteries", mentionnée par
Staring dans cette localité, où elle a été rencontrée une ou deux
fois en creusant un puits domestique.

Avant de quitter le village de Sellingen, nous voulons encore
relever sa position basse à la jonction de deux petites vallées, la
„Kleine-Beetse" à l'ouest, la „Koeweide'^ et les „Molenkampen''
au nord. Les rives beaucoup plus élevées, constituant des
esschen,
sont très distinctes. On a probablement à faire ici à une ancienne
bifurcation de la Ruiten-Aa, analogue et parallèle à celle de Rijs-
darn au nord de S. (Nouvelle Ruiten-Aa).

B. Environs de Vlaclitwedde et d'Onstwedde.

En aval de Ter-Apel la Ruiten-Aa n'offre rien de remarquable ;
les effets de l'érosion y sont encore minimes et n'ont abouti qu'à
produire un chenal, large de 2-3 M., profond de 1—2 M. et très
simple. Il serpente dans une vaste plaine de prairies, presque
horizontale et très monotone. A Sellingen pourtant, nous avons
fait remarquer la présence d'un lit oblitéré de l'Aa, qui contraste
visiblement^ avec les terrains labourés voisins, plus élevés. Or, à
mesure qu'on avance vers le nord ces contrastes se multiplient;
la grande vallée („thalweg'') se rétrécit et la vallée proprement
dite constitue des prairies fertiles, boisées et pittoresques, parmi
lesquelles s'élèvent les terrains labourés, souvent escarpés. La hauteur
de ces
esschen au-dessus des vallées est inégale ; parfois elle dépasse
3 M., et on se convainct facilement que ce ne sont que des fragments
du thalweg, dans lequel le ruisseau a creusé sa vallée actuelle.
Pourtant on ne peut nier l'action du vent ; çà et là des éminences
s'élèvent visiblement au-dessus de la surface de la grande vallée. Le
drainage est donc très bien réglé dans cette partie du cours de l'Aa,
où l'on ne voit pas les prairies étendues et marécageuses de Ter-
Apel, où le drainage est imparfait. L'observation d'une érosion,
plus forte en aval qu'en amont, nous porte à conclure que cette
érosion a commencé de bas en haut, qu'elle est donc rétrograde
et que peut-être dans le temps elle aurait aussi drainé de la
manière naturelle les marais de Ter-Apel. Aussi, en comparant
sur la carte topographique les parties du cours de la Ruiten-Aa
des .deux côtés de Vlaclitwedde et des deux côtés de Sellingen,

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95 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

on est frappé du contraste, qui existe entre les courbures fortes et
peu nombreuses d'un côté, petites et très nombreuses de l'autre.
A Vlachtwedde la petite rivière a bien appris le métier de l'éro-
sion et l'a exercé avec succès; à Sellingen elle n'est encore qu'en
apprentissage.

En allant de Vlachtwedde à l'ouest, on observe le môme phé-
nomène jusqu'à Smeerling; mais après avoir passé la Ruiten-Aa,
on voit de nouveau le paysage se modifier ; il redevient monotone ;
les terrains élevés et secs, contrastant avec des vallées profondes
et fertiles, font place à des bruyères étendues et à des prairies,
dont quelques fragments seulement sont plus élevés que les autres;
les contrastes sont redevenus rudimentaires pour ainsi dire. La
cause en est bien simple: on a quitté la vallée de la Ruiten-Aa
pour entrer dans celle de la „Mussel-Aa" et de son confluent
r„Oosterholts-Diep". Il en est de même au sud d'Onstwedde, où
l'on ne découvre qu'un nombre minime de petites bruyères plus
élevées au milieu de la prairie presque horizontale, composée de
sable et de tourbe de marais. La dernière roche est plus fréquente
au sud, dans le terrain appelé „De Plaaster" et „Nieuwe-Meede",
tout près du bord occidental de la vallée de la Mussel-Aa.

La haute tourbière du bord oriental entoure un terrain plus élevé,
près du hameau d'Ellersinghuizen et appelé „Ellersinghuizer-Veld" ;
il figure sur la carte géologique comme Diluvium sableux; mais
sa surface irrégulière nous l'a fait considérer comme un ancien
sable mobile. D'ici à Smeerling la prairie de la plaine est de
nouveau monotone, tourbeuse et marécageuse jusque tout près de
ce hameau, où la vallée de la Ruiten-Aa nous présente les con-
trastes pittoresques que nous venons de décrire.

Il y a pourtant une partie du cours de la Mussel-Aa, où les
contrastes apparaissent également ; c'est le cours inférieur, au nord
d'Onstwedde, où on les observe fort bien, p. e. aux environs de
la métairie de Sterenborg, bien mieux que la carte topographique
ne le ferait croire. La longueur de ce „terrain à contrastes" n'est
que de 3 K.M., jusqu'à la réunion des deux ruisseaux dans la
„ Wester woldsche-Aa".

lia différence du paysage le long de ces ruisseaux tient unique-
ment à leur différence de capacité. Nous avons vu que l'érosion
va en rétrogradant; elle diminue de bas en haut et les effets en
sont naturellement plus importants aux endroits où le courant est
plus fort. C'est ainsi que la rivière de l'Eems s'est creusée un

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96 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

chenal très profond à la hauteur où le Vecht plus"faible coule
dans une vallée peu prononcée; il va sans dire qu'une pareille
différence doit se produire entre la Ruiten-Aa et la Mussel-Aa,
qui est beaucoup plus faible.

La Westerwoldsche-Aa entre, à deux kilomètres de son origine,
dans un polder appelé „Lage-Meede" ; c'est, d'après la carte géolo-
gique, le plus intérieur qui ait été inondé pendant la plus grande
extension du Dollart. Il s'y trouve en effet de l'argile marine à
la surface et nous ne voulons pas nier que ce ne soit un sédiment
naturel; mais nous y avons aussi vu apporter en bateau l'argile
du Dollart, riche en coquilles, de sorte qu'une erreur n'est pas
impossible. Faute de temps, nous n'avons pas fait de recherches
sur se point.

Tout près d'ici, entre Wedde et Wedderhofte, la carte géologique
indique du Diluvium Scandinave et sableux, où il y a en réalité
des tourbières hautes et basses. Le versant N.E. de la colline
d'Onstwedde porte e. a. un rejeton assez étendu de la haute tour-
bière de Pekel-Aa, qui a été omis sur cette carte.

Le Diluvium Scandinave de la pente occidentale disparaît bientôt
sous le sableux, et celui-ci sous la haute tourbière D'après la carte
géologique il se montre encore une fois à la surface vers Pekel-
Aa; on y observe une colline isolée, assez élevée, que nous consi-
dérons comme un ancien sable mobile. Il s'en trouve plusieurs
autres sur la
colline d'Onstwedde, p. e. au hameau de Ter-Maarsch,
sur la route de Stadskanaal. Les hautes tourbières y
sont en grande
partie intactes et inclinent visiblement vers la Mussel-Aa.

C. Environs de Bourtange-Bellingwolde.

Retournons de l'autre côté de la Ruiten-Aa à Vlachtwedde ou
plutôt au hameau de Wollinghuizen, situé à mi-chemin de Sel-
lingen. A l'est on observe bientôt la haute tourbière, qui est encore
en partie intacte et plus étendue que l'îlot de la carte géologique.
Elle est bordée au N. E. par un dos sableux, que suit la chaussée
de Vlachtwedde à Bourtange. Il est parfaitement plat mais plus
élevé que la tourbière, monte lentement, se rétrécit et se partage
en îlots séparés par des bras de tourbei L'ancienne forteresse a
été bâtie entièrement sur du sable et est sensiblement plus élevée
que les environs de Vlachtwedde. Nous avions d'abord considéré
ce promontoire sableux comme Zanddiluvium ordinaire, ainsi que

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97 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

la carte géologique ; mais, depuis que nous avons vu dans nos excur-
sions tous les passages du sable encore en mouvement presque
parfaitement nivelés, au sable ancien nous ne pouvons plus hésiter
à considérer également comme tel celui de Bourtange. D'ailleurs
il est encore mobile en quelques points et ce n'est que cette
manière de voir, qui explique sa position plus élevée par rapport
à la haute tourbière.

A l'est du village de Bourtange le sable baisse assez vite et
reste cependant visible jusqu'à la frontière et au-delà. Lors de
notre dernière visite à ce curieux village (en 1893) nous n'avons
observé aucune discontinuité entre les terrains cultivés de Bour-
tange et ceux de Neurhede à Rhede; il se pourrait pourtant
qu'autrefois d'étroits bras de tourbe aient traversé ce terrain sableux.
En tout cas, la haute tourbière de Bourtange est comme coupée
en deux en cet endroit par un dos de sable visiblement plus
élevé (1|M. — 2 M.), dont la largeur dépasse généralement 500 M.
et que nous considérons en son entier comme un ancien sable
mobile.

Un peu au S. de Vlachtwedde, la Ruiten-Aa se partage en deux
bras, dont le paysage est assez différent. Celui de droite n'a creusé
que son propre lit, qui est presque droit ou à faibles courbes et
ressemble ainsi, avec son paysage à contrastes rudimentaires, au
cours supérieur de l'Aa près de Ter-Apel.

Un peu plus en aval, au hameau de Veele, on observe facilement
la position un peu plus élevée de la haute tourbière, ainsi que le
passage graduel des sables mobiles à la tourbière, dons nous avons
déjà fait mention plusieurs fois.

Plus loin au nord, vers Vriescheloo et Bellingwolde, l'état des
choses est parfaitement clair. La chaussée suit une zone sableuse,
qui incline graduellement à l'ouest, vers les „polders'' du Dollart,
ainsi qu'au nord, en suivant la pente générale de la contrée. Elle
monte régulièrement vers la haute tourbière, qui à été entamée
en plusieurs endroits, sans que le sous-sol ait été mis à nu, comme
le ferait croire la carte géologique, qui en place aussi la limite
un peu trop à l'ouest. L'épaisseur de la tourbe est assez impor-
tante, p. e. 1,5 M. près de Vriescheloo.

La zone sableuse est bordée à l'O. par l'argile marine récente
des polders du Dollart, déposée dans les derniers siècles, après la
destruction de la tourbe basse, qui s'y trouvait à l'origine. On en
trouve pourtant quelques restes au milieu des poldei'S, p. e. entre

13

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98 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

f

Blyham et Winschoten, près de la borne kilométrique 44, où l'on
creuse encore une bonne quantité de tourbe. Il en est de môme
tout pi'ès et à rO. de Scheemda, où elle est couverte de 1 M. d'argile.

Mentionnons ici un petit traité phyto-géologique de la main de
M. Hommo Tonkes, intitulé:
„Het PlantenMeed van Westerwolde in
Verhand, met de Bodemfjesteldheid'\
faisant partie du „Tijdschrift van
het Koninklijk Nederlandsch A.ardrijhskundig Genootscha,p"
de 1890.

Il relève entre autres une inexactitude importante de la carte
géologique, en ce qu'elle confond les hantes tourbières mises sim-
plement en culture, avec celles qui ont été totalement entamées
et dont le sous-sol est donc à découvert. Il est clair que les pre-
mières pourraient être indiquées sur une carte
géologique peu
détaillée de la même manière que les hautes tourbières intactes;
M. Tonkes les indique sur sa petite carte par une teinte différente.
Il fixe l'attention sur la formation de la tourbe dans de petites
dépressions entre les collines, surtout le long de la lisière des
hautes tourbières étendues. Or, il est évident qu'on a affaire ici
aux sables mobiles, que nous avons observés tant de fois en des
endroits semblables et qui font qu'il est si difficile de donner une
limite précise à la tourbière. Ils ont été traités un peu en passant
par l'auteur, ce qui est assez naturel du reste, puisque Staring les
a négligés également en une longue série d'endroits ; aussi faut-il
en faire une étude assidue pour les reconnaître encore, quand le
temps et la pluie les ont plus ou moins nivelés.

Un des points importants du traité est la plus grande extension
que l'auteur a donnée au Diluvium Scandinave, parmi lequel il
range les couches de glaise plus ou moins étendues, couvertes du
Diluvium sableux, le Diluvium graveleux étant si riche en couches
(ou lentilles) d'argile. Comme nous avons fait de môme pour le
Limbourg et le Brabant, nous ne pouvons que donner notre adhé-
sion à cette innovation de M. Tonkes.

Comme il n'a pas passé la frontière, les terrains franchement
graveleux de Ruitenbroek, de Lindloh et d'Altenberge lui ont
échappé; mais il en figure onze, de très peu d'étendue du reste,
à l'exception d'un, entre Vlachtwedde et Bourtange, qui est dit
avoir une surface de 25 H. A.

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OONTlilBUTIONS A LA GÉ0L0C41E DES PAYS-BAS. 99

I). Récapitulation. Considérations générales
et cliniatologiques. Blytt.

Le Pays de Westerwolde, bassin hydrographique de la Ruiten-Aa,
est une vaste plaine de Diluvium sableux. Nous le considérons
comme un dépôt de l'eau de fonte de la glace
Scandinave, dans
lequel ce courant s'est érodé ensuite une vallée très peu profonde,
mais très large. En s'affaiblissant graduellement, il s'est métamor-
phosé en un coui's d'eau tout à fait local, la Ruiten-Aa actuelle,
qui a continué le travail de l'érosion, en épargnant toutefois quel-
ques îlots de Diluvium graveleux, tels que Die Haar, Altenberge,
Lindloh, Ruitenbroek et le Hasseberg. La Ruiten-Aa, drainant ses
rives, a en même temps empêché la haute tourbière d'empiéter
dans la vallée. Sur les parties les plus élevées et les plus sèches
des pentes se sont formés des sables mobiles, ce qui est facile à
comprendre. 11 n'en est pas de même des vastes sables mobiles au
milieu de la tourbière, tels que le Schaapsberg, ceux de Sellingen,
d'Ellersinghuizen, de Ter-Maarsch et de Bourtange. Ils sont, en
partie du moins, plus anciens que la tourbière.

Nous ne voyons d'autre alternative pour les expliquer que de
suj^poser une période de sécheresse après la fonte de la glace qua-
ternaire, pendant laquelle les tempêtes ont fait subir à la surface
de ces déserts de sable des modifications sensibles. Après cette
période de sécheresse une autre, plus humide, aurait causé la for-
mation des hautes tourbières.

Or, nous avons observé que des bouleaux, ainsi que des chênes,
des sapins et des hêtres croissent sans peine à Erica, à Nieuw-
Dordrecht et à Nieuw-Schoonebeek sur la haute tourbière même,
dès qu'elle est bien drainée et sèche. Nous avons ensuite observé
au sud de Ter-Apel des troncs d'arbres enracinés dans la tourbe
même, mais à différents niveaux, ce qui nous a fait croire à
l'interruption (répétée peut-être) de la croissance régulière de la
tourbe par des périodes de sécheresse. Celles-ci auraient permis à
des forêts d'y prospérer, jusqu'à ce que l'humidité revenue fit de
nouveau croître la tourbe. Celle-ci à son tour enveloppa et étoufïa
les racines et fit périr les arbres, qui succombèrent en leur entier ou
furent brisés à fleur de terre, à la séparation du sol trempé et de l'air.

Les conclusions tirées de nos propres observations s'accordent
avec celles, beaucoup plus précises et plus détaillées, de M. Axel

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100 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Blytt {„Kurze Uehersicht meiner Hypothese von der geologischen Zeit-
rechnung^',
dans les „Geol. Foren. FÖrhandl., W, 127, Band 12, Heft 1).
11 relève que „les tourbières les plus anciennes de la Norvège sont
„composées de quatre couches de tourbe, séparées souvent par trois
„couches intermédiaires de troncs et de racines d'arbres. On retrouve
„cette alternance en Suède, en Danemarc et ailleurs. La formation
„de la tourbe n'a lieu actuellement que dans les tourbières les plus
„humides; d'après Steenstrup et Geikie il en est de même dans
„le Danemarc et l'Ecosse. Les tourbières de la Norvège méridio-
„nale étant aujourd'hui plus sèches qu'elles ne l'étaient dans le
„passé, l'alternance de la tourbe et de restes de forêts ne s'explique
„pas par des variations
locales dans l'humidité. S'il en était ainsi,
„beaucoup de tourbières devraient se montrer actuellement
jjIus
„humides qu'autrefois, ce que démentent les forages.''

