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TRAITE COMPLEX
DE
LA RAGE
CHEZ LE GHIEN ET CHEZ LE CHAT
MOYEN DE S'EN PRESERVER
PAR
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M. J. BOURREL
EX-VETBUINAinE OB L ARKEB,' DIRECTEUR DB L ETABLISSEMENT SPECIAL
POUR L'ETUDE DES MALADIES DES CHIENS^ RUE FONTAINE-AI! ROI, 7
MEMBBE DU CONSBIL d'admiMSTRATION DB LA SOCIETE PROTECTRICE DES ANIMAUX
MEMDRE FONDATEUR DU C01U1TE niPPÜPUAGIQUB
ET DB LA SOCIETE CONTItE l'ABUS DU TABAC ET DBS BOISSON3 ALCOOLIQUES
laquo;BMBRE DE LA COMMISSION d'uYGIBNB DU Hraquo;nu ARRONDISSEMENT
DE PARIS.
hl #9632;-.(gt;#9632;
PARIS
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Se vend chez l'auteur, 7, rue Fontaine-au-Roi GEORGES BARBAvLIB.-lll,y.EüR I P. ASSELW, LIBR.-^DITEÜR
7, RBE CHRISTINE, 7 \ | PLACE SE L^€OLE-DE-ME DECINE ET CHEZ TODS LE8 LIBRAIRES
1874nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; '--^
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TRAITS COMPLEX
DE LA RAGE
CHEZ LE CHIEN ET CHEZ LE CHAT
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CüBUIIt. — TYP. laquo;T SIEB. DE (quot;.ÜBTE Fits.
BIBLIOTHEEK UNIVERSITEIT UTRECHT
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TRAITE COMPLEX
DE
LA RAGE
CHEZ LE GHIEN ET CHEZ LE CHAT
MOYEN DE S^EN PRESERVER
M. J. BOURREL
EX-VETERISAIRE DE l'aRMEE , DIUKCTKUR DB l'eTAHLISSEHEXT ÜPECIAI.
pour l'etude des maladies des ciiiexs, rue fostaine-au-roi? 7
hbkbbb dü consbil d'adhinistration de la societe protectricb de3 amhacs
membre fondateur dü comite hirpopiugique
BT DB LA SOCIETE CONTRE l'aBÜS DU TABAC ET DES DOISSONS ALCOOLIQU:; j
MBMBRE DE LA COMMISSIOX d'hYQIENS DU Umlaquo; iRROUIDlSSSVSXT
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PARIS
Se vend chez 1'auteur, 7, rue Fontaine-au-Roi GEORGES BARBA, LIB.-EDITEÜR I P. ASSELIN, LIBK.4D1TED1I
7, RUE CHRISTINE, 7nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;| PLACE DE L'ECOLE-I) E • M K p EC I \ E
'ET CHEZ TOUS LES LIBRAIRES
1874
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PREFACE
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Si la transmission de la rage 6tait particuliere aux espfeces canines, si eile n'avail lieu que d'un chien ä un autre, chercher ä en combattre les effets serait un devoir pour moi. Mais cette question devient d'un bien plus grand intöret, puisque le chien, grace alapointe acör^e de ses dents, peut, avec facility, inoculer le virus rabique non-seulement aux autres animaux, mais en­core a rhomme lui-meme.
Aussi, dans toutes mes recherches, dans tons mes travaux, ai-je toujours eu pour objectif le remfede a apporter ä un flöau si funeste.
De nombreuses experiences souvent r6p6t6es, des observations prises sur beaucoup de sujets, m'ont con­duit k 6tablir depuis longtemps le systfeme pr^ventif (jue le lecteur trouvera expose ä la fin de ce traitd.
Si je livre aujourd'hui ä la publicity las rösultats de mes nouvellesötudes patiemment 61abor6es, c'estparce que je crois que c'est pour moi une obligation. Ne serait-ce pas, en effet, räpondre bien mal ä la con-liance dont le public m'honore, que de ne pas le met-
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VInbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; PREFACE.
Ire ä meme de connaitre un moyen certain de se pro-server de l'inoculation du virus rabique.
Douze anuses de persövörance dans l'ötude du Sys­teme cv66 par moi (1) me donnent la certitude d'6tablir aisöment la preuve de sa parfaite exactitude, ä condi­tion bien entendu que Ton appliquera rigoureusement les principes si faciles ä suivre de mamamp;hode.
Je sais combien d'obstacles ä leur propagation ren-coutrent les meilleures idöes, avant de se faire jour dans l'opinion publique et de passer dans nos habi­tudes. J'ose espörer cependant que tout le monde comprendra de quelle n6cessit6 pressante il est pour la sociöte de conjurer, par tons les moyens possibles, les malheurs que la rage occasionne journellemenL
Aussi, je fais appel ä toutes les personnes öclairees, et je sollicite leur concours intelligent, sans lequel il m'est impossible de vulgariser un systfeme que je crois appelö ä rendre de grands services; et je m'engage, pour leur garantie, ä faire pubJiquement les experien­ces auxquelles elles d6sireraient soumettre pröalable-ment ma möthode.
(1) Ce Systeme a ete expose pour la premiere fois dans une bro-cluire publiee en 1867, sous ce litre : De la Rug'', moyens de l'c-rifer.
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PREMIERE PARTIE
INTRODUCTION
Des le debut de ma carriere, mon attention se fixa par-ticulieremcnt sur deux maladies que les animaux avaient Ja triste faculte de transmettre ärhomme : je veux parlci-de la morve et de la rage. 11 me semblait que l'homme devait avoir la possibilite de se delivrer de ces deux fleaux.
De d848 ä 1857 mes recherches se porterent d'abord sur la morve qui decimait leschevaux du troisieme regi­ment de cuirassiers. C'est aux erreurs regrcttables d'un de mes collogues, qui etait mon chef de service ä ce regi­ment, que je dus de bien connaitre les causes de propaga­tion de cette maladie, connaissance qui m'indiqua les moyens de l'extirper (1).
Mais la morve ne se transmet que rarement ä l'homme; il n'en n'est pas de meine de la rage : c'est pourquoi je resolus de m'en occuper activement, et mes recherches sur les moyens de diminuer le nombre de ses victimes commencerent en 1859. Elles n'ont pas ete sans resullat, comme on le verra dans le cours de cet ouvrage.
(1) Ea effet, en 1856, vm dinev fut eifert Ji Versailles par le colonel du S0 cuirassiers, Ji l'occasion d'une lettro de felicitations sur le bon etat dos chevaux de son regiment, qu'il avait regue du miuistre de la guerre. Lo colonel porta un toast b. l'auteur de cet ouvrage, h qui, dit-il, on devait une grande partio des r^sultats obtenus.
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#9632;1nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; INTRODUCTION.
De 1839 ä 1872, j'ai regu dans raon infirmerie 1,219 chiens enrages: c'est le resume des observations prises sur cesanimaux qui forme le traite que je livre aujour-d'iiui ä la publicite.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;^
Je 1'ai divise on qualre parlies: la premiere expose les symptomes et Jes causes de la rage, la deuxieme deve-loppe son mode de propagation et la troisieme indique les moyens de combattre cette terrible maladie.
Dans la quatrieme partie, enfin, j'ai etudie la rage cbez le chat, ses causes, sa propagation, etc.
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,V'nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;CHAP1TRE PREMIER
CARACTERES DE LA RAGE
Symptömes generaux.
Quelques auteurs ont ecrit quo le meilleur preservatif de la rage etait d'en connaitre le debut initial.
Certes, cette science serait des plus utiles et produirait de bons resultats, si'elle n'etait pas tres-difficile ä acque-rir, meme pour les hommes de l'art. Souvent, en effet, les signes premonitoires de la rage se confondent avec des etats naturels de surexcitation, et presque jamais ils ne tombent sous les yeux du public.
II faut ä ce dernier un phenomene saillani, un Sym­ptome tout a fait extraodiuaire, changeant totalement ä ses yeux l'aspect habituel de Tanimal pour qu'il craigne on seulement qu'il soupgonne l'existence de cette funeste maladie.
Les exemples de cas de rage qui se produisent chez le chien, sans qu'aucune espece de signes premonitoires soient venus avertir son proprietaire, sont journaliers dans l'analyse des cas d'inoculation du virus rabique qui me sont passes sous les yeux.
Pour donner une idee des difficultes qui se rencontrent, lorsqu'il s'agit pour le public d'obtenir un renseignement
..
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inbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; DE LA RAGE.
serieux des le debut de la rage, je demanderai la permis­sion de repeter l'expression peut-etre un peu triviale dont se servent las gens qui m'amenent dos chiens enrages. laquo; Je ne sais ce qu'a mon einen, me disent-ils, il a l'air toutdröle (1). raquo;
Dix-neuf fois sur vingt, c'cst ainsi que, sans s'en dou-ter, ils me #9632;font la declaration des cas de rage.
Tout ce que je puis faire pour me rapprocher des idees emises par les auteurs auxquels je faisais allusion en commentjant, c'est de repeter au public les conseils que je lui donnais dans la brochure que j'ai publiee en 1867.
laquo; Si vous observez, ecrivais-je alors, un change-laquo; ment quelconque dans les habitudes de votre chien, laquo; isolez-le de toute communication avec les personnes et laquo; les animaux. Donnez-lui ses aliments ä part, observez-le laquo; quelque temps, quinze jours environ ; en un mot, con-laquo; siderez tout cbien malade comme suspect, et ainsi vous laquo; echapperez ä de terribles eventualites. raquo;
La description de la rage, de sa periode initiale ä sa periode ultimo, teile que Tont ropresentöo le celebre au-teur anglais Youatt et plus tard l'eminent academicien M. Bouley, ne pent s'appliquer seulement qu'ä un cer­tain nombro de chiens enrages.
Co qui, dans cette maladio, frappe d'abord l'obsorva-tour attentif, c'est la variete infinie des symptomes parti-euliers ä cette affection. 11 en est de tronte chiens enrages, comme do trente hommes atteints do folio ; chacun a son caractere special. C'est bien la meme maladie, mais eile diflere d'aspect.
On peut cependant classer los differences en trois grou-pes principaux :
(1) Certains disont: laquo; II est tout chose, raquo; ou bien : laquo; On le dirait toque. raquo;
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CARACTERES DE LA RAGE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; b
1deg; Les enrages muets qui sont les plus nombreux ;
2deg; Les enrages mixtes, qui aboient peu et mordent moderöment ;
3deg; Les enrages furieux, qui orient d'une maniere parti-cuiiere et, surtout, qui mordent.
Aussitot que le virus rabique a fait son evolution, l'ani-mal qui en a ete inocule est perdu. Les veterinaire? altentifs peuvent observer, comme signes premonitpires ou precurseurs de la rage, Tinnpatience, Tinquietude, les insomnies, un leger abrutissement resultant de la dimi­nution de la sensibilite pbysique des sujets dont la vie est alteinte.
Dans le cas oü un animal en proie ä une surexcitation quelconque aura mordu une personne qui en aura confii une fächeuse impression, la duree de la vie de Taninial est un criterium sür pour russurer le blesse. En effet, si quinze jours apres l'accident le ehien est encore en vie, cette personne ne court aucun danger. La meme obser­vation s'applique aux animaux mordus.
Enfin, je dirai que, pour moi, dont les erreurs dans cette triste matiere peuvent avoir des consequences per-sonnelles si funestes ; moi, qui ai eu a enregislrer la perle deplusieurs de mes collegues, parcequ'ils n'avaient pas reconnu le debut initial de la rage, je me base tou-jours SLirl'enseinble des pbenomenos irreguliers de l'in-nervation, par lesquels les diverses fonctions, dont I'en-semble constitue la vie, sont directement alteintes, pour diagnostiquer l'existence de cette rnaladie. Car on a souvent observe qu'un animal pent mourir de la rage en n'etant affecte que par un seul ordre de sensations, et, pour me servir de l'expression de Toussenel, generale-ment selon la passionnelle de cet individu.
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CIIAPITRE II
DUREEDE LA RAGE
Dans la derniere periodc de celte triste maladie, appa-raissent les phenomenes de la paralysie qui entraiae fatalement la mort, dans un laps dc temps qui, generale-ment, ne depasse pas huit jours. Au delä du quinzieme jour, les chiens que Ton avait soupfonnes, comme je l'ai dejä dit, peuvent, sans aucun risque, etre mis en liberte.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; ;#9632;gt;
Les enrages furieux, categorie assez pen nombreuse, comme i'a egalement observe le savant professeur de zootechnie de Grignon, M. Sanson, apres une vive exci­tation paraissent calmes, et ne sortent decette immobilite que lorsqu'ils sont provoques ou troubles par les chimeras qu'enfante leur delire. Leur epuisement, resultat de cette surexcitation, leur donne une expression sinistre et cause leur mort.
Les enrages mixtes perdent assez vile leur propension ä mordre et ne tardent point ä succomber ä la para­lysie.
Les enrages muels, chez qui la rage se manifeste d'une fagon beaucoup plus calme et qui entrent pour moitie dans les cas de rage que j'ai observes, ont pour sym-ptömes generaux : la gueule entr ouverte, ils bavent et portent la langue pendante ou placee sur le bord de l'ar-cade dentaire; l'expression de leur regard est douce,
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DUREE DE L\ HAGE.
triste, vague: le globe de Tceil est le plus souvent de-placö. Leur physionomie anxieuse inspire la pitie. Chez ces animaux la paralysie gagne peu ä peu toutes les par­ties du corps, la mort vient ensuite.
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CIIAP1TRE III
SYMPTOMES DE LA RAGE
Ce qui est la rage.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;Ce qui n'est pas la rage.
Temoignages d'affect ion. — Au debut de la rage, quelques sujets font des caresses plus vives 4 leurs maitres et aux animaux. 11s eprouvent principalement le besoin de lecher. D'aulrcs res-tent sombres, s'öloignent do la famille et cherchent I'obscurile.
Temoignages d'affection, — Le chien prodigue des caresses pro-voquges par la joie qu'il gprouve ä son retour au logis, la satisfac­tion de revoir ses maitres, la Sympathie pour d'autres ani­maux. Ou Men I'animal est som­bre par suite du chagrin que lui fait öprouver une punition in-juste ou trop violente, ou parce qu'il souffre de douleurs ner-\cuses, de rhumatismes, par exemple. La tonte le rend par­fois honteux.
Yue, —Les chiens, et plus par-tic uliörement ceux de couleur fauve, irritös, poursuivis, peu-vent avoir le regard brillant et leurs yeux peuvent lancer des lueurs fulgurantes. Le chien de combat, pendant la lutte, a I'oeil anitne, injects, menagant.
Oaie. — L'6tonnemenl, les roves, les hallucinations que j'ai vuesdurersix mois surle chien de M. Annois, rue Fontaine-au-Uoi, 33, les pröoecupations pas-sionnelles de la chasse, les do-sirs g6n6siques peuvent faire que
Vice. — Lc regard cst rarcment naturel , il est ordinairement triste, vague, brillant ou mena-gant ; Taxe de reell est quclque-fois deplace et s'engagc sous la paupiere superieure. Les rayons lumineux rimpressionnent vive-ment; les yeux sent parfois in-jcctiis do sang.
Ouie. — Elle est surexcitfie par lc moindre bruit ou affaiblic pen­dant la duree des hallucinations. Chez quelques sujets on remar-que une doulcur intense ä l'inlö-rieur de Toreille ou une #9632;vive d6-mangeaison dans cette partie.
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SYMPTOM ES DE LA. RAGE.
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Odorat. — Le chien cnragö flaire le sol avec persislance. II loche avec passion les urines, sans y etre excite par les effluves de la chienne et sans en avoir l'habitude. Le reniflement esl fröquent, et l'animal enragsect; se gratte parfois önerglquement le nez avec ses pattes, comme s'il 6tait gone par la presence d'un corps ötranger.
Goüt— L'appdtit est perverti, l'animal mange plus gloutonne-ment ses aliments ordinaires. 11 ingire des corps etrangers qui ne peuvcnt le nourrir, tels que plafre, graviers, paille, polls, herbe, lapis, linge, etc., etc. J'en ai vu avaler leurs excrömenls.
Youalf, savant anglais, qui le premier a donne une bonne des­cription des signes prcmonitoires de la rage, considere comme un des symptömcs les plus caraclö-ristiques de cette maladie, 1'acte du chien qui mange ses excrö-ments. 11 serait imprudent de faire de cette observation une regie pour däterminerl'existence de la rage, puisque, comme je le dis plus loin, des chiens parfai-tement sains ont cette habitude.
Etat de la peau. — La rage d6-bute assez souvent par des de-mangeaisons vives ä la peau, au nez, aux palles, aux oreilles. L'a-cuite de ces demangeaisons est teile dans quelques cas, que des
l'animal n'entende pas quand on I'appelle. La musique exalte ce sens.
Odorat. — Le chien flaire par suite de dösirs provoqu^s par les temps du rut ou parce qu'il est d'unc nature ardente. Atteint de coryza, l'animal renifle.
Gout. — Les chiens affects de pica (nevrose de l'estomac, ul-cerations, etc.), lorsqu'ils sent jeunes, pendant leur dentition, ou lorsqu'ils ont des convulsions ont des aberrations d'app^tit. M, Eggly, rue de Provence, 60, posseduil un vieux chien qui devorait les tapis, les rideaux ; j'ai vu des chiens parfaitement sains ingerer leurs excrgments.
Etat de la peau. — Les mala­dies de la peau tr^s-communes chez les cbiens n'affeclent pas les fonctions de relation desani-maux qui en sent atteinls. Elles n'ont gönöralement pas un d6but
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DE LA RAGE.
chiens vont jusqu'ä s'arracher des lambeaux de chairs.
Envie do mordre. — Une des manies les plus fixes et la seule dangereuse des chiens enrages consisle dans cette propension qu'ils ont ä prendre lögerement entre leurs denls les doigts des mains, lespieds, de mordiller les chaussures, de ronger, de mordre avec vivacitfi les tapis,1es meubles, lebois, elc; et enfin de mordre les personnes, les animaux, surloul ceux de leurespöee donl la pre­sence estpour eux generalement une cause de surexcitation.
Ces actes s'aecomplissent, con­tra l'liabilude, sans motif ni pro­vocation aueune.
II esl bon de remarquer que le chien enrage devient sournois, hargneux et traitre; si son mai-tre l'appelle, il peut avoir en ap-parence toute la douceur habi­tuelle; il remuera la queue en affeetant un air de salisfaclion ; puls, toutä coup, csect;dant ä une impulsion subite et irresistible, il se jette sur lui et le mord. Le danger peut existeraussi bien au debut de la rage que dans la Pe­riode la plus avaneee.
Aboicmcnt. — Le timbre de la voix est alterö ; l'ömission, en-trecoupöe, est falle en deux temps composes. Tun d'une note grave, l'autre d'une note aiguc, imitanl le plus souvent le cri du chien courant enroue par la fa­tigue.
brusque, et il est exceplionnel qu'ulles provoquent des lesions de la peau.
Envie de mordre. — II y a des chiens d'un caraetöre mechant et qui mordent a lout propos. D'au-tres, agaeös ou effrayes, mordent pour sedefeiidro. D'autres fois, il y en a qui, pour avoir la pos­session d'un os, par jalousie des caresses de leurs mailres ou des animaux qu'ils preferent, n'6-pargnont pas les coups de dent ä leurs sembkbles.
Dans certains cas de delire maternel, la chienne devore des objels divers, et eile peut mordro avee fureur.
Aboiement. —J'ai entendu des hu dements semblables ä ceux des chiens enrages, par deux de ces animaux qui avaicnt 616 vo-16s ; Us avaient en memo temps des hallucinations. Des chiens ä la recherebe de leur mailre aboientquelquefoisdeceltefagon.
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SYMPTOMES DE LA HAGE.
11
Le chien enragö n'aboie pas toujours,il peut möme conserver son aboiementnalurel.
Sur qualre chiennes atteintes de delire maternel, toutesavaient l'aboiement entrecoupö en deux temps formfis. Tun d'unc note grave et l'aulre d'une note aigue söparße d'un intervalle, en un mot, toulel'apparence de l'aboie­ment rabique.
Attitude. — Le chlen a sou-vent une attitude craintive lors-qu'il se trouve hors de la sphere de ses relations ordinaires. La paralysie, la fatigue, la crainte d'une correction lui font porter la queue basse.
S'il est coureur par caractere, il quittc frcquemment le logis ; il decouches'il trouve une chienne en chasse.
L'attitudepeut devenir mena-gante chezun chicnegare, pour-suivi, soit qu'il ait peur, soit qu'il veuille se defendre.
Rien ne rcssemble plus ä un chien enrage que I'animal qui a perdu son logis el contre lequel s'ameutent les passants ; errant, quelquefois poursuivi comme un etre dangereux, sonoeils'injecte, il mord ; la fatigue, la frayeur font ecumer sa bouche qui, cou-verte de poussiöre, prend un as­pect sinislre.
Aptitudes. — Les corrections violentes peuvent les modifier chez les chiens qu'elles ont ahu-ris; elles sont souvent alterfies par les chagrins profonds qu'eprou-vent des favoris fidöles de la
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Attitude. — La moilisect; des en­rages sont querelleurs, liardis. 11s perdent le sentiment de la crainte. L'animal se croit chez lui quand il esl chez les aulres. il portc la queue relevee, eile s'a-baisse sous reffet de la fatigue ou de la paralysic (I). Tantöt il est calmc et restc immobile, tan­töt il a un desir ardent de cou-rir ; sa demarche a des allures singuliöres, c'est celle d'un fou. Les sorties du logis sont provo-que'es par dos manies bizarres, par des desirs gönösiques, pres-que toujours surexcit6s dans cette funeste maladie; il fait des absences danslajournöe, decou-che parfois. Dans quelques cas, il ira au loin dans la campagne, mordant les hommes, les ani-maux qu'il rencontre sur son passage, jusqu'ä ce qu'il tombe ansect;anti; en expirant, il veut raordre encore.
Aptitudes. — Certains cbiens de chasse se montrent tout d6-concertßs sur les pistes; dans quelques cas, ils broient le chaume, les arbrisseaux, font des
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) Le public accordo beaucoup trop d'importanco ä ce signe.
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12 DE LA.nbsp; RAGE.
arröts imaginaires ou bien four-nbsp; nbsp;perle de leur maitre ou d'un
nissentdescourseseffrönöes, n'o-nbsp; nbsp;commensal afl'ectionnö. On a vu
böissant plus ä la voix de leurnbsp; nbsp;des chiens fouir la terre qui re-
maitre : d'aulres, contrairementnbsp; nbsp;couvrait un cercueil, s'absorber
ä leurs habitudes, devorent lenbsp; nbsp;dans la douleur la plus navrante
gibier ou mordent ceux qui s'ap-nbsp; nbsp;et rester dans la chambre du
prochent trop pris d'eux pournbsp; nbsp;mort pendant pris de quinzc
les corrigor. Des chasseurs ontnbsp; jours, saus vouloir prendre au-
dü la perle de la vie :t celle im-nbsp; nbsp;eune espece de nourrilure, ca-
prudence inconscienle.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; dies sous le lit de celui qui n'6-
II faul se defier du chien qui,nbsp; nbsp;lait plus, ordinairement d'un caractibre doux, se montre toulä coup que-relleur avec ses compagnons de chasse, si surlout la lice ou la possession d'un os ne peuvent expliquer celle surexcilalion.
Tenne dam les chmils. — Onnbsp; nbsp; nbsp; nbsp;Tenuo dans les chenils. — Le
volt tout ä coup les chiens, sansnbsp; nbsp;chien attachenouvellement dans
cause apparenle, ronger leurs at-nbsp; nbsp;le chenil tömoigne une impa-
taches, le bois des niches, lesnbsp; nbsp;tience due soil ;i la crainle, soil
plfilrcs des murs; dansleur löge,nbsp; nbsp;au desir de retourner aux lleux
ils tömoignent une impatiencenbsp; nbsp;qu'il a quiltes.
inaccoulumöe; ils changent sou-nbsp; nbsp; nbsp; Dans quelques cas, le chien se
vent de place, fouillent partout,nbsp; Jette avec fureur sur les bar-
ramassent lalitiöredans un coin,nbsp; nbsp;reaux desa löge,les delruil pour
puis Feparpillcnt ensuite, ils ennbsp; recouvrer sa liberte. Ccs desor-
avalenl. Ilssejettent sur lesbar-nbsp; nbsp;dres se produisent principale-
reauxde leur logo, tanlölavecfu-nbsp; ment lorsque l'animal est surex-
reur, lantöl avec indifference;nbsp; nbsp;eile par le desir de suivre sou
quelquefoisilsymettentlanld'ar-nbsp; mailre ou le cbeval de ce der-
deur qu'on en a vu s'y brisor lesnbsp; nbsp;nier lorsqu'ils sorlenl.
mächoircs, d'aulres prennent lenbsp; nbsp; nbsp; Exceplequelquesjeunes chiens
bälon qu'onleurpresenle ettirenlnbsp; nbsp;quiaiment ä jouer, ces animaux
dessus avoc fureur. On voll mflmenbsp; nbsp;restent generalement impassi-
des chiens enrages se preeipilernbsp; bles lorsqu'on leur lend un mor-
avec frenesie sur un fer chauffenbsp; nbsp;ceaudebois quelconque.
ä blanc et faire tous leurs efforlsnbsp; nbsp; nbsp; Les chiens en sante se mettent
pour Tarrachur des mains de ce-nbsp; nbsp;quelquefois en arret devant les
lui qui le leurpresente.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;mouebes.
II y en a qui restent aecroupis,
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SYMPTOMES DE LA RAGE.
13
immobiles dans un coin, d'autres se mettent en arröt devant des objets imaginaires; ils simulent parfois les gestes des chiens qui prennent des mouches.
