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LES

TROIS ROME

JOURNAL

D’UN VOYAGE EIV ITALIË,

ACCOMPAGNÉ 1» D’UN PLAN DE ROME ANCIENNE Eï MODERNE;

2» D’UN PLAN DE ROME SOUTERRAINE OU DES CATACOMBES;

J3ar Eabbf 3» (iuumc,

Yicaire general du diocèse de Kevers, chevalier de l’ordre de S^-Sjlvestrc, membre de l’Académie de la Religion Catholique de Rome,nbsp;auteur du Catéchisme de Persévérance, etc., etc.

Nee unquam [civitas) nee major nee sanctior.

II n’y eut jamais de cité ni plus grande ni plus sainte.

Tit. Liv. Hist. lib. i.

TOME QUATRIÈME.

HISTOIRE DES CATACOMBES.

BRUXELLES,

M. VANDERBORGHT, IMPRIMEUR-LIBRAIRE,

MARCUÉ-ADX-POÜLETS, N® 26.

1848

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LES

TROIS ROME

HISTOIRE DES CATACOMBES.

14 DÉCEMBRE.

Les Catacombes, ou Rome souterraine. — Coup d’ceil général. — Noms el posilioiis. Nombre des différents quartiers. — Pourquoi sur Ie bord des Voies romaiues.nbsp;Formes el dimension des Catacombes.

« Trois choses, écrivait Denys d’Halicarnasse, me révèlent la ma-» gnificence de Rome : les Aqueducs, les Voies et les Égouts (i). » S’il les avail connues, Ie grave historiën aurait certainement ajoulénbsp;les Catacombes, la plus grande de toutes les merveilles de Romenbsp;païenne et même de Rome chrélienne. Plus heureux est Ie voyageurnbsp;catholique. 11 peut parcourir dans tous les sens, vm’r de ses yeux,nbsp;toucher de ses mains, comprendre avec son cceur Ie chef-d’oeuvre denbsp;la Ville éternelle, la glorieuse Cité des martyrs, 1’immense Nécropolenbsp;de la gloire, Ie dernier effort du génie, de la charité, de la patience etnbsp;de la foi. Tel était notre désir de la visiter nous-mêmes, qu’i peinenbsp;orientés dans la Rome qui brille aux rayons du soleil, nous voulumesnbsp;descendre dans la Rome cachée au fond des entrailles de la terre.nbsp;L’étude des deux cites marcha d’un pas égal; mais, pour éviter toulenbsp;confusion, j’extrais du Voyage et je place ici tout ce qui regarde lesnbsp;Catacombes.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;'

Accompagnés d’un guide intelligent et muni d’une bonne lunette,

(ij Mihi sane tria magnificentissima videntur, ex quibus maxime apparel ampiiludo Romani imperii: Aqua:ductus, Via; slrat® et Cloaca;. Hist. lib. iii.

T. iv. nbsp;nbsp;nbsp;1

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LES TROIS ROME.

nous monlamp;mes sur Ie dóme de Saint-Pierre. Cette position est unique pour saisir d’un coup d’oeil la topographie générale de la ville sou-terraine que nous devious parcourir. Saint-Pierre se trouve i la cir-conference d’un vaste cercle dans lequel Rome est enfermée, soit parnbsp;le Tibre, soit par les murailles d’Aurélien. Semblables a quinze rayonsnbsp;lumineux, quinze Voies consulaires partent du cceur de la ville, tra-versent la circonférence, sillonnent la Campagne romaine, et, s’éten-dant vers les quatre points du ciel, disparaissent è I’horizon. Cesnbsp;quinze Voies divisent a la surface du sol la grande cité des Martyrs.nbsp;Ratio, c’est-a-dire creusée a droite et a gauche des Voies romaines, ellenbsp;leur doit le nom geographique de ses principaux quartiers; et quoiquenbsp;divisée, par le Tibre, en deux grandes régions, aussi bien qiïe la villenbsp;supérieure, elle forme autour de Rome un vaste amphithéalre.

De la place ou nous sommes, il est facile de reconnailre la position relative des cinquante quartiers de la ville souterraine.

A nos pieds et sous nos yeux tournés vers I’orient, est la Voie Triomphale. Sur ses bords, se trouve le cimetière de saint Pierre, ounbsp;la Catacombe Vaticane.

Un peu il droite, nous apercevons la Voie Aurélienne, qui fuit vers I’occident. Elle est célèbre par les Catacombes de saint CaUpode; denbsp;saint Jules; des saints Procés et Martinien; et de sainte Aguthe. Plusnbsp;loin s’ouvre la porte Cavalleggieri, d’ou sort la Voie Cornélienne,nbsp;courant a I’occident comme la précédente. Quoique arrosée du sangnbsp;d’un grand nombre de martyrs, entre autres des illustres soeurs Ruf-fine et Secunda, elle n’a pas de Catacombes; ou, si elle en a, on nenbsp;les connait point encore.

II en est autrement de la Voie de Porto, qui s’étend au sud-ouest. Voici les célèbres Catacombes de saint Félix; de saint Pontien; denbsp;Génèreuse ad Sextum Philippi; du Pape saint Jules. Dans le flancnbsp;du Monte Verde, voisin de ces lieux, Rosio découvrit le cimetière desnbsp;Juifs, dont le quartier était, comme on salt, sur la rive droite du Tibre.nbsp;L’étude de ce cimetière jette, ainsi que nous le verrons plus tard, unnbsp;jour précieux sur nos Catacombes chrétiennes.

Au midi, et de l’autre cóté du Tibre, la Voie d’Ostie présente la Catacombe de saint Paul et de sainte ÏMcine; de saint Timothée;nbsp;des saints Félix, Adaucte et Commodilla', de saint Cyriaque et denbsp;saint Zénon ad Aquas Salvias.

Plus loin apparait la petite église Domine, quo Vadis, ou commence la Voie Ardéatine. Rameau détaché de la grande Voie Appienne, ellenbsp;s’étend ii gauche et traverse la campagne entre les portes de Saint-

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KOMS ET POSITIONS. nbsp;nbsp;nbsp;7

Paul et de Saint-Sébaslien. Dans cetle région qui forme Ie quarlier Ie plus populeux de la ville soulerraine, se trouvent les Catacombes denbsp;sainte Pétronille; de sainte Flavie Domitille; des saints Nérée etnbsp;Achillée; de saint Damase et des saints Marc et Marcellin; de saintenbsp;Balbine et de saint Marc, pape.

Tournant légèrement è gauche, nous arrivons sur la célèbre Voie Appienne. Reine des Voies dans l’ancienne Rome, elle conserve lanbsp;même prérogalive dans la Rome soulerraine. Sous ces dalles fouléesnbsp;par les héros du paganisme, sous ces tombeaux somptueux élevés ennbsp;leur honneur, s’ouvrent les vasles Catacombes de saint Caïlixte; denbsp;saint Zéphirin; de saint Prètextat; de sainte Sotère; des saintsnbsp;Eusèbe et Marcelle. Découverts, en grande partie, par l’infatigablenbsp;Bosio, ces cimetières réunis forment une immense Catacombe ^ plu-sieurs étages, qui s’étend depuis les murailles de Rome a Saint-Paul-hors-des-Murs; et de la, jusqu’èi Saint-Paul-Trois-Fontames, et a lanbsp;Nunziala.

Au sud-est se montre la Voie Latine, traversant Ie Ctelius et fran-chissant l’enceinte d’Aurélien entre la porie Saint-Sébastien et la porie Saint-Jean. Sur les bords de cette voie, témoin du martyre du disciplenbsp;bien-aimé, se développenl les Catacombes d'Apronien; des saintsnbsp;Gordien et Epimaque; des saints Simplicien et Servilien; et de saintnbsp;Tertullien.

Quand l’oeil, continuant de se porter vers l’orient, a passé sur Sainie-Croix-en-Jérusalem, sur les ruines de Pamphithéatre Castrensenbsp;et des jardins d’Héliogabale, il se repose sur la Porte-Majeure. De lènbsp;sort ia Voie Lavicane, qui, fléchissant droite, conduisail èi Labicum,nbsp;antique terre du Latium. Elle indique la place des Catacombes desnbsp;saints Tiburce, Marcellin et Pierre, appelées aussi/n^er duas Lauros;nbsp;de sainte Hélène; des saints Claude et Nicostrate; de saint Castulenbsp;et de saint Zotique. La Foie Prénestine, qui passe également sous lanbsp;Porte-Majeure, n’a point de catacombes, mais elle redit de glorieuxnbsp;combats. Au nombre des héros chréliens qui l’arrosèrent de leurnbsp;sang, Phistoire nomme en première ligne les saints Primitivus etnbsp;Agapet.

Nous apercevons encore, h Porient, la Foie Tiburtine, qui court vers Tivoli, oü elle se perd dans la Voie Valérienne. Elle montre avecnbsp;orgueil les vastes Catacombes de saint Laurent et de sainte Cyriaque.

Au nord-est s’échappe de la Porte Pie la Voie Nomentane, qui conduisait au fameux Nomentum, devenu aujourd’hui Ie modestenbsp;bourg de Montana. A droite et è gauche, elie est bordée de cimetières

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8 nbsp;nbsp;nbsp;LES TBOIS ROME.

chréliens. Nous rencontrons d’abord les Catacombes ad Nymphas, puis les Catacombes de saint Nicomède; de saint Alexandre; desnbsp;saints Primus et Félicien; de saint Restitut; enG.a ceWe de saintenbsp;Agnès, les plus célèbres de toute cette région.

Un peu plus au nord, remarquez la Voie Solaria Nuova. Comme la poi’le d’oü elle sort, elle a conservé sou ancien nom. Elle signale anbsp;notre attention les Catacombes de sainte Priscille; de saint Sylvestre;nbsp;de sainte Félicité et de saint Alexandre; des saints Chrysanté etnbsp;Darie; de Novella; d’Ostriano; de sainte Hilaire et de saint Thrason.

Le nord n’est pas moins riche que les autres environs de Rome. Sur les hauteurs du Mont Pincius, nous voyons courir au dela de lanbsp;porte Pinciana la Voie Solaria Vecchia, hordée par les immortellesnbsp;Catacombes du coteau du Concombre et de saint Hermès.

Enfin, vers le nord-ouest, nous trouvons la Voie Flaminienne, avec les Catacombes de saint Valentin ou de saint Jules; ct de saintenbsp;Théodora. La Voie Claudienne et la Voie Cassienne, qui, se déta-chant de la précédente, au dela de la Porte du Peuple, n’ont pas denbsp;Catacombes.

Abaissons maintenant nos regards vers le Tibre, traversons la Voie Triomphale, el nous nous retrouvons i notre point de départ. Lenbsp;eerde est accompli; nous connaissons remplacement de la ville sou-terraine et les noms géographiques de ses dififerents quartiers ou ré-gions. Quant aux noms sacrés qui les distinguent dans les annales denbsp;rÉglise, ils demandent plusieurs explications, trop longues pour trou-ver ici leur place : elle viendra lorsque nous ferons la visite détailléenbsp;de chaque Catacombe. Je dirai seulement que tous rappellent d’illus-tres personnages, de glorieuses batailles et des événements qui tien-nent une large place dans la Irame générale de l’histoire. Résumernbsp;un fait dans le nom d’une rue, d’un quartier, d’un édifiee, n’est-cenbsp;pas une manière également ingénieuse et utile d’écrire l’histoire?nbsp;L’étranger qui pareourt l’Hótel des Invalides, cette cité de notre gloirenbsp;militaire, ne se trouve-t-il pas aussilót en pays de connaissance, lors-qu’il voit gravé sur les corridors, quartier de Metz, quartier d’Auster-litz, quartier de Wagram? Dans la cité de leur gloire, les premiersnbsp;chrétiens ont fait, il y a dix-huit siècles, ce que nous avons imité.

Cinquante cimetières, formant un vaste eerde autour de Rome, venaient de passer sous nos yeux. Nous aurions pu, avec certains ar-chéologues, en compter quelques-uns de plus ou de moins : le pèrenbsp;Marchi en nomme soixante. La différence vient de ce qu’on prendnbsp;quelquefois le quartier d’une Catacombe pour une Catacombe séparée;

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^OMBRE DES DIFFÉRENTS QUARTIERS. nbsp;nbsp;nbsp;“

OU, par une marche contraire, qu’on réunit sous la même denomination plusieurs quartiers dont certains auteurs ne font qu’une seule et même Catacombe (i).

Quoi q'u’il en soit, la Ville éternelle apparait aux regards des hommes et des anges comme une Reine environnée d’une armee denbsp;martyrs qui la protégent et qui défient les puissances de Fenfer;nbsp;comme une Mère juslement fiére de sa familie et qui \eille avec amournbsp;sur Ie berceau de ses fils endormis; comme FÉpouse toujours fidélenbsp;de FHomme-Dieu qui voit rangés autour d’elle les nombreux enfantsnbsp;qu’elle a donnés a son divin Époux, et dont les robes teintes du sangnbsp;de FAgneau ferment sa couronne; enfin, comme la Maitresse de lanbsp;vérité qui, pour certifier chacun de ses oracles, montre la signaturenbsp;sanglante de plusieurs millions de martyrs, venus des quatre coins dnnbsp;monde.

Dés ce premier coup d’oeil qui révèle sous un nouveau jour la grandeur exceptionnelle de Rome, est-il possible de ne pas admirer les conseilsnbsp;de Dieu sur la cité providentielle? Est-il possible de ne pas la féliciternbsp;elle-même de ses glorieuses destinées? Salut done, Ville mystérieuse!nbsp;longtemps tu fus la ciladelle du prince des ténèbres, Ie tróne d’oü ilnbsp;tyrannisait Funivers. Pour solenniser ses coupables fètes, il avait ras-semblé dans ton enceinte, les dépouilles opimes des nations, les perles,nbsp;For, Fargent, les marbres précieux. Mais voila que Ie trompeur a éténbsp;pris dans ses piéges ; il thésaurisait; il ne savait pas é qui profiteraitnbsp;sa peine : lui et les siens ont fait un long travail pour orner Ie trónenbsp;du Fils de FÉternel. Reine des peuples! lu échappes a son empire;nbsp;du baut de sa croix, FAgneau dominateur te fait sa noble conquêtenbsp;en inclinanl la tête de ton cóté, au moment de sa mort.

Pour s’assurer ó jamais ta possession, pour te rendre digne de lui en purifiant tes souillures, il verse son sang pour toi; puisil convoque

(0 La Rome souterraine comple un nombre de quartiers a peu prés égal a celui des paroisses de la Rome pontificale. Voici d’après Ie DiariodiUoma, du 26décembre, l’clatnbsp;de la population, a Rome, pendant l’année 1842 :

Nombre des paroisses ö4; idem des families 33,057; évéques 35; prêlrcs 1,522; moines el religieus 2,496; religieuses 1,461; séminarisles el élèves des colléges 625;nbsp;laiques ayant l’ége pour la communion 119,649; au-dessous de eet age 40,940; héréti'nbsp;ques, Tures et infidèles, non compris les juifs 288; manages 1,524; baplêmes d'enlanisnbsp;njAles 2,550; baplêmes de filles 2,251; morts du sese masculin 1,922; morts du sexenbsp;féminin 4,418. Total de la population ; hommes 85,485; femmes 75,106 *. en tout 160,589.

En 1842, la population s’est accrue de 1,721 personnes: la proportion des naissanccs è la population est de 1 a 33; celle des morts a cette même population, comme 1 a 54;nbsp;Ie nombre des naissances et des morts a été h peu prés égal. Le dernier a été de 367nbsp;par mois, environ 12 par jour.

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10 LES TROIS ROJIE.

dans tes murailles, l’innombrable armée des saints. II veut que chaque province de son immense empire ait auprès de toi un représentantnbsp;qui t’apporle de pieux tribuis. La Judée te donnera Pierre, chef denbsp;l’apostolat; la Cilicie, Paul, docteur des Gentils; la Syrië, l’illustrenbsp;Ignace; l’Espagne, Ie glorieux lévite Laurent; Isl Gaule, Sébastien, Ienbsp;valeureux guerrier; leur sang empourprera tes forum, cimentera tesnbsp;murailles, leurs os décoreront tes basiliques. Des aulres régions denbsp;l’univers, seront députés et des martyrs dont Ie nombre échappe aunbsp;calcul, et des confesseurs qui, t’offrant a l’envi leur sang et leur foi,nbsp;voudront prendre sous ton aile Ie repos de la tombe, el te donner Ienbsp;sceau d’une grande majesté (i).

A cette première harmonie en succède bientót une autre. Lorsqu’il reporte ses avides regards sur la glorieuse campagne dont il vient denbsp;faire Ie tour, Ie voyageur demande pourquoi les Catacombes se trou-vent, sans exception, sur Ie bord des voies romaines? Deux réponsesnbsp;s’offrent d’elles-mêmes k sa pensée. Servir de sépulture aux morts etnbsp;de retraite aux vivanls, tel était Ie double but des cimetières chrétiens.nbsp;II fallait y transporter furtivement un grand nombre de corps; il fal-lait, pendant les persécutions, y chercher un asile pour les femmes,nbsp;les enfants et les vieillards, auxquels les frères, reslés dans la ville,nbsp;devaient fournir chaque jour les choses nécessaires; il fallait è tousnbsp;les fidèles des lieux de réunion pour célébrer les saints Mystères etnbsp;manger Ie pain qui fait les martyrs.

Ainsi, d’une part, il ést évident que les Catacombes ne pouvaient être a une grande distance des murs de la Cité. D’autre part, les voiesnbsp;qui traversaient alors les faubourgs et qui sillonnent aujourd’hui lanbsp;Campagne romaine, sont tellement rapprochées qu’elles ne laissentnbsp;enlre elles qu’un intervalle peu considérable : de lè, Ie voisinage nécessaire des Catacombes. A cette première raison, tirée de la disposition des lieux, s’en joint une autre fondée sur l’usage connu desnbsp;Remains, qui élevaient constamment, sur les bords des voies, les mau-solées et les colombaires. Les premiers chrétiens ont suivi eet usage;nbsp;seuleraent ils ont fait, dans les entrailles de la terre, ce que lesnbsp;maitres du monde faisaient h la surface.

Tout en admettant ces motifs péremptoires, Ie philosophe chrétien aime a voir dans remplacement dont il s’agit une disposition supérieure de la Providence. Rome devait être substituée è Rome dansnbsp;l’empire éternel du monde; les gloires, les nobles coutumes de Rome

(i) Lucas Tudens, lib. ii, contr. Albig., c. 12.

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POURQUOI SUR LE BORD DES VOIES ROMAINES. nbsp;nbsp;nbsp;I 1

païenne, devaient faire place aux gloires, aux coutumes de Rome chi’é-tienne; et les lieux, théatre des premières, devenir Ie théütre des secondes. Dans ce plan divin, manifesté avec tant d’éclat par Voute lanbsp;suite de l’histoire, les voies romaines, voies Consulaires, voies Müi-taires, voies Triomphales, devaient, en conservant leur gloire origi-nelle, devenir plus dignes que jamais de leur triple fiom.

Voies Consulaires; elles avaieut vu les chefs du peuple-roi présider è leur creation, cimenler avec les sueurs et Ie sang des esclaves leursnbsp;dalles de granit, et promener sur leur indestructible chaussée la ma-jesté du nom romain. Toujours dignes de ce premier nom, elles de-vaient voir nos grands martyrs, vrais consuls du nouveau peuple-roi,nbsp;rehausser leur gloire par l’éclat de la leur, les immorialiser par l’ef-fusion de leur sang, et promener sur toute leur élendue la majesté dunbsp;nom chrétien.

Voies Militaires; elles avaient retenti sous les pas des légions de Fabius, de Scipion, de César et d’Augusle, partant pour la conquétenbsp;du monde. Plus militaires encore sous Ie christianisme, elles devaientnbsp;être parcourues, durant trois siècles, par la grande armée des martyrs, dont Pierre, Paul, Laurent, furent les illuslres chefs, et la con-duire è Ia double conquéte du monde et de Rome elle-même.

Voies Triomphales; elles furent témoins de la gloire la plus grande k laquelle un mortel put aspirer; elles conlemplèrent les richesses etnbsp;la force des nations conquises, apporlées en tribut è Ia grande Rome;nbsp;puis elles s’enorgueillirent en voyant élevés sur leurs bords les ma-gnifiques mausolées des héros dont la vie et la mort devinrent pournbsp;elles un égal titre de gloire. Depuis qu’elles ont été foulées par lesnbsp;vainqueurs du monde romain; depuis qu’elles ont vu vcnir de l’Orientnbsp;et de rOccident les nations volontairement enchainées au char desnbsp;conquérants, partis de Rome, afin de reconnaitre, par Ie double tributnbsp;de l’amour et de la foi, la glorieuse suprématie de la Ville éternelle;nbsp;depuis qu’elles ont vu succéder, sur leurs bords, les tombes raagniü-ques des fondateurs et des soutiens du nouvel empire, aux tombeauxnbsp;en ruines des consuls et des Césars : plus que jamais ne sont-elles pasnbsp;devenues triomphales?

Tels sont les lieux célèbres oü la Providence a marqué la sépulture des chefs et des premiers habitants de la nouvelle capilale du monde.nbsp;Si grand est Ie nombre de leurs tombeaux, qu’ils forment une villenbsp;souterraine dont nous voulumes connaitre la forme et l’étendue avantnbsp;d’en étudier les détails.

Représentez-vous autour de la Rome qui brille k vos yeux, une aulre

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12 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

Rome de plusieurs lieues d’élendue, cachée dans les enlrailles de la terre, avec ses différents quarliers, désignés par des noms illustres;nbsp;ses nonibreux habitants de tont ftge, de tont sexe, de toute condition ;nbsp;ses places publiques, ses carrefours, ses chapelles, ses églises avecnbsp;loutes leurs parlies; ses peintures, vivant tableau de la foi et des dispositions des générations dont elle est la demeure; ses innombrablesnbsp;galeries élagées les unes au-dessus des aulres jusqu’au nombre denbsp;quaire et même de cinq, tantót basses et étroiles, tanlót hauies etnbsp;larges; tanlót courant en ligne droite, tantót se courbant sur elles-inêines, fuyant dans tous les sens, se coupant, se mêlant, comnie lesnbsp;allées d’un immense labyrinthe; ces galeries, ces places, ces chapelles,nbsp;éclairées extérieurement, de distance en distance, par des ouverturesnbsp;pratiquées a la surface du sol, et illuminées intérieurement par desnbsp;millions de lampes de terre cuile ou de bronze, affectant la formenbsp;d’une nacelle; partout, a droite et amp; gauche, du sol jusqu’ó la nais-sance des voutes, des tombeaux, taillés horizonlalement dans les paroisnbsp;des galeries : telle est, autant qu’il est possible de Ie représenler parnbsp;Ie discours, la forme de la Rome souterraine. Quant ó son étendue, ilnbsp;suffit de dire, suivant Ie calcul des hommes dont la vie se passe ó l’ex-plorer, que si toutes les galeries étaient miscs bout a bout, elles for-meraient une rue de trois cents lieues de longueur, bordée de six millions de tombes {i).

Quelle est l’origine de cette ville, unique dans l’univers, dont elle est la plus étonnanle inerveille? A deraain la réponse.

15 DÉCEMBRE.

Origine des Calacombes. — Opinion de Bosio ét de Boldelli. — Opinion du P. Marchi.

_ Preuves liistoriques de l’origiue exclusivement chrélienne des Calacombes.—

Preuves pliysiquos.

Le désir de voir la collection des lampes antiques nous avail conduits au Musée du Collége remain. Nous y irouvames le P. Marchi,

(i)......i Cimiterj milledugento cbilomelri di longhezza con sei millioni di sepolori....

Quesle niisure e proporzioni a me, che sonomi sludiato da qualc anno, di meliere la popolozione crisliana di Roma ne’ quatro indicati secoli, a conl'ronto della vastila de’nbsp;cimiterj in qualche modo percorsi da me medesimo, paiono molto rislretie. Perciónbsp;amerei che chi all’ udire le migliaja e i millioni si seniisse tentato di tacciarmi d’esage-razione, ripetesse prima queslo mio studio. Le P. Marchi, Monumenti primil'wi dellenbsp;Arti cristiane nella Metropoli del cristianesimo, etc., p. 90. Rome, 1844. Je citerai souvent eet ouvrage, dont la publication n’est pas encore terminée et qui renferme les explications que nous avons entendues de la bouche du savant auteur.

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ORIGINE DES CATACOMBES.

expliquanl a des voyageurs anglais Ie plan des Catacombes de sainte Agnès. Le discours du savant religieux prit bienlót de plus largesnbsp;proportions et embrassa toute l’histoire de la Rome souterraine.

Voici, avec de nouveaux développemenis, le fond de eet entrelien, publié plus tard par le P. Marchi lui-même. 11 importe de s’en biennbsp;pénélrer, paree qu’il est Tinlroduction nécessaire a l’élude de nosnbsp;merveilleux cimetières.

Les archéologues des trois derniers siècles prétendent, en général, que nos Catacombes furenl primitivement ouvertes par les anciensnbsp;Romains. A leur tête marchent rimmortel Bosio, Aringhi et l’excel-lent Boldetti. Une étude plus approfondie fait croire au P. Marchi quenbsp;nos cimetières sont d’origine exclusivement ebrélienne. Simple historiën, je vais rapporter les raisons de part et d’autre, laissant au lec-teur le soin de choisir lui-raêrae l’opinion qui lui conviendra.

Commengons par l’étymologie du mot. Attenant è la partie de l’église de Saint-Sébaslien qui regarde la voie Ardéatine, on trouvenbsp;une enceinte souterraine, demi-circulaire et construite en roa^onne-rie (i). Cette enceinte, oü furent déposés les corps de saint Pierre etnbsp;de saint Paul, touche au vaste cimetière de Callixte ou de Saint-Sébas-tien, avec lequel cependant elle n’a aucune communication. A ellenbsp;seule fut donné originairement et appartient proprement le nom denbsp;Catacombes, c’est-a-dire, lieux prés des Tombeaux, dont on a faitnbsp;plus tard, suivant quelques auteurs, le nom de Catacombes, appliquénbsp;è tous les cimetières de Rome. De la cette expression si fréquente dunbsp;Martyrologe : Romw ad Catacombas natalis sancti, etc.; A Rome,nbsp;prés des Catacombes, nativité de saint, etc., pour indiquer que lenbsp;martyre eut lieu prés de l’enceinte dont je viens de parler. D’autresnbsp;font dériver le mot Catacombe du grec Catacombe qui'veut dire fossenbsp;profonde, excavation, souterrain, paree que les cimetières de Romenbsp;sont creusés dans les profondeurs des carrières de Pouzzolane (a).

Quelle main avait primitivement ouvert ces carrières? Évidemment une main païenne. Les Romains, suivant Boldetti, ne tardèrent pas ènbsp;reconnaitre que la campagne oü leur ville est assise renfermait d’ex-cellents matériaux pour les constructions, tels que le tuf el le sablenbsp;appelé Pouzzolane. La pensée leur vint naturellement d’en opérernbsp;1 extraction. Mais, afin de ne point endommager la surface du sol, ilsnbsp;pratiquèrent seulement de petites ouvertures, au moyen desquelles,

(0 Voir le plan a la fin du volume.

(2) Locus cavus alqueprofundus, qualiaRomm praeserliro ccemeleria csse solebanlin arenariis profundis cryptis excavala. — Baron. An. ad Mariyr. 20 jan.

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¦14 nbsp;nbsp;nbsp;les TROIS ROME.

descendant dans les profondeurs de la terre, ils en fouillèrent les en-trailles : un pareil système conciliait tons les avantages. D’une part, il laissait i peu prés intacte la superficie de la campagne; d’autre part,nbsp;il donnait la facilité d’exlraire tons les matériaux exigés pour les monuments qui erabellirent la capitale du monde. Ce genre d’exploita-tion était d’ailleurs très-possible aux Romains, grüce k la multitudenbsp;de leurs esclaves. Placés sur de longues files, comme les masons quenbsp;nous voyons, échelonnés les uns au-dessus des autres, se passer denbsp;main en main les pierres destinées a un édifice, les esclaves se trans-mettaient, de proche en proche, Ie tuf et la pouzzolane, qui parve-naient ainsi jusqu’é la surface du sol.

Ces excavations s’appelaient latomice, arenarice, carrières de pierre, carrières de sable. Plusieurs existaient lorsque Ie christianisme s’in-trodiiisit a Rome; d’autres étaient en voie d’exploitation. Parmi lesnbsp;dernières on compte celles des Voies Salaria, Appia, Aurelia et No-mentane (i). La formation des premières nous est révélée et par lanbsp;simple raison, et par Ie témoignage des auteurs profanes. Partout oünbsp;il existe de grandes cités, les matériaux employés k la construction denbsp;ces villes durent évidemment laisser dans Ie voisinage des carrièresnbsp;plus OU moins étendues. Ainsi Naples, Syracuse, Paris en possèdent,nbsp;qui sont de véritables catacombes : Carthage avait aussi les siennes.nbsp;Cicéron, Suétone, Vitruve, désignent les souterrains de Rome de ma-nière è ne laisser aucun doute sur leur origine. Dans Ie Discours pournbsp;Cluentius, Cicéron parle d’un certain Asinius qui, attiré dans les jar-‘dins des faubourgs et entrainé dans des arénaires hors de la porienbsp;Esquiline, y fut secrètement égorgé (a). Néron, se voyant au momentnbsp;d’être pris, fut engagé par Phaon k se cacher dans une arénaire:nbsp;« mais, dit Suétone, il refusa de s’ensevelir ainsi tout vivant (3). »nbsp;Pour désigner ces souterrains, Vitruve se sert du même terme arenarice {*).

Or, continue Boldetti, les chrétiens, se trouvant poursuivis el per-sécutés a outrance, cherchèrent un asile dans ces vasles cavernes. Ils pourvurent ainsi è la sureté des vivants; mais cela ne suliisait pas.nbsp;Afin d’ensevelir leurs frères mis i mort pour la foi ou décédés natu-rellement, ils creusèrent des tombeaux dans les parois des souter-

(i) Boldetti, lib. 1, c. 11. p. 5.

(«) Asinius au tem brevi illo tempore, quasi in hortulos iret, in arenarius quasdam extra partem Exquilinam perductus occidilur. C. xiu.

(5) Ibi, hortante eodem Phaonte, ut interim in specum egestm aren® concideret, ne-gavit sevivum sub terram iturum. In Ncr. c. xxvui.

(4) De Architect, xi, 4.

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OPINION DU P. MAHCIIl.

rains. Que tel ait été l’usage fait par les premiers Gdèles de ces anciennes carrières, la preuve en est non-seulement dans les inscriptions recueillies par Ie pieux el savant Severano, conlinuateur de Bosio,nbsp;mais encore dans les Actes des martyrs. Ceux des saints Marc et Mar-cellin disent en termes exprès : « Ils furent ensevelis sur la voie Ap-pienne, ii deux milles de Rome, au lieu appelé Ad arenas (prés desnbsp;arènes), paree qu’il y avail lii des carrières, d’oü Von tirait du sablenbsp;pour construire les murailles de la ville (i). » Tel est, suivant les ar-chéologues dont j’ai parlé, l’origine des catacombes. Tous accordantnbsp;néanmoins que les chrétiens ont considérablement agrandi les arénai-res païennes, et même qu’è l’exception de la galerie supérieure, lesnbsp;cimetières sont l’ouvrage exclusif de nos pères {2).

Voici maintenant l’opinion du père Marchi. Comme ses devanciers, il admet l’existence des arénaires et des latomies, c’est-è-dire desnbsp;carrières de sable et de pierre ouvertes par les Romains antérieure-ment au christianisme; mais il soutient qu’elles n’ont aucun rapportnbsp;avec nos catacombes; que celles-ci sont d’origine exclusivement chré-tienne, aussi bien dans la galerie supérieure que dans les galeriesnbsp;inférieures; en un mot, que les païens n’onl donné, suivant son expression, ni un coup de pic, ni un coup de ciseau dans les cimetièresnbsp;chrétiens (3).

D'abord, l’origine, moitié païenne et moitié chrétienne des cala-combes, ainsi que la destination chrétienne donnée aux arénaires ou aux latomies païennes, est une assertion qui ne repose sur aucun té-moignage de l’antiquité. Or, Ie silence absolu des historiens de l’an-cienne Rome ne. parait-il pas inexplicable? Qui ne connait l’amour etnbsp;la fidélité minulieuse avec laquelle Tite-Live, PUne, Suétpne, Tacite etnbsp;tant d’autres, ont décrit les monuments de la capitale du monde? Lesnbsp;Théamp;tres, les Cirques, les Aqueducs, les Voies, les Égouts mêmes, riennbsp;n’a été oublié. Et nos Catacombes, la plus grande de toules les mer-\eilles de Rome, ils ne les ont pas décrites, ils n’en ont pas dit unnbsp;seul mot! Leur silence ne devient-il pas une preuve positive qu’ils nenbsp;les connaissaient pas? Et s’ils ne les connaissaient pas, n’est-on pas

(1) nbsp;nbsp;nbsp;SeputU sunt via Appia milliario secundo ab Urbe, in loco qui vocawr Anbsp;nbsp;nbsp;nbsp;,

quia cryplaj arenarum illic crant, ex quibus Uibis moenia strucbanlur.

