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DIALOGVE

CONTENANT LA

DISPVTE et lac cord

DE LA PAIX^ ET DE LA G V E R. R. E.

EN VERS BVRLESQJES.

II

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A PARIS,

Chez CLAVDE HVOT, rue S. lacqucs,

proche ies lacobijns, au pied de Biche.

U. DC. XL IX.

JVSC PERMISSION.

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DIALOGVE CONTÈNANT LA difputc amp; Taccord de la Paix,nbsp;öc de la Guerre.

EN vers BVRLESQVES.

VN iQur la Paix la bonne femme Qm iamais ne iura fon ame,

Et qui croid faire vn gtand ferment De dire vramy feulcmentnbsp;marmore fes patenoftresnbsp;Pour elle ainfi que pour les autresnbsp;Et qui tient toufieurs en fes mainsnbsp;Grenade, OU la vie des Saints.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;-

Deuanc fon foyer accrcmpic Pretendoit fecher la roupicnbsp;Qm dans cc temps coule du neznbsp;Des plus gentils enfarinez ••

Eors que cette grande Diablede Pleinc de force , amp; de finelTenbsp;iure comine vn charretier

Car ainfi Ic vent fon meftier t nbsp;nbsp;nbsp;inbsp;nbsp;nbsp;nbsp;^

porte au lieu d’vne quenoüiile Vni rer qui iamais ne fe roüillenbsp;^Et fe coiffe d’vn morionnbsp;De peur quelle a du horionnbsp;nbsp;nbsp;nbsp;,

ï^army les ieuxjou l’as depique tous les autres fait la nique,nbsp;la Guerre fans la nommecnbsp;de pain nous a fait chommèrnbsp;Vint trouuer toutc eftonnéenbsp;tegardoit fa- cheminéenbsp;*^trant chez elk brufquemeat

A jij

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amp;ans liiy faire de compiiment.

La Paix qui fe trouua iiirprifc Ne killa pas d’cftre radifenbsp;.^urant que Ic pain du Bourgeoisnbsp;Ie garde depuis deux moisnbsp;Et voyant fa fiére ennemienbsp;A qui clle nc fongeci^ mi.enbsp;Luy ^it d’^n accehtj.fort. courto»,nbsp;Sizez vous plus de mille fois.

Mais 1’autrc d’vn ton cftroyable A faire conchier vn Diablenbsp;Si ma niemoire me fert biennbsp;Commenfa ce bel entretien,.

La, Guerre,

.C'eft bon a vous vieille bigotte V ieille refucufe, vieille fotte ‘nbsp;D’auoir Ie cul fur vn placet'

Et de faire icy Ie tacec Cependant que dans la campagnenbsp;'Non pas contre la fiere Efpagnenbsp;Mais contre voftre beau Parisnbsp;Ie dpnne des poups, amp; des cris.

A ce que Pon me vient de dire Contre moy vous ozez écrircnbsp;Et vous auez des Efcholiersnbsp;Qui barboüillent nsille cahiers.nbsp;Ces poltrons.qui dans leur eftudenbsp;N’ont rien que leut .ftyle de'rudenbsp;Èt qui d’vn iugement trompcurnbsp;Appellent fagcll'e la peur}

N’en ayez point de ma prefcncc Dans Ie temps de la Conferencenbsp;Vous pouuez parler lifircment,

Si vous en voulez vn ferment Ie vous en feray plus de millenbsp;Car cela dilTipe ma bile.

