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D I SCOURS
DE LA METHODE
Pour bien conduire fa rai(bn,&; cherchcr
la verite danslesfcienees.
Plus
LA DIOPTRIQVL
LES METEOR ES.
ET
LAGEOMETRIE.
§jd font des ejfais de cete Method e*
A L E Y D E
De rimprimeric de I a n Maire.
els la c xxxvu.
Aaec Triuilege.
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-------,-----,—.---,------,
3
D I S C O U R S
DE LA METHODE
Pour bienconduire fa raifbn,& chercher
la verite dans les fciences.
Si ce difcours [emble trop longponr eflre tout leu en vnefok, on le pour-
ra diflinguer en fix parties. Et en la premiere on trouuera diuerfes
considerations touchant les fciences. En la feconde,lesprinciples regies
de la Methode que I'Autheur a cherchee, £n la it, quelques vnes de
celles de la Morale qu'il a tiree de cete Methode. En la
4, Its ratfons
par lefquella ilprouue I'exiflence de Dieu
, & de I'ame humaine, qui
fintlesjbndcmensdefaMetaphyfique. En la ^,1'ordredes queftions
de Phjfiquequ'ila cherchees
, & parttculierement I'explication du
mouuement du coeur
, & de quelques autres difficult e^qui appartie-
nent a la Medecine, puts auffy la difference qui eft entre noftreame &
celle des defies. Et en la derniere, quelles chofes il croit eflre requijes
pour allerpltts auanten la recherche de la Nature qu'il n'a efte, &
quelles raifons Font put efcrire.
E bon fens eft la chofe du monde la JartV!.*6
1
mieux partagde: car chalcun penfe en
' eftre fi bien pouniii,que ceux mefme qui
1 font les plus difficiles a concenter en tou-
1 te autre chofe, n'ont point couftume cfen
defirerplusqu'iKenont. En quoyil n'eft pas vray fem-
blablequetousfe tropent: Maisplutoftcelatefmoigne
que la puiflTance de bieniuger , & dillinguer le vray
d'auecle faux, qui eft proprement ce qu'on nomme le
bon fens, ou la raifon, eft naturellement efgale en tous
leshommes; Etainfiqueladiuerfitc'de nos opinions ne
vientpas de ceqneles vns font plus raifonnables que les
a 2                     autres,
-ocr page 4-
4                         Discours
autres, maisfeulement de ce que nous conduifons nos
penfe'es par diuerfes voyes, 8c ne confiderons pas les mef-
rneschofes. Car ce n'eft pas affez d'auoir l'efprit bon}
mais Ie principal eft de l'appliquer bien.Lesplus grandes
ames font capables des plus grans vices, aufTy bien que
des plus grandes vertus: Ec ceux qui ne marchent que
fort lentement peuuent auancer beaucoupd'anantage,
s'ils fuiuent toufiours le droit chemin, que ne font ceux
qui courent, & qui s en efloignent.
Pour moy ien'ay iamaisprefumeque mon efprit fuft
enrienplusparfait que ceux du commun: mefrae i'ay
fouuent fbuhaite' d'auoir la penfee aufTy prompte , ou
1'imagination aufTy nette & diftindte, ou la memoire auf-
fy ample, ou aufTy prefente, que quelques autres. Etie
ne fc,ache point de qualitez que celles cy,qui feruent a la
perfection de Tefprit: car pour la raifon, ou le fens, d'au-
tant qu'elle eft la feule chofe qui nous rend hommes, &
nous diftingue des beftes, ie veux croyre qu'elle eft tou-
te entiere en vn chafcun ; & fuiure en cecy l'opinion
commune des Philofophes , qui difent qu'il n'y a du
plus & du moins qu'entre les accidens , & non point
entre les formes ou natures des mdiuidusd'vm me fine
efpec^_j.
Mais ie ne craindray pas de dire que ie penfe auoir eu
beaucoup d'heur, de m'eftre rencontrd de's ma ieunefTe
en certains chemins, qui m'ont conduit a des confidera-
tions & des maximes, dont i'ay forme'vne Methode, par
laquelle il me femble que i'ay moyen d'augmenter par
degrez ma connoifTance, & de 1'efleuer peu a peu au plus
haut poMit,auqueIlamediocritd de mon efprit & la cour-
tedu-
-ocr page 5-
De La Methode.                      s
tedurecdemavie Iuy pourront pcrmettre d'atteindre.
Car i en ay defia receuilly de tels fruits , qu'encore
qu'auxiugemensqueiefais de moymefme , ie tafche
toufioursdepencher versle coftedela defiance ,plutoft
queversceluydelaprefomptionj&que regardant d'vn
ceildePhilofophe les diuerfes a&ions & entreprifes de
tons les hommes , il n'y en ait quafi aucunequineme
femble vaine & inutile, Iene laifle pas de receuoir vne
extreme fatiffa&ion du progre's que ie penfeauoir defia
fait en la recherche de la verite', & de conceuoir de telles
efperances pour l'auenir,que fi entre les occupations des
hommes, purement hommes, il y en a quelqu'vne qui
foit folidement bonne &importante , i'ofe croyre que
e'eftcelle que iay choifie.
Toutefois il fe peut faire que ie me trompe. & ce n'eft
peuteftre qu'vn peu de cuiure & de verre que ie prens
pour de Tor & des diaraans. Ie fcay combien nous fom-
mesfuietsanousmeprendreence qui nous touchej &
combien aufly les iugemens de nos amis nous doiuent
eftrefufpe&s, Iorfqu'ils font en noftre faueur. Maisie
feraybienayfede faire voir en ce difcours quels font les
cheminsqueiayfuiuis, &d'y reprefenter ma vie com-
me en vn tableau, affin que chafcun en puifTe iuger, &
qu'apprenant du bruit commun les opinions qu'on en
aura, cefbit vn nouueau moyen de m'inftruire,que i'ad-
ioufteray a ceux dont i'ay couftume de meferuir.
Ainfimondefleinn'eftpasd'enfeigner icy la Metho-
de que chafcun doit fuiure pour bien conduire faraifon:
mais feulement de faire voir en quelle forte i'ay tafche'
de conduire la miene. Ceux qui fe meflent de donner
a 3                      des-
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vtf                           Disco u r s.
des preceptes, fedoiuent eftimerplus habiles, que ceux
..aufquelsilsdesdonneut.&s'ils manquent en lamoin-
dre chofe, lis en font blafmables. Mais ne propofant cet
efcrit,que corame vne hiftoire,,ou fi vrous l'aymez mieux
que comme vnefable,en laquelle parrai quelques exem-
ples qu'on peutimiter, on en trouuera peuteftre aufly
plufieurs autres qu'on aura raifon de ne pas fuiure;i'efpe-
re qu'il fera vtile a quelques vns,fans eftre nuifible a per-
fonne, Sc que tous me fc, auront grd de ma franchife.
l'ayeftenourriauxlettresde'smonenfance, & pour-
cequ'on me perfuadoit que par leurmoyen on pouuoic
acquerir vne connoiflance claire ScaflTure'e de tout ce qui
eft vtile a la vie, i'auois vn extreme defir de les appren-
dre. Mais fitoft que i'eu acheue tout ce eours d'eftudes,
auboutduquelonacouftumed'eftrereceu au rang des
docles, ie changay entierement d'opinion. car ie me
trouuois embaraffe' de tant de doutes & d'erreurs, qu'il
me fembloit n'auoir fait autre profit en tafchant de m'in-
ftruire; finon quei'auois decouuert de plus en plus mon
ignorance. Etneanmoinsi'eftoisenl'vnedes pluscele-
bresefcholesde l'Europe, ouie penfois qu'il deuoit y
auoir.de fgauans hommes s'il yen auoit en aucun endroit
delaterre: 1'yauois appristout ce que les autres y ap-
prenoient- & mefme ne m'eftantpas contente'des fcien-
ces qu'on nous enfeignoit, i'auois parcouru tous les liu-
res, traitaus de celles qu'on eftime les plus curieuies &
les plus rares, <jui auoient pu tomber entre mes main's:
Aueccelaie f^auoisles iugemens que les autres faifo-
ient de moy; & ie ne voyois point qu'on m'eftimaft infe-
•rjeuramescondifciples, bienqu'il y en euft defia entre
^ux
»
-ocr page 7-
De La Methods.                    7
eux<melquesvns,qu'ondeftinoitaremplirles places de
nosmaiftres: Et enfinnoftrc fiecle me fembloit aufly
fteuriffant, & aufTy fertile en bons efprits, qu'ait efte au-
can des preeedens. Cequi me faifbit prendre la liberte",
de iuger par moy de tous les autres, & de penfer qu'il n'y<
auoit aucune doctrine dans le mondequi fufi telle, qu'on
m'auoit auparauant fait efperer,
IenelahToispas toutefois d'eftimerlesexercices,au£'-
quels on s'occupe dans les efcholes. Ie fc,auois que les
langues qu'on y apprent font neceffaires pour rintelli-
gencedesliuresanciens; Que la gentillefle des fables
reueille refprit- Que les actions memorables des hiftoi-
res le releucnt, & qu'eftant leues auec discretion elles-
«aydent a former leiugement; C^ue la lecture de tous les
bons liures eft comme vnc conuerfation auec les plus
honneftes gens des fiecles paffez, qui en ont eftd les au-
theurs; & mefme vne conuerfation eftudide, en Iaquelle
ilsne nous de'couurent que les meilleures de leurs pen-
fdesj Que TEloquence a des forces & des beautez in-
comparablesj Que la Poefie a des delicateffes & des
douceurstres rauiffantes j Que les Matheraatiques ont
desinuentionstresfubtiles , & qui peuuentbeaucoup
feruir^ tant a contenter les curieux, qu'a faciliter tous les
arts, &diminuerletrauail des hommes; Que les efcris
qui traitent des meurs contienent plufieurs enfeigne-
menSj&plufieurs exhortations a la vertu qui font fore
vtilesj Que la Theologie enfeigne a gaigner le ciel} Que-
la Philofophie donnc moyen de parler vrayfemblable-
ment detoutes chofes, & fe faire admirer des moins>
fgauansj Qoe la Iurifprudence, la Medecine,& les autres
fcien-r
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8                           Disco u r s.
fciencesapportentdeshonneurs&des richeffes a ceux
qui les cukiuent; Et enfin qu'il eft bon de les auoir tou-
tes examinees, mefme les plus fuperftitieufes & les plus
fauffes, affin de connoiftre leur iufte valeur, & fe garder
d'eneftretrompe\
Mais iecroyois auoirdefia donne' aflez de terns aux
langues; Stmefme aufly a la le&ure des liures anciens, &■
a leurs hiftoires, & a leurs fables. Carc'eft quafi le mef-
me de conuerfer auecceux des autres fiecles, que de
voyager. II eft bon de %auoir quelque chofe des meurs
dediuerspeuples, affin de iuger des noftres plus faine-
ment, & que nous ne penfions pas que tout ce qui eft
contre nos modes foit ridicule, & contre raifbn ; ainfi
qu'ontcouftumedefaire ceux qui n'ontrienvii :• Mais
lorfqu'on employe tropde tems a voyafgeron deuienf
enfin eftranger en fon pais- &lorfqu'on eft trop curieux
des chofes qui fe pratiquoient aux fiecles paffez, on de-
meure ordinairement fort ignorant de celles qui fepra-
tiquent en cetuycy. Outre que les fables font imagine*
plufieurs euenemens comme poffibles qui ne le font
point; Et que mefme les hiftoires les plus fideles, fi elles
nechangentnyn'augment la valeur d*s chofes pour les
jrendre plus digues d'eftreleues, au moinsen omettent
<eiles prefque toufiours les plusbafTes & moins illuftres
circonftances,d'ouvientque le refte ne paroift pastel
qu'il eft, 8c que ceux qui reglent leurs meurs par les
■exemples qu'ils en tirent, font fuiets a tomber dans les
extrauagances des Paladins de nos romaus, & a conce-
uoir des deflfeins qui paffent leurs forces.
l'eftimois fort 1'Eloquence; & i'eftois amoureux de h
Poefie:
-ocr page 9-
De La Methode-                        9
Poefie: Maisiepenfois quel'vne & L'autre eftoient des
dons de I'efprit, plutoft que des fruits de 1'eftude. Ceux
Gut ont le raifonnementle plus fort , & qui digercnt le
mieux leurs penfe'dsanin deles rendre claires & intelli-
gibles, peuuent toufiours le mieux perfuader ce qu'ils
propofent, encore qu'ils ne parlafTent que bas Breton,&
qu'ils n'eufTent iamais apris de Rhetorique: Et ceux qui
outlcsinuentionsles plus agreables & qui les fgauent
exprimerauecleplusd'ornement &de douceurnelaifi*
roient pas d'eftre les meilleurs Poetes, encoreque l'art
Poetique leur full inconnu.
Ie me plaifois fur tout aux Mathematiques, acaufe de
la certitude & de 1'euidence de leurs raifons, mais ie ne
remarquois point encore lcur vray vfage , & penfant
qu'elles ne feruoient qu'aux arts Mechaniques, ie m'ef-
tonnoisdece que leurs fonderaens eftans fi fermes & fl
folides, on n'auoitrien bafti deflus de plus relcue. Com-
me au contraire ie comparois les efcris des anciens
payens qui traitent des meurs, a des palais fort fuperbes,
& fort magnifiques, qui n'eftoient baftis que fur du fa-
ble, & fur de la bove; lis efleuent fort haut les vertus, &
les font paroi ftre eftimables par deflfus toutes d"es chofes
qui font au monde, maisils n'enfeignent pas aflfez a les
connoiflre, & fouuent ce qu'ils appelent d'vn fi beau
nom n'eft qu'vne infenfibilite", ou vn orgueil, ou vn defe-
fpoir,ou vn parricide.
Ie reuerois noftre Theologie , & pretendois autant
qu'aucun autre a gaigner le ciel. mais ayant apris com-
me cliofe tres a{rure"e, que le chemin n'en eft pas moins
ouuert aux plus ignorans qu'aux plus dodtes, & que les
b                         veritez
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io                        D is c on r s.
veritez reuel^es qui yconduifent, fontaudcfllis de no-
ftre intelligence, ie n'eufle ofe les foumettre a la foiblef-
fe de mes raifonnemens, & ie penfois que pour entre-
prendrede les examiner, & y reuffir , il eftoit befbin
d'auoir quelque extrordinaire affiftence du ciel, &
deftre plus qu'homme.
Ie ne diray rien de la Philofophie , finon que voyant
qu'elleaefte'cultiue'e paries plus excellens efprits qui
ayentvefcudepuisplufieurs fiecles , & que neanmoins
il ne s'y trouue encore aucune chofe dont on ne difpute,
&parconfequentquine foitdouteufe, ien'auois point
affes de prefomption pour eiperer d'y rencontrer mieux
que les autres ; Et que confiderant combien il peut y
auoir de diuerfes opinions touchant vne mefme matie-
re, qui foient fouftcnues par des gens dodtes, fans qu'il y
en puifle auoiriamais plus dVnefeule quifoit vraye , ie
reputois prefque pour faux tout ce qui n'eftoit que vray-
femblable.
Puis pour les autres fciences d'autant qu'ellesemprun.
tentlenrs principesdela Philofophie, ie iugeois qu'on
ne pouuoit auoir rien bafti qui fuft folide, fur des fonde-
mens fi peu fermes- Et ny l'honneur, ny le gain qu'elles
promettent, n'eftoientfuffifans, pourmeconuier a les
apprendre: Car iene me fentois point, graces a Dieu, de
condition, qui m'obligeaft a faire vn meftier de la fcien.
ce,pourlafbulagementde ma fortune; Etquoyque ie
ne fiffe pas profeiEon de mefprifer la gloire en Cynique,
ie faifois neanmoins fort peu d'eftat de celle que ie
n'efperois point pouuoir acquerirqu'afaux titres. Et
enfin pour les mauuaifes doctrines, ie penfois defia con-
noiftre
-ocr page 11-
De La Methode.                    it
noiftre afTe's ce qu'elles valoient,pourn'eftreplus fuiet a
eftretrompe'.nyparlespromeffes d'vnAlchemifte, ny
par les predictions d'vn Aftrologue, ny par les impoftu-
resd'vn Magicieu, ny par les artifices ou la venterie
d'aucun de ceux qui font profeffion de f§auoir plus qu'ils
ne f^auent.
C'eftpourqnoy fitoft que l'aage me permit de forth:
de la fuietion de mes Precepteurs , ie quittay entiere-
mentl'eftiidedeslettres. Et merefoluant de ne cher-
cher plus d'autre fcience, que celle qui fe pourroit trou-
uerenmoymefme, oubien dansle grand Hure du mon-
de, 1'employay le refte de ma ieunefle a voyager, a voir
des cours, & des armdes.a frequenter des gens de diuer-
feshumeurs&conditions, areceuillir diuerfes experi-
ences,a m'e'fprouuer moymefme dans les rencontres que
la fortune me propofoit, & partout a faire telle reflexion
fur les chofes qui fe prefentoient que i'en puffe tirer
quelque profit. Car il me fembloit que ie pourrois ren-
contrerbeaucoupplus de verite'dans les raifonnemens
que chafcun fait, touchant les affaires qui luy importent,
& doiit I'euenement le doit punir bientoft apre's s'il a mai
iugej que dans ceux que fait vn homme delettresdans
fon cabinet touchant des (peculations quine produifent
aucun effecl;, & qui ne luy font d'autre confequence, fi-
non que peuteftre il en tirera d'autant plus de vanite
qu'elles ferontplus efloigndes du fens commun: a caufe
qu'il aura deu employer d'autant plus d'efprit & d'arti-
fice a tafcher de les reudre vrayfemblables. Et i'auois
toufiours vn extreme defir d'apprendre a diftinguer
le vray d'auec le faux , pour voir clair en mesadtions,
b %                         &
-ocr page 12-
ia                         Disco dr.s
& marcher auec aflbrance en cete vie.
II eft vray que pendant que ie ne faifois que confide-
rerlesmeursdesautreshommes, ien'y trouuois gueres
dequoy m'aflurerj &quei'yremarquois quafi autantde
diuerfitd que i'auois fair auparauant entre les opinions
des Philofophos. En forte que leplus grand profit que
i'en retirois,eftoit que voyant plufieurs chofes,qui bien-
qu'elles nous femblent fortextrauagantes & ridicules,
ne laiffent pas d'eftre communement receues 8c approu-
udespard'autres grans peuples , i'appreuois a nerien
croire trop fermement de ce qui ne m'auoit efte perfua-
deque par 1'exemple & par la couftume : Et ainfi ie me
deliurois peu a peu de beaucoup d'erreurs, qui peuuent
offufquer noftre Iumiere naturelle, & nous rendre moins
capablesdentendreraifbn. Maisapre'squei'euemploye'
quelques anne'es a eftudier ainfi dans le iiure du monde,
& a tafcherd'acquerirquelque experience , ie pris vn
iour refolution d'eftudier auffy en moymefme, & d'em-
ployertoutes les forces demon efprit a choyfir les che-
minsqueiedeuois fuiure. Ce qui me reuffit beaucoup
mieux, ce me femble, que fi ie ne me fuffe iamais efloi-
gndj ny demon pais, ny de mes liures.
Secode Tetois alors en AlLemaigne qu l'occafion des guerres
partie, qui n'y font pas encorefiniesm'auoit appele, & comme
ieretournoisducouronnementdelEmpereurvers l'ar-
mee, le commencement de 1'hyuer m'areftaxn vn quar-
ticroune trouuantaucune conuerfation qui me diuer-
tift, &n'ayant d'ailleurs par bonheur aucuns foins ny
paflionsquimetroublafTent, iedemeurois tout le iour
enfermdfeuldans.vnpoefle , ou i'auois tout loyflr de
m'en-
i
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De La M ethode.                     13
m'entretenirdemespenfees. Entrelefqu'ellesrvnedes
premieres, futqueie m'auifayde confiderer, quefou-
uent il n'y a pas tant de perfection dans les ouuf ages
compofezde plufieurs pieces, &faitsde la main de di-
ners maiftres, qu'enceux aufquels vn feul a trauaille'.
Ainfivoitonquelesbaftimens qu'vn feul Archite&e a
entrepris&acheuez, ontcouftume d'eftre plus beaux &
mieuxordonnez, queceuxque plufieurs out tafche' de
racommpder, enfaifant feruir de vieilles murailles qui
auoient efte'bafties a d'autres fins. Ainfi ces ancienes
citez,qui n'ayant efteau commencement que des bour-
gades, font deuenues par fucceflion de tems de grandes
vilies, font ordinairement fimal compaflVes, au pris de
ces places regulieres qu'vn Ingenieur trace a fafantaifie
dans vne plaine, qu'encore que confiderant leurs edifi-
ces chafcun a part on y trouue fouuent autant ou plus
d'artqu'enceuxdesautresj toutefois a voir comme ils
font arrangez, icy vn grand, la vn petit , & comme ils
rendent les rues courbees & inefgales,on diroit que c'eft
plutoft la fortune, que la volonte de quelques hommes
vfans de raifon, qui les a ainfi difpofez. Et fi on confide-
re qu'il y a,eu neanmoins de tout terns quelques offi-
ciers,quionteu charge de prendre garde aux baftimens
desparticuliers, pour les faire ieruira l'ornement du pu-
blic^ on connoiftrabien qu'il eft malayfe', ennetrauail-
lantquefurles ouurages d'autruy , de faire des chofes
fortaccomplies. Ainfi ie m'imaginay que les peuples,
qui ayant efte" autrefois demifauuages, & ne s'eftant ci»
uilifezquepeuapeu, n'ont fait leurs loix qu'a mefure
que lineommodite'des crimes & des querekes Ics-ya
63                       con-
-ocr page 14-
i4                        D i s c o u r s.
contrains, ne f§auroient eftre fibien police?., que cenx
qui de's le commencement qu'ils fe font affemblez, ont
obferue' les conftitutions de quelque prudent I.egifla-
teur. Commeil eft bien certain que l'Eftat de la vraye
religion, dont Dieu feul a fait les ordonnances,doit eftre
incomparabIementmieuxregle''qiietous lesautres. Et
pour parlerdes chofes humaines, ie croy que fi Sparte a
efte'autrefois tresflorifTante3cen'a pas efte'a caufe de
labontede chafcunedefesloix en particulier, vu que
plufieurs eftoient fort eftranges, & mefme contraires
aux bonnes meurs, maisa caufe que n'ayant efte inuen-
tdes que par vn feul, ellestendoient toutes a mefme fin.
Etainfi ie penfay que les fciencesdes liures,au moins cel»
les dont les raifous ne font que probables, & qui n'ont au-
cunes demonftrations, s'eftant compofees & groflies
peu a pendes opinios de plufieurs diuerfes perfonnes,ne
font point, fi approchantes de la verite', que les fimples
raifonnemens que peut faire naturellement vn home de
bon fens touchant les choles qui fe prefentent. Et ainfi
encore ie penfay, que pourceque nous auons tous efte'
enfans auant que d'eftre hommes, &qu'il nous a fallu
long terns eftre gouuernez par nosappetis & nosPrece-
pteurs, qui eftoient fouuent contraires les vnsauxau-
tres, Scquinyles vnsnyles autres ne nous confeilloient
peuteftre pas toufiours le meilleur, 11 eft prefq; impofli-
ble que nos iugemens foient fi purs, ny fi folides qu'ils au-
roient efte" , fi nous auions eu Tvfage entier de no*
ftre raifon de's le point de noftrenaiflance, & que nous
n'euflions iamais efte"conduits que par elle.
11 eft vray que nous ne voyons point qu'on iette par
terre
-ocr page 15-
De La Methode.                    if
tcrre toutes Ies maifons d'vne ville, pour le feul deflein
delesrefaire d*utre facon; & d'enreudreles rues plus
belles;mais on voit bien que plufieurs font abatre les leur
pour les rebaftir, & que mefme quelquefois ilsy font
contrains, quand elles font en danger de comber d'elles
mefmes, & que les fondemens n'en font pas bien fermes.
A i'exemple dequoy ie me perfuaday , qu'il n'y auroit
veritablement point d'apparence, qu'vn particulier fift
deflein dereformer vn Eftat,en y changeaut tout dds les
fondemens, & en le renuerfant pour le redrefler5 My,.
mefme aufly de reformer le cors des fciences, ou 1'ordre
eftabli dans les efcholes pour les enfeigner. Mais que
pour toutes les opinions que i'auois receues iufques alors
en ma creance, iene pouuois mieux faire que d'entre-
prendrevne bonne fois deles en oiler, affind'y en re-
mettreparapres, oudautresmeilleures,oubienlesmef-
mes,lotfque ie les aurois aiuftdes au niueau de la raifon.
Etiecreu fermement que par ce moyeniereuflirois a>
conduiremaviebeaucoup mieux, queliiene batiflbis
que fur devieux fondemens , &queie ne m'appuiafle
que fur les principes que ie m'eftois laifle' perfuader eh
ma ieunefle , fans auoir iamais examine's'ils eftoient
vrais. Car bienque ie remarquafle en cecy diuerfes diffi-
cultez, elles n'eftoient point toutefois fans remede , ny
comparables a celles qui fe trouuent en la reforma'tion
desmomdreschofesquitouchent le public. Ces grans
corsfonttropmalayfezareleuereftant abatus, oumef-
mearetenireftantesbranflez, & leurs cheutes ne peu-
uent eftre que tresrudes. Puis pour leurs imperfections,
mIs en ont , comme la feule diuerfite' qui eft entre eux
fuffit
-ocr page 16-
16                              D IS C OURS
fuffitpourafTurerqueplufieursenont, I'vfage les a fans
doutefortadoucies, 8c mefmeil en a eiilte, ou corrige
infenfiblement quantise', aufquelles on ne pourroit fi
bienpouruair par prudence ; Et enfia elles font quad
toufiours plus fupporcables que ne feroit leur change-
ment, En mefmefacon que les grans chemins, qui tour-
noyententredesmontaignes , deuienent peu a peufi
vnis &ficommodes,a force d'eftrefrequentez, qu'il eft
beaucoupmeilleur de les fuiure , que d'entreprendre
d'aller plus droit, en grimpantau deffus desrochers, &
defcendant iufques au bas des precipices.
C'eft pourquoyienefcauroisaucunement approuuer
ces humeursbrouillonnes, & inquietes, qui n'eftant ap-
pelez,nyparleurnaiflance, ny par leur fortune, auma-
niement des affaires publiques, nelaiflfent pas d'y faire
toufiours en Ide'e quelque nouuelle reformation. Et fi ie
penfois qu'il y euft la moindre chofe en cet efcrit, par la-
quelle on me piift foupc,ouner de cete folie, ie ferois tres
marry de fouffrir qu'il fufc publie\ Iamais mon deffein,
nes'eft eftendu plus auant que de tafcher a reformer
mes propres penfe'es,& de baftir dans vn foils qui eft tout
a moy. Que fi mon ouurage m'ayant aflez pleu, ie vous
enfaisvoiricylemodelle , cen'eftpaspourcelaqueie
yeuille confeiller a perfonne de l'imiter : Ceux que
Dieu a mieux partagez de fes graces aurot peuteftre des
defTeins plus releuez, mais ie crains bien que cetuy-cy ne
fbit defia quetrop hardi pour plufieurs. La feule refolu-
tiondefedefairedetoutes les opinions qu'on a receues
auparauant en fa creance, n'eft pas vn exemple que chaf-
cun doiue fuiure : Etlemonde n'eft quaficompofe'que
de
-ocr page 17-
De La Methode.                     17
de deux fortes d'efpris aufquels il ne conuient aucune-
ment. A fcauoir de ceux qui fe croyans plus habiles
qu'ils ne font ne fe peuuent empefcher de precipiter
leurs iugemens, ny auoiraflez de patience pour condui-
re par ordre toutes leurs penfdes : d'oii vient que s'ils
auoient vne fois pris la liberte' de douter des principes
qu'ils ont receus, & de s'efcarter du chemin commun,ia-
mais ils ne pourroient tenir le fenrier qu'ilfaut prendre
pour aller plus droit , & demeureroient efgarez toutc
leur vie. Puis de ceux qui ayant affez de raifon, ou de
modeftie, pouriuger qu'ils font moins capables de di-
ftinguerlevray d'auec le faux que quelques autres pat*
lefquels ils peuuenteftreinftruits,doiuent bien plutoft
fe contentcr de fuiure les opinions de ces autres, qu'en
chercher eux mefmes de meilleures.
Et pour moy i'aurois efte'fans doute du nombre deces
derniers, fi ie n'auois iamais eu qu'vn feul maiftre, ou
que ie n'eufle point fceu les difFerences qui ont efte' de
touttems entre les opinions des plus doctes. Mais ayant
appris des le College, qu'on ne fc, auroit rien imaginer de
fi eftrange &c fi peucroyable, qu'il n'ait efteditpar quel-
qu'vn des Philofbphes; Et depuis en voyafgeant ayant
reconnu, que tous ceux qui ont des fentimens fort con-
traires aux noftres, ne font pas pour cela barbares ny fau-
uages, mais que plufieurs vfent autantou plus que nous
de raifonj Et ayant confidcre' combien vn mefme hom-
me,auecfonmefmeefprit,eftantnorri dds fonenfance
entre des Frangoisou desAllemans, deuient different
de ce qu'il feroit, s'il auoit toufiours vefcu entre des
Chinois ou des Canibales ; Et comment iufques aux
e                        modes
•*
-ocr page 18-
1,8                         D i s c o u r s.
modes de nes habits, la mefme chofe qui nous a plu il y a
dix ans, & qui nous plaira peuteftre encore auant dix ans,
nous femble maintenant extrauagante & ridicule: En
forte que c'eft bien plus la couftume & l'exemple qui
nous perfuade, qu'aucuue connoiifance certaine ; Et
que neanmoins lapluralitd des voix n'eft pas vue preuue
quivaillerien, pourlesveritez vu peu malayfe'es a de-
couurir, acaufequ'ileftbien plus vrayfemblable qu'vn
homme feul les ait rencontrdes que tout vn peuple 5 Ie
nepouuois choifirperfonne dont les opinions me fem-
blaflent deuoir eftre preferees a celles des autres, & ie
me trouuay comme contraint d'entreprendre moymef-
me de me conduire.
Mais comme vn homme quimarche feul, &dans les
tenebres, iemerefolu d'allerfilentement , &d'vferde
tantdecirconfpedionentoutes chofes,quefiie n'auan-
$ois que fort peu,ie me garderois bien au moins de tom-
ber. Mefme ie ne voulu point commencer a reietter
tout a fait aucune des opinions, qui s'eftoient pu gliflcr
autrefois en ma creance fans y auoir eftc introduites par
la raifon, que ie n'euffe auparauant employe aiTez de
terns a faire le proiet de 1'ouurage que i'entreprenois, &
a chercher la vraye Methode pour paruenir a la connoif-
fance de toutes les chofes dont mon efprit feroit ca-
pable.
l'auois vn peu eftudie, eftant plus ieune, entre les par-
ties de la Philofophie a la Logique, & entre les Mather
matiques a 1'Analyfe des Geometres, & aTAlgebre,trois
ars ou fciences qui fembloient deuoir contribuer queU
quechofeamondeflein.. Mais en les examinant ie pris
garde,
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De La Methode.                      ij>
garde, que pour la Logiquefesfyllogifmes ,? & la plus
part de fes autres inftru&ions feruent plutoft a expli-
quer a autmy les chofes qu'on fc,ait, ou mefme, comme
1'artdeLulle , a parler fans iugement de celles qu'on
ignore, qu'a les apprendre. Et bienque elle contiene en
effecl: beaucoup de preceptes tres vrais & tres bons, ii y
en a tontefois tant d'autres meflez parmi, qui font on
nuifibles ou fuperflus, qu'ileftprefque aufTy malayfd de
les en feparer, quede tirer vne Diane ou vneMiuerue
horsd'vn bloc de inarbrequi n'eft point encore e'bau-
che". Puis pour l'Analyfe des anciens, & I'Algebredes
modernes, outre qu'elles ne s'eftendent qu'a des matie-
res fort abftra&es, & qui ne femblent d'aucun vfage, La
premiere eft toufioursfiaftrainte a la confideration des
figures, qu'elle ne peut exercer l'entendement fans fati-
guer beaucoup l'imagination, Et on s'eft tenement af-
fuietienladerniere acerraines reigles , & a certains
chiffres, qu'on en a fait vnart confus & obfcnr qui em-
barrafle l'efprit, au lieu d'vne fcience qui le cultiue. Ce
qui fut caufe que ie penfay qu'il falloit chercher quelque
autre Methode# qui comprenant les auantages de ces
trois, fuft exempte de leurs defaux. Et comme la mul-
titude des loix fouruift fouuent des excufes aux vices; en
forte qu'vn eftat eft bien mieux reigle'Jorfque n'en ayant
que fort peu, elles y font fort eftroitement obferuees:
Ainfiaulieudece grand nombre de preceptes dont la
Logiqueeftcompofee , ie creuque i'aurois affezdes
quatrefuiuans, pourvuque ie priflc vne ferme ftrcon-
ftante rcfolution de ne inanquer pas vne feule fois a les
o
feruer.
c 2                          Le
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20                                  D I S C 0 U R S.
Le premier eftoit de tie receuoir iamais au cume chofe
pour vraye queie nelaconnufTeeuidemmenteftre telle.-
c^ftadire, d'euiterfoigneufementla Precipitation, &
la Preuention^ &de ne comprendre riende' plus en mes
iugemens, quece qui fe prefenteroit fi clairement 8c fi
diftiuctement a mon efprit, que ie n'eufle ancune occa-
fion de le mettre en doute.
Le fecond, de diuifer chafcune des difficultez que
i'exarainerois en autant de parcelles qu'il fe pourroit, &
qu'il leroit requis pour les mieux refoudre.
Le troifiefme de condnircparordre mes penfees, en
commenceant par les obiets les plus fimples, & les plus
ayfezaconuoiftre , pour monterpeua peucomme par
degreziufquesalaconnoifTancedes plus compofez: Et
fuppofant mefme de l'ordre entreceux qui nele prece-
dent point naturellement les vns les autres.
Etle dernier de faire partout des denombremens fi
entiers, & des reueues fi generales^que ie fuiTe aflure'de
ne rienomettre.
Ces longues chaifnes de raifbns toutes fimples & faci-
les, dontles Geometresontcouftumede fe feruir, pour
paruenir a leurs plus dirEciles demonftrations,m'auoieut
donne occafion de m'imaginer,que toutes les chofes qui
peuuenttomberfouslaconnoifTancedes hommes s'en-
trefuiuent en mefme fa§on , &quepourvii feulement
qu'on s'abftiene d'en receuoir aucune pour vraye qui ne
Ie foit,& qu'on garde toufiours l'ordre qu'il faut pour les
deduire les vnes des autres , il n'y en pent auoirdefi
efloigneyes aufquelles enfin on ne paruiene, ny de fica-
chees qu'on neddcouure. Etiene fus pas beaucoup en
peine
-ocr page 21-
De La Methode.                  »»
peine de chereher par lefquelles ii eftoit befoin de com-
mencer: car ie f§auois defia que c'eftoit par les plus fim-
ples & les plus ayfe'es a connoiftre; 8c confiderant qu'en-
tre tons ceux qui ont cy deuant recherche'la verite' dans
les fciences, il n'y a eu que les feuls Mathematiciens qui
ont pu trouuer quelques demonftrations, c'eft a dire
quelques raifons certaines & euidentes , ie ne doutois
point que ce ne fuft par les mefmes qu'ils ont exami-
ndes; bienque ie n'en efperaffe aucune autre vtilite, fi-
non quellesaccouftumeroient mon efprita fe repaiftre
de veritez, & ne fe contenter point de faufles raifons.
Mais ien'eu pas defTein pour cela de tafcher d'appren-
dre toutes ces fciences particulieres qu'on nomme
communement Mathematiques: & voyant qu'encore
queleursobietsfoientdifFerens3elles ne laifTentpas de
s'accorder toutes , en ce quelles n'y confiderent autre
chofe que les diuers ra ppors ou proportions qui s y trou-
uent,iepenfayqu'il valoit mieux que i'examinafTe feu-
lement ces proportions en general, &fans les fuppofer
que dans les fuiets qui feruiroient am'en rendrela con-
noiflance plus ayfee • rnefme aufly fans les y aftreindre
aucunement, affin de les pouuoir d'autant mieux appli-
querapresatouslesautres aufquels elles conuiendroiet.
Puis ayant pris garde que pour les connoiftre, i'aurois
quelquefois befoin de les confiderer chafcune en parti-
culier;& quelquefois feulement de les retenir, ou de
lescomprendreplufieurs enfemble: ie penfay que pour
les confiderer mieux en particnlier, ie les deuois fuppo-
fer en deslignes, a caufe que ie netrouuois rien de plus
fimpie, nyqueiepuffeplus d.ftin<3eiuent reprefenter k
c 3                          mon
*
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22.                               D I S C G U R S.
nioti imagination & a mes fens; mais que pour les rete-
nir, ou les coraprendre plufieurs enfemble, il falloit que
ie les expliquafle par quelqnes chifFres les plus courts
qu'il feroitpoffible. Et que par ce moyen i'emprun-
terois tout le meilleur de l'Analyfe Geomctrique, &
de 1'Algebre, & corrigerois tous les defaus de l'vne par
l'autre.
Comme en efFed i'ofe dire, que l'exadte obferuation
de ce peu de preceptes quei'auois choifis,me donna tel-
le facilitd a demefler toutes lesqueftions aufquelles ces
deux fciences s'eftendeat, qu'en deux ou trois mois que
i'employay ales examiner, ayant commence paries plus
fimples & plus generates, fcehafqueverite que ie trou-
uoiseftantvnereiglequimeferuoitaprds a en trouuer
d'autres, uonfeulementie vins a bout de plufieurs que
i'auois iugees autrefois tresdifficiles, maisil me fembla
aufTyverslafin que iepouuois determiner , en celles
mefmequei'ignorois, par quels moyens, &iufquesou,
il eftoit poffible de les refondre. En quoy ie ne vous pa-
roiftraypeuteftrepas eftrefort vain, fivous confiderez
que n'y ayant qu'vne veritd de chafque chofe , quicon-
que la trouue en fcait autant qu'on en peut f§auoir : Et
que parexemple vn enfant inflruit en I'Arithmetique
ayant fait vne addition fuiuant fes reigles, fe peut aflurer
d'auoir trouud, touchant la fomme qu'il examinoir, tout
ce que l'efprit humain fgauroit trouuer. Carenrinla Me-
thodequienfeigneafuiurelevrayordre , &adenom-
brer exa&ement toutes les circonftances de ce qu'on
cherche, contient tout ce quidohnede la certitude aux
leiglesd'Arithmetique.
                                      Mais
IN
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De La Metiiode.                    23
Mais ce qui me contcntoit le plusdecete Methode,
eftoic que par die i'eftois afl'ure d'vfer en tout de ma rai-
fon,finonparfaitement , aumoins le mieux qui fuft en
mon pouuoir: outre que ie fentois en la prattiquant, que
mon efprit s'accouftumoit peu a peu a conceuoir plus
netement & plus diftin&ement fes obiets ; & que ue
l'ayant point afTuiettie a aucune matiere particuliere, ie
me promettois de 1'appliquer aufly vtilement aux difS-
cultezdesautresfciences,quei'auoisfaitacellesderAl-
gebre.Non que pour cela i'ofafTe entreprendre d'abord
d examiner toutes celles qui fe prefenteroient. car cela
mefme euil eftecontraire a l'ordre qu'elle prefcrit: Mais
ayantpris garde que leursprincipesdeuoient tous eftre
empruntezdelaPhilofophie, en laquelle ie n'entrou-
uoispoint encore de certains, ie penfay qu'il faloit auant
tout que ie tafchaffe d'y en eftablir; & que cela eftant la
chofedumondelaplusimportante, & ou la Precipita-
tion & la Preuention eftoient le plus a craindre, ie ne de-
uois point entreprendre d'en venirabout,queie n'eufTe
attaint vn aage bien plus meur que celuy de vingt-trois
ansquei'auoisalorsj Etque ie n'eufle auparauant em-
ploye" beaucoupdc terns a m'y preparer, tant en deraci-
nantde mon efprit toutes les mauuaifes opinions quei'y
auoisreceues auant ce terns la,"qu'en faifant amas de
plafieurs experiences, pour eftre apres la matiere de mes
raifonnemens, & en m'exerceant toufiours en la Metho-
de que ie meftois preferite, affin de m'y affermir de plus
en plus.
Et enfin comme ce n'eft pas affez, auant de comraen- Tfroifi"
cer arebaftir le logis ou on demeure, que de l'abattre, & plTtie
deF
-ocr page 24-
24                          D-iscours.
de fairc prouifion de materiaux & d'Archite&es,ou s'ex-
ercer foymefme a TArchitedture , & outre cela d'en
auoirfoigneufementtracddedeffein • mais qu'il faut
aufly s'eftre pourvu de quelque autre, ou on puifle eftre
loge commodement pendant le tems qu'on y rrauaille-
ra. Ainfi affin que ie ne demeurafTe point irrefolu en
mes adtions , pendant que la raifon m'obhgeroit de
l'eftre en mes iugemens, & que ie ne laiffafTe pas de viure
de'siors le plus hureufement queiepourrois, ieme for-
may vne morale par prouifion, qui ne confiftoit qu'en
troisouquatre maximes, dont ie veux bien vous faire
part.
La premiere eftoit d'obeir aux lois & aux couftumes
de mon pais, retenant conftanment la religion en la-
quelle Dieu m'a fait la grace d'eftre inftruit des mon
enfance, & me gouuernant en toute autre chofe fuiuant
les opinions les plus moderees, & les plusefloignees de
l'exces qui fuflent communement receues en pratique,
par les mieux fenfez de ceux auec lefquels i'aurois a vi-
ure. Carcommenceantdes lors a ne conter pour rien
les mienes propres, acaufeque ie les voulois remettre
toutes a l'examen , i'eftois afTure'de ne pouuoir mieux
que defuiurecelles des mieux fenfez. Et encore qu'ily
en ait peuteftre d'aufly bien fenfez parmi les Perfes ou
les Chinois que parmi nous, il mefembloit que le plus
vtile eftoit de me regler felon ceux auec lefquels i'au-
rois a viure; Et que pour fgauoir quelles eftoient verita-
blcmentleurs opinions, ie deuois plutoft prendre garde
a ce qu'il prattiquoient qu'a ce qu'ils difoient;non feule-
ment a caufe qu'en la corruption de nos mceurs il y a
peii
-ocr page 25-
De La Methode.                  £jjf
peu de gens qui vneiilent dire tout ce qu'ils croyerltj
tn:Tis auflya caufe que plufieurs l'ignorent eux mefmes,
car Taction delapenfecparlaquelle on croit vne chofe
eftantdifferentedecelleparlaquelleon connoift qu'on
la croit, elles font fouuent l'vne fans l'autre.Et entre plu-
fieurs opinions efgalement reeeues, ie ne choififlbis que
les plus modereesj tantacaufe que ce fonttoufiours les
plus commodes pour la prattique, & vrayfemblablement
lesmeilleures, tous excels ayant couftume d'eftre mau-
uaisjcomme auiTyaffindeme detournermoins du vray
■chemin, en cas que ie faillifTe, que fi ayant choifi I'vn des
extremes, c'euft efte l'autre qu'il euft fallu fuiure. Et
particulierement ie mettois entre les exce"s toutes les
promeiTesparlefquelles on retranchequelque chofe de
faliberte'.- Nonque ie defaprouuafle les Iois, qui pour
remedier a l'inconftance des efprits foibles, permettent
lorfqu'onaquelquebondefTein, ou mefmepour lafeu-
rete'du commerce, quelquedefTeinquin'eft, qu'indiffe-
rent, qu'on face des vceux ou des contrats qui obligent a
y perfeuerer: Mais a caufe que ie ne voyois au monde au-
cune chofe qui demeuraft toufiours enmefmeeftat, &
que pour mon particulier ie me promettois de perfe-
<Stionner de plus en plus mes iugemens, & non point de
lesrendrepires , i'eufle pcnfe commettre vnegrande
faute contre lebonfens, fi pourceque i'approuuois alors
quelquechofe, ie me fuffe oblige' de la prendre pour
bonne encore apres, Iorfqu'elle auroit peuteftre ceflVde
l'eftre ,ou que i'aurois cefle de I'eftimer telle.
Ma fecondemaximeeftoit d'eftre le plusferme & le
plus refolu en mes actions que ie pourrois; & de ne fuiure
«                         pas
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%6                             Dx scours
pas moins conftanment les opinions les plus douteufes
lorfqueiem'yferoisvne fois determine" , que fi elles
euflent efte'tres aiTure'es. Imitant en cecy les voyafgeurs
qui fe trouuant efgarez en quelque foreft ne doiuent pa&
errer en tournoyant tantoft d'vn cofte'tantoft d'vn au-
tre, ny encore moins s'arefter en vne place , mais mar.
chertoufioursleplus droit qu'ils peUuent vers vn mefc
mecoftd, &nele changer point pour de foibles raifons,
encore que ce n'ait peuteftre efte au commencement
que le hafard feul qui les ait determineza le choifir: car
parce moyens'ilsne vontiuftementou ilsdelirent, ils
arriueront au moins a la fin quelque part, ou vrayfem-
blablement ils feront mieux que dans le milieu d'vne fo-
reft. Etainliles actions de la vie ne fouffrant fouuent -
aucundelay, e'eft vne verite'trescertaine„ que Iorfqu'il
n'eft pas en noftre pouuoir de difcerner les plus vrayes
opinions, nous deuons fuiurc les plus probables, Et mef-
mequ'encore que nous neremarquions point d'auanta-
ge de probability aux vnes qu'aux autres, nous deuons
neanmoins nous determiner a quelques vnes , Et les
confidererapre'snonplus comme douteufes , en tant
quellesfe rapportent a la prattique, mais comme tres,
vrayes & tres certaines, a caufe que la raifon qui nous y a,
fait determiner fe trouue telle. Et cecy fut capable de's
lors de me ddliurer de tousles repentirs & les remors,
quiontcouftumed'agiterles consciences de ces efpris
foibles & chancelans, qui fe laiffent aller inconftanment
aprattiquer comme bonnes , les chofes qu'ils iugent
aprds eftre mauuaifes.
Matroiliefme ruaxiuie eftoit de tafcher toufiburs
plutoft
-ocr page 27-
De La Methods.                     27
plutoft a me vaincre que la fortune,& a changer raes de-
firs que l'ordre du monde : Et generalement de ln'ac-
couftumeracroirequ'il ny a rien'qui foit enticrement
en noftre pouuoir que nospenfees, enfbrtequ'apre's que
nous auons fait noftre mieux touchant les chofes qui
nous font exterieures, toutce qui manque de nous reuf-
fir eft au regard de nous abfblument impoffiWe. Et ce-
cy feul mefembloiteftrefuffifant pour m'empefcher de
rien defirer a l'auenir que ie n'acquifle, & ainfi pour me
rendre content: Car noftre volonte'ne fe portant natu-
rellement a defirer que les chofes que noftre entende-
raentluy reprefente en quelque fac,on comme poffibles,
il eft certain que fi nous confiderons tous les biens qui
font hors de nous comme efgalement efloignez de no-
ftre pouuoir, nous n'aurons pas plus de regret de man-
quer de ceux quifemblent eftre deus a noftre naiflance,
lorfque nous en ferons priuez fans noftre faute, que nous
auons de ne pofTeder pas les royaumes de la Chine ou de
Mexique: & que faifant,comme on dit, de neceflite' ver-
tu, nous ne defirerons pas d'auantage d'eftre fains eftant
malades, ou d'eftre Iibres eftant en prifon, que nous fai-
fons maintenant d'auoir des cors d'vne matiere aufly
peu corruptible que les diamans, ou des ailes pour voler
comme les oifeaux. Mais i'auoue qu'il eft befoin d'vn
long exercice , & d'vne meditation fouuent rei'tere'e,
pour s'accouftumer a regarder de ce biais toutes les cho-
fes: Et ie croy que e'eft principalement en cecy , que
confiftoit le fecret de ces Philofophes, qui ont pu autre-
fois fe fouftraire de l'cmpire de la Fortune, & malgre les
douleurs & la pauurete', difputer de lafeliciteauecleurs
4 x                     Dieux.
-ocr page 28-
1%                               DlSCOURS
Dieux. Gar s'occupant fans cefTe a confiderer Ies bor-
nesquileureftoientprefcritespar la Nature, ils fe per-
fuadoient fiparfaitementquerien n'eftoit en leur pou-
uoirqueleurspenfees, quecelafeuleftoit fuiEfant pour
les empefcher d'auoir aucune affection pour d'autres
chofeSj Scilsdifpofoientd'elles fi abfblument , qu'ils
auoient en cela quelque raifonde s'eftimer pics riches,
& pins puiffans, & plus libres, & plus hureux, qu'aucun
desautreshommes, quin'ayant point cetePhilofbphie,
tantfauorifezde la Nature & de la Fortune qu'ils puif-
fent eftre, tie difpofent iamais ainli de tout ce qu'ils
veulent.
Enfin pour conclu(ion decete Morale ie m'auifay de
fairevnereueue fur les diuerfes occupations qu'ont les
hommes en cete vie , pour tafcher a fairc chois de la
ineilleure, & fans que ie vueille rien dire de celles des au-
tres, ie penfay que ie ne pouuois mieux que de continuer
encellelamefmeou ie me trouuois, c'eft a dire, que
d'employer toute ma vie a cultiuer ma raifon, & m'auan-
cer autant que ie pourrois en la connoiflance de la veritd
fuiuant la Methode que ie m'eftois prefcrite. I'auois
efprouue'de fi extremes contentemes depuis que i'auois
commence"a meferuirde cete Methode , que ie ne
croyoispasqu'onenpuftrec.euoirde plus doux, ny de
plus innocens, en cete vie: Et defcouurant tous les iours
parfonmoyenquelques veritez, qui me fembloient af-
fez importantes, & communement ignorees des autres
hommes, la fatisfacStion que i'en auois rempliflbit telle-
ment mon efprit que tout Ie refte ne me touchoit point.
Outre que les trois maxim.es precedentes n'eftoient
fonde'es,
-ocr page 29-
De La Methode.                    29
fondees, que fur Ie defTein que i'auois de continuer k
m'inftruire: Car Dieu nous ayant donne" a chafcun quel-
quelumierepourdifcerner le vray d'auec le faux , ie
n'eufTe pas creu me deuoircontenter des opinions d'au-
truy vn feul moment, fi ie ne me fuffe propofe' d'em-
ployer mon prope iugement a Ies examiner lorfqu'il le»
roitterns: Et ie n'eufTe fcen m'exemter de fcrupule en
lesfuiuant,fiie n'eufTe efperedene perdrepourcela au-
cuneoccafiond'entrouuerde meilleures, en cas qu'ily
en euft; Et enfin ie n'eufTe fceu bonier mes defirs ny
eftre content,fiie n'eufTe fuiui vncheminparlequelpen-
fant eftre aflure de 1'acquifition de toutes les connoifTan-
ces dont ie ferois capable, ie le penfois eftre par mefme
moyendecellede tous les vrais biens qui feroient Ja-
mais en mon pouuoir : d'autantque, noftre volonte' ne
feportantafuiurenyafuiraucunechofe, que felon que
noftre entendementluy reprefente bonne ou mauuaife
il fuffit de bien iuger pour bien faire, & de iuger le mieux
qu'on puiffe, pour faire auify tout fon mieux, c'eft a dire,
pour acquerir toutes les vertus, & enfemble tous lesau-
tres biens, qu'on puiffe acquerir; & lorfqu'on eft cer-
tain que celaeft , onne fcauroit manquer d'eftre con-
tent .
Apres m'eftre ainfl afford deces maximes, &les auoir
mifes a part, auec les veritez de la foy, qui ont toufiours n
efteles premieres en ma creance, ie iugay que pour tout
le refte de mes opinions ie pouuois librement entrepren-
dredem'endefaire. Erd'autant que i'efperois en pou-
uoir mieux venir a bout en conuerfant auec les hommes,
qu'en demeurant plus long terns renfermd dans le poifle
d i                          ou-
-ocr page 30-
go                         Dxscours.
oui'au&iseu toutes cespenfees, rhyuern'eftoit pas en-
core bien acheue que ie me remis a voyafger. Et en tou-
tesles neufannees fuiuantes ie ne fi autre chofe que
rouler § a & la dans le monde, tafchant d'y eftre fpe#a-
teur plutoft qu'a&eur en toutes les Comedies qui s'y
iouent; Et faifant particulieremet reflexion enchafque
matierefurce qui la pouuoit rendre fufpedte, & nous
donneroccafiondenousmefprendre, iederacinois ce-
pendant demon efprit toutesles erreurs qui s'y eftoient
pugrifTerauparauant. Nonque i'imitafle pour cela les
Sceptiques, qui ne doutent que pour douter, & afferent
d'eftre toufiours irrefolus : Car au contraire tout mon
defleinnetendoitqu'am'aflurer, & a reietter la terre
mouuante & le fable, pour trouuer Ie roc ou l'argile. Ce
quimereuffiflbitcemefembleaflTez bien, d'autantque
tafchant a defcouurir la fauffete'ourincertitude des pro-
portions que i'examinois, non par de foibles coniedtu-
res, mais par des raifbnnemens clairs & aflurez, ie n'en
rencontrois point de ii douteufes, que ie n'entirafle tou-
liours quelque conclufion affez certainc, quand ce n'euft
efte'que cela mefme qu'elle ne contenoir rien de certain.
Et comme en abatant vn vieux logis, on en referue ordi-
nairement les demolitions, pour feruir a en baftir vn
nouueau: ainfiendetruifant toutes celles de mes opi-
nions queieiugeoiseftremalfonde'es, iefaifois aiuerfes
obferuations, Scacqueroisplufieurs experiences , qui
m'ont ferui depuis a eneftablir de plus certaiues. Et de
plus ie continuois a m'exercer en la Methode que ie
m'eftois prefcrite. caroutre que i'auois foin de condui-
re generalement toutes mes penfees felon fes reigles, ie
me
-ocr page 31-
De La Methode.                    3r
mc referuois de tems en tems quelques heures que i'em-
ployois particulieremet a la prattiquer en des difEcultez
dc Mathematique, ou mefme auffy en quelques autres
que ie pouuois rendre quafi femblablesacelles des Ma-
thematiques, enlesde'tachantdetous les prineipes des
autres fciences que ie ne trouuois pas aflez fermes. com-
me vous verre's que iay fait en plufieurs qui- font expli-
que'es en ce volume. Et ainfi fans viure d'autre fac,on en
apparence, que ceux qui n'ayant aucun employ qu'a pat
fer vne vie douce & innocente, s'eftudient a feparer les
plaifirs des vices;& qui pour iouir deleur loyfirfans s'en-
nuyer, vfent de tous les diuertiffemens qui font honne-
ftes,Ie ne Iaiflbis pas de pourfuiure en mon defTein, &
de profiter en la counoifTance de la veritd, peuteftre
plus, que fi ie n'eufTe fait que lire desliures r ou frequen-
ter des gens de lettres*
Toutefois ces neufans s'efcoulerentauant que i'eufle
encore pris aucun parti touchant les difficultes qui ont
couftume d'eftre difpute'es entre les dodtes, ny com-
mence'achercherles fondemens d'aucune Philofophie
pluscertainequelavulgaire. Et Pexemple de plufieurs
excelensefpris, quienayanteucydeuant le deflfeinme
fembloientnyauoirpasreufli, m'yfaifbit imaginer tant
de difficulte', que ie n'eufTe peuteftre pas encore fitoft
ofe l'entreprendre, fi ie n'eufTe vu que quelques vns fai-
foient defiacourrele bruit quei'en eftois venua bout. Ie
ne fcaurois pas dire fur quoy ils fondoient cete opinion.
&fi i'y aycontribudquelquechofeparmesdifcours,ce
doitauoir efte' en confefTant plus ingenue ment ce que
i!ignorois que n'ont couftume de faife ceux qui ont vn
pern ,
-ocr page 32-
32;                       Discours.
peueftudie, &peuteftreaufTyen faifant voir les raifbns
que i'auois de douter de beaucoup de chofes que les au-
treseftimentcertaines; plutoftqu'en me vantant d'au-
cune doctrine. Maisayant le cceur affez bon pour ne
vouloir point qu'on me prift pour autre que ie n'eftois,
iepenfayqu'ilfaloitqueie tafchaffe par tons moyens a
me rendre digne de la reputation qu'on me donnoit: Et
ilyaiuftement huit ansque ee deiirme fit refoudre a
m'efloigner de tous les lieux ou ie pouuois auoir descon-
noifTances, & a me retirer icy en vn pais oh la longue du-
re'e de la guerre a fait eftablir de tels ordres, que les ar-
rndes qu'on y entretient ne fcmblent feruir qu'a faire
qu'on yioui'fTe des fruits de la paixauec d'autant plus de
feurete; & ou parmi la foule d'vn grand peuple fort
acStif, & plusfoigneux de fes propresaffaires, que curi-
euxdecellesd'autruy, fans manquerd'aucune des com-
moditez qui font dans les villes les plus frequsnte'es, i'ay
pii viure aufly folitaire & retire que dans les defers les
plus efcartez.
Quatri- Ie ne fc,ay fi ie doy vous entretenir des premieres me-
eime. ditatios que i'y ay faites,car elles font fiMetaphyfiques &
' fi peu communes, qu'elles ne feront peuteflre pas au
gouftdctoutie monde; Et toutefois affin qu'on puifTe
iuger fi les fondemens que i'ay pris font aflfez fermes, ie
me trouue en quelq; fa§on contraint d'en parler. I'auois
des long temsremarqud que pour les meurs il eft befoin
quelquefois de fuiure des opinions qu'on fc,ait eftre fort
incertaines, tout demefme que fi elles eftoient indubi-
tables.ainfiqu'ilaeftc'ditcydefTus: mais pourcequ'alors
iedefirois vacquerfeulementala recherche de laveri-
te;ie
-ocr page 33-
De La Methode.                      33
td, ie peufay qu'il faloit que ie fiffe tout le contraire, &
que ie reiettaffe comme abfolument faux tout ce en,
■ quoyie pourrois imaginerle moindre dotite, affin de
voir s'ilnerefteroit point apres cela quelque chofe en
macreance qui full entierement indubitable. Ainu* a
caufe que nos fens nous trompent quelquefois, ie voulil
fuppofer qu'il n'yauoitaucune chofe qui fuft telle qu'iJs
nous la font imagiuer: Et pourcequ'il y a des hommes
qui fe mdprenent en raifonnant, mefme touchant les
plus fimples matieres de Geometric, & y font des Para-
logifmes, i ugeant que i'eftois fuiet a faillir autant qu'au-
cunautre, ie reiettay comme fauffes toutes les raifons
que i'auois'prifes auparauant pour Demonftrations : Et
enfin confiderant que toutes les mefmes penfees que
nousauonseftantefueillez , nous peuuent aufly venir
quand nous dormons fans qu'il y en ait aucune pour lors
qui foit vraye,ie me refolu de feindre que toutes les cho-
fes qui m'efloient iamais entrees en l'efprit n'eftoienc
no plus vrayes que les illufions le mes fonges- Mais auffy-
toftapresiepris garde, que pendant que ie voulois ainfi
ponfer que tout eftoit faux, il falloit necefTairement que
moy qui le penfois fuffe quelque chofe: Etremarquant
que cetevcritc^iepenfe^ouc iefuis, eftoit fi ferme & &
affure'e que toutes les plus extrauagantes fuppofitions
desSceptiquesn'efloientpascapablesdel'esbranfler, ie
iugayque ie pouuois la receuoir fans fcrupule pour le
premier principe de la Philofophie que ie cherchois.
Puisexaminant auec attention ce que i'eftois, & voy-
ant que ie pouuois feindre que ien'auois aucun cors &
qu'il n'yauoit aucun monde ny aucun lieu ou ie fuffe;
e                         mais
-ocr page 34-
34                          D i s c o u r s.
mais qtie ie Be- pouuois pas feindre pour cela que ie
n'eftois point; & qu'aucontraire de cela mefme que ie
peniois a douter de la verite'des autres chofes, il fuiuoit
tres euidenment & tres certainement que i'eftois : au
lieu que ii i'eufTe feulement ceffe de penfer, encore que
que tout le reftede ce quei'auois iamais imagine euft
efte'vray, ien'auoisaucune raifon de croire que i'eufTe
efte": Ie conml de la que i'eftois vne fubftance dont
toutel'efTenceoula nature n'eft que de penfer, & qui
pour eftre n'a befoin d'aucun lieu nyne depend d'aucu-
ne chofe materielle, En forte que ce Moy, cell a dire,
l'Ame par laquelle ie fuis ce que ie fuis, eft entierement
diftindie du cors, & mefme qu'elle eft plus atfe'e a con-
noiftre que luy, & qu'encore qu'il ne fuft point, elle ne
lairroi t pas d'eftre tout ce qu'elle eft.
Apres cela ie confideray en general ce qui eft requis a
vne proposition pour eftre vraye & certaine; car puifque
ie venois d'en trouuer vne que ie f§auois eftre telle, ie
penfay que ie deuois auffy fc, auoir en quoy confifte cete
certitude. Etayant remarque'qu'iln'y a rien du tout en
cecy,iepenfe done iefuis, qui m'aflure que ie dis la veri^
finon que ievoy tres clairement que pour penfer il faut
eftre: Ie iugay que ie pouuois prendre pour reiglc gene-
rale , que les chofes que nous conceuons fort clairement
& fort diftin&ement fonttoutesvrayes; Mais qu'il ya
feulement quelque difficulte a bien remarquer quelles
fontcellesque nous conceuons diftinclrement.
En fuite de quoy faifant reflexion fur ce que ie dou-
tois, & que par confequent mon eftre n'eftoit pas tout
parfaitj car ie voyois clairement que e'eftoit vne plus
gran-
-ocr page 35-
De La Methode.                  ly
grande perfe&ion de connoiftre que de douter : Ic
m'auifaydechercherd'oui'auois appris a penfer & quel-
que chofe de plus parfait que ie ri'eftoisj & ie connu eui-
denment que ce deuoit eftre de quelque nature qui fuft
en effed: plus parfaite. Pour ce qui eft des penfees que
i'auoisdeplufieursautres chofes horsde moy, commc
duciel,delaterre, dela lumiere, delachaleur, & de
millesautres, ie n'eftois point tant en peine de fc,auoir
d'ou elles venoient a caufe que nc remarquant rien en
elles qui me femblaft les rendre fuperieures a moy, ie
pouuois croyre que £\ elles eftoient vrayes , c'eftoient
des dependances de ma nature , entant qu'eile auoit
quelque perfection, & fi elles ne feftoient pas, queie les
tenois du neant, c'eft a dire , qu'elles eftoient en moy
pourcequei'auoisdu defaut. Mais ce ne pouuoit eftre
lemefme de 1'ide'e d'vn eftre plus parfait que Ie mien:
Car de la tenir du neant c'eftoit chofe manifeftement
impofliblej Et pourcequ'il n'y a pas moins de repugnan-
ce que le plus parfait (bit vne fuite & vne dependance du
moins parfait, qu'il yen a que de rien procede quelque
chofe, ie ne la pouuois tenir non plus de moymefme; De
fa$on qu'il reftoit qu'eile euft efte' mile en moy par vne
nature qui fuft veritablemet plus parfaite que ie n'eftois,
Scmefmequieuftenfoytoutes les perfections dont ie
pouuois auoir quelque idde, c'eft a dire, pour m'expli-
qnerenvnmot, qui fuft Dieu. A quoy i'adiouftay que
puifq; ie connoiflbis quelques perfections que ie n'auois
point, ie n'eftois pas le feul eftre qui exiftaft (i'vferay s'il
vous plaift icy librement des mots de l'Efchole) Mais
qu'il falloit de neceffite' qu'il y,en euft quelque autre plus
e 2                        par-
-ocr page 36-
"j6                               DlSCODRS.
parfait, duquelie dependiffe, & duquel i'eufTe acquis
tout ceque i'auois: Car ii i'eufTe tft.6 feul & indepen-
dant de tout autre , en forte que i'eufTe eu de moymef-
me tout ce peu que ie participois de l'eftre parfait; i'eufTe
pu auoir de moy par mefnie raifbn tout le furplus que ie
connoiffoismemanquer, & ainfi eftre moymefme infi-
ni, eternel, immuable, tout connoifTant \ tout puiffant,
&enfin auoir toutes les perfections que ie pouuois re-
marquer eftre en Dieu. Car fuiuant les raifonnemens
que ie viensvde faire, pour connoiftre la nature de Dieu
autant que la miene en eftoit capable,ie n'auois qu'a con-
Jiderer de toutes les chofes dont ie trouuois en moy
quelqj idde, fic'eftoit perfection ounon de lespoffeder,
& i'eitois aflure'' qu'aucune de celles qui marquoient
quelque imperfection n'efcoit en luy, mais que toutes
les autres y eftoient. Comme ie voyois que le doute,
l'inconftance, la triftefTe, & chofes femblables, n'ypou-
uoient eftre, vilque i'eufTe eft eJmoymefme bien ayfe d'exi
eftre exempt. Puis outre cela i'auois des ide'es de plu-
fieurs chofesfenfibles & corporelles: car quoy que ie
fuppofafle que ie refuois, & que tout ce que ie voyois ou
• imaginois eftoit faux, iene pouuois nier toutefois que
les idees n'en fufTent veritablement en ma penfee: Mais
pourceque i'auois defia connu en moy tres clairement
que la nature intelligente eft diftindte de la corporelle,
confiderantquetoutecompofition tefmoignede lade-
pendance, Sequela dependance eft manifeftcment vn
defaut, ie iugeois de la, que ce ne pbuuoit eftre vne per-
fection en Dieu d eftre compofe'deces deux natures, &
que par consequent ilneFeftoitpas; Mais qncs'ily auoit
-ocr page 37-
De La Methode.                      37
quelquescorsdans le monde, oubien quelqucs intelli-
gences ou autres natures qui ne fufTent point toutes par-
faites, leur eftredeuoitdependrede fa puiflance en tel-
le forte, quelles ne pouuoient fubfifter fans luy vn feul
moment.
              »
le voulu chercher aprel cela d'autres veritez , &
m'eftant propofe l'obiet des Geometres, que ie conce-
uois comme vn cors continu, ou vn efpace indefinimenc
eftendu en logueur largeur & hauteur ou profondeur,di-
uifible en diuerfes parties, qui pouuoient auoir diuerfes
figures, & grandeurs, & eftre meues ou tranfpofe'es en
toutes fortes, carles Geometres fuppofent tout cela en
leur obiet, ie parcouru quelques vnes de Ieurs plus fim-<
pies demonftrationsj Erayantpris garde que cetegran-
de certitude, que tourle monde leur attribue, n'eftfon-
dee que fur ce qu'on les concoit euidenment, fuiuant la
reiglequeiaytantoftditej Iepris garde aufly qu'il n'y
auoitriendutouten elles qui m'afTuraft dc Texiftence
de leur obiet: Car parexemple ie voyois bien, que fup-:
pofant vn triangle il falloit que festrois angles fufTent
efgaux a deux droits,mais ie ne voyois rien pour cela qui ■
m'afTuraft qu'il y euft au monde aucun triangle : Au
lieu que reuenant a examiner Tidee que i'auois d'vn
Eftre parfait, ie trouuois que i'exiftence y eftoit com-
prise , en mefme facon qu'il eft compris en celle d'vn
triangle que ces trois angles font efgaux a deux droits*
ou en celle d'vne Sphere que toutcs fes parties font efga-
lementdifcantesdefon centre , ou mefme encore plus,
euidenment, Etqueparconfequentileft pourlemoins
aufTy certain, que Dieu, qui eft cet Eftre parfait, eft ou-
e 3                   exifte,.
__.
-ocr page 38-
38                          D i scours.
exiftc, qu'aucune demonstration dc Geometric lc fc.au-
roit eftre.
Mais ce qui fait qu'il y en a plufieurs qui fe perfuadent
qu'ilyadeladifficulte'aleconnoiftra, &• mefnieauffya
connoiftrecequec'cft queleur ame, e'eft qu'ils n'eflc-
uent iamais leur efprit audela des chofes fenfibles , &
qu'ils font tellement accouftumez a ne rien coufiderer
qu'en l'irnaginanr, qui eft vnc fa§on de penfer particulie*
repourleschofes materielles, que tout cc qui u'eft pas
imaginable leur femblen'eftre pas intelligible- Cequi eft
affez manifefte de ce que mefme lesJPhilofophes tiencnt
pour maxime dans Ies Efcholes^qu'il n'y a rien dans l'en-
tendement qui n'aitpremierementefte" dans Ie fens, ou
toutefoisil eft certain que les Ide'es de Dieu & de I'amc
n'ont iamais cfte", Et il me fcmble que ceux qui veulent
vfer dc leur imagination pour les comprendre , font tout
de mefme que (i pour ouir Ies Ions, ou fentirles odeurs,
ilsfevouloientferuirdeleursyeux : Sinon qu'il y a enco-
re cete difference, que lefens de la veue ne nous affure
pasmoinsdelaveritedefesobiets , que font ceux de
l'odoratoudel'ouyejau lieu que ny noftre imagination
ny nos fens ne nous fc,auroient iamais aflurer d'aucune
chofe, fi noftre entendement n'y interuient,
Enfin s'il y a encore des hommes, qui ne foient pas af-
fezperfuadezdel'exiftencedeDieu5c dcleur ame, par
lesraifonsquei'ayapporte'es,Ieveux bien qu'ils fgachent
que toutes lesautres chofes,dontils fe penfentf euteftre
plusaffurcz, comme d'auoir vn cors , & qu'il ya des
aftres, &vne terre, & chofes femblables, font moins cer-
taines: Car encore qu'on ait vne affurance morale dc
ces
-ocr page 39-
Db La Methods.                    39
ces chofes, qui eft telle, qu'il femble qu'a moins que
d'eftreextrauagant on n'en peut douter $ Tontefois auf-
fyamoinsqued'eftrede'raifonnable, lorfqu'il eft quef-
tion d'vtie certitude metaphyfique, on ne peut nier,que
cenefoitafle'sdefuiet pour n'en eftre pas entierement
a(Ture',que d'auoir pris garde qu'on peut en rnefnae fa*
c,on, s'imaginer eftant endormi qu'on a vn autre cors,&
quon voit d'autres aftres, &vne autre terre, fans qu'il
enfoitrien. Car d'ou f§ait on que les penfees qui vie-
nentenfongefontplutoftfaufles que les autres, vuquc
fouuent elles ne font pas moins vines & exprefles ? Et que
les meilleurs Efprits y eftudicnt tant qu'il ieur plaira, ie
ne croy pas quits puifTent donncr aucune raifon qui fbit
fuffifantepourofter ce doute; s'ils ne prefuppofent 1'ex-
iftence de Dieu. Car premierement celanrefme que i'ay
tantoftpri- pourvnereigleJafc,auoif queles chofes que
nousconceuous tres clairement & tres diftinclrement
font toutes vrayes, n'eft aflure cju'a caufe que Dieu eft
ou exifte, & qu"il eft vn eftre parfait, & que tout ce qui
eft en nous vient de luy: Dou il fuit que nos idees ou no-
tions, eftant des chofes reelles, & qui vienet de Dieu,en
tout ce en quoy elles font claires & diftinc-tes, ne peu-
uent en cela eftre qae vrayes. En forte que ft nous en
auons affez fouuent qui contienent de la fauflete/, ce ne
peut eftre que de celles, qui ont quelque chofe deconfus
&obfcur, a caufe qu'en cela elles participent duneanr^
c'eftadirejqu'ellesne font en nous ainfi confufes qu'a
caufe que nous ne fommes pas tousparfaits. Et il eft eui-
dent qu'il n'y a pas moins de repugnance que la fauflete'
ou rimperfedtion procede de Dieu entant quetelle,qu'il
yen
-ocr page 40-
                        D]is co u rs.
yenaquelaverite'oula perfe&ion procede du neanr.
Maisfi nousne fcauions point que tout ce qui eft en
nous de reel, 8c de vray, vient d'vn eftre parfait & infini,
pour clair.es & diftin&es que fuffent nos idees,nous n'au-
rionsaucuneraifon qui nous afluraft, qu'elleseuftent la
perfe&ion d'eftre vrayes.
Or aprds que la connoifTance de Dieu 8c de l'ame
nous a ainfi rendu certains decete regie, il eft bien ayfe
a connoiftre que les refueries que nous imaginons eftant
endormis, nedoiuentaucunementnousfairedouterde
la verite'des penfees que nous auons eftant efueillez. Car
S'il arriuoitmefme endormantqu'on euft quelque idee
fort diftin&e , corame par exemple qu'vn Gepmetre
inuentaft quelque nouuelle demonftration, fon ibmmeil
lie 1'empefcheroit pas d'eftre vraye: Et pour l'erreur la
plus ordinaire de nos fonges, qui confifte en ce qu'ils
nous reprefentent diuers obiets en mefme facon que
font nos fens exterieurs3mimporte pas qu'elle nous don«
ne occafion de nous deffier de la verite'dc telles idees, a
caufe qu'elles peuuent aufTy nous tromper affez fouuent
fans que nous dormions: comme lorfque ceux qui ont la
iauniffe voyenttoutdecouleuriaunej ou que les aftres
ou autres cors fort efloignez nous paroiffent beaucoup
pluspetitsqu'ilsnefont. Carenfin, foit que nous veil-
lions, foit que nous dormions, nous ne nous deuonsia-
mais laiffer perfuader qu'a l'euidence de noftre raifon.
Etileftaremarquerqueiedis, de noftre raifbn, 8c non
point, de noftre imagination ny de nos fens. Comme en-
core que nous voyons le foleil tres clairement, nous ns
<kuons pas iuger pour cela qu'il ne foit que de la gran-
deur
-ocr page 41-
De La Methode.                   41
deur que nous le voyons; Et nous pouuons bien imagi-
ner diflin&emet vne tefte de lion ente'e fur le cors d'vne
cheure, fans qu'il faille conclure pour ,oela qu'il y aitau
monde vneChimere: Car la raifon ne nous di&e point
que ce que nous voyonsou imaginons ainfi foit verita-
ble. Mais elle nous di&e bien que toutes nos idees ou
notions doiuent auoir quelque fonderflent de verite"}car
il ne feroit pas pofTible queDieu quijefr. tour parfait &
tout veritable leseuft mifes en nous fans cela; Etpour-
cequenosraifonnemensnefont iamais li euidens ny ii
entiers pendant lelbmmeilque pendant la veille, bien-
que quelquefois nos imaginations foient alors autant ou
plus viues & exprefles, elle nous dicte fluffy que nos pen-
fees ne pouuant eftre toutes vrayes, a caufe que nous ne
fommespastous^parfaitSjCequ'elles ont de verite'doit
inralliblement fc rencontrer en celles que nous auons
eftant efueillez, plutoft qu'en nos fonges.
Ieferoisbienayfedepourfuiure, & de faire voir icy Cinqui
toutelachaifnedes autres veritez que iay deduicesde efme
ces premieres: Mais a caufe que pour cet effect ,il feroit Partie*
maintenant befoin que ie parlaffe de plufieurs questions,
qui font en controuerfe entreles docl:es,aueclefqueIsie
ne defire point me brouiller, ie croy qu'il fera mieux que
ie m en abftiene ; & que ie die feulementen general
quelles elles font, affin de laiffer iiigerauxplusfages, s'il
feroit vtile que le public en fuft plus particulierement
intorme'. Ie fuis toufiours demeure' ferme en la resolu-
tion que i'auoisprife, denefuppoferaucun autre princi-
pe, queceluy dont ie vien de me feruir pour demon-
ftrerl'exiftencedeDieu&defame, & de nereceuoir
f                     aucune
-ocr page 42-
4.1                    . Discouis
aucunechofe pour vraye, qui nemcfemblafl: plus clairc
&plus certaine que n'auoient fait auparauant les de-
monftrations desGeometres.- Et neantmoins i'ofe dire,
que nonfeulement i'ay trouue moyen de me fatisfaire
en peu de terns, touchant toutcs les principales dinicul-
tez dont on a couftume de traiter en la Philo(bphie;
Mais auflTy que i'af remarque'certaines loix, queDieua
tellementeftabliesen la nature, & dont il a irnprimede
telles notions en nos ames, qu'apres y auoir fait aflez de
reflexion, nous ne fgaurionS douter qu'ellcs ne foient
exa&ement obferuces, en tout ce qui eft ou qui fe fait
dansle rnonde. Puis en confiderant lafuite de ces loix,
il me femble auoir defcouuert pluiieurs veritez plus vti-
les & plus importantes, que tout ceque i'auoisappris au-
parauant, ou mefrae efpere'd'apprendre.
Maispourcequeiaytafchc'd'en expliquer les princi-
pales dans vn traite^, quequelques confiderations m'em-
pefcheatdepublier,ienelesfcaurois mieux faire con-
noiftre , qu'en difant icy fommairement ce qu'il con-
tient. lay endefleind'ycomprendre tout ce que ie pen-
fois fgauoir auant que de refcrire,touchant la nature des
chofesmaterielles:Mais toutde mefmeque lespeintres,
ne pouuant efgalement bien reprefenter dans vn tableau
plat toutes les diuerfes faces d'vn cors fblide, en choifif-
fent vne des principales qu'ils mettentfeule vers le iour,
& ombrageant les autres, ne les font paroiftre, qu'antant
qu'on les peut voir en la regardant: Ainu" craignantde ne
pouuoir mettre en mon difcours tout ceque i'auois en la
penfec , i'entrepris feulement d'y expojfer bien ample-
ment ce que ie conceuois de la lumiere -t Puis a foil occa-
sion
-ocr page 43-
De La Metbode.                    4j
fton d'y adioufter quelque chofe du foleil St des Eftoiles
fixes, a caufe qu'elleen precede prefq; toute, des cieux,
a caufe qu'ils la tranfmettent, des Planetes,des Cometes,
& de la terre, a caufe qu'elles la font reflefchir,& en par*
ticulier de tousles cors quifont fur la terre,a caufe qu'ils
font ou colorez, ou tranfparens, ou lumineux, & enfin
de I'liomrae, a caufe qu'il en eft le foe&ateur. Mefme
pourombrager vnpeutoutesces chofes, &pouuoirdire
plus librementce que i'eniugeois, fans eftre oblige' dc
fuiurenyderefuterles opinions qui font receues entre
lesdo&es, ieine refolu de laiffer tout ee monde icy a
leurs difputes, Srdeparler feutement de ce qui arriue-
roit dans vn nouueau, fi Diea creoit maintenant quelque
part dans les efpaces imaginaires affez de matiere pour
le compofer, & qu'il agitaft diuerfement &fans ordre les
diuerfes parties deeete matiere, en forte qu'il en com-
pofaft vn Chaos auffy confus que les Poetes en puifTent
feindre, Et que parapresil ne fift autre chofe que pre-
fter fon concours ordinaire a la Nature, &la laiffer agir
fuiuanties loix qu'il a eftablies. Ainfi premierement ie
defcriuis cete matiere, & tafchay de la reprefenter telle
qu'ilnyarieuaumonde, cemefemble, deplusclairny
plus intelligible, except^ cequi a tantoft efte' dit de Dieu
&de Tame: Car mefme ie fuppofay exprelfement, qu'il
n'yauoit en elleaucunedeces formes ou qualitez done
ondifputedans lesEfcholes, ny generalement aucune
chofe , dont la connoiffance ne fuftfinaturelleanos
ames, qu'on ne puft pas mefme feindre de 1'ignorer. De
plus iefis voir qnelleseftoient les loix de la Nature; Et
fans appuier mes raifons fur aucun autre principe que fur
f 2                         ks
*■
-ocr page 44-
44                        Discour s
les perfections infini&s de Dieu, ie tafchay a demonftrer
toutes cellesdont on euft pu auoir quelque doute, Er a
faire voir qu'elles font telles, qu'encore que Dieu auroit
credplufieursmondes, iln'y enf^auroit auoir aucun ou
elles, manquaflent d'eftre obferue'es. Apres ccla ie mon-
ftray comment la plus grand part de la matiere de ce
Ghaos deuoit,en fuite de ces loix, fe difpofer & s'arren-
gerd'vne certainefagonquilarendoit femblable a nos
cieux.-Comment cependant quelques vnes de fes parties
deuoient compofer vne Terre , & quelques vnes des
Planetes, & des Cometes, & quelques autres vnSoIeil,
& des Eftoiles fixes: Et icy m'eftendant fur le fuiet dela
lumiere, i'expliquaybienau long quelle eftoit celle qui
fc deuoit trouuer dans Ie Soleil & les Eftoiles, Et com-
ment de la elle trauerfoit en vn inftant les immenfes
efpacesdescieux,Et comment elte fe reflefchiflbitdes
Planetes & des Cometes vers la Terre. l'y adiouftay
aufly plufieurs chofes touchant la fubftance, la fituation,
lesmouuemens , & toutes les diuerfesqualitezdece*
cieux&decesaftresj Enfortequeiepenfoisen dire af-
fez pourfaire connoiftre , qu'il ne fe remarque rien en
ceux de ce monde , qui nc deuft, ou du moins qui ne
puft, paroiftre tout femblable en ceux du monde queie
defcriuois. Delaievinsaparler particulierement de la
Terre: Comment, encore que i'eufTe expreffement fup-
pofe, que Dieu n'auoit mis aucune pefanteur en la ma-
tiere dont elle eftoit compofe'e, toutes fes parties ne laif-
fbientpasdetendreexaiftemeutversion centre: Com-
ment y ayant de l'eau & de l'air fur fa fuperficie,la difpo-
fition des cicux& des aftres, priucipalement delaLune,
y de-
ft
-ocr page 45-
De La Methode.                   4?
ydeuoitcaufervnflus Sc reflus, qui fuft femblable en
toutes fes circonftances a celuy qui fe remarque dans
nos mers; Et outre cela vn certain cours tant de l'eau
que de l'air, du leuant vers Ie couchant, tel qu'011 le re-
marque aufly entre lesTfopiques: Comment les mon-
taignes, les mers, les Fontaines, Sdesriuieres pouuoient
naturellement s'y former; Et les metaux y venir dans les
mines;Etlesplantesy croiftre dans les campaignes; Et
generalement tous les cors qu'on nomme mellez ou
compofez s'y engendrer: Et entre autres chofes a caufe
qu'apre's les aftrcs ie ne counois rien au monde que Ie fen
qui produife de la lumiere ie m'eftudiay a faire entendre
bien clairement tout ce qui appartient a fa nature, com-
ment ilfe fait, comment il fe nourrit , comment iln'a
quelquefois quedelachaleurfans lumiere, &quelque-
fois que de la lumiere fans chaleur, comment ilpeut in-
troduire diuerfes couleurs endiuerscors, & diuerfes au-
tres qualitez, comment il en fond quelques vns, &en
durciftd'autres, comment il les peutconfumer prefque
tous,ou conuertiren cendres & en fumee »Et enfin
comment de ces cendres par la feule violence de fort
action il forme du verre: Car cete tranfmntation de cen-
dres en verre me femblant eftre aufly admirable qu'au-
cune autre qui fe face en la nature , ie pris particuliere-'
ment plaifir a la defcrire.
Toutefoisienevouloispasinferer de toutes ceschor
fes, que ce monde ait eft e'eree'en lafa§on que ie propo-
fois: Car il eft bien plus vrayfemblable que d6s le com-
mencement Dieu l'a rendu tel qu'il deuoit eftre. Mais il
eil certain, Scc'eft vne opinion communement receue
f i                * entre
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4-6                          :D i s c o u r s.
entre les Theologiens, que l'aclion par laquelle mainte-
nant il le conferue, eft toute la mefme que celle par la-
quelle iiracree":De fa$on qu'encore qu'il ne luyauroit
point donneau commencement d'autre forme que celle
du Chaos, pourvft qu'ayant eftabli les loix de la Nature
illuy pretaft fon concours pour agir aiufi qu'eile a de
couftume, onpeutcroyre, fans faire tort au mira le de
la creation, que par cckfeul toutes les chafes qi ti font pa-
rement materiellesauroientpuauec le tems s'y r^ndre
teiles que nous les voyons a prefent: Et leur nature eft
bien plusayfe'e a conceuoirlorfqu'on les voit naiftre peu
apeuenceteforte, que lorfqu'on ne lesconfidere que
toutes faites.
De la defcription des cors inanimez & des plantes, ie
paflayacelledes animaux , & particulierement a celle
deshommes. Mais pourceque ie n'enauois pas encore
affezdeconnouTance pour en parlerdu mefme ftyle que
durefte.c'eftadire, en demonftrant les effets par les
caufes, & faifant voir de quelles femences, & en quelle
fa$on la Nature les doit produire, Ie me contentay de
fuppofer, que Dieu formaft le cors d'vn homme, entie-
rementlemblableal'vndesnoftres, tauten la figure ex-
terieure de fes membrcs, qu'en la conformation inte-
rieure de fes organes, fans le compofcr d'autre matiere
quede celle que i'auoisdefcrite, & fans mettre ea iuy
au commencement aucune ame raifonnable, ny aucune
autre chofe pour yferuir d'ame vegetante ou fenfitiue,
Sinon qu'il excitaft en fon coeurvn de ces feuxfanslu-
miere que i'auois defia expliquez, &r que ie neconce-
uois point d'autre nature que celuy quiechaufe le foin,
lorf.
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De La U ethode.                     47
lorfqu'on l'a renfermc auaflt qu'il fuft fee, ou qui fait bo-
uillirles vins noaueauxj Iorfqu'on les laiflecuuer fur la
ripe. Cat examinant les fon<Stions, qui pouuoicnt en
fuitede celaeftreencecors , i'y trouuois exaclrement
toutes celles, qui peuuenteftre en nous fans que nous y
penfions, ny par consequent que noftre ame, e'eft k dire,
eetepartiedifHn&educors dont il a efte dit cy deflus
que la nature n'eft que de penfer,y contribue.Et qui font
toutes les raefmes en quoy on peut dire que les animaux
fans raifon nous refemblent: Sans que i'y en puCe pour
cela trouuer aucune, de celles qui, eftantdependantes
de la penfde, font les feules qui nous apartienent entant
qu'hommes ; Au lieu que ie les y trouuois toutes par
apre's, ayartt fuppofe que Dieu creaft vne ame raifonna-
blc, & qu'il la ioignift a ce cors en certaine fa£on que ie
de'eriuois.
Mais affin qu'on puiiTe voir en quelle forte i'y traitois
cetematiere, icveuxmettre icy 1'expiication du mou-
uementdu coeur & des arteres, qui eftant le premier &
leplus general^u'onobferue dans les animaux, on iuge-
rafacilementdeluycequondoitpenfer de tous les au-
tres. Etaffin qu'on ait moins de difficulte' a entendre ce-
quei'endiray, ie voudrois que ceux qui ne font point
verfez en l'Anatomie prifTent la peine, auant quede lire
cecy , de faire couper deuant eux le coeur de ^aelquc
grand animal qui ait des poumons, car il eft en tous aflez.
femblableaceluydeIhomme; Et qu'ils fefiflcntmon-
trer les deux cbambres ou concauitez qui y font , Pre-
mierement celle qui eft dans fon coftd' droit, a laquelle
refpondent deux tuyaux fort larges -, A f§auoir la vene
caue.
-ocr page 48-
4.8                          Disc our fc
caue, qui eft Ie principal receptacle du fang, & comme
letroncdel'arbredonttouteslesautres venes da cors
fontles branches,- Et la vene arterieufe, qui a cfte' ainfi
malnommee pourceque c'eften effecl: vne artere, la-
quelleprenautfonorigineducoeur, fediuife, aprds en
eftre fortie, en plulieurs branches qui fe vont refpandre
partout dans les poumons. Puis celle qui eft dans fbn
coftd gauche , a laquelle refpondenten mefmefac,on
deuxtuyaux, qui font autant ou plus larges que les pre-
cedensj Afcauoirrartereveneufe, qui a eftd aufly mal
nornmee acaufe qu'ellen'eft autre chofe qn'vnevene,
laquelle vient des poumons , ou elle dft diuifee en plu-
fieurs branches, entrelacees auec celles de la vene arte-
rieufe , & celles de ce conduit qu'on nomine le fifflet
parouentrel'airde larefpiration; Et la grande artere,
qui fortant du coeur enuoye Ces branches par tout le cors.
Ie voudrois aufly qu'on leur montraft foigneulement les
onzcpetitespeaux, qui comme autantde petites portes
ouurent & ferment les quatre ouuertures qui font en
.ces deux concauitez: Afgauoir, troisal'entre'ede la ve-
ne caue, ou ellcs font tellement difpofe'es , qu'elles ne
peuuent aucunement empefcher que le fang qu'elle cort-
tient ne coule dans le concauite'droite du coeur, & tou-
tefoisempefchent-exactement qn'il n'en puiiTe fbrtir;
Troisarentreede la vene arterieufe, qui eftant difpo-
fe'es toutaucontraire, permetentbienau fang , qui eft
dansceteconcauite', de paffer dans les poumons , mais
nonpasaceluyquiejt, dans les poumons d'y retourner;
Et ainfi deux autres a i'entrde de larterc veneufe , qui
JaifTent couier Ie fang des poumons vers la concauite'
gauche
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De L a Met mode.                   49
gauche du coeur, mais s'oppofent a Ton retour^ Et trois a
i'entreede la grande artere, qui luy perractent de fortir
du coeur, mais l'empefchent d'y retourner. Etiln'eft
point befoitidechcrcher d'autre raifon du nombre de
cei? peaux, finon que l'ouuerture de I'artere veneufe,
eftant en ouale a caufe du lieu ou elle fe rencontre, peut
eftre commodementfermeeauec deux, aulieu que les
autres, eftant rondes, le peuuent mieux eftre auec trois.
Deplus ievoudroisqu'on leur fift confiderer , que la
grande artere & la vene arterieufe font d'vne compofi-
tion bcaucoup plus dure & plus ferme, que ne font I'ar-
tere veneufe & la vene caue; Et que ces deux dernieres
s'eflargiffent auant que d'entrer dans le coeur , & y font
ccmmedeux bourfes, nommees les oreilles du coeur, qui
font compofees d'vne chair femblable a la fiene;Etqu'il
yatoufiours plus de chaleur dans le coeur, qu'en aucun
autre endroit du cors; Et enfin que cete chaleur eft ca-
pable de faire, que s'il entre quelque goutte de fang en
fes concauitez, elle s'enfle promtcment & fe dilate, ainfi.
que font generalement toutes les liqueurs, lorfqu'on les
laiffetomber goutte a goutte en quelque vaiflfcau qui eft
fort chaud.
Carapre'scelaie n'ay befoin de dire autre chofe pour
expliquer le mouuement du coeur, finon que lorfque (es
concauitez ne font pas pleines de fang, il y en coule ne-
ceflairement de la vene caue dans la droite, & de I'artere
veneufe dans la gauche: D'autantque ces deux vaifteaux
en font toufiours pleins, & que leurs ouuertures, qui rc-
gardent vers le coeur, ne peuuent alors eftre bouchees.
Majs que fitoft qu'il eft entre ainfi deux gouttes de fang,
g                        vne
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JO                               D I S C O U R S.
vnc cnchacuncdefesconcauitez, Cesgouttes, qui ec
peuuent eftre que fort grofles, a caufe que les ouuertures
par ou elles entrent font fort larges, Seles vaifleaux d'oii
elles vienentfortpleins do fang, fe rarefient & fe dila-
tent,a caufe dc la chaleur qu'ellesytrouuent, Au moyen
de quoy, faifant enfler tout le cocur, elles pouflent & fer-
ment les cinq peticesportes , qui font aux entrees des-
deux vaifleaux d'oii elles vienent, empefchant ainfi qu'il
nedefcended'auantagedefaugdanslecoeur ; Etcon-
tinuant a ferarefierde plus en plus , elles pouflent 8c
ouurent les fix autres petites portes, qui font aux entrdes
des deux autres vaifleaux par ou elles fortent, faifant en-
fler par ce moyen toutes les branches de la vene arterieu-
fe, &delagrandcartere, quafi aumefme inftant quele
coeur, Lequel incontinent apres fe defenfle , comme
font au fly ces arteres, a caufe que le fang qui y eft entre'
s'yrefroidift,&leurs fix petites portes fe referment, &
les cinq de la vene caue & de l'artere veneufe fe rouuret,
& donnent paflage a deux autres gouttes de fang , qui
font derechef enfler le coeur & les arteres, tout demef-*
me que les prccedentes. Et pourceque le fang, qui en-
tre ainfi dans le coeur, pafle par ces deuxbourfes qu'on
nomme fesoreilles, delavient queleurmouuemcnt eft
contraireaufien, & qu'ellesfe defenflentlorfqu'ilsenfic
Aurefteaffin que ceux qui ne connoiflent pas-la force
des demonftrations Mathematiques , & ne font pas ac-
coutumez adiftinguer les vfayes raifons des vrayfembla<-
bles, ne fe hafardent pas denier cecyfansrexaminer, le
lesveuxauertirquecemouuementque ie vien d'explu
quer/uit aufly neccflairement de la feule difpofition des
orga*
-ocr page 51-
De La Methode.'                   ft
organcs qu'on pent voir al'oeil dans Ie coeur, & de la
chaleur qu'on y peut fentir aucc les doigts, &de la natu-
re du fang qu'on pent connoiftre par experience , Que
fait celuy d'vn horologe , de la force , de la fitua-
tion, & de la figure defes contrepois 8c de fes roues.
Mais fi In demande comment le fang des venes ne
s'efpuife point, en coulant ainfi continuellement dans 1c
coeur, & comment les arteres n'en font point trop rem-
plies,puifque rout celuy qui pafTe par le coeur s'y va ren-
dre, Ie n'ay pas befoin d'y refpondre autre chofe, que ce
Herunh
moat
qui adefiaefte'efcritpar vn medecin d'Angleterre an-cordis.
quelilfautdonnerlalouangcd'auoir rompu la glace en
ce'tendroit, & d'eftrele premier qui a enfeigne,qu'ily a
plufieurs petits pafTages aux extremitez des arteres, par
ou Ie fang qu'elles recoiuent du coeur entre dans les pe-
tites branches des venes, d'ou il fe va rendre derechef
vers le coeur, En forte que fon cours n'eft autre chote
qu'vne circulation perpetuellc. Ce qu'il prouue fort
bien, par l'experience ordinaire des Chirurgiens , qui
ayant lie'le bras mediocrement fort, audeflusdel'en-
droit ou ils ouurent la vene, font que le fang en fort plus
abondammenti ques'ils ne 1'auoient point lid: Et llarri-
ueroittoutlecontraire, s'ilsleboientau deffous entre la
main Sd'ouuerturejoubien qu'il s Ie liaflenttresfortau
defTus. Car il eft manifefte que le lien mediocrement
ferre, pouuantempefcherquele fang qui eft defia dans
le bras ne retourne vers le coeur par les venes, n'empe-
fche pas pour la qu'il n'y en viene touiours de nouueai*
par les arteres: A caufe qu'elles font fitue'es au deflbus
des venes ; Et queleurs peaux eftant plus dures font,
g 2                    moins
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fZ                               D IS COBRSi
xnoiiis ayfees a prefler• Et auffy que le fang qui vient du
coeurtend auec plus de force a pafFer paretics vers la
main, qu'ilne fait a retourner delayers le coeur par les
venes;Et puilque ce fang fore du bras par rouuerture qui
eftenl'vnedes venes , il doit necefFairement y auoir
quelques paffages au defTous du lien, e'eft a dire, vers les
extremitezdu bras, par ou il y puifTe venir des arteres. II
prouueaufTy fortbiencequ'ilditducours du fang, par
certaines petites peaux , quifonttellementdifpofeesen
diuers lieux le long des venes, qu'elles ne luy perraetent
point d'ypafler du milieu du cors vers les extremitez,
mais feulement de retourner des extremitez vers le
coeur- Etde plus parl'experieneeqni monftre,quetout
eeluyquieft dans le cors en peut fortirenfort peu de
terns par vnefeulearterelorfqu'elle eft coupde, encore
mefme qu'elle fuft eftroitement liee fort proche du
coeur, & coupde entrc luy &le lie, En forte qu'on n'euft
aucunfuietd'imaginer que le fang qui en fortiroit vint
d'ailleurs.
# Mais il y a plufieurs autres chofes qui tefmoignent que
lavrayecaufe dece mouuement du fang eft celle que
iay dite. Comme premierement la«difference, qu'on re-
marque entreceluy qui fort des venes & celuy qui fort
des arteres, ne peut proceder que de ce qu'eftant rarefie",
& comme diftile', en paffant par le coeur, il eft plus fub-
til & plus vif & plus chaud incontinent apres en eftre
forti, e'eft a dire, eftant dans les arteres, qu'il n'eft vn
peu deuant que d'y entrer, e'eft a dire,eft^nt dans les ve-
nes: Et fi on y prend garde, on trouuera que cete diffe- .
rence ne paroift bien que vers le coeur, & non point taut
aux
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De La Methode.                     55
aux lieux qui en font Ies plus eiloignez. Puis la durete
despeaux , dont la venearterieufe& la grande artere
font composes, monftrc afTez, que Ie fang bat contre
ellesauec plus deforce que centre Ies venes. Et pour-
quoy la concauite*gauchedu coeur& la grande artere,
feroient elles plus amples &plus larges, que la concaui-
te droite 5c la vene arterieufe ? Si ce n'eftoit que le fang
del artere ueneufe, n'ayant efte'que dans Ies poumons
depui's qu'fl a paflVpar le coeur, eft plus fubtil, & fe rare-
fie plus fort & plus ayfement, que celuy qui vient irnme-
diatementdelavenecaue. Et qu'eftce que Ies mede-
cins peuuent deuiner en taftant Ie pouls, s'ils ne fgauent,.
que felon quele Jang change denature, ilpent eftrc ra-
rer^ par la chaleurdu coeur plus ou mains fort, & plus
ou moins vifte qu'auparauant. Et 11 on examine com-
ment cete chaleur fe communique aux autres raera-
bres , ne faut il pas auouer quec'eftparlemoyendu
fang, qui paflant par Ie coeur s'y refchauffe,& fe refpand
de la partout Ie cors: D'ou vient que fi on ofte Ie fang de
quelque partie, on en ofte par mefme moyen la chaleur;
Et encore que le coeur full aufly ardent qu'vn fer em-
brafe', il ne fuftTroit pas pour refchauffer Ies pieds & Ies
mains tantqu'il fait, s'iln'y enuoyoit continue'IIement
denouueaufang. Puisaufly on connoift de la, que Ie
vray vfage de la refpiratiou , eft d'npporter aflez d'air
frais dans Iepoumon,pourfaire que le fang, qui y vient
de la concauite droite du coeur, ou il a efhf rarefie' 8c
commechangeen vapeurs,s'yefpailJifte, Stconuertiffe
enfangderechef, auant que de retomber dans lagau-
chej fans quoy il ne pourroit eftre propre a feruir de nou-
g 3                    riture
-ocr page 54-
54                        Dj scours.
riture au feu qui y eft. Ce qui fe confirme paree qu'on
void que les animaux qui n'ont point de poumons, n'ont
auffy qu vne feule concauite'dans le coeurj Et que les
enfans, qui n'en peuuent vfer pendant qu'ils font renfcr-
mezau ventredeleursmeres, ontvneouuerturepar ou.
ilcouledufangdelavenecaue en la concauite gauche
du coeur, Et vn conduit par oii il en vient de la vene ar-
tcrieufeenlagrandeartere, fans paffer parlepoumon.
Puis la co&ion comment fe feroit die en l'eftomac ? fi le
coeur n'y enuoyoit de la chaleur par les arteres, & auec
cela quelques vnes des plus coulantes parties du fang qui
aydeutadiffoudreles viandes qu'on y a mifes.Et Taction
qui conuertift le fuc de ces viandes en fang, n'eft elle pas
ayfce a connoiftre, fi on confidere qu'il fe diftile, en
paflant & repaflant par le coeur., peuteftre plus de cent
ou deux centfois en chafque iour. Et qu'at on befbin
d'autrechofepourexpliquerla nutrition, & la produ-
ction des diuerfeshumeurs qui font dans le cors, llnon
de dire que la force, dont le fang en fe rarefiant paffe du
coeur vers lesextremitez des arteres, fait que quelques
vnes de fes parties s'areftent entre celles desmembres
ou elles fe trouuent, & y prenent la place de quelques
autresqu'elles en chaffent;Et que felon la fituation, ou
la figure, ou la petiteffe des pores qu'elles renconrrent,
les vnes fevont rendre en certains licux plutoft que les
autres^ En mefme facon que chafcunpeutauoirvudi-
uerscnbles>quieftantdiuerfementpercez feruent afe-
parer diuers grains les vns des autres. Et enfin ce qu'il y
a de plus remarquable en tout cecy, e'eft la generation
,des efprits animaux, qui font commc vn vent tresfubtil,
oa
-ocr page 55-
De La MethodEi                    jj
ouplutoftcommevne flame tres pure & tres viue, qui
montane continuellement en grande abondance du
eoeurdanslecerue*au, fe va rendre de la par les nerfs
danslesmufcles , & donne le mouuement a tous les
membres: Sans qu'ilfaille imaginer d'autre caufe , qui
face que les parties du fang, qui eftant les plusagite'es &
les plus penetrantes font les plus propres acompoferces
efprits, fe vont rendre plutoft vers le cerueau que vers
ailleurs; Sinon que les arteres, qui les y portent, font cel-
les qui vienentducoeurle plus en ligne droite de tou-
tesjEt que felon les regies des Mechaniques; qui font
les mefmes que celles de la nature,lorfque plufieurs cho-
festendentenfembleafemouuoirvers vn mefmecofte*
ouiln'y a pas afFez> de place pour toutes, ainfi que les
parties du fang qui fortent de la concauite'gauche da
coeur tendent vers le cerueau, les plus foibles &moins
agite'es en doiuent eftre detourne'es par les plus fortes^
qui par ce moyen s'y vont rendre feu-Ies.
I'auois explique'aflez particulierement toutes ces
ehofesdans letraite'que i'auois eu cy deuant deflein de
publier. Et en fuite i'y auois monrtrd, quelle doic eftre
la fabrique des nerfs & des mufcles du cors humain,pour
faire queles efprits animaux j eftant dedans^ ayent la for-
ce de mouuoir fes membres: Ainfi qu'on voit que les te-
ftes,vnpeuaprdseftrecoupees, feremuent encore, &
mordent la terre, nonobflant qu'elles ne foient plus ani-
mdesj Quels changemens fe doiuent faire dans le cer-
ueau pour caufer la veille, & le fommeil & les fonges.
Comment lalumiere, les fons, les odears, les gouts, la
chaleur , & toutes les autres qualitez des obiets exte-
rieurs-
-ocr page 56-
J6                              D I S C O U R S
rieursypeuuentimprimcrdiuerfesidees , par I'entre-
mife des feus; Comment la faim , la foif, & les autres
paffionsinterieures, ypcuuentauffy enuoyerlesleur; Ce
qui doit yeftrepris pour le fens commun , ou ces ide'es
font receues- pour la memoire qui les conferue; & pour
la fatitaifie, qui les peut diuerfement changer, & en com-
pofer de nouuelles, & par mefme moyen, diftribuant les
efpris animaux dans les mufcles, faire mouuoir les mem-
bres dece cors, enautantdediuerfesfagons, &autant a
propos des obiets qui fe prefentent a fes fens, & des paf-
fions interieures qui font en luy, que les noftres fcpuif-
fent mouuoir fans quelavolonte'lesconduife. Cequine
*fembleranullementeftrange,aceuxqui fgachant com-
bien de diners automates, ou machines mouuantes, l'in-
duftrie des hommes peut faire, fans y employer que fort
peu de picces,a comparaifon de la grande multitude des
os, des mufcles, des nerfs, des arteres, desvenes , & de
toutes les autres parties, qui font dans le cors de chafque
animal, Confidereront ce cors comme vne machine,qui
ayant efte' faite des mains de Dieu , eft incomparable-
ment mieux ordonne'e, & a en fby des mouuemcns plus
admirablcs, qu'aucune de celles qui peuuent eftre inuen-
tees par les hommes. Et ie m'eftois icy particulicrement
arefte'a faire voir, que s'il y auoit de telles machines, qui
euffent les organes & la figure exterieure d'vnfinge, ou
de quelque autre animal fans raifbn nous n'aurions aucun
moycn pour reconnoiftre , qu'el/es ne feroient pas en
tout de mefme nature que ces animaux: Au lieu que s'il
y en auoit qui euflent la refemblance de nos cors, 8c imi-
taffent autant nos actions que moralement ilferoit pof-
fible,
-ocr page 57-
De La Methods.                     S7
flble, nous aurions toufioursdeux moyens tres certains*
pour reconnoiftre qu'elles ne feroient point pour celade
vrais hommes. Dontle premier eft que iamais elles ne
rourroient vfer de paroles,ny d'autres fignes en les cora-
pofant, conime nous faifons pour declarer aux autres
nospenfe'es. Car ou peutbien conceuoir,qu'vnemachi-
ne foit tellement faite qu'elle profere des paroles, & mef-
me quelle en profere quelques vnf s a propos des actions
corporelles qui cauferont quelque changement en fes
organes: Comme fion la touche en quelque endroit,
qu'elledemandecequ'onluyveutdirej lien vn autre,
qu'elle crie qu'on luy fait mal, & chofes femblables :
Mais non pas qu'elle les arrenge diuerfement, pour ref-
pondre au fens de tout ce qui fe dira en fa prefence, ainfi
que les hommes les plus hebetcz peuuentfaire. Etlefe-
condeft, que bienqu ellesfiflentplufieurs chofes, aufly
bien.oupeuteftremieux, qu'aucundenous, elles man-
queroientinfalliblement en quelques autres , par ief-
quelles on decouuriroit qu'elles n'agiroient pas par con-
noiflance,maisfeulementparladifpo(itionde leurs or-
ganes: Car au lieu que la raifon eft vn inftrument vni-
uerfel, qui peut feruir en toutes fortes de rencontres, ces
organes out befoin de quelque particuliere difpofition
pour chafque action particulierejd'ou vientqu'ileft mo-
ralemen^mpoffible, qu'il y en ait affez de diuers en vne
machine, pour la faireagir en toutes les occurrences de
lavie,demefmefa§on quenoftre raifon nous fait agir.
Or par ces deux mefmes moyens, on peut aufly connoi-
ftre la difference, qui eft entreles hommes & les beftes.
Carc'eft vne chofe bienremarquable, qu'il ny a point
if                      d'hom-
-ocr page 58-
ft                              D I S C O U R S.
d'hoinmes fi hebetez & fi ftupides , fans en excepter
mefme les incenfez, qu'ils ne fbient capables d'arrenger -
enfemble diuerfes paroles, & d'en compofer vn difcours
par lequel ils faccnt entendre Ienrs penfdes ; Et qu'au
contraire, iln'ya point d'autre animal, tant parfait &
tat heureufemet ne'qu'il puiffe eftre, qui face lefembla-
ble. Ce qui n'arriue pas de ce qu'ils ont faute d'organes,
caronvoit que les pies &les per roquets peuuent profe-
rer des paroles ainfi que nous, & toutefois ne peuuent
parler ainfi que nous, c'eftadire, en tefmoignant qu'ils
penfent ce qu'ilsdifent: Au lieu que les hommes, qui
eftans nez fours & muets,fbnt ptiuezdes organes qui fer-
nent aux autres pour parler;autant ou plus que les beftes,
ont couftume d'inuenter d'eux mefmes quelques fignes,
par lefquels ils fe font entendre a ceux qui eftans ordinai-
rement auec eux ont loyfir d'apprendre lenr Iangue. Et
cecy ne tefmoigne pas feulement que les beftes ont
moinsderaifon que les hommes, mais qu'elles n'euont
point du tout: Gar on voit qu'il n'en faut que fort pea
pour f$auoir parler, & d'autant qu'on remarque de l'in-
efgalite' entre les animaux d'vne mefme efpece, aufly
bien qu'entre les hommes, & que les vns font plus ayfez
a dreffer que les autres, il n'eft pas croyable qu'vn finge
ou vn perroquet, qui feroit des plus parfaits de fbn efpe-
ce, nVgalaft encelavn enfant des plus ftupides, ou du
moinsvn enfant qui auroitle cerueau trouble' , fi leur
ame n'eftoit d'vne nature du tout differente de la noftre.
Etonnedoitpas confondre les paroles, auec ies mouue-
mes naturels,qui tefmoignet les paffions, & peuuet eftre
imitez par des machines aufly bien que par les animaux:
ny
-ocr page 59-
De La Methode.                    5p
ny penfer, comme quelques Anciens,queles belles par-
lent:, bienque nous n'entendions pas leur langage : car
s'ileftoitvray,puifqu'elles ontplufieurs organes qui fe
rapportent aux noftres , elles pourroient auffybienfe
faire entendre a nous, qu'a ieurs femblables. G'eft aufly
vne chofe fort remarquable, que bien qu'il y ait plufieurs
animaux qui tefmoignent plus d'induftrie que nous en
quelques vnes de leiirs anions, on voit toutefois que les
mefmes n'en tefmoignent point du tout en beaucoup
d'autres: De fa§on que ce qu'ils font mieux que nous, ne
prouue pas qu'ils ont de l'efprit, car a ce conte ils en au-
roient plus qu'aucun de nous, & feroient mieux en toute
autrechofe;Mais plutoft qu'ils n'en ont point, & que
c'eft la Nature qui agift en eux felon la difpofition do
leurs organes: Ainfi qu'on voitqu'vn horologe,qui n'eft
corapofd que de roues & de refTors, peut conter les heu-
res, &mefurer le tems , plus iuftement que nous auee
toute noftre prudence.
I'auois defcrit apres cela lame raifonnable, & fait voir
qu'elle ne peut aucunement eftre tire'e de la puiffance dc
delamatiere , ainfi que les autres chofes dont i'auois
parld, mais qu'elle doit exprefTement eitre creee j Et
commentilnefuffitpas, quelle fbit loge'e dans lecors
humain ainfi qu'vn pilote en fon nauire , finon peuteftre
pour mouuoir fes membres, Mais qu'il eft befoin quelle
foit iointe, & vnie plus eftroitement auec luy,pour auoir
outre cela des fentimens, & des appetits femblablcs aux
noftres, & ainfi compofer vn vray homme. Au refte ie
mefuisicyvnpeucftendufurle fuietde 1'ame, a caufe
qu'il eft des plus importans: Carapre's l'erreur de ceux
b z                     qui
-ocr page 60-
€o                          Discours.
qui nient Dieu, laquelle ie penfe auoir cy deffus affez re-
fuse, iln'y en a point qui efloigneplutoftles efprits foi-
bles du droit chemin de la vertu, que d'imaginer que
lame des belles foitde mefme nature que la noftre, &
que par confequent nous n'auonsrien acraindre, ny a
efperer, aprescete vie,non plus que les moufches &les
fourmis: Au lieu que lorfqu'on f§ait combien elles diffe-
rent, on comprent beaucoup mieux les raifons,qui prou-
went que^a noftre eft d'vne nature entierement inde-
pendante du cors, & par confequent qu'elle n eft point
fuiette a mourir auec luy: puis d'autant qu'on ne voit
point d'autrescaufes qui la deftruifent, on eft naturelle-
inent porte'aiiiger de la qu'elle eft immortelle.