Functions digestives. — Le chien enragö, lorsque la maladie est encore ä son debut, peut pren-dre sa nourriture comme ä l'or-dinaire ;le plussouvent, il cher-clie ä boire, mais, s'il y a para-lysie de la gorge, il laisse relom-ber los boissons au fur et ä me-sure qu'il les lape.
Unauleur dilque le chien en-ragö a horreur de l'eau. Celle assertion est erronee, comme je l'ai constate maintes fois et, avant moi, de la Bire-Blaine.
J'ai cependant observe un fait que je cite ici ä cause de sa ra-rete. Le 4 juin 1804, M. Wolls, rue Menilmontant, 71, m'amona son einen qui etait enrngä ; les symptOmes qui se manilestcrent chez cet animal consistaient en utie peur invincible de l'eau. II mourut peu de jours aprös.
Les vomissements sont fre­quents, souventsanguinolcnls.
La salivation est un fait peu constant, blendes enrages ontla bouche söclie, quelques-uns sou-lement salivent. Ceux qui ont la gueule böante bavent ordinaire-ment.
Le 16 septembre 18ö9, le chien de M. Girardot, artiste lyrique, fut amene chez moi et je consta-tai qu'il ötait enragö. M. Girar­dot, ne voulant pas croire ä man
Fo7ictions diQestives. — Dans bien des maladies graves, l'appe-tit du chien pour les aliments so­lides diminue ou meme se perd completement. Les inflamma­tions d'cntrailles notamment produisent cet efl'et. L'animal, dans certains cas, refuse (oule espöee deboisson. Certains chiens boivent naturellement fort peu.
J'ai vu römotion faire saliver des chiens qu'on amenait ä ma consultation. Los convulsion-naires, les ßpileptiques, pendant leurs attaques, salivent beau-coup,
La salivation pent aussi etro produile pardes aphthes dans la bouche, le scorbut, la carie des dents ou la presence de corps strangers.
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DE LA RAGE.
diagnostic, pria son ami M. De-larond, alors direcleur de recole vetörinaire d'Alfort, de venir le visiler il mon ßlablissement. Lorsque lo savantdirecleur entra dans ma conr, on entendait uboyor le cliien de M. Girardot. laquo;M. Bourrcl, me dit-il, combien avez-vous de cliiens enrages ? — Un seul, monsieur le Direcleur, et c'estcelui de monsieur.raquo; xVlors
se lournant vers M. Girardot : laquo; Mon ami, dit-il, ton chien est enragä. raquo;
On voit par ce qui pröeöde, combien 6tait accentuä, chez cet animal, l'aboiement particulier amp; la rage; il avait comme autre Symptome une envie effrßnöe de mordre. lili bien, ce chien ne cessa de boire et de manger qu'a-vec la mort.
En somme, les signes fournis par les fouetions diges­tives eclairent peu le diagnostic. Le public leur aecorde beaueoup trop d'importance.
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CHAPITRE IV
PARTICULARITES
Le 14 mars 1872, M. Fresne, rue de Meaux, 22, amena ä mon etablissement un chien metis epagneul, äge de cinq ans, dontla physionomie iui avait paru inquiete : eel animal avait gratte les plätres de sa niche et en portait encore des traces sur les dents. II avait mordu a. la tete un terrier qui vivait avec Iui.
J'observai chez Iui les symplomes suivants : decubitus en cercle , frissons sur toute I'etendue de la peau ; il etait d'unetres-grande impressionnabilite aux courants d'air ; son aboiement n'etait pas rabique., mais se rapprochant de celui des chiens atteints de choree aigue.
J'ai dejä observe plusieurs fois ces memes symptomes et cru ä la rage sans certitude : mais le terrier, qu'il avait mordu, presenta exactement les memes phenomenes trente-cinq jours apres, ce qui eclaira completement mon diagnostic. Pour moi e'etait I'afGrmation de la rage.
Ces cas se presentent rarement, et on voit quelquefois, parmi les sujets chez lesquels ils se produisent, des chiens qui tordent le cou et out des spasmes, ils ne tardent pas a etre perclus de tous les membres.
II est des chiens enrages doux et caressants pour les sujets de leur espece : par consequent le reactif que Ton conseille comme devant completement eclairer le diagnos­tic dans les cas douteux, et qui consiste ä presenter des ani-
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16nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;DK LA BAGE.
maux de son espece au chien enrage pour l'exciter ä mordre pent introduire dans des erreurs fatales ceux qui l'eniploieraient. A l'appui de cette assertion je ne citerai que las deux faits suivants:
Le 4 septembre 1864, M. Gazin, demeurant ä Paris, rue Saint-Laurent, 45, impasse Jeandel, 4, m'amena un petit epagneul äge de deux ans. II etait enrage et, au lieu d'etre surcxcite par la vue des chiens, il les caressait avec beaucoup de grace, tandis qu'il se jetait avec frenesie sur les chaises.
Le 1quot; decembre 1873, M. Morin m'amena un chien terrier äge de cinq ans. Le matin de ce jour il avait etc con­duit chez M. Gatineau, veterinaire a Paris. Celui-ci, re-marquant des allures singulieres chez cet animal, 1c mit en presence de deux cbiens. 11 detourna la tote: cepen-dant M. Gatineau doutait, et il envoya I'animal chez moi oü il mourut enrage.
On a dit que le chien enrage quitte le logis qu'il habite, parce qne, ayant conscience de son etat, il ne vent pas exposer un maitre affectionne au danger d'etre mordu par lui. J'avoue qu'il m'est difficile de partager ccttc opi­nion. Le chien fuit son logis^ dit-on. Oui, le chien fuit son logis, mais pour y revenir dans les vingt-quatre heures. Comment admettre en effet que I'homme, animal intel­ligent par excellence, ait tant de peine ä acquerir la notion du virus rabique, tandis que le chien, au moment oü il esl malade, c'est-ä-dire, lorsque ses facultes meme les plus developpees sont comme obscurcies, arrive de prime sautälaconnaissance du danger auquel sa presence expose son maitre,
Le meme auteur ajoute que les proprietaires de chiens ont pour eux le benefice d'une certaine grace d'etat,
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PARTICULARITES.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;17
qu'ils jouissent d'une certaine immunite. 11 est certain que le chien, habitue ä etre docile envers son mailre, n'entre pas, du jour au lendemain, en revolte contre lui; I'animal pent elre dangereux pour les etrangers, sans I'ctre pour son maitre. Mais il ne fautpas s'y fier, attendu que le mal, en se devcloppant, Yiendra incvitablement paralyser co sentiment chez le chien et alors son maitre, se trouvant constamment en rapport avec lui, sera plus expose que personne.
N'cst-ce pas accorder k I'animal une notion qu'il ne pent avoir que de dire, comme on I'a fait, que le chien en santc fuit le chien enrage, parce qu'il pressen! le dan­ger auquel il s'expose. Les chiens s'eloignenttoujours par un instinct naturel de conservation de leur espece dont l'cxpression du regard est menagante, qu'ils soient sains ou malades. M. Hugo, vcterinaire principal, ecrivait ä ce snjet en 1838 : laquo; Un chien ne reconnait pas la rage chez laquo; un autre ct n'en n'a point peur. raquo;
On a voulu empecher la propagation de la rage, en faisant connaitre aux proprietaires de chiens les signes premonitoires qui se manifestaient an debut de cette ma-ladie; mais, outre que, ainsi que je l'ai demontre plus haut, la connaissance de ces signes est presque impossible pour le public, le premier indice que Ton recueille de l'inoculation du virus rabique est bien souvent le desir invetere de mordre.
Je pourrais citer nne quantite de fails a l'appui de cette assertion, je me contenterai d'en rapporter trois.
Le 8 fcvrier 1865, M. Pierrot,, marchand, boulevard Richard-Lenoir, 91, m'amena une chienne griffonne qui etait enragee; le seul Symptome qu'elle presentat etait
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un besoin constant de mordre les chiens qu'elle trouvait sur son passage.
Le 8 mars 1867, M. Lombard, passage du Renard, 12, me conduit un chien atteint de la rage. La seule preuve que j'en pus avoir, apres une observation minutieuse, consiste en un besoin irresistible de mordre tout ce qui se trouvait ä sa per tee.
Le chien de M. Harne), rue des Bois, ä Belleville, alteint de rage furieuse le 25 Janvier 186S, a pour Symptome unique le besoin de mordre toutes les personnes qui l'ap-prochent; il est doux envers les chiens.
On voit par lä combien est insuffisant le moyen pre-ventif de la rage qui consiste seulement ä en signaler le debut, puisque ce meme debut se manifeste generalemcnt par une morsure.
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CHAPITRE V ETIOLOGIE DE LA RAGE
Son origine, sa nature, son siege.
Les ecrits de Celse, de Plutarque, ecrivains de l'anti-quite; ceux de Cullen, de Girard de Lyon et de Bosquil-lon (1); les ouvrages, opuscules, rapports, discours des savants contemporains qui ont fait une etude speciale de la rage, tels que : Triollet, Willerme, Renault, Youatt, Boulcy (de I'lnstitut), Sanson, Reynal, etc., ne nous ap-prennent absolument rien sur l'origine du virus rabi-que ; ils ne sont pas plus explicites sur sa nature et sur son siege.
Je demanderai au lecteur de me suivre dans los re-cherches que je vais faire pour essayer d'elucider cette question.
Et d'abord quel est l'origine de la rage?
Un auteur, partisan et propagateur de l'idee de spon-taneite de la rage et dont nous aurons plus loin ä exa­miner l'opinion, se sert de rargument suivant: il y eut un premier chien enrage, done la rage peut etre spon-tanee! Pour le moment la premiere partie de ce dilemne seule nous Interesse.
(I) Ces deux demiers auteurs nialent l'existence du virus rabique et at-tribuaient les desordres qu'il cause it une lesion speciale du systfeme ner-veux.
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Oui, il y eul un premier chien enrage, mais ä quelle epoque? Le grand malheur, c'est que les vetcrinaires de ce temps n'ont point signallaquo; l'apparition du virus rabique dans lours laquo;recueilsde medeciue veterinaire raquo;.
A vrai dire, l'origine do la rage doit so perdrc dans la nuit des temps. Mais la Bible n'en parle pas. On a cite un passage d'llomerc qui semblerait avoir trait ä cette triste maladie, mais cst-ce bien interpreter I'ex-pression du grand poeto grec? 11 en est de meine d'Aris-totc, le grand philosophe auquel nous faisons dire chaque jour une foule do choses qui ne lui sont bien probablement jamais venues ä l'idee. Plutarque est le premier auteiir qui traite de la rage d'une fafon non equivoque; pour lui, c'etait une maladie nouvelle qui aurait fait son apparition du temps d'Asclepiade.
Faut-il en deduire que cette affection n'a commence ses ravages qu'ä cette epoque? Je ne le crois pas, je crois beau-coup plus plausible d'admettre que les nombreuses con-quetes de l'empire romain out importe chez lui cette ma­ladie, qui devait exister bien anterieurement chez im des nombreux peuples qu'il a soumis ä sa puissance.
On le voit, los auteurs des temps les plus recules, ceux qui sont venus apres eux constatent simplement l'appari­tion de la rage, mais n'en connaissent pas l'origine.
Voyons maintenant quelles sont les causes de la rage.
La recherche des causes de la rage, ce mirage qui nous seduit tons, est d'un si haut interet que, pour arriver ä une solution serieuse de ce prohleme, je suis oblige de proceder par elimination. Je dois done laisser de cöte toutes ces idees surannees qui se trouvent emises d'äge en äge, d'auteur ä auteur sans aucun resultat capable d'e-claircir un tant soit peu cette question. Ainsi on adit
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que la rage pouvait etre occasionnee par rintensile des rayons solaires, au moment des grandes chaleurs, par la privation d'aliments solides ou liquides, par la conirainte qu'imposait au chien la muselicre, etc. Essayer de repon-dre ä ces suppositions serait perdre mon temps.
J'ai ä analyser un tout autre ordre de causes de rage , dite spontanee, et attribuees ä des motifs bien divers par des veterinaires, des medecias, ou des parli-culiers.
1deg; Influence du chagrin (1).
Le 22 mai 1863, M. Petit, marchand de vin, rue Simon-Lefranc, 27, me presente un chien alteint de rage; il attribue ce fait au chagrin qu'a eprouve cet animal de la perte de son commensal, un chat, qu'il affectionnait beaucoup.
Le6 fevrier 1866, M. Delarue, passage d'Angouleme, m'amene un chien loulou, äge de 3 ans, et qui, dit-iljCst devenu enrage parce que, comrne dans le cas precedent, le chat de la maison l'a quitte.
Le 23 fevrier 1866, M. Suchard, 46, rue d'Angouleme, conduit ä mon etablissement un chien loupäge de 8 mois, malade depuis cinq jours. Get animal fuit le logis, a le goüt perverti, cherche partout, ne joue plus avec les chiens, a maigri subitement. On remarque une grande faiblesse du train posterieur, voix rabique, des vomisse-ments. Le proprietaire attribue ce cas de rage au chagrin qu'a eprouve ce chien du depart d'un apprenti qu'il n'a cesse de cliercher depuis.
Ces trois cas sont les seuls, de ce genre, qui aient ja-
(1) II est bien entendu que ceci n'est pas teit pour les hommes qui ont traits spficialement de la rage, mais bien au contraire pour le public chez lequel ces id^es ont trop souvent de la prise et que je dois Sclairer.
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mais ete signales ä retablissement special pour les mala­dies dos chiens qua je dirige.
L'homme impartial et consciencieux qui, n'ayant pas de parti pris dans la question, I'etudie de sang-froid, est amene ici naturellement a so demander :
De ce que leurs proprietaires attribuent ces cas de rage au chagrin eprouve par ces animaux lors de l'eloigne-ment de leurs commensaux, peut-on serieusement en de-duire : 1deg; que ces chiens n'aient jamais ete mordus par un de leurs semblables atteint de la rage, lorsque leur maitre n'avaitpas Toeil sur eux; 2deg; que par consequent ce soient lä des cas de rage dite spontanee?
J'avoue que, tant que je n'aurai que des faits de ce genre ä enregistrer, ils ne me prouveront pas que le cha­grin puisse produire la rage dite spontanee. 2deg; Influence de lapeur.
Le 11 novembre 1863, M. Imbert, rue du Grand-Chan­tier, JO, conduit ä mon elablissement un chien terrier fortement constitue, äge de 2 ans.
Get animal paraissait abruti, sa demarche etait chan-celante; il avait des hallucinations, la voix de la rage et etait dans un etat de paralysie avancee ; en un mot, il pre-sentait des symptömes non equivoques, il eiait en­rage.
M. Imbert afßrme que son chien n'a pas sailli, qu'il dedaignait les chiennes et leur preferait les chiens. II etait d'une nature ardcnte, sensible, intrepide au combat. II y a six mois qu'il s'est battu, et, depuis, chaque fois qu'il se trouve en presence du maitre du chien avec le-quel il a ete aux prises, il eprouve une grande frayeur qui se Iraduit par des spasmes. La derniere impression a ete ressentie deux jours auparavant. Conduit ä Alfort, cet
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animal y mourut le 14. On trouva ä l'autopsie des corps etrangers ä ralimentation dans l'estomacet l'on constata une vive inflammation de la maqueuse intestinale.
Certes, voila un fait interessant et l'on pourrait en deduire que la peur a occasionne la rage dite spontanee chez ce chien, sirargument dejä exprime netrouvait passa place ici :qu'est-ce qui prouve que ce chien si querelleur ne se soitpas attaque äun animal enrage dont il ait ete mordu ?
3deg; Influence des rapports sexuels.
M. C. Leblanc ecrit dans le Recueil de Medecine veteri-naire (octobre 1873, page 754) :
Observation I [fevrier 1864). — Le 19 fevrier 1864, M. X., laquo; demeurant 52, chaussee Clignancourt, me presente un laquo; chien de Pomeranie, vulgo loulou, äge de 8 ans, sous laquo; poil noir et blanc, qui est atteint de la rage furieuse. laquo; Get animal n'a jamais convert de chienne et ne sortait laquo; jamais qu'accompagne de son maitre ou du fils do laquo; celui-ci; il n'a pas ete mordu ni renverse par aucun laquo; chien. La personne qui faisait le menage de M. X. avait laquo; une chienne en chaleur vers la fin de decembre 1863, laquo; et ses vetements etaient impregnes de l'odeur de cette laquo; bete, aussi le chien etait-il continuellement apres cette laquo; femme, la suivant et se frottant apres eile. Pour se de­ft barrasser de cette poursuite, eile amena sa chienne, et laquo; voulut la faire couvrir par le male ; il ne put, en raison laquo; de sa petite taille, y parvenir, el s'echauffa inutilement. laquo; Deux mois apres, la rage furieuse se manifeste, et la laquo; mort eut lieu le21 fevrier.
En tete de cette citation, I'auteur met: laquo; Tons les cas laquo; de rage spontanee que je cite onl ete pris dans des con-sect;gt;nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;laquo; ditions telles que, pour moi, il n'y a pas de doute sur
laquo; l'origine de la maladie. raquo;
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Je pense que, de ce qui precede, il ressort pour tout le monde que l'auteur attribue ä des desirs genesiques non satisfuits le developpement de la rage chez ce chiea; voyons un pen si apres discussion nous pourrons etre de sou avis.
L'auteur dit que cet animal n'a ete ni mordu ni rcn-verse par aucunchien et s'empressc d'en tirer la conclu­sion ci-dessus.
Mais, comment peut-il savoirque ce chien n'a pas ete mordu par un de ses semblables?On mc dira qu'il ne sortait jamais qu'accompagne d'un de ses maitres, et que, s'il en avait ete ainsi, ils le lui auraient dit.
En est-on bien sür ?
II ne faut pas faire tant de foi sur les dires des clients et, pour preuve, voici un fait qui s'est passe chez moi et dont je puis garantir l'exactitude.
Madame X..,, rue Portefoin, 16, possedait un chien de tres-pelite espece, du volume du poing; il devint enrage, eile nie l'amena.
La dame en question ne sortait son cheri qu'en le por-tant dans ses bras, il n'avait jamais foule de ses pattes le pave de Paris. Aussi, se recria-t-elle bien fort quand je lui declarai que Toto avait ete mordu par un chien en­rage ; trouvant cette occasion favorable, et esperant pres-que etre ä meme de constaler un cas de rage spontanee^ je fis une emjuote rigoureuse, et voici ce que je decouvris.
Dans la maison qu'habitait madameX..., se trouvait une cour, oü eile deposait son chien en rentrant, pour qu'il satisfitses necessites. Or,unjour, un camionneur s'y trouvait avec son chien, un terrier, qui roula et mordit le petit favori. Ce terrier vintdeuxjours apres a mon in-firmerie, il y mourut de la rage.
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D'ou je conclus, naturellement, qu'il ne faut faire au-cun fond sur les dires des proprielaires. Souvent, leurs renseignements sont intentionnellement faux, et, lors meme qu'ils sont de bonne foi, leurs rapports sont tou-jours insuffisants. Si j'en croyais mes clients, les qualre cinquiemes deschiens enrages qui entrent dansmon eta-blissement seraient atteints de rage spontanee.
11 faut etre plus difficile lorsqu'il s'agit de trouver les preuves scientifiques de l'existence d'un phenomene, et Ton ne pent pas ecrire que l'origine d'une maladie est teile, parce que Jean, Pierre, ou Paul ontaffirme qu'il en etait ainsi.
EXEMPLES D'EXALTATIONS GENES1QUES NON SUIVIES DE EAGE SUR DES CHIENS.
Observation!.—Le 1quot; juinl866, un chien bull-terrier appartenantäM. Lemoine, rue Mazarine, 36, presenta un etat d'erotisme si puissant qu'il offrit les apparences de la rage. Depuis six sernaines il avait des hallucinations, avalait de la terra, cherebait toujours comme s'il eüt eu pres de lui des mouches. Apres quelques jours de traite-ment il sortit non enrage.
Obs. II.—Le 31 decembre 1866, M. Birand, rue Saint-Denis, 28, m'amena un cbien terrier äge de 18 mois; il a\ait decouche trois jours, refusait les aliments, se jetait sur les chiennes. II avait un mouvement spasmodique dans les mächoires, eberebait ä mordre; prurit tres-violent. Non enrage.
Obs. III. — Le 3 fevrier 1863 M. Lagraveraud, rue des Trois-Bomes, 21, conduisit ä mon etablissement un terrier suspect. Dans la meme maison et appartenant au
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DE LA RAGE.
meme proprietaire se trouvait une chienne en chasse que Cesar voulait caresser, il etait tres-excite, on l'em-pecha de salisfaire ses desirs. Depuis cinq jours Tanimal ne mangeait plus, sa voix etait restee naturelle, mais il aboyait frequemment: il se monlrait tres-impatient dans la löge. Non enrage.
Obs. IV.—Le 10 fevrier 1864, MM. Paraf-Javal freres, rue du Chantier, 32, mepresententun terrier trcs-vigou-reux. II y avait deux mois que, pour la premiere fois, cet animal avait quitte le logis de ses maitres, son absence avait dure six jours; le28 Janvier, il disparutde nouveau. Lorsque je le vis, il avait perdu l'appetit et rongeail le bois. Son attitude etait bardie et il flairait avec avidite les odeurs. L'exaltation genesique est manifeste. Non enrage.
Obs. V. — Le 22 avril 1864, madanie Gormont, rue Aumaire, 21, me confia un cbien mouton äge de 5 ans. Depuis six jours, il ne mangeait pas. II y avait dans le quartier une chienne en chasse dont il etait tres-epris et il faisait faction ä sa porte depuis une quinzaine; lä, il s'echauffait tellement que, lorsqu'il revenait, il etait couvert de sueur. Sa patience avait ete vaine. Non enrage.
Obs. VI. —Le 10 fevrier 1863, M.X..., boulevard Ma­lesherbes, 32, me remit un bei epagneul, äge de 2 ans, sujet ä des excitations genesiques tres-violentes qu'il ne pouvait satisfaire. Non enrage.
EXEMPLES D'EXALTATIONS GENESIQUES NON SÜIVIES DE RAGE SÜR DES CHIENNES.
Obs. VII. — Le 2S juillet 1859, M. Langlois, bou-
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ETI0L0G1E DE LA RAGE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;27
levard Saint-Martin, 21, me conduisit une chienne d'ar-ret, ägee de 2 ans. Dans un acces de folie provenant de fureurs uterines, eile avail devore pour plus de 60 francs de tapis, rideaux, etc., dans une nuit. Son proprietaire la croyail enragce. Une saignee, le regime blanc la cal-merent. Elle n'etait pas enragee le moins du monde.
Obs. VIII. — Le 16 septembre 1839, M. Bertrand, quai Jemmapes, 226, m'amena une chienne de forte taille, ägee de 20 mois; eile etait en proie ä de vifs de-sirs qu'elle n'avait pu satisfaire. Elle avait beaucoup maigri, salivait abondamment; son ceil etait hagard. (Excitation hysterique). Non enragee.
Obs. IX. — Le 7 aoüt 1864, M. Lepart, rue Grange-aux-Belles. 37, conduisit ä mon etablissement une chienne en chasse depuis quinze jours. N'ayant pu avoir de rela­tions avec les chiens, eile etait devenue mechante et mor-dait ceux qui l'approchaient. Non enragee. J'appelle l'at-tention du lecteur sur ce fait que j'ai observe bien souvent.
Obs. X. — Le 19 octobre 1864, la chienne d'arret de de M. Boyer, rue Vanneau, 33, me fut amenee. Get ani­mal, äge de 15 mois, sous rinfluence de desirs genesi-ques, avait devore une couverture de laine et une che­mise. On la croyait enragee, eile ne l'etait pas.
Obs. XI. — Le 13 avril 1865, M. Palanque, rue de Bondy, 80, me conduisit une chienne de chasse. Surexci-tee par des chaleurs genitales, cette bete dechirait ce qu'elle trouvait sous sa dent et aboyait apres tout le monde. Non enragee.
Je pourrais poursuivre cette nomenclature, attendu que j'ai mainte et mainte fois observe des fails du genre de ceux qui precedent; je n'en vois pas la necessite, ceux que j'ai relates etant plus que suffisants pour que Ton
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2laquo;nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;DE LA RAGE.
puisse se faire une opinion sur la question qui nous occupe.
OBSERVATIONS SEMBLABLES A CELIES DE M. C. lEBLAMC.
l0Le 22 juiltet 1864, M. Cavillon, nie de la Marne, 30, ä Belleville, nie presente un chien orange, äge de 4 ans.
Renseignements : Get animal a couvert la chienne qui iui avait donue le jour, le 7 de ce mois, et le 14 il Ta mor-due ä l'oreille; cette chienne entra comme suspecte ä l'ecole d'Alfort le 23 juillet et le li aout eile mourait enragee.
Le chien de M. Cavillon temoignait un desir violent de mordre.
Le 23 juillet, il mangea gloutonnement du pain et de la viande et but de l'eau.
Le 24, il poussa des cris rabiques tres-accentues.
Le 2S, il a tons les caracteres de la rage, l'abatage est prescrit.
2deg; Le 13 juillet 1863, madame veuve Depressevillo, rue du Caire, 36, amene ä mon infirmcrie une chienne de chasse venant d'etre mordue ä l'oreille par un chien son commensal.
Gelte chienne etant en rut, le 30 juin, excita violem-ment les desirs genesiques d'un jeune chien de sa portee qui vivait avec eile. Get animal avait 2 ans et demi et voulait ä toute force la saillir, eile s'y opposa.
Ce jeune chien mourut enrage le 14 juillet, on mit alors la chienne en surveillance ; trois semaines apres el!o suecombait aussi.
3deg; Le 30 janvier 1866, M. Mares, 70, boulevard de Strasbourg, m'amene un chien loulou noir äge de 4 aus.
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ETIOLOGIE DE LA RAGE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;29
Huit jours auparavantcet animal s'est troirve en rap­port avec deux chienncs havanaises qui etaient en rut.
