HISTOIRE
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D E
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PORT-ROiAL'
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HIS TO IRE
GENE RALE
D E
PORT-ROIALi
DEPUIS LA REFORME DE L'ABBAIE
jufqu'a fon entiere deftru&ion.
TOME CINQUIEME.
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A AMSTERDAM;
Chez JEAN VANDUREN4
M. DCC. LVI,
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HISTOIRE
GENERALE
D E
PORT-ROIAL.
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SECONDS PARTIE.
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LIVRE TROISIEME.
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A
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Pre's le cruel enlevement que —~ "
fit M. de Perefixe dans le monaftere T de P. R. de Paris, de la mere abbefle, EtatdwreK- de la mere Agnes & de dix autres re- EKioJS! Ugieufes , il les envoia dans differens monafteres , com me nous l'avonsvu, pour y core enfcrmees dans le plus dur efclavage. Pour juger de l'ctat de ces Tims F, A |
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i Histoire de Port- roial."
]" filles , & pour pouvoir fentir com- bien it eft aftreux ; qu'on fe represents une pauvre religietiie ,qui, apres avoir ete leparee de tout ce qu'elle avoir de plus cher,eft enfermee dans une maifon oil tout le monde lui eft contraire , ou elle ne voitperfonne qui nela condam- ne ou par fes paroles ou par fon vi- fage ; qui eft privee des Sacremens , qui faifoient fa plus douce confolation ; qui n'entend aucune nouvelle de tous ceux avec qui elle a eu quelque liaifon, 8c a qui on n'en dit point d'autres que celles qui la peuvcnt affliger ; a q d Ton n'envoie que des prctres, dont on s'eft afture qu'ils entreront dans tous les defleins de leurs perfecuteurs , & qu'ils lui rcpeteront fans ceile qu'elle eft dam- nee , qu'elle eft en peche mortel de ne pas croire le fait de Janfenius, & mille autres extravagances qu'on dit en fecret & pathetiqueinent a l'oreille d'une religieufe. Y a-t-il au monde une filia- tion plus cruelle que celle-la J Non je ne crains point de le dire , celle des efclaves qui gemilTent fous le poids des fers dans les prifons de Maroc, n'eft pas fi dure. Que dis-je ? celle des premiers chreciens , foit dans les pri- fons, foitdans les exils ou ils etoient cpiidamncs a fcier des marbres, n'a- |
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II. Parti e. Liv. III. $
voit rien de fi cruel &: de fi accablant :
elle etoit meme douce en comparaifon puifqu'ils y avoient la confolation d'y ctre vifites, foutenus &c encourages par leurs freres , foit de vive voix , (bit par des lettres-, au lieu que ces pauvres filles etoient fans aucune con- folation, & ne voioient que des per- fonnes , qui bien loin de les encourager & de les foutenir , ne cherchoienr qu'a les feduire & a les faire comber. Chafe etonnante 1 c'eft dans l'Eglife catholi- que , c'eft dans un roi'aume ou Ton fait profeffion de la religion chretienne , c'eft dans un fiecle ou Ton eft fi in- dulgent pour les plus grands defordres , qu'on fe porte a de relies extremites &c qu'on traite d'une maniere fi etrange line communaute de vierges chre- tiennes, & qu'on fait une affaire d'e- tat d'opprimer de pauvres filles : c'eft un Archeveque , qui devroit etre Ieur prote&eur , qui fe prete a une telle in- humanite & qui en eft lui-meme le mi- ll iftre ! (II n'y avoit pour lors qu'un Eveque en France , qui exercat une telle tyrannie; & qu'un monaftere , qui fiit ainfi traite : mais quel progres n'a pas faisle mal dans le malheureux fiecle ou nous vivons) 1 Qui s'etonnera apres cela qu'il y ait
Aij
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4 HlSTOIRF. DE PoRT-RGlAk.'
m 1(564, eu ^e ces re^gieu^"es qu' aient fuccom-
be a une rigueur fi exceilive; qu'il y en ait eu qui foient devenues comme ftu- pides dans cette affreufe folirude , ou elles ont ete enfermees; qu'il y en ait eu qui fe foient laiflTees eblouirpar l.es plus mauvaifes raifons ? Qui ne s'e- tonneraplutot, qu'il yen ait eu unfi grand nombre, qui aient refifre a une captivite capable de faire renoncer a la foi 6c de jetter dans l'apoitafie des religieufes qui n'auroient eu qu'une vertu mediocre 2 Que fit-on autrefois aux Eveques af-
Ttiftes efFots fembles a Rimini, qui ait quelquecom- ^ci» viokn- paraifQri avec [e rraitement qu'onafait
c= fur des r . 1
iEye^ues. a ces pauvres rengieuie.s > L tmpereut
Conftance fecontenta de les tenir eloi- gnes de leurs diocefes , de les fati- guer par les incommodir.es da fejour de Rimini, & de leur faire croire qu'ils n'en fortiroient qu'en fe rendant a fa volonte & en s'accordant avec les Ariens. Une perfecution fi legere en apparence , { & qui n'a rien de com- parable avec celle qu'on a faite aux re- ligieufes de P. R, ) ebranla la conf- tance de trois cens Eveques , & leur fit abandonner ce qu'ils avoient fait pour foutenir la foi: » Pkriqm nof- ti tritm, dit Severe Su!pice3 pwim |
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tl. PAMlt. Liv. 111. J
* imbecillitate ingenii , partim udio
" pertgrinationh evicli, dedere fe ad- » verfariis ; faclaque femel inclinations »> animorum , catervatim in partem at- » teram conceffum <>. Il n'y en eut que vingt qui refolurent de tenir ferme. Mais ces vingt mernes defirant mettre fin a cette affaire, fe lailTerent trom- per par la fubtilite des Ariens. De forte que I'erreur fut en apparence plei- nement vi&orieufe. Le Pape Libere , qui avoir d'abord
paru fi ferme , fut vaincu par l'ennut d'un exil de deux ans , udio vicius exi- lii, dit Saint Jerome. Lavuedequel- ques foldats , les menaces de quelques Officiers de l'Empereur, & l'exemple du mauvais traitement fait a faint Fla- vien , porterent tons les Eveques d'o- rient a condamner la foi du fecond concile d'Ephefe. Qui s'etonnera apres eela, qu'en emploiant des moiens en- core plus- violens contre des religieufes que leur fexe & leur ignorance ren- doient plus foibles,on ait emporte quel- que chofe fur des efprits abbacus pac la triftelle, par la langueur & par l'en- nui > Quelle gloire pour les perfccu- teurs de ces pauvres filles I N'eft-il pas bien glorieux pour eux d'avoir reuui a' fubjuguer un petit nombre de religietv- |
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4 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt? .
" j £6 fes par des durer.es inouies , puifqu'on
voir que des violences beaucoup moin- dres ont fait foufcrire 1'erreur a des Eveques de la plus grandepartie de l'E- glife ? ni; H n'y a gueres eu de religieufes aufll Trifles effets vertueufes que les premieres filles de
ce fur des re- fainte Thsrefe. Elie en parle elle-me- ligieufes tres me comme de perfonnes parfaitement detachees de toutes chofes, & qui n'etoientpofTedees que du defir deplai- re a Dieu. Neanmoins Dieu a permis que de li faintes religieufes aient ete engagees a figner des chofes fauffes & defavantageufes a fainte Therefe , par 1'apprehenilon d'etre excommu- niees , arm que ce fut un exemple pour la pofterite de la fragilite humaine & du peu d'egard qu'on doit avoir a des fignatures arrachees par cette voie. Nousapprenonscettehiftoiredeslettres de fainte Therefe , & des remarques de M. de Palafox , Eveque d'Ofma (ur ces lettres. Il dit fur la dix-feptieme : » que le monaftere de Seville , fonde » par fainte Therefe , founrit deux » grandes perfecutions; la premiere , » la fainte y etant encore; & la fe- u conde, depuis qu'elle fut retournee « a Avila , & que le Pere Gratien for- w tit de l'Andaloufie, fa yifue etant |
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II. P A RTIJ. LiV. HI. 7
» achevee. Cat les Carrries chaufTes \(,(,x„
» rentrant dans leur jurifdittion , » voulurenc avoir connoiflahce de ce » nouveau monaftere de Carmelites » dechaiuTees •, & auffi-tot qu'ils y mi- » rent le pie , ils changerent tout, ils » depoferent la prieure , & en elurent » une autre-, 8c ilsfirent utteinforma- " tion contre le Pere Gratien , centre » quelqu'une des anciennes & contre *» la Sainte , qui ai'ant ete mife entre « les mains du Nonce , fit elever une » ire's grande tempete contre elle , Sc » une cruelle perfecution contre fa re- » forme. Mais une autre information » que le Nonce, le Confeil & les au- » tres Tribunaux rlrent faire , apporta » le calme fi defire. L'innocence triom- » pha de la calomnie , & la veriti du » menfonge ». Cependant cette pre- miere information pleine de menfon- ges & de calomnies , etoit fignee des religieufes de Seville , que ces Car- mes alors leurs fuperieurs , meftacerent d'excommunier , fi elles tie fignoient des chofes tdut-a-fait faufTes , comme fainte Therefe le tefnoigne par fa let- tre 17. »Ces pauvres rHles,dit-elle, 6nt » bien eu faute de quelqu'un qui leur » donnat quelque confeil: car les Avo- v cats de te pa'isfont etonnesdes chofes A iv
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8 HlSTOIRE DE PoRT-ROi'Ai."
» qu'on leur a fait faire par la crainte
" des excommunications. J'apprehen-
» de bien qu'elles n'aientdit beaucoup
» de chofes contre leur confidence>
» peut-etre qu'elles ne fe font pas bien
" expliquees , parcequ'il y avoir des
» chofes dans leurs depofitions qui font
" tout- a- fait faufles, d'autant que j'e-
« tois pour lors dans le co.uvent,& relle
« chofe n'eft: jamais arrivee. Mais je
» ne m'etonne pas qu'on leur ait fait
" dire tant de faufletes & d'extrava-
» gances, d'autant qu'il y eut certaines
« religieufes qui furent examinees & in-
>' terrogees fix heures durant; & quel-
» qu'une de celles-la , faute d'avoir
» du jugement , aura ' figne tout ce
» qu'on aura voulu.
Sainte Therefe n'eft point etonnee ,
que des religieufes tres bonnes d'ail- Ieurs , interrogees pendant fix heutes feulement par un fuperieur qui les prefle , qui les embarrafTe , qui les menace , depofent & fignent des exr- travagances & des faufletes ; & on s'etonnera que le trairement qu'on a fait fi long-tems fouffrir aux religieufes de P. R , foit dans leur propre monaf- tere , foit dans des monafteres. etran- gers , ou elles etoient dans la plus dure captivite, priveesdes facremens , 8z |
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II. P A R T I E. L'lV. HI. 9
menacees de ne les pas recevoir a la £££?".
mort •, on s'eronnera , dis-je, qu'uti pareil traitement ait fait tourner ia tete a quelques-unes de ces titles , & les aic engagees a faire ce qu'eiles avoient tou- jours juge etre contraire a. leur cons- cience , tant qn'ellesrontpuconfiderer d'une vue tranquille ! Il eft bien plus furprenant qu'il y en ait eu un fi grand w nombre, qui aient pu refifter a de telles rigueurs. On ne peut fans fremir en lire le derail dans les relarions , que ces faintes martyres de la fincerite chretienne en one faites , & donr nous aurons occafion de parler dans la fuite. Quelqu'affreux que paroifte I'etat R^
des iz religieufesquifurenrenleveesngieufes" &. de leur monaftere , & enfermees dans p- R- de l!a" r •r r t v ■ rts prifonnie-
cles mailons etrangeres., la condinon res riini ieiKf
de celles qui refterent n'etoit gueres uionaft«e.- plus fupportable. Elles fe voi'oient rous les jours arracher le cceur par de nou- veaux enlevemens •, elles etoient tou- jours dans l'incertitude fi elles pafife- roient le jour dans leur maifon; elles n'entendoient que des menaces dedif- perfion , d'excommunication, & de chofes encore plus terribles ; elles e- roientprivees de route communication avec les perfonnes qui les pouvoient confoier; elles etoient affirjetties a 1* |
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10 HlSTOIRE DE PoRT-ROl'At.'
domination illegitime de perfonnei
ctrangeres , fans voir aucune reflburce dans leurs afFaires , ni aucune efperan- ce de foulagement; fachant que tous les grands 8c les puiflans de ce monde etoient contre elles. Enfin le fouvenir du pafle , la craintede l'avenir , 8c l'a- mas de tant de maux fans confolation 8c fans reinede , formoient un e^at fi horrible a la nature , qu'il eft etonnant comment des filles ont pu fubfifter fi long-tems fans perdre l'efprit; 8c il faut allurement que Dieu les ait ex- traordinairement foutenues par le te- moignage qu'il leur rendoit au fond de leur cceur , de leur innocence & de la juftice de leur caufe , pour n'etre pas *ombees dans le defefpoir oil on ta- choitde les jetter. Nous trouvons une belle peinture de
Fetat de P. R., & de l'efprit desper- fecuteurs de ces faintes filles , dans une lettre ecrite par M. D. R. , i M. * (l). >) Paris, dit-il, eftunlieuou " Ton doit accourir du bout du mon- »j de , non pour y fervir de quelque » chofe aux perfonnes que vous favez, » car on eft dans l'impuiffance de le" )> faite ; mais pour y voir de pres le « plus grand & le plus rare fpe&acle (ij Rel. in-4. Rccutild< pieces, p. 30.
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II. Part ii. Llv. III. i 1
»> qu'il foit poflible d'imaginer , qui u eft le combat de la plus grande , de « la plus violente , & de la plus derai- « fonnable injuftice , contre la plus » genereufe & la plus abandonnee in- « nocence qui fiit jamais. Les acres " des religieufes , que vous recevrez » peut-etre avec cette letcre, ont tire " les larmes des yeux des perfonnes » les plus dures & les plus infenfibles. » Mais tout cela n'eft rien en compa- >> raifon de ce qu'elles foufFrent pr4^ » fentement. 11 y a an mois que les- » douze enfermees font forties, fans » qu'on ait pu encore en apprendre » aucune nouvelle , tant les ordres " font precis de ne les laifler voir a » perfonne. Mais cel'es qui font le » plus a plaindre , font celles qui ref- » tent , qui font accablees de toutes » parts , &£ par des confelTeurs qui »> leut refufenr l'abfolution , qui les ♦> chargent d'injures ; & pardesfupe- » rieurs, commirtaires, qui ne travail- » lent qu'a les feduire , & encore plus » par la perfecution que la fceur Fla- '*> vie excite contre elles, avec le petit »» hombte de celles qu'elle a gagnees , * qui tend a fe rehdre maitrefle de la » rttaifon , a faire elire cette fceur ab- > betfe, & a chaffer & a opprimer tout |
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11 HlSTOIRE CE PoRT-ROlAtT
1664. » le refte." Joignez a cela la foibleffe
» de quelques efprirs , qui n'ont pas s> de fermete & qui embarraffent les » autres ; & jugez fur routes chofes, » s'il y eilt jamais afflidion pareille a » celle de ce pauvre monaftere. Ce- » pendant parmi tous ces maux jamais » la folidite de la vertu de P. R. ne » parut davantage. Il y a de jeunes » filles qui font des miracles , 8c Von « ne s'eft jamais rien imagine de pa- » reil, en prudence, en fermete, en » courage. » Il faut attendre en paix comment
m. d^Beau. " Dieu denouera ce qui femble fi fort mnnt de Pe- „ mele , & quelle fera 1'iflTue de cette » grande & etrange affaire. Cn ne »> voit aucun moi'en pour en fbrtir. »» Le Roi eft' inexorable fur ce point •, » & Dieu a permis que l'on eut un Ar- » cheveque qui a routes les qualites' »■ propres pour etre l'inftrument des » plus extremes violences. C'eft un » horn me qui apeu de fens & d'intel- w ligence, & ainii qui n'eft point em- » peche par la raifon de faire & de » dire des chofes extremement derai- « fonnables, On a vu en detail tout » ce qu'il a dit aux religieufes fur la » Signature , & la verite eft qu'il n'y » a pa,s 1'ombre de fens commun. ta |
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II. P A R T I E. L'lV. III. ■ I }
» petitefte de fon efprit eft jointe 4 x
»» une fecurite qui n'eft pas conceva- » ble. II a pour maxime de porter » tout a I'extremite, & de ne point » reculer. Il eft en cela appuie de la » cour , qui l'engage &c qui le fou- >» tient •,. il eft incapable de rien refu- » fer au P. Annat •, il met fa gloire - » a ne demordre point •, il a tous les » moiensd'accablerceuxqui refiftenn » on peut juger par la. de ce qu'il peut « faire , ou plutot Ton peut voir que >• tout ce qu'il a fait s'accorde par* » fakement avec fe9 difpofitions. On " dit dans lemonde qu'il n'a eu l'Ar- » chev?Achequ'a la condition exprelle » de faire tout ce qu'il fait. Ce feroit » la plus deteftable de toutes les fi- » monies ; auffi rien ne fit jamais » mieux voir la verite de cette pa- » role du Fils de Dieu : Fur non ve- » nit nifi utfuretur & mactet, que le » procede de cet Archeveque. Il erc- » tre dans un. diocefe plein de defor- » dres, & il n'en voit aucun. Il vok » quelques cures zeles contre le de- » reglement de la morale , & il com1- w menee par leur impofer fiUnce , » fans rien dire contre ceux qui pu^ » blient & qui pratiquent ces mechan- » tes maximes. La plupart des monaf- |
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14 HlSTOIRE DE Pon.T-R.6lAl.
» teres de fon Diocefe font pleins de
» fimonie , de divifions , fans parler m des aittres defordres ; il ne fonge pas " feulement a y remedier. Il en a w un exempt de tous ces maux , par- » faitement uni , plein de verite , de s> charite j de defintereiTement 5 8c il » forme le delfein de le perdre. N'en » trouvant point de fujet dans les loix » deja etablies , il en fait line nou- » velle qu'il fait etre contraire a leurs « confciences •, & parcequ'elles n'y » peuvent obeir, il ne trouve point » d'autre moi'en pour les punir de " cette pretendue defobeiffance , que « de renverfer de fond en comble ce » monaftere , de mettre la diviiion » parmi elles, d'enlever feandaleufe- » ment les principals, delesempri- » fonner cruellement , de tenir les » autres dans une captivite encore ft plus dure. Voili , Monfielir , ee » que c'eft qu'un Archeveqite aflervi » aux Jefuites ou par amour, ou par » crainte. •'•' » Ceux qui le coftnouTent, con*
" tinue la lettre , n'ont pas ete from- « pe$ dans fa condtiite; & je vous puis »> dire auffi , que ceux qui connoillent » bien P. R., ont toujoUrs bien juge *> qu'il feroit detruic de quelque ma- |
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II. Partih. Llv. III. if
» niere extraordinaire. Nous ne fom- 1664, '
» mes plus dans un tems ou les grands » biens puiflent etre durables dans « l'Eglife. Comme elle eft fur fon » declin , elle ne jette plus que des » lueurs de peu de duree, femblables » a celles de ees chandeles qui font » pr£s de finir. C'etoit un trop « grand bien pour l'Eglife que le mo- » naftere de P. R. , 011 la piete etoit » pure & folide en routes manieres ,.'" » & oii il n'y avoit rien que d'edi- » fiant & de ronde fur la verite. La " corruption de notre fiecle ne meri- * toit pas d'etre plus long-tems eclai- » ree par un fi grand exemple •, & ainfi. » Dieu nous le ravit, & il punit en » eteignant cette Iumiere ceux qui » n'etoient pas dignes de la voir. De » forte qu'en effet, ce n'eft pas P. R. » qui fouffre cette difgrace , c'eftl'E- " glife , c'eft la ville de Paris , ce font » les perfecuteurs de cette fainte mai- » fon. Mais dans cette calamite ge- » nerale, il y a certe confolation pour " ceux qui aimoient ce monaftere , « qu'il perit de la plus glorieufe ma- il nLere qu'il pouvoit p^rir , & que »> Dieu s'en fert utilement pour fai- » re voir , par la genereufe refinance « de ces filles > la lachete de ceux qui |
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iS HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt."
» ont abandonne la verite , & 1'injufr
» rice de ceux qui l'ont perfecutee. » Cette fin eft infiniment plus glo- » rieufe , que celle qu'ont eue la pin- » part des autres monafteres, qui fe » font detruits par le dereglement 8c » le defordre des mceurs , encore que » leurs murailles en aient peut-etre » fubfifte. Les Jefuites croient, en le » detruifant, abattre pour jamais ce » qu'ils appellent janfeniime ; & mot » je crois qu'il y a lieu d'efperer qu'ils » le releveront par cecomble d'injuf- » rice plus que par route autre chofe; »» puifqu'il n'y a rien qui falFe mieux « voir I'exces de leur emportement » & le mediant efprit qui anime ce » parti, que d'avoir mine , pour une » audi grande bagatelle qu'eft celle de » la queftion qui refte.le plus faint & le » plus regulier monaftere de I'Eglife. Cette lettreeftde main de maitre ,
$c d'une perfonne qui avoir tout le talent de la Bruyere , pour peindre les mceurs & les caracteres des hommes. Le portrait de M.de Beaumont dePe- refixe n'y eft point flatte ; mais on ne voir que rrop, par la conduite qu'il a tenue a Regard des religieufes de P. R, qu'il eft peint au naturel. Nous avons deja rapporte qu'un^
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II. Parti e. Llv. III. 17
religieufe aiant demande a ce Prelat, 1664.
lorfqu'il etoit encore dans le monafte- v.
re , la permiffion d'approcher des Sa- . 'neg»U«*
r rr dans la con-
ciemens pour ie conloler dans 1 at- duite de m.
ftiftion extreme ou il les rednifoit, H^^'^V
u , c « , r ~\ les eunent f«*
1 accorda lans parler de lignature. CelaVues.
fait bien voir , felon la remarque de la fceur Genevieve de l'lncarnation (2) y l'inconfequence & l'inegalite de la con- dnite de ce Prelat, qui leur accordoit apres l'enlevement de leur mere , ce qu'il leur avoir 6te peu auparavant, ic ce qu'il leur 6ta encore peu apres , quoique les religieufes demeurafTent dans les mcmes difpofitions.. Le but de M.Perefixe,danscette alternative de violences & de douceur feinte , etoit, ielon la fceur Genevieve de l'lncarna*- tion , de les foumetrre a la conduite de M. Chamillard &c de la mere Eu- genie , afinde les pouvoir detacher des iuperieures legitimes qu'il leur avoit enlevees , & de publier enfuite tout ce qu'il auroit voulu •, favoir , que c'etoit avec juftice qu'il les avoit trai- tees comme il avoit fait, qu'ellesfett- les empechoient les religieufes de rendre a l'Eglife 1'obeilTance qui lui etoit due; qu'aufli-rot apres leur fortie es autres s'etoient rendues. Des le joue (:; Re!, de la S, Genevieve as L'lncaraation , p. i.
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18 HlSTOIRE DB PoRT-RoVAt."
\ \&»a. m^me de l'enlevemenr, on avoir com-
mence a debirer ces faux bruits dans Paris. M. 1'Archeveque eut ere char- me de fe rirer ainfi d'embarras; & les religieufes enlevees feroient demeu- rees feules dans le combar , chargees de calomnies , & auroienr ere regar- dees comme meritant rous les rraire- mens qu'on leur avoir fair fourfrir. Ce projer eur pu reuffir , fi le plus grand nombre des religieufes eur fuccombe , mais Dieu ne permit pas ce fcandale , & la plus grande parrie demeura atra- chee a la verite , malgre rous les arri- fices qu'on emploia pour les feduire , & les mauvais rrairemens qu'elles ef- iliierent, furtout de la part de leurs geolieres , la mere Eugenie & ks com- pagnes. vt. On les avoit mifes a leur arriveeafin- jj^f^'firmerie; maiselles n'ypaiTerenr que
rie A p. r. de quelquesjours & avec peine jparceqn'el- |
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Patis
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lesfe rrouvoienr un peu rrop eloignees
pour veiller a leur grefur les actions de la communaute , ce qui etoit le point ca- piral de leurs foins* Les captives par- loienta leurs geoljeres avec beaucoup de circonfpection & le moins qu'elles pou» voienr;c'eftpourquoielleseviroienrfoi- gneufemenrde les renconrrer & d'avoir affaire ayec ellesjmais d'ailleurs quand |
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II. ParttE. Llv. III. 19
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il etoit necellaire de leur parler, elles 1664.
le faifoient avec beaucoup de refpedr. Les religieufes de la Vifiration faifoient au contraire tous leurs efforts pour en- trer en difcours avec celles de P. R. ■, furtout celles qu'on avoir chargees de travailler a les convertir, ou plutot a les feduire ou a les tromper 5 ce qu'el- les regardoient comme un emploi tres importanr & qui pouvoit beaucoup fer- vir a la gloire de Dieu •, & dont on peut juger qu'elles s'acquittoient avec un grand zele. Le lendemain de l'enlevement, M. """ vn. "■
Chamillard voulant prendre pofTeffion ,$ ^JPJJJJ de la charge de fuperieur, que M. de i« reiigieuf« Perefixe lui avoir donnee , il fit affem- ^Z"'' bier la communaute, & ordonna deButdefadou. a part de jyl. dePans, quon remir toutes les clefs du monaftere entre les mains des religieufes de fainre Ma- rie (3). La communaure s'y oppofa , difant qu'elles ne pouvoient le faire , & qu'elles n'abandonneroienr jamais leur monaftere enrre les mains deper- fonnes etrangeres : a la fin de la con- ference , M. Chamillard dit que M» l'Archeveque avoir accorde les Sacre- mens, que routes celles qui voudroient (3) Hift. de> perfee. Red. de U fceut Pioeau, p,
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lO HlSTOIRE DE PoRf-Ra'lAt.
fe confeffer n'auroient qu'a le fairs
avertir, qu'il fe trouveroit au confef- fional, & qu'elles pourroient commu- nier a la grande meffe. Il ne parla point de fignatuie, & ne demanda aucune condition, Iln'en parla point non plus au confeflional, &c ne demanda point aux religieufes , qui fe prefenterent en grand nombre , parceque c'etoit le jour de l'odtave de faint Bernard , quelles etoientleurs difpofitions. Quel- ?iues-unes memes aiant voulu les lui
aire connoitre, &c s'en expliquer en lui temoignant qu'elles etoient toujours dans les memes fentimens , il ne vou- lut pas les ecouter, & apres leiir avoir donne l'abfolution , il les porta a com- munier. Il leur reeommanda feulc- ment de bien demander a Dieu qu'il leur fit connoitre fa volonte , & d'etre bien unies avec les meres de la Viiitation ; ear c'etoit alors le point capital, & on efperoit de les gagner par ce moien. Ceft pourquoi dans ces commence- mens , M. Chamillard fe conduifoit avec beaucoup de douceur , & paroif- foit entrer dans tout ce qu'on lui di- foir. Il etoit fort referve darfs les con- feflions, excepte a I'egard de la fceur Angelique , contre laquelle il ne pou- voit s'empecher de marquer fa mau- |
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II. P A R T i E. LlV. III. 21
vaife humeur, fans doute; parceque 1664.
cette religieufe , qui avoit beaucoup d'efprit &c un jugement admirable, l'avoit fouvent defarme par la folidite de fes raifonnemens. Cela n'empechoit Eas qu'il ne debitat des chofes horri-
les dans fes conferences contre les perfonnes , conrre lenr vertu, conrre leur do&rine &c meme contre leurs mceurs. L*apres-midi, la mere Eugenie fit vm.
afTembler la communaure , fous pre- La.mfe E** 1 r 1 t r • 8enie "eman'
texte de lamer routes les loeurs , mais d=ies deft de
dans le deflein veritable de faire exe-Uraalfo'1' cuter ce que M. Chamillard avoit or- donne le matin dans fa conference de la part de 1'Archeveque (5). Com- me elle commencoit a embrafTer les anciennes, la plupart des jeunes fe re- tirerent: apres qu'elle eut falue.celles qui reftoient, elle dit a la foeur Fran- coife de fainte Claire, qu'elle avoit or- dre de M. 1'Archeveque de mettre au tour deux filles qu'elle avoir amenees, Tune pour ouvrir la porte , & l'autre pour parler au rour ; & qu'ainfi elle eut a leur remettre entre les mains les clefs de la cloture & des parloirs. La four Francoife s'en defendit le mieux qu'elle put | & comme elle n'a- |
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22 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.
voit pas fur elle les clefs qu'on lui de-
mandoit, elle fe retira. Enfuite la mere Eugenie die a la fceur Genevieve de l'lncarnation, que M. l'Archeveque lui avoit commande de mettre une de fes fiiies a la facriftie , & qu'elle l'al- loir envoier pour prendre la clef du tour. La fceur Genevieve fir quelque refiftance, apres quoi elle fut obligee de ceder & de remettre cetre clef a la fceur Seraphine. La fceur Francoife de fainte Claire
etant retournee au rour , apres l'ordre que la mere Eugenie lui avoit donne, les deux religieufes de fainte Marie fe f>refenterent pour prendre pofteffion de
a porte du monaftere &c de, toutes les clcs desportes de clotures, parlous, jar- dins & autres lieux. La fceur Francoife les refufa , & envo'ia la fceur Jeanne pour reprefenter les raifons de fon re- fus a la mere Eugenie , qui la traita avec beaucoup de hauteur, &c ne put ncanmoins obtenir que les clcs fuflent remifes, Elle en porta fes plaintes £ M. Chamillard, qui des le lendemain matin fe rendit au monaftere, & fit tous fes efforts pour perfuader a la fceur Jeanne Fare d'obeir : mais malgre tous fes difcours, fes commandemens &C fes inveclives, il ne put reuffir : la re- |
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II. P A R T I E. LlV. III. X 5
ligieufe tint ferine, &c garda les cles \6£*.
jufqu'au 14 feptembre , que M. de Pe- rerlxe changea , comme nous le ver- rons, les officieres, pour mettre dans les charges les religieufes qui avoient eu le malheur de fuccomber. Qu'on compare la douceur, la mo- IX.
ddtie , l'humilite des meres Anseli- cirattere.ie |
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a
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j a, \ 1 _? la mete Eu-
ue , des meres Agnes, des meres g.nie,
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s Anges, avec l'humeur haute &c im-
perieufe de la mere Eugenie , qui agif- foit en tout avec une autorite abfolue, & qui avoit appris de celui qui l'a- voit inftalee, contre toutes les regies , dans un monaftere etranger , a ne pas recu!er, 8c a ne vouloir pas avoir le de- menti de ce qu'elle avoit ordonne , fouvent fans raifon , & fans difcerne» menr, <k qu'on juge par-la dece qu'ont eu a founrir des religieufes accoutu- mees a un gouvernement doux , fage , conforme a I'efprit de l'Evangile , ious une pretendue fuperieure , qui, joi- gnant a fon propre fond , a jfes mou- vemens & a fes fentimens particu- Hers, un certain melange ou compofe de ceux de M. de Percfixe & de M. Chamillard, n'etoitoccupeequ'atour- menter & a tendre des pieges a. de pauvres filles qu'elle tenok en capti- |
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24 HlSTOIRE DE PoRT-ROIAt.
1664.. Wlt^(6)- La mere Eugenie etoit par~
earaaeKs fakement fecondee par les religieufes desamtcs re- qU'elle aVoit amenees avec elles. Celle fainte Marie, qui far mife a la faeriftie eroit une fe- u fccurconcje mere Engenie , qui , entrant dans toutes les vues , & ammee du me- me efprir, concouroitavec elle de tout fon pouvoir a faire fouffrir leurs pri- fonnieres, pour lefquelles elles avoient 1'une & l'autre une durete qui alloit juf- qu'a l'inhumanite. Elles applaud ifibient non feulement a tous les mauvais trai- temens qu'on faifoit a ces innocentes victimes , & les aggravoient encore , rnais il n'y'a forte de rigueurs qu'eilesne fuifent difpofees d'elles-mcmes a exer- <er ,fiM.de Paris leur en eut donnci le pouvoir, Croiroit-on que des ames re- ligieufes fuflent capables de tels exces ? Mais de quoi l'bomme n'eft-il pas ca- pable 5 Et de quoi ne font pas capables des efprits prevenus, a qui Ton fait croire que de perfecuter des faintes , c'eft faire un ceuvre meritoire,& rendre fervice a Dieu 3 Au refte , doit-on etre furpris de trouver une telle durete dans des filles feduites, lotfqu'on entend un Pretre,un miniftrede Jefus-Chrift,dire cpie les religieufes de P. R. avoient ete 4fi) y>. p j«4,n. jo.
traitees
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-II. Parti e. Liv. HI. i. $
faaitees trop doucement par M. l'Ar- 1($6a..
cheveque , &c que ii elles avoient ete en Italie ou en Efpagne, elles auroient ete habillets en diable, & brulees vi- ves (7). Quelle horreur! Outre la mere Eugenie & la mere u faat
Angelique , il y avoit une autre reli- Jlf?r6u"i;?,de
• °7 i r ■ \a 11' r Saintc Ellfa"
gieule de lainte Marie , appellee iceur beth.
Marguerite de fainte Eliiabeth, qui £fjj™$£-
etoit comparable aux deux premieres ne.
par fon caradbere haut , aigre & me-
prifant. C'etoit Tune des deux fceurs
que Ton avoit mifes au tour. L'autre
qui fe nommoit fceur Marie-Magde-
leine , quoique fans efprit, n'etoit pas
plus traitable que fa compagne.
Quant aux deux autres , la mere Eli- x.
fabeth de la Sourdiere, & la mere de je iaaramcte
Maupeou, elles etoient l'une & l'au-de Sourdietc,
tre dun bon cara&ere , & de bonnes
religieufes. La premiere avoit une
humeur douce : Elle aimoit & efti-
moit extremement les exercices de la
communaute & les fuivoit autanc
qu elle pouvoit. Elle dit meme ut\
jour a la four Marguerite-Angelique ,
que fi elle eut eu connoilTance de ce
qui fe pratiquoit a P. R. avant que d'e-
(7) C'cft M. Bail qui main de l'enleyement d«f
^>arloit ai'.ifl dans une let- icligieufes. tie cju'il ecrivit le lende- ■ ■ ■ Tome V. &
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iS HlSTOIRE BE PoRTr-ROlAt.
tre religieufe , elle ne l'auroit jamais
ete ailleurs , car , ajouta-t elle ,/ert aime tout. Aufli n'etoit-elle pas bien dans l'efprit de la mere Eugenie , qui defaprouvoit tout ce qui fe faifoit dans Je monaftere. Elle n'avoitaucune part- aux avis & aux confeils de cette pre- tendue fuperieure ; & lorfqu'elle en apprenoit quelque chofe, elle fe faifoit un plaifir d'en donner avis aux reli- gieufes prifonnieres , auxquelles elle temoigna a en differentes occafions , beaucoup de bonte & de charite. Elle avoit une grande veneration pour la mere Agnes , dont elle difoit: Ilfant que ce foit une perfbnne toute remplie de l'efprit de Dieu , ne me \;zrraije ja- mais dfespies ? Queje m'eflimerois heu- reufe de lajervir ! Elle portoit par-tout le livre de la Religieufe parfaiu , & ravoitcontinuellemententreles mains. « II faut , difoit-elle encore en diffe- *> rentes rencontres, que la mere A- *> gnes fiit une fainte, & qu'elle fik « toute abimee en Dieu , pour avoir m compofe un ouvrage fi eleve. Neanmoins comme l'efprit de la
mere de Sourdiere etoit borne , & na- curellement petit, les temoignages de ia bonte, 8c l'union qu'elle avoit avec Je,5 xeligieufes de P. R., ctoient fort |
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II. Par tie. liv. III. tf
inegaux , ce qui venoit des conferen- KS64.'
•ces qu'elle etoit obligee d'avoir avec la mere Eugenie , devant laquelle elle trembloit comme un enfant. Mais la plus raifonnable de routes xr.
■ etoit la mere de Meaupeou (8). Elle wLa mece ie etoit agee de loixante-douze ans : rort son boa «• •eftimee dans fon ordre,dans lequel elle ta&erer avoit ete trois fois fuperieute. Elle avoit une vraie charite pour les reli- gieufes captives, qu'elle edifioit , 8c qui etoient fort edihees d'elle. Elle leut difoit quelquefoisavecbeaucoup d'hu- milite , qu'il n'y avoit pas de compa- raifon entre fon ordre &c le leur , &C qu'a. peine etoient-elles religieufes au- pres d'elles. Elle admiroit tout > les regies, les obfervances , & particu- lierement 1'ofHce divin , auquel elle amftoit regulierement. La folidite de la vertu de cette bonne religieufe pa- rut dans l'epreuve que le Seigneur lui envoi'a par la difgracedeM. Fouquet fon neveu (9). Pendant le terns de fa profperite , elle avoit fouvent deman- ds a Dieu qu'il lui plut de l'humilier, parcequ'elle le croioit dans un etat tlangereux pour fon falut. Ses prieres (8) Htft. Jcs perfcc. la mere de M. Fouquetj
Jb. p. 5 ?« , ; 57. Dame tris vertueufe. . (9) HUcuit focui d«
T» " »
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1*8 HlSTOIRE DE PoRT-RoYaI.*
furent exaucees , & avec des circonf-
tances qu'elle ne fouhaitoit pas allure- ment , mais qu'elle accepta comme un ordre de la divine Providence , &C dont elle lui rendit graces. Les reli- gieufes de P. R. eurent fujet d'admi- rer la religion & lapiete qu'elle fit pa- roitre dans cette occafion , particulie- remen-t lorfqu'il fat fur le point d'etre juge , & que cette bonne mere atteiit- doit 1'ifiTu de ce jugement , ne fachant s'il feroit condamne a rnort,ou Ci on lui conferveroit la vie. Dans cet ctat, Sc au milieu de tant de fujets d'afflidtions capables d'accabler une perfonne de fon age , elle confervoit la paix , &c prioit conrinuellement, ne demandant a. Dieu que l'accomplirlement de fa vo- lonre & fa plus grande gloire. La mere de Maupeou auroit fort
fouhake que les religieufes de P. R. , qu'elle aimoit tendrement, fe fuiTent rendues a ce qu'on demandoit d'elles, foit en flgnant, foit au mains en fe foumettant a M. Chamillard, parce- qu'on les auroit laiflees tranquilles : e'etoit, d'unepart, un effet de fa ten- drefle , &. de 1'autre celni de fon attar chement aux maximes de 1'obeifTance loveugle •, car elle 6toit perfuad^e, ainfj que toutes \q$ fiUes de fon ordre , |
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H. Paktie. Llv. HI. i$
fpj'un" inferieur ne peut pas pecher en ' obeirTantaion;iuperieur,quelque foitle commandement qu'il fait, & queDiea recompenfe l'obeiflance qu'on rend a tin ordre meme injufte , bien loin que 1'inferieur peche en y obeiflant. C'eft la ce que les filles de famte Marie re- gardent comme la feule fcience &c \\v nique verm neceftaire a une religieufe. Mais ces bonnes filles, qui s'imaginent que l'obeiflance excufe tout, devroienc iavoir qu'il n'y a point d'obeiflfance qui puifTe mettre a couvert ceux qui violent la loi de Dieu , qui eft la cha- xite; que nul commandement des horn- mes ne peut exemter de peche le juge- tnent temeraire ; que c'eft un aveugle- ment.&non une humble retenue,d'ap- prouver des traitemens injuftes faits a des vierges innocentes. Qui eft-ce qui leur a dit que leur vceu d'obeiflance , lequel ne regarde que les obfervances- regulieres de leur inftitut, les obligeoit de fortir de leur etat & de leur profef- fion , pour etre les geolieres des reli- gieufesde P. R., & les executrices des? inhumanites de M. de Pereiixe a l'e- gard de ces vierges chretiennes > Voibient-ellesbien clairement qu'elles: etoient appellees de Dieu a un tel em-- ploi ? Etoienc-elles bien atfiirees de la; |
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1664.^
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JO HlSTOIRF DE PoRT-Ro'lAl.
1,664. juftice de ce que Ieur ordonnoir Mi
i'Archeveque , pour s'en charger? Le principe de l'obeiflance aveugle ,• in- connu a rous les Peres, & condamne en termes expres par le bienheureux Francois de Sales leur Fondateur, les, autorifoit-il.a perfecuter des religieufes, fans favoir quel etoit leur pretendu crime 2 Diront elles que ce n'eft point A l'executeur de la haute juftice a fa- voir & a examiner fi les criminelsqu'il execute en verm des arrets du Parle- ment, font veritablement criminels fe Mais qui les a obligees de fe rendre les ex^cutrices des arrets de M. de,Pa- ris contre des epoufes de J. G. 5 II y a apparence que la mere de
Maupeou, quelque prevenue qu'elle, fut des principes de fon ordre fur l'obeiflance aveugle , fit quelques re- flexions Ia-delfus; que Dieu la toucha ,, & qu'elle fentit le danger de Todieux miniftere dont elle avoit le malheur d'etre chargee: car elle retourna dans fon monaftere , ne pouvant plus pren- dre part aux deflTeins qu'on formoic tous les jours d'augmenter les fouffran- ces des religieufes prifonnieres., aui, ne lui paroilioient pasafle$ coupables pour meriter de pareils traiteinens. Que n'a-t-elle fait ce que fit le geoliex |
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tl. PA r t i t. liv. lit. i't:
des quarante martyrs 1 Que n'a-t-elle pris la place de quelques-unes des re- ligieufes de P. R., qui eurent le mal- heur de fuccomber ! Qu'elle eut ete heureufe , & que nous aurions de fa- tisfadkion a ajouter ce trait au portrait que nous venons de faire de cette bon- ne mere ! Lorfqu'elle fut fur le point de par-
tir , elle demanda la permiffion de dire adieu a quelques-unes des reli- fieufes: mais comme cet adieu fe fie
ans la chambre de la mere Eugenie , elles n'eurent pas laliberte de fe temoi- gner reciproquement leurs veritables fentimens. Elle allaenfuite voir la faeur Liee ( Madame de Chaze ) & lui a'ianc dit en entrant, qu'elle venoit lui dire adieu-, j'en fuii bitn-aift\t ma mere, lui repondit la foeur Liee, Dieu vous airne, voulant lui faire entend^, que Dieu lui faifoit une grande grace de la tirer d'un fi mauvais emploi: puis, s'embraflant Tune & l'autre , la mere? de Maupeou dit a la faeur Liee : M& fptur, jtprie Dieu qu'il mefajfe la gra- ce d'etre dans le Ciel a vas pits : comr- me elles entroient en difcours , la foeur Seraphine furvint & prelfa la mere de Maupeou d'aller trouver la mere- -Eugenie, qui 1'attendok. Cette am- is iv- |
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Ji HlSTOIRE M PoRT-ROL*t7
balTade n'etoit pas fans deifein , par-*
ceque la fceur Liee etoit fort fufpeite a. la mere Eugenie depuis qu'on lui eut die qu'elle connoiffoit M. de faint Cy- lan avant que d'etre religieufe, &C que e'etoit par fon moien que les re- lig eufes de P. R. l'avoient connu (ce qui etoit faux) ce qu'elle regarda com- me un fi grand crime qu'elle crut devoir en avertir M. de Perefixe v. Eh bien , repondit le Prelat, il ria pu Lur apprendre rien que de bon. Si M. de Paris avoit toujours parle auffi vrai > jamais il n'eut trouye tant de docilite que dans les religieufes de P. R. Il faut encore ajouter, par rapport a
la mere de Maupeou , que malgre les marques de bonte , qu'elle donnoit aux religieufes captives , elle lailfoit toujours echapper, ainfi que la mere de la Sourdiere, quelqu'inegalite d'efprit qui lui faifoit quelquefois condamner ce qu'elle avoit approuve, ou approu- ver ce qu'elle avoit condamne. C'e- toit comme nous l'avons deja remar- que les fuites du faux principe de Tor beiflance aveugle ; 8c 1'efFet de, la con- duite qu'on tient fur les filles de cet ordre; & a laqaelle elles font aflujetties d'une maniere fervile qui les gene, qui smeantit & etpuffe leslumieres dePieu |
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If. Partie Liv. 111. f$
5iT mcme le difcernement que le bon x 66*% '
fens donne atous les hommes. Il etoit necellaire de faire connoitre xii.
les cara&eres & les principes de con- , ?o{^"r7£ dime des geolieres des religieufes de gieufes de ia»- P. R., pour qu'on puifTe mieux juger vifiuuon.- de l'etat des pnfonnieres fous leur gou- vernement. Mais comrae la verite obli- ge de rendre juftice a tout le monde , nous ajouterons, a. ce que nous venons dedire, qu'elles ont edifie leurs pri- fonnieres en plufieurs chofes , par Tu- mour de leur vocation, la modeftie dans leurs habits , par leur pau- vrete , par leur charite envers les ma- lades , dont elles avoient beaucoup de compiffion , mais que leur faux zele les portoit a tourmenter cruellemenr. Car il faut avouer que c'etoit pour les religieufes de P. R. une persecution des plus terribles , que ce que leur di- foient ces geolieres. Une pauvrema-* lade, al'extremite, etoit accablee d'en- tendre perpetuellement parler de revol- te , de rebellion au.Pape, al'Eglife,, a fon Archeveque , qu'elle feroit dam- nee , qu'elle mourroit fans Sacremens, . fkns pretre & qu'apres fa mort elle fe^- roit jettee a. la voirie. Tels etoient les ■ difcours des Elles de fainte Marie , By
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J4 H'lSTOIRE DE PoRT-RoifAt.
$6. lorfqu'clles affiftoient leurs prifonniel
res dans la maladie. Pour avoir une idee jufte des qua-
lites d'efprit des filles de fainte Marie , il faut fe reprefenter, que: comme il y a des maladies corporelles. qui arretent tellement l'ufage des fens du corps3qu'elles lui fontperdre toutes; fes fonctions naturelles; de meme l'o- beiffance aveugle des filles de fainre- Marie eft pour elles une maladie gene- rale qui empeche routes les puiflan- ces & les fondtions de.leur ame & de leur raifon ; qui leur 6ce l'ufage des. fens fpirituels & de la fainte liberte que Dieu a donnee de difcerner le bi n d'avec le mal pour embracer l'un & evirer l'autre : enforte qu'orv peut dire d'elles, qu'elles ontdesyeux Be qu'elles ne voient pas ; qu'elles one des oreilles & qu'elles n'entendent pas. Ceft une efpece d'ivrefle qui leur ore: la raifon , & qui les prive meme fou- vent du fens commun , tant elles font peu d'ufage de leur jugement dans tou- tes les a&ions quiforment la conduite d'une: vie chrerienne & civile,bien xeglee.. La mere Eugenie qui etoit re- fardee comme une autre mere de
;hantaj,.croitla plus aveuglede toil? |
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ft. Pabjtie. Llv. 111! $y
tes, 8c n'avoit pas meme ces bons in- tervalles qu'on remarquoit quelquefois dans les autres. L'obeifTance aveugle etoit fori unique regie: elle n'aimoit &' n'eftimoit que les pratiques de fon ordre : il auroit ete impoflible de lui feire comprendre qu'il yeutquelque cbofe de faint & de Son dans le monde. fi cela ne fe fut trouve conforme auxc inaximes de fon obeilTance aveugle. Les filles de fainte Marie font pref--
que routes formees fur un meme mo- dele •, ellesfonr routes d'un meme ef- prit & d'une capacite tresbornee^ Elles^ onr meme pour maxime de ne point: mettre en place les fujets, qui auroienc de grandes qualites. Elles font livrees.; a une quantite de petites pratiques de devotions , qui tiennent de ce joug; fefant de la loi judai'que , qui ne fai-
bit qu'accabler, fans pouvoir famSfcifier. - Voila les perfonnes que M. de Perefixe - mir a la place des meres de Ligny *, des meres Agnes, des meres Angeli- que de faint Jean, pour conduire una s communaute de religieufes la plus eclairee, la plus inftruke des grands: & folides principes de la religion dire- tienne , qu'il y eut dansl'univers. Sous ce rrouveau regime, on ne parloic phis-,a-P. R.,,ni-.de la priere, ru de 1* |
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J<> HrSTOIRE DE PoRT-ROiAL.
1C64.. vertu , mais de 1'obeifla.nce aveugle &*"
de la fignature du formulaire, comma fi route la religion & le falut eiit con- fifte a croire 8c a figner que cinq pro-f portions condamnees etoient dans Jan-» fenius. xm. Peu de jours apres que la mere Eu^ J"^"lcrev^ genie fur entree dans le monaftere de
cxerccr fa ^ P. R., elle demanda les conftitutions» undue fuPp6- Pour s'inftruire en les lifant des obfer- tiWK. vances , arm de pouvoir exercer fa char- ge, de. fuperieure pretendue , fans errs obligee de riendemanderaperfonne(9). Et comme elle n'avoit pas grande idee des religieufes, qui etoient reftees apres l'enlevement des douze en qui elle s'i- maginoit que refidoit roure la force & tout l'efpritde la communaute , elle prit la refolution de les traiter avec empire, afin de les reduire par auto- rite & par violence, ne le pouvant faire.autrement.C'eft ce que la mere de la- Sourdiere apprit elle-meme aux pri- ibnnieres, qui voi'ant que la mere Eu- genie prenoit de jour en jour un ail plus imperieux &c plus defpotique , prirent-des mefures pour ne pas fe laif- fer entierement opprimer & refolurent de fe conduire en toutes chofes par Pa- vis, de la-:communaute, fans ex* rie»- i») Ib- £.- w< «• Mr- |
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IT. Par. tie. Liv. HT. >?"
feommuniquer a la mere Eugenie ; ce \$6*:% qui deconcerta tellement fon projetde domination, qu'i la fin elle fut con- trainte de les lanTer faire , & de fe te- nir en repos dans fa chambre. Ce qui lui faifoit fouvent dire qu'elle ne fer- voit de rien. Dans les commencemens elle entre* XIy;
prenoit tous les jours quelque chofe, Mleveata*- pour s'etablir dans fa charge pretendue "r"q e c as - de fuperieure , & elle s'avifa de vou- loir faire l'aflemblee & le chapitre. Les religieufes apres avoir refifte pen-5- dant les quinze premiers jours , fe ren* dirent par le confeil qu'on leur en don-4 na, parceque le bruit couroit qu'on etoit dans la refolution d'en enlevee encore plufieurs , au cas qu'elles refif- taflTent. On crut done qu'il feroit plus a propos & plus utile de fe confervee toutes enfemble dansileur monafterei- que de s'expofer aetre enlevees poue des chofes de peu de confequence, &> qui ne leur caufoient aucun prejudice; Le chapitre fe tint: les religieufes da iainte Marie s'y trouverent, malgre les representations qu'on fit a la mere Eugenie pour qu'elles n'y affiftalTent pas. Avantque de le commencer,la feus Francoife Agathe , en qualite de fous-» ^rieure, die tout haw i » Mes fours ^, |
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3&: HlSTOlRE DE' PoRT-Ro'lAt.-
P'
Lvi664. >} c»eg. £-anspr£juclice de notre appel 8C- » de nos proteftations «. Le chapitre ■
fe tint, les coulpes fe dirent felon l'u- fage ordinaire , mals les religieufes prifonnieres avoientle cceur perce d'u- ne fi vive douleur, en voi'anr une in- trufe dans une place, qui avoir ete fi dignement oocupee par lesfuperieures qu'on leur avoir enlevees j & elles re- f>andoient une fi grande quantite de
armes qu'elles ne pouvoienr parler. E'on n'entendoit que pleurs, que ge- mifTemens &C que foupirs. Neanmoins- tour fe patla aflez doucemenr, & Tin- trufe ne dir rien fur les fauces done les religieufes s'accuferenr, ce qu'elle' obferva toujours depuis a l'egard de • eelles qui n'avoient pas figne ; au lieu qu'elle faifoit des corrections & don- noit des penitences a eelles qui s'e- toient foumifes , les traitant en tout comme fes propres filles. C'eft vrai- ment le cas de dire qu'elles le meri-»- toient bien. Vers le meme terns la mere Eugenie ■
exit au chceur laplace de la mere prieu-» re , comme elle avoit fait au refectoi- f€, 8c voulur bien s'en contenter, arant quelqu'egard a la representation de Iaa j^aur Genevieve-de.llncarnaoion am |
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~
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ll:_VMVL TIT. Liv. M. ty______
lui.dit quelle nepouvoit point pren- i£jS^u-
dre celle de 1'abbeue. Depuis ce jour elle & fes filles fe renditent tres exadte- ment a toutes les obfervances » furtouc al'office, & s'y trouvoient des pre- mieres. Elles,etoient dans de grandes •inquietudes, lorfque quelques-unes des; prifonnieres , furtout celles qui pou- voient ecrire , etoient abfentes de l'of- - fice ; parcequ'on avoit fpecialement re- commande aux geolieres d'empecher les proces verbaux & les communica-- tions au dehors. Mais route leur vigi- lance , aideedela perfidie de la foeurr Flavie , qui leur donnoit toutes les con- - noiffances dont elles avoientbefoin, yv a echoue & n'a point empeche les reli-» gieufes ,ni d'avoir les communications = & de recevoir les avis qui leur etoient neceflaires >. ni de devoiler dans des: proces verbaux les injuftices criantes ,- dont leurs perfecuteurs vouloient par • lionneur derober la connoifTance air public. Tandis que la mere Eugenie tachoit _ XV.' ■
ainfi de fe rendremaitrefledelaplace & mi- |W «n£| d etablirfapretenduefuperioritedafceurgieufes de. W • Flavie faifoir d'un autre cote tous fesR* efforts pour feduire les efprits & leur perfuaderde figner le formulaire & de-/ fc ibumettre a M.. de-Paris, a qui elle- |
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'$0 HlSTOIRE DE PoRT-RCfMt^
"**T7TT avoit fait efperer qu'elle en gagneroiS
plufieurs, parcequ'd y en avoit beaiv- coup qui avoient confiance en elle. G'eft ici le fnjet de la douleur la plus vive que pouvoient avoir les religieu- fes de P. R. Leur plus douce consola- tion avoit ete , jufqu'a l'enlevemenc de leurs cheres meres , dans la paix & l'union qui regnoient entr'elles; mats le demon de la difcorde leur enleva ce precieux avantage : & celui qui avok permis qu'il fe trouvat an traitre parmi fes difciples, permit qu'il s'en trou<- vat parmi fes epoufes, afin qu'ellas participafTenr a fon calice , & qu'elles euflent encore ce trait de conformite avec leur divin epoux. Devoilons ce nouveau myftere d'iniqtiite. xvr. La fceur Flavie, fi fameufe par fes ds- liT^° j^'lations & fes intrigues, etoit deja chan-
vie. gee depuis long- terns; mais le principal objet de fa politique dans le commen-
cement fut de cacher fa veritable diipa- • fition, afin de tromper plus facilement fes fceurs fideles, avec lefquelles elle etoit encore unie en apparence lespre^- miers jours apresl'enlevemenrCioJ.Elle temoigna meme beaacoup de chagrin de n'avoir pas fi'gne le proees verbal $ parcequ'elle crut que les retigieufes l'a* <l»). liiii. des p?rfec. p 341. n. 1 j . it, jjrt |
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II. Part it.. Llv. Hf> 4*
Voient fait par defiance d'elle , quoique ce rut par oubli, & parcequ'elle nes'e- toupas trouveei l'alTemblee : elle s'en plaignit fort amerement a la foeur Ge- nevieve de l'lncarnarion (n), en lui difant que ces Meilieurs avoient re- marque qu'elle ne l'avoit pas figue. C'e- toit ce qui la fachoit, parcequ'elle ne vouloit pas qu'ils-foupconnaflent qu'elle etoit difpofee a (tgner le formulaire > Sc elle avoir fans doute deffein d'en- tretenir communication avec eux le plus longtems qu'elle pourroit pour en tirer des lextres & des ecrits , afin de les trahir enfuite , en les mettanc entre les mains de M. L'Archeveque ,. comme elle en a mis quantite d'autres.. Elle ne laifla pas , malgre fon cliange- ment, de figner le proces verbal la fe^ conde fois , lorfqu'il fut rapporte pour y faire quelque changement; il fut aufli figne de toutes les foeurs qui fiV gnerent depuis le. formulaire , & qui ctoient meme des-lors dans la difpofi? tion de fe foumettre. Mais apres la fignature du proces verbal , la fceur Flavie & la foeur Doroth.ee a'iant trou- ye a redire a quelques expreflions, qui (11) La fceur Genevieve pat les religieufes , quu
etojt regardee en qualiiS u'avoient plusni AbfciEUCj.
d'ancienne de.Ia majfori , niPrieute,
nonune la Supcrieuie , |
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4f% HlSTOIRE DE PORT-Roi'Al.
J(J<j4. pouvoient choquer M. 1'Archeveque J
on le rtforma encore, &c il fur figne de toute la communaute, excepte de la; four Flavie, qui die qu'elle ne vou- loit pas figner. Lorfque cette piece pa* rut dans le public , quelques perfon- nes y trouverent a redire , pretendant <}u'elle n'etoit pas affez conforme an refpect qui eft du aux fuperieurs; 8c qu'elle ne pouvoit que produire uw mauvais effet en irritant M. I'Arche- veque. Alors M. Arnauld en prit la derenfe, & refuta folidement ces rai- fons par un ecrit, qui fe trouve dans le neuvieme volume du recueil de fes lettres, pag. 108. On trouvera dans cec euvragedigne du grand Arnauld,la jus- tification des religieufes de P. R. fur le pretendu manque de refpecl:, foit dans le proces verbal, foit dans les conferences avec M. de Paris, M. Cha- millard & autres,dans lefquelles il leur Cchappoit quelquefois des expreiliona un peu vivesfn). xvrf. Dans ce commencement, les pri- on donnefonnieres recevoient des avis par des wis delatra- f , , , . , r .
Wfon aux re- perlonnes du dehors , qui les avertii-
ligicufes.quifbigrir qu'elles etoient traKies (1?).. croire. Lcut- (ft) Ce proces verba! a' (ij) Ibid; Rel. de la-
tourment &«te rei'mprime en 1751 , fceur Pineau j p. J40,, B4- isnjnieuide a dans le Tome 3 des riei 10, u , M«. ¥^uj*t. Mif. p. 171-188* ■ |
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H. Parti e. Llv. III. 4$
Irtais ces pauvres filles accoutumees a
juger favorablement, & qui n'eroient dans l'efclavage, que parcequ'elles ne vouloient pas raire de jugement reme- raire,nepouvoientfeper{uadercequ'on leur mandoit. Enforte que M. Doam- loup etant venu dans ce meme tems a la maifon , & aiant demande a la four Genevieve de l'lncarnation dans ?uelle difpofition etoientles religieu-
es , elle repondit bonnement, que' toutes les foeurs ecoient bien fermes. Mais M. Doamloup lui parla d'une maniere qui lui fit voir qu il en favoit plus qu'elle, la-de(Tu$: furquoi la foeur Genevieve lui dit encore : Quoi, Mon- Jieur , ave^vous appris quelque choje de certain : 11 mtjemble, que toutes- nos faurs- font refolues drmourir plu* tot que d'offenfer D'uu. Vers le meme' tems , la four Euphrofine ditaufli avec douleur a la four Genevieve: » Ma »> four, j'ai vliM. l'Archeveque •, mais ■»# il faur neceffairement qu'il y en ait » quelqu'une d'entre nous, qui lui. » dife rout: car il favoit exadtement » tout ce qui s'eft pafle dans ce mo- »>- naftere du tems de nos.meres ; celas ». eft pitoi'able. Il n'y a rien de fi fe- » cret, dont on ne l'ait informs auflis- n& bien que M. Chamilkrd.»»> |
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44 HistoirE de Port-roi'a*.'
Toutes ces circonftances reunies t\6
laiflerent pas de faire impreffion fur l'efprit de la fceur Genevieve de l'ln- cacnation , & lui perfuaderent peu & peu qu'il fe formoit un parti & une divifiondans lacommunaute. Plufieurs fours entrerent dans fes vues, enforce que la chofe leur parut prefque certai- ne. Et ce fur pour elle un fujet d'afflic- rion tel qu'on peut fe l'imaginer. La vue des fuites d'une telle divifion , Tincertitude & l'ignorance al'egard da eelles qui formoient ce parti, la ne- cellite ou cela les mettoit de fe derier les unes des autres, ne connoiffant point eelles qui les trahifloient;y a-t-ilfitua- tion an monde plus affligeante que celle-ld 1 Chacune de ces pauvres iilles etoit obligee de concentrer fa dou- leur en elle-meme, fans pouvoirla de^ couvrir, dans la crainte de s'addrefler a quelqu'une des ennemies. Lorfqu'il falloit deliberer furies af-
faires dela communaute, elles etoienc contraintes de prler devant eelles qui ne les ecoutoientque pour les trahir, 8c ainfi reduites a ne pouvoir communi- quer, ni en commun , ni en particu- lier, de leurs affaires , fans nn danger -inevitable d'etre trahies. Si leur refb- Ikuion etoit crop douce & trop refpeg# |
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II. Partii. Llv. III. 45
iftieufe, cela donnoit prife fur elles j 1664-. ii elle etoit trop forte , elles s'expo- foient a etre traitees avec encore plus de dutete. Elles marchoient ainfi con- tinuellement encre deux ecueils , fans prefque pouvoir eviter Tun qu'en fe jettant dans l'autre. Quel embarras pour chercher & trouver des moi'ens de ne donner lieu ni a l'un ni a l'autre de ces inconveniens I II fe prefentoit ncanmoins desoccafionsou elles etoient dans la neceffite de faire paroitre leurs ^ veritables fentimens 5 & de temoigner
le refpect qu'elles devoient aux veri- tables & legitimes fuperieures qu'on leur avoir enlevees , 8c qu'elles nepou- voient reconnoitre , ni la mere Euge- nie , ni M. Chamillard. Elles leur de- claroient meme qu'elles ne pouvoient les regarder comme aiant une autorite legitime, puifqu'elles ne les avoient pas choifis. Cette fermete les fachoit extremement & fut caufe qu'ils com- tnencerent a publier des calomnies atroces centre ces vierges innocenres , debitant qu'elles etoient dereglees, qu'il y avoit des defordres inouis parmi elles , & qu'il n'y avoit pas forme de religion. M. Chamillard alia jufqu'a dire qu'il n'y avoit pas meme de l'hcta*- jnetete entr'elles. |
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4<f HrsTome de Port-roiae.
- jTjjgT Au milieu de tant d'affli&ions , le» xviii. religieufes captives recevoientquelqua* tes prifon f0is des ecrits, qui leur etoient en- Ilieres fe tor- .., , . 1 , r • 1
tifienc par la voies parties amis , pour leur iervirde
leaure dcs confolation. Elles fe partageoient en ■tents qui leur ■ i 1 t- *»• °„ if
JfontenYoi'es. trois bandes, en divers lieux & en de-
ferens terns pour les lire •, ce qui leur reuffiiloit aflez heureufement& fervoit beaucoup a les foutenir 8c a les confo- ler. Il y en a qui ont depuis aflTure , qu'il etoit venu de ces ecrits dans des terns oii elles ne favoientplus cequ'el- Ics devoient faire , a caufe de 1'extreme accablement d'efprit ou elles etoient, & que ces lectures les avoient entiere- ment determiners a demeurer fermes :pour la verite (14). Un jour que ces pauvres filles etoient affemblees , en- viron au nombre de douze , pour lire •tine lettre que M. de fainte Marthe ieur avoit ecrite, la fceur Euphroflne , -dont on ne pouvoit encore fe defier , s'y etant trouvee, en donna avis a la •mere Eugenie, qui fit i ce fujet une reprimande fi forte , que ces pauvres prifonnieres furent encore obligees de fe priver de la confolation qu'elles gou- toient enfemble, ne fachant qui etoient ■celles qui les trahiflToient. 414) Hid.'des perfec. Rel. 4e la fcrur Pineail i
*-J*»P-}«4- * |
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tl. P ARTIE. LlV. 111. 47
Pendant qu'elles etoient ainfi tra- 1664..
^rerfees au dedans par les foins & la vi- xix. eilance de la mere Eugenie & par la.M; charai1- o £3 r lard tourmen-
;rrahiion de leurs propres ieeurs , iur- te les reiigieu-
tout de la fceur Flavie; qui avoit, dit J^'SSlS la fceur Genevieve de l'lncarnation , monafteic, des inventions & des malices de demon pour les furprendre , M. Chamillard les exer^oit & les tourmentoit au de- hors a fa fac,on , c'eft-a-dire en faifanc des conferences : nouveau genre de fupplice comparable a ce que ces pri- fonnieres avoienc a fouffrir de plus dur au dedans , de la part de l'intrufe & des dyfcoles (15). Faudra-t il done, dit la foeur Chriftine , que nou<allions loutes les jemaines Ventendre ainji pro- phaner la parole de Dieu & fa veritit Voulant exercer fa charge de fuperieur, & s'imaginant avoir droit de prendre cette qualite dans le monaftere, M. Ghamillard continuoit a faire fes con- ferences routes les femaines. Il en fit entr'autres trois de fuite, rernplies de calomnies , d'impoftures 8c d'injures tontre les religieufes qui a/voient ete enlevees , & contre les perfonnes qui avoient conduit la comrrmnaute > les traitant d'heretiques , les comparant a Calvin & a quantite d'autres herefiar- (1.5)lb. j>. ><?,«. )«.
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4? Histoirs t>K Port-ro'i'al.'
~ i66a. 1ues ' ^ avanc.a hardiment & avec Ie
plus grand emporrement, parlant aux religieufes , qu'elles etoient engagees dans lesherefies de ceux qui les avoienc conduites, & qu'elles feroient marty- res du diable dans les enfers. xx. A la troifieme conference, ces vier- les teiigieu-ges chretiennes ne pouvant entendre
iesconfiren-debiter de telles calomnies dans la *? d.^. M: chaire de verite fe retirent la plupart« Le ranatique declamateur en rut li lr- rite , qu'il mterrompit fon difcours, en fe levant de fa place, 8c cria tout haut frappant des mains contre la grille : » Celles qui fortent, ne communie- « ront jamais , il y a des canons, qui ») excommunient ceux qui fortent « quand onprechela parole deDieu ». La fceur Flavie , jaloufe de l'hon- neur de M. Chamillard, ai'ant voulu retenir la fceur Angelique de faint Ale- xis , en lui difant: Vene^ , ma fceur , yousjire^ excommuniee , Jivous Jbrtefa celle-ci lui repondit: » Il n'y a que s> ceux qui fortent quand on preche " la parole de Dieu, qui font excom- » munies. Ce n'eft pas la la parole de t> Dieu. Que Ton nous preche la pa- rt role de Dieu 8i nous l'ecouterons ». Apres la conference, M. Chamil- lard fit appeller la fceur EuJloquie, 8c lui
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II. Part ie. Liv. HT, 49"
lui demanda fi elle etoit de celles qui
etoient forties de la conference •, el- le lui repondit ferieufement que non, qu'elle n'avoit garde d'en fortir. Il la loua fort, & l'exhorta a engager les autres a s'y rendre. Mais comme elle vit qu'il etoit plus fatisfait d'elle, qu'el- le ne'le fouliaitoit , elle lui dir que ce qui l'avoit empeche de fortir , etoit qu'elle n'y avoir pas aflifte, & lui fie entendre qu'elle etoit refolue de ne s'y jamais trouver. Alors M. Chamil- lard changea fes louanges en inju- res & en invectives, & lui dit avec beaucoup d'aigreur,quel'onfavoit bien le moien de la rendre a foil devoir ; ce qui occafionna une difpute aflez longue & aflez vive , mais peu glorieufe au declamateur. Depuis ce jour , plufieurs religieu-
fes fe retirerent des conferences , en- forte que bien-tot il n'eutprefqueplus perfonne , ni nieme afon confeflional; ce qui augmentoit de jour en jour fa mauvaife humeur. On les fonnoir aflez fouvent deux ou trois fois pour faire venir des fceurs ; mais cela etoit inutile. La fceur Genevieve & la fceur Marguerite etoient les feules , des bonnes reli^ieufes,qui s'y trouvoient, encore n'v afliftoient-elles que pour fa- Torm'r. C |
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50 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.
voir ce' qui s'y paflbit. La premiers
avoue neanmoins dans fa relation , que ces conferences lui fervoient beau- coup par la comparaifon qu'elles lui donnoient fujet de faire de la doctrine 8c des maximes fcandaleufes de M. Chamillard , avec la doctrine pure 8c les maximes faintes dans lefquelles elle avoir toujours ere elevee 8c nourrie precedemment. Le confeflional de ce faifeur de conferences devint bien-toc audi defert que fon auditoire, 8c me- me le petit nombre de celles qui con- tinuoient d'aller a confefle a lui, lui declaroient nettement qu'elles ne fi- gneroient jamais. Tout cela fachoit extremement M. Chamillard, qui, par la defertion de fon auditoire & de fon confeflional , fe voioit reduit a ne pouvoir prefque plus faire de fonctions de fapretenduefuperiorite ; il en fai- foit des plaintes a tout le monde , & fur-tout a M. l'Archeveque,a qui les re- ligieufes demandoient aufli de leur cote un autre confeffeur. Une pareille demande, qui n'etoit pas flateufe pour un homme de bonne volonre pour l'e- scercice du miniftere, comme M. Char millard , I'indifpofoit encore davan- tage. Toutes ces plaintes jointes aux zv'is fecrets que donnoieat la mere Eu- |
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II. P A R T I E. L'lV. III. 5 I
genie & la fceur Flavie , qu'il n'y avoic \C6s..
rien a efperer des religieufes oppofees a lalignatute> engagerent M. de Pere- fixe a venir en perfonne leur fake les menaces queM. Chamillardavoitinu- tilement faites de fa part. Les religieufes perfecutees demon- xxr.-.
derent & obtinrent le 10 de feptem- fes obUeifncnt bre des lettres de Choncellerie , par des Ieai« de lefquelles il leur etoit permis de faire tQ. affigner M. de Paris , &c tous ceux qu'elles jugeroient a propos, pour re- pondre au Parlement de Paris de routes les violences qui leur avoient ete fai- tes. Ces lettres furent fignifiees a M. l'Archeveque, a M. Chamillard &c aux religieufes intiufes , le 15 du metrve mois , avec affignation au Parlement. Mais il fut bien aife a celui qui avoir interetque fes violences & fesinjufti- ces ne fu(Tent pas condamnees , d'em- pccher qu'on ne fit juftice a ces filles,& il obtint un atret du Confeil par le- quel le Roi evoquoit cette affaire a (011 Confeil, & en interdifoit la connoif- fance au Parlement. Deux jours apres que les religieufes xxir.
de P. R. eurent obtenu ces lettres , fjf^fff c'eft-a-dire le li , le Prelat fe rendit r. dePaiisic" au monaftere a fept heures du matin : ^^fffj il dit la melTe , a laquelle il donna religieufes. Cii
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5& HlSTOIRE BE PoRT-Ro'lAL.
permiffion rle communier a routes cel-
les qui le pourroienc; il y en eut un grand nombre qui communierenr, Apres la meiie 11 monta au parloir, on il recur la fignature de fepr religieu- fes^) , dour M. Chamillard avoir fair la conquere. Ce fut pour le Prelat un jour de rriomphe. Quel triomphe 1 Egregiam vero laudem,fpolia ampla re- finis ; Quel rriomphe, dis-je, pour M, rArcheveque de Paris , & pour un dodbeur de Sorbonne , d'avoir renfli par les mauvais rrairemens , & par Ta- bus le plus marque de l'autorite , a ar- racher une miferable fignature de fepr religieufes , donr une parrie etoienc des efprirs affez foibles & bornes , &c donr quelques unes avoient beau- coup d'ambition. La gloire d'une telle vi&oire les de-
domraageoic-elle de la confufion qu'ils ont rant de. fois eifui'ee dans les com^ bats qu'ils' ont livres a leur honte aux religieufes qui font demeurees fideles a Dieu ; La chute de ces fept religieu- fes fur regardee differemmenr par cclles qui demeurerent fermes dans la (i«) i La focur Flavie, f La fccur Philiberre ,
t Ifabelle des Anges , 6 Ifabelle de S. Jofeph ,
5 M.irie Doroth-ie , 7 Catherine Ptlagie fja-
4 La faur Eupiirofijie f mcljji,
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H. Part ie. Liv. III. 5?
verite. Les unes n'en furent ni etonnees 1664.
ni ebranlees , d'autres en furent pene- trees de la plus vive douleur , 8c ce fut pour elles la plus grande affliction qu'elles euifent encore eue (16). M. de Perefixe paiTa ce jour de triom-
phe avec ces fept religieufes en conver- fatioas peu ferieufes (17). Elles etoient pour l'ordinaire telles •, & la fceur Ger- trude dit un jour a la fceur Genevieve de Plncarnation , que c'etoit une chofe pitoi'able que les contesqui fe faifoient de part &c d'autre. He que pouvoit-oni dire de bon , en faifant de fi mauvaifes affaires ? Sur les fix ou fept heures da foir , le Prelat demanda la communau- te,& temoignale mecontentement qu'il pretendoit recevoir de leur part. II fie beaucoup de menaces qui firent en- tendre clairement aux religieufes fidd- les , qu'elles devoient s'attendre a tout fouffrir. Elles le prefferent cependanc de leur donner un autre confeffeur , & lui dirent, en prefence de M. Cha- millard lui-meme »(ces bonnes filles donnoient en tout des marques de leur droiture & de leur fincerite) qu'elles (is) Rel. in-i,. RtcutU it fainte Claire, p,. Ifr
ic Iclttei. Lettre de la (17) Ibid. p. 371. foiur Jeanne Radegonde C iij*
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54 MlSTOtRE DH PbRT-ROIAt.
ne pouvoient plus avoir de confiance
en lui, apres ce qu'il avoir dit de leurs meres dans fes conferences , &: dans les eonfeffions: ( ce qui a fait dire phi- fieurs fois a M. 1'Archeveque que M. Chamillard lui avoit tout gate. ) Elles lui demanderent M. Cheron ; ce qui itoit inutile , comme le remarque la fceur Genevieve dans une lettre qu'elle ecrivit le lendemain de cette fcene, puifque M. Cheron avoit le pouvoir de les confeCer (18) •, cela prodnifit meme un mauvais effet; car M. Che- ion , qui avoit permiffion de confefler, etant venu le lendemain,reciit un ordre du contraire de la part de M. l'Arche- veque, de forte que les religieufes fa- tent obligees de le demander derechef. M. Chamillard qui n'etoit pas trop flatte de rempreflement que les reli- gieufes temoignoient pour avoir un autre confeflfeur, repondit qu'elles n'e- toient pas en etat de recevoir les Sa- cremens. Sur quoi la fceur Francoife Louife Claire l'entreprit & leprefTa tres vivement. Apres avoir rapporte ce qui s'etoit parte entre lui & elle , lorf- que voulant lui expliquer fes difpofi- tions au fujet de la fignature , il lui |
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(i8) Rel. in-4. Rccueil dc lettres, p. 14.
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II. Part tE. Liv. III. 55
avoit die > fans vouloir l'entendre • TgGa.."
Taifc^-votis , mafdlt , taifc^-vous , laif- fe^-vous donntr fabfolution ; elle ajou- v
te : « Ou j'etois coupable , ou je ne
» l'etois point. Si j'etois coupable ,
» pourquoi nevouliez-vouspas m'en-
» tendre,& pourquoi m'accordiezvous
» les Sacremens fans me vouloir en-
» tendre ? Et fi je ne l'etois pas alors ,
" je ne le fuis pas devenue ; car je fuis
» dans les memes difpofitions «. L'ar-
gument eft preflfant, il faut l'avouer ;
II eft fans replique. Audi le repondant
refta-t-il court: il cherchoit a s'en tirer
en changeant de thefe , niais le preii-
dent vinta fon fecours & parla d'obeif-
'fance. Apres avoirdifcourulong-tems,
& avec beaucoup de vehemence, il finit ainfi : » Enfin , mes filles , ne m'o- t> bligez pas a vous faire fouffrir &c a » fouffrir avec vous : car je ne fouffri- » rai jamais que ce monaftere foit un » nid de janfeniftes ». Il ajouta que le diable avoit fes mattyrs , voulant leur faire entendre qu'il les feroit affez fouf- frir pour en augmenter le nombre (19). Depuis cette exhortation , M. Cha- xxirr.
r M. Chair.it-
lard continue
(19) Ve>Vez dans la re- entreelle & !e Prclat dans fes confereu? lation de la fceur Angeli- cette vifite. Vies edif. T. «s. <jucde Saint Alexis d'He- j , p tjo. caucoun , ce qui l'c pafTa Civ
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56 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.
1604. millard commence a precher l'obliga-'
tion de la Signature foils peine de dam- nation , & refufa en confequence 1'ab- folution a plufieurs de celles qui alle- rent a confelTe a. lui. Il continuoit aufll fes conferences ; mais voi'ant que fes declamations precedentes lui avoient peu reuffi , il changea de methode & parla des vertus.Le jour de la Prefenta- tion de la Ste Vierge , les filles de Ste Marie renouvellerent leurs voeux, felon l'ufage de leur ordre.En faveur de cette ceremonie , il fit trois conferences fur les trois vceux ; la premiere, fur la pau- vrete •, la feconde , fur la chafrete , au fujetde laquelle il dit des chofes fi re- voltantes , que les religieufes qui y af- ♦ fifterent firent tout leur poffible pour ne rien entendre , &c prioient Dieu qu'il leur fit la grace d'oublier ce qu'el- les avoient entendu; la troifieme con- ference fut fur l'obeiflance , qui lui donna occafion de debiter bien des pa- radoxes & des extravagances. Ce fut apres ces trois conferences , que la communaute prit le parti de n'y plus allifter. X**9' . Les fceurs qui avoient figne tcmoi- que les reii- gnerent a M. 1 Archeveque qu elles ap- gieufo tom prehendoient extremement le retour de m. de Paris, celles qui avoient ete enievees, parce- |
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II. Part ie. Liv. 111. 57
qu'ai'ant figne , elles craignoienr , a \66ju,
ce qu'elles difoient, d'en etre plusmal
dans leur efprit , & de ne pouvoir
s'accorder avec elles (10). C'eft ainii
cju'avec la verite elles abandonnerent
leurs legitimes fuperieures. Les faeurs
Flavie , Dorothee & Philberte, le fup-
plierent de leur promettre , qu'en cas
qu'elles revinffent, il les mettroit dans
d'autres mohafteres. Mais M. de Pa-
ris les raflura , & leur dit, que celles dont elles craignoient le retour , ne re- viendroient jamais, pas meme apres fa mort , & qu'il y avoit mis bon or- dre. Il y eut auffi quelques autre* fceurs qui dirent a M. de Paris , que celles qui refufoient de fe foumettre » le faifoient parcequ'elles s'etoient en- gagees par ferment fur les faints Evan- giles, en prefenee des meres , a ne ja- mais figner. Le Prelat fur charme de cette pretendue decouverte , s'imagi- nant qu'elle lui faciliteroit le mo'ier* de venir a fon but, &c qu'en les rele- vant de ce pretendu ferment, il les engageroit a figner. Ce fut dans cette* vue qu'il les prefla plufieurs fois , fur- rout dans fa conference du 1 z fepterrr- bre , de lui avouer qu'elles avoient £aie Jiq) Hift. des perfec. p. 374,
c -*
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5# MlSTOiRE DE PoRT-ROl'At;
ce ferment avec leurs meres, en les af-
furant qu'elles ne retourneroient ja- mais ; ce qu'il difoit, afin que celles qui feroient difpoftes a figner n'en fuf- fent point empechees par la crainte d& paroitre devant des fuperieures qu'elles auroient abandonnees en abandonnant la verite". Il fit beaucoup de promeflTes &de menaces ; mais ni 1'efperance des biens , ni la crainte des maux de ce monde , ne firent impreflion fur des cceurs qui n'avoient d'attache qu'aux biens eternels , & qui ne craignoient que d'offenfer Die i. „ Quoiquefaifent les hommes ils
» ne fauroient nous oter la pierre " immobile fur laquelle font etablis »> tous ceux qui font vraiment a Dieu > » leurs violences memes ne font qu'af- » fermir davantage ceux qu'ils croient » renverfer. Il n'y a que les pailles, v comme dit fi fouvent faint Auguf- » tin , qui foient brulees dans ce feu » de la perfecution ; mais Tor en de- » vient plus pur. Nous le voionS bien, *» & ce nous eft un double fujet de »> gcmilTement 8c de joie. Dieu a » voulu cribler fon aire. Malheur a » celles que le vent de ce lcandale a » emportees , non pas hors de leur » maifon temporelle , mais hors de |
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U. Partih. Liv. III. 59
" l'etemelle , qui eft Jefus-Chrift; \C6±. " qu'elles one miferablement aban- >» donne pour fe conferver l'autre. Et » que celles-la au contraire font heu- » reufes , dont la vertu a ere a l'epreu- " ve d'un fi grand choc , & qui one » prefere le repos de leur confeience , » parmi les plus mauvais traitemens, » a la faufle paix que leur auroic " procure une mauvaife complaifan- » ce a des commandemens injuftes L » Notre fiecle n'etoit pas digne d'un » tel exemple: mais il etoit bien digne » d'une telle barbarie,& encore plus de » l'abandonnement ou fe trouvent ces » vi&imes de la verite. Mais elles font " dans la main deDieu, d'ou perfonne »» ne les pourra arracher. Ayions foin » de nous y tenir, & nous ferons a cou- » vert de tous les orages du monde(i i). Ces religieufes fideles a Dieu , a la
verite & a leur fuperieures legitimes , ecrivirent le lendemain une lettre en commun a leur chere mere abbefle , pour lui renouveller les fentimens de refpect qu'elles avoient pour elle , Sc lui faire part de cette vifite (zi). Les fceurs qui avoient figne le jour uf^$kxl.
de cette vifite , fe feparerent des lors fesfiddesper- fecut£es par
(11) Arn. lctt. 47. T. 8. (n) Voi'ez la rel in-4. leuwf<rurs. f.151. RtiHtilde letttes t p. 11. C vi
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60 HlSTOIRE DE PoRT-RoTAI.'
~"de la comrriunautc , pour fe joindre-
aux intrufes , & elles firent bien^ tot voir un auili grand changement dans leurs moeurs que dans leurs fen- timens, etant auili infidelles a leurs de- voirs & a leur regie , qu'a. Dieu , a la. verite & a leur eonfcience. Depuis- leur deplorable chute , elles devinrent les plus cruelles perfecutrices de leurs fours , agiffant a leur egard comme- des ennemies declarees, veillant con- tinuellement fur leurs actions pour les furprendre , & pour les empecner d'a- voir des communications au dehors , jufqu'a paiTer les nuits dansdesgreniei'9 a regarder par les fenetres, pour voic fi on leur apportoit des papiers a la faveur des tenebres. C'etoit pour le3 leligieufes fidelles le fujet de la plus vive douleur , de fe voir non-feule- ment abandonnees, mais encore trai- , tees avec tant de durete par leurs pro- pres fours , qui ctoient encore les premieres a fe plaindre d'elles, comme fi elles les euflent maltraitees. Celt dans l'exces d'une femblable douleur que David reflTentoit fi vivement, qu'il s'exprime ainfi: » Si celui qui me naif- » foit avoit parle de moi avec mepris » & hauteur, peut-etre que je me fe- » rois cache de lui. Si celui qui ecok |
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II. Par tie. Llv. 111. 6t
* mon ennemi m'avoit charge de ma- Idd*. » ledi£tions, je l'auroisplutot foufferr. " Mais c'eft vous qui viviez dans un " meme efpric avec moi, qui etiez le » chef de mon confeil, & dans mon' » etroite confidence, qui trouviez tant » de douceur a. vous nourrir des me- " mes viandes que moi, & avec qui je » marchois avec tant d'union dans la » maifon de Dieu. La fceur Flavie fe diftinguoit par- XXvr:
mi toutes les autres: on la vo'ioitfilns Monde la celTe courir d'tin lieu en un autre, avec jjfjjj ^^J. ' un vifage pale & egare, femblable £*Attente «w un loup aflame , qui cherche quelque'?",."^,. pauvte brebis pour la devorer. De- puis le ix fcptembre jufqu'au 24 du meme mois, elles agiiroient avec un- pen plus de moderation , parcequ'el- les n'avoient point encote d'autorite, n'etant point dans les charges. M. de Paris avoit donne cet intervalle de douze jours aux religieufes oppofantesf a la fignatute pour deliberer entr'elles' fur le parti qu'elles avoient a prendte' en confequence de fes promefTes & de' fes menaces. Pendant cet intervalle, Dieu delivri.
de la main des perfecuteurs & mit enr liberte une des prifonnieres. Ce fuff |
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6% HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt;
166a.. la tew Jeanne de la Croix Morin, qui
mourut d'une attaque d'apoplexie. Cette bonne religieufe avoit demar.- de a Dieu le jour de fainte Croix ( 14 feptembre ) de lui faire la grace de mourir plutot que de rien faire con- rre fa confidence : fa priere fut exau- cee , & elle mourut quatre jours apres le 1 8 feptembre d'une maladie qui la preferva des aflauts qu'elle auroit eus afoutenir de la part de M. Chamillard Sc de la fceur Flavie , qui ne la quitta pas d'un moment. Elle avoit ete con- feree huit jours auparavant, & avoit communie le dimanehe. ' Les autres religieufes s'attendoienc
de jour a autre a. etre enlevees, fuitout la foeurEuftoquie de Flefceles de Bregy, & la fceur Magd. de Ste- Chriftine Bri- quet, parcequ'elles etoient les plus en butte. " Je penfe vous dire a tous par » cette lettre, le dernier adieu, die » la fceur Euftoquie. Car allurement » nous avons lieu de croire ma fceur » Chriftine & moi , que nous allons " etre menees d'une etrange facon .. . » Je m'eftimerai infiniment heureufe » d'etre facrifiee en la maniere qu'il » plaira a Dieu pour une caufe fi fain- n te, pouryu qu'il me falTe la grace de |
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II. P A K T I E. L'lV. 111. ff
» eonferver jufqu'a la fin ce depot de
" verite(i3). » Je fuis prete a tout,dit la fcrurChrif-
" tine Briquet, & s'il faut etre maudite » de tout le monde y a la bonne heu- » re; fi on me devoile, qu'on me don- « ne des foufflets, qu'on me banni(Te , » on n'a qu'a faire ce qu'on voudra, '• je m'eftimerai trop heureufe de fouf- " frir pour une fi bonne caufe, 8i » de pouroir obtenir par ce moi'eri » la remiflion de mes peches. Von » dit qu'il eft bien afliire que ma foeur » Euftoquie & moi, fortirons lundi » au plus tard .... Quoi que ce » foit que Ton me puiffe faire, j'y » fuis toute prete. J'apprehende feu- « lenient de n'etre pas n maltraitee que » lesautres, en confiderationde mon »> oncle ( M. Bignon). Je vous avoue » que j'auroisde la douleur de porter » encore en cela les marques de la » vanite du monde , auquel Dieu m'a » fait la grace de renoncer (14). On peut juger par ces expreflions
comparables a celles da grand martyr faint Ignace , dans les lettres qu'il ecri- vit fur fa route , lorfqu'on le condui- foit d'Antioche a Rome pour etre mar- (i;)Rel. in-4. Rtcutil (M) XemtilJt Uttrts4
it Ultra, p. ». ■ &c. Relat.jn-4'P-*^«
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(?4 HfSfOIRB DE PoRT-ROlAt;
tyrife , du courage que Dieu mettoir
dans le cceur de ces vierges chretien-- nes (25). M. deParis voi'ant qu'il n'avancpitrien
par ces delais & par reus les moi'ens- qu'il avoit empioies , & perdant efpe- rance que le grand nombre de celles qui eteiertt demetirees apres l'enleve- ment des denize, fe rendit; il fe trou- va fort embarrafle , a caufe du petit nombre de celles qui avoient figne 8c de leur incapacite pour remplir les- charges, etant la plupart d'une ver- tu fort commune &c d'une capa- city tres bornee; Tant de circonf- tances firent manquer toutes les me- fures qu'il avoit prifes pour reuffir. Et comme d'ailleurs le proces ver- bal commencoit a paroitre , figne- de route la communaute , il forma un nouveau delfein , qui fut d'en venir aux effets , fans abandonner les menaces- qui fe renouvelloient de jour en jour , avec des duretes capables de faire fe- cher ces pauvres filles de douleur & de crainte , fi Dieu ne les avoit foute- nues dans un fi grand accablemenr., Elles ecrivirent le 22, feptembre une (if) Voi'cz encorel'en- re, Rel. in-4. Recuell it
trstien de la <ceur Eufto- Ultra }p. i;-, 16. quie »ycc Madame fa me- |
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II. P A ft. T I t. Llv. 111. 65
Iettre a M. de Paris, pour tacher de le 1664, toucher en lui reprefentant les maux e.ffroi'ables que caufoit dans leur mo- naftere Texaibion de la fignature du formulaire. Cecte Iettre eft trop belle pour ne la pas inferer ici. » L'extreme douleut ou nous fom- xxvrr.
1 n ' i • Lercre des
» mes de voir notre monaltere reduit reiigieufes da
* » en un etat de faire companion a toutp- *•d= pf 1 1 01 r 1 ,' til i M. «5
" le monde , 6c en danger de tomber Petefixe^
» dans une entiere ruine , nous por- » te a nous profterner a vos pies , pqur » vous fupplier tres humbfement de - confiderer devant Dieu les etranges » malheurs que caufe l'exaction de la- » fignature du formulaire ; cela vous » portera fans doute a avoir quel- » que condefcendance pour notre fal- si ble'lTe, & a la fupporteravec charite » & patience, &c a nous exempter d'u- » ne loi fi dure. Il y a cinquante ans' » que cette maifon eft par la grace de » Dieu dans une intime union d'ef- » prits & de caeurs, dans une exadre- » obeiftance, & dans la pratique d'u- » ne continuelle priere. Nous n'avons' *> point fu jufqu'ici ce que c'eft que' « de defirer les charges, 3c tout notre- >t zele au contraire etoit de les fuir : « perfonne ne cherchoit fes interets , » maisfeidementceluideJefus-Chriftj |
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66 HlSTOIRF. DE PoRT-Roi'At.'
xd64. " & Pour recompenfe il prefidoit 1"
» nos alfemblees; & pour marque de .. » fa prefence , il nous donnoit une par- jj faite concorde dans l'ele&ion de nos » meres. Nous avions la confolation » d'etre defintereflees dans notre pau- » vrete , & riches par la charite que » nous nous rendions les unes aux au- » tres. C'etoit-la toute la fcience qu'on » nous enfeignoit, & dun's l'exercice « de laquelle routes nos fours qui onf » eu le bonheur de rriourir avanr ces »> mauvais jours , fe font fan£tifiees< » Qui doute * Monfeigneur , que ce » ne foit l'ennemi de notre falut , » qui nous a ravi cet heureux repos » ou nous etions, & qui a fait de ce a lieu un figne de contradiction &C » un etrange fpectacle > Depuis que » nous fommes dans la fouffrance, on « nous reproche que Dieu nous a aban- » donnees , on nous fait un crime de » ce que nous fommes dans le trou- » ble ; mais ce font ceux memes qui » font ces accufations, qui nous trou- »» blenr. Onditqu'il n'y aprefqueplus »» de difcipline dans notre monaftere ; » nous tachons de la garder le mieux » qu'il nous eft poflible ; mais quand v il feroit vrai qu'il y auroit quelque » relachementj n'avons-nous pas iu- |
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II. Part ie. Llv. HI. 67
*» jet de nous plaindre qu'il vient de
*> l'abfence desperfonnesquiveilloient » fur nous &c qui etoient !es pierres * fondamentales de cette maifon. » Quel eftle monaftere,quelque fon-
« de qu'il foit dans la piete , qui ne w fut ebranle par une fi grande tempe- » te 5 On fe plaint que nous n'avons pas " toute la deference que nous devrions ») a. nos confeffeurs 5 mais on n'ecoute » point nos plaintes , quand nous ge- » miflons de ce qu'ils ne nous par- « lent que pour tenir nos confcien- » ces dans une continuelle gene. On » nous traite de revoltees, & on ne »» confidere pas que toute notre faute - eft de refufer un joug que Ton n'im- » pofe point aux perfonnes feculieres, « qui- vivent & qui meurent dans la »» communion de I'Eglife, fans qu'on » leurparledeces queftions. On nous- » traite dedefobeiflantes, &onavoue » qu'on exige de nous une chofe que » jamais I'Eglife n'a exigee des per- » formes de notre condition , &c qu'il » n'y a nulle neceflite d'exiger. Une in- » finite de perfonnes fignent fans rien » croire de ce qu'ils fignent; ils le di- » fent publiquement, & n'en font pas » moins bons catholiques. Tout le « mal que nous faifons plus qit'eux^ |
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6% HlSTOIRE DE P0R.T-R0YAI.
\66a, » c'efl: que nous fommes linceres &i
m que nous ne voulons pas agir comme
» eux contre le mouvement de notre^
» confcience; & cependant ils font
« dans la reputation de perfonnes
» rres innocentes; mais pour nous, on
» nous traite avec d'extremes rigueurs.
» Si routes ees rigueurs fe termi- » noient a tourmenter nos corps, nous
» ferions tres contentes. Mais notre
» douleur eft qu'elles fervent a in-
» troduire dans ce monaftere l'efpris
» du monde , le fchifme & la divi-
« fion. La fignarure qu'on nous de-
« mande eft un miferable moi'en pour
» routes les religieufes qui voudront
« s'elever au-deffus de leurs fceurs ,
« de fatisfaire leur ambition. Elles
.j s'en ferviront pour fe faire valoir,
» & pour meriter d'entrer dans les
» charges. C'eft audi un piege aux
» ames foibles , qui ne fachant ou fe
» mettre en furete dans cette tem-
» pete , fe peuvent rendre a ce qu'on
» leur dit, non par la lumiere de ce
» qu'on leur dit , mais par l'impor-
» tunite qu'on leur fait &parcequ'el-
,> fe laffent d'y refifter. S'il y en a par-
,, mi nous d'afTez malheureufes pour
» s'ennu'ier de la difcipline de la mai-
P fon, elles auront encore recours a
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II. Parti e. Liv. III. 69
'» la fignature , pour oter le joug de
« Jefus-Chrift de deflus leur tete , » fous pretexte de fe foumettre a ce « nouveau joug , qui ne fort a morti- » fier ni le corps ni I'efprit. Voila. » les maux qu'inrroduifenc dans cette » maifon ceux qui tachent de nous » fake figner. Malheur aux ames qui " tombero-nt dans ce piege. Mais con- » fiderez aulli, Monfeigneur , quel » eft le malheur de ceux qui mettent » devant nos pies ce fcandale pour »-> nous faire tomber. Permettez-nous^ » Monfeigneur , de prorefter devant u Dieuque nous fommes innocentesdu » fang de toutes les ames qui s'affoibli- v ront & qui par leur chute feront caufe » de la ruine de certe maifon. Perrnet- => tez-nous, Monfeigneur , de vous » declarer avec tout le refped qui " nous eft poffible, que 11 ce monaf- *> tere eft fe temple de Dieu , nous » avons grand fujet de gemir du mal- » heur de ceux qui travaillent a le rui- » ner ; & fi Dieu a permis par un fe- » cret jugement, que vous nous ayiez » traitees avec une rigueur route ex- » traordinaire , nous vous fupplions » de vous contenter de ce que nous » avons foufferc , de ne nous pas jet- tt tcr dans le dernier accablement {% |
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70 HlSTOIRE DE 'PoRT-ROlAI..