Dans deux travaux antérieurs, M. Blytt a traité cette question
plus en détail. Ce sont:
„On Variatioiis of Climate in the Course of
Time". {Christiania Videnshahs-Selskabs Forhandlingar,
1886) et: „Die
„Theorie der wechselnden kontinentalen und insularen Klimate.''
{Engler's Botanische Jahrbücher, II,
1882). Le premier travail s'oc-
cupe plus de la partie physique et astronomique, le secojid de la
partie botanique et géographique. Nous pouvons leur emprunter
les détails suivants, qui ne sortent pas de notre cadre.

On rencontre les hautes tourbières de la Norvège à des hauteurs
très différentes et, comme le pays s'est élevé depuis la disparition
de la glace quaternaire, les plus anciennes tourbières se trouvent
au-dessus du niveau de 180 M. (partie sud-est du pays), où l'on
observe encore des traces non douteuses de la présence de la mer.
Les tourbières les plus jeunes se trouvent naturellement à une
hauteur très peu considérable au-dessus de la mer. Blytt les par-
tage en plusieurs catégories.

r. Au-dessous de 9,5 M. Exiles ont rarement plus de 0,6—1,25 M.
d'épaisseur et se composent exclusivement de tourbe.

2°. Au-dessous de 15,5 M. Elles sont épaisses de 1,5 M. en moyenne ;
la tourbe repose sur une couche de troncs d'arbres, qui est l'équivalent
de la couche de troncs supérieure des tourbières plus anciennes.

3". Au-dessous de 46,5 M. Puissance moyenne de 1,5—3 M. Deux
couches de tourbe, séparées par une couche de troncs d'arbres.

4°. Au-dessous de 110 M. Puissance moyenne de 3,1—3,8 M.
Deux couches de tourbe et de troncs, dont l'inférieure est
enracinée dans le sous-sol. ' /

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BîbSiolheeK

fnstîîuut voor aardvveîtîfiscu^ppijft-i
BudapesUaan 4
35.'34Cû utreofit

CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. _ 101

5°. Au-dessus de 110 M. les tourbières possèdent généralement
trois couches de troncs et quatre de tourbe. L'épaisseur en est en
moyenne de 4—4,5 M. et, comme elles sont à peu près du même
âge, elle est peu variable lorsqu'elles sont situées au-dessus des
marques d'émersion les plus élevées.

Certahies tourbières ont pourtant une plus grande épaisseur,
qui va jusqu'à 8 M., puisqu'elles ont toujours été tellement humides,
que la. croissance de la tourbe s'est continuée même pendant les
périodes de sécheresse.

Quant aux tourbières danoises, Steenstrup a également distingué
quatre couches tourbeuses, séparées parfois i)ar des couches de
troncs et caractérisées chacune par une flore particulière. La base
en est formée souvent par: 1° une argile à flore arctique—
Salix reticulata, Salix polaris et Betula nana. Ensuite viennent
successivement les couches suivantes:

2°. Tourbe avec des feuilles de Betula odorata et de Fopalus tremula.

3°. Troncs d'arbres.

4°. Tourbe avec des troncs de Pinus sylvestris et des histruments
de pierre. Il faut remarquer que les sapins n'ont pas végété sur
la tourbe même, mais sur les rives de la tourbière ; ils sont tombés
sur la tourbe et ont été ensevelis par elle.

5°. Troncs d'arbres, avec des noisettes et des chênes (du moins dans
la Norvège méridionale), qui sont des indices d'un climat plus tempéré.

6°. Tourbe avec des troncs de Quercus sessilifiora, tombés d'à côté ;
le chêne était donc autrefois beaucoup plus fréquent qu'actuelle-
ment; le sapin n'y croît plus à l'état sauvage.

7°. Troncs d'arbres.

8°. Tourbe, principalement de sphagnes.

9°. Surface actuelle, généralement assez sèche et couverte de
bruyères et de forêts. Il s'y forme donc une quatrième couche
de troncs d'arbres. D'après M. Blytt, les conditions dans les deux
pays sont parfaitement parallèles et prouvent: 1° une amélioration
graduelle du climat et
une alternance de périodes de sécheresse
relative (climat plus continental) et d'humidité (climat plus insulaire).

D'après lui, ces alternances se seraient déjà produites auparavant;
il en voit la preuve dans les moraines frontales concentriques de
la fin de la période glaciaire. Chaque recul de la glace scandhiave
correspond à une période continentale et chaque avancement, qui
aboutit à la formation d'une moraine, à une période insulaire.
Cependant, en général le climat s'est amélioré.

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102 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Il fait ensuite entrer dans la comparaison les terrasses fluviatiles,
les lignes de rivage et les bancs coquillers soulevés. Il plaide en
faveur d'uu soulèvement graduel de la Scandinavie, qui s'est toutefois
ralenti avec le temps et il en conteste la périodicité. Selon lui, la
formation des dépôts de sable et de gravier dans les fleuves et la
préservation des bancs coquillers correspondraient aux périodes de
climat insulaire, plus uniforme par conséquent et plus humide.
Au contraire les périodes de climat continental, avec des hivers
plus rigoureux et des étés plus secs, auraient creusé des vallées et
isolé les terrasses dans les dépôts fluviatiles. Elles auraient aussi
causé la formation de lignes de rivage et auraient empoché celle
de bancs coquillers par la profusion de glace marine.

Jusqu'ici les raisonnements de M. Blytt sont extrêmement sédui-
sants et nous ne saurions y faire d'objection, sinon que parfois
ses peintures nous ont semblé être un peu schématiques. Il emploie
ces considérations pour pénétrer de plus en plus dans le passé
obscur et nous nous sommes demandé souvent s'il ne faudrait pas
appliquer cette sentence: „c'est trop beau pour être vrai". Du
reste ces considérations, à moitié géo-physiques, à moitié astrono-
miques, ne sont que dans un rapport très éloigné avec le sujet qui
nous occupe: les tourbières des Pays-Bas; et nous pouvons les
abondonner, après avoir fait observer une dernière fois, que l'étude
de nos tourbières présente plusieurs analogies avec celles de la
Norvège et du Danemarc, analogies qui se multiplieront probable-
ment avec le temps.

En étudiant le pays de Westerwolde et la haute tourbière de
Bourtange, nous avons considéré le Diluvium sableux de cette
contrée, bordée par l'Eems, comme un dépôt de l'eau de fonte de
la glace quaternaire. Ce sable est absolument le même près dm
Vecht et a été déposé probablement par une nappe d'eau courante
d'une largeur très considérable. Or, le Vecht et l'Eems sont à peu
près parallèles sur une certaine étendue, jusque près d'Emblicheim,
où le premier se tourne à l'ouest. S'il faut considérer le A^echt
supérieur et l'Eems comme des rudiments de ce courant d'eau de
fonte, il en est de même du Vecht inférieur et l'eau de fonte s'est
donc bifurquée à l'endroit de Nieuw-Amsterdam et de Nieuw-
Schoonebeek. Les deux branches de cette bifurcation n'ont proba-
blement pas toujours fonctionné simultanément; il nous semble

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CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 103

que le bras du Vecht inférieur est plus ancien et a été en fonction
pendant que la Drenthe, etc. étaient encore couvertes de glace.
Mais quand le promontoire occidental de celle-ci eut aussi disparu,
l'eau de fonte a pu s'écouler directement au nord, dans la direc-
tion de l'Eems inférieur. Le Vecht ne fut pas rendu tout à coup
inactif, mais peu à peu et l'eau diniitmante a pu y creuser un
chenal, qui fut ensuite employé pour le drainage local. Plus tard
la même chose s'est répétée pour l'Eems, quand l'eau de fonte
dut s'écouler dans un chenal situé encore plus à l'orient, coïncidant
peut-être avec la Weser actuelle. Avant que Ma zone de l'Eems
pût recueillir toute l'eau de fonte, la Hunse et la Ruiten-Aa ont
probablement fonctionné, mais pendant un temps très court, ce
qui explique leur moindre puissance. L'Eems, au contraire, paraît
avoir fonctionné assez longtemps, avant de céder sa tâche, ce dont
nous voyons la preuve dans la quantité de ses affluents, qui vien-
nent tous de l'est et ont leur source assez près de la Weser.

Or, nous pouvons pousser ces considérations en sens inverse et
regarder la vallée de l'IJsel et la Vallée Gueldroise, peut-être aussi
la Betuwe, comme des voies d'écoulement de l'eau de fonte, qui
ont été utilisées ensuite par les rivières du voisinage. Jusqu'à un
certain degré ces voies avaient été prédisposées par le glacier
lui-même, formant le paysage morainique; car, dans la vallée de
l'IJsel, à Deventer, nous avons trouvé l'argile à blocaux à une
profondeur considérable (80 M.—A. P.) De l'autre côté, les
vallées ont été rehaussées plus tard par la déposition de sable
alluvial fluviatile, comme dans la Vallée Gueldroise. Plus tard
encore, dans la période liistorique, le dépôt est devenu essentiel-
lement argileux.

Q u a t r i è m e P a r t i e.

Les petites iiautes Tourbières de l'Overijsoi.

XVII. HAUTE T0URBIÎ<]RE DE NI.IVERDAL.

En traitant de la haute tourbière de Hardenberg—Almeloo,
nous avons parlé de la colline de Wierden, c{ui forme une partie
de sa limite. Elle se prolonge bien davantage (au nord jusqu'à
Daarle) que ne le figure la carte géologique et il en est de même
des deux hautes tourbières, qu'elle dessine sur la plaine de Dilu-
vium sableux. En réalité elles forment un entier, quoique de peu

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104 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

d'épaisseur, situé entre la colline de Wierden et la Regge. On
aperçoit déjà la tourbière tout près de cette colline, dont la pente
sud-ouest est élargie par un terrain de sables mobiles, jusqu'à mi-
chemin de Wierden à PIooge-Hel?:sel. A partir d'ici c'est le
Diluvium graveleux de la colline, qui constitue la limite natu-
relle de la tourbière.

En allant de ce hameau à l'ouest, on aperçoit d'abord un faible
abaissement du sol vers les prairies du „Heksel-Vlier", tourbière
de marais de 0,5 M. d'épaisseur tout au plus, qui constitue un
prolongement partiel de la haute tourbière vers le nord, se conti-
nuant dans le „Linder-Beek". Dans cette partie orientale de la
tourbière la tourbe est peu épaisse; un certain nombre d'étangs
prouvent cependant, que localement elle doit avoir été plus
importante.

Le Heksel-Vlier est bordé à l'ouest par un terrain plus élevé,
du nom de „De-Piksen"; c'est un sable mobile, cultivé en partie,
qui cause un rétrécissement de la haute tourbière. D'ici à Hülsen
sur la Regge le chemin suit un petit dos de sable, entre deux
vastes étangs, qui correspondent à une des deux hautes tourbières
entamées de la carte géologique. C'est probablement encore un
sable mobile.

Les rives de la Regge offrent beaucoup d'analogie avec celles
du Vecht; elle s'est creusé une vallée, portant des prairies et des
champs plus élevés et cultivés, qui s'égalisent ensuite av^ec la
bruyère des deux côtés de la rivière, où les traces directes de
l'érosion détaillée manquent par conséquent. Tous ces îlots cultivés
(dans la plaine des prairies) ne sont pourtant pas uniquement le
produit de l'érosion ; il y en a qui ne sont que des sables mobiles,
plus
"OU moins nivelés ultérieurement.

Tout près de Hellendoorn on n'observe plus ce contraste des
deux terrains, conséquence naturelle de la situation du village sur
la pente de la colline. Le sol y est du sable avec d'assez gros
cailloux, jusqu'à 6 c.M., dérivé probablement de la colline et con-
stituant un passage du Diluvium graveleux au sableux. Nous y
avons aussi observé l'argile à blocaux au S. E. du village, près
du pont et de l'autre côte de la Regge; elle y était draguée dans
un fossé. Ce point est à peu près vis-à-vis du pied occidental de
la colline de Hooge-Heksel, où nous avons également observé
cette argile en quelques endroits; elle y était brune, tachetée de
vert-grisâtre.

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......a Ikl.^

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CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 105

Le chemin de fer passe, à 1 K.M. cà l'est de la gare de Nijverdal,
sur la haute tourbe, derrière le petit bois d'Eversberg; ce n'est
d'abord que de la tourbe de gazon, mais à Vs K.M. plus loin, on
voit des étangs, preuves d'une couche plus épaisse dans le passé.
Au sud du chemin de fer la haute tourbière porte le nom de
„Notterveen" et s'étend jusqu'à 2 K.M. Dans la direction de l'est
elle subit un rétrécissement causé par des sables mobiles, qui
s'arrêtent à 1 K.M. du chemin de fer.

Les causes de la formation et des bornes de la haute tourbière
de Nijverdal sont assez simples. Elle a pris naissance sur un plan
presque horizontal, très faiblement incliné du S. au N. et de l'E. à
l'O. et trempé en conséquence. Elle a été arrêtée à l'E. par la
colline de gravier de Wierden, élargie par des sables mobiles;
d'autres, probablement plus anciens, la rétrécissent au N. et au
S. La limite occidentale est la vallée bien drainée de la Regge,
dont les bords sont naturellement trop secs pour le développement
de la tourbe. Au sud la Regge approche de la colline de Wierden,
la tourbière se rétrécit et s'arrête par conséquent. Au nord, le
Linder-Beek, confluent de la Regge, agit peut-être de la même
manière et offre à l'extension de la tourbière un obstacle, qui
cependant ne peut pas être le seul, la distance étant beaucoup
plus grande.

XVIII. HAUTE TOURBIÎ^RE DE RI.ISSEN.

La carte géologique de Staring figure, à l'ouest du village de
Rijssen en Overijsel, une haute tourbière, enlevée pour la plus
grande partie. Voici les résultats de notre visite faite dans l'été
de 1893.

La tourbière est traversée par le chemin de fer de Deventer à
Almeloo et sur le parcours on voit facilement, qu'elle se trouve
entre les collines de Diluvium graveleux de Holten à l'ouest et
de Rijssen à l'est et que vers le milieu elle augmente des deux
côtés en humidité et en épaisseur, ainsi qu'on pouvait s'y attendre.

En suivant la chaussée de Rijssen à Hellendoorn au N.O., on
traverse d'abord un terrain de prairies très étendu, appelé „De
Mors" et on se demande: „pourquoi n'a-t-il pas été envahi parla
haute tourbière, puisque les conditions paraissent être favorables
et que l'humidité du sol est suffisante?" C'est la même question
qui s'est présentée si souvent à nous; nous ne saurions y trouver

14

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106 CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS.

d'autre réponse que celle-ci : „le terrain est inondé trop longtemps
pendant l'hiver et le printemps, de sorte que les plantes qui pro-
duisent une haute tourbière ne peuvent y pousser." La carte
géologique figure une tourbière de marais, mais nous doutons fort
qu'elle ait pris une telle extension. Plus au nord, près du hameau
de Zuna, on. voit le terrain devenir de plus en plus sec à mesure
qu'on approche d'un canal de drainage, la Regge, Près de la
chaussée le sol est tout à fait plat; mais à l'est les dift'érences de
niveau s'accentuent de plus en plus : des parties basses (prairies)
alternent bizarrement avec des parties plus élevées (champs labourés).

A l'ouest de la chaussée, près de la barrière, le sol sableux est
parfaitement plat. On le voit monter lentement à l'ouest et devenir
plus humide en même temps. Il s'y présente des fossés remplis d'eau
et on voit apparaître dans le sable homogène des cailloux de quartz,
assez rares du reste, qui ont jusqu'à 1 c.M. de diamètre. Parfois
de petits champs plus secs et plus élevés alternent avec le terrain
marécageux, qui devient graduellement tourbeux. Cependant on ne
voit que de la tourbe de gazon à cette hauteur, qui est aussi l'extré-
mité septentrionale de la tourbière, d'après la carte géologique.

Ce qui a empêché la tourbière de s'étendre, c'est: au N. le
voisinage de la Regge qui a abaissé le niveau de la nappe super-
ficielle; au N.E., celui d'un terrain, probablement trop trempé;
au S.E., au S. et à l'O., celui des collines environnantes. C'est
donc principalement la présence d'une vallée, entourée de collines,
un des caractères du paysage morainique, qui a donné naissance
à une haute tourbière.

Staring (1. c. pag. 95) consacre quelques lignes aux tourbières
de Nijverdal et de Rijssen. Il prétend: „c|u'une tourbière considé-
„rable s'est autrefois étendue dans la vallée située entre les col-
„lines de Plellendoorn, Plaarle, Holten, Markeloo, Herike, Rijssen,
„Wierden et Heksel. Près de Hellendoorn on trouve encore un
„peu de tourbe et on en creuse encore au sud (plutôt S.O.)
„de Rijssen. La Regge coupe cette plaine, du S.E. au N.O., de
„sorte que cette tourbière a sans doute toujours été divisée en
„deux."

