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Rijksuniversiteit Utrecht

Collectie
KALMAN KLEIN

<S>

-ocr page 3-

M. Bourdet.

Recherches et Observations sur toutes les
parties de l\'art du Dentiste.
Paris 1786 (2e druk).

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recherches

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OBSERVATIONS

^e toutes les parties
D E L\'A R t

Du DENTISTE.

tome second.

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recherches

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OBSERVATIONS
sur toutes les parties
DE L\'ART

DENTISTE.

M. Bovudet ^ Dsatifte np ai^
College de Chirurgie.

TOME SECOND.

^ A P A R I S^

«^Hez Sertiere, Libraire, rue S. Jean d«-Bearw

I

M. DCC. LXXXVÏ;
\'^vcc Approbation , & FdyiUgc du Rai.

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H

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\' \'. i

-f-ï!
11

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Recherches

ET OBSERVATIONS

^^ur toutes les parties

D E

L\'ART DU DENTISTE,
CHAPITRE CINQUIEME.

premier.

^^nîere de redreffer les dents & de les
remettre en pUcc , par le moyen des

fil^^ des flaques.

Apuâs avoir donné les movens de

lïdian ^^ maintenanc

rf^elT en réparer b

A

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^ De VAn du Dentïjîe.

défofdre, les redrelfeL\' & leur donner
ladilpofîtion convenable, foit pour leurs
principales fonélions, foie pour l\'agré-
ment de la bouche.

M. Fauchard a déjà donné le détail
des opérations que j\'entreprends de re-
préfenter. Mais comme tout ce qui eft
manuel eil fournis à l\'expérience, celle
que je puis avoir acquile, m\'a Aiggéré
de nouvelles vues fur le méchanifine de
l\'arc. J\'ufe donc, pour les propofer j
du privilège qu\'ont les Arciftes d\'ajou-
rer aux inventions reçues, fauf à elFuyer
le reproche de facilité qu\'on attache à
l\'exercice de ce privilège. Ceci doit s\'ap-
pliquer à tout ce qu\'on trouvera dans
nson ouvrage de particulier fur les dif-
férensobjets de notre Art.

Les moyens généraux qu\'on emploie
pour redrefTer & pour arranger les dents,
après les avoir féparées, ou après avoir
retranché celles qui incommodent les
autres, font les fils, les plaques , la
pince droite & le pélican. Commençons
ici par les fils fîmples &: les plaques.

Lorfqa\'une denr,de l\'une ou de l\'autre
mâchoire, fe trouve enfoncée ou reculée
§n dedans, pour la ramener en fa place,

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De VAn du. Dintific. .

L f ; un cordonnet afTez

f délai\'\'&

-^i^delamanierefuivante.
les d" rî\' e^^tre

denr u P\'^® de la

; on le fait parcille-

t \'\' on le fait

C n ^^ par ce

JPoyen en dedans trois dents à la fois -

Z L I On reprend

lo^s les deux bouts du fil qu^on fait re-

^ STu\'\' ^-^nes desdeu^
^ftTibre ^^ "«e facoa

voile t \' T\'r la dent

que PouVS fait

outroisTo"^ 5enouveiIer cous les deux

Wqu\'il S\'agit de redreiTet une dent

Ai]

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4 De VAn du Dcnûjle,

inclinée en dehors , on fait la même
opération dans un fens contraire. Le fil
barre alors en devant la dent difforme
& fes deux voifines , & vient fe nouer
en dehors fur la face antérieure de
celle-là.

S\'il fe trouve deux dents de fuite
dérangées de.deux divers fens, c\'eft-à-
dire , l\'une penchée en dedans, & l\'autre
inclinée en dehors, l\'application des fils
fe fait pour chacune dans un fens con-
traire de la façon que nous venons de
décrire, le nœud en dedans pour la pre-
miere , & en dehors pour la fécondé.
Ce qui fe pratique fur une dènr , foie
en dedans, foit en dehors ^ fe fait éga-
lement fur trois , pourvu qu\'elles fe
trouvent de fuite. Mais quand les fils
ne produifent pas on afTez prompt effet ^
quele dérangement eft trop confidérable,
ou que le fujet eft d\'un certain âge, il
faut avoir recours aux plaques.

Quand toutes les incifives & les cani-
nes chevauchent les unes fur les autres ,
ou fe trouvent comme entalTées, il ne faut
pas les féparer, mais leur faire à chacune
une place convenable. On ôte pour cet
effet, de chaque côté j la premiere petite

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T>c ÎAn du Denûfie. 5

molaire 5 on palTe autour de la pre-
jttiere groffe molaire^, un fil dont les deux
Douts, fe croifant entre-elle & la petite
molaire, viennent d\'abord embralTer
celle^3, & enfuite la canine où fe fait le
«œud. On renouvelle le fil tous les deux
«u twis jours, jufqu\'à ce que cette ca-
nine au joint la petite molaire. Pour cet
enet, on engage le fil entre la canine &
A \\ncihve, & avant que de le nouer ^ ou
tait palier dans rinterftice un peu forcé-
inent un gros fil ou uns efpece.de ficelle,
ahn de renvoyer la canine & de lui faire
Oî^cuper plus prompcement la brèche.
V® gfos fil fe coupe des deux côtés au
îîiveau des dents, & le fil dVctaclie fe
noue avec force fur la canine. Au com-
niencement de l\'opération , ce fil ou
cordonnet doit être affez fin ; mais à
gelure que la dent prête, on en met de
Fus.gtos. A mefure auffi que la canine
s éloigne de l\'incifive , on applique à !a
premiere grolTe molaire un fécond fil
comme îe premier , dont les deux
"outs le ramenent encore, fe croifenc
^viennent fucceffivement embrafTer la
Peure molaire, U canine & l\'incifive.
Apies avoir fait paiTer le fil dans Tinter-

A ii]

-ocr page 15-

(>\' Be tAn du Denûjîe.

valiedes deux indfives, on le tire bien
en dehors , & on !e noue fortement
fur
la derniere, afin de la ramener vers la
canine. LoiTque par le moyen de ce fil
Tincifive eft ftiffifamment féparée de fa
"voifine , & rapprochée de la canine, ou
vient avec le même fil embrafler la fé-
condé incilîve & y faire le nœud. Les fils
s\'appliquent de la même façon de l\'au-
tre côté, jufqu ace que îa canine occupe
la place de la dent ôtée , que les deux
incifives foient libres. Toutes ces dents
rnifeseo liberré, s\'il s\'en trouve quel-
qu\'une hors de rang,on la remet promp-
tement en place , par l\'application des
Ms que l\'ai décrite un peu plus hauf. En
voilà ce me femble allez pour l\'appli-
cation des fils fimples : les plaques exige-
ront un peu plus de détail.

Lorfque l age du fujec on l\'érac des
dents demande le fecours des plaques :
s\'il s\'affit, par exemple, de redrefîèr
trois dents dérangées , dont celle du
milieu s\'incline d\'un fens oppofé aux
autres, il faut avoir une petite plaque
dont l\'étegdue n\'excede point celle des
n-ois dents,
Se dont les extrémités ne
portent que fur les dencs penchées du

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De VAn du Dentijle. 7

«"^eme côté, tandis que celle du milieu
le trouve éloignée de la piece. Cette
plaque fera percée de fix petits trous s
dont deux à chaque bout deux au mi-
leij. 11 faut obferver que la plaque étant
"iiie en place, ces trous foient exaétc-
®ent vis-à-vis des dents. Après avoir
garni la plaque de trois fils donc les fix
Doues pafîent dans les trous, on engage
chacune des dents dans une efpece d^anfe
jormée par chaque fiij enfuite en tirant
\' ^^ pi\'^ce s\'appliqiîe fur la face
jntéi-ieure des dents, & ces fils fe nouent
if^icceffivement en commençant par les
^xtréniirés de la plaque. On ôte & l\'on
^emet de la même maniéré cette piece
garnie de nouveaux fils deux fois au
nioins par femaine, jufqu\'à ce que les
«ents aient pris un bel ordre.

Si la dent du milieu fe trouvant en
place , les deux autres reftenc encore
penchées , on prend une plaque plus
ctendue qui puiiTe porter fur les dents
^ifines de chaque côté de celles-ci,
^ette piece s\'applique en dedans fur les
"sux dents qui font bien en place &: fur
celle qu\'on a remife. Elle doit avoir huit
fa voir, deux à chaque extrémité
A iv

-ocr page 17-

8 De tAn du DentlJIe.

vis à vis des deux dents qui la foutien-
nent, & deux autres de chaque côté vis-
à-vis des dents qu\'on veut redrefler. On
paffe dans ces huit trous quatre fils,
dont chaque bout fort du côté de la
plaque qui pofe fur les dents,
5c chaque
fil fait ainfi fon anfe fur la face oppofée
de\' la piece où il palîe entre les dents.
On commence par les deux bouts de fil
qui font à l\'une des extrémités de la pla-
que; on les engage des deux-côtés dans
le corps de la dent qui doit fervir d\'ap-
pui à cétte plaque ; c\'eH-à-dire j on fait
paffer entre les deux dents régulières,
le bout de fil introduit dans le premier
trou à l\'extrémité de la plaque , & l\'au-
tre bout du même fil qui traverfeie fé-
cond trou fe paffe entre la dent en place
Ôc îa dent penchée. Le bout du fil du
troifiema trou fera pafTé de même entre
ces deux dents, & celui du quattieme
trou entre la dent reftcc difforme , &
la dent nouvellemenc redrelTée qui fe
portoit en dedans. Le fil du cinquième
trou s\'engage de l\'autre côté entre cette
dent remife, & l\'autte dent dérangée ;
celui du fixieme trou entre celle-ci &
la dent naturellement droite : le fep-

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Be VAn du Dentijle. 9

Jîenie fil s\'introduit enfin entre la dent
bien arrangée & la dent difforme , com-
îneon a fait de l\'autre côté , & celui du
huideme trou entre les deux dents ré-
gulières. Pour placer la plaque , on tire
eu dehors les huit boucs de iil : on com-
mence à Tune des extrémités de cette
plaque à nouer les deux premiers bouts
de^ fil fur la face antérieure de la dent
^ui appuie cette extrémité ; on va en-
suite de l\'autre côté de la piece nouer de
niême les deux bouts de fil far k dent
qui la foutienï en cet endroit. La plaque
^infî bien alliuée , on noue tïès-force-
nient les fils fur chaque dent dérangée ,
^ on en coupe l\'excédent. Avant que
dé faire les nœuds , il eft bon de faire
dépaffer un des bouts du fil pour recon-
noitre celui qu\'il faut prendre, parce
qu\'on pourroic s\'y tromper, & prendre
un bout de fil pour l\'autre. H faut encore
obferver que les fils ne foient pas trop
près des gencives. Les fils, ainfi que l\'ap-
plication de la piece , fe renouvellent
encore deux fois par femaine j, jufqu\'à ce
que les dents foient bien de niveau.

Lorfqu\'une dent eft tout-à-fait pen-
chée en dehors » quoique les autres

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lo Be VArt du Bemifie.
foient en bel ordre , il faut préférer k
plaque aux fils fimpies ^ parce qu\'elle
Fera plus promprement rentrer cette
dent à fa place, & fatiguera moins les
dents voifines. Cette plaque doit s\'ap-
pliquer en dedans comme la précédente,,
& elle doit être alTez étendue pour pou-
voir porter de chaque bout fur une ou
deux dents bien rangées. 11 faut auîii
qu\'elle ait huit trous ; favoir , deux à
chaque extrémités , deux dans le milieu
de la piece, vis-à- vis la dent qu\'on veut
aligner, à quelque diftance l\'un de l\'au-
tre, & deux autres à côté de ceux-ci,
efpacésde même, l\'un à droite & l\'autre
a gauche. Les quatre trous des estré-
sîiités fervent à palier & à repafler deux
d^ifferens fils qui fe nouent de chaque
côté fur la dent d\'appui j & les quatre
bouts du milieu s\'engagent, favoir, deux
de chaque côté entre la dent difforme &
la réguliere,pour faire deux ligatures fé-
parées fur la dent difforme.

Quand il y a deux ou trois dents de
fuite^hors do place & inclinées du mê-
me côté , il faut pour les redreffer em-
ployer la même plaque qu\'aux précé-
dentes ; mais qu\'elle ait a£Rz d\'éteiî-

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Dc VAré du. Denûfie. îî
due , pour que Tes deux extrémités
portent
5c s\'appliquent exaétement ds
ci^aque côté fur deux dents bien droites^
Cette plaque fera percée de la façoM
nue je viens de dire , & fera folidement
arrêtée à chaque bout par les fils. On
i\'era de même pour chaque dent déran-
gée deux petits trous vis à-vis-d\'elle ,
pour recevoir un fil deftiné à ralTujettir,
Si les denrs font penchées au-dedans de
la bouche J il faut appliquer , ia piece
du côté oppofé , & les fils alors forme-
ront y comme à la premiere plaque , une
anfe à chaque dent, après avoir paiTé
dans leurs interftices. Si la pente des
dents, eft-en dehors, k plaque fe mes
en dedans.

M, Fauchard, qui dans fon ouvrage
n\'a pas oublié les plaques pour redref-
fer les dents, les applique de toute
autre maniéré. Il y a dans le
Chirurgien-
Dentijle
( tome i j planche 15 ) deux
différentes plaques gravées, dont l\'appli-
cation ne me paroît point propre à opérer
l\'effet qu\'on femble promettre. Ces pla-
ques d\'ailleurs ne font point percées pré-
cifément comme elles doivent l\'être ^
pour recevoir les différens fils qui doi-

-ocr page 21-

I i De VAn du Dentijîe.
vent concourir avec chaque piece à
remettre les dents en place. La mé-
thode de M. Fauchard , eft de faire
«ne plaque percée à chaque extrémité
de deux trous, ou une\'plaque fans au-
cun trou & avec une fimpie échancrure
aux deux extrémités pour y attacher les
fils. Si la dent eft penchée en dedans,
la plaque s\'applique en dedans far cette
dent même, Ôc fes deux extrémités por-
tent à, peine en ferrant beaucoup les
fils, ce qui la dérange bientôt : car les
extrémités de cette plaque ne pofant:
qu\'impirfaitenient furies denrs; en pla-
ce, pour peu que ces dears obéiffenc,
elle eft vacillante, & gêna la langue.
Dé plus , par cette poftrion, les fils au
lieu d\'amener la dent difforme au ni-
veau des dents régiilieres, peuvent à la
longue ébranler celles-ci & les ramener
vers la premiere. Quand-.il s\'agit de
redreifer une dent inclinée en dehors ,
laplaqaede M. Fauchard s\'applique eu
dehors, ce qui produit le même incon-
vénient. La feu e expofîcion de cette
méthode met le le6teur intelligent eu
érat de l\'apprécier,
8c je retranche les
îéliexions que faurois Heu de faire.

-ocr page 22-

De VAn du Demlfte. i ^

q^^elqu\'ane des incïCives eft
îPUrnee de côté, il fauc la retourner
-vec la pince droite, fî le fujet ne
J^ut point fouffi-ir cette opération qui
^lï un peu douloureuie, les plaques font
encore ici préférables aux fimples fils.

, taut donc fabriquer une plaque per-
cée a chaque extrémité de trois trous
ûUtans l\'un de l\'autre d\'une demie ligne :
eue doit être alfez longue pour porter
chaque côté fur deux dents en place,
^ ne s^1ppliq^er qu\'en dehors. On gar-
nit les extrémités de cette plaque de
«eux fils qui occupent les deux pre-
"iiers trous & dont les deux bouts for-
cent en dehors. L\'anfe du fil palTe de cha-
^îe côté dans la fécondé dent droite ,
« !©sdeux bouts fe nouent fur la plaque.
Avant que d\'engager dans chaque denc
cette efpece d\'anfe, on attache , à celle
qu on veut retourner, un fil qu\'on noue
par le milieu fur cette dent de deux
"mples nœuds, placés de façon qu\'ils
1 empêchent point de fuivre la direc-
tion qu\'on veut lui donner. Si la dent
e^î queftion a fa face antérieure de côté
ou tout-à-faic tournée en dedans, & que
pour la metre en bel ordre ^ il faille la

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î4 De l\'An du Benûfte,

recourner à droite ou à gauche, !)n
prend alors un des bouts du fil , dou
on entoure deux ou trois fois cette dent
du côté où Ton veut la faire venir^ on
fait enfuite avec le fécond bout de fil,
deux ou trois tours fur les prèmiers à
la même dent & toujours du même cô-
té ; par ce moyen ces deux bouts de
fil qui fortent en dehors, fe rencon-
treront entre la dent qu\'on redreffe &
la dent en place. Cela fait y on revient
à la plaque : l\'anfe du fil qui eft paffé
dans cette plaque s\'engage des deitx
côtés dans les fécondés dents réguliè-
res j enfuite les deux bouts du fil qui en-
tourent la dent, s\'introduifent auflîdes\'
deux côtés dans le troifieme trou vers
chaque extrémité de la plaque- Après
cela les différens fils qui fortent tous
ainfi en dehors, fe tirent fufïîfammenc ~
pour placer la piece j on les noue tous
fur cette piece , & pour la fixer, on
commence par nouer enfemble les deux
premiers fils, & puis on noue avec
ceux-ci le troifieme le plus ferme qu\'il
eft pofîible. La même opération ^ les
mêmes nœuds fe font du côté oppofé,
& l\'application de la plaque, ainfi que

-ocr page 24-

Be r Art du Dentïjle. 3 5

^es fils , fe renouvelle de la même
«Çon deux fois en huit jours, juf-
a ce que la dent foit entièrement re-
•^ife à fa place. J\'ai retourné de cette
Jttaniere en très-peu de tems les dents
^es plus défedueufes.

Lo^fque les canines & les incifives de
ja mâchoire inférieure s\'approchent tel-
jement de la levre, qu\'elles font avancer
menton & déborder la levre inférieu-
( ce qui fait rentrer & comme enfoncer
Jes dents <5c la levre fupérieure ), cette
difformité fe corrige auflî par le moyen
des plaques. Pour relever les dents fupé-
fieures & reculer celles d\'en bas, il faut
deux plaques faites en demi-eercles qui
prennent d\'un côté depuis la féconde pe-
molaire, jufqu\'à la pareille dent de
Vautre côté. Ces plaques ne doivent
porter qu\'aux deux bouts fur les feules
^nolaires, & s\'éloigner au moins d\'une
demi-ligne des incifives & des ca-
^|nes. Chaque plaque fera percée de
\'\'\'mgc petits trous, qui , la piece étant
Placée ^ doivent fe trotiver exademenc
"^is-à-vis des dents qu\'il s\'agit de remet-
J^e en ordre , afin que le fil engagé
^ans Içs deux trous qui fervent pour

-ocr page 25-

ï 6 De rJn du Denûfie.
ciiaque dent puiffe l\'amener vers la pla-
que en ligne dis-\'ede^ La plaque de la
mâchoire fupérieute aura plus d\'étendue
que celle d\'en bas, & s\'appliquera en
dehors vers la levre. La plaque inférieu-
re au contraire s\'appliquera au dedans
de la bouche vers la langue. Les vingt
trous de chaque plaque . doivent rece-
voir dix fils qui feront vingt bouts. A
la plaque d\'en bas chaque fil fera fou
anfe fur la face poftérieure de la piece, &
I es bouts qui feront palTés entre toutes
les dents fortiront en dehors pour être
noués chacun fur fa dent. L\'anfe de cha-
que fil à la plaque d\'en haut fe fera fur
la face poftérieure de chaque dent, &
les deux bouts de chaque fil fe noueront
fur la face antérieure de la plaque, pour
tirer vers elle la dent à laquelle ils fer-
vent d\'amarre. Tous ces fils fe paflTent
& fe nouent comme aux autres p aques.
On commence à l\'un des côtés de la
mâchoire fupérieure & à l\'extrémité de
ia plaque, par faire entrer le fil d\'un des
côtés de l\'anfe qu\'il forme en cet en-
droit dans
l\'intervalle de la derniere pe-
tite molaire & de la premiere des grolTes,
& l\'autre bout du même fil paffe dans

dans

-ocr page 26-

De l\'An du D entire. 17
J^interftice des petites molaires. Un côté
cle la deuxieme anfe s\'introduit de
jneme entre les petites molaires ,
&z
\\autre côté entre la canine & la pe-
tite molaire qu\'elle touche, Le fil de la
jroifieme anfe fe paffe d\'un côté entre
ies mêmes dents, & de l\'autre entre
canine & la petite incifive. On con-
tinue ainfi de faire paffer les fîîs entre les
autres denrs ; on les tire enfuite pour
placer fa plaque , & on les noue chacun
®parc, en commençant aux extrémités
Pa-r les fils qui fixent la piece. La même
Çhofe à-peu-près s\'obferve à la mâchoire
inférieure. Chaque bout de fil s\'intro-
Cnit de même entre la groife & la petite
polaire , & on continue de faire pafier
lucceffivemenc les autres îxjuts de fils
Qans l\'intervalle de chaque dent. Tous
fils étant ainfi engagés, on les tire en
pnors & on les noue fur chaque dent
uns après les autres. Ces fils fe renou-
"V\'eUent en ôtant & en remettant de la
façon les plaques deux fois îa fe-
^^ine , jufqu\'à ce quî ies dents aient
leur place & leur diredion naru-
, c\'eft-à-dire , jufqu\'à ce que les
de la mâchoire fupérieure qui
Tome IL B

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18 De l\'An du Demi/le.

pafToient derriere celle d\'en bas fe por-^
tent en dehors & les couvrent. Quand-
cette opération eft bien faite , il femble
qu\'on ait enfoncé ou qu\'on ait raccourci
le menton, êc le fujet la\'eft prefqueplus
reconnoiffabîe.

Toutes les plaques doivent être dor,
ou de.chsval-marin,,
Se jamais d\'argent j,
parce que ce métal noircit dans k bou-
che ,, ce qui eft défagréable à voir. Les
plaques de cheval-marin font fouvent
mieux faites que celles d\'or , parce
qu\'elles font l\'ouvrage du Dentifte,
que rOrfevre, quelque habile qu\'il foit,.
n\'exécute pas toujours avec afiez de pré-
cifîon le modele ou l\'idée q.u\'on lui
donne.

Lorfqu\'il faut fabriquer une plaque
d\'une certaine étendue , & qu\'on la-
veut en or, pouc que le demi-cercle ÔC
les trous en foient de la plus grande
lufteife, il eft bon que le Dentifte en fatfe
wne en cheval-marin, & qu\'il la termine
avec foin d\'après le fujet : l\'Orfovre
alors avec un peu d\'attention réulîîra
mieux. J\'ai fait graver des modeles des-
plaques que je viens de décrire j cales
trouvera à k planche ci-jointe.

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De VAn du DentlJîe, i ij

"TROISIEME PLANCHE.

Plaques pour redrefler & arranger les
Dents.

Fig. I. Plaq^Vbpour relever les dents de
^^ mâchoire fupérieure y quand elles font
couvertes par celles d\'en bas.

AAAA, Endroits de la plaque qui po-
Jent & qui s\'établijj\'ent en dehors fur les
dents qui lui fervent de point d\'appui.

BBBB. An/es formées par les fils qui
paffent entre les dents enfoncées
j & qui ies
^menent vers la plaque.

Fig. II. Autre plaque qui sajufie au
^^dans de la mâchoire inférieure , afin de
J^^re rentrer les dents.

CCCC Endroits de la plaque qui s\'ap\'
Piiient fur les dents en place,

dddd. Anfes des fils fur la face con-
cave de cette plaque.

Fig. 11 î. Plaque percée de dou^e trous^
J lui s\'appliqué en dehors pour arranger
\'\'edreJJ\'er quatre dents penchées en de-

dans.

Bi|

-ocr page 31-

io De VArt du Dentiße,
- Fig. \\Sf. Plaque percée de huit trouspour
mettre en bel ordre deux dents quife por-
tent en dehor.

FF. Endroits de la plaque quipofent en
dedans fur les dents qui lui fcrve.nt d\'appui.

Fig. V. Plaque percée de fix trous, &
qui s\'applique en dedans pour redreffer une
dent penchée en dehors. •

Fig. VI. Plaque pour retourner une
dent.

g g. Les deux trous qui donnent paf~
fage aux deux bouts du fil qui entoure & re-
tourne la dent.

-ocr page 32-

D& tJn du Dentijîe, i s

II.

De tufage du Pélican.

On fe ferc du pélican pour remettre à
leur place les dents qui font penchées
"Vers le palais à la mâchoire fupérieure
^ vers la langue à la mâchoire infé-
rieure. Pour arranger ces fortes de dents,
on lime les dents voifines qui les gê-
ïient, afin d\'en diminuer la largeur.
Lorfqu\'une dent ainfî dérangée eft trop
couverte par celles d\'à-côté , il faut
oter l\'une des petites molaires , & faire
Remplir la hrcche par k dent voifine ,
moyen d\'un fil. Enfuite , quand la
dent eft fufEfamment découverte , on
ramene au niveau des autres avec le
pélican ordinaire. Cet inftrument n\'a
P^s néanmoins toute la perfeélion né-
^eflaire pour réuflîr toujours dans cette
Cutreprife. M.
Fauchard nous apprend
|ui-iTiême, qu\'il eft arrivé à un de fes
•Nieves d\'emporter la dent, au lieu de k
î^eniettre en place, & que k perfonne a
recours aux dents artificielles. JMais

-ocr page 33-

il De F An du Denûfie»

|e m\'étonne que cet Eleve n\'ait ^
fongé à replanter à l\'inftant même îa\'denc
ôtée dans fon alvéole : en la mainte-
nant au niveau de fes voifines, elle fe
feroit affermie J & feroit devenue aufli
forte que les autres, comme je lé ferai
voir en traitant cet article. J^ai dit que
le pélican ordinaire n\'étoit pas toujours
propre à redreffer les dents , & en effet
l\'ai trouvé tant d\'incoovéniens à m\'en
fervir J que j\'en ai inventé un autre qui
m\'a paru jufqu\'à préfenc d\'un ufage
beaucoup plus sûr, & qui m\'a toujours
réufïï. Mais avant que de procédér à l\'o-
pération , il faut bien s\'affurer fi la dent
qu\'on veut mettre au niveau des autres,
aura une place convenable & propor-
tionnée à fa largeur. Quand tout eft bien
préparé, on démonte la demi - roue con-
vexe & brifée qui s\'ajufte au corps de
cet inftrument pour y adapter une autre
piece triangulaire un peu concave.
On ore enfuite les deux branches pour
y en fubftituer une autre , qui ne tourne
ni à dtoite ni à gauche. Cette branche
montée , la piece triangulaire, qui fe
viffe à l\'extrémité du pélican j fait fon
point d\'appui fur les deux dents droites5

-ocr page 34-

De rÀn du Dentifli,
^ndis que la branche va chercher la
oent penchée. Après l\'avoir accrochée
l\'autre main , on tourne la demi-
»"oue qui ell à l\'autre extrémité du
pélican & qui ne fe démonte point, de
^açon qu\'en l\'amenant de droite à gau-
che, on raccourcit la branche du péli-
can
qui rétrograde vers la piece trian-
gulaire , & on fait revenir la dent , en
nuiltipîiant plus ou moins les tours, fui-
Vant que la dent eft plus ou moins pen-
chée.

Pour pratiquer cette opération aux
*lents de la
mâchoire inférieure, il faut
fe placer devant le fujet; au lieu qu\'il
faut être derriere lui, pour opérer à la
\'ïiâchoire fupérieure. 11 faut auffi le faire
^^ïfeoir fur un iîége fort bas, & que fa
^^te foit renverfée fur le dcffier du fan-
\'•^uil, ouj s\'iln\'yapoint de doflier, fur
Celui qui opere. Si l\'on s\'apperçoit que
dent qu\'on veut redrelfer frappe
Contre la dent de la mâchoire oppofée
^ laquelle elle doit répondre , parce
*îu\'elle eft trop longue ou trop épaiffe^
en doit fe fervir de la lime, & en ôter
qui excede, foie en longueur, foit,en
cpaUfeur. li eft même important de le

-ocr page 35-

5 4 ^^ i\'^rt du Dentijîe.

faire avant que de remettre la dent dif-
forme au niveau des autres , parce que,
fans cette précaution, le choc cominuel
de la dent oppofé empêcheroit celle-là
de s\'affermir dans la place qu\'on lui fait
occuper, il eft encore nécefiàire, avant
Topération du redrelTeinent, d\'enga-
ger entre la dent & les deux voifînes
un âl qui la maintiendra dans fa place,
Aulîi-tôt qu\'on aura ramené cette dent
où l\'on veut qu\'elle refte , tandis que
l\'inftrument la tient encore, un Aide
ferrera le nœud, en fera un fécond ,

6 s^il eft befoin un troifîeme. On voit
que le fil n\'eft mis que pour empêcher
îa dent de rentrer dans le vuide qu\'elle
a laiffé, du côté vers lequel elle étoic
penchée.

L\'avantage qu\'on retire encore de
palfer le fil entre les dents voifines ^
avant d\'amener celle qu\'on veut re-
drefîèr, confifte en ce que cette dent,
confervant toujours une tendance à re-
culer, il n\'y a plus qu\'à ferrer le fil pour
la maintenirau niveau des autres ; au liea
que, fans cette précaution , il faudroic
avoir plus d\'une fois recours à l\'inftru-
ment , ce qui alongeroit beaucoup l\'opé-
ration ,

-ocr page 36-

De VAn du Dentijle. if
J^atîon J & fatigueroic trop îe fujet. On
3- foin d\'ailleurs de lui faire rincer la
touche plufieurs fois le jour , avec quel-

iielque

que eau aftringente, ou
liqueur convenable. La
en moins de dix ou douze jours la même
fermeté que les autres, & on peut alors
en ôter le fil. Lorfque cette dent eft de
côté, il faut,-après l\'avoir attachée , la
tetouruer avec ia pince droite.

Quand la premiere des grofTcs mo-
laires fe trouve gâtée, ou fe gate en for-
tant, comme ces dents y font affez fu-
jettes, fî l\'enfant fe noue à trois ou qua-
tre ans, ou s\'il vient au même âge à être
attaqué de quelquesmaladies, telles que
U rougeole, la petite vérole, la fievre
îîialigne, les affedlions fcrophuleufes ou
fcorbutiques j il ne faut pas balancer à
les ôter. Ce n\'eft pas ici le tems de les
plomber , quoiqu\'elles ne fafTent point
de mal ; car ces dents peuvent caufec
par la fuite des engorgemens aux glan-;
des, & quelquefois même un dépôt,-
quand l\'enfant eft futchargé d\'humeurs,;
ou elles deviennent douîoureufes & ex-
halent une mauvaife odeur. Or tous ces
inconvéniens s\'évitent, en ôtant
Tome II. C

autre

dent acquiert

ces

-ocr page 37-

^^ De l\'Art du Dentijle.

«dents gâtées de bonne heure, &C quand
Fextradion fe fait avant le renouvelle-
ment de la canine & des deux petites
molaires,le vuide qu\'on a fait fert àcelîes-
ci à fe bien arranger, parce qu\'elles en
occupent une grande partie j & la qua-
trième molaire qui paroît à treize ou
quatorze ans, & qui eft pour Iprs la troi-
iieme , remplit exadement le refte. La
dent de fagefle, qui vient ordinairement
quelques années après, trouve auffi plus
de place qu\'il ne lui en faut j ainfi elle
ne produit pas en perçant les maux ni les
défordres qu\'elle caufe fouvent lorf-
qu\'elle eft gênée dans fa fortie , ce qui
■oblige quelquefois d\'ôter îa dent qui la
précède, quand on ne peut
l\'ôter elle-
même, afin qu\'elle force librement, ^
que tous les açcidens cefTenç.

Observation l

Une fille de Madame * * *, demeu-
rant rue du Bouloy au Bureau des
Cuirs , alors âgée d\'environ dix ans ,
avoic les quatre premieres groftes mo-
laires qui parurent gâtées en perçant.
Peux de ces dents lui faifoient par in"

-ocr page 38-

Be tAn du Dentijîe, i f
fervalles beaucoup de douleur, & cau-
ioient de l\'engorgement aux glandes pa-
rotides. Les parens étoient d\'avis de
raire feulement plomber les deux mo-
ntres qui ne faifoienc aucun mal. Je leur
confeillai de faire ôter les quatre dents ,
^ en effet je les ôtai fucceffivemenc à
quelques jours de diftance. Ces quatre
dents ôtées, les petites molaires , lorf-
qu\'elles fe font renouvellées, ôc les fé-
condés grodes molaires qui font venues
environ à treize ans & demi, ont bou-
rne fi exaétemenc.la brèche, qu il nepa-
^oîc plus y avoir aucune dent de maa-
■ & comme le fujet a la mâchoire
\'eu étendue, les dernieres groiTes mo-
ntres trouveront de la place , & forti-
^ont librement. La même avoit encore
^iiîe petite incifîve extrêmement gâtée,
^ais fans lui faire aucun mal. Quoique
cette dent fût bien l\'angée , je l\'ôtai
5a,r préférence à la premiere petite mo-
laire
qui étoit renouveliée & très-faine ,
afin de faire place à la canine, qui com-
^snçoit à percer en haut par deflTus les
^ents de fon voifinage. Cette incifive
Retranchée , la canine , en pouiTanc , a
S^giîé la brèche, de l\'a fi bien remplie.\'

c i)

-ocr page 39-

i\'8 De VAn du DentlJIe:
qu\'elle eft jtctiiellemeuc au niveau des
■dents voifines. Mademoifei\'le
* * * , a
par ce moyen de fort jolies dents bien
rangées, bien faines; ce qui auroit été bien
différent, fi je ne m\'y étois p^is de cette
inaniere
: car s quoique fa mâchoire diic
encore s\'étendre, attendu
fa grande jeu-
Beffe , elle n\'avoit point alors la capacité
jiéceffaire
, pour que toutes fes dents fe
milfent en bsl ordre.

Observation il

Sur une dent penchée vers h palais ^
-remife dans fa place avec le pélican
ordinaire.

Mademoifelîe * ** ^ avoit depuis
plufieurs années à la mâchoire fupé-
rieure du côté gauche luie canine, dont
«ne dent de lait avoit long-tems occupé
la place. Dès que celle-ci vint à pa-
roître , cette canine devint fî branlante,
qu\'elle l\'incommodoit beaucoup. Elle
alla chez un Dentifte qui la lui ôta ;
mais comme celle qui lui fuccédoit étoic
enfoncée vers le palais , cette diffor-

-ocr page 40-

De VAn du Dentijle.
choquoic la vue , & faifoit pa-
goitre la Demoifelle brêche-dent. Elle
demanda au Dentifte, s\'il n\'y avoir pas
njoyen de faire revenir cette dent eu
place : il lui répondit que tout ce qu\'on
Poutroit y faire feroit inutile, & qu\'on
ne parviendroit jamais à la mettre dans
^ "tuation naturelle. Il faut remarquer
S« en cet état la gencive étoit auffi grofle
\'^ue a Ja dent eût occupé fa place , ce
y^i 3>\'efl; par ordinaire ; car lorfqùe les\'
^eiits font ainfi penchées , la gencive
^ Talvéole s\'affailfent, & il fe
\'fair un
enfoncement proportionné à la dent,
ici c etoic tout le contraire j ce qui pou-
"^oit faire penfer qu\'il y avoit là une fé-
condé dent, ou une racine qui tenoitia
gencive ainfi élevée, - quoique cette élé-
J\'atioij ne provînt que de l\'épaifTeur de
alvéole. Je n\'ofai donc pas, par cette
^aifon , propofer à la Demoifelle de
l\'émettre Jur le champ fa dent en place ,
P\'ir le moyen du pélican : je lui propo-
feulement de la faire venir avec
^ fils & des plaques. Je commençai
^ abord par limer , afin de faire une
F, ^ce convejiable pour loger la dent ;
jappi

iquai enfuite les fils pendant plus
C iij

-ocr page 41-

\'50 De T Art du Dentlflet
de Quinze jours J mais ne l\'ayant point
él/ranlée , je compris que les plaques ne
me feroient pas d\'un plus grand fecours.
Après avoir examiné de nouveau la bou-
che, je trouvai que cette dent étoit très-
épailTe & un peu trop longue : je la li-
mai fur fa longueur & fur fon épaîffeur,
afin qu\'étant remife à fa place, elle n\'ef-
fuyâc point de choc fur fa face interne
tandis qu\'alors elle étoit heurtée fur fa
face externe par la canine d\'en bas, de
façon que la bouche étant fermée , la
dent de la mâchoire inférieure couvroit
celle de la fupérieure , ce qui eft l\'effet
ordinaire des dents penchées. Enfin,
|e travaillois à faire revenir celle dont il
s\'agifFoit dans fa place avec le pélican
ufité pour ces fortes d\'opérations ; mais
|e rencontrai bien des obftacles de la
part de l\'alvéole qui ne prètoit & ne
«\'écartoit en aucune maniéré , ce quiem-
pêchoit la dent de fe mettre au niveau de
les voifines. Cet alvéole étoit fi fort
Se
£ épais, que la fécondé petite molaire
fur laquelle étoir mgn point d\'appui ,
«e put réfifter à l\'effort que je fis pour
ramener la canine qui ne fut prefque
pas\' ébranlée. Il ne m\'avoit pas été pof-

-ocr page 42-

De l\'An du ï>emifiê. 5 f\'
\' e de placer le point d\'appui fur la
. \'f/e petite molaire, parce qu\'elle
deja ébranlée par les fils que jap-
W^?^® depuis quinzejours; jefusdonc
.\'ge de prendre un autre point d\'ap-
premiere große molaire. Après
^ remis la dent en fa place, je tentai
\'nouveau de la faire revenir au niveau
autres ; mais bien loin de s\'y ranger,
fortoit de fon alvéole chaque fais
.r^ Je faifois quelque effort. Lorfque
j.^pperçus cet obftacle de la part de
^ "jvéole , je portai le doigt fur l\'excré-
de la dent, a mefare que je vou-
la faire avancer, afin de la contenir
^^»s fon trou , & de forcer l\'alvéole à.
Heter ; mais rien n\'empêchoit cette
^e^ortir. Je réitérai ce travail au
oins cinq ou fix fois avant que de pou-
oir la mettre de niveau, & chaque fois
que j\'opérois, quoique j\'eu {Te beaucoup
attention au point d\'appui & qu\'il fût
^^idement établi fur la premiere groffe
jîiolaire, malgré toutes mes précautions,
^ ^^mmiffure des levres me renvoyoic
\' rai foi t rouler la demi-roue de mon
pelican fur la dent déjà enfoncée , ce
arriva tant de fois , qu\'à la fin la
Civ

-ocr page 43-

De VAn du Dentifte:
dent que je voulois redreffer, & celie
fur laquelle j\'avois fait mon premier
point d\'appui, tombèrent dans la bou-
che à deux ou trois reprifes. J\'avois foin
diaque fois que la Demoifelle ne s\'ap-
perçÛE pas de leur chute j je les repre-
nois fubtilement, & je les remettons en
place. Cependant elle me demandoit de
lems en tems, fi la dent n\'étoit point
tombée5 mais je n\'avois garde d\'en con-
venir, & je continuois mon opération.\'
Enfin, à force de travailler, grace à la
patierxe finguliere de la Demoifelle j je
parvins à ranger fa dent au niveati des
autres. Le lendemain, l\'étant venu voir ^
|e ne lui cachai point que fes dents
étoient tombées, comme elle s\'en étoit
apperçue. C\'étoit à l\'heure du dîner que
l\'opération fe fit : elle fe mit à table, &
<iîna comme à fon ordinaire , en s\'abite-
jiant néanmoins de manger du côté ma-
lade. Elle fe fervir d\'une eau aftringente
dont elle avoir foin de fe rincer fré-
quemment la bouche , & depuis , cette
dent remife avec tant de peine n\'a pro-
duit aucun inconvénient. Quant à celle
qui avoit été enfoncée & qui étoit auflî
tombée dans la bouche , elle fut extiê-

-ocr page 44-

De l\\4rt du Denûfle. 35
ttiement fenfîble pendant environ vingt-
<îuatre heures ^ fur-tout lorfqu\'elle ap-
piiyoic deffus , mais deux jours après
mangea du même côté. Ce qui pa-
yoitra furprenant, c\'eft que cinq ou fix
jours après , cette canine j ainfî que la
petite molaire, s\'eft trouvée aufïi ferme
^ auffi folide qu\'elle eût jamais été
^vanc l\'opération. Depuis, les dents
de la Demoifeile fe font toujours bien
^^aintenues , & elle les a toutes très-
tionnes & très belles.

Si dans le tenis de cerre opération
j\'enlfe imaginé mon pélican, je n\'aurois
Certainement pas enfoncé la petite mo-
laire, & je fsrois venu bien plus aifé-
R^^entà bout de cette rétive cabine , fans
ia faire fortir de fon alvéole. J\'ai bien
des fois redrelfé de pareilles dents avec
le pélican ordinaire \\ mais il ne m\'étoit
jamais arrivé femblable accident , ni
Survenu pareil obftacle de la part de
l\'alvéole. Cependant, je ne puis m\'em-
pêcher de dire que le pélican ordinaire
eft à craindre en certain cas , avec
quelque prudence & quelque douceur
que fe faife l\'opération.

C\'eft le danger èc la difficulté de cette

-ocr page 45-

j ^ Ùe t Art ill Dcntifié.

opération qui m\'a fait naître l\'idée de
chercher un moyen de faire venir fur le
champ les dents dérangées au niveau des
autres; & j\'ai trouvé cet avantage dans
l\'inftrument que j\'ai imaginé, & qui m\'a
réuiii toujours.

D\'un grand nombre d\'obfervarions
que je pourrois produire, je vais me bor-
ner à trois ou quatre , dont je ne crains
pas que perfonne me contefte la vérité.

Observation L

Au mois de Juin 1751 , un Clerc
de M. *^ Procureur au Parle-
ment vint me consulter fur une, fif-
tule qu\'il, avoit depuis environ trois
mois à la joue du côté droit de la mâ-
choire inférieure. Je trouvai, à l\'examen
de fa bouche , la premiere
groffe mo-
laire gâtée, & je lui dis que s\'il nefaifoic
tirer cette dent, fa fiftule ne guériroit
jamais. Comme il avoit déjà fait beau-
coup de remedes inutiles , il fe déter-
mina dans l\'inftant 4 l\'opération. La
dent ôtée, lîx jours après la fiftule fe
trouva guérie fans d\'autres remedes.
Lorfque j\'examinai fa bouche , je re-;

-ocr page 46-

■De VArt du DentlJIe. 5 5

^arquai que les dents de la mâclioice fii-
■^erieure étoient en un défordre affreux :
^ grande incilîve du côté gauche vers
e palais , & la canine du même côté,
5 élevoient par-deflus les voifines. A près
®voir ôté la premiere petite molaire
qui etoit gâtée , en dix ou douze ap-
plications de fils , je mis la dent ca-
l^^ue au niveau de fes collatérales , en
jui faifant occuper la place de la mo-
^ire que j\'avois ôtée. Je rapprochai en-
suite avec les mêmes fils la petite inci-
nve qui étoit alors affez éloignée de
^ Canine , ce qui découvrit prefque
entièrement la grande incifive pen-
mais la place que je voulois faire
occuper à celle-ci ne me paroiffant pas
\'uffifantej j\'emportai avec la lime ce
qui excédoit dans la largeur de cette
"ent , & dans l\'autre grande incifive
qui étoit en place \\ j\'allai même juf-
qu\' au haut de la gencive j obfervant
paslaiffer de largeur qui pût arrê-
Gela fut fait en moins d\'une demie
^""inute : mon pélican ramena cette
^ent à fa place , oil elle eft aduelle-
»Tient bien affermie. Tout le foin qu\'elle
Coûta dans les premiers jours, fut de fe

-ocr page 47-

3 De VAn du DentlJîe,

rincer de tems en tems la bouche avec
une eau convenable. Dès le feptieme,
elle fe trouva très - folide & dans le
meilleur ordre qu\'elle puilfe être.

Observation ii.

Dans îe mois d\'Août de la même an«
née, la niece de M.***, Limonadier,
demeurant dans la place du Palais-
Royal j fille âgée d\'environ vingt-deux
ans, vint chez moi, parce qu\'il lui étoit
furvenu une dent canine vers le palais
tandis qu\'elle avoir encore la canine
de
lait qui branloit beaucoup. Elle ne
doucoic pas qu\'il ne fallût lui ôter la
îremiere canine & raffermie celle qui
jranPôit; mais je penfois différemment. Jô
ui ôrai la dent de lait qui ne tenoitpref-
que plus,
Ôc je fis de k pkce à l\'autre
canine , en diminuant de fa largeur Si
de celle des deux voifines , ce qui fut
l\'ouvrage de la lime- Enfuite j\'appli-
quai pendant trois femaines des fils que
je renouveliois tous les deux ou trms
jours ; mais voyant que cela n\'avançoit
point & que la dent penchée vers îe
pakis étoic toujours au même étatj
je

-ocr page 48-

De t An du DcntiJlc. 3 7
II"? a bout de déterminer cette jeune
monpéiican. Ce
re\' minute : la dent fut

foUd ^ ^ maintient

O

BSERVATION IÎL

Dans le mois de Novembre de la
^^i^e année, Mademoifelle * * âgée
^^environ vingt-cinq ans, demeurant rus
^^ Cjros - Chenet, accompagnoit chez
une autre Demoifeile à qui je mis
Piufieurs dents faélices. Après avoir
^mfté ces dents,
j\'examinai celles de
Jr^ademoifelle * ^ Elle avoit la pe-
incifive de la mâchoire fupé-
ieiire du côté droit totalement ren-
^erlee vers le palais. Je lui dis que , fi
, vouloir, je lui redrelferois cette
^ fnt en moins d\'une minute. Elle me
^pondit qu\'elle avoit toujours cru que
n^éroit pas poffible , & qu\'elle
même entendu dire par plu-
Dentiftes. Je l\'aifurai du con-
\'iire , ^ elle s\'affic dans un fauteuil.
^^ imiai d\'abord de part & d\'autre les
^^^ies latérales 5 afin de faire à la dent

-ocr page 49-

jg Dc l\'An du Dentijle.
penchée une place convenable; mais je
n oîai que de la largeur de la grande
inciGve & de la canine qui en avoienc
trop, tandis que la dent penchée étoit
fort étroite. La place ainfi préparée,
j\'y amenai la dent en moins de dix fé-
condés , & je la mis bien au niveau de
fes voifines. Je fis nouer par l\'autre
Demoifelle le fil que j\'avois paflé,
l\'opération fut finie. Huit jours après ,

revint chez moi.

pour faire ôter le fil de la dent : je lâ
trouvai très - ferme & très - folide j &
elle a maintenant les dents fort jolies»

O B s E S.VAT ION IV.

En Mai 1753 , un Officier vint me
trouver dans le feul deffein de fe faire
nettoyer les dents. L\'opération faite
je lui confeillai de fe faire remettre, au
niveau des autres, deux dents fi cour-
bées vers le palais, qu\'elles fembloienc
abfolument lui manquer. Ces dents
étoient les deux incifives latérales de
la mâchoire fupérieure! Le peu de rems
que je lui dis qu\'il falloit pour cette opé-
ration , le détermina à la fouffrir. Je corn-

Mademoifelle

-ocr page 50-

De r Art da B entitle. 39

l^ençai d\'abord à faire aux deux dents
place convenable avec la lime. Les
ents de la mâchoire inférieure qui ré-
Pondoient aux dents penchées , paf-
Jpient devant elles & par-delfus, en-
^orte que ces dents penchées étant re-
Jj^^esà leur place en auroient e/Tuyé le
> ce qui auroit incommodé la per-
^onne , ac même auroic empêché le
ucces de l\'opération. Pour remédier à
inconvénienc , je diminuai de k
longueur & de l\'épailfeur de ces dents
jei\'s leur extrémité & fur la face anté-
^^eure. Je fis la même diminution à la
^^ce poftérieure des deux dents pen-
î^\'^u \' que la difpofition de la

tnaçhoire inférieure étoit telle que les
ncifives & les canines paffoient der-
^i^ere celles de la mâchoire ftipérieu-
Quand les molaires oppofées fe
^^^S^oient, routes les dents d\'en haut
^ d en bas étant limées convenable-
nient, je Igs remis dans l\'inftant en place
jUiie après l\'autre avec mon pélican*
e huicieme jour j\'ôtai les fils : ces
^ents fe trouvèrent très-fermes & très-
„, ^\'^"gées. Mon opération avoit fait un
^\'langement f;avantageux chez cet Offi-

-ocr page 51-

^o Dc tArt du Dcmiftc.

cier, qu\'étant allé fuc le champ chez M.
Dumas, Rec-eveui\' Général des Finances,
ce dernier ne pue s\'empêcher de mar-
quer
fon , étonnemenc de lui voir les
dents fi bien rangées ; il ne pouvoic
pas croire que ce changement eût pU
fe faire en fi peu de tems.

Dans toutes ces opérations je me
fers de fil , non pour empêcher la
dent de defcendre 5 mais pour l\'empê-
cher de
rentrer. Pour cet effet, je les
fais paffer fur la face poftérieure de h
dent, en les engageant de chaque côte
à la dent qui l\'avoifine , & les atta"
chant fur Tune des deux.

« / f

Autres ohfervatïons des dents déplacées
renverfées en divers fens.

Observation I,

En l\'année 1750, au mois.de Juil\'
let, Mademoifelle * * âgée pour lofS
d\'environ vingt ans , demeurant che^!
M. le Roi, Horloger J rue S. Denis?
avoit les petites incifives de la mâ\'
choîte inférieure les unes fur les
autre?-
Je fus obligé d\'en ôter-une, tant pou"^

faii\'^

-ocr page 52-

I>eVAn du Dentïjle, 4»

place aux autres, que parce que
Cette dent n\'autoit jamais pu durer long-
jenis, étant déjà fort déracinée. Je fis
^ même opération à la mâchoire fupé-^
leure- j\'y ^r^i une des petites mo-
^R^es, tant parce qu\'elle étoit gâtée,
pour: f^ire place à la canine qui
commençoit à s\'élever par - deffus la
petite incifive. Quand
j\'eus remis à
sur piace toutes les dents de l\'une èc
. ^ ï autre mâchoire , & qu\'elles furent:
exactement rangées par le moyen des
/S & des plaques, je retournai la pe-
[ife incifive du côté de la canine , ÔC
ie ramenai celle-ci dans la place de la
^j^olaire que j\'a vois ôtée. La fituation
J e cette petite incifive étoit telle , que
■\'es parties latérales étoient placées anté-
^leai-^ment & poftérieurement. Lorfque
) eus difpofé la canine à remplir le
y«ide de la molaire , & que la petite
|nciGvg fat fuftifamment ébraiilée par
^application des fils , je la retournai
^^ec la pince droite, & la mis dans la
^\'^«ation qtîi lui convenoic. Je féparai
^\'^luue avec la lime les grandes inci-\'
^ ^es qui croifbienc anffi les unes fur les
je les arrangeai & les mis dans
J-ome II, O

-ocr page 53-

De l\'Art du Dentijle.

un très-bel ordre. Touce l\'opération ne
dura qne deux mois.