7^7 " de ne nous pas faire tout le ma1
" que pourroient fouhaitter nosenne » mis , & plus qu'ils ne nous en pour » roient faire eux-memes , 11 nou jj etions entre leurs mains. Vous fa « vez, Monfeigneur, que Jefus-Chrif « vous demanderacompte de la moin « drebrebis,qui s'ecarteradutroupeai " ou que les betes devoreront, Stqu'i » condamne les pafteurs qui traiten » leurs ouailles avec empire & durete « Mais,pardonnez cette parole , quellt « durete plus grande que de nou 3> avoir arrache nos meres , pour nou « mettre en des mains etrangeres , £ » puis de nous aftujettir a un confef » leur qui vous anime contre nous s> & qui eft pen touche de tous le »> maux que nous fouffrons Voilapeut » etre , Monfeigneur , la derniere foi » que nous vous demanderons quel w que grace , ne rejettez pas nos tre w humbles prieres, com me vous defl » rez que Dieu ne rej etre pas les vo »> tres. Si vous nous refufez quelqui » foulagement, vous nous donnez •j routes le coup de la mort, & nou si dcfirerions qu'elle fur auffi prompt » que celle de notre chere fasur, ait » la douleur de l'afflidtion a fait mou v rir en peu de tems ( Jeanne de fain |
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II. Part ie. Llv. III. -;\
w te Croix Motrin ) & dont nous en- " » vions le bonheur. Mais dans la >• mortmeme nous nous fouviendrons » que vous etes nocre pere , nous de- » mandons pour vous la mifericorde » que vous nous refufez : nous aurons » toujours pour votre Grandeur un tres » fincere refpecT: •, & nous vous fup- » plions feulement que le monden'aic « pas occafion de dire que nos peres » font nos parricides. » Mais n nous ne meritons pas ,
« Monfeigneur , que vous foiez tou- » che de nos maux, & que vous ay-iez » refolu de nous immoler de vos pro- " pres mains , nous nous contente- w rons d'en gemir devant Dieu, de » lui montrer la fincerite de notre » coeur. Notre affli&ion fera notre » feule defenfe ; nos gemiflemens & »" nos pleurs feront routes nos armes; » notre oppreflion fera toute notre » force •, &c nous efperons que fi cet » etat ne flechit point la durete des » hommes, il attirera fur nous la mi- s' fericorde & la benediction de Dieu. |
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\GG\.
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» La derniere durete de ceux qui
>» oppriment les innocens par leur au- » torite , dit le pere Gerberon , e'eft » que quelque cnantesque foiendeurs |
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■""MM-------------------------------------------------------------------------------------------- ------------- ---------7-
■Jt HlSTOIRE DE PoRT-Ro'JAr..
j<$64. » injuftices, ils ne peuvenr fouffKr
» qu'on s'en plaigne. Rieii ne Chaga- ll noit tant M. de Perefixe que de voir » que les religieufes de P. R. qu'il » avoidant maitraitees, faifoient ecla- m ter leurs plaintes par des aires ou » proces verbaux qu'elles avoient dref w fes de roures les violences que cet » Archeveque leur avoir fakes ; & » qui etant devenus publics expofoient w aux yeux de rout le monde fes er- » reins , fes emportemens , fes injuf- » tices & la tyrannie de fa domina- » tion. Il vouloit done etoufFer & la « voix & les plaintes de ces innocen- » tes viirimes , & les contraindre de « revoquer furrout les acles qu'elles » avoienr drelfes de la defenfe qu'il » leur avoit faite d'approcher des Sa- ri cremens,& de l'enfevement de leurs » meres , fans aurre crime que de ne » vouloir pasartefter & jurer fur fa pa- • » role, que V propofuions heretiques j> ont ete tirees dulivre d'un fainr Eve- " que (2.6). w^ Tl' • Le terme que M. de Perefixe avoit
M.dc Paris , , , ^ . , .. .
viem a P. R. donne , etanr expire, 11 vint a P. R. le
24 feptembre de grand matin pour
executer fes nouveaux projets , & y
pafTa le refte de la journee. Il s'v tour-
in) Hift. du JiUfcnif. T, } ' p. J )p.
menta
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II. Part ie. Liv. III. 7.3
Sftenta beaucoup Sc tourmenra encore"
plus la communaute; & il eft bien a craindre qu'en pretendant faire des Martyrs du diabh (*7),il ne fe foittrom- pe lui-meme etrangement. Etant mon- teau parloir, il dit aux religieufes, qu'il venoit faire la lecture du proces-ver- bal (z8) & autres pieces, qu'il voulok favoir fi la communaute reconnoiftoit tout ce qui y etoit contenu. Il fe donna la peine de les lire lui-meme , faifant des pofes a chaque article pour de* mander fion avoit vu ce qu'il lifoic , parcequ'il s'etoitimagine qu'elles n'au- roient pas la hardiefte de le foutenir 'en fa prefence •, mais il fe trompa, comme en bien d'autres chofes ; & quoiqu'il pretendit qu'il etoit plein de fauflTer.es, les religieufes lui fourinrent hardiment & avec fermete qu'il ne contenoit rien que de vrai (19). Il demanda enfuite ■quelle etoit celle qui.avoit drefTe ce proces-verbal ; la foeur Euftoquie lui ai'ant repondu fort refpe&ueufement que c'etoit elle,illui dit qu'elle meritoit (17) C'etoir lineexpref- 1664.
fion favorite de M. de Pe- (Z9> Voicz les re!, in-4,' refixe. Retudl de leilm , &c. p»
(iS) Ce proces verbal 51 & fuiv. It. la rel»
contient la relation di ce Srde S. Alexis d'Hecau-
qois'eft parte a l'enlive- court. ViesedikT. ). g^
meat des 1 l . religieuCes, 300.
tie 16 aoiit de cette annee Tome V, D
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74. HlSTOIRE DE PoRT-ROlAL.
i(,(,. d'etre mife entre quaere murailles , Sc
d'y vivre au pain& a l'eau le refte de fes - jours , He qu'on la traiteroit de la forte ii on en croioit madame fa mere. Il y a lieu de douter que cette Dame , mal- gre fes preventions"injuftes contre une li digne hlle (j o), eiit autant d'inhuma- nite que M. de Paris lui en attribue. Il fe palla encore beaucoup d'autres cho- fes a la lecture de ce proces-verbal &c de la lettre , dont le detail nous con- iduiroit trop loin. Sur le foir , le Prelat voulut parler
a routes les foeursen particulier avant que de depofer les officieres pour mettre a/leurs places celles qui avoient figne; apparemment pour voirs'il n'entrou- veroit pas quelqu'une difpofee a le fai- re , arm de prendre fes mefures pour la diftribution des offices. Il fe flattoit auffi de pouvoir gagner quelque t hofe en parlant en particulier , par rapport au proces-verbal dont il auroit bien fouhaite un defaveu. xxi*. II vit done routes les fceurs en par- Fermece des
rclgieufcs & (jo) M. Flefceles ptef- felon S. Paul, nous fom-
refufer la fi-f0it beaucoup la fitur mesappelles par fort, &
cnature , & Euftoquic de (igner , & que li l'on prenoit ainfi le
ledelaveu du fui djfoit meme des dure- rerme de fort , lorfqu'on
ftoces-yer- tes, jtifqu'alui dire qu'i/j difoit qu'elle etoit tnfor-
pal. avpit cltt fort , & qu'elle cele'e , elle s'eftimoit hctt-
rtoh enfarcclc'c : La faeur rcufe de l'etre,
f.uftoquie lai teponSit <jU? |
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II. P A r t i e. Liv. TIL 75
tinnier, & fit tout ce qu'il put pour 16S4.
tirer d'elles la Signature & le deiaveu du proces-verbal (30); mais tous fes efforts furent inutiles , 6c ces vierges chretiennes lui temoignerent autant de fermete fur ces deux articles , etant fe- parees , qu'elles en avoient marque etant raffemblees en communaute. El- les lui declarerent genereufement qu'- elles etoient dans la, difpofition delui outenirqu'ellesn'etoient dev°nues les victimes des paflions des hommes, que parceque leurs fuperieures les avoient inftruites dans la crainte & l'amour de Dieu , & que par consequent il avoic commis une grande injuftice en les fai- fant fortir par violence de leur monaf- tere (31). La fceur Euftoquie, & la fceur Mag-
deleine defainte Chriftine, qui eurent beaucoup de part a tout ce qui fe paffa dans cette terriblejotynee , comme elles l'appellent, & qui en porterent tous les coups , en ont dreffe une relation exac (;o) M. de Paris ne fut qui a pour litre: Ju/lifiaf
pas le feul, qui fur cho- tion des acles des religieit*
que des aftcs des religieu- fes de P. R. m fujel des
fes , il y cut encore d'au- -violences exitcecs par M.
tres perfonnes, qui y trou- de Perepxc duns ce m-ma\-
vcrent a redire. Mais M. tere. Voi'ez les pieces a la
Arnau'denprit ladeTenfe, fin du volume. Am. T.
& detruifit toutes leg, rai- IX. desleitres p. 108,114.
fons qu'em alleguoic con- (;i) Hift. des p„rfec. ire ces acles, jar un ecrit p. jji«. n. 11.
Dij
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7<? Htstoire df. Port-roial.
i66 • te , qui fe trouve dans les grandes re- lations in-if. Recueil de Uteres , &c., p. 3 z. & fuiv. L'une & 1'aurre fe trou- verent chargees du poids de cette jour - nee , parceque la S. G«nev. de {'Incar- nation , l'une des anciennes, connoif- fant leur capaciteJeurdit expreflement de fe mettre les premieres 3c de parler fortementfur tout ce au'on leur diroit; ce qu'elles accepterent & execute- rent avec l'applaudHTement de la com- munaute & non du Prelat,qui leur don- na force dementis pour reponfe,& leur fouhaita d'avoir quatre millefois moins d'efpritqu'elles n'en avoient: effedfci ve- in en t elles en avoient trop pour liii. La four Angelique de faint Alexis
d'Hecaucourt eut auffi beaucoup de part a ce qui fe pafta dans cette vifite , 8c elle dreffa une relation de 'ce qui la concerne. M. l'Arche,veque fit tons fes efforts pour lui fake defavouer un ar- tide du proces verbal, que la religieu- fe foutint conftammenc avoir enren- ., du de la bouche du Prelat. Elle fut traitee avec une durete & un emporte- ment qui n'eft pas croiable , par l'Ar- cheveque, qui , en lui parlanr, ne lui dltprefqut jamais quatre paroles , que la quatritme ne fut une injure j mais elle &utinr toujo&rgqu'ellen'ayoicrien. |
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It Part i'e. tlv. 111. y-f____
1 avance que de vrai, & que quand elle 1664-
feroit au lit de k more, elle ne charw geroicpasde langage (31). La fermete des religieufes , & Ik
folidite deleurs raifons , mettoienr le Prelat dans une etrange eolere » done les acces redoubloient felon la vigueur des reponfes. Elles etoient neanmoinsi toujours audi fages & refpedfcueufes * . que ferrnes &£ genereufes •,. & il n'avoit rien a y oppofer que 1'autoiite dont il abufoit, & les menaces continuelles des plus mauvais traitemens. En vain> ees pauvres filies lui reprefentoient l'inutilite de la flgnature du formulaire' pour le falut; en vain elles le prioient de les traiter en pere, & d'en avoir les- fentimens a leur egard; en vain elles lui propofoient l'exemple d'un de fes predecefleurs qui les avoit protegees >. rien ne le touchoit; e'etoit un parti pris , il ne vouloit pas en avoir h de- menti. » Moi qui fuis votre Archeve- w que , difoit-il, je vous commands » de figner le formulaire, & je lui1 » donne autorice par mon commande- ;» mem. Oui, je rends le formulaire » valable a votre egard, en vous com- n mandant de le figner «. A-t-on ja- mais porte Tabus de l'autorite a un tet tji) Rel. 4}, Vies edif. T. 3, p. ijo & jo^.
Diij
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78 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt..
1kAjl execs ? Les Eveques Ariens rendoient-
ils les formules hereriques valables en
ordonnant de les figrter ? Le Pape Li-
bere rendoit-il valable la condamna-
tion de S. Athanafe \ 11 avoit,fans dpu-
te, autantd'autorite que M. de Perefixe.
xxx. Ce Prelat apres avoir paffe la jour-
depo'fce \™ n^e * folliciter les religieufes , foit eft
officieres, & general, foit dans des conferences par-
met & leurs • 1 • r I places ceiies ticheres, lans en pouvotr gagner au-
qui avoient cune , fit aflembler la communaute
Les'intrufes pour depofer les Officieres & mettre
emrcm en \ leurs places celles qui avoient figne.Il
pofflflion,&c \ r r\ • c ■ o t
ttduifent nomma la lceur Mavie,boupneure oc In-
leurs foeurs firmiere, & reunit deux charges incom- dans la plus i i . 1 /- i 9
dure cajtivi- patibles; dans une leule perlortne qui
etoit incapable de remptir ni Tune ni. l'autre feparement j la foeur Dorothee, Celeriere & Fourniere , lui donnant pour aide la foeur Jacqueline ; la'fceur Philiberte,a,la Saeriftie* & la fceurPela- gie pour fon aide; la fceiir Eiifabeth des Angers doht toute la capacite etoit renfermee dans la fcience de tailler des torchons , fut mife a la roberie. De routes ces Officieres , la fceur
Dorothee etoit celle qui pouvoir mieux s'acquitter de fes emplois , aiant de l'intelligence & ctant capable dupli- cation ; mais elle avoit une humeur fi: inegale que tout le rnonde craignoi^ |
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11. Part t% Liv. 111. 1$
<Tavoir affaire a elle. Son vifage an-
hon^oir roujours une perfonne en co- lere , & fes paroles dures & picquan- tes auroient fait croire qu'elle y etoir* Elle avoit neanmoins debons interval- les, 8c n'etoit meme que trop douce & trop complaifante dans fes bons mo- mens. Lefoirde cette fameufe jour- nee , la fceur Flavie fit un billet con- $u en ces termes :» Mesfceurs , la me- » re Eugenie rnordonne de vous dire » qu'en conjidiration de ee qui s'ejt n paffe aujourd'hui, on ne communierat » point jufqua dimanche. , Le lendemain de cette nomination ,
les nouvelles Officieres fe prefente- rent de grandmatin pour prendre pof- feffion de leurs charges. Elles leur fu» rent cedees fans aucune refiftanee par les religieufes fidelles , parceque rou- tes leurs oppofitions auroient etc inu- riles , & n'auroient fervi qu'a leur at- tirer encore de plus mauvais traite* mens dans l'etat ou elles fe trouvoient reduites. Ces nouvelles Officieres ne furent pas plutot inftallees dans les- places ou leur prevarication feule les avoit elevees, qu'elles reduifirent leurs propres fceurs dans la plus dure capti- vite ; elles fermerent les tours , leg parloirs , les chambres, les jardins, 6c . . . Div . |
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So HlSTOIRE BE PoRT-Ro'lAt~
generalement rous les lieux ou elles (
pouvoient fe retirer pour parler de leurs affaires. Ces pauvres captives n'ofoient aller ailleurs qu'a l'Eglife, au refe6loire & a leurs cellules , en- core les obfervoit-on de pres , pour voir fi elles n'enrroient pas dans les cellules les unes des autres ; L'on ne. pent etre plus captives que nous lefom- mes , dit la foeur Elifabeth Agnes. // ne,- rejle plus qu'a nous met ere en prifonfous. lade. Ajoutez a un rel ejat la priva- tion des Sacremens, la defenie d'e- crire & de recevoir des. lettres fous peine d'excommunication. Que peut- on faire de pis a de pauvres nlles > Ne feroit-ce pas les traiter plus douce- ment en les faifant mourir, que de leur tourmenter ainfi le corps & l'efprit I C'eft une chofe prefque incroYable que l'etat ou elles le virent reduites en JTioins d'un demi-jour; il n'etoitpas midi qu'elles fe trouverent comme des etrangeres dans leur monaftere , 8c dominees d'une maniere etrange par les religieufes de fainte Marie, & par leurs propres fceurs , qui n'avoient pas d'autre merite que leur fignature , mais que l'autorite de M. l'Archeve-. que rendoit route puiffantes (33). Quand toures ces perfonnes qui veil- (ii) Rcl. (untenant..Iti Uttret,?.4}.. |
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H. Part if.. Liv. 111. 8.1.
Ibient fur leurs a&ions , les rencon- 1664.
troient dans quelqu'autre chemin que celui de l'Egiife ou du refe&oire , c'e- toit un crime capital : on foupconnoit auili-tor qu'elles cherchoient des voies pour avoir des communications au dehors , & Ton redoubloit les veilles & les gardes. Le foir meme du pre- mier jour de ce gouvernement tyran- niqne , la fceui" Flavie fe prefenta aprcs Complies pour donner de 1'eau-benite a la communaute. La pluparr des fceurs s'y rendirent & la recurem de fa main ; ce qu'ellescontinuevent de faire jufqu'a Paque de lannee fuivante. Cette rule ambitieufe entreprenoit tous les jours quelque chofe pour fe mieux etablir dans fa charge de Souj»rieure. Des la-, premiere fois que la mere Eugenie: manqua de fe rrouver a l'aflemblee , la foeurFlavie fe mitafa place; mais; elle en eut toute la confufion qu'elle- meritoit, aucune des religieufes fidel- les ne s'etant prefentee pour dire fa i coulpe devant elle ; jamais meme el- les ne lui ont rendu aucun devoir em qualite de fouprieure , u ce n'eft de-' recevoir de l'eau-benire de fa main i apres Complies : ce qu'elles ont me- me regarde depuis comme une faute.. Ejaia voiant dans cette place , elles; Ely.-
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8> HlSTOIRE DE PoRT-RGlAL.
1664. nepouvoientavoir d'autres penfee qua
de craindre en fa perfonne l'image de ce que Ton voi'oit autrefois dans les persecutions de L'Egllfe,OU l'on chaflbit les plus grands faints & les plus grands. Ev^ques de leurs Eglifes pour les en- voier en exil , tandis qu'on etablif- foit a leurs places des chefs d'herefie ,\ des apoftats (33). Il femble que la voie la plus ftire.
Embarrasaeseiit ete de ne regarder la fceur Flavie reiigieufes fc [es autres mifes d'une maniere m pat rapporca. , ... :, , ,
la. conduite irreguliere dans leurs charges,que com
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relies de- me jes inI:rufes & de ne leur rendr
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voient temr a . . -. •
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lfgatd desaucun devoir, non plus qu'a la mere:
ifiiwres.. Eugenie. C'etoit 1'avis de quelques- unes, entr'autres de la four Euftoquie- & de la four Elizabeth Agnes , qui. dirent qu'il ne falloit fe relacher dej rien , parceque du commencement dependoit toute la fuite. Mais cet avis ne fut pas fuivi. La bonte des ancien- nes les porta a ceder certaines chofes, aux intrufes, a agir avec douceur, &: Prendre a la mere Eugenie des devoirs: qu'elles virent bien dans la fuite qui etoient quelque chofe, car elles fe vi- rent les: mains liees avec les chaines; qu'elles s'etoient elles-memes formees.. Si; des la premiere fois que la mere: (n) Rel* w-4»- Rw. wtfBMt Us Utku, &«i»
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II. Parti e. L:v. ITT. 8$
Eugenie fit former lechapirre, aucune
religieufe ne s'y fur. rendue , &c qu'en- fuite , on lui eut reprefente qu'aiant appelle on ne pouvoit la regarder com- me fuperieure , ni lui en laiffer faire les fonctions •, fion ne lui eut pas ren- du compte de plufieurs perires chofes , ni agi (i familierement avec elle , elle n'eut pas pris tant d'afcendant, & elle auroir ete forr embarraflee , auili-bien que la fceur Flavie que la fceur Eufto- quie vouloir qu'on trairat apres fa no- minarion, comme les religieufes de Poilfy trairoienr celle que le,Roi avoir nonimee fdusprieure , ne lui rendant aucun devoir , & s'addrefTant toujours en Tab fence de leur fuperieure , a leur ancienefousprieure. La fceur Francyoife Claire , qui eut aflTez aime qu'on amr rortement, pourvu que ce rur ians em- portement &c d'une maniere qui fit voir qu'on n'avoir que Dieu en vue , difoir a la fceur Euftoquie que e'etoit une chofe prefque impoflible d'agir ainfi , parcequ'il y avoit des perfonnes de trois erages, duhaut, dubas&du; moi'en. Chacun de ces etats a fes vues , fespanfees0 qu'il eft difficile de faire quadrer avec celles des autres. De plus it eft certain que peu de perfonnes font capjibles.de. difcerner ce que c'eftque |
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84 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAX.
"{aqa. d'agir avec force par le zsle de la jui-- (
tice, qui vent que Ton s'oppofe au malf, cm de le faire par un principe d'orgueil & dans la vue de.l'emporter. On con- fond aifement l'un avec l'autre •, on ne comprend pas que dans les rencontres • ou Ton eft oblige .derefifter al'injuftice,. llhumilite & la douceur compatillent fort bien avec la generofite & la conf- tance , & trouvent meme en elle- leur perfection , n'y aiant point d'hu-, milite plus veritable que celle qui fait, qu'on s'oublie foi-meme & fes propres interets , pour ne foutenir que la jus- tice & la verite , fans laquelle il n'y a ni, vraie humilite ni vraie douceur.. D'ailleurson aime la paix & la tran- quil lite; & en agiffant avee force, \U faut toujours avoir lesarmes a la main 8c:vivrea la poinu de Tepee, comme deux anciennes le difoient a la fceur- Euftoquie.dans une occafion ouils'a- giflToit de rendre quelques devoirs a la, iceur Flaviepour nelapaschoquer (34)* Tel eroit Tembarras des religieufes de B.- R.par rapport a la conduitequ'elles, devoient tenir a l'egard des inuufes :: ©mbarras qui faifoit pour elles un fur'-' crok de peine j par la crainte qu'elles, avoient de. faire quelque faute ■, foit eiv; faifant trop > fait .en ne faifant pas aflez.% |
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II. Part ie. Liv. 111. S$________
Ba fignature fit un tel changement \6C>±^
dans l'eiprit des pauvres filles qui s'e- xxxn. toient laitfeesfeduire , qu'elles s'indif- Conduited* poioient contre les plus iohdesverites dont elles fe nourrifibient auparavant, & fe fcandalifoient de ce qui les avoic edifiees. Les meilleures lectures qu'on faifoit en communaute, quoiqu'elles fuffenr les memes qu'elles avoient tant de fois entendues avec plaifir, les cho- quoient. Les filles defainte Marie s'ert offenfoient aufli 5 mais pour elles, iL n'y avoir pas fujet de s'en etonner ,, parcequ'elles n'en favoienc pas davan- tage. Elles accufoient fouvent' les lec^ trices de compofer ce qu'elles lifoient;, quelquefois elles alloient en colerede- mander le livre pour voir fi ce qu'orj: lifoit y ctoit en effet. La fanir Flavie dit un jour a la fceur Genevieve de l'ln- carnation, que la mere Eugenie n'etoit pas contente de la lecture du refectoi- re : la foeur Genevieve, lui repliqua qu'il ne falloit pas s'etonner fi efle im- piouvoit leur conduite & leurs fenti- mens , puifqu'elle condamnoit meme les vies des Saints. Une autrefois la:, mere Eugenie etant a la lecture de coin- plies , qui etoitde faint Auguftin fur, lespfeaumes , elle s'en offenfa de telle- ferte qu'il fallut lui porter le livre pout |
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8<f Histoire ete Port-roYae.
77 laconvaincre qu'oa n'y avoit rien 31011-
U664. , _ ,n'n ' . '. - te. bt quand elle ne pouvoic plus ao
cufer la ledtrice d'avoir compofe oil
ajoute , elle difoit qu'elles prenoient
plaifir a choifir des livres propres a les
entrecenir dans leurs fentimens & dans
leur defobeifTance. Il y avoit fouvent de
femblables fcenes. La mere Eugenie die
unjour , qu'elle avoit commence a lire
la vie de S.Bernard, maisque voi'ant
qu'il parloit contre la charite, elle la
quitta auffi-t6t. On appelloit (felon le
temoignage de M. de la Brunetiere )
les Saints dont M. d'Andilly a ecrit la
xxxiii. vie , Les Saints mutins.
M.de Paris Depuis le 24 feptembre que M.
prive des Sa- <•"«-' r r 1 1 ■
crcmens Us de Perehxe nt tous les changemens
reiigieufes dont nous venons de parler, pour fe vanger du refus que ces filles fidelles. a Dieu & a la verite avoient fait de Cu gnerle formulaire & de defavouer leur proces verbal, qui lui faifoit tant mal au cceur, il ordonna a M. Chamillard &a la mere Eugenie de ne permettre a aucune cj'approcher des Sacremerls. LePreiat chargea aulli les filles de fain- te Marie de faire tous leurs efforts pour tacher de tirer de leurs prifonnieres quelque farisfadUon au fujet du proces verbal. Files le firent avec tout le zele qu'on peut s'imaginer, mais fans fuc- cej. M.-Chamillard fe.chargea enfuite |
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n. partie. iiv. ni. tr
de la meme■ comniffion , & nereuffit ^Jj<j7~"
pas mieux, quoiqu'il n'epargnat rien pour en venir a bout. La fceur Eliza- beth Agnes fait une reflexion bien fen- fee fur le defaveu, que M. de Pere- fixevouloit engager les religieufes de Pi R. a lui donner de leur proces verbal:. » II me femble , dit-elle , que M. de » Paris ne pouvoir mieux faire pour »»• nous fortifier, & nous faire voir par » quel efprit il agit, que de joindre "■■ au commandement qu'il nous fait » de figner1 que les herefies condam- » nees font dans un livre que nous, » fommes incapables de lire , celui » de defavouer des chofes que nous « avons vues de nos yeux 6c enten- » dues de nos oreilles. Car c'eft nous » demander non-feulement que nous *». trahifllons nos oreilles &nosconf— » ciences , mais encore que nous per- » dions le fens & la railon , pour de-> 5* favouer par obeiflance a notre Ar- m- cheveque les chofes dont nous fom- » mes temoins , & que nous avons; « vues ('} 5) ».. Il n'y en eut pas uhe^ qui voulut defavouer la moindre chofe du proces verbal. N-eanmoi ns M. 1' Ar- cheveque & M. Chamillard ne laifle* tent pas de publier partour que trente |
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ffi~ HlSTOIRE DE PoRT-ROlAT'.'-
1664. d'entr'elles l'avoient defavoue & erf'
avoienc demande pardon. Les reli- gieufes informees des bruits qu'on re- pandoit, fe crurent obligees de faire connoitre a tout le monde qu'ils etoient faux.' En confcquence elles firenr un nouvel adfce figne de. quarante-cinq , par lequel elles s'mfcrivoient en faux oontre ce pretendu pardon demande. M. de Paris fut pique au vif de ce de* menti, & dechargea fa colere par quan- tite de menaces &c de reproches. Nous rapporterons ce nouvel acle en foil lieu. ■Jcxxiv. M. Chamillard qui avoir eu beaucoup 8eCMnKchCe^e Part*ce 1U* 8?t^ patfe le 24-fep-
miiUrd furtembre, fit fa prochaine conference lifiiomnic. fur la calomnie &c la medifance , pour tacher de jetter du fcrupule dans l'ef- prit des religieufes au fujet de leut proces verbal &c de la lettre , & les en- gager a.quelque retractation. II pre- rendit qu'elles etoient en peche mor^ tel; parceque , difoit-il,, en fuppo- fant meme que le proces verbal ne con- tint rien que de vrai, & qu'ainfi el- les fufTent exemptes du crime de ca- lomnie , elles ne le feroient pas de ce- lui de medifance , qui confide a faire, connoitre aux autres la faute ou le pe-> die du prochain qu'on doit cachejf. |
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H. P A R T I E. L'lV. III. 8<*
Comme fi 5'eut ete une medifance ™T>
de rapporter dans un proces ver- bal des violences dont tout Paris avoit "vu les funeftes efFets. Auffi la fceur Euftoquie, interrompant le fai- feur de conference., lui fit fentir le ri- dicule de ce qu'il venoit d'avancer :. alors la conference degenera en une efpece de difpute, & dura depuis qua- tre heures & un quart jufqu'a fept heu^- res & un quart. Et pendant tout ce terns , M.Cnamillard donna lieu d'ad- mirer fon egalite d'efprit, qui ne fe hauffa ni ne fe baifTa de tout ce qui lui fut dit. Le jour fuivant la me're Euger- nie ai'ant tenu chapitre , fit de grandes plaintes de ce qui s'etoir pafTe a la con- ference ; eile temoigna en etre fort: fcandalifee, &c qualifia cela de man-r que de refpecT: pour la parole de Dieu ,, de rebellion , de defobeifTance. La fceur Euftoquie fe leva & rendu raifon de fa conduite, & de ce qui Tavoit engagee ainterrompre M.Chamillard:. la mere Eugenie apres l'avoirecoutee- lui dit: Pourquoifaut il, ma faur, que.- yous parlie^ toujours pour la commu>- naute ? Ell ce aux jeunes a fi, meler de tout cela, & a parler d'affaires ! La fceur Euftoquie ne fur pas embarraflee, goiir repondre a cette queftion de. In |
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*)0 HlSTdlRE DE P0RT-R0'lA£r
' 1664. mere Eugenie qui n'etoir pas plus re-
doutable pour elle, que M. Chamillard
& que M. l'Archeveque lui-meme.
xxxv. Ce Prelat venoit de terns en tems a
Frfquentes p_ r# pour fonifier fes profelytes 8c
vtlites de M. . . r r / _ .
de perefixe d ies intrutes , & pour tacher de raire
r. r. Poutquelque nouvelle conquerc Y etanc Ies difcoles.sc venu un lamecu lur les trois heures 8C d"auire?dU're demie , il y refta jufqu'a huit heures; il entretint la four Marie Gabrielle > |
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I
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i fut fi prete a figner, que la plume
it trempee a cet effet; mais Dieu la |
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fecourut 8c la retint fur le borddu pre-
cipice. Elle fut fi effrai'ee du danger ou elle avoit ete, que pour fe fortifier contre de femblables occasions, elle fit le dimanche fuivant un vceu de ne jamais figner, qu'elle declara etre aufli inviolable que ceux de fon bapteme 8c de fa profeflion. La four Euftoquia femble ne pas approuver cecte devo- tion (j<>) extraordinaire. EfFedivement elle paroit inutile, puifque nous re- nonc,ons par le bapteme a Satan le pere du menfonge, a fes pompes & a fes ceuvres; par confequent au menfonge & au parjure renfermes dans le for- mulaire. Cette bonne fille ne laifla pas que de (e dementir un peu par rap- port au proces verbal,. Car lorfque les (;}<)Ibid.p.4«.
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Hi Partie. Liv. JtlL 91
religieufes dyfcoles fignerent une de* ^6 ■
claration , par laquelle elles defa- vouoienr les proces verbaux, les ap" pels , 8cc., & qu'elles engagerent la fceur Catherine de faint Paul & la fceur Suzanne Cecile a fe joindre a ellej pour cela , la fceur Marie Gabrielle fit auffi quelque chofe, maisneanmoite ' d part, parcequ'elle he pouvoit Hi avouer ni defavouer , n'y ai'ant pas ete prefente. Les religieufes fidelles ai'ant appfis.
cette demarche des dyfcoles par lai fceur Elizabeth des Anges, qui quoi- que du nombre des, fignantes, 'cbnfer- voit pour elles de la tendrefle & les ' avertiflbit de tout ce qui venoit a. fa connoiflance , elles fignerent l'ac"te fui- vant, par lequel elles confirmerenc tous les precedens : »i Nous, foufligrtees , religieufes de xxxvr;
>* P. R. du faint Sactement a Paris , , Dkhratio* . .. / . r .. desreligiculcsj
» nous croions obligees en conlcience de p. r. tou-
» de faire le prefent ac~te pour decla- c^ant leu" |
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> rer que nous trouvant accablees de'
» dpuleur, non-feulement par I'etat fi ». violent & fi penible ou Ton nous a » mifes , en nous arrachant du fern » de celles qui nous nourrifToient de v Ieurs inftru&ions toutes pleines de *>> piete, de la verite & de rhumilits.- |
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<)1 HlSTOIRE DE PoRT-ROl'jtt.J
\66a, » chretienne, qui nous echaurfoie
» par l'ardeur de leur charite , & q » nous fortifioient par la force de le >• exemple & de leur vertu , pour no y> mettre entre les mains de perfonn y> qui quoique bien vertueufes ne pe » vent jamais etre qu'errangeres a n » tre egard, mais aufli pax la dure » de ceux, qui ne fe contentant p » d'inquieter fans cefTe nos confcie* » ces fur l'injufte exaction d'une chc r> a laquelle notre fexe & notre profe « (ion nous obligent. de ne prend' » aucune part, nous veulent defend » de faire ce qui a toujours ete pe » mis aux perionnes opptimees, q » eft de demander juftice, & nous ve » lent faire tin crime de calomnie » demedifance & de malice de ce qL »» la pure necellite nous a contraintes i » faire , qui eft de drefTer nos act »> capitulaires fur la fignature qu'c m nous demandoir, nos ac"tesd'appe s» & de proteftation & en confequenc » les proces vexbaux des chofes qt « ont ete faites dans les deux vifitt » de. M. i'Archeveque, 1'un du z. » aout de la prefente annee U>(>$t. & m l'autre du 2 6 en fuivant, & nou » veulent obliger contre toute fort* »■ de juftice a nous retracter de tou |
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II. Partii. Llv. JIT. 95
•» cela & a dire que des chofes que TssZi
» nous avons vues de nos yeux &
» entendues de nos oreilles , font
» faurFes, quoique nous en foyions
» tres affurees Sc que nos cceurs en
» aient ete & foienr encore tellement
» brifes de douleur , que nous avons
» befoin que Dieu nous foutienne tres
» particulierement, pour ne pas mou-
» rir d'affliclion, comme fit dernie-
» rement notre tres chere four Jeanne
» de la Croix •, & aiant fujet de crain-
» dre qu'a l'occafion de celles de nous
x qui ont figne , & qui ( ce que nous
» ne pouvons dire fans un dechire-
» ment de cceur inexprimable ) fem-
k blent erre defunies de la commu-
« naute , & avoir perdu beaucoup du
» refped:, de i'eftime & de l'afFe&ion
« qu'elles temoignoient avoir pour les
» perfonnes qui nous ont toujours con-
» duites, & que Dieu par une tres
» grande grace nous avoit donneespour
*. les peres & les meres de nos ames ,
» on ne fafie en leur norn , ou me-
« me an nom de nous routes , par
„ une fuppolition qui crieroit ven-
„ geance devant Dieu , un ecrit pour
„ eluder la verite de ces a6tes & pro-
« ces verbaux , & en oter par ce mo'ien
» la-validite, nous proteftons devant
|
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94 HlSTOIRE T>E PoRT-RClA!/
» Dieu, qui eft le Dieu de verite , que
» nous les croionstous veritables, que »> nous ne les avons dretTes par au- » cun mouvement de haine ou de « paffion, de calomnie , de malice, » ni de medifance, mais par la pure ■» neceffite de foutenir par-la notre ap- i> pel, lequel nous n'aurions jamais « fait, fi nous avions etc des per- » fonnes privees & partictilieres, &C » nous nous ferions contentees de fouf- » frir avec l'humilite, le filence & la « patience done Jefus-Chrift nous a »> donne l'exemple ; mais formant un » corps & une maifon confacree aDieu, » nous avons cru que nous ne pouvions « fans blelfer notre confeience & ce >j que nous devions a Dieu , foumir -» qu'on 'detruifit un monaftere qui »j lui eft tout dedie , fans nous oppo- « fer a cette deftrucHon par les voies » que la juftice donne & permet a. tou- »» te perfonne opprimee , qui eft celle " d'appel. Ainu nous proteftons que » jamais nous ne ferons & ne confen- v tirons a une retra&ation defdits » ades capitulaires , de proteftations , » d'appels & proces verbaux , ni me- » me aux changemens ou diminutions » qu'on y pourroit faire fans notre ». confentement a toutes; ne croi'ant |
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II. Parti e. Llv. III. 95
« pas les avoir encore reius & exami- 1(j
» mines mot a mot dans une affemblce
» generale depuis qu'ils font impri-
» mes , que nous le puiilions faire fans
" blefTer notre conference &c la verite,
" & fans nous trahir nous-memes &c
» abandonner nos tres cheres meres &
m nos fceurs qu'on nous a enlevees avec
» tant de durete. C'eft ce que tou-
» tes les perfonnes equitables avoue-
» ront aifement etre tres jufte & rai-
« fonnable : elles reconnoitront qu'il
" eft etrange qu'on nous demande re-
» paration fur quelques termes que
» nous aurions peut-ctre pu adoucir
" oufupprimer , quoiqu'ils foient treses,.
« veritables , ou fur quelques autres
» particularites qui font aulli vraies,
» mais qui ne font en effet que des
» accefTbires , lorfqu'on refufe de nous
w la faire*, de la violence qu'on nous a
« faite en nous otant nos meres 8c
» nos fceurs , en nous donnant des re-
« ligieufes etrangeres, en nous refu-
»» fant la liberte de choifir un confef-
" feur pour nous entendre, en nous
w feparant de la participation des Sa-
» cremens les plus adorables, fans
» aucun fujet legitime , &c en nous
» reduifant dans une dure captivite ,
s. qui font les chofes qui font l'eflen-
* La reparation.
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5>6 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAX.
» tiel de notre proces verbal. Nous
» declarons done, que nous confir- » mons , approuvons, 8c racifions tous » les a£tes que nous avons ci-devant » fairs , & qui ont ete impri- » nres fous notre nom •, que nous » voulons les foutenir 8c nous en » fervir en tous les tribunaux , ou « nous pourrons etre ecoutees 8c ef- » perer juftice. Erpour l'obrenir nous » declarons encore d'abondant , » que nous appellons comme d'abus, « en adherant a nos premieres appel- » lations , de tout ce qui a etc fait i> depuis notre appel flgnifie , dont la » Cour eft faiiie , 8c particulierement » du commandement qui a ete fait a *> nos novices, de fortir ; du refus » qu'on continue a nous faire du choix i> libre d'un confefleur a qui nous puif- » lions aller •, de la pretendue nomi- » nation que M. l'Archeveque a faite » de la fceur Flavie pour fousprieure , " & d'autres pour d'autres offices, def- » quels il a demis celles qui y avoient » ere etablies par notre mere abbeiTe , » qui eft un droit qui n'apparrienc » qu'a elle feule , & qui lui eft acquis « par fon ele&ion , fuivant l'ordre ■*> etabli dans nos conftitutions ; com- • me auffi de ce que ledit feigneur w Archeveque |
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H. Partie. Liv, III. 57
»> Archeveque nous a 6te les cles de i^^±,
» notre cotf're fort, ou font les titres »> & papiers de la maifon pour les met- » tre entre les mains de la mere Eugenie »» religieufe dela Vifitation , de ladite » foeur Flavie 8c des autres qui lui font « liees; enforte qu'elles en peuvent » faire ce qui leur plaira, fans en avoir n fait aucun proces verbal ; entendanc » nous pourvoir contre ledit feigneur »» Archeveque, pour Ten rendre ref- » ponfable , s'il en arrive faute. Et » pour pourfuivre notredit appel, de- al mander au Parlement que deux Con- « feillers failent defcente dans notre « monaftere pour faire proces verbal 8c j) informer de notre captivite , ordon- »» ner que nous aurons un parloir a » nous dans notre monaftere , & un « confeil que nous pourrons voir & con. » fulter fans aucun empechement ni » temoins de la part dudit feigneur Ar- » cheveque, foitfeculiersou reguliers, » 8c pour pouvoir plaider , oppofer , » appeller , elire domicile , fubftituer »> & generalement faire pour nous 8c » en notre nom tout ce qu'il appartien- 3> dra, nous avons fait Sc conftitue » notre procureur general 8c fpe- » cial.......auquel nous en
» avons donne Sc donnons pouvoir.
Tome V' £ |
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5 HrsTomE de Port-roTa£."
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i66^-
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Fait & delibere en notre monaftere
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de Paris & figne de nos feings le
" 5 o<5k>bre 1664 ».
xxxvii. Cette declaration fuc fignee par 45
Rcquetepre-re[j2jeufes apres qu'on eut modere
icntee au „ o » f i
piriement & modific quelques expreihonsj qui
pouriesteli- caufoient du fcrupule a quelques-unes. ii. Ces genereules nlles avoient conmtue un procureur pour pourfuivre leur appel
au Parlement. Ce Procureur y pre- fenta en leur nom le fept du me- me mois d'o&obre, une requete contre M. l'Archeveque, contre M. Chamil- lard , contre les religieufes inrrufes > & contre leurs feeurs , auxquelles on avoit donne des charges contre les conftitutions de la maifon. Cela mit M. de Paris dans une fi grande colere que n'ofant attaquer ni le Procureur qui l'avoit prefentee , ni M. le Clerc de Courcelles qui en etoit le rappor- teur , il s'en prit a M. Akakia qu'il cro'ioit avoir donne quelqu'avisa ces filles, & le fit mettre a la baftille tout jnalade qu'il etoit. C'etoit autrefois l'office des faints
Eveques de tirer des prifons ceux que leurs primes y avoient fait mettre ; mais c'eft aujourd'hui celui des Eve- ques de Cour d'y faire jetter ceux dont Pinnocence & l'amour de la verite font, WUt le crime.
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II. Part ie. Liv. III. 99
Quatre jours apres avoir fignc cette \(,q, j declaration , les religieufes ecrivirent le 9 o&obre la lettre fuivante a M. l'Archeveque. » Monleigneur , dans l'exces de la xxxviil.
11 / / 1 ■ Lettre ties te-
» douleur ou notre etat nous reciuit , ijgieiUes <je
» nous ofons nous profterner encore p- R- * m. » a vos pies , pour demander miieri- » corde en un jour ou il ne nous eft » pas permis de croire que vous nous » la relufiez , fans bleiler l'eftime que » nous devons faire de votre Gran- » deur , qui nous oblige de vous re- s' garder comme le fuccefTeur, non » feulement de Fautorite & de la di- " gnite de ce grand &c premier Eve- s' que de Paris, mais auffi de fa juf- » tice & de fa bonte. Nous fom- » mes dans une profonde nuit d'afflic- " tion , vous ne l'ignorez pas, Mon- » feigneur, & nous fommes refolues » en cet etat d'imiter la perfeverance » importune , mais falutaire , de cet » hcmme de l'Evangile., en frappant » fans celTe a la porte de" votre cccur , » comme lui a. celle de Ion ami, pour " vous demander trois graces qui fe- j) ront le remede a tous nos maux. » Nous avons cetavantage furlui,Mon- » feigneur, que nous frappons a la por- » te, non d'un ami qui pent changer, E ij
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I0« HlSTOIRE DE PoRT-Ro'lAL.
j^ » mais a celle du coEur d'un pere ,
" qui ne peut fans renoucer a fa qua- » lice, n'aimer & n'ailifter pas fes u enfans, & que nous lui deman- » dons ces graces par les entrailles de « la mifericorde de Dieu & le fang « de trois martyrs, qui font fes peres »> & meres & les notres , & qui fem- t> blent vous les demander pour nous , w rant elles ont de rapport a eux & » a leur miniftere. Ne nous 6tez pas > » Monfeigneur , le pain des enfans , » puifque vous etes notre pere; & ne « nous eloignez pas de ce myftere ado-* i. rable , qui eft le myftere de la foi, ■» dont faint Denis, qui eft le pere w commun des fideles du roi'aume, a » etc Fun des premiers 8c des plus » illuftres predicateurs. Et pour nous u preparer a recevoir faintemenr une w chofe fainre, accordez-nous , s'il » vous plait, un pretre dont la chari- » te , la juftice & la piete honore cel- » le dont nous honorons auffi la me* » moire, & en qui nous puiffions avoir » une entiere confiance. Et pour ne *> feparer pas ce que Dieu a uni & » fur la terre & dans le ciel, ren- •» dez-nous la paix, Monfeigneur , en <* e> l'hanneur de ce faint Diacre, qui-. f a, ^annonce aux peuples dont y ou$ |
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II. P A ft T I E. L'lV. 111. I 21
■» etes le pere, l'Evangile & la paix.
» Ces graces font tres grandes , Mon- » feigneur, & cependant il vous eft » aife de nous les accorder. Votre » puiflance, qui eft an ecoulement de » celle de Dieu, eft fi divine , que » vous n'avez qu'a dire un Fiat pour » retablirP. R., comme il n'en adit " qu'un pour creer le monde. Mais » permettez-nous de vous dire avec » un profond refpe<ft, qu'il eft de vo- » tre juftice de ne pas meprifer nos » tres humbles prieres; puifqu'en qua- " lite d'Eveque, vous renez un rang » dans cette Hierarchie divine, dont » felon faint Denis (37} T la fin eft » d'etre femblable a Dieu ; & l'of- » dre , d'imiter fes divines perfec- » tions. Or , Monfeigneur, Dieu ne » condamne & ne punit que le mat j » 8c nous ne penfons pas, Monfei- » gneur, qu'on puiflfe donner ce nom » au refus que nous faifons de vous » obeir dans une chofe , ou nous » croions certainement que nous of- m fenferionsDieu, & defobeirions a la « fource & au principe de votre puif- (57) Cet ouvrage a'eft togiensl'ont cru de mim*
pas de S. Denis 5 il n'eft jufqu'au dernier fieclc ,
pas furprenant que des re- qu'une fage critique a fait
ligieufes le cite comme de voir qu'on s'etolt trompe~.
lui, puifnue toils lestheg- E iij
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IOZ HlSTOIRE DE PoRT-ROlAE.'
1C64. " fance & de votre autorite, qui effi
" Dieu. Vous-meme , Monfeigneur , *» avez eu la bonte de nous alfurer , » que vous ne vouliez pas que nous » le fiffions avec trouble deconfcien- » ce , fans croire & fans etre perfua- » dees de la verite de ce que nous figne- « rions ; & nous n'avons ni cette per- » fuafion , ni cette foi, & nous avons » encore des fcrupules infurmonta- » bles fur ce fujet •, deforte que felon. " votre aveu meme , Monfeigneur ,, " nous ne le pouvons faire dans la dif- » pofition interieure ou nous fommes. *> Ai'ez done pitie de nous, Monfei- » gneur ; regardez-nous, & nous vi- » vrons; faites nous fentir les effets » de votre bonte paternelle , en nous " rendant le pain des enfans. Et fi » cette folemnite fainte a ete pour " nous un jour de larmes par fa pri- " vation, que l'odfcave nous foit urn » jour de joie par la permiflion que j> vous nous donnerez d'offrir de cette » table divine, & d'offrir a Dieu pour » votre Grandeur nos vceux & nos " prieres avec un efprit tranquile 8c » avec une ardeur egale au tres pro- » fond refpect avec lequel nous fom- » mes &c. L'experience du paflfe ne donnoitpas |
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II. Part ie. Liv. II7. ^03
lieuauxreligieufes d'efpererunheureux i66 fucces de cetre nouvelle demarche. La xxxix. charite de faint Denis , l'un des pre- , Mo*en» miers Apotres des Games , qu elles Iiu m. de Percfi- propofoient pour modele , le touchaiixe Pour, &1' pen, quetant venu apres Vepres au teligieu&s. monaftere le jour meme de la fete de ce faint, il leur parla avec toute fa du- rete ordinaire, & un emportement ex- traordinaire;. & il leur fit entendre qu'il en enleveroit encore. Il demeura juf- Siu'a. fept heures du foir , & vit routes
es proielytes 5 ce qu'il ne manquoit jamais de faire , tantilcraignoitqu'el- les ne lui echappaflfent. Lorfqu'il avoir efperance d'en gagner d'autres pour groffir fa petite troupe , il n'eft pas cro'i'able jufqu'ou il portoit la flatterie & la bafleiTe (} 8). On en jugera par ce trait. La fceur Fran^oife Julie , dont la fceur Flavie lui avoit fait efperer qu'il pourroit faire la conquete, ai'ant ete comme forcee de fe prefenter de- vant lui, auili-tot qu'il la vit paro'itre , il feleva pour la faluer tres refpe&ueu- fement , l'afliira qu'il etoit fon tres humble & obeiflant ferviteur, puis il la pria de s'affeoir , fit fon eloge , lui difant qu'elle etoit tres vertueufe,fage: (38) Rel. in-4. «»fw«rt Us Uttres, &c. p. f«.
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104 HlSTOIRE DH PoRT-ROlAI,
1664. raifonnabIe, d'une humeur douce, &TcV
& apres l'avoir entretenue pendant plus de cinq quarts d'heure, illui temoigna qu'il etoit mortifie de ne pouvoir pas l'entretenir plus iongtems; qu'il paf- feroit les jours entiers a lui parler , Sc qu'ils ne lui dureroient qu'une heure, voi'ant qu'elle avoit la borne de l'e- couter. ( Si les jours ne duroient qu'u- ne heme pour M. de Paris , peut-etre duroient-ils plus d'un an a celle qui 1'e'coutoit. ) Tels etoient les moiens , dont M. de Perefixe fe fervoit pourga- gner celles qui ne paflbienc pas pour etre des plus fermes; & malheureufe- ment pour quelques-unes, ils lui reuf- firent. XL. La fceur de fainte Melthide Tho- chute de la mas, fceur de M. du Fofle , fut de ce
Melthide. nornbre , Sc caufa par fa chute la plus vive douleur a toutes fes fceurs fidelles & a fa famille. » C'etoit une fort bon- » ne file, dit M. du Fofle fon frere » » parlant de fa chute (59), fort humble » & pleine de charite; mais il lui man- » quoit un peu de cette force & de » cette fermete d'ame , qui s'accorde » fort bien avec l'humble fimplicite » du chriftianifme ». Elle dit, aprcs » cette demarche, a la mere Marie (}?; Mem. du Fofle, p. iji.
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II. P A R. T I E. Llv. 111. I 05
« de fainte Agnes, en qui elle avoir- j^, " » confiance •, que » M. de Paris lui » avoir fait des inftances incroi'ables »> pour l'engager a figner; qu'elle y » avoir une peine extreme , & etoit » devenue plus froide qu'un marbre ; » que la plume lui romboir des mains, » &: qu'elle ne voioic quad pas ce » qu'elle faifoir, ranr elle etoit hors » d'elle-meme •, que pendant ce rems- » la M. de Paris prioir Dieu pour elle, ( Quel nom merite une telle priere ? ) » Sc lui difoit : Courage , courage, » ma chert filte , je prie Dieu pour » vous , acheve^ , cefera tout-a-TIieure " fait. Enfuire il la conjratula 8c la » reucita en fa maniere (40) ". La four Melthide exigea une condition ere fignantle formulaire , favoir qu'on ne* lui parleroir jamais de condamner fes meres & fes fieurs, & que fi on lui en parloit , elle erTaceroit fon nom. La fignarure fake , cette pauvre fille en- tra dans un trouble & des peines in- croi'ables •. elle gemilTbit , repandoit des larmes , &: jettoit des ens fi ex* traordinaires qu'on crut qu'elle fe de- fefperoit, ne voulant ni boireniman^ ger. Ce n'etoit pas neanmoins , di- t^o) ReL int,. comntnt Us Uttret, p. «o & fuir,
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i6<5 HlSTOIRE DE PoRT-Roi'Atr
$6, foit-elle , fa fignature qui la faifoit pleurer , parcequ'elle ne croioit pas avoir mal fait, n'ai'ant figne que dans la crainte d'offenfer Dieu par fon re- fus ; mais parceque la fceur Marie de fainte Agnes ( qui la pleuroit avec autant d amertume que li elle eut ete inorte ) & les autres religieufes la re- gardoient avec moins d'arreclion, &c comme une perfonne qui s'etoit fc- paree d'elles ; ce qu'elle prerendoic n'etre pas. Pour les en afTurer, elle vint le lendemain a l'alTemblee, &s'etant mife a genoux, elle parla ainfi avec beaucoup de larmes J Mes fceurs, je vous fupplie tres humblement de pritf Dieu pour moi. Je Jignai hier , par- ceque j'y fus contrainte , naiant pic rijijler aux raifons quon me dit. Je vous prie de croire que je ne feral rien contre vous , & je prie Dieu de tout mon cceur, fi je Vai ojfenfe ( ce que je ne crois pas neanmeins, I'aiant fait par pure oleijj'ance ) de me punir en ce monde (41). Il arriva une chofe extraordinaire ,.
qui fetrouve confirmee par plufieurs manufcrits, le jour que la fceur Mel- thide figna le formulaire. Une reli- gieufe converfe , nominee fceur Ni- (41) Ibid. p. fi.
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IT. P Artie. Liv. III. 107
cole , etant a la chapelle de fainte ' Anne , fur les trois heures & demie , vit fur I'autel, au cote de l'Evan- gile, un cierge fort ardent &c qui ren- doit beaucoup de lumiere , ce qui la furprit , parceque cela etoit contre la eoutume , & que de plus il n'y en avoir point de l'autre cote. Mais environ au milieu du premier pfeaume de Vepres elle vit ce cierge s'eteindre Ik tomber. Dans le moment il lui prit un trem- blement & une forte penfce que quel- que fceur avoir figne , enforte qu'e- tant fortie auffi-tot de la chapelle , 8c a'iant rencontre une autre foeur con- verfe , elle lui dit: AJJiirement une de- nos fours ajigne ; puis lui conta l'hif- toire , dont la fceur Gerevieve de: l'lncarnation demeura tres perfuadee , ajpres en avoir fait des informations fort particulieres. Le meme jour que la fceur de fainte
Melthide eut figne , qui etoit le 15 oclobre , M. Chamillard la fit venir au parloir pour lui en temoigner fa joie , & lui propofa de fe confefler , pour communier le lendemain , qui etoit l'oftave de faint Denis , comme fl toute la difpolition pour bien com- munier eut confifte a- attefter avec ferment; un fait douteux & calomnieux. E vj
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_________ 108 HlSTOIRE DE PORT-ROIAE.'
166$. Etrange conduite , qui feule devoir
faire juger de ce qu'il falloit penfer
de cette miferable fignature , & de
ceux qui l'exigeoient. Aveugles, qui
propofoient pour prix & recompenfe
d'une prevarication & d'unparjure , la.
participation au Corps & aii Sang de
Jefus-Chart, tandis qu'ils en privoient,
avec tant d'inhumanite , les fidelles
epoufes de'ce divin Sauveur.La vue de
cette prophanation ctoit pour ces vier-
ges chretiennes, le fujet d'une nouvel-
le douleur , plus grande meme que
celle d'etre privees du pain desAnges..
» Je vous avoue , dit 1'une d'entre
ChXU'ment" e'*eS (41) > ecrivant Ala merePrieu-
de "Kite" re des Champs, ma tres chere me-
dans les tcii- „ re , que qnelque grande que foit ma-
snoient. " doiueur d etre pnvee d un tel bien ,.
» j'en reoois une infiniment plus
» grande pour celles que j'en vois ap^-
jj procher (1 fouvent apres avoir figne.
» Plut a Dieu que nos fceurs, qui ne
» font point encore expofees an fort
» dela tentation, ni epouvantees par
» la. grandeur de la tempete , puflent
» voir le changement , ou plutot le
„ renverfement que caufe cette mife*
» rable fignature dans celles qui l'ont
« faite; & je crois qu'elles en conce*
(4*) la&cm Chiiftine, p. «$. ReJ, in-^
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fi. P A R T I £. Liv. HI. I G<y
>♦ vroient une telle horreur , que les "
» plus terribles menaces que Ton " pourroit faire apres cela «e les ebran- »» leroienc pas, non plus que les abo- » minables flatteries , dont on fe fere » pour attirer celles que Ton croic » d'une hurrreur plus complaifante &C » plus douce ». On voit par-la que les religieufes qui avoient figne , ne fe diftinguoient gueres par la regula- rity de leur conduite , &c qu'elles- etoient audi infidelles a Dieu , a lent' regie , a leurs legitimes fuperieures » qu'a leur propre confeience , ai'anc abandonne, en fignant, la verite , la' juftice & la charite. Il eft rare que i'erreur fe picque de regularite. m C'eft une chofe admirable de voit"
» les eftets de la fignature (difoit a. ce » fujet unereligieufe(43)); les folles » paflent pour fages quand elles one » ligne, & les fages pour folles quand » elles ne le veulent pas faire. Dor- » mez,paries, mangez, buvez , di~ » vertiflez-vous tant que vous vou- » drez , pourvu que vous ayiez figne * » vous etes toujours en etat de com- j> munier. Enfin , au lieu de dire" » avec faint Auguftin : Aime^ a & » fakes ce que vous voudn^j Jj g^jj <4iJ La faur Mkrguerite Hitniiin.. |
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TIO HlSTOTRE DE PoRT-Ro'lAt^
■ TT72 »» dire , fignez, & faites tout du pis
» que vous pourrez, & tout fera tou-
» jours fort bien «.
xtn. Ainfi malgre lefcandale de ces chu-
c« querent tes , malgre tous les mauvais traite-
les reiigieufes mens qu'effuioient les religieufes de
chai^gement P. R. 5 <S^ les epreuves auxquelles elles
de conduite etoient expofees , fl capables de les
desdifcoles& _-.,.. o J 1 UL
des fdvoks affoibhr & de les abbatcre , on peut
raifonnemens djre qu'elles avoient de grands fecours formulate. ™ pour fe foutenir , & de grandes inf- truitions pour fe fortifier , fans parler de l'onition de la grace qui les foute- noit interieurement , & des fecours exterieurs qu'elles reccvoient par les ecrits des amis , & les lettres. Les violences qu'on exerc^oit contreelles, fi contraires a l'efprit de l'Evangile ; la conduite irreguliere de celles de leurs fosurs qui avoient eu le malheur de fe laifler feduire; les faux princi- pes & les raifonnemens frivoles de ceux qui les vouloient engager a fi- «*ner , ecoient pour des cceurs audi droits que ceux de ces faintes filles, des inftrudtious folides, & de vraies demonfttadons contre la fignature.- En effer , quelles raifons donnoit-on a
ces viergeschretiennes pour les engager 4 figner » & quales reponfes faifoit-on aux folides raifonnemens par lefque's |
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II. P A R T I E. LlV. III. 11 I
elles montroienc l'injuftice de la con-
duite qu'on tenoit a leur egard ">. Cell ce qu'on peut voir dans les relations qui en ont ete faites ; nous en avons dcja vu des echantillons , & nous en rapporcerons encore ici un trait qui le merite" par fa fingularite. On fait que les Predicateurs du formulaire n'ont pas d'autres fermons que fur l'obeif- fance aveugle. Comme un de ces Pre- dicateurs , ( M. de faint Aubin , pretre de faint Nicolas du Chardonnet , en- vo'ie (40) a P^ R. de Paris par M. Cha- millard, a titre de confefTeur) repetoit fans cefle a une religieufe , que , felon faint Paul, ilfautobeir auxfuperieurs, elle lui repondit que faint Paul enfei- gne auffi qu'il fain condefcendre a l'infirmite des foibles , 8c qu'on ne doit pas contraindre celui qui doute s'il doit manger de la viande,a en manger •, qu'ainfi , en fuivant le precepte de faint Paul, M. l'Archeveque fachantqu'elles ne refufent de figner que par la feulc crainte d'offenfer Dieu , ildevroit les tolerer dans leur infirmite , & ne les pas obliger a rendre un temoignage , dont il avoue lui-meme que l'Eslife n'a pas befoin , 6c qui eft une chofe nouvelle &inouie. Le confelleur con-? (44] Enfept. i«4.
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I1J HlSTOIRF. DE PoRT-ROlAt^
1^(j.> vint que cela etoit vrai, & que ja-4
mais celane s'etoitfait ; mais , ajou- ta-t-il favament , vous fave^ que pat' tout il y a commencement. Telles etoient les lumieres des confefTeurs que M. Chamillard donnoit aux religieufes de P. R. Ce pretendu fu- perieur fe trompa neanmoins un jour dans fbnchoix. xliii. La Providence voulut pour la con- M Boiibuir- folation de ces faintes filles , qu'il leur
fon, confer- ..A , 1
feurde p. R. envoiat un homme de bon lens ,
vIrit!U8cdUur clt" » ^tant entte dans la connoif-
iend feivice. fance de la verite , leur rendic de grands fervices. La conduite bifare & extraordinaire de M. Chamillard fut, par un effet de cette meme Pro- vidence , ce qui defilla les yeux de ce confefleur. M. BoifbuiiTon (c'eft ainfi qu'il fe nommoit ) ne comprenanc f>oint la raifon pour laquelle celui qui
e mettoit en ceuvre, vouloit qu'on ac- cordat l'abfolution aux fceurs conver- £es , fans exiger d'elles la fignature qu'on demandoit aux religieufes de eb.ceur comme une condition necef- faires pour les abfoudre , pria une des fceurs converfes de lui expiiquer ce que c'etoit que cette fignature. Elle k fit comme elle put , & l'adrefla a ane religieufe de chceur , qui lui en |
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II. Partie. Llv.'llT. 11$
apprit davantage. M. Girard , do&eur de Sorbonne qu'il confulta, l'ai'ant encore mis plus au fait , le conduifit chez M. de lainte Marthe , qui etoit alors retire au fauxbourg faint Antoi- ne , oil Ton concerta les moiens pour qu'il put rendre fervice aux religieu- ies. M. de Boifbuiflbn s'y preta de tres bonne grace , 8c les fervit parfai- tement bien pendant les trois premie- res annees de leur captivite , non-feu- lement au confellronnal, mais encore pour les communications au dehors , portant lui-meme les lettres, 8c rap- portant les reponfes. Il fit encore quelque chofe de plus. Aiant ete en- voi'e pour confefTer une religieufe (45) dangereufement malade , il apporta avec lui la faints Eucbariftie , confefTa la fceur , approuva fes difpofitions fur le refus de la fignature , 8c lui donna' 1'abfolution 8c le faint Viatique , fans que M. Chamillard ni la fceur Flavie, qui etoient dans la chambre, s'en apper- c^ufTent. On peut juger par ce trair de la: bonne volonte de M. Boifbuiflbn, &: des fervices qu'il put rendre , 8c rendic effe&ivement jufqu'a Tan 1665 , que M. de Perefixe aiant transfere- ies reli- gieufes a P. R. des Champs , il fs (4j) La fame Louifcde faime Fate de Bonnetetiij.
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114 HlSTOIRE Dfi PoRT-ROlAt.
"j^^ retira dans le fauxbourg faint Antoine'
avec M. de fainte Marthe & M. de
Pontchateau. Nous le verrons revenir
dans le faint defert avec les autre9
folitaires , lorfque le calme fut rendu
en 1669.
xnv. Pour revenir a la chute de la four
la fiur'Mei- Melthide: elle repandit une fra'i'eur
thije aifaime extraordinaire dans tons les efprits ,
routes la , . 1 f L ■
foursfiddes., memedes plus rermes,qmcraignoienr,
comme le dit la four Genevieve , que les plus foibles ne s'affoiblilTent encore davantage par cet exemple (46). La four Euftoquie , qui avoit un cou- rage fi admirable, en fut faifie d'un tel tremblement & d'une crainte ft grande qu'elle prioit Dieu initamment de la tirer alui , & s'orfroit a endurer route fa vie toute forte d'humiliations,. d'affli6tions & de maladies, pour ob- tenir le fecours de la grace & le don de la perfeverance. Les fortes rani- moient les foibles , & leur parloient plus fouvent qu'a l'ordinaire, parce- que l'afflicHon ou elles etoient, jointe a la grande folitude qu'elles gardoienr, {jouvoit jetter les efprits dans la mi-
ancolie & l'abbattement. Mais il y en eut quantite de celles fur qui on n'avoit pas jette les yeux pour aider (4.6) 8*1. in-4. g, 61 , col. i. |
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II. Partie. Llv. III. 115 ______
Sc fortifier les autres , qui temoigne- uj^
rent un courage extraordinaire , com- me la fceur Marie de fainte Agnes , qui fit & dit des chofes admirables , &c de la meilleure maniere, a la fceur de fainte Melthide. |
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La fceur Euftoqnie (47) toute ef-fraiee & allannee qu'elle rut , n en ctemoigna pas moins de courage dans ^
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XIV.
Frai'eur de \X- fto- fon>
courage. |
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une lettre qu'elle ecrivit vers ce me-
me terns, & ou elle rappelle que lorf- 3ue Dieu la toucha & lui infpira le
efir d'etre religieufe a P. R., le pre- mier fentiment &c la premiere vue |
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I
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'il lui donna , fut de lui faire envi-
ger la vertu chrerienne comme un |
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etat ferme & immuable , qui doit
nous clever au-deflus de tout ce qu'il y a de bien & de maux dans le mon- de , pour demeurer uniquement atta- ches a Dieu, & pour vivre comma s'il n'y avoir que lui & nous au mon- de, felon la maxime de M. de faint Cyran. Cette belle maxime fervoit d'arme offenfive & defenfive a la fceur Euftocuie dans toutes les rencontres 011 elle pouvoit etre tentee par la com- plaifance , ou la crainte de ce que les hommes pouvoient dire ou faire. Elle- s'attendoit a des excremites encore. (47) Ibid- p. i«.
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II6 HiSTOIRE DE PoRT-ROlAto
" 1(j(j4t plus grandes : » Car il faut, difoir-
saconfiance" elle (48) , que nous entrions dans *n Dieu. „ }e Cle\ par Ja yoje Jes faints • c'efl>
» a-dire, par beaucoup d'affli&ions.
m Nous ferons , fans doute , d'autant » plus heureufes )qu'elles feront plus » grandes, pourvu que celui qui ale » premier ouvert cetre voie, &c mar- » che par elle, nous affifte de fa grace , » fans laquelle nou s ne pouvons rien. " J'ai plus de fujet que perfonne d'ap^ » prehender ma foiblefle ; mak~ fai » neanmoins confiance que J. C. , » qui a commence en nous cette » bonne ceuvre, l'accomplira. Je vous n aflure , que je vois vifiblement fon » fecours & fa protection fur nous rr. Ce qui donnoit cette confiance a la fceur Euftoquie , c'etoit le courage qu'elle voi'oit dans quelques-unes de fes fceurs qu'on avoit crues foibles, comme la fceur L. B. ,'& la fceur G. T. Rien effeftivement n'eft plus ferme 8c plus edifiant que la reponfe que celle- ci fit a la fceur Euftoquie , qui lui de- mandoit file Brefdu Pape ne l'eton- neroit pas. La reponfe fut que le Pape ne pouvoic pas changer les comman- demens de Dieu ; que tout ce qu'elle defiroit, etoit qu'on confellat haute- |
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II. Part ie. Llv. HI. 117
rnent la verite de Jefus-Chrifl:, fans \66x. tifer de mollelle &c de complaifance. 11 n'y a point d'accord a faire avec le menfonge , Sc ne defendre la verite qu'a demi, c'eft l'oppriruer tout-a-fait. Ces paroles de l'ecriture , Et refpon- debo exprobantibus mihi verbum , &c. oes autres de faint Paul: Ego auum Chrijli ; Sc celles-ci : Nihil pojjumus contra veritaum,fed magispro veritate, lui fervoient de regie fure pour ne point ecouter tous les projets d'accommode- ment. » Cela , difoit-elle , termine « routes les deliberations, exclut toutes » les capitulations, les raifonnemens , « Sc fait refoudre a s'abandonner a la » fouffrance , fans penfer feulement j» qu'il y a des poites pour en fortir «. 1 andis qu'on perfecutoit ainfi ces xlvi.
f-aintes filles , un nomme de bien frap- °n *crit ''*" pi du reproche que Dieu fait par fon reiigieufw. prophete , Le j'ujle peril, & perfonne n'y fait reflexion , entreprit de faire leur apologie. La premiere partie fut achevee le zo oclobre 16 6 x ; mais elle ne parut que l'annee fuivante. M. d'Angers avoit ecrit , le 12 avril de cette annee, une lettre en leur faveur a M. de Perefixe , qui y fit reponfe par une lettre du 5 novembre fuivant, % laquslle M.. d'Angers repliqua le j |
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It 8 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAT..
janvier 1665. Ces lettres forment la
troifieme panie de l'apologie de P. R. Le faint Eveque d'Alet temoigna auffi l'eftime qu'il faifoit de la con- duitedes religieufes de P. R. , comme on le peut voir par une lettre qui pa- rut fous ce titre : Lettre £un ecclefiaf- lique dAlet , fur le fentiment de M. d'Alet, touchant k refus de Jlgner que font les rtligieufes de P. R. C'etoit pour elles une grande confolation de lavoir que les plus faints Eveques approu- voient leur conduite. Les religieufes fidelles, frappees de la
chute de la S. Melthide, & de quelques autres de leurs fceurs , fur lefquelles elles avoientcompte, & quiapres avoir refufe genereufement dans le terns de liberte la fignature du formulaire , l'a« voientaccordee danslacaptivite, crai- gnant tout de leur foiblede & des mau- vais traitemens , voulurent prevenir & defavouer par un ac"te authentique , route fignature qu'onpourroitextorquer d'elles par violence dans un etat de <:aptivite. L'adte fut figne avec grande joie par les religieufes, & en particu- lier par la fceur Euftoquie qui en parle ainfi (49). ■> L'adbe me paroit fi bien »> & fi utile, que j'ai impatience de i4»J Ibid. col. 1.
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II. P A R T I I. L'lV. 111. 11 9
« le figner. J'aime a me lier de ces kJ64,
" liens, d'ou n'ait, ou du moins qui
» fervent a conferver la vraie liber-
y> te ; & je dirai bien de ces chaines,
» ce que faint Bernard a dir des paf-
» teurs : Qui me donnera cent liens
;> pour demturer fidele a Dieu , & pour
n empechcr que par mon extreme foibUffi
» Je ne m'eloigne de ce queje lui dois.
» II me femble que rien ne peut plus
*> temoigner l'humilite chretienne que
» cec a&e w. Il etoit concu en ces
termes :
» Aujourd'hui 31 o&obre 16(54 >
» nous foufiignees religieufes de P. Aa'e *pat » R. duS.Sacrement,nous trouvant re- ,eiueI les re- di 1 • 1 litiieufes de
uites par les ordres rigoureux de p. r. defa-
» M. l'Archeveque de Paris dans une y.ouent toute
a • • / o > ■• fignature qat
» extreme captivite , oc n aiant au- pourroit tae
» cune liberte de communiquer avec e*t°rtiuee par r. , w ,-1 1 violence dans
» qui que ce loit qu avec M. Lhamil- un tems de
» lard que nous nous fommes crues taPuvW-
jj obligees de prendre a partie, & en
« qui nousavons fujetde n'avoir nulle
" confiance , ou avec des perfonnes
» choifies de fa main, & qu'il ne nous
» permet de voir , qu'apres avoir ti-
•> re aifurance d'eux qu'ils nous trai-
» teront avec la meme durete que lui
•» Sc qu'ils eifaieront comme lui de
it troubler nos confeiences & de fe-
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I 10 HlSTOIRE BE PoRT-ROlAL.
mer la divifion parmi nous; apres
» avoir expoie a. Dieu cet etat fi peni- » ble , ou fa providence permet »» que nous foions , & defuant plus » que jamais de lui etre fidelles & w de le fuivre par quelque chemin »» qu'il lui plaife de nous conduire , » nous avons confidere que cet etat » meme, ou Monfeigneur l'Archeve- » que nous reduit , dans la feule in- » tention de nous porter a la creance « humaine d'un fait , fur lequel on « nous inquiete, & a rendre un temoi- " &nage public de cette creance par la « fignature du fonnulaire , nous met- « toit au contraire dans une nouvelle » obligation de ne point rendre ce » temoignage, & de ne point former » dans notre cceur cette efpece de ju- » gement que M. l'Archeveque exige » de nous, & qu'il appelle creance hu- » maine. Car etant fortement perfua- » dees que ce jugement que nous for- « merions , feroit temeraire, puifque m nous doutons de ce fait, & que » nous avons raifon d'en douter, etant » fi fort contefte , & n'y aiant aucung « obligation de nous meler de cette « affaire; ce traitement extraordinai- » re augmente & fortifie tous nos » troubles, au lieu de les diminuer, » puifque
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II. P A R T I E. LlV. HI. 111
r> puifque nous voi'ons , &: par les dif-
*> cours que M. Chamillatd fait de-
» vant nous contre nos meres &c les
» perfonnes qui nous ont conduites
>> qu'il ne craint pas d'accufer de The-
» refie desV propofitions, quoiqu'elles
« les aient fi fouvent condamnees , 8c
» par tant d'autres injuftices que Ton
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»»
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nous fait, que les miniftres de l'E-
" glife font capables d'opprimer des
» innocens, & de fe laifler aller a
» croiredes calomnies. Et de plus cet
» etat de captivite nous met dans une
» impuiflance entiere de fortir de ces
» doutes -, car il eft vifible que la
» vbie que Ton prend pour nous per-
»> fuader , eft telle qu'il n'y a point
j» d'erreur qu'on ne puifte faire entrer
» dans l'efprit de pauvres filles enfer-
» mees & prifonnieres , par le meme
» moi'en par lequel on y veut faire
» entrer la creance du fait de Janfe-
» nius. M. ChaiTiillard nous dit tout
» ce qu'il lui plait; il fait des peches
« mortels de tout ce qu'il veut •, il
» fepare de la communion qui il lui
» plait, & il ne nous eft permis de
» conferer avecperfonne de ce qu'il
» nous dit M. l'Archeveque le fou-
» tient en tout, quoiqu'il nous enfei-
,» gne une dodrine contraire a foil
Tome V. F
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in Histoire de Port- roial.
"~T~ » ordonnance & qu'il exi^e tie nous
1664. , i- -1 j r • r » une creance divine du rait, au lieu
» que I'ordonnancene parle que d'une
» creance humaine. Ses raifons, Dieu
m merci, n'ont fait jufqu'ici aucune im-
m preilion fur notre efprit; roais quand
" eUesenferoiental'avenir,nousvoions
" clairement que nous ferions teme-
» raires de fuivre cette impreffion ,
» n'y aiant rien de fi facile a des per-
» fonnes favantes , que de tromper &c
» d'embrouiller des filles ignorantes
" comme nous; ce qui nous oblige
» de nous defier de tout ce qu'il nous
u die, Nous voulons fuivre les fenti-
w mens de l'Eglife catholique & non
» ceux de M. Chamillard , n'etant
» pas obligees de prendre pour vrai 8c
« pour catholique tout ce qu'il lui
» plaira de nous dire dans un fecret,
» qui lui donne moi'en d'avancer des
» chofes qu'il n'oferoit psut-ctre dire
» devant des perfonnes plus intelli-
» gentes; & ainfi tant qu'il n'y aura
» que lui qui nous parlera, & que
» nous n'aurons pas la liberie de con-
1, fulter qui nous voudrons , pour
w nous informer de la verite ou de la
»» fauffete de ce qu'il nous dit, nous
» ferions tres imprudentes d'y avoir
* aucun egard, & de juger. fwfle^er
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II. P A R T I E. L'lV. III. 11}
n moignage d'une partie qui nous eft 1664.
»> fufpe&e par rant de raifons. Nous
» nous croions done obligees plus que
» jamais de ne point admettre dans no-
« tre cceur la creance de ce fait, puif-
« que quandbien meme, ce que nous
» croions etre tres faux , nous y pour-
« rions etre obligees en un autre terns,
« il eft vifible que Dieu ne nous y obli-
u ge pas dans l'etat ou nous fommes ■.,
" etant dans rimpuiffance de nous
« informer d'une maniere raifonnable»
?j fi Ton peut impofer a des filles cet-
» te obligation de croire des fairs
» qui ne les regardent point, & qui
» font conteftes dans 1'Eglife. Ceft
» pourquoi confiderant d'une part tant
v de raifons que nous avons de ne pas
» changer de fentimens fur la figna-
» ture,& qui nous paroiifenr folides 8c
» veritables, &c etant refolues avec la
»» grace de Dieu d'y demeurer fermes
» jufqu'a la mort , mais confiderant
» auiTi de l'autre les aftoiblilTemens ou
» nous pourrions etre portees, & par
» tant de durete que Ton exerce fur
n nous & par notre propre infirmite,
»» dont nous ne vo'ions que trop d'e-
*> xemples dans quelques-unes de nos
» fours , qui aiant toujours cru qu'el-
n les ne devoient point figner, pen-
Fij
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114 Histoire oe Port-roi'ai,.
dant qu'elles n'etoient point mal- traitees, ont commence de croire qu'elles devoienc figner quand on les a maltraitees, comme fi ces mau- vais traitemens etoient une preuve qui nous renditle fait de Janfenius plus croi'able , nous nous fommes refolues, pendant que nous ne fen- tons point ces afFoiblirTemens , 8c que nous confiderons toute cette af- faire d'une vue tranquille, depreve- nir les mauvais effets de l'inrirmite humaine , & dela rigueur dont ceux qui nous oppriment, ufent contre nous. C'eft pourquoi nous protef- tons a la face de toute lTiglife, qu'en- core qu u arnvat ( ce que nous eipe- rons que Dieu ne permettra pas ) que quelqu'une d'entre nous fe rendit a figner le formulaire, pendant qu'elle eft dans cet etat de captivite & fans avoir moi'en de s'eclaircir a fond de toute cette matiere avec une entiere liberte, on n'y doit avoir aucun egard mais regarder feulement cette figna- ture comme un effet funefte de la mifere humaine , & de l'horrible violence qu'on exerce contre nous. Nous n'avons, Dieu merci , aucu- ne pente a trahir notre confcience pat une telle lachete j mais quand |
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166$.
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II. Part ie. Liv. III. 115
>> nous ferions fi malheureufes que de
» le faire , routes les perfonnes equi- » tables auront fans doute beaucoup " plus d'egard aux fentimens libres » que nous expofons dans cette decla- " ration, qu'a une fignature extorquee, " ou par la force ouverte dont on ef " faie de nous effra'ier , ou par des ca- » reffes trompeufes, par lefquelles on » tache de nous amollir & de nous » feduire. C'eft dans cette vue que » nous avons dreife le prefent acte , » & que nous l'avons figne de nos " feings •, la captivite ou Ton nous » retient , nous empechant de pou- w voir avoir aucun notaire pour le » pafTer, comme nous Faurions de- >» fire. » Declarant en outre que nous en~
» tendons que cet.acFe, s'ilfepeut , » foit rendu public, afin que tout le »» monde y puifle voir nos veritables « fentimens , & prier Dieu pour « nous , qu'il nous empeche par fa « grace d'agir jamais contre les mou- " vemens de notre confcience pour » nous tirer d'une fi dure perfecution. » Fait ledit jour & an que deffus. Si- « gne fceur Marguerite Angelique du » faint Efprit, &c. ». C'eft ainfi que les religieufes de P.
F iij |
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\%6 HlSTOIRE DE PoRT-ROIAX.
Kjg^ R dans la captivite oii on les avoic
xlviii'. reduttes, n'etoient occupees que des Autt« chu- f0ins & cJes moi'ens de conferver la tes.Nouveaux / 1 i r ■ 1 r r ■ r
fujetsd'afflic- purete de leur roi » de ie roruner con-
re°i>Kufts fi-S tre *es tentations > & de prevenir le
delw, fcandale des chutes, fiDieu en per- mectoit, comme il avoit permis cel-
les de la fceur Mekhide & de quel- ques autres. Celle des fceurs Marie Claire & Angelique Therefe, filles de M. d'Andilly , les jetta dans la plus grande confternarion. >» Qui ne trem- » blera , s'ecrie la fceur Euftoquie , a Foccafion de ces deux chutes i » Qui » ne craindra, lorfqu'il voit ceux de « la race par laquelle on efperoit le » falut d'Ifrae'l, tombes 2 (50) » La fceur Chriftine Briquet ne fait pas difficulte de dire (51)5 que Fafflio rion que lui caufa la chute de ces deux fceurs etoit fi grande, que celle du cruel enlevement de fes cheres meres etoit douce en comparaifon. Ces chutes etoient au contraire un fu- jet de joie pour les difcoles , qui non- feulement les publioient avec affec- tation , mais meme qui en avancoient fouvent d'autres fans aucun fonde- ment. La fceur Flavie debitoit fans, |
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(lo) Rel. in-4. Rel. cvnttnant Us Ultra, y.Jl*,
(ji)Rel.ia-4. p. 74- |
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II. Par tie. Llv. 111. iff
pudeur , que la mere Agnes etoit de- X(,6a' ja entree en compofition , & qu'elie ne demandoit que du terns •, ce qui perc_oit le cceur des religieufes fide- les , lefquelles penfoient que e'en etoit fait de la mere Agnes , fi elle avoit demande du terns, & qu'elie ne pour-» roit jamais refifter aux importunitesi de la four Angelique Therefe fa nie- ce , qui avoit eu le malheur de fe lanTer feduire. Mais ces chutes etoienc furtout un fujet de triomphe pour M. de Perefixe & M. Chamillard , qui propofoient ces pauvres filles feduites a. celles qui evitoient prudemment leurs pieges , & qui reliftoient courageu- lement a. tous les mauvais traitemens. Le Prelat co/itinuoit toujours d'al- xtIX
ler a P. R. de Paris , pour tacher de M. de puit gagner quelques religieufes : il y alia *'J0%£"te |
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un jour dans le deflein d'entreprendre Bn-gy , s
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faui
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la four Euftoquie. L'entreprife etoit |^0JI1£6tt
hardie, M. de Perefixe en connoif- foit route la difficulte ; ainfi ne fe fen- tant pas aflfez fort pour livrer un com- bat a cette Vierge chretienne , il en- gagea la mere de la four Euftoquie a fe joindre a lui. La partie etant con- certed , ils fe rendirent l'un & l'autre a P. R. mais feparement, afin qu'ort crut que e'etoit fans delTein, & par F iv
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liS HlSTOIRE DE PoRT-ROlAi.'
pur hazard qu'ils s'y etoient rencon-
tres enfemble. La foeur Euftoquie eut done a combartre en un meme jour contre deux perfonnes, dont l'autori- te etoir bien refpe&able pour elle ; mais dont les foibles raifons firent peu d'impreflion fur un efprit auflijufte, auili fohde que le Men. Au defaut me- me de raifons , M. de Paris fit beau- coup da< reproches a. la foeur Eufto- quie , la traitant d'opiniatre, d'or- gueilleufe, de fille la plus entetee qu'il cut jamais vue. Il lui dit (5 3 ) que fi elle ne portoit point le nom qu'elle avoit, elle ne feroit plus a P. R. La fille de Sion pria le Prelat d'en ufer librement, fans confiderer a qui elle appartenoit, ajoutant qu'elle efperoit qu'elle feroit dautant plus forte, qu'el- le feroit plus feparee des creatures 8c plus unie a Dieu. Surquoi Madame de Bregy prenant la parole, dit : Cet- te fille ne releve que de Dieu & de fort epee. M. de Perefixe applaudit beau- coup a cette plaifanterie, &pria Ma- dame de Bregy d'exhorter elle-meme fa fille; mais elle lui dit, que e'etoit une fille a laquelle elle ne fe jouoit pas fur ce point, qu'elle n'avoit pas (n)Rel. in-4. Rtl. (ontemnl Its hurts , &c. p»
to & fuiv. |
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II. P A R T I E. Llv. HI. I 2$>
aflez bonne tete. M, de Perefixe au- 166^»
roit fait fagement d'imiter Madame
de Bregy. Auffi ne retira-t'il que de
la confufion de cette entreprife, & ii
tut force d'avouet en la quittant, qu'ort
ne reuifiroit jamais.
Lorfque le Prelat fe fat retire , Ma-
dame de Bregy dit a la fasur de fainte Euftoquie qu'elle la prioit de deux chofes : la premiere de croire qu'elle etoit fort grande fervante de M. l'Ar- cheveque ; la four Euftoquie repondit qu'elle n'en doutoit point, & qu'elle etoit perfuadee que fon obeiflance etoit C\grande, que fi M. l'Archeve- que lui commandoit de couper la te- te a fa fille , elle le feroit avec grande devotion. L'autre chofe dont elle la pria, fut de parler fouvent a la mere Eugenie : la foeur Euftoquie lui di que fa regie defendoit de parler aux notes, & que ne regardant la mere Eugenie qu'en eette qualite, elle ne devoit point lui parler (54). M. de Perefixe, apres avoir fait „ f •
tout les ravages dont nous venons de deperefixeip. faire le detail, dans le monaftere de R.descham£&. P. R. de Paris, tourna fes vues fur celui des Champs, & ecrivit a la me- C54)Ib. p. 83.
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I 30 HiS TO IRE DE PoRT-ROrAi;
re Prieure pour lui annoncer fon arri-
vee. Ces faintes filles avoient pris pare a tout ce qui s'etoit fait dans le mo- naftere de Paris, non feulement par les fentimens de leurs coEurs, mais encore par desactesauthentiquesd'ad- hefion a. leurs fceurs , a l'appel de l'en- levemeut de leurs meres , a leurs pro- teftations, &c.Quoique les religieufes duffent bien s'attendre depuis long- tems a cette vifite, neanmoins elles furent dans une extreme confternation en apprenant cette nouvelle ; elles re— pandoient continuellement des lar- mes, & etoient dans un fi grand fai- fiffement que la mere Prieure crai- gnoit qu'elles ne puflent chanter le- Te Deum. (5 3) LePrelat fi redoutable, arriva le 15 de Novembre fur les deux heures apres midi, & fut re§u a la pone par M. Floriot & M. Paulon.. Apres le chant du Te Deum, il fit fortir tout le monde de l'Eglife, s'ap- procha tie la grille, accompagne de fon, grand Vicaire, & fit une exhortation dans laquelle il prit Dieu a temoin , qu'il n'avoit point d'autre intention , que de procurer fa plus grande gloire (53) Voi'ez Relation dt nov. par la mere du Fargis
la vifite de M. I'Artheve- dans l'hiftoire des perfecu-
tpie de Paris i P. R. des tions , p. 445 Jcflliv.
Champs les Iti IS & j7 |
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II. Pa».tie. Llv. lit.' r3 r
& le falut des religieufes ; & que s'il 1664. avoit d'autres vues , il feroic non feu- lement un mechant Pafteur , un me- chant Eveque , mais encore un me- diant Chretien & un mechant hom- me. » Oui , mes foeurs , dit-il, je fe~ » rois un mechant homme , fi je n'en- » treprenois cette vifite dans le feul « deur de la gloire de Dieu & de votre » falut. » Apres untel debut, M.de Perefixe continuant fon difcours, die aux religieufes: Vousfave^ ajfii dejet qui jt demande la Jignaturc duformu- lalre. Quoi , un Eveque prend Dieu a temoin , qu'ii n'a point d'autre inten- tion en faifant la vifite du monaftere que la gloire de Dieu &c le falut des religieufes, & la premiere chofe, l'u- nique meme dont il leur parle , e'efb de figner le formalaire 1 Quoi, alTurer avec ferment un fait qu'on ignore , Sc dont on a grand fujet de douter •, con- damner comme heretique un Eveque mort dans le fein de l'Eglife -, e'eft li ce qu'on appelle procurer la plus gran- de gloire d'un Dieu qui defend qu'orr prenne fon nom en vain I c'eft-la ce- qu'on appelle procurer le falut des ames 1 Qu'elle idee donne-t-on de la religion chretienne \ M. de Perefixe pretendit enfuite lever la difficulte F vj
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131 HlSTOIRE DE PoRT-RoVAI.
MUG a, des religieufes , fondees fur ce qu'eif
fignant leformulaire elles etoientper- fuadees qu'elles feioient un jugement tcmeraire & condamneroient un grand Prelat mort en odeur de fainte- te •, en leur difant qu'il ne leur de- mandoit point de jugement , mais feulement un acquiefcement a la con- damnation & an jugement rendu par le Pane. Admirable expedient! Com- me u acquiefcer a la condamnationSc a un jugement rendu contre quelqu'uiv ce n'etoit pas le croire coupable , &: juger qu'il Felt. lI- Le lendemain , M. de Perefixe dit. u mere du la meiTe du faint Efprit, apres laquelle
Fargis & des jj monra au parloir pour ouvrir le JWlglCUlCS. ,- • • r L i
icrutin , qui commence par la mere
fnrieure ( du Fargis.) Les exhortations »
es commandemens, les longs verbia- ges furent mis en cuuvre pour enga- ger a la fignature , mais la mere da Fargis' n'etant nullement convaincue de l'obligation d'alfurer avec ferment un fait donteux, repondit qu'il lui etoit impoffible d'obeir, ne pouvant le faire fans blelTer fa confcience. En- vain M. de Paris debita tous fes dif- cours & fes raifonnemens ordinaires , la mere du Fargis y repondit avec rou- te la fagelfe» la modeftie. &. la ferme-. |
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II. Parti i, Liv. III. ijj,
te poffible. Enfin, apres un entretien de deux heures , pendant lequel elle fur fouvent traitee d'opiniatre &c d'en- tetee , M. de Paris la quitta, ternoi- gnant fa furprife de voir une religieu- fe qui aimoit mieux s'expofer a. toutes fortes de mauvais traitemens , que de faire une chofe auffi facile que de ii- gner le formulaire , c'eft a due que de faire un faux ferment. L'apres dine M. de Paris continua fon fcrutin, &c vit la fceur de fainte Euphrafie , qui ne lui parla pas avec moins de fagefle 8c de force que la mere du Fargis -. de forte que voiant qu'il pendoit fon tems, rl la renvo'ia & en fit venir une autre. Ce fut la fosur Charlotte de faint Bernard de faint Simon , fosur de Madame de Crevecceur : cette bon- ne religieufe dit a M. de Paris 9(54) que depuis trois ans qu'on leur par- loit de ce formulaire , elle n'avoit cef- fe de prier Dieu de lui faire connoi- rre fa volonte, & qu'elle n'etoit jamais fortie de la priere que plus affermie dans la refolution de ne prendre au=- eun parti, c'eft a dire de ne rien fi- gner ; & quoi que M. de Paris put lui dire , en faifant beaucoup valoir l'aur- jtorite du Pape & la fienne, & l'(> (5.4) Rel. in4-dej7j5,E,4j3„
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134 HrsTonu de Port-roiax,-
T77T bligation d'obeir a fes fuperieurs, elle demeura fertne dans fa refolution , difant qu'elle nepouvoit en confiden- ce aCTurer une chofe qu'elle ignoroit & dont elle doutoit tres fort, qu'elle ne pouvoit figner fans peche , parce qu'elle feroit un menfonge : a quoi le Prelat repondit : Vous en revene^ tou- jours la ; n'tn par Ions plus , vous yr penfere^. Prie^Dieupourmoi. Effective- ment ces bonnes filles en revenoient toures la. Avoienr elles tortde crain- dre de blefler leur confcience , en fai- fant un menfonge , & en aflurant avec ferment un fait dont elles doutoient?- Lafceur Denife defainte Anne etant venue enfuite (5 5), M. l'Archeveque Jui demanda fi elie ne feroit point obeif- fente ? Elle repondit qu'elle le feroit dans toutes les chofes, ou fa confcien- ce ne feroit point interelTee. » J'en- s> tends bien , ma bonne fceur, dit » M. de Perefixe, vous ne voulez pas » foufcrire au formulaire ». Non ,. Monfeigneur ,. repliqtia la fceur Denife ft ne It puis tn confcience. Apres plu- fieurs difcours , auxquels la religieu* fe repondit qu'elle ne pouvoit figner en confcience, & qu'elle efperoit avec la grace de Dieu de ne le jamais faire » (5 5) lb. B,4j*.
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IL> Partii. Liv. ITT. ij$
Ie Prelat lui dit qu'elle etoit poffedee ZcsTT'
du demon & la chafla., apres l'avoir te-
nue aflez longtems a genoux,parcequ'el-
le s'y etoit mife en le vo'iant fi emu. La
religieufe lui a'iant demande s'il n'e-
toit point ttop las pout continuer, il
repondit que non , qu'il vouloit ache-
ver , & qu'il voi'oit bien qu'il ne ga—
gneroit rien non plus avec la derniere
qu'avec la premiere. En quoi il die
vrai.
La four Jeanne de fainte Domitille Lir.
vint a fon rang (56), &c eut comme Maxim#- fes fceurs], bien des duretes , des c*" ^ u, de faux raifonnemens & de fades raille- Petefixe. ries a elfui'er deda part de M. de Pere- fixe, qui pretendoit que, de refufer de lui obeir en fignant le formulaire , e'etoit s'elever en foi-meme un petit tribunal qui ne recorinoit ni Pape ni fuperieur : comme fi e'etoit ne recon- noitre ni Pape ni fuperieur, que de- ne pas vouloir obeir a un commande- ment injufte d'un Pape & d'un fupe- rieur, & de preferer le commande- mem de Dieu a celui des hommes.. C'eft faint Pierre qui apprend par fon exemple a eleverenfoi cepetit tribunal; Obedire Deo oportet magis quam horni- nibus, non qui ne reconnoit ni Page . (j<s) lb.p. 457*-
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_________1}6 HlSTOIRE M PoRT-R.o7aI
166+. ni fuperieur, mais qui releve de Diet*
feul lorfqu'il s'agit de fes commande- mens; qui prefere Dieu a 1'homme , la verite au menfonge , la juftice al'in- juftice ; en un mot qui defend de men- tir & de faire des fermens faux & inu- tiles,»tels que celui qui eft renferme dans le formulaire. M. de Paris vou- lut prouver a. la four Domitille , qu'il n'y avoir point de menfonge a crain- dre en fignant ; parceque, difoit-il, » on ne petit mentir en alfurant tine « chofe dont on ne fait que douter, « pourvu que d'aurre difent qu'elle eft » veritable, furtout s'ils ont autorite » fur nous; &c pour faire le menfonge *> il faut avoir une certitude toute en- » tierequela chofe n'eft pas telle qu'on » l'a die ». Les cafuiftes reiaclies ne parleroient pas autrement. Cette ma- xime meriteroit allurement une place dans la fomme d'Efcobard, & par con- fequent dans les provinciales. La four Domitille en fut errraiee , & jugea que Dieu permettoit que M. de Perefixe avancat une maxime fi fcandaleufe* pour la fortifier dans Topinion qu'elle avoir de lui, & l'empecher par-la d'etre feduite. M. de Paris lui ai'ant dit de pner Dieu qu'il lui fit la grace de con- ixoitre ce qu'elle devoit a fes fuperieurs, |
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II. Part ie Liv. III. 137
elle lui repondit qu'elle le feroit, & Kjjjx,
ajoata quelle le prieroit auili , qu'il lui fie connoitre a iui-meme les raifons qu'elle avoir de refufer la fignature, & que s'il les connoiifoit relies qu'elle les avoit dans le creur, il feroit le pre- mier a la detourner de figner. Le Pre- lat prit fort bien la reponfe , puis fe leva & congedia la foEur Domitil- le en lui difant qu'il etoit fon fervi- teur. La four genevieve Madeleine s'e-
tant prefenree , M. de Paris lui de- xnanda fi elle ne convenoit pas qu'elle devoit obcir a fes fuperieurs : Oui , Monfeigneur, dit-elle , qudndil s'agie de chofes indifferentes, qui ne font pas contre les commandtmens de Dieu. Elle ajouta qu'elle avoir lu dans un livre de M. de Geneve , que dans l'o- beiflance aveugle qu'on rend aux fu- perieurs , il falloit que le commande- ment fervit a. unir l'ame a Dieu; & qu'elle ne voioit point cela dans le commandementde figner le formulai- re , qu'au contraire elle n'y voioit qu'un faux temoignage qu'elle ren- droit, en alTurant une chofe dont elle n'avoit pas de connoiiTance. La reli- gieufe qui fit cette reponfe & plufieurs autres aufli fenfees » fe donnoit poujr |
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1)$ HiSTOIRE DE VORT-KOIAL,
l(z£. unepauvre Normande trh groffiere &
ires ignorante. Il paroit que M. de Pa- ris n'enavoit pas cette idee; carl'en- tendant parler , il lui dit: » Il fane » que ceux qui vous ont condui- » tes, vous aient bien inilruites de » ces matieres , car les autres religieu- » fes ne font point favantes comme » ici ».La pauvre Normande repondit modeftement, que les perfonnes qui les avoient conduues ne leur parloienr. que de ce qui pouvoit fervir a les avan- cer dans la vertu ; mais que depuis trois ans qu'on les vouloit obliger de figner, celales avoir obligees a. deman- der ce que e'etoit. Tant pis de ce que vous Vave^voulu favoir, reprit M. de Paris , pretendant que e'etoit un mal- heur pour elles de ce qu'elles avoien t voulu etre inftruites (57). La fceur Genevieve fupplia M. de Perefixe de ne point l'obliger de prendre connoifTance de chofes qui n'etoient point necef- faires a fon falut, & lui temoigna qu'il n'y avoit que Dieu & fa cons- cience qui l'empechoient de lui obeir, & enfuite elle fe retira. ,.l1}\ Le lendemain le Prelat vit le refte
M. de Pere- , . , . .
fixe termine de la communaute dans la matinee, 8c
oUminam Taeut *a mortification de n'en pouvoir fignatiu; du (j 7) Ibid, p 4.6a.