SoUerranca che son

(2) ... Da’ sostenitori deUa opinione contvavia alle cristiane ongim denbsp;si concede un esclusivo dirillo e un iranquillo possesso su luue que e pa

cavaie sotlo un primo piano. — Marchi, p. 5o.

(s) Debbo innanzi luuo far palesi ie ragioni, per Ie quali credo, che ne’ nostri cimi-lerj il pagano non abbia dato mai un colpo nè di piccone, nè di scalpello. — ld. p. 7.

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^6 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

en droit de conclure qu’elles n’existaient pas avanl Télablisseraent du christianisme, et que les païens sont complétement étrangers anbsp;leur création (i) ?

De plus, si la grande Nécropole était l’ouvrage des païens, les inscriptions suppléeraient au silence de 1’histoire, etrendraient au moins quelque témoignage de son origine : pourtant il.n’en est rien. Sur lantnbsp;de milliers de tombes découvertes, depuis trois siècles, dans nos souterrains, on n’a pas rencontré une seule inscription dont Ie millésimenbsp;soit antérieur k l’ère chrétienne : toutes les dates sont postérieuros inbsp;la prédication de l’Évangile.

II faut descendre jusqu’au'xvi® siècle pour trouver l’origine de l’opinion qui fait de nos cimetières des arénaires ou des latomies. Misenbsp;au jour par les archéologues de cette époque, on l’a répétée sansnbsp;prendre la peine d’en rechercher les fondements; et, de nos jours, ellenbsp;est parvenue amp; l’état de monnaie courante.

Bosio, Ie prince de l’archéologie sacrée, ou peut-être ses continua-teurs, Severano et Aringhi, l’avancent comme un fait admis, dont ils dédaignent de fournir les preuves (2).

Boldetti se fonde sur les Actes des saints Marc et Marcellin, qui pla-cent la sépulture des deux martyrs prés de la Voie Appienne, au lieu appelé Ad arenas : il en conclut que les cimetières chrétiens étaientnbsp;ouverts dans les arénaires païennes (5). Aurait-on jamais cru ces paroles susceplibles d’une pareille interprétation? N’est-ll pas évidentnbsp;que l’auteur a voulu exprimer, d’une part, que Ie cimetière oü lesnbsp;deux martyrs furent ensevelis avait une étroite relation avec l’aré-naire, du voisinage de laquelle il prenait son nom; et, d’autre part,nbsp;que cimetière et arénaire étaient deux choses distinctes? II ne dit pasnbsp;qu’ils furent ensevelis in cryptis arenarum, ce qui eüt été impossiblenbsp;dans un temps oü, sulvant Ie même auteur, on tirait du sable pour lanbsp;construction des murs de Rome, quia cryptce arenaram illic erant,nbsp;ex quibus Urbis mwnia struebantur. II dit simplement : in loco quinbsp;dicitur Ad arenas : « Au lieu appelé Prés des carrières de sable; »nbsp;ce qui est bien différent. Pourquoi confondre deux souterrains, si clai-

(1) Je faisais un jour eet argument a une personne qui crut te réfuter en disant : On n'a pas décrit les Catacombes de Paris. — Connaissei-vous un de nos historieiis qui aitnbsp;décrit les routes et les égouts de la capitale? D’ailleurs, entre les Catacombes de Parisnbsp;et celles de Rome, il y al’infini. Les premières ne sont que des carrières, les secondesnbsp;sont une vitle. Si Ie silence de Dulaure, de Mercier,etc., est une chose toute naturelle,nbsp;l'omission de Pline, deTite-Live,etc.,demeure inexplicable.

(ï) Roma Subterranea, 1.1, c. i.

(ö) Boldetti, Osservazioni, etc., lib. i, c. 2, p. 3.

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TREUVES lIlSTOr.IQL'ES BES CATACOMEES.

rement distingués dans Ie texte? Comment, sur une relation si légère-ment examinee, établir en principe que les chrétiens converlirent è leurs pieux usages les excavations païennes?

Bottari est encore plus faible. Toute son argumentation se réduitii dire : « Asinius fut tué dans les arénaires du mont Esquilin; Néron futnbsp;pressé de se cacher dans les arénaires de la voie Nomenlane; » donenbsp;les catacombes chrétiennes furent originairement creusées par lesnbsp;païens (i). Oü en serions-nous, s’il fallait se rendre a des raisonne-ments de l’évidence et de la force de celui-ci? Les deuxfaits rités parnbsp;Bottari prouvent très-bien que 100 ans avant l’établissement du chris-tianisme, Rome avait des arénaires hors de la porte Esquiline, et qu’ilnbsp;en existait hors de la porte Golline peu d’années après que les chré-liens eurent commencé amp; creuser leurs cimetières. lis prouvent encorenbsp;que ces arénaires étaient des cavernes très-favorables aux brigands quinbsp;voulaient commeltre des assassinats sans êlre vus de personne, et auxnbsp;coupables qui voulaient se soustraire aux recherches de la justice.nbsp;Mais quel rapport entre ce double fait et l’origine païenne de nos catacombes?

Non-seulement l’antiquilé se taitsur cetteorigineprétendue païenne de nos cimetières; la raison et Texpérience prouvent de plus qu’ellenbsp;est une chimère. Quel était Ie besoin des chrétiens persécutés? sinonnbsp;de trouver un refuge centre les recherches passionnées de leurs en-nemis. Or, ce refuge pouvaienl-ils Ie trouver dans les arénaires ou lesnbsp;latomies païennes? Les unes étaient encore en pleine exploitation, lesnbsp;aulres étaient peut-être abandonnées; mais toules étaient connues desnbsp;païens qui les avaient ouvertes. S’y établir d’unemanière permanente,nbsp;y placer leurs autels et les tombes de leurs morts, n’était-«e pas, pournbsp;les chrétiens, se livrer un peu plus tót ou un peu plus tard ó une mortnbsp;certaine ? Chercher leurs victimes dans les seuls lieux capables de leurnbsp;offrir une retraite, n’était-ce pas la première pensée qui devait venirnbsp;aux persécuteurs? A moins de supposer les chrétiens dénués de sens,nbsp;est-il permis de leur attribuer une pareille conduite?

Que dans un premier moment de frayeur, lors, par exemple, que la persécution de Néron éclata, les chrétiens se trouvant pris au dé-pourvu, se soient réfugiés passagèrement dans les cryptes païennes,nbsp;cela est non-seulement possible, mais encore vraisemblable. De cettenbsp;circonstance trop peu remarquée, est venue, je crois, en grande partienbsp;du moins, 1 origine prétendue païenne de nos Catacombes. En effet.

(i) Picture e sculiure, elo.,t, 2.

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18 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

I’étude attentive des lieux montre qu’ii l’enlrée' des cimetières chré-tiens se trouve assez souvent une arénaire païenne ou une latomie. D’une part, ainsi que nous l’avons dit, il était naturel que les premiers chrétiens cherchassent un asile momentané dans ces vastes ca-vernes : d’aulre part, il est certain qu’ils ne pouvaient mieux placer,nbsp;du moins au commencement, la porte de leurs cimetières. Telles sont,nbsp;en effet, les sinuosités, l’étendue et Tobscurité de ces carrières primitives qu’il est facile de s’y égarer; et, è plus forte raison, d’y pra-tiquer des ouvertures secrètes pour s’enfoncer dans les entrailles denbsp;la terre. Ces cavernes abandonnées leur offraient une aulre utililé. lisnbsp;pouvaient, sans se compromeltre, y déposer les malériaux provenantnbsp;des premières galeries qu’ils creusaient è leur usage : mais, je Ie ré-pète, les arénaires ou les latomies païennes n’ont rien de communnbsp;avec les Catacombes auxquelles elles servent simplement de vestibule.

Néanmoins, comme je l’ai dit, ce voisinage est la cause problable de Terreur que nous combattons : erreur qu’il était pourtant facilenbsp;d’éviter. Entre les carrières païennes et les cimetières chrétiens, onnbsp;remarque une telle différence, qu’il est impossible è Tobservateur at-tentif de les confondre. Les premières, larges et spacieuses, ouvertesnbsp;généralement è quelques pieds au-dessous du sol, prouvent évidem-ment Tintention d’une exploitation matérielle, ainsi que Ie loisir etnbsp;tous les moyens de Topérer. Les autres, au contraire, basses et resser-rées, s’enfonganl amp; une grande profondeur, annoncent avec la mêmenbsp;évidence un but tout différent. Ajoulez qu’elles trahissent è chaquenbsp;pas la crainte de Touvrier, Ie manque de temps et quelquefois la privation des outils ou des ressources nécessaires.

Pour ne conserver sur ce point aucun doute, il sulQt de comparer les Catacombes de Naples, ouvrage Incontestable des païens, avec le.snbsp;latomies ou les arénaires de Rome et les cimetières chrétiens. 11 ré-sulte de cette comparaison que la galerie supérieure des Catacombes,nbsp;la seule dont les adversaires réservent Torigine aux anciens Remains,nbsp;est tout aussi chrétienne que les galeries inférieures. S’il en étaitnbsp;autrement, on y remarquerait quelques traces de sa création et de sanbsp;destination primitive. Eh bien! on n’en trouve aucune. Pour ne citernbsp;que deux exemples : dans le cimetière de Saint-Hippolyte, les galeriesnbsp;inférieures du quatrième étage, et dans le cimetière de Saint-Thra-son, celles du second, du troisième, du quatrième et du cinquièmenbsp;étage sont d’une forme parfaitement semblable aux galeries supérieures.nbsp;11 est done clair qu’elles n’ont ni une origine ni une destination différente. Or, puisqu’on accorde aux chrétiens Thonneur d’avoir creusé

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PREDVES HISTORIQUES DES CATACOMBES. 19

les galeries inférieures, sur quel motif pourrait-on leur refuser celui d’avoir ouvert la galerie supérieure?

J’ai dit que les arénaires ou les lalomies païennes servaient de vestibule aux cimelières chrétiens; mais ce fait, dont on connait la cause, est loin d’êlre général. Lorsque Ie christianisme eut fait a Rome denbsp;nobles conquêtes, et il en fit dès Ie premier voyage de saint Pierre,nbsp;des Catacombes s’ouvrirent dans l’enceinte des jardins et des pro-priétés particulières. L’histoirenomme avecreconnaissance les illustresnbsp;matrones Priscille, Gyriaque, Lucine, qui s’empressèrent d’offrirl’intérieur de leurs villas pour servir de sépulture aux martyrs. La cha-rité leur donna de nombreux imitateurs. Ouvrir des cimetières inac-cessibles aux païens et procurer aux fidèles des asiles ou ils pussent,nbsp;sans crainte, cacher leur vie, déposer leurs morts, célébrer leurs mys-tères, était d’ailleurs une nécessité générale (i). Aussi il va de soi-mème que ce n’est ni dans les arénaires, ni dans les latomies, ni surnbsp;Ie bord des voies romaines qu’il faut chercber les entrées primitivesnbsp;de ces Catacombes. Les vestiges qui en restent se trouvent aujourd’huinbsp;dans les vignes et dans les champs abandonnés des environs de Rome.nbsp;Quant aux portes actuelles, voütées, magonnées, béties, elles sontnbsp;postérieures a la paix de l’Église, c’est-^-dire contemporaines dunbsp;tv' et même du v® siècle. Indépendamment du caractère de 1’architecture et des témoignages de Phistoire qui fixent cette date, il est impossible de leur assignee une époque antérieure, è moins de supposernbsp;que les chrétiens ont voulu, de gaité de coeur, livrer leur refuge auxnbsp;regards de tous les passants et mettre les persécuteurs sur les tracesnbsp;de leurs victimes (2).

Jusqu’ii ce moment, trois choses sont établies ; la première, que l’antiquité ne dit pas un mot de l’origine païenne de nos Catacombes;nbsp;la seconde, que les arénaires et les latomies païennes ont servi denbsp;vestibule a plusieurs cimetières chrétiens, sans avoir rien de communnbsp;avec ces derniers; et la troisième, que la galerie supérieure n’est pasnbsp;moins 1’ouvrage d’une main chrélienne que les galeries inférieures.nbsp;11 reste è prouver que la supposition moderne de l’origine, moiliénbsp;chrétienne, moitié païenne, des catacombes est une assertion dénuéenbsp;de fondement et dont la nature même du sol démontre la fausseté.

(i) Haud procul extremo cuUa ad Pomceria vallo,

Mersa latebrosis crypla latet foveis;

Hujus in occultuin gradibus via pronareflexis,

Ire per anfractus luce latenle docet.

Prudent. Hym. xi.; Boldetti, c. 11, p. 8.

!•) P. Marchi, p. 35.

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20 LES TKOIS ROME.

Le sol de la Campagne romaine n’est pas un terrain primitif, mais un terrain de formation secondaire. La pierre volcanique ou le tulennbsp;forme le caractère général et présente au géologue trois nuances biennbsp;distinctes :

Le tuf lithoïde, qui a la dureté du silex ou du granit, et qui peut être employé avec succès comme assise ou comme base dans les plusnbsp;grands edifices.

Le tuf graniilaire, qui se taille facilement, mais que le grand air décompose, et que le transport, s’il est un peu saccadé, fait lombernbsp;en gravals.Employé sur plaee et dans les fonderaents des constructionsnbsp;de moyenne grandeur, il olfre assez de consislance pour supporter desnbsp;excavations et des voütes sans danger d’éboulement.

La pouzzolane, simple nuance du tuf granulaire, est une roche sablonneuse dont les parties, privées de toute espèce deciment, n’ontnbsp;entre elles aucune cohésion : en d’autres termes, c’est du sable, maisnbsp;un sable excellent.

Cela posé, on comprend sans peine que les Remains aient creusé de vastes carrières de tuf lithoïde et de pouzzolane; double élément denbsp;leurs immenses constructions. Qu’ils l’aient fait, et fait sur une largenbsp;échelle, l’histoire le dit, l’aspect de la Campagne romaine le monlrenbsp;et toutes les ruines en offrent la preuvepalpable.Mais autant ils avalentnbsp;d’intérêt ii rechercher le tuf lithoïde et la pouzzolane, autant ils ennbsp;avaient peu a extraire le tuf granulaire. Impropre par lui-même a lanbsp;construction des grands édifices, ou même des édifices exposés au contact de l’air extérieur et du soleil, il ne peut y servir que commenbsp;sable, c’est-^-dire, comme partie intégrante du ciment. Dira-t-on quenbsp;les Remains ont suivi jusque dans les profondeurs du sol et qu’ils ontnbsp;exploité les lilons maigres et irréguliers de tuf granulaire, afin de lenbsp;réduire en poudre et d’en faire de la pouzzolane? Mais la pouzzolanenbsp;se trouve en immense quanlité et dégagée de tout alliage, presque 5nbsp;fleur de terre, sur toutes les collines des environs de Rome. Elle senbsp;présente ainsi, notamment dans l’arénaire voisine des Catacombes denbsp;Sainte-Agnès, arénaire ouverte par les païens et non encore épuisée.nbsp;Or, peut-on supposer qu’un entrepreneur de b4timents qui trouvenbsp;sous la main et presque sans frais des matériaux excellents, s’imposenbsp;l’énorme peine et l’énorme dépense d’aller les chercher dans les en-trailles de la terre, oü ils sont d’une qualité inférieure?

A cette première question s’en joint une autre. Dans les carrières de pouzzolane, beaucoup plus friable et, par conséquent, beaucoupnbsp;plus facile S extraire et ö transporter que le tuf granulaire, les païens

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niEUVES HISTORIQÜES DES CATACOMBES. nbsp;nbsp;nbsp;21

ont pratiqué des excavations, deux, trois, quatre fois plus larges que les galeries des Catacombes; dans les latomies, les excavations pré-sentent une largeur de vingt, de trenle et de quarante mètres ; et dansnbsp;les carrières de tuf granulaire, on se serait réduit au faible espace denbsp;buit OU neuf décimètres! Cela se con(!oit-il? Le désir de trouver lanbsp;plus grande quantité possible de malériaux, l’avantage de l’entrepre-neur, la facilité de la circulation pour les ouvriers, les bêtes de sotntnenbsp;et les tonibereaux, expliquent très-bien les vastes excavations des aré-naires et des latomies. Comment se fait-il que, pour l’extraction dunbsp;tuf granulaire, on oublie toutes ces considérations? D oü vient qu onnbsp;se resserre dans des galeries tellement étroites, qu’un fossoyeur peutnbsp;bien y travailler de front et avec un outil a manche court, mais qu’ilnbsp;ne peut s’y mouvoir, s’il est en compagnie ou s’il a sur les épaulesnbsp;quelque gros fardeau? Ce n’est pas tout : comment expliquer que lenbsp;marchand de tuf granulaire ait trouvé son avantage ouvrir toutesnbsp;ces galeries en ligne droite, ales tailler toujours perpendiculairement,nbsp;a maintenir ses excavations a peu prés toujours sur le même niveau, sansnbsp;1 exhausser ni le baisser; enfin a descendre jusqu’aux entrailles de lanbsp;terre en creusant jusqu’a cinq galeries les unes au-dessus des autres,nbsp;pour aller chercher des matériaux qu’il trouvaitala surface ou presquenbsp;è la surface du sol? Telle est cependant l’absurde méthode qu il fautnbsp;imputer aux Romains, quand on suppose Texploitation souterraine desnbsp;filons de tuf granulaire pour en oblenir de la pouzzolane.

Si ce fait sans raison, comme sans exemple, est évidemment inadmissible, il y en a un autre qu’il est impossible de nier, è moins de nier l’évidence ; c’est que toutes nos Catacombes sont crpusées exclu-sivement dans le tuf granulaire (t). Ajoutons qu’elles ne pouvaientnbsp;être creusées que la; et que leur destination chrétienne peut seule

(i) On ne connait que deux exceptions : les Catacombes de Saint-Ponlien, a Monte Verde; el celles de Saint-Jules sur la voie Flaminienne. Les premières sont pratiquéesnbsp;dans la roche marine. Par cela seul il est prouvé que cette Catacombe n’est pas plusnbsp;que les autres 1’ouvrage des païens. En eft'et, on n’y trouve ni carrières de pierre pournbsp;les constructions, ni carrières de pouzzolane pour faire du ciment. Le sol est un amasnbsp;conius de pierres siliceuses, calcaires, roulées el reunies par un ciment de sable siliceux,nbsp;calcaire, argileux, el mëlées de detritus vegétaux ou d’animaux lerreslros et marins. Denbsp;quelle utilitépouvaient être, pour les constructions, ces debris de toute nature? Lachauxnbsp;et 1 argile étaieui sans doule d’un usage Irès-commun; mais comment les Romains au -raient-ils laissé la fine argile du Janicule et du Vatican, qui se trouvent a deux pas, ounbsp;les roebes calcaires des collines si rapprocbées des Corniculanl el du hucretile, pour scnbsp;mettre follement a creuser dans ce chaos de Monle Yerde, afin d’en extraire un mélangenbsp;informe de chaux el d’argile ? —Les Catacombes de Saint jules et dc Saint-Valentin,nbsp;sur la voie Flaminienne, sont creusées dans la roche fluvialc; elles prouvent par la,nbsp;comme celles de Monle Yerde, qu’elles ne sont, ni ne peuvent être 1’ouvrage des paiens.

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22 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

expliquer, comme de fait elle explique admirablement, la créalion de ces prodigieux souterrains dans la couchevolcaniquedont nous parlons.

Les catacombes ne pouvaient être creusées dans la pouzzolane. II est clair que celte terre sablonneuse n’offre pas assez de consislance,nbsp;pour supporter un pareil travail. Qu’a l’ouverture d’une carrière denbsp;sable, avant Ie desséchement produit par l’air extérieur, on puissenbsp;ouvrir une galerie quelconque, cela se comprend. Mais si on voulaitnbsp;pratiquer une seconde ou une troisièrae galerie au-dessus ou au-des-sous de la première, un éboulement serait inévitable. Chaque coup denbsp;pic ou de ploche donné pour creuser les secondes galeries ébranleraitnbsp;Ie fragile milieu qui les sépare de la première; si bien qu^au termenbsp;du travail on aurait pour résultat une ouverture béante et informe,nbsp;mais jamais des galeries ni des arcades distinctes, propres è recevoirnbsp;un ou plusieurs tombeaux. En effet, il ne suffisait pas d’ouvrir desnbsp;galeries; il fallait encore en percer les parois de mille ouvertures asseznbsp;spacieuses pour contenir des corps; il fallait enfin pouvoir fermernbsp;hermétiquement ces ouvertures après l’inhumalion. Saus cette pré-caution,les miasmes peslilentielséchappés des cadavresauraient rendunbsp;la Catacombe inhabitable. Vienne maintenant Ie plus habile architecte,nbsp;el qu’il essaie de fermer ces arcades pratiquées dans la pouzzolane,nbsp;avec de lourds morceaux de inurbre ou de larges luiles fortement ci-mentées et incruslées dans un sable qui tombe en poussière au plusnbsp;léger contact, et il verra s’il est possible a la science humaine de ré-soudre un pareil problème. Telle est pourtant la manière rigoureuse-ment nécessaire dont les loculi des Catacombes devaient être fermés :nbsp;preuve évidente qu’ils ne pouvaient être pratiques dans la pouzzolane.

Les Catacombes ne pouvaient être creusées dans Ie tuf lithoïde. Sans doute cette roehe volcanique permet d’ouvrir de spacieuses galeries,nbsp;de larges places, d’élégants tombeaux, et raême des demeures commodes ; mais Ie tuf lithoïde a toute la durelé de la pierre. Le mêmenbsp;ouvrage qui, dans le tuf granulaire, demande les bras et la journéenbsp;d’un homme, exige, dans le tuf lithoïde, les bras et la journée de troisnbsp;hommes; paree que cette roehe est, pour le moins, trois fois plus durenbsp;que la première. Si done chacune des paroisses de Rome, avec unnbsp;collége ou confrérie de huit ou dix fossoyeurs, pouvait suffire a lanbsp;sépulture des morts, en creusant les cimetières et les loculi dans lenbsp;tuf granulaire, qui offre, d’ailleurs, toute la solidité désirable, pournbsp;quel motif exiger de ces églises, si pauvres et si peu nombreuses,nbsp;qu’elles entretinssent constamment vingt-quatre ou irente fossoyeurs,nbsp;afin d’ouvrir des tombeaux dans le tuf lithoïde, dont l’excessive durelénbsp;n’était nullement nécessaire è leur pieux travail?

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CARACTÈRES GÉNÉRAUS DES CATACOMBES.

Indépendamment de ces raisons géologiques, plus que suffisantes pour expliquer la créalion des Catacombes dans Ie tuf granulaire, onnbsp;peut dire que I’instinct seul de la conservation devait nécessairetnentnbsp;les y placer. La pouzzolane et Ie tuf lilhoïde étaient avidenienl recherchés des Remains, qui en faisaient une large consommaiion. En ynbsp;creusant leurs retraites, les chréliens s’esposaient évidetnmenl a irenbsp;bientót découverts. Ils éloignaient, au contraire, Ie danger en se ornbsp;Want des demeures et des sépullures dans la partie du sol que ® “nbsp;uu la cupidité n’avait aucun intérêl h explorer. Ici Ie fait con rmnbsp;raisonnement: on ne connait aucune Catacombe ou parlie e a anbsp;combe qui soit creusée dans Ie tuf lithoïde. Que reste-t-i niaintenannbsp;sinon a bénir la Providence d’avoir disposé les éléments e manierenbsp;è ce que l’Église naissante Irouvamp;t, dans Ie sol même e ome,

asile assuré de toutes parts. nbsp;nbsp;nbsp;, n-ro

Tels sont en abrégé les motifs sur lesquels s appuie e savan e Marchi, pour soutenir que nos Catacombes sont exclusiiementnbsp;vrage des chrétiens. Dans cette grande cause, j ai exposé es^ raisonnbsp;de l’un et de l’autre sentiment; Ie lecteur jugera lequel merite sonnbsp;adhésion. Je Ie prie seulement de se souvenir que, quel que soinbsp;parli qu’oii embrasse, l’authenticité des reliques n en deraeure pgt;'nbsp;moins inattaquable : nous Ie verrons clairement dans la suite e ce enbsp;histoire.

19 DÉCEMBRE.

Caractères généraux des Catacombes. — Les Fossoyeurs— Histoire des Catacombes.— Catacombe de Sainl-Pierre. — Sou origine. — Ses gloires.

La Chapelle papale nous avail atlirés k Saint-Pierre, el nous élions tout posés pour visiter la Catacombe Vaticane. Avant d ynbsp;nbsp;nbsp;nbsp;*

nous reste a compléter l’élude générale de la Rome Souterraine. j nous savons que la main de nos pères créa la merveilleuse cilé, maïsnbsp;tous les chrétiens sans distinction en furent-ils les architectes. ucunenbsp;direction ne présida-t-elle au travail? Nos cimetières sont-ilsun amasnbsp;de galeries juxiaposées au hasard et sans regie? L’élude des Caia-combes, d’accord avec l’histoire, répond négativemenl. Dans 1 immense labyrinthe, on découvre un plan uniforme qui détermme ^esnbsp;parties intérieures de chaque cimetière, et qui, reliant entre e esnbsp;différentes Catacombes, tend h n’en former qu’un seul et vaste or oir.

D’abord, la dimension des galeries, inexplicable dans la supposi ion

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LES TROIS ROME.

de l’origine païenne, se jusliCe d’elle-raöme au point de vue de la destination chrétienne et témoigne d’un plan sagement con^u. Lesnbsp;galeries sont étroiles, et l’on comprend qu’elles doivent l’être. II suf-fisait qu’elles donnassent passage è deux hommes chargés de déposernbsp;un mort dans la tombe. En outre, il y avait loujours une grandenbsp;difficulté, quelquefois même un danger sérieux i transporter ailleursnbsp;les malériaux provenant de l’excavation. Ainsi les galeries devaientnbsp;étre d’autant plus resserrées que les déblais étaient accrus par l’ira-périeuse nécessité de creuser les parois, afin d’y pratiquer des ouvertures capables de recevoir deux, trois et même quatre corps.

Ensuite, la direction rectiligne emprunte son explication au rit chrélien, suivant lequel les cadavres doivent être élendus dans Ie sé-pulcre, et non point courbés en are pu en peloton. Quant a Ia taillenbsp;verticale des parois, elle est en rapport avec la fermeture des différentsnbsp;étages de tombes. II est bien évident qu’ils ne pourraient se soutenir,nbsp;si la fermeture des tombes supérieures ne tombait perpendiculaire-ment sur la partie pleine de la fermeture inférieure.

Enfin, la profondeur totale des loculi de droite et de gauche sur-passe, en général, la largeur de la galerie intermédiaire; ce qui dénote d’une manière évidente que celle-ci a élé ouverte pour Ie service desnbsp;tombes, et nullement dans un but d’exploitation matérielle.

Pas plus que les tombes et les galeries, la sépulture n’est laissée au caprice ou a l’arbitraire : Ie mode en est Ie même dans toutes les Ca-tacombes. Une niche taillée horizontalement dans les parois, capablenbsp;de contenir un ou plusieurs corps élendus, et fermée par des dallesnbsp;de marbre, de pierre ou par de larges briques fortement cimentées;nbsp;voili ce qui se reproduit six millions de fois dans les cinquante quar-liers de la Rome souterraine. Non moins que la forme des galeries,nbsp;cette manière d’ensevelir les corps suppose done un plan arrêténbsp;d’avance et rigoureusement maintenu. Elle prouve encore que ce plannbsp;même, ainsi que les Catacombes oü il est exécuté, sont d’originenbsp;exclusivement chrétienne. Les Grecs et les Remains brulaient les morts,nbsp;dont ils renfermaient les cendres dans des urnes; les Égyptiens lesnbsp;conservaient dans leurs maisons. Les Juifs seuls taillaient leurs sé-pulcres dans les cavernes et les rochers, oü ils déposaient les corpsnbsp;entiers, enveloppés de linges, après les avoir embaumés.

Comment ce mode de sépulture se irouve-t-il tout h coup en Occident, oü il était inconnu; a Rome, oü prévalait, depuis plusieurs siè-des, un usage absolument contraire? En dehors des données chré-tiennes, cette question demeure insoluble; au point de vue de la foi, elle s’explique d’elle-même.

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CARACTÈRES GÉNÉRAl'X DES CATACOMBES. nbsp;nbsp;nbsp;25

Saint Matthieu nous apprend qu’après la mort de Notre-Seigneur, Joseph d’Arimathie vint trouver Pilate et lui demanda Ie corps denbsp;Jésus. L’ayant obtenu, il l’enveloppa dans un linge parfaitement pro-pre, avec des parfums, et Ie. mit dans un tombeau cveusé dans Ie roe,nbsp;dont il ferma la porte avec une grosse pierre. L’Évangile a soinnbsp;d’ajouter que telle était la manière d’ensevelir parmi les Juifs [i).nbsp;boin d’abolir eet usage de l’ancien peuple, JNotre-Seigneur Ie consa-cra, en l’adoptant pour lui-même. De plus, Ie fondateur du christia-uisme i Rome, saint Pierre, était juif d’origine. Quoi de plus naturelnbsp;que les ebrétiens, instruits par l’Apótre, adoptassent ce mode de sé-pullure? Et quoi de plus évident qu’ils Tont fait? Comme celle denbsp;1 Homme-Dieu, leurs tombes sont taillées dans Ie roe et fermées avecnbsp;des pierres ou des briques. Les corps y sont enveloppés de lingesnbsp;très-propres, quelquefois d’étoffes très-riches, et défendus centre Ianbsp;corruption par une grande quantité d’aromates. « L’Arabie et la Sa-lgt;ée, dit Tertullien, nous envoient plus d’aromates pour ensevelir nosnbsp;morts, qu’elles n’en vendent pour enfumer vos dieux (2). » « Notrenbsp;manière d’ensevelir, ajoute Prudence, est d’étendre des linges d unenbsp;blancheur et d’une flnesse extréme, sur lesquels nous répandons desnbsp;parfums, aGn de conserver les corps (s). »

Tels élaient Ie soin religieux et la pieuse prodigalité avec lesquels les premie^s ebrétiens s’efforgaient de préserver des ravages de lanbsp;tombe ces corps desiinés è la résurrection glorieuse, qu’un grandnbsp;uombre de loculi, ouverts quinze siècles après la sépullure, laissaientnbsp;encore échapper l’agréable odeur des parfums (a). Dans une foulenbsp;d’autres, les suaires, les éloffes de laine et de soie qui Servirent denbsp;linceuls, témoignent du même fait.

Voici un nouveau trait de ressemblance. Au témoignage de l’Évan-gélisle, les saintes femmes, ayant achelé des parfums, s’empressèrent de se rendre au sépulcre, aün d’embaumer Ie corps du Sauveur (s).nbsp;Cette noble conduite ne resta pas sans imitateurs. Rien n’égale l’em-pressement des ebrétiens ^ venir répandre des aromates précieux de-

(t) Acceperunt ergo corpus Jesu et ligaverunt illud linteis cum aromatibus, sicut inos est Judaeis sepelirc. S. Joan., c. xix,40.

(2) Thura plane nos emimus! Si Arabiae querunlur, sciant Sabaei pluris et carius suas mercescbrisUanissepeliendis profligari quani diis 1'umigandis,nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i,42.

(s) Candore niteniia claro prsetendere lintea mos est,

Aspersaque myrrha Sabseo corpus medicatnine servet.

Hym. Caihemer,

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Boldelli, lib. i, c. 59.

(5) nbsp;nbsp;nbsp;Luc, c. xxxiu.

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26 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

vant les tombes des martyrs (i). A l’exemple de Madeleine et de Marie, les femmes chrétiennes se distinguèrent surtout par leur zèle coura-geux pour ce pieux devoir (2). Né sur Ie Calvaire, continué dans lesnbsp;Catacombes, l’usage dont il s’agit, s’esl perpétué avec une grandenbsp;magnificence dans Ie monde entier, depuis la paix de l’Église. Outrenbsp;l’encensement des reliques, nous avons deux fails qui en rendent Ic-moignage. Dans les somptueuses fondations de Constantin en faveurnbsp;des Basiliques chrétiennes, on trouve toujours des revenus considéra-bles pour fournir les aromates, l’encens et l’huile de nard deslinésnbsp;aux tombeaux des Apótres. L’Église de Rome posséda longtemps unnbsp;vaste domaine dans la Babylonie, dont la redevance annuelle consistaitnbsp;en une quantité de baume suffisante, pour brüler nuit et jour devantnbsp;les corps de saint Pierre et de saint Paul (3).