On remarqne un changement notable dans ses habi­tudes, il cherche a mordre les pieds et eprouvc de la sa­tisfaction qnand on lui frotte les cötes.
II mourut de la rage ä rinfirmerie.
Ces faits ont le tort de ne pouvoir fournir aueune preuve qui puisse etre invoquee par M. C. Leblanc en faveur de la doctrine qu'il defend.
Rien ne prouve en effet que ces chiens n'aient pas ete mordus anterieurement par des animaux de leur race atteints de la rage ; je dirai plus : pour certains cas ^cites par M. Leblanc oü les relations du male et de la femelle re-montent jusqu'ä deux mois avant la declaration de la ragesurle sujet observe, il se peut parfaitement que la morsure qui a inocule le virus aiteu lieu ulterieurement.
Dans des cas de ce genre, on pent tout au plus ad-mettre que la surexcitation causee par les desirs genesi-quesa pu hater revolution d'un virus entre dans le sang avant que les animaux dont il s'agit aient ressenti leurs influences.
Comment concevoir, en effet, que les desirs genesiques puissont produire la rage chez les chiens qui ne peuvent les satifaire. Cette theorie me parait en desaccord avec la raison humaine, et, comme on vient de le voir, eile n'est pas davantage justifiee par les faits, lorsqu'on yient a approfondir cette interessante question.
4deg; La rage peut-elle etre determinee par la morsure d'un chien quijonit dune bonnesante?
A cette question, categoriquementposee, Ilurtrel d'Ar-boval repond : laquo; Nous ne pouvons nous persuader, quoi laquo; qu'on en dise, qu'un chien en colere et furieux, mais
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DE LA RAGE.
laquo; non enrage, ait jamais pu donner la rage h un autre laquo; individupar des morsures. raquo;
Ccpendant ses adversaires citent des fails nombreux qni tendent ä etablir qu'un chien bien portant peut commu-niquer la rage.
Parmi eux se trouve le docteur Putegnat, de Luneviile, qui, en 1863, ecrivit un memoire ä TAcademie sur ce sujet.
M. Pietrement parle de denx chiens, Tom et Black. A la suite d'une morsure que lui fit ce dernier, Tom devint enrage et Black resta sain et sauf.
AI. Decroix cite le chien Patteau qui inocide le virus rabique pendantqu'il est indemne.
Le docteur Hermann-Strahl, d'apresla laquo; Revue medi­cate raquo; de mai 1873, a observe un cas d'hydrophobie ter-mineepar la mort äla suite d'une morsure fuite par un chien parfaitement sain.
Moi-meme, j'ai observe plusieurs faits de ce genre parmi lesquelsj'eu citerai trois :
1deg; Le chien de M. Rithz, boulevard Saint-Denis, 38, devient enrage le 19 fevrier 1863. 11 y a environ trois se-maines qu'une chienne ayant des petits s'est jetee sur lui et l'a mordu. Le proprietaire rapporte ä cet accident l'etat de son chien.
2deg; Le 3 avril 1863, M. Cottart, rue du Temple, 168, me consulta au sujet d'un epagueul, age de 3 ans, qui etait enrage. II y a deux mois, cet animal eul I'oreille droite pcrcee, de part en part, par la morsure dJun chien qui est bien portant. Son maitre afßrmait que son chien n'avait pas ete mordu depuis.
3deg; Le 8 mai 1865, M. Crouvain, rue de la Villette, 37, conduisit ä mon infirmerie un chien de chasse, äge de
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ETIOLOGIE DE LA RAGE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 31
2 ans. II fut expedie ä Alfort le 9 mai et y mourut. Son maiivc afßrmait qu'il avait ete mordu ä la patte im mois auparavant par un chien non enrage.
Quelle conclusion faut-il tirer de tons cos fails? Pour donner plus de poids ä ieurs assertions, certains auteurs ont ecrit que, lorsque le chien, cet animal dont le Systeme nerveux est doue d'une si grande sensibilite,, etait sous l'influence de la colere, ce sentiment occasionnait chez lui unc perturbation momenlanee, et ils ont trouve, dans cet etat, la possibilite d'une surexcitation susceptible de produire et d'inoculerle virus rabique. Mais, ce n'est lä qu'une hypothese qui aurait besoin, pour passer a I'etat de fait, d'etre appuyee de quelques preuves. Or, les ob­servations queje viens de citer peuvent-elles lui tenir lieu de preuves?
Si j'etais comme quelques personnes, comme elles, je repondrais oui, sans hesiter; mais, lorsqu'il s'agit de preuves scientifiques, je suis beaueoup plus difficile, beaueoup plus exigeant.
Un dient me dit: laquo;Monsieur, mon chien a ete mordu il y a deux mois par un chien qui n'est pas malade, et je vous affirme qu'il n'a pas ete mordu depuis. raquo; Nous avons vu plus haut un veterinaire qui ne demande pas autre chose qu'une bonne affirmation pour constater d'une maniere qui ne lui laisse pas de doute les cas de rage dite spontanee. Mais il me semble qu'ä l'idee du veterinaire il doit toujours venir une de ces observations: Volre chien n'a pas ete mordu depuis deux mois, maisavant? II a ete mordu par un chien bien portant, qui vous prouve qu'il ne l'a pas ete aussi par un chien en­rage? Si i'on se posait exaetement ces questions, il y aurait plus de doute dans l'esprit des partisans de la rage
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DE LA RAGE.
dite spontanee. Le proprietaire d'un chien afßrme qu'il n'a pas iete mordu par d'autres. Le proprietaire du chien pcut-ilsoutenir cette affirmation? Combien de temps faut-il done pour inoculer le virus rabique? Une seconde. La sollicitude du maitre n'a-t-elle pu etre mise en defaut pendant un si court espace de temps? 11 n'en a pas fallu davantage.
Madame X..., place de laCordonnerie, 8,avait un einen de garde qu'elio affectionnait beaueoup, il devint en­rage. laquo; Get animal ne me quitte jamais, me disait-elie, je vous \afßrme, je le descends moi-meme, jamais il ne sort. raquo; Queljoli cas de rage spontanee! Malbeureu-sement une enquete serieuse me fit decouvrir qu'un chien enrage errant s'etait blotti dans l'escalier, et avait mordu Medor au passage.
Pour en revenir ä la production de la ragö dite spon­tanee par la colere, je ferai observer ce qui suit.
Les evenements n'ont pas besoin d'historien pour les ecrire; ils frappent assez par eux-memes les personnes qui y assistent pour qu'il en reste au moins la me-moire.
Si la rage dite spontanee pouvait etre engendree par la colere, oü se serait-elle jamais mieux developpee qu'en Espagne, dans le midi de la France, en Angleterre ou ä Paris ä la barrieredu Combat,oü des bull-terriers luttent journellement pour la plus grande satisfaction de maitres barbares. Ces contrees ne devraient-elles pas approvi-sionncr le monde entier de chiens enrages? Qui a jamais entendu dire cela ?
5deg; Conclusions generales.
Les partisans de la spontaneite ou de la non-spontaneite comprennent trois groupes:
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etiologiü: de u. rage.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 33
1deg; Les partisans de la spontaneite frequente : MM. Le-blanc pcre et fils, Tardieu, Vernois, Le Ccetir, Lafosso, Huzard, ßlatin, Boucher, Tofloli, Grevo, Fleming, etc.
2deg; Les partisans de la spontaneite rare : MM. Reynal, Bouley qui accuse un cas de rage spontanee sur mille, Renault qui en cite trois cas seulement dans toute sa bril­lante carrierc, et encore, ily en a denx dont 11 n'etait pas bicn sur, etc.
3deg; Les partisans de la non-spontaneite : de la Bere-ßlaine, Rey, professeur ä TEcole de Lyon, Boudin qui ecrit que les contrees qui n'ont pas ctabli de communica­tion avcc l'Europe sont preservees de la rage.
M. Andre Sanson, esprit tres-positif, a public en 1860 un Traite sur la rage dans lequel 11 dit que les documents lui semblent insufflsanls pour etablir scientifiquement l'affirmation ou la negation de la rage spontanee.
Un des meilleurs arguments des partisans de la rage dite spontanee, c'est celui du premier chien enrage. Celui-lä est irrefutable et acquis sans contestation! Cependant, je me pcrmettrai une observation : ces messieurs admet-tent la spontaneite de la rage chez le chien, le chat, le loup, le tigre et le lion. Lequel de ces cinq animaux a commence? R se pent que le premier chien enrage ait ete mordu par le premier chat, qui, lui, a ete mordu par le premier loup, qui lui, etc... Cette question est bien difficile a resoudre.
Je ne vois pas d'ailleurs que, parce qu'il y a eu im premier chien enrage, tout en admettant que la rage ne lui ait pas ete communiquee, ce soit lä une preuve de la spontaneite de la rage. 11 y a eu un premier syphilitique. Qui a jamaisentendu parier de la syphilis spontanee?
Generalement, dans la science, on neglige les facteurs
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DE LA. RAGE.
premiers, pour ne s'occuper que de leur mode de propa­gation.
Si les spontaneistes, qui out trou\e des cas de rage spontanee, les examinaient bienafond, il leur arriverait ce qui cst arrive ä M. U. Leblauc ä propos du chien de M. Weber. M. U. Leblanc citait ce cas comme preuve de la spontaneitedela rage produitc par les desirs genesiqnes non satisfaits. M. Weber lui-meme a reconnu que ce fait etaiterrone.
Les partisans de la rage dite spontanee font quelquefois des exceptions. Ainsi Tun d'eux affirme que la chiennc n'est pas sujette ä la rage spontanee produite paries desirs genesiqnes.
Comment se fait-il que, ressentant comme le cbien ces meme desirs, eile n'en eprouve pas les effets?
Les spontaneistes disent que la rage spontanee peut naitre de desirs genesiques non satisfaits ou dela surexci-tation causee par la colere. Us s'etonnent que les expe­riences de Toffoli ne soient pas convaincantes; mais pour qu'nne experience soitprobante, ilfaut qu'on ne puisse lui faire quelque objection serieuse. Et c'est justement le caractere qui manque ä celles dontilestquestion.il n'est pas prouve que les chiens qui ont servi aux experiences de Toffoli n'avaient pas ete mordus par d'autres.
Qne ceux qui veulent se convaincre fassent naitre dans un chenil vingt chiens de combat; que, lorsqu'ils seront parvenus ä 1 age adulte,ils les excitent Tun centre l'autre.
Et si, apres avoir empeche toute communication avec le dchors, ils deviennenl enrages, je m'inclinerai tout le premier devant l'evidence, la rage spontanee pourra etre produite sousl'influence dela colere.
Qu'ils fassent, d'autre part, naitre dix chiens et dix
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ET10L0GIE DE L\ RAGE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 3b
chiennes dans un chenil diviseen dix compartiments, que dans chaque compartiment ils mettent un chien et une chienne separes seiilement par une claire-voie, afin qu'ils puissents'echauffer Fun l'autre; et, si des cas de rage se produisent entre eux, je conclurai ä la rage spoutunee produite par les excitations genesiques(l).
II ne suffit pas d'etre un savant, d'avoir un grand nom, pour qu'une affirmation quelconque ait de la yaleur, il faut encore qu'elle soit appuyee de fails incontestables. Toffoli affinneque la rage peut etre spontanee; scienlifi-quement il ne le prouve pas, scicntifiquement la preuve de la rage spontanee est encore a. faire.
SIEGE DE LA RAGE.
Le siege de la rage n'est pas determine par les rares auteurs qui en out ecrit.
Quant ä moi, je pense ne pas etre trop temeraire en emettant I'opinion suivante :
II est probable que le virus rabique, apres inoculation, entre dans le sang qui lui sert alors de matrice jusqu'a maturite. Ensuite il a pour emouctoire les glandes sali-vaires. Tant que le virus reste dissemine dans le sang, il n'est pas inoculable ; les experiences de Renault le prou-vent. Mais, lorsqn'il est accumule dans la bouche par les canaux salivaires qui I'y deversent, qui I'y concentrent, il est eminemment contagieux soit experimentalement, soit par inoculation naturelle par les dents pointues du chien.
(I) M. M^nficier a fait ces experiences, comma le rapporte M. Roucher, et le resultat en est contraire k celles do Toffoli; mais pour moi elles ne sont pas sufflsantes, parce qu'ellcs n'ont pas ete faites dans les conditions voulues, les sujets, dfes leiu- naissance, n'ayant pas 6te Isolds de tout rap­port cxt^rieur.
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CHAP1TRE VI
GUERISOX DE LA RAGE
Le Dante nous fait descendre dans l'enfer on habitent les mechants apres leur mort. laquo; Lasciate ogni speranza, raquo; laissez toute esperance, leur dit-il, lorsqu'ils y entrent. Et il considere comma le plus grand des supplices qui torturent les maudits cettc perte de rcsperancc. Souffrir, souffrir encore, souffrir toujours, n'est rien ; les philoso-phes stoiciens narguaient la douleur. N'esperer plus en qui ni en quoi que ce soit est terrible. Et c'estla, helas! la situation de rhomme enrage.
Sur 1,219 chiens enrages qui sout entres ä mon infir-merie, j'ai eu la douleur d'en voir la moitie au moins, conserves pour des raisons de prudence, jusqu'ä ce que la mort vint les frapper. Pas un n'a ete epargne. Pas un de ces malheureux animaux atteints de la rage n'a pu s'en guerir.
II serable pourtant qu'un rayon de lumiere yienne dimi-nuer la tristesse causee par celte hecatombe. Le virus rabique deiruit-il toujours la vie. La solution de ce pro-blenie, si eile etait negative, serait bien consolante et cette solution desiree, nous l'avons. Les experiences du savant Renault ont demontre qu'un quart des animaux inocules resle indemne.
On admet aujourd'hui l'existence de natures refrac-taires a l'aclion du virus rabique, qu'y a-t-il d'impossible
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GUERISON DE LA. RAGE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 37
a ce que des temperaments privilcgies lultent energifjue-ment contre les principes dissolvants du poison inocule et sortent quelquefois victorieux de ce combat dont la vie est le prix?
31. Decroix dans un interessant petit ouvragc qu'il a public en 1868 (1) cite plusieurs observations de cas de guerison de la rage qui, certes, sent affirmatives, puis-qu'il avail inocule lui-meme les snjets de ses expe­riences; que ces animaux apres un certain temps out donne des signes evidents de rage et en ont gueri, par leur propre force,
Le 18 juillet 1862, il inocula en Afriquc la rage d'un bomme ä un cbien. Seize jours apres, ce dernier eut des symptömes de la rage, mais il sc retablit. Ce vcteri-uaire distingue rapporte egalement qu'äl'article laquo;Rage raquo; du Dictionnaire public, en 18SÜ, par les professeurs de l'Ecole veterinaire de Lyon, on voit : laquo; que Ton a con-laquo; state dans les höpitaux plusieurs cas de guerison de la laquo; rage. raquo;
Je nc puis pcrsonnellement appuyer cette opinion de fails aussi positifs que ceux qui precedents Mais, dans l'ensemble de mes observations, j'ai ete parfois saisi de Tcvidence do fails qui s'en rapprochaient. Ils manquent, ä la verite, de la sanction principale, Ve'tat rabique bien et dümcnt prouve des animaux qui avaient mordu les su-jets observes. Cependant,tels qu'ils sont,je leslivre ä lapu-blicite, dans la pensee qu'ils pourront fortifier I'avenir d'une question quiinteresse äun si haul point I'humanite.
1deg; Le 26 aoüt 1868, M. Roussier, rue de Turbigo, 38, conduit ä mon infirmerie un chien metis blanc et marron, äge de 18 mois.
(1) Oe la i-ngre, curability tvaitement.
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DE LA RAGE.
Ce sujet avail ete mordu, depuis environ deux mois, par im einen inconnu,
Symptömes : Centre son habitude il a quitte son logis, il a mange des poireaux crus, de la paille, de ia corne, il loche le sol et renifle.
II sortit non enrage.
2deg; Le 9 novembre 1868, M. liervieux, 142, rue de Lafayette, m'amena im chien de chassc orange, äge de 2 ans.
II y a cinq mois, ce chien a ete mordu au nez par im chien inconnu, il perdit par sa blcssure beaueoup de sang et la plaie fut cauterisee huit minutes apres l'accident.
Symptömes : II a mange beaueoup d'herbes, il a des vomissements, gratte, ronge le bois, le carton, sa voix est alteree. Son proprietaire trouve pour le moment l'ensem-ble des habitudes de son chien tres-dröles.
Sorti non enrage.
3deg; Le 17 avril 1869, M. Dehais, rue Vieille-du-Tem-ple, 117, me conduisit im chien de Terre-Neuve age de 15 mois, qui avait ete mordu six semaines plus tot par un chien inconnu.
Arthur (nom du chien) grogne, il vent mordre son mai-tre, ses domestiques.
Sorli non enrage.
4deg; Le 12 novembre 1873, madame Martin, 9, rue d'Enghien, amena ä mon infirmerie une chienne, genre terrier fauve, agee de 6 ans, qui avait ete mordue trois mois auparavant par un chien mconnu.
Symptömes : Le jour de son entree ä Tinfirmerie, eile avait vomi, mordu du bois et du charbon;salanguesortait de sa gueule et y rentrait par mouvements continus.
Sortie non enragee.
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GUERISON DE LA RAGE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;33
Le Jesir de voir enfin uno porte de salut entr'ouverte aux malheureux desesperos m'a peut-etre fait attacher trop d'imporlance aux faits qui precedent; ils m'ont cepen-dant fait accueillir favorablement Fopinion de la possi-bilite de guerison de la rage par le seul effut dos forces de la nature. Cette theorie repond d'ailleurs a l'idee de l'eminent docteur Jules Guerin, lequcl admet, pour cer-taincs maladies virulentes, une periode d'ebanche suivie de guerison.
Anssi convaincu que mes devanciers de l'impuissance des remedes que possede la pharmacie inodenie, j'emploie toutc mon energie ä calmer le moral des personnes mor-dues par des chiens sains ou enrages.
II est ä noter que les personnes simplement contu-sionnees ou chez qui la peau, entamee d'une fugon pres-que imperceptible, ne laisse pas place ä effusion de sang, n'en eprouvent aueun effet, meme si Tanimal est en­rage.
Pour les individus mordus avec quelque danger, dont l'imagination surexcitee pent produire dans le Systeme nerveux des derangements beaueoup pins graves quo ceux produits par la morsure elle-meme, morsure qui n'entraine que tres-exceptionnellement l'inoculation, on doit, ä mon avis, employer tout ce qui pent les rassurer: amulettes, potions empiriqnes, voir meine la famense clef de Saint-Hubert, peuvent produire d'heureux effets chez ceux qui croient en leur vertu.
Voici, pour clore ce chapitre, l'histoire d'une situation originale.
Un jour, im des chauffeurs du remorqueur qui sta-tionne dans le canal Saint-Martin, au coin du faubourg du Temple, entra dans mon cabinet; il etait aussi sur-
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excite que possible, il y avait de quoi. Ses mains, ses bras venaient d'etre laboures par les dents d'un chien enrage : laquo; Je suis perdu! raquo; me dit-il. — laquo; Ah ! farceur, lui repondis-je en riant, encore comme les autres vous, vous croyez ä la rage. raquo; Et, pendant ce collocjue, je posais la pierre infernale sur les plaies. laquo; Vous ne savez done pas, malhcureux, qu'on a decouvert le contre-poison de la rage et qu'il existe aujourd'hui une potion infaiilible centre ce mal? — Oh! dites-moi, Monsieur, oü la trou-ver? raquo; — laquo; Attcndez un moment, je vais vous la pre-parer. raquo;
Un instant apres j'avais ä la main un verre d'eau colo-ree, non pas avec du vin ou de l'alcool, il eüt pu s'aper-cevoir de la supercherie, mais avec une liqueur colo-rante quelconque, et, le lui presentant : laquo; Mon brave, buvez-moi 9a, et je reponds de vous. raquo; II fit un bond sur mon verre d'eau qu'il but voluptueusement, il ne savait comment me temoigiier sa reconnaissance. Quand il partit, il etait calme et rassure. Je ne l'ai plus revu.
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CHAPITRE VII
ERREURS DE DIAGNOSTIC
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Leurs consequences.
M. X..., rue Chapon, m'amena, en 1869, ua chien bra-que sous poll cuivrc, qui, me dit-il, ne mangeait plus depuis deuxjours.
Cot animal avail la gueule beante, il bavait ; Tcxprcs-sion de son regard etait triste, le globe de l'ceil etait de vie.
Je diagnostiqaai la rage calme.
Ce chien ful mis dans la löge des enrages, je Texaminai souvenl; le sixieme jour il n'y avait aucune modification h son etat. Ordinalrement, a cot ;ige de la maiadie, on les enrages sent morts, ou ils sont dans un etat de paraly-sie avancee.
J'ordonnai que Ton sortit cet animal de sa löge, et, a l'aide du pas d'ane, je visitai l'interieur de sa bouche. Je trouvai, alors, un os implante en arriere de la derniöre molaire, dans le pilier droit du voile du palais.
L'os enleve, le chien fut instantanement gueri.
Le meme fait, mais pour une autre cause, s'est prä­sente en 1870, sur un loulou de 10 ans, appartenant ä madameX..., rue Beaubourg. II avait aussi la gueule en-tr'ouverte, avec ecoulement de salive, et I'expression du regard navrante.
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DE LA RAGE.
Pour celui-lä aussi, je conclusci la rage muette.
Mais, la duree de sa malaJie depassant Ja moyenne or­dinaire, je con^us des doutcs, et, apres inspection des mächoires, je coiistatai qu'une des dents molaires de l'arcade gauche de la bouche ayant presque quitte son alveole ecartait, ä la raaniere d'un coin, les deux maxil-laires.
Je la fis tomber, le malade fut gueri.
Si ces deux chiens se fussent debarasses eux-memes, l'un de l'os, l'autre de la dent qui les gönaient, j'aurais eu la conviction que j'avais assiste ä deux cas de guerison de la rage; de meme que s'ils etaient morts d'inanition, parce qu'il leur etait impossible de manger, j'en aurais conclu qu'ils avaient succombe ä une inoculation du virus rabique.
Ces deux observations nous indiquent combien 11 est important, en tout ce qui concerne la rage, d'exarainer si quelquc cause naturelle n'induit pas en erreur celui qui observe un fait extraordinaire.
Bien des fois j'ai vu des chiennes qui, sous I'inQuence d'aberrations maternelles, simulaient des atteintes de rage ä un point dont on n'apas idee. L'acces passe, I'ani-mal redevenait calme.
II y a done lieu de suspend re plus longlemps son diagnos­tic sur la chienne que sur le chien. Ceci est tres-impor-tant dans les cas oü des personnes ont.ete mordues par le sujet observe.
Pour clore ce qui a trait aux erreurs de diagnostic, je cite le fait suivant qui se reproduit fort souvent.
Le 12 novembre 1873, M. Legrand., boulevard Saint-Denis, 19, fit conduire ä mon etablissement un chien braque, age de 6 ans, sous poii blanc et marron, qui avait
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DIAGNOSTIC.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;43
ete mordu ä l^oreille gauche cinq jours auparavant.
Sur le moment, je ne Tis rien d'insolite en cet animal, je le fis cependant conduire dans la loge d'observation.
Trois heures apres, il donna les signes les plus evidents de la rage.
11 reste, pour moi, peremptoirement demontre quo ce chien etait dejä enrage le 7 novembre et qu'il fut blesse a I'oreille en provoquant, sous l'influence de sa cruelle maladie, les animaux de son espece.
C'est a des faits de cet ordre qu'il faut rapporter les incubations ä tres-courte duree, rapportees par quelques personnes qui prennent leseffets pour les causes.
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CHAPITRE VIII
DAXGERS QÜ'OFFRB LA PRATIQUE DE LA MEDECEVE EXVERS LES CIIIEXS
Chaque brauche de la medecine entraine pour l'horame qui la cultive consciencieusement des risqnes morteis ; la medecine humaine, la medecine veterinaire ne comp-tent plus leurs victimes.
Aussi nc saurait-on trop recommander ä ceux qui se destinentä la pratique de l'art veterinaire d'etre toujoiirs sur leurs gardes lorsqu'ils traiteront des chiens, sans ce-peudant, pour cela, ctre pusillanimes. Tons ne sent pas dangereux, puisqne nous avons vu que sur 100 malades, 8 seulement sont contamines. II ne serait done pas juste que les 92 atteints seulement de maladies ordinaires fus-senttroplongtemps sequestres; leuretatde sante pouvant rcelamer l'application immediate des soins de l'art.
Mais, je crois de mon devoir d'engager forteincnt ä porter toujours sur soi des matieres caustiques pour en faire l'application immediate sur toute plaie provenant de la morsure d'un chien quelconque; attendu que, malgre one longue pratique, on pent courir de grands risques, comme le prouvent lesfaits suivants :
1deg; Le 25 decembre 18G5, M. Plon, rue Saint-Gilles, 5, m'amenaunechienne epagneulede petite espece, agee de 2 ans; eile avait ete blessee ä Toeil droit par la grille d'un chat. II etait nuit (de 7 ä 8 heures du soil). Place pres de la lumiere, j'allais ecarter les paupieres avec les doigts
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DANGERS Qü'OFFRE LA PRATIQUE DE LA MEDEC1NE. is
pour apprecier l'importance de la blessure, quand, tout a coup, par un mouvement brusque, cette petite bete se jeta sur ma main et prit mpn pouce entre ses dents sans cependant recorclier.
Cette maniere febrile de mordre m'inspira quelques craintes qui n'etaient que trop fondees. J'avais affaire ä une chiennc enragee. Elle avait ete mordue quinze jours au-paravant par le chien de M. Prieur, mort de la rage dans mon etablissement. La blessure qu'elle avait k I'ceil pro-venait de ce que la petile epagneule, dans un acecs de rage, s'etait precipitee sur un chat pour le mordre,, celui-ci I'avaitgrifleeen se defendant.