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II. Partie. Liv.IIL 159
gagner aucune ($8). L'apres-dinee il 166^.
entra dans le monaftere pour faire la formuiaire. vifite de la cloture , etant accompa- fa*[l '%}^2 gne de M. de la Brunetiere l'un de fan. fes grands Vicaires, de fon porte croix & de deux ecclefiaftiques , dont l'un etoir M. Paulon confeifeur de la mai- fon (59). La vitke de la cloture etant faite, il entra au chapitre ou la com- munaute s'etoit deja rendue, & or- donna aux religieufes par toute l'auto- rite que Dieu lui avoit donnee, de lui donner promptement des marques de leur foumiffion a I'Eglife, par la figna- ture du formulairequ'il avoit mis au bas de fon mandement, ou de lui dire leur derniere refolution. La mere Prieure > a qui il addrefla la parole , lui repon- dit avec fermete qu'elle avoit deja eu Thonneur de lui reprefenter toutes les raifons de confcience qui l'empe- ehoient d'obeir au commandement qu'- il leur faifoit •, elle lui demanda pardon de la neceflite ou elle fe trouvoit de- lui redder, fondee fur ce qu'elle ne- pouvoit lui obeir fans blefler fa conf- cience. Des raifons (i folides & fifen- ((8) Les interrogatoires la mere du Fargfs, dans
& les reponfes de chaque l'hiftoire des perfecutions,
seligieufe fe ttouvent p-4(i & fuiv.
e» entice dans la relat. de (5?) Ibid- p- 4*f- |
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I40 HlSTOIRE DE PoRT-ROl'At.
1664. -^es defefperoient M. de Paris & fai-
foient fur ion efprit le merhe effet que les raifonnemens de Paveugle ne fur celui des Scribes &c des Pharifiens. N'ai'ant rien de bon a y oppofer, il fe repandir en invedives, furrout contre les perfonnes qui avoienc conduir la maifon; ce qui obligea la mere Prieure a prendre leur defenfe conrre fes de- clamations (60). Alors il fortit a de- mi de fa chaife en levant la main , de- forte que la mere du Fargis , crut qu'il alloit la frapper; & en effet il lui don- • na un coup fur le bras en difant: » 11 u faut avouer que vous etes bien enti- ty tee. Puis fe tournant vers les foeurs,. il leur dit: » Oh bien, mes bonnes » fceurs , je vois bien que vous ne » voulezpas vous rendre. Je n'ai done » plus rien \ vous dire, finon que je « vous exhorted beaucoupprierDieu w qu'il me faffe connoitre ce que je « dois mettre dans l'ordonnance que » je m'en vais drefler, & qui vous fe- » ra fignifiee par M. le grand Vicai- » re. Je vous aflTure qu'il n'y aura rien » qui ne procede de {'affection pater- s' nelle que j'ai pour vous routes ». Le le&eur pourra juger de l'affection pre- tendu paternelle de M. de Perefixe par <eoJ Ibid. p. 4*5,
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II. Part ie. Liv. lit. 141
cette ordonnance que le grand Vicai- I(j£4i ~
re lut au parloir en prefence de ces faintes filles. M. de la Brunetiere avant que d'en
faire If lecture , die aux religieufes qu'il ne doutoit point qu'elles ne fuf- fent fbrtfurprifes de la durete de quel- ques points de I'ordonnance ; ( qui en verite n'en feroit pas furpris ) J mais, dit il , M. l'Archeveque a trou- ve votre mal li grand , qu'il a cru etre oblige de fe fervir de remedes durs , pour le guerir. (Quel crime effective- ment, que de refufer de faire un par- jure ?) Apres ce preambule atfbrti a la fiiece , le grand Vicaire commenca a.
ire (61 ). " Nous, Hardouin, par la grace de liv.
« Dieu & du fiege Apoftolique Ar- Se"tcnce d« „ cheveque de rans , nous iommesfixedu 17 no- » tranfportes le 15 Novembre 1664 , J'1.eem1bersc, "£ » a l'abbaye de P. R. des Champs, gieufes de p. „ affiftesdeM. Guillaume de la Bru-R-dcschamE' „ netiere, pretre, docteur en theo- » logie, archidiacre de notre Eglife » de Paris, Tun de nos grands Vicai- » res & de nos aumoniers, pour pro- « ceder a la vifue de ladite Abbai'e , ,, confbrmement a l'avis qui en avoir „ ete donne de notre part, le jour pre, J<Si) iparc de la relat. p. i. i.
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141 HtSTOIRE DE PoRT-ROlAt.
■--------- » cedent a la mere Prieure par un au-
l6(>4- » tre de nos Ecclefiaftiques ; auquel
» lieu etant arrives fur les deux heu- » res apres midi, nous fommes alles « peu de tems apres a l'Eglife , ou » ai'ant ete rec,us par les ecclefiafti- » ques de la maifon, les religieufes „ ont chante le TeDeum ; apres quoi w nous avons vifite le faint Sacrement » & les faintes Huiles, &c enfuite ,> avons fait une brieve exhortation « aux religieufes a la grande grille du 1, chceur, pour les difpofer a profi- » ter de notre vifite, &c avons averti ?, la mere Prieure de tenir toutes cho- » fes pretes pour le jour fuivant, pour « continuer ladite vifite. Le lende- « main matin 16 , apres avoir celebre « la melfe du faint Efprit, nous fom- » mes alles aun des parloirs de ladite « abbaie , ou apres avoir recu de la- » dite Prieure un catalogue de toutes » les religieufes proferfes refidentes „ dans ladite abbaie de P. R. des « Champs, qui font au nombre de »> feize de chceur, nous les avons tou- » tes entendues dans leur fcrutin les » tines apres les autres, durant le di- » manche & lundi matin , & apres le .« diner, nous fommes retournes dans « ladite abbaie, afliftes de nofdits |
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II. Partie. Llv. HI. 14$
a grands Vicaires 8c Aumoniers, &
» du confeflfeur defdites religieufes , t> pour y terminer notre vifue ; & a m ceteffet avons fait notre entree dans » la cloture, & icelle vifitee avec » tous les lieux reguliers qui en de- " pendent, que nous avons rrouves » en bon etat. Enfuite toute la com- » munaute s'etant aflfemblee dans le m chapitre, apres l'invocation du faint n Elprit, nous avons temoigne la juf- » te douleur que nous avions de la » difficulte que ladite Prieure & les „ autres religieufes apportoient a la « iignature du formulaire, mis au » bas de notre mandetnent du 7 du 3u mois de Juin , touchant les V Prop. „ extraites du livre de Janfenius int. „ Augujlinus, & condamnees dans le » fens de cet auteur par nos SS. PP. les „ Papes Innocent X & Alexandre « VII, lequel dit mandemsnt leur M avoir etc fignifie par le doi'en m- » ral de Chateaufort, ainfi qu'elles » nous Tont avoue, des le terns qii'il » fut public dans les paroifTes de no- » tre diocefe : leur avons paternelle- » ment remontre par toutes les rai- „ fons de confcience les plus preflan- » tes que nous leur avons expliquees >> fort au long, en public, comme |
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144 HlSTOIRE DE POR.T-B.01AX.
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» qu'elles devoient fe foumettre a no- „ tie ordonnance, &enfin leuravons „ commande abfolument par la puif- » fance que Dieu nous a donnee fur » elles (non pour les opprimer ) en „ qualite de leur Archeveque, d'o- » beir a leurs fuperieurs legitimes. » Mais tant s'en faut que nofdires re- » montrances , exhortations & com- „ mandemens aient rien pu fur leurs » efpnts, qu'au contraire elles nous ,, ont fait paroitre encore plus claire- » ment, l'attachement opiniatre (62.) » qu'elles ont a tout ce qu'ont invente » artificieufement les defenfeurs de » Janfenius pour eluder la condam- » nation de fa doctrine. C'eft pour- « quoi afin de remedier a un fi grand » mal, & charier une rebellion fi in- » jurieufe aux jugemens des fupe- » rieurs ecclefiaftiques , nous les » avons declarees & declarons par no- » tre prefente ordonnance , defobeif- (62) La mere Prieute mais par la feule crainte
interrompit en cet endroit de faire une chofe qui Te- le lefteur , & lui dit que roit contre leur confcien- M. l'Archeveque leur fai- ce ; 8c que ltii-meme, M. foit injure deparler ainfi, de la Brunetiere , avoit puifqu'elles lui avoient ete temoin de ce qu'elles protefte plnfcuts fois qu'- avoient declare fur ce fujet elles n'ag,i(ibient point par a M. l'Archeveque. attache a qui que cc rut, »» fantes,
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II. P A R. T I E. L'lV. III. I45
•» fames, & comme telles incapables
»» de participer aux facremens de l'E- » glife, julqu'a ce que Dieu leur aic »' fait la grace de fe reconnoitre : » nous Ies avons declarees en outre « & les declarons incapables de voix « active & paffive dans les elections ; » & enfin leurs faifons exprefles inhi- » bitions & defenfes fous peine d'i- » nobediance, d'avoir commerce avec » les perfonnes fufpectes de favorifec » la doctrine condamnee , ni confe- jj rer meme entr'elles & avec qui que » ce foit fur ces matieres , 11 ce n'effc » pour s'inftruire de bonne foi des » raifons qui les peuvent reduire a » 1'obeuTance ■, & principalement a la *> Prieure d'induire les autres reli- » gieufes, ni en general, ni en parti- ta culier, a s'eloigner de la foumif- « fion qu'elles nous doivent ; & afin « de leur temoigner que nous avons « toujours pour elles la tendrelTe d\m » veritable pere , & le caeur ou- »• vert toutes »«:s fois qu'elles voudront « obeir &c rentter dans les devoirs de » veritables filles de l'Eglife, nous » les conjurons par les entrailles de la „ mifericorde de Dieu, & leur en- » joignons par l'autorite qu'il nous a » doanee , de le prier fans celfe pouc Tome K G |
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I4<> HlSTOIRE DF. POR.T-R.OlAI.
*"T77 " °btenir la docilite qui leur eft ne-
» ceftaire , & de mediter ferieufe- » roent combien elles fe rendent cou- y> pables , fi elles perfiftent plus long- » tems dans le meprisinjurieux qu'el- ■» les ont fait juiqu'ici d'ecouter la » voix de leurs veritables pafteurs. }> Fait a ladite Abbai'e de P. R. des » Champs, ce 17 Novembre 1664, » Hardouin, Archeveque de Paris. » lv_ Lorfque M. de la Brunetiere eut us reiigiw- acheve de lire cette ordonnance
a? uPsPeat«n- remplie de quelques points} tres durs , tcnce i; m. Ja Prieure lui dit qu'elle enappelloit, 8c que Monfleur l'Archeveque n'a- voit pas droit de les traiter de la for- te apres la declaration qu'elles lui avoient faite de leurs difpofitions. Toute la communaute fe joignit a la mere prieure, difant qu'elles appel- loient. M. de la Brunetiere furpris de cet appel, demanda devant qui elles appelioient : Devant qui il appartien- dra, repondit la Prieure. iVous ne » fauriez , repliqua le grand Vicaire , » appeller au Parlement, car la voie » de l'appel comme d'abus vous eft »» interdite par l'Arret que le Roi a » donne, par lequel il defend au Par- s' lement de connoitre de votre aftai- » re, & fe referye le droit d'en ju- |
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II. Partie. Liv. III. 147
s> get. » II ajouta en raillanc, qu'elles
pouvoient avoir recours aux voies ec- clefiaftiques, qu'elles pouvoient appel- ler au primat de Lyon , ou bien a Rome , que les chemins etoient libres. Les religieufes perfifterent a dire qu'el- les en appelleroienc par tout ou il ap- partiendroit,& lui en demanderentac- te : il repondit qu'il n'etoit point no- taire, & qu'elles feroient iignifier leur a6te a M. l'Archeveque ; les religieu- fes repondirent qu'elles n'y manque- roient pas. Quelques-unes des foeurs aiant temoigne la douleur qu'elles; avoient d'etre ptivees des Sacremens , le grand Vicaire leur dit avec durete , qu'on n'avoit rien fait qu'on ne due faire. La Prieure voi'ant que cela com- men^oit a. tourner en difpute > dit aux foeurs qu'elle penfoit qu'il valloit mieux fe taire & prier Dieu, puif- qu'on vouloit les opprimer : ce qui 00 cafionna encore quelques paroles de part & d'autre , apres quoi les reli- gieufes fortirent du parloir &c allerent toutes en larmes fe profterner devant le faint Sacrement, ou elles dirent toutes enfemble le pfeaume exaudi Domint juflitiam meant, avec le fym- bole des Apotres, & l'oraifon domi- nicale. Gij
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148 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.
Quoique route la reflburce de ces
faintes falles fut en Dieu , elles ne crureat cependant pas devoir negli- ger les voies que les loix orfrenr a ceux qui font dans l'oppreinon, & elles ap- pellerent de l'injufte ordonnance de M. de Paris , par un acte drefle le 18 du meme mois , & qui fut figne de routes les religieufes. " Aujourd'hui mardi 18 de novem-
t> bre 1W4, Nous Prieure & reli- » gieufes du faint Sacremenr, etanc » au P. R. des Champs, fouflignees , » affemblees capitulairemenr en notre 5J chapitre dudir monaftere , avons » confeie 8c delibere entre nous de » ce que nous avons a faire fur l'or- » donnance ou fentence contre nous » rendue le jour d'hier par Mgncur. « Hardouin de Perefixe de Beaumont, »» Archeveque de Paris , qui nous a » ete lue & laifTee cejourd'hui matin ». par Monfteur Guillaume de la Bru- n netiere, pretre, l'un des Vicaires ge* » neraux dudit Seigneur. Er apres w nous etre profternees devant Dieu , u 8c avoir implore fonfecours, nous » nous fommes trouvees obligees en u confcience de nous porter pour ap- ». pellantes de ladite fentence ou or- f> dpnnance ? tan: comme d'abus qu\, |
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II. Partie. Liv. HI. 149
» aurrement; comme nous appellons
» par ces prefentes, en adherant a no-
" tre appel verbal que nous avons fait
>' lors du delaiflement de la copie de
» ladite ordonnance ou fentence du-
» dit Seigneur Archeveque pour les
" caufes & raifons a deduire en terns
" &c lieu : Sc pour relever notre appei
» au Parlement , &C par tout ailleurs
" ou il appartiendra , & par devant les
» tribunaux ecclefiaftiques ou fecu-
" Hers , defquels nous efperons jufti-
» ce , faire intimer fur icelui qui il ap-
>■> partiendra & pourfuivre Taftaire juf-
" qu'a arret definitif, plaider , oppo-
»» fer , appeller, elire domicile, fubf-
» tituer un ou plufieurs procureurs ,
» nous avons fait & conftitue notre
» procureur general & fpecial M. N.
» auquel nous donnons pouvoir de ce
» faire,& de faire en outre tout ce qu'-
» audit cas appartiendra , & avons
» confirme & confirmons , autant que
» befoin feroit , l'appel contenu en
>» l'a&e capitulaire du 9 feptembre
» 1664, & les autres fairs par nous
» en confequence , pour nous joindre
» & approuver de notre part tout ce
» qui a ete fait par nos fours les reli-
» gieufes de P. R. de Paris , depui3
M la procedure abufive & infoutena-
G iij
i
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150 HlSTOIRE BE PoRT-Ro'lAt.'
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I66jf.
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» ble faite contre notre mere Ab-
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» befTe & nos fceurs les religieufes ,
» & la durete exercee contre elles de- " puis leur enlevement. Fait & deli- » bere. i-vi. Outre la relation de cette vifite faite M. Paulon 1 J 1- . _
CoufrfTeur de Par 'a mere oil rargis , nous en avons
p. R. des encore une autre de M. Paulon, qui amj,s* avoit ete envo'ie a P. R. des Champs Pan 1661 parM. Bail , pour remplir la place des confefleurs qu'on avoir obli- ges de fortir (63). Cette feconde rela- tion nous apprend quelques circonf- tances de ce qui s'etoit paiTe dans le dehors , fur-tout par rapport a M. Paulon , qui en a fait le recit a M. Floriot (64). M. de Paris ai'anr fait ap- peller M. Paulon le dernier jour de fa vifite dans fa chambre 011 il etoit feul, il lui dit d'un ton & d'un vifage fort trifle : Hi bitn , mon cher ami, tout ctci va Men mal ; je n'ai trouve que de i'oppofition & de la rejijlance. Il ajouta que M. Paulon lui avoit fait mieux efptrer que cela. M. Paulon lui repon- dit qu'il avoit feulement dit a. Monfei- gneur,»qu'il trouveroit de bonnes filles CSj) ibid. p. 47;. mi les Rel. 1M-4. p. 391.
_ (64) Voi'cz les entre- & fuiv. nonv. edit. & la
tiens de M. Floriot avec lettre de M. Paulon a ia
M. de Paris , fon ptojet fin de ce vol.
de lettre a ce Pielat, pai- |
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II. Partie. Liv. III. 151
fort humbles,& qui feroient bien aifes » de vivre clans le fiience &c l'ignoran- » ce de tomes fortes dc conteftations." Le Prelat l'aiant enfuite interroge fuc fes propres difpofirions , il rendit te- moignage a la verite & refifta coura- geufement a. toutes les follicitations de M. de Perefixe : ce que vo'fant le Prelat, vous etes un malhcureux horn- me , lui dit-il, de vous itre laijffe per~ vertir de la forte. M. Paulon lui re- pliqua, que » s'il etoit perverti, c'etoic « lui - meme qui s'etoit perverti. It » ajouta qu'il n'avoit jamais vu M. *> Arnauld &c M. Singlin. II dit encore » qu'il ne favoit pas pourquoionl'avoic » choifi pour cet emploi, & qu'il en » avoit temoigne fa furprife a M. Bail, » lequel lui avoit dit, qu'il croioit que » la foi des religieufes etoit Jin cere ; » ce qu'ai'ant reconnu par lui-meme , » il avoit cru ne devoir pas fe mettre » en peine d'autre chofe , voiant que » la confeience des religieufes & la » fienne etoient en stirete de ce cote- » la devant Dieu ». Vous etes un tnalhiurtux , lui dit encore M. de Pe- refixe , vous ne vouh[ pas obeir. .... Cejl aj(fe{ , alle\ , vous etes un malheu- reux hornme , alle^vous en. M. Paulon etant ainfi congedie, fe
G iv
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r$i HrsromE de Port-uoYah,
jf^g retira, & euc enfuite un autre entre-^ lvii. tien avec les ecclefiaftiques de Is MWr"auion *""e ^e M- 1'Archeveque. Il euc oc-
aveciesEcde-cafion de faire l'apologie des religieu-
Wui" de^es f)eP' R" & debattre en mine ces
m. dc Paris. Meffieursfur le formnlaire : il leur die fans fac/jn ((J 5), qu'il y avoit lieu de s'etonner » de ce qu'on inquietoit de » pauvres filles , qu'on troubloit leuc » filence , & qu'on les tourmentoit » fur une chofe qui ne les regardoit n point, & a laquelle elles ne devoient » point prendre part,quand meme elle » feroit faifable , pour cette feule rai- « fon qu'elle leur feroit inutile ; mais i> que ce n'etoit qu'un piege du demon » pour miner une maifon dans laquel- « le on tachoit de fervirDieu, & qu'il » etoit bien evident qu'on ne les pref- » foit point de figner par aucun mo » tit de leur falut ni de leur perfec- » rion , puifqu'au contraire celeur en " etoit un obftacle ; que ce n'etoit " point non plus par aucune vue de » l'utilite de l'Eglife.....qu'il n'y
» avoit que la France ou l'on fitfigner
» le formulaire .... Que ce n'etoit « que par un mouvement de l'ani- »> mofite Sc de la vengeance de ceus ; («}) Ibid. p. 482 , col. 1,
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II. P A R T I E. LlV. III. I ^ 5
" qui haiflbient les religieufes de Port- TgTZT
" Roial, &c qui avoient remue jufqu'-
" ici routes Cortes de retTorts pour les
« perdre; & qu'il etoit tres certain
» que fi ces perlbnnes eulTent cru que
» les religieufes eyuTent du figner, on
»> ne fe feroit jamais avife de ce mo'ien
»» contre elles ; que fi elles avoient fi-
» gne .... on inventeroit quelqu'-
*> autre chofe pour les poutler a
" bout «.
Aptes cette vifite, M. Paulon etant ' rtrr.
oblige de fortir de P. R. , il fe retira ka*J$Z aupres du faint Eveq.ue d'Alet, auquel fottir de -1 r • / • i r u J P. R. de*
il avoit ecnt le 15 leprembre. de cette champs.
annee une lettre tres belle & tres in- rerreflante (66). On y trouve un grand detail non-feulement fur ce qui regar- de M. Paulon & la maniere dont il fut defabufe de routes fes preventions ; mais encore une apoiogie des faintes- religieufes de P. R- > que la verite Sc la fincerite femblent avoir di&ee eiles- memes. Ce bon pretre, qui avoit con=- nu par lui-meme la vertu de ces vier- ges chretiennes & 1 a purete de leur foi^ prevoi'ant qu'il pourroit etre oblige de quitter ce defert, avoit ecrit cette ex- cellente lettre a M. d'Alet pour fe («) Ibid. p. 487.
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154 Histoire he Port-roYal,
"~i~66Tr nienager une retraice aupres de ce faint Evcque , pour y getnir dtvant Dieu , dit-il, pour mes pechis . qui m'ont of- furement rendu indigne d'etre plus long- terns avec dtji bonnes fdles (67). Tandis que les religieufes de P. R-
des Champs etoient aux prifes avec M. de Perefixe, celies de Paris levoient les mains au ciel & faifoient des prie- res pour elles : eiles dirent pour ce fu- jet le Veni Creator, apres lequel lafceur Euftoquie die pour troifieme oraiibn celle du vendredi dans l'octave de la Pentecofte , ou font ces paroles : Ut Spiritufanclo congregata hojlili nul- lateniis incurjione turbetur , aiant fub- ftitue familU tu&, a. ces mots , ecchjiA tuA. Elles attendoient avec grande impatience le refultat de la vifite , 8c ce fut pour elles un grand fujet de joie d'apprendre la nouvelle de la viitoire que le Seigneur leur avoit fait rempor- ter , & fur-tout de ce qu'aucune n'a*- voit fuccombc. JX. Peu de jours apres, elles eurent la ia rccurMel- confolation de voir une de leurs foeurs,
lliiJe retrace
fa fiimature.
P'oces ver- <*?) M. Paulon , ainfi lettre de cachet qui lui oi» bal de cette 1ue M. Fioiiot, ne furent donna d'en forcir , avec
riraciatios. Pas 'es feu's' 1al gu'lte- defenfed'y rentrer', Coat
rent P. R. des Champs. M. peine de defob6if[ance» Girouft . SacriAain, recut lbM,-% (utrl.[. j» le 3 cU'tunbie ua otdrc ou |
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II. Par. tie. L'tv. lit. rjj
■qui les avoit abandonnees fe rejoin-
are a elles , en retradbant fa iignature. Ce fut la four Mekhide , qui. , depuis qu'elle avoit figne , eprouvoit de grands remors ; ce qui donnoit efpc- iance aux religieufes fidelles qu'elle pourroit fe reconnoitre. Ell'e difoit meme un jour a la four Francoife Ju- lie , qui etoit malade (68) , qu'elle1 prioit Dieu pour elle , aim qu'elle ne fit pas ce qu'elle avoit fait elle-meme. Dieu exauca les humbles prieres des. religieufes qui gemiffbient de la chute de la four Mekhide , & il la toucha au bout d'une neuvaine de prieres , qu'elle crut elle-meme devoir faire a ee fujet. Elle ecrivit a. M. de Paris s. en lui envoiant fa retractation, qu'elle hit le 2 3 novembre a fes fours , qui (tfS)Cettereligieufe nu- confiance aux merites de
fade £toit continuelle- la mere Angelique , qu'- ment obftdee par les recurs elle nc douta point que ligneufes r une religieufe Dieu ne lui rendit la fan- en fut touchie , 8c crai- t£ ; & des ce moment elle gnant que fa maladie ne dit 4 la fceur Flavie , lui fut un fujet d'affoi- qu'elle n'auroit point la< bliffement , elle eut le nevre, ce que l'evene- deffein de faire une neu- ment juflifia. Dieuconfo- vaine a U mere Angeli- la encore les religieufes de- que , pour lui demander P. R. dans leur afliftion ,. la delivrance de cet etat, par cette merveille operee- ou par une promptc mort, dans l'o&ave de la fere de ou par une prompte gue- faint Martin de cette an- lifon. Aiant ptopoT6 fon n6e. Rel. in-j,. Lettres fS"<« delTein a la malade , elle f. 85 & 8s. |
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IL'agtea y 8c em une telle
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G vf
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1$6 HlSTOIRE PE PoRT-ROlAEr
en drefferent Facte fuivant.
" Nous , fouffignees , religieufes de
» P. R. du faint Sacremenr de Paris , » dans la profonde admiration oil » nous fommes de la mifericorde in^ jj finie de Dieu , 8c dans l'exces da j. la joie & de la reeonnoifTance ou « nous nous trouvons de la grace qu'il »> lui a plii de faire a notre tres there » fceur Madeleine de fainte Melthir » de , de fe retracter aujourd'hui " publiquetnent de la faute qu'elle » reconnoit avoir commife en fignans " le formulaire, & de fe relever de m fa chute avec ime humilire & un ?> fentiment qui nous donne fujet de » croire 8c de confelfer qifelle eft »» du nombre de ces ames , dont le » Prophete parle quand il dit: Si It =j jujle tombt , il ne fe brijera point, » parceque le Seigneur avancera fa. « main pour le foutenir ; nous nous w croi'ons obligees de drefler le pre- « fent a&e en forme de proces-ver- 3> bal, pour faire favoir a tout le mon- » de , s'il eft poffible , comment cette »» action fi edifiante s'eft paffee , 8c. » pour etre comme un monument de " la grace qu'il a plu a Dieu de re- » pander fur notre chere fceur, &de » notre reconnoiflance particulier© |
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II. P ar t 11. Liv. III. r J7
»> envers lui & envers la fainte Eglife, " aux prieres de laquelle il faut attri- " buer la conversion des ames , puif- » qu elle eft la colombe myftique , » par les qemirlemens de laquelle les » pccnes lent pardonnes. » Notre chere foeur a done ecrit ce
n matin n novembre 1664 a M. " l'Archeveque,& a. onze heures & un » quart,la communaute ctant au refeo « toire , elle s'eft mife a genoux apres » le Benedicite , &c elle nous a dit: JW« cheres fceurs , je me fens obligee en conjclence de vous demander ires hum- blement pardon de la faute que je re- connois avoir faite enjignant leformii- laire , & de la maniere dontj'ai agi en cette occafion. Je me retra&e de tout mon ctzur , & dejire fincerement de fatisfairs a Dieu pour cette faute , &je vous de" mande pour cela raffijiance de vosprie- re* & la continuation de voire charite ; & vous , ma mere ( a-t-elle dit a la mere Eugsnie) je vous fupplie de croire qua je fuis ce que je fais par la Jeule craints de Dieu qui my porte , fans induction ni perfuafwn d'aucune de mes fceurs , rien aiantparlea aucune, & a'iant dreffi ce papier de mes difpofitions Jans leur en avoir rien dit du tout, & j'ai fupplit ffae.de mesfaurs di It lire ici tout haut » |
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IjS HlSTOlRE DE PoRT-ROi'AX.'
afin de fatisfaire a Dim , a ma conf- cience . & a la communauti que, J'ai fcandalifie. La mere Eugenie avoic » tache de l'interrompre , cede lui jm- - pofer filence ; mais le mouvement
» du coeur de cecte chere fcEur ani- »» mant fa voix , la lui avoit fait ele- » ver a mefure que l'autre tachoit d'e- >» touffer les paroles d'une confeffiorr » qui lui etoit auffi defagreable qu'elle » etoit agreable a. Dieu , ediiiante « pour nous, & falutaire a celle a qui - il donnoit la force de la prononcer.
» Mais enfin le zele de la mere Eu» s« genie ne pouvant plus fe diffimuler , » elle s'eft levee de fa place avec uti v air & un gefte qui ne marquoient w que trop fon impatience. Elle a » voulu arracher le papier a cette » fcEur , qui commencoit a. le lire ; » mais elle lui a reiifte , & apres avoir » lu une ligne , la mere Eugenie con- s' tinuant a. s'ecliauffer , elle a celTe » pour eviter la confufion , & chacur- m ne s'eft mife & tenue a table dans » la modeftie ordinaire , & dans un >» mouvement de joie tres extraordi- » naire. Auffi -tot apres graces , que *» Ton va achever dans PEglife , no- re tre chere foEur aentonne l'antienne » d'adfcion de graces Te Diutn patrem a |
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II. Partte. Llv. III. 159
»» mais a la derniere fyllabe, la M.Eu-
» genie a frappe des mains plulleurs » fois, pour faire ceifer, fans avoir au- m cun refpe£t au S.Sacrement,qui etoit » expofe a caufe de la maladie de la » Reine. Mais cette a£tion qui a don- » ne un fujet legitime de kandale a: » l'efprit , n'a pas empeche le par- » fait accord des voix. Nous avons » pourfuivi I'antienne & y avons » ajoute lesverfets & lesoraifonsque » nous avons jugees les plus confor- » mes au fujet & a notre devotion.. » La mere Eugenie , fes filles & nos; » fours qui ont figne , qui fe fonc »> trouvees a cette adtion , font forties » du chceur, a. l'exception d'une feule, » avec precipitation , 8c en difant m quelques paroles que nous omet- » tons , &c qu'elles auroient mieux fait » de fupprimer entierement. La priere » d'a&ions de graces etant achevee,. j> nous nous fommes proftemees de- » vant le faint Sacrement, pour offrir » a Jefus-Chrift l'hymne du fdence 8c » l'hoftie du coeur , apres lui avoir of- » fert le facrifice des levres. Puis » nous fommes allee's au chapitre ,. » pour lire le papier qu'on nous avoit „ empeche de lire au refe&oire. Pen- » dant que la communawe paffoit |
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K?0 HlSTOTRE DE PoRT-ROlAt."
» pour y aller , une des foeurs qui ont
m figne , difoit avec un gefte & un
» air qui marquoient grande chaleur :
" VoiLa comme font les demons, quand
» ils ont attrapi quelquun , its font
» fete tous enfemble. Sur quoi une de
« nos fceurs lui a dit aflez bas : Les
" demons ne rendentpas graces a Dleu.
» Une autre a couru avertir la mere
» Eugenie que nous etions au chapi-
» tre ; elle y eft venue aufll-tot avec
» deux de fes religieufes ; & avec un.
» air & des paroles imperieufes , nous
» a dit : qu'elle nous ordonnoit de
» fortir de la , &c. Les religieufes par
» refpecl: pour le faint Sacrement done
» elles etoient proches, & pour eviter
» le bruit, fortirent 8c allerent dans
» un lieu oil la foeur Melthide hit fa
» retractation. Elles drelTerent le len-
» demain , 13 de novembre, un ac~te
» de tout ce qui s'etoit pafle (69) ;
» mais la captivite dans laquelle elles
« etoient retenues ne leur permit de
» le figner que le 7 du mois de de-
» cembre.
(*<>) Vo'i'cz dans les Rel. datee du meme jour if
fe-4. contenant Its Ittitts , novembre , jour qu\lie
&c. I'expofition des fenti- s'etoit confacrce. i Diet*
mens de la feur Angeli- par fa profeflion religieq,
<]ue ds faint Alexis, fur fe»
lit fign*tute du fbrmulaire,, |
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II. P ARTIE. Llv. III. I6l
Cette retractation de la fceur Mel- 1664.
thide & la guerifon miraculeufe de la lx. ceur Pran^oiie Julie , qui avoit prece-£xc s-irrireder de dequelques jours, furent felon l'ex-p'us en Plus triir-tr • 1 r • contre les re-
preiiion de laloeur Marguerite de iainteiigjeufa de p.
Thecle (70), comme un boh qui allu- R- de 1,aris«
ma de plus en plus la colere de M. de
Perefixe, & les effets fuivirent de pres.
Le Prelat fut furtout pique de ce que
Ton avoit chante le Te Deum : » Si
» elles avoient envie de rendre gra-
» ces a Dieu, dit-il, que ne le fai-
» foient-elles enleurparticulier. Mais
» quoi, s'en aller chanter le Te Deum.
n Elles triomphent de moi , 6c font
» ravies de le faire tout hardiment ».
Depuis ce jour, il fut dans une etrange
colere contre la fceur Melthide, quoi-
qu'il affectat de faire paroitre, qu'il fe
foucioit pen de fa retractation , n'ai'anr
jamais fait cas de fa fignature, ne vou-
lant pas , difoit-il, qu'on fignat mat-
gre foi , mais qu'on le fit de bonne
volonte & avec joie. M. de Paris en
parlanr de la forte , pouvoit-il pronon-
cer d'une maniere plus claire l'arrec
de fa condamnation \ Puifqu'il ne voil-
loit quedes fignatures fakes de bonne
rolonte , pourquoi done vouloit-il l'e-
ii7o) Rd. in-4. lettm, 3cc. p*8?.
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\6l HlSTOIRE DE PoRT-Ro'l'AI..'
'rr. xiger de ces faintes filles qui avoienf
I664. t> , 1 tant de repugnance I Fourquoi trai-
toit-il fi durement des vierges chre- tiennes, parcequ'elles refufoient une fignature , que lui-meme reconnoifToit qu'elles ne pouvoient ni ne devoient accorder dans la difpofition ou elles etoient > Pourquoi fe vantoit-il qu'il viendroita bout de les faire figner tou- tes par quelque moien que ce fut I Eft-ce la la conduite que doit tenir ce- lui, qui veut que les chofes fe faflenc de bonne volonte J Quelle contradic- tion 1 txT. M. de Pereflxe fit bientot fentir ^^^•.auxreligieufesdeP.R. de Paris, &
surptife & en particulier a la foeur Melthide les- ril#ZJa effets de fa dLire & ini«fte colere- II
Reproches vint au monafterele famedi 19 novem-
«pii eur ait. jjre ^ avant \e jour } pOUr enlevet trois religieufes. Comme il y avoit deja ete
la veille 8c y avoit meme refte plus de fept heures, ces pauvres filles qui fe flattoient qu'elles pourroient etre en re- pos au mains pendant quelques jours , & que M. 1'Archeveque ne reviendroit pas fi-tot, furent extremement fur- prifes , lorfqu'il arriva fur les fept heu- res du matin avec des flambeaux , & oa'on l'introduifit dans le chapitre avec in compagnie » M» de la Brunetiere , |
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If. Partie. Llv. III. 163
le fameux Chamillard & fon porte \(>$a,
croix (71). La fcear Flavie, la lanter- ne a la main, faifant la fonction, non d'une cpoufe de Jefus-Chrift , mais eelle d'une epoufe du difciple qui le trahit, les conduifoit. Lorfque le Pre- lat fut entre dans le chapitre, il fit fermer la porte , pour empecher qu'on ne fortit. Alors ces pauvres religieufes erTrai'ees d'un procede fi etrange , s'i- maginoient les unes, que M. de Pa- ris etoit venu pour les excommunier -y d'autres que c'etoitpourleur 6ter leurs voiles (71), & toutes repandoient des larmes en abondance ; ce qui fitun fi grand renverfement dans les corps & les efprits, que route la communaute en fut malade* La fccur Francjoife Ju- lie Baudran s'evanouit en prefence de M. de Perefixe » qui demanda fon nom , & fi elle ne fe trouvoit point rnal auparavanc. La fceur Euftoquie.- penfant qu'il n'etoit pas mauvais de lui raire faire quelque reflexion fur fa con- duite , lui dit que c'etoit l'extreme fraieur qu'avoit eue cette religieufe , qui l'avoit fait tomber en cet etat •, parceque le voiant arriver a cette heu- (71) Hift. desperfec. p. mere Genevieve de l'Jn«
40;- carnation , p. 57. (71) Rel. in-4, de U
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I<?4 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.'
re , elle jugeoit bien que c'etoit pour
quelque nouvelle expedition. Le Pre- lar tout interdit regarda la foeur Euf- toquie en faifant un figne de tete qui marquok alFez qu'il ne l'oublioic pas (73). On fut pres d'un quart d'heu- re a la faire revenir ; enfuite on la me- na a l'infirmerie. La foeur Francoife Louife penfa perdre l'efprit de fraieur, & cette indifpofition lui dura trois 011 quaere jours (74). Lorfque la mere Eu- genie rut revenue de Tinnrmerie , oil elle avoit conduit la fceur Francoife Julie, M.de Perefixe commenca apar- ler ainfi (75) : » Mes foeurs , e'eft »» avec une douleur extreme que je « vous traiterai en la maniere que je » le vais faire ; mais je fuis oblige » de mettre ordre aux dereglemens » de cette maifon; & je crois devoir » ufer de remedes extremes, pour re- » medier aux maux extremes qui y n font ». Apres ce preambule , M. de Paris s'etendit fur les pretendus de- reglemens , qui n'etoient fondes que fur les foupcons & les delations de la mere Eugenie & de la fceur Flavie.il fit (7;) Rel. de la captivite p. 104.
At la foeur Euftoquie. (75) Rel. in-4. letttet <J (7<l)Voiez la rel.in-4. &c.p. 74.
foKterunt tu Utttts , See. |
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II. Part ie. Llv. III. 165
un grand crime aux religieufes d'en- i6~6±, trer dans les chambres les unes des au- tres ; ce que la neceffite les obligeoic de faire pour parler enfemble. Il die qu'elles ecrivoienr au dehors contre fes ordres , & qu'il avoir des originaux dans fa poche ; ce qu'il repera plu- fieurs fois •, de maniere que la mere Genevieve de llncarnarion , crut qu'il avoir reellemenr de leurs lerrres , & qu'il alloit les faire fouiller par les filles de fainre Marie (76). C'eft pourquoi comrae elle avoir des lercres & des pa- piers precieux qu'elle portoir fur elle, n'ofanr les lauTer dans fa chambre , parcequ'ils n'y auroienr pas etc en fure- te, elle eur une fi grande frai'eur , que fes yeux commencerent a fe troubler 8c qu'elle fe feroir evanouie, fi elle n'euc prevenu eet accidenr qui auroir in- failliblemenr decouverrle fecrer.Com- me elle fenrit qu'elle s'afFoibliflToir, elle demanda la permiffion de fe rerirer , en difanr a la mere Eugenie que fi on ne la laiiToit forrir, il lui en arriveroit autanr qu'a la fceur Fran^oife Julie. Ce- la engagea M. de Perefixe a la laifler foitir, dans la crainre qu'elle ne rerar- dar fon expedition, qu'il auroir bien (71) Rel. de la mere Genevieve de l'inparna-.
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l66 HlSTOIRE DE PoRT-ROl'At.'
" TZTt voulu faire avant le grand jour:Qw ma-
ll agit , odlt lucem. Il fit de grands re- proches aux religieufes (77) d'avoir cherche des mo'iens indignes de leur etat, pour paffer des ecrits & en rece- voir : il leur reprefenta comme un cri- me, d'avoir tache d'apprendre des nou- velles de ce qui regardoit leurs affaires & les deffeins qu'on avoit fur elles , de s'etre communique les unes aux au- tre s ce qu'elles en avoient appris, pour concerter enfemble leurs mo'iens de de- fenfe & la maniere de fe conduire.Puis il leur dit qu'ai'antdeja 6te celles qu'il avoit jugees etre les plus attachees aux fentimens des defenfeurs de Janfenius, il vo'i oitneanmoins qu'elles perfiftoient dans 1'attachement aux opinions de ces perfonnes , qu'ainfi il fe croi'oit obli- ge de remedier aux dereglemens qu'il avoit reconnus dans cette maifon. En- fuite de quoi il fit lire par fon Secre- taire l'ordonnance qu'il avoit dreflee pour remedier a ces pretendus abus , dont il faifoit le detail. lam. La conclufion de cette ordonnance fut ■v<:U«0lSvIia>i- un OT&Te donne aux trois religieufes, «nes de ia co- qu'il avoit choifies pour etre les vic~H- B&it M'dC mes ^e *"a c°lere» de & retirer dans les
maifons 011 il alloit les faire conduire. tffl Rd. ta-4. Leltm, See. Hift. ies pcrfcc. |
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II. Par tie. Llv. III. \G-j
11 renouvella l'interdiction des Sacre- T^T, mens pour la communaute,& la priva- tion de voix active &c paflive. Les re- ligieufes l'interrompirent & luidirent routes d'une voix , qu'elles appelloienc de fa fentence. L'Archeveque leur im- pofa filence pour faire continuer la lec- ture de fon ordonnance , laquelleetant finie , une fceur lui dit qu'etant toutes audi coupables que les trois religieu- fes qu'il enlevoit , puifqu'elles etoient dans les memes fentimens , elles me- ritoient le meme traitement. Le Pre- lat rcpondit qu'il vouloit bien les traiter toutes de la meme maniere,mais que ce ne pouvoit etre pour le prefent,parce- qu'il n'avoit pas alfezde lieu ; & il dit que fi elles perfiftoient dans leur fen- timent, il les fatisferoit bientot. Il ■proceda enfuite a l'enlevement des trois religieufes , qui ne flit pas moins vio- lent que celui du i6 aout , quoi- qu'il n'y euc ni Lieutenant de Police m Chevalier du Guet,ni archers a celui- ci •, mais les religieufes de fainte Ma- rie , & quelques-unes des religieufes qui avoient figne , y fuppleerent, & ne fitent pas moinsque ce qu'eufTent fait les miniftres de la puiflance feculiere. Le Prelat qui conduifoit lui-meme Enlevement
&s } prifonnieres pour les faire forcir, jL^ueftB* |
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Iv53 HlSTOIR-E DE Pr.T-71.01AI.
~'l66.— e:ant a la porce , die a la four Mel-
U thide que c'ecoit-la ce que lui avoit procure fa retractation , &. qu'elle pou- voit voir fi. elle fe trouvoit bien de s'e- tre retractee, fe plaignant fort de fa defobeiflance. Elle fe mit auffi-tot a genoux , & lui dit: » Monfeigneur , '• vous voi'ez bien que je vous obeis •» a cette heure avec joie. Quand j'ai » figne le formulaire , je vous ai obei » avec beaucoup de repugnance, par- «> ceque j'etois dans le trouble & que » j'agifiois contre ma confeience ; » mats a prefent je fuis ravie de pou- " voir vous temoigner la difpontion » ou je fuis, & de vous donnerdes « preuves de mon refpeel: & de ma » foumiffion dans toutes les chofes « qui ne bleileront point ma confeien- » ce ni la verite. » txiv. On n'eft pas furpris de voir la fceur df"Ir'tot Euftoquie du nombre des trois fur
lefquelles tomba le courroux de M. de Paris. Cette religleufe fi recomman- dable par fa piete & fes grandes qua- lites , s'etoit trop diftinguee par fon zele & fa fermere , pour etre epargnee. Et ce qui merite d'etre admire en elle, e'eft l'eloignement qu'elle avoir de fa fervir d'aucun moi'en humain qu'elle pouvoit avoir pour eviter un pareil trai- tementt
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II. Partii. L'iv. 111. 169
.t'ement. Elleetoit filleule de la Reine 1664."
mere & en etoit aimee. Sa grande mere
avoit fort envie qu'elle lui ecrivit :
a> Mais, dit lafoeur Euftoquie (78), j'en
» fuis fort eloignee ; tout ce qui nous
« engage avec les gens du monde,
»» furtout les Grands, etant a craindre,
» parcequ'il eloigne dd'humilite chre-
» tienne & religieufe, dont il femble
h que la devife doit etre 1 Ama rtef-
" ciri & pro nUido reputari. Monfieur, F0iadm;ri-
frere duRoi dernandoit desnouvellesdebIedcla.fa:u,J
la foeur Euftoquie & fe recommandoit " 0^m *
lui & la princeiTe fa fille a. fes prieres.
Elle avoit des parens puiflans, qu'el-
le eut pu interelfer pour elle : mais
aucun de ces moiens humains n'etoit
du gout de cette grande ame qui vi-
voit de la foi & ne mettoit fa confian-
ee qu'en Dieu. Ecoutons-la parler dans
une lettre qu'elle ecrivoit trois jours
avant qu'on l'enlevat: - Je n'attends ,
» dit-elle (79), nullement notre deli-
s» vrance des hommes, mais de Dieu
» feul; & c'eft pourquoi je penfe qu'il
t> vaut mieux folliciter fa bonte par
» des prieres redoublees, que de nous
» mettre tant en peine d'ecrire pour
t» prier les hommes. Ma fceur G.
{78) Rel. 111-4. Lettm, See. p. 8j.
(79) Ibid. p.^t. To mi K, H
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170 Histoire de Port-roYal.
"" l66i,~ " m'avoit un peu preflee d'ecrire a » plufieurs de mes parens, mais je » vous avoue que je n'ai pu m'y re- » foudre. C'eft a mon pere qui eft un " horn me du monde de parler ami « hommes du monde , &c je fais bien i> qu'il n'oubliera rien pour moi de » .ce cote-la ; mais c'eft a. moi qui » fuis fervante de Dieu , de parler a » Dieu. Lorfque cette genereufe vierge for-
tit du monaftere ou elle s'etoit con- facree a. Dieu, elle demanda la bene- diction a celui qui Ten chaftbit, & lui dit qu'elle embralTeroit de bon cceur la folitude dans la quelle il 1'alloit en- fermer , & qu'elle efperoit qu'etant plus degagee des occupations exterieu- res & plus appliquee a Dieu, elle fe fortifieroit encore davantage dans l'a- mour de la verite & dans la refolution, qu'il lui avoit donnee de s'expofer X rout plutot que de la blefler tant foic peu. lxv. M. de Perefixe fit enfuite fortir la Enlevement {c£m Francoife de fainte Claire , en
France de lui recommandant de garder le filen- b» claire. ce qU'jj n'ayoit; pU 5 dit-d, venir a bout de lui faire obferver dans fon monaC-
tere ; apres quoi il revint au chapitre, ©u il trouya les religieufes avec fpn. |
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II. P ARTIE. LlV. 111. IJI
grand Vicaire , qui lui dit, •> Monfei-
»> gneur,ces Dames vont verbalifer fur » rout ce qui fe dit ici &c. N'en don- s' tez point, repondit l'Archeveque , " qu'elles ne faflent un proces verbal « de tout ce que nous dirons & fe- » rons : elles tiennent compte de tout.» Le Prelat s'affit enfuite , il debita tous les raifonnemens frivoles & fi fou- vent detruits., par lefquels il vouloit etablkfafoi humaine : lorfqu'il eut fi- ni fon difcours , une religieufe s'etant mife a genoux devant lui, il lui dit avec aflez de douceur, »levez-vous,ma » bonne fceur , que voulez-vous > »» Monfeigneur, lui repondit la reli- » gieufe , nous vous fupp lions tres *> humblement de nous delivrer de » M. Chamillard, car il n'y a plus » mo'i'en de fouffrir fa domination. >» Toutes les religieufes s'approcherent de lui, pour lui parler Sc tacher de le toucher, en lui reprefentant 1'etat de- plorable ou il les reduifoit , n'ai'ant point d'autre crime que la crainte de violer les commandemens de Dieu ,. &c de lui obeir a lui meme puifqu'il leur avoit ordonne de ne point men- tir en fignant le formulaire fans etre perfuadees du fait ; Mais toutes ces remontrance3 & celles qui lui furent Hij
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171 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.
T, fakes au fujet des fceurs converfes , qui
1604. , . r > , „ . , , 1. etoient iouvent vexees, oc pnvees de la
communion fansfujet, furent inutiles ,
8c le Prelat fortit laiflTant ces pauvres fil- les dans la douleur & les larmes. Se voi'ant done hors d'etat & d'efperance de pouvoir faire entendre leurs juftes plaintes aux homines , elles eurent re- cours a celui dont les oreilles font tou- jours ouvertes a la voix des pauvres &c des affliges •, & elles allerent fe prof- terner devant le faint Sacrement, ou elles appellerent au tribunal de Jefus^ Chrift. Une des fceurs hit tout haut leur appel conc^u en ces termes, qui font de faint Bernard, txvi. " Nous en appellons a votre tribu- tes reiigieu- „ nai Seigneur Jefus, nous attendons
les appellenc . o
de ces vioien-» votre jugement, & nous remettons
cesi jU T"^u"" r-otre caufe entre vos mains. Sei- lial de J. C. . .
Proces ver-» gneur , Dieu des Anges & des hom-
viWces.C" " mes C1U' )u§ez *~e'on *a juftice,qui pe-
» netrez le rond des cceurs , & dont h les yeux ne peuvent fe tromper ni »» etre trompes, vous vo'i'ez qui font f eeux qui cherchent vos feuls inte^ m rets ou les leurs propres. •> Toutes Slant repondu , Alnfi foit-il, elles re- doublerent leurs foupirs & leurs lar- mes , & offrirent leurs vceux & leurs jjrjeres, Tout cecj. eft rapporte dansl$ |
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II. P A R T I 1. L'v. 111. 17 J
rproces verbal de l'enlevementdes trois
religieufes, dreiie le jour meme z? Novembre , relu, & figne le 5 Decem- bre par trente cinq religieufes, qui marqueut leurs difpofitions & l'efpris qui les faifoient agir,par ces belles pa- roles qui terminent le proces verbal. » Dans cette extreme aftli&ion , nous i> avons offert a. Dieu nos vceux & nos " inftantes prieres , nous fbrtifiant en » meme rems dans 1 efperance quenous » avons en fa mifericorde q ii nous « fait dire avec confiance que quand » meme il nous auroit ruees, nous » efpererions en Iui, 8c que nous ne » cefferions jamais d'attendre de lui m le fecours & le falut que nous ne « pouvons recevoir que de fa feule » grace, laquelle nous lui demandons » continuellement; croi'ant avec certi- w tude qu'il ne rejette pas nos tres » humbles prieres, encore qu'il differe » de les exaucer , & reconnoiffant » meme pour une preuve de fadivi- « ne affiftance , la refolution ferme 8c " inebranlable qu'il nous donne de » lui etre fidellesjufqu'a la mor-t, en » nous expofant de bon coeur pour « l'amour de lui a. fouffrir route forte n de mauvais rrakemens, & a etre » bannies de notre monaftere plutot Hii)
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174 HlSTOIRE BE PoRT-Ro'lAL.
J(564>" " que de manquer a fa fainte lot »
» &: de bleffer notre confcience par
" une fignature qui feroit une recon-
» noiflance d'un fait contefte & pre-
» judiciable a. lhonneur d'un grand
« Eveque, & dont nous ne fomrhes
» point obligees de nous informer ,
» ne pouvani en avoir aucune con-
w noitfance par nous memes , & aVant
»» fatisfait par nos actes precedens &
»» qui ont ete rendus publics a tout ce
»' qui regarde la foi. Mais parceque
« ce refus que nous faifons de notre
•» fignature , eft le pretexe que Ton
m prend pour detruire notre monaf-
»» tere •, & d'autant que cette violence
f 6c voie de fait, montre que le def-
»> fein de M. l'Archeveque n'eft au-
»» tre que de le ruiner entierement
*» pour fatisfaire la paffion de ceux qui
« s'en font de tout terns declares let
w ennemis, nous avons cru etre obli-
»» gees en confcience de nous y oppo-
u fer ; & nous avons refolu de nous
w plaindre atoute l'Eglife, & de de-
« mander juftice devant tous les tri-
» bunaux oil nous pourrons etre en-
s> tendues , meme devant celui de
»> Jefus - Chrift, comme nous avons
» fait & faifons par le prefent acte ,
» voi'ant qu'on nous veilt fermer tou$
» ceux de la terre.»
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IX. V A R T I i. LiV. III. 17$
La veille que les religieufes de P. i6d*~*
R. fignerent cet ac~te , qui fut le 5 De- xlvii. cembre , elles en avoient llgne un fil^'",-^d6" d'une autre efpece, date du quatre , mem ajmi- qui ne leur fait pas moins d'honneur ™&Lfo de par l'equite & le defmterefTement P- R. qu'elles y marquent , en formant op- position a tout ce qui pouvoit etre fait a l'avenir dans leur maifon , qui ref- fentiroit l'interet ou l'avarice. Voici de quelle maniere s'expriment ces filles admirables en tout , attentives a rem- plir toute juftice : » Nous, fouflignees » » religieufes du monaltere de P. R. » du faint Sacrement , voiant avee " une douleur extreme le renverfe- » ment general que Ton fait dans cet- » te maifon , & que , fous pretexte de » mettre ordre a une pretendue de- jj fobeiirance aux ordres fi extraordi- » naires qu'il plait a M. l'Archevequc » de nous faire , pour nous obliger a » prendre part a une queftion a la- » quelle routes fortes de loix &c de » raifons nous obligent de n'en pren- * dre aucune , on y introduit des de- » ford res reels & veritables , & qui » pourroient avoir des fuites tres fa- « cheufes , (1 Dieu ne touche le coeur » de ceux qui ne fe fervent de leur »» autorite que pour accabler de pau- H iv
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ijS HrsToiRE db Port-RoiiAr.
» vres filles; voiant que M. TArche-
" veque a 6te des charges toutes cel- » les que nos meres y avoient mi- » fes & qu'elles en avoient jugees » capables , pour y mettre celles » qui ont figne , qui n'ont rien du » tout qui le leur puifTe faire me- » riter , temoignant fi peu de con- » formite a l'efprit , & aux maxi- " mes fainres & chretiennes des per- « fonnes qui nous ont conduites juf- » qu'a prefenc ; 8c voiant enfin que " nos affaires temporeiles, qui)ufqu'd » cette heure avoient 6:6 conduites » par M. Akakia , dont la prudence » » la fidelite, la piete & le delinterei- » fement meritoient un traitement « plus favorable que celui qu'on lui « a fait en le mettant a la Baftille (80) » fur un fimple foupcon qu'il s'ctoit •> charge de notre procuration pour la " pourfuite de nos affaires, font pre- " fentement entre les mains de per- » fonnes qui nous font inconnues , &C » que nous doutons qui aientles qua- » lites de M. Akakia & fon definte- (80) VoTez Rel. in-4. p. cruelle dont M. Akakia ,
f; , une lettic de la fueur qui emit malade , fut en-
Hifabetli Agnes a la mere Ieve , & le zele que Ma-
Pdeurede I'ort-Roial des demoifelle Conflant te-
champs , dans laquelle moigna en cette occafioiu
die detaille la niauiers |
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II. Partie. Lip. IIL tjj_______
* reflement; dans la jufte apprehen- 1664.
» fion que cela nous donne , que fous * pretexte de la pauvrete de la mai-
" Ion, ceux & celles qui ont main- » tenant le foin de la maifon , ne fat » fent des bafleffes & des injuftices, » foit en ufant d'une trop grande exac- " titude envers ceux qui nous doivent " pour les fake paier, ou en s'effor- « $ant de faire caller les contracts, " tranfactions & donations que nous » nous fommes crues obligees en conf- » cience de faire avec quelques per- » fonnes qui nous avoient donne leurs » biens, dans l'efperance de ne fe » feparer point de la maifon & d'y » etre entretenues, & qui fe verroient « fruftrees de ce qui leur eftdit, par » le renverfement qu'on y fait fous » pretexte que ces comrades fe font » raits depuis le commencement des » affaires de la fignature, comme {i * nous etions incapables de rien fai-
» re de valide pour le bien temporel, » tant que nous refuferons de bleffer » notre confeience par une foufcrip- » tion temeraire &c pleine de degui- » fement ; Nous declarons par le pre- » fent adle que nous n'avons aucune »• part a tout cela ; que nous renon- » 50ns a tout ce <jui pourroit reffea- H y
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_______ I78 IrllSTOIlU DE PoK.T-Ko'lA't.'
1664. " tie tant foit peu Pinteret, Pa varies
»» ou Pingratitude envers les perfon- « nes a qui nous fommes redevables- « & qui nous one fait charite ; que " nous efperons que Dieu nous fe- » ra la grace de ne nous ecarter jamais » des faintes inftru<5tions de nos me- " res, qui nous one toujours portees » a ne vouloir point d'autre trefor w que celui d'une charite fincere, « d'un definterefTement vraiement •> chretien & religieux , d regarded »> notre pauvrete comme un etat heu- « reux, comme un fond facre qui edi- j> fie & confacre les maifons religieu*- « fes , & les richefles au contraire » comme en etant un fujet de ruins » & comme des ordures qui fouillent « la beaute & la purete de la maifon » de Dieu, & a ne jamais mettre no- » tre confiance pour la fubfiftance de '» notre ame , ni pour celle de notre » corps dans les prevoyances humai- *> nes & la prudence du fiecle, mais s» dans la bonte & la divine providen- » ce de celui qui d'une parole repare » tout Punivers , & qui recompenfe » la pauvrete , de fes benedidtions les » plus abondantes. Que fil'onditque » fans les baflefTes & les injuftices. »» qu'on midite de fake, nous tom.be.- |
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II. P A R T I E. Liv. III. 179
w rions dans la derniere necefliteyrous
» repondons que nous aimons mieux » mourir de faim que d'avoir recours » a des moiens indignes de chretiens " & encore plus de religieufes , pour »» foutenir une miferable vie qui doit » toujours finir de quelque maniere »» que ce foit ; mais que de plus on •i n'a qu'a faire cefler les violences »» qu'on a exercees envers nous, & on « verra que Dieu pourvoira abon- » dammenc a nos befoins (81) , tant »> par notre travail que ces vexations » nous ont ote le moi'en de continuer, " perfonne n'abordant plus de notre » monaftere pour nous donner a tra- » vailler, que par les charites de plu- » fieurs perfonnes qui ne nous out »» jamais abandonnees, rant qu'ils ont » cru qu'ils contribuoient a la fubfif- »> tance d'une maifon de Dieu, & qui » fe font retires quand ils ont vu w qu'ils ne contribuoient plus par » leurs liberalites qu'a donner plus de » moiens d'y miner tout le bien fpi- (81) la fceur Flavie d'aumones,la mere Gene-
ai'ant un jour dit a la me- vieve lui repondit que
re Genevieve de l'lncarna- c'etoir une maledi&ion
tion , qu'on avoit bien de qui accompagnoit la fi-
la peine A fubfiltet, parce- gnature , &c. Rel. irc-4.
qu'on n'etok point paiee, de la mere Genevieve j £•
ti qu'on neieceyoic point 34, col. ».
H vi
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I So HlSTOTRE DE PoRT-Ro'lAt?
» r.tuel. Nous prions done toutes le&
» perfonnes qui liront cet acte , que » nous drefTons par notre mouve- w ment & fans induction de perfon- » nes, de prier Dieu qu'il grave de » plus en plus ces faintes maximes m dans notre coeur , & d'etre afTurees *> que nous n'avons,ni n'aurons jamais » aucune part, Dieu aidant, a tout ce « qui pourra ie faire par les fceurs " qui ont figne le formulaire, ou » par les perfonnes qui auront le ma- « niment du temporel de la maifon , >y qui feroit contraire a ces fentimens » & a nos constitutions. En temoi- " SnaSe *^e cluo^ nous avons figne le
" prefent a&e de nos feings, ai'anr » regret que la captivite ou nous fom- " mes, nous'empeche de le paflerpar » devant Notaire, comme nous le y fouhaiterions pour le rendre plus »» authencique. Fait en notre monaf- » tere de P. R. de Paris le 4 Decem- » bre 1664. figne de quarante-une re- » ligieufes » C'eft ainfi que les religieufes de P.
R, non contentes de ne point prendre part a 1'in.juftice, vouloient encore au- tant qu'il etoit en elles s'oppofer a celle qu'on pouvoit commettre. Ennemies de tout deguifement dans Iqs affaires |
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II. Parti e. Llv. 111. iSt
<3e religion , elles n'etoient pas moins 1664.
ennemies de toure injuftice dans les affaires temporelles, & portoient la delicateffe jufqu'a prendre desmoYens pour empecher celle que pouvoienc faire leurs fours difcoles. Cependant M. de Paris n'etoit pas taYchriP
encore fatisfait; & quoiqu'il eut dir tine foMcitee que cetce affaire lui donnoit rant de £, ^aaT* peine, qu'il en itoit vkilli de plus de vingt cinq ans depuis trois mois , il n'en pourfuivoit pas moins (Si) l'exe- cation. Ilfaut que cet Archeveque fiit etrangement follicite & prefle pour ie livrer a de tels exees, fans pouvoir etre arrete ni par l'honneur ni par l'hu- manite, ni par la religion , ni meme par la crainte de vieillir. Les religieu- fes de leur cote ne doutoient point qu'il ne fit quelque nouveau retran- chement, & la fceur Chriftine Bri- ?uet s'attendoit avec beaucoup de
ondement a etre du nombre de cel- les qui feroient enlevees (83 ). M. de Paris en fit lui meme donner avis fous- main a M. Bignon, Maitre des Reque- tes , Oncle de la fceur Madeleine Chriftine. Ce Magiftrat etant venu le 4 Decembre a P. R. le dir a la fceuE <Ri) Rel. 10-4. lettrts, Sic. p. I0J j col**.
j*j) Ibid. f. 10*. |
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l8i HlSTOIRB DE PoRT-ROtAtv
166* Chriftine qu'il vit en ai'ant obtenU
permiilion de M. de Paris, qui la lui accorda aifement en le voiant bien difpofe a tourmenter fa niece pout 1'engager a la fignature. M. Bignon avoua dans cet entre-*
tien a la fceur Chriftine , qu'il avoic ete entierement perfuade de la juftice de leur caufe par la lecture du livre de la foi humaine , &c qu'il avoir dit a. M. de Paris , qu'il n'y avoit rien de plus convaincant, & qu'il ne compre- noit pas comment il pouvoit com- mander la creance du fait i & il ajou- ta que M. l'Archeveque 1'avoit fait entierement changer de fentiment en lalTurant qu'il n'avoit jamais fait un tel commandement ; qu'il laiffoit a* tout le monde la liberte de croire ce qu'il voudroit; que ce qu'il deman- doit, n'etoit autre chofe qu'une fou- minion exterieure de jugement & un dcquiefcement a la decinon de l'Egli- fe. » Je ne pretends nullement , lui » dit M. de Perefixe , avoir pouvoir » fur les efprits pour faire croire ce »» que je voudrois ; & de tous les ea- rn clefiaftiques de mon diocefe qui ont » figne, il y en a peut etre la plus » grande partie qui n'ont pas plus va » Janfenius que les religieufes de P- |
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II. Par.tie. Llv. 111. i?$
» R. mais ils ne laiflbnt pas de figner'
m fur la foi de leur Eveque qui leut » commande , parceque c'eft une fou- « million exterieure que Ton eft tou- » jours oblige de rendre a fes fupe- " rieurs, & qui n'empeche point qu'on « n'ait toujours la liberte de croire ce » que Ton veut, pourvu. que Ton foic » dans fon devoir en obeifTant a fes » Prelats : comme moi, die encore » M. de Perefixe , j'ai liberte d'avoir » telle creance que je voudrai. Je puis » etre calvinifte dans mon cceur , s'il » me plair •, mais cela n'empecheroiE » pas que je ne fufte oblige de faire » toutes les fon&ions de l'Archeve- » que de Paris, parceque pour l'exte- » rieur il faut que l'ordre & la police » foient toujours gardes. " Etrange raifonnement, pour prouver qu'il faut figner le formulaire 1 La fceur Chrifti- ne en fut fi furprife , que ne pouvant le croire , quoiqu'elle n'eut pas une haute idee des lumieres de M. de Pe- refixe , elle ne put s'empecher de dire a M. fon Oncle , qu'il fe meprenoit y mais il confirma ce qu'il avoir avance,. & lui dit que M. de Perefixe avoir par- te de la meme maniere qu'il l'avoit rapporte. M. Bignon, 1'AvocatGeneral,vial' |
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f?4 HlSTOlRE DE PoRT-ROiAt.
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1664. auffi voir la fceur Chriftine, en ai'anf
eu la permiffion a la meme condition que le Maicre des Requetes , c'eft- a-dire, a condition qu'il feroit tout fon poflible pour lui perfuader de fi- gner (8 4). Mais il ne reulTit pas mieux; & ce Magiftrat dit a fa niece de la partde M. de Paris, que puifqu'elle ne vouloit pas figner , il falloit avifer en quel endroit on la metrroit, & lui demanda la-defTus qu'elle feroit fon inclination. La fceur Chriftine repon- dit qu'elle ne vouloit pas faire cechoix par elle meme, que fon defir feroit de demeurer dans la maifon oil elle avoitfaitprofeilion,mais que puifqu'el- le etoit obligee d'en fortir contre fa volonte,elle etoit refolue de s'abandon- ner entierement a la providence. Re- ponfe digne d'une vierge chretienne , qui ne vouloit point prevenir la vo- Ionte de Dieu, ni jouir d'un privilege qu'aucune de fes fceurs n'avoit eu ; &c qui s'eftimoitheureufe de n'avoir plus rien a faire qu'a fouffrir en filence en quelque endroit qu'on la mit. Nouv'eile On voitencore ici une nouvelle for- jitrRcution te de persecution pour les religieufes fo Je p.'eR.de P. R. plus dangereufe que celle par les folli-
citacions de Jcurs patens, (84) Ibio, p. ioj» |
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II. Parti e. Llv. 111. 185 ______
Cju'elles eprouvoient au dedans & au \6Cj.\
dehors de la part de leurs fauflfes fceurs & de l'Archeveque ; je veux di- re la perfecution des parens, qui nora feulement n'avoient pas le courage de parler pour elles & de defendre leur innocence,mais meme quife pretoient a ce que les perfecuteurs de ces vier- ges chretiennes exigeoient d'eux, en s'engageant a. ne leur parler que pour les exhorter a crahir la v<kite & leur confcience. Un Maicre des Requetes, un Avocat general acceptent de relies conditions, & s'en acquittent! Un on- cle prete la langue au feducteur qui veut tromper fa niece ; un pere fe char- ge de la meme commirfion a l'egard de fa fille I Et de quelle maniere en- core s'en acquittoient-ils ? » II femble ( dit une de ces faintes fiiles (85) ecrivant apres un entretien qu'elle avoir eu a ce iujetavec M. fon pere), que m ces gens-la prennent plaifir a inful- » ter aux perfonnes, & qu'il fuffit que » vous ayiez des ennemis qui vous m veulent perdre , pour etre oblige £ « vous rendre a routes chofes, afin d'e- » viter cette perte'& cette ruinequi eft »» tout ce qu'ils confiderent le plus an (86) La fceur Elifabeth contenant les hurts , Sec*
Agnes leFeion. R.elin-4. p.^xo; »coL t* |
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iSlj HlSTOIRE DE PoRT-ROIAf
" » monde , ce qu'ils jugenc le plus im-
» porcanr, & fur quoi il faut aban- m donner fa confcience & tout le ref- » te des engagemens, ou Ton eft de » fuivreDieu dans letatou il nous met, » pour fuivre leur politique & leur » prudence qui ne leur donne de la lu- » miere, que pour juger des chofes » tout humainement........
»• lis vou'droient bien que nous fuflions
» plus ignorantes que iuus ne fom- » mes, ou plutot que nous fuffions des » betes, pour nous rendre a ce qu'ils v ont toujours a nous dire, que nous m devons obelr. . .....
» En verite, continue la meme reli-
gieufe (86) , apres avoir rapporte une partie de fon entretien aveo M. fon pere , » nous ne devons pas « attendre notre fecours de ces gens- » la , nous ferions rrop mal fondees ; « & il eft vifible que tout le monde a w confpire contre nous , & que nou*, « n'avons plus qu'a nous regarder coni- » me des errangeres qui n'ont plus de » maifons, & des orphelines qui n'ont » plus ni pere ni mere. Qnand nous « nous abandonnerons a cet etat pour » l'amour de la verite &>pour la fide- w lite que nous devons a Dieu, je (8*) Ibid. p. io«, coI.,i.
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II. P A R T I E. L'tV. III. 187
» penfe que ce ne fera pas prefomp-
» tion que d'efperer que Dieu nous » recevra, & qu'il nous tiendra lieu » de toutes chofes. » On fe plaignit de ce que M. Bignon
oncle de la fceur Chriftine Briquet crut n'avoir rien a faire avec M. de Paris , qu'a deliberer avec Iui du lieu ou elle feroit enfermee : mais les au- tres religieufes ne rec_urent pas plus de fecours de leurs parens (87). Au lieu d'imiter la genereufe mere desMacha- bees , qui exhortoient fes enfans i meprifer la vie prefente par la vue de celle qui ne finit point, & a fouffrir la mort & les plus cruels tourmens plucot que de violer la loi de Dieu , ils les exhortoient la plupart a fe ren- dre a ce qu'on exigeoit 11 inj uftement d'elles. Ils voioient bien qu'on leur faifoit une gtande injuftice , mais il faut cider , difoient-ils , parceque tou- tes les Puijfances font contre vous, & que nous nen aurionspas le deffits. Ainfi parloit M. de Buzenval a fes deux filles, qu'il avoit obtenu lapermiffion de voir aux conditions dont nous avons parle. Apres les avoir exhortees a l'humilite , il leur dit qu'il n'ofoit demander a M. de Paris qu'il les envo'iat a Beauvais (»7) Ibid. col. u colu |
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I SS HlSTOIRE DE PoRT-KOlAt.
( quel courage ! ) mais que s'il lui en
parloit, il le prendroit au mot, finon al le prieroit de les metcre a Paris; qu'il lie pouvoir faire autre chofe pour elles. » Voila, dit la fceur Chriftine, tout » ce qu'on peut attendre d'un honnete « homme de ce fiecle.il voit de quelco- « te eft la juftice,il en eftperfuade & s-'il » la pouvoit defendre avec honneur,il » le feroit de rout fon cceur; car qui »> n'aimeroit la juftice & la verite feroit » lui-mcme injufte : mais parce- » que l'une & 1'autre font opprimees- » par les Puiifances, il les faut aban- » donner: unum contemnet & alteram parietur». Mais bien loin que les reli- gieufes fe plaigniflent d'etre ainfi aban* nees de leurs parens, elles s'en efti- moient heureules,& jugeoient que leur caufe etoit trop jufte & trop fainte pour attendre leur juftification de la part des hommes ; que c'etoit la caufe de Dieu & qu'il n'appartenoit qu'a. lui feul de la defendre; enfin que puifque c'e* toit pour la verite qu'elles avoient l'a- vantage de fouffrir , il etoit bien rai- fonnable qu'elles n'attendiflent leur fe- cours & leur delivrance que de la main de celui qui a dit : Veritas libe- rab'u vos. C'etoit-lales difpofitions que Pieu mettoit dans le cceur des religiea- |
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II. Part i*E. Liv. III. 189
fes de P. R., & en parciculier de la i^Sjl.
faur Briquet , comme elle le temoi- gne dans une lettre qu'elle ecrivitquel- ques jours avant fon enlevement (83). Cette religieufe etoit depuis long- |
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tems en butte a M. de Perefixe qui Tap- Enieye'menf
pelloit une danoermfe petite Rile : le de la f«ur iecteur lent ce que cela lignihe dansquet. une telle bouche. Enfin il prit la refo- Rick de ce lution de s'en debarraffer , & alia pour ^"„s Cette «- cela a P. R. le 18 decembre, non pour pedition, l'enlever ce jour-la, mais pour con- certer fon expedition. Aufli-t6t qu'on fut l'arrivee du Prelat, 1'allarme fut dans la maifon, caril n'a voir pas coutu- tame d'y venir pour faire du bien. L'experience du paflfe , les violences qui avoient deja precede, les menaces au'il avoient faites, donnoient fujet
e tout attendre & de tout craindre. C'eft ce qui fut caufe qu'une des an- ciennes alia le foir trouver la mere Eugenie, pour favoir d'elle fi elle ne favoit pas le fujet du voi'age du Prelat. La mere Eugenie repondit que les re- ligieufes pouvoient fe tranquillifer , & qu'affurement M. de Parisne viendroie pas a caufe des Quatre-Tems , ou il etoit occupeaux ordinations. Maisfoit que cette religieufe fut trompee ou, (»S;p.el.in-4. p. io*f
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IS><5 HlSTOlRE DE PORT-ROlAE.
qu'elle voulut tromper , ce qu'elle die
fe trouva faux par l'evenement. Car l'occupation de M. de Paris ne l'em- pecha pas de venir des le lendemain matin , meme malgre une rres grande pluie , pour faire fon coup. Il eft des chofes qui l'emportent fur tout le refte, cela arrive alfez ordinairement quand il s'agit de perfecuter la verite & Fin- nocence. Les Juifs, tout occupes qu'ils etoient de la celebration de la Paque, trouverent le tems de prendre & de fai- re mourir le Sauveur : l'occupation des ordinations n'empecha done pas M. de Perefixe de venir le Vendredides Qua- tre-Tems 19 decembre furies huii^ieures du matin pour enlever une epoufe de Jefus-Chrift. Il la fit venir au parloir 011 etoient la mere Eugenie & la four Flavie, lui fit un long difcours dans lequel il rebattit tout ce qu'il avoit coutume de dire fur la fignature en y joignanr lesreproches de defobeiflance &c de rebellion , apres quoi , n'aiant pu rien gagner fur la four Chriftine , il dit a la mere Eugenie , qu'elle n'a- voit qu'a la conduire dans fa cellule pour prendre fon breviaire & fes har- des (89). La four Chriftine lui a'i'ant demandelapermiilion d'allerentendre la ($g) Rcl, de la fecur chriftine, p. <>4, ?f. |
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II. P A R. T I E. L'lV. III. I 5) I
Me(Te,pour y offrir fon facrifice, il le re
fufa en lui difant qu'elle l'entendroit au lieu ou elle alloit, & qu'elle fe depechat d'aller a la porte , parcequ'il attendoit fon caiofle qui devoir la conduire , pour retourner chez lui. Il ne voulut pas meme lui accorder un quarr-d'heure qu'elle lui demanda. 11 lui permit ce- pendant d'embrafTer celles de fes fceurs qu'elle rencontreroit, en la priant que ce fut fans bruir : elle lui rcpondit qu'elle n'en feroit poinr de fa part, & en difant cela, la voix lui manqua parcequ'elle etoit extremement faifie. LePrelat en fut touche & ne put s'empe- cher de repandre des larmes ; ce fpec- tacle en arracha meme a la mere Euge- nie & a la fceurFlavie, foit qu'ellesruf- fent attendries ou qu'elles vouluiTent fe conformer a M.deParis,quidit en pleu- rant: Encorefi vous penfie^, ma bonne fceur , quon n tut point de peine a fairs ce que Fon fait, » Si vous en aviez, » Monfeigneur , repondit la fceur » Chriftine, il eft en votre pouvoir de •> vous en delivrer & nous auffi : vous $> n'avez qu'a nous decharger de la » foi humaine & nous permettre de ,> parler fmcerement, apres cela vous « lerez en repos, & nous efperons que h vous n'auriez pas fujet de vous plain,' |
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I$>Z HlSTOIR.E DE PoRT-ROlAI.'
" 1664. " dre de nous. Que voulez-vous di-
m re, repliqua le Prelat, avec votre
» foi humaine , ou I'avez-vous ete
« inventer J Vous n'avez que cela a
» m'alleguer. Pour moi je ne fais pas
»» que vous faire : le Pape eft un hom-
» me , je ne puis pas vous comman-
t> der de croire de foi divine ce qu'il
t> decide •, croiez-le de telle foi qu'il
*> vous plaira,mais n'en doutez poinc;
»» &c depechez-vous d'aller a la porce ,
" je vous attendrai en bas ». Laiceur
Chriftine etant fortie du parloir , elle
pria la mere Eugenie de la laifler un
moment feule dans fa cellule } & de
garderplutot la porte fi elle le vouloit;
ce qui lui fut refufe (90). Aufli-totque
les fceurs eurent appris que la fceur
Chriftine alloit etre enlevee, elles fu-
lent toutes dans un etonnement & une
confternation qui nepeut s'exprimer,
& chacune s'emprefla d'embrafler ,
avec tous les temoignages d'amitie &
de tend rede une fceur qui leur etoitu*
chere,aiantete eleveedepuis l'age de
deux ans & demi dans la maifon , dont
elle faifoit les delices & l'edification.
Commeonlaconduifoitala porte, une
four ancienne lui dit avec beaucoup
Jko)R.eL ia-4. Procss verbal, p. 107 , lot.
de
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II. Part ie. Liv. 111. 193
de tendrefTe en l'embraifant : Ma pau- —7777""
» vre enrant, louvenez-vous toujoius m de la paffion de notre Seigneur Je- m fus -Chrift*, je vous eftime heureu- » fe de faire a Dieu vocre facrifice le » vendredi, qui eft le jour ou notre »» Seigneur nous a donne l'exemple w. de toutes les vertus dans fa fainte v> Paffion , ne fongez plus qu'a cela. » La foeur Chriftine s'en alloic ainfi au milieu de fes foeurs , qui re- doublerent leurs pleurs & 'leurs cris lorfqu'elles virent la porte ouverte & cet- te chere fceur prete a fe feparer d'elles. M. l'Archeveque , qui l'attendoit a la porte , en parut furpris : Ne phure^pas mesfours, leur dit-il, nepleure^pas : vous voiei que je fais Us chofes avec U plus de douceur qu'ilm'efipojjible. Quel- le douceur ! Ce fur ainfi que la foeur Chriftine fut enlevee & conduite au monaftere des religieufes de fainte Ma- rie de la rue faint Antoine, fans favoir ou elleetoit. Lorfqu'elle fut partie, les religieufes txi.
monterentauparloir,& aiantobtenu de reseprotetteiu voir M.l'Archeveque qui les fit attendre centre ren- rr \ \ 1 • r \ levement tie
allez longtems , s etant miles a genoux !a S- Chriili.
(ellesluidirent,uneancienne(9i)portantnc > & «n " k dreflent ua
procesver-
(ji)la fceur Marguerite, bal. Tome V. X
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194 HlSTOIRE PE PoRT-RoSfAt.'
» la parole : Monfeigneur , la crainte
» que nous avons que les pleurs & touc » ce qui s'eft pafie a la porte ne vous » ait empeche d'entendre les appels & » proteftations que nous avons faites » de l'enlevement de notre chere four, » nous oblige a vous declarer encore » derechef, que nous appellons de la » violence qui vient d'etre faite. Ap- »> pellez-vous cela une violence, dit » l'Archeveque ? Si vous faviez ce que " jefourfremoi-meme, & ce qui s'eft » paffe ici entre votre fceur & moi,vous » feriez perfuadees de celle que je me s» fais. Penfez-vous que je prenne plat- s' fir a vous feparer les unes des au- « tres 5 Mais n'allez pas expliquer que *> je donne cela a la violence de vos » ennemis ; car ce que je fais, je crois »> etre oblige de le faire en confeienct, » & je puis vous aflurer que je pouf- m ferai les chofes jufqu'au bout. II ne » ferapas dit que foixante >. je ne fais » combien de nlles, feront tete a leur t> Archeveque , ( excellente raifon 1) » & perfevereront dans la defobeif- »> fance ». La meme religieufe qui » avoit deja parle , reprit la parole , » & dit a l'Archeveque » qu'elles n'e- *> toient point defobeiiTantes, que e'e- f» toit la feulecrainte d'offenfer Dieu |
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II. Parti e. Llv. III. 19 $
n qui les engageoit a refufer la figna- ' »» ture , & a ne lui point obeir , que « cela etoit vrai comme il l'etoitqu el- s' le tenoit encre fes mains le livre » des faints Evangiles ». Enfuitetou- tes les religieufes preterent ferment fur ce faint livre, que c'etoit l'uni- ■que crainte d'ofFenfer Dieu , qui les empechoit de lui obeir. Mais tout ce <jue pouvoient faire ces pauvres rilles «toit inutile a l'egard d'un homme qui avoir l'autorite en main, &c qui venoit de leur declarer qu'il poufferoit les chofesjufqu'au bout, & qu'il nefe- roit pas dit qui foixante filles fijfent the a leur Archeveque (92). Et afin qu'elles ne doutaffent point de ce qu'el- les avoient a attendre de fa part, il leur dit encore :» Voiez ce que je viens » de faire a votre fceur Briquet: au pre- •» mier jourjereviendrai,puifque vous » voulez perlifler dans votre opinia- »> trete a 1 engagement,ou vous etes en- » trees a foutenir ce parti. Helas, Mon- u feigneur , lui repondit une ancien- » ne, nous nefoutenons point de parti; « c'eft vous feul qui nous avez enga- « gees dans cette affaire ; vous le fa- w vez bien que ce n'eft que vous feul |
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£z)lbid.j>. no.
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in
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I9<? HiSTOIRE DE PoRT-ROi AX,
1664. " & que ii vous euffiez voiilu , vous
» nous en eiiffiez bien exemptees, 1* » declarationduRoin'aiancpointconif » pris les religieufes & ne les aiant pas » obligees a la fignature; & prefento « ment Msneur, il eft encore en votre « pouvoir de nous accorder de n'y ,<> point prendre de part; puifque ce^ » lui qui a fait la loi, en peut facile- « ment difpenfer quand il lui plait.», jMonfeigneur n'aiant rien a repliquer a. cela fe jetta fur les lieux co.mmuns : une religieufe lui aiant repondu quel- que chofe, il demanda fon nom &: lui dit qu'elle meritoit qu'on la fit jtuner au pain & a I'eau. Enfuite, comme il s'en alloit, une fanjr ancienne lui dit: « Monfeigneur 3 nous laiflez-vous ainfi « fans confolation, n'aurez-vous point « la bonte de nous accorder les Sacre- sj mens pour la grande fete , comme >> nous vous en fupplions tres hum- » blement 2 Que je vous accorde les » Sacremens , dit le Prelat, vous etes >> bien en etat de cela ; puis-je en s> confcience vous permettre de com- •> munier dans la difpofition ou vous m vculez demeurer » ? Apres avoir dit cela ., il les quitta fans rien re-? wondre a ce que 1'exces de la dou- ffur faifoit dire a. quelqu.es religieu- |
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II. PAttTifi. Liv.'iH. 1$-}
fes , dotit les unes lui difoient, qu'el- les attendoient tout de Dieu, qui fe- roit juge entire lui &c elles; d'autres, que 11 tous les tribunaux de la terre leur etoient fermes, elles efperoient que ce- lui da Ciel ne le feroit pas , & au- tres chofes femblables. Elles drefle- rent un proces verbal de tout ce qui s'etoit pane, dans lequel elles declare- rent, que d'autant que la conduite de M. de Paris & les voies de fait dont il ufe , marquent aflTez que fon delfein n'efl: autre que de aetruire entie- remenr leur monaftere en continuant de les traiter, comme il venoit de traiter leur chere fceur Madeleine de fainte Chriftine, fans avoir ait- cun egard a~ leurs proteftations 9c Jt leurs appels , fur lefquels on ne leur rendoit aucune raifon & on ne gar- doit aucune forme > elles prennent la refolution de s'en plaindre derechef a toute 1'Eglife & d'en demander jaf- tice d tous les tribunaux, ou elles pourront etre entendues, meme devant celui de Jefus-Chrift, li tous ceux de la terre leur etoient fermes. Ce proems verbal fut figne de trente-cinq reli- gieufes. Les religieufes de P. R. ecrivirent
yers le meme terns une lettre au fainC Iiij
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I»>S HlSTOIRE DE PoRT-RoiAt.'
" 166^. EvcquefAlet, pour le remercier de
ce qu'il avoit la bonte de fe fouvenit d'elles, & lui temoigner la confolation qu'elles avoient d'apprendre la ferme- te apoftolique avec laqnelle il fe con- duifoit dans i'affaire du formulai- re (93). lxti. « Dans l'extremite de l'oppreffion Files ecfivcnt \ r / 1 * 1 * /*
a m. i Eve- " ou nous lommes reduites, dilent
<jue d'Akt. » ces faintes filles, Dieu qui n'aban- » donne jamais ceux qui font a lui ,. » ne nous pouvoit pas donner une »» confolation plus grande & plus fen- « fible que celle que nous avons re- » que en apprenant la bonte que vous « avez pour nous & que vous faites la » grace a de pauvres filles abandonnees » & orphelines , de vous fouvenir » d'elles devant le fouverain pafteur *> & le pere de ceux qui n'en ont point » fur la rerre ; & rien ne pouvant da- m vantage juftifier le defir qu'il nous « a donne de lui etre fidelles jufqu'a » la mort, que de voir 8c d'appren- » dre la merveilleufe conftance & la » vigueur vraiment apoftolique que ■» vous avez temoignee fur les affaires j> de la fignature. C'eft, Monfeigneur , » dans ce double fentiment de joie & |
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<9))VoTez la vie de M. d'Alet, ce qu'il fit Jaas
I'aliaire du Formulaite. |
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If. P ARTIE, tlv. UI. 199 ______
v deforce que nous donnent vos ex'em- 1664*
>i pies & vos prieres, que nous ofons
»* nous jetter a vos pies pour vous te-
» moigner notre profonde veneration
» pour votre merite & nos extremes
» reconnoiiTances de vos bontes, &c
» pour vous fupplier de donner & con-
» ferver une place dans le fein de vo-
m tre charite vraiment paftorale a des
» brebis qui font rejettees d'une ma-
» riiere 11 peu epifcopale & paternelle
,t par leur propre pafteur & leur propre
» pere,& quis'eftiment heureufes d'o-
» fer prendre la quatite , non-feule-
,i ment de vos tres humbles fervantes,
» mais de vos filles; puifqu'erant ca-
» tholiques , nous pouvons regarder
» tous les Eveques catholiques comme
» nos peres. 11 eft vrai, Monfeigneur,
" que nos maux & nos miferes font
» extremes, & nous ne doutons pas
» que leur recit n'attire aifement vo-
» tre compaffion. Nous fommes fans
» meres & fans conduite. Nous fom-
» mes fans cefTe environnees & au de-
„ dans & au dehors , de perfonnes
» qui s'efforcent de troubler nos conf-
w ciences, & qui nous accufent, pref-
„ que fur routes chofes, de defordre ,
„ de dereglement, de peche mortel;
„ jufques-U que M, Chamillard n a.
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200 HlSTOIRE DE PORT-ROlAI.'
» pas craint de nous traiter auffi bien
» que nos meres & ceux qui nous out » conduites jufqu'a prefent, d'hereti- w ques & de perfonnes hors de 1'Egli- » ie; & que fans etre touche d'aucun » fentiment d'humanite & de crainte » de Dieu, il a bien ofe dire a la « plus ancienne de la maifon, qui » eft une fille agee de quatre-vingts « ans, & qui a lervi Dieu depuis foi- » xante- dix ans avec une fidelite & une « ferveur exemplaire, qu'elle feroic »» damnee. L'on nous tient dans une « captivite ou les plus criminels ne » font pas reduits, n'aiant la liberte » de confulter qui que ce foit fur les « plaintes memes que nous fommes » obligees de faire a la juftice, du m traitement que Ton nous fait. M. » l'Archeveque a 6te des charges du » monaftere routes celles. que notre » mere abefte y avoir mifes, &ya » etabli les fceursqui ontfigne, contre " norre regie & nos conftitutions: & » ces pauvres filles que Ton n'a mi- *» fes au deffus de nous, que pour « s'etre feparees de nous , nous trai- » tent avec un empire & une durete » qui nous eft d'autant plus fenfible , » qu'elle nous eft une marque qu'elles *» font auffi bien changees dans la |
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IT. Part ie. Llv. HI. 101
* cceur que dans L'efprit. Mais ce qui 7771
w eft le comble de l'afflidtion & de
» la douleur, c'eft , M. que Ton nous
» fepare des Sacremens &c que Ton
» ne veut pas feulement nous don-
» ner de confefteur , ou fi i'on nous
» en donne, c'eft a condition qu'il
» refufera l'abfolution aux fours dit
» choeur fi elles ne promettent de fi-
» gner, & aux fours converfes fi el*-
»> les ne condamnent nos fours &c
» nous. Car c'eft la conduite donr oia
» ufe depuis plus d'un mois avec ces
« pauvres filles. Ainfi , M., le Per©'
» ore le pain a. fes enfans, on nous
» expofe au combat fans armes, 8c
» on arrache des Autels de Jefus-
» Chrift, des filles qui n'ont abandon-
m ne le monde que pour s'y refugiec
» comme dans un faint afyle , parce-
u qu'elles ne veulent pas fe feparen
» de Jefus Chrift par le menfonge ;
« en meme terns que l'on en laifte ap-
» procher prefque tous les jours cel-
» les qui le font feparees du corps,
« dont Dieu les avoient rendues.
j- membres , en violant par leurs ac-
» tions toutes les loix de la charite..
» Et ce qui eft de plus etrange , M. „
» on nous menace de nous traiter
»> avec certe rigueur a la mort meme »,
I v
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202 hlSTOIRE DE PoRT-ROlAt;
»» & on a commence de l'exercer de-
» puis quelques jours, a'iant refufe les
» Sacremens a. une de nos fceurs qui
'» a ete fort malade (94)5 en difant
" qu'elle etoit poiTedee du Demon.
*• Mais Dieu l'a guerie en un moment
" par une grace extraordinaire & une
»» efpece de miracle par l'interceilion
•' de feue la mere Angelique. On
" nous menace meme de ne nous
» pas donner la fepulture en terre
" lainte.Voila, Monieigneur, l'etat oil
** nous fommes reduites , & qui nous
** donne un befoin extreme de la mi-
*» fericorde de Dieu, fi ce n'eft pas
" pour nous delivrer, comme peut-
** etre n'eft - ce pas fon deflein, au
" moins pour nous foutenir & nous
» conferver jufqu'a la fin la volonte
" qu'il nous a donnee de le fuivre par
» tout, & jufques dans les abimes, de
»> preferer fa volonte a. toutes chofes „
» & d'en faire pour jamais l'objet de
« notre amour 8c de nos delices. C'eft
" de quoi, Monfeigneur , vous nous
» donnez l'exemple,& le fujetpour le-
»» quel nous vous demandons avec un
» profond refpect la continuation de.
3) votre charite & de vos prieres; &C
' (94) C'eft appttemment la S. Eranjoife Julie.
To'iejp. J5J. |
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II. Part ie. Llv. III. 203
» nous vous fupplions treshumblement » de croire que nous nous eftimerons » toujours tres heureufes, quoi qu'il » nous arrive , d'etre dans votre fou- » venir, & de pouvoir vous afTurer que >r nous fommes avec une foumiffion » parfaite & une profonde veneration, »» Monfeigneur,vos tres humbles & tres >» obeifTantes filles &c fervantes &c. » La captivite dans laquelle etoient reduites les religieufes de P. R. ne leur aiant pas permis de figner la let- tre,a caufe de lapeine qu'elles avoient a s'aflembler, elles envoi'erent a M. d'A- let une lifte de tous leurs noms (95 ) „ cant de leurs meres & fours exilees que de celles des Champs, en le priant de faire mettre cette lifte fur l'Autel, afin de les offrir toutes enfemble & Dieu dans le Sacrifice : r. La mere Catherine Agnes de fainc
Paul. 2. La mere Madeleine de Ste. Agnes,
3. ScEur Catherine de faint Paul
4. S. Anne de faint Auguftin.
5. S. Marie de l'lncarnation.
6. S. Marguerite de la Paflion.
(j^) On ne trouve point la lettre a £te ecrite entre"
dans cette lifte !e nom de fa chute & la retra&atiott
la fosur Melthide , ce- qui de fa fignature.
(iuiuic lieu de croire que 1 VJ
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204 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt'.'
1604. 7' S. Marguerite Angelique du faint'
. Efpric. 8. S. Genevieve de l'Incarnation. 9., S. Madeleine des Anges. 10. S.Madeleine de fainte Candidev U.S. Francoife de fainre Agathe. 12. S. Marie de fainte Madeleine.-
13. S. Angelique de faint Jean.
14. S. Marie de fainte Agnes.
15. S. Elizabeth Madeleine de fainr
Luc.
i(j. S. Angelique de faint Alexis. 17. S. Marie de fainte Euphrafie.
18. S. Louife de fainte Julienne.
19. S. Marie Charles de fainte Claira*"
20.. S. Agnes de fainte Thede. 21. S. Anne de fainte Gertrude.
22. S. Francoife de fainte Lutgarde.
25. S.Suzanne de fainte Ceciie. 24. S. Charlotte de faint Bernard.
25. S. Madeleine de fainte Scolafti^
que.
z6. S. Anne de fainte Catherine. 27. S. Genevieve de fainte Therefe..
28. S. Marie Gabrielle de fainte Ca>-
therine.
29. S. Anne de fainte Chriftine
30. S. Genevieve de fainte Thecle;-
31. S. Elizabeth de fainte Anne.
32- S. Anne de fainte Eugenie. $$.-. S. Marguerite de fainte Therefe.-
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HV Partib. Llv. III. 405
34, S. Jeanne de fainte Colombe.
35. S. Elizabeth de fainte Agnes
}6. S. Marie de fainte Therefe. 37. S. Denife de fainte Anne.
38. S. Francoife Louife de fainre
Claire.
39. S. Madeleine de fainte Agathe.
40. S. Jeanne de fainte Domitille.
41. S. Genevieve de fainte Madelei-
ne.
41. S. Suzanne de fainte Julienne. 4?. S. Anne de fainte Cecile. 44. S. Marguerite de fainte Yrene.
45. S. Liee Madeleine de fainte Eli-
zabeth-.
46. S. Catherine de fainte Suzanne.
47. S. Anne Marie de fainte Eufto--
quie.