II est vrai, pourtant, que les Catacombes offrent un certain nombre de corps ensevelis dans la chaux vive. Quand on connait Ie zèle extréme des premiers fidèles pour conserver intacte la dépouille de leursnbsp;frères, on s’étonne d’abord qu’ils aient employé un élément dont lanbsp;propriété est de consumer si promptement les chairs qu’on lui confie.nbsp;Mais, en y réfléchissant, on ne tarde pas h reconnaitre qu’une impé-rieuse nécessité les contraignit a préférer Ie salut des vivants è la conservation plus longue des défunts. II est vraisemblable que les corpsnbsp;dont il s’agit n’avaient pu être inhumés immédiatement après Ie tré-pas : ce cas ne devait pas être rare. On sait que les persécuteurs nenbsp;négligeaient aucune précaution pour erapêcher les chrétiens d’empor-ter les restes des martyrs et de leur donner Ia sépulture. Afin de pré-venir la putréfaciion, qui pouvait nuire aux fidèles et donner l’éveilnbsp;aux païens, la pauvreté de nos pères avait recours è l’emploi infailli-ble et peu dispendleux de la chaux vive (4).

Entre Ie Calvaire et les Catacombes, signalens une dernière confor-inité. Sur la tombe momentanée de l’Homme-Dieu, aucune Inscription funèbre ne dut être gravée. Il est bessuscité, il n’est plüs ici; telle estnbsp;la devise triomphale que la foi de l’univers Ut sur ce tombeau, quinbsp;n’aura rien a rendre. Autant que Ie permettent les lois de la Providence, les premiers chrétiens imitèrent dans leur sépulture Ie cóténbsp;glorieux de la sépulture du vainqueur de la mort. Ne pouvant pas

{1) nbsp;nbsp;nbsp;Titulumque et frigida saxa

Liquide spargemus odore.

Prvb., Hym. 10.

(a) Boldetü, lib. i,c. S9.

(5) Bar.,.4tm., t. x, an. 1061.

(4) P. Marchi, p. 19.

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GARACTÈRES GÉSÉRAUX »ES CATACOMBES. nbsp;nbsp;nbsp;27

écrire ; il est ressuscité, ils onl écrit; il resscscitera. Corame dans la longue obscurité des nuits d’hiver, les étoiles brillent d’un éclat plusnbsp;vif a la voute du firmament; ainsi, dans la profondeur des Galacom-bes, Ie dogme de la Résurrection future resplendit d’un éclat incomparable. Les mots depositus, in pace quiescit, gravés sur des myriadesnbsp;de tombes, sont comrae autanl de rayons étincelants, dont l’ensemblenbsp;jette sur cette vérité une lumière éblouissante; comme aulant de voixnbsp;(jui proolament sous les sombres routes de l’immense Nécropole, Ienbsp;grand dogme des chrétiens ; Fiducia christianorum, resurrectio mor-tuorutn (i). Il est done vrai, les galeries, les tombes, Ie mode de sé-pulture, les inscriptions, tout prouve un plan arrêté dans la disposition partienlière des Catacombes, ainsi que l’intention manifeste, denbsp;la part des chrétiens, d’iraiter, dans sa mort comme dans sa vie, Ie

Dieu-Sauveur, leur amour et leur modèle (2).

La disposition générale de la Rome souterraine révèle avec la même evidence un autre caractère éminemment chrétien. Si la résurrectionnbsp;des corps est Tarlicle fondamental du symbole catholique, la charilénbsp;est Ie premier précepte du Décalogue. Or, Ie précepte, aussi bien quenbsp;Ie dogme, se trouve gravé dans les Catacombes. Je n en donnerai icinbsp;qu’une preuve générale, réservant pour un autre jour les térooignagesnbsp;particuliers.

Le premier effet de la charité chrétienne, c’est l’égalité devant Dieu. Égalité sainte, mère de la liberté et de la dignité qui distinguent encore les nations modernes 1 de quel éclat vous brillez sur les modestesnbsp;tombeaux de nos glorieux ancêtresl Dans leurs cimetières, le martyrnbsp;est distingué du simple chrétien; mais le signe de distindion ne con-siste ni dans une urne, ni dans un ossuaire, ou vase cinéraire de cris-tal, d’albatre, de roarbre, éclipsant, par sa richesse et la beauté desesnbsp;sculptures, les vases en terre cuite des tombes ordinaires. Un vase denbsp;sang de la forme et de la malière la plus simple, scellé dans le murnbsp;avec de la chaux; une palme gravée sur la pierre tombale et, le plusnbsp;ordinaireraent, imprimée dans la chaux, en dehors de la tombe : telsnbsp;sont les signes que permet cette égalité parfaite. A la vérité, on trouvenbsp;a 1 intérieur ou a l’extérieur de plusieurs tombeaux des peintures, desnbsp;mosaïques, des objets en bronze, en ivoire, des médailles, des perlesnbsp;et autres signes semblables; mais ils n’y sont nullemenl placés pournbsp;indiquer une supériorité de naissance ou de mérite. On doit y voir denbsp;simples témoignages de l’amour des vivants pour leurs parents et leurs

TerluU., De Resurrect, car., c. 1.

(4) Marchi,p. 61.

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28 nbsp;nbsp;nbsp;tES TROIS ROME.

aniis décédés. C’est la traduction palpable de l’afifection si vive et si vraie, qui respire dans la plupart des inscriptions funéraires. J’ai ditnbsp;que cette égalité dans la tombe est un caraclère distinctif du christia-nisrae; car tout Ie monde sait qu’elle était complétement inconnue desnbsp;païens.

Le second eflèt de la charité, c’est l’union qui, de tous les enfants de l’Église.ne fait, suivant l’énergique expression de l’Évangile, qu’unnbsp;seul ccBur et une seule ame. La vie de nos pères en fut un exempfenbsp;tellement héroïque et tellement continuel, que leurs persécuteurs eux-niêmes en étaient dans le ravissement (i). Fille de la foi et Immortellenbsp;comme sa mère, cette union cordiale survit la mort et se manifestenbsp;radieuse dans nos Catacombes. Perdus au milieu d’une ville immense,nbsp;toujours épiés ou poursuivis par les païens, les premiers fidèles denbsp;Rome ne pouvaient se réunir que passagèrement dans leurs assembléesnbsp;religieuses ou dans leurs innocentes agapes. Les prisons oü ils souf-fraient, les amphithéfttres oü ils mouraient ensemble furent les lieuxnbsp;dans lesquels ils se rencontrèrent peut-être le plus souvent. Séparés,nbsp;malgré eux, pendant la vie, ils aspiraient, du moins, è reposer ensemble après la mort. Ne former qu’un seul dortoir, comme ils ne for-maient qu’une seule familie, un seul coeur, une seule flme, était toutenbsp;leur ambition.

Mais la création d’une seule Catacombe était chose impossible. D’une part, un cimetière unique eüt été insuffisant pour la multitudenbsp;des morts que la maladie et plus encore le glaive des bourreaux se-condé par les lions du Colysée moissonnaient chaque jour. D’autrenbsp;part, eet unique cimetière, forcément éloigné de plusieurs quartiers,nbsp;aurait créé des dangers inévitables aux fossoyeurs chargés d’ensevelirnbsp;les corps, ainsi qu’è tous les chrétiens dont la consolation était d’allernbsp;prier aux tombeaux des martyrs. La prudence et la nécessité firentnbsp;done creuser différentes Catacombes autour de la ville; mais, si grandenbsp;que soit la distance qui les sépare, il est facile de voir, en les étudiant,nbsp;que l’intention des fondateurs était de les relier les unes aux autres,nbsp;de manière è ne former qu’un immense et unique cimetière, partagénbsp;seulement, comme Rome elle-même, par le cours du Tibre (2). Dansnbsp;cette sublime Nécropole, saint Pierre, inhumé au Vatican, apparaitnbsp;comme le chef de la région transtibórine, et protégé Rome au nord etnbsp;è 1’occident; tandis que saint Paul, dont la sépulture se trouve sur la

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Vide ut invicem se diligant, et ut pro alterutro mori sint parali. —Tert., Apol. c. 40.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Voir les preiives dans tous les archéologues roreains, et notamment dans le P. March!, p.68-78.

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caractères générarx des catacombes. nbsp;nbsp;nbsp;29

voie d’Ostie, devient Ie chef de la région cistibérine et protégé Rome au midi et ii l’orient (i).

La résurrection et la charité, ces deux dogmes exclusivement catho-liques, gravés, de toutes parts, dans les Catacombes, dont ils sont rame et Ie secret, distinguent si bien nos cimetières chrétipns, qu’ilnbsp;est impossible de les confondre jamais avec les sépulcres païens. Cenbsp;n’est pas la moindre preuve que les Catacombes sont 1’ouvrage exclusifnbsp;de nos pères. J’ai vu bien des tombes païennes, bien des mausolées,nbsp;bien des colombaires, d’autres en ont vu plus que moi; et, nulle part,nbsp;on n’y irouve indiqué Ie dogme de la résurrection de la chair, k lanbsp;croyance de l’anéantissement du corps se joignait, dans Ie paganisme,

Ie dogme de l’égoïsme. Comme les acles de leur vie publique ou pri-vée, les tombes des païens Ie réfléchissenl dans sa hideuse nudilé. Un coup d’oeil rapide suffit pour en acquérir la preuve. Les tombes païennes Se divisent en trois classes : les mausolées, les colombaifes et lesnbsp;puticuli, OU la fosse commune.

Les Mausolées. On peut douler si Jamais 1 orgueil et 1 égoïsme sont montés plus haut que dans la construction de ces gigantesques monuments, oü Ie marbre, Ie bronze, les peintures, 1’argent et 1 or semblentnbsp;s’être donné rendez-vous pour produire des merveilles capables denbsp;braver les ravages des siècles. Ces tombeaux somptueux s élèvent souvent pour un seul individu : il suffit de nommer la pyramide de Ces-lius, Ie monument de Cécilia Métella et Ie möle d’Adrien. Quelques-uns s’ouvraient aux, membres dp la même familie. Tels étaient Ienbsp;maiisolée d’Auguste, destine recevoir aussi les cendres de ses succes-seurs; celui de la Gens Plautia sur la voie de Tibur; le« magnifiquesnbsp;hypogées des Scipion, sur la Voie Appienne; les tombeaux, non nioinsnbsp;somptueux, des Lentulus, des Dolabella, des Céthégus, des Cécilius, etnbsp;d’une foule d’autres.

Les Colombaires. Si la fortune ne permettait pas b tous de s’édifier des tombeaux somptueux, tous sans exception répugnaient égalementnbsp;a une sépullure commune. De la naquirent les colombaires, destinésnbsp;aux diverses associations d’afl'rancbis, de négociants, d’artistes. 11 n’estnbsp;pas rare d’y trouver quelques esclaves dont Ie petit pécule servit a leurnbsp;acbeter une place, ou qui Toblinrent de la générosité de leurs mai-tres; pour tous les aulres 1’exclusion élait absolue. Entre une foule

(i) A facie hostili duo propugnacüla prfesunt Quos iitiei lurres Urbs eapui orbis habei.

FoRTüN. can

T. IV.

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LES TROIS ROME.

d’inscriplions, je me contenterai de rapporter les suivanles, qui con-statent cetle importante cession :

50

l!

C. AVÏLIO. LESCHO TI. CLAVDIVS. BVCCIO.nbsp;COLVMBARIA lïll, OLL. VIÏI.nbsp;SE. VIVO. A. SOLO. AD.nbsp;FASTIGIVM. MANCIPIO.nbsp;DEBIT.

Voila Ie don de quatre niches et de huit urnes dans Ie colombaire.

G. C. GAW^IAIVVS SIBI ET QVINTIiEnbsp;VALERI.E CONJVGnbsp;BENEMERENTInbsp;HELFIDIO p^mtnbsp;ONI. ET AVGVST^

OVARTILLiE VIVO ME LOCA CESSr.

Voil^ une cession en vertu de laquelle Primionus el Augusta acqui-rent Ie droit d’être inhumés dans Ie tombeau de Gamianus.

D. M. S.

L. FABIVS. MODESTVS.

SIBI. ET SVIS. OMNIBVS.

INSTANTIA. ET. LABORIBVS.

SVIS FECIT.

Voici un tombeau exclusivement réservé aux membres de la même familie.

D.^ M.

T. /ELIO. AVG. LIB. G. LAVCO.»

CVBICVLA*f (0.

STATIONIS. PRIM^.

ROSCIA. LYDE.

CONJVGI. KARISSIMO.

BENEMERENTI. FECIT.

ET. SÏBI. ET. SVIS. ET L, U B. L. LIBERT.

P. E. HOC. MONIMENTVM. H. N. S.

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caractères gésérato res catacombes. nbsp;nbsp;nbsp;31

Ici, la propriétaire, Roscia Lyde, veut bien accorder Ie droit de sé-pulture dans son tombeau a ses affranchis, ses affranchies el k leurs descendants; mais remarquez la clause : Hoe monimentum hwredesnbsp;non sequitur : « Ce monument n’appartient point aux héritiers. »nbsp;Cette formule sacramentelle, qui traduit si bien l’exclusion jalousenbsp;donnée non-seulement aux étrangers, mais encore aux propres héritiers du défunt, se rencontre h chaque pas, et s’exprime par les siglesnbsp;suivants : H. M. H. N. S. Ordinairement des peines sévères, des ma-lédictions, des amendes énormes, exprimées sur les torabeaux, mena-cent l’audacieux qui oserait aliéner Ie colombaire, ou y déposer unnbsp;étranger (i). Souvent on appelle encore sur lui toutes les rigueurs denbsp;la justice (2). Tel était 1’esprit de la société romaine. Quelques annéesnbsp;avant que les chréliens donnassent, dans leurs Catacombes, Ie ma-gnifique exemple de charité et d’égalilé universelle que nous avonsnbsp;admiré, Cicéron nous apprend que la religion el la loi continuaientnbsp;de protéger de toute leur autorité Ie dogme païen de 1 égoïsme et denbsp;l’orgueil, portés alors au plus haut degré (s).

Les PcTicüLi. La lerre et l’argent auraient manqué a la reine du monde, si elle avail voulu inhumer dans des colombaires ou des mau-solées tanl de millions de plébéiens et d’esclaves qui se remuèrent dansnbsp;sa vaste enceinte, pendant neuf ou dix siècles. La grande loi de la sa-lubrité publique lui fit trouver, pour celte partie de la population, unnbsp;mode de sépulture qui manifeste I’orgueil et Tégoïsme, presque avecnbsp;Ie même éclat que les plus somptueux mausolées. Des ustrinw, pu-blicce, ou buchers publics, servaient a consumer les corps. C’élaientnbsp;de vastes carrés entourés de fortes murailles, dans lesquels on jetaitnbsp;pêle-mêle les cadavres des malheureux esclaves el des pauvres. Unenbsp;grande quanlité de bois résineux alimentail Ie foyer el prévenait, parnbsp;sa fumée odoriférante, la corruption de Talmosphère. Souvent encorenbsp;on jetait dans des puits profonds, creusés en dehors de Ia porte Es-quiline, les corps des hommes avec les cadavres des animaux, et tonsnbsp;pourrissaient ensemble (a). Entre cette manière bonteusement sauvage

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Siquis aulemliocxeaiiere voluerit, arkaeponlilicum L. SS.

feret; vel si quis aUeuum corpus hic intulerit, pajnam supra sen ptam nbsp;nbsp;nbsp;• P

par FoSielO', p. 205. no HO. nbsp;nbsp;nbsp;.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;,nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;inferatsera-

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Huic monumento inlercedatlex ne donatio fiat; quod siquisa mi

rio P. R. -II-S-. XXX. N. Inscription du lUusée de Vérone, p. a20 . • nbsp;nbsp;nbsp;negent

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Sane tanta religio est sepuicrorum, ut extera sacra et gen em

esse.DeLesf.,lib.ii, c.xxii. nbsp;nbsp;nbsp;„„„s senultura: in puteis fuerit,

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Puticulos dicunlappEllatos, quöd vetustissimum genu pnbsp;nbsp;nbsp;nbsp;appellatos

eumque lucum fuisse publicum extra porlani EsquiUnam.

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LES TROIS ROME.

de trailer les restes de Thomme, et la respectueuse sépullure des Ca-tacombes se trouve toute la distance qui sépare Ie paganisme du chris-lianisme.

Je demande pardon au lecteur de lui avoir manqué de parole. II était convenu que nous ferions aujourd’hui connaissance avec les Fos-soyeurs de la primitive Église, et que nous descendrions ensemblenbsp;dans les Catacombes du Vatican; mais il esttrop tard pour tenir cettenbsp;double promesse. L’étude des caractères généraux de nos cimetières anbsp;absorbé tous nos loisirs. Puissé-je, du moins, les avoir décrils d’unenbsp;manière assez claire, pour ne laisser aucun doute sur l’existence dunbsp;plan profondément chrélien, qui a présidé è la formation de la Romenbsp;Souterraine, et qui la distingue, de tout point, des sépulturesnbsp;païennes.

20 DÉCEMBRE.

Les Füssoyeurs. — Portrait. — Impression. — Prière. — Catacombe Vaticane. — Son origine. — Ses gloires. — Linceul des martyrs. — Instrument de suppUce. — Vénéra-lion des fidèles. — Monde chrétien.

Le matin, visiter Ie Colysée; Ie soir, descendre dansles Catacombes; contempler tour a tour l’arène sanglante oü, dans une lutte héroïque,nbsp;les martyrs cueillirent leurs palmes immortelles; et les sombres pro-fondeurs choisies par une piété non moins héroïque, pour entourernbsp;leurs restes deux fois vénérables de. tous les hommages de l’amour etnbsp;de la foi : tel est le bonheur que nous valut aujourd’hui le retard denbsp;la veille. Cependant l’ombre glorieuse des Fossoyeurs nous arrêta denbsp;nouveau sur le seuil de la Catacombe Vaticane. Hier, nous avions re-connu l’existence d’un plan parfaitement suivi dans la construction denbsp;la Rome Souterraine. Inspires par la foi, nos pères I’avaient d’abordnbsp;congu : aux Fossoyeurs en fut confiée l’exécution. II est temps de fairenbsp;connaissance avec ces immorlels architectes et ces sublimes entrepreneurs.

Si haut qu’on puisse remonter dans l’histoire de FÉglise de Rome, on trouve sept diacres établis dans les quatorze régions de la ville.nbsp;Chaque diacre avait un lieu, une maison, une chambre peut-être, oünbsp;il exer^ait, a l’égard des neophytes, les fonctions spirituelles et tem-

cssc exislimal puticulos ^lius Stilo, quöd cum in eum locum patresfamilias pecudcs morlicinas et villa projicerent mancipia, ibi cadavera ea putrescerent. — Festus, ad verb.nbsp;Puliculi; ed. Cor. Od. Muelleri.

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LES FOSSOïEÜRS.

porelles de son ordre; ce lieu s’appelait Diaconie. Vingt-cinq prêtres, ordonnés par saint Giet, second successeur de saint Pierre, régissaientnbsp;les différentes portions du même troupeau : telle fut Vorigine desnbsp;paroisses. D’abord au nombre de sept, elles furent portées h vingt-cinq par Ie Pape saint Évariste, Van 96. Ce cbiffre augmenta peu anbsp;peu avec ie nombre des fidèles (i). Outre un ou deux prêtres, unnbsp;diacre, un sous-diacre, un notaire, dont je parlerai plus tard (2}, cha-que paroisse avail un collége de huil ou dix Fossoyeurs (5) spéciale-went chargés de tout ce qui regardait la sépulture des morls ; Tra-vailleurs. Doyens, Lecticaires, Porteurs, Carriers, mms divers, quinbsp;indiquentou leu/nombre, ou la roultiplicité de leurs saintes mais

périlleuses fonctions (a). nbsp;nbsp;nbsp;.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;, .

Tandis que les palens poussaienl Ie mépris de 1 homme jusqu h jeter son cadavre dans une voirie, oü il pourrissait avec celui des animaux,nbsp;l’Église professait une telle vénération pour les dépouilles mortellesnbsp;du Chrétien et surlout du martyr, qu’elle ne confia Ie soin de les in-humer qu’è ses propres ministres. Dans Ie clergé romain, les Fossoyeurs formaient Ie premier degré de la hiërarchie. Nouveaux Tobies,nbsp;ils devaient, ^ Fexemple de leur modèle, briller par la sainteté de leursnbsp;tneeurs, 1’intelligence de leurs devoirs, Ie courage de leur professionnbsp;et la vivacilé de leur foi, qui, les faisant agir en vue de la résurreclionnbsp;des corps, leur montrait Ie Sauveur lui-même dans chaque défunt

conamp;é h leur pieuse sollicilude. (s).

Comment payer un juste tribui de reconnaissance el d’admiration

h ces hommes d’élite, dont la vie se passait è creuser dans les entrailles

*

(i) Voyez Plali, De Cardinalis Dignkate et Officio, 1.11, p. 12-13.

(a) Baron., De JIlarti/roL Boot,, c. 1.

(5) Le setle parroccliie urbane... con un coUegio di otto o dieci fossori. — Marchi, p. 58 et p. 10,

{*) Copialse seu laboranles, Decani, Lecticarii, Porticani, Arenarii. —Boldetli, lib. i, c. x\i; Aringhi, lib. i, c. xiii.

(5) Primus in clericis Fossariorum ordo est, qui in similitudinem Tobia; sancti sepe-lire morluos admonentur, ut exhibenles visibilinm rerum curam ad invisibiUum lesü-nent, et resurrecliomen carnis credentes in Domino, totum qnod faciunt Deo proieciori deberi, non moriuis cognoscant. Tales ergo Fossarios esse Ecclesiae convenil, qualisnbsp;Tobias propheia luit, ejusdera sanclitatis, ejusdem scienlias atque virtuüs. Non ergonbsp;putes parvum esse officium Fossariorum, etc. De septem Gradïb. Eccïesicr; inter operanbsp;D. Hieronymi, £p,st. ad Rustic. Narbon.—El il parait hien que les Fossores faisaientnbsp;panie de la biérarchie, puisque nous les voyons assister conime lérooins, avec les lanbsp;cres et les prêtres, a la reconciliation de 1’hérélique Cécilianus : « Sedente Paulo epis-copo, et Moritano, Victore, et Memorio presbyteris; adslante Marte euro Helm diacono,nbsp;Marenclio, Gatullino, Sitvano et Carolo subdiaconis; Januario, Meraclo, Fructuoso,nbsp;Migione, Saturnino, Victore et CEteris Fossoribus, etc, » — Labbe, 1.1 Concil., p. 1

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04 LES TROIS ROME.

de la lerre des tombes pour leurs frères, ^ recueillir les corps, a les laver et a les ensevelir? Quand on se reporte a l’ère sanglante des persecutions, et qu’on mesure les obstacles it vaincre, les dangers it courirnbsp;pour arracher des mains des bourreaux les restes des martyrs, pournbsp;les acbeter des magistrals, les enlever des lieux environnés de satellites, les transporter par les rues d’une ville ennemie, et les des-cendre, au milieu des ténèbres de la nuit, dansde profondes cavernes;nbsp;quand on songe a l’exiguité des galeries, ii l’obscurilé profonde, itnbsp;l’humidité, aux miasmes pèrnicieux d’un cimetière sans cesse ouvert:nbsp;comment admirer assez ces bomraes magnaniraes qui, soutenus par lanbsp;seule espérance de la résurrection glorieuse, créèrent cette Jérusalemnbsp;souterraine, la cité la plus merveilleuse et la plus sainte après la Jérusalem du ciel? Comment ne pas reconnaitre, dans ces robustes chrétiens,nbsp;les champions les plus intrépides et les plus dévoués de l’Église nais-sante? Si, dans le martyr, je vois un soldat qui a donné, une fois, sa vienbsp;pour Jésus-Christ: dans le Fossoyeur remain, je trouve un héros qui anbsp;cent fois exposé la sienne pour son frère (i).

Aux yeux de la foi primitive, leur profession était si noble et si mé-ritoire qu’elle fut souvent exercée par les plus grands personnages et les plus illustres matrones. II suffit de citer les noras des saints Papesnbsp;Étienne, Callixte, Fabien, Eutichien, Marcel et Melchiade; les saintesnbsp;Praxède, Prudentienne, Lucine, Cyriaque, et de tant d’autres dont lesnbsp;pères, les époux et les fils étaient honorés de la toge sénatoriale ou desnbsp;faisceauxconsulaires (2). Faut-il s’étonner si la reconnaissance etl’admi-ration des vivants suivaient jusqu’après la mort ces hommes tant denbsp;fois héroïques? Le nom de Fossor figure comme un titre de gloirenbsp;sur leurs modestes tombes. En void seulement quelques exemples :

FELIX FOSSARIVS IN P.

« Félix, fossoyeur, en paix. »

SERGIVS ET JVNIVS FOSSORES B. N. M. IN PACE. BISOM.

« Sergius et Junius, fossoyeurs, qui ont bien mérité, en paix dans le même tombeau. »

(1) Voyez March!, p. iO. (s) AringhI, lib. 11, c. XU.

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LES FOSSOÏEURS.

PATERNO FOSSORI. BENEMERENTI.

BIXIT. A. P. M. XXXVI.

QVIESCIT LN PACE.

« A Palernus, fossoyeur, qui a bien mérité. 11 a vécu Irenle-six ans plus OU moins. II repose en paix. »

Les architecles des Calacombes nous sont désormais connus de nom et de réputation : ce serait Ie comble du bonheur si, avant de visiternbsp;leur imnaortel ouvrage, nous pouvions les conlempler de nos yeux. Ehnbsp;bien, les voici tels que nos pères les ont vus dans leur modeste costume, et avec les instruments de leur profession. Regardons avec respect celte figure seize fois séculaire : elle a été copiée dans une desnbsp;eryptes du cimetière de saint Callixte (i).

Au-dessus de l’arcade, on lit Ie nom du glorieux ouvrier, sa mort dans la paix du Seigneur, son espérance de Ia résurrection et Ie journbsp;de sa sépulture ; « Diogène, fossoyeur dans la paix, déposé Ie huil desnbsp;Galendes d’Octobre. » Bien que Ie millésime n’y soit pas, les carac-lères graphiques de l’inscriplion accusent une haute anliquilé. Denbsp;chaque cèté de la modeste épitaphe sont les deux colombes, emblêmenbsp;de la pureté et de la foi du défunt. Au milieu du champ parait Diogène,nbsp;il porie les cheveux courts a la manière des Remains el les oreillesnbsp;découvertes, peut-être suivant les prescriptions ecclésiastiques : pa-tentibus auribus. L’épaule gauche supporte un morceau d’éloffe lai-neuse ou peut-être de peau de mouton qui, repliée sur elle-même,nbsp;pouvait servir de coussinet et rendre moins sensible la pression desnbsp;fardeaux. Quelques archéologues ont cru y voir Yamphibalum, espècenbsp;de capuchon desliné èi couvrir la lête.

Sur l’épaule droite est appuyé un pic de carrier dont Ie manche repose dans la main droite, placée sur la poitrine. G’est Ie signe dis-tinctif de la profession; et ce pauvre outil me parait plus glorieuxnbsp;entre les mains de Diogène que Ie béton de maréchal ou Ie sceptre desnbsp;rois aux mains des conquérants. Le Fossoyeur exer^ait son rude métiernbsp;dans les entrailles de la terre, au milieu des plus épaisses ténèbres ;nbsp;voici é la main gauche la petite lampe qui 1’éclairait dans son travail.nbsp;Elle a, comme vous voyez, la forme d’une nacelle, symbole en miniature de la grande barque de Pierre, l’Église calholique. La chaineltenbsp;par laquelle le Fossoyeur la soutient, est destinée é la suspendre auxnbsp;parois des galeries, non loin du loculus é creuser.

(i) Voir le plan 4 la fin du -volume.

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56 LES TROIS ROME.

L'habillement consiste dans une tunique courte, arrondie par Ie bas et amp; manches étroites. Les mancbes elles-mêmes sont serrées prés dunbsp;poignet par des liens ou des agrafes. Ce costume est on ne peut mieuxnbsp;en rapport avec les occupations du Fossoyeur qui avait besoin de toutenbsp;la liberté de ses mouvements, pour travailler dans d’étroites galeriesnbsp;et creusera plusieurs pieds d’élévalion, des tombes de quelques poucesnbsp;de bauteur et d’un ou deux pieds de profondeur. Trois croix sontnbsp;gravées sur la tunique, deux a la parlie inférieure, une auire sur Ienbsp;bras droit. Pour peu qu’on soit familier avec notre antiquité sacrée,nbsp;il est facile de reconnaitre, dans ce signe auguste, Ie grand objet,nbsp;l’objet indispensable de la foi vive et de l’ardente charité de nosnbsp;pères.

Ils ne pouvaient se passer de la croix; a chaque instant, ils en for-maient Ie signe tutélaire et chéri sur leur front, sur leur coeur (i), sur tous leurs sens. Plus tard leurs habits, leurs vases, leurs tables,nbsp;leurs meubles, les parois de leurs maisons Ie reproduisirent sous toutesnbsp;les formes (2). La place qu’il occupe sur la tunique de Diogène n’estnbsp;pas arbitrairement choisie. Transporter lesmorts etcreuserdes tombes,nbsp;telles étaient les principales fonctions du Fossoyeur. Gravée prés desnbsp;genoux et du bras, la croix encourage, en les sanctiilant, son rudenbsp;labeur et ses périlleux voyages. Une chaussure pleine en forme denbsp;sandales couvre les pieds et compléte Ie costume.

Gravez bien dans votre imagination les traits du vénérable Fossoyeur; prenez les torches allumées qu’on vous présente, et, sur les pas d’un guide ecclésiastique, descendez avec nous 1’obscur escaliernbsp;qui va nous conduire dans Ie premier quartier de la grande Gité desnbsp;martyrs. Ne deraandez pas ce qu’on éprouve a la vue de ces lieux, té-moins de tant de mystéres de foi, de douleur, de courage etd’héroïquenbsp;vertu. Eb! que peut ressentir un fils bien né qui visite les lieux oü ilnbsp;naquit, oü naquit la liberté du monde; les lieux oü ses illustres ancê-tres, injustement persécutés, offrirent, pendant trois siécles, leursnbsp;larmes et leurs priéres pour Ie salut de leurs bourreaux, passérent leurnbsp;vie dans les angoisses et les privations, rude apprentissage du mar-tyre, et regurent une sépulture clandestine aprés avoir étonné lanbsp;grande Rome par Ie spectacle de leurs glorieux combats? Entre cettenbsp;foule de pensées, de souvenirs, d’émotions, il s’éléve dans l’Sme unnbsp;sentiment qui domine bientót tous les autres ; c’est Ie besoin du

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Tertull. De Coron. c. 111.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Concil. Niccen., 11, act. 7.

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LES FOSSOïEURS. nbsp;nbsp;nbsp;37

silence et de la prière. Avec quelle jouissance intime on réeite lesorai-sons composées exprès pour la circonstance (i)!

(1) Ant. Corpora sanctorum in pace sepulta sunt, et nomina eorum vivenl in selernum.

Psal. Isli snnt qui venerunt de tribulatione magna; et laverunt slolas suas in sanguine Agni.

Verbera carnificum non timuerunt servi lui; ideo dedisli eis locum nominatum in regno Palris tui.

Tradiderunt corpora sua in mortem, ne servirent idolis; ideo coronati possident palmam.

Videbantur oculis insipienlium mori; illi autem sunt in pace.

Gloria et honore coronasti eos, Domine, et constituisti eos super opera manuiim tuarum.

Transierunt per ignem et aquam, et eduxisti eos in rel'rigerium; requies autem eorum est in teiernum.

Gloria Patri, etc.

^gt;‘t. Corpora sanctorum in pace sepulta sunt, et nomina eorum vivent in teiernum.

V. Exsultabunt sancti in gloria.

n. Lmtabunlur in cubilibus suis.

V. Justi in perpetuum vivent.

R. El apud Dominum est memoria eorum.

V. Custodit Dominus omnia ossa eorum.

R. tinum ex bis non conlerelur.

V. Orate pro nobis, sancti Christi martyres;

R. Ut digni efficiamur promissionibus Christi.

V. Domine, exaudi orationem meam.

R. Et clamor meus ad te veniat.

Domine Jesu Christe,rex gloriosissime marly rum, alque confUenlium corona, qm dispositione mirabili sacra corpora tuorum militum, qm pro tua fide ac nomine, san-guinem suum fuderunt, in hoe loco per sanctos angelos tuos custpdire dignatus es,nbsp;illosque hujus urbis lu» dilect® Jerusalem circa muros constituisti custodes, quorumnbsp;spiritus in coelis tola die ac node non cessant laudare nomen sanctum luum ; conceaenbsp;nobis, ut sicul sacras ipsorura reliquias visilamus, ita semper eorum Iriump s gnbsp;mur, et jugi praisidio lueamur.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.. . reildis

Domine Jesu Chrisle, qui servorura luorum marlyrum sepulcra regus clariora, ubi sacros cineres et ossa quondam Spiritus sancti viva temp a vener.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;’

ut sicut ipsi per tuam fidem el caritatem de tuis hostibus, sacr® lu» Passionis i res eö'ecli, palmam moriendo reportaverunt; ita nos eorum mentis el inlercessinbsp;bosiium mentis et corporis insidiis Uberemur, et ad paradisi gloriam perveniai

nam; Qui cum Deo Palve,etc. nbsp;nbsp;nbsp;,nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;,,nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;,

Ant, Les corps des saints reposent dans la paix, et leur nom vivra elerne em .

Psaume. Void ceux qui sont venu.« de la grande tribulation et qui lavèrcnl leur robe dans Ie sang de 1'Agneau.