Observation. IL

Au mois de Décembre de l\'année
1751 J Mademoifelîe demeurant

rue de la Verrerie, à la Tête Noire,
avoit une petite incifive du côrt droit
de la mâchoire fupérieure placée à
contre - fens , c\'eft-à-dire , de façon
que les faces antérieure & poftérieure
étoient tranfpofées ; & que la pre-
miiere étoit plus penchée du côté de la
grande incifive que de la canine. Une
pareille fituation défiguroit beaucoup
Je fujer. Après avoir ébranlé cette
dent & lui avoir fait une place con-
venable avec la pince droite, je la re-
tournai & je îa remis dans le fens natu-
rel où, elle devoir être , ce qui ne dura
pas une minute. Cette dent eft reftée
depuis dans la même fituation , & elle
eft auffi foiide que fes voifines. J\'ajou-
terai que pour l\'affujettir & l\'empêcher
de defcendre ou de s\'alonger, je lui
fis tenir dans la bouche un morceau de
liège mordoiï de tems en cems?

-ocr page 54-

^ ^ Be VArt du Dentïjîe.

M appuyoic fur cette dent,

à f"^ ^^^angea le même join-comme
tir, > avec la feule précau-

vej," "S P« %e travailler la dent
fenaf^\' pai-\'ce qu\'étant encore très-
liible & peu feriiie elle auroit pu fe

oeranger.

Ob s e r.v,at i o\'n iii.

J la Femme - de - Chambre

j^« Madame demeurant rue faint
^ enis, vint me trouver pour lui ar-
acJier une petite incifive de ia niâ-
^ou-e fapécieure qui fortoit en dehors
^ je préfentoit dans un fens tout oppofé
^ . ordre naturel : car les faces anté-
Ifs^^\'\'^ ^ poftérieare étoient latéra-
& par conféquent les faces latérales
& poftérieure; fuiiation quij,
cjever la levie caufoit une diffor-
- choquante. Je ne confeillai
^^int à cette fille de fiire ôter fa dent,
^^ui auroitfait à fa bouche une brèche
de^^ \'^\'^^-fi-^srable ; mais je lui propofai
Ui^r n ^^ fituation na-

tcic^ \'V bien,qu\'elle ne fe-

plns-difFomis. Elle parue charmée
D ij

-ocr page 55-

44 De VAn du Dentijle.
de mes offres, & confentit à l\'opérarion.
Avant que de décrire mon procédé ,
il faut que je rappelle ici quelque chofe
deia ftrudure de cette dent. On fait
que les dents incifives ont leur-s parties
latérales un peu applaties, Scies parties
antérieure 8c poftérieure arrondies.
Comme la dept en queftion étoit dans
un fens contraire au fens naturel, on
conçoit que les faces latérales qui de-
:voient être applaties , devenues anté-
rieure &c poftérienre, fe trouvoient ar-
rondies. Je me mis à opérer , & ayant
voulu retourner la dent, malgré plu-
fieurs efforts que je fis , je ne pus en -
venir à bout. Je la repris de nouveau,
& elle tomba prefque dans ma main.
Sans m\'effrayer de cet a\'ccident , je
rôtai rout-à-fait, & je vis que la racine
avoir un crochet qui l\'empêchoit de
pouvoir tourner; j\'enlevai fur le champ
avec la lime cette ^extrémiré crochue,
pour pouvoir replacer la dent comme ,
elle devoir être , & je le tentai fans
fuccès. La racine dans les côtés étoic
piatte & arrondie par les faces j de
façon que fon alvéole avoit fuivi la
même conformation. Il ne me fur donc

-ocr page 56-

De VArt du Dentijîe, 45
P^^s poffible d\'f faire rentrer cette dens
^ ans fa fituation naturelle, parce que
a racine étoit plus groffe que
la capa-
de l\'alvéole. Je remédiai à ce: in-
convénient en limant cette même raci-
j j\'emportai à différentes reprifes
atis toute fon étendue au moins un
tiers de fa grolTeur à fa face interne. Je
auffi obligé de diminuer de la lon-
gueur de l\'épaiffeur du corps de la
à fa face antérieure , afin qu\'elle
débordât point les autres , & qu\'elle
fût point heurtée par celle de la
^lachoire d\'en
bas qui lui répondoit,

ce moyen, je vins à bout de remettre
cette dent à fa place & de niveau avec fes
Voifines. Au refte, je fis tenir à cette fille,
comme â Mademoifelle * ^ , un petit
\'^^orceau de liège qu\'elle mordoit de
|ems en tems pendant la journée, je
fis tincer fa bouche plufieurs fois le
Jour avec une eau aftringenre,
jafqu\'à
que la dent fiit totalement reprife.
^eu de jours après l\'opération j cesta
^eut fe trouva folide.

-ocr page 57-

[j^ê JDe l\'An du Dentifte,

Observation IV.

L\'an 1751 , dans le mois de Mai ^
M. de. * * 3 demeurant rue St. Vic-
tor, m\'envoya chercher pour me faire
voir les dents de Mademoifelle fa fille j
qui avoit environ dix ans. Je trouvai
que les incifives Si les canines de la mâ-
choire inférieure qui étoient renou-
vellées, ainfi que celles de la mâchoire
fupérieure , dépaffoient & croifoieiît
celle-ci par-devant \\ au lieu de pencher
en-dedans i comme elles doivent faire,
en fermant ia bouche & en appuyant
fur les molaires , ou en fe rencontrant
vis à-vis , ce qui eft moins ordinaire.
Les denrs de Mademoifelle de * * * ^
dans la fituation que je viens de dire,
faifoient avancer fa levre inférieure
& enfoncer la fupérieure, ce qui pro-
duifoit cette efpece de difformité qu\'on
appelle commuîtéraenc
menton dc ga-
loche.
Je corriueai ce défaut choc]uant,
en faiCiîît rentrer d\'une part toutes les
incifives & ies canines de la mâchoire
inférieure, Se forru ie l\'autre celle de
la mâchoire fupérieure. J\'employai pour

-ocr page 58-

De l\'An du Dentijle, 47

des^ plaques percées de plufieurs \'
qui donnoienc paflage à autant de
s qu\'il y avoit de dents à faire rentrer
fortir. Ces fils fe nouoienc tous fépa-
fui- chaque dent par le moyen
„ plaqueajuflée à chaque mâchoire,
qui portoit far les molaires déjà
outes tenouvellées. Je changeois les
p 5 deux fois par femaine ; & .toute
operation dura environ un mois & de-
Cette Demoifelle a préfentement les
P-Us^belles dents du monde , & le men-
a l\'ordinaire.

Observation V.

^ j^es Demoifelles D ^ ^, Filles de
pVi ! D * * * , Penfionnaires à

^bbaye de B , avoient les dents
en défordre. J\'ôtai d\'abord à l\'aï-
£ ® fécondes petites Molaires pour
place aux canines qui venoienr
g^\' defïlis. ^Elle avoit encore à la mâ-
inférieure, une petite incifive
"it^remént retournée de telle forte ,
lat^ antérieure étoit Sevenue

étale. Pom- reétifier ce défaut; j\'otai
Peute molaire ; je fis aller
la ca-

-ocr page 59-

4? De r An du Dentijîe.
nine & Tincifive voifines du côté de
la brèche , & par le moyen des fils je
mis la dent difforme à découvert. Alors
je retournai cette dent par l\'application
d\'une plaque d\'or, garnie de fils , & fem-
blable à celle qui eit repréfentée
à la croi-
fieme planche,
p. 15. Je lui avois aupara-
vant propofé de retourner cette même
dent avec la pince droite ; mais elle
marqua tant d\'éloignement pour cette
opération, que je fus obligé d\'avoir re-
cours à la plaque d\'or , dont l\'effet ,
comme on Tifflagine, fut beaucoup plus
long que n\'auroit été celui de la pince.
Maiemoifelle D * la cadette, avoit
aulfi les dents fi mal difpofées\'que celles
de la mâchoire inférieure pafToient en
devant les dents fupérieuresj comme à
Mademoii^lle Il eft aifé d\'ima-

giner combien cette conformation dif-
gracioit cette jeune perfonne. D\'ailleurs
les dents de la mâchoire inférieure, ainfî
renverfées en avant, fe rencontrant avec
celles de la mâchoire fupérieure, toutes
ces dents fe croifoient, & par leur frot-
tement Taltéroient & fe détruifoient
les
unes les autre.i, de façon que l\'émail des
dents d\'en haut commençoit à s\'ufef

ïuc

-ocr page 60-

T>e f Art du Dentijle. 49
«r la face antérieure. Je remédiai à cet
^uconv^jjjgj^^ en faifant reutrer les dents
inférieure , & fortir cel-
^sdelafupérieare, ce qui fur exécuté
Fr e moyen de deux plaques garnies
his. Aujourd\'Hui qu\'il n\'y a plus de
Sottement, l\'émail ne fe détruit plus ;
e menton qui commeneoit à trop avan-
cer, eft revenu dans fon état naturel ;
^ levre fupérietire qui s\'enfonçoit s\'eft
enfin toutes les dents\'font ré-
tabhes dans un très-bel ordre , & ont
repris leur folidité. Un an après cette
opération, les dents canines qui n\'é-
pas encore renouvellées paru-
& percerent de chaque côté fur
fécondés petites molaires à la ma-
\'^hoire fupérieure,tandis qu\'elles avoient
^out l\'efpace qu\'il falloit pour bien s\'ar-
^^nger naturellement à leur place. On
jje dira pas que ce dérangement fût occa-
nonné par la dent de lait, puifque de
^e coté même elle étoit ôtée; il y avoic
^^h plus de quatre ans que la brèche
^«bfiftoit, & que du cÔré oppofé la dent
e lait éroiten place, quand les cani-
nes en queftion parurent. Ces dents qui
auroienc dû fe trouver fous les racines
i orne II. £

-ocr page 61-

5 ® De tAn du Dentijle.

de leurs devancieres de lair, étoient
i-enfermées dans la mâchoire vis-à-vis la
féconde petite molaire. Quand ces for-
tes de dents font tardives & fe renou-
vellent les dernieres, fi d\'abord elles
Jie trouvent pas la place convenable ,
elles percent aifez fou vent, foit fur la pe-
tite inci,iive, foit fur la petite molaire, ou
en partie vis-à vis & par deffus la brèche,
ainfi que vers le palais. Cela peut arriver
aulTi, parce que le germe eft plus rappro-
ché de ces différentes parties que de la ra-
cine de la dent de lait qu\'il doit rempla-
cer; mais oa ne voit pas fréquemment de
ces bizarreries de la nature. Je les répa-
rai dans la bouche de Mademoifelîe ***
par le feul moyen des fils, après avoir
ôté la dent de lair qui étoit reftée.

Si j\'entreprenois de rendre compte
de toutes les luxations des dents & au-
tres défauts de conformation que j\'ai
toujours heureufement corrigés, je grof-
firois trop cet Ouvrage, & je m\'éloi-
gnerois du but que je me fuis imique-
ment propofé : car mon objet eft de ne
donner que quelques obfervations fur
chaque matiere, pour faire fentir les
avantages qu\'on retire de pareilles opé-

-ocr page 62-

De l\'An du Dentijîe. 5 x

rations encre les mains d\'un haHie Iiom-
me.

Je n\'ignore pas combien il y a d\'er-
reurs & de préventions fur ce point-.
Preventions dangereufes en ce qu\'elles
répandent & fe perpétuent par tradi-
tion. Les uns vous diront, qu\'il ne faut
jamais faire toucher aux dents des en-
rans, qu\'ils n\'aient atteint un certain
^ge- D\'autres fburiendront que de re-
dreffér Jes dents, à quelque âge\'que ce
^it, c\'eft rendre leur chute inévitable ,
& que par l\'ébranlemeut qu\'elles fouf-
f^\'ent, elles tombent avant trente ans.
Y autres enfin, auffi peu inftruits, préten-
J^ent, qu\'en ôrant trop tôt les dents de
j^îtj on détruit fouvent le germe des
Secondes dents , & qu\'elles ne font
point remplacées : erreurs populaires
introduites par une imbécile frayeur, &
3ecré«}itées par l\'ignorance.

11 eft certain qu\'il n\'eft pas poffible
d arranger & de redreffer les dents, fans
^es ébranler j mais pour peu qu\'on faife
attention au relTort ou à l\'élafticité des
alvéoles & des gencives, on fera bien-
tôt convaincu que les dents, une fois
Bien remifes par les moyens que j\'ai

E ij

-ocr page 63-

5 X De VAn du Dentijle,
<îécrics reprennent en très-peu de jours
leur premiere foiidité.

Une dent tirée de fon alvéole &
replacée à l\'inftant par un bon Dentifte,
reprend aufli fûrement & encore plus
vite qu\'un arbufte , enlevé de terre
: replanté par un Jardinier habile. Ou
fait que la dent d\'un Savoyard , non-
feulement s\'ajufte à merveille , mais fe
naturalife encore & s\'affermit fi bien
dans une bouche étrangère, qu\'elle dure
autant que toutes les autres. Or, pour-
quoi les dents naturelles, qui font fim-
plement ébranlées , ne reprendroient-
eiles pas de même ? Les fibres & les
. petits ligamens qui les attachent & les
confondent ne font point détruits; l\'al-
véole leul eft dilaté dans quelqu\'une
de fes parties, ce qui fait que la dent
trop à l\'aife dans fon chaton eft plus ou
moins branlante ; mais elle reprend fa
confiftance, à mefure que les parois de
l\'alvéole fe refferrent & fe rapprochent,

6 que le périofte & les gencives font
débarraffés du fang dont ils étoient fur-
chargés : indications promptes & dont
on eft sûr, lorfqu\'on ceffe l\'ufage des
-Ills 4s des plaques. C\'.eft alors qu\'après

-ocr page 64-

Z?e I\'Art du Dentljlé. 5, j
avoir dégorgé tentes ces parties, il ne
plus que de rappeller leurrelTorc
quide quelque aftringent ii-

• dents qu\'on retourne avec la
Fnce droite , & les dents penchées
^^ ie palais qu\'on ramené avec le pé-
can fe raffermilTent également en très-
Peu de jours, comme on l\'a vu par plu-
jeurs des obfervations précédentes. Or,
5 Pi^ompt afTermilTementne peut avoir
^f". que par la réunion des fibres du
Periofte, & par le relTerrement de Tal-
eoie qui vient de nouveau fertir ÔC
«^oufoliderladenr.

§. I I I.

-^^niere de nettoyer les Dents , fans les
^brànler & fans fatiguer le fujet.

Xj\' \'

, Operation la plus ordinaire &
^ pJus fimpie en appaience, eft celle
^e nerroyg^ les dents pour les débar-
^ Y du tartre qui les couvre. Mais
quelque familière , ou plutôt qtielque
"viale qu\'elle foit, elle exige de l\'in-

E iij

-ocr page 65-

54 De tAn du Dentijie.
telligence & fur - tout bien àe î\'at-

tencion.

Quand les dents font délicates ou
branlantes , & qu\'il y a beaucoup de
tartre , il faut commencer par le fendre ,
afin de l\'enlever plus facilement; ce qui
fe fait fur la face extérieure de bas en
haut à la mâchoire d\'en bas,
ôc de haut
en bas à la mâchoire d\'en haut , avec,
k gratoir en langue de char. C\'eft ce
mime inftrument qui ferc à enlever le
tartre, en !e tournant de l\'autre fens. On
le fend dans la face interne avec l\'inftru-
ment appelle
divife-tartre, qui efl fait
exprès, & qui relfemble à un déchauf-
foir. Voici la maniéré de procéder.

Il eft toujours à propos de commencer
l\'opération par la mâchoire fupérieure ^
parce qu\'elle eft ordinairement moins
chargée de tartre que l\'inférieure. Le
fujet par ce moyen n\'eft pas fi effrayé»
& il s\'accoutume à endurer ce travail j
au lieu qu\'en commençant par la mâ-
choire inférieure; la quantité prodigieufe
de tartre, qui fe trouve à certaines per-
fonnes, peut d\'abord épouvanter & faire
perdre courage.

Le Dentifte, pour opéreE, fera placé

-ocr page 66-

De V Art du Dëntîfie. 5 5

[^u côté droit, le bras gauche par-delTus
P tete & à la gauche du fujet. Avec
index de la main gauche, il releve ia
|evre fupérieure & découvre les dents
Qe cette mâchoire , tandis que le doigc
«n milieu eft appuyé ferme fur l\'extré-
mité de la dent fur laquelle on travaille,
tient l\'inftrument de l\'autre main
svec le pouce , l\'index & le doigt du
Milieu. On porte d\'abord la pointe &
des tranchans de l\'inftrument fur la
^sce antérieure de la dent & au défaut
"es gencives; on fend le tartre de haui:
bas J on le détache enfuite & on
enleve de delfus la dent par plufieurs
Petits mouvemens de droite à gauche
^ de gauche à droite, & ,non pas de
"^nt en bas. On fuit, pendant toute i\'o-
Peration, la même méthode fur toutes les
^ les unes après les autres , fans
Changer d\'attitude. Quand il faut ôter le
dartre du côté droit, on fait tourner la
îece du fujet de droite à gauche, fans
pour cela changer de fituation; enfuite
porte le fécond doigt fur la commif-
i^re des levres, ainfi que l\'on a fait
i
gauche , en faifant prefque fermer la
ouche , afin qu\'elle prête davantage

E iv

-ocr page 67-

5 6 Be VArt du B entiße,
vers les groflfès molaires qui fe mon-
trent plus à découvert, & on enleve le
tartre de la même maniéré que du côté
gauche. Il faut auffi foutenir ces dents ,
fur-tout fi. elles font foibles, avec le
doigt du milieu que l\'on glilfe pour cet
effet fur l\'extrémité\' de leur couronne j,
tandis que l\'index écarte les joues Se
l\'ouverture des levres..

Après avoir enlevé tout le tartre de
la face antérieure de la mâchoire d\'en
Haut J on pafTe à la face intérieure 5
mais il efî: affez rare qu\'il s\'en trouve
fur cette face , vu fa pofition en pente ,
&;\'le frottement continuel de la langue.
Cependant , quand un côté des dents
refte dans l\'inaétion , le tartre peut s\'y
amaîTer. Otj fuppofé qu\'il s\'y en trouve,
on Tôte de la même façon, & avec les
mêmes précautions ; c\'eft-à-dire, on le
fend d\'abord avec le
divife-tartre , &
on l\'emporte avec Venleve-tartre. Cela
fait, on quitte l\'inftrument, pour pren-
dre le curedent d\'acier qui dégage &
fait fortir routes les particules du tartre
qui fe font introduites entre les dents
dans leurs parties latérales. Quand on
a bien nettoyé
toutes les dents de la

-ocr page 68-

De l\'Art du. Dentlp. S?
mâchoire fupéi-ieure , on palTe à la mâ-
^Iioire inféuieiue. On fe ferc des mêmes
l\'iftrumens & la fituation eft !a mcme.
On baiffe la levre in-férieiiie avec le
doigt du milieu j on pofe le pouce fur
l\'extrémité de rincifxve qu\'on opere ,
pour la maintenir ; & l\'index fert de
point d\'appui à rinftrument. On fend le
tartre de la même maniéré qu\'en haut,
la face extérieuî?e & fur le nùlieu du
des dents, mais en commençant
ers la gencive, &c en remontrtnt tou-
jours à l\'extrémité de la de ne. On réitéré
la même chofe deux ou trois fois jnf-
que le tartre feit tout-à fait divifé
& alors avec le même inftrumenc, on
l\'enleve, comme on a fait à la mâchoire
^î-ipérieure. On vient enfuice à la face in-
fur laquelle on opere de la luême
^\'\'»Çon, c\'efl à-dire, en commençant en-
core par divifer le tartre de bas en haut,
tant fur le milieu de la dent que fur les
Parties latérales J & on l\'emporte avec
\'inftrument propre à cet ufage. Pendant
«^e travail, il faut appuyer le pouce fur
l\'extrémité de la dent ,
Se l\'index fur fa
face externe , tandis qu\'on ôre le tartre
de fa face interne j ce qui doit fur-toac

-ocr page 69-

58 TitVArtduBenûjle,
s obferver, quandelieeft branlante. Oa
continue ainfî fur toute la face intérieu-
re de cette mâchoire j, & on ore jufqu\'aux
moindres vertiges du tartre. On finit par
le curedent d\'acier qu\'on paife dans les
interftices des dents. Le tartre exade-
ment enlevé, il faut alors examiner tou-
tes
Jes dents les unes après les autres ,
& s\'ils\'en trouve quelques-unes atteintes
de carie^ y remédier auffirôt, foit en
les féparant & en détruifant la carie
avec la lime^ foit en les plombant,
fi
le cas le requiert.

Quand les gencives fe trouvent fur-
chargées de fang, il faut les piquer avec
une lancette, ou avec le cure-dent d\'a-
cier , & les comprimer enfuite plufieurs
fois avec un linge fin, ou avec une fer-
viette bien douce, jufqu\'à ce qu\'il n\'en
forte plus de fang. Les inftrumens dont
je me fers pour nettoyer les dents, font
ici tepréfentés dans la quatrième plan-
che.

Telle eft la méthode que j\'ai trouvée
la meilleure, pour nettoyer parfaitement
les dents falies par le tartre, fans caufer
au fujet la moindre fatigue,
Se fans
ébranler les dents. Cependant fi , pair

-ocr page 70-

De l\'Art du Dentijle. 59

îa ténacité du tartre, on n\'avoir pu s\'em-
pêcher d\'ébranler un peu des dents dé-
icates, elles réprennent promiptement
eut foiidité , comme on le va voir pas
obfervations fuivantes.

Observation L
En 1752., vers la fin
d\'Août, |e

appeilé par M. Bourdier, De
^lédecin de la Faculté de Paris, pour
ftetîoyer les dents de Madame de * *
<^emeurant rue Vivienne.
J\'ex?minai la
bouche de cette Dame en préfence de
Bourdier, Médecin, & de _M.
La-
B^ycnnerie^ Maître en Chirurgie. Elle
fouffroic beaucoup, & n\'avoit pourtant
aucune dent de gâtée; mais elles étoient
toutes fort branlantes. Il y avoit gonfle-
ment & inflammation aux gencives; elles
étoient même féparées des racines, effet
ordinaire du tartre qui s\'étant infinué&
accumulé entre ces parties, avoit forcé
chaque gencive d\'abandonner le coîet
la dent. Le tartre empêchoit encore
le retour des liqueurs, & produifoit par
conféquent tout le défordte de cette
bouche» îi y avoit déjà fort long-tems

Dofteur-

-ocr page 71-

^o De l\'Art du Demi/le.-
qae k Dame étoic dans cet état. Deux
mois avant que j\'euffe l\'iionneur de k
voir, elle avoit été chez un de mes con-
freres qui lui avoit d\'abord confeiilé de
faire pendant huit jours des bains d\'eau
n^de dans fa bouche , & qui iui avoit
a/outé , qu\'il y auroit enfuite à y tra-
vailler de deux jours l\'un pendant plus
de deux mois. Peu de tems après cette
confuîtation, elle tomba malade ; li fallut
aller au plus prelTé; & kiHer les dents
jufqu\'à ce qu\'elle fût guérie: c\'eft ce qui
donna occafion à M.
Bourdier, fon Mé-
decin de m\'envoyer chercher.

Je commençai par ôter exademenc
tour le tartre qui s\'étoit étendu fortavanc
fur les racines & fous les gencives des
dents; après cela, je coupai ce qui ex-
cédoit des gencives, fnr-tout à celles
des incifives , fur les faces internes 6c
externes. Je fis enfuite de petites inci-
fions au dedans de ces gencives, c\'eft-
à-dire , à la partie qui rép^ndoit à k
racine, & ce a pour les débarraffer du
fang dont elles étoient furchargéesj &
pour faire par ce moyen plufieurs plaies
récentes, qui en fe réunilfant puffènt
îe relferrer fur k racine de k dent, &

-ocr page 72-

De VAn du Dentïjle. <?r
^^îi\'e des adhérences convenables. Il
^ortit beaucoup de fang de ces inci-

lons; j\'en facilitai encore l\'iffue, en ôtant

es caillots qui anroient pu l\'arrêter, à
Gelure qu\'ils fe formoient, & en com-
pimant les gencives avec une fervietre
lulqu\'à ce qu\'il n\'en fortit plus, ce qui
J^ura plus d\'une demie-heure. A force de
exprimer, je hs évacuer plus d\'une
<^hopine de fang; les geqcives fe trou-
vèrent en moins de huit jours fort bien
^afferrtiies & rétablies dans le meilleur
: enfin les dents reprirent leur fo-
l^\'^ité, & fans y faire autre chofe, cette
^ame ne fentit plus de douleurs.

Observatiok il

Une Niece de M*** Tireur d\'or,
"^«e S. Denis , âgée d\'environ trente-
^inqans, avoit les dents des deux mâ-
choires extrêmement mal rangées. Elles
Isolent d\'ailleurs branlantes , & d\'une
longueur défagréable : les gencives
■etoient appauvries , ilafques, & fon-
^gueufes ^ elles faignoient à chaque inf-
tant; les racines étoient toutes déchauf-
les vaiiTeaux qui fervent d\'atta-

es

-ocr page 73-

D£ l\'Art du DentijU.

ches aux dents avoient perdu leur ref-
fort. On devine bien ce qui produifoic
ce défordre, c\'étoit la préfence du tar-
tre qui éroienc en grande quantité, prin-
cipalement fur les racines des dents;
la ftagnation des liqueurs qui proveneit
de la même caufe, s\'oppofoit au retoixc
du fang , & de-Ià tous les accidens que je
détaille. Cette Demoîfelle me pria d\'ar-
ranger fes dents. J\'entrepris au mois
de
Juillet 1750, de remettre fa bouche en
bon état. Comme je trouvai les dents de
la mâchoire infédeure routes décbauf-
fées & fort branlantes, je ne jugeai pas
apropos de fonger à les redrefïer ^ mais
je travaillai pendant trois mois , deux
fois par femaine à redreffer celles de la
mâchoire fupérieure. Après les avoir
débarraffees du tarrre dont elles étoient
couvertes, chaque fois que
je renouvel-
lois les plaques & les fils, je dégorgeois
les gencives de la mâchoire inférieure,
en faifant dans l\'intérieur de chacune
avec la lancette plufieurs petites
pi-
qûres , & les cornprimant avec un linge »
jufqu\'à ce qu\'il n\'en fortit plus de fang.
Je lui faifois baffinerfes gencives exade-
menc trois fois par jour, avec une
petite

-ocr page 74-

^ JDe fjrt du Dendjie.

eponge trempée dans une eau appro-
piee. 1 ar cette méthode , les gencives
e lont parfaitement rétablies ,
& les
^eiKs font devenues très folides. Com-
eiles étoient extrêmement longues ,
\'nil que je l\'ai remarqué, elles défigu-
raient la bouche; de plus, en leur iaif-
»an_t cette longueur, elles n\'auroient ja-
mais acquis une foiidité fuffifante. Pour
prévenir cet inconvénient, je diminuai
la longueur de tontes les incifwes
canines environ d\'une ligne.
Les
«ents de cette Demoifelle ont repris leur
P\'^eriîiere foiidité , & la lime a emporté
Ï^Y ce^qu\'elles avoient de difforme. Je
s la même opération aux dents de la mâ-
^.oîre fupérieure. Après qu\'elles furent
^"es en un bel ordre, & que les genci.

es turent rétablies , je retranchai fuffi-
^mment de leur longueur avec la lime,
ctuellement cette perfonne a les dents
^s-termes, très-jolies ,
Se auffi bien
\'^"gees qu\'elles puiflént l\'être.

Observation III.

^^ Baronne de * * femme
« «a Officier-Général de Pruffe, vint en

-ocr page 75-

\'<64 ^^ ^^ Dentijle,

France au mois d\'Août 1751 ? pref-
que uniquement pour faire arranger
feS
dents. Cette Damej fur ies préjugés or-
dinaires, redoutoit tellement la lime, que
fon premier mot avec moi fut qu\'il n«
s\'agiiïbit (implement que de lui nettoyer
les de«ts, & qu\'elle ne vouloir point
du tout qu\'on les lui limât
, quoiqu\'elles
fuffent fort longues. Je cédai pour le
moment
à fa prévention , & je me mis
à^Lui nettoyer les dents 5 ce qui ne put
être fini dans une féance , tant par la
quantité du tartre dont elles étoient fur-
cliargéesj que parce que les incifives
les canines de l\'une & de l\'autre mâchoi-
re étoient fort foibles ôc fort ébranlées
îar le choc continuel des unes contre
es autres : nous remîmes donc au len-
demain le refte de l\'opération. Lorfque
j\'eus achevé de nettoyer les dents, j\'ef-
fayai de faire comprendre àcette Dame j
combien les injuftes frayeurs qu\'on lui
avoit données de la lime lui feroient pré-
judiciables : je lui fis voir que ce faux
jréjugé lui feroit perdre les dents, par
^ \'ébranlement continuel auquel elles
croient expofées; j\'appuyai fur lanécef-
iîté de les raccourcir , pour faire cefiTef

leur

-ocr page 76-

VAn du Bcnûfic.
leur choc, & je lui a (Tarai qu\'il n\'y avoir
î^îen du tout à craindre. Elle eut de la
peine à fe rendre, mais enfin je la per-
suadai. Elle confentit donc a fe faire li-
^er les desits j je les lui raccourcis à
deux fois, tant en haut qu\'en bas, au
nioms de deux tiers de ligne. A la der-
niere féance j (î j\'avois vouluda croire, je
|es aurois raccourcies beaucoup au de-
U de ce qu\'il falloit, parce qu\'elle avoir
^\'îia fenti les avantages qu\'elle en tiroit.
Qîiand toute l\'opération fut finie , fes
Qents n\'étoient point reconnoiffables y
^ qaoiqu\'après cette réparation, elle
refté peu de jours à Paris, lorfqu\'eile

eft

f

partie , fes dents étoient trèi-fermes

^^ très-folides , enforte qu\'elle eil bien
devenue de l\'idée qu\'elle avoit de là li-
lorfque j\'eus l\'honneur de la voie
pour la premiere fois. Il n\'y a aucun lieu
«e douter que, fi cette Dama n\'eût pas
confenti à faire limer fes dents^ elle au-
^^oic eu le défagrémenc de les perdre en
très-peu d\'années par l\'élyanlemenCjfui-
^ani tïia prédidtion. Je gagnai fur elle
encore une chofe : je la déterminai à me
iaifTer ouvrir & féparer les deux grandes
incifives qui étoient gâtées dans leurs

Tomi 11,

-ocr page 77-

De VAn du Denûfle:
parties latérales. Auffi-tôt par le moyen-
delà lime qui ne l\'efFrayoit plus, j\'em-
portai tout ce qu\'il y avoit d\'afFeété
dans ces deux dents. Ainfi, cette Dame
s\'en eft retournée bien fatisfaite 6c très-
aflurée de conferver ces dents, fans
craindre que la carie pût y faire de nou-
veaux progrès, parce qu\'elles ont été
fecourues à tems.

Ces trois obfervations font voir com-
bien on eft dupe d\'écouter les craintes
& les difcours populaires. Elles prou-
vent auffi le tort infini que le tartre fait
aux dents, aux gencives, & aux alvéoles,
îleft donc ridicule de penfer que par au-
cun moyen les dents puilfent redevenir
fermes , ou les gencives fe rétablir j tant
qu\'on laiiTe fubfifter le tartre, & qu\'on
n\'a point débarraffé les gencives du fang
ou de la limphe féreufe dont elles fe
îrouvent engorgées.

îl faut donc, tant qu\'il exifte du tar-
tre fur les dents, l\'enlever avec l\'inftru-
ment d\'acier ^i eft le feul convenable»
Car tout autre outil, de quelque mé-
tal qu\'il pût erre , or ou argent, n\'en
viendroit pas a bout. Paifons aux autres
opéiatioris..

-ocr page 78-

/

Ui\' _

-ocr page 79-

Tûm.II.Faû.^7.

Planche. .

-ocr page 80-

De l\'An du Dentifle, tf/

explication

DELA

QUATRIEME PLANCHE.

^ ET TE pldncke repréfente fix différcns
outils cjui fervent à nettoyer les Dents.

Fig. I. Gratoir f ou enlevé tartre^ eiy
forme de langue de chat.

Fig. II. Le même injîrument plus petite
A. Sa tige.

BB. Les deux tranchans.

C. Extrémité tranchante & pointue.

D. Manche de Coutil.

Fig. m. Divife-tartre en forme d&
^échauffoir. *

£. La tige.
^ Le tramhant.

G, Le manche,

Fig. l V. Rugine ou enleve-tartre , en
On fe fert de cette efpece de rateau ^
pour achever d\'enlever le tartre qui rejie
^près l\'opération du divife
-îartre>

H. La ti^e.

L Le tranchant,
K.. La poime.

T* »

r ïîj,

-ocr page 81-

De I Art du jDentl^e:

L. Le manche.

Fig. V. Cure-dent d\'acler propre à tirer
le tartre d\'entre les dents,

M. Sa tige.

N. Sa pointe.

O. Son manche.

Fig. VI. Outil dont on garnit Vextré-
mité de coton, pour pajfer la poudre fur les
dents.

P. Sa tige.

Q. Son extrémité un peu courbe &
garnie de dentelures ^ afin d\'empêcher le
coton qui fe roule deffus, dc tourner &
de fe détacher.

R. Le manche.

-ocr page 82-

Be tJn du Dentifle,

IV.

Des différens ufages de la Lime-,

Q u E les dents courtes foient les plus
durables parce qu\'eiles font les moins
^\'etres à s\'éclater ou à s ebranler ;

les dents longues au contraire pé-
i^nient ordinairement par-là , tant parce
Jîu elles ont peu de proportion avec
■•eur bafe , qu\'à caufe du
choc conti-
\'i.uel qu\'elles font obligées,de fouflrir^
fien de mieux établi par l\'expérience ,
^ nous l\'avons déjà fait voir. Or,
^.eft la lime qu\'on emploie, pour cor-
ce dernier défaut, & on fe fert
jü même inftrument pour féparer les
"ents qui font trop ferrées, ou en dan-
de fe gâter les unes les autres par le
^ontaét. Quand on lime à propos une
^ent gâtée, & avant que la carie l\'ait

entièrement pénétrée, il eft fûr qu\'après
cette opération , elle fe conferve bien
"es années, & même toute la vie.

^ our raccourcir les denrs des Jeunes
gens, il faut attendre qu\'ils aient atteint

-ocr page 83-

7» De FAn du Dennjîe.

l\'âge de quinze â feize ans , parce qu\'é-
tanc alors fuffiramment pleines,el!es font
en état de fupporter l\'effet de la lime.
On voit cependant de
jeunes pesrfonnes,
qui à douze ans font plus capables de
foutenir cette opération que d\'autres i
quinze ; c\'eft pourquoi il faut avoir
égard à ces différentes circonftances ,
& à ladéiicateïïe des dents. Il faut ob-
ferver encore , qu\'il n\'y a ni tems ni âge
qui doive régler pour limer & emporter
la carie, quand elle affede les dents
dans les parties latérales ; on doit même
la prévenir , quand on ia foupçonne pro-
chaine , ou que l\'on craint que quelque
dent nefe gâte. Les jeunes perfonnes^
après avoir renouvelle leurs dents ^ foni
fujettes à eerie maladie, comme on le
verra par l\'ohiervation que je rapporte-
rai bientôt.

J\'ai fair remarquer que les incifîves
inférieures fe gitoient très - rarement
dans leurs parties latérales; il ne ^^^^
donc les féparer que pour des grandes
raifons ^ parce qu\'elles font les |5kis fu-
|ettes à périr par l\'ébranlement, à caufe
du tartre qui s\'y amalfe en plus grande
^uandté qu\'ailleurs. De plus j leurs ai-

-ocr page 84-

Bi c Art du Benùjte, jt
^eoîes étant plus minces & plus dclicares
que ceux des autres dents, quand ces in-
cifives font féparées,. elles ne font plus-
1 fùiides ; au lieu que, quand elles fe tou-
\'^hent, elles fe fervent mutuellement
de
point d\'appui, & durent plus long-tems.

donc on eft obligé de les féparer pouc
l^aufede carie, il ne faut diminuer leuE
largeur vers les gencives , qu\'autans
qu\'il eft nécedaire pour emporter la ca-
Lorfqu\'une4ent de devant ou des.
^océs eft cariée bien avant, il faut em-
porter la carie le plus
qu\'on peut vers la;
J\'^Çe interne , afin dene point crop l\'affoi-
^ir, & bien ménager la largeur de la fa-
externe, dont le moindre retranche-
^^m la rendroit défedtueufe. On ache-
té d\'emporter la carie avec une rugines
^ il faut en enlever jufqu\'à la moindre
\'^ace.^
S\'il refte alors dans la dent une
^^\'\'^vité trop profonde & qui pénétré
^^\'/qu\'au canal, il faut remplir cette ca-
, J & boucher le canal avec des feuil-
les d\'or,

^ Si le cordon qui remplit le canal fub-
/\'OU encore , il faudroit auparavant
^^ détr

par les

:ruire

31

aup2
moyens que

-ocr page 85-

7§. De VAn du Dentijîe.
indiqués • on introduit enfuite les feuilles
d\'or dans ce canal avec fuccès.

Quand on fépare une dent pour caufe
de carie , & que la voifine n\'eft point
altérée, il faut fe fervir d\'une lime qui
ne foit taillée que fur une face, & donc
l\'autre face foit polie, afin de ne limer
que la dent malade. Quand la carie a
miné fort avant une dent feule, ou
deux dents voifines, & qu\'on efl: obli-
gé d\'emporter confidérgiblement de leur
largeur j pour que ce grand vuide fe
bouche en partie par l\'approche des deux
dents, il faut ouvrir ces dents gâtées,
emporter de leur largeur jufqu\'à la
racine. On fe fert alors d\'une lime plus
cpaiifcj & taillée des deux côtés, en
obfervant de rendre ces dents le moins
difformes que l\'on pourra. Quand au
contraire l\'efpace qu\'on a fait entre ces
dents n\'eft pas difforme , après avoir
emporté la carie, il faut laiffer la l
.ar-
i?eur de la dent vers la racine à fleur de
,a gencive , afin d\'empêcher que ces
denrs ne fe rapprochent trop , & ne fe
gâtent de nouveau. Lorfque les groffes
molaires font gâtées fort avant, on fiic

une

-ocr page 86-

De l\'Art du Dentifte:
«ne fépararion fufEfance avec la lime
qui fect à égalifer ou à raccourcir les
uents, & dont lé tranchant doit être ar-
me de petites fcies ; on acheve d\'em-
porter la carie avec les rugines propres
a cet ufage , & l\'on plombe enfuite ,
Ci
cela eltpoffible. Si la carie n\'eft que fu-
perficielle , il faut l\'emporter toute avec
la lime.

Lorfque les dents font inégales, ra-
ooteufes
Se remplies de petits trous ou
ae taches fur leur furface , comme font:
^es dents de ceux qui ont été noués ^ on
détruit ces inégalités avec la lime qui
rend leur furface liffb & polie. 11 y a
^^ependant certaines taches qu\'il ne fau-
^l\'oic point s\'obftiner à détruire, parce
qu\'elles pénétrent quelquefois fort avant
•^aas le corps fpongieux de la dent : le
^ttiede alors feroit pire que, le mal.
On ne doit point non plus pratiquer ,
\'^ette opération fur aucun fujet qui n\'aie
atteint l\'âge de dix neuf ou vingt ans^
parce qu\'alors l\'émail a pris la coniif-
^ence, & que la dent ell moins fen-
nble.

I^orfque les deux grandes incifives
ctoifent l\'une fur l\'autre , il faut

Tome IL \' Q

-ocr page 87-

^^ jye l\'An du Dcntijle.
féparer & mordre également fur toutes
les deux , jufqu\'à ce que la lime foit par-
venue à la gencive, ôc que les dents
foient bien ouvertes dans toute l\'éten-
due de leurs parties latérales ; enfuira
on lime fur le côté de celle qui croifoic
en dehors : pac ce moyen on vient a
ÎDoutd\'eh corriger la difformité. Quand
elle eft ci-op dérangée , on fe fert de h.s
pour la mettre au niveau de fes voihnes.

Quoique la lime foie l\'iiiftsTument or-
dinaire qu\'on emploie pour racourcir
les dents trop longues, il y a néanmoins
des cas où il faut donner la préférence
à la pincette incifive. Quand ^ par exem-
ple , les dents font fore ébranlees ^
Se
ne peuvent fupporter le frottement de
îa lime , on a recours à la pincette ;
mais il faut fe fervir de cet mftrument
avec beaucoup de précaution , pour ne
point faire éclater l\'émail,, & quelque-
fois, le corps de la dent. Voici donc
comment: on s\'y prend. On fait avec
la lime une trace autour de la dent,
enfuite on porte le tranchant de la pin-
cette dans cette trace, & on coupe la
dent en cet endroit, en ferrant beau-
coup;
Par ce moyen on peut réduire les

-ocr page 88-

De VArt du Demljle: jf
àenrs au volume qu on veut. On ren-
contre quelquefois des dents toutes
cariées & noires fur le devant, qu\'on
eft obligé de couper /ufqu\'au niveau de
la gencive , pour mettre à la place une
dent fadice : alors fans contredit la pin-
cette convient beaucoup mieux que la
lîme , en ce que l\'opération fe fait
dans le moment. Cependant il faut tou-
jours la ifinir avec la ime, pour unir &
adoucir les endroits que la
pincette
vient de couper.

Les pincettes font de deux fortes : les
luies fout tranchantes fur les côtés , de
les autres le font à leur extrémité. Elles
relfemblent à-peu-près à celles dont
on
fe fert pour couper les ongles ,, excepté
Ji\'elles doivent être bien trempées.
Se
de bon acier. En voulant raccourcir Jes
denrs, il faut prendre garde de ne pas
couper trop avant vers le canal, ce qui
pourroit avoir des fuites fâcheufes. Les
canines & les petites molaires font les
plus expofées à cet accident, fur-tout
^uand le fujet eft fort jeune , parce
qu alors l\'intérieur de ces dents n\'eft
pas encore affez rempli. Les dents dont
peut diminuer la longueur , font

G i|

-ocr page 89-

y Be l\'Art du Dentijiel

donc les incifives , les canines & îes
pointes des petites molaires ; à l\'égard
(des grofles molaires, on ne peut gueres
en diminuer, fans courir certains rifques.
Si cependant il s\'y trouvoic quelques
pointes qui piquaflent la langue ou
qu\'une molaire creufât trop , & minât
celle qui lui répond
à la mâchoire op-
pofée , on pourroit avec la lime enlever
ces pointes, fans qu\'il y eût aucun dan-
ger, en obfervant de ne limer précifé-.
jnent que ce qu\'il faut.

Lorfqu\'une incifive oa iine canine fe
porte en dedans ou en dehors , elle
excede ordinairement fes voifines. Si
elle fe porte en dedans, il faut la limer
en pente 5 & comme en bizeau du côté
de la langue ; fi elle eft penchée en de-
hors J pour l\'arranger & la .remettre au
niveau des autres, il faut y faire avec la
lime une penre en dehors, afin que le
tranchant fe porte en dedans.

Les limes dont on fe fert, foit pour
réparer, foit pour racourcir les dents ,
doivent être taillées en tout fens foit
avec
le cizeau pour celles qui ont alfez
d\'épailTeur, foit avec le couteau pour
Gslies qui font trop minces. Leur épaif-

-ocr page 90-

De rAn du Dendfte, 77

fsur doit erre égale par\'tout; les railles
en doivent être très-fines; enfin il fauï
qu\'elles foient bien trempées & de bon
acier, pour qu\'elles mordent bien fur
la dent qui eft un corps extrêmement
dur, qu\'elles ne fatiguent point le
iujeg.

Celles qui fervent à féparer & à ou-
vrir les dents , font pîattes , longues
d\'environ quatre pouces, larges-d\'une
ligne & demie , & de l\'épaifleur d\'une
piece de douze fols. Quelques - unes
doivent
être caiiices d\'un feul côté , afin
qu\'elles ne mordent pas fur la dent
voifine , dans le cas que j\'ai fpécifié >
les autres font taillées des deux côtés.
Leur tranchant qui en fait l\'épaiffeaB
doit être en forme de petite fcie, &r
avoir les dents très-fines.

Les limes qui fervent à racourcir les
dents , doivent être à-peu-prèssSemême
longueur & de même largeur, mais au
nioins de l\'épaifFeur des deux tiers d\'un
écu de trois livres ^ toutes plâtres &
îaillées au cizeau.^

Il faut fe fervir de toutes ces difFé-
îentes limes , fans qu\'elles foient em-

G iij

-ocr page 91-

7 s De l\'An du Bentifie:

manchées J & en avoir cependant de
plus ou moins épaiiTes , de plus grandes
&_de pltis petites , pour racourcir & ou-
,vrir les dents, felon que le cas peur le
requérir, & qu\'il fera befoin de faire
«ne ouverture plus ou-moins grande.
Avant que de fe fervir de la lime, il eft
bon de ia mouiller pour qu\'elle morde
davantage, qu\'elle coule plus aifémenr,
s\'échauffe pas trop, ce qui pour-
ïoit la détremper.

Pour bien conduire cet inftrument,
on fait alTeoir le fujet dans un fauteuil
bas îa tête appuyée fur le doffier, ou fur
îe côté gauche de l\'opérateur ^ qui doit
la tenir embraifée bien ferme. Quand
il s
\'agît de travailler aux dents de la
^achoire fupérieure j il faut être placé
a la droite du fujet. pour limer les
incifives, il faut lui faire tenir la tête
droit^ rpoiir les canines & les molaires
du côté gauche, la tête doit être pen-
chée plus ou moins fur le côté droit, &
vice verfâ , fi c\'eft fur le côté droit qu\'on
opere.

Quand on opere fur les molaires, il
faut avoir l\'atfenticn d\'envelopper la

-ocr page 92-

Bè VArt du Dentijîê. 75
Cotnmiffiu-e des levres avec une fer-
viecce , afin de préfervec la levre ou la
joue des atteintes de la lime.

Tandis qu\'on tient la lime par le
milieu avec l\'index , le doigt majeur &
le pouce de la main droite , le pouce
& l\'index de la main gauche pofent
fur l\'extrémité des deux dents que
l\'on
veut réparer J, & la lime pafle librement
entre les deux doigts pour les ouvrir.
Pendant l\'opération , le doigt du milieu
releve la levre fur le devant, ou écarte
le bord des
levres. Si l\'on fépare \'es
molaires J on monte ainfi avec la lime
en appuyant légèrement, & en la fai-
fant aller de dehors en dedans, jufqu\'à
ce que ks dents foient fuffifamment li-
mées & ouvertes j ou que la carie en
foit détruite. On voit bien que les doigts
qui fe placent fur l\'extrémité de ces
dents, n\'y font mis que pour les fouic-
iîir & pour tenir la tête ferme.

Si l\'on opere à la mâchoire inférieure,.\'
la tète du fujet doit être appuyée fur le
doffier, & non plus fur l\'opérateui". Au
défaut d\'un fauteuil convenable , on
fait tenir la tête par un domeftique»
^\'opérateur fe place au côté droit au-

Civ

-ocr page 93-

\'I© Ds l^An du B&ntifie.
devant de la perfonne, & on fait de
même tourner la tête à droite ou à
gauche , félon que le cas l\'exige. On
tient auffi la lime autrement que pour la
mâchoire fupérieure : c\'eft par la foie
qu\'on la prend avec le pouce & le doigt
du milieu, & on porte l\'index fur un
des tranchans, tandis que le tranchant
oppofé, fépare les dents. En féparant les
incifives, les canines & les premieres
iBolaires , il faut porter le pouce de la
jîiain gaiiche fur la face antérieure qui
répond à la levre, tancpour abailTer cette
levre , que pour foutenir les dents.

Quand il s\'agit de féparer les grolfes
molaires j & que la perfonne a la bouche
petite , on fe met du côté oix.il faut
opérer ; on garnit bien la commiffure
des levres , & on fait fermer la bouche
aufuj\'et, de façon qu\'il ne refte d\'ou-
verture que pour laiffer à la lime la
liberté d\'aller & venir. 11 faut écarter
auffi ia commiffure des levres avec la
lirnej non avec le doigt ; quand elle eft
Lien enveloppée par la ferviette , on ne
l\'ifquepointdelableffer, & par ce moyen
on peut limer fans crainte i\'ufqu\'a la fa-
conde & dernière groiTe molaire, parce

-ocr page 94-

De VArt du Dentifte. S\'i
lacommifTure des levres prête da-
vantage , &:que le doigtqui fert à l\'écar-
ter n\'empêche pas la lime d\'être portée
entre les dents. On peut fe fervir encore
fi l\'on veut, de la lime coudée, dont la
figure eft gravée dans ie livre de M. Fau-^
char d. y y ai fait quelque changement,
& elle eft, aufti gravée dans mon ou-
vrage 5 avec quelques autres qui m\'ont
patu ies plus convenables pour féparer
6c raccoutcir ies dents, Pl. V. pag. 87.

Pour diminuer ia longueur des inci-
fives , des canines & des petites mo-
laires de latp.ichoirc fupérieure , ii faut
fe fervir d\'une lime un peu épaifie, bien
taillée & bien trempée. Le Dentifte fe
placera da côté droit : il tiendra la hme
de la main droite vers la foie avec le-
pouce & l\'index J tandis que ie doigt
majeur & l\'annuilaire feront étendus fur
le plat Se vers ie milieu de la lime ^
afin de lui donner plas de force, & que
la face oppofée morde mieux fur la
dent qu\'il faut diminuer à la mâchoire
fupérieure. On pafTe le bras gauche par
de\'fius la tête du fujet, pour relever là
levie avec l\'index de cetie main 5

-ocr page 95-

§1 DerAnduDentiJie.

le doigt du milieu fe pofe fur la face
externe de la dent pour la fourenir.

Quand les dents font affez près l\'une
de i^autre pour pouvoir mutuellement
le lervir d\'appui, il faut mener la lime
de droite à gauche , c^ de gauche à
droite, non pas de dedans en dehors ,
& de dehors en dedans comme le veut
M.
Fauchard. Mais fi elles font écartées
les unes des autres & déjà branlantes ,
Il tauc les limer avec une lime très-
douee, en remplir même les intervalles
avec de petits coins eu couIilTe, afin de
ne rien ébranler, & de pouvoir ôter fuf-^
lilamment de la longueur de ces fortes
de dent. Si elles font trop ébranlées
& trop douîeureufes , il vaut mieux
les racourcir avec les pincettes incifiyes
de la maniere que je l\'ai marqué.