Cette dernière assertion est parfaitement ) exacte ; la Regge con-
stitue un obstacle infranchissable à l'extension de la tourbière par
ses rives bien drainées et sèches.

»

i

-ocr page 112-

CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 107

XIX. HAUTE TOURBIÈRE DE DIEPENHEIM.

Dans le premier volume de son „Sol des Pays-Bas" Staring
parle d'une haute tourbière hypothétique entre la petite ville de
Lochem et le village de Diepenheim..

Il dit d'abord (pag 96): „il faut admettre que du côté oriental
„des „Heriker-" et „Vriesenberg", il y a eu autrefois une haute
„tourbière, à l'endroit où se trouvent actuellement r„Enterveen"
„et r„Elsensche-Broek" et qui a été i^eut-être en continuité avec
„le „Stokkumer-Vlier". Ensuite (pag. 97): „Dans le „Stokkumer-
„Broek" il existe encore aujourd'hui une multitude de hauteurs,
„nommées „Horsten", composées d'une haute tourbe épaisse et
„couvertes de houx et de fougères, qui sont probablement les
„restes d'une haute tourbière."

La carte géologique figure aussi une petite haute tourbière
entièrement enlevée. La lecture des lignes sus-mentionnées nous
engagea à y faire une visite, entièrement infructueuse, comme
nous allons le voir.

En voyageant par le chemin de fer de Hengeloo à Zutfen, on
traverse, derrière la station de Goor, une vaste prairie où çà et
là on creuse de la tourbe. La carte géologique figure de la tourbe
de marais, ce qui est correct, mais aussi de l'argile de ruisseau,
ce qui nous paraît très problématique. A. la station de Markeloo,
près du village de Diepenheim, le terrain est plus élevé ; c'est une
colline d'ancien Diluvium avec des erratiques assez volumineux.
Ensuite le chemni de fer coupe une large plaine tout à fait
semblable à la précédente et traversée dans sa longueur par le
„Schip-Beek", qui se jette dans l'IJsel à Deventer, et parsoncon-
flueut, le „Bolks-Beek". Le tout prouve que ce terrain n'est qu'une
ancienne vallée de rivière, trop large pour les ruisseaux qui l'oc-
cupent actuellement et qui ne sont que des rudiments de la rivière
d'autrefois. De même que de l'autre côté de la station de Markeloo,
l'existence de la tourbe est hors de question ; on en creuse çà et
là, mais ce n'est que de la tourbë de marais, formant le sol de la
prairie dans la vallée et épaisse de quelques décimètres tout au
})lus. Nous avons aussi essayé de prendre des informations au sujet
de la haute tourbière disparue; mais personne n'en savait rien.

Or, Staring parle de „horsten", petites hauteurs, qui seraient des
restes de la couche de haute tourbe d'autrefois. On nous en a montré

14^

-ocr page 113-

108 C0NTKIJ3UT10NS A LA GEOLOCUE J)1<],S PAYS-BAS.

à jiotre demande; mais ce n'étaient qui de petites collines de
sable avec un peu de gravier, probablement d'ancieiis sables mobi-
les sur un noyau de Diluvium graveleux. Sur quelques-unes il y
avait de petites dépressions ou pannes,
daiLS lesquelles il paraît y
avoir eu autrefois une très petite formation de tourbe, extrêmement
locale.

Ainsi, pendant notre excursion, de très courte durée du reste,
il ne nous a été possible de découvrir aucune trace d'une ancienne
haute tourbière, ni sur le sol, ni dans le souvenir des paysans.

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XX. HAUTE TOURBIÈRE DE GRONAU.

A plusieurs reprises nous avons relevé combien le figuré de la
carte géologique diffère de la réalité, en ce que les hautes tourbières
contiennent généralement encore beaucoup plus de tourbe que
l'indication de „tourbière entamée" ne le ferait croire. Ici nous
sommes dans le cas contraire ; la carte figure simplement une haute
tourbière, intacte par conséquent, mais dont la tourbe a en réalité
disparu pour la plus grande partie.

A l'est de la tourbière coule la petite rivière du Dinkel, con-
fluent du Vecht; la ville de Gronau et le village d'Epe sont bâtis
dans la vallée, assez apparente et profonde de 1—2 M. Celle-ci est
bordée à l'ouest par une bruyère, qui monte lentement, comme on
pouvait s'y attendre, et est couronnée de sables mobiles, tant
anciens que récents, qui passent graduellement dans la tourbière,
de la manière que nous avons déjà décrite plusieurs fois. Le sous-sol
est de 1 -2 M. plus élevé que celui de la tourbière et est constitué
uniquement de sable fin; nous n'y avons du moins observé ni
erratiques, ni argile à blocaux.

Dans la partie septentrionale de la tourbière, on observe en
plusieurs endroits des restes de la couche de tourbe, de 0,5—1 M.
d'épaisseur (e. a. sur la frontière) et les troncs d'arbres habituels,
qui sont distinctement enracinés dans la tourbe même et non
(directement) dans le sous-sol.

Au N.E., la différence entre une rive plus élevée et la tourbière
même est donc assez facile à constater. 11 n'en est pas de même
au N.O., où la bruyère limitrophe passe graduellement dans le
sous-sol de l'ancienne tourbière, en montant lentement à l'est. Le
mauvais temps, qu'il faisait lors de notre visite, fut cause de ce
que nous ne pûmes faire que quelques observations fugitives dans

-ocr page 114-

CONTUIEUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 109

cette partie; et l'étude de la carte topographique ne nous a pas
conduit plus loin. La carte du Waterstaat au contraire est plus
propre à nous éclaircir sur les relations topographiques ; elle montre
très bien le haut cours du Glaner-Beek, avec ses affluents de gauche,
qui descendent de la colline de Diluvium graveleux d'Enschede.
C'est donc moins cette colline que la vallée, qui olfre un obstacle
à l'extension de la tourbière; comme ailleurs la limite de celle-ci
est bordée de quelques petits sables mobiles.

L'allure du terrain s'observe très bien le long de la chaussée;
Gronau et Glanerbrug sont les points les plus bas, situés dans
deux vallées et séparés par le dos, qui forme la rive orientale de
la tourbière. Il y a donc une dépression, un chenal accentué dans
la vallée du Glaner-Beek; mais il ne faut pas le considérer comme
la prolongation d'un chenal, dans lequel serait situé la haute
tourbière, quoique l'étude de la
carte seule soit assez fjivorable à
cette manière de voir. En réalité il n'y a aucun rapport
direct
entre la pointe septentrionale de la tourbière, qui })asse impercep-
tiblement dans la bruyère ordhiaire, et le ruisseau.

En suivant le bord occidental de la tourbière au sud, on voit
de plus en plus des cailloux et des erratiques dans le sol, qui
devient plus élevé que la tourbière. Il en est parfaitement de
même sur le bord méridional, où la limite est constituée par une
colline de Diluvium graveleux très distincte, qui se dirige de l'est
à l'ouest, parallèlement au ruisseau de l'Aa et est évidemment la
cause de son brusque changement (S.-N. en E.-O.) de direction,
en aval d'Ahaus. Plus loin ce ruisseau prend le nom de „Ruisseau
de Buurse" et ensuite celui de „Schip-Beek".

Pour autant que nous le permettent nos recherches incomplètes,
nous voyons la cause première de la naissance de cette haute
tourbière dans les ondulations du paysage morainique. La colline
d'Oldenzaal—Enschede se dirige du S. au N., ainsi que le dos
entre Dinkel et Glaner-Beek. Entre l'Aa et le bord méridional de
notre tourbière est un terrain plus élevé, couvert également de
Diluvium graveleux; mais, précisément à cause de cette direction,
anormale dans le paysage morainique, nous sommes tenté d'ad-
mettre un noyau de calcaire turonien, comme il en vient à la
surface à peu de distance.

Le manque de relation entre l'extrémité septentrionale de notre
tourbière et le Glaner-Beek est pour nous une raison de ne pas
considérer le sous-sol de la tourbière comme un chenal d'érosion.

-ocr page 115-

110 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

dont ce ruisseau serait la continuation. Ce dernier ne prend pas
sa source dans l'extrémité septentrionale de la tourbière, comme
on pourrait s'y attendre, mais en partie près de la rive occidentale
et en partie (Floer-Bach) à une distance de plusieurs kilomètres au
S.E. dans l'élargissement méridional.

Staring consacre encore quelques lignes à cette tourbière (B. v.
N. I. Pag. 96).

„L'Amtsveen" (nom de la partie néerlandaise de cette tourbière)
„n'est bordé par des hauteurs qu'à l'ouest; il est au sud en relation
„avec le Schip-Beek (qui n'a rien à faire avec la tourbière N.B. !)
„et à l'est avec le Dinkel" (ce qui n'est pas vrai non plus), „tan-
„dis que le Glaner-Beek y prend sa source au nord. Le défaut de
„moyens de transport et les droits d'entrée sur la frontière font,
„que cette tourbière ne s'épuise que très lentement."

XXL HAUTE TOURBlh^JiE DE HAAKSBER'^EN.

(Jette toui'bière, qui possède encore une quantité Jiotable du
combustible, est dans un rapport bien plus intime avec l'Aa ou le
Ruisseau de Buurse, que celle que nous venons de quitter.

La carte géologique figure, vers Eibergen, un terrain de Dilu-
vium graveleux, allongé de l'O. à l'E. ; c'est un des nombreux îlots,
épargnés par les eaux de fonte de la glace quaternaire. Tout près
d'Eibergen, au hameau de Mallem, il forme la rive droite, très
prononcée, du „thalweg" du Berkel.

Son extrémité N.E. s'étend encore au-delà de la frontière prus-
sienne et descend dans le sous-sol de la haute tourbière, composé
d'un sable fin avec un certain nombre de cailloux, qui disparais-
sent à l'est.

Quant à la tourbière même, nous y avons trouvé un grand nom-
bre d'arbres fossiles, des chênes, etc., jusqu'à Vs M. en diamètre,
rompus au-dessus du tronc et couchés en général à l'E. ou au N.
La tourbe diminue en épaisseur depuis le centre jusqu'au bord mé-
ridional, pour passer en tourbe de gazon, interi-ompue çà et là par
des parties plus élevées et plus sèches, qui se coiifondent ensuite.
La cause de la limite méridionale n'est pas difficile à trouver; en
allant au S on voit la bruyère baisser et devenir plus sèche en
même temps, porter même une chaîne de sables mobiles, derrière
lesquels on observe la vallée bien prononcée de r„Emmrich-Bach".

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CONTUIEUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 556

Le chenal a des rives escarpées de V^—1 M. de hauteur et la val-
lée a parfois des versants hauts de 1 M. Le Diluvium graveleux,
avec des erratiques fréquents, s'y montre à plusieurs reprises, mais
reste séparé de celui du versant de la colline, où de temps à autre
nous avons observé l'argile à blocaux bien distincte, couverte de
1—2 d.M de sable.

A l'est la tourbière diminue plus lentement en épaisseur; elle
passe en tourbe de gazon, qui se partage en îlots, devenant de plus
en plus rares et plus petits. Des sables mobiles, plus ou moins
facilement reconnaissables, sont fréquents ; ils portent e. a. la mé-
tairie de „lloge-Lugt" et le hameau de „'t Venn". La bruyère monte
en même temps, mais presque imperceptiblement.

Des sables mobiles assez développés et souvent cultivés accom-
pagnent le cours du Buurser-Beek et de son affluent gauche le
„Zodde-Beek", preuves de la plus grande sécheresse du sol près
du chenal de drainage. Ils sont en même temps une cause directe
j. de la formation de la tourbière ; la carte topographique indique
' e. a. un terrain du nom de „Groene-Plas en Hörster-Veen" qui
I est si clairement en rapport avec d'anciennes collines de sable mobile,
I que nous devons le considérer comme une panne de 0,5—1 K.M.
j d'étendue. Comme toujours, ces collines augmentent en importance
à mesure qu'on approche du ruisseau; elles sont probablement la
cause de la fondation de la colonie de Buurse, ainsi que des terres
cultivées de Haaksbergen même, où les pentes rapides et la position
élevée et bombée de plusieurs champs labourés attirent facilement
l'attention. La délimitation septentrionale de notre haute tour-
bière est donc en grande partie accidentelle et la suite du jeu
des vents

La limite occidentale devra être étendue d'environ 500 M. en
comparaison avec la carte géologique. La carte topographique
figure très bien une chaîne de sables mobiles, parallèles d'abord
au Ruisseau de Buurse, mais s'infléchissant ensuite au sud, et der-
rière (E.) elles quelques pannes, qui font en réalité partie du
terrain de la tourbière La limite de la carte géologique coïncide
en partie avec un ancien sable mobile très développé et portant
une petite colonie, entièrement entourée par la tourbière. C'est
près d'ici, à l'E., que la tourbe acquiert sa plus grande épaisseur,
que nous avons évaluée à 2 M.

En somme les conditions topographiques de la haute tourbière
de Haaksbergen sont peu équivoques.

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112 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Elle est limitée d'un côté (S.O.) directement par un terrain plus
élevé de Diluvium graveleux et des autres par un terrain plus
bas de Diluvium sableux, qui est drainé à une certaine distance
par deux (ou trois) ruisseaux, coulant à l'O.

Or, la sécheresse relative de ce sable est accentuée par la pré-
sence de nombreuses dunes, qui sont naturellement accompagnées
de dépressions, de pannes Elles ont à leur tour été la cause de
colonies agricoles, comme celle de „'t Venn" à l'extrémité orientale
de la tourbiêi'e, où leur caractère original est distinct encore. Leur
étude conduit à conclure, que les terres labourées élevées de Buurse,
de Elaaksbergen, e tutti quanti, ne sont que d'anciens sables mobiles,
moins facilement reconnaissables par le visiteur peu expérimenté.

Le drainage, suffisant près des ruisseaux et insuffisant dans la
tourbière même, est visible sur la carte du Waterstaat, où l'on
voit la ligne de séparation des bassins hydrographiques du Buur-
ser-Beek et du Berkel traverser la tourbière.

Cinquième Partie.

Les Tourbières du Sud-est de la Gueldre et de la Province d'Utrecht.

t'i.

- ! Nous allons maintenant nous occuper de l'examen de cinq autres

tourbières, dont deux seulement se trouvent entièrement sur le
territoire des Pays-Bas; les trois autres sont traversées par la
li frontière de la Gueldre et de la Westphalie.

XXII. HAUTE T0URBIÎ]RE DE ZWILLBROEK.

H Cette tourbière est située non loin de celle de Haaksbergen;

mais les conditions topographiques n'en sont pas aussi faciles à
déchiffrer. Elle se trouve tout près du hameau prussien de Zwill-
Ç broek et à une distance de 3—4 K.M. de la petite ville de Groen-

loo. En partant d'ici, on monte lentement sur une colline de
Diluvium graveleux, bien indiquée sur la carte géologique Â
l'extrémité nord se trouve le village d'Eibergen et à l'extrémité
sud, celui d'Aalten. Ainsi que plusieurs ^autres de ces collines (ou
plutôt terrains plus élevés que la plaine voisine), elle est orientée
du N. au S. et non du N.O. au SE., comme plus loin au nord
dans les Pays-Bas.

'5-

r

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CONTRIBUTIONS A LA GEOLOG-IE DES PAYS-BAS. 113

La base montre en plusieurs endroits l'argile à blocaux bien
distincte et quelques sables mobiles de peu d'importance. La
limite de la haute tourbière est une ligne, ondulée par l'alternance
de rejetons de la colline et d'autres de la tourbière- La cause en
est bien simple: ce n'est que l'effet de l'érosion, qui a créé une
série de petites vallées, qui ont été envahies par la tourbière en
croissance, comme nous l'avons observé ailleurs, e. a. à Schoone-
beek et à Dalerveen en Drenthe, à Fochteloo en Frise, etc.

Tout près de cette limite occidentale, se trouve une digue de
tourbe, qui traverse la tourbière du N. au S. et sert de route de
Zwillbroek à Winters wijk. Elle offre une bonne occasion de mesurer
l'épaisseur minimum de l'ancienne tourbe, égale à 2 M. au moins.