Vos servileurs ne craignirent pas les coups des bourreaux; c’est pourquoi vous eui avez donné une place d’honneur dans Ie royaume de volre Père.

lis livrèrcnl leur corps a la mort plutót que d’adorer les idoles; et ils on v couronne el la palme de l’iramorialilé.

Vous les avez couronnés d’honneur et de gloire, ö mon Dieu; el vous i sur lous les ouvrages de vos mains.

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58

LES TROIS ROME.

La Catacombe Valicane, appelée aujourd’hui GroUes Vaticanes, remonte au berceau du christianisme. Toute la tradition la fait contemporaine de la première persécution, a laquelle même elle est peut-être antérieure. Lorsque l’an 66 de notre ère, sous Ie consulatnbsp;de C. Lecanius Bassus, et de M. Licinius Crassus, Néron se donna Ienbsp;barbare plaisir de faire éclairer ses jardins avec des flambeaux vivants,nbsp;il y avait environ cinq ans que saint Pierre était de retour a Rome. Lenbsp;zèle de l’Apótre avait formé de nombreux prosélytes; et cette Église,nbsp;qui naissait sous le coup des orages, avait dü cacher son existence etnbsp;ses mystères ^ la police du farouche empereur. II est done extrême-ment probable que la Catacombe Vaticane servit de refuge è nos pèresnbsp;avant d’être leur sépulture. Quoi qu’il en soit, la persécution éclate;nbsp;et une immense multitude de chrétiens sont mis è mort au Vatican,

Ils passèrent par 1’eau et par le feu, et vous les avez conduits au lieu du rafraichis sement, et leur repos sera éternel.

Gloire au Père, etc.

Ant. Les corps des saints reposent dans la paix, et leur nom vivra éternellement.

V. Les saints tressailliront dans la gloire.

E. Ils se réjouiront dans leurs demeures.

V. Les justes vivront éternellement.

E. Et leur récompense est auprès du Seigneur.

V. Le Seigneur garde tous leurs os.

E. Aucun d’eux ne sera brisé.

V. Priez pour nous, saints martyrs;

E. Afin que nous soyons dignes des promesses de Jésus Christ.

V. Seigneur, exaucez ma prière,

E. Et que mon cri parvienne jusquA vous.

Seigneur Jésus-Christ, roi très-glorieux des martyrs et de ceux qui vous confessent, dont l’admirable Providence daigne garder en ce lieu, par le ministère de vos saintsnbsp;Anges, les corps sacrés de vos soldats qui ont versé leur sang pour votre foi et votrenbsp;nom, et qui avez placé comme des sentinelles auteur des murailles de cette ville, votrenbsp;bien aimée Jérusalem, ceux dont les Smes louent jour el nuit votre saint nom dans lesnbsp;cieux; accordez-nous la grdce, a nous qui allons visiter leurs saintes reliques, de nousnbsp;réjouir éternellement de leur triompheet d’être environnés jusqu’a la fin de leur puis-sante protection.

Seigneur Jésus-Christ, qui avez rendu plus glorieux que les palais des rois les tom-beaux des martyrs, vos serviteurs, dans lesquels nous honorons leurs cendres et leurs ossefnents sacrés, qui furent des temples vivants du Saint-Esprit; comme vous leur aveznbsp;donné d’etre, par la foi et par la cbarité, les vainqueurs de vos ennemis et les imilateursnbsp;de votre Passion, et de remporter, en mourant, la palme de l’immortalité; accordez-nous, par leurs mérites et leur intercession, d’être préservés de toutes les embüchesnbsp;des ennemis de nos corps el de nos fimes, et d’arriver la gloire éternelle du paradis;nbsp;Vous qui, avec le Père et le Saint-Esprit, vivez et régnez aux siècles des siècles. Ainsinbsp;soit-il.

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LES FOSSOÏEUnS.

dans les jardins, dans Ie Cirque et prés de la Naumachie de Méron (t).

On con?oii que les frères durent chercher Ie lieu Ie plus voisin pour les inhumer. Aussi, Voute l’anViquité vénère dans les Grottes Vaticanes ^nbsp;les reliques augustes de nos premiers martyrs. Terre sacrée du Vatican, eoUine la plus respectable du monde, après Ie Calvaire! oui, vousnbsp;deviez boire les prémices du sang chrétien, comme Ie Golgotha avail

hu Ie sang divin.

Saint Pierre, qui avail souvent habité cette Catacombe, visité, consolé, baptisé, insiruit, nourri du pain des martyrs et abreuvé du vin _ des vierges les fervents chrétiens dont elle étaitl asile, vint y reposernbsp;après sa glorieuse confession. Dés lors, une immense célébrité, unenbsp;vénération profonde, constante, universelle, fut acquise au premiernbsp;cimetière chrétien. Les papes, a l’envi, voulurent ètre inhumés atipresnbsp;de leur chef et de leur modèle. Les princes et les princesses, les roisnbsp;el les reines, les empereurs et les impératrices de toute nation, les consuls, les sénatjeurs, les rejetons des plus anciennes families romaines

ambitionnèrenl la même faveur. nbsp;nbsp;nbsp;^

Parmi les papes, je citerai seulement les saints Lin, Anaclet, tva-

risle, Sixte I, Télesphore, Hygin, Pie, Éleuthère, Victor, Fabien, Jean I, tous martyrs; et les saints Léon 1, Simplicius, GélaselL Syra-niaque, Hormisdas, Agapet, Grégoire Ie Grand, Boniface IV, Dieu-donné, Eugène I, Vitalien, Agathon, Léon II, Serge 1, Grégoire 11,nbsp;Grégoire III, Zacharie, Paul I, Léon III, Léon IV, Nicolas I, Léon IX et

Félix IV.

Parmi les empereurs, les rois el les reines ; Honorius, Valentinien, Othon II, Cedwella roi des Saxons occidentaux, Coiyad roi des Mer-ciens, Offa rol des Saxons, Ina roi des Anglais, la reine Eldiburge sonnbsp;épouse, la princesse Marie, fille de Stilicon el épouse de l’empereurnbsp;Honorius, sa soeur; la princesse Terraantia, rimpératrice Agnès, 1 in-foriunée Charlotte, reine de Chypre, et enfin la grande comtesse

Maihilde.

Parmi les personnages illuslres ; Junius Bassus, préfet de Rome, de de 1 ancienne familie Junia; Probus, prefet du prétoire, les consulsnbsp;Olybrius et Probinus, Livia Primitiva, el un grand nombre d aulresnbsp;qu il serail trop long de nommer.

Tous ces princes du monde, venus longlemps après les persécutions,

(i-) Ergo abolendo rumori Nero subdidtl reos et quïesitissimis pcenis affecit, quos per flagilia invisos, vulgus Christianas appellabat. Igitur primo correpii qui fatebantur;nbsp;deinde indicio eonim multitudo ingens, baud perindc in crimine incendii, qiiam odionbsp;generis huraani convicli sunt. Et pcreuuUbus addiia ludibr)a,eic.—Tacite, tlist. lib. xv.

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40 LES TROIS ROME.

voulurent avoir dans la Catacombe de superbes tombeaux. II en est résulté unc modification considérable du plan primitif. On ne trouvenbsp;plus, dans les Grottes Vaticanes, ni les étroites galeries, ni les mo-destes loculi, ni les peliles cryples des autres cimetières. Ajouteznbsp;qu’en rempla^ant la basilique Constantinienne par l’église actuelle,nbsp;on a bouleversé la Catacombe, obstrué ou détruit un certain nombrenbsp;de galeries, et enfoui une foule d’inscriptions, de tombes et de monuments non moins précieux pour la science que pour la piété (i). Ce-pendant les Souverains Pontifes ordonnèrent k Michel-Ange et auxnbsp;autres arcbilectes de conserver intacte la portion du pavé de l’anciennenbsp;église qui couvrait les grottes. Soutenu par des pilastres et des épe-rons, ce pavé supporte des voiites puissanles d’environ quaire mètresnbsp;de hauteur et sert de plain-pied i l’église souterraine située au-dessousnbsp;de Saint-Pierre.

Au bas de l’esealier circulaire on trouve la Chapelle de la Confession. Elle forme une petite croix latine dont la tête correspond direc-tement k l’autel papal de l’église supérieure. Toules les parois sont ornées de marbres précieux, de stucs dorés, de bas-reliefs en bronze,nbsp;représentant les différentes actions de saint Pierre et de saint Paul.nbsp;Sur l’autel on vénère deux portraits fort anciens des mêmes Apótres,nbsp;peints sur argent. L’autel même, ou j’eus Ie bonheur de célébrer lanbsp;messe, inspire un profond respect; car il touche iramédiatement a lanbsp;ch4sse dans laquelle reposent les corps des illustres fondateurs denbsp;l’Église.

Malgré les changements dont j’ai parlé, les Grottes Vaticanes con-servent encore une foule d'inscriptions anciennes, de mosaïques, de peintures, de bas-reliefs, d’urnes et de tombeaux d’un égal intérêtnbsp;pour l’artiste et pour Ie chrétien. Entre ces derniers, Ie sarcophage denbsp;Junius Bassus est un des plus remarquables tant par son antiquité quenbsp;par Ie fini du travail et par la poésie chrétienne de rornementation.

II forme un carré long en marbre de Paros. Sur la frise, on lit 1’inscription suivante :

IVN. BASSVS VC QVl VIXIT ANNIS. XLII MEN. 11 IN IPSA PB,EFECTVRA VRBI NEOFITVS IIT AD DEVM.

VIII KAL SEPT. EVSEBIO ET YP.ATIO COSS.

« Junius Bassus, homme très-illusvre, qui vécut quaranle-deux ans (0 Rom. Sutler., lib. ii, c. iv, p. 143.

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42 nbsp;nbsp;nbsp;les TROIS ROME.

geait la juridiction, et plus longtemps en place, Ie préfeljouit bienlöt de plus d’autorité que lui (i).

Neofitus. 11 n’était pas rare de trouver dans les premiers siècles des catéchumènes qui attendaient amp; recevoir Ie baptême jusqu’a un ftgenbsp;avancé, ou en cas de maladie. La crainte de péeher après êlre devenunbsp;enfant de Dieu, élait Ie motif ordinaire de ce délai, blémé du reste parnbsp;les Pères et en général par les fidèles, qui appelaient ces retardatairesnbsp;clinici ou grabatarii.

lit ad Beunt. Cette inscription, dictée par la foi a la résurrection et la vive espérance du bonheur éternel, distingue, k ne pas s’y mé-prendre, les tombes chrétiennes des sépulcres païens.

Eusebius et Hypatius. Ces deux frères de la familie Flavia étaient consuls ensemble dans l’année 3S9. Le monument de Bassus remontenbsp;done au milieu du iv® siècle et il donne un spécimen très-bien conservénbsp;de l’art contemporain.

La grande fagade, la seule que je vais décrire afin d’éviter les longueurs, présente deux rangées de bas-reliefs séparées par un élégant cordon. La rangée supérieure contient cinq tableaux en compartiments,nbsp;divisés par des colonnes corinthiennes. Les quatre colonnes des extré-mités sont cannelées, les deux du milieu couvertes de bas-reliefs, etnbsp;toutes dues è un habile ciseau.

Le premier tableau exprime au naturel le sacrifice d’lsaac. Ce sujet, éloquent symbole de l’obéissance et de la résignation è la volonté denbsp;Dieu, convenait trop bien aux premiers fidèles, pour n’êlre pas souventnbsp;présent leur pensée : aussi on le rencontre fréquemment dans lesnbsp;monuments des Catacombes. Ici l’ignorance du sculpteur semble avoirnbsp;commis deux irrégularités. D’abord, il a mis 5 cölé d’Abraham un per-sonnage qui regarde le saint Patriarche; puis il a oublié de donner desnbsp;cornes au bélier; ce qui n’est pas conforme au lexte sacré. Mais l’ar-tiste n’a pas oublié la main divine qui sort du nuage et relient Ie glaivenbsp;d’Abraham. L’intervention d’un ange n’appartient nullement è la tradition de Tart primitif.

Le second tableau représente le reniement de saint Pierre. Entre deux soldats remains on voit l’Apótre dont le maintien embarrassénbsp;trahit la faiblesse. Suivant Buonarotti, la chute de l’Apótre, suivied’unnbsp;illustre repentir, était pour les chrétiens un emblème du baptême etnbsp;de la pénitence : double sacrement oü l’homme, infidèle comme l’Apó-tre, Irouve la force de ressusciter ó la fidélité et a la vie. Telle est la

(I) Onuphr. Panvin., Descrip. Civit. Rom. lib. ii, p. 280.

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VÉNÉRATION DES FIDÈLES. 43

raison pour laquelle cette scène reparait souvent dans la Rome sou-lerraine.

Le Iroisième tableau montre l’Enfant Jésus au milieu des docteurs. La pertc et le recouvrement de Notre-Seigneur au temple de Jérusalemnbsp;est, suivant saint Ainbroise, une image de la résurrection, que les premiers chrétiens aimaient a graver sur leurs tombeaux (i). Sous lesnbsp;pieds de l’Enfant Jésus on voit une figure qui tient élevée au-dessus denbsp;sa tête une écbarpe volante; e’est le firmament représenté sous lesnbsp;traits d’une divinité marine. II n’est pas rare de trouver sur les monuments chrétiens les ètres spirituels avec les insignes et les attributsnbsp;des divinités païennes. L’ignorance d’une autre manière ou la néces-sité d’être compris expliquent en la justifiant cette imitation. En pla-^ant ici le firmament sous les pieds de Notre-Seigneur, on a voulunbsp;exprimer le dogme catholique et combattre les hérétiques qui préten-daient que le monde visible, le ciel et la terre étaient le Fils de Dieu (2).

Le quatrième tableau représente Notre-Seigneur conduit devant les tribunaux de Jérusalem. Un livre est sous son bras, et représente lanbsp;sainte doctrine qui avait excité Ia haine déicide des pharisiens. Deuxnbsp;soldats le tiennent comme un malfaiteur. On les reconnait a leur costume militaire et a l’épée que l’un d’eux porie de la main gauche.

Le cinquième montre Pilate incertain, embarrassé. II est assis sur son tribunal la tête couronnée de lauriers; devant lui sonl deux per-sonnages, dont l'un, également couronné de lauriers, tient une aiguièrenbsp;et une palère. Mais pourquoi la couronné de laurier sur ces deux têtes?nbsp;on attribue cette incorrection k l’artiste qui aura pris une figure d’em-pereur au moment de sacrifier aux dieux, pour repréfSenler ie gouverneur de Judée.

La rangée inférieure conlient également cinq tableaux, dont le premier représente le saint homme Job assis sur son fumier. Un des amis du saint patriarche le regarde tristement; et sa femme, couverte d’unnbsp;grand manteau suivant l’usage des personnes de condition, se bouchenbsp;le nez avec un coin de son voile, et offre h son mari un pain fixé a 1 ex-Irémité d’un manche. Que de legons amères, mais utiles dans ce sujet!

Le second nous montre la chute de nos premiers parents. A cólé d eux est une brebis, pour faire comprendre è la femme que son occupation la plus ordinaire sera de filer la laine destinée k remplacer lenbsp;vêtement d’innocence par des habits fails de la dépouille des animaux.

(1) Exposit. Ei'ajig. sccund. tuc., lil), n. (*) Orig., Conlr. Cels., lib, vi, p. 30S.

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44 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

Le rude labeur d’Adam est indiqué par un épi de blé qui s’élève prés de lui.

Le troislème représente Nolre-Seigneur entrant é Jérusalera cinq jours avant sa passion. Un jeune homme vient ^ la rencontre du fils denbsp;David, portant la penula, babit de voyage. L’artiste a voulu faire allusion a l’usage des premiers lidèles, qui prenaient ce vêtement pournbsp;aller au-devant des étrangers. On sait, en effet, que leur charité lesnbsp;conduisait jusqu’è plusieurs lieues de leur demeure, afin de recevoirnbsp;le frère dont 1’arrivée leur était annoncée, le féliciter, lui servir denbsp;guides et se disputer l’honneur de lui donner l’hospitalité. Nousnbsp;voyons en particulier les chréiiens de Rome se partager en deux bandes, pour aller au-devant de saint Paul; et les uns s’arrêter ad tresnbsp;Tabernas, tandis que les aulres vont jusqu’au Forum d’Appius a dix-huit lieues de Rome.

Le quatrième nous fait voir Daniel dans la fosse aux lions. De cha-que cóté du Prophéte sont deux personnages que Pon croit être les salrapes, ses accusateurs.

Le cinquième nous offre la scène du jardin des Olives, au moment oü l’auguste Viciime est saisie par ses bourreaux. Les médaillons inférieurs sont terminés par un attique ou par une courbure qui laissentnbsp;entre chaque sujet un léger intervalle. Dans eet espace libre se reproduit plusieurs fois l’Agneau, symbole du Fils de Dieu. On voit tour ènbsp;tour ce divin Agneau faisant sortir Peau du rocher en frappant sur lanbsp;tête d’un autre agneau, car la pierre du déserl était, selon saint Paulnbsp;lui-même, Pimage de Notre-Seigneur (i); puis multipliant les pains etnbsp;ressuscitant Lazare. Sur les deux parois latérales, sont représentées,nbsp;dans leurs gracieux détails, des scènes de la vie champêtre, les mois-sons et les vendanges. On y trouve quelques usages encore conservésnbsp;de nos jours dans les environs de Rome, tels, par exeraple, que lenbsp;transport du raisin sur un char atlelé de deux boeufs, et la fauchaisonnbsp;au moyen de la faucille (2).

Quant ^ Pesprit général de ces sculptures, il faut, pour Papprécier, distinguer deux parties : la partie historique ou fondaraentale et lanbsp;partie purement décorative. Dans la derniére, on ne voit rien de triste,nbsp;rien d’austére; maisla simple reproduction de la vie de Phomme surnbsp;la terre; vie champêtre qui rappelle la vie pure et détachée des pa-

(1) nbsp;nbsp;nbsp;I Cor., X, 4.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Tertio modo melitur, ut sub urbe Roma et locis plerisque, ut stramentum mediumnbsp;subsecent, quod manu sinistra summum prehendunt; a quo medio messem dictam puto.nbsp;— Varr., De Re rustic., lib. i, c. l.

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MONDE CHRÉTIEN.

triarches, dont les Chretiens devaienl imiter les vertus. La partie his-torique rappelle toute I’histoire morale de 1’humanité ; la chute primitive, la rehabilitation par les mérites et les souffrances de Notre-Seigneur, et la résurreclion finale, glorieux dénouement de la grandenbsp;épopee. II me semble que ce symbolisme, gravé sur un tombeau, nenbsp;sauraii êire ni plus noble, ni plus complet, ni plus utile.

Bien que les Grottes Vaticanes ne soient pas très-étendues, il est certain que la Catacombe, dont elles font partie, était fort considérable.nbsp;Nous avons vu qu’elle servit de sépulture a une multitude de martyrs.nbsp;En 1607, on trouva sous une colonne un seul polyandrum de marbrenbsp;et de porphyre, avec cette inscription :

LOC. MA. C CLVIIII. ISC.

Locus martyrum cclviiii in Christo; « sépulture de 25 mar y en Jésus-Christ; » et les anciennes archives du Vatican en comp ennbsp;jusqu’ü dix mille, le vingt-deux juin (i). H existe encore un monume

qui rappelleTeffroyableboucherie dont ces lieuxfurent eti ' nbsp;nbsp;nbsp;*’®’

veux parler du vaste linceul ou drap mortuaire dont on enve oppa , pour les apporter du Cirque ou de TAmphithéétre, les corps sang a^^nbsp;des martyrs. Cette précieuse relique se conserve dans le Trésor unbsp;tican. Chaque année, le jour de I’Ascension, après les vèpres, on ennbsp;tire avec une grande solennité, et jusqu’au premier du mois d aout,nbsp;elle reste exposée h la vénéraiion empressée d’un immense concoursnbsp;de fidèles. Les Gatacombes Vaticanes ont aussi donné un de ces horribles instruments de suppliee appelé fidicula, avec lequel on labouraitnbsp;les cótes et les membres des martyrs. Pour en avoir une idéé il fautnbsp;se représenter de longues, tenailles dont les branches sont garnies denbsp;plusieurs ongles ou crochets, qui, s’engrenant les uns dans les aulres,nbsp;coupaient la chair en petits morceaux et devaienl causer d inealculanbsp;bles douleurs.

Détrempées par le sang des premiers martyrs, illustrées par a s pulture de saint Pierre et d’un grand nombre de Pontifes, ses succes-seurs sur le tróue et sur Péchafaud, les Grottes Vaticanes ont toujoursnbsp;été regardées comme un lieu d’une sainlelé particulière. G’est pournbsp;cela que Penlrée en est interdite aux femmes, sous peine, d’excommu-

(t) Die 22 junii decern milUa martyrum habemus de eorum reliquiis, ludo muVierum confluit ad Basilicam flexis genibus, ct 1'aculas accensas innbsp;tantium, — Aringhi, Rom. Suiter., lib. ii, c. in,p- ttt.

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46 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

nication, excepté un seul jour dans l’année, Ie lundi de la Pentecóle :

HVC MVLIERIBVS INGREDI NON LICET,

NISI TNICO DIE LVN.E POST PENTECOSTEM,

QVO VICISSIM VIRI INGREDI PROHIBENTVR, QVl SECVS FAXENTnbsp;AN.ATHEMA SVNTO.

Telle fut, dès l’origine du christianisme, I’inimense concours de pèlerins venus de toules les parties du monde pour prier sur cettenbsp;terre sacrée, particulièrement Ji la fête des saints Apótres, oü lesnbsp;Papes se virent obligés de conserver longtemps l’usage de dire, cenbsp;jour-lè, deux messes solennelles, afin de satisfaire ii la piété de la multitude. La première se célébrait Ji Saint-Pierre, la seconde ii Saint-Paul-hors-des-Murs (i). Les évêques de l’Europe s’y donnaient, chaquenbsp;année, comme un rendez-vous général. Celui d’entre eux qui, sansnbsp;cause très-grave, aurait négligé de venir se retremper aux sources denbsp;l’esprit apostolique, était réprimandé par Ie prince des pasteurs.nbsp;« Quelle occupation, écrivait saint Grégoire è un évêque de Rouen,nbsp;quelle dilEculté insurmontable vous fait, depuis si longtemps, négligernbsp;de venir a Saint-Pierre, lorsque nous voyons accourir, chaque année,nbsp;des extréraités du monde, même les nations nouvellement converties,nbsp;les hommes, les femmes et jusqu’aux malades (2)? » Plaignez les nations dont les chefs ont oublié la route de Rome; tremblez pour lesnbsp;Églises dont les évêques négligent ou sont empêchés de venir voirnbsp;Pierre : Ie chemin de Rome est Ie chemin de la justice et de l’équité;nbsp;Ie tombeau de Pierre est Ie foyer de la lumière, Ie palladium de lanbsp;llberté morale et la source du dévouement è Dieu, è l’Église et aunbsp;peuple.

(1) Transtiberina prius solvit Sacra pervigil sacerdos;

Mox hue recurrit, duplicatque vota.

Prud. Hymn. xti.

(j) Qui vero labor, aut qus dilTicuUas pra: aliis dissuasit vobis per tantum spatii Beatum Petrum negligere, ubi et ab ipsius mundi finibus, etiam gentes noviter ad fidemnbsp;converssestudent omnes tam mulieres quam viri adeum venire? — Regest., liv. ix, Ep.i.nbsp;Écrivant ii un autre évêque nommé Lanfranc, Ie même pape s’exprime ainsi: o Nonnbsp;enim labor aut difficullas ilineris te suflicienter excusat, cum satis notum sit mullosnbsp;longe remotos, licet corpore invalides, et infirmos ut a lectulis vix valenles surgere,nbsp;tarnen Beati Petri amore flagrantes ad ejus limina vehiculis properari. — ld., id-,nbsp;Epist. XX.

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HISTOIRE DES CATACOMBES. 47

21 DECEMBRE.

Histoire des Catacombes, depuis leur origine jusqu’au xvi' siècle. - Pieux empressc-ment des chrétiens è reposer dans les Catacombes. —Inscriptions.—Trois remar-ques sur les inscriptions. — Sépullure dans les Catacombes après les persecutions. — Translation des martyrs dans les églises. — Sepulture dans les églises. —Histoire etnbsp;description des Catacombes de la voie Aurélienne. — Cimetières de saint Calepo e,nbsp;— de saint Jules, — des SS. Procés et Marünien.

L’A.rc de Constanlin el la Basiliqtie de sainl Clément nous avaienl, comme rAmphithédtre, servi de preparation a une nouvelle visite desnbsp;Catacombes. Traversant Ie Tibre par Ie Ponte-Sisto, nous avrivamesnbsp;eu Janicule, prés de l’antique Voie Aurélienne. Lh, se trouve Ie vastenbsp;cimetière de Saint-Galépode. Avant d’y descendre, ou plutót afin d’ynbsp;descendre avec plus d’ulilité, il nous restait une question k résoudre ;nbsp;Quel a été, depuis leur fondation jusqu’a nos jours, l’état des Cala-combes? Hier, nous avions reconnu des modifications considérablesnbsp;dans les Grottes Vaticanes, les autres cimetières ont-ils éprouvé Ienbsp;même sort? Intéressante sous Ie rapport purement historique, cettenbsp;question devient très-irnportante au point de vue religieux; car elle senbsp;rattache, du moins indirectement, è l’authenticité des reliques.

Nous connaissons déji l’origine et la destination des Catacombes. Pendant toute la durée des persécutions, c’est-4-dire depuis l’arrivéenbsp;de sainl Pierre it Rome jusqu’è l’avénement de Constantin, les fidèlesnbsp;n’eurent pas d’autre lieu de sépullure. Martyrs ou non, tous voulaientnbsp;reposer, les uns auprès des autres, dans la vénérable«Nécropole. Telnbsp;étail, pendant la vie, leur voeu Ie plus ardent; telle leur volonté suprème au moment de la quitter. II serail trop long de rapporter tousnbsp;les témoignages de cette lol si vive des mourants et de la religieusenbsp;fidéliié avec laquelle on se conformait a leur pieux désir. Quelquesnbsp;inscriptions prises au hasard dans les différenles Catacombes sont plusnbsp;que sulïisanies pour ne laisser aucun doute sur ce point.

Au cimetière de Saint-Calépode

VALENTlJiE C0X3VG1 BEXEMEREN TI FECIT MARITUS QUE VIXITnbsp;AN. XVII. MES. VU. ET CVM MAPUTVSnbsp;FECIT ANN. V. ET MESES VU.

« A Valentine, épouse bien mérilante, son mari a fait cette tombe.

Elle vécut dix-sept ans sept mois, et avec son mari cinq ans et sept mois. jgt;

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48 LES TROIS ROME.

EVTIICHIE FILIE DVLCISSIME QVE VIXIT ANN. V 111. MENS. Vil. DIES. IIII.nbsp;DEPOSITA VIII. IDVS OCTOBRISnbsp;IN PACE.

« A Eiitichia, fille bien-aimée, qui vécut huit ans sept mois quatre jours. Déposée Ie huit des ides d’oclobre, en paix. »

Au cimetière de Sainte-Cyriaque :

JVSTINVS. L^EDE. CONJVGI. BE NEMERENTI. LEONTIVS ET VICTOnbsp;RINVS L/EDE MATRI gt;P£ KARISSIMF.nbsp;AMANTISSIME.

« Justin a Léda, son épouse bien méritante. Léontius et Viclorinus è Léda, leur mère, en J.-C., très-chère, très-aimée. »

Au cimetière de Saint-Callixte :

LEO ET PETRONIA PAVLO FILIO DVLCISSIMO QVI VIXIT ANN.nbsp;XXllI. M. V. D. XV IN PACE DEP.

« Léon et Pétronie è Paul, leur üls chéri, qui vécut vingt-trois ans cinq mois quinze jours, déposé en paix. »

Au lieu de laisser Ie soin de leur sépulture a leurs parents ou a leurs amis, souvent ils préparaient eux-mêmes leurs tombes, dont ilsnbsp;indiquaient Ie lieu et la forme. Rien n’est plus commun que les inscriptions relatives a eet usage et dont je vais donner seulement quel-ques modèles :

Au cimetière de Saint-Callixte :

MARCELLA. SE. VIBA. FECIT. SIBI.

« Marcelle, de son vivant, s’esl fait è elle-même cette tombe. »

CONSTANTIA FECIT SIBl VIVA LOeVM.

« Constance s’est fait 5 elle-même, de son vivant, ce loculus. » Au cimetière de Sainte-Cyriaque :

BONIFATIA SIBI, ET COMPARl SVO JVSTINO BENEMERENTI FECIT QVInbsp;BIXIT ANNIS LXV. ET FECIT CVMnbsp;COMPARl SVO ANNIS XVT.

i

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50 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

VBISONI A BAPRONE ET A BIATORE (l).

« Dans la crypte neuve, derrière les saints, Valeria et Sabina se sent acheté de leur vivant, ce lieu pour deux tombes, d’Apron et denbsp;Viateur. »

Ces inscriptions, qu’il serait facile de multiplier, donnent lieu è trois remarques: sur les fautes de style, sur l’usage d’acheter unenbsp;place dans les catacombes, et sur Ie soin de désigner ou de préparernbsp;Ie lieu de sa sépulture.

En voyant les incorrections et les barbarismes de nos inscriptions tumulaires, les uns ont dit qu’elles appartiennent è l’époque de dé-cadence et qu’elles sont postérieures a l’ère des persécutions; d’au-tres ont attribué les fautes qu’on y découvre a l’ignorance des premiers fidèles, sortis, a Rome, aussi bien que dans Ie reste du monde,nbsp;de la dernière classe de la société. La première de ces deux assertionsnbsp;est entièrement fausse; la seconde n’est exacte qu’en partie. D'abord,nbsp;il n’est pas d’archéologue tant soit peu exèrcé qui ne sache que lesnbsp;inscriptions païennes de la meilleure époque, même du siècle d’Au-guste, présentent souvent les mêmes incorrections, les mêmes chan-gements de lettres, les mêmes barbarismes. Les innombrables exem-ples rapportés par Goltzius (2) et par Fabretti (s) rendent ce faitnbsp;évident comme la lumière du jour.

Sans doute les premiers chrétiens de Rome ne sortaient pas tous, ni méme en grand nombre, des hautes classes de la société: la gloire denbsp;l’Evangile est d’avoir parlout commencé par les pauvres. Néanmoinsnbsp;il compta, dès l’arrivée de saint Pierre, et dans la première persécu-tion, d’illustres néophytes : Ie sénateur Pudens, sa femme Priscille,nbsp;ses filles Praxède et Pudentienne, ses fils Novat et Timothée; saintenbsp;Prisque, sainte Lucine l’Ancienne, saint Tropes et saint Evellius, officiers de Néron, et bien d’autres encore, qui appartenaient è la cournbsp;de l’empereur: qui de Cmsaris domus sunt (i). Les fautes qui se mon-trent dans les inscriptions chrétiennes ne sauraient done être attri-buées exclusivement è l’ignorance des premiers chrétiens. Cela devient

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Voici la même inscription elans une langue moins incorrecte lincrypta nova retronbsp;sanctos emerunt se vivos Valeria, et Sabina merum locum Bisomura ab Aprone etnbsp;Viatore.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Thesaur. Rom. Antiq., etc.

(5) Inscript. Antiq. Rom., 1702.

(4) Epist. ad Pbilipp. c. iv, 22.

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SI

REMARQtlES SER LES INSCRIPTION'S-

évident, puisque nous possédons des inscriptions chrélienn même époque qui sont parfaitement correcles (i).

Que l’ignorance de la langue aristocratique sod, en par^ de ces barbansmes et de ces incorrections, nul n pnbsp;nbsp;nbsp;nbsp;,nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;¦ j

dire; mais si l’on se reporte aux temps et aux heux d paraitnj de les attribuer la plupart è la diöicullé de mieox faire. qnbsp;gissait-il en effet? D’inhumer ^ la hamp;te, pendant la nu .nbsp;lieux élroits et de difficile accès, un nombrenbsp;nbsp;nbsp;nbsp;, cirques,

rable de corps sanglants apporlés des AnipWtbé«res, ^ ^ des Voies publiques, oü ils étaient resVés peut-être pnbsp;nbsp;nbsp;nbsp;„„aienl

souvent. Avec la pointe du pic, dont il s était ser f loculus, Ie Fossoyeur gravait précipitamment sur a

pierre, quelquefois sur la chaux, Ie nom du ® nbsp;nbsp;nbsp;’nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;,nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;gualilés

martyre, tout au plus quelques lignes destin nbsp;nbsp;nbsp;longue h lui,

et 1’époque de sa mort. Ajoutons que Ie nbsp;nbsp;nbsp;^ piaute ne

toute autre que Ie langage de la ^ nbsp;nbsp;nbsp;d'idiome qui

sont-elles pas un monument vivanl de cette nbsp;nbsp;nbsp;d’une

existait h Rome, entre les ouvriers, les artisans, e® part; et les riches, les savants, les littérateurs, denbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•

pas encore de même aujourd’hui dans toutes les capi rope? Or, si Ie people avail une langue k lui, qu i par ainbsp;conversation, est-il étonnant qu’il 1’ait éc.rile sur sa tom e^.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;„

Quant a 1’usage d’acheter une place dans les cryptes “ souterraine, il conduit k plusieurs explications d’un grand mierei.nbsp;Les cimetières chrétiens furent, dès 1 origine, la propriét es pnbsp;roisses on des parliculiers. Creusés dans les entrailles e anbsp;auprès des Voies Romaines, les premiers, n’appartenant énbsp;nbsp;nbsp;nbsp;’

étaient la sépulture commune de tous les fidèles de la paroisse. descendait également les martyrs égorgés dans Ie voisinap, qu qnbsp;fut Ie lieu de leur domicile ; la nécessité en faisait une Snbsp;ment absolue. Les seconds, donnés par les cbrétiensnbsp;nbsp;nbsp;nbsp;’

ouveris dans leurs champs, reslaient la propriélé des on ^ nbsp;nbsp;nbsp;gt;

ce sens qu’ils se réservaienl Ie droit d’y être inhumés, qu i naient plus facilement Ie bonbeur d’y déposer les martyrs, e , m ynbsp;nanl quelques aumómes k Véglise, ou quelque gratification aux^ ^nbsp;soyeurs, d’accorder aux fidèles qui Ie désiraient la permissnbsp;reposer auprès des saints.

p. 4S7.