Pour raccourcir les dents avec Ja lime
on ne doit pas changer de iîtuation. On
i-ait tourner la tête du fujet de la maniere
quii^ convient pour la commodité de
1 Uperaceur. _

Pour diminuer la longueur des inci-
lives, des canines & des petites molaires

-ocr page 96-

De VArt du Dentijîe. 11

de la mâchoire inférieure , ofi fe place
du même côté : on tient fa lime avec le
pouce & le doigt du milieu vers la foie
qwi eft fixée dans la paume de la main ,
^l\'index s\'étend vers l\'extrémité de la
iime, fur la face platte oppofée à celle
agir fur la dent. Par ce moyen elle
Kîord davantage ,
a plus de force &
caiïe moins , que quand elle eft emman-
chée comme celles de M.
Fauchard, Le
pouce de la main gauche eft pofé fur la
face externe des dents pour les foutenir
& pour abbaiffer la levre, &: les autres
doigts tiennent le menton.

Quand les dents font écartées ou
branlantes, il fatit obferver les mêmes
pofîtions que celles que j\'ai recomman-
dées pour la mâchoire fupérieure..

Au refte , quoique j\'aie indiqué, tant
pour le travail de la lime, que pour net-
toyer les dents, les fituations qui m\'ont
paru les plus commodes, il ne faut pas
toujours s\'y affiijettir, lorfque dans d\'au-
tres circonftances on en trouve de plus
convenables.

-ocr page 97-

É\'4 VArt du Dcntiftéi

Obfervatïon fur plufieurs incifives de là
mâchoire fupérieure ^ affectées de carie.

Made m\'01 selle étant âgée

de dix ans j avoit les quatre incifives
atteintes de carie dans leurs parties îaté-
raies; mais il n\'y avoir qu\'un Dentifte
qui pût s\'en appercevoir , parce que ces
dents étoient fort ferrées, & que le
iiége de la cariç étoit principalement â
leur face poftérieure. Cette carie étoit
d\'autant plus dilBcile à reconnoitre,
qu\'elle éroit de couleur jaunâtre : efpece
pourtant plus à craindre que celle qui eft
noire, en ce qu\'on rie l\'apperçoit ordi-
nairement que quand elje a miiié fore
avant, & que fes progrès font bien plus
rapides qae ceux de la noire qui fe
montre & fe découvre en naiflant. ^

Au mois de Juillet 1751 , je fus
mandé chez M. *** pour lui nettoyer
les dents, 11 me pria de voir en même-
tems Ja bouche de Mlle, de F***. A
l\'examen, je doutai d\'abord qu\'il y eût
de la carie. Pour m\'en affurer , je pris
an peu de coton que je fis entrer diw

-ocr page 98-

Be tJn duDentifle.
^es interftices avec un petit inftrument
propre à ôter Je limonqui s\'y trouveroir.
AuHî-tôr que
j\'eus reciré le coton , &
Ote le limon qui s\'y étoit attaché
, j\'ap-
Perçus que les parties latérales des
quatre incifives étoient jaunes. Je portai
mon attention à la face poftérieure , &
je remarquai que le fiége de cette cou-
leur jaune étoit fur les faces latérales du
corps de ces dents. Je dis alors qu\'elles
étoient gâtées , & qu\'il falloit emporter
la carie avec la lime. Madame R * * *
qui étoit préfente, me lailTa le maître de
faire ce que je jugerois
à propos. Je
féparai donc les quatre dents,
& j\'em-
portai totalement la carie ; j\'ôtai très-
peu de la largeur de ces dents, au moyen
d\'une lime très-fine qui n\'étoit taillée
que d\'un côté , & je les limai en glacis ,
c\'eft-à-dire , beaucoup plus fur la face
poftérieure où la carie avoit gagné le
plus de terreiuj que fur ia face anté-
rieure : je ménagai auffi la largeur de
ces dents du côté de la gencive , afin
qu\'eiles ne fe rapprochaffent pas, ce qui
les auroit pu faire gâter de nouveau. Or
fans le prompt fecours donné à çe?

-ocr page 99-

s s An du Bentifie.

dents, je fuis perfuadé qu\'à douze ans
il n\'y auroit point eu de relTource ; parce
que Ja cane auroitété fon chemin,
ÔC
auroit pénétré fort avant, j\'ai fait de
pareilles opérations à des enfans encore
plus jeunes.

-ocr page 100-

; - ^ " V,

■Î.V-

-ocr page 101-
-ocr page 102-

DcrArtduDenûp. 87

explication

DELA

CINQUIEME PLANCHE.

î^ig. L IME qui fert à féparer & à
(Ouvrir Vintcrfilce des dents , vue par la
P^^is large de fes deux furfaces.

Fig. 1L Lime plus petite & moins
^paljje , pour le mîme ujage.

AAAA. Les dentelures en forme de
fleh

B. La foie qui fert à les monter fur
^^ manche dont on peut néanmoins fe
Pilfer,

fig. III. Lime coudée pour féparer &
^\'ivrirdans leurs Interftkes , la dernière &
^ pénultieme grojfe molaire.

C. Sa tige,

D . Ses dentelures". .

E. Le bouton qui Vempêche de piquer la
longue ^ ^ de fortlr dans rinterfiice des
dents.

F. Le manche.

G. Lmpetite yls.

-ocr page 103-

I g De V Art duDcnûfie.

Fig. IV. Petite lime taillée au cifcau
^n deux fcns 3 pour achever d\'ouvrir on
de féparer certaines dents.

Fig. Vi Lime taillée de même , mais
bien plus grande & plus épaijje.

Fig. VI. Moyenne lime de même efpece.

Les deux dernieres fervent principal
hment
cl limer, a raccourcir les dents trop
longues 3 & quelquefois à emporter la carie
qui fe trouve entre les molaires.

H H H. Ze corps de chaque lime garnie
de dentelures.

Ill H L Les dentelures qui fervent
^ujfi à ouvrir certaines dents.

K K K. La foie de la lime.

explication

-ocr page 104-

k -^-x/

•■♦s-i p

r

JF-f"

- ^ ** 1

-ocr page 105- -ocr page 106-

De VAn du Dentifte.

EXPLICATION

DE LA
SIXIEME PLANCHE.

Contenant quatre inftrumens propres
à détruire & à emporter la carie
des dents.

Fig. L J\\ u GI N JE en forme de Trois-
quart 5 qui\'fert à ébifelUr & à détruire la
carie de certaines dents.

Fig. IL Rugine en forme de bec dê
perroquet , mais un peu moins courbe.

Fig. ni. Rugine femblable , mais un
peu moins grande.

Fig. IV. Petite rugine prefque droite^
Les trois dernieres rugines vues latéra-z
iemtrit.

A A A A. La tige de chaque injtrii\'!^
Vient.

BBBB. Le manche.
CCCC. La pointe recouroée de chucnrA
D. Vextrémité du Troifquart.
Tome Ht H

87

-ocr page 107-

De TAn du Dentijîe.

V.

Précautions à obferver avant que de plom-
ber les dents ; maniere de les bien
plomber - accidens qui peuvent furvenir
aux dents , lorjqu elles ont été plom-
bées mal-à-propos , moyens d\'y remé-
dier.

u A N D une dent fe trouve gâtée
fans avoir fait aucune douleur, & qu\'on
mange très-bien deffus, il fauc alors la
remplir de piomb ; mais auparavant il
eft néceffaire d\'ôrer les parties molles
avec unerngine , &\'enruire d\'introduire
<ians la cavité un peu de coton , pour en-
lever les particules de carie qu\'on a déta-
chées de ia dent ^ & qui peuvent y être
xeftées. On promene îe morceau de co-
ton dans cette cavité , on en change une
ou deux fois, &on laiffe le dernier dans
le trou , jufqu\'à ce qu\'on foit prêt à y in-
troduire le plomb. Toutes les fois qu\'on
veut plomber une dent, il fauc n\'en
tirer le coton que dans l
\'inftanE où l\'on
ya y
mettre le plomb, afin de mieii^î

-ocr page 108-

Be r Art du Dentific, t.

fôcher le trou , & qu\'il n\'y rcRc aucune
humidité. Lorfqu\'une dent efl: plombée
de cette maniéré , avant qu\'elle caufe
de la douieur , & que le irou eft exac-
tement bouché 5 on peut la garder toute
ia vie, quand ce feroit même à la mâ-
choire-fupérieure.

- II faut obferver que quand la carie a
fon lîége dans les parties latérales , ou
doit avant que de les plomber ,"~les ou-
vrir fuffifamment , pour bien faire Pope-
ration. L^étaîn fin vaut beaucoup mieux
que le plomb. Quand il fe trouve quel-,
que excroifïance de gencive qui pour-
roit empêcher de plomber la dent , il
faut la couper , & attendre que le fang
foit tari.

Lorfque la carie dans les incifives ^
dans les canines. & dans les petit;es
molaires eft parvenue jufqu\'à découvrir
le canal ; ou fi l\'on craint en emportant
la carie avec la lime de trop affoiblic
^a dent , il faut s\'en tenir à la plomber.
On fait donc une placé convenable pouc
^a garnir fuffifamment y enfuite on
enlevé avec la rugine toutes les parties
affectées ; après quoi l\'on remplit 1©
^î^ou, non avec de l\'écain ou du plomb 3,

-ocr page 109-

/

çX De rAn du DentlJîe:

mais avec des feuilles de l\'or le plus fira
qu\'on fait battre exprès. Chaque fois
qu\'on les employe, on les fait chauffer
fui- une pelle. Les feuilles d\'or dont fe
fervent les doreurs font beaucoup trop
minces , il faut que les nôtres ayent plus
depaiiTeur. L\'or quand il eft doux , bien
battu,- & qu\'on a foin de le chaiifrer ,
tient tout auiîi bien que l\'étain ; il a de
plus l\'avantage de ne pas noircir j & de
ne point altérer la couleur des dents.

Quand ies dents fîtuées à la partie
antérieure de la bouche fe gâtent fur ks
faces antérieures, comme cela arrive
quelqtiefois , pour les garnir ^ il faut
encore préférer l\'or au plomb & à l\'étain,
Lorfqu\'en ôtant les parties molles &
cariées d\'une dent avec la rugine , cette
dent fe trouve trop fenfible, & qu\'en
bourrant le coton , le fujet reffent une
douleur fourde , il faut, avant que de
plomber fa dent, porter le bouton de
fea, &: le promener dans toute l\'éten-
.Gue de la carie , tant pour la deffécher
& en arrêter les progrès , que pour ôter
la fenfibiiité de la dent. On réitéré cette
•application une ou deux fois plus oa
s^xioins , felon l\'exigence des cas. Il

-ocr page 110-

De l\'An du Benùfie. m

svrive queiqiiefois qu\'en nettoyant de
toutes les traces de carie , une dent
gâtée , ia rugine découvre ou pique le
cordon dentaire : alors il faut für le
champ le détruire avec le bouton de^
feu , la dent fe plombe avec fac--
cès. Quand une\'deiuqui eft peugârée\'-
fait de la douleur, quoiqu\'on ne puiiTe
pas manger delTus, & qu\'elle foit fen-
fibleau chaiîd & au fi\'oid, fi d\'ailleurs-
elle ne produit point d\'accident ,_il
faut encore fe contenter d\'en détruire
les parties fenfibks , avant que de la-
plomber.

On s\'imagine eommiinémenr qu\'lln®^
dent gâtée n\'a befoin d\'etre plombée
que quand elle fait de la douleiu-. Suc
cette idée, on vient toujours à l\'ex-
tfémité trouver le Dentifte, & l\'on veut-\'
faite plomber fes dents , lorfqu\'on
ne neut plus fupporter les maus qu\'elles
caufenr. On (e %ure a)ors, que quand\'
la dent tnalade fera bien lîouchée, eïie
iîe fera plus de douleur , parce que Taie
ne frappera plus le nerf qui fait la fenft-
bilité.

Mais un Dentifte expérimenté verra-
aien fi l\'opcration doit foiilager le ma-;

V

-ocr page 111-

De t An du Dcntijle,
lade. Ordinairemeuc quand une denE
extrêmement fenfîbie eft plombée
j les
douleurs loin de diminuer augmentent,
parce que le plomb comprime le nerf,
ou, s\'il n\'eft pas comprimé , la caufe qui
agit furie nerf ne ceiïant point de l\'irri-
ter les douleurs fubfiftent toujours.
Ainli quand elles celfent, après que la
dent ,eft plombée , c\'eft que l\'humeur
eft adoucie , ou qu\'elle s\'eft portée ail-
leurs , & que le nerf n\'eftplus irrité pair
aucune autre caufe intérieure, & non
l\'effet du plomb.
En un mot, quand oji
?lombe une dent dotdoureufe , & fur
aquelle on ne peut manger , non-feu-
lement op en tire peu ou point du tout
de foulagement J mais encore on s\'ex-
pofe à des douleurs bien plus vives oc-
cafionnées par la préfence du plomb qui
comprime, comme je l\'ai dit, les par-
ties nerveufes reftées à découvert. Mais
que d\'avantages au contraire on fe pro-
cure, en faifantplomber fes dents apro-
pos ! On arrête les progrès de la carie j
on empêche les alimens d\'y entrer j la
dent plombée ne rend plus d\'odeur,
Ôc
ne
peut plus gâter fes voifines , ce qui
n\'auroit pas
manqué d\'arriver £ l\'oij

-ocr page 112-

BsTArt du De^îe.
i^\'eûc ra\'rêté ie cours de la Hrie. Enfin on
fortifie par-là les tlenrs creufes , & le
plomb empêche qu\'elles ne fe calfent fî
facilement en mangeant delfus.

Les inftrumenS qui fervent à plomber
les dents , font de plufieurs efpeces.
Î1
y en a trois pour les caries qui font
aifées à remplir. Le premier , qui eft le
fouloir introducteur, fert à introduire le
plomb , & à remplir exadfement le trou
de la dent. Le fécond fouloir, oii le
plomhoir perforatif, fert à percer lê
plomb J & à le piquer , après que la den£
eft
remplie, afin qu\'il s\'infinue dans
tous les coins & recoins du trou de la
dent J qu\'il la bouche parfaitement, &
fe contienne bien. Le troifieme eft le
fouloir, ou
plomhoir en équierre : celui-ci
fert à unir , à polir, à pre (fer & à mou-
ler le plomb dans le trou de la dent.

Il y a quelquefois des dents ôellemens
Cariées & trouées de façon , qu\'avec

les trois inftrumens il ne feroit pas pofr-
fiblc d\'y faire jenir le plomb : il fauE
alors varier la forme de ces inftrumens,
ce qui fe fait en leur donnant plus oa,
nioins de courbure, vers leur pointe^
^infi que plus ou moins d\'épaiifeur.

-ocr page 113-

fê .î)^Aft duBcnûjle,

Un Dencme doit donc en avoir de
différentes formes, «en équierre , en bec
de perroquet, ou applatis du côté de la
courbure, & en un mot de tout calibre.
Lorfqu\'on eft: bien adbrti,on peut plom-
ber toutes fortes de dents en plomb,
en étain , ou en or , fuivant que le cas
l\'exige. Voici la meilleure maniéré de
plomber.

Après avoir exaétement porté les
parties molles & cariées de la dent ,
lorfqu\'elle eft devenue infenfible tc
qu\'on peur manger delfus librement ,
on ôte de la main gauche avec une ru-
gine le coton qu\'on vient d\'y introduire f
on tient de la droite le plomboir , qui
eft chargé de plomb ou d\'autre métal
roulé vers l\'extrémité de l\'inftrument.

Aufli-toc que ie coton eft ôté , on fe
débarraffe de ia rugine ; enfuite on porte
fur la dent le plomb qu\'on tient de la
main gauche ; tandis qu\'un des doigts de
l\'autre main bailTe la levre , la relâche ,
ou en écarte les deux bards, fuivantla
dent que l\'on garnit, & on fait entrer
peu-à-peu avec le fouloic le plomb dans
îe trou. On en remplît bien d\'abord le
fond jufqu\'aupius petit
recoin, & en

foulane

-ocr page 114-

Be VAn du Denûjle. 57
foulant on continue de le combler entié-
reinenr. Quand le plomb excede le rrou,
quoique plein , on le mer au niveau à
force de le preller avec i\'iuftrument, on
ôte le faperrlu delà feuille,, & on quitte
l\'introducteur pour fe fervir du fouioir
perforatif. Avec ce dernier inftrument,
o i larde le plomb en plufieurs endroits
avec affez de force : après quoi on re-
preîid le premier outil j ^our fouler &
preiFer de nouveau, & de cette façon on
bouche tous les petits trous que l\'on
Vient de fiire. Par-là le plomb fe moule,
s\'unit, & s\'engage mieux dans toutes les
^iiuiofitcs de ia dentcreufe. Enfin, on
quitte encore une fois cet ourii, pour
prendre le fouioir en équerre, ou quel-
que autre inftrumejit propre à unir & à
polir iafurfice extc&ieure du plomb,"afin
qu\'il n\'y refte aucune inégalité.

Il faut avoir foin que le piomb ne dé-
borde pas le niveau du trou de la denr ,
afin qu\'il n\'incommode pas j que l\'on ait
la liberté de palfer la plume dans les
parties latérales de îa dent plombée , &
que le mouvement de la mallication ne
dérange pas le plomb.

La fituation du Dentifte , pour plomW
Toms IL l ^

-ocr page 115-

f,8 De l\'An du Dentïjle.

ter , eft à-peu-piès la même que pour
nettoyer les dents. La perfonne dosr
être aiÏÏfe la tête appuyée & bien ftable,
mais qu\'on fait lever , bailfer & tour-
ner , fuivantque la commodité l\'exige.
Le Dentifte peut cependant , ^ comme
nous l\'avons déjà dit, changer à fon gré
de fituation : il eft même à propos &
iiéceilaire dans plufieurs cas qu\'d foit
ambi-dexcre , afin de pouvoir opérer avec
plus d\'aiiance & d\'adrelTe. Quand le
plotTib ne îiént pas bien dans une dent,
il ne faut que le retourner, & enfuite le
bien fouler : il eft rare qu\'en le chan-
oeant ainfi de côté, il ne s\'ajufte.pas a
Fa dent. Si ce changement n\'opere rien ,
il faut ôter le plomb, 5c en remettre
d\'autre ; m.ais auparavant
il eft^ bon
de piqusr avec la rugine les cavités qui
font
trop lifies, trop unies, ou trop peu
profondes , afin que le plomb, rencon-
trant de oetites inégalités, fe maftique
mieux. Car, quand le plomb n\'eft pas en
quelque forte incorporé dans la dent,
îôrfqu\'il y remue feulement, la dent fe
pâte de nouveau par la pénétration &
pu- le féjour, foit de la falive, fou du
imon , ce qui espofe aux mêmes acci-

-ocr page 116-

De TAn du Dentifte. 99
dens que fi elle n\'étoic pas plombée.

Quand on plombe les incifives , ou
les dents voifines, il faut le plus que
l\'on peut faire entrer le plomb dans le
canal dentaire; pour peu qu\'il foie à dé-
couvert J le plomb ou l\'or y eft bien
mieux retenu.

Quoique le plomba l\'étain & l\'or
foient d\'un grand fecours pour confer-
ver les dents, & pour empêcher qu\'elles
ne caufent de la douleur , il arrive
cependant quelquefois qu\'une denc
plombée , après
avoir .été des années
emieres fansfeire atrcun mal 5 caufe tout-
à coup des douleurs très-vives. 11 eft
queftion alors de calmer l\'inilammatioa
du périofte ou des nerfs : il faut donc
fi la fluxion l\'exige, faire aufli-tôc fai-
gner le fujet , & lui fiire faire ufage
d\'eau de guimauve tiede, qu\'il gardera
dans fa bouche du côté malade ; ce pe-
tit: bain fera réitéré plufieurs fois.
Si la
douleur ne fe paffè pas, on prendra le
parti d\'ôter le plomb, & le malade
fera foulagé, fi c\'eft le plomb qui com-
prime îe cordon, lequel en fe gonflant
s\'eft porté de fon côté. Quand les dou-
leurs font totalement paffées 5 &c que la

-ocr page 117-

I oo De l\'An du DentlJîe.

denr peut être livrée à fes fonétions or-
dinaires , il faut la replomber de nou-
veau. On fait que toutes nos parties
font fujettes à des embarras & à des
engorgemens : ainli on ne doit pas s\'é-
tonner , qu\'une dent plombée depuis
long-tems caufe de la douleur , puifque
nous voyons les dents les plus faines
être fujettes aux mêmes inconvéniens.
îl en eft de même, lorfqu^on plombe une
dent qui eft encore fenfible , ou avant
qu\'on ait détruit le nerf. Cette même
dent, peu de tems après , devient ex-
trêmement douloureufe , ôc on ne peut
foubger le malade qu\'en étant le plomb,

II ne faut donc alors replomber la deiiC,
qu\'après avoir détruit le nerf.

J\'ai vu beaucoup de perfonnes dont
ies dents étoiens gâtées depuis bien du
temsj mais ne leur faifoient aucun mal,
qui après les avoir fait plomber, fans
feutir aucune douleur, & feulement pour
empêcher que ie féjour desalimens n\'y
causât de mauvaife odeur, reiTentoient
bientôt des douleurs cruelles. Le mal
s\'appaifoit, lorique" îa dent étoit dé-
plombée , parce que l\'abfence du plomb
laillbit une iilue libre à la matiere fé-

-ocr page 118-

De tin âtt Denûjte. ï o î
l\'eufe, dont l\'interceptioncaufolt ce dé-
sordre, Il m\'eft arrivé pitis d\'une fois de
plomber de ces fortes de dents, qui ,
dès le lendemain, fefaifoient vivement
fentir ; & quand j\'ai cherché la fource
du mal J j\'ai toujours trouvé qu\'il pro-
yenoit de la ftagnation du fluide qui
étoit renfermé fous le plomb. Ce fluide
ne s\'amaffe ainfl &ne fiic de telles dou-
leurs 5 que parce que le plomb, en bou-
chant exadement le trou de la dent,
l\'empêche de fuinter & de s\'échapper
par l\'extrémité des petits vaiffëaux du
cordon qui font ouverts & retirés vers le
fond du canal.. Or, quand je plombe une
d.\'nt mfenlible qui devient douloureufe
un ou deux jours après, je perce le
plomb avec un ftilet jufqu\'à ce que j\'aie
atteint le canal. Je fais jour par ce moyen
au fluide, qui par-là reprend fon cours
& s\'écoule librement, ce qui fait ceiTèi-
la douleur. La dent de cette façon
n\'eft pas déplombée , & Ton peur con-
tinuer à manger d efl us, fans qu\'il y en-
tre aucun aliment. Au refte, ces acci-
dens ne font pas ordinaires, & n\'arri-
vent même que rarement. Cependant
je fuis perfuadé que plufieurs de mes

I iij

-ocr page 119-

î oz De VArt du D entiße.
Confreres ont vu la même chofe que
moi, & qu\'ils y ont trouvé le remede;
mais comme aucun de nos Auteurs, au
moins que je fçache, n\'a parlé de ce cas-
là , j\'ai cru ne devoir pas l\'oublier dans
un ouvrage où je m\'attache à ne rien
négliger d\'elfentiei. Les Obfervations
qui fuivent confirmeront, je crois j mes
principes.

Observation L

M. * * * Oculifte, avoit une premiere
grolle molaire à la mâchoire fupérieure,
qui, quoique extrêmement gâtée, de-
puis long tems ne lui faifoit aucun mai,&
fur laquelle il mangeoitbicn. Mais com-
me il entroit chaque fois quelques reftes
d\'alimens dans la cavité faites par la ca-
rie^ l\'impatience qu\'ils lui caufoient ie
fit réfoudre à faire plomber fa dent. La
dent plombée, dès ie lendemain il fen-
tit de vives douleurs ; il fat obligé de
faire ôter le plomb & d\'abord il fut
guéri. Quelque tems après, attribuant
le mal que lui avoit fait fa dent à quel-
que autre caufe, il la fit encore plom-
ber y mais il arriva la même chofe que la

-ocr page 120-

Tie t Art du Demijle. 105
premiere fois ; ii fut encore obligé de
faire déplomber fa dent, & il la garda
ainfî pendant quelques années. Enfin
il s\'adrelfa à moi, & comme je crus que
fa denc avoit été plombée à coiltre-
t€ms_, je la plombai de nouveau. Je n\'y
trouvai pas la moindre fenfibilité, & ce-
pendant , dès le lendemain de l\'opéra-
tion , elle lui fie autant de mal qu\'aupara-
vant. II me vint retrouver pour me faire
Oter fa dent, & je fus obligé de céder
à fon impatience. Si j\'avois alors per-
foré le plomb , pour donner du jour au
fluide retenu dans le canal dentaire, il
auroît été guéri fans être privé de fa
dent : mais il ne voulut point effàyer
cela J & il voulut abfolument que fa
dent fût ôtée.

Obseiivation îî.

M. ^ * *, frère du Commandant de la
Milice de Corbeil, avoit aufli une groffe
molaire à la mâchoire fupérieure qui ne
lui fa i foit aucun mal, & fur laquelle il
mangeoit fort bien. Je la lui plombai,
mais le lendemain elle lui fit de très-
grandes douleurs. Il revint pour fe la

1 iv

-ocr page 121-

I04 BeVArt du Denûfie.
faire ôfer, ce que je ne voulus point fai-
re : je me contentai
de percer !e plomb ;
il en fortit quelques gouttes de férofité,
& s étant trouvé guéri peu de jours après,
fà dent eft reftée plombée.

Observation ÏH.

M. * * Employé à îa Pofte , avoic
une petite molaire à la mâchoire infé-
rieure, que j\'avois plombée en 1748,
lans
y trouver aucune fenfibiiité, & fur
laquelle il mangeoit bien. Elle étoit ref-
îée cn cet état jufqu\'en 175 a : mais cette
même année, dans le inois d\'Avril, elle
lui fit des douleurs très-aigues. Comme
il croyoit que c\'étoit une fluxion , il
foufFrit afTez patiemment pendant cinq
jours ; mais le mal devenant opiniâtre ,
il vint chez moi pour me confultcr fur ce
qu\'il y avoit à faire. Ayant examiiié tou-
tes fes dents, je trouvai la petite mo-
laire en queftion exrrêmement relâchée,
8c fa gencive fort gonflée. Comme le
plomb n\'étoit pas dérangé, par les quef-
tions que je fis au malade & par fes ré~
ponfes, je jugeai qu\'il y pouvoir avoir
un dépôt dans le canal de la dent fous le

-ocr page 122-

DctAnduDmûJle. 105
plomb , entre l\'alvéole & la racine , &
qu\'il fe porcoii du côté de la gencive. Je

ne fus pas trompé dans mon pronoftic :

car , auifi-tôc que j\'eus ôté le plomb, il
fortit du canal un pus d\'abord très-loua-
ble , & enfuite fanguinolent. En preifanc
la petite tumeur qui étoit fur la gencive,
la matiere affluoit hc fe dégorgeoir par
la cavité de la dent que bouchoit le
plomb.

il falloit que les trous, qui font à l\'ex-
irémité des racines & qui donnent paf-
fage aux vaiffeaux dentaires , fuifenc ici
confidérables -, puifquen appuyant fut
la tumeur, la matiere épanchée pafloit
par ces trous, & venoit fortir àj\'cxrré-
mité de ia dent par celui qui étoit plom-
bé. Quoi qulii en foit, cette opération
fit difparoître la tumeur. J\'intrcduiiis à
plufieurs reprifes du coton dans le ca-
nal, jufqu\'à ce qu\'il en fartû fec. Après
cela , je recommandai au malade de rin-
cer fa bouche plufieurs fois le jour avec
du vin tîîiellé, de manger deifus le plu-
^tôt qu\'il pourroit , & quand il y man-
"geroit, de revenir me trouver pour ku
replomber fa denr. Il revint en effet le
iicuvieme ou dixieme jour, & fa denc

-ocr page 123-

JôS De VAn du Dentijîe,

fut plombée de nouveau avec tout îe
fuccès poffible. Il la garde depuis ce
tems-ià , fans qu\'elle lui caufe aucune
douleur , & il n\'y a pas d\'apparence
qu\'elle lui en faffe davantage j parce
que le pus, en fe formant & en féjour-
nant dans le canal, a détruit totaletnenc
le cordon & les membranes qui l\'en-;
velopoient.

-ocr page 124-

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V*

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-ocr page 125- -ocr page 126-

Del\'Jn duDentiJlc. Î07

EXPLICATION

DELA

SEPTIEME PLANCHE.

Contenant cinq inftrumens propres ï
plomber les dents.

Fig. î. Fouloir introducieur moujfe qui
fert d faire entrer le plomb dans prefque
toutes
les cavités qui peuvent fe faire aux
dents, ,

Fig. ïf. Fouloir introducieur très-
pointu fervant à introduire le plomb dans
^es plus petites cavités j ainfi qua k pi-
quer & à le fouler dans certaines dents
cariées, pour Vinfinucr folidement dans
tous les coins & recoins. ^

Fig. ill. Autre fouloir introdu^eur a
douhfè courbure , pour le même ifage &
pour certaines
dents qui font gâtées dans
leurs interfaces,

Fig. IV. Autre fouloir introducteur pour
porter le plomb dans
Us plus petits trous
de ces interftices.

-ocr page 127-

î o§ De VAn du Dentïjîe.

Fig.\'V. Plomhoir ou brunijjoir qui fert
à fouler & à brunir où polir le plomb.
AÂAAA. La tige de chaque injîrument,
BBBBB. L.e manche.

C. L\'extrémité moujfe du premierfouloir,

D. V extrémité pointue dufecondfouloïr»

E. r extrémité du fouloir à z courbures,

F. U extrémité du quatrième fouloir.

G. La tète du brunijfoir.

H. V extrémité du même inftrument.

-ocr page 128-

De VArt du Denûflc.

§. V I.

De la maniere de cautérifer les dtnts.

Les dents qu\'on peut cautérifer avec
fuccès, font les incilîves & les canines,
quand le canal eft à découvert, parce
qu\'elles n\'ont qu\'une feule racine ar-
rondie.

Cette opération réuffit moins fur les
petites molaires de la mâchoire fupé-
rieure , parce qu\'elles ont une racine
applarie , & même allez fou vent deux.
Or J le canal de ces dents eft quelque-
fois partagé en deux, 5c de plus fi
étroit qu\'il ne permet pas au caucere ,
quelque fin qu\'il foit, de pénétrer aîTez
avant pour pouvoir biuler le nerf. Les
grolfes molaires , aufli fupérieures , ont
pour l\'ordinaire trois racines fore écar-
tées J ainfi fort foiivent la carie ne dé-
couvre que le trou d\'une de ces racines,
de façon que le canal où loge le nerf ne
peut être atteint par le cautere que par
un petit trou très-fin : le nerf ne fera
donc brûlé qu\'en partie, & quand il le

109

-ocr page 129-

110 De l\'An du Denûjîe,

feroit tout-à-fait, les nerfs qui parcou-
rent les autres racines, ayant
communica-
tion avec le nerf cautétifc, peuvent s\'en-
flammer encore davantage par l\'irrita-
tion & enflammer les autres, ce qui
peut produire une fluxion ; ou fi
après
l\'opération le mal vient heureufement à
cefTer, il faut attribuer la guérifon à
l\'inflammation du cordon qui tombe en
pourriture, ou à toute autre caufe qu\'au
cautere. Mais il arrive aifez fouvent que
le malade, après plufieurs applications
du cautere, foulfre tellement, qu\'il
faut
tivoir recours à d\'autres moyens pour le
gu4rir.

Les petites molaires de la mâchoire
inférieure fe cautérifent bien , mais il
n\'en eft pas de même des greffes mo-
laires de cette mâchoire. Il ne faut donc
pas appliquer indiftinclement le cautere
à toutes les derus, pour ôter une dou-
ieur vivSj puifqa\'au contraire il
ne fait
fouventque l\'augmenter. Mais on doit,
comme je l\'ai dit, le rcferver pour les
incifives & les canines fupérieures , ôc
pour les petites molaires inférieures J oil
il fe pratique avec fuccès.

Le cautere convient encore , ainfi

-ocr page 130-

I î î

De r Art du Dentifte, ^
que je l\'ai obfervé , pour rendre infen-
fible une denr d\'où l\'on vient d\'ôter la
carie, lorfqu\'elle n\'a point encore fait de
douleur,
Ci ce n\'eft dans le moment de
l\'opération, & qu
\'il n\'y a que cjuelques
filets qui fe diftribuent dans le corps
fpongieux , fans que le principal nerf
qui les fournit foit encore d découvert.

On retire deux avantages du bou-
ton de feu, ou cautere
ac5tuei : le pre-
mier eft de
con fumer les parties feniiblcs
dans toute la
cavité de la dent^ ce qui
fait qu
\'on la plombe enfuite avec plus
de sûreté & de fuccès ; !e fécond eft de
deftécher & d\'arrêter la carie, On em-
ploie encore utilement le caurere ac-
tuel , quand une dent qui s\'eft\'caffée
dans l^\'extraétion n\'a plus de couronne ;
Car on détruit par fon moyen la
fenfibi-
lité que caufent à cette partie les cor-
dons nerveux c]ui font quelquefois fi
gonflés
5c fi découverts, que \'a langue,
les boiffbns, ou autres alimens ne fau-
foient y aborder, fans faire beaucoup de
douleur. Or,
en brûlant toutes ces par-
ties découvertes, on les rend parfai-
tement infenfibles.
Lorfqa\'une dent eft
sinfi
dénuée de couronne , Se qu\'on ne

-ocr page 131-

ï I z De rAn du DentlJîe.
peut dans le moment ôter les racines, il
arrive quelquefois que les vaifTeaux ou-
verts produifent une hémorragie confi-
dérable : on l\'arrête plus fûrement par
le moyen du cautere, auquel on joint
les aflringens convenables.

Les caureres, propres pour les dents
découronnces, doivent être larges avec
un bouton applati , & à-peu-près du vo-
lume d^ une groîTe lentille. Ceux qui fer-
vent à deilécher les caries, doivent
être gros & ronds comme un grain de
chénevi , plus ou moins, fuivant le dia-
mètre des trous ou il faut le fiire entrer.
Ceux dont on fe fert pour les dents de
devant, font des aiguilles à tricoter que
l\'on amincit & que l\'on çourbe , fuivant
ia difpoficion du canal de la dent où il
faut le porter pour en détruire le cor-
don. Voici la maniéré de procéder dans
l\'application du cautere.

Après qu\'on a enlevé avec la rugine
toutes les.portipns de carie, & cela juf-
ques dans le canal que l\'on met à décou-
vert pour faciliter l\'entrée du bouton,
on elfuie bien la cavité dc Ja dent ,
on la remplir de coron; on fait enfuite
chauffer le cautere à fa portée fur un ré-
chaud

-ocr page 132-

D& VArt du Dentijîe. ï i ^
chaud de feu, & pendant qu\'il rougit,
on garnit avec une ferviette les parties
qui pourroient en être o (Fon
fée s , com-
me les levres & les joues. On a auffi une
cuiliiere pour garantir la langue, que
l\'on couvre , & on la fait tenir par un
Domeftiqoe : mais cette derniere pré-
caution n\'a lieu que pour les gr/oiîes
molaires ; car^ quant aux inciiîves, aux
canines & aux petites molaires, une
ferviette faffit pour les garantir. Quand
le cautere eft affez chaud, après avoir
pris toutes les précautions convenables,
on ôce le coton du trou avec la main
gauche j & on y porte roui de fuite le
bouton de feu avec la main droite; il
ne faut pas le laifter long-tems dans la
dent, parce qu\'elle fe féleroit. On fait,
s\'il eft nécelfaire, pluiieurs applications
fucceinvemenr, en portant le bouton
de feu dans le canal le plus avant qu\'il
eft poffible. Lorfqu\'on a bien brûlé le
cordon , ou introduit au fond du canal du
coton trempé dans une elfence, ou d\'autre
liqueur, & on l\'y laiffe plufieurs jours >
jufqu\'à ce que la dent ne faffe plus au-
cune douleur : alors on ôte le coton,
& l\'on garnir le trou de la dent. 11 fur-

K

Tome II.

-ocr page 133-

114 De l\'An du Denûfie.
vient quelquefois une petite fluxion, que
l\'on diffipe ordinairement avec de l\'eau
de guimauve : quand elle efl: opiniâtre
& que le malade eft replet, on fait une
faignée. S\'il n\'eft queftion que d\'ôter une
îégere fenfibilité, & de defl^écher le
trou de la dent, il faut alors j en ôtant
le coton, pour abforber l\'humidité, y
porter tout de fuite le bouton de feu, &
le promener dans toute l\'étendue de la
cavité , fans cependant Py laiffer trop
long-tems. On réitéré, s\'il eft befoin,
deux ou trois fois la même chofe , & on
plombe la dent de la même maniéré
que je l\'ai marqué.

Lorfqu\'il s\'agit de brûler & de dé-
ti\'uire les parties fenfîbles,ou l\'extérieur
du cordon d\'une dent découronnée^n
met de même du coron pour abforber le
fang, enfuite on y porte le bouton de
feu bien rouge, & l\'application fe répété
autant de fois que le cas l\'exige.

Voyez différens cauteres à la planche
deuxieme du premier volume.

-ocr page 134-

De l\'An du Dentijlel 115

§. VIÎ.

De r extraction des Dents.

L\'opération de l\'Arc du Den-
tifte la plus aifée en apparence, parce
qu\'elle eft la plus fami iere, eft celle
d\'ôter les dents. Cette opération j dont
fe mêlent une infinité de gens fans prin-
cipe & très-étrangers dans notre Arc j
a néanmoins fes difficultés. Mais comme
je n\'écris que pour les Dentiftes, je meré-
duis ici à traiter de l\'ufage des inftrumens
nécelTaires pour l\'extradion des dents
en quelque état qu\'elles puiffent être.

Lorfqu\'une dent eft totalement gâ-
tée , ou qu\'elle produit de ces accidens
dont on ne peut arrêter le cours que par
le retranchement de la caufe, il faut ôter
cette dent fans aucun délai.

L\'extirpation de certaines dents eft
quelquefois très-difficile , foie parce que
leurs racines font mal conformées, cro-
chues & fort écartées l\'itne de l\'ajitre ;
foit parce que la csrie les a trop minées,
ou ciu\'elles fe trouvent mal fituées. Les

Kij

-ocr page 135-

11 (î" De rAn du Dentijle,
dencs de fagefTe de la mâchoire infé-
rieure font principalement fujettes à
cette mauvaife poiition. Quand elles
n\'ont pas une place fuffifante , elles font
comme arcboutées auprès de l\'apophyfe
coronoïde ; la mâchoire en cet endroit
efl fort épaiffe, & la dent pour l\'ordi-
naire efl beaucoup plus penchée vers
la langue que vers la joue : enfin elle
ne fort prefque point, & efl prefqu\'en-
tiérement couverte par la gencive. Il
y
a donc de ces fortes de den\'s qu\'il n\'eft
pas poffible d\'ôter, ni avec le pélican ,
ni avec le davier. II faut fe fervir alors
du pouftoir , & voici de quelle maniéré.
On pouffe avec l\'inftrument ces dents
peu-à peu, & on les fait fortir du côté de
la langue, où l\'alvéole étant plus mince,
fait toujours moins de réfiftance.

M. Fauchard veut qu\'avec une mafTe
de plomb, on frappe fur le manche du
pouffoir, pour lui donner plus de force;
mais l\'inconvénient de cette invention
eft fenfible. Le coup du plomb doit né-
cefTairement caufer à la tête & même au
cerveau une commotion, qui n\'eft pas
feulement douloureufe , mais qui peuc-
encore avoir des fuites. Quand on ren-

-ocr page 136-

De tAn du Denûjle. 117
Contre une pareille dent, on n\'a befom
que dti pouffoir , fans autre fecours, ^
force du Dentifte fuftît, fur-iout pour
peu qu\'il y ait de fluxion.
Car, alors il
^e fait un gonflement plus ou moins con-
fidérable au périofte qui enveloppe les
racines : cette membrane en fe gonflant
dilate l\'alvéole , & la dent fe trouve_ re-
lâchée, ce qui en rend l\'extraétion aifée.
C\'eft pour cela que dans tous les cas ou
^\'on a des dents difficiles à ôter, i! faut,
s\'il eft poilible, y appliquer un fil que
^\'on arrache aux dents voifines : la pré-
fcnce de
ce fil produit an engorgement
^ant à la gencive qu\'au périofte, ce qui
^ait dilater l\'alvéole.

Le levier à courbure que M., Moutotî
^ imaginé, & auquel
j\'ai ajouté deux
^^\'ochets, l\'un pour le côté droit, l\'autre
pour le gauche, convient bien pour les
dents dont nous parions. On applique
levier en dedans , à la face oppofée de
<^elle ou s\'attache le pélican , & il ren-
\'^\'-rfe la dent du côté de la langue , com-
î^ie le pélican la renverfe du côté de la
^oue. U faut que les crochets aient la
forme d\'une manivelle : l\'extrcmité de
^\'iirftrunient fait par ce moyen vers la

-ocr page 137-

1 18 De l\'Art du Demijle.
langue le même office que le pélican
fait du côté oppofé , & fon point d\'ap-
pui, au lieude fe faire fur la dent même
c]ue l\'on ôte, fe fait fur la face intérieure
de la quatrième molaire vers la langue.
Après avoir appliqué fur la dent malade
le levier courbe, on l\'accroche vers ia
joue ; on tourne enfuite le poignet &
rinftrument de dehors en dedans , &
à rirsftant ia dent eft renverfée du côté
de la langue. Cette opération eft d\'au-
tant plus aifée , que de ce côté l\'aivéole
eft bien plus mince & moins fort que
du côné de ia joue, où fon épailfeur
eft coniîdérable , parce qu\'il avoifine
l\'apophyfe coronoïde.

Lesdernieres molaires de la mâchoire
fupérieure fon-t auffi quelquefois très-
difficiles à ôter, comme je le ferai voir
en expliquant les avantages du pélican
que j\'ai ajufté pour mon ufage.

Le poulfoir, quand on fait bien s\'en
fervir ^ fuffit pour ôter la plupart des
dents de fageife : celles qui lui réfîftent
ne cedent gueres qu\'à mon pélican ; car,
ni le pélican ordinaire , ni le davier, ni
quelque levier que ce foit, ne viendroienc
about de certaines molaires, dontaftez

-ocr page 138-

De VAn du Dentijîe, 11 f

fouvent le corps fe trouve couché vers
l os zygomatique.

Quand les grolfes molaires de la mâ-
chou-e fupérieure ont ia couronne cour-
te 5 que les alvéoles en font fort épais,
^ que les gencives, loin d\'être affaiffées,
^ont au contraire très-folides, il ne faut
point ôter ces dents d\'abord avec le
davier , parce qu\'elles pourroient fe
i^r : c\'eft le pélican qu\'il faut employer.
Si après qu\'elles font re
%verféeSj il ar-
rive que l\'alvéole s\'éclate , on acheve
de les emporter avec le davier, afin de
lîicnager à la fois & la gencive
6c l\'al-
\'^éole.

Les petites molaires , les incifives
canines doivent ordinairement fe
^\'l\'er avec la pince droite, après avoir
^it, s\'il eft néceiîaire , un léger effort
le pélican fur la dent malade. Les
îlcifives
Se les canines de la mâchoire
inférieure fe tirent de même. Les
petites & les greffes molaires s\'ôtent
î^vecle pélican avec le davier, quand
e cas l\'exige. On peut toujours ôter les
^ents ébranlées & relâchées avec le
davier.

On ôte les racines avec pélican ,

-ocr page 139-

ïio De rAn du Demlfie.
avec le bec de corbeau, & avec le pouf-
foir : ce dernier iiiftramenr vaut même
beaucoup mieux que le pélican, quand
la racine n\'a de prife que du côté de la
face externe qui répond aux levres ou
aux joues. Mais on doit préférer le pé-
lican au pouffoir, lorfqu\'il y a du côté
de la fiice interne ou vers la langue aifez
de prife , pour favorifer l\'opération.

Quand il s\'agit d\'aller chercher certai-
nes racines qu^ont été auparavant ébran-
lées & déplacées par le pélican , il faut
finir l\'opération avec le bec de corbeau.

§. Vin.

Moyens dc difcefner les dents gâtées qui
font du mal, d\'avec celles qui caufent les
mêmes douleurs, fans être gâtées.

Avant que d\'ôter une dent, il faut
être sûr que c\'eft précifément celie qui
produit le mal, pour ne la point ôter
aa hafard. Si l\'on s\'en rapportoit
aU
malade, on feroit fouvent dans le cas
d\'être trompé , & d\'ôter une dent pour
une autre. -Le fujet même ne fait pas

toujours

-ocr page 140-

Ï2Î

De TAn du Denûjle:
toujours ceiie qui lui fait le plustîe mal,
parce que toutes les dents du même côté
luîenfont, attendu que tous les nerfs
fe communiquent & fe répondenr. C\'efi:
donc au Dentifte à s\'aifurer par lui-mê-
^■ie de la dent qu\'il faut ôter, & l\'on ne
sjy trompera jamais, eu faifant attention
a ce qui va fuivre.

La carie affede fouvent les dents
dans lei. 1rs ps.rties laterales , fur-tout
quand elles font trop ferrées les anes
contre les autres. Le mal alors n\'eft pas
aifé à appercevoir , principalement
G la
carie eft firuée vers le collet d\'une dent.

n\'y a donc d\'autre moyen pour recon-
noitre l\'endroit malade, que d\'y porter
i^ne fonde bien déliée.
Se qui puiffe fe
Courber tantôt d\'un côté , tantôt d\'un
3utre. Quelquefois les dents font fi fer-
rées que la fonde paffe outre, fans pou-
voir atteindre la carie
Ôc entrer dans le
frou de la dent. Il faut, dans ce cas , in-
terroger toutes les dents les unes après
les autres, en frappant un petit coup fur
chacune avec un inftrument convena-
b|e. Celle qui fe trouvera affedée , fera
Mûrement la plus feniîble ,
ôc par ce
«3cyen fe découvrira. Cette fenfîblité
^o/ne IL L

-ocr page 141-

98 De VAn d\'i Denûfie,
feule eft beaucoup plus fûre que la fon--
de, parce qu\'aflez fouvent celle-ci at-
teint les ligamens de la gencive qui s\'at-
tache au collet de la dent, ce qui caufe
une douleur très-vive, & pourroit in-
duire en erreur un Dentifte peu expé- .
rimenîé. On peut auffi féparer la dent
qu\'on foupçonne de fes voifines, pour
\' fe convaincre par fes yeux de leur état
différent. On connoit encore une dent
gâtée-, lorfqu\'il s\'y forme une fluxion ;
car, la maladie fe jette toujours fur îe pé-
riofte & fur la gencive qui recouvrent
les racines de cette dent. Quand une
dent fe trouve gâtée fous la voûte, ce
qui eft fort rare^ on fe fert des mêmes
moyens pour la reconnoitre. Si la carie
eft fituée au milieu du corps delà dent,
à l\'extrémité de la couronne, ou vers la
joue, on s\'en apperçoir au moindre coup-
d\'œil, & on skffure , ou par la fonde,
ou en frappant, comme je l\'ai dit, H
c\'eft elle qui fait la douleur. Lorfqu\'il fe
trouve à la fois plufieurs dents gâtées
les unes près des autres, ondiftinguera
de la même manière celle qui caufe de
ia douleur d\'avec celle qui n\'en faic
point. •

-ocr page 142-

De. rArt du Denûjle,

Une dent relâchée à un certain point
tft ordinairement très-fenfible, & au
moindre attouchement caufe quelque-
fois de vives douleurs. Le froid èc le
chaud J y font fouvent les mêmes im-
preffions c|u\'aus dents gâtées \\ parce
qu\'entre la racine & ia gencive, il fe
trouve un vuide formé par la deftrucHon
de l\'alvéole & du période, ce qui fait
que le nerf eft aifément frappé. Toutes
les dents ainfi relâchées, font fujettes à
de fréquentes fluxions, & comme on ne
îeut s\'y méprendre , le plus court eft de
es ôter.

Lorfqu\'une dent fe trouve ufée au
point que le nerf eft irrité, elle fait
quelquefois bien du mal, mais on la
diftingue aifément ; car elle eft beau-
coup plus fenfible que toutes les autres >
fur-tout à l\'endroit qui eftufé & qui ré-
pond au canal. Il ne faut qu\'y porter
une rugine j la fenfibilité du fujec l\'in-
dique d\'abord au Dentifte. Ainfi l\'on ne
peut fe tromper, lorfqu\'il eft queftion
d\'ôtec une pareille dent ; mais on peut
ia conferver par les moyens que je dé-
crirai.

Toutes les dents en général peuvent

L ij

-ocr page 143-

I oo De VAn du Denûfie.

faire de grandes douleurs, fans être nî
gâtées, ni relâchées, ni ufées. Ces dou-
leurs proviendront alorf de quelque en-
gorgement formé, foie dans le cordon j
foie dans la membrane qui les envelop-
pe, foit dans celle qui eft communes
l\'alvéole & ^ la racme : toutes parties
qui peuvent s\'abfcéder & caufer bien du
défordrcj fi l\'on ne prend pas le parti
d\'en venir à l\'extraction.
Il eft vrai que
pour l\'ordinaire le chaud & le froid
n\'y
font aucune impreflïon douloureufe ;
mais comme d\'ailleurs elles font fenfi-
bles, on reconnoîr bientôt leur état en
les frappant.

Quand la maladie de ces dents n\'eft
pas négligée, on la guérit alfez promp-
tement par les faignées , & par l\'ufage
de
l\'eau de guimauve tenue tiede en fo-
rnentation dans la bouche : ainfi on évitf
d\'ôter la dent,

en. - iti;

-ocr page 144-

De VArt du. Dentijle,

§. I X.

Defcriptian du Pélican que Jal imaginé
pour ôter les Dents ù les racines.

Lorsqu\'il eft queftion d\'empîoyet
le pélican pour tirer une dent , celui
que j\'ai fait conftruire a, finis contredit,
plufieurs avantages fur les pélicans or-
dinaires.

1°. En tournant une des deux demi-
roues deftinées à cet ufage , l\'autre fait
toujours fon point d\'appui convenable-
ment à la denc, ou à la racine que l\'on
veut ôter : parce que les deux branches
s alongent ou fe raccourciffent au degré
qu\'on veut, felon que l\'opération l\'exige.

