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MuSfiUMD^HISlQiBE NATURELLE
LEO�NS
DE PATHOLOGIE G�MP^REE
LA NATURE VIVANTE
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IA CONTAGION
CONTAGIOSITE DE LA T�BERCULOSE
PAR
Hr BOUi^EY
MEMBHE DE L'iNSTIT�T 1882-1883
PARIS
4SSELIN;BT C'v �.;
LIBRAIRES DE t-A FAC�LTfi DE MEDECINE
EI DE LA SOCliTfi CERfBALB DE M�DBC,M yfiifiRIHAlai:
Plactde tEcole de-Uedecine 1884
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LA NATURE V1VANTE
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EVRKUI, IHfillMKRlE DE CHARLIES HER1SSEY.
BIBUOTHEEK UNIVERSITEIT UTRECHT
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MUSfiUM D'HISTOIRE NATURELLE LEQONS
DE PATHOLOGIE/COMPAREE
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LA NATURE VIVANTE
DE
LA CONTAGION
CONTAGIOSITE DE LA TUBERCULOSE
H. B O U L E Y
MEUBUE DE l'iNSTITDT 1882-1883
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VSTTrf
PARIS
ASSELTN ET Cie
LIBRAIRES DE LA FACULTfi DE MEDECINE
ET DE LA 30C1ETE CENTRALE DE MEDECINE VETEIUNAIIIE
Place de tEcole-de-Mcdecine 1884
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AVANT-PROPOS
La publication de la serie des legons professees l'annee derniere au Museum que renferme ce vo�lume a deux objets : d'une part, revenir avec une nouvelle insistance sur cette grande notion que les maladies contagieuses sont laquo; fonction d'un element vivant raquo; qui est la condition necessaire et exclusive des manifestations symptomatiques et anatomiques par lesquelles elles se caracterisent; et, d'autre part, fixer fortement l'attention sur les rapports redoutables qui existent entre la tuberculose des animaux alimentaires et celle de l'homrae; et pre-parer les esprits � l'adoption des mesures sanitaires dont les connaissances, qui sont aujourd'hui decide-ment acquisessurcesujet, demontrent la necessite.
Les idees nouvelles, quand bien meme elles pre�cedent de recherches experimentales qui leur don-nent un caractere de certitude absolue, ne sont jamais aeeeptees sans qu'elles aient � lutter contre les resistances que leur opposent les idees du passe,
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jinbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; c'est-�-dire celles qui sont dej� en possession des
esprits, au moment o� les premieres surgissent. Les motifs sont nombreux pour que celles-ci ne
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IInbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;AVANT-PROPOS.
soient pas immediatement repudiees. On les a affirmees par ses paroles ou par ses ecrits comme l'expression de la verite; et voil� que, tout � coup, la demonstration surgit qu'elles sont l'expression de l'erreur. Quel difficile aveu que celui qu'en pareil cas on est force de se faire � soi-meme! Et com-bien plus difficile encore, ^quand on a charge d'en-seignement et que la necessite s'impose de dire a son auditoire : laquo; Rayez de vos papiers tout ce que je vous ai dit jusqu'� present! raquo; Alors la passion s'en mele; celle necessite, on se refuse a s'y soumettre et Ton s'obsline centre I'evidence. C'est cette dispo�sition d'esprit qui explique les resistances qu'on a vu se produire, ces temps passes, avec un grand eclat, et � la tribune de l'Academie de medecine et dans deux chaires de la Faculte de Paris, contre la doctrine microbienne, qui a donne la clef du mys-tere de la contagion et illumine de ses clartes si eclatantes toutes les obscurites de la pathologic des maladies contagieuses.
Sous l'inspiration malheureuse de cet esprit de resistance, n'a-t-on pas ete jusqu'� vouloir etablir une separation profonde entre les deux medecines : celle de l'homme et celle des betes, et pretendre que les decouvertes, si prodigieuses fussent-elles, que Ton avait faites dans le domaine de celle-ci, ne pouvaient etre profitables � l'autre? Comme s'il n'y avait pas des maladies communes aux hommes et
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AVANT-PHOPOS.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; Ill
aux animaux, identiques dans toutes les especes qui en sont susceptibles, puisqu'elles procedenl d'un germe unique, qui trouve dans toutes son milieu de culture! Est-ce qu'un pareil fait ne donne pas la refutation sans replique de cette opinion singuliere, trop eloquemment defendue, que ce qui est verite au del� du seuil de la clinique humaine devient irnmediatement erreur en dega ?
Sans doute que de pareilles doctrines ne sauraient se soutenir, quelques efforts d'eloquence et de talent qu'on puisse depenser pour t�cher de les etayer. Rien ne saurait prevaloir contre la verite. Mais I'er-reur fait toujours quelques adeptes, surtout lorsque des hommes dont la parole semble autorisee s'en constituent les defenseurs. C'est pour cela qu'il est necessaire de la combattre et j'y ai t�che aussi energiquement que je Tai pu dans les lecons que je public aujourd'hui.
line autre question y est traitee : celle de la con-tagiosite de la tuberculose et, tout particulierement, de sa transrnissibilite possible par les voies diges�tives. Sur ces deux points de fait, scientifiquement etablis puisque la demonstration experimenlale en a ele donnee � profusion, et pent etre reproduite, on pent dire, � volonte, il n'y a plus de dissidences se-rieuses. Mais si Ton considere la question an point de vue des applications pratiques qui devraient de-couler des principes, on est amene a constater que
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IV
AVANT-PROPOS.
1'on se trouve en presence de difficultes materielles qui se sont opposees jusqu'a present � ce que I'hy-giene publique humaine put profiler integralement des resultats acquis par les recherches experimen-tales, relativement aux dangers de Tusage alimen-taire de viandes provenant des animaux infectes de tuberculose. II y a l� un tres grave probleme qui est pose. J'ai cherche � en preparer la solution par I'en-semble des documents que j'ai reunis dans mes legons, Mais pour que cette solution soit possible dans le sens qu'elle doit etre, il faut que, grace aux enseignements certains que donne la science expe-rimentale, toutes les convictions soient faites � l'en-droit de la realite des dangers que fait encourir aux consommateurs 1'usage des viandes de provenance tuberculeuse, quelque belle que soit leur apparence.
Cette conviction, je l'ai acquise, pour ma part, et tres profonde, en presence des fails d'experimenta�tion dont j'ai ete temoin.
Le but des legons que je public aujourd'hui est de la faire parlager, le plus largement possible, par tons ceux qui, a un litre quelconque, peuvent etre appeles a connaitre de cette grave question d'hygiene publique et � contribuer� la solution qui doit logiquement decouler de la connaissance ex-perimentale des choses,
H. BOULEY
15 f�vriei' 1884.
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MUSEUM DH1ST0IRE NATURELLE
COURS
DE
PATHOLOGIE COMPAREE
LECON D'OUVERTURE
La chaire de pathologic comparee au Museum. � Annexion d'un laboratoire. � Caract�re positif donne par l'expeiimentation � la medecine. � R�ie infiniment grand des infiniment petits. � La fermentation fonction d'un etre vivant. � Rapports des infiniment petits avec les organismes vivants. � Le myst�re de la contagion devoile. � Impuissancc de Vapriorisme k rtisoudre les questions de fait. � La contagion esl un phenom�ne de pullulution d'un element vivant. � Correlation avec les phenomenes de la fer�mentation. � La theorie de Liubig demontrec erronee. � Les changements d'etat de la mati�re organique morte et les �tres du monde invisible. � Experiences demonstratives de l'influence de ceux-ci sur ceux-l�. � Les elements vivants des contagions. � Ils sont dej� determines pour un certain nombre de maladies � Parallele entre les fermentations et les contagions. � Grandeur du service rendu � la medecine par la science experimentale. � Fecondite de la notion de la nature vivanle de la contagion. � Decouverte de l'attenuation des virus qui en derive. � Resultats economiques de son application sur les auimaux. � Grand fait scienlifique dontla medecine del'bomme est appelee � beneficier. � II n'y a pas de disjoncliou entre la medecine de l'liomme et celle des animaux. � 11 n'y a pas deux medecines. � Elles ne se distinguent l'une de l'autre que par la Symptomatologie.
Messieurs ,
Lorsque, il y a deux ans, une chaire de pathologic com�paree fut instituee au Museum et que je fus iuvesti de
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inbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; COURS DE PATHOLOGIE COMPARtiE.
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rhoaneur insigne, mais redoutable, de Toccuper, on a pu se demandersi cettefondation repondait � un besoiu veritable et si le nouvel enseignement n'allait pas faire double emploi avec celui de la chaire de pathologic exp�rimentale et comparee de la faculte de medecine de Paris. L'evenement a prouve que les deux enseigne-meuts pouvaient marcher de pair et avoir respective-meut leur importance et leur fecondite. L'accueil si bienveillant qui a ete fait par le public au premier volume de mes Lecons de Pathologie compar�e du Mu�seum m'a enhardi � continuer ma t�che, en me prou-vant quejepouvais �treulile, par son accomplissement, aux progres de la science medicale. Je le pourrai d'au-tant plus aujourd'hui qu'un laboratoire a ete annexe � cette chaire et que je me suis attache, dans la per�sonne de M. Paul Gibier, un collaborateur qui me donnera le concours de ses connaissances etendues, de son habilete experimentale, de son initiative et de son devouement.
J'ai dit, Messieurs, dans ma lec-on inaugurale, que Tun des motifs principaux qui m'avait determine � me charger du nouvel enseignement fonde au Museum, etait la.possibilite que nous avions aujourd'hui, grace aux progres accomplis par le concours de l'experi-mentation, de donner � un certain nombre des grands problemes de la medecine une solution rigoureuse qui substitue la clarte et la certitude aux tenebres des temps passes et aux conceptions conjecturales, mobiles et changeantes par la force meme des choses, puis-qu'elles n'ont pas la verite pour assise.
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LEgON D OUVERT�RE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;3
Quelle decouverte, en effet, Messieurs, et combieu feconde pour la medecine que celle du role infiniment grand des infiniment petits dans I'ordonnance generale de l'univers! La fermentation, d'une maniere generale, reconnue fonction de Tactivite d'un 6tre vivant qui possede en lui la puissance etonnante de rompre, par ses afiinites superieures, l'equilibre de composition des matieres organiques qui ont vecu, et de rendre la liberte � leurs elements, pour qu'ils puissent constituer des combinaisons plus simples et rentrer dans le grand circulus de la matiere minerale, o� la vie les retrouve et les captive de nouveau, pour les associer � de nou-veaux composes organiques! Et toujours ainsi dans la longue serie des temps, chaque fermentation ayant son agent special auquel appartient exclusivement la fonction de la determiner!
Tout ce monde invisible qui habite les airs, les eaux et les lieux depuis l'origine des choses et qui, jusqu'� ces derniers temps, malgre la puissance de ses effets, s'etait derobe, comme cause, � tons les yeux; tout ce monde devoile, saisi, compris dans les manifestations de son activite si energique, soumis � une etude experimentale qui a permis de le voir � son oeuvre et de donner la demonstration rigoureuse de son role si necessaire, que sans son intervention, l'entretien de la vie sur la terre n'aurait pas ete possible!
Voil� ce que nous a revele la science experimentale.
Mais les infiniment petits des airs, des eaux et des lieux n'exercent pas seulement leur action sur les ma�tieres organiques mortes dout ils liberent les elements
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4nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;CO�RS DE PATHOLOGIE COMPAR�E.
pour lesrestituer au moade mineral; dans les echanges reciproques qui s'operent necessairement entre les organismes vivaats et les milieux ou ils vivent, les infiniment petits qui peuplent ces milieux sont inces-samment en rapport avec ces organismes.
Que resulte-t-il de ces rapports? Jusqu'� ces derniers temps, il n'y avait � cet egard que des hypotheses, que des conjectures : conceptions � priori qui peuvent temoigner des facultes intuitives de ceux qui les ont emises, raais qui etaient restees sans influence sur le mouvement scientifique, parce qu'uue idee ne pent s'imposer imperieusement aux esprits que lorsqu'elle est demontree vraie par l'experimentation, c'est-�-dire lorsqu'on pent toujours, en reunissant les conditions reconnues necessaires, donner lieu � la manifestation des phenomenes dont cette idee pretend etre l'expres-sion.
Or, c'est justement l� ce que la science experimen-tale est parvenue � realiser dej�, � l'egard des effets que sont susceptibles de produire les infiniment petits du monde invisible dans leurs rapporls avec les orga^ nismes vivants du monde visible. Non que tout soit devoile; ce n'est que d'hier qu'ou est entre dans ce domaine, inconnu des temps qui precedent le n�tre. Mais, que de grandes, que de magnifiques decouvertes dej� faites!
Ce grand, ce profond, ce desesperant mystere de la contagion est aujourd'hui devoile.
C'est encore dans le monde des infiniment petits que s'eu trouvent les agents. Que savait-on autrefois, c'est-
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LEQON D OUVERT�RE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;5
�-dire il y a quelques ann6es� peine, du mode suivant lequel une maladie se transmet de Torganisme qui en est attaint � un organisme sain de la mamp;ne espece ou mime d'espece differente? Rien de positif, rien de cer�tain, si ce n'est le fait de la transmission lui-mamp;ne. On savaitque, dans decertaines conditions de rapports, soit immediats, soit � distance, la transmission s'operait. Et encore, meme sur ce point, la certitude n'etait-elle pas toujours acquise, car il y a des maladies qui ont, tour � tour, passe pour contagieuses et non contagieu-ses, suivant les idees dominantes : la peste, la morve, la syphilis � certains de ses degres, la rage, � oui, la rageelle-meme! Cast la doctrine deBroussais surtout, qui, � cet egard, a beaucoup contribue � rendre les esprits inclairvoyants. La force du Systeme l'avait em�p�rte sur celle de la verite demontree par I'observation das siecles. Lamaitre avait sibianfait, par la puissance da sa persuasion, qua sas elevesne voyaient plus qu'� travars I'idee doctrinale.
On paut laur appliquer, � la lettre, la parole de l'Ecriture : laquo; Ils avaiant das yaux at ils ne voyaient pas raquo;.
Quelle preuve plus frappante paut-on donner de l'impuissance de Vapriorisme�Tesoudre ]es questions de fait?
En matiere de contagion, I'observation seule, dans la plupart des cas, ne peut suffire � donner la raison des choses et leur interpretation. Comment la contagion s'effectue-t-elle? par quel intarmediaire? par qual m6-canisme? Comme il arrive toujours, quandles elements
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6nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COUBS DE PATHOLOGIE COMPARtiE.
de la certitude font defaut, on avait imaging, pour expli. quer le phenomene de la contagion, qu'il se degageait des malades unematiere subtile, une aura, qui portait en soi le principe du mal et donnait lieu � sa repro�duction dans l'organisme o� il avait p�netre. C'est de la meme maniere qu'en physiologic on expli-quait ou, pour mieux dire, on s'expliquait I'action fecondante du sperme. On avait admis l'exhalation d'une aura seminalis qui emanait du sperme comme une vapeur, dont l'influence rendait la femelle feconde. Interpretation bien subtile, on le voit, aussi bien pour la fecondation que pour la contagion, et qui ne pouvait donner � l'esprit aucune satisfaction, car, entre les deux termes du phenomene, eile ne mettait qu'une hypothese sans preuve.
Mais, quelle difference, aujourd'hui que la science experimentale a decouvert le role des infiniment petits, dans les manifestations des phenomenes de la conta�gion, comme dans ceux de la fermentation! � Comme tout s'illumine � la clarte de cette decouverte! L'aura contagionis, la matiere subtile des anciens a pris une forme; eile est devenue substantielle. On sait qu'elle est constituee par un element vivant d'une infinie petitesse et douee d'une puissance infinie de pullu-lalion. Rien ne demeure obscur � present. Cet element vivant qu'on pent ^oir par l'intermediaire d'un microscope, dont on pent suivre revolution en dehors de l'organisme dans un milieu favorable � son deve-loppement, on sait comment il se comporte dans l'or�ganisme lui-meme; et, grace � la notion acquise par
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Tobservation directe, il est possible d'en suivre, avec les yeux de l'esprit, revolution dans le milieu orga-nique interieur et de se rendre un compte fidele de tons les effets qu'il produit.
La contagion n'a plus rien de myst^rieux. C'est un phenomene de pullulation d'un element vivant, qui vit dans I'organisme vivant et � ses depens, de la mfime maniere que l'element de la fermentation vit dans la matiere organique morte et � ses depens aussi.
Similitude des phenomenes dans les deux cas; presque identite m�rae. Identite de causes, en effet, et grande similitude des resultats.
Conlinuons ce rapprochement, car I'histoire aujour-d'hui si achevee de la fermentation eclaire de toutes ses clartes celle de la contagion.
Afin de bien preciser, je vais prendre pour exemple la fermentation alcoolique. Son agent est la levure. Lorsque la levure a ete mise au contact avec le mo�t d'orge, on voit survenir le mouvement tumultueux que determine le degagement des gaz et qui est la carac-teristique objective de la fermentation. Et, ce mouve�ment acheve, la levure a augmente de poids; eile s'est multipliee. C'est cette multiplication qui a mis sur la voie de la decouverte de la nature du pbenomene et conduit � formuler cette proposition fondamentale que laquo; la fermentation est correlative � la manifestation des activites vitales de la levure raquo;, et non pas dependante, comme I'admettait Liebig, d'une alteration eprouvee par les matieres azotees au contact de l'air, et trans-mise par elles aux matieres fermentescibles.
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La preuve de cette correlation a 6te donnee par une experience absolument concluante qui a demontre, de la maniere la plus peremptoire, que la theorie de Liebig n'etait pas fondee sur la realite. Dans cette conception, le ferment etait une matiere albumino�de alteree au contact de l'air et transmettant son mouvement d'alte-ration aux matieres fermentescibles qui se resolvaient alors en produits nouveaux.
Qu'a fait M. Pasteur pour demontrer l'inanite de cette explication, que tout le monde avait acceptee comme l'expression de la verite, et que les medecins avaient adaptee � l'interpretation des pbenomenes de la virulence? II a mis en presence la matiere fermen-tescible et son ferment dans des milieux ou il n'existait que des sels mineraux, et il a vu la fermentation se produire, malgre l'absenee de la matiere albumino�de, dont I'alteration etait reputee la condition necessaire pour qu'elle p�t s'efFectuer. Des lors, la doctrine alle-mande, sapee dans sa base, d�t s'ecrouler. A la con�ception de Liebig, qui n'etait qu'une vue de l'esprit, M. Pasteur substitua la sienne qui etait assise sur la base inebranlable de l'experimentation, et qui s'imposa aux plus refractaires par la force meme de son evidence.
Mais, si la solution 6tait donnee pour la fermentation alcoolique, eile ne I'etait pas pour toutes les autres. Si la preuve etait faite que le mouvement intime qui fait sortir laicool du mo�t d'orge etait correlatif aux activites de la vie do la levure, la question se posait de savoir si cette loi etait generale et si, partout o�la fermentation se produisait, c'est-�-dire partout o� un
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mouvement moleculaire de la matiere organique morte aboutissait � la formation, comme spontanee, de nou-veaux produits, on pouvait invoquer la presence d'un agent vivant, donnant le branle � ce mouvement par Tactivite de sa vie, comme fait la levure pour le mo�t de biere.
Nous arrivons. Messieurs, � la grande decouverte de ce que Ton aappele la Panspermie, c'est-�-dire de la dissemination dans I'air, dans les eaux, dans la terre et � sa surface, et � la surface de tons les objets qui la couvrent, d'une multitude infinie de germes qui, par-tout, invisibles et presents, en quantite variable cepen-dant suivant les lieux et les Saisons, sont prets � l'ac-tion et s'y mettent, des que se rencontrent pour eux les conditions favorables aux manifestations de leur vie.
Inspire par cette idee directrice que la fermentation, sous ses manifestations diversifiees, devaitprocederde conditions fondamentales identiques, c'est-�-dire etre correlative � l'activite vitale d'agents speciaux, aptes � la determiner sous ses differentes formes, M. Pasteur se mit � leur recherche, et il parvint � confirmer, par les experiences les plus ingenieuses et les plus precises, I'idee qu'il avait congue que les agents vivants, d'o� les fermentations procedent, etaient dissemines et dans l'air, et dans les eaux exposees, et dans la terre, et sur la terre et � la surface de tons les objets, et qu'ils re-presentaient, par la puissance de leur vie, qui faisait sortir des milliards de l'unite, i'une des plus grandes forces qui fut dans la nature. Tout un monde nouveau d'^tres vivants venait d'etre devoile, immense par le
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10nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPAR^E.
nombre, immense par sa fonction economique dans I'univers, tenant sous sa dependance toutes ces grandes metamorphoses que subit la matiere qui a vecu, et faisant l'office d'agents liberateurs des elements de cette matiere pour les restituer au grand circulus.
Notons bien, Messieurs, que rien ici n'est avance dont la preuve ne soit faite. Le determinisme des phe-nomenes est etabli avec la plus grande rigueur. Grace au dispositif experimental le plus ingenieux, on pent conserver indefmiment les composes organiques dans l'etat de composition que la vie a constitue, tant que les agents vivants, les germes comme on les appelle, qui peuventrompre, par leurs affinites, I'equilibre molecu-laire de ces matieres, n'ont pas eu acces vers eux, L'air seul, quand il est pur, ne pent donner lieu qu'� quel-ques phenomenes d'oxydation superficielle, mais il laisse les molecules enchainees dans leurs combinaisons temaires ouquaternaires, c'est-�-dire dans leurs combi�naisons organiques. Mais que, dans le flacon o� des ma�tieres organiques ont ete conservees pendant des mois, voire des annees, on laisse entrer de l'air tenant en sus�pension les germes auxquels il sert de vehicule; ou, mieuxencore, qu'on seme directement sur ces matieres ceux de ces germes qui ont ete interceptes par les bou-chons de coton disposes aux goulots des vases pour ne donner passage dans leur Interieur qu'� de l'air pur, et alors tout change de face. Cette fixite de compo�sition qui etait demeuree accidentellement l'attribut des matieres organiques, tant qu'elles avaient ete soustraites � l'action des germes aeriens, cette fixite
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est surmont�e des que ces germes eatrent en jeu; la fermentation s'etablit et Ton voit se former ses produits ordinaires, c'est-�-dire les gaz et les nouveaux corps qui resultent des nouvelles combinaisons des Elements rendus libres par Tintervention de ces germes.
Ainsi, les fermentations sont correlatives � la mani�festation de l'activite vitale des infiniment petits du monde invisible, � des microbes, comme les a appe-les heureusement Sedillot. Rien de plus rigoureux que les demonstrations experimentales qui le prouvent, puisque Ton peut, � volonte, prevenir les fermenta�tions ou les determiner, en soustrayant les matieres fermentescibles a l'action de leurs ferments propres, ou en etablissant entre elles et eux le lien qui est la condition uecessaire pour qu'elles fermentent.
Eh bien! ce que la science experimentale a demon-tr6 pour les fermentations, eile est en train de le de-montrer, et avec la meme rigueur, pour les conta�gions.
D'une maniere generale, on est en droit de dire aujourd'hui que la contagion est laquo; fonction d'un element vivant raquo; ou, si vous voulez, qu'elle est correlative � la manifestation de la vie d'un element, d'un germe, qui pullule � l'infini dans I'organisme o� il a ete ensemence et donne lieu, par le nombre infini des germes qu'il a engendres, aux manifestations des symptomes et des lesions qui caracterisent chaque maladie contagieuse.
Pour chaque fermentation un ferment special; pour chaque maladie contagieuse, un element special, qui en renferme I'idee, pour emprunter l'un de ses termes
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42nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPARfiE.
au langagephilosophique, et qui lareproduit, toujours identique � elIe-meme,.sous la diversite des formes individuelles qu'elle peut rev�tir.
L'element vivant de chaque contagion n'a pas en�core ete specifiquement determine pour toutes. Depuis la decouverte initiale, le temps n'a pas ete s�ffisant pour l'achevement de cette grande oeuvre. Mais ce qui deja a ete obtenu par les recherches experimentales autorise � admettre, des maiutenant, que l'element vivant de chaque contagion est de nature micro-bienne, c'est-�-dire constitue par un microbe qui est, � chaque maladie contagieuse, ce que son ferment propre est � chaque fermentation.
Cela, Messieurs, n'est pashypothetique; ou du moins, il n'y a d'hypothetique dans cette proposition que la generalisation anticipee d'une loi qui a deja pour base un certain nombre de faits rigoureusement etablis par ^experimentation. On connait, des maintenant, les microbes propres � un certain nombre de maladies : le cholera des poules, le charbon bacteridien, le charbon symptomatique, les varietes de la septicemie, le rouget du porc, la tuberculose, la morve, enfin la maladie nouvelle determinee par le microbe que M. Pas�teur a rencontre d'abord dans le liquide buccal d'un enfant mort de la rage, et qu'il a retrouve dans d'autres conditions, ce qui lui a ote tout caractere specifique � l'endroit de cette maladie. Pour ce premier groupe, non seulement on a pu voir les microbes generateurs d'etats pathologiques parfaitement determines; mais encore on a pu les
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LEgoN d'ouverture.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 13
isoler, les enseraencer dans des milieux de culture appropries, en etudier revolution et donner la preuve, par l'inoculation � des organismes susceptibles, que ces microbes etaieut bien les agents, et les ageats exclusifs de maladies contagieuses determinees pour chacua d'eux, puisqu'on pouvait � volonte produire ces maladies par leur intermediaire; et que, sans leur presence dans les liquides inocules, l'inoculation res-tait toujours sterile.
A cote des maladies dont le microbe a pu sect;tre saisi et soumis � une culture qui a permis d'en faire une etude experimentale complete, il y en a d'autres pour lesquelles dej� la constatation a pu etre faite de la pre�sence d'un microbe, qu'on pent considerer comme l'element de leur virulence, mais sans qu'on ait reussi encore � trouver le milieu de culture qui conviendrait pour en faire l'etude experimentale en dehors de l'organisme : telles sont, notamment, la rage, la peri-pneumonie contagieuse du gros betail. Ainsi les faits dej� recueillis sont assez nombreux pour qu'on puisse en induire avec autorite que, dans toute maladie conta�gieuse, l'element de la virulence est de nature micro-bienne.
Comme ce parallele entre les fermentations et les contagions montre bien la similitude des choses! Dans les deux cas, les phenomenes resultent de l'interven-tion necessaire des sect;tres du domaine des infiniment petits, qui manifestent leur puissance par leur nombre, et donnent lieu, par les activites de leur vie, au chan-gement d'etat des milieux orgauiques ou ils pullulent.
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COURS DE PATHOLOGIE COMPAR�E.
Comment, en presence de pareils resultats, ne pas reconnaitre la grandeur du service que le concours de la science experimentale a rendu � la medecine ! Depuis plus de trois mille ans, l'observation reduite � ses seules ressources etait demeuree impuissante � resoudre le probleme de la contagion. Elle n'avait pu constaterque des faits, pour ainsi dire, exterieurs, � savoir que dans de certaines conditions de rapports, immediats ou me-diats, une maladie se transmettait d'un sujet malade � des sujets sains. Mais le comment de cette transmis�sion, la nature de l'agent qui en etait l'instrument, son mode d'action, les phenomenes intimes auxquels cette action donnait lieu, les rapports entre eile et les lesions consecutives enfin, autant de questions restees impenetrables, car l'observation seule ne pou-vait fournir les elements de leur solution positive. Dans les sciences d'observation, les yeux del'espritne sont claivoyants que lorsque ceux du corps ont fourni � l'esprit une image fidele des choses. Quand on a pu se rendre compte par l'observation experimentale de l'ordre dans lequel les faits se succedent et doivent se succeder, parce que la loi de leur succession a ete etablie experimentalement, on pent concevoir alors avec justesse comment ces faits doivent se passer, lorsque ce n'est plus sous les yeux qu'ils evoluent, mais dans un milieu o� ils echappent � l'observation di-recte, comme, par exemple, l'element d'une virulence donnee, introduit dans un milieu organique vivant. Ce que l'observation, dans un vase de culture, a permis de reconnaitre de la nature de cet element et de ses pro-
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prietes, conduit � des inductions tres legitimes sur sa maniere d'agir quand il est dans ce milieu. En pareil cas, I'esprit a pour base de sa conception, non l'idee � priori qui n'a pas de valeur scientifique, mais l'idee d posteriori, c'est-a-dire celle qui resulte ou d'une observa�tion rigoureuse ou d'une demonstration experimentale.
Yoil� done eclaire le mystere de la contagion par la lumiere eclatante qui a jailli de la decouverte de la na�ture de la fermentation, cetautre mystere, que lachimie etait demeuree impuissante a penetrer completement, meme lorsqu'elle etait au service du genie d'un Lavoi�sier. Mais il y a une teile conformite de nature entre les pheuomenes des fermentations et ceux des conta�gious, qu'une fois la lumiere faite sur les premiers, les seconds s'en sont trouves a I'instant meme illumines; e'etait dans la logique des choses,
Cette decouverte de la nature des contagions est pleine de grandeur en soi, car eile a substitue la certitude aux conjectures sur une des questions les plus fonda-mentales de la medecine, � laquelle, sur ce point, eile a donne un caractere vraiment scientifique. La science n'existe, eneffet, que lorsqu'on sait, c'est-a-dire lorsque la verite est acquise et que toujours on pent la faire apparaitre, en reunissaut les conditions necessaires pour sa manifestation.
Mais une autre decouverte est sortie de cette pre�miere : et celle-l� plus grande encore et plus feconde. La science a donne la preuve qu'il etait en son pou-voir de dompter l'une des plus grandes fatalites de la nature : la contagion; et, apres en avoir assujetti les
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agents, de les faire servir � pr�munir centre leuis propres atteintes, trop souvent mortelles, quand ils sont dans toute leur puissance, les organismes sur lesquels ils peuvent avoir prise; en d'autres termes, les virus mortels peuvent 6tre transformes en vaccins contre eux-memes. La methode est trouvee.
Voil� le merveilleux probleme que la science vient de resoudre. Sans doute que la prophylaxie, dans ses rapports avec les populations humaines,n'a pas encore beneficie de cette grande invention. Elle n'a encore ete profitable qu'� Tagriculture dont eile sauvegarde les valeurs animales, en mettant, des � present, les bes-tiaux � l'abri, par des inoculations preventives, de deux des fleaux les plus desastreux dont ils subissent trop souvent les attaques, dans de certaines regions : je veux parier des deux charbons, le charbon bacteri-dien et le charbon bacterien. Tout fait esperer que, dans cette campagne memo, la vaccination du rouget du pore � autre maladie meurtriere � sortira de sa phase experimentale, toute demonstrative de son effi-cacite, pour entrer dans la pratique et y produire ses bienfaits. L'inoculation preventive de la rage donne des esperances. Enfin les recherches poursuivies dans le laboratoire de la rue d'Ulm sur le microbe de la fievre typhoide du cheval perme^ront, peut-etre, dans un avenir prochain, de ranger cette maladie, si redou-table encore par les grosses pertes qu'elle entraine, parmi les maladies vaccinables.
A ne considerer les choses qu'au point de vue economique, ne sont-ce pas l�. Messieurs, de bien
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beaux resultats, et bien profitables � la societe bu-maine, puisqu'ils sauvent de la destruction des valeurs qui constituent une part considerable de la fortune publique ?
Mais, en dehors de ce point de vue utilitaire qui a son importance, n'est-ce done pas un grand fait scientifique que celui de la premunition, demontree experimentale-ment possible, d'un organisme superieur contre les attaques des maladies auxquelles il est expose dans les conditions de milieu o� il vit? J'avoue que j'ai peine � comprendre comment la signification d'une pareille conquete, acquise � la medecine par la science experi-mentale, n'a pas ete saisie par tons les medecins; et comment, � defaut de ses applications actuelles � la therapeutique prophylactique de l'espece humaine, � car ces applications ne peuvent etre que l'oeuvre du temps, � cette decouverte, si belle en soi, et qui promet d'etre si feconde, n'a pas fait naitre dans tous les esprits les plus grandes esperances.
II y a l�, Messieurs, un phenomene psychologique qui resulte, je crois, de l'idee erronee que se font beau-coup de medecins de la grandeur des differences qui existent, an point de vue patbologique, entre I'horame et les animaux. La superiorite de Tbomrae, � en juger par certaines opinions emises dans la discussion actuel-lement pendante encore devant l'academie de medecine, se traduirait, semble-t-il, par des differences fonda-mentales dans I'etat patbologique. N'a-t-on pas ete jusqu'� emettre I'assertion que Fhistologie protestait contre les siiuilitudes que je voulais etablir? Paitant de
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cette maniere de voir, on protend que si la mede-cine des animaux peut beneficier des grandes decou-vertes faites dans le domaine de la microbie, il n'en est pas de msect;me de la medecine de Thomme. Je n'invente pas, je raconte. laquo; Que nous importe vos microbes, vient-on de dire a la tribune academique? En quoi cette notion introduite dans le domaine de la science medicale peut-elle servir � eclairer l'etiologie, � interpreter les phenomenes sympto-matiques, � donner aux lesions une signification pre�cise? II y a un microbe, dans la tuberculose, me dites-vous; il y en a un dans la morve. Eb bien, apres? raquo; Je n'invente pas, je raconte.
Je ne m'attendais pas, je Tavoue, � cc que tant de progres accomplis dans les choses de la medecine, par le concours de la science experimentale, aient puetre �ce point meconnus; ctqu'� I'epoque ou noussommes, on ait pu se faire de ces choses une idee si insufOsante et, dirai-je, si etroite, qu'une disjonction complete en-tre la medecine de l'homme et celle des animaux ait paru naturelle; qu'on ait pu dire et soutenir qu'il fallait preserver la medecine de l'homme contre l'inva-sion redoutable de ce que Ton a appele les doctrines microbiennes qu'il faut laisser � la medecine des betes.
Comme si il yavait deux medecines! Comme si il y avait deux pathologies! Comme si essentiellement les phenomenes de I'etat pathologique n'etaient pas iden-tiques dans rhornme et dans les animaux!
Cette identite ne ressort-elle pas de l'identite des lois qui president aux loiictioii� organiques? Est-ce qu'il y
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a deux physiologies? Evidemment noa. II n'y en a qu'une. Done il n'y a qu'une pathologie.
Ce qui fait la difference entre la medecine de rhommeetcelle des animaux, c'estla Symptomatologie.
C'est ce qui ressortira, je l'espere, des developpe-ments ulterieurs dans lesquels j'entrerai.
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DEUXIEME LECON
IDENTITE DES DEUX MEDECINES
Nature microbienne des maladies contagieuses. � Demonstra�tions faites sur les animaux de la vaccination possible des mala�dies mortelles. � Grand progrfes accompli. � Lumi6rejetee sur la nature des contagions, � quelque esp�ce qu'elles s'attaquent. � Ces resultats viennent d'etre contestes. � La medecine humaine n'aurait rien � gagner � de pareilles conqugtes. � Opinion qui procfede de fausses idees sur les differences des deux medecines. � Question de sentiment. � Identite des phenom�nes au point de vue organique. � La parturition. � Identite de la construction elementaire. � II n'y a pas deux physiologies. � Identite des phe-nom�nes de volition, de circulation. � L'action des microbes iufec-tants est la msect;me. � Egalite de l'homme et du mouton devant le charbon. � La vaccination charbonneuse applicable � rhomme.� Dans quelles conditions? � Les hallucinations, phenom�nes iden-tiques dans toutes les esp�ces. � Exemples fournis par la rage, les r�ves du sommeil, ceux de l'eth6risation. � Le vertige stomacal du cheval. � L'homme et lesbetes egaux devant les conditions orga-niques des maladies. � La medecine de l'homme beneflcie des conquetes de la science dans quelque champ qu'elles se fassent.
Messieurs,
C'est le privilege d'un cours, dont le programme n'est pas trace, de pouvoir s'adapter aux circonstances qui peuvent intervenir au moment o� il est fait, et de prendre pour objet de ses legons des questions de
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l'ordre de celles qui rentrent dans son cadre, au sujet desquelles des controverses sont survenues. Or, il en est une, et des plus importantes, qui vient d'etre remise en cause, avecun certain eclat, devant TAcademie de medecine : celle de la nature microbienne de la con�tagion, d'ou procede la grande decouverte de l'atte-nuation des virus et de la prophylaxie par I'inoculation des virus attenues.
Je croyais,je le confesse, que c'etaient l� des verites decidement acceptees par le monde medical tout entier, et que Ton considerait comma une grande conquete, pour la prophylaxie, la demonstration faite sur des bestiaux qu'il etait possible de les mettre � l'abri des maladies contagieuses les plus redoutables, par I'inoculation du virus vaccinifie de ces maladies; il me semblait qu'un pared resultat, si inattendu et si grand, devait ouvrir � la medecine de l'homme des perspectives nouvelles et lui faire concevoir les plus grandes esperances. Je croyais qu'� ne le considerer qu'au point de vue scientifique exclusif, il constituait Tun des plus grands faits de la pathologie generale, voire de la biologic, et j'ajouterais meme de la philo�sophic de la nature, et qu'� tant de titres, il etait digne des meditations des medecins.
Quoi de plus etonnant, en effet, que cette decou�verte � laquelle nulle autre nest egale, je crois, dans les choses de la medecine, depuis ses commencements : Isoler d'un organisme malade l'element vivant, le mi�crobe, d'o� procede sa maladie; le mettre dans un milieu compose tout expres pour qu'il puisse y vivre;
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le suivre dans son evolution et ses metamorphoses; I'entretenir, par une serie indefinie de cultures succes-sives, en puissance de tonte son activite pendant des annees; prouver cette activite conservee par des ino�culations toujours fideles. Puis quand la preuve est faite, par ces inoculations, que ce microbe, fidele � lui-meme, donne toujours la maladie dont il precede, tout aussi s�rement que si on I'avait puise dans le sang d'un animal mort de cette maladie, le mettre dans des conditions rigoureusement determinees oil il se de-pouille, graduellement, de l'energie qui fait la viru�lence mortelle ; puis reduire cette energie � un degre assez faible pour que le microbe attenue ne donne plus lieu qu'� une maladie benigne, � la suite de laquelle I'immunite est acquise � l'organisme qui I'a subie centre les atteintes de la maladie mortelle. Ce n'est pas tout : lorsque le microbe a ete attenue � un degre determine sous l'influence des conditions o� on I'a place, lui faire faire souebe de microbes attenues comme lui, c'est-�-dire constituer, dans l'espece viru�lente, une race vaccinale, dont on pent multiplier inde-finiment les produits, qui peuvent etre distribues dans toutes les parties du monde pour les besoins de la vac�cination : Teile est cette decouverte! On pent dire qu'elle est complexe, car eile en embrasse plusieurs : laquo;, la determination de l'element vivant qui constitue la virulence; b, Tisolement de cet element dans un milieu de culture et l'etude de son evolution dans ce milieu; c, la demonstration de la perpetuation de son activite mortelle dans une longue serie de generations simul-
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tanees ou successives; d, Tattenuation progressive de cette activite � des degres divers; e, sa reduction � la juste mesure o� rinoculation ne donne plus lieu qu'� une maladie benigne qui transfere I'immunite; /, enfin le microbe attenue de la virulence mortelle faisant souche de microbes attenues comme lui, c'est-�-dire, engendrant une race dans laquelle les proprietes ac-quises artificiellement par 1'ascendant deviennent fixes et indefiniment transmissibles.
Tout cet ensemble de faits, dont la preuve est faite pour tons, ne constitue-t-il pas pour la medecine, abstraction faite des especes animales sur lesquelles ils ont ete constates, un progres qui depasse tons ceux qui se sont accomplis dans la serie des temps? Et n'est-ce done rien pour le medecin que les grandes clartes que jettent de pareilles d�couvertes sur la nature de la contagion, consideree d'une maniere generale, sur revolution des maladies contagieuses cbez les individus et leur collectivite, sur I'extinc-tion graduelle des epidemics etc., etc. ?
Est-ce qu'il est necessaire que de pareils faits aient ete observes sur I'homme pour que la pathologic humaine beneficie de tons les enseignements qu'ils renferment?
laquo; Oui, a-t-on dit, toutes ces decouvertes-l� n'inte-ressent que la medecine veterinaire, I'agriculture; mais nous, medecins de I'homme, nous n'en avons que faire. Bien loin qu'elles puissent nous etreutiles, nous les considerons comme dangereuses et nous devons preserver la medecine humaine de l'invasion de la
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microbiatrie qui constitue pour eile, tout � la fois, un peril social et un peril intellectuel, car eile mene � l'ho-micide et � la deraison. raquo;
Voil� ce qni vient d'etre dit, apres more reflexion, car le discours etait ecrit, � la tribune academique ! Toutls ces belles decouvertes de M. Pasteur sur la natJe vivante de la Yirulence et sur la prophylaxie par quot;inoculation, ne doivent aboutir, quand on vou-dra adapter les eclaircissements qui en resultent � la pathologie de l'homme, qu'� une sorte de folie, la folie microbienne; et le medecin qui, s'inspirant des pratiques propbylacliquesappliqueesauxbestiaux,vou-dra en faire rapplication, comme moyen preventif des grandes epidemies contagieuses dont les populations humaines sont trop souvent victimes, sur toute la sur�face de la terre, ne sera rien moins qu'un homicide!
Comment de pared les doctrines ont-elles pu etre soutenues devant l'Academie de medecine de Paris et par un professeur de la Faculte? Comment une pareille manifestation d'inclairvoyance a-t-elle pu se produire et dans un tel lieu? La raison en est, je crois, dans le cercle trop etroit ou la medecine humaine s'est ren-fermee, jusqu'� present, en France tout au moins, en prenant l'homme pour objet exclusif de ses etudes, et en se maintenant dans I'idee que la superiorite intel-lectuelle de l'homme imprimait � ses maladies un caractere propre qui le differenciait essentiellement des animaux malades.
Cette idee, je crois, Messieurs, est toute sentimentale; les phenomenes du dehors ont de tels caracteres de
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dissemblance, a premiere vue tout au moins, quand on les considere dans l'homme et dans les animaux, pour le meme etat pathologique, qu'on se laisse aller volontiers � l'idee que cette dissemblance n'est pas seulement ext�rieure. Un soul exemple pour bien rendre ma pensee : Voici une jeune femrae qui va mettre un enfant au monde; un grand acte va s'accom-plir; un nouveau membre va etre donne � une famille et � la societe humaine. Rien de plus emouvant que le spectacle des souffrances auxquelles la jeune mere est en proie. Les parents sont partages entre I'esperance et la crainte. De l'evenenient qui s'accomplit peuvent dependre ou les plus grandes joies, ou les plusgrandes douleurs dont l'�me humaine est capable. Tout contri-bue � faire de cat acte, qui confine de si pres � la pathologie, un acte d'un ordre si eleve et d'une si grande importance sociale, que l'idee d'une similitude entre lui et celui qui s'effectue dans I'etable quand une vache met bas son produit, s'ecarte de l'esprit. Cependant, � ne considerer les choses qu'au point de vue exclusivement fonctionnel, la similitude est com�plete, absolue.
Identite absolue du pbenomene dans toute son evo�lution. A la periode initiale, fecondation, c'esl-�-dire association intime de la cellule vivante que I'onappelle spermatozoide avec l'oeuf, c'est-�-dire, la cellule vi�vante qui procede de l'ovaire. L'oeuf feconde se greffe sur la muqueuse uterine; une serie de phenomenes histologiques se manifestent, identiques dans les deux especes, ayant pour objet la constitution des appareils
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� l'aide desquels des rapports intimes sont �tablis entre I'organisme en voie d'evolution et l'organisme de sa mere; puis, � l'heure marquee, la meme pour les deux especes, c'est-a-direauboutde neuf mois, quand I'organisme du nouvel etre est acheve at qu'il reunit toutes les conditions pour vivre de la vie exterieure, le Systeme nerveux revolt I'excitation qui doit mettre en branle I'appareil musculaire, dont les contractions synergiques out pour effet d'exprimer, pour ainsi dire, de la matrice le produit de la conception auquel eile a servi de reservoir pendant neuf mois, enfant dans un cas, veau dans I'autre, qui tons les deux prennent le meme chemin, sont mis en momement par le meme mecanisme, etarrivent aujour avec plus on moins de rapidite. Chez la femme, en regie generale, I'accou-chement est plus lent, plus difficultueux, et donne lieu � de plus grandes souffrances, � cause tout � la fois, et del'etroitesse relative plus grande et de l'incurvation du detroit que I'enfant doit franchir; tandis que, chez la femelle domestique, le detroit est rectiligne et sou diametre est plus en rapport avec le volume du foetus qui doit s'y engager.
Mais, � part ces differences, anatomiquement, histo-logiquement, physiologiquement les phenomenes sont identiques.
Dans Tun et I'autre cas, les enveloppes fcetales, appareil desormais inutile, sont rejetees par le meme mecanisme.
Enfin, si la retention de la totalite ou d'une partie de ces enveloppes donne lieu � des phenomenes de
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septicite ou de putridity dans 1'Interieur de la matrice, les phenomenes d'infection generale qui en resultent sont les memes pour les deux organismes. La superio-rite morale de la femme ne pent rien contre la redou-table invasion de l'arrnee raicrobienne qu'elle renferme dans son uterus. La seule difference qu'il y ait entre eile et sa soeur inferieure, comme aurait dit Michelet, c'est que celle-ci a plus de force de resistance qu'elle, c'est-�-dire qu'elle constitue un milieu de culture moins favorable � la pullulation des microbes septiques.
J'ajoute, enfin, qu'au point de vue des moyens thera-peutiques, il y a egalite parfaite entre les deux organis�mes et que les injections antiseptiques continues, celles d'acide borique de preference, sont egalement efficaces � prevenir I'infection septique ou putride dont la con�dition est constituee par la retention, dans la matrice, de matieres organiques en voie de decomposition.
Vous le voyez. Messieurs, dans ce cas particulier, la difference entre les etats physiologiques et patholo-giques est tout exterieure : an fond, identite absolue des phenomenes.
Mais il faut continuer ce parallele pour multiplier les exemples, et faire ressortir que la superiorite intel-lectuelle de l'homme ne permet pas d'etablir entre lui et les betes une difference fondamentale, an point de vue pathoiogique.
Aussi bien, du reste, cela ne ressort-il pas de l'iden-tite de leur construction elementaire? S'il y a entre eux des differences morphologiques, et si, a la diversite des formes correspondent des dispositions anatomiques qui
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sont commandees par elles, au fond un muscle est un muscle, un os est un os, un cartilage est un cartilage, dans quelque espece qu'on les considere ; les cellules, qui composent respectivement ces tissus, fonctionnent dans chacun de la meme maniere, soit qu'ils se trouvent dans les conditions normales, soit qu'ils aient subi I'ac-tion d'une cause qui ait modifie leuractivite nutritive.
Ce qui est vrai des actes cellulaires propres aux tissus Test egalement du fonctionnement des appareils. II n'y a pas deux physiologies: une qui serait pro�pre � l'homme et l'autre aux animaux; ce qui impli-querait une physiologic particuliere pour chaque espece. Non evidemment: la loi en vertu de laquelle une voli�tion qui part du cerveau donne lieu a la manifestation d'un mouvement est la meme dans l'homme et les betes. La volition congue est transmise par les cordons nerveux. De meme pour les impressions qui sont trans-mises de la peripherie au centre et y donnent lieu � l'excitation qui fait la sensation pergue; cela est d'une evidence absolue. Or, le Systeme nerveux joueun role preponderant dans la manifestation des signes par lesquels les etats pathologiques se caracterisent ou, autrement dit, les symptomes.
Si, dans les conditions physiologiques, le fonctionne-ment de ce Systeme est identiquement le msect;me chez l'homme et chez les animaux, il doit enetre de meme, il en est de meme, en effet, dans I'etat pathologique.
Msect;mes considerations � l'egard de la fonction du liquide circulatoire, ce grand appareil dont les orgaues, infiuis par leur nombre et par leur petitesse, tienuent
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sous leur dependance tout le Systeme organique. Chez l'homme et chez les animaux, le fonctionuement des globules est identique et, s'il devient irregulier, le trou�ble qui enresulte est identique dans toutes les especes. La respiration de l'oxyde de carbone rend les hema-ties incapables, dans toutes les especes, de se combi�ner avec l'oxygene de l'air inspire, par suite de la fixite de combinaison du premier de ces gaz avec leur subs�tance, et une asphyxie fatale en resulte, � quelque espece que I'animal appartienne.
De meme lorsqu'un microbe ennemi, comme la bacteridie charbonueuse, a ete iutroduit dans le sang par une inoculation experimentale on par accident, si I'organisme envahi constitue un milieu de culture fa�vorable � son developpement, les modifications subies par le sang seront identiques dans toutes les especes susceptibles et elles auront les memes consequences, c'est-�-dire la mort. Entre l'homme et le mouton qui ont succombe � cette infection, ou est la difference, une fois l'ceuvre de mort accomplie? Nulle part. Les alterations des elements des tissus et des globules du sang sent les memes dans les deux cas. Mais � la pe-riode initiale des phenomenes, il y avait une difference importante, resultant de ce que les deux organismes ne coustituaient pas pour la bacteridie uu milieu egale-ment favorable � son developpement. L'inoculation est bien plus lente � produire ses effets sur l'homme que sur le mouton, en raison justement de ce que sont leurs milieux respectifs par rapport � l'activite nutri�tive de la bacteridie; car I'infection, e'est lapullulation,
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qui est d'autant plus active que la composition du milieu s'adapte mieux aux besoins du parasite.
Ici une reflexion vient naturellement � l'esprit. Si I'organisme humain est susceptible du charbon, � et trop de faits en temoignent pour que, � cet egard, le moindre doute puisse etre congu, � pourquoi done la vaccination charbonneuse ne lui serait-elle pas ap�plicable? Je n'entends pas proposer qu'onla generalise comme la vaccine contre la variole. De ce que le sulfate de quinine guerit les fievres [intermittentes, cela n'im-plique pas que pour se mettre � l'abri des fievres in-termittentes eventuelles, il faudra, dans tons les pays, se maintenir an regime du sulfate de quinine. II en est de meme pour les vaccins resultant de la transformation des virus. A mesure que la medecine fera la conquete d'un nouveau vaccin, cela n'entrainera pas cette con�sequence que la vaccination, dont ilsera I'instrument, devra etre appliquee quand meme et partout. On a pu developper cette these plaisante � la tribune de l'Aca-deinie de medecine, mais ce n'etait que pour amener une plaisanterie preparee sur le personnage legen-daire qui se jette � l'eau afin d'eviter d'etre mouille par la pluie. Tout vaccin doit constituer pour la medecine une ressource mise en reserve, et dont on ne fera usage que lorsque les circonstances le reclameront. Ainsi, par exemple, ce serait la mesure la plus mal entendue, � tons les points de vue, que de soumettre � la vaccination les moutons de l'Angleterre o� le charbon ne sevit pas. Aucune indication n'existe de l'ernploi de colte mesure preventive contre uu mal qui
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n'a jamais ete menagant dans ce pays. Mais dans la Beauce, dans la Nievre, dans la Haute-Marne, dans tons ceux de nos departements o� le charbon fait annuellement un grand nombre de victimes, la gene�ralisation de la vaccination sur tons les troupeaux ex�poses se trouve indiquee, et ce n'est pas comprendre ses iuterets que de ne pas recourir � cette mesure qui a donne aujourd'hui tant de preuves de ses vertus pro-phylactiques.
Ces vertus 6tant certaines, pourquoi rhomme n'en beneficierait-il pas pour son propre compte? J'entends Thomme qui est expose par sa profession aux dangers de l'inoculation accidentelle du charbon, dans les pays o� sevit cette maladie sur les animaux. Ces accidents ne sont pas rares chez les bergers, les bouchers, les equarrisseurs, les ouvriers megissiers, voire meme les veterinaires. Pourquoi ne se rendraient-ils pas invul-nerables aux atteintes de ce mal redoutable, en se plagant sous le palladium de la vaccination? Mais, a-t-on dit, ne serait-ce pas l� une pratique homicide, puisque la vaccination sur les moutons n'est pas exempte toujours d'accidents mortels ? Quand il s'agit d'une bete, cela compte peu. Mais a-t-on le droit d'exposer un homme � des chances possibles de mort, si faibles qu'elles soient, en vue de le premunir contre un accident eventuel? L'argument serait de valeur si la vaccination charbonneuse sur Thomme ne pouvait pas etre pratiquee sans qu'une part f�t laissee aux chances dangereuses. Mais ces chances peuvent etre evitees, en procedanl � la vaccination par plusieurs
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inoculations successives de virus dont l'�nergie irait croissant, sans jamais atteindre le degre dangereux. L'homme etant done, de par sa composition organi-que, d'un certain degre de resistance � Tinfection charbonneuse, il ne serait pas necessaire, pour I'in-vestir d'une immunite complete, de recourir � des vaccins d'une grande puissance comme celui de la vaccination du second degre du mouton.
Cela dit, pour repondre � cette objection formidable que Ton ne pourrait, sans courir les chances d'etre homicide, appliquer � l'homme I'inoculation prophy-lactique avec des virus attenues, laissons faire le temps, et la medecine de l'homme saura profiter, eile aussi, de cette grande methode prophylactique dont la science est redevable an genie de M. Pasteur,
Je ferme cette longue parenthese et jereviens �mon sujet.
II n'y a pas deux physiologies, disais-je: respiration, digestion, secretion, urination, circulation, nutrition, fonctions sensorielles, s'operent par des m�canismes idenliques. Done il n'y a pas deux pathologies, car ce que le genie d'Hippocrate avait pressenti et formule dans un aphorisme celebre, est I'expression d'une rigoureuse v^rite : Qua faciunt in sano actiones sanas, eadem in cegro morbosas. Les lois qui president aux fonctionnements physiologiques etant les memes dans toutes les especes, dans toutes 6galement les troubles fonctionnels, expressions des etats pathologiques, doi-vent proceder des memes lois. Et c'est ce qui a lieu, en effet.
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Plagons-nous en presence des faits pour mettre cette verite en pleine �vidence.
Je vais considerer, dans les animaux, quelques maladies du systems nerveux et je prendrai, d'abord, la rage pour exemple, car c'est cette maladie qui nous permet le mieux de nous rendre compte de la simili�tude qui existe entre le fonctionnement cerebral de l'homme qui se trouve dans de certaiues conditions pathologiques, et le fonctionnement cerebral des ani�maux dans des conditions analogues.
L'une des caracteristiques les plus frappantes de la rage, chez les animaux, ce sont les hallucinations. Voyez ce chien qui est � la periode initiale de la rage: evidemment, il se trouve transporte dans un monde imaginaire et nous pouvons nous rendre compte de ses sensations toutes subjectives, d'apres les manifestations auxquelles elles donnent lieu. A un moment donne, en effet, quand on l'examine en silence et sans que rien puisse detourner son attention du cours o� eile est entrainee, vous le voyez immobile, l'oeil fixe, l'oreille tendue, comme s'il avait devant lui un objet contre lequel il d�t se mettre en garde. Et, de fait, cet objet, homme ou bete, tout imaginaire qu'il soit, fait naitre en lui l'idee d'une menace^ car il se lance sur lui et fait le geste de le mordre. Dans d'autres cas, c'est par le sens de rouie qu'il est determine � l'action : on le voit se precipiter contre une porte, dans un etat mani�feste de fureur, comme s'il avait entendu, de l'autre cote, des bruits menagants.
Entre ce chien determine � des mouvements par des
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sensations subjectives, et rhomme qui,dans ses diffe-reuts delires, voit des etres imaginaires, enteud des voix qui lui parlent ou des bruits qui l'irritent, et se deter�mine � des mouvements en rapport avec ses sensations, egalement subjectives, o� est la difference? Est-ce qu'il n'y a pas ici identite absolue des phenomenes ? Et notons bien que ce n'est pas seulement le chien, c'est-a-dire le plus intelligent de nos animaux domes-tiques, qui est, dirais-je volontiers, capable d'hallucina-tion. Cette manifestation particuliere des facultes cere-brales pent etre observee meme sur les animaux aux-quels le nom de brutes est le plus justement applique, ceux de l'espece bovine par exemple; ils out leurs hallucinations, comme le chien, tout aussi expressives. Rien de plus significatif, � ce point de vue, que la des�cription qui a ete faite, par le regisseur d'une pro-priete, des premieres manifestations de l'etat rabique sur des vaches qui avaient ete mises en liberte dans une prairie. Voici la relation qu'il donne des symp-t�mes tres bien observes par lui sur une de ces betes : laquo; Je me suis apergu qu'une de mes genisses mordues ne mangeait pas dans le paturage, qu'elle etait inquiete, toujours en mouvement et regardait dans toutes les directions. Tout � coup, eile se mettait � courir, lan-Qait des coups de pieds de derriere comme si un chien lui mordait les jarrets; eile faisait volte-face subite-ment, baissait la tete, marchait ainsi et, avec ses pieds de devant, cherchait � frapper quelque chose; eile paraissait attendre une attaque, eile grattait le sol avec ses pieds, faisait voler la terre et beuglait avec
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fureur; eile croyait, sans doute, voir le chien qui l'avait mordue et se mettait sur la defensive pour le chasser. raquo;
Eutre cette vache qui se trouve en presence d'un ennemi imaginaire, qui se derobe par la fuite � ses attaques, en se defendant, par ses ruades, de ses mor-sures; puis tout � coup se retourne et lui fait face, fond sur lui tete baissee et l'attaque de ses pieds anterieurs; entre cette vache et l'homme ea proie au delire, qui voit aussi des ennemis imaginaires et les fuit ou les attaque, suivant qu'il y est determine par ses sensations subjectives actuelles, oii est la diffe�rence?
Le cheval a aussi des hallucinations. On est autorise � l'induire de certaines de ses attitudes, certains mou-vements de sa tete, certaines expressions de sa physio-nomie. Tant�t son oreille se dresse, comme s'il perce-vait des sons qui l'etonnent. tantot son ceil se fixe vers un point o� quelque fantome semble lui apparaitre; d'autres fois il secoue la tete, ou bien la redresse, erige sa levre superieure et fait la grimace particuliere � l'etalon qui vient de flairer une jument. Son regard inquiet s'eclaire parfois de lueurs soudaines et devient feroce et menagant, comme celui du cheval, mechant par nature, au moment o� il s'attaque � l'homme expose � ses coups. De temps en temps, il semble suivre de l'oeil quelque objet imaginaire, et alors, il ronfle et s'ebroue, comme cela est habituel au cheval qui se trouve en presence de quelque chose qui l'etonne ou l'effraye.
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De meme le mouton : on le voit prendre des attitudes defensives ou agressives, baissant la tete devant I'ennemi que, seul, il voit, grattant le sol de ses pieds anterieurs, puis se precipitant en avant, et faisant le geste de frapper du front et des comes.
De msect;me le pore, repute par Buffon le plus brute de tous les animaux. Lui aussi, cependant, a ses ballu-cinations qui sont denoncees par les mouvements, en apparence sans cause, auxquels ou le voit se livrer dans son bouge.
De m�me enfin les oiseaux : n'obeissent-ils pas, eux aussi, � des sensations subjectives, quand on les voit fuir comme s'ils etaient poursuivis, ou bien marcher devaut eux dans une attitude agressive? Ces atti�tudes n'impliquent-elles pas, ou bien qu'ils cherchent � eviter les attaques de I'ennemi qui n'est visible que pour eux seuls, ou bien qu'ils marchent � sa ren�contre ?
Ainsi, entre l'homme et les animaux, la similitude est grande au point de vue du fonctionnement cere�bral. Dans Tun et dans les autres, I'idee ou I'image, produite par l'impression des objets, pent donner lieu � une sensation identique � celle que Tobjet lui-meme a determinee, et faire croire a sa realite actuelle, quoique le cerveau n'en pergoive que le fantome.
Mais ce n'est pas seulement dans I'etat maladif que ces phenomenes peuvent etre observes. Le chien n'a-t-il pas des reves pendant lesquels il eprouve, comme nous, des sensations subjectives, qui nous sont denon�cees par des signes non douteux, tels que I'agitation
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desa queue, lesifilement nasal par lesquels il cxprime ses desirs ou ses plaiutes; les grondemeiits qu'il fait entendre, signes de sa colere. Tout eel a pent etre observe facileraent sur les chiens familiers, qui vivent, on pent le dire, dans notre intimite.
Ces reves du sommeil, on pent donner lieu � leur manifestation par Taclion de Tether sur des animaux qui, tels que le cheval, sont, au point de vue intellec-tuel, places � un niveau de beaucoup inferieura celui du chien. Voici une experience involoiitaire qui en temoigne de la maniere la plus frappante : Un jour, � Alfort,j'avals fait soumettre � l'etherisation un che�val entiersur lequel je me proposals de pratiquerune operation pour une blessure profonde d'un pied poste-rieur. Une fois l'anesthesie obtenue, je me mis � mon oeuvre et j'etais arrive au moment le plus douloureux de l'operation, lorsque I'animal fit entendre le petit hennissement qui est propre au cheval entier lorsqu'il s'approche de la jument pour la saillir. En meine temps, le penis sortit du fourreau et s'allongea sur la litiere, et enfin I'animal, toutentrave qu'il f�t, se livra � des mouvements lombaires dont la signification ne pouvait etre douteuse. Ce cheval etait sous le coup ou, pour mieux dire, sous le charme d'un reve, qu'il est bien permis d'appeler erotique, car il eprouvait des sensations subjectives , identiques, � coup s�r, aux sensations du memo ordre dans I'espece humaine, Dans Tun et l'autre cas, memes impressions cere-brales; meme determinisme du phenomene, memes manifestations.
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Si nous passions en revue les maladies vertigineuses, ou bien celles qui resultent de compressions exerc^es sur la substance cerebrale par des tumeurs, telles que les kystes, les ccenures, les concretions ventriculaires, etc., etc., nous verrions les memes causes produire, dans toutes les especes, des effets identiques, ne se differenciant les uns des autres que par des degres. Ainsi, par exemple, le vertige stomacal du cheval se caracterise, en raison de Timpossibilite du vomissement cbez cet animal, par des symptomes d'une extreme intensite. Le cheval dont l'estomac est le siege des sensations douloureuses que cause sa distension, est determine � se porter en avant par une force comme fatale. S'il est attele � un manege, il tourne inces-samment. Dans son ecurie, il pousse du front contre le mur qui lui fait obstacle, s'y arcboute et tombe sou-vent devant la resistance qu'il ne pent surmonter. Libre, il va devant lui, titubant, jusqu'� ce qu'il ren�contre l'obstacle qui l'arr^te et contre lequel il se maintient dans l'attitude de la propulsion.
Que ressort-il de ces developpements et de ces rapprochements? C'est que l'homme et les b^tes sont egaux devant les conditions organiques des maladies et que c'est une fausse idee que d'invoquer la superio-rite intellectuelle de l'homme pour pretendre qu'au / point de vue pathologique, il se differencie des ani-maux � tel point que la medeciue humaine n'aurait aucun benefice � tirer des progres accomplis dans la pathologic des animaux par les etudes experimentales qu'elle comporte et que la nature des choses autorise
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et legitime. Grosse erreur et qu'il faut repudier au nom de la science et au nom de l'humanite qui n'a qu'� beneficier des conquetes de la science, dans quei-que champ qu'elles se fassent.
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TR01SIEME LECON
IDENTITE DES DEUX MEDECINES [Suite)
Similitude ontrc lo fonctionncmenl cerebral chez rhomme ct chez les animaux. � Importance du phenom�me des hallucinations au point de vue de la Psychologie compan'.e. � Les sensations subjeetives subordonnees hl'csprit par la pliilosophie. �#9632; Question de mots. � La cerveau, instrument des plienom�nes psychiques. � La memoire chez les animaux. � L'idee cartesienue sur la nature des animaux.
�nbsp; Pensee profonde de Buffon. � Les faits de la pathologie des b�tes peuvent servir � ^interpretation des faits de la pathologie de rhomme. � Exemple ; experiences de laboratoire sur le virus rabique. � Le siege de la rage devoile experimentalement. � La substance nerveuse, milieu de culture de l'element vivant de la rage. � Ensemencement direct � la surface du cerveau. � Grande rapidite de la pullulation dans touts l'etendue de Taxe cerebro-spinal. � La rage a cesse d'Stre une nevrose. � Preuve par l'ino-culation cerebrale de Texistence materielle d'une lesion invisible, meme au microscope. � Nouvellc voie ouverte � ranatomie patho-logique. � Explication des formes variees de la rage par le si�ge des pullulations. � L'anatomie pathologique pourra mettre � pro�fit ces localisations pour l'ctude des functions cerebrales et medul-laires. � Explication des paralysies rabiques. � Pullulation dans le tissu des nerfs, demontree experimentalement. � Cheminement du virus par pullulation, suivant le trajet des cordons nerveux. � Hypothese de M. Duboue, de Pau, rendue plausible par cette de-c.ouverte. � Preuve du concours de la pathologie experimentale et comparee pour l'interpretation des faits de la pathologie humaine.
�nbsp; Les repudiations de ce concours ne sont pas reflechies.
Messieurs,
L'etude symptomatologique de la rage dans les ani�maux, au point de vue des manifestations cerebrales.
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43nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPARfiE.
nous fait voir une parfaite similitude entre le fonction-nement cerebral chez l'homme et chez les betes. Les b�tes ont des hallucinations, identiques � celles que rhomme pent avoir, c'est-�-dire, des sensations, sans objet exterieur, que l'homme rapporte � un objet qui n'existe pas.
Au point de vue de la Psychologie comparke, l'exis-tence chez les animaux des hallucinations, que donne l'etat rabique, presente un grand interet, car eile montre que les cerveaux sont construits sur le meme plan et fonctionnent de la msect;me maniere, comme organes des sensations, c'est-�-dire des impressions transmises par les sens, et comme reservoirs des idees, c'est-�-dire, dans l'espece actuelle, des images per^ues, qui laissent dans le cerveau une empreinte plus ou moins durable.
La philosophie fait intervenir I'esprit dans l'inter-pretation des phenomenes que Ton designe sous le nom d'hallucinations. Je me garderai bien de me hasarder dans une discussion relative � l'intervention de ce que Ton appelle l'esprit dans les phenomenes de cet ordre. Mais je ferai observer que, du moment que les betes ont des hallucinations certaines, dans des cas dont les conditions sont rigoureusement determinees, cela doit impliquer pour les philosophes qui admettent l'esprit comme element du probleme, l'existence d'un esprit chez les betes, en sorte que le terme de Psycho�logie comparee, dont je me servais tout � l'heure, est parfaitement autorise. De fait, il n'y a l�-dessous qu'une question de mots. A vrai dire, la psychologie
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est la science qui a pour objet le fonctionnement ce�rebral, le cerveau etant rinstruraent necessaire des manifestations que la philosophie rapporte � I'�me; qua l'�me existe, comme I'admet la philosophie spiri-tualiste, ou qu'elle ne soit qu'un etre de raison, il y a un point sur lequel le desaccord ne saurait exister, c'est qu'en definitive toutes les manifestations que Ton appelle psychiques ne peuvent se produire sans 1'intervention du cerveau. Voil� le point absolument positif de la question.
Cela pose, que voyons-nous chez nos animaux hallucines, soit par une cause morbide, comme dans la rage, soit par l'action d'un modificateur de l'actlon cerebrale, comme dans 1'etherisation? Des manifestions exterieures de la part d'un animal, qui sont identiques � eel les qui se produiraient si leur condition objective existait, e'est-a-dire si I'animal avait devant lui un objet reel qui le determinat � agir comme il agit. Dans la prairie, la vache en sante fuit le chien re'e/qui l'attaque, et se defend, en fuyant, par des ruades; puis eile se retourne, se met sur la defensive et fond sur lui tete baissee;puis, apres avoir lutte, eile se remet � fuir. Quand nous la voyons faire absolument les memes gestes, sans qu'il y ait aucun motif de ses determinations, qui soit exterieur � eile, qui lui soit objectif, nous devons en conclure qu'il est subjectify e'est-a-dire que le motif de la determination des mou-vements de I'animal est, j'allais dire, dans son esprit, comme on le dit pour I'homme en pared cas. II est dans rimage, dans I'idee que la condition patholo-
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44nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPARfiE.
giquea eveillee, ainsiqu'iltarrive dans le reve; et cette image, impressionnant le cerveau, doune lieu aux de�terminations qui se traduisent par les phenomenes ex-terieurs dont nous sommes temoins. En sorts, � et c'est � cette conclusion que je veux en arriver, � an sorte qu'au point de vue du fonctionnement du cer�veau, considere comme l'organe par lequel l'animal manifeste ses sensations et se determine � des actes qui leur sont correlatifs, la similitude est complete entre lui et Thomme. Sans doute que la difference est grande, est immense entre eux deux, au point de vue de la puissance de l'action cerebrale; ce n'est cepen-dant l� qu'une difference de degres, certainement adequate aux plus grands developpements de l'organe, mais fondamentalement le mode de fonctionnement est le meme. Le cerveau, dans les especes animales, comme dans l'homme, regoit des sensations qui se transforment en idees ou en images, plus ou moins du�rables, lesquellesideessont le point de depart de deter�minations immediates ou plus ou moins eloignees, comme il arrive dans les phenomenes de m^moire.
Car la memoire n'est pas seulement l'apanage de l'homme, les animaux la possedent et souvent tres durable. Que d'exemples je pourrais citer! � Je me boruerai � quelques-uns qui suffiront pour demontrer que le cerveau des animaux est capable, comme le n�tre, de conserver des idees qui, �un moment donne, deviennent le mobile de leurs actions. J'ai raconte quelque part l'histoire d'un cheval qui, descendu dans une mine pour y servir de moteur, y sejourna pendant
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dix annees. Au bout de ce temps, devenu infirme et incapable de continuer son service, il fut remonte � la surface du sol. Des quil revit le soleil, il le salua par un hennissement, puis la vue des objets qui I'en-touraient reveillant en lui le souvenir des choses d'au-trefois, il s'en inspira pour s'orienter et regagna de lui-meme l'ecurie qu'il avait quittee dix ans aupara-vant et qui etait situee � une assez grande distance de l'ouverture de la mine. Evidemment ici, on ne saurait etablir aucune difference entre le fonctionne-ment cerebral de ce cheval et celui d'un homme qui, regagnant ses penates apres dix ans d'absence, s'en va droit � la maison quittee par lui depuis si long-temps.
Voici un autre fait o� le phenomene de memoire est plus complique par I'association des idees qu'il implique, et, consequemment, est plus demonstratif encore au point de vue de l'identi�cation du fonction-nement cerebral chez I'homme et chez les auimaux. II s'agit d'un chien de garde, du nom de Jupiter, au-quel la qualification de feroce pouvait etre justement attribuee, tant ses instincts etaient mechants. II n'etait apprivois� que pour une seule personne, le piqueur de l'etablissement d'otnnibus auquel il appartenait. Un jour, ce chien regut un coup de pied de cheval qui lui fractura un avant-bras. L'appareil qu'ou lui appliqua fut serre trop fort et donna lieu � des accidents gan-greneux sur la partie du membre situee au-dessous du siege de la fracture. Comme il arrive, en pared cas, ce malheureux animal subit une veritable torture. On
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le conduisit sur une petite charrette � bras, chez mon beau-frere, M. Vatel, veterinaire, rue des Saints-Peres, o�je le soumis, moi-meme, � 1'anesthesie avec Tether et lui pratiquai ensuite I'amputatiou dans la partie superieure de l'avant-bras. Apres le pansement, on le replaQa dans sa charrette, et il fut reconduit � Mont-rouge et remis � l'attache dans sa niche. Trois se-maines � un mois s'etaient ecoules depuis ce petit evenement, lorsque j'eus roccasion de retourner, avec M. Vatel, � l'etablissement des omnibus de Montrouge dont il etait le veterinaire. Des que Jupiter me vit, il agita sa queue et fit entendre le sifilement nasal qui est chez le chien un signe de sentiments afiectueux. Tout etonne d'une manifestation aussi inaccoutumee de sa part, car, je le repete, la ferocite etait sa carac-teristique dominante, j'osai m'approcherde lui, malgre les objurgations du piqueur, et le caressai sur la tete. Jupiter se dressa sur son train de derriere et, s'ap-puyaut sur moi de sa patte unique, il me temoigna par des signes non douteux ses Ires vives sympathies. C'etait une repetition de l'histoire, plus on moins au-thentique, du lion d'Androcles. Voici, je crois, I'inter-pretation que comporte ce fait singulier. Jupiter etait en proie � une veritable torture au moment o� je me mis en rapport avec lui pour Kanesthesier. Ce court instant suffit pour que, par Fun ou l'autre de ses sens, l'oeil ou le nez, je fisse sur son cerebrum une impression qui y est restee. A cette impression s'est associee l'idee du bien-etre qui a suivi l'anestbesie et de la cessation des douleurs intolerables auxquelles il
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etait en proie par le fait de la constriction excessivenbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; i
du bandage applique pour la fracture.� Lorsque Ju-nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; \
piler m'eut reconnu, un mois apres I'operation, cette association d'idees fit naitre en lui le sentiment de la reconnaissance qu'il me temoigna de la maniere quenbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; I
je viens de dire. Est-ce que, en pared cas^ un cerveaunbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;
humain fonctionne d'une autre mani�re que celui denbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; ;
ce chien?nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;f I
Un dernier exemple pour moutrer que, dans le cer-nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; \
veau des betes, des idees s'associent absolument corame dans celui de rhomme et donnent lieu � des volitions tres reflechies. Un cheval avait ete opere � Alfort d'un abces cause, en avant d'une epaule, par la pression du collier. Au bout de quelques mois, cet abces s'etaut reforme, l'animal fut reconduit � la cli-nique d'Alfort o� il subit unenouvelle operation. Une troisiemeetantdevenue necessaire, cette fois-ci les sou�venirs du cheval se reveillerent � l'aspect des lieux, et il refusa de franchir la grille de l'ecole; il fallut lui bander les yeux pour le decider a avancer. Mais cet abces s'elant reproduit une qualrieme fois, c'est au pout de Chareuton que l'animal se moutra recalcitrant et on ne put le lui faire franchir qu'en lui bandant les yeux, comme, la derniere fois, on I'avait fait � la grille. Les souvenirs des souffrances endurees deja faisaient prevoir � ce cheval celles qui I'attendaient dans les memes lieux, et il etait determine par ses im�pressions � refuser de s'y laisser conduire.