{*) Boldeiti, Ub. u, c.

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5“2 LES TROIS nOME.

Or, dans Ia donation, dans la réserve et dans la concession brille égaleraent la vivacité de la foi primitive. Elle était vive la foi de cesnbsp;illustres néophyles qui convertissaient les superbes jardins de leursnbsp;villas en lieu de sépulture pour leurs nouveaux frères. Quel changement dans les idéés et les moeurs! Ces fiers Romains, ces superbesnbsp;matrones, qui, hier encore, écrasaient de leur faste et de leur dédainnbsp;Ie pauvre et l’esclave, avec lesquels ils auraient rougi d’avoir rien denbsp;commun dans la vie ou dans la mort : les voilé, aujourd’hui qui, nonnbsp;contents de les nourrir, de les soigner, de baiser avec un respectueuxnbsp;amour leurs chaines et leurs blessures, s’imposent de coüteux sacrifices pour leur procurer une sépulture honorable, et renoncent a leursnbsp;briilants mausolées, afin de dormir avec eux dans les mêmes tom-beaux! S’ils se réservent quelque droit sur les terres qu’ils ont don-nées, c’est celui de pouvoir les sanctifier en y faisant déposer les martyrs. Dépenses, fatigues, dangers, rien ne leur coute pour se procurernbsp;un semblable bonheur.

Entre cent autres, l’histoire nous montre sainte Juste, glorieuse fille d’une des plus nobles families de Rome, faisant enlever des gé-monies Ie corps de saint Restitut. Elle l’emporte dans sa maison,nbsp;l’enveloppe dans Ie linge Ie plus fin avec les parfums les plus exquis,nbsp;et va elle-même l’inhumer dans son cimetière, sur la Voie Nomentane,nbsp;a seize milles de Rome (i). L’hisloire nous montre encore sainte Théo-dora, en qui la vertu semblait rehaussée par la noblesse du sang, pre-nant les corps des saints martyrs Abbondius et Abondantius, et lesnbsp;déposant, de ses propres mains, dans sa Catacombe sur la Voie Fla-minienne,évingt-huit milles de Rome (a). Enfin elle nous montre l’illus-tre Lucine, cachant dans son palanquin et transportant de la Voie Sa-laria, oü ils avaient été mis é mort, jusqu’é son cimetière situé sur lanbsp;Voie d’Ostie, é sept milles de Rome, les saints Cyriaque, Largus,nbsp;Smaragdus et vingt autres martyrs (5).

Pendant que les chrétiens favorisés des dons de la fortune donneet de si éclatants témoignages d’une foi vive, les frères d’une conditionnbsp;inférieure en donnent de plus touchants peut-être, par l’ardeur avecnbsp;laquelle ils sollicitent, par les sacrifices au prix desquels ils achètent

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Ex Act. cod. ms. S. Marice ad Prcesepe. — Bar., t. il.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Bar. Adnot. ad Martyr., 16 sept.

(5) Imposuit nocte in pavone cum eunuchis suis et suslulit undo commendala 1'ue' rant. ïranslata sunt cum S. Cyriaco in prii;diosuoViaOsliensi,miUiarioab urbeRoW^nbsp;septimo, ubi roquiescunt in sareophagis lapideis quos sua manu rccondidit B. Lucini*nbsp;iu pace, sexto idus Augusti. Ex Cod. Later. Vat., 6, 8, 3.

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COMMïNiUTÉ DE SÉPÜLTÜRE.

rinsigne bonheur d’être ensevelis auprès des saints, lis savaient, disent leurs dignes interprètes, qu’il est ulile de reposer non lom des martyrs, dont Ie démon crainl la présence, dont Ie corps excite plusnbsp;vivement la ferveur des vivants, et dont les prières sont toutes-puis-santes pour obtenir la résurrection glorieuse (i).nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;t:

Le désir d’avoir une tombe dans un lieu plutöt que dans un autre,

Ie soin de la désigner el de s’en assurer la possession, n’a rien de commun avec l’égoïsme païen et I’orgueilleuse exclusion des tombeaux.

Dans le paganisme, on voit des mausolées de familie, des colorabaires pour telle ou telle corporation; tous sont isolés et inlerdits aux élran-gers, sous peine d’analhème. Dans la Rome chrétienne, au contraire,nbsp;on troüve des sépultures communes, ouveries sans exception amp; toutesnbsp;les classes et amp; toutes les conditions. Seulemenl, les époux, les peres,nbsp;les frères, les amis et les parents si tendrement unis pendant la vie,nbsp;désirent n’être point séparés après la mort et placés le plus presnbsp;possible des martyrs. Dans la communauté de sépuUure, brille 1 ac-complissement du grand précepte de la cbarité el do i’égahté uniyer-selle. Dans les réserves particulières se montre encore celte mêmenbsp;cbarité qui consacre les liens plus intimes du sang et de 1 amilié,nbsp;aussi bien que les pieux désirs de la foi : loin de détruire la nature, la religion la perfectionne. Telle on 1’admire dans la vie desnbsp;premiers cbrétiens, lelie on la irouve dans leurs vénérables cime-tières.

Après les persécutions, les Catacombes conlinuèrenl d être le lieu général de sépullure pour les enfants de l’Église ; dans ce bul plu-sieurs furent agrandies. C’est un fait auquel la science et Thisloirenbsp;rendent également témoignage. lt;c Eu 1716, dit l’excelient Boldeili, jenbsp;trouvai dans les Catacombes de Sainte-Agnès des galeries entièrementnbsp;remplies de sable. Je les fis attaquer par nos Fossoyeurs. Nous y ren-contrames jusqu’è douze rangs de loculi lous parfaitement fermésnbsp;avec des briques ou avec des morceaux de marbre. Plusieurs avaientnbsp;des inscriptions en caractères grecs et lalins; mais dans aucun de cesnbsp;tombeaux Je ne pus découvrir ni la palme, ni le vase de sang, signesnbsp;, caractérisliques du marlyre. J’allai plus loin. Afin de m assurer plei-nement si quelque vase de sang n’élait point renfermé dans 1 intérieurnbsp;des loculi, ce qui arrive quelquefois, je fis ouvrir sous mes yeux, ennbsp;un seul jour, environ un cent de ces tombeaux : il me fut impossible

(1) St. Aug. De Cur. pro morluis nerend. S. Maxim. Homil. in Natal. SÖ. Taurm, Inbsp;nbsp;nbsp;nbsp;3/aiiyr. CiMjolfa. PP., t. v, pars u— LH tempore rcsurrectionis cum opuulatonbus spe

gt; nbsp;nbsp;nbsp;se liduciA plcni resurgant. Apud. Ruinart, Adm. in Ilomil. de 40 SS- Martyr.

T. IV. nbsp;nbsp;nbsp;5

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34

LES TROIS ROME.

d’y trouver aucun signe du marlyre. Je m’assurai par que cette partie de la Catacombe était postérieure aux persécutions. L’histoirenbsp;vint confirmer mon jugement et m’apprendre que cette partie du ci-metière de Sainte-Agnès date du règne de Constantin et même denbsp;quelques années après (i). »

A la fin du même siècle, l’histoire nous montre Ie pape saint Sirice, inhumé dans les Catacombes de Sainte-Priscille; au commencementnbsp;du v“, Ie pape saint Anastase dans celles de VUrsum Pileatum; unnbsp;peu plus tard, Ie saint pape Sozime va reposer dans les Cataeombesnbsp;de Sainte-Cyriaque, sur la Vole Nomentane; saint Boniface dans cellesnbsp;de Sainte-Félicité; saint Céleslin dans celles de Sainte-Priscille, etnbsp;saint Sixte III dans celles de Sainte-Cyriaque; enfin, tons les papes,nbsp;jusqu’è saint Grégoire exclusivement, attendent la résurrection dansnbsp;les Grottes Vaticanes, auprès du Prince des Apótres.

Cependant les Catacombes, comme tous les monuments de Rome, eurent a souffrir des invasions des peu pies du Nord, et notammentnbsp;des Lombards. Voilé pourquoi Ie pape Boniface IV, en 607, fit transporter au Panthéon une multitude d’ossements de martyrs que Ienbsp;raauvals état de plusieurs cimetières auraient pu exposer é la profanation ; ses successeurs imitèrent son exemple. Les églises de Rome nenbsp;tardèrent pas é se peupler des héros de l’Évangile, et la même foi,nbsp;qui avait si longtemps porté les chrétiens a reposer dans les Catacombes, leur fit désirer une sépulture dans les églises, toujours afin d’at-tendre la résurrection en la compagnie des martyrs (2). L’usage géné-ral de cette sépulture a duré jusqu’au commencement de notre siècle,nbsp;a l’époque de l’occupation fran^aise.

Bien que les Catacombes eussent cessé d’être Ie cimetière des fidè-les, on ne laissa pas de les visiter avec une profonde vénération et d’en tirer de siècle en siècle de nouvelles reliques (3). Toutefois, il est justenbsp;de Ie dire, ces extractions étaient assez rares, et les translations plusnbsp;rares encore. Le moment marqué par la Providence n’était pas venunbsp;de révéler au monde les merveilles et les richesses de la grande Citénbsp;des martyrs. Get état de choses dura jusqu’au xvi® siècle. Ici commence une nouvelle ère dans 1 histoire des Catacombes; mais é dcmain ¦nbsp;le récit. N’oublions pas que nous sommes sur le Janicule, et le Cimetière de Saint-CaUpode réclame tous nos instants.

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Osservaz., lib. 1, c. 11, p. 6.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Cessaruiit autem fidelium stadia in ccemeteriis adeundis, poslquam ea quoe ibi sil.anbsp;crant corpora sanctorum marlyrum intra urbem sant delata, et in diversis ecclesiisnbsp;honorificentius collocata. —Bar., An. 226, n. xi.

(ö) Boldelli, lib. i,c. xxii; ctlib. 111, e. 111.

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HISTOIRE DES CATACOMBES DE IA VOIE AURÉLIENNE. S5

Non loin de la Voie Aurélienne, jadis bordée de lombeaux magnifi-ques et de colombaires, se développe majeslueusement l’aqueduc de la Fontaine Pauline, appelée dans les auteurs païens forma Trajana,nbsp;forma Sabhatma et forma Alseatina. Sur cette terre vraiment hislo-rique s’élève l’église de Saint-Pancrace oü se trouve la principale entrée des Catacombes de Saint-Calépode; les autres sont répanduesnbsp;et lè dans les vignes. La Basilique renferme Ie lieu même, théfttre desnbsp;combats du jeune martyr, dont Ie corps repose sous l’autel. Bien quenbsp;Ie cimetière porte Ie nora de Saint-Calépode, raartyrisé sous Alexandrenbsp;Sévère, son origine parait beaucoup plus ancienne. Avant d’y descen-dre, apprenons ft connaitre les hóles illustres qui habitèrent ou quinbsp;habitent encore ce quartier de l’auguste Nécropole. Le premier est Ienbsp;saint prêtre que nous venons de nommer. Calépode se livrait avec ar-deur h l’exercice de soa bienfaisant ministère lorsqu’il fut arrêlé parnbsp;ordre de l’empereur Alexandre. Dans la vue d’effrayer les chrétiens,nbsp;on le condamna è êlre trainé par les rues de Rome, puis jelé dans lenbsp;Tibre : mais les frères l’avaient suivi sur les différents théótres de sonnbsp;marlyre. On le retira du fleuve, et saint Callixte l’inhuma de ses pro-pres mains dans le cimetière oü nous allons entrer (i).

Le second est le charitable ponlife qui donna la sépulture h saint Calépode. Alexandre Sévère, ayant appris Faction de Callixte et lanbsp;conversion d’un de ses soldats, entra dans une grande fureur. Priva-tus, le soldat converti, expira sous les coups de cordes garnies denbsp;plomb; et Callixte fut précipité d’une fenêtre dans un puils, avec unenbsp;pierre au cou. Dix-sept jours après 1’exéculion, un prêtre, nomménbsp;Astère, vint, pendant la nuit, accompagné de dix ecclésiasliques, surnbsp;le lieu du martyre. II retira du puits le corps du saint pape et Fense-velit dans la Catacombe de Saint-Calépode, la veille des ides d’oclo-bre. Saint Calépode et saint Callixte reposent aujourd’hui sous lenbsp;maitre aulel de Sainte-Marie-m-IVosteeere.

Parrai les autres gloires du cimetière de Saint-Calépode, il faut encore nommer Filluslre martyr saint Jules, sénateur remain, mis a mort sous Commode. Les saints Vincent, Pèlerin, Eusèbe et Pontien Favaicntnbsp;conxerti avant de subir eux-mêmes le dernier supplice; plus encorenbsp;que leur parole, leur sang fut une semence de nouveaux chrétiens. Unnbsp;de leurs bourvcaux, nommé Antonin, ayant vu de ses yeux un angenbsp;tout brillant de lumières, qui recucillait le sang des martyrs, demanda

(i) Tune gaudio replelus est (B. Callixtus), quod corpus sanctum acceptum recondi-dit cum aromalibus et linieatninibus, cum hymnis, et sepelivit in eoemeterio ejusdeni VI id. majas. Ex Cod. ms. Taf.

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56 LES TROIS ROME.

lout amp; coup Ie baptcme, et, quelques heures après, il signait lui-niéme de son sang la foi qu’il venait d’embrasser. Mis a mort sur la Voie Au-rélienne, prés de la forma Trajane, il fut inhumé par Ie saint prêtrenbsp;Rufin, dans Ie ciraetière voisin de celui de Saint-Calépode. Lè, vinrentnbsp;aussi reposer Ie consul saint Palmase avec sa femme, ses enfants etnbsp;quarante-deux pcrsonnes de sa maison; Ie sénateur Simplicius, sanbsp;femme Claudia et soixante-dix-huit personnes de sa familie. Tousnbsp;avaient élé baptisés par saint Callixte, et tous furent mis a mort parnbsp;ordre d’Alexandre Severe, qui fit attacher leurs têtes aux portes denbsp;Rome. Souvenons-nous encore des saints Victor et Couronée, qui souf-frirent sous Antonin; songeons que nous allons fouler une terre airo-sée de leur sang, passer devant leurs loculi, voir les lieux embaumésnbsp;de l’encens de leurs prières, et, sous Ie cortége de ces nobles et saintesnbsp;pensées, entrons.

Voici l’escalier qui nous conduit aux galeries souterraines; un grand labyrinlhe commence. A droite, ii gauche, des tombes vides; d’abord,nbsp;nous pouvons nous lenir debout; bientót il faudra nous baisser etnbsp;marcher en rampant, selon que la galerie s’élève ou s’abaisse dans lesnbsp;veines de tuf granulaire. Voici les arew, petites places oü se réunis-saient nos pères ; les cryptes oü, agenouillés devant l’autel d’un martyr, ils se nourrissaient du triple pain de la parole, de la prière et denbsp;l’Eucharislie; voici les cubicula, dont les peintures et les humbles or-nemenls ont disparu sous la main des Lombards. Quelques inscriptions, trouvées par Bosio, apprennent que Ie ciraetière de Saint-Calépode servit encore de sépulture après les'persécutions. Dansl’intérieurnbsp;jaillit une source d’eau limpide, admirablement placée pour les be-soins el les usages de l’Église naissante, et tout prouve que cette vastenbsp;Catacombe fut Ie dortoir d’un peuple entier de martyrs (i).

Un des quarliers porte Ie nom de Saint-Jules. II Ie doit ü ce zélé pon-tife, qui fut enseveli dans les Catacombes de Saint-Calépode, dont il augmenta les galeries ou restaura les monuments. 11 en fit commencernbsp;deux autres, Tune sur la Voie Flaminienne, et l’autre sur la Voie denbsp;Porto ; son corps repose aujourd’hui k Sainte-Marie-m-Jrasferere.

Non loin de lè s’ouvre une des plus anciennes Catacombes, puis-qu’elle remonte a 1 an 69 de notre ère ; j’ai nomraé Ie ciraetière des Saints-Procès et Martinien. Geóliers de saint Pierre et de saint Paul anbsp;ia prison Mamertine, ces deux saints furent convertis et baptisés parnbsp;.saint Pierre, dont ils ne tardèrent pas k suivre les traces sanglanles.nbsp;Lucine, qui les avait vus souvent, lorsqu’elle venait visiter les Apótres

(i) Aringlii, lib. i, c. x!i.

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CIMETIÈRES DES SMSTS PROCÉS ET MAÏITINIEN.

daas leur prison, leur continua les mêmes soins quand ils furent eiix-mênaes devenus prisonniers de Jésus-Christ. Le jour de leur marljrc, elle les accorapagna suivie de sa familie, et, jusque sur l’échafaud,nbsp;leur adressa ces nobles paroles : « Soldats de Jésus-Christ, ayez bonnbsp;courage, et ne craignez pas des lourmenls d’un instant (i). » Avec lanbsp;méme inlrépidité que les saintes femmes du Galvaire, elle brave losnbsp;bourreaux, recueille les corps des martyrs, les enveloppe dans desnbsp;l'oges précieux avec des parfums, et les depose dans le cimetièrenbsp;^n’elle a fait ouvrir dans sa propriété sur la Voie Aurélienne (a).

Comme on le voit, dès la première persecution, les ebrétiens eurent des Catacombes dont l’entrée élait inaccessible aux païens. Versnbsp;l’an 816, le pape Pascal fit transporter les corps des saints martyrs an Vatican, ou ils reposent encore aujourd’hui (5). En sortant denbsp;ces lieux sacrés, témoins de lant d’hérotsme, on croit entendre les paroles prononcées, au milieu de leurs supplices, par les saints Procesnbsp;el Martiuien ; « Qne le nom du Seigneur soit béni (*); » et, dans 1 effusion de sa reconnaissance, le calholique répète . Que le nom dunbsp;Seigneur soil béni; béni pour avoir inspiré tant de courage; béni pournbsp;avoir certifié la foi par la signature sanglanle d’uu si grand nombrenbsp;de témoins; béni pour I’avoir conservée et, avec elle, la liberté, les lu-mières, la civilisation du monde.

22 DÉCEMBIIE.

Histoire des Catacombes depuis le xvi® siècle jusqu'a nos jours. — Reouvorlure provi-denlielle.— Sainl-Philippe-de-Néri. —Bosio. — BoldeUi. — Marangoni. — D’Agin-court. — Raisons de Vcncombrement dcs galeries. — Fouillcs acluelles. — Voie Cor-nélienne. — Catacombes de la Yoie de Porto, — de Sainl-PouUcn, — de Genéreuse ad Sextum Philippi, — du pape saint Jules.

Nous allons reprendre I’histoire des Catacombes, que nous avons laissée bier an xvP siècle. Alors elles furent rouvertes pour ne plus senbsp;referiner. Pour comprendre ce qu’il y cut de providCntiel dans cel évé-

(t) Milites Chrisii, conslanles estote, el nolile meluere pcenas quse ad tempus sunt. Eod. ms. S. Cecilies.

(2) Id., id.

^ (o) Quant au cimetière de Sainte-Agathe, dont il est parlé dans les Dulles de saint Grégoire et de saint Léon, plusieurs croient qu’il est le möme que celui des SS. Procesnbsp;etManinien; d’aulres pensent qu’il est dift'érent; mais comme il n'cst pas ouverl,nousnbsp;nous contenlerons de le saluer respectueusement et d'honorcr les marijrs dont il estnbsp;la sépuUure. — Aringhi, lib. n, c. xiv.nbsp;b) Sit nomen Domini benediclum. ld., id.

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aö nbsp;nbsp;nbsp;LES inois ROME.

nement, il faut se reporter aux circonstances ou se Irouvait 1’Église. Luther vient de paraitre. Du soufflé de sa bouche impure, Ie moinenbsp;apostat allume dans la \ieille Europe un vaste incendie. On voit lesnbsp;peoples, saisis tout a coup de vertige, profaner les sanctuaires, brisernbsp;les tombeaux, livrer aux ffammes les reliques des saints et jeter aunbsp;vent les cendres des martyrs. A l’égal des persécutions de Néron etnbsp;de Dioclélien, celle guerre sacrilége désole la religion, qu’elle dé-pouille brutalement de ses joyaux les plus précieux. Rachel inconsolable, elle pleure les corps vénérables de ses enfanls, donl la signaturenbsp;sanglanle, apposée au bas de son symbole, commande l’admiration etnbsp;la foi de l’univers. Que vont devenir toutes ces églises de France, denbsp;Suisse, d’Angleterre et d’Allemagne, veuves de leurs saints et de leursnbsp;martyrs? Par quoi reraplacer tant d’illustres modèles, dont les glo-rieux exemples, comme aulant de colonnes lumineuses, dirigeaient lanbsp;marche de chaque chrélienté dans Ie ténébreux désert de la vie; dontnbsp;la présence était pour tous une predication conlinuelle, et la puis-sante prière un refuge, un boulevart, une bénédiction? Et puis, tandisnbsp;que l’Europe caiholique perd ses protecteurs et ses guides, un nouveau monde sort, comme par miracle, du sein des flots : l’Amériquenbsp;se peuplera bientót d’églises et de chréiiens. A ces enfanls nés d’hiernbsp;il faut aussi des patrons, des modèles et des amis; oüles trouver?

C’est è ce moment, deux fois solennel, que s’ouvrent, pour ne plus se reformer, toutes les portes de la Rome souterraine. Explorée avecnbsp;l’ardeur de la science et la persévérance de la foi, la grande Cité desnbsp;martyrs viendra réparer les pertes des églises de l’Europe el enrichirnbsp;les jeunes chrétientés du Nouveau-Monde. Pendant que Luther et sesnbsp;imitateurs attisent avec Ie plus de violence l’incendie sacrilége qui ré-duit en cendres les anciens monuments de 1’art caiholique et les tré-sors des saintes reliques dans la plus grande parlie de l’Europe, saintnbsp;Philippe de Néri, suivi de saint Charles Borromée, va s’ensevelir dansnbsp;les galeries silencieuses des Catacombes ; pendant douze ans elles de-viennent son séjour habiluel. C’est lè que les deux Moïses, mêlant,nbsp;d urant des nuits entières, leurs larmes et leurs prières au sang des martyrs, obtiennent pour l’Église une victoire longtemps dispulée (i).nbsp;Imité par un grand nombre de pieux fidèles, leur exemple réveille lanbsp;piété envers les martyrs et rouvre Ie chemin de nos vénérables cime-

(i) Essendosi intra lasciala la ricerca de' cimiteri, e de' sagri corpi, di mode, clie erano quasi posU in oldivione luoglii si sagrosanli; nel secolo XVI, si rinnuovó la devoiionenbsp;de’ medesimi, culle visile frequenli di S. Philippe Neri, e di S. Carlo Borromeo, i qualinbsp;anchc vi dimoravano e nolli inlere in fervorose orazioni: cd Antonio Bosio, elc. — Bol-delli, Osservaz., lib. ui, c. ix.

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60 LES TROIS ROME.

aulrc de Clément IX, oü l’on trouve les mêmes défenses sous les mömes peines. Le 13 janvier 1672, Clément X, par son déeret Exnbsp;commissce nobis, etc., renouvelant les dispositions déjè prises par sesnbsp;prédécesseurs, confia la surveillance exclusive des Catacombes au car-dinal-vicaire, qui, pour l’exercer avec plus de succès, la remit a unnbsp;gardien général, toujours revêtu du caractère épiscopal ou sacerdotal (i).

Lc premier gardien des Catacombes, choisi par le cardinal Carpegna, vicaire de Clément X, fut le chanoine D. Vincent Guizzardi. Entré ennbsp;charge au mois de janvier 1672, il mérita, par ses lumières et sa hautenbsp;vertu, de continuer ses fonctions sous le Pontifical d’Innocent XI.nbsp;A Guizzardi succéda un des plus dignes émules de Bosio, l’illustre an-tiquaire d’ürbain, le prélat Fabretti (2). II fut remplacé par Alexandre Bonaventura qui, étant devenu aumónier de Sa Sainteté, eut pournbsp;successeur 1’immortel Boldelti. L’excellent chanoine de Sainte-Marie-in-Trastevere joignait aux lumières d’un savant de premier ordre toutnbsp;le zèle d’un antiquaire accru de la dévotion d’un ecclésiastique. IInbsp;passa trente années de sa vie h. la visite et a l’élude des Catacombes.

Pour le seconder, la Providence lui donna un autre lui-même dans le P. Marangoni, chanoine d’Agnani et protonotaire apostolique. Lesnbsp;ouvrages de ces modestes grands hommes sont de véritables Irésorsnbsp;d’antiquités sacrées. Dans le dernier siècle, les Catacombes trouvèrentnbsp;un nouvel interprète dans un de nos compatriotes, le savant d’Agin-court, qui, venu è Rome pour quelques mois, y passa prés d’un demi-siècle, occupé de sa grande Histoire de l’Art par les Monuments {3).nbsp;Sur les traces de tant d’illustres devanciers s’avance aujourd’hui lenbsp;P. Marchi, de la compagnie de Jésus. Depuis quatorze ans la Romenbsp;souterraine est devenue son domicile, et chaque jour il y trouve denbsp;nouvelles richesses.

Cela ne doit pas étonner, quand on songe que les trois quarts des Catacombes sont encore a découvrir (*). Néanmoins on en connait lanbsp;circonférence approximative; de même qu’on connait le pourtour denbsp;Pompéi, bien que la plus grande partie de la ville demeure ensevelienbsp;sous la cendre. Mais d’oü vient qu’après des travaux si longs et si

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Boldelli, Osservaz., lib. i, c. xlvii, etlib. 1, c. xlvi.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Son ouvr.ige est intitule : Inscriptiones antiques, Roma, 1702, in-folio.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Paris, 6 vol. in-folio.

{4) Aspri sono gli accessi che colaggiü menano, e quelle vie, quelle stanze, quelle chiese sono in parlc piene di orridozza e di pericoli, in parte sono a meta ostruite onbsp;intcramente interrale : talchc neppur forse nella quarta loro parte banno potuto finoranbsp;csscre conosciute ed csplorate. — Marchi, p. 1.

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t

GI

RAISONS DE l’eNCOMBREMENT DES GVI.ERIES.

actifs les Calacombes n’ont pas éló corapléienient visilées? Les ébou lements survenus dans un grand nombre, puis rencombrement c esnbsp;galeries; telles sont les deux causes qui ont retarde la marebc es

explorateurs. nbsp;nbsp;nbsp;,

Quant aux ébouleinents, les dévastations desBarbares, gt;es treinb e-ments de terre, l’acUon des siècles, l’enlevement des pierres tom suiSsent pour en rendre raison. Mais a quoi lient l encoin renbsp;des galeries, d’ailleurs parfaitemenl conservées? Pour en “nbsp;cause, il faut se reporter h l’hisloire même des Calacombes.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•

vons que les premiers chréliens ouvrirent 1 enlrée de eurs cnn tont k la fois dans les arénaires ou les latomies paiennes, enbsp;champs et les jardins donnés par les frères. C’était un premier

de se soustraire aux recherches des persécuteurs, mais 1 n

pas. II fallait cacher a leurs yeux les lerreaux, Ie tuf, la pouzï . extraUs des galeries, aulrement on eut mis les pjiiens sur anbsp;leurs viclimes. En conséquence, après avoir trausporténbsp;nbsp;nbsp;nbsp;^

dans nn lieu éloigné, ou jeté dans les profondeurs abandonnée, ou enfoui par tout autre moyen les déblais provennbsp;la première galerie, les Fossoyeurs creusaient leurs locuh, es remnbsp;plissaient, les fermaient, puis ouvraient une nouvelle galerie onnbsp;terrains servaient i combler la première. La même operation cnbsp;nuait è mesure qu’ils avan^aient dans les enirailles de la teire, a moinbsp;qu’ils ne trouvassent Ie moyen de transporter ailleurs les deblais pro-venant de nouvelles excavations.

Ce moyen, ils durent Ie cbereber souvent, et il faut convenir que dans les Calacombes privées ils durent Ie troiiver Sans peine. Par la,nbsp;ils eurenl la facililé de raénager des places, des cryples, des pleriesnbsp;plus OU moins nombreuses, pour servir de retraite aux fidèles. .-anbsp;preuve de cette méthode est encore palpable dans les Catacomnbsp;Ainsi, on attaque une galerie parfaitemenl intacte et corablée e a

on trouve toutes les tombes ferinées, les vases de sang, les

base è la voute de pouzzolane el de tuf granulaire concassé . on déblaie; et

intègres nbsp;nbsp;nbsp;loculi des martyrs, les inscriptions, les ornemenis

lerie a élé nr^ ^ dérangé. C’est une preuve évidente que la ga-nous venons dTcomblée de la manière et pour la cause que

B’aulres fois les

nr(Scpntp„. j . nbsp;nbsp;nbsp;°nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;quoique remplies dans toute leur étendiie,

des vas d nbsp;nbsp;nbsp;'^'des, des tombes arrachées, Ia petite niche

Ie rem T'- ^ ouverie ou brisée. A ces marqués on reconnait que p issa^jO est postérieur au vi*^ siècle, époque oü TÉglise Roraaine

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62 nbsp;nbsp;nbsp;LES TRO!S ROME.

commenfa d’extraire des Catacombes les corps des martyrs (i). Mais pourquoi, dans ce temps de paix, comblait-on les galeries explorées?nbsp;On Ie fit pour plusieurs raisons : la première, afin de proléger les galeries intérieures non encore visitées; la seconde, afin de laisser en lieunbsp;saint laterre délrempée du sang des martyrs et des larmes de nospères.nbsp;Cet usage est devenu avec Ie temps une loi tellement rigoureuse,nbsp;qu’aujourd’hui même on ne peut, sous les peines les plus graves,nbsp;jeter hors des cimetières une pelletée de terre des Catacombes; toutenbsp;celle qui provient des fouilles doit être reportée dans les galeries ounbsp;les aretc déjii parcourues. On peut ajouter, pour quelques cas parti-culiers, que l’encombrement provient du moins en partie des terrainsnbsp;d’alluvion descendus dans les Catacombes par les lucernaires, c’est-a-dire, par les ouvertures pratiquées dès Torigine a Ia surface du sol,nbsp;afin de donner un peu d’air et de lumière (2).

Commencées vers Ie vi® siècle, ralenties pendant Ie moyen 4ge, sus-pendues aux xiv® et xv® siècles, les fouilles ont été, comme nous l’avons vu, reprises par Bosio dans Ie xvi® siècle. Depuis cette époque, ellesnbsp;se conlinuent chaque année avec un zèie et une intelligence qui nenbsp;laissent rien è désirer. Elles ont lieu surtout pendant l’hiver et Ienbsp;printemps, paree que dans ces deux saisons, l’air éiant moins chaud,nbsp;la santé des Fossoyeurs et des gardiens n’a rien a craindre des fièvresnbsp;et des maladies. La partie des dispenses de mariage qui ne va pas auxnbsp;missions ou aux pauvres sert a rétribuer les Fossoyeurs, d’ailleurs ennbsp;petit nombre : nous parlerons plus tard de la surveillance des travaux.

Maintenant que nous connaissons Thistoire générale des Catacombes, reprenons la visite particulière de chaque quartier de la Rome sou-terraine. Une longue trainée de sang va nous conduire des cimetièresnbsp;de la Voie Aurélienne è ceux de la Voie de Porto.

Non loin de l’aqueduc de Trajan était une large pierre, nommée la Pierre des Scélérats, Petra scelerata. Un jour, quatre martyrs y étaientnbsp;étendus; des bourreaux leur brisaient les os avec des cordes garniesnbsp;de plomb. Quel était leur crime? Ils avaient refusé d’adorer Pempe-reur Commode, qui avait la prétention de se faire passer pour Herculenbsp;et rendre les honneurs divins. Quel était leur nom? Eusèbe, Vincent,nbsp;Pèlerin et Pontien. Glorieux martyrs, priez pour nous!

A quelques pas, voici Ie préteur Platon assis sur son tribunal. De-vant Ie représentant d’Aurélien, paraissent enchainés vingt-trois chré-tiens dont les chefs s’appellent Mandale, Tripodis et Basilide; ils re-

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Boldeui, lib. in, c. in.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Marcbi, p. 94-S.