48. S. Marguerite Agnes de fainte
Julie.
49. S. Marie de fainte Benediifce.
50. S. Francjoife de fainte Therefe.
51. S. Jeanne Radegonde de fainte'
Fare.
f-x. S. Louife de fainte Eugenie. %}, S. Marguerite de fainte Thecle.- 54. S. Francoife Madeleine de fainte Julie.
fj. S.Jeanne de fainre Aldegonde.- 5.6. S. Antoinette Catherine de fain! Jofeph.
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2jO(J HlSTOIRE DE PoRT-fto'lAE."-
1.66a. 57- S.Genevieve de fainte Dorothee.
58. S. Marie de fainte Agathe. 5,9. S. Jeanne de fainte Apolline. 60. S. Catherine de fainte Hildegar-
de.
(J 1. S. Madeleine de fainte Chriftine. 61. S. Francoife de fainte Beatrice.
6$. S. Catherine de fainte Eulalie. 64. S. Marguerite de fainte Luce.
65. S. Louife de fainte Fare.
66. S. Anne de fainte Agathe.
67. S. Anne Julie de fainte Syncle-
tique.
XX[ll Les religieufes de P. R. des champs
Itat des reli-n'etoient pas dans une fituation auffi
KhfmpPs'. P^nible & auffi affligeante que celles de Paris. Elles n'avoient point parmi elles de fceurs difcoles qui faifoient la plus grande croix des religieufes fidelles du monaftere de la ville ; elles n'eprou- voient pas non plus ces cruels affiants 8c ces allarmes continuelles que celles-ci eprouvoient toutes les fois que M. de Perefixe venoit dans leur maifon. De plus on n'avoit enleve perfonne d'en- tr'elles , fcparation qui avoit tant cou- te a celles de Paris , & leur avoit fait repandre tant de larmes. Neanmoins outre que leu etroite union avec leurs. fceurs attachees a la verite,, leur fai- |
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II. P A K. T 11. Liv. III. 16 f
{bit partager avec elles toutes ces af- "TJjTIT" fli&ions particulieres , elles efluioient encore elles memes la peine la plus fenfible a. des vierges chretiennes, etant, par Tordonnance de M. de Pe~ refixe du 17 Novembre, privees des Sacremens. Des le commencement de l'avent, c'eft-a-dire pen apres la vifi- te que M. de Perefixe fit au mois de Novembre dans ce monaftere , les ecclefiaftiques recurent ordre de fe re- tker; & comme fi on eut voulu les; priver de tous fecours , meme pour la fante du corps comme on les privoit de tous les fecours fpirituels pour Ta- me , on voulut enlever M. Hamon leur Medecin, qui tomba fans le favoir, & fe livra en quelque fac,on entre les mains de celui qui venoit Tarreter. M. Hamon f qui nous apprend lui txrv;
raeme le detail decetevenementdansrgtet M. Ha_ une lettre du 4 decembre a M. de mon: u toin- T • , 1 . 1 1 r ■ be entre les
Luzanci) rencontra le jour de la laint mains ae
Andre , en fortant de l'Eglife apres Sux lui, _ , , ° ->-\ viennent le
. primes, Brandon avec un homme qu ll prendre : la.
ne connoifloit point y que Brandon lui Providence
j- a i r •* t ■ 1 ten retire., dit etre un honnete homme qui de-
mandoit a lui parler (96). Cepreten-
du honnete homme tira deux papiers
de fa poche , qu'il depiia lui me-
(,?«) Hilt, des perfec. Rel. i part. p. 4 8c s ■ •
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io£ HlSTOIRE DE PoRT-ROl'Af;.
me pour les montrer a M. Hamon ,et£
lui difant que c'etoit des ordres du Roi. M. Hamon qui avoit Cant d'ef- prit, n'en eut pas alfez a ce qu'il dit»- pour avoir peur,, &c parla au contrair& a cet homme avec route forte de li- berte & de franchife ; & ccmme l'hon- nete homme deplioit fes papiers affez lentement & comme une perfonne qui- reve , il demanda a M. Hamon s'il le connoilfoit bien, & ajouta qu'il etoit le meme qui avoit apporte l'or- dre du Roi a M. d'Andilly & a M.. de Luzanci. En verite , lui repondit M. Hamon , je ne vous reconnoiflbis. point, & il lui temoigna qu'il avoit fouvent enrendu M. d'Andilly fe louer de fa civilite. Les deux papiers etoient deux ordres du Roi, 1'un addreffe au. nomme Charles , afin qu'il continuata prendre foin du labourage ; & l'antra au nomme Hilairt, afin qu'il prit foin du menage & du courant des affaires. M. Hamon commenca , dit-il, a voir, qu'il auroit dii avoir peur auparavant,, mais qu'il n'y en avoit plus de fujet,, de telles lettres de cachet ne pouvant. faire de mal a perfonne. (Il paroft que l'efprit ne commencoit pas en- core a venir a M. Hamon. ) Apres. avoir lu fort attentivement les lettres |
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II. Parti e. Liv. III. 109
He cachet, il die a fon honnete hom-
me que M. Charles & M. Hilaire n'e- toienc ni l'un ni l'autre a la maifon, & qu'ils etoient tous deux aiTez heu- reux pour executer les ordres du Roi avant que de les avoir recus; parce- qu'ils etoient ce jour-la a la foire a Chartres,a deflTein d'y acheter un trou- peau de moutons pour la maifon. M. Hamon difoittout cela avec franchife 8c meme avec gaiete , ne penfant a rien moins qu auaeflTein de celui a qui ilpar- loit. Il invita enfuite le Lieutenant a dejeuner, lequel lui dit qu'il attendoit encore quelqu'un ; e'etoitfon adjoint, qui bientot joignit la compagnie. Le Lieutenant demanda a M. Hamon, fi M. Floriot, M. Paulon, & M. Gi- rout le Sacriftain y etoient: il repon- dit que M. Floriot ne demeuroitplus a la maifon, que M. Paulon etoit al- le a Paris , & que M. Girout etoic dans fa chambre. Le Lieutenant avoit auparavant tire de fa poche & lu uti billet tout fale fur lequel etoient ecrits les quatrenoms de MM. Floriot, Paulon, Girout & Hamon, difant qu'il ecoirneceflfaire que tous les qua-r tre figna(Tent en temoignage qu'ils avoient rec,u les ordres donnes aux nommes Charle & Hilaire, Ce fut £. |
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%\0 HlSTOIRB DE PoRT-ROlAt.
" X664> cette occafion que M. Hamon die au
Lieutenant qu'il n'y avoit que M. Gi- rout & lui a la maifon, 6c que s'il vouloit laiffer fes ordres, ils figneroient 3u'ils les avoient re^us. Le Lieutenant
it qu'il les falloit attendre y aiant or- dre de les faire tous figner. L'adjoint qui atriva enfuite , ajouta que quand ils reporterent la lettre de eachet de M. d'Andilly, M. le Tellier leur avoit fait un petit-reproche de ce qu'ils n'a- voient fait figner perfonne. Cet ad- joint plus fourbe encore que fon Lieu- tenant , difoit cela avec un vifage di- vert 8c dans l'air d'une converfation d'amis. M. Hamon fit prier M. Giiouc de defcendre , le prevint lorfqu'il fut defcendu, en lui montrant les lettres de cachet, &c lui fit le recit de ce qui s'etoit pafle. M.Duval qui s'etoit joint a eux,etoit auffi de la partie •, il envoi'a faire du feu dans fa chambre,& les pria d'y monter pour dejeuner , ce qu'ils firent. M. Hamon les laifTa dans cet- te bonne compagnie en difant qu'il alloit s'habiller : mais auparavant il crut en devoir dire un mot a la mere prieure, afin qu'on ne s'erFraiat point au dedans d'une telle vifite qui eft tou- jours capable d'allarmer par elle me- me, 8c furtout dans une maifon per- |
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II. Parti v. Llv. III. 111
fecutee. La mere etant venue au par-
loir dans la crainte de ce qui pouvoit etre I'objet d'une telle vifice , M. Ha- mon commen^a par la radurer en lui rapporrant une partie de ce qui s'etoit pane. Mais M. Duval, qui avoir quit- te fes hotes, ai'ant appris que M. Ha- mon etoit avec la mere, y vint dire qu'il y avoir des archers dans la cour &c que tout cela ne lui plaifoit pas. Cela fit ouvrir les yeux a M. Hamon , qui avoit manque une occafion de ie defabufer plutot; car lorfqu'il etoit en- core avec le Lieutenant, celui-ci avoit lache ua mot qui faifoit a(Tez connoi- tre le fujet pour lequel il venoit. Ce fut au fujet d'une femme, quiaborda; M. Hamon dans ce moment, pour lui demander l'ufage de quelques re- medes qu'il lui avoit fait pafler du de- dans du monaftere : apres qu'il eur fa- tisfait a. la demande de cette pauvre- femme, il dit au Lieutenant de quoi il s'agifloit, 8c prit occafion de lui parler de la charite que faifoit la mai- fbn en donnantpain,viande, bouillons, medicamens; &c. ce qu'il dit en paf~ fant & changea mcme auflitot de dif- cours : le Lieutenant en parut touche, Sc il lui echappa de dire : Je vous af- Jure que c'eji dommagt dt vous our dtki, |
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ill HWorRE DE PoRT-R.Ol'At;
vous autres, &'que vousyfaltes beaucottp de bien. Cela n'avoit fait faire aucune reflexion a M. Hamon -> mais fon ef- prit s'ouvrit fur ce que venoit de dire M. Duval: il quitta la mere, & alia s'habiller, afin d'entrer, de voir les malades, & enfuite prendre des me- fures fur ce qu'il y avoir a faire. Com- me il revenoit de fa chambre, il vit quatre ou cinq archers avec des fufils; & M.Duval, qui ne s'endormoit point, envoi'a dire a la mere que les archers s'etoient empares de la porte pendant que leur maitre dejeunoit. Il n'etoic (>as difficile de voir ce que cela VQtt-
oit dire, & on conclut qu'il falloit que M. Hamon , qui etoit encore au dedans , fe retira fans diflferer. On re- ^ut en meme tems un fecond avis de M. Duval, que les archers etoient tel- lement difpofes , qu'on ne pouvoit pa- roitre dans aucune des cours fans etre vu. Cela fut caufe qu'on avifa aux moiens de gagner le jardin S. Antoi- ne , oii M. H^mon ne pouvoit pas etre vu ; il y refta On peu de terns, puis gagna la chauflee & fe retira par le pare. On voit dans cet evenement la. fimplicite du jufte qui tombe entre les mains de l'impie , & la providence de Dieu qui veille fur lui 6c 1'en re- lire;. |
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II. P A R T I E. Liv. HI- ilj
"Ecoutons M. Hamon expliquerlui- ^gT "
meme ce qui fe pafla en lui, lorfqu'il ixv.
fe vit oblige de quitter le defert de pouieur «e
_ & I reflexion de
F. R. » Je vous conreile, mon tres m. Hamoa
v cher frere , dit-il dans fa lettre i.«-9«"teMW
» M. de Luzanci, que quand je vis
w qu'il falloit ibrtir tout de bon , fans
« pouvoir peut-etre jamais rentrer ;
» quand je vis plufieurs de nos foeurs
m qui me dirent adieu avec le temoi-
" gnage de leur amitie ordinaire -,
» quand je vis le terns paffe que je
„ regrettois , & que j'eiuTe bien voulu
M avoir emploie d'une autre maniere ,
v le tems prefent qui etoient accom-
» pagne de circonftances fi fenfibles ,
» le tems a venir qui etoit fi a crain-
J? dre dans fon incertitude a une per-
» fonne fi foible , je fus touche , 6c
» lefuis encore en vous 1'ecriv.ant. II
m me vint tout d'un coup tant de dif-
» ferentes penfees , que dans la verite
» je ne favors ce que je faifois ; & ce
» ne fut pas fans difliculte , que la
» nuee qui groffiflbit toujours , atten-
» dit que je ruffe feul pour fondre
» tout d'un coup avec bienfeance. En-
» fin l'heure etoit venue, qui n'etoit
jj pas tant matquee par l'injuftice des
» hommes, que par la jnftice de Dieu
>• qui regie tout, qu'il falloit quitter
» un lieu fi £jinr, &c.
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ZI4 HlSTOIRE DE PORT-ROIAI.
I(j64- Ce fut une grande perte pour les re-
iigieufes de P. R. des Champs , d'etre privees de M. Hamon , de qui elles tiroient de grands fecours ; & plus en- core de fa piece tendre &c eclairee , que de Ion habilete dans la medecine. Elles perdirent en meme tems Mef- fieurs Paulon & Girout, qui recjurent ordre de fe retirer; de forte qu'elles fe trouverent fans confelTeur, fans facrif- tain , &c qu'elles auroient fouvent manque de mefles depuis leur de- part fans la charite de M. Canut. On ne fe mit pas meme en peine d'en- voi'er d'autres confefTeurs. Au refte , ce ne fut pas un mal: car qu'auroit- on envoi'e 2 &c fans doute c'etoit pour ixvi. elle un avantage d'en manquer plutot in reiigieufes que d'avoir un tentateur. Jes champs l .. . . , _,
ecriventaM. tiles auroient iupporte en lilence
•Stffa"eu lm t0Ut ce °lue ^a mauce des hommes
iine tequete. vouloit leur faire fouffrir •, mais l'o- bligation de lever le fcandale que tout Je monde pouvoit prendre a leur oc- cafion , en les voiant traitees avec tant de rigueur , les porta a ecrire a M. de Paris & a lui adrefler une requete. » II y a vingt ans ( difenc ces reiigieufes , dans leur lettre du 5 » decembre ) que nos ennemis nous *■ irnpofent routes fortes de crimes , |
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II. Par tie. Liv. HI. n$
« & que ceux qui fuivenc leur pafllon TgfjZ " nousjugent dignes de routes fortes «j de chatimens. C'etoient des calomr « nies fans fondemens; mais cepen- » dant u* nous n'euffions pas eu foin » de nous juftifier , tout le monde » en feroit demeure perfuade. Il y " a vingt ans que fur ces foupcons « on menace de ruiner notre mai- » fon & de nous diiperfer. Nos " ennemis voient fort bien qu'ils le » feroient; mais au moins Dieu nous » a donne cette confolation, de mon- « trer a tout le monde , que toutes » les accufations fi atroces qu'ils ont „ inventeescontre nous,font tres fauf- *> fes. Maintenant , Monfeigneur , ,u nous voi'ons manifeftement qu'on „ nous condamne encore fur des » foupcons.On fait bien qu'on n'a pas „, droit de nous obliger de croire des « fairs eonteftes qui ne nous regardent » point , & encore moins de nous les » fake figner fi nous ne les croions » pas. Mais on veut , malgre nous , n que nous foi'ons coupables de fou- tt tenirles Vpropofitions condamnees, u quelques claires 6c precifes que ,> foient les condamnations que nous „ en faifons. Plufieursperfonnes auifi, „ Monfeigneur, fe feandalifentde ce |
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21 6 HlSTOIRE DE PoRT-Ro'lAt*
» qu'encore , difent-ils , que votre
» Grandeur ne nous demande aucune
» creance interieure des fairs conref-
* res, & que la foi humaine que vous
m exigez ne fignifie rien aurre chofe ,
» fmon que nous fommes obligees de
» croire que les Papes qui onr con-
» damne les V propofitions, les one
» crues de Janfenius; nous refufons
» neanmoins d'obeir a. une chofe ft
» indubirable. C'eft pour nous jufti-
*> fier conrre ces foupc,ons que nous
» nous fommes crues obligees de vous
« faire , Monfeigneur , certe tres
w humble requete , pour apprendre
« plus clairemenr vorre intention ,
w 8c vous dire fincerement la difpo-
» (ition ou nous fommes. Nous ef-
» pcrons, Monfeigneur , qu'elle ne
>j nous fera pas inutile , &c comme
» le tems a difllpe toutes les anciennes
» calomnies qu'on avoit formees con-
w tre nous, Dieu permettra audi que
» vous connoitrez un jour notre inno-
» cence , que prefque route la France
» reconnoir deja •, & que fi maintenant
v Dieu permet que vous nous affligiez
*> d'une manierequinous eft fifenfible,
» la patience que Dieu nous donnera
^ a fouffrir nous juftifiera envers vous j
<» que l'envie de nos ennemis vous
i* fera
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II. Par tie. Liv. III. 217
w fera en horreur, & que vous chan- x6(j, « gerez bien-tot les maledi&ions que w nous n'avons pas meritees , en des ■h benedictions que nous fouhaitons « deroutnotrecceur,&c.{97). M. de Paris avoir fait par un billet
la declaration fuivante,aux religieufes r^S ies de P. R. de Paris : » Afin de lever vos reWgieufa de *. fcrupules (98), qui jufqu'ici ont ete cLm'ps^M. » le pretexte de votre defobeiflance, 1'Archeveq. " je declare bien volontiers , que la fi-de P"15* »» gnature du formulaire que je vous or- » donne, n'eft point un temoignage ni »» un jugement que je veuille que vous « rendiez par vous memes fur la doc- » trine de Janfenius , parceque vous » en etes incapables •, mais que je defire . ,, feulement , que par une foumiflion
«, fincere, refpe&ueufe & de bonne » foi , vous acquiefciez a la condam- » nation & au jugemertt qu'a rendu le *' faint Siege de fa doctrine, auquel je » vous commande d'obeir, par la puif- » fance que Dieu m'a donnee fur vous « en qualite d'Archeveque': je vous af- » fure de plus que ce n'eft pas un men- O97) I-Iift. des perfec. M. de Paris aux rtligituftt
Rel. 1 part. p. 7 , col. i. de P. R., dans lequel on
p. 8 , col. i. faifoit voir, qu'il ne le-
(98) Ilparutbien-totun voic point les diificultct
petir ecrit indruli : Refit- de confcience.
xien fur l" de'cUmtion dt Tome F. K
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il8 HlSTOIRE DE PoRT-Ro'lAt;
» fonge , ni un faux temoignage , &C m que fi en cela il y a un mal>je le prens m volontiers furmoi, M. l'Archeveque qui avoit dqa re-
nonce a la foi divine, fembloit avoir encore abandonne la foi humaine , en declarant aux religieufes qu'il fe con- rente qu'clles acquiefcent & fe foa- mettent fincerement; car cet acquief- cement ne fignifie pas toujours une creance interieure, ni un acquiefce- ment de l'efprit 5 mais fouvent une fimple foumimon exterieure , qui con- flfte a. ne s'oppofer pas, Ainu", li les religieufes avoient cherche des biais & des detours pour fe tirer d'affaire , elles auroient pu figner de cette forte, puifque M. de Paris ne s'expliquoit: que pour lever leurs fcrupules qui les avoient empeche de figner , & que ces fcrupules ne regardoient que la foi humaine , qui par confequent n'au- roient pas ete leves, fi la foi humaine n'eut ete exclue. Mais comme elles n'avoient que la verite en vue , 8c que le terme d'acquiefcement eft am- bigu , elles ne crurent pas devoir s'en feryir dans la fignature. Les religieu- fes de P. R. des Champs auffi finceres que celles de Paris , adreflerent done & M. de Perefixe la requete fuivante |
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II. P A R T I E. LlV. IIf. 2,1 9
|>our lui demander l'explication de ce
terme , & le fupplier de declarer net- tement, fi par le terme de foumijjion & d'acquiejiement, iln'entendoit point renfermer la creance interieure, com- me il l'avoit temoigne aplufieurs per- fonnes de merits (99). " Supplient humblement les reli-
« gieuies de P. R. des Champs, difanc » que pour favoir ce qu'elles one a fai- " re fur la fentence a elles prononcee »> le 17 novembre , par laquelle vous " les avez declarees defobeilTantes , » & comme relies incapables de par- » ticiper aux SS. S acremens de l'Egli- » fe , en les privant de plus de voix » active & pailive dans les elections ; « elles fe croient obligees de s'adref- » fer a vous meme, pour vo.us de- » mander avec route humilite, l'e- » claireilTement dont elles ont befoin m fur divers points de cette fentence. »' Car il femble, Monfeigneur, que » vous J fuppofiez que nous ayions ab- » folument refufe de fatisfaire a i'or- » donnance de la fignature. Et cepen- n. dant la vcrite eft que nous y avons » fatisfait, ai'ant figne comme nos (99) Voi'ez la Rcl. in 4. Agnes, ce qui fepalTa i
p. 114 Sc fuiv. dans la P. R. de Paris aufujetde kttie de La S. Eiifabeth cetle requite. Kij
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2.40 HlSTOIRE DE PoRT-ROl'At.'
» fceurs de Paris &c aiant adhere a
3> tous leurs actes & fignarures ; &c la » maniere dont nous l'avons fait, n'eft » point de foi contraire a. votre or- » donnance , qui ne defend point de « s'expliquer , & elle eft entierement »> conforme a la doctrine de 1'Eglife , » puifque nous y promettons la crean- » ce pour le droit, & le refpedt & le m filence pour le fait, qui eft tout ce » que 1'Eglife peut exiger des fideles w fur de femblables matieres. C'eft >» pourquoi vo'iant que vous ne nous » accufez point dans cette fentence , u d'avoir ugne d'une maniere defec- m tueufe ; mais de n'avoir point figne « du tout , nous avons cm devoir ?. vous envo'ier la fignature que nous »» avons faite lorfque votre ordon- » nance nous fut fignifiee, en vous m fuppliant ou de revoquer cette fen- » tence comme fondee fur une faulfe » fuppofition & fur ijne erreur de fait, w ou de juger de notre fignature &c » de nous declarer quel, eft le defaut » que vous y trouvez & que nous n'y » pouvons concevpir. » Nous voi'ons bien , Monfeigneur,
„ que vous nous accufez dans votre v fentence d'etre des defobeifTantes &c i> nous en ?Drou,Yons Ja peine la plus |
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II. Partis. Liv. 111. in
» terrible que nous puiilions fouffrir,
« qui eft la privation des Saeremens ; » mais nous n'avons pas encore com- » pris quel eft le fujet & le fonde- » ment veritable de ce reproche. Et » plus nous rappellons avec foin dans » notre memoire routes les diverfes » chofes que nous avons apprifes de « votre intention, ou par vous me- » me, ou par des perionnes finceres « qui nous en ont informees, plus t> nous fommes embarrafTees a devi- " ner en quoi confifte proprement le *> commandement auquel vous nous » accufez de defobeir. » Nous favons que la lignature n'eft * pas une a£tion purement exterieure
- & qui ne fignifie rien , mais qu'elle * eft inftituee pour etre une ma-rque
»» de quelque difpofition interieure , » & de quelque penfee qui y repond. » La fignature de la main n'eft que » le corps du commandement, mais » la difpofition de l'efprit en eft Tame; » c'eft proprement ce que Ton doit « appeller la chofe commandee , par- » ceque c'eft ce principal objet que las » fuperieurs regardent en commaa- " dant , & que les inferieurs doivenc » regarder en obeilTant. • 11 eft bien vifible par la, Msneut;
Kiij |
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2 21 HlSTOIRE M FORT-Ro'lAt."
» qu'il y a deux cas auquel on ne pent
» etre oblige a la fignature fans par- » ler des autres : le premier ell " qnand nous ignorons 8c qu'on ne « nous fair pas favoir quelle eft cette » difpofition d'efprit, dont on veut " que nous rendions temoignage; par- m cequ'alors' on ignore quelle eft la •» chofe comrnandee ; & ainfi on ne ■» peut cue oblige de l'accomplir. Le *> fecond eft quand on n'a pas droit ■- d'exiger de nous que nous foyions » dans certe difpofition d'efprit, dont » la fignature eft une marque; parce- » qu'alors il eft injufte de nous com- » mander de temoigner que nous fom- » mes dans une difpofition ou nous » avons droit de n'erre pas. " Nous ne nous fommes encore ex-
" cufees de la fignature fimple du for- » mulaire, que par le fecond de ces » principes , parceque nous croions » bien favoir quelle etoit la chofe com- » mandee. Nous etions perfuadee , » Monfeigneur,que Ton vouloit exiget » de nous la creance interieure de la » verite du fait contefte , qui eft qu'il » y a cinqpropofitionsheretiques dans. " le livre de Janfenius; & en efFet les » fimples paroles du formulaire for- i.» ment ce fens, votre ordonnance le |
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It. Part IE. Liv. III. zij
*» confirrne, & il nous femble que
» c'eft en cette maniere que vons nous rt l'avez expliquee > & vous avez ta- » che <le nous perfuader que nous » etions obligees de croire interieure- " ment le fait en nous appu'i'ant, non » fur notre propre connoiifance , mais *» fur l'autorite des jugemens qui one » ete renduscontre ce livre. » Or encore, Monfeigneur, que nous »» foi'ons fort ignorantes , neanmoins » la eonnoiflance generate des princi- » pes de la foi dont nous devons etre » inftruites; la lumiere de la raifon que » nous ne devons pas eteindre en nous, » & le peu d'inftru&ion fur ces ma- il tieres , que la neceffite ou Ton nous »>a mifes nous a obligees de reciter- » cher , nous ont fait connoitre claire- « ment & nous ont trcs fortement pet- " fuadees qu'en matiere de fait,tels que » celui dont il s'agit, I'Eglife n'en peut » exiger par autorite & par comman- » dement la creance &c la perfuaiion » interieure •, & qu'elle ne peut com- » mander a fes enfans d'etouffer toiis » les doutes qui les peuvent tenir eit » fufpens; parceque fon autorite n'e- » tant que faillible en ces rencontres » » elle n'eft pas capable d'affujettir les K liij
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114 HlSTOIRE r>E PoRT-ROIAr..'
1664. " efprits lorfqu'ils font fortement emns
« par des raiions contraires. » Ce principe que nous avons ap~
» pris etre conftant parmi les Theolo- « gtens de l'Eglife Cadiolique , $c qui " a ete encore depuis peu loutenu par » de grands Eveques, nous a fait crol- m re que doutant, par des raifons qui « nous paroiflent considerables, de la w verite du fait qui fert de matiere a » la conteftation prefente, nous ne » fommes point obligees de quitter ce » doute , ee qui ne nous eft pas me- » me poflible , n'en ai'ant point de « motif fuffifant ; & que par confe- »» quent nous ne pouvions temoigner » que nous n'en doutions point, que « nous en etions certaines, que nous *> en etions interieurement perfua- »» dees. » En fuppofantdonc > Monfeigneur »
» que la chofe commandee par votre " ordonnance fut d'avoir dans 1'efprit « une certitude de ne point douter , « & d'etre interieurement perfuadees « que les erreurs le trouvent effecti- » vement dans le livre d'un Eveque » Catholique que nous n'avons point m lu, 8c oil plufieurs perfonnes fince- » res & habiles foutiennent qu'elles |
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It. P'artie. Llv. III. i%5
»> ne font pas > nous n'avons point » cru etre obligees a ce commande- » ment que l'Eglife n'a jamais fait y » & qu'elle n'a pas droit de faire fe- » Ion la doctrine la plus autorifee » dans l'Eglife mane. Et il eft bieti >■> clair qu'on ne peut nous accufer de » defobeiftance en ce point; puifque » ce n'eft point defobeir que de ne » pas faire une chofe, qu'il eft cer- » tain qu'on n'a pas eu droit de nous- » commander. » Mais cette regie, que l'Eglife ne
« commande jamais par autorite la « perfuafion interieure des fairs con- » teftes,demeurant certaine & immua- ble, nous trouvons, Monfeigneur > » qu'il y a fujet de clouter de votre » intention touchant l'obligation que. » vous avez pretendu nous impofer y w parceque nous voi'ons qu'on l'expli- »» que fort diverfement. Les paroles » de votre ordonnance portent fans » doute a croire que vous exigez en » cffet la creance interieure, & c'eft » aufli ce que vos interactions nous ont » fait entendre r il fe trouve nean- » moins des perfonnes qui croient etre » fort informees de votre inrention,. n 8c bien penetrer le fens de votre or- w donnance , qui foutiennent le con- |
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■£2<? HlSTOTRE CE PoRT-ROl'At
i(j6-."" » traire & qui pretendent que vous lie-
» demandez point la foi humaine da » fait contefte , mais feulement la fot » humaine que la decifion a ere taite » avec autorite; ce qui eft une forte » de foi humaine qu'il eft tres facile &C « d'avoir & d'accorder &C de temoi- » gner. C'eftainfi , Monfeigneur, que " nous avons su que le R. P. Efprit, » Pretre de l'Oratoire avoit explique » par votre ordre le formulaire a nos » fcEiirs de Paris , en les afturant qu'il » avoic appris de vous meme que vo* »> tre intention n'etoit pas d'obliger a. » croire que les V propoiitions fullent « effeclivement dans Janfenius , mais si feulement a. croire que le Pape l'a- -•> voit ainfi juge. C'eft pourquoiil leur n enfeignoit que le fens du formulaire » etoit :je condamne les V Propofi- » tions de Janfenius , c'eft-a-dire, que' - le Pape a dcclarees etre de Janfenius, " foit qu'elles y foient, foit qu'elles- » n'y foient pas en effet (i). » Nous favons aufli qu'on a allure a
(t$ LsP. Efprii fe plii- quecesplaintesetoient trej
gnit de ce qu'on l'avnit mal fondees, par une rc-
aomme dans cctte requete, ponfequi fe trouve dans la:
pretendanc qu'on avoit feconde partie de la tela--
viole les regies de, l'ami- tionde la mere du Fargis,
tie, & que e'etok le com- p. 10 , 11. Hill, des fer>;
promeure avec fes fupe- fee.
licais.;. mail oft fit voir. |
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n. Pa Kin. Eiv.m. ttr
j»<quelques unes cle nos fccurs qui one » ligne , qu'on ne les engageoit point » a la creance du fait; & de plus, que » vous vous ctes plaint, qu'on expli- » quoit malicienfement ce que vous w aviez dit de la foi humaine, en fup- » pofant que vous vouliez obliger a- " croire le fait interieurement. Cette. « contrariete appareute nous a mifes ,, » M., dans une entiere incertitude de.' 3> votre intention, &rnous reduitainiv •> dans l'impuiflance de la fuivre ,. » quand bien memenouslevoudrions,, « puifque nous ne favons plus quelle. " eft la chofe commandee qui fait l'ef- » fence de la fignature. •> Vous nous commandez de figner,-,
» pour temoigner qnelque chofe , mais » nous ignorons abfolument quelle' » elle eft; & ainli ce feroit bien fans. » raifon 8c fans apparency > qu'on. » nous traiteroit de defobeiflantes- » for ce prctexte, puifque nous ne » favons pas enquoi vous voulezque » nous vous obeiifions. Car vous nous. » permettrez de vous reprefenter ,, » M. , que nous n'avons ete nulle- » ment eclaircies fur ce doutepar une- "explication de votre ordonnance que m vous nous avez montree, ou vous; g*. dcclarez que la fignature du formu^- K vi
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2l8 HlSTOIRE DE PORT-RGTAI.
i66a. " l*ire n'eft pas un jugement que voutf
» vouliez que nous rendions par nous » memes; mais que vous defirez feu* « lenient, que par une foumiflion fin- « cere & refpecmeiife &c de bonne foi, m nous acquiefcions a la condamna- » tion que le faint Siege a faite de la » doctrine de Janfenius. Ce n'eft pas, w Monfeigneurdever nos doutes,nire- « medier a nos fcrupules , que de » nous declarer une chofe dontnous » n'avons jamais doute. Or nous ne » nous fbmmes, jamais imagine qu'on « ait eu la penfee de nous obliger a »> faire par nous memes un jugement » de la doctrine de Janfenius , & nous 3» ne formerons jamais un foupcon fi » injurieux a. la conduite. de nos fu- » perieurs que de leur attribuer un « deflein fi deraifonnable- Nous avons » feulement cru que votre ordonnan- « ce nous oblicieoit a rendre un teV » moignage & a former un jugement » fur un fait contefte , en nous ap- » puiant fur 1'autorite qui l'a decide.. » Voila l'unique fujet denotre doute ,. » & c'eft furquoi nous "'-ivons trouve. » aucune lumiere. dans votre declara- » tion. " Peut-ttre que des perfonnes, plus
f. intelligences que nous;y en trouver |
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. II. Partie. Lh. HI. tvf
■n ront dans les paroles fuivantes, que
*> vous ne nous demandez qu'un ae- » quiefcement & unefoumijjion Jinctrs. » Mais pour nous , Mgf., nous vous » proteftons avec fincerite ,• que nous » n'y en avons point du tout trouve, » & que nous ne favons ce que vous « voulez qu'on entende par ce terme •• d' aquiefcement, de foumijfion & d'a~ " beiflance pour le jugement du faint » Siege. Car fi par cet acquiefcement n & cette foumifiion on entend la pet- s' fuafion interieure de la verite du fait " contefte, on a raifon de dire que « nous n'acquiefcons pas en cette ma- » niere ; mais nous croions auffi avoir « fujet de dire , que Ton n'a jamais- » cru dans l'Eglife que les fidelesfuf- « fent obliges a cette forte d'acquiefce* >* menta l'egarddes fairs. Mais fi Ton » entend quelqu'autre chofe que cette » perfuafion interieure, on nous fait in* » juftice,Monfeigneur, depublierque- » nous n'acquiefcons pas & que nous- » ne nous foumettons pas aux confti- « tutions ; puifqu'excepte la creance w interieure \i rait, nous avonsren- » ferme toute forte de refpect & de « deference qu'on peut rendre au* » constitutions des fouverains Ponti- ff' feSp.memea 1'egard des faits,Jbuf |
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IJ'O- HlSTOIRE DE PORT-ROIAC'
» les termes de refpe£b & de filencff
» que nous avons promis a. l'egard dil » fait dans notre ngnature. » Ce confidere, Monfeigneur, 8c at-
» rendu que le droit divin & humaia » oblige les fuperieurs de faire con- » noirre a. leurs inferieurs quelles font » les fautes donr ils les accufent 8c » pour lefquelles ils les punillenr, 8c * quelles font les chofes qu'ils leur » commandent, les fuppliantes vous » conjurentpar les entrailles de la cha- j> rite de Jems Chrift de declarer juri- 5> diquement quel defaut vous trou- 7> vez dans la fignature qu'elles vous m ptefentent , 8c d'expliquer par un « acte public 8c authentique , d'une » maniere claire , precife 8c propor- » tionnee a leur efprit, ce qu'il fauc » entendre par les mots d'acquiefce- » ment , de foumiffion jd'obeilfance,, »» de deference & autres femblables , 8c »»■ fi vous leur demandez par-la la per- « fuafion interieure du fait contefte , >»' qui exclut le doute & l'incertitude » touchant le fait; ou fi vous ne vou- »• lez fignifier au contraire qu'un ref- » peel exterieur, qui n'enferme point » la creance, lequel elles n'ont jamais » refufe de rendre aux conftirutions : n> 8cvous ferez,Monfeigneur3une cho^ |
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» fe digne de la bonte & de la charit£ ~
» epifcopale, qui ne dedaigne point » de condefcendre a. l'infirmite des- » perfonnes foibles & affligees comme » nous fommes ».< Rien n'eft plus modefte & plus jufte
que cette requete qui fut prefentee le; 6 decembre a M. de Paris. Rien n'e- toit plus facile a ce Prelat que de fatis- faire ces filles. Il n'avoit qu'a direun: mot & a declarer nettement, qu'il n'en- tendoit par l'acquiefcement qu'il leur demandoir , qu'un acquiefcement ex-- rerieur pour garderladifcipline; rou- tes les difficultes etoient levees , & Ie ealme etoit rendu a P. R. Neanmoins- il fe trouva embarraflfe. i<>; Parceque s'il leur avoit declare qu'il n'exigeoic par leurs fignatures qiv'un acquiefce-- ment exterieur , e'etoit leur donnec a&e de I'injufHce de la perfection' qu'il avoit faire a. ces religieufes , puif- qu'elles avoient toujours temoigne- qu'elles avoient ce refpedt exterieur a l'egard de la decifion du fait. 1u. S'il leur eut declare qu'il exigeoir par cet' acquiefcemenr, une perfuafion inte— rieure , les religieufes auroient pu lui; reprocher qu'il vouloit les feduire ,» en leur faifant croire qu'il vouloic kv.tr leurs fcrugules, puifquil auroip |
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1 3 1 HrSTOIRB DE PoRT-Ro'l'Xt;
1664. demande d'elles ce qu'il en avoir de-'-
mande auparavanr, & ce qui les avok empeche defigner. M. de Paris, pour fe rirer de cer embarras, jugea a pro- pos de ne poinr faire de reponfe. Les religieufes voi'anr que M. de Perefixe ne leur repondoir poinr , vouluren* prendre fon iilence pour un aveu ta- eire qu'il n'exigeroir plus d'elles la ereance inrerieure pour le fair ;& com- me les feres de Noel approchoienr, elles lui ecrivirenr le 2 3 decembre la lerrre fuivanre pour lui demander la permif- fion d'approcher des Sacremens ( 2 ). txviu. „, Monfeigneur, nous avons fujet Seconde let- , - ° , \ i * '
tre dcs reii- » de croire , qu apres la requere que
gieiifode Pi » nous nous fommes crues obligees de R.des champs , - . y ,
dM.de Paris.» vous preienrer cc qui vous a ere ren*
» due des le 6 de ce mois, vous au*- v rez ere conrenr de norre difpofition y » & que vous voudrez bien ne nous? » plus regarder comme des defsbeif- » fanres, puifque vorre filence femble » erre un confentemenrraciteque vous » ne rrouvez rien a redireanorre figna- n rure. Car vous ai'ant conjure par les » enrrailles de lacharite de Jefus-Chrift » de nous declarer juridiquemenr quel » defaur vous y rrouviez , apres vous- » l'avoir encore prefenree, nous ne («.) Hid, des perfect 1 part.p. 13 ,col. b- |
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II. P A R T I E L'lV. HI. 13 i
*» pouvons pas nous imaginer que vous xCG^.
» euffiez manque de le faire s'il y en » avoit eu quelques-uns ; & il nous- - female que ce feroit une chofe tout- » a-fait contraire , non feulement a la » bonte d'un pere, mais merae a la » juftice d'un juge , que de punir avec » une feverite fans exemple de pauvres » filles qui ne cherchent que Dieu, fans *> leur vouloir faire connoitre en qnoi » confide precifement la faute pour lw- » quelle on les punir, lorfqu'elles le de- » mandent paries plus humbles fupplica- « tions, pouvant protefter devanr Dieu w qu'elles ne le favent pas. Souffrez »» done , Msneur , qu'a'ianr meilleure » opinion de votre equite & de votre »> affection parernelle , nous nous jet- " tions encore a. vos pies pour vous con- » jurer de ne nous pas laifFerpaffercette » fete dans une auffi grande douleur » que feroit celle de nous voir pa- s' vees de ee pain divin que le Ciel a » donne a la terre en ce faint jour &c » de cette paix fi defiree que les An- » ges nous font, venus annoncer. Ainfi » Dieuveuilte ecouternos prierescom- » me vous ecoutez les notres; & vous » faiTe grace com me vous la ferez a de- » pauvres affligees , qui font avec uj*. w profond refpect, &£» |
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Zj4 HlSTOlRE DE PoRT-ROlAt;
M. de Paris, au lieu d'etre atten>
dri par des prieres fi humbles, fi juf- tes & fi chretiennes , repondk avec fa durete ordinaire , a cecte lettre par la fuivante, datee du Z4decembre, adreflee a la mere pr-ieure (3). » Je n'ai » point repondu , dit-il, jufqu'ici a la. » requete qu'on m'a ptefente'e l'autre » jour de voire part, & qui depuis ce » tems a ete imprimee & court pre- »> fentement les rues de Paris, a caufe »> qu'elle eft toute remplie de Tor- 's gueil & de la prefomption fur la- » quelle eft fondee votre defobeiflan- n ce. Il feroit a fouhaiter pour vo- *» tre falut que vous n'eufliez jamais »> appris qu'a prier Dieu & i rendre »> a vos legitimes fuperieurs l'obeiflan- » ce que vous leur devez. De cette » fa^on vous ne feriez pas devenue » une demie favante, qui a la pre- »» fomption d'interroger Ion Archeve- » que, en lui demandant une cho- 53 fe qui n'eft pas moins claire que » le jour, c'eft-a-dire ce que lignifie » le mot d'acquiefcement & de fou- » mifllon , qu'il defire de vous a l'e- » gard du jugement que I'Eglife a ren- » du tres canoniquement fur la doe- .*r trine de Janfenius. Vous feriezr (3) lb. col. x. >
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II. Part ie. Llv. 111. 135
•» bien ignorante fi vous ne faviez
" pas la fignification de ces termes ; » & ceux qui vous ont inftruites , » font bien malicieux, s'ils nevous " out pas fait connoitre que dans la " primitive Eglife, lorfqu'on a defire » cet acquiefcement & cette foumif- » lion a des jugemensfemblables, les » veritables fidelesy ont toujours obei » fans s-'avifer de faire la demande " que vous me faites, laquelle ne peut » qu'etre injurieufe & contre le ref- » pec"l qui eft du aux fuperieurs a » qui on la fait. Vous pouvez bien » juger que de ma part, je ne defire w de vous cet acquiefcement, que de » la maniere qu'il a toujours etc defire' »»■ dans les conciles les plus cecumenir- » ques •, & de votre cote vous devez »r auilile rendre de ia;meme forte qu'il » a toujours ete rendu par tous les fide- » les , c'eft-a-dire refpe&ueufement, » fincerement & de bonne foi (4). Il » me femble que c'eft furfifarnmenr » s'expliqtier pour une perfonne qui » entend le Francois & qui n'ufe point » d'artifice pour donner tems a une » herefie de s'erablir 8c de s'accroitre. (4) On voit que M. la difficulr6 des rellgienfer-
de {Paris s'envelope dans en Ieur declarant s'it eli- des termes , & ne veut geok une creance imciKUr joint t'oxgliquct ni. level: K.- |
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1}6 HlSTOIRE DE PORT-ROTAt.
(j<54, » Au refte le Pere Efprit ne torfibe pa?
» d'accord de ce que vous dkes de Jul » dans votre requere ; & s'il etoit w vrai qu'il m'eut expKque de la ma- » niere que vous l'aniirez, il n'auroit » pas etc un fidele interprete de mes .1 penfees. Je n'ai plus rien a vous di- » re, ma foeur, nnon que rant que » vous ferez dans le pitoiable etat ou » vous etes prefenrement, je ne puis »> vous accorder ce que vous me de- ft mandez. Contenrez-yous de vous » humilier profondement devant Dieu » & de lui demander toutes les gra- ft ces dont vous avez befoin pour cela. » Eeoutez toutes les raifons qui vous »> peuvent porter a l'obeifTance , rejet- n tez toutes celles qui vous entretien- » nent dans des fentimens contraireS', " & que je ne veux pas exprimer par » d'autres paroles , parcequ'elles ie- » roient trop dures •, & ne doutez pas » que de mon cote je ne demande irt- » cedamment & inftament aDieuqu'il » permette que vous pafliez de l'etat « oil vous etes a celui dans lequel je » pourrai vous accorder ce que vous » defirez de moi , &c vous temoigner » que je fuis veritablement, ma fceur, » votre tres humble ferviteur , Hai> g douin, Archeveque de Paris. |
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IT. Partis, Llv. IIT. z 3 7 ^^^^
C'eft une chofe finguliere que les 1664,
difpofitions que M. de Paris & M. Cha- miilard avoienc coutume de demander ayx religieufes de P. R., en leur ordon- runtle dcpouillement, 1'indifFerence, la defiance de foi-meme, le renonce- ment a fon opinion , le defir de con- noitre la verite , de prier Dieu de la leur faire connoitre. Quand on con- noit la verite , eft-il permis d'avoir de 1'indifFerence J Les ennemis de faint Athanafe & de faint Cfaryfoftome apres les avoir fait condamner dans les Con- c.tliabules de Tyr & du Chefne , pou- voient dire la meme chofe a ceux qui connoiflbient 1'innocence de ccs grands Saints & refufoientde foufcrire a leur condamnation; depouillez-vous de vos prejuges, renoncez a vos ienri- mens, depouillez-vous de l'opinion out vous etes, demandez a Dieu des lu- jnieres. Qu'eft-ce que tout celaveutdiV re dans labouche de M, de Perefixe & de M. Chamillard, qui avoient repete cent fois tout ce qu'ils pouvoient dire en faveur de leur formulaire devant les religieufes de P. R., qui avoient re- pondu cent fois a leur mauvais raifon- nemens, & aux raifons defquelles ils n'avoient jamais donne aucune repon- fe folide J Quand on a le bonheur de |
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ij 8" Hjstoire de Port-roi'ai.
~\fC connoitre la verite , il faut y etre telle- merit attache , qu'on foit pret a dire anatheme a des legions d'anges def- cendus du Ciel, qui nous diroient le contraire. Les religieufes de P. R. fa- voient qu'on ne doit point faire de ju- gement temeraire , qu'on ne doitpa* accufer un innocent , qu'on ne doit pas aflurer avec ferment une chofe dont on doute: & M. Chamillard veut qu'ellesfe depouillentdeces opinions , -qu'elles demandent aDiett de leur faire connoitre la verite. N'eft-ce pas fe jouer de la religion que de faire de pareils saifonnemens 2 » Il faut chercher juf- *> qu'a ce qu'on ait trouve •, quand on a " trouve, il faut croire; lorfqu'on croit » il ne faut plus s'appliquer qu'a perfe- u verer dans ce qu'on croit ». Voila la regie des Peres de l'Eglife. C'etoit celle que prefcrivoit Tertullien : Heu- reux s'il Petit toujours fuivie ("5)1 ixtx. Les religieufes de P. R. de Paris *df leufc/de aianr vu ^a Prem*ere requete de leurs
p. r de Pa- fceurs de P. R. des champs (6), fe joi- *B'Le lt da. patent a. elles & en prefenterent une *«(T4. le 28 decembre en cette forme. A U) Lib. de prefer. Elifaberh Agnes , qui cen-
ts) Voiez dans les Rel. tient descirconftances par- ing. Rental de lettrei, p. ;iculieiej fur cette requete. J j 4. .une lejtre de la fecur. |
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IT. Part is. Liv. 111. iy$
Monfeigneur l'Archeveque de Paris. "Z
» Supplient humblement les religieu- « les du faint Sacrement de' P. R. de « Paris , difant qu'ai'anr eu communi- « cation de la requete que leurs tres » cheres fcEius qui font aux champs, « vous ont prefentee , pour vous con- » jurer paries entrailles de la charite » de Jefus-Chrift , de leur declarer » juridiquement quel defaut vous ttou- « vez dans la fignature qu'elles ont " faite pareille Ala notre du 10 juillet, « & d'expiiquer par un acle authenti- » que , d'une maniere claire & pro- » portionnee a leurs efprits ce qu'il " .fa ut entendre paries mots d'aquief- » cement, de foumiilion , d'obeiiTan- » ce, de deference & autres fembla- " bles, 8c fi vous leur demandez par » la la perfuafion interieure du fait u contelte , qui exclut le doute & I'in~ » certitude touchant le fait, ou fi vous » ne voulez au contraire iignifier qu'un » refpectqui n'enferme point la-crean- » ce , lequel elles n'ont jamais refufe, » non plus que nous ; nous avons cru „ etre obligees de nous joindre a el- » les , (k nous jetter a vos pies pour n vous faire la meme fupplication ; n d'autant dIus que nous avons enco- ?». re plus de fujet qu'elles, d'etre in- |
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140 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAr.'
» certaines de votre intention, apres
» les diverfes chofes qu'on nous a di~ » tes de votre part fur ce fujet. Car » outre ce qui eft rapporte dans la » requete de nos foeurs, l'une de nous » a afliire que depuis peu une perfonne » de condition de fes parens l'etant » venu voir par votre ordre, pour la » porter a. la fignature , lui a dit que « que vous ai'ant reprefente qu'il ne v voioit point d'apparence qu'on put » nous obliger a la creance du fait , » vous lui aviez repondu que vous n'a- » viez audi jamais fait un tel comman- » dement, & que vous en laifllez croire » ce qu'on vouloit. Deforte que fi ce- » la eft, Monfeigneur, il n'y a rien « de fi facile que de rerablir notre h maifon dans l'etat de paix & d'union " ou vous l'avez trouvee , en nous =) donnant moi'en d'obeir fans bleflTer » notre confidence , puifque vous n'a- » vez qu'a declarer juridiquement ce s> que vous avez temoigne en partial- is lier a cette perfonne. Ce confidere, » Monfeigneur, il vous plaife recevoir » les fuppliantes, intetvenantes avec » leurs foeurs de P. R. des champs dans « la requete qu'elles vous ont prefen- u jee le 6 decembre, aux fins fufdi- «tes >».
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II. P A n. t i e. Llv. HI. 141
rn tes ». Cette requete etoit fignee de 1664/
quarante religieules. Les religieufes de P. R. des champs,
fans fe rebuter de toutes les duretes de M. de Paris, & prenant pour mo- dele la femme de l'Evangile qui force le jugeinjufte, par fes importunites, de lui rendre juftice, addreflerent une feconde requete au Prelat, & 1'accom- pagnerent d'une troifieme lettre datee du } o de decembre. » Monfeieneur , nous vous protef- txx-
a r 1 tes religieu-
» tons, que nous iommes dans une fes de p. r.
n extremeafflidion d'etre encore obli- d« champs j 1 is \ adareflent
» gees de vous preienter cette tresune feconde
w humble requece, & de nous expofer *fla*ie. ■* M*
r i c ■ v rr J de Paris,
>» une ieconde rois a.paller dans votre
» efprit pour des perfonnes pleines
» d'orgueil & de prefomption. Nous
» favons , Monfeigneur , 1'obligation
»> que nous avons de nous humilier; Sc
« nous en avons tant de defir, qu'il
» nous eft venu une forte penfee de
» fupplier votre Grandeur de nous re-
»* duire toutes au lieu 011 peuyent-
f etre des religieufes. Nous recevrons
»> comme une grande grace que vous
„ fouffriez que nous fo'ions routes de
»» fimples fceurs converfes , pourvu
h que vous ayiez la bonte de nous de»
n charger de la fignatiire du formula!-
Tome V. L
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£41 HlSTOIRE DE PoRT-Ro'lAt'
» re , comme vous faites routes Ie$
» perfonnes de cetre condition , de » nous permettte l'ufage de la fainte » Communion que nous fouhaitons » plus que toure autre chofe, & de » nous laiiTer mourir enfemble dans » la maifon ou Dieu nous a mifes. *> Voila, Monfeigneur, la mifericor- w de que nous vous demandons. » La deuxieme requete etoit ainfi con^ue. » Suplienthumblement les religieu-
» fes de P. R. des Champs, difant » que nous etant crues obligees de " vous prefenter une requete , comme » nous avons fait le 6 de ce mois de m Decembre 1664 , pour demander » avec route humilite quelle etoit la w difpofition que vous nous comman- » diez de temoigner par la fignature » du formulaire, (i c'etoit la creance »> interieure du fait de Janfenius , ou » bien un fimple refpedfc, & fi c'etoit » cette creance interieure que vous » entendez par les mots d'acquiefce- -.> ment & de foumiffion que vous « nous avez declare vouloir exiger de » nous; nous avons ete, Monfeigneur, ». dans un etonnement extreme de la »maniere dont il vous a plu nous ?j repondre, en ecriyant non a nous f • •■ •-
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II. P A R. T I E. Liv. III. 14 J
*» mais a notre mere Prieure. Vous y 1664."
f fuppofez, Monfeigneur, que nous en « tendons bien les termes, dont nous t> vous demandons l'explication, que » c'eft dans le defTein de vous fake » injure que nous vous avons prefen- « te cette requete, & que ces termes « etant clairs a tous ceux qui emeu- s' dent le fran^ois , ce ne peut etre " que par malice & par artifice que » nous temoignons avoir befoin qu'on » nous les explique. C'eft fur ce fon- »» dement que vous nous accufez feu- s' tes en faperfonne de prefomption &c »> d'orgueil, Sc que fans avoir egard » a notre requete , vous nous repetez »» fimplement les memes termes que « nous vous avions declares n'enten- » dre pas, fans nous en donner au- « cune explication. Nous nous fen- *> tons,Monfeigneur,a(Tezredevables a w la juftice de Dieu, pour ne pas croi- » re avoir droit de nous bleffer des « reproches que vous nous faites, puif- » que nous les meritons fans dome pour »» d'autres fautes, & nous fouhaite- » rions de tout notre coeur que vous »> les euffiez appliques a. des chofes ou » nous reconnoiflant coupables devant " Dieu, nouspuflions aunl en faire un v aveu fincere Levant l'Eglife & de- tij
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244 HlSTOIRE DE Po&T-Roi'Al.'
» vant vous, Monfeigneur,qui nous te*
» nez la place de Dieu fur la cerre. » Mais l'humilite chretienne etantinr » ieparable de la verite , & Dieu ne » pouvanr etre honore par le menfon*- » ge , nous fommes obligees de pro- ?> tefter devant lui, que nous fommes " encierement eloignees des inten- se tions que vous nous attribuez , que » nous ignorons effedHvement la ng- » nilication des termes fur lefquels ?» nous vous ayons demande 1'eclair- » cilTement &c que nous ne favons m point allurement fi votre deflein eft *• d'exiger de nous par cette fignature « la creance jnterieure dii fait contef- >> teoufi vous n'avez pas ce deiTein. Et » comme il s'agit ici d'une intention tf cachee dans notre coeur, & d'une »> penfee fecrete dont il n'y a que Dieu ?> qui puifTe etre le juge , & dont nous » fommes les uniques temoins, nous «'croions,Mqnfeigneur, que vous nous « devez faire cette juftice de nous ju- ?> ger plutot fur le temoignage que » nous vous rendons nous memes de *> notre difpofition, que fur des foup- » 50ns qui ne peuvent avoir de fon- ?> dement legitime. De forte que s'il »« eft vrai, comme vous nous en al- >> furez, que ces termes foient intek |
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II.- PARflE. Lh. III. 24J
» ligibles a tous ceux qui entendent Ie x^'(,
» Francois , c'eft une ignorance & une » ftupidite a nous de n'en pas favoir » le fens ; mais ce n'eft pas une pie- s' fomption ni un orgueil de le de- » mander dans la prefla-nte neceffite » ou nous nous trouvons. Si on nous " avoit permis,Monfeigneur,de ne fai- » re autre chofe que de prier Dieu , » nous ne nous ferions jamais rendues w importunes a nos fuperieurs fur de » femblables queftions. Nous nous « fommes tenues dans cet heureux " etat autant que nous avons pii, & " c'eft avee grand regret que nous en » fommes forties. Vous favez , Mon- »»*feigneur,qu'il n'y a gueres de monaf- »> tere en France, ou on parlat moins *> que daiis le notre de ces contefta- n tions, & ou Ton eut moins de curio* » fite de s'en informer avant qu'oa »» nous eut demande la fignature ; & » 1'engagementoiionnousa mifes mal- w gre nous , eft Punique fujet qui m nous a obligees de nous en inftruire » un peu , ann de pouvoir rendre a » Dieu dans cette occafion extraordi- » naire la fidelite que nous lui de- » vons. Nous avons cru que cette fi- » delite confiftoit a ne rien faire que 0* de tres fincere , & a ne temoigner i L iij
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14<> HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt;
n l'Eglife que ce que nous avions ef-
» fettivement dans le coeur : &: pour « cela, Monfeigneur, puifque la figna- » tore eft un figne de quelque difpofi- » tion d'efprit, il etoit necefTaire avant » que de la faire, de s'informer exac- ts tement quelle etoit cette difpofition « d'efprit dont elle eft le figne. Nous « avions cru d'abord la creance inte- « rieure de la verite du fait contefte •, » & comme nous n'avions pas cette ?j creance, nous avions penfe etre obli- « gees d'ajoutet a notre fignature des »» termes qui exprimaflent notre veri- « table etat. Maisdepuis,Monfeigneur, » que nous fommes entrees en doute " de votre intention fur ce point , » comme nous vous l'avons expofeV »par notre requete, ce doute s'effc j> plutot augmente que diminue par » votre reponfe , ou vous ne nous di- » tes en aucune forte , fi vousne de- « mandez pas la creance interieure de » ce fait, quoique ce foit le princi- » pal fujet de notre requete , & qu'e- s> tant a(Tez ignorantes pour n'enten- » dre pas ce que veulent dire en cette » rencontre les termes d'acquiefce- » ment & de foumifllon , nous ne le " foyons pas afTez pour n'entendre » pas ceux de creance & de perfuafion |
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II. PartIe. Liv. III. 247
» interieure , fi vous euffiez bien vou- » lu vous en fervir pour vous y rabaif- " fer a la proportion de notre intel- i> ligence. » II eft vrai, Monfeigneur, que vous
i> nous dites dans cetce reponfe que le » P. Efprit n'avoit pas bien, interpre- » te votre intention a nos fours de » Paris j s'il leur avoit dit ce que nous » en avons rapporte ; ce qui donneroic » lieu de croire que vous exigez en » effet la creance de ce fait. Mais ou- » tre , Monfeigneur, que vous ne nous " dites pas precifement en quoi il n'a » pas bien pris votre fens , nous avons » vu depuis pen une piece qui n'eft » pas fujette a defaveu , & qui nous » paroit detruirecette conjedture.C'eft, » Monfeigneur , la lettre que vous » avez ecrite a M. d'Angers (7), ou il « nous femble que vous y marquez » aflez clairement, que la fignature » que vous exigez, n'eft point un te- » moignage de creance interieure , » mais d'un fimple refped. Car non » feulement vous ne dites nulle pare 3> que vous exigiez la foi humaine, la » perfuafion interieure ; mais vous y (7) Voi'ez la troifieme fe trouvent les lettres de
partie de l'apologie des MM. de Paris & d'Aa»t jeligieufes de P. K. , oii gets. t iv
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148 HlSTOIRE PE PoRT-ROlAt^
» accufez ceux, qui ont combattu vo-
" tre ordonnance en fuppofant que 5> vous y demandiez la foi liumaine » du fait contefte , de Pavoir expli- »> quee a contre fens par une mali- » cieufe critique. Et vous y enfeignez » de plus , que quand on fuppoferoit " que l'Eglife fe feroit trompee dans * un fait I il faudroit neanmoins fouf- » crire ce jugement de fait •, &c en « ce cas il eft bien clair, que votre » fentiment n'eft pas que la foufcrip- « tion fut une marque de creance , " puifque fans doute on ne doit ni » croire la fauftete, ni temoigner qu'on *> la croit. Vous voi'ez aflez , que eel- s' te contrariete apparente eft capa- w ble d'embarrafler l'efprit de filles , « qui ne favent pas allier ce que des »> perfonnes plus habiles 8c plus intel- >» ligentes que nous allieroient peut- » etre fans peine. Car il nous paroit » en confiderant votre ordonnance , » vos inftructions, votre declaration , »> & quelques termes de votre repon- » fe , que vous demandez la creance » interieure du fait ; & il nous pa- » roit en meme tems par votre lettre « aM. d'Angers, par d'autres termes » de votre reponfe, & par plufieurs » autres circonftances, que vous ne la |
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II. Partie. Liv. III. 149
» demandezpas. Si nous n'etions point » obligees de rien faire fur cela, nous » demeurerions de bon coeur dans ce » doute, fans vous en parler davan- » tage ; mais vous nous commandez , » Monfeigueur , de figner, quoiqu'on » n'ait jamais fait dans PEglife un pa- " reil commandement a. des fiiles ; 8c » cette fignature doit etre un temoi- " <?nage' ou de 'a creance interieure " fi vous la demandez, ou de quel- » qu'autre chofe fi vous ne la deman- » dez pas. C'eft a nous, Monfeigneur y » que vous commandez de rendre ce « temoignage, 8c il nous eft impoffible » de le rendre,. fi nous ne favons ce » que c'eft que vous defirez que nous » temoignions. Pour obcir , il faut fa- " voir ce que c'eft que l'on comman- » de , & avant cela il n'eft pas pof- » fible ni d'obeir ni de defobeir. C'eft »>pourquoi,Monfeigneur,tantquenous •» ne faurons point precifement ce « que vous exigez de nous, nous ne » ferons point defobeilfantes, mais it »> ne nous eft pas meme poflible de » l'etre : 8c nous punir pour ce fujet t n ce feroit nous punir pour une faute » que non feulement nous n'avons- M pas faite, mais que nous n'avons n pas meme pu faire. Nous nous fom- L v
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15O HiSTOIRE DE PoRT-ROl'At."
» mes done trouvees , Msneilt. dans
» une neceffite indifpenfable de vous » demander cet tsclaircifTement, Sc ■» nous forames encore dans la meme » neceflite , puifque notre ignorance w fait que nous n'en fommes pas plus ■» eclaircies que nous ctions. Nous ne » fommes pas a(Tez inftruites, Mon- " feigneur , dans l'hiftoire de l'Eglife » pour favoir quel a ete l'ufage de » l'Eglife primitive touchant lesprof- » criptions , & en quel fens on les » a faites ; ni par confequent pour " entendre ce que vous dites dans » votre lettre , que vous ne deman- » dez que ce que Ton a rendu aux » Conciles cecumeniques. Nous fern- s' mes auffi hors d'etat de pouvoir nous " en informer •, mais ce que nous fa- » vons, Monfeigneur, par lalumiere de » la foi & de la raifon,eft que perfonne » n'a jamais du figner fans favoir ce » qu'il iTgnoit, & quelle etoit la chofe » dont il rendoit temoignage par fa » fignature. C'eft,Monfeigneur,cequi » nous paroir clair & certain, & qui »nous oblige encore de recourir a n vous, quelque repugnance que nous » y ayions , & que vous pouvez juger » etre extreme , apres la lettre que » nous avons re§ue de votre part. L'c- |
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II. Partie. Llv. lit* tfi
s>'tat ou on nous a reduites , eft fl ef-
» froiable , que nous ne pourrions pas *> y demeurer , fans tenter toutes les " voies d'en fortir •, & cette affaire re- » garde tellement notre confcience y » qu'elle ne nous permet pas d'avoir » egard a toutes les confiderations hu- » maines qui nous auroient empechees » de vous faire cette feconde requete , " apres le rebut que vous avez rait de « la premiere. Nous vous fupplions » tres humblement, Monfeigneur, de " croire que nous n'avons nul deffein " de vous faire injure;que nous ne vous » demandons point eclairciffement fur » des chofes que nous entendions •> » que nous ne penfons qu'a fatisfaire a. « Dieu, a l'Eglife & a notre confcien- » ce, & que tout notre deflein en cette » requete eft de vous porter a. la chofe » du monde la plus facile, qui eft de « nous declarer precifement ou que » vous ne demandez point la creance » interieure du fait contefte , &c que - ce n'eft point ce que vous entendez » par cet acquiefcement dont vous par- » lez , ce qui nous donneroit mo'iert »» de vous fatisfaire entierement, puif- » qu'il n'y a que cela qui en empeche, » & qui nous en ait jamais empechees ; » ou de nous declarer au contraire ex.- L vj
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_____*5 * HrSTOlRE DE PoRT-ROlAt.
1664. » preffement que vous exigez de nous
» la creance interieure de ce fait coa- » tefte , afin qu'il paroiffe a coure l'E- » glife qu'on a detruit notre monaf- « tere , parceque nous croi'ons qu'on « n'a pas droit d'exiger cette creance » de nous ; en quoi nous penfons n'a- »voir point de fentiment qui ne foit » re^ix par la plus grande partie des » Eveques & des theologiens catho- » liques. Voila, Monfeigneur, en quoi » confifte tout notre artifice , & nous » croi'ons que cet artifice eft bien le- « gitime, puifqu'il nous donne raoien » ou de vous fatisfaire entierement y. » cotwme nous le defirerions de tout » notre cceur, ou de fatisfaire aumoins- » i'Eglife, en levant le fcandalequela » mine de notre monaftere y pourroit » caufer. C'eft dans ce deffein que nous » nous profternons encore a vos pies, » ayec tout le refped & toute l'humi- » lite qui nous eft potlible , pour vous. » prier de nous donner reclaircuTe- » ment que nous vous demandons. » Nous vous en conjurons , Monfei- » g^neur, par lacharite que vous devez » a 1'Eglife, dontcescotneftationstrou- » blent la paix depuis fi long-tems j » nous vous en conjurons par la cha^ " rite qne vous avez pour notre mair |
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II. Parti e. Llv. 111. 15 j
» fon & pour nos ames, que vous fou- ' » lagerez infiniment par cetre declara- " rion ; 8c nous vous en oonjurons » enfinparlacharite du fouverain paf- » ceur , qui ai'ant donne fa vie pour » vous, 8c vous ai'ant oblige de la don- » ner pour les ames qui vous font con- » fiees, vous oblige encore beaucoup- » davantage de donner a. de pauvres " filles , que Dieu a foumifes a votre « conduice , des paroles de charite 8c » de juftice , qui feront capables de •» leur donner le repos dans une agita- « rion fi violente. » Ce eonfidere , Monfeigneur, 8i
« attendu qu'il eft tres veritable que » nous n'avons pas compris par votre » reponfe , fi vous pretendez ou fi » vous ne pretendez pas enfermer la » creance interieure du- fait contefte, » qui exclut le doute 8c 1'incertitU' " de , fous les termes d'acquiefce- » ment, de foumiflion & d'obeiflan- <• ce fincere & refpeclueufe que vous » exigez de nous , il vous plaira » nous declarer expreflement , 8c par » un a&e public 8c authenrique , qui t> regie le fens de- la fignature que » vous nous ordonnez. C'eft, Mon- » feigneur , ce que nous voulons efpe- » rer que votre bonte ne vouspermet- |
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254 HrSToiRB m> Port-roiax.
» tra pas de refufer a de'pauvres filles » accablees d'affliiSfcions & de miferes , w qui vous le demandent dans une » neceffite fi preftante. Il etoit aife a M. de Paris de levee
les difficulties des religieufes de P. R. , en repondant nettement a la demande qu'elles lui faifoient de leur expliquer ee qu'il entendoit par les termes d'ao quiefcement & de foumiffion. Quand meme elles auroient eu tort, n'etoit- ce pas a un pafteur, qui eft redevable a tous , a les fatisfaire I II le pouvoit par un feul mot , & il refufa de le dire; il fe contenta d'ecrire le 31 de- cembre une lettre afTez courte , dans laquelle il leur marqua qu'il vouloic bien pour leur derniere fatisfaction cou- eher fis penfe&s par eerie fur ce fujet ; mais il leur demanda, un peu de terns pour cela , a caufe qu'il etoit accable d'affaires, & qu'il ne vouloit rien leur prefenttr qu'il ne I'eui au moins digffi autant qu'il en etoit capable. |
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II, P AR T I E. Llv. IF. £ff
111 u, iMWMgp^wwwwi——
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LIVRE QUATRIEME.
1_/'A n n i e 1665 , dans laquelle 1665.
nous entrons ne fut pas moins orageu- ,, l% .
le que les precedentes, cc les religieu- &,rentimem
fes de P. R. ne furent pas moins per- *• teiigieu-
/-/ - 1 / • 1 r • r, , fes de P. R. iccutees. Maistous les traitemens qu el-
les efTu'ierent ne fervirent qu'a. faire
eclater la force de la grace de Jefus-
Chrift dans ces vafes d'election. Les
epreuves a&uelles ne les abattoienc
point, & la vue de celles auxquelles
elles devoient s'attendre , bien loin
de les allarmer > leur donnoit une nou-
velle confiance. La foi dont elles vi-
voienr leur faifoit envifager comme
plus heureufe l'annee ou elles auroient
plus a fouffrir. » Si nous parlons hu-
»> mainement, die une de ces faintes
» fiiles , ecrivant a la mere Prieure des
» champs, a qui elle fouhaite une bon-
» ne & heureufe annee (1) , nous di-
n rons que nous ne fommes pas en etat
" d'en attendre une de cette forte ,
» puifque celle-ci fera, felon toutes les
»> apparences , celle de notre deftruc-
» tion & de notre difperfion. Mais fi
(1) Rel. in-4. ReiKtil de leltw, &e. p. li«V
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15 ^ HHloiiU de Pnr-tLbi'MLi
" nous parlons felon les fencimens qil£
» la foi doit nous dormer , nous l'ap- « pellerons de ce nom, ( c'eft-a-dire »j lieureufe ) puifqu'elle veut que nous »> prenions cette deftruction &c ce mal- »' heurapparentpour Ie plus" grand effet » dela mifericorde &du dellein qu'il » a de nous garder une maifon fainte » & eternelle dans le Ciel, en nous » rendant etrangeres dans ce monde , » & nous faifant forcir de la notre , « afin peut-etre que nous ne voi'ons » pas la corruption & Ie relachemenc » qui doit fuccedet au bien & a la vertu »» qui a ete jufqu'a prefent & qui nous » devroit etre fans comparaifon plus „ fenfible que la mine temporelle de » notre maifon, qui ne nous empe- » chera pas de fauver notre ame & d'u- i, ne maniere allurement plus fure > » au lieu que nous la perderions, R m nous preferions la confervation de » la maifon a l'obligation que nous » avons de ne rien faire contre notre »> confcience & de nous expofer a. tout » plutotqned'ymanquer».- Ainfipar- loit la fceur Elizabeth Agnes, qui etoit de la maifon de Paris. • Cette maifon avoit encore plus de
mauvais traitemensa elTui'er que celle des champs, par les vifites de M. de |
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II. Par.tie. Ltv. IF. 257
Paris 8c de fon fubdelegue le fameux
M. Chamillard. Le Prelat y vint le 3 Janvier & vie la fceur Louife Eugenie , avec M. fon pere , qui avoit deman- ds a voir fa fille : M. de Paris ai'ant demande a la religieufe quelle etoit fa derniere refoltition , elle lui repon- dit qu'elle pouvoit l'afturer etant de- vant Dieu , que s'il lui commandoic de fe jetter dans le feu, elle choifiroit de s'y jetter plutot que de figner (1). Voila qui eft etrange , dit le Prelat: » Oui, Monfeigneur, repliqua lare- » ligieufe, fi vous vouliez me faire « mettre dans un cachot les pies 8c » mains lies , 8c que vous me vouluf- » fiez quitter de la fignature , je vous » obeirois de tout mon cceur ». M. de Perefixe au lieu d'admirer la foi de cette vierge chretienne, dit que cela etoit ipouvantabh, qu'llfalloit"qu'il y eut da demon a cela , & il ajouta : Ok Hen , ma fxur , vous ne faurie£ Jigner : nous avons commence , nous acheverons. Les religieufes de Paris voiant que
M. de Perefixe ne leur faifoit aucune reponfe a. la requete qu'elles lui avoienc prefenteelezS decembrepour fejoia- |
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(KH: Ibid p. 118.
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l$S HlSTOIRE DE PoRT-Ro'lAl.
dre a leurs foeurs des champs 8c Im
demander, qu'il voulut bien declarer fl par la fignature du formulaire qu'il exigeoit d'elles , il entendoit exiger la creance du fait de Janfenius; & fe voiant de plus menacees d'exil & de difperiion , elles donnerent une procu- ration, pour appeller en leur nom com- me d'abus de routes les violences'qu'on leur faifoit fourfrir, 8c du deni de juf- tice qu'elles eprouvoient de la part de M. l'Archeveque. Rien n'eft plus edifiant que les dif-
pofitions & les fentimens que les reli- gieufes de P. R. faifoient paroitre au milieu de ces epreuves. Elles etoient contentes , tranquilles 8c temoignoient une extreme horreur de routes les pro- positions d'accommodement : elles etoient attachees a. leur vocation 8c connoiflbient tout le prix d'etre reli- gieufes de P. R. 8c d'etre dans les foufFrances. On voir tous ces fentimens exprimes avec une force 8c une efFu- fion de cceur admirables dans les difFe- rentes lettres qu'elles ecrivirent pen- dant leur captivite ( 3 ). » Je me trou- » ve, dit la fceur Jeanne Radegonde, » dans la plus grande paix 8c tran- »> quil lite que jepuifTe fouhaiter* ... <}) Ibid. p. ti?«
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it. P'ARTIE. Uv. IV. 159 ______
a Qu'y a-t-il de meilleur que cette in- "TtftfjT
» certitude ou nous fommes , croi'ant
» tous les matins lorfqu'on fort de fa
» chambre , qu'on n'y rentrera pas.
y> II n'y a rien , ce me femble de plus
» capable de nous detacher de tout ,
» que cet etat; mais c'eft lorfqu'on
» le confidere ferieufement devanc
» Dieu.....Je me fouviendrai
» que c'eft a vous apres Dieu a qui j'ai
» l'obligation d'etre religieufe , & re- » ligieufe de P. R-, qui eft unequa- » lite que j'eftime telle, que je ne » trouve rien au monde qui merite » d'y etre compare. » Tout ce qu'on faifoit pour tourmen- £•
ter ces famtes fines ne lervoit qu ales ai- fermir dans l'amour de la verite (4). » M. de Paris , dit la foeur Elifabeth- » de Ste. Agnes nepouvoit pas mieux » faire pour fortifier les perfonnes, » & pour rendre incapables desfcru- » pules que Ton pourroit avoir de » lui defobeir 5 car fa conduite parle » quand on ne fauroit pas autre cho- » fe. » Elles avoient un attachement fi fincere & fi ferme pour la verite , que toute propofition d'accommode- ment les allarmoit •, elles les redou- toient commt ta chofe du monde /« (4) Rel. in-4. ««»«/ it hunt, 6cc. p. 114* j
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z6o HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.*
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1665. plus dangereufe (5). » Je ne puis m'em-
» pccher de craindre, dit a ce fujet la.
» Prieure de P. R. des Champs que,
» ( les perfonnes qui ont la bonte
»» d'agir pour nous en ces occafions )
w n'aient une companion un j>eu trop
» humaine de ce que nous fouffrons ,
» qui les porte a ecouter quelque pro-
» pofirion de relachement, qui fera
» allurement notre veritable mine*
w Au nom de Dieu, Monfieur, dites
» bien a nos amis que nous les fup-
» plions de ne fe point engager a nous
» rien faire faire au dela de ce que
» nous avons deja fait. «
tth Cette digne fuperieure parloit ainii
l«°rcdou-el" * l'occafion d'une propofition qui avoit
toiemiespro- ete faite par M. de Meaux , d'aiTem-
commo^aC"bIer les frpcneures des deuxmaifons,
awot. afin qu'elles deliberafTent enfemble
pour prendre de concert quelques
moiens de fatisfaire M. de Paris , 8c
d'eviter par-la la ruine de leurs mai-
maifons. Get accommodement devoic
fe traiter dans lafemaine fainte ; mais
ce projet fe reduifita rien , & lame-
me 'fuperieure en ecrivit dans ces.
termes le lendemain de Paque> 6
avril. » Je loue Dieu de bon cceur de
■ ft) Relaf. de la vifire de M. de Perefixe i P. R. de*
pharops, p, 4s. col 1. Let du 1 avtil.- |
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II. P A R. T I B. LtV. IV. l6l
»> la rupture de l'accommodement qui
♦« m'avoir fait fi peur, & je vous w avoue que je ne me puis perfuader » que nous ayions jamais une paix Co- " lide par ces fortes de traites. » M. Arnauld lui meme en qui elles
avoient d'ailleurs une fi grande & fi jufte confiance , avec toute la force de fon raifonnement, ne reufliflbit pas toujours a leur perfuader ce qu'il fou- naitoit. Ce celebre do£teur, fenfible a 1'etat ou il les vo'ioit , aiant drefle fur la fin de cette annee une lettre , pour erre prefentee a M. l'Archeveque de la part des religieufes, pour leur fervir envers lui d'uri temoignage clair & fincere de leur difpofition a l'egard de la fignature qu'il exigeoit d'elles; cette lettre ne fut pas du gout de rou- tes les religieufes. Une entr'autres 1* ■trouva trop foible, & ecrivant a ua ami du monaftere, pour lui propofer fes difficultes fur la lettre que M. Ar~ nauld avoit dreffee, elle marquoit fans facon, qu'on devoit regarder la figna- ture avec reftri&ion?, telle qu'on la. leur propofoit, commt de petites reve- rences au menfonge. M. Arnauld aiant eu communication de cette lettre, lui ecrivit auffitot a elle meme, avec une Jbpnte, une modeftie &i une humility |
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Q
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iSz Histoire dp. Port- roiai.
admirables. Il lui fait voir que ces fi-
gnatures avec reftri6tion , qu'elle re- garcle comme de petites reverences au menfonge , bien loin d'etre ce qu'elie penfe , font au contraire avantageufes a l'Eglife , parcequ'elles font des te- moignages en faveur de la grace ef- ficace & de l'innocence de Janfenius; etant certain &c notoire que tous ceux qui fignent avec reftriction , font des defenfeurs des verites de la grace & per- fuades de l'innocence de l'Eveque d'Y- pres. « On doit done, dit-il (6) , re- » garder ces fignatures , comme de » petites reverences , que 1 on rait par » charite & par condefcendance a des » fuperieurs qui abufent de leur pou- » voir •, ce qui eft permis &c jufte pour » eviter de plus grands inconvenients. » En un mot il n'eft permis en aucun « cas de confentir a. la calomnie, au » menfonge , a 1'etablhTement de l'er- » reur •, mais il eft permis en plufieurs » cas de fouffrir qu'on nous impofe un w joug injufte & deraifonnable, quand *> on ne lepeutrejetterqu'entroublant »> la paix , en ruinant & en decriant « un faint monaftere , & en excitant ?, un fcandale dans l'Eglife. » On voit le meme eloignement de
. {«) Am. Lett. 1^7. T. j. , p. j*?-5Jg..
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II. P A R T H. LlV. Jr. 16}
tous les accommodemens , qui ne fe " 1
font jamais gueres qu'aux depens de la verite, dans les differences lettres qu'ecrivirent ces faintes filles depuis I enlevement de leurs meres au mois d'aoiit 1664, jufqu'a leur retour au mois de juillet 166$. On ne leur faifoit jamais de propofitions de cette nature, qu'on ne les mic dans 1'allarme (7). •> II me femble quec'eft » faire contre nous , dit la fceur Eli- » fabeth Agnes , de deliberer & de " penfer a quelque chofe, apres avoir " dit tant de fois &c le difant encore p tous les jours, que nous ne fommes » plus en etat de faire quoi que ce » foit. - Je penfe, dit la meme reli- gieufe dans une autre letrre du u Janvier 1665 ,» que Ton trouverabon » que nous en demeurions-la, 8c que » nous ne parlementions point avec » nos ennemis. Pour moj je vous pi' avoue qu'il m'eft impoflible de me » rendre a quoi que ce foit. Un bref » de Rome ne me donne que plus ft d'horreur de la fignature, & je n'en »» fuis troublee que par l'apprehenfion w que j'ai de me voir reduite aux ,, memes peines que j'ai eues du terns „ de nos meres fur ces projets de fir (6) R.el ifl-4. p. fiSp
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Z<?4 HlSTOIRK DE PoRT-Ro'lAl.'
(j 6 5, » gnature 3 & fur celle que 1'on fit >» alors. Tout ce qui eft arrive depuis » n'a ete bon qu'a me fortifier davan- » tage la dedans , 8c a m'eloigner de » plus en plus de ces propofitions qui v me mettent dans des angoifles epou- » vantables •, a quoi je vous fupplie » tres humblement que Ton ait egard, w 8c que Ton ait la bonte de voir s'il » ne nous eft pas plus avantageux m de demeurer dans l'etat ou nous t» fommes, 8c dans les fentimens « que nous avons temoignes tant de » de fois , qui eft de n'ecouter aucune » propofition qu'apres le retour de t> nos meres. Nous fommes fans chef, »» par confequent incapables d'agir de « nous memes. La maniere dont on » nous a traitees , nous a rendu cette « affaire encore plus fufpe&e, 8c il » faudroit renoncer a J. C. pour » croire qu'elle peut proceder de fon » efprit, & il ne faut au contraire a> qu'avoir un peu de raifou , pour » voir qu'elle n'eft conduite que par » l'intrigue 8c par l'efprit du dia- » ble. (8). » Que je fuis affligee , dit la meme
» religieufe, de voir que Ton re- f> commence toujours a parler d'ac^- i%) Ibid. p. i^o.
»» cornrnodement,
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H. Part ie. L'v. IK 265
*» commodement. J'aipeurde tout___
» au nora de Dieu que Ton ne nous
*> engage a rien , & que Ton eloigne » je vous prie tous nos amis le plus v qu'on pourra de toutes les propofi- » tions d'accommodement, qui nous u troublent plus qu'on ne peut pen- *> fer (9). II faudroittranfcrire toutes ces lettres
pour faire voir les difpofitions ad- mirablesque Dieu mettoit dans le cceur de ces faintes lilies, au milieu des tourmens que l'inhumanite des hom- mes leur faifoit fouflfrir. On y voit la foi vive des premiers martyrs, leur conftance inebranlable , leur detache- ruent de tout ce qui n'elt pas Dieu, Jeur confiance en la grace de Jefus- Chrift de qui feul elles attendoienc la force neceffaire pour fe foutenic dans de G. terribles epreuves (10). » L'etat ou nous fommes , & les cho- « fes dont on nous menace font n* ter- u ribles , dit la foeur Marguerite The- » cle, que fi l'on ne regardoit Jems- » Chrift , &c Jefus-Chrift attache a la » Croix, on y fuccomberoit ». Les (9) Voiezp. \66. col. i. lettre de la mere Agnes
la lettre de la fbeur Fran- centre les accommode-
^oife..-. Voi'ez danslarel. mens,
de la fccur Genevieve de (10) Re!. in-4. Sennit
4'Incarnation , p. 50. la He lettres, &c. p. n».
Tome F. M
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l66 HlSTOIRE M PoRT-Ro'lAt,.
nSde, menaces que Ton faifoit pour lors aux
religieufes de P. R., etoient de les difperfer & de les excommunier : car du refte , on ne pouvoit gueres ajou- ter a leurs fouffrances, finon de leur oter la vie •, & ence cas on auroit abre- ge leurs douleurs par des douleurs moins fenfibles ; & afTurement elles auroient eu plus d'obligation a ceux qui les auroient fait mourir qu'a ceux qui les faifoient vivre dans la lan- gueur. C'eft ce que dit la mere Gene- vieve de l'lncarnation a M. Cbamillard qui vint a P. R. de Paris le 29 Janvier 1665 , & demanda a. parler a toutes les fceurs en particulier , fous pretexte de la bulle qui devoir venir de Ro- me fii). iv. Ce do&eur dit a. la fceur Genevieve sntretien deqU»eiies devoient s'attendre a etreex-
Ja recur Gene- "1 . , .
witveavecM. communiees u elles perhltoient dans
Uwaiilard. feur refiftance ■: fur quoi la fceur Gene- vieve lui repondit que lui-meme lui avoit dit qu'il n'y avoit point de peche a refufer la fignature : elle lui repre- fenta qu'etant au rang des perfonnes Jaiques , comme il le difoit, on ren- doit leur condition pire que celle des fruitieres &c des vendeufes d'allumet- <n) Rel. de la fceur Genevieve, p. jj 8c futjr.
Hift. des petftc p. <to>. |
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II. Partie. Llv. IV. i6j-
-res a qui l'on ne parloit point de figna- ^^ lure : que ceux qui les prelloient de figner, fe mettoient peu en peine de caufer des fcrupules & des peines de <onfcience qui tenoient du defefpoir , pourvii qu'ils citorquaflent une figna- ture a de pauvres filles, qui apres cela pleuroient jour 8c nuir & etoient dans Tin trouble & un accablement d'efprit incroiable : elle lui dit encore que la conduite que Ton tenoit fur elles etoit. fi peu chretienne & fi contraire a celle que Jeius-Chrift & les Apotres avoient tenue fur les fideles, qu'il ne falloit que cela pour les inftruire &c leur faire voir de quel cote etoit la juftice -, que fi elles n'aimoient pas leur vocation, on les expoferoit a avoir du regret de s'ctre engagees au fervice de Dieu, en les tourmentant pour une bagatelle ; que la pofterite feroic etonnee en apprenant que le Pape , les Eveques , le Roi & toutes les Puiflan- ces de la terre s'etoient unies pour confpirer enfemble a. la ruine d'un mo- naftere , & pour extorquer a force de tourmens une fignature de pauvres re- ligieufes ignorantes qui avoient fait profeffion de vivre dans la fimplicite & de ne prendre jamais aucune part i ce qui fe pafie dans le monde , fur un Mij
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2<>S HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt,"
1(j(jr. fujet qui ne les regardoit point, ail*'
quel elles n'entendoient rien & qui n'a-» voit nulle utilite raifonnable. v-, , La meme foeur Genevieve , apres ttat de !a . , , , r .1
maii'on de p. avoir pane de ion entretien du 29 jan-
«-• dej?ans. vier avec M, Chamillatd, fait enfuite k defcription de l'etat dans lequel etoit alors reduite la maifon (12). » En » ce t ems-la , dit-elle , nous croyions » notre fortie coute afTurce 8c nous at- " tendions de jour en jour celui de w notre enlevement, ce qui nous obli- 3' geoit a. nous tenir toujours pretes s> pour partir quand on nous auroit » prononce notre fentence. Nous m nous difions le dernier adieu tou-r « tes les fois que nous nous rencon- » trions dans le monaftere , &c nous v ne pendens plus qu'a une feparation « general e pour le refte de notre vie. " II y a plufieurs de nos foeurs qui » m'ont parle de leurs peines d'efprit » fur le fujet de cette divifion , qui m feroient faigner le coeur , fi nous w les pouvions faire fa voir. Pour moi » je fentois tres vivement les mien- » nes , & je juge des autres par moi- » meme , de voir une maifon fi fain- » te ruinee pour le fpirituel & pour » le temporel; nous voir feparees de (11.J lliik. <ks pcrfec. p. +1I,
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II. P>RTIE. LlV. IV. X6$
» nos meres , & les unes des autres';
» chaeune a part prifonnieres dans une » maifon etrangere avec des perfonnes » qui ne nous regarderoient que com- » me des demons , privees des Sa- ra cremens, & a la more meme , avec " routes fortes d'infultes & dans le « dernier mepris •, accablees de re- - proches 8c de paroles faxheufes ; » dans le manquement de toutes les » chofes neeenaires a la vie, & fans » pouvoir efperer les confolarions " qu'on ne refufe pas meme aux plus » criminels & aux plus miferables »> dans un hopital ou fur on gibec « meme.' » II me fottvient que je me fuis>
» quelquefois trouve l'efprit fi rem- ■» pli de ces penfees , que ne facnant »> plus ce qui fe paflbit en moi, 8c »> l'inftincl;de la nature crierchant quel- « que foulagement dans la douleur qui » m'accabloit , je prononcois quel- » ques paroles fans attention, &quanA » je revenois- de cet afloupifTement , » je m'appercevois que je difois fou- »> vent en parlanr a notre mere Agries : » Ma chert mere , ou etes-vous ? ne vous n reverrai-je jamais ? & en difant cela m je revenois comme d'un profond **- fbmmeil; &ai'ant le cceur ferre, j^ M iij;
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IJO HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.~
!6(jt. » faifois deux ou trois grands foupirsr
» comme une perfonne qui etourre 8c « qui tache de fe foulager. Quand le » foir approchoit , nous reprenions « un peu de force dans la penfee que » nous pafferions encore au moins » cette unit dans notre monaftere •, 8c »» cette nuit qui enfermoit le refte de » nos efperances fe pallbit a. compter « le refte des heures dans l'appre- m henfion de la voir finir, 8c que le « point du jour fuivant ne fut celui »» de notre feparation. Mais quand le » jour commencoit a paroitre , tou- »> tes nos douleurs fe redoubloient 8c » nos efprits etoient dechires d'une » infinite de crainte. Nous apprehen- « dions autant ce qui arriveroit a nos >• fceurs que ce qui arriveroit a nous- » memes........Mais nous
» apprehendions notre feparation fur
» toutes chofes , parcequ'elle ne pou- » voit fe faire fans une extreme vio- »» lence , a caufe de 1'union que Dieu \ s> avoit mife entre nous ; & la feule » penfee de cette funefte divifion etoit
>y pour nous une fi etrange fouffrance , » que je ne la puis exprimer.....
» Dans I'attente de notre feparation ,
» etant ainfi accablees de toutes parts, « quand nous favions que M. l'Arche* |
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IT. Partie. Liv. IV. i-ji
>'»' veque etoit au parloir), car il ve-
» noit ordinairement quaere ou cinq *> fois par femaine en ce tems4a ) »> & que nous avions appris qu'il fe- » roir fortir des fceurs , il fe faifoic » un fi etrange renverfement dans les » corps & dans les efprits que je ne w le puis rapporter. Je peux dire en » verite avoir reiTenti dans ces ren- * contres des angoiflfes mortelles , qui » avoient quelque chofe de fembla- « ble a. celle des perfonnes que Voat » conduit aufupplice, &il eft certain « que la mort m'auroit ete un foula- » gement dans la douleur ou j'e- » tois ......... Voila comme » nous paffions les jours & les nuits
» chacune portant la croix &c des » croix affez pefantes; car quoique* » j'en aie beaucoup dit , j'en pour- » rois dire encore beaucoup davantage » & avec cela je n'en faurois exprimer » que la moindre partie , parcequ'il y » avoit une infinite de circonftances » qui etoient comme des fuites & des- » confequences attachces a notre cap- » tivite qui augmentoient beaucoup' » nos travaux & rendoient notre af- n- fli6tion tres difficile a fupporter (i 3)* (i;) VoTez dans le Ri- in-4. le dctail'qae fait une
|K«/ dee Leltrei, &c. Rel, religieufe de l'etat ou elb' M iv
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1.-JZ HlSTOIRE TfE PoRT-RdlAfl
j<56 5. Telle etoit la fituation des religieit*
vi. fes de P. R., qui prefente deux grands l^atlp^fion obJets * confiderer, pour parler cont- gencraie eft me faint Auguftin en faifant l'eloge lomfu. cj.un martyr } favoir la patience de ces faintes filles, & la cruaute de leurs perfecuteurs •, la premiere, afindel'i- miter,& lafeconde pour la detefter. Le delfein de la difperfion generate fut rompu au mois de Janvier ou de fe- vrier -, mais comme elles Tignoroient , elles demeurerent toujours dansl'etat violent dont nous venons de parler. On croit que ce qui fit manquer le pro- jet de la difperfion, ce furent les Eve- ques qui retirerent la parole qu'ils avoient donnee d'en recevoir dans leurs diocefes , & que les communautes memes ou l'on vouloit les transferer , s'y oppoferent. Les unes apprehen- dant ces faintes filles comme des de- |
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fut reduite pat la frai'eur a cieux, puifque la p£.
dont elle fill Faille en 33 m'tence eft (i generale , voiant M. de Paris , p. 3, que la nature ne trouve 151 , 8c p. 176. col. 1. 3) aucun moi'en de fe fa- la lettrede la foeur Gene- 3) tisfaire en quoi que ce ■vieve. 33 La Communaure 33 foit. 11 faut benirDieu 33 eft dans uae iangueur 33 de tout , & le prier qui fait pitie— Toute la 33 qu'il nous foutienne par 33 jeunetle eft ruinee , 6c 33 fa grace.... Tout eft en. i3 elle n'aura jamais de 33 paix &c dans une gran- 33 fame. Dieu le voit. En 33 dre fatisfaction de loufg 33 verite, nous fommes 3J frit. » dans tin terns bien ptc- |
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It. Par tie. Liv. IV. 27?
ftions •, les autres craignant qu'on ne
les foupconnat d'etre dans leurs fen- timens, & que cela ne leur attirat la haine des Puiffances de la tene. Il y eut des communautes eloisnees de plus de cent lieues de Paris, qui ecrivi- rent pour prier qu'on ne leur en en- voi'at point & qu'elles ne les recevroient pas. Ces difKcultes ai'ant empcche le projet de la difperiion , on en forma un autre, qui etoit de les mettre tou- tes dans line maifon qu'on devoit pren- dre dans le fauxbourg faint Marceau, 011 elles auroient ete fans eglife, fans ■ cloitre & fans aucune forme de reli- gion. Ce projet n'avoit ete forme que pour epargner a eelles quiavoientfigne,, &: en particulier a la fceur Flavie , la peine qu'elles fe faifoient de voir re- venir leurs fceurs fideles a Dieu, parce- que leur vue feule les auroit tourmen- t£es , felon l'aveu que les impies font dans l'Ecriture, que la vue du jufte leur eft dure ; durus eft nobis etiam ad ■ videndum. Cette maifon devoit etre choifie proche le monaftere , pour la. commodite des dyfcoles , qui leur aur roient envoi'e les chofes neceflaires a la vie. C'eft ce que la fceur Elizabeth des Anges dit a la fceur Marguerite de fain- ge-Thecle-, comme l'aiant appris de Mr.
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J74 HlSTOIRR DE PoRT-RoVat..
i66<, M. l'Archeveque lui-meme. Ce pro-
jet eutle meme fort que le premier , c'eft-a-dire qu'il n'eut pas lieu, & les religieufes qui ignoroient que celui de la difperfion generate fiit rompu , at- tendoient de jour en jour le moment de leur enlevement (14). » Nous at- » tendons tous les momens du jour , » dit la foeur Marguerite de fainte The- «' cle dans une letcre , M. de Paris, qui » doit venir arme de foudres & d'e- » clairs pour nous accabler. Dieuvoit — tout cela ; fa fainte volonte foit fai- » te. Pourvu que nous demeurions » fermement attachees a lui &a far » fainte verite, je crois que nous n'a- " vons rien a craindre, & que s'il per- " met qu'on nous accable en ce mon- » de, it nous delivrera plus heureu- » fement en l'autre. « vin: Gependantcettefameufebulle,qu"on tbx\e (ocma- attendoit de Rome & que M. Chamil-
!«>«• lard avoit annoncee aux religieufes, Convert! en 1 . • . / °
Ban*. le 29 Janvier , netoit pas encore ar-
rived. Et plut a Dieu qu'elle n'eut:
jamais palfe les Alpes 1 II s'etoit d'a- bord repandu en France un bruit que le Pape avoit ecrit un brefaux Eveques de ce roi'aume , par lequel il ordon- noit de contraindre tous les ecclefiaf- <J4) Rel. in-4. Keitnil de pints . &c.p. no. |
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IT. Parti?. Llv. IV. 275
tlques & les Eveques memes, fous TggTT'
peine de fufpenfion & d'excommuni-
eation , de foufcrire le formulaire-
Mais les partifans de la fignature , &
en particulier M. de Perefixe, ne ju-
geant pas qu'un bref eut aflezde force
pour obliger , fous de fi grande peine ,
de figner certe fonnule , lis prierent le
Pape Alexandre VII de convertir fon
bref en conftitution.
Le bruit qui avoit couru touchant vim ,,
1 r 1 i, / -x 1 -NT- M. Nicole'
ee bret , engagea lauteur ( M. Ni-donne la cin-
cole ) qui avoit deja public quatre let-qu'<™e I""*6
* ,, / 1 ' ■ L -1 x imaginaitc*-
tres , appellees les imaginaires , a en
publierune cinquieme furl'excommu-
nication-, dans laquelle il prouve par lesperes & paries theologiens: 1 °. Que rexcommunicationinjulteneniiit point a celui qui la fouffre avec humilite , &c qu'elle ne le fepare point interieure- ment de l'Eglife. z°. Qu'on peut de- meurer tres intimement uni a l'Eglife,. quoiqu'on en foit fepare exteneure- ment par une excommunication in- jufte. 50. Que c'eft une efpece de mar- tyre tres agreable a Dieu de fouflrrir cette ieparation avec patience , humi- lite, conftance & charite. 40. Qu'on ne doit rien farre contre la loi de Di eii ni contre fa confcience, pas meme- une faure venielle, pour eviter d'etre: M r'f
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IjS HfSTOlRfc DE PoRT-RoVll.'