2deg; Le 3 avril 1866, M. Labbe, 16 rue de Courtille, fit porter par un enfant ä mon etablissement un chien metis marron äge de 6 mois, qui avait la patte fracturee.
Je trouvai cet animal tres-irritable; quand je voulus apprecier l'elat de sa blessure, il chercha ä me mordre. Je mis ses intentions hostiles sur le compte de la douleur. Je posai l'appareil et, ä peine quittait-il la table d'opera-tion, qu'un cri qu'il poussa me fit decouvrir qu'il etait enrage.
L'enfant qui m'avait apporte ce pauvre animal n'avait donne aucun renseignemcnt ; je fis mander immediate-ment son proprietaire qui me dit avoir, d'un coup de pied, casse la patte de son chien. 11 lui avait administre cette correction parce qu'il venait de mordre son enfant. Le maitre ne se doutait nullement de la maladie dont etait atteint son chien.
Ces fails montrent de quelle importance est pour le veterinaire de se bien renseigner sur les antecedents des sujets qu'on soumet ä sa consultation.
II faut surtout prendre des precautions toutes particu-
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DE LA RAGE.
lieres ä l'egard des chiens qui ont la gueule beante, se grattent le nez, comme s'ils etaient genes par la presence d'un corps etranger dans la bouche, un os par exemple. Le plus souvent ces malades ont la rage mue, et 1c corps etranger accuse par les proprielaires n'existe que dans leur imagination.
II arrive pourtant, parfois, que des aiguilles, des os, des morceaux de bois, implantes dans la muqueuse buc-cale on encore des dents sorties de leur alveole forcent l'animai ä ecarter les machoires et le font simuler la rage mue.
C'est une exception.
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CHAPITRE IX
CONDÜITE DES VETERIlV/v IRES EXVERS LErRS CLIENTS '
L'enqußte sur les antecedents du chien mene ä la con­sultation devra etre d'aulantplus circonstanciee que notre esprit en aura pergu ä premiere vue une impression plus fächeuse.
II est de la plus grande importance de ne pas s'expri-mer sur la nature du mal, s'il s'agit de la rage, avant de s'assurer si les maitres de l'animal n'ont pas ete mordus. Malheureusement, ce renseignement n'est pas toujours facile ä obtenir, car il n'est pas souventäla connaissance de ceux qui presentent le chien suspect, et, comme nous l'avons dejä vu, il y a souvent mauvaise foi dans leurs de­clarations.
Des que Ton apprend qu'un individu a ete mordu, il faut taire l'etat rabique du chien, cauteriser immcdiate-ment le blesse si c'est lui qui conduit l'animal (bien des fois cela m'est arrive), donner ä la famille, ä la police les conseils les plus prudents, afin que la personne mordue suive les prescriptions urgentes necessaires a son etat, tout en ignorant ä quelle terrible inoculation eile est exposee.
L'epouvante qui saisit I'homme mordu par un chien enrage on non est parfois navrante.
Madame X..., rueDauphine, fut mordue par un chien
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age de 6 inois qui n'avait que des convulsions, mais qu'elle croyait enrage. Elle resta longtemps sous I'ln-fluence de la peur, eile ne pouvait dormir et n'eprouvait de soulagement que dans nion cabinet, lorsque je lui de-montraisle peu de fondementde ses apprehensions.
31. X..., rue de Rivoli, ayant ete mordu par un chien parfaitement sain, fut tellement frappe de la peur de la rage que, pendant deux ans, il resta sous cette influence et parfois il disait ä ses domestiques : laquo;Allez-vous-en, j'ai envie de vous mordre. o
De savants veterinaires de Paris, Vatel, Barthelemy, Leblanc pere ont ressenti des impressions extremement penibles apres avoir etc attaints par la dent de chicns sus­pects ou enrages.
Le 2o novembre 1863, M. Docroix, qui s'occupait dejä de prouver la possibilile pour rhomme de faire entrer, dans son alimentation, des viandes d'animaux morts de maladie,sanspour cela s'exposer ä aucun danger, se trou-vait avec M. Pierre Sanson et moi; il avala, devant nous, un morceau de viande crue pris dans les muscles d'un chien mort de la rage.
Ce bienfaiteur de l'hurnanite et des animaux, a qui Ton doit, sans conteste, rinstitutitui des boucheries pour le debit de la viande de cheval ä Paris, institution qui rend de si grands services ä la classe laborieuse et qui epargne souvent des annees de souffrance a un animal auquel rhomme doit tant, M. Decroix, dis-je, prit con-naissance peu de temps apres d'unc brochure de Gohier, ancien directeur de l'Ecole veterinaire de Lyon, dans laquelle ce savant affirmait avoir communique la rage a des chiens en leur faisant manger de la viande provenant d'animaux rabiques. II fut si vivement impressionne de
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CONDUITE DES VETERINAIRES ENVERS LEUUS CLIENTS. 49
cette decouverte qu'il ressentit pendant quelques jours des constrictions ä la gorge et eut des insomnies. Con-vaincu que le virus rabique n'existait que dans la salive, il finit par se calmer.
M. Decroix pouvait impunemenJ; poursuivre ces expe­riences, puisqn'ilm'est arrive plusieurs fois de faire man­ger ä des animaux de la viande de chien enrage, sans qu'aucuncas d'inoculation se soil produit, contrairement a ce que dit Gohier ; je dirai meme que, pendant deux ans, j'ai fait manger ä des chiens qui m'appartenaient de la viande imbibee de la have d'animaux enrages, sans aucun resaltat.
J'appellerai l'attention du lecteur sur le fait suivant avec lequel je terminerai cette nomenclature qui n'en fini-rait point si je voulais citer tous les exemples de ce genre quej'ai constates.
M. X.., rue Amelot, amena ä ma consultation, en 1870, une magnifique chienne de chasse atteinte de rage muette des mieux caracterisöes. Je l'interrogeai longtemps pour savoir si Taniinal n'aurait pas raordu quelque personne des le debut de la maladie. II me repondit peremptoire-ment que non. Alors je dcclarai la verite, et Tanimal resta ä mon infirmerie oü il mourut bientot.
Je fis iimnediatement ma declaration au commissaire de police du quartier de ce client. Je ne saurais trop re-cornmandor de ne pas negliger cette formalite qui, au reste, est prescrite par la loi. Elle aide beaucoup la police, par les investigations auxquelles eile permet ä celle-ci de se livrer, ä couper le mal dans sa racine et ä eviter ainsi bien des inoculations.
Mais, revenons ä mon sujet. Je re?us, dix jours plus tard, la visite du frere de M. X.., qui m'apprit qu'il avail
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dejäla jaunisse et refusait toute nourriture. II s'etait rap­pele s^etre servi, pour essuyer la salive qui tombait de la gueule de son chien, d'un mouchoir avec lequel il s'etait mouche ensuite ; il etait persuade que cela avait suffl pour lui inoculep le virus rabique, et cette idee s'etait si fortement emparee de son esprit qu'il s'etait mis au lit et deperissait ä vue d'oeil.
Son frere Yenait me supplier de lui indiquer un moyen de le sauver.
Son idee est completement fausse, lui dis-je, il faut ä tout prix Fen dissuader. — Oui, me repondit-il, mais le malheur est qu'il ne nous croira pas, il ne faudrait pas qu'il sedoute que c'est pour le consoler que nous agis-sons. — Eh bien, ma foi, nous mentirons.
Immediatement je redigeai im contre-rapport dans le­quel je declarai : qu'ayant observe depuis quelques jours plusieurs chiens malades, presentant des symptomes identiquesä ceux delachienne deM. X.., et qui n'etaient pas, pour cela, enrages, je concluais a une erreur de diagnostic expliquee parfaitement par la disposition des machoires, disposition qui etait inevitablement le resultat d'une contraction nerveuse produite par une vive emo­tion. Je remis cette piece au commissaire de police en le mettant au courant de l'affaire ; eile parvint de son bu­reau chez le malade.
Que le lecteur mepardonne d'avoir menti; M. X..., fut sauve.
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CHAP1TRE X
MEDECINE LEGALE
Quelquefois, je suis prie par la police de faire l'au-lopsie des chiens sacrifies par les scrgents de ville on les habitants ameutes auxcris de laquo; ce chien est enrage. raquo; En pareil cas, mon examen porte principalement sur les faits que I'enquete pent me fournir relativement aux an­tecedents du chien occis.
II suffit de renseignements bien circonstancies pour etablir assez sürement la position du cas que Ton a sous les yeux.
Dans cette perilleuse occurrence, je ne dis pas avec le sage Zoroastre: laquo; Dansle doute, abstiens-toi;raquo; mais,rtieme sans croire a la rage, je prends soin que des mesures pre-ventivessoient immediatement adoptees äl'egard des per-sonnes ou des animaux mordus, tout en derobant ä la connaissance des individus interesses tout ce qui pourrait leur donner vent de quelque danger.
Mais si le chien accuse de rage s'est livre de son vivant a des agissements insolites qui Tout signale ä l'attention des agents de police ou du public, et qu'ä l'autopsie on trouve des corps etrangers dans I'estomac, tels que : paille, graviers, etc., on pent en conclure l'existence de la rage; et generalement ce diagnostic est juste, I'exception en confirme la regie.
Si le tube intestinal ne renferme dans tout son trajet aucune matiere etrangere ä la nourriture, II n'en faut
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52nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;DE LA RAGE.
pas conclure que le chien n'etait pas enrage, en void la preuve:
M. Ileckcnbinder, place des Trois-Couronnes, bureau du genie, avait un chien qui fut mordu ä V(ßil par celui d'un habitant du quartier. Ce dernier fit abattre sa bete et porter son cadavre dans un de nos premiers etablisse-ments-veterinairespoury faire constalerson etat. Illui fut delivre un certificat attestant que la bete n'etait pas morte enragee, attendu que Ton n'avait rien pu decouvrir d'etranger ä i'alimentation ni dans Testomac, ni dans I'intestin.
Or, le 27 fevrier, le chien de M. Heckenbinder cnlrait a mon infirmerie suspect de rage.
L'etat rabique de ce sujet ne fut pas un instant dou-teux dans mon esprit; et, effectivement, le 28, les symp-tomes s'aggraverent, il mourut le 30.
Autopsie : pommes de terre, cartilages dans Testomac, rougeur de la muqueuse.
D'apres ce qui precede, on voit que si I'expert n'est pas eclaire par les renseignements, qu'il est ä meme de re-cueillir, sur ce qu'etait, de son vivant, I'animal qu'il consulte ä l'etat de cadavre, I'autopsie meme la plus fa­vorable peut I'induire en erreur. Je l'ai dejä dit, les chiens qui out le pica ou des convulsions, les jeunes pendant la dentition sont sujets ä ingerer toute espäce de corps etrangersä la nutrition. Pour l'exactitude du juge-ment, il faudra done toujours avoir egard ä ces particu-larites.
Je recommande tout specialement aux agents de po­lice, lorsqu'ils le peuvent, sans danger pour la salubrite publique, d'acculer dans un endroit quelconque les chiens suspects et de ne pas les abattre avantqu'un veteri-
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MEDECINE LEGALE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 53
naire n'ait caracterise le cas oü ils se trouvent. Les chiens epileptiques, convulsioimaires ou ahuris par la perte de leur logis, peuvent tres-bien passer aux yeux du public pour des chiens enrag-es. Et, lorsque ces chiens ont mordu quelques personncs, il y aurait une grande sa­tisfaction pour ces dernieres a apprendre que la bles-sure qu'elles ont regne ne met nullement leurs jours en danger.
Cast pour la meme raison que les chiens enrages qui entrent dans les infirmeries veterinaires doivent y etre conserves et meine nourris, toutes les fois qu'ilsacceptent des aliments. II peut y avoir erreur de diagnostic et, lors meme que le chien est enrage, sa mise a mort immediate peut avoir, si eile est coimue, une influence des plus fä-cheuses sur l'esprit de ses victimes.
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CHAP1TRE XI LESIOXS CADAVERIQUES.
Le 3 mars 1861, M. Roberty, rue Vieille-du-.Temple, 123, amena ä mon infirmerie un loulou de 3 mois qui venait d'etre mordu par un chien errant. II etait alors malade de raffcclion dite des jeunes chiens (catarrhe muqueux) et avait un commencement de pneumonie lo-bulaire.
Je le traitai ä l'iodure de potassium, et il entrait en convalescence quand, le 28 avril, on remarqua un chan-gement subit dans sa physionomie; il avait envie de mordre, pourtant il mangeait avec appetit et buvait comme ä I'ordinaire, sa voix avait pris le timbre de la rage; le 29, ses forces commencörent ä diminuer. Le 30, je lui presentai du mou avec des pinces, il se jeta dessus avec frenesie et l'avala goulüment. Le 1quot; mai, il etait mort.
A l'autopsie je trouvai dans l'estomac et dans I'intestin du colon provenant de mes matieres de pansement, qui etait tombe dans sa niche. La membrane muqueuse de ces organes etait saine.
Dans la poitrine, le poumon etait marque de points indures isoles, resultat de la pneumonie lobulaire. Les bronches contiennent des secretions spumeuses abon-dantes que Ton remarque egalement dans la trachee. On constate aussi la presence d'excoriations sur la muqueuse
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LESIONS CADAVERIQUES.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 33
qui tapisse le bord anterieur des cartilages arythenoi-diens.
De nombreuses autopsies de chiens enrages pratiquees par des veterinaires, des medecins, celles que j'ai faites moi-meme ne fournissent pas plus de renseignements que celle qui precede.
D'oü je conclus que I'anatomie pathologique ne re-cueille dans l'espece que des alterations produites en de-hors de toute action specifique du virus rabique, et dues uniquement a des actes purement mecaniques, tels que : l'irritation de la muqueuse fort sensible qui tapisse le pharynx et le larynx, provenant du frottement accelere de l'air, pour les aboiements que certains chiens enrages font entendre ou des attaques de corps etrangers sur cette memo membrane, tels que graviers, poils, pailles, etc., qui sont ingeres dans l'estomac oü par leur presence ils causent de Tirritation dans ce viscere et provoquent des vomissements qui sont quelquefois sanguinolents.
Toutes les recherches auxquelles je me suis livre sur le Systeme cerebro-spinal et sur les glandes salivaires ont ete sans resultat, je n'ai ricn pu decouvrir a l'oeil nu. Je me propose de les continuer ä l'aide du microscope.
Quelques auteurs ont cm que la vacuite de la vessie et un leger changement de texture des reins etaient une consequence de la rage. C'est une erreur, cette alteration est commune h bien des maladies, et eile n'est pas cons-tante, bien des chiens enrages ayant ces parties comple-tement saines. Souventnous avons constate la plenituderaquo; de lavessie. M. Pakt, veterinaire militaire, et M. C. Le-blanc ont fait la meme remarque.
La seule observation que j'aie faite et qui soil une des consequences directes de la mqjadie, c'est la coagulation
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fit!nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; DE LA RAGE.
plus rapide du sang veineux du chien enrage, qui est plus rutilant que celui del'animal sain.
En resume, jusqu'ä ce jour, on n'a pu constater au-eune lesion Interieure produite par le developpement de la rage sur un individu; un voile impenetrable nous les a cachees. C'est vers ce point que doiventä IVvenir tendre toutes nos investigations, attendu que de la connaissance de ces lesions decouleraient un traitement ralionnel de la rage et peut-etre la curabilite dans la plupart des cas.
Cette etude estl'ceuvrede l'avenir, le present pour moi est clos. 11 a fait connaitre comment se propage la rage et les moyens d'hygiene ä lui opposer, c'est avoir fait faire ä la question un grand pas.
Si la morsure d'un animal enrage implante le germe fatal dans le sang, evolue, ä l'etat de maturite,le virus ra-bique devient ä son tour un tefrible mordeur, il dechire, il remplit d'epouvante I'etre qui en est devore, ilaneantit les organes qui president aux functions nobles de la vie.
De quelle maniere et pourquoi tue-t-il? C'est le terrain nouveau ä explorer.
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DEUXIEME PARTIE
.CHAPITRE PREMIER
INTRODUCTIOIV A L'ETÜDE DES CAUSES DE LA PROPAGATION DE LA RAGE
On a vu au chapitre des causes de la rage qu'en Orient, aux temps anciens, le virus rabique etait connu. Ge mal parait avoir suivi le mouvemenl de la civilisation, et il s'est particulierement fixe en Europe.
A Constantinople on ne signale que de rares cas de rage; cependant, le savant docteur Roucher, dans son traite De la rage en Algdrie, montre que, contraire-ment ä l'opinion de certains auteurs, la rage existait dans cette region avant notre conquete, et il en donne la preuve irrecusable dans le mot laquo; mkloub,raquo; qui en arabe signifle rage. Mais, depuis la conquete, les travaux de ce savant et les documents qu'il a puises au conseil d'hygiene fournis par beaucoup de medecins, notamment les doc-teurs Dussourt, Rossignol, Bergot, J. B. Toussaint, et de veterinaires tels que MM. Hugo, Decroix, etc., et les obser­vations qu'il a faites lui-meme, etablissent d'une maniere certaine que les cas de rage sont tres-frequentsen Algerie, surtout parmi les chiens qui nesubisseat aucune seques-
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DE LA RAGE.
tration.Je suis heureux de constater que roeuvre re-marqnable de M. le docteur Roucher, quant aux circou-stances qui favorisent revolution du virus rabique en Al-gerie, concorde avec les resultats de l'etude que j'ai faite ä Paris. Ainsi M. J. B. Toussaint, cite plus baut, laquo; con-sidere, comme surtout favorable ä la rage en Algerie, la periode d'octobre ä mars, raquo; ce qui concorde exactemcnt avec mes observations person neues, et ce n'est que par des rapports venus de France en Algerie, que M. Rou­cher a pu croire qu'il en etait autrement en France, rapports qui sont errones comme on le verra plus loin.
Toutefois, les fails generaux indiquent que le virus ra­bique sevit avec intensite dans les contrees dont le climat est tempere, tandis que le contraire a lieu dan's les regions dont la temperature estardente.
On attribue cetle difference a plusieurs causes, telles que : la liberte dont jouissent les cbiens dans ces pays, la proportion egale qui existe entre les males et les fe-melles, etc., etc. Tont cela n'est pas autre cbose que des on dit, sur lesquels on ne pent faire aucune foi. Ce ne sent pas de simples impressions de voyageurs, savants sans aucundoute, mais pour qui cet objet est acccssoire, ce ne sont pas leurs recits qui pourront eclairer cette difficile question.
Les recherches du docteur ßoudin etablissent que l'A-merique n'a connu la rage qu'ä la suite de Timportation des cbiens europeens dans ces vastes contrees. Au Perou, notamment, eile apparut pour la premiere fois en 1803, epoque ä laquelle on signala des phenomenes patholo-giques ä l'etat epizootique sur tous les animaux et sur l'homme meme. Ces faits, rapportes par Fleming, me pa-raissent surprenants et je me range completeraent ä l'o-
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INTRODUCTION A L ETÜDE DES CAUSES. 39
pinion du savant M. ßouley, qui dit, avec beaucoup de raison, que cette observation n'a pas ete recueillie avec la sürete de vue que donne la competence medicale.
11 se pourrait que I'epizpotie observee au Perou, en 1803, füt une affection differente de la rage, bien qu'af-fectant plusieurs de ses symptomes.
11 resulte d'une correspondance suivie que j'ai entre-tenue avec un de mes parents qui habile laCochinchine, que de memoire d'Annamite on n'aurait pas entendu par­ier de rage dans ce pays, malgre l'intensite de la chaleur et des pluies qui y regnent si souvent.
11 y a quelque temps, j'ai de nouveau envoye un ques­tionnaire en Cochinchine, et si j'apprenais qu'il se passät dans ce lointain pays quelque fait interessant la question qui nous occupe, je m'empresserais de le faireconnaitre. Pour le moment, mes recherches se concentrent sur ce vaste champ d'observations que Ton appelle Paris. A mon sens, nulle part on ne peut trouver pareille abondance de preuves scientifiques, et ce n'est pas sans etonnement que j'ai vu quelqueshommes des mieux places pour explorer cette mine feconde, aller chercher ä Berlin on ailleurs des statistiques sur lesquelles ils pussent fonder leurs theories, lorsqu'il y en avait eu de beaucoup plus se-rieuscs publiees a leur porte.
La population canine abonde dans I'immense capitale de la France (il y a plus de 60,000 chiens inscrits), et J'e-lement rabiquey fait chaquejour quelque victime.
C'est le depouillement de ces cas de rage journaliers avec leurs caracteres varies a Tinfini qui contient, autant que je le puis concevoir, la plus pure, la plus vive lu-miere sur le mode de propagation de la rage.
La rage ne peut etre contagieuse que lorsqu'il y a rap-
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DE LA. RAGE.
port direct entre le virus et le sang. Une piqüre en intro-duisantle virus dans des tissus absorbants, ou encore un simple depot sur des surfaces denudees d'epidertne, eta-blissent ce rapport.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;#
C'est ä l'etat sporadique que celte maladie s'est tou-jours montree en France, et les cas en ont ete aussi fre­quents en toute saison. II y a eu cependant des annees oü le virus rabique s'est montre plus dangereux et, en cela, il est bon de le remarquer, il n'a fait que suivre la marche commune k tous les virus, ce que j'ai observe dejädans mes etudes sur la morve. Le mal peut prendre un deve-loppement considerable s'il coincide avec le relächement dans latenue deschiens, si on les laisse davautage errer librement.
Ces exagerations dans la propagation de la rage ont fait croire aux observateurs superficiels que ce pheno-mene etait du ä des causes d'un autre ordre que la cause ordinaire, la piqüre; et ils en ont, ä tort, conclu qu'on devait les attribuer ä des faits plus frequents de rage dite spontanee.
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CHAPITRE II DUREE DE L'liVCUBATION DU VIRUS RABIQUE
II y a dans l'histoire du virus rabique, ferment vege­tal ou animal, molecule ou atome, n'importe, tout un monde de lois qui lui sont propres et qui sont accusees par les variations de ses periodes d'incubation.
II a, cet etre infernal, sa constitution particuliere, tons les organismes ne sont pas egalement favorables ä son de-veloppement. Certains animaux se trouvent refractaires a son action, chez d'autres eile ne produit ses effets que longtemps aprös.
Si je m'en rapportaisaux affirmations des proprietaires, le virus rabique aurait parfois necessite pour son evolu­tion plusd'une annee; exemple :
Le 28juin 1864, M. Brugnieres, place Saint-Victor, 28, fait conduire a mon infirmerie un chien de chasse et une chienne de meme race qui, le soir meine, avaient ete mordus par un chien suspect de rage.
Les plaies furent cauterisees quatre heures apres I'acci-dent.
Le 1er aoüt, la chienne devenaitenragee.
Le chien fut observe pendant six mois, puis rendu ä la liberte.
II me fut rapporte que cet animal avait ete tue dans un bois quinze mois apres sa morsure,parce qu'il avait donne tous les signes caracteristiques de la rage.
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Le 24 mai 1870, M. Madeleine, rue Chevert, 11, m'amena un chien loulou, äge de 2 ans, atteint de rage muette. II avait, disait son proprietaire, ete mordu le 30 septembre 1869 par un chien suspect. Cos chifFres por­tent la duree de rincubation ä 8 mois.
A propos de cette derniere observation, on m'a rapporte que deux chiens de berger, male et femelie, le chien produit de la chienne, se trouvant dcvant la porte do la ferme furent mordus presque en mcme temps par un chien errant. Onze mois apres ils devinrent simultane-ment enrages.
Ce fait, s'il eüt ele constate par un veterinaire, eut pu avoir une tres-grande importance; les cas de rage etant rares ä la campagne, il eüt pu etre probant. Ces deux sujets mordus h la memo heure et devenant enrages a la meme epoque eussent certainementecarte bien des doutes de l'esprit. Malheureusement, les assertions des proprie-taires sont si souvent erronees qu'il est hien difficile de s'en rapporter ä elles.
Aux faits qui precedent et qui ne sont que des oiü-dire j'ajouterai ceux qui suivent, que j'ai observes moi-meme.
1deg; Le 13 mars 186S, M. Geffrotin, rue Vendome, 7, fit conduire un chien terrier anglais ä poil noir, qui etait atteint de rage mue. Get animal avait ete mordu quinze jours auparavant par une chienne enragee morte ä l'ecole d'Alfort.
2deg; J'ai parle plus haut d'une chienne epagneule de petite espece ayant appartenu ä M. Plon. Cette petite hete est devenue enragee quinze jours apres avoir 6te mordue par un chien, mort ä mon infirmerie de rage bien ac-cusee.
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DUREE DE L'INCUBATION DU VIRUS RABIQUE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 63
3deg; Le 20 avril 1869, un chien griffon aveugle quej'avais adopte et baptise du nom de Belisaire, et qui errait libre-ment dans les cours de mon etabiissement, fut niordu par un chien enrage qu'en mon absence, un de mes gardens conduisait au chenil. Ce pauvre animal ne recjut aucun soin immediat, ete'est seulementle lendemain que je fus informe de l'accident. J'observai une morsure h I'oreille et constatai parfaitement Fetat rabique du chien qui I'avait produite. J'ordonnai immediatement la sequestra­tion la plus rigoureuse de ce pauvre griffon; le 2 novem-bre 18G9, il devenait enrage. L'incubation du virus rabi­que avaitdure cent quatre-vingt-dix-sept jours.
C'est lä le cas le plus long que j'aie pu observer par moi-mcrae ; il confirme le fait que cite le savant Renault d'un cas d'incubation qui aurait durecent dix-huit jours.
M. Goubaux, professeur d'anatomie ix I'ecole d'Alfort, a constate un cas de rage qui s'est developpe six jours apres la morsure.
CIRCONSTANCES QUI MODIFIENT LA PERIODE D'iNCÜBATION.
La periode d'incubation pent etre avancee ou retardee par des causes diverses.