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VOIE CORNÉLIENJiE.

fusent de sacrifier aux dieux; et leur sang arrose la terre que nous foulons. Voyez-vous cette foule lutnullueuse qui couvre Ie Janicule elnbsp;se porie sur la Voie Aurélienne? il y a des tortures a savourer, elle ynbsp;court cotnme a ramphilhéaire. Par ordre des divins enapereurs Dio-clélien et Maximien, quatre -vélérans de rarmée, Basilide, Cyrinus,

Nabor et Nazaire, ont déclaré qu’ils élaient soldats de Dieu avant de 1’être de César; ils vont payer de leur tête leur noble courage. Péchi-rés è coup de.scorpions, ils \ersent pour Jésus-Christ les restes du

sang dont ils ont donné les prémices la patrie.

Sang fécond en martyrs 1 Artéinius Ie geblier, Candide son épouse et sa fille Pauline, sonl converlis ; la bache du préteur tranche la tèlenbsp;d’Artémius, et les mains des bourreaux précipilenl Candide et Paulinenbsp;dans les profondeurs d’une crypte, ou ils les ensevelissent sous unnbsp;amas de cailloux el de pierres. Telles sont les principales scènes quinbsp;se présenlent sur cette partie du Janicule au pieux souvenir du voya-geup.

En avangant vers la Voie Cornélienne, il en trouve d’autres non nioins sanglantes, non moins illuslres. Aux gloires païennes de la anbsp;mille Cornelia, dont celle Voie rappelle Ie nom et les monuments,nbsp;succède une gloire cbrétienne plus durable, et pluspure. Depuis quinzenbsp;siècles, deux soeurs, également distinguées par leurs grftces el leurnbsp;naissance, Rulïlne et Secunda, effacent ici tous les aulres .souvenirs.nbsp;Tandis qu’Auguste ne pouvait trouver sisVestales dans tout 1 empire,nbsp;il fallul i peine quelques années au christianisme pour remplir Romenbsp;d’un peuple de vierges. Rufine et Secunda avaienl contraclé avec Ienbsp;Fils de Dieu cette auguste alliance qui ennoblit la'femme, en fait unenbsp;puissance et l’égale aux anges mèmes. Les partis les plus brillants leurnbsp;soul offerls. Vains appMs! la vierge cbrétienne ne sail point se pay-jurer; et Ie juge Archésilaüs condamne les deux soaurs k mourir! Maïsnbsp;comrae les profanateurs ont des sacriléges particuliers pour les vasesnbsp;les plus sacrés; ainsi des tortures plus rechercbées et plus effroy.ablesnbsp;seront exercées sur les épouses de Jésus-Christ, jusqu a ce que Ienbsp;'yran, honteux et faligué, ordonne de les conduire dans une forèl ap-pelée Silva Nigra, afin de cacher aux yeux des hommes et leur moitnbsp;et sa bonte.

L’ordre exéculé, et les corps des vierges ebréliennes, abandonnes aux aniraaux carnassiers, restent saus sépulture. Mais Ie Seigneur quinbsp;avail assislé ses marlyres pendant la vie, ne les délaisse point aprnbsp;la mort. Les bêles respectent leurs précieuses dépouilles, el la nnitnbsp;suivanle les deux sainte.s environnées de gloire apparaissenl a une de

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64 LES TROIS ROME.

leurs amies, fille comme elles d’une des plus nobles families de Rome. « Plaulilla, lui disent-elles, cesse de te souiller en adorant les idoles;nbsp;erois en Jésus-Christ, et viens dans ta propriété sur la Voie Cornelia;nbsp;tu y trouveras nos corps, et tu leur donneras la sépulture oü tunbsp;pourras. » Plautilla se rend en toute héte au lieu indiqué, et trouvenbsp;les corps de ses amies sans odeur et sans lesion : elle adore, elle croitnbsp;et fait élever une tombe aux vierges de Jésus-Christ. L’éclat de cettenbsp;mort, les miracles dont Ie tombeau devient Ie théétre, ^nt changer Ienbsp;nom de la forêt. Au lieu de Silva Nigra, elle est appelée Silva Candida : nom vénérable et gracieus qu’elle porte encore, et qu’un desnbsp;sis évêques suburbicaires ajoute a son litre (i).

Un sang non moins illustre abreuva cette même Voie Cornelia. Tons les grands martyrs devaient livrer leurs combats et remporter leursnbsp;palmes immortelles aux regards de la superbe Rome. Ainsi l’exigeaientnbsp;et les souillures profondes de la capitale du Paganisme, et la diilicullénbsp;de chasser Ie démon de sa forteresse, et la nécessité de frapper Ienbsp;vieux monde d’étonnement et de stupeur. Des extrémités de l’Orientnbsp;était venue a Rome, sous I’empire de Claude, une noble familie P'er-sane, coraposée du père, de la mère et de deux lils. Convaincus d’êtrenbsp;chrétiens, tous sont condamnés é mourir; on les conduit sur la Voienbsp;Cornelia, a l’endroit appelé les eaux de Calabassus, et la on déploienbsp;contre ces illustres étrangers une cruauté qui aurait fait rougir lesnbsp;barbares. On commence par les briser de coups de béton comme denbsp;vils animaux; on les étend ensuite sur Ie chevalet; on leur brüle lesnbsp;cótés avec des charbons, on leur déchire Ie corps avec des peignes denbsp;fer, on leur coupe les mains; puis Marlhe, la mère de cette glorieusenbsp;familie, est noyée; Marius son mari, Audifax et Abacum ses enfants,nbsp;ont la tête Iranchée; enfin, pour épuiser leur rage, les bourreaux jet-tent aux flammes les resles mutilés des martyrs. Ils ont beau faire, cesnbsp;corps sacrés ne périront pas tout entiers; Ie 14 des Calendes de février,nbsp;une courageuse chrétienne, nommée Félicilé, vient relirer du puils Ienbsp;corps de sainle Marthe et recueillir les cendres de ses compagnonsnbsp;qu’elle ensevelit tous ensemble dans sa propriété (2).

C’est a la lueur des büchers et les pieds dans Ie sang que nous ar-rivames sur la Voie de Porto, a l’entrée des Catacombes de Sainl-Pontien. Voici un des quarliers les plus anciens et les plus vastes dc la Rome Souterraine. Quand on se rappelle que les Juifs habitaient

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Episcopus Poi'lucnsis et SS. Rulinte et Secuiidae in Sylva Candida. Cod. ms. S. Petr,nbsp;et S. Coecil.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Martyr. Rom. lihalend.febr.

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\01E COraÉLlENNE. 65

delè du Tibre; que saint Pierre descendit d’abord parrni eux; qu’il y fit de nobles conquêles, entre autrcs Priscille et Aquila; que la persecution de Néron dut sévir sur les chréliens de ce quartier commenbsp;sur les autres; on comprend la nécessité d’un cimetière dans Ie voisi-afin de ne pas compromettre les vivants. On salt, en effet, parnbsp;les inscriptions, que les martyrs ou les chrétiens étaient généraleraentnbsp;‘uhumés dans les Catacombes les plus rapprochées de leur domicile ounbsp;‘lu lieu de leur mort. J’en cilerai deux seulement, publiées. Tune parnbsp;llesio, el 1’autre par Boldetli. La première est celle d’une humblenbsp;efirétienne nommée Pollecla, marchande d’orge dans la Via Nova, etnbsp;fiui fut enierrée au cimetière de Saint-Callixte, voisin de la Via Nova :

BE BIANOBX

POLLECLA QVE ORDEV BENDET DE BIANOBA

seconde est celle des saints martyrs Simplicius et Faustinus, noyés fians Ie Tibre et inhumés dans la Catacombe de Sainte-Généreuse-ad-^«x^um-Philippi, dont Ie fleuve baigne les abords ;

MARTÏRES SIMPLICIVS ET FAVSTINVS QVl PASSI SVNT IN FLVMEN TIBERE ET POSlnbsp;TI SVNT IN CEMETERVM GENEROSES SVPERnbsp;FILIPFI,

Ainsi, bien qu’elle porte Ie nom de saint Pontien, qtli vivait au mi-fieu du 111® siècle, la Catacombe que nous allons \isiter remonte cer-tainement a une époque antéricure ; son étendue même est une autre preuve d’antiqullé. Les Fossoyeurs ne creusaient pas leurs galeries etnbsp;leurs loculi par sauts et par bonds, mais successivement et de procbenbsp;en proche. Les simples chrétiens et les martyrs remplissaient les tombes au fur el a mesure qu’ils mouraient. On ne laissait pas de galeries séparées pour les martyrs, pas plus que pour les autres fidèles. IInbsp;faut en conclure que plus on trouve de martyrs séparés les uns desnbsp;autres dans les dilférentes galeries d’une Catacombe, plus cetle Catacombe. elle-même a vu de persécutions (i).

Plusieurs noms différents désignent Ie vaste cimetière de Saint-Pon-tien. A ce noble Itomain qui vivait sous Alexandre Sévère, d doil Ie

(lt;) Marclii, p. 23.

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66 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

premier. Pontien était un de ces riches et zélés néophytes dont la fortune et la vie furent dignement consacrées au service de l’Église nais-sante. Obligé de fuir, Ie Pape saint Callixte vint, avec dix de ses clercs, deraander un asile ii Pontien, qui Ie cacha dans sa maison, située denbsp;l’autre cóté du Tibre. II aida même Ie courageux Pontife a retirer dunbsp;fleuve Ie corps de saint Calépode et a lui donner la sépulture. Soit anbsp;cause du voisinage de sa maison, soit plulót cause de l’agrandisse-ment qu’il donna au cimetière de la Voie de Porto, cette Catacombenbsp;prit Ie nom de Saint-Ponlicn. Elle est aussi appelée Catacombe desnbsp;Saints-Ahdon et Sennen, paree que ces deux princes persans, martyrises dans rAmphilhéatre sous l’empire de Dèce, y furent d’abord dé-posés. Enfin, elle est connue sous la denomination : Ad Ursum pi-leatum, « A l’Ours coiffé, » vraisemblablement a cause de quelquenbsp;simulacre placé dans Ie voisinage.

Quoi qu’il en soit, il serait impossible de nommer tous les héros, toutes les héroïnes ebrétiennes dont ce quartier de la grande Nécro-pole fut la sépulture. II re§ut tour a tour dans ses vastes souterrainsnbsp;Quirinus, ce généreux athlèle qui lassa les bourreaux de I’empereurnbsp;Claude; et Pigmenius, ce saint aveugle qu’un enfant conduisait par lanbsp;main, et que Julien l’Apostat fit précipiter, avec son guide, dans lesnbsp;eaux du Tibre; et la courageuse Candide, si zélée pour recueillir lesnbsp;corps des martyrs; et les saints Pontifes Anastase et Innocent P'’; etnbsp;les saints Pollion, Vincent, Milex, Marcellin et Pierre. Sous Ie portraitnbsp;de ces derniers, Bosio découvrit cette touchante inscription gravée surnbsp;Ie tuf : « Eustathe, pauvre pécheur, serviteur du bienheureux Marcellin, martyr (i). »

L’entrée de la Catacombe se trouve sur la colline, h droite de la Porte du Tibre. On y arrive au détour d’un petit chemin, voisin d’unenbsp;chapelle. Les galeries sont pratiquées dans la roche marine et fluviale;nbsp;mais les escaliers déblayés par Bosio indiquent plusieurs étages dontnbsp;Ie plus bas doit arriver a la roche volcanique. Quand on réfléchit,nbsp;d’une part, au peu de solidité que présentent ces couches de terrainnbsp;secondaire; d’autre part, a l’existence d’une vaste latomie païennenbsp;superposée a cette Catacombe, on a la preuve péremptoire que lesnbsp;chrétiens aimaient mieux, pour cacher leur vie, leur mort et leursnbsp;mystères, se condamner aux plus dangereux et aux plus rudes travaux,nbsp;que d’employer a leur usage les excavations païennes. Quelle vastenbsp;église, quel solide cimetière ils auraient trouvé dans la latomie dont je

(0 Eustathius humilis pcccalor, servitor beati MarccUini martyris.

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CATACOMBES CE SAINT-PONTIEN. nbsp;nbsp;nbsp;67

Parle! Et pourlant ils Tont dédaignée! Soit crainte, soit horreur, ils

voulaient avoir rieti de commun avec les païens. Soutenus par la ^oi, ils savaient se sulïire i eux-mêmes.

C’est ainsi qu’ils ouvrirent, malgré la difficulté du travail, des pla-

OU arew dans la Catacombe de Saint-Pontien. II en est une, entre ®utres, qui est assez large pour servir aux synaxes, ou assemblées re-^'gieuses des fidèles. Cette destination ne serait pas douteuse, si onnbsp;®vait déblayé le fond de la place oii se trouve communement le Monu-^enturn arcuatum, c’est-a-dire I’autel du martyr principal. Mais unenbsp;*^hose indubitable, c’est I’existence d’un baptistère.

Au fond d’une crypte s’ouvre un large bassin creusé de main *i’horame, et assez profond pour y pratiquer le baptême par immersion, suivant le rit de la primitive Eglise. La peinture qu’on y voit,nbsp;^ien que d’une date postérieure, indique claireraent I’usage de ce réservoir. Saint Jean baptise Notre-Seigneur, sur la tête duquel se re-Pose le Saint-Esprit sous la forme d’une colombe; droite de Notre-Seigneur est un Ange portant entre ses mains le nom de Jésus; i sesnbsp;pieds, Un cerf qui se désaltère dans I’eau du Jourdain. On trouve encore dans plusieurs autres peintures des sujets que j’expliquerai ennbsp;leur lieu. Mais je ne puis oublier les portraits des saints martyrs quinbsp;ont illustré cette Catacombe. Dans un compartiment, Notre-Seigneur,nbsp;sortant du sein d’un nuage, tient ses deux mains étendues sur la têtenbsp;des saints A,bdon et Sennen, qu’il couronne de roses. Les deux martyrs portent le manteau court, rattaché sur la gorge par un bouton,nbsp;et sur la tête Vamphibalum, ou capuchon oriental. A cóté d’eux pa-caissent leurs compagnons de gloire, les saints Milex et ^^^ncent; I’un,nbsp;dans son costume remain, I’aulre avec la chasuble primitive : tousnbsp;sont représentés debout, dans I’attitude du triomphe, et la tête en-lourée du nimbe circulaire. II en est de même partout des autresnbsp;Diartyrs.

roêraes tortures que la cruauté paienne savait si bien inventer, va

Prés des Catacombes de Saint-Pontien se trouvent celles de Géné-^^use-ad-Sextum-Philippi, et celles du Pape saint Jules. Les premières doivent probablement leur double nom è quelque dame romaine qui aura, comme les Cyriaque et les Lucine, donné ses jardins pour lanbsp;sépulture des fidèles; ainsi qu’è une propriété appartenanl ii quelquenbsp;Romain nommé Philippe, et située au sixième milliaire de la ville.nbsp;Oeux grands martyrs, dont les corps reposent aujourd’hui ii Sainte-Marie-Majeure, sont les gloires connues de cette Catacombe. Simplicius et Faustus étaient frères. Animés du même courage, ils soulfrirentnbsp;les ¦nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;------------ —

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68 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

rier, prolonger : Ie glaive mit Bn ^ leur supplice, mais non èi la rage des bourreaux. Leurs corps mulilés, jetés dans Ie Tibre, du haul dunbsp;Pont de Pierre, probablement Ie Pont Di Quattro Capi, furentnbsp;portés par les eaux vers le.Sextum Philippi. Sainte Beatrice, la dignenbsp;soeur des martyrs, aidée par les saints prêtres Crispe et Jean, les re-cueillit, et les enterra dans la Catacombe de Généreuse. Elle-même,nbsp;saisie et mise a mort par ordre du juge Lucrétius, vint reposer au-près de ses illustres frères. Émules de sa charité et de sa foi, les deuxnbsp;prêtres Crispe et Jean partagèrent la même tombe. Leur martyre eutnbsp;lieu sous Dioclétien Ie dix-huit du mois d’aout (i).

Quant au cimelière de Saint-Jules, il n’est encore connu que par son nom. Mais on ne peut douter qu’il ne renferme un grand norabrenbsp;de martyrs. Que penser en sortant de ces lieux tant de fois vénérables?nbsp;sinon que les sacrifices auxquels nous sommes exposés, nous chrétiensnbsp;du XIX® siècle, enfants des martyrs, ne sont rien en comparaison desnbsp;travaux, des perils et des souffrances de nos pères. S’il était vrai denbsp;dire qu’après Ie désastre de la grande armee de Russie on avail perdunbsp;Ie droit de se plaindre : avec plus de vérité, la même parole doit-ellenbsp;se trouver sur les lèvres du pèlerin des Catacombes!

23 DECEMBRE.

Catacombes de la Voie d’Ostie. — Double destination dos Catacombes. — Noms divers. — Discipline primitive. — Séjour des chrétiens dans les Catacombes pendant la paix,nbsp;pendant les persecutions.— Pourquoi plusicurs entrees. — Raisons de la forme desnbsp;galeries.— Tombes a deux, a Irois corps. — Catacombes de Sainte-Lucine,de Saint-Timolhée, — des Saints-Félix, Adaucte et Comodilla, — de Saint-Cyriaque.

Revenus sur les bords du Tibre pour visiter l’antique Église de Sainle-Praxède, nous traversêmes Ie fleuve par Ie Pont des Quattronbsp;Capi, afin de nous rendre sur la Voie d’Ostie oü nous appelaient lesnbsp;célèbres Catacombes dont elle est environnée. Mais, pour descendrenbsp;avec fruit dans nos vénérables cimetières, il ne sufiit pas de tenir al-lumée la torche que Ie custode vous présente; il faut encore porternbsp;avec soi Ie flambeau de la science, et surtout de la science sacrée. Cenbsp;que Pompéi est au paganisme, les Catacombes Ie sont au christia-nisme. De même que Pompéi montre Ie paganisme tel qu’il était, il y

(0 Romm, in Scxlo Philippi nalalis bcalornm presbylerorum Joannis ct Crispi, qui in pcrsocnlionc Dioclctiani et Maximiani muUa sanctorum corpora scpeliverunl. Quorum mcrilis cl ipsi postmodum sociati gaudia vitte mcruerunt. Adnot. Martyr. 18 aug-

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DOUBLE DESTINATION DES CATACOMBES. nbsp;nbsp;nbsp;69

a dix-huit siècles, dans sa religion, dans ses moeurs, dans ses arts, dans ses Usages de la rie publique et privée; ainsi dans les Catacombes,nbsp;liereeau de I’Eglise, on surprend sur le fait le christianisme tel qu’ilnbsp;^tait il y a dix-huit siècles.

La Rome souterraine est un livre vivant, palpable, imniortel, oil sont écrites, tantót avec le sang des martyrs, tantót avec le pinceaunbsp;®ovice d’un peintre inconnu, tantót avec I’outil émoussé du Fossoyeur,nbsp;les croyances, les moeurs, les usages, I’esprit, et tous les détails de lanbsp;^ie si laborieuse et si sublime de nos pères. Livre d’un intérêt immensenbsp;pour I’archeologue et plus encore pour le chrétien; mais, comine tousnbsp;les autres, il veut être compris.

Les jours précédents, il nous a raconté son origine et son histoire; ®'^jourd’hui il va nous dire sa double destination. Les Catacombes ser-^irent è cacher la vie des premiers chrétiens, leurs mystères, leursnbsp;larmes et leurs prières; après la mort, elles offrirent un dortoira tousnbsp;les enfants de l’Église et particulièrement aux martyrs. Qu’elles soientnbsp;Pleines de la vie et de la mort de nos pères, la preuve en est non-seu-lement dans les tombes, les chapelles, les peintures et les monumentsnbsp;que nous décrirons par la suite, mais encore dans les horns donnés anbsp;ces lieux vénérables. Outre la dénomination générale de Catacombes,nbsp;les cimelières chrétiens avaient dans la langue primitive des noms oünbsp;fespirent et la foi vive de nos aïeux, et l’usage qu’ils faisaient de cesnbsp;Souterrains. Ils som appelés tour a tour ; lieux cachés, refuges souterrains, conciles des martyrs, sancluaires, dortoirs, lieux de repos,nbsp;mémoires, paix, port et tróne (i). II n’appartient qu’au christianismenbsp;de donner de semblables noms aux prisons et aux lombgaux de sesnbsp;®nfants. Ne faut-il pas être bien pénétré de Fimmortelle grandeur denbsp;1 homme et bien assuré de sa résurrection future, pour appeler dor-^oir le champ de bataille ou la mort le tient étendu, et tróne, la tombenbsp;s’accomplissent les tristes mystères de sa décomposilion?

^ ces noms révélateurs viennent se joindre, pour manifester la double destination de la Rome souterraine, les usages connus de la primitive Église. Une loi disciplinaire voulait qu’on offril le saint sacrifice ®tir la tombe des martyrs. Ainsi, chaque fois que les mystères sacrésnbsp;devaient se renouveler, il fallait descendre aux Catacombes. Or, l’usagenbsp;des premiers chrétiens étant de communier tous les jours, il deraeurenbsp;done établi également que ce voyage avait lieu tous les jours, du moins

(gt;) Cryptae, hypogeos, lalebrae, concilia marlyrum, sancluaiium, dormilorium, sedes ¦'equieiionis^ memoria:, pax, porlus, solium. — BoldelU, p- 38ö.

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70 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

pour une grande partie des fidèles (i). L’Église entière I’accomplissait aux nombreux anniversaires des martyrs, qu’on célébrait invariable-ment sur leur tombeau par roffrande de l’auguste Victime. De plus,nbsp;la piété, Ie besoin de s’encourager aux combats de la foi, les travauxnbsp;et la surveillance des Fossoyeurs, multipliaient, pour un grand nom-bre, des visites prolongées dans ces retraites silencieuses. Ajoutez quenbsp;la crainte d’exciter l’attention ou la haine des païens devait les fairenbsp;choisir très-souvent pour l’instruction des catéchumènes, l’administra-tion des sacrements et la célébration des agapes. Néanmoins, en tempsnbsp;de paix, les chrétiens habitaient dans la ville, et vaquaient è l’exercicenbsp;de toutes les professions légitimes. « Vous nous reprochez, disait auxnbsp;païens un témoin oculaire, d’être des gens inutiles! Comment? Maisnbsp;nous habitons avec vous; même nourriture, même habillement,mêmesnbsp;occupations, mémes besoins; nous ne sommes ni des brachmanes, ninbsp;des gymnosophistes indiens, habitants des forêts et fuyant Ie commercenbsp;des hommes... Nous ne nous passons pas plus que vous des choses nécessaires ii la vie; comme vous, nous nous rendons au Forum, auxnbsp;boucheries, aux marchés, aux bains, aux foires, dans les boutiques,nbsp;dans les hótelleries. Nous naviguons avec vous, nous portons les armes,nbsp;nous cultivons la terre, nous exergons les mêmes professions et pournbsp;votre usage (2). »

Si, durant les rares intervalles de tranquillité, Ie séjour des Cata-combes était seuleraent habituel pour nos pères, il devenait continuel aux époques de persécution. A peine l’édit sanglant était publié, qu’onnbsp;les voyait disparaitre et chercher un asile dans leurs souterrains pendant toule la durée de Forage. Les païens ne Fignoraient pas. De lè,nbsp;les noras injurieux de race taupinière, de race ennemie du grandnbsp;jour, qu’ils leur donnaient (3). De la encore, après la publication denbsp;Fédit, ce premier cri poussé par la cruauté païenne : « Qu’on fermenbsp;les cimetières! qu’on ferme les cimetières! » Arew non sint (4)!

Non moins avides du sang chrétien, les empereurs s’empressaient de seconder Ia fureur populaire et défendaient, sous peine de mort.

(0 Prima del dugensetlanta dell’ era nostra, la Chiesa romana per divola consuelu-dine celebrava gt;1 sacrifizio Eucarislico sopra i sepolcri di marliri. Eu il pontifice san Felice il quale ordinó che quella consuetudine avesse forza di legge universale e per-petua. —Marchi, p. 31.

(2) Apol., C. XLII-XLIU.

(5) Latebrosa el lucifugax nalio. Min. Fel.

(1) Sub Hilarione praeside cum de areis sepulturarum nostrarum acclaniassenl ; « Area: non sint! » area; ipsorum non 1’uerunl. — Tertul. Ad. Scapul. c. in.

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SÉJOÜR DES CHRÉTIENS DANS LES CATACOMBES. nbsp;nbsp;nbsp;71

1 entrée des Catacombes (i). Enfin, lorsque Ia guerre se ralenlissait, Ie premier acte de clénience des persécuteurs consisfait h permettrenbsp;aux chréliens Ie libre accès de leurs cimetières. Effrayé de la mortnbsp;“ffreuse de Valérien son père, Gallien s’adoucit envers l’Église etnbsp;donne un rescrit par lequel il autorise les évêques retourner dansnbsp;cimetières (2). Que faut-il de plus pour prouver que, dans ces ter-'¦‘files moments, nos aïeux n’avaient pas d’aulre asile? Leur histoirenbsp;^^ablit qu’ils y couraient en foule, et les chefs du troupeau leur ennbsp;dennaient eux-mêmes Ie conseil et l’exemple. « Venez, asserablez-vousnbsp;dans les cimetières, disait Ie Pape saint Clément, pour lire les Livresnbsp;aacrés, chanter les hymnes en l’honneur des martyrs et de tous lesnbsp;aaints sorlis de ce monde, prier pour vos frères morts dans Ie Sei-ëiieur, offrir, dans vos églises et dans vos cimetières, l’Eucharistienbsp;®gréable a Dieu, type de votre corps royal, et accompagner, au chantnbsp;des Psaumes, ceux qui meurent dans la foi (5).

A. ce téraoignage il serail facile d’en ajouter heaucoup d’autres; ^ais les fails sont encore plus décisifs que les paroles. Que, durantnbsp;les perséculions, la plupart des Souverains Ponlifes se soient relirés,nbsp;avec les fidèles, dans les Catacombes, les monuments primitifs ennbsp;offrent la preuve è chaque page. Pour ne parler ici que d’un petitnbsp;nombre : qui ne sail que I’apótre saint Pierre, Ie premier et Ie mo-fièle des Papes, saint Callixte, saint Urbain, saint Pontien, saint An-lère, saint Pabien, saint Corneille, saint Étienne, saint Sixte II, saintnbsp;Caius, y firent leur séjour? saint Étienne et saint Sixte y furent mar-lyrisés; saint Caius s’y tint caché pendant buit ans (a). Or, a I’exem-ple de Paul dans sa prison, ces infatigables Pontifes accomplissaient,nbsp;dans leur vivant lombeau, toutes les fonctions de leur apostolat. Ils ynbsp;tenaient des conciles, consacraient des évéques et des prêtres, jetaientnbsp;les fondements de la discipline, instruisaient les fidèles, baptisaient lesnbsp;^atéchumènes, en un mot, s’acquittaient de tous les devoirs imposésnbsp;par leur double litre d’évêques de Rome et de chefs de l’Église uni- 1

1

Proconsul dixit: Justum est ut nulla conciliabula faciant, neque ccrmeteria in-^''edianiur quod qui facere comprehensus fueril, capile pleclatur. Pont. Act, procon-*«iar. Voyez aussi Bar., 260; Euseb., Hist., lib. vii, c. x; lib. ix, c. ii; Boldetti, “a-c. III.

W Exstat ejus conslitutio quam ad episcopos misit, permiltens illis illa loca recipere, OUffi coemeleria vocaniur. —Euseb. lib. vu, c. xiii; Bcldetti, lib. 1, c. i, p. 12.

(5; Convenile in ccemeteriis ad legendum sacros Libros, etc., Constit. aposu, lib. vii,

C' ultiin.

(a) Ingredientes verö Uomam invcnerunt apostolum in loco qui dicitur Vaticanus, acens multas populorum turmas. — Aringhi, t. i, lib. i, c. n; Bar. Annul., t. xii,nbsp;R'Iö-llbO; Boldetti, lib. i, c. m.

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72

LES TROIS ROME.

verselle (i). Tout cela ne suppose-t-il pas évidemment la présence du pasteur et du troupeau ?

Néanmoins, au plus fort même de la persécution, tous les chrétiens ne quittaient pas la ville, ou, du moins, ne faisaient pas des Catacom-bes leur séjour conlinuel. Un grand nombre reslaient parrai les païensnbsp;pour observer ce qui se passait et en averlir l’Église; pour visiter,nbsp;consoler, encourager les martyrs dans leurs prisons, les accompagnernbsp;devant les juges et prendre note de leur inlerrogatoire; les suivre aunbsp;lieu de leur supplier, recueillir leur sang, et transporter leurs restesnbsp;précieux dans la grande Nécropole. D’aulres encore demeuraient dansnbsp;Rome, soit paree que leur emploi, tel, par exemple, que la professionnbsp;militaire, ne leur permettait pas de s’éloigner; soit paree qu’il étaitnbsp;indispensable de pourvoir a la subsistance des frères cachés dans lesnbsp;cimetières; soit enfin paree que, n’étant pas obligés de fuir, ils se sen-taient assez de courage pour braver la fureur des tyrans. Chose re-marquable! on retrouve la même conduite dans tous les pays, a toutesnbsp;les époques de persécution. On l’a vue notamment, en Angleterre,nbsp;sous Elisabeth, et, en France, pendant la révolution du dernier siècle :nbsp;elle se reproduit, de nos jours, dans la Cochinchine et Ie Tonquin.

Du moins, l’Eglise, ensevelie dans les entrailles de la terre, jouis-sait-elle d’une eertaine tranquillité? Ie croire d’une raanière absolue serait une erreur. Nos pères, retirés dans les Catacombes, étaient ennbsp;süreté, commele furent, aux époques citées plus haut, les ealholiquesnbsp;de France et d’Angleterre, cachés dans les bols, dans les caves; commenbsp;Ie sont encore les fidèles d’Orient dans leurs profondes retraites. Lanbsp;fermeture des cimetières, réclamée par Ie peuple et ordonnée par lesnbsp;persécuteurs, prouve que les païens connaissaient les asiles de nosnbsp;pères. Or, tel était Ie danger d’être découverts, qu’il les tenait dansnbsp;de continuelles alarmes et les obligealt souvent a s’enfoncer dans lesnbsp;dernières profondeurs de leurs souterrains. « La persécution est tel-lement violente, écrivait. Fan 260, Ie Pape Corneille, que nous ne pou-vons plus nous assembler dans les Catacombes les plus connues (2). »nbsp;L’inscription du martyr saint Marius raconte aussi d’une manièrenbsp;touchante les alarmes continuelles des chrétiens :

TEMPORE ADRIANI IMPERATORIS

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Lib.deRom.Pontif. Aringhi, t. i, c. 11, p. 10,11.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Publice neque in cryptis nolioribus missas agere chrislianis licuisse. Ep. vin adnbsp;Lupicin. Vicim.

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SÉJOUR BES CIIUÉTIENS DANS LES CATACOMBES. nbsp;nbsp;nbsp;75

MARIVS ADOLESCENS DVX MILITVM QVI SATIS VIXITnbsp;DVM \TTAM PRO CHO CVM SANnbsp;GVINE CONSVNSIT IN PAGEnbsp;TANDEM QVIEVIT BENEMERENTESnbsp;CVM LACRIMIS ET METV POSVERVNTnbsp;ID. Vt

® Au temps de l’empereur Adrien, Marius, dans la fleur de l’Sge, officier de l’armée, qui vécut assez, puisqu’il donna sa vie avec sonnbsp;pour Jésus-Christ, reposa enfin dans la paix. Ses amis, ses pa-*‘®ots dans les larmes et les frayeurs, lui ont fait cette tombe, Ie sixnbsp;fies ides. »

alarmes n’étaient que trop fondées. 11 arrivait souvent que les P^iens poursuivaient nos pères jusque dans les profondeurs de leursnbsp;*'®lraites. Ainsi nous voyons Ie pape saint Sixte II martyrisé dans lesnbsp;^stacoinbes mêmes de Saint-Callixte, avec quatre diacres (i). On pour-’'®it en citer bien d’autres. Quelquefois, par une attroce barbarie, ilsnbsp;^sisaient fermer les enlrées des Catacombes, et étouffaient ainsi d’unnbsp;*®til coup une multitude de victimes. Numérien, apprenant qu’unnbsp;gfand nombre de fidèles étaient assemblés dans les cimetières de lanbsp;''oie Salaria, ordonna qu’on fit démolir la porie et qu’on fit tombernbsp;eux la monlagne de terre suspendue au-dessus de la crypte (2).nbsp;Pour se souslraire aux recherches des perséculeurs, les chrétiensnbsp;hiultipliaient les enlrées de leurs Catacombes. Chaque jour encorenbsp;en découvre de nouvelles dans les vignes et dans les jardins desnbsp;*hvirons de Rome. Cette multiplicité d’ouvertures avait un autrenbsp;•^oiif; i’Église voulait que les bomraes et les femmes eussent leurnbsp;®hlrée difl'érente. On con^oil que la séparation des sexes, encore obser-'ée, de nos jours, dans un grand nombre de paroisses, devait êtrenbsp;’’•goureusement prescrite, alors que les assemblees avaient lieu, pen-la nuit, dans des souterrains éclairés seulement par des lampes.nbsp;*^ire Ie témoignage des anciens Pères, les Catacombes elles-mêmesnbsp;*^^i*blissent la destination des doubles enlrées. Une inscription Irouvéenbsp;Pïir Bosio, dans les Grottes Valicanes, met la question hors de doute ;

AD SANCTVM PETRVM ANTE REGIA IN PORTICV GOLVMNA SECVNDA QVOMODO INTRAMVS

Oia ^ nbsp;nbsp;nbsp;m ccemelerio Caïlixli aniraadversum scialis oct. nonas Augusti, et cum eo

Epist. ad Success., £7«sM.xxxii.

fry nbsp;nbsp;nbsp;crypla; paries levaretur, quod cum factum fuissct, montem qui

gt;Pue imminebat super eos dejecil. ~ Bar. an. 284; Marchi, p. 81.