On y voit aussi la tourbe augmenter en épaisseur du N. au S.,
puis diminuer jusqu'au bord méridional, preuve de sa convexité,
comme en tant d'autres hautes tourbières. Nous y avons vu à plu-
sieurs reprises des troncs d'arbres, enfouis dans la tourbe et ramenés
au jour par l'exploitation. Généralement il y avait encore de la
tourbe en-dessous, de sorte qu'il y avait déjà une tourbière en
développement au moment oii la semence commença à pousser.
En un point nous vîmes même trois troncs, l'un sur l'autre, trois
générations d'arbres, par conséquent séparées par une petite couche
de tourbe.

Quant à la limite méridionale, les conditions en sont plus compli-
quées. Au point où la route de Winterswijk s'éloigne de la tour-
bière on est encore sur le versant de la colline de gravier et on
observe dans un petit fossé l'argile à blocaux. Le sol monte même
encore un peu au sud; mais en suivant à l'est la lisière de la haute
tourbière on descend très lentement, toutefois en passant par quel-
ques petites hauteurs de Diluvium graveleux. Vers le milieu, le
terrain est le plus bas, comme on pouvait s'y attendre, et se con-
tinue au sud dans une zone de prairies avec des fossés. Un petit
ruisseau de drainage prend sa source dans la tourbière, traverse
les prairies et se continue au sud, pour incliner successivement au
S. 0., à rO et au N. 0. et s'unir avec le ruisseau, dit „Groen-
loosche-Slinge". Celui-ci traverse du S. E. au N. O. une vallée
étroite, avec la ville de Groenloo, qui sépare en deux la colline
de gravier d'Eibergen-Aalten et qu'on peut donc considérer comme
la continuation assez bizarre de la dépression de la tourbière de
Zwillbroek.

En suivant la route de la tourbière à Meddeho, on la voit monter

15

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114 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

lentement au S. E., sur une nouvelle colline de Diluvium graveleux,
qui se dirige d'abord du S. O. au N. E., mais incline bientôt du
S. au N. et forme ainsi un pendant à la colline d'Eibergen à
Aalten. On peut la distinguer déjà dans la tourbière même, grâce
aux champs de seigle vert-clair, qui couvrent son versant occidental.

La carte géologique n'indique que du Diluvium sableux hori-
zontal, tandis que le Diluvium graveleux y est fort facile à con-
stater; nous avons même observé à plusieurs reprises l'argile à
blocaux. La carte topographique figure trois collines séparées, au
lieu d'une seule, qui s'étend encore jusqu'à une certaine distance
au N. de la tourbière.

Sur le bord septentrional la chaussée, de Zwillbroek à Vreden
est en général plus élevée que la tourbière ; mais les sables
mobiles sont de nouveau en jeu. Un petit ruisseau de drainage
les traverse du S. au N. par une entaille artificielle, profonde de
1-2 M.

Lors de notre dernière visite à la tourbière, en Septembre 1893,
nous avons voulu nous orienter sur la limite septentrionale et
nous avons pu constater ce qui suit.

A l'est de la colline de gravier, appelée „Eibergsche-Veld", on
observe de la tourbe, jusqu'à 2 d.M. d'épaisseur dans un terrain
plus bas avec des prairies, qu'on est tenté de considérer comme
la prolongation de la tourbière, d'autant plus, qu'il est traversé par
un petit ruisseau ou fossé, le „Veengoot" ou „Ramsbeek", qui
joint le Berkel à Eibergen. Il draine la partie septentrionale de
notre tourbière et coupe la chaussée presque sur la frontière. La
douane allemande est située dans un terrain un peu plus bas de
prairies, à l'est duquel on observe des champs cultivés plus élevés
et ensuite les sables mobiles sus-mentionnés. Le temps défavorable
nous a empêché de nous orienter complètement; mais nos obser-
vations, contrôlées par l'étude de la carte du Waterstaat, nous
permettent de constater une prolongation de la dépression tourbeuse
au nord, vers le Berkel. Nous en avons constaté une autre au
sud, vers Meddeho, et la carte sus-nommée indique distinctement
une ligne de séparation des bassins hydrographiques de la Groen-
loosche-Slinge et du Berkel, qui traverse notre tourbière de l'O.
à l'E., assez près de son bord méridional.

Les causes de son origine sont maintenant assez claires. C'est
en première ligne une ondulation du paysage morainique; deux
collines de Diluvium graveleux s'étendent du N. au S., l'une

iSf;.

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CONTUIEUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 115

d'Eibergen (ou de Groenloo) à Aalten, l'autre de Eekken à Meddeho.
L'intervalle, insuffisamment drainé au S. et au N., a par conséquent
une nappe superficielle très élevée et s'est facilement couvert d'une
tourbière pendant une période d'humidité.

Il faut encore faire observer, que les deux ruisseaux suivent de
près la colline occidentale; la pente de celle-ci est donc plus
raide que la pente ouest de la colline orientale, et la tourbière
s'est développée principalement sur cette dernière. Or, nous avons
observé précisément la même chose dans la tourbière de Gronau,
dont la partie nord se trouve sur la pente occidentale du dos
entre Dinkel et Glaner-Beek et qui est bordée à l'ouest par ce
dernier ruisseau, derrière lequel s'élèvent les hautes terres de la
colline d'Enschede.

Staring ne consacre que quelques lignes aux tourbières de Haaks-
bergen et de Zwillbroek (1. c. pag.. 97). „La tourbière de Haaksbergen
„a été peu exploitée jusqu'à ces dernières années" (avant 1856),
„mais elle va actuellement au devant d'un meilleur avenir".

„La tourbière de Zwillbroek est à peu près épuisée, ainsi que la
„tourbière de Kolenberg" (dont nou's parlerons tantôt), „dans laquelle
„on creuse presque autant de bois fossile que de tourbe".

„II ne reste que très peu de chose de la tourbière de Burlo et
„de la Tourbière Blanche".

XXIII. HAUTE TOURBIÈRE, DITE „KLOOSTERVEEN".

Les quatre tourbières, qui suivent, sont situées autour du village
de Winterswijk. La première, du nom de „Kloosterveen" se trouve
presque entièrement sur le territoire prussien, tout près du village
de Burlo, entre Winterswijk et Borken, et est traversée par le
chemin de fer qui unit ces deux villages. Nous y avons fait
quelques observations qui ne sont cependant pas suffisantes.

La ville de Bocholt est située dans la large vallée du „Priester-
Beek" ou „Aastrang", qui se jette dans le Vieux IJsel près du
village d'Ulft. En allant de cette ville à l'est, au village de Rhede,
on s'éloigne du ruisseau et on monte lentement le versant d'une
colline assez considérable. D'abord le sol n'est que le Zanddiluvium ;
mais celui-ci passe graduellement dans le Diluvium graveleux, bien
reconnaissable. Nous y avons même observé l'argile à blocaux
distincte près des hameaux de „Feldboom" et de „Middelkamp"
entre Rhede et Burlo, tout près de la tourbière et comme d'ordi-

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116 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

naire, couverte de 1—2 d.M. de sable à cailloux. Le sol graveleux
passe graduellement dans le tourbeux; on n'y voit pas de diffé-
rence de niveau, mais seulement une faible pente générale à l'O.
Le long de la limite S.E. de la tourbière on observe quelques
anciens sables mobiles avec des dépressions à côté, qui ont natu-
rellement favorisé la formation de la tourbe. Tout près de Burlo
la pente de la colline est plus forte; la tourbe augmente par con-
séquent plus vite en épaisseur et est plus nettement séparée du
sable voisin.

Le Diluvium graveleux s'étend encore plus loin que sur la carte
géologique; nous l'avons observé e. a. dans le fossé de la frontière
à la borne 770. C'était un sable contenant bon nombre de cailloux,
jusqu'à 1 d.M.

Sur le bord septentrional plusieurs sables mobiles se sont déve-
loppés, alternant avec des couches de tourbe peu épaisses. D'ici au
hameau de Kotten le sol est du Diluvium graveleux, pauvre en
cailloux; une pente quelconque n'a pas été observée.

XXIV. HAUTE TOURBIERE, DITE „WiTTE VEEN".

A 6 K.M. à l'ouest de la tourbière précédente s'en trouve une
autre, appelée „Witte Veen" (tourbière blanche), à cause de la grande
quantité de sphagnes mortes qu'elle contient.

Le village le plus proche de cette tourbière est Aalteii, dont
nous avons déjà parlé à l'occasion de la tourbière de Zwillbroek.
Il est bâti sur le versant méridional d'une colline importante de
Diluvium graveleux, vers la vallée de r„Aaltensche-Slinge". En
allant du village à la tourbière, on traverse le „Keizers-Beek", con-
fluent du Priester-Beek, derrière lequel le terrain monte sensible-
ment sur la „Kiefsche-Heide", hauteur de Diluvium graveleux,
reconnaissable, mais pauvre en cailloux. Sur la frontière prussienne
le sol baisse un peu et on arrive dans la prolongation de la tour-
bière blanche. Le Diluvium graveleux devient plus distinct; tout
près de la tourbière nous avons trouvé plusieurs cailloux de 8 et
10
C.M., quoique la carte ne figure que du Diluvium sableux. Il
en est de même du bord septentrional où l'argile à blocaux s'ob-
serve sur quelques points. ^

La tourbe a disparu pour la plus grande partie; çà et là on en
voit encore des vestiges, des digues servant de route dans les temps
de grande humidité. Elles ont une hauteur de 1 M. tout au plus,

-ocr page 122-

CONTUIEUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 117

égale par conséquent à l'épaisseur minimale de la couche de tourbe.
On y voit en même temps les troncs d'arbres ordinaires, enracinés
sur la tourbe même. Le bord septentrional de la tourbière, ainsi
que le bord méridional, étant sensiblement plus élevé que le sous-
sol du milieu, nous avons de nouveau affaire à une ondulation du
terrain, particularité du paysage morainique, et il est fort probable
que la tourbière de Burlo doit son origine à la même cause. La
position est parfaitement analogue, mais avec cette difference, que
nous n'avons pas réussi à y constater à son bord N. O. une émi-
nence de Diluvium graveleux, aussi distincte que la Kiefsche-
Heide au N.O. du Witte Veen.

La carte géologique de Staring figure pourtant une série de
petites éminences de Diluvium graveleux du côté néerlandais de
nos deux tourbières, indiquées par les localités de Heurne, Miste,
Woold, Kotten et Ratum. Elles sont situées sur une ligne, qui
a d'abord une direction de l'O. à l'E. pour s'infléchir ensuite au
N. E., parallèlement à la colline de Bocholt-Stadtlohn. Or, c'est la
même courbe que nous avons signalée déjà en parlant de la li-
mite orientale de la tourbière de Zwillbroek et du changement
de cours de son ruisseau de drainage méridional. Toutes ces cour-
bes si analogues ont certainement une cause commune, dont nous
parlerons plus bas.

XXV. HAUTE TOURBIÈRE, DITE „KoRENBERGER VEEN".

Cette tourbière, ainsi que la suivante, se trouve entièrement sur
le territoire néerlandais et du côté 0. de Winterswijk. Sur la carte
topographique elle porte aussi le nom de „Corle'sche Veen",
d'après le hameau de Corle, qui est situé à 2—3 K.M. au sud.
Elle est traversée diamétralement par le chemin de fer de Win-
terswijk à Zutfen, tandis que celui de Winterswijk à Groenloo en
touche le bord septentrional.

Le bord au N. E. et au N. est visiblement plus élevé que la
tourbe; mais la différence est due en partie aux sables mobiles,
revenus en repos et couverts de bois de sapins et de terres labou-
rées; des collines de sable mobile alternent de nouveau avec de
petites tourbières isolées. Dans cette partie nous avons aussi ob-
servé la présence de la limonite, qui forme localement le sous-sol
de la tourbe peu épaisse. Plus à l'ouest, elle augmente en puis-
sance et on en voit un grand nombre de monceaux, de sorte qu'ici

-ocr page 123-

....................... ................-.....' : .................

fe.-'. .. ................ . ,

118 CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS.

encore il n'y a pas de motif pour regarder la tourbière comme
entamée. La tourbe intacte y atteint même une épaisseur de 1—2
M.; elle n'est pas seulement creusée, mais aussi draguée, d'où il
résulte des tourbes noires, très dures et compactes.

Au sud du chemin de fer elle est plus puissante encore; les
restes constituent des digues et des monticules de 2—2,5 M. de
hauteur, qui sont naturellement secs et portent par conséquent
une végétation particulière: des bouleaux, des
Rubus, des Callwna
vulgaris;
la tourbe basse et humide porte des Erica tetralix, des
Luzula, des Garex, des Eriophorum, des sphagnes, etc.

Au S.O. les digues baissent naturellement par suite de la con-
vexité de la tourbière; le sous-sol sableux devient peu à peu
visible, porte des chênes et des sapins, et passe dans le bord de la
tourbière, qui est d'un mètre plus élevé et ne se compose que de
sable sans cailloux. Dans la même direction cependant après
avoir traversé le ruisseau de drainage, le „Schaars-Beek", on voit
apparaître des cailloux, qui augmentent à mesure qu'on arrive sur
la colline et forment un passage à l'argile à blocaux, cachée sous
1 d.M. de sable et contenant de nombreux erratiques. La colline
descend au S., ainsi qu'à l'O. et à TE.; elle a donc une pente
analogue au ruisseau Schaars-Beek. Celui-ci prend naissance dans
la tourbière, tout près et au N. de laquelle coule la Groenloosche--
Slinge. On peut donc conclure a priori que notre tourbière se
trouve au bout d'une vallée, tout près de la séparation de deux
bassins hydrographiques, et en consultant la carte du Waterstaat,
on s'aperçoit qu'il en est ainsi en effet. Les chiffres qu'elle porte
le long du chemin de fer prouvent, que le milieu de la tourbière
(avec 27,5 M. -f- A.P.) est notablement plus bas que son bord
occidental (avec 30 et même 35) et que son bord oriental (avec
29,3 et 30,9 M. -l- A.P.).

Elle est donc située dans un chenal (d'érosion en partie), qui
n'est actuellement occupé que par un ruisseau insignifiant. Celui-ci
coule du N. au S., près de la pente orientale, relativement raide,
d'une colline de gravier, pour se jeter dans l'Aaltensche-Slinge,
qui coule à l'O., fait ensuite une-courbe au nord et suit la direction
générale des ruisseaux de cette contrée. La colline de Diluvium
graveleux, que nous avons ici en vue, celle de Aalten-Eibergen,
est celle, dont nous nous sommes déjà occupé plusieurs fois et
dont nous nous occuperons encore à propos de la tourbière suivante.

On remarque facilement la position alialogue des tourbières de

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CONTRIBUTIONS A LA GEOLOG-IE DBS PAYS-BAS. 119

Zwillbroek et de Korenberg; les deux principaux points de diffé-
rence sont: 1° le Diluvium graveleux à l'est vient à la surface
près de la première et est couvert de Diluvium sableux près de la
seconde, et T la première se draine des deux côtés, la seconde
seulement au sud.

XXVI. HAUTE TOURBIÈÎRE NOIRE OU „ZWARTE VEEN".

Au S.O. du village de Lichtenvoorde et au N.O. de celui d'Aalten
nous trouvons sur la carte géologique une cinquième tourbière,
indiquée comme entièrement enlevée. Elle porte le nom caracté-
ristique de „Zwarte Veen" (tourbière noire), tandis que de l'autre
côté d'Aalten nous avons examiné le „Witte Veen" ou tourbière
blanche. Dans la première les sphagnes sont rares, dans la seconde
elle sont fréquentes; de là la différence de couleur.

Notre tourbière est située assez près du hameau de Dalen (au
N. d'Aalten) et de la colline d'Aalten—Groenloo, qui descend
lentement au N.O. en devenant plus humide, comme on pouvait
s'y attendre ; en même temps le Diluvium graveleux fait place au
sableux. Les champs labourés alternent de plus en plus avec les
prairies, qui finissent par prendre le dessus; elles sont entourées
de bosquets d'aunes et de bouleaux et sont remplacées à leur tour
par des champs de foin, qui deviennent plus sauvages dans la
même direction.

Cependant le sol n'est toujours que le Diluvium sableux, dont
on voit de temps à autre de bonnes coupes dans les nouveaux
fossés. Il est composé de strates fines, qui ne sont pas toujours
horizontales, mais aussi ondulées ou inclinées, et présentent de
petites failles et parfois des couches synclinales, qui prouvent la
présence d'un ancien lit de ruisseau, rempli de sable. Peu à peu
l'herbe alterne avec des bruyères, des joncs et même des roseaux,
et on voit apparaître çà et là de la tourbe, d'abord dans des
dépressions isolées accidentelles, ensuite en couche continue, qui
devient de plus en plus épaisse. L'herbe fait place à la bruyère,
qui couvre la tourbe en son entier, à l'exception de nombreux
champs de foin, mieux drainés. L'ancienne tourbière a perdu la
plus grande partie de son combustible; mais des tertres isolés
oubliés et les digues déjà mentionnées"" prouvent, qu'autrefois il y
en a eu une couche de 2 M. au moins.