2°. Lorfque Tinftrument étant appli-
qué
, le point d\'appui eft trop près ou
trop loin, il n\'eft pas befoin de
l\'ôter :
on ne fait que tourner
de l\'autre main,
dans le fens convenable
, la demi-roue
oppofée , pour raccourcir ou aloiiger
la branche, fuivant que le cas
l\'exige.
Par ce moyeji, on tire la dent avec

L iij

I X I

-ocr page 145-

iz6 De VAn du Dentïjle,
beaucoup plus de facilité, que fi le poinî
d\'appui n\'étoit pas proportionné à la ré-
liitance que doit rencontrer rinfirumenc.
Carj ii arrive fort fouvent que, faute
d\'avoir un point d\'appui convenable, on
fait beaucoup foufFrir un malade , &
quelquefois on eft obligé de renoncer
à
l\'opération.

j". Les deux branches du pélican or-
dinaire font prefque d\'égale largeur &
pe peuvent s\'ôter, pour en fubftituer
d\'autres plus convenables dans certains
cas affez fréquens. Leurs crochets d\'ail-
leurs font fendus à leur e::trémité, d\'où
ii réfuke quelquefois un inconvénient.
Quand il eft queftion par exemple,
d\'aller chercher un chicot ou une racine\'
à l\'entrée de Palvéole, on ne peut les
accrocher : le peu de prife qu\'ils ont peut
échaper pat ia fente du crochet, ce qui
n\'arrive pas avec mon pélican, dont les
crochets, au iieu d\'être fendus à l\'extré-
mité, font feulement un peu concaves
& tranchans.

4®. L\'extrémité des crochets du pé-
lican ordinaire eft encore fort large , ce
qui eft bien pour les groCfes dents; mais
quand il faut tirer une incifive ou une

-ocr page 146-

De rAn du Dentijle. 117
canine hors de rang , c eft-à-dire ^ pla-
cée en dehors, ou tournée de façon que
les deux dénis voshnes ne laiiTent qu\'un
très-petit efpace que bouche cecte dent
mal rangée , comment ôter une pareille
dent avec une branche dont îe crochet
fera beaucoup plus ou moins large
que la brèche , fans emporter les dénis
voifines, qu\'elle accroche également ?
Cet accident ne peut s\'éviter\' avec de
telles branches : au lieu qu\'ayant une
branche armée d\'un crochet qui a tout
au plus un quart de ligne de largeur, ce
crochet s\'introduit aifément dans le plus
petit intervalle, fans crainte d\'accro-
cher les dents voifines. Au refte, il ne
faut point culbuter tout-à-faîtcette dent,
pour ne point fradurer
l\'alvéole, ce
qui affoibliroit les dents voifines , mais
on acheve de l\'ôter avec la pince droite,
Lorfque la dent eft par-detfus fes voi-
fines, on peut l\'ôter avec cette pince
droite , fans qu\'il foit néceifaire de
l\'ébranler avec le pélicaUj parce qu\'elle
a de la prife fur les cotés. Il eft facile
auffi de tirer avec la pince droite les
dents qui font tout en-dedans , & l\'on
cloit la préférer au pouffoir. Les dents

L iv

-ocr page 147-

Ill

De VÀrt du Dentijîe.
ainfi hors de rang tiennent beaucoitp
moins que les autres , parce que leurs
racines font moins couvertes par l\'al-
véole & la gencive. On pourroit ôter
avec le poufToir les dents hors de rang j
mais cette opération ne peut gueres fe
faire fans fradurer l\'alvéole , fur-tout à
la mâchoire inférieure^ ce qu\'il faut
éviter â caufe des dents voifuies qu\'on
ne manqueroii pas d\'affoiolir^ c^ c\'eft
ce qui arrive principalement quand on
emporte quelque portion de l\'alvéole
avec la racine. De plus , je le répété,
avec une branchede pélican alfez étroite
on ôte niteux ces fortes de dents qu\'avec
lepouffoir, quand elles font penchées
en dehors. On rerire encore un autre
avantage des branches qui ont l\'ex-
trémité du crochet étroite , tranchante
& prefque pointue : quand une racine
eft minée jufques dans fon alvéole ,
quelquefois même un peu avant au
de là de fes bords, on place ce crochet
tranchant entre la gencive & l\'entrée de
Falvéolej en même-tems on appuie avec
le pouce de l\'autre main affez fort fur
la tête du crochet , & par ce moyen on
le fait enuer fans peine entre l\'alvéok

-ocr page 148-

De VArt du Dmlfte, ii-9
& la racine qu\'il accroche &C qu\'il cul-
ture. Mais , comme elle eft fore en-
foncée clans l\'alvéole , il arrive quel- .
quefois que la gencive du côté oppofé
l\'empêche\' de fortir : il faut donc poiu*
lors avoir une efpece do rugme applatie
& courbée en façon de bec de perroquet
que l\'on palTe entre l\'alvéole & ious
cette racine J &on la fait fortir fans qu\'il
foit nécelfaire d\'ouvrir la gencive. On
peut aulfr quelquefois achever l\'extrac-
tion de ces fortes de racines avec ie bec
de corbeau.

5®. 11 eft des cas où certaines racines fe
trouvent minées fi avant, qu\'il n\'eft
pas
5offible de les aller chercher avec les
tranches ordinaires, ni avec le ppulToir:
or, avec les branches de mon pélican, on
manque rarement ces racines. Une bran-
che qui feroit de la largeur ordinaire
ne pourroit aller dans l\'alvéole Se s\'in-
fînuer entre îa racine, malgré tous les
efforts qu\'on pourroit faire en appuyant
avec le pouce fur la tête du crochet,
parce que la racine étant ronde, l\'alvéole
qui
l\'enveloppe prend la même forme ;
de façon que les parties latérales du
crochet portant
Hir les parties latérales

-ocr page 149-

s 3 o l\'An du Dentïfle.

de cet alvéole , l\'empêcheroient d\'y
pénétrer , & par conféqiient il ne feroic
^^pas poffible d\'avoir les racines.

Outre ia branciie étroite de mon
pélican, & celie qui fert à remettre
en
ilace les dents penchées, il y a fixautr^^s
tranches qui fe montent fuivant les
diftérens cas, ce qui fait en tour huit
branches. L\'une eft droite &: à l\'ordi-
naire, mais tranchante à l\'extrémité du
crochet, & concave fans être fendue.
L\'autre eft encore droite, tranchante,
& fort large à l\'extrémité du crochet,
afin de pouvoir ôter en même tems deux
racines qui fe trouvent féparées l\'une de
Taurre , quand la couronne de ia denC
eft totalement détruite , ce qui a lieu fort
fouvent aux racines des greffes molaires
de la mâchoire inférieure. Comme il
peut arriver auffi qu\'on foit obligé d oter
de fuite deux dents , dont l\'une eft
jâtée par l\'autre ; au moyen de cette
tranche , l\'opération fe fait d\'un feul
coup.

11 y a deux autres branches coudées ,
l\'une adroite l\'autre à gaucîie, afin
de s\'accommoder à la commifÏÏne des
levres, pour aller chercher une dent à

-ocr page 150-

De rArt du Dentijîe. ï ? 2
•droite ou à gauche au fond de la bouche.
Ceci, à la vérité , n\'eft pas nouveau ;
lïiais les branches de mon pélican font
îî\'anchanres & point fendues à l\'extré-
rnité, afin d\'aller chercher & d\'accro-
cher plus focilement les racines qui
font reftées après la fracture de quelque
denr.

Deux autres branches du même péli-
can , coudées l\'une & l\'autre, fe ƒ lacent
à droite & à gauche, pour aller ôrer des
deux-côtés au fond de h bouche la cin-
quième & derniere greffe dent de la
n-iâchoire fupérieure. Quoique le plus
fouvent on en vienne à bout avec le

pouffoir, il s\'en trouve quelquefois^ de

très-difficiles, & que le poufioir ne fau-
toit avoir, foit parce que îa dent fera
minée du côté où il faut appliquer Tinf-
trument, foit parce que ces fortes de
dents
auront tel nombre de racmes qui
\'eut donnera une force extraordinaire.
J\'en ai vu qui avoîent jufqu\'a quarte à
cinq racines très diftincbs & très-écar-
tées , tindis que
pour l\'ordinaire elles
ont qu\'une raciiie affez courte fort

arrondie , ou deux racin.es jointes enfem-

ble fans faire d\'éçait. Or , quand i! y ^

-ocr page 151-

111 De tin du Dem\'ijlc:
tant de racines , il efi- rrès-d;fficile, poiïï
ne pas dire unpoiuble , d\'ôter avec 1®
pouffoir ces fortes de dents d\'un feul
coup. Les branches coudées, dont je me
fers pour les autres dents , ne con-
viennent pas ic5, parce que ces groffés
molaires font ordinairement couchées
& inclinées vers le iigoma : ainli les
branches dont le crochet eft coudé à
l\'ordinaire à fon extrémité ne peu-,
.vent ies faifîr pour les culbuter. C\'eft
ce qui m\'a fait imaginer deux autres
branches qui ne fervent qu\'à ôter ces
fortes de dents. Elles font
coudées
comme les dernieres, l\'une à droits
& l\'autre à gauche, pour pouvoir s\'ajuf-
ser de
même à la commiifure des le-
vres. Les crochets ordinaires dans leur
courbure s\'inclinent plus intérieuremen-t
que perpendiculairement : ceux dont
je viens de parler, s\'écartent & s\'éren-
deiitun petven devant au de-là de \'aligne
perpendiculaire , pour pouvoir faifir la
derniere groffe dent qui eft prefque tou-
jours penchée vers la joue,
& derriere
l\'os de la pomette. On peut donc faci-
lement ôter cette dent par le moyen
de ma nouvelle branche dopt le crochee

-ocr page 152-

De rjn du Dentifte. 135
eft moins coudé , afin de mieux faifir la
^ent, ce qu\'on ne peur faire avec les
^ranches donc ks crochets ont plus de
^■outbure. Toutes ces différentes bran-
ches fe montent & fe démontent aifé-
^ent fur le corps du pélican ^ comme
Qn le voit dans la figure que j\'ai fait
graver. On va voir un cas fingulier, 011
\'«s branches étroites de mon pélican
^fonc été d\'un grand ufage.

Observation.

Mademoifelle P***^ Penfionnaire
^^x Filles de Sainte Agnes , alors âgée
quinze ans, avoit une incifive gâtée
^ la mâchoire inférieure. Un Dentifte ,
pour la délivrer des douleurs qu\'elle lui
^^ufoic, lui propofa de l\'arracher , Bc
^Ue caftà dans l\'opération. II fit tout ce
lu\'il put pour avoir la raciue , & la
pourfuivit \'jufqu\'au bord de l\'alvéole j
^ais toutes les peines furent inutiles, &
Il fut contraint de l\'abandonner, En peu
jours la gencive fe réunit & couvric
^oralementcette racine; mais la Demoi-
^lle fentoit toujours certaines douleurs,
^lîfîn , il fe fie au bas de la gencive un

-ocr page 153-

î 5 4 ^^ Dentifte, *

petit dépôt qui devint fifttileux , & qui
augmentoit tous les jours. Cette De-
moifelle fouffrant beaucoup , un joui"
çjueje me trouvai dans la maifon
pouC i
d\'autres Penfionnaires J on me l\'amena.
Après avoir examiné le mal, je lui de-
mandai
fi la denc avoit éfé bien ôtée.
Elle me dit qu\'elle s\'étoit ca(fée en 1 o-
tant, mais que peu-à-peu on avoir tire
la racine ,
Se qu\'elle avoit cependant
toujours beaucoup fouffert depuis. Sut
ces indications, je lui alîlirai que fa
dent, quoiqu\'on n\'en vît aucun vefti-
ge , n\'avoit pas été entièrement ôtée, ôi
que fi .elle vouloir guérir, il n\'y avoit
d\'autre parti à prendre que d\'en extir-
per les relies qu\'il étoic dangereux de
îaiffer. Voici quel étoit l\'état de
bouche» Sa dent avoit été calîée juf-
ques dans l\'alvéole même. La gencive
étoit totalement fermée , mais fort bru--
ne , & un peu molalfe ;
la racine étoit
fort étroite, comme le font pour l\'ordi-
naire toutes les racines de ces fortes de
dents : les dents voifines fe
trouvant
crop ferrées s\'étoient avancées dans I®
vuide que la dent calfée laiifoit, & I®
bouchoient prefque entièrement.
Il y ref-\'

-ocr page 154-

T)e VAn du Dentijle. i ^ ƒ
pourtant une petire brèche de Tefpace
^ «n tiers de ligne. Mon pélican étoit
rs inventé , mais
je n\'y avcis pas
\'core ajufté des branches étroites i
je fus obligé dé remettre l\'opéra-
on au lendemain. Auffi-tôt que je fus
rive chez moi, je penfai aux moyens
j^e la faire avec tour le fuccès poifible.
^ e la branche ordinaire demon péli-
jI^\'i . je fis une branche plus étrqite en
mant de la largeur du crochet ce qu\'il
\'l^oit en retrancher; pour pouvoir le
j^ite paffer dans la petite brèche, &ôter
j^s reftes de la racine , fans accrocher
deux dents voifines. Muni de cette
ouveiIe;branche , je procédai de cette
aniere. J\'ouvris d\'abord la gencive au
^^^t de la racine & du côté de la levre,
de la pouvoir culbuter & la faire
^rtir plus facilement. Enfuite prenant
crochet, qui ^ par fon extrémité
"^oic un peu plus étroit que la brèche,
Prefque pointu Se fors tranchant,
je le
J ® entrer en l\'appuyant avec force avec
®pouce de la main oppofée à celle dont
le cenois. Ce crochet s\'engagea par
moyen entre l\'alvéole & ia racine
fut culbutée à l\'inftant & du premier

-ocr page 155-

DerAnduDentlflâ.
tour de poignet. Par Textradion de cette
racine, Mademoifelie P * fut par-
faitement guérie en ttès-peu de jours,
fans autres remedes, & avec un
fil je
fis rapprocher les deux dents voifines
que cette racine incommode empèchoïc
de fe joindre exaétemenr. Il eft donc
évident que, fans cette branche étroite,
il n\'auroit pas été poflible d\'avoir jatnais
cette racine avec le pélican, fans ôter
une des dents d a-côté, ou peut-être
mêmetoutesles deux. Elle n\'auroit pas ptl
s\'ôter non plus avec le pouffoir , parce
qu\'elle étoit entièrement couverte^
tant
par la gencive que par l\'alvéole elle
étoit renfermée, & qui s\'élevoit beau^
coup au-deffus.

Le pélican que je viens de décrire a
été préfenté à l\'Académie Royale àç
Chirurgie ; & voici le réfultat du rap-
port (jui en a été fait à cette Compagnie^

EXTRAlt

-ocr page 156-

Dâ VArt du Dentijîe: 13 7

EXTRAIT DES REGISTRES
de t Académie Royale de Chirurgie.

Da 18 Mai 1755.

M. DU POU Y, qui avoit été nom-
mé pour examiner un Pélican particu-
lier , de l\'invention de
M. Bourdet ,
Dentifte à Paris , en ayant fait fon rap-
port : l\'Académie a jugé que cet inf-
trument eft applicable à des ufages donc
le Pélican ordinaire eft privé , qu\'il a le
mérite effentiel de fervir à l\'arrange-
ment des dents, & qu\'il eft digne d\'être
approuvé.

A Pari?, ce 19 Mai 1755.

Signé, MORAND^

Secrétaire perpétuel.

U

Tome IL

-ocr page 157-

1 3s T>e VAn du Dent\'ip.

explication

DE LA

HUITIEME PLANCHE.

Fig. I. P E Lie AN qui fert à ramener
hs dents enfoncées ^ vu par fa furface fu-
périeure , dégarni de fes branches & de fa
demi-roue y à la pVace de laquelle on viffe
une piece triangulaire, pour fervir de point
d\'appui dans Vopération,

A A. Le corps du pélican ^ fur lequel on
peut monter différentes branches, & re-
mettre la demi-roue, quand il efl quejlion
de s\'en fervir pour ôter les dents.

BB. La piece triangulaire.

QQ.Lavis qui fert àfaire monter ou def-
cendre Veffeu , pour alongcr ou raccourcir
la branche du Pélican.

D. Veffieu engagé dans le corps du Pé-
lican avec fa vis.

EE. Le pivot de Veffieu fur lequel rou-
lent & fe montent les branches.

FF, La demi-roue qui fait Vextrémité

-ocr page 158- -ocr page 159-

- \'v

M\'

: t,-

l. ^ : ^

■ 1

5 ■

-ocr page 160-

De l\'Art du Dentïjle.

de la vis fans fin , & qui fiert à la faire
tourner. 1

Fig. II. la branche qui fert à ramener
les dents enfoncées ^ démontée & vue par
une de fes furfaces latérales.

G. Le corps de la branche.

H. Le quarré de la branche.qui entre
dans la mortoife, dont l\'effet efi de per-
mettre à l\'effteu de monter ou de defcen-
dre par le moyen de la vis > & qui fert auffi
à loger le quarré de la vis au-devant de
l\'effîeuj, pour empêcher la branche de tour-
ner à droite ou a gauche.

Fig. 111. Le même Pélican defiiné
feulement à ôter les dents. Il ne différé du
premier ^ qu\'en ce qu\'il efi garni de deux
branches y & d\'une demi-roue qui fert de
point d\'appui y au lieu de la piece trian-
gulaire.

I. La demi-roue fervant de point d\'appui.

K. La demi-roue qui fert à faire tour-
ner la vis.

L. L\'extrémité du crochet étroit & poin-
tu J pour ôter les racines cachées & cou-
"^ertes par la gencive.

M. La branche ordinaire.

N. La mortoife de Leffieu.

Fig. IV. La vis qui empêche la branche

M ij

-ocr page 161-
-ocr page 162-

Dc C Art du Dcmijle. 141

Explication

DE LA
NEUVIEME PLANCHE.

^^g- I" JL-^ branche du Pélican^ déta-
chée : ladite branche recourbée de gauche,
fi droite , pour ôter certaines dents de fa-
gejfe du côté droit à la mâchoire fupérieure,
£lle efivi. par fa face fupérieure ^ & fon
crochet eft vu par fa face latérale y ainfi
^ue par fa face interne ou pofiérieure.

A. La premiere courbure,.

B. Seconde courbure.

C. Troifieme courbure,

D. L\'extrémité du crochet.

E. La gouttiere & les dentelures de la
face interne du crochet,

anneau de la branche,

Fig. II. Autre branche, détachée du
même Pélican recourbée de droite à gau"
che, pour ôter les mêmes dents du coté gau-
che de la mâchoire d\'en haut. Elle ne dif-
fère de. la premiere, que parce quelle a fa
<=ourbure dans un fens oppofé.

-ocr page 163-

Ï 42- De rjn du Demifle.

Fig. IIÎ. Branche coudée de même que
les deux précédentes , & qui n\'en différé que
par fon crochet qui eft beaucoup plus re-
courbé & rentrant j au lieu que la courbure
de celles là s\'étend davantage & fort de la
ligne perpendiculaire.

G. le dos du crochet j ou fa face anté-
rieure. \'

H. La face pofîérieure ou fe trouvent la
gouttière & les dentelures du crochet.

Fig. ly. Quatrième branche qui ne dif-
fère de la troifieme., qu\'en ce quelle efl re^
courbée dans un fens contraire.

Fig. V. Le levier formé fur la clef an-
gloifii vu par fa fut face latérale^ armé
d\'un nouveau crochet totalemeni relevé ^ &
prêt à défendre pour faifir la dent. Au.
moyen de ce crochet, qui fait trois cour—
hures y l\'infirument ôte les dents comme le
L^élican , & de plus il a l\'avantage de ren-
verfer la dent du côté de la joue , qui efl le
feul ou elle puiffe être renverfee par le Pé-
lican.

I î. II. Le corps du lévier.

K. La premiere combme élevée , afin
que les inaflves ne gênent pas en ôtant les
dents de fugeffe au dedans de la bouche.

L. La deuxieme courbure.

-ocr page 164-

De rjn du Denûfic. ï 4 j

M. La troificme courbure qui ferc à re-
cevoir C anneau du chapiteau dans fon en-
taille.

N. Vextrémité de la furface latérale dc
Vinflrument qui fait le point d\'appui en
opérant fut la dent voifine de celle qu\'on
ôte,\'

00. L\'anneau du chapiteau dans Ten-
taille de rinftrument,

PP. Le chapiteau.

QQ. Le crochet mo^é, engagé & viffe
dans le canon du chapiteau, vu par Jaface
antérieure.

RR. La goupille engagée , tant dans le.
trou qui fe trouve pour la recevoir à l\'ex-
trémité de l\'injlrument ^ que dans l\'anneau
du chapiteau , ce qui fait que ce chapiteau
roule fur l\'extrémité de l\'irifirumtntpar um
efpece de charnicre.

S. La vis qui empêche le crochet détour-
ner, quand il eji vijfé
dans le canon du
chapiteau à fa /ace fupérieure.

TT. L\'extrémité dc l\'injîrument ou il
y a deux trous, l\'un rempli par le manche^
6\' Vautre d\'attente, pour y pouvoir rechanger
le manche en cas de befoin.

Vy. Le manche engagé & vljfe dans
l\'inftrument »

-ocr page 165-

144 Be VArt du Demi/le.

Fig. VI. Le même crochet détaché du
levier, vu par Ja face fupérieure ^ pour
renverfer aujjl la dent de fagefe du côté
droit à la mâchoire inférieure.

X. La partie qui fe vijfe dans le châ\'
piteau. ,

Y. La premiere courbure de gauche à
droite.

2. La fécondé courbure.

A. La troifeme courbure qui forme U
crochet.

B.. Le dos J ou la furface antérieure du
crochet.

C. La gouttiere & les dentelures de Ia
\'face interne que formée le devant du crochet.

Fig". VII. Le crochet pour ôter les dents

f^g^ff^ du coté gauche à la mâchoire
d\'en bas ^ vu par fa furface inférieure, tO\'
talement renverfé b pofé fur fa face fupé-
rieure.

D. Le dos du crochet^ vu de façon qu\'il
par ou rentrer fur lui-mime ; ce qui le rend
plus fenfible par rapport à la pojition de fa
branche.

Fig. VIII. Le crochet ordinaire dont
on s"efl toujours fervipour le levier. Celui-
ci, comme on voit, fe démonte, pour pou"
yoir être changé de côté^ & pour donner Id-

liberté

-ocr page 166-

De rAn du Dentijle, 145^
lihené de monter au befoin fur Vinjlrummt
les trois dijferens crochets ; au lieu qu\'il y
tides leviers dont le crochet, par le moyen,
d\'un reffon y tourne & change au befoin
de côté.

Fig. IX. Canule de plomb pour faci-
liter r écoulement de la matiere qui sejl
amajféc dans lefinus maxillaire.

E. L\'extrémité de la canule & Vouver-i
turc de fon canal, qui entre dans lefinus
par le trou qu\'a laiffé la dent qu\'on vient
d\'ôter.

FF. L\'étendue du canal.

GG.Les deux lames percées chacune de
deux petits trous , pour recevoir un fil qui
fe noue aux dents voifines de la brèche ,
pour bien ajjujettir la canule & la rendre
fiable.

N

Tome II.

-ocr page 167-

De tAn du Denûjîe.

X.

\'IDe Vufage du péliçan, du davier 3 du bec
de corbeau 3 de la pince droite ^ du le-
vier en for rne de manivelle^ & du pouf-
foir,

£ tous les inftrutnens qui fervent
à ôter les dents, le pélican ( quand on
fait bien le manier ) eft fans contredit
îe plus sûr ,
Se le moins fujet â caflèc
ces os délicats & fragiles : mais il eft
auffi le plus dangereux lorfqu\'\'on ne fait
pas s\'en fervir. Celui que j\'ai imaginé
eft certainement le plus commode, en
çe qu\'on peut porter le point dkppui où
l\'on veut, comme je viens
de ie démon-
Erer , & que, par le moyen de fes dif-
férentes branches ^ il n\'y a guere de
racines qu\'on ne puffie ôter. Pour fe
fervir du péliçan , il faut faire alTeoir
le malade dans un fauteuil, ou fur
un
autre fiegefort bas, fur-tout quand il faut
opérer à la mâchoire fupérieure. Il faut
que rOpérateur évite de monter der-
i:ierefur un tabouret, pu de s\'élever de

-ocr page 168-

De r An du Demijle: 147
quelque autre maniere , comme font
\' quelques Dentiftes : cet appareil futît:
fouvent pour effrayer le malade. On ne
doit point envelopper la demi-roue du
pélican avec un mouchoir ou une fer-
viette , parce que cet équipage ne fert
qua embarraffer le Dentifte. Déplus,
en garniffanc ainfi cette demi-roue , il
réfulte un autre inconvénient. Souvent
la branche fe trouve trop près ou trop
éloignée du point d\'appui j ce qui oblige
quelquefois d\'ôrer l\'inftrument j après
l\'avoir appliqué, pour en rajufter la
garniture; &c lorfqu\'il s\'agit de la re-
mettre pour ôter la dent ou la racine,
le malade effrayé ne peut plus.fe réfou-
dre
à le laiffer pofer de nouveau, ou ne
s\'y réfout qu\'avec beaucoup de peine.
La demi-roue, quoiqu\'à nu j ne gliffera
jamais fur fon point d\'appui quand
l\'inftrument fera manié par un homme
adroit.

M. Fauchard a imaginé de fixer la ■
branche du pélican par le moyen d\\ia
écrou, & dégarnir la demi-roue de peau :
niais cette invention n\'eft pas fort com-
\'"Uode, & a les mêmes inconvéniens que
les garnitures. Car, on eft fouvent obligé

N ij

-ocr page 169-

1De l\'An du Denùjîe.
fl\'ôcei" l\'indrument, après l\'avoir pi\'é-\'
lenïé dans la bouche, pour rappro-
cher ou éloigner la branche du point
d\'appui. Il confeille encore de mettre
entre la branche &: le corps de l\'inftru-
ment un petit rouleau de papier , ôC
d\'alTujettir enfuite cette branche au
corps du pélican avec un petit lacet y
pour l\'eaipèchér d\'aller & venir: il en eft
de cet expédient comme de l\'écrou. Le
même, enfin, dans fon Ouvrage ( Torn,
ï. p, 179 ) dit, qu\'il pofe la dçmi-roue
fur la gencive & fur les dents les plus
proches des dents ou des racines qu\'il
s\'agit d\'ôter. Il faut bien fe garder de
fuivrç une pareille méthode; car, en
pofant de cette maniéré la demi-roue
fur la gencive, on écrafe & on emporte
fouvent cette gencive ^ ce qui fait beau-
coup fouffrir le malade, & peut nuire à
la foiidité de la dent dont la gencive fe
trouve ainfi maltraitée. La demi-roue
• ne doit porter que fur les dents qui font
le point d\'appui, jamais fur la gencive,
il faut donc qu§ la branche du péhcan ne
foit point du tout gênée, & que celui
qui opere , en appliquant fon
mftrU"
ment, ait la îiberté de la mettre au de".

-ocr page 170-

De tAn du. Dentïjle. ï
gré convenable. On trouve aifémenr le
moyen de fixer ttès-fiDiidemenc & cerrè
branche & la demi-roue, en les pla-
çant comme il convient, H en tenant
avec la force nécelfaire l\'inftrument fixé
dans la main. C\'eft la méthode de M.
Caperon & la bonne. Cependant ceu;i
qui ne fauront pas bien fe fervir du pé-
lican peuvent garnir îa demi-roue &
aflujettir le crochet. Si le malade eft trop
effrayé, ou fi l\'on craint que la vue de
l\'inftrument ne faife quelque itïipreffioii
fur lui, avant que d\'opérer , il faut avoir
la précaution de Tenvelopper de façon
qu\'il ne puifTe pas l\'appercv^voir ^ fans
que l\'enveloppe ôte à la branche la li-
berté d\'aller & venir.

Lorfqu\'il s\'agit d\'ô^çer une dent oa
une racine du côté droit, c\'eft la main
droite du Dentifte qui doit tenir le pé-
lican
\\ ôc s\'il opere du côté gauche, il le
tiendra de la main gauche.

Quand c\'eft une incifive qu\'il faut
ébranler avec le pélican , pour l\'otec
enfuite avec la pincé droite, il faut fairs
le point d\'appui de la demi-roue fur
unecanine, Se à fon défaut fur une petite
molaire.

N iij

-ocr page 171-

15 0 De VArt du Denûjîe.

Quand c\'eft une canine qu\'il faut
tirer, le point d\'appui doit fe faire fur
les petites molaires , & à leur défaut fur
ia premiere groffe molaire.

Si r on veut ôter une petite molaire ,
îe point d\'appui doit s\'établir, ou fur la
canine, oafur la petite molaire qui refte,
ou fur la premiere groffe molaire.

Quand c\'eft une premiere groffe mo-
laire qu\'on ôte, le point d\'appui fe prend
ou fur les deux petites molaires, ou fdr
la canine & la premiere petite molaire.
Enfin, quand le point d\'appui ne peut
avoir lieu, foit par le relâchement de
ces dents, foit par leur abfence, il fauc
le faire fur la quatrième ou fur la fe-:
conde groffe molaire.

Lorîqu\'on ôte la quatrième grofTè
molaire, le poiat d\'appui fe fait fur
la
premiere, & à fon défaut fur les deux
petites molaires, ou fur la canine atte-
nant , quand celles-ci manquent. Mais ,
il c\'eft la cinquième ou derniere molai-
re , ( lorfque le pélican a lieu ) il faut
faire le point d\'appui ou fur la premiere
groffe molaire j ou fur la fécondé, ou
fur l\'avant-derniere.

Quand il s\'agit d\'ôter une premiere

-ocr page 172-

Dc l\'Art du Dcntljie. î 5 î
grolTe molaire qui ordinairement tienE
très-fort, il faut que le point d\'appui fe
prenne fur les petites molaires. Car il
eft bon d\'obferver que plus le poinc
d\'appui eft près de ia dent que l\'on
veut ôter moins il fatigue , & plus il
donne de force au crochet. Cependant,
quand les dents voifines de celles que
l\'on veut ôter ne font point en état de
fupporter le point d\'appui , il faut îe
porter plus loin. Il arrive ( mais le cas eft
rare) que l\'on ne peut trouver de dents
pour former un point d\'appui , comme
quand le malade a perdu ia premiere
groffe molaire , les deux petites mo-
laires & la canine : comme alors les in-
cifives ne peuvent fervir de point d\'ap-
pui, il fauc avoir recours au davier 3
quand la dent qu\'on veut ôter eft la fé-
condé , ou la quatrième grolfe molaire,
& qu\'elle n\'eft pas en danger defe caffer,
ou bien fe fervir d\'un levier avec un cro-
chet à l\'ordinaire ; mais quand ce font
des racines il faut fe fervir du poufiToir.
Si la dent qui doit être ôtée eft la cin-
quième ou derniere
groffe molaire , il
faut porter le point d\'appui fur la den£
Voifine, ou l\'oceravec le poufibir. Pour

N iv

-ocr page 173-

De VAn du Dentijle.
donner plus de force à la branche oa
au crochet du pélican, & pour que les
dents_ fur lefquelles eft le point d\'appui
ne foient point ébranlées, ii faut appuyer
fortement le pouce, ou fur-le dos du
crochet, ou bien fur la face interne de
la dent où eft le point d\'appui ^ tandis
que de la main qui tient l\'inftrument^ on
culbute Ja dent malade en donnant un
tour de poignet. Le fecours du pouce
fur le dos du crochet eft très-néceffàire ,
far-tout quand les denrs où l\'on met le
point d\'appui, font très-foibles en com-
paraifon de celle qu\'on va tirer. Sou-
vem les premieres s\'enfoncent, & pa-
roiffent prêtes à partir, tandis que la
dent qui doit être ôtée n\'eft prefque
point ébranlée. Mais quand on fait bien
ménager ce même point d\'appui, en le
faifant fur deux dents , & en l\'aiTurant
avec le pouce ^ la dent s\'ôte facile-
ment, quand elle feroit beaucoup plus
forte que celles où eft le point d\'appui,
qui en feront par ce moyen bien moins
fatiguées.

Le Dentifte qui doit être ambidextre
fe place derriere le malade , au côté
droit, ou au côté gauche, felon fa com-

-ocr page 174-

De VAn du Dentifte. 155
rnodité. Il mec fon malade fur un fiega
Convenable, la tête appuyée fur le dos
du fiege , ou fur le Dentifte j enfuite il
place la demie-roue du pélican comme
je l\'ai déjà dit, & il fait palTer le crochet
de fon inftrument vers la face intérieure
de la dent qu\'il veut ôter. Si cette dent
eft fort gâtée & en danger de fe cafféf,
il faut appuyer avec le pouce de la
main oppofée fur la tête du crochet,
afin de l\'enfoncer entre îa gencive &
la dent qu\'il doit embralTer jufques an
collet, pour éviter qu\'elle ne fe calfe. On
porte, après cela, le pouce fur le dos du
crochet, & l\'on appuie fortement. On
doit dans, cette opération,
ménagerie
tour du poignet & le faire un peu len-
tement. L\'alvéole du côté de la joue s\'é-
cartera par ce moyen à un certain degré
& laiffer.1 renverfer k dent. Si cepen-
dant il arrivoit ( ce qui n\'eft pas rare )
que la portion de l\'alvéole qui s\'eft écar-
tée fût adhérente aux racines, il faudroit
achever de l\'ôter avec le davier, afin de
ménager l\'alvéole & la gencive.

Quelquefois après avoir ôté une dens
qui étoic fortement adhérente, malgré

-ocr page 175-

154 De rAnduDemifis,
toutes les précautions qu\'on a prifes, il
arrive que quelque portion de l\'alvéole
s\'éclate & fe trouve totalement féparée
de fa maffe. On ne peut être trop atten-
tif à cet accident qui eft affez commun,
parce que jufqu\'à ce que ce fragmenE
offeux foit totalement hors de la genci-
ve , le malade en fera incommodé ; il
faut donc
y remédier promptement Si
l\'ôter avant que de preffer a gencive.
Il fe peut faire auffi qu\'en ôtant la dent,
qixelque pointe de l\'alvéole foit entrée
dans la gencive, & la pique ou ia com-
prime : il faut enlever cette pointe,, ou
remettre dans leur place naturelle les
jarties fracturées & déplacées ; enfuite
îien preffer la gencive avec l\'index & le
pouce. Quand les adhérences viennent
avec la dent, il n\'en réfuite aucun ac-
cident : quand au contraire la portion
d\'alvéole qui eft fradurée refte fans être
bien replacée, il furvient de la douleur
pendant_plufieurs jours, & quelquefois
«ne fluxion, felon la difpofition du fujer.
^ Lorfqu\'une racine eft trop enfoncée &C
n\'a point de prife, on parvient ordinai-
rement à l\'accrocher avec la branche &

-ocr page 176-

Be VArt da Benûfte. 155
le crochet dont j\'ai parlé dans la def-
crjpnonde mon pélican ; mais on a quel-
quefois bien de la peine à ia faire forrir,
C\'eft alors qu\'on va la faifir avec le bec-
de-corbeau dans i\'avéole qui fe trouve
dilaté par i\'eftort que le pélican vient de
faire , & par ce moyen on réuffit à ôter
les racines.

Lorfqu\'on fe fert du davier, il ne fauc
point trop ferrer ia dent de crainte qu\'elle
lie fe cafte, fur-tout ii elle rient forte-
ment, & que le péii«in n\'ait pu trouver
de point d\'appui. On doit feulement;
pincer ia dent le plus qu\'il eft poffible
Vers le collet j en portant le pouce de îa
înain oppofée fur le dos du bec fupérleiifj
& en appuyant fortement. De cette ma-
Jtiiere , le davier ferre moins la dent ,
l\'alvéole de fon côté prête, & la dent ell
moins expofée à fe caffer. Il faut auffi
donner le tour de poignet avec dou-
ceur , afin de donner le tems à l\'alvéole
de prêter & de livrer paffage aux raci-
nes ; on ménage par ce moyen & la gen-
cive & l\'alvéole.

Lorfqu\'on fe fert du levier en mani-
velle , il faut prendre garde que l\'ex-
trémité du corps de cet inftrument ne

-ocr page 177-

i^G De rArt du Dsnùjle.
roule point fur la gencive, comme il fai^
toujours, ce qui la meurtrit & la blelfe-
Pour éviter cet inconvénient, ii n\'y ^
qu\'à porter l\'index de la main oppofée
fur la gencive, & de cette façon on em-
pêchera l\'inftrument de rouler defflis. Il
ne faut point non plus fe trop précipitô^j
lorfqu\'on enleve une dent avec le
levier,
parce qu\'on pourroit la caffer de mêm®
qu\'avec le davier , fur-tout quand elle
tient beaucoup. On ne peut fouvent
l\'éviter qu\'en portant le plus qu\'il eft
loffible le point d\'appui de ce levier fur
a gencive , même vers l\'excrémiité des
racines. Cet accident n\'arrivera point
aux dernieres dents
de la mâchoire infé-
rieure , fi au moyen
d\'uiî crochet on fait»
comme j\'ai déjà dit, le point d\'appui fu^
la face interne de l\'avant-derniere, tandis
que le crochet va faifir la derniere du
côté oppofé , c\'eft-à-dire, du côté de
la joue.

On peut fe fervir anffidu levier pour
d\'autres dents : il fait le même effet que
le pélican , c\'eft-à-dire , fon point d\'ap\'
pui s\'établit fur k dent voifine , tandis
que îe crochet en Z va chercher & cul-
buter la dent. Cet inftrument a daii^

-ocr page 178-

De l\'An du Dentïjle. 15 7
certains cas l\'avantage fur le pélican, en
ce qu\'il peut ôter les dents de l\'extérieur
a l\'intérieur , & de l\'intérieur à l\'exté-
tieur, au lieu que le pélican ne peut les
Oter que de îa derniere façon.

La maniéré de le fervir de la pince
ciroire eft toure fimple. 11 faut feulement
obferver de failîr la dent le plus près de
\'a gencive qu\'il eft poffible, & ne point
trop la lerrer. Par divers mpuyemens du
poignet de droite à gauche & de gauche
a droite, on défunit fans beaucoup de
peine I alvéole de la racine , & on ôte la
dent fans rieii délabrer.

Qn ne peut guere fe fervir du bec-de-
corbeau que pour aller chercher les ra-
cines qui font plus ou moins profondes
dans le fond de \'alvéole^ après qu\'elles
font ébranlées ou déplacées par le péli-
can. On fait glifter pour cet effet les deux
becs de l\'inftrument dans l\'alvéole, entre
U fertilfure & la racine de la dent. Quand
îes deux becs font engagés, on ferre les
branches, & l\'on faifit la racine
qu\'on a
par ce moyen très-promptemenc.

Il y a deux fortes depoujjoir, l\'un qui
€ft fait en pied-de biche, .& l\'autu en
cifeau. Sa longueur doit être
d\'enviion

-ocr page 179-

î 5 s De l\'Art du D entiße.
cinq pouces , y compris le manche.
Lorlqu\'ou fe fert de cet inftrumenc ,
faut prendre garde de ne point blelfeÇ
quelques parties de la bouche , ce qu^
peut arriver quand la dent ou la racine
vient à forcir tout-à-coup. Ainil, ily^
des précautions à prendre.

Le malade doit être affis dans un fau-
teuil bas, quand on opere à la
mâchoire
fupérieure, & dans un fauteuil plus haut
quand c\'eft à la mâchoire inférieure.
faut que la tête du fujet foit bien ap\'
puyée contre le doffier ou fur
le flanc
de l\'Opérateur. Celui-ci tient d\'une maii^
l\'inftrument, & porte deux doigts de
l\'autre enveloppés d\'une ferviette fine
dans la bouche
da malade , pour y rece"
voir l\'inftrument auifi-tôc qu\'il a fait
fortir îa dent ou ia racine, ou qu\'il en ^
feulement emporté les parties extérieU"
res, comme aifez fouvent le cas arrive»
lorfqu\'elles font tellement
pourrie^
qu\'elles cedent au moindre effort.

Quelquefois les racines font fort écaf
tées ou crochues; quelquefois aufîi l\'al"^
véole eft fore épais & adhérent, ce q^i
fait que fouvent le crochet fe cafi^e , q^^®
l\'alvéole fe fradure,ouque I\'inftrumen^

-ocr page 180-

Be VArt du Bcnt\'ijlc.^ 15^
emporte quelque portion avec la ra-
pine fans qu\'on puiife éviter ces acci-
dens. On ne peut même quelquefois
avec le meilleur pélican emporter de
certaines molaires autre chofe que la
couronne. Quand les dents font ainfi
«îfpofées , ou que la couronne d\'une
molaire eft plus foible que les racines
que l\'alvéole , elles fe caffent nécef-
Jairement dans l\'opération : le plus lia-
bue Dendfte ne peut ni prévoir ni em-
pêcher cet accident. Enfin , quelquefois
n\'eft pas même po/fible de faire fortir
•^^ns le moment les racines. Dans tous
^es cas, il faut différer & remettre l\'opé-
ration à quelques jours, ou plus long-
^ems, quand il ne fur vient pas de fluxion,
^ur la faciliter en relâchant ces parties!
J^ans la fuite ces racines fe découvrent,
Portent au dehors, & font expulfées tant
par le fuc offeux qui s\'accumule dans le
de l\'alvéole , que par fa contra(51:ion
Naturelle , & cela d\'autant plus facile-
J}jent que les dents de la mâchoireoppo-
^e
ne peuvent plus empêcher leur pro-
^^»gement. D\'ailleurs, les racines fe
^elachenc & deviennent par ce moyen
\'■es-aifées à ôter fans faire prefqu\'aucun

-ocr page 181-

16o De l\'An du Dentijle.

ma! ; au lieu que quand la dent s\'eft
caflee, cette opération étoit impratica\'
ble. Lorfque la dent n\'eft pas caftée au-
delà de la voûte , la partie qui refte caufs
affez fouvent de grandes\'douleurs. Dans
ce cas, comme il n\'eft pas poffible d\'à volt
k racine , il faut cautérifer & brûler le
cordon, de îa maniéré que je l\'ai
marque»
Souvent on eft promptement guéri pa"^
le moyen du bouton de feUj & p^i\'-"
l\'ufage de l\'ean tiede. Quand malgré cela^
les douleurs fubfiftent, & que la iluxiort
furvient peu de tems après, l
\'extraélion
de la racine eft alors facilitée par l\'en-
gorgement & le gonflement de fa meni\'
3rane qui fe relâche qui fait dilate^
l\'alvéole.

explication

-ocr page 182-

I

f •

\'f
* ;

fj,»-.

I "\'\'i"

-ocr page 183-

Fu,\'. 3

Mfi

-ocr page 184-

De t Art du Dentlße. \\ 61

EXPLICATION

DE LA

DIXIEME PLANCHE,

Fig. -pince droite qui fert à ôter
certaines dents.

A. Le corps de cet inflrument.

BB, Les deux extrémités de la pince qui
faißt la dent.

CC. Les \'deux extrémités qui fervent
de manche à cet inflrument.

Fig. W. Le pouffoir en cifeau,

D. Sa tige.

E. Son extrémité tranchante.

F. Son manche.

Fig. III. Sorte de fonde pour s\'affurer

la cavité & de la fenfibiiité d\'une dent,

G. Son corps.

H. Son extrémité plätte {$> pointue\'^

I. Vextrémité oppofée arrondie &
pointue.

Tome ÎL

-ocr page 185-

I De l\'Art du Dentïjle.

XI.

Des hémorrhagies qui furvlennent après
l\'éxtraciion d\'une dent,

1j\'EXTRACTION d\'une dent ou d\'une
racine peut caufer une hémorrhagie qui
dure quelquefois long-tems, exténue
beaucoup le malade, & peut le mettre
dans un état fâcheux, fi on ne
l\'arrête
promptement.

Ces fortes d\'hémorrhagîes , qui font
rares & qui ne dépendent pas du Den-
tifte , proviennent de ce que l\'artere qui
porte la nourriture à la dent, ou quel-
que autre artere , fe trouvant confîdé-
lable, s\'eft déchirée dans l\'opération,
ce qu\'on ne peut guere éviter lorfqu\'on
emporte avec la dent quelque portion
d\'al\\ éole qui eft adhérente à la racine.
Or, plus ces vaiffeaux ont de diametre ,.
îlus ils peuvent fournir de fang,
S^plus
\'hémorrhagie a de durée ; cependant
ces hémorrhagies , quelques vviolentes
qu\'elles foient, s\'arrêtent aifémeiit de la
jaiaiiiere que je vais décrire.

-ocr page 186-

Be TAn du Bemïjîe,

n fauc d\'abord\', fans s\'effrayer, enlever
les caiiiots de fang qui font quelquefois
fort
gros , pour s\'affurer d\'où il fort. Si
le fang vient du fond de l\'alvéole,
on
a de la charpie toute prête, & l\'on en
fait un petit tampon, dans lequel eft en-
veloppé un peu de vitriol en poudre.
On trempe ce petit tampon dans le vi-
naigre, ^enfuite on l\'introduiE dans le
fond de l\'alvéole, qu\'on acheve de rem-
plir avec de la charpie, trempée aufîî
dans du vinaigre-, il faut que cette char-
pie excede les bords de l\'alvéole pour
que les compreffes qu\'on y applique
puiffent la comprimer, & rafruje"^tdr au
fond de l\'alvéole. Ces compreffes doi-
vent êsre d\'une largeur proportionnée
à la brèche qu\'a laiffée îa dent; elles fe-
ront multipliées jufqu\'à ce que les dents
de la^mâchoire^, ou au défaut de dents ,
la mâchoire même oppofée, prefTencas
compriment encore ces compreffes qui
auront pareillement été crempées dans
du vinaigre, afin de les appliquer plus
facilement. Si l\'hémorrhagie vient du
Coté de la joue, foit des gencives , foÎE
du corps de la mâchoire , parce qu\'on
emporté quelque portion d\'alvéoie

Oi|

-ocr page 187-

ï 64. De rArt du Dentijîe.
qui y étoit adhérente, alors, après avoir
enlevé le cailiot de fang, on rernpirt
exa(?cemenc i\'alvéole de charpie imbi-
bée de vinaigre , dans lequel on aura
fait fondre un peu de vitriol. Enfuite
on a une compreffe affez longue , large
d\'environ trois lignes, & affez épaiffe ,
dans laquelle on aura mis & enveloppé
du vitriol en poudre : on trempe cette
longuette dans le vinaigre; on l\'appli-
que enfuite le long des gencives, fur l\'en-
droit d\'où fort le fang. On met fur la
charpie une compreffe affez longue pour
la renverfer fur ia longuette ; on main-
tient cette compreffe en y entaffant une
fécondé & troifieme compreffe, enforte
que la mâchoire oppofée les comprime
fuffifamment vers le fond de l\'alvéole;
On fait en même-tems approcher & bien
ferrer les deux m.âchoires l\'une contre
l\'autre, en.mainrenant: toujours la com-
preflelonguetce au-dehors, en appuyant
d\'une main far la joue, à l\'endroit où elle
fait une élévation. A ce même-endroit on
applique une autre compreffe fortépaiffe,
large d\'environ deux travers de doigt,
& longue de quatre ; on fait enfuite le
bandage appelle le CAer^re
Jîmple , &

-ocr page 188-

De rAn du Dentifte. i ^^
l\'on en fait paflei: les trois tours fur cette
comprelfe. Après tout cet appareil on
fait tenir le malade dans un fauteuil
commode; là il porte fa main
fur le ban-
dage & fur fa joue, S>i le coude appuyé
fur le genou , ou fur le bras du fau-
teuil , il penche la tête & la foutient
fur fa main , jufqtt\'à ce qu\'il foit las de
cette attitude. La compreflicn par ce
moyen , étant faite exaftement, l\'hé-
niorrhagie ceiTera bien tôt. Âa lieu de
vitriol , on peut fe fervir d\'agaric de
chêne qui eft reconnu pour l\'aftringent
le plus propre a arrêter ies hérnorrha-
;ies , ainfi que M. Faget l\'a prouvé paf
^lufieurs expériences qu\'il en a faites
à
"Hôpital de la Charité, dans le tems
cju\'il en étoit Chirurgien-Major.

J\'ai eu quelques occafionsd\'employer
1 agaric préparé de îa façon que M. Fa-
get l\'enfeigne , & il m\'a parfaitement
^éuffi.
J\'en\'rempiiftbis J au lieu de char-
pie, le trou d\'où croit fortie la dent, &
mettois defllislacompreiTedelamême
"Manière que je viens de le décrire. L\'a-
garic a l\'avantage de n\'être point défa-
§^éabie au
foÛc comme le vstriol. SI

O

-ocr page 189-

166 De FAn du Dentijîe.
i\'hémorrhagie vient de la gencive 011 de
quelque dépei-dirion de l\'aivéole, on
applique au lieu de la compreile lon-
guette un morceau d\'agaric, auquel on
donne à-peu-près la même forme, ôc
qu\'on alfojettic par d\'aurres compreifes

par le bandage convenable.

Voici plufieurs obfervations d\'hé-
niorrl-iagies que j\'ai arrêtées par hs
moyens que je prefcris.

Observation L

En 1748 , le nommé * * Fripier fur
le Pont-neuf, étant venu me trouver
je lui^ ôcai à ia mâchoire fupérieure une
premiere petite molaire qui étoit entiè-
rement gâtée, & qui lui faifoic beaucoup
de douleur. L\'opération fe fit avec tout
le fuccès pofiible , fans le moindre déla-
brement de gencive ni d\'alvéole , & ii
eri fortit très-peu de fang. L\'opération
faite , il s\'en alla, ne faignant déjà pref-
que plus ,
Se un quart-d\'heure après, il
ne parut pas une goutte de fang. Huit
jours s\'écoulerent en cet état : le neu-
vieme jour
il vint chez moi tout fai-
gnant,
^ il me dit qu\'il y avoir plus de

-ocr page 190-

Be l\'An duBentijle, iSj
deux heures qu\'il perdoic une grande
quantité de fang. Je rrse mis en devoir
d\'arrêter cette hémorrhagie tardive,
ï^our cet effet, j\'ôtai le gros caillot de
^ang qu\'il prenoit pour un morceau de
chair, & quand mon appareil fut prêt,
}e l\'appliquai de la façon que j\'ai dit ;
j\'enveloppai dans la charpie le vitriol
en poudre, & je mis compreffe fur
compreffe pour que.la mâchoire com-
primât le tout. Une heure après, ayant
c»té les compreflès, il ne laifTà que le
îampon de charpie dont il fe débarrafîa
le fur-lendemain, & l\'hémorrhagie n eft
plus revenue.