Voil� ce qui ressort de l'observation des fails et montre combien la similitude est grande, au point de
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48nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; COURS DE PATHOLOGIE COMPAR^E.
vue du fonctionnement cerebral, entre les animaux et l'homme.
Que nous voil� loia de l'idee Cartesienne, qui accordait � Thomme seul la faculte de penser et faisait des animaux de simples machines. Ces idees du grand philosophe du xviic siecle ne sont peut-etre pas sans avoir laisse leur trace en medecine, et sans contri-buer � maintenir, dans l'esprit d'un certain nombre, une disjunction entre la medecine de l'homme et celle des betes.
Erreur profonde contre laquelle il faut protester au nom des progres de la science. laquo; Si les animaux n'exis-taient pas, a dit Buffon, la nature de l'homme serait encore plus incomprehensible. raquo; Pensee pleine de justesse, qui implique la similitude fondamentale de l'homme et des betes, et le concours que peut don-ner l'etude de celles-ci, � quelque point de vue que Ton se place, pour dechifFrer la nature du premier. De fait, est-ce que la constitution de la physiologic comme science ne procede pas des interrogations que Ton a faites aux animaux par des experiences? Est-ce que ce ne sont pas les reponses de leurs organes, sous forme de resultats experimentaux, � et celles-l� plus veridiques que celles qu'entendaient les augures, � qui ont permis de comprendre et d'expliquer les phenomenes similaires de l'organisme humain? Que de fonctions devoilees, grace � ces recherches! Le foie et son sucre, le r�le du pancreas, l'influence des nerfs sur les vaisseaux capillaires, les localisations dans l'appareil nerveux, etc.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; #9830;
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TUOtSIEME LEQON.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;49
Les fails spontanes ou experimentalement determi�nes de la pathologie des betes ne donnent-ils pas un concours analogue pour 1'interpretation des faits de la pathologie de l'homme? Evidemment oui, et rien u'est plus demonstratif, � ce point de vue, que les beaux resultats qui sont sortis des experiences du laboratoire sur le virus rabique. Par exemple, que savait-on de la nature de la rage avant ces experiences si lumi-neuses et si convaincantes? Rien, ou plut�t peu de chose. L'interpretation des phenomenes symptoma-tiques avait conduit � Tinduction tres legitime que le siege de la rage etait dans le cerveau et dans le bulbe, mais cette induction, si legitime qu'elle f�t, d'apres les donnees de la physiologie, I'anatomie pathologique ne pouvait pas la confirmer, car la rage ne laissait apres eile aucune trace visible, meme � l'aide du mi�croscope, qui permit d'etablir une relation eutre une lesion organique au lieu fixe par I'induction physiolo-gique et la manifestation des symptomes. Mais voil� que ce chimiste, ignorant des choses de la medecine, que Ton appelle M. Pasteur, intervient dans cette question et y apporte les lumieres de son esprit et de ses melhodes rigoureuses.
L'expression symptomatique de la rage indique que son siege est dans le systeme nerveux central; et c'est une maladie conlagieuse! Puisqu'elle est contagieuse, eile a sa cause dans un element vivant, qui n'a pas encore ete vu, mais dont I'existence peut etre affirmee avec certitude, puisque rinoculalion d'uuc infinilesiine parlie de l'humeur virulente donuo lieu� la repioduc-
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wrr--raquo;-------- ..u. .u,. . imiiii._..-----uliijii inbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; i ii m*mmm-^^^^^mmmmmm*^mmmmmmmmmn
50nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;OOURS DE PATHOLOGIE COMPAKliE.
tion des elements de la virulence, en quantite infinie, dans la have des animaux inocules qui contractent la maladie. Cela etant, etant donne que la rage est une maladie du Systeme nerveux central, n'en peut-on pas conclure que I'element qui la constitue a son siege dans la substance nerveuse elle-meme? Et alors I'ino-culation de I'element de la virulence rabique direc-tement � la surface du cerveau, ne donnera-t-elle pas lieu � la manifestation des sympt�mes, d'une maniere plus sure et dans un temps plus court que I'inoculation suivant le mode habituel, dans une partie quelcouque du corps?
Ces questions, qu'on s'etait posees, furent soumises � un contr�le experimental. Mais I'inoculatioii directe, sur le cerveau, de la salive ou, pour mieux dire, des liquides buccaux, provenant des sujets enrages, uede-termina que des phenomenes d'irritation suppurative, a cause de la presence, dans ces liquides, de germes aeriens, associes � I'element de la virulence rabique, lesquels donnent lieu � des accidents mortels trop rapides, dans leur marcbe, en raison du siege de Tino-culation, pour que les effels de I'inoculation rabique aient le temps de se produire. C'est alors que M. Pasteur eut l'idee de puiser, dans le cerveau meme des animaux morts de la rage, le virus qui, suivaut I'induction physiologique, devait s'y etre developpe, et les resultats de i'experience d'inoculation directe de ce virus � la surface du cerveau d'un chien, demontrerent qu'il y etait d'une extreme purete, en meme temps que d'une tres grande activite, qui se denongait par la Constance
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TROISIEME LEgON.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 51
des resultats de riuoculation et par la duree tres courte du temps necessaire pour que ces effets se produisent. Generalemenl, c'est pendant les deux premieres semaines que la rage survient; rarement cette limite est depassee pour la periode d'incubation.
L'epreuve experimentale par l'inoculation de la substance nerveuse, dans toutes les regions, depuis le cerveau jusqu'� Textreniite caudale de la moelle, a demontre que TelemeDt de la virulence existait dans toute Fetendue de ce Systeme, puisque I'inocula-tiou cerebrale de cette substance, puisee dans un point quelconque de son etendue, la demontre viru�lente.
� Voil� done decouverte, par ces experiences, une serie de faits absolument nouveaux : � savoir que la subs�tance du Systeme nerveux central constitue pour I'ele-ment de la virulence rabique le milieu de culture le plus favorable; que la pullulation, dans ce milieu, s'ef-fectue avec une si grande rapidite qu'il suffit d'une � deux semaines, rarement plus, pour que les conditions materielles, necessaires � la manifestation des pheno-menesrabiques, se trouvent realisees; que, consequem-ment, la ragen'est plus cette nevrose, cette maladie sans matiere, qu'on croyait autrefois, maisbienune maladie determinee par une lesion d'un ordre tout nouveau : celle qui resulte de la diffusion, dans la substance ner�veuse, des infiniment petits qui constituent les elements de la virulence et qui ont pullule � Finfini.
Cette lesion invisible, meme au microscope, est aussi reelle que l'alteration d'un liquide dune extreme pu-
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82nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;CO�RS DE PATHOLOGIE COMPARfiE.
rete apparente par une substance chimique incolore qui s'y trouverait dissoute, et que denoucent quelques gouttes d'un reactif approprie. Pour I'element de la virulence rabique, le reactif approprie, c'est la subs�tance nerveuse d'un animal vivant ensante, avec cette difference que le mode d'epreuve est inverse de celui auquel on a recours en chimie. Le procede chimique consiste � verser le reactif dansla liqueur donton veut reconnaitre la nature; le procede physiologique con�siste � mettre une parcel le de la substance dont on veut reconnaitre la nature, ou pour mieux dire, dans laquelle on veut constater la presence d'un element etranger, en rapport avec le milieu o� cette presence sera denoncee par sa multiplication.
Mais cette difference est secondaire an fond. L'im-portant, c'est que le moyen soit Irouve � et il Test � de faire la preuve de l'existence materielle d'une lesion invisible, meme au microscope. En sorte que voil� ou-verte une nouvelle voie � l'anatomie pathologique; voil� uu moyen nouveau de sonder les secrets de la trame orgauique, quand la vie s'est eteinte, et de lui demander aiusi les secrets de la manifestation des symptoines par lesquels, pendant la vie, la maladie s'est traduite.
Avec cette notion nouvelle, acquise par I'experi-
mentation, de la nature intime de la rage, c'est-�-dire
de la pullulation, dans le Systeme nerveux central, de
I'element de la virulence de cette maladie, les formes
varieesdes manifestations symplomatiqucs, Ires diverses
suivant les sujets, out leur explication dans les locali-
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sationsqui se produisent au moment o� la pullulation s'effectue. Ainsi, par excmple, il y a des cas o� la rage inoculee se traduit rapidement par des pheno-menes de paraplegic. N'est-il pas admissible, qu'en pareil cas, c'est dans.lc renflcment lombaire de la moclle que la pullulation s'est concentree? Pourquoi ? Lc pourquoi est etcrncl. Apres chaque nouvelle decou-vcrte, un nouveau pourquoi se pose, qui sollicite de nouvelles recherches. Apres tout, ces localisations, c'est-�-dire ces concentrations des elements de la viru�lence dans des regions determinees, dans des tissus, dans des parties de tissus, sent un fait qu'on pent dire general dans revolution des maladies contagieuses. Ce fait semble 6tre egalement une des caracteristiques de la rage. Que si, par exemple, la pullulation se concentre plutot dans une partie du cerveau que dans une autre, I'expression symptomatique se mon-trera differente, suivant le role fonctionnel de cette partie.
La rage mue qui est si calme et n'en est que plus traitresse au point de vue de sa transmission � l'homme, doit avoir un siege cerebral different de celui de la rage furieuse. De msect;me pour la forme rabique o� le sentiment affectueux de la part du chien, de la part de l'homme aussi, est longtemps predominant.
Un jour, sans doute, quand le microbe rabique aura pu etre colore comme celui de la tuberculose, I'anato-mie pathologique pourra mettre � profit l'aptitude du Systeme nerveux � servir de milieu de culture � ce microbe, pour etudier et specifier les fonctions de ses
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34 COURS DE PATHOLOGIE COMPAKtE.
differentes parties, en etablissant un rapport entre les manifestations des symptomes et la concentration des microbes dans teile ou teile region, qu'ilsera possible de determiner par leur coloration.
Ainsi, par exemple, une des caracteristiques ana-tomiques de la rage, quand la vie s'est prolongee suf-fisamment longtemps apres son debut, est le ramollis-sement de la substance nerveuse dans tel ou tel depar-tement de Taxe cerebro-spinal. L'ancienne anatomic patbologique ne pouvait que constater cette lesion, mais son interpretation lui ecbappait. Aujourd'hui, on est autorise � l'expliquer par la pullulation sur place des elements de la virulence, qui finissent par etouffer les elements anatomiques et par les frapper de mort: d'o� la desagregation de la trame qui les supporte. C'est identiquement le meme phenomene que celui dont la membrane pituitaire devient le siege, dans la morve aigue, lorsque les elements de la virulence sont tellement accumules dans sa trame qu'ils entrai-nent sa mortification humide par plaques etendues, ou, autrement dit, son ramollissement, comme dans I'ap-pareil nerveux.
Mais ce n'est pas seulement le systerae nerveux cen�tral qui est apte � servir de terrain de culture � 1'ele�ment de la virulence rabique; les nerfs eux-memes possedent cette aptitude, mais a un moindre degre, en raison de ce que Telement nerveux y est plus rare. Aussi la pullulation du microbe rabique y est-elle plus lente; eile s'y effectue, cependant, deproche enprocbe, du centre vers la peripherie. C'est ce qui a ete constate
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experimentaleraent par M. Pasteur sur le pneumo-gas-trique, depuis son origine cerebrale jusqu'� son entree dans la cavite thoracique.
Pour ces premieres epreuves, les resultats sont posi-tifs; le nerf a ete reconnu virulent dans toute cette etendue o� i! a ete essaye par I'inoculation cerebrale. Jusqu'o� cette virulence s'etendra-t-elle ? C'est ce que nous diront les experiences qui sont actuellement en cours d'execution.
Probablement que ce n'est pas le pneumo-gastrique seul qui devient virulent et que tons les autres nerfs, semblables � des canaux de derivation, constituent au-tant de voies par lesquelles la pullulation du microbe se continue du centre dans une etendue plus ou moms grande, suivant que la vie s'est plus ou moinsprolon-gee apres la manifestation de la maladie.
La preuve etant donnee experimentaleraent que la pullulation de l'element rabique pent s'effectuer, de proche en proche, dans la substance des cordons des nerfs, avec une lenteur proportionnelle � la rarete rela�tive de l'element nerveux dans leur tissu, on pent en induire que, dans le cas de morsure ou d'inoculation experimentale, le mouvement de pullulation s'effectue en sens inverse dans les cordons nerveux, c'est-�-dire de la peripberie vers le centre, et que c'est par la voie de ces cordons que cheminerait le virus vers I'appareil nerveux central, ou se trouvent toutes les conditions de sa pullulation rapide. Ainsi se trouverait verifiee l'bypothese de M. le docteur Duboue, de Pau, sur le cbeminement du virus rabique par la voie des nerfs :
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36nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPARfiE.
hypothese bien inexplicable, et, par cela meme, bien inadmissible au moment ou eile a ete eraisc, car il n'existait alors aucune donnee physiologique sur la-
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quelle on put l'appuyer. Ce n'etait l� qu'une conception a priori, ingenieusement deduite d'un ensemble d'ob-servations cliniques, montrant que la duree de la pe-riode d'incubation de la rage est d'autant plus courte que les morsures inoculatrices sont faites dans une region plus rapprochee de Taxe cerebro-spinal; mais ce n'etait qu'une conception � laquelle manquait la ve�rification que les experiences de M. Pasteur lui ont donnee. La preuve est faite, par ces experiences, que la pullulation virulente pent s'eflectuer dans la subs-nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; f
tance des cordons nerveux, et que cette pullulation, de proche en proche, est la condition du chemine-
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meut du virus du point o� il a pu 6tre insere sur un nerf, par une morsure, jusqu'� 1'appareil central o�, une fois arrive, il trouve, comme le microbe ense-mence � dose iufinitesime dans un milieu de culture, la condition favorable � sa multiplication � l'infini.
Voil� fournie, par ces nouvelles experiences, une preuve nouvelle, et bien couvaincante, du con-cours ellicace que la pathologic experimentale et com-paree pent donner � la medecinc de l'homme. Et c'est quand de pareils resullats sont obtenus, quand le se-nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; I?
cret, si longtemps garde, de la nature et du siege rigou-reusement determine de la rage est enfmdevoile, qu'on ne craint pas de lancer I'anathcme centre ce grandnbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;raquo;
chercheur qui, en mettant ses precedes d'analyse au service de la medecine, a resolu, d'une manieresi com-
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plete, cet eternel problerae de la rage, reste impene�trable � l'observation simple et � l'analyse clinique. On ne craint pas de dire � cet homme d'un si grand devoue-ment, � qui la medecine est redevable de ses plus grands progres : laquo; Vous n'etes qu'un chimiste; vous ne connaissez pas le premier mot des choses de la me�decine ; de quel droit vous en melez-vous ? raquo;
Voil� ce que Ton a entendu ces jours-ci � l'Acade-mie de medecine et les colonnes du temple ne se sent pas ecroulees I
Non seulement cela a ete dit, mais, chose plus dou-loureuse encore, de pareilles paroles ont ete accueillies par les applaudissements d'un trop grand nombre des auditeurs, qui out ainsi temoigne que le grand mou-vement imprime � la science medicale par M. Pas�teur etait encore meconnu et incompris par eux.
Tout cela est regrettable, mais ne saurait avoir de consequences serieuses, parce que la verite finit tou-jours par prevaloir, quelles que soient les resistances qu'on t�che � lui opposer et malgre tons les decriments par lesquels on cherche � diminuer les inventeurs. Aussi bien, e'est une loi comme fatale. L'idee nouvelle n'est jamais acceptee sans de grandes l�ttes, o� son auteur succombe souvent, mais dont eile sort toujours inbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;victorieuse quand eile est vraie. Heureusement pour
l'honneur de ses contemporains, que si M. Pasteur a du lutter, lui aussi, pour le triomphe de ses idees, le raquo;nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;succes, apres tout, a couronne ses efforts; et aujourd'hui
ce chimiste, dont, tout � l'heure encore, on deplorait presque I'admission dans les rangs de l'Academie de
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38nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPAR^E.
medecine, a vu se rallier � lui les jeunes generations parmi les raedecins, et dans les anciennes une forte majorite qui a su divorcer avec les idees dont eile etait imbue et conformer son esprit aux verites nou-velles.
Les dernieres attaques qui viennent de se produire ne constitueront done qu'un episode qui ne laissera pas que de paraitre curieux,, au point de vue psycho-logique surtout, dans l'histoire de ce grand mouvement dont M. Pasteur a ete l'initiateur et le promoteur ine-branlable.
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QUATRIEME ET CINQUIEME LECONS
LA NOTION DE LA NATURE V1VANTE DES ELEMENTS DES CONTAGIONS ET LES LESIONS ANATOMIQUES
Los phenoin6nes de la rage en rapport avec les pullulations du microbe de cette maladie dans les difterentes regions de l'appareil nerveux. � De mfime ses lesions materielles devenues objectives.
�nbsp;Fails anatomiques qui caractcrisent les maladies contagieuses.
�nbsp;Leur signification par lesphenom�nes de pullulation des elements vivanls des contagions.�Exemples, enprocedant des fails les plus simples aux plus complexes. � Dennaloses acariennes. � Les le�sions de la bronchite verrnineuse. � Les faux tubercules determi�nes par les oeufs d'un strongle nematoide. � Les tubercules muscu-laires de la trichina. � Les taches rouges du rouget, determinees par la pullulation d'un microbe dans le corps muqueuxde lapeau.
�nbsp; La morve du cheval et son microbe. � Interpretation des faits symptomatiques et anatomiques par la pullulation dans des or-ganes d'election. � Action phagedenique de l'inoculation morveuse sur le ehien. � La tuberculose et son microbe. � Analogic entre le mode de developpement des tubercules helminthiasiques et celui des tubercules vrais. � Les uns et les autres, expressions d'une ac�tion irritante sur place. � VEpinc irritantc des anciens devenue substantielle et constituee par le microbe pullulant. � Decouverte de ce microbe par M. Toussaint sous forme de micrococcus, et par M. Koch, de Berlin, sous forme de bacilles. � Le microbe revet probablement ces deux formes. � Transmission de la tuberculose par les liquides de culture. � Verification par M. le professeur Cornil. � Le microbe de la tuberculose constate dans les lesions sous leurs differentes formes. � Concordance entre les caraet�res des lesions spontanees et ceux des lesions experimentales. � La for�mation du tubercule se rattacho ci la loi generale qui exprime les rapports de la ti'ame vivante avec les corps etrangers.
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Epr
00nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; coubs de pathologie compar^e.
Messieurs,
Dans la derniere seance, j'ai essaye de montrer combien la notion acquise experimentalement, et de-venue aujourd'hui verite demontree, de la nature vi-vante des elements des contagions, contribuait � l'eclaircissement de la pathologie de la rage. La loca�lisation de l'element rabique, � disons du microbe de la rage, puisque aussi bien il a ete yu, � dans le Systeme nerveux central, ou sa presence certaine est demontree par l'inoculation, donne la raison du carac-tere des sympt�mes par lesquels la maladie s'exprime. Ce sont des sympt�mes qui procedent manifestement d'un trouble de la fonction cerebrale et medullaire. L'angoisse respiratoire, les spasmes, l'impressionnabi-lite, teile que la moindre vibration aerienne, si Ton pent ainsi dire, est pergue par le malade, dans l'espece bumaine; d'autre part, l'etat anesthesique, si complet en apparence sur le chien, que, quand on met le feu � sa litiere, il ne sort qu'avec lenteur du foyer qui l'en-veloppe de ses flammes; la sorte d'impassibilite avec laquelle le chien supporte le contact d'un fer rougi au feu : tons ces sympt�mes, ou d'hyperestbesie ou d'a-nesthesie, impliquent leur origine nerveuse, et il est probable que les differences de leurs caracteres proce�dent des differences de localisation et de concentra�tion de relement rabique dans les differentes parties de l'appareil si complexe et encore si mysterieux, que Ton appelle le Systeme nerveux. Si, sous Tinfluence
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QUATR1EME ET CINQUIEME LEgONS.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;61
de la presence dans le Systeme nerveux central du microbe rabique, un chien est determine tant�t � raordre, tant�t � caresser avec une sorte d'ardeur, dont ses lechements coutinus sont I'expression, on pent induire de manifestations si opposees qu'elles ne pre�cedent pas des memes alterations de I'appareil nerveux, ou, en d'autres termes, que les localisations des ele�ments de la virulence rabique ne se sont pas faites dans les memes parties du cerveau o\i de la moelle. Quand sur un meme chien, ce qui est habituel pour les chiens familiers, c'est Faffectuosite qui predomine d'abord dans la manifestation des sympt�mes, et qu'ensuite c'est la fureur se traduisant par des envies de mordre, il est bien admissible que ces differences dans les ex�pressions symptomatiques impliquent des differences de siege des lesions. Quand la rage a ete ensemencee sur un cerveau de chien, ce n'est pas d'emblee que ses sympt�mes apparaissent; il faut, pour cela, un certain temps pendant lequel la pullulation s'opere ; de la meme maniere que lorsqu'on ensemence un liquide de culture, ce n'est pas immediatement qu'il perd sa transparence; il faut un certain temps, variable suivant la nature des germes eusemences, pour que le liquide commence � se troubler, c'est-�-dire, pour qu'appa-raissent en lui les signes de la proliferation de ces germes. Notons, Messieurs, en passant, combien cette comparaison rendue possible entre un bouillon de cul�ture o� Ton a seme une bacteridie, et un cerveau de chien, � la surface duquel on a seme une particule ce-rebrale virulente, puisee sur un animal enrage, notons
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61nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; COUUS UE PATUOLOGIE COMPAKIiE.
combiencette comparaison, rendue possible par la con-formite des choses, aide a la comprehension d'un phenomeue demeure jusqu'� hier mysterieux. Grace � cette analogie tres legitime, on peut suivre avec les yeux de l'esprit la progression de la pullulation dans la substance cerebrale et induire, autant que les con-naissances physiologiques actuelles le permettent, les localisations dans I'appareil nerveux d'apres les expres�sions symptomatiques. Rien de plus legitime que cette induction � l'egard du renflement lombaire de la moelle, lorsque c'est par la paralysie que la rage de�bute d'emblee, comme cela se voit quelquefois chez le che\al. Quand la paralysie se manifeste sur le chien, ce qui est ordinaire � la periode ultimo de leur mala-die, cette manifestation derniere est le sigue certain de la concentration dans la moelle lombaire des ele�ments de la virulence.
Mais ce ne sont pas seulement les symptomes qui s'expliquent par la pullulation, dans la substance ner-veuse, des elements de la virulence; ce sont aussi les lesions materielles quand elles deviennent objectives. Or, ces lesions, quelles sont elles ? C'est le ramollisse-ment, c'est-�-dire la mortification, avec rupture de la coherence du tissu. II est admissible qu'en pared cas la pullulation est teile dans la trame des lissus que les elements nouveaux, qui y sont accumules, en etouffent la vital ite et en determinent la desagregation.
Ce n'est pas seulement sur I'anatomie pathologique de la rage que la notion de la virulence, fonction d'un element vivaut, jette ses claries. Les maladies conta-
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QUATRIEME ET CINQU1EME LEgONS.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;63
gieuses, considerees d'une maniere generale, se ca-
racterisent soit par des faits anatomiques exterieurs sur la peau, et sur les muqueuses, ou dans las tissus sous-jacents, qui constituent des symptomes, en meme temps que des lesions; soit par des faits anatomiques iuterieurs, qui constituent les lesions que I'autopsie de-voile. A l'exterieur, ce sout des modifications dans les couleurs des teguments, consequence le plus souvent de congestions ou de stases sanguines; des eruptions de differeuts ordres; des modifications de la cohesion; des destructions de la trame, soit par fragments, comme daus la gangrene; soit parun travail d'erosion progres�sive plus ou moins rapide. A l'interieur, ce sont des modifications de la trame organique par congestion ou par slase; des rupturs de sa cohesion, ou des augmen�tations de sa consistance par rafflux d'elements orga-uisables dans sa trame; des formations nouvelles sous formes de grains ou de noyaux, comme dans la tuber-culose ou dans la morve, par exemple.
Quelle etait la signification de ces lesions diverses, exlerieures ou interieures, avant que la nature de la contagion eut ete devoilee, c'est-�-dire que la notion eut ete acquise qu'elle procedait de la pullulation, � l'interieur de l'orgauisme, d'un element vivant? Cette signification echappait completement. La raison des choses n'etait pas trouvee. Aujourd'hui eile Test, et Ton pent dire, d'une maniere generale, que toutes les lesions, externes ou internes, sont l'expressiou de la presence, daus les parties o� elles se montreut, des elements de la virulence � microbes specifies ou par-
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raquo;
G4nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPAR^E.
ticules Vivantes encore indeterminees specifiquement, mais demontrees Vivantes par une experimentation certaine.
Pour faire la demonstration de la verite de cette pro�position, procedous des faits les plus simples, et dirai-je, les plus objectifs, aux faits plus compliques dont la nature n'est pas immediatement aussi saisissable.
Prenons la gale d'abord; eile se caracterise � la peau par des lesions particulieres : sillons creuses par l'acare dans l'epaisseur de l'epiderme; eruptions parti�culieres de boutons discrets, � base rosee et � sommets trausparents; rougeurs aux points o� ces deux symp-t�mes se moutrent. Je n'insiste pas actuellement sur ces caracteres. Qu'il me suffise de dire que ces lesions tegumeutaires sont etroitement correlatives � la pre�sence et � l'action irritante de l'insecte qui est l'ius-trument vivant de la manifestation de la gale et de sa transmission.
Qu'il me suffise de dire encore qu'il y a plusieurs varietes de dermatoses acariennes chez l'homme et chez les animaux, donnant lieu � des manifestations symptomatiques en rapport avec les especes acariennes dont dies dependeut, et etroitement correlatives � l'action des iudividus de ces especes.
Cette correlation est si etroite que l'acare detruit, ce qui n'est pas toujours facile � temoin la variety de gale qu'on appelle folliculaire chez le chien � les symptomes disparaissent instantanement, � l'exception du prurilqui persiste quclquefois longtemps apres que sa cause primitive a disparu. luvorsement pour l'en-
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semble des symptomes: tantque I'insectedemeure, ces sympt�mes persistent egalement. La gale folliculaire en est une preuve trup certaine.
Ce qui est vrai des acariens, dans leurs rapports avec le tegument externe, Test egalement d'autres in-sectes parasites dans leurs rapports avec les teguments internes. Par exemple, les differentes varieles de strongles qui determiuent chez le mouton, la chevre, les betes boviues, le cheval, leporc, le lapin, voire les poules et les faisans, la maladie particuliere que Ton designe sous le nom de bronchite vermineuse. L'une des caracteristiques anatomiques de cette variete de bronchite est la preseuce, dans les poumons, de pe-tites tumeurs d'appareuce tuberculeuse, d'une cou-leurjaune pale ou un peu verd�tre, du volume d'un grain de chenevis �celui d'une noisette, dans lesquelles on trouve des strongles microscopiques, isoles ou for-mant des pelottes par l'enroulement de plusieurs dans la meme loge. Ces strongles microscopiques, loges dans les vesicules pulmonaires qu'ils out transformees enturbercules, aupointde vue objectif, par I'irritation qu'ils out causee, ces petits strongles sont agames, d'un demi � un millimetre de longueur, et ils restent avec ces caracteres, taut qu'ils demeurent cloitrh � l'extremite des bronches; ce n'est que lorsqu'ils out pu penetrer dans les ramifications bronchiques qu'ils trouveut l'espace et les elements necessaires � leurs developpements.
Quelquefois ces favx tubercules sont determines par les oeufs d'un strongle uematoide, autour desquols
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6�nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATH�LOGIli COMPARfiE.
s'etablit une modification de la substance pulmonaire, qui lui donne l'aspect du tubercule de la phtbisie. C'est � M. le professeur Laulanie, de l'Ecole veteriaaire de Toulouse, que l'oa doit la constatation de ce fait d'une grande importance au point de vue de la genese du tubercule proprement dit.
II en a fait la communication par une note, � l'Aca-demie des sciences, dans sa seance du 2 Janvier 1882. Dans le cas observe par M. Laulanie, la formation du tubercule a ete prise sur lefait : lesoeufsd'un strongle nematoide ont ete vus, chez un chien, dans I'interieur de tubercules ayant les apparences exterieures des tubercules vrais de la phthisic.
Comment ces oeufs avaient-ils ete deposes dans la trame pulmonaire de ce chien. En voici le mecanisme, tel que M. Laulanie I'a expose dans sa note.
Les strongles des vaisseaux vivent, � l'etat adulte, dans le ventricule droit et les grandes divisions de Tariere pulmonaire du chien, o� ils se reunissent en pelotons plus ou moins volumineux, composes de males et de femelles. Lorsqu'un de ces pelotons est immobi�lise dans un point du vaisseau, il se forme, � l'endroit o� il s'est arrete, un travail inflammatoire qui donne lieu � des vegetations sous forme de cordages et de lames entrecroisees, grace auxquelles le peloton de strongles n'est plus susceptible d'etre entraine par le courant circulatoire. C'est dans cet espece de nid que s'opere I'accouplement. Les oeufs fecondes sont ensuite transportes, au fur � mesure, dans les divisions les plus fines de Tariere o� ils out ete produils. C'est l�
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qu'ils parcourent les differentes phases de leur deve-loppement.'Ges oeufs, ou les embryons qui en sontsor-tis, arr�tes dans les fines arterioles, deviennent le point de depart d'une arterite noduleuse, reunissant dans sa structure tous les caracteres que Ton assigne aux follicules elemeutaires jde la tuberculose. On trouve, au centre de chaque foyer noduleux, un ceuf ou un embryon niche dans une cellule geante, qui est en-touree d'une couronne plus ou moins abondante de cellules epitheliales et d'une zone externe embryon-naire qui tend frequemraent � la formation fibreuse.
M. Laulanie a argue de ce fait, qu'on peut appeler un fait experimental spontan�, pour soutenir la these de l'origine intra-vasculaire de la cellule geante. C'est l� une question d'histologie pour l'examen et la discus�sion de laquelle je n'ai, je le confesse, aucune compe�tence. Mais ce que je retiens de l'enseignement qui res-sort de ce fait si interessant et si bien observe, dont l'exactitude a ete verifiee par M. le professeur Cornil, c'est que, entre le tubercule proprement dit � celui de de la phthisie � et celui qui resulte de l'arret daus une fine arteriole, soit d'un oeuf, soit d'un embryon nematoide, il n'y a pas anatomiquement de difference. D'o� cette consequence, deduite avec beaucoup de sa-gacite par M. Laulanie de l'examen histologique qu'il a fait de la nodosite constituee par Taction irritante de l'oeuf du strongylus vasorum, laquo; que l'agent specifique de la tuberculose agit de la m6me maniere que les oeufs du strongle et porte son action initiale sur les vaisseaux dans lesquels il est en circulation raquo;.
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08nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;CO�RS DE PATHOLOGIE COMPAR^E.
Nous alloas voir, tout � l'heure, combieu cette pre�vision est aujourd'hui verifiee.
Ges modifications que nous venous de voir se pro-duire dans la trame pulmonaire, autour soit des strongles agarnes pelotonnes dans les vesicules bron-chiques, soit des ceufs ou des embryons des filaires du sang, elles se constituent, de la meme maniere, sous l'action d'une cause analogue et par le meine meca-nisme, dans le tissu musculaire, lorsque la larve de la trichine y a penetre. Elle, aussi, excite par sa presence un mouvement inflammatoire autour d'elle, et, bientot, eile se trouve comme emmuree dans le kyste d'appa-rence fibreuse dont eile a ete la condition de formation : vivant d'une vie que Ton peut appeler tres rigoureu-ment claustrale, et attendant que vienne le jour de sa delivrance, par la dissolution de son kyste enveloppant dans le sue gastrique de l'animal qui aura faitsa nour-riture du muscle qu'elle habite.
Dans tous les cas que je viens de citer, le rapport a ete facile � etablir entre les tumeurs d'apparence tu-berculeuse et leur contenu, dont la presence et la na�ture out pu etre reconnues par l'inspection microsco-pique. Mais, jusqu'� ces tout derniers temps, cette ins�pection avait ete impuissante � rien distinguer dans les lesions de la tuberculoseetdans celles de lamorve, qui fut d'autre nature que celle des elements anato-miques. On n'avait vu dans les alterations de tissus qui constituent ces lesions que les effets de mouve-meuts inflammatoires, dissemines dans les poumons, saus qu'on pul se rendre compte du mecanisme de ces
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localisations dispersees qa et l�, et dans la trame pulmo-naire et ailleurs; se rattachant 6videmment � une cause unique, que Ton avait designee du nom dedia-these, pour exprimer la disposition de l'economie � la constitution de phenomenes semblables dans diffe-rentes regions � la fois, mais sans que ce mot eveill�t dans I'esprit I'idee d'une cause rigoureusement deter-minee et bien saisissable.
Aujourd'hui, on sait � quoi s'en tenir et Ton salt o� s'en prendre. La notion certaine de la nature de la virulence permet de se rendre compte de l'apparition des sympt�mes et des lesions, une fois donnee leur cause sous la forme de l'element de la virulence d'une maladie determinee.
Soil, par exemple, le mal rouge, ou rouffetdu. porc, dont la nature microbienne vient d'etre decouverte par M. Pasteur et M. Thuillier, dans ces derniers temps. La caracteristique objective de cette maladie est la dissemination, � la surface de la peau, de taches et de plaques rouges, plus ou moins etendues, se fon-Qant jusqu'au rouge vineux. Quelle est la significa�tion de ces taches? L'anatomiepathologique d'hier etait forcement muette sur ce point. Aujourd'hui, on est au-torise � les considerer comme le signe de la pullula-tion dans le corps muqueux de la peau, par places circonscrites ou tres irregulierement etendues, des elements de la virulence de cette maladie tres rapi-dement mortelle. De fait, aujourd'hui que le microbe du rouget a ete trouve, qu'on a pu l'isoler et l'entrete-nir par des cultures dans des liquides appropries, rien
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n'est plus facile que d'obtenir la repetition de cette maladie sur des organismes sains, autant de fois qu'on le veut, et de faire apparaitre ces taches rouges qui traduiseat la pullulation du microbe, de la msect;rne ma-niere que les pustules varioliques, dans rhommeet le mouton, sont I'expression, sous une autre forme, de la pullulation, par places isolees ou confluentes sur le tegument, de Telement vivant, microbe probablement, d'ou ces maladies dependent.
La meme interpretation des faits symptomatiques et anatomiques est applicable � la morve du cheval. Quand vous avez ensemence I'organisme d'un cheval bien portantavec la semence morveuse, qu'arrive-t-il, au bout des quelques jours necessaires pour que la pul�lulation ait eu le temps de se faire, et de se traduire par les effets qui resultent de la localisation du virus dans ceux des tissus qui lui constituent des milieux de culture plus favorables � son developpement rapide? Quand il s'agit de la morve aigue, que j'ai plus particuliere-ment en vue pour montrer les phenomenes avec leurs caracteres les plus saillants, les manifestations exte-rieures qui font suite � l'inoculation, ont pour siege, fapr�f�rence, la muqueuse pituitaire et la peau. Sur la pituitaire, elles consistent dans des eruptions pustu-reuses, rapidement remplacees par des ulcerations qui, elles-memes, rapidement grandissantes en surface et en profondemv, ne tardent pas � transformer la pitui�taire en une vaste plaie, supportee par une trame dont les elements se desagregent et forment une sorte draquo;. deliquium putride. Quelle est la signification de ce
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travail si rapide de desorganisation ? L'anatomie pa-thologique d'hier ne pouvait la donner. Mais si Ton admet ['accumulation, par pullulation rapide, des ele�ments de la virulence dans le tissu de la membrane, milieu de culture qui leur est tres favorable, on s'ex-plique comment les elements anatomiques, constitutifs de cette membrane, peuvent etre etouffes, pour ainsi dire, par les microbes accumules autour d'eux et en eux, qu'ils cessent de vivre et que, leur vie cessant, le tissu perde sa coherence et se reduise en pulpe. Peut-etre bien aussi qu'en pareil cas, les diastases qui sont les produits de la manifestation de la vie des microbes ajoutent leur action necrosante � celle des microbes eux-memes. G'est probablement un phenomene de cet ordre qui se produit, mais avec plus de lenteur, dans cette plaie recalcitraate de la muqueuse nasale que Ton appelle le chancre de la morve chronique, et qui, loin d'avoir de la tendance � se fermer, tend, au contraire incessamment � s'elargir. Quelle est la raisou de ce travail rongeur? Sur ce point encore l'anatomie patho-logique d'hier etait muette. Mais si Ton admet I'exis-tence, dans la trarae du tissu, au point ou I'ulceration s'effectue, de microbes qui y pullulent et etouffent les elements anatomiques de ce tissu parune progression plus ou moins lente, corame c'est le cas dans la morve chronique, l'elargissement progressif du chancre s'ex-plique. On a vouiu mepreter l'idee que je considerais les microbes comme des animaux devorants. Cela a ete un argument pour faire rire, mais nullement conforme � ce que j'ai dit. Les microbes accomplissent leur ceuvre
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de destruction par leur pullulation sur place et peut-etre bien aussi en vivant aux depens des elements aux-quels ils sont associes, comme ils vivent dans un mi�lieu de culture en y epuisant, pour les besoins de leur vie, tons les elements qui sont propres � leur servir. Sur ce point, on ne peut emettre que des hypotheses; mais ce qui n'en est pasune, c'est I'action commej^a-gedenicjue qui fait suite � l'insertion du microbe de la morve sur la peau d'un animal propre � lui servir de milieu de culture. Ces pheuomenes-la sont tres inte-ressants � etudier sur le chien, car s'il n'est pas refrac-taire � la morve, au moins il resiste longtemps, dans la plupart des cas, aux effets de son inoculation; et souvent meme ces efFets restent exclusivement locaux; I'infection generale ne se produit pas, on si eile se produit, ce n'est que sous forme atlenuee. Inoculez, par exemple, du virus morveux sur la peau de la face quot; d'un chien, vous verrez, au bout de quelques jours, la petite plaie de riuoculation prendre un caractere ul-c�reux; eile gagnera en surface plus qu'en profondeur; et de proche en proche, la face finira par 6tre envahie par un vaste ulcere, qui constilue uue plaie d'une ex�treme irregularite sur ses bords, sans que la sante du chien paraisse se ressentir de ce travail local de des�truction. Cependant, I'ulcere qu'il porte est bien un ulcere de morve, car si vous transportez une goutte de l'humeur secretee � sa surface sur un organisme sus�ceptible, comme celui de T�ne ou du mulct, vous ver�rez la morve se manifester, a la suite de cette inocula�tion, avec des caracteres d'intensite tout aussi graves
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que si le virus avait ete puise directement sur un che-val ou sur un �ne atteints de la raorve aigue, contrac-tee dans les conditions ordinaires de la contagion, ou trausrnise par I'artifice d'une inoculation directe. II ressort manifestement de cette interessante experience que le tegument exterieur du chien pent servir de mi�lieu local de culture au microbe de la morve, comme fait un mur humide pour une moisissure. Le microbe de la morve se comporte, en pareil cas, comme I'acare de la gale, n'ayant d'autre effet que I'effet local qu'il est susceptible de produire, mais ne franchissant pas, semble-t-il, les barrieres gauglionnaires. De fait, ce qui prouve bien que la morve reste locale ou, tout au moins, est succeptible de rester locale sur le chien, c'est qu'au bout d'un certain temps, le travail ulcera-teur s'arrete de lui-meme et est remplace par un tra�vail cicatriciel qui repare, dans la limite du possible, ce que le premier avait fait. Et quand vous procedez � l'autopsie de l'animal sur lequel la succession de ces faits a pu litre observee, vous ne rencontrez, la plu-part du temps, aucune trace qui denonce que I'infec-tion a pu etre generale. Elle pent I'etre cependant dans quelques cas. M. le professeur Trasbot, de l'Ecole veterinaire d'Alfort, a eu I'occasion, I'annee derniere, d'observer la morve sur un lion d'une des menaseries ambulantes qui servent aux exhibitions des dompteurs. Ce lion etait nourri avec de la viande de cheval; et comme aujourd'hui la viande de cheval est devenue une viande de boucherie, les equarrisseurs n'abattent plus guere que des animaux malades, au nombre des-
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74nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPARfiE.
quels les morveux comptent pour une part principale; toutes chances done pour qua les lions des menageries consomment la viande de ceux-ci. C'est dans ces con�ditions que le lion envoy� � Alfort avait contracte la morve, qui rev^tit chez lui des caracteres de gravite exceptionnelle, et se termina par la mort. Un �ne et deux chiens, auxquels eile fut transmise par inocula�tion, succomberent egalement. II semble qu'en pas�sant par Torganisme du lion, le microbe de la morve avait acquis une plus grande energie.
Revenons aux cas qui sont les plus ordinaires, o� l'inoculation de la morve sur le chien ne donne lieu qu'� des accidents locaux, quoique le virus conserve toute son activite au lieu de l'inoculation, et s'y en-tretienne pendant des semaines et des mois par une pullulation incessante, comme il fait dans un milieu de culture. Une question se pose ici : on congoit que dans un milieu de culture la pullulation s'arrete d'elle-meme, lorsque les milliards de microbes, issus de la premiere semence, ont epuise pour leur formation les Elements constitutifs que ce milieu renfermait. Mais pourquoi la pullulation s'arrete-t-elle aussi, au bout d'un certain temps, sur Torganisme du chien qui pour-rait fournir incessamment, par les activites de sa vie, les elements propres � l'entretien de la vie des microbes de la morve, au lieu o� ils pullulent et o� ils denon-cent leur action par l'agrandissement de l'ulcere cu-tane?
Pourquoi? Neserait-ce pas que l'organisme du chien se vaccine progressivement par le passage dans le
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sang, � doses tres faibles, des microbes de la virulence, et que, peu � peu, une immunite lui soil acquise qui rende desormais le milieu qu'il constitue impropre au developpement des microbes de la morve? Gertaines experiences dans lesquelles M. Chauveau a transmis I'immunite contre le charbou par des inoculations suc-cessives, � doses extremement faibles, du virus non attenue, autorisent cette hypothese ; et peut-etre qu'� considerer les choses de ce point de vue, tout ne serait pas illusoire dans cette doctrine de la syphilisation dont Auzias-Turenne, qui I'avait congue, a ete le si ardent promoteur. U y a, parmi les accidents sypbilitiques, des phenomenes de pbagedenisme extremement redou-tables, qui font disparaitre par une action rongeante, comme incoercible, I'organe qui en est le siege. L'im-munite transmise par des inoculations successives � 1'organisme tout entier ne constituerait-elle pas une ressource pour rendre le terrain, o� le pbagedenisme s'effectue, impropre au developpement, sur place, des agents de la virulence, et prevenir les effets de ce de�veloppement, c'est-a-dire la destruction pbagedenique? En pared cas, quand les medications se montrent im-puissantes, n'est-on pas autorise � recourir � des ten-tatives en faveur desquelies on pent invoquer, en d6fi-nitive, des faits d'experimentation et des inductions legitimes?
Dans l'etude que nous venons de faire, nous avons considere les microbes de la virulence dans leurs rap�ports avec les lesions exterieures ou iuterieures de quelques maladies que nous avons prises pour exemple;
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et nous avons pu etablir le r�le certain de ces microbes comme causes de lesions rigoureusement determinees : celles de la gale par las acariens, du rouget par son microbe propre, nouvellement decouvert et vaccinifie; celles de la trichin�se par la larve de la trichine, de la morve par son microbe, nouvellement decouvert ega-lement; enfin de certaines formes fausses de tubercu-lisation pulmonaire par la presence soit de strongles microscopiques dans les vesicules pulmonaires, soit d'oeufs ou de larves d'un nematoide [strongylus vasorum) dans les plus fines arterioles terminales de l'artere pulmonaire.
Mais les vrais tubercules � ceux de la phthisie, ceux de la morve�est-ce qu'ils sont, eux aussi, l'expression d'une action irritante locale, determinee par un ele�ment special qui en constituerait la nature, comme font le strongle oul'oeuf du nematoide pour les petites tumeurs d'apparence tuberculeuse dont ils forment les noyaux et sont la condition causale? Une induction tres legitime autorisait � donner � cette question une solution positive, mais ce n'etait qu'une induction, et, comme teile, eile etait controversable. Etant reconnu que le tubercule proprement dit n'est pas, histologi-quement, different de celui qui se conslitue autour de Vepine irritante que representent un strongle micros-copique, ou un ceuf, ou une larve de filaire des vais-seaux, il etait logique de conclure de l'etiologie connue de ceux-ci � une etiologie analogue de ceux-l�. Mais, si rationnelle que f�t cette conclusion, la preuve experimentale lui manquait et, consequem-
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meat, eile ne pouvait s'imposer comme fait uiie cer�titude.
Aujourd'hui, cette preuve est acquise; la demons�tration est faite que le tubercule de la phthisie, de meme que celui de la morve, a la m6me signification, comme fait anatomique, que celui de la tuberculose helminthiasique, c'est-a-dire qu'il procede, comme eile, d'un element vivant qui, dans I'espece, est un bacille special, dont la decouverte est due � M. le professeur Koch, de Berlin.
Un grand fait a 6te acquis � l'histoire de la tubercu�lose de l'homme et, partant, des animaux, le jour ou M. le professeur Villemin, du Val-de-Gr�ce, donna la preuve experimentale certaine que Ton pouvait faire developper sur des animaux les m^mes lesions que celles de la phthisie humaine, par l'inoculation de la matiere constitutive de ces lesions dans l'homme, sous les differentes formes o� elles sont susceptibles de se montrer. M. Villemin n'avait pu determiner specifique-ment la nature des elements organiques � l'aide des-quels il transmettait la contagion; la science n'etait pas encore faite sur ce point; mais il lui a fait faire un grand progres le jour o� il a doune la preuve que la phthisie etait une maladie transmissible. De fait, quand la nature de la contagion, consideree d'une ma-niere generale, aete devoilee; quand il a ete demontre qu'elle etait fonction d'un element vivant, la tuberculose etant reconnue maladie contagieuse, on s'est mis � lare-cherchede relemeut vivant d'ou eile procedait, et cette recherche a conduit M. Koch � des resullats certains.
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II avait ete precede dans cette voie par M. le profes-seur Toussaint, de l'Ecole veterinaire de Toulouse, Le 18 ao�t 1881, M. Toussaint a communique � l'Acade-mie des sciences, par mon intermediaire, une note qui portait ce titre significatif : Sur le Parasitisme de la tu-berculose. II annongait, dans cette note, qu'il avait soumis � des cultures appropriees, soit du serum pro-venant du sang d'une vache tuberculeuse, soit du sang, de la pulpe des ganglions pharyngiens, pulmonaires et iutestinaux d'une jeune truie, devenue tuberculeuse � la suite de l'ingestion, en deux jours, d'un poumon du poids de 39 kilogrammes, provenant d'une vache tuee � l'abattoir de Toulouse. Ces cultures s'etaieut traduites par I'apparition laquo; d'un depot compose detres petites granulations, isolees, geminees, reunies par groupes de trois � dix, ou en petits amas irreguliers raquo;, laquo; Examines an microscope,les points agglomeresmon-trent, dit M. Toussaint, des amas extremement riches d'un microbe qui parait alors immobile et repaudu iso-lement sur toute la surface de la preparation. Dans les parties liquides, on observe, au contraire, dans les granulations isolees, geminees ou reunies en plus grand nombre, des mouvements browniens tres pro-nonces. Plus tard, la couleur blanch�tre du liquide de-vient uniforme et, enfin, les microbes tombent au fond du liquide. raquo;
Ce sont ces granulations, dont le diametre est un peu inferieur � celui du microbe du cholera des poules (0,mm0001 � 0mm,0002), que M. Toussaint considere comme les agents de la virulence tuberculeuse. De
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fait, il annonce avoir reussi � transmettre la maladie par I'inoculation, � des chats, � des lapins et � des porcs, de liquides de culture contenant ces granula�tions, et avoir reconnu que ces liquides etaient dou�s d'une plus grande energie virulente que la matiere tu-berculeuse elle-meme, puisee directement dans les lesions.
Une particularite doit etre signalee dans les faits que rapporte M. Toussaint : c'est la presence, dans les premiers jours de la culture laquo; de flocons blan-ch�tres assez consistants, qui ressemblent beaucoup aux filaments de culture de bacteridies raquo;. Ce nuage per-sisterait plusieurs jours dans le liquide clair sans se diluer. Nous verrons, tout � l'heure, l'importance de ce fait dont la signification parait avoir echappe � la saga-cite habituelle de M. Toussaint.
Quoi qu'il en soit, il ressort manifestement des tres nombreuses experiences que M. Toussaint a faites sur differentes especes, le pore, le lapin, le chat, que lorsque Ton ensemence Torganisme des animaux de ces especes avec des liquides de culture, dans lesquels se sont multipliees les granulations microbiennes dont il vient d'etre parle, cet ensemencement est suivi, dans des periodes de temps variables entre deux on cinq mois, de l'apparition de semis tuberculeux � differents degres de developpement, desquels on pent faire sortir par de uouvelles cultures, dans des liquides appro-pries, de nouvelles granulations microbiennes iden-tiques � celles dont elles procedeut.
Ainsi, d'apres M. Toussaint, le microbe de la tuber-
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culose serait ua micrococcus tres petit qui, dans les li�quides de culture, se montre ou isole ou, ce qui est frequent, gemine, ou dispose en series de cinq, six, dix ou plus encore.
Ses observations ne sont pas concordantes avec celles de M. Koch, � Tendroit de l'espece du microbe. Sur la question des proprietes contagieuses de la tuberculose, et de la nature microbienne de l'agent de sa contagion, la concordance est complete entre les deux observateurs; mais, tandis que M. Toussaint n'a vu cet agent at ne I'a obtenu par ses cultures que sous la forme de granulations tres fines, isolees ou en series, et I'a range, en raison de ses apparences., dans la categorie des micrococcus, M. Koch I'a vu et I'a obtenu sous la forme de bacilles, c'est-�-dire de ba�guettes, morphologiquement semblables � celles du charbon. Gette contradiction entre les faits ne doit etre qu'apparente, et il est � presumer que la conciliation resultera de ce que le microbe de la tuberculose pent se montrer sous deux formes distinctes, expressions des deux phases de son evolution, comme ie microbe charbonneux se montre, tantot sous la forme des corpuscules brillants ou spores, en lesquels la bacte-ridie se resout dans les liquides de culture, et tantot sous la forme de baguette, qui est celle qu'elle revet exclusivement dans le sang de l'animal vivant.
Quoi qu'il en doive etre de la solution de cette ques�tion, un fait demeure avec toute sa signification � sa-voir : la transmission de la tuberculose par I'inoculation des elements vivauts que Ton a fait sortir des produits
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tuberculeux par rensemencement dans des milieux de culture appropries des matieres qui les constituent. Sur ce point fondamental le doute n'est plus permis aujourd'hui, apres les experiences si concluantes de M. Toussaint et de M. Koch. De fait, M. le professeur Cornil a verifie, par ses recherches, de concert avec M. le Dr Babes, la rigoureuse exactitude des faits cons�tates par le Dr Koch, c'est-�-dire, la presence, dans les lesions de la tuberculose, d'un microbe, sous forme de bacille, que Ton met en pleine evidence par I'artifice d'une coloration bleue, et il est venu apporter � l'Aca-demie de medecine, dans ses seances du 24 avril et 1quot; mai, le temoignage de sa competence si autorisee en favour de la realite de cette importante decouverte.
Voici le resume de ces recherches :
Le bacille de la tuberculose existe dans les granu�lations tubcrculeuses, � leur debut dans les membranes sereuses.
laquo; Soil une masse tuberculeuse developpee dans la pie-mere, par exemple, on constate d'habitude sur une coupe perpendiculaire � la surface du cerveau, au centre de cette masse, un vaisseau oblitere par de la fibrine et dos cellules lymphatiques et, dans cette �brine, des bacilles. On en rencontre egalement dans les parois du vaisseau et dans son voisinage; et il est probable que c'est le coagulum fibrineux intra-vas-culaire qui est envahi le premier. raquo;
Meme constatatiou dans les granulations des cir-convolulions cerebrales : les bacilles siegent dans les capillaires obliteres et autour d'eux.
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8^nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;CO�RS DE PATHOLOGIE COMPAR^E.
Dans les granulations pleurales recentes, les ba-cilles occupent ce que Ton a appele les cellules geantes qui ne paraissent etre que l'expression objective d'une coupe de vaisseaux capillaires.
On en trouve egalement dans le tissu embryonnaire qui constitue 1'infiltration tuberculeuse. � Lorsque la plevre est le siege d'une lesion chronique, sou tissu est constitue par un tissu fibreux dans les mailles du-quel se trouve un liquide caseeux qui contient des bacilles.
En meme temps que ces bacilles, on trouve souvent de petits grains irreguliers, soit disposes bout � bout, soit isoles, qui se colorent en bleu par le meme pro-cede que les bacilles eux-memes. On peut les rencon-trer seuls dans les parois des vaisseaux, ou dans les granulations tuberculeuses. Leur existence avec les ba�cilles dans les memes lesions, et leur presence isolee dans les granulations, ne viennent-elles pas � l'appui de l'induction, dej� formulee plus haut, que les microbes de M. Toussaint et ceux de M. Koch pourraient bien n'etre que deux formes differentes du meme proto-organisme?
L'etude d'une muqueuse tuberculeuse, dont M. Cor-uil conservait des echantillons depuis trois ans, lui a fait constater, � l'aide du moyen nouveau d'investi-gation dont il peut disposer aujourd'hui : dans les couches de l'epithelium stratifie, un certain nombre de bacilles migrateurs disposes entre les couches epith�-liales, dans les espaces que M. Ranvier considere commo des voies lymphatiques. On en a trouve ega-
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meat dans le tissu conjonctif, repartis dans les cellules embryonnaires qui constituent le tubercule; dans le protoplasma de ces cellules, autour des noyaux. Dans ces memes points, les caillots intravasculaires, obtura-teurs des vaisseaux tres dilates, renfermaient aussi des bacilles en quantile plus ou moins grande.
C� et l�, se trouvaient disseminees des granulations tuberculeuses typiques, avec cellules geantes et tissu embryonuaire, qui etaient remplies de bacilles.
Memes alterations, avec presence de bacilles, dans le tissu d'une muqueuse intestinal e qui etait le siege d'une ulceration tuberculeuse. Memes resultats don-nes par l'examen des lesions de la tuberculose aigue miliaire du poumou, des granulations fibreuses et des excavations. � Presence de bacilles dans les cellules epitheliales et lymphatiques des granulations recentes. Dans les granulations devenues tout � fait fibreuses, on trouve les bacilles entre les faisceaux du tissu fibreux qui les constituent.
L'examen des cavernes pulmonaires fait constater la presence des bacilles dans le tissu cellulaire em-bryonnaire qui en forme les parois : dans les debris qui resultent de la destruction des parois des alveoles et des bronches et qui proeminent souvent dans la ca-vite sous la forme de villosites; et enfin dans le liquide qui les revet. Cette derniere particularite explique pourquoi on trouve des bacilles, en quantite plus ou moins considerable, dans les crachats de tons les tu-berculeux atteints de cavernes pulmonaires. On les y observe facrlement, avec leurs formes irregulieres,
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84nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COUBS DE PATHOLOGIE COMPARfiE.
tantot rectilignes, tantot sinueux, souvent recourbes en crochets � leur extremite. Souvent ils presentent, dans leur Interieur, de petits grains qui, au bout de dix � quinze jours, deviennent plus nombreux; et enfin, le bacille finit par se reduire � ces grains places bout � bout. Cette metamorpbose, observee par M. Cornil dans le liquide des cracbats conserves dans des tubes pendant six semaines, a de grandes analogies, ce me semble, avec celies que subit la bacteridie char-bonneuse dans le liquide de culture, et pourrait don-ner la raison du desaccord qui existe entre M. Toussaint et M. Koch � l'endroit du microbe speeifique de la tu-berculose.
De fait, on peut encore invoquer, � l'appui de cette opinion, cette observation de pericardite chronique tu-berculeuse, que rapporte M. Cornil, o� Ton constata des tubercules fibreux, avec des cellules geantes dans lesquelles il riy avail pas de bacilles, mats seulement des grains arrondis, siegeant dans les cellules geantes, et se colorant de la meme maniere que les bacilles, par le meme procede.
La presence des bacilles de la tuberculose a ete cons-tatee par M. Cornil et son collaborateur, dans les gan�glions lymphatiques de la racine des bronches de pou-mons tuberculeux;
Dans les ganglions mesenteriques, lorsque I'intestin est le siege de lesions tuberculeuses.
Dans les cellules geantes des granulations tubercu�leuses de la rale;
Dans les lesions tuberculeuses des reins.
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Enfin dans les lesions qui resultent sur les auimaux de l'inoculation de la tuberculose.
laquo; Les cobayes, dans le peritoine desquels on injecte quelques gouttes de crachats de phthisiques, con tenant des bacilles, presentent, au bout de cinq � six se-maines, une eruption de granulations tuberculeuses tres abondantes dans la rate, le foie, le peritoine, les ganglions, I'intestin, le mesentere, les organes genitaux et le poumon,
laquo; Partout les granulations contiennent une grande quantite de bacteries, accumulees soit � la surface du peritoine qui revet les organes, soit dans les tuber-cules. raquo;
Que ressort-il de l'ensemble de ces faits? Un premier rapport: celui de la coincidence avec les lesions anato-miques par lesquelles la tuberculose est caracterisee, d'un element vivant, associe � ces lesions, et qui s'y rencontre d'une maniere presque constante, soit dans la profondeur des tissus malades, soit plus exterieu-rement. Mais n'est-ce l� qu'un simple rapport de coin�cidence? Non, evidemment, puisque Ton pent faire naitre les tubercules par un ensemencement experi�mental, � I'aide de liquides qui tiennent des bacilles en suspension, et que, dans ces tubercules, dontla condi�tion de genese est certaine, on trouve les bacilles en quantite considerable.
II y a done eu l� un double phenomene : celui de la pullulation des bacilles ensemences et celui de la pro�duction de nombreuses granulations tuberculeuses, dans les points multiples o� les bacilles ont determine
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80nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPABfiE.
par leur presence une irritation inflammatoire. La preuve est done donnee, par cette experience, du rapport de causalite qui existe entre les bacilles et les lesions anatomiques auxquelles on les trouve associes. Le rapport de ces lesions avec I'^Iement vivant qu'elles contiennent est aussi s�rement etabli, que celui du kyste enveloppant la larve de la trichine avec cette larve elle-meme, et des tuberculeshelminthiasiques avec soit les vers, soit les oeufs qu'ils renferment.
Sans doute qu'au point de vue de la presence des bacilles, les lesions de la tuberculose ne sont pas egales entre elles. II y en a dans lesquelles le nombre de ces microbes est si considerable que le rapport de causalite entre eux et les lesions o� on les trouve � granulations et infiltrations � ressort en pleine evidence du seul examen des pieces pathologiques. laquo; Les lesions sont l�, dit M. Cornil, aussi manifestement liees aux bac-teries que les nodules de la lepre aux bacteries qa'ils renferment. raquo;
Mais lorsque les bacilles sont pen nombreux dans les lesionsqu'on examine, ce rapport est-il aussi certain? Oui, peut-on dire; car si les bacilles ne sont pas nom�breux, leur presence est constante, et e'est dans les cellules geantes qu'on la constate, e'est-a-dire an mi�lieu des granulations tuberculeuses.
D'autre part, laquo; au lieu des bacilles ou � cote d'eux, on rencontre des grains qui se colorent de la meme maniere, par la meme serie de manipulations. raquo; M. Cornil ne croit pas que ce soit ceux qui out ete vus par M. Toussaint et par M. Klebs, et consideres
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par eux comme la seraence tuberculeuse; et il se fonde, pour ne pas adiuettre celte ideutite, sur ce qu'il a constate la presence des bacteries de Koch dans les lesions tuberculeuses que M. Toussaint a produites en inoculant � des lapins le liquide de ses cultures de microcoques. Mais c'est une question de savoir si ces microcoques ne sont pas une des formes de l'element vivant de la tuberculose, comme la spore � l'egard de la bacteridie; et ne pourrait-on pas invoquer juste-ment, � Tappui de cette maniere de voir, la presence des bacteries de Koch dans la lesion tuberculeuse que Toussaint determine par l'inoculation de ses cultures? Cette question, ce me semble, doit etre reservee.
Reste maintenantun certain nombre de cas o� Ton ne trouve pas de bacilles dans les lesions tubercu�leuses, celles de la tuberculose chronique. Daus les parties en degenerescence caseeuse notamment, les ba�cilles ne se voient pas, dit M, Cornil; mais si Ton examine, au pourtour des masses caseeuses, la zone qui contient aes granulations plus recentes, leur presence pent etre constatee. On la constate aussi dans les parois des cay ernes et des branches ulcerees.
laquo; Pour commenter les cas de ce genre, o� le nombre des bacilles est loiu d'expliquer toutes les lesions ob-raquo;nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; servees a I'autopsie, on pe�tsupposer qu'ils out ete eli-
mines ou detruits, mais n'en ont pas moins laisse, apres eux, des inflammations chroniques de nature scle-reuse ou des ilots de degenerescence caseeuse, toutes modifications qui persistent apres leur disparitiou. raquo;
Suivant M. Cornil, la disparition des bacilles dans
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88nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPARSE.
les produits tuberculeux aucieus s'expliquerait par ce fait qu'ils sont transportes par les cellules migratrices, et qu'il s'en fait une elitnination constante et conside�rable par les crachats provenant des brooches et des cavernes, par les catarrhes, par la surface des ulcera-tions de I'mtestin, et par les urines.
Peut-etre aussi que les bacteries tuberculeuses, con-finees dans les points o� elles ont pullule et donne nais-sance aux lesions auxquelles elles sont associees cessent, au bout d'un certain temps, d'y trouver les elements propres � leur developpement, et que meme leur vita-lite ne pouvant plus s'y entretenir , elles se resolvent en fines granulations et disparaissent. II ne faut pas oublier, en effet, que les manifestations de la vie des microbes se traduisent par le double phenomene propre � toute action vitale: l'assimilation et la desassimila-tion, et que les produits de cette derniere rendent im�propres � l'entretien de la vie le milieu o� ils se sont accumules. La se trouve, peut-etre, une des raisons qui coiitribucnt � faire disparaitre les bacilles des le�sions chroniques.
Quoi qu'il en soit, leur rarete on meme leur absence dans ces lesions ne sauraicnt faire echec a I'interpre-tation si legitime de l'etiologie de ces lesions par I'ac-tion irritante que delerminent les bacilles dans les lieux multiples o� ils se disseminent apres leur pullu-lation, puisque, d'une part, on est maitre de les pro-duire, d'une maniereconstante, commel'afaitM. Koch, par l'ensemencement des organismes d'animaux sus-ceptibles avec des bacteries isolees et puriQees par plu-
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sieurs cultures; et que, d'autre part, ces bacteries se rencontrent coustamment dans les lesions recentes. II y a done ici, comme on pent le voir, une remarquable concordance entre les faits, tels qu'ils sont etablis par l'examen histologique des lesions spofitames, et ceux qui resuitent de l'inoculation experimentale. Identite, dans les deux cas, des alterations eprouvees par les tissus; identite egalement de la cause � laquelle ces alterations peuvent etre logiquement rattachees : e'est-a-dire presence, dans les deux cas, au milieu des tis�sus �lteres, du meme microbe, la bacterie on le bacille, qui fait aujourd'hui une realite materielle de l'qmie irritante qui n'etait qu'une metaphore dans la bouche des anciens anatomo-pathologistes : metaphore beu-reuse, apres lout, car eile impliquait que, dans leur pensee, les choses se comportaient comme si, partout o� des tubercules apparaissaient, la raison de leur for�mation se trouvait dans une irritation localisee au point precis o� cette formation s'effectuait.
L'hypothese du passe est devenue aujourd'hui une realite; et voici que ce tubercule de la phthisie, sur lequel on a tant discouru, ainsi que sur les autres le�sions qui Taccompagnent, a maintenant une significa�tion bien precise et bien deterrainee ; il est I'expres-sion d'une irritation locale, causee par la pullulation sur place d'elements vivauts qui sont les agents de la virulence de la tuberculose et donnent seuls � cette maladie son caractere specifique. Au point de vue anatomique, le tissu des tubercules ne difiere pas es-sentiellemeut de celui des tumeurs determinees dans
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90nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPAR^E.
Ie tissu pulmonaire par la presence, soit des slrongles microscopiques, soit des oeufs ou des embryons des vers du sang. II ne differe pas essentiellement de celui des kystes des trichines; il ne differe pas essentielle�ment de celui des enveloppes kysteuses qui se consti�tuent dans les tissus autour des grains de plomb dont l'action n'est pas assez irritante pour determiner une inflamation suppurative.
L'etiologie du tubercule se rattacherait done pure-ment et simplement � la loi generale qui exprime les rapports de la trame organique vivante avec les corps etrangers par lesquels eile est accidentellement pene-tree.
Oui, mais ce n'est pas tout. A l'action propre du microbe, agissant comme corps etranger, s'ajoute celle des diastases qui sont les produits de son activite vitale, lesquelles exercent sur les tissus une action dissol-vante, en meme temps qu'irritante, et sont probable-ment une cau?e des transformations qu'ils eprouvent aux points o� la pullulation des bacilles s'effectue. Un fait tout exterieur pent donner une idee de ce pheno-mene complexe : l'acare sur la peau n'agit pas seule-ment comme corps etranger, il agit aussi par une Sorte de venin qu'il secrete et qui determine les pbenomenes inflammatoires specifiques par lesquels la dermatose acarienne est caracterisee.
D'interessantes recherches sont � faire dans cet ordre d'idees.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;i i
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SIXIEME LEGON
F,A CONTAGIOSITE DE LA T�BERCULOSE
Grande decouvertc deM. le profcsseur Villemin, du Val-de-Gr�ce.
�nbsp; La tuberculose est de nature microbienne. � Les decouvertes deM. Toussaint et M. Koch corollaires de celles de M. Villemin.� Transmission de la tuberculose par les voies digestives. �Exp6-rienccs de M. Chauveau sur l'esp�ce bovine. � Modes d'ingeslion de la matiere tuberculeuse. � Constance des resultats oblenus. � Generalisation des lesions impliquant la pullulation de Telement dont elles proc�dent. � Sjmptumes de la tuberculose transmisc par les voies digestives. � Le sue gastrique ne met pas I'organisme en defense contre les virus. � La vitalite des virus les preserve-Excmple : La tricbine et son kyste. � De meme pour les elements de la virulence et les matiferos qui leur servent d'exeipients. � Transmission de la tuberculose par les injections intra-vasculaires.
�nbsp;Actions par de tres petites quanliles. � Transmission par injec�tions sous-cutanees. � Inertie apparente du virus, pendant quelques jours aux points de 1'inserlion. � Phenomfenes consecutifs. � Ex�periences comparatives de M. Chauveau avec des mati�res autres que les matteres tuberculeuses. � Pseudo-tuberculose survenue dans un cas. � Les lesions n'etaient pas inoculables. � Objections faites a M. Villemin, basees sur des resultats semblables.�Faits spon�tanes de la pathologie, analogues � ceux de Fexperimenlation. � Cette analogic est tout exterieurc. � Peut-etre les abcis metasta-tiques consecutifs aux complications des plaies ont-ils cc rapport de similitudeavec les tubercules vrais, qu'ils sont determines egalc-ment par un microbe: eclui do la septicemie.�Hypoth�se � veri�fier experimentalement.
Messieurs,
La belle decouverte qu'a faite M, le professeur Ville�min, du Val-de-Gr�ce, des proprietes conlagieuses de
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la phthisie, constitue Tun des grands progres que la medeciae a realises dans ce siecle, et qui doit servir .de base � des mesures preventives efficaces contre une raaladie, la plus meurtriere peut-etre aujourd'hui, par la continuite de ses coups, de toutes celles dont les populations humaines ont � p�tir dans tous les pays. Cette decouverte a eu pour corollaire celles de MM. Toussaint et Roch. La demonstration experi-mentale faite par M. Villemin de la contagiosite de la tuberculose a conduit, en effet, � la recherche de 1'agent de cette contagion, qui est apparu � ces expe-rimentateurs sous deux formes differentes, paraissant impliquer un desaccord sur la nature de cet agent, micrococcus pour le premier, bacille ou bacterie pour le second, mais probablement identique � lui-msect;me, sous deux formes qu'il peut revetir, comme le microbe de la fievre charbonneuse, qui se montre tant�t � l'etat de spore et tantot � l'etat de bacte-ridie.
Mais de quelque maniere que puissent etre concilies les resultats, en apparence differents, donnes par les recherches de Toulouse et de Berlin, un fait reste ac-quis : c'est que la contagion de la tuberculose est de naturemicrobienne, autrement dit, qu'elle procede d'un element vivant, qui a pu etre isole, cultive et demon-tre actif, comme cause, par les resultats que donnent les inoculations de ses generations successives dans les milieux de culture.
Ce point etabli, nous allons maintenant passer en revue les faits principaux qui temoignent de la facilite
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redoutable avec laquelle la tuberculose peut etretrans-mise aux animaux par differentes voies et, tout parti-culierement, par les voies digestives. Nous trouverons dans les resultats de ces experiences de precieux en-seignements qui peuvent servir � eclairer la question, d'une si grande importance, de l'etiologie de la tuber�culose dans l'espece humaine, et conduire � l'applica-tion de mesures prophylactiques energiques contre l'usage alimentaire de viandes provenant d'animaux infectes par la tuberculose.
G'est � M. Chauveau, del'Ecole veterinaire de Lyon, que la science est redevable des premieres experiences, confirmatives de celles de M. Villemin. M. Villemin n'avait pu experimenter que sur des lapins et des co-bayes, et, plus d'une fois, on s'etait servi, pour mettre en doute la justesse de ses conclusions, de cet argument devenu banal, � force d'avoir 6te ressasse, que les resultats obtenus sur ces animaux, le lapin notam-ment, n'avaient aucune valeur, attendu que Ton pou-vait determiner, chez eux, le developpement de la tuberculose par l'inoculation de n'importe quoi, voire d'un morceau de chiffon. J'ai entendu formuler cette derniere affirmation devant l'Academie des sciences, il n'y a pas encore bien longtemps.
M. Chauveau, � qui sa situation, comme professeur dansune ecole veterinaire, donnait le moyen d'experi�menter sur des animaux de nos differentes especes do-mestiques, choisit pour sujets de ses experiences des animaux de l'espece bovine, dontrorganismeconslitue un milieu tres favorable � la pullulation de l'element
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de la contagion tuberculeuse, car laquo; ils sent, suivant lui, les seuls qui partagent, avec I'espece humaine, le triste privilege d'entretenir la tuberculose � la surface du globe raquo;. C'etait, en effet, se placer dans les condi�tions les plus favorables pour prouver la realite de la virulence de la tuberculose, quede prendre pour reac-tif Torganisme animal, que I'observation demontre etre le plus apte a contracter cette maladie spontane-ment, e'est-a-dire en dehors des conditions experi-mentales. Si, pour cet objet, on se servait du chien, dont I'organisme est si pen dispose � cette maladie qu'on ne la constate^ on pent dire jamais, surdessu-jets de cette espece, il est clair qu'on commettrait une grosse erreurde principes, eninvoquant, contre la rea�lite de la virulence tuberculeuse, les resultats,presque � coup s�r negatifs, que donnerait sur des chiens l'epreuve de cette virulence. En d'autres termes, quand on veut s'assurer si une maladie humaine est conta-gieuse, la premiere des regies � suivre est depratiquer les inoculations sur des animaux appartenant � des especes dont I'observation clinique a demontre la sus-ceptibilite par la constatation, plus ou moins frequente., de cas qui temoignent de son existence sur des sujets de ces especes. Si cette maladie humaine, que Ton veut eprouver an point de vue de la contagiosite, est de celles qui paraissent exclusives � l'homme, en ce sens que leur developpement spontane n'a pas ete observe sur les animaux, il faut alors proceder par voie de t�-tonnements^ pour arriver � reconnaitre ceux des orga-nismes de louche sur lesquels a prise la matiere a es-
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sayer; et, danscescas, la Constance des resultats donnes par des essais serablables permet d'affirmer la virulence de ces matieres, puisque leur ensemencement sur un autre organisme que I'organisme humain donne lieu � la manifestation de phenomenes semblables � ceux qui caracterisent la maladie cbez celui-ci. Exemple : veut-on savoir si une maladie, observee sur un homme, est de nature morveuse? � defaut d'un cheval, d'un �ne ou d'un mulet, qui sont les sujets les plus aptes � servir de reactifs en pared cas, on peut faire l'epreuve de la virulence sur un cobaye ou sur un chat, voire sur un chien, dont I'organisme est propre � une cul�ture locale du virus, et. les effets produits eclairent sur la question de savoir si la maladie eprouvee est ou n'est pas de la nature virulente soupgonnee.
Voil� les regies en la matiere. M. Chauveau s'en est inspire pour instituer ses remarquables experiences, si concluantes, sur la contagiosite de la tubercu-lose.
Dans les conditions ordinaires o� les maladies con-tagieuses se transmettent, les voies par lesquelles leurs elements trouveut acces dans les organismes sont les voies aeriennes et les voies digestives. Dans quelques cas plus rares, la peau et les muqueuses les plus exte-rieures, commecellesde I'oeil etdeslevres, peuvent se laisser penetrer par les elements virulents, tels que ceux du charbon et de la morve; ce sont l� de veri-tables inoculations accidentelles qui constituent des exceptions relativement � h frequence des cas, o� c'est par la voie des grands appareils, respiratoire ou diges-
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tif, que les elements des contagions respectives enva-hissent les organismes.