1^777" excommunie. D'oii Ton inferoit que '#
Pape ni les Eveques n'aiant aucun droit d'exiger la fignarure des fairs conteftes, la crainte de l'excommunication ne devoir porter, ni determiner perfonne a figner. G'etoit principalement poiir les religieufes de P. R. que cetre ler- tre etoic ecrite; •& la foeur Elizabeth Agnes (15), apres avoir dir, qu'iln'y a Hen de plus convaincant & de plus capable de. confoUr & de-fortifier dans Ietat prefen t , que la let ere fur I'ev* communication, prie laperfbnne a qui elle ecrit, d'en faire des -remetcimens pour elles- Elle aiTure dans fa lertre que jamais les foeurs n'onr ere plus fermes & plus difpofees a porter i'excommu-t nication comme le refte (16).. ix. La mere Prieure des champs ecrivic ?t.J-a m"e line tres belle lettre a. la communaute.
p. r. des de Paris fur le meme fujet, e'eft-a-dire.
champs ecrit fur 1'excommunicarion donr on di-^
ime leitre fur •-. . , . r
I'txcommu- ioir que le nouveau brer menacoit
weapon. ceux. qui refuferoient de figner : elle. leur dir queries doivent fermer leurs cceurs a toutes les craintes qui ne peu-: vent que les affoiblir , pour ne crain- dre que d'offenfer Dieu & de lui de- (1?) Ibid. p. iij, col, Iesdifpolkionsdcsre^igieu-i
a- fes par rapporc X ce bref
(jf) Voicz le Retueil de 8c i rexco'mmunication ,
liiirti, dansjes id, ill-4. p. u», it j , !*+,.
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XL Pa-xtre Lh.'lV. vjf
■plaire •, qu'elles ne doivent pas crain-
dre une excommunication , dont on les frappe parcequ'elles ne veulent pas trahir leur confcience ; que les hom- mes n'ont point le pouvoir de les ik,- parer de la charite de Jefus-Chrift; que perfonne ne pent condamner ceux que Dieu juftifie, felon la parole de faint Paid, que les hommes ne peuvent fermer la porte du Ciel a ceux a qui Dieu l'ouvre, Elle les ratTure contre une maxime capable de les affoiblir , 6c qu'elle appelle une tentation tres dangereufe, qui eft de croire que ,. ?uoiqu une excommunication dont on
eroit frappe flit injufte , elle pent retomberfurd'autresfautesqu'onauroie commifes (17). Lesreligieufes de P. Ri de Paris firent reponfe a la mere Prieu^ re des champs &c luitemoignerent leuu reconnoiftance des avis falutaires qu'el-* le avoir eu la bonte de leur donner. • Elles lui difent que M. Chamillard a voulu les effrai'er par ce bref, qui de- voit etre fuivi d'une excommunica- tion ipfo facto, mais que perfonne1 d'elles, excepte la fceur Catherine de faint Paul qui s'eft laiffee abbatre, nV; cte afFoiblie & ebranlee par les me- naces d'etre privees de la MelTe, de- (1,7] Rel. in-^., HecHiil </f let/ret, p. i j« k fuilV-
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£78 HlSTOIRF DE PoR.T-R01*At.
*vJ{jj"J l'Office public , des Sacremens a h>
mortj 8c de lafepultureecclefiaftique. Elles lui marquent qu'elles font encore trente-neuf dans la maifon , fi parfai- tement unies par les liens d'une il ve- ritable paix & par une fi fainte affec- tion pour la verite, quil femble que plus l'iniquite eft abondante , plus leur charitc redouble & s'accroit. Xi M. de Perefixe fe perfuadant qu'il M. de pe- reduiroit plus aifement ceux qui refu-
te RoiCTdee foient de figner, filePape authorifoit mandec au [e mandement qu'il avoit fait, ilfe ti- Pape une Bui- 1 s 1 n /-• t 1 •
ie. gut 5 "it le P. Gerberon avec les prin-
cipaux frondeurs de lajignature , pour
faire croire au Roi que les reftes de l'herefie Janfenienne ne pouvoientetre; exurpes , fi le Pape n'appuioit pofiti* vement & exprelfement de fon auto- rife la foufcription du formulaire ; & ils engagerent fa Majefte a en ecrirev aRome. Seconds- £n confequence le Roi donna ordre xandrevn. ^ f°n Ambaftadeur de demander en
fon nom a fa Saintete, qu'elle ordon- nat a tous les ecclefiaftiques de figner le formulaire qui avoit ete dreffe par les Evcques de France. Le Pape Ale- vandre Vllaccorda volontiers ce qu'on lui demandoit, fit drefier un formu- laire- different en quelque chofe.de ce« |
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H. Parti r. Llv. IV. tyj-
lui du clerge , & donna le 15 fevrier" une Bulle terrible contre le monftre imaginaire dw Janfenifme ; & afin qu'on en effacat jufqu'aux moindres- traces,il ordonna que tous les eccle- fiaftiques, meme les religieufes, & juf- qu'aux Maitres d'ecole iigneroient le fonnulaire fuivant, qu'il avoit infere dans fa Bulle. » Je, fouffigne, me fou- » mets a la constitution apoftolique » d'Innocent X, Souverain Pontife ,-. » donnee le 31 jour de mai 1653 , jj tk a celle d'Alexandre VII, fon fuc- » cefTeur,donnee le 16 Odfcobre 165 6, " & rejette & condamne fincerement " les V propofitions extraires du livre » de Cornelius Janfenius intitule Au- " guftinus, dans le propre fens du h meme auteur, comma le fiege apof- " tolique les a condamnees par les » memes eonftitntions , je le jure ain- » fi. Ainii Dieu me foit en aide , & » fes faints Evangiles. » Quel eft le chretien qui ne fremitfeen voi'ant un tel ferment, pour affurer un fait aufll inutile 1 Pour exiger un tel ferment, il faut 1 ° ou que le Pape fe foit cru in- v faillible dans la decifion de ces fortes de faits , ce qu'on peut regardercom- me une nouvelle herefie inventee par les. Jefuices. a9 ou qu'U fe foit hit |
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Z$0' HiSTOlltE DE PoRT-ROlSit?'
"' 1(j£. fe perfuader que le fait de JanfeniuJ etoit infeparable du droit, ce qui eft 1'extravagance d'un homme qui a re- nonce a l'ufage de la raifon : 30 ou qu'on lui ait flit croire • que ce fait ne pent fouftrir aucune difticulte , ce qui eft une infigne fauflete. 40 ou qu'il ait eu deffein de faire faire un parjure a tous les Archeveques, Eve- ques , Theologiens , &c., ce qu'on ne peut croire du Pape. "Sa. Avant que cette funefte Bulle pa- •ar^TTa' rut en France > on donna au public la
pbiogie dcs feconde partie de l'apologie des re- ptKange ligieufes de P. R., dont nous avons conduite de donne un precis ci - deflus dans les j^.e Perefi" reflexions que nous avons faites fur la conduite des religieufes. Quelle conduite que celle de M.
TArcheveque de Paris a l'egard de deux faints monafteres? Un feul trait en va demontrer l'injuftice. Ces pau- vres filles perfecutees lui avoient a- drefle jufqu'a deux requeues , pour le conjurer de leur declarer authenti- quement, s'il demandoit ou ne de- mandoit pas la creance interieure du fait: il ne repond point a la queftion, & ecrit le 31 decembre 1664, a la mere Prieure des champs, qu'il a be»- jtbin de tems pour reppndre a ces xe>. |
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1 ------------------------------------------------------------------------------J-
II. Par tie. liv. TV. 181
squetes. Trois mois fe paffent fans I(j(j<,"~
que les religieufes perfecutees, privees des Sacremens & traitees cotnme des criminelles , recoivent de reponfe , c'eft-d-dire, fans qu'on piaffe deter- miner leur precendu crime, ni leur dire de quoi elles font coupables, & fi elles font obligees de faire quelque ehofe de plus que ce qu'elles avoienc fait par leur fignature du 4 juillet 1664. Cependant on ruinoit par pro- vifion leurs maifons, on exer$oit des cruaures inouies contre des religieufes d'une piete exemplaire, faufacher- cher a loifir le pretexe dont on pour- roit colorer de fi etranges injustices: enfin au bout de trois mois, M. de Paris fit 011 fit faire une reponfe qu'il envoi'a fans etre ecrite de fa main , ni meme fignee de lui. Peut-etre fe menageoit it par-la une voie pour dc- fkvouer une piece fi peu digne d'un Archeveque (18). '< Apres que vous avez fait toutes xit.
krir n > " ' Reponfe ex
s refiitances qu on a vues pour n o- M- je Paris 1
»» beir pas a notre mandement, vous la tequecedw
xa • ri 1 '/• religieufes de
»» vous etes avifees de nous prelenter1)g °R. 4^
»• une requete, qui nous fomm-e de champsv t$ declarer juridiquement quel defaut » nous trouvons a la fignature qu^. £iB), Hill, des perfec. i pact. p. w , u».
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i'8'l HrSTOIRE DE PbRT-ROlAt;
" vous nous aver prefentee, & d'ex-
» pliquer par un acte public & au- » thentique & d'une maniere precife » claire & proportionnee a votre ef- » prit , ce qu'il faut entendre par » ces mots, d'acquiefcement , de {ou- » miffion , d'obeiflance & autres fem- »> blables. »> Ce procede veritablement eft
»> fort nouveau & tout-a-fait inoui » dans l'Eglife : on ne peut pas dire » qu'il ne foit tr&s peu refpeclueux a. » l'endroit de vos pafteurs, & fort » contraire a l'humilite & a. la modef- » tie dont les religieufes font ptofef- »> fion. Neanmoins > afin qu'il ne vous y refte plus aucun fubterfuge, ni l'om- ». bre feulement d'un obftacle auquel » vous puiffiez vous arreter , nous » voulons bien , quoique fans aucune » obligation de juftice ni de necef- » fire , mais par le feul motif de 1* >» charite d'un pere qui relache quel- » quefois de fon autorite, pour com- »» patir a la foiblelfe de fes enfans ma- tt lades , nous voulons bien , dis-je,, » vous aider encore par cette repon- » fe a detacher le bandeau, que vous » avez pris tant de peine a vous met- -w tre fur les yeux. w C'eit une verite fondamentale du.
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II. P A Rt 11; Liv. IV. i%5
'»» chriftianifme que le faint fiege & »» les Eveques ont droit de juger de » la doctrine & de condamner les er- V reurs, & les auteurs, dans la bouche f» on dans les ecrits defquels elles fe *» trouvent. »> C'en eft auffi une autre bien eta-
»• blie par la pratique & par les exem- r> pies des Conciles les plus faints &C » les plus cecumeniques, que quand » ils ont condamne une propofition, » un auteur , un livre , ils ont droit » d'obliger de foufcrire a. cecte con- » damnation ; que c'eft etre defobeif- » fant & opiniatre de ne le pas faire , n & que routes les loix de l'Eglife » punififent la defobeiffance & 1'opi- » niatrete prefque auffi feverement »* que I'hcreiie.. » Or pour favoir quelle doit etre
» la fouuiiffion qu on doit avoir pour » ces fortes de jugemens de l'Eglife v »* il faut voir de quoi elle pent con- » noitre , & jufqu'ou s'etendfa jurif- »> diction en ces rencontres-la. On de- » meure d'accord qu'elle ne va point » jufqu'a definir quel eft lefentimenr ». interieur d'un auteur : Car en cela » elle pourroit fe tromper 84 lui en „ attribuer un autre que celui qu'il M a dans, l'efpriu Comrae ce point |
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£$4 HlSTOlRB DE PoB.r-S.OlAt.
»» n'eft pas neceflaire pour entreteni?
*» l'unite & la paix de l'Eglife, Sc » qu'il ne regarde par la religion en >» general ni l'inftrudtion des fideles, w Dieu ne s'eft point engage de lui » donner des lumieres pour penetrer » jufques-la. Mais d'autre pare, com- » me il eft neceflaire qii'on empeche w le fehifme & le fcandale, il faut » aufli demeurer d'accord qu'elle a » toutes les lumieres & toute la pui£> « fance dont il eft befoin pour cotr- »> noitre & pour condamner ce qu'il »> y a de dangereux & d'errone dans » les ecrits & dans les difcours dont »> elle juge; & il eft ejicore de fes » fon&ions de condamner les auteurs >» des erreurs qu'elle a reconnues ; u afin qu'etant notes ils ne puiflent pas » a l'avenir enfeigner de femblables « chofes , & qu'ils renoncent a cea » mauvais fentimens, s'ils les ontef- » fe&ivement dans l'ame _; ou s'ils ne m les ont pas tels comme ils paroiflent w dans leurs ecrits ; ils prennent le «> foin de les expliquer d'une maniere « plus orthodoxe. Mais il eft certain » que quand ils les auroient expli<- » quesdecette forte, & qu'ils leuf » auroient donne un fens favo- ft rabie, & qu'ils fe feroient pleinaa- |
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II. Partie Llv. yIV. 2S5
■*• ment juftifics de tout foupc/m ,
.» neanmoins Jeurs livres demeure- a> roient toujours condamnes avec v juftice ; parcequ'il y auroit toujours *» le meme inconvenient & le meme »» peril a les lire. » Or la deference & la foumiffiosi
" que l'Eglife demande , quand elle
« exige qu'on foufcrive au jugement
« qu'elle a donne cantre un auteur &
»> contre fes livres , confifte en ce que
» 1'on croie fincerement que cet auteur,
«> faifant abftra&ion s'il eft orthodoxe
» dans fon ame ou non , a donne jufte
*» fujetde le condamner, qu'ill'a ete
v jnftement &juridiquement, & que
" l'Eglife a vu & remarque dans ies
" ecrits les propofitions qu'elle y a
« condamnees; qu'elle ne s'eft point
t> trompee , parcequ'elle les y a vues
»> & qu'elles y font effectivement; fi
» bien qu'elles s'y prefentent a tous
," ceux qui les lifent fans preocupation
» & avecfoin , &c qui lesprennent fe-
w Ion leur fens naturel & felon lapre-
« miere& fimple notion queleurspa^
jj roles,commeelles font couchees,for-
j> ment dansl'entendementduledceur,
« 8c c'eft .cela qu'on appelle le fens de
•w l'auteur , parceque c'eft cekri que
3= por.tenr.fes ecrits , quand bien mem?
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2.8<S HlSTOIRE DE PoRT-ROlAI.
» il en auroit eu un different dans fore
» efprit lorfqu'il les compofoit. Main- » tenant pour appliquer ces verites a ce »qui eft porte par votre requete, » nous repondons au premier point « de ce que vous nous demandez, que « la fignature que vous avez offerte w ne fatisfait nullement a ce qu'on de- « fire de vous ,&ace que vous devez. « La premiere , parceque bien loin
" de marquer votre refpect & votre «> obeiflance , elle marque la bonne »• opinion que vous avez de vous me- *> mes & l'amour de vos propres fenti- ■m mens. Nous vous commandons de » foufcrire le fotmulaire , & vous le » voulez expliquer. Le pouvez-vous, »> fans preferer vos lumieres a celles « du faint Siege & des Prelats de l'E- » glife Gallicane , fans dire que vous » voiez plus clair qu'eux , & fans leuc oj reprocher tacitement qu'ils veulent « ufer de furprife & exiger des chofes >.> qu'on ne leur doit point , ou qu'ils ii font ignorants, & qu'ils ne favenc s> pas ce qu'ils demandent? » La feconde , parceque cette Agna-
il ture eft contraire a l'ufage & a la pra- »■> tique de l'Eglife, dans laquelle on ne » trouvera jamais que ceux qui ont fi- »>%m en pared cas 5 aienc figne aveg |
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II. Part ie. Llv. IK iSy
»* reftridtion ou avec explication, erant "\ t> une chofe tout-a-fait injurieufe a >»» l'Eglife. »La troifieme eft,parceque cette fbu£-
»' cription ainfi reftreinre & modified *> rendroit le jugement du Pape & des »> Eveques illufoire , a caufe qu'il fe- « roit impoffible de marquer fur quoi *■ tomberoit la condamnation , & que »» d'ailleurselle embrouilleroit la quefc *' tion , au lieu qu'il faut la trancher »» nettement afin de terminer ces lon- » gues conteftations, qui troublent les *> confciences des fideles depuis vingt « ans. « Au fecond point nous repon-
v dons , que par acquiefcement, de*- »> ference, foumiflion & autres termes, *> nous entendons {implement ce que " ces mots fignifient naturellement, »> & dans leur acception qui leur eft « propre, & que tout le monde com- w prend quand on les prononce. » Ainu nous vous demandons que
w fincerement & de bonne foi vous « croyiez , non point que M. d'Ypre »> ait etc dans l'erreur , non point qu'il »> ait voulu ni eu deflein d'en ecrire »» ni d'en enfeigner dans fon hvre , •» mais que foit par faute d'avoir fij if bien digerer ces marier.es fi difficil^s'„ |
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2.88 HlSTOIRE DE PoRT-HOlAti
» foit pour n'avoir pas ete alTez heu-J
ji reux de s'expliquer aulfi-bien qu'il » penfoit, il le trouve dans fon irvre » des erreurs contraires aux fentimens « de l'Eglife ,Sc qu'on en a extrait cinq «proportions qui font condamnees « dans le propre fens de fon ouvrage. » Nous ne vous demandons point *» que vous ayiez cette creance fur vos » propres lurnieres & fur une connoif- « fance evidente , parcequ'en effet » vous n'avez point lu ni du lire le » livre de Janfenius ; mais que vous » l'ayiez fur le rapport & fur la foi jj de vos fuperieurs qui font juges »> xompetens de ces -chofes-la, qui ont » xara&ere particulier pour examiner » routes fortes'de livres & d'ecrits, &C *> qui, au fujet du livre de Janfenius, » y ont procede felon toutes les formes » des jugemens ecclefiaftiques. Ce sj qui eft li conforme aux regies & a. » l'ufage de l'Eglife , que fi M. d'Ypre v revenoit au monde, &c qu'il vit le a faint Siege & les Eveques de l'Eglife j> Gallicane avoir condamnefon livre, u il avoueroit affurement que fa plume *> s'eft egaree •, & s'il ne pouvoit fup- m primer fon livre , il foufcriroit a fa » cpndainnation , comme en effet il y «j a foufcrit d'avance, puifqu'il a fou* v w mis
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II. P A R T I E. L'lW IV. i.tff
a* mis enrierement & fans aucur.e re- ,, —
« ferve fon ouvrage au faint Siege. Voila la reponfe de M. de Perenxe xm.
a la requete des religieufes de P. R. g^*^. des Champs. Falloit-il crois mois pour gicufes de p. toucher par icrit de telles penfees , & ^^fT les digerer ? Les religieufes fe crurent "fi«. obligees de lui ecrire pour Ten remer- cier , & lui faire connoitre les fenti- naens que cette reponfe avoir fait nat- tre en elles : ce qu'elles firent par la letrre fuivante dateedu 4avril 1665. » Monfeigneur, encore que nous
»» aVons trouve dans la reponfe qu'il *> vous a plu de faire a notre requete * w un grand nombre de chofes fort m eloignees de nos penfees & de l'idee » que nous avons prife de vos fenti- « mens fur la lettre que vous avea »» ecrite a M. l'Eveque d'Angers , nous »» nous croi'ons oSligees neanmoins »> de vous en remercier , & de v&us a> faire connoitre en meme tems les w fentimens qu'elle a excites en nous. » Nous ne craindrons pas , Mon-
» feigneur, de vous dire avec la con- » fiance que vous nous permettez , » que le premier mouvement que « nous avons reffenti , a ete un mou- M yement de joie de ce que Dieu nous ,. a fait la grace de ne figner point Tome K N |
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1()0 HlSTOIRE DE PORT-ROlAt,"
'TggT" » jufqu'a prefent; puifque i'explica-
» tion que vous donnez maintenant a
» la ngnatiire que vous demandez ,
» nous a fait connoitre que fi nous
?> l'avions faite dans la difpofition ou
» nous etions, nous n'aurions fait que
»> nous tromper nous-memes en trom-
•> pant l'Eglife •, que nous n'aurions
« point fait veritablement ce que vous
» nous demandez , &c que nous aurions
»> fait ce que vous ne nous demandez
» pas ; &c qu'ainfi nous nous fenons
» jouees d'une chofe auili fainte qu'eft
» une profeffion de foi & un ferment
» qu'on fait a la face de l'Eglife. Vous
m nous declarez , Monfeigneur , que
sj vous ne nous demandez pas que nous
t> croyions que M. d'Ypres ait ete dans
» l'erreur , ni qu'il ait voulu , ni ait
» eu deflein d'en enfeigner dans fon
» livre. Vous nous affiirez que la jurif-
» diction de l'Eglife ne va point juf-
» qu'a definir quel eft le fentiment
». interieur d'un auteur , qu'en cela
>» elle pourroit fe tromper & lui en
=r attribuer un autre que celui qu'il a
» dans l'efprit; que comme ce poinc
» n'eft pas neceflaire pour entrete-
» nir l'unite & la paix des fideles ,
j. Dieu ne s'eft point oblige de lui don-
» ner des lumieres pour penetier juf-.
» ques-la»
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II. Part ie. Llv. IK z9I
» Nous apprenons done , Monfei- —
i> gneur, par votre reponfe,qu'il eft in- * " jufte de demander aux rideles, £c »» particulierement a des religieufes , » qu'elles croient & foient perfuadees » que M. l'Eveque d'Ypres a eu dans » l'efprit les erreurs qu'on lui at- » tribue , & qu'il a eu intention de » les enfeigner; & que cette creance » feroit temeraire , puifque 1'Eglife » peut fe tromper en ce point. Ce- » pendant, Monfeigneur , il eft tres « veritable que e'eft en ce fens que » nous prenions les paroles des conf- » titutions , auxquelles on fe foumet » par le formulaire ■, & que nous etions »» perfuadees qu'elles fignirioient que » Janfenius avoit eu intention » d'enfeigner ces mauvais fens : 8c »> cette explication n'etoit pas hors » d'apparence , puifque la conftiru- » tion du Pape porte exprelTemenc » qu'il condamne les propofitions dans » le fens que Janfenius a eu intention » d'enfeigner , & que ces rnemes pa- » roles fe trouvent dans le nouveau » formulaire drelfe par le Pape. Il » eft fans doute qu'ecant perluadees »» comme nous etions , qu'on nous » demandoit cette creance , touchanc »» l'intention de l'auceur, nous avons N i)
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3-91 HlSTOJRB DE PoRT-R.OiA£.
» eu raifon de refufer de la promettrtf
» puifque vous nous declarez a prefenj » qu'il ferok injufte de nous la deman- » der , & que vous nous faites alTez j. connoitre que nous aurions ete te- » merairesde l'accorder. Nous avons f, done fujet, Monfeigneur , de benir ?» Dieu de ce qu'il nous a fait la grace » de lui etre alfez fidelles, pour refu- »> fer de faire une chofe , qui auroic »> ete certainernent injufte & contraire » a votre intention : car finous avions v figne, & que nous euifions voulu re- »» noncer a. routes nos Lumieres , il eft v certain que nous aurions figne en v cette vue , & dans le defiein de » rendre temoignage a l'Eglife que *i nous etions perluadees que M, v d'Ypres avoit eu dans l'efprit ces v erreuis , & qu'il ayoit eu intention v de les e.nfeigner; & comme ce re- w moignage eft injufte & terneraire , v felon la declaration que vous nous » en avez faite , nous aurions rendu » un temoignage injufte & cemeraire v devant 1'Eglife. « Nous ne ferions pas moins eloi«.
v gnees de votre intention , Monfei- » gneur , fi nous euflions voulu ecou- v ter d'autres perfonnes » qui ngtu$ w youloient perfuader de fener, fanj |
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II. Parti i. Liv. IV. 195
ir» croite en aucune forte que les erreurs " condamnees fuffent dans le livre de »» Janfenius , & qui nous afluroienc » que notre fignature ne feroit point » un terhoignage de creance , mais « feulement de refpect, 8c qui nous *» difoient que c'etoit la votre opinion. « Car puifqu'il paroit maintenant que " vous nous demandez une forte de » creance , fi nous avions figne fui- « vant les inftru&ions de ces perfon- » nes j notre fignature auroit encore 5> ete une pure illufion, qui n'auroit » pu que vous offenfer en offenfanc »» la verite fouveraine , qui nous de- *> fend de tromper en aucune forte *» ceux qui nous tiennent fa place fur »» la terre. » Ainfi, Monfeigneur, ce nous eft
» une grande confolation de voir par w votre reponfe que nous avons eu » raifon de croire, que ce confeil qu'ils » nous donnoient, etoit eloigne des ?> regies de la fincerite chretienne , & m de n'avoir pas cru legerement que » votre intention fut de nous obliger n a prendre les paroles de la figna- »> ture en un fens fi eloigne de leur ve- i> ritable fignihcation. » Que pouvions-nous done faire ,'
jp- Monfeigneur , de plus legitime dans Niii
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294 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt^
1(j(jr » l'agiration que ces difrerentes pen-
» fees produifoient neceflairement » dans notre efprit , que de nous a- » drefler a vdus-meme , pour vous » demander la nature de ['obligation » que vous nous vouliez impofer , »» puifqu'il paroit par l'evenement que » n nous euflions voulu la deviner " au hazard & nous priver par une « faufle humilite de leclaircifrement » que vous nous avez donne , nous w nous ferions entierement egarees , ?> nous n'aurions fait que nous eloi- » gner de vos veritables intentions en « pretendant nous y conformer? « Et c'eft ce qui nous fait efperer
m de votre equite, Monfeigneur, que " quelque jugement que vous portiez »> de la conduite que nous tiendions w a l'avenir, vous jugerez au moins m que nous n'en avons pu tenir une - autre que celle que nous avons te- » nue jufqu'ici; que dans la difpofi- » tion ou nous etions & dans le fens |
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e nous donnions a la fignature 5c
lon la maniere dont on I'inter- |
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« pretoit, la refinance que nous y avons
■» apportee etoit jufte & neceflaire j » 8c que l'obeiflance que nous y au- a>' rions rendue, auroit ete fauiTe, tram- s' peufe &c indigne de religieufes con-; |
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if. Partie. tiv. IK 19$
*> facrees a Dieu , puifque nous au- 1665,.
« rions fans douce fuivi l'une de ces « opinions que vous rejettez par l'e- « clairciffement qu'il vous a plu. de »» nous donner. •» Ainfi , Monfeigneuf , eomme k
»» defenfe que vous nous avez faite de a participer aux Sacremens , n'eft pas »» rondee furnos fauces futures, mais " fur nos fauces paflees, nous avons - cerce confiance que vous aurez la
v bonce de la lever , en reconnoif- « fane par cecte declaracion que nous » vous faifons de notre fentiment,que » nous ne pouvions pas agir autremenc » felon les penfees que nous avions » & qui n'etoient pas fans beaucoup » de rondement. » Quant a la voie que vous nous
» propofez maincenant pour figner , » en nous declarant le fens que vous » avez intention d'enfermer fous la fi- » gnature , parceque notre propre ex- « perience nous a fait voir combien »> ll eft facile de fe tromper, croiant » bien entendre le fens des fuperieurs » fur des matieres fi embrouillees » m nous fupplions tres humblement » votre Grandeur de trouver bon que - nous lui reprefentions de quelle forte
w nous l'avons compris, & de nous N iv
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1<)6 HlSTOlRE DE PoRT-ROlAr;
» redrefTer iinous l'avons mal conv
» pris. « Nous avons comptis,Monfeigneu»,
« par votre reponfe , que vous nous » y enfeigniez quel'Eglife fe pouvoit » tromper en definiflant qu'un auteur m a eu un tel fens , ou une telle er- « reur dans l'efpric, & qu'il aic eu in- » tendon de l'enfeigner ; 8c que Dieu » ne s'eft point engage de lui don- s' ner des luinieres pour penetrer cela; » & qu'ainli il feroit injufte d'exiger » cette creance des fideles; ma is que »» quand il s'agit de favoir quel eft le » lens du livre d'un auteur, & fi des » erreurs y font effe&ivement conte- »> nues, elle ne fe peut tromper en ce » point, c'eft-a-dire qu'elle eft infail- « lible; que Dieu s'eft oblige de lui »» donner route la lumiere necelTaire » pour penetrer ce fens ; qu'ain/i nous ♦» devons croire fincerement que la con- f damnation de ce livre eft jufte 8C - que 1'Eglife y a vu & remarque les. » propositions qu'elle condamne , » qu'elle ne s'eft point trompee en m cela, qu'il faut croire que ces er- » reurs y font effectivement & qu'elles « fe prefentent a tous ceux qui les li- » fent fans preoccupation & avec foin. v Et ainfi , Monfeigneur, en ap« |
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If. Par.tie. Liv. IV. i^j
b> pliquant cette maxime generale an " fujet dont il s'agit, il nous a fem- »» blequevousexigiezde nouslacrean- » ce , non que Janfenius ait eu Verita- s' blemenr dans fon efprit les erreurs n qu'on lui attribue , mais que ces er- » rents fe trouvent efFectivementdans » fon livre; que l'Eglife n'a pu. fe trom- « per en ee point, c'eft-a-dire qu'elle >» eft infaillible dans l'intelligence du " fens deslivresnouveaux,&queDieu » s'eft oblige de lui donner des lumie- » res neceffaires pour decouvrir ces » fortes de verites de fait. » Voila, Monfeigneur , Tidee de
« vos fentimens, que nous avons pri- » fe dans votre reponfe. Nous vous- » fupplions tres humblement de 1& » corrigerau eas qu'elle rut defectueu- » fe. Nous jngeons tres bien que, fup- » pofe que cela foit veritable , il n'y a »» plus de difficulte a la fignature. Car » s'il eft vrai que le Pape foit infail- « lible dans l'intelligence du fens des w livres, 8c que Dieu fe foit oblige 7} de lui donner cette lumiere pour le » penetrer , il eft indubitable que nous ?> devons croire que les erreurs des V » Propofitions font effectivement dans *> le livre de Janfenius, & que fi nous ?» k devons croire, nous ne devons Nt
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2p 8 HlSTOIRE M PoRT-ROlAr;
» point faire difficulte de I'attefter.
» Toute la difficulte qui nous ref-
» te , confifte done uniquement fur 3> cette infaillibilite du Pape & de l'E- « glife dans l'intelligence des livres , » que vous etabliffez , Monfeigneur , « par votre reponfe, comme l'unique » fondement de cette creance que vous « exigez; & comme vous avez la bon- » tc de vouloir bien foufFrir que nous » vous propofions nos doutes, nous ne « craindrons pas de reconnoitre de- " vant vous, que jufqu'ici nous avons » ete dans un fentiment contraire. » Nous avions cru , Monfeigneur ,. « qu'encore que l'Eglife fut infailli- » ble dans les dogmes & dans la con- » damnation des erreurs, parcequ'elle » s'y conduifoit par la lumiere de l'E- » criture & de la Tradition dont « elle eft depofitaire, elle ne l'etoit » pas neanmoins dans les jugemens » qu'elle fait, qu'une telle erreur eft » contenue dans un tel livre, parce- » qu'elle n'a point recu cette verite » de la Tradition ni de la revelation M de Dieu ; & qu'ainfi elle fe pouvoit y tromper dans l'intelligence des li- » vres nouveaux , 6c leur attribuer des ■» fens dirTerens du veritable que des « perfonnes non prevenues ou plus |
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if. Pa r. t r e. Llv. IV. 19j
w eclairees trouvent dans ce livre ; que
w cela n'empechoit pas que l'Eglife
» n'eut jurifdi&ion pour juger & des
n perfonnes & des livres ; mais que
" comme elle n'en jugeoit pas infail*
» liblemenc, elle n'impofoit pas la
» neceffice de croire ce qu'elle en ju-
»» ge, comme on n'impofe pas la ne-
» ceffite de croire que la lettre d'Ho-
»» norius eft remplie de Pherefie des
» Monothelites , ou les ecrits de Theo-
» doret de celle deNeftorius ; qu'ainfi
« il etoit bien neceffaire de condatn-
» ner avec l'Eglife le fens des Propofi-
» tions que le Pape declare etre de
» Janfenius , mais qu'il n'etoit pas
n necelTaire de croire que ces fens riif-
» fent effectivement clans Janfenius.
» Nous etions, Monfeigneur , d'au-
» tant plus confirmees dans cette idee ,
» que nous voyions que de grands
» Eveques avancent certe maxime ,
» que l'Eglife n'eft pas infaillible dans
m Pintelligence du fens des ecrits,com-
» me etanr gencralement recue par
» tous les theologiens catholiques, 8c
» qu'ils affurent que Popinion con-
» traire n'a jamais ece foutenue avant
» les dernieres dix annees. Car c'eft
» ainfi que M. l'Eveque de Vence en,
» parle dans fon hiftoire fur Pannee
N vj
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3 00 HlSTbmE DE PoRT-ROlAt;
» de Jefus-Chrift 5 5 3, N. 1 % ; 011 if
« fait voir que les Papes & lesCon- « ciles fe peuvent tromper dans les »> queftions de fait, foit que ces fairs » regardent les perfonnes , foit qu'ils » regardent leurs ecrits; & que c'eft » ce qui avoit etc cru univerfellemenc » dans toutes les ecoles catholiques, » avant que quelques theologiens de " ce tems l'euftent revoque en doute. .» Vous favez auili, Monfeigneur ,
» que M. l'Eveque d'Angers en parle » de la meme forte dans la reponfe »» qu'il a faite a votre lettre ; & qu'il 3> croit cette doctrine fi indubitable , " qu'il eft perfuade que c'eft auffi vo- « tre fentiment & qu'il s'efforce de le " prouver par vos propres termes. » Nous ne pouvons, Monfeigneur ,.
« nous etonner affez de cette diverfitc » de fentimens que nous voi'ons en- » tre les Eveques. Ceux que nous vous » avons allegues ne parlent pas de leut » opinion comme d'une chofe dou- « teufe , &c ils pretendent que c'eft la » doctrine de FEglife ; & ce qui eft » plus etrange, c'eft que ce ne fono » pas feulement ceux qui ont de l'eloir. »» gnement du formulaire , qui par- » lent de cette forte , mais ceux mc- »* mes qui le favorifent. & nous yea* |
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IT. Par.tie. Llv. If. jdT
J» lent perfuader de figner ; ainfi que « vous pouvez voir ,. Monfeigneur , » dans un ecrit compofe , a ce qu'orr » nous a die, par un des grands de- » fenfeurs du formulaire r & que nous » avons cru devoir envoi'er a votre w Grandeur, arin qu'elle juge d'une « part, que ce que nous lui expofons , »» n'eft pas fonde fur des difcours en » l'air , & qu'elle voie de l'autre les » raifons qui nous font douter de la » T«rite de cette doctrine , qui font » les memes que celles de cet ecrit. " II eft certain ,. Monfeigneur, que
» dans les cliofes qui regardent ro- » beiflance, nous ne devons ecouter » que vous , puifqu'il n'y a que vous " a qui nous foions affujetties par >• 1'ordre de Dieu ; mais quand il s'a.- » git de doclrine, comma nous n'en » devons point avoir de particuliere, » l'autorite de tous les Eveques nous w eft egalement considerable. Ainfi » vous ne trouverez fans doute pas « oxanpe que nous hefitions fur cette » doclnnede 1'infailiibilite de l'Egli- » fe dans l'lntelligence des livres , « puifque nous la trouvons ii fore » conteftee, & que des lors qu'une n doctrine eft conteftee dans l'Eglife » & qu'elle n'eft pas etablie par ua |
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3T6I HlSTOlRE DE PoUT-Ro'lAtr
» confentement univerfel , elle n& » nous regarde plus , puifqu'il fuffit » a des filles de fe nourrir des veri- » tes certaines , & d'avoir une inten- « tion generale d'embrafTer les fenti- » mens de l'Eglife Catholique, fans » qu'elles foient obligees de prendre » part aux matieres conteftees. » C'eft, Monfeigneur, la difpofi-
» tion ou nous nous fommes trouvees » a Tegard de cette nouvelle quef- » tion •, Sc pour en fortir, il eft fans » doute befoin que nous ayions » d'autres lumieres que celles que » nous avons ; de forte que nous ne » pouvons faire autre chofe que » de nous eclaircir par tomes les. » voies que nous pourrons. Le delat » que le Pape donne par fa bulle nous » eft favorable pour cela ; mais ce* » pendant, comme vous voiez, Mon- »> feigneur, que nous ferions tres te- » meraires de figner fans etre perfua » dees de cette infaillibilite du Pap: » ou des Eveques dans l'intelligencc » des livres, fur laquelle vous eta » bliffez cette obligation , & fans la » quelle elle ne petit fubfifter , & qu » nous avons tres grand fujet de dou »» ter de cette maxime fur. l'autorit »»- de grands Eveques qui la come |
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IL PARTIE, Llv.lK }9?
»> tent, nous vous fupplions tres hum- » blement de confiderer que ce dou- " te ne peut fervir de raifon legitime » " pour nous priver des Sacremens , » puifqu'on n'en peut priver perfonne »» que pour une faute claire, mani- » refte &c indubitable , au lieu qu'il » n'y a point de faute a. douter d'une » dodfcrine que des Eveques fl cele- » bres reprefentent comme contraire » ait • confentement general de l'E- »» glife. •> C'eft , Monfeigneur , le princi-
» pal fujet de cette lettre , qui nous: ?> fervira de requete pour vous deman- » der ce retabliflement fi jufte , &C >? nous prendrons la liberte d'y ajou- » ter une priere qui nous paroit tres » legitime , qui eft , Monfeigneur, » qu'il nous foit permis de confulter » for les points de doctrine que vous y> nous propofez, des Theologiens St » des Eveques; afin que nous nous » puiffions aftiirer des fentimens de » i'Eglife fur tous ces points, puif- » qu'a moinsqu'ilsne foient certains, » indubitables. & univerfels , vous » favez que nous n'avons aucune » obligation de les recevoir, & qu'ils >» ne nous peuvent fervir de fonde- » ment fumfant pour faire le fer- |
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$&4 HfSTOlRE DE PdHT-ROirAt;
» ment contenu dans le formulaire*
" Nous ne croions pas , Monfei' » e;neur , qu'apres toutes ces chofes » n votre grandeur falTe difficulte de » nous accorder uue chofe II legiti- » me, quoique nous fouhaitions beau- »> coup davantage que vous vouluf- » fiez ufer en vers nous de la conduits » done on a ufe jufqu'a ce tems dans » l'Eglife envers toutes les perfonnes- »> a qui on n'a jamais demande de fi- » gnature , en fe contentant qu'elles » demeuraflent dans la fimplicite de »» la foi •, puifqu'il n'a que trop parti » que cette nouvelle pratique n'etoit »> capable que de produire des trou- » bles de confeience fans aucun fruit. » II eft fans doute , Monfeigneur, que »» vous pouvez nous decharger de cet- » te obligation , puifque perfonne ne » vous a pu forcer d'etablir cette loi « fi extraordinaire , &c que perfonne n ne |vous peut empecher d'en dif- » penfer ceux que vous voudrez ; & » nous votilons efperer que nous ob- m tiendrons enfin cette grace de vo- » tre bonte , lorfqn'elle aura mieux » connule fond de notre cceur, & »> l'eloignement que nous avons tou- » jours eude toutes ces queftionsou » on nous embairafle fans fujet: c « |
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II. Part IE. Llv.IV. 305
i* qui nous donnera mo'ien de vous 166%,
" temoigrier avec plus de joie , raais " non avec plus de verite que nous » faifons a prefent, que nous fom- » mes &c. (19). " Cette lettre fat fignee de toute la
communaute , & remife par Hilaire £ M. l'Archevecjue , qui en la recevant die avec chaleur ^ Cespauvres filles ft donnent hien de la peine, mats cela 11 e fervira dt rien : enfuite en a'iant Iu une page, il dit, elks rnenvoient des li- vres , ( heureux s'il en euc profite !) il ny a pas moyen de lire cela a prefent: je le lirai a. mon loifir, & puis jt feral ce que J'aurai a /aire (10). C'eft-la tout 1'efFet que produifit cette excel- lente lettre lur f'efprit de l'inrlexible Prelat. Dans l'intervalle des requetes des *&• ft
religieufes, & de la reponfe de M. quaaicm"" de Perefixe, on vit paroitre la troi- Pa"ie.edc ''^ fieme partie de l'apologie des religieu- teU«feofei <Jsr fes de P. R. achevee le io mars ; elle p-R> eft prefque toute compofee de trois lettres, enrichies d'excellentes notes. La premiere de ces lettres eft de M. d'Angers, ecrite le iz avrU 1-664 a (is) Hift. des perfec. x M. de Perefixe , p. 4&.»4
fart. p. X4 & fuiv. Hift. des perfec. p xy» (xa) Rcl. dsla. viGte Ae
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30<J HrSTOIRE DE PoRT-ROlAt:
M. de Perefixe , pour lui fake com-
prendre qu'il n'y a point de nouvelle lecle d heretiques en France, ni de raifon de tourmenter des vierges chre- tiennes pour une fignature qui ne les regarcloit point. La feconde lettre eft de M. de Paris a M. d'Angers , datee du 5 novembre ou il s'etforce en vain de realifer fa fe&e d'heretiques &c de juftifier fa conduite a l'egard des religieufes de P. R. La troifieme let- tre eft une replique de M. d'Angers y du7 Janvier 1665, oil il detruit tou- tes les raifons de M. de Perefixe :il y juft ifie les religieufes de P. R. par un raifonnement aufli fenfe que glorieux a ces faintes filles , que ce Prelat per- fecutoit fi cruellement: »on a fujet,dit m M.d'Angers,d'etre edifie de voir que n tout un monaftere fe voiant menace « des plus grandes extremites,n'ait pas » fait difficulte de s'y expofer plutot » que de faire une chofe 011 elles » croioient que la fincerite chretien- » ne etoit bfeffee. Cette difpofition n de preferer l'interet de fa confcience » a toute autre confideration , eft fi » grande en foi & fi rare en ce fiecle , » que quand elles auroient eu tort » dans le fond, on ne devroit pas laif- *» fer de dire, qu'il y auroit plus: de |
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II. Parti e. Llv. IV. 307
*»» bien que de mal dans leur action , «> comme faint Auguftin le dit de » faint Gyprien. » En verite , Monfeigneur , conti-
» nue M. d'Angers , le defaut qu'on » reproche a ces filies eft un defaut » dont peu de perfonnes font capa- « bles,& jamais celles qui n'ont qu'une » vertu commune n'y tomberont. On » fait ce que 1'interet &c la crainte peu- » vent aujourd'hui fur le commun » des chretiens ; 8c il n'y a rien de fi " extraordinaire , que de voir un© » maifon route entiere etre fi fort au- » deffus de ces deux mouvemens , »> auxquels la plupart du monde fe y laifle emporter. Ainfi il me femble, » Monfeigneur, que tout ce que pour- »» roit faire un Prelat equitable , quel- » que perfuade qu'il fut que les pro- » pofitions font dans Janfenius, fe- »» roit de louer & d'approuver la dif- » pofition de ces filies, que nulles rai- » fons humaines n'ont pu tant foit » peu ebranler , pour les porter a fai- »» re une chofe ou elles cro'ioient leur » confcience intereffee , &c de les »» tolerer dans leur fcrupule avec une » charire paternelle , bien loin de- 5) leur etre une occafion de mine &C t> de fcandale, en les voulant con^ |
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J©8 HlSTOIRE DePoRT-ROIAE."
» traindre a faire une chofe , qu'efle*
» nepourroient faire fans peche, dans » les difpoficions ou elles font. » La troifieme partie de l'apologie de
P. R. fut fuivie de pres de la quatrie- me, qui parut le z i d'avrii, &c qui conrient une ample & ' pleine refuta- tion de tout ee qui a ete avance , pour juftifier la fignature, par le pere Annas &c autres ccnvains de cette efpece. On fait connoitre dans la preface les ar- tifices dont les Jefuites fe fervent pour troubler l'Eglife & pour accabler ceux qui s'oppofent a leurs fentimens. On y rapporte comment ees Peres inven- terent 8c etablirent en Efpagne , ou leur pere Nitard etoit aulti puirTant que le P. Annat en France, une for- mule touchant la conception de Ix fainte Vierge, pour tourmenter les Dominiciins & leur faire interdire routes les chaires, s'ils ne reconnoif- foientpuhliquemental'entree de leurs fermons , que la Vierge a ete con^ue fans le peche originel. Un certain Defmarets de faint Sor-
lin entreprit de repondre auxquatre parties de l'apologie des religieufes; mais M. Nicole refuta dans huit let- tres, connues fousletitrede vifionnai- |:es, !a faulfe devotion, les menfon-* |
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II. P A R. T I B. LlV. IV. $00
ges & les calomnies de cet Ecrivain.
Quelqu'excellents que foient ce$
ecrits fans en faveur des religieufes de P. R., on pent dire que leur meil- leure apologie etoit leur.conduite fain- te & edifiante au milieu des mauvais traitemens qu'on leur faifoit fouffrir, 8c cette difpofition inebranlable de tout facrifier plutot que de Heifer la fincerite. Leur defenle &c leur reponfe a tout ce qu'on pouvoit leur obje&er etoit de dire qu'elles craignoient de bleller leur confcience &: d'offenfer Diey, qui defend de prendre fon non» &n vain & de juger temerairement de fon prochain ; qu'elles ne pouvoient pas affurer une chofe dont elles n'a- voient aucune connoiflance. Ces pauvres filles paflerent le care-
me de cette annee dans la douleur, en attendant tpujours quelque nouvelle affliction , parceque les menaces qu'on leur faifoit continuelletnent &c les avertilfemens qu'on leur donnpit, ne leur permettoient pas de refpirer. Sur la -fin du careme de cette annee, il y eat des propofitions d'accommode- rnent de faites: elles venolent de Mf de Meaux, qui auroit bien voulu trou- ver quelque expedient pour eviterl'en- fiere ruihe dela maifo.i ? 8c qui dan? |
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$10 HlSTOIRE DE PoRT-Ro'lAI..
- TT7", cette vue avoit propofe a M. de Paris
de faire affembier routes les fuperieu- res des deux maifons pour deliberer & avifer enfemble s'il n'y auroit pas quelque moi'en de le fatisfaire. xv. La mere de Ligny, Abbefle , qui ,,ProPo('tion etoit foeur de M. de Meaux , manda
daccommo- ,
.dement. cette nouvelle a la mere Prieure des
Prieure de"* Champs, ajoutant que M- de Paris ne R.des champs vouloit pas que la foeur Angelique de «tt.eaefiaiee.faint Jean fut fe pafl~emblee. La mere Prieure futfi allarmee de lapropofition,
qu'elle en ecrivit dans les termes les plus forts, le Jeudi faint z d'avril (n)-> & commen^a ainii fa lettre , Contritum eft cor meum in medio mei, contremuc- runt omnia o]Ja mea: - Permettez-moi, « dit-elle enfuite, de me fervir de ces »• paroles que nous avons chantees ce « matin, pour vous exprimer l'angoif- »i fe ou j'ai ete, depuis avoir re^u vo- « tre billet qui parle d'accommode- » ment. L'experience que j'ai des mau- « vaifes fuites qu'ont eues tous ceux » qu'on a rentes jufqu'a pre fent, me « rait redouter toutes ces propofitions w comme la chofe du monde la plus « dangereufe. Cen'eft pas quejen'aie » une entiere confiance aux perfonnes dO Rel. de la vifite de P. R. des Champs, p. 4«»
JHiildespeifee. p. tj.
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il. Par.tie. Liv. IV. jn
m qui ont la bonte d'agir pour nous ^771 ' « en ces occafions : je faisbien qu'elles » ont plus d'amour pour la verite u 8c plus de lumieres pour difcerner » ce qui pent la bleffer, que nous n'en *' pouvons avoir. Mais jene puis m'em- " pecher de craindre qu'ils n'aient une >» compaffion un peu trop humaine de » ce que nous fouffrons , qui les porte m a ecouter quelques propositions de » relachement, qui fera aflurement „ notre veritable ruine. Au nom » de Dieu, Monfieur, dites bien a t* nos amis , que nous les fupplions " de ne fe point engager a nous faire «. rien faire au-dela. de ce que nous » avons deja fait. Je fuis fortement » perfuadee que c'eft tout ce que nous » pouvons faire en confcience », Ainfi parloit cette digne Superieure. R^[-' ae
Ces fentimens ne lui etoient pas par- sacremem ticulier: c'etoient ceux de toutes les au- * p*i"? /***
r • r cl il r\ ■ aux rell8le"»- tres religieuies hdelles. Un peut voir ces res de p. &,
fentimens expnmes dans les lettres
qu'elles ecrivirent dans ce terns. Cet accommodement n'eut pas lieu, 8c la merePrieure fut ficharmee de cette rup- ture , qu'elle en ecrivit en ces termes le.lundi de Paque 6 d'ayril (i%) ; ,i Je loue Dieu de bon cceur de 1* fai) Hifl. 4espetfec. p. %jt
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J I Z HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt
» rupture de l'accommodement, qui
» m'avoit fait fi peur ; & je vous m avoue que je ne me puis perfuader >> que nous aions jamais une paix foli-, » de par ces fortes de traites (13). » La mere Abbefle n'avoit eu aucune
part dans cette propofition d'accom- modement, dont elle avoit feulement cru devoir donner avis a la mere Prieure des champs; 8c elle lui recri- vit qu'elle entroit entierement dans fes raifons & que fes fentimens etoient les jiens. C'eft la l'accommodement dont il eft parle dans le recueil des lettres io-4Q des religieufes de P. R. de Pa- ris , lequel fe devoir traiter avec M. de Paris dans la Semaine fainte, &c dont on avoit deja concu de n grandes efperances, qu'on fe promettoit que les religieufes communieroient a Pa- que (14) *, mais celafe reduifit a rien , & ces vierges chretiennes furent pri- vees , malgre les inftances reiterees qu'elles £rent aupres de M. l'Archeve- que , de la confolation de recevoir le corps de Jefus-Chrift dans un tems ou l'Eglife inyite tous les fideles a. le re^ (15) -Vote la Rel, in-4. ijj , col. i. 8<c.
de la vifite de P. R. des (14) Rel. de la viiite de
Cliaraps, pp. 49 , 50. le P. R. des Champs , p. 47.
JLciMd de kttrts 8cc. p. coj. ;.
cevoir ,
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IT. P A R T I E. L'lV. IV. 3 I J
Cevoir , 8c en fait meme un comman- \CGs-
dement. Cette privation leur fut tres fenfible & leur fit repandre beaucoup de larmes , furtout a la MefTe du jour de Paque; mais elle n'affoiblit per- fonne , 8c Dieu leur fit la grace de con- cevoir 8c meme d'eprouver, comme le dit la mere Prieure des Champs , ecrivanta M. de Sevigne (15), »qu'il »> a plufieurs voies pour fe communi- »» cjuer aux ames qui le cherchent, 8c » qui aiment mieux etre privees exte- « rieurement de fon corps,que d'obte- « nir un fi grand bien en faifant un » menfonge (16) ». Elles foufFrirent cette privation, quelque dure qu'elle fut pour elles, avec une parfaite (bu- rn iffion aux ordres de la providence , Sc dans une efperance tranquille qu'el- les ne feroient pastoujours privees de cet adorable Agneau , 8c que fi la du- rete des homines les en feparoit pen- dant la vie 8c meme a. la mort , ce fe- roit pour lesrendre plus veritablement les membres de celui qui avoir voulu ctre immole pour les faire entrer dans fa gloire. Les religieufes de P. R. eurent bien Lcsx^"gieu.
des combats a. efiuier par rapport a la fes efluient divers coni-
(15) Ibid, le navril. bassdelapatt (itf) HH1. des peifec. p. 17. col. 1. ■ des amis &
Tome V, O
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314 KlSTOIRE DE PoRT-ROlAl,
I(y<$c. communion pafcale , tant de la pare
is ennemisde leurs amis , que de celle de lews an fujctJeia j Ceux - ci cherchoient a les Communion ~ . ,
Pafcale. furprendre par malice, & ceux-la troni-
pes eux-memes , tachoient , fans le favoir , de les tromper. Madame de Liancourt alia deux fois a P. R. , pout leur temoigner fa tendre affection 8c fon extreme defir de cravailler de tour fon pouvoir a leur procurer la commu- nion pafcale : comme elle etoit bon- ne , elle jugeoit des autres par elle- meme , & portoit un jugement trop fa- vorable des deifeins de M. Chamillard, jufqu'a. croire qu'il etoit plein de cha- rite pour les religieufes de P. R., & qu'a la fignature pres, il leur etoit devoue entierement (17). Elle apporta aux religieufes de P. R., une lettre Four demander la communion a M.
Archeveque , ( c'eft la troifleme let- tre des religieufes de Paris fur le meme fujet ) ; & elle en avoit donne une copie ecrite de fa main a M. Chamil- lard (i 8). Ce negociateur faifoit audi de fon cote des otfres de fervice aux religieufes & de grandes promefles de s'emploier pour elles aupres de M. (17) Hid. desperfec. p. Genevieve , p. 4S. R»l.
411. col. 1. in-4. Rccneil de htlret &c, . (18) Rel, de la fceur p. iff, col. 1.
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II. Partie. Liv. IV. j15
I'Archeveque (19): mais elles n'etoient
pas fi faciles a furprendre que Madame de Liancourt. Auili ces filles qui fa- voient joindre la prudence du lerpent a la fimplicite de la colombe , deme- lerent toujours fes artifices,& eviterent les pieges qu'il leur tendoic. II auroic voulu les engager a ecrire a M. de Pa- ris , & a lui marquer qu'elles etoient dans la meme difpofition que lorlqu'on les avoir retablies dans la participation aux Saoremens ; mais elles rejetterenc unanimement cette propofition &: de- clarerenr avecbeaucoup de force, qu'el- les ne confenriroient jamais a. l'indif- ference : les unes ajoutoient qu'elles avoient eu trop de fcrupule par rap- f>ort a cetre indifference; d'autres qu'el-
es ne l'avoient jamais promife ; & rou- tes enfin, qu'elles n'y etoient point du tout; qu'elles vouloient parler fincere- rement, & qu'elles ne vouloient point acheter a ce prix la communion de Pa- que. Cependant elles fe refolurent a ecrire pour la demander , afin de ne pas paroitre indifferenres pour la com- munion de ce jour •, mais elles le firent de maniere que M. Chamillard n'en pouvoit prendre aucun avantage •, car on ne lui fit pas meme l'honneur de (ij>) Hilt, despeifec.p. 419,430.
o ii
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$%6 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt,.'
faire mention de lui : aufli ne voulut-'
il point fe charger de la porter, quoi- qu'il l'eut promis. M. du Sauflai le re- rufa egalement (jo). La participation des Sacremens in-
terdite a des ames fi pures rappelle na- turellement ce que dit faint Auguf- tin (31) : » que la providence divine » permet fouvent que des perfonnes » vertueufes foient chaffees dela com- « munion de l'Eglife, par des trou- » bles & des feditions que des gens v charnelsexcitentcontr'elles. Ce qui >» arrive, dit ce faint Do&eur, arm v qu'apres avoir fouffert avec une par » tience extraordinaire cette ignomi- » nie & cette injure, pour conferver v la paix de l'Eglife , fans youloir y m former Jquelque nouveau fch ifme ou v quelque nouvelle herefie, elles ap- m prennent a tout le monde par leur « exemple , combien nous devons fer- » vir Dieu avec une affection verita- ». ble & une charite fincere......
» Cgs perfonnes font couronnees en
?. fecret par le pere qui voit en fe- " ctet. Cela paroit rare , & cepen- v dant les exemples n'en manquenr p, point; & il y en a meme plus qu'on (50) Rel. in-4. Secueil (?i) Aug. de vera Re.
fee, p. 157. col. 1. lig. c, *._tt» lit |
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l<>6y
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II. P A R T I E. Liv. IV. J I 7
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jj ne fcautoit croire. Rarum hoc vi-
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i66$.
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» detur genus , & tamen exempla non
" defunt,' imb plus quatn credi potejl. La Reine-mere etant allee a P. R. le xvnr.
Samedi faint pour voir la mere Euge- . p{*Tcj"'.0«« me, dontelle railoitgrand cas&qu elle comreles re- regardoit comme une Sainte , la fceur ''S'™*" * Marguerite Angelique fe jetta a fes pies comme elle alloit fortir, & lui parla, en repandant beaucoup de lar- ines,du refus des Sacremens qu'on leur faifoit : ObeiJJe{ , repondit la Rei- ne, quoi des religieufes dejcbeiffantes a leur Archeveque J Cela fait horreuf. La mere Prieure des Champs ai'ant ap-- pris cet evenement, en temoigna ainfi ion fentiment dans une lettre du 11 avril 1665. » II me femble que dans m l'etat ou nous fommes , nous ne de- - vons rien craindre davantage que de » chercher des inventions &: des voies » humaines pour nous delivrer. Je ne » crois pas neanmoins que nos fours » qui ont parle a la Reine,aient gram- s' de confiance en elle -, & la joie qu'el- » les ont eue de fon rebut , fait bien » voir qu'elles ne lui ont parle, quo » parcequ'elles ont cru le devoir faire. » Maisil me femble que pour ne point »» nous afFoiblir dans la duree de la ,a p perfecution, qui pourra aller loin,
O iij
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3 18 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAl.
7777 » nous ne faurions trop craindre de
» chercher l'affiftance des perfonnes " du monde,qui ne nous peuvent qu'af- » foiblir & noas faire fortirinfenfible- « ment de la voie ou Dieu nous a en- " gagees. Je penfe que nous devons " prendre pour devife ces paroles da » pfeaume : Auxilium meum a Do- » mlno, tous les autres fecours nous » devant etre fufpedts (jz). xix. La. privation des Sacremens a. Pa- Mort de !a qUe ^toit p0Ur ces ^p0ufes de Jefus-
foeur Francoi- T, r. r feCUireciifz Chriit la peine la puis grande que les
les ui-fulwes. hommes pouvoienc leur faire foufFrir j cependantDieuquipermettoit cette in- juftice pourles eprouver,leurenvoi'aert- ■core dans le meme tems une affliction d'une autre eipece. Ce fut la mort de la fceur Francoife Claire, l'une des douze qui avoient ete enlevees le 16 aout de l'annee ptecedente ( 33 ). Lorfqu'elles apprirent fa maladie le 9 avril, elles furent penetrees de douleur , la vo'iant privee dans cet etat de l'unique con- folation des perfonnes malades. Alors fe croiant obligees de lui rendre dans cette rencontre les derniers temoigna- ges de leur charite & de leur union , Oi) Rel.de lavifite de fur cette mort, Rel. in-4.
P. R. des Champs, p. 48. p. 160. col. 1. p. iSi.^ (j j) Yoiez les letties col. 1,1. p. IS7. col, 1. |
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II. P A R T I E. L'lV. IV. 3 I jj
%lles ecrivirent a M. l'Archevcquepour
le conjurer d'avoir pitie de l'etat de leur foeur, & de lui accorder a la mort les Sacremens qu'il lui avoir refufes pendant la vie (54). La mort de la foeur Francoife de fainte Claire, ar- rived dans la femaine de Paque, fut pour les religieufes un furcroit d'af- fliction , & elles y furent d'autant plus fenfibles que leurs perlecuteurs en prirent avantage conrre elles , a caufe d'une miferable fignature qu'ils avoient extorquee de cette pauvre moribon- de (35). Celles qui avoient figne fai- foient elles memes fi peu de fond fur cette fignature qu'elle avoit refufce trois fois dans fa maladie, c'eft-a-di- te, rant qu'elle avoit eu fon bon fens, que la fameufe foeur Flavie dit a la foeur Anne Gertrude, qui lui en te- moignoit fa furprife , qu'elle ne re- viendroit point dans le monaftere fi elle recouvroitla fante, a moins qu'elle ne fit une nouvelle fignature ($6). Ce qui montre afiez que la pauvre fille |
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& de reflexions Hen foli-
des, a une religieufe de Paris , Hift. des perfec. ipart. p. zS. ()6) Rel. de la foeur
Genevieve d; l'lncarna- tion . p. 4f , col. 1. Hift. des perfec. p. 411. O iv
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(34) Hilt, des perfec. p.
4;z tk fuiv. (55) la mere Prieure
de P. R. des Champs ecri- vit fur la more & la figna- ture de la foeur Francoife de fainte Claire , une let- tie remplie d'infttuitions |
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j io Histoire df. Port-RoiAii
i<j(,e. ne favoit ce quelle faifoit lorfqu'on X&t
lui extorqua. xx. j^_ Chamillard en triomphoit nean- Vam tnom- . ... • r r if i i
The de m. moms ; ll la mit iur la tete dans la
chamillard cour jes rjrmlines pour la faire voir pour une u- i / « • r
gnature arra- comme un trophee , & en vint aul-
thee inns re- ^t£t app0l-ter la nouvelle aux dyfcoles ligieufe mo- i r '
libondc de P. R. Nous avons au refte une
relation concernant cette fignature , qui apprend ce qu'il en faut penfer au jufte. M. le Vicaire de faint Me- dard, etant entre dans la chambre de la malade , ( qui avoit declare prece- demmenr que s'il venoit pour la con- feirer , elle le recevroit avec joie •, jnais que fi c'etoit pour lui perfuader la fignature, elle le prioit de ne point entrer,) lui parla ences termes (37): " Je ne viens point ici ma bonne me- r» re, pour vous parler de formulaire » &c de mandement-,jene viens point » pour vous inquieter, mais pour » vous confoler; c'eft route la com- » million qu'on m'a donnee. On fe ■» contente feulement que vous te- » moigniez que vous etes fille de » 1'Eglife. Fille de l'Eglife,zcpondk 5. la malade 1 Monfieur , je fuis fille » de l'Eglife, &je le temoignerai de w tout mon cceur. He bien ma bonne (37) M. in-4. Rtmil de Ultra, p. i«j, |
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II. P A R T 1 E. LlV. IF. J1I
*> mere, on ne vous demande que la I(j
« foumiffion qu'une fille de l'Eglife " eft toujours obligee de rendre a l'E- » glife. On ne vous demande que " cela pour vous faire recevoir les » Saeremens •, je n'ai charge que de » cela, & le petit ecrit de M. l'Ar- }> cheveque , dont vous avez deja en- " tendu parler , ne demande que cet- • » te foumiifion & cet acquiefcemenc » que vous devez a vos fuperieurs. » Mais , Monfieur , dit elle, pour- *» rois-je le figner en confcience , 8c » voudriez vous en repondre devant » Dieu J Le Vicaire n'en fit aucune » difficulte ; 8c apres lui avoir donne " route forte d'afturance , il ajouta " qu'il etoit vrai qu'il y avoit quel- « que chofe d'obfcur a la fin & qui *» pouvoit pafler pour equivoque 5 » mais ce qu'elle avoir dira|M.de faint » Nicolas, ce qu'elle lui difoir, Sc » ce qu'elle avoit tant de fois temoi- » gne de fes fentimens a la Superieu- " re & a routes les religieufes qu'elle »« avoit vues, determinoit fi claire- m ment la fignature au bon fens, qu'il « feroit impoffible d'en dourer , &c » qu'elle auroit la confolation de ne » mourir pas fans Saeremens. Je vous j» prie done, Monfieur, lui dit elle,de O y
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3 21 HlSTOIRE DE PoRT-Ro'lAt.
I(5^. » temoigner bien la difpofition oil je
» fuis , & de la maniere que je figne j » ce qui lui aiant etc promis, elle » figna l'ecrit de M. de Paris & fe » confelTa. M. le Vicaire etant venu » voir la malade le dimanche , elle » le con jura encore de temoigner « bien dans quelles difpofitions & de » quelle maniere elle avoit figne ce «» petit ecrit de M. de Paris , Paflurant » que fi Dieu lui redonnoit la fante , " elle etoit dans la resolution encore n plus que jamais de ne pas figner le » formulaire ni le mandement de M. » de Paris. » II paroit par ce reck, que la victoke que M. Chamillard croioit avoir remportee fur cette pau- vre moribonde eft tres equivoque , & relfemble fort a ces vi&okes que les deux partis s'attribuent, & pour Ief- quelles on chante le Tc Deum de part & d'autre. xxi. Cette relation eft fake fur le re- Declaration c[t que m. ie vicaire de faint Me-
d i Vicaire i i • r • l • r
is. faint Me- dard avoit rait de toutes ces circonf-
•lard an fujet tances & de plufieurs autres a une per- rnre. e 8na fonne de fa connoifiTance , a qui il te- moigna qu'il etoit ravi de l'avoir vu, arm de l'afturer de la verite de tout ce qui s'etoit paflTe , & qu'il fe croioit oblige en conicience d'en parler aux |
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II. Partie. Liv. IK jij
gens de bien , regardant cela comme l'execution d'un teftament dont il au- roit ete charge, & que c'etoit effec- tivement l'execution de la derniere volonte de la defunte. On peut juger de ce que c'etoit que cette fignature de la fceur Franc,oife , par le ctifcours que ce Vicaire de faint Medard tint a la fceur Louife Fate dans la feconde vilite qu'il lui rendit. » Si vous faviez, » combien on m'a interroge fur cette » fignature , & en quelle maniere el- » le l'avoit fake , vous en feriez eton- » nee •, & je puis vous ailurer que » ce qu'elle a fait n'eft rien , & je « n'^urois qu'a faire voir une decla- » ration qui montre clairement la » nullite de ce qu'elle a fait; mais les » perfonnes qui ont travaille a votre >y perfection, & qui prennent inte- » ret a vos affaires, ne trouvent pas » a propos qu'elle patoiffe enco- » re (38). » La fceur Franc,oife de fainre Claire
mourut le 14 avril, fon corps fut ap- porte a P. R. de Paris •, les Urfulines avoient con$u une grande eftime pour les vertus de leur prifonniere , qui les avoient beaucoup edifiees,comme elles (}8J Rel. in-4. Xtctxil <tt lettres, &. p. 17?, col.
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324 HlSTOIRE DE PoRT-ROl'At.^
1(j,jf le temoignerent a Mademoifelle ds
Monglat, a qui elles dirent qu'elles n'avoient jamais vu une fi bonne re- ligieufe. xxn. La veille de la mort de cette fainte letueTelT-fiHe . les religieufes de P. R. de Pa-
]isieufes pout ris avoient eerie une cinquieme lettre co—toB a M. de Perefixe , pour lui demander Pifcale. la communion pafcale. » Vous nous » eftimeriez indignes, lui difoienc jj elles dans cette lettre du 1 3 avril, 5J de la grace que nous vous avons » demandee par piufieurs lettres , fi v nous ceflions de la demander juf- » qu'au dernier moment, puifque C9 » ne feroit pas temoigner un atTex » ardent defir de participer a la fain- 3) te Euchariftie dans ce faint tems de » Paque. Nous nous profternons » done encore » Monfeigneur, a vos w pieds, puifqu'il nous refte encore » un moment pour recevoir de votre » bonte paternelle l'accompliifement « de nos defirs. Nous croi'ons , Mon- " feigneur, que e'eft lale plus efficace » moi'en pour obtenirdeDieu les lu« " mieres qui nous font neceffaires pour » nous conduire felon les regies dan3 3» les affaires prefentes , & principa- j> lement a Pegard de la nouvelle bul- « le de nocre S, P, le Pape; & nou^ |
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I!,rPA&TlE. LtV. IV. }l$
m tacherons de les lui demander ,'
» comme nous avons toujours fait t " avec un entier renoncement a touts » attache humaine, & a toutes les pre- » venrions de I'efprit propre, en ne » confervant dans le fond de notre » caur quun defir Jincere de connoitre » & defuivre en toutes chofts fa divine » volonte. » M. ChamiUard a'iant vu eette lectre temoigna une joie extraor- dinaire , & dit que les religieufes fe feroient delivreesde biendespeines, fi elles avoient toujours parle de la forte. Il ajouta qu'il efperoit que M. l'Archeveque accorderoit les Sacre- mens dans les huit jours , & que pour lui il donneroit des confefTeurs qui ne parleroient point de fignature. Mais' M. Chamillard fentit bientot l'illu- fion qu'il s'etoit faite. Si les religieu- fes , par condefcendance pour desr amis j avoient emploi'e certains ter- mes qui fembloient les mener au but du Prelat; ces paroles qui y ctoient jointes, comme nous avons toujours fait , corrigeoient tout & montroient aflez qu'elles etoient toujours dans les- memes difpofitions. Auffi cette lettre n'eut pas plus d'effet que les prece- dences. M- de Perefixe fe contenca de |
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$l6 HlSTOIRE DE PoRT-R01A£.
" I<j<jc. dire, qu'il Vavoit trouvk un peu plus
ra'ifonnablt que Us autres. xxiii. M. Chamillardrevint le vendredi ? jproj^reje1" huit mai, & propofa un nouveau pro- iit jet , a 1'occanon de la nouvelle bulle d'Alexandre VII, mais les religieufes
craignant toujours la furprife, rejet- terent ce projet -, & pour fe debaraf- fer des importunites de ce negocia- teur, elles lui dirent qu'elles ecri- roient a M. de Paris. Comrae elles en avoient deja forme le deflein au fu- jet d'une de leurs fceurs qui etoit ma- lade , elles l'executerent le meme jour par une lettre, a. laquelle elles joigmrent un billet de la malade elle meme a M. l'Archeveque , par lequel elle le conjuroit d'avoir pitie de l'etat ou elle etoit reduite , & de ne pas lui re- fufer la grace qu'elle lui avoit deman- dee plufieurs fois avec fes fceurs (3 §). XXIV- ^a religieufe malade etoit la fceur Premier en-Fare , fille d'une eminente piete. Elle four" Louifeavoit deja vu dans fa maladie le Vi- de &ime Fa-caire de faint Medard , & elle eut un ic avec le Vi- • \ • t • t rr t
caire de faintentrecien avec uu *°Tt lntereilant Le
Medard. Vicaire lui ai'ant propofe le petit ecrit
de Monfieur de Paris , par lequel
il demandoit la foumiffion & \a-
quiefcement, la fceur Louife de fain-
(38) Hift. desperfec. p. 43S j4J« j 437-
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II. Partie. Liv. IV. 517
te Fare lui dit qu'elle avoit autant 166 $>
d'horreur de ces aquiefcemens que du formulaire meme (39). Apres quel- ques difcours fur ce fujet, le Vicaire lui dit qu'il n'etoit point venu pour getter fa confcience , ni pour lui don- ner des fcrupules , mais feulemenc pour s'acquiter des ordres de M.de Pa- ris : la religieufe lui repondit, qu'elle etoit dans un grand repos de confcien- ce fur l'article de la fign autre , & que c'etoit la feule crainte de Dieu , qui l'empcchoit de fatisfaire M. de Paris. Le Vicaire lui ai'ant demande , fi elle n'auroit pas de peine de mourir fans recevoir les Sacremens, elle lui re- pondit qu'elle fe croi'oit obligee de faire tout ce qui etoit en fon pouvoir pour les recevoir , mais que fi on les lui refufoit, elle mourroit en paix, ef- perant que Dieu qui voi'oit fon coeur & la volonte qu'elle avoit de les re- cevoir , auroit plus de mifericorde pour elle que les hommes : qu'il y avoit 8 mois qu'elle n'avoit ete a confef- fe , & qu'etant impoflible qu'elle ne fit beaucoup de fautes , elle avoit grand fujet de craindre les jugemens |
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(3?) Ibid. p. i<7 , col. 1.
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}l8 HlSTOIRE DE PORT-Rd'/At;
de Dieu , mais que fon efperance etanC
fondee fur la grace qu'il lui avoir fai- te de defirer d'etre fidelle a la verite jufqu'a la fin, elle efperoir que la verite la delivreroir (40). Le Vicaire approuva fes difpofirions , Sc l'exhor- ta a y perfeverer : apres quoi la fceur Louife Fare lui park ainii. » Je vous » fupplie, Monfieur , de confiderer » quelle punition on nous pourroic « faire davantage , quand nous au- " rions commis le plus grand crime » du monde. On nous empeche d'ap- » procher des Sacremens , & Ton » nous fepare les unes des autres •, or* » nous tient dans une captivite hor- " rible &c. •> II vautmieux , dit le Vi- caire, perdre cette maifon de la terre , que non pas celle du ciel. La religieufe lui repondit, que c'etoit la feule pen- fee delagloire erernellequi les avoir engagees a fouffrir routes les vexations & les afflictions qu'elles fouffroient depuis rant de terns; qu'aucun interec numain ne pouvoit leur faire fuppor- ter un etat fi penible , & qu'il n'y avoit que le feul interer de Dieu qui put les foutenir. Le Vicaire lui decla- (40) Rcl. du 1? avril, ibid. p. 1*7.
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II. P A R. T I fi. LlV. IP". $ Z?
ra, en lui demandant le fecret, que *"j
lorfque M. de Paris l'avoit fait venir, il lui avoit annonce qu'il etoit p'erfua- de qu'il n'y avoit que la confcience qui les retint, 8c qu'il n'y avoit point de mauvaife foi; fur quoi il avoit pris la liberte de lui reprefenter, qu'elles itoient plus dignes defa compjjfion & di fa mifericorde. La religieufe prenanc la parole , lui dit que le grand crime dont on les accufoit, etoit de dire qu'elles ne favoient pas /I cinq pro- pofitions font dans un livre ou 11 dies' n'y font pas , patcequ'elles avoienr peur de dire une chofe faude ; que pour ce crime, on les traitoit avec plus de rigueur qu'on ne traire ceux qui meurenr a la potence , puifqu'on- les prefle fouvent de fe confelfer, lorf-- qu'ils le refufent; au lieu qu'on leur refufe de fe confelTer, a elles qui de- mandent cette grace avec la derniere inftance. Cela eft dignt de pitie , dir le Vicaire, qui loua les difpofitions dans lefquelles la fceur Louife Fare' lui temoigna etre a l'egard de ceux qui les traitoient avec tant de durete. Il lui demanda enfuite pourquoi elle l'avoit demande ; a quoi elle repondit, que c'etoit parcequ'etant venu autrefois , i8c .que ne leur ai'ant point parle dǤ |
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3 3° HlSTOIRE DE PORT-ROIAL.
" j66 affaires du terns , elle avoit penfe pou~
voir s'adrefler a iui avec confiance. Il lui dit la - delfus qu'il fouhairtoit qu'on l'oubliat & qu'on ne penfac pas plus a. lui que s'il n'etoit pas au mon- de , que neanmoins il feroit toujours pret a leur rendre fervice. Apres cet entretien, la four Louife
Fare lui temoigna la peine qu'elle avoit des bruits qui couroient touchant la, four Franc^oife Claire , dont elle avoit vu le nom au bas du papier d'aquief- cement. LeVicairelui dit qu'il auroit fouhaite pouvoir dire comme la cha- fe s'etoit paffee, mais qu'il ne le pou- voit pas, parcequ'il y a tems de par- ler & de fe taire. La four Louife aiant infifte & Fai'ant prie de dire au moins quelques mots pour les tirec de peine touchant cette fignature ; il lui dit de fe tenir en repos de ce cote- la & de n'en avoir aucune inquietu- de : il ajouta que dans quelque tems il paroitroit quelque chofe qui eclair- ciroit route 1'arFaire; que cette mort pourroit etre utile a l'Eglife, qu'il ne pouvoit pas pour le prefent lui en dire davantage. ' xxv. La four Louife Fare s'etant trouvee kretCienndeelJa extl^mement mal (41) quelques jours
fjeur Louife
Ive avec le (4') R«s du 11 mai. XeeMtildc putts , &c, p»-
171 & Coir, r |
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II. Partie. Liv. IV. 3 j i
apres cet entretien , elle demanda M. —"TT le vicaire de faint Medard, auquel elle vicaire d declara qu'elle avoir un grand defir de Meiatd. recevoir les Sacremens , mais que com- me on ne les lui vouloit accorder qu'a une condition qui eroirconrre faconf- cience , elle etoit plus refolue que ja- mais de mourir dans routes fortes de privations plunk que de rrahir fa conf- erence ; qu'elle etoit perfuadee que ce que M. de Paris defiroit d'elle,etoic directement conrre les commandemens de Dieu; qu'elle etoit plus obligee d'obeir a Dieu qu'a un homme ; que , quoique M. l'Archeveque l'aflliratque s'il y avoir le moindre peche a faire dans ce qu'il exigeoir d'elle , il s'en chargeoir, cela ne la rafTuroir pas , par- ceque lorfqu'elle paroirroir devanc Dieu , ce Prelat ne la fuivroit pas; 8c que Dieu la jugeroit fur fes comman- demens & fur l'Evangile , fans avoir egard a la decharge qu'on lui offroir •> qu'elle avoir fait rour ce qui eroir en fon pouvoir pour obtenir les Sacre- mens , & que fi e'eroit un parti pris de les lui refufer , elle demeureroir en repos •, que les hommes pouvoienr Ten priver exrerieuremenr, mais qu'il n'e- toir pas en leur pouvoir d'arracker Pieu de fon cceur , ni de lui ravu; |
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J3* HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.
fon ro'iaume & fa grace ; qu'on les
empechoit d'appeller devant les tri- bunaux de la terre , mais qu'on ne pouvoit pas les empecher d'avoir re- cours a celui du ciel. A cette decla- ration de la religieufe , le vicaire repondit: » Que pour parler franche- " merit, fa depofuion etoit fort bonne y » qu'il n'y avoir rien a craindre , par- » ceque l'Eglife ne pent obliger a » croire les faits , c'eft pourquoi il » n'y avoit point de peche; que c'e- » toit meme un grand bien qu'il y en ». eut qui refiltauenr, afin qu'auxtems » a. venir on ne dit pas qu'en un tel » tems on s'etoit foumis a. la creance » des faits , & qu'un monaftere apres » avoir lo ng-tems refifte , s'etoit enfin » rendu, & avoit reconnu que c'e-* " toit une chofe jufte «, Enfuite le vi- caire ajouta , » Vous penferez peut- » etre que je fuis un homme bien la- » che d'avoir ligne ; mais je fuis bien » aife , ma fceur, de vous dire que je « n'ai figne que pour le droit,ai'ant tou- » jours ete ties perfuade parplufieurs m exemples de l'antiquite , que l'Eglife »n'etoit point infaillible dans les » faits «. M. le vicaire donna enfuite une explication a la religieufe fur xnielque chofe que M. Ch.amillai.-4, |
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Tl. Part ie. Liv. IF. 353
tivoit avance , comtne venant de lui j i66«. ce qui etoit faux , & ce qui lui donna occafion de dire , qu'il ne s'etonnoit pas qu'elles ne puifent mettre leur con fiance dans un tel homme. » Ma « fccur, lui dit-il enfuite, un avis que « j'aurois a vous donner, c'eft qu'en » ce tems-ci il faut etre tres circonf- » pecte & fort prudente , afin de ne » point donner prife fur vous. Votre « etat fait pitie ; mais voi'ez-vous , ma » fceur , vous n'avez pas encore refifte » jufqu'au fang «. Enfinen quittantla religieufe , qui le remercia de fa cha- rite j il lui dit qu'il prioit Dieu qu'il la maintint dans fes bonnes difpofi- tions. Nous ajouterons ici un billet de M. xxvr.
de fainte Marthe , qui fut envoie a Billet deM. „ 1 il- 1 r de Ste Mar-
Alet,avec la relation concemant iaiceur ,he fur la s.
Fare ; il eft interrefTant pour connoitre Louifc r arc,
cetteS" fille. » La fceur Fare, dit-il,eft
» une fille qui a toujours ete elev.ee dans
» la maifon ; ellepeut dire a la lettre :
,> Pater metis & mater mea denliquerunt
» me , Dominus auumfufcepit me. Son
» pere & fa mere ['oat abandonnej juf-
» qu'a ne la point reconnoitre pour
» leur fille •, ils Font fait nourrir loin
» de chez eux par des pai'fans •, & des
w cinq ou fix ans elle eft entree dans
|
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334 Histoire de Port-roYaI.'
„ la maifon , fans avoir jamais eu au- » cune nouvelle de fes parens, que m nous favons pourtanc erre des per- » fonnes d'honnete condition , alTez » riches & maries legitimement; » Cette fille eft tres fimple & aufli
» innocentedetoutpechemortel,qu'un ■ enfant d'un jour , autant que j'en.ai •• pu reconnoitre pendant fix ans que n je l'ai vue. Je puis dire tres afture- » ment qu'avant ces trois ou quatre „ dernieres annees , elle n'avoit ja- » mais oui parler des queftions da » terns. C'etoit la conduite que Ton » gardoit tres religieufement a l'e- » gard des enfans & des religieufes ; i> & quand on auroit voulu faire au- » trement, je puis dire qu'on n'auroit » pas choifi la fceur Fare pour lui par- s' ler de cesmatieres , parcequ'elle pa- .> roiflbit avoir fi peu d'ouverture d'ef- » prit, qu'on I'auroit fait inutilemenr. M La pauvre malade ne pent avoir que w vingt-deux ou vingt-trois ans , etant » toute la derniere profeffe de la mai- » fon. Cependant elle a fait paroitre » une paix, une force , une fagefle m tout-a-fait religieufe pendant fa ma- il ladie , & que nous avons d'autant » plus d'occafion d'attribuer tout a »> Dieu, que nous apprehendions que |
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II. PA8.TtB.IiV. IK jjj
»» fa foibleffe , jointe a fa maladie &
» a l'importunite des fccurs qui l'en- 3* vironnenc, & qui ne lui font que » dire qu'elle eft damnee , qu'elle eft « excommuniee , qu'elle eft hors de j» l'Eglife, ne la fit tomber dans une w difpofition toute contraire , ou au « moins ne la troublat ou impatientat » beaucoup •, mais Dieu fait ce qu'il => veuf, il choifit les foibles & confond «< les forts ; & il eft le foutien de ceux »> qui n'en ont aucun ni d'eux-memes , « ni d'aucune creature. ■> Ce nous eft une grande confab-
s' tion de voir par experience que dans » les combats, que Ton a pour Jefus- » Chrift , il n'eft pas befoin de grand ») efprit, de grande fcience , de vertu " extraordinaire. Les enfans, les igno- » rans & les perfonnes imparfaites » peuvent vaincre &c vainquent tou- » jours , quand celui qui les a engages M a combattre,combat pour eux & leur j> donne la vicfoire. Ce n'eft pas que » nous n'aions oceafion de craindre »j toujours , puifqu'iln'y a que laperfe-r » verance jufqu'a la fin qui puifle ache- „ ver notre ialut •, mais nous avons » auffi grand fujet d'efperer que Dieu „ qui a commence fon ceuvre, l'ache-. » vera. |
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J3<> HlSTOlRE D.E PoRT-Ro'lAU
!^(jc Dans la feconde vifite que M. le vi-
xxvii. caire de faint Medard rendit a la fceur yandre VII. M. l'Archeveque etoit que le P. Annat
France6 "* ^IU ^cu^olt toujours aux oreilles; que c'etoit une perfonne de cour qui vou- loit complaire a routes fortes de gensj qu'ainfi elles devoient fe preparer a. voir bientot un grand choc tomber fur leur maifon. Ce choc ne tarda pas > comme nous l'allons voir. La ;nouvelle bulle du Pape Alexandre VII, donnee le 15 fevrier, en fut l'occafion. Lorfqu'elle fut arrivee en France , le Roi donna, le 2. 5 avril, une declara- tion qu'il fit enregiftrer au Parlement ■en fa prefence le 29 du merne mois, par laquelle il enjoignoit a tous les Archeveques & Eveques du roiaume de figner & de faire figner le nouveau formulaire du Pape , par tous les ec- clefiaftiques fcculiers 8c reguliers , par les re.Ugieufes & par les maitres d'e- cole, faifant defenfes (quoique la bulle nela fit point) d'u/er d'aucune diflinc- tion , interpretation , ou rejiriciion. Il y eut un incident a l'occafion de la publication de cette bulle. Le Nonce j'a'iant fait imprimer , en prenant la qualite de. Nonce dans tout le roiaume , fox) ReL in-4. Recmil de/f/rw,8cc.p.i74.' cela
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II. P A R T I E. Liv. IV. J J 7
cela parut aux gens du Roiune entre- {<i<:t,*
prife contre l'autorite roi'ale ; en con- iequence , ils firent leur remontrance au Parlement, qui rendit deux arrets, l'un le 6 mai, l'autre le 28 juin. Le bulle d'Alexandre VII aiant ete xxvni.
envoi'ee a tous les Eveques de France, i^esr~oiva" avecles lettres patentesqui en ordon- differem- noient l'execution ; ils la rec,urent & ment' firent tous figner le formulaire , mais non de la meme maniere. Les uns fi- rent foufcrire le formulaire dans leur fynode , fans aucun mandement. D'au- tres firent des mandemens pour exiger la fignature pure &c fimple. Quelques- uns diftinguerent dans leurs mande- mens le faitd'avec le droit, & declare- rent qu'ils fe contentoient d'une defe- rence refpe£bueufe pour le fait. II y en eut aulli, qui fans fe declarer, permet- toient a ceux qui fignoient le formu- laire , d'y appofer cette declaration. Enfin , quelques Prelats , entr'autres» M. Felix Vialart, Eveque de Chalons, fans rien ecrire dans leurs mandemens, ni dans leurs proces-verbaux , firent une declaration publique de vive voix, qu'ils n'entendoient pas , en faifant ligner le formulaire, obliger a la crean- ce du fait, les Eveques d'Alet , de Beauvais , d'Angers 8c de Pamiers , Tome r. P |
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5 3 S HlSTOIRE DE PoRT-Ro'lAE.
,££ ai'ant rendu publics leurs man'demens J
dans lefquels ils etabliflbient la dif- tin&ion du fait & du droit, & ne de- roandoient a l'egard du fait qu'une foumifiion de refpeit, furent accufcs <Tavoir contrevenu a la bulle du Pape; ce qui donna occafion a une grande conteftation qui ne fut terminee que fous le pontificat de Clement IX Tan 166$ , par le celebre accommode- ment connu fous le nom de Paix de Clement IX. Ce qui piqua le plus dans les mandemens de M. d'Alet, & <les trois autres Eveques , c'etoitmoins la diftin&ion du fait & du droit, que la claufe par laquelle ils declaroient que par la condamnation des V pro- portions , la doctrine de faint Au- guflin & de faint Thomas , & le dogme de la grace efficace par elle-meme n'a- yoient requ aucune atteinte, comme quel* ques-uns le pretendoient, & qu'ils de- meuroient dans la mime autorite qu'ils avoient auparavant dans I'Eglife. xxrx. M. de Paris recut avec joieupe bulle
Second Man- ,-i • r n- • ' i> #»
dement deM. qu ll avoit lolhcitee avectant d empref-
d; Petcfixe fement, & donna le 15 de mai une fe- une du for-conde ordonnance pour la Signature, mulatto ( c'eft le cinquieme mandement de I'Eglife de Paris fur ce fujet. ) ll de- jnande dans cette otsbnnance, » une |
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II.Partie. Liv. IV. 3557
'*» foumiffibu de foi divine pour les u dogmes ; & quant au rait non reve- » le., une veritable foumiflion, par » laquelle on acquiefce fincerement « &c de bonne foi a la condamnation " de la do6trine de Janfenius conte- m nue dans les V Propositions ». M. de Perefixe dit ici adieu a fa foi humaine: il ne demande plus a l'egard du fait , qu'une foumiflion & un acquiefcement que perfonne ne comprenoit alors, &c qu'apparemraent il ne comprenoit pas lui-meme , ne s'en fervant que pouc tromper & eblouir ; c'eft-a-dire afin que ceux qui vouloient qu'on crut le fait, penfaflent qu'il en exigeoit la creance par ce terme d'acquiefcement; & que ceux qui foutenoient qu'on ne la pouvoit exiger , ne puflent lui re- procher qu'il la demandoit, puifqu'ii n'exigeoit qu'un acquiefcement, qui pouvoit etre fans perfuafion. L'auteur des imaginaires fit a ce fujet uue fixie- me lettre, dans. laquelle il reprefente les diverfes vues de M. de Perefixe , & les diverfes agitations de fon efprit. Ce mandement avoit etc precede d'une deliberation de plus d'un mois, pen- dant lequel le Prelat avoit paru atfez porte a. fe mettre en repos en donnant jU paix a l'Eslife; mais le pere Annat Pij
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$4° HlSTOIRE DE PoRT-Ro'lAt.'
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166? qui lui fou.ffl.oit toujours aux oreilies j
l'emporra lorfqu'on etoit fur le point de conclure ; tant il eft difficile de fe cirer d'un malheureux engagement dans lequel on eft entre fans conful- ter la raifon ni la confcience. xxx. En demandant au Pape Alexandre La mere yil une bulle pour autorifer la fi^na-
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ciurrps ecrit ture du rormulaire , on ^ivoit princi-
a la com- palement en vue les relisieufes de Pads au fujet P. R. ; c eft pourquoi des que la de- rfeiabuUe. claration du Roi parut pour la publi- cation de cette bulle, la Superieure de P. R. des Champs la regarda comme le fignal d'un nouveau combat dans le- quel elle &c fes fceurs alloient entrer. C'eft ce qui l'engagea a ecrire a la communaute de Paris, pour les exhor- ter a croitre dans l'amour de la charite & de la verity , &dans l'humilite, qui etoient toute leur force & qui devoient les rendre invincibles (41). Elle leur temoigne qu'elle defire s'unir a elles pour avoir part a. la vi&oire qu'elle ef- pere qu'elles remporteront fur des en- nemis qui ne cherchent que la ruine de leurs ames-, & la crainte qu'elle a > que le mandement qu'on fe difpofoit de publier le dimanche fuivant , ne ftit compofe de telle forte, qii'il c$- (41) Rel. in-4. p. J70,
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II. Partie. Liv. IV. 541
chat du venin fous des paroles equi- \_66%.
Voques capables de tromper les fimples; elle ajouce que fi cela arrive , elles ne fauroient demeurer trop fermes a ne rien faire qu'on ne leur ait rendu leurs meres ; & qu'en cas qu'on les leur rendit, il faudroit etre egalement fermes a ne rien faire , qui ne frit rres clair , 8c qui ne decouvrit pleinement leur difpolition. Elle les avertit qu'il faut joindre une grande humilite a" leur fcrmete & a leur refiftance , mais une humilite qui exclue la prefomp- tion & l'orgueil, & qui ne degenere point en pufillanimite & en lacnete. Les religieufes de Paris repondirent xxxt
le 1 i de mai a la mere Prieure des R<-;pynre <fc Champs , qu'elles avoient recti fa let- nautl; %VpT- |
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tre avec une joie d'autant plus grande, * '
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la mere
dca |
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qu'elles pouvoient dire que Dieu leur champs
avoit mis dans le coeur les memes fen- timens , ne fouhaitant rien tanr que de demeurer dans la charire & la par- faite union qu'elle delire ; qu'elles veilloient plus que jamais a conferver cette divine vertu, qui eft route la force & la fame de l'ame, comme le dit faint Auguftin, & l'unique marque desdjfciplesde Jefus-Chrift. Elles lui temoignent qu'elles ont la meme crain- te qu'elle, touchant le mandemenc P iij
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J41 Hl'STOIRE DE PoR.T-R.o'lAri
l66. Quant a M. Chamillard, dont elle leS avoit averties de fe defter , elles lui marquent que l'experience leur en ap- {irenoit plus que tout ce qu'on pouvoit
eur en dire , &c que tous les jours il leur donnoit de nouvelles preuves da defleiniqu'il avoitde lesfurprendre(43) xxxn. La crainte que la mere Prieure des JubUfecondchamps> & les religieufes des deux Mandemcnt communautesavoient aufujet dunou- aLw'ijmX veau mandement de M. de Perefixe, n'etoit pas fans fondement comme nous l'avons vu, par les termes equivoques dont il etoit compofe. Il fut donne le 13 mai, & publie le 17 , qui etoit le Dimanchedans l'octave de l'Afcenfion. La four Angelique rapporte dans la, relation de fa captivite une penfee fin- guliere & frappante qu'elle eut au fu- jet de ce mandement (44). Etant a. la JMefle, lorfqu'elle entendit ces paroles: . abfque fynagogis facicnt vos, &c., Us vous chafferont de leurs Jinagogues , elle dit en elle-meme : ajjuriment on pu- hltt la bulU aujoureChui ; & elle etott impatiente de favoir fi cela etoit vrai; mais elle n'en put rien apprendre que le mardi fuivant : & quand elle fut qu'en efFet le mandement avoit «£ (4;) Ibid. p. I7«.
(44) P. 7«. col. i.ed. inn p. ij6;
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ft.PAR.TfE. L'lV. IK fof
public ce jour-la , elle eut une grande \(,6<,'.""
confolation de penfer que Jefus-Chrift- 1'avoit prevu & qu'il les avoit regar- dees dans cette occafion, lorfqu'ilav oic dit ces paroles : Uc cum vencrit hot a co- rum, reminijcamini quia ego dixi vobis. M. de Paris alia lui-meme, le di- xxxm,
manche , le fignifier aux religieufes de ^{^ l'l'£* P. R. (4$). Vers les trois heures & de-mandemem s mie la communaute le rendir au par- ■ loir, ou elle rrouva l'Archeveque, M. de la Brunetiere &c M. Chamillard (46) ; Le Prelat park d'abord , puis fit lire la bulle & fon mandement par M. Cha- millard ; enfuite de quoi il fit un dif- cours qu'il termina par de grandes me- naces. Aprescela, ildit quecelles qui vouloienc iigner n'avoient qu'a refter. On avoit tout prepare pour cet effet, une table & une ecritoire. Car I'encre itoit toujours prete, comme au tems des Ariens^pour me fervir des paroles de S. Gregoire de Nazianze. M. de Perefixe donna Pexemple , en fignant le pre- mier. M. de la Brunetiere & M. 'Cha- millard le firent apres lui; puis la mere- Eugenie- & lesrantres filles de Sre. Ma- rie. On appella enfuite l'ancienne (47),, ■45) Rel. in-4. Utttes , (47) Catherine de Saint
tec. p. i8o & fuiv. Paul , qui avoit figna'
(46) Hift. des pcrfec. p. quelcjues mois auparavant,-
iB7- .. .
P IV
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J44 HiSTOIRE DE PoRT-Ro'lAt.'
qui s'excufa fur fon age, difant qu'elle
etoit un.tpauvTtfi.lh de quatre-vingts ans dont il falloit avoir p'uii , qii'on lui fcrolt perdrc lefprit fl on la tourmentoit. M. de Paris lui dir qu'il efperoit qu'elle le feroit. Kous le fere{, dir-il encore, c'eftparceque vous ave^ quatre-vingt ans, qiCil faudroit Jigner quatre-vingts fois. Cetre bonne religieufe ne fur point convaincue par une raifon (i folide(43). La fcEur Ifabelle des Anges figna. Li-defTus les religieufes fidelles for- rirent du parloir pour aller dire Vepres laiflant fept des douze qui avoient {i- gnele premier mandement; favoirles fours Ifabelle des Anges , Flavie , Do- rothee, Philiberte, Jacqueline, Cathe- rine Pelagie, Marie Aimee. Elles fu- rent fuivies de cinq autres, de Pan- cienne & des fceurs Candide (49), Eu- phrofme, Anne Gertrude (50) & Ifa- belle de faint Jofeph. M. de Paris en- (48) Ibid. p. 44s,col. 1. de mats.