On trouvera furprenant, fans doute,
qu\'au bout de neuf jours il foit furvena
^lîe pareille hémorrhagie. L\'artere qui
^a produifoit fe déchargeoit fûrement
dans l\'alvéole, mais je ne puis croire
qu\'elle vînt du fond de cet alvéole
même. La nature eft fujette à tant de
\'Variations, quec\'étoit apparamment une
fingularité dans la route de cette artere,
qui, au lieu d\'entrer dans l\'alvéole par
Je fond de cette cavité, y entroit du côté
qui répond â la joue. Or, comme il n\'eft
guère poffible d\'ôtêï les petites molaires

-ocr page 191-

De l\'Art du Dentifce.
fans écarter plus ou moins l\'alvéole »
l\'écartement que je fis avoit comprime
cette arte^re au point d\'empêcher pen-
dant neuf jours le fang de fortir; mais
les parties écartées s\'étant rapprochées
peu-à-peu , comme c\'eft l\'ordinaire
après l\'extradion d\'une dent, & Fartere
n\'ayant plus été comprimée , l\'efibrc du
fang aura fait fortir le caillot & l\'hémot-
rhagie s\'en fera fuivie. En effet, il n\'y a
guere d\'apparence que quelque artère
qui entroit dans la lame écartée de l\'al-
véole , ayant été diftendue & fes mem-
branes déchirées , il fefoit fait un ané-
vrifme.

On pourroit encore attribuer cette
hémorrhagie finguliere à la fuppuration j
qui aura fait tomber le caillot de fang î
car, il faut remarquer que les extrémités
des vaiileaux qui parcourent les parties
olfeufes, fe froncent & fe bouchent plus
lentement que dans les parties charnues,
Se comme, 24 heures après i\'extraéiiort
d\'une denc, il furvient toujours une lé-
gère inflammation, tant à la gencive qu\'à
l\'alvéole, le fang alors fe porte beau-
coup plus abondamment dans ces par-
ties j ce qui fait que les hémorrhagies

qui

J

-ocr page 192-

De l\'Art du Demijle. 1
qui doivent arriver après l\'extraétioii
dune dent, font plus fortes au bout de
douze iieures , ou de vingt-quatre heu-
res , qu\'im quart-d\'heure après. Quant
à celle-ci , il faut avouer que
je n\'en
avois jamais vu furvenir une pareille au
bout de neuf jours. Au refte, quelle que
foit la caufe de cet étrange retardement,
le fait eft auffi vrai, qu\'il eft fur que j\'ai
fait ceffier dans le moment l\'héniorra-;
gie
f ôc qu\'elle n\'eft plus revenue.

Observation ii.

Au mois de Juillet 1750, M. **
demeurant dans la même maifon que
moi , avoir cà la mâchoire fupérieure
Une premiere groffe molaire caffee depuis
fort long-tems par la carie qui l\'avoic
minée : il y reftoit trois racines qui vin-
rent à lui faire de vives douleurs fuivies
d\'une fluxion alTez confidérable. M. Bou-
langer, Maître Chirurgien, lui fit met-
tre les cataplafmes convenables fur la
joue qui étoit d\'une groffeur monftrueu-
fe. Enfuite après l\'avoir faigné deux ou
trois fois, il lui fit faire ufage du
laîC
tiède qui fait très - bien en pareil casj
Tome IL P

-ocr page 193-

170 Dc t An du Dentijle,
Ces remedes n\'empêcherent peint qu\'il
ne fc fît d\'abord un épanchement, & en-
fin un abfcès au haut de la gencive du
coté de la joue. M. Boulanger ouvrit cet
abfcès pour évacuer la matiere ; il en
fortit peu de fang , mais beaucoup de
pus fort épais & fort noir. J\'allai voir ce
jour-là le malade, comme voifin. Il me
parla de fes maux, ce qui me donna oc-
cafion de regarder fa bouche. A la feule
infpeébion , ]e le blâmai fort de n\'avoir
pas fait ôter plutôt les racines d\'où
provenoit tout le mal; j\'ajoutai qu\'il
falloit même ne pas avoir égard àla flu-
xion, & que le plutôt qu\'il pourroit faire
faire cette opération feroit le meilleur ,
parce que celTant la caufe , la maladie
celferoit. Il me répondit qu\'il n\'oibic
prefque plus fe faire "tirer aucune dent^
parce que toutes les fois qu\'on lui en
avoit ôtées , il lui étoit furvenu une
hémorrhagie confidérable , & qu\'à l\'ex-
traétion de la derniere qu\'il s\'étoit fait
tirer en province, il avoit perdu une
grande quantité de fang , ce qui l\'avoit
extrêmement afFoibli. Je l\'affurai qu\'il
n\'avoit rien à craindre , Se qtie fi par
Kafard ii venoit une nouvelle hémor-

-ocr page 194-

De tAn du Demljîe, i y i
thagîe , je 1 arrêcerois auffi facilement
qu\'une faignée du bras. Sur cette pro-
nieife, il confentit à fe faire tirer fes ra-
cines après la Huxion , s\'il en reffentoit
des douleurs. Cinq jours fe paiîerent de-
puis qu\'on eût ouvert le petit dépôt j
fans que le malade fût foulagé, ni même
que fa fluxion parût diminuée. Comme
je le voyois tous les jours , je lui difois
chaque fois que la guérifon dépendoic
de l\'extraction des racines. Enfin, voyant
qu\'il fouffroit toujours , & fe fentanc
exténué , parce qu\'il y avoir déjà neuf
jours qu\'il ne vivoic que de bouillon, il
ie détermina à l\'opération. J\'ôtai fans
effort trois racines qui fe trouvoient
fort relâchées par fépanchement faic
dans l\'alvéole & aux environs, pendant
l\'extraaion. _ Il forrit du pus, pais un
fang fort noir & fort épais. Un demi-
quart-d\'heure après 5 le fangcefîà totale-
ment, & la fluxion diminua à vue d\'œiî.

, au bout de quatre jours, on me fie
\'^ver à quatre heures du matin pour fe-
\'^ourir le malade, qu\'une affreufe hé-
^^orjrhagie venoit de furprendre. j\'allai
dans l\'inftant chez lui, je k trouvai bai»
Si^é de fang dans fon lit, où on l\'adroit pu

Paj

-ocr page 195-

i^i DeVAn âuDtr.np\'
rainafler par caillots avec la main j ainfi
l\'on peut juger s\'il en avoit beaucoup
perdu. Je me mis donc en devoir d\'ar-
rêter \'ce fang. Comme j\'avois apporté

«ne petite pierre de victiol, j\'en ratiifai
fuffifamment, je l\'enveloppai dans de
la charpie que je trempai dans le vmai-
crre. Je fis enfuite plufieurs petites com-
preffes, &
quand tout fut prêt, j\'ôtai
les caillots de fang de fa bouche. Lorf-
que je fus pour porter le petit tampon
de charpie dans l\'alvéole , je^ vis que le
fanc^ ne venoit point de-là. J\'écartai
donc la levre & la joue^ & je m\'apper-
çus que le fang fortoit de l\'ouvermre
4ue la lancette avoir faite à la gencive ,
pour donner une ilîue à la matiere épan-
chée. Alors je fis un autre appareil je
taillai une comprelfe en longuette, dans
laquelle j\'enveloppai du vitriol en pou-
dre que je trempai dans le vinaigre;
|e l\'appliquai fur l\'ouverture qui n\'étoic
pas plus grande que celle qu\'on fait d\'or-
dinaire pour une faignée. Cette com-
preffe bienajuftée, c\'eft-à-dire, couchée
le long des gencives & fut l\'ouverture,
je la fis maintenir par un garçon. J\'en
mis une autre fort épaiifé & feche far la

-ocr page 196-

De l\'Art du Dentijîe, î 71
joue vis-à-vis de la premiere , puis j af-
fujettis Tune & l\'autre avec le bandage
nommé
monoculus , mais dont les tours
étoient plus ferrés & plus multipliés que
celui qui fe fait ordinairement. J\'opérai
de cette maniere une compreffion affez
forte. Je fis mettre enfuite la main du ma-
lade fur fa joue & fur le bandage, de fa-
çon qu\'il y repofoit fa tête, en appuyant
le coude fur fon oreiller, ce qui augmen-
ïoit encore la compreifion, & l\'hémorrba-
gie fut arrêtée dans le moment. Il garda
cette fituation pendantun quart
-d\'heure,
& il ne vint plus de fang. Douze heures
après, je lui
ôtai le bandage , & ne lui
laiffai que la longuette 3 qui étoit fur la
gencive & fur l\'ouverture d\'où forroit
îe fang : dès la nuit fuivante j elle tomba
d\'elle-même , fans qu\'il parut de fang
davantage.

Cette hémorragie ne paroât pas moins
étonnante que la premiere. Comment,
au lieu de venir immédiatement après
le coup de lancette, ne
s\'eft-elle, décla-
i^ée que neuf jours après? Poirr expliquer
cette efpece de phénomène, il faut ob-
server 1°. que le fujet étoit extrêmement
î^eplet U. fanguin
5 z®. que dans le tems

P iij

-ocr page 197-

ï74 VAn du Denûfie.

«le la faignée la fluxion étoit fi forte,
qu\'elle empêchoit ie cours du fang par
la comprefiion que le fluide humoral ar-
rêté & épanché faifoit aux arteres , de
façon qu\'alors la circulation fe
faifoit
très-difficilement, parce que la pulfa-
tion de l\'artere étoit fi foible qu^elle
ji\'empêchoit pas le caillot de fang d\'en
boucher l\'ouverture. Or, la fluxion étant
diffipée par l\'estraétion des racines,
l\'artere ceßa d\'être com.primée, & le
lang força le caillot qui bouchoit l\'ou-
verture de ce vaiffeau : de-là le retard
de l\'hémorrhagie & fon éruption fubite.

Observât: on III.

M. l\'Abbé ** demeurant fur le
Quai de la Mégilferie 3 fe fit ôter au
mois de mai 175©, à la mâchoire infé-
rieure, une greffe dent qui croit la der-
niere molaire. Cette dent qui avoit été
fort tardive , s\'étoit gâtée peu de tems
après fa fortie j &; elle s\'étoit caffée dans
l\'extraétion , fans qu\'il y eût de îa faute
du Dentifte , parce qu\'elle étoit fort re-
culée au fond de la bouthe, & logée ,
pour ainfi dire , derriere l\'apophyfe

-ocr page 198-

DcTArtduBentijie. î 5
coronoïcîe ; ce qui arrive quelquefois j
quatid ia mâchoire n\'a pas affez d\'éten-
due pour ioger les dernieres dents. De-
puis que ceile-ci fut caffée , il fortit un
peu de fang pendant tout le jour. Ce-
pendant le malade fe coucha, & même
dormit affez bien. Mais , s\'étant éveillé
vers les cinq heures du matin , il fuc
très - furpris de fe trouver îa bouche,
pleine de fang , & d\'en voir une grande
quantité dans fon lit. Il fe leva fort ef-
frayé, & fe rinça plufieurs fois la bou-
che avec du vinaigre & de l\'eau ; mais
le fang continuant toujours à couler, il
s\'informa où il pourroit aller pour faire
remédier à cet accident. On l\'envoya
chez moi à fept heures du matin : j\'exa-
minai l\'endroit d\'où fortoit le fang, &
|e m\'apperçus qu\'il reftoit encore envi-
ron les trois quarts des racines de la
dent caffée. Je lui dis que, s\'il étoit pof-
fible d\'ôter les débris de ces racines ,
l\'hémorragie
s\'arrêceroit fur le champ
d\'elle-même; mais que le fuccès étoic
fort douteux , & que je ne voulois pas
tenter une opération qui îe feroic beau-
coup fouffrir inutilement. Je me con-
tentai donc d\'arrêter fon hémorragie,

P iv

-ocr page 199-

1De VArt du Denüße.
àe
la même maniéré que j\'avois arrêté
les précédentes. Je lui recommandai feu-
lement de garder tout l\'appareil jufqu\'i
midi, d\'ôter alors les compreffes, & de
lailTer la charpie; ce qu\'il fit ponauel-
Jement. Il dîna à fon ordinaire, en ob-
fervant de ne manger^que du côté qui
n\'éroit point malade, & foupa
le foir.
Mais le petit tampon de charpie qui n\'é-
toic app iqué que fur une racine étant
tombé, le fang revint. Il accourut auffi-
îoc chez moi : j\'arrêtai de nouveau le
fang, & je lui appliquai le bandage ap-
pellé
h fronde j d\'abord pour plus de fû-
re cê , & puis afin que la compreflion fe fît
également pendant le fommeil. Il paiTa
la nuit fans qu\'il vînt de fang. Le len-
demain matin il ôta le bandage & les
compreffes : la charpie tomba auffi dans
le jour, fans qu\'il parût une goutce de
lang J enfin, il fe coucha le foir, & s\'en-
dormit tranquillement. Mais le matin il
s\'éveilla à fix heures encore plein de
fang5 il fe leva & vint chez moi au plus
vite. Voyant donc que cette hémorra-
gie revenoit toujours, & qu\'on ne pou-
voit avoir les racines, j\'appliquai plu-
fieurs fois le bouton de feu fur les vaif-

-ocr page 200-

De VArt du Dentïjle. 177
féaux ; je pris enfuite une aiguille à tri-
cotter que je courbai j & je la portai
jufqu\'à trois fois fur les mêmes vaiffeaux
& dans le canal ; enfin, je fis entrer un
petit tampon de charpie dans le canal
de la racine d\'où le fang fortoit j je mis
par-deifus un autre tampon de charpie
& les compreffes à l\'ordinaire, en fai-
fant appuyer & joindre les deux mâ-
choires. Le fang fut fi bien arrêté, qu\'il
ifefl plus revenu depuis.

§. X I L

Des Jluxlons qui fuivent Vextraclion
d\'une Dent.

Après Textraétion d\'une dent , iî
furvient quelquefois une fluxion oc-
cafionnée, foit par la difpofition du
fujet, foit par les éclats qui fe font à
l\'alvéole par le déchirement de la gen-
cive, ou par les adhérences de l\'alvéole
avec les racines de la dent, foit par k
mauvaife conformation des racines me-
mos, foit enfin parce qu\'on fe
fera impru-
demfnent expofé à un air trop froid après
l\'opération. Dans tous ces cas a ii faut

-ocr page 201-

lyB De\' VAn du. Bentifie\', I
rafraîchir le malade, & iui faire les re-
medes que j\'ai prefcrits en traitant des
fluxions. Un remede afTez bon qu\'il y faut
joindre , c\'eft de faire recevoir au ma-
lade la famée d\'eau bien chaude. On le
place auprès du vafe, là tête enveloppée,
de façon que toute l\'évaporation s\'y
porte direébement & la pénétré bien. i

^11 peut arriver qu\'après l\'extraélion
d\'une dent la fluxion qui étoit déjà
commencée augmente , fans qu\'il fe foit
fait de délabrement ni à l\'alvéole, ni à la
gencive. Cependant, fi Ton n\'avoit pas
ôté cette dent, fi l\'on eiît voulu laifler
palTer la fluxion , elle feroit devenue
fi confidérable qu\'elle ne fe feroit ter-
minée que par un abfcès : au lieu que la j
dent étant êtée dans le rems que com- î
mençoit la fluxion, le fang que l\'opéra- ;
tion fait fortir de l\'endroit même qui
étoit engorgé, fait diminuer cette fluxion
au moins des trois quarts ,
8c fonvenc
éviter l\'abfcès.

Quand la fluxion eft toute formée,
pourvu que le malade puiffe ouvrir la
bouche autant qu\'il eft befoin, il ne faut
5as attendre qu\'elle foit paffée. En étant
la dent, l\'abfcès crève, & fort par l\'ai-

-ocr page 202-

T>£ l\'Art du Dentijîe. î 7 9
véole. Ainfi l\'on évite par-là qu\'il ne
perce en dehors , & que la plaie ref-
tanc fiftuleuîe ne défigure le vifage par
fies cicatrices. On empêche auffi que îe
féjour de la matiere ne faife des progrès
& quelque défordre à la mâchoire.
Il
y a de plus cet avantage , que la dent
alors eft très-aifée à ôter , parce que fes
racines font relâchées par le pus qui les
inonde. La fluxion difparoît donc, & le
dépôt fe vuidant prefque toujours par
l\'ouverture que la dent laiffe, le malade
eft promptement foulage.

Si le dépôt eft confidérable, fur tout
à la mâchoire inférieure , quoique la
dent foit ôtée il eft quelquefois nécef-
faire d\'ouvrir la tumeur ail dedans de
la joue , ou de fe fervir de comprefles
expulfives, pom" accélérer l\'évacuation
de l
\'abfcès &: fermer promptement le
fac. Quand l\'abfcès fe porte au-dehors ,
on y fait un bandage convenable , pour
n\'être point obligé de l\'ouvrir. Il eft
donc contraire à l\'expétience & très-
faux , comme on le penfe vulgairement 5
qu\'on ne doive point ôter une denc
pendant que la fluxion dure. Quelques

-ocr page 203-

18 o De VArt du Dentifie.

Obfervations fufEront pour détruire ee
préjugé.

Observation L

La petite fille de M. * * ^ Marchand
de galons, âgée de trois ans & demi,
ne faifoit depuis huit jours que crier
fans^ celfe, & fa joue devint tellement
enflée, qu\'on m\'envoya chercher pour
vifiter fa bouche. A l\'infpedion je trou-
vai que deux molaires nouvellement
forties étoient gâtées l\'une à côté de
l\'autre, par la fluduation de l\'humeur
qui faifoit gonfler la gencive. Je dis aux
parens qu\'il falloit ôter les deux dents,
fans avoir égard à la fluxion , pour em-
pêcher que fabfcès ne perçât en dehors ^
& ne laifsât quelque cicatrice qui défi-
gureroit l\'enfant J les glandes fe trou-
vant très-dures & très-enflées fous la
gorge._ Je fis donc tenir la perice fille ,
& je tirai les deux dents. Pendant l\'opé-
ration, l\'abfcès crêva; la matiere fit
même un jet qui alla jufqu\'à mon vifage^
& elle fut totalement évacuée de l\'al-
véole, de la gencive, & des environs

-ocr page 204-

Be VArt du Bcnùjle. s g î
des racines. Je fis mettre enfuite fur
la- gorge de l\'enfant îes cataplafmes
Convenables , pour diflîper l\'engorge-
ment des glandes. Le jour même cette
Petite fille fe trouva parfaitement fou-
agée J fes cris celferent, & elle re-
pofa plufieurs heures. Le lendemain îa
fluxion difparucj & les glandes furent
défenflées. Cet exemple fait voir que ,
fi on avoit attendu que la fluxion fût
palfée , l\'abfcès n\'auroit pas été guéri ,
ni fi promptement, ni avec le même
fuccès.

Cette Obfervation prouve encore que
îes dents des enfans, dès leur plus ten-
dre enfance & aufli-tôc qu\'elles ont per-
cé, ont befoin de l\'œil du Dentifte.

Observation il

Sur un, dépôt formé dans le Jinus maxll^.
taire.

Un fils de M. D^* % Avocat au Par-
lement, de l\'âge d\'environ douze ans,
avoit une premiere petite molaire fupé-
rieure qui étant gâtée lui caufa une flu-
ùon, & un dépôt dans îe finus maxil-

-ocr page 205-

I s z De l\'Art du Dentifte.
■ îaire. Je fus mandé pour voir le malade :
je trouvai la petite molaire en mauvais
état, & ne doutant point que ce ne fût
elle qui produifoit les accidens, je ne
balançai point àloter. Mais il fallut au-
paravant combattre le préjugé du pere,
qui croyoit que l\'on n\'ôtoit point de
dents pendant une fluxion. Cependant,
comme j\'avois la confiance , on s\'en
remit à moi-, par conféquent j\'eus la
liberté d\'agir. J\'ôtai donc la dent gâtée,
& par le trou que fa racine occupoit, il ,
fortit quantité de matiere féreufe. L\'ex-
traclion faite , j\'appuyai un peu fur la
tumeur; elle rendit encore beaucoup de
matiere J, & quand tout fut évacué, je
îailfai aller les chofesau gré delanacureS
Comme ii s\'étoit formé un dépôt confi-
dérable dans le finus maxillaire , il fe
vuida par le trou de la racine pendant
&C après l\'opération.. Ce trou fe boucha ,
comme c\'eft l\'ordinaire, en peu de jours ;
mais les parois du finas, du côté de la
joue, s\'étoient tellement dilatés par la
quantité du fluide & par la durée de fon
féjour , que ce finus avoit perdu fon ref->
fort, ce qui fit que le lac fe remplit de
nouveau. En effet, quelques jours après

-ocr page 206-

DeTAn du Dentijîe. i8|
je retrouvai le finus auffi plein que la
premiere fois. Voyant donc que la joue
^ coté du nez étoic toujours fort groffie^
je fentis la faute que j\'avois faite de ne
pas avoir mis dans le trou de la racine
^•ne tente allez longue , pour aller jufques
dans le fmus ; comme auffi de ne pas
avoir fait une comprefflon fur la-joue
^ fur la tumeur, afin que pat le moyen
des compreffies & du bandage la matiere
ppuifée prit fon cours par le trou que
■»a tente entretenoit. Je tâchai de ré-
parer cette faute, en ouvrant le finus
près de la levre au haut de la gencive j,
<:omme étant ia partie la plus déclive.
Je n\'eus pas grande peine à y faire entrer
\'e biftouri, parce que la partie offieufe
s y trouvoit fort mince & faifoic une
faillie en cec endroic. L\'ouverture faite,
j\'y mis une petite tente pour empêcher
Qu\'elle ne fe fermât. J\'appliquai fur la
joue & fur la tumeur des comprefies &
^n bandage. Le lendemain j\'ôtai la tentej
je la renouvellai pendant plufieurs jours,
^ chaque fois je faifois fortir le pus qui
^ étoit amafie. Quand le finus eût repris
^a forme naturelle, & que ia tumeur fût
entièrement difiipée, J\'ôtai là tente ^

-ocr page 207-

« s4 Be l\'Art du Bentifie.
|e recommandai de continuer la com-
jieflion fur la joue, pour éviter que la
ympheféreufequi arrofe ordinairement
e finus s\'y amaflTànt en trop grande
quantité n\'en écartât de nouveau les
paroiis. On négligea de faire cette com-
preffion , & il reparut une petite tumeur
qui dura pendant plus de fix femaines
mais qui fe diffipa peu-à-peu par l\'appli-
cation d\'un petit bandage qu\'on mettoic
le foir au malade.

J\'ai vu plus d\'une fois le même cas :
l\'ai toiijours trouvé que ces fortes de
dépôts étoient produits par la même
dentj & que le finus étoit ouvert
aU
fond de l\'alvéole à l\'extrémité de la ra-
cine. C\'eft pourquoi , après avoir ôté
la denr, je pris le parti de faire fortir le
fluide, & de mettre une tente aflez lon-
gue pour aller jufqu\'au finus. Mais, quoi-
que j\'eufle attaché cette tente avec un
lil aux dents voifines, le bandage ex-
pulfif & la préfence du fluide la déran-
geoient toujours, de forte que le
finuS
fe formoit trop tôt; ce qui m\'obligea
une fois de le rouvrir par le trou de l\'al-
véole que ia tente avoit confervé. J^
portai une petite éponge dans l\'alvéole

èC\'

-ocr page 208-

Be VArt du Dentijle. 185

& à l\'entrée du finus. Pour pouvoir la
retirer quand je voudrois, je l\'avois au-
paravant attachée à un fil affez fort qui
s\'entortllloit à une dent voifine.
Je pan-
fois tous les jours le malade, en retiranc
l\'éponge que je renouvellois à chaque
panfemenc, & c\'efl: ainfi que je l\'ai gué-
ri.
J\'ai cependant encore remarqué un
autre inconvénient que produifent l\'é-
ponge & la tente.
Pour empêcher celle-
ci
de fortir, il faut qu\'elle ait un certain
Volume alors elle bouche l\'ouverture,
la matiere qui s\'amaffe, ne s\'évacue qu\'à:
chaque fois qu\'on l\'ôre.
L\'éponge d\'un aU"
tre côté fe gonfle, en s\'imbibant de-la ma-
tiere,
8c bouche l\'ouverture, en forte que
la compreflion peut difficilement rap-
procher les parois offeux.
De plus, & la
tente & Képonge donnent un mauvais
goût dans la bouche.
Le remede à cet
Inconvénient, efl: de pan fer
fouvenr le
malade & de les changer chaque fois.
IVIais le féjour du fluide, pour peu qu\'il
y en ait, eft: toujours un grand obfl:acle
à la prompte guérifon du finus.
Si après
l\'extraéïion de la dent, on s\'en tient à
ta compreffion , & que le dépôt foit
confidérable ,-l\'alvéole fe refferre & fe
Tome IL Q

-ocr page 209-

De rArt du Dentlße:
bouchera même j» ainfi que la gencive ^
en très-peu de tems. Le fluide alors ne
pourra s\'évacuer enriérement, ce qui
produira à côté du nez une élévation
qui refle long-tems, & défigure le vi-
fage , fans faire à ia vérité beaucoup de
douleur. Pour remédier à cet incon-
vénient,, j\'ai imaginé une canule de
plomb, ( cette canule eft repréfentée à
la pl. IX. ) aftez longue pour entrer dans
le finus, & y refter. Je l\'attache de deux
côtés aux dents voifines, par le moyen
de deux petites avances aflez minces
qui fe renverfent &: s\'aptpliquent fur les
dents. Une feule dent fuffit pour aflii-
jettir cette canule , au moyen d\'un
fil
qui s\'engage dans les trous de fes avan-
ces. Ainfi le fluide coule par la canule ,
& fort à mefure qu\'il s\'épanche dans le
finus maxillaire. D\'un autre côté, la com-
pte flion qu\'on fait en dehors fur la joue
produit plus d\'effet, & remet prompte-
ment ce finus dans fon état naturel.
Il
n\'eft queftion que de laiffer cette canule
fept à huit jours : les parties oflTeufes re-
prennent bien-tôt leur reffort. Après
que Î3 canule eft ôtée, il faut cependant
continuer pendant quelques jours ds

-ocr page 210-

De VAn du Dentijîe. 18 7
comprimer encore la joue. L\'avantage de
cette canule, eft de ne pouvoir fe déran-
ger , & de ne communiquer à la bouche
aucun mauvais goût ni aucune odeur. J\'ai
plus d\'un garant de fon fuccès ; mais je
me borne à l\'obfervacion fuivante.

Observation IIL

Au mois d\'Août 1751 , un Ouvrier,

demeurant rue Phelipeaux , chez un
^^ourelierj vint chez moi, pour fe faire
®cer une dent : c\'étoir une premiere pe-
tite molaire de la mâchoire fupérieure.
Cette dent qui étoit fort gâtée lui avoit
caufé iix mois auparavant une violente
fluxion y de plus , il s\'étoit formé dans I9
finus maxillaire un dépôt très-confidé-
table qui le défiguroit beaucoup , & il
avoit à côté du nez une tumeur qui aug-
îneucoit de jour en jour. Je lui ôtai donc
fa dent,
ôc après avoir évacué la ma-
nière qui étoit fort abondante , je lui ap-
pliquai ma canule de plomb , avec u^
ï^andage pour rapprocher les parois du
finus qui étoit fort dilaté. Quelques
jours après je lui ôtai la canule, & je lui
Recommandai bien de continuer encore

Q ij

-ocr page 211-

18 8 I>t VArt du Dentijîe,

quelques jours à comprimer fa joue. 0
n\'eu fie rien , & cependant le finus re-
vint dans fon état naturel ^ en forte que
le dixieme jour on ne s\'appercevoit plus
de la moindre chofe, &c qu\'il fut par-
faitement guéri.

X 1 I I.

Dépôts, abfces, & engorgemens des ca-
naux dentaires , provenant de Dents
ufées, agacées , &e,

IjE s dents ufées , gâtées, agacées pro-
duifent quelquefois dans les canaux den-
taires de petits abfcès & des engorge-
mens , qu\'il feroit dangereux de négliger.
En voici quelques exemples.

Observation L

La Femme-de-Chambre de Madame
de * * demeurant à l\'Hôtel de Lon-
gueville, vint il y a quelque tems che2
moi.
Elle fouffroit beaucoup depuis plu-
fieurs jours d\'une incifive qui étoit gâ-
îée, & vouloit k faire ôter fur le champ

-ocr page 212-

De VArt du D entiße, i

Maïs ayant reconnu la caufe du mal, je
me contentai de lui trépaner fa dent. Il en
fortit quelques goûtes de matiere fangui-
ïiolente, & elle fe trouva guérie. Elle a
par ce moyen confervé fa dent qui a
enfuite été plombée , & n\'a pas reffenti
de nouvelles douleurs.

Observation IL.

Un Suifîe du vieux Louvre, grand
fumeur, avoir à la mâchoire inférieure
Une canine fort ufée par le tuyau de la
pipe qu\'il avoit fans ceffe à la bouche.
Cette dent, qui n\'étoic nullement gâtée ,
devint tout-à-coup fort douloureufe. Il
fouffric patiemment pendant quelques
jours y mais enfin il prie le parti de fe
délivrer de fa dent, & il vint pour cet
effet
me trouver. Aufïi-tôt que j\'eus re-
connu la fource du mal, je iui trépanai
fa canine J il fortir du canal dentaire
quelques goûtes de pus > & comme la
gencive étoic un peu gonflée vers la ra-
cine, en preffant cette tumeur, le pus
fortit par le trou du trépan , ce qui fit
difparoître la tumeur, fans qu\'il fût be-
foin de l\'ouvrir : ainfi le malade fe trouva
guéri. Je bouchai quelques jours après

a

-ocr page 213-

t 5 ® De rArt du Dentijle.
avec du plomb le trou qu\'avoir fait le
trépan , & je recommandai au fumeur
de garnir le tuyau de fa pipe avec un
linge , pour l\'empêcher d\'ufer fa dent
davantage. Le trépan qui me fert ordi-
nairement pour faire cette opération eft
repréfenté à la planche X IL

Observation II L

^ M. de avoit deux incilîves infé-
rieures fort ufées , qui étant venues à lui
caufér beaucoup de douleur, l\'obligerent:
d\'avoir recours à moi. Je reconnus bien-
tôt, parla rougeur que je visan-deffus
du caiiaî à l\'endroit ufé , que le mal pro-
venoit de l\'inflammation qui s\'étoit for-
mée daîis le cordon , ainfi je perforai ces
deux dents, j\'en
fis fortir du fang en dé-
truifant le cordon, & le malade fut guéri
en moins de vingt-quatre heures.

Obses.vations IV & V.

L * * * „ demeurant à la Place des
Viéloires , avoit plufieurs dents ufées :
une canine inférieure entre-autres de-
vint fi fenfible ^ que l\'approche des ali-
mens & la rencontre de la dent oppofée y

-ocr page 214-

Be VArt du Dentijîe. 191-.

y produilent une fenfation doulouteufe,
enforte qu\'il avoit beaucoup de peine à
manger. Il me vint voir , & à la feule
mfpedionj je faifis la caufe du mai. Je
préparai un bouton de feu ; je lui cauté-
l\'ifai fa denc qui fut parfaitement guérie
fans autre remede, & depuis ii s\'en fert
Comme des autres. Quelques tems après
je lui trépanai une autre dent j pour
donner du^jour au fluide, qui s\'y trouvoic
epanclié, & laguérifoii fut aufîi prompte.
■ Un Officier de Marine avoit auffi les
dents ufées. Une canine d\'en iiaut fur-
tout lui failbic fentir en mangeant, de-
puis quinze jours, un agacement fort in-
commode. Je lui palfai de même à plu-
sieurs reprifes fur l\'endroit fenfibie le
Cautere aduel^ & je raccourcis un peu
avec la lime la dent oppofée qui détrui-
foit la canine: ii fut entièrement guéri.

Observation V î.

M. B * avoît une premiere petite
molaire venue depuis peu qui lui faifoit
beaucoup de douleur, fans être gâtée ni
altérée en aucune façon.
Il vint chez moi

-ocr page 215-

■f 9 2 JDc VAn du Dentijîe.
pour fe la faire ôter. L\'ayant trouve
très-peu relâchée & fort faine, je lui
confeillai de fe faire faigner, & de tenir
le plus fouvent qu\'il pouiroit du lait tie-
de dans fa bouche , ce qu\'il fit réguliè-
rement. Deux jours après il fe trouva
bien guéri fans autre reniede.

Observation VIL

Un apprentif du Sieur ** Sellier ?
vint chez moi pour fe faire oter une pe-
tite incifive de
la mâchoire inférieure ?
dont il fouffroit beaucoup depuis quel-
ques jours. Ne trouvant point cette
dent gâtée y mais feulement relâchée
& fort douloureufe , je lui demandai
s\'il n\'avoit point reçu quelque coup»
Comme il m\'alfura qu\'il n\'y avoit aucun
accident de cette efpece , je portai lî
fonde entre îa gencive, en appuyant un
peu fur l\'extrémité de la dent :
il fortit
auffi-tôt de îa matiere d\'entre îa gencive
Se la racine. Cette matiere étoit renfer-
mée entre la racine même & l\'alvéole»
>ar les attaches de la gencive qui em-
>raifoieRC le collet de la denc. Quand

par

-ocr page 216-

Bc l\'Art du Dentijle. 195
far le moyen de la fonde j\'eus défuni
ces prcies, la matiere trouvant du jour
fut toute évacuée à l\'inftant. Je recom-
niandai au malade de fe rincer fouvent
la bouche avec du vin miellé : deux jours
après il revint me voir tout-à-fait guéri j
& fa dent qui eft devenue très-folide
ne lui a plus fait aucun mal.

Paffons àla tranfplantaiion des der.tSj
dont plufieurs auteurs avant moi onc
recommandé la pratique , mais dont le
fuccès eft toujours un problême pouc
bien des gens.

§. XIV.

Maniéré de tranfporter une dent d\'une
bouche dans une autre • circonjiances
à obferver pour le fuccès de cette opé-
ration.

/ a trois chofes à confidérer dans
la tranfplantation des dents. 1". Les
difpofilions de la perfonne fur laquelle
il s\'agit d\'opérer. 2". Celle de la dent
qui doit remplacer la dent malade.
3 Le procédé .du dentifte. Il faut doni,
Tome IL R

-ocr page 217-

194 Be r Art du Dentlße,
1°. que le fujet foit d\'une bonne faute ;
que la gencive & l\'alvéole de la dent
malade ne foient point appauvris ; que
. cette deat en l\'état qu\'elle eft, foit folide
S>c bien couverte par la gencive , Bc.
qu\'elle ne foit point trop adhérente à
l\'alvéole , parce que j.li quelque portion
s\'en détache , l\'opération ne peut fe
faire. II faut aulTi que le malade obferve
de point en point ce qui lui fera pref-
crit, après l\'opération. 2°. La dent def-
tinée à remplir la place de la dent ma-
\' lade doit être précifément de la mê-
me efpece : il faut même que la ra-
cine de cette dent ait à peu près le
volume de celle qu\'elle va remplacer ;
mais en tout cas il vaut mieux qu\'elle
foit un peu plus grolTe & un peu moins
longue. C\'eft pour cela que , quand on
fait cette opération, il eft bon de s\'affurer
de plufieurs fujets, Savoyards ou autres ;
afin que fi la dent de l\'un n\'eft pas
convenable on la lui remette, pour qu\'il
n\'en foit point privé , & de pouvoir en
efifayer plufieurs, jufqu\'àce qu\'on en trou-
ve une à peu près conforme à celle
qu\'on
veut remplacer. Mais comme il eft bien
difficile de trouver des dents étrangères

-ocr page 218-

l\'An du Dentijîe.
^Xademenc du même volume que celles
«ionc elles doivent occuper la place , il
^auc beaucoup mieux qu\'une dent tranf-
plantée entre un peu de force qu\'avec
frop d\'aifance J & que le collet de cette
^ent fe trouve vers l\'entrée de l\'alvéole.
Sue hors de la gencive. Si cependant
racme fe trouve trop longue & trop
grolfe, & qu\'on ne foit point à portée
«e choifir une dent mieux proportion- "
Jjee , il faut alors diminuer de fa grof-
eur &de fa longueur ; mais les dents
^inli travaillées reprennent ordinaire-
j^ent allez mal. Quand c\'efl le corps d\'e
J- dent qui eft trop long & trop épais, ,
^ taut, avant que de la placer, leraccour-
„\'f & le diminuer fut fa face interne
llr tout vers fon extrémité, afin que\'
ette dent n\'elfuye point le choc des
^,^nts^oppofées , ce qui
1 ebranleroit &
"^nipêcheroic de reprendre parfaite--
^ ent, fur-tout quand les deux mâchoi-
J.®« fe croifent & chevauchent l\'une fur
j^^^tre, comme il arrive alfez fouvenr.

^^"^fque la dent eft bien en place , &
^^ elle eft encore expofée au choc des
^^îîs oppofées, il faut alors raccoutcii:

Ri]

-ocr page 219-

De l\'Art du Dent\'qfe.
celles-ci de façon qu\'elles ne l\'atteignent
plus.

Pour bien faire cette opération, on
commence par déchauffe c la dent
qu\'on
veut remplacer, & celle qui doit oc-
cuper fa place ; enfuite on ôte la der-
niere avec toutes les précautions que
j\'ai ci-devant prefcrites, & puis on ôte
la dent malade. La place faite , on y
remet fur le champ la dent étrangère
que l\'on fait entrer peu à peu, jufqu\'à ce
qu\'elle foit bien encaftrée dans l\'alveo-
le où elle doit être reçue. On appuyé
alors quelque tems avec le doigt fut
rextrémicé\'de cette dent , afin d\'eU
contenir la racine dans le fond de l\'al-
véole , pendant qu\'on prelfe de l\'autre
main la gencive qui doit la fertir. 11 ne
refte plus après cela qu\'à faire
mordre
au fujet fur a denc remife un petit mor
çeau de liège , & à lui faire garder quel\'
que tems dans la bouche un peu d\'e»^
appropriée à cette opération. Mais
malade doit avoir foiii que la liqueuf
baigne la deni : il ne s\'agit pour
effet que de bailfer la tête, parce q«®
e\'eft ordinairement à la mâchoire fuf®\'

-ocr page 220-

T>e VArt du Dentijîe. i
rîeure que cette opération fe pratique«
Dans ma derniere Lettre qui a pour ti-
tre,
Edaircijfemçnt y &c, on trouve îe
détail de cette opération telle que je l\'ai
faite à Madame la Corateffe
de* * *

voici encore trois Obfervations qui
€n confirment les avantages.

O BSEa V ATI ON I\'

Il y a environ quatre ans que la De-
moifelle * * ^ * . Danfeufe à la Comé-
die Françoife j avoir une petite inci-
five fort gâtée qui la faifoit beaucoup
fouifiir. Je la lui ôtai, &
j\'en fubftituai
mie pareille provenant d\'un petit Sa-
voyard qui faifoit fes commiffions. Cette
deraiere dent s\'étant trouvée plus
groffe
Se plus longue par ia racine
S[Ue celle donc elle devoir prendre la.
placé , je fus obligé de ia diminuer & de
raccourcir , Malgré cette diminution j
®lle reprit & elle eft reftée jufqu\'à f»
^orc arrivée depuis peu de tems.

Riil

-ocr page 221-

De TAn du Dentifle.

O b s e rv ati o k I î.

Une Dame de confîdération de Fi"
îaife , en Baffe-Normandie, avoit une
petite incifive à la mâchoire fupérieure
que la carie avoit minée^ de façon qu\'elle
fe cafia j & qu\'il ne refta plus que la
racine. Cette, Dame vintexprès à Paris
pour fe faire mettre une autre dent,
& elle me fut adreffi:e. Après avoir oté la
dent d\'un\'Savoyard , j\'enlevai la racine
en queftion, mais à l\'examen que j\'eî^
fis , jela trouvai noire, & le périofte tel\'
lement appauvri, que je doutai du fuccè«
de l\'opération , ce que je ne diflimulaJ
, 3ointaux perfonnes quiaccompagnoien^
a dame , Cependant je plaçai la denÇ
du Savoyard , & je fus obligé de l\'ôter ^
l\'inftant pour la rétrécir & pouidiminue^
de fa longueur. Lorfqu\'elle fut ajuftée?
Je la remis en place, & elle reprit pat\'
faitement, malgré une fluxion qui fut\'
vint le neuvieme jour de l\'opération\'
fluxion qu\'on ne peur attribuer qu^\'a\'-\'
peu de précaution de la dame qui s\'e^^
pofa dès l\'inftant même à ia promena^l^
au grand air, mais qui ne dura que deU^

-ocr page 222-

De tAn du Dendfie, 15?.
jours. J\'avois prévenu la malade que
cec accidenc empêcheroic la denc de
reprendre \\ mais auffi-toc que la fluxion
fiu palTée , je la
vis avec étonnemenc fe
raffermir de jour
en jour, fans ofer pour-
tant me prometcre qu\'elle fut jamais
bien folide. Cette Dame , au bouc de
quelques jours, étant retournée en Pro-
vince , je la priai de me donner des nou-
velles de fa dent. Environ fix mois
après
elle m\'écrivit qu\'elle étoit par-
faitement reprife ^ & auffi folide que les
autres. Ce font les termes de fa lettre
Je reçus encore au bout de deux ans
une féconde Lettre de cette Dame, par
laquelle j en me confulcant fur quelques
autres objets fort étrangers à celui-ci,
elle me marquoit que ia dent remife
ctoit toujours très-folide.

J\'ai fait il y a environ un an la même
opération à une Demoifeile en préfence
de M.
Borie, Dodeur en Medecine. La
dent qui étoic une petite inciiîve fupé-
i\'ie\'ure a
de même parfaitement repris ,
^ans le moindre accident , & elle efi:
•ïiaintenant très-folide.

Voici une autre opération plus fur-
Prenante encore & qui réufîic quand

Riv

-ocr page 223-

300 T>e l\'Art du Dentijle.
elle eft bien faite , mais moins fouvent
que la précédente. Elle conlifte à fubfti-
tuer une dent feche à une dent fraîche-
ment ôtée. On conçoit qu\'il faut auflî
cîioilir une dent de la même efpece
que celle qu\'on veut remplacer \\ mais
la racine en doit être un peu plus grof-
fe 5 de forte qu\'elle entre un peu de
force » en fuivant pour tout le refte ce
que j\'ai prefcrit pour la tranfplantation
des dents vives. Une chofe elfentielle
à obferver, avant que de placer une
dent feche ,
c\'eft de faire avec une
lime tout autour de fa racine plufieurs
entailles d\'un demi-tiers de igne de
profondeur , afin que l\'alvéole, foit par
fon approche , foit par le moyen de ion
prolongement, puilfe remplir ces en-
tailles , ce qui rend ces fortes de dents
très-fol ides. C\'eft ce que j\'ai moi-même
éprouvé, & les deux faits fuivans ea
font foi.

Observation!. •

Une Demoifelle qui apprenoit à
coëffer il y a environ trois ans chez M.
Dubois J demeurant fur le Quai de l\'E-,

-ocr page 224-

De l\'An du Dentïjle. 201
cole , avoir une grande incifive extrê-
mement difforme & gâtée qui lui caufoit
beaucoup de douleur. Après avoir ôté
fa dent, je la remplaçai par une dent
feche dont j\'avois piqué la racine , Sc
cette derniere ayant repris une parfaite
folidité, fe maintient aufïi bien que fes
Voifines.,

Cependant la bonne foi m\'oblige d\'a-
vouer que de trois perfonnes fur qui j\'ai
tenté cette opération , elle ne m\'a réuffi
que fur celle-là. Mais voici un fait quî
Confirme le précédent.

Observation II.

Mademoiselle *** Marchande de
Perles, rue Sv Denis, fouffroit depuis en-
viron douze jours de très-vives douleurs
d\'une canine fupécieure du côté droit,
qui étoit gâtée. Elle alla trouver il y
a
environ 15 ans, le Sieur Foucou , Cou-"
tellier , demeurant alors\'rue de ia Hu-
chetre , & depuis retiré à Marfeille.
Comme le fieur
Foucou fe mêloît de
la profefiîon de Denrifle , Mademoifelle
* * * le pria de lui ôter fa dent , &
de lui en remettre une autre à la place.

-ocr page 225-

101 De VAn du Dentifte.

Le Sieur Foucou iui ôra fa dent, lui
remit une dent feche qu\'il choifîc par-
mi^ un grand nombre dont il avoit pro-
vilion , & ne manqua pas de faire des
entailles à la racine. La Malade revenus
chez elle fe jeta dans un fauteuil, s\'af-
foupit, & par un fomm.eil affez long fe
dédommagea des mauvaifes nuits qu\'elle
avoit pafîées fans dormir. Cette dent
feche ainfi remife ne lui a jamais fait
aucun mal; elle eft fi ferme & fi folide
qu\'elle fe trouve être la plus forte qu\'elle
ait dans la bouche , & îa blancheur s\'eft
bien cofffervée. Depuis environ cinq
ans que je connois cette Demoifelle, je
n\'ai jamais rien remarqué d\'extraordi-
naire à cette dent, ni le moindre en-
gorgement à la gencive , quoiqu\'elle
ne s\'attache point fur le collet. Il fuffic
de voir cette dent pour ne point dou-
ter de l\'opération, car il eft aifé de re-
connoitre que c\'eft une dent du côté
gauche qui a été replantée du côté
droit ; ce qui ne fçauroit échapper à un
Dentifte qui connoîtbien fa partie,com-
me un Anatomifte connoît une rotule
droite ou gauche. J\'ai rapporté ce der-
nier fait tel que je l\'ai appris de Mademoi-

1

-ocr page 226-

De VAn du Denûjle. 205
feîle * ^ Ceux qui le révoqueraient en
doute pourront s\'en informer à elle-
même. Elle exifte encore ,
Se j\'ai indi-
qué fa demeure.

M. Fauchard y dans la premiere édi-
tion de fon Livre parle de cette opé -
ration ; il dit qu\'un Dentifte de Province
la prariquoic, & il la regarde comme
très-poffible, mais on eft furpris de ne
trouver rien de plus dans ia fécondé
édition du même ouvrage qui a paru,
plus de vingt ans après.

S. XV.

Des Dents ébranlées & déchaujfées»
Moyens de les raffermir.

Q u A N D les dents font tellement
ébranlées , que leurs racines (ont dé-
couvertes par ia deftruétion des al-
véoles ^ les gencives n\'afant plus de
fouîien fe retirent & s\'ilfaùTent, ce qui
fait que les dents ne tiennent pius qu\'à
quelque portion du périofte qui refte en-
core ; ii
y auroit alors bien da charktâ-

-ocr page 227-

204 De VAn du Dentifte,-

rtifme à faire efpérer aux malades que
ces fortes de dents peuvent fe raffermir
par quelque remede que ce puiffe être.
On voit cependant tous les jours desEm-
pyriques aufîi hardis qu\'ignorans , abu-
fer étrangement fur ce point de Ja cré-
dulité du Public, Se débiter de prétendus
remedes pour faire revenir les gencives.
Ils ne parlent pas des alvéoles, parce
qu\'apparemment ils ne faventpas qu\'une
dent, quelle qu\'elle foit, ne peut être
folide fans cette gaîne offeufe ; autre-
ment ils trouveroient auflî des remedes
pour réparer les alvéoles. Les vrais Den-
tifies au contraire , qui , après avoir in-
terrogé îa nature ,connoiffent également
les reffources & les bornes de l\'Art,
font obligés, dans certains cas j pour con-
ferver les alvéoles & rendre tes dents
plus foîideSj de couper quelque por-
tion des gencives. II efl donc certain
que J pour les dents ébranlées par les
caufes que nous venons de décrire j on
ne peut employer avec fuccès que Jes
fils d\'or , quelquefois les feuilles ou •
plaques d\'or , es coins en coidiffe,
quand les denrs ne fe joignent pas, les
dents faétices, lorfqu\'il fe trouve affes

-ocr page 228-

De tAn du Dentijle. 105
«ï\'efpace entre les naturelles , & enfîa
les fils ordinaires ou les cordonnets de
foie.

Lorfque les dents ébranlées fe joi-
gnenr, & qu\'il n\'y a point d\'interruption
ou d\'intervalle aifez grand pour y pla-
cer des coins, ou une piece plus éten-
due, il
faut fe fervir de fils d\'or de ducat
très
-fin. Le fil s\'attache aux deux dems
Voifines les plus folides ,ouon îe croifej
on le fait pafier enfuite autour des dents
ébranlées toujours en croifant, & l\'on
obierve de le ferrer chaque fois. On
mene ainfi ce fil jufqu\'à ce qu\'on aie at-
teint une Qu deux dents bien fermes dti
côté oppofé, & on revient avec le même
fil en le faifant repaffer fur toutes les
dents qu\'on a déjà parcourues. Après
avoir fait trois ou quatre fois îe même
tour,
on arrête le fil fur une dent foiide,
en le tordant avec une pince d\'hor-
loger J & on en fait entrer le bouc dans
l
\'intervalle de deux dents , pour qu\'il
ne bleffe point la levre ou la joue. Quand
le fil fe porte trop vers la gencive par
la forme pyramidale de la racine de cer-
"^aines dents, & que les dents ébran-
lées font plus allongées que leurs voi-

-ocr page 229-

4o{> T>e. I*Art du Dentijle.
lines J il faut commencer par les racconr\'
cir. Si elles font expofées au choc des
dents de la mâchoire oppofée, il faut
avec une lime fine & pointue faire une
petite entaille autour de la racine à l\'en-
droit où le fil doit Être appliqué, afin
qu\'il remplilfe cette entaille; que par
ce^moyen il empêche la dent de s\'allon-
ger davantage, & qu\'il ne puiffe pas
glifïer vers l\'extrémité de la racine qui
eft plus mince. En ferrant les différens
tours de fil, on doit avoir foin d\'appuyer
fur l\'extrémité de chaque dent pour la
faire rentrer dans fon trou j & pour que
racine s\'emboîte Se touche au fond
de l\'alvéole. Pour limer ces fortes de
dents , il faut auparavant les bien af-
fermir avec un fil ordinaire qu\'on entre-
lafTe de la même façon que le fil d\'or.
Enfuite on ôte le premier fil pour y ap-
pliquer le fécond, à moins que les dents
ne foient trop foibles, auquel cas on y
laifTe le fil ordinaire , jufqu\'à ce qu\'on
y ait appliqué ie fil d-\'or.

\'Il ne faut point faire d\'entaille aux
dents qui ne font point ébranlées,
parce

que le fil en creufant l\'entaille pourroic

à la fin les couper j mais on ne rifque

-ocr page 230-

Dt VAn ill Demifle, 207
nen d\'en fait-e à des dents qui fans
Cela périroient biencôt par leur feul
ébranlement. Lorfqu\'il fe trouve cinq
Ou fix dents de fuite fort ébranlées, oa
peut fe fervir d\'une feuille ou d\'une lame
Qor très-mince & large d\'une ligne,
felle qu\'elle eft repréfentée à ia Plan-
che II.