Les experiences instituees par M. Chauveau donnent la preuve tres frappante et tres concluante que la voie digestive pent ouvrir a I'infestation tuberculeuse un acces trop facile.
Elles ont ete faites sur onze animaux de l'espece bovine, parfaitement bien portants et choisis., du reste, � un �ge o� la tuberculose naturelle en pleine evo�lution est extremement rare. Le plus age avait qua-torze mois; quelques-uns etaient des veaux de lait.
On leur a fait ingerer de la matiere tuberculeuse provenant soit de sujets de l'espece humaine, soit de sujets de l'espece bovine, et extraite de poumons atteints de granulie, avec on sans pneumonie caseeuse, M. Chauveau admeltant qu'au point de vue de la viru�lence, toutes les lesions sont egales, comma dans la morve, o� les lesions les plus diverses peuvent fournir des matieres esialement virulentes.
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La matiere tuberculeuse a ete administree � quelques-uns des animaux dans la proportion considerable de 50 � 100 grammes, donnes quatre fois par jour, pen�dant une quinzaine. Sur ceux-l�, les doses ont ete aug-mentees pour forcer les lesions; les autres n'en ont pris qu'une fois et en petite quantite.
La duree la plus longue de l'experience a ete de trois mois et demi. Quelques animaux ont ete sacrifies au bout d'un mois.
Aucun sujct n'a echappe � linfcclion. Elle s'est tra-duite, chez tous, par des lesions qui, legeres chez les
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uns, ont apparu chez les autres avec de telles propro-tions que M. Chauveau les qualifie de veritablement opoumntables.
Ce qui prouve qu'elles dependaientbien d'une pullu-lation at non pas d'une sorte d'obstruction, de proche en proche, par lamaliere ingeree, c'est qu'on les a ren-contrees non seulement dans I'appareil digestif et ses dependances, mais aussi dans I'appareil respiratoire sous forme d'eruptions miliaires avec ulcerations sur la muqueuse respiratoire, depuis le larynx jusqu'aux bronches terminales; plus frequentes dans les bronches que sur la trachee et le larynx. Les lesions pulmonaires etaient des granulations peribronchiques, ou perivas-culaires ou meine alveolaires ; des noyaux volumineux formes par un a mas de ces granulations; des noyaux homogenes o� Ton pouvait observer revolution des diverses formes de pneumonie caseeuse.
Voil� done donnee par cette experience, � l'endroit des lesions du poumon, la preuve de l'identite de leur nature, puisqu'une meme cause en a ete determinante. Toute la theorie de Virchow sur les caracteres anato-miques specifiques de la granulation tuberculeuse etait done bien plut�t une vue de l'esprit qu'une expression reelle des faits.
Quant aux lesions de I'appareil digestif, determinees par l'ingestion de matieres tuberculeuses, les plus graves et les plus communes siegeaient dans les or-ganes formes de tissu adenoide : les follicules solitaires et les follicules agmines de l'intestin grele, les gan�glions mesenteriques, retropharyngiens el sous-maxil-
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laires. Elles avaient pour base une iaflammatipn ca-seeuse, diffuse ou nodulee, avec tumefaction souveut enorme des organes.
Pour donner toute leur signification aux lesions dont l'ingestion des matieres tuberculeuses pouvait etre sui-vie, M. Chauveau avait eu soin de conserver deux veaux temoins qui ne furent pas soumis � 1'experience. Leur �utopsie a fait constater que tous leurs orgaues etaient parfaitement sains, sauf, sur l'ua d'eux, la presence de quelques nodules cretaces dans la mu-queuse de l'intestin grele.
Voil� pour les lesions; considerons maintenant les sympt�mes :
Chez tous les sujets de cette experience, l'adminis-tration de la matiere tuberculeuse a ete suivie d'une diarrhee plus ou moins intense et plus ou moins prompte � apparaitre.
Chez trois, aucun autre Symptome n'a ete constate; et, une fois la diarrhee disparue, les atiimaux ont paru bien portants.
Chez les huit autres, le deperissement a suivi la diarrhee; mais, pour cinq d'entre eux, il ne continua pas, et les animaux se trouvaient, au moment o� ils furent abattus, dans l'etat moyen d'emboupoint que les sujets de l'espece bovine affectes de tuberculose peu-vent conserver pendant des mois et des annees. La compatibilite possible des lesions tuberculeuses pul-monaires avec la regularite conservee des fonctions digestives et, consequemment, la formation de reserves de graisse, qui donnent � la viande un bei aspect et
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impliquent ses qualites alimentaires : cette compati-bilite peut faire d'un de nos animaux alimentaires les plus precieux un agent redoutable d'une des maladies les plus graves, la plus grave peut-etre et la plus fre-quente, dont l'espece humaine puisse etre atteinte. Je signale ce fait en passant; j'y reviendrai quand j'aurai acheve l'expose des faits d'experimentation qui de-montrent la contagion de la tuberculose.
Revenons aux trois autres sujets soumis � l'expe-riencede I'ingestionde matierestuberculeuses : ceux-la ne seremireut pas; leur etat alia toujours en s'aggra-vant et Tun d'eux meme etait sur le point de mourir, quand il fut sacrifie. C'est sur ces trois animaux que Ton constata les lesions intestinales et ganglionnaires les plus developpees, fait parfaitement concordant avec ceux de l'observation cliuique. Les maladies abdomi�nales, surtout quand elles ont pour element essential robstruction des appareils ganglionnaires, sent bien plus appauvrissantes pour l'organisme et determinent son deperissement plus profoud que les maladies pul-monaires. On a constate sur des sujets d'espece bovine, primes dans des concours d'animaux gras, de vastes sequestres pubnonaires qui trahissaient une attaque anterieure de peripneurnonie contagieuse. II est vrai que ces sequestres etaient hermetiqueraent enfermes dans leur kyste et que, consequemment, ils n'avaient subi aucune alteration d'ordre putride. C'est ce qui en faisait I'innocuite. Mais, malgre cela, 11 est remar-quable que la sante, qu'on peut appeler florissante, seit compatible, dans l'espece bovine, avec la des-
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100nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPAltflE.
tructioii complete d'une partie considerable du pou-mon.
La toux a ete conslatee chez quelques-uns des Su�jets infectes experimentalement par la tuberculose, et l'autopsie a permis d'etablir un rapport entre ce sym-tome et l'eruption granuleuse sur la muqueuse res-piratoire, plus particulierement celle des bronches. Les noyaux pulmonaires sans lesions de la muqueuse n'ont pas determine de toux.
Derniere particularita, importante au point de vue de la demonstration de l'action cerlaine de la cause : chez les trois animaux les plus malades, on put assis�ter � revolution de la tuberculisation ganglionnaire, denoncee par des sympt�mes exterieurs. Les ganglions sous-maxillaires et pre-cervicaux se tumefierent et, en moins de huit jours, sur Tun de ces sujets, le gan�glion sous-maxillaire du cote gaucbe acquit les pro�portions d'un ceuf de dindon.
Ce fait est bien la preuve de la generalisation de Telement actif de la tuberculose, apres l'ingestion dans l'appareil digestif des matieres qui lui servaient de vehicule. En voyant ces engorgements ganglionnaires apparaitre apres cette Ingestion, on ne saurait mecon-naitre le rapport qui existe entre ces deux faits, et in-voquer, pour nier la contagion, la preexistence de le�sions tuberculeuses sur les animaux pris pour sujets d'experience.
Une derniere observation avant de terminer sur ce point: c'etait une croyance de Tancienne physiologie, o� la conjecture avait une si large part, que les mala-
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dies contagieuses ne pouvaient penetrer dans les orga-nismes par les voias digestives, attendu que le sue gastrique exergait, pensait-on, sur les matieres viru�lentes une action dissolvante qui en annulait les pro-prietes. Cependant, dej� � la fin du dernier siecle, le marquis de Courtivron et Vicq d'Azyr avaient demon-tre, par des experiences directes, que la peste bovine etait transmissible par les voies digestives, Mais I'en-seignement qui ressort de ces experiences etait reste sans influence, faute peut-etre de sa source, ou plut�t parce qu'il n'a pas ete connu, et l'idee que le sue gas�trique, par sa puissance dissolvante, mettait I'orga-nisme en defense contre les infections contagieuses par les voies digestives, continua � prevaloir comme une verite. Depuis, d'autres experiences out ete faites, celles de Renault entre autres, il y a une trentaine d'annees, sur le virus morveux; celles de M. Chauveau sur le virus vaccinal, le virus claveleux; � une periode plus recente, celles de M. Pasteur et de M. Toussaint sur le virus charbonneux, et la demonstration en est ressor-tie, d'une importance considerable au point de vue de l'hygiene publique, que Faction dissolvante du sue gastrique ne s'exergait pas sur les matieres virulentes, ou plutot, on le sait aujourd'hui, sur les agents de la virulence qu'elles tiennent en suspension, parce que ces agents sont vivants. Elles peuvent bien, ces ma�tieres, subir Faction du sue gastrique et s'y dissoudre, comme le kyste qui enveloppe la trichine; mais celle-ci, sortie vivante de son kyste, traverse le sue gas�trique sans qu'il ait prise sur eile et se trouve dans
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l'intestin grele, en puissance de toutes ses activites et de sa force reproduclrice. Aiiisi en est-il des elements vivants des virulences; la matiere qui leur sert, pour ainsi dire, d'excipient, pent 6tre digeree par le sue gastrique, qui reste sans action sur eux et les laisse libres de passer dans l'intestin, o� l'absorption s'en erapare et les transporte dans le courant circulatoire. Le sang, suivant les especes virulentes, ou leur sert de milieu de culture, ou les dissemine dans les tissus qui sont le plus favorables � leur pullulation sur place. La belle experience de MM. Arloing, Cornevin et Thomas sur le charbon symptomatique fait bieu comprendre, ce me semble, le pheuoraene de la localisation. Taut qu'il est dans le sang, le microbe de cette maladie n'y trouve pas, parce qu'il est anaerobic, les conditions favorables � une pullulation rapide. Le milieu est trop oxygene pour lui. Mais qu'une circonstance inter-vienne qui fasse extravaser quelques gouttes de sang dans le tissu cellulaire ou, mieux, dans le tissu mus-culaire, � l'instant meme, au point de cette localisa�tion, la pullulation s'effectue avec une prodigieuse ac-vite et donne lieu � des accidents gangreneux, presque toujours mortels. J'imagine que dans les localisations qui constituent les caracteristiques respectives des ma�ladies contagieuses, queique chose d'analogue sepasse, c'est-�-dire que les pullulations s'effectuent de prefe�rence dans ceux des tissus qui sont le mieux adaptes, par leur composition anatomique et chimique, � la vie des elements de la virulence de chaque maladie cou-tagieuse.
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Ce n'est pas seulement par les ingestions digestives que M. Chauveau a fourni la preuve de la coatagio-site de la tuberkul�se; il a eu recours aussi aux injec�tions intra-vasculaires, eu ayant soin de ne se servir, pour ces injections, que dun liquide tenant exclusive-ment en suspension des partieules tuberculeuses d'une extreme tenuite. On y reussit en delayant la matiere tuberculeuse dans une grande quantite d'eau et en laissant deposer pendant trente-six � quarante-huit beures, apres avoir filtre avec un Huge fin; on evite, par cette precaution, d'introduire dansl'appareil circu-latoire des parties trop grossieres, qui pourraient don-ner lieu a des obstructions capillaires et aux accidents de necrose et d'inflammation qu'elles determinant � leur suite.
Ces experiences d'injectioos vasculaires out ete faites sur des veaux, des chevauxetdes�nes. Toujours elles ont determine des lesions pulmonaires, accompagnees ou non de tuberculisation des ganglions bronchiques. C'est sur les aniraaux de l'espece bovine que les effets sont le plus marques, ce qui se comprend puisque c'est leur organisme qui est le milieu de culture le plus fa�vorable � la pullulation de l'element de la virulence tuberculeuse; mais c'est chez le cheval, d'apres M. Chauveau, que les lesions qui se produisent sont le plus curieuse's et interessantes. Avec de tres pe-tites quantites de matiere tuberculeuse, il a reussi � provoquer, dans le poumon de ces animaux, des Erup�tions miliaires grises et transparentes d'une incroyable richesse, comparables aux eruptions les plus fines et
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les plus abondantes de la tuberculose miliaire aigue chez rhomme, et cela saus trouble apparent de la saute. Quandles iujectious etaient tres aboudautes, on obtenait plut�t de vastes pneumouies catarrhales avec fievre, toux et autres sympt�mes.
Ces uouvelles experiences sout, on le voit, trescon-cluautes. Elles temoignent bien, elles aussi, de lapul-lulation^ puisqu'il suffit d'une tres petite quantite de liquide, tenant en suspension des particules de matiere tuberculeuse, pour que les poumons deviennent le siege de cette eruption miliaire d'une richesse incroyable, dont parle M. Cbauveau. Or la pullulation est le sigue de la vie des elements ensemences par les veines : d'o� cette conclusion rigoureuse que la tuberculose est virulente, puisqu'elle est susceptible de se repro-duire par semis.
Quand on injccte sous la peau du veau, du cheval, de l'�ne ou du mulet, � des doses variables entre dix et quarante gouttes, le meme liquide dont on se sert pour rinjection intra-vasculaire, cette inoculation est toujours suivie, au point o� eile a ete faite, de la for�mation d'une tumeur qui a ce premier caractere tres significatif que, pendant une periode qui varie entre dix et vingt-deux jours, l'action de l'injection parait absolument nulle. Aucun effet local ne se montre. Puis, unefois cette periode d'inaction apparente ecou-lee, la tumeur commence � se former et s'accroit avec lenteur pendant deux, trois, quatre, six semaines et meme davantage. A ce mouvement en succede un autre en sens inverse: la tumeur decroit graduellement, en
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affectant une apparence lobulee; et quandelle s'estre-duite dans une certaine rnesure, eile reste stationnaire. Meme an bout de quatre � cinq mois eile persiste.
Ces caracteres la distinguent tres notablement des tu-
meurs qui resultent d'injections simplement irritantes. Celles-ci apparaissent presque immediatement apres l'action de la cause, se developpent proportionnelle-meut� l'intensite de l'imtation et se resolvent graduel-lement pour disparaitre, d'une maniere complete, une fois raction irritante epuisee. L'etude histologique de la tumeur formee sur place par I'injection sous-cuta-nee du liquide charge de ces particules d'une extreme termite, que Ton obtient avec les precautions indiquees plus haut, montre que cette tumeur est essentiellement tuberculeuse, c'est-a-dire formee des memes elements queceux qui s'accumulent dans les poumons, � la suite d'uue inoculation intra-vasculaire. Cette tumeur est le produit d'une veritable pullulation sur place, ayant donne lieu, dans le tissu ou eile s'est produite, � un mouvement inflammatoire, conformement � la loi ge�nerate des rapports des corps etrangers avec la trame vivante, mouvement inflammatoire dont les effets per�sistent parce que les elements vivants, dont la presence les a produits, sont persistants eux-memes, avec leur activite, pendant un certain temps tout an moins.
Get element qui pullule dans le tissu cellulaire � l'endroit o� Ton a injecte le liquide quile tient en sus�pension, qui pullule aussi avec une si grande activite dans le tissu pulmonaire, lorsque le sang qui en est charge le dissemine dans la trame de ce tissu : cet ele-
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100nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATFIOLOGIE COMPARfiE.
raent de la virulence luberculeuse, M. Chauveau est parvenu � 1'isoler par les procedes de filtration quil avait si heureusement appliques aux autres humeurs dont la virulence n'est et ne pent 6tre contestee par personne : celles de la morve, de la clavelee par exemple. Etl'identite des resultats qu'il a obtenus, en mettant en evidence que la matiere tuberculeuse, trai-tee comme les matieres incontestablement virulentes, se comportait comme elles, lui a fourni un nouvel ar�gument � l'appui de la contagiosite de la tuberculose. De fait, lorsqu'on a separepar la filtration les elements solides de la matiere tuberculeuse des liquides qui leur sont associes, si Ton inocule par injection sous-cuta-nee la partie liquide filtree, dans la plupart des cas, cette injection reste sans aucun effet, tandis que I'in-jection des elements solides, recueillis sur le filtre et delayes dans une certaine quantite d'eau, donne lieu, apres une certaine periode, comme d'incubation, a revolution de la tumeur dont j'ai donne tout � l'heure les caracteres.
Enfin, pour completer sa demonstration que la ma�tiere tuberculeuse a une specialited'actionqui la cons-titue � l'etat d'espece virulente rigoureusement deter-minee, M. Chauveau a fait des experiences compara�tives avec des substances, qui ont, avec la matiere tu�berculeuse, plusou moins de ressemblance exterieure, comme le pus de consistance caseeuse, provenant de sources completernent pures de toute contamination tuberculeuse, et toutes ces experiences ont echoue. Inoculations cutanees, inoculations dans le tissu con-
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jonctif, injections vasculaires, ingestions digestives : tous ces procedes oat ete egulemeut impuissants a faire naitre la tuberculose de toute piece, sur les animaux des especes bovine et chevaliiie.
Cependant,dans un seul cas, M. Chauveau a reussi � produire, chez un lapiu, des nodules d'iuflammation ca-seeuse dans le poumon, par une injection sous la peau de quelques gouttes de pus tres irritant. Mais ces no�dules n'avaient que les appareuces exterieures de ceux de la tuberculose. C'est ce qui est ressorti des resultats de leur inoculation, compares aux effets de l'inocula-tion de la tuberculose vraie. La matiere extraite de ces nodules, inoculee dans le tissu conjonctif sous-cutane d'un veau et d'un cheval, n'a donue lieu qu'a une tu-meur inflammaloire qui a disparu completement en quelques jours. Mais il en a ete tout autrement des resultats de Tiiioculation par le meme procede, faite avec la matiere extraite de nodules analogues develop-pes chez un autre lapin, � la suite d'une inoculation de matieres authentiquement tuberculeuses. Celle-ci a determine, � l'endroit o� la matiere des nodules a ete iujectee, la formation d'une tumeur qui a evolue suivant le mode iiidique plus haut et est restee persis-tante. II n'y avait done enlre les nodules pulmonaires des lapins qui ont fourni la matiere de ces experiences qu'une ressemblance tout exterieure; mais la dissimi�litude de nature etait complete entre eux, puisque les premiers n'etaient constitues que par des elements ana-tomiques inactifs, tandis que, dans les seconds, � ces elements anatomiques se trouvaient associes les ele-
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COURS DE PATHOLOGIE COMPARfiE.
ments vivants qui sont les agents de la virulence de la tuberculose. Voil� une experience des plus interes�santes, car eile donne le secret de la divergence d'opi-nions, meme eutre les experimentateurs, � l'endroit de la contagiosite de la tuberculose. Quelles objections a-t-on opposees� M. Villemin venant affirmer les pro-prietes contagieuses de cette maladie, demontrees, lui semblait-il, d'une maniere eclatante par les resultats posilifs des experiences qu'il avait faites et multipliees sur les animaux dont il pouvait disposer, les lapins et les cobayes? Ces objections, on les basait surtout sur des faits contradictoires, en apparence, de ceux qu'il avait vus se produire sous ses yeux. Non, lui disait-on, les matieres tuberculeuses n'ont pas de proprietes contagieuses, car ce que vous produisez sur le lapin par leur inoculation, nous le produisous avec un pus quelconque. Vous attribuez done � tort � un principe contagieux des effets que Ton pent determiner avec des matieres certainement depourvues de proprietes virulentes.
Ceux qui opposaient ce raisonnement a M. Ville�min se laissaient tromper par I'apparence, car ils eta-blissaient une identite entre des faits qui n'avaient entre eux d'autre rapport que celui d'une similitude tout exterieure, Ce n'est pas une vraie tuberculose que Ton determine par l'inoculation de matieres qui ne sont pas d'origine tuberculeuse, e'est une pseudo-tuber-culose qui differe de la vraie par ce caractere essentiel-lement distinctif: eile n'est pas inoculable. Les expe�riences de M. Ghauveauen temoignent inefulablement.
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D'ailleurs la pathologie nous oflFre � observer des faits qui sont absolument du rn^me ordre. Chez le cheval, par exemple, les lesions traumatiques de la troisieme phalange, qu'elles soient accidentelles ou con-secutives � une action chirurgicale, sont susceptibles de donner lieu � des abces visc6raux dissemines qui ont avec ceux de la morve aigue d'assez grands carac-teres analogiques, roais qui en different essentiellement par leur nature, car iis ne renferment pas I'element contagieux d'o� la morve precede. Le mecanisme de leur formation est probablement le meme cependant. Les uns et les autres ont pour cause initiale une epine imlante, representee dans les abces d'origine mor-veuse, par Telement de la virulence morveuse ou, autrement dit, par le bacille propre � cette maladie; et pour les abces consecutifs au traumatisme compli-qu6 de la troisieme phalange, par un des microbes septicemiques, suivant toutes probabilites. II faut con-siderer, en effet, que la condition necessaire pour que le traumatisme de la region digitale entraine des abces visceraux, e'est que la troisieme phalange devienne le siege d'une carie putride, e'est-a-dire d'un ramolis-sement de sa substance, dans une etendue plus ou moins considerable, par suite d'une infdtration puru-lente de son tissu si spongieux. L'odeur qui s'en de-gage, quand on I'entame avec I'instrument tranchant, ne laisse aucun doute sur la nature de ralteration dont eile est devenue le siege. C'est de ce foyer de putridite que proviennent les microbes qui, entrai-nes par le courant circulatoire, vout ensuite se disse-
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110nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATUOLOGIK COMPAR15E.
miner dans les visceres, pouraons, foie, rate, oil ils constituent les epines irritantes autour desquelles se forment les pullulations et les secretions morbides, bases des nodosites caseeuses multiples que Ton designe sous le nom d'abccs mkastatiques.
L'ancienne anatomic pathologique ne s'etait done pas trompee lorsqu'elle s'est servie de cette expres�sion, qui implique l'idee du transport d'un element morbide d'un lieu determine, siege d'une lesion chi-rurgicale, vers les visceres. Le rapport entre les deux faits avait ete bien saisi par eile, et eile en avait trouve la raison dans une resorption purulente. C'etait presque la verite; mais la theorie microbienne rend compte des faits d'une maniere bien plus satisfaisante.
Dans ce cas, comme pour la tuberculose, 11 n'y a entre les lesions qu'une analogie exterieure. Toutefois, il se pourrait que I'abces metastatique traumatique eut avec I'abces de la morve aigue une analogie autre que celle de la forme, et qui residerait dans une pro-priete contagieuse speciale, celle que lui donnerait l'element de la virulence septicemique. Ce n'est l� sans doute qu'une induction, mais je dois la formuler, des mainteuant, parce qu'elle me parait autorisee par revolution des phenomenes.
A la premiere occasion, je la sournettrai � une veri�fication experimentale.
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SEPTIEME LECON
LES ABCES META.STATIQ�ES ET LES LESIONS VISCfiRALES DETERJUNEES PAR DES ELEMENTS SPECIFIQUES.
Les experiences de M. Chauveau sur la transmission de la tuber-culose par les voies digestives, ont confirnie celles dc M. Viliemin. � Les objections faites � M. Viliemin basees sur la predisposition pretendue de Torganisme du lapin, sont dctruites par les resultats obtenus sur le bceuf. � Analogie extericure entre les abces dits metastatiques et les lesions de la morve aigue. � Conditions de la manifestation de ces abces chez le eheval. � Ils sont assez fre�quents ii la suite des complications des blessures de la troisi�me plialange. � Raisons de la frequence de ces complications. � Structure particuli�re de la phalange favorable aux infiltrations purulenles et sepliques. � Experiences ayant pour objet de deter�miner artificiellement des abcfes visceraux. �Injections vasculaires de poussi�res inertes.� Injections de pus filtre. � Abces semblables aux abces metastatiques spontanes. � Proprietes irritantes de glo�bules du pus qui commence a s'alterer. � Intervention probable de microbes septiques. � Dans cette hypothese, identite d'evolu-tion des abc�s metastatiques et de ceux qui caracterisent la morve aigue. � La consomption rapide des animaux implique i'inter-vention des ferments sepliques. � Les abc�s metastatiques la suite de phlebite suppurative ascendantc de la jugulaire. � Infil�tration purulente du tissu spongieux de l'occipital. � Abc�s me�tastatiques de la gourme determines probablementpar un microbe pyogenique. � Induction autoriseepar la constatation d'un microbe dans les furoncles de l'bomme. � Necessite d'eclaircir ces questions par des recherches experimeutales.
Messieurs,
Les experiences remarquables de M. le professeur Chauveau, dout je vous ai reudu comple daus la der-
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niere seance, sont, comme vous avez pu en juger, ab-solutnent confirmatives, par leurs resultats, decelles de M. le professeur Villemin, qu'elles completent en de-montrant que la matiere tuberculeuse produit ses effets, c'est-a-dire se reproduit par pullulation, dans les organismes qui ont une aptitude naturelle a con-tracter la tuberculose. Toutes les objections que Ton a faites a M. Villemin, en invoquant centre les conclu�sions de ses experiences la predisposition pretendue de l'organisme du lapin � devenir tuberculeux � la suite de l'inoculation d'une matiere quelconque, tombent devant ce fait significatif qu'il est possible de donner lieu chez le boeuf, le cheval, l'�ne, le mulct, � la ma�nifestation de lesions tuberculeuses des poumons, de l'inlestin, du tissu conjonctif et, enfin, des ganglion-naires bronchiques, mesenteriques ouautres, en ense-meiiQaut l'organisme de ces �nimaux avec de la matiere tuberculeuse introduite par une voie ou par une autre: canal digestif, appareil circulatoire, tissu conjonctif. La preuve que la matiere tuberculeuse est bien virulente, e'est sa multiplication dans l'organisme in-fecte experimentalement, et 1'apparition des lesions qu'elle est susceptible de determiner, en dehors des points o� se sont etablis ses rapports de contact. Ainsi, I'infestatiou par I'appareil digestif est suivie de l'apparition de lesions pulmonaires, qui temoi-gneut que les elements actifs de la matiere tuber�culeuse, transposes par la circulation et dissemines dans la trame des poumons, y ont trouve un milieu propice pour leur pullulation. C'est, en effet, ce dont
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temoignent les resultats des injections intra-vascu-laires d'un liquide qui tient en suspension des par-ticules tenues de matiere tuberculeuse. Ces parti-cules, qui sont les germes de la virulence, donnent lieu aux lesions par lesquelles s'exprime leur pullula-tion, plus particulierement dans la trame pulmonaire, comme si cette trame constituait un milieu plus favo�rable que tout autre a leur developpement. Point de doute done, d'apres ces faits, que la matiere tuber�culeuse ne renferme un element virulent, e'est-a-dire un element vivaut^ qui manifeste son activite en se reproduisant daus les organismes susceptibles de lui servir de milieu de culture, et en donnant lieu, dans ces organismes, � des lesions dont les caracteres dis-tinctifs ne sont pas dans leurs apparences, voire m6me dans leur structure anatomique, mais resident dans une activite qu'elles doivent � des elements vivants tout speciaux qui leur sont associes. De fait, I'experience a prouve que Ton pouvait determiner experimentale-ment, chez certains animaux, le lapin notamment, la formation de nodosites disseminees dans differents organes, le poumon, le foie, la rate, et qui accusent la presence, partout o� elles apparaissent, d'une con�dition speciale d'irritation, d'une epine irritante, pour employer I'ancienne metaphore. Ainsi, dans i'expe�rience de M. Chauveau, dont j'ai parle dans la der-niere seance, la formation de nodules de pneumonie caseeuse, dissemines et generalises, avait ete provo-quee, chez un lapiu, par I'iujection, sous la peau, de quelques gouttes de pus tres irritant. Des faits sem-
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biables out ete vus par d'autres experimeutateurs, puisque ce sont ces faits que ron a iuvoques pour battre en breche la theorie de la contagiosite de la tuberculose. MaisM. Chauveau, vous le savez, a donne la demonstration experimentale que, si les lesions qui surviennent dans ces dernieres conditions avaient des ressemblances avec celles de la tuberculose, ces res-semblances etaient tout exterieures et n'impliquaieut nullement leur similitude, puisqu'elles different les unes des autres par ce caractere essentiel : rinnocuite absolue des unes au point de vue de la virulence qui, au contraire, est inherente aux autres et peut etre mise en evidence par l'ensemencement de la raatiere qui les constitue, sur des organismes susceptibles.
J'ai parle, dans ma derniere legon de faits spontanes qui sont absolument du m^me ordre que ceux que Ton peut produire experimeutalement et qui demontrent, avec autant de force, la grande difference qui existe entre des lesions anatomiques exterieurement sem-blables entre elles, dont les unes sont l'expression d'une maladie contagieuse, la morve aigue, et les les autres se manifestent � la suite du developpement, dans de certains tissus, d'inflammations suppuratives, dont elles constituent la complication la plus redou-table. J'ai en vue, en ce moment, les varietes d'abces visceraux dont l'ancienne Chirurgie avait pressenti et comme devine les conditions etiologiques necessaires, lorsqu'elle les qualifiait de metastatiques, pour expriraer e rapport qu'elle avait saisi entre leur manifestation et les inflammations suppuratives dont je viens de
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parier. La pathologie du cheval fournit, � cel egard, je vous l'ai deja dit, des examples bien demonstratifs auxquels donna un grand inter�t la connaissance cer-taiue du rapport qui existe entre une pseudo-tuber-culose aigue, qu'il n'est pas rare d'observer sur le che�val, et de certaines lesions traumatiques compliquees de sa derniere phalange, qui est enveloppee par le sabot et lui serf, pour ainsi dire, de moule. Je veux revenir aujourd'hui sur ce point avec quelques details. Pour la comprehension des phenomenes patholo-giques dont je veux donner une idee, quelques consi�derations sont ici necessaires sur la structure de la phalange ungueale du cheval et sur les conditions de complications qui resultent pour eile et les tissus dont eile est enveloppee, de son etroite claustration dans la boite du sabot, dont les parois inextensibles opposent un obstacle insurmontable � la tumefaction que deter�mine toujours, dans les parties vives, l'afilux du sang, lorsqu'il y est appele par une cause irritante. A ce point de vue, on pent dire que les conditions de ce que les chirurgiens appellent retranglement se trouvent rea-lisees dans la region du pied du cheval de la maniere la plus redoutable. Or, la derniere phalange, Pos du pied, comme on I'appelle communement, presente cette particularite remarquable qu'elle est tres spongieuse et que son enveloppe corticale^est criblee d'une multi�tude infinie d'ouvertures vasculaires, destinees au pas�sage, tout � la fois, et des arterioles qui se distribuent dans le riebe reseau de la partie du tegument � la-quelle la phalange sert de support, et des veinules qui
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emergent de ce reseau. C'est qu'en effet, � l'extremite digitale, le tegument, remarquablement modifie dans sa disposition anatomique, est adapte par la richesse de sa vascularisation � la fonction speciale qu'il rem-plit corame appareil formateur de la corne, appareil kamp;ratogkne.
Etant donnee cette organisation, supposons mainte-nant Intervention d'une cause irritante, comme celle qui resulte de la piq�re d'un des clous, � l'aide des-quels le fer est fixe et rive fortement au sabot. Cet accident n'est pas rare, car l'occasion, pour qu'il puisse se produire, se rencontre trente-deux fois, au moins, � chaque renouvellement de la ferrure des quatre pieds, chaque fer exigeant huit clous pour sa fixation; mais sa frequence est loin d'etre proportionnelle au nombre de ces occasions, grace � l'habilete que la pratique du metier donne � l'ouvrier, tout ignorant qu'il soit de l'organisation de la partie sur laquelle il pratique ses operations si hardiment. Voil� done le cheval pique et, dans ce cas, l'epine irritante n'est pas metaphorique. La piq�re appelle le sang dont l'afflux se traduit par une tumefaction proportionnelle. Mais le sabot, inex-tensible, ne se prete pas � cette augmentation de vo�lume. De l�, pour les parties rendues douloureuses par le traumatisme de la piq�re, un surcrolt d'irritation qui resulte de la compression qu'elles subissent. A cette ir�ritation accrue correspond un nouvel afflux, qui donne lieu � une tumefaction plus forte, condition fatale elle-meme d'une compression plus intense : et toujours ainsi dans ce cercle vicieux au possible, o� l'efiet
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devient cause productrice de nouveaux effets, dont raction causale 1'emporte en intensite sur celle de la cause originelle. Etant donnees ces conditions, I'in-flammation ne manque pas d'intervenir � son tour et, sous I'influence d'une si violente irritation, eile revet le caractere suppuratif. Le pus forme, qui ne trouve pas d'issue immediate se fait sa place en raison de son incompressibilite, et, puisque le sabot est inextensible, il ne peut se la faire qu'en ecrasant les tissus et en les mortifiant. C'est ce qui arrive, en effet; et lorsque, grace � l'incurie ou � l'inclairvoyance des hommes proposes aux soins des chevaux, I'accident primitive-ment simple d'une piq�re a eu le temps de produire la serie de ses effets dans les conditions causales que je viens d'indiquer, qu'est-ce que l'examen de la par-tie malade fait reconnaitre au Chirurgien veterinaire appele � pratiquer I'operation que necessite la gravite des complications? Le voici: le sabot est desuni, dans une eteudue plus ou moins grande, des parties aux-quelles il adhere normalement par un engrenagesi in-time. Cette desunion, ce decollement, comme on dit vulgairement, resulte primitivement de Tinterposition du pus entre lui et ces parties, et, plus tard, de la fle-trissure de celles-ci, quand leur vitalite s'est eteinte sous l'energie de la pression qu'elles ont subie. Elles se presentent absolument exsangues, avec une teinte violacee, sans consistance et sans tenacite; dilacerables facilement et meme reductibles en une sorte de pulpe; dans quelques points, le chorion qui supporte le reseau vasculaire reflete une teiute verd�tre. L'etat de putre-
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faction de ces parties tegumentaires est accuse par l'odeur extrfemement fetide qui s'en exhale.
Voil� pour les caracteres des parties molles; voyons maintenant ceux qui appartiennent � l'os. La teinte de sa couche exterieure est brune jaun�lre; quand on l'entame avec un instrument approprie, ce que rend facile sa consistance diminuee, il s'en degage une odeur remarquablement fetide et caracteristique. Son tissu, completement exsangue, reflete une teinte jaune verd�tre tres accusee, due � la presence du pus qui remplit toutes ses areoles et, dans quelques cas, � une teile profondeur qu'une cavite Interieure de la troi-sieme phalange, que Ton appelle le sinm sfoni-lunaire, constitue, � vrai dire, un abces.
Partout o� il a eprouve cette transformation par in�filtration purulente dans les spongioles de son tissu, l'os est facilement attaquable par l'instrument tran-chant ou la rugine. II se reduit, sous leur action, en une sorte de poussiere humide, ou se brise par fragments, refletant partout la meme teinte jaune verd�tre, signe de l'infiltration purulente, et repandant la meme odeur putride, caracteristique de cette forme de necrose. Quand on arrive avec la rugine aux points o� s'arr�te cette alteration, on voit disparaitre^ par gradations in�sensibles, la teinte jaune verd�tre du tissu osseux qui se nuance d'une coloration rouge, de plus en plus ruti-lante, �mesure que l'on penetredans des couches plus saines; et, en m^me temps et graduellement, l'os recu-pere sa consistance et sa structure areolaire normales, dont les caracteres contraslent, de la maniere la plus
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tranchee, avec ceux que presentait la partie infiltree de pus.
Une des particularites les plus caract�ristiques de cette gangrene humide de la phalange ungueale est sa marche envahissante en surface et en profondeur, dontla condition se trouve sans doute � on peut I'ad-mettre aujourd'hui � dans la presence d'un ferment pyogenique qui, par sa pullulation de proche en proche dans les areoles du tissu osseux, y donne lieu � la for�mation du pus, � la mortification consecutive et enfin � la desagregation moleculaire qui se traduit par la diminution de la cohesion du tissu.
Ce qui me porte � admettre que cette hypothese peut bien sect;tre l'expression de la realite, c'est qu'il n'est pas rare, comme je l'ai dit precedemment, qu'� la suite des accidents compliques qu'uue lesion trau-matique peut determiner dans la region digitale, on voie survenir des lesions viscerales et, notamment, des lesions pulmonaires, du m�me ordre que celles que M. Chauveau a vu se produire dans le lapin dont il a donne l'histoire, � la suite de l'injection, dans le tissu cellulaire, de quelques gouttes d'un pus tres irritant.
De fait, les chevaux qui sent victimes de cet acci�dent meurent assez souvent de ce qu'on appelle une pseudo-tuberculose aigue. Quand on precede � leur autopsie,on est frappe de l'aspect irregulierement bos�sele que presenteut les poumous. Leur tissu deprime, sous la pression de l'air, aux points ou il a conserve son integrite, iaisse apparaitre en relief des tumeurs tres nombreuses, d'une couleur jaune rosee, dont le
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volume equivaul � celui d'une noisette et le depasse meine. Ges tumeurs qui, sur leur coupe, presentent une couleur jaune tres accusee, ont une cousistance caseeuse, et quandon les examine, meme seulement � l'oeil nu, il est facile de distinguer les lineaments de la trame pulmonaire dans les mailies de laquelle se sont accumules les elements morbides qui en ont determine l'etouffement et la necrose. Get examen conduit � con-cevoir comme une analogie entre la lesion de l'os ne�crose et celle du poumou lui-meme.
G'est � ces tumeurs pulmonaires, dont on peut ren-contrer les analogues dans le foie et dans la rate, que l'ancienne anatomic pathologique a donne le nom d'a�ces meiastaiiques, impliquant l'idee d'une relation de causalite entre la lesion traumatique primitive et leur manifestation. On pensait qu'elles avaient leur cause dans les elements meines du pus qui, trans-portes par les voies vasculaires, allaient se disseminer dans les poumons, le foie et la rate, et constituaient partout, o� ils etaient arretes des noyaux d'irritation, des epines, autour desquelles le travail pyogenique s'etablissait dans une certaine etendue peripherique, et donnait lieu � la formation des nodules de pneu-monie caseeuse qui constituent les abces dits metasta-tiques. Sous l'instigation de cette idee, des experiences ont meme ete tentees pour tucher de donner lieu, par l'injection de poussieres inertes dans les vaisseaux, � la formation de foyers purulenls autour des grains de ces poussieres, faisant roftice de l'epine irritante. Jamals ces tentatives u'ont abouti � une imitation
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*;nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; vraie du processus morbide dont I'aDces metastatique
est 1'expression.
Mais si, au lieu d'injecter des corps inertes ne pou-vant donner lieu, par leur presence, qu'� une petite excitation locale qui souvent est � peine ressentie par les tissus, ce sont les elements du pus eux-m�mesque Ton fait passer dans la circulation, en ayant soin de debarrasser, par une filtration, le pus qu'on se pro�pose d'injecter, des grumeaux et matieres grossieres qui pourraient donner lieu � des manifestations d'un autre ordre que celles qu'on se propose d'etudier, dans ce cas, on peut reussir � produire dans les poumons, ainsi que daus le foie et la rate, des lesions d'appa-rence caseeuse, dissemiuees,� la maniere des abces me-tastatiques d'origine pathologique, et si semblables � ceux-ci qu'on peut se croire autorise � conclure de la parfaite similitude des effets � la complete identite des conditions causales. L'experimentateur etant maitre, non pas toujours, maisdans un certain nombre de cas, dont on n'a pas encore determine la nature, de faire naitre des tumeurs pulmonaires semblables aux abces metastatiques, par l'injection intra-vasculaire d'un li�quide tenant en suspension les elements d'un pus uon specifique, on s'est demande si lorsqu'on voyait ap-paraitre ces abces � la suite de lesions traumatiques compliquees, leur cause ne se trouvait pas dans le transport, par les voies de la circulation, des elements du pus puises au siege de la lesion. Ce qui tend � ren-forcer cette induction, c'est qu'il resulte d'une etude experimenlale tres remarquable de M. Chauveau, que
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les corpuscules du pus semblent posseder, par eux-m�mes, des proprietes irritautes qui en font des agents irritants d'uue grande euergie. Le serum qui sert de vehicule aux globules du pus, debarrasse par une fil�tration de ces globules, constitue un agent tres iuoffen-sif, tandis que les globules qu'on en a separes, injectes dans le tissu cellulaire, donnent lieu � une irritation violente, suivie d'une inflammation pyogenique d'une extreme activite secretoire.
Mais c'est surtout le pus qui commence � s'alterer et dout I'alteration est denoncee par I'odeur putride qu'il exhale qui est irritant. Exemple : le pus du seton, vingt-quatre heures apres son application.
Les abces visceraux spontanes du cheval, auxquels on a donne le nom d'abces metastatiques, coincident avec la formation de pus putride dans les areoles de la troisieme phalange, o� s'opere l'absorption des ele�ments actifs qui, transportes par les voies vasculaires, vont se disseminer dans les organes parenchymateux, les poumons, le foie, la rate, et donnent lieu, par leur action irritante locale, � la formation des noyaux caseeux multiples dont ces organes sont farcis.
Or, qui dit putridite dit intervention des microbes propres � la fermentation putride. II est done bien probable que I'ancienne theorie qui faisait jouer aux elements propres du pus le role principal dans la for�mation des abces metastiques est une theorie insuffi-sante, Suivant toutes probabilites, la cause de ces abces se trouve dans les microbes associes au pus, et dans leur pullulation sur place partout o� appa-
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raissent des uoyaux purulents dans les visceres. A ce point de vue, 1'analogic entre les abces de la morve aigue et ceux de la metastase du traumatisme com-plique de putridite, ne serait pas seulement exte-rieure; eile resulterait aussi d'une grande similitude dans le mecanisme du developpement des lesions, les unes et les autres procedant d'une pullulation sur place de microbes propres � chacune d'elles, Ce se�rait done par la difference specifique de ces microbes qu'elles se differencieraient, bien plus que par leurs caracteres anatomiques et meme histologiques.
Un fait clinique milite fortement en faveur de Thy-pothese que I'infestation qui se traduit chezquot; le cheval parl'apparitiond'abcesvisceraux, est de nature micro-bienne : e'est la consomption extremement rapide des animaux chez lesquels ces phenomenes se manifestent. Si le pus putride, injecte experimentalement dans les veines ou introduit par 1'absorption dans les voies circulatoires, ne jouissait que de proprietes irritantes, il ne donnerait pas lieu � une reduction si prompte et si considerable du volume de I'animal.
Ce n'est pas seulement � la suite du traumatisme complique de suppuration putride de la troisieme pha�lange que Ton voit survenir, chez le cheval, les abces visceraux; la condition peut s'en trouver r6alisee toutes les fois qu'� la suite d'un traumatisme, la suppuration devient diffuse et putride dans la partie spongieuse d'un os. Temoin, par exemple, ce qui survient, chez le cheval encore, lorsque, � la suite de la phlebite sup-puralive ascendante de la jugulaire, le tissu spongieux
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de l'occipital est envahi par uue infiltration purulente, par le meme mecanisme et de la meme maniere que la troisieme phalange. La lesion osseuse, identique dans les deux cas, donne Heu aux memes resorptions, aux memes transports, � la meme dissemination des ele�ments morbides et aux memes lesions viscerales con-secutives.
L'histoire de la phlebite de la jugulaire donne une preuve tres remarquable de la difference des effets que le pus peut produire, suivant qu'il provient d'un foyer de tissu spongieux o� il a fermente, ou d'une collec�tion purulente close qui, � un moment donne, peut s'ouvrir dans la jugulaire et se verser tout entiere dans le milieu sanguin.
Je vais entrer sur ce point dans quelques details, ne-cessaires pour que je sois bien compris.
Lorsque, � la suite de la saignee, la veine jugulaire s'enflamme, rinftammation lie revfit pas generalement le meme type au-dessous et au-dessus de la piq�re du vaisseau.
La circulation se trouvant arretee � l'endroit de cette piq�re, cause et point de depart de rinflammation, deux phenomenes absolumeut opposes se produisent au-dessus et au-dessous.
Au-dessous, la veine, n'etant plus distendue par le sang, revient sur elle-meme, en vertu de la retractilite de ses parois,jusqu'au point o�une collaterale, venant s'aboucher dans la jugulaire, la maintient � l'etat de canal ouvert par le sang qu'elle y verse. Dans tonte la partie retrecie, depuis la plaie de la saignee jusqu'�
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l'abouchement de cette collaterale, un travail adhesif s'opere par une exsudation � la surface de la mem�brane interne, affrontee contre elle-meme, et la jugu-laire s'oblitere.
Voil� ce que Ton observe le plus ordinaireraent. Mais il y a des cas exceptionnels, o� le travail adhesif devient suppuratif et donne lieu � une collection pu-rulente qui n'est separee de la partie de la veine de-meuree libre � la circulation que par une mince elei�son, constituee par des valvules adherentes. Que cette cloison vienne � se rompre sous la pression de la co-lonne de liquide purulent qu'elle supporte, et que, par ce fait, se trouvent realisees les conditions d'une veri�table injection purulente par lesvoies vasculaires,dans ce cas, on voit survenir des phenomenes de gangrene pulmonaire, par obstruction, sans doute, des capil-laires, dans une etendue plus on moins considerable, mais non pas des abces visceraux.
Bien autres sont les phenomenes qui se passent dans la partie superieure de la veine: lesang, dontle cours est arrete � l'endroit de la saignee, distend le vaisseau autant que le permet l'extensibilite de ses parois, et ne tarde pas � y former un caillot obturateur volumi-neux qui n'adhere d'abord que par une simple agglu�tination � la surface de la membrane interne.
Lorsque les eboses suivent une marche reguliere, c'est-�-dire que I'inflammation consecutive � l'obstruc-tion de la veine reste moderee, le caillot obturateur se reduit graduellernent de volume, puls disparait, et le vaisseau s'oblitere � la longue par l'adhesiou de sa
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126 COURS DE PATHOLOGIE COMPAREE.
membrane interne avec elle-m�me. Mais les cas sont frequents sur le cheval, dont i'organisme est si predis�pose � la secretion purulente, o� la phlebite devient suppurative. Dans ce cas, l'adhesion du caillot avec la membrane interne de la veine est rompue par l'inter-position du pus entre deux, et le canal vasculaire se convertit en une cavite purulente, d'o� le caillot est elimine pen � peu, par fragments successifs, avec le pus qui les entraine. Una fois cette elimination ache-vee, la cavite purulente intra-vasculaire peut s'oblite-rer, � la maniere de celle de tous les abces, et la gue-rison s'en suit. G'est la terminaison heureuse de la phlebite suppurative.
Mais il y a des cas o� TinQammation suppurative de la jugulaire suit une marcbe ascensionnelle que rien ne pent arreter; eile gagne ses racines, puis ses radi-celles et se traduit, quand eile a envahi le tissu spon-gieux de l'occipital, par des phenomenes de necrose humide, identique � celle que Ton observe dans la troisieme phalange et qui est, comme celle-ci, le point de depart d'une infestation generate, se traduisant de la m�me maniere, c'est-�-dire par l'apparition d'abces visceraux. Identite des phenomenes dans les deux cas, m�mes conditions originelles, memes lesions termi-nales.
II est, chez le cheval, une autre maladie susceptible, eile aussi, de se compliquer d'abces visceraux : c'est la gourme, benigne dans la majorite des cas, mais qui, par exception, peut �tre grave jusqu'� la mort; et, dans ce cas, ce qui la caracterise essentiellement, c'est la
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presence dans lepoumon de nodosites d'aspect caseeux o� I'infiltration des elements morbides a etouffe la trame pulmonaire et en a determine la mortification.
Comment, par quel mecanisme, ces lesions se cons-tituent-elles? Sur ce point, I'anatomie pathologique restait forcement muette, il n'y a pas longtemps en�core. Aujourd'hui, on pent admettre, par une induction tres autorisee, que les abces dits metastatiques de la gourme out leur cause dans une pullulation micro-bienne qui determine, dans les points dissemines o� eile s'etablit, le travail pyogenique dont I'abces est I'expression.
Aussi bien, du reste, I'existence d'un microbe pyo�genique n'est plus maintenant unehypotbese. M. Pas�teur a constate sa presence dans le furoncle de l'homme et donne ainsi la clef de cette particularite si caracteristique des furoncles qui restent rarement iso-les, mais, au contraire, apparaissent par eruptions successives, une fois qu'une premiere manifestation s'en est faite. Entre ces eruptions � la peau et celles qui s'operent dans les visceres sous forme d'abces mul�tiples, la similitude etiologique est tres grande; ce sont l� des phenomenes de meme ordre, puisqu'on pent les rattacher, les uns et les autres, � une action irritante locale, determinee par la presence d'un microbe, spe�cial pour chaque eruption, et lui imprimant, en vertu de sa specificite m6me, la forme qui lui appartient.
Sans doute. Messieurs, que la preuve n'est pas en�core faite de toutes les propositions que j'enonce, et qu'il y a lieu de les soumettre � une verification expe-
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128nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPAR^E.
rimentale avant de les accepter pour vraies. Mais elles sout vraisemblables et nous nous en servirons, comme d'idees directrices, dans les recherches que comporte Teclaircissement des questions que j'ai abor-dees dans cette seance. La doctrine microbienne peut et doit nous donner l'interpretation de bien des faits dont la nature etait restee jusqu'� present impene�trable.
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HUITIEME LEGON
LA CONTAGIOSITE DE LA TUBERCULOSE
L'inoculation est le criterium des vrais tubercules. � Toutes les lesions k forme turberculeuse ont ce caractere commun qu'elles proc�dent d'une action ii'ritante centrale. � Memes phenomfenes dans le r�gne vegetal. � Accumuler las preuves de la contagiosile de la tuberculose, afln de disposer ropinion publique en faveur des mesures propres � en prevenir les effets. � Les experiences de M, Villemin faites en 1869 sur des lapins et des cobayes. � Trans�mission par les voies digestives. � Lesions experimentales ayant leur siege dans les organes o� on les rencontre lorsque la tubercu�lose est accidentelle. � Experiences conformcs de M. Saint-Cyr, de Lyon, et des Ecoles veterinaires de Hanovre et de Dresde. � Con�cordance enlre les experimentaleurs de tous les pays. � Note discordanl.e de M. Colin, d'Alfort. �L'ingeslion de matu'res tuber-culeuses serait inoffensive.� L'absorption de ces mati�res par une membrane muqueuse. � Fails negatifs opposes aux faits positifs. � Inobservation des r�gles de la melhode experimentale. � Influence des opinions discordantes de M. Colin sur les autorites ayant mission de sauvegarder l'hygi�ne publique. � Nccessite de multiplier les preuves de la contagiosite de la tuberculose.
Messieurs,
L'etude comparee, au point de vue etiologique prin-cipalement, de maladies diverses qui out pour carac-teristique anatomique commune l'existence et la disse�mination dans les poumous et d'autres visceres, de
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petites tumeurs, de tubercules, comme on les designe ea prenant ce mot dans son acception etymologique; cette etude comparee nous a conduits � cette notion, ou decidement acquise ou autorisee par une induction legitime, que la raison de la formation des tumeurs tuberculeuses, quelle que soit leur nature, etait I'irri-tation causee aux points o� elles apparaissent, par une particulevivante. Pour la tuberculosehelminthiasique, pas de doute sur le rapport qui existe entre la tu-meur tuberculeuse et le noyau vivant qu'elle contient: strongles microscopiques, ou bien ojufs ou larves de filaire hematique. Et comme Ketude histologique de ces tumeurs helminthiasiques ne permet pas d'etabiir de differences fundamentales entre elles et la subs�tance des tubercules caracteristiques de la phthisic, on pouvait induire de la similitude de la structure que ceux-ci procedaient aussi d'une action irritante cen-trale, cause determinante d'un mouvement inflamma-toire peripherique dont le tubercule etait I'expression. Cette induction est devenue aujourd'hui une verite de-montree. Le tubercule de la phthisie est analogue, au point de vuede l'etiologieanatomique, � celui de l'hel-minthiase, car il procede, comme lui, de l'action de particules Vivantes, micrococcus ou bacilles, qui four-millent aux points o� les tubercules se forment et sont leurs conditions necessaires. Sur ce point I'ana-tomie pathologique est arrivee � une teile rigueur de demonstration qu'elle a pu evaluer � cinq milliards le nombre de bacilles que contient un millimetre cube de poumon tuberculeux. Je trouve ce renseignement dans
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une legon que vient de faire � la Pitie,s\ir la tubercu-lose parasitaire, M. Debove, professeur agrege, charge de la suppleance de M. le professeur Lasegue dout la mort vient de faire un si graad vide dans les rangs de la Faculte de Paris. Tubercules helminthiasiques, tu-bercules bacillaires de la tuberculose, c'est tout un, au point de vue de ce que Ton peut bieu appeler le mecanisme anatomique. La particule vivante deter�mine autour d'elle, dans les deux cas, le fluxus iu-flammatoire qui se traduit par une transformation de la texture dont la tumeur est 1'expression. M�me mode de formation que celui de cet autre tubercule muscu-laire qui constitue le kyste enveloppant de la tri-cbine.
Notons, en passant, que, dans le regne vegetal, on voit des effets semblables determines par des causes analogues. Qu'est-ce que ces tumeurs que Ton appelle des galles, que Ton voit se developper sur difFerentes parties des vegetaux, si ce n'est des tubercules donl la cause determinante est la presence, dans la trame des tissus, des oeufs que certains insectes y ont depo�ses en leur frayant un passage par une piqure de leur tarriere. Autour de ces oeufs, le tissu vegetal, comme irrite, se modifie par une proliferation accidentelle et la mix, dite de galle, veritable tubercule pathologique, est ainsi constituee.
La demonstration etant faite que les tubercules de la tuberculose proprement dite resultent, comme ceux de la tuberculose helminthiasique, de l'action irritants des particules Vivantes qu'ils renfermeut, 1'induction
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lt;32nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;CO�KS Dfi PATHOLOGIE COMPAB^E.
autorise tres legitimement � conclure que lorsque des lumeurs d'appareace tuberculeuse se disseminent dans les poumons, dans le foie, dans la rate, comme on le voit � la suite de certains traumatismes compliques, ou de certaines inoculations experimentales, faites avec du pus putride: I'induction autorise, disais-je, � conclure, et des conditions dans lesquelles ces tumeurs apparaissent, et de leur mode rapide de formation, et de leurs caracteres anatomiques, qu'elles ont aussi, pour noyaux formateurs, des microbes procedant des foyers putrides et dissemines par les voies de la circu�lation, comme le sont les oeufs des filaires du sang, dans les parenchymes o� ils s'arretent et exercent leur action irritaute locale.
Meme induction pour les abces pulmonaires mul�tiples et dissemines, par lesquels se caracterisent la morve aigue ou chronique; meme induction egalement pour ceux de la gourme, maladie contagieuse, eile aussi, et qui, consequemment, est constituee par un element vivant, cause determinante des alterations anatomiques qui la caracterisent, et instrument de sa transmission.
II ressort de ces considerations que les maladies � forme tuberculeuse sont assez nombreuses; mais, sous I'unite morphologique, la distinction pent etre faite entre les especes, soit d'apres des caracteres objectifs parfaitement accuses, tels que ceux qui resultent de la presence de vers, de larves ou d'oeufs, dans le centre des tubercules; soit d'apres des caracteres phy-siologiques qui ne laisseut aucun doute sur la nature
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de la lesion; ce sont ceux qui sont donnes par I'ino-culation. Lorsqu'on fait sortir la morve, sous ses deux types iiidistinctement, des lesions tuberculeuses du poumon, point de doute possible sur la nature de ces lesions. II en est de mamp;me lorsque ce sont des pheno-menes de nature gourmeuse auxquels donue lieu l'inoculation de matieres morbides, puisees dans les lesions pulmonaires d'uncheval mort de cette maladie.
M6mes conclusions lorsque c'est la tuberculose pro-prement dite, celle qui est caracteristique de ce que Ton appelie plus communement la phthisic, que Ton fait sortir de l'ensemenceinent, sur des organismes suscep-tibles, des lesions tuberculeuses. Et comme ces lesions seules peuvent reproduire la tuberculose; comme celles qui leur ressemblent anatomiquement, mais precedent d'une autre cause, ne sont pas susceptibles de repro�duire la tuberculose par l'inoculation, il est evident que l� se trouve le criterium qui permet d'etablir un caractere tres distinctif entre le tubercule proprement dit et celui qui est I'expression viscerale, soit d'un traumatisme complique, soit d'une inoculation de pus irritant. Le tubercule traumatique n'ayant pas ete reconnu inoculable, forme une espece � part, distincte de la tuberculose vraie.
La tuberculose vraie est inoculable : voila son carac�tere distinctif de la tuberculose helminthiasique et de celle qui se manifeste dans les conditions, que j'ai spe-cifiees, de traumatisme et d'inoculation purulente.
Gela dit, il faut maintenant que je revienne sur les preuves de la contagiosite de la tuberculose, car il
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s'agit d'une question dont on ne saurait trop s'occuper et se preoccuper. paisque cette maladie est une de celles qui sevissent avec le plus d'intensite sur les po�pulations humaines. Point de doute, puisqu'elle estcon-tagieuse, que la contagion ait une large part dans son expansion. Consequemment, ce � quoi doivent tendre tons les efforts des medecins, des hygienistes, des vete-rinaires charges de l'inspection des viandes de bou-cherie, des autorites qui ont la mission d'edicter et de faire executer les rnesures sanitaires, ce � quoi doivent tendre tons les efforts, c'est � reduire le plus possible les chances de cette contagion redoutable, par I'em-ploi de tons les moyens propres � lui fermer les acces des organisraes sur lesquels eile pent avoir prise; et de tons ces acces, celui que representeut les voies diges�tives est un des plus largement ouvert.
C'est � faire la preuve de cette verite que je vais maintenant m'attacher, car la premiere condition pour qu'on se melte en garde contre la tuberculose est que les convictions, fortement faites � l'endroit de ses dangers, inspireut a chacun et � tons la ligne de con-duile qu'il convient de suivre pour en eviter les effets.
Multiplions done les preuves afin que ce qui est evi�dent, des maintenant, dans le domaine de la science, acquiert le meme caractere d'evideuce aux yeux de tons et que chacun, dans les limites de son action propre, contribue � l'ceuvre de la preservation com�mune.
Depuis que M. Villemin a signale la contagiosite de la tuberculose et l'a demontree par ses remarquables
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experiences, un grand nombre d'experimentateurs en France, en Allemagne, en Italic, en Angleterre out sou-mis sa decouverte � une verification experimentale et en ont donne I'eclatante confirmation. Si j'etais charge d'un cours de facultes, il me faudrait faire un his-torique complet, o� je passerais en revue tous ces tra-vaux. Mais l'objet de ce cours n'est pas de faire l'his-toire de la science; le but que je me propose est de con-tribuer � son progres, dans la mesure des moyens dont je dispose, en reunissant autour de ce que je crois elre la verite tout ce qu'il est necessaire de prouver pour la faire prevaloir et l'imposer aux esprits.
Dej� pour arriver � ce resultat, je me suis inspire des travaux de M. Chauveau. Je vais en citer un certain nombre d'autres qui me paraissent avoir une valeur demonstrative toute particuliere, pour I'eclaircissement de la question que j'ai specialement en vue: la possi-bilite de l'infection tuberculeuse par les voies diges�tives.
Je demanderai � M. Villemin lui-meme les premiers documents que je veux inserer ici. Ils datent de 1869. Dans trois series d'experiences faites sur des lapins et des cobayes, M. Villemin a etudie les eifets de l'in-gestiou digestive soit de liquides dans lesquels on avait triture un morceau de poumon d'homme tuber-culeux, qu'on administra avec de la farine, sous formes de petites boulettes molles, de la grosseur d'un petit haricot, au nombre de huit � dix par lapins; soit en fin de p�tes de consistance d'opiat, faites avec du son et des crachats de phthisiques, et donnees � des cobayes,
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au nombre de quatre, qui eu out pris, chacua, envi�ron quarante grammes, sans difficultes.
L'examen autopsique de ces animaux a demontre :
1deg; Sur deux des trois de la premiere serie, des le�sions tuberculeuses des poumons, de la rate, des gan�glions mesenteriques. Le troisieme est sorti indemne de l'epreuve.
2deg; Sur un des deux de la deuxieme serie, des lesions tuberculeuses de la rate et du foie, du grand epiploon, des ganglions mesenteriques, du coecum, de Tintestin grele. Quant � l'autre lapin de cette serie, aucune lesion.
3deg; Surles quatre cobayes, qui avaient ingere des era-chats de phthisiques, incorpores � du son, les lesions tuberculeuses out ete constatees, sur tous, dans les poumons, la rate, le foie, les ganglions mesenteriques, I'intestin grele, le coecum, etc.
laquo; Ces observations font voir, dit M. Villemin, que les matieres tuberculeuses ingerees agissent sur les tissus et sur les organes d'election habituels an tuber-cule. Le tube digestif lui-meme, natureliement impres-sionne le premier, n'est pas atteiut indifferemment dans toutes ses parties, mais toujours dans celles qui se montrent affectees lorsqu'il s'agit d'uue tuberculose naturelle ou nee de rinoculaliou sous-cutanee. raquo;
II y a, dans cette election de lieu, la preuve que la matiere tuberculeuse est bien virulente, c'est-�-dire qu'elle renferme un element vivant qui se developpe de preference dans les tissus le plus aptes, par leur com�position organique, � lui servir de milieu de culture
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M. le professeur Parrot a presente � la Societe raedi-cale des h�pitaux, en 1869, des pieces d'autopsie pro-veuant d'animaux qui avaient ingere des matieres tu-berculeuses et avaient ete infectes de tuberculose � la suite de cette ingestion.
De son cote, M. le professeur Saint-Cyr, de l'ecolc veterinaire de Lyon, en experiraentant sur des veaux et des genisses de six mois, en parfait etat de sante, a obtenu des resultats analogues � ceux qui ont ete donnes par les experiences de M. Chauveau. La dose de la matiere tuberculeuse, donnee � un premier sujet, a ete de 60 grammes, administres en deux jours. A son autopsie, faite deux mois apres, on a constate une degenerescence tuberculeuse des plus manifestes des deux ganglions retro-pharyngiens et de plusieurs gan�glions mesenteriques. Trois granulations seulement � la surface d'un des poumons, tous les deux parfaite-ment sains d'ailleurs.
Sur un autre veau, de la matiere tuberculeuse broyee et delayee dans un peude lait, a ete administree trois jours de suite, � la dose de 30 grammes chaque fois. � Deux autres doses de 20 grammes, chacune, ont encore ete donnees, un mois apres les premieres.
Ce veau a vecu deux mois, apres la premiere inges�tion. A son autopsie, on constata I'infiltration tuber�culeuse des ganglions retro-pharyngiens et d'un bon nombre de ganglions mesenteriques ; tumefaction tu�berculeuse de trois plaques de Peyer. � Rien ailleurs.
Sur deux veaux, iemoms de ces deux experiences et soumis an raeme regime alimentaire que ceux aux-
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quels la raaliere tuberculeuse a et6 administree, I'au-topsie n'a permis de constater aucune alteration.
M^mes resultats obtenus en Allemagne par des pro-fesseurs des ecoles veterinaires de Hanovre et de Dresde. AHanovre,sur quatre lapins qui mangevent de la viande provenant d'un pore fortement tuberculeux, deux furent reconnus tuberculeux au bout de trois mois. Sur quatre autres lapins qui furent nourris avec les poumons tuberculeux de ce meme pore, on constata les lesions de la tuberculose � un haut degre; et de meme, mais � un degre moindre, sur quatre lapins qui avaient ingere des lubercules de vache.
Par contre, quatre derniers lapins, nourris avec des matieres tuberculeuses cuites, echapperent � la ma-ladie.
L'experience de l'^cole veterinaire de Dresde pre-sente ce nouvel interet qu'elle a pour sujet un ani�mal d'une espece � laquelle on ne s'etait pas encore adresse pour la soumettre � cette epreuve.M. Leisering, professeur � cette ecole, a fait prendre � un mouton, pendant trois jours, des ganglions lymphatiques tuber�culeux provenant d'une vacbe. Des le quinzieme jour, le thermometre indiquait une augmentation de tempe�rature de 1deg; � 10,5. Vers la sixieme semaine, on cons�tata de la toux, de l'emaciation; vers la dixieme, la respiration s'aecelera et 1'auscultation denonga des le�sions pulmonaires � droite. A l'autopsie de ce mouton, qui fut tue le quatre-vingt-cinquieme jour, on constata des uleerations sur la muqueuse intestinale, avec de petites tumeurs tuberculeuses; les ganglions mesen-
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teriques etaieut tuberculeux ; le foie, ainsi que le pou-mon, se trouvait rempli de tubercules.
Un autre mouton, qui ne regut qu'une fois 20 grammes de matiere tuberculeuse, fut egalement in-fecte par la tuberculose.
Enfin M. Z�rn, professeur � la station agronomique de lena, a reussi � infecter des pores par la tubercu�lose, en leur faisant prendre d'abord du lait d'une vache phthisique, puis de la viande provenant de cette vache.
Des experiences sur les lapins donnerent le meme resultat.
Si cette experience est concluante, au point de vue de la contagiosite, eile ne permet pas malheureuse-ment de distinguer la part qui pent revenir soit au lait, soit� la viande, comme instruments respectifs de la contagion. Nous verrons plus loin que d'autres expe�riences fournissent, sur ces deux points, des elements d'une solution plus complete et plus satisfaisante.
Jusqu'� ce moment, la concordance est parfaite entre les resultats des experiences de tons les experimenta-teurs. La preuve semble sortir evidente de toutes les epreuves auxquelles ils ont soumis des animaux de differentes especes, que les voies digestives sont des cliemins ouverts par lesquels les elements de l'infec-tion tuberculeuse peuvent trouver un acces facile dans l'organisme, quelle que soit la matiere qui serve d'ex-cipient � ces elements : substance pulmonaire infiltree de tubercules ou de matiere caseeuse; ganglions lym-pbatiques tuberculeux; muscles, lait, provenant d'ani-
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140nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPAREE.
maux tuberculeux, crachats, etc. Voici qu'un nouvel experimentateur va entrer en ligne, pour rompre cet accord et venir s'inscrire, au nom de ses propres expe�riences, contre les resultats iuvoques par tant d'autres � l'appui de la verite de la decouverte de M. Villemin. Cet experimentateur est M. Colin, d'Alfort.
M. Colin est un peu taille sur le patron d'Alceste :
laquo; Le sentiment d'autvui n'est pas fait pour lui plaire;
et
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Mais, apres tout,
laquo; Get esprit contrariant qu'il a regu des ciem raquo;
lui a fait jouer uu role qui, dans bien des circons-tauces n'a pas laisse d'avoir son utilite, en obligeant ceux dont il s'etait coustitue le contradicteur � de nouveaux efforts pour soutenir la verite de leur opinion et en faire eclater 1 quot;evidence. C'est ce qui est arrive pour M. Villemin et M. Chauveau dans la lutte qu'ils out eu a soutenir contre M. Colin, opposant � leurs experiences celles qu'il avait faites lui-meme, et s'appuyant sur elles pour s'inscrire contre la justesse des conclusions des leurs.
II est necessaire d'entrer � ce sujet dans quelques details, car on se trouve ici en presence d'une question de methode et l'examen des faits conduit facilement a cette conclusion que si les resultats des experiences de M. Colin semblent contradictoires de ceux qu'ont ob-tenus MM. Villemin et Chauveau, cela depend unique-
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ment des conditions differentes quot;dans lesquelles ces experiences ont ete faites.
Que fallait-il faire, tout d'abord, en presence des re-sultats annonces? Se mettre dans les conditions memes o� s'etaient places les experimentateurs qui les avaient obtenus et voir s'ils se reproduiraient exactement sem-blables. M. Colin s'abstient de ce premier controle : au lieu d'injecter dans le tissu cellulaire la matiere servant d'excipient � l'element actif de la tuberculose, il I'etale sur la peau depouillee de son epiderme, ou sur les membranes muqueuses les plus absorbantes, ou bien encore dans des petites piq�res de la peau, faites au moyen de la lancette, et ne voyant rien se produire dans ces conditions, il en a conclu que laquo; le tubercule n'est ni specifique ni virulent raquo;. Mais, dans les expe�riences de M. Villemin, dans celles de M. Chauveau et des autres experimentateurs que j'ai cites tout � l'heure, on voit I'infection tuberculeuse generalisee faire suite comme fatalement, tant les exceptions sont rares, � l'ingeslion de matieres tuberculeuses dans le canal digestif d'animaux de differentes especes.
Eh bien,M. Colin a fait aussi des experiences d'in-gestion digestive sur une serie d'animaux de differen�tes especes, savoir: deux taureaux de un an � quinze mois, deux beliers adultes, quatre jeunes pores, plu-sieurs animaux de l'espece canine, une serie de lapins d'�ges divers, et plusieurs cochons d'Inde; et, cbose assez singuliere, tandis que M. Villemin et tous les experimentateurs, M. Chauveau en tete, qui ont con�trole ses experiences, sont d'accord pour reconnaitre,
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d'apres les fails observes par eux, qua la tuberculose est transmissible par les voies digestives, M. Colin ne voit aucun phenomeue de cet ordre se produire sous ses yeux; tous les sujets de ses experiences, � quel-que espece qu'ils appartienneut, sortent indemnes des epreuves auxquelles il les a soumis ; et, alors conside-rant comme non avenus les resultats obtenus par les autres experimentateurs, il est arrive � cette conclu�sion : laquo; Que l'iugestion reiteree et en masse de la raa-tiere tuberculeuse � ses differents etats, l'ingestiou de la chair, du sang, des muscles, des mucosites bronchi-ques provenant des sujets tuberculeux, ne dunnenl lieu ni � la phthisic pulmonaire, ni � aucune autre tuber-culisation viscerale raquo;. �'o� cette consequence, suivanl lui, que l'usage de la chair des animaux phthisiques n'entraine pas les dangers qu'on lui a attribues. M. Co�lin insinue, � la fin de la note o� il donne � l'Academie de medecine (27 mai 1873) la relation de ces faits, que s'ils sont en desaccord avec ceux des experimen�tateurs qui l'ont precede, cela tient et aux mauvais choix des sujets d'experience, et � des fautes com-mises dans rexperimentatiou: laquo; Je suis couvaincu, dit-il, que ces resultats (ceux qu'ils a obtenus) seront ceux de tous les experimentateurs qui auront soin de ne pas operer sur des sujets tuberculeux et qui s'abs-tiendront de faire avaler par force la matiere tubercu�leuse ecrasee et delayee, laquelie, en tombant dans les voies aeriennes pent donner lieu � des pneumonies caseeuses plus ou moins etendues raquo;.
Puis, non content d'opposer ses faits negatifs aux
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faits positifs observes par les experimeutateurs qui I'ont precede, il a recours � des raisonnements, sui-vant une methode qui lui est assez habituelle : laquo; S'il est vrai, dit-il, que le tubercule n'est point absorbe, ni sur ie derme denude, ni dans les solutions de con-tinuite superficielies de son tissu, o� toutes les ma-tieres virulentes sont prises avec tant de facilite, comment concevoir qu'il puisse I'etre sur une mem�brane muqueuse intacte, qui n'a pas mfime le pou-voir d'ubsorber un veniu aussi actif que celui de la vipere et un poison aussi violent que le curare ? raquo;
M. Colin oublie, volontairement ou non, en arguant de ces faits, que la preuve est faite par les experiences directes sur le virus de la morve et du charbon, de la possibilite de la transmission de ces maladies par les voies disgestives. Plus loin, M. Colin invoque, � I'appui de ce qu'il appelle laquo; sa these de la non absorb-tion du tubercule par les membranes muqueuses laquo; ce fait experimental, suivantlui, significatif, que la pulpe tuberculeuse peut-etre maintenue entre les paupieres et le globe de l'oeil, pendant plusieurs heures, soit par les doigts d'un aide, soit par une bandelette agglutina-tive^ sansproduire aucun effet; et Ton sait, ajoute-t-il, si le pouvoir absorbant de la conjonctive est faible raquo;.
Mais que dirait M. Colin si Ton se servait de ce raisonnement pour essayer de prouver que la trichine n'est pas infectante,parce qu'elle ne se degagerait pas de son kyste sous la paupiere o� Ton maintiendrait un fragment du muscle qui en est farci ? Est-ce qu'on ne pent pas admettre que les liquides digestifs, en exer-
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Qant leur action dissolvante sur les matieres orga-uiques qui servent d'excipients aux elements de la vi�rulence, degagent ceux-ci qui leur resistent, en verlu de leur vitalite, comme fait la trichine liberee de son kyste, et qu'ils se trouvent ainsi aptes � passer daas les vaisseaux absorbants et � aller manifester � dis�tance leur activite qui se traduit par des tuberculi-sations disseminees ?
Depuis la decouverte de la nature parasitaire de la tuberculose, cette hypothese n'est pas, ce me semble, sans quelque vraisemblance.
Mais qu'est-ce que les raisonnements a priori de M. Colin avaient � faire ici ? Un probleme se posait devant lui: celui de la discordance qui existait entre ses propres resultats et ceux des autres experimenta-teurs. Au lieu d'en chercher la solution, M. Colin prend le parti plus commode de considerer ceux-ci comme nuls et d'invoquer, pour les annuler, la nature des choses, comme il lui semble qu'elle doit etre. Les faits contradictoires des siens ne peuvent pas etre,laquo; car comment concevoir qu'ils soient? raquo; Ainsi raisonne-t-il; si son esprit, s'inspirant de certaiues analogies ne s'ac-commode pas � un fait, il ne le croit pas possible et refuse de l'admettre. On peut aller loin dans la ne�gation avec de pareils raisonnements.