Orilyamaintenanttroisansque i'eftois paruenuala
findutaite'quicontient toutes ces chofes , & que ie
commencois a Ie reuoir affin de le mettre entre les mains
d'vnimprimeur, Lorfque i'apprisque des perlbnnes a,
quiiedefere; &dont lauthorite ne peut gueres moins
furmesactions, que mapropre raifon fur mes penfees,
auoientdefapprouud vne opinion de Phyfique publiee
vnpeuauparauant par quelque autre , de laquelle ie ne
veux pas dire que ie fufTe, mais bien que ie n'y auois rien
remarque',auantleur ceniure,que ie puffe imaginereftre
preiudiciable ny alareligionnya Teftat, ny par confe-
quent qui m'euft empefchc' de l'efcrire, ii la raifon me
l'euft perfuade"e; Et que cela me fit craindre qu'il ne s'en
trouuaft tout de mefme quelqu'vne entre les mienes, en
laquelle ie me fufle me'pris: nonobftant le grand foin que
i'ay toufiours eu, de n'en point receuoirde nouuellesen
ma creance, dont ie n'eufTe des demonftrations tres cer-
taines5
-ocr page 61-
De La Methode.                    tfr
tames;&de n'en point efcrire,quipufTent tournerau def-
auantage de perfonne. Ce qui a efte fuffifant pour m'ob-
liger a changer la refolution que i'auois eue de les pu-
blier. Car encore que les raifons, pour lefquelles ie
I'auois prifeauparauant, fuffent tres fortes, mon incli-
nation, qui m'a touliours fait hair le mefticr de faire des-
liures,m'enfit incontinent trouuer affez d'autres pour
m'en excufer. Et ces raifons de part & d'autre font tel-
ies, quenon feulement i'ay icy quelque intereft de les
dire,maispeuteftreauffy que le public cnade les f§a-
uoir.
le n'ay iarnais fait beaucoup d'eftat des chofes qui ve-
noientdemonefprit, & pendant que ie n'ay receuilly
d'autres fruits de la methode dont ie me fers , finon que
iemefuisfatisfaittouchantquelquesdifficultez qui ap-
partienent aux fciences fpeculatiues,oubien que i'ay taf-
che' de regler mes meursparles raifons qu'clle m'enfei-
gnoit, ie n'ay point creu eftre oblige d'en rien efcrire.
Car pour ce qui touche lesmeurs, chacunabondefi fort
enfonfens, qu'il fe pourroit trouuerautant dereforma-
teurs que de teftes, s'il eftoit permis a d'autres qu'a ceux
que Dieua eftablis pour fouuerains fur fes peuples, ou,
bienaufquelsil a donne' aflez de grace & de zele pour
eftre prophetes, d'entreprendre d'y rien changer j Et
bienque mes (peculations me pleufTent fort , i'ay creu
quelesautres en auoient aufly, quileurplaifoient peut-
eftre d'auanrage. Mais fitoft que i'ay eu acquis quel-
ques notions generates touehant la Phyfique , & que
commengantalesefprouueren diuerfesdifficultez par-
ticuliereSji'ayremarqudiufques ou elles peuuent con-
h 5;                 duire,,
-ocr page 62-
<J2                                    D I S C O U R S
duire, Sc combien dies different des prin'cipes dont on
s'eft ferui iufques aprefenr, I'ay creu que ie ne pouuois
lestenircachdes, fans pecher grandement contre la loy
qui nous oblige a procurer autant qu'il eft en nous Ie
bien general de tousles hommes: Car elles m'ont fait
voir qu'il eft poffible de paruenir a des connuiffances
qui foient fort vtiles a la vie; Et qu'au lieu de cete Philo-
fophieipeculatiue qu'on enfeigne dans les efcholes, on
enpeuttrouuervnepratique, parlaquelle connoiffant
la force & les a&ions du feu, de l'eau, de 1'air, des aftres,
des cieux, & de tons les autres cors qui nous enuiron-
nent, auflydiftindtemeut que nous connouTons les di-
uers metiers de nos artifans,nous les pourrions employer
enmefmefac.onatous les vfages aufquels ils font pro-
pres, &ainfi nous rend re comme maiftres & poffeffeurs
de la Nature. Cequin'eftpas feulement a delirer pour
linuentiond'vneinfinite'd'artifices, qui feroientqu'on
iouiroit fans aucune peine des fruits de la terre,& de tou-
teslescommoditez qui s'y trouuent: Mais principale-
ment aufly pour la conferuation de lafante', laquelleeft
fans doutele premier bien, & lefondement de tous les
autres biensde cete vie: Car mefme l'efprit depend fi
fort du temperament, & de la difpofition des organes du
cors, que s'il eft poffible de trouuer quelque moyen, qui
rende communement les hommes plus fages, & plus ha-
biles qu'ils n'ont efte iufques icy, ie croy que c'eft dans
la Medecine qu'on doit le chercher. ] 1 eft vray que cel-
lequi eft maintenant en vfage contient peu de chofes
dont lvtilite' foit fi remarquable: Mais fans que i'aye au-
cundeffeindelamefprifer, Ie m'aflure qu'il n'y a per-
Xonne,
-ocr page 63-
De La Methode.                    <5j
fonn e, mefme de ceux qui en font profeffion, qui n'auo-
ue que tout ce qu'on y fcait n'eft prefque rien, a compa-
raifon de ce qui refte a y fc,auoir; Et qu'on fe pourroit
exemter d'vneinfinite'de maladies, tantdu corsque de
l'efprit, & mefme aufly peuteftre del'affoibluTementde
lavieillefle, fi on auoit aflfez de connoiflance de leurs
caufes, &de tous les remedes dont la Nature nous a
pourueus. OrayantdefTeind'employertoute ma vie 4
la recherche d'vne fcience fi necefTaire, & ayant ren-
contre'vnchemin qui me femble tel qu'on doit infallj-
blement la trouuer en Ie fuiuant, fice n'eft qu'on en fbit
empefchd, ouparlabrieuete'de la vie, ou par iedefaut
desexperiences,Ieiugeoisqu'iln'y auoit point de meil-
leur remede contre ces deux empefchemens, que de
communiquer fidellement au public tout lcpeu que
i'aurois trouue", & de conuier les bons efprits a tafcher de
pafler plus outre, en contribuant,chafcun felon fon in-
clination &fonpouuoir, aux experiences qu'il faudroit
faire, & communiquant auflTy au public toutes les chofes
qu'ils apprendroient, affin que les derniers commen-
§eant ou les prccedens auroient acheue, & ainfi ioignanc
les vies & les trauaux de plufieurs, nous allaffions tous
enfemble beaucoup plus loin, que chafcun en particulier
ne f§auroit faire.
Mcfmeie remarquois touchant les experiences, qu'cl-
les font d'autantplus necefTaires, qu'on eft plus auance
en connoifTance. Car pour le commencement, il vaut
mieuxnefeferuir que decelles qui fe prefentent d'elles
mcfmes anosfens , &que nous ne fijaurions ignorer.
pourvuxjue nous y facions tant fbitpeu de reflexion, que
d'en
-ocr page 64-
$4                       D i s c o u r s
d'enchercherdeplusrares& eftudiees: Dont laraifbn
eft que ces plus rarestrompent fouuent , Iorfqu'on ne
fgait pas encore Ies caufes desplus communes; & que Ies
circonftances dont elles dependent font quafi toufiours
fi particulieres, & fipetites, qn'ilcft tresmalayfe de Ies
remarquer. Maisrordrequei'aytenuencecy aefte'tel.
Premierement i'ay tafche'de trouuer en general Ies prin-
cipesou premieres caufes de tout cc qui eft ou quipeut
eftre dans le monde, fans rien confiderer pour cet effecT:
<jue Dieu feul qui l'a cree', ny Ies tirer d'ailleurs que de
certainesfemencesdeveritezqui fontnaturellement en
nos ames. Apre's eela i'ay examine' quels eftoient Ies
premiers & plus ordinaireseffets qu'on pouuoit deduire
decescaufesjEtilmefemble quepar la i'ay trouud des
cieux, des aftres,vne terre, & mefme fur la terre de l'eau,
de l'air, du feu, des mineraux, & quelques autres telles
chofes, qui font Ies plus communes de toutes, & Ies plus
fimples, & par confequent Ies plus ayfees a cpnnoiftre.
Puislorfque i'ay voulu defcendre a celles qui eftoient
plus particulieres, ils'eneft tant prefente'a moy de di-
uerfe*,que ie n'ay pas creu qu'il fuft poffible a l'efprit hu_
main de diftinguer Ies formes ou efpeces de cors qui
font fur la terre, d'vne infinite'd'autres qui poufroient y
eftre fi e'euft efte' le vouloir de Dieu de Ies y mettre; Ny
par confequent de Ies rapporter a noftre vfage, fi cc n'eft
qu'on viene au deuant des caufes par Ies effets, & qu'on
feferuedeplufieurs experiences particulieres. En fuite
dequoy repaffant mon efprit fur tous Ies obiets qui
s'eftoient iamais prefentez a mes fens, i'ofe bien dire que
ien'yayremarque'aucunechofe que ie nepeuiTe affez
com-
-ocr page 65-
D E L A M E T H O D E.                      €j
commodement expliquer par les principes que i'auois
trouuez: Maisilfautaufly quei'auoue, quelapuiffance
dela Nature eft fi ample, &fi vafte, & que ces principes
font fi fimples & fi generaux, que ie ne remarque quafi
plus aucun effecl; particulier, que d'abord ie ne con-
noifle qu'il peut en eftre deduit en plwfieurs diuerfes fa-
mous; Etque ma plus grande difficult e'eft d'ordiuaire
de trouuer en laquelle de ces fac,ons il en depend, Car a
celaienefc, ay point d'autre expedient que de chercher
derechefquelques experiences, qui foient telles, que
leureuenementne foitpasle mefme fi c'eft en 1'vne de
ces fa$ons qu'on doit l'expliquer, que fi c'eft en l'autre.
Au refte i'en fuis maintenant la, que ie voy ce me-fem-
ble afTez bien de quel biaiz on fe doit prendre h. faire la
plus part de celles qui peuuent feruir a cet effect: Mais
ie voy aufly qu'elles font telles & en fi grand nombre,
que ny mes mains, ny mon reuenn, bienque i'en eufle
mille foisplusqueien'enay, ne fc,auroient fuffire pour
toutes: En forte que felon que i'auray deformais la com-
modiie d'enfaire, plusoumoins, i'auanceray aufly plus
oumoinsenla connoiflfance de la Nature. Ce que ie
meprometois de faire connoiflre par le traite' que i'auois
efcrit, & d'y monftrer fi clairement lvtiliteque le public
en peut receuoir, que i'obligerois tous ceux qui defirent
en general le bien des hommes, c'eft a dire, tous ceux
quifonteneffedtverrueux, &c non point par faux fefn-
blant,nyfeulement par opinion, tant a me communi-
quer celles qu'ilsontdefiafaites, qu'a m'aydereu la re-
cherche de celles qui reftent a faire.s
Mais i'ay eu depuis ce tems \k d'autres raifons qui
i                        m'out
-ocr page 66-
66                               DlSCOURS.
in'ont fait changer d'opinion, & penfer que ie deuois
veritablement continuer d'efcrire toutes les chofes que
ie iugerois de quelque importance, a mefiire que i'en
de'couurirois la verite, &y apporter Ie mefme foin que
B ie les voulois faire imprimer: Tant affin d'auoir d'au-
tant plus d'occafion de les bien examiner j Comme fans
doute on regarde toufiours de plus pres a ce qu'oncroit
deuoireftreveuparplufieurs, qu'a cequ'bn ne fait que
pour fbymefme, Etfbuuent les chofes, quim'ont fem-
ble'Vrayes lorfque i'ay commence' ales conceuoir,m'ont
parii fauffes lorfque ie les ay voulu mettre fur le papier;
Qu'affin de neperdre aucune occafion de profiter au pu-
blic fi i'en fuis capable, & que fi mes efcrits valent quel-
que chofe , ceux qui les auront apresma mortenpuif.
fent vfer, ainfi qu'il fera le plus a propos. Mais que ie nc
deuoisaucunementconfentirqu'ilsfuflent publiez pen-
dant ma vie, affin que ny les oppofitions & controuerfes
aufquellesilsferoient peuteftre fuiets, ny mefme la repu-
tation telle quelle qu'ils mepourroient acquerir, ne me
donnaffent aucune occafion de perdre le tems que i'ay
deffein d'employer a m'inftruire. Car bienque il foit
vray que chafque homme eft oblige'de procurer au tant
qu'il eft en luy le bien des autres, & que e'eft propre-
ment ne valoir rien que de n'eftre vtile a perfonne-Tou-
tefoisil eft vray aufTy que nos foins fe doiuent enVndre
plus loin que le tems prefent, 6c qu'il eft bon d'omettre
les chofes qui apporteroieut peuteftre quelque profit k
ceux qui viuent, lorfque e'eft a deflein d'en faire d'autres
quienapportentd'auantagea nos neueux. Comme en
effedt ie veux bien qu'on fijache, que le peu que iay
appris
-ocr page 67-
De La Methods,                   ty
apprisiufques icy n'eft prcfque rien, acomparaifonde
cequei'ignore, &que ie ne defefpere pas de pouuoir
apprendrc: Car c'eftquafi lc mefme dc ceux qui de'cou-
urent pcu a pen la vericd dans les faiences, que de ceux
qui commenceant a deuenir riches ont moins de pei-
ne a faire de graudes acquiiitions, qu'ilsn'ont eu aupa-
rauant eftant plus pauures a en faire de beaucoup moin-
dres. Oubienonpeutles comparer aux chefs d'arme'e,
dont les forces one couftume de croiftre a proportion dc
leurs vidtoires, & qui ont befoin de plus de conduite
pourlemaintenirapres la perte d'vncbataille, qu'ilsn'ont
apre'sl'auoir gaigne'e a prendre des villes & des prouin-
ces. Carc'eftveritablem-entdonner des batailles, que
detafcheravaincretoutesles difficultez & les erreurs,
qui nous empefchent de paruenir a la connoiflance de la
verite'j&c'eftenpcrdrefne, que de receuoir quclquc
fauffe opinion, touchant vnc matiere vn peu generate &
importante: Ilfaut apres beaucoup plus d'adrefle pour Co
remettre au mefme eftat qu'on eftoit auparauant, qu'il
ne faut a faire de grans progress,lorfqu'on a defia des prin-
cipes qui font aflurez Pour moy fi i'ay cy deuant trouud
quelques veritez dans les faiences (& i'efpere que les
chofes qui font contenues en ce volume feront iuger que
i'enaytrouue'quelques vnes) ie puis dire que cenefont
quedesfuites&des depeudances de cinqou fixprinci-
pales difficultez que iay furmonte'es)& que ie conte pour
autantde batailles ou i'ay cu l'heurde mon cofte': Mef-
me ienecraindray pas de dire que ie'penfe n'auoir plus
befoin d'en gaigner que deux ou trois autres femblables,
pourvenirentiercmentaboutdemesdeflreins ; Etque
t 2                       mon
-ocr page 68-
6%                          Dhcohrs.
mon aage n'eft point fi auance', que felon le conrs ordi-
naire de la Nature, ie ne puifTe encore auoir afTez de loy-
firpour cetefFect. Mais iecroyeftre d'autantplus ob-
lige a menager le tems qui me refte, que i'ay plus d'efpe-
rance de lepouuoir Men employe^ Eti'aurois fans dou-
teplulieursoccafionsdeleperdre, fiiepublio's Iesfbn-
demens dema Phyfique. Car encore qu'ils foient pref-
que tous fi euidens qu'il ne faut que les entendre pour les
croire,& qu'il n'y enaitancun dontiene pcnfe pouuoir
donner des demonftrations j toutefois a canfe qu'il eft
impoffible qu'ils lbient accordans auec toutes les diuer-
fes opinions des autres hommes , ie preuoy que ie fe-
rois fouuent diuerti par les oppofitions qu'ils feroient
naiftre.
On-peut dire que ces oppofitions feroient vtiles, tant
affindemefaireconnoiftremes fautes , qu'affin que II
i'auois quelque chofe de bon ,les autres en euffent par ce
moycu plus d'intelligence, &,comnic plufieurs peuuent
plus voir qu'vn homme feul , que comraenceant des
maintenant a s'enferuir, its m'aydaffent auffy de leurs
inuentions. Mais encore que ie me reconnoiflfe extreme*
ment fuiet a faillir, & que ie ne me fie quafi iaraais aux
premieres penfdes qui mevienent, toutefois l'experien-
ceque i'ay des obie&ions quon me petit faire m'em-
pefchedenefpereraueunprofit: Car i'ay dafia fouuent
efprouud les iugemensj tant de ccux que i'ay tenus pour
mesamis, que de quelques autres a qui iepenfoiseftre
indifferent, 8i mefme aufTy de quelques vns dont ie fc,a-
uois quelamalignite& lenuietafcheroit affez a ddcou-
urircequel'aftedion cacheroit a mes amis j Mais il eft:
rare-
-ocr page 69-
De La Me those.                    g9
rarement arriue qu'on m'ayt obiedte quelque chofe que
ien'eufle point du toutpreueue, fi ce n'eftqu'elle fuft
fort eloign de de mon fuiet: En forte queje n'ay quafi ia-.
mais rencontre aucunCenfeurde mes opinions, qui ne
me femblafl ou raoins rigoureux , ou moins equitable
que moymefme. Et ie n'ay iamais remarque' non plus,
que par Ie moyen des difputes qui fe pratiquent dans les
Efcholes.onaitde'couuertaucune veritequ'on ignoraft
auparauant. Car pendant que chafcuntafche de vain-
crc, on s'exerce bien plus a faire valoir la vrayfemblance,
qu'a pefer les raifons de part & d'autre; Et ceux qui one
eftd long terns bons auocats, ne font pas pour ceia par
aprdsmeilleursiuges.
Pourl'vtilite'que les autres receueroient de la com-
munication de mes penfe'es, elle ne pourroit aufTy eftre
fort grande, d'autantque ie ne les ay point encore con-
duces filoin, qu'ilnefoit befoind'y aioufter beaucoup
dechofes, auant que de les appliquer a l'vfage. Et ie
penfe pouuoir dire fans vanitd, que s'il y a quelqu'vn qui
en fbit capable ,ce doit eftre plutoft moy qu'aucun au-
tre : Non pas qu'il ne puifTe y auoir au inonde plufieurs-
efprits inconiparablement meilleurs que le mien; mais
pourcequ'on ne fc,auroit fi bien conceuoir vne chofe, &
la rendre fienc, lorfqu'on l'apprent de quelque autre,
quelorfqu'onrinuentefoymefme. Cequieftfi verita-
bk'en cete matiere, que bienque i'aye fouuent explique
quclquesvnesde mes opinions a des perfonnes de tres
bonefprit, & qui pendant que ielenrparlois fcmbloient
les entendre fort diftin&ement, toutefois lors qu'ih les
ontredites,i'ay remarque'qu'iIs les ont cllange'es prey-
s' 3
                         que .
-ocr page 70-
70                        Discouns.
que toufiours en telle forte que ie ne les pouuois plus
auouerpourmienes. Al'occafion dequoy ie fuis bien*
ayfe de prier icy nos ncueux, de ne croire iamais que les
chofes qu'on leur diravienentdemoy, lorfqueie ne les
auray point moymefme diuulguees: Et ie ne m'eftonne
aucunement des extrauagances qu'on attribue a tous ces
anciens Philofophes dont nous n'auons point les efcrits,
ny ne iuge pas pour cela que leurs penfees ayent efte'fort
deraifonnables, veu qu'ils eftoieiit des meilleurs cfprits
de leurs temSj Mais feulement qu'on nous les a raal rap-
porters. Comme on voit aufly que prefque iamais il
n'eft arriud'qu'aucun dc leurs fectateurs les ait furpaffez:
Eticm'affiireque les plus paffionnez, de ceux qui fui-
uentmaintcnant Ariftote, fe croyroient hureux , s'ils
auoient autant de connoiflance de la Nature qu'il en a
eu, encore mefme que ce fuft a condition qu'ils n'en au-
roient iamais dauantage. Ilsibnt comme le Iierre, qui ne
tend point a monter plus haut que les arbres qui le fbu-
tienent, & mefine fbuuent qui redefceud aprds qu'il eft
paruenu iufques aleur faifte : Car il me femble aufly
que ceux la redefcendent, e'eft a dire , fe rendent en
quelque fac,on moins fe,auans que s'ils s'abftenoient
d*eftudier,lefquels non contens def$auoir tout ce qui eft
intelligiblement expliqiue' dans leur Autheur; veulent
outrecelay tronuer la folution de plufieurs difficultcz
dontilneditrien , & aufquelles il n'a peuteftre iamais
penfe'. Toutefois leurfa$on de philofopher eft fort com-
mode, pour ceux qui n'ont que des efprits fore medio-
cres: car robfeurite des diftin&ions, & des principes
dont ils fe feruent, eft caufe qu'ils peuuent parler de tou-
tes
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--■ —------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------'                                                                                                               """ ""                                                                                      ""                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                      ......                                                                                                                                                                                                                                                                               — -                                                                                                                                                                                                                  -----------------------------------------------------------------—-
De La Methode.                   71
tes chofes aufly hardiment qne s'ils les fijauoient,&fou-
ftenirtoutcequ'ils en difent contre les plus fubtils &
les plus habiles, fans qu'on ait moyendeles conuakicre:
En quoy ils me femblent pareils a vn aueugle, qui pour fe
battre fans defauantage contre vn qui voit, l'auroit fait
venirdanslefondsdequelquecaue fort obfcure: Etie
puis dire que ceux cy ont intereft que ie m'abftiene de
publierlesprincipesde la Philofophie dont ie me fers,
car eftans tres fimples & tres euidens, comme ils font, ie
ferois quafi le mefme en les publiant , que fi i'ouurois
quelquesfeueftres, Scfaifois entrer du iour dans cete ca-
ue oii ils font defcenduspourfe battre. Mais mefme les
meilleurs efprits n'ont pas occafion de fouhaiter de les
connoiftre: car s'ils veulent fgauoir parler de toutes cho-
fes, & acquerir la reputation d'eftre doctes, ils y par-
uiendront plus ayiement en fe contestant de la vray-
femblance, qui peut eftre trouue'e fans grande peine en
toutes fortes de matieresj qu'enchercbant la verite', qui
ne fe decouure que peu a peu en quelques vnes , & qui
lorfqu'il eft queftion de parler des autres oblige a con-'
fefTer franchement qu'on les ignore. Que s'ils preferent
laconnoifTance de quelque peu de veritez a la vanite"de
paroiftren'ignorerrien, comme fans doute elleeftbien
preferable, &qu'ils vueillent fuiurevn deflein fembla-
ble au mien, ils n'ont pas befoin pourcela que ie leur die
rien d'auantage que ce que i ay defia dit en ce difcours.
Car s'ils font capables de patter plus outre que ie n'ay
fait.ils le feront aufly a plus forte raifon,de trouuer d'eux
mefmes tout ce que ie penfe auoir trouud: D'autant que
» ayanti'amais rien examine'que par ordre,il eft certain,
que-
s
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7^                         D is c o 11 r s.
que ce qui me rede encore a de'couurir eft de Toy plus
difficile & plus cache, que ce que i'ay pucy deuant ren-
contrer, & ils auroieut bien moms de plaifir a I'appren-
dre de moy que d'eux mefmes : Outre que l'habitude
qu'ilsacquerront; en cherchant prenfierement des cho-
fesfaciles, &paflantpeuapeupardegreza d'autxespius
dirficiles,leurferuiraplus, que toutes mes inftru&ions
nefgauroientfaire. Comme pour moy ie me perfuade,
quefionm'euftenfeigndde'smaieuneffe toutes Ies ve.
ritez dont i'ay cherche'depuis les demon ftrations,& que
ie n'eurTe eu aucune peine a les apprendre, ie n'en aurois
peuteftre iamais fceu aucunes autres, & du moinsque
iamais ie n'aurois acquis i'habitude, & la facilite'que ie
penfe auoir, d'entrouuertoufioursde nouuelles, a me-
fure que ie m'applique ales chercher. Et en vn mot s'il y
aaumondequelqueouurage, quinepuifle eftre fl bien
acheue'paraucun autre, que parle mefme qui l'a com-
mence', c'eft celuy auquel ie trauaille.
II eft vray que pour ce qui eft des experiences qui peu-
uent yferuir, vnhommefeul nefgauroitfuffireales fai-
retoutes: Maisiln'y f^auroit auffy employer vtilement
d'autres mains que Ies iienes, finon celles des artifans, ou
telles gens qu'il pourroit payer, & a qui 1 'efperance du
gain, qui eft vn moyen tres efficace, feroit faire exa&e-
ment toutes les chofes qu'il leur prefcriroit. Car pour
Ies volontaires, qui par curiofite'ou delir d'apprendre
s'offriroietft peuteftre de luy ayder, outre qu'ih ont pour
1'ordinaire plus de promefles que d'effed , & qu'ils ne
font que de belles propofitions dont aucune iamais ne
reiiflit,Iis voudroientinfalliblement eftre payezpar rex-
plication
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De La Methode.                    7j
plication de quelques difficultez, ou du moins par des
complimens&desentretiensinutiles, qui ne lny f§au-
roient coufter fi peu de fon tcras qu'il n'y perdift.Et pour
les experiences que les autresontdefiafaites,quand bien
niefme ilslesluy voudroient communiquer, ceque ceux
qui les nomment des fecrets ne feroient iamais,elles font
pour la plus part compofe'es de tant de circonftances, ou
d'ingrediensfuperflus, qu'il luy feroittres malayfd d'en
ddchifFrerlaverite": Outre qu'il les trouueroit prefque
toutes fi raal explique'es, ou mefme fi faufles,a caufe que
ceux qui les ont faites fe font efforcez de les faire paroi-
ftre conformes a Ieurs principes, que s'il y en auoit quel-
ques vnes qui luy feruiflent,elles ne pourroient derechef
valoirle terns qu'il luy faudroit employer a les choifir.
De fac,on que s'il y auoit au monde quelquVn , qu'on
fceuft aflurement eftre capable de trouuer les plus gran-
des chofes, 8c les plus vtiles au public qui puiflfent eftre,&
que pour cete caufe les autres hommes s'efforc, affent par
tous moyens de l'ayder a venir a bout de fes defleins: Ie
ne voy pas qu'ils peufTent autre chofe pour luy, finon
fournir auxfrais des experiences done il auroit befoin,
&durefteempefcherquefbn loifir ne luy fuft ofte'par
l'lmportunite'de perfbnne. Mais outre que ie ne prefu-
me pas tant de moymefme, que de vouloir rien promet-
tre d'extrordinairej ny ne me repais point de penfe'es fi
vaines, que de m'imaginer que le public fe doiue beau-
coup interefler en mes defleins: Ie n'ay pas aufly Tame fi
baffe, que ie voulufle accepter de qui que ce fuft aucune
faueur, qu'on puft croyre que ie n'auroispas meritee.
Toutes ces considerations iointes enfemble furent
\                      caufe
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74                        Discours
caufeilyatroisans que ie ne voulu point diuulguer Ic
traite que i'auois entre les mains; Etmefme que reprrs
rcfolution de n'en faire voir aucun autre pendant ma vie,
qui fuftfi general, ny duquel on pilft entendre les fon-
demensdemaPhyfique:Maisilya eu depuis derechef
deux autres raifons, qui m'ont oblige a mettre icy quel-
qaes eflais particuliers; & a rendre au public quelque
eompte de mes actions, & de mes deffeins. La premiere
eft, que fi i'y manquois,plufieurs,qui ont fceu 1'intentioa
que i'auois eue cy deuant de faire imprimer quelques
efcrits , pourroient s'imaginer que les caufes pour le£
quelles ie m'en abftiensferoient plus a raon defauantage
qu'ellesnefont. Carbienqueien'aymepas lagloire par
excess ou mefme, fi ie I'ofe dire,que ie la haiffe, en tant
que ie la iuge contratre au reposylequel i'eftime fur tou-
tes chofes : Toutefois auflyien'ayiamaistafche'deca-
cher mesa&ions comme des crimes,ny n'ay vfd de beau-
coup de precautions pour eftre inconnu j taut a caufe
que i'euffe creu me faire tort; qu'a caufe que cela m'au-
roit donne'quelque efpece d'inquietude, qui euft dere-
chef eftVcontraire au parfait repos d'efprit que ie cher-
che.. Etpourcequem'eftant toufiours ainfi tenu indif-
ferent entre le foin d'eftre connu ou ne l'eltre pas.ie n'ay
pu empefcher que ie n'acquifle quelque forte de reputa-
tion , i'ay penfe'que ie deuois faire mon mieuxponr
m'exempter an moins de l'auoir mauuaife.L'autre raifon
qui m'a obliged efcrire cecy, eft que voyat tous les iours
de plus en plus le retardement que fouffre le deflein que
i'ay dem'inftruire, a caufe d'vne infinite d'experiences
dont i'ay befoiu, &. qu'il eft impoflible que ieface fens
l'ayde
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De La Methode-                    75
l'ayde d'autf uy, Bienqucie ne me flatte pas tant que d'e-
fperer que le public prenegrande part en mes interefts.,
ToutefoisieneveuxpasaufTy me defaillir tant a moy-
mefme, que de donner fuiet a ceux qui me furuiuront de
mereprocherquelqueiour , quei'difTepuleurlaifTer
plufieurs chofes beaucoup meilleures que ie n'auray fait,
fiien'eufTe point tropneglige'de Ieur faire entendre en
quoyilspouuoientcontribueramesdefleins.
Et i'aypenfd qu'il m'eftoit ayfe de choifir quelques
matieres, qui fans eftre fuietes a beaucoup de controuer-
fes, ny m'obliger a declarer d'auantage de mes principes
queienedefire,nelairroientpasde faire voir aflcz clai-
rcruentce que ie puis, ou ne puis pas, dans lesfciences.
En quoy ie ne fgaurois direfi i'ay reuffi, 8c ie ne veux
point preuenir les iugemes de perfonne, en parlant moy-
mefmedemesefcrits: Mais ie feraybien ayfe qu'onles
examine, & affin qu'on en ait d'autant plus d'occafion,ie
fupplie tous ceux qui auront quelques obie&ions a y fai-
re de prendre la peine de les enuoyer a mon libraire, par
lequelcneftantauerti, ie tafcheray d'y ioindre mare-
fponfe en mefme terns, & par ce moyen les lecteurs,
voyantenfemblel'vn&rautre, iugeront d'autant plus
ayfementdelaverite/: Carienepromets pas d'y faire Ja-
mais de Iongues refponfes, mais feulement d'auouer mes
fautes fortfranchement, fi ieles connois} oubien fi ie ne
les puis aperceuoir, de dire {implement ce que ie croyray
eftre requis, pour la defence des chofes que i'ay efcrites,
lansyadioufter l'explication d'aucune nouuelle matie-
fe , affin de ne me pas engager fans fin de I'vne en
l'autre-
Kz               Que
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JS                               DlSCOURS.
Querfi quclques vncs de celles dont i'ay parle'an com-
mencemet de la Dioptrique & des Meteores,chocqucnt
d'abord, a caufe que ie lcs nomme des fuppofitions, &
que ie ne femblepas auoir enuie de les prouuer, Qu'o ait
la patience de lire Ie tout auec attention , & i'efpere
qu'on s'en trouuera fatisfait : Car il me femble que les
raifonss'yentrefniuent en telle forte , que commc les
dernieres font demonftre'es, par les premieres qui font
ieurs caufesj ces premieres le font reciproquement, par
les dernieres qui font leurs effets. Et on ne doit pas ima-
ginerqneie commette en cecy la faute que les Logi-
eiensnomment vn cercle- car l'experience rendant la
plus part dc ces effets tres certains, les caufes dont ie les
deduitsneferuentpastanta les prouuer qu'a les expli-
quer- mais tout au contraire ce font elles qui font prou-
uees par eux. Et ie ne les ay nomme'es des fuppofitions,
qu'affin qu'on fcache que ie penfe lcs pouuoir deduire de
ces premieres veritez que i'ay cy deffus explique'es- Mais
que i'ay voulu expreffement ne le pas faire , pour empe-
fcher que certains efprits, qui s'imaginent qu'ils fgauent
en vn iour tout ce qu'vn autre a penfe en vingt anne'es, fi
toftqu'illeurenafeulement dit deux outroismots, S&.
qui font d'autant plus fuiets a faillir, & moins capables de
la verite', qu'ils font plus penetrans & plus vifs, Ne puif-
fentde la prendreoccafion, de baftir quelque Philofo-
phieextrauagante fur ce qu'ils croyront eflre mesprin-
cipes, & qu'on m'en attribue la faute. Car pour les opi-
nions qui font toutes mienes, ie ne les excufe point com-
menouuelles, d'autantque fi on en confidere bien les
xaifons,ie m'afTure qu'on les trouuera fi fimples, & fi con-
formes
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De La Methodi.                     77
formes au fens commun, quelles fembleront moins ex-
trordinaires, & moins eftranges,qu'aucunes autres qu'on
puifTeauoirfurmefmesfuiets. Eciene me vante point
aufTy d'eftre le premier Inuenteur d'aucunes, mais bien
que ie ne les ay iamais receues, ny pource qu'elles auoiec
eftc dites par d'autres,ny pourcequ'elles ne l'auoiet point
cfte',mais feulemet pourceq; la raifo me les a perfuadees.
Que fi les artifans ne peuuent fi toft executer l'inuen-
tionquieftexpliquecen la Dioptrique, ie ne croy pas
qu'on puifTe dire pour cela quelle foit mauuaife : Car
dautant qu'il faut de l'adrefle & de 1'habitude, poor fai-
re,&pouraiufter, les machines quei'aydefcrites, fans
qu'il y manque aucune circonftance, ie ne m'eftonne-
rois pas moins s'ils rencontrorent du premier coup, que
fiquelqu'vn pouuoit apprendrc en vn iour a iouer da
luth excellemment, par cela feul, qu'on luy auroit don-
ne de la tablature qui feroit bonne. Et fi i'efcris en Fran-
Sois,quieftlalanguedemonpai'sjplutoft qu'en Latio,
qui eft celle de mes Precepteurs; e'eft a caufe que i'efpe-
rc que ceux qui ne fe feruent que de leur raifon naturelle
toute pureiugerontmieux demes opinions, que ceux
quinecroyentqu'auxlinresanciens: Et pour ceux qui
ioignent le bon fens auec Teftude, lefquels feuls ie fou-
haite pour mes iuges, ils ne feront point ie m'afleure, fi
partiaux pour Ie Latin, qu'ils refufent d'entendre mes
raifbns pourceque ie les explique en langue vulgaire.
Au refte ie ne veux point parler icy en particulier des
progre's, que i'ayelperance de faire a l'auenir dans les
fciences, Ny m'engagerenuersle*public d'aucune pro-
oiefle, que ie ne fois pas aflure'd'accomplir: Mais ie diray*
\, 3                      feule-
/
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78 Discours De La Methode.
feulement que i'ay refolu,de n'employer le terns qui me
refteaviure.a autre chofe,qu'atafcher d'acquerir quel-
que connoiflance de la Nature, qui foit telle, qu'on en
puifletirer des regies pourlaMedecine, plus aflurdes
que celles qu'on a eues iufques a prefent; Et que mon
inclinationmefloignefifortdetouteforte d'autresdef-
feins, principalement de ceux qui ne f§auroient eftre
vtilesauxvnsqu'ennuifantaux autres, que fi quelques
occafions me contraignoient de m'y employer , ie ne
croy point que ie fuffe capable d'y reuflir. De quoy ie
fais icy vne declaration, que ie f§ay bien ne.pouuoir fer-
uiramerendreconfiderabledans lemonde; mais aufly
n'ayie aucunement enuie de leftre: Et ie me tiendray
toufiours plus oblige"* ceux , par la faueur defquels ie
iouiray fans empefchement demon loifir j que ienefe-
rois a ceux qui m'offriroient les plus honorables emplois
de la terre.
FIN.
'
s
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- —— —- ■■ ■- ........                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                             ■■-■—- ......■ —- -                                                                                                                     ■ ■
LA     
DIOPTRIQUE.
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I
LA
DIOPTRIQVE
Difcours Premier
DE LA LVMIERE.
Oute la conduitede noftre vie depend
de nos fens, entre lefquels celuy de la
veiie eftant le plus vniuerfel & le plus
noble , il n'y a point de doute . que les
inuentions qui feruent a augmenter fa
puiflance, nefbyent des plus vtiles qui
puiffenteftre. Et il eft malaifed'entrouueraucune qui
rausmente dauantage que celle de ces merueilleufes
lunettes, quin'eftantenvfageque depuis pen,nous ont
defiade'couuertdenouueausaftres dans leciel, &d'au~
tres nouueaus obiets deiTus la terre en plus grand
norabre que ne font ceus, que nous y anions veus au-
parauant: en forte que portant noftre veiie beaucoup
plus loin que n'auoitcouftume d'aller ['imagination de *
nosperes, ellesfemblent nous avoir ouuertle chemin,
pour parvenir a vne connoiflance de la Nature beau-
coup plus grande & plus parfaite, qu'ils ne i'ont eue.
Maisalahonte denos fciences,cette inuention fi vtile
& fi admirable , n'a premierement efte" trouuee que
par l'experience & la fortune. Il y a enuiron trente
ans, qu'vn nomine" laques Metius de la ville d'Alcmar
en Hollande, honime qui n'auoic iamais eftudie', bien
qu'ileuft vnpere &vn frere qui ont fait profeflion des
A                           mat he-
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2                        LaDioptriclue
mathematiques,mais qui prenoit particulierement plai-
fir a faire des rairoirs & verres bruflans, en compofant
mefme I'hyuec auec de la glace jainfiquel'experience
a monftrd qu'on enpeutfaire; ayant& ceteoccafionplu-
fieurs verres de diuerfes formes,s'auifaparbonheur de
regarder aii trailers dedeus, dontl'uneftoitvnpeuplus
efpais au milieu qu'aux extremites, & l'autre au contrai-
)re beaucoup plus efpais ausextremite'squ'au milieu, &
il les appliqua fi heureufement aus deux bouts d'untu-
yau, que la premiere des lunettes, dont nous parlons,
en fut corapofee. Et c'eft feulement fur ce patron, que
* toutes les autres qu'on a veiies depuis, ont eftd faites,
fans que perfonne encore, que ie fgache , ait fuffifan-
ment determine'les figures que ces verres doiuentauoir.
Car, bienqu'ily ait eu depuis quantite de bons efprits,
qui ont fort cultiue' cete matiere , &ont trouuda fon
occafionplufieurs chofes eu i'Optique qui valent mieux,
que ce que nous en auoientlailTBles anciens,toutefois
acaufeque les inuentions vn peu malayfe'es n'arriuent
pas a leur dernier degrd de perfection du premier coup,il
eft encore demeure affe's de difficulte'z en celle cy, pour
me donner fnjet d'en efcrire.Et d'autant que l'execution
des chofes queie diray, doit dependre de l'induftrie des
artifans,qui pour l'ordinaire n'ont point eftudie' , ie ta-
fcheray de me rendre intelligible a tout le monde, & de
nerienomettrenyfuppofer , qu'on doiue auoir pppris
des autres fciences. C'eft pourquoy ie comenceray par
l'explication de lalumiere&de fes rayons -t puis ayant
fait vnebrieuedefcription des parties de 1'ceil, ie diray
particulieremet en quelle forte fe fait la vifiofl; & en fuite
ayant
i
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Discours Premier.                      3
ayantremarqud toutes les chofes qui font capablesdela
rendreplusparfaite, i'enfeigneray comment elles ypeu-
uent eftre adiouftdes par Ies inuentions que ie de-
fcriray.
Or n'ayant icy autre occafiondeparlerde Ialumiere,
que pour expliquer comment fes rayons entrent dans
l'ceil,& comment ils peuuent eftre ddtournds paries di-
vers cors qu'ils rencontret,iln'eft pas befoin quei'entre-
prene de dire au vray quelle eft fa nature, & ie croy qu'il
fuffira que ie meferue de deus ou trois comparaifons, qui
aydentalaconceuoirenla faconqui me femble la plus
comode, pour expliquer toutes celles de fes proprietes»
quel'experieuce nous fait connoiftre,&pour deduire en
fuite toutes les autres qui ne peuuent pas fi ayfdmet eftre
remarqudes. Imirant en cecy les Aftrondmes , qui,
bienqueleurs fuppofitionsfoyent prefque toutes fauffes
ou incertaines, toutefois a caufe qu'elles fe rapportent a
diuerfes obferuations qu'ils ontfaites,nelaiffent pas d'en
tirerplufieurs confequences tres vrayes&tres affuree's.
H vous eft bien fans doute arrive' quelque fois en mar-
chat de nuit fans flambeau,par des lieux vn peu difficiles,
qu'il falloit vous ayder d'vnbafton pour vous conduire,
& vous auds pour lors pu. remarquer, que vous fentids
par l'entremife de ce bafton, les divers obiedts qui fe
rencontroyent autour de vous, & mefme que vous pou-
uids diftinguer s'il y auoitdes arbres,oudespierres, ou
du fable, oudel'eau, ou de l'herbe, ou de la boiie, ou
quelqu'autre chofe de femblable. 11 eft vray que cette
forte de fentiment eft vn peu confufe & obfeure, en
ceus, qui n'enont pas vn long vfage: mais confiderds la
A 2                            en
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4                     LaDioptri o^u e
en ceus, qui eftant nes aueugles, s'en font feruis toutc
lenrvie, & vous l'y trouuere's fi parfaitte, & fi exacte,
qu'on ppurroit quafi dire qu'ils voyent des mains,ou que
Ieur bafton eftl'organe de quelque fixjefme fens, qui
leur a eftddonne" au defautde la veue. Etpourtirer
vne comparaifon de cecy,ie defire que vous penfids,
que la lurnieren'eft autre chofe dans les corps qu'on
nomine lumineux , qu'vn certain mouuement, ou vne
action fort promte, & fort viue , qui paffe vers nos
yeux, par l'entremife de l'air & des autres corps tranfpa-
rens en mefmefacon que le mouuement ou la refiften-
ce des corps, que rencontre cet aueugle, paffe vers
fa main , par l'entremife de fon bafton. Ce qui vous
empefchera d'abord de trouuer eftrange , que cefte
lumiere puiffe eftendre fes rayons en vninftant, depuis
le foleiljufques a nous: car vous fcauds que Taction,
dont on meut l'vn des bouts d'vn bafton, doit ainfy
pafiTer en vn inftant iufques a l'autre, Scqu'elie y deuroit
paffer en mefme forte, encores qu'il yauroitplusdedi-
ftance qu'il n'y en a depuis la terre iufques aux cieux.
Vous ne trouverds pas eftrange non plus, que par fon
moyen nous puiffions voir toutes fortes de couleurs i Et
mefme vous croyrds peuteftre que ces couleurs ne font
autre chofe dans les corps qu'on nomme coIords,que les
diuerfes fagons, dont ces corps la regoyuent & la renuo-
yent contre nos yeuxrli vous confiderds que les differen-
ces , qu'vn aueugle remarque entre des arbres, des pie-
res, de l'eau, & chofes femblables,par l'entremife de fon
bafton,ne luyfemblent pas moindres, que nous font
celles, qui font entre le rouge, le jaune , le verd, & tou-
tes
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D i s c o u it s Premier.                    r
tes les autres couleurs; & tautefois que ces differences
ne font autre chofe entous ces corps, que les diuerfes
facons de mouuoir, ou de refifter aux mouuemens de ce
bafton. En fuite de quoy vous aurds occafion de iuger,
qu'il n'eft pas befoin de fuppofer qu'il palfe quelque
chofe de materiel, depuis les obiecls iufques a nos yeux,
pour nous fairevoir les couleurs & la lumiere , nymef-
me qu'il y ayt rien en ces obieds, qui foit femblable aux
idees, ou aux fentimens que nous en ations: tout de
mefme qu'il ne fort rien des corps, quefent vnaueugle,
qui doiue pafter Ie long de fon ballon iufques a fa
main,& que la refiftence ou le mouuement de ces corps,
quieftlafeulecaufedes fentimens qu'il en a, n'eft rien
de femblable aux iddes qu'il en congoit. Et par ce mo-
yen voftre efprit fera deliure de toutes ces petites ima-
ges voltigeantes par fair, nominees des effects intentio-
nelles,
qui trauaillent tant l'imagination desPhilofophes.
Mefme vous pourres ayfe'ment decider la queftion, qui
eft entre eux, touchant le lieu d'ou vient faction oui
caufe le fentiment de la veiie. carcoinme noftre aueu-
gle peutfentirles corps qui font autour de luy, nonfeu-
lement par l'adtionde ces corps, lors qu'ils fe meuuent
contre fon bafton, mais aufly par celle defa main , lors
qu'ils ne font que luy refifter: ainfy faut il auoiier, que les
obiedtsde la veiie peuuenteftre fentis, non feulement
. parlemoyende Faction, quieftant en eux, tend vers
les yeux; mais auflfy par le moyen de celle, qui eftant
dans les yeux, tend vers eux. Toutefois pour ce que
cefte action n'eft autre chofe que la lumiere, il faut re-
marquet qu'il n'ya queceux qui peuuentvoir pendant
A 3                            les
-ocr page 85-
6                            LA DlOPTRl Q^U E
les tenebres de la uuitjCome les chats, dans les yeux def-
quels elle fe trouue: & que pour l'ordinaire des hommes,
ils ue voyent que par Taction qui vient des obiects j car
l'experience nous monftre que ces obiects doiuent eftre
lumineuxou illurnine's pour eftre veus, & non point nos
ycux pour les voir. Mais pour ce qu'il y a grade differece
cntre le bafton de cet aueugle, & Fair ou les autres corps
tranfparens, par l'entremife defquelsnous voyons; il faut
que je me ferue encores icy d'vneautre comparaifon.
Voye's vne cuue au temps de vendange , toute
pleine de raifins a demi foule's, & dans le fons de la
quelle on ait faitvn trou oudeux, comme A & B,
par ou le vin doux , qu'elle contient , puifle cou-
ler . Puis penfe's que n'y ayant point de vuide en
la Nature , ainfy que preTque tous les Philofophes a-
uouent, & neantmoins y ayant plufieurs pores en tous
Iescorpsque
nous aper-
ceuons au
tour de
nous , ainfy
que 1'expe-
rience peut
moftrer fort
clairement;
ileft necef-
faireque ces pores foyent remplis de quelque matiere
fort fubtile & fort fluide , qui s'eftende fans interru-
ption depuis les Aftres iufques a nous. Or cefte ma-
tiere fubtile eftantcompardeauec le vin de cefte cu-
-ocr page 86-
DiscoursPremier.                   7
ue , & les parties moins fluides ou plus groflieres
taot del'air, que des autres cors tranfparens, anec les
grappes de rai fins qui font parmi : vous entendrds fa-
cilement, que comme les parties de ce vin , qui
font par exemple vers C, tendent a defcendre enli-
gnedroite par le trou A, aumefme inftant qu'ileft ou-
uert, & enfemblepar letrou B, & que celles qui font
versD, & versE, tendent aufly en mefine tems a def-
cendre par ces deux trous, fans qu'aucune de ces actions
foit empefche'e par les autres, ny aufly par la refiftencc
des grappes qui font en cefte cuue; non obftant que ces
grappes, eftant fouteniies 1'vne par l'autre, ne tendent
point du tout a defcendre par ces trous A &B, comme
le vin j & mefme qu'elles puifTent cependat eftre meiies
en plulieurs autres fa§ons, par ceux qui les foulent. Ain-
fy toutes le s parties de la matiere fubtile, que touche le
cofte du Soleil qui nous regarde , tendent en ligne
droite vers nos yeux au mefine inftant qu'ils font ou-
uers, fans s'empefcher les vnes les autres, & mefme fans
eftre empefch(5es par les parties groflieres des cors tran-
fparessqui fontentre deux: foit que ces cors fe meuuent
en d'autres fa§ons, comme l'air, qui eft prefque tou-
fieurs agite' par quelque vent -, foit qu'ils foyent fans
mouuemeurvcomme peut eftre le verre ou le criftal. Et
remarques icy qu'il faut diftinguer entre le mouuemenr,
& Taction ou inclination a fe mouuoir. Car on peut fort
bien conceuoir que les parties du vin,qui font par exem-
ple vers C, tendent vers B, & enfemble vers A, non ob-
ftant qu'elles ne puifTent adtuelfement fe mouuoir vers
ces deuscoftds en mefme temps^ & qu'elles tendent ex-
adte-
-ocr page 87-
8                        La Dioptrique
aclrement en ligne droite vers B 8c vers A, non obftant
qu'elles ne fe puiffent mouuoir fi exactement vers la
enlignedroite, acaufe des grapes de raifins qui font
entredeux : & ainfy penfant que ce n'eft pas taut Ie
niouuement, comme Taction des cors lumineus qu'il
faut prendre pour leur lumiere,vous deuds inger que les
rayons de cette lumiere ne font autre chofe, que les li-
gues, fuiuant lefquelles tend cette a&ion. En forte qu'il
y a vne infinite de tels rayons qui vienent de tous les
poins des cors lumineus, vers tous les poins de ceus qu'ils
illuminent, ainfy que vous pouues imaginer vne infinite
delignesdroites , fuiuant lefquelles les actions qui vien-
ent de tous les poins de la fuperficiedn vin C D E, ten-
dent vers A, & vne infinite d'autres , fuiuant lefquelles,
les actions qui vienent decesmefmes poins, tendent
auffy versB. fans que les unesempefchent les autres.
An refte ces rayons doiuentbien eftre ainfy toufiours
imagines exactementdrois, lors qu'ils ne paffent que
par vn feul cors tranfparent, qui eft par tout efgal a foy-
mefme: mais lors qu'ils rencontrent queiques autres
cors, ils font fujets a eftre de'tourne'spareux, ouamor-
tis, en mefme facon que l'eft Ie mouuement d'vne balle,
ou d'vne pierre iettde dans l'air, par ceux qu'elle rencon-
tre. Car il eft bien ayfe a croire que Taction ou inclina-
tion a fe mouuoir, que i'ayditdeuoir eftre prifepour la
lumiere, doit fuiure en cecy les mefmes loys que le
mouuement. Et afin que l'explique cette troifiefme
comparaifon tout au long, confidere's que les corps, qui
peuuent ainfy eftre rencontres par vne balle qui paffe
dans fair, font ou mous,ou durs, ou liquides; & que s'ils
font
-ocr page 88-
Discours Premier.                 9
font mouSjils arreftet & amortiffent tout a fait fon mou-
uement: comme Iors qu'elle donne contre des toiles,
ou du fable, ou de la boUe'; au lieu que s'ils font durs, lis
la renuoyent d'vn autre cofte' fans 1'arrefter; & ce en
plufieurs diuerfes facons: Car ou leur fuperficie eft tou-
.te efgale & vnie, ou rabotteufe & inegale; 8c derechef
eftaut efgale,elle eft ou platte, ou courbee : & eftant in-
egale, ou fon inegalite'ne confifte, qu'en ce qu'elle eft
corapofee de plufieurs parties diuerfement courbees,
dont chacune eft en foy aire's vnie; ou bien elle confifte
outre cela,en ce qu'elle a plufieurs diuers angles ou poin-
tes, ou des parties plus dures l'vne que l'autre, ou qui fe
meuuent, & ce auec des varietes qui peuuent eftre
imaginees en millefortes. Etilfaut remarquer que la
bale, outre fon mouuementfimple & ordinaire , qui la
porte d'vn lieu en l'autre , en peut encores auoir vn
deuxiefme, qui lafaittournerautour de fon centre, &c
que la vitefle de ceftuy cy peut auoir plufieurs diuer-
fes proportions aueccelledel'autre.Orquand plufieurs
bales venant d'vn mefrne cofte, rencontrentvn cors,
dont la fuperficie eft toute vnie & efgale, elles fe ■ refle -
fchiflent efgalement, & en mefrae ordre , en forte
que fi cette fuperficie eft toute plate, elles gardent
entre elles la mefme diftance, apres l'auoir rencontre'e,
qu'elles auoyent auparauant. & fi elle eft courbee en
. dedans, ou en dehors, elles s'a-pprochent, ou s'efloig-
net enmefine ordre les vnes des autres, plusbu moins,a
raifon de cefte courbure. Comme vous voyes icy les ba-
les ABC, qui, apres avoir rencontre'les fuperficies des
cors D E F, fe reflefchiflent vers G H I. Et fi ces bales
B                       rencon-
-ocr page 89-
10 *                  LA DlOP.TRIQJiE
rencontrent vne fuperficie inefgale, cornme L,ou M,
ellesfereflefchiffentversdiuers coftes, chafcune felon
*^V>AAAAA/                            ^v^a^n^sawN/vsas^/
M                                    L,
la fituatio de I'endroit de cefte fuperficie qu'elle touche.
Et elles ne changent rien que cela en la fa§on de leur
mouuement, lors rue fon inefgalite' ne confifte qu'en
ce quefes parties font courbeesdiuerfement.Mais elle
peut aufTy confifter en plufieurs autres chofes & faire
par ce moyen que fi ces bales n'bnt euauparauant qu'vn
lirnple mouuement droit, elles en perdent vne partie,&
en acquerent au lieu vn circulaire, qui peut auoir diuerfe
proportion auec ce qu'elles retienent du drqit,felon que
la fuperficie du cors qu'elles rencontrent peut eftre di-
uerfement difpofee. Cequeceux qui iouent a la paunie
efprouuent aflcs, lors que leur bale rencontre de faux
quareaux, ou bien qu'ils latouchent en biaifantde leur
raquette, ce qu'ils noment, ce mefemblecoupper oufri-
fer. En fin oonfidere's que fi vne bale qui fe mcut rencon-
tre obliquement la fuperficie d'vn cors liquide,par le-
quel elle puiflc paffer plus oumoins facilement,que par
celuy d'ou elle fort, elle fede'tourne 8c change fon cours
en
-
-ocr page 90-
Discours Premiek,                  ii
enyentrant:come par exemple,fieftant en l'airau point
A on la pouffe
vers B, elle va bien
en ligne droite de-
puisAiufques a B,
ficen'eftquefa pe-
JHEM| fanteur ou quelqu'
autre caufe parti-
culiere l'enempef-
che, maiscftantau
point B ou ie fup-
pofe qu'elle rencontre lafuperficiedel'eau CBEellefe
decourne & prend fon coUrs vers I,allat derechef en ligne
droite depuis B iufqnes a I,ainfy qu'il eft ayfe'a verifier par
l'experience. Or ilfautpenferenmefme fac^on, qu'il y a
des cors qui eftant rencontres par les rayons de la lumiere
lesamortiffent, &leuroftenttoutcleur force, a f§auoir
ceux qu'on nome noirs,les quels n'ont point d'antre cou-
leurquelestenebres. Etqu'ilyenad'autres qui les font
reflefchir, les vns au mefme ordre qu'ils les recoiuent • a
f§auoirccux quiayantleur fuperficie toutepolie peuucnt
feruirdemiroirstant plats que courbes, & les autrescon-
fufement vers plufieurs cofte's. Et que derechef entre
ceux cy les vns font reflefchir ces rayons fans aporter au-
cun autre changemet en leura&:ion;a fc, auoir ceux qu'on
nornme blancs : & les autres y aportent auec cela vn
changement femblable a celuy que re§oit le raouue-
mentd'une ballequandon lafrize • a fcauoir ceux qui
font rouges, ouiauneSjOU bleus, on de quelq; autre tel-
le couleur. Car ie penfe pouuoir determiner en quoy
B 2                     con-
■ -■■- '- ■ -' '■'■-.' : - .r.:_
-ocr page 91-
ix                    La DiopTRioaiE
confifte la Nature de chacune de ces coujeurs, & le fai-
re voir par experience; mais cela pafTe les bornes de
monfuiet. Ec ilme fuffit icy de vous auertir, que les
rayons,qui tombent furies cors qui font colort's, & non
polis,fe reflefchnTent ordinairement de tous coftesven-
cores mefme qu'ils ne vienent que d'vn feul code. Com-
me encore que ceux qui tombent fur la fuperficie du
cors blanc A B , ne vienent
que du flambeau C,ils ne laif-
fent pas de fe reflefchirtelle-
ment de tous coftes, ■ qu'en
quelquelieu qu'onpofe l'oeil,
comme par exemple vers D,*
il s'en trouue toufiours plufieurs venans de chafque
endroit de cefte fuperficie A B,qui tendent vers luy. Et
melinefiTonfuppofe ce cors fort delie comme vn papier
ou vne toile,en forte que le ipur paffe au trauers,encores
que Tceil foit d'autre cofte' que le flambeau, comme
vers E,ilnelairra pas de fe reflefchir vers luy quelques
rayons de chacune des parties de ce cors. En fin con-
fideres que les rayons fe detournentauffy, en mefme fa-
c,on qu'il a efte'dit d'vue bale, quand ils rencontrent ob-
liquement la fuperficie d'vn cors tranfparant, par lequel
ils penetrent plus ou moins facilement, que par celuy
d'ou ils vienent,& cette fae,on de fe de'tourner s'apelle en
eux Refraction.
DE
-ocr page 92-
Discours Second.                      13
DE LA REFRACTION
cT>'ijc.Giir$ Second.
TV A utant que nous anrons befoin cy apr es de fca-
-■-^uoirexa&ement laquantite'de cette refraction, &
qu'elle peut affes commodc'menteftre entendue par la
comparaifon,dont ie viens de me feruir, ie croy qu'il eft
a propos, que ie tafche icy tout d'vn train de l'expliquer,
&queieparleprernierementde la reflexion, arm d'en
rendrel'intelligeuced'autant plus ayfe'e." Penfons done,
qu'vnc bale eftant
pouffe'ed'A versB,
rencontre au point
B, la fuperfkie de
laterre C BE, qui
I'empefchant de
pafTer outre , eft
caufe qu'elle fe de-
tourne ; & voyons
vers quel coftd. Mais afin de ne nous embarafler point en
desnouuelles difficulte's, fuppofons que laterre eft par-
faitement platte & dure, & que la balle va toufiours
d'efgalevitefle, tant en defceodant, qu'en remontant,
fans nous enquerir en aucune fa§on de la puiflance, qui
continue de la mouuoir, apres qu'elle n'eft plus tou-
chee delaraquette,nyconfiderer aucun effect: de fa pe-
fanteur, ny de fa groffeur, ny de fa figure. Car il n'eft
pas icy queftiond'y regarder de fi pre's, & il n'y a aucune
B 3                        de
-ocr page 93-
14                           L A DI O P T R I QJ.1 E
de ces chofes qui ait lieu en l'a&ion de la lumiere a la
quelle cecy fe doitrapporter. Seulement fant il remar-
quer, que la puiffance,telle qu'elle foit,qui fait cotinuer
le mouuemet decefte balle,eftdifferente de celle,qui la
determine a fe mouudir pluftoft vers vn cofte'.que vers
vn autre, ainfy qu'ileft tre'sayfe'a cognoiftrede ce que
c'eftla force dont elle a efte'pouffee par la raquette, de
qui depend foil mouuement, & que cefte rnefme force
l'auroit pu faire mouuoir vers tout autre cofte', aufly fa-
cilement que vers B,au lieu que e'eft la fituation de cefte
raquette qui la determine a tendre vers B, & qui auroit
pu l'y determiner en mefme fac,on,encores qu'vne autre
force l'auroit mene. Ce qui monftre defia qu'il n'eft
pas impoflible que cefte ballefoit de'tournee par la ren-
contre de la terre, & ainfy que la determination qu'elle
auoit a tendre vers B foit changee, fans qu'il y ait rien
pour cela de change en la force de fon mouuement, puis
que ce font deux chofes diverfes: &par coufequent
qu'onnedoit pas imaginer qu'il foit necefTaire qu'elle
s'arefte quelque moment au point B auant que de re-
tourner vers F, ainfy que font plufieurs de nos Philofo-
phes; car fi fon mouuement eftoit vne foix interrompu
parcet arreft, ilnefetrouueroitaucunecaufe,qui lefift
par apres recommencer. De plus il faut remarqiier,que
la determination a fe mouuoir vers quelque cofte', pent
auify bien que le mouuement, & generalement que tou-
te autre forte de quantite" eftre diuife'e en toutes les par-
ties, defquelles on peut imaginer qu'elle eftcompofe'e.
& quon peut ayfement imaginer que celle de la balle
qui femeutd' A vers B eft compofee de deux autres,
dont
-ocr page 94-
Discours Second. •          i^
dontl'vnelafaitdefcendredelaligne A F. verslaligne
CE, &l'autreen mefme temps la fait aller de la gau-
che A C , vers la
^\v
H >^/
I l
■s
£
J
E 1
droite FE, en for-
te que ces deux
iointes enfemble
la conduifent iuf-
ques a B fuiuant
la ligne droite A
B. Et en fuite il
eft ayfe a enten-
dre, que la rencontre de la te'rre ne peut empefcher cuje
1'vnedeces deux determinations, &non point l'autre en
aucune facon. Carelle doit bien empefcher celle qui
faifoit defcendre la balle d'A F vers C E,a caufe qu'elle
occupe tout l'efpace qui eft audeflbus de C E, mais
pourquoy empefcheroit elle l'autre, qui la faifoit auan-
cer vers la main droite, vu qu'elle ne luy eftfucune-
mentoppofeeen ce fens-la? Pour trouuer done iufre-
ment vers quel cofte" cefte balle doit retourner, defcri-
uons vn cercle ducentre B, qui pafle par le point A, &
difonsquenautantde temps qu'elle aura mis a fe mou-
uoir depuis A iufques a B,elle doit infalliblement retour-
ner depuis B iufques a quelq; point de la circonference
de ce cercle ,d'autat que tous les points qui font aufly di-
ftans de ceftuy cy B,qu'en eft A ,fe trouuent en cefte cir-
conference^ que nous fuppofons le mouuemet de cefte
balle eftre toujours efgalemet vifte. Puis a fin de f§auoir
precifement au quel de tous les points de cefte circon-
ference elle doit retourner, tirons trois lignes droites
AC,,
-ocr page 95-
i6                   ILa Dioptrioue
AC;HB,&FE perpehdiculaires fur CE,& en telle for-
te, qu'i I n'y ait ni plus ni moins de diftance entre A C, &
H B,qu'entre HB,&FE: & difons, qu'en autant de
temps,quela bale a mis a s'auancer vers le cofte"droit,
depuis A, lVn des poins de la ligne A C, iufques a B Pvn
de ceux de la ligne H B, elle doit auffy s'auancer depuis ■
la ligne H B, iufques a quelque point de la ligne F E. car
tousles poins de cefte ligne F E, font autant efloignds
deHBencefensla,Tvn comme Tautre, & autant que
ceux de la ligne AC, & elle eft aufTy autant deterrnine'e
a s'auancer vers ce cofte'-la, qu'elle a efte auparanaut. Or
ejj,il, qu'elle ne peut arriuer en mefme terns en quelque
point de la ligne FE, &enfemble a quelque point de la
circonference du cercle A F D, fi ce n'eft au point D, on
au point F,d'autant qu'il n'y a que ces deux, ou elles s'en-
trecoupent 1'vne Tautre;fi bien que la terre Tempefchant
de paf% r vers D, il faut conclure qu'elle doit aller infal-
liblementvers F. Etainfivous voye's facilement, com-
ment fe fait la reflexion, afgauoirfelon vn angle tou-
fiours efgalaceluyqu'onnomme Tangle d'incidece. Co-
me fi vn rayon, venant du point A, tombe au point B fur
lafnperficiedumiroirplat CBE, ilfereflefchift versF,
en forte que Tangle de la reflexion FBE , n'eft ne plus
ne moins grand que celuy de Tincidence ABC.
Venons maintenant a la Refradtion. Et premitrement
fuppofbns qu'f ne bale poufTe'e d'A vers B, rencontre au
point B, no plus la fuperficie de la terre, mais vne toile C
B E, qui foit fi foible & delie'e que cefte bale ait la force
delardmpre&depaffertout au trailers,enperdant feu-
lement unepartiedefaviteiTe, afgauoir, parexemple,la
moitie".
-ocr page 96-
•'
Discours Second.                       f$
moilie. Or cela pofe , a fin de fcauoir quel chemin elle
doit fuiure,confiderons derechef, que fon inouuement
differe entieremet
§/^H
"""""""V^
F
K
B E
i
• ■
\
de fa determina-
tion a fe mouuoir
pluftoft vers vn co-
ftd que . vers vn
autre , d'ou i\ fuit
que leur quantity
doit eftre exami-
nee feparcment .
Et confiderons auf-
fy que des deux parties, dont on peut imaginer que
cefte determination eft compofee, il n'y a que celle qui
faifoit tendre la bale de haut en bas, qui puifle eftre cha-
gde en quelque facon par la rencontre de la toile; & que
pour celle qui la faifoit tendre vers-la main droite, elle
doit toufiours demeurer la meime qu'elle a efte", a caufe
quecette toile ne luy eft aucunemet oppofHe en ce lens-
la. Puis ayant defcrit du centre B Ie cercle A F D,& tire
a angles droits fur CBE les trois lignes droites A C,
H B,FE,en telle forte qu'ily ait deux fois autant de di-
ftanceentre FE & H B, qu'entre H B &-AC, nous
verrons que cefte bale dqit tendre vers Ie point I. Car
puis qu'elle perd la moitie de fa vitefTe, en trauerfant la
toile C B E, elle doit employer deux fois autant de terns
apaflerau defTous.depuis B, iufques a quelque point de
la circonfereuce du cercle A F D, qu'elle a fait au deffus
avenirdepuis A,iufques a B. Et puis qu'elle ne perd
riendu tout de la determination qu'elle auoit a s'auan-
C           .               cer
i.
-ocr page 97-
i8                      La Dioptrique
cer vers le coftd droit, en deux fois autant de temps,
qu'elle en a mis a paffer depuis la ligne AC,iufques a
HB, elledoitfaire deux fois autant de chemin vers cc
mefme coftd, Etparconfequencarriuera quelque point
de la ligne droite FE , au mefme inftant qu'elle arriue
auffi a quelque point de la circonference du cercle A F
D. Cequi feroit impoflible, fi elle n'alloit vers I, d'au-
tant que c'eft le feul point au deffous de la toile C B E,ou
le cercle AFD, & laJigne droite F E, s'entrecoupeot.
Penfons maintenaut que la bale qui vient d'A, vers D
rencontre au point B, non plus vne toile, mais de
l'eau, dont la fu-
perficie CBEluy
ofle iuftement la
moitiede fa vitef-
fe ainfi que faifoit
cette toile. Et le
refte pofd comme
deuant, ie dis que
cefte bale doit paf-
fer de B en ligne
droite non vers D,mais vers I. Carpremierement il eft
certain, que la fuperficie de l'eau la doit detourner vers
laenmefmefaconque la toile^vii qu'elle luy ofte tout
autant de fa force, & qu'elle luy eft oppofde en mefme
fens. Puis pour le refte du cors de l'eau qui remplift
tout l'efpace quieftdepuis B iufques a I, encores qu'il
luy refifteplus ou moins que ne faifoit l'air que nous y
fuppofions auparauant, ce n'eft pas a dire pour cela qu'il
doiueplus ou moins la-detourner: car il fe peut ouurir
pour
-ocr page 98-
»               Discours Second.                   ip
pour luy faire pafTage tout auffi facilement vers vn conM
que vers vn autre, au moins fi on fuppofe toufiours,
comme nous faifons, quenylapefanteurou legerete'de
ceftebale, nyfagroffeur, ny fa figure, ny aucune autre
telle caufe eftrangere ne change fon cours.Et on peut icy
remarquer,qu'elleeftd'autantplusdetourneepar la fu-
perficie de l'eau ou de latoile, qu'elle la rencontre plus
obliquemeut, en forte que fi elle la rencontre a angles
droits, comme lors qu'elle eft poufTe'e d' H,vers B, elle
doitpaffcr outre en lignedroite vers G fans aucunement:
fedetourner. Mais fi elle eft poufTe'e fuiuant vne Iigue,
comme A B, qui foitfi fort inclinde fur la fuperficie de
l'eau ou de la toile C B E, que la ligne FE eftant
tire'e , comme tantoft , ne coupe point le cercle A
D, cete bale ne doit
aucunement la pene-
trer, mais reiaillir de
fa fuperficie B, vers
I'air L,tout de mefme
que fi elley auoit ren-
contre de la terre. Ce
qu'on a quelque fois
cxperimetdauec regret,lors que faifanttirerpourplaifir
des pieces d'Artillerie vers le fous d'vne riuiere, on a
blcfTe^ceux quieftoyent de 1'autre coftd fifr le riuage.
Mais faifons encore icy vne autre fuppofition, &: pen-
fonsquela bale, ayant eftd premiereraent poufTe'e d'A,
vers B, eft poufTde derechef eftant au point B, par la ra-
quette CBE, qui augmente la force de fon mouue-
ment, parexemple, d'vn tiers, en forte qu'elle puifTe
C z                     faire
-ocr page 99-
20                     LaDioptriqjue
faire par apre's autant de chemin en deux momens, qu'el-
leen faifoit en trois auparanant. Ce qui fera le mefme
effect, que fi el-
Ie rencontroit au
point B vn cors de
telle nature, qu'el-
le paflaft au tra-
ilers de fa fuperfi-
cie C B E, d'vn
tiers plus facile-
mentqueparl'air.
Et il fine manife-
flcment de ce qui a efte* defia demonftre , que fi
Ion defcrir le cercle AD comme deuant,& Ies Iignes
A C, H B, F E, en telle forte qu'il y ait d'vn tiers moins
dediftance entre FE & H B>qu'entre H B & A C, le
point I,ou la ligne droite F E,& la circulaire A D, s'en-
trecoupent, defignera le lieu vers lequel cefte bale
eftantau point B, fe doitdetourner.
Or on peut prendre auffi le reuers de cette conclufion
& dire que puis que la bale qui vientd'A en ligne droi-
te iuf ques a B.fe detourne eftant au point B,& prend Ton
coursde la vers I, cela fignifie que la force ou facility,
dont elle entre dans le cors C B E I,eft a celle, dont elle
fortdu cors. A C BE, comme la diftance qui eft entre
A C & H B, a celle qui eft entre H B & FI, e'eft a dire
comme la ligne CB eft a BE.
En fin d'autant que Taction de la lumie re fuit encecy
les mefmes loix que le mouuemeut de cette bale ,
il faut dire que lor> que fes rayons pafTent obliquement
d'vn
J
-ocr page 100-
Disc ours Second.                    zt
d'vncors traniparantdansvnautre, qui Ies re$oit plus
oumoinsfacilementquele premier, ilss'y detournent
entelleforte,qu'ilsfetrouuenttoufiours moins incline's
fur la fuperficie de ces cors, du cofte" ou. eft celuy qui les
recoit le plus ayfernent, quedu cofte^ou eft l'autre: &
ceiuftement a proportion decequ'il les rec,oit plus ay-
fernent que ne fait l'autre. Seulement fant-il prendre
garde que cette inclination fe doit mefurer par la quan-
tity des lignes droites, comme CBouAH, & E B ou
IG, & femblables, compardes les vnesaux autres; non
parcelle des angles, tels que font ABH, ou GBI, ny
beaucoup moins par celfe des femblables a D B I, qu'on
nomme les angles de Refraction. Car la raifon ou pro-
portion qui eft entre ces angles, varie a toutes les diuer-
fes inclinations des rayons- au lieu que celle qui eft entre
les lignes AH & I G ou femblables , demeurelamef-
me en toutes les refractions qui font caufees par les mef-
mescors. Comme par exernp!e,s'ilpaiTeva rayon dans
1 air dA,vers B, qui rencontrant au point B la fuperficie
«
-ocr page 101-
22                      La Dioptriclue
lignes KM & LN, ou PQ^& ST, qu'entre AH&
IG, maisnon pas la mefme entre les angles KBM &
LBN, on P R Q & S RT, qu'entre A B H & IBG.
Si bien que vous'voyes maintenant en quelle forte fe
doiue.nt mefurer fes refractions; & encores que pour de-
terminer leurquantiie,entantqu'elle depend de la Na-
ture particulieredescorsouellesfe font, il loit befoin
d'enveniral'experience, onne laiffepasde h pouuoir
faire afles certainement & ayfement, depuis qu'elles
lont ainfi toutes reduites fous vne mefme mefure i car il
fiiffit de les examiner en vn feul rayon pour cognoiftre
toutes celles qui fefont en vne mefme fuperficie, & on
peut euitertoute erreur,fi on les examine outre celaen
quelques autres. Comme li nous voulons f§ auoir la quan-
tite'de celles qui fe font en lafuperficie C B R,qui fepare
fair A K P, du verre LIS; nous n'auons qu'a Tefprouuer
en celle du rayon A B I, eu cherchant la proportion qui
eft entre les lignes AH & IG. Puis fi nous craignons
d'auoirfail-
li en cefte
experien-
ce , il faut
encores
l'efprouuer
en quel-
ques autres
rayons ,
comme KBL,ou PRS, & trouuant mefme propor-
tion de KM a L N, & de PQ^aST, que d'AHalG,
nous n'auros plus aucune occafio de douter de la verite.
• Mais
-ocr page 102-
Discours Second*                     23
Mais peuteftre vous eftonneres vous en faifant ces
experiences, de trouuer que les rayons de-la Iumiere
s'inclinent plus dans fair, que dans 1'eau, fur les fuperfi-
ciesoufefaitlenrrefraction ■ & encores plus dans l'eau
que dansle verre, tontauconrraire d'vne bale qui s'in-
clined'avantagedans feau que dans fair, &nepeutau-
cunement pafler dans le verre. Car par exemple,fi c'eft
vnebale, qui eftant pouffee dans fair d'A,vers B, ren-
contre au point B la fuperfkie de feau CB E, elle fe de-
tournera de B vers
V i & fi c'eft vn ra-
yon , il ira tout au
contrairede B,vers
I. Ce que vous cef-
feres toutesfois de
trouuer eftrange, fi
vous vous fouuencs
de la nature que fay attribue'e a la lumiere,quand i'ay dit
qu'elle n'eftoit autre chofe, qu'vn certain mouuemenn
ouvne action receue en vne matiere tres-fubtile, qui
remplift les pores desautres cors: & quevousconfide-
deries, que comme vne bale perd d'avantage de /on agi-
tation, en donnant contre vn cors mou, que centre vn
qui eft dur; & qu'elle roule moins ayfement fur vn tapis,
que fur vne table toute nue. ainfi l'a&ion de cefte ma-
tiere fubtile, peut beaucoup plus eftre empefche'e par
les parties de Fair, qui eftant comme molles.& mal-ioin-
tes, ne luy font pas beaucoup de refiftance, que par cel-
lesdel'eau, quiluyenfontd'auantagej & encores plus
par celles de Feau, que par celles du verre, ou du criftal.
En
-ocr page 103-
24                           L A DlOPTRIQUE
En forte que d'autant que le? petites parties d'vn cors
tranfparant font plus dures & plus fermes, d'autant laif-
fent elles paffer lalumiere plus ayfement, car cette lu-
miere n'en doit pas chaffer aucunes hors de leur places,
ainfi qu'vne bale en doit chaffer de celles de l'eau, pour
trouuer paffage parmy elles.
Aurefte, fcachant ainfi lacaufe des refractions qui
fe font dans l'eau, & dans le verre, & communement
en tous les autres cors tranfparans qui font autour de
nous, onpeutremarquerqu'elles y doiuenteftre toutes
femblables, quand les rayons fbrtent de ces cors, &
voyesia qUand ils y entrent. Comme fi le rayon qui vient d'A,
lavage6 vers B, fe derpurue de B, vers I, en paffant de fair dans le
1 -; verre , celuy qui reviendra d' I, vers B , doit aufll fe de-
toumer deB,vers A. Toutesfoisiifepeut bien trouuer
d'autres cors, principalement dans le ciel, ou les refra-
ctions procedant d'autres caufes, ne font pas ainfi reci-
proques. Et il fe peut auffy trouuer certains cas, auf-
quels les rayons fe doiuent courber, encores qu'ils ne
paffent que par vn feul cors tranfparant. ainfi que fe
courbe fouuent le rnouuenient d'vne bale , pource
qu'elle eftdetourne'e versvncoftdparfapefanteur, &
vers vn autre par Taction dont on l'a pouffeej ou pour di-
verfes autres raifons. Car en fin i'ofe dire que les trois
comparaifons, dontieviens de me feruir, font fi pro-
pres, que toutes les particularity qui s'y peuuent re-
inarquer, fe raportent a quelques autres qui fe trouuent
toutes femblables en la Jumiere: mais ie n'ay tafche' que
d'expliquer celles qui faifoient le plus a mon fuiet. Et
ie ne vous veux plus faire icy confiderer autre chofe, fi-
non
4 ■■
-ocr page 104-
Discours Second.                   2j-
non que les fuperficies des cors tranfparens qui font
courbees, detournent les rayons qui paffentpar chacun
de Ieurs poins, en mefme forte que feroient les fuperfi-
cies plattes, qu'on peut imaginer toucher ces cors aux
mefmes poins. Comme par exemple, la refraction des
rayons A B, A C, A D, qui venans du flambeau A, tom-
bent fur la fuperficie courbe de la boule de criftal BCD,
doit eftre confidere'e en mefmc forte, que fi A B tomboit
fur la fuperficie plate E B F, & A C fur G C H, & A D
fur IDK, &ainfi desautres. D'ouvous voye's que ces
rayonsfepeuuent affembler, ou efcarter diuerfement,fe-
lon qu'ils tombent fur des fuperficies qui font courbees
diuerfement. Et H eft temps que ie commence a. vous
defcrire,qu'elle eft la ftru&ure del'ceil,afin de vous pou-
uoir faire entendre comment les rayons, qui entrent de-
dans, s'y difpofentpour canfer lefentimentde la veue.
D                       DE
-ocr page 105-
24                       LaDioptriqjie
DE LOEIL.
'Difcours ^Troiftefme .
C'Jl eftoitpoffibledecouperrqeilparlamoitie , fans
^queles liqueurs dontil eft rempli s'efcoulaffeut, m
qu'aucune de fes parties changeaft de place, & que Ic
plandelafe&ionpaffaft iuftement par le milieu de la
prunelle, il paroiftroit tel qu'il eft reprefentd en cefte
figure. A B C B, eft vne peau aire's dure & efpaifle, qui
compofe comme vn vaze rond dans lequel toutes fes
parties interieures font con-
tenues. D EF, eft vne autre
peau plusdelie'e, qui eft ten-
due ainfi qu'vne tapiiTerie au
dedans de la precedente. Z H,
eft le nerf nomme optique, qui
eft compofe' d'vn grand ncm-
bre de petits filets , dont les
extremite's s'eftendent en tout
Tefpace G HI, oii fe meflant
auec vne infinite' de petites
veines & arteres, elles com-
pofentvnefpecede chairextremement tendre & deli-
cate j laquelle eft comme vne troifiefme peau, qui cou-
ure tout le fons de la feconde. K L M, font trois fortes
de glaires ou humeurs fort tranfparentes, qui remplif-
fent tout Tefpace contenu au dedans de ces peaux, & ont
chacune la figure, en laquelle vous la voyes icy repre-
fentee.
*
-ocr page 106-
Discours Troisiesme.               27
feotee. Et ['experience monftre, que celle du milieu L,
qu'on nomrae l'humeur criftaline, caufe a peu pre's mef-
me refra&i on que Ie verreou lecriftal; & que les deux
autres K & M la caufent vnpeu moindre, environ come
l'eau comune, en forte que ies rayons de la lumiere, paf-
fent plus facilement par celle de milieu, que par les deux
autresj & encores plus facilement par ces deux, que par
1'air. En la premiere peau, lapartieB C Befttranfparete,
& vn peu plus voute'e que le refte B A B. En la feconde,la
fuperficie interieure de la partie E F, qui regarde le fons
del'ceil, eft toute noire & obfcure; &elle a au milieu
vn petit trou rond FF, qui eft ce qu'on nomme la pru-
uelle, &qui paroiftfinoir au milieu del'ceil, quand on
Ie regarde par dehors. Ce trou n'eft pas toufiours de
mefme grandeur, & la partie EF delapeauen laquelle
il eft, nageant librement dans l'humeur K, qui eft fort Ii-
quide, femble eftre comme vn petit mufcle, qui fe peut
eftrecir & eilargir a mcfure qu'on regarde des obiets
plus ou moins proches, ou plus ou moins efclairds, ou
qu'on les veut voir plus ou moins diftinctement. Et
vouspourre's voir facilement l'experience de tout cecy
enl'osild'vnenfant, carfi vousluyfaites regarderfixe-
ment vnobietproche, vous verrds que fa prunelle de-
uiendravn peu plus petite, que fi vous luy en faites re-
garder vn plus efloigne'', qui ne foit point auec cela plus
cfclaire'. Et derechef qu'encores qu'il regarde tou fiours
le mefme obiet, ill'aura beaucoupplus petite, eftant en
vrechambrefortclaire, quefi en fermaut la plus part
des feneftres on la rend fort obfcure. Et en-fin que de-
meurant au mefme iour, & regardant le mefme obiet,
D 2                       s'il
-ocr page 107-
2.%                    LA DlOPTRlQJlE
s'il tafche d'en diftinguer les moindres parties, fa pru-
nelle fera plus petite, que s'il ne le confidere que tout
entier, & fans attention. Et note's que ce mouuement
doiteftre appeley volontaire, non-obftant qu'ilfoit ordi-
nairement ignore' de ceux qui le font,car il ne laiffe pas
pour cela d'eftre dependant, & de fuiure de la volonte'
qu'ilsontdebienvoir • ainfiquelesmouuemens desle-
ures & de la langue qui feruet a prononcer les paroles, fe
nomment volontaires, a caufc qu'ils fuiuent de la volon-
te'qu'onade parler, nonobftant qu'on ignore fonuent
quels ilsdoiuenteftrepourferuira la prononciation de
chaque lettre. *EN,EN, font plufieurs pet its filets
noirs, qui embraflent tout au-
tourl'humeur marquee L, &
qui naiflans anffi de la fecon-
de peau 5en l'endroit ou la troi-
fiefme fe termine, femblent
autantde petits tendons, par
le moyen defquels cette hu-
meur L deuenant tantoft plus
voutde,tantoftplusplatte, fe-
lon rintention qu'on a de re-
garderdesobiets proches, ou
efloignp's, change vn peu toute
la figure ducors de l'ceil. Et vous pounds cognoiftre ce
mouuement par experience, car fi Iors que vous regar-
ded fixement vne tour ouvnemontaigueunpeuefloig-
ne'e, onprefente vnIiuredeuant vosyeux,vousn'y pour-
re's voirdiftin&ement aucune lettre, iufques a ce que
leur figure foit vn peu change'e. Enfin O O, font fix ou
fept
-ocr page 108-
Discours Troisiesme.                29
feptmufcfes attaches a 1'ceil par dehors, qui lepeuuent
mouuoir de tous cofte's, & mefme auffi, peut eftre, en le
preflant ou retiranf,ayder a changer fa figure. Ie laiffe
a deflein plufieurs autres particularite's qui fe remar-
quent en cefte matiere, & dont les Anatomiftes groflif-
fentleurs liures; car iecroyquecellcs que i'ayrnifesicy,
fuffirontpourexpliquertoutcequiferta monfuiet, &
que les autres que i'y pourrois adioufter, n'aydant en
rien voftre.intelligence, ne feroyent que diuertir voftre
attention.
DES SENS EN GENERAL.
^ifcours Quatrie/mc.-
"XT A is il faut que ie vous die maintenant quelquc
^v-*"chofe de la Nature des fens en general, arm de
pouuoir d'autantplus ayfemeutexplkjucren particulier
celuy de la veue. On f§ait defia afles que c'eft Tame qui
fent, & non le cors: caronvoit que lors qu'elle* eft di-
uertiepar vne extafe ou forte contemplation, tout le
corsdemeurefansfentiment, encores qu'il y ait diners
obiedts qui le touchent. Et on fc.ait que ce n'eft pas pro-
prement, entant qu'elleeft dans les membres qui fer-
uent d'organes aux fens exterieurs, qu'elle fent, mais
entant qu'elle eft dans le cerueau , ouelle exercecette
faculte'qu'ils apellenc le fens com muni car on voit des
bleffures & maladies qui n'offenfant que le cerueau feul,
empefchentgeneralement tous les fens, encores que le
reftedu cors ne laiffe point pour cela d'eftre am me. En
D 5                         fin.
-ocr page 109-
30                     La Dioptrique
fin onfc,aitque c'eft par l'entremife des Nerfs, que Ies
impre/fions qae font les obiets dans Ies membres exte-
rieurs, paruienet iufques a l'ame dans le cerueau: car on
voitdiuersaccidens, qui nenuifant a nen qu'a quelque
Nerf, oftent lefentimentdetoutes les parties du cors,
ouceNerfenuoye ces branches, fans riendiminuerde
celuy des autres. Mais pour fgauoir plus pcrticuliere-
ment en quelle forte l'ame demeurant dans le cerueau,
peut ainfi par l'entremife des Nerfs, receuoir les im-
preffions des obiets qui font au dehors, il faut diftinguer
trois chofes en ces Nerfs ; a f§auoir prcmierement les
peauxquiles enuelopent, & qui prenantleurorigine
decellesquienuelopentle cerueau,font comme depe-
titstuyaux diuifes en plufieurs branches , qui fevont
efpaudre c,a & la par tous les membres, en mefme fac,on
que les venes & les arteres. Puis Ieur fubftance interi-
eure, qui s'eftend en forme de petits filets tout lelong
de ces tuyaux, depuis le cerueau, d'ou elle prend fon ori-
gine,iufques aux extremite's des autres membres, ou el-
le s'attachej en forte qu'on peut imaginer enchacun de
ces petits tuyaux, plufieurs de ces petits filets indepen-
dans les vns des autres. Puis enfin les efprits animaux,
qui font comme vn air ouvn vent tres-fubtil, qui ve-
nantdeschambresouconcauites, qui font dans le cer-
ueau, s'efcoule par ces mefmes tuyaux dans Ies mufcles.
Or Ies Anatomiftes & Medecins auoiient affes, que ces
trois chofes fetrouuent dans les Nerfs; mais il ne me
femble point qu'aucun d'eux en ait encores bien diftin-
gue les vfages. Car voyant que les Nerfs ne feruelnt pas
feulement a douner le fentiment aux membres, mais
aulli
-ocr page 110-
DlSCOUKS QllATRIESME.                JI
auffialesmouuoir, &qu'ily a quelque fois des paraly-
fies,quioftent le mouuement, fans ofter pour cela le
fentiraent • tantoft ils ontdit, qu'il y auoit deux fortes
de Nerfs, dont les vns ne feruoyent que pour lesfens, &
Ies autres que pour les mouuemens i & tantoft que la
facultddefentir,eftoit dans les peaux ou membranes, 8c
que celJe de monuoir, eftoit dans la fubftance interieure
des Nerfs; qui font chofes fort repugnantes al'expenen-
ce & a la raifbn. Car qui a iammais pu remarquer aucun
Nerf, qui feruift au mouuement, fans feruir auffi a quel-
que fens > Et comment, fi c'eftoit des peaux que le fen-
timent defpendift, les diuerles impreflions des obiets
pourroyent elles par le moyen de ces peaux paruenir iuf-
ques au cerueau? Afin done d'euiter ces difficultes, il
faut penfer que ce font les eforits, qui coulauspar les
Nerfs dans les Mufcles, & les enflans plus ou moins, tan-
toft les vns, tantoft les autres, felon les diuerfes fac,ons
quele cerueau les diftribue, caufent le mouuement de
touslesmembres: & que ce font les petits filets, dont la
fubftance interieure de ces Nerfs eft compofe'e, qui fer-
uentausfens. Etd'autantqueie n'ay point icy befoin
de parler des mouuemens, ie defire feulement que vous
concerned, que ces petits filets eftans enfermes, comme
i'aydit, endestuyauxquifonttoufioursenfles & tenus
ouuers par les efprits qu'ils contienent, ne fe preffent ny
empefchentaucunement les vns les autres,& font eften-
dus depuis le cerueau iufques aux extremile's de tous les
membres qui font capables de quelque fentiment, en
telle forte que pour pcu qu'on touche & face mouuoir
lendroit de ces mebres, ou quelqu'vn d'eux eft attache^
on
-ocr page 111-
32                    LaDioptrique
on fait auffi mouuoir au mefme inftant l'endroit du cer-
ueau d'ouil vient, ainfi que tirant I'vn des bouts d'vne
corde quiefttoutetendue, on fait mouuoir au mefme
inftant 1'autre bout. -Car fcachant que ces filets font
ainfi enfermes en des tuyaux, que les efprits tienent tou-
fiours vn peu enfles & entre ouuerts, il eft ayfe' a enten-
dre qu'encores qu'ils fuflentbeaucoupplus Jelie's, que
ceux que filent les vers a fbye, & plus foibles, que ceux
des araigndes, ils ne lairroyent pas defe pouuoir eften-
dre, depuis la telle iufques auxmembres les plus efloi-
gne's, fans eftre en aucunhafard deferompre,nyqueles
diuerfes fkuations decesmembresempefchafTentleurs
mouuemens. II faut outre cela*prendre garde ane pas
fuppofer , que pour fentir, l'ame ait befoin de con-
templer quelques images qui foyent enuoye'es pas les
obiecls iufques au cerueau, ainfi que font commune-
ment nos Philofophes; ou du moins il faut conceuoir la
nature de ces images tout autrement qu'ils ne font. Car
d'autant qu'ils ne confiderent en elles autre chofe, finon
qu'elles doiuent auoir de la refemblance auec les ob-
jects qu'elles reprefentent, il leur eft impoflible de
nous monftrer, comment elles peuuent eftre forme'es
par ces obiects , & receues par les organes des fens
exterieurs , & tranfmifes par les Nerfs iufques au
cerueau. Et ils n'ont eu aucuneraifon de les fuppofer,
finon que voyant que noftre penfee peut facifement
eftre excitee par vn tableau, a conceuoir l'obiectqui y
eft peint, il leur a femble qu'elle deuoit 1'eftre en mefme
fa§on , a conceuoir ceux qui touchent nos fens, par
quelques petits tableaux qui s'en formafTent en noftre
tefte.
-ocr page 112-
DlSCOURS QUATRIESME.                33
telle, au lieu que nous deuons confiderer, qu'ilyaplu-
fieursautres chofesque des images, qui peuuent exciter
noftre penfe'e; comme par exemple, les Agnes & Ies pd-
roles, qui ne refemblent en aucune facon aux chofes
qu'elles fignifient. Et fi pour ne nous efloigner que le
moins qu'ii eft poflible des opinions defia receues, nous
aymons mieux auoiier,que les obiets que nous fentons,
enuoyent ^entablement leurs images iufques au dedans
de noftre cerueau : il faut au moins que nous remar-
quions, qu'ii n'jr a aucunes images, qui doiuent en tout
refembler aux obiets qu'elles reprefentent, car autfe-
ment il n'y auroit point de diftincStion entre l'obiet & fbn
image: mais qu'ii fufHft qu'elles Ieur refemblent en peu
de chofes g & fouuent mefme que Ieur perfection de-
pend dece qu'elles neleur refemblent pas tant qu'elles
pourroyent faire. Comme vous voye's que les taille-
doucesn'eftant faites que d'vn peud'encre pofe'ega &
la fur du papier, nous reprefentent des forets, des vil-
les, des hommes, & mefme des batailles, & des tempe-
ftes,bienqued'vneinfinite/'dediuerfes qualites qu'elles
nous font conceuoir en ces obiets, il n'y en ait aucune
que la figure feu le, dont elles ayent proprement la re-
femblance. &encoreseft-cevne refemblancefort im-
parfaite , vuque fur vne fuperficie toute plate, elles
nous reprefentent des cors diuerfement releue's & en-
fohces. & que mefme, fuiuant les regies de la perfpecli-
ue, fouuent elles reprefentent mieux des cercles, par
des ouales, que par d'autres cercles; & des quarres par
lozanges que par autres quarrds, & ainfi de toutes les
autres figures, en forte que fouuent pour eftre plus
E                         par-
-ocr page 113-
34                     La Dioptrique
parfaitesenqualite'd'images, & reprefenter mieux vn
obied:, elles doiuent ne luy pas refembler. Or il faut que
nous penfions tout Ie mefme des images qui fe forment
en noftre cerueau, & que nous remarquions, qu'il eft
feulement queftion de f§auoir, comment elles peuuent
donner moyen a Tame, de fentir toutes les diuerfes qua-
lite's des obiets aufquels elles fe raportent, & non point,
comment elles oiit enfoy leur refemblance. Comme
lors que l'Aueugle , dont nous auons parle' cydeffus,
touche quelques cors de ion bafton, il eft certain que
ces cors n'enuoyent autre chofe iufques a luy, finon que
faifantmouuoirdiuerfement fon bafton,felon les diuer-
fes qualite's qui font en eux, ils meuuent par mefme mo-
yen les nerfs de fa main, &en fuite les endroits de fon
cerueau d'ou vienent ces nerfs j ce qui donne occafion
a fon ame, de fentir tout autant de diuerfes qualite's en
ces cors, qu'ii fe trouue de variete's dans les mouue-
mens, qui font caufds par eux en fon cerueau.
EES
-ocr page 114-
DlSCOURsClNQUIESME.                3 J
DES IMAGES Q VISE
FORMENTSUR LE FONDS
DE L'OEIL.
~i y
D'tfcours Cinqmefme.
Vo u s voyes done afTes que pour fentir, Tame n'a pas
befbin de contempler aucunes images, qui fbyent
femblables aux chofes qu'ellefent.mais cela n'empefche
pas qu'ilne foit vray, queles obiets que nousregardons,
en impriment d'afTe's parfaites dans lefonds de nos yeuxj
ainfi que quelques vns ont defia tres-ingenieufement
explique", par la coparaifon de celles qui paroiflfent dans
vue chambre, lors que 1'ayant toute ^erme'e, referue' vn
feul trou, &ayant mis au deuant de ce trou vn verre en
forme de Ientille, on eftend derriere, a certaine diftan-
ce, vn linge blanc, fur quilalumiere,qui vientdes obiets
de dehors, forme ces images. Car ils difent que cette
chambre reprefente I'oeil; ce trou, la prunelle; ce verre,
l'humeurcriftaline, ou pluftoft toutes celles des parties
deTceilquicaufentquelquerefraction; & ce linge, la
peau interieure , qui eft compofde des extremite's du
nerf optique.
Mais vous en pourre's eftre encores plus certain , fi
prenant l'ceil d'vn homme fraifchement mort, ou au
defaut, celuy d'vn bceuf, ou de quelqu'autre gros ani-
mal, vous coupe's dextrement vers le fonds les trois
peauxqui l'enuelopent, en forte qu'vne grande partie
ae l'humeur M,qui y eft, demeure decquuerte, fens qu'il
E 2                        yait
.
-ocr page 115-
La Dioptriciue
36
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-ocr page 116-
Dl SCOURS C INQJUIESME.                37
y ait rien d'elle pour celaqui fe refpende. puis l'ayant
recouuerte de quelque cors blanc, qui foit fi delid, que
Ie iourpaffeautrauers, commepar exemple d'vnmor-
ceaude papier ou delacoquille d'vn cenf, RST, que
vous raetties cet ceil dans le trou d'vne feneftre fait
expre's, comme Z> en forte qu'il ait le deuant, BCD,
tourndvers quelque lieu ou il y-ait diuers obiets, com-
me V X Y, efclairds par le foleil j & le derriere ou eft le
cors blanc, RST, vers le dedans de la chambre, P,
ou vous fere's, &enlaquelle ii ne doit entrer aucune
lumiere,que celle qui pourra penetrer au trauers de cet
ceil, dontvous frauds que touteslesparties, depuis C
iufques a S, font tranfparentes. Car cela fait , fi vous
regardes fur ce cors blanc RST , vous y verre's non
peut-eftre fans admiration, &plaifir, vnepeinture,qui
reprefentera fort naiuement en perfpec^iue tous les
obiets, qui feront au dehors vers V X Y. au moins II
vousfaites en forte que cet oeil retiene fa figure natu-
relle, proportionne'e a la diftance de ces obiets: car
pour peu que vous le preflie's plus ou moins que de rai-
fon, cefte peinture en deuiendra moins diftincte. Et
il eft a remarquer, qu'on doit le preffer vn peu d'auan-
tage, & rendre fa figure vn peu plus longue, lors que les
obiets font fort proches, que lors qu'ils font plus efloi-
gnes. Mais il eft befbin que i'explique icy plus au long,
comment fe forme cefte peinture, car ie pourray par
mefmemoyen vous faire entendre plufieurs cho/es qui
apartienent a la vifion.
Confidere's done premierement, que de chafque
point des obiets VXY,il entre en cet ceil autant de
E 3                    rayons,
-ocr page 117-
38                     La Dioptrique
rayons, qui penetrant iufques au cors blanc R S T, que
l'ouuerture de la prunelle FF en peut comprendre, &
que fuiuant ce qui a efte" dit icy deffus, tant de la na-
ture de la refraction, quede celle des trois humeurs
K, L,M, tous ceux de ces rayons , qui vienent d'vn
mefme point, fe courbenten trauerfant les trois fuper-
ficies B C D, i 2. $ , St 4 s 6, en la fagon qui eft re-
quife pour fe raflembler derechef enuiron vers vn
mefme point. Et il feut remarquer, qu'afin que lapein-
ture, dontilefticyqueftion, foit la plus parfaite qu'il
eft poflibIe,les figures de ces trois fuperficies doiuent
eftre telles, que tous les rayons, qui vienent de 1'vn
des points des obiets , fe raflemblent exadlement en
l'vn des points du cors blanc R S T. Comme vous
voyes icy que ceux du point X, s'aflemblent au point
S; en fuite dequoy ceux qui vienent du point V", s'af-
femblent auffi a peu prds au point R; & ceux du point
Y, au point T. Et que reciproquement, il ne viene au-
cun rayon vers S, que du point X; ny quafi aucun vers
R, que du point V; ny vers T, que du point Y, &ainfi
des autres. Or cela pofd, fi vous vous fouuene's de ce
qui a eftd dit cydefTus, de la lumiere & des couleurs
en general, & en particulier des cors blancs, il vous
fera facile a entendre, qu'eftant enfermd dans la cham-
bre P, 8c iettant vos yeux fur le cors blanc R S T,
vous y dene's voir la refemblance des obiets VXY.
Car premierement la lumiere, c'eft a dire, le mouue-
ment cm Taction dont le foleil ou quelqu'autre des
cors qu'on nomme lumineux, pouffe vne certaine ma-
tiere fort fubtile, qui fe trouue en tous les cors tranfpa-
rents,
-ocr page 118-
■ " —                                                                 """"                                                 " ""                                                              - .                                                                         -                                                        ........- .
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Discours Cinojuiesme.
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-ocr page 119-
40                     La Dioptriqje
rents, eftant repouffe'e vers R, par 1'obietV, qlie ie fup
pofe par exemple, eftre rouge, c'eft a dire, eftre difpo-
fe, a faire que les petites parties de cette matiere fub-
tile, qui out efte' feulement pouffees en lignes droites,
par les cors lumineux, fe raeuuent auffi en rond au-
tour de lenrs centres, aprds les auoir rencontre'es, &
que leurs deux mouuernens ayent entre eux la pro-
portion , qui eft requife pour faire fentir la couleur
rouge . il eft certain, que Taction de ces deux mouue-
rnens ayant rencontre au point R, vn cors blanc, c'eft
a dire, vn cors difpofe a la renuoyer vers tout autre cofte
fans la changer, doit dela fereflefchir vers vos yeux par
les pores de ce cors, que i'ay fuppofe a cet effect fort
delie', & comme perce a iour de tous coftds, & ainfi
vous faire voir le point R, de couleur rouge. Puis la
lumiere eftant auffi repouflee de l'obiet X, que ie fup-
pofe iaune, vers S- & d' Y, que ie fuppofe bleu, vers T,
d'ou elle eft porte'e vers vos yeux; elle vous doit faire
paroiftre S de couleur iaune, & T de couleur bleue.
Et ainfi les trois poins R, S,T, paroifTans des mefmes
couleurs,&gardans entre euxlemefine ordre , que les
trois V, X,Y, en ont manifeftement la refemblance.
Et la perfection de cette peinture depend principale-
ment de trois chofes,a fcauoir, deceque.laprunellede
l'ceil ayant quelque grandeur , il y entre plufieurs
rayons de chafque point de l'obiet, comme icy XB
14 S, XC 2; S , XD 36 S , & tout autant d'autres
qu'on en puifle imaginer entre ces trois, y vienent du
feul point X. Et de ce que ces rayons fbuffrent dans
Tceil de telles refractions, queceuxqui vienent dedi-
uers
,/
-ocr page 120-
D ISC OURS ClNQUIESME.               41
uers poins j fe raffemblent a peu pre's en autant d'au-
tres diuers points fur Ie cors blanc R S T. Et en fin
dece que tantles petits filets EN, que le dedans de
Iapeau EF , eftaut de couleur noire, & la charabre
P, toute ferme'e &: obfcure, il ne vient d'ailleurs que des
obiets VXY, aucune luraiere qui trouble l'action de
ces rayons. Car fi la prunelle eftoit fi eftroite , qu'il
ne paflaft qu'vn feul rayon de chafque point de 1'ob-
iet, vers chafque point du cors RS T , il n'auroit pas
afles de force pour fe reflefchir de la, dans la chambre
P,vers vos yeux. Et la prunelle eftant vn peu grande,
s'ilnefe faifoit dans l'ceil aucune refraction, les rayons
qui viendroient de chafque point des obiets, s'efpan-
droyent §a& la en tout Tefpace RST, en forte que,
parexemple,lestroispoints VXY, eiiuoyeroient trois
rayons vers R, qui fe reflefchiffans de la tous enfemble
vers vos yeux, vousferoient paroiftrece point R, dVne
couleur moyenne entre le rouge, leiaune, &lcbleu, &
tout femblableaux points S & T, vers lefquels les mef-
mes points VXY, eiiuoyeroient aufli chacun vn de
leur$rayons. Et ilarriueroit auffi quafi le mefme, fila
»refracl;ion qui fe fait en l'ceil, eftoit plus ou moins
grande qu'ellene doit, a raifondela grandeur de cet
ceil, car eftant trop grande, les rayons qui viendroi-
ent , par exemple du point X, s/affembleroient auant
que d'eftre paruenus iufques a S, comme vers M. &
au,contraire eftant trop petite, ils ne s'aflembleroient
qu'au dela, comme vers P; fi bien qn'ils toucheroient
le cors blanc RST, enplufienrs points, vers lefquels
il viendroit auifi d'atitres rayons des autres parties de
F                  l'obiet.
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La Dioptriqjie
42
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.DiscoursGiNQUiesme.              43
l'obiet. Enfin; fi les cors E N, E F, n'eftoyent noirs,
c'eft a dire, difpofe's a faire que la lumiere qui donne de
contre, s'y amortifTe, les rayons qui viendroient vers
eux du cors blanc RST, pourroient de la retourner
ceuxde T vers S, ScversR; ceux deR, vers T, Severs
S; SrceuxdeS, vcrsR, &versT: aumoyendequoy,
ils troubleroient l'adtion les vns des autres, &: le mefme
feroient aufly les rayons qui viendroient dela chambre
P, vers RST, s'il y auoit quelque autre lumiere en cet-
te chambre, que celle qu'y enuoyent les obiets V X Y.
Maisapresvous auoir parld des perfections de cette
peinture.ilfautaufli que ie vous faceconfidererfesde-
fauts. dont Ie premier & le principal eft, que quel-
qnes figures que puiffent auoir les parties de 1'ceil, il eft
impoflibile, qu'elles facent que les rayons qui vienent
de diuerspoins, s'aflemblent tous en autantd'autresdi-
uers points, & que tout lemieux qu'elles puiffent faire,
c'eft feulement que tons ceux qui vienent de quelque
point, comme d' X, s'aflemblent en vn autre point,
cormne S,dansle milieu dufondsdel'ceil; enquelcas
il n'yen peut auoir que quelques vns de ceux du point"
V, qui s'aflemblent iuftement au point R, ou du point
Y, qui s'aflemblent iuftement au point T -y & les autres
sen doiuent efcarter quelque peu, tout a l'entour, ainfi
que i'expliqueraycyapre's. Et cecyeftcaufe que cette
peinture n'eft iamais fi diftindte vers fes extremite's
qnaumilieu, comineil a efte' aflHs remarque'par ceux
quiont efcrit de l'Optique. Car c'eft pour cela qu'iis
ontdit, quelavifion fefaitprincipalement fuiuant la li-
gnedroite, qui pafle par les centres de l'humeur crifta-
F 2                     line
-
-ocr page 123-
44                      £-A DlOPTRIQJlE
line&delaprunelle, telle qu'eft icy la ligne XKLS,
qu'iis noinment l'aiflieu de la vifion. Et note's, que les
rayons, par exemple, ceux qui vienent du point V,
s'efcartent autour du point R, d'autant plus que l'ou-
uerturedelaprunelleeft plus" grande: & ainfique fi fa
grandeur fert a rendre les couleurs dc cette peinture
plus viues & plus fortes , elle empefche en reuanche
que fes figures ne foyent fi diftindtes, d'ou vient qu'elle
ne doit eftre que mediocre. Note's aufli que fes rayons
s'efcarteroient encores plus autour du point R, qu'iis
ne font, file point V, d'oii ils vienent, eftoit beaucoup
plus proche de Tceil, comme vers io, ou beaucoup plus
efloigne', comme vers n,quen'eftX,aIadiftancedu-
quel ie fuppofe, que la figure de l'ceil eft proportionnde;
de forte.qu'iis rendroyent la partie R, de cette peintu-
re encores moins diftinctc qu'iis ne font. Et vousenten-
drds facilement les demonftrations de tout cecy, lors
que vous aurds vii cy aprds , quelles figures doiuent
auoir les cors tranfparents, pour faire que les rayons qui
vienent dVn point, s'atfemblent en quelqu'autre point,
"aprds les auois trauerfds. Pour les autres defauts de cette
peinture, ils confiftent en ce que fes parties font renuer-
fe'es, c'efta dire, enpofitiontoutecontraireacelledes
obietS; &ence qu'elles font apetifTdes &racourcies, les
vnes plus, les autres moins, h. raifon de la diuerfe distan-
ce, Situation des chofes qu'elles reprefentent, qua-
fi en mefme facon que dans vn tableau de perfpedti-
ue. Comme vous voyds icy clairement, que T, qui eft
vers le cofte gauche, reprefente Y, qui eft vers ledrok,
8c que R, quieft vers le droit, reprefente V, qui eft vers
-ocr page 124-
Discours Cin
Q^IESME.
At
*.
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...... • : " --------
..
46                   La Dioptriqjie
le gauche. Et de plus que la figure de l'obiet V, ne doit
pas occuper plus d'efpace versR, que celle de l'obiet
i o, qui eft plus petit, mais pins proche -} ny moins que ■
celle de l'obiet u, qui eft plus grand, mais a propor-
tion plus efloignd, finonentantqu'elle eftvn peu plus
diftincte. Et en fin que laligne droite VXY, eft re-
prefente'e par la courbe R S T.
Orayantainfivucefte peinture dans l'ceiid'vn ani-
mal mort, & en ayant confidere" Ies raifons, onnepeut
douter qu'il ne s'en forme vne toute femblable ence-
luy d'vn homme vif, fur la peau interieure, en la place
de laquelle, nous auions fubftitue le cors blanc RS T,
& mefme qu'elle ne s'y forme beaucoup mieux, a caufe
que les humeurs eftant plaines d'efprits font plus tranfpa-
rentes, & ont plus exadtement la figure qui eft requife
a cet effect. Et, peut-eftre auffi.qu'enl'ceil d'vn bceuf,
la figure de la prunelle, qui n'eftpas ronde , empefche
que cette peinture n'y fbit fi parfaite.
                 *
On ne peut douter non plus que les images qu'on fait
paroiftre fur vn linge blanc dans vne chambre obfcure,
ne s'y forment tout de mefme, &pour la mefme raifon
• qu'au fonds de l'ceil. mefmes a caule qu'elles y font
ordinairement beaucoup plus grandes, & s'y forment
en plus de fa§ons,on y peut plus commodementremar-
quer diuerfes particularites , dont ie defire icy vous
auertir, afin que vous en fade's Pexperience, fi vous ne
Tau^s encores iamais faite. Voye's done premierement,
quefionne met aucun verre audeuaut du trou qu'on
aura fait en cette chambre, il paroiftra bien quelques
images fur le linge , pouruu que le trou foit fort eftroit,
mais
' *
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DlSCOURS ClNQUIESME. •           47
mais qui feront fort confufes & imparfaites, & qui lefe-
ront d'autant plus, que ce trou fera moins eftroit. Et
qu'elles feront auffi d'autant pins grandes, qu'il y aura
plus de diftance entre Iuy & le linge. en forte que Ieur
grandeur doit auoir a peu pre's, mefine proportion anec
cette diftance, que la grandeur desobiets, quilescau-
fent, auec la diftance qui eft entre eux & ce mefme
trou. Comme il eft euident que fi ACB eft l'obiet,
D letrou, & EGF l'image. EG eft a FD, comme
AB eft a CD. Puis ayant mis vn verre en forme de
lentille au
quelle tenant le linge, les images paroiffentfort diftin-
c^es, & que pour peu qu'on l'efloigne, ou qu'on l'apro-
che d'auantage du verre , elles commencent a I'eftre
rnoins; Et que cette diftance doit eftre mefure'e par
l'efpace qui eft , non pas entre le linge & le* trou,
mais entre 1c linge & le verre : en forte que fi Ion met le
verre vn peu au dela du trou de part ou d'autrc, le linge
en doit au/Ii eftre d'autant aproche'oureculc- Etqu'el-
Ie depend en partie de la figure de ce verre , & en
partie auffy de l'efloignement des obiets; Car en laif-
fant l'obiet en mefine lieu , moins les fuperficies du
verre font courbees, plus le linge en doit eftre efloigne^
& en fe feruant du mefme verre, fi les obiets en font fort
proches,
-ocr page 127-
48                    LaDioptriqjje
proches , il en faut tenir le-linge vn plus loin, que
f
             s'ils en font plus efloigne's ; Et que de cefte diftan-
ce depend la grandeur des images , quad en mefme
fac,on que lors qu'il n'y a point deverre au deuant du
trou. Et que ce trou peut eilre beaucoup plus grand,
lors qti'on y met vn verre , que lors qu'on le Iaiffe
tout vuide , fans que Ies images en foyent pour cela
de beaucoup moins diftincles. Et que plus il eft grand,
plus elles paroifTent claires 8c illumine'es : en forte
que fi on couure vne partie de ce verre, elles paroif-
tront bien plus obfcures qu'auparauant , mais qu'elles
ne lairront pas pour cela d'occuper autant d'efpace fur
le linge. Et que plus ces images font grandes & clai-
res, plus elles fe voyent parfaitement:, en forte quefi
on pouuoit auffi faire vn ceil, dont la profondeur full
fort grande, & la prunelle fort large, & que les figu-
res de celles de fes fuperficies qui caufent quelque
refraction , Fuflent proportione'es a cette grandeur,
Ies images s'y formeroient d'autant plus vifibles. Et
que fi ayant deux ou- plufieurs verres en forme de
lentilles, mais affes plats, onlesiointfvn contrel'au-
tre , lis auront a peu pres le mefme effecT:, qu'auroit
vn feul j qui feroit autant voute ou conuexe qu'eux
deux enfemble carle nombredes fuperficies ou'fe font
les refra&ions n'y fait pas grand chofe. Mais que fi
on efloigne ces verres a certaines diftances les vns
desautres, le fecond pourra redreffer Timage, que le
premier aura rehuerfee , & le troifiefme la renuerfer
derechef, &• ainfi de fuite. Qui font toutes chofes
dont les raifons font fort ayfees a deduire de ce que
fay
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DlSCOURS ClNOUIESME.                   4<>
i'ay dit, & elles feront.bien plus voftres,s'il vous faut vfer
dVn peu de reflexion pour les conceuoir, que fi vous les
trouuidi icy mieux explique'es.