(49) La fceur Candide (yo)Lafeeur Anne Ger-
6toit du nombre des u trude 6toit dans le meme premieres exilees. Elle eut cas de la fceur Candide ; le malheur de (igner , 8c & elle avoir grand regrej revint en confluence 4 de fa premiere lignature, P. R. de Paris le mcme bien loin d'etre difpof6e J jour que la fceur Eufto- recommencet. Voi'Sz la cjuie fut exilee. Dieu lui lettre qu'elle ccrivir a la tit la grace de reconnoi- fceur Euphrofine , ReL, ia- fte fa fame , 8c elle r6- 4. p. ijj, sra£ta fa lignature ail mois
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II. Parti e. Ltv. V. $$f
voi'a chercher cette derniere,qui vintjde —" T77~* fort mauvaife humeur ; on fit appelier * la fceur Euphtofine, qui etoit a Vepres,
& penfoic s'etre fauvee du peril. Lorf- qu'elle fut venue , elle die qu'elle pren- droit le terns des trois mois, pour prier & pour penfer a ce qu'elle avoit a faire, que cela etoit d'aflez grande importance pour ne pas le faire lege- rement. M. de Perefixe fut fort mor- tifie de cette reponfe , & lui dit qu'elle le faifoit mourir. On lailfa la fceur Anne Gertrude en repos •, mais la fceur Candide fut traitee d'une etrange ma- niere , & elle effuia t<>utes les duretes imaginables de la part de 1'Archevequc qui menaga de la mettre entre quatre muraillesoit elle jeuneroit aiipain & a l'eau. II fit au contraire de grands ac- cueils a celles qui fignerent, & fe rejouit beaucoup avec elles. 11 defendit aux au- tres fous peine d'excommunication , de fe parler, & leur donna trois mois pour fe determiner. Apres cette vifite, les religieufes fai- xxxir.
fant reflexion fur les menaces que leur ^f^^jj avoit faites M. de Paris, & fe rappellant gieufes deia- ce qui <koit arrive a la fceur Francoife ^retouttt de fainte Claire , elles dreflerent facte qu'on ponr- fuivant par lequel elles defavouent tou- r°t"n£j* fui* te fignature qui pourroit leur etr& P v
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546 HlSTOIRE DF. PoRT-ROIA£r
~i6cT7 exrorquce par furprife a la mort (5 lfr » Aujourd'hui 19 mai 166 5 , nous , s> religieufes de l'abbaie &c monaftere » de P. R. du faint Sacrement de Pa- »> ris, aiant ete touchees de la plus fen- »» iible douleur qu'on fe puifle imagi- w ner, de ce que notre fceur Francoifs » de fainte Claire, qui eft une de cel- » les qui one ete enlevees, & qui eft •> morte le 14 du mois pafte au cou* » vent des Urfulines de ce fauxbourg, » s'eft enfin rendue dans cette derniera » heure a une fignature dont elle au- » roit eu afliirement la meme horreur » qu'elle a toujours temoignee , s'il « n'y avoit lieu de croire qu'elle a ete » ou accablee de la violence du mal, » ou furprife & eblouie des raifons " qui lui ont etc prefentees par une » perfonne en qui elle pouvoit avoir »« quelque confiance , & n'etant plus » capable de faire le difcernement qui » etoit neceflaire pour decouvrir l'ar- » tifice & les termes equivoques & am* » bigus, qui ctoient caches dans la » fignature qu'on exigeoit d'elle, fous 3> pretexte d'une deference qu'elle fe » perfuadoit ne Fengager qu'a une » foumiffion generale a l'Eglife ; 8c » e'eft ce qui nous donne tout fujet » de croire qu'elle- n'a rmliement pr<i- feij Ibid. p.187.-
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It! Parti e. Llv. IV. 347
W tendu s'obliger par-la a la creance
» du fait, puifqu'elle a temoigne juf- « qu'au dernier foupir de fa vie urt » entier eloignement & une grande » horreur pour la fignature fimple du » formulaire. Cette chute , que Diet* » ne lui aura peut etre pas imputee , « mais qui ne laiflfe pas de nous etre » un fujet de gemir pour elle , nous * engage, dans le defir d'eviter un » malheur fi grand & fi funefte , de » declarer nos fentimens par ce prc- » fent a£le , que nous faifons par un » mouvement libre & volontaire , &c » fans aucune induction de perfonne , :> apres nous etre mifes en la prefence » de Dieu en la meme maniere que fi >» nous etions pres de paroitre de~ » vant lui , &c auquel nous voulons » que l?on ait egard comme a.- nos » dernieres volontes & a la veritable » difpofition dans laquelle nous foib- » haitons de vivre &c de moarir » » & que nous proteftons etre tres; » fincere, quoique nous reconnoif- 5, fions en meme terns qu'il peut » arriver par un effet de la mifere &c » de la foiblefle humaine , & par une M fuite de l'horrible violence que' » Von exerce a notre egard, que l'oir » pourra extorquer de nous quelque- * a&e comraire dans un etat lemma*- |
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348 HlSTOIRE BE PoRT-ROlAIf!
7~ » ble a celui dans lequel on a fur-
» pris notre pauvre four. Et c'eft: pour » prevenir toutes les tentations & le.s » differens pieges que l'on nous peut » tendre, ( foit par les careftes , foit » par les menaces, ou par l'horreur » que Ton nous voudroit infpirer 5. d'un etat audi humiliant que ce- » lui de mourir fans Sacremens, & 3J n'etre point enterrees en terre fain- " te ) que nous faifons cecte prefente. » declaration, que nous voulons qui » foit un temoignage affure & au- » thentiqne de la dilpofition dans la- » quelle nous refufons la fignature, » qui ne vient ni d'op.iniatrete , ni » d'entetement, ni d'aucune attache « ou confederation humaine , mais de » la feule crainte d'offenfer & de blef- y> fer notre confeience & la verite. »» Nous proteftons fincerenient & a « la face de l'Eglife, qu'il n'y a que =» cette feule raifon qui nous em- « pcche d'obeir a M. l'Archeveque ; » & que nous avons une telle idee » de la fignature , que nous croions « ce peche capable d'eteindre en nous » la charite 8c la vie de la grace ,. *> fans laquelle il n'y a point de faluc « a efpcrer : & c'eft dans la jufte crain- «• te que nous avons de torhber dans » ce malheur 3 que nous penfons.de.- |
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II. P A r t 11. Llv. IV. 349'
t* voir nous expofer a tour & aux der-
» nieres exrremites, plurot que de » manquer a la fidelite inviolable que » demande de nous une caufe fi fain- " re & fi forr audeffus de nos for- *» ces 8c de nos merites , dans la- » quelle nous nous trouvons fi heu- " reufement engagees, &c qui nous » devroit renir dans une conrinuelle j' action de grace de la mifericorde » qu'il nous fair de fouffrir quelque » chofe pour la verite & pour la juf- " tice. Cetre penfee nous devroit ra- » vir de joie, & etre feule capable *> d'adoucir toutes les peines & l'en- *» rjui que peut caufer une afflic- » tion audi longue &c audi penible " qu'eft lanotre, n'y aianr perfonne » qui ait plus d'obligation de dire » avec le prophete » : Nous avons iti rcmplies, Seigneur, des effets de votre mifericorde des le matin, & nous avons ite dans la joie & dans 1'allegrejfe tous les jours de not re vie ; » puifque nous » avons eprouve en tout terns , & des » celui meme de notre jeuneffe, des => effets fi particuliers de la benedic- » tion qu'il a repandue avec tanr >r d'abondance & de profufion fur ce »• monaftere, & dont nous pouvons » dire mcme qu'il ne nous prive pas >* da-is l'ctat de fouiirance on il nous. |
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'£50 HlSTOIRB »E PoR.T-S.O*Al»
»> reduit, qui nous oblige d'ajoute$ » encore avec le meme prophete » f Nous nous Jpmrnes rijouies des jours mimes ou vous nous ave^ humiliees , & des annies ou nous nous fommes vues accablies de maux. » C'eft la difpofi- » tion que Dieu a mife par fa mife- »» ricorde dans nos cceurs & que nous » efperons qu'il y confervera toujours* m Que fi neanmoins il arrivoit ( ce » que Dieu ne veuille permettre) que » la longueur de notre caprivite, les » mauvais traitemens , & l'accable- » ment ou Ton fe peut trouver dans j» les maifons etrangeres , (: ou Ton » n'eft afliege que de perfonhes qui » ne parlent que pour infuker a notre » malheur & a notre affliction ) nous 3> portoient a quelque affbiblifTemenc » & meme a nous rendre a quelque » iignature , foit dans la fante ou dans » la maladie, nous voulons qti'on n'y. « ait aurfun egard , & nous declarons « qu'elles font nulles, invalides & fans sj aucun efFet, comme aiant ere ex*- » torquees 8c arrachees par la violen- » ce qu'on auroit exercee fur nous, 3» Cell pourquoi les perfonnes qui fe » feront employees pour nous affbiblir ,. » feront veritablement coupables de- »■ vant Dieu de la fame ou ils nous. » auroiew faic tomber ; & s'il nous |
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II. Partis. Llv. \P. }$i
*> eft permis de le dire, nous decla- •> rons que nous nous fouleverons con- " tre eux au jugement de Dieu, pour " leur reprocher cette a&ion , qui » n'ai'ant eu rien de libre & de vo- » lontaire de .notre part, devroit ne- » ceflfairement retomber fur ceux qui >• n'auroient point apprehende de con- s' tribuer a. eteindre en nous l'efprit » de verite 8c de charite, que nous » ofons efperer que Dieu y a mis par « fa grace. Que n Dieu par un fecret "jugement nous abandonnoit a nous » memes en quelque forte , en nous » faifant eprouver la profondeur de » notre mifere par une chute fi deplo- « rable , nous prions & nous coniu- » rons tons ceux qui en feront infor- « mes d'etre touches de companion de j> notre etat, de gemir pour nous, & » de demander a Dieu qu'il n'entre »point en jugement avec nous, &c » qu'il ne nous traite point felon la " grandeur de notre peche ; mais qu'il » exerce fur nous la mifericorde qui » lui eft propre , en nous pardonnant »> par mi effet fmgulier de fa bonte un r, afFoibliftement, ou I'infirmite pour- s' roit avoir plus de part que la vo- " lonte. Nous declarons encore , que » nous defirons & entendons que cet w ade/bit rendu public, au cas que |
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J 5 2. HlSTOIRS DE PoRT-Ro'lAt.,
» quelqu'une vienne a changer de
m fentiment, 8c a faire quelqne chofe » de contraire a la difpofition ou nous » nous trouvons , ou s'il arrive que » Dieu retire quelqu'une de nous dans » la privation ou nous fommes des » Sacremens •, 8c c'eft ce que nous » fouhaiterions qui fe put faire des » a prefent, fi l'etrange captivite oa » Ton nous reduit & d'autres confide- » rations nous le pouvoient permettre. » Nous voulons de plus que ledit ac- » te foit figne de nos feings , afin de » nous rendre un temoignage recipro- * que les unes aux autres de notre ve- » ritable difpofition , & dans laquel- »le nous fupplions tous ceux qui le » verront, de prier Dieu qu'il nous » conferve & qu'il nous rende dignes » d'etre du nombre de ceux qui fouf- » frent, non pour leurs peches , mais » pour la juftice & la verite. Fait en » notre monaftere du faint Sacrement » de Paris, ledit jour & an que deflfus ; » &c figne de nos feings le mardi dans » l'odave du faint Sacrement neuf - Juin 1665. Get acte fut figne par » quarante religieufes (51). » Elles ecrivirent vers le meme tems,
au nombre de trente - huit a M. de fainte Marthe, pour le remercier d* (5>,)Ib.p. 187...
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II. Part IE. Liv. IF. 353
Vavis qu'il leur avoit donne fur la 166$, maniere de fe conduire dans les vifites de l'Archeveque. Ce Prelat ne fit pas degrandesconquetes avec fori nouveau mandement, qui ne fur figne que de huit religieufes , & qu'il eut meme la mortification de ne pouvoir faire figner a quatre fceurs qui avoient figne le premier. Depuis ce terns les reli- gieufes ne penferent plus qu'a s'armer de patience, en envifageant les liens & les tribulations qui les attendoient. La bnlle & le mandement de M. xxxv;
de Pereftxe furent aulfi pour les exi- semimenr lees un furcroit de peines & de dou- Marie Jel'la- leurs. La bulk ell epouvantablc, (dit la fa«1«»on fur mere Marie de 1 incarnation , Pneure manjement de Paris ecrivant a une fceur) ajfure *J^*" *'*' menc la fin du monde vient (5 2). Cette cette fainte bonne religieufe fiit fort eprouveefill'\ • & »* , .. » - .. r quelqucs aa-
dans le lieu de ion exil; Dieu per- tea,
mit qu'elle fentit de grands affoiblif- fements fous le fpecieux pretexte de 1'obeilTance , & avec de telles angoif- fes qu'elle defiroir de mourir de grand cceur , regardant une mort fu- bite comme le plus grand bonheur qui pouvoit lui arnver 5 elle la demandoit a Dieu , & prioit qu'on lui demandat pour elle qu'il la fit mourir fubite- roent, afin de n'etre pas expofee a la* (f>J Ibid.p. i^ikfuiz*
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354 Histoire de Port-roiaiT
j(j^, meme tentation que la fceur Frangoifi? de fainte Claire. Sagrande peine etoit un doute qui lui venoit fouvent, fi l'on ne doit pas autant craindre de blelfer la charite que la verite , ( cela n'effi pas douteux ) mais cette bonne religieufe faifoit mal Tapplication de cette maxime : elle connderoit que du tems des Donatiftes , on avoir fait des chofes contraires a la discipline de l'Eglife pour eviter le fchifme , comme de lailfer deux Eveques fur un fiege ; il lui venoit done dans l'ef- prit, que quoique la verite fiit bletfee par la fignature du formulaire , nean- moins comme plufieurs etoient fcan- dalifes de leur refiftance , & que cela faifoit un efpece de fchifme , peut- etre n'y auroit il pas de mal a figner pour lever ce fcandale. Ces doutes la tuoient, e'eft fon expreflion , & la tour- mentoient etrangement depuis le mois de Janvier ; mais elle n'avoit perfonne pour les lui lever. Ces etats ,. il faut l'avouer, font fenfibles : la fceur Candide (55) qui les avoit eprouves , & qui avoit eu le malheur d'y fuc- comber , en fait une peinture ties vive : elle dit elle meme que fi dans ces incertitudes elle avoit feulement eu un petit mot, quand ce n'eut etc ijj)P. 1^0'col. *.- |
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II. Partie Liv. IV. 355
?u'un oui ou un non , cela lui auroit
ufR , cV qu'elle n'auroit jamais ngne. La niere Marie de L'lncarnation tom- ba malade de l'agitation ou elle etoit, mais Dieu la tira comme par miracle de cette peine , lorfqu'elle refolut de contremanderM. de Paris , qui l'avoit deja ebranlee, & qui devoit la venir voir (54). Elle fat privee de la com- munion comme les autres a Paque meme. M. Chamillard l'etant venue voir pour lui parler de la bulle, la prefloit de figner pour obtenir la com- munion a la Pentecote , &c lui difoit pour l'y engager, que la mere Agnes/ n'etoit pas eloignee de le faire : il fe flattoit meme qu'elle le feroit; mais elle lui dit que quand elle auroit a le faire, ce ne feroit pas avant la fete.- Elle fe plaignit qu'elle n'avoit pei-fon- ne pour l'eclaircir. M. Chamiilard lui offrit le cpnfef-
feur de la fceur Louife Fare , qu'elle accepta par un trait de la Providence. Enfin Dieu la tira de peine par cette eccafion; & elle dit en confiance a. une fceur a qui elle ecrivit, que jamais elle n'avoit eprouve le fecours de Dieu {>lus fenfiblement; qu'elle efperoit que
e Seigneur lui donneroit part a la grace de fouffrir avec joie pour une fi bonn* |
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3 5<? HlSTOIRE DE PORT-ROIAX.'
i<J6c. caufe -, qu'a.la verite elle ne l'avoit ja-
mais crue autre , mais comme elle n'en- tendoit plus rien pour la fortifier , elle ne fa voir ou elle en etoit. La mere Marie de l'lncarnation ne voulut plus penfer a la denature , dont elle avoit paru d'abord n'etre pas eloignee; ce qui irrita beaucoup fes geolieres con- tre elle. Nous ne nous arreterons pas plus long-terns fur cet article , parce- que nous aurons occafion d'en parler dans les relations particulieres des re- xxxvi. Hgieufes eX1leeS. m. de PaiU M. 1 Archeveque , apres avoir rait chunllUtk A fignmer fon mandement aux religieu- p. r. des fes de P. R. des champs , jugea a pro- cbamps. ^QS ^y envoier M. Chamillard avec une lettre datee du 7 Juinpour la mere Prieure(5 5); illui marquoitque n'aiarro pu y aller;lui-meme , il avoir prie M. Chamillard de prendre cette peine > afin de lui rendre, & a routes les re- ligieufes de la maifon, tous les fervi- ces qu'il pourroit , & de voir dans quelle difpofition elles etoient par rap- port a la fignature qu'il leur deman- doit. Il la prioit que M. Chamillard eut la meme liberte qu'il auroit lui- meme d'entretenir chaque religieufe en.particulier, pour qu'elles en eufTent (5?) R.el. de la vifite de P. R.des Champs, p. foi
•oi. ;..
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II. Part ie. Llv. IF. $57
davantage de lui decouvrir leurs. fen- 1(j6> '
timens. Des le lendemain , M. Chamiilard xxxvn.
fe rendit a P. R. des champs , fur les JSgjJJ quatre heures du foir , 8c fignifia fes ordres a la mere Prieure , qui lui declara nettement qu'elle ne le pou- voit reconnoitre pour fuperieur , apres qu'il s'etoit intrus dans fa maifon con- tre leurs conftitutions , qu'il s'etoit declare leur partie, & qu'il avoit traite leurs fceurs de Paris comme un enne- mi declare (56). M. Chamiilard fut fort pique d'une telle reception , & dit que s'il avoit ete une heure plutot, il feroit parti fur le champ pour porter fes plaintes a. M. de Paris , & la me- naca que tout retomberoit fur elle. La mere Prieure tint ferme , & lui repon- dit qu'elle ne craignoit rien en faifant fon devoir. Ainfi M. Chamiilard s'en revinc a Paris (57) le lendemain 9 juin fans avoir vu aucune religieufe que la Prieure,quiecrivitaM.l'Archev.les rai- fons qu'elle avoit eues d'en agir ainfi. Auflfi-tot qu'on fut a Paris le vo'iage $£j*j^
de M. Chamiilard a P. R. des champs recoit dam cette circonfr
(i€)lb. p. 51, col. j. P. R- rouchant le vo'iage tance laPrieu-
Hitt. d?s perfec. i part. p. de M. Chamiilard , hift. re de 1>. R,
jo , col. 1. des perfec. i part. p. 31 , des Gharry
(57) Voiezla relation de 3i)3J.
M. Canu , Chapelain d« |
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J 5 8 HlSTOIRE DS Pu.T-R.Ol At?
7* (5 8), on penfa a. y envoier quelqu'ufi pour en donner avis. M. de Monfrin ( de Pontchateau ) fe chargea de la commiffion , partit a une heure & de- mie apres midi, £c arriva aux granges environ une demi - heure apres que M. Chamillard fut arrive a l'abbaie. II remit fes depeches a M. Charles pour les porter a la mere Prieure , qui avoir, dejacongedie M. Chamillard. Elle en- voi'a a M. de Monfrin la lettre que ce do&eur avoit apportee de la part de M. l'Archeveque pour voir en particuliet toutes les foeurs ; elle etoit en peine fi cela ne changerok rien aux affaires , & s'il falloit perlifter a refufer M. Cha- naillacd. M. de Monfrin le penfa ainfi , de meme que M. le Brun & M. Char- les , 8c le manda a la mere. On fit partir Hilaire pour Paris a fept heures du foir; il y arriva a neuf, & revint aux champs a trois heures du matin , avec le projet de la lettre que la mere Prieure devoit ecrire a M. l'Archeve- que. On fut par la meme voie a. P. R. de Paris , des une heure apres minuic , l'arrivee de M. Chamillard a P. R. des champs , fa reception avec toutes les circonftances & les fuites. » Il eft vrai, n dit M. Lancelot , ecrivant fur ce i) Hill, des perfec. t pan. p. j i, |
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II. Part ie. Llv. IV. 359
'" fujet a M. Ie Brun , qu'il femble que TTgl
" ce foit un coup de Dieu , j& qu'il *•*
» fe trouve peut-etre peu d'exemple
« dans l'hiftoire 011 les plus puiffans
» Rois aient ere fervis , je ne dirai
» pas avec autant d'afTection & de fi-
" delite , car cela eft impoflible , mais
" je dis avec autant de promptitude &c
" de diligence que les religieufes de
»> P. R. l'ont ete dans cette occafion.
» Car cet homme ( M. Chamillard )
» adroit au dernier point , cacha fi
« bien fon deflfein , qu'on n'en fut
» rien que quand il fut pret a partir ».
Cependant Dieu permit qu'on eut le
terns de detourner une autre partie qui
etoit faite pour aller a P. R., & qui
eut furpris. » Enfin en moins de dix
» heures, la mere Prieure fut avertie
« de tout ce qui s'etoit paffe ; elle re-
« cut le modele de la lettre qu'elle de-
» voir ecrire , & les prifonnieres ,
» au milieu de la nuit , & malgre les
.. ferrures & routes les gardes , furent
» informees de toute l'hiftoire.
Dans la lettre que la mere Prieure xxxjx.
/ • • . «r il. 1 a 11 1 • Elleectiti
ecnvit a M. 1 Archeveque , elle lui M. de Patis.
-tnarquoit que c'etoit avec un extreme regret qu'elle n'avoit pu fatisfaire a 4'ordre qui avoir ete apporte par M. •Chamillard , que fa qualite de fupe* |
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3<?0 HlSTOIRE DE PoRT-RoYaI.
rieure 1'obligeoit d'en maintenir les
droits qui lui etoient confies comme un depot ; qu'il ne lui avoit pas ere poffible de reconnoitre un homme in- truscontre leurs conftitutions approu- vees par les Archeveques fes prede- cefTeurs, par lefquelles elles avoient un plein droit de nommer leur fupe- rieur •, qu'outre cela elles avoient des raifons particulieres de ne point recon- noitre M. Chamillard , parceque tou- te la Communaute l'avoit pris a partie pour des raifons tres legitimes qu'il avoit eu la principale part a l'enleve- ment de leurs meres qu'il avoit trai- tees publiquement d'heretiques en plu- fieurs rencontres , & enfin qvi'elles etoient pretes a prouver en juftice qu'il avoit agi contre elles comme un ennemi declare ; qu'elle efperoit que Monfeigneur auroit egard a. des raifons ft equitables; que pour elle en fon par- ticulier elle n'etoit pas fort touchee des menaces qu'il lui avoit faites ; que graces a Dieu elle ne croi'oit pas de- voir rien craindre de ce qui pouvoit lui arriver de la part des homines en faifant fon devoir ; qu'elle avoit fujet d'efperer un traitement plus favora- ble de fa bonte , puifqu'il etoit leur pere , mais que quoi qu'il put arriver, elle
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II. Partie. Liv. IK 361
felle efperoit que la verite meme qui lui faifoir reprefenter ces chofes a fa gran- deur , lui donneroit la force de fouf- fiir avec patience routes les fuites de cette affaire (55)). Cette lettre fut rendue a M. de Pa-
ris le meme jour apres fon diner , Sc il dit en la recevant: Voice le commen- cement de la tragtdie (60). Comme le porteur de la lettre en attendoit la re- ponfe, le Prelat l'ai'ant appercu en „ paffant dans une fale, lui ait : Mon- Jieur , il riy a point de reponfe. Quel- ques jours apres , M. de Perefixe man- da a la mere Prieure par Hilaire , qu'il etoit etonne de ce que faifant de fon cote tout.ee qu'il pouvoit pour ne leur point faire de mal, il fembloit qu'elle voulut l'y obliger par fa maniere d'agir, «k furtout par ce dernier refus; & que s'il avoir cru des perfonnes confidera- bles , il ne l'auroit pas laitfee dans la maifon apres cela , parceque cette ac- tion faifoit bien voir qu'elle tenoit les fceurs dans une grande captivite , Sc qu'il le favoit par les parens de quel- ques religieufes. Cela pouvoit venir <^j) Relation de lavi- datee dansl'hift. des per-
fite p. i' > co'- * •• Cette fee. p. 54.
Lettre eft du 9 , & non (60) Ibid. p. yi.col. 1, in 1 juin , comme elle eft Hilt, des perfec. p. 34.
Tome K Q
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■.i.«ii.uMi.i.m.ij.—
J(Ji HlSTOIRE DE PoRT-ROlAL. |
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1665.
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des parens de la fasur Marie Therefe >
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laquelle avoir temoigne a fonpere, qui
l'etoit venu voir , qu'elle n'etoir pas libre. Certe pauvre fille avoit ere tres mecontente de la refolurion qu'on prir de ne pas voir M. Chamillard: elle fie ce qu'elle pur fous main pour engager la mere Prieure a fe rendre a ce qu'il demandoir, & elle pleura beaucoup de ce que cela ne reuffit pas. Il courur metne un bruir que M. Chamillard "devoir l'emmener a Paris, pour grollir la communaute des figneufes ; Mon- fieur Collart fon pere fe rroiiva au mo- naftere de P. R. de Paris , le jour que M. Chamillard retourna de celui des champs, pour voir fa fille a fon arrivee, e'eft ce qu'on apprir de la bouche de la fceur de cetre religieufe. xi. Jufqu'ici M. de Paris n'avoir pas Deffeindefait de grands progres dans les deux
tomet les re-monaltei:es "e * • «•• : aucune 11 avoit lgieufes op- ficme dans celui des champs , & il n'en pofantes J.ans • r 1 • ' > 1 • 1
uis meme avoir iubjugue qu une douzaine dece-
miifon. Jui Je Paris , donr quelques-unes me- me fe repenroienr & avoienr rerracte leur fignarure, ou etoient dans la dif- pofirion de le faire. Cetoit la tour le fruit de tanr de bulles &c de mande- mens , de tanr de travaux , de tant de violences exercees contre ces pauvres- |
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• II. P a r t i e. Llv. ir. $6y
ftlles. Ces mauvais fucces firent pren- \C6s%'
dre la reTolution de ralTembler tomes les religieufes oppofantes , dans le mo- naftere de P. R. des champs (Go). Ja- mais cependant on ne fe feroit at- tendu a cela : aufll , M. de Perefixe ne s'y potta-t-ilpas de lui-meme. Voici, comment la chofe fe tit. » Le°Roi en- » nuie avec raifon de pa'fer 5 00 livtes » de penfion pout chacune des feize jj religieufes qui etoieiit hors de P. R., « dit a M. l'Archeveque qu'il pouvoic » les renvoier a P. R. des champs vi- " vre de leurs revenus. Le Prelat ju- « gea qu'il etoit auffi a propos d'y » envo'ier toutes' celles de Patis , qui » n'avoient pas vouhi figner, de peur » qu'elles ne fifTent retracter celles » qui l'avoient fait «. La mere Euge- nie fut confultee par la Reine-mere, qui la regardoit comme un oracle ; & elle approuva ce projet, qui fut exe- cute dela maniere que nous l'allons voir. M. deParis chargea fon agent ordinal- XLI;
re de la manoeuvre de cette affaire.il al- Manoeuvre la le 1 j Juin voir la mere Agnes (61), J^* ch» a qui il dit qu'il avoit vu toutes les fours de dehors a & qu'elles lui avoient <«o) Rec. de pieces I Utrecht en 1740 ,p. 454.
(e1JR.el.in-4. Hunt/I tie Utftef, &c. p. 100, ioi;
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364 Histoire db Port-RoiAt.'
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*rw
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2<j(jf routes die, pour repondre a la propo-
rtion de figner , qu'elles ne pouvoient rien faire li elles n'ecoient reunies; il ajouta, que fi la mere Agnes le defi- roit ,il fe flattoit de le faire agreer a M. l'Archeveque. La mere Agnes temoi- gna que cela lui feroit beaucoup de plaifir , pourva que cela ne l'engageat a rien , & il l'alTura que cela feroit ainfi. Aiant done l'agtement de la mere Agnes , il alia le lendemain, jour de faint Jean, a P. R. de Paris, ou aiant fait venir au parloir la four Genevieve de l'lncarnauon (61) avec quelques- autres religieufes , il leur dit, qu'elles avoient fouvent demande a etre reu- nies avec leurs meres , pour avifer en- femble a ce qu'elles auroient a fajre , & que M. l'Archeveque vouloit bien le; leur accorder fi on lui demandoit. La fceur Genevieve s'ecria la-delfus , dans la joieque lui caufoit une propofition fi peu attendue , Ho , Monfieur, /<? bonm nouvelle ! M. Chamillard , fort content de voir ces fentimens , S£ efperant conduire l'afFaire felon fes vues, ajouta , que toutes celles qui etoient au-dehors le fouhaitoient ; que la mere Agnes avoir ecrit a M. («i) Rel. de la fiyur Geneyieye , p. 47, col. 1. Hjfi;
^ej petfcc, p.4ii?4;t, |
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P!*jw>;.- -™ ■— '
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II. Parti e. Llv. IK j6$
I'Archeveque pour leluidemander, & ~~J^~f que c'etoit une grace qu'on leur accor- doit. La fceur Genevieve,qui d'abord a- voit temoigne une fi grande joie au mot de reunion, faifant plus d'atcention a ee qu'on vouloit qu'elles demandaflent elles - memes comme une grace , re- pondit qu'aiant fait vceu de ftabilite , elles ne pouvoient , ni ne devoient en aucune maniere demander a for- tir de leur maifon. Hi bien , reprit M. Chamillard tout en colere , c'ejl-a- dire , qu'il faut que les meres fe rifolveni a demeurtr toute leur vie en prifon. Ce qu'il difoit pour les attendrir. La fceur Marguerite Angelique lui reprefent.t que la maifon de Paris etoit affez gran- de pour y recevoir & y loger celles qu'on en avoir fait forth- : il repondit que cela ne fe pouvoit, parceque cel- les qui avoient ftgne y etoient : on in- fifta ; mais mutilement. Il repeta ce qu'il avoir deja dit, cejl-k-dire que les meres demeureront toute leur vie en pri- fon ; & il ajouta que, fi elles ne deman- doient promptement la grace qu'on etoit difpofe a leur accorder pour lors 3 elles ne pourroient plus y revenir ,• ?[u'elles en auroient regret lorfqu'il ne
eroit plus terns. C'eft ainfi qu'ora youloit engager des religieufes a de-* Qiij
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3 £6 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAL.
mander une chofe qu'on vouloit les
obliger de faire de gre ou de force , afin que cela fut regarde comme une grace accordee par bonte & par ten- dreiTe a leurs prieres, & pour les em- p&cher par ce moien d'appeller corrv- me d'une violence , d'etre chaifees de leur monaftere. Quelque defir qu'euf- fent les religieufes d'etre reunies a leurs cheres meres, la crainte de contri- buer elles-memes a rinjuftice & a la violence , en demandant a aller a P. R. des champs, les arreta , & les empe- cha de faire la demarche qu'on vou- loit qu'elles fiflfent , ne croi'ant pas pouvoir demander a fortir de leur maifon en l'abandonnant ainfi a une dixaine de religieufes dyfcoles. M.Chamillard s'en retourna done fans avoir rien avance & tres mortifie de fe voir trompe dans fes efperances •, mais il ne quitta pas prife & revint trois jours apres (63) avec M. de la Brune- tiere. Il les preflfa encore vivement de demander a etre reunies avec leurs me- res dans la maifon de P. R. des champs , en les aflTurant'que toutes les exilees le defiroient ardemmsnt; que la mere Agnes lui avoir dit qu'au moins «j) Le famedii7 juin. Rcl. in-4. Lettrts, &c. ft,
»06. c |
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II. Parti u.idv. IV. $67
elles fauveroient par-la une de leurs i<j<jc,
maifons. Mais , comme les religieufes attendoient des avis qu'elles avoicnt demandes, elles ne lui donnerent au- cune reponfe pofitive, & lui deman- derent jufqu'au mercredi fuivant pour lui dire leur refolution. M. Chamillard etoit fort fache de XUI-
tous ces retards, & il en fit des plain- Agnes *«it tes a la mere Agnes. Ce fot peut-ctre ?ux, "lis.'eu- " . r v , . les dc Paris au
ce qui engagea cette bonne mere a ecn- fujet de c«tc
re aux religieufes de P. R. de Paris tiunlon« une lettre dans laquelle elle leur mar- que (64) qu'elle a regarde la reunion qu'on leur propofe, comme une cefla- tion de rigueur, & non comme une nouvelle violence , n'en trouvant point a fe mettre enfemble dans une de leurs maifons , qu'elle prefereroit a celle de Paris, quand mane elle auroit le choix : qu'elle a appris par M. Chamillard qu'elles s'y oppofoient comme fi c'e- toit leur faire une injuftice; que cette oppofition lui fait croire qu'elles envi- fagent cela d'une maniere qui leur faic penfer qu'elles doivent conferver leur maifon , quoique d'ailleurs elles l'ex- pofent pour le bien de leurs ames. » Pour moi, dit-elle, je regarde no- («4) Rel. iri-4. p. loo, toi.
Q iv
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3 (J8 HlSTOlKE 6E PoRT-ROlAL.'
i66$, - tre reunion com me le plus gran<£
» avantage qui nous puifle arriver j ,> &c je fepare l'interet de notre tem- » porel de l'unique interet que nous » avons de n'etre qu'un meme canir jj & un meme efprit; ce qui ne peut »» etre encierement dans la feparation » ou Ton eft & dans I'ignorance des fen- » timens les unes des autres. Je vous » avoue , mes tres cheres fours , que »> je m'en fuis bien fait accroire dans w cette occafion , m'imaginant que w vous feriez bien-aifes de nous re- » voir, comme j'avois une joie tres » grande d efjjerer que je vous em- » braftorois encore. Que fi vous avez m des inclinations que vous jugiez pre- m ferables a celle-la , il me faudra done »» refoudre de ne vous jamais revoir , » comme Ton nous le fait entendre. " J'ai donne moi-meme cette lettre a " cette bonne fille , que je prierai de s> retourner demain pour nous apporter » votre reponfe, que je me promets )j qui fera favorable quand vous aurez » confidere que votre refus fera caufe » de la continuation de la captivite de » nos fours & de la notre. » Reponfe des Comme les religieufes de Paris faL- Jf ^esAf foient reponfe a la mere Agnes, M. de sues. Paris vint au monailere fignifier fes |
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II. Part ie. Llv. IF. 369
ferdres (55). Elles fe contenrerent de ^5tT"
marquer a la mere qu'elles ne favoient fi elle avoit ete informee que Ton ne devoit mener qu'une partie des reli- gieufes a P. R. des Champs (66) , en laillant les jeunes dans l'opprellion fous- celles qui dominoient a Paris: que c'e- toit certe raifon avec d'autres, qui les avoir engagees a ne poinr donrter laur confenremenr, ne croiant pas le pou- voir faire en confidence , parcequ'el- les prevoioient, que bien loin que eela pur fervir a les reunir davanrage , il en nairroir une nouvelle defunion. La mere Agnes, ai'anr rec,u cettexepon- fe par Mademoifelle de Monglar, re- moigna aux religieufes , qu'elle les trouvoit les plus raifonnables da monde de ne vouloir pas je defunir a"avec cel- les qui etoient de leur fentlment. Elle- leur marque enfuite qu'elle efpere qu'elles obriendronr de M. de Paris que toutes foienr rcunies, puifqu'il lui avoir dir pofitivement qu'il defiroit qu'elles y allafTenr routes. Elle les prie de venir de la meilleure maniere qu'el- les pourront. Sur quoi les religieufes: lui repondirent, qu'il n'y avoit rien (tfj) Ibid. p. 101 8c deiTcin de M. de Paris T
fuiv. qui le declara lui-memo ±66) C'ctoit le premie: lei8 juin.
Q v
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37° Histoire de Port-roVal.
"77T. qu'elles ne vouluffent faire pour con- ' tribuer a fa fatisfa&ion , mais que/ear fortir de bonne grace de leur monajiere, c'etoit ce qu'elles ne devoient pas fai- re } qu'elles en fortiroient par des or- dres abfolus, mais qu'elles ne le fe- roient jamais de leur confentement > ne pouvant pas le donner a une vio- lence. La mere Agnes approuva ces difpofitions , & leur manda que ce qu'elle appelloit fortir di bonne grace, c'etoit le faire fans bruit; qu'elle pen- foitque ce feroit alTez de dire : » Mon- « feigneur , nous fortons parceque » vous nous l'ordonnez, & que vous le » commandez; & nous proteftons que « e'eft fans prejudice du droit que nous " avons de revenir en notre maifon » quand nous le pourrons » , & apres cela fortir en filence & demander la benediction a Monfeigneur. Les religieufes eurent beaucoup de joie de recevoir ce billet, qui leur donna lieu de fatisfaire entierement la mere Agnes en 1'afTurant qu'elles etoient refolues d'agir comme elle leur marquoit. El- les lui temoignent enfuite la peine qu'elles auront de laifTer leurs fceurs converfes fous la tyrannie de celles avec lefquelles elles refteront, & ajou- tent qu'il feroit quafi neceflaire qu'elles les pulfent fuivre. |
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II. P artie. Liv. IV. 571
Quoique les religieufes eufTent de- ic>6^.
mande a M. Chamillard jufqu'au mer- . xliv.
ciecli pour fe determiner , M. L'Arche- }*• VMdT
f. r . 1 - veque notice
vequequine prenoit pas le conlente- fcioid*«ruc
merit de ces filles pour regie de fes !aaux ^l^'^u- violences, & qui regardoit cette affai- fesdeP. k.. re comma fort preflee, vint des le len- demain dimanche au monaftere (67). Ai'ant fait venir quelques religieufes au parloir , il leur dit qu'il avoit def- fein de les reunir & de leur accorder la grace qu'elles lui avoient fouvene demandee ; que la mere Agnes & les autres demandoient a etre envoi'ees a P. R. des Champs (68). La foeur Ge- nevieve de llncarnation lui reprefenta qu'il n'etoit pas necetTaire de les faire fortir de la maifon de Paris , oil elles etoient, qu'il pouvoit y faire revenir leurs fceurs , & les y reunir routes en- femble. Urio telle representation pi- qua le Prelat, qui maltraita fort celle qui avoit ofe la faire , & la menac,a de la condamner au pain & a l'eau entre quatre murailles La religieufe lui die encore, que s'il leur comman- doit d'aller a. P. R. ,elles lui obeiroient, {£■)) Rel. de la fceur dc cette vifite dans !e Re-
Genevieve de l'lncatna- cv.tll de letives, Sic. y.
tion . p. 48- *o;. col.ji. iQtf.
162) Voi'ez la relation
Qvi
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37 2. HisToire £>e Port-roiAt.
maisque pour s'y preter d'elles-memes", elles ne le pouvoient. Une fceur le pria' enfuite de faire retirer M. Chamillard & la mere Eugenie, afin qu'elles euf- fent plus de liberte de lui Poller 5 ce' qu'il fit, 8c M. l'Abbe Boffuet qui fe rrouvoit prefent fe retira audi. Apres qu'on lui eut reprefente diverfes cho? fes touchant le gouvernement des fib les de fainte Marie, on retomba fur la Tranflation, & les religieufes leprie- rent de differer le vo'iage Sc de leur ac- corder encore quelques jours pour met- tre ordre a. leurs affaires, mais il le refufa, difant qu'il avoit bien d'autres affaires que le monaftere de P. R. Alors quelques fceurs lui dirent que s'il leur eommandoit exprefTement , elles iroient a P. R. des Champs > maisque pour confentir a fortir de leur maifon., & a le demander , comme on vouloit les yobliger, elles ne le feroient pas •, qu'elles protefteroient contre cet- te violence, ainfi qu'elles le faifoient' des ce moment. Ce difcours mit le Prelac de fort mauvaife humeur, & lui fit dire bien des duretes a ces pauvres filles, apres quoi il les quitta. Non feulerhent les religieufes pro-
t^fterent en prefence de M. de Paris ,. de l'injuftice qu'on leur faifoit de les |
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!!. Part ie. Llv. IF. ;yf
faire fortir de leur maifon •, mais elles 166 < "J drefTerent le 29 juin un a&e d'oppo- fition a. ce tranfport & a toutes les- fuites qu'il pourroit avoir. Le premier deffein n'etoit que d'y tranfporter une partie des religieufes , pour affoiblir les autres qu'on retiendroit a Paris •, & ce fut contre cela qu'elles protefterent. Le' mercredi fuivant, premier de juillet elles apprirent que ce deflein etoit change, qu'on les feroit toutes fortir de la maifon de Paris & qu'on n'y laif- feroit que celles qui avoient figne. Erv confequence elles drerTerent un autre afte pour protefter contre ce nouveau deflein , qui quoique plus avanta- geux pour elles en quelque maniere, puifqu'il ne les feparoit point les unes' des autres, n'etoit pas pour cela moins- injufte. Elles declaroient dans cet a£tey 3u'encore que ce fut un foulagement
ans leur affliction de n'etre point feparees de celles que Dieu leur avoir: unies, elles ne confentiroient nean-- moins- a ce rranfport, que pour obeir aux ordres de M. de Paris ; qu'elles- s'oppofoient autant qu'elles pouvoient a toutes les fuites qu'il pouvoit avoir; qu'elles n'infirmoient en aucunema-- niere le droit qui leur etoit acquis & h maifon de Paris, etant perfuadees- |
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1
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J 74 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAL.
~ i(j(jc, qu'elles commettroient une efpece do
facrilege, fi elles abandonnoient une maifon fainte &c confacree a Dieu, en- tre les mains de celles qui avoienc abandonne fa verite 8c contribue a. la captivitede leurs meres. 5CLV. Dans l'intervalle du depart des reli-* M.ae|Paris •(• de Paris, M. PArcheveque fit
cnvoie fon t> ' . 1
grand Vicai-une nouvelle tentative lur celles dela
cht^.'R"maifo? des c.hamPs ^9); II y avoit
cit de cetteenvoie le 7 juin M. Chamillard qui y
* fut recu comme on Pa vu ; il y ren-
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voi'a le 30 de juin M. du Pleflis avec
une lettre pour la mere Prieure , par
laquelle il lui marquoit, que » fi To-
» pinion qu'elle avoir que M. Cha-
» millard etoit leur ennemi declare >
» l'avoit empechee de deferer aux or-
» dres dont il etoit porteur, il ne
M doutoit point que le meme ordre
« qu'il lui envoi'oit par fon grand
» Vicaire, ne fur execute poncluelle"
» ment, & qu'ainfi elle ne commen-
» cat la premiere a lui parler fur les
» chofes qu'il l'avoit charge de lui
" demander, & qu'enfuite elle ne lui
>» fit parler a routes les religieufes en
» particulier. *. M. le grand Vicaire
s'etant rendu a. P. R. le premier juillet,
(«9)ReI. de lavifite, &c. p. jr, col. x. Hift,
4« pci-fc«.
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II. Par.tie. Llv. IV. 37^
accompagne de Madame de Creve-
cceur & d'une autre Dame , remit fa lettre a la mere Prieure, qui l'aiant lue, lui dit qu'elle entendoitce qu'il avoit a. lui dire. Effe&ivement il lui parla fur la fignature, & la follicka furtout fur 1'indifFerence, mais fans fucces (70). Enfuite il demanda a. par- ler aux fceurs. La mere Prieure les aiant aflemblees, elles temoignerent toutes n'aveir rien a dire a M. le grand Vicaire. Elles le prierent en corps de leur faire favoir ce qu'il etoit charge de leur dire de la part de M. l'Archeve- que ; ajoutant que pour lui parler en particulier, elles ne le pouvoient faire parcequ'il n'etoit point leur Superieur. Le grand Vicaire repondit qu'il n'a- giffoit pas en qualite de Superieur, 3u'il apportoit feulement des ordres
e M. I'Archeveque, & qu'elles ne pouvoient fe difpenfer de l'entendre chacune en particulier. Comrtie il vit que cela ne perfuadoit pas, il fomma la Prieure de lui faire parler aux fceurs; elle repondit qu'elle ne pouvoit pas les contraindre : alors il prit le liaut ton, & dit a toutes les religieufes, qu'il les fommoit d'obeir. Il vouloit meme |
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{70) Ibid, p. <}.col. j.Hift. ib|4.
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ll<3 HlSTOrRE BE PoRT-ROTAtr
encore faire cette fommation a cha-^
cune en parciculier , mais la Prieure f interrompit, difanc qu'U fallok aller diner, & quelleluidiroitladerniere refolution des fceurs. Apres le diner, le jjrand Vicaire
aiant offert de mertre fur fon proces verbal, que les fceurs avoient confenti de l'ecouter , a la charge que cela ne prejudicieroit point a leur droit r on s'en contentaj &c les fceurs lui parle- fent l'une apres l'autre environ l'efpa- ce d'un mifercre , excepte la fceur Marie Therefe,a qui il parla allez long-terns. II dit a la fceur Charlotte de faint Ber- nard , qu'il avoit fon obedience que M. de Paris lui avoit donnee a la priere de Madame fa fceur ( Madame de Cre- vecceur ), qu'il la lui fignifteroit en fa prefence. La foeur etant fortie du par- loir , elle dit ce qui s'etoit paffe a. la mere Prieure , qui l'envoia coucher , parcequ'elle avoit pris medecine , 8c fe chargea de repondre pour elle. Apres que le grand Vicaire eut parle aux re- Egieufes en particulier, la Prieure vine au parloir , & il lui dit qu'il avoit char- ge de M. de Paris de l'avertir de pre- parer des lieux pour recevoir quelques> fceurs de Paris. Dans ce moment Ma- dame de Crevecoeur vint fe prefenter |
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II. PARfn. Liv. IF. 377
a la porte ; M. de la Brunetiere alia la joindre, lui park tout bas & rentra avec elle •, puis il dit a la mere Prieure qu'il avoit apporre l'obedience de la four Charlotte de S. Bernard, & que Madame de Crevecoeur venoit pout 1'emmener. La mere Prieure repondin qu'elle s'etonnoit que M. de Patis eut accorde cette obedience a Madame de Crevecoeur , qu'il n'ignoroit pas de quelle maniere elle les avoit trai- tees ; qu'il etoit fort etrange qu'on leur envoiat une perfonne aufli fuf- pe£te que certe Dame pour enlever ae la maifon une de leurs fceurs. Ma- dame de Crevecceur, qui etoit prefen- te, demeura fort interdite. Apres quel- ques autres difcours fur le meme fujet, le grand Vicaire Iut l'obedience , qui portoit que la fceur Charlotte de faint Bernard iroit ou on la conduiroit ; fur quoi la mere Prieure arreta le gtand Vicaire, & lui declara qu'elle n'avoit garde de donner aucune de fes fceurs fur un tel ordre &c entre les mains d'une telle perfonne. Madamed Cr- vecceur fut obligee de s'en a.ller aveo cette reponfe (71). Apres qu'elle fe fut retiree , la mere Prieure temoi- (71) Rel. de la vifite de P. R. des Champs- jgjj
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-—!-------------------" ------------------------------------------------ IIIIIUJI.II
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J7& HlSTOIIU DE PORT-ROIAI.
X66c, gna au grand Vicaire qu'elle etoit fur-
prife qa'il fiit accompagne de cette Dame. Il lui en fie des excufes , pre- tendant qu'il ignoroit les juftes iujets qu'elles avoient de fe plaindre de Ma- dame de Crevecceur. Voila ce qui fe paffa a la vilite de M. de la Brune- tiere. XLVi. La mere Prienre en rendit compte pnVure "e" * M. ^e l>aris par une lettre du z juil-
v. r. des let (7z)|, danslaquelle elle lui marque compie* "parflue ce& une peine extreme pour elle ecm de fade fe voir engagee dans des affaires rapporT aPux pleines de troubles , qui interrompent ordres qu'a- {e famt loifir de la vie religieufe 8c volt apponcsp ^ , j , j /• 1 '
le grand vi-* empecnent de s occuper du ieul ne-
«airi. ceffaire. Apres lui avoir fait le detail de ce qui s'etoit pafle a. l'egard de M.
de la Brunetiere , elle lui parle de Madame de Crevecoeur , & dit qu'elle fe croit obligee de penfer qu'il a ete furpris, quand il a donne une obe- dience a la fceur faint Bernard , par laquelle il la droit de la maifon pour la mettre entre les mains de fa fceur •, que cette pauvre fille apprehendoit tellementde tomber en de fi mauvai- fes mains , que fa' maladie avoit aug- mente ; que la modeftie l'obligeoit de (7i)Voi'ez cette lettre , ibid. p. 55. & hift. des
fctfec.,p. J«,57- |
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II. Partie. Liv. IF. 379
jtaire beaucoup de chofes fur cette
Dame; mais cependant qu'elle avoit penfe que c'etoit obeir, en ne defe- rant point a l'obeiflance que M. de la Brunetiere avoit apportee , puifqu'il avoit cru en la faifant fortir de la maifon, la mettre entre les mains d'une fcEur & non d'une ennemie ; que pour elle, elle avoit auffi juge qu'il etoit du devoir de fa charge de ne point abandonner une de fes fours a une perfonne , avec qui elle ne pou- voit etre fans danger de fon falut, & fans une affliction capable de la faire mourir ou de lui renverfer la tete ; que fi Monfeigneur croioit qu'elle eut manque dans cette occafion a l'obeif- fance qu'elle lui devoit , elle etoit prete a fouffrir ce qu'il lui plairoit d'ordonner , & qu'elle efperoit en me- me terns que la charite lui en feroit un merite devant Dieu. Apres ce de- tail , la mere Prieure terminoit ainfi fa lettre. » II ne me refte plus , Mon- w feigneur, qu'a vous rendre de tres » humbles actions de grace de la bon- » te que vous avez de nous promettre » le retour de nos fceurs en cette mai- » fon. Je vous fupplie feulement que » cette faveur foit entiere , qu'elles v reviennent toutes. Nous ne nous |
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$%0 HrsTOIRE DE PoRt'-RO'lAt,
~TTTT~» fouviendrons plus de toutes floft
' « peines quand nous aurons la confe » lation de vivre enfemble & de n'e- » tre toutes qu'un meme efprit & uri » meme cceur. Cette joie nous fera » oublier toutes nos affli&ions; & j'ef- » pere que nous n'aurons plus d'autre » foin que de nous appliquer a obfer- " ver notre regie, & que vous aurez « la bonte de permettre que nous ne » prenions point depart a. des quef- » tions qui font fi difproportionnees a a notre condition. Nous efperons, » Monfeigrieur, que vous fouffrirez » en nous ce que vous etes oblige " d'approuver dans les plus faints Eve- ft que de France. Puifque vous con- » fervez la communion avec eux j a vous ne nous refuferez pas votre » charite ; & comme la diverfite des » fentimens, fi toutes fbis il y a quel- w que diverfite, n'empeche pas que » vous ne conferviez une parfaite » union avec eux , elle n'empechera »» pas aufli que vous ne nous donniez " votre paix. » la mere Prieure ecrivit cette lettre
le z de juillet, & le lendemain elle eut la confolation de recevoir la plus grande partie des religieufes fidelles» tant de la Coramunauce de Paris, qui? |
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ft. P A R T I E. L'lV. IV. 381
,des exilees , qui furenr amenees a P. i66\,
R. des champs, lout ce qui regarde cet evenement remarquable , eft de- taille au long dans le proces verbal du tranfpon de la plus grande panic de la communaute dans le monajlere des (hamps , Us J , 4 & 2.4 juillet. Dieu , qui rait tout ce qu'il veut des
volontes des hommes, meme de ceux qui ne font pas ce qu'il veut, voulant clonner aux religieufes de P. R. fidelles aia verite, la confolation de revoir leurs cheres meres qu'on leur avoit ft auellement arrachees d'entre les bras, & tirer de la captivite ces dignes me- / res qui etoient exilees & prifonnieres
depuis plus de dix mois , il infpira si leurs perfecuteurs le defTein de les reu- nir routes enfemble dans le monaftere de P. R. des Champs. C'eft ce qui fut execute le vendredi 3 juillet, & les 4 &14 du meme mois de cette annee. 166), Les religieufes de Paris firent le ven- XLVIf-
uredi 3 juillet, jour de leur fortie a sordedes re- cinq heures du matin , pour la der- {jf*^ ^ niere fois , la proceffion de la fainre' Epine. Elles avoient deflfein d'y porter toutes les faintes reliques , & d'aller «nfuite dire le dernier adieu a leurs fheres meres & femurs deced^es > |
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j8i HlSTOlUE DE PORT-ROIAL.
& aux autres faintes perfonnes qui*,
etoient enterrees dans le preau (73) > mais la crainte de n'avoir pas aflez de tems fie qu'elles ne porterent que la fainteEpine.En effet comme elles ache- voient la proceflion , M. de Paris ar- riva avec cinq carolTes a quaere che- vaux 5 ce qui les empecha d'aller au preau. La communaute fe rendit au chapitre ou le Prelat leur park ainfi : » Je crois que la reunion que nous » allons faire de routes les religieufes v de cetce maifon pourra fervir a pro- » curer la paix qu'il y a fi longtems " que je defire ». Il leur parla enfuite de la fignature du formulaire, & les conjura d'emploi'er le tems qui reftoit a demander a Dieu les lumieres qui leur etoient necefTaires, pour connoi- tre la verite & avifer enfemble a ce qu'elles pourroient faire pour pacifier les chofes. Apres quelques autres dif- cours , il lut la lifte de celles qu'il vouloit envoi'er ce jbur-la. a P. R. des Champs. En la lifant, il dit que e'e- toit-la celles qu'il avoit refolu de faire fortir des l'hiver , e'eft-a-dire que e'e- toit les trente qui devoient etre dif- perfees a cent lieues de Paris. Les re- (73) Rel.de la fceurGe- p. 4;. Ptoces-veibaJ du
nevicve de l'lncvnation , 14 juillet. |
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II. P ARTIE. L'lV. IP'. }t}
ligieufes protefterent, & appellerent de j
la violence &c de l'injuftice qu'onleur faifoit en les obligeant de fortir de leur monaftere. Ce fut la fceur Marguerite Angelique Girard qui porta la parole pour toute la communaute: » Nous » fortons , dit-elle , parceque vous » nous l'ordonnez & que vous le com- n mandez •, mais nous proteftons que » c'eft fans prejudice du droit que nous n avons de revenir en notre maifon j> quand nous le pourrons. >» Les ap- pels , les proteltations & les voies de juftice ont autant de force contre la violence, que la colombe en a contre l'aigle. Quantum Chaonlas dlcunt, aqui~ la venienu , columbas (74). La fceur Genevieve de Plncarnation
reprefenta a M. de Paris, que la fceur Elifabeth Madeleine & la fceur Louife Fare , etant malades , n'etoient pas en etat de faire ce voi'age 5 a quoi il re- pondit, comme ai'ant des entrailles de charite : Ma bonne fitle, penfe^ yous que je demande votre fang. Les religieufes fe rendirent fur les
fept heures du matin a la porte, que l'Archeveque tenoit lui-meme ouverte. La fceur Genevieve de l'lncarnation <74) Vierg. Egl. IX. yuf.lj%
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384 HlGTOIRE BE PoRf-Ro'lAi;
— fortit la premiere , & fe mettant a
genoux devant le Prelat, -elle lui dk : m Monfeigneur, nous fortons par vo- » tre commandemenr, parceque nous u jie pouvons pas vous refifter, mais » c'eft fans prejudice de notre appel » & de nos proteftations ». Il fe trou- va dans la cour des religieufes , lorf- qu'elles fortirent, quantite de leurs amis qu'elles eurent la fatisfacHon de voir & de faluer. Elles fortirent au nombre de trente, que M. l'Arche- que fit rnonter & rangea lui meme dans cinq carofTes, fix dans chacun. Il en reftoit encore une douzaine, qu'on re- tint quelque terns , tant par l'efperance de.lesgagner, commeM.Chamillard en avoitflatte M. l'Archeveque , que pour fbutenir la communaute mal afrortie des figneufes, qui, quoique foumifes au Prelat ducote de la fignature, ne lui plaifoient gueres pour le refte. Mais le Prelat trompe dans l'efperance qu'on ■lui avoit donnee qu'il les gagneroit, ou du moins, qu'il les foumettroit a. la conduite de la mere Eugenie & de M. Chamillard, en renvoia , comme rious le verrons , dix en trois voiages avec leurs foeurs converfes ; qui mal- gre les prometfes & les menaces qu'on feur fit, demeurerent attachees a leurs Ic^itim
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II. Part ie. Llv. IV. 385
legitimes meres. Il reftoit encore la I(j<j<.
foeur Genevieve de fainte Thecle Mi- dorge & la foeur Suzanne Cecile Ro- bert , qui refifterent courageufement, foit aux follicitations pour figner, foit a celles qu'on leur fit pour les engager a fe foumettre a la conduite des intru- fes ; enforte que peu apres on les reu- nit aux autres. Enfin bien loin de ga- gner aucune des bonnes religieufes , ils fe virent abandonnes de fix de cel- les qu'ils avoient feduites , deux de la maifon de Paris , & quarre de celles , qui avoient figne pendant leur capti- vite , aiant retrace leur Signature , apres s'etre reunies a leurs meres. Ce fut ainfi qu'on fit fortir les religieufes de Port-Roial de Paris , d'une mai- fcn qui avoit 500000 livres de bien provenant des families de celles qu'on en chafloit, fans y comprendre 5 000 1. de penfions viageres, & qu'on la livra a dix ou douze dyfcoles, qu'on avoit eu la charite d'y recevok. Dans le meme tems que M. de Pa- XLVm
ris travailloit a. envoier les religieufes les reiigieu- de Paris au monaftere de P. R. des £; "'" *s, Champs, il fit fornr les exilees de leurs dans la ma.. |
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prifonsparticulierespour les reuniravec %as£^
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elles. Les unes revenoient glorieufes 6c
Tome F. R
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38(3 HlSTOIRE DE PoRT-RoTAI.
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166$. triomphantes , comme autrefois les
confeifeurs, Dieu leur ai'ant fait la grace de perfeverer dans l'amour de la verite, de la confelTer dans les liens , 8c de triompher de tous les artifices & de jtous les mauvaistraitemens qu'on leur avoir fait fouffrir; De ce nombre etoitla refpe&able mere Agnes, la fourAngeli- que de S. Jean, fa digne & admirable niece p la fceur Chriftine Briquet , la four Euftoquie de Bregy, la four An- ne Eugenie , &c. Les autres revenoient le coeur penetre de douleur, d'avoir eu le malheur de fe lailfer feduire j mais femblables a ces confefleurs done parle faint Cyprien , qui ai'ant ete vaincus dans un premier combat fe re- levoient de leur chute & n'en temoi- gnoient que plus de courage dans un fecond , elles pleuroient avec amertu- me la fauffe demarche qu'elles avoient faite , & regardant avec horreur la main qui avoit figne la malheureufe for- mule, elles attendoient avec impatien- ce l'occafion de reparer leur faute (75). (75) Quot illic lapfl tosefle , & novs atgue
gloriofa ;confefljone funt infuet<e rei pavore trepi-
reftitmi ? Steterant fortes daffe , rediiile ad fe poft-
& ipfo dolore pcenitentiat modum fidem veram , 8c
fafti ad prxlium fortiores; vires fuas de Dei timore
|lt appareat nuper. fubita- collcftas ad Qmnern pa-
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^r
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II. P A R t i e. Liv. IV. 5^7_______
elles etoienr en particulier les difpo- x <j<$j.
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Utions des deux nieces de la mere
Agnes; ce qui temperoir la douleur 8c le chagrin que leur^ chute lui avoir caufes. Le rappel de ces vierges exilees , xnx.
leur fortie de prifon, leur rranflarion g^u^de^s" dans la folitude de P. R. des Champs, Jean fort de leur arrivee dans ce fainr deferr, fontfa caPuvuc- accompagnes de rant de circonftances «difianres , que nous ne croi'ons pas pouvoir nous difpenfer d'en recueillir au moins quelques-unes. La fcEur An- gelique de fainr Jean s'eft rrop iignalee & a trop fait eclarer en route occafion, fa foi & fon courage , pour ne point parler d'elle. Elle re^ut lansetre emue , aneuf hemes du foir, le 2 de juiller , 1'ordre de M. l'Archeveque , pour for- tir du monaltere des- Annonciades 8c aller dans celui des religieufes de fain- -te Marie au fauxbourg S. Jacques (76). La mere fuperieure hit effraiee d'un tel ordre, & ne pouvoir fe refoudre a mettre une religieufe dans les rues de Paris a une telle heure : elle alia meme parler a. l'ecclefiaftique porteur tientiam conftanter & fir- Pamel. LVII. Oxon. LX.
miter roboiailc, nee jam Ed. Bat.*j7, p. Jf.
ilare ad criminis veniam , (76) Rel. de la focus fed ad paflionis coronam. Angelique de S. Jean , p,
*m. Ep- ad Cornsl. E4. i0z , col. « & fuiv.
Rij
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J 88 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAl.' f
~ de l'ordre, pour faire enforte qu'on erj
differatl'execution aulendemain. Pen- dant ce terns la foeur Angelique de faint Jean qui etoit deja defcendue, entra dans le chaeur , fe profterna devant le faint Sacrement, & fe mettant de nou- veaufous la conduite du bpn pafteur , elle lui fit de tout fon cceur cette priere: Si ambulavero in medio umbra mortis non timtbo main , quoniam tu mecum ts. La Superieure ne put rien obtenir de l'ecclefiaftique , & il fallut partir, Quand on eut fait quelque chemin , l'ecclefiaftique defcendit, fans dire ou il alloir : c'etoit pour lui amener Vine compagne , qu'on attendit pres de trois quarts d'heures a. la porte du monaftere des filles de fainte Marie , rue faint Antoine. C'etoit la fceur Chriftine Briquet, qui etant montee dans le carofle , fe jetta auffi-tot au cou de la mere.Angelique , en difant : He, ejl-ce ma tame ? Quoi, repon- die la foeur Angelique de faint Jean, c'ejl mon enfant ! Ce fat tout ce que fe dirent ces deux faintes religieufes 4 cette entrevue & dans tout le chemin. » Mais ces deux paroles , dit la foeur w Angelique de faint Jean elle-meme, v forties du cceur , qui fuffifoient n pour fe reconnoitre, fuffifoient auill |
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II. Part Ie. Llv. IV. 3'g?
tf pour nous combler d'une confola- i> tion j qui ai'ant un principe tout « fpirituel, quoiqu'elle en eut auffi *» un fenfible , fe devoient premiere- s' ment gouter dans le fdence en pre- ss fence de celui qui en etoit le pre- ss mier objet & la veritable caufe . .. *> car certainement cette reconnoif- " fance mutuelle enferme tout dans s) une amitie fpirituelle , & fouvent *« la multiplication des demonftrations » &c des paroles difputent quelque « chofe de la joie qu'elles torment ss dans le cceur , & troublenr l'ac- *> tion de grace que Ton doirrendre ss a Dieuavant toutes chofes, afinde »s lui confacrer les premices d'une li » heureufe moiffon qu'on a recueillie ss apres rant de larmes «. La fceur Angelique commence dans ce moment a gouter de nouveaux fruits de con- folation & de joie •- car l'inquietude qu'ofi lui avoif donn^e en lui faifant accroire qne la mere Agnes traitoir de quelque accommodement, l'avoit toute troublee. Mais en voi'ant la fceur Chriftine Briquet , que Dieu avoir foutenue dans une fi terrible epreuve , fur - tout une fill© a foil age, la joie qu'elle en eut lui donna tant de bonnes efperances 1 qu'elle n'ecouta. |
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39° HlSTOlRE DE PoRT-ROIAL;
i(5(j, "plus fes craintes& ne penfa qu'alouef
Dieu, qui leur donnoit des gages fi doux de fa grande mifericorde en commen^ant a refermer leurs plaies > & a. les rapprocher les unes des au- tres. Elles continuerent en filence leur
route , & arriverent chez les filles de fainte Marie du fauxbourg a plus d'onze heures du foir (77). Apres avoir atten- du long terns a la porte, Sc enfuite dans la cour , elles furent recues par la fu- perieure 8c cinq ou fix religieufes qui prirent beaucoup de part a la joie de leurs prifonnieres en cette occafion , & leur donnerent de grandes marques •d'affection & de tendrefTe.. La fupe- •rieure ai'ant dit quelque chofe a la foeur Angelique de faint Jean pour la con- gratuler de fa delivrance , celle-ci lui repondit : » Helas , ma mere , ce font » des prifonnieres que Ton transfere ■» d'une prifon dans une autre : jene » me flatte pas d'avantage. t Mais la S. Angelique de St Jean ou- intrevue deblia en un moment, fes liens fefaprifony
{*£?, Ad," commeelle le dit,lorfqu'elle vit fes deux fes faurs, & foeurs deliees , qui etoient accourues %all mereaudevant d'elle fous la porte, doni; (77) Rel. Jn-4. p. loji
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II. Parti e. Liv. IV. $91
1'une , favoir la fceur Marie Angeli-
que , qui avoir acTruellement le fnifon de la fievre quarte , n'etoit pas feule- ment habillee. Elles ne lui donnerent pas le loifir de penfer comment elle les recevroit, & a ce qu'elle leur diroir en- fuite de l'affli&ion qu'elles lui avoienc caufee par leur fignature.Elle les vit plu- tot a fes pies temoigner le regret de leur fame , qu'elle n'eut le terns de les difcerner j de forre qu'elles n excite- rent dans fon cceur qu'une rendreflTe extraordinaire. » Je recevois deja de « Dieu , dit la foeur Angelique de « faint Jean , le double de toutes nies « pertes, & j'attendois encore le cen- »* tuple en allant embracer la mere « Agnes , qui nous attendoit dans fon » lit (78) «. Apres avoir adore le fainc Sacrement , elle monta a la cham- bre de cette chere mere , qui la re- «pt avec la meme joie que les An- ges recoivent les ames qui onr echap- pe aux pieges du diable & qui for- tent de la prifon de ce monde. Qui pourroit exprimer les fentimens de ces faintes ames dans cette entrevue ? Lx fasur Angelique entretint peu de terns la mere Agnes , parceque devanr par- tir lelendemainpour P. R. des champs, {78) Ibid. p. 106, col. 1.
R iv
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391 HiSTOIRE DE PoRT-ROlAt.'
\q^, elle voulut lui laifferprendre lerepo*
dont elle avoir befoin ; mais elle la trouva fi remplie de grace & de force , qu'apres fes longues angoifles de la re- paration & des Faux bruits qu'on avoit fait courir d'elle, elle pouvoit dire k cet inftant : Rcjloruit caro mea, & ev yoluntati mea confittbor Domino. |
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LI.
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En meme tems les foeurs de la fceur
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^tonnement Angelique de faint Jean lui racontoient
A^geUa-i"11' leurs aventures, comment on les avoit fat ditetens fait tomber , comment Dieu avoir fait r^cits qu'on * r 1 r •
lui fait de cena,tre une. occahon pour les raire re-
.11!! s'etoit lever de leut chute , par le refus qu'el- pa lie pendant i • r ■ ■ A i i 11
fa capdvi^. les avoient rait de ugner la nouvelle
bulle. » Je relTufcitois des mores, dit »> la fceur Angelique , en apprenant « ces nouvelles refurre&ions ««. On y ajoutoit encore le retour de la fceur Candide , de la fceur Catherine de faint Paul , de la fceur Anne Gertru- de. On lui contoit la fermete de tou- tes les foeurs, & en particulier de quel- ques-unes , en qui elle prenoit un inte- ret particulier ; route l'hiftoire de la fceur Magdeleine Chriftine , dont elle ne favoit pas un mot •, la conftance 8c la generofite de M. d'Alet, & autres Pre- lats, qu'on lui avoit voulu faire croire qui avoient abandonne entierement la caufe de la verite;on lui difoitdes nour |
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If. Part ie. Llv. IV. J95
Velles des amis de P. R. , que Dieu I(5(j.
avoit foutenus , qui avoient juftifie Vinnocence de leur maifon par des apologies. Tout cela etoit aula" nou- veau pour la foeur Angelique de faint Jean , que fi elle fur fortie du fond d'un fepulchre , apres y avoir ete en- fevelie dix mois. Elle reffembloit a ces pauvres efclaves fortis des prifons de Tunis 8c d'Alger , qui ne recon- noilTent plus rien dans leurs pais lorf- qu'ils y reviennent. Elle ignoroit les chofes les plus publiques , & qui etoient prefqu'oubliees dans le mon- de , tant elles etoient vieilles, comme I'itnprelTion des proces-verbaux & des actes , les appels interjettes au Parle- ment & evoques au Confeil , les eta- blilfemens d'Officieres, les lettres de M. d'Angers a M. de Paris , & les reponfes , &e. Elle apprenoit avec une confolation fi extraordinaire la protection de Dieu, quidefendoit lui- nieme fa caufe.en foutenant par .La fiuiflfance de fa grace tons ceux&cet-
es qu'il avoit engages a. fouffrir pour elle , qu'il ne s'en fafloitgueres qu'elle ne ditnon-feulement, c'eft afe{ , mais meme , c'cfl trop. En fe fouvenant de la pauvretedans laquelle eUe avoit eta, elle fe trouvoit fi accablee de tant de Kv.
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394 HlSTQIRE DE PoRT-Ro'lAL.
* richefles, qu'a. chaque nouvelle qu'elle
apprenoit, elle diloit : He mon Dieu. >en voila ajjl^ ; fi j'avois feulement fit cela , cette confolation m'auroit foute- nue long terns dans ma prifon. Cette iainte fi lie avoir de l'inquietude de ne favoir ce qu'elle rendroit a Dieu pour tant de biens. C'eftpourquoi, afin d'a- voir le terns de refpirer & de parler a Dieu dans le filence , pour lui pouvoir offrir feule le facrifice de louange qu'el- le lui ofFroit deja dans fon cceur, elle confentit a fe mettre un peu fur un lir , commeonl'en prelfoit. A peine y fut- elle une demi-heure ou trois quarts d'heure , qu'elle penfa qu'il falloir apprendre aux amis la nouvelle de fa <telivrance par un billet de fa main. Le jour vint bientot , &C elle ecrivoit encore lorfque la religieufe qui avoit foin de la mere Agnes vint favoir de leurs nouvelles, & invita les nouvel- les hotelTes a. voir leur maifon. Mais Feu de rems apres,un aumonier de M.
Archeveque arriva avec un carrolfe, pour les faire partir. La mere Agnes qui etoit encore dans fon lit fe leva promptement , & defcendit aufli-tor. On prit conge de part & d'autre avec routes fortes de marques de charite & de civilice, » Pour moi, dit agreable- |
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II. Parti e. Llv. IK S9S
i* men:la four Angeliquede S. Jean, i66<.~
» qui n'avois ete que fix heures avec
« ces bonnes meres , j'avois plus de
» remerciemens afaire,que toutes les
» autres , parceque je n'y avois regu
« que des careftes & des complimens;
« & celles qui y avoient demeure da-
33 vantage , avoient eprouve de tout.
La mere Agnes monta done en ca- tir.
rofTe avec fes quatre filles ( fes trois m^eparcAdanj* nieces , & la foeur Chriftine) & une & de fes lie- tourriere de fainte Marie. Apres qu el-^" £^ppf/ les eurent die l'itineraire & enfuite primes, la four Angelique de faint Jean pri: une bible enun volume,qu'el- le avoir avec elle, & la prcfenta a la; mere Agnes , qui l'ouvrit & trouva a. l'ouverture du livre le texte fuivant, V& paftoribus qui difpergunt & dllau- rant gregem (79). » Malheur aux paf- 33 teurs qui detruifent & qui dechi- » renr le troupeau de man paturage. 33 Celt pourquoi le Seigneur qui eft 3* le Dieu d'lirael, dit ceci a ces paf- 33 teurs qui conduifent mon peuple •> *» vous avez difperfe mon troupeau ,. 33 vous les avez chaffes dehors & ne » les avez pas vihtes. Mais moi je 33 viliterai fur vous la- malice de vo* |
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^79) Jeieuiie. c. 13,
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R vj
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3^<J HlSfOtM DEPoRT-Ro'lAt;
i6(jf, » defleins, dit le Seigneur, & je raf-
» femblerai le refte de mon troupeau » de tous les lieux ou je les avois jet- t> tes, & je les ferai retourner a leur « maifon. » Pourroit-on douter qu'il n'y eut de la providence dans une tel- le rencontre J Et auroit-on put trou- ver dans tous les livres,tantde l'ancien que du nouveau teftament, un pafTage qui eut une application plus jufte a. tout ce qui s'etoit paffe dans la com- munaute de P. R. & a l'occaiion pre- fente de leur retour. !■"'• Le caroffe qui conduifoit la mere Toutes les re- a ^ o r •• ' ' i r
ligjeufes fe Agnes & ies compagnes aiant ete obli-
lencoiKrent. ge d'arreter a Chatillon parcequ'il eurjoie. fa[l0jt faire ferrer un cheval, cet ac- cident qui retarda leur vQi'age,avan(ja leur joie par la rencontre de leurs fceurs de Paris qui ctoient parties une demie heureapres elles, & a qui cec accident donna le tems de les joindre. Ge fut pour les unes & les autres le fujet d'une grande joie , lorfqu'elles fe reconnurent; mais elles ne purent que fe faluer de loin, parceque les cinq carolTes dans lefquels etoienc les religieufes de Paris alloient fort vite , & que M. le Mafdre qui efcor- toit a. cheval les prifonnieres , empe- choit qu'on ne les arretat,, Ces fix ca- |
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ft. Pa ft tie. Liv.lK f$j
rofTes marchoient de file, & faifoient i^-c-tT
un fore beau cortege, ou plutot une admirableproceffion , car tout le mon- de y benilloit Dieu & fuivoit la croix de Jefus-Chrift. Le chemin etant dif- ficile en de^a de Joui, il fallut defilef & arreter un peu ; ce qui donna moi'en a. ces bonnes religieufes de s'approcher* de fe voir, &c de fe dire quelques mots^ La S. Angelique ne fait a quoi compa- rer ce fpectacle de certe quantite de perfonnes qui fe levoient toutes droi» tes dans leurs carofTes en tendant les mains & s'ecriant de joie d'apperce- voir la mere Agnes , qu'on les avoic tant menacees qu'elles ne reverroient jamais , &c de voir avec elle la foeuc Angelique de faint Jean. Les premie- res paroles qu'elles purent fe dire in* telligiblement, apres ces cris confus , ne furent que des paroles d'actions de graces de la mifericorrle que Dieu' leur avoir faite de les avoir foutenues dans la fidelite a la verite , & de les recompenfer deja de leurs foufFrances par la joie de leur reunion, qui de routes les confolations etoit la plus grande qu'elles pufTent defirer , apres ce qu'elles avoient fouffert d'une fi cruelle feparation. C'etoit un forcroir de joie pour la
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*e,t HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.
J^6(j, mere Agnes &c fes compagnes, a me- fure qu'elles appercevoient parmi leurs fours , celles qu'elles aimoient davan- tase, ou celles qu'elles apprehendoient le plus qu on n eur voulu retenir a l-'a- ris.Lorique la four Angelique appergut la four Candide & enfuite la four Anne Gertrude , elle ne favoit plus que dire a. Dieu de ce triomphe de la grace , finon les paroles du Prophete : Dicant qui redempti funt a Domino , quos redernit de mdnu inimici, & de re- gionibus congregavit eos. Outre les cinq carofles, dans lef-
quels etoient les religieufes de Paris & celui de la mere Agnes & de fes nieces, il y en avoit un feptieme qui marchoit a la fuite de tous, dans le- quel etoient M. de la Brunetiere , M. Chamillard, M. du Saugey, Made- moifelle de Monglat, une religieufe de P. R., une tourriere de fainte Ma- rie (80). liv. Les religieufes etant heureufernent *$£L*l arrivees dans le faint defert, elles def-
p k. d« cendirent de carofTe , prirent leur man- ^ami,s- teau de choeur & allerent d'abord dans L'Eglife fe proftcrner aux pies d« bon pafteur, qui raflfembloit fes bre- (8b)Rel.. in-4,. p. no &fipF.
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II. Partib. Llv. IV. 39^
bis difperfees. La mere Prieure de la *^ maifon qui les attendoit avec l'impa- tience que Ton peut imaginer, vint avec la communaute ouvrir la porte des Sacremens pour les faire entrer. La mere Agnes qui etoit a genoux, s'e- tant levee, marcha la premiere & fiat fuivie de routes les fceurs comme les brebis fuivent le pafteur. Qui pourroit exprimer la joie que ces faintes lilies fe remoignerent de part & d'autre? Ceux qui favent ce que c'eft qu'une union & une amitie parfaite , & qui peuvent comprendre ce que ces Vier- ges chretiennes fouffroient depuis pies d'un an ; les unes par une captivite ef- froi'able ou on peut dire qu'elles etoient enfevelies toutes vivantes, & que tout ce qu'elles aimoient au monde etoit mort pour elles ; les autres par un de- chirement plus cruel que la mqrt, en fouffrant la feparation de leurs meres & de leurs fours, la diviuon & les trahifons de celles qui les avoient abandonees , la domination de per- fonnes etrangeres, & l'attente conti- nuelle de toutes fortes de maux &: d'une difperfion entiere; ceux, dis-je, qui peuvent Ken fefigurer ce que c'effe que de fourTrir toutes ces peines fans, aiicune confolation , imagineront facir |
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400 HfSTOTRE DE PoRT-Ao"At>
T',££,' lement quelle put etre alors la joie dei
3* religieufesdeP.R.ens'ernbra{Tant,& fe
racontant les unes aux autres ce qu'elles
avoient eiTui'e.,pour remercier Dieu qui
les avoit delivrees de tant de dangers j
qui de. tantis periculis emit.
iv. La mere Prieure n'eroir pas telle*
£aPR!eUdesde ment occupee de cette joie , quelque
champs pro- grande qu'elle fiu pour elle , quells
ttti* trTnfl" ne penfat a remplir toute juftice en s'u-
tion , &. en nillant aux demarches qu'avoient faites
appelle- les religieufes de Paris au fujet de leur
forrie. Aiant done prie M.- de la 13ru-
netiere de s'approcher de la porte ,
elle lui parla ainil. » Vous etes temoin,
» Monfieur , que nous recevons nos
» meres & nos foeurs av-. c une extre-
m me joie , mais cela n'empeche pas
» que nous ne nous croyions obligees*
» pour conferver ies droits de la mai-
» ion, de declarer qn'ai'ant adhere a
« reus les appels que ros fceurs ont
» faits 1'annee paiTee , noi s nous por-
» tons audi pour appdlanres dc cette
» tranflation. » La mere Agnes fue
un pen furprif; de ces proteftations ,
mais elle les 'atffafaire, & les apprcu*-
va lorfque la mere Prieu .e lui eut dit
fes nitons (81).
(Bi)Lettre de la mete Prieute, Hift. des pet feci
* P«t. g. 5,7. |
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II. Partu. Liv. IV. 401
Le lendemain ( famedi quatrieme 166$.
du mois ) M. de Paris retourna a P. R. tvi. de Paris fur les fix heures & demie , ^yiSS avec deux carofTes a quatre chevauxnue d'en- pour faire une nouvelle expedition, ^'"champi Auflitot que la communaute en fut'« oppofao-; avertie, elle fe rendir au chapitre ou J^%U fisna* le Prelat leur tint ce difcours. » Les » religieufes d'ici ont etc perfuadees >> qu'elles ne pouvoient fe rendre a ce » qu'on demandoit d'elles, fans faire »/ un peche , & moi je vous afTure » qu'il n'y en a point : je vous le dis » fur ma confidence, fur mon hon- » neur & fur mon caractere. Croi'ez- ■» vous que je ne faffe pas ce que je « fais,en confcience 1 Si j'avois ete un » particulier , j'aurois mene une vie « douce y & je n'aurois penfe qu'a. » m'appliquer a. Dieu , au lieu que je » me trouve charge de peines & de » foins, & fouvent ma fante en eft m intereflee ; mais il faut bien paiTer « pardefilxs, car je vous avoue , me3 »^fceurs , qu'il y va de votre falut, 8c » que l'ennemi ne pouvant vous faire »> tomber dans des peches grofliers i » il tache de vous prendre par la de- » fobeiflTance, par les peches de l'ef- „ prit, &: qui font meme contre le „ faint Efprit, qui ne fe remetteiu n* |
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4&1 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.'
.££? » en ce monde ni en l'autre. » Quo!
ce feroit un peche contre le faint Ef- prit, que de refufer d'affurer avec fer- ment une chofe qu'on ignore ? Quelle illufion ! Quel abus de l'autorite , de VOuloir faire regarder comme un peche eontre le faint Efprit le refus d'obeir a un commandement injufte 1 M. de Perefixe continua & dit, » j'ai laiife *> ici, ce me femble, les efprits les *> plus dociles, felon la connoifTance " que j'ai prife des religieufes de cet- " te maifon , car il en taut pour faire »> fubfifter 1'orKce ; mais je ne fais fi je »> me fuis trompe , car on ne connoit 9* pas le fond des cceurs. » Il paroit effe&ivement qu'il s'etoit trompe ; &c pour qu'il n'en doutat point, la fceur Elizabeth Marguerite la plus ancienne de la maifon, aiant peine qu'il conceit, de fauifes efperances d'elle, luidcclara qu'elle ne feroit jamais rien, qu'elle ne fut reunie avec fes meres &c fes fceurs * & que le peu de religieufes qui ref- toient dans la communaute, etoienc dans la meme difpofition. M. de Pa- ris lui repondit auffitot: vous ma fceur s qui me parlez , vous fortirez des au- jourd'hui ; il nomma enfuite celles qu'il vouloit faire partir , parmi lef- quelles il y avoir cinq fceurs convec* les. |
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It. P A R. T 1 E. L'lV. IV. 40}
Lorfque les deux carofles , qui con- i<J£c,
duifoient ces religieufes , furent dans la campagne elles rencontrerent un au- tre caroffe , dans lequel etoit la mere Prieure de Paris avec cinq fours exi- lees , dont trois , favoir la four An- ne Eugenie , la four Marguerite Ger- trude , la four Anne Marie Euftoquie , avoient ete transferees du lieu de leuc exil, par ordre de M. l'Archeveque 9 au couvent de fainte Marie du faux- bourg faint Jacques fur les neufheu- res du foir du jour precedent, & elles y avoient pafle la nuit. Quelques perfonnes amies de P. R. mr.
a'iant appris que ces exilees etoient ^.'a^sM- en depot dans ce couvent, allerent gne pat m> les vifiter. M. de Sevigne s'y etant |'^rcheva_ tendu des le matin, pour avoir le Riponfefer- plaifir de les voir & de leur rendre ™ £ cefd* quelques bons offices, Ci l'occafion s'en prefentoit, M. de Paris, qui y arriva prefque auffi-tot que lui, lui demanda brufquement ce qu'il venoit faire ; il lui fit enfuite de grandes plaintes de ce qu'il recevoit les Janfeniftes chez lui , difant que fa maifon etoit une retraite de Janfinips; & il ajouta que fi ce n'etoit le refpe£t de M. d'Eguillon il n'y demeureroit pas longtems. M. der Sevigne repondit avec fermete, que fe |
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464 HlSTOIRE ME PoXT-ROl'At.
le Roi etoit le maitre, que s'il Iui
commandoit de quitter fon logis il le feroit, mais qu'il ne pouvoit pas l'em- pecher de voir fes amis , a moins de le mettre a. la baftille •, qu'il les ver- roit toujours , par-tout ou il feroit 8c leur rendroit tous les fervices qu'il pourroit : » Au refte, Monfeigneur, » dit il , n'eft-il pas bien etrange que " vous trouviez mauvais que je vienne * faluer feulement des perfonnes, qui
» me font plus cheres que la prunelle * de mes yeux , & qui font en pri-
» fon depuis plus de dix mois ? »* La reponfe de ce Seigneur paroitra fans dome au le£teur plus chretienne, plus edifiante & plus epifcopale, que la re- pliquequ'y fit M. de Paris, en difant : » Mort D.....vous triomphez
» deja , comme fi vous aviez victoire
i> gagnee. Vous vous imaginez que la * Cour 8C le Roi font fort changes ,
A mais je vous ferai bientot voir le » contraire. Vous vous imaginez que m vous etes au-deffus de tout, parce- » que vous avez pour vous le mande- « ment de M. d'Alet 8c quelques au- •» tres Evcques; mais par D. . . . je » vous ferai bien voir que vous etea »» dans l'erreur «. On voir que les pa- ries du Prelat font affez aflbrties 4 |
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1665.
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II. Partie. Llv. IV. 405
fes expeditions., c'eft-a-dire plus mi- i^6j,
liraires qu'epifcopales.. Aianc donne fes ordres, il alia a P. R. pour faire partir les religieufes , comme nous l'avons rapporti. Pendant qu'il travailloit d'un cote,
ies agens etoient occupes fous fes ordres a ranembler les exilees. L'Officialetoit alle a la creche, fauxbourg faint Vic- tor , d'ou il amena au couvent de fainte Marie, la fceur Agnes xle la mere de Dieu 6c la fceur Francoife de la Croix, qu'il avoir ordrede faire partir avec les quatre qui avoient pa(Te la nuit dans ce monaftere. Il les fit mettre routes fix inferable dans un meme carofie que M, leMafdre efcortoit a cheval. Les religieufes fe trouverent alors LVIir_
reunies dans le defert de P. R., au Les, rciigicy. nombre de foixante-treize , foixante- lebrenUaVste vine de chceur & douze converfes , de la <^<Ha- 1 • / ■ ; c:,& adherent
dont cinquante-une etoient arnveesaux aa„ <£
le vendredi & le famedi, quarante- probations cinq de chceur & fix converfes. Elles en ifuV afe? sjrriverent aiTez a terns pour celebrer fen«- enfemble la fete de la dedicace de l'Eglife , qui tomboit le dimanche fui- vant. Jamais elles ne chanterent avec plus de confolation & de joie fpiri- tuelle : Hue eft Domus Domini firmi- tjr tdif.cata j benefundata ejljuprafif- |
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4©6 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAi;
mampetram. line reftoitplus a la mai- fon de Paris que huit religieufes de -celles qui demeuroient unies de fenti- mens a leurs fours de Port-Roi'al des Champs; c'etoit tout ce qui compo- foit la communaute de Paris avec lept fours converfes 8c les neuf qui avoienc iigne. Deux jours apres l'arrivee des reli-
gieufes exilees a la maifon desChamps, elles firent le 6 juillet un a&e par le- quel elles adheroient a tous les actes , requetes , proteftations & appels, que leurs fours avoient faits pendant leur abfence. Cet a&e eft figne de onze religieufes , favoir la mere Agnes, la merePrieure, Marie Dorothee de l'ln- carnation , Angelique de faint Jean , Agnes de la mere de Dieu, Candide , Marie Charlotte de fainte Claire , Fran^oife de la Croix , Anne de fain- te Eugenie , Marie Angelique de fain- te Therefe, la four Euftoquie , la foeuc Chriftine Briquet. Les exilees etoient toutes revenues ,
excepte la four Helene, quiavoit de- mande a retourner dans l'Abbaie de lJEau, dont elle etoit profeflTe, & la mere AbbelTe avec la four Anne Ce- cile, qu'elles attendoient tous les jours atrribuant a fon eloignement de ce qu'e - fo n'etoit pas encore arrivee. |
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II. Part is, Llv. IV. 407
M. de Paris lui avoit fait expedier x6G^[
le 5 du mois une obeiffance pour ve- lix. nir a P. R. des Champs avec la fceur bL^ vaet'JL^ Anne Cecile. Mais les termes de certe d'abord de obeiflance , dans laquelle M. de Paris bi!ffa"cV ui ne lui donnoit que la qualite de, ci- lui eft en- devant Abbctfef de P. fi., quoiqu'elle £** MEI£ n'eiit point ete depofee , & qu'il n'y Mcaux, & re- edt point eu de nouvelle ele&ion de- jle"Aii!,'nf'* • ri r \ i»; v 11 desCUamps.
puis la lienne, joint a ietat ou elle ap-
prit qu'etoit la maifon , & dont nous -parlerons bientot, la determinerent a n'y point deferer & a refter dans le Ueu de fon exil. C'eft ce qu'elle manr da a M. l'Eveque de Meaux fon frere, dans une lettre , ou elle lui fait part des reflexions qu'elle avoit faites eu difant l'officede faint Thomas de Can- torbery, & dont elle avoit ete fort touchee , c'eft-a-dire de l'homelie qui fait partie de cet office, dans laquelr le faint Chryfoftome parle avec l'elo- quence qui lui eft propre , des qua- lites du bon & du mauvais pafteur : »» J'aurois bien fouhaite , die cette » pieufe Abbeffe, que M. de Paris y » fit un peu de reflexion. Je fouhai- » terois auffi que Dieu donnat a tous .» Mefleigneurs les Prelats la genero- ,» fite & le courage de ce grand Saint »> ( faint Thomas) pour fake entendre ff au Roi la verite, & lui reprefenter |
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40S HlSTOIRE DE PoRT-Ro'lAt.'
.» que c'eft non-feulement une chofe
» honteufe & indecente, mais auffi. » fcandaleufe, d'environner des filles » confacrees a Dieu d'une troupe de » gens-d'armes. Ne fe fouviendront- » ils point du titre qui leur appartient » de protedteurs des Vierges'Et quand 5> pourroient-ils mieux temoigner qu'ils » le font erfe&ivem'ent, que dans cette » occafion fi touchante & fi inouie ? » Pour moi, je vous avoue , mon tres m cher frereque jen'en peux revenirj& » pour vousparleracceurouvertje trou- » ve que fion avoit deflein denousfaire » faire quelque chofe,ce feroit s'ypren- *> dre bien mal, & que quand je n'au- » rois pas les lumieres que Dieu a per- » mis que j'aie eues fur la fignature , » la conduite fi violente qu'on tient, » feroit capable de me faire defier de » la bonte de cette affaire. Je vou- » drois que M. de Paris fut que j'ea » fuis plus fortifiee (8i). La mere Abbefle remercie enfuite
M. de Meaux, de ce qu'il veut bien la garder •, & eile lui dit qu'elle va redoublet fes prieres, pour que Dieu lui infpire de mettre une difiinciion bien nute dans fon mandement. Elle ccrivit dans le meme tems a M. de $1) Journal, p. n. col. i, Paris ;
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II, Parti b. Liv. IV. 409
Paris, felon l'avis de M. de Meaux, &
elle en chargea la perfonne qui avoir voulu faire le vo'iage dans le dellein d'en etre le porteur (83), La reponfe que M. l'Archeveque fit a fa lettre lui ai'ant fait juger , que dans la difpofi- tion 011 il etoit a fon egard , elle n'au- roir aucune juftice a. efperer de lui , elle prit la refolution de venir fe join- dte a fes foeurs , plutot que de de- meurer plus longtems dans line maifon etrangere , 011 elle ne pouvoit agir & fervir la fienne. Elle partit done de li/Ieaux le 2 j juillet, jour auquel M. de Paris envo'ia encore quatre religieu- fes a P. R. des Champs, deux de chceur &c deux converfes, & y arriva le 2 5 avec la fceur Anne Cecile. Elle fut recue avec une joie d'autant plus gran- de qu'il y avoit longtems qu'on l'at- tendoit, & que par fon abfence il manquoit quelque chofe a la fatisfac- tion que leur donnoit leur reunion , laquefle ne pouvoit etre parfaite tant qu'elles ne pofledoient pas celle , qui etoit le chef de leur communaute. Avant que de partir de Paris ou elle palfa pour aller a P. R. des Champs, elle fit an afte avec la fceur Anne de jfainte Cecile , par lequel elle ratifioit, 48}) Ibid. p. ij. col. I,
Tome V. S
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'4f© HlSTOIRE DE PoR.T-R.OlA!.
4(j6 ' confirmoit & approuvoit tous les aftes
des religieufes contre les violences de M. l'Archeveque , de M. Chamillard ,& contre les entreprifes de la foeur Dorothee; dans cet a&e , elle appel- Joit duTefus que M. de Paris lui fai- foit du titre d'abbeffe, quoiqu'elle ne fe fut point demife , & que par la grace de Dieu , elle n'eur rien fait qui meritat la depofition. Cet afte etoit du 15 juillet. Le 3 i du meme mois la communaute drelTa un proces ver- bal de ce qui s'etoit palFe a l'arrivee de l'abbefle & ratifia l'a&e qu'elle avoit drefle 8c figne" a Paris. |
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II. Partie. Liv. K 411
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LIVRE CINQUIEME.
V_v E n'etoit point pour mettre en li- —-rrr
bene les religieufes de P. R. exilees j. dans des maifons etrangeres , qu'on captiv>ted« les avoit rappellees &envoiees danSpelglR"eSdet le monaftere de P. R. des Champs 5 champs dans ,, • • 1 r • leur monal-
ce n etoit point non plus pour raire tete.
plaifir aux religieufes fideiles de la maifon de Paris,qu'on les y avoit tranf- ferees , quoiqu'on afFe&at de leur dire que c'etoit une grace qu'on leur faifoit, & qu'on vouliit meme leur perfuader de demander : c'etoit au vrai, pour les mettre toutes enfemble dans une prifon commune. Voici de quelle maniere ce plan tyrannique fut exe- cute. Le jour meme que M. de la Bru- netiere amena les premieres religieu- fes , c'eft-a-dire le 5 de juillet, il or- donna de la part de M. de Paris a M. Canu de fe retirer -, c'etoit un bon ecclefiaftique fort fimple , qui fervoit de chapelain depuis dix ans : & il le chargea du meme ordre pour M. Gi- rout. Enfuitell donna pour confefleur a cette maifon un favo'iard nommc du Saugey, homme fans experience, .j8c%e feuleoient de 30 ans, quin'a- |
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412 HlSTOIRE DE PoRT-RoTAI.
~~JuJfiTT" vo^r Pas m&me encore ditfa premiere
meiTe. La mere Prieure temoigna fa furprife de ce qu'on genoit leurs conft ciences jufqu'au point de leur donner pour confeifeur un homme qu'elles n'avoient point choifi & qu'elles ne connoiiToient point, elle oeclara en confequence qu'elie en appelloit , & que cela entroit dans leur appel com- me tout le refte. Comme une melTe ne fuffifoit pas les fetes & dimanches pour une fi nombreufe communaute , M. de la Brunetiere dit qu'il enver- roit le lendemain un autre ecclefiaf- tique , qui fut encore un favoi'ard age de 28 ans, nomine Biord. Tout cela n'etoit qu'une partie de l'efclavage ou Ton vouloit reduire ces pauvres filles. 11. A peine M. de la Brunetiere fut il Gamifon 4 parti s qU'un Exempt des Gardes du
chamjs. Corps,nomme de faint Laurentd'hom-
me du monde le plus foupconneux , le plus defiant & le plus terrible qu'on pouvoit choifir , arriva entre cinq &c fix heures du foir,accompagne de qua- tre gardes , Chateaufort, a Hauteror- ge, d'Arzac & l'Efperance (1). L'E- xempt etant monte au parloir, die a la mere Prieure qui s'y rendit, qu'ils |
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(1) Journal, p. 5.