En fait de mauere experimentale, il ne faut jamais opposer des negations � des resultats nouveaux, meme lorsqu'ils paraissent le plus contraires laquo; aux dounees les plus positives de la science actuelle raquo;; je me sers ici des expressions qu'a employees M. Colin pour con-
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tester l'absorption de la matiere tuberculeuse par la muqueuse iutestinale. Quand un fait nouveau apparait, il faut s'assurer qu'il est, en se mettant, pour le faire apparaitre, dans les conditions memes oicelui qui I'a decouvert I'a vu se produire ; et, une fois que la certi�tude est acquise de sa realite, tons les raisonnements du monde ne pourront pas faire qu'il ne soit pas. Tous les a comment concevoir que raquo; demeurent sans valeur devant lui. Qu'il soit etonnant, invraisemblable, in�comprehensible; qu'il se trouveen contradiction laquo; avec les donnees les plus positives de la science actuelle raquo;; il est: done il faut l'accepter. Y a-t-il rien de plus ex�traordinaire que ce que determine M. Brown Sequard lorsqu'en coupant un sciatique sur un cobaye, il donne lieu � la manifestation de l'epilepsie et, qui mieux est, de l'epilepsie hereditaire ? C'est ici que les laquo; comment concevoir que... raquo; pourraient etre excla-mes I Mais tout inconcevable que soit la chose, il faut bien I'admettre puisqu'elle est.
Je reviens, en quelques mots encore, sur I'argumen-tation de M. Colin � l'endroit de la decouverte de M. Villemin. � Vous vous rappelez que ce qui donne aux injections sous cutanees de matiere tuberculeuse leur signification si remarquablement differentielle des injections de matieres purement irritantes, c'est le delai qui se passe entre le moment ou la matiere tuber�culeuse est mise en rapport avec le tissu cellulaire et celui o� eile accuse sa presence par de premiers effets. Ce delai peut etre de 10 � 20 jours, qui representent comme une periode d'iucubation, au bout de iaquelle
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l'activite vivaate des elements associes � la gangue de la matiere injectee se traduit par le developpement d'une tumeur graduellement grandissante, qui decroit ensuite en se bosselaut irreguiierement, mais ne se resout jamais. De ce fait si caracteristique M. Colin ne dit mot, sans doute parce qu'ii geuait Tinlerpreta-tion qu'il voulait t�cher de faire prevaloir, de l'action toute mecauique de la matiere tuberculeuse, qui, trans-portee materiellement dans les vaisseaux, comme les grains de matiere colorante, dans le cas de tatouage, s'accumule dans les ganglions lymphatiques dont eile determine le gonflement inflammatoire.
Suivant M. Colin, les effets de l'inoculation tuber�culeuse seraient toujours proportionnels � la quaulite de la matiere tuberculeuse injectee, et ce seraient sur-tout les pheuomenes pyogeniques qui joueraient le role principal dans la manifestation des effets consecutifs � l'inoculation par injections sous-cutanees. M. Colin oubliait, en soutenant cette these, les tuberculisations generalisees que Ton a pu produire par Tingestion di�gestive de faibles quantites de matiere tuberculeuse. Du reste, nous le verrons ulterieurement, lui-meme a fourni contre cette opinion, qu'il soutenait devant l'Academie de medecine, en 1873, I'argument le plus propre � demontrer qu'elle n'etait pas fondee, en trans-mettant la tuberculose avec s�rete par des inoculations de petites quantites.
Si j'ai insiste, avec quelques details, sur les expe�riences qu'a faites M. Colin, en vue de conlr�ler celles de M. Villemin, et d'eu contredire la signification,
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c'estque, dans cette affaire, la methode experimeutale etait elle-meme en cause, et qu'il est toujours regret�table que rinobservation de ses regies conduise a des cousequences qui semblent impliquer qu'elle peut 6tre raise en defaut, et qu'on peut lui faire produire des re-sultats coatradictoires, c'est-�-dire lui 6ter, dans les choses de la medecine, ie caractere de certitude qui lui appartieat essentiellement. Notons bien que ces re-sultats contradictoires sont volontiers acceptes, corarae une arme contre eile, par ceux dout I'esprit ne s'ac-comraode pas, immediatemeut tout au moins, aux idees nouvelles qui contrarient les leurs : laquo; Que prou-vent les experiences sur lesquelles on veut s'appuyer pour demontrer la verite de ces idees, puisque, aussi bien, on peut en invoquer d'autres, ayant, dit-on, tout autant de valeur et qui contredisent les premieres raquo;. Ceux qui raisonneat aiusi, et ils sout assez nombreux, meconnaissent, de la maniere la plus complete, les principes de la methode experimeutale, car ils serablent admettre que les faits peuvent 6tre contradictoires, c'est-�-dire qu'etant douue et bien etabli le determi-nisrae d'un phenomene, on pourra voir se produire, daus des conditions toujours les m�mes, tant�t un eifet, et tant�t un autre, different du premier et qui meme en est la negation. Mais cela n'est pas plus admissible dans le domaine de la medecine on de la physiologie, que dans celui de la chimie on de la physique. Dans toutes les experiences instituees pour la solution d'un probleme si, les conditions pour la manifestation d'un phenomene etant supposees semblables, on voit des
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effets ou differents ou meme opposes se produire, cela implique forcemeat que ces conditions ne sont pas ce qu'elles paraissent, et qu'il y a entre elles des dissimi�litudes qui se traduisent par la dissimilitude des re-sultats. Voil� las vrais principes en la matiere; et on les meconnait d'une maniere absolue, lorsque, voulant contr�ler une experience, on se place, pour en veri�er les resultats, dans des conditions autres que celles oil le premier experimentateur s'etait mis.
C'est ce qu'a fait M. Colin vis-�-vis deM. Villemin; et voil� la raison du defaut de concordance des resul�tats qu'il a obtenus avec ceux qu'ont vu se produire les experimentateurs qui ont marche fidelement sur les traces de M. Villemin, et ont su s'astreindre � re-peter exactement d'abord ce qu'il ava'it fait.
La marche suivie par M. Colin n'a pas eu seulement cette consequence f�cheuse de jeter le desaccord sur des points de faits o� la contradiction n'aurait pas du exister, puisque le determinism e de ces faits etait connu; eile a eu cet autre resultat que, dans la pra�tique, les autorites qui ont la charge de l'application de mesures sanitaires en rapport avec la nature des choses, sont restees indecises devant les incertitudes et les contradictions apparentes de la science, et se sont abstenues d'autant plus que les consultations, qu'elles ont demandees aux hommes qui etaient le mieux a mime de les eclairer par leur competence technique, se sont ressenties de ces incertitudes et de ces indecisions. Comme dans les questions toutes coujecturales, il a paru possible d'opposer des opinions
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� des opinions, tandis que, en realite, las faits etaient univoques et ne comportaient pas de contradictions.
Tel est encore l'etat de choses; les municipalites des grandes villes s'inquietent, consultent et, la plupartdu temps, ne recoivent que des avis sans fermete, parce qu'ils sont le reflet des incertitudes qu'ont fait naifro dans les esprits les resultats, en apparence, contradio-toires de l'experimentation sur cette question, qu'on pent appeler de salut public : celle de la contagiosite de la tuberculose et, tout particulierement, de sa trans�mission possible par les voies digestives.
On ne saurait done trop multiplier les preuves qui temoignent de cette contagiosite par toutes les voies ouvertes aux elements de la virulence, et surtout par les voies digestives, o� ces elements peuvent trouver un acces si facile et si souvent renouvele. C'est ce que je m'efforcerai de faire dans les logons qui vont suivre.
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NEUVIEME LECON
1,A CONTAGIOSITfi DE LA TUBERCULOSE
Les fails ne peuvent Ctre contradictoires. � Proposition de M. Chauveau de faire des experiences, de concert avec M. Colin, devant une commission del'Academie demedecine, � Solution que I'liyfri�ne publique reclame. � Refus parM. Colin detoute collabo�ration avec M. Chauveau. � Le cartel adresse dans des circons-tances analogues par M. Pasteur aus professeurs de l'Ecole veteri-naire de Turin, nu sujel des resultats dc leurs experiences sur la vaccination charbonneuse. � Programme des experiences publiques que M. Pasteur devait faire � Turin pour juger le diflerend. � La cause de ce dilKrend etait annoncee d'avance. � Refus des expe-rimentateurs Italiens d'accepter le programme propose. � Discus�sion prealable qu'ils exigent.� Hommage �M. Pasteur qu'implique ce refus. � La question a eteporlee devant l'Academie des sciences de Paris. � Cause demontrec de la discordance entre les resultats des experiences de Turin et ceux qui se sont produits ailleurs. � Tr6s fine analyse experimentale des faits. � La contradiction resullait des differences des conditions o� les experimentateurs etaient places. � Les experiences de M. Chauveau sur la tubercu-lose faite a Lyon devant une commission dc I'Association pour l'avancement des sciences, en 1872. � Resultats qu'elles out donnes. � Complications resultant de la promiscuite des animaux temoins avec les sujets d'experienco d'ingestion.� Elles temoignent de la contagiosite de la luberculose.
Messieurs,
Parmi les experimentateurs qui ontcontrole la belle decouvertedeM. Villemin, unseul, nousl'avonsdit, n'a
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pas vu se reproduire sous ses yeux les faits annonces par M. Villemin, et donttousles experimentateursqui out refait ses experiences avaient reconnu I'exactitude. Par la plus etrange des singularites, M. Colin n'a reussi � transmettre la tuberculose � aucun des sujets de differentes especes, sur lesquels il a experimente. Tous, meme les plus susceptibles, comme les bovides et les lapins, sont restes refractaires � ses tentatives d'infection par les differentes voies et, tout particu-lierement, par les voies digestives. D'o� venait ce desaccord? Evidemment, il ne pouvait dependre que des conditions differentes dans lesquelles M. Colin avait du se placer, car la methode experimentale ne comporte pas de telles contradictions entre les fails; et, quand alles viennent � se produire, il est necessaire d'en rechercher les causes, pour montrerqu'elles sontimpu-tabies non pas � la methode, mais� ceux qui ne se sont pas astreints � l'observation rigoureuse de ses regies. C'est ce que M. Cbauveau a bien compris : aux con�clusions si absolues que M. Colin avait formulees contre rinoculabilite de la tuberculose, en s'appuyant sur les resultats si etrangement negatifs de toutes ses expe�riences sur presque toutes les especes, M. Chauveau a fait la reponse la plus cntegorique, inspiree par les vrais principes de la methode. Voici, en effet, ce qu'il lui a dit dans une letlre adressee a l'Acad6raie demedecine, au sujet de ses experiences : laquo; M. Colin aurait-il a faire valoir, dans I'espece bovine, une masse de fails nega�tifs, que ceux que j'ai observes n'en conserveraieut pas moins toute leur valeur. Je serais en droit d'affir-
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mer que les faits recueillis par M. Colin n'ont pas ete obtenus dans des conditions strictement identiques aux miennes, ou, s'ils I'ont ete, qu'on n'a pas su chercher les lesions tuberculeuses o� Ton avait chance de les rencontrer. Que si M. Colin en doute, je lui propose de faire, de concert avec moi, et � fraiscommuns, une serie d'experiences, sous le contr�le d'une commission de l'Academie, et je m'engage � supporter la depense a moi seul, dans le cas o�, non pas tons, � il faut bien que je me reserve un peu de marge � mais les deux tiers au moins des animaux ne presenteraient pas de lesions tuberculeuses an bout de deux mois et m�me de six semaines. raquo;
En terminant, M. Chauveau formulait ainsi son opi�nion sur cette grave question :
laquo; L'hygiene publique est si gravement interessee � la solution de cette question, que l'Academie voudra peut-etre, en tout cas, la mettre � l'etude. Je tiens � dire � mes honorables collegues que leur conviction sera vite formee par les experiences qu'ils voudront bien instituer. Debarrassee de toute consideration theo-rique sur le virus et la virulence de la tuberculose, la question se reduit, en effet, pour le moment, � la cons-tatation de ce fait brut: L'ingestion de la matiere tu-berculeuse fait-elle naitre des lesions tuberculeuses sur les animaux de l'espece bovine?
laquo; Est-ce l� une question difficile �resoudre? Pour donner une idee du degre de simplicite que je lui at-tribue, je comprendrai ma reponse dans la formule suivante rendue systemaliquement absolue :
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COURS DE PATHOLOGIE COMPAR^E.
laquo; Sur quatre cents veaux de lait, nes de parents sains, il n'y en a peut-etre pasun qui presente � I'au-topsie la moindre lesion tuberculeuse, quand ils ont vecu en dehors de toute cause d'infection naturelle ou accidentelle.
laquo; Par centre, sur quatre cents veaux de lait, nes de parents sains, il n'y en aurait peut-etre pas un qui ne present�t des alterations tuberculeuses, soit dans les appareils lymphoides de l'intestin, soit dans les gan�glions mesenteriques, soit dans d'autres ganglions, soit ailleurs, si les animaux avaient avale de la matiere tu�berculeuse convenablement choisie.
a L'exactitude de la premiere partie de la formule etant garantie par Tacquieseement general de tous les observateurs qui se sont oecupes du sujet, on voit combien il est facile de verifier l'exactitude de la se-conde partie. raquo;
A cette proposition trbs loyalement faite, qui per-mettait de donner � la question une solution experi-mentale immediate, qu'a repondu M. Colin? laquo; Qu'il se mettait � la disposition de l'Academie pour les expe�riences qu'elle croirait utile de verifier; qu'il ofTrait de repeter � ses frais, sous les yeux des commissaires qu'elle designerait, les trente experiences qu'il avait faites sur la non-absorption du tubercule par les voies digestives; mais qu'il repoussait toute collaboration avec son adversaire, qui pourra etre appele, disait-il, � donner ses preuves de son cote. raquo;
Singuliere reponse et qui semble temoigner que M. Colin n'etait pas assez sur de lui-meme, c'est-a-dire
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de la rigueur des resultats de ses propres experiences, pour accepter un debat contradictoire. De quoi s'agis-sait-il, en effet? De s'entendre sur 1 es conditions dans lesquelles de nouvelles experiences devaient etre entre-prises, pour chercher et trouver la raison de la discor�dance entreles resultats obtenus. laquo; Non, dit M. Colin, je ne veux pas d'entente prealable : je rip�terai mes experiences dans les conditions o� je les ai faites, et TAcademie jugera; que laquo; mon advarsaire raquo; fasse les siennes de sou c�te. raquo; Mais, dans ces conditions, aucune solution n'etait possible, puisqu'il s'agissait justement d'arriver � faire la preuve experimentale que si M. Colin n'obtenait pas les memes resultats que les autres experimentateurs, cela dependait exclu-sivement de la maniere dont il experimentait.
Ici je demande la permission d'ouvrir une assez longue parenthese pour introduire un episode actuel qui sera bien � sa place, car il s'agit egalement d'un cartel scientifique, propose pour resoudre experimen-talement une question litigieuse, et � peu pres decline *nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; par les experimentateurs auxquels il a ete adresse.
Le grand avantage de la raethode experimentale, c'est de supprimer les discussions qui procedent des con�ceptions de 1'esprit sur la nature des choses. Taut que, sur une question donnee, on ne pent opposer que des opinions � des opinions, les chances sont grandes pour que les discours Solent longs et que les questions \nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; demeurent longtemps pendantes, faute d'une solution
qui s'impose par l'evidence de sa demonstration. Bien des discussions academiques portent temoignage.
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dans les choses de la medeciue, des incertitudes qui demeurent et des divergences qui persistent, meme apres les plus eclatanls debats, parce qu'aujourd'hui ce n'est plus laquo; le verbe raquo; seul qui a le pouvoir de con-vertir; l'eloquence n'a de valeur que si eile est mise au service d'unc verite toujours demontrable. Ce que Ton demande aujourd'hui, ce sont des actions, bien plus que des paroles; des actions, c'est-�-dire des preuves fournies par l'experimentation et que Ton peut toujours produire et reproduire.
Si M. Pasteur, par exemple, est toujours sorti victo-rieux des l�ttes auxquelles il a du prendre part pour soutenir ses idees contre les oppositions qui leur ont ete faites, c'est que toujours il a pu leur donner l'appui d'une demonstration experimentale, et convier ceux qui s'etaient constitues ses adversaires � venir faire la preuve, dans le champ clos du laboratoire, de la justesse des objections qu'ils croyaient pouvoir lui opposer.
Ce procede de discussion lui a toujours trop bien reussi pour qu'il ne fut pas determine � y recourir dans la circonstance que je vais relater.
Les professeurs de l'Ecole veterinaire de Turin s'etant propose de soumettre, de leur c�te, � une verification experimentale l'efficacite de la vaccination charbonneuse par la methode dont M. Pasteur est l'inventeur, instituerent, � cet effet, des experiences dont les resultats furent diametraleraent opposes � ceux qu'avaient donnes les experiences fameuses de Pouilly-le-Fort ettantd'autres, concordantes avec elles.
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qui furent pratiquees soit en France, soit � l'etran-ger. De fait, les moutons soumis � Turin � l'epreuve de l'inoculation virulente, aussi bien les moutons vaccines que les moutons non vaccines temoins, pe-rirent � la suite de cette inoculation. La nouvelle me-thode etait done mise en echec par ces resultats, puisque les moutons vaccines etaient demeures sans defense centre les attaques du virus mortel.
Teile fut, en effet, la conclusion que les experimen-tateurs de Turin se h�terent de tirer de leur expe�rience; et sans vouloir incriminer les intentions, je crois bien que, l'esprit de nationalite aidant, ce ne fut pas sans quelque satisfaction qu'ils en publierent les resultats.
Quelle etait la raison de cette contradiction si fla�grante entre les faits de Turin et ceux qu'avaient vu se produire les experimentateurs tres nombreux qui, en France et ailleurs, et � Turin meme, en dehors de l'Ecole veterinaire, avaient soumis la methode de M. Pasteur � une verification dont les resultats avaient ete conformes � ceux qu'avait donnes I'experience si concluante de Pouilly-le-Fort? Si les professeurs de l'Ecole de Turin avaient ete moins prompts, ils se seraient pose cette question qui surgissait, pour ainsi dire, d'elle-meme, du contraste des choses, et sans doute qu'en poursuivant leurs recherches � tete reposee, ils auraient eu le merite d'en trouver et d'en donner la solution.
Cette recherche qu'ils out neglige de faire, M. Pasteur ne pouvait manquer de Teutreprendre, car il ne fallait
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pas que les adversaires de la uouvelle vaccination res-tassent armes contre eile d'un argument d'autant plus puissant en appareuce qu'il semblait avoir la valeur d'un resultat experimental. En consequence, M. Pasteur fit son enquete, � distance, sur les circonstances dans lesquelles s'etaient produits, � Turin, les faits observes par les professeurs de cette Ecole. Un point principal etait � eclaircir : celui de la date exacte de la mort du mouton sur le cadavre duquel on avait puise le sang charbonueux dout on s'etait servi pour pratiquer I'ino-culation virulente aux moutons vaccines et aux mou-tons temoins. II resulte des renseignements fournis, � cet egard, par le directeur de l'Ecole de Turin, qu'un delai de plus de vingt-quatre heures s'etait ecoule entre le moment o� le mouton charbonneux etait mort et celui o� on lui avait emprunte le sang dont on s'etait servi pour l'inoculation de controle. Tout s'ex-pliquait par cette circonstance : ce n'etait pas seule-ment du sang charbonneux qu'on avait inocule, c'etait en meme temps du sang septique, et si les moutons vaccines n'avaient pas resiste plus que les moutons temoins, c'etait que leur vaccination charbonneuse etait impuissaute � les defendre contre la septicemie. Rien de plus simple que cette explication, de plus couforme � la nature des choses. M. Pasteur, fort de sa lougue experience personnelle, la donna, dans sa seance du 9 juin 1882, � la Societe centrale de mede-cine veterinaire en disaut laquo; que l'Ecole de Turin avait eu le tort de prendre du sang d'un animal mort depuis vingt-quatre heures au moins, et qu'elle s'etait
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aiusi servie, � son insu, d'un sang � la fois septique et charbonneux. raquo;
Sans doute, c'etait une legon que le maitre frangais donnait aux experimentateurs Italiens; mais, apres tout, c'etait une legen meritee, puisque ceux-ci, ou-blieux des regies de la methode, ne s'etaient pas as-treints � rechercher la cause de ce qu'il y avait de si completemeut contradictoire entre les resultats de leurs propres experiences et ceux des experiences faites avant eux, sur le meme objet, par des hommes ayant toute competence pour bien les diriger et en juger leseffets.
Cette legen ne fut pas du gre de ceux auxquels eile etait adressee, et, dans une longue lettre circulaire envoyee � tous les savants et � tous les jouruaux scien-tifiques des deux mondes, ils protesterent centre eile en des termes tres vifs, tout empreiuts d'une ironie qui masquait un depit veritable.
Cette lettre des professeurs de Turin temoigne evidemment qu'au moment o� ils Tont ecrite, ils n'e-taient pas au courant des beaux travaux aecomplis par M. Pasteur sur la septicemie, car, lui disent-ils en pro�pres termes, laquo; nous tenons pour merveilleux que Votre Seigneurie ait pu, de Paris, reconuaitre avec une si grande s�rete la maladie qui a fait tant de victimes parmi les animaux vaccines et nou vaccines, soumis � l'inoculation du saug charbonneux dans notre Ecole, le 23 mars 1882 raquo;. laquo; II ne nous semble pas possible, ajoutaient-ils, qu'un savant puisse affirmer l'existence de la septicemie chez uu animal qu'il u'a pas vu. raquo;
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Ne voil�-t-il pas deux propositions bien etranges! Est-ce que les connaissances plus completes que nous avons des choses, ue nous permettent pas de deviuer, dans les textes des anciens auteurs, � quelle maladie ils out eu affaire et quelles sont les confusions qu'ils ont pu commetlre, taute d'etre suffisamment eclaires? Ne savons-uous pas, par exemple, que le charbon blancamp;e nos anciens n'est pas de nature charbonueuse, et que ce qu'ils appelaient le farcin-volant n'a, avec le far�cin veritable, qu'uue analogic tout exterieure? Est-ce que, bien que nous riayons pas pu voir leurs malades, il ne nous est pas permis d'affirmer les erreurs qu'ils ont commises � l'endroitde leurs maladies? Supposons que les faits dont il s'agit icisesoient passes � distance de nous dans le temps, les professeurs Italiens se gar-deraient, saus doute, de tenir pour si merveilleuse la sagacite d'un critique qui, eludiant ces faits � la lu-miere de la science moderne, leur donnerait leur veri�table interpretation, en montrant que les experimenta-teurs du passe n'avaient pas su reconuaitre que les resultats de leur experience etaient entaches d'uue erreur par rintervention dune maladie meconnue par eux, et dont les effets les avaient mis en defaut � l'endroit de l'efficacite de l'inoculation preventive qu'ils se proposaient d'eprouver.
Les emerveillements de nos collegues de Turin n'avaient done pas de motifs serieux, Cependant M. Pasteur, fidele � sa raethode d'argumenter, voulut leur reudre le service de leur demontrer Terreur dans laquelle ils etaient tombes, en faisant devaul eux, et �
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Turin m�me, les experiences necessaires pour la metlre en evidence � leurs propres yeux. Voici, trace dans une lettre � leur adresse, le programme qu'il leur proposa :
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Messieurs,
Une contestation s'etant elevee entre vous et moi au sujet de l'interpretation k donner � l'echec absolu de votre expe�rience de contr�le du 23 mars i882, j'ai Fhonneur de vous informer que, si vous voulez bien l'accepter, je me rendrai a. Turin le jour que vous me designerez; vous inoculerez, en ma presence, le charbon virulent h tel nombre de moutons qu'il vous plaira. Pour chacun d'eux l'instant de la mort sera de�termine et je demontrerai que, chez tous, le sang du cadavre, d'abord uniquement charbonneux, sera le lendemain tout la fois seplique et charbonneux.
11 sera des lors etabli, avec une entiere exactitude, que I'as-sertion formulee par moi le 8 juin 1882, et centre laquelle vous avez protesle � deux reprises, correspondait, non a une opinion arbitraire, comme vous le dites, mais a un principe immuable, et que j'ai pu legitimement affirmer, de Paris, la seplicemie, sans qu'il fut le moins du monde necessaire que j'eusse vu le cadavre du mouton qui a servi � vos experiences.
Un proces-verbal sera dresse, jour par jour, des fails qui se produiront; il sera signe des professeurs de l'Ecole veterinaire de Turin et des autres personnes, medecins ou veterinaires, qui auront ete presentes aux experiences,
Enfin, ce proces-verbal sera rendu public par la voie des academies de Turin et de Paris. J'ai I'honneur d'etre,
L. Pasteur.
Rien de plus net que cette proposition, de plus simple aussi, et, ajouterai-je, de plus loyal. La lettre redigee par les professeurs de l'Ecole de Turin, pour repondre
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I�?nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPARfiE.
� l'explication donnee par M. Pasteur des resultats de leur experience de controle, avait eu le plus grand re-tentissement, grace � la prodigalite avec laquelle ils I'avaientrepaadue. M. Koch, de Berlin, s'en etaitservi dans sa polemique si passionnee contre les travaux du mailre framjais; et enfin M.Ie professeur Peter, de la Faculte de Paris, non moinspassionne, semblait-il, que le maitre allemand, s'etait fait un malin plaisir de lire, tout au long, � la tribune de l'Academie de mede-cine, la lettre italienne dont les auteurs, disait M. Peter, avaient tout doucettement egorgamp; le savant frangais, ou, autretnent dit, avaient mis � neant sa doctrine.
En un tel etat des choses et des esprits , M. Pasteur se devait � lui-m�me et devait � la medecine framjaise, � laquelle il a communique une si puissante impul�sion, de forcer ceux qui s'etaient constitnes ses adver-saires de venir confesser leur erreur devant la verite qu'il devait faire surgir, eclatante, des experiences publiques dont il avait trace le programme.
Mais il avait compte sans la timidite de ceux � qui il avait adresse son cartel scientifique. Sans doute que l'histoire du passe de M. Pasteur, sorti toujours triom-phant de luttes semblables, ne laissa pas que de leur inspirer quelque terreur, car, au lieu d'accepter pure-ment et sirnplement sa proposition, ils la declinerent, ou � peu pres, par une longue lettre qui ne comptait pas moins de dix-sept pages manuscrites, ou ils lui de-mandaienl des explications sur tout ce qu'il se propo-sait de leur montrer � Turin. Ce n'etait l�, pour ainsi dire, qu'une Qu de uon-recevoir, car les explications
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reclamees etaieut inscrites, tout au long, dans les com�munications faites, en 1877, � l'Academie des sciences sur le charbon et la septicemie, et les experimentateurs de l'Ecole v�terinaire de Turin n'avaient qu'� consul-ter ces documents, pour savoir o� M. Pasteur puisait la terme assurance avec laquelle il les avait coavies aux experiences publiques dont il leur avait trace le programme.
M. Pasteur, ne voulant pas donner ouverture � des discussions sans fin, se maintint rigoureusement dans les termes de sa premiere proposition, ayant pour ob-jet bien determine de faire la preuve experimentale que le sang d'un mouton mort du charbon reste d'abord exclusivement charbonneux, et devient, le lendemain, tout � la fois septique et charbonneux. G'etait une simple constatation materielle qu'il s'agissait de faire; et, ce point etabli, tout se serait eclairci, car la raison e�t ete donnee de ce qu'il y avait de contradicloire entre les faits observes � Turin et ceux qui s'etaient produits devant les experimentateurs des autres pays. Mais la commission italienne ne voulut pas accepter un programme dans lequel eile prevoyait bien qu'elle allait se trouver enserree, sans qu'aucun pas de recul lui f�t possible ; et, dans uue lettre d'assez mauvais gout, ou. M. Pasteur est compare � un duelliste qui se reserve le choix des armes et ne combat qu'� coups surs, eile declara ne pas vouloir accepter le defi de M. Pasteur tant qu'elle n'en aurait pas regu les explications qu'elle lui avait demandees.
A bien considerer les choses, ce refus a ete un hom-
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mage, bien involontaire sans doute et bien force, mais reel, que la comraissioa de l'Ecole veterinaire de Turin a rendu au savaut frangais. La comparaison qu'elle en a fait avec un duelliste de professioa n'implique-t-elle pas, en effet, et sans qu'elle s'en soit doute, un bien grand eloge. Quoi de plus elogieux que de dire � un savant qu'il est si bien arme par la science, c'est-�-dire si pleinement en possession de la verite, qu'il est s�r de faire tomber toutes les objections qu'on lui op�pose et d'obliger ses contradicteurs � se rendre.
En cet etat de cause, M. Pasteur prit le parti de porter la question devant l'Academie des sciences de Paris et de lui presenter l'expose de la demonstration qu'il aurait faite � Turin, si son programme e�t ete accepte par ceux qu'il voulait convaincre.
La question soulevee par les experiences de l'Ecole veterinaire de Turin est la meme qui s'est produite, il y a quinze ans, lorsque MM. Jaillard et Leplat oppo-serent � la doctrine bacteridienne du charbon, queDa-vaine avait etablie sur ses experiences si ingeiiieuses, les resultats qu'ils avaient vu se produire � la suite de l'inoculation d'un sang de source charbonnense qui leur avait ete envoye de Chartres. Les sujets inocuies etaient morts et l'examen microscopique de leur sang n'y avait pas fait reconnaitre de bacteridie. laquo; Done le charbon n'est pas la maladie de la bacteridie raquo;, comma Davaine le pretendait. Teile etait la conclusion, en ap-parence rigoureuse, que MM'. Jaillard et Leplat avaient deduite de leurs experiences. Davaine les reprit, cons-tata la realite du fait materiel, observe par MM. Jail-
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lard et Leplat, mais fort des convictions qu'il avait pui-sees dans les resultats de ses recherches anterieures, il admit, avec une grande finesse d'observation qu'� cote de l'element charbonueux, condition exclusive de la manifestation du charbon, pouvait s'en trouver un autre, encore indetermine pour lui, susceptible de transmettre par I'inoculation une maladie, mortelle comme le charbon, mais qui etait tout autre. Cette maladie, il la designa provisoirement sous le nom, quelque peu singulier, de maladie de la vache, par le-quel il se proposait de rappeler la source oii avait ete puise l'element contagieux qui pouvait coexister dans le sang d'une vache charbonneuse avec l'element char-bonneux lui-meme. C'est alors qu'intervint M. Pas�teur, avec son collaborateur de cette epoque (1877), M. le Dr Joubert, et que le mot de l'enigme fut trouve. Ces deux experimentateurs reconnurent que l'element virulent d'o� procede la maladie de la vache, si fine-ment distinguee par Davaine de la maladie charbon�neuse, etait un element septique qui, a un certain moment apres la mort, vient s'ajouter � l'element char�bonueux et pent determiner, par son inoculation, la maladie, autre que le charbon et independante de lui, que les hasards de l'experimentation avaient fait sur-gir sous les yeux de MM. Jaillard et Leplat. Tout se trouvait corcilie par cette remarquable analyse qui faisait disparaitre ce que les faits de l'experimenta�tion avaient serable avoir de contradictoire entre eux. CTest parce que M. Pasteur etait eclaire par les re�sultats de ses belles experiences, faites en 1877 avec
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le concours du Dr Joubert, qu'il a pu, a cette clart^, voir de Paris ce qui s'etait passe � l'Ecole vetcrinaire de Turin, et tracer, avec une complete assurance, le programme des experiences, bien simples aujourd'hui, par lesquelles ii se proposait de mettre en evidence l'erreur commise.
Ces experiences auxquelles les professeurs de l'Ecole veterinaire de Turin se sont refuses d'assister, M. Pasteur en avait fait faire la repetition par celui de ses collaborateurs, M. Roux, qui I'aurait accompagne � Turin, afin que tout f�t, comma il l'a dit � TAcade-mie, d'une clarte saisissante devant la commission italienne. Et il est vraiment regrettable que cette com�mission ait laisse echapper la belle occasion qui lui etait Offerte de reconnaitre son erreur et de la con-fesser loyalement.
Jugez, en effet, par les resultats dont M. Pasteur a donne communication � i'Academie dans sa note d'hier, combien la demonstration e�t ete frappante et irrefragable.
Le 5 mai,un mouton inocule etant mort du char-bon, I'autopsie en rfut faite vingt-six heures apres la mort, et Ton ensemenga une goutte de sang extrait du coeur dans du bouillon sterilise : l'une des cultures fut faite an contact de Pair et l'autre dans des tubes propres � faire le vide.
Ce meme sang fut, en outre, inocule � \\n mouton.
Des le lendemain, la culture � l'air fournit de la bacteridie cbarbonneuse qui, inoculee a deux cobayos, les fit perir du charbon pur. La culture dans le vide '
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fut, au contraire, septique; inoculee � deux cobayes, eile les a fait perir de la sepliccmie la plus aigue en moins de vingt-quatre heures.
Le mouton iuocule avec le sang du coeur mourut egalement septique le leodemain de l'inoculation.
Ainsi, quand, sur un raouton mort du charbon les conditions de la septicemie ont ete realisees par la longueur du temps ecoule depuis la mort, on peut facilement retirer de son corps le charbon et son mi�crobe d'une part; et, de l'autre, ia septicemie et son microbe egalement.
Que faut-il pour cela? Faire les cultures du sang en-semence dans les conditions qui sont appropriees � la vie de ces microbes respectifs. La bacteridie ayant besoin, pour se multiplier, de l'oxygeue de l'air, doit sect;tre cultivee � l'air libre.
Le vibrion septique etant anaerobic, doit 6tre cul-tive soit dans le vide, soit en presence de I'azote ou de l'acide carbonique purs.
Le m^me sang, extrait d'un cadavre charbonneux-septique, peut done fournir Tun ou l'autre de ces mi�crobes, suivant les conditions o� Ton place les liquides de culture : sous l'influence de l'air, e'est la bacteridie qui pullule, tandis que le vibrion septique meurt � son contact. Inversement, le vibrion septique prospere dans un liquide sur lequel Faction de l'air ne peut pas se faire sentir, tandis que la bacteridie y suc-combe. laquo; Teile est I'analyse, aussi sure et plus rapide qu'une analyse chimique, dit M. Pasteur dans sa com�munication academique, que nous aurions fait subir
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au saug du coeur d'uu mouton, le leudemaiu de sa mort en presence de l'Ecole de Turin. raquo;
laquo; II y a, dit-il encore, une autre maniere, moins pre�cise et plus sujette � illusion, d'etudier un sang qui est � la fois charbouneux et septique: c'esl Tinoculation directe du sang � des animaux de races diverses, cobayes, lapins, moutons, saus operer prealablement la separation des deux microbes que le sang contient. Dans ce cas, suivant l'etat de receptivite des sujets ino-cules, et suivant les rapports de developpement des deux maladies dans le sang doublemeut infectieux, on voit apparaitre tantot le charbon pur, tant�t la septi-cemie pure; tantot le charbon et la septicemie associes. II arrive meme que, au cours des sympt�mes qui sui-vent l'inoculation, on voit parfois l'une des maladies se substituer � I'autre. Tel cobaye, par exemple, mourra charbonneux, apres avoir manifeste, en pre�mier lieu, des sympt�mes septiques. Le cas inverse peut se presenter egalement. raquo;
Quelle fine analyse des phenomenes! Quand jamais le diagnostic differentiel a-t il pu etre fait avec tant de s�rete et de precision? Et il s'est rencontre un pro-fesseur de la Faculte de medecine de Paris qui a ose proposer � l'Academie de repudier M. Pasteur, sous pretexte qu'il n'etait pas medecin!
Vous comprenez maintenant, Messieurs, pourquoi les professeurs de Turin se sont derobesal'epreuveque leur proposait M. Pasteur; trop s�rs de ne pas en sortir victorieux, ils onl prefere ne pas etre forces de signer, eux aussi, le proces-vetbal de leur defaite et
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ils se sont retranches derriere une question de forme qui leur evitait ce qu'ils devaient considerer comme un affront, apres avoir donne un si grand relentis-sement aux reponses contradictoires qu'ils avaient adressees � M. Pasteur.
Malgre leur resistance, la question scientifique que soulevaient les experiences de l'Ecole de Turin n'en est pas moins jugee et d'une maniere definitive. Si dans leurs inoculations de contr�le, les experimenta-teurs de l'Ecole de Turin out vu perir, tout � la fois, les moutons non vaccines et ceux que la vaccination aurait du proteger, e'est que le virus puise dans le cadavre du mouton charbonneux mort depuis plus de vingt-quatre heures, etait le virus septique.
Voil�, n'est-ce pas, une preuve bien eclatante de la grande certitude avec laquelle une question de mede-cine pent etre resolue quand il est possible de denian-der�l'experimentation les elements de sa solution. Les experimentateurs italiens qui n'ont peut-6tre pas su assez sedefendre. dans cette affaire, dos sentiments de misogallisme dont leur pays est auime, ont eu beau repandre beaucoup d'encre pour faire prevaloir leur opinion, il a suffi d'ensemencer quelques gouttes de s�nget d'inoculer ensuite quelques gouttes de liquides de culture, pour que la lumiere se fit; et eile est faite.
Get episode a ete un pen long; mais il est si plein d'enseignements � tons les points de vue, que je suis convaincu que vous ne regretterez pas d'en avoir en-tendu le recit.
Je reviens k la tuberculose.
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Je vous disais tout � l'heure que M. Colin avait re�fuse peremptoirement de faire, de concert avec M. Chau-veau, les experiences de contr�le que celui-ci lui avait proposees d'apres un programme tres fermement trace. En presence de ce refus, M. Chauveau se decida � por�ter la question devant VAssociation pour l'avancement des sciences, qui tenait � Lyon sa deuxieme session eu 1872, et, fort de ses convictions, il demanda la nomi�nation d'une commission de cinq membres, devant les-quels serait faite l'autopsie de quatre veaux, dont deux avaient ete soumis deux mois avant � l'experience de l'ingestion par les voies digestives : les deux autres devant servir de temoins. Voici comment l'experience avait ete faite : le 25 juin, on avait administre aux deux plus vigoureux de ces veaux, �ges de six se-maines environ, une petite quantite (10 a 15 grammes) de matiere tuberculeuse provenant d'une vache; cette matiere avait ete prise � la surface des coupes faites sur des poumons tuberculeux, � la surface aussi de la muqueuse bronchique et, enfin, dans les ganglions bronchiques. Apres l'avoir agitee avec de I'eau on l'avait laissee se deposer et c'est le depot qui avait ete administre.
Les deux jours suivants et le 6 juillet, l'ingestion avait ete renouvelee aux inemes doses, mais sous la forme d'une pate, le dernier de ces jours.
Sur Tun de ces veaux, la deuxieme Ingestion avait ete suivie d'une diarrhee qui n'avait dure qu'un jour, Aucun autre phemomene maladif pendant les cinq pre�mieres semaines.
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M. Chauveau, faisant sa communication au soixan-tieme jour de l'experience, crut pouvoir annoncer � la reunion qu'on trouverait, sur les sujets qu'il avait soumis � Tinfection par les voies digestives, des lesions d'une tuberculose evidente.
L'un avait maigri; il etait plus faible que I'autre veau, qu'il depassait en force avant l'experience; il avait la gorge emp�tee et n'avalait qu'avec diffi-culte. Les ganglions sous-maxillaires et retro-pharyn-giens etaient engorges. En un mot, la tuberculose ganglionnaire etait manifeste. Quant au deuxieme veau, il avait encore les apparences exterieures de la sante.
Le 24 ao�t, les quatre veaux ont ete abattus et ou-verts devant les membres de la commission. Le pre�mier examine fut celui qui presentait des symptomes accuses de maladie. On constata dans les ganglions sous-maxillaires, et surtout dans les retro-pharyn-giens, des lesions tuberculeuses tres accentuees. Ces derniers avaient decuple de volume; ils donnaient � la main la sensation d'ua testicule tuberculeux pris en masse, et, � la coupe, ils laissaient voir des masses caseeuses, ramollies en plusieurs points, avec quel-ques parties ulcerees, formant cavernes, d'o� Ton extrayait un pus blanc-jaun�tre.
Memes alterations, � des degres divers, sur la plu-part des ganglions mesenteriques, mediastinaux et bronchiques. Quatre petits foyers avec ulceration, au niveau de deux plaques de Peyer. Sur les deux pou-mons, mais plus particulierement sur le droit, on
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trouva de petits foyers caseeux eu petit nombre, rela-tivement � l'inteQsite de la lesion ganglionnaire.
Sur le deuxieme sujet soumis � l'experience de l'ingestion de mallere tuberculeuse, on constata les memes lesions que sur le premier, mais � un degre raoins avance : lesions ganglionnaires multiples; points caseeux sur deux plaques de Peyer.
Mais, contrairement aux affirmations si positives que M. Ghauveau avait faites devant l'Academie et re-nouvelees devant l'Association scientifique, les veaux temoius ne furent pas reconnus exempts de lesions tuberculeuses; on en constata quelques-unes, loca-lisees exclusivement dans les poumons et les ganglions bronchiques et mediastinaux.
Quant � l'appareil digestif, tons les organes etaient absolument sains.
La commission qui, sur la proposition de M. Ghauveau, avait etc nommee pour assister � l'autopsie des sujets de ses experiences, s'est demande si les lesions tuber�culeuses, constatees sur les veaux temoins, ne pou-vaient pas etre attribuees � la contagion par l'interme-diaire des vases, bouteilles et baquets, qui servaient � ralimentation journaliere des animaux et qui etaient communs pour les quatre; et eile a admis la probabi-Hte de l'intervention de cette cause, en se basant sur ce fait que la tuberculose contractee hereditairement par les jeunes de l'espece bovine est d'une extreme ra-rete dans la region, comme eu temoigne l'inspection des abattoirs.
La commission, formulant sa troisieme conclusion, a
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done considere laquo; comme tres probable que les veaux temoins avaieut ete iufectes, eux aussi, par les voies digestives, consecutivement � leurs voisins malades et par eux, en maugeaut dans les memes baquets et en ingerant des boissons et des aliments contamines par eux raquo;.
Si probable que soit cette conclusion, on ne saurait meconnaitre, cependant, que les faits, tels qu'ils se sont produits, autorisent la suspicion, au point devue de la tuberculose, des deux veaux sur lesquels I'expe-rience de l'ingestion de matieres tuberculeuses a ete faite. II existe des raisons pour se demander si I'in-fection, dont ils ont presente des marques si mani�festes, ne dependait pas de ce que dej� les germes de la tuberculose existaient en eux.
Eh bien, meme en acceptant que cette hypothese soit fondee, Texperience demeure avec une signifi�cation importante au point de vue de l'inoculabilite de la tuberculose. Comme la difference a ete enorme entre les lesions constatees sur les deux veaux soumis � l'epreuve de l'ingestion, et celles des deux veaux te�moins, il est bien difficile de ne pas admettre un rap�port de causalite entre cette ingestion et les altera�tions tuberculeuses si considerables que I'autopsie a fait recounaitre sur les sujets de cette experience. En admettant done chez eux une tuberculose preexistante � un degre assez faible encore pour que tous les ca-racteres de la sante fussent conserves, la conclusion qu'il y aurait � tirer de ces faits serait que I'usage alimentaire des substances servant d'excipient � des
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matieres tuberculeuses peut sect;tre d'autant plus nui-sible que Torganisme est plus predispose � la tuber-culose ou deja ea a subi les alteintes. Au point de vue de la predisposition, la preuve ressort de la faciliteavee laquelle les animaux de l'espece bovine contractent la tuberculose par ingestion digestive; et 1'experience actuelle semble temoigner que, parmi ces animaux, ceux qui sont le plus aptes � se tuberculiser experi-mentalement, sent justement ceux chez lesquels existent dej� des lesions qui demoutrent que leur or-ganisme constitue un terrain favorable � revolution de la tuberculose.
A ne la considerer qu'� ce point de vue, I'expe-rience de Lyon de 1872 ne presente-t-elle pas uu tres grand interet pour l'hygiene des populations humaines, o� se rencontreut tant de sujels tout prets � servir de milieux de culture � cet element redoutable, quand il a trouve acces dans leur organisme par une voie ou par une autre, et tout particulieremeut par les voies digestives qui lui sont si largement ouvertes ?
D'ou la necessite qui s'impose de prendre toutes les mesures possibles pour diminuer les chances de l'in-fection tuberculeuse par l'ingestion de matieres ali-mentaires, servant d'excipieut aux elements actifs de cette infection.
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DIXIEME LECON
LA CONTAGIOSITE DE LA TUBERCULOSE (Suite)
Importance d'en multiplier lespreuves dans I'mteretde I'hygi^ne publique. � Les experiences de M. Chauveau � Lyon, en 1872, con-trariees par suite de la promiscuite des temoins et des sujets sur lesquels on experimentait. � L'infeclion accidentelle des temoins a une grande signification aujourd'hui comme preuves de la con�tagion. � Experiences de M. Viseur, d'Arras, sur le chat, par I'in-gestion de mati6res tuberculeuses. � La preuve de la contagio-site de la tuberculose donnee par M. Colin. � Observation faite par lui de tuberculisation generalisee a la suite de l'inoculation du tubercule la pointe de la lancette. � La virulence est demontree par la rapidile du d�veloppement des lesions et leur etendue. � Lesions tr�s remarquables jusque dans les os. �Veritable phthisie galopante. � Grande valour de ce fait experimental � l'appui de la contagiosite de la tuberculose.
Messieurs,
L'interet qui s'attache � cette question si grave de la contagiosite de la tuberculose, et tout particulierement de sa transmission possible par* les voies digestives, necessite qu'on reunisse le plus grand nombre possible des faits qui en temoignent, afin de forcer toules les convictions et que les autoriles chargees d'edicter les mesures que comporte une pareille contagion, trouvent
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dans l'opinion, eclairee par l'evidence des demonstra�tions, l'assentiment et le concours sans lesquels les meilleures lois sont souvent difficiles � appliquer.
Multiplions done les preuves.
Je vous ai rendu compte, dans la derniere seance, des experiences faites � Lyon par M. Chauveau devant VAssociation pour Vavancement des sciences, qui y tenait sa deuxieme session en 1872. Cette experience faite sur de jeunes sujets de l'espece bovine, choisis dans un pays o� la tuberculose n'existe pas, a laisse des doutes dans les esprits parce que, chez les deux veaux teinoius, l'autopsie a fait constater des lesions tubercu-leuses, tout � fait inattendues de M. Cbauveau qui, fort de son experience persoiinelle, s'etait cm en droit d'affirmer l'etat de sante parfaite des animaux qu'il avait choisis avec le plus grand soin. Les resultats n'ont pas ete conformes � ses previsions et, par suite, l'experience n'a pas eu la portee de demonstration que lui aurait donnee uue complete disparate, au point de vue de l'integrite des visceres, entreles sujets temoins et ceux qui etaient soumis � l'epreuve de l'iugestion de matieres tuberculeuses. A l'epoque o� ces faits se sont produits, I'hesitation etait encore grande � accep�ter l'opinion de M. Viilemin comme l'expression fidele de la realite. Beaucoup meme lui opposaient une re�sistance Interieure et meine explicite qui s'appuyait sur tout le passe. Comment admettre qu'un fait aussi considerable ait echappe, s'il etait reel, � la clair�voyance des medecins de tous les temps et de tons les pays? G'est Teternelle objection que Ton fait � toutes
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les decouvertes. Rayer l'a renconlree devant lui, lors-que sa sagacite lui fit reconnaitre qu'une maladie in-determinee, dont se trouvait atteint uu homme couche dans uue des salles de son service � la Charite, n'etait autre que la morve du cheval, dont Elliotson, vingt ans auparavant, avait affirme la transmission possible � l'homme, en la prouvant par des exemples. Quand Raver refit cettedecouverte,�carcelle d'Elliotsonetait bien oubliee et n'avait pas eu sur I'hygiene publique rinfluence qu'elle devait avoir� que lui opposa-t-on? L'histoire du passe, Timpossibilite qu'un pareil fait, s'il etait reel, eut echappe aux medecins et aux veteri-naires dans les temps anterieurs at dans le temps actuel. La morve est une maladie si commune chez le cheval, disait-on a Rayer; � et effectivement la croyance en sa non-contagion avait eu cette consequence fatale qu'au temps de Rayer, la morve s'etait repandue dans une proportion qu'on a peine a croire aujourd'hui; � la morve est si commune, disait-on, que, si eile etait con-tagieuse a l'homme, les exemples de contagion se pre-senteraient en foule, taut est grand le nombre des hommes exposes � ce danger, et taut en sont frequentes aussi les occasions. A tons ces arguments qui parais-saient d'autant plus solides qu'ils etaient presentes par un homme done d'une veritable eloquence, qu'a re-pondu Rayer ? II a prouve le mouvement en marchant; et le coup de lancette qui a transmis � un cheval, sous la forme de la morve aigue, la maladie du palefrenier de la Charite, fit sur l'eloquence de Barthelemy I'effet d'un coup d'epingle dans un ballon goufle de vent.
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Elle s'affaissa; et le fait experimental, se dressant dans sa pleine evidence, suffit � lui tout seul pour demon-trer le peu que valaient les objections que l'on avait t�che d'appuyer sur ce qui semblait ressortir d'une observation imparfaite et, surtout, non sufiisamment clairvoyante des faits du passe.
G'est un resultat de cet ordre que M. Chauveau pou-vait esperer de l'experience qu:il avait preparee pour faire la demonstration de la transmission de la tuber-culose, devant les merabres de V Association pour l'avan-cement des sciences, tenant � Lyon sa deuxieme ses�sion. II a pu sembler, � premiere vue, dans les dispositions o� etaient alors les esprits, que cette experience n'avait pas ete fidele � toutes les promesses qu'on avait faites en son nom, puisque les sujets sur lesquels les lesions de la tuberculose ont ete constatees, et dans une si large mesure, apres l'ingestion, ont pu etre suspectes d'etre dej� infectes avant l'experiraen-tation, justement d'apres l'etat quelque peu maladif de leurs congeneres, qui devaient temoigner, par leur propre integrite, qu'entre les lesions tuberculeuses et l'ingestion des matieres servant d'excipients aux ele�ments de la tuberculose, il y avait un rapport etroit de c�usalite. � Aujourd'hui, d'apres tous les faits qui se sont produits depuis, il est permis de dire que l'ex�perience de 1872 a uue plus grande signification, comme preuve de la contagion, que celle qu'elle au-rait eue, � supposer que les veaux temoins n'eussent pas laisse voir � leur aulopsie des signes d'infection tuber-culeuse ; car ces signes peuvent etre consideres au-
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jourd'hui, avec certitude, comma les effets d'une conta�gion accidentelle qui s'est produite par suite des rapports etroits dans lesquels on a laisse les sujets des deux groupes : ceux qu'on voulait infecter par 1'inges-tion de matieres morbides et ceux qui devaient temoi-gner, par l'integrite deleurs propres organes, de 1'effi-cacite pathoiogique de cette infection. Mais ces derniers eux-raemes, sans que Ton s'en fut rendu compte, se sout trouves soumis aussi aux effets de I'iagestion, grace � la comraunaute des vases � l'aide desquels on leur donnait leur nourriture, et ils out contracte des lesions qui peuvent etre considerees comme I'expres-sion certaine de l'action des matieres morbides qu'ils ont iugurgitees. En sorte qu'en definitive, la conta�gion s'est produite sur les sujets de cette experience de deux mauieres : d'une part, sur deux sujets, dans des conditions experimentales determinees, et, d'autre part, sur deux autres sujets, dans des conditions ac-cideulelles dont les effets ont d'autant plus de valeur comme preuves que leurs causes ont ete moins inten�sives.
Nous verrons que cette interpretation est justifiee par des faits d'experience dont on a pu determiner la manifestation dans des conditions semblables.
Poursuivons 1'expose des faits qui temoignent de la transmission de la tuherculose par les voies digestives. Un aucien eleve de l'Ecole de Lyon, M. Viseur, au-jourd'hui veterinaire departemental � Arras, a fait de tres interessantes experiences sur une espece carni�vore, celle du chat, que son histoire pathoiogique ne
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ISOnbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;CO�fiS DE PATHOLOGIE COMPARltE.
deuonce pas comme tres susceptible de tuberculose. Cependant cette susceptibilite est reelle, au moins chez les jeunes sujets. Ce queje vais rapporter en temoigne :
Dans deux series d'experieuces, M. Viseur a reussi � transmettre la tuberculose � de jeunes chats, en leur faisant manger, de temps � autre, des morceaux de poumons de vaches iufiltres de matiere tuberculeuses. Les lesions dont il a determine la manifestation, � la suite de ce regime, out etetellemenlaccusees et carac-teristiques, que M. Ghauveau, qui a fait l'autopsie de quelques-uns des sujets de ces experiences, a cru devoir en faire l'objet d'uue note speciale qu'il a com-muniquee � l'Academie de medecine, dans la seance du 15 septembre 1874, pour fournir de nouvelles preuves experimentales de la transmission de la tuber�culose par lesvoies digestives.
Voici ce que M. Ghauveau a constate sur deux chats quv, une fois par semaine, dans une periode de cin-quante jours, avaient fait un repas avec des debris de poumons de vaches tuberculeuses:
laquo; Sur I'intestingrele, pas une seule plaque gaufree qui ne fut envahie. Toutes etaient gouflees, parsemees de points caseeux et profondement ulcerees. La plaque terrainale de l'ileon se faisait particulierement remar-quer, surtout sur Fun des sujets. Les ulcerations s'y montraient confluentes et formaient, par leur reunion, un vaste chancre allonge et sinueux qui, en quelques points, avait entame presque completement I'epaisseur de la membrane charnue. Des granulations s'etaient de-
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veloppees ences poiuts sur la membrane peritoneale.
laquo; Le trajet des lymphatiques emergeats etait marque par des trainees de granulations, que Ton pouvait suivre jusqu'� la masse ganglionnaire qui constitue le pancreas d'Aselli. D'autres poiuts de la surface du me-sontere presentaient egalement des granulations types^ semees plus ou moins abondamment sur le trajet des vaisseaux.
laquo; L'appareil adenoi'de du gros intestin etait aussi envahi. II n'y avait peut-etrepas un seul des follicules solitaires decette region qui e�t echappe � l'hypertro-pbie tuberculeuse. Beaucoup etaient caseeux et ulce-res. Quant a l'appareil ganglionnaire proprement dit, il etail si gravement atteint qu'on s'etonnait qu'il n'en fut pas resulte un plus fort retentissement sur la sante geaerale des animaux; le pancreas d'Aselli etait, en efTet, d'un volume enorme. II se montrait infiltre do petites masses jaunes, generalement disposees en forme de nodules, isoles ou agglomeres, constituant dans ce dernier cas de vastes foyers d'iuflammation tuberculeuse. Les autres ganglions annexes � l'intestin n'etaient pas davantage epargnes, excepte ceux qui appartiennent a la portion tout � fait terminale du tube digestif.
laquo; Rien dans le foie et la rate.
laquo; Un nodule tuberculeux dans l'estomac d'un des sujets.
laquo; Sur les deux sujets, les poumons contenaient des nodules gris, transparents, plus ou moins petits, su-perficicls et profonds.
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laquo; La plevre etait saine, ainsi que les ganglions bron-chiques; rien non plus d'anormal dans les bronches et la trachea; inais la muqueuse laryngee offrait de belles granulations transparentes sur les replis ary-theno-epiglottiques. On en trouvait egalement � la base ie i'epiglotte, sur la paroi du pharynx.
laquo; Sur Tun des chats, on trouva tuberculises le gan�glion sous maxillaire gauche et les ganglions retro-pharyngiens. Sur I'autre, ce furent seulement le gan�glion sous-maxillaire et le ganglion retro-pharyngien du cote droit. raquo;
Avant cette experience, M. Viseur en avait fait une autre: sur quatre chats, dont trois jeunes et un deja vieux. Chose remarquable, celui-ci avait echappe � l'infectiontuberculeuse, quoiqu'il fut soumis au meme regime que ses congeneres qui, tons les trois, contrac-terent la tuberculose avec les memes caracteres que ceux qui viennent d'etre specifies par M. Chauveau.
La question de l'�ge ne serait done pas indifferente dans une experience de cette nature, et l'hygiene pu-blique humaine doit tout particulierement s'en preoc-cuper. Par exemple, pour le dire en passant, lorsque Ton croira devoir recourir a l'usage des viandes sai-gnantes pour la refection des organismes debilites des enfants et des adolescents, ne sera-t-il pas plus pru�dent de prescrire la viande du mouton plutot que celle du boeuf, en raison des chances plus grandes qui exis�tent certainement pour que cette derniere provienne dun animal infecte de la tuberculose.
Les experiences de M. Viseur, auxquelles je reviens.
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presentent ce caractere particulier qu'elles ont eu pour sujets des animaux d'une espece carnivore, dont la susceptibilite pour la tuberculose a ete reconnue egale � celle de l'espece bovine: fait tres considerable par-ce qu'il demontre que la semence tuberculeuse peut prendre sur des terrains organiques de compositions diverses, comme ceux des especes differentes et que, consequemmeut, la contagion, dont eile est I'instru-ment, a un caractere de generalite tres etendu.
Jusqu'� present, dans les experiences que j'ai rap-portees, rensemencement de la matiere tuberculeuse a ete faite, pour ainsi dire, largd manu, et il semble resulter des effets produits qu'il existe un certain rap�port entre leur intensite et les quantites de la matiere ingeree ou injectee dans le tissu cellulaire. Ainsi, par exemple, dans I'experience faite � Lyon en 1872 de-vant la commission nommee par YAssociation pour t�vancement des sciences, les lesions de la tuberculose sont bien plus accusees sur les sujets qui ont ingere les matieres tuberculeuses determinees par I'experi-mentateur, que sur les deux autres, infectes acciden-tellement, en n'en prenant que de petites parcelles.
On se rappelle que M. Colin, en inoculant la matiere tuberculeuse, comme on fait d'ordinaire pour les ma�tieres virulentes, c'est-�-dire avec la petite dose dont la pointe d'une lancette peut etre chargee, n'a vu se produire aucun effet � la suite de ce mode d'inocula-tion.
II semblerait done qu'a ce point de vue, la virulence de la tuberculose differerait de celle des autres virus
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qui sont susceptibles de produire leurs effets les plus accuses aux doses les plus infmitesimes: comme, par exemple, les virus du cholera des volailles, des deux charbons, des septicemies, de la variola humaine, de la clavelee, de la morve aigue, elc.^Cela depeud-il de la moindre energie relative du bacille de la tuber-culose ou des conditions de son enveloppement dans la matiere qui lui sert d'excipient? Les experiences qu'a faites M. Toussaint avec des liquides de culture d�nnent � penser que cette derniere circonstance peut n'etre pas sans influence, car il a reconnu que le virus des cultures avait plus d'activite que celui qui est as-socie � des matieres morbides naturelles.
Cependant il se rencontre des cas ou le virus de ces matieres se montre actif � l'egal des plus -virulents et peut, comme ceux-ci, produire ses effets � doses infi-nitesimes. Et, par une singuliere ironie du sort, c'est justement � M. Colin qu'il a ete donne d'observer un des exemples les plus convaincants de l'activite exces�sive de la virulence tuberculeuse, dont il avait nie si categoriquement I'existence quelques annees aupara-vant.
La note o� il a rendu compte � l'Academie de me-decine, en 1879, de cette observation remarquable, porte ce titre significatif: Sur la tuberculisa�on genera-lisee d la suite de rinoculation du tubercule. Je vais la resumer ici, en la raarquant par ses trails essentiels.
Les hasards de rexperimentation ayant fait ren-contrer � M. Colin un bei exemple de tuberculisation de la muqueuse intestinale et des ganglions niesente-
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riques sur un lapin, il voulut voir ce que le tubercule pris sur ranimal presque vivant produirait sur des aniraaux de m^rae espece. Une tres petite quantite, reduite en pulpe, fut inseree, dans trois piq�res sous epidermiques, � la region du flanc sur deux lapins de meme �ge et de merae portee. L'un d'eux ne regut que la moitie de la quantite donn�e � l'autre; et un troi-sieme de meme taille, frere des precedents, fut pris pour terme de comparaison.
Ils avaient environ cinq mois et jouissaient de la meilleure sante.
Voil� bien l'inoculation � doses extremement mi-nimes; et si eile est suivie de la multiplication de l'element insere par deux ou trois piq�res sous epidermiques, la preuve de l'activite vivante de cet element, c'est-�-dire de sa nature virulente, en res-sortira bien manifestement.
Voyons done ce qui s'est passe.
Pendant la premiere semaine, les piq�res sont de-meurees fermees, seches, sans elevures sensibles, sauf sur celui des lapins qui avait regu le plus de ma-tieres tuberculeuses.
Des la deuxieme semaine, commencement de la manifestation d'une reaction locale. Trois elevures, legerement rougeatres au centre, un peu sensibles, se sont dessinees sous les dimensions d'un grain de cafe.
A la quatrieme semaine, elles etaient ulcerees au centre et avaient le volume d'une petite aveline. La matiere qui s'en echappait etait caseeuse, blanche, bien liee, sans odeur putride.
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Uq peu plus tard, les trois tumeurs, en s'etendant, sont devenues confluenles et les trois ouvertures, comme creusees � l'emporte-piece, presentaient plus d'un demi-ceutimetre de diametre. La plus legere pression en faisait sortir la matiere caseeuse. Elles avaient alors le volume d'un oeuf de perdrix et se re-liaient par une corde noueuse, du volume d'un tuyau de plume, � un bubon ferme, insensible., developpe dans le pli de l'aine.
Jusqu'� la fin de la sixieme semaine, les effets de l'inoculation parurent etre restes locaux. Bon appetit des animaux qui avaient augmente de plus de dOO gr. chacun, par semaine. De 2,460 gr., poids initial. Tun etait monte � 3,100 gr., et l'autre de 2,770 � 3,440.
Puis tout d'un coup, et sur les deux � la fois, l'ac-croissement s'arreta. Apres une certaine periode sta-tionnaire, l'amaigrissement commenga. Des lors, les symptomes generaux s'accuserent : diminution de l'appetit; soif un peu plus grande que normalement; fievre legere.
L'un des sujets fut tue au commencement de la huitieme semaine, pour qu'on put saisir les lesions viscerales� leur debut; voici ce qui fut constate : etat tuberculeux du ganglion precrural, dans loquel exis-taient trois etats caseeux tres distincts. La c�i J3 lym-phatique etait en partie induree, en partie caseeuse. Meme etat des ganglions axillaires de ce cote; rien dans ceux du cote oppose, ainsi que dans les ganglions pelviens, lombaires et mesenteriques. Un tubercule dans la rate; cinq dans le foie; trois dans un rein.
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Le poumou etait parseme de tubercules du volume d'ua grain de mil � celul d'un grain de chenevis. Cha-cun etait entoure d'une zone rouge hepatisee. La plupart etaient constitues par une couche grise, demi-transparente et, au centre, par un petit amas casei-forme. Les plus petits ou les plus recents conservaient seuls les caracteres des granulations dites transpa�rentes.
Ainsi, au bout de huit seraaines, l'inoculation, � dose que j'appellerai virulente, de la matiere tubercu-leuse, a donne lieu � une dissemination des elements tuberculeux dans le foie, la rate, les reins en petite quantite, mais tres abondante dans les poumons qui out ete trouves farcis de granulations pulmonaires, � leur periode initiale.
Le deuxieme sujet de cette experience, celui chez lequel l'inoculation fut faite � plus faible dose, ne fut pas sacrifie ; on laissa la maladie suivre son cours. Elle alia toujours en s'aggravant, determina un ma-rasme excessif et amena la mort au bout de quatre mois.
Le poids de ce lapin, qui etait de 3 kil. � la sep-tieme semaine, tomba � 1,760 � la dix-huitieme, tandis que celui du lapin frere, conserve comme terme de comparaison, monta, dans le meme temps � 4 kil. 710. Les progres de la tuberculisation se sont accuses, chez le deuxieme sujet de cette experience, par des sympt�mes bien marques : diminution de l'appetit j effacement des vaisseaux des oreilles, raideur des at�titudes, rarete des raouvements, perte du brillant des
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polls, secheresse et adherence de la peau, retrccisse-raeat de la poilrine, essoufflemeut � la raoindre agi�tation, plaintes accompagnant les deplacements, cris meme que poussait ranimal quand on lui comprimait la colonne vertebrale ou les articulations.
Pendant la derniere semaine : immobilite de rani�mal, respiration plus profonde et plus lente qu'� I'etat normal. Temperature � 38quot; 1/2.
Voici les lesions constatees; elles presentent le plus grand interet par leurs caracteres et leur intensite.
A la region des piq�res des inoculations, il ne res-tait qu'un disque caseeux assez mince; ganglion pre-crural tuberculeux, mais reduit au quart du volume qu'il avait presente � la fin du deuxieme mois; persis-tance de la corde lymphatique.
Tubercules miliaires dans la plupart des ganglions, excepte ceux du mesentere. Dans les poplites, cet etat etait tres accuse; tuberculisation des deux reins.
Les poumons, dans tons les points de leur surface et de leur epaisseur, etaient uniformement parsemes de granulations et de foyers caseeux, en nombre incal�culable. D'apres leur poids, compare � celui des pou�mons d'un animal sain, la masse de matiere tubercu-leuse dans ces organes devait representer dix-huit centimetres cubes.
La tuberculisation s'etendait aux plevres qui etaient semees de plaques jaunes d'un demi � un centimetre de surface. Memes lesions sur le pericarde et sur l'arachnoide, au niveau surlout des lobes anterieurs du cerveau, des lobes olfactifs et autour de la glande
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pituitaire. En un mot, la pleuresie, la pericardite et la meningite tuberculeuses sont tres caracteri-sees.
II semble que, sur ce sujet, Telement vivant de la tuberculose ait eu une affinite toute speciale pour le Systeme sereux. On a constate, en effet, la presence de tubercules, en grand nombre, sur les synoviales des articulations femoro-tibiales, tibio-tarsiennes et de quelques autres dans las membres des deux cotes; quelques-unes etaient entierement remplies de matiere caseeuse.
Memes lesions dans beaucoup de gaiues synoviales tendineuses, notamment celles de l'origine des ex-tenseursdes phalanges et des flechisseurs dumetalarse, dans la coulisse superieure du tibia.
Mais ce n'est pas tout. L'ensemencement � dose infinitesime de l'element tuberculeux, sur le sujet de cette experience, a donne lieu � une pullulation de cet element jusque dans le squelette.
Dans les parois du crane, trois tubercules au fron�tal et au temporal out completement fait disparaitre les deux tables et leur diploe. Ces trois tubercules se continuaient avec ceux des meninges.
Dans le rachis, plusieurs tubercules ont ete consta�tes soit � l'interieur des vertebres, soit � leur surface: un dans la deuxieme vertebre cervicale, un dans une apophyse epineuse dorsale; deux, du volume d'une aveline � l'etat frais, sur les apophyses articulaires des vertebres des lombes.
Dans le sternum, tubercule tres volumiueux a
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son appendice trach^Iieu, et un moindre � sa region moyenne.
La table interne de l'ilium droit est perforce par un tubercule pisiforme de son tissu spongieux.
Les deux tables de l'ilium gauche sont detruites, en regard l'une de l'autre, par un tubercule de la grosseur d'une feve. Un tubercule de meme dimeu-sion couvre la tuberosite ischiale droite.
Les os des membres, notamment les extremites in-ferieures des deux humerus, presentent des tubercules on des foyers caseeux, au niveau desquels la substance compacte amincie est devenue � la fois transparente et flexible. La moitie superieure de Thumerus droit est tres gouflee et sa moelle est remplacee par de la subs�tance tuberculeuse ramollie.
Les muscles eux-memes portent l'empreinte de cette infestation tuberculeuse si generalisee. Dans la plu-part des regions, ils montrent, g� et l�, � leur surface on dans leur epaisseur, des tubercules miliaires, pres-que toujours fermes.
La peau elle-msect;me, particulierement au niveau de la poitrine et sur les membres anterieurs, est farcie, � sa face interne, de tres petits tubercules.
laquo; En resume, dit M. Colin, sur I'animal qui a sur-vecu quatre mois � I'inoculation d'une Ires petite quantitede tubercule sur la pointe de la lancette, la tuber-culisation etendue aux ganglions lymphatiques, aux poumons, aux reins, aux plevres, au pericarde, aux raeninges, aux synoviales articulaires et tendineuses, aux os, aux muscles, meme � la peau, semble indiquer
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uu etat general, une diathese, comparable, jusqu'� un certain point, � la diathese ou � l'etat constitution-nel qui resulte de la diffusion du virus syphilitique chez rhomme. raquo;
Rien de plus demonstratif que cette belle observa�tion deM. Colin, si bien saisie et si bienrelatee; rien qui porte mieux temoignage de la contagiosite de la tuberculose. La pullulation, dans I'enorme proportion qu'on vient de voir, a ete la consequence de l'inocula-tion d'une particule infinitesime de la matiere tubercu-leuse. Gependant M. Colin semble ne pas avoir ose tirer de cette observation la conclusion qu'elle ren-ferme, ou, du moins, il ne I'a formulee que d'une ma-niere obscure, en faisant intervenir une diathese, laquo; analogue � celle qui resulte de la diffusion du virus syphilitique chez Thomme raquo;. Du moment qu'il elait conduit, par l'evidence deschoses,�admettre leur ana�logic avec les effets d'un virus, il n'aurait pas du he-siter � affirmer une virulence qui ressortait si evidente de revolution des fails. Oui; mais le souvenir de ses negations si energiques � l'endroit de cette virulence le dorainait sans doute ; et, apres avoir eu la tr�s ho�norable franchise de pubiier une observation qui etait en si complete contradiction avec ses opinions passees, il n'a pas pu se decider � aller jusqu'o� la logique devait le conduire.
Apres tout, le fait qu'il a recueilli et publie demeure avec toute sa valeur, comme preuve irrefutable de la virulence de la tuberculose. La maladie qui est nee sous la lancette de M. Colin est une veritable phthisie ga-
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lopante, bien semblable, par la rapidite de sa marche et l'intensite de ses lesions, � la maladie qu'on desi-gne sous ce nom dans la medecine de l'homme, et qui peut-etre est causee, comme la phthisie experi-mentale des lapins de M. Colin, par un ensemence-ment tout accidentel des germes de la virulence.
Nous verrons, dans la suite des developpements que comporte cette question, des faits du meme ordre se produire sur des animaux d'autres especes, notam-ment sur le pore, que M. Toussaint a adopte pour su-jet d'experience, et sur lequel il a fait se developper la phthisie par l'ingestion de matieres tuberculeuses, et rinoculatiou soit de jus de viande, soit de salive, soit de mucus nasal provenant d'animaux tubercu-leux. II y a l� une serie de resultats d'une tres grande importance et qui doivent donner � reflechir � ceux qui out la charge de l'hygiene publique.
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ONZIEME LECON
LA CONTAGtOSlTE DE LA TUBERGULOSE [Suite)
La tuborculose demoutree virulente � dose infinitesime par le fait experimental de M. Colin. � Ce fait est nne reproduction �d�le des phthisies galopantes spontanees. � Etudes experimentales de M. Toussaint sur le pore. � Marche rapide de la phthisic inoculee dans I'espcce porcine. � Infostation de pores par I'ingestion ; par injection sous-cutanee. � Demonstration de la presence dans le sang des elements de la virulence. �Transmission de la tuberculose par injection de quelques gouttes de sang. � La chair musculaire est virulente. � Preuve par l'inoculation de son jus. � Tenacite de cette virulence. Elle persiste apres le chauffage des viandes � la temperature de ii� a 08deg;. � Grande importance pratique de ces ex�periences. � Constatation dc la virulence dans la saliva, dans I'urine, dans la serosite des pustules vaccinates. � Transmission pos�sible de la tuberculose dans l'esp�ce humaine par la salive.
Messieurs,
Le fait experimental dont M. Colin a donne la re�lation nous a montre la tuberculose avec un caractere de virulence qui I'identifie, an point de vue des condi�tions de sa contagion, avec t�utes les maladies conta-gieuses.
Je m'explique : dans la plupart des experiences an-terieures � celle de M. Colin, la question de la quan-tite ne semblait pas indifferente pour que la transmis-
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sion s'effectu�t. L'inoculalion, � la laiicette, par une piq�re sous-epidermique, etait loin d'etre s�rement efficace, comme celle de la variole, de la clavelee, de la morve, de la peste bovine, etc. On se rappelle que c'esl sur les resultats negatifs d'inoculations pratiquees par ce mode, que M. Goliu s'etait appuye pour contes-ter la specificite virulente des matieres tuberculeuses. Les efFets de l'ingestion de ces matieres lui parais-saient s'expliquer par les quantites ingerees, qui don-naient lieu � des obstructions de l'appareil lympha-tique et � des phenomenes pyogeniques, consequences de rirritation determinee par les matieres obstruantes. Le caractere essentiel de la virulence : I'action par l'intimite des doses^ la pullulation � rinfini de la par-celle infmitesime, ce caractere paraissait manquer � la tuberculose, et ce manquement faisait de sa contagion quelque chose de particulier, puisque son activite pa�raissait, jusqu'� un certain point, dependante des quantites ensemencees, et proportionnelle � ces quan�tites. Le fait observe par M. Colin demontre que la tuberculose pent proceder, eile aussi, de quantites infinitesimes et marcher I'egale, dans de certains de ses etats qu'il reste � determiner, des maladies les plus virulentes. L'extreme acuite de la tuberculose de l'homme dans un trop grand nombre de cas, celte marche galopante qu'elle affecte ne sont-elles pas 1'expression de l'extreme activite d'uu germe, dont I'organisme a ete ensemence par une voie ou par une autre, et qui manifeste ses effels d'une maniere, pour ainsi dire, foudroyaule, par l'extreme energie de sa
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pullulation. Les faits experimentaux que M. Colin a vu se produire sous ses yeux, � la suite de l'inocula-tion � dose infinitesime d'une tuberculose intestinale, me paraissent etre la reproduction fidele de ces phthi-sies galopantes dont les medecins sont trop souvent les temoins impuissants et stupefaits, taut le passage est prompt de la saate la plus florissaate � l'etat ma-ladif le plus profond, et taut la distance est rapide-ment franchie entre l'heure o� la maladie debute et celle o� la mort frappe. Avec l'idee de contagion, le mystere d'un pared pheuomeue s'eclaircit^ car I'expe-rimentation, en nous faisaut voir la contagion � son oeuvre, qui est une imitation parfaite de la maladie developpee spontanement, nous conduit � l'inductiou tres legitime de l'identite de la cause devant I'idenlite des manifestations.