Au refte les images des obiets ne fe forment pas feu-
lement ainfi au fonds de l'ceil, mais elles paflent encores
au dela iufques au cerueau, comrae vous entendres faci-
lemenr, fi vous penfe's, que par exerrjple , les rayons qui
G
vienent
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jo                     La D i opt ri clue
vienent dans l'oeil de Tobiet V, touchent au point R
Textremitd de l'vn des petits filets da nerf optique,
qui prendfonoriginederendroit 7 dela fuperficie in-
terieure du cerueau 789; & ceuxde l'obiet X, touchent
au point Sl'extremite' d'vn autre de ces filets, dont le
commencement eft au point 8; & ceuxde Tobiet Y, en
touchent vn autre au point T, qui refpond a l'endroit
du cerueau marque' 9. &ainfi des autres. E* que la lu-
miere neftant autre chofe qu'vn mouuement, ou vne
action qui tend a caufer quelque mouuement, ceux de
fes rayons, qui vienent d'V versR, ont la force demou>
uoir tout le filet R 7, & par confequent l'endroit du cer-
ueau marque' j; & ceux qui vienent d' X vers S , de
mouuoir tout le nerf S 8, & mefme de le mouuoir d'au-
tre facon que n'eft meu R 7, a caufe que Ies obiets X &
V font de deux diuerfes couleurs, & ainfi que ceux qui
vienent d'Y, meuueutle point 9. D'oii il eft manifefte
qu'ilfeforme derechefvne peinture 78$)Jaife/sfemblable
aux obiets V X Y, en la fuperficie interieuredu cerueau
qui regarde fes concauitds. Et de la ie pourois encores
latranfporteriufques avnecertainc petite glande, qui
fe trouue enuiron le milieu de ces concauites, & eft pro-
prement le fiege du fens commun. Mefme ie pourois
encores plus outre vousmouftrer coment quelquefois,
elle peut pafler de la par les arteres d'vne feme enceinte,
iufques a quelq^ membre determine'' de 1'enfant qu'elle
porte en fes entrailles,&y former ces marques d'enuie,
qui caufent tant d'admiration h. tous les Dodtes.
DE
-ocr page 130-
DlSCOURS SlXIESME.                    JI
DE LA VISION.
cDi(cours Sixiefme.
OR encores que cette peinture en paflant ainfi iuf-
ques au dedans de noftre tefte, retiene toufiours
quelque chofe de la refemblance des obiets dont elle
procede; ilne fefaut point toutesfois perfuader, ainfi
queie vous ay defia tantoft affes faic entendre, que ce
foit par le moyen de cette refemblance qu'elle face que
nous les fentons, comme s'il y auoit derechef d'autres
yeux en noftre cerueau, auec lefquels nous la pnffions
aperceuoir. Mais pluftoft que ce font les mouuemens
par lefquels elle eft compofee, quiagiffans immediate-
ment contre noftre ame tant qu'elle eft vnie a noftre
cors, fontinftitue'sde la nature pour luy faire auoir de
telsfentimens. Ce que ievous veux icy expliquerplus
en detail. Toutes les qualite's que nous aperceuons dans
les obiets de la veue, peuuent eftre reduites a fix princi-
pales, qui font, laluraiere,lacouleur,lafituation, la di-
ftance, la grandeur, & la figure. Et premierement
touchant la lumiere & la couleur, qui feules apartie-
nentproprementaufensde la veue, il faut penfer que
noftre ame eft de telle nature, que la force des mouue-
mens, qui fe trouuent dans les endroits du cerueau,d'ou
vienet les petits filets des nerfs optiques, luy fait auoir le
fentiment de la lumiere; & la fa§on de ces mouuemens,
celuy de la couleur. ainfi que les mouuemens des nerfs
qui refpondent aux oreilles, luy font oiiir les fons; 8c ceux
G 2                     des
-ocr page 131-
;2                          L A DlOPTRIQjlE
desnerfsde lalangue, luy font goufter les faueurs; &
generatemenr, ceuxdesnerfsde tout le cors, luy font
fentir quelque chatoiiillemeut, quand ils font mode re's,
&quand ils fonttrop violents- quelque douleur; fans
qu'ildoiue, en tout cela, y auoir aucune refemblance
entrelesidees qu'elle con§oit, & les moultemens qui
caufentces ide'es. Ce que vous croires facilement, fi
vous remarques, qu'il femble aceux qui re§oiuent quel-
que bleffure dans l'ceil, qu'ils voyent vne infinite'de feux
& d'efclairs deuanteux,nonobftant qu'ils ferment les
yeux, ou bien qu'ils foyent en lieu fort obfcur; en forte
que ce fentiment ne peut eftre attribue" qu'a la feule for-
ce du coup, Iaquellemeut les petits filets du nerf opti-
que,ainfi que feroit vne violente lumiere. & cette mef-
me force touchant les oreilles, pourroit faire ouir quel-
que fon, &touchantle corsen d'autres parties, y faire
fentir de la douleur. Et cecy fe confirme aufTy, de ce
que fi quelquefois on force fes yeux a regarder le foleil,
ou quelqu'autre lumiere fort viue, ils en retienent apres
vn peu de temps l'impreffion, en telle forte, que nonob-
ftant mefme qu'on les tiene fermds, il femble qu'on
voye diuerfes couleurs, qui fe changent & paffent de
l'vne a l'autre,a mefure qu'elles s'affoibli Sent: car cela
ne peutproceder quedecequeles petits filets du nerf
optique, ayant efte' meus extrordinairement fort, ne fe
peuueutarrefterfi toft que de couftume. Mais l'agita-
tion, qui eft encores en eux apres que les yeux font fer-
mes, n'eftant plus afTes grande, pour reprefenter cette
forte lumiere, qui I'a caufe'e, reprefente des couleurs
moins viues. Et ces couleurs fe changent en s'affoiblif-
fanr,
-ocr page 132-
D I SCOURS SrXl ESME.                      J J
fant, ce qui monftre que leur nature ne confifte qu'en la
diuerfite'du mouuement, &n'eft point autre que ie l'ay
cydefllis fuppofee. Et en fin cecy fe manifefte de ce que
les couleurs paroifTent fbuuenten des cors tranfparens,
ouil eft certain, qu'il n'y a rienqui lespuiffecaufer, que
les diuerfes fac,ons, dont les rayons de la lumiere y font
receus. comme lors que l'arc-en-ciel paroift dans les
nues, & encores plus clairement , lors qu'on en voit
la refemblance dans vn verre , qui eft taille" a plu-
fieurs faces.
Mais ilfaut icy particuliercment confiderer, enquoy
confifte la quantite'de la lumiere, qui fe voit, c'eft a dire,
de la force dont eft meu chacun des petits filets du nerf
optique, carellen'eft pas toufiours efgale a la lumiere,
qui eft dans les obiets, mais elle varie a raifon de leur di-
ftance,&de la grandeur de la prunelle, & aufly a raifon
del'efpace que les rayons, quivienentdechafque point
del'obiet, peuuentoccuperaufondsderceil. Comme
parexemple,il eft manifefte que le point X enuoyeroit Voyesia
pins de rayons dans l'ccil B, qu'il nefait, fi la prunelle fig<«e ea
FF eftoit ouuerteiufques a G; & qu'il en enuoye tout fuiaante.
autantencet oeil B, qui eft proche de luy, & dont la
prunelle eft fort eftroitte, qu'il fait en 1'ceil A, dont la
pmnclle eft beaucoup plus grande, mais qui eft a pro-
portion plus efloigne'. Et encores qu'il n'entre pas plus
de rayons des diuers points de l'obiet V X Y, confideres
tous enfemble, dans le fonds de l'ceilA,quedansceluy
del'ceilB, toutesfois pource que ces rayons ne s'y eften-
dent qu'en 1'efpaceTR, qui eft plus petit que n'eft HI;
dans lequel ils s'eftendent au fonds de l'ceil B, ils y doi-
G 3                     uent
~...
-ocr page 133-
74                   La Dioptrique
uent agirauec plus de force, contre chacune desextrc-
mitesdu nerf optique qu'ilsytouchcnt, cc qui eft fort
aife a calculer. Car fi par
exemple , l'efpace HI eft
quadruple de T R, & qu'il
contiene les extremitds de
quatre mille des petits filets
du nerf optique, T R, ne con-
tiendra que celles de mille,
& par confequent chacun
de ces petits filets fera meu
dans le fonds de l'ceil A, par
la milliefme partie des forces,
qu'ont tous les rayons qui y
entrent, iointes enfemble • 8c
dans le fonds de l'ceil B, par
le quart de la milliefme par-
tie feulement. 11 faut aufly
confiderer, qu'on ne peut
difcerner les parties des cors
qu'on regarde , qu'entant
qu'clles different en quelque
Ti'R
fagon de couleur: & que la
vifion diftincte de ces couleurs, ne depend pas feule-
ment de ce que tous les rayons, qui vienent de chafque
point de l'obier, fe rafTemblent a peu pres en autant d'au-
tres diuers points; au fonds de l'ceil • &: de ce qu'il n'en
vient aucuns autres d'ailleurs, vers ces mefmcs poins,
ainli qu'il a efte'tantoftamplementexplique: maisauf-
fy de la multitude des petits filets du nerf optique, qui
font
. '
-ocr page 134-
DlSCOURsSlXIESME.                      ff
font en l'efpace qu'occupe l'image au fonds de I'oeH*
Car fi par exemple l'obiec VX Y, eftcompofe de dix
mille parties , qui fbyent difpofdes a enuoyer des ra-
yons , versle fonds de l'ceil RST, en dix mille fa-
$ons differentes , & par confequent a faire voir en
mefme temps dix mille couleurs, elles n'en pourront
neantmoins faire diftinguer a l'ame que mille tout au
plus, fi nous fuppolbns qu'il n'y ait que mille, des fi-
lets dunerfoptique , en l'efpace RST, d'autant que
dix des parties de l'obiet, agifTant enfemble contre
chacun de ces filets, ne lepeuuent mouuoirqued'vne
feule fa§on , compofde de toutes celles dont elles a-
giflent, en forte que l'efpace qu'occupe chacun de ces
filets ne doit eftre confidere' que comme vn point.
Et e'eft: ce qui fait que fouuent vne prairie qui fera
peinte d'vne infinite de couleurs toutes diuerfes , ne
paroiftra de loin que toute blanche , ou toute bleue.
Et generalement que tous les cors fe voyent moins
diftinctement dc loin, que de pres. Et enfin que plus
on peut faire que l'image d'vn mefme obiet occu-
pe d'efpace au fonds de l'ceil , plus il peut eftre vu\
diftin&ement. Ce qui fera cy apres fort a remar-
quer.
Pour la fituation, e'eft a dire, le cofle' vers lequel
eft pofe'e chafque partie de l'obiet au refpedt de no-
ftrecors, nous ne l'aperceuonspasautrementparl'en-
tremife de nos yeux , que par celle de nos mains; 8c
w cognoiflance ne depend d'aucune image , ny d'au-
cune action qui viene de l'obiet j mais feulementdela
Mtuation des petites parties du cerueau d'oii les nerfs
prenent
'
-ocr page 135-
56                      L A DlOPTRIQJJE
prenent leur origine. Car cette fituation fechangeant
tant foit peu , a chafque fois que fe change celle des
membres, ou ces nerfs font inferes, eft inftituee de la
nature, pour faire, non feulement que fame cognoif-
fe, en quel eudroit eft chafque partie du cors qu'elle
anime, au refpecl: de toutes les autres; mais auffy qu'el-
le puifTe transferer de la fon attention, a tousleslieux
contenus dans les lignes droites, qu'on peut imagi-
ner eftre tire'es de 1'extremite.de chacune de ces par-
ties , & prolongees a l'infini. Comme Iors que l'A-
ueugle , dont nous auons defia tant parle* cy deflus,
tourne fa main A, vers E, ou C, auffy vers E,les nerfs
inferes en cette main , caufent vn
certain changement en fon cer-
ueau, qui donne moyen k fon ame
de connoiftre , non feulement le
ieu A, ou C, mais aufly tous les au-
tres qui font en la ligne droite
A E, ou C E, en forte qu'elle peut
porter fon attention iufquesauxobietsB &D5& deter-
miner les lieux ouils font, fans connoiftre pour celany
penferaucunement a ceux ou font fes deux mains. Et
ainfi lors que noftre ceil, ou noftre tefte, fe tournent
vers quelque cofte' , noftre ame en eft auertie par le
changement, que les nerfs infere's dans les mufcles, qui
feruent a ces mouuemens, caufent en noftre cerueati.
Comme icy enl'ceil R S T, il faut penfer que la fitua-
tion, du petit filet du nerf optique, qui eft au point R, on
S, ou Tj eft fuiuie dVne autre certaine fituation, de h
partie du cerueau 7, ou 8,ou 9, qui fait que l'ame peut
connoilt^
-ocr page 136-
DlSCOURSSlXlESME.                . $7
connoiftre tousles lieux, qui font en la ligne RV, ou
S X, ou T Y. De fagon que vous ne devCs pas trouuer
M            Y                X                 
cftrange, que les obiets puiffent eftre veus en leur vraye
Situation , non-obftant que la peinture , qu'ils impri-
ment dans l'osil, en ait vne toute contraire. Ainfi que
noftre aueugle peut fentir en mefine temps I'obiet B,
qui eft a droite, par l'entremife de fa main gauche; & D,
H                           qui
-ocr page 137-
58                    LaDioptriqjie
qui eft a gauche, par l'enrremife de
fa main droite. Et com me cet a-
ueugleneiuge point quVncorsfcit
double, encore cju'il le touchede
fes deux mains, ainfi Iors que nos
yeux font tous deux difpofes en la
facon qui eft reqnife pour porter
noftre attention vers vnmefme lieu, ils ne nous y doi-
uent fairevoir qu'vn feul obiet,non-obftant qu'il s'en
forme en chafcun d'eux vne peinture.
La virion de la diftance, ne depend non plus, que cel-
lede la fituation d'aucunes images enuoyees des obiets.
Mais premierement de la figure du cors de l'oeil^ car,
comme nous auons dit, cede figure doit eftre vn peu
autre, pour nous faire voir ce qui eft proche de nos yeux>
que pour nous faire voirce qui en eft plus efloigne. &
a mefure que nous la changeons pour la proportion-
ner a la diftance des obiets, nous changeons auffy cer-
taine partie de noftre cerueau, d'vne facon qui eft in-
ftituee de la nature pour faire aperceuoir a noftre ame
cette diftance. Et cecy nous arriue ordinairement fans
que nous y facions de reflexion^ tout de mefme que lors
que nous ferronsqueIquecors,de noftre main, nous la
conformons a la groffeur & a la figure de ce cors,& le
fentonsparfbnmoyen, fans qu'il foit befoin pour cela
que nous penfions a fes mouuemens. Nous cognoiffons
en fecond lieu la diftance par le rapport qu'ont Ies deux
yeuxlVnarautre. Car comme noftre aueugle tenant
les deux baftons A E, C E, dont ie fuppofe qu'il ig'nore
la longueur, & fgachant feulement l'intervale qui eft en-
tre
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DlSCOURS SlXlESME.                    S9
tre fes deux mains A & C, & la grandeur, des angles
A C E, C A E, peut de la, comme par vne Geometri e
naturellecognoiftreoii eft le point E. Ainfi, quand nos
deux yetix RST & rst, font tournds vers X,la gran-
deur de la ligne S /, &celle des deux angles X S s Sc
X s S nous font fgauoir ou eft le point X. Nous pou-
uons aufly le mefme par l'aide d'vn oeilfeulen lay fai-
H a                    fant
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60                   La Dioptrique
fant change* de place , comme fi le tenant tourne' vers
X, nous le mettons premierement au point S & in-
continent apres au point /, cela fuffira pour faire que
la grandeur de la ligne S s & des deux angles XS;
& X s S fe trouuent enfemble en noftre fantaifie , &
nous facent aperceuoirladiltancedupointX. &cepar
vne adtion de la penfe'e, qui n'eftant qu'vne imagination
route fimple, nelaifle point d'enueloper en fby vn rai-
fonnement toutfemblable a celuy que font les Arpen-
teurs, lors que par le moyen de deux differentes ftations
ils mefurcnt les Iieux inacceffibles. Nous auons en-
cores vne autre facon d'aperceuoir la diftance, a /§a-
uoir, par la diftindtionouconfufionde la figure, & en-
femble par la force ou debilite'de la lumiere. Comme
pendant que nous regardons fixement vers X, les rayons
qui vienent des obiets 10 & 12, ne s'aflemblent pas fi
exadtement vers R, &vers T, au fonds de noftre oeil,
que fices obiets eftoyent aux points V, & Y; d'ou nous
voyous, qu'ils font plus efloigne's, ou plus proches de
nous, que n'eftX. Puis dece que la lumiere, quivient
de l'obiet 10 vers noftre ceil, eft plus forte, que fi cet ob-
iet eftoit vers V, rrous le iugeons eftre plus proche: & de
ce qu. celle qui vient de l'obiet 12, eft plus foible, que
s'il eftoit vers Y, nous le iugeons plus efloigne. Enfin
quandnons imaginons defia d'ailleurs la grandeur d'vn
obiet, ou fa fituation, ou la diftindtion de fa figure & de
fescouleurs, ou feulement la force de la lumiere qui
vient deluy, cela nous peutferuir, nonpas proprement
a. voir, mais a. imaginerfa diftance. Comme regardant
de loin quelque cors, que nous, auons accouftume de
voir-
f
-ocr page 140-
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DlSCOURS SlXIESMI.
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-ocr page 141-
6x                    La Dioptrique
voir de pres, nous en iugeons bien mieux l'efloigne-
ment , que nous ne ferions fi fa grandeur nous eftoit
moins connue. Et regardant vne montaigne expofe'e
au foleil, au dela d'vne foreft couuerte d'ombre, ce n'eft
cjue la fituation de cette foreft, qui nous la fait iuger la
plus proche. Et regardant fur mer deux vaifTeaux,dont
l'vnfbit plus petit quei'autre, mais plus proche a pro-
portion, en forte qu'ils paroiffentefgaux, nouspourrons
par la difference de leurs figures, & de leurs couleurs, &
delalumiere qu'ils enuoyent versnous,iugerIequelfera
le plus loin.
Au refte pourlafacon dontnous voyons la grandeur,
& la figure des obiets, ie n'ay pas befoin d'en rien d ire de
particulier, d'autant qu'elle eft toute comprife, en celle
dont nous voyons la diftance, & la fituation de leurs par-
ties. A fcauoir leur grandeur s'eftime, parlaconnoiffan-
ce,ou l'opinion, qu'on a de leur diftance, compared
auec la grandeur des images qu'ils impriment au fonds
de l'ceil; & non pas abfolument par la grandeur de ces
images, ainfi qu'il eft afles manifefte de ce que encore
qu'elles foyent, par exemple, cent fois plus grandes, lors
queles obiets font fort proches de nous, que lors qu'ils
en font dix fois plus efloignes,eIles ue nous les font point
voir pour cela cent fois plus grads, mais prefque efgaux,
au moins fi leur diftance ne nous trompe. Et il eft mani-
fefte auffy, que la figure feiuge par la cognoiflance, ou
opinion, qu'on a de la fituation desdiuerfes parties des
obiets; & non par la refemblance des peintures qui font
dans 1'ceil. Car ces peintures ne contienent ordi-
jiairement que des buales&des lozanges, lors qu'el-
les
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I^MIW'A'l'"'-"^                                                                                                         ......                                            .....---------■--------........ —-■--------------
ppi.^lLl.lll.™
DlSCOURS SlXlESME.                    6}
les nous font voir des cercles & des quarres, '
Mais afin que vous ne puiffids aucunement dourer,
que la vifion ne fe face ainfi que ie Tay expliquee,ie vous
veaxfaire encore icy confiderer les raifons, pourquoy il
arriue quelquefois qu'elle nous trompe. Premiere^
ment a caufe que c'eft Tame qui voir, & non pas l'ceil,
& qu'elle ne void immediatement que par l'entremife
ducerueau,delavient que les frenetiques, 6c ceux qui
dorment, voyent fouuent, ou penfent voir, diuers obiets
qui ne font point pour celadeuantleurs yeux : a fcauoir
quandquelques vapeurs remuant leur cerueau,difpofent
celles de fes parties, qui ont couftume de feruir a la vi-
fion, en mefme fagon queferoyent ces obiets s'ils efto-
yentprefens. Puis a caufe que les impreffions, quivie-
nent de dehors, paflent vers le fens commun par l'entre-
mife des nerfs,fi la fituation de ces nerfs eft contrainte
par quelque caule extrordinaire, elle peut faire voir les
obiets en d'autres lieux qu'ils ne font. Comme fi l'ceil
r s t, eftant difpofd de fby a regarder vers X,eit cotraint
parledoigtN, afetournervers M, les parties du cer-
ueaud'ouvienent fes nerfs, nefe difpoferont pas tout a
tait erl mefme forte, que fi c'eftoyent fes mufcles qui le voyes ra
tournaflent
vers M- ny aufly en mefmeforte, que sJil re- ff Hcca
gardoitveritablementversX-maisd'vnefacon moyen- J9.
ne entre ces deux, a fcauoir, comme s'il regardoit vers
Yj& ainfi l'obiet M paroiftra au lieu qu eft Y, par ren-
tremife de cet ceil, & Y au lieu ou eft X, & X au lieu oil
eft V, & ces obiets paroiffans aufly en mefme temps en
leursvrais lieux, par 1'entremife de l'autre ceil RS T,ils
fembleront doubles. Enmefmefa§on quetouchant la
petite
-ocr page 143-
<?4                     La Dioptrique
petite bouIeG, des deux doigts A & D croifesl'vn fur
l'autre, on en penfe toucher deux; a
J^iCaufe que pendant que ces doigtsfe re-
0>p tienent l'vn l'autreainfi croife's, lesmu-
fcles de chacun d'eux tendent a les
efcarter, A vers C, & D vers F, au mo-
yen de qnoy , les parties du cerueau
d'ou vienent les nerfs, qui font inferds en ces mufcles, fe
trouuent difpofees en la facon qui eft requife, pour faire
qu'ils femblent eftre, A vers B, & D vers E, & par confe-
quenty toucher deux diuerfes bouhs, H,& T. De plus,
a catife que nous fommes accouftumes de iuger, que les
impreflions quimeuuent noftre veue, vienent des lieux
vers lefquels nous deuons regarder pour les fentir,quand
ilarriuequ'elles vienent d'ailleurs, nousy pouuonsfaci-
lement eftre trompe's. Comme cenx qui ont les yeux in-
fectes de la iauniffe, ou bien qui regardent au trailers
d'vnverreiaune, ouqui font enferme's dans vne cham-
breouiln'entreaucunelumiereque par de tels verres,
attribuent cefte couleur a tous les cors qu'ils regar-
dent . Et celuy qui eft dans la chambre obfcure que
voycsla - tautoft defcrite, attribue au cors blanc R $T les
n^urc en J                                         '
la page couleurs des obiets V X Y, a caufe que e'eft feulement
"' vers luy qu'il dre {Te fa veue. Et les yeux A, B,G3D,E,F,
voyans les obiets T,V,X,Y,Z, £?,autrauers desverres
N,0,P, & dans les miroirs QRS,les iugent eftre aux
points G,H,I, K,L,Mj & V, Z, eftre plus petits, & X, &t
plus grands qu'ils ne font: ou bien auffy X, &, plus pe-
tits &aueccelarenuerfe's, afc,avoir, lors qu'ils font vn
peu loin des yeux C F, d'autant que ces verres & ces
miroirs
-ocr page 144-
D I S C O U R S S I X I E S M E.                    gf
nfiroirs detonrnent Ies rayons qui vienent de ces cbiets,
en telle forte, que ces yens ne Ies peuuent voir diftin-
ftement, qu'en fe di/pofant comme ils doiuent eftre
Pour regarder vers Ies points G, H, I, K, L, M, ainfi que
con-
r
-ocr page 145-
66                     La Dioptriqjie
connoiftront facilement ceux qui prendront la peine*de
fexaminer. Et ils verront par mefme moyeu, combien
les anciensfe font abufes en leur Catoptrique,lors qu'ils
ont voulu determiner le lieu des images,dans Ies miroirs
creux, Scconuexes. 11 eft auffy aremarquer que tousles
moyens qu'on a pourconnoiftre la diftance, font fort
incertains, car quant a la figure de l'ceil, elle ne varie
quafi plus fenfiblement lors que Tobiet eft a plus de
quatre ou cinq pieds loin deluy, & mefme elle varie
il peu lors qu'il eft plus proche,qu'on n'en peut tirer au-
cune connoiffance bien precife. Et pour les angles,
compris entre les Iignes tirees desdeusyeuxl'vnarau-
tre & dela vers 1'obiet, ou dedeus ftations d'vn mefme
obiet,iIs ne varient aufly prefque plus lors qu'on regarde
tant foit peu loin. Enfuite de quoy noftre fens commun
mefme ne femblepas eftre capable dereceuoir en foy
1'ide'ed'vnediftanceplusgrandequ'enuiron decent ou
deus cens pieds. ainfi qu'ilfe peut verifier dece que la
lune & le foleil, qui font du nombre des cors les plus
efloigne's que nous puirlions voir, & dont les diametres
font a leur diftance apeupre's com me vn a cent, n'ont
couftumedenousparoiftre que d'vn ou deus pieds der
diametretoutauplus, nonobftantque nous fcachions
afles par raifon, qu'ils font extremement grands, & ex-
tremement efloigne's. Car cela ne nous arriue pas, fau-
te de les pouuoir eonceuoir plus grands que nous ne fai-
fons, vu que nous conceuons bien des tours & des mon-
taignes beaucoup plus grandes, mais pource que ne les
pouuant eonceuoir plus efloignes que de cent ou deus
cens pieds, il fuitde Ik que leur diametre ne nous doit
paroiftre
-ocr page 146-
Discours Sixiesme.                67
paroiftrequed'vn ou de deuspieds. En quoy la fitua-
tion ayde aufly a noustromper, car ordinairement ces
Aftres femblent plus petits lors qu'ils font fort hauts
vers le midy, que lors que fe leuant, on fe couchant, il fe
trouue diuers obiets entre eus &nos yeus, qui nous font
mieus remarquer leur diftance. Et les Aftronomes
efprouuent aire's en les mefurant auec leurs inftrumens,
que ce qu'ils paroiflent ainfi plus grands vnefois que
l'autre, ne vient point de ce qu'ils fe voyent fous vn plus
grand angle, mais de ce qu'ils fe iugent plus efloigne's.
d'ou il fuit que l'axiorae de Tanciene Optique, qui dit,
que la grandeur apparente des obiets eft proportionne'e
a celle de Tangle de la vifion, n'eft pas toufiours vray.
On fe trompe aufly en ce que les cors blancs ou lumi-
neus, & generalement tous ceus qui ont beaucoup de
force pour mouuoir le feus de la veue, paroiflent tou-
fiours quelque peu plus proches & plus grands, qu'ils ne
feroient s'ils en auoient moins. Or la raifonqui les fait
paroiftre plus proches , eft que le mouuemeqt dont la
prunelle s'eftrecift pour euiter la force de leur lumiere,
eft tellement ioint auec celuy qui difpofe tout Tceil a
voirdiftin&ementles obiets proches, &par lequel on
iugedeleur diftance, que l'vn ne fe peutgueres faire,
fans qu'il fe face aufly vn peu de l'autre. En mefme fa-
con qu'on ne peut ferrner entierement les deus premiers
doigts de la main, fans que letroifiefme fe courbe aufly
quelque peu comme pour fe fermer auec eus. Et la rai-
fonpourquoy ces cors blancs oulumineus paroiflet plus
grands, ne confifte pas feulement en ce que Teftime
qu'on fait de leur grandeur depend de celle de leurdi-
I 2                      ftance,
-ocr page 147-
6$                     La Dioptriqjie
fiance, mais auffy en ce que leurs images s'impriment
plus grandes dans lefondsde l'oeil. Carilfautremarquer
que les bouts des filets du nerfoptique quile couurent,
encores que tie's petits, ont neautmoins quelque grof-
feur;en forte que chacun d'eus peut ellre touche en l'vne
defes parties par vnobiet,& en d'autres par d'autres; &
que n'eftant toutesfois capable d'eftre meu que d'vne
feule facona chafque foix, lors que la moindre de fes
parties eft touche'e par quelqu'obiet fort efclattant, &
les autres par d'autres qui le font moins, il fuit tout entier
le mouuement de celuy qui eft le plus efclatant, & en re-
prefente 1'image, fansreprefenter celle des autres. Com-
nie fi les bouts de ces petits filets font 12 3 , 8c que les
rayons qui vienent, par exemple, tracer 1'image d'vne
eftoilefurlefondsdel*ceil, s'y eftendent fur celuy qui
eft marque 1, & tant foit peu au delatout autour fur les
extremites des fix autres marques 2, fur lefquels
iefuppofequ'ilnevient point d'autres rayons,
que fort foibles, des parties du ciel voifines a
cette eftoile , fon image s'eftendra en tout l'efpace
qu'occupentcesfix marque's 2, &mefme peut eftre en-
cores en tout celuy qu'occupent les douze marques 3,
fi la force du mouuement eft figrandej qu'elle fe com-
munique auffy a eus. Et ainfi vous voyes que les Eftoi-
les, quoyqu'ellesparoiffentaffe's petites; paroiffent ne-
antmoins beaucoup plus grandes qu'elles ne deuroienta
raifondeleur extreme diftance; Et qu'encores qu'elles
ne feroientpasentierementrondes, ellesne lairroient
pasdeparoiftretelles. Comme auffy vnetour quarrde
eftant veue de loin paroift ronde, & tous ks cors qui
ne
-ocr page 148-
DrSCOURsSlXlESME.                    tfp
ne tracent que de fort petites images dans l'ceil,n'y peu-
uent tracer les figures de leurs angles. Enfin pour ce qui
eftdeiugerde ladiftancepar la grandeur, ou la figure,
oulacouleur, ou la lumiere, les tableaus de Perfpectiue
nousmonftrent affe's, combien il eft facile des'y trom-
per. Car fouuent, pare eque les chofes, qui y font pein-
tes, font plus petites, que nous ne nous imaginons qu'el-
lcs doiuent eftre, & que leurs lineamens font plus confus,
& leurs couleurs plus brunes , ou plus foibles, elles
nous paroiffent plus efloignees qu'elles ne font.
I 3
DES
-ocr page 149-
70                    La Dioptriqjie
2
DES MOYENS D E
PERFECTIONNER LA
VISION.
Difcours Septiefme.
"\yT A INT en ant que nous auons affe's examine
-*-*-*-comment fe fait la vilion, receuillons en peu de
mots, & nous remettons deuant les yeux toutes les con-
ditions, qui font requifes a fa perfection ■, afin que confi-
derant en quelle forte il a defia efte" pourvu a chacune
par la Nature , nous puiffions faire vn denombrement
exacT:, de tout ce qui refte encore a l'art a y adioufter.
On peut reduire toutes les chofes, aufquelles il faut
auoir icy efgard, a trois principals, qui font, les obiets,
lesorganes interieurs qui re§oiuent les a&ions de ces
obiets, & les exterieurs qui difpofent ces actions a eftre
receuescommeellesdoiuent. Ettouchantles obiets, il
fuffitde feauoir, que les vns font prochesou acceffibles,
& les autres efloignes & inacce/Iibles -, & auec cela les
vns plus, les autres moins illumines: afin que nous foyons
auertis que pource qui elides acceffibles, nous les pou-
udns approcher ou efloigner, & augmeter ou diminuef
lalumiereqniles efclaire, felon qu'il nous fera le plus
commode; mais que pour ce qui concerne les autres,
nous n'y pouuons changer aucune chofe. Puis touchant
les organes interieurs, qui font les nerfs & le cerueau, il
eft certain aufly,que nous ne fcaurions rien adiouter par
ait
-ocr page 150-
DiscoursSeptiesme.              ft
artaleurfabrique; carnous nef^aurions nous faire vn
nouueau cors ;.& fi les medecins y peuuent ayder en
quelque chofe, cela n'apartient point a noftre fuiet. Si
bienqu'ilnenousreftea confiderer que les organesex-
terieurs, entre lefquels ie compi*ns toutes les parties
tranfparentes de l'ceil, aufTy bien que tous les autres cors
qu'on peut mettre entre luy & l'obiet. Et ie trouue que
toutes les chofes aus quelles il eft befoin de pouruoir
auec ces organes exterieurs , peuuent eftre reduites a
quattre points. Dont Ie premier eft, que tous les rayons,
qui fevontrendre vers chacunedes extremite's du nerf
optique, ne vienentautantqu'ileft poffible que d'vne
mefme partie de l'obiet, & qu'ils ne re§oiuent aucun
changement en l'efpace qui eft entre deus: car fans ce-
lales images qu'ils forment, ne fcauroient eftre ny bien
femblables a leur original, ny biendiftinctes. Lefecond,
que ces images foient fort grandes; non pas en eftendue
de lieu, carellesne f§auroient occuper que Ie peu d'e-
fpace qui fe trouue au fonds de l'ceil; mais en l'eftendue
de leurs lineamens ou de leurs trais. car il eft certain
qu'ils feront d'autant plus ayfds a difcerner qu'ils feront
plus grands. Le troifiefme, que les rayons qui les for-
ment foyentafles forts pour mouuoir les petits filets du
nerfoptiquej &parce moyen eftre fentis; mais qu'ils ne
lefoyent pas tant qu'ils bleffent la veue'. Et le quatrief-
me, qu'i] y ait le plus d'obiets qu'il fera poffible, dont les
images fe forment dans l'ceil en mefme temps , arm
qu'on en puifTe voir le plus qu'il fera poffible tout d'vne
veue.
Or !a nature a employe'plufieurs moyens a pouruoir
a la
-ocr page 151-
72                         L A DlOPTRIQUE
a la premiere de ces chofes. Car premierement rem-
pliffant l'oeil de liqueurs fort tranfparentes, & qui ne
font teintes d'aucune couleur, elleafaitqueles actions
qui viencntde dehors, peuueut paffer iufques au fonds
fans fe changer. Etfar les refradtionsque caufent les
fuperficies de ces liqueurs, elle a fait qu'entre les rayons,
fuinant Iefqnels ces actions fe conduiffent, ceux qui vic-
nent d'vn mefme point, fe raffemblent en vn mefme
point contrele nerf; & en fuite, que ceux qui vienent
desautres points, s'yraffemblent aufly en autant d'an-
tresdiuers points, le plus exadtement qu'il eftpoflible.
Car nous deuons fuppoferque la nature a fait en cecy
tout ce qui eft poffible, d'autant que l'experience ne
nous y fait rien aperceuoir au contraire . Et mefme
nous voyons, que pour rendre d'autant moiudre Ie de-
faut,quine peuten cecyeftretotalement euite', elle a
faitqu'onpuiffereftrecir la prunelle quali autant que la
force de la lumiere Ie permet. Puis park couleurnoire,
dont elle ateinttoutes les parties de l'oeil oppofe'es au
nerf, qui nefbnt point tranfparentes, elle a empefche
qu'il n'allaft aucuns autres rayons vers ces mefmes
points. Et enfin par Ie changement de la figure du cors
de l'oeil, elleafaitqu'encorequeles obietsen puiffent
eftre plus on moins efloignes vne fois que l'autre,les ray-
ons qui vienent de chacunde leurs points, ne laiflent
pasdes'affcmblertoufiours, auffy exadtement qu'il fe
peut, en autant d'autres points au fonds de i'ceil. Tou-
tefois elle n'a pas li entierement pourvu a cette derniere
partie, qu'il ne fe trouue encore quelque chofe ay ad-
;outer: car outre que communement a tous , elle ne
i              nous
-ocr page 152-
DiscoursSeptiesme.              73
nous a pas donne'le moyen de conrbertant les fuperfi-
cies de nos yeux, que nous puiflions voir diftin&ement
les obiets qui en font fort proches,comme a vn doigt ou
vndemidoigtdediftance: Elley a encore manque d'a-
uautage en quelques vns, a qui elle a fait les yeux de tel-
le figure, qu'ilsneleurpeuuent feruir qu'a regarder les
chofes elloignees, ce qui arriue principalement aus vieil-
lars; Et aufTy en quelques autres, a qui au contraire elle
les afaitstels, qu'ils ne leur feruent qu'a regarder les
chofesproches, ce qui eft plus ordinaire aus ieunes gens.
En forte qu'il femble qud les yeux fe forment au com-
mencement vn peu plus longs & plus eftrois qu'ils ne
doiueteftre,& que par apre's pernio qu'onvieillift, ilsde-
uienet plus plats & plus larges.Or afin que nous puiflions
remedierparartacesdefauts, ilferapremierement be-
foin que nous cherchions les figures, que les fuperficies
d\ne piece de verre ou de quelq; autre cors tranfparent
doiuentauoir, pour courber les rayons,qui tombentfur
elles,en telle forte que tous ceux qui vienet d'vn certain
point de l'obiet,fe difpofet en les trauerfant,tout de mef-
me que s'ils eftoient venus d'vn autre point, qui fuft plus
proche, ou plus efloignd: a fgauoir, qui fuft plus proche,
pour feruir aceuxquiontlaveuecourte; & qui fuft plus
efloigne', tant pour les vieillars, que generalement pour
tous ceux, qui veulet voir des obiets plus proches que la
figure de leurs yeux ne le permet.Car par exeple l'oeil B,
ou C,eftant difpofe'a faire que tous les rayons qui vienet
du point H, ou I, s'aflemblent au milieu de fon fonds-, &
ne le pouuant eftre,a faire aufly que ceux du point V, ou
X,s'y affemblent^il eft euident,que fi on met au deuat de
K                         luy
-ocr page 153-
74                    La Dioptriclue
luyleverre 0,ouP,qui face quetous Ies rayons du point
V, ouX,eutrent dedans, tout de mefme que s'ils ve-
noyent du point H, ou I, on fuppleera par ce moyen a
fondefaut. Puisacaufequ'ilpeutyauoir des verres de
plufieurs diuerfes figu-
res, qui ayent en cela
exactement le mefme
effect , ii fera befoin,
pour choifir les plus
propres a noftre dcf-
fein , que nous pre-
nions encore garde
principalement a deux
coditions. Dont la pre-
miere eft , que ces fi-
gures fbyent Ies plus
fimples & les plus ayfe'es
a defcrire & a tailler
qu'ilferapoffible. Etla
»H
feconde , que par leur
< F
moyen les rayons qui vienent desautres points de l'ob-
iet, comme E E, entrent dans Toeil a peu prds de mef-
me, que s'ils venoient d'autant d'autres points , com-
me F F. Et notes que ie dis feulement icy a peu pre's,
nonautantqu'ileftpoffible} car outre qu'il feroit peut
eftre aire's mal-ayfe'a determiner par Geometrie, entre
vne infinite de figures qui peuuent feruir a ce mefme ef-
fect, celles qui y font exactement Ies plus propres, il fe-
roit entierement inutile^ a caufe que 1'ceil mefme ne fai-
fant pas , que tous Ies rayons qui vienent de diuers
points,
-ocr page 154-
Discours Septiesme.^              7S
points, s'afTemblent iuftement en autant d'autres diuers
points, dies ne feroyent pas fans doute pour cela les plus
propres a rendre la vifion bien diftin&e. & il eft impof-
fible en cecy de choifir autrement qu'a peu pres, a caufe
que la figure precifede 1'oeil ne nous pent eftre cognue.
De plus nous aurons toufiours a prendre garde, lors
que nous appliquerons ainfi quelque cors au deuant
denosyeux, que nous imitions autant qu'il fera poffible
la nature, en toutcs les chofes que nous voyons qu'elle a
obferudenlesconftruifant: & que nous neperdions au-
cun des auantages qu'elle nous a donne's, fi ce n'eftpour
en gaigner quelque autre plus important.
Pour la grandeur des images,il eft a remarquer,qu'el-
le depend feulement de trois chofes. a f$auoir, de la di-
stance qui eft entre l'obiet, & le lieu ou fe croifent les ra-
yons, qu'il enuoye de diuers de fespoins vers lefonds de
l'oeilj puis de celle qui eft entre ce mefme lieu, & le
fonds del'ceilj & enfin de la refraction de ces rayons.
Comme il eft euident que l'image R S T feroit plus
grande qu'elle n'eft,fi l'obiet V X Y eftoit plus proche
du lieu K, ou fe croyfent les rayons V K R & Y K T , ou
pluftoft de la fuperficie BCD, qui eft proprement le
lieu ou ils commencent a fe croifer, ainfi que vous verres
cyapres; Oubien fi on pouuoit faire que le cors de 1'ceil
full plus long, en forte quil yeuft plus de diftance qu'il
ny a, depuis fa fuperficie BCD, qui fait que ces rayons
s'entrecroyfent, iufques au fonds R S T: Ou enfin fi la
refraction ne les courboit pas tant en dedans vers le mi-
lieu S,mais pluftoft, s'il eftoit poffible , en dehors. Et
quoyqu'on imagine outre ces trois chofes, il ny a rien
K 2                     qui
. ....
-ocr page 155-
La Dioptriqjue
76
G
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-ocr page 156-
Discours Septiesme.               77
qui puifTe rendre cette image plus grande. Mefme la
derniere n'eft quafi point du tout confiderable, a caufe
qii'onnepeut Jamais augmenterl'image par fon moyen
quedc fortpeu, & ce auec tant de difficult^, qu'on le
peuttoufioursplusayfement par 1'vne des autres, ainii
quevousfc.aure'stout maintenat. AufTy voyons nous que
la nature Fa negligee, car faifant que les rayons, come
VKR&YKTfe courbent en dedans vers S, fur les fu-
perficies BCU&123;ellea rendul'image RS T vn
peu plus petite, que fi elle auoit fait qu'ils fe courbaffent
en dehors, comme ils font vers 5 fur la fuperficie 4 f 6-y
ouqu'elleleseuftlaiffeeftre tous droits. On n'a point
befoinauffydeconfiderer la premiere de ces trois cho-
fes lors que les obiets ne font point du tout acceflibles:
mais lors qu'ils le font, il eft euident que d'autant que
nous les regardons de plus pre's, d'autant Ieurs images fe
forment plus grandes au fonds de nos yeux. Si-bien-
que la nature ne nous ayant pas donne'le moyen de les
regarder de plus prds, qu'enuiron a vn pied ou demi
pied 4e diftance, afind'y adioufterparart tout cequi fe
peut,ileftfeulement befoin d'interpofer vn verre, tei
queceluy qui eft marque' P , dont il a efte' parle tout Voycs en,
maintenant j qui face que tous les rayons, quivienent aPaSe
d'vn point leplus proche qu'il fe pourra 3 entrent dans
l'oeil, comme s'ilsvenoientd'vn autre point plus eiloi-
gne'. Or tout le plus qu'on puiffe faire par ce moyen e'eft
qu'il n'y aura que la douze ou quinziefme par tie d'autant
uefpace entre l'oeil & l'obiet, qu'il y en deuroit auoir
fenscela: & ainfique les rayons qui viendront de di-
ners poins de cet obiet, fe croiflans douze ou quinze fois
K 1                     plus
-ocr page 157-
78                     La Dioptriqjie
plus pres de luy; ou mefme quelque peri d'auantage, a
caufeque ceneferaplus fur la fuperficie de l'oeilqu'ils
eommenceront afe croifer, mais pluftoft fur celle du
verre, dont l'obiet fera vn peu plus proche; ils formeront
vneimage, dontlediametre fera douzeou quinze fois
plus grand qu'il ne pourroit eftre fi on ne fe feruoit point
dece verre: & par confequent fa fuperficie fera enuiron
deus cens fois plus grande, ce qui fera que 1 obiet paroi-
ftra enuiron deux cent foisplus diftindtement. au moyen
de quoy, il paroiftra aufly beaucoup plus grand, non pas
deus cent fois iuftement, mais plus ou moins a propor-
tion de ce qu'on le iugera eftre efloigne'. Car par cxexn-
ple, fi en regardant l'obiet X au trauers du verre P,ou
difpofe fon ceil C, c'n mefme forte qu'il deuroit eftre
pour voir vn autre obiet, qui feroit a 20 ou 3 o pas loin de
luy}& que n'ayant d'ailleurs aucune cognoifTance du
lieu ou eft cet obiet X, on le iuge eftre veritablernent a
trente pas, il femblera plus d'vn milion de fois plus
grand qu'il n'eft. en forte qu'il pourra deuenir d'vne
puce vn elephant; car il eft certain que l'image que for-
me vne puce au fonds de rceil, lors qu'elle en eft fi pro-
che, n'eft pas moins grande, que cclle qu'y forme vn ele-
phant, lors qu'il en eft a trente pas. Et c'eft fur cecy feul
qu'eft fonde'e toute 1'inuention de ces petites lunetes a
puce compofe'es d'vn feul verre, dont Tvfage eft par tout
afles commun: bien qu'on n'ait pas encores connu la
vraye figure qu'elles doiuent auoir: & pource qu'on fcait
ordinairement que l'obiet eft fort proche , lors qu'on les
employe a leregarder,ilnepeutparoiftrefi grand, qu»
feroit, fion 1'imaginoit plus efloigne.
-ocr page 158-
DiscoursSeptiesme.                79
line refteplusqu'vnautremoyenpouraugmenter la
grandeur des images, qui eft de faire queles rayons qui
vienentde diuers points de l'obiet,fe croifent le plus loin
qu'ilfepourradufondsde l'osil. mais il eft bien fans co-
paraifon,Ie plus important & le plus
confiderable de tous. Car c'eft
I'vnique qui puifTe feruir pour les
obiets inacceffibles, aufly bien que
pour les acceffibles, & dont 1'effet
n'a point de bornes: en forte qu'on
peutens'en feruant augmenterles
images de plus en plus iufques a
vne grandeur indefinie. Com me
par exemple, d'autat que la premie-
re des trois liqueurs dont l'oeil eft
rempli, caufe a peu prds mefme re-
fraction que l'eau commune, fi on
applique tout contre vn tuyau
plein d'eau, comme EF, au bout
du quel il y ait vn verre G H I,dont
h figure fbit toute femblable a cel-
JE^iPi
le de la peau B C D qui couure cet-
te liqueur, & ait mefmc rapport a
la diftance du fonds de l'oeil; il ne
fe fera plus aucune refraction a l'en-
tre'e de cet ceil; mais celle qui s'y
faifoit auparauant , & qui eftoit
caufe que tous les rayons qui ve-
noient d'vn mefine point de l'obiet
commencoient a fe courber des cet
endroit-
mm
K
j
-ocr page 159-
So                    La Dioptriqde
endroit-la , pour s'aller aflembler en vn mefme point
furies extremite'sdu nerf optique, & qu'en fuite tous
ceux qui venoyent de diuers points s'y croifoient, pour
s'aller rendre fur diuers points de ce nerf,fe fera des Ten-
tree du tuyau G T: fibienque ces rayons fe croifans des
Ia3formerontTimage RS T beaucoup plus grande, que
s'ilsnefe croifoient que fur la fuperfkie BCD; & ils la
forrneront de plus en plus grande felon que ce tuyau fe-
ra plus long. Etainfil'eau EF, faifant Toffice de Thu-
meurK;leverreGHI,celuydelapeau BCD; & Ten-
tree du tuyau G I, celuy de la prunelle, la vifion fe fera en
rnefme facon que fi la nature auoit fait Tceil plus long
qu'il n'eft,de toute la longeurde ce tuyau.Sans qu'ily ait
autre chofe a remarquer, finon que la vraye prunelle fe-
ra pourIors, nonfeuleraent inutile, mais mefme nuifi-
ble, en ce qu'elleexclura, par fa petiteffe, les rayons qui
pourroient aller vers les coftes dufonds de Tceil, &ainfi
empefchera que les images ne s'y eftendent, en autant
d'efpace qn'elles feroient, fi elle n'eftoit point fi eftroi-
te. Ilnefautpas aufTyqueiem'oublie ds vous auertir,
que les refractions particulieres, quife font vnpeuau-
trement dans le verre GHI, que dans Teau EF, ne
font point icy conliderables, acaufeque ce verre eftant
par tout efgalementefpais,fi la premiere de fes fuperfi-
ciesfaitcourber les rayons, vn peu plus que ne feroit
celle del'eau, lafeconde les redreffe d'autant a mefme
temps. Etc'eftpourcette mefme raifbn, quecydeffus
ie n'ay poiut parle des refractions que peuuent caufer les
peaus qui enueloppent les humeurs de Tceil, mais feule-
ment de celles de fes humeurs.
Or
-ocr page 160-
Discours Septiesme.                8r
Ord'autantqu'ily auroit beaucoup d'incommodite
aioindredel'eaucontrenoftre ceil, en la fagon que ie
vien d'expliquer; & mefme que ne pouuant fgauoir pre-
cifement quelle eft la figure de la peau BCD qui Ie cou-
ure,onne fc.auroit determiner exactement celle du ver-
re GHT, pour lefubftitner en fa place-il feramieux de
fe feruir d'vne autre inuention. Etdefairepar le moyen
d'vnoudeplufieursverres, ou autrescorstraufparens,
enferrae's auflyen vn tuyau, mais non pas iointsa I'ceilfl
exactement qu'il ne demeure vn peu d'air entre deux,
que des l'entrde de ce tuyau, Ies rayons qui vienent d'vn
mefmepointdel'obietfeplient ,oufe courbent, en la
faccmqui eft requife, pour faire qu'ils aillent fe raffem-
bler en vn autre point, vers l'endroit ou fe trouuera le
milieu du fonds de l'ceil, quand ce tuyau fera mis au de-
uant. Puisde rechefquecesmefmes rayons en fortant
dece tuyau feplient & fe redreflent en telle forte qu'ils
puifTent entrer dans l'ceil tout de mefme que s'ils n'auo-
ient point du tout eftd plies, mais feulement qu'ils vin-
fentdequelque lieu qui fuft plus proche. Et en fuite,
que ceuxquiviendrontde diuerspoints, s'eftant croife's
des l'entrde de ce tuyau, ne fe decroyfent point a la for-
tie, mais qu'ils aillent vers l'ceil en mefme fagon que
s'ils venoient d'vn obiet qui fuft plus grand, ou plus
proche. Gomrae fi le tuyau H F eft rempli d'vn verre
tout folide, dont la fuperficie G HI foit de telle figure,
qu'elle face que tous Ies rayons qui vienent du point X,
eftantdans le verre tendent vers S;& que fon autre fu-
perficie KM Ies pliede rechef en telle forte, qu'ils ten-
dent dela vers l'ceil en mefme fagon que s'ils venoient
L                          du
-ocr page 161-
DlOPTRIQUE
du point x, que ie fuppofe en te!
lieu,queleslignes x C, & C S,
ont entre elles mefme proportion
queXH, &HSj ceuxquivien-
dront du point V les croyferont
necefTairement en la fuperficie
G H I, de facon que fe trouuant
defia efloignes d'eus lors qu'ils fe-
ront a l'autre bout du tuyau, la fu-
perficie KMne les en ponrra pas
rapprocher, principalement li elle
eft concaue , ainfi que ie la fuppo-
fe , mais elle les renuoyra vers
1'oeil, k peu pre's en mefme forte
ques'ils venoient du pointy, au
moyen de quoy ils formeront
Timage R S T d'autant plus gran-
de, que le tuyau fera plus long. &
il ne fera point befoin, pour de-
terminer les figures des cors tran-
fparents dont on voudra fe feruir
a cet effecl:, de fcauoir exa&e-
ment quelle eft cellede la fuperfi-
cie BCD.
Mais pour ce qu'il y auroit de
rechef de rincommodite a trou-
uerdes verres ou autre* tels cors
qui fufTent affes efpais pour rem-
plir tout Ie tuyau HF,& affes
clairs & tranfparens pour n'em-
pefcher
-ocr page 162-
Discours Septiesme.                85
pefclier point pour cela Ie paflage de la lnmiere:on pour-
ra laiffer vuide tout le dedans de ce tuyau, 8c mettre feu-
Iement deux verres a fes deux bouts, qui facent lemef-
me effet que ie vien de dire que les deux fuperficies
GHI & KLMdeuoientfaire. Et c'eft fur cecy feul
qu'eft fondde toute l'inuention de ces lunetes compofees
de deux verres mis aus deux bouts d'vn tuyau, qui rn'ont
donnebccafion d efcrire ce Traite.
Pour la troificfrne condition qui eft requife a la perfe-
ction de la veue de la part des organes exterieurs, a fca-
uoir, que les actions qui rneuuent chafque filet du nerf
optique, ne foieut nytrop fortes nytrop foibles, la natu-
re y a fort bien pourvu , en nous donnant le pouuoir
d'eftrecir & d'eflargir les prunelles de nos yeux. Mais
die a encore laiffe'a Tart quelque chofe a y adioufter.
Car premierement lors que ccs Actions font fi fortes,
qu'onne peutaffe's eftrecirles prunelles pour les fouf-
frir, comme lors qu'on veut regarderle foleil, il eft ayfe
d'yapporterrernedeenfemettantcontrel'ceil quelque
corsuoir,dans lequel il n'y ait qu'vn trou fort eftroit,
qui face 1'ofHce de la prunelle; oubien en regardant au
trailers d'vn crefpe, ou de quelqu'autre tel cors vn pen
obfcur, &quineIai(Te entrer en 1'ceil qu'autant de ra-
yfcns de chafque partie de l'obiet,qu'il en eft befbin pour
niouuoir le nerf optique fans Ie bleffer. Et lors que
tour,, au contraire fes actions font trop foibles pour eftre
fenties, nous pouuons les rendre plus fortes, au moins
quand les obiets font acceffibles, en les expofant aux
rayons du foleil, tellement ramaffe, par l'ayde d'vn
nuroir ou verre bruflant, qu'ils ayent le plus de force
L 2                     qu'ils
-ocr page 163-
84                    LaDioptriqjie
qu'ils puiflent auoir pour Ies illuminer fans les cor-
rompre.
Puis outre cela, Iors qu'on fe fert des Iunetes dont
nous venons de parler, d'autant qu'elles rendent la pru-
nelle inutile, & que e'eft l'ouuerture par ou elles recoi-
uentlalumierede dehors qui fait fon office, e'eft elle
auffy qu'on doit eflargir ou eftrecir, felon qu'on veut
rendre la vifion plus forte ou plus foible. Ft il eft a re-
marquer, quel!onnefaifoitpoint cette ouuerture plus
large qu'eft la prunelle, les rayons agiroicnt moins fort
contre chafque partie du fonds de l'ceil, que ii on ne fe
feruoit point de lunetes: & ce en mefme proportion,que
les images qu'ils y formeroient feroient plus grandes.-
fans conferee que les fuperficies des verres interpofe's
oftentdeleur force. Mais on peut la rendre beaucoup
plus large, &ce d'autant plus, queleverre qui redreffe
les rayons, eft fkue plus proche du point vers lequel ce-
luy qui les a plies les faifoit tendre. Comme fi le verre
G g H i fait que tous les rayons qui vienent du point
qu'on veut regarder tendent vers S, & qu'ils fbient re-
drefle'sparle verre KLM, en forte que dela ils ten-
dent paralleles vers l'ceil: pourtrouuer la plus grande
largeurque puiffe auoir l'ouuerture du tuyau,ilfaut fai-
re la diftance, qui eft entre les points K &M, efgale m
diametre de la prunelle ; puis tirant du point S deus
lignes droitesquipafTent parK &M, af§auoir S K,^u'il
faut prolonger iufques a g • & S M, iufques a i; on aura
%i, pour le diametre qu'on cherchoit. Carileftmani-
fefteque lion la faifoit plus grande, il n'entreroit point
pour cela dans i'ceil plus de rayons du point vers lequel
on
-ocr page 164-
Discours Septiesme.                 8jr
on dreffe fa veue, & que pour ceux qui y viendroient de
plus des autres lieus, ne pouuans ayder a la virion, ils ne
feroient que la rendre plus
confufe. Mais li au lieu du
verre K L M , on fe fert de
\lm, qui a caufe de fa figure
doit eftremis plus proche du
a
point S, onprendrade rechef
la diftance entre les points
^&iwefgaleaudiametre dela
prunelle5 puis tirant les lignes
droites S / G, & S m I, on aura
GI, pour le diametrede Tou-
uerturecherchee, quicomme
vousvoyes eft plus grand que
gi, enmefme proportion que
la ligne S L furpaffe S /. Et
licette ligne S / n'eft pas plus
grande que le diametre de
1'oeil, la virion fera aufTy forte
apeuprc's, & aufly claire, que
fionne fe feruoit point de lu-
neteS)& que les obiets fuffent en recopenfe plus proches
qu'ils ne font, d'autant qu'ils paroiffentplus grands. En
lortequefilalongeurdu tuyau fait, par exemple, que
1 image d'vn obiet efloignd de trente lieues fe forme
aufly grande dans 1'ceilj que s'il n'eftoit efloigne' que de
trente pas 5 la largeur de fon entree eftant telle que ie
viens dela determiner, fera que cet obiet fe verra auffy
clairement 3 que li, n'en eftant veritablement efloigne
L 3                      que
-ocr page 165-
85                      La Dioptriqjie
que de trente pas, on le regardoit fans lunetes. Et fi on
peut faire cettediftance entre les points S & /encore
moindre, la vifion fera encore plus claire.
Mais cecy ne fert principalement que pour les obiets
inacceffiblesj car pour ceus qui font acceilibles Touuer-
ture du tuyau peut eftre d'autant plus eftroite qu'on
les en aproche d'auantage, fans pour cela que la vifion en
foitmoins claire. Comme vous voyes qu'il n'entre pas
x rnoinsde rayons dupoiut X dans lepe-
A           titverre^z, que dans le grand G I. Et
1 4S I enfin elle ne peut eftre plus large que les
i;;i\0:. verres qu'ony applique, lefquelsacaufe
:;//j!'::\V- de leurs figures ne doiuent point exce-
i;ij \'\v\ dercertainegrandeur, queie deterrm-
pJJ-^-^\ neray cyapres.
*^~-------"^ Que fi quelquefois la Iumiere qui vient
des obiets eft trop forte, il fera bien ayfe'de raffoiblir,en
couuranttoutautour les extremitds du verre qui eft a
I'entrde du tuyau: cequi vaudra mieus que de rnettre
audeuantquelquesautres verres plus troubles ou Colo-
re's, ainfi que plufieurs ont couftume de faire pour regar-
derlefoleil: car plus cette entree fera eftroite, plus la
vifion fera diftincte. ainfi qu'il a eftedit cydeffus de la
prunelle. Et mefme il faut obferuer, qu'il fera mieux de
couurirle verre par Ie dehors que par Ie dedans, afiii
que les reflexions ,qui fe pouroient faire fur les bords de
fafuperficie,n'enuoyent vers l'ceil aucuns rayons: car
ces rayons neferuans point a la vifion,y pouroient nuire.
Il n'y a plus qu'vne condition qui foit defire'e de la
part des organes exterieurs, qui eft de faire qu'on aper-
cx>iue
-■
-ocr page 166-
Discours Septiesme.                87
coiuele plus d'obiets qu'il eft poffible en mefme temps.
Etil eft a remarquer qu'elle n'eft aucunement requife
pour la perfection de voir mieux; mais feuleraent pour
la commoditd devoir plus; eft mefme qu'il eft impoffi-
ble de voir plus d'vn feul obiet a la fois diftinctement: en
forte que cette commodite', d'en voir cependant confu-
fement plufieurs autres, n'eft principalement vtile,qu'a-
findefgauoirversquelcofte'jl faudra paraprds tourner
fesyeux, pourregarderceluy d'entreeux qu'on voudra
mieux confiderer. Et e'eft a quoy la nature a tellement
pourvu, qu'il eft impoffible a l'artd'y adioufter ancune
chofe: mefme tout au contraire, d'autant plus que par Ie
moyen de quelques lunetes on augmente la grandeur
des lineamens de l'image qui s'imprime au fonds de
l'oeilj d'autant fait on qu'elle reprefente moinsd'obiets:
a caufe que l'efpace qu'elle occupe ne peut aucunement
eftre augmente, fi ce n'eft peut eftre de fort peu en la
renuerfant, ce que ie iuge eftre a reietter ponrd'autres
raifons. Mais ileft ayfe', fi les obiets font acceffibles, dc
mettre celuy qu'on veutregarder enl'endroitouilpeut
eftre vu le plus diftinctement au trauers de la lunete; &
s'ilsfontinacceffibles, de mettre la lunete fur vne ma-
chine, qui ferue a la tourner facilement verstelendroin
determine'qu'on voudra. Et ainfi il ne nous manquera
riende ce qui rend le plus cette quatriefme condition
confiderable.
Au refte, afin que ie n'obmette icy aucune chofe, i'ay
encore a vousauertir, quelesdefautsderceil,quicon-
fiftent en ce qu'on ne peut afTes changer la figure de
I'hurneur criftaline, ou bien la graudeur de la prunelle,fe
peuuent
. ,:';;-A":^>-:r!:H^.'i : -■-■ .-.-.:.
-ocr page 167-
88                    La Dioptriqjie
peuaentpeua peu diminuer & corriger par l'vfage} a
caufe que cette humeur criftaline, & la peau qui con-
tient cette prunelle, eftant de vrais mufcles, leurs fon-
<5tions fe facilitent & s'augmentent lors qu'on les exer-
ce- ainfi que celles de tous les autres mufcles de noftre
cors. Et c'eft ainfi que leschaffeurs & les matelots en
s'exerc, ant a regarder des obiets fort efloignds; & les gra-
ueurs ou autres artifans, qui font des ouurages fort fub-
tils, a en regarder de fort proches;acquerent ordinaire-
ment la puiflance deles voir plus diftincternent que les
autres hommes. Et c'eft ainfi aufTy, que ces Indiens
qu'on dit auoir pu fixement regarder le foleil, fans que
leurveueenfuftofFufqueejauoient deu fans doute au-
parauant,en regardant fouuent des obiets fort efclatans,
accouftumerpeuapeu leurs prunelles a s'eftrecir plus
que les noftres. Mais ceschofes apartienent pluftoft a
IaMedecine, dontlafineftde remedier aus defauts de
laveue par la correction des organes naturels, que non
pasalaDioptrique, dont la fin n'eft que de remedier
aus mefmes defauts par l'application de quelques autres
organes artificiels.
DES
-ocr page 168-
DlSCOURS HtllCTlESME.                S?
DES FIGVRES QVE DOIVENT
auoir les cors tran(parenspour detour-
ner les rayons'par refraction en toil-
tes les fac,ons qui feruent a
la veue.
Diftours HulBiejmc.
ORafinque ie vous puiffe tantoft dire plusexa&e-
ment en quelle forte on doit faire ces organes arti-
ficiels, pour les rendre les plus parfaits qui puiflfent eftre-
il eft befoin que i'explique auparauant les figures que
doiuent auoir les fuperficies des cors tranfparens pour
plier Scdetournerles rayons de la Iumiere en toutes les
famous qui peuuent feruir amondefTein. En quoy fi ie
ne me puis rendre afles clair & intelligible pour tout le
monde, acaufe que c'eft vne matiere de Geometrie vn
peu difficile; ie tafcheray au moins de l'eftre alTe's pour
ceuxquiaurontfeulement appris les premiers Eleraens
de cettefcience. Etd'abordafin dene les tenir point en
fufpens, ie Ieur diray, que toutes les figures dont i'ay icy
a leur parler , ne feront compofe'es que d'Ellipfes ou
d'Hyperboles, & de cercles ou de lignes droites.
L'EUipfe ou l'Ouale eft vne ligne courbe que les Ma-
thematiciensontaccouftume de nous expofer encou-
paot de travers vn Cone ou vn Cylindre, & que i'ay vn
aulTyquelquefois employer par des Iardiuiers dans ks
M                       com-
-ocr page 169-
$>o                       LaDioptr.iq.ue
compartimens de leurs parterres, ou ils la defcriuent
d'vne facon qui eft veritablement fort groffiere & peu
exadte, mais qui fait, ce me femble, mieux comprendre
fa nature, que la fection du Cylindre ny du Cone. lis
plantent en terre deux picquets, comme par exemple,
Tvn au point H, l'autre au point I, & ayant noiie enfem-
ble les deux bouts d'vne corde ils la pafTent autotir
d'eux, en la fa§on que vous voyes icy B H I. Puis met-
tant Ie bout du doigt en
cette corde, ils Ie condui-
fent tout autour de ces deux
picquets, en la tirant ton-
fiours a eux d'efgale force,
K afinde latenirtendueefga-
lement, & ainfi defcriuent
fur la terre la ligne courbe
DBK, qui eft vne Ellipfe.
Et fi fans changer la longueur de cette corde B HI ils
plantent feuleraent leurs picquets H & I vn peu plus
prochesl'vnde l'autre , ils defcriront derechef vne Eli-
pfe, mais qui fera d'autre efpeceque la precedente: &
s'ils les plantent encore vn peu plus proehes,ilsen defcri-
ront encoreyne autre: & enfin s'ils les ioignent enfemble
tout a fait, cefera vn cercle qu'ils defcriront. au lien
que s'ils diminuent la longueur de la corde en mefme
proportion que la diftance de ces picquets, ils defcriront
bien des Ellipfes, quiferontdiuerfes en grandeur, mais
qui feronttoutesde mefme efpece. Et ainfi vous voyes
qu'il yenpeut auoir d'vne infinite'd'efpeces toutes di-
uerfes, en forte qa'elles ne different pas moins l'vne de
l'autre,
-ocr page 170-
■ ■' "'
DlSCOU RS HUICTIESME.                 91
l'autre, que la derniere fait du cercle; & que de chafque
efpece, ily en peutauoirde routes grandeurs. Etquefi
d'vn point, commeB, pris a difcretiondans quelqu'vne
de ces Ellipfes, on tire deux lignes droites, vers les deux
points H & I, on les deuspicquets doiuent eftre plantes
pour la defcrire: ces deux lignes B H, & BT, iointesen-
femble, feront efgales a fon plus grand diametre D K-
ainfiqu'ilfeprouuefacilementparla conftruction. Car
la portion de la corde qui s'eftend d'l vers B & dela fe
replie iufques a. H, eft la mefme qui s'eftend d'f vers K
ouvers D Scdela fe replie aufly iufques a H: en forte que
D H eft efgale a I K; & H D plus DI, qui valent autant
que H B plus B I, font efgales a la toute-EH*? Et enfin
les Ellipfes qu'on defcrit en mettant toufiours mefme
proportion entre leur pins grand diametre D K & la di-
ftance des points H & Lfont toutes d'vne mefme efpece.
Et a caufe de certaine propriete' de ces points H & I, que
vousentendres cyaprds, nous les nommerons les points
bruflansj'vn interieur,& l'autre exterieur;a fc,auoir fi on
les rapporte a la moitid de l'Ellipfe qui eft vers D, I fera
l'exterieur; &li on les rapporte a l'autre moitid qui eft
versK,il fera 1'interienr. & quand nous parlerons fans
diftindion du point bruflantj nous entendrons toufiours
parlerdel'interieur. Puis outre cela il eft belbin que
vous fcachids, que fi par ce point B on tire les deux lignes
droites LB G & C B E, qui fe couppent 1'vne l'autre a
angles droits, & dont l'vne L G, diuife Tangle H BI en
deux parties efgales, l'autre CEtouchera cette EUipfe
en ce point B fans lacoupper. dequoy ie ne mets pas
lademonftration pource que les Geometres laf§auent
M 2                       aftes,
.
-ocr page 171-
92                         I>A DlOPTRIQJlE
afles, & que les autres ne feroyent que s'ennuyer de
l'entendre. Mais ce que i'ay icy particulierement def-
fein de vous expliquer, c'eftque fi on tire encore dece
point B, horsdeTEllipfe ,1a ligne droite BA, parallele
au plus grand diametre DKj& que l'ayant prife efgale a
B I, des points A & I on tire fur L G les de'ux perpendi-
culaires AL & IG, ces deuxdernieres A L & IG au-
ront eutrc elles mefme proportion que les deux DK &
HI. En forte que fi la ligne A B eft vn rayon de Iumie-
re,&: que cette Ellipfe DBKfbit en la fuperficie d'vn
cors tranfparent tout fblide, par lequel, fuiuant ce qui a
eftdditcydefTus, les rayons paflent plus ayfement que
parl'air,en mefme proportion que la ligne DK eft plus
grande que HI: Ce rayon A B fera tellement detourne
au point B, par la fuperficie de ce cors tranfparent, qu'il
iradelavers I. EtpourcequecepointBeftprisadifcre-
tion dans l'Ellipfe, tout ce qui fe dit icy du rayon A B, fe
doit entendre generalement detous les rayons, paral-
lels a raiffieu DK,qui tombent fur quelque point de
cette Ellipfe, a fgauoir qu'ils y feront tous tellement de-
tournes, qu'ils iront fe rendre dela vers le point I.
-ocr page 172-
D I SCOURS HUICTIESME.                  9J
Or cecy fe demonftre en cette forte. Premierement
fi on tire du point B, la ligne B F perpendiculaire fur
KD.&quedu point N,ou LG&KD s'entrecoupent,
ontireauflyla^igne N M perpendiculaire fur IB, on
trouueraque ALeftalG, comrae B Feft aN M. Car
d'vne partles triangles B F N & B L A font femblables,
acaufe qu'ilsfont tousdeux rectangles, & que N F &
B A eftans paralleles, les angles FNB&ABL font
efgausj & d'autre part les triangles NBM&IBG font
aulTyfemblables, acaufequ'ils font rectangles, & que
1'angle vers B eft commun a tous deux. Et outre cela
les deux triangles B F N & B M N ont mefme rap-
port entre enx que les deux ALB & B G I , a cau-
fe que comrae les bafes dc ceux-cy BA & BI font
efgales, ainfi B N qui eft la bafe du triangle B F N eft
efgale a foy mefme en tant qu'elle eft aulfy la bafe du
triangle BMN. D'ou il fuit euidemmenr que com-
me BF eft a NM , ainfi AL celuy des coftes du tri-
angle ALB qui fe rapporte a B F , dans le trian-
gle BFN , c'eft a dire qui eft la fubtendue du mef-
me angle , eft a I G , celuy des coftds du triangle
B GI qui fe rapporte an cofte' N M du triangle B N M.
Puis B F eft a NM comme BI eft a N I, a caufeque
les deux triangles BIF & NIM, eftans rectangles, &
ayans le mefme angle vers I, font femblables. De plus II
on tire H O parallele a N B, & qu'on prolonge I B iuf-
quesaO,onverra que BI eft a N I, comme OI eft a
HI, a caufe que les triangles BNI&OH1 font fem-
blables. Enfin les deux angles H B G & G BI eftant
efgausparlaconftruaion, HOB qui eft efgala GBI
M 3                       eft
\
'-■"■--■ - .                                                    .....ta____                                                         _____........... ... ..................,........,._.^.,.___^„,.._
-ocr page 173-
94-                         L A DlOPTRIOJlE
eft auffy efgal a OHB, acaufe que cetuycy eft efgala
H B G. & par confequent le triangle H B O eft ifofce-
le, & laligue O B eftant efgale a H B, la toute OI eft
efgale a DK, d'autant que les deux ertfemble HB&
IB luy font efgales. Et ainfi pour reprendre du premier
au dernier, A Left a IG comme BFeftaNM, &BF
aNM comme BlaNI, &BIa NIcommeOIa HI,
Sf OI eftefgale aDKjdonc A Left a IG commeDK
eft a HI.
Sibienque fi pour tracer 1'ElIipfe DBK,on donne
aux lignes DK & H I, la proportion qu'on aura coiinu
par experience eftre celle, qui fert a mefurer la refra-
ction de tous les rayons, qui paflTent obliquement de Fair
dans quelque verre,ou autre matiere tranfparente qu'on
veut employer; & qu'on face vn cors de ce verre qui ait
la figure que defcriroit cette Ellipfe fi elle fe mouuoit
circulairement autourde raiffieu DK; les rayons qui
feront dansl'airparalleles a ce't aiflieu comme A B, ab,
entrans dans ce verre, s'y detourneront en telle forte,
qu'ilsiront tous s'afTembler au point bruflant I, qui des
deux H & I eft le plus efloigne' du lieu d'ou ils viennent.
Car
-ocr page 174-
.,.-:; v:---
DlSCOURS HUICTIESME.                pf
Car vous f§aues que le rayon A B doit eftre detournc
au point B, par la fuperficie courbe du verre, que repre-
fente l'Ellipfe D B K, tout de mefme qu'il le feroit par
la fuperficie plate du mefme verre que reprefentc la
ligne droite C B E, dans laquelleildoitailer de B vers
I, a caufe qu'A L & IG font l'vne a l'autre comrne
DK & HI, c'eftadire,commeelles doiuent eftre pour
mefurer la refraction. Et le point B, ayant efte_pris
a difcretion dans l'Ellipfe, tous ce que nous auons de-
monftre'de ce rayon AB, fe doit entendre en mefme
facondetous lesautres paral-
lels a DK, quitombentfur
les autres points de cette El-
lipfe- en forte qu'ils doiuent
tous allervers I.
De plus a caufe que tous les
rayons, qui tendent vers le
centre d'vn cercle ou d'vn
globe, tombans perpendicu-
lairement fur fa fuperficie,
n'y doiuent fouffrir aucune
refraction: fi du centre I on
fait vn cercle a telle diftance
qu'on voudra, pourvu qu'il
pafTe entre D & I, comrae
BQjJ,leslignes DB& QB,
tournant autour de l'aiffieu
D Q , defcriront la figure
d'vn verre , qui afK mblera
dansl'air au point I tous les
rayons,
-ocr page 175-
.
$6                    La Dioptriclue
rayons, qui aurontefte'de l'autre cofte', auffy dansl'air,
paralleles a cet ai/Iieu: & reciproquement quiferaque
tous ceux qui feront venus du point I, fe rendrontparal-
leles de l'autre cofte".
Et II du mefme
centre I ondefcritle
cercleRO,a telle di.
ftance qu'on voudra
au del a du point D;
& qu'ayant pris le
point B dans l'El-
lipfe a difcretion,
pourvu toutefoix
qu'ilne fbit pas plus
efloigne de D que
deK,ontirelaIigne
droite B O, qui ten-
de vers I • lesiignes
RO,OB, &BD,
meues circulairemet
autour de l'aiflieu
D R , defcriront la
figure d'vn verre,
qui fera que les rayons paralleles a cet aiffieu du co-
de- de l'Ellipfe, s'efcarteront §a & la de l'autre cofte',
comme s'ils venoient tous du point I. Caril eft raa-
nifefte, que par exemple le rayon P B doit eftre autant
detournd par la fuperficie creufe du verre DBA,
comme AB par la conuexe ouboffuedu verre DBK,
&c par confequent que B O doit eftre en mefme ligne
droite
:...■(. ..^.i-^^ifc^k,!           L           - «. :.:«...;:w,.iif. -.■■■ ■■-■ ,
-ocr page 176-
DlSCOURS HulCTlESME.
97
droiteque BI, puifque PB eft en mefme Iigne droite
,que B A. &ainfi des autres.
Et fi de rechef dans l'Ellipfe D B K on en defcrit vne
autre plus petite, maisde mefme efpece comme db\,
dontIepoint broflant marque J,
foit en mefme lieu que celuy de
la precedente aufly marque' I, &
l'autre h en mefme Iigne droite
& vers le mefme cofte' que D
H, &'qu'ayant pris B a difcre-
tion, comme cy deuant, on tire
la Iigne droite B b , qui tende
vers I, Ies lignes D B, B b, b d,
meues autour de I'aiffieu D d
defcriront la figure d'vn verre
qui fera que tous les rayons qui
auant que de le rencontrer au-
ront enVparalleles fe trouueront
derechefparallelesapreeneftre
fortis, & qu'auec cela ils feront plus refTerre's, & occupe-
ront vn moindre efpace du cofte' dela plus petite El-
. • N                       lipfe
-ocr page 177-
9%                     La Dioetriqjie
lipfe db, que de celuy de la plus grande. Et fi pour eui-
ter Tefpaiffeur de ce verre DB bd, on defcrit dii
centre I les cercles QB & ro, les fuperficies DBQ^
& robd reprefenteront les figures & la fituation de
deuxverres moins efpais, qui auront en, celafonmef-
me effe6t.
Et fi on difpofe les deux verres
femblables D BQ^& dbq inegaus
en grandeur , en telle forte que
leurs aiflieux foient en vne mef-
rne ligne droite , & leurs deux
points bruflant exterieurs, mar-
ques I, en vn mefme lieu ; 6c que
leurs fuperficies circulaires BQ,
b q fe regardent l'vne l'autre , ils
auront aufly en cela le mefme
effedl -
Et fi on ioiut ces deux verres
femblables inegaus en grandeur
DBQ_& db q,Qxiqu'onlesmette
a telle diftance qu'on voudra l'vn
de l'autre, pourvu feulement que
leurs aiflieux foient en mefme ligne
droite, & que leurs fuperficies Elli-
ptiques fe regardent, ils feront que
tons les rayons qui viendront du
point bruflant de l'vn marque' I, s'i-
ront aflembler en l'autre aufly mar-
que I.
Et fi on mat les deux differens DBQ&DBOR
en
-ocr page 178-
Dl SCOURS HUICTIESACE.                 99
en forte auffy que Ieurs fuperficies DB & B D fe re-
gardent,ils ferontquelesrayons*qui viendrontdu point
*i que 1'ElIipfe du verre DBQj pour fon point bru-
fl.ant, s'efcarterontcommes'ils venoientdupointl,qui
eft le point bruflant du verre BDOR: ou reciproque-
ment, que ceux qui tendent vers ce point I, s'iront af-
fembler en l'autre marque' i.
Et enfin fi on ioint les deus DBOR & DBOR
toufiours en forte , que leurs fuperficies DB, BD fe
regardent, on fera que les rayons qui en trauerfantl'vn
de ces verres tendent au delaversl, s'efcarteront de-
rechefen fortant de l'autre cornme s'ils venoient de
N 2                 l'autre
f
-ocr page 179-
too                    La Dioptriqjte
l'autre point I. Et on peut
faire la diftance de chafcun
de ces points marques I plus
ou moins grade autant qu'on
veut, enchageantla gradeur
de 1'Ellipfe dont il deped.En
forte que auec 1'Ellipfe feule
'■ & la ligne circulaire on peut
defcire des verres qui facent
que les rayons qui vienent
d'vn point,outendetversun
point, ou font paralleles,
changent de l'vne en l'autre
deces trois fortes de difpo-
fitions en toutes lesjac.ons
qui puiffent eftre imagine'es.
L'Hyperbole eft aufTy vne
ligne courbe que lesMathematiciens expliquent par la
fedtion d'vn Cone } comme 1'Ellipfe. Mais afin de vous
la faire mieux conceuoir, i'introduiray encore icy vn
iardinler qui s'en fert a compaffer la broderie de quelque
parterre. Ii plante derechef fes deux piquets aux points
H &c I-?&ayant attache"au bout d'vne longue reigle le
bout d'vne corde vn peu plus courte, il fait vn trou rond
a l'autre bout de cette reigle,dans lequel il fait entrer le
piquet I, & vne boucle a l'autre bout de cette corde
qu'il paffe dans le picquet H. Puis mettant le doigt au
point X, ou ellcs font attache'es l'vne a l'autre, ille coule
dela en bas iufques a D, tenant toufiours cependant la
corde toute iointe& comme cole'e contre la reigle de-
:,.          "                   *                                         puis
-ocr page 180-
D'lSCOURS HuiCTIESME.              jor
puisle point X iufques a l'endroit ou il la touche, &
auec cela toute teadue: au moyen dequoy, contraignant
cette reigle de tourner autour du picquet I a rnefure
qu'il abaiffe fon dcigt, il defcrit fur la terre la Iigne cour-
beXBD, quieft vne
partie dVne Hyperbo-
le. Et apre's cela tour-
nant fa reigle de l'autre
cofte'vers Y, il en de-
fcrit en mefme facon
vne autre partie Y D.
Et de plus s'il pafTe la
boucledefacordedans
lepicquet I, &Iebout
de fa reigle dans le pic-
quetH ,il defcrira vne
autre hyperbole SKT
toute femblable & oppofee a la precedente. Mais fi
fans changer fes picquets ny fa reigle, il fait feulement fa
corde vn peu plus longue , il defcrira vne Hyperbole
d'vne autre efpece5& s'il la fait encore vnpeu plus lon-
gue , il en defcrira encore vne d'autre efpece, iufques a
ce que la faifant tout a fait efgale a la reigle, il defcrira
aa lieu d'vne Hyperbole vne ligne droite. Puis s'il
change la diftance de fes picquets en mefme proportion
que la difference qui eft entreles longueurs dela reigle
& de la corde, i I defcrira des Hyperboles qui feront'tou-
tesde mefme efpece,' mais dont les parties femblables,
feront differentes en grandeur. Et enfin, s'il augmente
efgalement les longueurs dela corde &de la reigle, fans
. N 3         t            chan-
»
'•••■•
' '■ .
- 4
' - - *
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■ ■ ■ ■ . .
. ■'..
.
-ocr page 181-
102                         LA DlOPTRlOUE
changer nyleur difference, ny la diftance des deux pic-
quets, il ne defcrira toufiours qu'vne meftne Hyperbo-
le, mais il en defcrira vne plus grande partie. Car cette
ligne eft de telle nature, que bienqu'elle fe courbe tou-
fiours de plus en plus vers vnmefmecofte', elle fe peut
toutesfoiseftendrearinfiny, fans que iamais fes extre-
mitds fe rencontrent. Et ainli vous voye's qu'elle a ea
plufieurs facons mefme raport a la ligne droite, que l'EI-
lipfe a la circulaire. Et vous voye's aufly qu'il y en a
d'vne infinite de diuerfes efpeces , & qu'en chafque
efpece il y en a vne infinite" dont Ies parties femblables
font differentes en grandeur. Et de plus que fi d'vn
point, eomme B, pris a
difcretion dans l'vne
d'elles, on tire deux li-
gnes droites .vers les
deux points comme H
& I, ou les deux pic-
quets doiuent eftre
planters pour la defcri-
re , & que nous nora-
merons encore les
points bruflantSj la dif-
ference de ces deuxli-
gnes H B & IB , fera
toufiours efgale a la ligne DK, qui marque la diftance
qui eft entre les Hyperboles opgofces. Ce qui paroiit
dece que Bleft plus longue que BH, d'autant iufte-
ment que la reigle a efteprife plus longue que ia corde;
& que DI eft auffy d'autant pi us longue que DH. Gar
                                                   lion
-ocr page 182-
DlSCOQRS H'UlCTiESME.                IOJ
fi on acconrcift celle-cy DJ,. de KI, qui eft efgalea
DH,on aura DK pour leur difference. Et enfin vous
voye's que les Hyperboles , qu'on defcrit en mettant
toufiours mefme proportion entre DK & HI, font
toutes d'vne mefme efpece. Puis outre cela il eft be-
* foin que vous fc^achids, quefiparlepointBprisadifcre-
tion dans vne Hyperbole, on tire laligne droite C E,qui
diuife Tangle H BI en deux parties efgales, la mefme
C E touchera cette Hyperbole en ce point B, fans la
couper. de quoy les Geometres f§auent affe's la de-
monftration.
Mais ie^veux icy en fuite vous faire voir que fi de ce
XV          G/
.         ~ ~£T£                F H Id             kT-!
mefme point B on tire vers le dedans de 1'Hyperbole fa ,
%ne droite B Aparallele a DK, & qu'on tire auffy par
le mefme point B la ligne L G qui couppe C E a an-
gles droits, puis ayant pris BA efgale a BI, que des
points A & I on tire fur L G les deux perpendiculaires
AL&IG: cesdeuxdernieres AL & IG aurontentre
elles.
-ocr page 183-
104                    Ea DiotTriqjje
elles mefme proportion que les Ies deux D K & H I. Et
en fuite que fi on doune la figure de cetteHyperbole a vn
cers de verre dans leqnel les refractionsfe.mefuren.tpar
la proportion qui eft entre les Iignes D K & H I,elle fera
quetous les rayons quiferontparalleles afonaiffieudans
ce verre,s'irontafTemblerau dehors au point I, au moins
fl ce verre eft conuexe; & s'il eft concaue, qu'ils s'efcar-
teront 5a & la, comme s'ils venoient de ce point I.
Ce qui peut eftre ainfi demonftre'. Premierement fi
ontiredupoint B laligne BF perpendiculaire fur KD
prolonged autant qu*il eft befoin, & du point N, ou L G
&K.Ds'entrecoupent, laligne N M perpendiculaire fur
IB auflyproIongee3ontrouueraqueALefta IGcom-
me BFefta NM. Car dVne part les triangles BFN
& BLA font femblables a caufe quils font tousdeux ,
rectangles & que N F & B A eftant paralleles les angles
F N B & L B A font efgaus. Et d'autre part les trian-
gles IGB &NM-B font aufly femblables a caufe qu'ils
font rectangles & que les angles IB G & N B.M font
efgaus. Et outre cela, comme la mefme BN fert de
bafe aux deuxtriangles B FN & NM B,ainfi B'A la bafe
du triangle A L B eft efgale a B I la bafe du triangle
IGB. d'ou ii fuit que comme les codes du triangle
BFN font aceux du triangle N M B,ainficeuxdu trian-
gle A L B font aufly a ceux du triangle IB G. Puis B F
eft a N M comme BI eft a N I, a caufe que les deux tri-
angles B IF & NIM, eftans rectangles, & ayans le
mefme angle vers I, font femblables. De plus fi on tire
H O parallele a L G, on verra que BI eft a NI comme
O left a HI, a caufe que les triangles BNI'& OHI
font
-ocr page 184-
DlSCOURS HllICTIESME.                 IOf
foiitfemblables. Enfinles deux angles E BH & EBI
eftansefgausparlaconftruc"tion,& HO, qui eft paral-
lel a LG,couppant comme elle CE a angles droits,
les deux triangles B EH & BEO font entierement
efgaus. Etainfi B H la baze de l'vn eftantefgale a B O
labazedel'autre, ilrefte OI pour la difference qui eft
entreBH & B I, laquelle nous auons dit eftre efgale a
D K. Sibienque A L eft a IG, comme D K eft a HI.
D'ou il fuit que mettant toufiours entre les lignes DK&
HI la proportion qui peut feruir a mefurer les refra-
ctions du verre ou autre matiere qu'on veut employer,
ainfi que nous auons fait pour tracer les Ellipfes, excepted
que D K ne peut eftre icy que la plus courte , aulieu
qu'elle ne pouuoit eftre auparauant que la plus Ion-
gue: Si on trace vne portion d'hyperbole tant grande
qu'on voudra comme D B, & que de B on face de-
fcendre a angles droits fur K D la Iigne droite B
Qo les deux lignes DB, & QBtournant au tour de
O                       l'aiflieu
-ocr page 185-
i°<S                    La Dioptriq^ue
1'aiffieu D Q, defcriront la
figure dVn verre, quifera
que tous les rayons qui le
trauerferont & ferontdans
lair paralleles a ce't aiffieu
du cofte' de la fuperficie
plate BD, en laquelle,
comme vousfgaue's, ilsnc
fouffriront aucune refra-
ction , s'aflembleront dc
l'autre cofte'au point I.
Et fi ayant trace l'hy-
perbole db femblable a la
precedente,on tire la ligne
droite roentellieu qu'on
voudra , pourvu que fans
eoupper cette hyperbole
elletombe perpen||||Iairement fur Ton aiffieu dJ^s &
qu'on ioigne les deux points b Sc o parvne autre ligne
droite parallele a d^, les trois Iignes ro, ob} &c bd,
meues autourde 1'aiffieu d^, defcriront la figured'vn
verre, qui fera que tous les rayons qui feront paralle-
les afonaiffiea du coftdde fa fuperficie plate, s'efcarte-
ront 5a & la de 1'autre cofte', comme s'ils venoientdu
point I.
Et fi ayant pris la ligne HI plus courte pour tracer
rhyperbole du verre robd> que pour celle du verre
3D B Q, on difpofe ces deux verres en telle forte que
leurs aiffieus D Q, r d foient en mefme ligne droite x &
leurs, deux points bruflans marques I en mefme lieu, &
que
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DlSCOURS HUICTIESME."               107
que leurs deuxfuperficieshyperboliques fe regardentj
ilsferont que tousles rayons, qui auant quede lesren-
contrer, auront efte' paralleles a leurs aiffieus, le feront
encore apres les auoirtousdeuxtrauerfes, & auec cela
feront referres en vn moindre efpace du cofte'du verre
to Wquedel'autre.
Et fi on difpofe Ies deux verres femblables D B Q_
kdbq inefgaus en grandeur, en telle forte que leurs
aiffieus D Q, dq , foyent aufly en mefme ligne droi-
ts » & leurs deux points bruflans marques I en mef-
me lieu , & que leur deux fuperficies hyperboliques
fe regardent; ils feront comrne les pr^edens que les
rayons paralleles d'vn cofte' de leur aiflieu le feront
O z                   aufly
.......
-ocr page 187-
~1
108                    La Dioptrioue
auffy de l'autre , & auec ce-
la feront referred en moin-
dre efpace du cofte' du moin-
dre verre.
Etii onioint les fuperficies
plates de ces deux verres
HB Q_& dbq, ou qu'on les
mette a telle diftance qu'on
voudra l'vn de l'autre, pour-
vu feulement que leurs fu-
perficies plates fe regardent,
fans qu'il fbit befoin auec ce-
la que leurs aiffieus fbient en
mefme ligne droite : ou pla-
ftoft fi on compofe vn autre
verre , qui ait la figure de ces
deuxainfi conjoints, on fera
par fon moyen que les rayons
qui viendront de l'vn des
points marques I, s'iront af-
fembler en l'autre de l'autre
cofte.
Etfi on compofevn verre qui ait la figure des deux
DBQ.& ro &i,tellementioints, que leurs fuperficies
plates s'entretouchent, on fera que les rayons qui feront
venus de l'vn des point I, s'efcarteront comme s'ilse-
ftoieiit venus de l'autre.
Et enfin, fi on compofe vn verre qui ait la figure de
deux teis que r o b d, de rechef tellement ioins, que leurs
fuperficies plates s'entretouchent ? on fera que les ra-
yons,
-ocr page 188-
DlSCOURS HUICTIESME.                IOJ
-ocr page 189-
no                   La Dioptriqjie
yons, quiallansrencontrer ce verreferont efcartes com-
mepours'aflembler au point I qui eft de l'autre coftd,
feront derechef efcartes apre'srauoirtrauerfe'.comme
s'ils eftoient venusde 1'autre point I.
Ettoutcecyeftcemefembleficlair, qu'il eft feule-
ment. befoind'ouurirles yeux&de confiderer les figu-
res pour l'entendre.
Aurefte les mefines changemens de ces rayons que
ie vien d'expliquer premierement par deux verres el-
liptiques, & apre's par deux hyperboliques, peuuent auf-
fy eftre caufe's par deux dont Tvn fbit elliptique & 1'au-
tre hyperbolique. Et de plus on peut encore imaginer
vne infinite d'autres verres qui facent comme ceux cy,
que tous les rayons qui vienent d'vn point, ou teudent
versvn point, ou font paralleles, fe changent exadte-
mentdel'vne en l'autre de ces trois difpofitions. Mais
ie ne penfe pas auoir icy aucun befbin d'en parler, a caufe
que ie les pourray plus commodemeut expliquer cy
apres en la Geonjetrie, & que ceus que i*ay defcrits
font les plus propres de tous a mon deffein. ainfi que ie
veustafcher maintenant de prouuer; & vous faire voir
parmefme moyenlesquels d'entre eux y font les plus
propres, en vous faifant confiderer toutes lesprincipales
chofes en quoy ils different.
La premiere eft que les figures des vns font beaucoup
plus ayfe'es a tracer que celles des autres: & il eft certain
qu'apre's la ligne droite, lacirculaire, & la parabole, qui
feules ne peuuent fuiBre pour tracer aucun de ces ver-
res, ainfi que chafcunpourrafacilement voir, s'ill'exa-
mine, iln'yena point de plus fimples que l'Ellipfe, &
Thy-
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DlSCOURS Hill CTIESME.               Hi
Thyperbole. enfortequelaligne droite eftant plus ay-
fee a tracer que la circulaire- & l'hyperbole ne 1'eftant
pas moins quel'Ellipfe, ceux dout les figures font com-
pofe'es d'hyperboles & de Iignes droites,font les plus ay-
fees a tailler qui puiffent eftre. Puis en fuite ceux dont
les figures font compofe'esd'Ellipfes & de cercles: en
forte que tousles autres que ie n'ay point explique's Ie
fontmoins.
Lafecondeeftqu'entreplufieurs, qufchangent tous
en mefmefa^on la difpofition des rayons qui fe rappor-
tent a vn feul point, ou vienent paralleles d'vn feul co-
fte, ceux, dont les fuperficies font le moins courbees, ou
bien Ie moins inegatement, en forte qu'elles caufent les
.moinsinegales refractions, changent toufiours vn peu
plus exa&ement que les autres, la difpofition des rayons
qui ferapportentaux autres points, ou qui vienent des
autres coftes. Mais pour entendre cecy parfaittement,
il faut confiderer que e'eft la feule inefgalite'de lacour-
buredes Iignes dont font compofe'es les figures de ces
verres, qufempefche qu'ils ne changent sully exacte-
ment la difpofition des rayons qui fe rapportent a plu-
fieurs diuers poins, ou viennent paralleles de plufieurs
diuers coftes, qu'ils font celle de ceux qui fe rapportent
a vn feul point, ou vienent paralleles d'vn feul cofte". Car
parexemple, fi pour faire que tous les rayons qui vie-
nentdu point A s'affemblent au point B, ilfalloit que le
verre G HIK, qu'on mettroit entre deux,euft fes fuper-
ficies toutes plates, en forte qae la ligne droite G H,qui
enreprefetitel'vne, euft la propricte'de faire que tous
ces rayons venans du point A, fe rendiffent paralleles.
dans.
-ocr page 191-
1
La Dioptrkxue
112
dans le verre , & par mefme
moyen que.I'autre ligne droite
KI fift que dela ils s'allaffent
aflemblerau point B, cesmef-
mes lignes G H & K I fe.
roient aufly que tous les rayons
venans du point C s'iroient af-
femblerau point D; & genera-
lement, que tous ceux qui viendroient de quelqu'vn des
points de la ligne droite AC, que ie fuppofe parallele a
G H , s'iroient aflembler en quelqu'vn des points de
B D, que ie fuppofe auffy parallele a K I, & autant efloi-
gnee d'elle, qu'A C eft de G H : d'antant que ces lignes
GH & KI, n'eftant aucuneraent courbe'es , tousles,
points de ces autres A C & B D fe rapportent a elles en
mefme facon les vns que les autres. Tout de mefme fi
c'eftoit le verre LMN O, dont ie fuppofe les fuperficies
LMN &LON eftredeuxefgales portions de Sphe-
re, qui eirft la propriete' de fai-
re que tous les rayons venans
du point A s'allafTent afTem-
blerau point B, ill'auroitaufTy
de faire que ceux du point C
s'affemblaffent au point D,&
generalement que tous ceux
de quelqu'vn des points de la
fuperficie C A, que ie fuppofe
eftre vne portion de Sphere,
qui a mefme centre que LMN, s'affembleroient en
quelqu'vn de ceux de B D, que ie fuppofe aufly vne por-
tion
■■
-ocr page 192-
DlSCOURS HUICTIESME.                 It %
tion de Sphere , qui a mefme centre que L O N
&eneftauffyeiloigne'e qu'AC eft d'LMN, d'autant
que toutes les parties de ces fuperficies LMN&LON
font efgalement courbc'es au refpect de tous les points
qui fout dans les fuperficies C A & B D. Mais a caufe
qu'il n'y a point d'autres Iignes en la nature, que ladroite
& la circulaire, dont toutes les parties fe rapportent en
mefme facon a plufieurs diuers points, &: que ny 1'vne ny
1'autreuepeuuentfuffire, pour compofer la figure d'vn
verre , qui face que tous les rayons qui vienent d'vn
point s'affemblent en vn autre point exactement, il eft
euidentqu'aucune decelles qui y font reqnifes, nefera
que tous les rayons qui viendront de quelques autres
points, s'affemblent exad:ement en d'autres points. Et
que pour choifir celles d'entre elles qui peuuet faire que
ces rayons s'efcartent le moins des lieus ou on les vou-
droit affembler, il faut prendre les moins courbees,& les
moins inefgalemet courbees, afin qu'elles approchent le
plus de la droite ou de la circulaire; & encore pluftoft de
ladroite que de la circulaire , a caufe que les parties de
celtecynefe rapportet d'vne mefme fa§onqu'a tous les
points qui font efgalement diftans de fon centre, &ne
fe rapportent a aucuns autres en mefme fa§on qu'ellcs
font a ce centre. D'ou il eft ayfe de conclure qu'en cecy
l'liyperbole furpaffe I'Ellipfe , & qu'il eft impoffible
d'imaginer des verresd'aucune autre figure, qui raffem-
blent tous les rayons venans de diuers poins en autant
d'autres poins efgalement eiloigne's d'eux,fi exadtement
que celuy dont la figure fera compofe'e d'hyperboles. Et
mefme fans que iem'arrefte a vous en faire icy vne de- v
P                  monftration
-ocr page 193-
ii4                   La Dioptriqjie
monftration plus exa&e, vous pouuds facilement appli-
quer cecy aux autres fac,ons de changer la difpofition
des rayons qui fe rapportent a diuers poins ou vienent
parallelesdediuerscone's, &connoiftre que pour tou-
tes, ou les verres hyperboliques y font plus propres
qu'aucuns autres, ou du moins, qu'ilsn'y font pas nota-
blement moins propres, en forte que cela ne peut eftre
mis en contrepois auec la facilite'd'eftre taillees, en quoy
ils furpafTent tous les autres.
La troifiefme difference deces verres eft que les vns
font que les rayons qui fe croyfent en les tranerfant, fe
trouuent vn peu plus efcartes de 1'vn de lenrs code's que
de l'autre; & que les autres font tout le contraire. Com-
me fi les rayons G G font ceux qui vienent du centre du
Soleil, & que 11 foient ceux qui vienent du corte' gau-
che de fa circonference, 6c KK ceux qui vienent du
droit, ces rayons s'efcartentvn peu plus les vns des au-
tres
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DlSCOURS HUICTIESME.                Ilf
tres aprds auoir trauerfd le verre hyperbolique D E F,
qu'ils ne faifoient auparauant: & au contraire, ils s'efcar- •
tent moins apre"s auoir trauerfe l'Elliptique ABC, en
forte que cet Elliptique rend les points LHM plus pro-
cheslesvns des autres, que ne fait l'hyperbolique, &
mefme il les rend d'autant plus proches qu'il eft plus
efpais. Mais neanmoins tantefpais qu'on lepuifTe fai-
re, il ne les peut rendre qu'enuiron d'vn quart ou d'vn
tiers plus proches que l'hyperbolique. Ce qui fe mefure
par laquantite des refractions que caufe le verre,en for-
te que le criftal de montaigne, dans lequel elles fe font
vn peu plus grandes, doit rendre cette inefgalite vn peu
plus grande. Mais il n'y a point de verre d'aucune au-
tre figure qu'on puifle imaginer, qui face que les points
K.LM foient notablement plus efloignes que fait cet
hyperbolique^ ny moins que fait cet Elliptique.
Orvouspouuesicy remarquer par occafion en quel
fens ilfaut entendre ce que i'ay dit cydefTus, que les ra-
yons venansdediuerspoins, ou paralleles de diuers co-
fte's, fe croyfent tous dds la premiere fuperficie qui a la
puiflancedefaire qu'ils feraffemblent a peuprds en au-
tantd'autres diuers poins. Cpmmclorsquei'aydit que
ceux de l'obiet V X Y, qui forment l'image R S T fur le
fouds de l'oeil, fe croyfent des la premiere de fes fuperfi-
cies BCD. Ce qui depend de ce que par exemple les
trois rayons V C R, X C S & Y C T, fe croyfent verita-
blement fur cette fuperficie B C D au point C. d'ou
vient qu'encoreque VD R fe croyfeauec YBT beau-
coup plushaut,& VB R auec YD T beaucoup plusbas:
toutesfois pour ce qu'ils tendent vers les mefmes poins
P 2                     que
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n6                 La DioPTRiciUE
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-ocr page 196-
Dl SCOURS JHlllCTlESME.                117
que font V C R & Y C T, on les pent confiderer tout de
mefme que s'ils fe croyfoient auflyau mefmelieu. Et
pourcequec'eftcette fuperficie BCD qui les faitain-
fitendre vers les mefraes poins, on doit pluftoft pen-
fer que c'eft au lieu ou elle eft qu'ils fecroyfent tous,
quenonpasplus haut nyplus bas. Sans mefme que ce
que les autres fuperficies , comme 123 & 4.? 6 , les
peuuent detourner , en empefche. Non plus qu'en-
core que les deuxbaftons ACD&
B CE qui font courbes, s'efcartent
beaucoupdes poins F & G, verslef-
quels ils s'iroient rendre, fifecroy-
fans autant qu'ils font au point C
J auec cela ils eftoient droits; ce ne
laifTe pas d'eftreveritablementence
point C qu'ils fe croyfent. Mais ils pourroient bien
eftre fi courbds, que cela les feroit croifer derechef en
vu autre lieu. Et en mefme facon les rayons, quitrauer-
fent les deux verres conuexes DBQ.& dbq, fe croy- voycsla
fent fur la fuperficie du premier, puis fe recroifent de- f^11" ea
rechef fur celle de l'autre; au moins ceux qui vienent de I08.b
diuers cofte's: car pour ceux qui vienent dVn mefme co-
fte", ileft manifefte, que cen'eft qu'au point bruflant
marqud I, qu'ils fe croifent.
Vous pouues remarquer auffy par occafion, que les ra-
yons du Soleil ramafres par le verre Elliptique ABC, ^efin8?ac
doiuent brufler auec plus de force qu'eftans ramafle's page 114.
par 1'hyperbolique DEF. Carilne faut pasfeulement
prendre garde aux rayons qui vienent du centre du So-
leil, comme G G, mais aufly a tous les autres qui venans
P j                       dcs
-ocr page 197-
ti8                   La Dioptriclue
des autres points de fa fuperficie} n'ont pas fenfiblement
moins de force, que ceux du centre; en forte que la vio-
lence de la chaleur qu'ils peuuent caufer fe doit mefurer
par la grandeur du cors qui les affemble, comparee auec
cellede I'efpace ou il les affemble. Comme fi le dia-
metre du verre A B C eft qnatre fois plus grand que la
diftance qui eft entreles poins M & L, les rayons ramaf-
fe's par ce verre doiuent auoir feize fois plus de force que
s'ils ne paffoyent que par vn verre plat qui ne les deftour-
naft aucunernent. Et pource que la diftance qui eft en-
tre ces poins M 6c L, eft plus ou moins grande, a raifon
de celle qui eft entre eux & le verre ABC, ou autre tel
cors qui fait que les rayons s'y affemblent, fans que la
grandeur du diametre de ce cors y puiffe rien adioufter,
ny fa figure particuliere, qu'cnuiron vn quart ou vntiers
tout auplus- il eft certain que cette ligne bruflante a 1'in-
finiquequelquesvnsontimagine'e, n'eftqu'vne refue-
rie. Et qu'ayant deux verres ou miroirs ardens, dont
l'vnfoitbeaucoup plus grand quel'autrc, de quelle fa-
$on qu'ils puiffent eftre, pourvii que leurs figures foient
toutes pareilles, le plus grand doit bien ramafter les ra-
yons du foleil en vn plus grand efpace, & plus loin de
foy, queleplus petit; mais que ces rayons ne doiuent
point auoir plus deforce en chafque partiede cet efpa-
ce , qu'en celuy oil le plus petit les ramaffe. En forte
qu'onpeutfaire des verres ou miroirs extremement pe-
tits, qui bruflerontauecautant de violance que les plus
grands. Et un miroir ardent dontle diametre n'eft pas
plus grand qu'enuiron la centiefme partie de la diftance
qui eft entre Iuy & le lieu ou il doit raflembler les rayons
du
-ocr page 198-
DlSCOORS HllICTlESME.               H9
du foleil; c'eft a dire, qui a mefme proportion auec cette
diftance, qu'a le diamctre du foleil auec celle qui eft en-
tre luy & nous, fuft-il poli par vn Ange ne peut faire,que
lesrayons qu'ilafTemble efchaufFent plus en 1'endroit ou
illesafTemble, que ceux qui vienent direclement du So-
leil. Ce qui fe doit auflfy entendre des verres brnflans a
proportion. D'ou vous pounds voir que ceux qui ne font
qu'a demi f§auans en FOptique fe laiffent perfuader
beaucoup de chofes qui font impoffibles, & que ces
miroirs dont on a dit qu'Archimede brufloit des nauires
defort loin, deuoient eftre extremement grands, ou
pluftoft qu'ilsfont fabuleus.
Laquatriefme differece qui doit eftre remarque'e entre
les verres dont il eft icy queftion appartiet particuliere-
ment a ceux qui changent la difpofition des rayons qui
vienent de quelq; point aflHs proche d'eux, & confifte en
ce que les vns,a fgauoir ceux dot la fuperficie qui regarde
vers ce point eft la plus creufe a raifon de Ieur grandeur,
peuuent receuoir plus grade quantite1 de ces rayons, que
les
-ocr page 199-
i2o                  La Dioptriqjje
lesautres, encore que leurdiametre ne foit point plus
grand. Et en cecyleverre Elliptique NOP, queie
fuppofe fi grand, que &s extremitcs N & P font les
poins oil fe termine le plus petit diametre de l'Elli-
pfe, furpaffe l'hyperbolique QRS, quoy qu'on lefup-
pofe auffy tant grand qu'on voudra; & il ne peut eftre
furpaffe par ceux d'aucunc autre figure. Enfin ces ver-
res different encore en ce que pour produire les mef-
mes effe&s ed efgard aux rayons qui fe rapportent a vn
feul point ou a vn feul coftd , les vns doiuent eftre
plus en nombre que les autres , ou doiuent faire que
les rayons qui fe rapportent a diuers poins, ou a di-
uers cone's, fe croyfent plus de fois. Comme vous
ave's vu que pour faire auec les verres Elliptiques,
que les rayons qui vienent d'vn point s'afTemblent en vn
autre point, ou s'efcartent comme s'ils venoient d'vn
autre point •, ou que ceux qui tendent vers vn point
s'efcartent derechef comme s'ils venoient d'un autre
point; ileft toufiours befoin d'y en employer deux; au
lieu qu'il n'y en faur/ employer qu'vn feul, fi on fe fert
des hyperboliques. Et qu'on peut faire que les rayons
paralleles demeurans paralleles occUpent vn moindre
efpace qu'auparauant , tant par le moyen de deux
verres hyperboliques conuexes, qui font que les ra-
yons qui vienent de diuers coftes fe croyfent deux
fois ; que par le moyen d'vn conuexe dc dVn con-
caue , qui font qu'ils ne fe croifent qu'vne fois.
Mais il eft euident que iamais on ne doit employer
plufieurs verres a ce qui peut eftre auffy bien rait
par l'ayde d'vn feul , ny faire que les rayons fe croi-
-ocr page 200-
Discours Neufiesme.                121
fent plufieurs fois lors qu'vne fuffift .
Et generalement, ilfaut conclure de toutcecy que
les verres hyperboliques & les elliptiques font prefe-
rables a tous les autres qui puiffent eftre imagines, &
mefme que les hyperboliques font quafi en tout prefe-
rables aus elliptiques. En fuite de quoy ie diray main-
tenant de quelle fa'con il me femble qu'on doit com-
pofer chafque efpece de lunetes , pour les rendre les
plus parfaittes qu'il eft poffible.
LA DESCRIPTION
DES LUNETES.
^ifcours J\(jufiefme.