J'ai vu deux chiens devenir enrages ä la suite d'une forte contrainte, un autre au sortir du bain.
An premier abord, j'aurais pu croire ä la rage spon-tanee, mais cestrois chiens avaient ete mordus'anterieu-rement par des chiens enrages.
Ces observationsprouvent qu'il est des causes occasion-nelles qui peuvent activer revolution du virus rabique et forcer la rage ä se declarer subitement (I),
(1) L'economie 6tant minee par ce terrible virus, une ^tincelle peut I'en-flammer.
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DE LA RAGE.
Avant des doutes sur l'etat de plusieurs chiens, il m'est arrive de les saigner, et je les ai vus devenir subitement enrages. Cette operation avance la mort des chiens chez qui la rage est confirmee.
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CHAP1TRE III
PROPAGATION DE LA RAGE
Tous les ecrivains qui ont traite ce sujet s'accordent a dire que les dents canines et incisives des chiens sont le principal agent qui transmette la rage ä Fhomme, aux animaux herbivores, aux oiseairx et ä eux-memes. L'ino-culation produite par les animaux qui lechent les mains ou autres parties du corps, denudees d'epiderme, est pen frequente, bien qu'en disent certains auteurs. Tous, ä part M. G. Leblanc, n'admettent que tres-exceptionnelle-ment la spontaneite de cette maladie.
Au reste, voici ce que dit ce dernier dans un travail lu ä l'Academie de medeeine au mois de juin 1873 :
laquo; La spontaneite de la rage s'observe presque unique-laquo; mentchez les chiens tenus en charteprivee et qui ontun laquo; temperament ardent.... Si eile aete plus specialement laquo; constatee chez les petits chiens drappartement, cela tient laquo; a la sequestration de ces animaux.... Le chien de chasse laquo; constamment surveilTe par son maitre ou le chien de laquo; garde maintenunuitetjour ä I'attache ne sont pas moins laquo; aptes ä contracter lä rage spontanee.raquo;
Comma je l'ai fait ressortir dans le cours de cet ou-vrage, on ne peut affirmer que le chien de chasse ou le chien de garde1 n'ont pa quitter leur chaine, et, quand cela serait, un chien enrage n'a-t-il pu s'introduire furtivement aupres d'eux comme celui que nous avons
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G6nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; DE LA RAGE.
vu blotti dans l'escalier de la place de la Cordonnerie (1).
Dans une etude aussi serialise que celle de la propaga­tion de la rage, dont les conclusions tendent a indiquer des regies d'hygiene pours'en preserver, on ne pent accepter des dircs vagues, des impressions sans doute fort respec­tables , ieur auteur occupant avec distinction depuis vin^t-quatre ans unc haute situation veterinairc, mais qui peuvent avoir rinconvenient d'induire en erreur la police administrative.
Voici plusieurs faits qui en demontrent rinexactitude :
1deg; La maison Ravery, de pere en fils, tient l'article chiens de luxe et, principalcment, les sujets de race ar-dente dont parle M. Leblanc. Avant de trouver acheteur, ces animaux sont souvent conserves dans cette maison pendant des mois entiers, des annees meine ; et ils y vivent rigoureusement sequestrcs. Sur le nombre total de ces chiens, au moins les deux tiers ne servent ,pas ä la reproduction. M. Ravery fils dit n'avoir jamais observe la ra^e spontanee dans son etablissement. D'autres indus-triels de chiens, depuis nombre d'annees, m'ont con-firme ces dires.
L'interet capital que les marchands de chiens ont ä surveiller avec le plus grand soin les objets de leur com­merce donne beaucoup de creance ä leur affirmation.
2deg; M. Beraud, veterinaire instruit, de l'ecole de Lyon, attache depuis dix ans ämon etablissement et qui, assure-ment, possede de grandes capacites d'observation des phe-nomenes morbides qui se produisent sur les animaux confies ä ses soins, a eu journellement sous les yeux de jeunes animaux qui, habitues ä etre gates, choyes par
(1) Voir page 38.
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PROPAGATION DE LA RAGE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;57
leurs maltres, se sent vu tout ä coup violemmeut separes d'eux, rigoureusement sequestres et par suite prives de la satisfaction de leurs desirs genesiques. Les uns 011t subi cette contrainfe pendant quelques jours, mais beaucoup pendant un long- temps. Jamals il n'a observe un cas de rage spontaneo, meine douteux.
3deg; J'exerce la medecino veterinaire depuis trente ans. J'ai mis lous mes soins ä chercher la raison des resultats que j'obsenais, m'appuyant sur des verites scientifiques demontrees. Cette voie, je puis le dire, n'a pas ete par-courue sans succes pour moi.
Depuis quinzc ans, je soigne journellement quarante chiens en moyenne, tantot inoins, tantöt plus. J'entretiens d'ordinaire six chiens valides que leurs proprietaires ont abandonnes. Ces derniers qui restent dans mes infirmeries deux, trois ou six mois, voire meme des annees, sont bien nourris, bien tenus et parfois ardcnts. La sequestralion la plus rigoureuse les empeche de satisfaire leurs desirs ge-nesiques. J'obsei've aussi, chaque jour, pres de quinze chiens malades, soit dans mes consultations de cabinet, ou duns mes Yisites ä domicile. En outre, ma clientele dans les riches quartiers de Paris oü se trouvent princi-palement les petites races de prix est fort nombreuse.
Malgre toutes les observations les plus minutieuses,yt; n'ai jamais pu constater un seul cas de rage spontanec. Deux fois, j'aicru que l'occasion s'en presenterait ä moi. Je veuxparier du chien de madame X,.., rue Portefoin, et de celuideM.Y..., aux Champs-Elysees, que j'ai cites plus haut. Apres bien desrecherches, je n'avais rien decouvert. Une enquete severe est venue pour ces deux cas, comme pour tous les autres, me prouver que ces deux faits etaient dus a la spontaneite.... d'un coup de dent.
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68nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; DE LA RAGE.
CONCLUSION
J'ai cite dans un chapitre precedent mon chien aveu-gle, Belisaire, qui ne sortait jamais de rinfirmerie, le chien de madame X... nie Portefoin, que Ton portait sor las bras toutesles fois qu'on le sortait, celui de M. Y..., des Champs-Elysees, qu'on tenait constamment enferme. Ces trois chiens ont ete inocules du virus rabique par des animaux venus du dehors, et j'en pourrais citer bien d'au-tres qui sent dans le meme cas.
Cela prouve que les chiens les mieux tenus peuvent devenir enrages, sans qu'il seit necessaire, pour expliquer ce fait, d'invoquer la spontaneite pour cause de sequestra­tion, comme Tecrit M. C. Leblanc.
Contrairement ä ce qu'ontdit certains auteurs, ta rage peut se transmettre d'un animal ä un autre sans que le virus perde rien de son intensite, en voiei la preuve :
Le 13 mars 1864, M. Geff'rotin, rue Vendome, 7, m'a-mena un chien terrier äge de 3 ans. Ce chien mourut enrage ä men etablissement. Quinze jours auparavant, il avait ete mordu par une chienne qui mourut ä Alfort de la rage qui lui avait ete communiquee par une chienne de Terre-Neuve.
M
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CHAPITRE IV
STATISTIQUES
Depuis 1889 jusqu a 1872, d8,531 chiens sont entres dans mon etablissementl Sur ce nombre 1,219 etaient enrages.
J'ai drvise, pour en faciliter l'analyse, l'espace de temps qui est compris entre 18S9 et 1872, en deux periodes dont je vais m'occuper successivement.
Dans la premiere qui comporte inclusivement les an-raquo;ees 18S9 ä 1866, il est entre dans nres infirmaries 8,639 chiens, sur lesquels 393 etaient enrages. C'est une moyenne de 4 enrages et un^ fraction sur 100 cas de maladies.
Parmi ces 393 animaux, 31 etaient äges de moins de I an, les autres avaient de 1 a 13 ans,
Les deux tableaux suivantsdonnent leur classeuient par äge et par sexe.
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70
DE LA. RAGE.
PREMIERE STATISTIQUE
Age et sexe des 393 chiens enrages eutres dans nion etablissement de 1859 ä, 1866.
AKIMAÜX D'UN A DOÜZE MOIS.
MOIS.
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362
Ces nombres publies dans ma brochure de 1867'etaient alors les plus grands qui eussent ete rassembles. On peat en tirer des consequences assez serieuses, ils etablissent d'une facon absolue que la rage altaque le chien ä tout äge.
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STATISTIQÜES.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;71
Dans les deux statistiques qui suivent, j'etablis d'aborJ le classement par mois et par sexc, puis dans la suivante la race des chiens qui ont paye leur tribul ä la rage. Ces deux statistiques ne sont pas sans interet. En effet, la premiere prouve par son classement par trimcstre que la clialeur n'a pas I'inflaence qu'on y attache commu-nement, puisque le premier trimestre et le troisieme trimestre sont presque egaux, ce dernier ne depassant Tautre que de 4 cas seulement. Si le public, si I'autorite, prennent des mesures plus cnergiques pour se preser­ver de la rage, lorsque le temps est chaud, ce n'est done pas que la rage soil plus dangereuse ä cette epoque de l'annee; mais les jours qui correspondent au printemps et ä l'ete etant les plus longs, les desordres de rues sont plus remarques; au reste, la rage furieuse est plus com­mune en ete qu'en hiver, ou du moins mon registre d'in-firmerie le constate. La rage nine au conlraire se produit plutotpendantla saison froide, et comme les animaux qui en sont atteints ne sont pas exaltes comme les autres, on les remarque moins, ce qui explique l'erreur que je viens de mentionner.
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72
DE LA RAGE.
Relev6 par mois, par sexe et par trimestre.
.MOIS.
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Femelles....
51
Totaux......
1
393
1er Irimcslrc. 93
2e trimestre. 100
3C trimestre. 97
4deg; trimestre. 97
393
Glassement par races et par sexes.
1 . RACES.
MALES.
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TOTAUX.
M(5tis.......................
102
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1
Loups dits Lou/ous..........
De chasse..........
Epagneuls (petite espfece).... Darbet.s, Ganiches..........
Terre-Neuve................
L^vriers...............
Mätis Carlin..............
Bichons....................
Danois..................
[ Totaux.......
344
49
393
Dans la deuxieme periode, de 1867 ä 1872, j'ai re^u 9,892 chiens dans mon etablissement, 826 etaient enrages.
m
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STATISTIQÜES.
Sur ce nombre 77 etaient äges de moins de
73
1 an,
749 avaient de 1 ä 15 ans.
J'appellerai l'attention de ceux qui altribuent aux desirs geneskjues une grande influence sur les tableaux des pages suivantes. Chez les jeunes animaux, il n'y a pas apparence d'excitatlons genesiques violentes, et, ä mon sens, olaquo; doit tont simplement rechercher la cause de la rage dont ils ont ete altaques dans une morsure qu'ils ont rejue dans la rue en errant au Hasard, ce qui parait d'autant plus plausible qu'a Tage de 1 et 2 mois, epoque a laquelle le jeune chien reste au logis, on ne constate qu'un cas de rage, tandis qu'ils augmentent ensuite rapidement a par-tir de Tepoque oü le chien commence ä sortir. Lorsque les jeunes chiens qui ne sont pas encore sortis du logis deviennent enrages, c'est ä leur mere qu'ils le doivent, ou bien encore ä quelque animal venu du dehors.
Le deuxieme tableau montre que Tage des chiens en­rages correspond exactement k Tage des animaux que Ton rencontre le plus communement dans la rue. Ainsi on en compte beaucoup plus de 1 ä 5 ans que de 6 ä 10, et il n'y en n'a que quelques-uns de 11 ä 15.
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74
DE LA RAGE.
DEUXlfiME STATISTIQUE
Age et sexe des 826 chiens enragös entrös dans mon Etablissement de 1867 ä 1873.
ANIMAUX d'CN A DOÜZE MOIS.
MOIS.
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Totaux.......
749
La remarque que j'ai faite pour la premiere periode est corroboree par le troisieme tableau. Les chaleurs n'ont pas d'influence sur le developpement de la rage.
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STATISTIQUES.
73
Releve par mois, par sexe et par trimestre.
MOIS.
1 56 11 67
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Males.......
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Totaux......
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3e Irimcslrc. 216
4C Iriraeslro. 185
826
Classement des 836 cas de rage par races et par sexes.
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MALES.
FEMELLES.
TOTAUX.
Terriers..............
201 191 38 64 60 •57 27
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Metis.....................
Barbets, Caniches...........
Terre-Neuve et Chien de mon-
Bichons... . ...............
Danois..............
Totaux.......
706
120
820
Ce dernier tableau n'a pas toujours ete compris. En
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70nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; DE LA RA.GE.
le faisant, j'ai tout simplement voulu ctablir la concor­dance des cas de rage et de la plus ou moins grande quan-tite d'individus de chaque race que Ton rencontre dans la rue d'une manicre relative et point absolue, comma I'ont cm quelques personnes.
CONSIDERATIONS GENERALES.
On vient de voir que, dans la premiere periode, sur 8,G39 chiens, 393 etaient enrages, c'est-ä-dire environ 4 p. 100 du nombre total; tandis que, pendant la se-conde, sur 9,892 de ces aniraaux, 826 sont inocules, c'est-a-dire plus de 8 p. 100. A quelle cause attribuer cette augmentation rapide ? C'est ce que je vais etudicr.
On voit d'abord que les influences genesiques n'y en-trent pourrien, la population canine etantrestee presque la meme, par rapport ä la proportion des sexes, pnisque on trouve, pour les deux periodes, environ 1 chienne pour 3 chiens.
Les saisons n'y ont pas contribue da vantage, puisqu'il y a peu ou point de difference entre elles.
C'est ä deux autres causes bien plus importantes qu'il taut attribuer cette progression :
1deg; A l'augmentation du nombre total äe,s chiens qui vivent ä Paris, nombre qui, dans la premiere periode, etait de 48,000 individus, tandis que, dans la deuxieme, il s'eleve au chiffre de 60,000 inscrits, la population Taga-bonde a naturellement du s'accroitre dans la meme pro­portion.
2deg; A ce que, pendant la premiere periode, la loi sur le musellement etait encore appliquee, quoiqu'on se füt dejä
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STATISTIQUES.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;77
bien reläche ä son endroit,, tandis qu'elle a ete lotalemeat negligee pendant la seconde periode.
La museliere produisait ua double effet. D'abord, le maitre du chien redoutant une contravention qu'il etait force de payer lorsque son chien etait trouve errant sur la voie publique, le tenait enferme chez lui, ce qui avail pour resultat de soustraire Vaatimal aux rencontres des chiens enrages;. ensuite, lorsque celui-ci etait lui-meme atteint de cette maladie, la museliere dite a panier oppo-sait des obstacles plus serieux ä ce qu'il mordit ses sem-blables que la laniere de cuir ou le ruban de soie.
Ouelques faits ä l'appui de cette assertion :
Le 27 novembre 1863, madame Brunet, marchande de dentelies, rue Vivienne, 2, me presente un chien metis, äge de 3 ans, atteint de la rage.
On me I'amene tenu en laisse, ce qui ne 1'a pas empe-che, pendant le parcours de la rue Vivienne ä la rue Fontaine-au-Roi, de se jeter ä la tete de beaucoup de chiens qu'on a eu peine ä lui arracher de la gueule.
Le 29 fevrier 1864, M. Marchand, rue Saint-An-toine, 222, amene ä mon infirmerie un chien enrage, il le tient en laisse, et tout le long du chemin cet animal mord les chiens qu'il rencontre.
Le 10 juillet 1864, M. Dusautoy, 162, rue de Belleville, me conduit une chienne terriere atteinte de rage fu-rieuse qui, menee en laisse, mord sur sa route plusieurs chiens.
Ces trois personnes ignoraient l'etat de leur chien, sans quoi elles eussent pris des precautions; mais il res-sort de lä träs-nettement que si, alors, on avait execute consciencieusement l'ordonnance de police sur la muse­liere, on aurait dans ces trois cas evite bien des morsu-
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78nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; DE LA RAGE.
res qui ont, sans aucun doute, donne lieu ä des inocu­lations.
II est im fait incontestable, c'est que rauginentation des cas de rage est proportionnelle ä raugmentation du nombre des chiens qui errent dans les rues, libres de toute entrave.
Ainsi, en 1869, la rage sevissait dans la proportion de 6,S p. 100, depuis quelques annees eile etait en crois-sance.
En 1870, sur 1,642 chiens entres ä rinfirmerie, on cotnptc 122 enrages, c'est-a-dire 7,5 p. 100.
En 1871, sur 1^170 entres, on trouve 170 enrages, soit 14 p. 100.
En 1872, 1,571 entres ne donnent que 133 enrages ou 9 p. 100.
Enfin, en 1873, sur 1,672 entres, on n'a plus que 83 en­rages, ce qui donne seulement 5 p. 100.
En 1870, 1 habitant etait arrache ä. son foyer par les quot;#9632;ardes qu'il lui fallait monier au rempart; il emmenait son chien avec lui, l'animal errait ä droite, ä gauche, en pleine libertc; c'est par troupes qu'on les voyait suivre les bataillons de gardes nationaux. A cette epoque on constate une augmentation de 1 p. 100.
En 1871, nous avons tout l'acquis de 1870, le mal s?est developpe rapidement, l'augmentation est enorme; j'en-registre 14 p. 100 de cas de rage.
En 1872, le calme renait, le chien rentre au foyer, je n'ai plus que 9 p. 100 d'enrages.
Enfin, en 1873, la proportion se trouve reduite ä 5 p. 100 (1).
(1) Cetle annee a 6t6 exceptionnelle pour la reduction des cas de rage.
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STATISTIQÜES.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;79
Je crois que ces chiffres prouvent d'une maniere in­contestable que rinoculation a generalement lieu dans la rue.
Un fait constant, puisque onle reraarque dans les deux periodes, e'est la disproportion qui existe entre les cas de rage qui se developpent sur les males et ceux que Ton observe sur les femelles. Sur 1,219 enrages, il y a 1,049 males et seulement 170 femelles, e'est-a-dire une proportion de 6 males pour 1 femelle. Cette proportion est considerable, et il n'est pas etonnant que des auteurs ä qui les renseignements font defaut s'y arretent.
La raison en est pourtant bien simple.
J'ai pointe le nombre des sujets de la race canine que je rencontrais libres dans la rue h diverses heures du jour sur les differents points de Paris. Voici ce que j'ai trouve :
1quot; recensement ; 5C6 males, 114 femelles (1).
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5Cnbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;
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51
Ii08nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;282
Soit plus de 4 chiens pour 1 chienne.
Cela demontre que, lorsqu'un animal enrage passe dans la rue, il a beaucoup plus de chances, en mordant au hasard, de contaminer plus da chiens que de chiennes.
Si, d'autre part, je considere que les males ont une propension plus grande ä mordre ceux de leur sexe que les chiennes, qu'en outre le caractere de la femelle est
(1) Ce relev^ resume plusieurs jours de pointage.
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80nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; DE LA RAGE.
plus froid que celui des males, qu'elle est disposee ä se sauver du bruit, ä se garer des combats si frequents des animaux de sa race, je repondrai completement ä la question posee. II resulte de lä que ce n'est pas dans une immunite organique dont jouirait la chienne qu'il faut aller chercher, comme Tont fait certains auteurs, la cause de la disproportion qui existe; la chienne a tout autant de propension ä contracter la rage que le chien.
Quelques auteurs ont pretendu qu'elle ne se trouvait pas comme le chien soumise ä l'influence des desirs ge-nesiques, attendu que chez elles ils sont periodiques, tan-dis que, disent-ils, chez le male ils sont permanents (1), et ont voulu y voir la raison de cette disproportion.
Mais, s'il en etait ainsi, si les desirs genesiques non satisfaits pouvaient produire, chez le male, larage, on observerait que les chiennes entrant ordinairement en rut deux fois par an, aux mois de fevrier et d'aoüt, les males setrouvant par consequent ä ces deux epoques sur-excites an plus haut point, devraient y contracter la rage en plus grand nombre ou au moins a quelque temps de lä.
Or, je vois par les statistiques par mois qui precedent
(1) Ceci n'est pas exact en tout point, et le mot permanent doit fetre pris dans une acception spöciale. En effet, le chien est apte ä la reproduction de son espfece d'un bout de l'annäe a Tautre1; mais les dfisirs- gen6sdqueamp; ne sont eveilles en lui que par les effluves que produit la chienne lorsqu'elle est en rut. Lorsque le rut est pass^, gfinamp;alement il considfere celle-ci avec indif­ference. Nous retrouvons ici une loi admirable de la. nature, en vertu de laquelle les besoins des etres sont accompagnös des moyens de les satisfaire; et, comme la chienne qui n'est pas en rut ne se laisse gßnöralement pas approcher par le male, il fallait pour que Tequilibre se fit, que ce desir ne devint imperieux, chez lui, qu'au moment oü eile le ressent aussi. En outre, je ferai observer que le chien n'ayant pas de v^sicule sfiminale ne peut 6prouver, comme cela se passe chez d'autres animaux lorsque ce reservoir est plein, une excitation de desirs qui provient de cette conformation.
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STATISTIQUES.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 81
que, bien loin d'etre plus forts que les autres, ces mois seraient plutot plus faibles. Generalement le nombre des cas de rage de chaque trimestre differe peu ou point.
J'ai observe des desirs genesiques violents aussi bien sur les males que sur les femelles. J'ai vu des chiens, exaltes au point de refuser toute nourriture, monter des gardes impossibles pres de l'objet de leurs amours, ou faire des courses effrenees.
Jamais jen'aipu constater un seulcasde rage provenant de ces causes.
Ceux qui afflrment le contraire sont trornpes par les ap-parences et ne tiennent pasassez compte des periodes d'in-cubation; I'etat rabique pout quelquefois remonter a plus d'un an, et, de plus, le caractere de ce mal est de pousser parfois energiquement aux desirs veneriens.
Tableau des chiens rencontres sur la voie publique par race et par sexe.
Races.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;Males.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; Femelles.
Metis..................nbsp; nbsp; nbsp; 225nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 42
Loulous................nbsp; nbsp; nbsp; 110nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 8
Terriers...............nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 98nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 51
De chasse..............nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;COnbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;12
Griffons................nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 38nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 8
Caniches...............nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 22nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; G
fipagneuls (petite race)..nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 50nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 6
Levriers . .......,.....nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 7nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 9
ßichons-Havanais.......nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 21nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;a
Terre-Neuve et de mon-
tagne................nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; (jnbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 5
Danois.................nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; raquo;nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 1
G07nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;151
Ce tableau clot mes recherches sur la voie publique; il contientla preuve: i0que les cas de ragen'affectentde pre-
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DE LA RAGE.
ference aucune race, mais qu'ils sont proportionnels au nombre de chiens de chaque race habituellement libres dans la rue; 20quela chienne terriere, d'uncaracteremoins doux, plus vagabond, plus agressif que les autres et ren-contree proportionncllement en plus grand nombre snr la voie publique que les femelles des adtres races, est bien plus sujette ä contracter la rage.
En resume, le nombre des enrages males a toujours ele en rapport constant avec celui des individus de ce sexe rencontres dans la rue.
Tableau des chats et chattes traites dans mon Etablissement de 1859 ä 1873.
MALES
FEMELLES
an.\£es.
MALES.
I'EMELI.ES.
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enragfe.
curagees.
1859
as
7
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1801
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1862
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1863
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11
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1 1864
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25
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1806
105
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20
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1866
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1 1807
122
23
1808
104
17
1809
105
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—,
20
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1871
45
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1872
42
19
1093
238
1
\
Le tableau des cbats prouve que c'est completement ä tort que Ton accuse la sequestration de produire la rage, puisque, sur 1,331 chats, un seul est affecte de cette ma-
(1) Entröe ie 2fi octobre, cette chatte avait ete mordue a la Ifevro par un chien enragö.
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STAT1STH(U£S.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 83
ladie, et, encore, parce qu'il a ete mordu par un chien enrage. Non, quoi qu'on ait ecrit, les mceurs des chats qui vivent dans une sequestration absolue n'ont jamais pu me faire assister ä un cas de rage spontanee ; bien plus, cette sequestration les fait jouir d'une iramunite presque complete, la rage ne se propage pas entre eux.
Jamais je n'ai entendu dire qu'un chat ait communique la rage a un autre chat on d un chien. Deux fois j'ai con­state qu'un chat avait contracte la rage apres avoir ete mordu par un chien; la premiere fois, en 1859, le cas qui figure au tableau, la seconde fois, au mois do septem-bre 1873. Le chat de madame X..., rue Julien-Lacroix, avait ete mordu par un chien enrage. Cclle-ci n'y prit garde et, mordue par son chat, dans un de ses acces de rage, eile mourut enragee. L'animal elait chätre.
11 y a ä Paris beaucoup de chats que leurs proprietaires font chätrer. Je ne nie pas ce fait, mais je ferai observer qu'il y a au moins un chat entier sur dix, qu'en outre la chatte est peut-etre de tons les animaux celui qui ressent le plus vivement les desirs genesiques, et pourtant, dc 1839 ä 1872, je n'ai ä signaler qu'un cas de rage sur la chatte (1), du ä la morsure d'un chien enrage. Apres cela, peut-on soutenir que les desirs genesiques non satisfaits produisent la rage spontanee?
J'ajouterai que mes observations faites au Jardin des Plantes sur les felins nient energiquement la possibility de la rage spontanee, comma resultat de la sequestration. Les lions, les jaguars, les tigres sont soumis u une seques­tration absolue, et si les lions, les jaguars out la possibilite de satisfaire leurs desirs genesiques, ce dont its ne se font
(1) Je fais remarquer que la plupart des chattes en amour, dans Paris, ne re^oiveiit point satisfaction.
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DE LA RAGE.
pas faute, il n'en est pas de möme des tigres auxquels on refuse toute espece de communication entre eux.