Il faut que ce foit de l\'or de ducat ^
flexible qu\'il puilfe fe mouler fur la
Hirface interne des racines où l\'appli-
«nation doit s\'en faire. Les trous prati-
qués dans cette plaque ^ pour donner
Palîage aux fils d\'or, doivent être dif-
Pofés de façon que ia plaque étant placée
^is fe trouvent vis-à-vis les intervalles
Jies dents. Au moyen de cette difpofi-
tion , en ferrant le fil d\'or fur les dents,
^ plaque entre dans leurs interftices.
^n conçoit qu\'il faut ici pour chaque
^ent un fil particulier qu\'on y arrête
^ ce fil doit être plus gros que celui qui
à entrelafter les dents pour les affer-
^U\'. Chaque extrémité de la plaque doie
porter fur quelque denc ferme j
Pour y être foîidement attachée avec ie
\' d\'or.

Quand coures les dents d\'une ma-

-ocr page 231-

io8 De l\'Art du Dentijîe:
choire font tellement ébranlées qu\'elles
ne tiennent prefque plus, & qu\'il y a
des breches fulEfantes pour y placer des
coins en couliffe ou des dents artificiel-
les , je préféré aux fils d\'or les cordonnets
de foie crûe faits exprès pour cet ufage.
Les dents en feront plus folides èc du-
reront même plus long-tems qu\'avec les
fils d\'or, qui ne ferrent jamais aulfi-bien:
car le cordonnet fe gonflant par la falive
qui le pénétre, ferre les dents de plus
en plus, au lieu que le fil d\'or fe relâche.
Les cordonnets de foie ne
fe coupent
point alors entre la piece qui fuit le mou-
vement des dents ébranlées ;
ôc ils ne

donnerontpas d\'odeur, pourvu qu\'on aie
foin chaque jour de fe bien laver la bou-
che le matin & après le repas, avec une
jetite éponge trempée dans parties ég^-
es d\'eau commune & de quelque eait
vulnéraire ou autre. Lorfqu\'on fait
deS
coins en coulilTejil faut qu\'ils foient bi^i
ajuftés entre les d&nts voifines,
8c qu\'ils
les étavent par-tout j mais fans rien for^
cer. On les perce comme une dent of*\'
dinaire , & l\'on prend garde que^ l^S
fils dans leur fortie ne foient pas gêné«
tant par ia piece que par les de^ts voi\'

fineî\'

-ocr page 232-

De l\'Art du Dentijle. 209
fines. Pour évirer cet inconvénient, on
fait une petite rainure aux deux côtés
de la coaliffe , èc précifément aux en-
droits d\'où les fils doivent fi^rtir pour
embracer la dent. On peut encore faire
Une fécondé rainure qui regne tout au-
tour du coin, ou de la dent artificielle,
Un peu au-deffus des trous ; celle-ci doit
être affez profonde pour recevoir deux
ou rrois tours de fils d\'or ou de foie
qu\'on entrelaffe à l\'ordinaire , après
avoir attaché la piece aux deux dents
Voifines .avec ie fil c]ui la traverfe.

Quand il faut une piece plus étendue,
on fait aux deux dents un trou alTez grand
pour que le même fil d\'or ou le cordonnet
puiffe 7 palTer & repaffer plufieurs fois.
Cette piece doit être percée de la face ex-
térieure à l\'intérieure, & les trous feront
éloignés plus ou moins du talon de la
piece , fuivant que les dents voifines
font plus ou moins déchauffées, & îes
gencives recirées. On fait une rainure
tranfverfile depuis chaque trou jufqu\'l
l\'extrémité de la piece & dans toute fa
circonférence. Les deux bouts du fii
entrent en fe croifant dans ces loges ^
entourent l\'extrémité de la piece, & fc
Tome //» S

-ocr page 233-

210 Be l\'An du Denûjlc:
replient fur elle & entre îa dent natu-
re îe qui fert de languette à fa couliiTe.
Ainfi le bout du fil qui paffe en
-dedanS
eft ratïiené en-dehors,celui qui pafiè en-
dehors revient en-dedans, & tous deux
fe perdent dans îa rainure tranfverfale.
On embraife de même îa dent naturelle
en faifant pafier & repaifer entre fes
deux voifines les deux bouts du fil ,
ainfi fuccefiivement entre routes les
dents qui fe trouvent ébranlées, jufqu\'à
ce qu\'on foit parvenu aux dents folides.
Alors on revient fur fes pas, & le fil
étant ramené vers la piece , on le croife
& on le fait repaffer plufieurs fois tant
fur cette piece qu\'entre les dents qu\'il
étaye de la façon que j\'ai décrire. Enfin
le fil doit faire autant de tour^qu\'il eft
«éceiTaire, tant pour aîTurer la piece que
pour affermir les dents. S\'il fuffifoit
pour garnir les brèches de deux denrs
artificielles, il ne faudroit faire à la
piece qu\'un feul trou afTez grand pour
faciliter le paflàge des différens fiîs quij
après avoir parcouru les dents ébranlées,
doivent à chaque tour repaffer p>ar ce
trou; mais il faut toujours faire une rai-
nure autour de la piece pour loger ce fil»

-ocr page 234-

De VAn du Dentïjle.

^w^i i« awt^

CHAPITRE SIXIEME.

Des Dents artijicielles. Precautions à
obftryer avant que de les pofer, en les
pofantf & quand elles font pofecs.

IjEs dents artificielles-, on poftiches,
rendent prefque autant de fervice que
les dents naturelles. Elles redonnent cet
air de jeuneffe dont les hommes ne font
guere moins jaloux que les femmes ,
& font difparoître à l\'inftant cette vieil-
letfe anticipée qu\'amene l\'abfence de
plufieurs dents j elles empêchent de
cracher , en parlant, au vifage de ceux
qui nous approchent, rendent la pro-
nonciation nette & diftinde, & fou-
lagent . par conféquent la poitrine , en
ce qu\'il faut moins d\'air & moins d\'ef-
fort pour parler. Les dents artificielles
font encore d\'un très-grand fecours
pour manger, fur-tout quand il refte
"uelques racines qui puilfent leur fervic
e bafe ; car
s\'étayant alors récipro.-

Sij

211

-ocr page 235-

aî4 Vû VArt du Bentïfie,
marin , mais jamais d\'ivoire. S\'il y ^
plufieurs dents à remplacer, & qu\'il en
reile des racines afTez bonnes , on peut
de même y ajuffer féparément des dents
humâmes. Mais fi toutes les racines n®
fe trouvem pas propres à maintenir cha-
que dent avec
fon tenon, il faut faire
une piece de toute l\'étendue de la brè-
che , & y bien marquer chaque denî
vis-à-vis chacune des racines. Ces dents
doivent bien imiter les dents naturelles,
être bien affifes fur- les gencives , S^
bien proportionnées aux dents voifines?
afin qu\'elles ne foient point
expoféeS
au choc des denrs de la mâchoire oppo-
fée. On perce la piece vis-à-vis dil
canal de chaque racine qui doit rece-
voir un tenon ; on fait entrer à force
dans chaque trou la partie du tenof
qui doit l\'occuper, & on le rive après
l\'avoir fiit fortir de l\'autre\'côté. DeU^
tenons fuffifentpour maintenir une piece*
Quand elle efl: d\'une certaine\'étendue^
on peut l\'attacher d\'un côté ou de touS
les deux , avec un fil d\'or , fur
dent qu\'elle va joindre , après avoif
engagé les tenons dans le canal des ra-
cines. Si les racines ne font pas propre®

-ocr page 236-

De VArt du Dentïjle. 11 j
â recevoir un tenon j après en avoir rafé
excédent avec la lime pour les mettre
^^ niveau des gencives , & en avoir
"^aitement rempli de plomb toutes les
^^vités , il faut percer la piece à chaque
^trémité pour y faire paffer les fils qui
attachent aux dents d\'à-côté.

Plufieurs perfonnes ne fe font point
^^tnplacer les dents qui leur manquent,
par la crainte qu\'elles ont qu\'il ne faille
Oter d\'abord les- racines.
Mais c\'eft
erreur de s\'imaginer que l\'extrae^^
^lon de ces racines foit ncceiTàire pour
®i^ettre des dents ; on voit qu^il eft aiï
^îitraire très - avantageux d\'en avoir.

peut encore m.ettre une ou deux
®fits en couliffe par le moyen d\'un
P^tit reffort , fans qu\'il foit néceffaire
® les attacher.

^ Wfque ia mâchoire inférieure eft
^l^alement dépourvue de dents , on y
mi râtelier complet fans attache.
. ^ pièce alors eft foutenue tant par les
J^^es que par la langue ; & pourvu
^^ elle foit bien affife far les gencives
ôc
^^^^elle prenne bien le contour de îa
^ achoire, on parvient en peu de jours
Ranger aifément fur fon rajelier.

-ocr page 237-

\'ixé De VArt du Denûjîe.

Enfin quand les deux mâchoires font
entièrement démeublées, on les regar-
nit de deux pieces , ou même d\'un
dentier complet. Mais fi dans une bou-
che ainfi dégradée il fe trouve
quelque
dent qui , quoiqu\'ifolée , foit alTez fo-
iide , il faut bien fe garder de l\'ôter.
Cette dent folitaire y loin de nuire,
fert à mieux affurer la piece , à laquelle
on fait une ou plufieurs entailles, fui-
Vant le nombre des dents qui doiven®^
»\'y loger.

§. L

Des Dents à tenon.

Xi E s dents à tenon , quand elles fon^
entées fur de bonnes racines, font le®
meilleures dents poftiches, & fans coU\'\'
tredit les plus agréables. Car elles n®
different en rien des dents naturelles ?
tellement que y lorfqu\'elles font bie^
choifies & bien pofées , il n\'efl pas pof\'
fible, même au plus habile Dentifte,
les diftinguer des autres , à moins qu ^
n\'aille chercher la petite rivure du t^\'\'

-ocr page 238-

De .l\'An du Dentijîe. nj
lîon, laquelle ne peut être apperçue
examinant avec attention l\'inté-
rieur de la mâchoire.

Toutes les racines , quoique faines,
ne font pas propres à recevoir une dent
a tenon. Celles qui relient ordinaire-
nienr^& qui conviennent à ce genre
d\'implantation , font les inci/ives fnpé-
l\'ieures & les canines. On la tente rare-
ment fur les petites molaires, attendu
qu\'elles ont fouvent deux racines. De
plus, lorfq u elles n\'en ont qu\'une, cette
j^acine unique eft applatie , & au mi-
lieu eft une rainure qui commence
vers
le coller de la dent, & fe termine à l\'ex-
ïi\'émité de la racine , enforte que le
cz-
Jial fe trouve divifé en deux parries,
dont chacune, par conféquèm, n\'eft-
pere propre à recevoir un tenon aftes
lolide pour maintenir la dent.

Les groffes molaires inférieures &
^es fupérieures ne fauroient porter ua
^enon j c\'eft pourquoi ii faut rafer leurs
^3-cines quand elles excedent trop les
gencives, pour y affeoir foiidement une
piece quelconque.

Les petites molaires inférieures font
pins propres à recevoir
un tenon que
^ome IL T

-ocr page 239-

a, I s De Ü An du D entiße.

les canines leurs voifines, parce qu\'elles
ont une racine ronde & d\'une longueur
fuffifaute. Cependant on y met peu de
Dents à tenon, parce que la brèche ne
fe voit guere , étant cachée par la levre
qui efi: ordinairement élevée.

Les canines & les incifives inférieu-
res étant peu fujettes à fe gâter , on eft
rarement dans le cas d\'y enter des dents
à pivot. Mais, comme elles s\'ébranlent
aftez fouvent de bonne heure au point
de tomber, on a recours aux fils. Lorf-
que ces dents minées par la carie vien-
nent à fe cafler, leurs racines qui font
applaties dans leurs parties latérales &
aifez menues , font moins propres à re-
cevoir les tenons que celles de la mâ-
.choire fupérieure. Je fuis pourtant venu
à bout, non fans peine , d\'aifurer fo-
ndement un tenon dans une incifive in-
férieure. Deux Dames, à qui j\'ai ajufté
de ces incifives à tenon, s\'en fervent
depuis plufieurs années, ôc les gardent
encore.

Voici la meilleure maniéré de po-
fer les dents a tenon. Après avoir li-
mé la racine de la dent qu\'on veut
remplacer, & l\'avoir rendue parallele

-ocr page 240-

Be VAn du Dentïjîe. % i cy

à Ja gencive, on prend un trépan fait
d\'un bout d\'acier, & en forme d\'éoua-
iiiîoir , tel qu\'il eft repréfenté dans
la planche XH, figure fixieme. La
coince de cet inftrument fe porte dans
e canal de la racine, oii on l\'introduit
légèrement en le tournant de droite à
gauche j & de gauche à droite. Par ce
moyen on aggrandit le canal, ou du
moms on en
fiit fortir les parties molles
& cariées. Quand le trou eft afTez large
Se afTez profond, on y implante avec le
tenon une dent naturelle de la même
efpece ou du njême volume que celle
qu\'on veut remplacer, en afTortifTant fa
blancheur à celle des dents qui Pavoifi-
nent. Si les dents de la mâchoire op-
pofée ne portent pas fur les incifives ou
fnr les canines qu\'on ajufte, on laifTe à
la dent qu\'on veut remettre toute fon
épaiffeur, & l\'on y rive le tenon à ri-
vûre perdue, ce qui îe rend encore plus
folide & afuire la durée de la dent. Si
au contraire les dents oppofées frottent
fiir celles-ci, il faut amincir la dent pof-
tiche fur la face poftérieure. Quelque-
fois même il eft à propos d\'emporter de
ce côté-là, non-feulement l\'émail de la

Tii

-ocr page 241-

Zlo De l\'An du Dentifte.
denr, mais encore une partie du corps
fpongieux , pour la mettre à labri du
choc des dents oppofées. Il faut cepen-
dant éviter d\'altérer trop la dent pofti-
che en l\'aminciifant, & pour lui laiffec
plus d\'épailfeur , on raccourcit fuffifam-
menc avec la lime les dents qui la heur-
tent.

Quand le canal de îa racine où doit
entrer le pivot fe trouve trop large , il
faut le boucher entièrement avec des
feuilles d\'or , comme je vais bien-tôt
l\'expliquer, & cela avant que de percer
la denc. Celle-ci étant percée , on y fait:
entrer de force avec la pince un tenon
d\'or qu\'on fait fortir de l\'autre côté pour
le river. On proportionne la longueur
de ce tenon au canal qu\'il doit remplir;
enfuite on le garnie de filace ou de fil à
broder; on le bac en plufieurs endroits
avec le tranchanc du marteau , pour y
faire des inégalités qui emp-chent la
garniture de glilfer vers le talon quand
on monte la dent ; & enfin on f intro-
duic dans la racine. Lorfqu\'il y efb bien
ftable & bien ferme, on acheve de mon-
ter la denc avec une pince. Il eft effen-
tiel qu\'elle joigne bien, Ôe qu\'elle cou-

-ocr page 242-

De VAn du Dentifte. ix i
Vre exaâremenc ia racine. Elle eft par
ce moyen très-folide , dure en cet état
nombre d\'années ^ & fait toutes les mê-
iîies fondions que les autres.

Quand les racines minées par la carie
ont le canal trop large , mais aifez
profond pour contenir un tenon d\'une
longueur fuffifante , il faiu plomber ce
canal .iufqu\'au bord de la racine , & le
percer enfuite au milieu ou un peu plus
Vers le dehors , lorfque la dent tft fuf-
ceptible de quelque choc. Ce trou doit
être fut avant que de placer la denr ,
& l\'on y fait entrer le tenon , toujours
avec un peu de force , fulqu\'à ce que
la dent joigne parfaitement la racine qui
lui fer c de bafe.

Si la racine n\'eft pas bonne , ni îe ca-
nal affez profond, après avoir ajuftc ia
dent , il faut la percer non-feulement
pour recevoir le tenon , mais encore
pour y palTer un
fil d\'or qui s\'attache
d un feul côté fur quelqu\'une des dents
Voifines. il faut aufli plomber le canal ,
^ le percer comme on vient de dire.
Au moyen de cette double attache la deiii
lei-a foiide & durable.

il eft encore un autre moyen de fixer

T iij

-ocr page 243-

itz De VArt du Dentïjle.
uîi pivot dans une racine afTez bonne
pour le porter ; mais ii ne doic erre em-
ployé que pour celles où ii n\'y a point
de\' Piuxion à craindre. Ce moyen con-
fide à fiire un tenon, qui d\'un bouts\'en-
gage dans la dent poifiche , 6c dont
l\'autre bout foit fait en vis pointue j
mais un peu plus gros que le diametre
du canal , & un peu moins long. La
dent armée de ce tenon fe monte peu-
à-peu en
la tournant du fens convena-
ble pour faire entrer dans le canal le
bout du tenon qui doit s\'y viifer, juf-
qu\'à ce qu\'elle foit exaétement- réunie à
Ja racine. Mais pour que les pas de la
vis s\'engagent bien dans les parois du
canal, ii ^aut que la racine foir rafée un
peu au-delà de la gencive , & que la
dent poftiche foit un peu moins large
que la breche, pour \'pouvoir la tourner
autant qu\'il eft nécelfaire. Il faut encore
cbferver que le tenon ne foit pas trop
gros, & qu\'en fe vilfant ii ne force pas
trop la racine , cÊ qui
pourroit la faire
éclater.

On peut auffi faire entrer le tenon à
vis dans ia racine avec une pince qui
fert
à le tourner j quand il eft fuâi-

-ocr page 244-

D& rArt du Dentifte. ix^

famment engagé , îa denc s\'ajufte au
Î30UC du tenon qu\'elle doic recevoir &c
qui n\'eft poinc comme l\'autre en vis,
mais rond & longuet. Toutes les di-
menfions de ia denc doivent aupara-
vanc avoir été prifes fur la racine. On
perce cette denc depuis le talon jufqu\'à
fon extrémité entre les deux émails. A
l\'endroit où fort la poince du foret, du
côté de la face poft.érieure , on fait une
pétite mortoife pour loger la pointe du
tenon. Lorfque la dent joint parfaite-
ment la racine j on renverfe fuc fa face
poftcrieure l\'excédent du tenon avec
une petite pince ; on le fait entrer dans
la mortoife , & l\'on coupe avec iiiie
lime ce qui ne peut s\'v loger. Mais
pour que cette opération ait lieu , il
faut que la dent puilfe conferver affez
d\'épadfeur vers l\'extrémité fur fa face
poftérieure : autrement elle ne feroic
pas fi durable, & le bout du tenon qui
eft renverféj pourroit incommoder la
langue.

Enfin , on pent fceller un tenon dans
le canal d\'une racine avec le maftic, dé-
crit par M. Fauchard ; mais il va deux in-
convéniens. Le tenon, par ce moyen,

T iy

-ocr page 245-

2 24 Bi l\'An du Dentifte.
n\'eft jamais fi bien aiTmé qu\'il ne fe
dérange , de forte qu\'on eft fouvent
obligé de revenir au tenon rivé. 2°.
Le
maftiç altéré la blancheur de îa denc
dont il cimente fa bafe.

On met audi des pieces entieres com^«.
pofées de plufieurs dents à tenons fim-
plesoiien vis, & d\'une étendue propor-
tionnée aux biêches que l\'on veut rem-
plir. Mais ii faut toujours que le fujet ait
des racines propres à recevoir les te-
nons, & que la piece puiffe conferver
une certaine épaiiîeur. Chaque tenon y
effc eiîgagé comme il l\'eft dans une feule
dent J & cette piece fe pofe de même.

I I.

Des fluxions, occaflonnées par les dents à

tenon.

Lés dents à tenon font payer une
forte de tribut dont peu de perfonnes
font exemptes. On ne fouffre point dans
l\'opération , mais ordinairement vingt-
quatre heures après , ou même dès\'la

-ocr page 246-

De TAn du D entiße. 21^
lendemain on commence à fentir ejueî-
douleur qui n\'i faic qu\'augmeiireî
Pendant deux ou trois jours, & il fe
Orme une fluxion plus on moins forte,
^»ivant les difpofitions du fujet, ou fui-
vant qu\'on a négligé de faire les rémé-
rés convenables, foit pour la détourner ,
^orc pour l\'adoucir. Ces fluxions fe termi-
^^ent aifez fouvent par un petit abfcès à la
ê^ncive , & quand la matiere a pris fon
^ours, le malade efl bien-tôt guéri. Ainfi,
7-s qu\'on s\'apperçoit de quelque tumeur
^ gencive, il fauc faire jour à la matiere
P;\'"-" un petit coup de lancette. Cette flu-
^\'oneft prefque inévitabieiheureufement
ne l\'efl\'uie que la premiere fois qu\'on
fait mettre de ces fortes de dents
^tfqu\'il faut les renouveller, il n\'y a
P\'Us de fluxion à craindre. De plus, il eft
^ l\'emarquer que , fi avant la premiere
opération , la dent qu\'on remplace a
^^ufé fluxion ou dépôt , le tribut eft
P^yé d\'avance & la fluxion ne revient
11 en eft de même, quand il fe crou-
fur la gencive une bulbe ou petit
"Outon provenant de la racine : ce petit
garantie encore de la fluxion, parce

-ocr page 247-

xi6 De VArt du Demijle.

qu\'il en fort une humeur féreufe q\'ui

en entraîne la matiere au dehors.

Au refte, la Huxion n\'eft produite que
par la préfence du tenon qui comprime
les parois du canal. Les petits vailfeaux
qui s\'y diftribuent, irrités par cette com-
preffion, s\'enflammentj & le fluide eu
s\'y arrêtant les engorge» Le périofte de
la racine , d\'où partent tous les petits
vaiffeaux qui la vivifient, eft bien-tôt af
feété de mêm.e. L\'inflammation fe com-
munique au périofte des alvéoles, ainfi
qu\'à ia gencive & aux levres, & toutes
ces parties s\'enflant plus ou moins de-
viennent douloureufes.

M. Fauchard eft d\'un avis différent :
il croir que la fluxion eft produite pnr la
trop grande longueur du tetion qui ex-
cédé la profondeur du canal, quand la
racine a été percée trop avant. Mais cer-
tainement il n\'eft pas aifé de percer la
racine d\'outre en outre, & fi ce cas ar-
rivoitjii en réfulteroir bien d\'autres ac-
cidens qu\'une fîmple fluxion. Le mêrn^
ajoute encore que cette fluxion n\'a iier^»
que quand ie cordon des vaiffeaux n\'ej^
pas détruit. Ainfl pour éviter, felon lui >
ce double inconvénientj il s\'agit de n\'a\'

-ocr page 248-

Di VÂrt du Dentifte. ii-j
S\'\'andir le canal qu\'à un certain degrés
^ d\'y proportionner le tenon.

Mais, tout Praticien fait par expé-
^^etîce que, quoique le canal foit vuide
^^ infenfible , lorfqu\'on l\'aggrandit avec
équarifioir, comme leconleilleM. fau-
& qu\'on y plante le tenon, malgré
^ftte infenfibilité qui prouve la deftruc-
^\'«n du cordon de nerfs & de la mem-
^fane du canal, la fluxion n\'en vient
P^^s moins. II s\'enfuit donc que, fi les pa-
rois du canal font vivifiés & nourris de
p maniéré que je l\'ai toujours obfervé ,
fluxion indépendamment de l\'élar-
RÙfement du canal eft produite par la
préfence du tenon \\ enfôrte qu\'elle
^ft inévitable, fi l\'on ne prend certaines
P^\'ccautions.

Or, pour prévenir la fluxion, ou du
\'^\'\'«ins pour qu\'elle foit peu confidéra-
, Se ne forme point de dépôt, il faut
creufant le canal reconnoitre d\'abord
^\'il eft d\'une couleur roageâtre , ce qui
P\'ouve que les vaiffeaux fanguins fe dif-
^■ibuentdans les parois du canal. Alors,
^^ant que de pofer la dent, on doit^def-
& détruire ces petits vaifleaux

-ocr page 249-

De VArt du Detit\'ijle.
ave: une aiguille à tricoter, ôu avec un«
pointe feche rougie au feu que l\'on porte
trois ou quatre fois dans toute l\'étendua
du canal. On fait entrer dans ce canâ^
un peu de coton imbibé d\'effence , pouC
en remplir la capacité, & on l\'y laiffe
quatre ou cinq jours; enfuifCj après
Favoir ôté, on établir h dent à tenon. Si
le fujet, daîis cec intervalle, ne veut point
laifTer voir de brèche à fa bouche , il eft
aifé de la boucher pour quelques jours
avec cette dent, jufqu\'àce qu\'elle puifl^
fe pofer plus îbiidement fans aucun
rifque. Mais
J fi la perfonne exige qu\'ellî^
foit mife fur le champ à demeure, il faut
après l\'opération lui frire rincer fré--
quemment fa bouche pendant deux foi\'s
vingt-quatre heures avec de bonne eau;
de-vie pure. Ce fera le moye:i de Ui^
faire éviter la fluxion, ou,s\'il en furvienf»
elle fera légere. Alors^ pour la di/lipe^
promptement, il fuffira de fe rincer trèî\'
fouvent la bouche avec du laitj
on
l\'eau tiede ; & fi par la difpofition
fujet J la fluxion ne cédoit pas à ces
petits remedes, il frudroit le faire fai\'
gner ^ lui faire prendre foir
Ôc mari«
quelques lavemeiîs, ôc une boiffon ta-.

-ocr page 250-

De VAn du Denûfte. %
^■aîchilTa nte. Quand la levre eft tendue
gonflée, on met lescataplafmes émol-
\'.^ns. La fîuxion la plus opiniâtre ne
^\'ent pas contre tes dsfférens remedes,
^ difparoît dans peu de jours.

Lorique les parois du canal dentaire
font pas vermeils, & qu\'au contraire
eft noilâtre par-tout, c\'eft une mar-
H^e que les vaifleaux font détruits parla
^^■ufticiré de l\'humeur qui s\'eft épanchée
^^nscette partie. Alors, fans qu\'il foit
"efoin de cautere, il fauc tout de fuite
pofer la dent a tenon.

1 1 L

Dents , & des pieces pojliches atta-
chécs avec des fils, ou de diverfies auues
Manières.

I

E s dents qu\'on attache j & qu\'on
^^intient avec des fils d\'or ou de foie,
P^iirbieu repréfenter les dents naturel-
> pour ne poitugêner ni ébranler celles
S^|leur ferviront de foutien , pour être
J^bdes & durables, demanéent de l\'a-
"^«fle, du goût, & une extrême attention.

-ocr page 251-

X 3 o De l\'Art du Dentifie.
Carr , autant on tire d\'avantages des den^^
pofticiies bien pofées, autant celles cjui
font mal caufent d\'incommodités & d\'io\'
convéniens.V^oici ce que l\'expérience m ^
appris de plus sûr dans cette pratique. ^ j
Lorfqa\'il s\'agit de remplacer unefeul^
dent, foit de devant , foit des côtés»
qui n\'a point laiffé de racine pour fervii^
de bafe à la dent poftiche j il efl: toU^
fimpie d\'employer , autant qu\'on peut i j
comme pour les dents à tenon, uo^ j
dent humaine , & du même ordre qf
celle qui manque., Mais , il arrive aii^^
fouventque, quand c\'efl une grande ii^\'
cifive qu\'il s\'agir de fubftituer, labrêch^
fe trouve trop grande ; enforce qu\'on
peut trouver de dents \'humaines aff^^
larges pour la remplir convenablement\'
Il faut donc avoir recours ou aux den"^^
de boeuf, ou aux dents factices de ch^\'
val marin. Or, pour ne pas mettre ui^^
dent trop large qui ne quadreroic
avec fes voifines , on doit la façonner ^
maniéré qu\'elle ne les excede point,
tout en largeur. Tout le fecret ici co\'i\'
fifte à faire enforte , que les
pardf
latérales de la dent poftiche, pri«^^\'
paiement vers fon extrémité, netouche\'^^

-ocr page 252-

Be VAn du DcnûJle. 231
point aux dents voifines, & qu\'il y aie
®ntre-eUes de chaque côté
uiie petite
^^paration. z\'\'. Que ia paitie de cette
dent qui répond au coiiet des dents
\'Naturelles, touche au contraire fes deux
yoifineSj & s\'appuie contre elles pour
^^re étayée de deux côtés. Pour donner
de l\'apparence à cette dent, & rendre
^a largeur peu fenfible, il faut emporter
fon épaifieuc vers les parties latéra-
les , & laiffer plus de volume du côté
touche au corps de la dent nacu-
^"elle. On fait paroître par ce moyen
^ine efpece d\'enfoncement & de fépa-
^ation à l\'endroit où la dent a le plus
largeur, & elle femble en effet moins
*arge vers la gencive
qu\'à fon extrémi-
té. Enfuite, pour la rendre folide , on la
percera dans les parties latérales qui
touchent de chaque côté les dents n-a-
ïUi\'elleSj & on l\'y attachera avec un fil
appliqué de façon qu\'il ne comprime
pas les gencives. Ainfi l\'on n\'eft point
obligé , pour remplir la brèche d\'une
^ent, quelque large qu\'elle foit, de la
•emplacer par une piece compofée de
^eux dents étroites qui ne quadrent
plus avec les voifines, (Jeft ce que font

-ocr page 253-

z 3 2 , Be l\'An du Dentïjîe.
quelques Denuftes: mais auffi la difpro-
porciou de ces dents étroues avec les
autres, choque beaucoup plus la vue
qu\'une feule denc allez large pour bou-
cher ia brèche.

J\'ai imaginé un autre moyen pour
imiter encore plus parfaitement la belle
nature, &c je le pratique fouvent. C\'eft
de monter une dent humaine de la mê-
me efpece que celle qui manque &c bien
uniforme, fur un morceau de cheval ma-
rin travaillé proprement & fi bien pro-
portionné à ta brèche , qu\'il ne puifïe
être apperçu quand îa dent fe trouve
placée. On coupe pour cet effet la ra-
cine de cette dent ; on ajufle
enfuies
celle-ci fur la piece de cheval marin ,
comme on fait une dent à tenon fur uns
racine; on perce de la même f-içon la
piece & la dent, pour, y introduire une
goupille d\'or qui ies traverfe l\'une & l\'au-
rre, & qui fe rive des deux côtés, c\'eft-à-
dire, fur la favcdela piece qui fert de ba-
fe ou de talon à la dent, 6c qui pofe fur la
gencive qu\'elle embrafte d\'une part,
d\'autre parr à l\'endroit où fe fait la rivûr®
des ^Usits à tenon. Le morceau de che-
val marin doitfêtre
alïèz large , pouc

joindï®

-ocr page 254-

Dc rjn du Dentifte, z 5 j
joindre des deux côtés les deux dents
Voifines, & allez jufte pour que celles
î^uxquelles s\'attachent les fils qui tien-
nent la piece en état n\'en foient poinc
ébranlées. Il faut de plus que la piece
foit foîidement appuyée, & que la denc
qui doit être moins large que la brèche ,
^our mieux repréfenter la nature , aix
ieu de toucher les dents voifineSj laiffe
du jour entre ces ^nts dans les parties
latérales , commel^n laiffoit la denc
qu\'elle remplace. Les trous pour paffer
les fils feront pratiqués dans cette piece
aux
endroits qui touchent les dents voi-
fines, de façon qu\'ils fe rencontrent à-
peu-près vis-à-vis le collet de celles oii
les fils feront attachés mais fans
gcncr
la gencive.

Quand l\'alvéole a fouffert quelque
déperdition de fubflance dans l
\'extrac-
tion de la dent ou de la racine, que la
gencive eft trop retirée , & que les dents
Voifines au contraire ne font point dc-
chauifées ni dégarnies , il faut mettre
^ine denc plus longue vers la gen.ctve
retirée,. afin que ceUe-ci fe remarque
\'n^ins. J\'ai encore trouvé un moyeo
pour remédier à cette dirrormiié , 0«
Tome IL ¥

-ocr page 255-

a54 ^^ ^^^^^ ^^ Dentiße,
pout" réparer en meme-tems les défauts
de la dent & de la gencive. Il s\'agit de
faire faire par un Orfevre une efpece de
cuvette d\'or qui puilfe s\'appliquer fur la
gencive délabrée ^ & fe mettre au ni-
veau des autres. On y ménagera de pe-
tites pointes qui imitent celle des gen-
cives J & qui répondent aux interftices
des dents. Les deux côtés de la cuvette
feront percés de deys petits trous, pour
donner paffage à f^ fil qui s\'attachera
comme les autres pieces à deux dents
voifines. Celle-ci du côté qui s\'applique
Sz qui s\'affeoit fur la gencive formera
une cavité, ou uneforte de chaton, pour
enchâifer recouvrir la denc qu\'elle
doit recevoir. On laiife pour cet effet
très peu de racine , & fuivant la pro-
fondeur du chaton. L^ dent fera fixée
dans cette piece d\'or par une goupille,
comme celle quife monte fur une piece
de cheval marin : mais ce doit être de
même une dent humaine , pareille à
celle qu\'elle remplace. Pour bien faire
exécuter cette piece à l\'Orfevre, il faut
prendre exademenc couces les mefures
néceffaires , & en former un modelÄ«
cire. La piece finie & même effayée , o«

-ocr page 256-

De VAn du Dentï/îe, 235:
la donne àrémailieur, pour la rendre de
la couleur des gencives, c\'eft-à-dire ^
plus ou moins rouge , fuivant l\'inftruc-
cion du Dentifte. On monte enfuite la
dent poftiche fur cette piece , & on l\'y
fixe avec une goupille : on peut même
en la pofant , pour l\'affermir davan-
tage ,
èc pour empêcheï que rien ne
s\'infinue entre le chaton & la dent, maf-
tiquer celle ci dans fa fertifîure.

Je reviens aux dents établies fur des
pieces de cheval marin. J\'ai remis fou-
vent de cette maniéré, non-feiilemenc
les quatre incifives , mais même les ca-
nines & les petites molaires , & plu-
fieurs perfonnes en portent de ma fa-
çon depuis nombre d\'années. Or, pour
pofer folidement ces fortes de dents
fur une piece de cheval marin , il faut
d\'abord que la piece foit bien ajuftée fur
la gencive ; enfuite qu\'elle s\'emboîte
parfaitement avec les dents qui _ la re-
çoivent , & qui doivent la maintenir
par le moyen des fils. On ne laifse de
hauteur à cette piece , aux endroits oiV
l\'on veut monter les dents, qu\'environ
»ne ligne & demie , foivant la longueur
des dents voifines^ & on diminue de fon

v ij

-ocr page 257-

s De VAn du Dentijle.
épaifseur d\'environ un tiers de ligne fur
la face qui répond à la levre, pour don-
ner plus de foiidité aux dents qu\'on
doit y placer. La piece étant ainfi pré-
parée , on choifit des dents naturelles ;
on ôte avec la lime l\'épaifseur d\'un
quart de ligne far route l\'étendue de
leur racine à la face poftérieare; mais
on a foin d\'en conferver la face anté-
rieure , pour remplacer ce qu\'on a dimi-
ïiué de la piece. On emporte auffi plus
ou moins du corps de la dent vers la
racine, en ménageant de même fa face
antérieure, Enfuite on affied cette dent
fur la piece , en obfervant qu\'elle joi-
gne bien dans route fa circonférence ^
ainfi que la portion de la racine , fur la
face antérieure de cerre piece où elle
doit exactement
s\'appliquer. Après ce-
la on perce la dent à l\'endroit du ca-
nal , & l\'on fait fortir le foret, comme
aux dents a* tenon, vers fon extrémité
fur la face poftérieure : on fait à la pie-
ce un pareil trou , qui doit répondre
jufte au trou de la dent; alors on in-
troduit dans celui de la piece une gou-
pille qui la traverfe
pour entrer dans la
dent, & qu\'on fait fortirdla face pof-

-ocr page 258-

Dc t Art du Dentifte. i ? 7
lérieure où elle fe rive à rivûre perdus
ainfî qu\'à la piece du côté de la gen-
cive. Quand ia denc eft bien pofée , oa
fait à la racine un pareil trou qui la tra-
verfe j ainfi que la piece , jufqu\'à la face
poftérieure , & qui fe croife avec ie pre^.
uiier. Ce trou ferc à recevoir une fa-
conde goupille qui fe rive d\'un côté
fur ia racine de ia dent , & de l\'autre
fur la face poftérieure de ia piece. Ces
deux goupil es, en fe croifant j empê-
chent ia dent de remuer & l\'attachent
foîidement à la piece. On peut mettre
ainfi toutes les dents expofées à la vue,
les unes à côté des autres ] elles font
toutes fort folides, & reprcfentent mieux
les dents naturelles que ceiles de cheval
marin.

Il y a une perfonne très-connue qui
porte , depuis plus de quatre ans , une
piece entiere de ma façon à la mâchoire
inférieure. Cette piece eft loate garnie
de dents naturelles , à l\'exception des
groffes molaires quî font pratiquées aux
deux bouts. Il ne refte à la même per-
fonne, à la mâchoire fupérieure qu\'une
Canine , & une groffe molaire du côté
gauche. Depuis deux ans je lai fais re-

-ocr page 259-

2 3 ? De l\'An du Dentijle.
nir , par le moyen de ces deux dents,
une piece très-folide, qaoiqu\'artachée
d\'un feul côté : cette piece eft garnie de
dents naturelles , depuis la canine qui
fublîfte, jufqu\'à ia fécondé petite mo-
lai re de l\'autre côté. Aind ia perfonne
paroît avoir les plus jolies dents du
monde , & fouvent on lui en fait coni-
pliiiienr.

On peut faire pour plufieurs dents
naturel es une piece d\'or en forme de
cuvette, pareille à celle que j\'ai décrite,
pour encliatonner une feule dent. Cette
piece fera percée de trous pour rece-
voir les racines , à-peu-près de la mê-
me maniéré qu\'elles étoient articulées
dans la mâchoire, & pour les recouvrit
comme elles étoient recouvertes par
Talvéole & par la gencive. Elle doic
avoir des pointes bien marquées qui ré-
pondent aux interftices des dents J pour
y faire le même effet que la pointe des
gencives; enforte que chaque denc na-
turelle trouve dans la piece un croU
convenable à fa racine. Mais quoique
fes racines doivent être couverces jaf-
ques fur le corps de îa dent, par le cha-
îon de la piece qui fait l\'office de rai"

-ocr page 260-

De t Art du Dentijîe, x 3.9
véole & de ia gencive tour enfenible , il
faut obferver qu\'elles ne le foient point
plus que les dents du fujet. Pour cec
effet, il n\'eft pas befoin que ces racines
aient toute leur longueur, & l\'on en
«diminue plus ou moins ^ fuivant la hau-
teur de la piece. 11 fuit aulfi que toutes
l s cents qui doivent être cranfplantées-
dans la piece, foientdifpofées de façon ,
qu\'étant chacune à fa place , elles fe
trouvent bien rangées fuivant le con-
tour de la mâchoire , & ne foient point-
excédées par les dents qui refient\'. En-
fin , il feue que les dents de la mâchoire
oppofée ne cboquenc pas celles de la
piece , & c\'eft une attention â faire
avant que de fceller ces dernieres dents.
Ou fait au milieu de tous les chatons un
petit trou, pour recevoir une goupille
qui entre d\'un côté à la face antérieure ,
^ va fortir à la postérieure, en traverfant
aufîi la racine pour l\'affermir dans le
chaton. Tout étant difpofé de cette ma-
nière, on ôte les goupiiles& on démon-
te les dents, pour envoyer la piece chez
l\'Emnlleur, qui lui donne j ainfi qu\'à
la tête des goupilles, la couleur natu-
relle des gencives. Dès que la piece eft

-ocr page 261-

a 40 De TAn du Dônnfle,
émaillée , on remonte ies dents dans
leurs chatons, & pour mieux les affer-
mir, on emploie utilement le maftic
décrit par M. Fauchard. On fait d\'abord
fondre ce maftic : on en verfe quelques
goures dans chacun des chatons de ia
piece, & avant qu\'il foit refroidi, on y
introduit la goupille qui n\'a plus befoin
d\'être rivée, ce qui enîéveroit l\'émail,
mais dont il fuffit. de rafer la pointe qui
fort à la face poftérieure. Enfuite on
pofe toutes les dents les unes après les
autres , & l\'on ôte l\'excédent du maftic
que la préfence de la racine fait débor-
der du chaton , & qui pourroit s\'attacher
autour de la dent ou de la gencive ar-
tificielle. Par le moyen de ce maftic , ies
dents fe trouveront bien folides, eljes
ne branleront point dans leur fertifllure ,
& aucun alimeni, ni même la falive, ne
pourra s\'infinuer entre la racine & le
chaton.Des dents plantées de cette façon
peuvent durer plus de vingt ans, & fi
quelqu\'une dans la fuite venoit à man-
quer , elle peut fe remplacer aifémenî
par une nouvelle, ou fe raffermir.

Voici ie maftic de M. Fauchard. " Pre-
5i> nez de la gomme laque, deux onces ;

iî d©

-ocr page 262-

Be VAn du Dmdfic. 2 ^ r
cle la térébenthine de Venife la piu^
fine , une demi-once j du corail blanc
»» en poudre très - line , deux onces :
w faites fondre la gomme dans un vaif-
feau de Terre verni.à rm feu médiocre-
» quand elle fera fondue, mettez-y U
» rerébenthine & le corail en poudre.

On réduit ce mélange en petits bâ-
>» tons, qu\'on pulvérife pour s\'en fer-
»> vir. »

11 eft bon d\'obferver que M. Fau-
chard ne prefcrit l\'emploi de ce maftic ,
que pour affermir les denrs à tenon dans
les racines qui les reçoivent. Mais ce
maftic n\'eft guere propre à fixer foii«
dement les dents à tenon , en ce qu\'il
ne fauroit bien tejiir fur les parois du
canal qui, quoi qu\'on faffe , confervent
toujours unecertaine humidité. Dans Je
cas où je l\'emploie, au contraire, la pièce
& les denrsJtant hors de ia bouche
font très-fechesj ainfi le maftic s\'atta-
che ^ foude fi parfaitement les racines
dans leurs alvéoles artificiels ,
qu\'elles
pcîurroient tenir fans goupille, fi , pour
plus grande siireté, il n\'étoit à propos
d en mettre. La piece au refte eft per-
cee de même à chaque extrémité de
Tome IL X

-ocr page 263-

Be VArt du Dentijîe.
deux petits trous, plus ou moins éloi \'
gnés du talon , de façon que les fils qui
paffent dans ces trous puifi\'ent fe rejoin-
dre & s\'attacher aux dents d\'à-côté, un
peu au-deifus de la gencive, afin de ne la
pas comprimer. J\'ai déjà dit que, pour
bien faire fabriquer cette piece, il falloit
prendre avec delà cire des mefures juf
tes fur le fujet. On ne peut marquer
trop exadement la hauteur que la piece
doit avoir, le diametre des chatons def-
tinés à recevoir les racines, & l\'endroit
précis des trous qu\'il faut pratiquer à
leur extrémité. On peut encore faire en
yyoire un modele plus parfait de cette
pieceen le fabriquant & en le finiffanc
foi-même fur le fujet, de façon
qu\'il
n\'y ait plus qu\'à fixer les dents par des
goupilles. Cette piece, ainfi garnie de
fes dents , fe donne à l\'ouvrier qui la
copie plus parfaitement.

Une pareille piece bien faite n\'efl:
pas fufceptible de la moindre odeur, &
rien n\'imite mieux, non-feulement les
dents naturelles, mais même les gen-
cives qu\'elle fait revoir dans la plus
grande beauté : cette piece étant de

même couleur, & au niveau des vérita-r

-ocr page 264-

De l\'Art du Dentlße, 145
î)!es gencives. De plus, les dents dont
elle eft garnie étant naturelles & bien
afTorties, pour la forme & pour la blan-
cheur, aux dents qui reftent au fujet,
il ne paroît aucun artifice. On a beau
rire & ouvrir la bouche, il eft impoffi-
ble de s\'appercevoir que ce foient des
dents & des gencives de rapport.

M. Fauchard dit, qu\'on peut faire
émailler une piece d\'os entiere , en y
appliquant une lame d\'or ou d\'argent
qui tient à chaque extrémité par deux
vis , ou par plufieurs petites goupilles.
Mais une piece émaillée fur une fimple
plaque qui s\'applique fur fa face anté-
rieure , ne peut jamais être aufli folide ,
ni rendre auffi bien la nature que la pie-
ce d\'or que je propofe , & dont les bons
effets me confirment de plus en plus les
avantages.

Suivant M< Fauchard, on peut met-
tre encore plufieurs dents naturelles
jointes enfemble par leurs parties
lacé-
l\'aies, foie avec des goupilles, foit avec
Une
petite lame d\'or appliquée fur leur
face poftérieure. Dans le dernier cas,
les dents
font percées vis-à-vis de la
plaque qui l\'eft auffi pour recevoir une

X ij

-ocr page 265-

Z4.4 ^^ l\'An du Dentlße.
goupilie qu\'on rive d\'un côté fur le^taîon
de chaque dent, & de l\'autre fur la
plaque même. Mais les dents enfilées
de cette maniéré ne fauroient être en-
core ni auffi durables ni aufii parfaite-
ment relfemblantes que celles de ma pie-
ce. D\'ailleurs, lorfqu\'il faut couper une
partie de la racine de ces dents , & ce-
pendant en laiifer alfez pour qu\'elles
foient de même longueur que les dents
voifines où elles s\'attachent, la méthode
de M. Fauchard ne peur avoir lieu.
Car les racines n\'ont plus alTez de talon,
pour être affifes folidement fur les gen-
cives ; au lieu que ma méthode peut être
exécutée avec fuccès dans tous les cas
que j\'ai marqués, & même dans ceux
où l\'on pourroit employer la pratique
de M. Fauchard.

Toutes les bouches ne font pas pro-
pres à recevoir une piece de dents na-
turelles telle que celle-là. Quand les
dents de la mâchoire oppofée à celle
qui fe trouve dégarnie, fe font allon-
gées au point de frapper fur les genci-
ves de celle-ci, ou du moins d\'en ap-
procher de fort près , il n\'eft pas pclu-
ble alor$ de
remeubler cette derniere en

-ocr page 266-

De. VAn du Denûjle, 245
dents jiaturelles montées , comme je
viens de dire : elles feroient du moins
peu durables, par le peu d\'épailTeur qu\'il
fâudroic donner tant à la piece qa\'aux
dents mêmes. C\'efl; le cas de s\'en tenir
à une piece de cheval marin bien choi-
iie , & garnie de denrs de même ma-
tiere. ^

11 faut donc commencer pàr lîmee
& raccourcir les dents trop longues ,
tant pour leur donner plus de propor-
tion avec leurs racines, que pour taci-
lirer l\'ufage de la piece qu\'on veut pla-
cer à l\'autre mâchoire , & pouvoir la
rendre plus durable , en lui donnant
une certaine épaiiïeur. Cependant, Ii
après avoir limé les dents allongées , la
piece étoit encore gênée dans la jonc-
tion des deux mâchoires par les dents
qui répondent à l\'artificielle j il faut di-
minuer de cette piece jufqu\'à ce qu\'il
n\'y ait plus de choc.

Si la piece eft tellement étendue que
les molaires de la mâchoire oppofée en
la rencontrant l\'incommodent, il fauc,
pour faire ceifer ie choc, creufer & rac-
courcir les dents de la piece qui répoa-

X\'iij

-ocr page 267-

De tAn du DentlJIe.
dent à ces molaires, parce qu\'on- ne
peut guere diminuer celles-ci.

Maîs, fi la mâchoire qu\'on regarnir n\'a
pomt de dents qui fe rencontrent avec
celles de la mâchoire oppofée , on aura
beau creufer ou amincir la piece , &
raccourcir les dents naturelles, celles-
ci viendront toujours frapper fur cette
piece. Il faut alors avec la lime rafer Se
mettre au niveau des gencives ce qui
peut y refte r de racines ; enfuite y bicii
aifeoir la piece , & l\'accommoder de
façon que les dents correfpondantes
portent également delfus. Par ce moyen,
pourvu que la piece foit bien attachée
des deux côtés aux dents qui reftent à
la mâchoire, ou d\'un feul côté, lorf-
qu\'il y a quelque racine propre à rece-
voir un tenon , la maftication fe fera
rrès-bien fur cette piece , quoique le
choc de la mâchoire oppofée fe faiîe
uniquement fur elle.

Quand il ne fe trouve aucune racine
fous la piece, on a plus de peine à s\'y
accoutumer , & la mafticarion en eft
auffi plus pénible ; mais alors il faut
Iaiffer à cette piece plus d\'épaifteur ôc

-ocr page 268-

De VArt du Dmtlfie. 247

de largeur, afin que les dents de îa mâ*
clioire oppofée la rencontrent plus ai-
fément.

Lorfqu\'il s\'agit d\'attaclier une piece
d\'une certaine étendue à de groffes mo-
laires , il faut qu\'à chaque extrémité elle
foit percée au bord du talon de deux
petits trous parallèles U diftans d\'en-
viron une ligne. Ces trous , qu\'il efi: à
propos de conduire aufli loin qu\'il eft
poflible , doivent aboutu" vers le milieu
de la hauteur de la piece à la free d\'une
des pentes molaires fa(5tices qui répond
à la joue » de façon que les deux boats
du fil foient noués fut cette piîce & fur
la petite molaire, îandis qu\'ils ne font
qu\'une anfe far la grofle molaire naru-
relle qui fert à affermir la piece. On fiic
Ja même chofe de l\'autre côté : mais s\'il
falloit aller nouer le fil fur une groife
molaire trop reculée , an lieu de faire le
noeud fur cette dent, on perceroit de
même la ,piece pour y nouer le fil qui
entoure alors la dent naturelle , & pour
n\'y faire pareillement qu\'une anfe.

Jl y a encore une autre maniece. Au
lieu de faire fortir Jes deux bouts du ill
fur la face de la petite molaire asii ré-

X IV \'

-ocr page 269-

2 4 s " Be VAn du Bemijle.
répond à la joue, on peut n\'en faire paf-
fer qu\'un bout fur la même face dans la
féparacion des dents factices, & ramenee
i\'aaa-e bout de l\'autre côté â la face op-
pofée. Le fil alors fe noue toujours fur la
piece dans la fcparation des petites mo-
laires , & le nœud s\'y loge.

Quand Ja piece a moins d\'étendue &
eft iîxée fur les petites molaires , les
trous fe font à l\'orduîaire ^ & le fil
fe noue fur la dent naturelle.- Il entre
d\'abord à fon extrémité du côté du talon;
on le fait fortir en-delfus ducôré & fuc
la fice oppofée où il fait une anfe, &
(le-là li va regagner la denr à laquelle il
doit s\'attacher.

Si la piece n\'eft que de trois ou de
quatre denrs,
Ôc ù les dents naturelles
qui doivent fervir à l\'attacher font dé-
chaulfées , il faut que la piece foit f^er-
cée à l\'extrémité de fes parties latérales^
que les trous foient plus ou moins éloi-
gnés du talon , fuivant que les dencs
voifines deftinées à faire l\'attache fe
trouveront dégarnies , & que ces trous
fe trouvent à-peu-près vis-à-vis du col-
ler des mêmes denrs.