TL eft befoin premierement de choifir vne matiere
^tranfparente, quieftantaffesayfee atgiller, & neant-
moins aiTds dure pour retenir la forme qu'on luy donne-
ra, foit en outre Iimoins colore'e, & qui caufe le moins
de reflection qu'il eft poffible. Et on n'en a point enco-
re trouue qui ait ces qualite's en plus grande perfection
"quele verre, lors qu'il eft fort clair, & fort pur, &com-
pofedecendresfortfubtiles. Car encore que le criftal
de raontaigne femble plus net & plus tranfparent, tou-
tes fois pource que fes fuperficies caufent la reflexion de
plus de rayons que celfesdu verre, ainfi que ['experien-
ce femble nousaprendre,il ne fera, petit eftre, pas fi
propreanoftre deffein. Or afin que vous fgachies la
caufe de cette reflexion, & pourquoy elle fe fait pluftoft
Q_                      fur
t
-ocr page 201-
Hz                     La Dioptriqjie
furies fuperficies tant du verre que du criftal, quenon
paseni'efpaifTeurdeleurcors, &pourquoy elle s'y fait
plus grande daas le criftal que dans le verre, il faut que
vous vousfouuenie'sdelafa^on, dont ie vous ay cydef-
fus fait conceuoir la nature de la lumicre^ lors que iay
dit, qu'elle n'eftoit autre chofe dans les cors tranfparens
que l'adtionou inclination a femouuoir d'vne certaine
matiere tres fubtile qui remplir Ieurs pores: & que vous
penfies que les pores dechafcun deces cors tranfparens
font fi vnis &fi droits que la matiere fubtile qui peut y
entrer coule facilement tout du long, fans y rieji trouuer
qui l'arrefte. Mais queceux de deux cors tranfparens
de diuerfe nature, commeceux de I'air&ceuxdu verre
ou du criftal, ne fe rapportent iamais fi iuftement les vns
ausautres, qu'il n'y ait toufiours plufieurs des parties de
la matiere fubtile, qui, parexemple, venant de l'air vers
le verre, s'y reflefchiffent, a caufe qu'elles rencontrent
les parties folides de fa fuperficie : & tout de mefme,
venant du verre vers l'air, fe reflefchiffent & retournenc
au dedans de ce verre, a caufe qu'elles rencontrent les
parties folides de la fuperficie decetair; car ilyena auf-
fy beaucoup en l'air qui peuuent eftre nominees folides k
comparaifon de cette matiere fubtile. Puis en confide-
rant que les parties folides du criftal font encore plus
groffes que cejles du verre, & fes pores plus ferres, ainfi
qu'il eftayfe'aiuger dece qu'il eft plus dur & plus pe-
fant, on peut bien penfer, qu'il doit caufer fes refle-
xions encore plus fortes, & par confequent donner
paffage a moins de rayons que ne fait ny fair ny le
verre s bien que cependant il le donne plus libre a
ceux
\
-ocr page 202-
DiscoursNeufiesme.               125
ceuxaufquels il ledonne, fuiuant cequia efte'dit cy-
deflus.
Ayantdoncainfichoifileverrele plus pur, le moins
colore, &celuy qui caufelemoins de reflexion qu'ileft
poffible,fionveutparfonmoyencorriger le defaut de
ceux qui ne voyent pas fi bien les obiets vn peu efloi-
gne's, que les proches; ou les proches, que les eiloigne'S;
les figures les plus propres a ceceffedtfbnt celles qui fe
tracent par des hyperboles. Comme par exemple 1'osil
B.ouC, eftant difpofe'a faire que tous les rayons, qui
vienentdu point H, ou I, s'avfemblent exactement au
milieu de Ton fonds, & non pas ceux du point V, ou X, il
faut, pour luy faire voir
diftindtement l'obiet
qui eft vers V, ou X,
mettre entre deux le
verre O, ou P, dont les
fuperficfes, l'vne con-
uexe &c l'autre conca-
ue , ayant les figures
trace'es par deux hy-
perboles qui foyent
telles qu'H, ou I, foit
le point brulant de la
concaue, qui doit eftre
tourne'e vers l'oeil, &
V, ou Y , celuy dela
conuexe.
Et fi on fuppoie le
point I, ou V, aire's efloigne'', comme feulement a quinze
Q_ji                       ou
-ocr page 203-
124                    La Dioptrique
ou vingt pieds dc diftance,ilfwrHra, au lieu del'hyper-
bole dont ildeuroit eftrele point bruflant, de fe feruir
d'vneligne droite, & ainfide faire Tvne des fuperficies
du verre toute plate; a fcauoir l'interieure qui regarde
vers l'oeiljfi c'eft I qui foit afTes efloignd; oul'exterieu-
re, fi c'eft V. Gar lors vne partie de l'obiet de la grandeur
de la prunelle pourra tenir lieu d'vn feul point, a caufe
que fon image n'occupera gueres plus d'efpace aufonds
del'oeil, quel'extremite'de l'vndes petits filets du nerf
optique.Etmefmeiln'eft pas befoindefe feruir deverres
differens a chafq; fois qu'on vent regarder des obiets vn
peu plus ou moins efloignes l'vn que l'autre; mais c'eft
affes pour Tvfaged'enauoir deux, dontl'vn foit propor-
tionne a la moindre diftace des chofes qu'on a couftume
de regarder, & l'autre a la plus grandc; ou mefme feule-
ment d'en auoir vn, qui foit moyen entre ces deux. Car
les yeux aufquels onles veut approprier, n'eftans point
tout a fait inftexibles, peuuent ayfement afTes changer
leur figure, pourl'accommodera celle d'vntel verre.
Que fi on veut par le moyen aufjy dVn feul verre faire
que les obiets accefiibles, c'eft a dire ceux qu'on peut
approcherdel'ceilautantqu'on veut, paroilfent beau-
coup plus grands, &fe voyent beaucoup plus diftin&e-
ment que fans lutietes: le plus commode fera de faire
celle des fuperficies de ce verre qui doit eftre tournee
vers I'ceil toute plate, & donner a l'autre la figure dVne
hyperbole, dont le point bruflant foit au lieu ou on vou-
dra mettre l'obiecl:. Mais note's queie dis le plus com-
mode , car i'aduoue bien que donnant a la fuperficie
de ce verre la figure d'vne Ellipfe, dont le point bruflant
foit
»                                                                                                                                                                                                                                  . ■-. -
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Discours Neufiesme.                12f
foit auffy au lieu ou on voudra mcttre l'obiet, & a l'autre
celle d'vne partie de Sphere, dont le centre foit au mef-
me lieu que ce point bruflant, 1'effed: en pourra eftre vn
peu plus grand.-mais en reuanche vn tel verre ne pourra
pas ficommodement eftre taille. Or ce point bruflant,
foit de l'hyperbole, foit de l'ellipfe , doit eftre ft proche,
que l'obiet, qu'il faut fuppofer fort petit, yeftantrnis, il
ne refteentreluy& le verre, que iuftement autant d'e-
fpace, qu'il en faut, pour donner paffage a la lurniere qui
doitl'efclairrer. Et il faut enchaffer ce verre en telle
forte, qu'il n'en refte rien de de'couuert que le milieu,,
qui foit enuironde pareille grandeur que la prunelle,ou
mefmevn peu plus petit. Etquela matiere en quoy il
fera enchaffe foit toute noire du cofte qui doit eftre
tourne vers l'oeil, ou mefmeaufly il ne fera pas inutile
qu'elle foit garnie tout au tour d'vn bordde panne ou ve-
lours noir, a fin qu'on la puifTe commodement appuier
tout centre l'oeil, & ainfi empefcher qu'il n'aille vers lny
aucune Iumiere,que par l'ouuerture du verre. Mais en
dehors il fera bon qu'elle foit toute blanche, ou pluftoft
toute polie, & qu'elle ait la figure d'vn miroir creux, en
forte qu'elle renuoye furl'obiecT: tous les rayons de la
luniiere qui vienent vers elle. Et pour fouftenir c6t obiet
en l'endroit ou.il doit eftre pofe"pour eftre vil, iene def-
approuue pas ces petites fioles de verre ou de criftal fort
tranfparcnt, dont l'vfage eft defia en France affes com-
mun. Mais pour rendre la" chofeplus exa&e, il vaudra
encore mieux qu'il y foit tenu ferme, par vn ou deux pe-
tits reffbrs en forme de bras, qui fortentdu chaflis de la
hinete. Enfin pour nemanquer point delumiere ilfau-
Q. 3                     dra
-ocr page 205-
ii6                    La Dioptriqjie
dra en regardant cet obiet le tourner tout droit vers le
foleil. Commefi A eft le verre, C la partie interieure
de la matiere en la quelle il eft enchafle', D l'exterieure,
El'obiet, Gle petit bras qui lefouftienr, H l'oeil, & He
foleil, dont les rayons ne vont point
en l'oeil directement, a caufe de
l'interpofition tant de la lunete que
de 1'obiet, mais donnans contre le
cors blanc, ou le miroir D, ils fe re-
flefchiflfent premierement de Ik
vers E, puis d'E ils fe reflefchiflent
vers l'oeil.
Que fi on vent faire vne lunete
la plus parfaitte qui puifTe eftre
pourferuir a voir les Aftres ou au-
tres obiets fort efloigne's & inaccef-
libles; On la doit compofer de deux
verres hyperboliques, l'vn conuexe & l'autre couca-
ue , mis dans les deus bouts d'vn tuyau en la fagon
que vous voyds icy reprefente'e. Et premierement a be
la fuperficiedu verre concaue abedef, doit auoir la fi-
gure d'vne hyperbole, qui ait fon point bruflant a la di-
stance a la quelle l'oeil, pour lequelon prepare cette lu-
nete, peut voir le plus diftindtementfes obiets. Comme
icy l'oeil G eftant dilpofd a voir plus diftindtement les
obiets qui font vers H, qu'aucuns autres, H doit eftre le
point bruflant del'hyperbole a be: 8c pour les vieillars,
qui voyent mieuxles obiets fort efloigne's, que les pro-
ches, cette fuperficie a be doit eftre toute plate; au lieu
que pour ceux qui ont la veue fort courte, elle doit eftre
afles
-ocr page 206-
.......
Discours Neufiesme.
127
aflcsconcaue. Puis l'autre fuperficie defdoit auoir la
figure d'vne autre hyperbole , dont le point bruflant I
foit efloigne' d'elle de la largeur d'vn pouce, ou enuiron,
en forte qu'il fe rencontre vers le fonds de 1'ceil, lors que
ceverre eft applique* tout contre fa fuperficie. Notes
toutes fois que ces proportions ne font pas fi abfolu-
ttent neceflaires, qu'elles ne puifTent beaucoup eftre
chan-
-ocr page 207-
128                     La Dioptriqjie
changees, en forte que fans tailler autrement la fuperfi-
cie abcpourceux qui ont la veue courte, ou longue,
que pour les autres, on peut afies comrnodement fe fer-
uir d'vnemefmelunete pour toutes fortes d'yeux, en aU
longeantfeulement ouaccourciflant le tuyau. Et pour
la fuperficie def, peut eftrequ'a caufe de la difficultd
qu'onauraa la creufertant commei'aydit, il feraplus
ayfe de lay donner la figure d'vne hyperbole, dont le
point bruflant foit vn peu plus efloigne'. Ce que 1'expe-
rience enfeignera mieux que mes raifons. Et ie puis
.' feulement dire en general que les autres chofes, eftant
efgales,d'autantcjuece point I fera plus proche, d'au-
tantles obietsparoiftront plus grands, a caufe qu'il fau-
dradifpoferrceilcommes'ilseftoient plus prds de Iuy;
& que la vifion,pourraeftreplns forte & plus claire, a
caufe que l'autre verre pourraeftre plus grand; mais
qu'elleneferapasfidiftindejflonle rend par trop pro-
che, a caufe qu'il y aura plufieurs rayons qui tomberont
trop obliquement ljur fa fuperficie au pris des autre's.
Pour la grandeur de ce verre, la portion qui en demeure
de'couuerte, Iors qu'il eft enchafTe dans le tuyau KLM,
n'a befbin d'exceder que de fort peu la plus grande ou-
uerture de la prunelle. Et pour fon efpaiifeur elle ne
f^auroit eftre troppetite;car«ncor«xpi''end'augmentant
on puifTe faire que 1'image descxbkts foit vn peu plus
grande, a caufe que les rayons qui vienent de diuers
poins s'efcartent vn peu plus du cofte'de l'ceil, an fait
aufly en reuanche qu'ils paroiffenten moindre quantity
&moins clairs. & l'auantagede faire que leurs images
deuienenr plus grandes fe peut mieux gaigner par autre
moyen.
-ocr page 208-
Discours Neufiesme.               129
moyen. Quant an ver re conuexe NOPQ, fa fuperji-
cie N Q P qui eft tourne'e vers les obiets, doit eftre toute
plate; &TautreN OPdoitauoir la figure d'vne hyper-
bole , dont le point bruflant I tombe exadement
au mefme lieu que celuy de l'hyperbole defde l'autre
verre, &foit d'autant plus efloigne du point O qu'on
veutauoir vnelunete plusparfaitte. En fuite de quoy
la grandeur de fon diametre NP fe determine par les
deux lignes droites I d N , & I/P , tirees du point
bruflant I, par d, 8c f, les extremite's du diametre du
verrehyperbolique def, que ie fuppofe efgaler celuy
delaprunelle. Ou toutesfois iifaut remarquer qu'enco-
re que le diametre de ce verre NOP Qjbit plus petit,
les obiets n'en paroiftront que d'autant plus diftinds; &
n'en paroiftront pas moindres pour cela, nyen moindre
quantite', maisfeulement moins efclaires. C'eft pour-
quoy lors qu'ils Ie font trop, on doit auoir diuers cercles
de carton noir, ou autre telle matiere, comme 123,
pour couurir fes bords, & Ie rendre par ce moyen Ie plus
petit que la force de la lumiere qui vient des obiets
pourra permettre. Pour ce qui eftde I'efpaifTeur de ce
verre, ellenepeutderienprofiter,nyaufly de rien nui-
re, finon en tant que le verre n'eft iamais fi pur, & fi net,
qu'il n'empefche toufiours le paflage de quelque peu
plus de rayons que ue fait l'air. Pourletuyau KLM, il
doit eftre de quelque matiere afles ferme & folide, afin
quelesdeuxverresenchaffe'senfes deux bouts y retie-
nent toufiours exadement leur mefme fituation. Et il
doit eftre tout noir par Ie dedans, & mefme auoir vn
bord de pane ou velours noir vers M, affin qu'on puiffe
R                           en
-ocr page 209-
130                    La Dioptriqjie
en I'appliquant tout contre 1'ceil, empefcher qu'il n"y
entre aucune lumiere que par Ie verre N OPQ^ Ec
pour fa longueur & falargeur, elles font aflfds deterini-
ne'esparladiftance& la grandeur des deux verres. Au
refte il eft befoin que ce tuyau foit attache' fur quelque
machine, comme R S T , par le moyen de la quelle il
puifle eftre commodement tourne' de tous code's, & are-
ftd vis a vis des obiets qu'on veut regarder.Et a ce't effect
il doit yauoirauffy vne mire ou deux pinnules, comme
V V, fur cette machine. & mefme outre cela , pour ce
que d'autant que ces lunetes font que les obiets paroif-
fent plus grands, d'autant en peuuent elles moins faire
voirachafquefois, il eft befoin, d'en ioindre auec les
plus parfaittes quelques autres de moindre force, par
I'aydedefquellesonpuiffe, comme par degree, venira
la connpiffance du lieu, ou eft fobiet que ces plus par-
faittes font aperceuoir. Comme font icy XX, & YY,
queie fuppofe tellement aiuftees auec la plus parfaite
QJL M, que fi on tourne la machine en telle forte, que
par exemplc la planete de Iupiter paroifTe au trailers des
deuspinnulesVV, clle paroiftra auffy au trailers dela
lunete X X, par la quelle outre Iupiter, on pourra auffy
diftinguer ces autres moindres planetes qui l'accompai-
gnentj&fionfait que quelqu'vne de ces moindres pla-
netes fe rencontre iuftementau milieu de cette lunete
X X, elle fe verra auffy par l'autre Y Y, ou paroiffant
feule & beaucoup plus grande que par la precedente, on
y pourra diftinguer diuerfes regions: & derechef entre
ces diuerfes regions, celle du melieu fe verra par la lu-
nete KLM, & on y pourra diftinguer plufieurs chofes
particu-
-ocr page 210-
Discours Neufiesme.                 131
ptrticulieresparfon moyen; mais on ne pourroit fca-
uoir,que ces chofes fuflenten telendroit de la telle des
planetes qui accompaignent Iupiter , fans l'ayde des
deux autres, ny aufly la difpofer a monftrer ce qui eft en
tout autre endroit determine' vers Iequel on veut re-
garder.
On pourra encore adioufter vne ou plufieursautres
lunetes plus parfaittes auec ces trois, au moins, fi i'artifi-
cedeshommespeut paflerfi auant. Etiln'yapointde
difference entre la fagonde ces plus parfaittes, &decel-
ks qui lefont moins, finon que leur verre conuexe doit
eftre plus grand, & leur point bruflant plus efloigne. En
forte, que fi la main des ouuriers ne nous manque, nous
pourrons par cette inuention voir des obiets,aufly parti-
culiers, Stauffy petits,dans les Aftres,queceux que nous
voyons communement fur la terre.
Enfin fion veut auoirvnelunete qui face voir lesob-
iets proches & acceffibles le plus diftinc-tement qu'ilfe
peut, & beaucoup plus que celle que i'ay tantoft defcrite
pourmefme effecl:, on la doit aufly compofer de deux
verreshyperboliques,l'vn concaue & l'autre conuexe,
enchafles dans les deux bouts d'vn tuyau, & dont le con-
caue a bcdeffoit tout femblable a celuy de la preceden-
te. CommeaufTyN OPlafuperficieinterieure ducon-
uexe. Mais pour l'exterieure NRP,au lieu qu'elle
eftoittoutepIate,elledoit icy eftre fort conuexe, &
auoir la figure d'vne hyperbole, dont le point bruflant
exterieurZfoitfiproche, que l'obiet y eftant mis, il ne
refte entre luy & le verre qu'autant d'efpace, qu'il en
fautpourdonnerpaflage alalumiere qui doit l'efclairer.
R 2                      Puis
-ocr page 211-
Puis le diametre de ce verre n'a pas befbin d'eftre fi
grand que pour la lunete precedente, nyne doit pas
Voycs en aufly eftre ft petit que celuy du verre A de l'autre d'au-
ill^ parauant. maisil doitapeu prds eftre tel que la ligne
droite N P pafle par le point bruflantinterieur de I'hjr-
perbole N R P: car eftant moindre, il receuroit moins
de rayons de l'obiet X-, & eftant plus grand, il n'en rece-
uroit que fort peu d'auantage;en forte que fon efpaifleur
deuant eftre a proportion beaucoup plus augmented
qu'auparauant, elle leur ofteroit bien autant de leur for-
ce que fa grandeur leur en donneroit, & outre cela l'ob-
iet nepourroit pas eftre taat efclaire", II fera bon aufly
»                 de
-ocr page 212-
DiscoursNeufiesme.               133
de pofer cette lunete fur quelque machine comme S T,
quilatiene dire&ement.tourne'e vers le foleil. Et il faut
enchaflferleverre NOPR dans le milieu d'vn miroir
creux paraboliquc, comme C C, qui raffernble tous les
rayons du foleil au point Z, fur i'obiet, qui doit y eftre
fouftenu par le petit bras G, qui forte de quelqu'cndroit
dece miroir. Etcebras doitauffy fbuftenir, autour de
ce'tobiet, quelque cors noir &obfcur, comme H H, iu-
ftement de la grandeur du verre NOPR, afin qu'il
empefche qu'aucuus des rayons du foleil ne tombent di~
rc&ement fur ce verre; car delaentrans dans le tuyau,
quelquesvnsd'euxfepourroient retlefchir vers l'ccil &
affoiblir d'autat la vifion, pource qu'encore que ce tuyau
doiue eftre tout noir par le dedans,il ne le peut eftre ton-
tesfoisfiparfaitementquefamatiere ne caufe toufionrs
quelque peude reflexion, lors quelalumiereeft fort vi-
ne, ainfi qu'eft celle du foleil. Outre cela ce cors noir
H H, doit auoir vn trou au milieu marque Z, qui foit dc
la grandeur de robiet,afin que fi eel: obiet eft en quelque
facontranfparent, il puiffe auflyeftre efclaird par les ra-
yons qui vienent dire&ement du foleil; Ou mefme en-
core fi befoin eft, par ces rayons ramafles au point Z par
vn verre bruflanr, comme 11, de la grandeur du verre
N O PR, en forte qu'il viene de tous eoftds autant de
lumiere fur l'obiet, qu'il en pent fouffrir fans en eftre
• confume'. Et ilferaayfe'de couurir vnepartie de ce mi-
roir C C, ou de ce verre 11, pour empefcher qu'il n'y en
puiffe venir trop. Vous voyds bien pourquoy i'ay icy
tant de foin de faire que I'obiet foit fort efclaire',& qu'il
viene beaucoup de fes rayons vers l'ceil. car le verre
Kj                  NOPR
-ocr page 213-
i34                   La Dioptriqjje
N O P R qui en cette lunete fait l'omre de la prunelle,
& dans leqnel fe croifent ceux de ces rayons qui vienent
dediuers poins, eftant beaucoupplusproche de l'obiet
que de l'ceil,eft caufe qu'ils s'eftendent fur Ies extremites
dunerfoptique, en vn efpace beaucoup plus grand que
n'eft la fuperficie de l'obiet d'ou ils vienent; & vous fca-
ue's qu'ils y doiuentauoir d'autant moins de force, qu'ils
y font plus eftendus, come on voit au contraire qu'eftans
raflemble's en vn plus petit efpace par vn miroir ou verre
bruflant, ils en ont plus. Et c'eft de la que depend la
longueur de cette lunete, c'eft a dire,la diftance qui doit
eftre -entre l'hyperbole N O P & fon point bruflant.
Car d'autant qu'elle eft plus longue, d'autant l'imagede
l'obiet eft plus eflendue dansle fonds de l'ceil, ce qui
fait que toutes fes petites parties y font plus diftincles.
Mais cela mefrae affoiblift aufly tellement leur adHon,
qu'enfinellenepourroit plus eftre fentie fi cette lunete
eftoit par trop longue. En forte que fa plus grande lon-
gueur ne peut eftre determined que par 1'experience, &
raefme elle varie, felon que les obiets peuuent plusou
moins auoir de lumiere, fans en eftre confume's. Icfgay
bien qu'on pourroit encore adioufter quelques autres
moyens pourrendre cette lumiere plus forte, mais outre
qu'ils feroient plus malayfds a mettre en pratique, a pei-
ne trouueroit on des obiets qui en peuflent fouffrir
d'auantage. On pourroit bien auffy au lieu du verre Iiy- «
perbolique NOP K,en trouuer d'autres qui receuroient
quelque peu plus grande quantite de rayons; mais ou ils
ne feroient pas que ces rayons venans de diuers poins de
l'obiet s'afTemblaflent fi exa&ement vers l'ceil en autant
d'autres
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Discours Neufiesme.              135
d'autres diuers poins- ou ilfaudrorfy employer deux
verres au lieu d'vn, en forte que la force de ces rayons
neferoic pas moins diminue'e par la multitude des fuper-
ficies de ces verres, qu'elle ferok augmented par Ieurs fi-
gures, & enfin l'execution en feroit de beaucoup plus
difficile. Seulement vous yeus-ie encore auertir que ces
lunetes ne pouuat eftre appliquc'es qu'a vn feul ceil,il fe-
ra mieux de bander 1'autre, ou le couurir de quelque voi-
le fort obfcur, arm que fa prunelle demeure la plus ou-
nerte qu'il fe pourra, que de le laifTer expofe' a la lumie-
re,oudeIefermerparl'ayde des mufcles qui meuuent
fes paupieres; car il y a ordinairemet telle connexion en-
tre hs deux yeux, que l'vn ne f^auroit gueres fe mouuoir
en aucune facon, que 1'autre ne fe difpofe a l'imiter. De
plus ilnefera pas inutile non feulement d'appuier cette
Iunetetoutcontre Tceil, en forte qu'il ne puiffe venir
vers luy aucune lumiere que par elle, mais auffy d'auoir
auparauantattendrifaveueenfetenanten lieu obfcur,
& d'auoir Timagination difpofee comme pour regarder
des chofes fort efloignees &fort obfcures, afin que la
prunelle s'ouured'autant plus, & ainfi qu'on en puiffe
voirvnobiet d'autantplus grand. Car vous fc,aue's que
cette action dela prunelle ne fuit pas immediatement
de la volontd qu'on a de l'ouurir, mais pluftoft de I'ide'e
oudufentimentqu'onaderbbfcurite' & de ladiftance
des chofes qu'on regarde.
Au refte fi vous faites vn peu de reflexion fur tout ce
quiaefteditcydeffus, & particulierement fur ce que
nous auonsrequisdela part des organes exterieurs pour
rendre la vifion la plus parfaitte quelle puiffe eftre, il ne
vous-
/
-ocr page 215-
13(5                       L A D lOPTRIC^UE
vous fera pas malayfe' a entendre que par ces diuerfes fa-
c,ons de lunetes on y adioufte tout ce que 1'art y peut ad-
ioufter. fans qu'il foit befoin que ie m'arrefte a vous en
deduire la preuue plus au log. II ne vous fera pas malayfd
non plus a connoiftre, que toutes celles qu'on a eues iuf-
cues icy, n'ont pu aucunement eftre parfaittes, vil qu'il y
atrefgrande difference entre la ligne circulaire &l'hy-
pei-bole, & qu'on a feulement tafche en les faifant a fe
feruirdecellela, pour les effects aufquels i'ay demon-
ftre'quecellecyeftoitrequife. en forte qu'on n'aiamais
fceurencontrer que lots qu'on a failli ii heureufement,
que penfant rendre fpheriques les fuperficies des verres
qu'on a tailles, on les a rendues hyperboliques, ou de
quelqu'autre figure equiualente. Et cecy a principale-
ment empefchd qu'on n'ait pu bien faire les lunetes qui
feruent a voir les obiets inacceffibles, car leur verre con-
uexe doit eftre plus grand que celuy des autres : & outre
qu'il eft moins ayfd de rencontrer en beaucoup qu'en
pcu, la difference qui eft entre la figure hyperbolique &
lafpheriqueeftbien plus fenfible vers les extremites dn
verre que vers fbn centre. Mais a caufe que les artifans
iugeront peuteftre qu'il y a beaucoup de dirficulte'a tail-
ler les verres exactement fuiuant cette figure hyperbo-
lique, ie tafcheray encore icy de leur donner vne inuen-
tion,parlemoyende laquelleieme perfuade qu'ilsen
pourront aflescommodement venir about.
DE
-ocr page 216-
DlSCOURS DlXlESME.                   137
DE LA FACON DE TAIL-
LER LES VERRES.
cDifcoursDixiefme.
APres auoirchoifileverreou le criftaJ, donton a
defleindefeferuir, il eft preniierement befoin de-
chercher la proportion, qui fuiuaut ce qui a efte' dit cy
deflus, fert de mefure a fes refra&ions; & on la pourra
comraoderaenttrouuerparrayde d'vn tel inftrument.
E FI eft vne planche ou vne reigle toute plate & toutc
droite, &faittede telle matiere qu'on voudra. pourvft
cju'elle nefoit ny trop luifante, ny tranfparente, affin
que la Iumiere donnantdeffus puiffe facile ment yeftre
difcerneederombre.E A&FL font deux pinnules,c'eft
adiredeuxpetites lames, de telle matiere aufly qu'on
voudra, pourvu qu'elle ne foit pas tranfparente, efleue'es
aplomb fur EFI, & dans lefquelles il y a deux petits
trous ronds, A & L, pofds iuftement vis a vis 1'vnde I'au-
tfe, en forte que le rayon A L paflant au trauers, foit pa -
S                        rallele
-ocr page 217-
138                   La Dioptrique
rallele a la ligne E F. Puis RPQ^eft vne piece da verre
que vous voules efprouuer, taillde en forme de triangle,
dont Tangle R Q P eft droit, & P R Q eft plus aigu que
R P Q. Les trois cofte's R Q, QP, &RP, font trois fa-
ces toutes plates & polies, en forte que la face QJ3 eftant
appuiee contre la planche E F I, & l'autre face QJl con-
tre la pinnule F L, le rayon du Soleil qui pafTe par les
deux trous A & L penetre iufques a B au trauers du verre
PQjt fans yfbuffriraucunc refraction, acaufequ'ilren-
contre perpendiculairement fa fuperficie R Q^ M ais
eftant paruenu au. point B ouil rencontre obliquement
fon autre fuperficie R P,il n'en peut fortir fans fe courber
vers quelque point dela planche E F, comme par exem-
ple vers I. Et tout l'ufage de celc inftrument ne confifte
qu'a faire ainfi palTer le rayon du Soleil par ces trous A &
L, affin de connoiftre par ce moyen le rapport qu'a le
point I, c'eft a dire le centre de la petite ouale de lumie-
re que ce rayon defcrit fur la planche E F I^auec les deux
autrespoinsB &P, quifontj B, celuy ou la ligne droite
qui pafTe par les centres des deux trous A 8c L fe termine
fur la fuperficie R P j &P celuy ou. cette fuperficie RP
& celle de la planche E FI font couppecs, par le plan
qu'on imagine pafTer par les poins B & I, & enfemble par
les centres des deux trous A &L.
Or connoiffant ainfi ex-
a&ement ces trois poins
BPI, & par confequent
aufly le triangle qu'iis de-
terminent, on doit transfe-
rer ce triangle auec vn compasfur du papier ou quel-
qu'autre
-ocr page 218-
Disc ours Dixiesme.                159
qu'autre plan fort vni. puisdn centre B defcrire par le
pointBlecercleNPT,& ayant pris 1'arc NP efgal a
PT,tirerlalignedroiteBN quicouppe IP prolonged
au point H. puis derechefdu centre B par H defcrire
le cercle HO qui couppe BI au point O. & on aura
laproportion qui eft: entre les lignes HI & OI pour
lamefure commune de toutes les refractions qui peu-
uent eftre caufees par la difference qui eft entre l'air&
leverrequ'on examine. Dequoyfi on n'eft pas encore
certain, Onpourrafairc taillerdu mefme verre d'autres
perils triangles rectangles differens de cettuy-cy, & fe
feruantd'eux en mefme forte pour chercher cette pro-
portion, on latrouueratoufioursfemblable, & ainfi on
nauraaucuneoccafiondedouter que ce ne foitverita-
blement celle qu'on cherchoit. Que fi apres cela dans
lalignedroite HI,onprend MI efgale a OI, & HD
efgale a D M, on aura D pour le fommet, & H & I
pour les pOins brulans de l'hyperbole dont ce verre doit
auoir la figure pour feruir aus lunetes que i'ay de-
fcrites.
Et on pour-
ra rendre ces
trois poins H
DI plus ou
moins efloi-
gnees qu'ils
nefontdetantqu'on voudra, en tirant feulement vne
autre ligne droite parallele a HI plus loin ou plus pre's
quelle du point B, & tirant de ce point B trois lignes
droites B H, B D, BI qui la couppent. Comme vous
S 2                    voyes
-ocr page 219-
14°                  La Dioptriqjie
voye's icy qu'il y a mefme raport entre les trois poins
H D I, & h ^*,quTentre les trois hdi.
Puis il eft ayft ayant
ces trois poins de tra-
cer l'hyperbole en la
facon qui a efte' cy def-
fus expliquee, a f§auoir
en plantant deux pic-
ques aux poins H & I,
& faifant que la corde
niife autour du picquet
H , foit tellement at-
tached a la reigle qu'el-
Ie ue fe puifTe replier,
vers I, plus auant que
iufques a D.
Mais fi vous ayrnds mieux la tracer auec le compas or-
dinaire en cherchant plufieurs poins par ou elle pafle;
mettes Tvne des pointes de ce compas au point H; &
l'ayant tant ouuert, que fon autre pointepaffe vn peu au
i%
t .-■
: : ■
5)3;
dela du point
_ D, comme iuf-
ques a T,ducen-
H { I
points,
dentau:
)a i m i-ire ri ucicrivc*
le cercle1 133;
puis ayant fait M
2e(galeaHi,du
centre I par le
defcriud's le cercle 233, qui couppe le prece-
c poins 3 3, par lefquelscette hyperbole doit paf-
fer,
1
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DlSCOURS DlXIESME.                 141
fer,aufly bhn que par le point D, qui en eft le fommet.
Remette's parapres tout de mefme l'vne des pointes du
compas au point H, &l'ouurant en forte que fon autre
pointepaffe vnpenaudeladupoint 1,comme iufques a
4, du centre H defcriuds le cercle 4.66. Puisayant pris
M yefgale aH4, ducentre I par j defcriue's le cercle
$66, qui coupe le precedent aux poins 66 qui font dans
I'hyperbole. &ainfi continuant demettre la pointe du
compas au point H, & le refte comme deuant, vous pou-
ue"s trouuertant de poins qu'il vous plaira de cette Ity-
perbole.
Ce quineferapeuteftre pas mauuais pour faire grof-
fieremerit quelque modelle qui reprefente a peu prds la
figuredes verresqu'onveuttailler. Mais pour leurdon-
ner exa&ementcette figure, il eft befoind'auoirquel-
que autre inuention par lemoyen de laquelle onpuiffe
defcrire des hyperboles tout dVn trait, comme on de-
fcrit des cercles auec vn compas. Et ie n'en fc.ache
point de meilleure que la fuiuante. Premierement
du centre T, qui eft le milieu de la Iigne H I, il faut de-
fcrire le cercle H V I, puis du point D efleuer vne per-
pendiculaire fur H I, qui couppe ce cercle au point V.
& de T tirant vne Iigne droite par ce point V,on au-
ra Tangle H T V, qui eft tel, que G on l'imagine tourner
enrondautourdeTaiffieu HT,laligne TV defcrira la
fuperficie d'vn Cone, dans lequel la fe&ion faite par Ie
plan V X parallele a cet aiffieu H T , & fur lequel
DV tombe a angles drois, fera vne hyperbole toute
femblable&efgale ala precedente. Et tous les autres
plans paralleles a cettuy-cy coupperont aufly dans ce
S 3                      Cone
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La Dioptrioue
Cone des hyperboles tou-
tes femblables, mais inefga-
les, & qui auront leurs poins
bruflans plus ou moins efloi-
gnes felon que ces plans Ie
feront de ce't aiflieu.
En fuite de quoy on peut faire vne telle machine. A B
eft vn tour ou rouleau de bois ou de metal, qui tournant
furies poles i. 2 reprefente Taiffieu HI de l'autre figu-
re. C G, E F font deux lames ou planches toutes plates
& vnies principalement du cofteJ qu'elles s'entretou-
chent, en forte que la fuperficie qu'on peut imaginer en-
tre elles deux, eftant parallele au rouleau A B, & coupee
a angles droits par le plan qu'on imagine pafTer par les
poins 1,2, & C, O, G, reprefente le plan V X qui coup-
pe le Cone. Et N P lalargeurdela fuperieure CGeft
efgale au diametre du verre qu'on veut tailler, ou tant
foit peu plus grande. En fin KLM eft vne reigle qui
tournant auec le rouleau A B fur les poles 1, 2, en forte
que Tangle ALMdemeure toufiours efgal aH T V,re-
prefente laligne T V qui defcrit le Gone. Et il faut pen-
fer que cette reigle eft tellement paffee au trauers de ce
rouleau, qu'elle peut fe haufTer & fe baiffer en coulant
dans le trou L, qui eft iuftement de fa grofTeur; & mef-
me qu'il y a quelque part, comme vers K, vn poisou ref-
fort, qui la preffe toufiours contrelalame C G, par qui
elle eft fouftenue, & empefche'e de paffer outre. Et de
plus que fon extremite'M eft vnepointe d'acier bien
trempee, qui a la force decoupper cette lame CG,mais
non pas l'autre E F qui eft deffous. D'ou il eft mauifefte,
que
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DlSCOURS DlXIESME.                 145
que fi on fait mou-
noir cette reigle K
L M fur les poles
1,2, en forte que
la pointe d'acier M
pafTe d'N par O
vers P, & recipro-
quement de P par
Overs N,ellediui-
fera cette lame C G
en deux antres, C
NOP.&GNOP,
dontlecofte'NOP
fera termind d'vne
ligne tranchante, connexe en C N O P, & concaue en
GNOPjquianraexadement la figure d'vne hyperbo-
le. Et ces deux lames, C N O P, G N O P, eftant d'acier
ou autrematierefort dure, pourront feruir non feule-
ment de modeiles,mais peuteftre auffy d'outils ou in-
ftrumenspourtaillercertainesroues, dont iediraytan-
toft que les verres doiuent tirer leurs figures, toutesfois
il y a encore icy quelque defaut en ce que la pointe d'a-
cier M, eftant vnpeu autrement tournee lors qu'elle eft
vers N, ou vers P, que lors qu'elle eft vers O, le fil ou le
tranchant qu'elle donne a ces outils ne peut eftre par
toutefgal. Ce qui me fait croire qu'il vaudra mieus fe
feruir de la machine fuiuante, nonobftant qu'elle foit vn
peu plus compofee.
ABKLM n'eft qu'vne feule piece qui fe meut toute
cntiere fur les poles r, 2, & dont la partie A B K peut auoir
telle
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144                     ^A DlOfTRIQjiE
telle figure qu'on voudra, mais K L M doit auoir celle
d'vnereigleou autre telcors, dontleslignes qui termi-
nent fes fuperficies foient paralleles : & elle doit eftre
. tellement inclinee, que la ligne droite 4 3 qu'on imagine
pafTerparle centre de fbn efpaifleur eftant prolonged
iufques acelle qu'on imagine pafTer paries poles 1, i, J
L°I°LT facevnangle %■$ 4 efgalaceluyqui a tantoft efte'mar-
de l^page qu deles lettres H T V. CG,KF font deux planches pa-
I+1" ralleles a Paiffieu 12, & dont les fuperficies qui fe regar-
dent font fort plates &vnies, Sccouppe'es a angles drois
par le plan 12 G O C. Mais au lieu de s'entretoucher
comme deuant elles font icy iuftement autant efloi-
gne'es l'vne de 1'autrequ'il eft befoin pour donner pafla-
geentre elles deux a vn cylindreouroulleaUjQjR, qui
eft exa&ement rond, & par tout d'efgale grofleur. Et
de
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DlSCOURS DlXIESME.                147
deplasellesont chafcunevne fente,NOP, qui eft li
Iongue & li large, que la reigle K L M paffant par dedans
peut fe mouuoir § a & la fur les poles 1,2, tout autant qu'il
eft befoin pour tracer entre ces deux planches vne partie
d'vne hyperbole, de la grandeur du diametre des verres
qu'on veut tailler. Et cette reigle eft aufly paflee au
trauersduroulleauQ.R,en telle facon, que le faifant
mouuoir auec foy, fur les poles 1,2, il demeure neant-
raoins toufiours en-
ferme entre les
deuspIanchesCG,
E F , & parailele a
l'aiffieu 1 2. Enfin
Y<J7,& Z 8 9, font
les outils qui doi-
ucnt feruir a tailler
en hyperbole tel
cors qu'on voudra,
& leurs manches
YZ font de telle
efpahTeur que leurs
fuperficies qui font
toutes plates tou-
chent exa&ement de part & d'autre celles des deux
planches C G, E F, fans qu'ils laiffent pour cela de glif-
fer entre deux, a caufe qu'elles font fort polies. Et ils
ontchafcunvntrourond, $,$, dans lequell'vn des bouts
duroulleau QR efttellement enfermd, que ce roulleau
peutbienfetournerautourdelaligne droite yy, qui eft
comme foil aiffieu,fans les fairetournerauec foy, a caufe
T                        que
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i4<5                     La DiOptrique
que leurs fuperficies plates eftant engagers entre les
planches les en empefchent; mais qu'en quelque autre
fac,on qu'ilfe meuue il les contraint de fe mouuoif aufly
auec luy. Et de tout cecy il eft manifefte que pendant
quelareigleKLMeftponfleed'N vers O & d'Overs
P3 ou de P vers Q & d'O vers N, faifant mouuoir auec
foy le roulleau Q_R, elle fait mouuoir par mefme moyen
cesoutils Ytf7;&Z 8p,eutellefaconque lemouuement
particulierdechafcune de leurs parties defcrit exacfte-
met la mefme hyperbole que fait 1'interferon des deux
lignes ] 4, & f ?. dontl'vne, a f§auoir 3 4, parfon mou-
uement defcrit le cone, &l'autre, 5 ?, defcrit le plan qui
lecouppe. Pour les pointes ou tranchans de ces outils,
on lespeutfaire de diuerfesfa$ons, felon les diuers vfa-
ges aufquels on les veut employer. Et pour donner la fi-
gure aux verres conuexes, il me femble qu'il fera bon de
ie feruir premierement de l'outil Y 6 7 & d'en tailler plu-
fieurs lames d'acier prefque femblables a C N O P qui a
tantoft elle' defcrite. Puis tant par le moyen de ces la-
mes que de l'outil Z 8 9, de creufer vne roue comme d,
tout autour felon fon efpaifTeur 0 £ £, en forte que toutes
les fedtions qu'on peut imaginer y eftre faites par des
plans dans lefquels fe trouue e e l'aiffieu de cette roue,
ayent la figure del'hyperbole que trace cette .machine.
Et enfin d'attacher le verre qu'on veut tailler fur" vn tour
comme hi^Sz Pappliquer contre cette roue d, en telle
forte que faifant mouuoir cetour fur fon aiffieu b\,, eQ
tirant la corde //, & cette roue auffy fur le fien , en la
tournant,Ie verre mis entre deux prene exa&ement la fi-
gure qu'on luy doit donner.
Or
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Dl SCOURS D IX IESME.                    I47
Or touchant lafac,on defe feruir de l'outil ¥67, il eft
a remarquer qu'on ne doit tailler que la moitie des lames
cnopa. vnefois, par exemplequecelle qui eft entre les
poins n & 0. Et a cec effet il faut mettre vne barre en la
machine vers P, qui empefche que la reigle KLM
eftant meue d'N vers O ne fe puifle auancer vers P
qu'antant qu'il faut, pour fafre que laligne 3 4 qui mar-
que le milieu defonefpaifTeur paruiene iufques au plan
12 G O C qu'on imagine coupper les planches a angles
droits. Etleferde cet outil Y 67 doit eftrede telle figu-
re, que toutes les parties de fon tranchant foient en ce
mefme plan, lors que la ligne 5 4 s'y trouue5 & qu'il n'eti
ait point d'autres ailleurs qui s'auancent au dela versle
cofrcmarque P, mais que tout le tallu de fon efpaiflfeur
/e iette vers N. Au refte on le peut faire fi monffe ou fi
T 2          '          aygu,
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'                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                        '"■■■■-■-......
148                    La Dioptrique
aygu, & tant ou fi peu incline^ & de telle longueur qu'on
voudra, felon qu'on le iugera plus a propos. Puis ayant
forgeleslames cnop, &leurayant donne* auec la lime
la figure la plus approchate qu'on aura put de celle qu'el-
les doiuet auoir, il les faut appliquer & preffer contre cec
outilK67,&faifantmouuoirlareigle KLM, d'Nvers
0,i8creciproquementd'OversN, on taillera l'vne de
leurs moities. Puis afin de pouuoir rendre l'autre toute
femblable, il doit y auoir vne barre ou autre telle chofe
qui cinpefche qu'elles ne puiffent eftre auance'es vers ce't
outil, au dela du lieu ou elles fe trouuent lors que leur
moitie'N O eft acheue'e de tailler: & iors les en ayant vn
peu reculees, il faut changer le fer de ce't outil Y 6 7 & en
naettre vn autre en fa place dont le tranchant fbit exa&e-
ment dans le mefme plan, &de mefme forme, Stautant
auance'quc le precedent, mais qui ait tout le tallude
fon efpaifTeur iette'vers P, en forte que fi on appliquoit
ces deux fers deplatl'vn contre l'autre, leurs deux tran-
chans femblafTent n'en faire quVn. Puis ayant transfere'
vers N la barre qu'on auoit mife auparauant vers P pour
empefcher le mouuement de la reigle K L M, il faut fai-
re mouuoir cette reigle d'O vers P & de P vers O, iuf-
ques a ce que les lames cnop foient autant auance'es
versl'outil Y6 7, qu'auparauant, & cela eftant elles fe-
ront acheue"esde tailler.
Pour la roue d, qui doit eftre de quelque matiere fort
dure, apre's luy auoir donne auec la lime la figure la plus
approchante de celle qu'elle doit auoir, qu'on aura pu,ii
fera fort ayfc'de I'acheuer, premierement auec les lames
eHfl/^pourvu" qu'elles ayent efte' au commencement fi
bier/
I
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" ~ ' " ""
i
DlSCOURS DlXIESME.                   I$9
bien forgoes que la trampe ne leur ait rien oftd depuis de
leur figure, & qu'on Ies applique fur cette roue en telle
forte que leur tranchant nop & fon aiffieu e e foient en
                           J
vnmefme plan; & enfin qu'il y ait vn reflbrt ou contre-
pois qui Ies prefle contre elle, pendant qu'on la fait tour-
nerfur fon aiffieu. PuisaufTyauecl'outil 289, dontle
fer doit eftre efgalement talkie'desdeuscoftds, &auec
cela il peut auoir telle figure quafi qu'on voudra, pourvu
que toutes les parties de Ion tranchant 8 9 foient dans vn
plan qui couppe Ies fuperficies des planches CGEFa
angles drois. Et pour s'enferuir on doit fairemouuoirla
reigle K L M fur les poles 1,2, en forte qu'elle pafTe tout
de fuite de P iufques a N, puis reciproquement d'N iuf-
ques a P, pendant qu'on fait tourner la roue fur fon
aiffieu. Au moyen de quoy le tranchant de cet outil
oftera toutes Ies inefgalite's, qui fe trouueront dVn cofte
a 1'autre en I'efpaifleur de cette roue^ & fa pointe tou-
tes celles qui fe trouueront dehautenbas. Car il doit
auoir vn tranchant & vne pointe.
Apprds que cette roue aura ainfi acquis route la per-
fection qu'elle peut auoir, le verre pourra facilement
eftre taille'par les deus diuers mouuemens d'elle & du
tour, fur lequel il doit eftre attache', pourvu" feulement
qu'ily ait quelque reflbrt, ou autre inuention, qui fans
empefcher le mouuement que le tour luy donne, le pref-
fetoufiours contre la roue, &que le bas de cette roue
foittoufioursplongddans vn vafequi contiene legres,
ou l'emeri, ouletripoli,ouIapote'e,ou autre telle matie-
re,-font il eft befoinde fe feruir pour tailler & polir le
verre.
T 3                       Et
-ocr page 229-
ijo                   La Dioptriqjie
Et a 1 exeuiple de cecy vous poundsaiTes entendre en
quelle forte ondoitdonner la figure aux verres conca-
ues,afc,auoir en faifant premierement des lames com-
me en op auecl'outil Z 8 9.puis taiilant vne roue tant
auec ces lames qu'auec l'outil Y 6 7, & tout le refte en la
fac,on quivient d'eftre expliquee. Seulementfautilob-
feruerquela roue dont onfefert pour les conuexespeut
eftre auffy grande qu'on la voudra faire, mais que celle
dont onfefert pour les concaues doit eftre fi petite que
lors que fbn centre eft vis a vis de la ligne 5 j-, de lama-
chine qu'on employe a la tailler, fa circonference ne paf-
fe point audeflus de la ligne 12, de la mefme machine.
Et on doit faire mouuoir cette roue beaucoup plus vifte,
queletour, pour polir ces verres concaues; aulieuqu'il
eftmieux pour les conuexes de faire mouuoir le tour
plus promtement; dont la raifbu eft quelernouuement
du tour vfe beaucoup plus les extremites duverre, que
le milieu , & qu'au contraire celuy dela roue les vfe
moins. Pour 1'vtilite' de ces diuers mouuemens elle eft
fort manifefte, car poliffant les verres auec la main dans
vne forme, en la fa§on qui feule a efte en vfage iufques a
prefent, il feroit impoffible de rien faire de bien que par
hafard, encore que les formes fuffent toutes parfakesj &
les poliffant auec lefeulmouuementdu tour fur vn mo-
delle, tous les petits defauts de ce modelle marque-
roient des cercles entiers fur le verre.
Ien'adiouftepas icy les demonftrations de plufieurs
chofes qui appartienet a la Geometrie, car ceux qui font
vn peu verfes en cette fcience , les pourront affes enten-
dre d'euxmefmes, &ieme perfnade que les autres fe-
'- root
!-*
-ocr page 230-
Disc ours Dixiesme.                ijr
rontplusayfesdcm'en croire, que d'auoir la peine de
les lire. Au refte, affin que tout fe face par ordre, ie
voudrois premierement qu'on s'exercaft a polir des ver-
res, plats d'vn cofte", & conuexes de l'autre, qui eujQTent
la figure d'vne hyperbole dont les poins bruflans fuf-
fent a deux outroispicdsl'unde l'autre : car cette lon-
geur eft fuffifante pour vne lunete , qui ferae a voir
affes parfaittement les obiets inacceflibles. Puis ie
voudrois qu'on fift des verres concaues de diuerfes
figures en les creufant toufiours de plus en-plus, iuf-
ques a ce qu'on euft trouue' par experience la iufte fi-
gure de celuy , qui rendroit cette lunete la plus par-
faitte qu'il foit poffible, & la mieux proportionne'e a l'ceil
qui auroit as'en feruir. Car vous fcauds que ces ver-
res doiuent eftre vn peu plus concaues pour ceux qui
ont la veue courte que pour les autres. Or ayantain-
litrouue" ce verre concaue, d'autant que Ie mefme peut
feruir an mefme ceil pour toute autre forte delunetes,
iln'eftpius befoin pour les lunetes qui feruent a voir les
obiets inacceflibles, que de s'exercer a faire d'autres
verres conuexes qui doiuent eftre pofes plus loin du
concaue que le premier, & a en faire aufTy par degre's
qui doiuent eftre pofe's de plus en plus loin,iufquesa
la plus grande diftance qu'il fe pourra, & qui fbient
aufTy plus grands a proportion. Mais note's que d'au-
tant que ces verres conuexes doiuent eftre pofe's plus
loin des concaues, & par confequent aufTy de l'ceil, d'au-
tant doiuent ils eftre taille'splus exa&ement, a catife que
les mefmes defauts y ddtournent les rayons d'autant
plus loin de l'endroitou ils doiuent aller. Ccmmefi le
verre
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tfz                  La Dioptrique
verre F de'tourne le rayon C F autant que
leverreEdetourne AE, en forte que Ies an-
fFgIes AEG & CFH foientefgaus, ileftma-
nifefte que C F, allant vers H, s'efloigne bien
plusdupoint Douiliroitfans cela, qu'AEne
fait du point B, allant vers G. Enfin la dertiie-
re & principale chofe a quoy ie voudrois qu'on
s'exercaft, c'eft a polir Ies verres conuexes des deux co-
file's pour leslunetes qui feruent a voir Ies obiets acceffi-
bles, & que s'eftant premierement exerce'a en faire de
ceux qui rendent ceslunetes fort courtes, a caufe que ce
feront Ies plus ayfe's, on tafchaft apres par degre's a en fai-
re de ceux qui Ies rendent plus longues, iufques a ce
qu'on foit paruenu aus plus longues dont on fe puiffe fer-
uir. Et affin que la difficulte'que vous pourres trouuer
en la conftru&ion de ces dernieres Iunetes ne vous de-
goufte, ie vous veux auertir qu'encore que d'abord Ieur
vlage n'attire pas tant que celuy de ces autres, qui fem-
blent promettre de nous efleuer dans Ies cieux, & de
nous y monftrer fur Ies aftres des cors aufly particuliers,
& peut eftre, aufly diuers que ceux qu'on void fur la ter-
re;ielesiuge toutesfois beaucoup plus vtiles, a caufe
qu'on pourra voir par leur moyen Ies diuers meflanges &
arrengemens des petites parties dont Ies animaus & leJ
plantes}& pent eftre aufly Ies autres cors qui uousenui-
ronnent, font compofe\ & de la tirer beaucoup d'auan-
tage pour venir a la connoiflance de leur nature. Car def-
ia felon ropiniondeplufieursPhilofophes,tous ces cors
nefont faits que des parties des elemens diuerfement
meflees enfemble; & felon la miene, toute leur nature 8c
leur
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Dl SCOURS DlXlESME.
leureffence, au moins de ceux qui font inanime*s, ne
confifte qu'en la grofleur, la figure, l'arrangement, S^les
mouuemens de leurs parties,
Pourladifficulte qui le rencontre , lors qu'on voute
ou creufe ces verres des deus cofte's, a faire que les
fommets des deux hyperboles foient diredtement op-
pofdsl'vn al'autre, ony pourra remedier , enarondif-
fant fur le tour leur circonference, & la rendant exacte-
ment efgale a celle des manches aufquels on les doit
attacher pour les polir. Puis lors qu'on les y attache, &
que le plaftre,ou la poix & le ciment,dont on les y ioint,
eft encore frais& flexible, en les faifant pafTer auec ces
manches par vn anneau dans lequel ils n'entrent qu'a
peine. Ie ne vous parle point depiufieurs autres parti-
cularite's qu'on doit obferuer en les taillant, ny aufly de
plufieurs autres chofes que i'ay tantoft dit eftre requifes
enlaconftrudiondeslunetes, cariln'y en a aucuneque
ieiugefi difficile qu'elle puhTe arrefter les bons efprits.
& ie ne me reigle pas fur la portee ordinaire des artifans.
mais ie veus efperer que les inuentions que i'ay mifes en
ceTraitdferonteftime'esaflesbelles & affHs importan-
tes pour obligcr quelques vns des plus curieus & des
plus induftrieus de noftre fiecle a en entreprendre l'exe-
cution.
F I N.
V                     LE S
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'
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METEORES.
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IJ7
LES
METEORES.
'Bifcours Premier.
DE LA NATVRE DES
CORS TERRESTRES.
O u s auons naturellcment plus d'adrni-
ration pour les chofes qui font au deffus
de nous que pour celles qui font a pareil-
lehauteur, ouau deffous. Et quoy que
les nues n'excedent gueres les fommets
de quelques montaignes, & qu'on en voye mefme fou-
uent de plus baffes que les pointes de nos clochers, tou-
tefois a caufe quil faut tourner les yeux vers le del pour
les regarder, nous les imaginons fi releve'es, que mefme
lesPoetes & les Peintres en compofent le throfne de
Dieu, & font que la il employe fes propres mains a ouurir
& fermer les portes des vens , a verfer la roze'e fur les
fleurs,& a lancer la foudre fur les rochers* Ce qui me
fait efperer que fii'explique icy leur nature, en telle for-
te, qu'on n'ait plus occafiond'admirerriende ce qui s'y
voit, ouquien defcent, on croyra facilement qu'il eft
poffible en mefme fa§on de trouuer les caufes de tout ce-
qu'il y a de plus admirable deffus laterre.
Ie parleray en ce premier difcours de la nature des
corsterreftres en general; affin de pouuoir mieus expli*
V 3                     quer
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iy8                    Les Mete ores.
quer dans le fuiuant celle des exhalaifons & des vapeurs.
Puis a caufe que ces vapeurs s'efleuans de l'eau de la mer
forinentquelqiTefoisdu felau deflus de fa fuperfkie,ie
prendraydelaoccafiondem'areftervn peu ale defcri-
re, & d'effayer en Iuy fi on peut connoiftre les formes de
ces cors que les Philofophes dffent eftre cornpofcs des
elemensparvnmeflangeparfait, auffy bien que cellcs
desMeteores qu'ilsdifent neneftre cornpofcs que par vn
meflange imparfait. Apres cela conduifant les vapeurs
par lair, i'examineray d'ouvienent les vensj Etlesfai-
fantaflembler en quelquesendroits, ie defcriray la na-
ture des nues: Et faifant diflbudre ces nues, ie diray cq
qui caufe la pluie, la grefle, & la neige^ ou ie n'oublieray
pas celle dont les parties ont la figure depetites eftoiles
a fix pointes tres parfaitement compaflees, & qui, bien-
qu'elle n'ait point efte'obferuee par les anciens, ne laiffe
pas d'eftre I'vne des plus rares merueilles de la Nature.
Ie n'oublieray pas aufly les tempeftes,letonnerre, lafou-
dre, Sdesdiuers feus qui s'allument en 1'air, ou les lu-
mieres qui s'y voyent. Mais fur tout ie tafcheray de bien
depeindre Tare en ciel, & de rendre raifon de fes cou-
leurs, en telle forte, qu'onpuifle aufly entendre la natu-
re de routes celles qui fe trouuent en d'autres fuiets. A
quoy i'adioufteray la caufe de celles qu'on voit comma-
nement dans les nues- &des cercles qui enuironn.ent les
aftres: Etenfin la caufe des Soleils, oudes Lunes, qui
paroiflent quelquefois plufieurs enfemble.
II eft vray que la connoiflance de ces choies,depen-
dant des principes generaus de la Nature,qui n'ont point
encore efte, que ie fc,ache, bien expliquds, ilfaudra que
ie
j,.*^-—•**
-ocr page 238-
Di scour s Premier.                  ij9
ic me ferue au commencement dje quelques fuppofi-
tions, ainfi que iay fait en la Dioptrique. mais ie tafche-
ray.de les rendre fi fimples & fi faciles, que vous ne feres
peuteftrepasdifficulte'de lescroyre, encore que ie ne
les aye point demonftre'es.
Iefuppofepremierementquel'eau, la terre, l'air, &
tousles autres telscors qui nous enuironnent,font com-
pofdsdepluficurs petites parties de diuerfes figures &
grofleurs, qui ne font iamais fi bien arrenge'es, ni Ci iufte-
rnent iointes enfemble, qu'ilne refte plufieurs internal*
les autour d'elles. Et que ces interualles ne font pas
vuides, mais remplis de cette matiere fort fubtile; par
i'entremife de laquelle i'ay dit cy delTusl^uefecomuni-
quoit I'a&ionde la lumiere. Puis en particulier ie fup-
pofe que les petites parties dontl'eau eftcompofee font
longues, vnies, & gliflantes, ainfi que de petites anguil-
les> qui quoy qu'elles fe ioignent & s'entrelacent, ne fe
nouentnynes'accrochent iamais pour cela en telle fa-
con qu'elles ne puiffent ayfement eftre feparees. Et au
contrairequeprefquetoutescelles tant dela terre que
mefmede l'air, & de la plus part des autres cors, ont des
figures fort irregulieres & inefgales j en forte qu'elles ne
peuuent eftrefipeu entrelacces,qu'elles ne #acerochent
& fe lient les vnes aus autres, ainfi que font les diuerfes
branches des arbrilTeaus, qui croilTent enfemble dans-
faehaye. Et lors qu'elles fe lient en cette forte i elles
compofent des cors durs, comme de la terre, du bois,ou-
ai]tresfemblables. aulieu que fi elles font fimplement
pofe'es l'vne fur l'autre, fans eftre que fort peu ou point
dutoutentrelace'esi ftqu/ellesfoieot auec cela fi peti-
te s>
.^..^^ H ^1 , _                  .* - ~ - - ^^.:..W~. :w-_i^a;a
-ocr page 239-
tijo                    Les Meteores
tes, qu'ellespuiflent eftre meues &fepare'e$par I'agita-
tion de la matiere fubtile qui les enuironnej ellesdoi-
uent occuper beaucoup d'efpace, &compofer des cors
liquides, fort rares, & fort legers, comme des huiIes,ou
de lair. De plus il faut penfer que la matiere fubtile, qui
remplift les interuales qui font entre les parties de ces
cors , eftde telle nature qu'elle ne cefle iamais de fe
mouuoir 9a & la grandement vifte, non point toutefois
exa<3:ementdeniclmevitefre,entouslieus, & en tous
terns, mais quelle fe meut communement vn peu plus
vifte vers lafuperficiede la terre, qu'elle ne fait au haut
de l'air ou fot les nue's, & plus vifte vers les liens proches
del'Equateur, que vers les Poles, & au mefme lieu plus
vifte l'efte que l'hyuer, & le iour que la nuit. Dont la
raifon eft euidente, en fuppofant que la lumiere n'eft au-
tre chofe qu'vii certain mouuement, ou vne a&ion,
dont les cors lumineus poufTent cette matiere fubtile de
touscofte'sautourd'eusenlighedroite, ainfi qu'ilaefte
ditenlaDioptrique. Caril fuitde la que les rayons du
foleil, tant droits, que refiefchis, la doiuent agiter d'a-
uantage le iour que la nuit, & l'efte que rhyuer, & f°us
f Equateur que fous les Poles, & contre la terre que vers
les nues. P»is il faut aufly penfer que cette matiere fub-
tile eftcompofee dediuerfes parties , qui bienqu'elles
foient toures tres petites, le font toutefois beaucoup
moinslesvnesquelesautres, &que lesplus groffes, ou
pour mieusparlerles moins petites, onttoufiours leplus
de force, ainfi que generalement tous les grans cors en
ontplus que les moindres, qoand ils fontautant esbran-
fles.Ce qui fait que moins cette matiere eft fubtile,c'efta
dire
J
-ocr page 240-
Disc ours Premier.                i<Ti
dire corapofee de parties moins petites, plus elle pent
agiter les parties des autres cors. Ec cecy fait aufly qu'el-
leeft ordinairement le moins fubtile aux lieus, &aux
terns ou elle eft le plus agitee. comme vers lafuperficie
dela terre que vers les nines, & fbus l'Equateur que fous
les Poles, &eneftequ'enhyuer, &de iour quedenuit.
Dont la raifon eft que les plus groffes de fes parties ayant
leplus de force, peuuent le mieux aller vers les lieux, ou
l'agitation eftantplus grande, il leur eft plus ayfe'de con-
rinuerleurmouuement. Toutefois il y en a touliours
qaantite'defort petites qui fe coulent parmi ces plus
grofles. Et ileftaremarquerque tous les cors terreftres
ont bien des pores, par ou ces plus petites peuuent paf-
fer, maisqu'ily enaplufleurs qui les ont: fi eftroits, ou
tellement difpofe's, qu'ils ne recoiuent point les plus
grofles; & que ce font ordinairement ceux cy qui fe fen-
tent les plus froidsquand on les touche, ou feulement
quand on s en approche. Comme d'autant que les mar-
bles & les metausfefentcnt plus froids que le bois, on
doit penfer que leurs pores ne recoiuent pasfifacilemet
les parties moins fubtiles de cette matiere;■& que les po-
res de la glace les recoiuent encore moins facilement
que ceux des marbres ou des metaus,d'autant quelle eft:
encore plus froide. Cariefuppofeicyque pour le froid
&lechaud, i/n'eft point befoin de conceuoir autrecbo-
fe, finon que les petites parties des cors que nous tou-
chons, eftant agite'es plus ou moins fort que de couftu-
rne,foit par les petites parties de cettcmatiere fubtile,
f°it par telle autre caufe que ce puifte eftre, agitent auf-
fy plus ou moins les petits filets de ceux de nosnerfs qui
X                        font
-ocr page 241-
i6z                   Les Mete ores.
font les organesdel'attouchement. Etque lors qu'elles
les agitent plus fort que de couftume, ceta caufe en nous
le fentiment de lachaleur; au lieu que lors qu'ellesles
agitent, moins fort, cela caufe le fentiment de la froi-
deur. Etileft bien ayfe'a comprendre qu'encore que
cettcmatjere fubtile, nefeparepas les parties des cors
durs, qui font comme des branches entrelace'es,en mef-
me fac,on quelle fait cellesdel'eau>& de tous les autres
cors qui font Iiquides; elle ne IaifTe pas de les agiter &
faire trembler plus ou moins, felon que fon mouuement
eft plus ou moins fort, & que fes parties font plusou
moins groffes. Ainfi que le vent peut agiter toutcs les
branches des arbriflfeaus dont vne paliflade eft compo-
fee, fans les oiler pourcela de leurs places. Au refte il
faut penferqu'ily a telle proportion entre la force de
cette matiere fubtile, & la refiftence des parties des au-
tres cors, que lors qu'elle eft autaut agite'e, & qu'elle
n'eft pas plus fubtile, qu'elle a couftume d'eftre en ces
quartierscontrelaterre, elle a la force d'agiter, & de
faire mouuoir feparement Tvne de l'autre, & mcfme dc
plier la plus part des petites parties de l'eau entre lefquel-
les elle fe glifle, & ainfi de la rendre liquide. Mais que
lors qu'elle n'eft pas plus agite'e, ny moins fubtile, qu'elle
a couftume d'eftre en ces quartiers au hautde l'air, ou
qu'elle y eft quelquefois en hyuer contre la terre, elle na
point afles' deforce pour les plier & agiter en cette fa-
§on, ce qui eft caufe qu'elles s'areftet confufementioin-
tes & pofees 1'vne fur l'autre, & ainfi qu'elles compofent
vn cors dur, a f§auoir de la glace. En forte que vous
pouue'simagincrmefme difference entre de l'eau & de
la
-ocr page 242-
Discours Premier.                153
la glace, que vous ferie's entre vn tas de petites anguil-
ks, foit viues, foit mortes, flotantes dans vn batteau de
pefcheur tout plein de trous par lefquels pafTe l'eau d'vne
riniere qui les agite, & vu tas des mefmes anguiltes tou-
tesfeiches, & roides de froid fur le riuage. Et pource-
que l'eau ne fe gele iamais que la matiere qui eft entre fes
parties nefoit plusfubtile qu'a l'ordinaire, de la vient
que les pores de la glace qui fe formentpour lors,ne s'ac-
commodans qu'a la groffeur des parties de cctte matie-
re plus fubtile, fe difpofent en telle forte, qu'ils ne peu-
uent receuoir celle qui l'eft rnoins; & ainli que la glace
eft toufiours grandement froide, nonobftant qu'on la
garde iufques at'efte'- & mefme qu'elle retient alors fa
durete', fans s'arnollir peu a peu commelacire, a caufe
quelachalcurnepenetreau dedans qu'a mefure que le
deffus deuient liquide.
Ilyaicydeplusaremarquerqu'entre les parties ton-
gues & vnies dont iay dit que l'eau eftoit compofe'e, il y •
en a veritablement la plus part qui fe plient ou ceffent dc
feplier felon que la matiere fubtile qui les enuironne a
quelque peu plus ou moins de force qu'a l'ordinaire, aiufi
queieviensd'expliquer- maisqu'ily en a aufly.de plus
grofTes, qui nepouuant ainfi eftreplie'es, compofent les
fcl$j &deplus petites, qui le pouuant eilre toufiours,
compofent les efpritsoueausde vie, qui ne fe gelentia-
mais. Et que lorfque celles de l'eau commune ceffent
du tout de feplier, Ieur figure la plus naturelle n'eft pas
en toutes d'eftrc droites comme des ioncs, mais en plu-
fieurs d'eftre courbe'es en diuerfes fortes : d'ou vient
qu'ellesnepeuuentpourlorsfe rengerenfi peud'efpa-
X z                      ce,
-ocr page 243-
3^4                  LesMeteor.es.
ce, que lorfque la matiere fubtile, eftant aire's forte pour
Ies plier, leur fait accommoder leurs figures les vncs aux
autres. Heft vray auflyque lors qu'elle eft plus forte,
qu'il n^pft rcquis a cec effect , el!c eft caufe derechef
qu'elles s'eftendent en plus d'efpace. Ainfi qu'on pourra
voir par experience, fi ayant rempli d'eau chaude vn ma-
tras, ou autre tel vafe dont le col foit affe's long &
eftroit, on 1'expofe a l'air lors qu'il gele: car cette eau
s'abaiffera vifiblement peu a peu, iufques a ce quelle foit
paruenue a certain degrd de froideur, puis s'enflera & fe
rehaufTeraauffypeu a peu, iufqu'ace qu'elle foit toute
gele'e: en forte que le mefme froid qui l'aura condenfee
oureferree au commencement, Iararefiera par appre's.
Etoupeutvoiraufly par experience que l'eau qu'on a
tenue long terns fur le feu fe gele plutoft que d'autre,
dont la raifon eft que cefles de fes parties, qui peuuent le
moms ceffer de fe plier , s'euaporent pendant qu'on la
chauffe.
Mais affin que vous receuie's toutes ces fuppoiitions
auec moins de difficult e',fcache's que ie ne concoy pas
les petites parties des cors terreftres comme des atomes
ouparticulesindiuiflbles, mais que les iugeant toutes
d'vne mefme matiere, ie croy que chafcune pourroit
eftre rediuifee en vne infinite' dc fagpns, 5c qu'elles ne
different entre elles,que comme des pierres de plufieurs
diuerfes figures,qui auroient eftecouppe'es d'vn mefme
rocher. Puis fc.ache's auffy que pour ne point rompre la
paix auec les PhiIofophes,ie ne veux riau du tout nier de
cequ'ilsimaginent dans les cors deplus queie n'ay dif,
comme leurs formes fubfiantielles, leurs qualites reettes,
-ocr page 244-
Discours Second.                  x6$
&chofesfemb!ables, rnaisqu'ilme femble que mes rai-
fonsdeuront eftre d'autantplus approuudes, que ie les
feray dependre de moins de chofes.
DES VAPEVRS ET DES
EXHALAISONS.
'Difcours Second.
SI vous confideres que la matiere fubtile, qui eft dans
les pores des cors terreftres, eftant plus fort agitde
vnefois quel'autre, foitparlaprefencedufoleil,fbitpar
telle autre caufe que ce puifTe eftre, agite auffy plus fort
les petites parties de ces cors 5 vous entendre's facile-
mentqu'elledoit faire que cellesqui font afles petites,
& auec cela de telles figures, ou en telle fkuation, qu'el-
Iesfepeuuentayfemetfeparerdeleurs voyfines, s'efcar-
teot §a & la les vnes des autres, & s'efleuent en 1'air- non
point par quclque inclination particuliere qu'elles ayent
amonter, ouquele foleilait en foy quelque force qui
les attire, mais feulement a caufe qu'elles ne trouuent
point d'autre lieu dans lequelilleur fbit fi ayfe'de con-
tinuer Ieur mouuement. Ainfi que la poufEere d'vne
campaigne fe foufleue, quand elle eft feulement poufTee
&agite'e paries pieds de quelque pafTant. Car encore
que les grains de cette pouffiere foient beaucoup plus
gros & plus pefans, que les petites parties ddnt nous par-
Ions, ilsnelaifTentpas pour cela de prendre leur cours
vcrsleciel. Etmefme on voit qu'ils y moment beau-
X 3                        coup
                                                                                                                                                        ........
-ocr page 245-
166                    Les Msteores.
coup plus haut, lors qu'vne grade plaine eft couuerte dc
gens qui fe remuent,quetlors qu'elle n'eft foule'e que par
vn feul home.Ce qui doit empefcher qu'on ne s'efton-
ne de ce que Taction du foleil efleue afle's haut les petites
parties de la matiere, dont fe compofcnt les vapeurs
Itlesexhalaifons, vft qu'elle s'eftend toufiours en mef-.
me terns fur toute vne moitie de la terre, & qu'elle y de-
meure les iours entiers. Mais remarques que ces pe-
tites parties qui font ainfi efleuees en 1'air par le foleil,
doiuentpourla plus part auoir la figure que i'ay attri-
bute a cclles de 1'eauj acaufe qu'il n'y en a point d'au-
tres qui puifTent fiayfement eftre fepare'es des cors ou
elles font. Et ce feront celles cy feules que ie nomme-
rayparticulierement des vapeurs jaffinde les diftinguer
desautresquiont des figures plus irregulieres, & auf-
quelles ie reftreindray le nom d'exhalaifons, a caufe que
ie n'en fcache point de plus propre. Toutefois aufTy en-
tre les exhalaifons ie comprendray celles, qui ayant a
peu pre's mefme figure que les parties de l'eau, niais
eftant plus fubtiles, compofent les efprits ou eaus de vie:
acaufe qu'ellespeuuentfacilement s'embrafer. Et i'en
exclueray celles, qui eftant diuifees en plufieurs bran-
ches, font fi fubtiles, qu'elles ne font propres qu'a com-
pofcr le cors de fair. Pour celles qui eftant vn peu plus
groflieres "font aufTy diuife'es en branches, il eft vray
qu'elles ne peuuent gueres fortir d'elles mefme des cors
durs ou elles fe trouuent, mais fi quejquefois lefeu s'ef-
prand en ces cors, illes en chaffe toutes en fume'e. Et
aufTy lorfque l'eau fe glifTe dans leurs pores, elle peut
fouuentles en degager, Sc les emporter en haut auec
-ocr page 246-
Discoors Second.                   167
foy. En raefme fac,on que levent, paffant au trailers
d'vnehaye, emporte Ies feuilles ou les pailles, qui fe
trou'uent entrelacees entre fes branches. Ou plutoft
comme l'eau mefme emporte vers lehautd'vn alem-
bic les petites parties deces huiles, que Ies Alchemi-
ftes ont couftume de tirer des plantes feiches, lorf-
que. les ayant abbreuees de beaucoup d'eau, ils difti-
lent le tout enfemble , & font par ce moyen que le
peu d'huile, qu'elles contienent,monte auec la grande
quantite'd'eau qui eft parmi. Car en effect la plus part
decellescyfont toutes les mefines, qui ont couftume
decompofer les cors de ces huiles. Remarque's auffy
que les vapeurs occupent toufiours beaucoup plus d'e-
fpace que l'eau, bienqu'elles ne foient faitcs que des
mefmes petites parties. Dont la raifon eft que lorfque
ces partiescompofent le cors de l'eau, elles ne fe meu-
uentqu'afles fort pour feplier, &s'entrelacer, enfeglif-
fantlesvnescontrc lesautres, ainfique vous les voye's
reprefente'es vers A. Au lieu que lor s qu'elles ont la for-
me d'vne vapeur, leur agitation eft fi grande, qu'elles
tournentenrondfortpromptement de tous coftes, &
s'eftendent par mefme moyen de toute leur longe'ur, en
telle forte que chafcune a la force de chaffer d'autour
defoy toutes celles defes femblables, qui tendent a en*
trer en la petite fphere qu'elle defcrit. Ainfi que veus
les voye's reprefente'es vers B. Et e'eft en mefme fa§on
que fi vous faites tourner afles vifte le piuot LH , au
trailers duquel eft pafle'e la chorde N P, vous verres que
cette chorde fe tiendra en l'air toute droite & eftendue,
occupant par cc moyen tout l'efpace compris dans le
ctr-
-ocr page 247-
Les M eteores.
i<J8
\mA
i(/s
\VxJ
■t\i
"^/^K
i/i
w>
cercle N O P Q^ en telle forte qu'on n'y pourra mettre
aucun autre cors, qu'elle nele frappe incontinent auec
force, pour Ten chaffer: au lieu que fi vous la faites mou-
uoir pluslentement,elle s'entortillera de foy meiine au-
tour de cepiuot, &ainfi n'occupera plus tant d'efpace.
De plus il raut remarquer que
ces vapeurs peuuent eftre plus ou
N.<
moins prefixes ou eftendues,& plus
ou moins chaudes ou froides , &
plus ou moins fcranfparentes ou ob-
fcures,&plus on moins humidesou
feiches vnefois que lautre. Car pre-
miere-
'':.                                        ■ ■ . . ■ '. '                                           .                                                                 :.
-ocr page 248-
Discours Second.'                  itfp
mierementlorfqueleurs parties, n'eftant plus afTc's fort
agitees pour fe tenir eftendues en ligne droite, com-
mencentafeplier& fe rapprocher les vnes des autres,
ainfiqu'elles font reprefentees vers C &versD; Oubien
Iors qu'eftant referrees entre des montaignes, ou entre
les actions de diuers vens qui eftant oppofes s'empe-
fchent les vns les autres d'agiter Pair, ouau defTous de
quelques nues, ellesnefe peuuent pas eftendre en tant
d'efpace que leur agitation Ierequert, comme vous les
pouuds voir vers E; Ou enfinlors qu'employant la plus
grande partie de leur agitation a fe mouuoir plufieurs
enfemble vers vn mefme coftd, elles ne tournoyent plus
• fi fort que decouftume, ainfiqu'elles fe voyent vers F,
oufortantdei'efpace E, elles engendrent vn vent qui
foufflevers Gjlleft manifefte que les vapeurs qu'elles
compofent font plusefpefTes ou plus ferre'es, que lors
qu'il n'arriue aucune de ces trois chofes. Et il eft mani-
fefte aufly que fuppofantlavapeurquieft vers E autant
agitee, que celle qui eft versB, elle doit eftre beaucoup
,pluschaude, a caufe que fes parties eftant plus ferrees
ont plus de force. En mefme facon que la chaleur dVn
fer embrafe'eftbien plusardente, que celle des charbons
oude la flame. Et c'eft pour cette caufe qu'on fent fou-
uentenefte'vne chaleur plus forte & plus eftouffante,
lors que l'air eftant calme & corarne efgalement prelTe
detouscoftes couue vne pluie, que lors qu'il eft plus
clair & plus ferein. Pour la vapeur qui eft vers C, elle eft
plus froide que celle qui eft vers B, nonobftant que fes
parties foient vn peu plus ferrees; d'autant que ie les fup -
pofe beaucoup moinsagitees. Et au contraire celle qui
Y                        eft
-ocr page 249-
eft vers U eft plus chaude^d'autantque fes parties font
fuppofe'es beaucoup plus ferre'es, & feulement vn pea *
mains agitees. Et cetle qui eft vers F eft plus froide que
celie qui eft vers E, nonobftant que fes parties ne fbient
ny moins ferrdes, ny moins agite'es; d'autant qu'elles
s'accordent plus a fe mouuoir en mefme fens, ce qui eft
caufe qu'elles ne peuuent tant esbranfler les petites par-
ties desautres cors. Ainfi qu'vn vent qui fouffie tou-
fiours de mefme fagon, quoyquetres fort, n'agite pas
tant les feuilles& les branches d'vne foreft, qu'vn plus
foible qui eft moins efgal. Et vous pourres connoiftre
par experience quec'eft en cette agitation des petites
parties
-ocr page 250-
Di scours Second.                   171
parties des cors terreftres que confiftela chaleur, fi fouf-
flant aflTds fort contre vos doigts ioins enfemble, vouS
prene's garde que Thaleine quifortirade voftre bouche
vousfemblerafroideau deflusde voftre main,ou paffaut
fore vifte & d'efgale force elle ne caufera gueres d'agita-
tion; au lieu que vous la fentire's afle's chaude dans les en-
tredeux de vos doigs, ou paffant plus inefgalement &
lentement elle agitera d'auantage leurs petites parties.
Ainfi qu'on la fent aufly toufiours chaude, lors qu'on
fouffle ayant la bouche fort ouuerte; & froide,lors qu'on
fouffle en 1'ayant prefque fermee. Et e'eft pour la mef-
meraifon qn'ordinairenienUes vens impetueux £e fen-
tent froids, & qu'il n'y en a gueres de chauds qui ne foi-
ent lents.
De plus les vapeurs reprefentees vers B, & vers E3 &
vers F,font tranfparentes, & ne peuuent eftre difcerades
parkveued'aueclereftede Tair, d'autant quefe remu-
antfort vifte & de mefme bran lie que la matiere fubtile
qui les enuironne, elles ne la peuuent empefcher de re-
ceuoir Taction des corslumineux}mais plutoft elles la re-
coiuent auec elle. Au lieu que la vapeur qui eft vers C
commence a deuenir opaque ou obfeure, a caufe que fes
parties n'obeifTent plus tant a cette matiere fubtile,
qu'elles puiffent eftre meues par elle en toutes facons.Et
la vapeur qui eft vers Dnepeut eftre du tout fi obfeure
que celle qui eft vers C, a caufe qu'elle eft plus chaude.
Commevous voye's qu'en hyuer le froid fait paroiftre
Thaleine ou la fueur des cheuaux efchauffes, fous la for-
me d'vnegroife fumee fort efpaiffe & obfeure ; au lieu
qu'en efte',que Tair. eft pluschand,elle eft inuifible. Et on
Y 2                      ne
-ocr page 251-
X1%                      Les Meteores
ne doit pas douter que l'air ne contiene fouuent autant
ou plus de vapeurs, lors qu'elles ne s'y voyent aucune-
ment, que lors qu'elles s'y voyent. Carcomentfepour-
roitilfaire fans miracle, qu'en terns chaud & en plein
midy le foleil, donnant fur vn lac ou vn mareft,manquaft
d'en efleuer beaucoup de vapeurs ? vu qu'on remarque
mefme que pour lors les eaux fe deffeichent, & fe dimi-
nuet beaucoup d'auantage,qu'elles ne font en terns froid
&obfcur. Aureftecelles qui font vers Efont plus hu-
mides, c'eftadireplusdifpofe'esafecouuertir en eau &
a mouiller ou hume&er les autres cors comme fait l'eau,
que celles qui font vers F. Car celles cy tout au contrai-
re font feiches, vu qu'allant fraper auec force les cors hu-
mides qu'elles rencontrent, elles en peuuent chaffer &
emporter auec foy les parties de l'eau qui s'y trouuent,
& par ce moyen les defTeicher. Comme auffy nous
efprouuonsqueles vens impetueux font toufiours fees,
&qu'iln'y en apointd'humidesquinefoientfoibles.Et
on peut dire que ces meimes vapeurs, qui font vers E,
font plus humides que celles qui font vers D,a caufe que
leurs parties eftant plus agite'es, peuuent mieux s'infi-
nuer dans les pores des autres cors pour les rendre humi-
des; mais on peut dire auffy en vn autre fens qu'elles le
font moins, a caufe que la tropgrande agitation de leurs
parties les empefche de pouuoir prendre fi ayfement la
forme de l'eau.
Pour ce qui eft des exhalaifons, elles font capables de
beaucoup plus de diuerfes qualites que les vapeurs, a
caufe qu'il peut yauoir plus de difference eutre leurs par-
ties- Mais il fuffira icy que nous remarquions que les
plus
-ocr page 252-
Discours Second.                   173
plus groflieresne font quafi autre chofe que de laterre,
telle qu'on la peut voir aufonds d'vn vaze aprds y auoir
laifTe'raffeoir del'eau de neige ou de pluie, ny les plus
fubtiles autre chofe que ces efpritsou eaux de vie, qui
s'efleuent toufiours les premieres des cors qu'on diftile.
Et qu'entre les mediocres, les vnes participent de la na-
ture des fels volatilesj & les autres de celle des huiles,ou
plutoft des fume'es qui en fortent lors qu'on les brufle. Et
encore que la plus part de ces exhalaifons ne montent en
rairquemefle'esauec les vapeurs, elles ne laiffent pas de
pouuoir ayfementparaprdss'enfeparer; oud'elles mef-
me, ainfi que les huiles fe demeflentde l'eau auec la-
quelle on les diftile- on ayde'es par l'agitation des vens
qui les raffemblent en vn ou plufieurs cors, en mefme fa-
con que les vilageoifes en battant Ieur creme feparent le
beurre du petit lait; ou mefme fouuent auffy par cela
feul que fe trouuant plus ou moins peftites, & plus ou
moins agitdes, elles s'areftent en vne region plus baffe
ou plus haute que ne font les vapeurs. Et d'ordinaire les
huiles s'efleuent moins haut que les eaux de vie, & celles
quinefont que terre encore moins haut que les huiles.
Mais il n'y en a point qui s'areftent. plus bas que les par-
ties dont fe compofe le fel commuri, & bien qu'elles ne
foient pas proprement des exhalaifons ny des vapeurs, a
caufe qu'elles ne s'efleuent iamaisque iufques audefllis
delafuperficie de l'eau , toutefois pourceque c'eft par
1'euaporation de cette eau qu'elles y vienent, & qu'il y a
plufieurs chofes en elles fort remarquables qui peuuent
eftrecommodementicy expliquees, ien'aypas enuie
delesomettre.
Y 3                      DV
\
-ocr page 253-
*
174                     £es Mete ores.
DV SEL
^ifiours T'roipefme.
A faleure de la mer ne confifte qu'en ces plus grofles
-"-'parties de fori eau, quei'ay tantoft dit ne pouuoir
eftre pliees comme les autres par l'aclion de la matiere
fubtile,ny mefme agitecs fas Tentremife despluspetites.
Car prernierement fi 1'eau n'eftoit copofeedequelques
parties ainfi que i'ay tatoft fuppofe'jil luy feroit efgalemet
facile ou difficile de fe divifer en toutes facons & en tous
fens, en forte qu'elle n'entreroit pas fi facilement qu'elle
fait dans les cors qui ont des pores vn pen larges, comme
dans la chauxj & dans le fable^ ou bien elle pourroitauiTy
en quelque iacon penetrer en ceux qui les ont plus
eftroits, comme^fensleverre, &lesmetaus. Puis fi ces
parties n'auoient la figure que ieleur ay attribue'e, lors
qu'elles font dans les pores des autres cors , elles n'en
pourroient pas fi ayfement eftre cliaflees par lafeule
agitation des vensou delachaleur: ainfi qu'on l'efprou-
ue afle's par les huiles, ou autres liqueurs grafTes , dont
nous auons dit que les parties auoient d'autres figures;
caronnelespeut quafi iamais entierement faire fortir
des cors ou elles font vnefois entrees. Enfin pourceque
nousnevoyons point decors en la nature, qui foientfi
parfaitement femblables entre eux, qu'ii ne fetrouue
prefque toufiours quelque peu d'inefgalite' en leur grof-
feur, nous ne deuons faire aucune difficulte'de penfer
que les parties de l'eau ne font point exa&ement toutes
efgales,
-ocr page 254-
Disc ours Troisiesme.            175-
efgales, &partieulierementque dans lamer, qui eftle
receptacle de toutes les eaux, il sea trouue de fi grofTes,
qu'elles ne peunent eftre plides comme les autres par la
force qui a couftume de les mouuoir. Et ie veux tafcher
icy de vous monftrer,que celafeul eft fuffifant,pour leur
donner toutes les qualite's qu'a le fel. Premierement,ce
n'eft pas merueille qu'elles ayent vn gouft picquant &
penetrant, qui differe beaucoup de celuy de l'eau dou-
ce: car nepouuant eftre plie'es par la matiere fubtile qui
les enuironne, elles doiuent toufiours entrer de pointe
dans les pores de la langue, & par ce moyen y penetrer
affe's auant pour la piquer - Au lieu que celles qui cora-
pofent l'eau douce coulant feulement par deffus toutes
couche'es,a caufe de la facilite'qu'elles ont a fe plier,n'en
peuuent quafi point du tout eftre gouft e'es.Et les parties
dufel, ayantpenetre'de pointe enmefmefac.on dans les
pores des chairs qu'on veut conferuer,non feulement en
oftent rhumidite", maisauffy font comme autant de pe-
tits baftons planted 5a & la entre Ieurs parties, oil de-
nieurant fermes & fans feplier, elles les fouftienent3 &
empefchent que les autres plus pliantes, qui font parmi,
ne les defarrengent en les agitant, & ainfi ne corrompent
lecors qu'elles compofent. Ce qui fait auffy que ces
chairs par fucceffiondetemsdeuienent plus dures. Au
lieu que les partie s de l'eau douce,en fe pliat, & fe gliffat-
par cy par la dans leurs pores, pourroientayder a les ra-
mollir, &ales corrompre. De plus, ce n'eft pas mer-
ueille que l'eau fale'e foit plus pefante que la douce,puit
qu'elleeft compofeedeparties, quieftant plus grofTes
& plus maffiues, peuuent s'arrengerea moindre efpace:..
cac
-ocr page 255-
\"}6                    Les Mete ores.
car c'eft dela que depend la pefanteur. Mais ileft befoiu
de confiderer, pourquoy ces parties plus maffiues de-
meurent meflees auec les autres qui le font moins,au lieu
qu'il femble qu'elles deuroient naturellement aller au
deffous. Etlaraifoneneft,aumoinspour cellesdufel
commun, qu'elles fontefgalementgroffes par les deux
bouts, & routes droites, ainfi qu'autant de petits ba-
ftons: car s'ily en a iamais eu dans la mer qui fuffent plus
groffes par vn bout que par l'autre, ayant eft e par mefrae
moyen plus pefantes, elles ont eu tout loyfir d'aller au
fonds depuis que le monde eft; ou s'il yen a eu de conr-
be'es, elles onteuloyfirderencontrerdescors durs, 6c
feioindreaeux, acaufe qu'eftant vne fois entrees dans
leurs pores, elles n'en auront pu fi facilement refortir,
que celles qui font efgales & droites. Mais celles cy, fe
tenant couche'es de trauers l'vne fur l'autre, donnent
moyen a celles de l'eau douce, qui font en perpetuelle a-
gitation, de fe roller &: s'entortillerautour d'elles, s'y ar-
rengeant & s'y difpofant en certain ordre; qui fait qu'el-
les peuuent continuer a fe mouuoir plus ayfement , &
plus vifte,quefi elles eftoiet toutesfeules.Car iors qu el-
les font ainfi rollees autour des autres, la force de la ma-
tiere fubtile qui les agite,n'eft emploide qu'a faire qu'el-
les tournent fort promptement autour de celles quelles
embraftent, & qu'elles paffent ga & lade l'vne fur l'au-
tre, fans pour celachangeraucun de leurs plis: au lieu
qu'eftant feules, comnie elles font lors qu'elles compo-
fent l'eau douce, elles s'entrelae,ent neceffairement en
telle forte, qu'il eft befoin qu'vnepartie de cette force
dela matiere fubtile foit employee a les plier, pour Jes
depager
-ocr page 256-
Discoiirs Troisiesme.                   177
degager Ies vnes des autres; & ainfy elle ne les peut faire
mouuoir pour lors fi facilement, ny fi vifte. Eftant done
vray, queces parties de l'eau douce pe'uuent mieux fe
mouuoir eftant rollers autour de celles du fel, qu'eftant
feules,ce n'eft pas merueille qu'elles s'y rollet.lors qu'el-
les en font afles proches, & qu'apre's Ies tenant embraf-
foes, elles empefchentquel'inefgalite'deleurpefanteur
ne les fepare. D'ou vient,que le fel fe fond ayfement eu
l'eau douce, ou feulement eftant expofe' a fair en terns
humide;& neantmoins qu'ilne s'enfond envne quantitd
d'eau determined, que iufques a vne quantite' determi-
ne'e, a fijauoir autant que les parties pliantes de cete eau
peuuent embrafTer des fienes en fe rollant autour d'elles.
Etfcachant, quelescors, qui font tranfparens, Iefont
d'autant plus qu'ils empefchent moinsles mouueraens
de la matiere fubtile qui eft dans leurs pores, on voit en-
core de cecy, que l'eau dela roer doiteftrenaturelle-
ment plus tranfparente, & caufer des refractions vn peu
plus grandes, que celle des reuieres. Et on voit aufTy,
qu'elle ne fe doit pas geler fi ayfement, en fcachant que
l'eau ne fe gele que lors que la matiere fubtile, qui e ft en-
trefes parties, n'a pas la force de les agiter. Etmefme
on peut encore icy entendre la raifon du fecret pour faire
dela glace en efte'j qui eftl'undes plus beaux que fca-
chent les curieux, encore qu'il ne foit pas des plus rares.
lis mettent du felmeileauecefgale quantitd de neige
ou de glace pilde tout autour d'vn vaze plein d'eau dou-
ce; &fans autre artifice , a mefure que ce fel & cete nei-
ge fefondentenfemble, Teau-qui eft enferme'e dansle
vaze, deuient glace. Dont la raifon eft, que la matiere
Z                          fubtile,
-ocr page 257-
378                  Les Mete ores.
fubtile, qui eftoitautourdes parties deceteeau, eftaiit
plus grofliere, ou moins fubtile^ & par confequent ayant
plus de force que celle qui eftok autour des parties de
cete neige, va prendre fa place a mefure que les parties
delaneige fe rollent autour de celles du felen fe fon-
dant j car elle trouue plus defacilite'afemonuoirdans
les pores de l'eau falde qu'en ceux de l'eau douce; & elle
tend inceflament apaffer d'vn cors en 1'autre, pour en-
trer en ceux ou fon mouuementeftle moins empefche^
au moyen de quoy la matiere plus fubtile, qui eftoit
dans la neige, entre dans l'eau, pour fucceder a celle
qui en fort; & pource qu'elle na point afles de force
pour y entretenir l'agitation de cete eau, cela eft caufe
qu'elle fe gele. Mais I'vne des principales qualites des
parties dufel eft, qu'elles font grandement fixes, c'eft a
dire qu'elles nepeuuenteftre efleuees en vapeurainfy
que celles de l'eau douce. Dont la caufe eft, nou feule-
ment,, qu'eftant plus grofTes, elles font plus pefantes;
maisauffy, qu'eftant longues & droites,elles ne peuuent
eftre gueres long tems fufpendues enl'air, foit qu'elles
foienten aclrion pour monter plus haut, foit pour en def-
cendre, que l'vn de leurs bouts ne feprefenteversen
bas, & ainfi qu'elles nefe tienent en ligneperpendicu-
laire vers la terre.cartant pour monter que pour defcen-
dre, il leur eft bien plus ayfe' a diuifer fair eftant en cete
fituation, qu'enaucuneautre. Ce qui n'arriue point en
mefmefa§onaux parties de l'eau douce,a caufe, qu'eftant
faciles afe plier, elles ne fe tienent Jamais toutes droites,
fice n*eft qu'elles tonrnent en rond auec vitefle. Au lieu
que celles du felnefc^uroientiamaisguerestourneren
cete
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Discours Troisiesme.                179
cete forte* car fe rencontrant les vnes les autres &fe
heurtant fans pouuoir fe plier pour s'entreceder,eiles fe-
roient incontinent contraintes de s'arefter . Mais lors
qu'ellesfetrouuentfiifpendues enl'air, ayant vne pointe
enbas, comme i'ay dit, ilefteuident, quellesdoiuent
defcendreplutoftquemonter: acaufe que la force qui
les pourroitpouffer vers enhaut, agift beaucoup moins,
que fi elles eftoient couchees de travers; & elle agift
moins d'autant mftement,que la quantity de l'air, qui re-
fifte a leur pointe, eft plus petite , que ne feroit celle qui
refifteroit a leurlongeur,- aulieu, que leur pefanteur,
eftant toufiours efgalp, agift d'autant phi s que cete refi-
ftence de l'air eft pf u^ petite. A quoy fi nous adiouftons
que Teaude lamer s'adoucift quand elle trauerfe dufa-
ble, acaufe que les parties du fel, fautedefe plier, ne
peuuent couler ainfy que font les parties del'eau douce
par les petits chemins ddtourne's, qui font autour des
grains de ce fable: nous fcaurons que les fontaines, & lei
riuieres, neftant compofees que des eaux qui out efte
efleue'es en vapeurs, oubien qui ont pafTd au trauers de
beaucoup de fable, ne doiuent point eftre falees. Et
aufTy que routes ees eauxdouces, rentrant dans lamer,
ne la doiuent point rendre plus grande, ny moins falee;
d'autant qu'il en reffort continuellement autant d'au-
tresj dont quelques vnes s'efleuent en l'air change'esen
vapeurs, puis voutretomber en pluie, ouenncige, fur la
terre- maisla plus part penetrant par des conduits fous-
terains iufquesau deffous des montaignes, d'oulacha-
leur, qui eft dans la terre, lesefleuant auffy comme en
vapeurvers leurs fommets, eilesy vont remplir les four-
Z 2,                              ces
-ocr page 259-
180                    Les Meteores.
cesdesfontaines, &desriuieres. Etnousf^auronsaufTy,,
que l'eau de la mer doit eftre plus falee fous l'equateur
que vers les poles, fi nous confiderons, que le foleil, y
ayant beaucoup deforce, enfaitfortirbeaucoupde va-
pcurs, lefquelles ne retombent point par apre's iuftement
aux mefmes endroits d'ou elles font forties, mais pour
l'ordinaire end'autres plus proches des poles, ainfy que
vous entendre's mieux cy apre's. Au refte, finon que ie
n'ay pas enuie de m'arefter a expliquerparticulierement
la nature du feu,i'adioufterois encore icy, pourquoy l'eau
de la mer eft moins propre a efteindre les embrafemens
que celle des riuieres,& pourquoy elle eftincelle la nuit,
eftant agite'e: car vous verrie's, que les parties dufel,
eftat fort ayfdes a efbrafler, a caufe qu'elles font eomme
fufpendues entre cellesde l'eau douce, & ayant beau-
coup de force apre's eftre ainfy esbranfle'es,a caufe qu'el-
les fontdroites & infiexibles; peuuent non feulement
augmenter la flame, lorfqu'on lesy iette^ mais aufTyen
caufer d'elles mefme, en s'eflaceant hors de l'eau ou elles
font. Comme
fi la mer qui
vnbanc de fable ou quelque autre obftacle, qui la face
monter vers B, Ie branfle que cete agitation donne aux
parties du fel, peut faire que les premieres qui vienent
en lair, fydegagentde celles de l'eau douce, qui les te-
noiententortillees, & que fe trouuantfeulesvers B a cer-
taine
-ocr page 260-
Discours Troisiesme.              igr
taine diftance I'vne del'autre, elles y engendrent des
eftincelles, affes femblables a celles qui fortent des cail-
lous quand on les frappe. II eft vray, qu'a cet effect il eft
requis, queces parties dufelfoient fort droites, &fort
gliffantes,affin qu'elles fe puiffent plus ayfement feparer
de celles de l'eau douce: d'ou vient, que ny la faumeure,
ny l'eau de mer qui a efte' long terns garde'e en quelque
vaze, ny font pas propres. II eft requis aufTy, que celles
de l'eau douce n'embraffent point trop eftroitement cel-
les duiel: d'ou vient, que ces eftincelles paroifTent plus
quand ii fait chaud, que quand il fait froid; & que l'agi-
tation de la mer foit afTes forte: d'ou vient, qu'en mefme
terns il ne fort pas du feu de toutes fes vagues; & enfin
que les parties du fel fe meuuent de pointe, comme des
fleches, & non de trauers: d'ou vient, que toutes les
gouttes, quireiailliflenthorsd'vne mefme eau, n'efclai-
rent pas en mefme forte.
Mais confiderons maintenant comment le fel flotte
fur l'eau quand il fe fait, nonobftant que fes parties foient
fort fixes & fort pefantes; & comment il s'y forme en pe-
tits grains, qui ont vne figure quarre'e, prefque fembla-
bleacelle d'vn diamenttaille'entable, excepte quela
pluslarge de leurs faces eft vn peu creufe'e.'Premieremet
il eft befoin a cet erTecl:, que l'eau de la mer foit retenue
en quelquesfoflesjpour eviter tant Tagitation contiuuel-
k des vagues,que 1 affluence de l'eau douce que les pluies
& les riuieres amenent fans ceffe en l'Ocean. Puis il eft:
befoin aufTy d'vn terns chaud & fee- affiuque l'adlion du
foleil ait afles de force ,pour faire que les parties de l'eau
douce, quifontrolldesautourde celles du fel, sVuapo-
Z 3                     rent-
-ocr page 261-
i8z                     LesMeteores,
rent. Ec 11 fault remarquer, <jue la fuperficiede l'eau eft
toufioursfortefgale &vnie, comme auffycelledetou-
tes les autres liqueurs:dont la raifon eft, que fes parties fe
remuent entre elles de mefme fa^on &de mefmebrau-
fle, & que les parties de I'air qui la rouchent fe remuent
auffy entre elles tout de mefme lVne que 1'autre • mais
que celles cyne fe remuent pasde mefme fa§onnyde
mefme mefure que celles la-, & particulierement aufTy,
que la matiere fubtile, qui eft autour des parties de fair,
fe remue tout autrement que celle qui eft autour des
parties del'eau: ce qui eft caufe que leurs fuperficies, en
fe frottant l'vne contre 1'autre, fepoliffent, en mefme ,
fa§on, que fi e'eftoientdeux corsdurs: excepte'quee'eft
beaucoupplusayfement, &prefqueen vninftant.; pour-
ce que leurs parties, n'eftant attacliees en aucune fagon
les vnes aux autres , s'arrengent toutes de's Ie premier
coup, ainfi qu'il eft requis a cet effect. Et cecy eft auffy
caufe que la fuperficie de l'eau eft beaucoup plus nialay-
fe'eadiuifer, que n'eftle dedans: ainfyqu'onvoit par ex-
perience , en ce que tous les cors affe's petits, quoy que
de matiere fort pefante., comme font de petites aiguil-
les d'acier,peuuet Hotter & eft re fouftenus au defTus, lors
qu'elle n'eft point encore diuife'eJ-au lieu que lorsqu'el-
lel'eft, ifcdefcendent iufqu'au fonds fans s'arefter. En
fuite de quoy il fault confiderer que lors que la chaleur
de l'air eft aifes grande pour former Ie fd, elle peut non
feulement faire fortir hors de l'eau de mer quelques vnes
des parties pliantes qui s'y trouuent, & les faire monter
en vapeur,mais aufly les y faire monter auec telle viteffe,
qu'auant qu elles ayenteuleloyfirdefe deueloperd'au-
cour
-ocr page 262-
Drscours Troisiesme.               183
tour de ce/les du fel, elles arriuent iufques au deffus
de la fuperficie de ceteeau, ou lesapportant auec foy,el-
lesn'acheuentdes'endeuelopper, qu'apres queletrou,
qu'elles ont fait en cete fuperficie pour en fortir, s'eft re-
ferme, au moyen de quoy ces parties da fel y demeurent
toutes feules flotantes deffus, comme
$ % W «r vous les voye's reprefente'es vers D. Car
§\ %*sSSfc yellantcouche'esdeleur long, ellesne
^W#' % f°nt pointafle's pefantes pour s'y enfon-
J % *K $ cernon P^us <lue ^es a'gu^^es d'acier
dont ie vieusde parler , 6c elles la font
feulemeat vnpeu courber &plier fous elles, a caufe de
leur pefateur,tout de mefme que font auffy ces aiguilles,
defacon que les premieres,eftant feme'es par cy par la fur
cete fuperficie, y font plufieurs petites foffes ou courbu-
res; puis les autres.qurvienent aprds, fetrouuantfuries
pentes de ces foffes, roullent & gliffent vers le fonds, ou
elles fe vont ioindre contre les premieres. Et il fault par-
ticulierement icy remarquer, que de quelque part qu'el-
les y vienent, elles fe doiuent coucher iuftement cofte a
cofte de ces premieres, comme vous les voye's vers E, au
moinslesfecondes, &fouventauf-
II Sc=\ t=/cS=* fy les troifiefmes,a caufe que par ce
***%*> Js J* moyen elles defcendent quelque
g=\ ^J peuplusbas, qu'elles ne pourroient
5 H ta°g faire fi elles demeuroient en quel-
""*
                  que autre fituation, comme en cel-
fe qui fevoit vers F, ou versG, ouversH. Etlemou-
uement dela chaleur, qui esbranfle touliours quelque
pen cete fuperficie,. ayde a les arrenger en cete forte.
*
                                                          Puis-
-ocr page 263-
184                       LES M ETEOREsi *
Puis lors, qu'il y en a ainfy en chafque foffe deux ou trois
cofte a code 1'vne de l'autre, celles qui y vienent, de plus
fe peuuent ioindre encore a elles en mefme fens, fi elles
s'y trouuent aucunement difpofe'es.,-mais s'il arriue qu'el-
les penchent d'auantage vers les bouts des precedentes
que vers les cofte's, elles fe vont coucher decontre a an-
gles droits, comme vous voyes vers K: a caufe que par
ce moyen elles defcendent aufly vn peu plus bas, qu'el-
les ne pourroient faire fi elles s'arrengeoient autrement,
comme elles font vers L, ou vers M. Et pourcequ'il s'en
trouue a peu pres autant, qui fe vont coucher contre les
bouts des deux ou trois premieres, que de cellesqui fe
vont coucher contre leurs cofte's,- delavient, ques'ar-
rengeant ainfy plufieurs centaines toutes enfemble, elles
forment premierement vnepetite table, qui au iuge-
mentdelaveue paroift tresquarre'e, &qui eft comme
labazedu grain defel qui commence a fe former. Etil
faut remarquer, qu'y en ayant feulement trois ou quatre
couche'es en mefme fens, comme vers N, celles du mi-
lieu s'abaifTent vn peu plus que celles des bords j mais
qu'y en venat d'autres qui s'y ioigent en travers,comme
vers O, celles cy aydent aux autres des bords a s'abaifler
prefque autant que celles du milieu,& en telle forte, que
la petite table quarre'e, qui fert de baze a vn grain defel,
feformantordinairement de plufieurs centaines iointes
enfemble , ne peut paroiftre a l'oeil que toute plate, en-
core qu'elle foittoufiours tant foit peu courbde. Or a*
mefure quecete table s'agrandift, elle s'abaifTedeplus
en plus, maisfilentement, qu'elle faitplier fous foy la
fuperficie de l'eau fans la rompre . Et lors qu'elle eft
paruenue
-ocr page 264-
Discours Troisiesme.            i8f
paruenue a certaine grandeur, elle fe trouue fi fort aba-
ifle'e, que les parties du fel, qui vienent de nouueau
vers elle,au lieu de s'arefter contre fes bords, paflent par
deflfus, &yroul!ent en mefme fens& en mefme fa§on
que les precedentes roulloient fur l'eau . Cequi fait
qu'eiles y forment derechef vne table quarree, qui s'aba-
ifTc en mefme fagon peu a peu. Puis les parties du fel qui
vienent vers elle, peuuent encore pafferpar deffus, & y
former vne troifiefme table. &ainfydefuite. Mais il eft
aremarquer que les parties du fel, qui forment la deuxi-
efmedeces tables, neroulle pas fi ayfement fur la pre-
miere, que celles qui ont formd cete premiere roul-
loient fur Peau, car elles ny trouuent pas vne fuperficie
dutoutfivnie, ny quileslaiffecoulerfilibrement: d'ou.
vient que fouuet elles ne roullet point iufques au milieu,
qui par ce moyen demeurant vuide, cete feconde table
ne s'abaifle pas fi toft, a proportion qu'auoit fait la pre-
miere; mais deuient vn peu plus grande auant que la
troifiefme commence a fe former; & derechef le milieu
de celle cy demeurant vuide elle deuient vn peu plus -
grande que la feconde, & ainfy de fuite, iufques a ce que
le" grain entier,qui fe compofe d'vn grand nombre de teU
les petites tables pofees l'vne fur l'autre, foit acheue',c'eft
a dire,iufques a ce que touchantauxbordsdesautres
grains voy fins, ilnepuiflfe deuenir plus large. Pource
qui eft de la grandeur dela premiere table qui luyfert
de baze, elle depend du degre'de chaleur qui agite l'eau
pendant qu'elle fe forme. car plus l'eau eft agite'e, plus
les parties du fel qui nagent deflfus font plier fa fuperfi-
cie ; d'ou vient, que cete baze demeure plus petite, &
A a                        mefme
.
-ocr page 265-
i8<*                     Les Meteores.
mefme 1'eau pent eftre tantagitee que les parties dufel
iront au fonds auaut qu'ellesayent forme' aucuns grains.
Pour le talludes quatre faces qui fortentdes quaticco-
fbes de cetebaze ,ilne depend quedescaufesdefiaex-
plique'es, lors que la chaleur eft efgale pendant tout le
terns que le grain eft a fe former: maisfiellevaenaug-
mentant, cetalluendeuiendramoindre,- 8c au contraire
plus grand, fi elle diminue; en forte que fi elle augmen-
te, & diminue, parinterualles, ilfe fera comme depe-
tits efchelons de longde ces faces. Et pour les quatre
querres oucofte's qui ioignent ces quatre faces, ellesne
font pas ordinairement fort aiguesny fort vnies. carles
parties, qui fe vont ioindre aux cofte's de ce grain, s'y
vontbienquafitoufiours appliquerdelong, commei'ay
dit, mais pour celles, qui vont rouller contre fes angles,
elles s'y arrengent plus ayfement en autre fens, a fcauoir
,
             comme elles font reprefente'es vers P. Ce
^pEjfc qui fait que ces querres font vn peu mouffes
t&Sl wL & iuefgales •, & que les grains de fel s'y fen-
dent fouuent plus ayfement qu'aus autres
lieux; & auffy quel'efpacevuide, qui demeureaumi-
lieu, fe fait prefque rond plutoft que quarre'. Outre cela
pourceque les parties qui compofent ces grains fe vont
ioindre confufement, Sc fans autre ordre que celuy que
ieviensd'expliquer, ilarriue fouuent que leurs bouts,
au lieu de fe toucher, laiffent entre eux affes d'efpace
pour placer quelques parties de Teau douce, qui s'y en-
®&m& ferment, & y demeurent pliees en rond,
jP|B r comme vous voyds vers R, pendant qu'elles
W&6m ne s'y meuuent que moyennement vifte;
mais
-ocr page 266-
Discours Troisiesme.               187
mais lors qu'vne fort violente chaleur les agite,elles ten-
dent auecbeaucoup de force a s'eftetidre, & fe de'plierjen
mefme fa<jon qu'il a tantoft efte'dit qu'elles font, quand
l'eau fe dilate en vapeur. cequi fait qu'elles rompent
leurs prifons tout d'vn coup, & auecefclat. Et c'eftla
raifon pourquoy les grains defel, eftant entiers^febri-
fent en fautant & pctillant quand on les iette darts le feu;
& pourquoy ils ae font point le mefme eftant mis en
poudre; car alors ces petites prifons font defia rompues.
De plus, l'eau de la mer ne peut eftre ii purement com-
pofee des parties que i'aydefcrites, qu'il ne s'y en ren-
contre auffy quelques autres parmi, qui font de telle fi-
gure, qu'elles ne laiflTent pas de poUuoir y demeurer, en-
core qu'elles foient beaucoupplusdelic'es: &qui, s'al-
lant engager entreles parties du fellors qu'il fe forme,
luypeuuent donner & cete odeur de violette tres agre-
able qu'a le felblanc quand ileft fraifchement fait, &
cetecouleurfaleqo'alenoir, & toutes les autres varie-
tes qu'on peut remarquer dans ies fels, & qui dependent
des diuerfes eaux dont ils fe forment. Enfinvous ne vous
eftonnere's pas de ce que le fel eft fi friable & fi ayfe a
rompre comme il eft, en penfant a la fae,on dont fe ioig-
nent fes parties,- Ny de ce qu'il eft toufiours blanc ou
tranfparent eftant pur, en penfant a leurgrofleur, &ala
nature de la couleur blanche,qui fera cy apres expliquee;
Ny de ce qu'il fe fond affe's facilement fur Ie fe u quand il
eftentier, en confiderant qu'ily a plufieursparties d'eau
douce enfermees entre les fienes,- Ny de ce qu'il fe fond
beaucoup plusdifficilementjeftant bienpuluerife & bien
feichd, en forte qu'il n'y refte plus rien de l'eau douce,
A a 2                         en
-ocr page 267-
188                    Les Meteores.
en remarquant qu'il ne fe peut fondre,eftant ainfy feul.fi
fes parties nefeplient, &qu'elles ne peuuent que diffi-
cilement fe plier.Car encore qu'on puiffe feindre, qu'au-
trefois celles de lamer ontefte* toutes, par degrees, les
vnes plus pliantes, les autres moins: on doit penfer que
toutes celles, quiont pd s'entortiller autour de quelques
autres, fe font amollies depuis peu a peu, & rendues fort
flexiblesj an lieu que celles qui ne font point ainfy entor-
tille'es, font demeure'es entierement roides: en forte
qu'il yamainternent en cela grande difference, entre
celles du fel, & celles de l'eau douce. Mais les vnes & les
autres doiuent eftre rondes; afcauoir, celles del'eau
douce, comme des chordesi & celles du fel,comme des
cylindres ou des baftons: acaufe que tousles cors, quife
meuuent en diuerfes fagons &c long terns, ont couftume
de s'arondir. Et on peut en fuite connoiftre qu'elle eft la
nature de cete eau extremement aygre & forte; qui peut
foudre for, & que les Alchemiftes nomment l'efprit ou
l'huyle defel. card'autant qu'elle nefe tire que par la
violence dVn fort grand fcu,ou du fel pur,ou du fel mefle'
auec quelque autre cors fort fee & fort fixe, comme
de la brique, qui ne fert qu'a rempefcher de fe fondre: il
eft euident que fes parties font les mefmes qui ont aupa-
rauant compofe' le fd, mais qu'elles n'ont p& monter par
Talembic, & ainfy de fixes deuenir volatiles,iinon appre's
qu'en fe chocquant les vnes contre les autres, a force d'e-
ftre agite'esparlefeu, de roides & inflexibles comme
elles eftoient, ellcs font deuenues faciles a plie^ & par
mefme moyen derondes en forme de cylindres, elles
font deuenues plates & tranchantes, ainfy que des feuil-
les de
-ocr page 268-
DlSCOURS dVATRIESME.               I8P
les de flambe ou de glayeul. car fans cella elles n'au-
roient pu fe plier. Et en fuite il eft ay fe a iuger la caufe du
gouft qu'elles ont fort different de celuy du fel. carfe
couchantdelongfurlalangue , & leurs trenchans s'ap-
puiant contre les extremites de fes nerfs, & coulant
deffus en les couppant, elles les doiuent bien agiter d V-
ne autre forte qu'ellesne faifoient auparauant, & par
confequent caufer vn autre gouft, a fcauoir, celuy qu'on
nomme le gouft aygre. Onpourroitainfyrendreraifon
de toutes les autres propriete's de cete eau, mais la chofe
iroital'infini, &ilfera,mieux que retournant a la confe-
deration des vapeurs, nous cornmencions a examiner
comment elles femeuuent dans l'air,& comment elles
ycaufentlesvens.