Les points élevés montrent une stratification très distincte dans

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120 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

la tourbe et par conséquent une interruption d'homogénité, qui
fait qu'il est impossible d'en couper de bonnes tourbes. Au milieu,
la surface et les bords des fossés ne sont que de la tourbe; on
n'aperçoit le sous-sol sableux que plus près des bords. Nous y
avons observé aussi un bon nombre de troncs d'arbre, probable-
ment de sapins, qui sont enracinés sur la tourbe elle-même.

Dans la tourbière nous n'avons pu observer qu'une pente très
faible au N. 0. La rive droite ou du N. E. paraît être au même
niveau que le sous-sol de la tourbière; c'est une plaine sableuse
très plate, couverte de prairies et de petits bosquets, auxquels
succèdent au N. E. les champs cultivés.

La rive gauche est entièrement différente; la tourbe touche
immédiatement à une chaîne parallèle de sables mobiles (bien in-
diquée sur la carte géologique), derrière laquelle le sol baisse très
lentement vers le ruisseau d'Aalten. Le drainage par celui-ci est
évidemment la cause de la formation de ces collines, qu'il faut
probablement considérer comme antérieures à la tourbière, quoi-
qu'elles ne soient pas entièrement revenues en repos. Lorsqu'elles
commençèrent à se former, le sol de la tourbière était probable-
ment déjà trop humide pour venir en mouvement, et pendant une
période suivante d'humidité, la tourbe s'y dévelojDpa facilement.

Quant au bord inférieur ou du N. 0., il tient le milieu entre
les deux rives voisines. Du côté de la rive S. 0. l'on trouve en plusieurs
endroits le passage graduel connu du terrain ondulé et aride au
terrain plat et marécageux. Du côté de la rive N. E. au contraire
la tourbière passe lentement au sable de moins en moins humide.

La chaussée de Lichtenvoorde à Varsseveld est parallèle à ce bord
inférieur, et la carte topographique figure de l'autres côté, plus au
N. O. par conséquent, plusieurs terrains aux noms curieux, tels
que: „Halsche-Fem, Vilders-Feeri, Heeren- of Wolfers-Fee/i".

Afin d'avoir au moins une idée de ce terrain, nous l'avons tra-
versé diagonalement de Varsseveld à Ruuiioo. A partir du Ruisseàu
d'Aalten, on aperçoit une très faible hausse du terrain, qui paraît
devenir plus forte à Lankhorst, où la route prend une direction
plus septentrionale, donc moins parallèle à l'axe des soi-disantes
tourbières. Le sable à côté de la route devient plus grossier et à
„De Landweer", sur la limite des terres cultivées et boisées et de
la bruyère, se montre la chaîne des anciens sables mobiles, qui se
continue aussi le long de la Tourbière Noire.

La bruyère entre De Landweer et „Tolhut" est un peu ondulée,

.........

ïLJi,

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CONTUIEUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 121

mais sèche, excepté dans quelques dépressions. Durant notre course
nous n'y avons pas observé de tourbe; les noms cités ci-dessus
n'avaient probablemeut rapport qu'à de petites tourbières tout à
fait locales.

Si l'on se demande quelles sont les causes de la naissance et de
la délimitation de la Tourbière Noire, il faudra répondre qu'elles
sont différentes de celles des tourbières que nous venons de décrire.
Il est clair que cette tourbière ne s'est pas étendue plus au S. E.,
puisque le terrain monte visiblement vers la colline d'Aalten et
devient plus sec en conséquence. Le côté S. 0. est également
sec, comme le prouve la série de petits sables mobiles qui sont
la conséquence du drainage souterrain vers le Ruisseau d'Aalten.
Au N. E, le passage à un terrain plus sec est beaucoup plus gra-
duel et nous n'avons pas affaire ici à un ruisseau de quelque
importance, coulant dans une entaille assez profonde, mais à un
assemblage des racines du Ruisseau de Lichtenvoorde, appelé plus
loin „Ruisseau de Vörden", qui se jette directement dans l'IJsel.
Or, ces racines coulent presque à fleur de terre, drainent plus
superficiellement et laissent par conséquent le terrain plus ou moins
marécageux. Le bord N. 0., en bas de la tourbière, a de l'analogie
d'un côté avec le bord N. E., de l'autre avec le bord S. 0. Cette
partie est drainée par un ruisseau spécial, le „Veengoot", confluent
du Ruisseau de Vorden et dont le haut cours à été allongé artifi-
ciellement dans la tourbière.

L'étude de la carte du Waterstaat rend les choses encore plus
claires. Elle montre un faible dos de partage entre le bassin
hydrographique du Ruisseau d'Aalten, qui se jette dans le Vieux-
IJsel et coule un peu plus au S. 0., et celui du Ruisseau de Vörden,
qui se jette dans l'IJsel et coule au N. O. Or, notre tourbière se
trouve tout près de ce dos de partage (couronné par le chaînon
de sables mobiles) et par conséquent la nappe superficielle y était
jadis tout près de la surface, l'eau ayant naturellement besoin d'une
certaine pente, pour s'écouler vers un chenal de drainage. Il est
évident que, vu la résistance dans le sable, cette pente doit sur-
passer sensiblement celle de l'eau à la surface.

Quand la pente du terrain est moindre que celle de la nappe
souterraine, il en résulte un sol trempé, qui va porter une tour-
bière à une certaine distance du chenal de drainage. Cette distance
sera d'autant plus grande (et vice versa), à mesure que le chenal
de drainage est plus profond et le sol plus perméable (gravier).

16

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122 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Comme nos terrains graveleux, plus perméables, ont ordinairement
une peute visible, il en résulte qu'ils ne portent qu'exceptionnel-
lement une tourbière (sauf dans une dépression).

Quand la peute du terrain est plus forte, il sera plus sec daus
sa partie la plus élevée; mais il se peut que l'eau souterraine
vienne à la surface assez près du chenal de drainage et il en
résultera uue tourbière de pente (p. e. tourbières de Frederiksoord,
de Gronau, etc.)

Avant de quitter les tourbières du S.E. de la Gueldre, il nous
faut faire quelques observations sur les directions des cours d'eau
de l'est de notre pays. Ces directions offrent une différence remar-
quable, qu'il serait dommage de laisser inaperçue.

Au nord, dans la Frise et en Drenthe, dans le territoire du
Diluvium
Scandinave de Staring, ils coulent du N.E. au S.O.
(Tjonger, Linde, Smilde, etc.), et
On peut les considérer comme des
rudiments des ruisseaux de fonte de la glace quaternaire.

Ensuite les traces d'une érosion plus ou moins considérable sont
abondantes dans notre Diluvium, de sorte qu'il est permis d'ad-
mettre que le Rhin aussi a coulé jadis à un nivea d plus élevé et
a pu déborder facilement à. droite et à gauche.

Or, en Gueldre les petites rivières ont une direction du S.E. au
N.O., perpendiculaire par conséquent à la première (Vieux IJsel,
cours supérieur du Ruisseau de Vörden, du Berkel, du Schipbeek).
Quant au Vieux—LJsel, il coule parallèlement au Rhin et à une faible
distance, de sorte que nous pouvons le considérer sans danger comme
un ancien bras du Rhin, comme une des branches de son delta
quaternaire, dans le lit duquel un cours d'eau indépendant a pris
naissance, après qu'il a été abandonné par le fleuve principal.

On peut appliquer le même raisonnement aux autres petites
rivières, mais seulement jusqu'à un certain degré et avec beaucoup
de précaution; car à mesure qu'on s'éloigne du Rhin, tant à l'est
qu'au nord, son influence diminue et celles des ruisseaux de fonte
de la glace quaternaire augmente. Ainsi, en traitant de la haute
tourbière de Bourtange, nous sommes arrivé à la conclusion que
l'Eems n'est (en partie) qu'un ancien cours d'eau de fonte et
qu'il en est de même du Vecht, tant pour son cours S.~N. que
pour celui E.—0. Or, la Regge et le Dinkel sont des Vecht en

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CONTUIEUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 123

miniature, comme le Vecht est un Eems en miniature; il y a
donc quelque raison de les considérer également comme des ruis-
seaux de fonte, qui ont acquis ensuite une existence indépendante.
Nous avons même appliqué cette manière de voir à la Vallée
Gueldroise et à la Vallée de l'Usel, qui coulent aussi parallèle-
à l'Eems et du S. au N. Pourtant, il ne sera pas possible de
tirer une limite nette entre le terrain de l'influence exclusive
du Rhin et celui des ruisseaux de fonte; il y a un large espace
intermédiaire oii l'une des deux va en diminuant, l'autre en
augmentant.

Il faut être prudent, surtout quant au Berkel, puisqu'il prend
sa source dans les terrains crétacés de la Westphalie, qui certaine-
ment n'ont jamais été inondés par les eaux rhénanes.

Les „Slinge" d'Aalten et de Groenloo pourraient passer plus
facilement du côté du Rhin, ainsi que peut-être la plus grande
partie du cours du Berkel et même du Schipbeek.

Pour ne pas trop nous éloigner du thème que nous traitons ici —
les hautes tourbières — nous ne voulons pas approfondir cette
question si intéressante, mais l'indiquer et en réserver la solu-
tion pour l'avenir.

Certes, les difficultés sont ici plus grandes que celles que nous
avons rencontrées en nous occuj^ant des métamorphoses de la Meuse.

XXVII. HAUTE TOURBIÈRE DE SOEST.

Le village de Soest est bâti sur la pente orientale d'une colline
jumelle, dont le sommet méridional porte le nom d'„Engeberg" et
atteint une hauteur de 18 M. ; le sommet septentrional, de 20 M.
de hauteur, porte le nom de „Lazarusberg". Le petit dos ainsi
formé a la direction habituelle du N.O. au S.E. ; la pente orientale
en est plus raide que l'occidentale et cette dernière, bien cultivée,
forme une limite naturelle de notre haute tourbière, appelée
„Het Veen".

Le Chemin de fer Central d'Utrecht à Amersfoort, etc. suit la
pente septentrionale d'un massif de Diluvium graveleux, beaucoup
plus étendu, à l'extrémité orientale duquel se trouve la ville
d'Amersfoort. Comme d'ordinaire, l'eau de pluie a lavé cette
colline et a transporté de haut en bas du sable fin, qui s'est
métamorphosé en dunes assez importantes jusqu'au pied de l'Eii-

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124 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

geberg ; elles forment ainsi la limite méridionale de la haute
tourbière, avec une différence de niveau, qui va jusqu'à 2 M.

Près de la gare de Soest, elles entourent une petite tourbière
locale, du nom de „Wittemansveen", convertie en prairie, qui n'est
donc qu'une tourbière de panne, comme on en rencontre fréquem-
ment dans les dunes.

Ensuite il y a un troisième massif, entre Baarn, Hilversum et
De Vuursche, indépendant des deux autres (du moins à la surface).
Le Diluvium graveleux, qui le compose, disparaît sur sa pente
méridionale sous le sable fin, qui porte e. a. le parc royal de
Soestdijk et un grand nombre de dunes, plus ou moins anciennes.
Au milieu il s'y est formé une autre petite tourbière locale,
représentée actuellement par un étang allongé, entre „Laanzicht"
et „De Stulp", à l'est de De Vuursche.

Cette pente méridionale du massif de Baarn est la limite sep-
tentrionale naturelle de notre haute tourbière. Elle rencontre la
pente septentrionale du Lazarusberg à Soestdijk, mais en est séparée
par un intervalle, un chenal, qui est employé depuis longtemps
pour drainer la majeure partie de la tourbière au moyen de
r„Oude Gracht".
Il en draine également la partie occidentale avec
les terrains adjacents, sableux et plus élevés, au moyen du „Praam-
gracht" ou „Pijnenburger-Wetering", qui est plus élevé que l'Oude
Gracht et a été creusé dans la rive gauche du chenal.

La plus grande partie des limites de notre haute tourbière sont
donc très naturelles; l'occidentale seule, autour de la maison de
campagne d'„Ewijkshoeve", au point de partage des chaussées
de Baarn à De Bilt et à Maartensdijk, cause quelques difficultés.

En y faisant une course on aperçoit facilement une pente
du sol sableux allant tlu sud au nord et de l'ouest à l'est; la pre-
mière de ces directions a déjà été mentionnée, la seconde seule a
encore besoin d'explication.

Or, nous y avons observé des erratiques assez volumineux (1—2
d.M.) dans une nouvelle plantation d'arbres entre les maisons de
campagne de „Prins-LIendrik-Oord" et d'„Eikenstein". Le Dilu-
vium graveleux du massif de Hilversum—Baarn, que la carte
géologique fait cesser au village de De Vuursche, s'étend ainsi
probablement à une profondeur minime d'ici à la chaussée
de De Bilt à Baarn et constitue la limite occidentale de la
dépression de la haute tourbière.

En somme, ce n'est que le paysage morainique si bizarrement

■■"-■-■"^■"^-iiiiiiii ' ....................^

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CONTUIEUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 125

constitué, qui est la cause de cette dépression. Les pentes des col-
lines ont été allongées et adoucies par la pluie, modifiées davan-
tage encore par le vent et entourent un bassin, qui n'a pu qu'in-
complètement se drainer au N. E., à Soestdijk.

Quant à la tourbière elle-même, elle est séparée des terres labourées
à l'est par un fossé de drainage, le „Veengoot", le long duquel
on voit distinctement la surface de la tourbe monter à l'ouest. On
en creuse encore une quantité notable, brune et plus légère à l'est,
noire et plus compacte vers le milieu. Au bout S. E. elle nous a
paru être encore assez intacte et d'une épaisseur de V2 M.

XXVHL Récapitulation.

Nous avons examiné dans cette étude les causes géologiques qui
ont préparé tel ou tel terrain à porter une haute tourbière. La
cause immédiate est toujours une nappe souterraine élevée, coïn-
cidant presque avec la surface du sol. Nous ne nous sommes
pourtant pas arrêté à cette observation; mais nous nous sommes
demandé quelle est la cause de la configuration du terrain, qui a
produit cette nappe élevée, et la réponse a été fort différente selon
les hautes tourbières. Celles de peu d'étendue ont été produites par
le vent, déplaçant le sable fin et creusant des pannes. Dans ces
pannes il s'est ensuite formé de la tourbe dans des temps d'hu-
midité, puisque l'eau souterraine y était naturellement fort près du sol.

Pour la plus grande partie des hautes tourbières il faut remonter
beaucoup plus loin dans le passé et chercher la cause première de
leur formation dans la période glaciaire. C'est d'abord le glacier
Scandinave lui-même, qui a directement modelé le terrain et élevé
des collines autour de dépressions, dans lesquelles l'eau souterraine
a naturellement pris un niveau élevé. Nous avons examiné les
tourbières de Winschoten, de Soest, et plus ou moins celle de
Makkinga etc. qui doivent leur origine à cette action.

Ensuite le glacier a plié ou ondulé le terrain sur lequel il
s'avançait, et les dépressions, les vallées entre ces plis devenaient
naturellement fort humides, soit en leur entier, soit dans les parties
les plus basses. C'est ainsi que le sol a été préparé pour porter
les hautes tourbières de Schoonoord, de Zwillbroek, de Gronau, les
tourbières dites „Kloosterveen, Witteveen et Korenberger-Veen", etc.

Le glacier a agi d'une troisième manière moins directe, par

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126 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

les eaux de fonte, tombant en cascade dans les crevasses de la
glace et creusant ainsi ces innombrables trous plus ou moins
circulaires, appelés marmites de géant, auxquels nous avons con-
sacré un petit travail (pag. 131). En réalité, ces dépressions ne
portent que des tourbières très peu étendues, qui peuvent cepen-
dant devenir autant de centres pour le développement d'une plus
vaste tourbière, quand le sol enviroimant est suffisamment humide
par lui-même. Nous avons traité cette question à propos de la tour-
bière de Drachten (pag. 4).

La glace quaternaire a agi d'une quatrième manière, un peu
différente, en creusant des chenaux d'érosion au moyen de ses
eaux de fonte. La tourbière la plus typique appartenant à cette
catégorie est celle de Wijnjeterp—Gorredijk; nous y joignons celles
de Zevenhuizen, de Smilde, de Koekange, de Kottevalle, etc.