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II; Partie. Llv. V. 413
'Venoient tenir la main pour faire exe-
cuter les ordres du Roi. On lui de- manda quels etoient ces ordres. » C'eft — Madame, dit-il, que nous avons »j ordre du Roi de demeurer ici: je " m'en vais prefentement me faifir de »■> toutes les portes & de toutes les >j clefs, pour empecher la communi- « cation que vous pourriez avoir avec « qui que ce foit au dehors, & j'ai » cru vous en devoir avertir, afin que »•> vous he foi'ez point furprife. » En defcendant du parloir, il de-
manda a M. Charles, fon nom; & apres qu'il le lui eut dit, il lui fignifia l'ordre du Roi avec de grandes mena- ces , s'il y contrevenoit : il en donna un autre a M. Hilaire , a qui M. de la Brunetiere l'avoit deja fignifie , en lui difant que le Roi le confirmoit de nou- veau dans l'emploi qu'il lui avoit don- ne de prendre foin du dehors, mais qu'il fe donnat bien de garde de rien faire outre cela, & de fervir en rien les religieufes pour la communication , qu'autrement il h'y demeureroit pas long-tems , & qu'outre cela le Roi lau- roit bien l'en charier, & qu'il rece- vroit fes ordres bientot. Il ne tarda pas efredtivement. L'Exempt etam alle dans la cour,
S iij
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414 HlSTOIKE DE PoRT-aoiAt?
l66c, trouva qu'on travailloit i une ports in aupres du preffoir, par laquelle on pat Sntdedesfoit dansla cloture, ou il entra.M.Hi- cisfk mSmelaire l'avertit que c'etoit le jardin des 4eci6mif. religieufes dans lequel on n'entroit pas, il lui repondit qu'il favoit bien ion metier, qu'il executeroit fes or- dres. La mere Prieure en etant infor- mee , fe crut obligee de demander a lui parler au tour, pour lui temoigner combien elle etoit furprife de ce qu'il fe faififlbit des clefs de la cloture , & qu'elle ne penfoit pas que ce fut la volonte du Roi. Il repondit qu'il ne faifoit rien que ce qui etoit porte par fon ordre : la mere Prieure 1'aiant prie de faire voir cet ordre , il lui dit qu'on ne demandoit jamais a voir les ordres duRoi, qu'il avoit le caradtere defon pouvoir en main, voulant parler de ion baton d'Exempt. Quelqu'inftance que la mere Prieure fit pour qu'il laif- fat le jardin libre a la communaute , elle ne put rien obtenir (2). iv. Le foir il fit aflembler tous les do- ^^"^meftiquesdelacourd'en bas, & leur
nuit dans le defendit de la part du Roi de fervir ligtoSet8""en rien a Pa^er des Dmets> des paquets*
ou autres chofes, a peine, s'ils etoient |
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(1) Journal. p. e, col. i.
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II. Par.tie. Liv. V. 41J
|*ris fur le fart, d'etre pendus dans i64f*
vingt-quatre heures; des cette nuit les gardes veillerent dans le jardin. La mere Prieure pria M. le Mafdre , ( qui avant que de partir de P. R. ou il avoit amene des religieufes de Pa- ris , lui demanda fi elle ne vouloit rien mander a M. 1'Archeveque ) de repre- fenter la furprife ou elles etoient de fe voir gardees par des gardes du corps , qui paflbient la nuit dans leurs jardins de cloture. Elle lui dit le plus forcement qu'elle put, quil etoit du devoir de M. de Paris de maintenir leur cloture, & de s'emploi'er pour fai- fe celfer un tel fcandale.M. le Mafdre fe retira en affurant la mere qu'il ne* manqueroit pas de rapporter a M. de Paris ce qu'elle venoit de lui dire. Apres tant d'affauts en un meme jour y ces pauvres religieufes eurent encore a. huit heures du foir une nouvelle al- larmeoccafionnee par l'arrivee du Lieu- tenant Civil, qui venoit de la part du Roi faire la viure de la cloture (3). Ce Magiftrat fignifia le foir meme vifiteduLfeu-
fa commillion d la mere Prieure, ce tenant civil qu'il fit avec beaucoup de politefle , champs, temoignant etre furpris qu'on l'eut |
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(?) Ibid. p. 8, sol. 1.
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$ H
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41 (J HlSTOiRE DE PbRT-ROlAl.
YTiTT" charge d'une pareille commiflion, qui
etoit l'afraire d'un grand Vicaire plu- tot que la fienne. La mere Prieure le pria de reprefenter au Roi dans quelle captivite on les reduifoit en leur otant la liberte d'entrer dans leur jardin , ou elles avoient conrinuellemenc af- faire, n'aiant pas d'autre eau que cel- le d'une fontaine qui y etoit renfer- mee, outre la neceilite d'y aller pour cueillir les fruits & les herbes, & au- tres ehofes dont elles avoient befoin. Le Lieutenant Civil fut touche de ces raifons, il promit d'en parler au Roi, & de dire aux gardes qu'il ne leur etoit pas permis d'entrer dans la clo- ture ; il ajouta a cela qu'il efperoit que les mauvais traitemens qu'on leur fai- foit fourrrir, ne ferviroient qu'a. aug- jnenter leur couronne. Le lendemain dimanche 5 de juit-
let, M. le Lieutenant Civil fit la vifi- te de la cloture. Apres l'avoir achev^e il vit la mere Prieure qui le fupplia encore de reprefenter au Roi la peine qu'elles avoient de voir des gardes dans leur cloture , ce qu'il promit de faire, de fort bonne grace/(Unpeu apres qu'il fut parti, les gardes envoYerent dire qu'ils n'entreroient plus le jour dans le jardin , fans les avoir averties , |
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II. Par tie. Llv. V. 417
5c que toutes les fois qu'elles vou- i6^77 droient y aller , elles n'avoient qu'a. le leur faire favoir, & qu'ils n'y en- treroientpoint. La neceffite de prendre l'air dans, tin lieu mal fain , comme ce- lui de P. R., obligea les religieufes d'acceptercettepropofition : ainfi lorf- qu'elles vouloient aller au jardin , el- les avertiflbient les gardes, & ils le lailfoient libre uneneure ou deux, mais pas davantage; & pendant ce terns ils faifoient la ronde autour des murs, quelquefois a pie , d'autres fois a cheval, afin de voir de deflus les montagnes dont la maifon eft en- vironnee , fi elles ne parloient pas aux jardiniers qu'ils menacoient conti- nuellement, que fi on les voi'oit ap- procher de quelques religieufes pour leur donner ou recevoir quelques let- tres ou qu'elque ecrit, on les enverroit auflitot a faint Germain , ou leur pro- ces etoit tout fait, & ou il n'y auroit plus qu'a les pendre (4). La porte etoit gardee jqur & nuit, V-
alternativement par ces gardes. Celui *.« w"gi«- r ° fes font ob-
ferv6esle jouc
(4) On ne leur laifla ordre du Roi de leur 6tet & la nuit.
pas meme ton jours cette le jardin , que dorefna-
liberte pendant leur capti- vant perfonne n'y entre-
vite ; car des 1'annee fui- roit , & qu'elles pour-
vante , l'Exempt leur de- roient Men le voir en fri-
£lara le 14 juin qu'ilavoit che. Journal, f. 83 ,«/.i.
S v
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418 HlSTOIRE 0E PoRT-ROlAi:
66<,~ qui TiWoit gardee le jour, veilloit la
nuit fu^vante dans le jardin, ou ils faifoient la patrouille; & quand ils etoient las, ils fe mettoient fur une paillalfe qu'ils lairlbient pour cela a la vue du dortoir. S'ils entendoient quel- que bruit, ils accouroient auffitot Te- pee 8c le piftolet a la main. L'exempt ne manquoit point tous
les foirs de faire fa ronde dans la cour & dans les iardins ; non content de cela , il veifloit lui-meme, tantot a une heure, tantot a une autre , & paf- foit une partie de la nuit fous quel- qu'arbre pour tacher de furprendre quelqu'un. Tous les jours les gardes entroient
& fortoient dans le jardin a toutes les heures qu'il leur plaifoit ; ce qui re- duifoit les religieufes, non-feulemenr a n'y point entrer, qu'aux heures qu'ils le lailToient libre , mais encore a ne pouvoir ouvrir les fenetres de leur dortoir qui donnoit de ce cote-la. Lorfqu'ils appercevoient qu'on parloit aux jardiniers , ils venoient auffitot ecputer. Ils tenoient meme ces jardi- niers auffi prifonniers que les religieu- fes , ne les laiflant jamais fortir qu'ils ne les accompagnaflent. Les diman- ches & les fetes ils alloient les prendre. |
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II. Par tie. tiv. P. 4tf
|>tmr les mener a la mefTe & a vepres > iC(>\.
les ramenoient eux-memes & les ren* fermoient auffitot, fans fouffrir qu'ils parlafTent a perfonne. A-infi les gar- des du Roi de France devinrent gardes des jardiniers de P. R. Ces gardes faifoient encore d'autres fon<5tions auffi honorables : ils fouilloient tous les ouvriers qui entroient & forroient >. jufqu'a les faire quelquefois dechauffer. On peur juger durefte par ces echan- rillons. C'eft ainfi que les religieufes de P. R. furent traitees pendant deux ans & demij avec l'approbation & par les- ordres de leur Archeveque. Ce Prelat ne trouvant pas encore W-
cette captivite ailez dure a Ion gre , dc M dc Pa„. ehargea M. Chamillard d'envoierune "* ?°<" *«»*■ ire , \ it \ blir unetouti-
roumere de ia racoon (5) •, elleamva a [kKa2.&.
P. R, le 9 juillet, & fut prefentee par
M. du Saugey, qui avoit rec,u Fordre
de M. Chamillard. La mere Prieure
la refufa ,' & en confequence elle reijut
un nouvel ordre de M. de Paris lui-
meme , en forme d'ordonnance epif-
eopale, qui fut fignifie par M. du Sau^
gey le 15 juillet. Elle etoit con^ue era
ces termes t « Hardouin de Perefixe s,
» par la grace de Dieu 8c du faint Sie*
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(flXourn.p,. 11.
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Svj
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________ 410 HlSTOIRE DE pR.T-R.01AI.
t6$t, » ge apoftolique, Archeveque de Pa-
« ris , a notre chere fille en Jefus- » Chrift . la fuperieure de notre mo- « naftere de P. R, des champs , Saluc »» en notre Seigneur. Jugeant qu'il eft » neceflaire pour votre avantage, & « pour des raifons qui nous font bien « connues, de vous dormer une nou- « velle tourriere, nous vous ordon- » nons de recevoir celle qui vous a » ete envoi'ee par notre ordre , & de « la reconnoitre en cette qualite fur w 1'afTurance que nous avons qu'elle « s'acquittera fidellement & a votre " fatisfa£fcion de l'emploi que nous " lui commettons , & qu'elle vous » rendra en cette qualite tons les fer- *» vices que vous pouvez attendre « d'elle ». Il permet enfuite de rece- voir dans le monaftere l'ancienne tour- riere (Madame de Miraumont) , fans qu'elle en puifle fortir. Viit. En vain on lit des representations tePrfUteftiM 1'Archeveque -, bien loin d'y
res les repre-avoir egard , il ecnvit une leconde ftntauonsdesj ttre plus j^g erjcore qUe la pr£>
miere. »» II eft bien etrange, dit-il
„ dans cette lettre, que quelque com- w mandement qu'on vous fafle, vous »> trouviez toujours des raifons pour «? defobeir. ( s'il y a quelque chcfe |
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II. Paatie. Llv. J*. 411
d'etrange ici , c'eft de voir qu'un Ar-
cheveque ne commande rien a des vier- ges chretiennes qu'il tient dans Pop- prefflon, qui ne foit coritraire ou a la Verite eternelle , ou au droit naturel. ) » Avant que de me reprefenter que » c'eft un droic acquis naturellemem a » tout le monde de choifir fes doinef- » tiques, vous deviez avoir confidere " que ce droit nJeft nullem'ent acquis a " des religieufes, qui font dans la re- » volte&dans la defobeiftance formelle » aux ordres de leurSuperiear legitime', » qui a droit de fon cote de fe fervir » de routes fortes de mo'iens raifonna-' • » bles pour les reduire a leur devoir <u On va loin avec de tels principes, & il n'y a point d'extremite a laquelle on ne foit capable de fe porter. Apres ce debut &c plufieurs autres chofes que M. de Paris etale dans fa lettre , il leur commande de recevoir la tourriere qu'il leur a envoi'ee , etant affiire que fa conduite fera fort fage, ( la con- duite de cette fille ne fit que trop voir que M. de Paris n'etoit pas prophete ,) & qu'a lareferve de lesfavorifer dans: leur defobeiftance , elle fera abfolu- rnent tout ce qui eft necelFaire pout les bien fervir. |
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411' MlSTOlM 9t PoR.T-ROi'AI«
Quant a ce que la mere Prieure lu?
avoit reprefente touchant les gardes qui paflfoient la nuit dans leurs jardins, il lui marque qu'on n'auroit pas fouf- fert qu'fls en euffent agi de la force , fi les murailles de cloture avoient ete dans l'etat qu'elles devoient etre , 8c fi la liberte n'avoit pas ete entiere a routes perfonnes du dehors de commu- niquer avec elles (6). Rien n'eft plus> faux que cequ'avance ici M. de Paris au fujet de la cloture : M. le Lieute- nant civil qui venoit d'en faire la vifite avoit declare qu'il y avoit vu la clotu- re , qu'il y avoit quelques petites re- parations a faire , mais que c'etoit: tres peude chofe. La lettre de M. de Paris fut rendue
a la mere Prieure par l'Exempt , en prefence de M. du Saugey, qui fe trou- voit partout. Apres l'avoir lue , elle s'adreffa a luf , & dit qu'elle voioit bien que M. de Paris ne vouloit plus ccouter leurs raifons, mais qu'elle fe croioit obligee de lui declarer qu'elle appelloit de la violence qu'on leuc faifoit en les contraignant de recevoir une tourriere inconnue. Apres cela elle fitentrer Madame de Miraumonxau- dedans. (<")iJbUHI. p. Jc, Col. I.
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H. Partih LW. V. 41 f_______
Quelques jours apres, les religieufes 1 <y<j c.
de P. R. eurent la confolation de voir ix. few digne Abbefle fe joindre a elles : ^^ ce futle z$ juillet, comme nous Pa- tomMes dans vons marque ailleurs, quelle arriva, jjjj£|^lt'padr! &c le 29 du meme mois elle aflembladon de tcwt la communaute pour une action de cha"jac!U'a chapitre qui lui avoir ere refervee de- puis la reunion (7). Toutes les fcEurs etanr prefentes •, la foeur Carherine de S. Paul Pancienne,agee de plus quatre- vingtsans, & les fasurs Magdeleine de fainre Candide , Marie Charlotte de fainte Claire ,. Anne Gerrrude , 8c Marie Angelique de fainre Therefe ». fe prefenterent au milieu du Chapi- tre, 8c fe jerterenr aux pi-es de leurs meres* La mere AbbeiTe dir d'abordj , a la communaute le defTein qu'elles avoienr de fatisfaire publiquement 8c devanc elles, pour la faute qu'elles- avoientfaite en fignant le formulai- re ; elle reprefenta en meme tems aux fours Pobhgation qu'elles avoient rou- tes de prendre part a la grace que Dieu^ leur faifoit de-reconnoitre leur faute gc de leur infpirer le defir d'en faire ]>enitence. Auffitot qu'elle eutacheveV
a fceur Catherine de faint Paul, qui- ■
{7) Jcjurn.p. 14^ col. U cqI.u
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'414 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAl.
i<S(S(i "ok paralytique de la moitie du corps,
demanda pardon du fcandale qu'elle avoit donne en fignant le formulaire, & avec fa langue route begai'ante , &c une voix que l'abondance de fes larmes etouffbit a chaque parole , elle fit pa- roitre en toutes les manieres qu'elle put, le regret de fa faute. La fceur Ma- rie Angelique de fainte Therefe la fui- vit, enfuite la fceur Anne Gertrude , puis la fceur Marie Glaire , enfin la fceur Candide , qui confefTerent tou- tes leur faute l'une apres l'autre, avec une profonde humilite 5 rcpandanr beaucoup de larmes , 8c demandant humblement penitence (8). x. A un fpectacle fi touchant, la com- Humiikcde munaute attendrie mela fes larmes
la mere A- 11 i • / •
gnes, avec celles de ces vierges penitentes ,
& fut penetree de divers mouvemens
de tendreife ., de joie , & de recon- noiflance envers Dieu qui leur infpi- roit de faire une demarche fi fainte 8c fi edifiante. Mais rien ne fut egal a la furprife & a la confufion oil elles fe trouverent, & en particulier la mere Abbeffe , lorfqu'elle vir , apres toutes les autres , la mere Agnes a genoux devant elle lui parler dans ces propres termes: » Ma mere, je vous fupplie (8) IbJdp.jj,colj,
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II. P A R T I E. VlV. V. \i J
*> tres hutnblement , & routes mes
*> foeurs, de me pardonner les fujets " de peines & d'inquietudes que je »> vOus ai donnees , en me fervam »» du terme & indifference que je croiois « en effec n'erre pas fi mauvais , & *> n'exprimer autre chdfe , finon que « je n'etois pas dans une opiniatrete » fur les affaires prefenres , qui fak « que Ton ne veut entrcr dans rien , « & que Ton eft determine a ne ja- « mais rien faire de ce qui pourrok 3* me me fe faire fans intereller la »* confeience , fans prendre garde au »* mauvais ufage que Ton en pourroit « faire, & que devant notre difper- « fion nous etions demeurees d'ac- » cord de ne rien faire du tout fepa- " rees les unes des autres. Je recon- ** nois que cette privation de lumiere " & qe peu de difcefnem'ent, a ete un " jugement de Dieu fur moi & caufe « du peu d'ufage que j'ai fait de la »' grace qu'il nous a fake de nousmet- *» tte en etat de fouffrir pour la verite. » La connoiffance que j'ai eue de ma « foibleife& de mon peu de lumiere, « m'a fait defirer d'etre remife avec » vous pour partkiper a la grace & *» a la force qu'il £ plu a Dieu de re- ** pandre dans la communaute , & je |
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42<£ HlSTOIRE BE PoRT-ROl'At.'
1665. " regards notre reunion , non comme
» un effec de mes prieres, & comme » une recompenfe de mes merites , » mais eomme un fecours qu'il ac- » corde a ma foiblefTe. Je vous nip- s' plie tres humblement , ma mere, » de me donner penitence de cette » entreprife. x*. La mere Prieure de Paris, irhitant »rieure dT l'humilite de la mere Agnes , deman-
JPaito. da pardon des fujets de peines & d'in- quietudes qu'elle ayoit donnes, ai'ant
parue affoiblie & ebranlee pour la figna- ture : & elle remoigna etre redevable a la communaute de la grace que Dieu lui avoir faite de la tirer de ee peril» en ne permettant pas qu'elle ngnat. C'eft ainfi qu'on voi'oit autrefois, com- me le rapporte faint Cyprien , des fi- deles, qui quoiqu'ils n'euflent point offert de l'encens aux idoles, temoi- gnoient leur regret de ee qu'ils avoient leulement eu lapenfeede le faire &en demandoient penitence. **• La fceur Anne Eugenis fit aufli des ftnne ^Ifge-excufes de s'etre fervie du terme d'in-
we. difference, pour obtenir la communion. D'autres foeurs qui croioient avoir fait
quelques fautes particulieres , l'imi- terent; d'autres enfin fe crurenr obli- gees» en axant l'occafion,, de temoir |
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IT. P ARTIE. Llv. V. 417
gner leur reconnoifTance envers les i£<jr,
foeurs, de la charite qu'on avoit eue pour elles •, & entre celles-la, la fceur Marie Agathe la fit d'une maniere des plus touchanres, Ce chapitre etoit une vive image ,
comme nous l'avons deja remarque ,. de ces aflfemblees de chretiens des pre- miers fiecles, dont les uns avoient confefle genereufement la foi dans la? perfecution ; d'autres qui avoient cu le malheur de fuccomber, s'£- tanc releves deleur chute , confeflbient leur faute & etoient difpofes a la re- parer. C'etoit une aflemblee de vier- ges chretiennes, humbles & pleines- «Ie charite, qui ie regardoient egale- ment redevables a Dieu & obligees de s'humilier ; les unes a caufe de leur chute; les autres , parceque fi elles n'e- toientpas tombees, elles s'en croi'oient capables, & que c'etoit la feule mi- fericorde de Dieu qui les avoit diftin- guees : ainfi elles s'humilioient touted egalement & fe demandoient recipro- quement leurs prieres, pour obtenir unenouvelle perfeverance dans les nou- Velles epreuves qu'elles attendoient. La mere Abbefle aflembla encore Aflimbl^
la communaute le jeudi fuivant ( 3 o au fuiet & la juillet) pour un fu|et qui n'edifia pas £UMiK <^£ |
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418 HtSTOIRE DE PoRT-ROlAt.
* jjj^f moins, que ce qui s'etoit pafTe dan
trude , quil'adernblee precedente (9). Ce ft dcmande par- pour ia fe^ Marguerite Gertrude Dv don de deux *■ , „.. °. i / i • r
fignamres. pre, que Dieu avoit touchee depuis ic
retour. Des le moment qu'elle eut fern
l'operation de la grace, elle entr
dans une profonde retraite, fe pr:
vant meme d'affifter aux affemblees c
eommunaute, ou elle ne fe trouva poi:
jufqu'au jeudi 30 juiller, qu'elle s
vint prefenter dans la pofture & It
fentimens d'une fincere & humble p
nitente. Elle lilt elle-meme tout hai
& avec beaucoup de larmes la retra
ration , qu'elle avoit dreffee par ft
propre mouvement & fignee de ft
lang, de deux fignatures qu'elle avo
faites de deux formulaires, de celt
de l'aflemblee des Eveques & du de
nier de Rome. Elle fupplia tres hur
blement la mere Abbefre de lui ii
pofer routes les penitences qu'elle j
geroit neceflaires pour fatisfaire a Die
& lui en demanda quelques-unes
particulier fort humitiantes , en t
termes qui marquoient fon eftii
pour les fceurs qui avoient confer
leurs mains pures & innocentes .
l'horrible tache 4 dont elle avoit foui
lee la fienne. (ce furent ces termes
(«)Journ. p, 16, coi. 1,
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If. Partie. Lev. V. ^t)
Eiie demanda aufli tres inftamment l66jf
l'liabit & le rangfdes foeurs converfes j ce que la mere lui refufa, Jui repon- danc qu'elles etoient dans un terns, oil il ne cpnvenoit pas de faire un fl grand changement, qui paroicroit trop , & que Mi de Paris pourroir prendre pour une infulte. Enfuite Ja mere Ab- oefle & la mere Agnes donnerent a la fceur Marguerite Gertrude plufieurs avis falutaires ; apres quoi la mere Agnes adreflant la parole a la mere AbbefTe, lui dit qu'elles devoient imir ter la conduite des Machabees, qui en-' voierent de l'argent au temple pour fai- re offrir des facrifices pour les ames de ceux qui etoient morts dans le com- bat; qu'elles fprtoient elles-memes d'un long & perilleux combat, dans lequel une de leurs foeurs avoit fuc- combe & etoit morte ; qu'il falloit Sue toutes les autres tachafTent de l'aider devant Dieu & contribuaflent de tout leur pouvoir, afin d'attirer fur ejlefa mifericordepour qu'elle re- Wuyrat la vie 8c la grace qu'elle ayoit perdues. La mere AbbefTe ap- pHia fur cette penfee, & elle permit ^•W les foeurs fiflent les penitences S»'elles fouhaiteroient, felon leur de- votion, pour la foeqr Gertrude a cjuj |
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4J O HlSTOIRE DE PoRT-Ro'lAi;
'j^gr pria la communaute de l'aider de Ces
prieres > ce que routes promirent, & commencerent dans le moment, eft difant le iWj/tTtrtv, proftemees(io). SOU. La fceur Marguerite de fainteGer- ^^p0;/; trade du Pre avoir ete religieufe de la
ce qu'eiie congregation de notre Dame en Flan- to'rdljje^e (i O-Elb eut deslorsquelque con- ies de p. r. noiftance des difpures fur la grace, 8c meme de la perfonne de Janfenius. Aiant entendu parler de la mere An- gelique , dont la reputation avoit deja penetre en Flandres, de la piete des religieufes, de la regularite qui etoit «n {vigueur a P. R., des grandes lu- mieres des directeurs de cette fainte maifon , elle con$ut le defir d'y en- trer, & la providence lui procura le mo'r'en d'executer fon deflfein & d'y etre rec,ue fans apporter de dot. Elle entra a. P. R. le 18 deeembre 1651, .{1 z).La fceurGertrude avoirunfi grand .attachement a. la verite , & etoit dans .nne refolution fi ferme de s'eloigner de tout cequiy etoit contraire , qu'ei- ie tomba malade en 1661 , & futre- duite a l'extremite par la douleur qu'ei- ie eat d'avoir fait, en fignant le man- *io) 7ourn. p. 17,col. edif. T. 1. p. }«i. p. }<j,
(«) #ecr. l*|.r. yi« |
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II. PartiE- Liv. V. 43.1
idemenr des grands vicaires de Paris, "~^7~ .quoiqu'avec diftintlion , ce qu'elle ayoitrefolu de ne jamais faire.De telles difpofitions donnoient lieu de croire , qu'elle feroir la plus ferme de routes a refufer la fignature , que M. de Pe- refixe exigea quelcjues annees apres. Aufli fur elle urie des premieres, & xiv.
-du nombre des douze que le Prelat^S^? enlevale 16 aour 1664 , pour les exi- ler (13). Elle furd abord envoi'eeavec la S. Candide aumonaftere deTrenel- Ie,d'ou elle fur Transferee 15 jours apres aux Annonciades de faint Denis. Elle v fur reflerree, comme [les autres exi- lees , dans une ettoit,e captivite; 8c eur beaucoup a foufFrir tant de la parr des religieufes, que du confeffeur & autre? qui la preflbient de fe rendre, & de- bitoient en fa prefence mille calom- nies conrre Meilieurs de Porr Roial, Sc conrre les religieufes de certe fain- te maifon. M. l'Archeveque vinr lui meme plufieurs fois lui livrer des af- fauts. Enfin cette pauvre fille iuccom- (tj) Voi'ez la lettre jio, avoit ecri: a cette reli-
T. i , P. M4& M. Ar- gieufe, ignoroitalors foa
tiauld i un Eveque ( M. changement , & fi elle
d'Alet) four recommtnJer avoit recu fa lettre. La
a /isprierej deux ferfonnes. ijo aun Eveque, contient
L'une'de ces perfonues eft un detail considerable fuf
Ja fceur Marguerite Ger- la fceur Margueriie Gtt-
trudg. H. Arnauld , qui Crude.
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4J I HlSTOIRE DE PoRT-ROlAL.
ba. Deux chofes c.ontribuerent a fa.
chute , comme elle l'a reconnu depuis, la premiere d'ayoir rrop multiplie les pratiques exterieures en accumulant neuvaine fur neuvaine „ ce qui mar- quoit urie inquietude de defiance , &c un defaut de foumiflion a l'epreuve ou la providence l'ayoit mife. La fe- conde tut de n'avoir pas ete exacle a fuivre les regies de conduite que la mere Agnes avoit dreflees pour le terns de persecution : au lieu de gar- der un humble filence , comme il etoit prefcrit par ces maximes, & de met- rre a fa bouche une parte & desferrures comme le fage l'ordonne (14), elle fe faifoit un plailir de tenir tete, & de refuter ce qu'on lui obje&oit. La pre- fomption s'y joignit encore , & fe manifefta par plufieurs chofes qu'elle dit a la fuperieure, fayoir qu'elle fe fentoit plus forte que jamais , qu'elle avoit redoute la vifite de l'Archeve' que , mais qu'elle ne la craignoit plus. Voila ce qui conduifit la foeur Ger- trude a la fignature. Une maladie qu'el- le eut, caufee par un abfces au cote , en fut l'occafion 8c la trifte epoque. Ses geolieres profiterent adroitement de cette circonftance, pour lui pre- (it) Ecd. 18 , ih, cher
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II, Par tie. Liv. V. 43$
cfier i'obeilfance, & la prefler de fe "7^7
rendre. Au lieu de mettre une haie d'i- pine a /is oreilles], elle ecouta desdif- cours feduifans, les tenebres fe repan- dirent fur fon efprit: elle commenca a douter quel etoit le parti le plus sur, de figner, vu quece n'etoit qu'un ac- quiefcement de foumiffion , comma le declaroit l'Archeveque ; ou de ne pas figner , parcequ'elle feroitun men- ibnge. Malheureufement, au milieu de cesdoutes, elle ecrivit a M. de Pa- ris pour lui demander un confefTeur: ce Pre!at,jaloux de faire une conquete, ne lui envoia pas M. Cheron qu'elle lui avoir defigne, mais vint lui me- me, & lui arracha enfin le 14 Janvier 1665 la fatale fignature de fon man- dement , qu'elle foufcrivit en mar- quant expreflement que ce n'etoit que par le principe de I'obeifiance aveu- gle. Cette demarche lui attira de la Eart du Prelat & des Annonciades
eaucoup de complimens & de louan- ges, qui ne la rendirent pas plus tran- quille. Quelques jours apres, elle ecri- vit a M. l'Archeveque, pour le prier de venir la confelTer comme il le lui avoir offert ; il y vint, & apres l'avoir confeffee, il lui dit de communier a la fete de la Purification. Tome F. T
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434 HlSTOlRE DE PoR.T-R.GlAL.
" . /-f, La four Gertrude ecrivit plufieurs
166 >' 1 li o •'i
xv. lettres vers ce terns-la : i", a la mere
tUe 6crit 4 prieui:e QxiUe chez les Urfulines de plufieurs per-. .. . ., ■ r ■
ibnnesduiieu la rue Montorgueil, qui lavoit rait
J fa captivi- prier <}e luj apprendre les motifs de fa fignature. i9 a la four Melthide , qui avoit figne 8c qui temoignoit moins d'attachement aux meres, qu'elle n'en avoit auparavant > furquoi la fceur Gertrude lui fait des reproches aiTez vits : $° a. la fceur Fran^oife Claire, a qui die marquoit qu'elle n'avoit fi- gne qu'en s'aveuglant pour obeir : 4" a la mere Angelique de faint Jean, qui defiroit favoir les raifons de fori cnangement. Cette lettre ne fe trou- yaftt pas affez cGnforme an gout & an vuesdes Annonciades, ellenefut point rendue : 50 l'efpece de calme, dont la four Gertrude jouit pendant le care- me fuivant, s'etant dilfipe , ells ecrivit a M. Arnauld, qui avoit etc foa direc- teur pendant plufieurs annc'es, pour lui expofer les motifs de fa fignature. Le fuperieur des Annonciades, qui etoit ami de MM. de P. R. vou- lut bien fe charger de faire tenir la lettre. La premiere chofe que fir M. Arnauld lorfqu'il l'eut recue , fut de prier pour cette pauvre fille feduite, & de la recommander aux prieres des |
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II. Partis. Liv. V. 455
amis, fpccialement a celles da faint kj^c. Eveque d'Alec, auquel il ecrivitpour ce fujet. Enfuite il montra rillufion qu'elle s'etoit faite , dans une reponfe qui vraifemblablement ne pairvint pas jufqu'a elle. Malgre le trouble & l'in- quietude que cette malheureufe figna- Hire caufoit a la fceur Gertrude , juf- qu'a lux dormer meme la penfee de faire une retractation pour s'en deli- vrer, elle eut encore la fbiblefle de fi- gner la nouvelle bulle d'Alexandre VII, que M. Chamillard lui apporta au mois de juin. La crainte qu'elle eut de demeurer plus long-terns captive, 11 elle refufoit de figner, fut ce qui la determina a. le re'ndre. Elle* avoit un grand defir de retourner a P. R. & etoit furprife qu'ori la laiflat a faint Denis apres avoir fait ce qu'on dcfi- roit d'elle ; elle le temoigna meme a M. Chamillard, qui refpe&a afifezpeu la verite pour lui repondre que ce n'e- toit pas fon avantage qu'elle retour- nat, parceque la maifon etoit route en defordre. Quel defordre y avoir il dans cette maifon, iinon celui qu'y •caufoient la fignature 8c celles qui avoient figne. XVI> Le terns de la delivrance de cette Elle revient
captive arrivaenfin. M. l'ArchevcqueQ^m*' d,"s Tij
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4$<> HlSTOIRE DF. PoRT-ROlAI.
alia lui meme a. faint Denis le 3 juil-
let 1665 la lui annoncer ; mais elle fut fort affligee de ce que le Prelat apres lui avoir dit qu'il avoir fait con- duire a P. R. des Champs un nombre de religieufes , ajouta que pour elle, il la mettroit dans la maifon de Pa- ris. Elle lui temoigna qu'elle ne pou- voit fe refoudre a etre feparee de fes meres & de fes fceurs , & le fupplia de vouloir bien l'envoi'er avec elles; ce qu'elle obtint avec beaucoup de peines. Le meme jour elle partit de, faint Denis, & fut conduite a Paris dans le monaftere des filles de fainte Marie du fauxbourg faint Jacques, ou elle trouva la mere Prieure , qui erpit forrie de celui des Urfulines de la rue montorgueil. Celleci, furprife de voir qu'on envoi'oit a P. R. des champs la foEur Gertrude , lui dit ; jyou v'unt done que vous vene{ avec nous a'iant toutjigne? » Celu ejt ainji, » repondit elle modeftement, je vais » avec vous, je relTemble a Ruth la » Moabite : Votre Dleu eji le mien, voire demeure fera la mlenne , je vivrai & je mourrqi avec vous. Le lende- rnain 4 juillet, elle fut envoi'ee a, P. R, des champs avec la mere Prieure 8cc, Dans la route, elle prion en. filence. |
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II. Partie.Z/v. V. 4^
demandant a Dieu qu'il lui fit connoj- ms< tre clairement, fi elle avoit fait une bonne ou mauvaife action en fignant; que fi elle etoit mauvaife , il lui don- nat la force de reparer fa faute. En arrivant a P. R. elle fut fort xvir.
etonnee de voir la maifon gardee par &&<£ Di
des gens armes. A peine eut-elle ref-
pireTair pur de ce faint defert, qui
lie fourfroit rien de fouille , que le
foleil de juftice commence a luire pour
elle , & a diffiper les tenebres de fori
efprit. « Dieu par fa bonre, vou-
*> lant rallumer le feu qui s'etoit eteint
*■» en elle , comme il l'avoit permis,
" afin de lui faire connoitre que les
« grandes ardeurs qu'elle avoir te-
>* moignees auparavant, etoient un
»» erfet de la grace, & non pas de fa
»> propre verm, lui ouvrit les yeux
»> des le lendemain qu'elle fut arrives
« pendant quelle affiftoit a la mefi-
*» fe ('i 5), & lui fit voir combien elle
» etoit dechue de fon premier etat.
— Cetre vtie la toucha fi vivefnent,
»> qu'elle fe refolut d'en faire peni-
»> fence tout le refte de fa vie (16). «
AVant fair avertir la fceur Angelique
de faint Jean, elle fe jetta a fes pies
Of) La premiere mefTe , qui fe difoit aprcs Primes..
\if) Necr.p. i£j. Tiij
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4J8 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAI."
~\G6$. en lut difant avec larmes ,j'aipcche,
je fuis refolue de faire penitence de ma faute qui eft tres grande. La foeur Angelique la releva & lui dit, » voila » qui eft bien , c'eft un commence- « merit. Non , repliqua la foeur Ger- » trude , mon affaire eft faite avec » Dieu •, j'ai fait ma retractation en » fa prefence •, j'attens que M. l'Ar- » cheveque vienne , pour la faire en- » tre fes mains. » Apres cette pre- miere demarche, qui rut affez fecrete, elle derneura treize jours en retraite dans fa chambre fans parler a perfon- ne, & fans que perfonne lui parlat de ce qui la regardoit. La plupart meme des foeurs ignoroient quelle eteit fa difpoiition a&uelle. Le plus grand nombre ne l'apprit que lorfqu'elle leur donna l'humble & edifiant fpe&acle dont nous yenons de parler. xvni. M. de Paris avoit donne un terme li^jf'^de trois mois aux religieufes, pour v. r.. Ju i« prendre leur parti fur ce qu'il exigeoit difo^^d'elles, & le leur avoit fait (ignite toicbant la par une ordonnance du 17 de mai. fotnmuTaeire.dU Lorfque ce terrrie approcha , elles fe crurent obligees de declarer leurs fen- timens & leur demiere difpofition touchant la fignature du formulaire > afin de prevenir en quelque forte 1© |
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II. "P art i t.'Liv. V. 4J9
fcandale que pourroit caufer a l'avenir ]
leurconduite a l'egard des perfonnesqui n'etant pas aflez informees de leurs dtf- pofitions pourroient en juger par la maniere dont on les traiteroit, fi au bout de ce terme on pouflbit les cho- fes aux dernieres extremites, comme on les en mena§oit. Cell dans cette vue , qu'elles drelTerent le 16 aout l'a&e fuivant qui contient un examen de leurs difpojiiions touchant la Jigna- tfire du formulaire , ou elles font voir qu'elles n'ont aucune raifon de douter que leur refus nefoit legitime. " Nous , fouffignees, Abbeflfe ,
» Prieure 8c religieufes des deux mo- » nafteres de P. R. du faint Sacrement, « de prefent raflemblees ,pour la plus » grande partie en cette maifon de P. »> R. des Champs , nous voi'ant pro- »» che de la fin du terme porte par l'or- »' donnance de Monfeigneur l'Arche- » veque pout la fignature du nouveau » formulaire du Pape , c'eft-a-dire » qu'apres avoir cprouve pendant une » annee entiere toute's fortes d'afflic- »> tions, nous fommes fur le point de » voir prononcer un jugement fur no- » tre conduite , il nous a paru nccef- » faire d'informer encore une fois nos *> juges d'une chofe qu'ils ne fauroient T iv
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44° HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.
- !$£<, " apprendre que de notre propre re-
» moignage, 8c de laquelle neaninoins " depend route la juftice , ou l'injuf- » tice de l'arret quils prononceront » ou pour nous ou centre nous. Car » il ne s'agit que de montrer quelle » eft notre difpofition interieure, ve- „ ritable & fincere,pour juger que fi » cette difpofition n'eft pas mauvaife , « nous ne faurions etre criminelles de » ne vouloir pas faire au dehors cequi » y feroit contraire ; ou que fi le de- » faut eft dans cette difpofition inte- » rieure, il ne fervkoit de rien de » changer de conduite a, l'exterieur , »j puifque ce ne feroit qu'ajouter la »» diffimulation a l'erreur & a l'igno- » ranee. » L'on n'auradone pas fujet de trou-
» ver a redire que, dans une occafion « ou les loix nous donnent droit de » recourir a tous les tribunaux pour » defendre notre innocence, les trou- « vant tous fermes pour nous, ou »> plutot nous trouvant nous-memes » reduites dans une telle captivite , » qu'il nous eft impoflible de faire en- » tendre nos plaintes a qui que ce foir, » nous nous procurions au moins la m confolation d'ecouter ce que notre » propre confeience nous dit pour no; |
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II. Parti e. Llv. V. 441
i> tre defenfe, puifqu'elle eft le feul 166c,
m temoin que Dieu ecoutera un jour »y dans le jugement qu'il rendra bien- » tot des accufees, des accufateurs 8c » des juges. Nous croions non-feu- m lement que nous nous devons a nous m memes cette juftice , mais auffi que » c'eft un refpec~b dont nous fommes » redevables a l'Eglife & a fes minif- » tres, de n'attendre pas lesdernierS m effets de leur indignation, fans avoir « fait encore une derniere inftance , i> pour leur perfuader que la defobeif- " fance qu'on nous attribue ne pafle- *» roit point pour un crime , s'ils dai- » gnoient confiderer la difpofition de » notre cceur , que nous leur expofons » avec autant de fincerite qu'a Died » nieme,& s'ils vouloient bien recon- » noitre qu'elle nous met dans une telle » impuiflance qu'elle les empecheroic « allurement eux-memes de nous con- » traindre a la furmonter, s'ils avoient >» confidere a quel peril ils expofent » notre falut. Car if eft fansdoute que »» Ton ne pretend pas nous obliger « a violer la loi. de Dieu , &c nean- " moins nous ne voi'ons aucun milieit " pour pouvoir eviter de le faire en ne « laifTant pas d'obeit a une ordonnan- v ce qui nous commande de figner 8c T v
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_______ 4*4 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.'
1665. » de jurer une chofe que nous n0
» cro'/pns point certaine , & de pren- « dre a ten>oin Pieu racme , les SS. » Evangiles & toute l'Eglife de lafin- » ceritje de notre creance a ce point de « fait, en rnerne-temsque notre coeur " nous defavoueroit & nous condam- » neroit d'un par jure ; puifque tous » les.doutes qui nous outarretees juf- » qu'ici, fubiiftent toujours dans no- » tr,e efprit & en quelque forte s'y » augrnentent plutot qu'il ne fe difli- w psnt, par routes les chofes que nous » vo'ions & que nous eprouvons dans >> Ip. fuite de cette affaire. » La derniere bulle qui a ete faite
?> pour la terminer, non feulement >» ne nous aiTure pas de ce fait, que »». nous avons tant de peine a croire, » §c fans la creance duquel none fi- w gnatureferoit.criminelle 5 mais elle »j nous donne un jufte fujet de pen- » fer qu'il eftpeut-etre aufli peu aflu- » re que les nerelles des V Proppfi- w tions foient dans le livre de M. m d'Ypres, qu'il eft peu certain qu'il » y ait en France une nouvelle fecle » & de nouveaux heretiques qui la » foutiennent, quoiqu'il paroifle qu'on » en a perfuade fa Saintete, puif- » qu'elle temoigne n'ayoir point d'au- |
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II. Partie. Liv. V. ' 44^
v tre fin en ordonnant la fignature de "" l » ce formulaire , que d&'chever de la w detruire. » On nous a dit fouvent fur cela ,
» que nous nous faifions une conf- » cience erronee en fuppofant du mal » ou il n'y en a point, Sc qu'il n'y en » peut avoir a fuivre la conduite de » l'Eglife. Nous favons bien qu'il y » a des occafions, ou en efFet il peut n arriver qu'on fe previenne de fcru- » pules mal fondes , que Ton doit fou- » mettre a la lumiere & a l'autorite des » perfonnes que Dieu a etablies fur " nous: mais nous fupplions tics hum- » blement que Ton confidere , qu'il » eft tout-a-fait impoflible que cela » arrive dans cette rencontre , parce- 11 qu'il ne s'agit d'autre chofe que de n favoir qu'elle eft notre difpofition w interieure , pour juger fi elle nous » permet de donner la marque exte- » rieure de creance Sc d'approbation » que Ton nous demande; & nul hom- » me, quelqu'autorite , quelque lu- ll miere qu'il ait, ne le peut favoir » mieux que nous-memes. » Si done une fois nous avons re-
»> connu devant Dieu que notre fenti- •» ment interieur n'eft point conforme »> au ferjnent que Ton nous oblige de Tvi
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444 HtSToiRE de Port-roiai^
» fake » & que nous ne croi'ons poit » ce que nous protefterions par nc » tre fignature de croire fincen » ment, il eft clair que ce ne pei « etre une eonfcience erron.ee d'at j» prehender de prendre le nom c » Dieuenvain, & de mentir au fair » Efprir & a route l'Eglife , a la fac " de laquelle nous rendrions ce v » moignage. Et ainfi notre peir » n'eft nullement un fcrupule, q " nous fafife apprehender qu'il n'y ; » du mal a donner cerre fignature » mais une evidence route entiere » que nous violerions la loi de Di " en faifant un menfonge fi authen » que. Il ne nous femroit de ri » de nous- vouloir rapporrer a fa* » des autres, qui favent moins q » nous memes ce qui fe pafte dans n » tre cceur; & Ton ne nous perfu » dera jamais qu'il y ait aucune fiire » de faire violence a une lumiere » manifefte, pour nous foumettre » l'autorite de nos fuperieurs , en noi » appmant de l'efperance qu'ils noi » defendroient un jour devant Diet « puifqu'ils ne pourroient pas delivre » de la rigueur de fon jugement de w perfonnes qui fe trouveroient dej » condamnees par l'accufacion de Lett u propre eonfcience. |
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II. P A a t i e. Llv. K 44j
» II nous femble que les chofes con- f> fiderees de la forte, on ne pourroic » trouver a redire que la crainte de u Dieu nous empechat de faire ce que » nous proteftons ne pouvoir faire fans » blefler la verite & la fincerite chre- " tienne, parceque nous n'avons point » la difpofition qui doit repondre a* « la fignature. Mais ferons-nous done » feulement criminelles en ce'que nous » doutonsd'une ehofedontlaconnoif- » fance nous eft inutile , favoirfi des n herefies que nous avons condamnees » par-tout oil elles font, font dans " un livre que nous n'avons jamais 'T lu , & que nous fommes tout-a-fait " ineapables de lire? Et trouvera-t-oti " fort extraordinaire que nous puif- •> fions demeurer dans ce doure, en » unechofe de fait comme celle-la, » quand le Pape l'affure, en meme- » rems que nous le voi'ons perfuade » d'une autre bien plus importante 8c " qu'il fuppofe neanmoins aufli cer- " taine, dont nous croions fort bien » favoir tout le contraire , non fur » des rapports d'autrui, ma is fur beau- » coupd'experiencesperfonnelles, qui ■ fans doute engagent beaucoup da- » vantage a croire , que ne pent fair© f» l'aucorirei |
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44<? HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.
» Nous prevo'i'ons ce que Ton pourra
» dire &c ce qui a deja ete dit a quel- » ques-unes d'entre nous, que pour « avoir reconnu de la vertu & de la « piece dans des perfonnes, on ne « peut pas etre aflure qu'elles n'aient p> poinr de fentimens neretiques fur » des points de do&rine qui ne regar- n dent point les mosurs : rnais nous « repondons a cela, qu'y ai'ant tou- ts jours beaucoup de peril a juger te- » merairement du prochain lorfqu'on 7> n'eft pas tout-a-fait certain de fon » crime, il y en a bien davantage a « entrer dans ces fouocons , lorfqu'on f eft prefque afturi de fon innocence ; t> &c que fi Ton veut obliger des per- _« fonnes ignorantes comme nous a « foufcrire aux ordonnances de l'Egli- « fe, il taut done leur laiffer au moins » la liberte de confulter la feule lu- ?» miere de la juftice naturelle qui con- m vient a tous les homines , puif- » qu'elles n'en ont point d'autre pour ?> fe conduire dans un pas fi dange- » reux ; & cette juftice nous obligera » nous autres religieufes de P. R. a » juger des autres par nous-memes > » enforte qu'apres avoir faill'experien- i> ce de combien de calomnies on a » tache de noircir la purete de notre
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II. Par.tib. Llv. V. 447
w foi depuis rant d'annees , nous de-
» vons etre fort inftruites que ce n'eft » pas une chofe nouvelle, d'accufer » d'herefies des perfonnes & des au- » teurs fort catholiques ; & que nous " aurons un jufte fujet decroire, que " ceux que l'on pretend aujourdnui » qui defendent une nouvelle herefie » en France, en font auffi eloignes w qu'ils 1'etoient de nous inftruire dans » les erreurs 8c les mauvaifes maxi- » mes qu'on leur a attributes & £ » nous fi long-tems & contre route » forte de verite & de juftice. » Nous ne fommes point capables
« de nous imaginer jamais, que nous « puiilions meriter d'etre retrancnees " juftement de la communion des fi- " deles , a caufe feulemenr que nous » ne voulons pas juter d'un fait, done ?» npus ne faurions avoir d'aflurance » tant qu'il fera contefte, & que nous » ne fommes pas difpofees a croire f fens examen &c fans reflexion tout le « mal qu'on impofe a des perfonnes , » en qui nous n'en avons jamais re- ?» connu ; & e'eft en effet ce que nous v avons trouve etre fi eloigne des in- « tendons de M. 1'Archeveque, qu'il »• marque expreflement dans fa der- *» niere ofdonnance pour la fignature |
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44-3 Histoire de Port-roYai:;
~ » du nouveau formulaire , que ii l'ort » n'a pour le point de fait une fou- » million veritable & fincere, la fx- » gnature feroit une pure illufion aux »» ordonnances du faint Siege & des " Eveques. Dieu nous garde de com- » mettre jamais une telle faute. Nous » favons trop qu'on ne fe moque point » de Dieu, ni de ceux qui tiennent » fa place •, & c'eft en cette occafion » que nous craindrons la parole que » Jefus-Chrift adreffe aux Pafteurs , » Qui vous meprift, me meprife, puif- » qu'il n'y a point de plus grands me- » pris que de fe jouer des ordonnances » de l'Eglife, en donnant des paroles » deguifees 8c des fignatures trom- » peufes qui lui temoignent une fou- »* miffion & une creance que Ton n'a » nullement dans le cceur » Nous croi'ons done nous devoir
w tenir tout-a-fait exceptees, par ces » paroles de l'ordonnance de M. I'Ar- » cheveque, du commandement qu'il » fait aux autres de figner , fi ce » n'eft qu'on pretendit qu'il nous de- » fend a la verite de figner fans cette » creance, mais qu'il nous commande » d'avoir cette creance. Mais ce fe- » roit, ce nous femble , lui faire in- »> juftice que de lui attribuer ce dd- |
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IL Par tie. Llv. V. 449
» fein, puifqu'ai'ant diftingue claire- » rement le rait non revele d'avec les » dogmes , c'eft-a-dire l'autorite hir- " maine d'aVec l'autorite divine, il « n'auroit garde de vouloir confondre » les devoirs qti'ils nous demande " pour l'une & pour l'autre, ni nous " obliger par voie de commandemerit " d'ofrrir a la creature le plus grand » de tous les facrifices , don: l'nom- » me eft redevable au createur, qui eft » celui defon jugement & defa rai- « fon , en nous contraignant dere- »> noncer a toutes nos penfees 8c a tous « nos doutes, pour captiver notre ef- »* prit a la creance d'un fait humain , »•> dont nous ne pouvons avoir de preu- >■> ves, 8c que la confternation qu'il » a excitee dans l'Eglife 8c plufieurs « autres circonftances nous rendent »» aftez incertain. » Que li, fans avoir egard a. l'im-
•' pttiiTance 011 eette difpofition nous " reduit, on ne laiftbit pas de nous « vouloir traiter en defobeiflantes 8c " nous faire fouffrir la peine qu'on " n'impofe dans l'Eglife qu'aux plus *' grands crimes, nous n'avons rien a " repondre, finon que nous ne fom- » mes point obligees d'examiner les p raifons de la conduice de nos paf. |
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45© HlSTOIRE DE PoRT-Ao'lAt.
» teurs : lis en rendront compte a ce-
» lui dont ils font les miniftres. lis » favent quel droit ils ont d'en ufer »» ainfi. Mais notre devoir confiite a » tacher de fatisfaite a ce que Dieu f demande de nous dans cette occa- » fion particuliere , qui eft de fuivre » inviolableroent fes faintes loix , & »» de ne point attefter par un ferment » temeraire une chofe dont nous ne » fommes point afTurees , quelque » mal qu'il nous en puifTe arriver. » Nous favons que l'autorite toute
>i fainte de l'Eglife ne peut pas nous » commander de pecher ; mais ceux »» qui en font reyetus peuvent biennous » faire fouffrir tout ce qu'il plaira a »• Dieu de permettre , & nous ne de- » vons pas trouver ctrange d'etre trai- »> tees a la vue des hommes comme n le fils unique de Dieu l'a ete pout » notre falut , quand meme les Btt* » niftres en viendroient a cette extre- »> mite de nous charger de maledic- » tions & d'anathemes , comme lui- » meme a bien voulu l'etre pour nous- » Son obei fiance jufqu'a la mort fera v toujours le modele de la foumiflion »» & de l'humilite que nous confer- n verons avec fa grace dans toute la *> feverite dont il plaira a nos pai" |
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II. Parti e. Liv. V. .451
» teurs de continuer d'ufer envers " nous. L'epee fpirituelle de l'Eglife, » qu'elle leur a mife entre les mains > » ne fauroit faire des meurtres; elle » n'a point le pouvoir de nous fepa- » rer de Jefus-Chrift qui eft nocre » vie , puifque le peche feul en eft » capable. Elle ne coupe dans fa vi- " gne que les.branches qui ne portent " point ce fruit de la charite qui nous .» unit a Dieu & a nos freres; & li elle » taill^ quelquefois de celles qui por- » tent des fruits , ce n'eft que pour » les faire rapporter davantage par » la patience. » II peut bien arriver que les fide-
" les enfans de l'Eglife femblent pour » un tems etre arraches de fes marn- " melles divines ; mais le Pere des » iiiifericordes , qui eft , par un titre » particulier, cornme le dit faint Ber- .» nard , le Pere des miferables, ne " fauroit manqiier de donner du pain » a fes pauvres. C'eft lui-meme qui » nous aflure que quand la mere fe- " roit capahle d!oublier l'enfant qu'elle " a mis au mpnde & de n'en avoir " pirie , pour lui il ne nous oubliera " jamais. Nous mettons notre affu- " rar.ce en fa promelfe , & nous avons * d'autantplus fujet de nous aflurer de |
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4$! HlSTOIRE DE PORT-ROlAt.
» fa bonte pour l'avenir, que nc
» en faifons deja l'experience dep » un an : car nous n'aurions pa's » fubfifte'r depuis rant de tems quv » nous rie'n't feparees de la fainre ra » par la plus dure & la plus fenfi » privarion que Ton puhTe faire foul » a des enfans de Dieu 8c a des r » sieufes confacrees au cuke parti » Tier de ce myftere d'amour, s'U » nous avoit nourries pendant cette » mine, d'une manne cachee qui to »> be dans le defert , en nous faif » trouver dansla meditation de fa pa » le, dans l'amour de fa verite, & d » raccompliflement de fa volonte n meme force que nous avons efp » de recevoir en participant d'une n niere vifible a ion divin Sacrem » Que s'il permet encore qu'on n » lailTe de plus en plus dans un en » abandonnement,ceferaalui ,cc »» me au fidele Createur, que nous »» commanderons nos ames , en fo » frant par fa volonrc, felon l'avis » faint Pierre dont nous avons d'a » tant plus lieu de nous promettre » protection dans cette rencontre » que nous favons que fan zele pou » le Dieu de verite ne s'irrite qi K contre ceux qui mentent au fai |
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II. Part ie. Liv. V. 45$
i> Efprit, & qu'il voir que c'eft la feule
» apprehension de commettre cette " faute , qui nous empeche de rendre >> a fon fucce/Teur un remoignage de « notre obeuTance en un point oii elle » neferoitpas iincere, & 011 elle n'eft w point d'obligation , bien qu'au refte " nous foyions pretes a donner notre » fang & notre vie plutot qne de per- " dre l'union, la dependance, l'obeif- " fance, le refpedt que nous devons » a l'autorite du chef vifible du corps » facre , dont Dieu nous a par fa mi- » fericorde fait la grace d'etre les ■> membres , quoique nous fo'fons les " plus infirmes de tpus. Tels qu'ils •' font » Dieu n'en a point fait dans > ce corps cjui foient inuriles: les plus
' foibles font les plusneceflaires, fe- » Ion J'Apotre , & la tete ne peut > point dire a fes pies , je n'ai que
' raire de vous , encore que Ces pies • ne puifTent pas voir & difcerner ' comme fes yeux , ni executer fes ' ordres & les fouferire comme fa ' niain. On fe doit coutenter qu'ils 1 portent le poids du corps & celui de l'autorite, fans fortir de l'humi-
lite 8c fans s'abbattre. Tant queDieu, nous fera la sjrace de nous conferver CQtte difpohtion , nous ne ferons |
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4J4 HlSTOIRE BE PORT-ROIAI/
» point feparees du corps de l'Eglife>'
» de quelque confuflon qu'on nous „ couvre , & quelqu'enfoncees que » nous puiffions etre dans la fange, »> le mepris Sc l'afnidtton. » L'Eglife.eftencorebanniedans une
„ terre etrangere; elle n'eft pas arrivee » a cette ville iainte, ou elle n'aura » plus befoin d'aucune lumiere em- >> pruntee , parceque la verire meme « iera fon flambeau. L'etat de cette » vie n'eft pas fi aflure ni fi heurcux : » elle n'y voir encore les chofes divi- " nes que par la loi, & les chofes hu- u maines que par la raifon. La foi ne » trompe point, mais elle eft obfcure; » la raifon fe peut meprendre & ne » penetre pas tout •, ainfi il n'y a au- ij cun fujet de fe fcandalifer de voir » arriver dans l'Eglife , qu'on y con- » damne des perlbnnes qui ne font ,1 point coupables , &c que fes guides » & fes condu&eurs marchent dans U » nuit, ne reconnoiflfent pas quelque" 5J fois fes propres enfans , & les pren- « nent pour des etrangers. Le jour %, de Dieu viendra , qui difllpera les » tenebres de cette longue nuit, & »> alors tous les enfans de l'Eglife fe re" » cohnoitront 8c s'embrafleront avec » ioie. Nous nous confolons d'autant |
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II. Partie. Liv. V. 455
m plas , que nous cro'ions que tout ce
r< qui fo paffe prcfentement nous eft
" un avertiffement que ce jour s'ap-
» proche. Sa lumiere decouvrira les
v fecrets de tous les cosurs ; 8c ceux
» qui l'auront merite recevront pour
" lors des louanges de Dieu meme.
» En l'attendant nous n'avons pour
" nous confoler, que le temoignage de
» notre conference , & elle nousdon-
" ne-une.fi forte'aHurance que e'eft a.
» la veiite feule , a la charite & a la
« juftice que nous nous attachons
j) dans cette rencontre , que bien loin
*> de nous reptocher que nous nous
'» feparons de l'obei (lance que nous
» devons aux miniftres de i Eglife ,
w elle nous perfuade au contraire que
m nous n'eiimes jamais une pareille ni
" une plus importante occafion de leur
» temoigner combien nous leur fom-
" mes uncerement aftujetties ; puif-
» que la plus grande preuve du refpect
» & de l'amour que Ton a pour un
" pere , eft de fouftrir fans alteration
" fes plus mauvais traitemens , fans
» s'ecarter jamais ni de l'honneur
" qu'on eft oblige de lui rendre, ni
» de la fidelite qu'on doit a la juftice >
" qui ne font point deux devoirs in-
H compatibles, mais tres aifes' a allier,
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4)6 HlSTOIRE DE PoRT-Ro'lAt.
» pourvu qu'on juge des chofes, non
» pas felon l'apparence, mais d'uii
» jugemenr droit &c equitable , qui
» nous fafie difcerner que l'obeiflan-
» ,ce necelTaire que nous tendons a la
» loi de Dieu, ne peut jamais pafter
» avec juftice pour une defobeitiance
jj formelle aux ordonnances de l'E-
" glife , dont la volonte certaine etant
« de faire matcher fes enfans dans la
» voie fure des commandemens de
» Dieu,s'ils renconttentquelque pietre
v de fcandale dans les otdonnances de
» fes miniftres, ils fe doivent tenir
» afTures que fon intention eft qu'ils
» s'en detournent , parceque ce ne
» peut etre fon deftein de les expofer
» a tomber. Elle les porte au contrai-
» re dans le fein de fa charite , quand
« leur foiblelTe & leur inipuiffance les
» empechent de furmonter la difficulte
» du chemin par lequel on veut les
» faire marcher , & qu'on leur com-
» mande des chofes qui patient leur
« capacite & leut obligation.
» Comme nous venons dedecouvrit
f, fmcerement celle oil nous nous trou- » vonsreduites au fujet de la nouvelle » fignature que Ton nous demande , & - que M. l'Atcheveque a des preuves *< aftez convaincantes qu'il faut que » cette
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II. Par.tie. Liv. V. 457
*> cette impuiflTance foit bien reelle 8c " bien infurmontable , puifqu'elle " nous a fait furmonter toutes les pei- " nesles plusdures& les plus fenfibles, » par lefquelles il a trouve a propos de " nous eprouver depuis un an •, il y a » fujet d'efperer qu'il nous dira enrin » ce que Dieu difoic autrefois au pere » des fideles , qu'il a prefentement re- » connu que nous craignons Dieu, 8c » qu'etant perfuade que nous n'agiflbns - que par ce principe , il fe contentera » du temoignage nncere que nous lui »» avons rendu de 1'integrite de notre " foi, par nos precedentes fignatures du » 5 & du 1 o juillet de l'annee paflee » 1664., 8c nous permetrra de rentrer » pour tout le refte dans le repos 8c » dans le filence qui eft fi convenable » a notre condition , 8c qui nous ren- » droit plus capables d'attirer par des » prieres continuelles les benedictions » de Dieu fur fa perfonne facree. « Fait en notre monaftere de P. R.
» des champs, relu 8c figne de nos " feings, le 16 aout de la prefente an- " nee 166$ : figne dans l'original, de »la mere Abbefle , 8c de toutes les " religieufes au nombre de 64. Cet afte tut encore figne par d'auties re- ligieufes am revinrent a P. R. , par Tome k V |
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458 HlSTOIRE PE PoRT-Ro'lAI.
les quatre (17) que M. le Mafdreame-
na le z 6 de ce mois , & par deux au- tres. |
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i66y
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xix.
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Ces faintes prifonnieres n'etoient
f«Mivtwd« Pas feulement privees de tous les fe-
Cccoars me- cours fpirituels, elles l'etoient encore
"fsjm, Guides fecours temporels pour les befoins
captjvite, du corps , du moins ne pouvoient-elles
les obtenir qu'avec d'extremes diffi cul-
tes (18) : on en peut jugerpar le trait
fuivant. Une des foeurs anciennes
nommee Marguerite de la paffion etant
tombee dangereufement malade, com-
me il n'y avoit point de Medecin a la
maifon, ondemanda a l'Exempt, s'il
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(17) Ces quatre auttes
ftoient les fceurs Jeanne de fainte Colmnbe, Fran- $oife de lainte Beatrix , Madeleine de fainte Aga- the j Catherine de fainte lu'.i'ic ; on les avoit rete- nues a Paris, dans I'ef- petancc de les gagner , mais aiant prie M. de Paris de les reunir a leurs feeuts, & lui a't'ant remoi- gne qu'elles ne lui decla- ieroient point leurs dernie- les difjolitions touchant fon ordonnance, il leur denna obeifiance pour y venir, ainfi qu a deux au ttes de chceur , qui Ten pricrent : mais comme (lies etoient ptctes de par- tir, M. Chamillard & la mete Eugenie retinrun les |
deux plus anciennes ; fur
quoi les quatre autres fi- rent beaucoup d'initances ? jufqu'adire qu'ellcsne par- tiroicnt point les unes fans les autres, mais tout fut inutile relies partiremdone feulemem quatre , avec deux converles, & arri- verent le is aouta P. F.i des Champs , ou atarit r£pport6 larraniete dont elks ctoient forties > * tout ce qui s'etoit palle j on en drefla proces ver- bal date du i< aout, jour de l'iittivee des quatre religieufes, qui fignerent le 19 du meroe mois le
grand atte que nous ve-
nons de rapporrer. (18) Jou.ro. p. 1} > c<*r
J. |
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■II. P a b. t i e. Liv. V. 459
ne permettroit pas qu'on en fit venir *
un de Paris. II dit qu'il ne le pouvoit permettre fansun ordre duRoi.Ii fallut done aller en cour afin d'avoir l'agre- ment du Roi, qui renvoi'a a l'Arche- veque. Celui-ci confentic que Mon- fieur Renaud, que 1'on avoit deman- de , allat voir la malade ; niais a con- dition qu'il n'entreroit point dans la cloture fans etre accompagne de la tourriere de confiance ; qu'il ne par- leroit que de ce qui concernoit la me- decine,& qu'il ne recevroitni ne don- neroit aucun billet. Le Medecin arriva le lod'aout, entra avec la tourriere, & vit la malade qu'il jugea etre en danger de tomber bientot dans un d6- lire, qui ne lui lailTeroit plus la liber- ie de le confefler; il donna meme par ecrit l'etat de la malade. La -mere Prieure 1'envoia a M. l'Archeveque avec une lettre , dans laquelle elle lui difoit une chofe fort remarquable tou- chant certe religieufe , favoir qu'elle demandoit a Dieu depuis un an , qu'il lui fit la grace de mourir ; & quelle avoit redouble fes prieres depuis l'or- donnance du 17 mai, par laquelle M. de Paris leur avoir donne un terme de trois mois pour ligner le nouveau for- nuilaire ; qu'elle etoit rombee malade ViJ
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4<>0 HlSTOIfl-E DE PoRT-ROlAt..
l6(,it le 17 aout, jour auquel expiroit le
terme accorde par le Prelat •, que la re- ljgieufe fe crut exaiicee au moment que la maladie la frappa ; qu'elle fe re- jouiffbit & difoic qu'elle etoit fur des rofes j apres avoir ete fur les epines ( par .la privation des Sacremens de- puis 8 mois) en penfant qu'elle etoit pres d'aller a Jeius-Chrift , fans que rien put la retarder de s'unir a lui, que les fautes dont elle deuroit de fe puri- fier par le Sacrement de penitence. La mere Prieure conjure le Prelat au nom de la malade $c de toute la commu- naute de ne lui pas refufer un confefr feur, & elle indique M, le Vicaire de faint Medard , qu'elle a appris qu'il avoir deja envoi'e a quelques-unes des 3{X, fceurs de Pans. U yieaire M.l'Archeveque envoia chercher le cii eptioit i vicaire deS.Medarddes les cinq heures p. a. par m. <JU matin, le dimanche x 5 d'aout (19), ^ue. lui montra la lettre qu ll avoit recue , £e plaignant que la mere Prieure le
traitoit toujours comme un petit gar- ^on : il lui demanda s'il ne la connoif- ' foit pas ; le vicaire ai'ant reponduque non , il lui dit ayec mepris : » c'eft de. ».» ces du Fargis, il n'eft pas que vous » n'ai'ez entendu parler de fa mere ; (iy) Jautn. p. 15, col. 1.
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II. P A R T I E. L'lV. V. 4^1
»» eette fille a un terrible efprit, il
>» n'eftpas moi'en d'en rien faire : pour » moi, dit-il, je fuis refolu de ne lui » plus jamais parler, m II le charges eniuite de dire aux religieufes de P.R., qu'il avoir pris la refolution d'aller le vendredi fuivantles excommunierlui meme, ou d'y envo'fer un de fes grands vicaires ; » mais n en parlez poinr , t> dir-il, a cette Prieure , car il n'y a » rien a gagner aupres d'elle. Il eft » bien etrange, pourfuivit-il, que ces » filles ne fe rendent poinr, & qu'el- *> les fouffrent d'etre excommuniees w li long - terns. » Il ajouta que cela n'etoit pas fans exemple , & qu'il avoit appris par un abbe qui Petoit vena voir depuis pen, que des religieufes Benedictines n'aiant point voulu fe rendre a ce que defiroit d'elles un Ar- cheveque de Milan , coufin & fuccef- feur de faint Charles, il les avoit ex- communiees , conformement a ce que, lui avoit mande le Pape a qui il s'etriit adreiTe-, mais que ces religieufes fu- rent fi entetees & fi opiniatres, que toutes monrurent dans I'excommunica- tion, qui dura cinquante ans. Apres tous ces difcours & autres femblables , ( qu'une perfonne du dehors apprit *|e M. le vicaire de faint Medard lui V iii
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4<5l HlSTOlRE DE PoRT-ROlAt.
" I(5<Sf. meme) il le fit partir en lui recom-
mandant de bien dire a ces filles qu'il
falloic figner , 8c lui remit un mande-
ment pour le porter.
xxi. On lui donna pour compasnie un
Idee que les , , , _ * . i r °
gardes m5- des gardes de Pi K. des champs , qui
nies avoiem d'abord qu'il fut dehors parla ainfi a
founUrei. M. le Vicaire : - je vous plains, Mon-
» fieur, pour la commiflion que vous
» avez de traiter avec ces filles de
» P. R. , il faut etre bien ferre pour
»» leur parler. Ce font des filles routes
« d'efprit; une feule de leurs paroles
m en vaut trente des autres. Je crois
» bien, Monfieur , que vous etes un
m habile homme, mais auffi,en verite,
» il le faut etre pour leur parler.Ces da-
« mes fon braves filles, ce font desSKS.
« mais elles ne veulent pas figner, on
» leur couperoir plutot la gorge que
" de le leur faire faire; elles chantent
» comme des anges. »
xxn. M. le Vicaire arriva a. P. R., mais
M. le vic*i- la malade etoit hors d'etat d'entendre,
re de s. Me- & fans connoilTance. Apres qu'il eut
dard fe com- i i \ \ u 11 1
potte a p. R.ete long-tems aupres d elle , la mere
des champs. AbbeflTe & les deux meres Prieures lui temoignerent qu'elles defiroienr de lui parler dans une chambre voifine 011 elle le conduifirent.il y trouvatreize ou quatorze religieufes; &c s'etant aflis |
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II. Par tie. Liv. K 4.6}
dans un fauteuil, il leur ditqu'il etoit TJT! venu chez dies pour y faire deux per- fonnages ; le premier etoit celui de M. l'Archeveque ; le fecond etoit le fien en qualite d'ami. Pour fatisfaire a celui de M. l'Archeveque , il leur die qu'il falloit figner , finon elles feroienc excommuniees , & tira un mandemenc de fa poche. Apres cela, il fie fon pro- pre perfonnage, exhortant ces faintes filles a. avoir bon courage. Il leur ra- conta toutes les nouvelles qu'il iavoit, & leur dit qu'elles devoient etre bien confolees dansleurs peines, & qu'on faifoit de belles apologies pour elles. Puis reprenant le perfonnage de M. l'Archeveque, il les exhorta a la figna- ture mais en raillant ; » fignez mes " fceurs , leur difoit-il, il le faut; car *> il ne faut pas qu'on puifie dhe dans » la fuite du terns que M. votre Ar- » cheveque ait eu le dementi : on » pourroit vous laifler comme vous » etes; mais il on ne vous faifoit point " figner, on diroit auflitot que les " religieufes auroient triomphe de » leur Archeveque , & des le lende- » main on ne manqueroit pas de l'im- » primer, c'eil pourquoi il faut fi- '> gner.» Apres cette raillerie , le bon •homme fit encore un autre perfonna- V iv
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464 Histoire de Port-roial.
ge , celui des amis d'Eleazar, 6c le exhorta a figner ( iniqua mifirati&n commotus ), en leur difant que leu fignature ne tomberoic jamais fur 1 fait, parcequ'il n'y a point d'autorit dans I'Eglife qui puifle obliger a 1 creance de ce fait. Ces raifons ne per fuaderent aucune des religieufer L'entretien fe tennina par la prid qu'elles lui firent de vouloir fe cha ger de quelque papier de confequena ce qu'il refufa par la crainte d'eti fouille par les gardes. En fortant, l fit au Commandant de la garde de plaintes dont les religieufes 1'avoien charge, fur ce qu'il avoit toutes le cchelles de la maifon entre fes main Le Commandant refufa de les rendn & dit qu'il voudroir pouvoir fervir c Dames, dont il connoiifoit le merit- mais que le Roi l'ai'ant chotfi poi faire ce qu'il faifoit, il falloit qu' s'en aquittat, <k qu'ainfi il le pouvc aifurer que jamais ville ou citadel n'avoit ete fi bien gardee que cet Abbare. M. le vicaire partit apres c la pour venir rendre eompte de fa mi fion a celui qui l'avoit envoi'e. Apr fon depart la communaute ecrivit lettre fuivante a M. l'Archeveque po liu tcmoigner fa douleur du trait |
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II. Par tie. Liv. V. 465
«ent rigoureux que 1'on faifoit a, leur TggTT fceur malade, en faifant defenfe de lui adminiftrer I'extreme onftion. » L'union fi parfaite que Dieu a L*™r*d
« forroee par fori efprit entre nous leiigieufes a » routes , dont vocre grandeur a des J* f^L1^."! w preuves aftez parciculieres, nous ne de leurs » rend auffi fenfibles I la difgrace de £su/s aai3r » notre fceur, que fi nous recevions » toutes enfemble le meme traite- » ment: c'eft pourquoi, Monfeigneur, » vous ne rrouverez pas etrange que » tous les membres d'un meme corps » vous faffent entendre enfemble la ■ douleur qui leur eft commune, en » vo'iant qu'on refufe a une mouran- » te une gcace» dont l'Eglife meme » fe tient redevable a fes enfans , » parceque Jefus-Chrift l'a rendue de- " pofitaire des merites qu'il lui a ac- " quis par fa mort, aim qu'ils eufTent » de qnoi paier ce qu'ils devroient A " fajuftice, en recevanr la grace qu'iL » leur eonfere par les derniers Sacre- » mens. Cette conduite dont on ufe » a notre egard eft en foi fi farpre- » nanre, furtour dans les circonf- » tances particulieres oil Ton nous- »■ refufe par vos ordres de don* » ner l'extreme-Onction a notre pait- » vre foeur, qui n'eft deja plus capa- |
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______4^6 Histoire m Port- roiai.
1665. " ble de communier, que nous dou-
» tons , Monfeigneur , li votre Gran- » deur a fuppofe Ie cas tel qu'il eft , " lorfqu'elle a donne cet ordre. Ce » qui fait que nous ofons pren- » dre ia liberce de lui reprefenter avec » toute forte de ref pe<5b, que fans parler >» des raifons qui nous ont juiqu'ici » retenues de figner le formulaire > il » eft de l'equite de reconnoitre dans » cette rencontre que l'on n'a pu. te- » nir pour coupable d'aucune appa- » rence de defobeiffance une perfonne » qui n'a pas encore declare fa der- » niere refolution fur ce fujet, par- » ceque le terme qu'on lui a accorde j» pour y penfer n'eft pas encore ex- " pire ; & laquelle etant tombee dans » une maladie qui lui ote tout-a-fait » la liberte de fon efprit, n'eft plus en » etat, ni devant Dieu, ni devant » l'Eglife , qu'on puifle avoir droit » d'exiger d'elle des conditions im- *> poffibles avant de lui conferer ce » dernier Sacrement. Si Ton vouloit » joindre d cela , quelle eft la per- il fonne , fur laquelle on fera lepre- » mier exemple d'une rigueurqui n'en " a point d'egale, nous vous rendrions » toutes temoignage , Monfeigneur , » que c'eft peut-etre l'ame la plus in- |
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II. Par tie. Llv. V. '467
" nocente, la plus droite , la plus 1665.
» fimple & la plus foumife qui foit » dans notre communaute. Depuis » trente-cinq ans qu'elle porre le voile, » elle a toujours ete un modele d'une » obeiflance parfaite, &que l'onpour- " roit nommer aveugle , fi elle n'a- » voir ete eclairee dans cetre derniere » occafion de la fignarure, oil la crainte » de Dieu, qui rempliiloir fon ame, - lui avoir donne cant d'eloignemenc » de l'injuftice & du deguifemenc » qu'elle auroit eu en le faifant, qu'el- » le a cm que la mort lui etoit infini- » ment plus avantageufe que de voir » plus longtems fa confcience expofee » a prendre parr dans des contefta- » tions, dont fon efprir etoit fi fort » incapable. Il paroir que Dieu a ecou- » te les prieres & les larmes qu'elle » arepanduesen faprefencectepuisplus » d'un an pour ce fujet, avec des fouf- » frances interieures fi extremes, qu'el- » le n'a pu mieux les exprimer depuis » meme qu'elle eft malade, qu'en nous >» difanr qu'elle etoit defcendue tou- " te vivante dans l'enfer. Apres cela, " Monfeigneur, votre Grandeur vou- » droir eile ajouter a rant de peines 8c " a une privation des Sacremens qu'el- »* le fouffre avec nous depuis plus de V vj
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468 HlSTOIRE DE PctRT-ROlAt.'
x66$. " hitit mois, elle qui avoir accoutu-
» me depuisplufieurs annees de fe nou-
" rir prcfque tous les jours de ce pain
» quoridien des enfans de Dieu avee
» une piete &c une ferveur extraordi-
» naire J Pourriez-vous, Monfeigneur,
" laifler mourir dans le dernier ab.in-
» donnement,une perfonnedontDieu
» s'eft declare le protecteur , puiiqu'il
» eft dir dans l'Ecriture, que c'eft lui-
" meme qui garde les perits , & qu'elle
« eft vraiment de ce nombre ? Nous
" ne faurions croire , Monfeigneur ,
» que vous vous y puifliez refoudre ,
» & nous voulons plutot efperer que
» vous changprez vos ordres, quand
» vous aurez appris l'etat oil eft notre
» malade que vous n'avez peut-etre pas
» fuquimenacatd'unemortfiprompte;
.y II pourroit meme arriver forr aife-
« ment qu'elle previendra votre re-
„ ponfe. Pour ton egard , Monfei-
» gneur , il y auroir fujet de fe confo-
» ler, quand meme cela arriveroit ,
»» ou que votre dernier fenriment ne
« lui feroit pas plus favorable : car
» c'eft une verire cerraine que Dieu
» ne privera pas de fes Hens ceux qui » marchent dans Vinnocence, comme
m on peuc aftlxrer qu'elle l'a fait toute
N fa vie; maisilge fooit pa$ ipipoffibl^ |
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II. Part ie. Llv. V. 469
" que Dieu s'intereflar dans fa caufe, 166 u » Sc qu'erant aupres de lui, il ne lui » rendit juftice ; de meme que quand » elle lui a demande d'aller a lui , il' » lui a fait mifericorde. Pardonnez- » nous, s'il vous plait, Monfeigneur, » ti nous ne pouvons pas nous empe- » cher d'envifager, quoiqu'avec crain- >» te , ce que nous dcfirons depouvoir » detourner par routes nos prieres &C •> meme par nos fouffrances. Nous les " offrons a Dieu de tout notre coeur, » pour obtenir fa paix &pour merirer »j- quevousnousaccordiezla vorre, done •» vous ne pourriez pas avec juftice nous » juger indignes , (1 vorre Grandeur » daignoir fe laifler perfuader avec » quelle fincerire & quel profond ref- » pect nous fommes, &c. Cette lertre fur rendue a M. de Pa- xxiv.
ris par M. du Saugey le 15 aout, & M- de pa"'* on en attendoit la reponfe avec d'au-point PT ia tant plus d'imparience que la malade'*"" «•« «■; eroit revenue de fon delire dans une 'g'eu enriere liberte d'efprir, & etoit en etac de fe confeiTer & de recevoir le faint Viatique. Le lendemain , 26, M. le Mafdre , Aumonier de M. 1'ArcIieve- que eranr venu a P. R. pour amener nx religieufes , quatre de chosur &c deux converfes, la mere Abbefle ae* |
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470 HlSTOIRE J>E PoRT-ROlAt.
X6(;, compagnee de la mere Prieure & de la
• ' fceur Angelique , lui demanda fi M. l'Archeveque ne l'avoit point charge de leur faire quelque reponfe touchant la. lectre qu'elles lui avoient ecrite ; il repondit qu'il l'avoit charge de leur dire qu'il n'avoit point voulu repondre lui-meme •, i". Parcequ'elles prenoient le titre d'Abbeffe &c de Prieure, &c qu'il ne les reconoiffoit point en cettequalite. 2°. Qu'elles faifoient paffer dans cette lettre pour une demie fainte une reli- gieufe qui mouroit dans l'impcniten- ce. 3°. Qu'elles fe meloient de lui donner des inftrucYions. xxv. Il ne fut pas difficile de repondre a ces tntreiiende fujets ^e mecontentement. Sur le pre- la mere Ab- ! . »i i rr 1• > ••
be0'e sc de la mier, la mere Abbelle car que n aiant
n1 ec M^le P°*nt ^te depofee & ne s'etant point Mafdre.' demife , elle ne pouvoit quitter le ti- tre d'Abbeffe qu'elle quitteroit avec fjlaifir auffi-tot ju'on leur donneroitla iberte de faire une election canonique. Sur le fecond point, elle dit qu'il etoit fort etrange qu'on traitat de fiile im- penitente une religieufe auffi vertueu- le que cede dont ii etoit queftion dans leur lettre , fans avoir d'autre crime a lui reprocher que le refus de la fignarure du formulaire , a laquelle on ne pou- voit pas mcme dire qu'elle fut obli- |
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II. P a n. t i e. Llv. V. 471
gee , puifque le terme que M. de Pa- ris avoir donne,n'etoit pas expire a fon egard , le mandement qui donnoir un terme de trois mois, n'aiant ere ligni- fie a P. R. des Champs que le 27 de mai ; que fi on lalaiiloit mourirpour ce fujet, privee des Sacremens , elle feroit la premiere & l'unique perfonne qu'on auroit traitee avec cecte durete dans les trois mois de liberte accor- 3es a tout le monde. M. le Mafdre repliqua , que fi elle etoit la premiere elle ne feroit pas la derniere ; & que fi elles ne prenoient le parti d'obeir a M. TArcheveque, elles feroient non- feulement privees des Sacremens a la moit, mais meme de la fepulture eccle» fiaftique. La mereAbbelle repliqua que cette conduite feroit bien injufte envers des perfonnes qui agiffbient par prin- cipe de confcience , & qui craignoient plus d'offenfer Dieu, que touslesmau- vais traitemens dont on pouvoit les menacer. La mere Prieure prenant la- parole , ajouta que ce traitement etoit d'autant plus etrange , qu'on ne difoit pas meme de quel crime elles etoienc eoupables, puifqu'ai'ant prefente plu- fieurs requctes a M. l'Archeveque , pour le fupplier de leur declarer juri- diquement ce qu'it demandoit d'el- |
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47* HlSTOIRE DE P0RT-'ROhA£#
les , s'il vouloic les obliger a la crean?'
ce intcrieure du fait, & fur quel prin- cipe il vouloit qu'elles etabliuent cette creance , il ne leur avoir point encore donne de reponfe ; qu'ainii il les con- damnoit pour lui avoir defobei, avant que de leur avoir declare ce qu'il leur commandoit. 30. Quant au mecon- rentement que M. de Paris temoignoit de la lettre r elles lui repondirent que leur intention avoit etc de la fake treS refpectueufe, rrvais qu'elles n'avoienc f>u s'empccher de lui temoigner la dou-
eur done elles etoient penetrees, voiant qu'on abandonnoit les- ames de la for- te , 8c qu'on rerufoit les dernieres af- fiftances a une perfonne qui alio it pa- roitre devant un juge, qui rend juf- rice a rout le monde fans exception de perfonne. La mere Abbeffe lui demanda en-
fuite les obeiGTances des religieufes qu'il avoir amenees •, & elle le pria de s'em^ ploier, pour qu'on envoiat auffi deux de leurs fceurs, qui reltoient encore a Paris avec quelques converfes (20). Il promit de le faire ; & les religieu- fes aunt ajouie que cette demande (zo) Cts dejx religteu- ou mutes les vierges fages
fes pattii ent le 5 feptemb. fe trouvetent alors rea» com P. R.. des Champs, nies. |
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II. Par tie. Liv. V, 473
fe faifoit fans prejudice de leurs appels 1(j£
precedens, M. le Ivlafdre repondir qu'il admiroit leurs inegalites , en ce qu'a- pres avoir demande les religieufes qui etoient a Paris, elles appelloient quand on les leur amenoir : a quoi elles repartirent qu'elles les deman- doient par la companion qu'elles avoient deles voirabandonnees , mais qu'elles ne lailToient pas de perfifter toujours dans leur appel contre le tranf- port qu'on avoir fait d'elles dans la niaifon des Champs. En fin la mere Prieure lui reprefenta
encore combien etoit indecente la con- duire qu'on tenoit a leur egard , en leur donnant des gardes , qui entroient jour & nuit dans Pinterieur de leur maifon,& qui couchoientdans leur jar- din ; qu'on n'avoit jamais oui par- ler d'une chofe audi fcandaleufe; que l'ordre duRoi adreffeala mere Prieu- re ne portoit point qu'on feroir gar- de dans la cloture ; que le Roi favoit bien que la cloture des religieufes de- voit etre inviolable 8c qu'elle n'appar- tenoit qu'a la jurifdi£tion eccleiiafti- que ; &r que quand meme on lui au- roit fait entendre que cela etoit nece£- faire, c'etoit a M. 1'Archeveque a main - tenir l'autorite des Canons, qui etoient |
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474 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.'
1(j6c, manifeftemenrvioles par une telle con-
duite; que tout le blame en retombe- roit fur lui , puifqu'il etoit certain que s'il avoir reprefente au Roi de quelle confequence etoit une telle entrepnfe, Sa Majefte avoir trop de piete pour ne pas faire cefTer une telle violence qu'il. n'avoit point ordonnee , & qu'elle ne favoit peur-etre point ou elle etoit por- tee. M« le Mafdreparutfurpris& n'eut rien a repondre ; il fe contenta de dire qu'il reprefenreroit de nouveau a M. l'Archeveque ce qu'on venoit de lui dire, & partit pour s'en retourner. R^nic' ds ^e ^°'r ^e ce meme jour la provi- m. Hamon a dence envoia a P. R. des Champs un ciamps/" confolateur pour fes epoufes , qui ecoient dans l'affliction & privees de routes fortes de fecours, tant pour le corps que pour 1'ame. C'etoit le ce- lebre M. Hamon , qui y vint avec petmiffion, de la part de M. de Pere- fixe, de voir les malades, mais a la condition qu'il ne recevroit&ne don- neroit nilettrenibiller aux religieufes, & qu'il n'entreroit point fans etre ac- compagne de la tourriere (zt). Nous (u) L'Exempt ajouta velle condition a laquelle
i ces conditions , quef'on l'Exemptdit le 25 feptem-
farleroit fi bant atipres des breala mere Prieure ,que
malades , qu'elle (la tour- M. Hamon entrcroit
riere ) entendroit tout ce quandillui plairoit.Voiel
quijediroit. Voila lanou- lejourn. p. 54, col. u
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II. Partib. Liv. V. 47$
avons vuavec quel regret il avoit quit- 166$. te cette fainte maifon neuf mois au- paravant, pour prevenir l'ordre qu'il en devoir recevoir; & il confervoir tou- jours le defir de fervir ces vierges chre- tiennes, lorfque Foccafion s'en prefen- teroir. Deforre que les religieufes a'iant fait demander fon retour a M. de Paris, n'etant pas poffible qu'elles puflent fe pafler de medecin , a'iant une fi gran- de quantite de malades, auffi-t6t qu'il eut appris que le Prelat y confentoit, il fe rendit promptement a P. R. des Champs. L'exempt ne s'etant pas trou- ve alors dans la cour , les gardes n'o- ferent lui ouvrit la porte ; ce qui Fo- bligea de fe retirer aiix Granges , d'011 l'exempt l'envoia querir fur les fept heures, pour favoir s'il avoir quelqu'or- dre de M. de Paris par ecrit. M. Ha- mon dit que M. de Paris s'etoit con- tente de le lui donner verbalemenr. Cette reponfe ne fatisfit pas M. de faint Laurent, qui le fit neanmoins entrer 8c conduire a fa chambre oil il fut tou- jours accompagne d'un garde jufqu'a neuf heures qu'ils 1'enfermerent fous la cle , dans la refokuion de le tenir. prifonnier , jufqu'a ce qu'ils eutTent des ncuvelles de la Cour. Il leur de- manda comme une grace la permif- |
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47<> Histoire de Port-roYa£
166 5. fion d'entendre la MelTe le lendemairt', ce qu'ils accorderent a condition qu'il y feroit raene par l'un d'eux qui le re- conduiroit dans fa ehambre, d'oul'e- xempt avoir donne ordre qu'on ne le Iaiffat point fortir. Xxvn. Quoique les religieufes euflFent dref- Nouvel aaer, p i „ »
dcs teligieu- le le i6 d aout mi acre, dans lequel
f« for lcur ejies marquoient leur derniere difpofi- dupofiuon . r i /• i r
touchant la tton touchant la lignature du rormu-
tfjuatute. jajre t ja conduite que M. de Paris ve- noit de tenir a l'egard de la four Mar- guerite de la Pallion , leur donna oc- eafion d'en faire encore un nouveau fur le meme fujet: le voici. Acte des religieufes de P. R. du 28
I aout Kj/Jj contenant leurs difpofitions a la vie & a la mort touchant la ligna-
ture du forniulaire ,•& leurs fentimens en cas de refus des Sacremens a la mort. Aujourd'hui 18 acsut \66% , nous
fouffignees , AbbelTe , Prieure & re- ligieufes de P. R. du faint Sacrement, de prefent aflemblees pour la plus grande partie en cette maifon de P. R. des champs , confiderant avec admi- ration la conduire fi extraordinaire que Cieu a renue fur cette commu- naute depuis quatre ans qu'il nous a expofees comme en fpe&acle aux yeux, |
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II. P A r t i e. Liv. V. 477
du monde & de toute l'Eglife , dont
les puiirances fe font unies pour nous faire fouffrir touces fortes d'afflidions, & pour oppriroer, s'il etojt poffible, la liberte que nous avons en Jefus- Chrift , en affervuTant nos confciences a un joug qu'elles ne peuvent porter, fans abandonner l'amour de la verite qui nous rend libres. Nous reconnoilfons avec adion dc
graces, que nous avons cpro.uve fans .celle , au milieu de 1'accaDlement de tant de maux , -qu'il n'y a point de protedion plus forte que celle qu'il nous donne fous le bouclier de fa ve- rite. C'eft elle qui nous a raiTurees contre la crainte de la nuit , & nous a ete coinme cette colomne de feu qui conduifoit le peuple d'Ifrael au travers d'un defert fans chemin, ou ils n'avoient qu'elle pour guide. Et comme dans la longue privation
que nous fouffrons de toute afiiftance liumaine , nous avons du nous accour turner a nous rendre les difciples de Dieu mcme, & a tirer non feulement de fa parole , mais auili de fa conduite fur nous , les regies que nous devons fuivre pour ne nous pas egarer , lorf- que mos oaftems nous abandonnent , Rotts noiis fommes crass obligees de |
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470 HlSTOIRE DE PoRT-Ro'lAt.
faire une grande reflexion fur le deiTein
qu'il a pu avoir, en permettanr qu'a- pres une auffi dure feparation que celle que nous avons foufferte pendant plus de dix mois , on nous ralTemblar tou- tes en ce lieu, contre route apparence, &c malgre meme les oppositions que nous avons ere obligees de former pour conferver les droits de notre communaute , commeonle peutvoir par les actes du jo juin & de juillet de cette annee 1665. II nous eft facile de juger par la con-
folation que nous relfentons de notre heureufe reunion , que Dieu a voulu par-la adoucir nos peines pafTees , & nous faire reprendre de nouvelles for- ces pour continuer a fouffrir ce qui nous refte, avec plus de confiance & de courage que jamais, en apprenant les unes des autres les circonftances ex- traordinaires, par lefquelles fa grace tome puiflante a foutenu notre foi- blelTe dans les differentes epreuvesou il lui a plu de nous mettre. Mais nous avons fujet de croire qu'il a encore voulu nous en faire tirer un autre avan- tage , qui eft de nous inftruire de tous les artifices , dont fe fert l'efprit de menfonge pour eteindre dans le cceur la lumiere de la verite , apres |
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II. Part ie. Liv. V. 479
que i'aftli£fcion d'un etat violent &
dune rude captivite a infenfiblement affoibli la conftance des refolutions qu'on avoir rakes de tout fouffrir pliuqt que de s 'eloigner en rien de la juftice. La providence de 1'amour de Jefus-
Chriftfurfeselus n'a peut-etre permis que lafidelite de quelques-unes de nos iceurs ait fait naufrage dans cette fu- rieufe tempete , qu'afin qu'elles euf- fenr occafion , apres que fa miferi- corde les en auroit delivrees , de nous raconter les dangers ou elles fe font trouvees dans cette perilleufe naviga- tion, Leur experience, quileura ap- pris a etre plus humbles , nousapprend aufli a nous humilier avec elles , & a nous defier entierement de nos refo- lutions & de nos connoiflances, fi nous ceffions un moment de regarder celut dont la grace eft notre feul appui, S£ de lui dire avec un Saint qui parloit ainii par experience : Je vous aimerai , Seigneur , parceque vous eres ma force, mon refuge , & mon Sauveur. Aiant done rendu a Dieu de tres
humbles actions de graces de la mife- ricorde qu'ila faite a fix de nos foeurs de revenir a lui & de fe rejoindre a* nous apres s'en etre feparees par une |
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4S0 Histoire de Port-roYal.
i66$~.~ fignarute conttainte que la feule vio- lence del'autorite quil'exigeoitd'elles, & la tromperie du demon avoient ar- racb.ee de leur main , quoiqu'il n'eut pu leur oter du fond du cceur l'amour de la verite , qu'elles n'ont bleiiee que parcequ'elles ont cefle pour un terns de la connoitre ; nous nous croions obligees nous-memes de pro- filer de cet exemple pour devenir in- telligences & iages , 6c prevoir ce qui peut arriver dans la duree de cette tentation , qui peut-etre aura de lon- gues fuites. C'eft pourquoi nous trouvant pref-
que routes rafiemblees enfemble en cette maifon , & parfaitement unies dans les memes fentimens, nous avons refolu d'un commun avis , & d'une volonte toute libre , de drefler le pre- fent acle a meme fin que les deux au- tres qui ont ete dreiies & fignes par celles de nous qui etoient demeurees dansle monaftere de Paris, l'un du ii odobre 1664, 1'autre du 19 mai 1665, lefquels nous pretendons par celukci confirmer &c ratifier , comme nous les confirmons &; ratifions. Ajoutant de plus qu'etant beaucoup mieux informees de tous les artifices que la malice fpirituelle de nos enne- mis
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II, Partie, Liv. V. 481______
rnais invifibies , jointe a l'accablemenc iT^T-
d'une persecution exterieure ii extraor- dinaire , peut emploier contre de pau- vres religieufes deftituees de toute af- iiftance, reduites, ou dans leur propre monaftere, ou dans des maifons etran- geres , a une captivite, a une folicude , dun abandonnement , dont il fera difficile de trouver aucun exemple dans Thiftoire des feize fiecles de l'E- glife, fur un pared fujet •, dejaprivees depuis un an entier des Sacremens de Penitence & d'Euchariftie ; mena- . cees d'en etre de meme privees a la mort, aufli-bien que de la fepulture ecclefiaftique •, qui fe voient devenues la proie de ceux qui fe font declares de- puis plus de vingtans les ennemispaf- fionnes de leur maifon qu'ils ont G. bien travaille a decrier par leurs ca- lomnies publiques & fecretes, qu'ils oct enfin arme contre elles toutes les puiflances de l'Eglife &c de l'Etat; en- forte que tout confpirant a favorifer leur injuftice, & a opprimer cette pau- vre communaute , nous nous trouvons deja chaffees de notre maifon de Pa- ris , & enfermees dans celle- ci comme des criminelles pour y mourir fans au- cune ailifrance ni confolation , n'atten- dant chaque jour qu'une augmentation Tom K X |
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481 HlSTOIRE DE PoRT-RO'lAt.
idOt.' ^e l"igueur qu'onnous promet a touce
heure. Un etat fi violent & fi etrange qu'il
donneroit de la terreur a la vertu la plus force , nous faifant apprehender avec fujec notre foiblefTe & les fur- prifes dont la fragilite humaine joints a une tentation fi extraordinaire , peut ctre capable dans la duree de cette longue affliction , & futtout a l'appro- che de la mort, ou 1'arYoiblnTement de la nature & le peu de liberie qu'elle laiffe d'ordinaire a. l'eiprit , rend une perfonne plus fufceptible de route forte de trouble , & moins capable de fe foutenir par un folide difcernement de la verite > nous nous cro'ions obli- gees j pour nous procurer quelque re- pos centre la crainte qu'il ne nous arrivat un femblable malheur a celui qui eft deja arrive a quelques-unes de nous, de le prevenir autant qu'il nous eft poflible; xxvm. iQ- Par un aveu fincere que nous idee de la fai{"ons ^ Dieu de notre'mifere & de l'entiere defiance ou nous fommes de toutes nos lumieres & de nos refolu- tions , facliant fort bien que s'il n'eft lui-meme notre lumiere & notre fa- lut, nous avons tout a craindre; au lieu que la vittoire nous eft afluree, fi |
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II. P A R T I E. LlV. V. 4S J
ffious mettons route notre confiance en
celui qui a vaincu pour nous , & qui par fa grace veut encore vaincre en nous. z°. Nous voulons declarer a route
l'Eglife que nous defavouons , infir- mons & annullons des a prefent roue a&e & fignature du formulaire qu'on pourroit extorquer de nous , ou que nous pourrions donner nous-memes forcees par 1'ennui de la fourrrance * Paccablement de la maladie , ou la crainte de la mort, quand menie il paroitroit que nous declarerions que ce ne feroit point par ces motifs , mais par quelque nouvelle connoif- fance & une perfualion toute volon- taire & toute libre qui nous auroit fait changer de fentiment ; parcequ'il n'y a rien de plus ordinaire que de voir arriver aux perfonnes qui s'affoiblif- fent dans Pafflidtion , ce que le Pro- phere reconnoiiloit dans fui-rrieme . que lorfquc fa vertu I'abandonnoit, la lumkre de fts yeux n'eioit plus avee ltd (2.1) ; e'eflr-a-dire, qu'en perdant la confiance en Dieu , qui eft lui-me- me notre lumiere & notre force , qui nous peut foutenir dans les plusgrandj <u) PC 37. u.