DES VENS.
^Difiours Quatriefme.
TOute agitation d'air qui eft fenftble fe nomme
vent, &toutcorsinuifible&inpalpablefe nomme
air. Ainfi lorfque l'eau eft fort rarefiee & changee en va-
peur fort fubtile, on dit qu'elle eft conuertie en air. non-
obftant que ce grand air que nous refpirons ne foit, pour
la plus part, compote que de parties qui ont des figures
fort differentes de celles de l'eau, & qui font beaucoup
plus deliees. Et ainfi l'air eftant chaffd hors d'vn foufflet,
oupouffe'parvne'ventail, fe nomme vent; nonobftant
que ces venspluseftendus, quiregnentfurlafacedela
mer & de la terre, ne foient ordinairement autre chofe
A a 3                      qwele
-ocr page 269-
i^o                   Les Meteores
que le mounement des vapcurs.qui en fe dilatant paflent
du lieu ou elles font en quelque autre oft elles trouuent
plus de commodite de s'eftendre.En mefme fa§on qu'oa
voit encesboules nomme'es des ^Eolipilcs, qu'vnpeu
d'eau s'exhalat en vapeur fait vn vent affes grand & affes
fort a raifon du peu de matierc dont il fe copofe.Et pour-
cequecevent artificiel nous peut beaucoup ayder a en-
tendre quels font les naturels, il fera bon icy que ie lex-
pliquc. ABCDE, eft
vne boule de cuiure ou
autre telle matiere, toute
creufe, & toute ferinee,
.^^^F except d qu'elle a vne fort
petite ouuerture en l'en-
droitmarqud D. & la par-
tie de cete boule ABC
b
                         eftantpleine d'eau, &l'au-
tre AEC eftat vuide, c'eft
a dire ne contenant que de l'air,on la met fur le feu^puisla
chaleur agitant les petites parties dei'eau, fait que plu-
fieurs s'efleuent au defTus de la fuperfirieA C,ou elles s'e-
ftendet,& s'entrepoufle t en tournoyat, & font effort pour
s'efcarter les vues des autres, en la fa§on cy defTus expli-
qude. Et pource qu'elles ne peuuent ainfy s'efcarter,
qu'a mefure qu'il en fort quelques vnes par le trouD,
toutes les forces dont elles s'entrepouffentconfpireten-
femble a chaffer par la toutes celles qui en font les plus
proches, & ainfy elles caufent vn vent qui fouffle de la
vers F. Et pourcequ'il y a toufiours de nouuelles par-
ties de fete eau, qui eftant efleue'es par la chaleur au
defTus
!
'
-ocr page 270-
Discours Q^u atr iesme.              191
defTusdecetefuperficie AC, s'eftendent &s'efcartent
l'vne de l'autre, a mefure qu'il en fort par le trou D: ce
rent ne cefle point que toute l'eau de cete boule ne
foit exhalee, oubien que lachaleur qui la faitexhaler
n'aitcefle'. Orles vensordinairesquiregnentenl'airfe
font a peu pre's en mefme facon que cetuycy, &ilnya
principalement que deux chofes en quoy ilz different.
La premiere eft que les vapeurs, dontilz fe compofent,
ne s'eflenent pas feulement de la fuperficie de l'eau,
comme en cete boule j mais auffy des terres humid es,
des neiges, & des nues.* d'ou ordinafrement elles fortent
en plus grande abundance que de l'eau pure, a caufe
que leurs parties y font defia prefque toutes deiointes
& defunies, & ainfy d'autant plus ayfe'es a feparer. La
feconde eft que ces vapeurs ne pouuant eftre renfer-
mdes en l'air, ainfy qu'en une iEoli pile, font feulement
empefchdes de s'yeftendre efgalement detouscofte's,.
par la refiftence de quelques autres vapeurs, ou de quel-
quesnueSjOudequelquesmontaignes, ou enfin de quel-
que vent qui tend vers l'endroit ou elles font,-mais qu'en
reuanche ily afouuent ailleursd'autresvapeurs, qui s'ef-
paiffiflent, & le refferrant au mefme tems que celles cy
fe dilatent, les determinent a prendre leur cours vers
1'efpace qu'elles leur laifTent. Comme par exemple fi
vous imagines qu'il y a mainten ant force vapeurs enl'en-
droit de I'air marque'F, qui fe dilatent, & tendent a oc-
cuper vn efpace incomparablement plus grand que ce-
luy qui les contietj & qu'au mefme tems il y en a d'autres.
vers G, qui fe refferrant & fe changeant en eau ou en
fteigelaiflet la plus grand part del'efpace ou elles eftoietr
voui
-ocr page 271-
vous ne doutere's pas que celles qui font vers F ne pre-
nent leur cours vers G, & ainfy quelles ne compofent vn
vent qui fouffle vers Ik. Principalement fi vous penfes
auec cela qu'elles fbient empefchdes de s'eftendre vers
A, & vers B, par de hautes montaignes qui yfont; &
versE, pourcequel'air y eft preflV & condenfe par vn au-
tre vent, qui foffle de C iufques a D; & enfin qu'il y a des
nues au defTus d'elles. qui Ies empcfchent de s'eftendre
plus haut vers le ciel. Et remarques que lorfque les va«
peurs pafTent en cete facon d'vn lieu en vn autre, elles
emmenent ou chaflent deuantfby tout l'airquifetroa-
ue en leur chemin, & toutes les exhalaifbus qui font par-
mi: en forte que bienque elles caufent quafi toutes feules
les vens, ce ne font pas toutefois elles feules qui les com-
pofent . Et mefrae aufly que la dilatation & condensa-
tion
-ocr page 272-
Discours Quatriesme.            ipj
tion de ces exhalaifons, &decetair, peuuentayderala
production de ces vens: Mais que c'eft fi peu, a compa-
raifon de la dilatation & codenfation des vapeurs, qu'el-
les ne doiuent quafi point eftre mifes en comte. Car
l'aireftaut dilate" n'occupcqu'enuiron deux ou troisfois
plus d'efpace qu'eftant mediocrement condenfei au lieu
queles vapeurs en occupent plus dedeux ou ttoisrnille
fois d'auantage: Et Ies exhalaifons nefe dilatent, c'eft a
dire,ne fe tirent des cors terreftres, que par i'ayde d'vne
grande chaleur; puis ne peuuent quafi iamais par aucune
froideur eftre derechefautant condenfdes, qu'ellesl'ont
efte' auparauant. au lieu qu'il ne faut qu£ fort peu de
chaleur pour faire que l'eau fe dilate en vapeur, & dere-
chef que fort peu de froideur pour faire que les vapeurs
fechangent eneau.
Mais voyons maintenent en particulier Ies propriete's,
& la generation des principaux vens. Premierement on
obferue que tout Tair a foncours autour de la terre de
l'Orient vers 1'Occident. ce qu'il nous faut icy fuppo-
fer,acaufe que la raifon n'en peut commodement eftre
deduite, qu'enexpliquant toute lafabrique del'vniuers.
ce que ie n'ay pas icy deflein de faire. Mais en fuite on
obferue queles vens orieutauxfont ordinairement beau-
coup plus fees, & rendent l'air beaucoup plus net & plus
ferein queles occidentaux. dont la raifon eft que ceux
cy,s'oppofantaucours ordinaire des vapeurs, les are-
ften^&fontqu'elless'efpaiffifTentennueS; au lieu que
lesautresleschaflent, & les diflipent. De plus onob-
ferue que c'eft principalement le matin que foufflent les
vens d'Orientj&'Iefoir que foufflent ceux d'Occident.
Bb                  dequoy
-ocr page 273-
194                    Les Meteoris.
dequoy la raifon vousfera manifefte, fi vous regardes la
terre ABCD, &lefoleil S, qui en efclairant la moitii^
A BC&faifantlemidyversB, &la minuit versD, fe
couche en mefme temps au refpect des peuples qui ha-
bitent vers A,& fe leue au re-
fpecl: de ceux qui font vers
C. Car pour ce que les va-
peurs qui font vers Bfont fort
dilatees par la chaleur du
iour,elles prenent leur cours,
partieparA, &paftie parQ
vers D,ou elles vont occuper
la place que laiffent celles,
que la fraifcheur de la nuit y
condenfe: En forte qu'elles
font vn vent d'Qcc ident vers
A, oulefoleil fe couche; &
vn d'Orient vers G, ou il fe
le'ue. Et mefme il eft a re-
'"--©—-
marquerque ce vent, qui fe
fait ainfi vers C, eft ordinai-
rement plus fort, &va plusvifte, que celuy qui fe fait
vers A: tant a caufe qu'il fuit Ie cours de toute la mafTe
de l'air- comme auffy a caufe que lapartie de la terre qui
eft entre C & D , ayant efte' plus long terns fans eftre
efclaire'e par le foleil, que celle qui eft entre D & A, la
condenfation des vapeurs a deu s'y faire pluftoft, &plus
grande. On obferue auffy que c'eft principalement pen-
dant leiour quefouffient les vensde Nort, & qulls vie*
nent de haut en bas, &qu'ils font forr Wolens ,.. & fort
' froids,
-ocr page 274-
DlSCOURS QjLlATRI£SME.                 Ip/
froids, & fort fees- Dont vous pouue's voir la raifon, en
confiderant que la terre E B F P eft couuerte de plu-
ficurs nues Scbrouillars, vers les poles E , & F , ou elle
n'eft gueres efchauffee par iefoleil,-& que vers B, ou il
doune a plomb, il excite quantity de vapeurs, qui eftant
fartagiteesparradtiondefa lumiere, moment enhauc
tres promptement, iufquesace qu'elles foient tantefle-
ue'es, que la refiftence de leur pefanteur face qu'il leur
foit plus ayfe'de fe de'tour-
ner, & de prendre leur cours
de part Sc d'autre vers I &
M, au deflus des nues G &
K , que de continuer plus
liauten ligne droite. & ces
nues G &K eftant auffy en
mefme terns efchauffe'es &
rarefie'es par le lb leil, fe con-
uertifleut en vapeurs, qui prenent leur cours de G vers
H, & de K vers L, plutoft que vers E, & vers F: car lair
efpais, qui eft vers les poles, leur refifte bien d'auantage,
que ne font les vapeurs qui fortentde la terre versle mi-
dy, & qui eftant fort agitdes, & preftes a fe^ouuoir de
touscone's, leurpeuuentfacilenient ceder leur place.
Ainfi prenant F pour le pole Arc-tique, le cours de ces
vapeurs de K vers E fait vn vent de Nort , quifouffle
pendant leiour en l'Europe. Etce vent fouffle de haut
enbas, a caufe qu'il vient des nues vers h terre. Etileft
ordinairement fort violent, a caufe qu'il eft excite par la
chaleurlaplusfortedetoutes, a f§auoir celle demidyj
& de la matiere la plus ay tee a dilfoudre en vapeur, a
Bb 2                  fcauoir
-ocr page 275-
*9<?                       Les Meteores.
f§auoir des nues. Enfin ce vent eft fort froid & fort fee
tant a caufe de fa force, fuiuant ce qui a eftd dit cy del
fus que les vens impetueux font toufiours fees & froids-
Comme auffy il eft fee, a caufe qu'il n'eft ordinairement
compofe' que des plus groffieres parties de 1'eau douce
mefle'esauecFair,aulieu quelhumidite depend pr i nci-
palement des plus fubtiles; & celles cy ne fe trouuent
gueres dans les nues dont il s'engendre; car, comme
vousverre'stantoft, ellcs participent bienplus de la na-
ture de la glace, quede cellede l'eau; Et il eft froid, a
caufe qu'il amene auec foy vers le micly la matiere tres
fubtile qui eftoit vers le Nort, de la quelle depend pria-
cipalementla froideur. On obferue tout au contraire
que les vens demidy foufflentplus ordinairement pen-
dant la nuit, & vienent de bas en haut, & font lens, &
humides.Dontlaraifonfepeut voir auffy, en regardant
derecheflaterre EBFD, & confiderant que fa partie
D, qui eft fous TEquateur, & ou ie fuppofe qu'il eft main-
tenant nuit, retient encore affe's de la chaleur, que le fo-
leilluy a communiqude pendant leiour,pourfaire fortir
de foy plufieurs vapeurs;
mais que fair qui eft au
deffus vers P,n'en retient pas
tant a proportion. Car gene-
ralement les cors groffiers &
pefans retienent toufiours
*®mm?
plus long tems leur chaleur,
que ceux qui font legers &
fubtilsj & ceux qui fontdurs
la retienent auffy plus long terns, que ceux qui font li-
qui-
-ocr page 276-
DlSCOURS QUATRIESME.                  Ij>7
quides. Ce qui eft caufe que les vapeurs qui fe trouuent
vers P, au lieu de pourfuiure Ieur cours vers Q & vers R,
s'areftent & s'efpaifliffent en forme de nues, qui, empef-
chant que cclles qui fortent de la terre D ne moment
plus haut, les contraignent de prendre leur cours de part
& d'autre vers N & vers O, et ainfi d'y faire vn vent de
midy, qui fouffle principalement pendant la nuit^ et
qui vient de bas en haut, a f§auoir de la terre vers l'air- et
qui ne peut eftre que fort lent, tant a caufe que fon cours
eft retards par l'efpaiffeur de l'air de la nuit, comme auf-
fy a caufe que fa matiere nefortant que de la terre on de
I'eau, ne fe peut dilater fi promptement 3 ny en fi grande
quantity, que celle des autres vens, qui fort ordinaire-
mentdesnues. Etenfinileft chaud et humide, tant a
caufe delatardiuete'' de fon cours; Comme auffy il eft
humide, a caufe qu'il eft compofe des plus fubtiles par-
ties de l'eau douce auffy bien que des plus groffieresj car
elles fortent enfemble de la terre5 Et il eft chaud,a caufe
qu'il amene auec foy versle Nort la matiere fubtile qui
eftoit vers le midy. On obferue auffy, qu'au mois de
Mars, & generalement en tout le printems, les vens font
plus fees, &les changemens d'air plusfubits, &plusfre-
quens, qu'en aucune autre faifon de l'anne'e. Dont la rai~
fonfe voit encore, en regardant la terre E B F D,&pen-
fant que le foleil, queiefuppofeeftrevisa vis du cercle
B A D qui reprefente l'Equateur, & auoir eftd trois mois
auparauant vis a vis du cercle H N, qui reprefente le tro-
pique du Capricorne, a beaucoup moins efchauffe'la
ffioitiedelaterreBFD, ou iifait maintenant le prin-
tems, que l'autre moitire'BED, ou il fait Tautomne; 8c
Bb j                    par
-ocr page 277-
jp8                   Les Meteores.
par confequent que cete mokid BFD eft beaucoup
plus couuerte de neiges, & que tout l'air , qui Tenui-
ronne, eft beaucoup plus efpais,& plus rempli de nues,
que celuy qui enuironne l'autre raoitie' B E D: ce qui eft
caufe que pendant leiour ih'y dilate beaucoup plus de
vapeurs, & qu'au contraire pendant la nuit ils'y encon-
denfe beaucoup d'auantage. car la maffe de la terre y
eftant moinsefchauffee, & la force du foleil ny eftant
pas moindre,il doit yauoirplus d'inefgalite'entre lacha-
leurduiour, & Iafroideur de la nuit: 6c ainfi cesvens
d'Orient, que i'ay ditfoufflerprincipalement le matin,&
ceux de Nort, qui foufflent fur le milieu du iour, qui les
vns & les autres font fort fees, doiueut y eftre beaucoup
plus forts & plus abondans qu'en aueune autre faifon. Et
pourceque les vens d'Occident, qui foufflent lefoir, y
doiuent auiTy eftre affesforts,par mefme raifon que ceux
d'Orient, qui foufflent le matin; pour peu quele cours
regulier de ces vens foit auance', ou retarded ou de'tour-
ne',par les caufes particulieres qui peuuent plus ou moins
dilater ou efpaiffir Fair en chafque contree, ils fe rencon-
trent les vns les autres, & engendrent des pluies ou des
tempeftes, qui ceffent ordiuairement aufly toft apre's, a
caufe que les vens d'Orient &de Nort, quichaffent les
nues, demeurent les maiftres. Etiecroy , que ce font
ces vens d'Orient &• deNort, que les Grecs appeioient
les Ornithies, a caufe qu'ils ramenoient les oifeaux qui
vienent au printems. Mais pour ce qui eft des Etefies,
quils ©bferuoient apres le folftice d'efte' , il eft vray
femblable qu'iis procedent des vapeurs que le foleil
efleue des terres & des eaux du Septentrion, apres auoir
defia
-ocr page 278-
D I SCOURS Qu ATR.IESME.                 I99
defiafeiourneafTds longs tems vers le Tropique du Can-
ere. Carvousfcanes, qu'ils'arefte bien plus a propor-
tion vers lesTropiques, qu'il ne fait en l'efpace qui eft
entredeux: &il fault penfer que pendant les moisde
Mars}d'Auril&deMay, ildiffoutenvapeurs & en vens
la plus part desnues & des neiges qui font vers noftre
Pole; mais qu'il ncpeut y efchaufFer les terres & les eaux
afle's fort pour en efleuer d'autresvapeurs qui caufent des
vens, que quelques femaines apre's , lorfque ce grand
iour de fix mois, qu'il y fait, eft vn peu au dela de fort
midy.
Au refte ces vens generaux & regutiers feroient to«-
liours tels que ie viens de les expliquer, fi la fuperficie de
laterreeftoitpartout efgalement couuerte d'eaux, ou
partout efgalement detouuerte, en forte qu'il nyeuft
aucune diuef fitd de mers, de terres, & de montaignes*
liyaucune autre caufe qui puft dilater les vapeursque la
prefenee du foleil, ou les condenier que fon abfenee,
Mais il faut remarquer que lorfque le foleil luift , il fait
fortir conamunement plus de vapeurs des mcrs que des-
terres, a caufe que tes terres fe trouuant feiches en plu-
fieursendroks, ne luy fourniflent pastant de matiere.
Et qu'au eontraire lors qu'il eft abfent, la chaleur qu'il a.
caufde, en fait fortir d'auantage des terres, que des mers,,
a caufe- qu'elle y demeure plus fort imprime'e. G'eft
pourquoy on obferue fouuent aux bords de la mer y>
que-
le vent vient le iour du coftd de l'eau, & la nuit du coftd
delaterre. Et c'cft pour cela auffy que ces teux qu'otb
nomine des Ardans conduifent de nuit les voyafgeurs.
verslcs.eanx,caE its fiiiuent indifferemnaent le cours do
L*akw
-ocr page 279-
200                     Les Meteores.
l'air, qui tire vers la des terres voyfines, a caufe que ce«
luy qui y eft fe condeufe. 11 fault aufly remarquer , que
1'airquitouchelafuperficiedeseaux , fuit leurcoursen
quelque fa§on;D'oii vieut que Ies vens changent fouuent
le long des coftes de la mer auec fes flux & reflux ; Et
que le long des grandes riuieres on fent en tems calme
de petitsvens, qui fuiuentleurcours. Puis ilfautreraar*
quer aufly, que les vapeurs, qui vienent des eaux , font
bien plus humides & plus efpaiffes, que celles qui s'eile-
uent des terres, & qu'il y a toufiours parmi celles cy
beaucoupplus d'air & d'exhalaifons. D'ou vient, que les
mefmes tempeftes font ordinairement plus violentes fur
i'eau que fur la terre , &; qu'vn mefme vent peut eftre *
fee en vn pais & Humide en vn autre. Comme on dit
que les vens de midy,qui font humides prefque par tout,
font fees en Egipte,oiiil ny a que les terres feiches &
bruflees du refte de 1'Afrique, qui leur fournifTent de ma-
tiere. Et e'eft fans doute cecy qui eft caufe qu'il n'y pleut
prefque iamais: carquoy que les vens de Nord venans
de la mer y foient humides,toutefois pource qu'auec ce-
la ilsyfontlesplusfroids quis'y* trouuent,ilsn'y peuuent
pas ayfement cauferde pluie,ain(i que vous entendre's cy
apres. Outre cela il faut confiderer, que lalumiere de
laLune, qui eft fort inefgale felon qu'elle s'efloigne ou
s'approche du foleil, contribue a la dilatation des va-
peurs.- Comme fait aufly celle des autres Aftres : Mais
que e'eft feulement en mefme proportion,que nous*fen-
tons qu'elle agift contre nos yeux; car ce font lesiuges
les plus certains que nous puiflions auoir pour connoi-
ftre la force de la luraiere. Et que par consequent celle
-ocr page 280-
DlSCOURS Q.UATRIESME.                201
des Eftoiles n'eft quad point confiderable, a comparai-
fon de celle de la Lune,ny celle cy a comparaifon du So-
ldi. Enfinon doit confiderer,que les vapeurs s'efleuent
fort inefgalement des diuerfes contrees de la terre. Car
Sdesmontaignesfontefchauffees par les aftres d'autre
facon que Les plaines, & les forets que le prairies, & les
charas cultiue's que les defers, & mefme certaines terres
font plus chaudes d'elles mefmes ou plus ayfe'es a
efchauffer que les antres- Et en fuite fe fbrmant des nue's
. en fair fort inefgales, & qui peuuent eftre tranfportees
d'vne region en vne autre par les moindres vens, & fou-
ftenues a diuerfes diftancesde la terre, mefme plufieurs
enfemble au deffus les vnes des autres, les aftres agiffent
derechef d'autre fac,on contre les plus hautes que contre
les plus baflesj & contre celles cy que contre la terre qui
eftaudeffous 5 & d'autre facon contre les mefmes en-
droits de la terre lors qu'il ny a point de nues qui les cou-
urent, que lors qu'il y en a ^ & apre's qu'il a phi ou neige'
qu'auparauant. Ce qui fait qu'il eft prefque impoffible
de preuoirles vens particuliers qui doiuent eftre chaf-
queiourenchafquecontreedelaterre : & que mefme
Uy en a fbuuent plufieurs contraires qui paffent au deffus
les vns des autres. Mais on y pourra bien determiner en
general quels vens doiuent eftre les plus frequens, & les
plus forts, & en quels lieux & quelles faifons ils doiuent
regner,fi on prentexactement garde a toutes les chofes
qui ont efte' icy remarque'es. Et on le pourra encore
beaucoup mieux determiner dans les graudes mers,
principalement a'ux endroits fort efloigne's de la terre,
acaufe que n'yayant point d'inefgalitds en la fuperflcie
Cc                          de
-ocr page 281-
20a                    Les Meteores.
de l'eau, femblables a celles que nous venons de remar-
quer furlesterres ,il s'yengendre beaucoup moins de
vensirreguliers, & ceux qui vienent des coftes ne peu-
uent gueres patter iufques la} comme tefmoigne afle's
1'experience de nos matelots, qui pour cete caufe ont
donne a la plus large de toutes les mers le nom de Pacifi-
que. Etienef§ache plus rien icy digne de remarque,
finon que prefque tous les fubits changemens d'air,
comme de ce qu'il deuient plus chaud, ou plus rare, ou
•lus humide, que lafaifonne le requert, dependent des
yens: non feulement de ceux qui font aux mefmes re-
gions ou fe font ces changemens, mais aufly de ceux qui
en font proches, & des dinerfes caufesdontils prece-
dent. Car par exemple, fi pendant que nous fentons icy
vn vent de midy, qui ne procedant que de quelque cau-
fe particuliere,&ayantfonoriginefort pres d'icy, n'a-
mene pas beaucoup de chaleur, il y en a vn de Nord aux
pais voyfms, qui viene d*aflesloin,ou d'affds haut,la ma-
tiere tres fitbtile que cetuy cy amene auec foy peut ayfe-
ment paruenir iufques a nous, & y caufer vn froid ex-
trordinaire. Et ce vent de midy ne fortant que du lac
voyfin,peuteftre fort humide 5 au lieu que s'il venoit
des campaignesdefertesqut font audela, il feroitplus
fee. Etn'eftant caufe'que par la dilatation des vapeurs
dece lac, fans que Iacondenfation d'aucunes autres qui
foient vers le Septentrion y contribue, il doit rendre
noftre air bien plus efpais, &plus pefant, que s'il n'eftoic
caufe que par cete condenfation, fans qu'il fe fift aucune
dilatation de vapeurs vers le midy. Aquoy fi nous ad-
iouftonsquelamatierefabtile ,& les vapeurs qui font
T
                                                          dans
aiij.— '■0"™"
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DlSCOURS ClNQU IESME.                 203
dans Ies pores de la terre, prenant diuers cours , yfont
aufTy comme des vens, qui amenent auec foy des exha-
laifons de toutesfortes, felon les qualites des terres par
ou ils pafTent; & outre cela que les nues, en s'abaiflant,
peuuent caufer vn vent qui chafle l'air de haut en bas,
ainfi queie diray cy appres: nous aurons ie croy, tou-
tes les caufes des changemens d'air qui fe remarquent.
DES NVES.
Di/cotirs Cinquiefmc.
AP r e s auoir confidere, comment les vapeurs en fe
dilatant caufent les vens, ilfautvoir commentenfe
condenfant &c referrant elles compofent les nues & les
brouillas. A fgauoir fitoft qu'elles deuienent noiable-
mentmoins tranfparentes que 1'air pur, fi elles s'eften-
dent iufquesalafuperficiedelaterre,onlesnomme des
brouillas; mais fi elles derneurent fufpendues plus haut,
onlesnommedes nues. Et il eft a remarquer que ce
qui les fait ainfi deuenir moins tranfparentes que l'air
pur, c'eftquelorfqueleurmouuements'alentift, & que
leurs parties fontafle's proches pour s'entretoucher, el-
les fe ioignent & s'afTemblent en diuers petits tas, qui
fontautantdegouttesd'eau, oubiende parcelles de gla-
ce. Car pendant qu'elles demeureut tout a fait fepare'es
&flotantes en Tair, elles ne peuuent guercs empefcher
ie cours de la Iumiere; au lieu qu'effont affemblees, en-
core que les gouttes d'eau ou les parcelles de glace
qu'elles compofent foient tranfparentes, toutelois a
C c 2                    caufe
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104                      ^ES Meteores.
caufe que chafcune de leurs fuperficies fait reftefchir
vne partie des rayons qui donnent decontre, ainfi qu'ila
efte'ditenlaDioptriquedetoutescelles des cors tran-
fparens , ces fuperficies fe trouuent ayfement en afTe's
grand nombre pour les faire tousou prefque tous refle-
fchir. Et pour les gouttes d'eau elles fe forment, lorfque
lamatierefubtile qui eft autour des petites parties des
vapeurs, n'ayant plus affe's de force pour faire qu'elles
s'eftendent & fe chaffent les vnes les autres, en a encore
afTe's pour faire qu'elles fe plient, & en fuiteque routes
celles qui fe rencontrent fe ioignent & s'accumulent en-
femble en vne boule. Et la fiiperficie de cete boule de-
uient incontinent touteefgale & toute polie, a caufe
que les parties de l'air qui la touchent fe meuuent d'au-
trefacon que les fienes, & auffy lamatiere fubtile qui eft
en fes pores d'autre fac,on que cellc qui eft en ceux de
l'afr, comme il a defiatantoft eft e'expliqu e'en parlantde
la fuperficie de l'eau de la mer. Et pour mefme raifon
auffy elle deuient exa&ement ronde : car comme vous
poiiu^sfouuentauoirveu,que l'eau desriuierestournoye
8c fait des cercles, aux endroits ou il y a quelque chofe
quirempefchedefemouuoiren lignedroite auffy vifte
que fon agitation le requert: ainfi faut il penfer , que la
matiere fubtile coulant par les pores des autres cors, en
mefme fagon qu'vne riuiere par les interfiles des her-
bes qui croiffent en fon lit, & paffant pluslibrement d'vn
endroitde l'air eni'autre, & d'vn endroit de l'eau auffy
enl'autre, que de Fair en l'eau, ou reciproquement de
l'eau en l'air, comme il a efte'ailleurs remarque, elle doit
tournoyer au dedans de cete goutte, & auffy au dehors
en
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DlSCOURS ClNQJJIESME.             ZOj
enl'airqui l'enuironne, mais d'antre mefure qu'au de-
dans, & par ce moyen difpofer en rond toutes les parties
defa fuperficie. Carelles nepeuuent manquerd'obeira
fesmouuemens, d'autant que l'eau eft vncorsliquide.
Etfansdoutececyeftfuffifantpour faireentendre, que
lesgouttesd'eau doiuenteftre exactement rondes, au
fensque leurs fedtions font paralleles a la fuperficie de la
terre;car il n'y a point de raifbn qu'aucune des parties de
leur circonference s'efloigne ny s'approche de leurs
centres plus que les autres en ce fens la, vuqu'elles ny
font ne plus ne moinspreffe'es d'vncofte'que d'autre par
i'air qui les enuironne,au moius s'il eft calme & tranquil-
Ie, comme nous le deuons icy fnppofer. Mais pource-
que les confiderant en autre fens on petit douter, lorf-
qu'elles font fi petites que leur pefanteurn'a pas la force
de leur faire diuiferl'air pour defcendre , ficelaneles
rend point vnpeu plus plates & moins efpaifTes en leur
hauteur qu'en leur largeur, commeT,ou V sil faut pren-
dre garde qu'elles ont de l'air autour de leurs coftes auffy
bien qu'au deflbus; & que fi leur pefanteur n'eftfuffi-
^ A
         fante pour faire que celuy qui eft au
t v x y deffous leur quitte fa place , & les
laiffe defcendre;elle ne le peut eftre
nonplus pour faire que celuy qui eft aux code's fe retire,
& les laiffe deuenir plus larges. Et pource qu'on peut
douter tout au contraire, lorfque leur pefanteur les fait
defcendre, fi fair qu'elles diuifent ne les rend point va
peupluslongues&eftroites, comme X, ou Y 3 il faut
encore prendre garde , qu'en eftant enuironnees tout
autour, celuy qu'elles diuifent, Scdont elles vont occu-
Cc 3                     per
-ocr page 285-
■io<s                      Les Meteores.
per la place en defcendant, doit monter a mefme terns
au deflus d elles, poury remplir celle qu'elles y laifTent,
Scqu'ilnele peutqu'encoulanttoutle long de leur fu-
perficie , ou ii trouue Ie chemin plus court & plus ayfe
lorfqu'elles font rondes, que fi elles auoient quelque au-
tre figure, car chafcun f§att que de toutes les figures
c'eft la ronde qui eft la plus capable,c'eft a dire, celle qui
ale moins defuperficie araifon de la grandeur du cors
qu'ellecontienr. Etainfien quelle fa$onqu'on leveuil-
!e prendre , ces gouttes doiuent toufiours demeurer
rondesj fi ce n'eft que la force de quelque vent, ou quel-
que autre caufe particuliere les en empefche. Pour ce*
qui eft de leur grofTeur,elie depend de ce que les parties
de la vapeur font plus ou moins proches les vnes desau-
tres lorfqu'elles commencent a les compofer, & auffy de
ce qu'elles font par aprc's plus ou moins agite'es, & de la
quantite'des autres vapeurs qui peuuent venir fe ioindre
a elles. Car chafcune dabbord ne fe compofe que de
deux ou trois des petites parties de la vapeur qui s'entre-
rencontrent, mais aufly toft apre's fi cete vapeur a efte
vn peu efpaiffe , deux ou trois des gouttes qui s'enfont
forrae"es,enferencontrantfe ioignent en vne , & de-
rechef deux ou trois de celles cy encore en vne, & ainfi
defuite, iufques ace qu'elles ne fepuifTent plus rencou-
trer. Et pendant qu'elles fefouftienent en l'air, il peut
aufTy venir d'autres vapeurs fe ioindre a elles, & les grof
fir, iufques a ce qu'enfin leur pefanteur les face tomber
en pluie ou en rofe'e.
Pour les petites parcellesde glace , elles feforraent
lorfque Ie froid eft fi grand que les parties de la vapeur
ne
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DlSGOURS ClNQUIESME.                 ZOJ
oepeuuenteftre pliers par la matierefubtile qui eft par-
mi elles. Et fi ce froid ne furuient qu'aprds que les gout-
tesfontdefiaformees, il les lahTetoutes rondes en les
gelant,fi cen'eft qu'ilfoitaccompagnedequelque vent
affds fort , qui les face deuenir Vn peu plates du coftd
qu'illes rencontre. Et au contraire s'il furuient des au-
parauant qu'elles ayent commence' a fe former, les par-
ties de la vapeur nefeioignentqu'en long, & necompo-
fent que des filets de glace fort delids. Mais fi le froid
furuient entre ces deux tems, cequi eft le plus ordinaire,
il gele les parties de la vapeur a mefure qu'elles fe plient
& s'entaflent plufieurs enfemble, fans leur donner le loy-
firdes'vnirafles parfaitement pour former des gouttes:
Et ainfiil en fait depetits noeuds ou pelotons de glace,
qui font tous blancs, a caufe qu'ils font compofe's de plu-
fieurs filets, qui nelaifTent pas d'eftre fepares & d'auoir
chafcunleursfuperficiesdiftin£tes, encore qu'ils fbient
plies I'vn fur l'autre: Et ces noeuds font comrae velas ou
eoauersdepoiltoutalentour, acaufequ'il yatoufiours^
plufieurs par ties de la vapeur, quine pouuant fe plier &
s'entafferfitoft que les autres, s'appliquent toutes droi-
tes contre eux, & compofent les petits poils qui les cou-
urent: Et felon que ce froid vient plus Ientement ou
plusacoup, & que la vapeur eft plus efpaifleou plus ra-
zees noeuds feforment plus grosou plus petits 5 & les
poils ou filets qui fes enuirounent , plus forts & plus
cours, ou plus delie's & plus longs.
Etvouspouue'svoir dececy qu'il y a toufiours deux.
chofes qui font requifes pour couuertir les vapeurs en
eau ou en gIace,.af$auoir, queleurs parties foient aire's
proches
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208                     Les M eteores.
proches pour s'entretoucher, & qu'il y ait autour d'elles
afles de froideur pour faire qu'en s'cntretouchant dies fe
ioignent&s'areftentlesvnesauxautres. Car ce ne fe-
roit pas affes que leur froideur fuft tres grande , fi elles
eftoient efparfes en l'air fi loin a loin qu'elies ne s'entre-
touchaflentaucunement, ny an fly qu'elies fuflent fort
proches les vnesdesautres&j fort preflees, fi leur cha-
leur,c'eftadire, leuragitation,eftoit afle's forte pour les
empefcherdefe ioindre. Ainfi on ne voit pas qu'il fe
forme toufiours des nuesau haut de fair, nonobftant que
le froid y foit toufiours affds grand pour cet effecT:: & il
eft requisde plus, qu'vn vent occidental, s'oppofant au
cours ordinaire des vapenrs, les aflemble & les condenfe
aux endroits ou il fe termine; ou bien que deux ou plu-
fieursautresvens, venans dediuers coftds, les preffeut
& accumulent entre eux; ou qu'vn de ces vens les chaffe
contrevnenue defia formee; ou enfin qu'elies aillent
s'aflemblerdefoyrnefmecontre le deflbus de quelquc
nue, a mefure qu'elies fortent de la terre. Et il ne fe for-
mepas aufly toufiours des brouillars autour dc nous;ny
en hyuer, encore que l'air y foit aire's froidj ny en efte'.en-
core que les vapeurs y foient afles abondantes; mais feu-
lement lorfque Iafroideur de l'air &l'abondance des va-
peurs concourent enfemble. Comrae il arriue fouuent
lefoirou la nuit lorfqu'vn iour afles chaud a precede".
Principalement au printems plus qu'aux autres faifons,
mefme qu'en automne, a caufe qu'il y a plus d'inefgalite'
entre la chaleur dn iour & la froideur de la nuit. Et plus
aufly aux lieux marefcageux ou maritimes que fur les
terres qui font loin des eaux,ny fur les eaux qui font loin
des
*
.
-ocr page 288-
Dl SCOURS C INQJ1IESME.               209
des terres, a caufe que l'eau perdant plutoft fa chaleur
que laterre, y rafroidift l'air, dans leqnel fe condenfent
les vapeurs que les terres humides & chaudes produifent
en abondance. Mais les plus grans brouillas fe forment,
comme les nue's, aux lieux ou. le cours de deux ou plu-
fieurs vens fe terrnine. Car ces vens chaflent vers ces
lieux la plufieurs vapeurs,qui s'y efpaiflent,ou en brouil-
las, fl l'air proche de laterreeft fortfroid; ou en nues,
s'ilne l'eftafTe's pour les condenfer que plus haut. Et
remarque's que les gouttes d'eau, ou les parcelles de gla-
ce, dont les brouillas font compofe's, ne peuuent eftre
quetres petites. car fielleseftoienttantfoit peu grof-
fes, leur pefanteur les feroit delcendre afles prompte-
ment vers la terre, de fa§on que nous ne dirions pas que
ce fuffent des brouillas, mais de la pluie ou de la neige,
Et auec cela que iamais il ne peut y auoir aucun vent ou.
ils font, qu'ii ne les diffipe bientoft apre"s,principalement
lorfqu'ils Ibnt compofe's de gouttes d'eau- car la moindre
agitation d'alr fait que ces gouttes en fe ioignant plu-
fieurs enfemble fe groffiflent & torn bent en pluie ou en
rofee. Reffiarque'sauflytouchantlesnues,qu'elles peu-
uent eftre produites a diuerfes diftances de la terre, fe-
lon que les vapeurs ont loyfirde monter plus ou moins
haut, auantqued'eftre afles condenfees pour les com-
pofer.D'ou vient,qu'on en voit fouuent plufieurs an def-
fuslesvnesdesautreSj&mefme qui font agitees pardi-
uers vens. Et cecy arriue principalement aux pais de
oiontaignes,a caufe que la chaleur qui efleue les vapeurs
y agift plus inefgalementqu'auxautres lieux. Ilfaut re-
Qiarquer outre cela, que les plus hautes de ces nues ne
D d                         peu-
?,
-ocr page 289-
aro                   Les Mete ores.
peuuentquafiiamaiseftrecompofees de gouttes d'eao,
maisfeulementdeparcelles de glace; car il eft certain
que I'air, ou elles font, eft plus froid, ou du, inoins aufly
froid queceluy qui eft aux fommets des hautes montai-
gnes: lequelneanmoinsl'eft aflHs, mefme au ceur de
I'efte', pour empefcher que les neiges ne s'y fondent. Et
pourceque plus les vapeurss'efleuent haut, plus elles y
trouuentde froid qui les gele, Scmoins elles y peuuent
eftre preffees par lesvens.De la vient que pour l'ordinai-
re les plus hautes parties des nues ne fe compofent que
de filets de glace fort delies, & qui font efparsen l'air
fort loin a loin; Puis vn peu au deflbus il fe forme des
noeudsou pelotons de cete glace, qui font fort petits,&
couuers de poik,-& par degres encore d'autres au defTous
vn peu moins petits; Et enfin quelquefois tout au plus
bas il fe forme des gouttes d'eau. Et lorfquel'air, quiles
contient, eft entierement calme & tranquille , oubien
qu'il eft tout efgalement emportd par quelque vent,tant
ces gouttes, queces parcelles de glace, y peuuent de-
meurer efparfes aflTes loin a loin & fans aucun ordre, en
forte que pour lors la forme des nues rie differe en rien
de celle des bronillas. Mais pourceque fouuent elles font
poinTe'es par des vens qui n'occupent pas efgalemeut
tout l'air qui les enuironne, & qui par confequent ne les
pouuant faire mouuoir de mefme mefure que cet air,
coulent par deffus, & par deflbus, en les preflfant, Sc les
eontraignant de prendre la figure,qui peut le moins em-
pefcher leur mouuement: celles de leurs fuperficies con-
trelefquelles pafTent ces vens deuienenttoutes plates &
v.nies. Et ceque ie defire icyparticulierementquevous
semai*
..
-ocr page 290-
DlSCOURS ClNQUIESME.                 2ll
temarquie's.c'eft que tous les petits noeuds ou pelotons
de neige, quifetrouuenten ces fuperficies, s'arrengent
exa&ement en telle forte, que chafcun d'eux en a fix au-
tresautourdefoy, quiletouchent, ou dumoins quine
font pas plus efloignes de luy l'vn que l'autre. Suppofons
par exemple qu'au deflus de la terre A B,il vient vn vent
delapartieoccidentaleD, qui s'oppofe au cours ordi-
naire de 1'air, ou fi vous rayme's mieux a vn autre vent,
qui vient de la partie Orientale Q & que ces deux vens
fe font areftds au commencement l'vn l'autre , enuiron
1'efpace F G P, ou ils ont condenfe quelques vapeurs,
dont ils ont fait vne mafTe confufe,pendant que leurs for-
ces febalengant & fe trouuant'efgales en cet endroit, ils
y ont laiffeTair calme & tranquille. Car il arriuefouuent
que deux vens font oppofe's en cete forte, acaufequ'il y
en a toufiours plufieurs differens autour de la terre ed
Wefme terns, & que chafcun d'eux y eftend d'ordinaire
foncours, fans fede'tourner, iufquesau lieu ou il en ren-
contre vn contraire qui luy refifte; mais leurs forces n'y
peuuentgueresdemeurer long terns ainfi balancees, &:
Dd z                     leur
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211                     LES METEORES.
leur matiere y affluant de plus en plus s'ils ne ceflent tous
deux enfemble, ce qui eft rare, le plus fort prent enfin
fon cours par le deffous, ou le deflus de la nue, ou mefme
aufly parle milieu,ou toutalentour,fe!on qu'il s'y trouue
plus difpofe'j au moyen de quoy s'il n'amortift l'autre
tout a faitsil le contraint au moins de fe ddtourner.Com-
me icy ie fuppofe que le vent occidental, ayant pris fom
cours entre G & P, a contraint l'Oriental de paffer par
deflbus vers F, ouil a fait tomber en rofee le brouillar
qui yeftoit, puis a retenuau deflus de foy la nue G, qui
fe trouuant prefTe'e entre ces deux vens, eft deuenue fort
plate & eftenduej Et les petits pelotons de glace qui ont
eftd en fa fuperficie, tant du deflus, que du deflbus, com-
me aufly en celle du deflbus de la nue P, ont dii s'y arren-
ger en telle forte que chafcun en ait fix autres qui l'enut*
ronnent. car on ne fcauroit imaginer aucune raifon qui
les en ait empefches, & naturellement tous les cors tons
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^---------,-,.—« -          - -T- .-          ' -"                -.-
DlSCOURS GlNOUIESME.               413
& efgaus qui font meus en vn mefme plan, par vne force
afles femblable s'arrengent en cete forte ainfi que vous
pourres voir par experience, en iettant confufement vn
rang ou deux de perles rondes toutes defilees. fur vne
afliette, &les esbranflant, ou foufflant feulement vn peu
decontreaffinqu'elles s'approchentlesvnes des autres.
Mais notes, que ie ne parle icy que des fuperficies du
defTous ou du deffus, & non point de celles des cone's, a
caufe que I'inefgale quantite' de matiere, que les vens
peuuent pouffer decontre a chafque moment , ou en
ofter, rend ordinairement la figure de leur circuit fort
irreguliere & inefgale. Ie n'aioufte point aufly, que les
petits noeus de glace, qui compofent le dedans de la nue
G,fedoiuentarrenger en mefme fa§on que ccux des fu-
perficies, a caufe que ce n'eft pas vne chofe du tout fi
manifefte. Maisie defire qUe vous confideries encore
ceux, qui fe peuuent aller arefter au deflbus d'elle, apres
qu'elte eft toute forme'e. car fi, pendant qu'elle demeure
fufpendue en l'efpace G,il fort quelques vapeurs des en-
droits de la terre qui font vers A, lefquelks fe refroidif-
fantenrairpeuapeufeconuertifienten petits noeus de
glace, que le vent chaffe vers L,il n'ya point de doute
que ces noeus s'y doiuent arrenger en telle forte que
chafcun d'eux foit enuironnd de fix autres.qui le preffent
efgalement, & foient en mefme plan; & ainfi compofer
premierementcommevne feuille qui s'eftende fous la
fuperficie de cete nue, puis encore vne autre feuille qui
s eftende fous celle cy, & ainfi encore d'autres , autant
qu'il y aura de matiere. Et de plus il faut remarquer, que
te vent, qui pafle entre la terre & cete nue',agiflant auec
Dd 3                    plus
-ocr page 293-
ii4                  Les Met eojr.es;
plus de force contre la plus baffe de ces feuilles que con-
tre celle qui eft immediatement au deffus, & auec plus
de force contre celle cy que contre celle qui eft encore
au deffus, & ainfi de fuite, les peut entraifner, & faire
mouuoir feparement Vvne de l'autre, & polir par ce mo-
yen leursfuperficies, en rabatantdes deux code's lespe-
tis poils qui font autour des pelotons dont elles font
compofees. Etmefmeii peut faire gliffer vne partie de
ces feuilles horsdudeffous decetenue G, & lestranf-
porter audela, comme vers N ,ou elles en compofent
vnenouuelle. Et encore que ien'ayeicy parld que des
parcelles de glace qui font entaffe'es en forme de petis
noeuds ou pelotons,le mefme fe peut ayfement auffy en-
tendre des gouttes d'eau , pourvuque le vent ne foit
point affe's fort pour faire qu elles s'entrepouffent, ou-
bien qu'il y ait autour d'elles quelques exhalaifons, ou,
commeiIarriuefouuent,quelques vapeurs non eacore
-ocr page 294-
Discours Cinouies'me.               213
difpofees a prendre la forme de l'eau, qui les feparenr.
carautrementfitoft qu'elles fe touchent elles s'affern-
blent plufieurs en vne, & ainfi deuienent fi grotfes & fi
pefantes, qu'elles font contraiutes de tomber en pluie.
Au refte ce que i'ay tantoft dit,que la figure du circuit
dechafqnenue eft ordinairement fort irreguliere 6i in-
efgale, ne fe doit entendre que de celles qui occupent
moins d'efpace en hauteur Scenlargeur que les vens qui
les enuironnent. Car life trouue quelquefois fi grande
abondancedevapeursenl'endroitoudeux ou plufieurs
vens fe rencontrent, qu'elles contraignent ces vcns de
tournoyerautourd'ellesau lieude paffer au deffus ou
au deflbus, & ainfi qu'elles forment vne uue extrordinai-
rement grande, quieftant efgalement preflee de tous
code's par ces vens, deuient toute ronde & fort vnie
en fon circuit. Etmefme qui lorfque ces vens font un
peuchauds, ou bien qu'elle eft expofe'e a la chaleur du
Soleil, y acquert comme vneefcorfe ou vne croufte de
plufieurs parcellesde glace iointes enfemble , quipeut
deuenir afles grofle & efpaiffe fans que fa pefauteur la fa-
ce tomber , a caufe que tout le refte de la nue la:
fouftient.
DE.
-ocr page 295-
■■■i-S ■.■;■■■. •>-:■';•.■■■:■-:y'-i'- ;.?•■'. -: :--y--v>-- .■:■■■;■■",-'■ ^;t;/'H ■'<- .;■;-. ■■■:-:.:--'.""'" • " ?■■;■■-': v;-.- c-:;-                                              ■ " .                                                                                                             7.-7-71-^
21(5                   Les Meteok.es.
DELANEIGE,DELA PL VIE,
ET DE LA GRESLE.
'Dtfcours Sixieme.
TL y a plufieurs chofes qui empefchenc commune-
-Vment que les nues ne defcendent incontinent apre's
eftreformees. Carpremierementlesparcelles de glace
oulesgouttesd'eau dont elles font compofees, eftant
fort petites, & par confequentayant beau coup de fuper-
ficiearaifbndelaquantite'deleurmatiere, la refiftence
del'airqu'ellesauroient adiuiferfi elles defcendoient,
peut ayfement auoir plus de force pour les en empefcher
que n'en a leur pefanteur pour les y contraindre. Puis
les vens, qui font d'ordinaire plus fors contre la terre ou
leurcors eft plus groffierqu'au haut del'airoiiil eft plus
fubtil, & qui pour cete caufe agiffent plus de bas en haut
que de haut en bas, peuuent non feulement les foufte-
nir, maisfouuentauflyles faire raonter au deflfus de la
region de fair ou elles fe trouuent. Et le mefme peu-
uent encore le s vapeursqui fortant de la terre, ou venant
dequelque autre cofte',font enflerl'air qui eft fous elles;
ouaufTy lafeule chaleur decet air qui enle dilatantles
repoufle- oulafroideurdeceluy qui eft audeffusquien
le referrant les attire; ou chofe s femblables. Et particu-
lierement les parcelle s de glace, eftant poufFees les vnes
contre lesautres paries vens, s'entretouchent fans s'vnir
pour cela tout a fait, 8c compofent vn cors fi rare, fi leger,
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DlSCOURS SlXIEME.                      2XJ
&fieftendu, ques'ilny furuientde la chaleurquifonde
quelques vnes defes parties & par cemoyen le conden-
fe & Tappefantifle, il ne peut prefque iamais defcendre
itifqu'aterre. Mais commeil aeftd dit cy deffus, que
l'eau eft en quelque facon dilate'e par le froid lorfqu'elle
fe gele, ainfi faut il icy remarquer, que la chaleur, qui a
couftume de rarefier les autres cors, condenfe ordinal-
rement celuy des nues. Et cecy eft ay f6 a experimenter
en la neige qui eft de la mefme matiere dont elles font,
exceptd qu'elle eft defia plus condenfe'e. car on voir,
qu'eftant mife en lieu chaud, elle fe referre & diminue
beaucoup de grefffeur , auantqu'ilen forte aucune eau,
ny qu'elle diminue de poids. Ce qui arriue d'autant.que
les extremites des parcelles de glace, dont elle eft com-
pose, eftant plusdelie'es que le refte, fe fondent plutoft,
& en fe fondant, c eft a dire v en fe pliant & deuenant
commeviues&remuantes3a caufede l'agitation de la
matiere fubtile qui les enuironne, elles fe vont glider &
attacher contre les parcelles de glace voyfines, fans pour
cela fe detacher de celles a qui elles font defia iointes, &
ainfi les font approcher les vnes des autres. Mais pour-
ce que les parcelles, qui copofent les nues, font ordinai-
rementplus loin a loin que celles qui compofent la nei-
ge qui eft fur terre, elles nepeuuent ainfi s'approcherde
                    j
quelques vnes de leurs voyfines fans s'efloigner par mef-
me moyen de quelques autres. Cequi fait, qu'ayant eftd
auparauent efgalement efparfes par 1'air, elles fe diuifent
apresenplufieurspetitstasou floccons, qui deuienent
d'autant plus gros, que les parties de la nue ont efte' plus
fences, & que la chaleur eft plus Iente, Et mefme lorf-
Ee                    que
-ocr page 297-
2r8                    Les Mete ores.
que quelque vent, ou quelque dilatation de tout l'air qui
eft au deffus de la nue ou autre-telle caufe fait que Ies
plushautsde cesfloccons defcendent les premiers, ils
s'attachentaceuxdedeflbus qu'ils rencontrent en leur
chemin, & ainfi les rendent plus gros. Apre's quoy la
chaleur, en les condenfant & les appefantiflant de plus
en plus, peutayfement les faire defcendre iufque ater-
re. Et lors qu'ils y defcendent ainfi fans eftre fondus
tout a fait, ils compofent de la neige,- mais fi fair, par ou
ils paffent, eft fi chaud qu'il les fonde, ainfi qu'il eft tou-
fiours pendant I'e&e, & fort fouuent aufly aux aurres fai-
fons en noftre climat, ils fe conuertifTent en pluie. Et il
arriue aufly quelquefois, qu'apres eftre ainfi fondus ou
prefque fondus, il furuient quelque vent froid qui les ge-
lant derechef en fait de la grefle.
Or cete grefle peut eftre de plufieurs fortes. Car prc-
mieremet fi le vent froit qui la caufe rencotredesgout-
tes d'eau defia forme'es, il en fait des grains de glace tons
tranfparens & tous ronds, excepte' qu'il les rend quel-
quefois vn peu plats du cofte qu'il les poufTe. Ets'il ren-
contre des floccons de neige prefque fondus,mais qui ne
foient point encore arondis en gouttes d'eau, alors il en
fait cete grefle cornue, & de diuerfes figures irreguiie-
res, dont quelquefois les grains fe trouuent fort gros, a
caufe qu'ils font formes par vn vent froid, qui chafTant la
nue de haut en bas, pouffe plufieurs de fes floccons I'vn
contre l'autre,& les gele tousen vne roafle. Et il eft icy
aremarquer,quelorfqueceventapproche de ces floc-
cons qui fe fondent, il fait que la chaleur de l'air qui les
enuironne, c'eft a dire, la matiere fubtile la plus agit^e
-ocr page 298-
Disc ours Sixiesme.               2rp
&IamoinsfubtiIequifoitencet air, feretiie dans leurs
pores,acaufequ'ilneles peut pas du tout fi toft pene-
trer. En mefme fagon que furtcrre quelquefois, lorf-
qu'ilarnue tant a coup vn vent ou vne pluie qui rafroidift
lair de-dehors, il entre plus de chaieur qu'auparaaant
dauslesmaifons. Et la chaieur, qui eft dans les pores
de ces floccons, fe tient plutoft vers leurs fuperficies que
vers leurs centres, d'autantque lamatiere fubtile , qui
la caufe, y peut mieux continuer fes mouuemens : & la
elle les fond de plus en plus vn peu deuant qu'ils corn-
mencent derechefa fe geler: & mefme les plus liquides,
c'eftadire, les plus agitdes de leurs parties qui fe trou-
uent ailleurs,tendent aufTy vers la;au lieu que celles, qui
n'ont pas loyfir de fe fondre, demeurent au centre, d'oii
vient que le dehors de chafque grain de cete grefle;,
eftantordinairementcompofed'vne glace continue &
tranfparente, il y a dans le milieu vn peu deneige , ainfi
que vous pourre's voir en les caffant. Et pourcequ elle
netombequafiiamaisqu'en efte , cecy vous aflurera,
que les nuespeuuenteftre pour lors compofe'es de par-
celles de glace aufly bien que 1'hyuer. Mais la raifon qui
empefche qu'il ne peut gueres tomber en hyuer de telle
grefle; au moins dontles grains foient vn peu gros , eft
qu'iln'arriue gueres affe's de chaieur iufques aux nues
pour cet effedt, finonlorfqu'elles font fi balfes, que Ieur
matiereeftant fondue, ou prefque fondue, n'auroit pas
le terns defe geler derechef, auantque d'eftre defcen-
due iufques aterre. Que fi la neige n'eft point encore fi
fondue, mais feulement vn peu refchauffe'e & ramollie,
lorfque le vent froid,qui la conuertift en grefle,furuient,
Ee 2                     elle
-ocr page 299-
2Zo                    Les Mete ores.
elle ne fe rend point du tout tranfparente, mais demeurc
blanche comme du fucre. Et fi les floccons de cete net-
ge font affe's petis, comme de la groffeur d'vn pois ou au
deflbus, chafcunfeconuertiftenvn grain de grefle qui
eft afTc's rond. Mais s'ils font plus gros, ils fe fendent &
, fediuifent en plufieurs grains tous pointus en forme de
pyramides. Car la chaleur, qui fe retire dans les pores
de ces floccons au moment qu'vn vent froid commence
a les enuironner,condenfe & referre toutes leurs parties,
entirantde leurs circonferences vers leurs centres, ce
qui les fait deuenir affds ronds; & le froid, les penetrant
auffy toft apre's, & les gelant, les rend beaucoup plus
durs que n'eft la neige. Et pourceque lorfqu'ils font \fn
peu gros, la chaleur qu'ils oufau dedans continue en-
core de faire que leurs parties interieures fe referrent &
fe condenfent, entirant toufiours vers le centre, apre's
que les exterieures font tellemet durcies & engelees par
le froid qu'elles ne les peuuent fuiure; il eft necefTaire
qu'ils fe fendent en dedans, fuiuant des plans ou lignes
droitesquitendent vers le centre, & que leurs fentes
s'augmentant de plus en plus a mefure que le froid pene-
treplus auant, enfinilss'efclatent & fe diuifent en plu-
fieurs pieces pointues, qui font autant de grains de grefle.
Ie ne determine point en combien de tels grains chafcun
fe peut diuifer, mais il me femble que pour l'ordinaire ce
doit eftre en 8 pour le moins, & qu'ils fe peuuent auffy
peuteftre diuifer en douze ou 20 ou 14, mais encore
mieux en trente deux , ou mefme en beaucoup plus
grand nombre, felon qu'ils font plus gros, &d'vne neige
plusfubtile, & que le froid, quilesconuertift en grefle,
eft
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DlSCOURS Si XIESME.                      211
eft plus afpre & vient plus a coup. Et i'ay obferue' plus
dVne foisjde telle grcfle,dont Ies grains auoient a peu
prcsla figure des fegmens d'vne boule diuifee en huit
parties efgales partrois fe&ions qui s'entrecouppent au
centre a angles droits. Puis i'en ay aufly obferud d'au-
tres, qui eftans plus longs & plus petis, fembloient eftre
cnuiron le quart de ceux la , bienque leurs querres,
s'eftant e'moufle'es & arondies en fe referrant, ils euflent
quafi la figure d'vn pain de fucre. Et i'ay obferue auffy,
que deuant ou aprds, ou mefme parmi ces [grains de gre-
fle, il en tomboit cornmunement quelques autres qui
eftoient rons.
Mais les diuerfes figures de cete grefle n'ont encore
riende curieux ny de remarquable, a comparaifbn de
cellesde la neige qui fe fait de ces petis noeuds ou pelo-
tons de glace arrenges par le vent en forme de feuilles,
en lafac,on que i'ay tantoftdefcrite. Carlorfque lacha-
leur commence a fondre les petis poils de ces feuilles,
elle abat premierement ceux du deffus & du deffous, a
caufe que ce font les plus expofe's a fon action, 8c fait que
le peu de liqueur qui en fort, fe refpand fur leurs fuperfi-
cies, ou ii remplift auffy toft les petites inefgalites qui
s'ytrouuent, &ainfi les rend auffy plates & polies que
font celles des cors liquides. nonobftant qu'il s'y regele
tout aufly toft, a caufe que fila chaleur n'eft point plus
grande qu'il eft befoin pour faire que ces petis poils,
eftant enuironnds d'air toutautour, le degelent,fans qui!
fe fonde rien d'auantage • elle nel'eft pas aire's pour em-
pefcher que leur matiere ne fe regele, quand elleeft fur
ces fuperficies qui font de glace. Aprds cela cete cha-
Ee 5,                 leur
-ocr page 301-
-zzi                   Les Mete ores.
leurramoliflant&flefchiflant auffy les petits polls qui
reftent autour de chafque noeud dans le circuit oil il eft
enuironne'de fix autres femblables a luy, elle fait que
ceux de ces poils , qui font les plus efloignes des fix
noeuds voyfins, fe plians indifferemment §a & la,fe vont
tous ioindre a ceux qui font vis a vis de ces fix noeudsj
carceuxcy eftans rafroidis par la proximitd de ces neuds,
nepeuuentfefondre, maistoutau contraire font geler
derechef la matiere des autres, fitoft qu'elle eft mellee
parmilaleur. Au moyen dequoy il fe forme fix pointes
ou rayons autour de chafque noeud , quipeuuent auoir
diverfes figures felon que les noeuds font plus ou moins
gros &preffe'sJ &leurs poils plu sou moins fors& longs,
&Iachaleur qui les aflemble plus ou moins lente &
inoderee, & felon auffy que le vent qui accompaigne ce-
te chaleur, fiau moins elle eftaccompaignee de quelque
H I K             £ S^^k
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vent,eft plus ou moins fort. Et ainfi la face exterieure
de lanue, quieftoit auparauant telle qu'on voit vers Z
ou
-ocr page 302-
I
DlSCOURS SlXIESME.                   22J
©uversM, deuient par aprds telle qu'on voit versO on
vers Q., & chafcune des parcelles de glace, dont elle eft
compofee,ala figure d'vne petite rofe ou eftoile fort
bientaillee.
Mais arBn que vous ne penfies pas que ie n'en parle
que par opinion, ievousveux faire icy le rapport d'vne
obferuationquei'enayfaitel'hyuerpafle 163$. Lequa-
triefme de Feurier, l'airayantefte'auparauant extreme-
mentfroid,iltombale foira Amfterdam,ou i'eftois pour
lors, vn peu de verglas, c'eft a dire, de pluie qui fe geloit
enarriuantcontrelaterre, &c apres il fuiuit vne grefle
fort menue, dont ie iugay que ies grains qui n'eftoient
qu'a peu pres de la grofTeur qu'ils font reprefente's vers
H, eftoient des gouttes de la mefme pluie qui s'eftoient
gele'es au. haut de l'air. Toutefois au lieud'eftreexacte-
ment rons comme fans doute ces gouttes auoient efte',
ils auoient vn cofte'notabiement plus plat que l'autre,en.
forte qu'ils reflembloient prefque en figure la partie de
noftre ceil qu'on nomme l'humeur criftaline. D'ou ie
connu que le vent, qui eftoit lors tres grand & tres
froid, auoit eu la force de changer ainfi la figure des
gouttes enles gelant. Mais ce qui m'eftonna le plus de
tout, futqu'entreceuxde ces grains, qui tomberent les
derniers, i'en remarquay quelques vns qui auoient au-
tourdefoy fix petites dens, femblables a celles des ro-
ues des horologes, ainfi que vous voye's vers I. Et ces
dens eftant fort blanches, comme du fucre, au lieu que
les grains, qui eftoient de glace tranfparente ,fembloient
prefque noirs, ellesparoifloient manifeftement eftre fai-
tesd'vne neigefort fubtilequis'eftoit attached antour
d'eux
*
.1
-ocr page 303-
224                    ^ES Meteores.
H I £             E
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*•***-*-■*-
d'eux depuis qu'ils eftoient forme's, ainfi que s'attache la
gelde blanche autour des plantes. Et ie connu cecy d'au-
tant plus clairement de ce que tout a la fin i'en rencon-
trayvnou deux qui auoient autour de loy plufieurs pe-
tits poils fans nombre,compofes d'vne neige plus pale &
plus fubtile que celle des petites dens qui eftoient au-
tour des autres, en forte qu'elle luy pouuoit eftre com-
pare'e en mefme facon que la cendre non foulde, dont fe
couurent les charbons en fe confumant, a celle qui eft
recuite&entaffeedansle fuier. Seulementauois-jede
la peine a imaginer qui pouuoit auoir forme & compaf-
fdfiiuftementces fix dens autour dechafque grain dans
lemilieud'vn air libre & pendant l'agitation d'vn fort
grand vent, iufques a cequ'enfinieconfideray, que ce
ventauoitpilfacilementemporterquelques vnsde ces
grainsaudeflbusouaudeladequelquenue, &les yfou-
ftenir, a caufe qu'ils eftoient affHs petits; & que la ils
auoient deu s'arrenger en telle forte, que chafcun d'eux
fijft
-ocr page 304-
DjSCOURS SlXIESME.                   %z$
fuft enuironne de fix autres fituds en vn mefme plafc, fui-
oantl'ordre ordinaire de la nature. Et de plus qu'il eftbit
bienvrayfemblable, quelachaleur, qui auoit deu eftre
vnpeuauparauantauhaut del'air , pour caufer la pluie
que'i'auois obferuc'e; y auoit aufly efmeu quelques va-
peurs que ce mefme vent auoit chaflees contre ces
grains, ou elles s'eftoient gelees en forme de petits poils
fort delids, &: auoient mefme peuteftre ayde a les foufte-
nir: en forte qu'ils auoient pu facilement demeurer la
fufpendus, iufques a ce qu'il fuft derechef furueuu quel-
quechaleur. Et que cetechaleur fondant d'abbord tous
les poils, qui eftoieut autour de chafque grain; except^
ceux qui s'eftoient trouues vis a vis du milieu de quel-
qu'vn des fix autres grains qui I'enuironnoient, a caufe
queleur froideur auoit empefche fonaction; la matiere
de ces poils fondus s'eftoit mefle'e aufly toft, parmi les
fix tas de ceux qui eftoient demeurds, & les ayant par ce
moyen fortifids & rendus d'autant moins penetrables a
lachaleur,elle s'eftoit gelde parmi eux, & ils auoient
ainfi compofe ces fix dens. Au lieu que les poils fans
nombre que i'auoisvu autour de quelques vns des der-
iriers grains qui eftoient tombes, n'auoient point du tout
efte attains parcete chaleur. Lelendemain matin furies
huit heures i'obferuay encore vne autre forte de grefle,
ouplutoft dene-ige, dont ie n'auois iamais ouy parler.
C'eftoientdepetites lames de glace toutes plates, fort
polies, fort tranfparentes, enuiron de l'efpaifleur d'vne
reuille d'affes gros papier, & de la grandeur qu'elles fe
VoyentversK, maisfi parfaitement tailless en hexago-
ns, & dont les fix coftds eftoient fi droits, & les fix an-
F f                       gles
-ocr page 305-
2t6                   Les Meteores.
gles fi efgaux, qu'il eft impoflible anx hommes de riea
faire de fi exact. Ie vis bien incontinent que ces lames
auoientdeu eftre premierement depetits pelotons de
glace, arrenge's comme i'ay tantoft dit, & prefle's par vn
vent tres fort, accompagne d'affes de chaleur, en forte
que cete chaleurauoit fondu tons leurs poils,&auoit tel-
lement rempli tous Ienrs pores de i'humidite qui en
eftoitfortie, que de blancs, qu'ils auoient efte' aupara-
uant, ils eftoient deuenustranfparens; & que ce vent les
auoit a mefmc terns fi fort prefle's les vns contre les au-
tres, qu'il n'eftoitdemeure'aucunefpaceentre deux, &
qu'il auoit auffyapplani leurs fuperficies en paffant par
defTus &c par deflbus, & ainfileur auoit iuftement donne'
la figure de ces lames. Seulement reftoit il vn peu de
difficulte,ence que ces pelotons de glace ayant efteainfi
demi fondus,& a mefme terns prefle's l'vn contre l'autre,
ilsne s'eftoient point colles enfemble pour cela, mais
eftoient demeure's tous fepares. Car quoy que i'y prifle
garde expreflement, ien'enpu iamais rencontrer deux
qui tinfent l'vn a l'autre. Mais ie me fatisfis bientoft la
deffus, en confiderantde quelle faconle vent agitetou-
fiours, & fait plier fucceffiuement toutes les parties de
la fuperficie de l'eau, en coulant par deflus,fans la rendre
pour cela rude ouinefgale . Car ie connu de la qu'm-
falliblement il fait plier & ondoyer eii mefme forte les
fuperficiesdesnues, &qu'y remuant continuellement
chafque parcelie de glace, vn peu autrement que fes
voyfines, il ne leur permet pas de fe coller enfemble tout
a fait, encore qtfilne les defarrenge point pour cela, &
qu'il nelaiffe pascependantd'applanir & de polir leurs
petites
-ocr page 306-
DlSCOURS SlXIESME.                IVJ
F.
H I K             E
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petites fuperficies : en mefme fagon que nous voyons
quelquefois qu'il polift celle des ondes, qu'il fait en la
pouffiere d'vne campaigne. Apre's cete nue il en vint
vne autre,qui neproduifoit que de petites rozes ou rou-
es , a fix dens arondies en demis cercles, telles qu'on les
voit vers Q, & qui eftoient toutes tranfparentes,& tou-
tes plates, a peu pre's de mefme efpaifTeur que les lames
qui auoient precede', & les mieux taille'es & compaflees,
qu'il foit poflibie d'imaginer. Mefme i'apperceu au mi-
lieu de quelques vnes vn point blanc fort petit, qu'on
euftpu dire eftre la marque du pied du compas dont on
s'eftoitferuipourlosarondir. Maisilmefut ayfe' de iu-
ger, qu'elles s'eftoient formdes de la mefme fagon que
ces lames, excepte que le vent les ayant beaucoup moins
preffees, & la chaleur ayant peuteftre aufTy efte'vh pen
moindre, leurs pointes ne s'eftoient pas fondues tout a
*ait, maisfeulementvnpeuracourcies, & arondies par
le bout en formede dens. Et pour le point blanc qui pa-
Ff a                  roiflbit
-ocr page 307-
223                         LES METEORES.
roiflbitau milieu de quelqucs vnes, ie ne doutois paint
qu'ilneprocedaftdecequelachaleur, qui de blanches
les auoit rendues tranfparentes, auoit efte' fi mediocre,
qu'elle n'auoit pas du tout penetrd iufques a leur centre.
11 fuiuit apres plufieurs autres telles roues, iointes deux a
deuxparvnaiffieu}ouplutoft,acaufeque du commen-
cement cesaiilieuxeftoient fortgros, on euft pu dire
que c'eftoient autant de petites colomnes de criftal,dont
chafquebouteftoitorne'd'vnerofe a fix feuilles vn pen
plus large que leur baze. Mais ii en toraba par apres de
plus delies & fbuuent les rofes oueftoiles qui eftoienta
leursextremites eftoient inefgales. Puis il en tomba
auflydepluscours, & encore de plus cours par de'gres,
iufques a ce qu'enfiu ces eftoiles feioignirent tout a fait,
& il en tomba de doubles a douze pointes ou rayons af-
fes longs &parfaitement bien compafles, aux vnes tous
efgaux, & aux autres alternatiuement inefgaux, comme
on les voit vers F & vers E. Et tout cecy me donna oc-
casion de confiderer, que les parcelles de glace, qui font
de deux diuers plans ou feuilles pofe'es l'vne fur l'autre
dans les nues ,fepeuuent attacher enfemble plus ayfe-
ment, que celles d'vne mefme feuille. car bienque le
vents agiffant d'ordinaire plus fort contre les plus bafles
de ces feuilles que contre les plus hautes, les face mou-
uoir vn peu plus vifte, ainfi qu'il a efte' tantoft remarque:
neanmoins il peut aufly quelquefois agir contre elles
d'efgale force, & les faire ondoyer de mefme fa$on:
principalement lorfqu'il nyenaque deux ou trois l'vne
fur l'autre, & lors fe criblant par les enuirons des pelo-
tons qui les compofent, il fait que ceux de ces pelotons.
-ocr page 308-
DlSCOURS SlXIESME.                      229
qui fe correfpondent en diuerfes feuilles, fe tienent tou-
fiours comme immobiles vis a vis les vns des autres,
nonobftantl'agitation& ondoyement decesfeuilles, a
caafe que par ce moy en Ie paflage Iuy eft plus ayfe. Et
cependautlachaleur, n'eftantpasmoins empefcheepar
la proximite des pelotons dedeuxdiverfesfeuilles, de
fondre ceux de leurspoils qui fe regardent, que par la
proximitd de ceux d' vne mefrne, ne fond que les autres
poils d'alentour, qui fe meflans aufTytoft parmi ceux qui
demeurent, & sy' regelant,compofent les aiffieux ou co-
lomnes qui ioignent ces petits pelotons, au raefme terns
qu'ils fe changent en rozes on en eftoiles. Et ie ne m'e-
ftonuay point delagroffeur, que i'auois remarque'eau
commencement en ces colomnes , encore que ie con-
nuflebienquelamatiere des petitspoils,qui auoientefte
autour de deux pelotons, n'auoit pii fuffire pour les com-
pofer: car ie penfay qu'il yauoit eu peuteftre quatreou
cinqfeuilles rvnefurTautre, Sequela chaleurayantagi
plus fort contre les deux ou trois du milieu, que centre
la premiere & la derniere, a caufe qu'elles eftoient moins
expofdes au vent, auoit prefque entierement fondu les
pelotons qui les compofoient, & en auoit forme' ces co-
lomnes. Ie ne m'eftonnay point non pius,de voir fouuent
deux eftoiles d'inefgale grandeur iointes enfemblc, car
prenant garde, que les rayons de la plus grande eftoient
toufiours plus longs & pluspointus que ceux del'autre,.
ie iugeois que la caufe en eftoit, que la chaieur ayant
eftdplus forte autour de la plus petite que del'autre,,
^oitd'auantage fondu & e'moufle'les pointes de cesra-
yoos: oubien que cete plus petite pouuoit aufly auoir
FT*                    efte
-ocr page 309-
2^0                    Les Meteores]
€ft€compofed d'vn peloton de glace plus petit. Enfin
ie nem'eftonnay point de ces eftoiles doubles a douze
rayons, qui tomberentapres,car ie iugay que chafcune
auoit efte compofee de deux fimplesa fix rayons, parla
chaleur qui eftant plus forte entre les deux feuilles ou el-
les eftoient qu'au dehors, auoit entierement fonduies
petits filets de glace qui les conioignoient, &ainfyles
auoit colleesenfemble. Comme aufly elle auoitaccour-
cy ceux qui conioignoient les autres, que i'auois vu
tornber immediatement auparauant. Or entre plufieurs
miliers de cespetites eftoiles queieconfiderayce iour
la,quoy que i'y prifle garde expreflemet,ie n'en pu iamais
rernarquer aucune qui euftplus ou moinsde fix rayons,
excepte" vn fort petit nombre de ces doubles qui en
auoient douze, & quatre ou cinq autres qui enauoient
huit. Et celles cy n'eftoient pas exacT:ementrondes,ain-
fy que toutes les autres, mais vn peu en ouale, & entiere-
ment relies qu'on les peut voir versO.d'ou ieiugay qu'el-
les s'eftoient forme'esenla conion&ion des extremite's
de deux feuilles, que le vent auoit pounces Tvne contre
rautreaumefmetems que la chaleur conuertiflbitleurs
petits pelotons en eftoiles. car elles auoient exaclrement
la figure que cela doit caufer. Et cete conionclrion, fe
faifant fuiuant vnelignetoutedroite, nepeuteftretant
empefche'e par l'oudoyement que caufent les vens, que
celle des parcelles d'vne mefme feuille:outre que la cha-
leur peut aufly eftre' plus grande entre lesbords dt ces
feuilles, quand elles s'approchent l'vnede l'autre,qu'aux
autresiieux, &■ cete chaleur ayant a derai fondu les par-
celles de glace qui y font, le froid qui luy fuccede au mo-
ment
-ocr page 310-
DlSCOHRS SlXIESME.                  2JI
ment qu'elles commencent afe toucher les peutayfe-
ment coller enfemble. Au refte outre les eftoiles dont
i'ay parle' iufques icy qui eftoient tranfparentes, il en
tomba vne infinite' d'autres ce iour la qui eftoient toutes
blanches comme du fucre, & dont quelques vnes auoient
apeu pres mefme figure que les tranfparentes, mais la
plus part auoient leurs rayons plus pointus, & plus delie's,
& fouuent diuifds, tantoft entrois branches, dont les
deux des cofte's eftoient replie'es en dehors de part, &
d'autre & celle du milieu demeuroit droite, en forte
qu'elles reprefentoient vne fleur delis, comme on peut
voir versR; &tantoft enplufieurs, qui reprefentoient
des plumes, ou des feuilles defougere, ouchofesfem-
blables. Et il tomboit auffyparmi ces eftoiles plufienrs
autres parcelles de glace en forme de filets, & fans autre
figure determine'e. Dont toutes les caufes font ayfees a
entendre, car pour la blancheurde ces eftoiles, ellene
procedoit que de ce que la chaleur n'auoit point penetre
iufques au fods de leur matiere, ainfi qu'il eftoit manife-
fte de ce que toutes celles qui eftoiet fort minces eftoiet
tranfparentes. Et fi quelque fois les rayons des blanches
rfeftoient pas moins cours & moufTes que ceux des tranf.
parentes, ce n'eftoit pas qu'ils fe fuffent autant fondus a
la chaleur, mais qu'ils auoient efted'auantage prefle's par
fcs vens: & communement ils eftoient plus longs & poin-
tus, a caufe qu'ils s'eftoientmoins fondus; Et lorfque ces-
royons eftoient diuife's en piufieurs branches, c'eftoit
que la chaleur auoit abandonne' les petits poils qui les
compofoient, fitoft qu'ils auoient commence'' a s'appro-
cher les vns des autres pour s'aflerabler- Et lors qu'ils
eftoient
-ocr page 311-
131                    Les Meteores."
eftoient feulement diuifes en trois branches, c'eftoit
qu'elle les auoit abandonne's vn peu plus tardjEt les deux
branches des coftes fe replioient de part & d'autre en de-
hors lorfque cete chaleurferetiroit, a caufe que la pro-
ximitc de la branche du milieu les rendoit incontinent
plus froides, &moins flexibles de fon cofte', cequifor-
moit chafque rayon en fleurdelis. Etlesparcellesde
glace qui n'auoient aucune figure determined, m'afTu-
roient que toutes les nues n'eftoiet pas compofe'es de pe-
tits noeus ou pelotons, mais qu'il y en auoit aufly qui n'e»
ftoient faites que de filets confufement entremeiles.
Pour la caufe qui faifoit defcendre ces eftoiles, la violen-
ce du vent qui continua tout ce iour la me la rendoit fort
manifefte,car ie iugeois qu'il pouuoit ayfement les defar-
renger & rompre les feuilles qu'elles compofbient, apres
les auoir faites,- & que fitoft qu'elles eftoient ainfy defar-
renge'es3penchant quelquun de Ieurs cone's vers la terre,
elles pouuoient facilement fendre l'air, a caufe qu'elles
eftoient toutes plates , & fe trouuoient aire's pefantes
pour defcendre . Mais s'il tombe quelquefois de ces
eftoiles en tems calme, c'eft que l'air de deflbus en fe re-
ferrant attire afoy toutelanue, ou que celuy de deffus
en fedilatantla pouffeenbas, &parmefmemoyenles
defarrenge. d'ou vient que pour lors elles out couftume
d'eftre fuiuies de plus de neige . ce qui n'arriua point ce
iour la. Le matin fuiuant il tomba des floccons de neige,
qui fembloient eftre compofe's d'vn nombre infini de
fort petites eftoiles iointes enfemble: toutefois en y re-
gardant de plus presie trouuay que celles du dedans n'e-
ftoient pas fi regulierement forme'es que celles du def-
fus, &
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D I SCOURS SlXIESME.                   2$$
fas, &: qu'elles pouuoientayfement proceder de la dif-
folution d'vne nue femblable a celle qui a efte* cy deflus
marquee G. Puis cete ueige ayant cefTe, vn vent fubit J°y^ C!»
en forme d'orage fittomber vnpeu de grefle blanche, delfpagc
fortlongue, & menue, dont chafque grain auoit la figu- iZ4-
re d'vn painde fucre. & l'air deuenant clair &; ferein tout
auffy toft, ieiugay que cete grefle s'eftoit forme'e de la
plus haute partie des nues, dont la neige eftoit fort fub-
tile, & compofee de filets fort delids, en la facon que i'ay
tantoft defcrite. Enfinatroisioursdela.voyant tomber
de la neige toute corapofe'e de pedes noeuds ou pelotons
enuironne's d'vn grand nombre de poils enrremefie's&
qui n'auoient aucuue forme deftoiles, ie me confirmay
en lacreauce de tout ceque i'auois imagine" touchant
cetematiere..
Pour les nues qui ne font compofe'es que de gouttes
d'eau, il eft ayfe a entendre de ce que iay dit comment
ellesdefcendentenpluierafcauoir,, ou par leur propre
pefanteur, iorfque leurs gouttes fe trouuent afles grof-
fesj ou parceque l'air qui eft deffous en fe retirant,ou ce-
luy qui eft deflus en les preflTant, leur donnent occafion
des'abaifTer;ou parceque plufieurs de ces caufes con-
courent enfemble. Et e'eft quand l'air du deflbus fe re-
tire, que fe fait la pluiela plus menue qui puifle eftre,
car mefmeelleeft alors quelquefois fi menue, qu'onne
dit pas que ce foit de la pluie, mais plutoft vn brouillar
qui defcendj comme au contraire elle fe fait fort grofle,
quand la nue ne s'abaifle qu'a caufe qu'elle eft prefle'e
par l'air dudeffbs, carles plus hautesde fes gouttes des-
cendant les premieres, en rencontrent d'autres qui les
Gg                   grof-
-ocr page 313-
234                    Les Mete ores.
groffiflent. Et de plus iay vu quelquefois en efte , pen-
dant vn tems calme accompagne d'vne chalcur pefantc
& eftoufante, qu'il eommencoit a toniber de telle pluie,
auantmefme qu'il euft para aucune nue.dont la caufe
eftoitqu'yayantenl'airbeaucoupde vapeurs, qui fans
doute eftoient preffees par Ies vens des autres lieux, ain-
fi que le calme & la pefanteur de l'air le tefmoignoient,
les gouttes en quoy ces vapeurs fe conuertiffoient de-
uenoient fort groffes en tombant, Sc tomboient a mefu-
re qu elles fe formoient.
Pour les brouillars, lorfquela terre en fe refroidiffant,
& l'air qui eft dans fes pores fe referrant, leur donne mc-
yendes'abaiffer, ilsfe conuertiffent en rozee s'ils font
comppfds de gouttes d'eau, & en bruineou gelde blan-
che s'ils font compofe's de vapeurs defia gelees, ou plu-
toft qui fe gelent a mefure qu'elles touchent la terre. Et
cecy arriueprintipalementlanuitou le matin, a caufe
que c'eft le tems que la terre en s'efloignant du foleil fe
reft oidift.Maisle vent abat auffy fort fouuent les brouil-
Jas , en furuenant aux lieux ou ils font : & mefme il
peuttranfporterleurmatiere, Stenfairede la rozee ou
de lagelee blanche, en ceuxou ils n'ont point efte' aper-
ceus: & on voit alorsque cete gelee ne s'attache aux
plantes, quefurlescofte'squele venttouche.
Pour le ferein, qui ne toinbe iamais que le foir 5& ne fe
connoift que par les reumes & les maux de telle qu'il
caufe en quelques contre'es, il ne confifte qu'en certai-
nes exhalaifons fubt'iles & penetrantes,qui eftant plus fi-
xes que les vapeurs, ne s'efleuet qu'aux pais afTds chauds
& aux beaux iours3 & qui retombent tout auffy toft que
la
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DlSCOURS SlXIEME.                      2jf
la chaleurdu foleil les abandonne. d'ou vient qu'il a di-
uerfes qualite's en diners pais, & qu'il eft mefme in-
connuenplufieurs, felonies differences des terres d'ou
fortent ces exhalaifons. Et ie ne dis pas qu'il ne foit fou-
uent a ccompagne' de la roze'e, qui commence a tomber
des le foir, mais bien quece n'eft nullement elle qui cau-
fe tes maux dont on l'accufe. Ce font auffy des exhalai-
fons qui compofent la manne, & les autres tels fucs, qui
defcendent de l'air pendant la nuit; car pour les vapeurs,
elles ne fgauroient fe changer en autre chofe qu'en eau
oti en glace. Et ces fucs non feulement font diuers en
diuers pai's, mais aufTy quelques vns ne s'attachent qu'a
certains cors,a caufe que leurs parties font fans doute de
telle figure, qu'elles n'ont pas affe's de prife contre les
autres pour s'y arefter.
Que fi la roze'e ne tombe point, & qu'on voye au ma-
tin les brouillas s'efleuer enhaut, & laiffer Iaterre toute
effuiee,c'eftr]gnedepkrie*. carcela n'arriue gueresque
lorfque Iaterre , ne s'eftant point affe's refroidie Ianuit,
oueftant extrordinairement efchauffe'e le matin, pro-
duift quantity de vapeurs, qui repouffant ces brouillas
vers leciel font que leurs gouttes en fe rencontrant fe
groffiffent> & fe difpofent a tomber en pluie bientoft
apre's. C'eft auffy vnfignedepluie devoir que noftre
air eftant fort charge'de nues, Ie foleil ne laiffe pas de
paroiftre affe's clair de's lematin. car c'eft a dire qu'il n'y
a point d'autres nues en l'air voyfin du noftre vers
^'Orient, qui empefchent, que la chaleur du foleil ne
condenfe cellesqui font au deffus de nous, & mefme
■au-fly qu'elle n'efleue de nouuelles vapeurs de noftre
G g 2                    terre
*
-ocr page 315-
x^6 .                 Les Meteores.
terre qui les augmente . Mais cete caufe n'ayant
lieu que le matin , s'il ne pleut point auant midy, elle
ne peut rien faire iuger de ce qui arriuera vers le
foir. Ie ne diray rien de plufienrs autres fignes de
pluie qu'on obferue , a caufe qu'ils font pour la plus
part fort incertains. & fi vous confideres quelamef-
me chaleur qui eft ordinairenient requife pour con-
denfer les nues & en tirer de la pluie , les peut auf-
fy tout au contraire dilater & changer en vapeurs, qui
quelquefois fe perdent enl'airinfenfiblement, &quel-
quefois y caufent des vens , felon que les parties de
ces nues fe trouuent vn peu plus preffees, ou efcar-
te'es, &; que cete chaleur eft vn peu plus ou moins
accompagnee d'humidite', & que l'air qui eft aux en-
uirons fe dilate plus ou moins , ou fe condenfe -} vous
connoiftrds bien que toutes ces chofes font trop va-
riables & incettaines , pour eftreafleurement preven-
ts par les hommes.
             
DES TEMPESTES , DE LA
Foudre, Sc de tous les autres feux
qui s'allumenc en lair. .
DifcoursSeftiefme..
AU refte ce n'eft pas feulement quaud les nues fe
difToluent en vapeurs quelles caufent des vens,mais
elles peuuent auffy quelquefois s'abaifTer fiacoup,qu'el-
leschafTentauecgran.de violence tout l'air qui eft fous
clles,.
*
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DiscoursSeptiesme.               2. 37
elles, & encompofent vn venttresfort, mais peu dura-
ble, dontl'imitationfe peutvoir en eftendant vn voile
vnpeuhautenl'air, puisdelale laiffant defcendre tout
plat vers laterre. Les fortes pluies font prefque tou-
fiours precedees par vn tel vent,qui agift manifeftetnent
dehautenbas, & dont la froideur rnonftre aftes qu'il
vient des nues , ou l'air eft communement plus froid
qu'autour de nous. Et c'eft ce vent qui eft caufe que
lorfque les hirondelles volent fort bas, elles nous auer-
tiiTent de la pluie. car ii fait defcendre certains mou-
fcherons dont elles viuent, qui ont couftume de prendre
I'eflbrr, & de s'efgayer au haut de l'air quand il fait beau.
C'eft Iuyaufly qui quelquefois,, lors mefme que-la nue
eftant fort petite, ou ne s'abaiiTant que fort peu, il eft fi
foible qu'on ne Ie fent quafi pas en fair libre, s'enton-
nant dans les tuyans des cheminees, fait iouer les cen-
dres & les feftus qui fe trouuent au coin du feu, & y exci-
te comme de petits tourbillons affe's admirables pour,
ceux qui en ignorentla caufe, & qui font ordinairement
fuiuisdequelque pluie. Mais fi la nue qui defcend eft
fortpefante& fort eftendue, (comme elle peut eftre
plus ayfement fur les grandes mers qu'aux autres lieux,
a caufe que les vapeursy eftant fort efgalement difper-
fees,fi toft qu'il s'y forme la moindre nue en quelque en-
droit,elle s'eftend incontinent en tons les autres circon-
voyfins) cela caufe infalliblement vne tempefte; laquetf-
le eft d'autant plus forte, que la nue eft plus grande &
plus pefante ■, & dure d'autant plus longtems, quelanue
defcend de plus haut. Et c'eft ainfi que ie m'imagine
que fe font ces tranades, que les mariniers craignent tant
G g 3                 • «a
-ocr page 317-
338                      Les Meteores.
•en leors grans voyafges, particuherement vn pcu au de-
la du cap de bonne efperance, oulesvapeurs qui s'efle-
nent dela merEthiopique, qui eft fore large & fort e-
fchauffee par Iefoleil, peuuentayfement caufer vn vent
d'abas,qui areftant le cours naturel de celles qui vienent
de la mer deslndes les a (Tenable en vne nue,laquelle pro-
cedant de I'inefgalite qui eft entre ces deux grandes
mers.& ceteterre, doit deuenir incontinent beaucoup
plusgrande, que celles qui feforment en ces quartiers,
ou. ellesdependentdeplufieursmoindresinegalites, qui
font entre nos pleines, & nos lacs, & nos montaignes. Et
pourcequ'ilnefevoitquafi ianiais d'autres nues en ces
lieux la, li toft que les mariniers y en appercoiuent quel-
qu Vne qui commence a le former, bienqu' elle paroifle
quelquefois li petite que les Flamens l'ont compared a
Toeil d'vn beuf, duquel ils lny ont donne" Ie nom, & que
le refte de fair lemble fort calme & fort ferein, ils fe haf-
tent d'abatreleurs voiles, & fe preparent a receuoir vne
tempefte, qui ne manque pas de fuiure tout aufly toft.
Et mefme ie iuge qu elle doit eftre d'autant plus grande,
que cete nue a paru au commencement plus petite- car
nepouuant deuenir afles efpaiffe pour obfeureir l'air &
eftre vifible, fans deuenir aufly afles grande, elle ne peut
paroiftre ainfi petite qu'a caule de fon extreme diftance,-
&vousfcaues que plus vncors pefautdefcend de haur,
plus fa cheute eft impetueufe. Ainfi cete nue eftant fort
haute, &deuenant fubitement fort grande & fort pefan-
te, defcend toute entiere, en chaflant auec grande vio-
lence tout l'air qui eft fbus elle , & caufant par ce moyen
le vent d Vne tempefte. Melmeil eft a remarquer que
-ocr page 318-
Disc ours Septiesme.             2.-39
lesvapeurs,mefleesparaiicet-air, font dilates parfon
agitation, & qu'il en fort aufly pour lors plufieurs autres
de la mer.a caufe de l'agitation de fes vagues, ce qui au-
gmente bcaueoup la force du vent, 6c retardant la def-
cente de la ntie , fait durer l'orage d'autant plus long
terns. Puis aufly qu'il y a d'ordiuaire des exhalaifons
meflees parmi ces vapeurs, qui ne pouuant eftre chaflees
filoinqu'ellesparlanue, a caufe que leurs parties font
moins folides,& ont des figures plus irregulieres, en font
feparees par l'agitation de 1'air, en mefme fac,on que,
comme il a efte'dit cy defTus, en battant la creme on fe-
parelebeurredu petit lait 5 & que par ce moyen elles
s'affernblentparcy par la en diners tas, qui flotanstou-
frourskplus haut qu'il fe peut contre la nue, vienent en-
fin s'attacherauxchordes&aux mats des nauires, lors-
qu'elle acheue de defcendre. Et la eftant embrafes par
cete violente agitation,ils compofent ces feux norrirne's
de faint Helme, qui confolent les matelots,. & leur font
efperer le beau terns. II eft vray que fouuent ces tempe-
ftes font en leur plus grande force vers la fin, & qu'il peut
yauoirplufieursnuesrvnefurrautre5fous chafcune def-
quellesilfetrouue detelsfeux.ee qui a peuteftreefte' la
caufe pourquoy les anciejis n'en voyant quVn, qu'ils
nommoientraftred'Helene3iIsreftimoient de mauuais
augnre, comme s'ils eufTent encore attendu alors le plus
fortdelatempefte. Aulieu que lorfqu'ils en voyoicnt
deux, qu'ils nommoientCaftor 82 Pollux, ilsies prenoi-
ent pour vn bon prefage. car e'eftoit ordinairement le
plus qifils en viffent, except^ peuteftre lorfque l'orage
eftoit extrordinairement grand qu'ils en voyoicnt trois,.
5c
-ocr page 319-
240                     Les Meteores.
&leseftimoientauffyacaufedecela de mauuais augu.
re. Toutefois iay ouy dire a nos mariniers qu'ils en vo-
yent quelquefois iufques au nombre de quatre on de
cinq, penteftre a caufe que leurs vaifTeaux font plus gras,
&t ont plus de mats que ceuxdesanciens, ou qu'ils voy-
afgentendeslieuxoulesexhalaifons font plus frequen-
tes. Car enfin ie ne puis rien dire que par conie&ure de
ce qui fe fait dans les grandes mers que ie n'ay iamais
veues. & dont ie n'ay que des relations fort imparfaites*
Mais pour les orages qui font accompaigne's de ton-
nerre,d'efclairs, detoui-billons, &de foudre, defquels
iay pu voir quelques exemples fur terre , ie nedoute
point qu'ils ne foient caufds de ce qu'y ayant plufieurs
nuesrvnefurl'autre, il arriue quelquefois que les plus
hautes defcendent fort a coup fur les plus bafFes. Com-
me fi les deux nues A & B n'eftant compofees que de
neige fort rare & fort
eftendue , il fe trouue
\MMiM$M&%y}           vn air plus chaud au-
tpur de la fuperieure
„...............................           A, qu'autour de Tinfe-
vii&:&^%&&*&           rieure B, il eft euident
que la chaleur de cet
H air la peut condenfer &
appefantir peu a peu,en
telle forte que les plus
hautes de fes parties , commenceant les premieres a
defcendre, en abbatront ou entraifneront auec %
quantitc'd'autres, quitomberont aufTy toft toutes en-
femble auec vn grand bruit fur finferieure. En mefme
fa§on
-ocr page 320-
Discours Septiesme.                441
fagon que ie me fouuien d'auoir vii autrefois dans les
Alpes, enuiron Ie mois de May, que les neiges eftant
efchaufFees & appefanties par le foleil, la moindre efmo-
tiond'air eftoit fuffifante pour en faire tomber fubite-
ment degrostas, qu'onnommoit ce me femble des aua-
lanches,& qui retentifTant dans les valees iraitoient afTes
bien le bruit du tounerre. En fuite dequoy on peut en-
tendre pourquoyiltonne plus rarement en ces quartiers
Thytier que i'efte'. caril ne paruient pas alors fi ayfement
afTes de chaleur iufquesauxplus hautes nues, pour les
diffoudre. Etpourquoy, lorfque pendant les grandcs
chaleurs,apresvn vent Septentrional qui dure fort peu,
on fent derechef vne chaleur moite & eftouffante, c'eft
figne qu'il fuiurabientoft du tonnerre. Car cela tefraoi-
gne que ce vent feptentrioual, ayant pafTd contre la ter-
pen a chau^la chaleur vers I'endroit de l'air on fe fer-
ment les plus hautes nues, & qu'en eftant apre's charTe'
luy mefme, vers celuy ou ie forment les plus baffes, par
la dilatation de Fair inferieur que caufent les vapeurs
chaudes qu'il contient, non feulement les plus hautes en
fe condenfant doiuent defcendre , mais aufly les plus
baffes demeurant fort rares, & mefme eftant comme
foufleue'es St repoufTe'esparcete dilatation de l'air infe-
rieur, Ieur doiuent refifter en telle forte, que fouuent el-
les peuuent empefcher qu'il n'en tombe aucune partie
iufquesaterre. Etnote'sque le bruit, qnife faitainfiau
deffus de nous, fe doit mieux entendre, a caufe de la re-
fonnance de Fair, & eftre plus grand a raifon de la neige
qui tombe, que n'eft celuy des aualanches. Puis notes
ainTyque decela feul,que les parties des nues fuperieures
Hh                      torn-
-ocr page 321-
...... ......■■-,«. ■ ■.■■■■■<----------------------..                                        ■■■■:" ■■■'■■.-...... -■....-■ ,-
%\t                   Les Meteores.
torn bent toutes enfenible, ou l'vne aprcs l'autre, ou plus
vifte, ou plus lentement ■, & que les inferieures font plus
ou moins grandes, & efpaiffes, Sc refiftent plus on moins
fort, tous les differens bruits du tonnerre peuuent ayfe«
merit eftre caufes. Pour les differences desefclairs, des
tourbillons, &de!afoudre, ellesne dependent que de
la nature des exhalaifbns qui fe trouuent en l'efpace qui
eft entre deux nues,& de la fa§ on que la fuperieure tom-
be fur l'autre. Car s'il a precede de grandes chaleurs &
feichereffes, en forte que cet efpace contiene quantite"
d'exhalaifons fort fubtiles, & fort difpofe'es a s'enflamer,
la nue fuperieure ne peut quafi eftre fi petite, ny defcen-
dre fi lentement, que chaffant l'airquieft entre elle &
l'inferieure, elle n'en face fortir vn efclair, c'eft a dire,
vne flame legere qui fe diflipe a l'heure mefme. En forte
qu'on peut voir alors de tels efclairs fans ouir aucune-
mentle bruit dutonnerre;Et mefme auffy quelquefois
fans que les naesfoientaffe's efpaiffes pour eftre vifibles.
Comme au contraire s'il ny a point en l'air d'exhalaifons
qui foient propres a s'enflamer, on peut ouir le bruit du
tonnerre fans qu'il paroiffe pour cela aucun efclair. Et
lorfque la plus haute nue ne tombe que par pieces qui
s'entrefuiuent, elle ne caufe gueres que des efclairs & du
tonnerre,- mais lorfqu'elle tombe toute entiere & aff^s
vifte, elle peut cauferauec cela des tourbillons &de la
foudre. Car il faut remarquer, que fes extremite's, com-
me C &D, fedoiuentabaiffervn pen plus vifte que le
milieu, d'autant que fair qui eft deffous, ayant moins de
chemin a faire pour en fortir, leur cede plus ayfement, &
ainfi que venant a toucher la nue inferieure, plutoft que
ne
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Discours Septiesme.              243
nefaitle milieu, il s'enfermebeaucoup d'airentre deux,
commeonvoit icy vers E; puis cetaireftant prefTe &
chaffeauecgrande force par ce milieu de la nne fupe-
rieure qui continue encore a defcendre , il doit necef-
fairemer.t rompre l'inferieure pour en fortir, comme
on voit vers Fjou entrouurir quelqu'vne de fes extremi-
tds, comme on voit vers G. Et lorfqu'il a rompu ainfi
cete nue il defcend auec grande force vers la terre, puis
delaremonteentournoyant,acaufe qu'il trouue dela
refiftencedetouscoftes, qui 1'empefche de continuer
fon mouuement en ligue droite, auffy vifte que fori agi-
tation lerequert. Et ainfi ilcompofevntourbillon; qui
peut n'eftre point accompaigne de foudrenyd'efclairs,
s'il n'y a point en cet air d'exhalaifons qui foient propres
a s'enflamer;Mais lorfqu'il y en a,elles s'affembleut tou-
tesen vntas, & eftant chafTdes fort impetueufement
auec cet air vers la terre , elles component la foudre.
Et cete foudre peut brufler les habits & razer le poii
fans nuireaucors,ficesexhaIaifons, qui out ordinaire-1
Hh 2                    ment
-ocr page 323-
144                     -LES Meteores.
ment l'odcur du fouffre, ne font que graffes & huilenfcs,
en forte qu'elles compofent vne flame legere qui ne
s'attache qu'aux corsayfdsa brufler. Comme au con-
traireellepeutropreles osfans endommager les chairs,
ou fondre I'efpe'e fans gafter le fourreau, fi ces exhalai-
fonseftant fort fubtiles & penetrantes, ne participent
que de la nature des fels volatiles ou des eaux fortes, au
moyeudequoyne faifant aucun effort contre les cors
qui leur cedent, eiles brifent & diffoluent tous ceux qui
leurfontbeaucoupderefiftence. Ainfi qu'on voitl'eau
forte diffbudre les rnetaux les plus durs, & n'agir point
contrelacire. Enfinlafoudrefepeut quelquefois con-
uertir en vne pierre fort dure , qui romp & fracaffe tout
cequ'elle rencontre, fiparmi ces exhalaifons fort pene-
trantes il y en a quantite'de ces autres qui font graffes &
enfbuffre'es. principalement s'il y en a auffy de plus
groffieres, femblables a cete terre qu'on trouue au fonds
de I'eau de pluie Iors'qu'on la laiffe raffeoir en quelque
vaze. Ainfi qu'on peut voir par experience , qu'ayant
mefld certaines portions de cete terre,de falpetre, & de
fouffre, fi on met le feu en cete compofkion, ii s'en for-
me fubite ment vne pierre. Quefilanues'ouure par le
cofte', comme vers G, la foudre eftant eflancee de tra-
uers, rencontre plutoft les pointes des tours ou des
rochers que les lieux bas, comme on voit vers H. Mais
lors mefme que la nue fe romp par le'defTous, il y a raifon
pourquoy la foudre tombe plutoft fur les lieux hauts&
eminens que fur les autres. Carfi par exemple la nue B
n'eft point d'ailleurs plus difpofee a ferompre en vn en-
droit qu'en vn autre,il eft certain qu'elle fe deura rompre
en
-ocr page 324-
Discours Septiesme.           245-
ea celuy qui eft marque' F, a caufe de la refiftence du
clocher qui eft audeffous. 11 y a auffy raifon ponrquoy
chafque coup de tonnerre eft d'ordinaire fuiui d'vne on-
dee de pluie, & pourquoy lorfque cete pluie vient fort
abondante, il ne tonne gueres plus d'auantage. car fi la
force, dont la nue fuperieure esbranfle l'inferieure en
tqmbantdeffus,efta{Tesgrande pourlafaire tonte def-
cendre, ileft euident.que le tonnerre doit ceffer; & fi
elle eft moindre, elle ne laifTe pas d'en pouuoir fouuent
faire fortir plufienrs floccons de neige, qui fe fondant en
l'air font de la pluie. Enfin ce n'eft pas fans raifon qu'on
tient que le grand bruit, comme des cloches, ou des ca-
nons, peutdiminuerl'effeclrde la foudre. car il ayde a
diffiper & faire tomber la nue inferieure, en esbranflant
la neige dont elle eft compofe'e. Ainfi que f§auent afTes
ceux qui out couftume de voyafger dans les vale'es ou Ies
aualanches font a craindre. car ils s'abftienent rnefme
deparler&detouflerenypaiTant, depeur que le bruit
de leur voix n'efmeuue la neige.
Hh 3                    Mais
»
-ocr page 325-
24<*                     Les Meteores.
Mais comme nous auons defia remarque* qu'il efclaire
quelquefoisfansqu'iltonne, ainfiaux endroits de l'air
ouilfe rencontre beaucoupd'exhalaifons & peu de va-
peurs, il fe peut former des nues fi peu efpaifTes, $c fi le-
geres, que tombant d'afle's haut l'vne fur l'autre elles ne
fontouir aucun tonnerre, ny n'excitent en i'air aucun
orage , nonobftant qu'elles enueloppent & ioignent en-
femble plufieurs exhalaifonsjdont elles compofent non
feulement de ces moindres flames qu'on diroit eftre des
eftoilesquitombentduciel, ou d'autres qui letrauer-
fent, mais auffy des boules de feu affe's grofTes,& qui par-
uenant iufques a nous font comme des diminutifs de la
foudre. Mefme d'autant qu'il y a des exhalaifbns de
plufieurs diuerfes natures, ie ne iuge pas qu'ilfoit impof-
fible,que lesnues, en les prefTant, n'en compofent quel-
quefois vne matiere, qui felon la couleur, & la confluen-
ce qu'elle aura, femble du lait,ou du fang, ou de la chair;
oubien qui en fe bruflant deuiene telle qu'on la prepc
pourdufer, oudespierres; ou enfin qui en fe corrom-
pant engendre quelques petits animaux en peu de
terns. Ainfi qu'on lift fouuententre les prodiges qu'il a
plu du fer, ou du fang, ou des fauterelles, ou chofes fem-
blables. De plus fans qu'il y ait en i'air aucunenue, les ex-
halaifons peuuent eftre entaffees & embrafe'es par Ie feul
fouffle des vens, principalement lorfqu'il y en a deux ou
plufieurs contraires qui fe rencontrent.Et enfin fans vens
& fans nues, par cela feul qu'vne exhalaifon fubtile & pe-
netrante, qui tient de la nature desfels, s'infinue dans les
pores d'vne autre, qui eft gralfe &c enfouffree , il fe pent
former des flames legeres tant au haut qu'au bas de l'air,
comme
-ocr page 326-
Discours Septiesme.              247
commeony voit au haut ces eftoiles qui le trauerfent;
fcaubastant ces ardans ou feux folets qui s'y iouent,
que ces autres qui s'areftent a certains cors, comme aux
cheueux des enfans,ou au crin des cheuaux,ou aux poin-
tes des picques qu'on a frotees d'huile pour les nettoyer,
ouachofesfemblables. Car il eft certain,que non feu-
lement vne violente agitation,mais fouuent aufly le feul
meflangede deux diuers cors eft fuffifant pour les em-
brafer. comme on voit en verfantde I'eau fur de la
chaux, ou renfermant du foin auant qu'il foit fee , ou en
vne infinite" d'autres exemples qui fe rencontrent tous
les iours en la Chymie. Mais tous ces feux ont fort pen
de force a comparaifon de la foudre. dont la raifon eft
qu'ils ne font compofes que-des plus molles & plus
gluantes parties des huiles; nonobftant que les plus viues
&plus penetrantes des fels coucourent ordinairement
auffy a les produire. Carcellescyne s'areftent pas pour
celaparmi les autres, mais s'efcartent promptement en
rairlibreaprdsqu'elleslesont embrafe'es. Au lieu que
la foudre eft principalement compose de ces plus viues
& penetrantes, qui eftant fort violemment preflees &
Chaffee s par les nues,emportent les autres auec foyiuf-
qu'aterre. Etceux quifcauentcombien le feu du fal-
petre &dufouffremefle'senfembie a de force &devi-
teffe, au lieu que la partie grafle du fouffre eftant fepa-
re'e de fes efprits en auroit fort peu^ ne trouueront en ce-
cyriende douteux. Pour la duree des feux qui s'are-
ftent ou voltigent autour de nous, elle peut eftre plus ou
moins longue , felon que leur flame eft plus ou moins
lente, & leurmatiere plus. 011 moins, efpaifle & ferre'e:
Mais
-ocr page 327-
248                  E-Es Meteores.
Mais pour celledesfeux qui nefe voyent qu'au haut de
l'air, ellenef$auroiteftre quefortcourte,acaufequefi
leur matiere n'eftoit fort rare,leur pefanteur les feroit
delcendre. Et ie trouue que les Philofophes ont eu rai-
fon, de les comparer a cete flame, qu'on voit courir tout
dulong dela fume'e, qui fort d'vn flambeau qu'on vient
d'efteindre,torfqu'eftant approche'e d'vn autre flambeau
elle s'allume- Mais ie m'eftonne fort,qu'apres cela ils
ayentpus'imaginer, que les Cometes , &les colomnes
ou cheurons de feu, qu'on voit quelquefois dans de del,
fuffent compofe'es d'exhalaifons,car clles durent incom-
parablement plus long tems.
Et pourceque iay tafche' d'expliquer curieufement
leur "production & leur nature dans vnautre traite",&
J
                      que ie ne croy point qu'elles apparticnent aux meteores,
nonplus que les tremblemens de terre, & les mineranx,
queplufieursefcriuainsy entaffent, ie ne parleray plus
icy que de certaines lumieres, qui paroiflant la nuit pen-
dant vn tems calme & ferein, donnent fuiet aux peuples
oyfifs d'imaginer des efquadrons de fantofmes qui com-
battent en l'air, & aufquels ils font prefager la perteou
la victoire du parti qu'ils affection nent , felon que la
erainteou I'efperancepredomineenleurfantaifie. Mef-
me a caufe que ie n'ay iamais vu de tels fpecl:acles,& que
ie fcay combien les relations qu'on en fait ont conftunie
' d'eftre falfifie'es & augmentdes par la fuperftition &
I'ignorance, ie me contenteray de toucher en peu de
mots toutes les caufes, qui me femblent capables de les
produire. La premiere eft qu'il y ait en l'air piufieurs
nues, aire's petites potireftre prifes pour au.tant-de.fol-
dats,
-ocr page 328-
Discours SepTiesme.               149
dats,&quitombantl'vnefur l'autre, enueloppent affes
d'exhalaifons, pour caufer quantite' de petis efclairs, &
ietter de petits feux & peuteftre auflfy faire oui'r de pe tits
bruits, au moyen dequoy ces foldats femblent comba-
tre. La feconde, qu'il y ait aufly en I'air de telles nues,
maisqu'aulieudetomberi'vne fur l'autre, elles recoi-
nent leur lumiere des feux & des efclairs de quelque
grande tempefte, qui fe face ailleurs fi loin de la , quelle
n'y puifle eftre apperceue.Et la troifiefme, que ces nues,
ou quelques autres plus feptentrionales de qui elles re-
§oiuent leur lumiere, foientfihautesque les rayons du
foleii paruienent iufques a elles. car fi on prend garde aux
Refractions & Reflexions que deux ou trois telles nues
peuuent caufer, on trouuera qu'elles n'ont point befbin
d'eftreforthautes, pour faire paroiftre vers le Septen-
trion de telles lumieres, apres que Theure du crepufcule
eft pafleej & quelquefois aufly le foleii mefme, au terns
qu'il doit eftre couchd. Mais cecy ne femble pas tant
appartenir a ce difcours qu'aux fuiuans,ou iay deflein de
parler de toutes les chofes qu'on peut voir dans l'air fans
qu'ellesyfoient;apre; auoiricyacheueTexplication de
toutes celles qui s'yvoyenti en mefme facon qu'elles y
font.
li                   DE
-ocr page 329-
ijQ                  Les Meteores.
" DE L'ARC-EN-CIEL;
'Difcours Huitiefme.