Elle a agi d'une cinquième manière, encore plus indirecte en
déposant du sable fin (partie du Zanddiluvium), qui formait ainsi
de vastes plaines. La vaste tourbière de Bourtange appartient en
première ligne à cette catégorie, puis viennent celles de Radewijk—
Wilsum, de Staphorst, la „Syen-Venne" près de Nordhorn, celle
de Haaksbergen et le „Zwarteveen" près d'Aalten.

Une bonne partie des hautes tourbières ont un caractère mixte.
Ainsi celle de Drachten appartient aux première, seconde et cin-
quième catégories ; celles de Hoogeveen—Koevorden et de Harden-
berg—Almeloo aux quatrième et cinquième; celles de Nijverdal
et de Rijssen aux seconde et cinquième, etc.

Nous pourrions y joindre une sixième catégorie, dont l'origine
est plus problématique. Ainsi la haute tourbière de Frederiksoord
est située sur un plan faiblement incliné au nord-ouest, mais non
au sud-ouest, comme ceux qui appartiennent aux ondulations du
paysage morainique. Nous avons la conviction que ce n'est que
la rive gauche d'un chenal d'érosion de l'eau de fonte, dont la
rive droite a disparu par suite de cette même érosion.

Il va sans dire que tous ces différents terrains n'ont pas été
préparés en même temps. Nous avons déjà indiqué les preuves
d'une certaine périodicité dans le retrait du glacier Scandinave,
visible dans les grandes voies d'écoulement de l'eau de fonte. Il
est assez singulier que ces voies alternent d'abord de direction,
vers l'ouest et vers le nord, pour prendre ensuite cette dernière
seule. A la première catégorie appartiennent la Betuwe et le
cours inférieur du Vecht; à la se'conde, la Vallée Gueldroise,

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CONTUIEUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 127

celle de TUsel, du Vecht supérieur, de l'Eems, du Weser, etc.

Les chenaux plus locaux présentent également une certaine
périodicité, que l'on observe fort bien en comparant les hautes
tourbières voisines de Wijnjeterp et de Smilde. Il est évident que
le chenal de la première a cessé de fonctionner, lorsque celui de
la seconde (rejeton de Haulerwijk) l'a remplacé. En consultant la
carte géologique, on voit aussitôt que la première est accompagnée
de celle de Drachten d'un côté et de celle de Frederiksoord de
l'autre, la seconde, de celle de Zevenhuizen au nord.

Quant aux causes, qui ont empêché les hautes tourbières de
s'étendre à l'infini, elles sont connues en partie. La plus facile à
concevoir est celle d'une rive plus élevée, à pente prononcée, très
souvent de Diluvium graveleux, qui est naturellement trop sec
pour porter de la tourbe.

Une seconde cause moins à portée de main est pourtant assez
facile à trouver. C'est une zone, desséchée par le voisinage d'un
profond chenal d'érosion, qui abaisse naturellement la nappe sou-
terraine.

Les exemples les plus frappants sont l'Eems, j^rès de la tourbière
de Bourtange, et le Vecht, entre les deux, tourbières de Hoogeveen
et d'Almeloo ; l'un et l'autre sont accompagnés de vastes sables
mobiles, qui sont également la conséquence naturelle de l'abaisse-
ment de l'eau souterraine. Nous avons cité un grand nombre
d'exemples dans la description détaillée, que nous ne pouvons
naturellement pas répéter ici.

Une troisième cause qui a empêché la croissance horizontale de
quelques hautes tourbières est la trop grande humidité du sol. On
en voit, qui sont bordées par des tourbières de marais, qui se dévelop-
pent sur un sol plus humide, souvent inondé. Nous ne voulons
rappeler ici que les vallées de la Hunse en Groningue, du Konings-
diep, du Tjonger et de la Linde en Frise. I^a tourbière de marais
est le produit d'autres plantes que la haute tourbière ; elle augmente
aussi en épaisseur, mais plus lentement. A mesure que la surface
s'élève elle devient moins humide et par conséquent les conditions
s'en éloignent de moins en moins de celles d'une haute tourbière.
Aussi voit on la dernière empiéter graduellement sur la première,
comme nous l'avons décrit plusieurs fois.

En dehors de ces cas assez nombreux il s'en présente d'autres,
dans lesquels on voit la haute tourbière s'amincir et disparaître
pour faire place, non à une tourbière de marais, mais à une sim-

-ocr page 133-

CONTRIBUTIONS A LA GEOLOG-IE DES PAYS-BAS. 128

pie plaine sableuse trempée. Nous nous sommes demandé à plusieurs
reprises: „pourquoi la haute tourbière ne s'est-elle pas étendue plus
loin encore, les conditions paraissant assez favorables?" On se
souviendra que Staring a cru résoudre (ou trancher) la difficulté
en admettant qu'il y a eu réellement de hautes tourbières sur ces
plaines (Leusener-Veld, environs de Goor et de Maartensdijk), mais
qu'elles ont été enlevées entièrement par l'homme. Nous sommes
extrêmement sceptiques à cet égard et nous ne considérons cette
explication que comme une hypothèse gratuite et peu fondée.
Nous nous sommes dit: „peut être le sol est-il
trop humide pour
porter une
haute tourbière!" C'est très probable en effet; mais
cette réponse ne fait que déplacer la question et la changer en
celle-ci: „Pourquoi ne s'y est-il pas formé une tourbière
basse ou
de marais f Nous n'avons pas honte d'avouer, que nous devons
laisser la question ouverte et en réserver la solution à l'avenir. Il
n'est pas nécessaire de faire tout en une fois!

En somme, nous croyons avoir démontré que l'étude géologique
des hautes tourbières n'est à proprement parler qu'une subdivision
de celle du Diluvium. Ensuite ce n'est que la théorie glaciaire de
Torell,
C.S., qui peut nous faire comprendre la genèse du paysage
diluvial et du sous-sol des hautes tourbières; ce que ne pourrait
faire l'ancienne théorie des glaces flottantes de Lyell.

Sixième Partie.
Aperçu de la Littérature géologique sur les Hautes Tourbières.

1. Staring. -,

i

Les hautes tourbières sont depuis longtemps un sujet d'étude
dans notre pays; nous allons commencer notre aperçu par l'ouvrage
fondamental de Staring. „De Bodem van Nederland" (Le Sol des
Pays-Bas). Il a consacré dans le premier volume 135 pages à ce
sujet; mais il ne s'est occupé qu'en seconde ligne des conditions
physiques et géologiques, qui ont conduit une haute tourbière à

-ocr page 134-

128 CONTRIBUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS.

pie plaine sableuse trempée. Nous nous sommes demandé à plusieurs
reprises: „pourquoi la haute tourbière ne s'est-elle pas étendue plus
loin encore, les conditions paraissant assez favorables?" On se
souviendra que Staring a cru résoudre (ou trancher) la difficulté
en admettant qu'il y a eu réellement de hautes tourbières sur ces
plaines (Leusener-Veld, environs de Goor et de Maartensdijk), mais
qu'elles ont été enlevées entièrement par l'homme. Nous sommes
extrêmement sceptiques à cet égard et nous ne considérons cette
explication que comme une hypothèse gratuite et peu fondée.
Nous nous sommes dit: „peut être le sol est-il
trop humide pour
porter une
haute tourbière!" C'est très probable en effet; mais
cette réponse ne fait que déplacer la question et la changer en
celle-ci: „Pourquoi ne s'y est-il pas formé une tourbière
basse ou
de vriaraisf Nous n'avons pas honte d'avouer, que nous devons
laisser la question ouverte et en réserver la solution à l'avenir. Il
n'est pas nécessaire de faire tout en une fois!

En somme, nous croyons avoir démontré que l'étude géologique
des hautes tourbières n'est à proprement parler qu'une subdivision
de celle du Diluvium. Ensuite ce n'est que la théorie glaciaire de
Torell, C.S., qui peut nous faire comprendre la genèse du paysage
diluvial et du sous-sol des hautes tourbières; ce que ne pourrait
faire l'ancienne théorie des glacer ' "—^^

^ v— In het tergadhtige en moietraesige

lerwhe diistriob Riosooanmon ie Tiet Scxrp

Cloon Sihâeiver bedolT/m oodeir ©en"'Van
bergen neer^lijidenden mjoddiervloed^. V-^

Het glijdièfnd moetras wias niet snel in zijïi'
vaart, sscx^at ai de bewomers van tet dorp
kondbn vlnohten. Ma&x on^evrnr 1000 hoo-
" mn zijn zonidter

S i x i è m e

\

Aperçu de la Littérature géologique sur les Hautes Tourbières.

1. Staring.

«

Les hautes tourbières sont depuis longtemps un sujet d'étude
dans notre pays; nous allons commencer notre aperçu par l'ouvrage
fondamental de Staring. „De Bodem van Nederland" (Le Sol des
Pays-Bas). Il a consacré dans le premier volume 135 pages à ce
sujet; mais il ne s'est occupé qu'en seconde ligne des conditions
physiques et géologiques, qui ont conduit une haute tourbière à

.1

-ocr page 135-

CONÏEIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. 129

prendre naissance dans tel ou tel endroit et non dans un autre.
Les tourbières de marais, qui forment un passage des hautes aux
basses tourbières, occupent bien moins d'espace: 10 pages seulement.

Quant aux conditions physiques et géologiques du sous-sol, nous
n'avons pu trouver que les passages suivants, peu importants:

Pag. 208, il dit que „le sous-sol est dans la règle le Diluvium
„sableux, qui compose généralement les vastes plaines; il touche
„parfois au Diluvium graveleux, p. e. au Hasseberg, dans la
„tourbière de Bourtange, au „Braamberg", dans celle de Hoogeveen,
„à la colline d'Onstwedde, au Hondsrug, etc.

„La plupart des tourbières de la Groningue et de la Frise sont
„même situées sur ce Diluvium, comme celles de Rijssen, d'Almeloo
„et de la Gueldre".

Cela n'explique pourtant pas encore l'aptitude de telle ou telle
localité à porter une tourbière. A cet égard nous n'avons trouvé
que ce qui suit, pag. 94.: „Les tourbières du Dedemsvaart et de
„ Hoogeveen sont entourées, comme dans un bassin, de terrains plus
„élevés s'étendant le long du Vecht, et de là à Koevorden, Dalen,
„Oosterhesselen, Westerbork et, à l'ouest, à Hoogeveen et Zuid-
„wolde. Le bassin n'était pourtant pas complet, mais communi-
„quait du côté de Meppel et du Vecht avec les terrains plus bas".

Pag. 95. „La haute tourbière d'Almeloo est entourée—ainsi que
„la précédente — de terrains plus élevés, mais communique par des
„ruisseaux de drainage avec le Vecht et la Regge. Ces terrains
„sont, dans le Hanovre, les hauteurs du „Belt" (extrémité N.O-
„du plateau d'Uelsen), du „Balderhaar" (rejeton de Sibculoo), et
„de Strijp ou Striepe (rejeton de Lange veen), ainsi que celles de
„Tubbergen et de Geesteren. Ensuite celles de Wierden et Den
„Ham à l'ouest et les dunes du Vecht au nord-ouest."

„Une haute tourbière considérable s'est étendue autrefois entre
„les hauteurs de Hellendoorn, Haarle, Holten et Markeloo, et
„celles de Rijssen et de Wierden."

Pag. 100. „On a prétendu que toutes les hautes tourbières se
„sont formées dans des bassins. Ceux qui ont fait leurs observa-
„tions à l'endroit même ont depuis longtemps acquis la conviction
„que cette hypothèse était sans fondement. Ensuite, les bords de
„ces bassins ont presque toujours des ouvertures pour les ruisseaux
„de drainage, qui laissent écouler la partie de l'eau qui n'est pas
„retenue par la tourbière, de sorte que le principal effet du bassin
„se perd".

17

-ocr page 136-

130 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Pag. 109. „La bruyère qui est propre à se changer en tourbière
„se couvre de galé (Myrica gale)".

Pag. 113. „La cause motrice des hautes tourbières a été les

„forêts....., mais de nombreuses exceptions démontrent qu'en

„plusieurs cas une haute tourbière s'est formée, favorisée par des
^ycirconstances locales,
sans avoir été d'abord une forêt". (Nous sou-
lignons, comme pour la suite).

Staring n'a donc fait qu'efileurer la question en ne parlant que
de
„Vaptitude locale de la bruyère'^ et de „circonstances locales"; cJest
justement ce côté physique et géologique, que nous avons voulu
traiter spécialement, tandis que le côté botanique n'était pour nous
que d'importance secondaire.

Il est connu que. Staring s'occupait spécialement de la partie
botanique et considérait la présence du bois, qui s'est converti
graduellement en tourbière, comme la principale cause de sa
naissance. Nous sommes loin de vouloir nier ce développement;
mais nous ferons observer que Staring parle aussi de „forêts sur
la haute Veluwe, qui ont disparu sans laisser de traces et n'ont
laissé que des bruyères chauves^'. Pourquoi est-il résulté d'une forêt,
tantôt une bruyère aride, tantôt une tourbière trempée? La question
se pose d'elle-même, nous semble-t-il, et il n'est pas superflu d'exa-
miner d'un peu plus
V„aptitude locaW et les „circonstances locales'l

Pourtant il faut être juste et reconnaître que Staring avait tant
à faire, qu'il lui était impossible de résoudre toutes les questions,
et que de son temps la connaissance des formations diluviales et
de l'eau souterraine n'étaient pas suffisamment développées, pour
qu'il pût les étudier à fond.

Dans son travail sus-nommé il revient à plusieurs reprises sur
les forêts comme prédécesseurs des hautes tourbières et communi-
que plusieurs observations exactes, qu'il a pourtant trop généralisées.
Il cite, e. a. (1. c. pag. 114—115) les chaussées romaines en Angle-
terre, qui, d'après la description de César, traversaient de vastes
forêts. Or, actuellement on n'y trouve pas de forêts, mais des
tourbières. Au moyen-âge déjà et plus tard on a creusé de la
tourbe, un demi-siècle après que des forêts avaient été détruites
par les tempêtes.

Plus loin (pag. 201) Staring prétend: „qu'il n'y aucune raison
„de douter que le bois fossile des hautes tourbières ne provienne
„en partie des forêts du moyen-âge, quoiqu'elles n'aient pas toutes
„été situées à l'endroit des tourbières actuelles".

-ocr page 137-

CONTUIEUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 131

Et ensuite (pag. 2i0): „presque partout l'origine des hautes
„tourbières doit être cherchée dans des forêts, composées des mêmes
„espèces d'arbres, qui croissent encore aujourd'hui dans cette con-
„trée".

Quant à cette concordance géographique d'anciennes forêts et des
tourbières actuelles (si elle était
prouvée), il n'est pas superflu de
faire remarquer, qu'il ne s'en suit pas que ce soit le
sous-sol de
ces tourbières et non la tourbière elle-même qui ait porté ces forêts.

Or, nous avons démontré que très souvent le sous-sol a d'abord
porté des sables mobiles et que les arbres croissent avec facilité
sur les tourbières bien-drainées. Cela fait donc supposer des
périodes alternatives de sécheresse et d'humidité relatives, qu'il
faut certainement prendre en considération. Les premières seraient
marquées par le développement des forêts, les secondes par leur
envahissement par la tourbe croissante.

Staring a aussi pensé un moment à de semblables variations de
climat, pour expliquer dans les tourbières la succession de différentes
espèces d'arbres; mais il a bientôt rejeté cette hypothèse (1. c.
pag. 125). Il attribue ce phénomène à l'alternance causée par la
nature elle-même, en ce qu'elle fait succéder des chênes aux sapins
et les hêtres aux chênes.

2. Lorié.

Il y a quelques années, nous nous sommes occupé de la for-
mation des hautes tourbières dans notre pays. En 1887 déjà,
publiant nos „Contributions à la Géologie des Pays-Bas, IL Le
Diluvium plus ancien ou graveleux" (Archives du Musée Teyler.
Série II. T. III), nous avons fait mention (pag. 89) de la présence,
dans le Diluvium de Steenwijkerwold et de Willemsoord, d'un
grand nombre de petites dépressions circulaires, remplies de tourbe
et faisant partie du paysage morainique. Or, il est clair que ces
tourbières, dans des conditions favorables, peuvent croître au-delà
de leurs limites et former ainsi une haute tourbière continue, plus
ou moins étendue.

Deux ans plus tard, nous avons traité ce sujet un peu plus en
détail, dans un petit article, intitulé, „De Derbingskuil van Gieten
en zijne Famille", faisant partie du „Nieuwe Drenthsche Volks-
almanak", de l'année 1890.