Jamais Ton n'a pu constaler im cas de rage chez ces terribles animaux.
Personnes mortes de la rage dans les höpitaux de Paris de 1865 ä 1872.
MOIS.
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Avril..........
Mai.............
Juin...........
Juiilet...........
Aoüt.............
Septembre........
Octobre . ..
Novembre........
Decembre........
8
12
12
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TROISIEME PARTIE
CHAPITRE PREMIER IXTRODUCTIOiV A L'HYGIENE DE LA RAGE
Les causes generales de la propagation de la rage out etc deduites da laits qui me paraissent si Men etablis, que je ne vois pas que, dans les etudes ä venir, il soil possible d'en ebranler les bases.
II y aura des repetitions, de tout temps on observera que les clirnats temperes, que cerlaines epoques plus tot que d'autres sont plus favorables au developpement du virus rabique. Mais, peu de decouvertes importantes res-tent ä faire sur cet ordre d^idees.
On ne contestera Jamals qu'a Paris la propagation de la rage a Thomme precede de Texlerieur a. I'mterieur ; c'est-ä-dire que sur 10 personnes inoculeesO (l)le sontä Tinterieur des maisons par des chiens qui ont ete con-tracter generalement an dehors cette redoutable maladie. L'inoculation de la rage ä rhomme pendant qu'il circule dans les rues est I'exception.
C'est tout le contraire de ce qui se passe pour les chiens.
(1) Vernois.
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86nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; DE IA RAGE.
Bien qu'un petit nombre de chiens enrages, comme je Tai prouve, s'introduisent dans les cours, les ecuries (1), les escaliers, les maisons, et y propagent le germe fa­tal ; bien que la plupart des chiens enrages, comme je le remarque egalement, reviennent au logis sous Timpul-sion de leur maladie et y apportent parfois la rage, il n'en reste pas moins indeniable que, de chien ä chien, le grand theatre de propagation de la rage est la rue. Et, ainsi que le prouve ma carte de la Rage ä Paris, d'une rue infestee ce mal se propage rapidement aux rues aboutis-santes. Un chien est-il enrage, cherchez le logis de son maitre, etvous le verrez entoure d'une Serie de cas de rage.
Le chien suit pas ä pas les mouvements de la vie des hommes. 11 suit son maitre au dehors comme il se plait ä cote de lui dans l'interieur du logis. La paix publique retire de la circulation un grand nombre d'animaux qui, mis en liberte, lorsque la guerre ravage nos contrees, pro­pagent alors le virus rabique dans une mesure effrayante, comme je l'ai prouve pour la guerre de 1870-71. II ne faut pas attribuer, comme l'ont faitcertaines personnes, la mul­tiplication des cas de rage ä la mauvaise nourrilure que Ton donnait aux chiens. J'ai nourri un grand nombre de ces animaux avec du son seulement.... et en tres-faible dose, et, je le repete, si Diogcne n'a pu trouver un bomme, je suis encore h la recherche d'un cas de rage spontanee.
La guerre est finie, la paix est revenue cicatriser nos plaies, en 1873 les cas de rage out diminue dans une pro­portion tres-appreciable. J'espere que l'application de la mesure que je propose viendra achever cette amelioration.
(!) II arrive frequemment que des chevaux mordus par des chiens enrages, dans rinterieur des maisons, contractent la rage.
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INTRODUCTION A L'flYGlfeNE DE LA RAGE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;87
11 resulte des considerations precedentes que la seques­tration, loin d'etre un des elements de propagation de la rage, comme le soutient Al. Leblanc, agit, au contrairc, dans le sens oppose, et que plus eile sera generalisee, moins il y aura de cas de rage.
La statistique signale le progres constant de la rage ca­nine, comme consequence de l'augmentation du nombre des chiens, et eile montre la frequence plus grande des cas de rage sur 1'homrae.
Le moyen de conjurer le peril qui menace notre es-pece, d'apres l'opinion de M. Bouley, qui I'indiquait de nouveau ä l'Academie, au mois de decembre 1873, est de faire connaitre au public le debut initial de la rage. Au commencement de ce traitej'ai apprecie cette methode qui a ete preconisee pour la premiere fois en 1860 par M. Sanson. Le savant Academicien lui a donne une im­portance tout a fait en desaccord avec les resultats qu'elle a donnes.
En effet, depuis que M. Bouley est venu exposer cette opinion a l'Academie, a-t-on constate la moindre diminu­tion dans les cas de rage ? Nous venons de voir que non-seulement la rage est devenue plus frequente sur le chien, mais encore sur Tbomme. Cette metbode est done au moins insuffisante.
Si 1'on reste dans Tobservation pure et simple des phe-nomenes, on congoit que la connaissance des signes qui marquent le debut initial de la rage, si eile etait entree dans la cervelle des proprietaires, puisse rendre quel-ques services. Mais intituler cette connaissance Le meil-leur preservatif, qua ad on connait l'indifference du public pour s'enquerir des choses de la medecine, la difficulte que les gens experts ont eux-memes de bien
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#9632; 88nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;DE LA RAGE.
connaitre ce debut initial, c'est beaucoup trop lui accor-der, et la preuve en est que cette methode n'a pas arrete raugmentation des cas de rage.
De deux choses l'une, ou il faut accepter le fleau de la rage et le laisser se developper, ou il faut proposer pour le combattre des moyens plus efflcaces que ceux que Ton propose chaque jour.
11 y a des veterinaires qui ne craignent pas de proposer raugmentation de l'impöt sur les chiens comme une excellente mesure.
Assurement, cette assertion a une certaine valeur. Mais j'avoue que je verrais avec peine l'autorite prendre ce parti. Le chien est necessaire au malheureux; celui qui ne trouve que deboires dans la vie s'attache facilement ä toutce qui temoigne un peu d'affection. Ea imposant for-tement les chiens, c'est le pauvre qu'on frappc et non le riebe ; pour le malbeureux, lui retirer son chien, c'est lui öier une partie de sa famille.
D'autres refonnateurs demandent un impöt plus fort sur les chiens, plus faible sur les cbiennes. Les cbiens sent la cause du mal, disent-ils., ils ne peuvent satisfaire leurs desirs genesiques; en augmentant le nombre des cbiennes, ce qui serait la consequence de cet impöt, on aurait moins de cbiens enrages. Les conclusions du traite de MM. Bachelet et Frossard tendent ä demander l'emas-culation.
Mais oü ont-ils vu que la cbienne etait exempte de de­sirs genesiques? Non, certes. Mais, comme je l'ai dit plus haut, les desirs genesiques violents, satisfaits ou non, peuvent hater revolution du virus rabique, ces memes desirs sont memc souventla consequence de I'etat rabique, ils ne sont que l'effet. Ces auteurs les ont pris pour une
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INTRODUCTION A L'HYGIEiNE DE LA RAGE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 80
cause. Tons ceux qui proposent ces theories n'en ont nullement fait I'application. 11 faudrait qu'ils aient fait quelques experiences; ils auraient yu si leurs opinions etaient fondees.
En 1845 rautorite, en prescrivant la museliere, etait sur la voie. Oa interposait entre la dent du chien et les animaux qu'il rencontrait un corps reellement isolant; on suppleait ainsiau manque de surveillance des maitres sur leurs chiens qui n'etaient plus des lors un danger pour la societe.
La museliere, pour etre efficace, enlevait loutagrement au chien, etetait une contrainte desagreable imposee a cet excellent animal. Ses inconvenients Font fait tomber en desuetude.
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CHAP1TRE II
HYGIEXE DE LA RAGE
Considerations gener ales.
Apres avoir analyse lestravaimleRenaultet de MM. Rey, Lafosse et Herhvig, M. Reynal, directeur de rEcole vete-rinaire d'Alfort, dit dans son Tratte de la police sani-taire, page 879 : laquo; Dans les conditions ordinaires, plus laquo; des deux tiers des sujcts, parmi les animaux domesti-laquo; ques, echappent ä l'inoculation probable ; et, dans les laquo; conditions experimentales, oü rinoculation est certaine, laquo; encore un tiers au moins de ces sujets restent indem-laquo; nes. raquo; II conclut avec la justesse de deduction qui caracterise son savant ouvrage : laquo; La rage ne pent done laquo; pas etre mise au rang des maladies dont la transmission laquo; soit des plus faciles. raquo;
Cette opinion, du reste, se trouve corroboree par plu-sieurs observations.
Ainsi, M. Tardieu Signale une moyenne annuelle de 2 cas de rage, 35 p. 100 dans le departement de la Seine, de 1833ä 1838.
Hunter dit que, sur 100 morsures faites a i'homme par des chiens enrages, 5 seulemenlpeuvent prendre.
Bien que ces donnees aient augmente, comme on le
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HYGIENE DE LA RAGE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;91
voit par le tableau ci-dessous, parsuite de Taugmentation toujours croissante des chiens enrages, mes observations personnelles me permettent de dire qu'il y a, en faveur de notre espece, encore bien presde 95 chances sur 100 de non-inoculation. Sur les animaux on n'en compte que 66 p.100.
Si ces chiffres etaient plus generalement connus, ils di-minueraicnt sensiblement les frayeurs bien naturelles que la rage inspire aux personnes mordues.
Eneffet, dans l'exercice quotidien de mon art, il m'est arrive bien souvent de relever le moral de sujets fortement troubles, et de les delivrer, en leur exposant ces faits, de ces poignantesangoisses que des morsures suspectesleur faisaient eprouver.
Par le meme moyen, j'ai pu consoler des families attris-tees par la perspective des dangersauxquels elies croyaient un de leurs membres expose.
II me reste maintenant ä analyser les moyens d'hygiene proposes par divers auteurs pour arreter le developpe-ment du virus rabique ou neutraliser soneffet, tels que : la cauterisation, l'abatage des chiens, la museliere, etc. Je ne parlerai pas de la responsabilite des maitres des chiens, quietant du domaine du droit commun se trouve dans les Codes. Je termiuerai cette partie en faisant l'ex-pose de la methode de la resection et des critiques qu'elle a soulevees.
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CHAPITRE 111
DE LA CAUTEUISATION
On ne saurait trop recommander de pratiquer a temps la cauterisation.
On n'a presque jamais sous la main un fer chaud ; 11 faut du temps pour le preparer : pendant qu'on I'ap-prete, il Importe de toucher les plaies avec le premier agentchimique denature caustique que Ton aä sa dispo­sition (acidesulfurique, acide nitrique ou eau forte, acide chlorhydrique,beiirre d'antimoine, pierre infernale, ara-moniaque, etc., etc.), on pent egalement faire brüler de la poudre de cliasse sur la blessure, aQn de detruire au plusvite legerme infectant etd'empecher son introduction dans le sang.
Combien de fois, helas ! n'ai-je pas constate la negli­gence que les personnes mordues apportent ä se faire cauteriser : combien de temps perdu avant qu'on se pre-occupe de trouver un agent caustique ; combien souvent ai-je trouve une insouciance deplorable cbez des indi-vidus menacesd'un danger imminent!
Les personnes mordues par des chiens laissent passer presque toujours un quart d'heure, que dis-je, deux jours at plus avant de se preoccuper de la morsure que leur a faite un chien enrage.
Combien de fois n'ai-je pas vu des gens qui, redoutanl la cauterisation, ne voulaient rien faire. D'autres, plus
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DE LA CAUTERISATION.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;93
presses, parce qu'ils sontplus effrayes., perdentla tete, et oublient de faire des succions (1) ou des ligatures au-dessus de la partie blessee pour empecher l'absorption du virus rabique, ou de pratiquer des lavages de la plaie pendant que l'on cherche des matieres cauterisantes.
Et, pourtant, rinoculation s'opere avec une rapidite effrayante : ainsi, M. Brillant, demeurant ä Paris, rue de Belleville, 36, avait un chien qui fut mordu ä l'oreille le 18 octobre 1867 par un chien enrage ; je le cauterisai au fer rouge, une demi-heure apres l'accident, et, dans une periode de deux mois, cet animal devint enrage. L'ope-ration avait eu lieu trop tard et, par suite, etait restee sans effet.
Les experiences les plus serieuses faites par le savant Benault nous apprennent que l'absorption du virus ra­bique pent avoir lieu en 5 ou 10 minutes.
Aussi, je ne saurais trop engager ä agir aussi diligein-ment et aussi energiquement que posible, lorsqu'on a ete mordu par un chien.
Begle generale : il faut pratiquer instantanement la cauterisation pour empöcher l'inoculation du virus rabi­que, quelque heroique que soit ce procede : car son ap­plication tardive, dans riminense majorite des cas, laisse l'bomme de l'art desarme en presence de redoutables eventualites.
(I) 11 va sans dire que les personnes qui auraient les levres gei'CÖes ou la muqueuse buccale entamöe doivent s'en abstenir.
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CHAP1TRE IV
DE L'ABATAGE DES CHIENS MORDUS OU SUSPECTS
I
La mort recommandee comme moyen preservatif de la rage, quoique necessaire, n'en accuse pas moins une epoque barbare et la faiblesse de nosmoyens.
Taer pour conserver est une chose qui blasse 1'esprit ; c'est un contre-sens- Cette mesure est vexatoire, et bien des gens lui preferent une longue sequestration de leur chien. Et,poiirtant, il faut donner le conseil du sacrifice. On pent prononcer, ä regret, la peine de mort, c'est le parti le plus sage. L'bumanite n'a-t-elle pas des droits superieurs a ceux des aniraaux? Certainement, ilfaut etre doux envers les animaux, mais, entre eux et rhomme, il n'y a pas ä hesiter ; et, du moment que Fanimal constitue pour celui-ci un danger reel, il doit etre sacrifie.
Voila ce que disent aujourd'hui, et avec raison, les ve-terinaires ; mais, et c'est lä un de ses grands avantages, ma methode supprime totalement cette obligation qui, pour etre necessaire, n'en est pas moins cruelle.
Et d'ailleurs, est-ce que cette pratique retire de la cir­culation tons les chiens dangereux ? Non, certes, malheu-reusement, et la preuve en est que la rage continue ä se perpetuer ; ce n'est done lä qu'une demi-mesure suscep­tible, tout au plus, de donner des demi-resultats.
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CHAPITRE V
MOYENS PRESERVAT1FS
M. Sanson, dans son Traite de la rage, public en 1860, ecrit ceci : laquo; Le meiJleur preservatif de la rage laquo; reside dans la notion des symptomes qui font connaitre, laquo; des son debut, cette funeste maladie. raquo; Ce principe a ete admis dans les conferences fort applaudies que M. Bou-ley a faites a l'amphitheätre de la Sorbonne. Youatt et ces savants ont etabli avec le talent et la clarte qui les distin-guent les caracteres de la rage. Les conseils donnes par ces homines eminents eussent porte leurs fruits, si cette indifference inherente ä notre nature pour les precautions les plus elementaires ne leur eut fait obstacle.
Designer un mal, en indiquant ses signes premoni-toires, est, assurement, le meilleur moyen de preserver la societe de ses ravages. Partisan de ce Systeme preventif, si profitable, s'il etait suivi, j'ecrivais en 1867, apres un expose succinct des symptomes de la rage : laquo; Si vous re-cc marquez un changement dans les habitudes de votre laquo; chien, isolez-le, et ne lui laissez aucune communication laquo; avec les personnes ou les animaux. Donnez-lui des ali-laquo; ments, en ayant soin de vous tenir a distance de lui. laquo;Observez-le quelque temps, quinze jours environ, et laquo; vous eviterez bien des malheurs. raquo;
Mais, donner un bon conseil au public, c'est presque toujours precher dans le desert.
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96
DE LA RA.GE.
Le chien d'un de mes clients est-il malade ?il le prend dans ses bras pour me l'apporter; ou, s'il peut marcher, il conduit sans museliere, sans precaution aucune, im animal toujours suspect, bien souvent enrage qui, dansle parcours du logis äla maison de consultation, mord betes et gens. Je ne parle pas du danger imminent que cette negligence fait courir ä mon personnel et ä moi-meme.
J'ai la preuve d'inoculations resultant do ce laisser-aller des plus imprudents. Notons, en passant, une autre con­sequence desastreuse de Tincurie du public en cette ma-tiere: les chiens malades reeoivent, ordinairement, les premiers soins k domicile, et la plupart de leurs pro-prietaires, avant de les conduire au veterinaire, leur font avaler de force des vomitifs, des purgatifs, etc., ou leur ouvrent la gueule pour voir s'il ne s'y trouve pas d'os, ou leur passent le poireau historique dans les premieres voies digestives pour le faire descendre, s'exposant ainsi ä recevoir et recevant parfois des blessures morteUes.
On devrait considerer tout chien malade comme sus­pect, et, s'il repugne d'appeler le veterinaire, qu'on atta­che et qu'on surveille sou chien, suivant les principes exposes plus haut.
Mais non, on affectionne son chien d'une fa?on qui de-passe les bornes de la raison. laquo; II n'est pas possible que laquo;cepauvre Black soit enrage, raquo;dit-on; et Ton dort sur ses deux oreilles, pendant que Ton a, nouvelle epee de Damo­cles, un danger imminent suspendu au-dessus de sa tete.
Pendant ce temps, le germe du mal se developpe chez le chien qui, dans un acces de frenesie, se jette sur son maitre et le mord. Quelque temps apres, une famille eploree conduit ä sa derniere demeure un mari, un pere ä qui sa negligence a ouvert les portes du tombeau.
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CHAPITRE VI
DE LA MUSELIERE
L'abatage des chiens mordus ou suspects, et la caute­risation des individus contamines de notre espece n'ayant pas oppose une barricre süffisante a la propagation du virus rabique, on imagina alors de rendre la museliere obligatoire pour tous les chiens. Elle etait en usage de temps immemorial pour d'autres animaux susceptibles de mordre, et une ordonnance du Prefet de Police de Paris Fimposa ä tous les chiens le 25 mai 1845. Par cette me-sure on croyait empecher les chiens de mordre et calmer toute inquietude a venir.
Voyons un peu quelles sont les opinions en faveur de ce Systeme et celles qui lui sont opposees, et etablissons sa valeur pratique.
Des le principe, la museliere etait de forme dite ä pa­nier, solidement fabriquee et reellement isolante, en un mot, eile etait serieuse. Je ne doute pas que, par un usage rigoureux et constant, eile n'eüt rendu de grands services. Je suis d'autant plus certain de la justesse de ce raison-nement, qu'on a constate une augmentation des cas de rage depuis que Ton s'est reläche a son endroit en tolerant la simple laniere de cuir, le ruban de soie ou de fil sur le nez (voir les tableaux statistiques).
II eut fallu aussi completer la mesuro du port de la museliere en invitant les proprietaires de chiens ä laisser ces animaux museles ä l'interieur du logis, hors le temps
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98nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; DE LA RA.GE.
des repas. Car, on peut remarquer, d'apres les observa­tions du docteur Vernois, qu'en raoyenne, sur les cas de rage tju'il Signale, les neuf dixiemes proviennent de mor-sures faitcs aux personnes et aux animaux qui habitent ou frequentent la meme maison que le chien.
11 faudrait, pour que le musellemenl füt reellementpro-pice, inviter les maitres des chiens ä les conduire en laisse dans la rue, parce que, ainsi que Fa observe Prange, le chien enrage peut se debarrasserdesamuseliere et rendre ainsi illusoire la precaution que l'on prend de le museler: beaucoup d'autres veierinaires ont fait cette remarque, et moi-meme j'ai souvent ete a meme de constaler le fait.
Aussi, l'usage de la museliere ne fit-il pas disparaitre la rage, comme on l'avait espere d'abord. Alors, il se trouva des gens qui pretendirent que l'emploide cetappa-reil pouvait provoquer la rage, et le docteur Vernois ecrit : laquo; La museliere predispose, par l'etat nerveux dans lequel laquo; se trouvent les animaux, äla production de la rage. raquo;
La Societe protectrice des animaux, dont le zele ne connait pas de bornes lorsqu'il s'agit des inlerets de ses proteges, se laissant entrainer peut-etre un peu par un bon sentiment ä i'egard d'un animal aussi interessant que le chien, trouva cruel l'emploi de l'ancienne muse­liere ä panier, dont rapplication, en empechant l'ecar-tement des mächoires, rend difficile l'acte si nccessaire de la respiration. Get inconvenient n'est pas sans im­portance, et sa gravite est considerable pendant la pe-riode des grandes chaleurs, epoque oü la transpiration des bronches est trös-active cbez ce quadrupede (1).
Afin de remedierä cet etat de choses, la Sociele mitau concours, en 1870, une museliere perfectionnee, tant au
(1) Le chien transpire peu par la peau.
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DE LA MUSEL1ERE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 99
point de vue de la securite de Thomme qu'ä celui de la commodite du chien.
Plus de quarante concurrents industriels ou particiiliers repondirent ä cet appel, et je ne doute pas qu'elle eüt mene ä bien cet acte protecteur si, ä ce moment, la muse-liere ne füt tombee en desuetude.
Je suis persuade que les vices inherents au muselle-ment, que je traite Jonguement ä cause du caractere offi-ciel dont il a ete revetu, ne vont pas jusqu'ä produire la rage, quoique des csprits serieux I'aient cru.
En effet, les cas de rage sont beaucoup plus nombreux depuis que Ton ne museile plus, puisqu'ils ont double pendant la derniere periode de six ans (voir les tableaux statistiques).
De plus, j'ai vu des chiens se debattre, comme des fous, pour eloigner cette contrainte; ils fussent plulöt morts que de s'y soumettre. Low, de M. de Guetz, de Passy, Fri-sette, de madame Lacroix, de Paris, et beaucoup d'autres dont je n'ai pas les noms presents ä la memoire, ont pre­sents une repugnance invincible pour la museliere; sur tous ces sujets, j'ai ete ä meme d'observer leur embarras, leur egarement, leur fureur meme, sans que cette cause de torture morale ait engendre la rage spontanee; du moins, pendant la periode du musellement, je n'ai jamais eu occasion de constater son apparition.
J'ajouterai encore que pour moi il n'appartient pas ä l'homme par des vivisections ou par toutes les tortures imaginables de faire naitre la rage. Cette maladie, comme les autres, a ses lois d'origine et d'evolution, lois impenetrables pour la science jusqu'ä ce jour. Seuls, ses funestes elTets sont connus de nous, et, comme nous ne pouvons les supprimer puisque nous n'en connaissons
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DE LA RAGE.
pas les causes, c'est ä nous d'en arreter le developpement. En resume, la museliere sera efficace toutes les fois qu'elle empechera de mordre et qu'elle sera portee cons-tamment. 11 faut y habituer les chiens des leur plus jeune äge, et tres-peu se montreront alors opposes a son appli­cation.
J'ai fait observer plus haut que les chiens enrages se debarrassent quelquefois de leur museliere; par conse­quent, je le repete, cesanimaux ne devraient jamais sortir que tenus en laisse; mais cette mesure aurait un double inconvenient : d'abord, eile empecherait le chien de prendre un exercice salutaire ä sa sante, et, ensuite, dans les rues frequentees, eile entraverait la circulation des passants.
Enfin, le musellement ä l'interieur des habitations serait le complement de cette mesure, si on I'appliquait serieusement; mais, dans la pratique, on voit tout le con-trairc, et les proprietaires de chiens ont hale de rentrcr chez eux, lorsque ceux-ci les accompagnent, pour les de-barrasser de ce masque genant.
En outre, les chiens malades, qui, par cela meme, sont suspects et devraient etre muscles, ne le sont jamais.
L'application de la museliere ne preserve done pas sui-fisamment fhotnme centre le danger dont le menace le chien, et son emploi soumet cet animal ä taut de con­trainte qu'il repugne ä notre civilisation eclairee d'en or-donner rigoureusement l'application.
Quoi qu'on fasse pour adoucir les inconvenients de cette espece de cage oü i'on enferme latete du chien, eile cons-tituera toujours pour celui-ci une souffrance reelle, tout en le defigurant. (Juelle expression possede, je vous le de-mande, la töte d'un chien musele?
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DE LA MUSELlfiRE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; 101
Hätons-nous done de lui oter cette vilaine machine qui ne nous preserve qu'ä moitie des atteintes de la rage. II existe un moyen bien plus simple de nous defendre des morsures du chien, tout en laissant liberte pleine ei en-tiere ä cat intelligent animal.
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GHAPITRE VII
liXTRODUCTIOiV A LA METHODE DE LEMOUSSEMEiXT DES DEXTS
Origine de ma methode.
De tons les moyens que je viens d'exposer, qui ont ete employes pour se preserver de la rage, un seul, le mu-sellement des chienSj contient des avantages positifs, pourvu qu'il soit rigoureusement applique.
Mais ce procede a le tort ä mes yeux d'oter au chien sa liberte, 11 lui enleve toute grace, toute Leaute, lui cause une souffrance et est, par suite, antipathique avec tout sentiment de bienveillance pour ces animaux.
Aussi,la plupart des proprietaires dechiens ne veulent-ils pas les museler, et les cas de rage devicnnent de jour en jour plus nombreux (voir les tableaux statistiques); sa non-application annule les resultats efficaces que pourrait produire la museliere.
Un jour, profondement attriste par le spectacle d'une famille desolee dont im des membres avail ete mordu par un chien enrage, je me disais que I'humanite ne saurait etre ainsi desarmee et qu'cn attendant quon decouvrit rantidotedu virus rabique, il devait exister un moyen plus efficace que ceux dejä employes pour combattre I'exten-sion de ce mal affreux.
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METHODE DE L'EMOUSSEMENT DES DENTS.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;103
Je me rappelai alors avoir quelquefois manque des sai-gnees sur des animaux, parce que la pointe de la lancette dont je me servais s'etait emoussee; en outre, reflechissant ä ce fait connu de tout le monde qu'une öpingle ou une aiguille epointee, un fleuret mouchete, sont incapables de penetrer un tissu quelconque, j'acquis ainsi la convic­tion que, si l'on parvenait a emousser la pointe des dents du chien, on arriverait inevitablement ä empecher l'ino-culation du virus rabique^ puisque la dent epointee n'en-tamerait que tres-difficilement l'epiderme.