L'A r c-e n-c i e l eft vne merueille de la nature fi re-
marquable, & fa caufe a eftd de tout tems fi curieufe-
meutrecherchdeparlesbonsefprits, & fi peu connue,
que ie ne fgaurois choifir dematiere pluspropre afaire
voir comment par la methodedont ie me fers on petit
venir a des connoifTances, que ceux dont nous auons les
efcrits n'ont point enes. Premierement ayant confide-
re'que cet arc ne peut pas feulement paroiftre dans le
ciei, mais aufly en 1'air proche de nous toutefois &
quantes qu'il s'y trouue plufieurs gouttes d'eau efclai-
rees par le foleil, ainfi que l'experience fait voir en quel-
ques fontaines: ilnfaefte' ayfe'deiuger, qu'il ne proce-
dequedelafa§on que les rayons de la lumiere agiflent
contre ces gouttes & de la tendent vers nos yeux. Puis
fcachant que ces gouttes font rondes, ainfi qu'il aeftd
prouue'cy deflus, & voyant que pour eftre plus groffes
ou plus petites elles ne font point paroiftre cet arcd'au-
tre fa§on; ie me fuis auife' d'en faire vne fort groffe, affin
dela pouuoir mieux examiner. Et ayant rempli d'eau,a
cet effect, vne grande fiole de verre toute ronde & fort
tranfparente, iay trouue'qnele foleil venant, par exem-
ple^e lapartie da ciel marquee A F Z,&mon ceil eftant
au point E, lorfque ie mettois cete boule en l'endroit
B C D, fa partie D me paroiflbit toute rouge, 8c incom-
parablement plus efclatante que le refte; Et que foit que
-ocr page 330-
DlSCOURS HUITIESME.               ZfX;
iel'approchaffe, foit que ie la reculafTe, & que ie la mifle
a droit, ou a gauche, ou mefnie la fifTe tourner en rond
autour de ma tefte, pourvuque la Iigne DEfift toufiours
vn angle d'enuiron \z degrees auec la ligne E M, qu'il
faut imaginer tendre du centre de 1'ceilvers celuy du
foleil , cete partie D paroiflbit toufiours e fgalement rou-
ge; Mais que, fitoft que ie faifois cet angle DEM tant
foit peu plus grand, cete rongeur difparoi libit; &quefi
iele faifois vn peu raoindre, elle ne difparoiflbit pas du
Ii 2               tout
-ocr page 331-
*fi                    Les Mete ores.
toutfi a coup, mais fe diuifoit auparauant comme en
deux parties, moras brillantes , & dans lefquelles on
voyoitduiaune,dubleu, &d'autres couleurs. Puis re-
gardant aufly vers Tendroit de cete boule qui eft marque*
K,iayapperceuque faifant Tangle KEM d'enuiron j-2
degre's,cetepartie K paroiflbit aufly de couleur rouge,
mais non pas fiefclatante que D: Et que le faifant quet-
qne peu plus grand, il y paroiflbit d'autres ceuleurs plus
foibles j mais que le faifant tant foit peu moindre, ou
beaucoup plus grand, iln'y en paroiflbit plus aucunc.
D'ou i'ay connu manifeftement que tout l'air qui eft
vers M eftant rempli de telles boules, ou en Ieur place de
gouttes d'eau, il doit paroiftie vn point fort rouge &
fortefdatantenchafcunedecellesdeces gouttes dont
les lignes tirees vers Tosil E font vn angle d'enuiron 4*
degres auec E M, comme ie fuppofe celles qui font mar-
quees R; Et que ces poins eftans regardes tous enfem-
ble, fans qu'on remarque autrement le lieu ou ih font
que par Tangle fbus lequel its le voyent, doiuent pa-
roiftre comme vn cercle continu de couleur rou-
ge : Et qu'il doit y auoir tout de mefme des poins en
celles qui font marque'es S &T, dont les lignes tirees
vers E font des angles vn peu plus aygus auec E M,
qui compofent des cercles de couleurs plus foibles.
Et que c'eft en cecy que confide le premier & princi-
pal arcenciel. Puis derechef que Tangle M E X eftant
de ft degrds , il doit paroiftre vn cercle rouge dans
les gouttes marque'es X, Et d'autres cercles de cou-
leurs plus foibles dans les gouttes marque'es Y. Et
que c'eft en cecy que eonfifte le fecond & moras
princs-
-ocr page 332-
DlSCOURS HuiTIESME.              i/3
principal arcenciet. Et enfinqu'en toutes Ies autres
gouttes marquees V il ne doit paroiftre aucunes cou-
leu/s. Examinant apre*scelaplusparticulierementenla
boule B C Dcequifaifoit que ta partie D paroiflbit rou-
ge, i'ay trouu^ que c'eftoient hs rayons dufoleil quive-
nansd'A vers B fe courboient en entrant dans Peau au
point B, & alloient vers Qd'ou ils fe reflefchiflfoient vers
B, &Ia fe courbans derecbef en fortant de Teau, ten<-
ioientversE; carfkoftqueie m-ettois vn cors opaque
I i 3                         on
-ocr page 333-
2|4                    LesMeteores.
. on obfctir en quelque endroit des lignes A B, B C, C D,
ou D E, cete couleur rouge difparoiflbit. Et quoy que
ie couurifTe tonte la boule excepte les deux poins B & D,
& que ie mifle des cors obfcurs partout ailleurs, pourvu
que rien n'empefchaft Taction des rayons ABCDE,
elle ne laiflbit pas de paroiftre. Puis cherchant aufly ce
qui eftoit caufe du rouge qui paroiflbft vers K, i'ay trou-
ue'quec'eftoient les rayons quivenoient d'F versG, ou
ils fe courboient vers H, & en H fe reflefchiflbient vers
I, & en I fe reflefchiflbient derechef vers K, puis enfin fe
courboient au point K>& tendoient vers E. Defagon
que Ie premier arc-en-ciel eft caufe" par des rayons qui
paruienent a l'ceil apre's deux refractions & vne refle-
xion , & le fecond par d'autres rayons qui n'y paruienent
qtfapre's deux refractions & deux reflexions; ce qui em-
pefche qn'il ne paroifle tant que le premier.
Mais la principale difficultereftoit encore, qui eftoit
de f§ auoir pourquoy, y ayant plufieurs autres rayons qui
apre'sdeux refractions & vne ou deux reflexions peuuent
fendre vers l'ceil quand cete boule eft en autre fitua-
tion, il n'y a toutefois que ceux dont i'ay parle'qui facent
paroiftre quelques couleurs. Et pour la refoudrei'ay
cherche', s'il n'y auoit point quelque autre fuietou elks
paruflenten mefmeforte, afRnque par la comparaifoa
dei'vn&del'autreie puflemieux iuger de leur caufe.
Pui$ me fbuuenant qu'vn prifme ou triangle de criftal en
fait voir defemblables, i'en ay confidere vn qui eftoit
telqu'efticy MNP, dont les deux fuperficies MN &
N P font toutes plates, & inclinees l'vne fur l'autre fe-
lon vn angle xTenuiron 30 ou 40 degres, en forte que
fi les
-ocr page 334-
DlSCOURS HllITIESME.              zfy
files rayonsdufoieilABC
-trauerfent MN a angles
droits, ouprefque droits',
& ainfi n'y fouffrent aucu-
nefenfible refra&ion , ils
en doiuent fouffrir vne at
i6% grande en fortant par
N P. Et couurant I'vne
de ces deux fuperficies
d'vncorsobfcur, dansle-
quelil y auoit vne ouuer-
ture aire's eftroite comme
DE, i'ay obferue queles
rayons , paffant par cete
ouuerture& dela s'allant
"redre fur vnlinge ou papier
blanc F G H, y peignent tbutes les couleurs de 1'arcen-
cielj Scqii'ilsy peignenttoufioursle rouge vers F, & le
bleu ou le violet vers H.D'oft i'ay appris, premierement
queia coiirbure des fuperficies des gouttes d'eau n'eft
point neceffaire a la production de ces couleurs • car
celles de ce <?riftalfont toutes plates; Ny la grandeur de
i'angle fons lequel elles paroiffent. car il peut icy eftre
change fans qu'elleschangent, & bienqu'on puifle faire
que les rayons qui vont vers F fe courbent tantoft plus &
tantoft moins que ceux qui vont vers H,ils nelaiffent pas
de peindretoufioursdu rouge, & ceux qui vont vers H
toufiours du bleujN'y aufly la reflexion:car il n'y en a icy
aucune- Ny enfin la pluralitd des refractions: car il n'y en
a icy qu'vne feule.Maisi'ay iugdqu'ily en falloit pour le
moins.
-ocr page 335-
i$6                    Les Meteores.
moms vne, &mefme vne dont 1 efFect ne full point de-
ftruit par vne contraire. carl'experience monftre, que f\
les fuperficies M N & N P eftoient paralleles, les rayons
fe redreflantautantenl'vnequ'ilsfe pourroientcourber
enrautre,neproduiroicnt point ces couleurs. Ie n'ay
pasdoute qu'ilnyfalluftaufTydeIalumiere; car fans die
on ne voit rien. Et outre cela i'ay obferue' qu'il y falloit
de 1'ombre, ou de la limitation a cete lumiere. car fi on
ofte le cors obfcur qui eft fur N P , les couleurs FGH
ceffentdeparoiftre; & fi on fait l'ouuerture DEaflVs
grande, Ie rouge, I'orange', & le iaune, qui font vers F,ne
s'eftendent pas plus loin pour cela, non plus que le verd,
le bleu, & le violet, qui font vers H, mais tout le furplus
de lefpace qui eft entre deux vers G demeure blanc. En
fuitedequoyiaytafchedeconnoiftre.pourquoy ces cou-
leurs font autres vers H que vers F,nonobftant que la
refraction & Tombre & la lumiere y concourent en mef-
me forte; Et conceuantla nature de la lumiere telle que
ie l'aydefcrite en la Dioptrique. a fgauoir , comme
Taction ou le mouuement d'vne certaine matiere fort
fubtile, dont il faut imaginer les parties ainfi quedepe-
tites boules qui roullent dans les pores des cors terre-
ftres. I'ay connu que ces boules peuuent roulleren di-
uerfes fa§ons, felon les diuerfes caufes qui les y determi-
nentjEtenparticulierque toutes les refractions qui fe
font vers vnmefmecoftd les determinent a tourner en
mefme fens;Mais que lorfqu'elles n'ont point de voyfines
qui fe meuuent notablement plus vifte, ou moins vifte
qu'elles, leurtournoyementn'eft qu'a peu pre's efgala
leur mouuement enligne droite; Au lieu que lorfqu'el-
-ocr page 336-
DlSCOURS HUI TIESML                  2J7
les en ont d'vn cofte' qui fe
meuuent moins vifte, & de
l'autre qui fe meuuent plus
ou efgalement vifte, ainfi
qu'ilarnueaux confinsde
l'ombre & de la Iumisre; fi
elles rencontrent celles
qui fe meuuent moins vi-
fte,du cofte' vers lequel el-
les roullent, comme font
celles qui compofent le
H rayon E H, cela eft caufe
qu'elles ne tournoyent
pas fi vifte , qu'elles fe
meuuent en iigne droite}
& c'eft tout le contraire,
lorfqu'elles les rencontrent de l'autre coftd comme
font celles du rayon D F. Pour mieux entendre ce-
cy,penfe's que la boule 11 3 4 eft pouflVe d'V vers X,
en telle forte qu'elleneva qu'en ligne droite, &que
fes deux coftes 1 & 3 defcendent efgalement vifte iuf-
quesalafuperficiedel'eau YY, ou le mouuement du
coftd marque^, qui la rencontre le premier, eft retardc',
pendant que celuy du cofte'marque' 1 continue encore,
ce quieft caufe que toutela boule commence infallible-
mentatournoyerfuiuantl'ord^pdeschiffres 123. Puis
imagines qu'elle eft enuironnee de quatre autres, Q, R,
S, Tj dont les deux Q & R tendent, auec plus de force
qu'elle, afemouuoirversX; &Ies deux autres S& Ty
tendent auec moins de force. D'ou ileft euident, que Q,
K k                 preffan
-ocr page 337-
a;8                    Les Meteores,
preflant fa par-
tie marque'e i,
&: S retenant
celle qui eft
marquee j, au-
gmentenc fon
tournoyernentj
& que R & T
X n'ynuifet point,1
pourceque R
eft difpofe'e a fe
x
              mouuoirversX
plus vifte qu'el-
le ne lafuit, 8c T n'eft pas difpofe'e a la fuiure fi vifte
qu'elle la precede. Cequi explique i'a&ion du rayon
D F. Puis tout au contraire fi QJfc R tendent plus len-
tement qu'elle vers X,& S & T y tendent plus fort, R
empefcheletournoyement de lapartie marquee ia&
T celuy de la partie is fans que les deux autres Q_& S y
facent rien. Cequi explique Taction du rayon E H.
Mais il eft a remarquer que cete boule i z 3 4 eftant
fort ronde, il peut ayfement arriuer que lorfqu'elle eft
prefleevnpeu fort par les deux R&T, ellefe reuire en
pirouettant autour de l'ai/fieu 42, au lieu d'arefter fon
tournoyementaleur occafion, & ainfi que changeant
en vn moment de fituation, elfe tournoye apre's fuiuant
l'ordre des chiifres |2f; car les deux R&T quil'ont
fait commencer a' fe detourner, l'obiigent a continuer
iufques a ce qu'elle ait acheue'vn demi tour en ce fens la,
&qu'eUespuifTentaugmenter fon tournoyement , au
lieu
-ocr page 338-
DlSCOURS HUITIESME.              2f9
lieu de le retarder. Ce qui m'a ferui a refbudre la princi-
ple detoutes les difficulty's que i'ay euesencete made*
re. Et ilfe demonftre ce me femble tres euidemment de
tout cecy, que la nature des couleurs, qui paroiffent vers
F, ne confifte , qu'en ce
que les parties de la ma-
tierefubtile, quitranfmet
Taction de la lumiere, ten-
dent a tournoyer , auec
plus de force,qu'a fe niou-
uoir en ligne droite : en
forte que celles qui ten-
dent a tourner beaucoup
| plus fort, caufent la cou-
& j leur rouge , & celles qui
n'y tendent qu'vn peu plus
fort , caufent la iaune.
Comrae au contraire la
nature de celles , qui fe
voyent versH, ne confi-
fte, qu'en ce que ces petites parties ne tournoyent pas fi
Vifte, qu'elles ont de couftume lors qu'il n'y a point de
caufe particuliere qui les en empefche; en forte que le
verd paroift ou. eiles ne tournoyent gueres moins vifte,
& le bleu ou elles tournoyent beaucoup moins vifte; Et
ordinairement aux extremites de ce bleu il fe mefle de
l'incarnat, qui luydonnantde la viuacite & de l'efclat,
le change en violet ou couleur de pourpre. Ce qui vient
fansdoutedecequela'mefmecaufe, qui acouftumede
retarder le tournoyement des parties de la matiere fub-
Kk 2                     tile,
\
-ocr page 339-
2<so                    Les Mete ores.
tile, eftant alors afie's forte pour faire changer de fitua-
tion a quelques vnes, le doit augmenter en celles la,pen-
dant qu'elle diminue celuy des autres. Et en tout cecy
laraifon s'accordefiparfaitement auec rexperience,que
ie ne croy pas qu'il foit poflible, apre's auoir bien conneu
l'vne & l'autre, de douter que la chofe ne foit telle que ie
viens de l'expliquer. Gar s'il eft vray que le fentiment
que nous auons de la lumiere foit caufe' par le mouue-
mentourinclinationafe mouuoir de quelque matiere
quitouche nos yeux,comrae plufieurs autreschofes te(-
moignent , ileftcertainquelesdiuersmouuemensde
cete matiere doiuent caufer en nous diuers fentimens;
Et comme il ne peut y auoir d'autre diuerflte' en cej
mouuemens.quecellequei'ayditejaufly n'entrouuons
nous point d'autre par experience dans les fentimens
que nous en auons, quecelle des couleurs. Et il n'eft
pas poffible de trouuer aucune chofe dans le criftal M
K P qui puifle produire des couleurs, que lafac,on dont
ilenuoyeles petites parties de la matiere fubtile vers le
lingeF G H, & de la vers nos yeux. d'ou il eft ce me feni-
ble afleseuident,qu'ou ne doit chercher autre chofe non
plus dans les couleurs que les autres obiets font paroi-
ftre:car l'experience ordinaire tefmoigne que la lumiere
ouleblanc, &l'ombreou lenoir, auec les couleurs de
ririsquiontefte'icyexplique'es,fuj3irrent pour compo-
fertoutes les autres. Et ie ne fc,aurois goufter la diftin-
&ion des Philofophes, quand ils difent qu'il y en a qui
font vrayes, & d'autres qui ne font que fauifes ou appa-
rentes. Car toute leur vraye nature n'eftant que de pa-
roiftre , c'eftcemefemblevnecontradidion, dedire,
qu'elles
-ocr page 340-
Disc ours Hut ties me.              z6i
qu'elles font .faufTes, & qu'elles paroiffent. Mais i'auoue
bien que Tombre & la refraction ne font pas toufiours
neceffaires pour les produire -, & qu'en leur place la
grofleurjlafigurejlafituationj&lemouuement des par-
ties des cors qu'on nomme colores, peuuent concourir
diuerfement auec la lurniere, pour augmenter ou dimi-
nuerletournoyement des parties de la matiere fubtile.
En forte que mefme en l'arcenciel i'ay doutd d'abord, fl
les couleurss'yprodufoient tout a fait en mefme facon
que dans lecriftal MNP: car ie n'y remarquois point
d'vmbre qui terminal* la lurniere , & ne connoiflbis
point encore pourquoy elles n'y paronToient que fous
certains angles , Iufques a ce qu'ayant pris la plume &
calculdpar le menu tous les rayons qui tombent fur les
diuerspoins d'vne goutted'eau, pourfcauoir fous quels
angles apres deux refractions & vne ou deux reflexions
ils peuuent venir vers nos yeux, i'ay trouue'qu'apres vne
reflexion & deux refractions, il y en a beaucoup plus qui
peuuent eftre veus fous Tangle de 41 k 4.1 degres, que
fous aucun moindre; &qu'il'n'y en a aucun quipuilfe
eftre vu fous vn plus grand. Puis i'ay trouue' aufly
qu'apres deux reflections & deux refractions, ily en a
beaucoup plus qui vienent vers Tceil fous Tangle de yia
f2 degrees, que fous aucun plus grand; & qu'i'l n'y en a
point qui vienent fous vn moindre. De facon qiTil y a
deTombre depart & d'autre, quitermine la lurniere, la-
                 0
quelle, apres auoir patTepar vne infinite de gouttes de
plaie efclaire'esparIefoleil,vient vers Tceil fous Tangle
dc42 degrees, ou vn peu audeffous, & ainfi caufe le pre-
mier & principal arcenciel -t Et il y en a aufly qui ter-
Kk 3                   mine
-ocr page 341-
■■■■■■ ' ■ ■■■■■■......
z6z                  Les Meteores^
mine celle qui vientfous Tangle de yi degrees ou vn pea
au deffus, & caufe l'arcenciel exterieur. car ne receuoir
point de rayonsdelumiere en fes yeux, ou en receuoir
notablementmoinsd'vnobiet, qued'vn autre qui lay eft
proche,c'eftvoirde l'ombre. Ce qui monftre claire-
ment, que les couleurs de ces arcs font produites par la
mefme caufe, quecellesquiparoifrentparl'ayde ducri-
ftal M N P, & que le demi diametre del'arcinterieurne
doit point eftre plus grand que de 42 degre's, ny celuy
de l'exterieur plus petit que de ffe & enfin que le pre-
mier doit eftre bien plus limite* en fa fibperficie exterieu-
re qu'en l'interieurei& le fecond tout au contraire, Ain-
ii qu'il fe voitpar experience. MaisafEn que ceuxqui
f§auentles Mathematiques puiflent connoiftre, filecal-
cul que i'ay fait de ces rayons eft aire's iufte, ilfauticy
queie l'explique.
Soit AFDvnegoutted'eau, dont ie diuife le demi
diametre C D ou A B en autant de parties efgales que ie
veux calculer de rayons, affin d'attribuer autant de lu-
miere aux vns qu'aux autres. Puis ie confidere vn de ces
rayons en particulier, par exemple E F, qui au lieu de
paffer tout droit vers G, fe detourne vers K , & fe
reflefchift de K vers N, & de la va vers l'ceil P: ou-
bienfereflefchift encore vnefoisde N versQ^, &dela
fe detourne vers i'ceil R. Et ayant tire' C la angles
droits fur FK, ieconnois decequiaeftdditenlaDio-
ptrique, qu'A E ou H F, & C I, ont entre elles la pro-
portion par Iaquelle la refraction de l'eau fe rnefure. De
fa§on que fi H F contient 8000parties, .telles qu'AB
encontientioooo, CI en contiendra enuiron de wH,
pource-
-ocr page 342-
DlSCOURS HUITXESME.
2.6i
pourceque la Refraction de l'eau eft tant foit peu plus
grande que de trois a quatre, & pour le plus inftement
quei'aye pula mefurer,elle eft comme de 187 a 25-0.
Ayant ainfi les deux lignes H F & CI, ie connois ayfe-
ment les deux ares, F G qui eft de 73 degre's & 44 minu-
tes , & F K qui eft de xo6.30. Puis oftant le double de
1'arcFK, del arc F G adioufte'a 180 degrez, i'ay 40.
44. pour la quantite" de Tangle ONP, car ie fuppofe
0 N parallele a E F. Et oftant ces 40.44 d'F K,i'ay 6?.
4<J pour Tangle S Q R, car ie pole aufly S Qj>arallele a
EF. Et calculant en mefme fagon tous les autres rayons
paralleles a E F, qui paffent par les diuifions du diametre
ABj ie compofe la table fuiuante.
-ocr page 343-
*
2^4                     Les Meteores.
la ligne
HF
[a ligne
CI
Tare
FG
Tare
FK
Tangle
ONP
Tangle
SQR
1000
2.000
748
1496
168. 30
iy<J.55
171.25
162. 48
5. 40
XI* 19
i<55. 4;
ijl. 29
3000
4000
2144
2992
I4f. 4
132. fo
1J4. 4
14 j\ 10
17. 56
22. 30
I3<J. 8
122. 4
yooo
6000
374°
4488
120.
106. 16
I3<5. 4
I2<J. 40
27. JT2
3*. r<J
108. 12
93- 44
7000
8000
5-23 6
T9H
91. 8 116. fi
73. 44 106. 30
37. 26
40. 44
79. 2J
<Jf. 46
9OOO 67}2
100001 7480
5-1. 41 9T- 22
0. I83. 10
40. J7
13. 40
54. 2;
<?5. 3c
Et il eftayfe' 'a. voir en cete table, qu'il y a bien plus
de rayons qui font Tangle ONP d'enuiron 40 degres,
qu'il n'y en a qui le facent moindre; ou S QRd'en-
uiron 5-4, qu'il n'y en a qui le facent plus grand.
Puis affin de la rendre encore plus precifeiefais
la
•■; .-...■•.-; : v
I
-ocr page 344-
".
la ligne
HF -
Disc
la ligne
CI
OURS
Tare
FG
HUITIESME.
Tare Tangle
FK ONP
4
Tangle
SqR
8000
8100
5-984
605$
73-
71-
44
48
IO(5.
10$/.

25-
40.
40.
44
5-8
6S-
64.
4<Jj
37|
8200
8300
<*i33
6"2o8
69.
57.
Jo
48
104.
103.
20
14
41.
41.
10
20
^3-
52.
lot
?4|
8400
8j-oo
6283
^35-8
<5J.
61.
44
34
102.
101.
9
2
41.
41.
26
30
<Jl.
5o.
43
32
8<5oo
8700
6432
65-07
61.
22
4
99-
9%.
48[4r.
30
28
22
12
57-
2(5
20
8800
8900
55-82
6657
j6.
5-4.
41
i<5
97-
96.
40
32
I41'
41.
5-<5.
18
20!
9000
9100
673 2
<58 06"
49.
41
0
9S-
94.
22
12
40.
40.
57
f4-
53-
25
9Z00
9300
<588r
69?6
4<*.
43
8
8
93-
91.
240.
Ti]39-
4
26
52.
5-2.
58
2J
9400
95-00
7051
7106
35>.
3*.
,4
24
90.
8*
38
2(5
38.
37-
38
3*
f2.
5r.
0
54
9600
9700
9800
7180
72;5
32.
28.
30 88.
8 86.
12
5-8
3 <J.
34-
6
12
S2.
f2.
6
4<5
7 33°.
22.
V |8f.
43
3».
3'
n-
12
V
Ec
-ocr page 345-
z66                    Les Mete ores.
Etievoy icy que le plus grand angle O NP peut eftre
de 41 degres 30 minutes, & le pits petit S O R de ;i.
5 4, a quoy adiouftant ou oftant enuiron 17 minutes pour
le demi diametre dufoTeil, fay 41.47 pour le plus grand
demi diametre de Tare encielinterieur,&: f\. n pourle
pluspetit de l'exterieur.
II eft vray que 1'eau eftant chaude, fa refra&ion eft
tant foit peu moindre, que lors qu'elle eft froide., cequi
peut changer quelque chofe en ce calcul. Toutefois ce-
la ne f$auroit augmenter le demi diametre de l'arcen-
cielinterieur, que d'vnou deux degre's tout au plus; &
lors, celuy de l'exterieur fera de prefque deux fois autant
pluspetit. Cequi eft digne d'eftre reraarque", pource-
que par la on peut demoftrer que la refractio de l'eau ne
peut eftre gueresjnoindre,uy.plusgrandeJque ie la fup-
pofe. Carpour peu qu'elle fuft plus grande, elle ren-
droit le demi diametre de rarcencielinterieur, moindre
que 41 degres, au lieu que par la creance commune on
luy en donne 45; & fi on la fuppofe affes petite pour faire
qu'ilfoitveritablementde 47, ontrouueraque celuy de
l'exterieure ne fera aufTygueres plus que de4r,au lieu
qu'ilparcift a 1'ceil beaucoup plus grird que celuy dei'in-
terieur. Et Maurolycus, qui eft ie croy Ie premier qui a
determinei'vnde4rdegre's, determine 1'autre d'enui-
ron f6- Cequi monftre le peu defoy qu'on doit adiou-
fterauxobferuationsquine font pas accompagne'es de
lavrayeraifon. Aurefteien'ay paseu de peinca con-
noiftre pourquoy Ie rouge eft en dehors en l'arcenciel
interieur, ny pourquoy il eft en dedans en 1'exterieur}
Car la mefmecaufc pour laquellec'eft vers F , plutoft
que
-ocr page 346-
DlSCOURS HUITIESME.               167
que vers H, qu'il paroift
au trauers du criftal M N
P, fait que fi, ayant l'oeil
en la place du linge blanc
F G H, on regarde ce cri-
ftal , on y verra le rouge
vers fa partie plus efpaiffe
MP, & le bleu vers N.
pourceque le rayon teint
de rouge qui va vers F»
vient de C, la partie du
foleil la plus auancee vers
M P: Et cete mefme caufe
fait auffy quele centre des
gouttes d'eau, & par con-
sequent leur plus efpailTe
partie, eftant en dehors au refped: des poins colords qui
forment l'arceneicl interieur, le rouge y doit paroiflre
en dehors; & qu'eftant en dedans au refped de ceux qui
foxment l'exterieur^e rouge y doit auffy paroiflre en de-
dans.
Ainfiie croy qu'il ne refte plus aucune difficulte'en
cete niatiere, fi ce n'eft peuteftre touchant les irregula-
ritesquis'yrencontrent. Commelorfque Tare u'eft pas
exadtement rond, ou que fon centre n'eft pas en la ligne
droite qui paffe par l'ceil&le foleil. ce qui peut arriaer
fi les vens changent la figure des gouttes de pluie. car el-
les ne fc, auroient perdre fi peu de leu r rondeur, que cela
ne face vne notable difference en Tangle, fous lequel les
<:ouleurs doiuent paroiftre. On a vu auiTy queiquefois, a
Liz                     ce
-ocr page 347-
*6%                      Les Meteores.
cequ'onma dit, vnarc-en-cieltellement renuerfe' que
fes corneseftoienttournees vers en hault, commeeft
icy reprefente F F. Ceque ie ne fcaurois iuger eftre ar-
riueque par la reflexion des rayons du fbleil donnans fur
Peau de la mer, ou de quelque lac. Commefi venans de
lapartiedu ciel SS, ilstombentfurl'eauDAE,&deli
fe reflefchifTent vers la pluie C F, l'ceil B verra Tare F F,
dont le centre eft au point C, en forte que C B eftant
prolongee iufques a A,& A S paffant par le centre dufo-
leil, les angles S A D & B A E foient efgaux, & que Tan-
gle CBFfoit d'enuiron42degres. ToutefoisileftatnTy
requis a cet effe ct, qu'il n'y ait point du tout de vent qui
trouble la face de l'eau vers E, & peuteftre auec cela
qu'il y ait quelque nue, comme G, qui empefche que la
lumiere du foleil allant en Iigne droite vers la pluie, n'ef-
face celleque ceteeauEyenuoye. d'ou vient qu'il n'ar-
riue que rarement. Outre cela 1'oeil peut eftre en telle
-ocr page 348-
DlSCOURS HulTIESME.                269
fituation, au refpecl: du Soleil & de la pluie, qu'on verra
lapartieinferieurequi acheue le cercle de l'arcenciel,
fans voir lafuperieure : 8c aufll qu'otila prendra pour
vnarcrenuerfe: nonobftant qu'on ne la verra pas vers le
ciel, mais vers I'eau, ou vers la terre.
On m'a dit aufly auoir vu quelque fois vn'troifiefme
arc-en-ciei au deflus des deux ordinaireSjmais qui eftoit
beaucoup plus foible, & enuiron autant efloigne du fe-
cond que le fecond du premier. Ceque ie ne iuge pas
pouuoir eftre arriue,fi ce n'eft qu'il y ait eu des grains de
grefle, fort ronds, & fort tranfparens, meflds parmi la
pluie, dans lefquels la refraction eftant notablement
plus grande que dans l'eau, l'arc-en-ciel exterieuraura
deuy eftre beaucoup plus grand, & ainfi paroiftre an-
defrusdeTautre. Et pour l'interieur qui par rnefme rai-
fon aura deu eftre plus petit que l'interieur de la pluie, il
le peut faire qu'il n'aura point efte remarque^ a caufe du
grand luftredecetuycy: oubien que leurs extremite*s
s'eftantiointesonnelesauracontestous deux que pour
vn. maispourvn dont les couleurs auront efte autre-
ment difpofe'es qu'a l'ordinaire.
Et Cecy me fait fbuuenir d'vne inuention pour faire
paroiftre des fignes dans le ciel, qui pourroient caufer
grande admiration a ceux qui en ignoreroient les rai-
fcns. Ieflippofequevousftjaue's defia la £ac,on de faire
voir Tarc-en-cicl par le moyen d'vne fontaine. Comme fi
l'eau qui fort par les petits trouts A B C,fautat afte's haut,
s'efpand en l'air de tous coftds vers R, & que le foleil
foit vers Z, en forte que ZEM eftat ligne droite Tangle
^ERpuifreeftred'enuiron42degre's, l'oeilEnemau- .
Ll 3                quera
»
-ocr page 349-
270                     Les Meteores.
querapas de voir l'iris vers R, tout femblable a celuy
qui paroift dans Ie ciel. A quoy il faut maintenent ad-
ioufterqu'il yadeshuiles, deseaux de vie, & d'autres
liqueurs , dans Iefquelles la refraction fe fait notable-
ment plus grande ou plus petite qu'en I'eau commune,
3c qui ne font pas pour cela moins claires & tranfparen-
tes. En forte qu'on pourroit difpofer par ordre plufieurs
ontaines; dans Iefquelles y ayant diuerfes de ces li-
queurs, on yverroit par leur moyen toute vne grande
partieducielpleinedescouleurs de l'iris: a fcauoiren
faifant que les liqueurs, dont la refraction feroit la plus
grande,fufTentles plus proches desfpec"tateursJ-& qu'el-
les ne s*efleuaffent point fi hault, qu'elles empefchaffent
laveuedecellesquiferoientderriere. Puis a caufeque
fermantvnepartiedestroux ABC on peut faire difpa-
roiftre telle partie de l'irisRR qu'on veut, fansofter les
autres,ileft ayfd a entendre que tout de mefme,ouurant
Scfermant apropos lestrouxde ces diuerfes fontaines,
on pourra faire que ce qui paroiftra colore' ait la figu-
re
»
-ocr page 350-
„■                                          ■                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                 ■ ■                                                              ;.
Dl SCOURS Hu I TIESME.                  271
red'vnecroix, ou d'vme colomne, ou de quelque autre
telle cfcofe, qui donne fuiet d'admiration. Mais i'auoue
qu'il y faudroit de ladrefle & de h defpenfe,affin de pro-
portionner ces fontaines, &faire queles liqueurs y fau-
tafleut fi hault, que ces figures peuffent eftre veue's de
fort loin par tout vn peuple, fans que l'artifice s'en de'-
couurift.
DE LA COVLEVR DES NVES,
Et des cercles ou coinonnes qu'onvoit
quelquefois autour des aftres.
<Difcours Neufiefme.
A P r e s cequei'ayditde lauature descouleurs, ie
-'■^■ne croy pas auoir beaucoup de chofes a adioufter
touchant celles qu'on voit dans ies nues. Car premiere-
mentpourcequieftdeleurblancheur & de leurobfcu-
rite; ou noirceur, ellene precede que de ce qn'elles font
plus ou moins expofees a la lumiere des aftres, ou a Tom-
bre, tant d'elles meftnes, que deleur voyfines. Et il y a
feulement icy deux chofes a remarquer. Dont Tvne eft
que les fuperficies des cors tranfparens font reflefchir
vne partie des rayons qui vienent vers ellessainfi que i'ay
ditcydefTus. cequieftcaufequelalumiere peutmieux
penetrer au trauers de troispicques d'eau, qu'elle ne fait
autrauers d'vnpeu d'efcume, qui n'eft toutefois autre
chofe que de l'eau, mais en Iaquelle il y a plufieurs fuper-
ficies dont la premiere faifant reflefchir vne partie de
cete
-ocr page 351-
, ---, —, . - _.----_ ,-
i-jz                    ^es Meteores.
cete lumiere, & la feconde vne autre partie, & ainfi de
fuite,iln'enreftebientoft plus du tout ou prefqueplus
. qui pafle outre. Etc'eft ainfi que nyleverre pile', nyla
neige, ny les nu.es lorfquelles font vn peu efpaiffes, ne
peuuent eftre tranfparentes. L'autre chofe qu'il y a icy
aremarquer,eft, qu'encore que Tadion des cors Iumi-
neux ne foit que de pouffer en ligne droite la matiere
fubtile qui touche nos yeux, toutefois le moquement
ordinaire des petites parties de cete matiere,au moins de
cellesquifontenl'airautourde nous, eft de rouller. en
mefmefagonqu'vnebalerotilleeftantaterre , encore
qu'on ne lait pouffee qu'en ligne droite. Et ce font pro-
prement les cors qui les font rouller en cete forte qu'on
nomine blancs. Comme font, fans doute, tous ceux qui
nemanquentd'eftretranfparens qu'acaufe de la multi-
tude deleurs fuperficies, Tels que font l'efcume, lever-
re pile, laneige, 8desnues. En fuite dequoy on peat
entendre pourquoyleciel, eftantfort pur & defcharge'
detonsnuages,paroift bleu, pourvii qu'on fcacheque
de luy mefme il ne rend aucune darted qu'il paroiftroit
extremement noir, s'il ny auoit point du tout d'exhalai-
fons ny de vapeurs au deffus de nous, mais qu'il y en a
toufiours plus on moins qui font reflefchir quelques
rayons vers nos yeux, c'eft a dire qui repouflent vers
nous les petites parties de la matiere fubtile que le foleil
ou les autres aftresont poufTe'contre elles: & lorfque ces
vapeurs font en afTes grand nombre , la matiere fubtile
eftant repoufTee vers nous par les premieres, en rencon-
tre d'autres apre's qui font rouller & tournoyer fes peti-
tes parties,auantquelles paruienenta nous. Cequi fait
-ocr page 352-
Discours Neufiesme.              273
alors paroiftre le ciel blanc; Au lieu que fi elle n'en ren-
contre affds pour faireainfi touruoyer fcs parties , il ne
doit paroiftre que bleu, fuiuant cequi a efte tantoft die
de la nature de la couleur bleuc. Et e'eft la mefme caufe
qui fait aufly que Teau de la mer, aux endroits ou elle eft
fort pure &fortprofonde,femble eftre bieue. car ilue
fe reflefchift.de fa fuperficie que pcu de rayons, & aucun
de ceux qui la penetrent ne reuient. De plus on peut icy
entendrepourquoyfouuent, quand le foleilfe couche
oufeleue, tout lecofte'du ciel vers lequel ii eft paroift
rouge: cequi arriue lorfqu'il ny a point tant de nues, ou
plutoft debrouillas, entre luy & nous, que fa lumiere nc -
pnifTe les trauerfer;mais quelle ne les trauerfe pas fi ayfe-
menttoutcontreiaterre, qu'vn peu plus hauit; nyfiay-
fement vn peu plus hault, que beaucoup plus hault: car
il eft euident que cete lumiere, fbuffrant refra&ion dans
ces brouillas, determine les parties de la matiere fubtile
qui la tranfmettent, a tournoyer en mefme fens, que fe-
roitvneboule qui viendroitdu mefme cofte'en roullant
furterre. defagonTjueletournoyementdesplustfuTes
eft toufiours augmente" par Taction de celles qui font
plus hautes, airaufe qu'elle eft fuppofe'e plus forte que la
Ieur, & vousfc.aue's que cela fuffift pour faire paroiftre la
'couleur rouge, laquelle fe rettefchiflant apre's dans les
nues, fe peut eftendre de tous cofte's dans le ciel. Et il
eft a remarquer que cete couleur paroifTant le matin
prefagedes vens ou de lapluie, a caufe qu'elle tefmoi-
gne, qu'y ayant peu de nues vers l'Orient, le foleil pourra
efleuer beaucoup de vapeurs auant le midy , & que les
brouillas qui lafontparoiftrecommencentamonterjAu
M m                   lieu
-ocr page 353-
274                  £es Meteores^
lieu que le foir elle tefmoigne le beautems \ a caufe
que nyayant quepeu ou point de nues vers le conchanr,
lesvensOrientaux doiuentregner, &les brouillas def-
cendent pendant la nuit.
Ie ne m'arefte point a parler plus particulierement des
autres couleurs qu'on voit dans les nues. car ie croy que
les caufes en font toutes afTe's comprifes en ceque iay dit.
maisil paroift quelquefois certains cercles autour des
aftres, dont ie ne dois pas omettre 1'explication. lis font
iemblables a l'arc-en-ciel en ce qu'ils font ronds,ou pref-
querons, & enuironnent toufiours le foleil ou quelque
autre aftre: cequi monftre qu'ils font caufds par quelque
reflexion ou refraction dont les angles font a peu pre's
tous efgaux. Comme aulTy en ce qu'ils font colored: ce
qui monftre qu'il y a de la refraction, & de l'ombre qui
limite la lumiere qui les produift. Mais ils different en
ceque l'arc-en-ciel nefe voit iamais, quelors qu'il pleut
a<ftuellement au lieu vers Iequel on le voit, bienque fou-
uent il ne pleuue pas au lieu ou eft le fpedtateur; Et eux
nefevoyent iamais ouil pleut. Cequi monftre qu'ils ne
font pas caufds par la refraction qui fe fait en des gouttes
d'eau ou en de la grefle, mais par celle cpai fe fait en ces
petites eftoiles de glace tranfparentes, dont il a eftepar-
le'cydeflus. Car on ne fcauroit imaginer dans les nues
aucune autre caufe qui foit capable d'vntel effect. &fi
on ne voit iamais tomberde telles eftoiles que lorfqu'il
fait froid, la raifon nous affure qu'il ne laiiTe pas de s'en
former en toutes faifons. Mefme a caufe qu'il eft befoin
de quelque chaleur, pour faire que de blanches qu'elles
font au commencement ellcs deuienent tranfparentes,
ainfi
-ocr page 354-
Discours Neufiesme.           2.7s
ainfi qu'il eft requis a cet effedfc, il eft vray femblable que
l'efte'y eft plus propre quel'hyuer. Et encore que la plus
part de celles qui tombent, paroiffent a l'oeil extreme-
ment plates &vnies, il eft certain neanmoins qu'elles
fonttoutesquelquepeu plus efpaifTes au milieu qu'aux
extremite's, ainfi qu'il fe voit auffy a l'oeil en quelques
vnes, & felon qu'elles le font plus ou moins, elles font pa-
roiftre ces cercles plus ou moins grands: car il y en a fans
doute de plufieurs grandeurs^ & fi ceux qu'on a le plus
fouuent obferue's ont eu leur diametre d'enuiron 4/ de-
gres,ainfi que quelques vns out efcrit,ie veux croyre que
les parcelles de glace, qui les canfent de cete grandeur,
out la conuexite' qui leur eft la plus ordinaire, & qui eft
peuteftre auffy la plus grande qu'elles ayent couftume
d'acquerirfansacheuerentierement de fe fondre. Soit
par exemple A B C le foleil, D l'oeil, E F G plufieurs pe-
tites parcelles de glace tranfparentes, arrenge'es cofte a
cofte les vnes des autres; ainli qu'elles font en fe for-
mantj & dont la conuexite' eft telle, que le rayon venant
par exemple du point A fur l'extremitd de celle qui eft
marque'e G, & du point C fur l'extremite' de celle qui eft
marquee F,retourne vers D; & qu'il en vient vers D
plufieurs autres de ceux qui trauerfent les autres parcel-
les de glace qui font vers E, mais non point aucun de
ceux qui trauerfent celles qui font au dela du cercle GG:
H eft manifefte qu'outre que les rayons A D, C D , &
femblables, qui paffent enligne droite, font paroiftre le
foleil de fa grandeur accouftumeedes autres qui fbuffrent
refracliion vers E E,doiuent rendre toute l'aire comprife
dans le cercle FFaffes brillante, &£aire que fa circonfe^-^
Mm 2                   rence
-ocr page 355-
"
Les Mete ores."
%76
rence entre les
cercles FF, &
G G, foit com-
mevnecouron-
ne peinte des
cotileurs de
l'arc-en-ciel: Et
mefme que le
rouge y doic
eftre en dedans
vers F , & le
bleu en dehors
vers G, toutde
mefme qu'on a
couftume de
l'obferuer. Et
s'il y a deux ou
plufieurs rangs
de parcelles de
glace l'vne fur
1'autre , pourvu. que cela n'empefche point que les
rayons du foleil ne les trauerfent, ceux de ces rayons qui
cntrauerferontdeuxparleurs bords, fe courbans pref-
que deux foisautantqueles autres, produiront encore
vn autre cercle colore', beaucoupplus grand en circuit,
mais moins apparent que le premier; en forte qu'on ver-
ra pour lors deux couronnes l'vne dans 1'autre, & dont
rinterieureferalamieux'peinte. Comme ilaauflyeite
quelquefois obferue'. Outre cela vous voyes bien pour-
quoy ces couronnes n'ontpas couftume de fe former au-
tour
-ocr page 356-
Discours Neufiesme.             177
tour des aftres qui font fort bas vers l'liorrzon. car les
rayons rencontrentalorstropobliquement les parcelles
de glace pour les trauerfer j Et pourquoy leurs couleurs
ne font pas fi viues que les fienes. car elles font caufdes
par des refractions beaucoup moindresj Et pourquoy el-
les paroifTent plus ordinairement que luy autour de la
lune,&mefmeferemarquentaufTy quelquefois autour
des eftoiles, a fcauoir lorfque les parcelles de glace in-
terposes n'eftant que fort peu conuexes les rendent
fortpetitesj car dautant quelles ne dependent point de
tant de reflexions & refractions quel'arc-en-ciel, la lu-
miere qui les caufe n'a pas befoin d'eftre fi forte. Mais
fouuent elles ne paroifTent que blanches, non point tant
par faute de lumiere, que pourceque la matiere ou elles
fe formentn'eft pas entierementtranfparente.
On en pourroitbienimaginerencore quelques autres
qui fe formaffent a l'imitation de l*arc-en-ciel en des
gouttes d'eau,a f§auoir premierement par deux refra-
ctions fans aucune reflexion; maisalorsilnty arien qui
determine leur diametre, & la lumiere n'y eft point Iimi-
tee par l'ombre, comme il eft requis pour la production
des couleurs. Puis aufTy par deux refractions 3c trois ou
quattre reflexions- mais leur lumiere, eftant alors gran-
dement foible, peut ayiement eftre efface'e par celle qui
fe reflefchift de la fuperficie des mefmes gouttes. ce qui
me fait douter fi iamais elles paroifTent, & Ie calcul mon- -
fire que leur diametre deuroit efb'e beaucoup plus grand
qu'on ne le trouue en celles qu'on a couftume d'ob-
feruer.
Enfin pour cequi eft de celles qu'on voit quelquefois
M m 3                 autour
-ocr page 357-
178                     Les Meteor.es.
autour des lampes & des flambeaux la caufe n'en doit
point eftre cherche'e dans Tair mais fenlement dans Poeil
qui les regarde. Et i'en ay vii cet efte' dernier vne expe-
rience fort manifefte. ce fut en voyafgeant de nuit dans
vnnauire, ou apres auoir tenutout lefoirma tefteap-
puiee fur vne main, dont ie fermois mon ceil droit, pen-
dant que ieregardoisde Pautrevers Ieciel, on apporta
vne chandelle au lieu ou i'eftois: & lors ouurant les deux
yeuxievydeuxcouronnesautourde laflame, dont les
couleurseftoientauffy viues, queie les aye iamaisveues
enlarc-en-ciel. ABeftlaplusgrande, quieftoit rouge
vers A, & bleue vers B: C D la plus petite, qui eftoit rou-
ge aufly vers C , mais vers D ellc eftoit blanche , &
s'eftendoit iufques a la flame. Apres cela refermant l'ceil
droit, i'apperceu que ces couronnes difparoiflbient^ &
qu'aucontraire en l'ouurant, &fermant Ie gauche, elles
continuoient de paroiftre. cequi m'aflura qu'elles ne
procedoientquedequelque difpofition, que mon ceil
droit auoit acquife pendant que ie l'auois tenu ferme', &
qui eftoit caufe, qu'outre que la plus part des rayons de
h flame qu'il re$euoit, la reprcfentoient vers O ou ils
s'aflem-
-ocr page 358-
Discours Neueiesme.              179
s'aflembloient , ilycn auoitaufTyquelquesvns , qui
cftoient tellement de'tourne's, qu'ils s'eftendoient en
toutl'efpace fO, ouilspeignoientlacouronneCD; &
quelques autres en i'efpace F G, ou ils peignoient la cou-
ronne AB. Ie ne determine point qu'elle eftoit cete
difpofition. carplufieurs differentes peuuent caufer le
mefme effect. Commes'ily a feuleraent vne ou deux
petites rides en quelqu'vne des fuperficies E,M, P, qui
a caufe de la figure de l'osil s'y eftendent en forme
d'vn cercle dont le centre foit en la ligne E, O, com-
meilyen a fouuent de toutes droites qui fe croyfent
en cete ligne E, O, & nous font voir de grans rayons
cfpars ca & la autour des flambeaux. Oubien qu'il y
ait quelque chofe d'opaque entre E, & P j 011 mefme
a cofte en quelque lieu , pourvu qu'il s'y eftende cir-
culairement j Ouenfinqueleshumeurs, ou les peaux
de l'oeil, ayent en quelque fagonchange'de tempera-
ment , ou de figure, car il eft fort commun a ceux
qui ont mal auxyeux de voir de telles couronnes, &
dies ne paroiffent pas femblables atous. Seulement
faut il remarquer que leur partie exterieure , com-
me A & C, eftordinairement rouge, toutau contrai-
rc de celles qu'on voit autour des aftres. dont la rai-
fon vous fera claire , fi vous confidere's qu'en la pro-
duction de leurs couleurs , ceft l'humeur criftaline
PN M , qui tient lieu du prifme de criftal dont il a Voyes au
tantoft eftd parld , & le fons de l'ceil FG/, qui tientWccedcnt
lieu du linge blanc qui eftoit derriere. Mais vous
douteres peuteftre pourquoy puifquc l'humeur crifta-
line a ce pouuoir, elle ne colore pas en mefme facon
tous
-ocr page 359-
Les Meteores.
28 O
tous les obiets que nous voyons ? fi ce n'eft que vous
confiderie's que les rayons, qui vienent de chafque point
de ces obiets vers chafque point du fonds dd'ceil, paf-
fantlesvnsparceluydefescofte'squieft marque' N, &
lesautresparceluy qui eft marque* S, ont des actions
toutes contraires, Sequife deftruifent les vnesles au-
tres j au moins en ce qui regarde la production des
couleursj au lieu qu'icy les rayons qui vontvers FG
fne paflent que par N. Et tout cecy fe rappo^te fi
bien ace que i'ay ditde la nature des couleurs , qu'il
peut ce me femble beaucoup feruir pour en confhmer
la veritd
DE
-ocr page 360-
Discours Dernier.              if*
-'                    ' '• •
DE L'APPARITION DE PLV-
SIEURS SOLEILS.
cDifcours 'Dernier.
ON voit encore quelquefois d'autres cercles dans les
nues, qui different de ceux done iay parle', en ce
qu'ils neparoifTentiamais que tous blancs, 8c qu'aulieu
dauoir quelque afire en leur centre, ils trauerfent ordi-
nairementceluydufoleiloudelalune , & fembientpa-
ralleles ou prefque paralleles a l'Horizon. Mais pource-
qu'ils ne paroiflent qu'en ces grandes nues toutes rondes
dont il a efte'parle cy deflus, & qu'on voit aufly quelque-
fois plufieursfoleilsou plufieurs lunes dans les mefmes
nues, il faut que i'explique enfemble I'vn & i'autre. Soit
parexemple A lemidy, oueft lefoleilaccompagne'd'vn
vent chaud qui tend vers B, &Cle feptentrion , d'ouil
vient vn vent ftoid qui tend aufly vers B. Et la ie iuppo-
fe que ces deux vens rencontrent ou aflemblent vne
nue, compofe'e de parcelles de neige, qui s'eftend fi loin
en profondeur& en largeur, qu'ils ne peuuent pafler
l'vnau deflus I'autre audeflbusou entredeux ainfi qu'ils
ontailleursde couitume, mais qu'ils font contrains de
prendre leur cours tout a l'entour : au moyen dequoy
nonfeulement Us rarondiflent;mais aufly celuy qui vient
du midy, eftant chaud, fond quelque peu la neige de fon
circuit, laquelle eftant aufly toft regelee, tant par celuy
du Nord qui eft froid, que par la proximitc' de la neige
N n                     intc-
-ocr page 361-
^%t                  - Les Meteores.
interieure qui n'eft pas cn«
core fondue, peut former
comme vn grand anneau
de glace toute continue &
tranfparente , dont la fu-
perficie ne manquera pas
d'eftre afTe's polie, a caufe
que les vens qui l'arondif.
fent font fort vnifbrmes.
Et de plus cete glace ne
manque pas d'eftre plus
efpaifle du cofte DEF,
que ie fuppofe expofe' au
vent chaud & au fbieil,que
del'autre G HI. ou Ianei-
genes'eft pii fondre fi ay
fement. Et enfin il fautremarquer qu'en cete co nfticu-
tion d.'air,& fans orage, il ne peut y auoir affes de chaleur
autour de la nue' B, pour y former ainfi de la glace, qu'il
ny en ait aufly ace's en la terre qui eft au defTous ,. pour y
exciter desvapeurs qui la fouftienent, en fouleuaut &
poufTant vers le ciel tout le cors de la nue quelle embra£
fe. Enfuitedequoyilefteuidentquelaclarte'du foleil,
lequelie fuppofe eftre afTe's haut vers le inidy, donnant
tout autour fur la glace DEFGHI, & de la fe refle-
fchifTant fur la blaucheur de la neige voyline, doit fairc
paroiltreceteneige.aceux qui feront au deffotis, en for-
me d'vn grand cercle tout blanc. Etmcfme qu'il furHft
aceteffecl:quelanuefoitronde,.&vn peu plus prefTe'e
cnfon circuit qu'au milieu, fans quel'anneaudegiace
doiue
-ocr page 362-
Di scours Dernier.                 283
doiue eftre forme. Maislors qu'ilt'elton peut voir,eftant
an deflbus vers le point K, iufquesafixfoleih, qui fem-
blent eftre enchafles dans le cercle blanc ainfi qu'autant
de diamans dans vnebague. Afgauoir le premier vers
E, par les rayons qui vienent directement du foleil que
iefuppofeversA:-Lesdeuxfuiuans vers D, & vers F,
par-la refraction des rayons qui trauerfent la glace en
cesIieuxIa,oiifonefpaiffeur allantendiminuant, ils fe
courbent en dedans de part &: d'autre, ainfi qu'ils font
entrauerfantle prifme de criftal dont il atantoft eftx
parle'. Et pour cete caufe ces deux foleils ont leurs bords
peins derouge,en celuy de leurs cone's qui eft vers E,ou
la glace eft le plus efpaiflej & de bleu en ['autre, ou elle
l'eft moins. Le quatriefme foleil paroift par reflexion au
pointH^ &JesdeuxderniersaurTy par reflexion vers G,
& vers I. par ou ie fuppofe qn'on peut defcrire vn cercle
dont le centre foit au point K, & qui pafle par B le centre
dela nue, en forte que les angles KGB, & KB G ou
B G A, font efgauxj & tout de mefme K1B, & K BI ou
B I A. Car vous frauds que la reflexion fc fait toufiours
par angles efgaux, & que la glace eftantvncors polidoit
reprefenterle foleil en tous les lieux d'ou fes rayons ife
peuuentreflefchirversl'osil. Mais pourceque les rayons
qui vienent tous droits font toufiours plus vifs, que ceux
qui vienent par refraction, & ceuxcy encore plus vifs,
que ceux qui font reflefchis, le foleil doit paroiftre plus
brillant vers E, que vers D ou F, & icy encore plus bril-
lant, queversGouHoul, &*cestrois, G,H,&I,nedoi-
uentauoiraucunescouleursautour de leurs bors, com-
me les deux, D, & F, mais feulement eftre blancs. Que
Nn 2                       fi
-ocr page 363-
Les Meteores.
filesregardans ne fbntpaj
vers K, mais quelque part
plus auances vers B.enfor-
te que Ie cercle dont leurj
yeux fbnr le centre, & qui
paffe par B , ne couppe
point la circonference dc
lanue, ilsnepourrontvoit
les deux foleils G & I, mais
fculementles4autres. Et
fi au contraire ils font fort
recules vers H, ou au deli
vers C,ils ne pourront voir
que les r, D,E,F, G, &I.
.
Et mefme eftant aftes loin
au dela, ils ne verront que
iestrois,D, E,F, qui neferont plus dans vn cercle blanc,
mais com me trauerfes d'vne barre blanche. Comme
auflfy, lorfquele foleil eft fi peu efleuc' furl'Horizon qu'il
nepeutefclairerla partie de la nue GHI, oubien lorf-
qu'ellen'eft pas encore forme'e, il eft euident qu'on ne
doit voir que les trois foleils D, E, F.
Aurefteiene vous ayiufquesicy fait confiderer que
leplan de cete nue, &il y a encore diuerfes chofes a y
remarquer qui fe verront mieux en fon pourfil. Premie-
rementbienquele foleil ne foit pas en la ligne droite qui
va d'E vers l'oeil K, mais phis haut ou plus bas, il ne doit
pas IaiiTer de paroiftre vers la. Prineipalement C\ la glace
nesyeftendpoint tropen hauteur ou profondeur. car
alors la fuperficie de cete glace fera fi courbe'e , qu'en
quel-
-ocr page 364-
Discours Dernier.               28;
quelquelieu qu'il foit, clle pourra quafi toufiours t«i-
uoyer fes rayons vers K. Comme fi clle a en fon efpaifc
feur la figure comprife entre les lignes 12 3 & 4 r 6, il eft
euident que fion feulementlorfquele fbleil fera en la li-
gne droite A 2, fcs rayons la trauerfant pourront aller
tfersl'ceilK; mais aufTy lors qu'il fera beaucoupplusbass
comme en la ligneSi, ou beaucoupplushaut, comme
en la ligneTji&ainfylefaire toufiours paroiftre com-
me s'ileftoit vers E. car l'anneau deglacen'eftantfup-
pofc'gueres large, la difference qui eft entre les lignes
4K, rK, & 6-K, n'eft pas coufiderable. Et note's que
cela peut faire paroiftre le foleil apre's mefme qu'il eft
couchd, & qu'il peut aufTy reculerouauancerl'ombre
des Horologes, & leur faire marquer vne heure toute
autre qu'il pe fera . Toutefois file fbleil eftbeaucoup
plus bas qu'il ne paroift vers E, en forte que fes rayonss
Nn< 3                   pafTent
-ocr page 365-
2%6                     Les Meteores.
paflent aufly en ligae droite parle deflbus de la glace,
iufques a I'oeil.K, corame S 7 K, que ie fuppofe parallele
aS 1, alorsoutre les fix foleil* precedens on en verra en-
core vn fettiefine au deflbus d'eux,& qui ayant Je plus de
lumiere, efFacera l'ombre qu'ils pourroient caufer dans
les Horologes. Tout de mefme s'il eft fi haut que fes
rayons puiffent pafler en ligne droite vers K par 1c def-
fusdelagIace,commeT8 Kquieft parallele a T3, &
que la nue interpofee ne foit point fi opaque qu'elle les
en empefchejOn pourra voir vn fettiefme foleil au deffus
des fix autres. Que fi la glace 123, 4;* s'eftend plus
haut &plus bas comme iufques aux poins 8, & 7,Ie foleil
eftantvers A, on en pourra voir troislVnfurrautre, vers
E, a fgauoir aux poins 8, 5,& 7: Et lors on en pourra auf-
fy voir trois l'vu fur l'antre vers D, & trois vers F, en
forte qu'ilenparoiftra iufques a douze , enchafle's dans
le cercle blanc D E F G H I. Et le foleil eftant un peu
plus bas que vers S, ou plus haut que vers T, il en pourra
derechefparoiftre trois vers E, af§auoir deux dans Ie
cercleblanc, &vnautEe au deflbus, ou au deffus : Et
lors il en pourra encore paroiftre deux vers D, & deux
vers F. Maisie ne fgache point que iamais on-en aittant
obferue'routa la fois; nycaefme quelorfqu'on en a vii
trois IVn fur l'autre, comme il eft arriue'plufieurs foix;ou
en ait remarque'quelques autres a leurscoftes, Ou bien
quelorfqu'on en a vu trois cofte acofte, comme il eft
aufly arrindplufieursfoix,ou en ait remarqud quelques
autres au deflus, ou au deflbus. Dont, fans doute, larai-
fon eft que la largeur de la glace, marquee entre ks
poins 7 &c%t n'ad ordinaire aucuneproportion, auec la
gran-
-ocr page 366-
______ -              - ~                                                                                       
-------
Disc ours Dernier,                x.%7
grandeur du circuit detoute la nuc: en forte que l'oeif
doit eftre fort proche du point E, Iorfque cete Iargeur
luy paroift afTe's grande pour y diftinguer trois loleils
l'vn fur l'autrej & au contraire fort efloigne'-affin que les
rayons qui fe courbent vers D, & vers F, oil fe diminue
leplusTefpaifleurdela glace, puiflent paruenir iufquc
a luy.
Et il arriue rarement que la nue foit fi entiere, qu'on
en voye plus de trois en mefme terns. Toutefois on dit
qu'en Tan 162? le roy de Polongne en vit iufque a fije. Et
iln'yaquetroisansque le Mathematicien de Tubinge
obferuaiesquatre defign&icyparles lettre$D,E-F,H.
niefme il rernarque particulierement en ce qu'il en a
efcrit que les deux D & F eftoient rouges, vers celuy du
milieu E, qu'il nommele vrayfoleil, &bleus de l'autre.
cofte'j & que le quatriefine H eftoit fort pale, & ne pa-
roiflbit-
-ocr page 367-
i88                  .Les Meteors s.
roiflbit que fort pen. Ce qui confirme fort ceque i'ay
dit. Mais 1'obferuation la plus belle & la plus remar-
quablejquei'ayeveuencetematierccftcelledes y fo-
leils, quiparurentaRome eu l'an 1629, le 20 de Mars,
fur les zou j heures aprds midy. & affin que vous puif-
fies voir fi elle s'aceorde auec mon difcours ie la veux
mettre icy aux melines termes qu'elle fut dds Iors
diuulguee.
A obferuator
fymanus. B ver-
tex loco obferuatth
ris incumbent. C
folverus obferva-
tus. A B plgnum
verticale, in quo 6
4 cuius obfervatoris,
6? fol objervatus
exiftunt, in quo
#
vertex loci B iacett
ideoque omnia per
lineam verticalem
A B reprcefentan-
tur: in banc enim
Utumplanum ver-
ticals procumbit.
Circa folem C ap-
paruere dux tn-
tompletce Irides
eidetnhomocentricte, diverficolores, quarum minor, five in-
terior D E Fplenior (3 perfeUior fuit, curt a tamen five
aperta
-ocr page 368-
Discours Dernier.                 2S5
aperta a D ad F,& inperpetuo conatufefe claudendiftribat,
y quandoque claudebat, fedmox denuo apeYiebat. Altera
feddebilisfemper
d? vixconfpicabilisfuit G H /, exterior &
Secundaria, variegata tamen
G? ipfa fuis coloribus; fed ad-
modum inflabilis. Tertia,
£2? unicolor, eaque valde magna
Iris,fuit IQL MN,totaalba,qualespepevifuntur in pa-
rafelenis circa lunam. htecfuitarcus excentricus integer ab
initio folis per medium incedens, circa finem tamen ab M
verfus Ndebilis
G? lacer, imo quafi nullus' Cceterum in com-
munibus circuli huius interfetlionibus cum Iride exterior^
G HI, emerferunt duo parhelia non ufque adeo perfebla
, N
(3 j^s quorum hoc debiliusjlludautemfortius & luculentius
jjtlendefcebat
, amborum medius nitor ismulabatur folarem*
fed latera coloribus hidis pingebantur ■$ neque rotundi ac
prcecifi,fedincsquales & lacunofiipforum ambitus cerneban-
tur. N inquietum fyeUrum
> eiaculabatur caudam fpiffam
[ubigneam NOP
, cum iugi reciprocatione. L &M fuere
trans S^enith B,prioribus minus vivaces, fedrotundiores
G?
albi, inflar circulifui cui inhxrebant, lac, feu argentum pu-
rumexprimentes, quanquamMmedid tertid iam propedi-
fparveraty nee niji exiguafui vefiigia fubinde precbuit, quip-
ped circulus ex ilia parte defecerat. Sol N defecit ante fo-
km KJilloque defitiente roborabatur
J^ qui omnium ultimus
difparuit,
S?r.
CKLMN eftoit vn cercle blanc dans leqnel fe
voyoient cinq foleils, & il faut imaginer,que le fpe&a-
teureftant vers A, ce cercle eftoit pendant en I'air au
deflus de luy, en forte que le point B refpondoit au font-
met de fa telle, &: que les deux foleils L & M eftoient
derriere fes efpaules, lorfqu'il eftoit tournd vers les trois
O o                     autres
-ocr page 369-
2p»                    Les Meteores.
autres K C N;
done les deux K
&N eftoient co.
lore's en leurs
bors, &n'eftoiet,
nyfi ronds, nyfi
brillans, que ce-
luy qui eftoit vers
C. cequimonftre
qu'ils eftoient
caufe's par refra-
ction j au lieu que
les deux L &
M eftoient aire's
ronds,maisnioins
brillans, & tous
blancs, fans me-
flange d'aucune
autre couleur en
leurs bors. cequi
monftre qu'ils eftoient caufe's par reflexion- Et plufieurs
chofes ontpii empefcher qu'il n'ait paru encore vn fi-
xieftne foleil vers V, dont la plus vrayfemblable eft, que
l'ceil en eftoit fi proche, a raifbn de la hauteur delanue,
que tous les rayons qui donnoient fur la glace, vers la, fe
reflefchiflbient plus loin que le point A. Et encore que
le point Bnefoit pas icy reprefente'fi proche des foleils
L &M, que du centre de la nue, cela n'empefche pas
que la reigle que iay tantoft dite, touchant le lieu ou ils
doiuentparoiftre, n'yfuftobferue'e. Car le fpe&ateur
eftant
-ocr page 370-
Di scours Dernier.               291
eftantplusprochedeTareLVM quedesautres parties
du cercle, l'a deu iugerplus grand, a comparaifon d'el-
les, qu'iln'eftoit; Outre que fans doute ces nues ne font
iamaisextremement rondes, bienqu'elles paroifTent a
l'ceil eftre telles.
Mais ily a encore icy deux chofes affe's remarquables.
La premiere eft.que le fbleil N qui eftoit vers le cou-
chant, ayant vne figure changeante Sc incertaine, iet-
toit hors de fby comme vne groiTe queue de feu, NOP,
qui paroiffoit tantoft plus longue tantoft plus courte. Ce
qui n'eftoit fans doute autre chofefinon que l'image du
foleil eftoit ainfi contrefaite & irreguliere vers N, com-
me on la voit fouuent lorfqu'elle nage dans vne eau vn
peu tremblante,ou qu'on la regarde au trauers d'vne vi-
tro dont les fuperficies font inefgales. Car la glace eftoit
vrayfemblablementvnpeuagiteeen cetendroit la, &
nyauoitpas fesfuperficies fi regulieres,pourcequ'elle y
commencoita fediffoudre , ainfi qu'il fe prouue de ce
que le cercle blanc eftoit rompu, & comme nul entre
M & N, & que le foleil N difparur, auant le foleil K qui
fembloit fe fortifier a mefure que 1'autre fe diffipoit.
Lafeconde chofe qui refteicy a remarquer,eft cfu'ily
auoit deux couronnes.autour du foleil C } peintes des
mefmes couleurs que 1'arcenciel, & dont 1'interieiire
DEF eftoitbeaucaup plus viue & plus apparente que
l'exterieure GHI, en forte que ie ne doute point qu'el-
les ne fuffent caufdes, en la facon que iay tantoft dite,par
larefra&ion qui fe faifoit, non en cete glace continue
oufe voyoient lesfoleils K & N, mais en d'autre, diuife'e
enplufieurspetites parcelles, qui fe trouuoit au deffus
Oo z                   &
-ocr page 371-
zyr                 Les Meteores^
& au defTous. car
il eft bien vray-
/emblable que h
mefrne caufe, qui
auoit pii compo-
fertout vn cercle
de glace de quel-
ques vnes des
parties exterieu-
res de la nue,
auoit dinbofe' les
autres voyfines a
faire paroiftre ces
eouronnes. De
fa§on que fi on
n'en obferue pas
toufiours detelles
lors qu'on voit
plufieurs fbleils,
c'eft que L'efpaif-
feur dela nue ne s'eftend pas toufiours au dela du cercle
deglacequil'enuironnejoubienqu'elleeft fi opaque &
obfcure qu'on ne les appercoit pas autrauers.Pour le lieu
ou fe voyent ces couronnes , c'eft toufiours autour du
vray foleil, Et elles n'ont aucune conjunction auec
ceux qui ne font que paroiftre. car bienque les deux
K & N fe rencontrent icy en I'interfeclion de l'exte-
rieure & du cercle blanc, c'eft chofe qui n'eft arrinee
que par hazard, & ie m'afTure que le mefme ne fe vit
point aux lieux vn peu loin de Rome , ou ce mefine
Phai-
-ocr page 372-
Disc ours Dernier.                19$
Phainoniene fut remarqud'. Mais ie ne itrge pas pource-
laqUe leur centre foit toufiours en la ligne droite tiree de
l'oeil vers lefbleil,fiprecifementqu'y eft celuy del'arc-
en-ciel; car il y a cela de difference, que les gouttes
d'eau,eftant rondes,caufent toufiours mefme refraction
enquelquefituationqu'ellesfoient; au lieu que les par-
celles de glace, eftant plates , la caufent d'autant plus
grande, qu'elles font regardees plus obliquement. Et
pourceque lorfqu'elles feforment par letournoyement
d'vn vent fur la circonference d'vne nue, elles y doiuent
eftre couche'es en autre fens, que lorfqu'elles fe forment
audeffusou au deffous, Il peutarriuer qu'onvoyeen-
fembledeuxcouronnes, l'vnedans l'autre, qui foient a*
peuprdsdemefme grandeur, & qui n'ayent pas iufte-
ment le mefme centre.
Deplus ilpeut arriuer qu outre les vens qui enuiron-
nentcetenue, il enpafTe quelqu'vn par defTus ou par
deflbus , qui derechef y formant quelque fuperficic
de glace , caufe d'autres variete's en cc Phainomene.
Gomme peuuent encore faire les nues d'alen^our,
ou la pluie s'il y en tombe . Car les rayons, fe re-
flefchifTant de la glace d'vne de ces nues vers ces
gouttes , y reprefenteront des parties d'arc-en-ciel,
dont les fituations feront fort diuerfes. Comme aufTy
les fpe<5tateurs n'eftant pas au deflbus d'vne telle nue,
mais a cofte eutre plufieurs , peuuent voir d'autres
cercles & d'autres foleils. De quoy ie ne croy pas
qu'il foit befoin que ie vous entretiene d'auantage.
car i'efpere que ceux qui auront compris tout ce qui
Oo y                 aefte'
-ocr page 373-
$94 k£s Meteores. Discours Dernier,
a efte dit en ce traite, ne verront rien dansles nues
a l'auenir, dont ils ne puiffent ayfement entendre
la caufe, ny qui leur donne fuiet
d'admiration.
-
F I N.
-ocr page 374-
L A
GEOMETRIC
-ocr page 375-
Actaertiflement.
TU s QJl E s icy i'ay tafche de me rendre intelligible a tout
■*-lemonde, mats pour cetmite ie crains, quilnepourraejlre
leu queparceux, qui ffauent dejiace qui eft dans les liures
de Geometric car ctautant quils contienent plufieurs Ve-
ritas fort bien demonftrees, i'ay creuqu'ilferoit fuperflus de
les repeter, & nay pas lai£6pourcela de menferuir.
*
-ocr page 376-
2?7
L A
GEOMETRI E.
LIVRE PREMIER.
T>es problefmes qu'onpeut conftruire fans
y employer que des cercles & des
lignes drones.
Ous les Problefmes de Geometrie fe
jpeuuentfacilement reduire atels termes,
qu'iln'eft befoin parapres que de connoi-
ftre lalongeur de quelques lignes droites,
Ipourlesconftruire.
Etcommetoutel'Arithmetiquen'eftcompofe'e, que comm&
dequatre ou cinq operations, qui font l'Addition, laI.e;calcul
Souftradtion, la Multiplication, la Diuifion, & l'Extra- th
lmeti-
ftion des racines, qu'on peut prendre pour vne efpece ^ue W
de Diuifion : Ainfi n'at'on autre chofe a faire en Geo- aux ope-
metrie touchant les lignes qubncherche, pour les pre-"""^
parer a eftre connue's, que leur en adioufter d'autres, ou «*«•
en ofter; Oubicn en ayant vne, que ie nommeray iVnitd
pour la rapporter d'antant mieux aux nombres , & qui
peutordinairement eftre prife a difcretion,puis en ayant
encore deux autres, en trouuer vue quatriefme, qui foit
al'vne de ces deux,comme Pautre eft alVnirc, ce qui eft
lemefme que la Multiplication« oubien en trouuer vne
quatriefme, qui foit a Tvnede ces deux, comme rvnitc
Pp                      eft
-ocr page 377-
i9&                   La Geometrte.
eft a 1'autre, ce qui eft le mefme que la Diuiiiorij ou enfin
trouuervne,ou deux,ou plufieurs moyennesproportion-
nellesentrel'vnite', &quelque autre ligne; ce qui eft le
mefme que tirer la racine quarre'e, on cubique,&c. Erie
ne craindray pas d'introduirc ces termes d'Arithmeti-
que en la Geometrie , affin de me rendre plus intel-
ligible.
la Multi-
plication.
Soit par exemple
ABrvnite*, &qu'il fail-
le multiplier B D par
B C, ien'ay qu'aioindrc
les poins A & C, puis ti-
rer DE parallele a C A,
& BEeft leproduitde
cete Multiplication.
La Divi- Oubien s'il faut diuifer B E par B D, ayant ioint les
fion- poins E & D, ie tire A C parallele a D E, & B C eft le
.,_ produit de cete diuiiion.
1 extra- w
ctiondcla
racine
I>
quarrce.
1
Ou s'il faut tirer la racine
quarre'e de G H , ie Iuy ad-
ioufte en ligne droite F G,
qui eft rvnite',& diuifant FH
p
jh en deux parties efgales au
K
point K, du centre K ie tire
Ie cercle FIH, puis efteuant du point G vne ligne droite
iufques a I, a angles droits fur FH, c'eft GI la racine
cherchee. Ie ne dis rien icy de la racine cubique, ny des
autres,acaufequei'enparJeray plus commodement cy
apre's.
Commct
on peut
Mais fouuent on n'a pas befbia de tracer ainfi ces li-
gne
-ocr page 378-
Litre Premier.                   i$9
gnes fur 1c papier, & il fuffift de les defigner par quelques vfer je
lettres, chafcune par vne feule. Comme pour adioufter chifftesen
laligneB DaGHjienommel'vnetf &l'autre£,&efcristi:ie.
a-i- b}Eta — &,pour fouftraire b d5 a-} Et a &,pour les mul-
tiplier l'vne par f autre5 Et f,pourdiuiferaparbsEt aa,
ou a, pour multipliers par foy mefme; Eta, pour Ie
multiplier encore vne fois par a, & ainfi a l'infini j Et
..'12.                                                                                                             Z                Z
* a H- b, pour tirer la racine quarree d' <* -+- b -3 Et
' Ca-i+aJi, pour tirer la racine cubique d'a—b
-\-abb, & ainfides autres.
Ou il eft a remarquer que par a ou b ou femblables,
iene convoy ordinairement que des lignes toutes fim-
ples, encore que pour meferuir des noms vfite's enl'Al-
gebre, ie les nomme des quarre's ou des cubes, &c.
Ileftaufly a remarquer que toutes les parties d'vne
mefme ligne.fe doinent ordinairement exprimer par au-
tant de dimenfions 1'vne que fautre, lorfque IVniteVeft
pointde'termineeenlaqueftion, comme icy a en con-
tientautantqu'a^ ou b dont fecompofe la ligneque.
i'ay nomme'e ^ C. a-b ~\- abb: mais que ce n'eft
pas de mefme lorfque l'vnitd eft de'termine'e, a caufe
qu'elle peut eftrefoufentendue par tout ou il y a trop ou
trop pen de dimenfions: comme s'il faut tirer la racine
cubique de aabb-b , il faut penfer que la quantitd
« ab b eft diuifee vne fois par l'viiite', & que 1'autre quan-
tite b eft multiplie'e deux fois par la mefme.
P p 2                        Au
-ocr page 379-
$00                      I/A GEOMETRIE.
Au refte affin de ne pas manquer a fe fouucnir des
nomsde ces lignes, il en fauttoufiours faire vn regiftre
fepare' , a mefure qu'on les pofe ou qu'on les change,
efcriuant par exemple.
A B so i, c'eft a dire, A B efgal a i.
GH so a
BD do b, &c.
Commct AinfivoulantrefoudrequelqueprobIefrne,on doit d'a-
nirau"" ^or&*econfiderercommedefiafair, &donnerdesnoms
Equatios a toutes les lignes, qui femblent neceflaires pour le con-
sent a re- ftruire, auffy bien acelles qui font inconnues, qu'aux
foudteiesautres. Puis fans confidereraucune difference entreces
re«.C lignes connues, & inconnues, on doit par courir la diffi-
eulte', felon 1'ordre qui monftre le plus naturellement
detous enqu'elle forte elles dependent mutueilement
les vnes des autres, iufques a ce qu'on ait trouue' moyen
d'exprimer vne mefme quantite'en deux fagons: ce qui
fenommevne Equation; car iestermes de 1'vne de ces
deux fagons font efgaux aeeux de l'autre. Et on doit
trouuer autant de telles Equations,qu'ona fuppofc' de li-
gnes, qui eftoient inconnues. Oubien s'il ne s'en trouue
pas tant, St que nonobftant on n'omette rien de ce qui eft
defire en la queftion,cela tefmoigne qu'elle n'eft pas en-
tierement determined. Et lors on peut prendre a difcre-
tion des lignes connues, pour toutes les inconnues auf-
qu'elles ne correfpond aucune Equation. Aprds cela s'il
en refte encore plufieurs , il fe fautferuir parordrede
chafcune des Equations quirefteut auflfy, foit en la con-,
fiderant toute feule,foit en la comparant auec les autres,
pour expliquer chafcune de ces lignes inconnues; & faire
ainii
-ocr page 380-
Livre Primiexi                   jfei
ainfi en les demeflant, qu'il n'endemeure qu'vnc lenle,
efgaleaquelqueautre, qui foit connue, oubien dont le
quarre*, ou le cube, ou le quarre'de quarre", oule furfoli-
de, oule quarre'de cube,&c. foit efgal a ce, qui fe pro-
duift par l'addition, ou fouftradtion de deux ou plufieurs
autres quantites, dont l'vne foit connue , & les autres
foient compofees de quelques moyennes proportion-
nelles entre 1'vnite', & ce quarre", ou cube , ou quarre de
quarre,&c. multiplicespar d'autres connues. Ce que i'e-
fcris en cete forte.
^ x> b. ou
%3& — a %-hbb. ou
^30 H- a ^ -+- b b £-- c. ou
4                    5                 5                 4
% 30 a % c s^-t- d. &c.
Ceil a dire, %, que ieprens pour la quantitd* inconnue;
eftefgalea^, oulequarrd de ^eft efgal au quarre' de b
moinsa multiplie par £. ou le cube de ^eft efgal k a
multipliepar le quarre de ^plus le quarre" de £ multiplie
par ^moinsle cube dec. 8c ainfi des autres..
Etonpeuttoufioursreduire ainfi toutes les quantites
inconnues a vne feule, lorfque le Problefme fe peut con-.
ftruirepardescerdes&deslignesdroites, ou aufTy par
desfe&ionsconiques.ou mefme par quelque autre lignc
qui ne foit que d Vn ou deux degrds plus compofee- Mais
ie nem'arefte point a expliquer cecy plus en detail, a
caufe que ie vous ofterois le plaifir de l'apprendre de
vous mefme, & i'vtilitd de cultiuervoftrc efprit en vous
y exerceant, qui eft a mou auis la principale,qu'on puiflfe
c
                 Pp y                    tirer
A
-ocr page 381-
3.02                      La Geometrie.
tirerdecetefcience. AufTyqueienyreniarquerien de
fi difficile, que ceux qui ferout vn peu verfes en la Geo-
metrie commune, & en 1'AIgebre, & qui prendront gar-
de a tout ce qui eft en ce traite', ne puifTent trouuer.
Ceftpourquoyieme contenteray icy de vous auer-
tir, que pourvii qu'en demeilant ces Equations on ne
manque point a fe feruir de toutes Ies diuifions, qui fe-
ront poffibles, on aura infalliblement Ies plus fimples
termes,aufquels la queftion puiffe eftre reduite.
Quels
font Ies
Et que fi elle peut eftre refolue par la Geometrie ordi-
probief- naire, c'eft a dire, en ne fe feruant que de lignes droites
mespans ^ circulates trace'esfurvnefuperficieplate, lorfque la
derniere Equation aura eftd entierementde,a)eflee,il n y
reftera tout au plus qu'vn quarre inconnu, efgal a cequi
fe produift de l'Addition, ou fbuftra&ion de fa racine
multiplie'e par quelquequantite'connue, & dequelque
autre quantite aufTy connue.
Com-
ment ils
fe refol-
uent.
Etlorscete racine, ouligneinconnue fetrouue ayfe-
ment. Car ft i'ay par exemple
t__...........                               \?o a %-hbb
Jefais le triangle rectan-
gle N L M, dont le co*
fte'L M eft efgal a b ra-
tine
quarree de la quan-
tite' connue bb, & l'au-
,j tre L N eft ~ a, la moi-
tie" de l'autre quantite"
connue, qui eftoit multiplie'e par ^que ie fuppofe eftre la
ligne inconnue. puis prolongeant M N la baze de ce tri-
angle,
f
-ocr page 382-
Livre Pre mtn-R.                    303
angle, iufquesaO.en fortequ'N O foitefgalea N L,
latoute OM eft ^Ialigne cherchde. Et elle s'exprime
en cete forte
I 30 \a ■+- V^ aa -+■ bb.
Quefiiay^00 -- 0 y 4- bb, & qu'^ foit laquantite*
qu'ilfauttrouuer , ie fais le mefme triangle rectangle
NLM.& de fa baze M N i'ofte N P efgale a N L, & Ie
refte P M eft y la racine cherchee. De fa§on que iay
y 30 - ~ a ■+- V\aa -\-bb. Ettout de mefme fi i'a-
uois x ?o ~ a x ~h &. P M feroit x. & i'aurois
x so ^ ■-. j«H- V -aa-r- bb: &ainfi des autres.
Enfin fi i'ay
t-
£ 30 a^ — b b:
ie fais N L efgale a \ a> & L M
efgale a b come deuat, pmis,au lieu
de ioindre les poins M N, ie tire
M QRparalleleaL N. &du cen-
tre N par L ayant defcrit vn cer-
cle qui lacouppe aux poins Q &
R, la ligne cherchee ^ eft M Q»
oubie M R, car en ce cas elle s'ex-
prime en deux fagons, a fcauoir 3; dd^a-H j/ \aa~bb,
& \ so \ a — fr^aa~bb.
Et fi le cercle, qui ayant fon centre au point N, pafle
par le point L, necouppe ny ne touche la ligne droite
JMQ^R, iln'yaaucune racine enl'Equation, de fa§on
qu'on peut aflurer que la conftru&ion du problefme
propofdeftimpoffible.
Aui
-ocr page 383-
^r
304                     Ia Geometrie.
Au refteces mefmes racines fe peuuent trouuer par
vne infinite^ d'autres moyens , & i'ay feulement voulu
mettre ceux cy, commefortfimples, aiBn defaire voir
qu'on peut conftruire tous Ies Problefmes de Ia Geome-
trie ordinaire, fansfaire autre chofe que Ie peu qui eft
compris dans les quatre figures que i'ay expliqudes. Ce
que ie ne croy pas que Ies anciens ayent remarqud car
autrementilsn'eufTentpas pris la peine d'en efcrire tant
de gros liures, ou le feul ordre de leurs propofitions nous
fait connoiftre qu'ils n'oqt point eu lav^e methode
pour les trouuer toutes,mais qu'ilsont feulement ramaf-
fe'c elles qu'ilsont rencontre'es.
:Exemplc £t on [e peut voir aufTy fort clairement de ce que Pap-
Pappus. pus amis au commencement defbnfeptiefme Iiure, ou
apres s'eftre arefte'quelque terns a denombrer tout ce
qui auoit efte efcrit en Geometrie par ceux qui l'auoient
precede, ilparieenfind'vnequeftion , qu'ilditque ny
EucIide,nyApollonius, ny aucun autre n'auoient fceu
entierement refoudre. & voycy fes mots.
ie cite Quern autem dicit [Apollonius) in tertio libra locum ad
verba la- tres, & quatuorlineas ab Euclide perfebtum non ejfe, neque
tim que le ip£e perficere poterat, neque aliquis alius ^ fed neque pau-
affin que lulum quidaddere it's, qua Euclides fcripjit,per ea tantum
chafcun
^^ qUlS afhtte ad Euclidk tempera pramonflrata
Ventende                   ' ?         '*                                       *          *             J
plut ayfe- fu/lt, &i,
ment.
Etvnpeuapre'silexplique ainiiqu'elle eft cete que-
stion. "
Jit locus adtres, 0 quatuorlineas \ in quo (ApoUonius)
magnificefeiacTtat,^ oflentat,nulla habita gratia ei
, qui
prius jiripferat t eft hujufmodi. Sipofitione datistribus
reclu
-ocr page 384-
Livre Premier.                   30?
reBis lineis ab uno Z§ eodempunBo, ad tres lineas in datis an-
gulis reBce lineis ducantur, ($ data Jit proportio reBanguli
contenti duabus duBis adquadratum reliquce: punBum con-
tingitpojitione datum folidum locum
, hoc eft unam ex tribus
comcis feBionibus. Et Ji ad quatuor reBas lineas pojitione
datas in datis angulis linea ducantur ; & reBanguli duabus
duBis contenti adcontentum duabus reliquisproportio data
fit: JimiliterpunBum datum coni feBionem pofitione contin-
get. Si quidem igitur ad duos tantum locus planus often fus
eft. Qupdjiadplures quam quatuor, punBum continget lo-
cos non adhuc cognitos, fed linens tantum diBas s quales au-
temfint, velquam habeant proprietatem, non conftat: earum
unam, neque primam, & qute manifeftijjima videtur, compo-
Juerunt oftendentes utilemefie. propojitiones autemipjarum
bee funt.
Si abaliquopunBo ad pofitione datas reBas lineas quin-
que ducantur reBce linete in datis angulis, & data Jit propor-
tio folidi parallelepipedireclanguli, quod tribus duBis lineis
continetur ad folidum parallelepipedum reBangulum, quod
contineturreliquis duabus, & data quapiam linea, punBum
pojitione datam lineam continget. Si autem adfex, & data
fit proportio folidi tribus lineis contenti ad folidum
, quod
tribus reliquis continetur; rurjus punBum continget pojitione
datam lineam. Quodfiadplures quamfex, non adhuc habent
dicere,an data fit proportio cuiufpid contenti quatuor lineis
ad id quod reliquis continetur, quoniam non eft aliquid con-
tentum pluribus quam tribus dimenjionibus.
Onievouspriederemarquerenpaflant, que lefcru-
pule,que£aifoientlesanciens cTvfer destermes del'A-
Tithmetiqne en la Geometrie, qui ne pouuoit proccder,
Q^q                           qiie
-ocr page 385-
3<5<f                       La Geometrie.
que de ce qu'ils ne voyoienc pas afTe's clairement leur
rapport, caufoitbeaucoupd'obfcurite, & d'embaras, en
lafacondontilss'expliquoient. car Pappus pourfuit en
cete forte.
Aequiefcunt out em his, quipaulo ante talia interpretaii
funt. nequeunum aliquopaBo comprehenfibilefignificantes
quod his continetur.Licebit aute per coniunBasproportioned
htec, Csl dieere, & demonfirare univerfe in diBis proportioni-
bus, atque his in hum modum. St ab aliquo ptinBo adpoji-
tione datas reBas lineas ducanturreBx linecein datisanpu*
Us, & data fit proportio coniunBa ex eay quam habet una du-
Barumadunam,
6? alteraadalteram,&'aliaadaliam,&re*
liquaaddatumlineam,fifintfeptemjfiverooBo,
&reliqua
ad reliquam: punBum continget pofitione datas lineas* Et
fimiliter quotcumque fint impares vel pares multitudine
cum hiect ut dixiy loco ad quatuorlineas refpondeanty,nullum
ipiturpofueruntita utlinea not a fit,
£$fc
taqueftiondoncquiauoitefte'commencee a refou^
dreparEuclide, &pourfuiuieparApoIlonius, fans auoir
efteacheue'e par perfonne, eftoit telle. Ayant trois oa
quatre ou plus grand nombre de lignes droites donnees
parpofition; premierement on demande vnpoint, du-
quelon puifle tirerautant d'autres lignes droites}vne fur
chafcunedes donnees, qui fac.ent auec elles des angles
donnds, & que le rectangle contenu en deux de celles,
quiferontainfitire'esd'vn mefme point, ait la propor-
tion donnee auec le quarre' de la troifiefrne, s'il n'y en a
que trois,-oubien auec le rectangle des deuxautres, s'ily
en a quatre;oubien,s'il y en a cinq,que le parallelepipede
compofede trois ait la proportion donnee auec le paral-
lelepipede
-ocr page 386-
Livre Premier.                  307
lelepipede compofe'des deux qui reftent,&:d'vne autre
ligne donne'e. Ous'ily en a fix, que le parallelepipede
copofe'de trois ait la proportion donne'e auec le paralle-
lepipede des trois autres. Ou s'il y en a fept,que ce qui fe
produift lorfqu'on en multiplie quatre Pvne par I'autre,
ait la raifon donne'e auec ce qui feproduift par la multi-
plication des trois autres, & encore d'vne autre ligne
donne'e^ Ous'ilyenahuit,que le produit de la multi-
plication de quatreait la proportion donne'e auec le pro-
duit des quatre autres. Et ainfi cete queftion fe peut
efteudre a tout autre nombre de lignes. Puis a caufe* qu'il
ya toufioursvneiufinite'dediuers poins qui peuuent fa-
tisfaireacequi eft icy demande', il eft aufly requis de
connoiftre,& de tracer laligne,danslaquelle ilsdoiuent
tousfe trouuer. & Pappus dit que Iorfqu'il n'y a que
trois ou quatre lignes droitesdonne'es, e'eft en vne des
troisfectionsconiques.mais iln'entreprend point de la
determiner, nyde la defcrire. non plus que d'expli-
quer celles ou tous ces poins fe doiuent trouuer, lorfque
la queftion eft propofe'e en vn plus grand nombre de li-
gnes. Seulement il aioufte que les anciens en auoient
imagine'vne qu'ils monftroie-nt y eftre vtile , mais qui
fembloit la plus manifefte, &; qui n'eftoit pas toutefois la
premiere. Ce qui m'a donne occafion d'eflayer li par la
methodedontieme fers on peut aller aufly loin qu'ils
ontefte'.
Et premierement i'ay connu que cete queftion n'eftant Refponfc
propofe'e qu'en trois, ouquatre,ou cinq lignes y on peut ^ ^~
toufiours trouuer les poins cherche's par la Geometrie Pappus.
finiple; e'eft a dire en ne fe feruant que dela reigle Sedu-
ce q 2
                  compas,
-ocr page 387-
jo85                   La Geometrie,
compas, ny ne faifant autre chofe, que ce qui a defiaefte'
dit; exceptefeulement Iorfqu'il y a cinq lignes donndes,
fi ellesfbnttoutes paralleles. Auquelcas, comme aufTy
lorfquela queftion eftpropofee en fix,ou 7, ou 8, ou 9
lignes, on peut toufiourstrouuer les poins cherche's par
la Geometrie des folides; c'eft a dire en y employant
quelqu'vnedestrois fe&ions coniques. Exceptefeule-
ment Iorfqu'il y a neuflignes donnees, fi elles font toutes
paralleles. Auquelcasderechef, & encore en 10,11,12,
ou 13 lignes on peut trouuer les poins cherches par le
moyen d'vne Iigne courbe qui foit d'vn degre plus com-
pose que les fec-tions coniques. Exceptd' en treize li el^
les font toutes paralleles, auquel cas, & en quatorze, if,
16, 8ci7ilyfaudra employer vne ligne courbe encore
d'vn degre' plus compofe'e que la precedente. & aiufi
al'infini.
Puisiay trouue''aufiy, que Iorfqu'il nyaquetrois ou
quatre lignes donnees, les poins cherche's fe rencontrent
tous , non feulement en I'vnedes trois fe&ions coni-
ques, mais quekjuefois auffy en la circonference d'vu
cercle, ou en vne ligne droite. Et que Iorfqu'il y en a
cinq, ou fix, ou fept, ou huit, tous ces poins fe rencon-
trent en quelque vne des lignes, qui font d'vn degre' plus
compofe'es que les fedtions coniques , & ileftimpoffible
d'enimagineraucunequi nefoit vtile a cete queftionj
mais ils peuuent aufly derecheffe rencontrer en vne fe-
&ionconique,ouenvncerde, ou en vne ligne droite.
Et s'ilyenaneuf, ou io,oun,ouii, ces poins fe ren-
contrent en vne ligne, qui ne peut eftre que d'vn degre"
plus compofe'e que les precedentes^ mais toutes celles
qui
-ocr page 388-
Livre Premier.              3&9
qui font d'vndegreplus compofeesy peuuentferuir, 8c
ainfiaTinfini.
Au refte la premiere, & la plus fimple de toutes aprds
les fedtions coniques, eft celle qu'on pent defcrirepar
rinterledtiond'vneParabole, &d'vnelignedroite, en la
fac,on qui fera tantoft explique'e. En forte que ie penfe
auoir entierement fatisfait a ceque Pappus nous dit auoir
efte'cherche'en cecyparlesanciens. & ie tafcheray d'en
mettre la demonftration en peu de mots.car il nvennuie
defia d'en tant efcrire.
Soient A B, A D, E F, G H, Sec. plufieurs Iignes don-
nees par pofition, & qu'il faille trouuer vn point, comme
G, duquel ayant tire d'autres Iignes droites furlesdon-
nees, comme C B. C D, C F, & C H, en forte que les
angles C B A, C WV, C F E, C H G, &c. foient donnes,'
-ocr page 389-
I
310                 LaGeometrte.
& que ce qui eft produit par la multiplication d'vne par-
tie de ces lignes,foit efgal a ce qui eft produit par la mul-
tiplication des autres, oubien qu'ils ayent quelque autre
proportion donne'e, car cela ne rend, point la queftion
plus difficile.
Commet Premierement ie fuppofe la chofe comme defia faite,
pofer°ies &Potir me demeflerde la cofufionde toutes ces^Iignes,
termes ie confidere l'vnedes donnees, & lVne de cellesqu'il
niTI ye- fauttrouuer, parexemple A B, & C B, comme lesprin-
ciuation cipales, & aufquelles ie tafche de rapporter ainfi touted
cxcmpie. les autres. Que le fegment de la ligne A B, qui eftentre
les poins A & B, foit nommd x. & que B C foit nomme
y. & que toutes les autres lignes donne'es foient prolon-
ged, iufques a ce qu'elles couppent ces deux, aufly pro-
longees s'il eft befoin, &fi elles neleur font point paral-
lels, comme vousvoyes icy qu'elles couppent la ligne
ABauxpoinsA, E, G,&BC auxpoinsR,S,T. Puis a
caufequetousIesanglesdutriangleARB font donne's,
la proportion, qui eftentre les cofte's A B, &BR, eftauf-
fy donne'e, &ie lapofe comme de ^kb, defacon qu' A B
h x                                                            h x
eftant.v,RBfera -'&latouteCR feray -f- -'acaufe
que le point B tombe entre C &Rj car fi R tomboit en-
bx
treC &B,C Rferoit j/ — -;&fi C tomboit entre B &R,
btc
CRferoit —jy-r-"' Tout de mefme les trois angles
du triangle D R C font donne's, & par confequent aufty
^proportion qui eft entre les coftes C R, & C D, que ie
b x
pole comme de ^a c: de fac,on que C Reftant y H- -'
CD
.
-ocr page 390-
Livr e Premie.*.
311
t v          hex
C D fera - -+- ~. Apres cela pourceque Ies lignes A D,
A D, & E F font donnees par pofition, la diftance qui eft
entre les poins A & E eft aufly donnee, & fi on la nom-
ine K, on aura E B efgal a ^-f- a?- mais ce feroit /^— *, fi
le point B tomboit entreE & A;& -- \-h xfiE tomboit
entre A & B. Et pourceque les angles du triangle E S B
ibnt tous donne's, la proportion de BE a BS eft aufly
donnee, & ie la pofe comme ^hd', libienque BS eft
dk^dx       .             _          z.y*dk<i<dx-      .        r •
-----—. Sc la toute C S elt-------------• mais ce feroit
Zi               *                                                                                                                     Z*                           <*
Xy_- j- x^ ^ p0-mt s tomboit entre B & C58£ ce feroit
------z-----------,fi C tomboit entre B Sc S. De plus les
trois angles dutriangle F S C font donne"s> & en fuite< la
pro*-
-ocr page 391-
jit                   La Geometric.
proportion de C S k C F, qui foit conime de % a e, & la
_ ez.y t^dek >$<dex                       r          r
toute CFfera-----—-------. En melme ragon A G
queienomme/eftdonne'e, &BGeft/-», & a caufe
du triangle BGT la proportion de BG a B T eft aufly
fl—fx
donne'e, qui foit comrne de ^ a f. &B Tfera —-_.-,&
C Too ^—-—-. Puisd£rechef la proportion de TC a
,C H eft donne'e, a caufe du triangle TCH, & la pofant
jv                   „,, <i>Z*y>i<fgl~fgx
.comrne de ^ag, on aura C H oo
Z.Z.
Etainfivousvoye's, qu'entel nombrede lignes don-
ne'esparpofitionqu'onpuifTeauoir, toutes les lignes ti-
rees deflus du point C a angles donne's fuiuant la teneur
de la queftion,fe peuuent toufiours exprimer chafcune
par trois termes; dont 1'vn eft compofe'de la quantity in-
connue y, multiplie'e , ou diuifee par quelque autre
connue; & l'autre de la quantite' inconnue x, aufTy mul-
tiplied ou diuifee par quelque autre connue, & le trofief-
me d'vne quantite toute connue. Excepte feulement fi
ellesfontparallelesjOubienalaligneAB, auqueicas Ie
terme compofe'de la quantite xferanul , oubienalali-
gne C B, auquel cas celuy qui eft compofe'de la quantite'
y fera nul; ainfi qu'il eft trop manifefte pour que ie m'are-
fte a l'expliquer. Et pour les fignes -+-, & —, qui fe ioi-
gnent a ces termes, ils peuuent eftre change's en toutes
les fa§ons imaginables.
Puisvous voydsaufly, que multipliant plufieurs de
ces lignes I'vne par l'autre, les quantitds x&cy, qui fe
trouuent dans leproduit, n'y peuuent auoir que chafcu-
ne autantdedimenfions, qu'il y a eu de lignes, al'expli-
catioa
-ocr page 392-
Livre Premier.                    313
cation defquelles elles feruent, qui ont efte ainfi multi-
pliees: en forte qu'e lies n'auront iamais plus de deux di-
menfions,encequi neferaproduitque par la multipli-
cation de deux lignes; ny plus de trois, en ce qui ne fera
produit que par la multiplication de trois, & ainfi a l'in-
fini .
De plus, a caufe que pour determiner le point C, il 0^°™^
n'y a qu'vne feule condition qui foit requife , a fcauoir que ce
quecequieftproduitparla multiplication d'vn certain J££eft "
nombre de ces lignes foit efgal, ou (cequi n'eft de rien plan, lorf-
plus malayfe'j ait la proportion donne'e, a ce qui eft pro- ^ltn c
duit par la multiplication des autres; on peut prendre a propofe
*.*■ • i>         J j                      • / •                                      „ en plus de
difcretionl vnedesdeuxquantitesinconnuesArouy, &cs lignes.
chercher l'autre par cete Equation, en laquelle il eft eui-
dent que Iorfque la queftion n'eft point propofee en plus
de cinq lignes, la quantity x quine fert point a l'expref-
fionde la premiere peut toufiours n'y auoir que deux di-
menfions. de fagon que prenant vne quantity connue
poury, il ne reftera que x x 30 -+- ou — a x -f- on — b b. &:
ainfi onpourratrouuer laquantite' x auec la reigle &le
compas,enlafac,ontantoft expliquee. Mefme prenant
facceffiuementinfiniesdiuerfes grandeurs pour laligne
yy on en trounera auffy infinies pourla Iigne x,!k ainfi on
aura vnc infinite'de diuers poins , tels que celuy qui eft
marque' C, par le moyen defquels on defcrira la ligne
courbe demand ee.
II fe peut faire aufly, la queftion eftant propofe'e en fix,
ou plus grand nombre de lignes; s'il y en a entre les don-
ndes, quifoientparalleles a BA, ou BC, quel'vne des
deux quantite's x ou y n'ait que deux dimenfions en
Rr                     l'Equa- -
t
-ocr page 393-
jr-f                   La Geometrte.
l'Eqoation, 8c ainfi qu'on puifTe trouuuer le point Cauecr
lareigle &lecompas. Mais aucontraire fi ellesfont rou-
tes paralleles , encore que la queftron ne foit propofee
qu'en cinqIignes,ce point C nepourra ainfi eftre trou-
ue, a caufe que laquantite x ne fe rrouuantpoint en tou-
te l'Equation,il ne fera plus permis de prendre vne quan-
tity connue pour celle qui eft nomineey , mars ce fera
elle qu'ilfaudra chercher. Et pource quelle aura trois di-
menfions,onnelapourra trouuer qn'en tirant la racinc
dVne Equation cubique. cequi ne fe peut generalement
faire fans qu'on y employe pour le moins vne fection co~
nique. Et encore qu'il y ait iufques a nenf lignes don-
ndes,pourvAqu'elles ne foient point toutes paralleles, on
peut toufiours faire quel'Equation ne monte que iufques
au quarre'de quarrd. au moyen dequoy on la pent auffy*
toufiours refoudre par les fections coniques, en la fagon
quei'expliqueraycyapres. Et encore qu'il yen ait iufc
quesatreize,onpeut toufiours faire qu'elle ne monte
que iufques au quarrd de cube; en fuite de quoy on la
peut refoudre par le moyen d'vneligne , qui n'eft que
d'vndegre'plus compofeequelesfec-tions coniques, en
la fac,on que i'expliqueray aufTy cy aprds. Et cecy eft la
premiere partie de ceque i'auois icy a demonftrer ■• mais
auantqueie pafTe a la feconde il eft befoin que ie die
quelque chofe en general de la nature des lignes cour-
bes.
—»
>. v ,                                               .- I :
-ocr page 394-
-I/ivre Second.                   ji:jr
/LA
GEOME.TRIE.
L1VRE SECOND.
*De la nature des lignes courhs,
T E s anciens ont fort bien remarque , qu'entre les
-*-Troblefmes de Geometrie, les vns font plans, les ail- Qoelles
tresfolides,& les autres lineaires, c'eft a dire, que les vns iigne,s
peuuenteftre conftruits, enuetra§ant que des lignes eourbes
droites, fodescerclesjau lieu que les autres ne le peu- —„" re»
uent eftre, qu'on n'y employe pour le moins quelque fe- ceuoil eB
ction conique; nienfin les .autres , qu'on n'y employe ai°,m '
quelque autre ligne plus compofee. Mais ie m'eftonne
de ce qu'ils n'ont point outre cela diftingue' diuers de-
grees entre ces lignes plus compofe'es, & ie ne f§ aurois
comprendre pourquoy ils les ont nommdes mechani-
ques, plutoft que Geometriques. Car de dire que c'ait
«fte'', a caufe qu'il eft belbin de fe feruir de quelque ma-
chine pour les defcrire, il faudroit reietter par mefme
raifon les cercles & les lignes droitesjvii qu'on ne les de-
fcrit fur le papier qu'auec vn compas,& vne reigle, qu'on
peut aufTy nommer des machines Ce n'eft pas non plus,
a caufe que les inftrumens, qui feruent a les tracer.eftant
plus compofes que la reigle & lecompas , ne peuuent
eftre fi iuftes;car il faudroit pour cete raifon les reietter
des Mechaniques, ou la iuftefle des ouurages qui fortent
delamaineftdefire'e; plutoft que de la Geometrie , ou
c'eft feukment la iuftefle duraifonnemet qu'on*ccher-
R r 2                    che,
-ocr page 395-
3ttf                   La Geometrie.
che, & qui peut fans doute eftre aufly parfaite touchant
ces lignes, que touchant les autres. Ienediray pas aufly,
que ce foit a caufe qu'ils n'ont pas voulu augmenter le
nombre de leurs demandes, & qu'ils fe fontcontentds
qu'onleuraccordaft, qu'ils puflent ioindre deux poins
donne's par vne Iigne droite , & defcrire vn cercle d'vn
centre donne', qui pafTaft par vn point donne'.car ils n'ont
point fait de fcrnpule defuppofef outre cela,pour traiter
des fedtions coniques , qu'on pull coupper tout cdne
donnCparvn plan donne'. &iln'eft befoin de rienfup-
pofer pour tracer toutes les lignes courbes, que ie pre-
tens icy d'introduire; finon que deux ou plufieurs lignes
puifTent eftre meues l'vne pari autre, & que leurs inter-
ferons en marquentd'autres,- ce quine me paroift en
rien plus difficile. II eft vray qu'ils n'ont pas aufly entie-
rement receu les fe&ions coniques en leur Geometrie,
& ie ne veux pas entreprendre de changer les nomsqui
ont efteapprouue's par lVfage^ mais il eft, ce me femble,
tresclair, queprenant comme on fait pour Geometri-
que ce qui eft precis & exact , & pour Mechanique
cc qui ne 1'eft pas -, & confiderant la Geometrie comme
vne fcience, qui enfeigne generalement a connoiftre les
mefures de tous les cors, on n'en doit pas plutoft ex dure
les lignes les plus compofees que les plus limples, ponrvu
qu'on les puifleimaginer eftre defcrkes par vn mouue-
ment continu, ou par plufieurs qui s'entrefuiuent & dont
les derniersfoient entierement regies par ceux qui les
precedent, car par ce moyen on peut touliours auoir
vne connoiflance exa<5te de leur mefure. Mais peuteftre
que ce qui aempefche les anciens Geometres de re§e-
uoir
-ocr page 396-
Livre Second;                    317
uoircellesquieftoient plus compofe'esque lesfedtions
coniques, c'eft queles premieres qu'ils ont confiderees,
ayantparhafardeftelaSpirale, la Quadratrice, & fem-
blables, qui n'appartienent veritablement qu'aux Me-
chaniques,8cnefbnt pointdunombre de celles que ie
penfe deuoir icy eftre receues, a caufe qu'on les imagine
defcrites pat deux mouuemens fepareV, & qui n'ont en-
tire euxaucun raport qu'on puifle mefurer exactement,
bienqu'ilsayentapres examine' la Conchoide, la Ciflbi-
de, & quelque peu d'autres qui en font, toutefois a cau-
fe qu'ils n'ont peuteftre pas afles remarque" leurspro-
prieteV, ilsn'en ont pas fait plus d'eftat que des premie-
res. Oubien c'eft que voyant , qu'ils ne connoiflbient
encore , que peu dechofes touchant les fe<Stionsconi-
ques, &qu'illeurenreftoitmefme beaucoup, touchant
ce qui fe peut faire auec la reigle & le compas , qu'ils
ignoroient, ils ont creu ne deuoir point entamer de ma-
tiere plus difficile. Mais pourceque i'efpere que d'of ena-
uant ceux quiauront 1'adrefTe defe feruirdu calculGeo-
metriqueicypropofe', netrouueront pas afTes dequoy
s'arefter touchant les problefmes plans, ou folides; ie
croy qu'il eft a propos que ie lesinuite a d'autres re-
cherches, ou ils ne manqueront iamais d'exercice.
Voye'sles lignes A B, A D, A F, & femblables que ie
fuppofe auoir eftd defcrites par Fayde de l'inftrument
Y Z,qui eft compofe de plnfieurs reigles tellement ioin-
tes, quecellequi eft marque"e YZ eftant arefte'e fur la
lrgne A N,on peut ouurir & fermer Tangle XY Z; & que
lorfqu'ileft toutferme' ,les poins B, C, D, F, G, H font
tous aflembles au point A 5 mais qu'a mefure qu'on
Rr 3.                louure,
-ocr page 397-
1'ouure, lareigleBC, qui eft iointe a angles droits auec
XYaupoint B, pouffevers Z lareigle CD, qui coule
fur Y Z en faifant toufiours des angles droits auec elle, &
C DpoufTeDE, qui coule tout demefme fur YXende-
meuf ant parallele a B C, D E poufTe E F,E F pouffe F G,
cellecy poufTe G H. & on en peutconceuoirvne infinite'
d'autres, qui fe pouflent confequutiuementenmefme
fagon, &dontles vnesfacent toufiours les mefmes an-
gles auec Y X, & les autres auec Y Z. Gr pendant qu'on
ouureainfiTangle XYZ,le point B defcritlaligne AB,
qui eft vn cercle, 8des autres poins D5F,H, ou fe font
les interfe&ions des autres reigles, defcriuent d'autres
lignes courbes A D, A F, A H ,dont les dernieres font
par ordre plus copofe'es que la premiere, & cellecy plus
que le cercle. maisiene voy pas cequi peut empefcher,
qu'on neconcoiucauflynettement, & aufTy diftin&e-
•ment la defcdption de cete premiere,quedu cercle, ou
-ocr page 398-
Livre Seconb.                    $x&
du moins que des fections coniqnes; ny ce qui peut em-
pefcher,qu'onneconcoiueIafeconde, & la troifiefme, '
&toutes les antres,qu'on peut defcrire, aufly bien que
la premiere; ny par confequent qu'on ne les recoiue
toutesenmefmefa§onJ pourferuirauxfpeculations de
Geometrie.
Ie pourrois mettre icy plufieurs autres moyens pour La facon
tracer&congeuoirdes lignes courbes, qui feroient dejj^1^'
plus cnpluscompofe'espardegre's a l'infini. mais pourccs les li-
comprendreenfembietour.es celles, qui font en la Datu-I""^1"
re , & les diftinguer par ordre en certains genres -, ie ne certains
fcache rien de meilleur que de dire que tous les poins,de Ic^on-
cellesqu'on peut nommer Geometriques, c'eft a dircnoiftte lir
qui tombent fous quelque mefure precile & exadte, onr
qu'ont
necefTairement quelque rapport a tous lespoins d'vnetousleurs
lignedroite, qui peut eftre exprime'par quelque equa-«uxdes
lignes
droites.
tion, en tous par vnemefme, Et que lorfque ceteequa*
tion ne monte que iufques au rectangle de deux quanti-
tds indeterminees, oubien au quarrd d'vne mefme, la li-
gne courbe eft du premier & plus fimple genre, dans le-
quelilnyaquele cercle, la parabole, 1'hyperbole , 82
rjELllipfe qui foient comprifes. mais-que lorfque Tequa-
tion monte iufques a la trois ou quatriefme dimenfion
des deux,ou de l'vnedes deux quantites indeterminees,
car il en faut deux pour expliquer icy le rapport d'vn
point a vn autre,elle eft du fecond?& que lorfque l'equa-
tion monte iufques a la j ou fixiefme dimenfion, elle
eft du troifiefme,- & ainfi desautres a 1'infini.
Comme fi ie veux f<jauoir de quel genre eft la lignc
E C, quei'imagineeftredefcriteparriaterfedtion de la*
reigle
-ocr page 399-
Xa Geometrie.
3*o
reigle GL, & du plan re&iligne C N K L, dontle cofte
K N eft indefiniementprolonge'vers C , & qui eftant
meu furleplan de deflbus en ligne droite, c'eft a dire en
telle forte que fon diametre K L fe trouue toufiours ap-
plique'fur quelque endroit de la ligne B A prolonged de
part & d'autre, fait mouuoir circulairement cete reigle
GL autourdupointG,a caufe quelle luyefttellement
iointe quelle paffe toufiours par le point L. Ie choifis
vne ligne droite,comme A B,pour rapporter a fes diuers
poinstousceuxdecete ligne courbeEC, &en cete li-
gne A B ie choifis vn point, comme A, pour commencer
parluycecalcul. Iedis que ie choifis &Tvn&rautre, a
caufe qu'il eft libre de les prendre tels qu'on veult. car
encore qu'il y ait beaucoup de choix pour rendre i'equa-
tionplus courte, & plus ayfe'e; toutefois en quelle faccm
qu'on les prene, on peut toufiours faireque la ligne pa-
jroiffe de mefrne genre, ainfi qu'il eft ayfe' a demonftrer.