Nous allons voir, maintenant, que sur une autre espece animale, et justement celle qui a, par son organisation, les plus grandes analogies avec I'espece humaine, la tuberculose transmise a une grande ten�dance � affecter une marche galopante. C'est ce qui ressort des etudes experimeutales auxquelles s'est livre M. Toussaint avec une grande assiduite, depuis quelques annees.
La susceptibilite du pore �contracter la tuberculose n'aurait pas pu etre deduite des resultats donnes par l'examen des cadavres dans les abattoirs, car autant les lesions de cette maladie sont communes � observer sur les organes des animaux de I'espece bovine, autant elles sont rares sur ceux de I'espece porciue. 11 sem-
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blerait, done, d'apres ces resultats, que le pore est refractaire � l'ensemeneement de la tuberculose. Cast cependant le eontraire qui est le vrai. D'o� vient done que sur tant de milliers de pores que Ton abat pour la eonsommation, les lesions tuberculeuses ne soient, on pent dire, jamaiseonstatees? La raison de eette immu-uite apparente se trouve justement, tout paradoxal que eela puisse paraitre, dans la susceptibilite de l'orga-nisme du pore pour cette maladie : susceptibilite teile qu'une fois le germe regu, sa proliferation est tres ra�pide et imprime � la maladie qu'il cause une marche galopante. Les pores qui coutractent la phthisic n'oul done pas le temps de vivre assez pour qu'ils puissent 6tre amenes jusqu'aux abattoirs. Voil� pourquoi on ne les y rencontre pas. Quelle nouvelle preuve, et bien frappante, de rinsuffisauce des ressources que fournit 1'observation seule pour donner aux faits leur signifi�cation veritable! Les lesions tuberculeuses ne se ren-contrent jamais sur les milliers de pores dont les ca-davres sont inspectes scrupuleusement dans les abat�toirs, avant que leurs viandes soient livrees � la eon�sommation. Quoi de plus legitime, quoi de mieux fonde, en apparence, que cette conclusion : le pore est refractaire � la phthisic! Eh bien! cette conclusion serait erronee; rexperimentation le montre : le pore est susceptible de la phthisic, � l'egal de l'homme, et raeme il lui est un terrain plus favorable que celui de l'organisme humain, car le germe y prolifere avec plus de rapidite et amene la mort en moins de temps. Des 1874, M. Saint-Cyr, de l'Ecole veterinaire de
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Lyon, avait reussi � transmettre la tuberculose � des pores en leur faisant manger des organes infectes de matieres tuberculeuses : poumons de vaches et gan�glions lymphatiques. D'autres experimentateurs sent arrives, apres lui, aux memes resultats. M. Toussaint a repris ces recherches, pour pousser plus avaut 1'etude de la contagiosite de la phthisic et montrer par des experiences, dont les resultats doivent donner � re-flechir, que la virulence n'est pas inherente exclusive-ment, dans l'aniinal phthisique, � ceuxde ses organes qui sont le siege d'infiltrations tuberculeuses. Elle est plus diffuse, corame nous aliens le voir, et, par cela merae, plus redoutable, car eile est bien plus insi-dieuse.
Passons en revue, en les marquant par leurs traits principaux, les resultats qu'a obteuus M. Toussaint par ses ires nombreuses experiences.
Dans une connnunication faite � l'academie des sciences de 29 mars 1880, M. Toussaint a rendu compte d'une premiere experience d'infestation tuber-culeuse de deux pores, de sept � huit mois, par I'in-gestion d'un poumon entier rempli d'une grande masse de tubereules. Ce poumon provenait d'une vaehe tuee � l'abattoir de Toulouse et livree � la consommation.
L'un de ees pores, qui avait considerablernent maigri depuis un mois, fut tue le soixante-dix-sep-tieme jour apres le repas de matieres tuberculeuses. L'autopsie montra une tuberculose generalisee tres avaneee. Les ganglions etaient hypertrophies par
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infiltration tuberculeuse. On constata l'existence d'ul-cerations sur le voile du palais, des granulations tuberculeuses dans tous les organes, ainsi que sur las sereuses des cavites splanchniques.
Une truie, deuxieme sujet de cette experience, mou-rut dans l'etat de maigreur le plus extreme, cent un jours apres l'iugestion. L'infection tuberculeuse fut accusee, � son autopsie, dans une mesure extreme, par la presence, dans tous les organes parenchyma-teux des cavites abdominale et thoracique, de tuber-cules innombrables, infiltres de sels calcaires. Les mamelles etaient farcies de tubercules. Les ganglions lymphatiques se trouvaient, partout, � l'etat cretace et il y avait une ulceration sur le voile du palais.
Un jeune porcelet, ne de cette truie, et qu'on avait laisse avec sa mere, mourut le meme jour et fut re-connu, comme eile, atteint d'une tuberculose genera-lisee, mais � un degre moins avance.
Suivant toutes probabilites, il avait ete infecte par le lait qu'il tirait des mamelles, farcies de tuber�cules.
Peut-etre aussi qu'il trouva, en dehors de cette source, dans les conditions m�mes de la cohabitation, des germes d'infection, car un jeune pore, qu'on avait fait cohabiter avec les deux sujets soumis � l'ingestion de matieres tuberculeuses, fut tue apres cent jours de cette vie commune, et reconnu atteint d'une tubercu�lose commengante, caracterisee par des lesions des ganglions sous-maxillaires et bronchiques, avec quel-ques granulations dans les poumons. Ce pore s'etait
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infecte en mangeant dans la m^me auge que les su-jets tuberculises par l'ingestion du poumon malade.
Au point de vue de l'hygiene humaine, il y a, dans ce mode de contagion, un enseignement qu il est im�portant de ne pas meconnaitre.
Voici maintenaut des exemples qui montrent avec quelle facilite l'organisme du pore est envahi par la tuberculose.
On fait manger � un jeune pore une partie du pou�mon et des ganglions du premier pore, tuberculise par ringestion d'un poumon de vache malade, et abattu le soixante-dix-septieme jour. Vingt-trois jours apres, ce jeune pore est tue et Ton constate l'existence de granulations tuberculeuses, � leur premiere periode de formation, dans les ganglions sous-maxillaires.
Le siege de ces lesions indiquait la marcbe suivie par les germes infectieux. M. Toussaint se proposa de reaiiser experimentalement les fails qui se produi-saient sous I'lafluence de l'ingestion de matieres tuber�culeuses, dont les germes trouvent acces dans I'appa-reil lymphatique au moment o� ils franchissent le pharynx.
II inocula un pore sur le cote gauche du voile du palais, par I'injection d'un centimetre cube d'un liquide filtre sur un linge, servant d'excipient � une parcelle de matiere tuberculeuse prise dans un gan�glion d'un des pores de la premiere experience. Cin-quante-sept jours apres, le ganglion sous-maxillaire correspondant au c�te de l'inoculation etait enorme et, � l'autopsie, on constata renvahissement par des
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granulations tuberculeuses, de tous les organes qui sont le siege habituel de cette infection.
Sur un jeune porcelet, auquel on donna � manger quelques debris tuberculeux, provenant de la truie de la premiere experience, on constata, un mois apres cette ingestion, l'engorgemeut volumineux des gan�glions sous-maxillaires, et, � son autopsie, faite un mois plus tard, toutes les lesions de la tuberculose generalisee, � sa derniere periode. Le voile du palais etait tuberculeux.
Dans cette serie d'experiences, la transmission re-sulte des rapports directs de la matiere tuberculeuse elle-meme avec les tissus ou s'effectue l'absorption des elements actifs auxquels cette matiere sert d'exci-pient. Mais voici une experience d'un autre ordre et qui prouve que, dans un animal tuberculeux, ces elements actifs de la virulence ne sont pas incorpores exclusivement dans les parties des tissus o� des lesions se sont constitutes. Ces elements se trouvent aussi dans le sang; car M. Toussaint a reussi, par une injection de quelques gouttes de sang, puise sur la truie de la. premiere experience, a transmettre a un porcelet de deux mois une tuberculose genera�lisee, caracterisee par des lesions de la peau et des ganglions, et de nombreuses granulations grises des plevres, du poumon, du foie, de la rate et de I'epi-ploon.
Si le sang est virulent, la virulence doit sect;tre par�tout, puisque le sang penetre tous les organes et constitue, pour leurs cellules, le milieu necessaire
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aux manifestations de leur activite. De fait, une nouvelie experience de M. Toussaint temoigne bien de la diffusion de la virulence, par I'intermediaire du sang, dans le tissu musculaire lui-meme. M. Tous�saint a extrait, au moyeu d'une presse de cuisine, le jus d'un muscle provenant d'une vache tuberculeuse, et il en a injecte deux centimetres cubes sous la peau d'un pore de cinq mois. Cette injection a donne lieu au developpement d'une tuberculose tres avancee, qui s'est caracterisee par des lesions disseminees dans le poumon, le foie, la rate, le centre phrenique du diaphragme, les ganglions. Rien de plus significatif que ces lesions dent M. Toussaint m'a envoye des specimens tres remarquabies que j'ai montres � l'Academie des sciences dans sa seance du 8 juin d880.
Nous voici done en presence d'un fait on, pour mieux dire, d'un double fait d'une extreme gravite : dans un animal tuberculeux, la virulence n'est pas in-herente exclusivement aux tissus malades, eile est diffuse dans le sang, eile est attachee � la substance musculaire elle-meme et Ton pent, par une inocula�tion � petite dose, faire sortir la tuberculose genera-lisee du jus exprime de cette substance, � l'aide d'une presse, semblable a celle dont les cuisinieres font usage pour la preparation de leurs sauces.
II n'y a plus moyen, en presence de pareils faits, de nier la contagiosite de la tuberculose et d'interpreter les phenomenes consecutifs � l'ingestion de matieres tuberculeuses on � leur injection sous-cutanee, par des
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obstructions lymphatiques, donnant lieu � des sup�purations locales et, plus tard, � des infections puru-lentes generalisees. Quand vous inoculez le sang, quandvous inoculez le jus de viande, et que l'inocula-tiou se montre active, comme dans les experiences de M. Toussaint, la raatiere tuberculeuse proprement dite, c'est-�-dire l'alteration pathologique qui s'est formee dans la trame des organes envahis, cette matiere n'a aucune part dans la manifestation des pheuomenes consecutifs � l'inoculation, puisqu'on ne I'a pas fait intervenir. Ce que Ton a fait agir, en pareil cas, et exclusivement, c'est l'agent vivant de la virulence que
nous connaissons mainlenant, c'est lebacille ou le mi-crocoque qui est dans le jus de viande ou dans le sang, comme il est dans le milieu o� Ton a reussi �
le cultiver, et qui pent se montrer d'autant plus actifnbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; lt;
qu'il est separe de sa gangue et peut se mettre direc-tement en rapport avec les bouches absorbantes, pour employer une des expressions dont se servait avec predilection Bichat dans sa physiologie.
Mais cette virulence est-elle tenace ? Ne s'attenue-t-elle pas apres la mort et, surtout, sous Faction de la cbaleur, � laquelle les viandes sont soumises, � des degres divers, pour devenir des aliments � l'usage de l'bomme?
M. Toussaint a demande a Texperimentation la solution de cette importante question , et voici les resultats qu'il en a obtenus :
Du liquide extrait par la presse d'un poumon tuber-culeux de vache a ete injecte, dans l'etat naturel, � la
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dose d'un centimetre cube et demi, sous la peau de la base de l'oreille d'un jeune pore, et � la dose de dix gouttes sur deux lapins.
Gomparativement, les monies quantites respectives ont ete injectees, dans les memes regions, � quatre porcs et quatre lapins, mais apres que Ton eut sou-mis le liquide injecte � l'action de la chaleur, pen�dant dix minutes, dans un bain-marie eleve � la temperature de 55 � 58deg;.
Ces auimaux mis en observation, on put constater sur tous la marche ordinaire de la maladie,dont I'en-gorgement du ganglion parotidien est un des premiers sympt�mes.
L'infection se generalisa tres rapidement et, chose � signaler, les lapins qui avaient regu le liquide chaufle moururent avant les autres.
Sur un des porcs, inocule avec le liquide chauffe et tue deux mois apres, Tautopsie fit constater un tuber-cule local caseeux, au point de riaoculation, un gan�glion parotidien enorme, renfermant dej� des points cretaces; et, dans le poumon, une grande quantite de granulations grises. Dans le foie et la rate, les tu-bercules etaient en grand nombre.
Apres le troisieme mois, un second pore fut tue, en meme temps que le pore temoin qui avait regu du liquide pulmonaire non chauffe; chez celui-ci, les lesions etaient plus accusees que chez I'autre, mais la difference n'etait pas ires grande.
L'inoculation des tubercules pulmonaires, develop-p�s sur les porcs a la suite de l'injection du liquide
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chaufFe, donna lieu � la tuberculisation des lapins sur lesquels eile fut pratiquee. Sur deux de ces lapins, tues apres trois mois, on constata de nombreuses le�sions dans le poumon, la rate, les reins et les sereuses.
Deux des pores inocules avec le liquide chauffe elaieut encore vivants apres cinq mois, au moment o� M. Toussaint rendait compte de ces experiences;! l'academie des sciences, mais Tun d'eux etait pres de mourir.
Des quatre lapins inocules avec le liquide chauffe, Fun est mort accidentellement apres trente-cinq jours, et l'on ne constata chez lui que l'etat caseeux du gan�glion parotidien; l'infection generale n'etait pas en�core manifeste.
Quant aux trois autres, ils sont morts avec une tu-berculose generalisee, du cent soixante-quatrieme au cent soixante-dixieme jour. L'un d'eux meme presen-tait, comme celui de M. Colin, des lesions des os, ex-tremeraent developpees, dans les membres anterieurs. Les articulations de l'epaule et du bras renfermaient un pus caseeux; les surfaces articulaires et meme une partie des diaphyses, etaient completeraent detruites.
Des deux lapins temoins, inocules avec le jus non chauffe, l'un, qui fut tue quarante-trois jours apres I'inoculation, presenta des tubercules gris nombreux dans le poumon et le foie; l'autre, une femelle, vivait encore au moment de la communication, mais eile etait dans un etat de tuberculisation tres avance. Elle avait eu trois portees depuis son inoculation ; les petits de la premiere etaient morts le lendemain de leur nais-
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sauce, et ceux des deux autres etaient conserves pour l'etude de l'heredite.
Voil� des experiences dont les resultats ont une si�gnification bien grave, puisqu'elles demontrent que, meme apres Faction d'une temperature de 58deg;, la virulence inherente aux lesious pulmonaires resiste et manifeste son activite avec une energie qui temoigne que la chaleur ne I'a pas affaiblie.
Mais on devait se demander si cette energie con-servee ne tenait pas � ce que le liquide virulent avait ete extrait directement des parties malades et si, daus les muscles, eile n'etait pas plus faible et plus suscep�tible d'etre attenuee ou plut�t aunulee par l'actioa de la chaleur. Une experience faite par M. Toussaint tend � raoutrer que la chaleur, meine quand eile est elevee au degre culinaire, c'est-a-dire an degre necessaire pour que la viande puisse etre mangee, est insuffi-sante � annuler en eile la virulence qui lui est inhe�rente.
Voici cette experience :
Des tranches de muscles, taillees dans la cuisse d'une truie tuberculeuse, furent placees sur un re-chaud chauffe au gaz jusqu'� ce que leur degre de cuisson fut equivalent, � peu pres, � celui des biftecks qui donnent du jus rouge. On exprima eusuite, de ces tranches, a l'aide de la presse, un liquide qui ser-vit � inoculer deux lapius, taudis que sur deux autres rinoculation fut pratiquee avec du jus non chauffe, provenant des memes muscles. Ces deruiers sont morts presque en meine temps, au bout de cent vingt
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jours, avec une pneumonie caseeuse et des tubercules daus presque tous les tissus.
Des deux lapins qui avaient regu le jus des tran�ches cuites � la maiiiere des biftecks, I'un fut tue le cinquante-sixieme jour, apres rinoculation, et Ton coustata sur lui la lesion locale au point de l'insertion virulente, les lesions gangliounaires correspoudantes, et des granulations grises dans le poumon, I'epiploon et la rate. L'autre etait encore vivant au moment de la coinmunicaliou academique, mais il avait maigri et tout anuougait qu'il n'avait plus longtemps � vivre.
Ces experiences ne sont pas, sans doute, encore assez nombreuses pour que la conclusion qu'elles reufer-ment s'impose � tous, el donne aux autorites, qui out la charge des interets de l'hygiene publique, la force necessaire pour edicter les mesures prophylactiques que commanderait la nature des choses, si le nombre et la concordance des experiences ne laissaient plus exister aucuu doute � l'endroit des dangers de Tusage alimentaire des viandes non suffisamment cuites, pro-venant d'animaux affectes de tuberculose.
J'aurai l'occasion de revenir ulterieurement sur cette question si importante; mais, des mainteuaat, on pent dire que les experiences de M. Toussaint, quoi-que le nombre n'en soit pas encore tres eleve, out une tres graude signification et une tres grande portee par la concordance des resultats, qu'elles out donnes. Ne prouvent-elles pas, en effet, que la virulence de la tuberculose ne reside pas seulemeut dans les lesions morbides, mais qu'elle est aussi dans le sang et dans
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le liquide exprime des muscles; et qu'elle a conserve son energie, meme lorsque les substances, auxquelles eile est inherente, out subi Taction de la chaleur au degre necessaire pour que la viande soit rendue co�mestible? Or si Ton cousidere qu'il est eutre daus uos habitudes culinaires de manger de la viande de boeuf demi cuite, et meme tout � fait crue daus ses parties centrales; et que, d'autre part, les prescrip�tions de l'usage de cette viande sont souvent faites par les medecins, en vue d'obteuir une refection plus rapide et plus complete des valetudinaires et des or�ganisations affaiblies; si Ton cousidere que m6me le sang de boeuf, adininistre par verrees, a eteconseille comme reconfortaut, on ne pourra se defendre, en presence des resultats des experiences de M. Tous-saint, de la crainte des dangers qui peuvent resulter de l'ingestion des viandes de boeuf et de leur jus � un degre de cuisson insuflisante.
La realite de ces dangers va ressortir davantage encore d'autres experiences de M. Toussaint qui de-montrent que les elements de la virulence sont si bien repaudus dans l'organisme des animaux tuberculeux, qu'on les retrouve dans le mucus nasal, daus la salive, dans Turine et, fait d'une bien grande gravite, jus-que daus la serosite des pustules vaccinales develop-pees sur ces animaux.
Voici le resume des experiences qui prouvent cette diffusion de la virulence tuberculeuse :
laquo; L'inoculation a ete faite, � la lancette, � la base de l'oreille de trois lapins, avec le liquide ciair et
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visqueux qui s'ecoulait de la uariiie d'une vache tu-berculeuse. Deux semaiues apres, les lapins presen-taient des lubercules locaux et deja une augmentation de la consistance et du volume du ganglion paro-tidien. La maladie a suivi sa marche habituelle. Le soixante-dixieme jour, les animaux ont ete lues et tons les trois presentaient une quantite considerable de tubercules dans le poumon, avec presence, dans quel-ques-uns, de matiere caseeuse au centre. Le plus grand nombre etait encore � l'etat de granulation grise.
D'autres experiences d'inoculation faites, le meme jour, avec la salive puisee dans la bouche de la meme vache, ont donne des resultats qui ne different de ceux qui viennent d'etre rapportes que par un degre moins avance des lesions pulmonaires. Le tubercule d'inoculation etait moins perceptible dans la peau, mais on pouvait le sentir dans le tissu cellulaire sous-cutane, et le ganglion voisin accusait, par sa tumefac�tion, I'infiltration tuberculeuse dont il etait le siege.
Ces faits d'experimentation expliquent les accidents de contagion que Ton voit se produire dans les etables. Les vaches saines qui vivent en rapport etroit de contact avec les vaches phthisiques, mangeant dans la meme auge, buvant dans le meme seau, iugerant sou-vent des fourrages, des racines, des p�tes, sur lesquels les mucosites nasales et. la salive des betes malades, leurs voisines, ont pu se repandre, s'inoculent ainsi, par les voies digestives, les elements de la virulence auxquels mucosites et salive servent d'excipients; et de cette maniere, la maladie peut se propager, de
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proche en proche, avec plus ou moins de lenteur, car, dans I'espece bovine, la phthisie affecte geuerale-ment une marche chronique.
On pent encore rapprocher des resultats donnes par l'inoculation directe de la salive, les faits de conta�gion accidentelle qui se sout produits en 1872 � Lyon, devant les membres de VAssociation pour tamncement des sciences, par suite de l'usage des memes baquets pour l'alimentation et des animaux soumis � l'epreuve de l'ingestioii tuberculeuse et de ceux qui devaient temoigner � cote, par l'integrite de leurs organes, � eux, de l'efficacite pathogenique des matieres inge-rees par leurs congeneres.
Si la salive est un excipient de la virulence et prouve ses effets, dans les groupes d'animaux qui vivent en rapports etroits de contact, par des accidents de contagion, resultant de l'impregnation des aliments ingeres par la salive des animaux malades, est-ce que, dans les rapports entre elles des personnes humaines, des conditions ne se presentent pas o� des accidents du meme ordre peuvent se produire? Est-ce que, par exemple, dans les rapports que j'appellerai de fos-siaiion, les chances n'existeut pas pour les echanges des salives : chances d'autant plus grandes que les basia sont plus ardents et plus intimes? Est-ce que lorsque deux personnes boivent au meme verre et de-glutisseut avec la meme cuillere. Tune d'elles n'est pas exposee � des ingestions redoutables, si I'autre est affectee de tuberculose ? S'il est vrai, comme I'admet la croyance populaire,
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que, dans les menages, les cas ne soient pas rares o� la phthisie devienne commune entre les deux con-joints, saus doute cette communaute de mal doit avoir une de ses causes principales dans l'intimite des rapports dont je viens de parier.
II n'y a pas encore bien longtemps que nos soldats raaugeaient � une gamelle commune, chacuu y pui-saut a tour de role avec sa cuillere, en sorte qu'apres un certain temps de cette rotation, le bouillon devait etre une dilution de loutes les salives melangees: condition involontairement experimentale, realisee � souhait, par cette dego�tante pratique, pour la trans�mission de toutes les maladies contagieuses. M. le ba�ron Larrey, � qui revient le merite d'en avoir demande et obtenu la re forme, avait surtout en vue de premu-nir les soldats contre les dangers de l'infection syphi-itique, que ceux qui en etaient exempts avaient des chances de contracter, lorsque se trouvaient dans leurs rangs des camarades dej� malades, qui pouvaieut in-fecter de leur salive virulente le bouillon de la gamelle commune.
Nous savous aujourd'hui que la reforme si sanitaire, dont M. Larrey a eu Finitiative, a une portee bien plus grande qu'on ne pouvait le savoir au moment o� il la proposa, car ce n'est pas seulement au virus syphili-tique que la gamelle commune pouvait servir de reci�pient, celui de la tuberculose s'y trouvait egalement; et Ion est autorise a admettre, saus etre taxe d'exa-geration, puisqu'on pent s'appayer sur des faits d'ex-perimeutation pour soutenir celle proposition, on pent
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admettre, disais-je, que sans doute plus d'un jeune soldat a pu trouver autrefois, daus le recipient de la gamelle commune, le germe de la taberculose qui a mine son orgauisme et entratue sa mort prematuree.
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DOUZIEME LECON
LA GONTAGIOSITfi DE LA TUBERCULOSE {Suite
Tous les experimentateurs sont aujourd'hui rallies � l'opinion de M. Villemin. � Nouvelles experiences de M. Toussaint. � Les viandes cuitesau degre comestiblerestent virulentes. � V6riflcation de ces resultats par M. Galtier, de l'Ecole veterinaire de Lyon. � Culture du microbe de la tuberculose par M. Toussaint. � Resultats positifs des inoculations avec des liquides de culture. � Virulence conservee dans des cultures successivesjusqu'�la vingti�me. �Vi�rulence du liquide vaccinal, puise sur une vache tuberculeuse. � Le lait d'une vache tuberculeuse peut 6tre virulent. � Experiences de Gerlacb, Bollinger, Klebs, en Allemagne; de M. Peuch, � Tou�louse. #9632;� La frequence de la phthisie dans l'esp�ce humaine n'a-t-elle pas des rapports avec la frequence de cette maladie dans I'esp�ce bovine? Question �mettre �l'etude.
Messieurs,
La tuberculose est une maladie contagieuse : voil� une verite centre laquelle rien ne saurait desormais prevaloir, car, depuis dix-huit � vingt ans que M. Villemin i'a fait sortir de son laboratoire, tant de faits ont ete accumules par les experimentateurs qui ont suivi M. Villemin dans la voie qu'il avait ouverte, qu'il ne jrfut plus y avoir de place dans un esprit eclaire, n'eme pour le doute et, a fortiori, pour la negation.
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COURS DE PATHOLOGIE COMPARfiE.
La tuberculose est une maladie coatagieuse
cela
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ressort en pleine evidence des experiences de M. Ville-min, d'abord, qui a pu la transmettre, par des inocu�lations variees, de rhomme aux animaux, en puisant Telement de sa virulence et dans les lesions orga-niques et dans les expuitions des malades, et qui a donne la preuve que la maladie transmise par lui a des animaux etait la tuberculose, en inoculant celle-ci et en la montrant virulente par les effets memes de cette inoculation, d'o� sortait, sur les animaux qui I'avaient subie, une maladie identique � celle de Thomme lui-meme.
Apres les experiences de M. Villemin, sont venues celles de M. Chauveau qui les out confirmees, en agrandissaut leur portee, car elles ont demontre que la tuberculose, sur quelque espece qu'elle se manifeste, etait contagieuse dans cette espece meme et en dehors d'elle, et qu'en outre, I'espece susceptible de la tu�berculose, qu'on appelle spontanee, constituait un ter�rain favorable a rensemeucement de la tuberculose humaine. D'o� cette conclusion, que sur quelque espece qu'elle apparaisse, la maladie est identique � elle-m6me, quant � sa nature, et qu'il n'y a de dif�ferences dans ses caracteres que celles qui resultent de sa marche plus on moins rapide, suivant les especes, voire meme suivant les ;ndividus, et de quelques apparences exterieures des lesions, en rapport avec les evolutions inflammatoires propres aux organismes dans les differentes especes. Les experiences de M. Chauveau ont, en outre, d6montre combien Tor-
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ganisme etait vulnerable aux attaques de la luber-culose par les voies digestives toujours ouvertes, et, pour aiusi dire, incessamment parcourues par des ma-tieres qui peuvent servir d'excipients aux elements de la virulence.
Ces experiences, repetees par M. Saint-Cyr sur des veaux et des pores, out donne les memes resultats. De meine, celles de M. Viseur, d'Arras, qui a fait entrer le chat dans le cycle des animaux susceptibles de la tuberculisation experimentale par l'ingestion des matieres tuberculeuses.
M. Colin, d'Alfort, qui, obeissant � la tendance scep-tique de son esprit, avait d'abord conteste la realite de la belle decouverte de M. Villemin, en lui opposant les resultats negatifs auxquels ses premieres experiences avaient abouti, M. Colin s'est Irouve amene � venir faire amende honorable, par l'evidence de la signi�fication d'un fait que les hasards de I'experimentation I'avaient mis � meme de recueillir. II lui a ete donne, en effet, de faire sortir la tuberculose experimentale la plus aigue de rinoculation, � la lancette, d'une parcelle de matiere puisee dans le tissu de la muqueuse de rifTtestin grele d'un lapin affecte d'une phthisic intes-tinale, et de faire ainsi la demonstration de la viru�lence de la tuberculose, et de sa virulence tres active et tres rapidement productive des eflets les plus con- ' siderables, � dose infinitesime, comme on I'observe pour les autres maladies coutagieuses.
Apres cette remarquable et tres concluante de�monstration de M. Colin, M. Toussaiut est intervenu
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216 COUBS DE PATHOLOGIE COMPAREe.
� son tour, confirmant, par ses experiences d'ingestion de matieres tuberculeuses, les resultats des experiences de ses devanciers et ajoutant aux preuves dej� pro-duites, en faveur de la nature contagieuse de la tuber-culose, des preuves nouvelles et des plus convaincantes qui ressortent des demonstrations qu'il a faites de I'etat virulent, non seulement de la matiere consti�tutive des lesions morbides, mais aussi du sang, des sues rausculaires, du jetage nasale, de la salive, de l'urine, de la serositedes pustules vaccinales develop-pees sur un animal tuberculeux. En un mot, d'apres M. Toussaint, la virulence tuberculeuse est partout dans l'organisme infecte, et ce caractere, comme de difTusion de la propriete virulente, etablit entre la tuberculose et les maladies contagieuses les plus ac-centuees, comme la morve aigue, la peste bovine, le charbon bacteridien, des rapports de similitude tres etroits. Aussi M. Toussaint, temoin des resultats qu'il a fait surgir de ses experiences sur des pores, des lapins et des chats, n'a-t-il pas hesite � faire la declaration, dans une de ses communications acade-miques � celle du Ier aoCit 1881 � laquo; qu'aucune maladie contagieuse ne possede une plus grande viru�lence raquo;.
Cette virulence qui est partout dans I'animal tuber�culeux, et notamment dans ses muscles, M. Toussaint a etudie I'influenceque la chaleur pouvait exercer sur eile, et il a reconnu qu'elle pouvait resister� une tem�perature egale � celle qui suffit pour faire arriver les chairs au degre de cuisson qui les rend comestibles.
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Dans une note encore inedite, destinee � une com�munication academique, M. Toussaint rend compte de nouvelles experiences qu'il a entreprises pour eclairer et t�cher de resoudre la question si impor-tante de la quantite de chaleur qui est necessaire pour eteindre la virulence dans Ies viandes de prove�nance tuberculeuse. Je vais vous en fairs connaitre les resultats;
Un morceau de muscle pris sur un boeuf trh gras, dont les poumons etaient remplis de gros tubercules caseeux, a ete chaufFe sur un gril jusqu'� ce que le thermometre marquat 52deg; dans son centre. Le jus ex-prime de ce morceau fut repandu sur du pain qui ser-vit � deux repas de cinq lapins, places dans la meme cage. Un de ces lapins, tue le trente-cinquieme jour, montra des ganglions tuberculeux et quelques granu�lations grises sur les poumons. Les quatre autres moururent tuberculeux dans la periode de cent vingt jours.
Pour determiner le point maximum de resistance du virus tuberculeux � la chaleur, M. Toussaint a sou-mis, dans un bain-marie, des jus de viande et du sang defibrine, � des temperatures de 61, 63 et 65deg;; � cette temperature, la fibrine restant dans le sang se coagule en une matiere gris�tre, sans cohesion, qu'on pent inoculer sous la peau avec la seringue Pravaz.
On inocule les liquides chauffes, � ces trois degres de temperature, � des groupes de deux lapins pour chaque degre.
Des deux qui out regu le jus porte � 61deg;, Tun
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COURS DE PATHOLOGIE COMPAREE
est tue le quaraute-quatrieme jour, et laisse voir des granulations grises et des tubercules crus, dans les poumons. la rate, le foie et les reins.
Le deuxieme mourut apres cent vingt-quatre jours. Les lesions tuberculeuses, qua Ton constata � son autopsie, furent inoculees � deux autres lapins qui moururent, l'un le soixante-quatorzieme jour, l'autre le quatre-vingt-dixienie, avec toutes les lesions de la pneumonie caseeuse.
Les quatre autres lapins inocules, deux avec les li�quides chauffes � 63deg;, et deux avec les liquides � 65deg;, furent tues le cent quatrieme jour et presenterent les meines lesions que les premiers. L'inoculalion des rnatieres de ces lesions fut egalement efficace.
La temperature de 61 a 65deg; ayant ete recounue insuffisante pour eteindre la virulence dans les jus de viandes, M. Toussaint la porta � 70 et 71deg;, pendant deux minutes, et inocula les jus ainsi chauffes � deux lapins dont Tun mourut tuberculeux au bout de quatre-vingt-cinq jours, et l'autre le cent quatorzieme.
Le poumon tuberculeux du premier mort servil � inoculer un nouveau Japin qui mourut en quatre-vingt-deux jours.
Avec des tubercules de ce dernier, on inocula deux autres lapins qui moururent tuberculeux, Tun le soixante-troisierae jour et l'autre le soixante-seizieme, apres l'inoculation.
En sorte qu'il semblerait que Tactivite du virus se serait accrue, au lieu d'avoir ete attenuee, puisque, aussi bien, on voit decroitre la duree de la vie, apres
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I'inoculation, dans les series qui se succedenl. Sans doute que le nombre de ces series n'est pas assez grand pour autoriser � formuler une loi; mais cette parti-cularite devait etre tout au moius signalee.
Somme toute, ces nouvelles experiences tendent � prouver que la virulence, inherente aux chairs des animaux tuberculeux, demeure active encore, meme quand ces chairs out subi une temperature de 70 � 71deg;, c'est-�-dire une temperature s�ffisante pour l'accommodation des viandes � l'usage alimen-taire.
Cette grave question de la virulence inherente au sang et aux chairs des animaux tuberculeux, a ete soumise � une verification experimeutale par M. Gal-tier, professeur � l'Ecole veterinaire de Lyon. Sur onze experiences d'inoculation faites avec le sang, et sur quinze, faites avec le jus exprime des muscles d'animaux saisis aux abattoirs pour cause de phthi-sie, il a obtenu quatre resultats positifs : deux avec le sang et deux avec le sue des chairs. II semblerait, done, d'apres ces resultats, que la virulence que j'ap-pellerai diffuse ne serait pas un fait constant dans les animaux tuberculises; qu'au contraire, eile constitue-rait plut�t l'exception. Mais � supposer qu'il en soil ainsi et qu'en prenant les chiffres des experiences de M. Galtier, la proportion des animaux tuberculeux chez lesquels la virulence est inherente au sang el aux chairs seit de 15 p. 100, cela n'etablit-il pas qu'en definitive, la cousommation des viandes tubercu-leuses expose � des dangers et que, consequemmenl.
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l'obligation de les prevenir s'impose � ceux qui ont charge de l'hygiene publique, puisqu'il est possible de les prevoir. En pareille matiere, du moment que Ton sait, on n'a plus le droit de rester inactif.
Dans une deuxieme note, destinee � l'Academie des sciences et encore inedite, M. Toussaint presente les resultats des nombreuses experiences d'inoculatioh qu'il a faites avec le microbe de la tuberculose obtenu par des cultures successives.
Ces experiences presentent un tres grand inter�t, car el les portent sur un grand nombre de sujets et elles viennent s'ajouter, avec la valeur de leur nombre et de leur signification positive, aux faits qui temoi-gnent de la nature contagieuse de la tuberculose. Je vais les resumer ici, car il s'agit d'enlever de haute lutte, contre des resistances tres energiques, les me-sures qu'il faut imposer pour diminuer le plus pos- ' sible les chances de l'infestation tuberculeuse que l'usage alimentaire de la viande infectee fait courir aux populations; et, pour forcer ces resistances, les faits ne sauraient etre trop multiplies.
Pour M. Toussaint, je le rappelle, le microbe de la tuberculose est un micrococcus tres petit qui, dans les cultures, se monlre on isole, ou plus souvent gemine, ou encore par groupes de cinq, six, dix, ou d'un plus grand nombre d'elements, jusqu'� presenter des amas ou zooglea, dont quelques-uns peuvent depasser le champ du microscope. Ces elements, isoles ou reunis ennbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; |
petits groupes de trente � quarante, sont animes d'un mouvement brownien tres accuse; leur refringence
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est assez grande. On desagrege facilement par des secousses les amas qu'ils forment.
Apres un certain nombre da tentatives, M. Tous-saiut a reconnu qu'on pouvait cultiver le microbe de la tuberculose, soit dans le serum pur, isole du caillot, soit dans le liquide cephalo-rachidien de divers animaux.
II suffit pour cela d'extraire, par les precedes connus, quelques gouttes de sang puise dans les vais-seaux d'animaux tuberculeux: vache, pore on lapin, et de les ensemencer dans ces milieux de culture. On reussit, dit M. Toussaint, constamment et facilement, ce qui impliquerait que la virulence du sang des ani�maux tuberculeux ne serait pas I'exception, comme les experiences de M. Galtier tendraient a le faire penser,nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; |
Quoi qu'il en soit, � quelque source qu'on le puise, le microbe que donuent les cultures est toujours le meme.
Voici le resume des experiences qui temoignent que les cultures ainsi obtenues sont fecondes :
Au mois de mai 1881, quatre chats furent inocu-les avec des cultures provenant d'une truie qui avail mange un poumon de vache tuberculeuse. Pour I'un, l'inoculation fut pratiquee � la base de l'oreille; pour les trois autres, eile consista dans l'injection de cinq gouttes de quatrieme culture dans le peritoine.
Le premier chat, inocule a l'oreille, mourut le qua-rante-septieme jour, sans lesions generalisees appa-rentes; mais le ganglion parotidien etait caseeux et
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virulent, car l'inoculation de parcelles de sa substance, faite � deux lapins, leur cornmuniqua une tuberculose dont ils moururent au bout de cinq mois.
Des trois autres chats, inocules par injection perito-neale, on constata sur Tun, qui fut tue le trente-sixieme jour, daus un etat maladif tres avance, des ganglions mesenteriques enormes, dont la matiere caseeuse, ino-culee � quatre lapins, les rendit tuberculeux.
L'uu de ces lapins, tue le soixante-troisieme jour, fouriiit la matiere de l'inoculation de trois autres la�pins et d'une genisse.
Ces lapins tuberculises servirent de source � une nouvelle inoculation toujours efficace; et ainsi de suite, jusqu'� une septieme generation, procedant d'un liquide de culture.
La genisse devint tuberculeuse et nous allons voir, tout � l'heure, que du vaccin puise sur eile a ete in-fectant de la tuberculose.
Quant aux deux autres chats, inocules par injection peritoneale, en meme temps que celui qui a fourni la matiere originelle des series qui viennent d'etre indi-quees, ils ne ressentirent aucun effet de cette inocula�tion.
Cinq mois apr�s ces resultats obtenus, on remit en culture, par un nouvel ensemencement, le microbe du flacon qui les avait produits, et apres sept cultures successives nouvelles, le liquide de la septieme gene�ration fut injecte � la dose de dix gouttes dans le peritoine de cinq jeunes chats.
Trois moururent, sans doute de peritonite, dans
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les dix ou douze jours qui suivirent l'injectiou. Des deux restant, Tun fut tue au moment o� il allait mou-rir, et Ton constata, � son autopsie, toutes les lesions de la tuberculose : ganglions intestinaux enormes; pe-ritonite avec serosite jaun�tre; foie, rate remplis de tubercules; poumons tres riches en granulations grises, quelques-unes caseeuses.
Des lapius furent inocules avec ces granulations. L'un d'eux, tue le cinquante-et-unieme jour, fournit la matiere d'inoculations de lapius de troisieme serie qui devinrent tuberculeux.
Le survivant des deux chats inocules avec le liquide d'une septieme culture, etait reste tres gras. II fut tue le cent trentieme jour apres Tinoculation, et Ton constata, � son autopsie, l'etat caseeux des ganglions
intestinaux, et des granulations grises, en assez grand
nombre, dans ses poumons. Deux lapins inocules avec la matiere de ces granulations moururent en quatre-vingts jours de pneumonic caseeuse.
Voici maintenant des faits qui temoignent de la vi�rulence conservee dans des cultures successives.
Sur six lapins inocules avec six gouttes d'une dou-zieme culture de sang de lapiu, deux sont morts : le premier en quatre-vingt-onze jours, le second en cent dix jours, avec une pneumonie caseeuse complete : ^nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;les poumons, la rate, les reins el les sereuses etaient
farcis de tubercules dont I'inoculation, faite a des
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series de lapins, prouva la virulence, car ils moururent
tuberculeux du centieme au cent vingtieme jour.
L'inoculation d'un liquide de seizieme culture de
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sang de pore dans du serum de veau, entraina la mort par la tuberculose de deux lapins sur six; pour le premier, apres deux cent soixante-dix jours, et, pour le deuxieme, une lapiue qui eut trois portees, apres un an et treize jours.
Sur trois lapins inocules avec une viugtieme culture faite dans le liquide cephalo-rachidien, deux devinrent tuberculeux et moururent, le premier en cent trente-trois et le deuxieme en deux cent quarante-neuf jours. Les lapins inocules avec les matieres des lesions cons-tatees sur ceux-ci succomberent � la tuberculose, du quatre-viugtieme au centieme jour.
Ces experiences d'inoculations, faites avec des tuber�culoses issues des liquides de culture, n'ont pas porte sur moins de cinquante-six sujets : cinq chats, une genisse et cinquante lapins.
Toutes ces cultures procedent originellement du sang d'une truie devenue tuberculeuse � la suite de l'ingestion d'un poumou de vache tuberculeuse. Le microbe provenant de la vache, ensemence sur une genisse, apres avoir passe par cette serie de flacons et d'organismes d'especes differentes, y a retrouve toute son activite premiere, car il a traduit ses effets par une tuberculisation de cette genisse, chez laquelle la virulence etait diffuse; on a pu, en effet, faire sortir cette virulence par I'inoculation, avec la lancette, de la serosite de pustules vaccinales, consecutives, chez cette genisse, a une inoculation de horse-pox.
De fait, douze piq�res d'inoculation ayant ete prati-quees autour de la vulve de cette vache avec une lau-
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cette chargee du liquide d'un cowpox provenant du horse-pox, on vit survenir, sept jours apres, autant de pustules vaccinales qu'on avait fait de piq�res.
La meme experience d'inoculation vaccinale ful faite sur une autre g�nisse, inoculee � l'oreille avec du jus de muscle de vache tuberculeuse, chauffe au degre o� Ton cuit la viande que Ton prescrit pour les malades anemiques.
Le liquide puise dans les pustules vaccinales de ces deux vaches fut inocule � douze lapins, dont six de-vinrent tuberculeux : quatre par Finoculation du vac-cin de la vache tuberculisee avec les liquides de cul�ture, et deux par l'inoculation du vaccin puise sur la vache tuberculisee par le virus chauffe au degre voulu pour la demi-cuissou des viandes.
Que nous voil� loin, Messieurs, de l'epoque o� l'idee de la contagion de la tuberculose ne rencontrait que des incredules ; o� l'on interpretait les pheno-menes dont l'inoculation de cette maladie etait suivie chez le lapin, que M. Villemin avait pris presque ex-clusivement pour sujet de ses experiences, par une susceptibilite exceptionnelle de l'organisme de cet ani�mal, qui le rendait apte � se tuberculiser � l'occasion de l'inoculation d'une substance quelconque ; ou encore par l'action irritante et pyogenique que les particules de la matiere tuberculeuse determinaient sur les parois des vaisseaux, qu'elles encombraient, et dans les ganglions lymphatiques obstrues.
Aujourd'hui l'element de l'activite virulente de la tuberculose est connu. M. Toussaint l'a vu sous une
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forme, M. Koch sous une autre; mais tous deux I'ont isole, Tont cultive et lui ont fait produire ses effets dans des organismes qui constituent pour lui des mi�lieux de culture pppropries. M. Toussaint i'a retrouve partout dans I'organisine infecte : dans les lesions viscerales qu'il y a determinees, dans le sang, dans le jus exprime de ses muscles, dans les mucosites na�sales, dans la salive, dans les matieres expectorees, dans les urines, et jusque dans la serosite des pustules vaccinales developpees sur des vaches tuberculisees experimentalement.
Ce n'est pas tout. Le lait, lui aussi, est infecte et pent servir de vehicule � la contagion. Je ne sache pas que des experiences aient ete faites pour denoncer, par la culture, la presence dans ce liquide du microbe infectant. Mais si cette demonstration n'a pas ete donnee par l'ensemencement de quelques gouttes de lait dans un liquide approprie, on l'a obtenue des ex�periences d'alimentatiou avec du lait des vaches phthisiques.
Les experiences faites en Allemagne par Gerlach, Bollinger et Klebs ont demontre que la tuberculose etait transmissible an mouton, au veau, au pore et au lapin par l'usage du lait de vaches-phthisiques. M. Peuch, professeur � l'Ecole veterinaire de Tou�louse, a repete ces experiences et a vu les resultats obtenus par les experimentateurs allemands se pro-duire sous ses yeux. Sur un jeune pore, qui avait bu, en quarante-trois jours, deux cent soixante-dix litres de lait proveuant d'une vache tuberculeuse, il a cons-
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t�te, � l'autopsie, les lesions de la tuberculose, accu-sees, surtout, dans les ganglions lymphatiques et le foie. Un lapin, auquel on avait fait boire quatorze litres de lait de vache tuberculeuse, en quatre-vingts* jours, est morl phthisique an bout de quatre mois. '
Comme tous ces fails ont de l'importance et comme ils sont graves ! Le plus precieux de nos animaux ali-mentaires, celui qui en raison de son volume et de sa taille fournit par ses chairs, par ses visceres, par son lait; la plus grande somme des substances qui entrent dans l'alimentation des populations, surtout dans les grandes villes: cet animal est expose � la tuberculose, maladie essentiellement contagieuse, dont I'element virulent est attache � toute sa substance et pent trou-ver un acces facile, par les voies digestives, dans tout organisme auquel cette substance serl de nourriture.
D'autre part, la phthisic de l'espece humaine est une maladie terrible. D'apres la statistique de M. Villemin le nombre de ses victimes annuelles, en France seule-ment, ne s'eleverait pas � moins de cent soixante mille, appartenant presque toutes � l'�ge de la jeunesse, c'est-�-dire du plus grand developpement physique et intellectuel. En sorte que cette maladie s'attaque, pour une trop grande part, aux forces vives d'une nation, qu'elle aneantit avant qu'elles aient eu le temps d'etre productives.
Est-ce que entre ces deux faits, l'existence (Te la phthisie sur une espece animale, dont les produits, en -substances nutritives, entrent pour une part priucipale dans L'alimentation des populations des grandes villes^
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et l'existence de la phthisie sur un grand nombre des individus qui composent ces populations, il n'y a pas un rapport? On est autorise � se poser cette question; et lorsque Ton considere que e'est surtout dans les villes que la phthisie exerce ses plus grands ravages, on a de la peine � admettre que le regime animal des populations des villes n'est pas sans avoir une part d'influence, et une part principale, sur le developpe-ment de cette terrible maladie, car le nombre des ani-maux alimentaires qui en sont affect�s et qu'on livre., malgre cela, � la consommation, s'eleve � un chiffre assez considerable.
G'est ce qui ressortira de quelques documents sta-tistiques que je produirai dans une prochaine seance.
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TREIZIEME LECON
LA CONTAGIOSITE DE LA T�BERGULOSE {Suite)
Fails accumules qui en temoignent. � Dangers de sa transmis�sion a l'esp�ce humaine par les voies digestives. � Les autopsies montrent qu'elle est plus repandue encore qu'elle ne le parait. � Forme benigne qu'elle rev�t. � Cette forme ne serait-elle pas une condition d'immunite contre la maladie plus grave? � Experiences inedites de M. Toussaint surle pore, qui autorisent cette induction. � Tous les ages ne sont pas egalement favorables au developpe-ment de la tuberculose. � Les chances de la contracter diminuent � mesure qu'on avance en age. � L'experimentation directe en te-moigne. � La misfire physiologique favorable au developpement du microbe de la tuberculose, comme, en general, de tous les para�sites. � Fait vrai dans les deux rfignes. � Nombre considerable des victimes de la tuberculose. � Une seule cause necessaire : la conta�gion.� Cette cause supprimee, les causes adjuvantes restent sans effets. � Done il faut s'attaquer � la contagion. � La voie ouverte est la voie digestive. � La chair et le lait, excipients possibles de l'element de la virulence. � Indications qui ressortent de la con-naissance de ce fait. � La tuberculose de la vache, maladie mal de-terminee symptomatologiquement sa periode initiale. � Neces-site de nouvelles etudes � faire avec les moyens plus parfaits dont on dispose aujourd'hui. � Emploi du thermom�tre. � Inoculations experimenlales pour eclairer le diagnostic. � Etude de I'urine, du lait. � La forme iusidieuse des premieres periodes, condition de la propagation dans les etables. � Importance des recherches en vue d'eclairer le diagnostic.
Messieurs,
Dans les seances anterieures, j'ai fait passer devant vous une longue serie des resultats donnes par I'expe-
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CO�RS DE PATHOLOGIE COMPAR�E.
rimentation, qui portent un irrefragable temoignage de la contagiosite de la tuberculose, de la diffusion par le sang de l'element vivant de sa virulence dans toutes les parties de l'organisme qui en est infecte, notam-ment dans les chairs musculaires et les parenchymes, et de la possibilite que cet element de la contagion, inherent aux chairs, inherent aux parenchymes, pullu-lant dans le sang, d'o� on peut I'extraire pour le mettre en culture et le faire apparaitre � l'etat d'isolement et de purete, en puissance de toutes ses activites, demontrables par 1'inoculation; � de la possibilite, disais-je, que cet element virulent trouveacces, par les voies digestives, dans l'organisme des hommes et des animaux qui se nourrissent de ces chairs virulentes, et qu'il y manifeste son activite propre par sa pullula-tion et toutes les lesions qu'il est capable de deter�miner dans les organes o� il s'arrfite. En d'autres termes, la tuberculose est transmissible par les voies digestives : les aliments ingeres, quand ils sont cons-titues par des organes provenant d'animaux tubercu-leux, muscles, foie ou reins, peuvent servir de ve-hicules � l'element de la virulence de cette maladie, � son microbe, puisque cet element est aujourd'hui connu. Et si l'organisme qui le regoit est susceptible, par nature, de lui servir d'habitat; si surtout, � cette susceptibilite de nature, se joignent des conditions ac-cidentelles de receptivite plus grande; ou bien encore si le microbe ingere est done d'une activite virulente exceptionnelle, comme celui que M. Colin a rencontre dans le lapin dont la raatiere tuberculeuse inoculee
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� deux de ses congeneres a donne lieu, chez Tun et chez l'autre, � une phthisie tres rapidement genera-lisee et profondement penetrante, puisque la moelle des os elle-meme en avait ete envahie : dans ces con�ditions, dis-je, des chances existent pour que I'ali-ment devienne I'agent d'une infection tuberculeuse, merae lorsqu'il a epr^gve 1'action de la chaleur culi-naire, c'est-�-dire de la chaleur s�ffisante pour que I'aliment animal soit rendu comestible pour I'homme. Ici une question se pose : celle de savoir comment il se fait qu'avec de pareilles chances de contagion, rien que par les voies digestives, la phthisie, dans I'espece humaine, ne soit pas plus commune encore qu'elle ne Test. A cela je repondrai, d'abord, qu'elle est plus commune quelle ne le parait, en ce sens qu'il est tres frequent de rencontrer des lesions de la phthi�sie, c'est-�-dire des tubercules, dans les poumons de personnes mortes accidentellement on de tonte autre maladie que la phthisie elle-meme. M. le professeur Brouardel m'a dit qu'il etait tres ordinaire de ren�contrer des lesions tuberculeuses dans les poumons des personnes dont on faisait l'autopsie � la Morgue. On pent se demander si ces lesions, pen graves par elles-memes, puisqu'elles sont compatibles avec les apparences et les realites de la saute, ne seraient pas le signe d'une tuberculose benigne, � la suite de la-quelle une immunite aurait ete acquise contre les at-teintes de la maladie sous sa forme plus grave. II ne serait pas impossible, en effet, que la tuberculose se comport�t, � l'egard d'elle-meme, comme la plupart
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des maladies contagieuses, et que l'organisme o� eile s'est manifestee sous une forme benigne, f�t desor-mais invulnerable, c'est-�-dire cess�t d'etre propre � servir de milieu de culture � l'element de la tubercu-lose. Cette idee n'est pas une simple vue de l'esprit. Elle a pour base quelques experiences dont M. Tous-saint nfa fait connaitre les resultats dans des lettres particulieres, Plusieurs fois il m'a signale Timmunite centre une nouvelle infection tuberculeuse, qui se trouvait acquise � des pores sur lesquels il avait pra�tique une premiere inoculation reussie, c'est-�-dire caracterisee par la tumefaction virulente du ganglion voisin du lieu de l'insertion, mais sans manifestation de phenomenes generaux graves. Sur ces porcs, la maladie commuuiquee avait ete benigne, car eile etait restee compatible avec toutes les apparences de la sante. Eh bien, toutes les inoculations ulterieures n'avaient plus rien produit sur eux, ce qui implique que leur organisme avait cesse de constituer un mi�lieu de culture favorable au developpement de l'e�lement vivant de la tuberculose.
Ces faits etant donnes, est-ce pousser I'induction au dela de ce qu'ils autorisent que d'admettre la pos-sibilite pour l'homme d'acquerir l'immunite, contre la tuberculose, par une sorte de vaccination, consecutive � l'ingestion d'aliments servant de vehicules au mi�crobe de cette maladie? N'est-il pas possible, en effet, que ce microbe, ingere avec les aliments, et absorbe avec le chyle en lequel ils sont transformes, ne pro-duise qu'une maladie benigne, caracterisee par quel-
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ques rares lesions, soil qu'il ait subi par la chaleur culinaire une alteration vaccinale, soit qu'il ne pos-sede qu'une activite limitee, car il y a des degres dans la virulence; soit enfin que l'organisme o� il a penetre ne lui constitue pas un milieu favorable?
Quoi qu'il en puisse etre des circonstances d'o� l'immunite peut dependre � l'endroit de la tubercu-lose, cette immunite est admissible, et, suivant toutes probabilites, c'est parce qu'elle existe que le nombre des victimes de la tuberculose, si considerable qu'il soit, ne se trouve cependant pas en rapport avec I'in-tensite de sa contagion, et la multiplicite des chances de la contracter auxquelles les populations sont exposees.
D'autre part, il faut considerer, pour expliquer le nombre relativement restreint des victimes de la tu�berculose, que tons les ages n'y sont pas egalement exposes. C'est sur les jeunes qu'elle a le plus de prise; avec le temps et les modifications qu'il en-traine dans le milieu organique, la receptivite pour la tuberculose decroit manifestement, en sorte qu'� conditions egales pour la contracter, les chances sont plus grandes pour les jeunes que pour ceux qui out depasse les limites de la jeunesse et, � plus forte rai-son pour ceux qui comptent leurs aunees plutot par les hivers que par les printemps. Non pas que la vieil-lesse soit absolument � l'abri de la contagion tuber-culeuse, mais eile est moins susceptible d'en eprou-ver les effets, sans doute parcei que la composition organique du corps vieilli ne convient pas autant � la
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pullulation du microbe de la tuberculose que celle du corps en voie d'evolution. Cela encore n'est pas une simple vue de l'esprit : on sait que dans le liquide de culture des microbes, il suffit des plus minimes in�fluences pour que l'activite de la pullulation soit ou precipitee ou ralentie, ou decidement arretee. Cette indication precieuse, fournie par la chimie biologique, ne doit pas etre perdue de vue par le therapeutiste. Nous y reviendrons.
Cette plus grande aptitude des jeunes organismes � servir d'habitat au microbe de la tuberculose est demontree par l'experimentation directe. M. Chauveau s'est servi de genisses et de veaux pour mettre en pleine evidence la contagiosite de la tuberculose. M. Colin, en experiraentant sur un taureau de quinze mois, n'a pas reussi � lui transmettre la tuberculose par les voies digestives,, comme M. Chauveau avait fait avec de jeunes animaux. Dans les experiences de M. Viseur, un vieux chat, soumis au regime de l'ali-mentation avec des organes tuberculeux, sort in-demne de cette epreuve, tandis que dans les msect;mes conditions trois jeunes chats contractent la maladie.
Ce n'est pas seulement par suite des modifications organiques qu'entrainent les progres de Tage, que l'homme est rendu plus refractaire � l'infestation tu-berculeuse. A conditions egales de jeunesse, les chances de contracter cette maladie sont plus grandes quand le corps a subi l'influence prolongee des mau-vaises conditions hygieniques, que lorsque, au con-traire, grace � l'excellence de ces conditions, il est
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en possession de toute sa force, c'est-a-dire que sa composition organique est exactement ce qu'elle doit �tre pour l'execution reguliere de toutes les fonc-tions.
A la misere physiologique correspond la disposition de l'organisme � se laisser envahir sans resistance par les parasites de toutes sortes, qui trouvent en lui un milieu favorable � leur pullulation. Gela est vrai dans les deux regnes. Inversement, les parasites out bien moins de prise sur les organismes qui se trouvent dans des conditions opposees. C'est toujours une question de milieu. Les colonies d'acares florissent sur les troupeaux qui out souffert des privations pendant les saisons rigoureuses. Les troupeaux bien nourris demeurent exempts de ces parasites. II y a plus: si comme I'a fait Delafond, on ensemence avec des fe-meiles d'acares fecondees les toisons de moutons bien portants, ce qui pent etre considere comme une veri�table inoculation de la gale, cette inoculation demeure sans effets on plut�t n'a pas d'effets durables, car la pullulation s'arr�te vite et la colonie perit, des les premieres generations, dans le milieu contraire � son developpement o� ont ete transplantees les femelles pleines d'ou eile procede. Que si^ an contraire, c'est sur un mouton en etat de misere physiologique que cette transplantation a ete faite, la colonie acarienne devient immediatement florissante et il suffit de quel-ques jours pour que le corps de l'animal se couvre d'acares qui denoncent leur presence par cette sorte d'eruption boutonneuse que cause l'action irritante de
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ce que Tont peut bien appeler le venin de ces in-
sectes.
N'est-ce pas l� l'image fidele et tout exterieure de ce qui se passe lorsque le microbe de la tuberculose se trouve en presence d'organismes qui sont, ou bien en possession de tonte leur force, on bien profonde-ment appauvris par suite des influences nuisibles aux-quelles ils ont ete soumis?
Sur les premiers, ce microbe n'a pas de prise; ou s'il en trouve une, eile est faible etpeu durable; et peut-etre m�me est-elle jusqu'� un certain point sa-lutaire, en ce sens qu'� la suite d'une maladie peu grave, determinee par ce microbe, I'immunite serait acquise par l'organisme qui l'aurait subie ? Mais il en est tout autrement quand le microbe de la tuberculose rencontre un organisme affaibli, rendu propre � son developpement, c'est-�-dire approprie � sa culture, par les modifications de composition organique qu'il a eprouvees dans les conditions de privations o� il a ete place. Dans ce cas, il produit ses effets avec une tres grande rapidite, et il donne lieu � une maladie galopante, comme on a l'habitude de le dire dans le langage clinique, c'est-�-dire � une maladie qui se caracterise, dans un temps tres court, tout � la fois par la multiplicite et par l'intensite des lesions qui lui sont propres.
En resume, si malgre sa contagiosite, que personne aujourd'hui ne songe plus � contester, la phthisic ne fait pas, dans les populations, un norabre de victimes qui soit en rapport avec l'intensite de ses poprietes
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contagieuses et la multiplicite des circonstances o� l'influence de la contagion pent produire ses effets, cela depend de ce que, avec les modifications organiq�es que l'�ge entraine, les aptitudes � contracter cette maladie decroissent proportionnellement, et sans doute aussi, de ce que les organismes se trouvent premunis, dans une assez grande proportion, centre la gravite de ses atteintes, par une atteinte benigne qui les a ste�rilises pour d'autres ensemencements. C'est au moins ce que Ton peut induire et des resultats que M. Tous-saint a obtenus par un certain nombre de ses expe�riences sur I'espece porcine, et des faits necropsiques qui denoncent, dans I'espece humaine, la frequence des lesions tuberculeuses, limitees en nombre et en intensite, et qui semblent impliquer que I'organisme tnbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;o� on les constate a subi une infection avortee.
Mais si le nombre des victimes de la tuberculose n'est pas en rapport avec la multiplicite des conditions favorables aux manifestations de cette maladie, il ne laisse pas, cependant, de temoigner, par la grandeur redoutable du chiffre qui l'exprime, de la gravite extreme de cette maladie, que Ton peut considerer comme un fleau veritable pour I'espece humaine, car eile sevit sur eile avec une continuite qui accuse
J l'immanence de sa cause. S'attaquer � cette cause et t�cher le plus possible d'en reduire 1'action, voil� ce qui doit etre l'objet des preoccupations incessantes des medecins et des administrateurs qui ont la charge de l'hygiene publique. Or, grace � la belle decouverte de M. Villemin, cette
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cause est connue, c'est la contagion, qui peut 6tre plus ou moins active, suivant que les circonstances sont plus ou moius favorables � la manifestation de ses efFets, mais qui est la cause, la cause primordiale, sans laquelle les autres influences, considerees comme causales par le plus grand nombre des pathologistes, ne sauraient rien produire de ce qui constitue essen-tiellement la tuberculose. Ces autres influences, repu-tees causales, sont adjuvantes � coup s�r; elles prepa-rent le milieu organique � recevoir la semence tuber-culeuse et � la faire fractifier, mais sans cette semence, qui est la cause indispensable, les causes adjuvantes sont impuissantes � produire la tuberculose.
C'est done � la cause qu'il faut s'attaquer; c'est eile qu'il faut annuler ou, tout au moins, reduire le plus possible dans son energie, pour preserver l'espece hu-maine de la tuberculose, ou diminuer le plus possible le nombre des victimes qu'elle fait annuellement.
Comment realiser ce grand resultat? En s'inspirant des connaissances certaines que 1'experimentation a fait acquerir sur les voies que suit la tuberculose pour penetrer dans l'organisme humain, et en re-courant aux mesures propres � interdire l'acces de ces voies aux elements de la virulence de cette ma-ladie, autrement dit, aux microbes qui en constituent |nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;essentiellement la nature.
Or parmi ces voies ouvertes � la contagion tuber-culeuse, celles qui le sont le plus largement peut-etre, et qui peuvent donner acces aux elements de la virulence � doses, dirai-je^ plus intensives, sont les
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voies digestives. Le boeuf tuberculeux, ayant des chairs tuberculeuses, peut transmettre sa maladie aux personnes qui s'en nourrissent; la vache tuberculeuse peut aussi etre infectante par son lait. L'experimen-tation a donne sur ces deux points des resultats trop positifs, pour que le doute puisse etre permis.
Ces deux sources de l'infestation possible de rhomme par la tuberculose etant connues, I'indication qui res-sort de cette notion certaine est de chercher et surtout d'appliquer les moyens propres � prevenir cette in�festation, plus frequente sans doute qu'on ne le croit.
La premiere des conditions qu'il faudrait realiser pour diminuer les chances de l'infestation par l'usage du lait, ce serait que la tuberculose bovine fut bien connue, bien determinee symptomatiquement et qu'on p�t, � des signes certains, en affirmer l'existence et faire abattre les animaux qui en sont atteints. On pre-viendrait ainsi la contagion dans les etables, et, de ce fait, les dangers de livrer � la consommation du lait puise sur un animal malade se trouveraient propor-tionnellement reduits.
Mais, malheureusement, la tuberculose de l'espece bovine ne se caracterise pas, surtout � sa periode ini�tiale, par des symptomes qui soient tellement signifi-catifs qu'on puisse en affirmer l'existence avec une complete s�rete, comme on fait pour la peripneu-monie contagieuse., � laquelle l'etendue des lesions pulmonaires donne une expression symptomatique si nettement distinctive.
Dans l'espece bovine, les lesions pulmonaires chro-
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niques, considerees d'une maniere generale, restent longtemps compatibles avec les apparences exterieures de la sante, surtout chez les animaux qui vivent en stabulationpermaneute. Ainsi, par exemple, lorsque la peripneumonie contagieuse a passe � l'etat chronique, il n'est pas rare qu'une partie considerable du pou-mon, dans laquelle la vie s'est eteinte par obliteration de tons ses vaisseaux, seit separee des parties periphe-riques restees Vivantes par une inflammation disjonc-tive, identique � celle qui s'etablit autour d'une es-chare tegumentaire, et que cette partie pulmonaire mortifiee, isolee de partout, constitue, au milieu de l'organe, un veritable sequestre, analogue � celui d'un os necrose contenu dans un os vivant. Eh bien, ce sequestre pulmonaire, renferme dans une cavite puru-lente completement close, reste sans influence sur la sante generale; les animaux peuvent mettre � profit leur ration et transformer en graisse ce qui en reste disponible, apres l'emploi de ce qui est necessaire pour l'entretien organique. Je crois vous avoir dit que l'on avait constate de ces sequestres pulmonaires sur des betes primees pour la perfection de leur engraisse-ment, dans des concours d'animaux de boucherie.
Etant donnee cette sorte d'indifference de l'orga-nisme du boeuf pour des lesions, m^metres etendues, de l'appareil pulmonaire, on doit concevoir que celles qui resultent de la tuberculose ne soient pas aecu-sees, surtout � la periode du debut, par des symp-t�mes tres significatifs.
Quels sont-ils, en effet ?
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L'un des premiers sympt�mes est la toux; mais cette toux ne peut que faire naitre des soupgons sur sa cause; eile n'est pas assez significative dans son mode et son timbre pour autoriser une affirmation diagnos-tique. Elle n'est pas tres forte; eile est seche, un peu sifflante, se produit quelquefois par quintes. Le pas�sage des aliments dans le pharynx en est, chez quel-ques sujets, la cause determinante; dans d'autres cas c'est l'action du froid sur la peau. Les efforts de la traction peuvent la provoquer sur les animaux de tra�vail ; de meme la pressiou de la trachee entre les mains. Mais cette toux n'a rien d'assez caracteristique pour qu'elle puisse servir de base � un diagnostic certain; d'autant plus, d'une part, qu'elle n'est pas constaute, qu'elle peut ne pas se manifester alors que la tuberculose existe; et, d'autre part, qu'elle pput exister avec les memes caracteres sur des animaux qui ne sont pas tuberculeux.
Interrogez I'appareil respiratoire par les autres moyensde la diagnose : ni la percussion, ni I'ausculta-tion ne vous fournissent des renseignements qui soient assez precis pour autoriser un diagnostic positif. Les lesions granuleuses disseminees ne modifient pas assez la densite pulmonaire pour denoncer leur presence par des modifications sensibles, soit des bruits produits par la percussion, soit de ceux que l'auscultation de la poitrine permet de percevoir. Les bruits de frotlements bronchiques et les rales sibilants muqueux, signales par quelques auteurs comme signes du debut de la phthisie chez la vache, u'ont peut-etre 6te pergus par
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ceux qui en ont parle, que parce qu'ils avaient le pre-juge que ces bruits devaient exisler. Ce phenomene psychologique n'est pas tres rare dans les choses de la medecine; quand on s'est d'avance fait une idee de la maniere dont un phenomene devait se produire, I'es-prit predispose le voit voiontiers tel qu'il I'a congu.
Le rhythme respiratoire n'est pas sensiblement mo-difie chez les betes en stabulation. Celles qui travaillent s'essoufflent plus vite; sans doute, aussi, quel'animal ne se sent pas aussi fort; mais comme il supplee par son energie, procedant de sa volonte, � sa force dimi-nuee, il est bien difficile d'attribuer � ces manifestations symptomatiques obscures une signification relative � la phthisic commengante.
Les symptomes qui procedent de l'appareil circu-latoire sont encore plus obscurs; quelques pulsations de plus, avec une plus grande tension de l'artere coin-cidant avec la force augmentee des battements du coeur, sont des signes trop vagues pour que l'idee de la phthisie debutante puisse en etre deduite, d'au-tant surtout que les animaux conservent dans leur habitude exterieure, dans l'expression de leur phy-sionomie, dans leur caractere propre, dans leur ap-petit et dans le fonctionnement regulier de leur appareil digestif toutes les apparences de la saute.
On a signale l'orgasme genital comme un signe qui apparaitrait souvent au debut de la phthisie chez la vache, laquelle serait ce que Ton appelle, en pareil cas, taurelicre on, autrement dit, soupirerait apres le taureau. Je ne sais si cette affirmation est etablie sur
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une observation bien rigoureuse; mais comme I'exci-tation geaesique, qui fait dire que les vaches sont taurelieres, se manifeste souvent en dehors de la phthisie, il en resulte qu'on ne saurait attribuer � ce Symptome une signification speciale � l'egard de cette maladie.
J'en dirai autant de la sensibilite excessive de la region dorso-lombaire, qu'on voit rangee, dans les descriptions classiques, parmi les sympt�mes par les-quels la phthisie se caracterise � son debut, dans I'es-pece bovine. Sur ce point, je dois d'abord faire obser�ver que dans les animaux de cette espece, la colonne vertebrale est normalement tres sensible, et qu'il suf-fit d'une faible pression des doigts pour determiner son incurvation en contre-bas. Que dans I'etat maladif cette sensibilite s'accuse davantage, je n'y contredis pas; mais ce n'est pas exclusivement dans la phthisie que ce fait se produit et, consequemment, quand il apparait, on ne saurait lui attribuer une signification speciale.
Somme toute, rien dans les sympt�mes, qu'on a donnes jusqu'� present, de la phthisie commengante dans I'espece bovine ne permet d'affirmer le dia�gnostic de cette maladie, ils ne peuvent que la faire soupgonner : la toux particulierement qui est, parmi ces sympt�mes, celui qui a le plus de signification.
Mais il faudrait que cette etude symptomatique fut reprise avec les moyens d'exploration et d'inves-tigation dont on dispose aujourd'hui.
Par exemple, je ne sache pas que les signes fournis
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par les variations de la temperature du corps aient ete recherches, ou du moins signales. Je ne les trouve pas indiques dans une nouvelle edition qui va paraitre, tout � l'heure, du Tratte pratique des maladies de l'espece bovine de Cruzel, que M. le professeur Peachy de l'Ecole veterinaire de Toulouse, s'est charge de refagonner pour le mettre au courant de la science. II est certain, cependant, que le thermometre donne-rait sur I'etat febrile de la periode initiale de la phthisie chez la vache, des indications plus precises que eel les qu'on pent obtenir par la palpation de la peau, I'ex-ploration du pouls et la perception de la chaleur de l'air expire.
D'autre part, l'exploration de la poitrine � l'aide du plessimetre et du stethoscope perfectionne de M. Cons-tantin Paul, qui evite � l'observateur la fatigue des attitudes fortement inflechies qu'il doit prendre pour mettre son oreille en rapport avec les parois thora-ciques; l'exploration de la poitrine par I'intermediaire de ces moyeus plus parfaits conduirail, sans doute, � distinguer dans les symptomes pulmonaires des caracteres significatifs qui ont echappe aux anciens observateurs.
II faudrait surtout recourir, pour asseoir le diagnos�tic sur une base solide, � des inoculations experimen-tales, voire � des cultures dans des liquides appro-pries. S'il est vrai, comme M. Toussaint I'affirme d'apres ses experiences multipliees, que la virulence soit inherente an sang, aux mucosites nasales, � la salive des animaux tuberculeux, quoi de plus simple
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que de soumettre � l'epreuve de I'moculation, le sang, les raucosites nasales, la salive d'une vache que Ton a lieu de suspecter phthisique. Si les lapins dont on se servirait, comme de reactifs, pour juger cette ques�tion, donnaient une reponse positive par la manifesta�tion des sympt�mes dont l'inoculation serait suivie, et surtout par les lesions autopsiques, toute indecision disparaitrait � l'instant meme, et Ton pourrait, avec une parfaite connaissance de cause, affirmer qu'une vache est phthisique et la faire abattre. Que si, an contraire, ces inoculations restaient sans effets, cela etablirait une forte presomption que la suspicion de phthisie n'a pas de motifs reels; je n'ose pas dire encore une certitude, parce que les experiences ne sont pas encore assez nombreuses pour permettre une conclusion dans ce sens.
Ce n'est pas tout : l'examen de l'urine, soit par I'analyse chimiqne, soit par le microscope, soit par l� culture de ses elements, revelerait peut-sect;tre dans ce liquide quelque signe, quelque caractere distinctif, quelque element propre, qui par sa Constance pourrait avoir une grande signification diagnostique � l'en-droit de la phthisie.
II y a de tres interessantes recherches � faire dans cet ordre d'idees. La chose en vaut la peine puisque, aussi bien, il s'agit de faire reconnaitre par des signes certains cette tuberculose de la vache, si obscure dans ses manifestations � sa premiere pe-riode, qu'elle reste dissimulee sous les apparences de la saute et que rien de suffisamment caracteristique
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ne peut permettre, dans l'etat actuel des choses, d'en affirmer I'existence.
C'est sous cette forme insidieuse qu'elle est sur-tout redoutable.
La premiere periode de la phthisic ecoulee, lorsque les lesions par lesquelles cette maladie se caracterise se sont multipliees et ont pris de grands developpe-ments aux lieux qu'elles occupent, qu'en un mot la tuberculose est devenue ce que nos anciens appe-laient la pommeliere, en raison des reliefs arrondis que les masses tuberculeuses font � la surface des poumons, alors le diagnostic cesse de presenter des difficultes reelles, car la gravite des lesions donne aux symptomes une signification tres saisissable.
De fait, sous quel etat se presentent les animaux atteints d'une phthisie qui se caracterise anatomique-ment par le degre d'infiltration tuberculeuse du pou-mon que le mot pommeliere implique ?
Ils sont dans un etat de grande maigreur, leur peau seche est terne et comme adherente. Ilss'essouf-flent vite et toussent souvent avec raucite et siflle-ment. Les matieres qui s'ecoulent par leurs narines sont muco-purulentes, granuleuses, parfois fetides.
L'etendue des lesions pulmonaires est denoncee fa-cilement, � la percussion, par la matite et, � l'auseul-tation, par le r�le sibilant.
L'appetit est diminue, et l'irregularite de la rumi�nation donne lieu � des retentions gazeuses qui se traduisent par des ballonnements intermittents.