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Xij
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4S4 HlSTOIR* DE Pop.T-R.OlAt.
maux , nous nous eloignons de fa iu^
miere & nous nous engageons, fans nous en appercevoir, dans des tener bres d'autant plus dangereufes , qu'on nous les fait pafler pourde nouvelles connoiflances, comme l'ont eprouv£ celles de nos fceur$ , qui s'etant laif- fees perfuader qu'elles etoient obli- gees de s'aveugler pour obeir , recon- nouTent a prefent que cette faufle lu- yniere les a condujres dans le precipice, ou elles ont eprouve , par les troubles de leur confcience , depuis cette acr tion , des peines infinies , 6c plus grandes que routes celles que la vior lence de la perfecution des hommes, qu'elles fembloient eviter par-la , leur ppuvoir fake fouffrir. Ainfi il eft vi- fible que tant que nous ferons dans un etat violent oil Yon nous yeut contraindre par routes fortes de ri- gueurs & de menaces a agir contre le fentiment de nos confciences , nous ferons tout-a-fait incapable s de chan- gef furement de difpofition , cette cqntrainte nous otant la liberte qui nous eft neceflaire pour embralTer , avec un choix yolontaire & eclaire I'opi-nion qu'on nous propofe , ou 1'ac- tibn qu'on nous commande. 3". Nous voulons nous laiffer I
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If. Part ft. Liv. V. 4§5
ttbus-memes un temoignage aflure de notre difpofition preiente , afin d'y pouvoir avoir recours s'il arrivoit que la tentation vint a obfcurcir dans no- tre efpric toutes les idees que nous avons eues jufqu'ici de cette fignature.- Comme elles font fondees fur des raifons tres folides , &furune deli- beration tres mure , puifqu'il y a plus de quatre ans que nous examinons cette affaire devant Dieu:, & que nous avons toujours cm , apres avoir tout entendu de part & d'autre , etrs obligees- d'agir comme nous avons fair* & de nous expofer plutot a toutes for- tes de fouffrances , qu'a trahir k ve~ rite, la charke & la juftice, qui nous paroiffent vifiblement bleffees pat cette fignature; fi nous venions a chan- ger de fentiment * il faudroit que ca fitt de nouvelles raifons fi convaincan-* tes , qu'elles puffent detruire routes les premieres, 8c que nous en fiilions le choix avec tant de liberte , qu'il n'y eut aucune menace ni aueune con- fideration humaine qui nous y enga- geaffent ; parceque tant qu'il y aurs quelque ehofe a craindre en refufant la. •fignature , ou quelque cbofe a efperec en l'accordant , nous aurons toujoura Jujet de tenir pour fufpe&es les noa- Xiij
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4§<J HlSTOIRE DE PoRT-ROlAl.'
velles penfees qui nous viendront,qu'ofi
le peut faire •, l'interet aunt d'ordi- naire autanc d'adrefTe pour trompec l'efprit , qu'il a de force fecrette pour corrompre la volonte. Void done l'idee prefente que
nous avons de cette fignature confi- deree par rapport a notre difpofition particuiiere , fans examiner, ni juger les autres qui n'en ont pas le mane fentiment. Elle nous paroit un viole- ment de toute la loi de Dieu, puif- que, s'il eft veritable que celui qui peche contre un feul point de la loi, fe rend coupable de tous les autres , il faut que cela foit encore plus vrai d'un crime qui viole tout-enfemble plufieurs commandemens de Dieu. i°. Si on fe porte , par le motif
A\\ne obeiftance aveugle , a vouloir croire un fait contefte , qui n'eft de- cide que par une autorite humaine > fur lequel on a beaucoup de doutes reels & bien fondes, en captivant fon cfprit fous cette autorite humaine , comme on feroit pour confentir a une verite revelee de Dieu , e'eft mettre l'homme a la place de Dieu, & fe faire une idole, contre le premier comman- dement. i°. Si fans avoir cette creance ort
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II. Part ie. Liv. V. 487
affirme par cette fignature, avec fer- ~Y66T~, ment fur le faint Evangiie , a la face de route l'Eglife, un Fait dont on eft incertain , qui eft injurieux a. la repu- tation d'un faint & favant Eveque qu'on reconnoit par-la avoir enfeigne des blafphemes , des irnpietes & des herefies , on viole tout a la fois tous les autres preceptes du decalogue qui regardent la charite du prochain : 1 u. parcequ'on deshonore la memoire d'un Eveque qui tient lieu de pere dans l'Eglife , contre le quatrieme commandement. 2°. Qu'on lui ravic 1'honneur & la reputation ; ce qui eft plus que lui ravir les biens & la vie , contre les cinquieme Sc feptieme com- mandemens. 30. Qu'on temoigne , acquiefcer , confentir & approuver fa condamnation , foit qu'on ne le croie pas coupable , foit qu'on reconnoille etre incapable de favoir par foi-me- me la verite de ce" fait, ce qui eft Forter un faux temoignage contre
innocence du prochain ; le temoi- gnage etant roujours temeraire & faux, quand on affirme ce qu'on ne fait pas, quand meme on le croiroit veritable. Ainfi on viole doublement par celui- ci le huitieme commandement , com- •Wie on viole par la meme raifon en X iv
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4§§ HiSTOIRE DE PoRT-KOlAl.*
deux manieres le fecond , qui defend
de jurer le nom de Dieu en vain , en aflurant avec ferment une chofe qu'on ne fait pas & qu'on ne croit point , parceq Yon eft oblige , pour jurer fans crainte de parjure , noiv feulcment de aoire , mais audi de favoir avec certitude la chofe qu'on attefte par jurement. On viole de plus la loi la plus
inviolable , qui eft cede qui defend le menfonge , & toute la loi naturelle en commettant une injuftice contre le prochain , qu'on ne voudroit fouf- frir de perfonne, qui que ce foil ne voulant etre condamne par ceux qui n'ont ni droit ni lumiere pour le faire avec counoiflance & juftice, com- me nous n'en 'avons point nous au- tres filles ignorantes , pour foufcrire un jugement que l'Eglife fait des. li-' vres &c des erreurs , furtout quand les faits en font conteftes & ne peu- vent nullement pafler pour notoires & indubitables. Si on ajoute a. tout cela, ce que nous
ne pouvons ignorer , qui eft que la fouf- cription qu'on exige de ce fait , a pour objet, de faire retomber la con- damnation de M. d'Ypres , fur les per- fonnes qui defendenc fa doctrine ,, f& |
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II. Par tie. Liv. V. 4S9
furrour celles qui n'erant pas capables
de la defendreni d'en juger, fe croient aufli incapables de la condamner par leur fignature, dont le feul refus les fait pafler pour erre du nombre des fauteurs d'herelies , q.u'on pretend examiner ere les puniffanr par routes les peines de droit & de rait. Sachant cela , que ferions-nous en pretant la main par iwe lache foufcription a des violence* fi odieufes, finon d'attirer fur nous- tout le fang innocent, routes les in- juftes perfections & routes les difra- marions qu'onr deja foufFerres, & que Ton fera fourfrir a l'avenir a des perfon- nes que nous favons non feulement erre rres carholiques, mais donr nous connoifions de plus la piere &c le me- rire extraordinaire, &c a plufieurs def- quels nous avons de fi erroires obliga- tions , que nous ne faurions, fans Iw plus criminelle de roures les ingrati- tudes , fourfrir qu'on nous atrribue fous le moindre pretexre du monde d'a- voir confenri a l'injuftice qu'on leur fair ? Si la foufcription feule du fait de Jan-
fenius , contenue dans le formulaire y enferme le violement d'aurant de pre- ceptes de la loi de Dieu , que nous Venons de le fake voir; que fera^ce Xv
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4JO HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt."
d'autorifer par un tcmoignage public
cet autre fait qus la bulle fuppofe etre auffi veritable, favoir que ces perfon- nes qui dependent le livre de M. d'Y- pres, font les fauteurs & les defen- ieurs d"une nouvelle herefie > Et com- ment des perfonnes comme nous , qui favons 1'injuftice de cette accufation » tk qui avons appris des principaux d'en- tr'eux les plus pures maximes de la doclxine de I'Eglife , foit pour la foi, foit pour les mceurs , & qui fommes temoins auffi bien que participans avec eux des calomnies & des impoftures par lefquelles leurs ennemis ont en- trepris depuis long-tems de les perdre 6c nous auffi , pourrons-nous renon- cer a routes ces lumieres & etouffer tout d'un coup tous les fentimens de la verite , de la charite & de la jufti- ce, pour tremper nos mains dans le fang de l'honneur de ceux qui font nos peres en Jefus-Chrift , & de celles qui nous ont elevees dans la piete avec plus de charite &c de fupport que n'en peuvent avoir les meilleures meres pour leurs enfans J Ne faudroit-il pas dire que ce peche feroit du rang de ceux, dont Jefus-Chrift dit qu'ils ne fe remettent ni en ce monde ni en I'autre •, puifque e'eft un veritable blaf- |
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II. Part ie. Liv. V, 49*
pheme contre le faint Efprit, que de is^e "
combattre la verite quand on la con- noit, 8c que rien ne nous fauroit etre plus conn 11 & plus evident que 1'inno- cence des perfonnes qu'on traite com- me de nouveaux heretiques ? Voila les fentimens veritables que xxix.
nous avons de cette affaire, prefen- Suitedela«" tement que nous 1 examinons avec h- berte d'efprir , apres l'avoir confideree fans ceffe depuis plus de quatreans, apres avoir ecoute routes les raifons |
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u'on nous a voulu dire pour nous en
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onner une autre idee , apres avoir
fouffertpour ce fujet depuis ce tems, mais furtout depuis un an , tous les maux qui peuvent etre les plus fenfi- bles a des religieufes qui ont renoncc a tous les biens du moride pour ache- ter l'union qu'elles poffedoienr avec Jefus-Chrift & entr'elles, qui etoient tout leur trefor. On s'eft efforce de nous le ravir ce
trefor, en nous fepara t de la table de Jefus Chrift , de la maifon vinble, ou nous vivions dans un meme fenti- ment. Mais parcequ'en tout lieu ou eft ce Corps divin les aigles s'y raffem- blent, la foi qui nous unifloit a lui & la charite qui nous rendoit in epa- rables les unes des autres , ont etc X v>
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4?1 HiSTOIRE £,£ PoX'T-ROTAl.'
cles ailes qui nous ont fait voler axfi
deffus de toutes ces oppofuions exte- rieures , pour nous attachet plus que jamais a Jefus-Chrift, qui eft lui-meme notre paix & le lien facre de notre union toute fainte. C'eft pourquoi ctant toujours demeurees infeparables de cceur & de fentiment dans, notre feparation fenfible , Dieu nous a enfin reunies de corps dans une meme mai- fon j ou nous ne penfons qu'a rendre notre union eternelle. C'eft a cet effet que nous fignons
le prefent acle, pour l'oppofer, comme nn bouclier , a. toils les traits , dont l'efprit de difcorde voudroit attaquer une petite armee , qui fera toujours forte , tant qu'elle fera rangee, & que le Dieu de paix en fera le chef. C'eft entre fss mains que nous promettons une fidelite infeparable a fa verite , que nous renoncons a tout menfonge ic a' tout deguifement qui y feroit contraire, & en particulier a cette ©beiflance aveugle, dont on fe fere aujourd'hui, comme d'un piege pour attraper les ames fimples; declarant qu'en matiere de creance , nous fom- mes perfuadees que nous ne devons cette obeiftance aveugle qu'aux veri- les certaines > rcvelees de Dieu afor^ |
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II. Part ie. Ltv. K $$$
Eglife , encore que dans routes les chofes exterieures de difcipline con- formes a la loi de Dieu & a nos re- gies , nous foi'ons pretes d'obeir fans difcernement a tous ceux que Dieu a ecablis en autorite fur nous, &qu'ainfi rien ne nous peut obliger a figner un fait, done il ne nous eft pas necef- faire d'avoir la creance , & que tort- res les loix divines & humaines nous defendenr d'affirmer par ferment, fi nous n'en avons ni la creance ni la certitude. Nous pretendons que ceci foit con-
iidere de l'Eglife & de nous-memes comme nos dernieres resolutions , & nous fouhaiterions qu'il nous fut pof- fible de nous lier de mille chaines , pour n'avoir plus la malheureufe liber- ie de changer. Mais en reconnoitfant que notre mifere nous en rendra tou- jourscapables, nous mettons toute no- tre confiance en la erace de notre Sau- veur, qui rend forts & invincibles tous ceux qui par fa lumiere font per-« fuades de leur foibleffe. Er pour ne rien laifter a faire, & entrer des ce mo- ment dans la difpofition ou nous de- firons etre a la mort, prevoiantqu'en ane heu/e (i redoutable, nous pour-, rions etre payees de toure afliftance,- |
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4?4 HlSTOIRE DE PoRT-ROlA£#
nous invoquons des a prefent le pef<?
des mifcricordes , qui eft le Dieu de toute confolation , arm que le fecours de fa grace nous tienne lieu de toures chofes , puifqu'elle eft inurnment ca- pable de fuppleer a tout, & que fans elle toutes les creatures enfemble ne nous fauroient donner la force de re- fifter a des ennemis audi puiflans que ceux qui combattent notre verm , la- quelle eft deftituee de tout foutien , nnon de celui auquel toute la force de nos ennemis invifibles ne fauroit fairela moindre refiftance. Que fi nous fom- mes fi heureufes que de nous appuier avec une ferme foi fur le Bien-aime de notre ame , il fera nos delices dans les plus grandes amertumes dela mort. Il fera notre pere eternel, qui recevra la confeftion que nous ferons en fa prefence avec un cceur humilie, & qui nous donnera lui-meme une douleur de nos peches, qui nous tiendta lieu de l'abfolution qu'on ne voudra pas nous accorder. II nous arrofera de cet- te hyfope fainte d'une profonde hu- milite & d'un aveu fincere de nos mi- feres , ce qui nous rendra a fes yeux plus blanches que la nege, pour etre dignes de participer au facre Viatique que Jefus-Chrift nous communiquera |
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IT. P A r. t i e. Llv. V. 49 $
par Pinfufionde fa grace , afin de nous
fortifier jufqu'a la fin de notre voi'age dans le chemin etroit oil il nous a engagees. L'ondtion fainte de fon ef- prit divin , qui opere la remilTion des peches, exaucera nos gemiile- mens , 8c nous conferera la grace de ce faint Sacrement, done on nous au- ra privees •, 8c Pignominie qu'on fera a nos corps, de leur refufer la fepul- ture ecclefiaftique , n'empechera pas qu'ils ne confervent le germe de Pim- mortalite qu'ils ont recu par Puniorr au corps de Jefus-Chrift , auquel nous avons participe tant defois pendant no- tre vie, & que nous aurions continue de recevoir avec toute la foi, la de- votion & la piete qui nous auroient ete poflibles , fi Pon ne nous avoit bannies de la fainte Table. La verite & la juf- tice que nous avons choiiies pour etre Pobjet de notre devotion 8c de nos vceux, viendront au-devant de nous a Pheure de notre mort, pour pren- dre notre defenfe , 8c nous faire con- noitre que e'eft dans Pabandonnement de tout fecours des hommes que fe trou-. vent la foi & la patience des Saints. Nous vous offrons done, 6 Jefus no-
tre Dieu 8c notre Sauveur, laconfian- ce que vous nous donnez dans ce mo- |
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49 6 HtSTOITCE DE PoRT-Ro!fAL;
ment, que nous regardons comtne 1*
dernier de cette vie , afin que vous nous conferviez ce precieux depot juf- qu'a. ce jour terrible, ou 1'on eprou- ve plus que jamais que Ton n'a rien que ce que vous donnez y puifque la perfeveranee ne fe peut jamais meriter etant un efFet de votre pure mifericor- de & de la predeftination gratuite que vous avez faite de vos elus, qui re- connoitront dans l'cternite que vous les avez fauves , parceque vous I'avez voulu. C'eft par cette charite eternel- le que vous les avez attires a vous , en a'iant pitie d'eux,- & que vous les avez aflbcies a tous vos biens. Vous voulez par cette raifon , que votre divine mere foit aufli la notre , que celle qui vous a recu dans fon fein nous receive aufll dans celui de fa mifericorde, & qu'elle emploie tou- re la puiflance que vous lui avez don- nee , pour etre notre protection & no- tre fauve-garde, furtout a l'heure de la mort. C'eft elle que nous invoquons &en qui apres vous, nous mettons no- tre confiance, parceque vous voulez qu'elle foit le canal par lequel nous re- cevons vos graces, comme §a etepar elle que vous vous etes donne a nous. "Vous voulez encore que tous vos An- |
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!l. Partii. Liv. V. 497
|jes foient vos miniftres dans l'ceuvre i(j<jc.~
de none falut, que les faints Apotres les Martyrs , les faintes Vierges & tous les Saints foient nos prote&eurs : c'eft pourquoi nous nedirons plus, 6 Jefus, que nous fommes delaiflees, puifqu'il y en a beaucoup plus pour nous que contre nous, & que ceux-la meme qui nous font conrraires , n'oferont nous attaquer, s'il vous plait de nous cat- cher fous 1'ombre de vos ailes jufqu'a ce que l'iniquite foit paffee, c'eft-a^ dire jufqu'a notre mort, qui fera la fin de nos peches > & le terns auquel nous oferons vous dire avec une con- fiance appuiee fur votre feule miferi- corde : Juge^-nous , Seigneur, parce- qua nous avons marche dans notre in- nocence, & recevez notre efprit en- rre vos mains, 6 Dieu de verite, par- ceque vous nous avez rachetees des ca- lomnies dei homines. Cet acte admirable futfigne de rou-
te la communaute. M. l'Archeveque de Paris ai'ant def- xxx
fein d'-aller a P. R. des champs , pour m. de la. y faire un dernier effort contre leSfoiS^ies vierges chretiennes qu'il y avoir raf- reiigieufes de femblees , ou pour mettre a execution g"^t°"r * les menaces qu'il leur faifoit depuis fi longtems x y envoia d'abord M. dfe |
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_______498 HlSTOIRE DE PoRT-Ro'lAt;
1665. la Btunetiere fon grand-Vicaire pouf
lui preparer les voies. Ce grandVicaire y arriva un jeudi 3 feptembre , & fit un grand difcours pour les engager a fiVner. Son difcours n'eut aucun fuc- ces, non plus que routes les foibles raifons par lefquelles il voulut leuc perfuader qu'elles ecoutoient trop leurs fcrupules. Apres une longue conver- fation , dans laquelle les religieufes firenr voir la verite de ce que difoit Un de leurs gardes , qiiune de leurs paroles valoit mieux que trente d:s au~ tres , M. le grand-Vicaire voi'ant qu'il n'y gagnoit rien , les pria de lui don- ner quelque bonne parole : la mere Prieure lui repondit qu'elles n'avoient rien a. dire que ce qui etoit dans leur a£fce , jufqu'a. ce qu'il euc plu a. M. l'Archeveque de repondre juridique- ment a leur requete parun acte public & aulli authentique qu^fon rnande- ment. La four Angebque de faint Jean le pria de lire fans prevention l'a&e du 16 aout, qu'on venoit de lui mettre en main , qui lui feroit con- noitre rimpuiflance ou elles etoient de figner , & qu'une ame qui n'a que- fa confcience a garder , a des peines infurmontables quand on lui ordonne des chofes qui y font contraires. |
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II. P a r t i e. Llv. V. 499
Trois jours apres , M. de Paris vint \66i.
iui-meme a P. R. , accompagne de xxxi. M. Dupleffis de la Bruneuere Convd^Je}u^ grand Vicaire, & defes aumoniers(i $).«fept. Apres avoir affifte a la me(Te qu'il fit dire par un de fes ecclefiaftiques , il fit un difcours dans lequel il temoigna aux religieufes la douleur que lui cau- foit leur difpofition dont il etoit inf- truit, tant par ce qu'il en avoir ap- pris de vive voix par M. de la Bru~ netiere , que par l'ecrir qu'elles lui avoient remis. Car enfin , dit-il , » dans quelle peine ne fuis-je point » reduit 2 Je vous demande une chofe « que je crois tres neceflaire an bien » de vos ames , & vous , de votre s» cote , vous cro'iez ne la pouvoir « faire , fans offenfer Dieu & fans »> blefler votre confcience «. Il fe donna enfuite pour un veritable Eve- que, un bon pafteur, un bon pere , proteftant qu'il voudroit donner de fon fang & abreger de beaucoup fa vie pour les tirer d'un etat qu'il pretendoit etre ttes facheux pour elles en routes manieres (14). Apres un difcours fi pathetique , il dit qu'il venoit pour la derniere fois favoir par lui-meme (1;) Journal , p. 41, col. i,
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500 HlSTOI-RE I>E PoR-T-Rd^ACr
i66$. °iueiie etoit leur refblution ; puis s'a-
dreflant a la mere de Ligny, il ajouta i Que s'il y avoit des religieufes qui ntf fuflent pas dans les memes fencimens dans lefquels elle temoigneroit etre, elles pourroient parler & fe declarer. La mere de Ligny repondif a M. de Paris , que c'etoit une extreme dou- leur pour elles de ne pouvoir faire ce qu'il leur demandoit, qu'elles ne met- toient que Dieu au-deflus de lui; que ce n'etoit que lui feul , & l'engage- ment de leur confcience , qui les em- pechoient de fe rendre a ce qu'il de- firoit, Enfuite toute la communaut£ declara que telle etoit fa difpoiition. M. de Paris difputa & raifonna beau^ coup ; mais trente de fes paroles n'en valoient pas une des religieufes. Le fucces repondit a la folidite des rai- fonnemens du Prelat, qui fe retira ert difant qail alloit voir dtvant Dimc« qu'il avoit a faire (15). xxxii. Sur les trois heures apres midi » il Irenes6 tell- &1 aflembler la communaute a la grille
^eufes. du choeur, 011 le iieur Petit fon fecre- taire , accompagne des lieurs le Maf- dre, du Saugey & Biord , fignifierent aux religieufes une fentence de f* ft;) Ibid. p. 44> col.»,
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H. Part if,. Liv. V. 501
part, par laquelle il les declaroit de- 166y,
fobeiuantes 8c contumaces , & com- me relies incapables de participer aux faints Sacremens de l'Eglife, privees de voix aclive & paffive -, 8c pour avoir perfifte fi longtems dans le refus de iigner le formulaire , ce que M. de Paris qualiiie de rebellion , il les deV claroit incapables de former aucim corps de communaute , de receyoir des novices , de prendre la qualite d'Abbefle, Prieure, OrEcieres , enfin ii leur defendoit meme de chanter liOfKce divin a haute voix foas peine d'encourir l'excommunication , ipfo facto : defendant fous la meme peine de parler ni d'entretenir aucun com- merce avec des perfonnes fufpe6tes , & de favorifer la docfrine de Janfe- njus , ni meme de conferer entre el* les. La fentence etant lue , elles de- clarerent routes d'une voix , qu'elles fe portoient pour appellantes a tous les tribunaux ou elles pourroienr erre ouies 8c entendues , & meme a celui de Jefus-Chrift, comme au jufte Juge de ceux qui ne eherchent que les interers & fa gloire , & enfuite elles lui deroanderent a£te de leur appel ; rnais au lieu de les ecouter il s'enfuir, Les religieufes prirenr a temoins df |
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JOZ HlSTOIRE DE PoRT-ROlAE.
i66<.' ce refus les eccleTiaftiques qui etoient
prefens , & reitererent leurs protefta- tions & leur appel, dont elles deman- derent a£te inutilement (2.6). Puis el- les furent fe jetter aux pies de l'au- tel de la fainte Vierge , ou etoient routes les faintes reliques , & direnc toutes enfemble a. voix baflfe le Pfeau- me Dcus ultionum Dominus , &c. Au fortir de la , elles furent prier
M. le grand-Vic aire de monter au parloir , & il s'en excufa fur ce que M. l'Archeveque vouloit partir. La fceur Fran^oife Lutgarde ai'ant rec,u cette reponfe , dit au garde qui etoit M. Chateaufort: » Je vois bien ce que " c'eft, Monfieur , perfonne ne nous » veut ecouter. Je vous fupplie tres » humblemenr de vouloir bien retour- « ner a. M. le grand Vicaire , & de >. lui dire que puifque perfonne ne » nous veut entendre , nous en ap- » pellons a tous les tribunaux & a ce- » lui de Jefus-Chrift «. Le garde s'ac- (iS)Les religieufes dreC- tre eiles, de la privation
ferentSc (Ignerent le 9 du des facremens, de lade-
meme moisde feptembre, fenfe de chanter l'office ,
un proces verbal de la vi- du violement de cloture
fire de M de PereKxe , 8c qu'il aiuorifoit, & gen£-
de fes circonftances, dans ralement de toutes les vio-
lequel elles appellerent de lences qu'il exerjoit con-
toutes} fes ordonnances , tre elles*
is U lentence pottle con-. |
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II. Par tie. Liv. V. 50 j
£|uitta de la commiflion , &M.de la i<j<jc, Brunetiere monta au parloir , 011 les religieufes renouvellerent leurs appels Sc leurs proteftations •, elles le prierent auili de leur expliquer les intentions de M, i'Archeveque touchant la reci- tation de 1'Office divin. Il leur re- pondit qu'il n'en etoit pas jnftruit ; mais que c'etoit une regie de droit que dans les chofes de rigueur on prenoit tout precifement a la lettre , & qu'ainfi il croi'oit qu'elles pou- voient le reciter au choeur , mais a voix baffe. Il ajouta qu'il leur con- feilloit de ne rien chanter du tout , pour ne pas occafionner de nouvelles procedures. C'eft avec cette inhuma- nite qu'on traita pendant plufieurs an- nexes plus de foixante religieufes , que leur propre perfecuteur confelloit etre pures comme des Anges , & qu'il n'ap- pelloit fuperbes comme des demons , que parcequ'elles vouloient obeir a Dieu plutot qu'aux hommes, & qu'el- les ne vouloient pas mentir ni fe par- jurer. Les religieufes aiant delibere entre xxxur.
elles fur ce fujet, prirent la refolution Les reiigieu- des'en tenir i la regie de droit que£**"™°£ M. de la Brunetiere leur avoir citee , *>*&*•. <k de ne point abandonner le choeur, |
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504 HlSTO'IRE DE PoRT-ROiAt:
" mais de continuer la pfalmodie i voiX
haffe. Des ce jour , M. du Saugey em- pecha qu'on ne fonnat vepres avec la groffe cloche , quoique ce fut un Di- manche. 11 ne voulut jamais fouffrir le lendemain qu'on fonnat la mefle en volee avec la grofle cloche , malgre les reprefentations qu'on lui fit que cela etoit abfolument neceflaire , 1'E- glife de P. R. aiant droit de Paroiffe pour les domeftiques d'en-bas He des Granges , & pour les fermes d'alen- tour qu'elles faifoient valoir, & qu'ainfii c'etoit expofer bien des perfonnes a fierdre la meffe. Il refuia de donner
a paix a la meflfe , prenant pour pre- -texte que l'ordonnance de M. de Paris leur defendoit toutes fortes de ceremo- nies ; & que s'etant informe a lui-me- me de fes intentions , il lui avoit de- fendu celle-la en particulier, ainfi que l'eau-benite & le painbeni. Il ecrivit le meme jour a M. l'Archeveque , quoique la mere l'eut prie de n'en rien raire , & il eavoi'a fa lettre par un expres, n'aiant pas voulu la confiet a. M. Biord qui alloit a Paris. M. Biord iui etoit fans doute fufpecT:, parcequ'il avoit temoigne a M. de Paris le jour qu'il partit, quelque compaffion pour £e$ pauvres filles •, M. l'Archeveque |
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II. Par.tie. Liv. V. 505
s'<en etoit memeorfenfe, &l'avoitfore x <j<j ?.
maltraite de parole pour ce fujet, lui faifanc defenles de parler en aucune forte aux religieufes. Qu'on juge dans quelle oppreffion etoient ces faintes filles , piufqu' une feule parole par la- quelle on temoignoit de la commife- ration pour elles , etoit capable de rendre fufpectes les perfonnes memes qu'on leur avoit donnees malgre elles. M. du Saugey aunt re^u reponfe a xxxiv.
la lettre qu'il avoit ecrite , voulut , u- ,duSa"g le jour de la Nativite de la fainte Jctcre de M. Vierge , avant tierce, en faire lecture1>Archev^- a la communaute , qui ne voulut point scandaiear- l'entendre , parcequ'il n'y avoit oasriv6 inno\ de temoms , & lui declara qu elle ne tette occa- recevroit point d'ordre de lui. M. du(5oa' Saugey , fans fe reburer , revint a la charge , & fur les rrois heures apres midi, an moment que la communaute fortoit du chceur apres none , il s'ap- procha de la grande grille du chceur , accompagne des gardes qu'il vouloit rendre temoins de fon a&ion , & pro- nonc,a d'une force extraordinaire , 8c d'une voix tout-a-fait furprenante , quelque chofe que perfonne ne put difcerner ; mais que plufieurs crurent etre quelque fentence d'excommuni- cat:on. Ce qui caufa un tel effroi a Tome r. Y |
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$06 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.
"T77*.— routes les religieufes , qu'au lieu de
fortir en rang 8c par la porte d'en- haut, felon la coutume , elles furent par celle d'en-bas , & avec tant de precipitation , qu'en paflant elles fi- rent tomber quelques chaifes avec leurs manteaux. Aufli-tot une fceur crut entendre que les meres ordon- noient de faire grand bruit, & obeif- fant aveuglemenr acet ordre prerendu, elle fir le plus de bruit qu'elle put, renverfant les chaifes avec beaucoup de zele & de devotion. D'autres la voi'anr faire , crurenr que cela fe fai- foit par ordre , entr'autres la faeur An- ne Eugenie , & la foeur Jeanne Fare , elles imiterent fon exemple , enforte que cela fit un bruit extraordinaire dans l'Eglife. Les Superieures furenr fenublemenr touchees de cer evene- ment , auquel elles n'avoienr aucune parr , 8c qui fcandalifa bsaucoup M. du Saugey 8c les gardes qu'il prir a temoins. La mere Agnes furtout en fur tres affligee , 8c fir atfembler la com- munautepour decouvrirl'originede ce defbrdre 8c faire des remontrances a ce fujet, mais on n'apprk rien aurre cho» fe, finon que e'eroit une pure meprife xxxv. £lle ecrivit le lendemain a Mon fowence tw-fieur de la Brunetiere pour le prevenir,
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II. Par tie. Llv. V. $07
,parceque M. du Saugey etoit parti des l66 , le matin pour informer M. de Paris tre les reii- de ce qui s'etoit pafle. Il revint le dix |iellfes de p- ■ 'A r . . , i,i~r R- porrant
du mois avec un Appanteur de 1 Of- dcfenfc de
ficialite , charge d'une nouvelle fen- ch'n.ter- . A 1 . ., fice divin , 6c
tence. On ne put apprendre qui 11 mime de
etoit , ni ce qu'il venoit faire , que le Pr»lrao<il(:r- lendemain. Le vendredi 11 , fur les fept heures du matin , cet homme de- manda a parler a la mere Prieure de la part de M. l'Archeveque , mais fans fe vouloir nommer ; ce qui obli- ' gea la mere de le refufer , comme ne devant pas voir une perfonne incon- nue. Il tacha enfuite par adreiTe , de favoir le nom de la fceur Jeanne Fare celleriere a qui il parloit , & il fit a l'heure meme un exploit au bas de l'ordonnance , puis il la rait dans le tour en difant: Madame, voila une fentence que je vous fignifie de la pare de M. l'Archeveque. La religieufe fe trouvant furprife , ne repondit autre chofe , finon qu'elle ne la recevoic point , & la laifla en effet dans le tour, ou elle refta plus d'une heure. Apres quoi il la reprit , & la jetta par une fenetre de la petite chambre du tour. Mais comme elles avoient fujet de croire que cet ordre etoit un effet des • ibllicitations de M. du Saugey , elles |
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508 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt.'
x(j(jf ne crurent pas y devoir deferer , nf
meme que la communaute en due
prendre connoiflance avant que d'a-
voir la reponfe a la lettre que la mere
Agnes avoit ecrite a M. de la Brune-
tiere , & qui avoit ete portee par un
garde du Roi. Ainfi on continua de
reciter , a voix bafle , I'Office dans le
chceur jufqu'au vendredi douzieme du
mois.
xxxvi. Le famedi, M. de la Brunetiere fit di-
tes reiigiei*. re aux Superieures de P. R. par M. Hi-
pfaimodier. laire , que M. 1 Archeveque etoit ex-
Leur manjere trememenc roide > e'eft pourquoi il les
de fane lpf- , , , r ,/-, ,.
fie?, prion de le menager oc de dererer a la
fentence qu'il leur avoit fait fignifier,
de peur de le porter par leur refiitan- ce a faire des procedures encore plus dures, a quoi il paroiflbit alfez difpo- fe. Les fuperieures fuivirent cet avis & aiant aflemble la communaute avant vepres, elles firent la lefture de la nouvelle fentence, par laquelle M. de Paris fuppofmt que les religieufes avoient meprife & elude fa premiere ordonnance du 6 feptembre, en reci- tant Poffice & pfalmodiant contre fon intention, & voulant la rendre plus claire & plus intelligible , il leur de- fend de le reciter publiquement, foit £n chantant, ou pfalmodiant ? pu ipe* |
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■ ll. Par tie. Liv. V. 505)
the le recitant a haute voix de telle
maniere qu'oh les put entendre au de- hors , en leur permettant feulement de le reciter en particulier. En confequence les Superieures pro-
poferent de quitter entierement le chant & la pfalmodie, mais de dire cepen- dant Poffice au choeur, aux heures 8c avec les ceremonies ordinaires ; ce qui fe fit de cette forte. Toutes les reli- gieufes etoient divifees en deux chceurs felon la coutume : chacune difoit fon office en particulier & tout bas , &c toutes faifoient les ceremonies enfem- ble a l'ordinaire. La Prefidente avoit loin a chaque endroit ou il en falloit obferver quelqu'nne s de frapper ur» petit coup, afin d'avertir les fceurs de le baifler, ou de fe tourner, ou de s'af- feoir, &c. Ainfi elles n'avoient pas befoin de fe regarder les unes les au- tres, ni de voir la Prefidente pour gar- der l'uniformite, ce qui auroit ete un continuel fujet de diftracT:ion. Celles qui pouvoient etre plus diligentes ou plus longues ne laifloient pas que de faire leurs ceremonies en meme terns que les autres. Les grandes fetes, elles chantoient 1'Office au chapitre ; c'eft- a-dire Matines, & difoient le refte de I'officeauchceur: elles y repetoient aufli Y iij
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<•>... '.■.
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5 IO HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt;
\66\. 'es Vepres, apres les avoir chanties
les fetes & les dimanches au chapi- tre ou dans la chambre de faint Jo- feph(27).^ Ce fut a la ToufTaint qu'elles com-
jnencerent. Enfin elles pratiquoient dans l'interieur de la maifoit tout ce que I'aveuglemenr & la malice des hom- ines les empechoient de faire & de pra- tiquer dans leur Eglife. Le jour de Noel, elles y chanterent
generalement tout l'Office , meme le Gloria in excel/is, V Alleluia, le Cre- do (z8). xxxvn. Quoique les religieufes fuflent ASe du 15 perfuadees de l'injuftice de cette fept. centre* u r - >
les emreprifes nouvelle ientence, qui n avoit aucun
deM. dusau- pouvoir d'aflervir fous les liens du pe-
gey, 8c con-r. , ,, ., , , , ■ / L tte ics deux che celles que 1 amour de la vente ren-
fenteiices de doitvraiment libres,elles crurentnean- M. 1 Arche- ... , ,ri , .
•ve^ue. motns devoir y dererer, en vue de la
puuTance abfolue qui les y fonpit, &
foufFrir avec patience la durete d'un joug, qui leur eut ete infupportable , {i la caufe pour laquelle on le leur im- pofoit n'en eut modere la rigueur , & ne leur eut donne une humble confiance |
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X
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e leur oppreffion rendant a Dieu
continuelles preuves de leur fr* |
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delite &c de leur amour, former©!};
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(i7) Journ. p. ?«, J7>
(2.8) Joucn. , p. «} , 64J |
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It. P A R T I E. LlV. V. 511
tin caritique toujours nouveau a la
louange de fa grace. Mais parceque l'humilite n'eft pas contraire a la juf- tice , qui etoit violee par le renverfe- menc d'une maifon confacr^e a Dieu , elles fe crurent obligees de faire tout ce qui dependent d'elles pour s'y oppo- fer, comme elles avoient toujours fait. C'eft pourquoi elles declarerent par un nouvel a&e du 1 3 feptembre , figne le 15, que fi elles cedoient a la violence parcequ'elles ne pouvoient y refifter fans fcandale, e'etoit neanmoins fans prejudice de leurs proteftations & ap- pels qu'elles avoient faits & qu'elles faifoient encore des deux fentences de M. l'Archeveque & de la conduite du fieur du Saugey & generalement de tout ce qu'il avoir fait contre elles au firejudice de leurs droits en Tune &
'autre maifon de Paris 8c des Champs j entendant continuer & pourfuivre leurs plaintes devant tous les tribunaux oil elles pourroient etres ouies , & devant celui de Jefus-Chrift leur jufte juge , de la mifericorde duquel elles atten- doient leur delivrance , bien qu'elles perfiftaiTent a demander juftice a ceux qu'il a etablis fur la terre pour la ren- dre. Elles rapportent plufieurs griefs 4ans cet a<ie ; entr'autres le refus Y iv
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512 HlSTOIRE DE PrT-ROIAI,.
que fit le fieur Biord d'entrer pour con*
feller une religieufe malade , a moins que d'etre accompagne d'une tourrierej iur quoi elles fe plaignent de l'avilif- fement de la dignite du Sacerdoce qui ell deshonoree par de telles conditions j & de ce que M. I'Archeveque ne fe fie pas lui meme a des perfonnes qu'il leur donne malgre elles , & en qui il veut qu'elles aient confiance. Le fieur du Saugey eut la principale
part dans ce proces verbal. Ce pretre fanatique, qui des le premier jour de fon arrivee n'avoit cefle de vexer ces faintes prifonnieres, refufa le-diman- che , 1 3 du mois , de faire le pain beni & de venir a la grille felon la coutume, donner l'eau-benite. Ce pro- cede , joint a ce que les religieufes eprouvoient prefque a chaque inftant de fa conduite extraordinaire a leur egard, les porta a le prendre a partie, comme elles avoient deja fait quel- quefois , 8c a le lui declarer par un ac- re expres, figne de leurs feings, date du meme jour , dans lequel elles de- claroient d'abord a lui fieur du Saugey &c au fieur Biord, qu'encore que pouc eviter le fcandale &c pat d'autres vues & raifons, elles deferalTent , quant a ce qui regardoit la recitation |
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II. P A R T I E. L'lV. V. 513
de l'Office , a la nouvelle fentence de
M. l'Archeveque , c'etoit neanmoins fans prejudice de leurs proteftations 8c appels qu'elles reiteroient tout de nou- veau. Enfuite elles declaroient a lui fieur du Saugey, que reconnoiilant tous les jours par de nouvelles & fre- quentes experiences, qu'il ne cher- choit qu'a aggraver leurs liens & a. aug- menter I'oppreffior^fous laquelle on les accabloit, elles le prenoient de nou- veau a partie. Cet aclre fut envoi'e £ M. du Saugey par la tourriere, qu'on chargea de le lui porter dans un pa- quet cachete , f?ns lui dire ce que c'etoit. Comme les religieufes n'a- voient pu faire d'oppofition en rece- vant la feconde fentence de M. de Pa- ris , elles crurent y pouvoir fuppleer par cette voie qui leur reftoit feule pour rendre publiques leurs proteftations &c leurs appels (29). M. du Saugey ne tarda pas a s'en venger; car etant alle a Pans le mardi 15, il en revint le lendemain , charge felon les apparen- ces de la nouvelle commiffion que les gardes executerent le jeudi 16, en ordonnant a M. Duval de fe retirer, $c rneme en le chalTant par les epaules » |
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|t?) Joutn. p. jc»
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Y v
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514 HXSTOIRE DE PoRT-RCHAt.''
'T66\ ^ans vol^°^r ^ permettre d'aller urr
moment a fa chambre pour mettre or- dre a des papiers qui n'etoient point a lui, 8c que M. Hamon lui avoit donnes a garder. Les gardes, apres l'avoir mis dehors , monterent a fa chambre & fe faifirent des papiers dont il leur avoit parle , parmi lefquels ils trouverent un petit journal de leur vie & de celles des ecclefiaftiques qui etoient a P. R.,. que M. Duval ecrivoit pour fe diver- tir. Ils prirent cela au criminel , 8c l'un d'eux monta promptement a che- val pour courir apres lui & l'arreter ,. mais il coutut en vain, xxxvnr. Les Supetieures de P. R* des champs Lesreiigieu- voiant qUe |a maniere dont on les COn- fe* difent le . M pfeaa[ier en traignoit de dire 1 (Jrnce , en abregeoit
entier was les beaucouple terns , penferent a le rem- jours , pour f .' r . ,
ruppiecr 1 ia pur par un exercice digne de leur pie-
rce divta! ^ 0 °) > .q1" rut de reciter tous les jours le pfeautier en entier > pour demander a Dieu la paix de 1'Eglife & celle da monaftere. Elles commencerent ce pieux exercice le dimanche 25 fep- tembre; & dans la fuite elles mar- querent dans un cahier, qui etoit ex- pofe dans l'avant-chceur, une intention particuliere pour chaque jour de la fe- jnaino, favoir : (jo) Journ. p. J4. |
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II. P A R T I E. tlV. K jff
Le Dimanche, pour la fainte Eglife»
fepoufe de Jefus-Chrift, pour qu'il la rende vi&orieufe detous ceux qui com- battent la purete de fa foi & la fain- tete de fes moeurs, pour les Rois 8c les Princes chretiens, qui doivent etre les prorecteurs de l'Eglife. Le Lundi, pour le Pape & pour rousr
les Prelats. Le Mardi , pour la converfion des
ennemis de l'Eglife, heretiques , fehif- niaciques , Juifs & Turcs ; pour ceux qui piechenc la foi aux infideles , afitx qu'ils le faiTent avec un zele digne de la laintete de leur miniftere. Le Mercredi, pour les amis de Dieu >
pour leurs amis fpirimels, pour leurs bienfaiteurs, pour les ames du purga- toire. Le Jeudi, pour demander a Diea
qu'il benit leur communaute , qu'il avoit choifie pour rendre un cuke par- ticulier au tres S. Sacrement: i°. pour celles de leurs fceurs, qui s'eroient de- funies d'avec elles: $ • pour les pau~ vres deftitues de tout feeours hit- main. Le Vendredi, pour les pecheurs qui
crucifient encore une feconde fois le fils de Dieu en euxmemes : z°. pour fous ce ux qui font a I'agonie de la more i Y vj
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5I<J HlSTOIRE DE PoRT-ROIAt.
166). ?'• pour tous-les affliges, les captifs'
& les efclaves. Le Samedi, pour demander a Dieu
qu'il leur fit tirer de leur fituation l'a- vantage qu'elles devoienr, d'etre plus pauvres , plus eloignees du monde Sc plus folitaires ; le fuppliant de lear accorder que leur folitude rut encore plus intirieure qa'exterieure par un ef- prit de retraite & de filence, qui leur fit recueillir le fruit d'une fainte union, xxxix. Bien l0in que les religieufes deP. R. «l%feufe«. ' fuiTent affoiblies par les rraitemens qu'on leur faifoit fourTrir & plus dif- pofees a. fe preter a quelqu'accommo- demenr, elles n'en avoient que plus d'eloignement ('31). La longue epreuve par laquelle elles etoient paffees, leur avoit appris, comme le dit la four An-- gelique, a connoitre Dieu & a connoi- tre les hotnmes , enforte qu'elles di- foient de tout leur cceur : Da nobis auxilium de tribulatione quia vana fd~ lus hominis ; elles n'avoient plus d'au- tre opinion de toutes les propofitions qu'on leur faifoit pour leur falut, finon qu'elles etoient vaines & trompeufes : elles n'attendoient leur falut que du Sauveur; elles etoient plus permadees" que jamais , qu'il ne les vouloic (30 Let duj aovemb. Journ.p. $5V |
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II. P a r t r e. Liv. F. j if .
delivrer qu'en delivrant fa Write , & kJ<J< qu'etant captives pour elle; elles ne de- voient point attendre de liberte qu'avec elle : elles fe furTent crues tres malheu- reufes , qu'on leur eut procure quel- que paix qui ne lui eut pas ete glo- rieufe: elles temoignoient qu'il leur etoit impoffible de fe refoudre jamais a accorder quelque chofe pour fe la pro- curer : » Quand ce fera , difoient-el- » les, fa feuleparole ( de Jefus-Chrift )* » qui eft la verite meme , fans aucnn » melange d'equivoque & de degui- *> fement, qui rompra noschaines, » nous le benirons de notre liberte , w finon nous nous contenterons de le » benir dans notre captivite, qui a » peut-etre des avantages plus folides. » que nous n'en trouverions dans un » autre etat. » Toute la comniunaute > " difoit la mere Prieure dans une » lettre du *G novembre, eft dans la* » refolution de porter autant qu'it » plaira a Dieu , 1'etat ou nous fom- >» mes , & toutes les fuites qu'il pour- » ra avoir : la paix & la joie qui fe » rrouvent parmi nous * font telles * » qu'elles nous etonnent quelquefois j n & il n'y a rien de plus capable da « nous perfuader que c'eft pour la ve- *> rite quenous fouf&ons, & que nou* |
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518 HlSTOIRE DE PoRT-ROlAt;
l66c, " ne devons point defirer d'etre d&i*
» vrees que par elle & avec elle. Je ,> ne vois rien qui foit capable de trou- » bier notre paix , que les nouvelles n propofitions d'accommodement* »* |
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*I>
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Leure de M. Paulon a M. FEveque
d'AUt, l5 Decembrei664- Onseigmeur, je vous fupplie-
» tres humblement de me donner votre fain- 03 te benediftion. Au milieu de l'orage, done » Dieu permet que Con Eglife foit agitee dans » ces mauvais jours , je prends la liberti de » m'adrefTer a votre Grandeur par ces paro- 33 les prefque femblables a celles que le pre- ss mier des Apotres dit autrefois a notre Sei- 33 gneur : Daigne^, Seigneur, mepreferver, de pair dans une tempete fi dangereufe, dans laquelle le naufrage ne me pourroit etre que funefie. Apres ce debut, M. Paulon, dit a M. d'Alet, qu'etant ne dans un village due tanguedoc , qui n'eft pas eloigne du diocefe d'Alet, 8c d'ailleurs perfuad^ que fa charite , «iont il * donne tant Silluflres temoignages9 n'eft pas reflerree dans cette province , il a cru, 33 qu'elle ne rejetteroit pas un pretre s> tres indigne du faint cara<5tere , qui de Ix x Capkale de ce roiaume va fe jetter a fes S3 pies en la maniere qu'il le peut prefentement, ss dans lefpdrance de le faire r^ellement & au S3 platot, fi elte daigne fc lui permettre >: ss pour lui demander avec tout le refpeft pof- 33 fible fa favorable protection, & lui aban- »3 donner entierement les interers de foname~ »s Car par la mifericorde de Dieu, il n'en » a $c n'en veut point avoir d'autres avec ss I'ailiftance de cette mime grace. Apres cela, M. Paulon entre dans le de-
tail des eveuemeiis de fa yie. Etaac forti dc |
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'^3.6 Ltttrt di M. Pauton
fa patrie pour continuer fes etudes, il all*,
a Marfeille , puis a Lyon , enfln a Paris, oti il recut les faints Ordres, trap inconfideri- ment, fans dome, dit-il, quoique ce fut 33 par Tavis & fous la direction de perfon- 33 nes, dont la conduite etoit le plus uni- 33 verfellement approuvce , & apres avoir 33 paffe dans le ferninaire de M. Vincent le » terns ordonne par M. l'Archeveque pour 33 fe preparer a l'ordination, sj Etant pretre recu dans le ferninaire de faint Nicolas du Cnardonnet , il fortit dans le deflein de fe retirer dans fon pais. II refta eepen- dant pour prendre quelque traite de theo- logie; apres quoi comme il fe difpofoit a executer fon deffein , M. le cure de faint Jacques de la Boucherie ( M. Cliapelas ) lui offrit de l'emploi fur fa paroifle, d'une manie- re fi obligeante qu'il l'accepta de I'avis de ceux en qui il avoit confiance. M. Paulon travailloit depuis fix ans dans
cette paroilfe , foit en qualite de Chapelain d'une confrairie, qui a foin de faire aflifter les pauvres honteux , foit en qualite de fous- Vicaire, lorfqu'on le demanda pour un em- ploi, 33 pour lequel, dit-il, je n'aurois j»-< 33 mais pu m'imaginer qu'on eut penfe a 33 moi, 33 e'eft-a dire pour etre confeffeur des religieufes de P. R., auxquelles on avort 6te Ieurs anciens confefleurs, ( en 1661 ). M. le curd de faint Jacques dit, fur la demande qu'on lui fit de M. Paulqn , qu'on pouvoit fe fier a lui, 33 & qu'il etoit tout- 33 a-fait eloigne des fentimens , qui avoient as fait chaffer ces premiers confeffeurs. Sur de telles aflurances , M. Bail, ( qui en ver- tu des ordres de la Com faifoit les fonc- tioas de Superieur des religieufes de P.. JUJ |
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<£ M. I'Eveque d'Jlet. 521
^ropofa a l'Abbefle pour confefTeur M. Pau- lon , fans l'avoir vu , ni lui avoir pads. M. Paulon fut tres furpris de recevoir a ce fujet une lettre de l'Abbefle de P. R., .qui lui annoncoit le choix qu'on avoit fait de lui, & lui marquoit de voir M. Bail. II alia le trouver a I'Hopital de fainte Catherine Je jour de fainte Marthe, & lui temoigna fon etonnement. M. Bail le raflura & l'ex- horta a accepter cet emploi , en lui difant que les religieufes de P. R. etoient de tref bonnes filles, ce qu'il rep^ta plufieurs fois. II ajoura que dans les entretiens qu'il avoit eus avec elles > il avoit reconnu que leur'foi itoit fincere; & qu'il etoit perfuade qu'il y trouveroit fa fatisfaition. M. Chapelas, a qui M. Paulon fit part dc
l'entretien qu'il avoit eu avec M. Bail, nc lui confeilla pas d'accepter , Si Ten detour- na , en lui difant qu'il n'y auroit point d'agrement, & que les religieufes attachees a leurs anciens confefleursne le regarderoient que comme un efpion. Ce difcours, quoique prejfant, dit M. Paulon, ne put effacer un certain mouvement que je fentois de voir ce qu'il en feroit. Il demanda a M. Chapelas la permiflion de voir au moins la commu- naute pour laquelk on le deftinoit. Le Cure la lui accorda , perfuade qu'il reviendroit, & ne voulut poiiK difpofer de la place qu'il quittoit. M. Paulon revint en effet, mais dans le deffein de retourner; & M. Chape- las fut fort etonne de le voir dans une dif- pofition tout autre que celle qu'il atten- doit. » Je pris conge de lui, dit M. Pau- 33 Ion , pour revenir dans l'etabliflement m que je commencois a regarder comme m'e- » taut often de la pan dc Dieu. Etanc daas. |
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J22 Lettre de M. Paulon
3i ce monaftere , apres avoir fait quelque r|-* m flexion fur la conduite qu'on y tenoit, apres 33 avoir obferve la maniere cTagir, tant des 3j religieufes que des perfonnes du dehors, ss je ne pouvois aflez m'etonner de la mali- » ce ou de I'aveuglement des hommes, qui » font capables de faire paffer pour un grand 53 mal le plus grand bien, en decriant com- as me une maifon de dereglement, une com- 33 munaute des mieux regimes. Je dois con- »3 fefler devant Dieu , que je fus touche d'un 33 fentiment de confufion & de douleur, pour m avoir cru une partie du blame dont on ■as chargeoit une maifon , dans laquelle je m ne vo'iois que des fujets d'edification. Et so quoique ma foiblefle me prefentat quelque^ >3 forte d'excufe , en me fuggerant que je as n'etois pas fi coupable d'avoir cru eft par- M tie" un bruit fi univerfellement repandu , as & meme par des perfonnes de pidte , Sc 33 qui ont de l'eftime parmi le monde, tout 33 cela ne'anmoins n'etoit pas capable de me m confoler, beaucoup moins de me juftifier 33 devant Dieu , fuivant ces terribles paro- 33 les de faint Bernard, puifqu'il eft en doute, 33 fi un medifant eft plus coupable que ce- ss lui qui Tecoute; auxquelles paroles je ne 33 faifois aucune attention r non plus que as la plupart du monde, ni a celles par lef- 35 quelles ce grand Saint nous allure que fi as le d^mon eft fur la langue du medifant, 3s il eft audi dans Poreille de celui qui l'e'cou- 33 te; & qulin calomniateur porte trois coups 33 de mort par un feul coup de langue ; faiC- 33 qu'en tachant de tuer , pour ainfi dire, la is reputation de fon prochain, il tue fon 33 ame, & Tame de celui qui ecoute la me- - m difance fans la condaraner. Je difois ea |
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a M. VEveqm d'AUt. 523
S» moi-meme; ne fuis-je pas Wen coupable 33 d'avoir cru des chofes fi horribles , fans » m'ctre donne la peine de m'en t'claircir le 33 moins du monde , quoique ce fafTent des » chofes ties faciles a verifier ? ( Combien de perfonnes font encore aujotird'hui dans le cas de M. Paulon , & que fi elles avoient le cceur auili droit que lui, feroient les me- ttles aveux ? » J'avois entendu dire a des 33 perfonnes, qui font profeilionde piete, & 33 a M. le cure de faint Jacques lui-meme 33 qu'on avoit banni de P. R. Veau-benite , 33 les chapelets &• autres chofes femblables. »3 Cela eft fi e"pouvantable, que lorfque je 33 pris conge de M. le cure de faint Jacques >3 & que je lui faifois le recit d'une partie 33 du bien que j'y avois deja vu durant le 33 peu de tems que j'y avois demeure, qui S3 n'etoit que d'un mois , il ne put s'empe- 33 cher de me faire paroitre la penfik qu'il »> avoit du contraire ; me diiant qu'il favoit si pourtant de bonne part, qu'on n'ufoit si point a P. R. d'eau-benite , ni des autres 33 chofes que je viens de rapporter ; que Ton »» ne fe confefloit que rarement, & mcme sj que Ton ne s'y confefloit point des peches 33 veniels , fi ce n'eft entr'elles, les unes aux S3 autres. II ajouta d'autres chofes, lefquel- 33 les toutes enfemble me jetterent dans ur» S3 fi profond dtonnement, qu'il fallut que je » me fiffe quelque violence pour pouvoir lui so r^partir. Je le fis pourtant a peu pres en S3 cettte maniere. Avant que je fufle a P. R. 33 j'ai cru quelque chofe de cela, mais S3 maintenant je m'etonne comment eft-ce que S3 je l'ai pu croire , & je m'etonne beaucoup »3 plus comment on le peut dire. Car com- *» msnt eft-il poflible cjue Ton n'ait pas l'u* |
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52.4 Lettre de M. Panion
»j fage de l'eau-benite dans une eglife de teJ
*> ligleufes, dans laquelle on la benit tous » les dimanches, & de laquelle on fait faf- s> pcrfion audi folemnellement & beaucoup 35 plus denotement que dans aucunc paroifle aj de Paris ; Comment n'ont-elles pas des is chapelets ni des images, puifque dans la »3 vifite que M. le Do'ien y fit dernierement =3 accompagne de M. Bail, que j'eus Thon- »3 neui" de fuivre partout le monaftere, on 33 ne vit pas une foeur qui n'eut fon cha- »3 pelet, garni la plupart de plufieurs m&- »3 dailies, ou autres petites marques de pie- »3 te & de devotion , comme font de petits » reliquaires & autres chofes femblables; Sc 33 que meme les fceurs converfes , foit qu'el- 33 les fachent lire ou noh, n'ont point d'au- as tre office a dire que leur chapelet qu'el- 33 les partagent en difFerentes heures du jour, 33 priant en leur particulier au meme terns 33 que les foeurs du choeur difent l'office ca- 03 nonial dans l'eglife ; & Ton n'a point trou» •» v& de cellule dans laquelle il n'y eut un 33 benitier avec de l'eau-benite, & des ima- 33 ges : & quant a la confeffion, elles fe con- 33 fefloient tous les quinze jours, & quel- 33 quefois plus fouvent; & fi elles ne fe 03 confefloient pas des fautes venielles , jc 33 ne voiois pas de quoi elles fe pouvoient *j confeffer, puifque je croiois que Dieu »3 leur faifoit la grace de veilter aflez foi- 33 gneufement fur elles pour ne tomber pas 83 dans des fautes mortelles . . . Ces premieres obfervations ne fervirent pas
peu a perfuader M. Paulon de la fauffete des autres accufations formees contre le monaf- tere de P. R. « En efFet, dit-il, a M. d'A- » let, il ne fe paflbit prefque pas un jovj| |
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a M. I'Eveque £AUt Jif
$ que je ne decouvrifle quelque faufTete &i
to quelquefois plufieurs, & meme d'horribles w calomnies, que j'avois vu publier contra » aette maifon. II rapporte entr'autres cho- 33 fes, qu'il avpit oui dire que , P. R. itoit ft comme un gouffre qui engloutijfoit les conu m modites de tous les particuliers ; que quan- 33 the de families en avoient he ruinees j 33 que c'etoit une ecole d'impiete, qu'on n'y »» croioit rien, que I'orgueily regnoit, qu'on 33 y miprifoit tout le monde, & qu'il n'y avail 33 que la crainte d'un mauvais traitement, 3> qui empechoit tous ceux qui y etoient atta* 3j ches, de fe feparer de I'Eglife en meprifant M toutes lespuiffances ecc!e/iafliquesi& feculie- 33 res. J'avois oui dire plufieurs chofes auifi ef- 33 froiables que celles-la. Et toutefois, Mon- 33 feigneur, je n'ai vu dans cette maifon 33 que ie contraire de ces fauifetes fi fanglan- 33 tes. »3 M. Paulon entrant dans le detail refute ces calomnies par ce qu'il a vu lui- meme & ce qu'il a appris certainement. » J'y 33 ai vu, dit-il, un fi parfait defincerefTemenr, 33 que plufieurs religieufes m'ont allure y *> avoir ete revues fans avoir doling quoi 33 que ce foit....., J'ai appris tres
33 certainement qu'on avoit contribue a ce
33 qui etoit neceffaire pour faire recevoir 33 dans d'autres monafteres de pauvres filles 3» qu'on ne jugeoit pas etre propres pour ce- 33 lui-ci. Peut-on s'imaginer un plus granci » defintdreflement ? J'ai reconnu dans ces 33 vertueufes filles unegrande crainte deDi «, 3> une pie'te folide , une humilite profonde 3j & un refpeil' fingulier des inferieures en-> 33 vers les fuperieures ; une chariti & une » union parfahe entre toutes, I'amour de lot & pauvrete 3 la pratique du recueilkment, dlf |
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jkJ Lettre de M. P)avion
a5 filence & de la penitence, join is a. une gran*
» de pur ete de confidence. J'y ai trouve les 33 pretcves tres evidentes de I'affurance que 33 j'ai dit que me donna M. Bail , lorfque 33 j'y vins , que leur foi etoit Jincere M. Paulon rapporte que M. Bail confirms
encore le temoignage qu'il avoit deja ren- du a la purere de la foi des religieufes , dans le difcours qu'il fit a la grille en prefence de la communaute , lors de la vifite , aiant dit, » qu'il avoit trouve la foi des religieufes 33 pure, lorfqu'il les avoit tdtees la-deffus. Ceft ce que M. Paulon entendit avec joie de la bouche de M. Bail; 8c rexpreftion dont il fe fervit, n.a ete plus propre , dit-il 33 pour m'en faire fouvenir que n'auroit ete » tout autre. 33 M. le Doien de Notre-Da- me etoit prefent a ce difcours de M. Bail , qui ajouta, 33 qu'il s'etonnoit que les reli- 33 gieufes de P. R. aiant ete conduites 33 par des perfonnes accufees d'erreur, n'euf- 33 lent re$u aucune mauvaife impreffion. Le meme M. Bail, dans un fermon pre-
che le jour de faint Pierre, avoit loue publi- quement les religieufes fur la purete de leur foi. Ceft ce que M. Paulon temoigne avoit appris , & ce qui lui donnoit une cftime par- ticuliere pour M. Bail. 33 J'ai vu encore dans cette fainte commu-
x naute une devotion fans artifice , point de 33 grimace , point d'ambition , point de bri~ 33 gue pour parvenir aux charges. Au con- 33 traire celles qui y font elevees, s'en difi- » penferoient de tout leur cceur, fii c etoit en. »3 leur pouvoir. 33 M. Paulon avoue que ces dernieres reflexions le determinerent a de- meurer a P. R., admirant d'autant plus ces bonnes qualites, qu'il ne les avoit pas re- |
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a M. VEvequt d'Alet. $iy
marquees dans aucune autre communaute jqu'il eut frequentee, quoiqu'il en eut v» ylufieurs. =3 J'ai encore reconnu dans P. R. une at~
sj tache inviolable a la fainte Eglife, un 33 grand refpect & toute la fournirfion que » tous les vrais fideles & les plus parfaits m chretiens doivent a 1'autorite fupreme de =' notre faint pere le Pape. M. Paulon fait a cette occafion un recit fuccint de ce que les religieufes ont fait au fujet des dirFerens mandemens publics par les grands Vicaires de Paris & M. de Perefixe, fur le for- mulaire : il rapporte les differentes flgnatures qu'elles ofFrirent de donner, & finit ainfi : 33 Toutes ces differentes flgnatures fi hum- 33 bles & fi finceres n'ont pas empeche qu'un 33 monaftere de religieufes tres vertueufes 33 n'ait etc" traite d'une maniere que je ne 33 puis decrire. Aurfi bien je crois que le 33 bon Dieu veut que Ton adore dans lc fi- »3 lence l'ordre de fa divine providence fur 33 cette maifon. J'ajouterai qu'aiant eprou-, 33 ve, comme j'y etois oblige felon Dieu , 33 la conduite des religieufes de P. R., je 33 n'ai pu voir <ju'avec beau coup de douleur »s le traitement qu'on leur a fait fouffrir. C'eft 33 ce qui m'obligera de fortir de ce pais, »3 pour me retirer dans quelque coin de vo- 33 tre diocefe, fi vous daignez, Monfei- 33 gneur , me le permettrc, afin que je puif- 33 fe gemir devant le Seigneur pour mes pe- as ches, qui m'ont arTurement rendu indi- 33 gne d'etre plus longtems avec de fi bon- 33 ries filles. J'avoue , Monfeigneur, que jc 33 ne fuis pas aflez heureux pour croire que 33 ma refolution ne foit approuvee de tou- «s> ces Jes perfonnes judjcieufes, lefquelles |
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|lX Ltttrt it M. Vaulon
-5= verront que ,dans les agitations qui trou*
33 blent la paix de l'Eglife, je cherche un 33 afyle aupres d'un grand Eveque, que tout »3 le monde reconnoit comme fon plus fermc 33 appui, comme prefque l'unique defenfeur 33 de fes droits, & prefque le feul qui ait 33 travaille avec tant de zele & avec unebe- 33 nediftion particuliere de Dieu pour ea 33 etablir les plus pures &c les plus faintes » maximes. J'ofe meme efperer , Monfei- 33 gneur, de votre charite, qui vous rend as en un etat fi miferable , Tun des plus di- 33 gnes fucceffeurs des Apotres, 8c parcon- 3j fequent -des Vicaires de Jefus-Chrift notre 33 divin Palleur, la grace que je lui demande 33 de tout mon coeur. L'inclination que Dieu 33 vous donne pour tous les interets de l'E- 3» glife, ne vous permettra pas , je m'af- *> lure, de rejettet le moindre de fes enfans. » C'eft la feule confolation qui me refte dans 33 un fi grand fuiet d'afflidion. Ce fera done 33 ties raifonnablement, Monfcigneur, que 33 j'irai chercher dans votre diocefe un port 33 favorable & aflure , lorfque la tempe- 33 te me contraindra de fortir tout-a-fait de 33 celui, dans lequel vous jugerez fans dou- 3> te, Monfeigneur , que la providence di- ss vine m'avoit conduit. »3 Nous fommes perfuades que le leiteur li-
ra avec d'autant plus de plaifir ce long ex- trait de la lettre de M. Paulon a M. d'A- let, qu'elle renferme une pleine justifica- tion des religieufes de P. R. & une apologic eriomphante de leur innocence. |
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TABLE
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5*9
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e
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TABLE
ALPHABETIQUE
'Desprinczpales Matieres
Contenues dans ce cinquieme Tome.
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A
XX ND i li y ( An- die replique, 3<S8. Son
gelique de faint Jean depart pour P. R. des Arnauld d') Ellefort Champs, 39$. A<5te de fa prifon aux An- d'humilite qu'elle fait nonciades , 387 , &c. enpleinchapitre34i4. Son entrevue avec fes Arnau'd( Antoine ) faeurs & la mere Agnes dofteur de Sorbonne ; 590. Son etonnement il prend la defenfe des 8c fes difpofitions fur religieufes de P. R. 5c ce qui s'&oir pafTe pen- les juftifie fur le pre- dant fa captivite, 391, tendu manque de ref- &c. peft pour leurs fupd- Arnauld ( Agnes ) rieurs ecclefiaftiques,
Elleeciitauxreligieu- qu'on leur attribue , fes qui etoient reflees 41. a la maifon de P. R. B <de Paris , fur la reu- "O
nion que M. de Pere- |"jOi s buisson fixe vouloit faire de ( M. ) II eft nomme routes les religieufes par M. Chamillard fidelles a P. R. des confefTeur des reli- Champs , 367. Elle gieufes de P. R. de lecoit une reponfe des Paris , s'inftruit de la religieufes, a laquelle veaie* & rend dc Tome K* 2> |
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5 jo TABLE DES MATIERES,
grands fervices au mo- difpofuion a cet egara
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naftere , m, 115
Boulogne ( Anne
Eugenie) veuve de M. de faint Ange , reli- gieufe deP. R., fes ex- cufes a la communau- te pour s'etre fervie du mot d'indifKrence afin d'obtenir la commu- nion , 4x6. Bregy ( Euftoquie
de Flefcelles de ) reli- gieufe deP. R., fa dif- fiofition a la yue de
a persecution , 6z. fermete de fes repon- fes a M. de Perefixe , traitemens qu'elle en lecoit, 73 , 75 » 7^- Elle difputecentre M. Chamillard , 89. Sa fraieur en vo'iant fi- fner la foeur Melthi-
e du ForK: fon cou- rage , 114, &c. Vie- toire qu'elle rempor- te fur M. de Perefixe & Madame de Bregy fa mere , 117 , &c. Elle eft enleve'ede for- ce de P. R. , fa foi en cette occafion, facori- duite, 168, &c. Briquet { Madeleine
de fainte Chriftine ) elle s'artend a etre en- Jeyeed; P. R..61. Sa |
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63. Part qu'elle eut a
tout ce qui fe paffa a la vifite de M. de Pe- refixe le 14 fepternbre 1664, 74 , 7J. Ses re- flexions fur la condui- te des religieufes dyf- coles , 108. Elle eft; follicitie de figner par fes parens, 181, Sec. Son enlevement de P, R. , r^cit de ce qui fe paffa dans cette expe- dition , 189 , Sec. Brunetiere ( M. de
la ) follicite les reli- gieufes de P. R. pour la fignature, 457. |
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\^j A m u s ( Fran-
coife de fainte Claire le) religieufe deP.R., fa pretendue fignature du formulaire : decla^ ration d'un Vicaire de faint M^dard a ce fu- jet, 318, &c. Samort, 314-
Chamillard ( M. >
Dofteur de Sorbonne , il confelTe les religieu- fes de P. R. fans rien exiger d'elles , but de fa douceur feinte, 19, II fait des conferences |
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MATIERES*. jfif
de la bulle d'Alexan- dre YII, & du man- dement deM. de Pe- refixe a ce fujet; etat Tiolent dans lequel el- le fe trouve pendant fa captivite , 353. D
D Upre'( Anne
Marguerite de faintc Gertrude ) elle fe fait religieufea^P. R ,430. Son attachment a la v&ite" , fon exil, fa chute,.430, 431, &c. Elle ecrit a pluiieurs perfonnes du lieu de fa. captivite ,434. Elle revient a P. R. des Champs , 43 j. Elle eft touchee de Dieu , 4i7. Elle demande en plein chapitre pardon & penitence de deux fignatures qu'elle a faites , 417, &c. F
JT A r e ( Louife )
religieufe de P. R. , 5on premier entrjtien avec un Vicaire de faint M^dard, 316 , &c. Son fecond entre- tien avec le meme Yi- Zij |
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TABLE DES
&tourmente les reli- tieufes prifonnieres
ans leur monartere , 47 , &c. II eft terraffe par les argumens pref- ians des religieufes , 54. II recommence fes conferences , ce qui s'y dit,y j &c. 88. Sa joie a la chute de la foeur Melthide du Forte", Con emprefle- tnent pour la faire communier, 107.Son entrerien avec la foeur Genevteve de l'lncar- nation , i6S. Vain triomphe de M. Cha- millard pou r une figna- tnre arrachee a une xnoribonde, 320. II propofe aux religieu- fes un nouveau projet de fignature , 3x6. II eft envo'ie par M. de Perefixe a P. R. des champs, comment il y eft recu par la Prieu- <re, Jj6, &c. Ses ma- noeuvres aupres desre- Jigieufes pour les por- ter a demander leur r^uuion a P. R. des champs, 363, &c. Comte ( Marie de
l'lncarnation le)Prieu- re de P. R. de Paris , jugement quelle porte |
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MATIERES.
cette conduite a M. de Perefixe, 378, &c. Elle protefte contre la tranflation des reli- gieufes de P. R. de Paris a Port-Roial des Champs , 40©. Son entretien avec M. le Mafdre aumonier de M. dePerefixe, 470, &c. Feron ( Elifabeth
Agnes h ) religieufe deP. R. ; reflexion ju- dicieufe de cette fain- te fille fur une forte de perfecution que les religieufeserTuioientda la part de leurs parens, 185, 186. Fontaine ( la mere
Eugenie de) religieu- fe de fainte Marie , introduite contre les regies a P. R. de Pa- ris , elle veut s'em- parer des clefs du mo-* naftere , refiftance qu'elle rencontre, n. Son caraftere , 13. Elle veut exercer fa pretendue charge de Superieure , 36. Elle veut tenirchapitre,37. Formulaire , Bref
d'Alexandre VII fur le formulaire converti en bulle, 174. M. de Pp- |
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j-5s TABLE DES
cake, 313, 330, &c. Ses vertus decrites dans un billet de M. de fainte Marthe a M. l'Eveque d'Aler, 333, &c. Fargis ( Marie de
fainte Madeleine du ) Prieure de P. R. des Champs ; fa fermete' lors de la vilite de M. de Perefixe en 1664 , 131. Elle ecrit aux re- ligieufes de P. R. de Paris une lettre fur l'excommunication , i.-]6. Sa fra'ieur au fu- jet d'un accommode- ment propofe , 3 10. Sa lettre a la commu- naute de P. R. de Pa- ris fur la bulle d' Ale- xandre VII, 340. Elle refufe de connoitre M. Charaillard pour Supd rieur; fecours qu'elle re^oit des amis en eet- te occafion, 357. Elle ieritaM. de Perefixe pour fe juftifier au fu- jet de ce refus, 3 59 , &c. Sa conduite & fa fermetd lors de la vi- fite de M. Dupleffis grand Vieaire de M. de Perefixe a P. R. des Champs , 374, Sec. Elle rend compte dc |
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MATIERES. HI
le fait fur la conduits des fceurs difcoles 109. Hamon ( M. ) Mi- decin de P. R. des Champs : ordre pour l'arreter , il fe livre entre les mains dc ceux qui viennent le prendre ; la provi- dence Ten retire, 107, &c. Doulcur qu'il ref- fent en quittant ce mo- naftere, 113. Il re- vient a Port-Roial des Champs, 474. L
I jEcERr ( Madelei-
ne de fainte Candide ) Elle figne & retra&e fa fignature , 344 * note 49. Elle confeflc fa faute en plein cha- picre , & en demande penitence , 414. Ligny ( Madeleine
de fainte Agnes de ) AbbelTe de P. R. exi- le"e a Meaux ; elle rc- colt fon ob&flance pour revenir a. P. R. des Champs, elle re- fufe d'abord d'y Ae£i- rer ; elle ecrit a M.' TEveque de Meaux * & vient enfuite a P. R. des Champs, 407. Ziij
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TABLE DES
refixe engage le Roi a. la demander , Ale- xandre VII l'accorde, 3.78. Horrible formu- Jaire infere dans cette bulle , 179. Seconde bulle d'Alexandre VII furle memefujet 336. Maniere done elle eft rejuepar les Eve'ques, 937. Idee du formu- laire, 481, &c. Fofle ( Melthide
Thomas du ) religieu- fe de P. R. ;. elle a le ma'heur de figner le fbrmulaire ; condi- tion qu'elle exige en fignant , 104 , ioj. Ses peines de confeien- ce apres fa chute, 105. Chofe extraordinaire arrivee a une fceur converfe le jour que ia fceur Melthide figna 106. Elle retrafte fa fignature , proces ver- bal de cette retracta- tion , 154. Elle eft enlevek de P. R. par M. de Perefixe j 167, 168. H
JTIamelin ( Mar-
fuerite ) religieufe de
. R.j remarque qu/elT |
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; MATIERES.'
N
J\ I c o t e ( M. )
11 ecrit fa cinquiemc
lettre imaginaire fur rexcommunication , x7f. Sa fixieme lettre fur les diverfes vues de M. de Perefixe &C les diverfes agitations defonefprit, 339. P
X Assart (Flavie)"
religieufe de P, R. ; elle trahit fes propres foeurs , fa trahifon Al* couverte , 40 , &c. Elle eft nommfc pat M. de Perefixe fous- Prieure & infirmiere , 78. Ses entreprifes j 81. Paulon ( M. ) il eft
nommd par M Bail confefTeur de P. R. des Champs , fon enrre tien avec M. de Pere- fixe , il rend temoi- gnage a la verite", il eft chafle de P. R. des Champs , iyo , 1 j 1. Entretien qu'il a avec les ecclefiaftiques de la fuite de M. de Pevefixe , iyi. 11 (fi |
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554 , TABLE DE!
Elle latific en paflant par Paris rous les a&es que les religicufes avoient fairs pendant fon abfence, 409. Son entretien avec M. le Mafcire Aumonier de lit. de Perefixe , 470, &c. M
JViARiE ( Les reli-
gieufes de la Yifita- <ion de fainte ) font Introduces a P. R. de Paris pour etre les gdo- lieres des religieufes de cemonaftere, 18. Leur caraftere , 14. On leur rend juftice fur leurs vie & mceurs, 3 j. Leur peu d'inftruc- tion , 54, 3 J. Maupeou (la mere
de ) religieufe de fain- te Marie , envoiee a P. R. de Paris , fon bon caractere, 17. Son eftime pour P. R. , 2.8 , &c. Elle deman- de a fe retirer . & re- tourne dans fon mo- naftere, 30, &c. Morin ( Jeanne de
la Croix ) religieufe deP. R.jfamortjfii. |
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Table des matieres. $h
Jeth'e aupres de Mon- Mo'iens qu'il emploie
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feigneur l'Eveque d'A-
let , i j;. Sa lettre a ce Pr^lat ,519. Perefixe ( M, Beau-
mont de) Archeveque de Paris; foil portrait, 12., &c. In^galite de fa conduite, fes vues, 17. II vient a P. R. de Paris le 11 feptembre & fait tomber dans fes pieges fept religieufes $ 1, &c. Le peu de fucces de fes demar- clies a P. R. lui fait faire des menaces terribles & dite bien des duretes , 64. II re- Vient a P. R. de Paris & veut faire defavouer aux religieufes ce qui etoit porte dans leur acte fur l'enlevement de douze religieufes lc l«aout 1664 , detail de ce qui fe paffa cet- te journee-la, 7i, &c. II depofe les OfKcie- res & met en place cel- les qui avoient fign£ , 78. II prive des Sacre- mens les religieufes oppofantes, %6 , &c. fes fr^quentes vifites a P. R. pour cncou- rager les difcoles &c en (pduire d'auues t j»o. |
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pour gagner quelques
religieufes , 103. H attaquela fceurEufro- quie de Bregy & il eft vaincu , 117. Sa vi- fit'e du 1 j novembre 1664 a Port Roial des Champs , ce qui s'y paffa, IZ9, &c.Fauffc maxime qu'il y avan- ce> 13 j. II termine fa vifite en ordonnant la fignature du formu- laire , 158. Sa fen- tence du 17 Novem- bre coutre les religieu- fes de Port-Roial des Champs , 141 , &c, II s'irrite de plus ea plus contre les reli- gieufes de P. R. de Pa- ris , 1 Si. II vient a P. R. de Paris, reprO- ches qu'il fait aux re- ligieufes , cc qui s'y paffa, 1 Si, &c. Ilea enleve trois religieu- fes, 166, jufqu'a 171. Etrange raifonnemenc de M. de Perefixe fait a M. Bignon Maitro desKequetes, 181. Il enleve la foeur Chrif- tine Briquet , r6cit de ce qui fe paffa dans) cette expedition, 189, jufqu'a 197. Sad6clat |
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5 3 6 TABLE DE:
ration aux religieufes de P. R. de Paiis au fujet du formulaire , 2.17. Sa reponfe du I4decembre 1664aux religieufes deP. R. des Champs. II vient a- P. R. de Paris le 3 Jan- vier 1665. pourquoi, 157. II engage le Roi a demander a Alexan- dre VII une nouvelle bulle , 178. Ettange conduite de M. de Pe- refixe a l'eVard de P. R. 180. Sa reponfe a la requete des reli- gieufes de P. R. des Champs du jodecem- bre 166), 28 r. Sou fecond mandement pour la fignature du formulaire , 5 J 8. II le publie , \<at%, II le fignifie a P. R. de Paris, 343. Ilenvoie a P. R. des Champs M. Chamillard pour fonder les religieufes fur fon fecond man- demement , 3j 6. II conc/m le deffein de raflembler toutes les religieufes oppofantes dans une mime mai- fon 5 il charge fon agent ordinaire de la manoeuvre de cette af- |
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I MATIERES
faire , 362 , &c* II notifie fes ordres fur cette rdunion aux reli- gieufes de P. R. de Pa- ris , 371 , &c. Ilen- voie fon grand Vicai- reaP. R. des Champs, recitdecette vifitc374, &c. II fait fortir de P. R. de Paris les re- ligieufes oppofantes, pour les envoi'er a P. R. des Champs , ce quis'y paffa, 382, &c. II fait fortir les exi- les du lieu de leur captivity pour les en- vo'ier a Port-Ro'ial des Champs, 5 8y. II con- tinue a envoi'er a P, R. des Champs les op- pofantes a la fignatu- re, 401. Outrage qu'il fait a M. de Sevigne , 403- II reduitaP. R. des Champs les reli- gieufes dans la plus dure captivit^, 411 , jufqu'a-419. Son or- donnance pour y ita.- blir une tourriere , 419- II eft fourd a toutes les repreTenta- tions des religieufes, 420. II envoie a P. R. des Champs un Vi- caire de faint Medard, difeours qu'il luitkec |
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TABLE DES MATIERES. jj?
fur la Prieure , 460. ligienfes, 39. On leur
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donne avis de la trahi-
fon de la foeur Flavie, 4z. Elles fe fortifient par la lecture des ecrits qui leur font envoi'es, 46. Elles font tour-, mentees par M Cha- millard , 47. Elles fc retirent des conferen- ces de ce dofteur , 48, &c. Elles obtiennenc des Lettres de Chan- cellerie, fi. Septd'en- tr'elles fe foumettent an joug de l'Archeve- que , 51, &c. Les re- ligieufes difcoles de- mandent a M. de Pe- refixe de les envo'fer dans d'autres monafte- res, fi leurs Superieu- res revenoient aP. R.; calomnie qu'elles a- vancent contre les Su- pe'rieures , $6 , $j. Les religieufes fidelles ^crivent en commun a leur AbbefTe , elles font perfe'cutees par les difcoles , ff , 60 t 61, 79 , &c. Elles s'attendent de jour en jour a etre enleve"cs , leur foi, 62., &c. El- les ecriventaM. l'Ar- cheveque pour tacher Divifion entrc les re- de le toucher^j, &&,' |
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fjt fAfiLE DES MATTERED .
Leut fermete a refufer 99, &c. Changemen?
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Ja fignature du formu-
laire & le deTaveu de leur proems verbal fur l'enlevement de leur meres , 74 , &c. Les difcoles font nominees aux charges , au preju- dice de celles qui y etoient , dies redui- fenc leurs faeurs dans la plus dure captivite, 78, Sic. Embarras des religieufes fiddles par rapport a la conduite qu'elles doivent tenir a regard des intrufes, 8i , &C> Elles font privees des Sacremens, 86. Les difcoles defa- vouent par une decla- ration les aftes aux- cpels elles ont eu part avant leur fignature , j 1. Declaration du j odtobre 1S64 des reli- gieufes fiddles par laquelle elles confir- ment leurs actes, ap- pels, proces-verbaux prdce'dens, & appel- ant de nouveau des dernieres violences , <>i , &c. On prefente requete au Parlement pour elles , 98. Leur lettre du 9 odTiobrc |
de conduite dans les
difcoles , 108. Con- fluences que tirent les religieufes fidelles de ce cnangement de conduite des difcoles & des raifonnemens frivoles des Apotres du formulairc , 110. Elles font allarmees de la chute de la foeur Mclthide du Foile , 114. On fait leur apo- logie , 117, Zeleavec lequd dies fignent un acre par lequel elles defavouent toute fi- gnature qu'on pout- roit leur extorquer par violence dans un terns de c"'vite', 118, &c. N. , caux fujets d'af- fliction pour dies, cau- fes par de nouvelles> chutes, 116. Les re-, ligieufes de P. R. des" Champs prennent pare a tous les acres de leurs fceurs de Pa- ris, leur confternation en apprenant une vi- fite prochaine de M. de Perefixe dans leur monaftere, 119,130. Reck de qui fe pafla dans cette vifite, 13 o, |
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i<54aM.dsP9t«fiw, jufijuj 14*, F«rmet4
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TABLE DES MATIERES fff
3es religieufes en cet- levement des religieii^
te occafion , & fur- fes , reck de ce qui fc
tout de la mere Prieu- pafTe en cette occafionj
re, 131, &c. Senten- proteftation des reli-
ce du 17 novembre gieufes contre cette
prononce-e contre elles nouvelle violence ; el-
141; &c. Elles appel- les en drefTent un proc.
lent de cette Sentence verb. 189 jufqua 197,
146, &c. Les religieu- Elles ^crivent a Mon-
fes de P. R. de Paris feig. I'Ev&que d'Alet
levent les mains au 197, Sec. Etatdesre-
Ciel pour leurs fceurs ligieufes de P. R. des
des Champs pendant la Champs, 106. Elles
•vifite qu'y rait Mon- eVriventaM. de Pere-
feignsur l'Arciieveque fixe pour fe juftifier
Ij4. Elles dreflent un contre les calomnies
proces verbal de la re"- intenrees contre elles,
traftarioh de la fceur 114 , Sec. Requeta
Mekhide, lj<J. Leur qu'elles lui addreffenc
furprife & affliction pour lui demander
envoiantarriveravant l'explication des ter-
le jour le 19 novem- mes de foumiffion tC
bre 1664, a leur mo- acquiefcemtnt dont il
naftere , M.. de Pere- permet de fe fervic
fixe, iGz , Sec. Enle- dans la fignature da
vement de trois reli- formulaire , 2:19 , Sec.
gieufes, 166, &c. juf- Leur feconde lettre fur
qu'a 171. Elles appel- meme fujet, 231, &c.
lent de ces violences Requete des religieu-
au tribunal de Jefus- fes de Paris a. M. de
Chrift: proces verbal Perefixe fur le meme
qu'elles en drefTent , fujet ,138, Sec. Tror-
171, Sec. Ai\e du de- fieme lettre & feconds
fintirefTement admira- requete des religieufes
ble des religieufes , de P. R. des Champs
175, Sec. Perfecution a M. de Perefixe, 141,
qu'elles foufFrentde la &c. Difpofitions Sc
part de leurs parens , fentimens des religieu-
«4 , &c. Nouvel ea- fes dc P. R. cant tf«r
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! MAT IERE1
i^jaM. de PerefT* xe,i89, &c. Troific- me & quatrieme par- tie de leur apologie , 30;. Nouvelle propo- fition d'accommode- ment dont elles font effraiees , 310. Elles font privees des Sacrc- mens a Paque . 311, Combats qu'elles ef- fuient de la part des amis & des ennemis au fujet de la commu- nion pafchale,; 13 &c. Beau paflage de faint Auguftin a la louange des leligieufes de P. R. privees des Sacremens ; 16. Prevention de la Reine-mere contre el- les, 317, Les religien- fes de P. R. de Paris dcrivent a M. l'Ar- cheveque pour lui de- mander les Sacremens pour une de leurs foeurs exiles malade , 319. Cinquieme lettre des religieufes de Paris a Monfieur de Perefixe pour lui demander la communion pafchale, 314. Elles rejettent un nouVeau projet de fi- gnature, propofe par M. Chamillard, 326. Les religieufes de P. R. de Paris recoiyenc |
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£40 TABLE DI
Paris que des Champs,
a j 5, sic. Les religieu- fes de Paris conftituent vin Procureurpourap- peller en leur nom com'Tie d'abns de tou- tes J'.'S violences qu'on leur fait fouffrir & du d£ni de juftice qu'el- eprouventdelapartde l'Archeveque , ijg, lermetd des religieu- fes des deux monafte- res au milieu des per- secutions, 159. Com- bien elles redoutoient les proportions d'ac- commodement, z6o, &c. Menaces de la part de M. Chamillard 5 leponfe qu'on y fait, z66. Etat en 1665 de P. R. de Paris, 168 &c. Le projet de les difperfer toutes eft iompu,i7i.Nouveau projet de les reunir toutes dans une mai- fon etrangere ^gale- rnent rompu, 175. Se- conde partie de leur .apologie , 180. Les leligieufes des champs xe^oivent de M. de Petefixe la reponfe a leurrequete, z8i, &c. Nouvellelettre des re- ligieufes de P. R. des Champs du 4 avril |
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TABLE DES
une lettre de la Prieu- re des Champs fur la bulIed'AlexandreVII, r^ponfe qu'elles lui font, {40, 341. M. de Perefixe fignifie (on mandement aux reli- gieufes de P. R. de Pa- ris , ce qui fe parte , 54} , &c. AcTre des re- ligieufes par lequel el- les defavouent toute fignature qu'on pour- roit leur furprendre , 54J , &c. Deflein de raffembler toutes les religieufes oppofantes au monaflere de P. R. des Champs , 361. Manoeuvre emploiee pour leur faire deman- der cette reunion com- me une grace , tipon- fe qu'elles font a ce fujet, 3$3 , &c. Re- ponfcdes religieures de Paris a la mere Agnes fur ce projet, j<>8,&c. M. de Perefixe notifie fes ordres fur cette reunion a P. R. de Pa- ris : reVonfes des reli- gieufes , elles protef- tent contre, 371, &c. II fait fignifier le me- me ordre a P. R. des Champs par fon grand ykaire, reck de ce |
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MATIERES. S4t
qui s'y paffe, 374 , &c. Sortie des reli- gieufes de Paris de leur monaftcre pour aller a Port-Roial des Champs, cequi fe dit de part & d'autre j les religieufet proteftene de nouveau contre cet- te tranflation , 381 , &c. Les religieufes exilees font envoiees a P. R. des Champs , joie reciproque de ces faintes filles en fe re- voi'ant, 38; , jufqu'a 398. Leur arrived a P. R. des Champs , 398. La comtnunaute' de P. R. des Champs proteftent contre la tranflation, 4^0. Sui- te de la tranflation , 401. Les religieufes rdunies ce'lebrent la fete de la dedicace de l'eglife Sc adherent aux aftes de proteftations & d'appels faits en leur abfence, 40 f. El- les ont la joie de re- cevoir leur mere Ab- befTe, 409. Captivit£ des religieufes aP.R, des Champs, 411. El- les font environnees de gardes, 411. Ljs gardes fe fainiTent des |
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•f#i TABLE T)I
clefs , meme dc clotu-
re, & veilknt la nuit danslejardin des reli- gieufes, 414- Vifite au Lieutenant ci- vil a P. R.des champs 4ij. Les religieufes font obfervees le jout ,& la nuit, 417. Elks font obligees pat fen- tence de prendre une tourriere de la main de M- de Perefixe , 4.19. Eiles font des repreTentations, mais inutilement : elles ap- pelant de toutes ces violences, 410, Sec, Beau fpcctacle dass le premier chapitre te- rm depuis la reunion^ l'Abbefle prefenre , 415 , &c. Noureau chapitre tenu au fiijet de la fceur Gertrude Dupre qui demande pardon de deux figna- mres, 42.7. Acre des religieufes de P. R. du 16 aoiit 16 i j fur leurs difpofitions tou- chant la fignature du formulaire , 45 8. Les religieufes privees des fecours memes tenipo- xels dans leur capti- •vite' ; demande dun M&deciu pour une |
! MAT1ERES.
foeur malade, 458. Demande qu'elles font d'un Vicaire de faint Medard pour confefler la meme malade, 460. Ce Vicaire eft envoie , comment il fe com- porte, 461, &c. Idee que les gardes memes avoient de leurs pri- fonnieres, 461. Lettre des religieufes a M. de Perefixe au fujet d'une de leurs foeurs malade* 46 j, &c. El- les ont la confolation d'avoir de nouveau M. Hamon pour leur Medecin, 474. Nou- vel afte des religieu- fes fur leur difpofi- tion touchant la figna- ture , 47 6 , jufqu'a 497. Elles font folli- citees a la fignature par M. de la Brunetie- re , 497. Elles recoi- vent une vifitede l'Ar» cheveque , Sentence portce contre elles , elles en appellent , 499 , &c. Elles font reduites a pfalrnodier rOffice a voix bafle , 505. Nouvelle Sen- tence contre elles , portant defenfe de pfalmodiexl'OrHce «U" |
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MATIERES f'4f
confeiTeur donne a P?
R. des Champs 5 i! veut lire aux religieu- fes malgre elles , une lettre de M. l'Arche- que , il fe fcandalifc d'un eVenement arri- ve innocemment , 505. Ses entreprifes contre les religieufes^, 507, Sec. |
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TABLE DES
g'n, 50S. Leur ma- »kre de faire l'Office, fiifuite de cettc fen- tence , 508 , &c. Leur a£te «Le protefta- tionduij feptembre contre les entreprifes du fieur du Saugey & contre les deux der- nieres fentences deM. de Perefixe, jio , &c. Elks difent tous les jours le pfeautier pour fuppleer a la brievete' de l'office , 5i4.Leurfermetedans cet &at violent ou el- les font reduites , svs. s
jj^AueEy ( M. du )
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J. Herese ) les
fillcs de fainte ) trif. tcs effets de la violen- ce fur elles, quoique tres vertueufes, 67 &c. |
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Win. de la TaUe des Madera,
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544
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ERRATA.
J_ A g E 4 , lig. 50 & 31 , nos trum , lifez
noflrorum.
P. 34, 1. 17 , bin , lif. bieh. P. }9 , ii & 13 ,/w hcnnneur , /?o«r /e«r honneur.
V. 48 ,1- 10 , fe retirent, lif. /e retirement P. 12.9 ,1. to , di, lif. </it. P. 1 jo, 1. iif , re'fii i Af. Floriot, lif. reci/, 6- a Af .
Ibid, note , col. t, 1. I , p. 391, lifez p. 4pz.
P. iji , note , co/. z, lif. co/. 2. P. 151, 1. 18; cotnefiations , lif. contefta- dons.
P. 153 > I-*6 1 declarer, lif. /e declarer, P. 199 , 1. 1, c« /w-e, lif. cm livres. V. $66 , note, ioif, lif. xoif. P. 377 , 1. 16, Madamed Cr- lif. Maid' me de Cre-
P. 409 , 1. 1, £& frt chargea, lif. £#e charged de Id lettre,.
P. 419, I. 13 , r/w.-e <z/z.f, lif. trois dns, P. 417 , 1. 4, la fit, lif. fc jfr. P. 489,1. 16, examiner , lif. exterminer. P. 49 z, 1. H , infeparable, lif. inviolablt. P. 501 , 1. 8 , qualifie . lif. qualifia. Ibid. 1. 18 & 19 ffupeBes & de , lif. /«yi P. joi ,1. 10, ywrenf prier, lif. firent prier.
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