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74 LES TBOIS ROME.

SINISTRA PARTE VIRORVM LVCELLVS ET lANVARIA HONESTA FEMINA.

II résulte de ce document, gravé sur la pierre, que les hommes entraient dans I’antique Basilique du Prince des Apötres, par le cölénbsp;gauche; done les femmes y entraient par le cóté droit. En observantnbsp;avec soin les Catacombes, on retrouve également les deux entrées, lesnbsp;deux escaliers, dont il est impossible de rendre compte, amp; moins d’ad-mettre qu’ils conduisaient séparément les hommes et les femmes dansnbsp;les chapelles souterraines, mi ils étaient également séparés. Je dirai,nbsp;en passant, qu’on rencontre ces escaliers, avec le caractère évident quinbsp;vient d’être expliqué, dans les Catacombes de Sainte-Agnès, de Sainte-Hélène (i). II est hors de doute que le même fait se reproduira con-stamment dans lesautres cimetières a mesure qu’on pourra les explorer.nbsp;Grdce amp; ce premier enseignement donné par nos vénérables cimetières,nbsp;on voit que la discipline de l’Église, bien que changeanle de sa nature,nbsp;étend ses racines jusqu’aux amp;ges apostoliques. Servir de sépulture auxnbsp;morts et de retraite aux vivants, telle est la double destination de lanbsp;Rome souterraine : passons maintenant amp; la structure de l’immensenbsp;cité.

Les galeries et les tombes sont la première chose qui frappe, lorsque vous entrez dans les Catacombes. Les galeries, nous le savons déja,nbsp;s’élèvent ou s’abaissent, s’élargissent ou se resserrent, suivant lesnbsp;couches de tuf granulaire. Leurs dimensions et leur forme, leur pro-fondeur et leur disposition en étages, sont éviderament calculées surnbsp;leur destination sépulcrale. Quant aux tombes appelées loculi, nousnbsp;savons encore qu’elles sont creusées horizontalement, h droite et ènbsp;gauche, dans les parois, et qu’elles s’élèvent les unes au-dessus desnbsp;autres, comme les rayons d’une bibliothèque, jusqu’au nombre denbsp;sept, huit, neuf et méme onze. En général, chaque loculus ne peutnbsp;recevoir qu’un corps; il en est cependant qui sont destinés è deux etnbsp;i» trois défunts, quelques-uns même a un plus grand nombre. On dé-signe les premiers par les noms, moitié latins et moitié grecs, denbsp;bisomum et de trisomum, tombe è deux, h trois corps. Les derniersnbsp;retiennent le nora grec de polyandrum, tombe pour plusieurs. Cettenbsp;destination est ordinaireraent indiquée dans l’inscription tumulaire.nbsp;En volei quelques exemples :

Au cimetlère de Saint-Calllxte :

DONATA SE VIV. EMIT SIBI. ET BÏ.WENTI.^ LOCVM BISOMV,

()) Marchi, p.

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TOMBES A TROIS CORPS. ;ö

« Donata, de son vivant, a acheté pour elle et pour Maxenlia un loculus pour deux corps. »

Au cimetière de Gordien :

IN. M. I. S. TVRDVS, ET CECILI.A BISOMV.

® Dans ce loculus è deux corps, sont Turdus et Cécile. »

Au cimetière de Saint-Callixte :

SEBERVS. LEONTIVS. BICTORINV. TRISOMV.

“ Sévère, Léonce, Victorin, loculus è trois corps. »

SE BIBA EMET DOMNINA EOCVM A SCCCESSVM

TRISOMVM VBI POSITI.

® De son vivant, Domnina a acheté de Successus un loculus a trois Corps, oü reposent.....» Le reste de l’inscription manque.

Dans les Grottes Vaticanes :

toe MA C.Ct. vuil. MC

« Tombeau de deux cent cinquante-neuf martyrs en J.-C. »

Les tombes sont fermées, soit avee de larges tuiles, soit avec des dalles de pierre ou de marbre parfaitemenl incruslées dans le tuf.nbsp;G’est lè que se trouvent gravées les inscriptions dont l’étude offre unnbsp;®i puissant intérêt i la science et è la piété. Demain nous la commen-cerons, car aujourd’hui, le temps nous presse de descendre dans lesnbsp;Datacombes.

Quand il a franchi l’ancienne Porte Trigemina, ainsi appelée des Irois Horaces qui la passèrent en se rendant a leur fameux combat, lenbsp;Voyageup se trouve sur la voie d’Ostie. A quelque distance de lanbsp;'*De, elle se divise en deux bras, dont l’un s’étend vers Ostie, l’autrenbsp;vers les Eaux-Salviennes, ou Saint-Paul-Trois-Fontaines. C’est danscenbsp;dernier lieu, a l’endroit appelé Gutta jugiter manans, que le grandnbsp;Apötre eut la têie tranebée. Dans la visite de Rome, nous avons parlénbsp;la Catacombe de Saint-Zénon, et des trois églises des Eaux-Sal-'iennes, élevées en mémoire du triple bond que fit la tête de l’Apètre,nbsp;co tombant sous la hacbe du licteur. Nous avons dit encore que sonnbsp;Corps sacré fut recueilli par sainte Lucine et enterré par elle dans unenbsp;^0 ses propriélés. Or, nous void sur cette Catacombe, immortalisée

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76 LES TROIS ROME.

lout a la fois par la sépullure du grand Apótre et d’une foule de martyrs, et par la Basilique Constantinienne, élevée dans ce lieu par Ie premier erapereur chrétien : nous sommes h Saint-Paul-Aors-rfes-murs.

Comme on Ie roit, la Catacombe de Sainte-Lucine ou de Saint-Paul remonte au berceau de l’Église. On y descendait autrefois par un Oratoire souterrain, dédié a saint Julien, martyr, et situé prés de lanbsp;Confession de l’Apótre : eet Oratoire est aujourd’bui fermé. Une an-cienne inscription, écrite sur Ie pavé en marqueterie de l’anciennenbsp;Basilique, témoignait de la multitude des martyrs inhumés auprès denbsp;saint Paul :

SVB HOC PATIMENTO TESSELLATO COEMETERIVM S. LUCIN.E.

MATRONE

IN QVO PLVRIMA SANCTORVM MARTÏRVM CORPORAnbsp;REQVIESCVNT.

« Sous ce pavé en mosaïque est Ie cimetière de la matrone sainte Lucine, dans lequel reposent les corps d’une multitude de saintsnbsp;martyrs. »

Parmi ces hótes illustres, il sufflra de nommer les saints Timothée, Julien, Basilisse, Celse et Marcionille, dont les corps sont aujourd’huinbsp;sous l’autel de sainte Brigitte. Le premier était un citoyen d’Antio-ebe qui était venu a Rome sous le pape Melchiade. Né dans le paganisme, il se montrait fort attaché a la religion de ses pères, lorsquenbsp;la lumière de la foi lui dessilla les yeux. Apótre aussitót que néophyte,nbsp;il se met a prêcher publiquement la divinité de Notre-Seigneur etnbsp;l’absurdité de 1 idolótrie. On I’écoute, on se convertit en grand nom-bre; mais le tyran Maxence apprend ce qui se passe. Ordre est dounénbsp;ó Tarquinius, préfet de Rome, d’arréler le prédicateur. Digne minis-tre de son maitre, Tarquinius fait jeter Timothée dans une noire prison, ordonne de le couvrir avec de la chaux vive, et d’exercer sur sonnbsp;corps toutes les tortures qu’une rage impuissante peut inventer. Lenbsp;martyr résiste a tout; enfin la hache du licleur finit son glorieuxnbsp;combat. Une sainte femme, nommée Théodora, recueillit son corps etnbsp;le déposa dans un champ qui appartenait au martyr, et qui prit lenbsp;nom de Catacombe de Saint-Timothée. Contigu au cimetière denbsp;Sainte-Lucine, et enfermé plus tard dans l’enceinte même de la Basi-

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CATACOMBES DE SAINTE-LÜCINE. nbsp;nbsp;nbsp;77

lique, Ce champ sacré n’est qu’un quartier de la Catacombe de Saint-

Paul (,).

Quant aux autres martyrs, leur présence dans ces lieux est un té-ttioignage de plus de eet immense désir, je dirais volontiers de cette jalousie maternelle que Rome manifesta dès Ie principe, d’avoir au-Près d’elle ses plus illustres soldats de l’Orient et de l’Occident, denbsp;1’Espagne et des Gaules. Julien et Basilisse son épouse habilaient A.n-boche, voisine de Nicomédie, oü fut d’abord publié l’édit de la derrière et de la plus sanglante persécution. Antioche fut une des pre-rtières villes qui envoyèrent au ciel les intrépides témoins de la foinbsp;Persécutée. Julien fut de ce nombre, après avoir rendu sous Ie prési-dent Marius un illustre combat. Ses compagnons de courage et denbsp;§loire furent Marcionille et Ie jeune Celse son fils, petit enfant qui,nbsp;^*“ep faible encore pour porter ses fees, étonna ses bourreaux par sonnbsp;•utrépidité. Or, Rome possède leurs reliques, et les monlre parmi sesnbsp;plus précieux joyaux. Ainsi de loutes les parties du monde elle a desnbsp;témoins de sa foi; et c’est a juste titre que ses Catacombes portentnbsp;1 auguste nom de Conciles des martyrs : Concilia martyrum.

Dans Ie convent des Bénédictins attenant è la Basilique de Saint-Paul, on trouve, incrustées dans les murs du cloitre, une foule d’in-scriptions qui servaient de pavé a l’ancienne église. Elles racontent les gloires de la Catacombe de Sainte-Lucine et font connaitre les papes,nbsp;les préfets de Rome, les illustres chrétiens et les martyrs plus illustresnbsp;encore, auxquels ces antiques souterrains servirent de dortoir en attendant Ie réveil de la résurrection. Je n’en rapporterai qu’une seule,nbsp;que la Providence a pris soin de conserver, comme un monument dunbsp;*èle et de la sollicitude empressée de nos pères et de nos mères dansnbsp;la foi, pour les saints martyrs. Le seul titre de gloire que Mandrosanbsp;'uut faire passer è la postérité, c’est son pieux respect et son coura-geux amour pour les soldats de Jésus-Christ.

MANDROSA IIIC NOMIXE OMWVM GRATIA PIENA FIDELIS IN XPO EJVS MANDATA RESERVANSnbsp;MARTïRVM OBSEQVnS DEVOTA TRANSEGI FALSI SECVLInbsp;VITAM VNIVS VIRI CONSORTIO TER QVINVS CONVICTAnbsp;per ANNOS REDDIDI NVNC DNO RERVM DEBITVMnbsp;COMMVNEM OMNIBVS OLIM QU^ VICXIT ANN. PL. M.nbsp;XXXIII. DP. V vuil KAL. FEBRVARIAS GONS. AGINA.NTInbsp;PAVSTI VC (2).

I') Mazzol., Sagri Cimiteri, p. 206.

(*) Sur la dale de celte inscription, voir Aringhi, lib. in, c. m, p. 247.

T. IV. nbsp;nbsp;nbsp;4

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78 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

On ne peut quitter la Catacombe de Sainte-Lucine, saus parler de rinscription publiée par Bosio et qui témoigne d’une circonstancenbsp;mémorable dans l’histoire de la foi primitive. En 319, après l’érec-tion des Basiliques de Saint-Pierre et de Saint-Paul, Ie pape saintnbsp;Sylvestre partagea les corps des deux Apótres et les pla^a par moitiénbsp;au Vatican et sur la Voie d’Ostie. Celte inscription est ainsi congue ;

SUB IIOC ALTAR

REQUIESCüNT GLORIOSA CORPORA APOSTOLORUM PETRl ET PAUllnbsp;PRO MEMETATE,

RELIQUA AUTEM MEDIETAS REPOSITA EST IN ECCLESIA S. PETRI ;

CAPITA VERO IN LATERANO.

« Sous eet autel reposent les corps glorieux des apótres Pierre et Paul, pour moitié; l’autre moitié est déposée dans l’église de Saint-Pierre : les têtes sont ó Saint-Jean-de-Latran. »

La pierre sur laquelle s’accomplit Ie partage, fut religieusement conservée et désignée aux hommages éternels de la piélé, par ces mots;

SUPER ISTO LAPIDE PORPHÏRETICO FUERUNT DIVISAnbsp;OSSA SANCTORUM APOSTOLORUMnbsp;PETRI ET PAULI

ET PONDERATA PER B. SILVESTRUM PAPAM

SUB ANNO DNI. C. C. C. XIX.

QUANDO FACTA FUIT H/EC ECCLESIA.

« Sur cette table de porphyre furent divisés les ossements des saints apótres Pierre et Paul, et pesés par Ie B. Sylvestre, Pape, en l’annéenbsp;du Seigneur trois cent dix-neuf, quand fut faite cette église. »

II résulte de ce fait que les princes des Apótres sont tout it la fois réunis et divisés. Pourquoi cela? En les réunissant dans Ie mémenbsp;tombeau, Rome a voulu confondre dans les hommages de la terre,nbsp;ceux qui, après avoir soutenu les mêmes combats, jouissent mainte-nant au ciel de la même couronne. En les laissant, chacun dans Ie lieunbsp;de son martyre, 'elle a voulu immortaliser Ie théótre de leur glorieusenbsp;victoire, comme en les pla^ant tous les deux ó l’Orient et ó l’Occident,nbsp;images du temps qui commence et du temps qui finit, elle a vouju

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BASILIQÜES DE SAINT-PIERRE ET DE SAINT-PAUL. nbsp;nbsp;nbsp;79

*^eUre sa jeunesse et sa vieillesse sous la garde puissante de ceux qui ^urent ses fondateurs et qui doivent être pendant toute Ia durée denbsp;Bon existence ses protecteurs et ses modèles (i).

Les deux Basiliques de Saint-Pierre au Vatican, et de Saint-Paul la Voie d’Ostie, forment ce qu’on appelle dans la langue caiholi-les Limina apostolorum (2) : lieux a jamais vénérables, que lanbsp;Piété reconnaissante du monde civilisé ne cesse de couvrir de sesnbsp;^aisers brülants; en sorte que Ie pèlerin du xix® siècle ne fait qu’ajou-ses prières et ses larmes aux hommages des chrétiens de la primi-bve Église. Tel était leur empressement auprès de ces tombes sacrées,nbsp;^Ue la violence même de la persécution ne pouvait Ie ralenlir, C’estnbsp;moment oü il faisait sa prière a la Confession de saint Paul, quenbsp;^i’anquillinus, noble père des saints martyrs Marc et Marcellin, futnbsp;Baisi par les païens et mis a mort au milieu des plus affreuxtourments.

Quand vous avez quitté la Catacombe de Sainte-Lucine, si vous en-'•quot;oz dans une des vignes situées sur la Voie d’Oslie, du cóté de Saint-^ébastien, vous arrivez a l’ouverture du cimetière des saints Félix, ^daucte et Comodilla. Bien que restauré par les papes saint Jean I etnbsp;Baint Léon III, il est fort endommagé ainsi que l’église de Saint-Félixnbsp;dont il reste h peine quelques ruines. Théfttre de glorieux combats,nbsp;®6Be Catacombe vous offrira sinon des monuments, du moins de pré-oieux souvenirs. Le trentième jour d’aoüt de Pan 502, sous l’empirenbsp;de Dioclétien, le préfet de Rome faisait conduire it la mort un prêlrenbsp;Oommé Félix. Arrivé sur la Voie d’Ostie au second milliaire, le cortégenbsp;B’arrête et le prisonnier re^oit l’ordre de se prosterner devant unnbsp;B^and arbre planté dans ce lieu. Félix, feignant d’obéir, se met ü ge-^^ux, fait sa prière, puis, se levant tout è coup, il souffle centre l’ar-en disant ; « Au nom de mon maitre Jésus-Christ, je t’ordonnenbsp;te déraciner et d’écraser dans ta chute l’autel sacrilége que tunbsp;couvres de ton ombre, afin qu’il ne soit plus un objet de déception (3).»nbsp;nom de celui qui a dit : Ceux qui croiront en moi feront de

(1) Janitor ante fores fixit sacraria Petrus,

Quis neget has arces instar et esse poli?

Parte alia Pauli circumdant atria muros,

Hos inter Roma est, hic sedet ergo Deus.

Guiiteu, Inscript., p. IHO.

1®) Venerande Basiliche amendue, appellate trol'ei, conl'essioni, e limirari apostolici. quot; Mazz. p. 194.

1^) Praicipio tibi in nomine mei Jesu (Ihristi, ut a radicibus tuis corruas et aram fun-

bus comminuas, ut araplius per te animse nullatenus decipiantur. Cod. ms. S. Petr, et ^alicell.

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80 nbsp;nbsp;nbsp;les TROIS ROME.

plus grands prodiges que moi-même, l’arbre obéit. Témoin du miracle, un païen se convertit a I’instant et participe au martyre du saint prêtre donl il parlagé la foi. Ignorant son nom, les chréliens Ie nom-inèrent AdauCtus, fleuren ajouté a la couronne-de Félix (i). Ce doublenbsp;supplice eut lieu non loin de la Catacombe de Comodilla dans la-quelle les héros de l’Évangile furent déposés.

En effet, si la Catacombe de Saint-Félix doit son premier nom au noble courage d’un martyr, elle doit Ie second è la charité non moinsnbsp;glorieuse d’une pieuse vierge, appelée Comodilla, qui l’avait fait ou-vrir probablement dans sa propriété. Déj^ deux vierges, célèbres dansnbsp;nos fastes sanglants, avaient immortalisé cette Catacombe. Sous l’em-pire de Valérien et la présidence de Gaïus, Digna et Emérita, viergesnbsp;romaines, toutes deux d’une naissance illustre, furent marlyrisées auxnbsp;regards de toute la ville et ensevelies par les frères dans Ie cimetlèrenbsp;de Comodilla sur la Voie d’Oslie. Objets de la vénération de FÉglise,nbsp;leurs corps sacrés se trouvaient en 7.57, par suite des ravages des Bar-bares, exposés ii la profanation, lorsque Ie pape saint Paul résolut denbsp;les transporter dans l’église des saints Denis, Rustique et Eleuthère.

Cette église avail été baiie dans la maison paternelle du saint Pon-(ife, par son frère Ie pape Étienne III, auquel, chose unique dans 1’histoire de la papauté, il succédait immédiateraent; la translation senbsp;fit avec une grande pompe. Quand Ie précieux dépot fut arrivé en facenbsp;de Féglise de Saint-Marcel, au Corso, on ne put, malgré tons lesnbsp;efforts possibles, Ie porter un pas plus loin. Le Saint-Père compritnbsp;que Dieu demandait que les corps des glorieuses martyres fussentnbsp;déposées dans Féglise de Saint-Marcel. Elles y sont encore, renferméesnbsp;dans une magnifique urne de porphyre; et leur présence plus d’unenbsp;fois s’est manifestée par d’éclatants miracles, nolamment en 1598, anbsp;1’époque de Fépouvantable inondation du Tibre (s).

En continuant a suivre la voie d’Ostie, on trouve, a sept milles de Rome, la Catacombe de Saint-Cyriaque. Gélèbre dans Fhistoire de lanbsp;primitive Église, et par les martyrs dont il fut la sépulture, et par lanbsp;Basilique dont il était enricbi, ce cimetière offre é peine quelquesnbsp;vestiges au voyageur actuel. Peut-êlre que des fouilles exécutées avecnbsp;soin metlront au jour les trésors sacrés qu’il renferme. En attendant,nbsp;il suffit de nommer quelques-unes de ses gloires,

Le seizièrae jour de mars de Fan 307, sous l’empire de Maximien,

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Hujus noiTien ignoraiilcs cliristiani, Adauclum eum appellaveriint,eoquodsanctonbsp;Folici auclus sit ad coronam. ilarlyr. Bom., ÖO aug.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Voyez Aringlii, lib. m, c. v, p. 25T.

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CATACOMBE DE SAINT-CÏKIAOUE. 81

diacre nommé Cyriaque, digne émule de saint Laurent par son ^èle el par sa charilé, était étendu sur un horrible instrument de sup-P^ice, appelé chevalet. A la grande joie de Rome païenne, on lui dis-^oquait tous les membres, on lui versait sur Ie corps de la poix bouil-*3Ute, on Ie déchirait de coups de baton; enfin, il rendait, en mourant,nbsp;plus incontestable témoignage que fhomme puisse rendre a sa foi.nbsp;^ c6lé de lui, et compagnons de ses tortures, étaient Largus, Sma-'“agdus et vingt autres soldats de Jésus-Christ, non moins intrépidesnbsp;'lue Ie saint diacre. Ils ont vaincu, el leur Iriomphe va commencernbsp;Pour ne plus finir. La foule, enivrée de leur sang, s’esl retirée dansnbsp;amphithéitres ou les lieux de débauche, comme Ie tigre rentrenbsp;'^ons son antre en se léchant les lèvres, après avoir dévoré sa proie.nbsp;^ois, comme au Calvaire, les chréliens restent sur Ie lieu du supplice,nbsp;ooniemplant avec amour les corps de leurs frères, et attendant Ienbsp;•Romenl de les ensevelir. lis les Iransportent en toule bamp;le dans lanbsp;*^oiacombe voisine de Sainte-Priscille, et, plus lard, dans celle quenbsp;Cyriaque a rendue si célèbre en lui donnant son nom. La tête de l’il-lusire Lévite repose a Sainte-Marie-m-Fia-Lala.

A.U souvenir de tant de courage, dont les Catacombes offrent, a ohaque pas, d’éclatanls exemples, la foi du pèlerin devient comme Ienbsp;diamant, et l’on ne peut s’empêcher d’adresser aux incrédules cetlenbsp;question sans réplique : « Aveugles que vous êtes! comment, nenbsp;Voyez-vous pas qu’il n’est personne au monde assez fou pour souffrirnbsp;sans motif de pareilles tortures, ou assez fort pour les supporter sansnbsp;1’assistance de Dieu (i) ? »

2 JANVIER.

Catacombes de la voie Ardéatine. — Inscriptions des tombeaux. — Caraclères dislincliis des inscriptions cbrétiennes. — Brièveté, simplicilé..— Contexture. — Le mol Deposi-tus. — Les acclamations. — Catacombes des Saints-Nérée et Achillée. — Triomphe

de sainte Flavie._Catacombes de Saint-Daraase et des Sainls-Marc et Marcellin. --

Stsloire de leur martyre. — Leur réponse. — Le pape saiiit Damase.

Les belles fêtes de Noël, les visites du premier de l’an et quelques ®lations faites aux bibliolhèques, avaient inlerrompu notre voyagenbsp;dans la Rome souterraine : nous le reprimes aujourd’hui. Dans la der-quot;^lere excursion, nous avions fait connaissance avec les noms divers,

U) Non inlelligelis, o miseri, neminem esse qui aut sine r.rlione velit poenam subire, aui tormenta sine Deo possit sustinere? — Min. Fel. Octav.

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8^ nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

les entrées, les galeries et les tombes de Timmortelle Néeropole. C’est la première page de ce grand livre : les inscriptions en forment unenbsp;seconde que nous allons éludier.

Dans les parlies explorées des Catacorabes, on a trouvé une multitude d’inscriptions appartenant aux premiers siècles de TÉglise. Soi-gneusement incrustées, pour la plupart, dans les murs intérieurs du Vatican, elles composent une vaste galerie, dont l’étude est une sourcenbsp;inépuisable de eonnaissances et de souvenirs délicieux. En regard desnbsp;inscriptions chrétiennes, on a placé un nombre correspondant d’inscriptions païennes, en sorte qu’il est facile d’apprécier les différencesnbsp;qui distinguent les unes des autres. Ces précieux monuments, joints hnbsp;ceux que nous avons rencontrés dans les différents cimetières.servirontnbsp;de base aux éclaircissements que nous allons donner.

La simplicité, la brièveté, la contexture, l’emploi de certains mots et de certains signes distinguent essentiellement les inscriptions cbré-tiennes, et empêchent de les confondre avec les inscriptions paï(nnes.

D’abord, la simplicité. Le nom de la personne, son üge, l’époque de son inhumation, sa mort dans la foi de l’Église : voila, en général, cenbsp;que disent les plus longues inscriptions de nos temps primitifs. Citonsnbsp;seulement quelques exemples :

D. p.

FLAV1.E, ISFXNTIS DVLCISS1M.E QVaj VICXIT ANXO V.NO ET MENnbsp;ni. D. P. V. ID. OCT. IN PACE.

« Au Dieu tout-puissant. — A Flavie, enfant bien-aimée, qui vécut un an et trois mois. Déposée le cinq des ides d’octobre. »

D. M.

SECVNDINVS FATRI SVO VICTORINO INnbsp;nbsp;nbsp;nbsp;B. M. QVI VIXIT. ANNIS XXXIII

ET MENSES VIII. DEPOSITVS XIII KAL.

OCTOB. IN PACE.

« Au Dieu très-grand. Secundinus è son frère Viclorin, bien méri-tant en Jésus-Christ, qui vécut trente-trois ans et huit mois. Déposé le treize des calendes d’octobre, en paix. »

Bien des fois, les inscriptions ne contiennent que le nom de la personne, la date de sa sépulture et sa morl dans la paix de l’Église.

VALER IN PACE VRBICA IN PACE DEPOSOVDICE VII IDVS SEPTEMBRIS.

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BRIÈVETÉ DES INSCRIPTIONS.

« Valéria dans la paix. Urbica dans la paix. Déposées Ie septième jour des ides de septembre.

VENERANE IN PACE DEPO SITVS. III. KAL. JVNIAS.

« Veneranus en paix. Déposé Ie trois des calendes de juin. »

Souvent même, on ne trouve que Ie nom du défunt et sa mort dans foi. Telles sont les inscriptions suivantes, dont la première fut dé-Couverte, en notre présence, dans les Catacombes de Sainte-Agnès.

TEODORVS IN PACE.

« Théodore dans la paix. »

CHRISTINE IN PACE.

« Christine dans la paix. »

Enfin, dans un grand nombre de cas, on ne lit autre chose que Ie bom de la personne.

HILARI.E

® A Hilaire. »

satvrnini,

a De Saturnin. »

La brièveté. — II est bien connu, parmi les archéologues, que plus les inscriptions tumulaires sont brèves, el plus elles approchent desnbsp;lemps primilifs (i). En eiïet, rien de plus facile h comprendre que,nbsp;pendant les persécutions nos fossoyeurs, manquant, d’une part, dunbsp;temps, de l’habileté, des outils nécessaires; d’autre part, absorbés parnbsp;Ie soin d’ouvrir les Catacombes el par la nécessité d’ensevelir les vic-times, qui, dès Ie règne de Néron, formèrent, au rapport même denbsp;Tacite, une multitude énorme, muUüudo ingens, ont dü se bomer énbsp;tracer en loute hamp;te Ie nom essenliel de la personne et Ie signe carac-téristique de sa mort, si c’était un martyr. Souvent même ils suppri-bnaient Ie nom pour tracer simplement la palme : paree qu’il impor-tait beaueoup plus de faire connallre la qualité de martyr que Ie nomnbsp;de la personne.

De 1^, Ie très-grand nombre de martyrs inconnus qu’on trouve dans les galeries. D’autres fois Ie nom est exprimé; mais comme dans lanbsp;dernière inscription cilée plus haut, il ne se trouve point au cas voulu :

(0 Marchi, p. S4.

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84 LES TROIS ROME.

preuve évidente que l’inscription attend une main qui l’achève. Ou la mort a glacé cette main, ou Ie glaive l’a coupée, ou mille autres cir-constances aisées a deviner, dans ces temps difliciles, Tont erapêchéenbsp;d’agir et rendu vaine l’intention du Fossoyeur. Néanmoins, tout n’estnbsp;pas perdu, puisque cette mutilation même est un témoignage éloquent des angoisses et des périls qui environnaient nos héroïquesnbsp;ancêlres.

La simplicité et la brièveté ferment done Ie premier caractère qui distingue les anciennes inscriptions chrétiennes. Quelques inscriptions païennes, prises comme point de comparaison, Ie rendront encore plus saillant. Les trois suivantes sonl choisies entre les plusnbsp;courtes publiées par Marangoni (i).

D. M.

SEMPRONI^

MAXIMILL.E VIX. AN. XXInbsp;MEN. VlII. D. XIV.

FECIT HERENNIAnbsp;JVNILLA. FIL.

SV.E.

ET. SIBI. ET S

« Aux Dieux Manes. A Sempronia Maximilla, qui vécut vingt-un ans buit mois quatorze jours. Herennia Junilla a fait ce monument amp; sanbsp;fille chérie et è elle et aux siens. »

D. M.

L. DtDIO PROeVLO

FECIT

DIDIA

restitvta

MATER

FILIO

PIENTISSIMO BENEMERENTInbsp;VIXIT ANNISnbsp;XLI. MENS. IIII.

DIEBVS TRIBVS

(0 Delle cose gemilische, etc., c. ixxxii, p. 468et 471.

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CONTEXTURE. nbsp;nbsp;nbsp;85

« Aux Dieux Mamp;nes. A Lucius Didius Proculus. Didia Restiluta, sa ®ère, a fait ce monument è son fils, objet de ses regrets et de sonnbsp;oniour, qui vécut quarante-un ans qualre mois trois jours. »

La contexture. — II est extrêmement rare que la filiation du défunt le nom de son père ne soient pas exprimés en tête des inscriptionsnbsp;psïennes ; je ne sais s’il en est un seul exemple dans les inscriptionsnbsp;®hrétiennes ;

M. ANICIVS. M. F. CAM.

TETTIVS. ET ANICIAE. MCE F.

ET. ATINIAE FORTVNATAE

CONJVGI. SVAE. ET. SVIS POSTERISQ.

« Marcus Anicius Camtetlius, fils de Marcus, a fait ce tombeau pour Anicia Nice (Victoire), sa fille, et pour Atinia Fortunée, sonnbsp;Spouse, et pour les siens et pour ses descendants. »

En outre, si simple qu’elle soit, l’lnscription païenne porte presque ^oujours le caractère d’exclusion, et va jusqu’a mesurer la conlenancenbsp;fiu terrain acheté pour le tombeau, circonstance qu’on ne rencontrenbsp;jamais dans les inscriptions chrétiennes. En voici un exemple, entrenbsp;mille :

PHILARGVRVS COCVS. PR.

FAMILIAE. ET. LIBER.

LOCVM. SEPVLCRl nbsp;nbsp;nbsp;*

D. S. P. D. IN. FR. P. XVI IN AGR. P. XII

« Philargurus, cuisinier du préteur, a, pour sa familie et pour ses affranchis, acheté, de son argent, ce lieu de sépulture, qui a seize piedsnbsp;front et douze de profondeur. »

Enfin, pour mettre le lecteur en étal de juger par lui-même de la oontexture païenne, je citcrai eomme modèle cette inscription irré-

Pgt;‘ochable:

DIS MANIBVS.

T. POEDIO. T. F. AN. MARTIAL.

VETERANO EX COIII PR.

JVLIA VICTORINA CONJVGI. K. ET SIBl SVIS POSTERQ. SVOR. FEC. ET

L. POEDIVS CLEMENS PATER. ET

4.

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86 LES TROIS ROME.

M. CLAVDIVS. VIRILIS. AMICO. B. M.

IN. FR. P. 1111. IN AGR. P. lil.

(( Aux Dieux MAnes. Pour Titus Poedius, Annius Martialis, fils de Tilus, véléran de la première cohorte prétorienne, Julia Victorina,nbsp;pour son époux chéri et pour elle, pour les siens et pour leurs descendants, a fait ce tombeau, ainsi que Lucius Poedius Clemens, pournbsp;son frère, et Marcus Claudius Virilis, pour son bien méritant; lequelnbsp;tombeau a quatre pieds de front et trois de profondeur. »

On pent voir maintenant combien la forme des inscriptions pa’iennes diffère de celle des inscriptions chretiennes. Les premières son plusnbsp;travaillées, les secondes plus simpfÈs; les premières témoignent toutnbsp;è la fois du loisir de l’ouvrier et des moyens d’exécution; les secondesnbsp;annoncent la précipitation et Ie manque de ressources; les premièresnbsp;sont plus développées; les secondes se composent souvent de deuxnbsp;mots, quelquefois d’un seul; ce qui est sans exemple, méme sur lesnbsp;urnes sépulcrales ou dans les colombaires.