La Paix,

Etfi

Ie ne fouffre point en cc lieu perfonne offenfe Ie bon Dicu

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:Et ïi vous au?z quelquc chofe ,A me dire cn vers ou en profcnbsp;Pourneu que ce föit fans iurcrnbsp;Voftre difcours pourcoit durernbsp;Tout autqnt que la Confcrenccnbsp;Qne l’on tienc pour reglcr la France inbsp;;Ciue ie ne vous troubkray pointnbsp;^ous lefpondant fur chaque point.nbsp;Car pour voftre premiere plaintenbsp;Si l’on vous.donne quelque attaintc»nbsp;Si centre Ie fer, amp; le feunbsp;Lc ganif veut ioücr fon ieu,

Et ft les foldats de mineruc Comme les voftres ont leur veruénbsp;Jl .ne faut pas s'en eftonner,

Puifquc vous voulcz raifonner Car a Ia force ie Ie quitte gt;

Et ne vous tends point de yifite»

Guerre.

que les pagnotes autJieqrs fcront touftouts vos fauteursnbsp;A caufe que Uur jrefuerienbsp;Tient fort de la poltronnerienbsp;^d'accufent d’eftourdiflcment,

Ec d’ vn mauiiais raifonnement Profnent que 1’humeur martialenbsp;rOrdinairement cft brutalcinbsp;Xe veux coinfondre ces pedantsnbsp;Au lieu de leur caiTec les dents.

Leur donnant contre ma couftume J)e grands coups de bcc, amp; dc plume»'nbsp;Car Madame,,ne fuis-ie pasnbsp;Minerue xuffi bien que Pallas?

l^a Paix.

Non vous n’eftcsqu'vne mefchante; Et de Mincrue la {jauantcnbsp;Le titre n appartient qu’è moynbsp;¦9ui vay toufiours de bqnnc foy.

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C’eft Ie tout fi vous ffaucz Ure,

Et lors que vous voulez ccrire Pour vn pafle-port feulementnbsp;Vous ne f(fauez quoy ny comment,nbsp;S’il vous furuienr la moindrc aft'airenbsp;Vous m’empruntez vn Secretairenbsp;Vn Ambafladeur, vn Agentnbsp;Mais encores mieux uion argent.nbsp;Vous eftes mere d’ignorancenbsp;Et vous 1’allez remettre en France;nbsp;Car Ariftote ny Platonnbsp;N'aimoient point la poudre a canon,nbsp;Pour Ciceron j amp;c poirr Virgilcnbsp;C’eftöient des gens a faire gilenbsp;Et iamais ne furent fi fatsnbsp;De fc trouuer dans les combats,nbsp;Pour vous parler encor de Romenbsp;Mecenas eftoit vn bon hommenbsp;Et fut de fi doux naturelnbsp;Qj£il n’^aimoit pas fort Ic düel,inbsp;Parlons de vos fapons de viurenbsp;Dont ie veux faire vn plaifant liure.nbsp;Premierement dés Ie matinnbsp;Vous demandez du bran de vin.

La pipe, amp; Ia mefehe allumées loignant leurs puantes fumces,

Er piiis tout Ie refte du iour Si vous vous troüuez de fciournbsp;Vous beuiiez comme vne templicrenbsp;öubliant voftre humeur guerriere,nbsp;Puis Ie lendemain ce dit on -Cinq OU fix boulets de canonnbsp;Vous feruent comme de pillulesnbsp;Pour euacüer vos crapules.

Mais lors que dans I’occafiorï Vous n’cxcrcez l’occifion.

Vous ri’eftcs plus qu’vne perfide' Vne afiafiine, vne homicidenbsp;Et vous beuuez Ie fang humairtnbsp;Comme vous auiez ben Ic vin»- ¦ ’nbsp;Vous n’aimez rien que Ie pillagenbsp;Tant a la ville qu’au village ,

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Vous mangez les peeks enfans n’oiic pas encores de dents,

Vous fakes violer Icurs meres Mefme en pretence de leiirs peresnbsp;font tres certains de l’afïrontnbsp;D'auoir des cornes fur Ie front.