Les vaches donnent un lait moins abondant et plus
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sereux, enfin le Systeme ganglionnaire lymphatique de la peripherie denonce, par les engorgements dont il est le siege, l'etat du Systeme lymphatique profond. Accusee par un pareil ensemble de symptomes, la phthisie de la vache n'est plus la maladie insidieuse de ses debuts. Mais on ne la rencontre que rarement aujourd'hui avec de tels caracteres. Les nourrisseurs, plus eclaires qu'autrefois et inspires par leurs interets mieux entendus, ne laissent plus vieillir leurs vaches laitieres aussi longtemps que le faisaient leurs devan-ciers. Ils ont soin de les livrer � la boucherie avant de les laisser deperir et previennent ainsi le grand de-veloppement des lesions tuberculeuses qu'il etait si commun d'observer au commencement de ce siecle, ainsi qu'en temoignent les relations des auteurs qui ont traite des maladies des vaches laitieres.
Cette pratique a eu cette consequence que si la tu-
berculose, consideree sur les sujets individuellement,
a diminue d'intensite, par contre eile s'est propagee
sur un plus grand nombre, le renouvellement plus
frequent des etables etant une condition pour que la
contagion multiplie proportionnellement ses attaques.
En cet etat des choses, vous le voyez, rien ne se-
rait plus important qne de resoudre le probleme du
diagnostic de la phthisie dans I'espece bovine, � la pe-
riode ou cette maladie est le moins reconnaissable,
afin qu'en se premunissant contre les dangers de la
contagion dans cette espece, on diminu�t d'autant
pour I'homme les chances de la contractor par I'usage
des chairs ou du lait.
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QUATORZIEME LECON
L'INSPECTION DES VIANDES DE BOUCHERIE AU POINT DE VUE DE LA T�BERC�LOSE
Dangers de la transmission de la tuberculose � rhomme par las voies digestives. � Surveillance des etahles. � Difflcultes qui re-sultent de Tincertitude du diagnostic. � Surveillance des abattoirs.
�nbsp;La phthisic est compatible dans l'esp�ce bovine avec le bon etat des chairs ct 1'embonpoint. � En principe, toute viande provenant d'animaux tuberculeux devrait etre eliminee de la consommation.
�nbsp;Difficulles pratiques. � Les convictions ne sont pas faites. � Re�sistances des interets leses. � H6sitations des inspecteurs et des autorites. � Diflerence de faire, suivant les regions. � Avis de-mande par le ministre an comite consultalif d'hygi�ne publique.
�nbsp;Documents relatifs � cette consultation. -� Mesures proposees. � Des experiences officit-lies devraient etre faites-pour arriver � une solution qui servirail de base k des mesures uniformes. � Sta-tistique faire pour fixer sur le chiffre des animaux phthisiques, parmi ceux qui sont abattuspour la consommation.�-Lesstatis-tiques actuelles sont insuffi�antes.
/
Messieurs,
La tuberculose est pour 1'espece humaine un danger toujours menagant et trop souvent realise. Deux voies sont largement ouvertes chez eile � l'invasion de cette maladie : les voies respiratoires et les voies diges�tives ; et, c'est peut-etre par ces dernieres que I'infes-
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tation de l'organisme humain s'opere le plus s�rement, en raison des doses, pour ainsi dire, massives des ele�ments contagieux auxquels les matieres alimentaires peuvent servir d'excipients. De fait, l'animal dont les chairs, les parenchymes et le lait entrent pour une si forte part dans l'alimentation humaine, etant expose � la tuberculose, les dangers pour l'homme de la transmission de cette maladie par l'intermediaire de ses aliments, se trouvent proportionnels au nombre des animaux de l'espeee bovine qui en sont infectes. Reduire les chances de ces dangers par une sur�veillance attentive, qui s'oppose, dans la plus grande mesure possible, � ce que Ton puisse faire servir � la consommation alimentaire de l'homme les substances provenant d'animaux infectes et meme seulement sus�pects de tuberculose, tel doit etre l'objet des preoccu�pations incessantes de tons ceux qui, � des titres divers, out la charge de sauvegarder l'hygiene pu-blique.
Sans doute que l'accomplissement de cette mission ne laisse pas de presenter de tres grandes difficultes qui precedent et des choses et des hommes : ceux-ci luttant centre l'interet public pour la defense de leurs propres interets ; celles-l�, pleines des difficultes inhe-rentes � leur nature, et dont la solution definitive demande encore beaucoup de recherches.
Ainsi, par exemple, je vous ai fait voir, dans la der-niere seance, combien le diagnostic de la phthisic tu-berculeuse des vaches, � sa periode initiale, etait encore enveloppe d'obscurites. Aucun Symptome uni-
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voque ne permet d'en affirmer I'existence. On peut la soupQonner � de certains indices, comme la toux, I'essoufllement plus grand, les forces un pen dimi-nuees chez I'animal qui travaille; mais combien cela est insuffisant pour servir d'assise � des mesures sani-taires et en permettre l'application rigoureuse! La question de la Symptomatologie de la phthisic de la vache doit done etre remise � l'etude, car 11 s'agit ici d'un interet superieur d'hygiene publique. Le lait pouvant servir de vehicule a I'element contagieux, rien de plus important que de pouvoir reconnaitre � des signes certains si une vache est susceptible de devenir infectante par son lait, e'est-a-dire si eile est atteinte de phthisic. Quand la maladie est ancienne, qu'elle se denonce par la maigreur de I'animal, sa toux frequente, les r�les pulmonaires et les modifi�cations des bruits donnes par la percussion des parois thoraciques , le diagnostic peut etre formule sans beaucoup de difficultes. Mais il n'en est pas de meme, je le repete, � l'epoque initiale de la phthisic, et meme, dans de certains cas, � une epoque plus avancee de cette maladie qui est compatible avec les apparences exterieures de la sante, comme cela n'est pas rare � observer dans les animaux de l'espece bovine.
On ne saurait done trop multiplier les recherches cliniques et experimentales pour t�cher d'eclairer la question du diagnostic de la phthisic, et donner les indications certaines propres a guider I'inspection sa-nitaire et � lui tracer avec s�rete la ligne de conduite qu'elle doit suivre.
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En attendant, je crois que toutes les fois qu'il n'y a pas de doutes possibles sur I'etat d'une vache lai-tiere� Tendroit de la phthisic, ou meme qu'il y a des motifs serieux de la soupgonner, l'autorite devrait lt;�tre armee par la loi du pouvoir d'emp�cher, par 1'abatage de cette b�te, que son lait soit livre � la consomma-tion. On tarirait ainsi une source possible d'infection tubcrculeuse.
D'autre part, le regime lacte auquel il est neccssaire de recourir devrait etre, de la part desmedecins qui le prescrivent, I'objet d'une surveillance attentive, et toutes les fois qu'on ne serait pas s�r de la prove�nance du lait, comme c'est le cas le plus ordinaire, il serait prudent de ne le faire consommer qu'apres ebullition.
Ces precautions pourront paraitre, sans doute, ex-cessives; mais elles sont justifiees, cependant, et par la frequence de la phthisie dans I'espece huraaine, et par la connaissance certaine, acquise aujourd'hui par I'experimentation directe, que les matieres alimentaires ingerees peuvent, quand elles proviennent d'animaux malades, servir d'excipients aux elements de la tuber-culose et devenir ainsi les agents de la transmission possible de cette maladie par absorption digestive. En presence d'une pareille eventualite, que les resultats des experiences directes permettent de prevoir, on ne saurait prendre trop de precautions pour tocher d'en prevenir les realisations.
Si ces precautions sont commandees centre les dan�gers possibles de l'usage du lait de provenance sus-
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pecte, combien, d fortiori, ne le sout-elles pas contre ceux qui peuvent resulter de la consommation de la viande et des autres organes, provenant d'animaux dont I'autopsie ne laisse aucuu doute sur I'etat d'infec-tion tuberculeuse � des degres divers.
Nous voici en presence de la grande difiiculte pra�tique. Cette difficulte n'existerait pas si la tuberculose bovine entraiuait toujours I'etat de phtbisie, c'est-�-dire I'etat de consomption pour les animaux qui en sont atteints. On pourrait, sans de grandes diflicultes, defendre de livrer � la consommation, comme ne reu-nissant pas de s�ffisantes qualites alibiles, les viandes fournies par les animaux reduits, par leur maladie, � une maigreur extreme, comme celle que la pbtbisie determine souvent, meme dans I'espece bovine. Et c'est effectivement l� la regle de conduite que Ton suit actuellement. Etant donne un animal tuberculeux, si sa tuberculose est accompagnee d'un grand etat de maigreur, l'interdiction de livrer sa viande � la con�sommation est prononcee et, de ce chef, se trouve rea-lisee la prescription sanitaire que coramande la nature des choses.
Mais, je i'ai dit, la tuberculose dans I'espece bovine est compatible, surtout lorsqu'elle est pulmonaire, avec la conservation du fonctionnement regulier de I'appareil digestif, et, dans ce cas, les animaux tirent parti de leurs aliments, non seulement pour le bon entretien de leurs muscles, mais aussi pour la forma�tion des reserves de graisse; de teile sorte qu'on pent se trouver a I'abattoir en presence, tout � la fois, et
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de lesions tuberculeuses incontestables, et de viandes qui ont le plus bei aspect, impliquant leurs qualites alibiles.
Que faire en pareil cas ?
S'il n'y avait qu'� resoudre une question de prin-cipe, la reponse � cette demande ne serait pas difficile � donner. Ces viandes, si belles qu'elles soient, de-vraient etre prohibees, puisque, aussi bien, l'experi-mentation demontre qu'elles renferment un element contagieux, dont la transmission par les voies diges�tives est possible, meme lorsque ces viandes ont subi l'action de la chaleur au degre necessaire pour qu'elles soient rendues comestibles. Mais, dans la pratique, les mesures prohibitives appliquees � des viandes qui, au point de vue objectif, sont irreprochables, rencontrent de grandes difficultes, d'abord parce que ces mesures ne sont pas encore conformes � l'opinion generate; les convictions ne sont pas encore faites � l'endroit des dangers inherents � l'usage des viandes de prove�nance tuberculeuse. Ces dangers sont meme contestes par un grand nombre, meme parmi les personnes competentes, veterinaires ou medecius,, qui se fondent, pour appuyer leurs doutes ou leurs negations, sur cette consideration que la phthisie, dans l'espece hu-maine, devrait etre plus f'requente qu'elle ne Test, si la consommation des viandes tuberculeuses etait une condition reelle de sa transmission.
II est difficile qu'avec ces incertitudes sur la nature reelle des choses, on trouve, pour l'application de mesures d'interdiction aux viandes de provenance tu-
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berculeuse, quelle que soit leur apparence ,ce concours d'eaergies et de volontes qui sont les conditions indispensables du succes.
Les autorites qui se trouvent en presence des opi�nions divergentes des hommes, dont elles invoquent la competence speciale, demeurent necessairement hesi-tautes, entre le out et le non qui se contredisent devant elles.
Les inspecteurs de boucherie, quand ils n'ont pas des convictions solidement arretees sur les dangers que peuvent faire courir les viandes de provenance tuber-culeuses aux personnes qui s'en nourrissent, n'osent assumer la responsabilite de faire rejeter de la con-sommation celles qui presentent tons les caracteres des viandes de bonne qualite. G'est qu'en effet, ils se trouvent l� en presence de resistances tres energiques, voire de menaces, de la part des bouchers, pour les-quels des decisions prohibitives entrainent, necessaire�ment, la perte totale de la marchandise que repre-sentent des animaux, qu'ils ont achet�s de la meilleure foi du monde, en se fiant � des apparences qui im-pliquaient, a leurs yeux, un parfait etat de sante.
Ces divergences d'opinions � l'endroit des dangers que pent faire courir la consommation des viandes provenant d'animaux tuberculeux, expliquent !es lignes de conduite differentes que suivent, dans la pra�tique, les inspecteurs des abattoirs : les uns autorisant la livraison de ces viandes quand elles ont un bei aspect, les autres se pronongant pour leur interdiction absolue, quelle que soit leur apparence. De l�, dans
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les localites o� I'iaspection se montre la plus severe, des reclamations de la part des bouchers qui ont peine � comprendre que la regie ne soit pas uniforme, et qua ce qui est repute un danger chez eux, cesse d'avoir ce caractere ailleurs.
Dans une circonstance recente, le ministre de l'agri-culture a ete consulte par le prefet de police sur la ligne de conduite qu'il convenait de prescrire aux inspecteurs des abattoirs, quand ils constataient les lesions de la tuberculose sur un animal abattu pour la consommation. Vous allez pouvoir juger, Messieurs, par le compte rendu sommaire que je vais vous donner de cette affaire, des grandes difficultes que presente, dans la pratique, la solution de cette question, sur laquelle le comite consultatif d'hygiene publique a ete appele � se prononcer, � l'occasion d'une demande de consultation adressee au prefet de police par le maire de Dijon.
A Dijon, l'inspection des abattoirs est faite par un veterinaire, M. Laligant, qui se montre tres severe � l'endroit des viandes provenant d'animaux tubercu-leux, parce qu'il est convaincu des dangers que peut entrainer leur consommatiou. Le maire de la ville s'est conforme � cette maniere de voir et 1'interdiction de la livraison de ces viandes s'en est suivie. Cette interdiction a donne lieu � d'energiques reclamations de la part des bouchers, s'autorisant pour les formuler de ce qui se passait � Paris. laquo; Que fait-on � Paris en pared cas? raquo; A cette demande qui lui est adressee par le maire de Dijon, le prefet de police lui fait
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repondre que laquo; � Paris le service de l'inspection de la boucherie faisait supprimer, dans las animaux de bonne qualite, les poumous, les plevres et quelquefois les cotes envahies par la tuberculose, et que I'animal entier n'etait saisi que lorsqu'il etait maigre et epuise raquo;.
Le maire de Dijon ne trouva pas dans cette reponse tous les eclaircissements qu'il attendait. Dans les cas qui motivaient sa consultation, il s'agissait, dit-il au prefet de police, dans une nouvelle lettre, de phthisie generalisee et laquo; par ces mots phthisie generalisee, je veux tous faire comprendre que des tubercules se rencontraient en qiianiite considerable dans toutes les parties du corps, Men que les animaux fussent dans un bon 6tat dembonpoint raquo;.
Maigre ce bon etat d'embonpoint, la saisie avait ete ordonnee � Dijon, mais le maire ne s'etait pas con-tente, pour la prononcer, du rapport du veterinaire prepose � l'inspection des viandes; il avait cru devoir, pour couvrir sa responsabilite, consulter M. Galtier, professeur de police sanitaire � l'Ecole veterinaire de Lyon, qui lui avait repondu que laquo; dans son opinion, on devait rejeter de la consommation les viandes d'animaux affectes de phthisie tuberculeuse � un degre meme moins avance que celle qui a ete constatee � Dijon sur les animaux dont la saisie avait ete ordon�nee. Suivant lui, cette saisie etait justifiee du moment que des tubercules, meme en petit nombre, existaient � la fois dans la cavite thoracique et dans la cavite abdominale raquo;.
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Cousulte, � mon tour, sur cette grave question par M. le maire de Dijon, voici la reponse que je lui ai faite :
Paris, 10 avril 1882.
Monsieur le Maire,
J'ai pris connaissance des differents proces-verbaux sur lesquels vous avez, bien voulu me demander mon avis, et je n'hesite pas a vous declarer que je me range completement a l'opinion de leur signataire. Rien de plus legitime que les conclusions auxquelles 11 s'est arrete. Lorsque la phthisie est arrivee au degre de developpement dont ces proces-verbaux portent temoignage, 11 y aurait une extreme Imprudence h permettre que la viande des animaux atteials d'une maladie aussl avancee fut livree � la consommation.
L'opinion contraire a pu etre soutenue dans un ouvrage sur la police sanitaire des animaux domesliques, public 11 y a une quinzaine d'annees, dont I'auteur est M. Reynal, alors directeur de l'ecole d'Alfort. Mais a Fepoque o� cat ouvrage a 6t6 r�dige, bien qua dej� les experiences da M. Is professeur Villemin, du Val-de-Gr�ce, fussent Ires probantes en faveur de la contagion de la phthisie, beaucoup d'asprits demeu-raient indecis � l'endroit da la realite de cette contagion. Mais depuis, son etude experimentale sur une plus grande echalle a 6te reprise par plusieurs experimentateurs : notamment M. Ghauveau, directeur da l'ecole veterinaire de Lyon, M. le professeur Saint-Gyr de la meme ecole ; et, d'une maniere toute particuliere, dans ces derniers temps, M. Toussaint, professeur �l'ecole veterinaire de Toulouse, qui a prouve que la phthisie elail transmissible � l'especeporcine, nonseulement par I'lnoculation da la matiere tuberculausa et par I'ingestion de cette matiere dans las voies digestives, mais encore par l'inoculalion du jus extrait, a I'aide d'une presse, des viandes provenant d'animaux affectes de tuberculose.
Les faits de transmission par I'lnoculation da ca jus de
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viande se sont reproduits avec assez de Constance dans les experiences de M. Toussaint, pour qu'il n'ait pas h�site a declarer a l'Academie des sciences, dans une communication que je lui ai faite en son nom, qu'a ses yeux la phthisic tuberculeuse etait une des maladies les plus contagieuses qui f�t au monde. II est vrai que cette opinion sur I'extreme activite de la contagion de la tuberculose n'est pas encore acceptee par la majorite des medecins; mais �l'endroitdela contagion meme, les divergences d'avis tendent de plus en plus � disparaitre.
De fait, les preuves fournies � l'appui de la transmissibilite de cette maladie par diflerentes voies : inoculations directes, injections sous-culanees, ingestions digestives, sont aujourd'hui si nombreuses que I'obligation s'impose, par la force de la de�monstration et, tout parliculierement, parcelle qui a ete faite sur I'espeee porcine qui a, avec la n�tre, de grandes analogies d'organisation, d'interdire de livrer k la consommation la viande des animaux luberculeux, surtout lorsque la tubercu�lose est generalisee, comme dans le cas ou vous me faites l'honneur de me consulter.
Voila, Monsieur le Maire, sans aucune hesitation, I'avis que je crois devoir vous soumettre. Avec une maladie qui a pris de si grands developpemenls, on serait blamable de negliger les indications positives que donne la science experimentale sur Tune des causes possibles de sa transmission � i'homme. Or les voies digestives sont im des chemins ouverts a la phthisic. L'indication absolue est de le lui barrer le plus possible, et c'est la remplir, dans une mesure importanle pour l'hygiene publique, que de ne pas permettre � cette redoutable maladie l'acces des voies digestives, en interdisant la consommation des viandes qui peuvent servir de receptacle a I'agent de la contagion, c'est-�-dire � l'element vivant de la tuberculose.
Veuillez agreer, Monsieur le Maire, I'hommage de ma respectueuse consideration.
H. Bouley.
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Ces deux documents, le rapport de M. Galtier et ma note, ayant ete communiques au prefet de police par M. le maire de Dijon, avec une demande d'avis sur la ligne de conduite qu'il aurait � suivre � l'ave-nir, M. le prefet de police demanda � M. Villain, chef du service de l'inspection de la boucherie de Paris, un rapport sur cette question, et voici en substance ce qua ce rapport coutient: Apres avoir resume les opinions des diflerents auteurs qui en out traite : opinions qui ne sont pas coucordantes � l'endroit des dangers que peut entraluer la consommation des viandesde bonne qualite apparente, mais provenant d'animaux atteints de tuberculose pulmonaire ou pleurale, M. Villain declare positivement que la saisie de ces viandes ne lui parait pas possible � Paris, parce qu'elle souleve-rait les protestations energiques de toute la boucherie, et que, d'autre part, eile doniierait lieu a des diffi-cultes inextricables entre les acheteurs de bestiaux et les eleveurs. laquo; Si le danger de l'usage alimentaire de viandes provenant d'animaux, en bonnes conditions d'embonpoint, qui presentent des lesions tuberculeuses, est reel, dit M. Villain, il faut qu'un reglement spe�cial intervieune pour interdire la vente de cette viande, car, dans l'etat actuel des choses, cette inter�diction n'est pas possible raquo;.
La forme dubitative dont M. Villain se sert, dans ce passage de son rapport, montre que ses convictions ne sont pas faites a l'endroit des dangers de la transmis�sion de la tuberculose � l'homme par l'ingestion de viandes provenant d'animaux aflFectes de tuberculose.
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En cet etat de cause, M. le prefet de police, ne trou-vant pas dans le rapport du chef du service del'inspec-tion de la boucherie de Paris, les elements d'une so�lution ferme de la question qui lui etait souraise, en appela � M. le ministre de l'agriculture et du commerce, qui, lui-meme, saisit de cette affaire le comite consul-tatif d'hygieae publique.
Nomme rapporteur de la section � laquelle I'examen de cette question fut soumis, j'en fis I'historique devant le comite, et apres avoir rappele toutes les preuves experimentales qui demontraient la possibilite de la transmission de la tuberculose par Fingestion de subs�tances servant de vehicules a Telement de cette mala-die, voici en quels termes je m'exprimais sur la grave question que le ministre avait soumis � l'appreciation du comite :
laquo; Quelle est la ligne de conduite que doivent suivre les inspecteurs de boucherie?
laquo; S'il etait possible, en pareille matiere, de faire une application absolue des principes, I'obligation rigou-reuse qui s'imposerait, par l'autorite des faits, aux ins�pecteurs de boucherie, et � laquelle ils devraient rigoureusement s'astreindre, serait d'eliminer de la consommation la viande des animaux sur lesquels on aurait constate les lesions de la tuberculose � quelque degre que ce soit, ou tout au moins de n'en autoriser la vente qu'� l'etat de viande cuite.
laquo; Mais on ne saurait se dissimuler qu'une pareille mesure, qui est cependant tres facilement appliquee pour une autre maladie contagieuse, la morve du ehe-
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val, rencontrerait des resistances bien difliciles � sur-monter si Ton voulait I'appliquer dans tuute sa rigueur � la tuberculose du boeuf, parce que las esprits n'y sont pas encore prepares et qu'on se fait difficilement � I'ldee qu'une viande magnifique d'aspect puisse etre incriminee, au point de vue sanitaire, par cela seul que Tanimal dont eile provient avait des tubercules dans ses poumons ou sur ses plevres.
laquo; 11 faut laisser faire au temps et aux demonstra�tions qui ne peuvent pas manquer de se multiplier, pour qu'une pareille idee se vulgarise et que 1'opinion publique comprenne la necessite de l'application rigoureuse des mesures sanitaires qui decoulent de la connaissance experimentale des differents modes de transmission de la tuberculose.
laquo; Ce n'est pas � dire, cependant, qu'a l'endroit de cette maladie, il n'y ait rien � faire, quant � present, pour reduire les chances des dangers que pent causer l'usage des viandes provenant des animaux qui sont affectes de la tuberculose. raquo;
Prenant en consideration que la belle apparence des viandes ne saurait donner une Garantie reelle a Ten-droit de leur etat sanitaire, je proposal au comite de prendre les lesions pour mesure de l'intensite de la maladie et des dangers proportionnels de sa transmis�sion possible par les voies digestives.
En consequence, je lui ai propose de declarer au ministre laquo; qu'il devait etre interdit de livrer � la con-sommalion les viandes, meme de belle apparence, provenant d'animaux affectes de la tuberculose :
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laquo; 1deg; Lorsque la tuberculose est generalisee et qu'elle s'accuse par des lesions disseminees dans tous les or-ganes : poumons^ plevres, foie, rate, peritoine, Sys�teme ganglionnaire lymphatique, Systeme musculaire,
laquo; 2deg; Lorsque les tubercnles ont envahi une grande partie des poumons et des plevres;
laquo; 3deg; Lorsque les tubercules ont envahi, en grande quantite, le peritoine et le Systeme ganglionnaire abdominal. raquo;
Sans doute qua considerer les choses du point de vue exclusif de la science, la permission laissee de li-vrer � la consommation la viande des animaux chez lesquels les lesions tuberculeuses ne sont pas encore tres avancees, constitue uue inconsequence, puisque, aussi bien, le propre des virus est de se montrer actif � des doses infinitesimes. Mais la necessite s'impose souvent de pactiser avec les principes et de ne pas s'astreindre a en faire une application trop rigoureuse, pour eviter les resistances qui pourraient mettre obs�tacle � ce qu'il est possible de realiser de bien � un moment donne. A supposer que 1'interdiction de vente des viandes de provenance tuberculeuse soit appliquee dej� dans la mesure qu'implique les trois prescriptions qui viennent d'etre tracees, ne serait-ce pas un resultat considerable que d'avoir reduit, dans cette mesure, les chances possibles de l'infestation tuberculeuse par l'usage de viandes o� l'element de la virulence se trouve incorpore.
J'ajoute que cette interdiction prononcee par le mi-nistre, sur l'avis du comite consultatif d'hygiene pu-
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264nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;CO�RS DE PATHOLOGIE COMPAR^E.
blique, aurait cet avantage de tracer aux inspecteurs de boucherie leur ligne de conduite et de les investir de 1'autorile morale dont ils ont besoiu pour remplir avec rigueur leur mission delicate, lorsqu'ils ont � se prononcer sur la grave question de savoir s'ils doivent refuser, pour la consommation, les viandes des ani-maux sur lesquels les lesions de la tuberculose peu-vent etre constatees. Mieux vaut done recourir � une interdiction restreinte, basee sur le nombre et Teten-due des lesions tuberculeuses, que de perraettre de livrer � la consommation toutes les viandes, quelle que soit leur provenance, lorsqu'elles se presentent avec un tel aspect.
Mais la solution que j'ai soumise an comite ne se-rait que provisoire; et s'il resultait de nouvelles re-cherches, qu'il est necessaire d'instituer et de pour-suivre, que les dangers de la contagion existent reellement dans la mesure qu'impliquent les resultats qu'a obtenus M. Toussaint, par ses experiences si nombreuses dej� et qui semblent si concluantes, au-cune hesitation ne serait plus permise; il faudrait que I'interdiction fut absolue.
Rien de plus urgent done, pour une question de cette importance, que d'arriver � une solution defi�nitive et rapide; aussi ai-je propose au comite con-sultatif d'emettre le vceu que les ecoles veterinaires soient raises � memo d'instituer des experiences sur la transmission de la tuberculose de Tespece bovine aux espeoes animales qui sont susceptibles de con-tracter cette maladie.
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Mais il ue suffirait pas de prononcer rinterdiction, il faudrait essayer d'en reudre I'application possible et, mieux encore, facile, en desarmant les interfets considerables auxquels fatalement eile porterait pre�judice et dont eile rencontrerait les resistances devant eile. Le meilleur procede pour resoudre le probleme serait, me semble-t-il, que les Interesses, c'est-�-dire les bouchers, formassent entre eux un syndicat, en vue de se donner des garanties reciproques contre les pertes qui pourraient resulter de cette sorte d'expro-priation qu'on leur ferait subir pour cause de maladie contagieuse. Si tons garantissaient chacun contre pe danger, la question se trouverait par cela mfeme singu-lierement simplifiee, car les interets individuels n'etant plus en souffrance, il n'y aurait plus de raisons se-rieuses pour ne pas se conformer � la mesure de l'interdiction, dont la rigueur pourrait sect;tre attenuee par la liberte laissee de faire cuire les viandes de bonne qualite de provenance tuberculeuse et de les livrer cuites � la consommation.
Maintenant une question se pose ici : Quelle est l'etendue des pertes que pourrait causer au commeree de la boucherie l'interdiction de vente des viandes provenant d'animaux affectes de tuberculose ?
Sur ce point, la statistique en France est � pen pres muette. Ge n'est que, dans ces derniers temps � je parlerais plus vrai en disaut dans ces derniers jours, � que Ton a commence � recueillir, au grand abattoir de la Villette, les faits relatifs � cette question. II ne faudra done pas attendre moins d'une annee pour obte-
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nir des chiffres qui aient, � cet egard, quelque signi�fication. En attendant que nous sachions � quoi nous en tenir � Paris sur ce point d'un si grand inter^t pour l'hygiene publique, je vais emprunter � M. Zun-del, de Strasbourg, quelques renseignements qu'il a rassembles dans un memoire publie par lui, en 1882, sur La nature parasitaire de la tuberculose. Dans ce memoire, communique � la Societe des sciences, agri�culture et arts de la hasse Alsace, M. Zundel s'est pro�pose justement d'examiner la question du danger d'infection de l'homme par la tuberculose bovine, et il I'a resolue par la negative, en invoquant, parmi les arguments qu'il fait valoir � l'appui de son opinion, ce qu'il y a de contradictoire entre la frequence de la tuberculose dans I'espece bovine et l'absence complete de faits cliniques o� se trouve donnee la preuve d'un rapport de filiation, dans des circonstances bien ri-goureusement determinees, entre la tuberculose hu-maine et celle de I'espece bovine. On pourrait re-pondre � cela que c'etait ainsi qu'on argumentait contre Rayer, quand il affirmait que la morve du cheval etait contagieuse � l'homme : laquo; O� sont, lui disait-on, les faits cliniques que vous pouvez produire � l'appui de votre affirmation? raquo; Ces faits existaient, mais ils etaient restes invisibles ou, pour mieux dire, meconnus, parce que leur signification n'avait encore ete saisie par personne. Des que la lumiere eut ete faite par Rayer, � 1'instant meme on vit apparaltre et se multiplier ces faits qui portaient temoignage de la sagacite clinique de ce profond observateur. Ainsi en
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serait-il de la tuberculose. Sa contagiosite ne peut plus etre mise en doute. L'experimentation demontre qu'elle est transmissible de l'homnie aux especes sus-ceptibles, et qne sa transmission peut s'operer par les voies digestives. On peut induire, tres legitimement, de ces fails certains que la reciproque est egalement vraie; et que I'element virulent qui, emanant de l'homme peut penetrer, par les voies digestives, dans I'organisme d'un animal et l'infester, peut retourner, par les mfemes voies, de l'animal � l'homme et donner lieu, de la meme maniere, � son infestation, Au-jourd'hui que les observateurs sont prevenus, ils se-ront sans doute determines et par les faits d'experi-mentation, et par l'induction legitime qui en decoule, � rechercher la part que I'aliment peut avoir comme cause dans les manifestations de tuberculose qui se produiront sous leurs yeux.
Revenons aux chiffres qu'a recueillis M. Zundel sur la frequence de la tuberculose dans I'espece bovine.
D'une maniere generale , la tuberculose est plus frequente sur les animaux qui sont condamnes par leur destinee industrielle a vivre en stabulation. Cette plus grande frequence s'explique par les conditions plus intensives de contagion que la stabulation realise. Vivant dans une atmosphere pen renouvelee, buvant dans les m^mes vases, mangeant dans les meraes man-geoires, les vaches peuvent facilement echanger entre elles, par l'intermediaire des aliments, les mucosites qui s'ecoulent de leurs narines et de leurs bouches; et si des phthisiques se trouvent dans leurs rangs, la
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contamination de leurs voisines doit en resulter d'une maniere comme neoessaire. C'est ce qui a lieu, en effet. Et comme, apres tout, la tuberculose, nous le savons, est compatible, dans I'espece bovine, avec la sante apparente des animaux qui en sont atteints, il en resulte que les effets de la contagion ont le temps de se produire, sans que les faits soient assez carac-terises pour eveiller l'attention. De l� la plus grande frequence de la phthisic chez les vaches en stabula-tiou; et comme on les renouvelle plus souvent qu'on ne le faisait autrefois, lesnourrisseurs mieux inspires, ayant le soin de les vendre pour la boucherie, des que leurs facultes laitieres diminuent, il en resulte que les etables des grandes villes fouruissent aux abat�toirs un plus grand norabre d'animaux phlhisiques que cela n'avait lieu lorsqu'on conservait les vaches laitieres plus longtemps.
Au rapport de Zundel, auquel j'emprunte les chiffres qui vont suivre, Hurtrel d'Arboval estiraait au dixieme la proportion des betes bovines phthisiques dans la Brie, la Beauce, le Pays de Caux, etc.
Woff admettait une proportion de 13 p. 100 dans le rayon de Liegnits (Saxe).
II y a cinq ans, la statistique a donne en Baviere un chiffre de 35,000 betes tuberculeuses, ce qui, pour une population de trois millions de betes adultes, donne une moyenne de 2 p. 100.
M. Adam a compte sur 106,321 betes bovines abat-tues en neuf ans � Augsbourg, 1,338 sujets atteints de tuberculose : soit environ 1,3 p. 100; mais il ne
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faut pas oublier que c'est dans les tueries des petites localites qu'on abat plus particulierement les b�tes phthisiques.
M. Drechsler a compte en 1875, � I'abatloir de Mu�nich, sur 35,883 animaux abaltus, 704 tuberculeux. Mais on n'a pas tenu compte des cas oii Ton ne ren-contrait que des uodosites isolees.
D'apres M. Fuchs, sur 44,339 betes bovinesabattues � Mannheim, dans une periode de six ans, 307 seule-ment out ete reconnues tuberculeuses, soit une pro�portion de 0,689 p. 100, sur lesquelles 226 out ete livrees� la consommation et 81 a I'equarrissage.
A l'abattoir de Strasbourg M. Trapp a compte, en 1880, sur 10,079 betes bovines abattues, 33 cas de tuberculose generalisee et 167 cas ou la consomma�tion des viandes a ete autorisee apres l'enlevement des parties malades.
Enfin, a Mulhouse, M. Mandel a compte, pour la meme annee 49 cas de tuberculose generalisee et 123 cas de tuberculose partielle, sur 5,105 betes abat�tues.
Ces chiffres ne sont pas sans doute 1'expression fidele de la realite, mais ils en disent assez pour dou-ner une idee des dangers iuherents � la tuberculisation des animaux dont les viandes servent � l'alimentatiou des populations.
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QUINZIEME LECON
IE TRA1TEMENT DE LA TUBERCULOSE
Experiences faire pour l'eclairer. � La connaissance de la na�ture parasitaire peut servir d'irtee directrice. � Prevenir Faction de la cause ou mettre I'organisme en defense contre eile. � La pullulation arretee dans des liquides de culture par des proportions infinitesimes de substances incompatibles. � S'inspirer de ces re-sultats de Fexperimentation. � II y a des organismes naturelle-ment refractaires. � Exemple:le mouton algerien pour la bacteri-die charbonneuse. � Essayer d'arriver k ce resultat par des medi�cations prealables. � Le tannin administre pendant quelques jours rend imputrescibles, apnbs la mort, les chairs et le sang. � Expe�riences de Polli, de Milan, surles medications par les sulfites contre les maladies par ferments. � La theorie de la catalyse est son idee directrice. � Neutraliser le ferment au sein de l'organisme vivant. � Emploi des sulfites et des hyposulfltes. � Imputrescibilite des chairs apr�s l'emploi de ces substances. � Experiences avec le pus, le sang pulrefie, le virus de la morve. � Resultats conformes a la theorie qu'eiles ont donnes. � Voie nouvelle ouverte la thera-peulique experimentale. � Rendro les animaux susceptibles d'une contagion impropres � la culture de l'element de celte contagion.
Messieurs,
Nous arrivons, maiutenaiit, � la question du traite-ment de la tuberculose.
Que d'importantes experiences sent � faire pour l'eclairer et donner � la therapeutique une base solide! La notion aujourd'hui acquise de la nature pa�rasitaire et de la coulagiosite de la tuberculose peut
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servir d'idee directrice. Avec les idees de i'ancienne etiologie, que faire ? On etait en presence de causes comme fatales, conlre lesquelles il paraissait bien difficile d'organiser une resistance efficace, parce que tout etait incertain du mode d'action des influences que Ton considerait comme causales. Mais aujour-d'hui, on sait o� se prendre. On peut se premunir coutre la contagion de deux manieres : en preveuant l'action de la cause, ou en mettant I'organisme en etat de defense contre eile, c'est-�-dire en realisant les conditions qui le rendent impropre � servir de milieu de culture au germe de la maladie.
Voil�, ce me semble, comment doit etre pose au-jourd'hui le probleme de la therapeutive preventive et curative d'une maladie contagieuse. Qu'est-ce, en effet, que ce que Ton appelle en medecine la recepti-vite, si ce n'est I'aptitude d'un organisme a servir de milieu de culture � l'element vivant d'une conta�gion? Or dans un milieu artificiel de culture, tel, par exemple, que le bouillon approprie qui sert � la culture extraorganique soit de la bacteridie char-bonueuse, soit du microbe du cholera des poules, que faut-il pour que la pullulation s'y arrete? Souvent des proportions infinitesimes d'un agent incompa�tible avec les manifestations de la vie de ces germes, si puissants par leur activite lorsqu'ils rencontrent des conditions favorables. Ne peut-on pas induire de ce fait experimental que I'organisme vivant peut etre modifie, comme le bouillon de culture, par I'in-corporation d'un agent modificateur qui rendra son
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milieu interieur impropre � la culture d'un germe coatagieux? Ce que j'imagine ici etre realisable par I'intervention methodique d'une medication, se trouve etre dej� realise, dans de certains cas, sans que le determinisme des conditions d'o� cette realisation depend ait pu etre encore suivi. Le mouton algerien, par exemple, est refractaire au charbon bacteridien. Pourquoi? C'est que son milieu organique n'est pas identique, par sa composition, � celui du mouton europeen. En quoi consiste la difference? On ne le salt. Mais I'observation, comme I'experimentation, proiive qu'elle existe.
Eh bien, ce qui existe certainement, sans qu'on en sache encore les conditions, pourquoi n'essaierait-on pas de le determiner, soit par un regime, soit par une medication methodique qui aurait pour resultat de modifier le milieu organique de teile falt;jon qu'un germe contagieux, apte � y pulluler dans les condi�tions physiologiques, n'aurait plus de prise sur lui?
J'ai emis cette opinion en octobre 1872, � propos des experiences si curieuses de Davaine sur la trans�mission de la septicemie au lapin par des dilutions vi�rulentes au millionieme, voire au billiouieme. Est-ce qu'il ne serait pas possible, demande-je alors, de rendre Torgauisrae du lapin refractaire a l'action de la septice�mie, en le modifiant par un regime alimentaire ou par une action medicamenteuse prealable ? Cette idee m'e-tait inspiree par le souvenir des experiences qu'avail faites, au commencement de ce siecle, le professeur Gohier, de TEcole veterinaire de Lyon, sur l'action du
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tanuiu, ayaut pour efi'et de rendre imputrescibles le sang et les chairs des animaux dans le regime des-quels on avait fait entrer le tannin pendant un certain nombre de jours, avant leur mort. II me semblait que si les causes determinantes de la putrefaction demeu-raient sans effets sur les tissus et les humeurs d'un orgauisme auquel le tannin avait ete incorpore, pen�dant la vie, par les voies de l'absorplion digestive, il se pourrait que, dans de telles conditions, I'action vi�rulente demeur�t inefficace. Ce n'etait l� qu'une in�duction quelque peu vague, car la theorie de la conta�gion qui la legitime si fortement aujourd'hui, n'etait pas encore trouvee; et, partant de cette idee, j'emet-tais l'avis qu'il serait interessant de faire des expe�riences ayant pour objet de mettre les organismes en etat de defense contre les inoculations du virus septi-cemique, en les soumettant, au prealable, � l'action protectrice d'agents antiseptiques dont leur substance serait comme penetree.
J'ignorais, au moment o� je tragais ce programme experimental, que dej� des experiences, instituees sous l'inspiralion de cette idee, avaient ete faites par M. le docteur Polii, de Milan, qui avait rendu compte de leurs resultats dans un important memoire Sur les maladies par ferment morbi�que et sur leur traitement par les sulfdes alcalins et terreux, dont je vais vous presenter le resume, d'apres la traduclion analytique qu'en a faite M. le docteur de Pietra-Santa. Vous allez juger par cet expose de l'importance des resultats dont le medecin de Milan rend compte dans son travail. Je re-
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grette bieu d'avoir ete distrait du soin de les soumettre � une verification experimentale, comme M.de Pietra-Santa m'y couviait par uue lettre qu'il a publiee en tete de sa traduction. Mais le temps m'a manque et peut-etre aussi la foi, � cette epoque o� l'enigme de la contagion n'avait pas encore trouve son OEdipe. Au-jourd'hui que la clarte s'est faite daus ce qui etait alors le mystere impenetre, les experiences du docteur Polli revetent un caractere de plus grande impor�tance, parce qu'on pent donner, de leurs resultats, une interpretation parfaitement concordante avec la certitude des notions que I'etude experimentale des choses a fait acquerir sur la nature de la contagion.
La theorie, dont Polli s'est inspire pour instituer ses experiences, est celle de Berzelius sur les fermen�tations, autrement dit la theorie de la catalyse, qui admet que les corps qui font l'office de ferments sont doues de la puissance mysterieuse de donner lieu, rieu que par leur presence, � ces grands mouvements de metamorphose des matieres organiques que Ton appelle des fermentations.
Appliquant cette theorie aux maladies conta-gieuses, Polli les interprete laquo; par la presence dans le sang de ferments morbifiques sous I'influence des-quels s'operent les transformations anormales de ses principes fermentescibles, d'o� derive la serie des desordres fonctionnels qui les constituent raquo;.
Ces premisses posees, voici comment Polli formule le probleme � resoudre : laquo; Etant reconnu et admis que, dans les affections catalytiques, le point de de-
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part de la maladie seit l'action d'un ferment specifique contenu dans le sang, y a-t-il posslbilitc d'enrayer les phenomenessuccessifs? Autrement dit, peut-on rendre ce ferment inactif, en le neutralisaut au sein de Tor ganisme vivant? raquo;
Polli repond � cette question que laquo; des faits precis et des experiences multiples I'ont conduit � admettre cette possibiiile, contrairement � l'opinion de Claude Bernard, qui ne considerait pas la neutralisation des ferments comme possible, parce qu'on ne pourrait l'obteiiir qu'en changeant les proprietes du sang � tel point qu'il ne serait plus apte � l'eutretien de la vie raquo;.
L'agent antifermentatif qui, suivant Polli, convient le mieux pour la neutralisation des ferments morbi-fiques dans le sang, est 1'acide sulfureux laquo; qui arretc toutes les fermentations des matieres organiques et entrave les metamorphoses de la putrefaction dans les tissus des animaux et dans leurs liquides raquo;.
Mais comment I'administrer?
L'acide sulfureux pur et � l'etat de gaz est promp-tement asphyxiant; sa solution aqueuse, plus ou moius conceutree, est difficilement toleree par les muqueuses gastro-intestinales. Polli a tourne la difficulte en re-courant � l'emploi des sulfites � bases alcalines (po-tasse, soude, magnesie, chaux), qui jouissent des proprietes les plus importantes de l'acide sulfureux, ont une action plus reguliere et plus durable, et sont parfaitement toleres par I'organisme vivant: ce qui en permet I'administration a l'iuterieur � doses medici-nales, soit � l'etat solide, soit� l'etat liquide. II resulte.
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en eflfet, des et|i*iences de Polli qu'un chien de taille moyenne peat ingerer jusqu'� quinze grammes par jour de sulfite alcalin, sans la moindre alteration de sa sante, et que Ton pent sans inconvenients conti-nuer ce regime pendant quinze jours.
La chair et les visceres des animaux traites par les sulfites auraient, d'apres Polli, une plus grande resis�tance, apres la tnort, contre les phenomenes de decora-position et de putrefaction. L'analogie serait grande, on le voit, entre l'action de ces sels et I'influence conservatrice que Gohier a reconnue au tannin.
laquo; Les sulfites absorbes � la surface de I'intestin et melanges au sang finissent par se transformer en Sul�fates, par leur passage incessant � travers l'appareil respiratoire, aussi convient-il, pour retarder cette transformation et rendre leur action plus durable, de substituer aux sulfites des hyposufiltes de meme base, qui exigent une plus longue action oxydante pour etre amenes � l'etat de sulfates et fournissent ainsi le moyen de porter dans le sang des sulfites tres actifs l'etat naissant. raquo;
Je laisse � Polli la responsabilite des interpreta�tions qu'il donne des effets determines par l'emplo des sulfites, et je passe immediatement � l'expose des resultats de ses tres interessantes experiences.
Leur nombre est considerable : 70.
Elles sont divisees en trois series :
A.nbsp; Experiences sur le pus;
B.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;avec le sang putrefie;
C.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;avec la morve.
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Le but que s'est propose Polli a ete de prouver que a les sulfites administres � un animal vivant s'op-posent reellement � l'action que produisent certaines substances introduites dans le sang et aptes, par elles-rnemes, � y developper des maladies catalytiques raquo;. Et Polli affirme qu'il ressort en pleine evidence de ses experiences :
laquo; 1deg; Que la neutralisation du ferment morbide dans I'organisme vivant est chose possible;
laquo; 2deg; Que cette neutralisation peut se faire par des agents compatibles avec la vie raquo;.
Voil�, n'est-ce pas? des affirmations qui valent la peine qu'on les examine et surtout qu'on les soumette � une verification experimentale. C'est ce que je me propose de faire, avec le concours de M. Paul Gibier. En attendant, je vais vous donner ici le resume des resultats obtenus par Polli, dans chaque serie de ses experiences.
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A. � Injections pnndentes. � Un chien du poids de 4 kilog. est soumis pendant cinq jours a I'in-fluence du sulfite de soude, administre a la dose de 10 grammes par jour. Ge temps ecoule, un gramme de pus est injecte dans la veine femorale gauche. Cette injection donne lieu � des phenomenes de tris�tesse et d'abattement, avec dego�t pour les aliments. Le lendemain, l'animal avait recupere sa vivacite et mangeait comme d'habitude; une nouvelle injection de pus fut faite par la jugulaire droite, deux jours apres la premiere. Meines symptomes d'abattement,
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de tristesse, d'inappetence que dans le premier cas; mais ils furent tout autant ephemeres et le lendemain tous les signes de la sante etaient revenus.
L'animal contimia � etre soumis au regime sulfite, � 2 grammes par jour, pendant quatre jours, et les plaies des operations faites sur les veines mar-cherent vers la cicatrisation dans de tres bonnes con�ditions.
Une experience parallele � celle-ci, faite sur un chien non soumis au regime sulfite, donna les resul-tats suivants :
Ce chien avait un poids double de celui du pre�mier : 8 kilog. On lui injecta, aux memes dates, les memes doses de pus. La premiere injection ne pro-duisit que des effets ephemeres; mais la deuxieme fut suivie de sympt�mes graves : grand abattement, evacuations alvines tres liquides; decubitus prolonge; refus de manger; cent quarante pulsations tres fai-bles ; respiration haletante; sympt�mes typhiques : mort le dixiemejour.
Les plaies etaient recouvertes d'un exsudat infect.
A I'autopsie, rien d'anormal dans les poumons, le coeur et le foie. Coloration rouge vineuse de l'estomac; ulceration du duodenum; arborisations de l'intestin grele; alterations du gros intestin, avec production d'une espece de bouillie rouge foncee.
Voici maintenant une experience de contre-epreuve qui, si eile avait un coefficient qui prouv�t la Cons�tance de ses resultats, aurait une grande signification comme preuve des vertus defensives des sulfltes
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coiitre l'infection purulente experimentale. Le meme chien qui, sous influence des sulfites, avait supporte impunement l'injection de 2 grammes de pus, fut soumis cinq jours apres la cessation de toute medi�cation, et alors qu'il etait en pleine sante, � deux nouvelles injections du meme pus : un gramme le premier jour, un second gramme le lendemain.
La premiere injection fut suivie de phenomenes d'abattement, de vomissements et d'evacuations al-vines qui disparurent le lendemain; mais il n'en fut pas de meme de la deuxieme. Les symptomes persis-terent pendant six jours et les plaies d'inoculation prirent un aspect sanieux,
Le septieme jour, Tanimal revenait � la sante, lors-qu'il fut abattu pour qu'on put saisir les lesions intes-tinales qu'il pouvait encore presenter. Elles ne consis-terent que dans des arborisations vasculaires dans toute l'etendue de l'intestin grele.
II semble, d'apres ce resultat, que le chien de cette experience beneficiait encore du regime sul fite auquel il avait ete soumis, car il resista � Faction de doses purulentes reconnues toxiques pour des sujets non sulfites; temoins les resultats dounes par I'experience que voici ;
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B. - Injections de sang putrefie. � Un chien le-vrier b�tard, du poids de 8 kilogrammes, prend, dans l'espace de deux jours, IG grammes d'hyposul-fite de soude, par doses successives de 1 gramme chaque.
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Deux heures apres la derniere prise, on lui injecte, dans la veine feraorale droite, 3 grammes de sang putrefle, qui exhalait une odeur extremement fetide.
Au bout de quelques minutes, des vomissements et des evacuations alvines se manifesterent avec des symptomes d'abattement et d'inappetence. Le lende-main, ce chien, quoique encore abattu, but du bouillon, et avala volontiers deux boulettes de viande contenant chacune 1 gramme de sulfite de magnesie. Le jour suivant, l'appetit etait revenu et les plaies des operations presentaient le plus bei aspect.
Le quatrieme jour, 1'animal avait recupere, avec son appetit, tous les caracteres de la sante.
Le meme jour, et presque � la meme heure, la meme experience fut faite sur deux chiens qui n'a-vaient pas ete soumis � la medications sulfitee. � 3 grammes de sang putrefie dans les veines.
L'un de ces chiens resta abattu immediatement apres I'injection; immobile sur ses pattes et la tete baissee. Peu � pen ses forces I'abandonnerent, il s'etendit sur le tlanc, r�la et mourut cinq beures apres I'operation.
A I'autopsie: taches ecchymotiques disseminees sur les poumons; foie marbre, d'une couleur noir�tre, violacee. � Sang noir, liquide, diffluent dans les ca-vites droites du cceur.
Coloration rouge foncee de la muqueuse gastro-intestinale ; exsudations mucoso-sanguinolentes � la surface des intestins greles.
L'autre chien presenta, pendant cinq jours, tous
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COURS DE PATHOLOGIE COMPAR^E.
les sympt�mes d'une maladie grave, � phenomenes ataxiques et adynamiques tres accentues. La plaie d'abord sanieuse se recouvrit d'un exsudat gangre-neux au cinquieme jour, au moment de la mort.
A l'autopsie, taches ecchymotiques sur les pou-mons fortement fences en couleur; l'une de ces taches presente au centre un point de suppuration: sang noir et spumeux dans les cavites droites du coeur et les gros vaisseaux, forte injection de la muqueuse gastro-intestinale.
Les chiens de ces deux dernieres experiences, sans defense, Fun et l'autre, centre l'infection de matieres putrides introduites dans leur sang, y ont succombe. Mais il en a ete tout autremeut de deux autres chiens, dans les veines desquels les matieres putrides ont ete neutralisees par l'action directe d'un sulfite.
Sur le premier, I gramme de sang putride, me�lange avec 3 grammes d'une solution saturee de sulfite de soude, avait ete injecte par une veine femo�rale. Le premier effet de cette injection se traduisit par les phenomenes ordinaires d'abattement et de tristesse; mais, des le lendemain, ces phenomenes se dissiperent. Le chien recupera son appetit et le troi-sieme jour il s'etait completement remis. La plaie de l'operation avait un bei aspect, tandis qu'elle presen-tait un aspect sanieux sur un chien temoin, auquel la meme dose de matiere putride avait ete injectee.
Un autre chien de cette serie regut 1 gramme de sang putrefie par une veine femorale et, une minute apres, 1 gr. 50 de sulfite de soude dissous dans
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5 grammes d'eau. Ce chien resta abattu pendant tonte la journee. Le lendemain il prit sa nourriture habi�tuelle et guerit promptement.
C Experiences sur le mucus morveux � Dans une premiere experience, un chien est inocule par une incision faite a la peau avec du mucus nasal pro-venant d'un cheval morveux.
Au bout de quelques jours, la plaie de rinoculation s'etait agrandie et etait devenue sanieuse.
Les signes de l'infection generale se caracteriserent par la tristesse, l'indolence, la perte de l'appetit.
Au quatorzieme jour, apparition de pustules sur difiereutes parties du corps. Mort le vingt-sixieme jour dans un etat de maigreur extreme.
A I'autopsie, les lesions specifiques de la morve.
Ce resultat obtenu, la meme experience d'inocula-tion avec du mucus morveux fut faite sur deux autres chiens vigoureux. Sur Fun, on laissa les phenomenes consecutifs suivre leur cours sans entraves; I'autre fut soumis � un traitement sulfite (6 grammes par jour d'hyposulfite de soude).
Chez le premier, la plaie prit, des le troisieme jour, 1'aspect caracteristique des lesions morveuses, tandis que, chez le second, eile revetit tons les caracteres d'une solution de continuity de bonne nature en marche vers la cicatrisation.
Malheureusement, il n'est pas donne d'autres ren-seignements sur les suites de cette experience.
En voici une autre qui aurait un bien grand interet
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si eile n'etait pas unique. Je la reproduis ici sous toute reserve, mais les resultats qu'elle a donnes sont trop importants pour qu'il n'y ait pas lieu de les sou-mettre � une verification experimentale. Voici ce que Polli dit avoir constate:
laquo; L'injection de 3 grammes de mucus morveux fut pratiquee par les veines feraorales sur deux gros chiens et se traduisit, tout d'abord, par les pheno-menes generaux et locaux de l'affection morveuse. Mais tandis que ranimal qui n'avait subi aucune medi�cation succombait au sixieme jour dans le marasme, celui qui avait absorbe trois jours avant I'operation 8 grammes, par jour, de sulfite de magnesie, et qui avait continue le memo medicament � la dose jour-naliere de 6 grammes, etait parfaitement gueri au troisieme jour... raquo;
Tel est, en substance, le memoire du Dr Polli, de Milan. Si les faits qui s'y trouvent rassembles ne sont pas encore suffisants pour resoudre le probleme si considerable de l'efficacite des medications preven�tives, ils etablissent, cependant, de grandes probabi-lites que cette solution pent etre obtenue dans le sens de l'afiirmative ; et, dans tons les cas, ils ouvrent � la therapeutique experimentale une voie uouvelle dans laquelle il faut entrer resoluraent. Trop souvent les medications centre les maladies micro-parasitaires demeurent inefficaces parce que, au moment o� Ton y a recours, dej� le milieu Interieur des organismes est devenu impropre � l'entretien de la vie par la pullulation a I'inQni des elements de ces
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maladies. Mais combien la medecine serait autrement puissante si eile possedait les moyens de steriliser ces orgauismes pour la culture des micro-parasites, de teile sorte que ceux-ci ue trouvassent pas daus le mi�lieu de ceux-lu les conditions de leur developpement, soit au moment meine de leur ensemencement, soit apres. Rendre les animaux qui sont susceptibles d'une contagion donnee impropres � la culture de l'element vivant de cette contagion : voil� le but qu'on doit se proposer d'atteindre par des recherches experimen-tales, puisque la nature des maladies coutagieuses est devoilee et que Ton salt qu'elles ne sont autre chose que des maladies micro parasitairesquot;.
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SEIZIEME LECON
L'IMM�NITE CONTRE LES MALADIES
LY'tude experimontale des microbes dans les milieux do culture.
�nbsp; Intluence sur la pullulatioii par des modifications inflnitesimes.
�nbsp; L'aspergiilus aiger dans le liquide Kaulin. � S'inspirer de ces fails pour les applications a la th^rapeutique. � L'action du tannin. Les experiences de Polli sur les sullites. � Lcur verification experi-meatale en Italic. � Des sullites centre les fifevres palustres ; contre la tuberculose compliquee de eavernespulmonaires. � Con�firmation de la valeur prophylactique des sulfltes par I'Academie de medecine de Turin. �Les experiences de Tommassi Crudeli.� Action preventive de Farsenic contre la malaria. � Experiences en grand sur les employes des chemins de fer. � Efficacite confirmee par d'autres experimentateurs. � Interpretation des fails par les experiences de laboratoirc. � Les animaux do l'esp�ce bovine sont susceptiblos dc la malaria. � Condition favorable pour les verifi�cations experimentales. � Suscoptibilite des chiens et des lapins.-
�nbsp; Projets d'experieuces � Flnstitut pathologique de Rome. � Le cuivre n'est-il pas un agent incompatible pour certains elements contfigioux? � Les statistiques du docteur Burq sur Faction thcra-peulique du cuivre contre le cholera et la fievre typboide. � Pour-suivre le traitement de la tuberculose dans cet ordre d'idees. � L'experimontation reudue facile par sa transmission � ditferentes esp�ees. � L'action des eaux sulfureuses et arsenicalos expliquee par la nouvcllc doctrine. �#9632; Programme d'experieuces � instituer.
�nbsp; Formule du problome aresoudrc.
Messieurs,
L'etude experimentale que Ton a pu faire par la culture, daus des milieux appropries, de champignoas
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microscopiques et de certains des microbes d'o� pre�cedent des maladies contagieuses bien determinees, a conduit � la constatalion de ce fait, qu'il y avail une etroite correlation entre la composition des milieux de culture et le plus ou moius d'activite de pullulation des microbes dont on les ensemeuyait; et que, conse-quemment, on pouvait diriger cette pullulation � son gre, dans un sens ou dans un autre, I'activerou la ra-lentir, ou I'arreter completement, suivant l'etat de composition du liquide de culture. Ces recherches out mis en luraiere un autre fait, d'une grande importance au point de vue de l'application � la therapeutique, qui ressort des notions acquises sur les rapports des microbes avec leurs milieux de cultures : a savoir que des modifications infinitesimes de ces milieux pou-vaient se traduire par une influence relalivement Enorme sur les manifestations de l'activite vitale des microbes mis en culture. Temoin ce que M. Raulin a vu se passer dans le liquide o� il eludiait le develop-pement de la plante microscopique qu'on designe sous le nom d'aspergillus niger. II a pu, soit par la sous-traction d'un des elements composants de ce liquide, soit par l'addition d'elements nouveaux, faire varier considerablement les produits de la recolte; la faire tomber, par exemple, de 25 grammes � 1 gramme seulement par la suppression de la potasse, et de 25 grammes a 2 gr. 5 par la suppression du zinc, dont la quantite u'est cependant que de 32 milligrammes dans le liquide employe.
laquo; L'actioii dc cette faible quantite de zinc suflit
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done, dit M. Duclaux, � produire une plus-value de 22,35 daos la recolte, c'est-�-dire qu'elle permet la formation d'un poids de plante 700 fois superieur au sien. Cela n'est-il pas singulier ? Cela ne le devient-il pas encore davantage quand on songe que la plante, si sensible � raction du zinc, est obligee de le puiser dans un liquide o� il est dilue au -jg^g- ? De quelles proportions infinitesimales d'un element utile pent dependre la sante d'un etre vivant, la prosperite d'une culture! raquo;
Ce n'est pas tout: l'addition dans le liquide des cul�tures d'elements qui sont nuisibles � la plante donne lieu � des effets plus grands encore que ne le fait la soustraction de ceux qui lui sont utiles.
laquo; Ajoute-t-on au liquide un seize-cent-millieme de nitrate d'argent, la vegetation s'arrete brusquement. Elle ne pent meme pas commencer dans un vase d'ar�gent, bien que la chimie soit presque impuissante � montrer qu'une portion de la matiere du vase se dis-sout dans le liquide. Mais la plante l'accuse en mou-rant. Elle accuse de meme ^�o� de sublime corrosif; g^ de bichlorum de platine, -^ de sulfate de cuivre. Une simple reflexion rendra ces chiffres interessants, dit M. Duclaux. Supposons que Vaspergillus soit un parasite humain, pouvant vivre et se developper dans l'organisme, et l'envahir tont entier, la quantite de nitrate d'argent necessaire pour le faire disparaitre du corps d'un homme pesant 60 kilos, serait seule-ment de 40 milligrammes. S'il se developpait seule-ment dans le sang, un etre aussi sensible que
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l'aspergillus � l'actiou du nitrate d'argent n'exigerait pas plus de 5 milligrammes de sou toxique. raquo; {Fer�ments et maladies, par Duclaux.)
Ces faits si curieux que Texperimentation nous de-voile, relativement � l'inftuence si considerable que des agents determines peuvent exercer, � doses infini-tesimes, sur le developpement d'etres microscopiques, dans leur milieu de culture, ne doivent-ils pas faire naitre la pensee, je dirai plus, l'esperance qu'on pent reussir � trouver les agents modificateurs qui, ajoutes au milieu sanguin, seraient susceptibles de rendre sa composition incompatible avec le developpement d'un microbe contagieux; et que, consequemment, il sera possible d'opposer � cbaque element contagieux des medications qui seraient ou preventives de ses effets ou curatives, en ce sens qu'elles les annuleraient, avant qu'iis aient eu le temps de se traduire par des lesions materielles.
Ce n'est pas l�, Messieurs, une conception a priori, commela maniere dont je viens de l'exprimer pourrait le donner � penser. Elle s'appuie dej� sur des faits as-sez nombreux pour lui donner un caractere positif, et pour encourager � multiplier les experiences propres � en affirmer la justesse. Je vais passer eu revue ces faits et j'indiquerai ensuite comment je congois que doiveut etre instituees ces experiences.
II s'agit l� d'un probleme de therapeutique dont la solution touche � de si grands interets qu'il me parait utile de convier � y prendre part tous ceux qui sont en position pour le faire.
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Je vous ai dit, Messieurs, comment des 1872, � propos des experiences de Davaine sur I'inoculation efficace de la septicemie, � doses infinitesimales, j'avais emis l'idee, devaut l'Academie de medecine, qu'il y aurait un grand interet, alors que la preuve etaitfaitede I'etonnante activitedu\irussepticemique, de rechercher experimentalement s'il ne serait pas possible de preraunir les animaux centre l'energie de cette action, en les soumettant, au prealable, � l'in-fluence de quelque puissant modificateur qui pourrait faire que le virus n'aurait plus de prise sur leur organisme. Cette idee m'etait iuspiree par le souvenir des experiences de Gohier, de l'ecole veterinaire de Lyon, qui avait reussi � rendre imputrescibles les cadavres des animaux qu'il avait soumis, pendant un certain temps, au regime du tannin associe a leur ration alimentaire. Cette imputrescibilite m'avait donne a penser que peut-etre la modification chimique eprouvee par les tissus serait une condition pour que le virus inocule demeur�t sans effets. Simple vue de l'esprit, � ce moment, dont je n'ai pas poursuivi la verification et qui, faute de sa preuve, est demeuree sans portee.
J'ignorais, au moment o� je formulais cette idee, qu'un experimentateur Italien, le Dr Polli, de Milan, I'avait cue quelques annees auparavant et s'en etait inspire pour instituer et poursuivre une serie d'experiences sur les maladies -par ferment morbi�que et sur leur traitement. II a rendu compte des resultats qu'il a obtenus dans un memoire dont M. le Dr de
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Pietra-Santa a donne la traduction analytique, que je vous ai resumee dans la derniere seance.
Ce qui semble en ressortir; �j'emploie cette forme dubitative parce que, en pareille matiere, il ne faut con-clure que lorsque les faits sont assez nombreux et assez concordants pour autoriser une affirmation, � ce qui semble en ressortir, c'est, d'une part, que l'administration prealable d'un sulfite alcalin meltrait l'organisme en etat de defense contre l'action de substances qui donnent lieu � des maladies tres graves, et souvent meme mortelles, lorsqu'on les fait agir, soit par injections vasculaires, soit par inoculations, sur des organismes 11071 defendiis par l'agent preservateur; et, d'autre part, que cet agent preservateur, le sulfite alcalin, administre soit en m�me temps que l'agent nuisible, soit apres, en conjurerait les effets.
Une fois ces resultats divulgues, ils ont et6 soumis, en Italic, au contr�le de l'experimentation clinique par un grand nombre de medecins, et des temoignages ont ete produits en faveur de l'efficacite de la nouvelle methode, appliquee au traitement de maladies diverses: fievres palustres, fievres typhoides, fievres miliaires, fievres puerperales, variole, affections syphilitiques; plaies de toute nature; infectionpurulente. � D'apres les observations relatives � cette derniere maladie, qui a de grands rapports, au point de vue etiologique, avec celles que Ton determine experimentalement sur des animaux, les sulfites auraient ete au taut efficaces � conjurer les accidents sur l'homme que sur les sujets d'experience.
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II est remarquable, en effet, que les medecins qui ont rendu compte de l'emploi des sulfites dans leur clinique, insistent surtout sur les bons resultats qu'ils en ont obtenus contre les maladies dues � cette cause. Ainsi le Dr Rodolfi, titulaire de la clinique medicale de Brescia, declare que dans deux cas de maladie par absorption purulente, provenant de la blessure d'une saignee, affection qui avait 6te rebelle � des doses elevees de sulfate de quinine, 1'administra�tion du sulfite de magnesie a sauve les malades d'une mort imminente : resultat absolument conforme, on le voit, � ceux qu'a donnes l'experimentation sur des chiens infectes par 1'injection directe du pus dans le sang; aussi le professeur de Brescia declare-t-il que laquo; celui qui negligerait l'usage des sulfites dans le cas o� Ton redouterait I'absorption purulente, serait responsable des malheurs qui peuvent s'ensuivre raquo;,
D'apres les observations du docteur Mazzolini, qui les a recueillies dans Tune des provinces les plus malsaines de la Lombardie, les sulfites alcalins seraient employes avantageusement pour neutraliser la cause des fievres palustres, en sorte qu'il y aurait avantage � recourir � la nouvelle medication pour mettre les populations des pays o� cette cause domine, en defense contre son action. Ici encore, se repro-duiralent les phenomenes que Ton determine experi-mentalement sur les animaux lorsqu'on les soumet � la medication sulfitee avant de faire agir sur eux la cause de la maladie infectleuse que Ton veut produlre. L'action de cette cause, en pareil cas, se trouve sin-
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gulierement affaiblie et m�me annulee, parce que le milieu sanguin, modifie par le sulfite, n'est pas favo�rable au developpement des elements vivants que renferment les matieres injectees. De meme, dans le cas d'infection palustre. Les elements vivants qui constituent les effluves resteraient inactifs, dans les organismes o� ils penetrent, par suite des modifica�tions imprimees au milieu sanguin de ces organismes, par I'addition � sa composition des sulfites ingeres.
La propriete antiseptique inherente aux sulfites alcalins les adapterait tres bien, d'apres le Dr Polli, au traitement de la tuberculose, quand eile s'est compliquee de cavernes pulmonaires. Dans ce cas, ce n'est pas contre la maladie en soi que la medication sulfitee serait efficace, mais contre les complications d'infection purulente dont les cavernes pulmonaires sont la source. Les sulfites de soude et de magnesie conviendraient parfaitement pour cet objet, car ils auraient, suivant le Dr Polli, pour effets, d'arr^ter dans le sang le mouvement catalytique determine par la presence dans ce liquide du pus resorbe, et de diminuer l'exsudation purulente des cavernes pulmo�naires.
Dans une note par laquelle il termine son resume analytique du memoire du Dr Polli, M. le Dr de Pietra-Santa atteste les bons resultats qu'il a obte-nus de l'emploi des hyposulfites de chaux dans le traitement de la phthisie compliquee de cavernes pulmonaires.
En resultat dernier, il ressort de tons les documents
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recueillis par M. le docteur de Pietra-Santa, sur les resultats donnes par l'experimentation clinique des Sulfites alcalins et terreux, que tous ceux qui les ont essayes seraient du meme avis � l'endroit de l'efficacite de ces sels dans le traitement des maladies dues d des ferments morhifiques, telles que I'infection purulente, la fievre puerperale, les fievres palustres, les fievres typhoides graves. Aussi le professeur Timermans s'est-il cru autorise � dire, d'apres ces resultats, dans un rapport lu devant l'Academie royale de medecine de Turin, pour le concours du grand prix Riberi: laquo; que la medication par les sulfites alcalins et terneux a ete et sera toujours feconde en heureux resultats, quoique le dernier mot ne seit pas dit et sur les indications cliniques, et sur les diverses theories des ferments, etc.
.....Et qu'alors meme que la doctrine du Dr Polli
ne serait pas, dans toutes ses parties, entierement sanctionnee par I'etude clinique, eile formera toujours un sujet de gloire pourHa science italienne, car cette admirable conquete therapeutique constitue le patri-moine exclusif du Dr Polli. raquo;
Sans doute que, dans un pareil jugement, il faut faire la part de l'exageration. Les medications, surtout quand elles n'ont d'autres assises que les applications cliniques, tiennent quelquefois des modes; elles ont leur vogue et passent, parce que le probleme de leur efficacite est difficile � resoudre au milieu des com-plexites de l'etat pathologique, o� les conditions de la guerison naturelle se trouvent, presque toujours, � cote de 1'action medicamenteuse qu'on fait intervenir.
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et emp�chent souvent de discerner la part reelle qui revient � celle-ci, dans les resultatsqui se produisent apres son intervention. Mais dans l'oeuvre du Dr Polli il y a une partie experimentale, o� les faits se presentent avec un caractere de plus grande sim-plicite, qui en rend la verification facile. Si le IV Polli ne s'est pas fait d'illusions, s'il n'a pas ete trop prompt � conclure; s'il etait vrai qu'en soumettant des animaux � l'influence d'une medication dont les Sulfites forment la base, on steriliseraitleur organisme, c'est-a-dire on le rendrait impropre � servir de milieu de culture a de certaines semences morbides, aptes � y pulluler lorsqu'il se trouve dans ses conditions physiologiques; s'il etaitvrai, enfin, que meme lorsque cette pullulation a commence, la medication sulfitee se montrerait encore efficace � l'arreter par la sterilisa�tion du milieu o� eile s'opere; ce seraient l� incon-testablement des faits de la plus grande portee, � considerer les choses d'une maniere generale, car ils donneraient la demonstration de la possibilite de mettre les organismes en defense contre les influences contagieuses, par des modifications imprimees � leur composition, au moyen d'agents speciaux, non com�patibles avec les manifestations d'activite des agents vivants des contagions.
Un pareil resultat vaut la peine qu'on multiplie les recherches experiraentales pour en verifier la rea-lite.
Voici, maintenant, un autre fait du meme ordre, qui nous vient encore d'ltalie. Le Dr Tommassi
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Orudeli, depute au Parlement, a rendu compte, dans un rapport presente au ministre de l'agriculture de son pays, � la date du 18 mars 1883, de tentatives qui ont ete faites, dans les pays � malaria, pour pre-munir, par l'usage de l'arsenic, les populations centre l'action pernicieuse de l'effluve ou, pour mieux dire, de l'agent vivant d'o� cette maladie precede. laquo; On avait seuvent remarque, dit-il, dans les pays � mala�ria, qu'apres des traitements arsenicaux bien reussis, le fievres reeidivaient plus rarement qu'� la suite du traitement par la quinine, et que meme les individus gueris par l'arsenic jouissaient souvent d'une immu-nite durable centre les agressions renouvelees de la malaria. raquo; Cela lui donna l'idee d'essayer l'effet pro-phylactique des petites doses d'arsenic, administrees tous les jours aux individus qui etaient obliges de demeurer dans les pays � malaria pendant la mau-vaise saison; et il s'y deeida sans hesitation, car l'innocuite de cette medication lui etait demontree par ce que Ton sait des habitudes des paysans de la Styrie, qui se soumettent regulierement � un regime arsenical journalier, parce que l'experience leur a demontre que, sous l'influence de ce regime, la respi�ration s'execute avec plus d'ampleur, et que l'acti-vite des fonetions digestives est plus grande, car eile se traduit par une certaine tendance � l'embon-point et par la coloration plus vive de la peau.
Pour eviter les accidents, M. Crudeli eut recours � une methode posologique certaine, et il adepta, comme le meilleur moyen de dosage de l'arsenic, des
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tablettes gelalineuses tres minces, divisees en cin-quante petits carres, que Ton pent detacher aussi facilement que des timbres-postes et qui, chacun, renferment une quantite determinee d'acide arse-nieux ou d'arsenite de soude.
Dans le but de reunir un ensemble d'observations auxquelles on put avoir contiance, M. Crudeli s'adressa aux societes des chemins de fer remains et meri-dionaux, dont un grand nombre des employes sont, par la force m^me des choses, exposes aux attaques de la malaria. Cette proposition fut acceptee par le medecin en chef de ces chemins, le Dr Ricchi; des ex�periences furent instituees par lui et il a rendu compte de leurs resultats dans un rapport adresse au directeur general des compagnies.
Les observations ont 6te recueillies dans trois sec�tions appartenant, l'une � une region de malaria grave, et les deux autres a des regions o� la malaria est plus grave encore. Dans ces trois sections, on soumit � l'experience 455 individus � 401 hommes et 54 femmes � en employant des gelatines threes, dont les petits carres contenaient deux milligrammes d'ar-senic. On commengait le traitement en administrant un seul carre par jour et par personne; apres quatre jours, on ajoutait un autre carre ; et ainsi de suite jus-qu'au maximum de huit milligrammes d'arsenic par jour.
Dans quelques cas, ce maximum fut depasse sans aucun inconvenient et meme avec avantage. Le resul-tat final est resume ainsi: laquo; sur 455 individus, 338 se
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guerirent des fievres qu'ils avaient, ou bien furent totalement preserves; pour 43 le resultat fut negatif et douteux pour 74 raquo;.
Dans la categorie des resultats negatifs, on a range les cas de quelques individus qui n'avaient pas suivi le traitement d'une maniere reguliere, et ceux dans lesquels l'essai de la medication u'avait ete fait que pendant quelques jours seulement, les personnes qui y etaient soumises s'etant refugees � en continuer I'usage. Dans la categorie des douteux, on a place les cas de plusieurs individus qui avaient alterne le trai�tement arsenical avec d'autres. M. Ricchi exprime sa conviction que les chiffres de ces deux categories au-raient ete plus faibles, si les medecins et les sujets d'ex-perience eussent eu une plus grande confiance dans l'emploi de I'arsenic. Aussi se propose-t-il de continuer l'experience cette annee m�me, dans des proportions plus grandes, car, dit-il, laquo; on pent se declarer satisfait des resultats dej� obtenus, puisqu'il parait avere que si I'arsenic ne preserve pas toujours de l'infection ma-larique, il rend au moins I'organisme humain moins accessible � l'action du ferment de la malaria raquo;.