Nous avons comparé ces dépressions circulaires, dont une est

17*

-ocr page 138-

132 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

devenue un peu légendaire, aux marmites de géant des contrées
rocheuses, qui ont été couvertes de glaciers. Il est clair qu'elles
doivent atteindre des diamètres plus considérables dans un matériel
peu cohérent, tel que le sable, que dans la roche solide. C'est
ainsi que nous en avons mesuré des diamètres de 100 et de 120 M.
Peut-être quelques-unes sont-elles restées toujours sèches, quand le
fond en était sableux et que le niveau de l'eau souterraine des
environs était bas ; d'autres au contraire en avaient un fond argileux
ou de l'eau souterraine plus élevée et se sont rapidement remplies
de tourbe.

3. Borgman.

M. A. Borgman a traité spécialement la question des hautes
tourbières des Pays-Bas dans une thèse intitulée:
„De Hoogvenen
van Nederland",
Winsum 1890. Cette thèse a le mérite de ne pas se
heurter à l'écueil de la „généralisation prématurée", ce qui est la
grande faute de certains géologues. Pourtant, de même que Staring,
M. Borgman traite la question de la formation des hautes tour-
bières principalement au point de vue botanique, et nos deux
travaux se complètent donc à souhait. Quant au côté physico-géo-
logique, nous ne trouvons que les passages suivants:

Pag. 79. „Le sous-sol diluvial des hautes tourbières montre çà
„et là des ondulations allongées, mais peu élevées, qui pt^uvent
„être en relation avec des plis glaciaires".

Pag. 101. „Le sous-sol a joué un rôle non-seulement passif, mais
„aussi actif On trouve les hautes tourbières tant dans des bassins
„et des vallées, que sur les dos de collines et le sol plat. Dans la
„Drenthe on trouve beaucoup de tourbières dans des bassins; la
„vallée diluviale entre le Hûmling et le Hondsrug est caractérisée
„par plusieurs dos de collines, ainsi que le sous-sol des hautes
„tourbières de Helenaveen. i

Pag. 103. „D'après Staring et d'autres, le rapport, qui existe
„entre le niveau du sous-sol et celui de l'eau voisine, est une con-
„dition essentielle de la formation d'une haute tourbière; mais
„j'ai déjà démontré^ (?) que cette condition n'a rien à faire avec
„la possibilité de la formation d'une tourbière. Le sous-sol est
„généralement du sable diluvial, qui passe parfois en sable argileux.
„Dans le nord de la commune d'Emmen, la haute tourbe repose
„en quelques endroits sur la basse | tourbe. J'ai pu constater que

IV-

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p

-ocr page 139-

CONTUIEUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 133

„beaucoup de hautes tourbières, surtout celles qui sont situées dans
„des bassins, sont
souvent entourées d'une zone de tourbe basse
„ou de marais, ce qui ne prouve nullement que cette espèce de
„tourbe doive s'étendre
sous la haute tourbe. Donc (?) le sous-sol
„a partout une grande analogie".
Pag. 159 „Je crois avoir observé en général que:
„1° les hautes tourbières les plus étendues se trouvent sur un
„sol sableux avec peu de difi'érence de relief.

„2° Là, où les terrains se trouvent plus bas que l'eau souterraine
„ou arrosés par des ruisseaux, la haute tourbière gît souvent sur
„la basse, ou en est bordée".

Pag. 162 „Nulle parte, je n'ai pu observer, sur les rives de l'Eems,
„des indices d'une connexion des deux hautes tourbières dans le
„passé. Elles sont actuellement séparées de l'Eems par une zone
„sableuse, qui a une largeur moyeniie de 5—6 K. M,"

Nous voyons donc que M. Borgman n'a guère approfondi cette
question géologique: „Pourquoi une haute tourbière s'est-elle
formée en tel ou tel endroit et non en un autre?" Ceci n'implique
nullement les mérites botaniques de la thèse; il a démontré avec
succès (pag. 131) que les forêts ne sont pas aussi nécessaires que
le croyait Staring. En outre, il faut bien distinguer entre une
forêt, qui a été la cause d'une tourbière et celle qui a été envahie
latéralement par une tourbière croissante. L'exemple, que cite
Staring, a plutôt rapport au dernier cas qu'au premier.

Pendant nos propres excursions nous nous sommes demandé
également, si les forêts n'ont pas souvent péri par la même cause,
qui a développé la tourbière: l'humidité croissante. Dans ce cas
la forêt ne serait donc pas le précurseur
nécessaire de la tourbière;
mais la disparition de l'une et l'apparation de l'autre ont eu une
cause commune.

Les auteurs étrangers ne donnent très souvent que des généralités ;
nous allons en énumérer quelques-uns dans l'ordre chronologique.

4° Grisebach : „ Ueher die Bildung des Torfes in den Ernsmoaren^y
1840, travail principalement botanique.

Il combat l'opinion (défendue plus tard par Staring) d'après
laquelle les forêts du commencement de notre ère sont l'origine
des hautes tourbières • celles-ci sont beaucoup plus anciennes. Selon
lui les sphagnes ne composent pas nécessairement une tourbe non-

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134 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

mûre, car près de Papenbm-g on Ta trouvée couverte de 6 M. de
tourbe et très peu modifiée.

Leo Lesquereux: „ UntersucJmngen über die Torfmoore. Mit
Bemerkungen von Sprengel und Lasius.''
Berlin 1847.

La croissance en épaisseur d'une tourbière est considérable dans
certains cas, de sorte qu'on peut la suivre d'une année à l'autre.
Dans quelques tourbières de l'Allemagne il y avait de petites col-
lines de sable, qui s'élevaient au dessus de la tourbe et auxquelles
les habitants du voisinage avaient même donné des noms, collines
qui ont peu à peu disparu sous la tourbe.

Les tourbières ne se trouvent pas toujours dans des dépressions
mais souvent aussi sur des pentes, surtout d'un sol schisteux. En
Irlande les hautes tourbières les plus élevées ont été formées direc-
tement et non à la suite de forêts, de sorte que celles-ci ne doivent
pas nécessairement précéder.

Dans le Jura et l'Oldenbourg on connaît des cas d'alternance
de tourbe et de bois. La tourbière drainée se couvre vite d'une
forêt et ce drainage peut se présenter accidentellement; plus tard
la tourbe peut de nouveau succéder au bois.

La croissance supra-aquatique (environ égale à la haute tour-
bière) a besoin d'une grande quantité d'eau. Seulement elle ne
supporte pas une nappe visible!

Dans les notes de Lasius, nous avons trouvé les observations
suivantes: Une des conditions de la naissance d'une haute tour-
bière est un sol imperméable ou saturé d'eau. Il s'y déve-
loppe une forte végétation, qui succombe graduellement, tandis
que l'eau n'affiue pas en trop grande profusion ni ne s'écoule
trop vite.

Les hautes tourbières ne s'étendent jamais jusque près des riviè-
res, qui laisseraient écouler l'humidité, sans laquelle une tourbière
ne pourrait croître. '

6° Dr. Alois Pokorny: „Untersuchungen über die Torfmoore Un-
garns. Sitzungsberichte der kaiserlichen Akademie der Wisschenschaften'\
.XLIII, Wien 1860.

Les hautes tourbières croissent habituellement dans des val-
lées peu profondes, en forme de bassin, ordinairement après une
végétation forestière.

Il donne aussi quelques détails sur les couches de tourbe flot-
tantes, dont nous ne nous occuperons pourtant pas ici.

7. Dr. F. Senpt: „Die Humus-, Marsch-, Torf- und Limonitbil-

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CONTUIEUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 135

dungen als Erzeugung smittel neuer Erdrindelag en'\ Leipzig 1862.
Pag. 77, etc.

Ce travail précieux ne contient que quelques brefs détails, qui
peuvent nous servir dans notre but spécial.

1°. L'endroit, où se formei'a une tourbière, doit être constitué de
telle manière, que l'eau s'y assemble et y reste continuellement. Il
en est ainsi dans les plaines entourées de hauteurs ou dans les
plaines inclinées, qui sont barrées à leur base par des séries de
collines.

2°. Les terrains, dont le relief oblige l'eau de rester stagnante,
sont propices à la formation de tourbières. Les dépressions et les
bassins, comme les vallées entre les ondes de dunes, montrent cette
disposition de la surface et sont par conséquent le site habituel
des tourbières.

3°. Quand la surface ou le sous-sol se compose d'une masse
imperméable, p. e. d'une roche solide sans crevasses ou d'une argile,
il s'y formera une tourbière.

Un sol perméable en soi, p. e. du sable ou du gravier, peut
cependant faire naître une tourbière, quand il se couvre ou s'imbibe
d'une masse minérale imperméable. Tel est le cas dans la Bavière
méridionale de l'„Alm", tuffeau calcaire, qui est absolument imper-
méable à l'état de boue. Dans les plaines de l'Allemagne du Nord
l'argile fluviatile agit de la même manière, quand elle couvre le
sol pendant les inondations ou quand elle sature le sable dans
lequel l'eau s'infiltre.

Le même effet se produit, pendant des années froides et dans
les endroits humides, par une végétation de mousses et d'autres
plantes hygrophiles.

Finalement, quand le sable repose sur un sol imperméable ou
quand il est continuellement trempé par l'eau de source.

8. J. Kutzen: „Die Gegenden der Hochmoore im Nordwestlichen
Deutschland und ihr Einfluss auf Gemüth und Leben der Menschen",
faisant partie des „Abhandlungen der Schlesischen Gesellschaft für
vaterländische Gultur, Philosophisch-historische Ahtheilung.
1864,
Heft IL"

C'est plutôt un traité social et littéraire, qui ne contient que
quelques détails épars dans le cadre de nos propres études. Nous
n'y avons trouvé que les passages suivants.

Une condition pour la naissance d'une tourbière est une humi-
dité continuelle, comme on la trouve dans les basses-plaines, les

-ocr page 142-

136 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

dépressions en bassin, les terrains qui retiennent l'eau et deviennent
marécageux.

Les vastes basses-plaines de l'Eems inférieur sont presque par-
faitement horizontales sur une étendue de plusieurs lieues carrées.
Cette horizontalité et la présence d'une guirlande de dunes, qui
les sépare de la Mer du Nord, obstrue le drainage.

A l'intérieur des tourbières on rencontre des collines isolées et
des zones allongées de sable, qui ne s'élèvent que de quelques
pieds au-dessus de la surface de la tourbe. Ceci leur donne pour-
tant un certain intérêt, elles portent une végétation différente,
les villages et les champs plus productifs. Les Hollandais et les
Westphaliens (plutôt Hanoverans) les appellent „Tangen."

9. Dr. j. Nöggerath. „Der Torf, 1875. Gemeinverständliche wis-
senschaftliche Vorträge,
230."

La naissance des tourbières est causée par les formes particulières
du relief du pays, par de vastes plaines avec des dépressions peu
profondes et par l'eau stagnante ou coulant lentement

Il ne se forme point de tourbe dans des mares qui se desséchent
entièrement en été, p. e. les Marais Pontins, les Maremnes de la
Toscane, les Marais de Mondego, etc.

10. Dr. a. Jentzsch: „ lieber die Moore der Provin?: Preussen, ihre
Ausdehnung, Beschaffenheit und Verwendungsfähigkeit zu technischen
und Culturzivecken\
faisant partie des „Schriften derphysikalischen-
oekonomischen Gesellschaft in KÖningsberg,
1878." Ce travail est
celui qui contient le plus de détails sur les conditions géologiques
et physiques des hautes tourbières.

1°. Le niveau de l'eau souterraine est toujours en coupole, descend
vers les cours d'eau voisins et monte et baisse avec ceux-ci.
Quand les dépressions sont plus élevées que le niveau de la nappe
souterraine, elles restent sèches ; dans le cas contraire, il s'y forme
des lacs, qui changent en tourbières en se remplissant de végétation.

Ce remplissage commence par les bords ou par les parties les
moins profondes, ainsi que par une végétation flottante de cryp-
togames et de phanérogames, dont des fragments plongent de temps
à autre, jusqu' à ce que l'eau en soit remplie. (C'est aussi une des
manières de voir de Pokorny).

2°. Le second type des hautes tourbières, se forme dans les bassins
à fond imperméable, qui s'élèvent parfois bien au-dessus de l'eau
souterraine.

3°. Le troisième type est également indépendant de l'eau souter-

-ocr page 143-

CONÏEIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. 137

raine et se forme sur un plateau argileux. Ces tourbières sont
généralement peu étendues, mais souvent très épaisses, jusqu'à
17 et même
24 M. (N.B. dans des dépressions très locales, de sorte
qu'il vaudrait mieux les placer dans le deuxième type).

4°. Le quatrième type s'est développé sur des plaines, qui sont
devenues marécageuses en conséquence de leur pente minimale.
Celle-ci est cause d'un niveau très élevé de l'eau souterraine et ne
baisse un peu que dans le voisinage des vallées. La croissance de
la tourbe est le plus forte au milieu du plateau; la tourbière se
bombe de plus en plus et il s'y forme — pour ainsi dire — une
colline d'eau. La tourbière s'étend aussi horizontalement sur le sol
fertile, les erratiques, les troncs d'arbres, les petites collines, jusque
dans la fôret voisine, qui succombe peu à peu à la suite de l'hu-
midité croissante.

5°. Le cinquième type embrasse les hautes tourbières de bas
niveau, dont le sous-sol est plus bas que l'eau. Cette situation est
la conséquence de l'abaissement séculaire, les troncs d'arbres du
sous-sol se trouvent parfois au-dessous du niveau de la mer (p. e.
dans le delta du Memel).

6°. Le huitième type s'est formé dans les vallées de rivière
abandonnées, p. e. du Pregel et du Memel.

11. J. Sch./vcht: „ Moor e des Herzogthums faisant partie

de „Petermann's Mittheilungen. 29, 1883". Ce travail ne contient
que quelques détails épars concernant notre question.

1°. Le sous-sol des hautes tourbières est presque toujours plus
élevé que les eaux courantes des environs; souvent la différence
est notable. L'eau de pluie pouvait donc s'écouler librement avant
la formation de la tourbière. Lorsque par suite de
quelques années
humides
ou d'une position élevée de la nappe superficielle (nous sou-
lignons !) les mousses se sont mises à pousser en quelques endroits,
la formation de la tourbe a commencé et se poursuit continuellement.

2°. Dans l'Oldenbourg, le sous-sol des tourbières est du sable
fin, parfois argileux; parfois une couche d'argile se trouve sous
le sable.

Des forêts ont souvent végété sur le sous-sol, jusqu'à ce
qu'elles ont péri par suite de l'extension horizontale et verticale
de la tourbière. Les racines
atteignent généralement le sous-sol
sableux; parfois (surtout celles de bouleaux), elles poussent sur
une mince couche de tourbe. Les arbres n'ont donc pris naissance
qu'après le commencement de la formation de la tourbe.

17

-ocr page 144-

138 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

Nous ne voyons pourtant aucune antithèse entre les bouleaux
et les autres arbres (sapins, hêtres, aunes, chênes) ; car les bouleaux
ont certainement aussi envoyé leurs racines dans le sous-sol de la
: tourbière, puisque la couche de tourbe était
mince. Ensuite le fait,
que les racines des autres arbres
atteignent le sous-sol, nous ferait
croire, qu'ils ont aussi poussé sur la tourbe-même, comme nous
l'avons observé tant de fois).

4°. Le soLis-sol peut être plus récent que le Diluvium, savoir
l'argile marine alluviale (Marschthon).

Comme on le voit, les lignes citées ne suffisent pas à nous expli-
quer la question.

12. J. Frïih: „Ueher Torf rnid Dopplerit''. Zürich 1883.
1°. Sendtner a constaté que toutes les tourbières sur les rives

de fleuves, même sur un sous-sol argileux, ont le caractère de

...... tourbières de marais, dès qu'elles sont sujettes aux inondations.

2°. Les hautes tourbières prennent naissance sur un sol privé de
calcaire et composé d'argile ou de sable argileux, par conséquent
imperméable et appartenant surtout aux dépôts glaciaires. Comme
ils sont souvent calcarifères, la végétation de sphagnes ne s'y
développe probablement pas aussitôt, mais après la croissance d'un
bois ou d'une prairie.

3°. Après avoir étudié la carte géologique des Pays-Bas de Staring
(ou plutôt l'atlas de M. Van Bemmelen, qui en est une reproduction),
il conclut que dans ce pays la haute tourbière passe souvent en
tourbière de marais.