Apre's
-ocr page 400-
Livre Second.
321
A pre's celaprenant vn point a difcretion dans la courbe,
comme C, fur lequel ie fuppofe que l'inftrument qui fert
aladefcrireeftapplique', ie tire de ce pointy C laligne
C B parallele a G A, & pourceque C B & B A font deux
quantitesindetermmees&inconnues , ie les nonime
l'vney & I'autre x. maisaffin de trouuer le rapport de
1*vrie a I'autre; ie confidere aufly les quantites connues
qui determinent la defcription de ccte ligne courbe,
comme G A que ie nomme a, K L que ie norame b, dc
N L parallele a G A que ie nomme c. puis ie dis, comme
NLeftaLKjOUfa^ainfiCB.ou^eft'aBK, qui eft
b                                     U
par confequent ~yj & B L eft — y - b, & A L 'eft x 4-
—y b. de plus comme C B eft a L B, ovy a ~y~-b, ainfi
a, ou G A, eft a" L A, ou x -+- - y - b. de fac,on que mul-
Si                      tipliant
-ocr page 401-
$zz                  La Geometrie.
a b
tipliant la feconde par la troifiefine on produit -j-y - ab,
y
qui eft efgale a xy -+~~yy fy qui fe produit en multi-
pliant la premiere par la derniere. & ainfi 1'equation qu'il
falloittrouuereft
ex
yy do ey -- ^j ~\-ay — a f.
delaquelle onconnoift quelaligneEC eft du premier
genre , eomme en effeel: elle n'eft autre qu'vne Hy-
perbole-
Que fi en I'inftrument qui ftrt a la defcrire on fait
qu'aulieude la lignedrokeCNK,ce foit ceteHyper-
bole, ouquelque autre ligne courbe du premier genre,
quitermineleplan CNKL; l'interfedtiondeceteligne
& de lareigle GL defcrira, aulieu de I'Hyperbole E C,
vne autre lignecourbe, qui feradii fecond'genre. Com-
raefiCNKeft vn cercle, dont L foit le centre, on de-
fcrira !a premiere Conchoidedes anciens'j &fi cell vne
Parabole dontlediametre foit K B, on defcrira la ligne
courbe, que i'ay tantoft diteftre la premiere, 5c la plus
fimple pour la queftion dePappus,!orfqu'iI n'y aque cinq
lignes droites donnces par pofition. Mais Ci au lieu d'vne
deceslignescourbesdu premier genre, e'en eft vnedu
fecond, qui termine le plan C N K L, on en defcrira par.
fon moyen vne du troifiefme, ou fi e'en eft vne du troifi-
cfme, on en defcrira vne du quatriefme, & ainfi a l'inrjni.
coiiime il eft fort ayfe'a connoiftre par le calcul. Et en
quelque autre fac,on, qu'on imagine la defcriptiou d'vne
ligne courbe , pourvuqu'ellelbitdunombredecelles
que ie nomme Geometriques, onpotirra touiiours trou-
uer
-ocr page 402-
----------
Livre Secokd.                 323
uervneequatioBpourdeterminertousfespoins enceto
forte.
Au refte ie mets les Iignes courbes qui font mouter
cete equation iufques au quarre'de quarre' , au mefine
genre que celles qui ne la font monter que iufques au
cube. & celles dont i'equationmonte au quarrd de cu-
be,au mefrae genre que celles dont elle ne montequ'au
furfblide. & ainfi des autres. Dont la raifon eft, qu'il y a
reigle generale pour reduireau cube toutes les difficul-
ties qui vont au quarre'de quarrd, &au furfolide toutes
celles qui vont au quarrd de cube, de facon qu'on ne les
doit point eftimer plus compofe'es.
Mais il eft a remarquer qu'entre les Iignes dc chafque
genre, encore que la plus part foient efgalement compo-
fees , en forte qu'ellespeuuentferuir a determiner les
mefmes poins, & conftruire les mefmes problefmes ,il y
en^atoutefoisaufly quelques vnes, qui font plus flmples,
dc qui n'ont pas tant d'eftendue en Ieur puiflance. com-
meentre celles du premier genre outre l'EUipfe I'Hyper-
bole & la Parabole qui font efgalement compofees ,Ie
cercle y eftaufTycompris, qui manifeftement eft plus
finaple. & entre celles du fecond genre il y a la Conchoi-
de vulgaire, qui a fon origine du cercle5 & il y en a en-
core quelques autres, qui bien qu'elles n'ayenr pas tant
d'eftendue que la plus part de celles du mefine genre,
nepeuuent toutefoiseftremifesdans le premier.
Or apre'sauoir ainfi reduit toutes les Iignes courbes a Sj£
certains genres , il m'eft ayfe'de pourfuiure en la de- wo^dela
monftration de la refponfe,que i ay tanroftfaite a la que- fiap°r" s
ilion de Pappus. Car premierement ayant fait voir cy mi("11
-                          ,        J liurc pre,
51 i                    ciellUS, cedent.
-ocr page 403-
f«l                    La Geometrie.
deflus , que lorfqu'il n'y a quetrois ou 4lignes droites
donndes, Tequation qui fert a determiner Ies poins Cher-
Che's, ne monte quciufques au quarre; il eft euident,que
la ligne courbe ou fe trouuent ces poins, eft neceffaire-
ment quelqu'vne de celles du premier genre:a caufe que
cete mefme equation explique le rapporc, qu'ont tous
Ies poins des lignes du premier genre a ceux dVne ligne
droite. Efr que lorfqu'il n'y a pointpkisde 8 lignesdroi-
tes donn^es , cete equation ne monte que iufques au
quarredequarre tout au plus, & que par confequent la
ligne cherchee ne peut eftre que du fecond genre, ou au
deflbus.Et que lorfqu'il n'y a point plus de 12 lignes don-
nees , Tequation ne monte que iufques au quarre de cu-
be^ que par confequent la ligne cherchee n'cft quedu
troifiefmegenre, ouaudeflbus. &ainfi desautres. Et
mefme a caufe que la pofition deslignes droites donnees
peut varier en toutes fortes, & par confequent faire cha-
ger tant Ies quantity's connues, que Ies lignes -+-&-- de
Tequation, eutouteslesfa§ons imaginables j il eft eui-
dentqu'iln*ya aucune ligne courbe du premier genre,
qui ne foit vtile a cete queftion, quand elle eft propofee
en 4 lignes droites; ny aucune du fecond qui n'y foit vti-
le, quand elle eft propofee en hak; ny du troifiefme,
quand elle eft propofee en douze: & ainfi des autrcs. En
forte qu'iln'y a pas vne ligne courbe qui tombe fbus le
Solution calcul&puiiTe eftre receiie en Geometrie , quin'yfoit
dUeftion vt^e POUE quelque nombre de lignes.
quandtlk Maisilfaut icy plus particulierement queiedetermi-
pofccP° ne,&donnelafagondetrouuerlalignecherchee , qui
quen 3 fert en chafque cas, lorfqu'il ny a que 3 ou 4lignes droi-
gnes».                                                                                                       tQS
-ocr page 404-
Livri Second.                   52?
tesdonodes; & on verra^ar mefme moyen que fe pre-
mier genre des lignes courbes n'en contient aucunes atr-
trcs, queles trois fe<ftionsconiques,8cle cercle.
Reprenonsles" 4 lignes AB, AD, EF, &GH don~
nees cy deflus, & qu'il faille trouuer vne autre ligne, en
laquelleilfe rencontre vne infinite de poinstels que C,
duquelayanttireies4 lignes CB,CD,CF, & CH.a
angles donnc's,furiesdonndes, CBmultiplie'e parGF,
produift une fomme efgale a C D, multiplied par CII.
c'eil a dire ayant fait C B 00 y, C D 00 -.-
X.Z.
F 30
11
1 equatio eft
}
—dezzx *j ^ l/cfgtx
--dekz.z.
I
7
Jj"
~bcfg
XX J
>J< begz
■ tgzz.
Sf 3
AU
-ocr page 405-
"1
l%&                     La GeometriEc
au moins en fuppofant e ^plas grand que eg.czt s'il eftoit
moindre, il faudroit changer tous les fignes -f- & —. EC
fila quantitdj'ie trouuoit nulle, ou moindre que rien ea
cete equation, lorfqu'on a fuppofe'Ie point C en Tangle
D A G, il faudroit ie fuppofer aufly en Tangle D A E, on
E A R, ou R A G, en changeant les lignes -+- & — felon
qu'il feroit requis a cet effect. Et fi en toutes ces 4 po-
sitions la valeur d'^ fe trouuoit nulle, la queftion feroit
impoffible au cas propofe. Mais ftppofons la icy eftre
poffible, & pour en abreger les termes, au lieu des quan-
t cfglz—d ekz.x. _ ..
iitcs-----,-------- efenuons zm , & au lieu de
ez,-- cgx.x.
d-ex,x.ii<cfgz — bcgr
           .            *■                       
1                                      *
ex.-cgx,^
; & ainfi nous au-
rons
m          b efglx — befg x x Anr\t fa ran*-
yyoozmy— xy —~
s
ex.— egx.z.
neeft
'            nx , V               imimx ' nitxx ^bcfglx-bcfgxx.
yzom™ ~—\- mm —------«f-—; -----—-------—•
J                           *                                                X.           '         X, ?                        ,i
ex,--cgzz,
& derechef pour abreger, au iiemte
zmn bcfgl                                                      nn —befo
—------4—:-----elcnuonso.&aulieu de-____3___
X,                    1                                               '                                     X.X,
ex.-cgx.jc '                                                     t ■•cgx.x,
efcriuons -. car ces quantite's eftant toutes donndes,
nous les pouuons nomnaer comme u nous plaift. &
ainfi nous auons
y x>m — ~ix~i- v mm -+• ox—- x x, qui doit eftre la
longeur dela ligne B C, en laifTant A B,ou .vindeter-
minee.
-ocr page 406-
Livre Second.                    5*7
mine'e. Et il eft euident que la qaeftion n'eftantpro-
pofe'e qu'cn trois ou quatre lignes, on peut toufiours
auoirdetels termes. excepts'que quelques vns deiix
peuuenteftrenuls, &queIesfignesH- & -- peuuent di-
ueriement eftre chaDgds.
Apre"scelaie fais KI efgalc & parallele aB A, en forte
qu'ellecouppedeBClapartieBK efgale km , a' caufe
qu'il y a icy -+- m -s & ie I'aurois adioufte'e entirantccte
lignelKdel'autrecofte,s'ilyauoiteu — m-} &ienel'au-
rois pointdu tout tiree, fi la quantite m euft efte nulle.
Puis retire aufTylL, en forte que laligne I'Keft'aKX,
commeZefta«. c'eft adire que IK eftant*, KL eft
x. Et par mefme moyen ie connois auffy la proportion
qui
-ocr page 407-
328                     t,A GEOMETR IE*
qui eft entre K L, & IL, que ie pofe comme entre n & a:
fibienque K L eftant -x, I L eft ~xj Et ie fais que le
point K foit entre L & C, a caufe qu'i! y a icy « - xs
au lieu que i'aurois mis LentreK & C.fi i'eufle eu -f- - xs
& ien'eufle point tire'cete Iigne IL.fi Areuft efteynulle.
Orcelafaitjilnemereftepluspourlaligne LC, que
,                  -
cestermes, L C» m m-h ox ~-^xx. d'ouievoy
que s'ils eftoient mils, ce point C fe trouueroit en la Ii-
gne droite I L;& que s'ils eftoient tels que la racine s'en
pufttirer,c'efta dire que mm 8c ~mx x eftant marque's
d'vnmefmefigne-hou--, 00 fuftefgala^^oubien
que'Iestermesww&:oAr,ouoA" &- xx fuflent nuls, ce
point Cie trouueroit en vneautre iigne droite qui ne fe-
roit pas plus malayfee a trouuer qu* IL. Mais lorfque
cela n'eft pas, ce point C eft toufiours enl'unedes trois
fe&ions coniques, ou en vn cercle , dont IVn des dia-
metres eft enla Iigne I L,& la IigneL C eft 1'vne de cel-
les qui s'appliquent par ordre a ce diametre;ouau con-
traireECefcparalleleaudiametre, auquelcellequi eft
en la Iigne IL eft applique'e par ordre. A f§avoir i\ le ter-
me *• x x, eft nulcete fe&ion conique eft vne Parabole-
&s'ileit. marque'dufigne -f-, e'eft vne Hyperbole; &
enfins'il eft marquedufigne — e'eftvne Ellipfe. Excepte'
feulement fi la quantite" aam eft e/galc a p\^ & que Tan-
gle ILC foit droit; auquel cas on a vn cercle au lieu
d'vae
-ocr page 408-
, JLivre Second.
-
5*9
d'vne Ellipfe. Que fi cete fe&ion eft vne Parabole, Con
0 7
cofle droit eft efgal a -ft & fon diametre eft toufiours en
la ligne IL. & pour trouuer le point N, qui en eft Ie
fomtnet,ilfautfaireINefgaka -j^-i 8c que le point I
foit entreL &N,filestermesfbnt-f- m m~h o#; oubien
que le point L foit entre I & N, s'ils font •+• mm ex*
oubien il faudroit qu'N fuft entre I & L,s'il y auoit
—   m m -+- o x . Mais il ne peut jamais y auoir
— m m, en la fa$on que les termes ont icy efte'jpofe's. Et
erifin le point N feroif Ie mefme que le point I fi la quan-
tity mmeftoitnulle. Au moyen dequoy il eft ay& de
trouuer cete Parabole par le ier. Problefme du icr. liure
d'A pollonius.
Tt                         Que
-ocr page 409-
3-jo-                    La Geometrie.
Que fi la Hgne demadee eft vn cercle,ou vne eIlipfe,ou
vneHyperbole, llfaut premierementchercherlepoinc
M, qui en eft le centre, & qui eft toufiours en la ligne
aom
droitelL, ouonletrouueenprenant ~ pour IM. en
forte que fi la quantitd o eft nulle,ce centre eft iuftement
an point I. Et fi la ligne cherchee eft vn cercle, ou vne
Ellipfe; on doi t prendre le point M du mefme cofte que
le point L, au refped du point I, lorfqu'on a ■+- ox-} &
lorfqu'on a -- o x, on le doit prendre de l'autre. Mais
tout au contraire en l'Hyperbole, fi on a -- o x, ce centre
M doit eftre vers L;&fi on a-f-o#, il doit eftrede l'au-
tre cofte'. Aprds cela le cofte" droit de la figure doit eftre
rt/'ooz x. impz.z, . ~ ,                                m             . ,.
~77~\-----J7~ lorlqu on a -f- m m, & que la ligne
eherche'e eft vn cercle, ou vne Ellipfe; oubien lorfqu'on
a—mm, & que e'eft vne Hyperbole. & il doit eftre
<t/~ooz.z. ^mpz.z.,rt                  . ■          .
~^I~------^7~"la "gne cherchee eftant vn cercle,
ou vne Ellipfe, on a — mm-, oubien fi eftant vne Hyper-
bole & la quantite'flo eftant plus grande que 4 mp, on a
-hmm. Que fi la quantite'm m eft nulle, ce cofte'droit
eft^, & Rex eft nulle.il eft ^4^iii. Puis pour le cofte'
a                                                                 an                   *
travcrfant, il fauttrouuer vne ligne, qui foita ce cofte'
droit, come a a meft ap ^,afcauoirfice cofte' droit eft
4 a am
f/ oozz. 4.mpz,z,                                 
le trauerfant eft
1/ aaaomm
**                                                          ppzz          ' pzz.
Et en tous ces cas le diametre de la fedion eft en la ligne
I M, &L Ceft 1'vnedecelles qui luy eft appliquee par
ordre. Sibienque faifant M N efgale a la raoitiedu cofte'
trauer-
-ocr page 410-
Livre Second.                  3ji
traucrfant & le prenant4u mefme cofte' da point M,
qu'eft le point L, on a le point N pour le fommet de ce
diametre .en fuite dequoy il eft ayfe'de trouuer la fe&ion
par le fecond 6c 3 prob. du ier. liu. d'Apollonius*
Maisquandcetefec"tioneftantvne Hyperbole, on a
-+- fflmjSc que la quantitd 0 0 eft nulle ou plus petite que
4p m, on doit tirer du c entre M la ligne MOP parallele a
LC,&CP parallele a L M. 8c faire M O efgale a
mm---—; oubien la faire efgale a mfi la quantite 0 x
eft nulle. Puis confiderer le point O, come le fommet
de cete Hyperbole; dont le diametre eft O P, & CP la
Tt a                     ligne
-ocr page 411-
33*                  I/A- Geometrie. ...
ligue qui luy eft appliqude par ordre, & fon cofte'droit eft
——-4 -- *l4i7~&foncoltetrauersateit ¥ qmm-—~
Excepte'quand o x ek nulle.car alors le cofte' droit eft
"~T^—, & letrauerfanteft i«, &ainfi il eft ayfe de la
trouuerpar Je j.prob.dli icr.liu.d'Apellonius.
ftwTion" Et *es denionftrations de tout cecy font euidentes.car
de tout cc compofant vn efpace des quantites que iay affignees
dvftre " pour le cofte droit, & le trauerfant, Scpourlefegment
eipiiquc. du diametreNL,ou OP,fuiuat Iateneur de l'i i,du 12,&
du 13 theorefraesdu t«. liured'ApoIlonius,on trouuera
tousles mefmes termes dont eft compofe' le quarre de
la ligne C P,ou C L,qui eft appliquc'e par ordre a ce dia-
metre. Comme en cet exemple oftantl M , qui eft
*«w                        .        ami/                             t-vt f         r
7-7, de N M, qui eft — r eo-+-4w/>,iayIN, alaquel-
leaiouftant IL, qui eft -a;, iay NX , qui eft - x— ■——■
-~- ^j/ 0 0 ■+- 4 w./? , & cecy eftant multiplie par
- » 0 -b- 4 w fr, qui eft le cofte droit de lafigure, il vient
# F 0 0 -f- 4ot^> "- — k 00 -\- \mp -f- ~" -i- z m m:
pourle rectangle, duquel ilfaut ofter vn efpacequi foit
au .quarre'de N JL comme le cofte'droit eft au trauerfant.
& ce quarre* de N L eft ££##-* ~fZZ'x
» a m ;/•-------------------a * 0 em m          aamt
-ocr page 412-
hi vre Second;                    jjj
"------TppTi— * oo-\-4mp qu'il taut diuifer par <&*;»&
multiplier par/>^, a caufe que cestermes expliquentla
proportion qui eft entre Ie cofte' trauerfant & le droit, &
• •                     P                            ,           ^/------------:-------                          o om
il vient- xx—ox-hxy 00-h-A.mp -i---------
m                                                                  '        *                  2. p
-J'-J?-/ 00-\-^mp-\- w^.cequ'ilfautofterdure&angle
P
precedent, Scontrouue mm-\-ox — -ararpourlequar-
re'de CL, qui par confequent eft vne ligne appliquee
par ordre dans vne Ellipfe,ou dans vn cercle,au fegment
du diametre N L.
Et Convent expliquer toutes Ies quantites donnees
parnombres,enfaifautparexemple EA:»3,AG30 5v
AB3oBR,BS5oiBE,GB:x> BT, CDoo iCR,CF
oozCS, CHoofCT, & quel'angle A B R foit de 60
degrdsj & enfin que le redtangle des deux C B, & C F,
foit efgal au rectangle des deux autres C D & C H; caril
faut auoir routes ces chofes affin que la queftionfoit en-
tierement determine'e. & auec cela fuppofant A B so x3
& CBso^ontrouue par la fa$on cy deflus expliquee
y y 30 2 y — x y -r* 5 x x x 8c y30 1 «- ^x 4-
f/" 1 -f- 4 x - -1 x x: fi bienque B K doit eftre 1, & K L
doiteftrelamoitiede KI, & pourceqne Tangle IKE
ou A B R eft de tfodegres, &: KIL qui eft la raoitie'de
K IBouIKL, de3o, 1 LK eft droit. Et pourceque IK
ou ABeftnomme#,KLeft ±x, & IL eft -x Y ~, & la
cjuantite qui eftoit tantoft nommee ^ eft i, celle qui
eftoit a eft V |, celle qui eftoit m eft i, celle qui eftoit 0
eft 43&celle qui eftoit p eft |,de fagon qu'on kY '|
Tt j                     pour
-ocr page 413-
334                   La Geometrie.
pour IM, & V % pour N M, & pourceque aam qui
eft | eft icy efgal a psft & que Tangle IL C eft droit, on
trouue que la ligne courbe N C eft vn cercle. Et on
peut facilement examiner tousles autres cas en mefme
forte.
Quels           Aurefte acaufe que Ies equations, qui ne montent
lieux" que iufques au quarre', font toutes eomprifes en ce que ie
plans, & viens d'expliquer; non feulement Ie problefme des an-
folides:&         .                  „ i-              n. •                                       t. -J■ ' -
la facon ciens en 5 &4lignes eft icy ennerement acheue; raais
de ies
         aufly tout ce qui appartient a ce qu'ils nommoient la
compofition des lieux folides -3 & par confequent auffy a
celle des lieux plans, acaufe qu'ils fontcompris dans Ies
folides. Car ccs lieux ne font autre chofe, finon que Iors
qu'il eft queftion de trouuer qaelque point auquel il
^nanque
-ocr page 414-
t ■'                                -
Livre Second.                    331"
manquevne condition pour eftre entierement determi-
ne', ainfi qu'il arriue encete exemple,tous les poins d'vne
mefme ligne peuuent eftre pris pour celuy qui eft de-
mands. Etficete ligne eft droite,oucirculaire , on la
nommevn lieu plan. Mais fi c'eft vne parabole, ouvne
hyperbole, ou vne ellipfe, on la nomme vn lieu folide. Et
toutefois&quantesquecelaeft, onpeutvenira vneE-
quationqui contient deux quantite's inconnues, & eft
pareille a quelqu'vne de celles que ie viens de refoudre.
Qne fi la lignc qui determine ainfi le point cherche', eft
d'vndegre'pluscompofeequeles feciions coniques, on
la peut nommer, en mefme facon , vn lieu furfolide, &
ainfi des autres. Et s'ii manque deux conditions a la de-
termination de ce point, le lieu ou il fe trouue eft vne fu-
perficie, laquelle peut eftre tout de mefme ou plate, on
fpherique, ou plus compofe'e. Mais Ie plus haut but
qu'ayenteulesanciensencetematiere a efte deparue-
niralacompofitiondes lieux folides: Et il femble que
toutcequ'Apolloniusaefcritdes feclions coniques n'a
eftequ'a deffeinde la chercher.
                                   Queikeft
Deplus on voiticyque cequeiaypris pourle premier laPremic"
genre des lignes courbes,n'en peut comprendre aucunes plus fim-
autres quelecercle, la parabole, l'hyperbole,&rellipfe. Pleude ,efi
qui eft tout cequei'auoisentreprisdeprouuer.
              lignes
Quefllaqueftiondesancicns eftpropofee en cinqli-c°"[^s
gnes, qui foient toutes paralleles ; il eft euident que le
uenten la
point cherche'feratoufiours en vne ligne droite. Maisfi Ycl^Z"
elleeftpropofeeen cinq lignes, dont ilyettait quatre=icns
qui foient paralleles, & que la cinquiefme les couppe aES^Jl
angles droits, & mefme que toutes les lignes tire'es duPofciccn
. cinq li-
pointgnei.
-ocr page 415-
3j<£                    La Geometrie.
point cherche les rencontrent aufTy a angles droits, &
enfinquelcparallelepipedecompofe'de trois deslignes
ainfi tiroes fur trois de celles qui font paralleles,foit e/gal
au parallelepipedecompofe'des deuxlignes tiroes I'vuc
fur la quatriefme de celles qui font paralleles &l'autre
fur celle qui les couppe a angles droits, & d'vnetroifief-
me ligne donneb. ce qui eft ce femble Ie plus fim-
ple cas qu'on puifTe imaginer aprc's le precedent ; 1c
point cherche' fera en la ligne courbe, qui eft de/critc
parlemouuementd'vneparaboleen lafajon cy deifus
pxpliquee.
Soient
-ocr page 416-
LivRe Second.                     337
Soient par exemple les lignes cherche'es AB,I H,E D,
GF.&GA. & qn'on demandc le point C, en forte que
tirantCB,CF,CD,CH,&C Ma angles droits fur les
donne'es, le parallelepipede des trois CF,CD,&CH
foitefgalaceluydes 2antres CB,&CM,&d'vne troi-
ftefme qui foit A I. Ie pofe C B doy. C M 00 x. A I, ou
AE,ouGE ao.ff.de fagon que le point C eftant entre les
lignes A B.&DE, iayCF:r>2d — y, C 0 30 a — y. &
C H ?oy -j~a. & multipliant ces trois lVne par I'autre,
iay y --2 ayy— a ay -H- 2 a efgal an produit des trois
autres qui eft: a xy. Apre'scelaieconfiderelalignecour-
be C E G, que i'imagine eftre defcrite par I'mterfe&ion,
de la Parabole C K N, qu'on fait mouuoir en telle forte
que fon diametre KL eft toufiours fur la ligne droite
A B, & de la reigle G L qui tourne cependant autour du
point G en telle forte quelle paffe toufiours dans le plan
decete Parabole par le point L. EtieiaisKLoo a,8cle
cofte'droit principal, c'eft a dire celuy qui fe rapporte a
1'aiffieu decete parabole, auffy efgal a a, &GA30 2«, &
C'JB ou M A my, & C M ou A B 00 x. Puis a caufe des
triangles femblablesGMC &CBL.GM quiefta^-y,
eft a M C qui eft x, comme C B qui eftv, eft a B L qui eft
X V
par confequenr jjfcy Et pourceque L K eft a, B K eft a
—— xy                           %&& ~* wy —- pc*t                              *
—-,oubien ±s_y—. Et cnfinpourceque ce mef-
meB K eftant vn fegment du diametre de la Parabole
eftaBCquiluy eft applique'e par ordre, comme cel-
lecyeft au cofte'droit qui eft a, le calculmonftreque
y —2 ayy—aay -+- za, eft efgal a axy. &parconfe-
V v                        quent
-ocr page 417-
La Geometrie.
3J*
quent que le point C eft celuy qui eitoit demaude'. Etil
peut eftre pris en tel endroir de la ligne C E G qu'on ve-
uille choifir, ou aufly en fbn adiointe c E G c qui fe de-
fcri t en mefme facon,excepre' que le fbmmet de laPara-
bole eft tourne"vers l'autre coftd, ou enfiD en leurs con-
trepofees NI o, r 103qui font defcrites par linterfection
que fait la ligne G L en 1'autre cofte' de la Parabole
KN.
Or encore que les paralleles donnees A B, IH, ED,
& G F ne fuflent point efgalement distantcs, & que G A
ae les couppaft point a angles droits, ny aufly Ieslignes
tire'es
-ocr page 418-
Livre Second.               33j>
tirdesdu point C vers elles, ce point C ne laifleroit pas
de fe trouuer toufiours en vne ligne courbe, qui feroit
de cete mefrae nature. Etil s'y peut aufly trouuer quel-
quefbis, encore qu'aucune des lignes donnees nefbient
paralleles. Maisfi lorfqu'ilyena 4ainfiparalleles,&vne
cinquiefme qui les trauerfe; & que Ie parallelepipede de
trois des lignes tire'es du point cherche, l'vne fur cete
cinquiefme, &, les 2, autres fur 2 de celles qui font paral-
leles; foit efgalaceluy, des deux tirees fur les deux au-
tres paralleles, &d'vne autre ligne donnee. Ce point
chercheeften vne ligne courbe d'vne autre nature, a
fcauoir en vne qui eft telle, que toutesles lignes droites
appliqueesparordre a fon diametre eftant efgales a cel-
les cTvne fedtion conique, les fegmens de ce diametre,
qui fbntentrelefommet&ces lignes, ont mefme pro-
portion a vne certaine ligne donncfe, que cete ligne don-
nee a aux fegmens du diametre de la fedtion conique,
aufquels les pareilles lignes font appliquees par ordre. Et
ie ne f§aurois veritablement dire que cete ligne foit
moins fimple que la precedente, laquelle iay creu toute-
fois deuoir prendre pour la premiere, a caufe que la de-
fcription, & le calcul en font en quelque fa§on plus
faciles.
Pour les lignes qui feruentaux autres cas, iene m'are-
fteray point ales diftinguer par efpeces. car ie n'aypas
entrepris de dire tout } & ayant expliquc la fa§onde
trouuer vne infinite'depoinspar ou elles paflent,iepenfe
auoir a(Tes donnd le moyen de les defcrire.
Mefme il eft a propos de remarquer, qu'il ya grande
difference entre cete facon de trouuer plufieurs poins
Vv 2                      pour
....
-ocr page 419-
34°                  I-a Geometric.
fonfies pourtracer vne ligne courbe, & celle dont on fe fert pour
courbes "* fpirale> & fe$ fernblables. car par cete derniere on ne
qu'on de- trouue pas indifferernent tous les poins de la ligne qu'on
trouuant enercne> maisfeulementceux qui peuuent eftre deter-
piufieurs mines par qu elque mefure plus fimple, que celle qui eft
poinesu" i requife pour la compofer, & ainfi a proprement parler
pcuucnc on ne trouue pas vnde fes poins. c'eft a dire pas vn de
ccucsen ceux qui luy font tellement propres, qu'rls ne puifTent
Seomc- eftre trouues que par elle: Au lieu qu'il ny a aucun point
dans les lignes qui feruent a la queftion propofe'e, qui ne
fe puiffe rencontrer entre ceux qui fe determinent par la
fac,ontantoft expliquee. Et pourceque cete faccm de
tracer une ligne courbe, en trouuant indifFerement plu-
fieursdefes poins, ne s'eftend qu'a celles qui peuuent
aufly eftre defcrkes par vnmouuementregulier & con-
tinuj on ne la doit pas entierement reietter de la Geo-
metries
fof'auffy Etronn'en doit pas reietter non plus, celle ou on fe
celles iertd'vnfil, ou d'vne chorde repliee, pour determiner
{^"uec Vegalite ou la difference de deux ou plufieurs lignes
vnechor- droites quipeiuient eftre tire'es de chafque point de la'
peuuenc courbe qu'on cherche, a certains autres poins , ou fur
r<ftre certaines autres lisnes a certains angles, ainfi que nous
auons fait en la Lioptrique pour expliquer l'Ellipfe &
1'Hyperbole. car-encore qu'on n'y puiffe regeuoir au-
cunes lignes qui femblent a des chordes , c'eft a dire qui
deuienenttantoftdroites &tantoft courbes, acaufe que
la proportion, qui eft entre les droites & les courbes,
n'eftant pas connue, & mefme re croy ne le pouuant eftre
par les homines, onnepourroitrien conclure de la qui
fufh
-ocr page 420-
LrvRE Second.                   J4r
fuftexa<ft&afTure'. Toutefoisa caufe qu'on ne fe fett
de chordes en ces conftrnclrions, que pour determiner
deslignes droites, dont on conuoift parfait'ement la lon-
geur, cela ne doit point faire-qu'on les reiette.
Orde cela feul qu'on ftjait le rapport, qu'ont tous les Que pour
poins d'vne ligne courbe a tous ceux dVne ligne droite, "w^L
en lafaconqueiayexpliquee; ileftayfe*detrouuer auflyproprie-
le rapport qu'ils ont a tous les autres poins, 8c lignes don- ^nseses
nees: & en fuite de connoiftre les diametres, les aiffieux, combes,
les centres, & autres lignes, ou poins, a qui ehafque li- dcfcau
OIL'
gne courbe aura quelque rapport plus particulier , ouler,aPPolt:
plus fimple, qu'aux autres: & ainfi d'imaginer diuers ^usieurs-
moyens pour les defcrire, & d'en choifir les plus faciles. p°>"»-
Et mefnie on peut auffy par cela feul trouuer quafi tout hgnes
cequi peut eftre determine' touchant la grandeur de l'e-'lTafaco
fpace quelles comprenent, fans qu'ilfoit befoin que i'en '-de tiret
donne plus d'ouuerture. Et enfin pour cequi eft de tous^ a^cs
tes les autres propriete's qu'on peut attribuer aux lignes qui les •
courbeSjelles ne dependent que de la grandeur des an- e°3sDE
sles qu'ellesfontauec quelques autres lignes. Mais lorf- ces. poins.
,                   -         tit-             -i                                    a angles
qu on peutnrer deslignesdroitesquilescouppentaan- droits.
gles droits, aux poins ou ellesfont rencontre'es par cel-
lesauec qui elles font les angles qu'on veut mefurer,, our
cequeie prensicy pour Iemefme, qui couppent lcurs
contingentesj la grandeur de ces angles n'eft pas plus
malayfee a trouuer, que s'ils eftoient compris entre deux
lignes droites. G'eftpourquoy ie croyray auoir mis icy
tout cequi eft requis pour les elemens des lignes cour-
bes, lorfquei'auraygeneralement donne' la facon den-
ser des lignes droites, qui tombent a angles droits fur
W jv                     tel's-
-ocr page 421-
341                    La Gbometrie.
tels de leurs poins qu'on voudra choifir. Ec i'ofe dire
que c'eft cccy le problefme Ie plus vtile, & Ie plus gene-
ral nonfeulement que ief$aclie, mais mefme que l'aye
iamais defire'de f§auoir en Geometric
Soit C E
la ligne courbe,
& qu'il faille ti-
rer vne ligne
droite par Ie
point C, qui fa-
ce auec elle des angles droits. Ie fuppofe la chofe deiia
faite, & que la ligne cherchde eft C P, laquelle ie pro-
longe iufques au point P, ou elle rencontre la ligne droi-
te G A, queie fuppofe eftre celle aux poins de laquelle
on rapporte tous ceux de la ligne C E: en forte que fai-
fantMAouCBsoj, &CM,oa B Ay>x, iay quelque
equation,qui explique le rapport, qui eftentre x 8c y.
Puis iefaisP Coo/, &P Atx>#, ou P M 30 v -y.t & a
caufe du triangle rectangle PMC iay//, qui eft I2 quar-
re' de la baze efgal a xx -f-» v-* 2v y -\-yy , qui font
les quarres des deux cofte's. c'eft a dire iay x 30
Vss — vv-h ivy—yy, oubieny aoz/-+- Y' ss — xx,8c
parlemoyendecete equation, i'ofte de 1'autre equa-
tion qui m'explique le rapport qu'ont tous les poins de la
courbe C E a ceux de la droite G A,IVne des deux quan-
fite's indetermine'es x cuy. ce qui eft ayfd a faire en
mettant partout V s s -- v v -H 2 vy — yy au lieu d'x, 8c
le quarrd de cete fbmme au lieu d'xx, & fon cube au lieu
d'x, &ainfid£sautres,fic'eft#queie veuilleofter; ou-
bien
Facon
generate
pour
trouuer
dos lignes
droites.
qui coup-
pent les
combes
doun£es.
ou leurs
contin-
genteS)a
angles
droits.
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LlVRE SECONDi
i%
......             -*n J
bien fi c'c&y, en mettantenfonlieu x -+- f/~s s— x x, &
le quarrd, ou le cube,&c. de cete fbmme, au lieu d Wou
i
jy &c. Defa§onqu'ilreftetoufioursapre'scelavne equa-
tion, en laqnelle il ny a plus qu'vne feule quantite' inde-
termine'e, xto\xy.
Comme fi C E eft vne Ellipfe , &que M A foit le
fegment de fon diametre, auquel C M foit applique'e pat
©rdre, dc qui ait rpour foncofte' droit ,& q pour le tra-
uerfant,onaparle t$ th.
B du i liu. d'ApoIlonius.
xx-xsry-^y y t d'ou.
oftant x x, il refte #/—
- vv-hzvy-yy 30 H--yy,
oubien,
JK.y --------jpr;--------~ efgal a nen. caril eftmieuxen
cet endroit de confiderer ainfi enfemble toute la fom-
me , que d'enfairevne partieefgale al'autre.
K Tout de mefme fi C
E eft la ligne courbe
L defcrite par le mou-
ucmentd'vneParabole
en la fa§on cy deflus
B expliquefe, &qu'onait
pofe^pourGA, <?pour
KL, & d pour le cofte
droit du diametre KL
a enlaparabole:l'equati5
qui explique le rapport
qui
-ocr page 423-
La Geometrie.
344
qui eftentre x Siy, cfty - byy - c dy 4- b c <£ 4- dxy^o o*
d'ou oftant x , on a y — byy — cdy -f- bcd-\- dy
Y ss--vv-hzvy--yy.
& remetrant en ordre ces
termesparlemoyende la multiplication, il vient
--!£«>                 "\ --zbb cd~%
f~ihy<* tt)-**4hd »** *'/<lLy..i.bccddy*bbccddx> o.
<i<ddvv^
Etainfidesautres.
Mefme encore que les poins de la ligne courbe ne fe
rapportaffentpasenlafaconqueiay ditte a ceux d'vne
ligne droite, mais en touteautre qu'on fgauroit imagi-
ner,on,ne laifTe pasdepouuoirtoufiours auoirvne telle
equation. Comme fi C E eft vne ligne, qui ait tel rap-
port auxtrois poins F, G, & A, queleslignes droites ti-
rdes de chafcun de fes poins comme C, iufques au point
Fj furpaffent la ligne F A d'vne quantitd, qui ait certaine
proportio-don-
. Q~^a^ .                   nee a vne autre
N                           quantite' dont
GA furpaffe les
lignes tire'es
des mefmes
poins iufques a G. Faifons GAso^AFoo^Sc prenant
a dilcretion le point C dans la courbe, que la quantite'
dont CF furpaffe FA, foit a celle dont GA furpaffe
G C, comme^a et en forte que fi cete quantite' qui eft
indeterminee fe nomme ^,FC eft c -+- £, &G C eft b — ^ £.
PuispofantMAsoy, GMefM--^, &FM eft *-hy,*&
a caufe du triangle rcuftangle CMG, oftant le quarre'
de
-ocr page 424-
Livre Second.                    34J"
de GM du qtiarre'de G C, on ale quarrede CM, qui eft
dkKXJ3i~^'2^y"yj' Pu" °ftant le quarre'de F M
du quarre deFC, on a encore le quarrede CMend'au-
tresiermes,a{$auoir%i~l-2c%--2cy--yy, & cester-
meseftantefgaux auxprecedens, ilsfont connoiftrej,
_, .           . „ ddzz ►£< 2. cddz-- eezz ►£< zbde7, _ , _ ..
ou MA, qui eft--------n,dd*Lcdd------"Scfubftituant ce-
re fbmme au lieu d'y dans le quarrede C M, on trouue
qu'il s'exprime en ccs termes.
bddzz 4< ceezz. >?• *■ bcddz x bcdez
bdd * cdd~                    J7*
Puis fuppofant que la ligne droite P C rencontre la
courbeaangles droits au point C, &faifant PC soj-, &
P Ado© comme deuant, PMeftt/— y -} & a caufe du
triangle rectangle P C M,on a jjp—w -f- 2 t>jy—yy pour
le quarre de C M, ou derechefayantau lieudjyfubftitue'
la fbmme quiluy eftefgale, il vient
►f< i bcddz--z bcdez— % cdd-vz — ibdevz — bddss ►£ bddvv--
h44 >b cee
»J< lev --44 v
-- cddss*tddw. so 0 p0ur l'equation que nous cherchions.
Or apres qu'on a trouue'vne telle equation , au lieu
des'enferuirpourconnoiftrelcsquantites #,ou7, ou \%
qui font defiadonnees, puifquele point C eft donnd, on
la doit employer a trouuerf, ou j- , qui determinent le
point P, qui eft demanded Et a cet effect il faut confide-
rer,que fi ce point P eft tel qu'on le defire, le cercle dont
il fera le centre, & qui pafTera par le point C, y touchera
la ligne courbe G E, fans lacoupper: mais que fi ce point
P, eft tant foit pen plus proche, ou plus efloignd du point
Xx                       A,qu'il
-ocr page 425-
y^if                   La Geometjlie.
A, qu'ilne doit, ce eercle couppera la courbe , non feu-
fement au point C, mais aufly necefTairement en quel-
que autre. Puis ilfaut aufly confiderer, que lorfque ce
eercle couppe la ligne courbe C E, l'equation par taquel-
leoncherche laquantite,Ar}ou/, ou quelque autre fem-
blable, en fuppofant P A & P C eftre connues, contient
necefTairement deux racines, qui font inefgales. Car par
exemple fi ce eercle couppe la courbe aux poins C & B,
ayant tire'EQj>arallelea CM, les noms des quantite's
indeterminees x &^, conuiendront aufly bien aux lignes
EQ^&QA.qu'aCM, &MA5 puis PEeft efgale a
PC,acaufeducercle,fi bien que cherchant les lignes
EQ& CLA, par PE &
P A qu'on fuppofe eom-
me donnees , on aura la
mefme equation, que fi
on cherchoit G M &
M A par P C, P A. d'ou
___________________ilfuiteuideinment,quela
PM             ^ valeurd'*,oud'7, oude
telle autre quantite' qu'on aura fuppofee , fera double en
eete equation, e'eft a dire qu'il y aura deux racines inef-
gales entreelles; & dont l'vne fera CM, l'autre E Q , fi
e'eftxqu'oncherche:oubienl'vne fera MA,&l'autre
QAjfic'eftj. &ainfi des autres. II eft vray que fi le
point Ene fetrouue pas du mefme cofte de la courbe
que le point Q il n'y auraque l'vne de ces deux racines
quifoit vraye, & l'autre fera renuerfe'e, ou moindre que
rien: mais plus ces deux poins, C, & E, font prochesl'vn
de Vautre* moins il y a de difference entre ces deux raci-
nesj
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----
Livre Second,                    347
«es; & enfin elles font entierement efgales, s'ils font tous
deuxioinsenvnjc'eftadirefileeerclejqui pafTe parC,
y touche la courbe C E fans la coupper.
De plus il faut confiderer, que lorfqu'ily a deux raci-
nes efgales en vne equation, elle a neceflairement la
mefme forme,que 11 on multiplie par foy mefme la quan-
tite"qu'on y fuppofe eftre incounue moins la quantity
connue qui luy eft cfgale, & qu'apre's cela fi cete derniere
fbmmen'apas tant de dimenfions que la precedente,
on la multiplie par vne autre fomme qui en ait autant
qu'U luy en manque; affin qu'il puifTe y auoir feparement
equation entre chafcun des termes de l'vne , & chafcun
des termes de l'autre.
Comme par exemple ie dis que la premiere equation
trouue'e cy defTus, a fc,auoir
yy ~~ q-r-------------"01t auoir *a mefme forme que
cellequifeproduiftenfaifant e efgal a/, & multipliant
y — epar fby mefme,d'ou il vient yy — % ey H- ee,en forte
qu'oripeut comparer feparement chafcun de leurs ter-
raes, & dire que puifque le premier qui eft; y eft tout le
mefme en l'vne qu'en l'autre, le fecond qui eft en l'vne
- —-— ' eft efgal au fecod de l'autre qui eft - 2 ey ,d'ou
cherchant la quantite" v qui eft la ligne P A , on a,
vcoe ~e-+- ^r, oubie
a caufe
fuppofe'
que nous
e efgal a.y
auons
,ona
vTOy
\f+*r
. Et
Xx i
ainfi
-ocr page 427-
548                   La Geometrie,
ainfi on pourroit trouuer s par le troifiefme terme
ee 30 ~ \_'rqS >' mais pourceque laquantite v determine
affHs le point P,qui eft le feul que nous cherchions,on n'a
pas befoin de pafler outre.
Tout de mefme la feconde equation trouude cy def-
fus, a fc, auoir,
^l -•Ibbcd-y
. J^^Abcdf-^^ ccddi
<i<ddJ - xddvJ -■ ddssf
>$<dd vv^
••
doit auoir mefme forme, que la fbmmequifeproduift
lorfqu'on multiplie yy~2ey-+-ee par
4             3                                  )              4
y -t~f7-*~gg77'*-hj-Jh1(f quieft
de facon que deces deux equations i'en tire fix autres,
qui feruent a connoiftre les fix quantite's j^ £, £ £ f, & s.
D'ou il eft fort ayfe'a entendre, que de quelque genre,
qucpuifleeftrela lignc courbe propofee, il vient tou-
iiours par cete fac,on de proceder autant d'equations,
qu'on eft obligd defuppofer de quantite's, qui font in-
connue's. Mais pour demeiler par ordreces equations,
& trouuer enfin la quantity v, quieftlafeuledontona
befoin,&al'occafiondelaquelle oncherclie les autres:
Il faut premierement par le fecond terme chercher f, la
premiere des quantites inconnues de la derniere fom-
me, & on trouue/oo i e -- z b.
Puis par le dernier il faut chercher ^la derniere des
quantite's inconnues de la mefme fomme, & on trouue
bbccdd.
i403-------—
V          ee
Puis
-ocr page 428-
LivUE Second.                    349
Puis pat le troifiefme terme il faut chercher g la feconde
quantite, Scona^so 3 ^e—4 &<?--2 f</-i- bb-k-dd.
Puis par le pcuultiefme il faut chercher /; la penulpielme
le £cc^rf ibccdd.
quantite', quiefti>530
Etainfi il fail-
t;
c c
droit continuer fuiuant ce mefme ordre iufques a la der-
niere, s'ily en auoit d'auantage en cete fornme; car c'eft
chofe qn'on pent toufiours faire en mefme facon.
Puis par le terme qui fuit en ce mefme ordre, qui eft
icy le quatriefme,il faut chercher la quantite' v, & on a
/"I*
ble
"dd"
bcc
ee
3 bee
hb c c.
b bcc.
''jr..
1«»
ice
vx>
dd        dd
©u mettant/ au lieu d'e qui luy eft efgal on a
2 be
3 *jyi ££^
'" dd ~*~ dd'
bcc
yy '
a. $t
-\-y-\-
vTO
dd
pourlaligneAP. .
Et ainfi la troifiefme equation, qui eft
Xx 3
«-
\
-ocr page 429-
3-yo                   La Geometrie.
>J< 2 bcddx, -- t!bcdez,~t cddvt — ibdevx. -• bddss if* b ddw-
%\
                                                                        bdd if* ceeift etv-
.- cddss <i> cddvv, ,           _ r
——j--------------a la mefme forme que
-44v                                                      *
KK,'-2f*L~*"ff> en ftppofant/efgal a ^, fi bienque il
y a derechef equation entre-- zf, ou--2 3;, &
if* ibcdd - tbc de — i cddv — xbdev . ...                        .n
—I)-,------—:—jtt--------- dou ou connoift que
b ddifi cee iff eiv — aav                                                          J
1                    /         n t>cdd~ bcde ift bddz, iff ceez.
h quantite v eft cdd*ide..ee^ddK
^^^                C'eft pourquoy
„ c>-js**5**^^                         compofant la
^^Tif J \/ ^""^—-^^^ cetefommeef-
f ~A. M p
                     :=^q gale a v dont
touteslesquan-
cite's font connues.&tirantdu point Painfitrouue', vne
Jigne droite vers C, elle y couppe la courbe G E a an-
gles droits, qui eft ce qu'il falloit faire. Et ie ue voy rien
qui empefche, qu'on n'eftende ce problefme en mefme
£a§on a toutes les lignes courbes,qui tombent (bus quel-
.que calcul Geometrique.
Mefme il eft aremarquer touchant la derniere fom-
me, qu'on prent a difcretion, pour femplir le nombre
des dimenfions de l'autre fomme , lorfqu'il y en man-
que , comme nous auons pris tantoft
y*"^rfy i-i"ggyymimh !.y-f-^45 quelesfignes -f-& —
ypeuuenteftrefuppofestels, qu'on veut, fans que la li-
gnes, ou A P, fetrouuediuerfe pourcela, comme vous
pourres ayfement voir par experience, car s'il falloit que
iem'areftaiTeademonftrertous les theorefmes dont ie
fais
/
-ocr page 430-
Livre Second.                  $fx
fais quelque mention, ie ferois contraint d'efcrire vn vo-
lume beaucoup plus gros que ie ne defire. Mais ie veux
bien en paflTant vous auertir que 1'inuention defuppofer
deux equations demefme forme, pour comparer fepa-
rement tou j Ies termes del'vne a ceux de l'autre, & ainfi
enfairenaiftreplufieursd'vnefeule, dont vousauesvft
icy vnexemple, peutferuir a vne infinite* d'autres Pro-
blefmes, & n'eft pas l'vne des moindres de la methode-
dont ie me fers-
Ie n'adioufte point les conftru&ions, par Iefquelles on
peut defcrire les contingentes ou les perpendiculaires
cherche'es, enfuiteducalculqueieviensd'expliquer, a
caufe qu'il eft toufiours ayfe'de les trouuer: Bienque foa-
uenton ait befbin d'vn peu d'adrefTe, pour les rendre
courtes Scfimples.
Commeparexemple, fiD Cell la premiere conchoi- Excm ,e
de des anciens,deiac0n-
dontAfoitlepo-^^.
Ie, & BH la reele: biefme,c»
r                    " la cor».
en lorte que tou- choid^.
tes les lignes droi«
tes qui regardent
vers A , & font
comprifesentrela
courbe CD, &la
droite B H, com-
me DB &C E, foientefgales: Etqu'on veuille trouuer
la ligne C G qui la couppe au point C a angles droits.
On pourroit en cherchant, dans la ligne B H, le point
par oucete ligne C G doitpaffer, felon la methode icy
expli-
-ocr page 431-
---------
35i                    La Geometrie.
explique'e, s'engagerdans vncalcul autantou plus long
qu'aucun des precedens: Et toutefois la conftru(3:ion3qui
deuroit apres en eftre deduite ,eft fort fimple. Car il ne
faut que prendre C Fenlalignedroite CA, & la faire
efgale aCH qui eft perpendiculaire fur HB: puis du
point F tirer F G, parallele a B A, & efgale a E A: au
moyen de quoy on a le point G, par lequel doit pafTer
C G la ligne cherche'e.
Au refte affin que vous fc,achiees que la confideration
des Iignes courbes icy propolee n'eft pas fans vfage, Sc
qu'ellesontdiuerfesproprietes, qui ne cedent en rien a
celles des lections coniques,ie veux encore adioufter icy
l'ex plication de certaines Ouales, que vousverres eftre
tres vtiles pour la Theorie de la Catoptrique , & de la
Dioptrique. Voycy lafacondontielesdefcris.
Explica-
tion de 4
nouue-
aux gera. -
res d'O-
uales, cjui
ieruent a.
ropu-
que.
Premierement ayant tire'les Iignes droites F A , &
A R, qui s'entrecouppent au point A, fans qu'il importe
a quels angles, ie prens en l'vne le point F a difcretion,
c'eft a dire plus oumoins eiloigne'du point A felon que
ie
y
-ocr page 432-
.Livre Second.                  3fj
4e veuxfairecesOualespIusoumoins grandes, &dece
point F comme centre ie defcris vn cercle , qui pafle
quelquepeuaudeladu point A, comme par le point ft
puis de ce point y ie tire la ligne droite r 6, qui couppe
Tautre au point 6, en forte qu' A 6 foit moindre qu* A ft
felon telle proportion donne'e qu'on veut, a fc,auoir fe-
lon celle qui mefure les Refractions fi ons'en veut fer-
uir pour la Dioptrique. Apre's celaie prens auffy Ie point
G, en la ligne F A,du cofte'ou eft le point r, a difcretion,
c'eftadireenfaifantquelesligncs AF&GA ontentre
clles telle proportion donne'e qu'on veut. Puis ie fais
R A efgalc a G A en la ligne A 6. & du centre G defcri-
uantvn cercle, dontle rayon foit efgal a Rtf,il couppe
l'autre cercle de part & d'autre au point I, qui eft l'vn de
ceux par oil doit pafler la premiere des Ouales cher-
chees. Puisderechef du centre F ie defcris vn cercle,
qui pafle vn peu au dec,a, ou au dela du point s, comme
par le point 7, &ayant tire'la ligne droiteyS parallele a
j 6, du centre G ie defcris vn autre cercle, dont le rayon
eft efgal a la ligne R8. & ce cercle couppe celuy qui
pafle par le point 7 au point 1, qui eft encore l'vn de ceux
de lamefme Ouale. Et ainfi ou en pcut trouuer au-
tant d'autres qu'on voudra , en tirant derechef d'au-
tres Iignes paralleles a 7 8, & d'autres cercles des centres
F, &G.
- Pour la feconde Ouale il n'y a point de difference, fi-
nonqu'aulieud'ARilfautde l'autre colte" du point A
prendre A S efgal a A G, & que Ie rayon du cercle de-
fcritdu centre G, pour coupper celuy qui eft defcrit du
centre F 8c qui pafTe par le point 5-, foit efgal a la
Yy                       ligne
-ocr page 433-
3/4                  La Geometric.
IigneS 6-, ou qu'il foit efgal a S 8, fi c'eft pour coupper
celuyqui pafTepar le point 7. & ainfi des autres. au
moyen dequoy ces cercles s'entrecouppent aux poins
marque's 2,2,, qui font ceux.de cete feconde Ouale
A2X.
Pour la troifiefme, & la quatriefme, au lieu de la ligne
A G il faut prendre A H de 1'autre coftd du point A, a
f§auoir du mefme qu'eft le point F. Et il y a icy de plus
a obferuer que cete ligne A H doit eftre plus grande que
A F: Iaquelle peut mefme eftre nulle, en forte que le
point Ffe rencontre ou eft le point A, en Iadefcription
detoutescesouales. Aprcscela les lignes AR, & AS
eftantefgalesa AH , pour defcrire la troifiefme ouale
A3Y,iefaisvncercle du centre H, dont le rayon eft
efgal
-ocr page 434-
Livr'e Second.
efgal a S <S, qui couppe au point 3 celuy du centre F, qui
pafTepar Ie point s-, &vn autre dontle rayon eft efgal a
S 8, qui couppe celuy qui pafleparle point 7, au point
auily marque 3;&ainfidesautres. Enfinpourladerniere
/
Yy z
ouale
-ocr page 435-
Zf&                  La Geometrie.
oualeiefaisdescerclesdu centre H , dont les rayons
font efgaux aux lignes R 6, R 8, & femblables, qui coup-
pent les autres cercles aux poins marques 4.
On pourroit encore trouuer vne infinite' d'autres
moyens pour defcrire ces mefmes ouales. comme par
exemple,on peut tracer la premiere AV", lorfqu'on fup-
pofe les lignes FA & A G eftre efgales, fi on diuife la
toute F G au point L, en forte que F L foit a L G, corn*
me A fh A 6. c'efta dire qu'elles ayent la proportion,
qui mefure les refractions. Puis ayant diuife'A L en deux
parties efgales au point K, qu'on face tourner vne reiglc,
comme F E, autour du point F, en preflant du doigt C,
la chorde E C, qui eftant attachee au bout de cete reigle
vers E,fereplie de C vers K, puis de K derechef vers C,
& de C vers G, ou fon autre bout foit attache , en forte
que la longeur de cete chorde foit compose de celle
des lignes G A plus A L plus PE moins AF. & ce fera
lemouuementdu point C, qui defcrira cete ouale , a
limitation de cequi a efte'dit en la Dioptriq; de 1'EUipfe,
&
-ocr page 436-
Eivre Second.*                   37/
&derHyperbole. mais ie ne veux point m'arefter plus
longtems furce fuiet.
Or encore que toutes ces ouales femblent eftre quafi
de mefme nature,elles font neanmoinsdc 4 diuers gen-
res, chafcun defquels contient fous (by vne infinite d'au-
tres genres, qui dcrechef contienent chafcun autant de
diuerfes efpeces, que fait le genre des Ellipfes, ou celuy
des Hyperboles. Car felon que la proportion, qui eft en-
trc Ies lignes A ?, A £, ou femblables, eft differente ; lc
genre fubalternede cesoualcs eft different. Puis felon
que la proportion, qui eft entrc Ies lignes A F, & A G,oii
A H, eft changed, Ies ouales de chafque genre fubalter-
ne changent d'efpece. Et felon qu' A G,ou A H eft plus
oumoinsgrande, elles font diuerfes en grandeur. Et ft
Ies lignes A 5 8c A 6 fontefgales, au lieu des ouales du
premier genre ou du troifiefme, onne defcrit que des
ligne&droites; mais au lieu de celles du fecond on a tou-
tes Ies Hyperboles poffibles; & aulieu de celles du der-
nier toutes Ies Ellipfes*
Outre ccla en chafcune de ces ouales il fautconfiderer Les pr«-
deux parties, quiont diuerfes propriete's ■, a fcauoirenla £"sCouakI
premiere, la partie qui eft vers A, fait que les rayons, qui touchanc
eftautdans 1'airvienentdupoint F, fe retouruent tous ["'^
vers le point G, lorfqu'ils rencontrent la fuperficie con-Ies refta-
uexe dVn verre.dont la fuperficie eft 1 A 1, & dans le~
quel les refraction sfe font telles, que fuiuant ce qui a
eftdditenlaDioptrique,elIes peuuenttoutes eftre me-
fure'es par la proportion , qui eftentreles lignes A $ &
A <s*,ou femblables, par 1'ayde defquellcs on a defcrit cete
ouale.
Yy j                      Mais
-ocr page 437-
3j2                    La Ge.om.etjr.ie.
Mais Iapartie, qui eft vers V, Fait que Ies rayons qui
vienent du point G fe reflefchiroient tons vers F, s'ils y
rencontroient la fuperficie concaue d'vn miroir, dont ia
figure fuft i V i, & qui full de telle matiere qu'il di-
ruinuaft Ja force de ces rayons,felon la proportion qui eft
entre Ies lignes A 5: & A 6: Car de ce qui a eftd demon-
ftre en la Dioptrique, il eft euident que cela pofe, Ies an-
glesde la reflexion feroient inefgaus, auiTy bien que font
ceux de la refraction, & pourroient eftre mefure's en
mefme forte.
En Iafecondeouale Iapartie 2 A1 fen encore pour Ies
reflexions dont on fuppole Ies angles eftre ine/gaux. car
eftant en la fuperficie d'vn miroir compofe' de mefme
matiere que Ie precedent,elle feroit tellement reflefchir
tous Ies rayons, qui viendroient du point G, qu'ils fem-
bleroient apres eftre reflefchis venir du point F. Et il
eftaremarquer, qu'ayant fait la Iigne A G beaucoup
plus
-ocr page 438-
Litre Second.                    3^,9
plus grande cjue A F, ce miroir feroit conuexe an milieu,
vers A, & concaue aux extremitez: car telle eft la figure
de cete ligne, qui en cela reprefente plutoft vti coeur
qu'vne ouale.
Mais fon autre partie X 2 fert pour Ies refractions, &
fait que les rayons, qui eftant dans l'air tendent vers F,fe
detournentvers G, en trauerfant la fuperficie d'vn ver-
re, qui en ait la figure.
La troifiefme ouale fert toute aux refractions, & fait
que les rayons, qui eftant dans l'air tendent vers F, fe
vont rendre vers H dans le verre, apre's qu'ils ont trauer-
fei fa fuperficie, dont la figure eft A 3 Y $, qui eft conue-
xe par toutjexceptd vers A ou elleeft vn peuconcaue,en
forte qu'elleala figure d'vn coeur auffy bien que lapre-
cedente. Et la difference qui eft entre les deux parties
de cete ouale, confifte en ce que le point F eft plus pro-
chede l'vne , que n'eft le point H;. & qu'il eft plus
efloigne'de l'autre, que ce mefme point H.
En mefme fa§on la derniere ouale fert toute aux re-
flexions, & fait que files rayons,qui vienent du point H„
rencontroient la fuperficie concaue d'vn miroir de mef-
me matiere que les precedens, &dont la figure fuft A 4
Z4, ilsfereflefchiroient tousversF.
Defac.onqu'onpeutnommerlespoinsF, &G, ouH
lespoinsbruflansdecesouaIes,al'exemplede ceux des
Ellipfes, &des Hyperboles, qui ont efteainfi nommes
enlaDioptrique.
I'ometsquantite'd'autres refractions, 8i reflexions,
qui font reigle'es par ces mefmes ouales : car n'eftant
que les conuerfes, ou les contraires de celles cy, dies en
peuuen&i
-ocr page 439-
$6o                    La Geometrie.
Dcmoa- peuuentfacilernen eftre deduites. Mais H nc faut pas
dcTpro- <3ue i'omette la demonftration de ceqae iay dit. & a cet
prictcs de effed:, prenonspar exemplelepoint C a difcretionenla
touchan" premiere partie de la premiere de ces ouales; puis tirons
is« «flc-
                                        ^^>              la ligne droite
refra-                                 C%*^                                  CP, qUlCOUp-
^ions'              ^^^F>\                  Pe *a eourDe au
^^^^f \ \/ "^~^---^^ Point C a an-
P ~A M p                 ^^"G gles droits, ce-
qui eft facile
par leproblefmcprecedentCarprenant b pour A G, c
pour A F, c -+- ^ pourF Cj & fuppofant que la propor-
tion qui eftentre </&<?, que ie prendray icy toufiours
pour celle qui mefure les refra&ions du verre propofe',
defigneaufly celle qui eft entreles lignes A j, & A 6, ou
iemblables, qui out ferui pour defcrire cete ouale,ce qui
donne£---^£pourGC: ontrouuequelaligne A Peft
***a«*dfc-.wt~ainfi<3ullacftemonftrecy deflas.
De plus du point Payant tire'PQ.a angles droits fur la
droite F C, &PN aufly a angles droits fur G C,confide-
rons que fi P Qeft a P N, comme d eft a e, c'eft a dire,
comme les lignes qui mefurent les refractions du verre
conuexe A C, Ie rayon qui vient du point F au point C,
doit tellement s'y courber en entrant dans ce verre, qu'il
s'aillerendreapre'sversG: ainfi qu'il eft tres euident de
cequiaefte'ditenlaDioptrique. Puis enfin voyons par
lecalcul,s'ileftvray.quePQjbit a PN; comme d e&
k e. Les
triangles rectangles P Q F, & C M F font feni-
"blables;
-ocr page 440-
LiyRE Second.                     3<ji
blables; d'ou il fuitque CFeftaCM, comme F P eft a
P Q ; & par confequent que FP, eftant multiplie'e par
C M, & diuifee par C F, eft efgale a P Q^ Tout de met
me lestriangles rectanglesP N G, &CMG fontfem-
blables; d'ou ilfuit que GP, multiplie'e par C M, & diui-
fee par C G, eft efgale a P N. Puis a caufe que les mul-
ti plications, oudiuifions, qui fe font dedeux quautites
par vnemefme, ne changent point la proportion qui eft
eatreellesjfiFP multiplie'e par C M; &diuife"eparCFs
eft a G P multiplie'e auffy par C M & diuifexe par C G;
commeieftae,endiuifantrvneSc 1'autre de ces deux
fbmmesparCM , puis les multipliant toutes deux par
C F,& derechefpar C G,il refte F P multiplied par C G,
qui doit eftre a G P multiplie'e par C F, comme d eft a e>
iifbcdd—bcde^fbddmifeeez,.
Or par la conftrudhon F P eft c hde^cdd^ ddx,__ttti
oubien F P so ^cdd *ccdd
& M<& ■£ cddt. ~~ ~
bdtfr cdd*32j -- eex, "** ^* U
b — -j ^.fibienque multipliant FP parCGilvient
tbcdd^bccdd^tbbddz^ibcddx.— bcdez. — ccdez. — bd*XA — cdez,\.
fit
* cdd >i>~dd(^Tez
_                   _ , — bcdd^bcde—bddx.-- ceeT, , .
PuisGPeft b -Tde^cddib'ddz-ee2: oubieu
„„ bbde bcde-- beex, - - ceez , _ __, „
Gp » bde^cdd^i<-^r-&CFeft c-hV,
€\
bienque multipliant G P par C F, il vient
bbcde >$< bade — bceez, - - cceez, ►{< bbde^^ bcdc\~ beix-z.-- ceezz..
bde <i> cdd
.»{< ddz. -- eex.
Et pourcequela premiere de ces fommes diuifee par d,
eft la mefme que la feconde diuifde par e, il eft manifefte,
que F P multiplie'e par G G eft a G P multiplie'e par CF5
Z z                        c'eft
-ocr page 441-
3<fa                     La Geometrie.
c'eft a dire que P Qeft a P N, coramc d eft k e, qui eft
tout ce qu'ilfalloit demonftrer.
Etfcache's, quecete mefme demonftration s'eftend
a tout ccqui a efte dit des autres refractions ou refle-
xions, qui fe font dans les oualespropofe'es; fans qu'il y
faille changer aucune chofe, que les fignes -f- & — du
calcul. c'eft pourquoy chafcunles peut ayfement exa-
miner de foymefme, fans qu'il foit befbin que ie m'y
arefte.
Maisil faut maintenent, queiefatisface a ce que iay
omis en la Dioptrique,Iorfqu'apres auoir remarque'qu'il
peut y auoir des verres deplufieurs diuerfes figures, qui
facent aufly bien l'vn que Tautre, que les rayons venans
d'vn mefme point de l'obiet, s'aflemblent tous en vn au-
tre point apre's les auoir trauerfes. & qu'entre ces verres,
ceux qui font fort conuexes d'un cofte', & concaues de
l'autre, ont plus deforce pour brufler, que ceux qui font
efgalement conuexes des deux coftes. au lieu que tout
au contraire ces derniers font les meilleurs pour les Iune-
tes. ie me fuis contente d'expliquer ceux, que i'ay cnl
eftre les meilleurs pour la prattique, en fuppofant la diffi-
culte' que les artifans peuuent auoir a les tailler. C'eft
pourquoy,afEn qu'il ne refte rien a fouhaiter touchant la
theorie de cete fcience, ie doy expliquer encore icy la fi-
gure des verres, quiayant Fvne de leurs fuperficies au-
tant conuexe, ou concaue, qu'onvoudra, neJaiffentpas
de faire que tous les rayons , qui vienent vers eux d'vn
mefme point, ou paralleles, s'afTemblent apre's en vn
mefme point ■, & celle des verres qui font Ie femblable,
eftant efgalement conuexes des deux cofte's, oubienla
conue-
-ocr page 442-
Livre Second.                   563
conuexitc'de l'vnc dc leurs fuperficies ayant la propor-
tion donne'e a celle de I'autre.
Pofons pour le premier cas, quelespoins G,Y, C, &F „n°™™f
eftant donne's, les rayons qui vienent du point G, oubien fake vn
quifontparallelesa GAfe doiuent affembler au point tvaen"eCOa-
F, aprds auoir trauerfe vn verre fi concaue, qu' Y eftant uexe on
le milieu de fa fuperficie interieure, I'extremite' en foit en^ne'
au point C, en forte que la chorde CMC, &laflechedefesfu-
Y M de Tare CYC, font donnees. La queftion va la, q"0"cs
que premierement ilfaut coufiderer, de laquelle desvo"?di:a»
oualesexpliquees, la fuperficie du verre Y C, doit auoir £mble 3
la figure, pour faire que tous les rayons, qui eftant de-™P°!nr
danstendentversvnmefmepoint, commevers H, qui tousles
n'eft pas encore connu, s'aillent rendre vers vn autre, a™3^)'.
fijauoir vers F, apresen eftrefbrtis. Cariln'y a aucun n<=nt d'vn
efFedttouchantle rapport des rayons change par refle-p""nct
xion, ou refraction d'vn point a vn autre , qui ne puifTe donnc.
eftre caiife' par quelqu'vne de ces ouales. & on voit
ayfementque cetuycy le peut eftre par la partie de la
troifiefmeOuale,quiatantoft efte' marquee 5 A 3, ou
par celle de la mefrae, qui a efte" marquee j Y3, ou enfin
par la partie de la feconde qui a efte'marque'e 1X2. Et
pourceque ces trois tombent icy fous mefme calcul, on-
doittant pour I'vne, que pour I'autre prendre Y pour
Zz 2                      Ieur
-ocr page 443-
3<?4                   La Geometric.
leurfommet, C pour l'vn des poins de leur circonferen-
ce, & F pour l'vn de leurs poins bruflans; apres quoy il
nerefte plus a chercher que le point H, qui doit eftre
1'autre point bruflant. Et on le trouue en confiderant,
que la difference, qui eft entre les lignes F Y & F C,doit
eftre acelle, qui eft entre les lignes H Y& H C,coir>me
*/eft a e, c'eft a dire3comme la plus grande des lignes qui
mefurent les refractions du verre propofe' eft a la moin-
dre; ainfi qu'on peut voir manireftement de la defcri-
ption de ces ouales. Et pourceque les lignes F Y & F C
font donnees, leur difference l'eft auffy y & en fuite celle
qui eft entre HY&HC; pourceque la proportion qui
eftentre ces deux differences eft donnee. Et de plus a
caufe que Y M eft donne'e, la difference qui eft entre
M H,&H C, l'eft aufTyj&enfin pourceque CM eft don*
ne'e, il ne refte plus qu'a trouuer M H le cofte'du triangle
c ■
G
-
rectangleC MH,donton a laiirre cofte' CM, & on a
auffy la difference qui eft entre C H la baze, & M H le
cofte'demande'. d'ou il eft ayfe'dele trouuer. carfion
prent >(pour l'exce's de C H fur MH,&« pour lalongeur
de Ialigne C M, on aura ~k - ^ ^ pour M H. Et apre's
auoirainiilepointH,s'ilfetrounepIusloin du pointY,
que
-ocr page 444-
Livre Second.                    35/
que n'en eft le point F, la ligne C Y doit eftre la premie-
re partie de l'ouale du troifiefme genre,qui a tantoft efte
nomme'e3 A 3: MaisfiHYeft moindrequeFY, oubien
ellefurpaffe HF de taut, que leur difference eft plus
grande a raifon de la toute F Y, que n'eft e la moindre
des lignes qui mefurent les refra&ions compare'e auec d
la plus grande, c'eft.a dire que faifanr H F 30 c, &
H Y 00 c 4- £, <M eftplus grande que zce-+-eb, & lors
C Y doit eftre la feconde partie de la mefme ouate du
troifiefme genre, qui a tantoft efte'nomee 3 Y 3 jOubien
d heft efgale, ou moindre que 2 ce-i-eb: & lors CY
doit eftre la feconde partie de l'ouale du fecoud genre
quiacydefluseftenommee 2X2. Et enfin fi le point H
eftle mefme que le point F,ce qui n'arriue que Iorfque
FY&FCfontefgalescete ligneY Ceftvncercle.
Apre*s celail faut chercher C A G Fautre fuperficie de
ce verre, qui doit eftre vne Ellipfe, dont H foit le point
bruflant,fi on fuppofe que les rayons qui tombent deflus
fbiet paralleles; & lors il eft ayfe de la trouuer. Mais fi on
fuppofe qu'ils vienet du point G,ce doit eftre la premiere
partie d'vne ouale du premier genre,dont les deux poins
bruflans foiet G & H, & qui pafle par le point Gd'ouon
t rouue le point A pour le fommet de cete ouale,en confi-
derat,que GCdoit eftre plus grade que GA,d'vne quan-
tite^quifoitacelledont H Afurpafle H C,comme dke.
car ayant pris ^ppur la difference,qui eftentre GH,& H
M,fi on fuppofe x pour A M,on aura^ -- vapour la diffe-
rence qui eftentre A H, & CHj puis fi on prent g pour
celle, quieftentreGC,&GM, qui font donndes, orr
aura^-hivpour celle, qui eft entre G C, &GA;&
Zz 3                       pour-
-ocr page 445-
$66                    La G some trie.
Comnicc
on peut
faire vn
verre, qui
aide mef-
me efFcdt
que le
prccedct,
& que la
conuexi-
tedel'vnc
dc fes fu-
perficies
ait la pro-
portion
donnee
aueccelle
del'autre.
pourceque cetc derniere^ *+- x eft a l'autre x — \, com-
meieft he, onkge-hexaodx "di^, oubien ■■ dje
pour la ligne x, ou A M , par laquelle on determine le
point A qui eftoit cherche'.
Pofonsmaintenentpourrautrecas j qu'on ne donne
que les poins GC,& F, auec la proportion qui eft entre
les lignes AM,&YM,& qu'il faille trouuerla figure du
verre AC Y, qui face que tousles rayons, qui vienent
du point G s'aflemblent au point F.
On peut derechef icy fe feruir de deux ouales dont
'vne, A C, ait G & H pour fes poins bruflans; & l'autre^
C Y,ait F& H pour les fiens.Et pour les trouuer,premie-
rement fuppolant le point H qui eft commun a routes
deux eftre connu, ie cherche A M par les trois poins
G,C,H,enla fa§on tout mainteneut explique'eja fgauoir
preuant^pour la difference, qui eft entreC H, &HM-,
&£pourceIIequieftentreGC &GM: &ACeftant
la premiere partie de l'Ouale du premier genre , iay
—JZ7 pour A M: puis ie cherche aufly M Y par les trois
poins F, C, H, en forte que CY foit la premiere partie
d'vne ouale du rroifiefine genre; & prenant y pourM Y,
&
-ocr page 446-
Livre Second.                     3(?7
&/pourla difference, qui eft entre CF, &FM , i'ay
f-+-y, pour celle qui eft entre C F, & F Y: puis ayant de-
fia <^pour celle qui eft entre C H, & H M,iay 1^-hy pour
celle qui eft entre CH.&HY, que ie fcay deuoir eftre
hf'-^ry comme e eft a d, a caufe de l'Ouale du troifiefme
genre, d'ouietrouue que^ ou MY eft -7777 puis ioi-
gnant enfemble les deux quantite's trouue'es pour A M, &
MY,ietrouue—j^pourlatoute A YjD'ou il fuit que
lie quelque cofte que foitfuppofele point H, cete ligne
AYeft toufiours compofe'e d'vne quantite', qui eft a cel-
le dont les deux enfemble GC.&CF furpafTent la tou-
te G F,Comme £,Ia moindre des deux lignes qui feruent
a mefurer les refractions du verre propofV, eft a d— e, la
difference qui eft entre ces deux lignes. cequi eft vn af-
f<6sbeautheorefme. Or ayant ainfi latoute AY, ilia
faut couper felon la proportion que doiuent auoir fes
parties A M & M Y-, au moyen de quoy pource qu'on a
defia le point M, on trouue aufly les poins A & Y,- & en
fuite le point H, par le problefme precedent. Mais au-
parauantilfautregarder,fila!igneA M ainfi trouue'e eft
plus grande que 5777OU plus petite, ou efgale. Car fi elle
eft plus grande,on apprent de la que la courbe A C doit
eftre la premiere partie d'vne ouale du premier genre; &
CY la premiere d'vne du rroifiefme, ainfi qu'elles ont
efte icy fuppofees: au lieu que fi elle eft plus petite, cela
monftre que c'eft C Y, qui doit eftre la premiere partie
d'vne ouale du premier genre j & que AC doit eftre la
premiere d'vne du troifiefme 1 Enfin fi AM eii efgale a
-ill
-ocr page 447-
3^8                   La Geomethib.
d — les deax courbes A C & C Y doiuent eftre deux hy-
perboles.
On pourroit eftendre ces deux problefmes a vne infi-
nite'd!autres cas, que ie ne m'arefte pas a dcduire,a caufe
qu'ils n'ont eu aucim vfage en la Dioptrique.
On pourroitaufTypafTer outre, & dire, Iorfque l'vne
des fuperficies du verre eft donnee, pouruii qu'elle ne
foit quetoute plate,oucompofeede fediions coniques,
oudecerclesj comment on doit faire fon autre fuperfi-
cie, affin qu'il tranfmette tous les rayons d'vn point don-
ne, a vn autre point aufTy donnd. car ce u'eft rien de plus
difficile que ceque ie viens d'expliquer; ouplutoft e'efc
chofe beaucoup plus facile, a caufe que Ie chemin en efc
ouuert. Maisi'aymemieux, que d'autres Ie cherchent,
affinqucs'ils ont encore vn peu de peine a le trouuer, ce-
laleur face d'autant plus eftinier l'inuention des chofes
qui font icy demonftrees.
Au refte ie n'ay parle en tout cecy,que des lignes cour-
Commct
ojTpeu't" bes, qu'on peutdefcrire fur vne fuperficie plate; maisii
apphguer eft ayfd de rapporter ceque i'en ay dit, a toutes celles
cftedk qu'on fcauroit imaginer eftre forme'es, par le mouue-
ii/nesS ment regulier des poins de quelque cors, dans vn efpace
coiubes qui a trois dimenfions. A fcauoir en tirant deux perpen-
lefcritcs
for vne diculaires,de chafcun des poins de la ligne courbe qu'on
fuperficie veut Confiderer_,fur deux plans qui s'entrecouppent aan-
cellw qui gles droits, l'vne fur l'vn, & 1'autre fur 1'autre. car les ex-
sfedefcti- tremite's de ces perpendiculaires defcriuent deux autres
uecdasvn                                  •■*-*'>        i            i           j r n
cfpace qui lignes courbes, vne fur chalcun de ces plans, deiquelles
meafio'ns.ou peut,enla fa§on cy defTus expliquee,determiner tous
les
-ocr page 448-
Livr»e Second.                    3°i>
lespoins,&lesrapporter aceuxdelaligne droite , qui
eft commune aces deux plans, au moyen dequoy ceux
de la courbe, qui a trois dimenfions, font entierement
determines. Mefmefionveuttirervnelignedroire,qui
couppe cete courbe au point donne' a angles droits : il
faut feulement tirer deux autreslignes droites dans les
deux plans, vne en chafcun, qui couppent a angles droits
ies deuxlignescourbes, qui y font, aux deux poins, oil
tombent les perpendiculaires qui vienent de ce point
donne'. car ayant efleue'deux autres plans, vn fur chaf-
cunedeceslignes droites, qui couppe a angles droits le
plan ou elle eft, on aura l'interfe&ion de ces deux plans
pour la ligne droite cherchee. Et ainfi ie penfe n'auoir
rien omis des elemens, qui font necefTaires pour la con-
noiffance des Iignes courbes.
L A
GEOMETRIE.
LIVRE TROISIESME.
T>e la conftruBion des Trob/efmes , qui
font Solides^ouplu/queSolides,
De qucl-
EN c o re que toutes les Iignes courbes, qui peuuentles Hgncs
a j t :                  , °                  ~ r ,. courbes
eitre delcntes par quelque mouuement reguher, OB peuc
doiuent eftre receues en la Geometrie, ce n'eft pas a di- fe (.eruir'
re qu'ilfoitpermis de feferuirindifferemment de la pre- ftruaicm
miere quife rencontre, pour la conftru&ion de chafque de■ ww*
Aaa                       pro-me.
-ocr page 449-
370                  La Geometrie.
problefme:maisiIfautauoirfom de choifir toufioursla
plus fimple ,parlaquelle il foit poflible de le refoudre.
Et mefmeil eft a remarquer, que paries plus llmples on
ne doit pas feulement entendre celles, qui pcuuent le
plus ayfement eftre defcrites, ny celles qui rendent la
confirmation, ou la demonftrationdu Problefme prope-
rs plus facile, mais principalement celles, qui font du
plus fimple genre,qui puiile feruir a determiner la quan-
tite'qui eft cherchde..
.
Corrime par exemple ie ne croy pas, qu'il y ait aucu-
nefagonplus facile, pour trouuer autarit de moyennes
proportionnelles, qu'on veut, nydont lademonftration
fbitpluseuidente, qued'y employer ies lignes courbes,
qui fe defcriuent par l'inftrument X Y Z cy delfus expli-
qudl Car voulant trouuer deux moyennes proportion-
nelles entre Y A & Y E, il ne faut que defcrire vn cercle,
duntlediametre foit YE; &pource que ce cercle coup-
pe
Exempte
tonchant
l'inuentio
de plu-
lieurs
inoyenes
propro-
tiondles.
-ocr page 450-
LlVRE 'TroISIESME.                 J7I
pelacourbeADaupointD.YDeftl'vnedes moyennes
proportionnelles cherchdes. Dontla dernonftration fe
voit a I'ceil par la feule application decet inftrument fur
la Iigne Y D. car comme Y A, ou YB, qui luy eft efgale
eftaYC;ainfiYCeftaYD;&YDa YE.
Toutdemefme pour trouuer quatre moyennes pro-
portioned entre Y A & Y G, ou pour en trouuer fix en-
treYA & YN, ilnefaut que tracer le cercleYF G,qui
couppant A F au point F, determine la ligne droite Y F,
qui eft l'vne de ces quatre proportionnelles; ou Y H N,
qui couppant A Hau point H, determine YH l'vne des
iix, & ainfi des autres.
Maispourceque la ligne courbe AD eft du fecond
genre, & qu'on peut trouuer deux moyenes proportio-
nelles parles fediions coniques, qui font du premier 5 8c
auffy pourcequ'on peut trouuer quatre ou fix moyenes
proportionelles, pardeslignes qui ne font pas de genres
jfi compofes, que font A F, & A H, ce feroit vne faute en
Geometric que de les y employer. Et c'eft vne faute
aufTy d'autre cofte de fe trauailler inutilement a vouloir
conftruire quelque problefme par vn genre de hgnes
plus fimple, que fa nature ne permet.
Or affin que ie puifle icy donner quelques reigles, dc la na-
tx>ur euiter l'vne & l'autre de ces deux fautes. il faut que iure de,s
i r                                                      i                    Equacios.
ie die quelque chole en general de la nature des Equa-
tionsjc'eft a dire des fommes compofees de plufienrs ter-
mes partie conuus, & partie iuconnus, dont les vns font
efgaux aux autres, ou plutoft qui confider es tous enfem-
ble font efgaux a rie'n. car ce fera fouuent le meilleur de
les conftderer en cete forte. .
Aaa 2             Scache's
-ocr page 451-
%7%               - LaGeometrie.
Upcut y Scache's done qu'en chafque Equation, autant que
auoir dc ja quantite*inconnue ade dimenfions, autant peutily
en chafq; auoir de diuerfes racines, e'eft a dire de valeurs de cete
Equatio. q0antite, car par exemple fi on fuppofe aefgale a 2; ou-
bien x— i efgal a rien ; & derechef x 30 3. oubien
x — 3 3oo; en multipliantcesdeux equations a? -- 2 30 0,
Sex —
3 300,1'vneparl'autre, on aura at a;-- j a?-t-<$ so o,
oubien xx aoj a;-- £, qui eft vne Equation en laquelle la
quantitd x vaut 2 Sctoutenfemble vaut 3. Que ii dere-
chef on fait a:-- 4 30 o,& qu'on multiplie cete fommepar
xx— s x-1-6300, on aura at' — 9xx -f-26# — 24300,
qui eftvne autre Equation en laquelle a? ayant trois di»
menfions a aufly trois valeurs.qui Ibnt 2, j, & 4.
fo^u" ^' a'suuentil arriue,.que quelques vnes de ces raci-
fauffesra- nes font faufles, ou moindres que rien. commefion
cines. fuppofeque A;defigneaufly le defaut d'vne quantite",
qui foit ?, on a x ■+• 5 30 0 ,. qui eftant multiplied par
xi — 9 xx -h 2$ x — 24 30 0 fait
A?4 — 4.V 5 — 15 ATAT-f- 10(5 AT-- I2O 30 <?
pour vne equation en laquelle il y aquatre racines , a
f§auoir trois vrayes qui font a, 3, 4, & vne faufle qui
eft f.
oif "cu" ^ on vo*c euidemment de cecy, que la fomme d'vne
diminuer equation,quicontientplufieursracines, peut toufiours
des°di-IC e^re diuifee par vn bindme compofe de la quantite' iu-i
menfions connue,moinsla valeurdel'vnedes vrayes racines, la-
qoation quelle que ce fbitj ou plus la valeur de l'vne des faufTeV
lorfqo'on £u moyen de quoy on diminue d'autant fes dimen-
quel- 110ns.
Ss'iad-6' ^C reciPrG9uement °tue fi^a fomme d'vne equation
nes.                                                                                                                     DC
-ocr page 452-
Livre Troisiesme.            373
ne peut eftre diuife'e par vn bindme compofe' de la quan- on peut
tke/inconnue-+-ou-- quelque autre quantite*, cela tef- «aminer
moigne que cete autre quantity n'cft la valeur d'aucune quantite
de fes racines. Commecetederniere
                           fftlsrva-
A; + «4 #'-- lyXX-h lo6x—IlO3O0                           leurd'vne
peut bien eftre diuifee, par x 2, & par x— 3, &parracme'
x—if, &parA?-f-5;maisnonpoint par x -f-ou— aucu-
ne autre quantite'. cequi monftre qu'elle ne peut auoir
que les quatre racines 2,3,4,8c f.
Onconnoiftauifydececyconibienilpeut y auoir de-<:::omb'ct,
vrayes racines, & combien de faufTes en chafqiie Equa- au«r de
tion. A f§auoirily en peut auoir autantde vrayes, que vra.ycs
tacmes en
c
Iesfignes-H& —s'ytrouucntdefois eftre changes ,• &
autant de faufles qu'il s'y trouue de fois deux fignes -H, EV*itl5-
ou deux fignes — qui s'entrefuiuent. Comme en la der-
niere,a caufe qu'aprds -f- x4 il y a■ - 4 x 5,qui eft vn chan-
gementduligne-r-en--3&apres- 19 xxi\ya-t-\o6x,
&apres-+-106 #ilya— 120 qui font encore deux autres
cliangemens, on connoift qu'il y a trois vrayes racinesjSS
vne fauffe,a caufe que les deux fignes — ,de 4 x ',& 19 xxs
s'entrefuiuent.
De plus il eft ayfcde faire en vne mefme Equation, c5nlent
que toutes les racines qui eftoient faufles deuienent on fait
vrayes,&parmefmemoyen que toutescellesqui eftoiet }^H
vrayes deuienent faufTes: a f§auoir en changeant tous »«">«
les fignes -f- ou - qui font en la feconde , en kqu«fon"
quatriefme , en la fixiefme , ou autres places qui fe ^iefL
defignent par les notnbres pairs , fans changer ceux les vrayes
de la premiere , de la troifiefme, de la cinqukfme f*uflcs*
& femblables qui fe defignent par les nombres
Aaa 3             impairs.
-ocr page 453-
374                    La Geometrie.
impairs. Comme fi au lieu de
-4-at4"4a;;— 19 xx-+- io<5 x — 120 00 0
onefcrit •
-h X 4H-4#'« I9XX-- \06X-' J2O3O0
on a vne Equation en laquelte il n'y a quVne vraye ra-
cine, qui eft f, & trois faufTes qui font 2, $, & 4.
Comcnt Que fi fans connoiftre la valeur des racines d'vne E-
augmea- quation, on la veut augmenter, ou diminuer de quelque
^n°"crdl" quantiteyconnue,ilnefautqu'au lieudu terme inconnu
lesracines enfuppofer vn autre, qui foit plus oumoins grand dece-
qaatioif,' temefme quantite', &le fubftituer par tout en la place
fansks du premier.
fhe"01' Comme fi on veut augmenter de 3 ia ratine de cete
Equation
a; + -+— 4. a; 5iyxx—-io6x— 120 x>o
il faut prendrey au lieu d'x, & penfer que cete quantite'
y eft plus grande qu'a; de 3, en forte que y — 5 eft efgal
aar,&aulieud'##, ilfautmettrele quarre'd'y-- 3 qui
eftyy-- 6y -+-9 &au lieu d'x ' il faut mettre fon cube
qui efty5 -- $yy+- zyy — zy, & enfin au lieu d' x+ il faut
mettre fon quarre'dequarre'qiiiefty4izy '-f- ?4.yy
— io8y-h8i. Etainfidefcriuant lafomme precedente
en fubftituant par touty au lieu d'x on a
y* — iiyi-+-^yy— ioS^y-f-81
-+-4;'— tfyy-h-ioZy — iot
js>yy ~*~ ll\y — *7*
— io<5y-f-3i8
— 120
y*<~%f.-iyy Hh- 8jf*             »*
oubien
-ocr page 454-
Livre Troisiesme.                 37^
oubien_y5 -- %yy iy--\- 8 do o.
ou. la vraye racine qui eftoit j eft maintenant 8, a caufe
du nombre trois qui luy eft aioufte\
Que fi on veut au contraire dimintier de trois la raci-
ne de cete mefme Equation , il faut fairejr-f- 3 30 x
&jy~*~ 6y -i- 9"x> xx.
& ainii des autres de fa§on
qu'au lieu de
                          '
X* -H4A?3 -• IpXX." IO<5 A>-I20 00 0
on met.
j/4-f-n^5 -+-$4,.yy-{- io$y ■+- 81
rh 4y5 -+- 3<J yjf -4- 108 yrf-108
"' *9 J^ "" XI4y "* I7I
— 106 j/ — 318
,                             —izo
1 -
y4_+~ i6_y 5 -+-71 y y— 4^.-420300.
Etileftaremarquerqu'enauementant les vrayes ra- QseH
cines d'vne Equation, on diminue les fauffes de la mef-
tanc les
me quantity ou au contraire en diminuant les vrayes,on ^ses0""
angmente les fauffes. Et que fi on diminue folt les vnes diminue
foit les autres, d'vne quantite qui leur foit efgale, elles f",&au
deuienent nulles, & que fi c'eft dVne quantite'qui les fur- contraire.
pafle, de vrayes ellds deuienent fauffes, ou de fauffes
vrayes. Comme icy en augmentant de 3 la vrayc racine
qui eftoit f, on a diminue' de 3 chafcune des fauffes, en
forte que celle qui eftoit 4 n*eft plus qu' 1, & celle qui
eftoit 3 eft nulle, & celle qui eftoit 2 eft deuenue vraye
& eft 1, a caufe que — 2 -\- $ fait -+-1. c'eft pourquoy
en cete Equationy5 - 8j^--i^-r-8 30oilny a plus que
3 racines, entre lefquellcs il y en a deux qui font vrayes,
-ocr page 455-
37<J                     La Geometrie.
i, & 8, & vne faufle qui eft aufly i. & en cete autre
y 4H- i6y '~t~7iyy mm4-y —■ 420 30o
il n'y en a qu'vne vraye qui eft 2, a caufe que -+- f — J fait
•+■ 2, &trois faufies qui font f,6, & 7.
Coment Or par cete fa§on de changer la valeur desracines
oft«ie fansles connoiftre, on peut faire deux chofes, qui auront
fccond Cy apre's quelque vfage: la premiere eft qu'on peut tou-
d'vneE- floursofterlefecondtermedel'Equation qu'onexami-
quanon. ne^
a f^auoir en diminuant Ies vrayes racines, de la quan-
tity connuedecefecond terme diuife'e par le nombre
des dimenfions dupremier, fi'l'vn de ces deux termes
eftant marque'du figne -+-,rautre eft marque du figne — j
oubien en I'augmentant de la mefme quantite', s'ils ont
tous deux le figne •+-, ou tous deux le figne —. Comme
pour ofter le fecond terme de la derniere Equatio qui eft
y 4 ■+■ i6y * -f- -j\yy.-- 4 y — 4 lo 30 0
ayantdiuifti(ypar4,acaufedcs4 dimenfions du terme
y 4, il vient derechef 4, c'eftpourquoy ie fais £ — 4 i&y,
& i'efcris
£4-- kJ^' + j^jj;.. 2j6^-r-2jtf
-4>I6^'--i^2^^-f-7d8 ^--1024
- 4*+" I<J
— 420
j£* * — 25^—tfo t"3<^ ^oo.
ou la vraye racine qui eftoit 2, eft 6, a caufe qn'elle eft
augmente'e de4; &lesfaufles qui eftoient j, 63 &7,ne
font plus que 1,2, & 5, a caufe qu'elles font diminuees,
chafcunede4.
Tout
-ocr page 456-
Livre Troisiesme.                377
Tout de mefme fi on veut ofter le fecond terme dc
JL * ft At           '
x4 — zaxivz xx.. za*x -j~a + 30o,
pourceque diuifant z a par 41I vient \ a-t il faut fairc
^ -+- ^ a 36 * &efcrire
-» cc — ace ---aacc
-■
-ha*
*
cc —ace -• ^aacc
Scfiontrouueapre'slavaleurde^, en luyadiouftant ~ a
onauracellede*.
                                                      c8n«M
La feconde chofe, qui aura cyapre's quelque vfage, °* peuc
eft, qu'on pent toufiours en augmentant la valeur des toutes"6
vrayes racines, d'vne quantitd quifoit plus grande queIes .fau(r«
n'eft celle d'aucune des fauffes, faire qu'elles deuienentdvne
tomes vrayes, en forte qu'il n'y ait point deux fienes -K Equation
J              .-.,?        J. r                  °          ' deuientt
ou.deuxngnes •- qui s entreluiuent, & outre cela que la vrayes,
quantite' connuc du troifiefme terme foit plus grande, [**sv^ue
que le quarrp'de la raoitie'de celle du fecond. Car en- deuienct
core que cela fe face, lorfque ces fauflfes racines font cs-
inconnues, ileftayfeneanmoinsdeiuger a peu pre de
leur grandeur, &de prendre vne quantite, quilesfur-
paffe d'autant, oude plus, qu'il n'eftrequis acet effect.
Commefiona
.*
Bbb                       *
-ocr page 457-
378                    La Geometrie.
en faifantj — 6nm *, on trouuera
y»- }6 »\y5 ^ 540»r/"\ y 4--4519 »'-*y' »fi 19440;? *\ yy--4«(!jS » 5^ y >£ 466561*9
1% » I ' *" 3°*? f "i" 3<o »»(' .« ti«o »♦['-.* 6480»'t' -- 77j6n«
•- 6nn* 41 1-4*4 ">\ •- 1196 »*I >i< f 18 4 »f I -- 7776 ns
<$* 3« »!-5 — «48»*.? ^4 j888 w ' f — 777tf»«
— il6»+f •£ if^r » 5 J - 777«»*
/ >f 1296 « 5J — 7776 »«
y*—3; » y 5>J« 504»» j*- 3780 »3 y'^< 15110 » * y*-- 1711* »sy * sdc.
Ouil eft manifefte, que 704 tin, qui eft la quantite"
connue du troifiefkie tertrre eft plus grande, que le quar-
re de |T n, qui eft la mortie'de celle du fecond. Et il n'y
a point de cas, pour lequel la quantite, dont on augmen-
te les vrayes racines, ait befoin a cet effect, d'eftre plus
grande, a proportion de celles qui font donnees , que
pourcetuycyv
Goment
On fait
que tou-
tes les
flaces
d'yne &-
quation
(oienc
Mais a caufe que le dernier terme s'y trouue nul, fi on
ne defire pas que c^la fort, il faut encore augmenter tant
foit peu la valeurdes racines j Etcene fijauroit eft rede
fi peu, que ce ne foit affes pour cet effect. Non plus que
lorfqu'on yeutaccroiftre le nornbre des dimcnfions de
rerapiics. quelque Equation, &faire que toutes les places de fes
termesfoientremplies. Comme fiaulieude x J ****
— 6 so 0, on veut auoir vne r-quation, en laquelle la
quantitc'inconnue ait fix dimenfions, & dont aucun des
termes ne foit nul, il faut prcmierement pour
* * * * — £300 efcrire
* *
bx *30o
puis ayant fait y—a so xs on aura
y* — 6*yf <j*i$»ay*-- io*iy*>t<is a*yy—6a,y^ao
300
-- b y t$ut b
Ouileft manifefte que tant petite que la quantite'a foit
foppofe'e
-ocr page 458-
Livrb TftoisiUME.              $79
fuppofefe toutes les places del'Equation ne lauTeht pas
d'eftre remplies.
De plus on peut, fans connoiftre la valeur des vrayes Commee
raritiesd'vneEquation, les multiplied, ou diuifer tou- muici-
tes, par telle quantity connue qu'on veut. Cequi fe fait jjjyjj^
en fuppofant que la quantitd in connue' eftant multiplie'e, racines
oudiuife'e, par celle qui doit multiplier, ou diuifer les connsD0^.
racines, eft efgale a quelque autre. Puis multipliant, ou ftre-,
diuifant la quantite' connue du fecond terme, par cete
mefme qui doit multiplier, ou diuifer les racines j &par
fon quarrd, celle du troifiefmej & par fon cube, celle du
quatriefme; &ainfi iufques an dernier. Ce qui peut fer- bn°™duift
uirpourreduireades nombres entiers &rationaux, leslcs nom-
fra<5tions,ou fbuuent auflyles nombres fours , qui fepusM°M
trouuent dans les termes des Equations. Gomme fi on a
uacion
a des ea-
X i -- tf'l X X ■+■ If X -- £yj 30 o,                                   tiert.
8c qu'on veuille en auoir vne autre en (a place, dont tous
les termes s'expriment par des nombres rationaux; ilfaut
fuppofer y so x Y 3, & multiplier par Y~i la quantite'
connue du fecond terme, qui eft aufly Y^ , & par fon
quarrd qui eft 3 celle du troifiefme qui eft |f, & par ion
cube qui eft 3 V'3 celle du dernier, qui eft ^vj ,ce qui
fait
Puis fi on en veut auoir encore vne autre eri la place de
celle cy, dont lesquantites connue's nc s'expriment que
par des nombres entiers j il failt fuppofer % 30 3 y, & mul-
tipliant 5 par 3, f * par 9, & |par %j on tfouue
V ~9l:i~+-26V-243° o> ou les racihes eftant 2,3,
& 4, on connoift de la que ceiles de l'autre d'auparauant
Bbb 2                 eftoient
-ocr page 459-
jSo                    La Geometrie.
eftoient|,i,&|, &quc celles de la premiere eftoient
csment Cete operation peut auflTy feruir pour rendre la quan-
quantkc tite comme de qualqu'un des termesdel'Equatioefgale
de'i^m a Q^S116 autre donnde, comme fi ayant
des ter-        *5 * — bbx-}~Ci300
EquatkMi On veutau°irenfaplace vne autre Equation, en laquel-
efgale a le la quantite connue,.du terme qui occupe la troifiefrne
qu'onUtrC place,,a fcauoir celle qui eft iey b £,foit 3 a a,\\ faut fuppo-
feryso* v -^3-puisefcnre^ 3 —laay-i—jj- r 3300.
Que les a u refte tant les vrayes racines que les faufTes ne font
wwm- pas toufiours reelles,-mais quelquefoisfeulementimagi-
yes auc naires • e'eft a dire qu'on peut bien toufiours en imaeiner
faoffes                             • ,.           1 £ t.                                   ...
pcuuene autant que lay dit en chafque Equation mais qu ll n y a
cftre reel. quelquefois aucune quantite', qui eorrefponde a celles
imaginai- qu'on imagine, comme encore qu*bn en puiffe iraagi-
ICS> nertroisenceflecy, x* - <$ a: at -f-13 .v — ioaoo, iln'y
enatoutefois qu'vne reelle, qui eft 2,, & pour les deux
autres, quoy qu'on les augmente,ou diminue, ou multi-
plie en la fa§on que ie viens d'expliquer, on ne fgauroit
les rendre autres qu'imaginaires.
lareda- Or quand pour trouuer la conftru&ion de quelque
t'Tafifs problefme,on vient a vne Equation, en laquelle la quan-
eubiques tite inconnue a trois dimenfions 5 premierement fi les
r^iucf.lc quantites connues , qui y font , contienent quelqiles
mecft nombres rompus, il les faut reduire a d'autres entiers,par
plan" la multiplicationtantoft explique'e -3 Ets'ils encontie-
nentdefburs , il faut aufTy les reduire a d'autres ratio-
naux, autant qu'il fera poflibte,tant par cete mefme mul-
,                                 tiplication,
-ocr page 460-
Livre Troisiseme.                 38r
tiplication, que par diuers autres moyens, qui font affHs
facilesatrouuer. Puis examinant parordre toutes les
quantke's , qui peuuentdiuiferfans fra&ion ledernie?
terme, il faut voir, fi quelqu'vne d'elles, ioinrs auec Ia
quantitemconnue'parlefigne-f- ou -. y peutcompofer
vn binome, qui diuife toute lafomme j & fi cela eft le
Problefme eft plan , c'eft a dire il peut eftre conftruit
auec la reigle & de compas s Car oubien Ia quantitd
connugdecebinofmeeftla raciue cherchee ; oubien
^Equation eftant diuife'e par Iuy, fe reduift a deux di-
aienfions, en forte qu'on en peut trouuer aprcsla racine,
par ce qui a efte'dit au premier liure.
Parexemplefiona
y6 — $y*~ 1*4^*-" 64.300:
le dernier terme, qui eft 64, peut eftre diuife fans fra-
<5tionpar 1,2,4, 8-, 16, 3 2, & 6^ C'eft pourquoy il faut
examiner par ordre fi cete Equation ne peut point
eftre diuife'e par quelqu'vn <fes binomes , yy — 1 ou
yy ■+• t$yy— 2 ouyy 4- z,yy --4 &c.&on trouue quel-
le peut l'eftre parjy^ — 16t en cete forte.
~*~ yg-- fy4--124^-64 30o
-iy6-Sy*~ 4yy
q '— 16 y + —128 yy
——*
x6           \6
-r- y'^-Tyy -+-4 ax,. ""
. Lafacon
le commence par le dernier terme, & diuife- <j4 parde diuifer
— 16, ce qui fait «+- 4, que i'efcris dans le quotient, puis vneEqua"
ie mukiplie -H 4 par -f^,ce qui fait-i-4^ c'eft pour- Jj£ ,
quoy l'eicns -. 4 yy en la fomme, qu'il faut dinifer.car il y me
lui
nil                                 r contict fa
o-OO 1                           fautractne,
-ocr page 461-
3&t                   La Geometrie;
fauttoufiours cfcrire lc figne -> ou — tout contraire a
celuy que produift la multiplication.& ioignant —124 yy
suec — 4-yy, iay — it$yy, queie diuife derechefpar-- \6;
& iay -^r 8 yy, pour mettre dans le quotient & en le mul-
tipliant par r^ia}'-- 8^ 4,pour ioindre auec leterme qu'il
fautdiuifer,quieftauiTy -8^ 4, & ces deux enfemble
font— 16y4, queie diuife par --«16, ce qui fait -hiy*
pour Ie quotient, &£-iy 6 pour ioindrC suec -i-ty t, ce-
qui fait 0, & monftre que la diuifion eft achcUee. Mais
s'il eftoit refte'quelque quantite", oubien qu'on n'cult pu
diuifer fans fraction quelqu'vn des termes precedens, oa
euft par la reconnu, quelle ne pouuoit eftre faite.
Toutdemefinefion ay(* a*y '''"lyy-"1"*'* so 0.
r ' -1""' V*^< „4#e,
Ie dernier terme fe peut diuifer fans fraction par
a, aa, aa ■+• cc, a' -f- ac<?, & femblables. Mais il n'y en a
que deux qu'on ait befonule confiderer, af§auoir aa &
sa ■+■ ccs car les autres donnant plus ou moins de dimen-
fions dans le quotient, qu'il n'y en a en la quantity con-
cue du penukiefme terme, empefcheroient que la diui-
fion ne s'y piift faire. Et note's, que ie ne conte icy les
dimenfions d'^e, que pour trois, acaufcqu'il ny a point
d'^ \ ny d'y \ ny d'^ en toute la fomme. Or en exami-
nant Ie bmdmeyy aa —cc 70 o,on trouuc que la diuifioa
fc peut faire par luy en cete forte.
~*"y Ziccy^^yy-1*"' z>°>
— aac*
.___-L ifcee —aacc .-aa--cc
0                           .. ----------------■
— auec —om—cc           ________^^
-v*!;;*>t:;« »•• ce.
-ocr page 462-
LivreTroisiesme.             383
Ce qui monftre que la racine cherchee z&aa-\-cc.
Et la preuue en eft ayfde a faire par la multiplication.
Mais lorfqiumne trouue aucun bindme, qui puifle Q3eI*
ainfidiuifertoutelalbmme de l'Equation propofee, il mes foot
e ft certain que le Problefme qui en depend eft folide. Et [olje*'
ce n'eftpas vne moindre faute apre's cela, de tafcher a le I'Bqua-
conftruire fans y employer que des cercles & des lignes "°^ ^
droites, queceferoitd'employer des fedtions coniques
aconftruireceuxaufquelsonn'abefoin que de cercles.
car enfin tout ce qui tefmoigne quelque ignorance s'ap-
pele faute.
Que (ion a vne Equation dont la quafitite inconnue Lft re(Js_
ait quatre dimenfions, il faut en mefme fac,on, apresenftion d«s
auoirofte'les nombresfburs, & rompus, s'ily en a, voir fi tij}ns"<}ai
on pourra trouuer quelque bincSme, qui diuife toute la °Qt q.ua-
fbmme,enlecompofantdervnedes quantitds, qui dt-mgfion*,
uifentfansfra&ion le dernier terme, Et fi on en trouue ,otf5J"Llc
v n, oubien la quantite'connue de ce bindme eft la racine
me eft
cherchee; on du moins apres cete diuifion, il ne refte en Plan, rEt
l'Equation, que troisdimenfions , enlutcedequoyilceux^ui
faut dercchefrexaminer en la mefme forte. Mais lorf- £™ loU~
qu'ilnefe trouue point de tel bindme , il faut en au-
gmentant, ou diminuantla valeur de la racine, ofter le
fecond terme de la fomme , en la fac, on tantoft expli-
que'e. Etaprdslareduire a vne autre , qui ne contie-
tie que trois dimenfions. Cequi fe fait en cete forte.
Aulieude-f-*4 .pxx . qx . r soe,
il faut efcrire -f- y6-2py \*f?yy ~ q q soo.
Et pour les fignes •+- ou --, que iay omis, s'il y a
'
                                                                         ea
-ocr page 463-
3*84                    La Geometrie.
eu -+-p en la precedence Equation, il faut mettre en ccl-
lecy H- zp, ou s'il y a eu -p, il faut raettre — 2 p. & au
contraire s'il y a eu -f- r, il faut mettre — 4 r, ou s'il y a eu
 r, il faut mettre ■+■ 4 r. &foitqu'il y ait eu -+- q, ou
--^, il faut toufiours mettre — qq,8c -+* />/>. au moins fi
onfuppofe que x*, 8c y6 font marque's du fignes -+-,
car ce feroit tout le contraire fi on y fuppofoit h fi-
gne --.
-Parexemple fi on a-h x 4 *-~4xx— S # -f- jr 30©
ilfautefcrirecnlbnlieu^* —8^4 —1x4/^ — 64300. car
la quantiteque iay, nomme'e/> eftant — 4, il faut mettre
 iy ♦pourz^ 4. &celle, que iay nomme'e reliant 3$-,
il faut mettre *i*Qyy, ceft.a dire — 114^, au lieu de
* 4 r^y-
& en^n ? eftant 8, il faut mettre — 64, pour - qqf
Toutdemefme au lieu de ■+- x
4 * —17 ## — to at— 500 a.
il faut efcrire
              -H^ys— 34^ 4-+~ 31 iyy - 4co'30 0.
Car ?4eft double del 7, &313 en eft le quarre' ioint au
quadruple de 6, &400 eft le quarre'de 2,0.
Tout de mefme aufly au lieu de
*■
II faut efcrire
J ..ice I *c* JJ _aac.
Carp eft -f- \aa ~ cc, Szpp, eft |«4 •- aacc -H e4, & 4 r
eft— ^a*-)-aacct&te.n1m--qqcR.--ai•'■zatcc --aac 4.
Aprcsquel'Equationeftainfi reduite a trois dimen-
fions, il faut chercher la valeur d'yy par la methode defia
explique"eJ Et fi celle ne peut eftre trouuc'e, on n'a point
befoin
-ocr page 464-
Livre Troisiesme.                  38/
befoindepafler outre; caril fuit de lit infalliblement,
que leproblefmeeft folide. Mais fi on la trouue , on
peutdiuiferpar Ton moyen la precedente Equation en
deux autres, en chafcune defquelles la quantite" incon-
nue'n'aura que deux dimensions, &: dontles racines fe-
ront les mefmes que les lienes. Afgauoir, au lieu de
-+■ x**.pxx.qx. rsoo,
il faut efcrire ces deux autres
~i-xx~yx-h±yy.±p.'t 200,8c
~}rxx-Vyx-3r\yy.\p.q~y 30*.
Et pour les fignes ■+• & — que iay omis, s'il y a -+- p en
1'EquatiOn precedente, ilfaut mettre -f- \p en chafcune
decellescy;& — jp, s'il y a en Tautre - p. b ais il faut
mettre H—;encelleou.ilya—vxzSc— , en celle oil il
y a-hyx, Iorfqu'ily a -f- q en la premiere. Et au con-
traire s'tlya — q,ilfaut mettre— -, en celle ou il y a
—y X-, & -+- —, en celle oil il y a -J-y x. En fuite dequoy
il eftayfddeconnoiftretoutesles racines de 1'Equation
propofe'e, & par confequent de conftruire le problefme,
dontellecontientlafolution, fans y employer que des
cercles, &deslignes droites.
Par exemple a caufe que faifant
y" — 3qy4 •+■ ii$yy- 400 30 0, pour
a?4*-- ijxx — iox — croo, on trouue que^j/eft id,on-
doii au lieu de cete Equation
-H x 4 * —17 xx*' 20 x to x 6 so 0, efcrire ces deux
Ccc                    autres
-ocr page 465-
3&?                   La Geometrie.
autres'-+-AfA?—4».—5 aoo. EtH-AW-r-4#-f- 2 30o«
carj'eft 4,^)7 eft 8,/> eft 17, & $r eft 20, de fa§onque
H-1>7 - s/>- fyfait.- 3, & 4-1^.- £/> -f-^fait ■+- 2. Et
tirant les racines de ces deux Equations, on trouue tou-
tesles mefines, que fi on les droit decelle ou eft a?4, a
f9auoir on en trouue vne vraye, qui eft V 7 ■+- 2,& troi?
faufles, qui font '/7-2, v-h- V1, 8cz- V'2.
Ainfi ayant x 4~ 4 ** - 8 a-H *r 30 ^pourceque Iaracine
dey'.-ty*~ix±yy-+.-*4300jeft derechef itf, il faut
efcrire
xx- 4.x ■+■ j 30 0, & .v* -+- 4 «r -J- 7 dj o.
Car icy H- \yy - J/i - ^fcit f, &H- i jy .-* ^ -f£
fait 7. Et pourcequ'on ne trouue aucune racine, ny
vraye, nyfauflc, en ces deux dernieres Equations ,- on
connoiftdela que les quatre de l'Equation dontelles
procedent font imaginairesj & que Ie Problefme, pour
lequelonla trouude, eft plan de fa nature • mais qu'il
ne f§auroit en aucune faconeftreconftruit,acaufeque
les quantitds donne'esne peuuentfeioindre.