Au dire de M, Crudeli, ces conclusions du Dr Ricchi se trouvent justifiees par les resultats qu'ont obtenus MM. Alexandre et Titus Piacentini dans la campagne romaine, le prince Corsini dans la maremme toscane, et le professeur Occhini dans le personnel des chasses royales de Gastel-Porciano. En outre, un grand proprielaire de la Pouille, M. Visocchi a fait aussi l'experience de la medication arsenicale, � titre
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preventif, sur les moissonneurs qui avaient ete, par escouades de quatre-vingts � cent personnes, travailler dans sa ferme de Giardiuo pendant les annees 1881 et 1882, et il s'en est declare satisfait. Suivant son temoignage, les hommes qui ont ete soumis au regime arsenical croient assez � son efficacite pre-servatrice pour demander, eux-memes, qu'on les y soumette � nouveau, lorsqu'ils reviennent travailler dans la ferme.
En sorte que voil� reunis dej� un certain nombre de faits cliniques qui ont un caractere experimental, en raison des conditions memes o� ils ont ete observes, et qui etablissent une tres forte probabilite en faveur des proprietes que possederait 1'arsenic de rendre l'organisme bumain impropre � la culture de l'element vivant dont lapullulation, en lui, deter�mine la terrible malaria.
Cela etant, est-ce que les phenomenes que Ton voit se produire dans le liquide Raulin, lorsqu'on y ajoute un element incompatible avec la pullulation de l'as-pergillus, ne conduisent pas � une interpretation tres legitime de ce qui se passe dans le milieu sanguin d'un organisme bumain, lorsque, grace au regime arsenical, une certaine proportion d'arsenic se trouve ajoutee � ce milieu? N'est-il pas admissible que, comme le li�quide Raulin qui contient des doses infinitesimes de nitrate d'argent ou de sublime, le milieu sanguin se trouve sterilise pour la culture de l'element mala-rique, par la petite proportion d'arsenic qu'il pent tenir en dissolution et qu'ainsi se trouvent realisees
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les conditions pour que la malaria, ou ne se developpe pasou s'arr�te si deja son developpement a commence. L'analogie est assez grande, ce me semble, entre les phenomenes, pour que l'on puisse conclure de Fun � l'autre et que, ici encore, les clartes de l'experi-mentation puissent servir � dissiper les obscurites des faits de la pathologie.
Une circonstance particuliere, mentionnee dans le rapport de M. Tommassi Crudeli, facilitera tres heureusement les recherches qui restent � faire encore pour resoudre, d'une maniere complete, la question si importante des vertus prophylactiques et curatives de l'arsenic � l'endroit de la malaria. Cette maladie ne s'attaque pas exclusivement � l'espece humaine. Si on ne I'a pas observee, dans les pays � malaria, sur les sujets de l'espece bovine de ces pays, cela depend d'une immunite de race, analogue � celledes moutons algeriens � l'egard du charbon, et dependante d'in-fluences hereditaires, c'est-�-dire des conditions de resistance transmises par I'heredite, qui font, sans qu'on en sache encore le pourquoi, que dans une espece, dans une race, certains groupes plus refrac-taires aux influences nocives du milieu o� ils vivent, font souche d'individus, refractaires comme eux, et capables d'y perpetuer l'espece malgre ces influences. Mais cette immunite, qui est une grace de race pour les animaux indigenes, n'appartient pas aux animaux de la meme espece qui sont Importes dans les pays malariques. D'apres les observations faites � Avala, en Sicile, par Grande, que cite M. Crudeli, laquo; tandis
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que les boeufs des races indigenes sont tres rarement attaques par la fievre malarique, les boeufs exotiques y sent, au contraire, tres sujets, et la frequence, comme la gravite des cas, oblige meine, pour eviter les pertes que la malaria pent causer, de faire emigrer les troupeaux infestes vers des localites exemptes de malaria. raquo;
laquo; Au rapport du Dr Vicchi, veterinaire distingue, dit M. Crudeli, les chevaux Importes dans la Cam-pa gne romaine seraient frequemment atteints de la fievre malarique, tandis qu'on ne l'observe que tres rarement sur la race du pays. raquo;
Enfin, il resulte des experiences de MM. Marchia-fava et Cuboni qu'on pent produire des infections malariques chez les chiens et les lapins par l'inocu-lation de tres petites quantites de sang, puise sur des malades affectes de malaria pernicieuse.
L'aptitude de differentes especes animales � con-tracter la malaria realise une condition extremement favorable pour les recherches que comporte l'etude exp6rimentale de la malaria humaine. Trop souvent, faute de cette condition, les problemes de la patholo�gic de l'homme ne sont pas susceptibles de solutions aussi promptes et aussi completes que ceux de la pathologie des animaux, o� Ton peut proceder par t�tonnements, sans avoir � s'inquieter des accidents mortels qui peuvent survenir au cours des recherches. La malaria etant commune � l'homme et � quelques-unes de nos especes domestiques, rien de plus simple que d'instituer sur celles-ci des experiences dont les resultats pourront servir de base � des applications �
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l'espece humaine ; et tout particulierement les expe�riences d'une si grande portee, au point de vue de la prophylaxie generale, ayant pour but de resoudre la question de savoir s'il est possible de mettre un organisme en etat de defense contre l'infection mala-rique, par l'influence d'une medication � laquelle il aurait ete prealablement soumis : soit arsenicale, soit sulfitee, soit tannique, ou autre encore, car en pareille circonstance, etant donnee la matiere expe-rimentale que representent les especes susceptibles, les experiences peuvent etre multipliees et variees au gre des experimentateurs, ou, pour mieux dire, autant qu'il est necessaire pour arriver � une solution defini�tive sur un point determine.
M. Crudeli a compris l'importance des ressources qu'il devait trouver dans les animaux susceptibles de la malaria, pour eclairer et resoudre le plus possible les differentes questions que comporte l'etude de cette maladie dans l'espece humaine. Grace aux ressources financieres mises � sa disposition par le ministre de l'agriculture et la societe des chemins de fer meridio-naux, il avait fait tout preparer, dans l'Iustitut patho-logique de Rome, pour faire des experiences sur une grande quantite d'animaux places dans des conditions hygieniques semblables; une moitie devait etre soumise au regime arsenical et l'on devait ensuite, une fois ceux-ci prepares, soumettre tout le groupe, les arseni-ques et ceux qui ne l'etaient pas, � l'inoculation avec du sang puise sur des malades affectes de la malaria pernicieuse. �L'efficacite prophylaclique de l'arsenic.
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si eile est reelle, devait sect;tre accusee par rirnmunite centre I'infection malarique acquise aux animaux Mfendus par le regime arsenical, tandis qua sur le groupe des animaux sans defense, I'infection consecu�tive � l'inoculation devait produire ses effets; mais I'annee 1882 n'ayant pas ete favorable au developpe-ment de la malaria sur I'espece humaine, en raison, sans doute de l'abondance des pluies et de la chaleur pen elevee, les h�pitaux de Rome ne regurent pas de fievreux atteints de la malaria pernicieuse, la seule qui puisse fournir la matiere experimentale convenable pour des experiences de transmission � des animaux. En consequence, M. Crudeli ne put donner suite � son projet; mais ce n'est que partie remise, et il se pro�pose de le realiser cette annee meme, si les condi�tions sont mieux appropriees que celles da I'annee derniere � sa reussite.
Toutefois, les resultats donnas, des maintenant, par les experiences cliniques dont il vient d'etre question, lui ont paru assez encourageants pour qu'il ait cru devoir demander au ministre de l'agriculture d'appeler l'attention de ses collegues de l'interieur, de la guerre, des finances et de l'instruction publique sur cette grave question, afin qu'on etende le champ de l'obser-vation, en soumattant au regime arsenical les gardes de la s�rete publique, las gardians das forgats, les carabiniers, les soldats, les financiers, les gardes archeologiques, qui se trouvent obliges de damaurer dans les pays � malaria pendant la saison des fievres. laquo; On pourrait ainsi reunir en peu de temps, dit
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M. Crudoli, une grande quantite de fails qui nous aideraient � resoudre, dans un sens positif ou negatif, ce probleme vital, et � proceder hardiment (si la solution est teile qua nous l'esperons) dans l'oeuvre legislative qui doit servir � repeupler tant de regions italienues desolees par la malaria. raquo;
Nous devons faire des voeux pour que M. Crudeli reussisse � faire instituer la grande experience qu'il propose au gouvernement de son pays. Si eile aboutissait � uu resultat positif et que la preuve f�t ainsi faite de la possibilite de mettre les organismes eu etat de defense coutre une infection aussi grave que celle de la malaria, par une medication prealable, imprimant au milieu Interieur de ces organismes de telles modifications que le germe decette maladie n'y serait plus cultivable, des tentatives .du m^me ordre devraieut etre faites pour d'autres epidemies, comme la fievre jaune, le cholera, la peste ; et il y aurait � rechercher, par voie experimenlale, quels sont les agents incompatibles qui pourraient etre aux germes respectifs de ces maladies, ce qu'est le nitrate d'argent � l'aspergillus daus le liquide de Raulin, ce queparait etre l'arsenic au germe de la malaria; ce qu'est le quinquina au germe de la fievre intermittente.
Le cuivre ne peut-il pas, lui aussi, �tre range parmi les agents incompatibles qui peuvent rendre le milieu organique humain impropre � la culture, c'est-�-dire � la pullulation, de certains germes morbides^ comme ceux du cholera et de la fievre typhoide? On peut se poser cetle question en presence des resul-
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306nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; COURS DE PATHOLOGIE COMPAR^E.
tats statistiques qu'a fait connaitre le Dr Burq, notam-meut dans une communication recente � l'Academie des sciences. Longtemps, Messieurs, la valeur des tra-vaux de cet investigateur opiuiatre a ete meconnue; les resultats qu'il annongait avaient contre eux une teile invraisemblance qu'on s'est refuse m6me � les verifier, et qu'on les a tournes en derision, en assi-milant les precedes par lesquels il les avait obtenus � laquo; aux pratiques astrologiques et cabalistiques an-ciennes raquo;. Cependant M. Burq est parvenu, par cette force de l'obstination que donne l'obsession de ce que Ton croit etre la verite, � obtenir de la Societe de biologic la verification des faits dont il affirmait la realite; une commission fut nommee � cet effet, et le rapport qu'elle a redige, apres une longue serie d'experiences qui se sont contiuuees pendant pres de deux annees, est venu temoigner que le Dr Burq ne s'etait pas fait illusion lorsqu'il affirmait qu'au contact des metaux avec l'organisme humain, des phenomenes se produisaient, qui, si invraisemblables qu'ils parussent, n'en etaient pas moins reels, et avaient une tres grande signification, au double point de vue de la physiologic et des applications therapeutiques. La metalloscopie et la metallothera-pie ne devaient done plus etre considerees desormais comme des conceptions imaginaires, digues de l'an-cienne magie.
Cela dit pour montrer I'importance qu'il faut atta-cher aux observations du Dr Burq, je reviens, main-tenant, aux resultats statistiques de ses enquetes rela-
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tives � Timmunite dont les ouvriers qui travaillent le cuivre se trouveraient revetus, par une sorte de grace d'etat, contre les germes de certaines maladies infec-tieuses, uotamment le cholera et la fievre typhoi'de. La demoustration par la statistique n'a pas la m6me valeur, certainement, que la demonstration experimen-tale; mais quand la nature des choses ne comporte pas celle-ci, il ne faut pas dedaigner les renseigne-ments que I'autre pent donner. Les chiffres peuvent, par leur nombre et leur concordance, servir � etablir une verite.
Or, pour le cholera, M. Burq en a recueilli un si grand nombre, dans toutes les parties du monde, � l'appui de Timmunite dont les ouvriers en cuivre sent doles contre cette maladie, que M. Vernois, rappor�teur du conseil de salubrite de la Seine en 1869, a reconnu leur signification positive par un rapport tres approbatif.
Quant � la fievre typhoide, il resulte de deux en-quetes faites par M. Burq, Tune en 1876-77 et I'autre en 1882-83, que le chiffre de la mortalite par cette maladie est considerablement plus faible pour les ouvriers qui travaillent le cuivre que dans les autres corps d'etat. Dans les deux epidemies de fievre typhoide qui out sevi � Paris aux deux dates que je viens de citer, les ouvriers en cuivre n'ont compte que quatre victimes, dit M. Burq dans sa communication � i'Academie des sciences, tandis qu'ils auraient du en compter au moins 100, si la mort avait frappe sur eux dans la meine mesure que sur les autres.
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laquo; Enfin, d'apres les renseignements transmis a M. Burq par la Societe dite du Bon-Accord, composee de trois � quatre ceuts tourneurs, monteurs et cise-leurs en bronze, il n'y aurait eu, parmi les membres de cette societe, qu'un cas de naort par maladie infec-tieuse depuis soixante-quatre annees, et c'est un cas de variole. Tous les ouvriers en cuivre qui se sont succede, dans la Soci6te du Bon-Accord depuis sa fon-dation en 1819, auraient ete epargnes par le cholera et par la fievre typhoide ou, tout au moins, aucun n'aurait succombe � l'une ou � l'autre de ces mala�dies raquo;.
laquo; Ne ressort-il pas de ces resultats statistiques, dit M. Burq, en terminant sa communication, que I'or-ganisme des ouvriers exposes � l'action du cuivre constitue, pour les elements vivants d'o� procedent les maladies infectieuses, notamment le cholera et la fievre typhoide, un milieu de culture pen favorable � leur developpement? Et n'est-on pas autorise � en conclure que rimpregnation cuprique progressive pour-rait etre un moyen preservatif contre ces affections; et, aussi, que, pour leur traitement, I'administration des sels de cuivre pourrait constituer une ressource precieuse?
laquo; Un certain nombre de faits, recueillis dej� par plusieurs medecins, temoignent assez de l'e�icacite de cette medication, pour encourager � la soumettre � de nouvelles epreuves cliniques qui, bien dirigees, n'ont rien de redoutable pour les malades et peuvent leur elre profitable. raquo;
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Vous le voyez, Messieurs, voil� uu ensemble de faits qui autorisent � penser que, sous Tinfluence de certains agents, modificateurs de la composition orga-nique, tout au moins par leur presence, les elements vivants d'o� procedent les contagions, on bien n'ont pas de prise sur les organismes mis en etat de defense contre leurs attaques, ou bien peuvent y etre neutra�lises, en ce sens que leur pullulation ne pent plus y continuer, comme 11 arrive � l'aspergillus dans un liquide de culture additionne de nitrate d'argent, msect;me seulement � un seize-cent-raillieme.
C'est dans cet ordre d'idees que des recherches doivent etre instituees pour t�cher de trouver les moyens qui seraient les plus aptes � preserver I'homme de la tuberculose, ou � en arrdter les progres, quand dej� eile a pris possession de son organisme.
La propriete qu'elle possede de se transmettre � diflferentes especes aniraales, constitue une condition tres favorable pour I'experimentation; grace � eile, en effet, le probleme de l'efficacite d'une medication se trouve singulierement simplifie, puisqu'il devient possible d'apprecier avec rigueur, d'une part, si 1'ele�ment de la virulence tuberculeuse aura prise sur un organisme defendu; et, de l'autre, si quand I'orga-nisme est dej� envahi, cet element de la virulence pent 6tre neutralise par 1'intervention d'un agent propre � l'empecher de continuer sa pullulation, c'est-�-dire � prevenir la manifestation des lesions orga-niques par lesquelles eile se traduit.
Ainsi, par exemple, il y a longtemps que Ton a ete
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conduit, par une observation tout empirique, � pr�co-niser I'usage des eaux sulfureuses et arsenicales dans le traitement de la phthisic pulmonaire. Bien des pages out etc ecrites pour prouver l'efficacite de ces eaux et pour interpreter leur action. Avec les donnees de 1'ancienne pathologic, je veux dire dc la patho�logic d'hier, cette interpretation ne pouvait etre que conjecturale. Aujourd'hui on sait davantagc o� se prendre; on peut considerer comme probable que, sous 1'influence du traitement thermal, le milieu interieur des organismes dej� cnvahis cst asscz modifie dans sa composition pour devenir moins propre au developpcmcnt du germe de la tubercu-lose et m6me pour ^tre completcment sterilise.
Mais ce n'est l� qu'une hypothese qui peut heureu-sement sect;tre soumise � une verification experimeutale.
Voici, par exemple, comment je comprends que de-vrait etre trace le programme des experiences � entre-prendre :
1deg; Soumettre des animaux susceptibles, comme le veau, le pore, le lapin, �la medication sulfitee, d'apres la methode de Polli; et, une fois l'organisme de ces animaux prepare par une duree s�ffisante de la medi�cation, le mettre � l'epreuvc de Tinfestation tubercu-leuse par les differentes voies : voies digestives et modes divers d'inoculation, � piqures sous-epider-miques, injections sous-cutanees, injections intravas-culaires. � Bien entendu que, parallelement, des ani�maux temoins de la meme espece seraient soumis aux ra�mes epreuves.
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2deg; Renverser les termes de la formule experimen-tale : commencer par infester l'organisme par une voie ou par une autre, et recourir ensuite dans la succession des jours, apres l'inoculation, � l'emploi des medications dont on vent eprouver I'efficacite centre l'activite de l'element de la virulence tubercu-leuse.
Dans ce cas, comme dans le premier, des expe�riences paralleles seraient faites sur des animaux te-moins.
Si dans de telles conditions, I'inoculatioa restail sans effets sur les animaux defendus par une medica�tion prealable; ou cessait de produire ses effets apr�s l'intervention d'une semblable medication pendant un temps s�ffisant, il est evident que si ces epreuves, suffisamment repetees, donnaient constamment les mfemes resultats, la preuve serait faite, avec rigueur, de I'efficacite des sulfites alcalins, pour mettre l'orga�nisme des animaux susceptibles en etat de defense centre l'invasion de la tuberculose et en etat de resis�tance contre ses progres, une fois l'invasion accom-plie.
Ge programme devrait etre suivi pour mettre la me�dication sulfureuse, sous toutes ses formes, � l'epreuve de l'experimentation. La valeur des Eaux-bonnes, par exemple, pourrait etre ainsi appreciee et mesuree au double point de vue de son efficacite prophylactique et curative.
De meme, celle d'une atmosphere dans la composi�tion de laquelle le gaz hydrogene sulfure entrerait
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pour une proportion compatible avec la vie des sujets d'experience. A cat egard, je trouve qu'il serait tres interessant de repeter, pour la tuberculose, les expe�riences si curieuses que M. de Froschauer a faites � l'Ecole veterinaire de Vienne sur la septicemie et sur la variole ovine. Vous savez quels en out ete les re-sultats : etant donnes deux groupes de souris sur les-quelles l'inoculation de la septicemie avait ete faite, cette inoculation, toujours mortelle, resta sans effets sur celui de ces deux groupes que Ton avait main-tenu dans une atmosphere chargee d'une proportion tolerable d'hydrogene sulfure, tandis que I'autre groupe, non protege par I'influence anliseptique de ce gaz, succomba infailliblement � la septicemie dont le germe trouve dans les organismes oil il a ete ensemence un milieu tres propre a sa pullula-tion rapide et, par consequent, mortelle.
Sur les moutons inocules de la clavelee, les choses se sont passees identiquement de la meme maniere ; nullite des effets de Tinoculation claveleuse sur un groupe de moutons maintenus, apres I'operation, dans une atmosphere chargee d'une proportion tolerable de gaz sulfhydrique; efficacite de cette inoculation, avec toutes ses consequences, la mort y comprise, sur le groupe des sujets respirant dans l'atmosphere normale.
J'avoue que cette experience m'a beaucoup frappe et je me propose de la repeter dans notre laboratoire, avec le concours de M. Paul Gibier. Si M. de Froschauer ne s'est pas fait illusion; s'il est vrai qu'on pent mo�difier le milieu organique d'une maniere assez com-
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plete, par la respiration dans ime atmosphere addi-tionnee d'un gaz incompatible avec la vie d'un virus, pour qu'un animal, mis dans ces conditions, demeure invulnerable par ce virus, de quelle importance la constatation d'un pareil fait ne serait-elle pas pour la therapeutique prophylactique et curative? Quoi de plus simple, en effet, que ce que Ton peut appeler la medication par les voies respiratoires, de l'utilite de laquelle la pratique avait le pressentiment lors-qu'elle envoyait des phthisiques vivre dans I'atmos-phere des etables!
Si les moisissures ne se developpent pas ou cessent de se developper sur les tranches de citrons exposees � l'air melange de la proportion de gaz hydrogene sul-fure qui est compatible avec la vie des animaux, est-ce qu'il n'y a pas l� des indications precieuses pour le traitement des maladies des voies respiratoires dont la caracteristique redoutable est le developpement de vegetaux parasites � la surface de la muqueuse? Est-ce que si la respiration dans une atmosphere additionnee de gaz sulfhydrique empeche le virus claveleux de prendre sur le mouton, I'indication ne ressort pas de ce fait, � le supposer confirme, de melanger une proportion de ce gaz � l'atmosphere d'une salle de malades ou la variole se serait de-claree, pour mettre les habitants de cette salle � l'abri des atteintes de la contagion?
Des experiences de cet ordre pourraient etre faites avec le virus de la morve qui est aussi une maladie tuberculeuse, car eile se caracterise avec tant de cons-
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tance par le developpement de tubercules dans les poumons, que le professeur Dupuy, d'AIfort, avait donne � la morve du cheval le nom amp; affection tuber-culeuse; et c'est effect!vement sous ce titre qu'il en a traite dans son livre sur cette maladie. Au point de vue de la medeciue generale et des applications � la prophylaxie, de quel interet ne seraient pas des experiences qui demontreraient qu'on pent steriliser, pour le germe morveux le terrain d'organismes sus-ceptibles, par I'action modificatrice d'agents deter�mines, � rinfluence desquels on I'aurait prealable-ment soumis?
Quel vaste champ d'experiences ouvert � la thera-peutique !
En m'inspirant des notions certaines qui sont aujou-d'huiacquises sur la nature des maladies contagieuses, je formulerais volontiers le probleme � resoudre de la maniere suivante:
laquo; Etant donneeune maladie contagieuse,rechercher Tagent modificateur qui pent rendre le milieu orga-nique impropre � la culture, c'est-�-dire � la pullula-tion de 1'element vivant, ou, autrement dit, du germe de cette contagion. raquo;
Quelle conquete pour la medecine que celle des moyens � l'aide desquels on parviendrait � rendre les hommes et les animaux invulnerables aux atteintes des contagions dont les germes peuvent trouver en eux des terrains propices � leur developpement!
Reve, cela, dira-t-on! Mais non, puisque dej� cer�tains faits sont acquis qui temoigneut qu'un pared
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resultat n'est pas au-dessus de nos efforts]. Grace aux lumieres jetees par la science experimentale dans les obscurites de la pathologie des maladies contagieuses, nous savons maintenant o� nous prendre, et nous pouvons nous inspirer de ce que nous apprend l'etude de la vie des germes, dans les milieux artiflciels de culture, pour t�cher soit de prevenir leur developpement dans le milieu des organismes vivants, soit de les y neutraliser.
II y a beaucoup � attendre, j'en suis convaincu, Messieurs, des recherches poursuivies sous I'inspira-tion de cette idee directrice.
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APPENDICE
La question de la phlliisie dans I'espece bovine, devanl le Congres international de Bmxellesen 1883. � Le temps a manque pour la traiter. � Memoire important de M. Lydtin, veterinaire principal du grand-duche de Bade. � Analyse de ce travail. � Diagnostic de la phthisie pommeli^re. � Periode initiale. � Signe fournis par le syst�me lymphatique; par le thermomfetre. � Sympt�raes procedant de la sensibilite des parois thoraciques. � Diflicultes du diagnostic positif. � Le veterinaire sanitaire a besoin do la certitude. � Necessite de nouvelles etudes cliniques et experimentales. � Rapports certains etablir entre les tumeurs ganglionnaires exterieures et les lesions viscerates. � Le vrai criterium anatomiqiie de la pbtbisie bovine est dans son mi�crobe. � Frequence des lesions ganglionnaires d�s le debut. � Lesions tuberculeuses des mamelles des vacbes laitieres.� Lesions des muscles, des os et des articulations. � Proportion do la phthisie pulmonaire dans la population bovine. � La phthisie dans les autres esp�ces. � Rarete dans i'espece ovine; dans l'esp�ce caprine; dans I'espfece cbevalino. � I. Influence de Vheridite. � Experience a instituer en vtie de l'etude de cette question. � Fails d'observation. � Ooyance populaire. � Fails zootechniques. � Fails analomiques. � Rarete de la phthisie chez les jeunes de l'esp�ce bovine. � Lesions analomiques sur des foetus et des nouveau-nes. � Fails zootechniques. � Influence du p�re et de la mere. � Tardivite do la manifestation de la pbtbisie hereditaire. � II. Influence de la contagion. � Documents � l'appui. � Fails cliniques. � Leur signification accrue par celle
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CO�aS DE PATHOLOGIE COMPARliE.
des fails d'experitnentalion. � Impuissance de l'observation saule � d�nner la solution du problamp;ue de la contagion. � Opinions discordantes sur la contagiosite de la phthisie bovine. � Trans�mission de la maladie par l'usage du lait. � Fails cliniques. � Fails d'e.xperiiuenlalion. � Resume synoplique. � Contagion par inoculation. � Inoculalion intra-oculaire. � Identite de la tulier-culose dans toutes les espfeces. � Preuve donnee par l'identile du microbe. � Transmission par inoculalion de la tuberculose � rhomme. � Preuve experimentale. � Transmission a 1'homme par le lait. � Transmission par les rapports des personnes entre elles. � Slalislique comparative de la phtbisie dans les populations bumaines el les populations animates. � HI. Mesures preventives contre les dangers de l'uscuje alimentaire des viandes provenant des animaux tuberculeux. � Effort d'accommodement des priucipes avec les difficultes de la pratique. � Gerlach. � DT Jobne. � La virulence nest pas localisee. � Experience de Toussaint sur la virulence des viandes.� La consequence lo^ique des fails. � Dif�ficultes pratiques. � Conciliation des inlerets prives et de I'interet general. � Indemnisation pour les pertes causees parl'application des mesures sanitaires � la taberculose bovine. � Assurance obligatoire. � Conclusions qui devaient etre soumises au Congr�s de liruxelles.
La question de la phthisie dans Tespece bovine avait ete inscrite dans le programme du Congres inter�national veterinaire qui s'est tenu � Bruxelles an mois de septembre dernier, et eile a ete I'objet d'un Memoire tres complet qui est l'oeuvre de M. Lydtin, medecin veterinaire principal du grand-duche de Bade. Ce travail, par rhnportance du sujet dont 11 traite et l'etendue des developpemeuts qu'il renferme, aurait pu servir � lui seul d'aliment aux deliberations du Congres pendant la semaine qu'il a dure; mais comme il est arrive souvent, en pared cas, le pro�gramme de ce Congres pechait par le trop grand
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nombre des matieres qu'il embrassait, et lorsque la question de la phthisic pommeliere est venue � l'ordre du jour, il etait trop tard pour qu'on put lui consacrer tout le temps et tous les developpemeuts que son importance comportait.
L'iuspcction sanitaire ne trouvera done pas dans les deliberations du Congres de Bruxelles toutes les so�lutions qu'elle en esperait, sans doute, pour regier sa conduitc. Mais si l'ceuvre du Congres est restee sur ce point incomplete et insuffisante, le tres bon travail de M. Lydtin, dont il a ete I'occasion, demeure avec toute I'importance que lui donne la longue serie des documents qu'il contient sur la contagiosite de la tuberculose et sur sa transmissibilite possible � l'es-pece humaine par l'intermediaire des auimaux.
Aussi ai-je cru utile d'extraire du Memoire de M. Lydtin et de reproduire ici, sous une forme subs�tantielle, tout ce qui peut contribuer � l'eclaircisse-ment et � la solution des graves questions d'hygiene publique qui ont ete l'objet de cedes de mes lemons du Museum que je viens de reproduire.
Le diagnostic de la phthisic dans I'espece bovine, ou phthisie pommeliere, est un des points que M. Lydtin s'est efforce le plus d'eclaircir, en recher-chant dans les ouvrages des auteurs de tous les pays les renseignements qu'ils peuvent conteuir sur cette question si importante, au point de vue surtout de la police sanitaire.
Voici, � cet egard, quelques donnees interessantes dont le praticien pourra tirer utilement parti pour
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s'aider � �claircir le probleme difficile qui est pose devant lui, lorsqu'ii se trouve en presence d'une b�te chez laquelle la phthisic est � sa periode initiale.
II resulte d'exp�riences faites avec tous les soins, dit M. Lydtin, que le debut decette maladie est marque par une reaction febrile legere, accompagnee de frissons et de cha-leur, d'anorexie, d'indigestion et de coloration anormale des muqueuses. En general, ces sympt�mes disparaissent apres quelques jours et il survient, en meme temps, une sensibi�te et une tumefaction anormale des ganglions lymphaliques cervi-caux, supei'ieurs, moyens et inferieurs ainsique deceux si-tues � l'enlree et d lapartie inferieure de la poitrine et parfois de ceux de Faine. Ges masses gunglionnaires deviennent plus tard noduleuses et dures.
A une epoque plus avancee de la maladie, il survient de nouveau une lievre legere qui se manifeste par acces, ou prcsenle un caiaclere remittent et dont Texistence peut etre facilemenl prouvee par l'emploi du thermometre. La tem�perature du soir atteint dans ces cas de 39deg; G. h 41, tandis que celle du matiu est souvent tres basse, lorsque la maladie est tres avancee. Elle peut, dans ce dernier cas, descendre jus-qu'� 37deg;.
L'urine est d'ordinaire neulre, parfois albumineusc. Elle con-tient des sels en assez grande abondance, surtoul � la suite des paroxysm.es qui surviennent souvent dans le cours de cetle affection.
Le lait ne presenle generatement rien de special au debut de Faflection; mais des que lamaigrissement et la flevre se declarent, la secretion mammaire diminue. Le lait perd aussi bien en qualite qu'en quantite, il devient bleu�tre et plus riebe de sels qu'il Fest d'ordinaire. Ges modifications ne sont pas cependant toujours aecompagnees d'une notable diminu�tion de la quantite du lait.
Los betes malades presentent parfois de Isidisphagie, causee par la tumefaction des ganglions cervicaux.
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Les sympt�mes tires de l'etat de l'appareil gan-glionnaire lymphatique me paraissent avoir d'autant plus de signification diagnostique qu'on les voit se manifester, avec assez de Constance, sur les animaux que Ton soumet experimentalement � l'infestatiou tuberculeuse par les voies digestives. La certitude est acquise � l'experimentateur que I'organisme est en-vahi, lorsque apparaissent les tumefactions ganglion-naires dans les regions qui viennent d'etre specifiees. Les etudes cliniques doivent done porter sur ce point principal, et si elles etablissaient sur des faits nom-breux la loi des rapports eutre la tuberculose genera-lisee et les tumeurs de l'appareil gauglionnaire lym�phatique sous-cutane, un grand resultat pratique serait obtenu, car la tuberculose pourrait etre dechif-free � sa periode la plus obscure, ceile de son debut, et il deviendrait possible d'eviter les longues contami�nations des etables, causees par la presence, dans les groupes qui les habiteut, d'animaux obscurement malades qui repandeut, � la sourdine, rinfectiou dont ils sont la source.
A cote de ces symptomes qui ont un caractere pathognomonique, d'autres sont enumeres, dans le Memoire de M,. Lydtin, qui sont loin d'avoir la meme signification que ceux qui precedent du Systeme lym�phatique, surtout quand on les considere isolement; mais par leur groupemeut ensemble et avec ces der-niers, ils ne laissent pas cependant d'acquerir uue valeur diagnostique assez importante. Tels sont notamment la loux courte, avortee, secho, prononcee
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surtout le matin, au moment du repas, et plus sou-vent encore apres un exercice un peu actif; la seche-resse, la rapidite, l'adherence de la peau aux parties sous-jaceutes; la couleur terne de la robe, due au herissement des poils et � leur enchevetrement...
laquo; Parfois, on constate une sensibilite anormale � la pression sur la region de l'avant-poitrail et sur la partie laterale de la poitrine, meme des le debut de la maladie, rnais qui est bien plus frequente et pronon-cee � une periode avancee du mal. Elle se denote par des gemissemenls et par des efforts que font les animaux pour eviter l'action de toute pression sur les regions malades... raquo;
Comme ce sont surtout les symptomes de la periode initiale de la phthisie bovine que je me propose de signaler ici, je m'abstiendrai de reproduire ceux dont l'auscultation et la percussion permettent de constater I'existence, car ils n'appartiennent qu'� une periode o� les lesions sont trop avancees pour que la maladie continue � demeurer obscure. II est evident, en effet, que pour que la percussion des parois thoraciques donne lieu � des sous mats, et qu'ou pergoive � l'aus�cultation les bruits de frottements et de r�les speciaux qui sont enumeres dans le Memoire de M. Lydtin, et rattaches � leurs causes avec une precision qui est peut-etre un peu plus dans l'esprit des narrateurs que dans la realite meme, il faut que les lesions tu-berculeuses aient pris de tels developpements qu'elles sont alors accusees par des expressions symptoma-tiques genera les uon douteuses.
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APPENmCE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;323
Ce n'est done pas formuler une proposition qui soit applicable � toutes les periodes de la phthisie (jue de dire, comme le fait M. Lydtiii, laquo; qu'uii pro-l)rietaire, bou observateur, recomiait assez facilemeat ceux de ses animaux qui sont attaints de cette mala-die, en se basant sur I'appetit diminue, la souplesse inoindre de la peau, le poil moins lustre que d'habi-tude, et l'expression plus triste de la physionomie raquo;.
Ce sont l� des signes qui doiveut mettre en defiance, surtout dans une etable o� des attaques anterieures de la maladie sont des motifs de redouter des attaques nouvelles, et consequemment, de considerer comme suspecte, � ce point de vue, toute manifestation mor�bide nouvelle si mal determinee qu'elle soit encore.
Mais si un proprietaire, seul juge de ses interets, pent se contenter de ces signes pour faire abattre les animaux sur lesquels on les constate, ou pour s'en defaire, en les livrant au commerce, avant que leur valeur ait decru sous le progres du mal dont ils com-mencent � etre atteints, le veterinaire sanitaire a besoin d'asseoir son jugement sur une base plus solide; le simple soupgon ne saurait lui suffire pour le deter�miner � reclamer de Fautorite l'application de me-sures rigoureuses, comme celle de I'abatage d'office, d'animaux qui sont en plein rapport pour les per-sonues qui les exploitent. En de pareils cas, on ne pent faire fonctionner I'action sanitaire avec toutes ses rigueurs, qu'autant qu'on a pour soi la certitude, e'est-a-dire qu'on pent faire la demonstration, par l'autopsie, de la justesse du jugement prononce pen-
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324nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COUUS DE PATHOLOGIE COMPA�l-IE.
dant la vie. En sommes-nous l� pour le diagnostic de la phthisie bovine � sa premiere periode ? Non � coup s�r, et nous pouvous I'avouer sans que cela implique, comrae M. Lydtin serable Tadniettre, que notre pers-picacite diagnostique est inferieure, sur ce point, a celle des eleveurs et des proprietaires de bestiaux. Les roles, de part et d'autre, sont differents :
Les proprietaires peuvent se coutenter, pour regier leur couduite, d'uue simple induction, et s'ils se trorapent, ils ne portent dommage, apres tout, qu'� eux-memes. Les veterinaires out une responsabilite plus haute et plus etendue qui leur commande de n'a-gir qu'� bon escient, e'est-a-dire quand la certitude leur est acquise de l'existence de la maladie, accusee par des symptomes qui ne laissent aucun doute dans I'esprit.
La necessite deraeure done, malgre tout ce que Ton sait dej�, de faire de nouvelles recherches cliniques et experimentales pour reunir tons les elements d'une solution complete du probleme de la phthisie bovine, � sa premiere periode. Les investigations portees sur I'appareil ganglionnaire lymphatique exterieur, I'ap-preciation thermometrique des oscillations de la tem�perature, l'exameu des urines, au point de vue surtout du microbe specifique qu'elles peuvent conte-nir; I'epreuve par Finocalation, et des urines elles-memes, et des mucosites nasales, et de la salive : voil� autant de moyens dont on pent se servir pour eclaircir cette question si importante de diagnostic. On pourra objeeter, sans doute, que, parmi ces
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APPENDICE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;323
moyens, il en est qui ne sont pas d'uae application facile pour le plus grand nombre des praticiens. Mais il s'agit ici d'une solution scientifique du probleme pose et, pour l'obtenir, le concours du laboratoire est necessaire. Une fois cette solution trouvee, le clini-cien n'aura pas besoin, pour chaque cas individual, de refaire toute la serie des recherches � l'aide des-quelles le diagnostic scientifique de la phthisie aura ete etabli. Ces recherches ayant donne une signifi�cation precise et rigoureuse a queiques-uns des symp-t�mes objectifs de la phthisie, il pourra suffire, dans la pratique, de la constatation de ces syraptomes pour qu'on soit autorise � se prononcer avec certitude sur l'existence de cette maladie. Ainsi, par exemple, la glande de morve a, pour nous, dans le plus grand nombre des cas, une signification absolue, et sa cons�tatation suliit pour qu'on soit en droit d'affirmer le diagnostic qu'elle implique, sans qu'il soit necessaire de recourir, soit � l'inoculation, soit � la culture des matieres du jetage pour mettre en evidence la na�ture de la maladie. Ainsi en sera-t-il, sans doute, des tumeurs ganglionnaires dans la phthisie debu�tante. Lorsque I'etude scientifique de cette maladie aura etabli un rapport certain entre ces tumeurs et les lesions tuberculeuses viscerales, elles auront tout autant de valeur pour le diagnostic clinique que la rjlande pour la morve, et ainsi l'une des plus grandcs difficultes de la pratique se trouvera resolue.
M. Lydtin a donne dans son Memoire des develop-pements assez etendus a la question de I'anatomie
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COURS DE PATHOLOGIE COMPARltE.
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pathologique de la phthisie bovine. Depuis la decou-verte de la nature parasitaire de la tuberculose, les caracteres anatomiques des lesions, auxquels on s'est tant attache autrefois, quand on ignorait la condition necessaire d'ou ces lesions procedaient, n'ont plus qu'un interet secondaire. Aussi bien, du reste, M. Lydtin, apres les avoir longuement exposes, arrive � cette conclusion qu'il emprunte � Cohnheim, et qui est aussi celle que j'ai formulee dans mes Legons, laquo; que les lesions de la phthisie pommeliere ne pre-sentent de specilicite reelle, de caracteres reellemenl distinctifs, ni dans leur siege, ni dans leur forme, ni dans leur volume, ni dans leur couleur, ni dans leur marche, ni enfin dans leurs elements histologiques.
laquo; Le vrai criterium de cette maladie doit etre recher�che dans I'irritant qui la determine, qui provoque son developpement. raquo;
La question se trouvant ainsi simplifiee, je vais me borner � extraire de ce chapitre ce qui me parait devoir etre le plus utile pour Teclaircissement du diagnostic de la phthisie � sa periode la plus obs�cure, celle du debut.
L'importance des indications dounees � ce point do vue par les alterations du Systeme ganglionnaire lym-phatique ressort de leur frequence. laquo; Ce n'est que dans des cas exceptionnels que ces alterations font defaut dans les ganglions lymphatiques de la tete, du cou, de la poitrine ; dans les sous-maxillaires, les pa-rotidiens, les cervicaux superieurs, moyens et infe-rieurs; les prescapulaires (glandtike cervicales superfi-
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APPEND ICE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;327
dales horn.), les parietaux superieurs et inferieurs [glandnlce Sternales) du thorax [tglandulce parietales mperiores et inferiores thoracis horn.). On rencontre ces lesions egalernent dans les glandes mediastines anterieures et posterieures, ainsi que dans les bron-chiques.
Voici maintenant deux faits cliniques qui prouvent les rapports de la tuberculose gauglionnaire exlerieure avec la tuberculose viscerale :
Une vache fortement amaigrie a succombe dans un etat de gestation avancee apres avoir, Tannee precedente, souffert d'une violente affeclion de poitrine, avec tumefaction consi�derable de la thyroi'de et de tout le voisinage du larynx; une amelioration dans fetat de sante de cette bete etait survenue depuis lors. A son autopsie, on a trouve dans le poumon un nombre considerable d'indurations, les unes petites, les autres volumineuses. Get organe etait, en outre, le siege de foyers purulents, renfermanl du pus liquide et une masse concrete et sablonneuse. A la surface interne de la trachee, il existait, chez cette vache, trois ulceres fort etendus, en pleine suppuration, dont Tun envahissait longuoment le la�rynx. (Schurber, Archives suisses de medecine veterinaire, 1847. Zurich.)
Caspar Krauer (memes Archives, 1851) cite le cas d'une vache phthisique qui, pendant qu'elle mangeait, grattait le sol de Tun et de lautre pied de devant, deglutissait difficile-ment et salivait beauroup. eile ne toussait que rarement. A son autopsie, on a trouve des tubercules dans la muqueuse de la trachee.
An point de vue de I'hygiene publique hurnaine, un fait tres interessant est siaiuale dans le Memoire de M. Lydtin : c'est la presence de lesions tuberculeuses dans las mamelles des vaches laitieres. M. le profes-
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seur Degive, de l'Ecole veterinaire de Bruxelles, et, M. Van Hertsen, inspecteur de l'abattoirde cette ville, ont fait de cette question l'objet d'un memoire qu'ils ont presente � l'Academie royale de medecine de Bel-gique.
Des faits du meme ordre ont ete constates en Suisse, dans le duche de Bade, dans le royaume de Saxe,et il en est fait mention dans les publications veterinaires de la Prusse.
La tuberculose des mamelles donne lieu � la forma�tion, dans leur tissu, de nodosites avec lesquelles doit coincider la tumefaction des ganglions de la region de l'aine. On comprend l'interet quis'attache l'ins-pection sanitaire des mamelles � ce point de vue, car les chances de la transmission de la tuberculose par l'usage du lait sont d'autant plus grandes, que ce li�quide pent etre infecte plus directement par la pullula-tion de l'element de la virulence tuberculeuse dans les mamelles elles-memes.
Les lesions tuberculeuses ont ete aussi rencontrees dans les muscles, dans les os et dans les articulations. D'apres le Dr Sch�tz, de l'Ecole veterinaire de Berlin, les nodules tuberculeux des muscles auraient leur siege dans la substance intermusculaire; et bien sou-vent on trouverait, chez les animaux atteints d'une phthisie avancee, des productions tuberculeuses dans les glandes lymphatiques intermusculaires : laquo; altera�tion, dit-il, qui passe frequemment inapergue raquo;.
Voil� des faits anatomiques dont il faut se souvenir et surtout s'inspirer quand il s'agit de resoudre la
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AVPENDICE.
grave et delicate question ds savoir si les viandes d'un animal reconnu tuberculeux par les lesions viscerales peuvent etre livrees � la consommation. Leur bei as�pect exterieur ne saurait etre considere comme la ga-rantie de leur innocuite, puisqu'elles peuvent receler des lesions tuberculeuses pour la constatation des-quelles I'inspection microscopique est necessaire.
Mais je reviendrai sur ce grave sujet dans la suite des developpements que comporte la question que j'ex-mine, de concert, ici, avec M. Lydtin.
Dans quelle proportion la phthisic pommeliere s'at-taque-t-elle � la population bovine?
M. Lidtin a rassemble, sur ce point, des donnees statistiques qui presentent un grand interet pour Ihy-giene publique humaine.
Le premier fait qui ressort de ces documents, c'est que la phthisic de l'espece bovine est une maladie de tous les pays : laquo; on la rencontre en Russie, en Suede, en Norwege, dans le Danemark, en Allemagne, en Hollande, en Belgique, en France, en Espagne, dans le Portugal, en Autriche-Hongrie, en Grece, en Algerie, en Australie, dans la Nouvele-Zelande, dans les Principautes Danubiennes, dans les Etats-Unis du Nord et dans le Canada. D'apres Krabbe, eile se-rait presque inconnue en fslande; et d'apres Stens-troom, eile est tres rare dans les conlrees polaires, dans le uord de la Norwege et de la Suede, dans la Laponie et la Finlande, quoique cependant les betes bovines de ces contrees soient faibles et souvent ra-ebitiques. raquo;
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Mais si la phthisic est, chez l'espece bovine, une maladie de tous les pays, sa frequence s'accroit avec l'elevation de la temperature; laquo; les betes bovincs de la Hollandc et de la Suisse contractent souvcnt la phthisic pommclierc si on les transporte en Espagnc, et presque toutes cclies que l'on cnvoie des deux pre�miers de ces pays dans les colonies de la zone equato-riale subissent les attcintcs de cettc maladie.
laquo; En Italic, au dire de Perroncito, la phthisic bo�vine constitue pour Tagriculture un veritable fleau. En Algeric, eile nc serait pas moins repandue qu'en Italic.
laquo; D'apres Flemming, eile se repandrait de plus en plus en Anglcterre. raquo; (Diet, de Zundel.)
Somme tonte, d'apres les resultats statistiques, laquo; un climat froid serait moins favorable au developpement et � la propagation de la phthisic sur respecc bovine qu'un climat chaud ou tropical raquo;.
Voici maintenant quelques chiffres qui peuvent don-ner une idee de la mesure dans laquelle la phthisic s'attaque � la population bovine dans quelques pays o� Ton a pu les recueillir.
D'apres le releve de Goering sur l'etat sanitaire de la Baviere, la proportion des animaux phthisiques aurait etc, en 1877, de 1,62 p. 100 et, en 1878, denbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; \
1,61.
Mais ces chiffres, d'apres Goering lui-meme, sont au-dessous de la realite parre que l'existence de la maladie n'est pas declaree dans tous les cas o� eile se manifeste.
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API'ENDICE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 331
Les chiffres recueillis par Adam a I'abattoir d'Augs-bourg en 1879, 1880 et 1881, ne different pas beau-coup des premiers : 2.92 p. 100, 2,24, 2,00. A Mu�nich, en 1875, 1,15, p. 100; � Strasbourg, en 1880, 1,6 p. 100. Dans cette meme annee, 2,4 p. 100, � Mulhouse et 2,5 � Munich.
La repartition faite suivant Tage montre que c'est surtout sur les animaux les plus ages que la phthisic a ete constatee le plus frequemment. Tandis que sur les animaux au-dessous d'un an, la proportion des malades n'est que de 0,02 p. 100; eile est de 7,1 pour les animaux �ges de un a trois ans; de 35,5 pour ceux de trois � six ans; et enfin de 59,2 p. 100 pour ceux de plus de six aus.
line autre repartition basee sur les conditions sexuelles etablit que la proportion des vaches phthi-siques est plus grande que celle des boeufs (5,30 p. 100 contre 1,13).
laquo; II resulte de ces chiffres :
laquo; Qu'environ 2 p. 100 des animaux amenes aux abattoirs des differentes villes citees plus haut ont etc reconnus atteints de phthisic pommeliere;
laquo; Que la somme des animaux males reconnus affectes est � celle des femelles dans la proportion de 1 a 3;
laquo; Que c'est dans la categoric des animaux de trois � six ans et au dessus, que se trouve le plus grand nombre de phthisiques;
laquo; Et que les tres jeunes animaux sont presque exempts de cette maladie. raquo;
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Toutefois ce serait une erreur de mesurer, d'apres les chiffres releves dans les abattoirs. la frequence de la phthisie dans la population bovine d'un pays, car ce sont surtout les animaux ages relativement, c'est-a-dire de trois � six ans, qui constituent la rnajorite de ceux que Ton abat pour la boucherie, tandis que les plus jeunes, qui forment les trois cinquiemes de la population sont reserves. Cela donne I'explica-tion du chifTre plus eleve des cas de phthisie sur le groupe des animaux abattus que sur la population bovine prise en masse.
M. Lidtin a rassemble dans son Memoire un cer�tain nombre de renseignemeuts sur la frequence de la phthisie tuberculeuse dans les autres especes domes-liques.
Apres le boeuf, c'est le pore qui serait le plus sus�ceptible de conlracter cette maladie. Cela ne ressort pas, cependant, de la frequence des cas constates dans les abattoirs. De fait, sur les 78,000 pores qui out ete abattus annuellement dans le grand-duche de Bade, de 1874 � 1882, la moyenne des animaux re-connus phthisiques n'a ete que de 22, ce qui fait en�viron 0,02 p. 100. Mais la phthisie est plus fre-quente sur I'espece porcine que ce chifTre si faible ne I'implique. Si les cas en sont rares dans les abattoirs, c'est que la phthisie n'etant pas, comme chez le boeuf, compatible avec I'engraissement, les pores atteints de cette maladie n'y sont pas conduits; on les tue clan-destiuement et pour dissimilier la qualite inferieure de eur viande, on I'utilise a la fabrication des saucissons.
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APPENDICE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;333
La phthisie ne parait pas etre uue maladie du mou-ton. Les faits cliniques rapportes par les auteurs, comme exemple de phthisie tuberculeuse daus cetle espece, sout d'uue extreme rarete et, selou tout es probabilites, on s'est mepris sur leur nature, oar il y a de grauds caracteres deressemblanceexterieure eutre les nodosites tuberculeuses et celles qui out pour noyaux soit des oeufs, soit des larves d'helminthe. Ce-pendaut, d'apres les faits rapportes plus loin, I'orga-nisme du mouton semble constituer pour I'elenieut vivant de la tuberculose un milieu de culture assez favorable, car l'inoculation de la matiere tuberculeuse se moutrerait efficace sur lui dans la proportion de 50 p. 100. (V. p. 350.) Mais dans la pratique, la tuber�culose est tres rare � observer sur le mouton et, con-sequemment, sa viande doit 6tre consideree comme saine au point de vue de cette maladie.
Quelques cas de tuberculose out ete signales sur des chevres, mais trop exceptionnellement pour qu'on puisse dire que les animaux de cette espece sont sujets � cette maladie et pour qu'il y ait lieu de s'en preoc-cuper au point de vue des mesures sanitaires.
II en est de meme du cheval; les quelques faits tres rares de tuberculose chez cette espece, rapportes par les auteurs, prouvent, par leur rarete meine, qu'ils ne constituent que des accidents exceptionnels, sans consequences redoutables pour I'hygiene publique.
Chez le lapin, la phthisie que Ton appelle spontanec n'est pas rare a constater, mais les cas que Ton en rencoulre ne sont pas en rapport de nombre avec Tap-
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334nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;CODBS DE PATHOLOGIE COMPARfiE.
titude, si bien demoatree, qui appartieiit � eel auimal de contracter experimetitalement la maladie. Comme eile est susceptible de revetir chez lui des caracteres d'exlreme virulence, aiiisi qu'en temoigne une expe�rience fameuse communiquee par M. Colin � l'Aca-demie de medecine en 1879, on ne saurait trop se premunir contre les dangers de l'usage alimentaire de la viaude provenant de lapins tuberculeux.
II n'y a pas jusqu'aux gallinacees chez lesquels des cas de phthisic ontefe signales; au rapport de GcEring, que cite M. Lydlin dans son Memoire, la tuberculose aurait ete constatee sur trente poules d'une seule ex�ploitation. La contamination, d'apres Gcering, aurait eu lieu par rintermediaire du coq.
Ce ne sont encore l� que des cas exceptionnels qui ne sauraient faire raettre en suspicion, au point de vue de la tuberculose, la viande de la volaille.
Somme toute, le fait principal qui me parail res-sortirdel'eusembledes documentsreunis par M. Lydtin dans la premiere partie de son Memoire, c'est que, de toutes nos especes domestiques alirnentaires, cellequi est la plus exposee � la tuberculose est l'espece bovine et que, consequemment, c'est sur eile quedoit se con-centrer l'action sanitaire, pour preveiiir, le plus possi�ble, les dangers de l'iufestation de l'espece humaine par l'usage de viandes susceptibles, en raison de leur provenance, de renfermerles germesde celte maladie.
Apres ces considerations preliminaires, M. Lydtin traite successivement les trois questions suivantes, dont l'interet ressort de leur libelle meine :
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APPEND1CE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 835
I.nbsp; (( Quelle est rinfluence de l'heredite sur la pro�pagation de la phthisie pommeliere?
II.nbsp; laquo; Quelle est rinfluence de la contagion sur la propagation de la tuberculose?
III.nbsp; laquo; Quelles sont les mesures preventives aux-quelles on doit avoir recours pour empecher I'influence nuisible que pent avoir l'utilisation de la viande et du lait des betes atleintes de phthisie pommeliere? raquo;
Je vais resumer ici, par une analyse sommaire, tons les documents que M. Lydtin a reunis pour I'eclair-cissement de ces importantes questions.
1deg; L'in�uence de Ihbredite. � Cette question est de cedes qui pouiraient 6tre resolues experimentalement en zootechnie; mais il ne parait pas que, malgre sa grande importance, qu'on pent appeler sociologique, eile ait ete l'objet de recherches suivies instituees, tout expres, en vue de sa solution rigoureuse. Les faits que M. Lydtin a rassembles dans sa these sont presque exclusivement des faits d'observation, qui ne sauraient etre aussi rigoureusement demonstratifs que ceux qu'on obtiendrait par des experiences o� toutes les conditions du probleme seraient rigoureusement determinees.
La croyance � l'heredite de la phthisie est tres an-cienne et, d'�ge en �ge, eile est restee vivace dans les esprits, appuyee sur des faits d'observation qui paraissent tres concluants. Ainsi, par exemple, en zootechnie, les fails sont assez nombreux de manifes-
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tations de la phthisie sur des veaux et des gorets issus de parents attaints de cette maladie. Envoici un, entre autres, emprunte par M. Lydtin�un ouvrage du dernier siecle, L'Encyclopedie d'economie ou Systeme general d'economie politique, domestique et rurale, par Kounitz (Berlin, 1778) : laquo; Apres avoir subi pendant bien des annees des pertes considerables dues � l'em-ploi d'animaux phthisiques en qualite de reproduc-teurs, un proprietaire est parvenu � se debarrasser du mal qui ravageait depuis lougtemps ses etables, en vendant ses taureaux reproducteurs et en ecartant pen � peu de la reproduction les vaches qui avaient servi jusqu'alors raquo;.
Mais des fails de cet ordre, qui sont assez nombreux dans les ecrits veterinaires de lous les pays, n'ont pas une signification rigoureuse au point de vue de l'heredite, parceque, en pareil cas, la question se pose de savoir, quand la phthisie s'attaque aux produits, si eile precede chez eux de rinlluence hereditaire, ou de leurs rapports de contact avec leurs parents.
La demonstration scientifique de la transmission hereditaire ne pent etre donnee par les faits de la pra�tique qu'autant que Ton constate les lesions de la tuberculose soit sur les foetus, soit sur les nouveau-nes.
Voici sur ce point le resume des documents que ren-ferme le Memoire de M. Lydtin : laquo; Sur 160,000 veaux soumis, en moyenne, � rexamen de Tiuspecteur de service � l'abattoir de Munich, on a constate la phthisie pommeliere :
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APPEND1CE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 33quot;
En 1878 sur 2 b�tes;
1879nbsp; nbsp;� 1 �
1880nbsp; nbsp;� 0 �
1881nbsp; nbsp;� 0 �
1882nbsp; nbsp;� 2 �
Ceschiffres n'autorisent pas sans, doute, � conclure que la phthisie dans I'espece bovine n'est hereditaire que tres accidentellement. II se pent, en effet, que le tres petit nombre des jeunes animaux de cette espece, reconnus phthisiques dans les abattoirs, depende de ce que I'influence hereditaire a ete assez puissante soit pourempecher revolution de l'ovule infecte, soit pour determiner I'avortement, soit enfin pour determiner la mort du nouveau-ne dans un bref delai, apres la naissance. Mais quoiqu'il en puisse sect;tre des causes de la tres grande rarete des cas de phthisie chez les jeunes animaux. de I'espece bovine, quoique I'orga-nisme de cette espece soit un terrain favorable an developpement de la raaladie, le fait existe, il esl constant; tons les experimentateurs I'ont constate et, au point de vue de l'hygiene publique humaine, son importance est considerable.
Je reprends l'expose des faits cliniques qui peuvent etre invoques � l'appui de l'heredite de la phthisie, ou autrement dit de l'infection de l'ovule et du foetus :
laquo; K�nig, veterinaire d'arrondissement, a signale plusieurs fois la presence de tumeurs de nature tuber-culeuse sur l'estomac et l'epiploon de veaux �ges de six � huit jours.
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laquo; M6mes observations out ete faites par le medeciu-veterinaire Stirnimanu. raquo; {Archives Suisses, 1851.)
Voici un fait pris entre bon nombre d'autres, dans lequel les lesions pommelieres ont ete constatees sur un veau mort pen d'heures apres sa naissance et issu d'une mere affectee de phthisie :
�ne vache da sept ans, de taille moyenne, presentait les sympt�mes suivants rrespiralion difficile, toux frequente et penible, bruit de frottement a rauscultation, son mat a. la percussion. Amaigrissement general: fievre hectique.
Gelte vache accouche d'un veau tres maigre, du poids de vingt-cinq livres et d'une faiblesse teile qu'il ne pouvait se lenir debout. Tons deux moururent quarante-huit heures apres la parturition accomplie. Leur autopsie fit constater les lesions suivantes :
Chez la vache, excroissances luberculeuses sur la plevre parietale et pulmonaire, en parlie grises ou jaunes tirant sur le rouge, d'aspect charnu et de consistance molle; en partie jaunes, solides et cretacees. Le parenchyme pulmonaire etait parseme d'une infinite de tubercules de volume variable, dont les uns de consistance molle, les autres plus durs. Un certain nombre avaient subi la transformation caseeuse; d'autres l'infiltratiou cretac�e.
Chez le veau, les muscles etaient, comme chez la vache, decolores, flasques, infillres de serosite; tous les tissus etaient anemiques. Le pericarde renfermait environ 100 grammes d'une serosite claire et jaun�tre; le peritoine presentait, dans le voisinage du rein droit, cinq excroissances rouge p�le et molles dont le volume variait de celui d'une feve � celui d'un ceuf de poule.
M. Adam, d'Augsbourg^ fait suivre cette observa�tion des reflexions suivantes :
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APPENDICE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 339
Bien que la tuberculose debute rarement, comme dans ce cas, pendant la vie foetalej il est de notori�t� qu'une vache tuberculeuse transmet a ses descendants la predisposition a contracter la phthisie pommeliere- Ge fait est une nouvelle preuve de la transmissibilite de cette maladie et doit engager les eleveurs se montrer tres circonspects dans le choix des reproducteurs (1857).
Autres faits :
En 1878, on trouva un veau tuberculeux h l'abattoir de Nu�remberg.
De 1878 a 1881, cinq cas de tuberculose out ete constates a l'abattoir d'Augsbourg.
En 1880, Butscher, de Brack (Oberbayern), a montre le pounaon tuberculeux d'un veau de lait dans une des seances de l'Association des veterinaires de Munich.
Virchow a mentionne l'existence de lesions tuberculeuses dans l'ovaire et les trompes d'une velle.
Semmer a relate cinq cas de tuberculose pulmonaire constatee par lui sur des foetus ou embryons de betes bovines, Le premier de ces sujets elait un embryon �ge de trois mois, rejete par ravortement d'une vache tuberculeuse. Semmer a constate dans le poumon de cet embryon plusieurs nodules de petit volume, qui consistaient en agregats de cellules sphe-riques et fusiformes, avec ramifications filamenteuses.
Le deuxieme cas s'est pr�sente sur un embryon de six mois rejete par une vache tuberculeuse. fie poumon de cet embryon presentait de nombreux nodules blancs de la forme d'un pojnt et quelquefois de la grosseur d'une tete d'epingle. Ces nodules avaient Fapparence de sarc�mes � cellules sphe-riques; celles-ci etaient par place entassees a tel point que la trame conjonctive paraissait completement absente. Ges amas de cellules peuvent etre consideres comme le point de depart d'une formation tuberculeuse.
Le troisieme cas, mentionne par Semmer, a ete constate sur un foetus de huit mois, provenant d'une vache tubercu-
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COURS UE PATHOLOGIE COMPARliE.
leuse. Le poumon renfermait des nodules isol�s, d'un volume un pen plus considerable que ceux des deux cas precedents, mais ayanl une structure analogue.
Enfin, dans les deux derniers cas, il s'agissait de deux veaux nouveau-nes provenant de vaches tuberculeuses. Les poumons de ces deux veaux �taient parsemes de nombreux nodules de volume variable, donl les uns etaient en voie de formation, tandis que les autres etaient d�j� caseifies ou cal�cifies.
Ces cinq fails, dit Semmer, prouvenl que la tuberculose pent dejti raquo;e developper pendant la periode embryonnaire el quelle peut etre transmise par voie d'heredite.
Jessen a trouve les deux poumons d'un foetus de veau de trois mois, rejete par avortement, farcis de tubercules re�cants.
Dans la dix-huiti6me asseinbl�e generale de I'Association des medecins veterinaires du grand-duche de Bade, siegeant � Fribourg en 1882, Fischer, de Wolfach, a mentionne le fait d'une genisse, d'un taureau et d'un veau de seize jours, qui appartenaient � une etable de Birkendorf, o� ils e(aient nes d'une vache turberculeuse. Ces trois produits etaient alteints de la maladie de leur mere. Fischer a fait specialement re-marquerqu'ilexistait, dans le poumon du veau, un amas de granulations miliaires grises et jaunes.
Muller, de l'Ecoleveterinaire de Berlin, a donn� la relation de l'autopsie d'un veau ne d'une vache tuberculeuse, sur la-quelle on avait constate les lesions de la tuberculose et notam-ment dos nodules ayant pour siege les tissus sereux, et des tubercules dissemines dans les poumons. Sur le veau, qui fut nourri pendant deux mois a. l'Ecole veterinaire et abattu en-suite, on trouva les lesions suivantes : sur la plevre costale, plusieurs nodules du volume d'un grain de millet � celui d'un grain de chenevis, peu solides et blanch�tres. Nodosites sem-blables sur la plevre pulmonaire. Glandes bronchiques tume-fiees, consistantes, d'une couleur gris blanc ii la surface des coupes d'oii suintait un liquide en petite quantile. Nodosites multiples k la surface parietale du pericarde; tubercules sur
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APPENDICE.
341
le grand Epiploon. Tumefaction des glandes mdsenteriques et bronchiques et presence dans leur trame de masses casei-formes d'un Wane jaun�tre. Nodules caseeux dans le paren-chyme du foie; degenerescence caseeuse des ganglions lym-phatiques; rate farcie de tubercules. Nature tuberculeuse de toutes ces lesions reconnue par I'examen microscopique.
M�ller a conclu de ce fait que la phthisie pommeliere est une tuberculose et qu'elle se transmet de la mere k sa proge-niture qui, au moment de sa naissance, peut presenter non seu-lemgnt de la predisposition, mais meme des lesions patentes de la tuberculose.
Voici maintenant un cas remarquable qui tend � prouver la transmission de la phthisie du pere au des�cendant :
Un fermier eleveur qui, depuis douze ans, n'avait observe aueun cas de pulmonie et de tuberculose dans son betail, acheta un taureau dans le Simmenthai et s'en servit pour la saillie de dix de ses vaches. Le taureau fut reconnu atteint da la phlhsie pommeliere et abattu de ce chef; tous les veaux des dix vaches fecondees par ce reproducteur, et qu'on a pu suivre assez longtemps, ont du etre abattus pour cause de cette maladie. Les premiers sympt�mes se d^clarerent, chez la plupart, au moment oil ils passerent k Tage adulte. (Zippelius. Wochenschrift d'Adam, 1876.)
M. Lydtin donne, apres ces citations, une longue enumeration des auteurs veterinaires de tous les pays qui ont recueilli des fails demonstratifs de l'heredite de la tuberculose.
D'apres Goring, dans presque tous les rapports de l'annee 1877, les medecins-veterinaires d'arrondisse-ment de la Baviere ont conclu, presque sans reserve, a la transmission hereditaire de la tuberculose des
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betes � comes, � propos de cent vingt-trois cas men-tionnes. Sur ces cent vingt-trois cas, la transmission se serait effectuee soixante fois par la mere et qua-rante-trois fois par le pere.
M. Gerlach attribue � l'heredite une teile action que, suivant lui, il suffit de quelques reproducteurs tuberculeux dans un chaptel pour que toutes les betes en soient infectees, si Ton s'obstine � n'avoir recours pour le maintien de la population bovine de pareilles fermes qu'� la reproduction in and in (1875).
Cette opinion est partagee par le Dquot; Johne, qui l'appuie sur de nombreuses observations faites par lui personnellement (1883).
Fischer, de Wolfach, a communique � l'assemblee gen6rale des m�decins-veterinaires de Bade, tenue � Fribourg en 1883, le fait tres interessant de la trans�mission de la tuberculose dans une meme famille jusqu'� la troisieme generation. Dans l'espace de cinq ans, on avait du abattre dans une m6me Stable, pour cause de tuberculose, deux vaches de la premiere generation, issues d'une mere tuberculeuse; deux vaches de la deuxieme generation et une genisse de la troisieme.
II est digne de remarque que la phthisic ne se ma�nifeste gen6ralement sur les animaux issus de parents tuberculeux qu'� un �ge relativement avance, c'est-�-dire apres la troisieme anuee. La statistique en te-moigne. Ici un probleme se pose : Les animaux tuberculeux transmettent-ils � leurs descendants le germe de leur maladie, dont revolution serait suspen-
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APPENDICE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;343
due par suite de conditions qui ne sont pas encore determinees? Ou bien est-ce seulement la predispo�sition � contracter la maladie qui serait transmise � leurs descendants par les animaux malades?
Ces deux opinions out leurs partisans; M. Lydtin les examine et les discute. Mais comme ici les ele�ments de la solution experimentale font encore defaut, je m'abstiendrai de suivre M. Lydtin dans les consi�derations qu'il expose. Aussi bien, les assertions, quelle que soit I'autorite deceux qui les formulent, ne sauraient servir d'assises solides � la science; ou, pour mieux dire, la science ne saurait etre consideree comme constituee sur un point determine, taut que la certitude experimentale n'est pas acquise et que Ton ne peut avoir sur la nature des choses que des idees a priori.
En definitive, il parait etabli par les faits d'obser-vation :
1deg; Que la tuberculose est hereditaire dans nos especes domestiques, tout particulierement dans I'es-pece bovine;
2deg; Que les deux geniteurs sont aptes � la trans-mettre � leurs descendants, mais avec une puissance inegale, l'action de la mere etant de beaucoup predo-minante surcelle du pere;
3deg; Et que, d'une maniere generale, ce n'est pas dans les premieres annees de la vie des jeunes que se developpe la tuberculose dont ils peuvent avoir requ le germe de leurs ascendants.
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34inbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; CO�RS DK PATHOLOGIE COMPARfiE.
II. lt;c Quelle est riufluence de la contagion sur la propagation de la tuberculose? raquo;
Pour l'eclaircissement de cette question qui touche de si pres et d'une maniere si etroite aux interets de la sante publique, M. Lydtin a rassemble dans son Memoire tons les documents qu'il a pu trouver dans les publications de tons les pays et, plus particuliere-ment dans celles de l'Allemagne. Js vais lui emprunter tout ce qui pourra me servir � completer et � agrandir la demonstration que je me suis proposee dans mes lemons : celle de la contagiosite de la tuberculose d'une maniere generate, et, plus particulierement, par l'usage de substances qui peuvent servir d'excipients aux elements de la virulence.
Les faits reunis par M. Lydtin sont de deux ordres : les faits cliniques et les faits d'experimentation.
Les premiers out acquis aujourd'hui une plus grande signification qu'ils n'en avaient autrefois, parcequeles resultats de rexperimentation, qui sont venus les con-firmer, leur out donne un caractere de certitude qui leur manquait. De fait, sur le point fondamental de la contagiosite de !a tuberculose, les opinions demeu-raient divergentes faute pour les observateurs, qui avaient trouve les elements de leur conviction dans les faits observes, de pouvoir les reproduire � discretion et donner ainsi la preuve de la justesse de leurs affirmations. Les opinions, en pareilcas, nepouvaient etre que des croyances; on croyait parce qu'on avait vu; mais ceux qui ne s'etaient pas trouves dans les m�mes conditions favorables d'observalion, pouvaient
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APPKND1CE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;345
ne pas se croire obliges de partager des convictions donl les elements leur manquaient. C'est de cette difficulte de faire la preuve que derivent les grandes incertitudes dont l'histoire de la medecine temoigne presque toutes les fois que les questions de contagion se sont posees devant eile. L'observation reduite � ses seules ressources s'est trouvee presque toujours impuissante � donner la solution complete des pro-blemes.
Ainsi en a-t-il ete pour la question de la phthisie des vaches.
En 1774, le Dr R�hling disait dans les Dissertations dutilite generate de Goettingue que laquo; le mal se trans-met aux animaux sains, et que la transmission a lieu par le contact des animaux qui, les uns � c�te des autres dans I'etable, se lechent reciproquement ou respirent Fair qui a dej� passe par le poumon des animaux malades raquo;. Kr�nitz, dans son Encyclopedie (Berlin 1787), n'est pas moinsaffirmatif : laquo; La maladie est contagieuse et se communique d'un animal a I'autre par contact. �. raquo;
Mais voici Fromage de Feugre qui emet une asser�tion contradictoire dans le Dictionnaire de Rozier : laquo; Les hommes de l'art sont assez d'accord que cette maladie n'est pas contagieuse, quoique quelques pro-prietaires pensent differemment. Huzard, qui a fait de la potnmeliere une etude speciale, � la fin du siecle dernier, conlredit l'affirmation de Fromage de Feu�gre : laquo; �eaucoup de veterinaires considerent cette
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346nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COUBS DE PATHOLOGIE COMPAB�E.
maladie des vaches comme contagieuse, de m^me qua certains medecins le croient de la phthisie des hommes. raquo;
Pour Spinola, laquo; la contagion est une cause possible, mais non frequente, et dont I'action demeure dou-teuse raquo;. (Manuel de pathologie et de therapeutique vete-rinaires, Berlin, 1858.) Cruzel s'est declare cate-goriquement pour la contagion, en s'appuyant sur les faits nombreux que Ton pent observer dans la pratique rurale.
M. Lafosse demeure indecis, malgre les experiences de Villemin qaiparaissent favorables � l'opinion de la contagiosite.
En Suisse, Zangger, directeur de l'Ecole veterinaire de Zurich, est tres affirmatif � l'endroit de la conta�gion de la pommeliere.
Apres ces citations M. Lydtin formule son opinion de la maniere suivante :
laquo; La Iransmission de la phthisie pommeliere peut avoir lieu de differentes manieres : le principe mor-bifique peut arriver dans I'organisme par voie respi-ratoire ou bien par voie digestive; I'air inspire ainsi que les fourrages ou boissons peuvent en etre les vehicules; ce contage peut egalement 6tre transplante par la voie des organes genitaux (en cas d'accouple-ment) ou par des voies accidentelles, comme nous le constatons si la transmission a lieu par des plaies accidentelles ou intentionnelles. raquo;
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APPENDICE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 347
A l'appui de son opinion sur la contagiosite de la tuberculose, M. Lydtin rapporte un certain nombre de faits qui sont demonstratifs que, dans les conditions multiples realisees par la cohabitation, la maladie pent se transmettre, sans qu'il soit possible, cepen-dant, de faire la part rigoureusemeut determinee de l'une ou de l'autre de ces conditions d'o� la contagion pent proceder. Leurs resultats, c'est la contagion : voil� ce que Ton sait et, au point de vue pratique, ce fait est des plus considerables.
Parmi les observations relatees par M. Lydtin, j'en choisis une o� les choses se sont passees comme si on les avait ordonnamp;es experimentalement; cette observation a ete recueillie par M. Jamm, medecin veterinaire d'arrondissement � Lcerrach, qui 1'a pu-bliee dans les Thier�rztl mittheilungen de Lydtin, 1882.
Sur le territoire de Tannenkirch se trouve une exploita�tion agricole dite Kaltherberg, louee depuis trois ans par un fermier, nomme Gugelmaier, qui tient en moyenne de dix h douze vaches, quelques genisses et un taureau. Tons ces ani-maux se trouvent loges dans line meme etable et appartiennent en partie k la race de Schwyz et en partie � celle de Sim-menthal.
Ce fermier acheta, il y a quatre ans, a Fribourg o� il ven-dait son lait, une vache grise qui commenca a tousser et a maigrir; on l'abattit et Ton constata ququot;elle elait affectee au plus haut degre de la phthisic tuberculeuse, pleurale et pul-monaire. Depuis l'acquisition de cette vache, Gugelmaier per-dit dix autres betes bovines, toutes atleintes de la memo maladie.
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348
COURS DE PATHOI.OGIK COMPAR�E.
Voici comment ces pertes se sont succ6de dans cetle etable :
1880.nbsp; Enjuia, la premiere; septembre, la deuxleme; . Decembre, la troisieme;
1881.nbsp;Septembre, la quatrieme;
1882.nbsp; Mars, la cinquieme; juin, la sixieme; Juillet, la seplieme; aout, la huitiume; Septembre, la neuvieme.
1883.nbsp; Juin, la dixieme.
Chez une autre bete, une genisse grasse qui ful vendue h. unboucher, I'autopsie fit roconnaltre des tubercules en petite quantite.
La maladie debuta, chez toutes ces betes, par une toux legere qui ne se prolongea pas au del� de trois mois. Les vaches pleines commencerent � tousser vers le milieu de leur gestation. Apres la mise base, la maladie s'aggrava en ge�neral rapidement.
Ajoutons, comme fait digne d'interet, que ce fennier a perdu, 11 y aun an, une fille adolescente des suites de la tu-berculose et que la mere de celle-ci, asthmatique depuis long-temps, esl, d'apres les dernieres nouvelles recues, egalement tuberculeuse.