Gelte theorie se trouvait justifiee par un memoire lu ä l'lnstitut et dans lequel il est dit que : laquo; les quadru-laquo; pedes herbivores atteints de rage ne peuvent la trans-laquo; mettre ä cause de leurs dents en couronnes. raquo; On y cite un cheval du regiment des guides qui, en 1862, devint enrage et mordit impunement la main de son ca­valier.
Moi-meme je fus appele, en 1863, chez M. Gaitz, en­trepreneur d'asphalte, pour visiter un cheval malade. L'expression de la physionomie de cet animal m'etonna; je le fis sortir de l'ecurie, et, apres examen, je fus con-vaincu qu'il etait enrage. En effet, un terrier qui s'etait refugie dans la cour de ce proprietaire lui avait inocule le virus rabique. Ce cheval avait mordu un homine ä la main. 11 n'y avait pas eu piqüre, l'homme fut indemne.
Dupuy cite des moutons enrages mordant leurs voisins sans leur inoculer la rage.
Or, il est prouvc que les herbivores enrages ont la salive virulente. En 1845, j'inoculai la salive d'iinquot;taureau enrage ä une brebis. Vingt-trois jours apres eile etait enragee.
J'etais done amene ä conclure que, si les herbivores
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DE LA RAGE.
n'inoculent pas la rage, la raison s'en trouve tout naturel-lement dans le fait que le chien, etant carnivore, est arme de canines et d'incisives aigues avec lesquelles il dechire les chairs, tandis que les herbivores, dont les dents sent destinees ä broyer les plantes qui forment la base de leur nourriture, les ont toutes ä surface plate et pressent generalement, lorsqu'ils mordent, l'epiderme sans l'entamer (1).
Donnez aux dents du chien, en les emoussant, la forme de celles des herbivores, et vous pourrez retourner la pro­position. Pas plus que celle des herbivores, la rage du chien ne constituera pour Fbomme un danger veritable.
(1) La dent des herbivores enrages dilacere parfois les tissus en les broyautet pourtant on neditpas, on ne Signale pas des faits d'inoculation qui hü soient imputables. Dans ces cas la mattere virulente qu'elle pent porter s'öparpille par la pression au delä du point \is6, et l'attrition des tissus con-tribue ä rendre nulle l'absorption.
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CHAPITRE VIII
DE LA RESECTIOX
Le meilleur preservatif de la rage ne serait-il pas celui qui, sans contrainte aucune, meltrait le chien dans l'im-possibilite de faire ärhorhme ou aux animaux des mor-sures susceptiblesd'inoculer le virus rabique. Co but ost parfaitemeat atteint par remoussement de seize dents (12 incisives, 4 canines) (1).
Des quo les dents de remplacement sent bion sorties, quelqu'äge qu'ait le cbien, on peut le desarmer.
Cette operation dure en moyenne de trois ä cincj mi­nutes. Elle ne donne lieu ä aucune irritation febrile; l'opere mange et boit comme auparavant.
Les dents limees ne sont pas plus exposees ä la carle que les dents intactes; les levres les cachent constamment, excepte dans le cas d'agression ou de legitime defense. La beaute du chien n'en est pas alteree.
En general, c'est un pinceinent brusque produitparles dents anlerieures qui inocule la rage, en dechirant l'epi-derme.
Par remoussement ou resection, on etablit seize cou-ronnes, aux lieu et place de seize pointes.
(I) Daubenton, dans ses instructions aux bei-gers, leur conseille de raccourcir les crochets.ou canines des chiens pour ^viter que ces animaux en rassum-blant les troupoaux n'enlfevent des lambeaux de cliair des jambes des bes-tiaux confies ä leur garde. Quelques auteurs ont vonlu assimiler cette me-thode ä la mienne, mais on ne peut ^tablir de rapport entre elles poisqnil faut d^sarmer 16 dents pour se preserver de la rage. Daubenton n'avait nullement en vue la rage lorsqu'il proposait son systfeme.
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DE LA RAGE.
Effets de la resection sur le caractere du chien. — Des chiens de chasse qui mordaient et dechiraient le gibier ont perdu cette ennuyeuse habitude ä la suite de l'emous-sement des dents.
Le caractere de quelques chiens de garde tres-mechants et par ceia meme dangereux s'est adouci, et Ton a pu ainsi conserver des animaux qu'il aurait fallu abattre.
Des terriers n'ont pas cesse de tuer les rats apres remoussement comme ils le faisaient avant cette opera­tion : il leur a ete seulement moins aise d'etrangler les chats; de mechants esprits seals peuvent trouver ce fait regrettable.
A ce sujet, j'ajouterai que le desarmement des boule-dogues serait doublement utile en ce qu'il contrarierait cette sauvage passion que quelques individus ont d'exci-ter cos pauvres beles ä s'entre-dechirer.
Des chiens de salon ont ete desarmes sans que ce fait ait donne lieu ä aucun inconvenient.
Cas oü il fant s'abstenir de pratiquer la resection. — Ces cas, assez peu nombreux du reste, sont indiques par la nature des services que rend le chien. 11 est evident, par exemple, que les chiens qui chassent la böte fauve n'ont pas trop de tons leurs moyens pour se defendre de ses attaques. On pourrait aussi excepter les chiens de garde, bien que leur mission ne soil pas autant d'arreter les mal-faiteurs que de signaler leur presence par des aboiements reiferes.
Inconvenients de remoussement. — II altere les signes qui font connaitre Tage du chien; cependant il est tou-jours facile, par l'inspection exterieure, la fraicheur, la couleur des deats, de classer ces animaux en jeunes, adultes ou vieux; d'ailleurs cette objection est de peu de
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valeur, puisque, ä l'etat naturel, l'usure des dents du chien n'a presque jamais lieu d'une facon reguliere.
Avantages de remoussement. — Le plus grand acte de protection que Ton puisse exercer en faveur de l'espece canine est de la soustraire, sans application de moyens rigoureux, aux cas de rage qui, chez eile, sont si frequents. En supprimant un danger qui eloigne cet animal si fidele ä l'hoinme de l'intimite de la famille, on previent, on an-nule l'arret de mortquifrappe un grand nombre da su-jets mordus ou simplement roules par un chien enrage errant, mesure violente autant que barbare, mais excusee par le motif qui la suggere et qui est le premier de tous les inlerets : la securite publique.
La resection entraine avec eile la suppression de la fourriere. N'est-ce pas la un avantage süffisant pour la faire admettre ?
Toutes les observations qui precedent sont l'expose suc­cinct des resultats que m'ont donnes des experiences com-mencees en 1862, et qui portent sur deux cents chiens.
Experiences. — Apres avoir lime les dents de trois chiens enrages, je les ai mis en contact avec six de ces animaux sains. Immediatementleschiens enrages se jettent sur eux, les mordent avec frenesie, pas un n'a la peau en-tamee. Ces six chiens d'experience furent surveilles six mois, et il ne survint aucun cas de rage sur eux. Un de ces chiens enrages saisit entre ses dents ma main gantee; lorsqu'il se decide ä la lacher, le gant est intact, la mor-sure n'a produit qu'une forte pression.
Cette experience repetee sur des chiens non enrages ä qui j'ai donne ä mordre ma main nue, m'a prouve que la dent emoussee ne pent, quelque grande que soit la con­traction des muscles de lamachoire, que raremententamer
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108nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;DE IA RAGE.
l'epiderme des animaux dont le poil amortit forcement la pression repue et seulement tres-exceptionaellement celui de l'homme.
OPERATIONS DE l'eMOUSSEMENT.
Deux aides doivent seconder l'operateur lorsque les chiens sont de forte taille, lorsqu'ils sont petits im seul sulfit.
LJanimal est assis sur une table, un baillon, s'appuyant ontre les dents molaires et sur les commissures des levres, est fixe par un ruban derrierc la nuque ; un autre ruban roule autour du museau, en arriöre du bäillon, serre les macboires et les immobilise.
Les instruments necessaires, fort pen compliques, con­sistent en une lime ordinaire, et, si Ton veut abreger la duree de l'operation, en une pince ä resection pour rac-courcir les canines.
Comme on 1c voit, cette methode est fort simple ct pent aisement etre generalisee, sans difficultes d'execution, dans les villas, les villages, les hameaux; tout homme habitue ä se servir d'une lime, tel que marechal, forge-ron, armurier, taillandier, etc., etc., pent I'appliquer.
Le seul point embarrassant est le moyen de contenir le chien; une planche que l'ontrouve ä la fin de cet ouvrage explique tres-clairement comment on I'oblient.
...
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CHAP1TRE IX
MESURES SPECIALES OU ADMINISTRATIVES CONCER1VANT LA RESECTION
La rage s'inoculant principalement au logis (Vernois), les particuliers qui desarment leurs chienss'assurent con-Ire cette redoutable evenlualite.
Jen'aime pas h voir I'autorite s'immiscer dans les affai­res qni concernent directement chaque citoyen; cepen-dant, je reconnais que, lorsque l'incurie des particuliers expose la securite publique, c'est son devoir d'agirener-giquement.
Si done I'interet general le demandait, on pourrait reudre i'arrete suivant:
laquo; Akt. Ier. — Tout proprietaire d'un animal de i'espece laquo; canine qui lui fera emousser les dents ne sera plus laquo; astreint sur la voie publique ä le museler. raquo;
laquo; Art. II. — Le chien portera sur son collier restam-laquo; pille de TAdministration (1) indiquanl que 1'operation laquo; aura ete pratiquee. raquo;
Comnie il pent arriver que, par suite d'un choc ou d'usure irreguliere, il survienne des asperites sur les dents emoussees, on pourrait completer cette ordonnance et la rendre tout ä fait efficace en ordonnant une \isite annuelle des machoires emoussees. Un point a la suite de l'estampille indiquerait qu'elle aurait eu lieu.
A Paris, la depense necessitee pour entretenir regu-
(1) Cette estatnpille pourrait ötre un L.
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DE LA RAGE.
gulierement emoussees, pendantsa vie, les dents duchien, pourrait s'elever pourchaque animal ä S francs par abon-nement, y compris la premiere operation. Si j'indique ce chiffre c'est pour montrer que l'operation est ä la portee de toutes les bourses. En proposant cette mesure je n'ai aucun but speculatif, autrement je n'indiquerais pas a chacun la maniöre de la pratiquer. Non, je n'ai en vne que I'interet general.
Certes, an point de vue economique le musellementdes chiens serait plus coüteux, s'il 6tait rigoureusement exige.
Tons les observateurs, et, comme nous Tavons vu plus haut, avec eux le savant M. Reynal, constatent qu'un tiers seulement des chiens mordus contracte la rage.
Apres les experiences que j'ai faites, je ne crains pas de dire que par la resection onreduira al'iinite cette propor­tion.
Sur cent morsures que refoit I'homme dans I'etat ac-tuel des dangers que lui fait courir la rage^ quatre-vingt-quinze suivant Hunter sont sans effet.
D'apres ces donnees, je le demande, est-ce se bercer d'une folle illusion, est-ce unvain reve que d'entrevoir !a possibilite de la disparition complete des cas de rage sur notre espece, quand le chien aura les dents emoussees et qu'il se trouvera dans la mcme situation que les animaux herbivores.
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CHAP1TRE X
LA METHODE DE LA RESECTION EN PRESENCE DE LA CRITIQUE
Des la conception de mon Systeme, j'amenai chez le docteur Blatin, rue Bonaparte, 30, deux chiens auxquels j'avais prcalablement lime les dents; La je trouvai aussi MM. le docteur Baron Larrey, U. Leblanc, medccin ve-terinaire^ et Decroix veterinaire en chef de la garde quot; municipale.
11s examinerent les mächoires de ces chiens et, frappes des avantages qui pourraient-resulter de l'application de ma melhode, ils encouragerent mes essais.
En 1862, j'adressaiä TAcademie de Medecine un me-moire sur la resection.
En 1867, je remis ä M. Bouley une brochure que je venais de publier sur le meme sujet.
Ma methode que j'y exposais succinctement fut appre-ciee de diverses fa^ons par les personnes qui en prirent connaissance. — Les unes l'accueillirent de la fafon la plus flalteuse pour moi, d'autres avec irouie.
II est des gens, d'excellentes gens, mais qui ont le tort de se croire aptes ä resoudre toute espece de questions, sans les avoir jamais etudiees. C'est ainsi que j'ai vu M. Meunier publier en 1863 un ouvrage intitule : La liierte du chien, dans lequel il me fait gratuitement arra-cher les dents ä cette pauvre bete et finalement m'accuse de cruaute enyers les animaux.
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Hinbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; DE L\ RAGE.
Le 18 Janvier 1869 etant malade, mon neveu fit ä ma place ä l'ecole d'Alfort des experiences sur mon Systeme qui furent appreciees par M. Reynal directeur de cet eta-blissement.
II les a consignees dans son Traiie de Police sani-taire, mais en y mettant cetle restriction : laquo; Toutefois laquo; nous devons dire que des essais que nous avons fails ä laquo; Alfort, il ressort que les bouledogues produisent avec laquo; les molaires des plaies contuses aptes ä absorber le laquo; principe virulent de la rageraquo;.
Je conviens qu'il pent en elre ainsi sur les chiens qui, comme ceux de cette race, montrent habituellement les dents molaires; seulement, rien deplusfaciie que d'obvier ä cet inconvenient en limant les dents molaires de ces ani-maux ; je l'ai fait souvent et sans aucun prejudice pour le chien. 11 n'y a jamais danger ä user et rneme a abuser de la lime, au contraire, il y a toujours danger ü ne pas s'en servir.
J'ajouterai d'ailleurs qu'une dent molaire non limee ne peut quetres-exceptionnellcment inoculer la rage, et la preuve en est dans la fagon dont se comporte le chien en­rage. En effel, I'animal s'avance poussepar le mal, ils'ar-rcle pen, detend ses mächoires et attaque principalement a la tete les sujets de son espece. Son action fievreuse, de-lirante, met d'abord en jeu les dents incisives, puis les canines, les molaires, etant au dernier plan et, relative-ment fort distantes des incisives, n'ont qu'une action excessivement limitee pour I'inoculation. A moins, done, que Ton eprouve le besoin de mieuxse preserver, on peut generalement en negllger 1'emoussemenf sans pour cela s'exposer a aucun danger.
Parmi les critiques que mes honorables confreres ont
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faitesde ma nnelhode,beaucoup sont loin d'etre revetucsdu
caraclere eclaire et competent decellequejeviens decilor.
En voici une qui, ä men sens, ne laisse pas d'etre im
peu......,le lecteur trouvera lemot:laquo; Si vous emoussez
k les dents du chien, me disait ce veterinaire, je souligne le laquo; mot parcequel'onpourrait douter quecesoit un hemme laquo; de l'art qui parle, si vous emoussez les dent?, Tinociila-laquo; tion du virus rabique n'en sera que plus facile. raquo;Et comme j'avouais ne pas comprendre cette observation, 11 poursuivit: laquo; La raison en est bien simple, vous aplatis-laquo; sezla dent; par ceseul fait, vous en elargissez la surface, laquo; et eile peut porter une plus grande quanlite de virus laquo; qu'une dent poiniue. raquo;
Comme la politesse exige que Ton reponde ä toute per­sonne qui s'adresse directement ä vous, je dis ä mon esti­mable confrere:laquo; Vous pretendez, Monsieur, que, par rap-plication de mon Systeme, l'inoculation du virus rabique se fera plusfacilement, mais, qu'en savez-vous? Ou sont, s'il vous plait, les experiences qui vous out apporte la cer­titude de ce que vous avancez? Croyez-vous, par hasard, que ce soit une theorie basee sur une chose aussi peu solide que le raisonnement d'un homme, que J'expose ici? Non, Monsieur, bien au contraire, c'est le resultat de fails observes avec le plus grand soin. El qu'imporie, je vous le demande, la quantite de virus que peut porter une dent du moment que cette meme dent ne peut plus l'inoculer?raquo;
M. U. Leblanc, membre de l'Academie de medecine,
dont je venere au moins autant que personne au monde
le grand devouement ä la veterinaire et aux idees pro-
tectrices des animaux, a donne lui aussi dans ce travers.
Par sa haute position justementmeritee dans lemoude
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scientifique, il pouvait, s'il eüt fait quelques experiences, donner ä rna methode un utile appui.
Au lieu de cela,se trouvant, en 1867, delegue au con-gres international veterinaire de Colmar, et interpelle par M. Kopp, veterinaire ä Strasbourg, sur les avantages de l'emoussement des dents du chien, il repondit: laquo; J'ai laquo; bläme et je bläme encore cette operation inventee laquo; et conseillce parM. Bourrel. Le cbien opere peut en-laquo; core mordre, et communiquer le virus rabique. En laquo; outre, cette Operation a quelque chose de barbare. raquo;
Certcs, j'apprecie ä sa juste valeur le grand caractere dont est revetu tout academicien; ce titre seul donne ä tout individu qui le porte des droits a. nion respect. Mais est-ce lä une raison pour que, sans avoir le moins du monde ctudie, approfondi une question, on reponde aux demandes que Ton vous adresseä son sujet par les paroles les plus vagues ?
laquo; Le cbien opere peut encore communiquer la rage. raquo; Si cette reponse avait ete le resultat d'etudes serieuses, M. Leblanc ne nous aurait-il pas dit au moins dans quelle proportion ?
On s'esttrop longtemps contente d'ä peu pres dans les questions scientifiques; il est temps de faire justice de tout cela; nous devons ä la generation qui nous suivra autre chose que des ideesen l'air, nouslui devons des opinions solidement elablies sur des faits pratiques.
Mon tres-honorable critique craignait que la pratique de l'emoussement des denls ne fit negligcr les aulres soins. Encore un jugement errone ! II est clair pour tout le monde que si Ton a quelque partie du corps mise ä vif, par la dent d'un chien enrage, que cette dent seit emousseeou non,ondoitimmediatement se faire cauteriser.
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Je cherche ä introduire dans nos moeurs Thabitude de desarmer le chien, et je demontre experimentalemenl qu'elle est im progres incontestable sur les agents hygie-niques actuellement en vigueur pour diminuer la pro­pagation de la rage.
Que mes adversaires me demontrent, eux aussi, expe-rimentalement, que je me trompe, et je ne demande pas mieux que de me rallier ä eux; mais une theorie qui ne repose sur aucun fait et qui sort de la bouche d'un homme en qui tout le monde a la plus grande con-fiauce, d'un homme dont la moindre parole fait auto-rite, est par cela meme mauvaise, parce que tous ceux qui l'entendent emettre, persuades que celui qui parle a etudie ä fond la question sur laquelle on lui demande son avis, iront colporter partout des erreurs qui, pour etre sorties de la bouche d'un savant, n'en sent pas moins pure-ment et simplement des erreurs.
laquo; L'operation a quelque chose de barbare raquo;, ditM. Le-blanc. Je suis force de constater encore ici un manque absolu d'observation.
L'homme qui se lime une dent n'eprouve qu'un peu d'agacement, mais jamais une douleur reelle. Pourquoi Teffet ne serait-il pas ie meme sur le chien? Si ce pauvre animal pouvait comprendre pourquoi on le bäillonne, comme l'exige l'operation de l'emoussement des dents, operation qui du reste est saus aucun danger pour lui comme pour l'operateur!
Maisilnecomprendpas; il y a done pour lui de plus que pour Thomine une contrainle qui dure de 3 ä S minutes.
Qu'est-ce que cela, si on considere le but atteint, et, si par ce moyen, le chien recouvre la liberte pour le reste de ses jours?
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Ah! si rhomme elait, comme le chien, susceptible de communiquer la rage äses semblables el qu'on lui dit : laquo; Tu as des dents qui inoculent le virus rabique, ilfautles limer pour assurer tasecurile et celle de tarace, pourcelle de tes freres inlerieurs, raquo; I'homine hesiterait-il un instant ?
Si le fideie compagnon do Thomme, si le chien pouvait parier, croyez-vous qu'il se moatrerait plus insouciant de son bien-etre el de la securile d'autrui ?
Non, certes, et il vous dirait : laquo;Ce qui est bar bare, ce n'est pas l'aetion de la lime sur un corps insensible, l'extremite superieure des dents, ni la contrainte fort desagreable ä laquelle nous soumet le baillon pour un temps tres-court; non, ce qui est barbare, le void :
laquo; Barbares Teffroi et les angoisses morales que font eprouver a nos maitres les morsures a sang laites par des chiens enrages, suspects ou meme bien portants! Craintes qui disparaitront du moment que la dent emoussee ne produira plus qu'une contusion.
laquo; Barbare cette coutume qui consiste a egorger, ä as-somnier sur la voie publique des chiens qui subissent des attaques d'epilepsie, ou les convulsions du jeune age; ou bien ceux qui, ahuris, excites, exaltes par la poursuite d'ennemis, sont pris pour des chiens enrages, alors qu'ils sent tout simplement ä la recherche de leurlogis, de leur maitre qu'ils ont perdu et qui perissent ainsi, victiuies deplorables d'une meprise !
laquo; Barbare la pendaison ä la fourriere qui serait abolie si la race canine n'inspirait plus de craintes!
laquo; Barbare le mal maudit qui, dans bien des cas, nous eloigne du foyer domestique!
laquo; Barbare l'amputation des oreilles et de ia queue pou r satisfaire ä des caprices de la mode!
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laquo; Barbare la mort qiie nous inoculons dans les veines de notre maitre au moyen de ces dents pointues que Ton tient tant ä nous conserver intactes! raquo;
Chaque annee, aux jours caniculaires, l'administration municipale cedant ä une erreur generalement admise et dont nos statistiques demontrent ie peu de fondement, l'adininistration municipale fait faire la chasse au ehien avec un redoublement d'energie : on voit ces animaux, ces fideles compagnons du pauvre et du riebe, se diriger par Landes compactes du cote de Tabattoir.
Pourquoi alors leur avoir permis de naitre? La vie d'un animal est done bien peu de chose pour certains hommes,
C'est afin de faire cesser cette habitude contraire ä tous nos prineipes de civilisation que je propose la resec­tion.
Le chien porte des dents incisives et des dents canines tres-developpees, parce qu'ä l'etat sauvage il elait oblige de tuer les animaux dont il faisait sa nourriture. En do-mesticite, il regoit ses aliments tout prepares, ces dents n'ont done plus besoin d^tre aussi developpees que lors-qu'il lui fallait saigner sa victime. L'homme doit done lui oter des armes qui ne sauraient plus lui etre d'aucune utilite.
Le meilleur preservatif de la rage, salon moi, etant trouve, comme je le demontre au chapitre de la Resec­tion des dents, il lui manquait pour sa vulgarisation d'avoir ete apprecie par un jury competent. En conse­quence, des l'annee 1863, je m'adressai a la direction de l'Ecole d'Alfort, et deux fois eile eut l'obligeance de me faire prevenir qu'elle mettait ä ma disposition des chiens enrages auxquels je pourrais limer les dents et faire mor-
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DE LA RAGE.
dre ensuite des animaux sains, afin de determiner la juste valeur de mon Systeme.
Je ne fus pas heureux : deux fois je me rendis ä Alfort, et chaque fois, soit pour un motif, soil pour un autre, on ne put me livrer un chien enrage. Enfin, en d869, M. le prefet de police ayant demande ä l'Ecole d'Alfort un rapport sur ma methode, je fus invite h m'y rendre, et mon neveu, veterinaire ä Paris, ainsi que je l'ai rapporte plus haut, y pratiqua l'emoussement dont M. Reynal ren-dit compte.
Mais, tenant essentiellement ä faire la preuve de ma methode moi-meme et en presence des hommes les plus eclaires et les plus capables de la juger, le 17 Jan­vier 1870, je mis un loulou enrage furieux dans un pa­nier, et je me rendis en voiture ä Alfort avec mes aides.
L'operation eut lieu en presence de M. Trasbout et de MM. les eleves. Le sujet etait trös-vigoureux, et il mordit deux chiens que Ton enferma alternativement avec lui.
II est ä regretter que les nombreuses occupations de MM. les professeurs de l'Ecole d'Alfort ne leur aient pas permis de faire surveiller ces chiens et de voir s'ils deve-naient enrages. Les experiences de ce genre sont loin d'etre sans danger, et l'objet qui motivait celle dont il est question interessait la science ä un tres-haut point. Si, comme on n'a pas craint de le dire, il y avait folie ä limer les dents d'un chien enrage, on ne pouvait con-tester un desir sincere de repandre la lumiere sur une question qui n'est pas sans importance.
Si je raconte ce fait, c'est pour prouver au lecteur que les nombreuses experiences de l'efficacite de mon Systeme que j'ai pratiquees me permettent d'avoir en lui la plus grande confiance, et que, si je ne I'ai pas experi-
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METHODE DE LA. RESECTION.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; U9
mentee sous les yeux des princes de la science, je n'ai, du moins, rien neglige pour en arriver lä.
Je sais bien que ce premier essai, en admettant qu'il cut ete suivi par l'EcoIe d'AIfort, et quand bien meme eile l'eül reconnu enlierement concluant, n'aurait pas suffi, la science ne pouvant baser ses appreciations sur line seule experience. Mais cette operation aurait eu un grand retentissement, et eile eüt appele l'atlention de beaucoup d'bommes savanls sur la methodo que je pre-conise; eile pouvait etre appliqnee et recomraandee fre-quemment par eux et ainsi ditninuer les cas de rage sur rhomme mordu par le chien, cas de rage qui deviennent de plus en plus frequents (voir les Statistiques).
Au sujet de ce qui precede, j'ajouterai qu'une expe­rience manque generalement de precision, si on ne la met pas dans des conditions favorables pour observer le phenomene que Ton veut reproduire. A ce point de vue, la cage qui, ä l'Ecole d'AIfort, a servi a I'experience sus-dite est trop exigue.