Tout de mefme ayant
pourcequ'on trouue a a -+- cc pour^y, il faut efcrire
^ -- V aa -+■ cc ^-f- j 00 .- i 0 1^'afl -+- cf 30 0, &
Car y eft /«+«, &4-\yy -+■ £/> eft£a«, & fy
eftitf V~<w-*-cc. D'ouonconnoift que la valeurde %
eft
'
-ocr page 466-
Livrk Troisiesme.
387
cft-| 1/raa,-3rcc-Jr'Vr — \aa-k-\cc -J- \& Yact •+■ at
oubien 5 -f/'aa H- cc if-^aa-h~cc -+- ^af/ 00-4- cc.
Et pourceque nous auions fait cy deflus ^-i-^azox,
nous apprenons que la quantite *, pourlaconnoiffance
dclaquelle nous auons fait toutes ces operations, eft
MaisafEn qu'on puiffe mieux connoiftre 1'vtilite de 5""&
cetereigle il faut que ie l'applique a quelq; Problefhie.de ces re-
Si le quarrd A D, & la ligne B N eftant donne's, il fautd aions
prolonger le cofte'A C iufques a E, en forte qu' E F.tiree
d'E versB, foit efgale a N B. On apprent de Pappus,
cui'ayantpremierementproIonge'BD iufques a G , en
ibrte que D G foit efgale a D N, & ay ant defcrit vn cer-
cle dont Ie diametre foit B G, fi on prolonge la ligne
droiteAC,ellerencontreralacirconference de cecer- -
cle au point E, qu'on demandoit. Mais pour ceux qui ne
£§auroiet point cete coftrudtion elle feroit afTds difficile
&. rencotrer,& en la cherchat par la methode icy propo-
se, ils ne s'auiferoiet iamais de predrc D G pour la qua-
titeinconnuc, maisplutofk CF, ou F D, acaufeque ce
Ccc a                 font
-ocr page 467-
388                    La Geometrie,
font elles qui conduifent le plus ayfement a 1'Equatia: &
lors ils en trouueroiet vne qui ne feroit pas facile a deme-
ller,fanslareigleque ie viens d'expliquer. Carpo/ant^
pourBDouCD,&<:pour EF, &#pouf D F, onaCF
oo a —x, & come C F ou a—*",eft aF E on <r,ainff F D ou xy
CX
eft a B F, qui par confequent eft ~. Puis a caufe du tri-
angle rectangle B D F, dont Ies coftes font 1'vn x & I'au-
tre a, leurs quarre's, qui font xx ■+- a a, font efgaux a ce-
CC XX
luy de labaze, quieft xx,^ax^aa ,de fa§pn que multi-
pliantle tout par xx—zax-i-aa, on trouue que I'E-
quationeftA; *~zaxl -r~ zaaxx — za?'' x-\- a°"x>cc xx>
oubien x*--zax} „" xx — za>x -\-a * so o. Et on
connoiftparlesreiglesprecedentes,que fa racine, qui
eft la longcur de Ja ligne D F, eft \a -I- V\aa-\-Uc
Que fi on pofoit B F, ou C E, ou B E pour la quantite'
inconnue, on viendroit derechefa vne Equation, en la-
quelleil y auroit 4 dimenfions, mais qui feroit plus ayfde
a demefler, & on y viendroit afTes ayfement au lieu que
fi c'eftoit D G qu'on fuppofaft, on viendroit beaucoup
plus difficilementa TEquation, mais aufiy elle feroit tres
fimple. Cequeiemets icy pour vous auertir, que lorf.
quele Problefmepropofe'n'eft point folide, fi en Ie cher-
chant par vn chemin on vient a vne Equation fort com_
pofee.onpeut ordinairement venir a vne plus finaple, en
le cherchant par vn autre.
Ie pourrois encore aioufter diuerfes reigles pour de'-
mefler les Equations, qui vont au Cube, ou au Quarre'
de
-ocr page 468-
LlVRE TROISI ESME.                 j8j3
dequarre', maiscllesferoientfuperflues- car lorfque les
Problefmes font plans, on en pent toufiours trouuer fa
conftruction parcellescy.
IepourroisaufTyenadioufterd'autrespour les Ecjua- Regie
.i: e
ttons qui moment iufques au furfolide, ou au Quarre- de ¥^"t
eube,ou an dela, mais i'ayme inieux les comprendre duireles
toutes en vne, & dire en general, que Jorfqu;on a tafche'qui paf?
de les reduire a mefme forme, que cellcs d'autant de di- 'cnc le
menfions,quivienent dela multiplication de deux au- quaire.
tresquien ont moins, & qu'ayant ddnorobre tous les
moyens, par lefquets cete multiplication eftpoflible, la
chofen'apufuccederparaucun, on doit s'aflurer qu'el-
les ne fc,auroient eftre reduites a de plus fimples. En for-
te que fila quantite inconnue a 3 on 4dimenfions,le Pro-
blefme pour lequel on la cherche eft folide,- & fi elle en a
5 ,on <s,il eft d'vn degre7plus compofej &ainfi des autres.
Aurefte i'ay omis icy les demonftrations de la plus
part de ce que iay dit a caufe qu'elles m'ontfemble'fi fa-
ciles,quepourvuquevous prenies la peine d'examiner
methodiquement fi iay failly, elles fe prefenteront a vous
d'elles mefme: & il fera plus vtile de les apprendre en ce-
te fa§on, qu en les lifant.
Or quand on eft afflire, que Ie Problefme propofe' eft n^"^"
fotide, foit que 1'Equation par laquelle on Ie cherche pourcon-
' j                 1 r •*. > 11                                     Itruire
monteauquarredequarre, ioit qu elle ne monte que tous ies
iufques au cube, on peut toufiours en trouuer la racine problef-
par l'vne des trois fe&ions coniques, laquelle que ce foit des, rc-
ou mefme par quelquepartie del'vne d'elles, tant petite duits a
qu'elle puifTe eftre; en ne fe feruat au refte que de lignes qUati5 de
droites.&decercles. Mais ieme contenteray icy de «oisou
J J          quatrcdi-
Ccc x.                  donnermenfion?.
-ocr page 469-
390                    LaGeometrie.
donner vne reigle generale pour Ies trouuer toutes par le
moyen d'vne Parabole, a caufe qu'elle eft en quelque fa-
gonlaplusfimple.
Premierement ilfaut ofter lefecond terme de {'Equa-
tion propofee, s'il n'eft defia mil, & ainfi la reduire a tei-
le forme, %J so *. ap %. a aqt fi la quantite' inconnue n'a
que trois dimenfions; oubien a telle, ^ so *. apstf. aaq^.
a
sr,fielle en a quatrejoubien en prenant a pour l'vmtd,
a telle, £ } ao ". p i. q, & a telle
cu-
—i
r
Apre%
-ocr page 470-
Livre TroIsiesme.                j^i
Aprcs cela fnppofant que la Parabole F A G eft defia
defcrite, & que fon aiffieu eft A C D K L, & que fon co-
fte' droit eft a, ou i, dont A C eft la moitie', & enfin que
le point C eft au dedans de cete Parabole, & que A en eft
le fommet; II faut faire C D so ±p, & la prendre du met-
me cofte', iju'eft le point A au regard du point C, s'il y a
-\rpenl'Equationj mais s'il y a—pilfaut la prendre de
1'autre cofte. Et du point D, oubien, fi la quantity
j^eftoit nulle.du point Cil faut eflener vne ligne a aa-
gles droits iufques a E, en forte qu'elle foit efgale a^.
Et enfin da centre E il faut defcrire le cercle F G, dont
-ocr page 471-
}*A
La Geometric.
le demidiaroetre fait
AE , fi rKquatiori
ri'eftquecubique, en
forte que la quanti-
ter foit nulle. Mais
quand il y a H- r ii
faut dans cete ligne
A E prolongee, pren-
dre d'vn cofte' A R
efgale a r, & de 1'autre
AS efgale au cofte
droit de la Parabole
qui eft r, &ayantde-
fcrit vn cercle dont le diametre foit R S, il faut faire A H
perpediculaire fur
A E , laqudle A H
rencontre ce cer-
cle R H S au point
H,quieftceluypar
ou 1'autre cercle
FHG doit pafler.
Et quand il y a — r
U faut aprds auoir
ainfi trouue* la ligne
A H, infcrirc A I,
qui Iuy Ibit efgale,
dans vn autre cer-
cle , dont A E foit
Iediametre,&lors
c'eftparle point I,
que
-ocr page 472-
LI V R E T R. OIS T E S M V.                         %$%
que doit pafTer FIG le premier cercle cherche'. Or ce
cercle F G peutcoupper, ou toucher la Parabole en i,
ou 2, ou 3, ou 4poins, defquels tirant des perpendiculai-
res fur laiffieu, on a toutes les racines de l'Equation tant
vrayes, que faufTes. A fgauoir fi la quantite q eft marquee
du figne -f-, les vrayes racines feront celles de ces per-
pendiculaires, qui fe trotiueront du mefmecofte' dela
parabole, que E le centre du cercle, comme F L; & les
autres, comme G K, feront .faufTes: Mais au contraire fi
cete quantite* q eft marquee du figne — les vrayes feront
celles de l'autre coftd; 5c les faufTes, ou moindres que
rien feront du cofte'ou eft E le centre du cercle. Et en-
fin fi ce cercle ne couppe,ny ne touche la Parabole en au-
cun point, cela.tefmoigne qu'ii n'y aaucuneracineny
vraye nyfaufle en l'Equation , & qu'elles font toutes
imagin'aires. En forte que cete reigle eft la plus genera-
te , & la plus accomplie qu'il fbit poffible de fbu-
haiter.
Et Iademonftration en eft fort ayfe'e. Car fi la ligne
G K3trouude par cete conftru&ion, fenomme %, AK
fera ^ ^ a caufe de la Parabole , en laquelle G K doit
eftre moyeneproportioneII'd,eHtfe A K, & le cofte'droit
qui eft i. puis fi de A K i'ofte A C, qui eft \ , & C D qui
eft tp, il refte D K, ou E M, qui eft n- \p -• \, dont le
quarre eft
sL*",PsLV'VL'+:-it Pp-^kp-^j- & a caufe que D E, ou1
K M eft 4 q, la toute GMeft^-i?) <lont le quarre' eft
VL~t~ 1K, "+" J 91>& aflemblant ces deux quarfes, on a
D d d                     pour
-ocr page 473-
394                   kA Geometrie.
poor le quarre' de la Iigne G E, a caufe qu'elle eft la baze
du triangle rectangle E M G.
Maisacaufe que cete raefrae ligne GE eft le demi-
diametre du cercle F G, ellefe peut encore expliquer en
d'autres terrnes,a f§auoir E D eftant { q, & A D eftant
ip-t-iEAe&Vj; qq'^h ±pp+ \ ftf- % a caufS de l*an-
gle droit A D E, puis H A eftant moyene proportionelle
entre A S qui eft i & A R qui eft r,elle eft Y'r, & a cau-
fe de Fangle droit E A H, le quarre de H E, ou E G eft
£ 11
■+" %fP -t~ip"i~l~i~r; fibienque il y a Equation
entre
-ocr page 474-
Livre Troisiesme.                 %9f
entre cete fbmme & la precedents cequi eft le mefme
que\4 30*/>^— q £•+- r.&par confequentlalignetrou-
uee,GK qui a eftd nommee ^eft la racine dc cete Equa-
tion, ainfi qu'il falloit demonftrer. Et fi vous applique's
ce mefme calcul a tons les autres cas de cete reigle, en
changeant les fignes ■+■ & — felon l'occafion , vous y
trouuere's voftre contc en mefme forte.fans qu'il foit be-
foin que ie m'y arefte.
.
Si on veut done fuiuant cete reigle trouuer deux mo-
yennesproportionelles entre les lignes a & ^chafcun
fc.aitquepofant ^ pourl'vne,, comme<ieft k % , ainil
^a •—-, & 7 a -; defagon qu'il y a Equation entre q & L'inuea-
                                                                                                             tioade
■i.i
, e'eft a dire, %»so * V* q. Et la Parabole F A G cftant f£%£
i portio-
Ddd 2                      de-nciies.
-ocr page 475-
2?6                  La Geometrie.
defcrite, auec la partie de fon aiffieu A C, qui eft \ a la
raoitie'ducoftc'cJrqiCj jl fautdu point Gefleuer Ia*per-
pendicuteire C E efgale a ±qt & du centre E, par A, de-
fendant Ie cercle A F, on tronue B L, Sc, L A, pour le$
deux moyennes cherche'es.
/ f
cX I
D \
E
K j
■-
V- /
li^tr
i
Tout de mefme fi on veut diuifer Tangle N OP, ou-
dediuifa bien l'arc, ou portion de cercle N QT P, en trois par-
vn angle tjes efgales; faifant N O oo i, pour le rayon du cercle, &
N P 30 qt pour lafubtendue de Tare donne, & N Q so ^,
pour lg.fubtcndufticlg %\e& de cet arc j 1'Equation
vient,                      .; v> ^,
^ ap>*3^-.- q. Car ayant tire* Ies lignes N Ql, O Q,
O Tj& faifant QJ> paralfele a T O, on voit que cpmme
N G eft a N Q^atafi N Q&Q R, & Q R a ft S j en forte
-ocr page 476-
Livre Troisiesme.                397
que N O eftant 1, & N Octant 1, QJR eft S&, & R S eft
^5: Et a caufe qu'il s'en faut feulement R S, 011 ^', que la
ligne N P, qui eft q, ne foit triple de N Qj qui eft ^, on
a ^ so 3 ^--^'oubien, .
Puis la Parabole FAG eftant defcrite, & C A la mci-
tid'de fon cofte'droit principal eftant £, fion prent CD
do I, & la perpendiculaire D E oo l q, & que du centre E,
par AjOndefcriuelecercIeFAgG, ilcouppe cetePa-
rabole aux troispoins F, g, & G, fans conter le point A
qui en eft le fbmmet. Ce qui monftre qu'il y a trois raci-
nes en cete Equation, a fc,auoir les deux G K, Scg l^> qui
font vrayes; & la troifieime qui eft faufTe, & fgauoir F L.
Etdeces deux vrayes c'eft^g^ la plus petite qu'il faut
prendre pour la ligne N Q qui eftoit cherchee. Car 1'au-
treGK, eftefgaleaN V, lafubtendue de la troiflefine
partiede Tare NVP, qui auec 1'autre arc N QJP achcue
le cercle. Et la faufle F L eft efgale a ces deux enfcmble
QN & N V, ainfi qu'il eft ayfe a voir par le calcul.
11 feroit fuperftus que iem'areftafle a donner icy d'au- Que tour
tres exemples; car tousles Problefrnes qui ne font que defines
fblidesfe peuuent reduireatel poinf.qu'on n'a aucun be-folides fe
« , .'                     ,              ,              n            f                                     peuuent
torn de cete reigle pour les conftruirejfinon entant qu'el- reduire a
le fert atrouuer deux moyennes proportionelles,oubien ceseux
a dioifervn angle en trois parties efgales. Ainfi que vous tions,
connoiftre's en eonfiderant, que leurs difficultes peuuent
touflours eftre eornprifes en des Equations, qui ne mon-
tent que iufqueauquarrddequarre, ouau cube s Etqae
toutes celles qui montentau quarrd de quarrd, fe redui-
fentau quarrel, par lemoyendequelquesautres, qui ne
Ddd 5               montent
-ocr page 477-
?«?8                     La Geometri e.
montent que iufques au cube: Et enfin qu'on pent ofter
le fecond terme de celles cy. En force qu'il n'y en a point
qui ne fe puiffereduire a quelq; vnede ces trois formes.
£' 30* -Hp ^H- q.
Or fi on a %' do * ,-p % ■+- <jr, la reigle dont Cardan at-
tribue I'inuentiona vanomme ScipioFerreus, uousap-
prent que la racine eft,
Commeauffyloriqu'ona^5 so"*•+-/? £-+-17, & que le
quarre de la moitie'du dernier terme eft plus grand que
le cube du tiers de la quantite connue du penultiefhie,
vne pareille reigle nous apprent que la racine eft,
D'ou il paroift qu'on peut conftruire tous les Problef-
jnes, dont les dirEcultesfereduifent al'vne de ces deux
formes, fans auoir befoin des fe&ions coniques pour au-
tre chofe, que pour tirer les racines cubiques de quel-
ques quantite's donne'es, e'eft a dire, pour trouuer deux
moyennes proportionelles entre ces quantite's & l'vnite'.
Puis fi ona^5so *-hp j^-f- q, & que le quarre'de la
moitie'du dernier terme nefoit point plus grand que le
cube du tiers de la quantite'eonnuedu penultiefme, en
fuppofant le cercle N Q P V,dont le demidiametre N O
fbit Pr-jpt e'eft a dire la moyenne proportionelle entre
le tiers de la quantitd donne'e/> & I'vnite'j & fuppofant
.auffy la ligne NP iufcrite dans ce cercle qui foit y
e'eft
-ocr page 478-
Livre Troisiesme.                3^9
c'eftadirequifoit sU'autre quantity donne'e q comme
l'vniteeft autiersdep; il nefaut quediuiferchafcundes
deux arcs NQP&NVPen trois parties efgales, & on
auraNQ, la fubtendue dutiers de l'vn, &N Vlafub-
tendue du tiers de l'autre, qui iointes enfemble compo-
feront la racine cherchee.
Enfinfiona ^' ao*/ %--q > en fuppofant derechef le
cercle N QJP V, dont le rayon N O foit V jp, & 1'infcri-
te NPfoit ~t NQja fubtendue du tiers de Tare NQP fe-
rafvnedesracinescherchees, & N V la fubtendue du
tiers de l'autre arc fera l'autre. Aumoinsli Icquarre' de
la moitiedu dernier terme, n'eft point plus grand, que le
cube dutiers de la quantite connue du penultiefme. car
s'll eftoit plus grand,Ia ligne N P ne pourroit eftre inferi.
te dans le cercle;, a caufe quelle feroit plus longue que
foudiametre: Ce qui feroit caufe que les deux vrayes ra-
ciaes1
-ocr page 479-
400                      X, A GlOMETRIE.
cines de cete Equation neferoient qu'imaginaires , &
qu'il ny en auroit de reelles gue la fauiTe,' qui fuiuant 14
reigle de Cardan feroit,
La facon ^ ^ * * ^ ^ M^'fiF ^ ^ C ** " ^Tw^
dexpri- Au refte il eft a remarquer que cete facon d'exprimer
meriava- [a Valeur desracinespar le rapport qu'elle^ ont aux co-
toutes les fte*s de certains cubes dont il n'y a.'quele contenu qu'on
des"T c0000'^! n'eft en rien P^US intelligible, ny plus fimple,
quations que de les exprimer par le rapport qu'elles ont aux fub-
& enluke tendues de certains arcs, ou portions de cercles , dont
de routes le triple eft donne'. En forte que toutes celles des Equa-
CCliCS QUI
nemon- tions cubiques qui ne peuuent eftre exprime'es par les
tent que rejeies de Cardan. Ie peuuent eftre autant ou plus claire-
lufquesau °                 _           .                   r'
qaarte de ment par la rac.on icy propolee.
qUari'          Car fi par exemple, on penfe connoiftre la racine de
cete Equation, ^3so * — q^-i-p> a caufe qu'on f§ait
qu'elleeft compofee de deux Iignes. dont 1'vne eft le
coftd d'vn cube, duquelle contenu eft | q, adiouftd'au
cofte'd'vn quarre' , duquel derechef Ie contenu eft
\qq—-£-p 'jEtl'autreeftle cofte'd'vn autre cube, dont
le contenu eft la difference, qui eft entre f q," & Ie coftc'
de ce quarre'dont Ie contenu eft \ qq - j$£ », qui eft tout
ce qu'on enapprent par la reigle de Cardan. II ny a point
de doute qu'on ne connoifle autant ou plus diftin&e-
ment la racine de celle cy, ^530*-H^ — p, enlaconfi-
derantinfcrite dans vn cercle, dont le demidiametre eft
1/ §/>, & f§achant qu'elle y eft la fubtendue d'vn arc
dont le triple a pour fa fubtendue j. Mefme ces ter-
mes
-ocr page 480-
Livre Troisiseme."                 4©r
mes font beaucoup moins embarafle's que les autres , &
ilsfetrouueront beaucoup plus coursfi onveut vfer de
quelque chifFre particulicr pour exprimer ces fubten-
dues,ainfi qu'on fait duchiffre 1^C> pour exprimer le
coftd des cubes.
Et on peut aufly en fuite de cecy exprimer les racines
cbtoutes les Equations qui moment iufques au quarrc
de quarre", par les reigles cy deflfus expKquees. En forte
que ie ne f<jache rien de plus a defirer en cete matiere.
Car enfin la nature deees racines ne permet pas qu'on
lesexprimeentermesplusfimples, ny qu'on les deter-
mine par aucune conftruction qui foitenfemble plus ge-
nerate & plus facile,
II eft vray que ie n'ay pas encore dit fur quelles raifons Vom-
ie me fonde, pour ofer ainfi affurer, fi vne chofe eft poffi- problef-
ble, ou ne l'eft pas. Mais fi on prent garde comment,par ™es foh~
la methode dont ie ne fers, tout ce qui tombe fous fit peuuent
consideration des Geometres, fe reduift a vn mefme ^ts011~
genre de Problefmes, qui eft de chercher la valeur des fansksfe-
racines-de quelque Equation; on iugera bien qu'iln'eft ^qSues>
pas malayfe de faire vn ddnombrement detoutes les vo- ny ceux
yesparlefquelles on les peut trouuer, qui foit fuffifant^^.
pour demonftrer qu'on a choifi la plus generate, & la plus pofes &ns
fimple. Et particulierement pour cequi eft des Problef- auHcT"-
mes folides, que lay dit ne pouuoir eftre conftruis, fans 8ncs Plus
qu'on y employe'quelque'ligne plus compofe'e quelaf
.'CS.
circulaire, e'eft chofe qu'on peut afles trouuer, de ce
qu'ilsfereduifenttous adeuxconftructions ; en lVne
-defquelles il faut auoir tout enfembleles deux poins,qui
determinent deuxmoyenes proportionelles entre deux
Eee                    Iignes
-ocr page 481-
40»                   La Geometrie.
lignes donnc&S; &en l'autre les deux poms, qui diuifent
cu trois parties efgales vnarcdonne': Car d'autant que la
courbure du cercle ne depend, que d'vn fimple rapport
de toutes fes parties, an point qui en eft ie centre -, on ne
peut aufly s'en feruir qi/a determiner vn feul point entre
deuxextrerneSjCommeatrouuer vne moyenne propor-
tionelle entre deux lignes droitcs'doiinees, ou diuifer en
deux vn arc donne: Au lieu que la courbure des feclions
coniques, dependant toufioursde deux diuerfes chofes,
peut aufly feruir a determinerdeux poins difFerens.
Mais pour cete rnefme raifbn il eft impoflible, qu'au-
cundesProblefmesqui font d'vn degrdplus compofes
que les foIides,& qui prefuppofent l'inuention de quatre
moyennes proportionelles,ou la diuifion d'vn angle en
cinq parties efgales, puiffenteftrcconftruitsparaucune
des feclrions coniques. Celt pourquoy ie croyray faire en
cecy tout Ie mieux qui fcpuiffe,fi ie donne vne reigle ge-
nerate pour les conftruire, enyemployantla lignecour-
be qui fe delcrit par l'interfe&io d'vne Parabole & d'vne
lignedroiteenlafac.oncydeffusexplique'e. car i'ofe af-
furerqu'ilny en a point de plus fimple en la nature, qui
puifleleruiracemefrneefFeclij & vous aue's vu1 comme
ellefuitimmediatementlesfe&ionsconiques, en cete
queftion tant cherche'e par les anciens, dont la fblution
enfeigne par ordre toutes les lignes courbes, qui doiuent
Facongc- eftrereceues en Geometrie.
neraie Vousfcaues defiacomment. Iorfqu'on cherche les
pourcon-           . 3 .                 ..          '.         »             .
iliuire quantites qui font requiles pour la conftruction de ces
1 robiet Pr°blefmes,on ^s peut toufiours reduire a quelque 'E-
mes tc- quation,quinemonte que iufquesauquarre'de cube, ou
duits a
au
-ocr page 482-
Livre Troisiesme.             405
aufurfblide. Puis vous fcaue's auffy comment, enaug- VneEqua-
mentantlavaieurdes ratines deceteEquation,onpeut ti,on <P
•*                                 n a point
toufiours faire qu'elles deuienent toutes vrayes; & auec pius de
cela que la quatitd connue du troifiefme terme foit plus ^-g1*..
grande que le quarre de la moitie de celle du fecond;Et
enfin comment, fi ellenemontequeiufquesaufurfbli-
de , on la peut hauffer iufques au quarre de cube 5 & fai-
re que la place d'aucun de'fes termes ne manque d'eftre
remplic Or affin que toutes les difficultes, dontil eft
icy queftion, puiflent eftre refblues par vne mefme rei-
gle, ie defire qu'on face toutes ces chofes, & par ce
moyen qu'on les reduife toufiours a vne Equation de
telle forme,
y6 ~~py5 ~^~ iy4 m~ry3 ~~^~ syy" ?y~^mPso °>
& en laquelle la quantity nommee q foit plus grande
quele quarre de la moitidde celle qui eft nommee/.
• ■
: .
Eec
puis
) 11
-ocr page 483-
404
La Geometrie.
Puis ayant fait a
ligne B K iudefi-
niement longue
dcs deux coftes^
& du point B
ayant tire" la per-
pendiculaire A B,
dontla longueur
foit^jil faut dans
vn plan fepare de-
fcrire vae Para-
bole , corame C
D F dont Ie coftd
droit principalfoit
que ie nommeray
n pour abreger.
Apres cela il faut
pofer le plan dans
lequel eft cete Parabole fur celuy ou font les lignes AB &
BK, en forte que fon aiffieu D E fe rencontre iuftement
au deflus dc la ligne droite BK: Et ayant pris la par-
tie de cet aiffieu, qui eft entre les poins E & D, efgale a
X~r~,ilfautappliquerfurce point E vne longue reigle,
en telle fa§on qu'eftantaufly applique'e fur Ie point A
du plandedeflbus,elledemeure toufiours iointe a ces
deux poins, pendant qu'onhaufleraou t>aiflera la Para-
bole
-ocr page 484-
Livre Troisiesme.                 40^
bole tout le long de la Iigne B K, fur Iaquelle fon aiffieu
eft applique, au moyen dequoy l'interfection de cete Pa-
rabole, & de cete reigle, qui fe fera au point C , defcrira
la ligne courbe A C N, qui eft celle dont nous auons be-
foinde nous feruir pour la conftrudtion du Probiefme
propofd. Car apre'squ'elle eft ainfi defcrite, fi on prent
le point L en la ligne B K, du cofte'vers lequel eft tournd
le fbmmet de la Parabole,. & qu'on face B L efgale a D
E,'c'eft adirea -— : Puis du point L , vers B , qu'on
prene en la mefme ligne BK , la ligne LH, efgale a
^v^> &quedu point H ainfi trouue', on tire a angles
droits, du cofte'qu'eft la courbe A C N > la ligne HI,
dont la longeurfoit;^- £-*-$& qui pour abreger
fera nommee ~: Etapre's,ayantiointles poins L & I,
qu'on defcriue le cercle L PI, dont IL foit le diametrej
& qu'on inlcriueen ce cercle la ligne LP dont la lon-
geur foit V —~ : Puis enfin du centre I, par le point P
ainfi trouud, qu'on defcriue le cercle P C N. Ce cercle
eouppera ou touchera la ligne courbe A C N, en autant
de poins qu'il y aura de racines en l'Equation : En forte
que les perpend iculaires tire'es de ces poins fur la ligne
B K, comme CG.NR, QO, &femblables, ferontles
racines cherchees. Sans qu'il y ait aucune exception ny
aucundeffaut en cete reigle. Car fi laquantitd s eftoit
figrande, aproportiondesautres^,^, r,t, &cv,qac la li-
gne L P fe trouuaft plus grande que le diametre du cer-
Eee 3               .           cle
-ocr page 485-
4«<*                  .. t<A Geomethh.
cle I L,en forte qu'elle n'y puft eftre infcrite, il ny auroit
aucuneracineenl'Equationpropofee qui ne fufrimagi*
naire: Non plus que fi le cercle IP eftoitfi petit, qu'il ne
coupaft la courbe A C N en aucun point. Et il la peut
couper en fix differens , ainfi qu'il peut y auoir fix
diuerfes racines en l'Equatfiou. Mais lorfqu'il la coupe
en moins , cela tefmoigne qu'il y a quelques vnes de
ces racines qui font efgales entre elles , oubien qui ne
font qu'imaginaires.
. -
Que
-ocr page 486-
Livre Troisiesme.               407
Quefi laTagon de tracer la ligne A C N par le raouue-
ment d'vne Parabole vous femble incommode, il eft ay-
fe'de trouuer plufietirs autres moyens pour la defcrire.
Comme fiayantlesmefmesquantites que deuant pour
A B & B L; & la mefme pour B K,qu'on auoit pofe'e pour
le conVdroit principal de la Parabolejon defcrit le demi-
cercle K S T dont le centre foicpris a difcretion dans la
ligne B K, en forte qu'il couppe quelq; part la ligne A B,
comme au point S, & que du point T, ou il finift,on pre-
ne vers K la ligne T V, efgale a B Lj puis ayant tird la li-
gne S V, qu'on en tire vne autre, qui luy foit parallele,
par le point A, comme AC;& qu'on en tire aufly vne
autre par S,qui foit parallele a B K, comme S Cj le point
C,ou ces deux paralleles ferencontrent,feral'vn de ceux
delaligne courbe cherchde. Et on en pent trouuer, en
mefme forte,autant d'autres qu'on en defire,
-ocr page 487-
4&8                   La Geometme.
Or la demonftration de tout cecy eft affcs facile, car
appliquant la reigle A Eauec la Parabole F D fur le point
G; comme il eft certain qu'elles peuuent y eftre appli-
quees enfemble ., puifque ce point C eft en lacourbe
A C N,qui eft defcrite par leur interfe&ion ; fi C G fe
nominey,GDfera^ , a caufe que le cofte'droit, qui
eft n,eft a C G,comme G G a G D.5c oftant D E, qui eft
"77, de GD, on a--- —,pourGE. Puis a caufe que
A B eft a B E, comme
CGefta GE ; AB
cftant \ p , B E eft
3T h_ X? ■
"t-Z •
3V
Et tout de melme
en fuppofant que le
point Cde la cdurbe k
efte'trouue' par l'inter-
fectiodes lignesdroi-
tes,SC parallele aB
K, &AC parallele a
SV. SBquieftefgale
a CG, efty : & BK
eftant efgale au cofte'
droit de la Parabole,
que iay nomine' n, B
Ted-, car comme
KBeftaBS, ainfiBS
eft a B T. Et T V
eftant
«
-ocr page 488-
Livre Troisiesme.               409
iVi>
eftant la mefme que BL , c'eft a dire™ , B V eft
n"~- &commeSBeftaBV, ainfiAB efta BE,qui
eft par confequentj;— - commedeuant,d'ouonvoit
que c'eft vne mefme ligne courbc qui fe defcrit en ces
deux famous.
Aprds cela, pourceque B L & D E font efgales, DL&
BE lefontaufly: defagon qu'adiouftat LH, qui eft -^i
aDL, quieft^-- ^;.on a la toute DH , qui eft
2, ~ ;j -1" ^Tv i & ea oftant G D , qui eft „-
on a GH, qui eft^ - VfV;™ - " Ceque i'efcris
par ordre en cete forte G H 00 — y> -+"s/>vy ■+• ^V^"-^r^'•
Et Ie quarre de G H eft,
nnyy
Et en quelque autre endroit de cete ligne courbe qu'on
veuille imaginer le point C, comme vers N, cm vers Q,
ontrouueratoufiours que le quarrd de la ligne droite,
qui eft entre le point H & celuy ou tombe la perpendicu-
laire du point C fur BH,peut eftreexprime'en ces mef-
mestermes,&aneclesmefmesfignes-+- &--.
Dc plus I H eftant^, & L H eftant ™, I L eft
^"Sf1 ■+* &1> caufe de l'angle droit IH L; & LP eftSt
Fff                      V
-ocr page 489-
410                    LA Geometrie.
Jin
+ ;;. iPouiCeff,
*/~mm           tt              s          pVv                  _
^ "^4"^ " S"-5.» a "u^aufTy de langfe
droit I P L. Puis ayant fait C M perpendiculaire fur IH,
I,M eft la difference qui eft entrelH, &HM011 CG,
cefta dire entre^-, &^ , en forte que fon quarre'
WW
1 my
tin
eft toufiours
-r-yy, qui eftant ofte" dfl quarre
de
-ocr page 490-
LivK.fi Troisiesme.                4x1
de IC, ll refle — - ~ - ~ •+■ —/— yy.
pourle quarre'de CM,qui eft efgal au quarre'de GH de-
fia trouue. Oubien en faifant que cete fomme fbit diui-
fe'e comme l'autre par nn yy, on a
nny4 ■+- zw^' — pf' v yy — syy ■+• -yy- Puis
nnyy
t
remettant ^y 4 -+- qy\ — ^ /£y4 , pour /my4 ; &
ry 5 -h 2 ^ v _y ' -+" ~^-y *, pour zmy* : & multipliant
l'vne Scl'autre fomme par ««yy, °n a
efgal a
^H-z ^ 0Ky 5 -• / (fyy
" 4 i 1 ft C _i " C
C'eftadirequ'ona,
•y ff
— ^?_y 5 -f- q y 4 -- rjJ «+■ s yy — ty -\- v 30^.
*D'ou il paroift queleslignes C G, N R, QO, & fembla-
bles font les racines de cete Equation, qui eft ce qu'il fal-
loit demonftrer.
Ainfidoncfion veut trouuer qnatre rnoyennes pro-
portioneilesentreles lignes^ Scb, ayant pofe'a; pour la
premiere , I'Equation eft x5 * * * * -- a * b so 0 oubien
x s * * * * „ a 4 £ x* ^o 0> £t fajfant^y.. ^ 30 x il vient
C'eftpourquoyilfaut prendre 3 a pour la ligne AB; &
' == -b <ja « pour fi K, ou le colte' droit de la Pa-
Fff*                 rabole
-ocr page 491-
4u                  La Geometrie.
rabolequeiaynomme'w. &y* f'"** "*~ *b Vmv D'Eob
B L. Et aprds auoir defcrit la ligne courbe A C N fur
la mefiire dc ces trois, il raut faire L H, » —=====
' inVaa^afr,
10 ^ * aw __----------           i8#+*?<»'£
& HI so — -H - fa« H- ^ H- -—- . ■& LPoo
■y 15 a4 ►£ <5 a 5 v<w *<* i. r-, 1                  ,                                 /-
--------------z— Car le cercle qui ayant ion cantre
aupointlpalFera par le point Painfitrouue, couppera la
courbe aux deux poins C&N-; defquels ayant tire'les
perdendiculaires N R & CG, fi la moindre, N R, eft
efte'e de la plus grande, CG, lerefte fera,*, la premiere
des quatremoyennesproportionelles cherchees.
11 eft ayfe en mefme fac,on de diuifer vn angle en cinq
parties efgales, & d'infcrire vne figure d'vnze ou treze
cofte's efgaux dans vn cercle, &de trouuer vne infinite'
d'autres exemples de cete reigle.
Toutefoisileft a remarquer, qu'en plnfieurs de ces
exemples, ilpeut arriuer que le cercle couppe fi obli-
que ment la paraboledufecond genre, que le point de
leur interferon foit difficile a reconnoiftre: Be ainfi que
Cete conftruction ne foitpas commode pour la pratique.
A quoy ilferoitayfe'deremedier encompofant d'autres
regies, a limitation decellecy , comme on en pent
compofer de mille fortes.
Mais mondefTeinn'eft pas de faire vn gros liure, &
ie tafche plutoft de comprendre. beaucoup en peu de
mots: comme on iugera peuteftre que iay fait, fion cou-
fidere, qu'ayant reduit a vne mefme conftru<5Uon tous
les
-ocr page 492-
Livre Troisiesme.                413
les Problcfmes d'vn mefmc genre, iay tout enfemble
donnelaia£ondelesreduire it vne infinite' d'autres di-
uerfes; & ainfi de refoudre chafcun deux en vne infinite*
de facons. Puis outre cela qu'ayant conftruit tous ceux
qui font plans, encoupant d'vn cercle vne ligne droite;
& tous ceux qui font folidep, en coupant aufly d'vn cer-
cle vne Parabolej & enfintous ceux qui font d'vn degre"
plus compofcs, encoupant tout de mefme d'vn cercle
vne lignequin'eft que d'vn degre'plus compofe'e que la
Parabole; ilne faut que fuiure la mefme voye pour con-
ftruire tous ceux qui font plus compofe's al'infini. Car en
matiere de progreffions Mathematiques, lorfqu'on a les
deuxoutrois premiers termes, il n'eft pas malayfe'de
trouuer lesautres. Eti'efpere que nos neueux me f§au-
rontgre', non feulement des chofes que iay icyexpli-
quees.; mais aufly de celles que iay omifes volontaire-
rement, affin de leurlaiffer le plaifir de les inuenter.
FIN.
-ocr page 493-
Acluertiffemait.
' Eux qui ne vifitet les Tables des liures, quaffin d'y chei-
sjir les matieres quits veulent voir,& dts' exempt erdela
peine de lire le refle, ne tireront aucune fatisfaUion de telle
ty: Car £ explication des quefiions qui y font marquSes de-
pendquafi toufioursfi expreffement decequi les precede, &
fouuent aujjy de ce qui lesfuit, qu'on ne la fcauroit entendre
parfaitement fi on ne lift auec attention tout le liure. Mais
pour ceux qui I'auront defia leu, & quifcauront ajfe^ Uen les
chofes les plus generales qu'il contient }<ete Table leurpourra
Jeruirs tant a Yesfaire [ouuenirdes endroitsoit ileflparledes
plus particulieres qui feront efchappees deleur memoire; que
fouuent auffy it, leurfaire prendre garde a celles quils auront
peutefire pajfees fans lesremarquen
-ocr page 494-
TABLE
*Des principals difficultez,,
Qui font explique'es en la
D I O PTRIQV E.
Difcours Tremier.
D E L A L U M I E R E.
COmment Hfufft de conceuoir la nature de la lumitre pour entendre
toutes fes proprietez,.
                                              page 4
Comment fa rajons paffent en vn inftant du Soled iufques a nous. 4
fiimment on voit les couleurs paffon may en.
                                  4
Quelle eft la nature des couleurs en general.                                   4
Jgu'on n'a point befoin d'efpeces intentionelles pour les voir.         j
Ny mefme qu'ily ait rien dans les obiets qui Jott (emblable aux Jenti*
mens que nous en auons,,                                                        *}
\§>ue nous voyonsdeiour,par lemoyen des rayons quivienent des obiets
vers nos yeux.                                                                     £
Etqu'au contraire les chats voyent detiuit par le may en des rayons qui
tendent de leursyeux vers les obiets.                                         7
Quelle efl la mattere qui tranfmet les rayons.                                 6
Comment les rayons de pin fears diuers obiets peuuent entrer enfemble
dans l'-aeil.                                                                           7
Oh allant vers diuers yeux paffer par vn mefme endroit de lair fans fe
mefler ny s'entr empefcher.                                                     7
Ny eflre empefchez. par lafluidite de I'ait.                                     7
Nypar I'agitation des vens.                                                       7
Ny par la drtrete du verre ou autres tels cors tranfyarens.                   7-
Comment cela n'empefche pas mefme qn'ils ne fiient exaelemeivt-
droits.                                                                               8
Et ce que c'efl proprement que ces rajons.                                      8
Et comment Hen vient yne infinite de cbafcun despoins des cors ls*mi-
neux..                     ,                                                          8:
0
-ocr page 495-
T A B I E.
fcquec'eft qu'vncm win- •■                                 ir
Ce que c eft qu vtf miroir;. ''                                                            in
Comment les miroirs tant plats que comexes & comma font reflefchir
la rayons.                                                                        xo&n
Ce que c'eft qu'vn cars blanc.                                                           i x
En quoy conflfte la nature des couleurs moyenes.                               11
Comment lei cars colorez. font reflefchir,les rayons,                           12
Ce que c'eft que la Refraclion.                                                        12
Difcours Second
DE LA REFRACTION.
QVe les cors quife meuuentne doiuentpoint s'arefter aucun moment
contreceux qui les font reflefchir.
                                       j^,
'Tourquoy Iangle.de,la reflexion esl efgal aceluydel'incidence. 14,
if. 16,
De combienlemouuementd'vnebale eft detourne , lorfquellepaffe au
trauersd'vne toile.
                 .v                                         itf>i7,
St de tombien lorfqu'elle entre dans I'eau.                                        1 g
Tourquoy la Refraction eft d'autant plus grande, que tincidence eft plus
oblique.
                                                                                   \ty
Et nulle, quand ['incidence eft perpendiculaire.                                 x 9
Tourquoy quelqueflis let bales, des canons tire^jvers beau, wypeuuent
entrer,& fe reflefchiflent vers I'air.
                                            ip
De combien Its rayons font detourne^par les cors tranjparcns qu'Us.pene-
trant.
                                                                                " 20
fimment i'lfkut mefurer la grandeur des refratlions.
                   21,22
Jgueks rayons paflent plus ayfement au trauers du verre que de i'eau, &
de I'eau que de I'uir, Et pourquoy.
                                             2 J
Tourquoy la 'Refraction des rayons qui entrenf dans tca&,efl efgale, a
celle des rayons qui enfortent.
                                                    24
Et pourquoy cela n'es~i pas general en tous cors tranjparens.
               24
JShte les rayons peuuent quelqueflis eftre courbe^fans fortir d'vn mefme
cors transparent,
                                                                      24,
Comment fe fait la Refraclion en chafque point des fuperfcies cour-
be'esj.
                                                                                       z$
Dtfcours
-ocr page 496-
■-,-■.' ■?■•:. '-"^-------
De La Dioptri^ue.
Difcours Troifiefme
DE UOEIL.
QVelapertunommeevu!gairementRetina.n'eft autre chofe que le
nerfOptique.
                                                                    26
Qjtelles font les refrailions que caufent les humeurs de rail.             2 7
Pour quel vfage la prunelle s'eftrecift & s'efiargijt.                           2 7
Que ce rnouuement de la prunelle eft volontaire.                               2 8
Que I'humeur criftaline eft commiyvn mufcle qui peat changer la figure
de tout I'ceil.
                                                                             28
Et que les petits filets nommez. proceffus ciliares en font les tendons. 28
Difcours Qmtriefme
DES SENS EN GENERAL.
QVe c'eft I'ame quifent & non le cars.                                       29
Quelle fent en tant qu'elle eft dans lecerueau, & non en tantqu'el-
le antme les autres meiftbres.                                                       2 9
Que c'eft par I'entremife des ntr fs qu'elle fent.                                  30
Que la fubfiance interieure de ces nerfs eft compofee deplufieurspetitsfi
lets fort deliez..                                                                          3 a
Que ce font les mtfmes nerfs qui feruent aux fens, & aux mouue-
mens.                                                                                       31
Que cefont les efprits animaux coutenut dans les peaux de ces nerfs qui
meuuent les membres.                                                                31
Que c'eft leur fubfiance inter ieure quifert aux Jens.                         3 1
Comment fe frit lefentiment par i'ajde des nerfs.                             3 Z
Que les idees que les fens exterieurs enuoyent en la phatttaifie ne font point
des images des obiets: on du mains qu'elles nont point befom de leur
repmbler.                                                                                 3 2
Que les diners mouuemens des petits filets de cbafque nerf ft'.jfifent pour
caufer diners fentimens,                                                             3 4
.'- *
Ggg                    Difcours
-ocr page 497-
Table.
Difcours Cinquiefme
DES IMAGES QUI SE FORMENT
SURLEFONDSDE LOEIL.
COmparaifon de ces images auec cellos qu'on voit en vne chambre
obfcure.
                                                                                                »*■
Explication de ces images en I'ceild'vn animal mort.                         2 6
Qu'on doit rendre la figure de cet ceil vnpeu plus longue lorfque les ob-
iets font fort proches,que loifqu'ils font plus ejloignez.-
                    27
JQu'ilentre en cet ceil plufteurs rayons de chafque point de I'obiet. 3 8
Que tons ceux qui vienent d'rn mefme point fe doittent afftmbler ait
finds de cet ceil enuiron le mefmepoint
j Et quilfaut difpofer (a figure
a cet effecl.
                                                                               2 8
Que ceux de diners poins s'y doiuent affembler en dmerspoins. • 2. 8
(fomment les coukursfevoyent autrauers d'vnpapier blanc qui est fur
le finds de cet ceil.
4,0
Que let images qui s'y forment out la repmblance des obiets. 40
Comment la grandeur de la prunelle feet a la perfection de ces ima-
ges.
40
Commenty fert la refratlion qui ft fait dans I'ceil; Et comment elle y
nuiroit ejlant plus grande ou plus petite qwelle n'efi.
4,1
Qomment la noirceur des parties interieures de cet ceil,& I'obfcurite de la
cbambre oufe voyentces images
v fert auffy. 4,3
Tourquoyellcsnelontiamaisjiparfnites enleurs extremitez.qu'au mi-
lieu.
4 j
(fommenton doit entendre cequiJedit, que vifio fit per axem. 4.$
Que la grandeur de fa prunelle rendant les couleurs plus viues>rend les fi-
gures moins diftincles: Et ainfi ne doit efire que mediocre.
44
Que les obiets qui font a cofte de celuy a la diflance duquel I'ceil eft dijpo-
fe, en eft ant beaucoup plus ejloigne7ou plus proches , s'y reprefenteivt,
moins diftintlement , que s'tls en eftoient prefque a pareille di-
flance.
                                                                                     44
Que ces images font renuerfees.
                                                     44
Que leurs figures font changees & racourcies a raifin de la diflance oufi-
tuation des obiets.
44
Que ces images font plttsparfhites en I'aeild'vn animal vitsant, qu'en
celuy
-ocr page 498-
De La D io ptriqjje.
celuy d'vn mort; Et en celuy d'vn bomme, qu'en celuy d'vn bozuf. 46
JQtte celles qui paroiffent par le moyen d'vne lentille de verre dansvne
chambre obfcure, s'y firment tout de mefme'que dans tail, Et qu'on y
pent faire I'experience deplufieurs chafes qui con firment ce qui eft icy ex-
pliqui.                                                                         46,4.7,48.
Comment ces images pajfent de I'ceil dans le cerueati.                         49
Difcours Sixiefme
DE LA VISION.
QZ)e la vifion ne ftfait point par le moyen des images qui pajfent des
yeux dans le cerueau, mats par le moyen des mouuemens qui les
compoftnt>.                                                                              y 1
J£ue c'eft par la force dc ces mouuemens qu'on fint la lumiere.              j 1
Et par leurs autres variete7 qu'on fent les coulettrs.                           51
Comment ft ftntent les fins, lesgovtfts , & le chatomllement & ladou-
leur.                                                                                            5r>52»
Tourquoy les coups qu'on recoitdans I'ceil fint Voir diuerfes lumieres: &
ceux qu'on recoit centre les oreillesfint ouir des fins: Etainftvne mef'
mefirce cauft diuers ftntimens en diners organes.                          52
Tourquoy tenant les yeux firme^ vnpeu apres auoir regardi le foleil,il
ftmble qu'on voye diuerfes couleurs.                                             J1
Tourquoy ilparoift quelquefiis des couleurs dans les cors qui nefint qut
tranjparens: comtne l'arc-en-cielparoift dans la pluie. 53 ,& 2 ?4
JQue le fe'ntiment qu'on a de la lumiere eft pita oh moins firt ftlon que tob.
iet est- plus 011 moins proche.                                                       J 3
Et felon que la prunelle eft pint ou moins grande.                               J 3
Et felon que t image quiftpeint dans le finds de tail est plus ou moins
petite.                                                                                       5 3
Comment la multitude des petits filets du nerfoptique fert a rendre la v»-
fton difttncle.                                                                             J4
Fourquoy les prairies eftant peintes de diuerfes couleurs ne paroiffent de
lorn que a'vne pule.                    ,                                              5?
Tourquoy tous les cors ft voyent moins diftintlement de loin que de
pres.                                                                                                  <jiS
Comment la grandeur de l'im4ge fert a rendre la vifton plus diftin-
&*                                                                                                     J?
Ggg 2                            Com-
-ocr page 499-
Table.
Comment on connoifl vers quel colli e$~l I'obiet qu'on reg4rde: Ou cclfty
qu'on monflre du doigt fans le toucher.                                  yy, j<J
Tourquoy le renuerfiment de I'image quife'fait dans I'oeiln'empefchepas
que les obiets ne paroijfent droits.                                                y 7
Pourquoy ce qu'on voit des deuxyeux, on qu'on louche des deux mains,
ne paroiji pas double pour cela.                                                   58
Comment les mouuemens qui changent la figure de I'ceil firuent a fiiire
voir la diftance des obiets,                                                         j 8
Jgu'encore que nous ignorions ces mouuemens nous ne laijfons pat de con-
notftre ce qu'ils defignent,.                                                         5 8
Comment le rapport des 2 yeux firt aufiy afnire voir la di/fance. y 8
Comment onpeut voir la diftance aucc vn ceil fiultn luy faifant changer
de place.                                                                                  yj>
Comment la diftinflion ou confiifion de lafioure, & la debilite oh lafirce
de la lumiere firt auffy a voir la diftance.                              60,6z
J>hie la connoijfance qu'on a eue auparauant des obiets qu'on regardefirt
a mieux connoiftre leur diftance.                                                60
Comment lajituation de ces obiets j firt aufiy.                                  6z
Comment on voit la grandeur de chafque obiet.                               6z
Comment on voit fit figure.                                                            6z
'Tourquoy fouuent les frenetiques, ouceuxqui dorment, penfittt voirce
qu'ils ne voyent point.                                                              (, j
Tourquey on voit quelquefils les obiets doubles.                                6 5
Comment I'attouchement fait aujfy quelquefils iuger qu'vn obiet fiit
double,                                                                                    64,
Tourquoy ceux qui ont la iaumfie} oubien qui regardent au trauers d'vn
verre iaune,iugent que tout ce qu'ils voyent en a la conleur.         64
JQuelefl le lieu ou on voit I'obiet au trauers d'vn verreplat dont les fit-
perficies ne fint pas paralltles.                                                     64.
Et celuy ou on le voit au trauers d'vn verre concaue.                       64,
£t pourquoy I'obiet paroift alors plus petit qu'il n'eft.                       64
J^uelefl le lieu ou it paroift au trauers d'vn verre conuexe,Et pourquoy
il y paroift quelquefils plus grand, & plus ejloigne,qu*d n'eH; €t
quelquefils plus petit & plus proche, & auec cela renuerfe.           64,
JShseleft le lieu des images qu'on voit dans les miroirs , tant plats, que
conuexes ,ou concaues: £t pourquoy ellesy paroijfent droites, ou ren~
per fees; & plus.grandes, ou plus petites; & plus proches,ou plus eftob-
gnics que nefint les obiets,                                                        64,
Four-
-ocr page 500-
De La Dioptriqjie.
Pourquoy nous nous trompons ayfiment en iugeant de la diftance. 66
Comment on peut prouuer que nous n'auons point couftume d'imaginer
de diftance plus grande que de i o o ou 2 oo pieds.                         6 6
Pourquoy le filed & la lunefimblent plus grans eftant procbes de tHo~
rifin, qu'en eflant efloignea.                                                        <>7
J!>)ue la grandeur apparente des obiets ne doit point fi mefitrer par cclle de
t'angle de la vifion.                                                                              6j
Tourquoy les obiets blancs & lumineuxparoijfent plusproches & plus
grans qutls ne put.                                                                   67
Tourquoy tous les corsfinpetis, bufirt efloigne^,paroifent ronds. 6 8
(fommcnt Je fint les efloignemens dans les tableaux de Terfpetliue. 69
Difcours Septiefme                 *
DES MOYENSDE PERFECTION-
NER LA VISION.
QV'iln'y a que quatre cbofes qui fint requifis pour rendre la vifion
touteparfhiie.
                                                             70,71
Qomment la Nature a pourvu a la premiere de ces cbofes, & ce qui refte
al'art ay adioufter.
                                                             72,7$
JQuelle difference ily a entre les yeux des ieunes gens & ceux des vieil~
lars.
                                                                                        7$
fimment ilfant pouruoir a ce que la ^Nature a amis auxyeux de ceux
qui ont la veuecourte: Et comment, a ce qu'elle a *n*f* aux yeux des
vieillars.
                                                                                 73
jQu'entreplufieurs verres quipeuuentfiruir a cet effeEl ilfkut cboijir les
plus ayfij'a tailler : Et auec cela ceux qui fint le mieux que Us
rayons qui vienent de diuerspoins fimbknt venir d'autant a'autres di-
uerspoins.
                                                                               74
Jgu'iln'esipas befi'm de choiftrencecy autrement qu'a peupres>& pour-
quoy.
                                                                                      74
Jghte la grandeur des images ne depend que de la diftance des obiets, du-
llest oufecroyfint les rayons qui entreat dans i'ceil, &deteur refra-
ction.
                                                                                      7jr
Jjhte la refra&ion n'eftpas icyfirt confiderabk; Ny la diftance des obiets
accefftbles: Et comment on doitfitfre lorfqu'tls fint in:.cceffibles.
7 7
En quoy conftfte I'muention des lunetes a puce compofees dvn ftul
G g g 3                             verrcy
-ocr page 501-
Table.
verre, & quel eft leur effett.                                             77,7%
Comment ou pent augmenter les images en faifant que les rayons (e
croyfcnt fin loin de i'asil, par le moyen d'vn tuyau flein a can.
79
Que plus ce tuyau efl long, pluil auqmente I'tmage, Etqu*ilfait It
mefme que ft la Kfature auoitfa.t I'asil, d'autant plus long.
            8 o
Que la prunelle de i'aeil nut!}, au lieu de (eruiry lorfqu'on fe fert d'vn tel
tuyau.
                                                                                      80
Que ny Us refraElions du verre qui contient I'eau dans ce tuyau, ny cel-
les des peaux qui enueloptnt les humeurs de I'oeil
, ne fint considera-
bles.
                    -;                                                                   80
£omment oupeut fhire le mefme par le moyen d'vn tuyau fepare del'oeil,
que par vn qui luy es~l ioint,
                                                       8 1
Enquoy conffteI'inuention deslunetes d'approche.                     82.83
Comment"on peut empefcher que la firce des rayons qui entrent dans
i'asil ne fiit trap grande.
                                                       8$,86
Comment on la peut augmenter, lorfquelle eft trop foible,& que les ob-
iets font accejfibles.
                                                                    8 J
Et Comment, lorfqu'tls font inacceffibles & qu'onf fert de lunetes d'ap-
proche.
                                                                                    84
De combien ou peut faire touuerture de ces lunetes plus grande que n'eji
la prunelle. Et pourquoy on la doit faire plus gfande.
              8 4., 8 f
Que pour les obiets accejfibles on n'a point befiin d'augmenter ainfi I'ou-
uerture du tuyau.
                                                                     86
Qtepour diminuer la force des rayons, lorfquon fe fert de lunetes , il
vaut mieux eftrecir leur ouuerture, que la couurir d'vn verre co-
lore.
                                                                                        8<J
■Que pour Peftrecir, il vaut mieux couurir les extremitez. da verre par
dehors, que par dedans.
                                                             8 6
tyi quoy il est vtile de voir plujieurs obiets en mefme terns; Et ce qu'on
doit fhire pour r'en auoirpas de befiin.
                                       8 7
Qu'on peut acquerir par exercice lafhctlite de voir Us obiets proches ou
ejloigne7.
                                                                                8 8
D'oavientqueles Gymnofopbifles ontpu rcgarder U filtil [ins gafter
leurveue,
                                                                                88
Difeoun
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De LA Dioptriqjje.
-
Difcours Huitiefme
DES FIGURES QVEDOINENT AVOIR
lescorstranfparenspourdetourner les rayons par
refra&ion, entoutcs lcs facons qui
feruent a la vcue.
QVelle efl U Nature de lEllipfe & comment on U doit defcrire.
80,90
1>emonflration de la propriete de I'Ellipfe touchant les refratlions. p j
Comment fans employer- d'autres lignes que des cercles on des Sllipfes
on pent faire que Us rayons paralleles s'affemblent en vn point, ou
que ceux qui vienent d'vn point fe rendent paralleled.
               9 4>9 ?
Comment on peut faire que les rayons paralleles d'vn cofte du verre,
foient efcartez, de I'autre comme s'ils venoient tons d'vn mefme
pointi
                                                                                      p6
Comment onpeut faire qu'eflans paralleles ties deux cofles , Us foient re-
ferred en vn moindre efface de bvn,que de I'autre.
                        p 7
Comment onpeut faire le mefme , en faifant autre c da que les rayons
foient renuerfi^.
                                                                       p%
Comment on peut faire que tous les rayons qui vienent d'vn point s'af-
femblem en vn autre point.
                                                        9 8
Et que tout ceux qui vienent d'vn point s'efcartent comme s'ils venoient
d'vn autre point.
                                                                      99
El que tous, ceux qui font efcartez, comme s'ils tendoient vers vn mefme
point , s'efcartent derechef comme s'ils venoient d'vn mefme
points
                                                                                     pp
La nature de I'Hyperbole , & la ftcon de la decrire. 100,1 o 1,1 o z
Demonflration de la propriete de I'Hyperbole touchant les refra-
ctions,
                                                                                   104
Comment fins employer que des Hyperboles ejr deslignes droites on peut
faire des verres qui changent les rayons, en tomes les mefmes facons,
que ceux qui font compofez, dEllip(es & de cercles. 1
06,107.108
Jgue bienque ily ait plufteurs autres figures qui puijfent caufer les mef-
meseffets, iln'y en a point de plus propres pour les lunetes que les pre-
cedentes.
                                                               .                 j 1 o
@hie
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1 ABLE.
Jjhse celles qui nefont compofees que d'Byberboles & de lignes droites
font les plus ay fees a tracer.
                                                       no
£hte quelque figure qn'aye leverre il ne petit frire exatlemeivt, que
les rayons venans de diners poins s'ajfemblent en autant d'autres
diuers poins.
                                                                           in
Jgjte cchx qui font compofiz. d'Hyperboles font les meilleurs de tons a
cet ejfctl.
                                                                                11 j
J5>ue les rayons qui vienent de diners poins s'e'cartent plus apres
auoir trauerfe vn verre Hyperbolique, qu apres en auoir trauerfe vn
Elliptique.
                             \ ■                               .114,
Jgnc d'autant que FEUiptique eft plus ejpais, d'autant Us s'ecarterttu
moins en la trauerfa/itj.
                                                          He
Que tan t ejpais qu'ilpuiffe eflre, il ne pent rendre I'image que peignent
ces rayons que d'vn quart ou d'vn tiers plus petite, que ne frit I'Hy
perbolique.
                                                                              n;
^ue cete ine'galite eft d'autant plus grande que la refraction du verre eft
plus grande.
                                                                           1 r c
J>ht'on ne pent donner au verre aucune figure qui rende cete image plus
grande, que celle de I'Hyberbole; ny qui la rende plus petite que celle
del'Ellipfi.
                                        -                                   11 f
Comment ilfrnt entendre , que les rayons venans de diners poins fecroi-
fent fur la premiere frperficie, qui a la firce de faire qn'ils (erajfem-
blent en autant d'autres diners poins.
                                        i\e
£>)ue les verres Elliptiques ont plus de force pour bmfler que les Hyper-
bolizes.
                                                                                117
Comment il frut tflefnrer la force des miroirs , ou verres bru-
flans.
                                                                                     117
JS{n'on n'enpeutfrire ancun quibrufle en ligne droiteet I'infihi. 117
Jgue les plus petits verres ou miroirs affemblent autant de rayons pour
brufler,enl'efpace on iLsles affemblent; que fint les plus grands qui
ont des figures femblables a ces plus petit s, en vn efpace pared.
118
Ghte ces plus grans n'ont autre auantage que de les ajfembler en vn efpa-
ce plus grand & plus efloigne. Etainfiquon pent frire des miroirs
ou verres tres petits qui ne laifjent pas de brufler anec beauccup de
force.
                                                                                     118
Jgu'vn miroir ardent dont le diametre n'excedepoint la loopartie de la
diftance a laquelle il affemble les rayons, ne pent faire quits bruflsnt ou
efcbauffent dauantage que cenx qui vienent direUemet du filet/.
118
gue
-ocr page 504-
De LA Dioptriqje.
Jbue les verres El/iptiques pcuuent receuoir plus de rayons d'vn mef-
nte point pom let rendre apresparalleles, que ceux daucune autre fi-
gure.
                                                                                     %ip
Jgue foment les verres Hyperboliques fontprefl\rables aux Elliptiques, a
cattfe qu'onpeut fiiire auee vn (eul ce aquoy il en faudroit employer
deux.
                                                                                     120
Difcours Neufiefme
DE LA DESCRIPTION DES
LUNETTES.
QVelies qualite"^ fint confiderabks pom choifir la matiere des lit'
netes.
                                                                             121
Tourquoy ilfi fkit quafitoufiours quelque reflexion en la fitperficie des
cors tranfparens.                                                                     121
Tourquoy cete reflexion eft pirn forte far le crijlal que Jar le verre. 122
Explication des lunetes quifruent a ceux qui ont la veue courte. 12$
Explication de celles qui firuent a ceux qui ne penitent voir que de
loin.                                                                                    .125
Tourquoy onpeutfitppofir les rayons qui vienent d'vn point ajfez. efloi*
gne,comme par alleles.                                                            124.
Tourquoy la figure des lunetes des vieillars n"a pas be fin d'eftrefirt ex-
atle.                                                                                      124
Comment il fhutfaire les lunetes a puce attec vnfiul verre.              124
JQuelles doiuent ejlre les lunetes d'approche pour eftre parfaites. 126
Et quelles dujfy les lunetes a puce pour ejlre parfaites.                     13 *
6)ue pourpjeruir de ces lunetes Heft mieux de f bander vn ceil, que de
le firmer par I'ayde des mufcles.                                               * 3 S
Jgu'ilfiroit bonaujfy d'auoir auparauant attendri fa veue en ft tenant en
lieu fin obfcur.                                                                      13 J
Et attjfy d'auoir ^imagination difpofee comme pour regarder des chofis
fort eloigners t*7" obfcures.                                                        13?
D'ou vient qu'on a mains rencontre ey deuant a bien faire les lunetes
d'approche que les autres.                                                        »3 6
Hhh             Difcours
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Table.
Difcours Dixiefme
DE LA FACON DE TAILLER
LES VERRES.
COmment il faut trouHer la grandeur des refractions An verre dont
on veutfifiruir.
                                                        137
Comment on trouueks poins brujlans, & lefimmet de I'Hyperbole,dont
le verre duquel on contioifl les refractions doit auoir la figure.
13 p
Comment on pent augmenter ou diminuer la dijlance de ces poins. 13 p
Qomment on peut defcrire cete Hyperbole auec vne chorde.             140
Comment on la peut defcrire par I'inuention de plufieurs poins. 140
Comment on trouue le Cone dans lequel la mefme Hyperbole peut ejlre
couppei par vn plan par allele a t'aiffieu.
                                 141
Comment on la peut defcrire £vn put trait par le moyen d'vne ma-
chine.
                                                                            14a
Comment on peut faire vne autre machine qui donne la figure de cete
Hyperbole a tout ce qui en peut auoir befiin pour tailkr les verres. Et
comment on s'en doit firuir-.
                                                144
Ce qu'ilfirut ebfiruer en particulier pour les verres concaues,& tnparti-
culier pour les conuexes.
                                                     1 j o
L'ordre qu'on doit tenirpour s'exercer a tailler ces verres.              151
Jgue les verres conuexes quifiruent aux plm tongues lunetes ont befoitu
ttefire taillez, plus exatlement que les autres.
                          1 j 1
Quelle eft la principale vtilite des lunetes a puce.                         1 c 2
Comment on peut faire que les centres des deux [uperfcies d'vn mefme
verre fi rapportent.
                                                           j j 3
TABLE
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Des Meteor.es.
TABLE
'Des principales difficult ez,*
Qui font expliqu^es aux
" M E T E O R E S.
Difcours Tremier.
DE LA NATURE DES CORS
TERRESTRES.
U E lean, la terre, fair, & tons les autres tels cars font
compofez, de plufieurs parties.                                 i f J>
J>h*Uy a des pores en torn ces cors qui font remplti d*vne
matierefirtfubtile.                                              IJ9
JQjte lesparties de I'em fint tongues, vnies , & glijfantes.
159,(^-174.
JQue celles de la pirn part des autres cors font comme des branches d'ar-
bres, & ont diuerfes figures irregulieres,                                    1 Jp
JQue ces branches eflant iointes on entrelacees component des con
durs.                                                                                     119
JQue lorfqu'elles ne font point ainfi entrelacees, nj fi grojfes qu'elles ne
puijfent eftre agiteespar la matiere fubtile, elles component des httiles
ou del'air.                                                                             16o
J>hte cete matiere fubtile ne cejfe iamais de fi mouuoir,                   160
Quelle je meut ordinairementplus vifiecontre la terre que vers les nues,
vers I'Equateur que vers les poles, hfte que I'hyuer, & le iour que U
nuit.                                                                                      160
jQuelleefl compose de parties in'egaks.                                         160
^ue les plus petites defis parties ont le mains de firce pour mouuoir les
autres cors.                                                                             160
ghie les mains petites (e treuuent le plus aux lieux ok tile est le pint
Agitee,                                                                                    ' ^ '
• H h h 1                           ^f*e
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Table.
Jghte ces mains petites ne peuuent puffer ah trauers deplufieurs tors: Et
que cela rendcts carsft aids.
                                                      x6t
fe qu'on pent c once uvir pour le chaud, &pour lefioid.                    \6z
Comment les coys dms penitent eft re efchauftz..                               16 2
1)'oh vient que I'eau eft communement liquide> & comment le ftoid /<*
rend dure.
                                                                               i6z
Comment la glace conferue touftottYS faftoideuY, mefme en efte: Et pouY-
quoy elk ne s'amohjl pas pen a peu comme la cire.
                      165
Jjhtelles font les parties des ftls.                                        16$, dr 17$
Jjhtellcsfont les parties des efprits ou eaux de vie.                           j 63
Pourquoy I'eau s'enfte en ft gelantL,,                                               163
Pourquoy tile s'enfte auffy en s'echauftmt"                                     164.
Pomquoy I'eau bouilliefigele plutoft que I'autYe.                            164
J^ue les plus petites paYtiesdes cars, ne doiuent point tflft conceues com-
me des atomes, mats comme celles qu'on voit al'osil, excepte qu'elles
font incompaYablement plus petites. Et qu'tl n'efi point be join de Yien
vcietcY de la Philofophie ordinaire pour cntcndYe ce qui eft en ce tYaitL.
164,
Difcours Second
DES VAPEVRS ET DES
EXHALAISONS.
COmment lefoleiljhit monter en I'air pluftettrs des petites parties des
coys terYeflYes.
                                                                  j 6;
J3)uelles font les vapeurs.                                                               ; 6$
Gfuelles font les exhalaifons.                                                         16 6
JSu'il monte en I'air beaucoup mains d'exhalaifons que de vxpeurs. 166
Comment les plusgrojfieres exhalaifons foYtent des coys terreftres. 166
Pourquoy I'eau eft ant conuertie en vapeuY occupe incompaYablement plus
defpacequauparauant.                                                           j(,j
Comment les mefmes vapeuYS penitent eflre plus ou mains pYeJfees. 16p
D'ou vient qu'on fent qttelquefou en efte vne cbaleur plus eftoitjfante que
de couftume.                                                                           t
Comment les vapeuYS font plus at* mains chaudes, on froides.            7 6p
PauYquoy fhaleine ft fent plus chaude quand on fiujfle ay ant la bouche
jvYt ouuerte, que ft on l'a prefque firme'e.                                    j 7;
Pour—
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Des Mete ores.
Tourquoy les Vens impetmux font ton fours froids,                         171
(fomment les vapeurs font plus ou mains tranfparentes.                     171
Tourquoy noflre haleine (e voit mieux L'hyuer que I'efle.            - 171
Jj>ue foment ily adans fair le pirn dt vapeurs , lorfqu'on les y voit le
moins,                                                                                    172
Comment les mefmes vapeurs font plus ou moins humidts ou (etches'. Et
comment vne mefmefipeut dire, en diuersfins,plus fikhe,& plus hn~
mide qu'vne autre.                                                                   172
Quelle s font les diuerfes natures des Exhalaifons.                            J 7"
Comment ellesp dsmeflent &feparent des vapeurs.                          17?
Difcours Troijiefme
DV SEL.
QVelle esl la nature de Ceau [alee: Et que les parties de Veaufont teU
les qu'tlaefle dit.
                                                             174
Tourquoy les cars mouillez. d'eau font plus #yfe^ afeicher, que ceux qui
font mouillex. d'huile.
                                                               174.
Tourquoy le fel a vn gouftjt different de celuy de I'eau donee.            17S
Tourquoy les chairs fe conferuent ejiantfalees.                               7 js
Tourquoy-lefelles durcift.                                                             17s
Tourquoy I'eau douce les corrompt.                                                17s
Tourquoy I'eau (alee eft plus pefante que I'eau douce.                        17s
Tourquoy neanmoinsle fel nefefirme que fur la fuperficiede I'eau de la
mer.
                                                                                      176
®>«e les parties du fel' commun font droites & efgalcment groffes par les
deux bouts.
                                                                            176
Comment elles s'arrengent eft ant me flees auec celles de I'eau douce. 176
Jgue les parties de i'eau faUe fe meuuent plus vijle que celles de I'eau
douce.
                                                                                    176
Tourquoy lefeleflayfemcnt fondu par I'humidite. Et pourquoy en cer-
taine quantite d'eau il ne sen fond que iufques a certaine quatite. 177
Tourquoy lean de la met esl plus tranffarente que celle des riuieres.
177
Tourquoy elle caufe des refratlions vn pen plus grandes:                  177
Tourquoy elle nefe gele pasji ayfemeriti.                                        / 77
Comment on pent faire geler de I'eau en efie auec dufe!,&pourquoy. 177
H hh 3                           Tour-
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1 ABLE.
Tottrquoj lepi eft firt fixe & Teau douce fort volatile.                 178
Tourquoy I'eau de la met s'adoucift en paffant aft trauers dtt (able. 179
Tourquoy I'eau da fintaines cjr des riuieres e(l douce.
                     179
Tourquoy les riuieres entrant dans la mer ne I'empefchent point d'eftre fa-
lees nj ne la r en dent plus grande.
                                               17 9
Tourquoy lamer eft plus (alee vers H Equateut que vers les poles. 180
D'ori vient que ieau de lamer eft moms propre a efteindre les embrap-
mens que celiedesnuieres.
180
T)'ou vient qit'elle ejlincelle la nuit eft ant agitee. 18 o
Tourquoy ny lafaumure, ny I'eau de mer qui eft trouble & corrompuet
n'eftincellent point en cete forte.
18l
Tourquoy I'eau de la mer eftmcelleplus quand il (hit chaud, quequand
ilfhit froid.
                                                                            181
Tourquoy tomes(es vagues, ny toutes fesgouttes , n'eflincellwt pas efga-
lement.
                                                                                   181
Tourquoy onretienl I'eau en des fifes an bord de la mer, pour (hire le
fel.
                                                                                         18 c
Tourquoy ilne s'enfhit qu'en terns chaud & fee,
                             181
Tourquoy la(uperficie des liqueurs eft firt vnie. 18 z
Tourquoy la (uperficie de I'eau esl: plus malayfee a diuipr que le de-
dans.
18 2.
Comment les parties duftl vienent floter au dejfus de I'eau.
182,^183
Tourquoy la baz,e de chafquegrain defil eft quarree. 184
Tourquoy cete baz.e quarree paroift a Coeil touteplate, & nean/aoins eft
vn pen cottrbee.
184
Comment le re fie de chafque grain de felp baftit fur cete bane. 18 y
Tourquoy cesgrains fint creux au milieu. 18 y
Tourquoy leur fuperieme partie eft plus large que lent ba^e. 18 f
^ue e'eft qui peut rendre leur baz,e plus grande ou plus petite,
18 5"
Tourquoy le (el vaquelquefiis au finds de i'eau fans fi firmer en grains
au deft us,
18 6
Ce qui, (hit que le tallu des 4 coftes de chafque grain eft plus ou mains
grand:Etpourquoy ilsfinr quelquefiis en efchelons.
j86
Tourquoy les querres de cesquatre coftes ne font ny firt aygu'es, ny firt
vnies: Et pourquoy les grains depls'y (indent plus quailkurs.
1 Stf
Tourquoy la concauite de chafque grain efiplutoft ronde que quarree. 186
Tourquoy ces grains ejlant entiers petillent dans lefiu; Et nepetillent point
eft ant pile ^.
187
D'oti
-ocr page 510-
Des Meteore s.
D'ou vient I'odeftr dupl blanc, & la couleur dupl noir.                 % 8 ?
'Pourquoy lepl eft friable.                                                           l g 7
'Pourquoy il eft blanc, ou transparent.                                           187
Pourquoy ilpfindplui aypment eft ant entier, qu* eft ant puluerife & fei-
che.                                                                                        ,87
D'ou vient la grande difference qui e(I entreps parties & celles de I'eaa
douce.                                                                                    x 8 8
Pourquoy les vnes & les autrespntrondes.                                     188
Comment pfdit I'huyle de pi.                                                       18 8
Pourquoy cete huyle a vn gouft aigre qui differefirt de celny du pi. \ 8 ?
Difcours Quatriefme
DES VENS.
QVec eftquelevent,                                                             lgp
Comment Up fait en vne isdSolipile.                                       19 a
Comment Up fait en I'air: Et en quoy il differe de celuy d*me tAioli-
pile.                                                                                      191
JQue cepnt principalement les vapeurs qui caupnt les vens j Mali non
pas elks pules qui les compofent.                                               19 2
'Pourquoy la caufe des vens doit eftre attribute aux vapeurs, er non pat
aux exhalaifins,                                                                     19 5
Tourquoy les vens orient aux pnt plus fees que les occidentaux.         1 9 j
Pourquoy c eft principalement le matin quefoufflent les vens d* orient t
& lefiir quefoufflent ceux a Occident.                                      194
®hte ce vent d'orient eftplus fort, que celuy £ Occident qui vient de la
mefmecaup.                                                                          194
Pourquoy le vent de T^ordfiuffle plm le iour que la nuit.                19 5:
Pourquoy ilfouffteplutosl dehaut en bos que de bos en baut.           195^
Pourquoy il'eft ordinairement plus violent que les auires."              197
Pourqnoy il eft fin fioid, & firtfec.                                              19$
Pourquoy le vent de midy regne plm la nuit que le iour.                   ip 6
Pourquoy il vient de bos en haut.                                                  19 6
Pourquoy Heft ordinairement plus lent, &plusfiible que les autres. 197
Pourquoy il es~l chaud & humide.
                                                 19 7
Pourquoy vers le mois de Mars les vens pnt plus fees qu'en aucune autre
fiifin.                                                                                    197
Pour'
-ocr page 511-
Table.
Pourquoy les cbangemens d'air font attjfy alors plus fubits & pltesfrc
quens.
                                                                                     198
Que Is font les vens que les ancient nommoient les Omit hies.            ip 8
JiihteIs font les Etejies.                                                                   19 8
Comment la difference qui eft entre la nter & la terre contribue a la pro-
duction des vens.
                                                                      ipp
Pourquoy fouuent aux bords de la mcr le vent vient le tour dtt cofte de
I'eau, & la nuit du cofte de la terre
.
                                           19 9
Pourquoy les Ardans conduifent les voyafgeurs vers les eaux.           19 $>
Pourquoy ks vens changent fouuent aux coftes de la mer auec fesflut &
re flu*.
                                                                                     200
Pourquoy les mefmestempeftes ont couftume d'eftre plus violentesfir mer
que fir terre,
                              .                                           200
Comment vn mefme vent pent eftre fee en vnpa'ts , & bumide en I'au-
tre.
                                                             «                         200
Pojirquoy les vens de midy font fees en Egipte^ Et pourquoy il ny phut
que raremeivL,.
                                                                       200
Comment & combitn lesaftres contribuent ala production des %J[€e-
teores.
                                                                                    200
(fommenty contribue auffy la diuerftte qui eft entre les parties de la
terre.
                                                                                      201
D'oii vient I'irregulariti & la multitude des yens particuliers & com-
bien ilefl difficile de les predire.
                                                201
Que les vens generaux font plus aife^a predire : Et pourquoy il y en a
moins d'irreguliers au milieu desgrandes tners que vers la terre.
2 o 1
Que la plus part des cbangemens de I'air dependent des vens.           2 0 2
Comment I'air ne laiffepas d'eftre quelquefois jroid oufec, lorfqu'il fiuffle
vn vent qui eft eh and ou humide.                                     .' 202
Que le cours que prenent les vapeurs dans la terre contribu'e auffy aux
cbangemens de fair,
                                                                2 c z
Difcours Cinquiefme
DES NUES.
QVelle difference ily a entre les nues, les vapeurs, & les brouillas, 203
Que les nfta nefont compofeesque degouttesd'eau, on de parcelles
de glace.
                                                                                  203
Pourquoy
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Des Meteores.
Pourquoy les nuts ne font pat tranlparentes,                                   **j
Comment let vapeurs fe changtnt en gouttes deatt dans lei wet- 2 04,
'Pourquoy ces goftttes font exatlement rondes.
                           2 04t20f
j|J*« c'efi qui rend cesgouttes groffes on petites.                              206
Comment let vapeurs fe changent en parallel deglaoe dans let nues. 206,
If oh vient que ces pantiles de glace (out quelquefits rondes & tranffa-
rentes, quelquefiis tongues & deliees, & quelquefois rondes & blatt.-
ches.
                                                                                       2oy
D''ou vient que ces dernieres font couuertes de petitspoils: Et que c'efi
qui let rend plus grojfes ou plus petites, & cespoils plus forts & plus
courts, ou plus deliez, &plus longs,
                                           20?
Quelefroid feulne fufft p,u pour couuertir les vapeurs en eau ou en.
dace.
                                                                                     20$
Jguelles font hscanfts qui affemblent les vapeurs en nues.                208
J^uelles font les eaufis qui les afkmbleM en IrmtiUas.                      208
D'ou vient qu ily a plus de brouillfis au printems qu'atix autres faifotisi
Etplus aux lienx marefcageux oh maritimes
} que lout des eaux oti
loin de la terre.
                                                                       208
^ue les plus grans brouillas, ou les plus grandes nues, fefbnt par Voppo-
fition de deux ouplufteurs vens.
                                                20?
Jghte les gouttes d'eau ou parccllcs de glace qui compopnt les brouilUf ne
peuuent eflre que tres petites,
                                                    2 op
^hSilnepeut y auoir devent ou font les brouillas , qu'il ne les diffipe
promptemeut..
                                                                       %of
Ghtily afoHuent plufeurs nues I'vne fur P autre: Et plus aux pais de
montaignes qu'ailleurs.
                                                            2 op
Shieles ha'utes nues ne font ordinairement compofees que de parcelles de
glace.
                                                                         210, & 219
JShtelesvensprejfent&poltfSentlesfiiperficies des nues , & les rendent
plates.
                                                                                   210
Jg>ue ces fuperfcies eft ant plates,les petits pelotons de glace qui les com-
ponent s'y arrentent en telle forte que chafcun en a fix autres qui ten-
uironnentj.
                                                                             211
Comment deux vens prene'nt leur corns I'm plus haut que I'autre, & po-
llffent les fuperfcies du deffous & du defus des nues. .
              212
^ue les fuperfcies du circuit des nues ne fe poliffent point pour ce\a , &
font ordinairementfirt irregulieres,
                                            213
III                              Corn-
-ocr page 513-
Table.
Comment il s"" affemble fotiuent an deffom desnms plufteurt feuittes oh
fitperficies compofe'es deparcelksde glace , chafcune defquelles eften-
uironnie dejix autres,                                                                213
Jghte fiuuent cts ftmlles, ou fuperficies, fe meuutnt pparement I'vne de
I''autre.                                                                                     2 14
gjfil pcut y amir des nu'es qui tie jo lent compofees que de telles fiuil-
les.                                                                                           Z14
Jgste les gouttes d'eau peuuent auflfy s'arrenger dans ies nu'es, en mefme
fncon que les pareelles de glace.                                                  2 tj.
Comment quelquefiis le circuit des plus grandes fines s'arondift , & mef-
me pent fe ctaurir d'vne fuperftcie de glace affez. efpaijfe , fins que (a
pefanteur lesface tomber.                                              2if,&28i
Difcours Sixiefme
DE LA NEIGE, DE LA PLUIE,ET
DE LA GRESLE.
COmment les nu'es fefouftienent en i'air.                                   216
Qomment la chaleur, quia cottftume de rarefier les autres cors con-
den fe les nu'es.
                                                                          117
Qommentles parcelles de g{ace qui compefent les nubs, s'entaffent en di-
ners foccons.
                                                                            217
(fomment cesfloccons fe gtoffffent & tombent en neige,ou en pixie, ou en
grefle-, 218
'Pourquoy lagrefleeftquelquefiis toute tranfparente &touteronde- 21
8
Oufeulement vn pest plus plate d,vn cofte que d'autrc. zi8,& 223
Comment fe fiit la phts groffe grefle qui eft d'ordinaire eormte& irrevu-
liera
                                                                                       218
'Tomquoj onfetit quelquefiis plus de chaleur qu'a t'ordinaire dans les
maifons.
                                                                                  219
Tostrquoy la plus groffe grefle eftant tranfparente en fa fuperftcie, eft tou-
' te blanche & compofee de neige an dedans. 219
rD'ou vient que cete groffe grefle ne tombe gueres que fefte, 2.19
Comment fefait la grefle qui eft blanche comme duflucre. 219
tourquoy les grains font quelquefiis affez. ronds & plus durs en leurs fti-
perficies que vers leurs centres, 2.10
- Tourquoy Us font quelquefiis poimtts & ont la figure d'vne pjramide on
Jtvn fain defucre, 2.20
.'..,■,                             / Com-
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Des Mete ores.
Comment Us petites parties de la neige prenent la figure de roues on eft at-
les qui out chafcune fix pointes%                                                  zzt
D'oh vient qu'il tombe at*ffy quelquefbis de petits grains dc^grefle tons
tranJfarens,qui ont ctutonr de foy fix point es toutes blanches. 2,23
D'ou vient qu'il tombe auffy depetites lames tranfrarentes , qui font he-
xagones.                                                                                  ZZ$
Et d'autres qui [emblem des rofes,ou des roues d'horologe qui entfeule-
mem fix dens arondies en demi-cercle.                                         22f
Pourquoy quelques vnes de ces roues ont vn petit point bland ah milieu.
D'ou vient quelles (ant quelquefii* iointes deux a deux par vn aiffiea on
i/ne petite colomnede glace: Et d'ou vient que I'vne de celles qui font
ainfi iointes efl quelquefbis plus grande que I'autre.
                      2 2 <P
Tourquoy il tombe quelquefbis depetites eftoiles de glace qui ont dou^e
rayons.
                                                                            228,239
Pourquoy Hen tombe auffy,bienque fort rarement,qui en onthuit. 230
Pourqnoy les vnes de ces eftoilesfont blanches,& les autres tranfparentes$
Et les rayons des vnes font courts efr ronds en forme dedens; les autres
longs & pointus, ejirfouuent diuifez. enplufteurs branches
, qui repre-
fentent des plumes,ott des feuilles defougere,ou desfleurs de lys. 231
Comment ces eft oiles de glace defcendcnt des nues.                           23 2
Pourquoy lorfqu'elles tombent en terns calme elks ont couftume d'eftre
fuiuies de plus de neige
, mats que ce n eft pas k mefme quand ilfhit
•vent.
                                                                    _,               zi£
^fomment la pluie defcend des nues: Et que c'eft q ui rendfes gouttes grof-
fesoumenues.
                                                                         233
'D'oit vient qu'il commence quelquefois apkuuoir auant mefme que I'air
foit coihiert de nues.
                                                                 2.34.
Comment les brouillas tombent en roz.ee ougelet blanche. Et que c'eft que
le Serein.
                                                                                234.
D'ou vienent la manne,& les autres telsfucs: Et pourquoy quelques vns
■•s'attachent a certains carsplutoft qu'a d'autres,
                          23s
Pourquoy ft les brouilUrs montentle matin, & que laroz.ee ne tombe
point, c'eft ftgne de pluie.
                         \                                 23s
Pourquoy ft lefoleil luit an matin lorfquily a des nues en I'air ,c'eft auffy
figne de pluie.
                                               "                          2Z$
Pourquoy tous lesftgnes de pluie font incertains..                             236
Iii 2              Difcours
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Table.
Difcours Septiefme
DES TEMPESTES, DE LA FOVDRE,
& de tous les autres feux qui s'allu-
ment en l'air.
COmment les nues en s'abaiffant peuuent caupr desvens firt impe-
tUtUX.
                                                                            236
D'oii vient que les firtes pixies font foment preceded par vn telvent. 237
Tourquoy Us hirondelles volentfirt bas auant la plate.
                    237
D'oitvientquonvoitquelquefintournoyer Us cendres ou Us fiftus au
coindufiu dans les chemir.ee s.                                                  237
Comment fe fint Us tempefies nommees des traaades.                      23 7
Comment s'engendrent ces jinx qui s'attachent auxmats des n Attires fur
la fin des grandes tempefles.                                                      239
Tourquoy Us anciens voyant deux de ces feux Us prenoient pour vn bon
augure; Et en voy ant vn, ou troii, pour vn manuals.                  23?
Tourquoy on en volt maintentnt quelquefiis iufques a 4 ou / fur vn
mefme vaiffeau,                                                                     240
gu'elle eft la caufe du tonnerre.                                                    240
Tourquoy il tonne plus rarement I'hyner que fefle.                          24.1
Tourquoyt lorfqa'apres vn vent feptentrional on pnt vne ehaleur moite
& efioufnnte, e'eftfgne de tonnerre.                                          241
Tourquoy U bruit du tonnerre esl firt grand & d'ou vienent toutes les
differences qu'on j remarque.                                                    241
Enquoy confiflent Us differences desefclurs des tourbillons &,de lafiu-
dre: Et comment s'engendrent les efilairs.                                  242
Tourquoy ilefclaire quelqnefiis fans qu'tl tonne, ny qu'on voyede nuesen
Pair; Etpourquoy il tonne quelquefiis fans qu'il efc/aire,             242.
Comment s-engmdrent les tourbillons.                                           2^2
Comment s'engendre la fiudre.                                                     243
D'oii vient que la foudre peut brufler les habits (ins nuire au coys, ou au
contrairefindre Cefpeefinsgafier U fourreat, & chops femblables.
243'
Comment la matierede la fiudre p peut conuertir envnepierre. 2\4
'Tourquoy elletombe plutofi fur les pointes des tours ou des rochers que fur
les lieux b.ts.                                                                           244
Tour'
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Des Meteores.
^Poutquoy chafque coup de tonnerre eftfiuuent fuiui d'vne ondee de plain
Et pourquoy le tonnerre (e paffe lorfque cete pluie vient fort abon-
dante.
                                                                                     24$
Tomquoy le bruit des cloches oh des canons diminue la force du ton-
nerre.
                                                                                      24s
Comment s'engendrent les efloiks on bonles de fin qui tombent quelquefiis
du del, fans tonnerre ny pluie.
                                                    246
Comment il peut quelquefiis pleumir du lait, duping, du fir, des pierres,
ou chef if femblables ■.
                                                                246-
Comment s'engendrent les eftoiles defiu quipmblent trauerprle del; Et
les ardans qui errent proche de laterre; Et les feux qui s'attachent aux
crms des cbeuauxouaux pointes des piques.
                              246
Pourquoy ces fiux ont fin pen de force; Et pourquoy 40 contraire celuy
de lafiudre en a beaucoup,                                                        247
®hte lis fiux qui s'engendrent au has de Pair peuuent durer affez. long
terns; mats que ceux qui s'engendrent plus haut p doiuent efteindre
fortptomptement; Etqueparconpquent,ny lesCometes, nyleschett-
rons quipmblent defiu, ne pnt point de tels fiux.                        24%
Comment on petit voir des lumieres & des mouuemens dans les nues qui
reprepntent des combats, & fiient pris par lepeuple pour des prodi-
ges.                                                                                        248
Comment on peut auffy voir le filed pendant la nuit.            249, & 2Sf
Difcours Huitiefme
DE L'ARCEN-CIEL.
QVe cl tf eft point dans-let vapeurs,ny dans les nues , mais pulemeut
dans lesgouttes de la pluie quepfirme I'arc-en-del-
            250
£omment on peut confiderer ce qui le cauftdans vne fiole de yelre toute
ronde, &pleined'ean,
                                                              2jo
Jj>)ue Finterieur eft caufepar des rayons qui paruienent a I'oeilapres deux
refraftions & vne reflexion; Et fexteneur par des rayons qui n'y par-
uienent quap'es deux refratliom & 2 reflexions, 0 qui le rend plus
foible que I'autre.
                                                                     253
Comment par le moyen d'vnprifme ou triangle de crtflal on voit les mef-
mes couleurs qu'en I'arcenciel.
                                                   254
.J§w# ny la figure des cars tranjparens, ny la reflexion des rayons, ny Li
Iil3                            plura-
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■ i »j!,.mni|ipMiiifJlf ill
T A B L E.
flurahte de leurs reftaBions ne feruentpoint a la prodttB'wn ^eceS
coulettrs.
                                                                                25S
J$uerienUjfertq&'vne reftaBion,& la lumiere, & Tombrt qui Itmite
cete lumiere.
                                                                          250
D'ou vient la diuerfite qui eft entre ces couleurs.                             256
Sn quay conftfte la nature du rouge, cjr celledu iaune, qu'otivoit par le
moyen de ceprifmede criftal-3Et enqu.oy celle du verd & telle du bleu.
259
Comentilfe mejle dtI'incarnat atiec cebleu qui en compofe dti violet.259
Enquoy conftfte la nature des couleurs que font paroiftreles aft^es obiets:
Et qu'tln'y en a point de fkujfes.
                                              2
Comment (ont pro duites edits de farcin-del: Et comment il s'y trouue
de I'ombre qui limit c la lumiere.
                                               2-61
Tourquoy le demi- diamstre de I'arc interieur ne doit point eftreplusgrad
que de42 degree; Ny celuy de I'exterieur pluspetit que de Ji. 262
Tourquoy le premier eft plus Itmite en fa fuperficie exterieure qu-eti lin-
terieurt; Et leficond tout au contraire.
                                     2 62
Comment tout cccy ft demonftre exaBement par le calcul.                2 62
Que I'eau eft ant chaude fareftxBion eft vnpeumoindre,& quelle cauje
I'arc interieur vnpeu plus grand
, & I'exterieur plus petit, que lorf-
quelle eft ftoide.
                                                                      266
Comment on demonftre que la reftaBion de leau a lair eft a peu pres,
comme 1S7 a 250 : Et que le demidiametre de I'arc-en- del ne peut
eftre de 4s degree.
                                                                  2.66
Tourquoy <?eft la partie exterieure del'arc interieur qui eft rouge j Et
I'interieurede I'exterieur.
                                                        266
(fomment ilpeut arriuer quecet arc nefoit pas exaBement rond. 2 67
Comment i I peut paroiftre renuerfe.
                                    '          268
Comment il en peut paroiftre trots I'vn fur I'autre.                           2 69
Comment on peut fhire paroiftre des ftgnes dans le del qui fembknt des
prodiges.
                                                                             -269
Difcours Neufiefme
DE LA COVLEVR DES NVES:
Etdcscercles oucouronnes qu'on voit quelquefois
autourdesaftres.
----------------_---.—.
Ve c'ejl qui (hit paroiflre let nu'e's blanches ou wires.              271
Tourquoy, ny le verre pile , ny la mige , ny les nties vn peu
efpaiffes
Q
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Des Meieores.
efpaiffes ne font tranffarentes.                                                   272
Jguels font prdpremcnt les cars blancs: Et pourquoy i'efcume, le verre pi-
le,la neige, & Us nptes font blanches.
                                           272"
Pourquoy, l*aireftantfortferein,lecielparoiftbleu: Et pourquoy il pa-
roifl blanc quand t'air eft rempli de vapours.
                               272
"Pourquoy lean de la mer paroiji bleue aux lieux ou elle eflfort claire &
fort profonde.
                                                                         2 7$
Pourquoyfouuent hrfque leftleilfe couche oufe lene le ciel paroift row
ge'                             .'■'■'.                                                       *73
Pourquoy le matin cete rotigcux da ciel pre fage des vens oh de la plme->
Et le foir elle pre fage le beautems.                                              27^
Comment ft ftrment les couronnes-autour des aftres.                       274
jQu elles peuuent eflre de plujieurs grandeurs : Et que c'ejl qui les rend
grandes oupet'ttes.                                                                   27$
Pourquoy efiant colorees elles font rouges en dedans, & bleues en dehors.
276
Peurquoy Hen paroifl quelquefois deux I'vne amour de I'autre , Et doni
I'interieure eft la mieux peinte.                                                 276'
Pourquoy elles ne paroiftent pointautourdes aftres qui font fint bos vers
rhoriz.on.                                                                               276
'Pourquoy leurs conleurs ne font pas ft vines que celles de" l'arc-en-ciel: Et
pourquoy elles par oiffent plus fouuent que luy autour de la lune , Et
mefme ft voyent autour des eftoiles.                                          277
Pourquoy d'ordinaire elles nepar oiffentque toutes blanches,              277
Pourquoy elles ne peuuent paroiftre en des gouttes d'eau, ainfi que l'arc->
en-ciel.                                                                                  277
jguelle eft la cauftdes couronnes qu'on voit quelquefois autour des flam-
beaux. ■
                                                                                278
D'ouvient qu'ony voit aujfydegrands rayons qui s'efttndent ca & la
en lignes droites.                                                                     279
Pourquoy ces couronnes font ordinairement rouges en dehors, & bltues
fiu blanches en dedans, au contraire de celles qu'on voit autour des
aftres.                                                                                    279
Pourquoy les refractions de I'ceil ne nous fint point toufoms voir des cou-
leurs,           *                                                                         2So
»
Difcours
-ocr page 519-
T ABLE.
Difcours Demur
DE L'APPARITION DE PLV-
SIEURS SOLEILS.
COmment fe foYment les nues qui font paroiftre plufieurs foleils. 281
JSht'il fe fait comme vn anneal* de glace atitonr de ces tines, dont U
[uperficiceft ajfezpolie.
                                                          282
J^ueceteglace eft ordinairement plus effaijfe vers le cofte dn fileilque
vers les autres.
                                                                       282
Jgue c'eft quila fbutient an haut del'air.                                       28 2
3$te c'eft qui frit paroiftre quelquefiis dans k del vn grandcercle blanc
quinaaucun aftre pour fin centre.
                                            28s
(fommentonpeutvoiriufquesafix fileils dansce cercle blanc: Le pre-
mier■diretlement; les deux finnans par refratlion; & les trois autres
par reflexion.
                                                                         283
'Pourquoy ceuxqu'on voitpar refiaclion ont d'vn cofte leurs borspeins
ds rouge, & de ?autre de bleu.
                                                 z 83
Pourquoy les j autres ne font que blancs, & ont peu d'efclatj.         2 83
D'ou vient qu'otfrien voit quelquefiis que j ; Et quelquefbu que 4jEt
quelquefiis que trots.
                                                              284
Tourquoy lorfquon t'en voit que trois,tineparoifl quelquefiis, att licit
du cercle blanc, qu'vne barre blanche f*i les trauerfe. ■■:
             184
^m le fileil,eftant plus ham ou plus bos que ce cercle blanc, ne laiffe pas
deparoiftie a mefme hauteur.
                                                  28 4
J$j*e cela le peut fkire voir apres i'henre qu'ileff couche : £t auancer ou
reculer de beaucoup L'ombre des horologes.
                                  2 8 s
Comment on peut yoirynfeptiefme filed audeffus ou ait dejjous des fix
precedens.
                                                                              2S6
Comment ou peut aujfy en voir trois I'vn fur P autre. Etpourquoy alors
on n'a point conftume d'en voir a'autres a cofte.
                         2.$ 6
Explication de quelques exemples de ces apparitions^ Et entre autres de
I'obfcrvation descinqfoleils qui ontparu a Rome le zo tJWars 16zg%
**7
'Tourquoy le fixiefme folding pointparu en cete obfemation.
          apo
Pourquoy la par tie du cercle blanc la plus efloignee du foleily efi rtpre-
fenteeplusgrande qu'elle n'apueftre.                                        2.90
-ocr page 520-
De La Geometrie.
D ou vient que tvn de cet fileils auoit vne grojfe queue defeu, qui chan-
geoitfiiuuent de figure,
                                                            291
2? ou vient qu'd paroijfoit deux couronnes autour du principal de cesfii-
leils:Etd'ou vientqu-'ilrienparoififas toufioursde telles.
           291
J£ue le lieu de ces couronnes ria riende commun auec le lieu desfileils
qu'ori voit a cofle du principal.
                                                292
Jgue defiled n'efl pas toufiours exaftement le centre de ces couronnes: Et
qu'tlpeuty en auoir deux i'pne autour de I'autre qui ajent diuers
centres.
                                                                                  29$
Smiles peuuent efireles caufes detoutes les autres apparitions extrordi-
naires,qui appartienent aux Meteores.
                                     29}
TABLE
T>es matteres de U
G E O M . E T R I E.
Liure ^Premier.
DES PROBLESMES QV'O N PEVT
conftruire fans y employer que dcs cercles &
des lignes droitcs.
Omment/« calcul d'Arithmetique fie rapporte aux ope-
rations de Geometrie.
                                            297
Comment fefint Geometriquement la Multiplication , U
Diuifion, & I'extraction de la racine quarree. 298
Comment on peut vfer de chiffres en Geometrie.
2?$>
Comment ilftut venir aux Equations qui feruent a refioudre kspro-
blefntes,
                                                                                 300
Jguels fitntlespr oblefimes plans; Et comment Us fie refiolucnt.
             302
Exemple tire de Pappus.
                                                              5 04
'Rejponje a la queftion de Pappus.
                                                  307
Cament on doitpofer let termespour venir a ^Equation en cet exeple.310
Kkk                            Com,
-ocr page 521-
Table.
Comment on trcune que ce prohhfme eft plan lorfqu'il neflpointpropofe
en pins de slignes.
.
                                                           3*3
Difcours Second.
DE LA NATURE DESLIGNES
COURBES.
■ ■■
QVelks font les lignes combes qn'on pent receuoir en Qeometrie. $\ $
La faeon de dift'tngner routes ces lignes combes en certains genres:
Et de connoiftre Ic rapport qu'ont tons lems poins^A ceux des lignes
drones.
                                                                                 3 1 g
Suite de I'explication de lit queftion de Pappus mife au lime precedent.
Solution de cete queftion quand tUe n'eft propofei qu'en 3 on jlignet.
324.
Demonftration de cete folutiott.                                                   332
J>>uels font les lieux plans ejrfolides & la facon de les trouuer tons. 334
Quelle eft la premiere & la plusftmplc de toutes les lignes cturbes qui
feruent a la queftion des anciens quandelle eftpropofee en cinq lignes.
33S.
Jgueltesfont les lignes combes qu'on defcrit en trouuant plujieurs de lems
poins qui peuuent eftre receues en geometric.                              340
JgueNes font aujfjr celles qu'on defcrit auec vne chorde, qui peuuent j eftre
receues*                                                                                 340
^uepour trouuer toutes lesproprietez. des lignes combes, ilfuffit defca-
noir le rapport qu'ont tons lenrspoins a ceux des lignes droites; & I*
facon de tirer dautres lignes qui les coupent en tons ces poins a angles
droits.                                                                                   341
Facon generate pour trouuer des lignes droites qui couppent les cturbes
donneeSfOn leurs contingentesa angles droits.                             34%
Exemple de cete operatipn en vne Ellipfe: Et en vneparabole du ftcond
genre.                                                                                   343
csfutre exemple en vne ouale dnfecondgenre.                               344
Exemple de la conftruBion de ce problefme en la conchoide.             3s 1
Explication de 4. nouueanx genres dOuales qui feruent a l'Optiqne,3i2.
Les propriete^de ces Onales touchant les reflexions & les refractions.
3S7
Demonftration de ces proprietez,
                                                  %6o
-ocr page 522-
De La Geombtrie.
Comment on peat fkire vn verream ant conuexe on cone aw en Pvne de
fes fuperfetes,qu on voudra, quirajfemble a vn point domic tout les
rayons qui vienent d'vn autre point donne.
                                 363
(fomment on en peatfhire vn qui pice le mefme, & que it cotiuexite de
I'vne de fts fitperficies ait la proportion donnee auec.la conuexite ou
concauite de tautre.
                                                                 366
Comment onpeut rapporter toutce quia efte dtt des Ugnes combes de-
fcrttesfar vne fuperficie plate,a cedes quife defcriuent dans vn ejpace
qui a 3 dimenftons. oubien fur vne fuperficie courbe,
                    368
Liure Troifiefme
DE LA CONSTRUCTION DES
problefmes folides,ou plufque folides.
DEquelles Ugnes courbes on peut fe feruir enlaconftrullion de chaf-
que problefme.
                                                                 369
Exemple touchant I'inuention deplufteurs moyenesproportionettes. 370
De la nature des Equations.
                                                       37'
Combien ilpeaty auoir de racines en chafque Equation,                 37 2
jQuelles font les fnuffes racines.                                                     37Z
Comment on peut diminuer lenombre des dimenftons d'vne Equation,
lorfqu'on connoift quelqu'vne defes racines.                                37 Z
Comment on peut examiner p quelque quantite donnee eft la valeur
d'vne racine.                                                                          $73
Combien ilpeut y auoir de vrayes racines en chafque Equation. 373
Comment onfktt que les fnujfes racines deuienent vrayes , & les vrayes
faffis. -                                                              373
Comment-on peut augmenter ou diminuer les racines d'vneSquation.374.
JShi'en augment ant am ft les vrayes racines on diminu'e lesfhujfes , ou att
contratre.                                                                               37 S
Comment on peut ojler le jecond terme d'vne Ecuador.                    37 6
(fomment on fait que les fauffes racines deuienent vrayes fans que les
vrayes deuienent fauffes.                                                         377
(fomment on fait que tomes les places d'vneEquation foient remplies 378
(fomment on peut multiplier ou diuijer les racines d'vne Equation. 3 79
(fomment on ofte les nombres rompus d'vne Equation,
                     379
ffomment on rend la quantite connu'e de I'vn des termes d'vne Equation
efgale 4 telle autre qu'on veut.                           , .                  3Ho
Kkk z                     j?«e
-ocr page 523-
Table. De LA Geometric.
J£w les rarities tant vrajes quefhuffespetment efire reelies ou imaginai-
rts.                                                                                        38o
La redutlion des Equations cubiques lorfque le problefme eft plan. 380
La faeon de dtuifer vne Equation par vn binome qui contient (a, racine.
Shtcls problefmes (ont filides hrfque ['Equation eft cubique.            3S3
La redutlion des Equations qui ont quatre dimenfions lorfque le problef-
ms oil plan. Et quels font ceux qui font filides.
                          $ $3
Exemple de Cvfage de ces reduilions.                                     - *gf
"Regie generate pour reduire toutes les Equations quipajjent le quarrc de
quarre.
                                                                                  s%$
Facon generate pour conftruire tous les problefmes filides redmts a vne
Equation de trois ou quatre dimenfions*
                                     sgo
L'muention de deux moytnes propor tionelles.                                  3pj
La diuifion del'angle en trois.                                                       39$
Jgue tous les problefmes filides fe peuuent reduire a ces deux conffru-
llions.
                                   .                                               jp7t
La facon d'exprimer la valeur de toutes les racines des Equations cubi-
que s: Et en [kite de toutes celles qui ne montent que iufques au quar-
ri dequarre*
                                                                      ■ 400
Tourquov les problefmes filides ne peuuent eftre conftruits pins les fe-
clions coniqtfes,ny ceux qui fint plus compofis fans quelques autres
Ugnespins com<pfees.
                                                                401
Facon generate pour conftruire tous les problefmes reduits a vne Equa-
tion qui n'a point plus de fix dimenfions.
                                    4o2
L'imtention de quatre moyenes proportionates.
                                4 / j
F I N.
* Let
•■
1
-ocr page 524-
Les fatttes de limpreffton.
BANS LE DISCOVRS DE LA METHODE.
.*
ET^lapage 6,ligne2, pour desUfiz.\es. page 8, lirrne 22,augment
Ufa augmentent. p.9,l.22,deslifiz, les. p. 10, /.-£<?, la Itje^le.
p.12,1.6,
Pbilofophos lifiz, Philofophes.p. 18,1. t,neslifiz.t\os.p.i8*
l.7,vuiifiz.vn.p.i?J.9-MiaetueliJel'M.ii\enie.p.i9,l.i7,
cerraincs
/i/fecertaines.^.i^,/.^?!qa'il/»/?z.qu'ils^;.j7,/r/j, tout Ufa tour.
p.37,l.26,ces Ufe7 fes.f4^,/.^(?,antant UfiZea tanr. p.47 J.3,Cat /*-
fiZCar.p.? i,L6,en liftman, p. £7,1.6 ,ou /i/ex, on p 60, l,is* tait£ H*
fez, tvzit6.p.74,1.2,
le pris refolution/*/?&, iefus en refolution..
DANS LE RESTE DU LIURE.
P.i3,ligne io,pour des Ufi7^de.p. 17,1.6,delifa du. page33. l-2$s
lozanges que par autres ///is. des lozanges que par d'autre?.^..^,
/.2i*auois/f/fc.auoir. p.48,1.1,^0 plus lije^vn peu plus. p.fi,I.13,
tant Ufa d'autam.p.f 6,!. 17,ieu/ifaliea.p.7Z.1.7,condai(\'eriiUfa
coduifent. p. 77,1.3 o,ctoiflans lifi^crottans.p.g s ,1.12,S I Cf life^
SkG.Et en la figure les lettres K&Mdoiuent eflre plusproches du point
Lqu'elles neJont.p.87,l^, e&lifiz.
8cp.96.en la figure lalettre K doit
efire mtfe vn pet* aft deffom du point I. p. lis, I, 'S> K LM li/ez,
LHM. p. 136, I. 1,
rera lifakta. p. 139, l,z,Blifi^PJ.26,
efloignees U(e7^ efloignez. p. 140,1. 9, picques lifiz. picquets.
p. 18j, 1.11, roiille lifiz. roulier.p. / 86,1.11 ,coftes Ufa coftes-o. 2; 9,
l.4,tanilifato\it*p.2s8,l.27> i*i Ufiz. in.p.269,1
2,7, trouts/1-
fi7^ trous. p. 269, I. 3, audi Ufa ainfi. p, 270, I, g, ontai-
x\eslifafonta\nes.p30t;,l.g,datu.lifa dna.p.326,1.18, c I:fa ez1
p.343,\iviix * Ufa lieu v^.p. 34s ,Li6,hd-\ hfi\ bdd.p.3S7,l.23,.
retouruent Ufa retournentp.j77J. 11, jj-Hi'ez-j.p.j78,/.Z4 — 6h_
fi^"bp.39S,Uo,^V/ C.*±llifel»V ~^. p.398,1,1 s-*{<]
m-Ufa*Li —,p.40i,l.i7,aelifa
me. On trouuera auffy enplufieurs
endroits des difiintlions fort mal mifes, & quantiti a autres fhutes de
peu d*importance: lefquelles onexcufera facilement quand on (court que
tAatbeur ne fait pasprofejfiona'eftre Grammairten
, & que le fom-
pojiteur dont le Libraire s'efl firm n'entend pas vnmot de Francois.
-ocr page 525-
PAr grace &C priuilege du Roy tres cnre-
ftien ileft permis a 1'Authenr du liure in-
titule Difcours dela Methode &c. plus la D(o\
ptriqueJesMetcorestgr la Geometrie&c.
de le
faircimprimerentelJepart que bon Juyfem-
b\era dedans 8c dehors le royaume de France,
&. ce pendant le terme de dix annees confe-
quutiues, a cornerduiourqu'il fera parache-
ued'imprimer, fans qu'aucun autre que le li-
braire qu'il aura choiu* le puifle imprimer, on
faire imprimermen tout ny en partie, fous quel-
que prerexte on deguiiement que ce puifle
eftre^ ny en vendre ou debiter d autre imprefc
lion que decelle qui aura efte fake par fa per-
miiTion,a peine de mil liures d'amande, con-
fiscation-de tous les exemplaires &c. Ainu"
qu il eft plus amplement declare dans les let-
tresdonneesaParisle4iourde May 16^7. (1-
gnees par le Roy en (on confeil Ceberet &C
(eelleesdu grand fceau dccireiaune fur fimple
queue.
1'Aiuheurapermisa IanMairemarchand
libra ire a Leyde, d'imprimer le dit liure &C de
iouirdudit priuilege pour le terns &; aux con-
ditions entre eux accordees.
slcbeued'imprimer le 8. iour de lain i&yj.
-ocr page 526-
...                                            .
E Staten Generaelder vereenichde Nederlanden heb-
bengheconfenteert,gbeaccordeert, ende gbeoclroyeertt
confenteren, accorderen, ende oUroyeren by defen Tan Maire
Boeckvercoopt r woonende binnen Leyden,dat by voorden tijt
vannegbennaeflcomettdejaren, alleeneindefe vereenichde
NedenandegeaJfocieerdeLantfchappen endeSteden,falmo-
fen drucken, doen drucken, uytgeven,ende vercoopen,feecker
oecl^daervan den Titelis
, Difcoursdcla Methode &c.
plusla Dioptrique5les Mcteores, & la Geometric,Sccver-
biedende alle ende eenyegelij cringefeteneti van defe landen,
binnen den voorfc tijtvan neghen naeficomende jaren, bet
voorfc Boec^Jtitgbebeelofte deelnae te drucken
, doen na
drucken,uytgbeven,ofvercoopen, ofte elders naegedruckt,
binnendefeLandentebrenghenomvercocht ofteghebruycki-
te rvorden, fonder confentvande voorfc Ian Maire opver-
beurte van alle de naeghedruckte exemplaren
, ende daeren-
boven van eenfomme van dryebondert Carolus guldens, tap-
pliceren een derdendeeldaer van, ten beboeve van den Officier
die de Calangie doen fal, bet tweede derdendeel ten beboeve
van den Armen, ende bet refierende derdendeel ten beboeve
vandenvoorfc IanMaire. Gbedaeninden Hageden xxm.
December 1616.
SCHOVENBORCH.
Terordonnanrie van de Hooghghemelte Heeren
Staten Generael,
Cor me lis Musch,,
1
Wft.