C^nd Ie fourrier vous a logee

V nbsp;nbsp;nbsp;ous peftez comme vnc enragcenbsp;Vous demandez aux pay fansnbsp;Non des perdrix, ny des faifans, 'nbsp;Mais vous voulez qu’il vous fricaflc

V nbsp;nbsp;nbsp;iftement des ceufs de becaflenbsp;Si mieux il n’aime d’vn Phoenixnbsp;Contenter vos bons appetits.nbsp;Autrement les morts, amp; les teftes

font les vents de vos tempeftes ï-'atfeurent que vous rompreztout.nbsp;Et qu’il ne verra pas Ie boutnbsp;Non fculement de eetteannéenbsp;Mais mefme de cetce iournce»

Ec pauure diable tout tranfi ^^i iamais n'eut tant de foucinbsp;öit qu’il nc veid iamais de placenbsp;Oü fe vendit ceuf de becalfenbsp;El ne croh pas qu’en fon paysnbsp;ait iamais veu de Phoenix.

Mais fe doutant que fa reCfourcc Ne peut eftre que dans fa bourfenbsp;öit qu’il donnera de 1’argentnbsp;quelque valet diligentnbsp;Eour aller iufqu’en Arabienbsp;^hereher 1’oyfeau de longue vie,

Ie foldat appalsé ^onfeffe qu’il n’eft pas aifénbsp;P^ recoiiurer telle viande,

Nals c’eft de l’argent qu’il demanded I la mfe ne fuffit pasnbsp;yV la menace du trépasnbsp;yOus Ie batez ainfi que platrenbsp;Ie faites coucher fur 1’atrenbsp;^ la trop voifine chaleurnbsp;caufc vne yiue douleur.

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yous Ie pcndc;z rnc cfcheUc Xuy mettant en bas la cerueUcnbsp;Et le cQBCraignaat d’aualernbsp;Dll vin qui ne fcaurpit coulef.

Ainfi d’yne mode ctuelle ,11 boitvne fanté (mortclle.nbsp;yous ffauez mille inuemionsnbsp;Dc gebenncs, amp; dc queftjonsnbsp;1^00 pour découurir des complicesnbsp;Ifly pour le chaftimcpt des vicesnbsp;Mais pour dii mjchon leu|emcntnbsp;^QjVon nomme guclde ct) allemand.nbsp;*:Qjipy que vous foyez rant volcufenbsp;y biis p'cftes pourtant qii’vne gueiife»nbsp;Et le drilje apres tant ae mauKnbsp;A rqcpurs .a nos

Tons les ipurs i’en voy dans rEgUfc ,Qm n’opt prefque poipt de chemifenbsp;Auec vne iambe dc bpisnbsp;Et mefine auec deujc quelqpcfois,nbsp;Demander de deurs voix tremblantesnbsp;X’aumolne a de paiiures feruantesnbsp;Sans pouupir allpngcr le brasnbsp;Car bien fpuuent ils n’en put pas,nbsp;Ainft routes les algaradesnbsp;;Les brauours, les fanfaronadesnbsp;C^^ils faifoient dans I’enrollemcntnbsp;Sc cliangeot cn ce compliment.

fjd Guerre,

C'cft mpn, Madame gt; la coquette V ray ment ie ne fuis qu’ync beftenbsp;^les foudarts font dc yrays cheuauxnbsp;D'endurer pour vous tapt de mauxnbsp;De s’exppfer aux canonadcsnbsp;Aiix bombes , cercles, amp; grenade*nbsp;Pour yous procurer le plaitirnbsp;De ypijs bien chauffer a loifir,

ppUt

Et d’aiuftcr yos Damoifellcs Pour les iiUrer aux Maquerellctnbsp;Qm les liurem aux E)atuoifcaux

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Pour bailer leiirs chlens de mufeaux. C’eft encore pis que mes drillcsnbsp;Soient qii’ils forcent femmes j amp; filles.nbsp;Car du moins au violemcntnbsp;Les hommes pechent feulement,

Ainli VOS hommes j amp; vos femmes-Sont tons egalemcnc infames gt;

Ht nourris dansl’oyfiueté Ne longent qu’a la volupté.