En effet, un chien enrage et desarme est-il introduit dans cette cage oü Ton a prealablement place des chiens non enrages, non desarmes, dans le but de les faire mor-dre, il se precipite avec fureur sur eux et les attaque avec tant d'energie que ces animaux jetes violemment centre les barreaux de fer de la cage peuvent recevoir, en dehors des contusions occasionnees par les morsures du chien enrage, des enlamures de la peau provenant des heurts violents que ne leur menage pas la rage de leur compagnon.
Pour parer ä ces inconvenients, qui rendent difficile la juste appreciation de ma methode, si Ton trouve neces-
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DE LA RAGE.
saire de la soumeüre ä de nouvelles experiences, voici le Systeme que je dcsirerais voir employer.
On elablirait sur im terrain vague deux cbenils un pen etendus, de manierc a permettre aux chiens enrages et ä ceux qu'ils attaquent les evolutions que ces animaux execu-tent dans la rue.
Ces clienils devraient etre parfaitement isoles Tun de l'autre. Dans chaque chenil on ferait nailre IS ou 20 chiens.
Tout chien mordu dans la rue par un einen enrage et destine par ce motif ä etre abattu serait conserve jus-qu'a concurrence de 3 ou 6 snjets pour chaque chenil.
Dans Tun, on introduirait les chiens suspects apres leur avoir prealablement lime les dents; dans l'autre ceux qui n'auraient passubi cette operation.
Suivant la rapidite avec laquelle se propagerait la rage dans Tun ou l'autre chenil, on etablirait la valeur de ma methode. Au reste, je me reserve de faire cette experience qui sera soumise ä Tappreciation d'hommes devoues aux verites scientiflques.
J'ai ete encourage, dans l'etude ardue du Systeme que je livre aujourd'hui ä la publicite, par les mentions toutes bienveillantes qu'en ont faites MM. le docteur Bia-tin (1), Eugene Gayot (2), Chevalier (3), etenflndans I'oeu-vre considerable de M. Reynal (4).
En outre, M. le docteur Th. Landrin et M. A. Lan-drin, veterinaire, toujours si empresses ä seconder toute idee de progres, qui assistaient, en 1868, aux experiences
(1)nbsp;Nos Cruauits enters les animaux; De la Rage chez le chien.
(2)nbsp; Tratte des chiens.
(3)nbsp; Hygiene et salubrite publiques.
(4)nbsp; Traili de la police sanilaire.
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MfiTIlODE DE LA RESECTION.
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que je faisais ä mon etablissement, redigerent un rap­port tres-favorable qu'ils adresserent au prefet de police.
La Societe protectrice des animaux, elle-meme, m'a fait l'honneur de me decerner, en 1867, utie medaille d'argent, et je suis sür que je ne ferai pas inutilement appel aux cceurs compatissants de ses membres en leur demandant de m'aider ä vulgariser une pratique qui, si eile etait generalernent admise, rendrait de si grands ser­vices non-seulement aux animaux qu'ils protegent, mais encore ä l'humanite qui dicte toutcs leurs actions.
C'est au patronage de la Societe protectrice des ani­maux dont la devise est: laquo; Justice, compassion, hygiene, morale, raquo; que je dedie respectueusement une creation au moyen de laquelle j'ai maintes fois conserve la vie ä des chiens que Ton craignait et qui eussent ete inevita-blement sacrifies, sans l'application de ma methode.
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QUATRIEME PARTIE
DE LA RAGE DU CHAT
IXTRODUCTION
J'ai dejä dit, dans le cours de cet ouvrage, que le chat, grace ä ses moeurs sedentaires, etait peu expose k con-tracler la rage. S'il eül ete atteint de cette maladie aussi frequemment que lechien,ileütfallu, pour notresecurite, exterminer sa race.
De 1839 ä 1872, 1,093 chats et 238 chattes sont entres dans mon infirmerie. Sur ce nombre, un seul cas de rage s'est produit.
Dans le courant de 1873, annee qui ne figure pas sur mes stalistiques, uq autre cas est signale.
Ces deux chats sont devenus enrages ä la suite d'une morsure qu'ils ont refue.
II est possihle que la proportion des chats enrages soil un peu plus forte que ne l'indiquent mes statistiques, et qu'une partie des accidents rabiques qui se developpent sur ces animaux echappent ä l'observation ; les quelques contamines, et au debut de ce mal, se retirent probable-
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DE LA RAGE.
mcnt dans les coins obscurs des grcniers et des caves pour y finirleurs tristes jours.
Le chat s'atiache ä la maison, son monde ä Uli, ce sont les pierres qui soutiennent le toit sous lequel il s'abrite. Qn'il soit ä tel ou tel proprietairej peu lui Importe pourvu qu'ori le nonrrisse. II ne s'ecarte pas ordinairement de son foyer. Et il faut toute la violence des desirs genesiques qui, chez lui, sent si ardents, pour le contraindre a s'eloigner de {'habitation. De lä peu de rapports avcc le dehors, par suite peu d'oecasions d'etre blesse par im animal enrage.
Lechien, aueontraire, s'altache ä lamain quilenourrit, qu'il soit ici ou lä, peu lui Importe, s'il peut se coucher aux pieds de son maitre, s'il peut veiller sur son sommeil, s'il peut le defendre contre ses ennemis. II suit chaque pas de son proprietaire, ä chaque pas il rencontre quel-que animal de sa race; ses meeurs sociables le portent k fraterniser avec les autres chiens ; de lä, de nombreuses occasions de contracter la rage.
Aussi, voit-on les chats enrages etre attaints de cette maladie, parce que le chien leur commensal I'ayant repue d'un voisin vient la leur communiquer.
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CHAPITRE PREMIER
CARACTERES DE LA RAGE CHEZ LE CHAT
Le 26 octobre 1860, une chatte demi-angora, ägee de 4 ans, appartenant ä M. Petit, veterinaire ä Paris, fut con-duite ä mon infirmerie pour y elre observee.
Le chien de garde da ce veterinaire, mort de la rage ä mon infirmerie^ avait mordu cette chatte ä la commis­sure gauche des levres.
Symptomes: le 26 decembre 1860, la chatte a refuse tout aliment; bonds desordonnes ä la suite desquels eile a epronve du coma, de la faiblesse; demarche simulant un etat d'ivresse.
Le 27, les bonds sont plus frequents, les mouvements plus obliques, le regard est hagard, les yeux fixes; eile cherche a mordre, ä griffer; on remarquo un peu de sa­livation.
Le 28, la paralysie fait des progres, le train de derriere se meut tres-difficilement; I'animal se jette cependant sur un baton qu'on lui presente, et gratte le fond de sa niche, cherche ä griffer et ä mordre; refus absolu d'aiiments et de boissons. La voix consiste en un miaulement plaintif.
Le 29, affaiblissement plus considerable, meme desir de mordre.
Le 30, mort.
Autopsie : un peu d'ecume dans la bouche. Debris de paille sur le trajet intestinal.
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CHAPITRE 11 ETIOLOGIE DE LA RAGE CHEZ LE CHAT
Je n'ai irouve aucune notion de la rage du chat dans les ecrits de date ancienne, et l'etude de son eliologie est trös-simple, attendu qua les fails tendent ä prouver en toutes circonstances qu'elle est la meme que celie du chien.
Comme ce dernier animal, le chat trouve parmi les savants de irotre epoque des auteurs qui pretendent qu'il est sujet ä contracter la rage spontanee. Les preuves qu'ils en donnent ne sont pas plus fondees que celles que nous les avons vus emettre an sujet du chien.
La spontaneite de la rage a je ne sais quel charme qui attire et seduit bien des gens. Ne va-t-on pas jusqu'ä dire quelque part, que la femelle du blaireau, sous I'inflaence des grandes chaleurs, conlracle la rage spontanee qu'elle s'empresse de communiquer aux chiens qui lui donnent la chasse?
Est-il necessaire de s'arreter plus longtemps a des ap­preciations aussi vagues?
II me reste ä parier des fails de spontaneite qu'un emi­nent auteur cite dans un laquo;Rapport sur la rageraquo; public dans les Annales d'hygiene pnhlique et de medecine legale de Janvier 1860 et que ma conscience m'oblige ä con-tester.
M. Tardieu ecrit:
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ETIOLOGIE DE LA. RAGE CHEZ LE CDAT.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;127
laquo; Nous devons noter deux exemples remarquables de laquo; rage sponlanee chez le chat, Tun qui parait s'etre devc-laquo;loppe ä la suite d'une large brülure, l'autre chez. une laquo; chatte rendue furieuse par l'enlevement de ses petits. raquo;
Pourquoi conclure de ces deux cas la rage spontanee? II me semble que Ton peut tout aussi bien en conclure la rage communiquee, puisque, nous Tavons vu dans le cours de ce traite, les fortes emotions peuvent häter l'in-cubation du virus rabique.Ce fait n'est done pas probant, et ceiui qui le suit ne Test pas davantage. II eüt fallu etablir que ces chats n'avaient jamais ete mordus par des chiens enrages ; or, qui peut Taffirmer?
La nature a des lois, lois irrevocables; c'est pourquoi je crois que la rage ne peut dependre des causes qui occa-sionnent les maladies ordinaires.
Les contradictions que d^bumbles praiieiens peuvent quelquefois etablir en opposition aux lumieres de savants eminents, viennent de ce que ceux-ci, des plus compe-tents pour ce qui concerne les objets directs de leurs ob­servations, ne voient qu'accidentellement certains pbeno-menes, et, dans ces occasions, cette justesse d'appreciation quilescaracterise ä un si haut pointpeutleur faire defaut.
D'ailleurs, ces quelques erreurs se trouvent effaeees par les grandes lumieres qu'ils repandent sur d'autres questions scientifiques.
Certes, si les hommes que cite mon ouvrage s'etaient oecupes specialement de la question qu'il traite, aujour-d'hui la rage n'existerait plus.
La preuve scientifique de la rage spontanee est aussi bien ä faire pour le chat que pour le chien.
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CHAP1TRE 111
INFLUEXCE DES DESIRS GENESIQUES
Quelques esprits superficiels pourront dire, que si les chats ne sont pas plus souvent atteints de rage qu'on ne Je voit dans mes statistiques, c'est parce qu'ils sont chätre?.
II est vrai qu'ä Paris, beaucoup de chats sont chätres, mais il y a cependant environ un chat entier sur dix; et, si les influences genesiques pouvaient donner la rage, les chats entiers en seraient souvent atteints, puisque le chat est de tons les animaux celui chez qui ces desirs sont les plus imperieux, et je n'ai qu'un cas de rage ä enregistrer sur les males dans une periode de 15 ans.
En outre, si beaucoup de chats, a Paris et dans les grandes villes, sont chatres, il en est autremont dans les petites villes et dans les campagnes. Or, si la rage faisait, en province, de nombreuses victimes parmi les chats, on en aurait entendu parier. II est de ces choses, comme je 1'ai deja dit, qu'il n'est pas necessaire d'ecrire pour qu'on les sache, et, de meme que Ton salt lorsque la peste bo­vine sevit dans les campagnes, on aurait appris, qu'ä tel endroit, taut de chats sont morts de la rage.
Mais cet argument ne saurait etre invoque en favour de la chatte. Tout le monde salt combien celle-ci est ar-dente, voici en quels termes en parle Buffon :
laquo; La femelle parait etre plus ardente que le male, eile laquo; l'invite, eile le cherche, eile Tappclle; eile annonce par
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INFLUENCE DES DESIRS GfiNfiSIQUES.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;129
laquo; de hauls cris la fureur de ses desirs, ou plutot l'exces de laquo;ses besoias; et, lorsque le male la fuit ou ladedaigne, eile laquo;le poursuit, le mord, et le force pour ainsi dire a. [ix sa-laquo;tisfaire, quoique les approches soient toujours accom-laquo; pagnees d'une vive douleur. raquo;
Mas observations personnelles confirment ces donnees et pour moi combattent victorieusement la possibilite de la rage spontanee causee par des desirs genesiques non satisfaits, attendu que, s'il en etait ainsi, on aurait trfes-souvent ä conslater la rage chez les chattes.
J'ai vu des chats et des chattes tellement surexcites par des desirs genesiques des plus violents, qu'ils etaient pris par tout le monde pour des enrages. II ne faut pas s'en rapporter aux apparences, et c'est au v'eterinaire a recti­fier le jugement du public.
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#9632; CHAPITRE IV
CE QUI N'EST PAS LA RAGE
I
En 1868, M. X..., faubourg Sainl-Martin, me fit ap-pelcr pourvisiter un chatqu'il croyait enrage.
M. Beraud, veterinaire adjoint de mon etablissement, setrou\ait de visite ce jour-lä, et il se fit accompagner d'un gargon. Muni d'une epaisse couverture, ilpenetra dans le lieu ou etait enferme le dangereux animal.
Accroupi dans un coin, poussant des cris effrayants,ce chat fixa sur luides yeux egares. Dans 1'appartcmenttout etait deteriore.Meubles, tapisseries, tableaux, garnitures de cheminee, rien n avail etait epargne ; sur le parquet s'etalaient des mares d'urine d'une odeur nauseabonde.
A son approche le chat fit des bonds prodigieux, pas­sant et repassant sur la töte de M. Beraud et de son aide. Ce n'est que lorsque les forces de cet animal furent epui-sees qu'ils purent, en le couvrant et l'enveloppant de la couverture, le mettre dans un panier et le porter ä l'in-firmerie.
Une fois depose dans uns niche, ileut un nouvelaccfes, il se mit ähacher la paille avec ses dents, mordit les bar-reaux de sa porte, et executa des bonds insenses, soufQant et dirigeant ses regards vers les personnes qui I'exami-
naient.
II frottait avec volupte son ventre contre les corps mis ä sa portee et refusait aliments et boissons. Une forte odeur s'exhalait de sa peau.
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CE QUI N'EST PAS LA RAGE.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;131
Apres 24 heures d'examen, sur I'observation que eel animal cherchait constammenl ä reproduire l'acte du coit, nous en conclumes que les desordres observes dans Tor-ganisme de ce chat etaient dus ä une violente excitation genesique. 11 fut chätre et redevint bien portant.
Autre observation. Le 7 aoüt 1873, madame X..., rue d'Aboukir, amene ä mon infirmerie un chat coupe, age de six ans.
Renseignements : il a bu du lait, comme d'habitude, a midi; deux heures apres il se met ä remuer la queue. 11 se cache, miaule, veut griffer et mordre sa maitresse, se roule sur le parquet.
Ce chat resle ä Tinfirmerie jusqu'au 16, jour oü ilen sort completement retabli.
Ces deux exemples prouvent combien il importe d'agir avec la plus grande prudence lorsqu'il s'agit de diagnos-tiquer la rage, puisqu'il y a des etats de surexcitation qui simulent parfaitement cette maladie.
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CHAPITRE V
PROPAGATION DE LA RAGE CHEZ LE CHAT
Ilnes'est jamaispresente ämoi un cas de transmission de la rage de chat ä chat ou de chat a chien. J'ai su, par example, qu'au mois de novemhre 1873, un chat auquel la rage avait ete communiquee par un chien enrage avait mordu une dame au visage, et que cette personne etait morte des suites de cette morsure.
En somme, la propagation de la rage du chat est fort rare, et il est etabli que les causes invoqu^es en faveur de la spontaneite de la rage chez cet animal ne sont pas mieux fondees que pour le chien.
Aussi, je me crois autorise ä dire que, puisque la rage est communiquee aux chatspar les chiens, le jour oii ces derniers auront les dents emoussees, il n'y aura plus ou presque plus de chats enrages.
Les moyens preservatifs qui aboliront la rage chez le chien la feront aussi disparaitre chez le chat, et, par suite, eile ne se produira plus sur l'homme.
Cette conclusion, qui derive forcement des considera­tions diverses exposees dans le cours de cet ouvrage, clot une oeuvre dont le seul hut est la recherche du bien de l'humanite.
Avant de deposer la plume, je demanderai la permis­sion de rendre hommage ä la bienveillance de quelques-
*
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PROPAGATION DE LA RAGE CHEZ LE CHAT. 133
uns demes honorables collegues qui m'oat aide ä agran-dir le champ de mes observations.
Merci, egalement, aux personnes qui ont bienvoulu me donner leurs'conseils pour me mettrea m6ine de rendre la lecture de ce traite plus attrayante.
Que ceux qui m'ont aide, ä quelque litre que ce soit, refoivent ici le temoignage de ma vive reconnaissance pour leur concours genereux ä une ceuvre qui voudrait ctre le bien pour tous.
Ma lache est finie. Si, par le moyen de ces lignes, je sauve un homme d'une mort cerlaine, j'aurai rejiu ma meilleure recompense.
FIN
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: I . • .
TABLE DES MATIERES
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PREMlfiRE PARTIE.
Introduction.
I 3 6 8
15 19 36 41 12
#9632;17 51 H
Chap,
I. Caractferes de la rage. Symptomes................-----
II. Durfie de la rage...................,..........•-----
III.nbsp; Symptomes. Ce qui est la rage. Ce qui n'estpas la rage.
IV.nbsp; Particularity...................................-----
V. Etiologie de la rage.............................-----
VI. Guörison de la rage..................................
VII. Erreurs de diagnostic. Lcurs consequences...........
VIII. Dangers de la pratique de la mödecine................
IX.nbsp; Conduite des vet^rinaires envers leurs clients..........
X.nbsp; Mödecine legale.....................................
XI. Lamp;ions cadavöriques................................
DEÜXlfiME PARTIE.
Chip. I. Introduction b. l'dtude des causes de la propagation de la
rage.
57
—nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;II. Duree de rincubation du virus rabique.................nbsp; nbsp; nbsp; 01
—nbsp; nbsp; nbsp; III. Propagation..........................................nbsp; nbsp; nbsp; 65
—nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;IV. Statistiques..........................................nbsp; nbsp; nbsp; 69
TROISIEME PARTIE.
Chap. I. Introduction i I'liygiine de la rage..................... 85
—nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; II. Hygifene de la rage................................... 90
—nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;HI. De la cauterisation................................... 92
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136nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;TABLE DES MATIERES.
Chap. IV. De l'abatage des chiens................................nbsp; nbsp; nbsp; 94
—nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;V. Moyens prfiservatifs..................................nbsp; nbsp; nbsp;95
—nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;VI. De la muselifere......................................nbsp; nbsp; nbsp; 97
—nbsp; nbsp; nbsp; VII. Introduction h la mäthode de reraoussement...........nbsp; nbsp; 102
—nbsp; nbsp; VIII. De la resection......................................nbsp; nbsp; 105
—nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;IX. Mesures sp^ciales ou^administratives concernant la resec-
tion...............................................nbsp; nbsp; 109
—nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; X. La möthode de la resection en presence de la critique...nbsp; nbsp; Ill
QUATRlfiME PARTIE.
Introduction....................................................nbsp; nbsp; 122
Chap. I. Caractferes de la rage chez le chat.....................nbsp; nbsp; 125
—nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; II. Etiologie............................................nbsp; nbsp; 126
—nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;III. Influence des d^sirs g^nfeiques.......................nbsp; nbsp; 128
—nbsp; nbsp; nbsp; nbsp;IV. Ce qul n'est pas la rage...............................nbsp; nbsp; 130
—nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; V. Propagation.........................................nbsp; nbsp; 132
FIN DE LA TABLE
Cuuiiil. — Typ. et äter. de Cniti nu
g^e.
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CARTE RABIQUE
AlinONhlSSEJlENTS.
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1nbsp; nbsp; nbsp;4 2 5 4 13 6 3 2 6 7 13 15 112 5 13 12 5 5
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L'examen de la Carte rabique, carle dans laquelle le classement des 1219 cas de rage observes par moi a 616 l'ait par annße, par arron-dissement et par quartier, confirme co quo j'ai dit de la propagation de cot te maladie.
On remarque que le 3e, le 10deg;, 1c dl0, le 17deg; et le 20deg; arrondlsso-ment, qui fournissent le plus de sujets malades ä mon inflrmcrio, ont soumis ä men observation le plus de cas de rage; il n'y a \h rien que de trös-naturel.
Aussi n'est-ce pas sur ce point que je veux attirer raltention, mais bien au contraire sur la progres­sion constantequ'a prise ledevelop-pement de la rage dans cos mömes quartiere, et la concordance de cette progression avec le nombre des cliiens qu'on rencontre errant dans les rues.
11 est övident que le d^veloppe-ment que cette funesle maladie a pris depuis quelqu es annöes ä Paris pourrait faire croire, au premier abord, qu'elle revflt un caraetcre 6pizootique, et par suite donncr raison aux auteurs qui ont cru voir dos cas frequents de rage spontanße dans la fagon dont cette maladie a sfivi ä certalnes ßpoques et dans certaines conlröes. Mais, en exami-nant Tespece de rayonnement qui se fait au tour de chaque cas de rage, on est amenö ä en conclure la transmission directe par mor-sure, puisque Ton voit, comme je l'ai döjii dit, que partout oü les chiens errent en grand nombre dans les rues, et par suite sontle moins bien tenus, la rage se döve-loppe davantage.
3.nbsp; Du Palais-Boyal,...... 1
4.nbsp; Do la Place Vondömo..
5.nbsp; fiaillon...............
(
2. Dc la Banquo..
1 Du Mail ............
3. Dlaquo; Temple___
(i. Do lionnc-Nouvollo.....
9, Dos Ai'ts-et-M6tiors----- !
10, Dos Enlaiits-Rouges....
4. De l'H6tel-de-
Ville...........
14 Saiiit-Gervais.........
15. De TArscnal...........
IC. Kotro-Dame.... ......
n Saint-Victor.........
5. Du Pantliöon... lt;
18.nbsp; Du Jardin-dos-Plantes..
19.nbsp; Du Val-de-Gräco.......
20.nbsp; De la Sorbonne........
21.nbsp; De la Monnaio.........
(
99 De l'Odäon............
C. Da Luxembourg lt;
7.nbsp; Du Palais-Bour­bon ............
8.nbsp; De l'filysöo ....
23.nbsp; JNotre-Dame-des-Cliamps
24.nbsp; St-Germain-des-Prös...
25.nbsp; Saint-Thomas-d'Aquin.. 9rt Des Invalides.........
27.nbsp; De l'Ecole-Militaire____
28.nbsp; Du Gros-Gaillou......
29.nbsp; Des Chainps-Elysöos...
30.nbsp; Du Faubourg-du-Roule.
31.nbsp; De la Madeleine.......
33. Saint-Georges..........
9. De rOpiira.....
10.nbsp; nbsp;De l'Enclos-St-Laurent........
11.nbsp; De Popincourt..
34.nbsp; nbsp;DelaChaussfe-d'Antin.
35.nbsp; nbsp;Du Faub.-Montmartre..
36.nbsp; De Rocbechouart......
37.nbsp; Saint-Vincent-de-Paul..
38.nbsp; De la Porte-Saint-Denis.
39.nbsp; De la Porte-St-Martin..
40.nbsp; DeTIlöpital-St-Louis...
41.nbsp; De la Folie-Möricourt..
42.nbsp; Saint-Arabroise........
43.nbsp; De la Roquette........
44.nbsp; Sainte-Marguerite.....
46 Du Bel-Air.............
4(i. De Plcnua ...........
12. De Reuilly.....
13. Des Gobelins...
48.nbsp; Des Quinze-Vingts.....
49.nbsp; De la Salp6trifere......
50.nbsp; De Groulebarbe........
ül. De la fiare...........
14. De l'Observa-
toii-e...........
52. De la Maison-Blanche.. ,53. De Montparnasso.......
54.nbsp; DclaSante...........
55.nbsp; Du Petit-Montrouge....
57. Saint-Lambert........
5S De Javel .............
15. De Vangirard..
i CA D'Auteuil.............
\ fi2 DfllaMaftttfi ........
IG. De Passy......
j C3. Do la Porto-Dauphino..
\ 64. Des Bassins..........
/ 65 Des Temos........
17. Des liatignolles.
CO. De la Plaine-Monceau..
Cquot;. Dos Batignolles........
Cft Dps F.ninettes..........
18.1!uttcs-Montmar-tre.............
/ C9. Dos Grandes-Carrifcres.
) 70. De Clignancourt.......
1 71. De la Goutte-d'Or......
179 Dp la Ghaoello.......
/ 73 Do la Villette..........
19. Buttes - Chau -
74. Du Pont-de-Flandro-----
20. Menilmontant..
7Ä ftaint-Farcoau........
7{). Du Pöre-Lacliaiso......
Totaux.......
8 9 1Q
T'-i-T-T'-rquot;.....r-r-iquot;quot;!quot;quot;!quot;-!quot;-!.........i-tm-i-,......inn,,,,,,,,,,,,,,,!.........,.....MITIM|-,m|l
12 13 14 15 16 g 18 la 20 21 22 23 U___25___26 27___28___29___3^
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TRA1TE DE LA RAGE PAR Mr BOURREL.
Fii l.
(U Position, el conleniion du chien pour Hemoussemeat des derts.nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; nbsp; %
III) Baillonplaceaufonddelaäueule et ' fixe forlemenl a la r.uque.
(Ul) Rutanrapprocliantlesmächoires surletaillon el les immobilisant.
llVJ Pince pour i-eduire principalemerdla lonftueur des canines,afind'abreöer laduree del'Qperatton..( N pas indispensable.)
(V) Lime pour deiruire la poirfie des iticisives.regulariser ies canines el pour emousser au besom les
remiiJres mölair
Fig. V.
Les dents du Qtaen eianl Iransformees par le limaße en couronnes ou meules sonl impmssanles i eritamer les chairs de '.'komme,des nr.imaux etnepeuvenl servir älinoculalion dela rage.lfos nombreuses experiences pronvent cerait; I'anfmal ovsre n'sneprouve aucim incomemerit dans laccomplissemni de ses foncTwns. Cesinslrumenls sonlreduils de-ß/i Lesbaillonsvarient selonlataille des chiens.
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