Voici maintenant des fails relatifs � la transmission de la maladie par l'usage du lait provenant de vaches tuberculeuses. Sur ce point, les fails ne sauraient ^tre trop multiplies:
D'apres Jessen, il est etabli que des veaux nourris avec le lait de vaches pommelieres, alorsmeme querafTection est la�tente chez celles-ci, perissent au bout de six mois � un an.
Volkers rapporle les fails suivants a l'appui de l'assertion de Jessen :
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APPENDICE.
349
Lehnert relate dans le rapport annuel sur la medecine ve-tfirinaire, enSaxe, pourl'annee 1876, qu'ilaeu � faire l'autop-sie de deux pores nes de parents sains et vendus tout jeunes comme cochons de lait. Leur nouveau proprietaire, dent les etables etaient infectees de tuberculose, les nourrit avec le lait non bouilli de betes tuberculeuses. Pendant les premiers mois ces porcelets parurent bien portants; mais apres quatre mois, ils commencerenl a tousser, cesserent de pro�fiter et au bout de six mois il fallut les luer. A l'autopsie, on constata chez eux des lesions identiques � celies que Ton constate chez les beeufs atleints de tuberculose.
Bromley, de Lancastre, relate un cas analogue.
Gerlach considere l'infection des veaux par le lait comme la cause la plus importanle, apres l'heredite, de la Iransmis�sion de la tuberculose. On doit, en eflet, attribuer�ringestion du virus avec les aliments et la boisson, le developpement de cette maladie chez un riombre assez considerable de veaux et de cochons qui naissent en bonne sante et perissent plus ou moins victimes de la tuberculose.
A la suite de ces faits recueillis par l'observation, M. Lidtin expose la longue serie de ceux dont on a determine experimentalement la manifestation dans tons les pays, quand M. le professeur Villemin eut donne la preuve par ses experiences fameuses. que laquo; la tuberculose est une maladie infectieuse et speci-fique, susceptible d'etre transmise de l'homme aux animaux et d'un animal � un autre raquo;.
Voici d'abord, d'apres le Dr Johue, auteur d'un tra�vail tres completsur la tuberculose des betes � cornes, le resume des experiences qui out ete entreprises en vue laquo; d'etablir Faction que pouvait avoir sur le con-
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330nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; COURS DE PATHOLOGIE COMPAR^E
somraateur ringestion, par voie digestive, de subs�tances, telles que la chair et le lait, fournies par des animaux tuberculeux :
'V
ANIMAUX
EN EXPERIENCES.
RESULTATS f
AFFIHHATIFS
KEGATIFS
DOUTEUX
1 clieval.........
0,0 p. 100 100,0 raquo;
51,4 raquo;
81,6 raquo; 65,0 raquo; 31,2 raquo; 25,0 raquo; 55,0 raquo; 83,0 raquo; 0,0 raquo;
100 p. 100
0,0 raquo;
42,9 raquo;
15.4nbsp; nbsp; nbsp; raquo;
18.3nbsp; nbsp; nbsp; raquo;
66.5nbsp; nbsp; nbsp; raquo; 75,0 raquo;
44.4nbsp; nbsp; nbsp; raquo;
16.6nbsp; nbsp; nbsp; raquo; 100,0 raquo;
0,0 p. 100 0,0 raquo; 5,7 a 0,0 raquo; 16,6 raquo; 2,3 raquo; 0,0 raquo; 0,0 raquo; 0,0 raquo; 0,0 raquo;
5 veaux .........
35 moutons........
60 pores...........
171 lapins.........
20 chiens..........
9 chats..........
6 cochons d'Inde.. 2 pigeons.........
322 animaux.......
43,5 p. 100
51,1 p. 100
5,0 p. 100
\
Sur ces 322 experiences d'alimentation, 250 faites avec des aliments non cuits ont donne :
47nbsp;p. 100 de resultats affirmatifs;
48nbsp; nbsp; nbsp;� de resunats negatifs; et 3,3 � de resultats douteux.
Dans 62 experiences ou Ton a employe des aliments qu'on avait fait cuire pendant dix a quinze minutes, les resultats donnes ont etc les suivants :
Affirmatifs. 35,5 p. 100. Negatifs. ..64,5 � Douteux... 1 �
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-T;'.1; . .i
APPEND1CE.
.801
Le classement de ces experiences fait d'apres les substances alimentaires employees donne les resultats suivants :
RESULTATS
ANIMAUX
EN EXPERIENCES
AFFIRMATIFS
NEGATIFS
DOUTEUX
117 animaux nour-ris avec de la mati�re tuberculeuse d'une genisse..........,
46 avec la chai r crue de vaches tubercu lenses.............
91 avec du lait de vaches tubercule uses
1nbsp; nbsp;avec du lait de lapin tuberculeux..,
25 avec de la ma tiere tuberculeuse de rbomme...........
33 avec de la ma ti�re tuberculeuse de pore...............
2nbsp;avec de la mattere tuberculeuse de bre-bis................
2nbsp;avec des mati�res tuberculeuses de la-pin................
3nbsp;avec des matieres tuberculeuses de singe.............
5 avec des mati6-res tuberculeuses d'oi-seaux..............
61,3nbsp; p. 100
13,1nbsp; nbsp; nbsp; raquo;
30,7nbsp; nbsp; nbsp; raquo;
100,0nbsp; nbsp; nbsp;raquo;
36,0nbsp; nbsp; nbsp; raquo;
53,0nbsp; nbsp; nbsp; laquo;
100,0nbsp; nbsp; nbsp; raquo;
50,0nbsp; nbsp; nbsp; raquo;
100,0nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;raquo;
100,0nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;gt;.
34.2nbsp; p. 100
86,9 raquo;
09.3nbsp; nbsp; nbsp; raquo; 0,0 raquo;
64,0 raquo;
47,0 raquo;
4,3 p. 100
0,0 raquo; 1,0 raquo; 0,0 laquo;
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En se basanl sur ces experiences et sur les fails cliniques bien elablis, le Dr Johne conclut comme il suit:
1deg; La transmission de la luberculose pent se faire d'animal
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f I .quot;-y-quot; quot;. #9632; - '#9632;' #9632;
niniiiiMimriii ibiuBji
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COUllS UE VATHOLOGIK COMHAUIiE.
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h animal et de I'liomme ;i Tanimal par I'mgestion de subs�tances tuberculeuses, mais ce mode de transmission esl bien plus incerlain que le mode par I'inoculation;
2deg; Les matieres qui transmettent le plus s�rement la tuber-culose par Ingestion digestive sont les matieres prises dans les poumons, sur les plevres et dans les glandes lympha-tiques;
Le lait des animaux. tuberculeux vient, sous le rapport de son action comma matiere contagieuse, se placer k la suite de ces substances;
L'infeclion a lieu moins facilement par l'emploi des matieres tuberculeuses provenant de l'homme que par celles fournies par les animaux;
3deg; L'infection se fait moins facilement par Tingestion de la chair musculaire que paries substances indiquees dans le pa-ragraphe precedent; et cependant eile a reussi dans 76 des cas menlionnes dans le tableau ci-dessus.
4deg; Les veaux, les brebis, les chevres et les pores presentent, comme I'a si bien fait ressortir Bollinger, la plus grande receptivile pour le contage tuberculeux. Quant � la pretendue immunite des carnivores, eile n'est pas aussi prononcee que quelques auteurs ont bien voulu le dire. raquo; (Deusche Zeitschrift f�r Thiermedizin und Vergleichende Pathologie von Frank und Bollinger, 1883.)
m
Les experiences faites par Gerlach lui ont donne les resultats suivants :
Sur 40 sujets de diffcreates especes nourris avec des substances tuberculeuses crues, 35 ont ete infectes;
Sur 35 animaux qui ont ete nourris avec de la viande crue provenant de b�tes atteintes de la phthi�sic pommeliere, 8 ontcontracte la tuberculose;
Et sur 15 qui ont ingere de la matiere tubercu-leuse cuite, 10 sont devenus malades.
Bollinger a constate experimentalement sur des
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_T�. w..nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; -----r^-------------------
APPENDICE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;353
pores que laquo; la consommation prolongee de lait de vaches pommelieres produit chez cet auimal la tuber-culose miliaire raquo;. (Versam lung deutscher oaturfors-cher und Aerzte, 1879.)
La question de la contagion de la tuberculose par I'inoculation sous-cutanee est traitee dans le memoire de M. Lydtin avec de longs developpements, dont une part principale est consacree aux experiences de M. Toussaint. � Comme l'analyse de ce paragraphe ferait double emploi avec ce que j'ai moi-meme longue-ment expose dans mes legons^ je n'en extrairai que ce qui est relatif aux experiences d'inoculation intra-ocu-laire, entreprises par Cohnheim, Salomonsen, H�nsell. Deutschmann et Baumgarten, pour mettre fin aux longs et violents debats auxquels avait donne lieu l'analogie qve preseutait les resultats de I'inoculation tuberculeuse avec ceux de I'inoculation d'une raatiere non tuberculeuse chez les lapins. laquo; Sur des lapins blancs � iris couleur de chair, on put exaetement suivre la marche de revolution tuberculeuse et on constata que, apres une inoculation de 20 � 30 jours, il apparaissail dans cet organe des nodules dont la production fut suivie d'une tuberculose miliaire ge-nerale.
a Baumgarten injeeta dans la chamhre anterieure de l'oeil d'un certain nombre de lapins quelques gouttelettes du sang d'un animal recemment abattu qui presentait des lesions fort prononeees d'une tuber�culose developpee � la suite d'inoculation, et il pro-duisitchez ces lapins une tuberculose oculaire typique
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354nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; COURS DE PATHOLOGIE COMPARfiE.
qui aboutit rapideraeut � une infection generale. Des tuberculoses apparurent, apres trois � qualre semaines, dans le segment inferieur de l'iris, dans le voisinage du point o� avait sejourne le sang injecte. Le nombre des tubercules devint ensuite de plus en plus grand dans l'oeil et finalement survinrent les manifestations et les lesions d'une tuberculose generale qui entraina la mort.
laquo; Ges experiences repetees avec du sang d'animaux sains ne dounerent lieu � aucune manifestation mor�bide. L'injection intra-oculaire de sang septicemique fut suivie d'accidents inflammatoires, mais non pas de lesions tuberculeuses locales ou generales. raquo; [De la contagiositi de la tuberculose, par Baumgarten.)
M. Lydtiu formule ainsi les conclusions qu'il croit
pouvoir deduire et des observations cliniques et des nombreuses experieuces qu'il a rapportees dans son travail:
laquo; La phthisic pommeliere est une maladie conta-gieuse � l'egal de la morve et de la peripneumonie contagieuse.
(i Elle n'est pas seulement contagieuse dans la si�gnification ordinaire du mot; mais eile est egalement transmissible par le lait et par la viande des animaux atteints, si ces matieres sont introduites dans le tube digestif. La contagion joue, dans la propagation de cette maladie, un role plus actif que l'heredite, quinbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; j
bien souvent ne nous explique pas suffisamment la frequence de la maladie. raquo;
La question de l'identite de la tuberculose de l'hoinme
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WTf
APPEND1CE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;3�5
etdecelle des auimaux, aiusi que des rapports qu'elles peuvent avoir entre elles, est traitee par M. Lydtin dans un paragraphs etendu. Apres uu apercu rapide jete sur les Iravaux des medecius du dernier siecle et de celui-ci, il arrive � la belle decouverte de la nature microbienne de la tuberculose, qu'il attribue trop ex-clusivemeut � M. Koch, tandis qu'une part importaute de cette decouverte revient incontestablement � M. Toussaint. Les comptes rendus de l'Academie des sciences en font foi, commeje I'ai demontre dansmes legons.
Quoi qu'il en soil, l'identite de la tuberculose dans toutes lesespeces a ete demontree par Tideulite du ba-cille qui en constitue la nature, car dans quelque orga-nisme qu'il ait ete puise, son ensemencemeut, apres sa culture dans un milieu approprie, doune lieu a la manifestation de la tuberculose dans quelque orga-nisme qu'on le trausplante, si cet organisme est apte � lui servir de milieu de culture.
Rien de mieux justifie done que cette conclusion que M. Koch a tiree de sesrecherches, que laquo; la pre�sence des bacilles dans les masses tuberculeuses ne constitue pas seulemeiit un fait concomitant du pro-cessus tuberculeux, mais qu'elle en est la cause, et que nous devons voir, dans les bacilles, la cause de la tuberculose, cette cause que jusqu'a ce moment on n'avait fait que soupgonner. C'est sous forme d'un pa�rasite vegetal que celle-ci se presente aujourd'hui de-vaut nous. raquo;
Toute reserve faite sur ce qu'il y a d'excessif dans
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336nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COUKS 1)E PATHOLOGIE COUPAR^E.
cette conclusion � l'endroit de la priorite exclusive de l'invention, je considere comrae tres fondee Topinion formulee par M. Koch sur la nature microbienne de la tuberculose et sur le role actif du microbe de cette maladie dans le developpement des lesions dissemiuees qui la caracterisent. Les considerations que j'ai expo-sees dans mes legons sur ce point me dispensenl d'y revenir ici.
Si l'identite de la phthisic tuberculeuse dans toutes les especes est etablie, d'une mauiere definitive, par la decouverte de sa nature microbienne, il n'est que juste de dire que deja les elements de la preuve de cette identite existaient dans la science, grace aux belles experiences de M. Villemin, confirmees par M. Klebs, M. Chauveau, et un grand nombre d'autres experi-mentateurs : lesquelles avaient demontre dej�, de la maniere la plus irrefragable que laquo; des matieres tuber-culeuses provenaut de l'homme provoquent la phthisic pulmonaire chez les animaux, et que cette phthisie, d'origine humaine, pent se transmettre par inocula�tion � d'autres animaux raquo;.
Les exemples si nombreux de transmission de la tu�berculose par inoculation k des animaux de differentes especes � tuberculose humaine ou tuberculose ani�mals � auraient suffi pour faire admettre, par uue induction tres autorisee, que l'homme est soumis a la meme loi et que I'inoculation directe aurait prise sur lui aussi bien que sur les animaux susceptibles.
Mais cette idee n'est plus aujourd'hui � l'etat d'in-duction; eile a regu sa preuve experimentale. Trois me-
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APPENDICE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;337
decins grecs ont pousse l'amour de la science jusqu'� tenter l'inoculation de crachats de phthisique sur un homme, affecte d'une maladie incurable � termi-naison prochaine. Get homme etant mort, trente-huit jours apres l'inoculation, des suites de la gangrene du pied gauche dont il etait atteint, on constata, � son autopsie, dans la partie superieure du poumon droit, la presence de tubercules � la premiere periode de de-veloppement. Deux etaient de la grosseur d'une len-tille, les autres comme des graines de moutarde. Deux tubercules analogues au somrnetdu poumon gauche. Au centre de la face convexe du foie, presence de deux tubercules, Tun de la grosseur d'un pois; I'autre plus petit. � (Dr Johne's. Geschichte der Tuberculose, et Fleming, Veterinarian, 1875 : The Trammissibility of Tuberculose.)
A c�te de cette experience, dont les auteurs ne trouveront pas, sans doute, beaucoup d'imitateurs, M. Lydtin rapporte un fait de transmission de tuber culose � un enfant par l'usage quotidien du lait d'une vache porameliere; le voici :
Un garcon, �ge de cinq ans, d'une forte constitution appa-rente, descendant de parents sains et bien constitues dont les families, du c�te paternel comme du c�te maternel, etaient exemptes de toule maladie hereditaire, fut atteint de la scrofu-lose et est mort, quatre semaines plus tard, des suites d'une tuberculose miliaire des poumons et d'une hypertrophie enorme des (jlandes miisentcriques. En pratiquant l'autopsie de cejeune garcon, on apprlt, par hasard, que pen de temps auparavanl, les parents avaient du faire abattre une vache qui, d'apres les declarations du medecin veterinaire, etait alteinte de phthisie
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#9632;quot;#9632;I
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pommeli�re. Cette vache (Hailbonne laitiere, et pendant long-temps, le garcon avail bu, immediatement apres la mulpion, le lait quelle donnait.
Dans ce cas particulier, le rapport entre la mala-die de 1'enfant et la nature du lait dont il a fait usage doit etre considere comme certain, car Ton pent,, � volonte pour ainsi dire, donner lieu, sur des animaux, � des phenomenes identiques, par l'ingestion de subs�tances infectees par 1'element de la virulence tuber-culeuse.
Si la tuberculose est contagieuse d'animal � animal, eile Test aussi dans I'espece humaine par les rapports des personnes entreelles, surtout les rapports intimes comme ceux de lalcove.Voici quelques faits � l'appui que M. Lydtin cite dans son memoire :
Une jetine fllle tres bien portante, issue d'une famille exempte de tout antecedent de phthisie, se maria � un phthi-sique qui appartenait � une famille dont dej� plusieurs membres avaient succombe � la tuberculose. Quelques annees apres son mariage. cette jeune femme devint malade et eile est morte de phthisie. Le mari, atleint du meme mal, se re-maria. II avail alors 52 ans. Sa seconde femmojouissail d'une sanle parfaiti; au moment du mariage ; ello est egalement morle de phthisie. [Fritzensmed. Annalen.)
Autre fait :
Un jeune homme predispose � la phthisie se maria avee une jeune Hollandaise d'un temperament sanguin el d'une bonne constitution. Quelque temps apres le mariage, la femme perdit sa couleur fraiche el fut alleinte d'une mauvaise toux ; un mois plus lard, eile crachail du sang; le medecin conseilla � la jeune femme de ne plus coucher dans un meme lit avec son mari.
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APPEND1CE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;359
mais eile ref�sa de suivre ce con.laquo;eil et, six mois apres, eile succomba � laphlhisie. La servante qui donna des soins � la fetnme et le domestique qui cependant, par mesure de pru�dence, ne s'etait guere trouve dans la chambre de la malade, sont morts de la meme maladie. (G�llen. Gazette salutaire.)
Les faits de cet ordre sont deveaus, tant ils sont norabreux, de notoriete vulgaire, et il est probable qu'� la longue, ils ne manqueront pas de produire leurs effets pratiques, en faisant predominer dans les esprits la croyance aux dangers qui peuvent resulter, dans les unions matrimoniales particulierement, de la contagiosite de la tuberculose.
De Tensemble de tous les faits reunis dans ce cha-pitre ressort � l'evidence la demonstration que la tu�berculose, maladie commune � Thomme et � un cer�tain nombre d'especes animales, est susceptible de se transmettre, par voie de contagion, d'une espece � une autre; et, dans la meme espece, d'individu � in-dividu, ce qui met hors de doute l'identite de sa na�ture, surquelque espece qu'elle se manifeste.
Les conditions necessaires pour qu'elle se trans-mette soit dans 1'espece^ soit d'une espece � une autre, peuvent se trouver realisees : 1deg; par les rapports de co�habitation, surtout lorsque ces rapports sont etroits et prolonges ; 2quot; par l'introduction dans les voies diges�tives de matieres servant d'excipients aux elements de la contagion; matieres morbides, lait, viandes, sang proveuant d'animaux tuberculeux; 3deg; par l'inoculation experimentale ou accidentelle.
A toutes les preuves, fournies pari'observation cli-
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tf^^nem^^^^^
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nique et par rexperimentation, d'une correlation cau-sale intime entre la tuberculose de rhomrae et celle des betes dont il fait sa nourriture, M. Lidtin a voulu ajouter celle qui ressort d'uu tableau graphique com-paratif de la propagation statique de cette maladie dans I'espece humaiue et dans I'espece bovine. L'or-ganisation tres complete de la police sanitaire dans le grand-duche de Bade, au double point de vue des po�pulations humaines et.des populations animales, lui a permis de reunir les elements de la double statistique quil voulait etablir, et voici les resultats qui sont ex-primes par le tableau qu'il a dresse :
En suivant les deux lignes qui marquent, Funeja mortalile causee dans Tespece humaine par la tuberculose, et l'autre, la frequence des cas de tuberculose parmi les betes bovines, on remarque un parallelisme approximatif des deux lignes, hor-mis dans les points qui correspondent aux localites ou se trou-ventetablis beaucoup de bouchcrs qui fournissent la viande de qualile inferieure aux centres populeux des arrondissements voisins. Dans les arrondis�emenls qui sont presque exempts de la tuberculose animale, la courbe correspondante sur le tableau � la tuberculose de I'liomme denonce la rarete des cas de mort. L'elevage predomine dans ces arrondissements oil Ton n'importe que rarement du belail etranger.
Les chiffres dont M. Lidtin s'est servi pour dresser son tableau n'embrassant qu'une seule annee n'ont pas encore uue grande signification, ma is ils en ac-quierent une plus forte de leur parfaite concordance avec les resultats de l'observation et de l'experimen-Hnbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;tation. La plus grande frequence de la phthisie hu-
maine dans les lieux ou la phthisie est constatee sur
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. - ^ #9632;#9632;gt;-#9632;#9632;- /
APPENDICE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;361
un plus grand nombre d'animaux alimentaires ne vient eile pas � l'appui de la loi de la relation causale entre celle-ci et celle-l�?
III. laquo; Quelles sont les mesures preventives aux-quelles on doit avoir recours pour empecher I'in-fluence nuisible que pent avoir Tutiiisation de la viaude et du lait des betes atteintes de phthisie pommeliere? raquo;
M. Lydtiu prelude � l'etude de cette derniere question par un tres long historique qui rnontre que, de tout temps, on s'est preoccupe des dangers que pouvait entrainer ralimentation avec des viandes pro-venant d'animaux atteints de phtbisie. L'observation les avait-elle fait constater, ou bien obeissait-on � un sentiment de repugnance inspiree par l'aspect et l'etendue des lesions qui prennent des proportions si considerables dans les animaux avances en Age? Pen importe. Toujours est-il que la vente de ces viandes a ete generalement prohibee et que meme on a eu recours a des mesures tres rigoureuses pour punir les infractions commises par les marchands. Temoin laquo; un arret du parlement de Paris, en date de 1716, par lequel un boucher, propose aux boucberies de campagne, fut coudamne � faire amende bono-rable, nu-tete et � geuoux, en chemise, une corde au cou, un cierge de deux livres entre les mains, une pancarte sur le dos et une autre sur la poitrine avec cette inscription: Prepose av.x boucheries, qui a dis-tribue aux soldats de la viande ladre (lepreuse) prove-
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l.Fquot;1
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nant d'animanx ahattm pour cause de maladie et qni a michamment vendu et distribut la viande des veaux creves raquo;. Suivant les idees qui dominaient alors dans la legislation penale, I'adequation etait loin d'etre justement etablie entre ia faute commise et la puni-tion qu'on lui appliquait.
Je ne suivrai pas davantage M. Lydtin dans son expose retrospectif, et j'arrive immediatemeut au point principal qu'il s'agit de resoudre : Commenl premunir les populations contre les dangers certains de l'infestation tuberculeuse, qui peuvent resulter de l'ingestion de viandes ou de lait provenant d'ani-maux atteints de cette maladie ?
Sur ce point I'accord est loin d'exister entre les auteurs qui ont fait de cette question l'objet de leurs etudes; presque tous ont obei a la preoccupation d'accommoder les principes avec les difficultes des applications pratiques. Geriach, par exemple, qui a constate experimentalement laquo; que non seuleraent l'in�gestion de matieres tuberculeuses, mais encore celle de viandes provenant d'animaux atteints de pommeliere, determinait souvent des alterations tuberculeuses et ca-seeuses chez les animaux en experience; et que ce resultat, ordinaire quand les substances ingerees sont crues, pouvait se produire encore, mais plus rarement, quand elles avaient ete soumises � la cuisson raquo;; Ger-lacb a cm pouvoir etablir des degres dans la nocuite des viandes provenant d'animaux tuberculeux. Sui�vant lui, laquo; la viande commencerait a �tre nuisible des qu'on pourrait demontrer, par des traces persistantes.
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APPENDICE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;363
que la maladie pommeliere. partie dun foyer tuher-culeux limite, s'est repandue plus on moins generale-ment dans l'organisme. Et ces traces seraient:
laquo;1deg; L'existence de lesions tuberculeuses dans les glandes lymphatiques voisines des organes atteints de neoplasies pommelieres;
laquo; 2deg; La presence de foyers caseeux dans les pou-mons;
laquo; 3deg; L'extension secondaire des tubercules;
laquo; 4deg; L'amaigrissement evident. raquo;
Mais cette maniere de voir n'a point ete partagee par un autre auteur, le Dr Johne, dont les travaux sur les questions sanitaires sont tenus en tres haute estime, au temoignage de M. Lydtin. laquo; Suivant Johne, Gerlach a ete trop loin en considerant la viande comme nuisibie des que la maladie a envahi les glandes lymphatiques voisines du foyer tuberculeux. raquo;
D'apres lui, pour qu'il y ait reellement action nui�sibie, il faut qu'il y ait dej� generalisation de la tu-berculose, c'est-�-dire que le principe nosogene du tubercule ne se trouve plus seulement dans les voies de la circulation lymphatique peripherique, o� il reste toujours plus ou moins localise, ma is qu'il soit arrive jusque dans le canal thoracique et dans le Systeme vasculaire sanguin, d'o� il se sera alors repandu dans tout le corps. Aussi longiemps que les b�tes de boucherie, atteintes de tuberculose, quelle qu'en soit I'espece, .ne presentent pas les caracteres de la metastase tuberculeuse, c'est-�-dire de la tuberculose generalisee et que, par consequent, il n'y a pas lieu
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364 COURS DE PATHOLOGIE COMPAR�E.
d'admettre une infection de la viande de ces animaux, aussi longtemps on pent se borner a n'ecarter de la consommation que les organes tuberculeux, ainsi que les vaisseaux et les glandes lymphatiques qui se trouvent sur le trajet de la circulation, depuis les or�ganes atteintsjusqu'au canal thoracique. Pour atteindre plus s�rement et plus facilenient le but propose, on rejettera en meme temps, dans ce cas, les vaisseaux avoisinants et la masse conjonctive qui les entoure. Quant � la viande, on doit, quel que soit l'etat de nu�trition de I'animal qui I'a fournie, la cousiderer comme non nuisible; eile est tout au plus de qualite inferieure, si toutefois il n'existe pas quelque autre cause pour laquelle on doit la rejeter de la consom�mation.
laquo; // n'en est plus de meme si rexistence des altera�tions ci-dessus indiquees rend probable une infection du sang; dans ce dernier cas, le cadavre tout entier de I'animal, quelqu'en soit le degre d'embonpoint, doit 6tre saisi; la consommation doit en etre interdite. raquo;
Les deux auteurs dont je viens de rapporter les opinions respectives me paraissent avoir meconnu. Tun et l'autre, ce principe fondamental de la patho�logic generale que, dans une maladie contagieuse, l'element vivant de la virulence ne demeure pas lo�calise aux lesions, mais qu'il court partout avec le sang et que, consequemment, I'organisme tout entier en est infecte. Aussi bien, � ne cousiderer que la tu-berculose, la preuve en est faite, pour eile, de la maniere la plus irrefragable par les experiences de
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APPEND1CE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 360
Toussaint, de Gerlach et d'autres experimeutateurs. La viande sert d'excipient � l'agent de la virulence, et le sang aussi. Les experiences eu temoignent.
La conclusion logique � tirer de ces faits, c'est qu'on devrait etre tout aussi scrupuleux � l'endroit de la viande de provenance tuberculeuse qu'on Test � l'egard de celle des chevaux morveux et interdire la consommation de l'une comme de l'autre, et pour les m�mes raolifs, quelles que soient ses belies appa-rences. Aucun accommodemeut avec les priucipes ne devrait etre permis, puisqu'il ne saurait plus y avoir de doutes aujourd'hui sur la realite des dangers qui peuvent resulter de l'usage de ces viandes.
Oui; mais il y a des difficultes pratiques qu'il est necessaire de surmonter pour que les principes puissent produire leurs consequences logiques ; il faut que l'on parvienne � resoudre le probleme de la conciliation des interets prives avec l'interet general. Si les premiers devaient etre sacrifies au second sans compensation, les chances seraient grandes pour qu'on se trouv�t en presence de resistances qui ren-draient tres difficile l'application des mesures sani-taires dout la tuberculose serait l'objet. L'exemple suivant, que j'extrais du memoire de M. Lydtin, en temoigne :
Lprsque, inspires par les eerils de Gerlach, cerlains inspec-leurs de viande du grand-cUichc de Bade, parmi lesqnels nous signalons le medecin velerinaire de district, Fuchs, de Mann�heim, ont cherche � appliquer, un peu plus rigoureusemenl et plus consciencieusemeat, les mesures prescrites par Je regle-
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366nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPARI^E.
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mentsurl'inspeclioadesbelesdeboucheriealteintesdephlhisie pommeliere, les bouchers et proprielaires de betail ont reagi d'une teile faoon que des consequences fort graves etaient � redouter. Ces derniers ont declare qu'ils ne vendraient plus aux. bouchers de Mannheim ou, au inoins, qu'ils ne le feraient plus que sous conditions d'etre afl'ranchis de toute garantie. Les bouchers, de leur c�te, ont prelendu que devant seuls su-bir toutes les mauvaises chances relativement a. la salubrile de la viande, il ne leur etait plus possible de fournir la viande auxprix actuels. D'autres bouchers annoncerent qu'ils n'iraient plus abattre dans l'abattoir de la ville, et qu'ils feraient ame-ner en ville, sous forme de viande abattue, tout ce qu'il leur fallait pour desservir leur clientele. En procedant ainsi, les bouchers, commelesmarchandsdebesliaux, rejeterent toutes les charges sur le consommateur qui, sans tenir compte du fait qu'il allait etre mieux garanti, au point de vue desasante et recevoir une meilleure viande qu'aulrefois, ne ressentit d'autre efl'et de l'application plus rigoureuse des mesures de police sanitaire que I'atteinte que Ton portait � son porte-mon-naie. Les bouchers cherchaient, d'autre part, h echapper a un contr�le plus severe et ils diminuaient encore ainsi la ga�rantie due au consommateur. Un tel etat de choses ne pou-vait se prolonger et les mesures plus severes auxquelles on avaiteu un moment recours, ont du, de nouveau, ceder la place aux mesures moins rigoureusesqui avaient ete en usage anle-rieurement.
M il
A quels moyens peut-on recourir pour eviter le conflit auquel l'application des mesures sauitaires ne manque pas de donner lieu entre les interets particu-liers et l'interet de l'hygieue publique, lorsque, pour sauvegarder celui-ci, on porte atteinte aux premiers par la defeuse de livrer � la consommation des viandes de provenance tuberculeuse ? II n'y en a qu'un seul reellement efficace : c'est i'indemnisation pour les perles que {'action oublique entraine fatale-
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^ i^�:� #9632; #9632;-#9632;gt; #9632;#9632;quot;#9632;,;
APPE^mCE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;367
merit lorsqu'elle iatervieut pour priver un proprietaire de la jouissance d'une chose qui lui appartient, et rempecher d'en disposer suivant sa meilleure conve-nauce. L'histoire de la peste bovine prouve que sans Tindemnite la lutte pour la defense de l'iuteret public est absolument impossible. Sous Louis XIV, I'autorite, malgre ses dragons et les moyens violents dont s'ar-mait la loi, n'a pas ete de force � surmonter les resis-ances des paysans dont on avait voulu abattre les bestiaux pour empecher les irradiations de la peste bovine dans nos provinces meridionales. Mais ce qu'on n'avait pu faire par la violence, on a reussi � le realiser sans peine par la mesure de 1'indemnisa-tion. L'interet prive se conforma facilement � la regie, des qu'il n'eut plus � craindre ce qu'il considerait comme une spoliation. Ainsi en a-t-il ete dans tons les pays. Les lois sanitaires sout d'autant plus effi-caces qu'elles sont plus liberales � l'eadroit de la propriete.
La question du mode a suivre pour appliquer le principe de Tindemnite a la phthisic pommeliere est discutee dans le memoire de M. Lydtin, et il se rallie � l'assurance obligatoire qui serait imposee aux eleveurs et aux bouchers, et permettrait de realiser les fends necessaires pour indeinniser les ayant-droits des pertes qu'entraineraienl soil. I'abatage des animaux malades ou suspects, soit l'interdiction de la vente des viandes provenant d'animaux sur lesquels des le�sions de la phthisic auraient ete constatees.
Pour douner la mesure de la somrae qu'il serait
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36laquo;nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COUKS DE PATHOLOGIE COMPARfiE.
neeessaire de realiser par I'assurance, en vue de I'ap-plicatiou du principe de riudemnite � la phthisic pommeliere, M. Lydtiu a reuni et reproduit dans son memoire tons les elements statistiques qu'il a pu trouver dans le grand-duche de Bade. Ces documents seront consultes avec fruit par les differents gouver-nements qui se proposeront de mettre � l'etude cette grave et difficile question, dont la solution s'irapose � tous, en raison de la realite incontestable des dangers qu'entraine pour les populations 1'usage des viandes provenant des animaux infectes par la tuberculose.
Voici, pour terminer cette analyse, l'ensemble des conclusions et resolutions que la commission, chargee de l'etude preparatoire de la question de la pomme�liere, se proposait de soumettre � l'adoption du Con-gres international veterinaire de Bruxelles ;
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li
#9632;
1deg; La phthisic pommeli�reestune maladie transmissible par voie d'heredile;
#9632;2quot; Elle est contagieuse ;
3quot; Elledoil elre classee parmiles affections qui doiventetre combattues par des mesures de police sanitaire;
4deg; Les mesures auxquelles on doll avoir recours dans ce dernier but, sont lessuivantes :
a). Tout proprietaire d'animaux domestiques est oblige de declarer, � bref delai, � l'autorite qui fait le service de la po�lice, tout cas de phthisie pommeliere, ainsi que I'apparilion jnbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; de loulsymplome Faisantsoup^onner I'exislencede celleaflec-
;nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; tion; et doit, en outre, maintenir laniinal alteint ou suspect
�carte de tout endroit oil il pourrait donner lieu � transmis�sion de celle-ci.
La meme obligation incombe � celui qui, dans une exploi�tation, remplace le proprietaire, au conducteurd'un tronpead
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APPENTMCE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;369
qui se trouve en route, ainsi qu'au proprietaire de l'etable, cour, paturage ou parcage, qui a re^u des animaux en depot.
La declaration est egalement obligatoire pour lesmedecins-veterinaires et pour toute personne qui exerce par profession l'art de gu^rir nos animaux domestiques. II en est de m�me pour les inspecteurs de viande et pour tout individu qui, par metier, s'occupede la destruction, de l'utilisation ou des ma�nipulations de cadavres et de leurs produits si, avant toute intervention de la police, ils viennent� constater l'existence de la phthisie pommeliere, ou h reconnaitre des sympt�mes fai-sant suspecter la presence de cette maladie.
b). L'apparition de I'affection doit etre signalee publique-ment, en meme temps que Ton aura soin de designer le trou-peau infecte.
c). Les animaux suspects, aussi bien que les malades, doi-vent etre sequestres et leur abatage est ordonne par mesure de police. Les animaux suspects de contamination doivent etre maintenus isolement, a. moins qu'ils ne soient que peu nombreux; dans ce dernier cas, ils sont abattus par ordre de l'autorite. Si le nombre des betes suspectes de contamination est plus considerable, il y a lieu de conseiller de les engraisser et de les envoyer a I'abattoir le plus tot possible.
d). Les etables et locaux infectes doivent etre soumis � une surveillance speciale de police pendant toute une annee a par-tir du dernier cas de la maladie. La vente d'animaux suspects de contamination n'ost permise que si les betes vendues sont destinees a Fabatage, qui devra etre surveille par un veteri-naire.
e). La place occupee par une bete pommeliere doit, apres l'enlevement de celle-ci, etre nettoyee et desinfectee; il doit en etre de meme des que la maladie a disparu des etables et autres locaux fermes dans lesquels des animaux atteints de phthisie pommeliere ont sejourne. Ge n'est qu'apres I'appli-cation des mesures de desinfection que les mesures de police qui ont du etre prescrites pourrontetre levees. Pendant toute la duree de la panzootie, on aura soin de maintenir les etables dans un etat de ventilation convenable.
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COUUS DE PATHOLOGIE COMPAUtE.
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/). Pour que laviande et les vlsceres dune bete pommelierequot; puissent etre livres� la con.aommation, ilfautque, au moment de l'abatage, la maladie soil reconnue etre encore a son de�but; que les lesions ne soieut etendues qu'� une petite partie du corps; que les glandes lymphatiques se montrent encore exemptes de toute lesion de la pommeliere; que les foyerstu-berculeux n'aient pas encore subi de ramollissement; que la viands pre ente les curacteres d'une viande de premiere qua-lite et que lelat general de la nutrition d'un animal abattu ne laisse rien � desirer au moment oil il est sacrifie.
La viande des betes tuberculeuses admises � la consumma�tion ne pent pas etre conduite en dehors de la localite dans laquelle I'abatugea eu lieu et ne peul etre mise en vente � un etal ordinaire de boucherie.
Tout quartier de viande et tout visceremontrant des lesions ou des transformations tuberculeuses, aiasi que la viande de tout autre animal chez lequel on rencontre � Faulopsie une infection tuberculeuse plus prononcee que celle dont il est parle ci-dessus, seront denatures par un arrosage a I'aide d'huile de pctrole; ils seront ensuite enfouis sous la surveil�lance de la police. L'extraction de la graisse par la cuisson, ainsi que l'emploi de la peau, peut etre autorisee.
L'inspection de toute bete alteinte de tuberculose aura lieu parunveterinaire qui, seul, jugera si la viande peut etre con-sommee.
g). he lait d'animaux atleints ou suspects de phthisic pom�meliere ne peut etre employe ni pour la consommation de Fhomme ni pour celle de certains animaux. La vente de pa�red lait doit etre scverement defendue. Quant au lait des ani�maux suspects de contamination, ilne doit etre employe qu'a-pres avoir ete bouilli.
h). II y a lieu d'accorder, sous reserve de Tapplication des mesures destinees � prevenir tout abus, une indemnity pour les betes bovines abattues par ordre pour cause de phthisic pommeliere, ainsi que pour celles mortes a la suite de cette maladie, et en sus pour celles reconnues tuberculeuses apres abatage pour la boucherie. L'indemnitc peut etre payee par la caisse de TEtat, ou bien
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APPENDIGE;nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;371
on peut, en vue de creer las fonds necessaires, recourir � la creation d'une assurance obligatoire.
i). Les contraventions aux prescriptions relatives aux me-sures preventives et repressives de la phthisic doivent etre pa�nics.
j). Pour sauvegarderlasante derhomme centre les dangers dont eile est menacee par la consommation possible de viandes provenant d'animaux malades, ou de viandes g�tees ou pu-trefiees, ou bien encore d'objets de charculerie putrefiee, 11 y a lieu d'instituer dans toute commune un service competent pour l'inspection des viandes.
k). Les etablissements qui ont pour specialite de fuurnir du lait pourle traitement des personnes malades ou pour la nour-riture d'enfants doivcnl etre soumis, en ce qui concerne les betes laitieres, a un contr�le durable, confie � des medecins veterinaires offlciellement designes � cet effet.
En recommandant au Congresradoplion des resolutions que nous venons d'exposer, nous ne pcnsons pas avoir oulrepass� la Ilmite degt; propositions necessaires, si on veut faire cesser un danger qui, menacant depuis trop longtempsdej� les proprie-tairesde bestiaux, ainsi que la sante des consommateurs, cons-tilue une veritable calamite.
On voit, par le libelle du paragraphe /, que M. Lydtin et ses collegues de la commission de la phthisie pommeliere n'ont pas ose aller jusqu'au bout des consequences de la domonslration qu'ils ont faite de la contagiosite de la tuberculose et de la possibilite que l'element de la contagion de cette maladie penetre dans I'organisme humain avec les aliments ingeres. Cette- preuve etant faite, la logique voulait que les viandes provenant des auimaux tuber-culeux fussent eliminees de la consommation, tout aussi bien que celle des chevaux morveux; dans un cas comme dans 1'autre, on ne saurait admettre une
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CO�RS DE PATHOLOGIE COMPAR�E.
proportionnalite eatre l'intensite de la virulence et ce�e des lesions par lesquelles les maladies s'ex-priment respectivement.
Teile n'a pas ete cependant la these soutenue par M. Lydtin dans la discussion trop courte � laquelle le paragraphe f a seul donne lieu � la derniere heure du Congres, devaut un auditoire reduit, et qui n'�tait plus dans les conditions d'esprit necessaires pour deliberer avec maturite sur l'importante question theorique et pratique qui lui etait soumise.
Voici comment, d'apresleproces-verbalanalytiquede la seance du 16 septembre, M. Lydtin a motive la pro�position specifiee dans le paragraphe f des conclusions qui devaient etre soumises � l'adoption du Congres :
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L'agent de la transmission penetre I'organisme par la voie des vaisseanx lymphatiques ; il se propage lentement. Les le�sions occasionnees par les germes tuberculeux sont d'abord localisees et comme isolees des tissus voisins; puis elles envahis-sent petit � petit I'organisme, en meme temps que les lesions plus anciennes subissent des transformations successives; d'abord celles-ci se presentent � l'etat de tubercules crus; ce sont les plus jeunes; puis elles deviennent caseeuses, pu-rulentes et cretacees.
La generalisation des lesions est lente et plusieurs cas peu-vent se rencontrer sur le cadavre d'une bete de boucherie. Quelquefois les tubercules sont localises et la viande a un bei aspect. Rien ne prouve que cette viande soil nuisible pour le consommateur.
On n'a pas encore d'accidents pouvant etre rattach�s a cette cause. Quand les tubercules sont repandus dans I'orga�nisme et que laplupart des voies lymphatiques sont atteintes, on pent dire que la viande est dangereuse ou au moins mal-saine, de mauvaise qualite ; en Allemagne, on la classedes lors
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APPENDICE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 373
dans la catdgorie des viandes de basse boucherie; eile est ven-due a part comme viande malade; le public est done pr6-venu. D'autres fois, il y a des foyers purulents ou cas�eux, des tubercules ramollis, dans ce cas la viande doit etre rejetde, comme aussi lorsque I'affection est generalisee, qu'un grand nombre de ganglions lymphatiques sont malades, ou bien encore que la bete tuberculeuse est dej� amaigrie, la nutri�tion ayant eU dej� profondement alteree.
M. Lydtin a, en consequence, propose d'accepter, quant a la consommation des viandes de Mtes tuberculeuses, I'ali-nea f de son rapport.
En d'autres termes, M, Lydtin a cherche, lui aussi, un accommodement avec les principes, en soumet-tant au Gongres la proposition de proclamer inoffen�sive la viande provenant d'animaux tuberculeux, lorsque ces animaux se trouvent, au moment de leur abatage, dans les conditions, assez difficiles � rigou-reusement determiner, du reste, qui sont specifiees dans le paragraphe /des conclusions.
Mais M. Lydtin s'est appuye pour soutenir sa proposition, plutot sur des inductions que sur des preuves. Rien n'autorise � admettre comme des faits certains, d'abord que la virulence de la tuberculose soit moindre � sa periode initiale qu'� une epoque plus avancee de son evolution; et ensuite qu'etant donnees des lesions qui sont l'expression des actions locales, determinees par l'element de la virulence, cet element serait concentre exclusivement au siege de ces lesions et ne se retrouverait nulle part ailleurs. � Aussi ai-je oppose aux affirmations tout induc-tives de M. Lydtin les resultats des experiences
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374nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPABfiE.
directes qui denoncent la presence de relement de la virulence tuberculeuse dans des tissus qui ne paraissent tXre le siege d'aucune lesion. M. Toussaint, notamment, n'a-t-il pas demontre, par exemple, que le jus de viande provenant de betes tuberculeuses, possedait des proprietes virulentes attestees par des inoculations faites sur le boeuf, le pore, le chat, le lapin; et que ces proprietes, il les conservait mamp;ne apres avoir ete chuuffe � des temperatures de 50 � 60deg;, c'est-�-dire � la temperature culinaire des viandes r�ties. � En presence de pareiis resultats, j'ai emis l'opinion qu'ou ne devait pas reconnaitre de degre, dans la tuberculose, pas plus que dans la morve, quand il s'agit des viandes de boucherie; et qu'il doit suffire, pour iuterdire la livraison d'une viande � la consommation,. que la certitude soit acquise de l'existence de la tuberculose sur I'animal dont cette viande provient. La preuve incontestable aujourd'hui, qui est faite par le laboratoire, que les animaux peuvent 6lre infectes de la tuberculose par les voies digestives, n'autorise-t-elle pas tres fortement I'induc-tion que la phlhisie humaine pourrait bien avoir une de ses sources principales dans Fetal du boucher, � source � peu pres meconnue aujourd'hui, et par cela meme, d'autaut plus dangereuse?
Fort de cette conviction, j'ai soumis au Congres de Bruxelles la proposition suivante � titre d'amende-ment au paragraphe f des conclusions de la commis�sion :
(i La tuberculose ayant ete reconnue experimen-
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APPtNDICE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;375
talement transmissible par les voies digestives, le Congres declare qu'il y a lieu d'eliminer de la cou-sommation les viandes provenant d'animaux tuber-culeux, quelque soit le degre de la tuberculose et quelles que soient aussi lesqualites apparentes de ces viandes. raquo;
J'ai fait suivre cette proposition d'une autre, relative � la concession d'une indemnite, car la mesure de ['interdiction des viandes de provenance tuberculeuse ne manquerait pas d'etre rendue tres difficile par la resistance des interets qu'elle leserait, si une indemnite n'etait pas accordee aux proprie-taires depossedes.
II est bien regrettable qu'une question aussi impor-tante que celle de la tuberculose bovine, consideree dans ses rapports avec la tuberculose humaine par l'usage des viandes provenant d'animaux malades, ne soit venue � l'ordre du jour du Congres qu'au dernier jour de ses travaux, alors qu'il etait reduit � une petite minorite, impatiente elle-meme d'en finir et pen disposee, par cela-meme, � une discussion appro-foudie. Les decisions qui out ete prises dans de telles conditions ne sauraient etre considerees comme I'ex-pression veritable du vote du Congres et invoquees ulterieurement avec cette signification. A vrai dire, cette question a ete reservee pour la cinquieme session du Congres international veterinaire, qui doit etre teuue � Pans dans quatre ans.
Aussi bien, du reste, les votes, tels qu'ils se sont repartis entre ceux, en nombre bien reduit, qui ont
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376nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COURS DE PATHOLOGIE COMPAR^E.
pris part � cette derniere deliberation, donnent � penser que la question n'etait pas encore mure. De fait, malgre tant de preuves accumulees, la conta-giosite de la tuberculose elle-meme n'a pas ete affir-mee par un vote unanime. Les doutes � cet endroit on, tout an moins^ le defaut de convictions, se sont ex primes par quatorze abstentions contre vingt-cinq voix affirmatives.
La dissidence a 6te plus grande encore quand il s'est agi de se prononcer sur la regle de conduite � suivre � l'egard des viandes provenant d'animaux tuberculeux. J'avais propose au Congres de declarer laquo; qu'il y avait lieu d'interdire de livrer � la consom-mation les viandes de cette provenance, quel que f�t le degre de la tuberculose et quelles que fussent aussi les qualites apparentes de ces viandes raquo;. Quinze voix seulement se sont ralliees � cette proposition; quatorze lui out ete opposees et il y a eu neuf absten�tions.
En presence de ce resultat, la question de l'indem-nite n'avait plus d'objet et il n'y a pas eu lieu de la mettre aux voix.
Le Congres international veterinaire de Bruxelles a done laisse sans solution complete la question si importante, au point de vue de l'bygiene publique, de la regie que doivent suivre les inspecteurs de boucherie, lorsqu'ils se trouvent en presence du cadavre d'un animal sur lequel les lesions de la tuber�culose sont constatees. Mais cette session ne sera pas sterile, puisqu'elle a ete l'occasion du beau Memoire
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APPEND1CE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 377
de M. Lydtin o� se trouvent reunis un grand nombre de documents sur la transmissibilite possible de la tuberculose par differentes voies et tout particuliere-raent par les voies digestives. De pareils faits, et en si grand nombre, ne peuvent pas manquer d'exercer peu � peu leur pression sur les esprits et de les pre-parer � accepter I'idee que les viandes provenant d'animaux affectes de la tuberculose, � quelque degre que ce soit, doiveut sect;tre rejetees de la consommation publique, tout aussi bien que celles qui proviennent d'animaux morveux. Laissons faire au temps, et cette opinion qu'on pent appeler salutaire flnira par preva-loir. Mais il ne faut pas se contenter des faits acquis; d'autres doivent y 6tre ajoutes par des experiences multipliees le plus possible; et quand les preuves se seront accumulees de la virulence inherente au jus des viandes chez les animaux tuberculeux, il faudra bien se rendre et toutes les considerations, de quelque ordre qu'elles soient, devront flechir devant l'inter�t superieur de l'hygiene publique.
G'est � donner cette demonstration definitive que doivent tendre malaquo;intenant tons les efforts des labo-ratoires qui se sont donne pour objet l'etude de la contagiosite des maladies et des voies par lesquelles leur transmission pent s'operer, etude dont I'impor-tance est si grande quand il s'agit des maladies propres aux animaux alimentaires.
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TABLE DES MATIERES
LEgON D'OUVERTURE
La chaire de palhologie comparee au Museum. � Annexion d'un laboratoire. � Caractere positif donne par rexperimentation � la medecine. � Rule inflniment grand des infiniment petits. � La fermentation fonction d'un etre vivant. � Rapports des infiniment petits avec les organismes vivants. � Le rayst�re de la contagion devoile. � Impuissance de Vapriorisme k resoudre les questions de fait. � La contagion est un phenom�ne de pullulation d'un element vivant. � Correlation avec les phenom�nes de la fer�mentation. � La theorie de Liebig demontree erronee. � Les changements d'etat de la mati�re organique morte et les etrcs du monde invisible. � Experiences demonstratives de l'influence de ceux-ci sur ceux-l�. � Les elements vivants des contagions. � Ils sont dej� determines pour un certain norabre de maladies � Parallele entre les fermentations et les contagions. � Grandeur du service rendu a la medecine par la science experimentale. � Fecondite de la notion de la nature vivante de la contagion. � Decouverte de l'attenuation des virus qui en derive. � Resultats economiques de son application sur les animaux. � Grand fait scientifique dont la medecine de I'liomme est appelee a beneflcier. � II n'y a pas de disjonction entre la medecine de l'homme et celle des animaux. � 11 n'y a pas deux medecines. � Elles ne se distinguent Tune de l'autre que par la Symptomatologie..... I
DEUXIEME LEQON
IDENTITE DES DEUX MEDECINES
Nature microbienne des maladies contagieuses. � Demonstra�tions faites sur les animaux de la vaccination possible des mala-
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TABLE DES HATIERES.
dies mortelles. � Grand progrfes accompli.�Lumi�re jetee sur la nature des contagions, � quelque esp6ce qu'elles s'attaquent. � Ces resultats viennent d'etre contestes. � La medecine humaine n'aurait rien k gagner �. de pareilles conqu�tes. � Opinion qui proc�de de fausses idees sur les differences des deux medecines. � Question de sentiment. � Mentite des phenomfenes au point de vue organique. � La parturition. � Identite de la construction elementaire. � II n'y a pas deux physiologies. � Identite des phe-nom�nes de volition, de circulation. � L'action des microbes infec-tants est la mfime. � Egulile de l'homme et du mouton devant le charbon. � La vaccination charbonneuse applicable k l'homme. � Dans quelles conditions? � Les hallucinations, phenom�nes iden-tiques dans toutes les espfeces. � Examples fournis par la rage, les r�ves du sommeil, ceux de Tetherisation. � Le vertige stomacal du cheval. � L'homme et les betes egaux devant les conditions orga-niques des maladies.� La medecine de l'homme beneflciedes con-quetes de la science dans quelque champ qu'elles se fassent.. 21
TR01SIEME LEQON
IDKNTITE DES DEUX MEDECINES (Suite)
Similitude entre le fonctionnement cerebral chez l'homme et chez les animaux. � Importance du phenomfeme des hallucinations au point de vue de la Psychologie comparie. � Les sensations subjectives subordonnees � l'esprit par la philosophic. � Question de mots. � Lecerveau, instrument des phenom�nes psychiques. � Lamemoire chez les animaux. �L'idee cartesienue sur la nature des animaux, � Pensee profonde de Buffon. � Les faits de la pathologic des bgtes peuvent servir � riuterprelation des faits de la pathologic de l'homme. � Exemple : experiences de laboratoire sur le virus rabique. � Le siege de la rage devoile experimentalement. � La substance nerveuse, milieu de culture de l'element vivant de la rage. � Ensemencement direct k la surface du cerveau. - Grande rapidite de la pullulation dans toule l'etendue de Taxe cerebro-spinal. � La rage a cesse d'etre une nevrose. � Preuve par I'ino-culation cerebrale de I'existence materielle d'une lesion invisible, meme au microscope. �Nouvelle voie ouverte � J'anatomie patho-logique. � Explication des formes variees de la rage par le si�ge des pullulations. � L'anatomie pathologique pourra mettre k pro�fit ces localisations pour l'elude des fonctions cer�brales et medul-
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TABLE DES MAXIERES.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 381
laires. � Explication des paralysies rabiques. � Pullulation dans le tissu des nerfs, demontree experimentalement. � Gheminemenl du virus par pullulation, suivant le trajet des cordons nerveux. � Hypothese de M. Duboue, de Pau, rendue plausible par cette de-couverte. � Preuve du concours de la pathologie experimentale et comparee pour l'interpretation des faits de la pathologie humaine. � Les repudiations de ce concours ne sont pas reflechies..... 41
QUATRlfiME ET CINQUlfiME LEQONS
LA NOTION DE LA NATURE VIVANTE DES ELEMENTS DES CONTAGIONS ET LES LESIONS ANATOMIQUES
Les phenom�nes de la rage en rapport avec les pullulations du microbe de cette maladie dans les differentes regions de l'appareil nerveux. � De meme ses lesions materielles devenues objectives.
�nbsp; Faits anatoraiques qui caracterisent les maladies contagieuses.
�nbsp;Leur signification par lesphenom�nes de pullulation des elements vivants des contagions. � Examples, enprocedant des faits les plus simples aux plus complexes. � Dermatoses acariennes. � Les le�sions de la bronchite vermineuse. � Les faux tubercules determi�nes par les ceufs d'un strongle neraatoide. � Les tubercules muscu-laires de la trichine. � Les laches rouges du rouget, determinees par la pullulation d'un microbe dans le corps muqueuxde lapeau.
�nbsp; La morve du cheval et son microbe. � Interpretation des faits symptomatiques et anatomiques par la pullulation dans des or-ganes d'election. � Action pbagedenique de l'inoculation morveuse sur le chien. � La tuberculose et son microbe. � Analogie entre le mode de developpement des tubercules helminthiasiques et celui des tubercules vrais. � Les uns et les autres, expressions d'une ac�tion irritante sur place. � L'epine irritante des ancieus devenue substantielle el constituee par le microbe pullulant. � Decouverte de ce microbe par M. Toussaint sous forme de micrococcus, et par M. Kocb, de Berlin, sous forme de bacilles. � Le microbe revet probablement ces deux formes. � Transmission de la tuberculose par les liquides de culture. � Verification par M. le professeur Cornil. � Le microbe de la tuberculose constate dans les lesions sous leurs differentes formes. � Concordance entre les caract�res des lesions spontanees et ceux des lesions experimentales. � La for�mation du tubercule se rattache � la loi generale qui exprime les rapports de la trame vivante avec les corps etrangers.....39
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TABLE DES MAXIERES.
SIXIEME LEQON
LA CONTAGIOSITE DE LA TUBBRCULOSE
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Grando decouverle deM. le professeurVillemin, du Val-de-Gr�ce.
�nbsp; La tuberculose est de nature microbienne. � Las decouvertes deM. Toussaint et M. Koch corollaires de celles de M. Villemin.� Transmission de la tuberculose par les voies digestives. � Expe�riences de M. Chauveau sur l'esp^ce bovine. � Modes d'ingestion de la matiere tuberculeuse. � Constance des resultats obtenus. � Generalisation des lesions impliquant la pullulation de Felement dont elles proe�dent. � Sympt�mes de la tuberculose transmise par les voies digestives. � Le sue gastrique ne met pas l'brganisme en defense contre les virus. � La vitalite des virus les preserve-Exemple : la tricliine et son kyste. � De memo pour les elements de la virulence et les mati�res qui leur servent d'excipients. � Transmission de la tuberculose par les injections intra-vasculaires.
�nbsp;Actions par de tr�s petites quantites. � Transmission par injec�tions sous-cutanees. � Inertie apparente du virus, pendant quelques jours aux points de insertion. � Phenomfenes consecutifs. � Ex�periences comparatives de M. Chauveau avec des mati�res autres que les mati�res luberculeuses. � Pseudo-tuberculose survenue dans un cas. � Les lesions n'etaient pas inoculables. � Objections faites � M. Villemin, basees sur des resultats semblables.�Faits spon�tanes de la pathologie, analogues � ceux de l'experimentation. � Cette analogic est tout exterieure. � Peut-etre les abc^s metasta-tiques consecutifs aux complications des plaies ont-ils ce rapport de similitude avec les tuberculcs vrais, ququot;ils sont determines egale-ment par un microbe : celui de la septicemie.�Hypothese � veri�fier experimentalement..................91
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SEPTIEME LEQON
LES ABCES METASTATIQUES ET LES LESIONS ViSCEHALES DETE11M1NEES PAR DES ELEMENTS SPECIFIQUES
Les experiences de M. Chauveau sur la transmission de la tuber�culose par les voies digestives ont confirme celles de M. Villemin. � Les objections faites a M. Villemin basees sur la predisposition
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TABLE DES MAXIERES.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 383
pretendue de rorganisme du lapin, sont detruites par les resultats obtenus sur le boeuf. � Analogie exlerieure entre les abc^s dits melaslatiques et les 16sions de la morve aigue. � Conditions de la manifestation de ces abc�s chez le cheval. � Ils sont assez fre�quents a la suite des complications des blessures de la troisi�me pbalange. � Raisons de la frequence de ces complications. � Structure particuli�re de la phalange favorable aux infiltrations purulentes et septiques. � Experiences ayant pour objet de deter�miner artificiellement des abc6s visceraux. � Injections vasculaires de poussi�res inertes.� Injections de pus flltre.�Abc6s semblables aux abc^s metastatiques spontanes. � Proprietes irritantes de glo�bules du pus qui commence � s'alterer. � Intervention probable de microbes septiques. � Dans cette hypothfese, identite d'evolu-tion des abe�s metastatiques et de ceux qui caracterisent la morve aigue. � La consomption rapide des animaux implique I'inter-vention des ferments septiques. � Les abe�s metastatiques � la suile de phlebite suppurative ascendante de la jugulaire. � Infil�tration purulente du tissu spongieux de l'occipital. � Abe�s me�tastatiques de la gourme determines probablement par un microbe pyogenique. � Induction autorisee par la constatation d'un microbe dans les furoncles de l'liomme. � Necessite d'eclaircir ces questions par des recherches experimeutales.............4lt;I
HUITIEME LEQON
LA. CONTAGIOS1TE DE LA TUBERCULOSE
L'inoculation est le criteriurn des vrais tubercules. � Toutes les lesions a forme lurberculeuse ont ce caractere commun qu'elles precedent d'une action irritante cenlrale. � Memes phenom�nes dans le r�gne vegetal. � Accumuler les preuves de la contagiosite de la tuberculose, afin de disposer 1'opinion publique en faveur des mesures propres � en prevenir les efl'ets. � Les experiences de M. Villemin faites en 1869 sur des lapins et des cobayes. � Trans�mission par les voies digestives. � Lesions experimentales ayant leur siege dans les organes o� on les rencontre lorsque la tubercu�lose est accidcntelle. � Experiences conformes de M. Saint-Cyr, de Lyon, et des Ecoles velerinaires de Hanovre et deDresde. � Con�cordance entre les experimentateurs de tous les pays. � Note discordante de M. Colin, d'Alfort. �L'ingestion de mati�res tuber-cuieuses serait inoffensive.� L'absorption de ces matteres par une
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TABLE DES MATIKRES.
membrane muqueuse. � Fails negatifs opposes aux fails positifs. � Inobservalion des r�gles de la melhode experimentale. � Influence des opinions discordanles de M. Colin sur les autorites ayanl mission de sauvegarder I'hygifene publique. � Necessite de multiplier les preuves de la conlagiosite de la luberculose.... 129
NEUVr�ME LEQON
LA C0NTAG10SITE DE LA TUBERCULOSE {Suite)
Les fails ne peuvent etre conlradicloires. � Proposilion de M. Chauveau de faire des experiences, de concert avec M. Colin devanl une commission del'Academie demedecine, � Solution que l'hygi�ne publique reclame. �Refus parM. Colin de toute collabo�ration avec M. Chauveau. � Le cartel adresse dans des circons-tances analogues par M. Pasteur aux professeurs de l'ficole veteri-naire de Turin, au su.jet des resultals de leurs experiences sur la vaccination charbonneuse. � Programme des experiences publiques que M. Pasteur devail faire � Turin pour juger le differend. �La cause de ce differend elait annoncee d'avance. � Refus des expe-rimentateurs Italiens d'accepter le programme propose. � Discus�sion prealable qu'ils exigent.� Hommage �M. Pasteur qu'implique ce refus. � La question a eteporteedevant l'Academie des sciences de Paris. � Cause demontree de la discordance entre les resultals des experiences de Turin el ceux qui se sont produits ailleurs. � Trfes fine analyse experimentale des fails. � La contradiction resultait des differences des conditions o� les experimenlaleurs etaient places. � Les experiences de M. Chauveau sur la lubercu�lose faite a Lyon devanl une commission de 1'Association pour l'avancemenl des sciences, en 1872. � Resultats qu'elles ont donnes. � Complications resultant de la promiscuile des animaux temoins avec les sujels d'experience d'ingestion.� Elles temoignent de la conlagiosite de la luberculose............151
DIXIEME LEQON
LA CONTAGIOSITE DE LA TUBERCULOSE [Suite)
Importance d'en multiplier les preuves dans rinlerel de l'hygi�ne publique. � Les experiences de M. Chauveau � Lyon, en 1872, con-
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TABLE DES MATIERES.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 385
trariees par suite de la promiscuite des temoins el des sujets sur lesquels on experimentait. � L'infeclion accidentelle des temoins a une grande signification aujourd'hui comme preuves de la con�tagion. � Experiences de M. Viseur, d'Arras, sur le chat, par I'in-gestion de mati�res tuberculeuses. � La preuve de la contagio-site de la tuberculose donnee par M. Colin. � Observation faite par lui de tuberculisation generalisee � la suite de Tinoculation du tubercule � la pointe de la lancette. � La virulence est demontrec par la rapidite du developpement des lesions et leur etendue. � Lesions tr�s remarquables jusque dans les os. �Veritable phthisie galopante. � Grande valeur de ce fait experimental � l'appui de la contagiosite de la tuberculose.............175
ONZlfiME LEgON
LA CONTAGIOSITE DE LA TUBERCULOSE (Suite)
La tuberculose demontree virulente � dose inflnitesime par le fait experimental de M. Colin. � Ce fait est une reproduction fid�le des phthisies galopantes spontanees. � Etudes experimentales de M. Toussaint sur le pore. � Marche rapide de la phthisie inoculee dans l'esp�ce porcine. � Infestation de pores par ringestion ; par injection sous-cutanee. � Demonstration de la presence dans le sang des elements de la virulence. � Transmission de la tuberculose par injection de quelques gouttes de sang. � La chair musculaire est virulente. � Preuve par l'inoculation de son jus. �Tenacite de cette virulence. Elle persiste apr^s le chauffage des viandes � la temperature de 55 k 58deg;. � Grande importance pratique de ces ex�periences. � Constatation de la virulence dans la salive, dans I'urine, dans la serosite des pustules vaccinales. � Transmission pos�sible de la tuberculose dans l'esp�ce humaine par la salive.,. 193
DOUZ1EME LEQON
LA CONTAGIOSITE DE LA TUBERCULOSE (Suite)
Tons les experimentateurs sont aujourd'hui rallies � l'opinion de M. Villemin. � Nouvelles experiences de M. Toussaint. � Les viandes cuites au degre comestible restent virulentes. � V6riflcation de ces resultats par M. Galtier, de l'Ecole veterinaire de Lyon. �
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TABLE DES MAXIERES.
Culture du microbe de la tuberculose par M. Toussaint. � Resultats positifs des inoculations avec des liquides de culture. � Virulence conservee dans des cultures successivesjusqu'� la vingti�me. �Vi�rulence du liquide vaccinal, puise sur une vache tuberculeuse. � Le lait d'une vache tuberculeuse peut 6tre virulent. � Experiences de Gerlach, Bollinger, Klebs, en Allemagne; de M. Peuch, � Tou�louse. � La frequence de la phthisie dans l'esp�ce humaine n'a-t-elle pas des rapports avec la frequence de cette maladie dans l'esp�ce bovine? Question � mettre �l'etude........213
TREIZIEME LEQON
LA CONTAGIOSITE DE LA TUBERCULOSE {Suite)
Faits accumules qui en temoignent. � Dangers de sa transmis�sion � l'esp�ce humaine par les voies digestives. � Les autopsies montrent qu'elle est plus repandue encore qu'elle ne le parait. � Forme benigne qu'elle revet. � Cette forme ne serait-elle pas une condition d'immunite contre la maladie plus grave? � Experiences inedites de M. Toussaint sur le porc, qui autorisent cette induction. � Tous les �ges ne sont pas egalemenl favorables au developpe-ment de la tuberculose. � Les chances de la contracter diminuent � mesure qu'on avance en �ge. � L'experimentation directe en te-moigne. � La misfere physiologique favorable au developpement du microbe de la tuberculose, comma, en general, de tous les para�sites. � Fait vrai dans les deux r�gnes. � Nombre considerable des victimes de la tuberculose. � Une seule cause necessaire : la conta�gion. � Cette cause supprimee, les causes adjuvantes restent sans effets. � Done il faut s'attaquer � la contagion. � La voie ouverle est la voie digestive. � La chair et le lait, excipients possibles de Telement de la virulence. � Indications qui ressortent de la con-naissance de ce fait. � La tuberculose de la vache, maladie mal de-terminee symptomatologiquement � sa periode initiale. � Neces�sity de nouvelles etudes faire avec les moyens plus parfaits dont on dispose aujourd'hui. � Emploi du thermom�tre. � Inoculations experimenlales pour eclairer le diagnostic. � Etude de l'urine, du lait. � La forme insidieuse des premieres periodes, condition de la propagation dans les etables. � Importance des recherches en vue d'�clairer le diagnostic................229
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TABLE DES MAXIERES,
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QUATORZlfiME LEQON
L'lNSPECTION DES VIANDES DB BOUCHERIE AU POINT DE VUE DE LA TUBBRCULOSB
Dangers de la transmission de la tuberculose �. l'homme par les voies digestives. � Surveillance des etables. � Difflcultes qui re-sultent de l'incertitude du diagnostic. � Surveillance des abattoirs.
�nbsp;La phthisie est compatible dans l'esp�ce bovine avec le bon etat des chairs et l'embonpoint. � En principe, toute viande provenant d'animaux tuberculeux devrait 6tre eliminee de la consommation.
�nbsp;Difficultes pratiques. � Les convictions ne sont pasfailes. � Re�sistances des inter�ts leses. � Hesitations des inspecteurs et des autorites. � Difference de faire, suivant les regions. � Avis de-mande par le ministre au comite consultatif d'hygifene publique.
�nbsp;Documents relatifs cette consultation. � Mesures proposees. � Des experiences offlcielles devraient 6tre faites pour arriver � une solution qui servirait de base � des mesures uniformes. � Sta-tistique faire pour fixer sur le chiffre des animaux phthisiques, parmi ceux qui sont abattuspour la consommation. � Lesstatis-tiques actuelles sont insuffisantes.............249
QUINZIEME LEQON
LE TRAITEMENT DE LA TUBERCULOSE
Experiences faire pour l'eclairer. � La connaissance de la na�ture parasitaire peut servir d'idee directrice. � Prevenir faction de la cause ou mettre l'organisme en defense contre eile. � La pullulation arretee dans des liquides de culture par des proportions infinitesimes de substances incompatibles. � S'inspirer de ces re-sultats de l'experimentation. � H y a des organismes naturelle-ment refractaires. � Exemple:le mouton algerien pour la bacteri-die charbonneuse. � Essayer d'arriver ce resultat par des medi�cations prealables. � Le tannin administrependant quelques jours rend imputrescibles, aprds la mort, les chairs et le sang. � Expe�riences de Polli, de Milan, sur les medications par les Sulfites contre les maladies par ferments. � La theorie de la catalyse est son idee directrice. � Neutraliser le ferment au sein de l'organisme vivant. � Emploi des Sulfites et des hyposulfites. � Imputrescibilite des
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TABLE DES MATIERES.
chairs aprfes I'emploi do ces substances. � Experiences avec le pus, le sang putrefie, le virus de la morvo. � Resultats conformes a la theorie qu'elles out donnes. � Voie nouvellc ouvcrte k la thera-peutique experimentale. � Rendre les animaux susceptibles d'une contagion impropres k la culture de l'element de celte conta�gion .........................271
SEIZlfiME LEQON
l'immunite contre les maladies
L'etude experimentale des microbes dans les milieux de culture.
�nbsp; Influence sur la pullulation par des modifications infinitesimcs.
�nbsp; L'aspergillus niger dans le liquide Raulin. � S'inspirer de ces faits pour les applications a la therapoutique. � L'action du tannin. Les experiences de Polli sur les sulfites. � Leur verification experi�mentale en Italie. � Des sulfites contre les fl�vres palustres ; centre la tuberculose compliquee de cavernes pulmonaires. � Con�firmation de la valeur prophylactique des sulfites par I'Academie de medecine do Turin.�Les experiences de Tommassi Crudeli.� Action preventive de 1'arsenic contre la malaria. � Experiences en grand sur les employes des chemins de fer. � Efficacite confirmee par d'autres experimentateurs. � Interpretation des faits par les experiences de laboratoire. � Les animaux de l'espfece bovine sont susceptibles de la malaria. � Condition favorable pour les verifi�cations experimentalcs. � Susceptibilite des chiens et des lapins
�nbsp; Projets d'expfiriences k l'Institut pathologique de Rome. � Le cuivre n'est-il pas un agent incompatible pour certains elements contagieux? � Les statistiques du docteurBurq sur faction thera-peulique du cuivre contre le cholera et la fi�vre typhoide. � Pour-suivre le traitemcnt de la tuberculose dans cet ordre d'idees. � L'experimentation rendue facile par sa transmission k differentes espfeces. � L'action des eaux sulfureuses ct arsenicales expliquee par la nouvelle doctrine. � Programme d'experiences k instituer.
�nbsp; Formule du probl6me � resoudre............287
APPENDICE
La question de la phtbisio dans I'esp^ce bovine, devant le Congr6s international de Bruxelles en 1883. � Le temps a manque
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TABLE DES MAXIERES.
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pour la trailer. � Memoire important de M. Lydtin, veterinaire principal du grand-duche de Bade. � Analyse de ce travail. � Diagnostic de la phthisie pommeli�re. � Periode initiale. � Signe fournis par le syst�mo lymphatique; par le thermomfetre.� Sympt�mes procedant de la sensibilite. des parois thoraciques. � Difficultes du diagnostic positif. � Le veterinaire sanitaire a besoin de la certitude. � Necessite de nouvelles etudes cliniques et experimentales. � Rapports certains � etablir entre les tumeurs ganglionnaires exterieures et les lesions viscerales. �Le vrai criterium anatomique de la phthisie bovine est dans son mi�crobe. � Frequence des lesions ganglionnaires d6s le debut. � Lesions tuberculeuses des mamelles des vaches laiti^res.� Lesions des muscles, des os et des articulations. � Proportion de la phthisie pulmonaire dans la population bovine. � La phthisie dans les autres esp�ces. � Rarete dans I'espfece ovine; dans resp�ce caprine; dans l'esp�ce chevaline. � I. Influence de l'heridite. � Experience � instituer en vue de l'etude de cette question. � Faits d'observalion. � Croyance populaire. � Faits zootechniques. � Faits anatomiques. � Rarete de la phthisie chez lesjeunes del'espece bovine. �Lesions anatomiques sur des foetus et des nouveau-nes. � Faits zootechniques. � Influence du p�re et de la mfere. � Tardivite de la manifestation de la phthisie heriiditaire. � II. Influence de la contagion. � Documents a Tappui. � Faits cliniques. � Leur signification accrue par celle des faits d'experimenlation. � Impuissance de l'observation seule � donner la solution du probleme de la contagion. � Opinions discordantes sur la conlagiosite de la phthisie bovine. � Trans�mission de la maladie par l'usage du lait. � Faits cliniques. � Faits d'experimenlation. � Resume synoplique. � Contagion par inoculation. � Inoculation intra-oculaire. � Idenlite de la tuber-culose dans toules les esp�ces. � Preuve donnee par l'identile du microbe. � Transmission par inoculation de la tuberculose � rhomme. � Preuve experimentale. � Transmission � l'homme par le lait. � Transmission par les rapports des personnes entre elles. � Statistique comparative de la phthisie dans les populations humaines et les populations animales. � III. Mesures preventives contre les dangers de l'usage alimentaire des viandes provenant des animaux tuberculcux. � Effort d'accommodement des principes avec les difficultes de la pratique. � Gerlach. � Dr Johne. � La virulence n'est pas localisee. � Experience de Toussainl sur la virulence des viandes.� La consequence logique des fails.� Dif�ficultes pratiques. � Conciliation des inter�ts prives el de Tinlerfil
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TABLE DES MATI�RES.
g�neral. � Indemnisation pour les pertescausees parl'application des mesures sanitaires �. la laberculose bovine. � Assurance obligatoire. � Conclusions qui devaient etre soumises au Congramp;s de Bruxelles......................317
EVRE1IX, 1MPRIMERIE DE C.IIABLE� I1ERISSEY
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