Les feftms, les icux,amp; les danlcs Et les lafeiues cojuenancesnbsp;Les debauches, amp;: Ics excez-Sont le beau meftiet de la paix.

Moy qui couche dans la tranchee Pendant que vous eftes couchéenbsp;Fort chaudement entre deux drapsj-Moy qui coupe iambes, amp; brasnbsp;Pendant que vous coupez la foupsnbsp;Et que vous beuuez a la troupe ,

Qm fouuent de I’eau d’vn boutbier Rafraifehis mon pauure goziernbsp;Pendant que vous tenez la beaunenbsp;Dans voftre verre long d’vne aune,-Ne dois-ie pas me delaffernbsp;Et mon temps quelquefbis paffer ?

Ne croyez pas que ie me pique Dc Science, de Rhetorique,

Ny du refte de tous ces arts Q^apprennent mefme les coiiards,nbsp;Payrae mieux partager vn hommenbsp;Par la moitié comme vne pommenbsp;Comme vne raue , comme vn'choUjnbsp;Et que vous prcfchlcz voftre fou.nbsp;Toutesfois fi pour me defendrenbsp;I’employois le grand Alexandre'

Oil le moindre de mesCefars Qm pafl'erCnt Maiftres és artsnbsp;11 vous donneroient tablaturenbsp;Four diicours amp; pour écriturc.

Vos Procureurs, vos Aduocats Sont plus mefehans que mes foldatsnbsp;Gar ccux-cy d’vne force ouucrte

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Au payfan annoncentia pcrtc.

Et lans vn plus long entregent IIs luy demandtnt de 1’argentnbsp;Mes gens commettent des rapines,quot;nbsp;Mais ks voftres ces ames finesnbsp;Sous pretexte de ioulagernbsp;Le payfan qu’ii veulent mangernbsp;S’intereflent dans fes iniuresnbsp;Luy font de grandes proceduresnbsp;De griefs, amp; de faluations,

Et de mille aiitres inuentions Pe vpftre fillcf la chicane,

Emportent iufqu’au baft de Eane,

Qm croit auoir eu bon fuccez D’eftre hors de cour, amp; de procez.nbsp;Vous eftes la mere des vicesnbsp;Puifque vous 1’cftes des dflicesnbsp;Des modes, amp; des paffe-tempsnbsp;vous inuentez tous les ans.

C’eft vous qui pour la bonne mine Auez iauenté la farine,

Et d’yn deftein caprreieux péguisé les icunes en vieuxnbsp;I’entends a ne voir que les teftes,

Car pour labarbe les pincettes N’ep laiflent plus rien qu’un filetnbsp;Qm vous rend le magot bien laid.nbsp;Pour les canons qu’on potte aux botesnbsp;Ou paroiftent fi bien les crottcsnbsp;Ie ne puis vous en dire rien.

Cc n’eft pas trop chacun le fien.'

Vous auez oblige les femmes Pc vendre leurs corps, amp; leurs amesnbsp;Ppur vne iuppe de fatinnbsp;Ppur le colet, pour le patinnbsp;Èt pour mille autres bagatellesnbsp;De paftemens, amp; de dentelles.

‘A prefent que ie fuis cn train En voulez vous iufqu’ji detnain?

-La Paix,

Non au contraire quand i’y penfe ïe croy que le bon Dieu s’offenfe

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Des 'mlures que nous difons Des reproches que nous faifons.

II vaudroit mieux boire chopinc Auec la commerc voifine.

Lu Guerre,

Q^e ie ff ache plutoft fon noiiit Lu Paix.

La Conference, ce dk-on.

Lu Guerre.

Bicn ie Ie veux pour 1’amour Jcllc C’cft vne bonne damoifelle.

Mais enfin que mangerons-nous / Cat ie pretends boire vingt coups.

Lu Paix,

V^s eftes caufe qu’on peut faire En Carefme affez bonne chere,

Ic vous donneray d’vn chapon Ou d’vn ieune cocq d’inde.


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Lu Guerre.


Bon.'


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