Si au contraire les dents du fujet ne

-ocr page 270-

DePÂrtduDentiJic. 245)
font point déchauflces, ni les gencives
lecirées , pour être foutenues par quel-
ques racines ou d\'autre maniere , les
trous fe feront au bord de l\'extrémité
de la piece , fous-le talon j & l\'on obfer-
Vera toujours que le fil attaché aux dents
Voifines ne comprime pas les gencives.
Car, faute d\'y faire attention, quand le
porte fur la gencive & fe gliffe ou
s infînuedeifous, ilarriveque lagencive
fe gonfle J qu\'elle devient douloureufe ,
ainfi que la dent où efi: actaclié ie fil, &c
^ue celle-ci s\'ébranle. Pour éviter cet
Inconvénient, il faut que les trous ne
foient poinc tout-à-fait: fous ie talon de
la piece. De plus, quand une piece s\'at-
tache des deux cotés , ii faut avoir foin
qu\'elle joigne exaâremenr les dents, &
qu\'elle ait aifêz d\'étendue pour n\'être
point cA)ligé d\'y amener ces dents , en
ferrant les fils qui les auroienc bientôt
ébranlées.

Quand il ne fe trouve de dents pro-
pres à foutenir une piece que d\'un feut
côté de la bouche, fût ce à la mâclioire
fupérieure, on peut l\'y fixer folidemenr.
Si iô fujet n\'a qu\'une feule dent fituée
devant ou fur les côtés , on fait

-ocr page 271-

15ô De tAn du Benûf.e,
une piece d\'une étendue fuffifante pouf
remplacer toutes les denrs qui man-
quent : on y pratique une échancrure
pour loger la denc naturelle qui fert à
maiacenir toute la piece ; on perce en-
fuite cette échancrure de deux trous à
chacune de fes parties latérales & près
du talon , en faifant fortir la pointe du
foret fur la face poftérieure , de même
qu\'aux pieces oi\'dinairesj on palTe d\'un
côté un fii qu\'on fait revenir en le repaf-
fint par le trou voiiin du premier ce qui
forme une anfe à la face poftérieure , SA
aind les deux bouts de fil fortent en
dedans de l\'échancrure. A l\'autre partie
latérale, oii font auffi deux trous paral-
lelles, on pafle de même un autre fil , Si
les deux fi s fe nouenc fur la dent qui fe
trouve enchâffi-;e dans la piece , ce qui
k rend très-folide. «

Si l\'unique dent qui refte eft fituée aU
fond de la bouche, il faut une pieceaffez^
étendue pour remplacer les denrs qui fe
voyent, & qu\'elle emboîte bien la denC
qu\'elle va joindre. On l\'y attache foli-
dementparle moyen de deux filsféparés.
On faic, pourcetsffec , deux trousl\'unà
côté de l\'autre à l\'extrémité de la piece

-ocr page 272-

De rArt du Dentifie. 151
& fous le talon ; on les conduit dans
cette piece le plus avant qu\'il eft poflible,
poui que les fils fe nouent defliis, & non
far ia dent naturelle. On pratique encore
dans la partie latérale de la piece qui
pofe contre cette dent , deux autres
trous éloignés des prerniers d\'environ
un tiers de ligne , & qu\'on pouffe de
même aflez avant pour que les fils
qu\'ils recevront fe nouent iur îa piece i
le fil qui eft fous le talon doit être
noué le dernier , pour faire appliquer
"plus exaétement fur la gencive l\'autre
extrémité de ia^piece. Enfin, pour em-
pêcher la piece d\'être vacillante & de
trop fatiguer la dent qui lui fert d\'appui,
il faut pratiquer à l\'extrémité de cette
piece une cavité qui embraOe toute la
gencive. Cette cavité eft principalem^ent
lîéceflaire à la mâchoire fupérieure y
pour peu que la gencive y fait élevée.
J\'ai fait tenir plus d\'une fois, & pen-
dant Tefpace de plufieurs années, une
pareille piece fur une dent unique ,
en
renouvellant to\'us les deux trois moia
les attaches qui doivent être d\'un cor-
donnet de foie un peu gros.

Lorfqu\'il refte d\'un feul côté deux

-ocr page 273-

i 5 i J^e l\'Art du Dentijîê.
ou trois dents isolées j la piece doit avoit
autant d\'cchàncrures pour loger fepa-
rémenrchaquedenr,& remplir en même
tems les intervalles qui fe trouvent entre
elles. Elle fera donc percée de fiiçoii
que, s\'il y a trois dents naturelles , il
y ait au moins deux fils fépacés qui fe
nouent en deux endroits fur la pieces
S\'il fe trouve d\'un feul côté deiix oU
trois dents de fuite , la piece à l\'endroit
de fa iondion avec la partie latérale an-
térieure de la premiere dent fera percc4
de quatre trous , pour recevoir deux
fils qui feront noués cgmme à la pre-
mière piece attachés à une feule dent.
Il faut encore que cette piece ait une
avance artiftement pratiquée, pour s\'ap-
pliquer fur la face interne des dents »
te qu\'elle ait a(fez d\'étendue pour ré-
gner le long des deux premieres dents
fur la face qui répond au palais. On
perce cette avance vis-à-vis de la fé-
conde dent 5 pour recevoir un fil qui fera
noué fur cette dent. Ainfi toute la piece
fera tenu folidement par trois fils , ôi
elle n\'aura pas befoin d\'être fort cave ,
p"arce que l\'avance dont je parle fiiff^^
pour l\'empêcher d\'aller & venir.

-ocr page 274-

De l\'Art du Dântijle. z 5 j

Des fils qui fervent à attacher les dents
artificielles.

O N fe fert de trois fortes de fiîs pour
attacher les dents poftiches : de fils d\'or,
de cordonnets de foie , & de fils de
chanvre. Les fils d\'or font d\'ordinaire
les plus durables de tous, &font exempts
de corruption j mais ils fe relâchent biem
tôt, & ne maintiennent pas une pisce
aufli foîidement que les cordonnets. îls
font d\'ailleurs à la longue fur certaines
dents une imprefiion qui produit quel-
quefois un agacement douloureux. On
peut éviter néanmoins cetinconvénient^
foit en applatiffant le fil d\'or avec un
inarteau pour lui ôter fa rondeur, foit
en n\'employant que de l\'or fort doux.

Les cordonnets font préférables aux
fils d\'or , parce qu\'ils font moins d\'im-
preflion fur les dents , & que d\'ailleurs
ilsdurent quelquefois
fix mois ou un an,
comme
je l\'ai fouvent éprouvé. De plus,
quand la piece qu\'ils maintiennent eft

-ocr page 275-

rArt du Dendp.
pofée de façon que les alimens ne peu-
vent s\'infuiuet- entre elles & la gencive ,
ils ne contradent aucune odeur.

On doit préférer les fils de chanvre
aux fils d\'or & aux fils de foie , lorf-
qu\'on fait attacher foi-même les dents
qui ont befoin d\'attache , ou qu\'on a
ies dents naturelles aifez tendres, pour
que les cordonnets ou les fils d\'or
y
falfent imprefiion. Au refte , ces trois
fortes de fils doivent être proportionnées
à l\'étendue de la piece, & plusou moins
gros , plus ou moins fin , fuivant qu\'ils
approchent des gencives, ou qu\'ils peu-
vent les comprimer, Ô^
leurcaaferquel-
que engorgement ; ce qu\'il eft aifé d\'évi-
ter par les foins que je recommande.

§. V.

Des dentiers ou pieces à r efforts.

Lorsqu\'un fujet n\'a plus aucune dent ;
on
peut garnir les deux mâchoires d\'un
dentier complet qui fetafoutenu par des
relTorts ; mais il faut donner à la piece

-ocr page 276-

De VAn duDentiflc. t\'y^
lîîoins d\'écendue fur ces mâchoires que
ïi\'eiî ocçupoient les dents qu\'on rem-
place, Ainli l\'une & l\'autre mâchoire
n\'eft compofée que de douze dents , &
n\'a de chaque côté qu\'une groffe molaire,
ce qui donne plus de jeu au reilort.

11 faut auffi que les reiforts ne foienc
pas trop longs , afin qu\'en fermant la
bouche , la piece ne fe porte pas trop
en devant, èc que l\'apopiyfe coronoïde
avec les mufcles qui s\'y attachent, pouf-
fant ces refforts, n\'empêchent point leur
jeu. Leur longueur depuis l\'endroit où
ils font
engagés dans chaque piece qui
comprend environ trois lignes, doit done
être à peu près fixée à 13 ou 14 lignes
hors d\'oeuvre. Les refforts d\'acier in-
ventés par M.
Fauchard doivent être
abfolument rejettés, parce qu\'ils font
fujetsà la rouille, & fe caffent aifémenr.
Kl.
Fauchard lui-même a fi bien fenti
le
double inconvénient des refforts d\'a-
cier, qu\'il recommande en un autre
endroit de fon livre de les doubler de
baleine fine ; ce qui eft multiplier les
êtres, fi ce n\'eft pas fans néceflicé, du
moins pour augmenter la gêne.

L\'or efl donc le feul métal qui con-

-ocr page 277-

De I\'An du Dentlße.
vienne ici, d\'autant plus que , quand il
eft bien ciioin & battu à froid, ii a ie
même relFortque l\'acier le plus élaftique.
D\'ailleurs il n\'eft pas caftant, ni fujet à
îa moindre rouille: deux avantages iuef-
timables. Les reftorts faits de ce métal
auront tout au plus l\'épailfeur d\'une
piece de douze fols, Se environ cinq
quarts de lignes de largeur. Plus ils
feront minces, plus ils feront doux , Sc
mieux ils obéiront aux mouvemens ds
la mâchoire inférieure pour la maiîica-
tion & autres fondions de la bouche.

Après avoir fuffifaramenc ouvert les
deux extrémités de chaque piece , pour
y engager les reiforts, il faut que ces
extrémités foîenc enveloppées d\'uns
calotte qui recouvre exadement les deus
ouvertures, & qui foit maftiquée avec la
piece. Les relforts engagés dans la pièce
y feront folidement arrêtés par une goU\'
pille , qui entrera dans un trou
pratiqué
tant à cette piece & à la calotte qu\'au
reflbrt même. La goupille traverfera les
deux furfaces oppofées de la calotte ,
Se fera rivée du côté qui répond à la
gencive
à rivûre perdue.
Avai2t que de faire fabriquer
îesrefforrs

d\'or,

-ocr page 278-

De VAn du Dentifte, 557
d\'or, il eft bon d\'en faire porter de ba-
leine pendant quelques jours au fujet ,
tant pour l\'accoutumer aux premiers ,
que pour faire modeler ceux-ci fur les
relforts de baleine qui par l\'ufage auront
pris d\'eux-mêmes la forme la plus conve-
nable, & la coudure la plus commode.
Des reftorts d\'or bien faits feront plus
durables que ceux d\'acier 5c de ba-
leine.

Je n\'adopte les relforts de baleine l
que pour fervir d\'eftàis à de plus folides,
parce que j\'en connois l\'inconvénient.
La baleine à force d\'être humectée par
lafalive , & d\'être alfujettie & trop cour-
bée, perd tout fon reffort en très-peu
de jours. Ainfi, pour peu qu\'on ouvre
la bouche j la piece d\'enhaut n\'eft plus
appuyée fur la mâchoire fupérieure , ou
ne fe porte vers la gencive que très-len-
tement. .Aufli pour les refîbrts de ba-
leine faut-il faire cette piece d\'enhaut
fort légere, afin que le reflbrt ait plus
de force ; au lieu qu\'avec des reflbrts
d\'or qui auront toujours aflez de force ,
on peut donner à cette piece tout le
poids qu\'on veut. Il eft vrai que plus les
pieces font légeres Ôc ont les dents

Tome II, Y

-ocr page 279-

253 Bet Art du Dentlße.
■eourres, plus aifément on s\'y accoit-
tume ; mais elles font auffi moins folides,
&c la mafticaticn fe fait mal, ou ne fe
fait pas. De plus , les reiforcs font ren-
verfés & fe joignent prefque par la ren-
contre de deux râteliers , de façon que
l\'arc du reffort s\'affaife & manque de
force pour relever la piece d\'enhaut.
Enfin quand les pieces ont peu de hau-
teur , les refforts d\'acier fe caffent bien-
tôt, ceux de baleine reftent bientôt fans
force , & ceux d\'or même perdent dans
la fuite une partie de leur reffort : or
il eft aifé de redonner à ceux-ci tout
leur reffort, en étendant un peu fon arc,
ce qui fe fait en ouvrant les deux pieces.

11 faut obferver que , quand on a per-
du les dents , les gencives fe retirent
& deviennent maigres j les parois des
alvéoles fe détruifent & s\'affaiffent à un
tel point J que les deux mâchoires ont
alors bien moins de hauteur. Les dents,
avant que d\'être ébranlées, & dans leur
état naturel , n\'ont environ que deux
lignes de longueur \\ mais
lorfqu\'elles font
déchauffées , foit par le tartre , foit par
quelque autre caufe, lorfque l\'alvéole &
la gencive font tellement confommées

-ocr page 280-

De VAn du Dentijle.
que la racine eft découverte fans que la
dent fe foie vallongée par la concraclion
^de l\'alvéole qui ne fubhfte plus, fi ce-
pendant j^eique dent s\'allonge, ce n\'eft
que par f^ propre p(iids à la mâchoire
fupérieure, ou que le périofte qui refte
à l\'extrémité de la racine fe gonfle &
chaffe la dent. Or , dans ce cas , la piece
inférieure doit avoir au moins fix lignes
de hauteur , & la fupérieure environ
quatre lignes. On peut les faire l\'une &
l\'autre d\'or ou d\'argent émailli. Les dents
qu\'elles doivent porter feront de la lon-
gueur des dents naturelles, fans y com-
prendre la racine, & le refte de la piece
de la hauteur des gencives dont l\'émail
imitera la couleur. Quand le fujet dé-
pourvu de dents n\'eft pas en état de faire
la dépenfede ces forces de pieces, on en
fait toutfimplemenrde cheval marin fans
émail, ou même en ivoire avec des ref-
forts de baleine. Alors 3 pour que ces
reflbrts fe foutiennent mieux & foient
plus durables, on leur donne environ
deux lignes de largeur. On a foin en
même tems de les garnir d\'une bandelette
de linge fin, & fur-tout bien blanc, donc
le bouc eft arrêté par un fil. Il fauc tous

Yi]

-ocr page 281-

zSo De tAn du Dentïjle.

les foirs ôter la piece de fa bouche ^
l\'ouvrir Se l\'étendre proprement dans
une ferviette , afin que par ce moyen
baleine reprenne fon rerfort. ^eft même
encore bon d\'avoif plufieurs ae ces ref-
forts de baleine tous préparés, pour
changer foi-même ceux qui n\'auront
plus de relfort.

Quand X on prépare la baleine pour
en fabriquer des relforts, il faut avoir
Fatten lion d\'en bien conferver la peau
qui eft le «ôté le plus liffe, le plus flé-
xible, ôc le moins fujet à perdre fon éîaf-
ticité. Ces reftorts doivent s\'engager
dans l\'extrémité de la piece de la lon-
gueur d\'environ, deux ignés. La piece
doit être auffi percée de deux trous pra-
tiqués l\'un à côté de l\'autre de delfus en
deftbus, & à l\'endroit du talon qui pofe
à l\'extrémité de la gencive. On paiïê
dans ces trous un fil qui fe noue du côté
oppofé à celui de la gencive , afin qu\'en
mangeant J le nœud foit à couvert, au
moyen d\'un petit creux qu\'on a ménagé
pour lui dans cec endroic de la piece.

-ocr page 282-

Be t Art du Dentlde. i^i

§. V I.

Maniere de placer une piece a la mâchoire
fupérieure , quand II rejie des dents à
l\'irférleure.

Îj or s qu\'il refte à la mâchoire infé-
rieure J ou des incifives, ou des cani-
nes, ou de petites molaires, ou des pre-
mieres groifes ; on fair, comme dit
M. Fauchard , dans le dentier ou dans
le demi-cercle inférieur une échancrure
fuflifante pour recevoir & loger ces
dents, quelles qu\'elles foienr. Si toutes
lesincifives, toutes les canines, & les
petites molaires fubfiftenr, on fait pour
chaque côté de cette mâchoire inférieure
où manquent les greffes molaires, une
piece d\'environ fix lignes d\'étendue quî
3ar conféquent fait plus de volume que
a premiere groffe molaire. On ne forme
point de dents à cette piece qui ne fe voit
>oint 5 5c qui n\'eft deftinée qu\'à recevoir
e reffort. Quand cette piece eft difpofée
de façon à bien s\'affeoir de chaque côté
fur la gencive, & qu\'elle emboîte bien

-ocr page 283-

i&t Be TAn du Dentijle,
laderir.ere molaire petire qui fert deiaiî-
guerre d fa coulifle, on fait à l\'extrémité
oppolée de cette même piece une entaille
profonde d\'environ trois lignes, pour y
attachsr le relforc, & on fait la même
chofe à l\'autre piece. On arme enfuite
ces deux pieces d\'un demi-cercle d\'or ou
d\'argent 5 qui n\'en fait qu\'une feule &
même piece ; mais avant que de les
aliembler, on s\'alfure de la jaftelFe du
cercle qui doit fuivre exaétement le con-
tour que les dents forment vers la lan-
gue. 11 doit être encore percé aux deux
bouts de deux ou trois trous qui répon-
dent à ceux qu\'on £iit de même à cha-
que piece, pour recevoir des goupilles
qui fe rivent d\'un côté fur le demi cer-
cle, & de l\'autre fur chaque piece. Avanc
que de percer la derniere , \'il faut bien
marquer la place du premier trou qui
rcpojid au demi-cercle , afin que la cou-
lifTe de cette pjece , & celle de la piece
oppofée, ne fe trouvent pas éloignées
des dents qui leur ferviront de languet-
tes. On évite ce défaut en n\'arrêtant
chaque piece, qu\'après avoir bien pris
la mefure & la diftaiîce de tons les trous
qui doivent fe répondre l\'un à l\'autre..

-ocr page 284-

De r An du Benûfie, z6 s

foit dans ces pieces, foit dans le cercle^,
il faut de plus prendre bien garde que ce
demi-cercle d\'or ou d\'argent ne bleiîe
point les gencives : il s\'agir pour cela ,
qu\'il ne porte point fur les dents trop
bas ou trop haut, mais qu\'il porte feu-
lement fur l\'avance des incifives & des
Canines , qui font fur la face interne &
Vers le collet deces dents où finit l\'craaiL
Ainfi, quand le fujet n\'aura pas les dents
déchaudées, mais au contraire la mâ-
choire élevée par la préfence des alvéoles
a fa partie moyenne & antérieure, le de-
mi-cercle doit être élevé de même, & fui-
Vre en tout la forme de cette mâchoire.

Une autre précaution à prendre, c\'eft
que ce même demi-cercle ne gêne point
la langue. 11 fera pour cet effet arrondi
par-tout, & large feulement de deux
tiers de ligne, fi ce n\'eft à fes extrémi-
tés qui feront plates , & qui auront cinq
quarts de ligne de largeur fur une épaif
feur proportionnée , pour que les trous
aient plus de force. Les perfonnes qui
Ont les dents déchauffées peuvent fup-
porter un fécond cercle en devant,pourvu
qu\'il foit afiez bas pour ne pouvoir être
appeixu, ni en riant, nien parlant,.

-ocr page 285-

■ De VArt du Denùjle.

Quant à ceux dont les levres cou-\'
vrenc leurs dents de façon qu\'on n\'en
voie que l\'extrémité, il eft encore plus
aifé de leur mettre un double cercle. Le
cercle antérieur fera appliqué fur la face
antérieure des dents au-deffus des gen-
cives , & fur chacune des deux pieces
qui doivent occuper les côtés & Tinté-
rieur, comme il vient d\'être dit. Les ex-
trémités des deux cercles fe joindront
aux extrémités de ces deux pieces, & fe-
ront fixés par deux goupilles, pour que
le tout foit foiide & joue bien , fans gê-
ner aucune partie de la bouche. On ne
fauroit apporter trop de juftefte dans la
conftrudion \'des cercles & des pieces.
Si l\'on veut faire les uns & les autres
d\'or ou d\'argent fur un modele en os,
que le Dentifte aura formé pour l\'ufage
même du fujet, ils ne feront alors qu\'une
feule piece d\'un feul morceau ,
dont
chaque extrémité ne recevra qu\'une
goupille pour arrêter les reiforts.
Une
pareille piece fera fans doute beaucoup
plus durable : mais, fi elle peut être vue,
il faut la faire émailler de la couleur des
dents. Au refte, c\'eft aux circonftances
à régler la
néceflicé de faire cette piece

double

-ocr page 286-

Be rArt du Dentijîe. x

double oa fimpie, de quelque matière
que ce foie.

S\'il n\'eft queftîon que d\'un (impie
cercle , parce que celui du dehors feroic
trop vihble j même étant émaillé de la
couleur convenablej &c iî dans ie jeu
des mâchoires il rifque de fe déranger :
pour ie rendre ftable, il faudra ie per-
cer dans le centre de deux trous ,. oii
l\'on paiTera \'un fil fimpie qui fe nouera
fur ia dent qui eft vis-à-vis. Mais fi l\'on
craint que cette dent ne foit trop fati-
guée , alors il faut percer de chaque cô-
té la piece de deux trous dans fa cou-
iiffe & vers
(a. partie inférieure , pour
recevoir un fil qui s\'attachera fur iadenc
donc chacune des couliifes eft remplie.

Observation.

Une perfonne obligée de parler fou-
vent en public, eut recours à moi pour
lui faire une piece à ia mâchoire infé-
rieure. Je fis cette piece de cheval ma-
rin j je l\'échancrai convenablement pour
recevoir quatre incifives , & deux cani-
nes qui lui reftoient. Sur la face inté-
rieure de ces dents, ma piece n\'avoir
Tome IL Z

-ocr page 287-

De r Art du 1) entiße,

qu\'une lîmple plaque faite en demî-
cercle mais afièz cpaiiTe pour ne point
calfer. Les canines s\'emboîtoienr dans
cette piece des deux côtés par une cou-
liffe J la piece étoit auffi percée de cha-
que côté fur les bords- & dans la cou-
iilTe, pour palfer un fil que la perfonne
renouvelloit elle-même. Cette piece s\'eil
très, bien maintenue. Je l\'avois mife prin-
cipalement j pour pouvoir établir une
piece entière à la mâchoire fupérieure,
lorfqu\'elle fe trouveroit dépourvue d\'une
unique grolle molaire qui reftoit alors ,
& qui, depuis plufieurs années., fervoic
à maintenir une piece artificielle aifez
folidement, pour faciliter à la fois la
prononciation & la maftication. Ainfi ,
quand le fujet fut privé de cette mo-
laircj il ne pouvoir plus parler, ni fe
faire entendre diftinclement : mais auffi-
tôt qu\'il eut une piece à la mâchoire fu-
périeure, piece qui fe réunit, comme
on îe conçoit, à celle d\'en bas, parle
moyen des reffiorts , il recouvra les
^-vantages qu\'il avoit perdus.

-ocr page 288-

Dx rAn du Dentifte. xSt

§. Viî,

Maniéré de pofer une piece à U mâchoire
■inférieure.^

L O R s Q u \' u N fujet a la mâchoire in-
férieure enriérenient dénuée de denrs ,
«Se que la mâchoire d\'en haut en eft
encore fuffifamment garnie , on doic
mettre abatte mâchoire inférieure une
piece entiere, qui, fans être attachée,
tiendra tout autant qu\'il faut pour opé-
rer la mafticacion. Ce qu\'il eft princi-
palement néceiTaire d obferver dans ia
conftrûction de cette piece, c\'eft qu\'elle
ait alfez d\'étendue pour aller jufqu\'au-
près de l\'apophyfe coronoïde ; qu\'elle
air vers fes extrémités, du côté qui ré-
pond aux apophyfes, une certaine élé-
vation pour s\'accommoder â leur
émi-
nence , & qu\'elle fuive bien le contour
dp la mâchoire & de la gencive. Cette
piece eft retenue par les joues, les
le-
vi-es, la langue, foutenue par la gen-
cive, fur laquelle
elle eft bien aflife
•ainfi
que par fon propre poids. Car lorf-

•Zij

-ocr page 289-

l\'Art du Dentifte.
que je fais de ces fortes de pieces, pour
qu\'elles foient moins fujettes à fe déran-
ger dans la maftication ^ & qu\'elles foienc
mieux maintenues, tant par les joues
que par la langue , je leur ménage allez
d\'épaiifeur pour leur procurer ces avan-
tages. C\'eft par cette raifon qu\'une piece
toure d\'or eft moins fujetre a fe dé-
ranger, & tient beaucoup mieux dans
la bouche. Pour épargner ia dépeiife de
l\'or, on peut-employer de l\'argent. Mais
lorfqu\'il s\'agit de faire une pareille
piece,
il faut d\'abord la fabriquer en
y voire, pour l\'ajufter convenablement,
foit fur les gencives, foit fur les dents
de la
mâchoire oppofée qui peuvent y
répondre. On fait porter au fujet pen-
dant quelques jours ce modele en yvoi-
re, jufqu
\'à ce qu\'il y foit accoutume.
Enfuite on donne la piece
à l\'Orfe-
vre, pour
l\'exécuter en or ou en ar^
gent , & de
-là à l\'Emailleur , pour lui
donner le ton de la nature. ^

Bien des perfonnes entièrement dé-
pourvues de dencs,
portent un double
dentier , qui, par le moyen des reftorts,
fait prefque toutes les fondions des
vé-
ritables dents J tandis que d\'autres les

4*

-ocr page 290-

DcT Art du Dentïjle. 2<5"9
ôtent pour manger , & fubfticuent à la
inâchoire inférieure un dentier fimpie,
fur lequel ils mangent plus aifément
qu\'avec ie double, parce qu\'ils portent
celui-ci principalement pour foutenir la
levre & la joue fupérieure. Il eft vrai
qu\'il.faut un peu d\'habitude pour man-
ger commodément avec un feul den-
tier ; car d\'autres perfonnes s\'aident
mieux du dentier double.

Z iij

-ocr page 291-

2 7® DetÂrt du DennjTe.

EXPLICA\'TION

DE L A

ONZ IE ME PLANCHE: \'

Fig. \\,âJeiai-cerCLE d\'or pour répa-
rer les dents à la mâchoire fupérieure. Il
repréfente les gencives & ks f of es alvéo-
laires âefiiriîcs a recevoir les racines des
dents naturelles dont il doit être garni, de
la façon qu\'on volt les deux grandes inci-
fives déjà montées & plantées dans leurs,
alvéoles artfiàels. Cette piece efi vue par
fa furface antérieure.

AAAA. Faces antérieures des gencives.

B B 3 B. Leurs faces pofierleures.

CC. Trous dans, lefquels fient encha-
tcnnéss les racines des dents, »

DD. Les deux grandes incifives en
place.

EE. Les\' trous des goupilles qui fixent
ces dents.

-ocr page 292-

Vlaiuhe^ .Tl . \' Tiftn.. II. Paç ■ z-jû

-ocr page 293-

\\

-ocr page 294-

ï>i VArt du Demljlé. %-j i

FFFF. Les goupillés prêtes à être mi-
fes en place.

GG. Les deux petites incifives prêtes
à être rfiontées fur la piece , & percées à
Vextrémité de leurs racines pour recevoir
les goupilles.

Mil. Lis deux Canines prêtes à être,
niifes dans leurs chatons.

l\'ig. n. Demi-cercle de cheval marin ^
préparé pour être garni de dents naturelles ,
comme on cn voit deux de montées.

if. Les deux moyennes incfives d\'en\\
b^s , montées fur lu piece.

KK. Lès dsux incfives latéfcdes tra-
vaillées.^ & prêtes à être montées fur la
pic ce vues latéralement.

L. Dent canine préparée & cin[jî prête
à être montée ^ vue par fa face antérieure,
M M MM. Les endroits delà piece tra-
vailles & ajujféspour recevoir les dents.

NNNN, Les tenons attachés à la piece
& prêts à entrer dans chaque dent,

OOOO Les trous des goupilles défi--
nées à fixer les dents.

PP. Les dents molaires artificldks pra-
tiquées dans la piece même.

Z hr

-ocr page 295-

lyi De VArt du Dentifie,

Fig. î 11. Grande incifive de cheval
marin ^ travaillée de maniéré quelle n\'ex-
(sde pas le volume de Vincifive naturelle ,
qui refie & qu\'il
s\'agit d\'imiter, quoique
la hreche foit bien plus large.

QQ. Les deux avances qui font ap-
puyées de chaque coté aux dents natu- •
relies.

Fig, IV. Autre grande incifive ^ mais
naturelle y montée Jurunpetit morceau de
cheval marin.

Rtl. Les deux avances de la piece ,
percées chacune de deux trous dejlinés à
recevoir le fil qui doit attacher la dent.

Fig, V. Dent naturelle ^ introduite ou
plantée dans une piece d\'or , faite pour
reptefnter la gencive qui fe trouve fort
retirée y & pour loger la racine de la dent.

S. La piece d\'or éniaillée de la couleur de
îa gencive & garnie du fil qui doit amarrer
le tout aux deux dents vofines.

T. La dent naturelle.

Fig. Vi. La meme dent prête à entrer
dans la piece.

Fig. Vil. Feuille d\'or pour raffermir
les dents ébranlées.

-ocr page 296-

De l\'Art du B entiße. 27 J
VV. Les trous qui donnent pajfagê
aux fils qui affermirent les dents ébian-

ees.

-ocr page 297-

17 8 Dî TAn du Denûjle.

§. V 11 L

Palais anificiels , ou obturateurs.

Ije s parties fcslides ou les os qui for-
ment la voure du palais , font fujets
à d\'étranges dégradations qui ont plu-
fieurs caufes. Tantôt elles font occa-
fionnées par des dépôts que des dents
garées ont produits : dans les parties
qui les environnent , Si dont la ma-
riere , en féjournant , carie non-feu-
lement les os maxillaires, mais en.core
ceux du palais : tantôt ce défordre eft
l\'ouvrage d\'un vice vénérien ou fcorbu-
tique. J\'ai vUj par l\'effet de ces deux
fléaux, des trous énormes qui s\'étoienc
faits au palais après l\'exfoliation des par-
ties oifeufes qui compofent fa voûte. Le
mercure mal adminiftré même eft ca-
pable de caufer le ravage.

Quand, par quelqu\'une de ces caufes,
la voûte du palais eft percée dans quel-
que partie que ce foit, & qu\'il y a un
ou plufieurs os de détruits, deux grands
inconvéniens en réfuirent : La per-
fonne dont le palais eft en ruine ^ ne

-ocr page 298-

V c VA n du D entiße. 275
pent prefque plus fe faire entendre en
parlant , parce que îe.fon de fa voix s\'é-
chappant par le trou de ia voûre , palîe
dans le nez,, où il perd fa force, ia pu-
reté des tons qui le modifient, &c i\'ex-
preiîîon mêm.e. 1°. file éprouve autant
d\'incommodué en mangeant ; car les
alimens qui font poulies par ia langue
dans le conduit de l\'œfophage , venanï
à-rencontrer îe trou du palais, enfilent
quelquefois cette route, & fortent par
le nez. Heureufement on a trouvé le
moyen de remédier à ces inconvémens
par le moyen d\'un obturateur, piece qui
s\'ajufte au palais & qui bouclie exade-
ment le trou de k voûte ; ce qui fait que
les alimens & k voix étant obligés de
fuivre leur route ordinaire, la pronon-
ciation au moins eft diclindle, & les ali-
mens font portés
à leur deftination na-
tarelle. Mais ce n\'eft pas un petit ou-
vrage que de faire un obturateur qui
produife ces deux effets , & qui tienne
folidement, fans incommoder le mala-
de, C\'eft le chef-d\'œuvre de notre art
qu\'un palais faétice : mais pour parve-
nir à le faire , il faut qu\'on Dentifte con-
noiife la ftruéture & k
connexion d«s

-ocr page 299-

17^ Be VArt du Bcmïp.
parties fur lefquelies il doit travailler ;
qu\'il ait le génie méchanicien, & par
conféquent aifez d\'invention pour n\'être
point embarraifé par quelques circonf-
tances qu\'entraînent fouvent ces mala-
dies , & qui pourroienc former des obf-
îacles à la foiidité de la mâchoire.

L\'obturateur doit être ou plus iim-
pie , ou plus compofé , felon l\'état des
parties qui fe trouvent détruites , & fe-
lon le diametre du trou qu\'il s\'agit de
boucher. Quand la dégradation des os
n\'eft pas fort confidérable , il fuffit d\'une
fimple plaque qu\'on laifie appliquée au
palais, jufqu
\'à ce que la régénération
des chairs fe foit faite. Car auffi-tôt que
les chairs font reproduites 8c fuffifam-
ment prolongées , ( ce qui va quelque-
fois au point de boucher exactement le
trou ), toutes lès fondions de la bouche
fe font fans aucune incommodité j &
bientôt l\'obturateur devient inutile.

Il faut que cette plaque foit un peu
plus grande que le trou qu\'elle doit cou-
vrir , enforte que rien ne puiffie y pafter.
Lorfqu\'elle eft appliquée bien jufte , on
la fixe au moyen de deux branches qui
font partie de la piece même, & qui

-ocr page 300-

De l\'An du Dentifte. 177
vont joindre des deux c&tés chacune
une dent. Ces branches font percées
de deux petits trous à leurs extrémités
ou les dents s\'emboîtent , pour rece-
voir un fil qui fert
à les attacher folide-
ment. Quand il ne refteroit des denrs
que d\'un feul côté ou fur îe devant,
quand il n\'en refleroit même qu\'une
ieuiej il efl aifé d\'affurer cette-plaque.
En n\'y faifant qu\'une feule branche ,
elle fera plus alongée vers la dent fur
laquelle elle doit porter, & fera percée
en deux endroits. Les deux premiers
trous ferviront à paffer un fil qui fe
nouera fur la dent près de la gencive ,
& les deux autres recevront un autre
fil qui fe nouera fur la même dentun
peu plus bas que le premier. La plaque
tiendra folidement de cette maniéré,
50urvu que fa convexSfc & celle de fa
îranche foient l\'une & l\'autre bien pro-
portionnées à la concavité du palais,
ôc
jamais elle n\'empêchera la régénération
des chairs qui fe fera en moins de fix
mois. C\'efl l\'efpece d\'obturateur qui
m\'a paru la plus fimple & la plus com-
iiiode.

Ceux qui font plus compofés ôc donf:

-ocr page 301-

De TAn du Dentïjle.

une piece entre dans le trou du palais,
pour y former le pointy d\'appui de ia
plaque, ont un inconvénient remar-
quable. Cette piece eft un obftacle in-
vincible à la régénération des chairs,
& au prolongement des parties char-
nues qui perdent entièrement leur ref-
fort par la préfence de ce corps étran-
ger : elles ne peuvent plus\'fe rappro-
cher, & le malade eft obligé de por-
ter l\'obturateur pendant route fa vie.
Ainfl,
à moins que i\'écartement des os
du palais ne foit prodigieux , _ ou les
trous formés par ia carie d\'un diametre
extraordinaire, ii faut, à mon avis , pj-é-
férer la plaque fimple que je propofe

qui doit avoir tour au plus i\'épaif-
feur d\'une piece de vingt-quatre fols.
Cette plaque doit encore être d\'argent
ou d\'or, & ne^it jamais s\'appliquer,
ou\'on n\'ait auparavant détruit toute
la
carie da palais. Le fait qui fuit va con-
Êrmer cg que j\'avance.

O B s E 11 V A T î o N I,

En 1751, un particulier s\'étant mis
entre les mains d\'un
Eleve en Chirur-

-ocr page 302-

Dt VAn du Dentijle. zl^
gie , pour paiTer les grands remedes, le
niercure qui s\'écoïc porré^ principale-
ment à la bouche lui iit perdre deux
dents. Auffi-tôt que le malade put for-
tir, il vint me confulter fur Tétat de fa
bouche qui lui faifoit reffientir de gran-
des douleurs. J\'examinai bien l\'inté-
rieur du palais : j\'en trouvai les os prêts à
s\'esfolier & à tomber ; j\'en ôtai même
fans effort un morceau de\'la erandeur
de l\'ongle , & il refta dans le milieu
du palais un trou aftez confidérable ,
pour y faire entrer aifément une aveline
de m.oyenne groifeur. Je remplis ce
croa d\'un boiudonnet trempé dans la
teinture de myrrhe & d\'aloës, afin de
hâter l\'esfoliatîon d\'une autre portion
d\'os cariée. Elle fe détacha le quatrie-
îTie j_our, & je l\'enlevai fans peine. Je fis
dncer la bouche du malade avec parties
égales d\'eau d\'orge & d\'eau vulnéraire
î
en quatre jours de tems les parties char-
nues revinrent prefque dans leur état
naturel. Mais comme il reftoit au mi-«
lieu de la voûte du palais une ouver-
ture affez fpacieufe pour contenir une
grofîé amande , le malade ne pouvoic
plus fe faire entendre, parce que la vois

-ocr page 303-

De VAn dtt Dentifie.
fe perdoit dans le nez. Je réfolus de lui
-appliquer un obturateur, & eiî atten-
dant, je remplis Je trou d\'une tente de
charpie trempée dans du vin miellé. Je
fis donc faire une plaque d\'argent
à
deux branches. Deux jours après je l\'a-
juftai fur le trou , après en a
Voir ôté la
charpie, & j\'attachai les deux branches
avec un fil d\'or à une denc molaire de
chaque côté de la bouche. Avec cetce
plaque 5 le malade parla auffi diflinc-
temenc qu\'il faifoit avant fon accident.
Environ iix mois après, il vint me trou-
ver pour faire reflèrrer le fil d\'or d\'une
des branches de la plaque. Il fallut ôter
cette machine , pour y remectre d\'aucre
fil; mais je ne trouvai plus le trou fur
lequel je l\'avois appliquée. En portant
îe doigt en cet endroic , je reconnus
que les chairs qui s\'étoient rapprochées
êc qui paroiffioient bien réunies ne l\'é-
toient pourtant pas. Ainfi je me dé-
terminai à rafraîchir très-légérement les
levres de ces chairs, pour en faire couler
de part & d\'autre le fuc nourricier : j^
me fervis pour cela de cifeaux courbes -,
êc j\'abandonnai enfuite à la nature le
foin de cicacrifer la plaie, Cetce plaie

devenue

-ocr page 304-

I>c tAn du Dentifte, 2.81
devenue récente par les légeres inci-
tons que l\'y avois faites, n\'empêchoit
poincies levres de fe toucher, comme
auparavant, & la réunion fe fie à la
réferve d\'environ une ligne. Je crus
alors n\'avoir pas fuffifamment incifé les
bords de la plaie , ou qu\'ils ne fe tou-
choient pas affez pour fe réunir , ou en-
fin , que la mucofité du conduit nazal,
s\'écou ant par cet endroit, empêchoir la
cicatrice de fe perfedionner. Je tentai
une fécondé fois d\'achever la réunion ,
mais ce fut inurilemenr. A cela près , la
perfonne en queftion parie aujourd\'hui
très diftinctemenc, mange & boit fans
peine, fans reffentir aucune incommo-
dité , & fans porter d\'obturateur. Ce
n\'eft qu\'en fondant qu\'on s\'apperçoit j
qu\'il s\'en faut une ligne que la réunion
foir complette.

On voie, par cette obfervation, qu\'il
y a des cas ou l\'obturateur fait d\'une
plaque fimple eft préférable à tous les
autres. L\'avantage qu\'on en retire con-
fifte, en ce que les parties charnues ont
plus de facilité à fe
rapprocher , & pas
conféquent à fe réunir; ce qui fait qti^on
Tome IL A a

-ocr page 305-

%-Si DcrJrtduDendfe.

f

r/a plus beioin d\'obturateur. J\'ajouteraî
rrjême que, dans les plus grandes déper-
ditions de fubftance, il eft à propos aiî
commencement de fe fervir d\'une plaque

fmple, parce qu\'il arrivé quelquefois que

dans l\'efpace d\'une année les chairs fe
rapprochent de telle forte , que leurpro-
lon.gement- &: la\'diminution du trou fa-
voi-ifent l\'application d\'une m.achine plus
convenable pour opérer tous les eifets
qu\'on defire. En voici des preuves-

II.

ret
cette

Pendant le cours du traitement, fur-rouî
vers k fin , l\'éminence
cufta gallï^ du
fphénoïde&levo/Tîer tombèrent entière-
ment ^ k luette & fes nuifcles, ainfi que
k cloifon du palais, furent totalemenr
détruit?, ce qui forma un trou ou pluto^
mie foife capable de contenir ungtos œi"
de poule. Dans cet alfreux^érat, le malads
■Quï ne pouvoir plus parler , fe fervit
d\'un.s éponge pour boucher ce tïoii

-ocr page 306-

De tAn du Dentifte. 285

maîs elle bouclioit en même-tems les
conques des narines, & ne laiffoit de
refpiration au malade que par la bouche.
Il écoir d\'ailleurs obligé de changer cette
éponge deux fois par jour : fans cette pré-
caution, l\'odeur qu\'il exhaloit l\'infecloit
lui-même , ainfi que tous ceux qui Tap-
prochoient. Lorfqu\'il eue achevé de paf-
fer les remedes, il vint à Paris, afin d\'y
chercher les fecours qui lui manquoient
en Province. On l\'adrefla d\'abord à un
Dentifte de réputation , qui pourtant ne
put parvenir à faire tenir un obruraceur,
tant par le défiiit des parries chariiuss
qui étoient décruices, que par celui des
portions olfeufes qui ne fe rencontranc
plus qu\'à ia partie antérieure du côté du
nez ne fufSioient pas pour alfujettir la
piece. Le trou croit en effet plus large à
fon entrée qu\'au milieu de-là fe rétré-
ci floirjufqu\'au fond. Ainfi l\'on peur juger
s\'il étoit facile d\'y ajufter un obturateur,
fans qu\'il incommodât au moins autanc
que l\'éponge. Le malade voyant donc que
le\'Dentifte n\'avoit pu
réuffira luifaire une
piece con venable, eutrecours à un Tablet-
tier.Celai-cilui ht uMobcurareur d\'ivoire^.
Biais qu\'on ne put jamais faire tenir»

A a ij,

-ocr page 307-

rArt du Dentlße.

Enfin il me flu amené par un de fes amis.^
Après l\'examen du dégât que je trouvai
précifément tel que je viens de le décrire,
je réfolus de lui appliquer une plaque
toute fimple , comme la piece la plus
propre à laiffer faire avec le tems la ré-
génération des chairs. Je fis faire une
plaque à deux branches, & à fa partie
pofiérieure, je fis pratiquer un petit trou
de figure ovale , tant pour faciliter l\'é-
coulement du mucus vers le gofier, que
pour donner au malade la liberté de ref-
pirer, lorfqu\'il fermeroit la bouche, &
fur-tout pendant le fommeil. J\'attachai
cette plaque d\'un côté d une greffe mo-
laire , & de l\'autre au défaut des groffes,
à une petite molaire, avec deux fils d\'or
qui la maintinrent en bon état pendant
près d\'un an fans empêcher le malade
ni de parler, ni de manger. Après cet
efj)ace de tems, j\'eus occafiondelevoirr
ayant découvert un jour le palais , je
m\'apperçus qu\'il y avoit encore un trou
affez grand pour palier un œuf de pi-
geon, Je crus que c\'étoit le moment de
placer un autre obturateur : mais le
malade voulut s\'en tenir à la plaque
dont il s\'étoit bien trouvé. Je la lui re-

-ocr page 308-

Be VAn du Denûjle, ifj
îTîis doncj & il retourna à Bordeaux où
fes affaires l\'appeiloient. J\'ai fu depuis-
qu\'il étoit en Bretagne, & qu\'il portoir
toujours fa plaque.

Observation Ilî.

Un particulier vivement attaque de
maladie vénérienne , fe mit au mois
de Janvier 1754, entre les mains de
M,
Dibon y Chirurgien-Major desdent-
Suiffes de la Garde du Roi, pour en être
guéri.

Les accidens auxquels il defiroit d\'a-
bord apporter du foulagement ,, étoient
l\'impuifiance de prononcer les paroles y
la difficulté de refpirer & celle d\'avaler,
en conféquence du ravage que le mal
avoit déjà fait dans fa bouche.

En effet, elle étoit tellement maléfi-
ciée que la cloifon charnue j la luette ^
l\'amigdale droite , ainfi qu\'une partie
des bafes des os maxillaires, des palatins
& du vomer, étoient détruites. Pour
adoucir la véhémence de ces accidens,
le malade me demandoir un obturateur.
Mon avis fut d\'attendre la fin du traite-
ment , pour mieux fupplécr aux patties

-ocr page 309-

iS«r \' Be VAn du Dendfte:
qni manquoienr. Je me difpenfe d\'allé-
guer les raifons qui engagerenc ce mala-
de à fe fervir d\'un autre Dentifte , lors
dsfaconvalefcence : mais il eft néceflaire
d\'expofer que l\'obturateur qu\'on lui
plaça, non-fealemenr ne lai rendit pas-
la prononciation plus diftincte , ni la
déglutition plus aifée, mais i\'incommo-
doit au point qu\'il ne s\'en fervit que
«quelques jours , bien réfolu de n\'en ufer
d\'aucune autre efpece.
J\'eus occafion
de le voir fix mois après, fe faifant beau-
coup mieux entendre, & mangeant avec
moms de peine j parce que, pendant cet
efpace de tems, l\'énorme rrou que j\'a-
vois vu à fon palais , s\'étoir rempli des
deux
tiers. 11 eft donc certain que, fi le
malade eût toujours porté un obturateur
dont le pointd\'appui eût été dans le troU
du palais , les cbairs n\'euilent pu s\'y ré-
générer, Cet exemple prouve encore
combien, dans ces commencemens, une
plaque fimpie eft préférable à rous les
obturateurs qui ne lailfent pas l\'ouvec-
îure libre»

-ocr page 310-

Dc VAn du Dmtijîc, 2 S/
Observation lY.

Au raois de Juin 1752, je fus con.-<
fuite par une Dame faifant fa réfîden.ce
à Paris, laquelle avoit une dégradaiioa
de palais toute pareille à la précédente.
Après m\'avoir fait on long récit des cir-
conftances de fo\'n accident, elleôtade
fa bouche un obturateur qui ne tenoic
prefque point : elle me dit fur cela que
depuis onze ans elle en avoic porté plu-
fieurs faits par trois différens Artiftes
& qu\'aucun n\'avoit réuffi. En effet, mal-
gré fon obturateur J elle avoit de la peine
à parler diûindement, & à refpirer. U
tomboit même quelquefois pendant
qu\'elle mangeoit,. Se elle étoit obligée
de l\'ôter en fe couchant. Je confidérai le
trou de la voûte : il étoit profond d\'en-
viron treize à quatorze lignes. La cîoi-
fon du palais. & la luette même étoient
abfolument rongées ; la carie avoit to-
talement détruit le vomer j les os pa-
latins , & la partie poôé.-ieure des os
maxillaires. Une telle déperdition de
fubflance, jointe à la mauvaife fabrique
de l\'obtiu-ateurj faifoirque cette p.iece

-ocr page 311-

Be l\'An du Dentijle.
ne cenoic pas iong-tems, & que la ma-
lade en étoit continuellement mcommo-
dée\'. Quand, j\'eus bien examiné l\'état du
palais, je fis faire en ma préfence , par
un Orfevre , un obturateur d\'argent
que je vais décrire, mais que la feule
infpeélion de la planche XIII fera
peut-être encore mieux comprendre, du
moins aux Artiftes.

Cet obturateur eft compofé de deux
pieces : celle qui doit entrer dans le
trou de la voûie en fuit à-peu-près la
forme , & eft faite en cœur. La plaque
qui s\'ajufte extérieurement à la conca-
vité du palais, excede le diamecre du trou
d\'environ une ligne. A fa partie pofté-
rieure, eft un trou ovale où aboutit un
petit canal ou conduit qui part de la
pointe du cœur. Ce canal eft pratiqué
pour trois ufages ; i®. pour rendre la
voix plus diftinéte ; z°. pour que le mu-
cus y découle &c prenne fon cours ordi-
naire; pour rendre au malade la ref-
piracion plus libre, loVfqu\'il a la bouche
fermée : trois avantages que produit né-
celfairement ce canal, qui répond pour
cet effet aux conques des narines. La
plaque à deux faces : celle qui couvre

le

-ocr page 312-

De VÂrt da. Denûjle, z s 9
îe palais eft convexe , & celie qui ré-
pond à la langue eft concave. Au mi-
lieu de cette àice concave, eft un petic
bouton plat percé d\'un petit trou quatre
où s\'adapte une petite clef quadrangu-
laire. Le corps de cette clef eft à trois
>ans,ce qui lui donne plus deprife pour
a manier ailément. Elle fert à faire
tourner une vis donc îe bouton fait la
tête. Cette vis qui eft fans fin eft aflu-
jettie d\'un côté à la partie convexe de
la plaque , par une efpece d\'écrou qui
roule avec elle fur cette même face, Se
à la partie concave par le bouton qui
tourne de même. Elle entre dans le mi-
lieu du cœur.où elle s\'engage ^ fans îe
percer à la partie fupérieure. En tour-
nant cecce vis de gauche à droice par le
moyen de la perite clef, îe cœur s\'ouvre
vers fa poince & fe dilate des deux cô-
tés. Ainfi, faifant plus de volume, il rem-
plit exadement le trou du palais, Se
comprime toutes les parties olfeufes,
Se
charnues qui l\'environnenc ; ce qui faic
le poinc d\'appui de robturareur , & le
maincienc folîdemenc. Comme la falive,
en humedanc le palais, mine & ronge
peu-à~peu toutes ces fortes de pieces ,
Tome IL B b

-ocr page 313-

zpo De VAn du Denûjle,
quand eiies ne font que d\'argent, j\'ai fais
faire d\'après-celle-ci un obturateur d\'or,
qui a réuffi même au-delà de mes efpé^
tances.

Osseavation V.