4°. Beaucoup de savants ont considéré les fôrets comme précur-
seurs essentiels des hautes tourbières. Früh ne nie pas qu'il n'en
soit très souvent ainsi; mais il soutient que généralement les tour-
bières de marais jouent ce rôle.

13. J. Früh : „Kritische Beiträge zur Kenntniss des Torfes. Jahr-
buch der k. k. geol. Reichsanstalt".
1885.

1°. II a examiné une série d'échantillons de tourbe, de différentes
profondeurs dans la tourbière de Kehding et a trouvé; qu'ils sont
Ih principalement composés de
Sphagnum et d'Erica, qui se sont

développés sur la tourbe de marais.

2°. Le résultat de l'examen d'un profil dans la haute tourbière
de Papenburg est, que probablement la première végétation du sol
diluvial n'était pas la bruyère, mais une tourbière de marais.

14. Fischer-Benzon : „Die Moore der Provinz Schleswig—Holstein.

Eine vergleichende Untersuchung". „Abhandlungen aus dem Gebiete der

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CONTUIEUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 139

Natmwissenschaften, herausgegeben vom naturwissenschaftlichen Verein
in Hamburg''.
XI Band, 1891.

C'est un travail soigné, contenant une foule de détails intéres-
sants, mais principalement botanique, comme tant d'autres. La
conséquence en est, que les faits topographiques et géologiques n'y
ont qu'une importance secondaire. Nous empruntons les citations
suivantes, dont la majeure partie a rapport au sous-sol.

A. C'est généralement l'argile à blocaux bleue ou inférieure.
L'auteur la mentionne sous les tourbières suivantes : 1°. „Himmel-
moor" (dans les points les plus bas); 2°. „Dosenmoor"; 3''. „Hecht-
moor"; 4°. Une des tourbières de Leck, qui est portée par une
colline assez plate et à surface ondulée; 5'. Tourbière de Lunden
(argile bleue, micacée); 6°. La tourbière de Lauenburg, dans la
haute rive de l'Elbe, l'argile est plus ou moins modifiée dans sa
partie supérieure et épaisse de 5—7 M.; 7^ Tourbière entre Win-
terbeck et Kiel (sable bleuâtre et argileux sur l'argile à blocaux) ;
8°. Tourbière de Landweer sur le canal de la Mer du Nord au
Baltique; 9° Idem à Hohenhörn; 10\ Idem à Steinhude (argile
fine et verdâtre, probablement produit de lavage de l'argile à
blocaux); IT. Idem à Diickerswisch (sous un sable bleuâtre, fin,
stratifié et argileux) ; 12'. La plupart des hautes tourbières du
Danemarc.

B. Quelques autres tourbières de la province reposent aussi sur
de l'argile, mais qui a une tout autre origine ; c'est l'argile marine
alluviale (Marschthon). Il en est ainsi : 1° du Weissmoor (tourbière
blanche); l'argile devient noire de bas en haut et passe dans la
tourbe de sphagnes; T de la tourbièi-e de Kehding.

C. Le sous-sol peut aussi être du sable. „L'eau souterraine y
„est si élevée que la tourbière a pu se former sur un sol permé-
„able. Il paraît qu'il en est de même des tourbières de l'Eems, car
„il est probable que la couche de sable noir, appelée „Sohlband"
„ne s'est formée qu'après la première tourbe".

Les détails topographiques donnés par notre auteur sont peu
nombreux. Il dit: 1° que le „Himmelmoor" est entouré à quelque
'distance de collines basses, qui ne dépassent pas 30 M. au-dessus
de la mer, tandis que le terrain adjacent n'a que 10—11 M. de
hauteur. 2^. On voit facilement que 1'„Esinger-Moor" ne s'est pas
formé dans une seule dépression, mais qu'il s'est étendu sur une
surface irrégulièrement ondulée, à partir de différentes dépressions.
3^ La tourbière entre Winterbeck et Kiel est située dans un

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140 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

terrain bas, entouré partout de collines d'argile jaune à blocaux.

Quant aux troncs d'arbres à la base de la tourbière, M. Fischer
dit, que dans les tourbières de „Leck" les troncs de sapins à
racines colossales sont enracinés parfois directement dans le sable,
mais généralement sur une couche de tourbe de 10 c.M., composée
de restes de bouleaux.

Dans ses remarques sur la succession des générations d'arbres
l'auteur adopte les distinctions, introduites par Steenstrup, entre:
r la couche à Trembles, 2° à Sapins, à Chênes et 4° à Hêtres,
équivalent de la période actuelle.

Pour l'auteur les deux couches caractérisées par les trembles
et les sapins se seraient formées dans la période interglaciaire et
les deux dernières, dans lesquelles on rencontre les chênes et les
hêtres, dans la période postglaciaire. Il nous a paru que les argu-
ments employés par l'auteur pour trancher une question aussi
difficile et compliquée sont trop faibles, surtout pour les tourbières
qui n'ont jamais été recouvertes d'un sable quelconque.

Si nous classifions les causes précitées, qui ont conduit à la
formation d'une haute tourbière, nous avons donc: 1° le voisinage
de collines, qui a naturellement relevé le niveau de l'eau souter-
raine, quoique l'auteur ne le dise pas spécialement.

T La présence d'un sous-sol imperméable ou peu perméable, soit
l'argile à blocaux bleue ou inférieure, soit un produit de lavage de
celle-ci. Il est facile d'entrevoir qu'un sol imperméable a beaucoup
de tendance à rester humide quand il est bas, de sorte que l'eau
atmosphérique ne peut pas s'écouler.

3". Le niveau élevé de l'eau souterraine dans un terrain per-
méable. On ne nous dit pas cependant par quelle cause ce niveau
est si élevé.

L'étude géologique des hautes tourbières a donc certainement
fait quelques progrès grâce au travail soigné de M. Fischer-Benzon,
mais moins que l'étude botanique.

15. Sitensky : „ Ueher die Torfmoore Böhmens in naturwissenschaft-
licher und nationalökonomischer Beziehung, mit Berücksichtigung der
Moore der Nachbarländer, Archiv der naturwissenschaftlichen Landes-
durchforschung von Böhmen".
VI Band, No. 1. Prague, 1891.

Ce travail achevé et très important contient une foule de détails
sur les nombreuses tourbières de la Bohème, mais ainsi que la
plupart des autres travaux que nous avons énumérés, il traite les
tourbières principalement du côté botanique.

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CONTUIEUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 141

Nous lui empruntons les observations suivantes:

1° Pag. 4. En Bohème, on trouve les tourbières aussi bien dans
les dépressions près des rivières, p. e. les anciens lits et les étangs,
que sur les montagnes qui entourent le pays et sur les pentes et
les dos plats et horizontaux ou creusés en bassins. Ces dos sont
généralement enveloppés de brouillards et possèdent des sources
nombreuses, dont Peau ne peut ni s'écouler vite, ni pénétrer dans
le sol imperméable et privé de fentes; ils sont par conséquent les
endroits les plus favorables à la formation de la tourbe. Les tour-
bières sont surtout puissantes dans les endroits oti deux crêtes de
montagne se rencontrent et s'étendent en vaste plaine. Dans
l'intérieur du pays on les trouve sur les plaines plates ou faible-
ment ondulées, dans les bassins, qui sont situés
sous le niveau
normal de la nappe superficielle,
dans les vallées, qui s'élargissent
et se rétrécissent alternativement et entravent ainsi le cours rapide
des rivières et des ruisseaux. Ils serpentent ainsi entre des prairies
marécageuses et tourbeuses et forment localement des étangs, sur
les bords desquels la tourbe prend naissance et pénètre de plus
en plus vers le milieu.

2° Pag. 5. Dans le „Riesengebirge" on trouve les tourbières
partout où des pentes faibles, traversées de petites dépressions,
entravent l'écoulement de l'eau.

3° Pag. 6. Dans les environs de Hirschberg et de Niemes, la
vallée du „Thammiihlbach" est fort propre à la formation de la
tourbe. Le niveau de la nappe superficielle est très élevé, de sorte
que dans les dépressions se sont formés des étangs, qui se sont
plus ou moins complètement remplis de tourbe.

4° Pag. 6. Il est évident que la tourbe se forme dans les endroits
humides, mouillés, marécageux ou riches en étangs, peu importe
que cet état de choses soit la conséquence du niveau élevé de la
nappe superficielle ou des sources, ou bien de l'humidité atmos-
phérique, retenue par les couches inférieures.

Le soul-sol des tourbières est généralement du sable diluvial ou
alluvial ; en beaucoup d'endroits il ne se trouve pas d'argile dessous,
tandis qu'en d'autres la tourbe repose directement sur l'argile ou
sur le limon.

5° Pag. 6. Les tourbières des montagnes reposent sur des roches
cristallines de différente nature, sur de la granitite, de la phyllite,
du gneiss, du granit. La marne et le „Plânerkalk" forment rarement
le sous-sol, plus rarement encore le calcaire. Parmi toutes les

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142 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

roches, l'argile forme le plus souvent le sous-sol, seule ou avec
une couche de sable. Pourtant l'opinion que l'argile
doit être pré-
sente, soit directement, soit indirectement, est erronée; elle a été
repoussée déjà par Grisebach.

La condition essentielle est l'eau peu profonde, stagnante ou
coulant fort lentement.

M. Sitensky consacre à l'âge des tourbières bohémiennes (pag. 184)
un chapitre intéressant, auquel nous pouvons emprunter quelques
détails. Pour fixer l'âge de ces tourbières, la présence de plantes
arctiques est d'une grande importance et indique une époque où
le climat était plus froid, savoir l'époque glaciaire.

La formation d'une nouvelle tourbe ne saurait nous aider à
fixer l'âge des tourbières. D'une part les données de différents
auteurs nous feraient croire, que cette formation se fait assez
rapidement ; d'autre part on voit que cette tourbe nouvelle est
bien différente de celle creusée dans les tourbières. Ensuite, la
croissance est très irrégulière, l'humidité l'étant aussi.

Les ossements d'animaux disparus sont fort importants pour
évaluer l'âge des tourbières. Ainsi on a trouvé des restes (molaires)
du
Cervus megaceros, du G&rvm euryceros, du Sus palustris et de
VElephas primigenius.

En Amérique, dans l'état d'Indiana, on a rencontré dans les
tourbières environ trente exemplaires de
Mastodon- Ce nombre
relativement grand ferait penser, qu'ils ont péri dans la tourbière
même et en prouverait l'âge considérable, puisque le Mastodon
avait disparu déjà dans le temps préhistorique.

16. Dr. G. Primics. „Die Torflager der Siehenbürgischen Landes-
theile. Mittheilungen aus dem Jahrbuche der königlich-ungarischen
geologischen Anstalt,
1892".

En Transylvanie la mineure partie des tourbières (les hautes
tourbières) se trouve dans la région des sapins ou dans son voisi-
nage, sur les plateaux ou dans les vallées en bassin. La majeure
partie s'est formée plus bas dans les plaines et les vallées. La
différence est constituée principalement par la végétation.

Dans les anciennes tourbières de marais la formation delà
tourbe a souvent cessé depuis longtemps et elles sont couvertes
d'humus et de gazon. La tourbe supérieure y est noire et
compacte, l'inférieure, spongieuse, rougeâtrè ou brun-fOncé; cette
dernière se compose de roseaux et de carices, incomplètement
carbonisés. Il y a eu évidemment d'abord un marais, ensuite un

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CONTRIBUTIONS A LA oéOLOOIE DES PAYS-BAS. 148

terrain humide et plus tard une prairie en suite d'un drainage
amélioré.

La tourbière de marais près du village de Hév Szamos se trouve
dans une dépression de couches synclinales de schistes crystallins,
recouverts d'une couche de débris peu perméable. Le drainage s'en
fait tant à l'est qu'à l'ouest.

La tourbière du village de Dealu Mluhi est située sur un pla-
teau en forme de bassin; l'eau s'en décoUle difficilement vers
deux côtés. On observe dans cette tourbière quatre petites mares
d'une surface d'à peine 10 mètres carrés, que la population dit
être sans fond, quoiqu'elles ne mesurent que 2 ou 3 M. en pro-
fondeur et commencent déjà à se remplir de végétation. L'auteur
les attribue à la présence de sources. L'origine de cette tourbière
aussi est due à une vallée de couches synclinales de grès des
Oarpathes.

La tourbière de marais du village d'Apatfalva, épaisse de 2—3 M.,
est déjà vieille et entièrement sèche; elle est située dans la
vallée du Rohrbach, qui a graduellement coupé la tourbière et
même le sous-sol de marne et de grès. Dans la période alluviale
ancienne ou même diluviale la vallée était fermée en aval, de
sorte qu'il s'y trouvait un lac, qui se convertissait peu à peu
en tourbière. Il s'y forma d'abord un dépôt de boue jusqu'à 3 M.
en épaisseur, contenant des ossements de mammifères quaternaires :
Elephas primigenim, Gervus elaphus, Rhinoceros, Bos primigenius et
priscus, etc.

Près du bain de Szekely—Udvardhely se trouve une tourbière
de marais dans une vallée étroite; elle était autrefois un marais,
reposant sur de l'argile salifère.

La vallée de la rivière du Csik a été autrefois barrée en deux
endroits par les éruptions volcaniques, qui créèrent les montagnes
Hargita. Ces deux barrages causèrent trois bassins, qui devinrent
des lacs et ensuite des marais et des tourbières; peu à peu le
Csik s'est coupé un lit à travers de ces barrages, de sorte que les
tourbières furent drainées.

Près de la commune de Madefalva s'en trouve une autre dans
le voisinage de la rivière Alt. Celle-ci coulait autrefois à un
niveau plus élevé et formait un réseau de nombreux bras dans
une contrée marécageuse; mais peu à peu la rivière a simplifié
et approfondi son lit, après que la tourbière s'était formée.

Nous voyons donc que les conditions sous lesquelles se sont

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144 CONTRIBUTIONS A LA GÉOLOGIE DES PAYS-BAS. '82

formées les tourbières transylvaniennes diffèrent des nôtres quant
au sous-sol; il y a pourtant une analogie frappante quant au
point cardinal, le drainage imparfait. Quelques-unes sont traversées
par une ligne de séparation de deux bassins hydrographiques, ainsi
que plusieurs des hautes tourbières de notre pays. Dans d'autres,
il n'y avait d'abord qu'un drainage embryonal, qui s'est perfec-
tionné avec le temps, de sorte que la formation de la tourbe a
cessé et la tourbière elle-même est devenue une prairie ordinaire,
assez sèche.

17. Résumé.

En résumant cet aperçu de la littérature sur les hautes tour-
bières, que nous savons être assez incomplet, nous voyons que la
plupart des auteurs ont donné „la part du lion" au côté botanique
de la question et que ce que nous avons appelé „le côté physico-
géologique" a été traité assez en passant. Quelques-uns seulement
se sont demandé:
pourquoi il y a des tourbières et pourquoi toMtQ
la surface de la zone tempérée n'est pas une tourbière continue.

En général, ils ont constaté que les hautes tourbières se trouvent
souvent dans un bassin, sur une plaine étendue ou sur un sol
imperméable ; mais ils n'ont pas approfondi davantage la question.
Quelques-uns ont appuyé ou bien combattu les opinions de leurs
prédécesseurs. Ainsi M. Borgman a réfuté l'hypothèse de Sta-
ring des bois comme précurseurs nécessaires des hautes tour-
bières, de même que Grisebach, Lesquereux, etc. l'avaient déjà
fait avant lui.

En somme, M. Jentzsch seul est allé plus loin en faisant
observer que
„le niveau de Veau souterraine est presque toujours
en coupole et descend vers les cours d'eau voisins".
C'est là le
point cardinal, auquel il faut toujours avoir recours, sans oublier
toutefois que les conditions physiques et topographiques diffèrent
fréquemment d'une tourbière à l'autre. Le niveau de l'eau sou--
terraine est la première chose à prendre en considération, puis
vient l'imperméabilité du sol, du moins d'après nos propres
recherches.

Nous croyons donc que l'examen des hautes tourbières néerlan-
daises, auquel nous avons consacré une série d'excursions dans les
quatre dernières années, a contribué à porter la question plus près

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CONTUIEUTIONS A LA GEOLOGIE DES PAYS-BAS. 145

de sa solution définitive. Le travail que nous terminons ici pourra
en même temps servir de texte explicatif partiel de la carte géo-
logique, texte qui a toujours fait défaut.

Arrivé à la fin de ce travail, j'éprouve le besoin de témoigner,
ma profonde gratitude à M. M. les Directeurs de la Fondation
Teyler, qui ont si généreusement contribué à sa publication.
Je les prie d'accepter ici mes sincères remerciments !