En Mai i75i, le Chirurgien-Major
d\'un Régiment m\'adrella un Domefti-
que, pour lui faire un obturateur. Ce
Domeftique en portoit un qui avoir déjà
occafîonné beaucoup d\'accidens. Le trou
du palais étoit capable de contenir une
perice noix : il n\'y avoit que les os
palatins de détruits , & la cavité étoit
profonde d\'un pouce. J\'imaginai pour ce
malade un obturateur un peu différentde
celui qu\'on vient de voir. Cet obturateur
eft compofé, comme le précédent j d\'une
plaque deftinée à boucher le trou en de-
hors, & à s\'appliquer au palais, & d\'une
autre plaque plus petite qui entre dans
le trou pour y fixer toute la piece. A ia
partie concave de ia grande plaque , eft
un bouton applaci : m.ais, afin que la pe-
tite plaque ne tourne point avec la vis,
il y a des deux côtés de cette vis deux
petits piliiers fpudés fur ie corps de la

-ocr page 314-

De tÀn du Dentifie. ipt
grande pkque, qui forcent par celle d\'au-
deffiis & fe cermiuenc par un T. En intro-
duifanc k cief dans i\'écrou, & en tour-
nanc de droite à gauche, on fait mon-
ter Ja petiteplaque, qui cil compofée de
trois pieces jointes enfemble, par des
charnîeres. Lorfqu\'eiie eft parvenue au
haut des deux T, les petites pieces laté-
rales s abailfent par le moyen des bran-
ches de chaque T. Au contraire, en tour-
nanc de gauche à droite, on fait defcendre
cetce petite plaque , tandis qu\'au moyen
de deux reiTorts les deux pieces qui
viennent de s\'abattre ou de fe brifer fe
relevent, s\'étendent, occupent
un plus
grand efpace, vont s\'appuyer fur les par-
ties offeufes & charnues, & par-ld main-
tiennent
l\'obturateur. Je reviens au ma-
lade pour qui j\'inventai cette conftruc-
tion. Il porcoit depuis plu/ieurs années
un obturateur garni d\'une éponge qui
avoir fi fort dilaté le trou du palais, que
les chairs froncées & râcornies avoient
perdu tout leur relTorr. Aufti-tôt que
j\'eus appliqué le mien , j\'eus k fatis-
fadion de voir que le trou du palais
étoit exacT:ement fermé par k grande
pkque, & le malade
l\'a porté jufqu\'l

Bbij

-ocr page 315-

i 9 z De l\'An du Dentlße,
préfeiît fans relfentir aucune incommo-
dité.

M. Fauchard nous a donné la conf-
truélion de cinq obturateurs différens ;
mais il eft étonnant qu\'il n\'ait pas ap-
?erçu l\'inconvénient des éponges dont
es obturateurs font garnis. Outre la
fujettion où l\'on eft de les démonter
très-fouvent pouf changer d\'éponge ,
malgré toutes les précautions qu\'on peut
prendre , ils exhalent continuellement
une odeur forte & infupportable. D\'ail-
leurs , comment n\'a-t-il point vu que
dans plufieurs cas l\'obturateur eft d\'un
ufage non moins dangereux qu\'incom-
mode par !es raifons que j\'ai marquées ,
& qu\'une fimple plaque fufïit ? Je fuis
donc bien fondé à croire que non-feule-
ment mes obturateurs ont l\'avantage de
la propreté, puifqu\'il n\'ont pas befoin
d\'épongés , mais qu\'ils font encore beau-
coup plus commodes & plus durables
que les fiens. Ainfi tous les obturateurs
pourroient fe réduire à trois : c\'eft-à-
dire , à la plaque fîm^ple dont j\'ai fait
voir que l\'ufage devoit être préféré
dans beaucoup de cas, & fur-tout au
commencement des dégradations du

r.

-ocr page 316-

Z)e VArt du Dentijie, îç)^
palais , Se aux deux pieces plus compo-
fées donc j\'ai donné la defcription. En
proportionnanc ces deux pieces au dia-
metre des trous qu^elies doivent cou-
, vrir, pour peu que l\'Arcifte ait d\'ex-
périence, elles fonc capables de remplir
toutes les indications poffibies.

Lorfqu\'on veuc remplacer des dentâ
à la mâchoire fupérieure , o^n peut faire
d\'une feule piece une phque en os » gar-
nie du nombre de dents qu\'il s\'agir de
repréfencer. Quand le malade a cette
mâchoire fupérieure démeublée de tou-
tes fes dents , on peut auffi par le moyefi
de l\'un de mes obturateurs y faire tenir
un dentier. Il faut pour cec effet que la
plaque extérieure qui s\'applique â la
voûte du palais, foit plus étendue à fi
partie antérieure, pour recevoir le den-
tier qu\'on attachera proprement
8c foli-
dement avec deux ou trois goupilles bien
rivées de part & d\'autre.

Bbiij

-ocr page 317-

294 DeVArtduDenûp,

explication

DELA

DOUZIEME PLANCHE.

:rturat-evk compofé de deux
plaques, tout monté & prêt à être placé
dans le trou du palais. Les deux parties
latérales de la plaque intérieure font hri-
fées & repliées vers la convexité de la.
plaque extérieure au moyen des avances
des deux
T,

A A. La plaque extérieure qui s\'applique
Jur la voûte du palais , & en bouche le trou.

La plaque ïniérleure.

CC. Les deux Tfoudés fur la convexité
de la grande plaque.

DJ-) DD. Les deux parties latérales de
cette plaque brifées & pliées de façon qu-e
Vunefe trouve cachée derrière l\'autre.

E. Le canon de la vis qui ejl foudéM
la convexité de la grande plaque.

F. La vis.

G. L\'extrémité de la vis, vue à la par-
tie fupérieure de la petite plaque..

-ocr page 318-

É

-ocr page 319- -ocr page 320-

De rJn du Denüße,
Fig. II. Ze mime obturateur vu de côte\\
dont^ la petite plaque ou la plaque interne
eß defcendue & non repliée vers la
grande
plaque^parceque les avances desTnepor-
tent plus pour faire brifer cette plaque.
Hîi. La grande plaapie.
11. La partie de la petite plaque qui
donne paffage aux T, & à la vis qui la fait
approcher ou éloigner de la grande plaque.

KK. Les deux parties laterales dt la pla-
que qui l\'abattent , quand la plaque efi
montée au haut delà vis qui fc voit ici éten-

due.

LL. Les avances des T.

M. r extrémité de là vis.

N. La vis-renfermée dans la canule eut
efifoudée fur la grande plaque.

oooo. Les charnîeres qui font brifer
O\' plier la plaque.

Fig. m. La grande plaque des deux ob-.-
tarateurs ci-defjus ^ vue par fa furface con-
cave.

V. Le bouton ou la te te de la & le
trou quarr é dans lequel entre la clef pour,
faire tourner & monter ou defcendre la pe-
tite plaque ou plaque intérieure..

Fig. IV. Âutre obturateur d\'une fimpie
plaque, qui s\'applique toutfimpkmentfur

Bb iy

-ocr page 321-

2 9 VAn du Dentijîe.

^a voûte du palais , tS- qui s\'attache de cha-
que côté fur une dent.

Q, La furface concave.

RR. Les deux avances ^percées chacune
à leurs extrémités de deux trous y pour re-
cevoir k fil qui fert à fixer cette plaque fur
la voûte du palais , en lés attachant aux
dents qu\'elles vont joindre,

Fig. V. La clef du premier obturateur.

Fig. VL Repréfentant une pointe d\'a-
cier, ou une pointe feche accommodée à
l\'une de fes extrémités en pointe triangu-
laire , pour trépaner ou perforer les dents.-

A. r \'extrémité quarrée ou quadrangu-
lalre qui fert à faire tourner dans les doigts
cette efpece de trépan , pour perforer la
dent. ■ ■ •

B, La poime de cet ïnfirumcnt.

-ocr page 322- -ocr page 323-

Tûnv.lL.Faç. .

r

JVL

PlaneAa\' i3 \'.

-ocr page 324-

De VArt du Dentlße, 297

EXPLICATION

DE LA

TREIZIEME ET DERNIERE

p jl a n c e,

BTURATEUR, compofé d\'une
plaque & d\'une autre piece en forme de
cœur y vu de côté, aux trois quarts ren-
verfé.

A A. La p-aque qui bouchtr l\'extérieur
du trou 3 e/2 l\'appliquant fur la voûîs du
palais,

BB. La piece en forme de cœur qui doit
être introduite dans le trou.

C. La petite plaque du cœur entr\'ouver te.

DD. Le canal qui commence depuis la
pointe du cœur , & vient fe terminer à la
partie poflérieure de la grande plaque.

E. La tete de la & le trou quarré
pour recevoir la clef.

Fig. II. L\'obturateur vu par fa partie
fupérieure,

F. La piece en forme de cœur.

-ocr page 325-

I9B De r Art du Dentîfie.

G. La VIS qui fait ouvrir la petite pU-,
que du cceuf.

H. La grande plaque qui bouche Vexté-
rieur du trou.

I. L ouverture du canal à la pointe du
cœur,

Fig. lîL Le même obturateur vu de côté
& un peu renverfé.

KK. La piece en forme de cœur vue de
côté,

h.-.La petite plaque entr ouverte.

MM. La grande plaque vue de côté, &
en partie par fa convexité^ cn partie par
fa concavité.

NN. Là vis qui entre dans la petite pia\'
que y & le bouton vu dans U concavité de
la grande plaque , ainfi que le petit trou
qui reçoit la clef.

O. La canule de la vis , fou dée fur la par-
tie centrale de la convexité de la plaque.

P. La charniere de la petite plaque qui
lui permet de s\'ouvrir ou de fe fermer à la
partie inférieure du cœur.

QQ. Le canal qui vient fe terminer a la
grande plaque.

Fig. IV. La clef de l\'obturateur., percée
du petiû^rou pour y placer un fil qui doit y
refier pàur la retenir & empêcher que le

-ocr page 326-

De l\'An du Denüße. 25)5?
malade ne Vavale en cas de naufées, comme
l\'application de Vobturateur en produit
quelquefois.

-ocr page 327-

jp M î

CHAPITRE SEPTIEME

ET DERNIER.

Choix de compojiùons pour la confervaûon
des Dents & des Gencives,

J\'ai faic remarquer dans le cours de
cet Ouvrage , combien il eft dangereux
d\'ufer indiftinélemenc & fans précau-
tions des poudres, opiacs & liqueurs que
diftribuenc les Empyriques, & de quelie
importance il eft de n\'employer que les
remedes compofés ou approuvés par de
vrais Denriftes. Chacun de nous a fur
cela fes ufages qui, pour êrre quelque-
fois aifez différens les uns des aucres ,
operenc néanmoins à-peu-près les mêmes
effecs. Mais, comme il fauc en coure
chofe déférer à l\'expérience, fans
précen-
dre iraprouver les remedes publiés par
M. Fauchard & les aucres *, j\'ai cru de-

* J\'en excepte pourtant la poudre dont
l\'Auteur d\'une
Dijfertation fur les Maladies des
Dents,
nous donne la cpmpofuion, & danS

-ocr page 328-

Del\'Art du Demijle. 30
voir propofer ici ceux qui m ont paru
les plus propres, foir a blanchir & à con-
ferver les dents, foit à raffermir les gen-
cives. On peut en toute sûreté s\'en fer-
vir , fans craindre aucun des accrdens
auxquels on s\'expofe toujours en ufant
de remedes inconnus.

I. ;

Poudre pour nettoyer & blanchir les
Dents.

Prenez ûx onces de pierre de ponce ,
que vous ferez bien calciner, & que
vous réduirez en poudre. Vous pafîerez
cette poudre fur le porphyre , en l\'hu-
nieélant de tems en tems avec de l\'eau

laquelle il fait entrer fur deux oBCes & demie
d\'^ngrédiens ordinaires, une onced\'alun calciné.
Un Dentifte peut-il ignorer la caufficité de
i\'alun , & en prefcrire une pareille dofe ? Cette
poudre qu\'il confeille de préférer à toute autre,
comme étant la meilleure, & dont il a l\'habi-
tude de fe fervir n\'eft pas moins dangereufe ,
foit pour les dents foit pour les gencives, que
celles qu\'il tâche de décrier comme étant com-
pofées de purs corrofifs.

-ocr page 329-

3-si Ds l\'Art du entlfie.
de rofes ou de myuthe ; vous la fere^:
enfuite fécher pour la remettre eii pou-
dre impalpable J & vous y ajouterez ce
qui fuit : lacque plate, fang de dragon ,
os de feche, bol d\'Arménie , de
chacun
trois onces; canelle , girofle, iris de
Florence, alun de roche calciné, de cha-
cun un gros ; le tout aufîi réduit en pou-
dre fubiile. On s\'en fert avec une racine
préparée, dont on a trempé ia barbe
dans cette poudre. ^

II.

Autre poudre pour le même ufage «S* pour
fort/fier les gencives.

Corail rouge, & tartre devin, de
chacun fix onces ; fang de dragon, os de
feche, & bol d\'Arménie, de chacun une
once; girofle, canelle, iris de Florence Se
fel blanc, de chacun trois gros. Le tout
doit être exadement mêlé, mis en pou-
dre, & pafie par le tamis de foie le plus
fin. On prend de cette poudre au bout
d\'une racine faite en petite broffe, ou
avec une petite éponge très-fine qu\'on
humeéle un peu. Les perfonnes qui ont

-ocr page 330-

De l\'An du Dsntijîe. 3 01
bien foin de leurs dents & qui par
conféquent ont peu de limon ^ s\'en fer-
viront une fois par mois. Ceux dont les
dents fe ternilfent aifément, ou qui ont
les gencives molles & engorgées , en
feront ufage toutes les fois que leurs
denrs auront perdu de leur blancheur ,
fans qu\'il y ait lieu de craindre d\'en de-
truu-e l\'émail, ou d\'altérer les gencives ,
comme bien des gens fe ie figurent.

ÎIL

Cplatpour nettoyer & blanchir les Dents,
. & pour fortifier les Gencives,

On prend telle quantité qu\'on veut
de la poudre indiquée ci-defiTus ; on met
fur environ quatre onces de cette pou-
dre , un gros d\'alun calciné , réduit de
même en poudre & paifé par le tamis de
foie. Le tour étant bien mêlé, on verfe
delTiis un demi-gros de teinture de muf-
cade,oude girofle, & vingt gouttesd\'ef-
fence de Rabel qu\'on y incorpore : ce
mélange enfuite eft réduit en confiftance
d\'opiat liquide, avec une quantité fuffi-
fante de miel rofat clarifié. Cette com-

-ocr page 331-

|04 De VArt du Demijle.
poficion doit fe faire dans un vaiffeaa
beaucoup plus grand qu\'il ne fauc pour
la contenir, à caufe de la fermentation
des ingrcdiens qui eft très-forte , fur-
tout en été. On a foin , pendant une
quinzaine de jours j de bien remuer
cette compoiition au moins une fois
par jour avec une fpatule de bois, &
on la met dans des pots de fayence ,
pour s\'en fervir au befoin. Cet opiat eft
très - bon pour nettoyer & b
anchir
les dents, &^pour raffermir les gen-
cives relâchées par quelque humeur acre
qui s\'eft infiltrée dans ces parties. Les -
perfonnes qui ont les gencives gonflées ,
relâchées, fîafques ou fongueufes , peu-
vent s\'en fervir tous les jours une oU
deux fois, même plus fouvent , fui-
vant l\'état de leurs gencives, jufqu\'à ce
qu\'elles foient parfaitement rétablies.
Ceux qui n\'auront pas befoin d\'entrete-
nir leurs gencives Se leurs dents en bon
état, fe ferviront de cet opiat feulement
deux ou trois fois par femaine , ou
toUS
les matins, fî l\'on eft fujet au tartre Ôc an
limon. On prend un peu de cet opiat fur le
bout du doigt ou fur une petite éponge\'
on s\'en frotte les gencives ôc les dents

de

-ocr page 332-

De l\'Art du Dentlße. 505
de bas en haue à la mâchoire inférieure,
& du fens oppofé à la mâchoire fupé-
rieure.

Autre opiat pour les Gencives molles ;

fongueufesj relâchées, gonflées^ &c.

Çi. Corail rouge & tartre de vin, os
de feche J de chacun deux onces; thym ,
romarin & marjolaine bien fecs & eni
poudre, de chacun une once; canelle &c
girofle , deux gros de chacun ; fel armo-
niac, alun de roche, un gros de chacun
fondu dans un peu de teinture de gayac à
l\'efprit de vin. Le tout étant bien incor-
poré enfemble, avec une quantité fuffi-
fante de miel rofat clarifié, eft mis dans
un vailfeau convenable pendant douze
ou quinze jours,, & confervé dans des
pots de fayence. On s\'en fert de la même
façon que du précédent tous les matins ,
jufqu\'à ce que les gencives foie rétablies 5
enfuite tous les trois ou quatre jours ,
afin de les entretenir en bon état.

Tome II, C c

-ocr page 333-

3 0^ Be TAn du Dentijle,
V.

Oplat Antifcorhutique, & abforhant,

Coraii rouge & tartre de vin d\'Ef-
pagne, ou d\'autre bon vin, deux onces
de chacun en poudre bien fine ; écorces
de grenade & de citron feches & pulvé-
rifées , de chacune une deini-/3ncej
graine de moutarde pilée , demi - once.
Ces drogues étant bien mêlées
& re-
muées enfemble , on réduit le tout en
confiftance d^opiat avec du firop de co-
chléaria. Cette compofition eft
mife dans
un vaiifeau de terre falTez grand pour
pouvoir la remuer tous les jours : com-
me elle fermente moins que les
autres,
elle eft auffi faite en moins de tems ,
de façon qu\'au bout de quatre ou cinq
jours on peut la renfermer. Mais, il faut
auparavant y joindre un gros de fel ar-
moniac & vingt grains de camphre. On
fond on difïbut ces drogues dans un
mortier , avec une demi-once d\'efpritar-
dent de cochléaria, compofé avec la ra-
cine de raifort fauvage. Le toutfeverfe
enfuite dans l\'opiac, & on le remue bien

-ocr page 334-

JDe rAn du Bsnûjîâ. 307
pour l\'incorporel-. L\'ufage de cette com-
pofition doit être plus ou moins fréquent,
fuivant les progrès que le fcorbuc peut
avoir fait fur les gencives, & on s\'en
fert jufqu\'à parfaite guérifon.

Observation
Sur les racines de guimauve & autres.

Les racines de guimauve ( dont on
fait tant de préparations différentes } ne
font gueres propres à nettoyer les dents,
parce qu\'el es deviennent fi pâteufes ,
qu\'au liêu d\'emporter le limon, elles j
laiffent une partie de leur vifcofité.
Quand on peut trouver des racines de
mauve affez groffes, elles font préfé-
rablesôc celles de luzerne valent en-
core mieux. On fait aufîi pour le même
ufage des bâtons de l\'efpece de rofeau
appeljé roctin , & vulgairement canne
ou jai, mais il faut en ôter la peau, ef-
pece de vernis qui empêcheroit ia li-
queur avec laquelle on l\'apprête de pé-
nétrer le bois. On bat avec un marteau
ies deux bouts de chaque racine de luzer-
ne, ou du petit baton de canne, pour en

C c ij

-ocr page 335-

3 o 8 Be VAn du Dentifte.
faire une efpece de brofie bien douce,
il fe fait encore des petits bâtons de
la tige du rofeau , ou jonc des étangs,
qui font très-doux, & par conféquenc
fort bons. Ii faut qu\'il foit cueilli vers la
lia de l\'été , afin qu\'il foit aifez mûr , &
qu\'il ne s\'y trouve plus de moelle. On
en fait de petits bâtons , dont les deux
bouts étant préparés forment une efpece
de broife , ou de pinceau propre à net-
toyer les dents. Ces bâtons doivent être
encore verts, pour pouvoir s\'eiïîler fous
îe marteau, ou en les frappant fur une ta-
ble de marbre. On peut s\'en fervir tous
les jours. Il faut cependant obferver ,
quand on fe fert des racines ^ ou de tout
ce qui eil propre à nettoyer les dents ,
de ne point trop les frotter : car tous
frottemens, quoique fait avec les cbofes
les plus douces , lorfqu\'ils font réitérés
trop fouvent, altèrent par la fuite les
corps les plus durs, tel que l\'émail. H
faut donc fe contenter d\'enlever tous les
jours la craife , ou le limon qui s\'atta-
che aux dent fans les trop frotter.

-ocr page 336-

De tAn du Dentlße. 3 09

V I. -

Préparation des racines j & des petits
bâtons propres à nettoyer
les dents.

Lorfqu\'on veut préparer des racines
de mauve ou de luzerne, on en ore ia
premiere peau, on les fait tremper plu-
fieurs jours, & enfuite on les fait fécher.
On ies remet après ceia dans l\'eau chau-
de : on les y laiffe environ douze heures
fur un feu médiocre , fans les faire
bouillir , & quand elles font retirées de
l\'eau, on les fait fécher une fécondé fois
pourj les jeter dans la liqueur appro-
priée à cer ufage. Cette liqueur efl com-
pofée d\'une pinte de gros vin , de deux
pintes d\'eau-de-vie, de deux livres de
fucre, & de quatre livres de miel de
Narbonne. On y ajoute canelle .& gi-
rofle en poudre, de chacun deux onces,
anis & coriandre, de chacun une once.
Les racines doivent infufer dans cette li-
queur à petit feu pendant douze heu-
res ^ & enfuite à froid pendant quelques
jours. Lorfqu\'elles en font bien péné-
trées , on les
ôte & on les fait féches à

-ocr page 337-

5 lo De VAn du Dentijle,
l\'ombre , en les fufpendant avec une fi-;
celle, chacune à parr.

Les bâtons de jonc ou de rofeau peii-\'
vent fe préparer de la même ma-
niéré.

VIL

Ejfence pour appaifer la douleur des Dents,

Ayez un flacon d\'étaim dont le bou-
chon foit à vis, & de même métal,
qui ait le goulot étroit. Mettez-y les
drogues fuiyaùEes réduites grolîîére-
ment en poudre : favoir, aloës un gros,
fécondé écorce de fureau, poivre long,
girofle, canelle, noix raufcade & noix
de gale de chacun demi-once , le tout
concaflé , fel armoniac & alun de roche,
deux gros de chacun j quarante grains de
camphre , & dix grains de laudanum.
Ajoutez y une once de véritable baume
du Commandeur ; verfez là defliis une
chopine du meilleur efpric de vin, &
bouchez exactement le flacon avec un
bouchon de liège qui foit recouvert du
bouchon d\'ésaim. On met ce flacon au
bain-marie pendant quinze jours, &cha-:

-ocr page 338-

De rAn du Dentlfu, 3 î ï
que jour on le lailTe pendant deux Heures
dans
i eau prefque bouillante. Quand la
liqueur eft faite , on la filtre , & on la
diftribue dans de petites bouteilles bien
bouchées.

La maniéré de s\'en fervir , eft d\'y
tremper un peu de coton qu\'on introduit
dans le trou de la dent creafe, après en
avoir ôté la carie & l\'avoir bien deffé-
chée. On tâche de faire pénétrer la li-
queur jufqu\'au canal ^ immédiatement
vers l\'endroit fenfible. Tous les jours
on fait la même chofe, jufqu\'à ce que la
dent ne foit plus douloureufe, & qu\'on
puifTe manger deffus. J\'ai trouvé que
cette liqueur agiffoit plus promptement
que toutes ies efîënces de canelle & de gi-
rofle. Cependant, lorfqu\'on peut attein-
dre le nerf avec la rugine, on le détruit
encore plus vite, parce que la liqueur
mord davantage
fur le cordon. Il faut
donc employer de tems en tems ia riv-
gine de la façon que
je l\'ai marqué.

-ocr page 339-

^IZ De VAn du Dentijîe.
VllI.

Pâte calmante four la douleur des Dents,

Les perfonnes à qui tous ies remedes
ordinaires ne peuvent rendre ia tranquii-
iité que des denrs gâtées ieurs ctent^ ou
qui ne veuient pas fupporter ies opéra-
tions convenables pour être guéries ,
peuvent ufer avec confiance de la pâte
fuivante qui réufîit prefque toujours à
calmer ies grandes douleurs eaufées par
ie cordon du nerf.

Trois grains d\'opium, cinq ou fîx
clous de girofle en poudre j dix grains
de noix de gaie aufïi en poudre, quinze
grains de terre figillée, dix grains de
camphre , & de gouttes anodines autant
qu\'il en faut, pour rendre ces poudres
en confiftence de pâte un peu ferme.
On en met dans ie trou de la dent qu\'on
remplit bien en fe couchant : la nuit fe
paffe ordinairement fans douleur, &
elle efl bannie pour plus ou moins de
tems par ee palliatif.

Xi

-ocr page 340-

TAn du Dentifte. jij
IX.

Eau fortifiante, réfiolutive , & afiringente.

Prenez du cochlearia dans la belle
fajfon , c\'eft-à-dire , vers la fin de Mai
qui eft le tems où il eft en fleur, ce qu\'il
-en faut, pour en rirei* par expreffion une
chopine de fuc. Ajoutez-y trois onces
ou environ de jus de citron : clarifiez le
tout fur le feu , fans le laiffer bouillir.
Quand le marc eft dcpofé dans le
fond
du vafe, on tire la liqueur au clair : on
y joint de l\'eau diftiilée de feuilles de
ronce , de myrthe & de plantin, quatre
onces de chacune; teinture de gayac à
1 eipntdevm , fix onces; efprit ardent
de cochlearia, deux onces, & quatre
onces de miel de Narbonne. Le tout
étant bien mêlé enfemble fe diftribue
dans des bouteilles.

Cette eau eft d\'un excellent ufage
jour mamtenir en bon état les dents &
es gencives. Elle raffermit & diftend
celles-ci, quand elles font gonflées • e!\'e
les préferve aufli des affeélions fcorbu-
tïques, & convient même dans le fcor-
Tome IL Dd

Â

-ocr page 341-

^ 14 De VAn du Dentifie,
but, en l\'animant, fuivant le befoin,
avec l\'efprit ardent de co;hlearia, ou
au contraire en l\'adouciffanc & la\'i\'en-
dant plus déterllve avec l\'eau de canelle
orgée. La même eau eft encore très-
bonne pour les aphtes & pour les petits
chancres qui viennent à la bouche, ainfi
que dans un grand nombre d\'autres m^a-
ladies qui affedent les gencives.

On en prend tous les matins environ
plein une cuiliiere à caffé 5 on la fait
rouler dans fa bouche, & on s\'en frotte
avec le doigt les gencives. Enfuite on
paffe fur fes denrs une petite éponge
trempée dans de fimple eau tiede. Quand
©na les gencives malades, ii faut enufer
plufieurs fois le jour.

-ocr page 342-

De rArt du Dentijle. j i ^

X.

Eau fûuveràine propre même ufage ^
ainfi que pour les gencives Jongueufes eu
faignantes j & pour corriger la mauvaife
haleine y eu rafraîchijfant la bouche.

Sauge de Provence, marjoiaine ,
thym , romarin , Se lavande, de chacun
quatre onces; grains degenievre concaf-
fée, une once ; girofle, caneiJe , bois de
gayac lapé ^ faifepareille, efquine, de
ciiacun quatre onces; fel blanc, deux
onces; fel armoniac,, alun de roche &
myrrhe, de chacun deux gros ,qu\'on fait
fondre dans un mortier avec un peu
d\'eau-de-vie. On met le tout dans une
grande cruche, d\'une capacité fuffifante,
avec douze pintes d\'eau-de-vie, & on
y
ajoute une livre de miel de Narbonne.
il faut bien boucher & lutter la cruche :
on la met enfuite infufer au foleil pen-
dant un mois, ou la nuit pendant quinze
jours fur les cendres chaudes. On filtre
après cela la liqueur , & on la met dans
des bouteilles. Proportion gardée dans
les dofes, la quantité des drogues fe

D d ij

-ocr page 343-

5 I (J Dc tin du Dcntijle.

inefure à la provifion qu\'on veut faire de
cette eau. Les propriétés de l\'eau fouve-
raine font, d\'émotilfer i\'âcreté delà
fainnure des liqueurs qui coulent dans
îés vaiffeaux capillaires dont les genci-
ves font tiiTues, & qui les rongent & les
tdcerenr, ainlî que les gaines offeufes
des racines.
.x°. D\'empêcher les dents
de s\'éb^ anler avant le tems , de raffer-
mir celles qui commencent à être bran-
lantes , quand les parties qui les fou-
tiennent ne font pas trop appauvries. 3°.
D\'entretenir la bouche propre, fraîche j
fans odeur.
4°. Enfin, de calmer fou-
vent la douleur des dents, foit par la
fimple application qu\'on en fair, comme
des eflence? avec un peu de coton dans
le trou d\'une dent garée , foit en la te-
nant dans la bouche du cfité malade pen-
dant quelque tems.

Lorfqu\'il n\'eft queftion que d\'entre-
renir les dents & les gencives , on fe
fert tous les matins de cette eau mêlée
avec une partie égale d\'eau tiede. Alais,
quand les gencives font douloureufes 8c
gonflées, on en ufe plufieurs fois le jour,
en y mêlant partie égale d\'eau de caneile
orgée. Les perfonnes qui ont les gencives ^

-ocr page 344-

De t An da Dentijie, 317
fiafques & fongueufes,ainfi que les dents
ébranlées doivent l\'employer toute pure,
& deux ou trois fois le jour. A la fuite
des dépôts aux gencives, après que la
matiere eft évacuée, on en fait rincer la
bouche au malade jufqu\'à parfaite gué-
rifon, en mettant fur un tiers d\'eau fou-
veraine deux tiers d\'eau tiede 3 ou d\'eau
d\'aigremoine. On en fait le même ufage
pour déterger tous les autres ulcérés bé-
nins qui peuvent farvenir aux gencives ,
& elle eft même préférable au vin miellé.

XI.

Gargarifme Antifcorhutique,-

Prenez cochîearia , creilon de fon-
taine , & beccabongaJ de chacun une
poignée, avec quatre citrons coupés
par tranches. Faites infufer le tout pen-
dant vingt - quatre heures , dans une
chopine de vin blanc , fur des cen-
dres médiocrement chaudes , enfuite
palfez la liqueur en preflànt le marc:
ajoutez-y un demi-feptier d\'eau de ca-
nelle orgée J deux onces d\'efprit ardent

D d iij

-ocr page 345-

3 ! 8 Be VArt du Bcntïjle.
de cochlearia , deux onces de tein-
ture de gayac à refprit de vin, & quinze
eu vingr gouttes d\'efprit de vitriol. On
fait rincer la bouche au malade avec
cette liqueur > ou il s\'en baffine les gen-
cives avec une coonge, de quart-d\'heure
en quart-d\'heure , pendant que, s\'il eft
neceifaire , L Dentifte dégorge les gen-
cives. On continue ce gargarifme julqu\'à
parfaite guérifon.

XIL

Autre GargarïfmQ Antifcorhutique.

^.Salfepareille , efquine, & bois d®
gayac rapé, de chacun deux onces. Fai-
tes-les înfufer,
comme il eft dit ci-delfus,
pendant vingt-quatre heures, dans un
demi-feptier d\'eau de myrthe , avec
autant d\'eau de plantin diftiilée. PalTez
enfuite la liqueur, ajoutez-y huit onces
d\'eau de canelle orgée , quatre onces
d\'ef|:)rit ardent de cochlearia où fera
fondu un gros de fel armoniac , deux
gros de teinture de myrrhe, deux gros
de teinture d\'alocs, U un gros de tein-

-ocr page 346-

De VAn du Demlße* 3 i ^

ture de girofle. Incorporez bien le toiîc
enfemble , & faites-en rincer la bouche
au malade.

Quand les ulcérés fcorbutiques fonc
profonds J que le fphacele & la gangrene
gagnent les gencives, & que la mâchoire
fe carie , en mème-tems qu\'on fait les
opérations que j\'ai décrites, on bafiine à
tout inftant les ulcérés, après en avoir
ôté le pus, &
on en lave les environs
avec la compofition fuivante.

XîlL

Eau fpiritueufe pour les ulcérés ßorhw
tiques & gangréneux.

Efprit ardent de côchleârîa, &
teinture de gayac , de chacun quatre
onces , où l\'on fera fondre deux gros
de fel armoniac, un gros de camphre j
& deux gros de bonne thériaque
dc\'layés
dans deux gros de teinture de myrrhe,
deux gros de teinture d\'aloës , & deux
gros de teinture de girofle , le tout bieri
mêlé.

il ne fufSt pas d\'en toucher très-fré-
D d iv

-ocr page 347-

DeVAn duDenûpi
quemment les ulcérés avec un linge om
une éponge : il faut y tremper ou un
bourdonnet^ qu\'on porte dans l\'ulcere
s 11 eft profond , ou de petites com-
pre
(ies, ou des plumaceaux qu\'on y,
tient continuellement.

à

F I N„

-ocr page 348-

table

I) E s CHAP I TRES^
paragraphes et sections

DU SECOND VOLUME.

CHAPITRÉ CINQUIEME.

Des différentes obfervations qui fe prati^,
quem fur les Dents,.

Î.I.Mant£re de redrejper les Dents & de
les remettre en place, par h moyen des fiis & des
plaques, p^^

d\'arranger ou redrelTer les Denrs
avec les fils fimples. a ^

Maniere d\'arranger & de redreffer les
J Jenrs avec les pJaq ues garnies de fils.. i,
Methode c^ plaques de M. Fauchard. pour
arranger & redreffer les Dents. Remarques
de 1 Auteur a ce iujer. , / j !

Moyen de retourner une Dentavec lapîa^
& les fds.
 i \' ia.

Moyens pour faire rentrer les incifive;

-ocr page 349-

Tabic des Chapitre^^

inférieures, & fortir les fupérieures, avec îeS
plaques & ks fils. 15,18

Planche troifieme qui rcpréfente ks dif-
férentes plaques. Son explication.

i. II. De l\'ufagt du Pélican pour remettre à
leur place les Dents rentrées. ZI

Inconvéniens du pélican ordinaire dans
cette opération. Maniéré de procéder avec
Is
nouveau pélican.Ce qu\'il faut obferver avar^t
& après ie remplacement de la Dent, zz, 25
Avantage qu\'il y a d\'ôter la premiere des
groffes molaires qui fe trouve gâtée avant le
renouvellement des paires molaires.ij/v/.

Observ. I. Au fujet des premieres groffes
molaires gâtées. ■ 26 &fuiv^

Observ. îl. Sur une Dent penchée vers le
palais., à remife dans fa place avec le pélican,
ordinaire.
 28 ^ 54

Observ. IÎÎ. Au fujet d\'une fiftule à la
joue, & fur une Dent penchée vers le palais
remife en place avec le nouveau pélican. :54

& fuiv.

Observ. ÏV. Sur une pareille Dent mife
en bel ordre. 5 6
^ fuiv.

Observ. V. Sur le même fujet. 37 6- fuiv.
Observ. VI. Sur deux petites incifives
remifes de même en bel ordre en
Un inftant.

58,40

Autres Obfervations de Dents déplacées &
renverfées en divers fens.

Observ. I. Sur des Dents fort en défor-
dre, qui furent arrangées en peu de tems.

40,4«\'

Obsery. II. Au fujet d\'une Dent retoar-

-ocr page 350-

Paragraphes & SeSllans. 525

née avec la pince droite. 42 faiv.

Orserv. IIL Au fujet d\'une Dent rerour-
née. Opération qu\'il fallut faire à la Dent
pour la mettre en bel ordre. 43,45

Observ. IV. Sur des incifives inférieures
quipoulToient la levre d\'en bas, tandis que
les incifives fupérieures rentroient & fai-
foient enfoncer la levre d\'en haut. Opération
fiiite pour corriger cette dilîocmité.46 6\'
fuiv.

Obs. V. Sur des Dents diverfemeni: déran-
gées. Dent retournée au moyen d\'une plaque
& des fils. Diverfcs opérations prariquables
pour rétablir les Dents en belordre- 47,50
Erreurs
Se préventions fur la chute des
Dents , attribué fauffement à ces opéra-
tions. fi Ô"
fuiv.
• IIL- Maniéré de nettoyer les Dents fans les
ébranler ^ fans fatiguer le fujet. j 5

Maniéré de fe fervir de difFérens inftru-
mens & de procéder pour bien nettoyer les
Dents. J4& fuî\'v,

OBStRV. I. Sur des Dents couvertes de-
tartre , fort branlantes,
Se dont les gencives
étoieni; fort malades. 59 > 61

Obs. II. Au fujec de Dents fort longues Se
ébranlées par le tarrre. 61, 6 j

Obs.^ II . Au fujet de Dents longues &
ébranlées qui furent rafFermîes après avoir
été limées & raccourcies. ,
66

Planche quatrième qui repréfente fix inf-
trumens fervant à nettoyer les Dents. Et fon
explication. 67
& fuiv,

$. IV. Des dijferens ufages de la lime. 69

Ce qu\'il faut obferver en féparant les

-ocr page 351-

-124 TaBle des Chapitres ,

Dents avec îa lime, foit pour détruire la ca«
lie jToit |?our d\'autres caufes. 70,74

Cas où il faut fe fervir des petites pinces-
. iflcifives , pour raccourcir ou rogner les
Dents.

Qualités que doivent avoir les limes qui
fervent à féparer ou à raccourcir les Dents.
Maniéré de s\'en fervir & de conduire cet
inftrument en féparant les Dents. 76:, 81
Maniéré d\'opérer commodément pour
diminuer la longueur des cents avec la lime.

81,85

Obfervations far plufieurs incifives de la ma •
chaire fupérieure affeBées de carie , dans un fujet
de dix ans.
 846\' juiv.

Planche cinquième qui repréfente plu-
fieurs limes propres à féparer & à raccourcir
les Dents J avec l\'explication. 87
&> fuiv.-
Planche fixieme qui repréfente plufieurs
rugines pour ôter la caris des Dents j- avec
l\'explication.

V. Précautions a obferver avant que de plom-
ber les Dents. Manière de les bien plomber ; acci\'^
dens qui peuvent furvenir aux Dents lorjjqu elles
ont été plombées mal-à-ptopos, & moyens d\'y re-
médier. ^o

Métal qu\'il faut quelquefois préférer pour
garnir les cavités des Dents.. Raifons qui em-
pêchent le plomb de tenir, lorfque l\'on a
trop tardé à faire plomber fes Dents. 92, 94
Inftrumens convenables pour plomberies
Denrs. Et la façon de les plomber. 95,98
Caufes qui produifent la douleur que fait
©quelquefois une Dent plombée depuis plu-

-ocr page 352-

Paragraphes & Sections. 3 2 5
ïieurs années. Moyens d\'y remédier. 99, ioj
Oeshr v. I. Au fujerd^ine Dent gâtée fur
iaquelle ie fujet mangeoit parfaitement pprcc

qu elle etoir infenfible, &qui devenoic doi^-
Joureufe auiTi-tôt qu\'elle étoit plombée. 10 ^
Css. II. Sur le même fujet. Guérifon du ma~
lacle operee en perforant le plomb & don-
-iwnt jour au fluide arrêté par fa préfence. ic?

Obs. III. Au fujer d\'un abfcês formé dans
ie can.al d une Dent plombée depuisplufîcurs
\'annees. ^/«-v

. Planche feptieme qui repréfente plufieuTs

inflrumcns pour plomber les Denrs } & fou
V i. /îe
la maniere de cautérifer les Dents, i oc,

Quelles font les Dents où le cautere réuf-
fit ordmairememîe plus? 109, no

Double avantage du cautere. i „

Ce qu\'il faut obferver avant que de cauré-
\' f\\mcautériiant.11iw

VII. l\'excraaion des Dents. \\ ^^
Dhilcultés de FextraéHon des Dents de
lagefle a la mâchoire inférieure. Méthode
finguhere propofée par M, Fauchard. Ir-
conveniens de cette méthode, & autres
moyens. ^^

„ Levier armé de nouveaux crochets pour
oter les Dents de fageffe à la mâchoire infé-
rieure.

Moyens d\'ôrer les dernieres molaires deTa
machou-e kipérieure, qui fontinclinées ver^
1 os z vgomarique. 118 r •

§ VIII Moyens de drfcerner Us oZfJâZ

qui font du mal, d\'avec celles qui caufclt les

-ocr page 353-

^tè Taih des Chapitres^

mêmes douleurs fans être gâtées. • 1 lO, î»4
IX.
Defcripùon du pélicanimagîné par C Au-
teur, pour ôter Us Dents
6* les racines. Avantages
de cet infîrumem fur lepélican ordinaire. 11J 6" JuiVf
Obfervation fur une incifive inférieure
caffée fort avant, & dont la racine étoit cou-
verte depuis îong-tems par la gencive & les
deux Denrs voifines rapprochées de façon à
boucher une grande partie de la brèche.

Jugement de l\'Académie Royale de Chi-
rurgie fur le pélican de l\'Auteur, 1

Huitième planche qui repréfente ce péîi"
can fous deux formes, & l\'explication. 13S

& fuiv.

Ncuvicme planche qui repréfente les
branches détachées du pélican,
ôc le levier
muni de nouveaux crochets; avec l\'expli-
cation. 141
&/uiv.

§. X. De l\'ufage du pélican , du davier ^ du bec^
de-corbeau, de la pince drohe, du levier enferme de
manivelle, du poujfoir. I 4(
j

Inconvéniens qui réfukcnt de certaines
maniérés d\'opérer , comme auJîi de garnir
d\'une ferviette la demi-roue:, de fixer ou
d\'arrêter k branche du pélican, & de faire
le point d\'appui fur la gencive, comiTiC l\'cn-
feigne M. Fauchard, 146 6*
fuiv.

Façon de faire le point d\'appui du pélican
dans tous les différens cas où il peut être mis
en ufage ; & manicre de s\'en fervir. 149,15 ƒ
Manière de fe fervir du davier. i jf
Avantages qu\'il a dans certains cas fur le
pélican.
 & fuiv-

-ocr page 354-

Paragraphes & Sections. ^ij

Maniéré de fe fervir de la pince droite &
du bec-de-corbeau.

Manière de fe fervir du pouffoir en ci-
feaii. ^ g

Ce qui fait que certaines Dents & certai-
nes racuies font d\'abord difficiles à ôter,
s orent enfuite facilement.
 r y 9,1 So

Dixième planche qui repréfente la pince
droite, le pouiToir en cifeau & une fonde de
Dennlte ; avec fon explicarion. 161

§. XI. D es hémorrhagies qui furviennent après

l cxtraBion d\'une Dent. jg ^

Moyens d\'y remédier. ï ^, g.

Agaric propre à arrêter ces hémorrhagies.

^ . Ifîj &fuiv,

Ues. I. Au fujet d\'une hémorrhagie furve-

nue le neuvième jour aprcstine dent ôtée.

rs yr r xSCtàfuiv,

C.BS. II. Au fujet d\'une hémorrhagie con-
iiderable, furvenue neuf jours aprèsun abf-
ces ouvert a la gencive. 1S-yj,/^.

Obs. III. Au fujet d\'une hémorrhagie fur-
venue après une Dent caffée; & produite
par
le cordoii qui étoit rompue dans la ra-
cine.

au. Des fluxions qui fuivent l\'extradiort
,a une Dent.

Caufes qui la produifent, & moyens Fy
remédier & de la guérir promptement. 17B

_ „ & fuiv.

Observ. I. Sur des Dents gâtées dans un
fujet d environ quatre ans, lefqudies lui
cauierent une fluxion & un abfcès". 180

Obs. II. Au fujet d\'un dépôt formé dans

-ocr page 355-

-5\'28 Table ces Chapitres,

le finus maxillaire par une Dent gâtée. l\'Sn.

6\' fuiv.

Obs. IIL Au fujet d\'un dépôt formé dans
le finus maxillaire J qui fut promptenienx
guéri au moyen d\'une nouvelle canulle de
plomb. 187 & fuiv:

§. XIÎI. Dépôts , abfcès., & engorgemens des
canaux dentaires provenant de Dents ufées , aga-
cées ,
 î s s

Obs. il Au fujet d\'un dépôt formé dans le
■canal d\'une Dent ufée. 189

Obs. III. Au fujet de deux Dents ufées.

150

Obs. îV & V. Au fujet de plufieurs
Dents ufées & fort agacées. 191

Obs. VI. Au fujet d,\'une Dent venue de-
puis peu, n\'étoit point gâtée.
Ibid.

Observ. VII. Au fujet d\'un abfcès formé
entre l\'alvéole & la racine de la Dent, ifz

XIV. Manière de tranfporter une Dent d\'une
bouche dans une autre\', circonfiances à obferver
j>ourlefuccès de cette operation. ,
196

^ Obs, L Au fujet d\'une Dent tranfportee
d\'une bouche dans une autre. 197

Ces.JL Sur le même fujet. 198 & fuiv.

Autre opération encore plus furprenante.

199 il fuiv-,

Obfervation au fujet d\'une Dent remife
feche qui s\'eft parfaitement confolidée fans
ctre attachée. 2,00

Oes. III. Sur îc même fujet. loi & fuiv.

XV. Des Dents ébranlées fi\' déchauffées.
Maniéré de /es rafermir, 205

Maniéré dapphquer le fil d\'or; ce aûi

eft

-ocr page 356-

Paragraphes & Sections. ji;^.

eft quelquefois à propos de faire autour des
Dents, avant que de l\'appliquer. 2.05
ùfuiy.-
Feuilles d\'or , pour raftermir les Dents
lorfqu\'il s\'en trouve cinq ou fix d\'ébranlées.

, Z07

Ce qu\'il faut faire quand desDents ebran-
iées laiffent des brèches fuffifantes entre elles.

2g8 & fuiv.

CHAPITRE SIXIEME..

Des Dents artificielles. P récaution a. ob-
ferver avant que de les pofer ^ en lespo-
fant, quand elles font pofées. x i i

Avantages que l\'on retire de ces fortes de
Dents. Manière dont elles fe font. Diffé-
rentes façons de les pofer. 211,2.1 ƒ
Avantage que procurent de bonnes raci-
nes, pour porter des dents artificielles, aiy
1. Des Dents a tenon. xi6
Avantages que l\'on rerire des Dents à te-
non-, quelles font les racines qui font propres
à recevoir des Dents à tenon- 217
& fuiv.
Ce qu\'il faut faire par rapport aux canaux
des racines pour rendre ces Dents folides.
Différentes fortes de tenons. ixt
§. II.
Des fluxions occafionnées par les Dents
à tenon. .13-4

Opinion de M. Fauchard fur la caufe de
ccs fluxions.

Moyens de prévenir ces fluxions & de les
éviter, 217 6»
fûv,-

Tome IL E e

-ocr page 357-

3 30 Tahh des Chapitres I

§. III. Des Dents & des pieces poftiches attâ^
chées avec des fils , ou de diverfes autres maniérés,

229

Maniere d\'opérer lorfqu\'il s\'agit de rem-
placer une feule Dent de devant, dont la
Drêche eft plus large que la Dent qu\'il fauc
repréfenter ne doit J\'erre. 230 &
fuiv>

Nouveau moyen pour imiter plus parfai-
tement la belle nature.

Maniere de bien établir plufieurs Denrs
naturelles pofécs fur une piece de cheval
marin. 7

Autre moyen de pofer des Dents naturel-
les avec la racine dans une piece d\'or qui
fait l\'office des alvéoles & à laquelle il y a
des fofTes pratiquées pour recevoir les ra-
cines qui repréfentent en même-tems les
gencives. 2386*
fuiv.

Maftic de M. Fauchard. 241

Moyens pour émailler des dentiers, pour
mettre plufieurs Dents naturelles, &pour
les attacher enfemble. 243,244

Moyens qu\'il faut mettre en ufage pour
éviter le choc qui fe fair fur les Dents arti-
ficielles. _ 24
.^,3.47
Différentespîeces artificielles pour réparer
les Dents qu\'on a perdues avec le moyen de
les rendre folides. 247,252
IV.
Des fils qui fervent à attacher les Denis
firtificielles,
ƒ 3 6» fuiv.
§. V, Des dentîersou piecesa reffort. 2^4, z(<o
VI. Maniere de pofer une piece a la mâchoire
fupérieurti quand il refis des Dents h l\'inférieure.

iél, 265

-ocr page 358-

Paragraphes & Sections:

Obfervation fur une piece maintenue à h
mâchoire fupérieure par le moyen des ref-
forts, quoique le fujet eût encore les incifives
& les canines.de la mâchoire inférieure. z66
4. VU. Maniéré de pofer une piece à la mâchoire
inférieure quand elle fe trouve dépourvue de toutes
fes Dents & qu\'il en reftè fuffifamment a la mâ-
choire fupérieure. 167, 169
Planche onzième qui repréfente plufieurs
pieces ardficielies d une nouvelle conftrûc-
tion , pour remeubler une bouche de Dents
naturelles; avec fon explication, Z75
5-VIII.
Des palais artificiels ou obturateurs. 174
Des diiïérentes maladies qui forment des
trous à la voûte du palais j nécelTxté de les
boucher. zyç:
Avantage que l\'on retire de la plaque fim-
ple , & les cas où il faut la préférer.

I. Obfervation au fujet d\'un trou au palais
affez confidérable que la nature feule a bou-
ché. 278,284
IL Obfervation fur le même fujet; moyens
quifurent mis en ufage pour boucher le trou.

282, i8jr

III. Obfervation qui confirme lanéceffité
de la fimple plaque. . 28^,28^

IV. Autre au fujet d\'un trou formé depuis
lon^tems à la voûte du palais, & qui n\'avoir
pu
erre bouché convenablement.Obturateur
imaginé pour opérer cet effet. 187, iB^

V. Obfervation au fujet d\'un trou formé
au palais. Defcription de l\'obturateur qui
fervit à le boucher. Infuffifance des anciens
obturateurs. 290,295

Ee ij

-ocr page 359-

Table des Chapitres ^

Douzième planche qui repréfente deu«:
nouveaux obturateurs , & un mftrumenr
propre à trépaner ou a perforer une Denr i
fon explication, 295

Treizieme planche qui repréfente un autre
obturateur de nouvelle fabrique & fon ex-
plication. ^<)J^

CHAPITRE SEPTIEME.

Choix de compofitionspour la confervation

des délits & des gencives ^ & pour la gué-

rifon des maladies qui les affectent, 300

r. Poudre pour nettoyer & hhnchir les Dents.

lol&fuiv..

II. Autre poudre pour le même ufage , & pour
fortifier les gencives, jot

III. Opiat pour nettoyer blanchir les Dents
é* pour fortifier les gencives. 505

IV. Autre opiat pour les maladies des gencives..

30;

V. Opiat antifcorbutique & ahforbant. 3 o ^
Ohfervations jur les racines de guimauve & au"

très. ^o^&fuiv..

VI. Préparation des racines 6? des petits ia-
tons propres.à nettoyer les Dents. ■ J op,

VII. EJfence pour appaifer la douleur des
Dents. 310^ 311\'

VIILP^e calmante pour la douleur des Dents.

3-ï2e.

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Paragrapnes & Sections-. ^

ÏX. Eau fortifiante , réfolutive & aflringente..

■V V r • 3^3.314

, £.au Jouveraine propre au même ufage,.

ainfi que pour les gencives fongueufies ou faignan-
tes, & pour corriger la mauvaife haleine & ra-
fraîchir la bouche. f S^fuiv,

XI. Gargarifme antifcorbutique. 5 i 7

XII. Autre gargarifme antifcorbutique & pro-
pre dans le cas de gangrène. 518

XIIÎ, Eaufpiritueufe pour ks ulcérés , fcorbu-
îiques & gangreneux. j 1.3,^ 32,0

fin, de la Table du dernier Volume,

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