L’emploi de certains mots. 11 est un autre caractère plus distinctif encore que les précédents; je veux parler de l’emploi de certains mots,nbsp;que l’on trouve toujours dans les inscriptions chrétiennes achevées, etnbsp;que l’on ne trouve jamais dans les inscriptions païennes : tels sontnbsp;les mots depositus, deposilio, dormitio avec les acclamations. 11 en estnbsp;de même des mots bisomum, ou trisomum, tombes ii deux ou troisnbsp;corps. Compléteraent inconnus dans les monuments païens, ces motsnbsp;sont d’un usage très-fréquent sur les tombes chrétiennes.

Quant au mot depositus, déposé, tous les archéologues remarquent avec raison, qu’il est essentiellement propre au christlanisme, dont ilnbsp;révèle Ie dogme par excellence, Ie dogme de la résurrection de la chair,nbsp;ignore des païens. Suppose/, une religion qui se tait sur la conditionnbsp;future du corps de Thomme rendu h la terre, ou qui, tout en admet-tant l’immortalité de l’iïme, regarde la mort comme l’anéantissementnbsp;de notre chair; il est évident que les sectateurs de cette religion serontnbsp;muets sur Ie fait de la résurrection : tel est Ie cas des païens. Aussinbsp;jamais leurs tombes, leurs mausolées, leurs colombaires, leurs urnesnbsp;sépulcrales, ne laissent apercevoir un mot, un signe de cette vériténbsp;consolante. Bien différente est la religion chrétienne. En tête de sonnbsp;symbole, elle inscrit Ie dogme de la résurrection de la chair, commenbsp;elle place au premier rang de ses préceptes Ie grand commandementnbsp;de la charité universelle. Déja nous avons vu que les cimetières pri-mitifs sont une éloquente traduction du précepte de l’amour; il en estnbsp;de méme du dogme de la résurrection.


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LES ACCLAMATIONS. nbsp;nbsp;nbsp;87

Aux yeux du christianisme, la mort n’étant qu’un sommeil, il a done fallu, pour exprimer cette vérité nouvelle, trouver des termesnbsp;nouveaux. En effet, la langue humaine s’est enrichie de deux parolesnbsp;aussi rayonnantes de lumière que fécondes en sacrifices généreux etnbsp;en consolations ineffables. II y a, dans les lois romaines, un mot sa-eramentel employé pour designer un dépot, e’est-a-dire I’objet confiénbsp;® une personne, avec obligation de le rendre. Le dépositaire n’est donenbsp;pas propriétaire de la chose remise a sa garde, il ne peut ni en user,nbsp;öi en abuser, ni la retenir indéfiniment. Or, le mot qui exprime cetnbsp;acte de conQance, est précisément celui que le christianisme a choisinbsp;pour désigner facte par lequel on confie a la terre le corps de ses en-l^ants : depositus, depositio. « Dans le sein de la terre, d’oii vous aveznbsp;ólé tiré, dit-il a fhomme, vous êtes sous la main de Dieu, qui veillenbsp;aur vous; loin de vous détruire, la terre vous gardera. Déposé dansnbsp;Ses entrailles comme dans le sein d’une mère, votre corps en sorliranbsp;pour une nouvelle vie. Afin que vous le sachiez bien, facte par lequelnbsp;jo lui confie voire dépouille mortelle s’appellera désormais du nomnbsp;consacré par les lois pour exprimer le dépót ; depositus, depo-^itio (i). »

Puisque chaque corps n’est qu’un dépót, il fallait un autre mot pour désigner le lieu on reposent tous ces corps deslinés a être rendusnbsp;^ la vie. Ce mot, le christianisme fa encore Irouvé. Dans sa langue,nbsp;les champs des morts s’appellent cimetières, c’est-è-dire, dortoirs (2).nbsp;Que fait-on dans un dortoir? On y dort. Et pourquoi y dort-on, si cenbsp;n’est pour se reposer et se réveiller ensuile? De la, les mot* : repos,nbsp;sommeil; quies, dormitio, quiescit, dormit, qu’on trouve a chaquenbsp;pas dans nos cimetières primitifs. Dépót et dortoir, admirables paroles! qui, répétées plusieurs milliers de fois par la grande voix desnbsp;Calacombes, et par la voix plus faible de chaque loculus, remplissentnbsp;du dogme consolateur de la résurreclion 1’oreille, fesprit et le coeurnbsp;du pèlerin; de même que les myriades d’éloiles, qui, pendant f obscu-rtlé de la nuit, scintillent au front des cieux, font distinguer les ob-jels que fabsence du soleil tient enveloppés dans 1’ombre.

Afin de mieux sentir toute la signification du mol par lequel 1’Église ®xprime la sépulture, il suffit de le comparer avec le terme usilé parmi

(*) C’est le sens que Cicéron lui-même donne au mot depositus, quand il appelle de-Posila, déposées, les choses confides a la garde d’un tiers: Neque semper deposita red-'ienda. Offic., ni,2ó; Digest., 16,0,1, 5; et Florent., ibid., 17.

(s) Coemeterium uldomus, in qua hospites dormiunt. — Strab., lib. i, De Reb. sub., c. VI—Dormitoria, ut discamus eos qui illic sili sunt, non mortuos, sed somno conso-PUos et dormire. — S. Chrys., Serm., xxxii, De Appcll. coemeter.

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88 LES TROIS ROME.

les païens. Persuadés que Ie dépót de leurs morts était absolu, irrévo-cable, éternel, ils Ie désignaient par ces mols : situé, placé, compose: situs, positus, compositus; les cbrétiens, qui Ie regardaient commenbsp;temporaire, l’exprimaient par les paroles que nous connaissons. Quel-ques inscriptions païennes et cbrétiennes rendront palpable cette difference :

D. M.

HIC SITVS EST L. .EL. \BBICVS.

« Aux Dieux Mdnes. Ici est situé Lucius .iElius Urbicus. »

MVSCILIVS CARVS SVIS ANN. nu. H. S. E. ET. TE. ROGOnbsp;PRAiTERlENS. VT. LEGAS. ETnbsp;DICAS. SIT. T. T. L.

(( Muscilius, cher aux siens, ègé de quatre ans, est ici placé. Et je te prie, passant, de lire et de dire : « Que la terre te soit légère. »

AVRELIA. VALERIA. JANVARIA QVAÏ VIXIT. ANNIS XXVIInbsp;M. V. Dl. X. DEPOSITA EST IN PAGE.

« Aurelia Valeria Januaria, qui vécut vingt-sept ans cinq mois dix jours. Elle a été déposée dans la paix.

ZOTICVS HIC AD DORUIENDVM.

^ (( Ici est Zoticus pour dormir. »

FILOS TORGVS HIC DORMIT.

(t Filostorge dort ici. »

DORMITIONE ANC. DEI OLYNPIATIS. PARENTESnbsp;FILI.E. B. M. F. Q. AN. B. V.

M. XI. D. XXI.

« Sommeil ou lieu du sommeil de la servante de Dieu Olympiade. Ses parents ont fait cette tombe ^ leur fille cbérie, qui vécut cinq ansnbsp;onze mois vingt et un jours. »

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LES ACCLAMATIONS. 89

CRESCENTIUS VISIT ANNVM ET OCTO ME.NSES IN PACE QVIESCE

« Crescentius vécut un an et huit mois. Repose en paix. »

ROMANVS FELICISSIMO PATRI QVI VISIT AN. P. M. XL. IN PA. QVIESCIT.

« Romain amp; Félicissime, son père, qui vécut quarante ans plus ou '®oins : il repose en paix. »

Les acclamations adressées aux défunts sont un autre signe qui dis-liogue les inscriptions chrétiennes des inscriptions païennes. A la mort d’une personne chérie, des larmes coulent des yeux, des souplrs s’é-^happent du coeur; des voeux se pressent sur les lèvres pour ceux quenbsp;Oous avons perdus ; tout cela est dans la nature. On trouve done surnbsp;tombes chrétiennes, comme sur les tombes païennes, des regrets,nbsp;•lös aeclamations adressées aux morts; car, nous l’avons dit, la religion n’est point venue pour détruire la nature, mais pour la perfec-L'onner. Les aeclamations païennes traduisent une affection tout hu-®aine, mêlée d’un certain désespoir occasionné par l’ignorance dunbsp;*logme consolateur de la résurrection future. Non moins vifs sont lesnbsp;*‘6grets exprimés sur les tombes chrétiennes; mais ils sont ennoblis,nbsp;Consolés par l’espoir du bonheur dont jouit Ie défunt dans la vie éter-nelle, et de sa réunion future avec ceux qu’il laisse dans les larmes.nbsp;Citons seulement quelques exemples, car la Voie Ardéatine nous réclame.

Pères, mères, frères, soeurs, amis, époux, épouses, affranchis très-fcgrettables, incomparables, très-pieux, très-chers, doux, très-doux, Lien méritants, objets de larmes et de douleurs, très-innocents; quenbsp;is terre vous soit légère; que vos os reposent tranquilles; adieu,nbsp;®dieu, adieu : tels sont les expressions de lendresse et les voeux ordi-ttaires parmi les païens (i).

TE LAPIS ORTESTOR LEVITER SVPER OSSA QVIESCAS ET MEDl^ ^TATI NE GRAVIS ESSE VELIS.

« Pierre, je t’en conjure, pèse légèrement sur ces os, et ne sois pas lourde a un mort qui est jeune encore. »

(') Desideralissimi, incompnrabiles, piissimi, carissimi, dulces, dulcissirai, benerae-(quot;entes, pieuüssimi, innocenlissimt; sit libi terra levis; ossa tua bene quiescant. Vale. '’ale. Vale.


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90 LËS TROIS ROME.

0. D. M. C. VALERE T.

T. SVCCESSI. HIERO T.

B. ET. ROMAiSA FILIO . L.

Q. CARISSIMO V. A. XI. S.

M. VI. D. XIII.

« Aux Dieux Manes. A Gains Valerius Successus. Hiero et Romana, A leur fils chéri, qui vécut onze ans six mois treize jours. »

Geile bizarre inscription, publiée par Muratori, a fort exercé les savants. La difRculté d’interprétation est venue de ce qu’on faisaitnbsp;entrer dans cbaque ligne les initiales et les finales; tandis que les si-gles qui commencent doivent se détacher et se lire de haut en bas ; cenbsp;qui donne les mots conuus ; Ossa tua bene quiescant: Que tes os reposent tranquilles. II en est de même des signes qui terminent, etnbsp;dont la lecture doit se faire en remontant. Par ce moyen, on obtientnbsp;1’acclamation ordinaire : Sit levis terra tibi : Que la terre te soitnbsp;légère.

Je me suis souvent demandé quelle était Ia signification de cette dernière phrase, et l’inteniion des païens en la faisant graver avecnbsp;tant de sollicitude sur la tombe de leurs amis ou de leurs proches?nbsp;Suivant Ie célèbre professeur Vermiglioli (i), les païens attachaientnbsp;une idéé de malheur et de bonte a la raalpropreté et a I’encombre-ment des tombeaux. De ha, entre bien d’autres lémoignages, l’inscrip-tion suivanle, oü l’on voit une femme, Ponzia Justa, léguer 600 sesterces, afin de lenir toujours propre la tombe d’une de ses alfranchies,nbsp;nomméeFortunata : Ut monvmentvm remvndetvr, et plus clairement:nbsp;Ne. patiare. mevs. tvmvlvs. increscere. silvis. De Pi encore, la scienbsp;gravée sur un si grand nombre de tombeaux, afin d’exprimer Ie soinnbsp;avec lequel les hériliers devaient empècber les ronces et les épines denbsp;pousser sur la terre des morts. De Ia enfin, cette imprécation lancéenbsp;centre les personnes odieuses ;

Terra tuumspinisobducat, Lena, sepulcrum.

« Que la terre produise des épines qui couvrent, Léna, ton sé-pulcre. »

Les expressions de tendresse et de regret que nous avons vues sur les tombes païennes, se trouvent aussi exprimées dans les mêmes ter-raes sur les tombes chrétiennes. II en est autrement des acclamations.

(i) hczioni elementari di Archeologia esposte nella Pontificia Universita de Perugia, da Giov. Battista Vermiglioli.'iM-ano, 1824; 2 vol. in 8, t. ii, p. 142.


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LES ACCLAMATIONS. 91

Au lieu des froides et insignifiantes formules : Que la terre te soit legére! Que tes os reposent tranquilles! les chrétiens font deux sou-haits pleins de consolation et d’espérance : c’est la vie et la paix éter-oelles en Dieu qu’ils souhaitent è leurs amis.

DIOSCORE VIBE IN ETERNO.

« Dioscore, vis dans rélernité. »

FAVSTINA DVLCIS BIBAS IN DEO.

« Douce Faustine, vis en Dieu. »

Quant l’acclamation in pace, elle se trouve presque sur chaque '¦ombe chrétienne, et ne se trouve que la. Or, pour peu qu’on veuillenbsp;réfléchir a la religieuse fidélité avec laquelle les premiers chrétiensnbsp;transporlaient dans leurs usages, dans leurs moeurs, dans leurs pa-•¦oles, les exemples et les lemons du divin Maitre, on ne pourra s’era-pêcher d’y voir Ie salut donné par Nolre-Seigneur a ses Apótres, aprèsnbsp;avoir consommé sur Ie Calvaire l’oeuvre de la rédemption. Ce salut,nbsp;dont Ie sens est lout a la fois si simple, si sublime et si étendu, anbsp;passé des lèvres du Sauveur sur celles de 1’Église, son épouse. Les inscriptions sépulcrales Tont emprunté a la liturgie, et sous quelquenbsp;forme qu’elle soit gravée par l’outil du Fossoyeur, cette divine parolenbsp;conserve la signification évangélique qu’elle a re^ue primitivement etnbsp;qui ne saurait varier.

Laissons maintenant les inscriptions tumulaires : cette belle page du grand livre des Catacombes n’est pas encore épuisée; nous y re-viendrons domain. Aujourd’hui, nous allons franchir l’antique porienbsp;Capena, et descendre dans les cimetières qui l’avoisinent.

Salut, d’abord, a Ia vénérable église Domine, quo vadis, oü la Voie Ardéatine, quittant la Voie Appienne, tourne sur la droite et conduitnbsp;^ la Fasciola. Ici se trouve la Catacombe des Saints-Nérée et Achillée,nbsp;%alement connue sous Ie nom de Sainte-Pétronille et de Salnte-Flavie.nbsp;Pour en trouver l’origine, il faul remonler au temps des Apótres (t).nbsp;C Évangile nous apprend que saint Pierre avail été marié, el la tradition lui donne une fille appelée Pétronille (2). Toutefois, quelques his-toriens ont pensé que Pétronille n’était que Ia fille spiriluelle de l’A-pótre, ó qui elle éiait devenue particulièrement chère par sa piélé et

CO S. Igii. Ep, IX.

(2) Clemens Alcxand., Slrom. lib. vu; S. Chrysost., Homil. iv in Isaiarn.

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92 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

son courageux dévouement (i). Quoi qu’il en soit, Ie corps de I’iHustre vierge fut déposé dans une crypte ouverte sur la Voie Ardéatine, anbsp;vingt minutes de Rome. Celte crypte était dans un jardin appartenanlnbsp;ü sainte Flavie Domitille, cette autre fille de saint Pierre, nièce desnbsp;empereurs Titus et Domitien, et si célèbre pour son courage dans lesnbsp;annales de la primitive Église.

Née sur les marches du tróne, Flavie s’élève dès la fleur de l’öge jusqu’i l’héroïsme de l’humilité chrétienne, et conserve sans tache,nbsp;au milieu du luxe et de la corruption de la cour des Césars, Ie lys dé-licat de la virginité. Son indigne parent, l’empereur Domitien, devailnbsp;naturellement haïr cette jeune personne qui faisait Ie charme et l’or-gueil de sa familie. Ayant appris qu’elle est chrétienne, et qu’elle anbsp;voué sa virginité enlre les mains du pape saint Clément, il la fait re-léguer dans File Ponzia, oü elle souffre un long martyre. Par ordrenbsp;du même prince, elle est conduite ii Terracine ainsi que deux viergesnbsp;ses compagnes ou ses suivantes, Euphrosine et Théodora, et hrüléenbsp;vive dans sa chamhre.

Avec la jeune princesse raoururent Nérée et Achillée, ses serviteurs, il qui elle était, après Dieu, redevable de la foi. Relenue peut-être parnbsp;Ie rang illustre de Flavie, la cruaulé de Domitien ne connut plus denbsp;hornes quand il fut question de ses officiers. Le consulaire Memmiusnbsp;Rufus les fait étendre sur le chevalet, en ordonnant qu’on leur brüle lesnbsp;cötés afin de les forcer è dire qu’ils ont été baptisés par saint Pierre,nbsp;et qu’ils sont disposés è sacrifier aux dieux de l’empire. Vaines tortures ! les saints martyrs restent muets : et le glaive termine leurnbsp;glorieux combat. Vainqueurs de César lui-même, les courageux athlè-tes méritaient les honneurs du triomphe; et Flavie devait rentrernbsp;dans la grande Rome, plus glorieuse que son aïeul et son oncle, aprèsnbsp;la prise de Jérusalem. Disciple, comme sainte Flavie, des saintsnbsp;Nérée et Achillée, Auspicius recueille avec soin les restes précieux desnbsp;martyrs, les place sur une petite barque, et se confiant au Dieu quinbsp;domine les flots et les tempêtes, il fait voile vers Rome. Jamais la mernbsp;Thyrrénienne, tant de fois sillonnée par les galères victorieuses desnbsp;Remains, n’avait porté de si riches dépouilles. Le petit équipage arrive au port; et Auspieius, pilote et patron du navire, dépose lui-même les saintes dépouilles dans le jardin impérial de sainte Flavie (2).

Mais un triomphe plus éclatant était réservé aux héros de la foi.

(0 Aringhi, lib. iii, c. xviii, p. 286.

(i) Haic nos referenle ipso Auspicio cognovimus, qui eorum corpora rapuit el sepcU-vii. Cod. tns, Valic, et Vallic»

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CATACOMBE DES SAINTS-NÉRÉE ET ACHILLÉE. nbsp;nbsp;nbsp;93

Retirés des Catacombes, leurs corps sacrés furent transportés par Rrégoire IX dans la diaconie de saint Adrien. 11s y recevaient depuisnbsp;Plusieurs siècles les hommages empresses des fidèles, lorsque l’im-®ortel Baronius, devenu cardinal du litre des Saints-Nérée et Achillée,nbsp;fit reslaurer la Basilique de la Fasciola et oblint de Clément Vlll lanbsp;permission d’y rapporter les saints martyrs. Le H mai de I an IS97nbsp;^ut pour Rome chrétienne un jour qui rappela les plus brillants spectacles de Rome païenne. Au milieu d’un magnifique corlége, composénbsp;•le tout ce que la capitale du monde avail de plus distingue; parminbsp;chants de la gloire, les larmes de l’amour, les accents de la prière,nbsp;tes nuages de l’encens, une illustre princesse, héroïne de la foi etnbsp;ttoble fille des Césars, traversait en iriomphe les grandes rues de lanbsp;^*lle éternelle; passait sous Fare de Septime-Sévère, et sous celui denbsp;Titus, vainqueur des Juifs, et son noble parent; puis, en suivant lanbsp;Toie Triomphale, elle entrait dans la Voie Appienne, et s arrêtait surnbsp;Tï Voie Ardéatine, en face du jardin, antique propriété de sa familie.nbsp;Ra. Plavie descendait de son char; et, comme une noble exilée, ren-Irait, glorieuse, au foyer paternel. Depuis ce jour, un temple augustenbsp;sa demeure; elle y repose au milieu des hommages de la lerre,nbsp;resplendissante de la double auréole de la virginité et du martyre,nbsp;*iue le Ciel a plaeée sur son front (i).

Cependant le cimetière de Sainle-Flavie s’étendit rapidement, et bienlót il devint un quarlier de la grande Catacombe de Prétextat,nbsp;dont nous parlerons dans quelques jours.

Non loin s’ouvre la Catacombe de Saint-Damase et des Saints-Marc et Marcellin. Bien qu’on puisse la considérer comme une partie dc 1’immense cimetière de Saint-Callixte, cependant elle en est séparéenbsp;dans les Actes des Martyrs, comme dans les ouvrages des archéo-^ogues. Elle s’étend du cóté de l’ancienne Vole Ardéatine, et doit sesnbsp;différents noms, soit aux héros dont elle rcQUt les glorieuses dépouil-R®, soit a Fimmortel Pontife pour qui elle fut un objet de vénérationnbsp;Particulière. Le 18 janvier de 1’an 286, sous l’empire de Dloclélien,nbsp;préteur Fabien arrêtait deux frères nommés Mare et Marcellin. Ac-rusés et convaincus d’être chrétiens, ils sont cloués è un arbre, etnbsp;Percés, comme des cribles, a coups de lances. De temps en temps, lenbsp;B'ge suspend l’exécution et, louché d’une hypocrite compassion, ünbsp;dit è ses viclimes ; « Malheureux! rentrez en vous-raêmes, et arra-rhez-vous aux tourments. » Des lèvres mourantes des glorieux champions de notre foi, s’échappe celte réponse inconnue a toute autre

(*) Bar. efot. ad Martyr., 12 mai; Vie de S. Phil, de Néri, lib. ii, c. ii, p. 83.

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94 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

bouche qu’amp; une bouche de calbolique et de martyr : « Jamais festin ne fut aussi délicieux que les souffrances que nous endurons pournbsp;Jésus-Christ. Nous commen^ons a être fixés dans son amour; puisse-t-il nous permettre de souffrir jusqu’ii ce que nous ayons dépouillé Ienbsp;vêtement de notre mortalité (i). »

Quel style! quel renversement étrange de sentiments et d’idées! Et pourtant, tel fut, en Orient et en Occident, Ie langage de la foi nouvelle; tel il dut être, puisqu’il était tout ensemble l’expression denbsp;l’Esprit-Saint lui-même, esprit unique qui parlait par la bouche denbsp;tous les martyrs, et la manifestation d’un dogme nouveau, transformateur de rhomme et du monde.

Quant a la multitude des martyrs ensevelis dans cette Catacombe, il faut renoncer 5 la connaitre et se contenter de redire avec Ie papenbsp;saint Damase : « Lecteur, qui que vous soyez, vénérez les corps desnbsp;saints qui reposent ici et dont l’antiquité n’a pu conserver, ni Ie nom,nbsp;ni Ie nombre (2). » Ce que l’antiquité a parfaitement conservé, c’est lanbsp;mémoire du glorieux Pontife qui consacra ses ressources it orner lesnbsp;tombeaux des glorieux champions de l’Évangile, son talent poétique ènbsp;chanter leurs vertus, et qui après avoir restauré cette Catacombe, luinbsp;légua son corps et lui donna son nom. Saint Damase, Ie docteur viergenbsp;de l’Église vierge, la terreur des Ariens, la colonne de la foi en Orientnbsp;et en Occident pendant prés d’un siècle, l’ami de saint Jéróme, la lu-mière de son époque, montra la piété la plus tendre envers les saintsnbsp;martyrs. Non content de visiter et d’orner leurs tombes, il voulut reposer auprès d’eux avec tout ce qu’il avait de plus cher au monde, sanbsp;mère et sa soeur (5). Inhumé dans la Catacombe des Saints-Marc et

(1) Nunquam tam jucunde cpulati sumus, quam ha3C quaj Jesu Christi causa perferi-mus, in cujus amore nunc fixi esse ccepimus: uiinam tamd'iu nos haec pali sinat, quam-diu hoe corruplibili corpore vestili sumus. — Mazzol., p. 225.

(2) Sanctorum quicumquelegis venerare sepulcrum;

Nomina nee numerum potuil retinere vetuslas.

(5) On aime 4 voir ce grand homme, ce saint Pontife, bon fils et bon frère, exprimer sa tendresse pour sa jeune soeur Irène, pleurer sa mort, raarquer sa place auprès d’elle,nbsp;et mauifester l'espérance de ressusciter glorieux avec elle. Voici la double épitaphe parnbsp;laquelle il consacre tous les sentiments de son coeur de frère et de Pontife :

Hoe tumulo sacra Deo nunc membra quiescunt Hic soror est Damasi, nomen signaris, Irenm.

Voveral ha;c sese Christo cum vita maneret,

Virginis ut meritum sanctus pudor ipse probaret.

Bis denas hyemes needum compleverat Ktas,

Egregios mores vitae praecesserat aetas.

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CATACOMBES DE LA VOIE ARDÉATINE. nbsp;nbsp;nbsp;95

Marcellin, il fut plus tard Iransporté dans l’église de Saint-Laurent-^‘^-Damaso, oü, par un juste retour, il est l’objet de la profonde et constante vénération des fidèles.

5 JANVIER.

^'Stacombes de ia Voie Ardéaline (suite). — Nouvelle étude des inscriptions. — Noms qui s’y trouvent. — Dédicace aux Dieux Manes. — Ponctuation.— Age des inscriptions__Catacombes de Sainte-Balbine et du pape saint Marc. — Histoire.

Rome est un monde, monde de souvenirs païens et chrétiens, monde tie richesses, dont il faut plus de temps a la science pour faire Ie tournbsp;tju’il n’en fallut a Colomb pour découvrir l’Amérique; plus de tempsnbsp;9ue n’en mettent aujourd’hui les fins voiliers de New-York ou les bailments a vapeur du Havre ou de Porslmouih, pour aller d’un pöle hnbsp;1’autre. Comme Ie missionnaire qui ne peut avancer au travers desnbsp;forêts vierges de l’Orégon que la hache it la main, ainsi Ie pèlerin desnbsp;Catacombes ne peut faire un pas sans être arrêté par quelques pré-cieux obstacles, dont Ie charme Ie séduit et suspend Ie cours de sonnbsp;itoyage. Les inscriptions, qui déja nous avaient retenus la veille, ob-liennent aujourd’hui une nouvelle et longue audience. Comment lanbsp;leur refuser? il leur restait tant de cboses a nous dire! Hier elles nousnbsp;avaient expliqué leurs caracières dislinctifs; en ce moment elles de-vaient nous rendre compte des noms qu’elles présenten!, de leur dédicace, de leur ponctuation et de leur flge.

Pour obscurcir 1’éclat des signes généraux qui dislinguent les inscriptions chréliennes des inscriptions païennes, on a dit : Les unes ct les autres offrent les mêmes noms propres, quelquefois la même dédicace païenne. Ainsi, ou toutes les inscriptions des Catacombes nenbsp;®t)nt pas chréliennes, ou les premiers chrétiens étaient encore è moitiénbsp;païens ; telle est la difficulté dont l’intéressante solution va nous oc-cuper.

Que les Inscriptions des Catacombes présenten! un grand nombre

Propositum mentis pielas veneranda puellae,

Magnificos 1'ruclus dederat melioribus annis.

Qui gradiens Pelagi fluclus compressit amaros;

Vivere qui prajslal morienlia seniina terra;

Solvere qui potuit Lazaro sua vincula mortis.

Post tenebras fratrem, post terlia lumina solis,

Ad superos iterum Maria; donare sorori,

Post cineres Damasum faciet qui surgcre credo.

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96 lES TROIS ROME.

de noms païens, et même les noms des dieux et des déesses, c’est on fait incontestable, mais qui ne prouve en aucune manière Ie paganismenbsp;des tombeaux. En devenant chrétiens, les premiers fidèles conservè-rent généralement leurs noms propres; aucune loi ne condamnail eetnbsp;usage (i). Ne lisons-nous pas dans les Actes des Apótres les noms par-faitement païens de Caïus, d’Alexandre, d’Apollon? Saint Paul lui-même ne changea-t-il pas son nom juif pour un nom romain? Maisnbsp;quand nos pères l’auraient voulu, celte substitution étaii loin d’ètrenbsp;toujours possible. Comment auraienl-ils pu prendre des noms nou-veaux, tous ces chrétiens qui, conduits a la mort immédiateraent aprèsnbsp;leur profession de foi, n’eurent pas même Ie temps de recevoir Ie bap-tême? Mais en admettant la possibililé constante d’un pared changement, l’intérêt légitime des néophyles, 1’honneur de l’Église, la gloircnbsp;de Dieu, ne faisaient-ils pas un devoir de Ie dédaigner?

Conserver après leur conversion les noms qu’ils porlaient dans Ie monde, comme ils gardaient leur état et leur profession, n’élait-ce pasnbsp;pour les nouveaux fidèles un moyen de caeber it leurs parents, a leursnbsp;amis encore païens, une démarche dont la prudence comraandait souvent de leur dérober Ie mystère? A son tour l’Église naissante, conti-nuellement accusée de n’êlre qu’une assemblee d’hommes vils et ignorants, ne devait-elle pas rencontrer dans ce reproche un obstaclenbsp;sérieux a de nobles conquêtes? Pour Ie faire tomber, n’était-il pas bonnbsp;qu’elle put monlrer, dans ses humbles ou sanglants dypliques, desnbsp;noms glorieux inscrits sur les registres du sénat ou dans les fastesnbsp;consulaires? Dieu lui-même devait manifester a tous les siècles sanbsp;puissance, en montrant les noms les plus illustres du paganisme,nbsp;gravés sur des tombes de martyrs, a cöté des noms les plus humblesnbsp;et les moins connus. Enfin, comme il élait venu pour tout réhabiliter,nbsp;ne fallait-il pas que Ie divin Rédempteur sanctifiat, en les laissant a sesnbsp;plus fidèles disciples, des noms portés par ses plus grands ennemis?nbsp;N’est-ce pas de la sorle qu’il a réhabilité, purifié la Minerve, Ie Panthéon et tant d’autres édifices consacrés au culte sacrilége ou aux fêtesnbsp;criminelles du paganisme?

D’ailleurs, pour quel motif les nouveaux convertis auraient-ils quitté leurs anciens noms? Sans doute, comme cela se pratique aujourd’hui,nbsp;afin de prendre Ie nom de quelque saint qui leur servit tout è la foisnbsp;de protecteur et de modèle. Mais pour les chrétiens des temps aposto-

(i) Non culpabile fuit genlilibus cUristianis faclis profana deorum nomina non depo-suisse, imo assumpsisse, ut pluribus oslendil Cuperus in Ulonutn. antiq., p. 100; Fa-brelli, Inscript., c. vin, p. Söt.

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NOÜVELLE ÉTUDE DES INSCBIPTrONS. nbsp;nbsp;nbsp;97

liques, Ces modèles n’existaient pas encore. Dira-t-on qu’ils auraient PU choisir les noms des patriarches, des prophètes et des justes denbsp;I Ancien Testament? Ils I’anraient pu sans contredit; raais ils ne Ie de-''aient pas, et, dans ses profonds conseils, Ia Providence n’a pas vouinnbsp;qu’ils Ie fissent.

D’abord, s’ils eussent adopté des noms hébreux, tels que ceux •^’Abraham, de David, de Jérémie, de Daniel et autres semblables, onnbsp;uurait pu, en les trouvant plus tard gravés dans les Catacombes, sup-Poser que nos cimetières furent coramuns aux juifs et aux chrétiens;nbsp;uu du moins qu’ils ne furent, ni Touvrage, ni Ie séjour, ni la tombenbsp;exclusive de ces derniers. Une facheuse incertitude serait restée dansnbsp;esprits, et l’Église primitive aurait perdu pour nous un des plusnbsp;^rillants fleurons de sa couronne.

En outre, soit ignorance, soit mauvaise foi, les païens avaient l’ha-^ilude de confondre, dans leur langage et dans leur haine, les juifs et *es chrétiens. Pour eux, c’était une mème secte, ridicule, turbulentenbsp;UI digne de la haine universelle (i). On comprend dès lors toute lanbsp;puissance des raisons religieuses et sodales qu’avaient nos pères, d’é-'iter tout ce qui pouvait même indirectement autoriser une semblablenbsp;uonfusion.

Aussi, chose merveilleuse! parmi les milliers de loculi découverts dans les Catacombes, on n’en a pas Irouvé un seul qui portét Ie nomnbsp;d’un personnage quelconque de l’ancienne loi. De lè, il faut nécessai-remenl conclure, ou que les juifs de Rome ont tous refusé d’embrassernbsp;Ie christianisme, ce qui est faux; ou qu’ils ont changé de notn en senbsp;convertissant. Cette dernière supposition est seule admissible; maisnbsp;ulle prouve sans réplique Ie soin extréme des fidèles de Rome amp; se dis-'iuguer de la race que Ie déicide vouait désormais l’exécration dunbsp;ë®nre humain (2).

Pour ces motifs, et peuCêtre pour d’autres encore, Ie changement nom fut exlrêmement rare parmi les premiers fidèles. Aussi, non-^eulement les Actes des Apólres, mais encore les Actes des martyrs

(i)On connait les passages de Tacile,de Suélone, de Xiphilin. Lc second, rapportant •idil de Claude, qui baniiissait les juifs de Rome, dit: Judaios impulsore Chresto, etc.

dernier, parlant de sainte Flavie et des autres convertis a la foi, s’exprime en ces 'ernies : Cujiis rei causa, multi qui in mores Judmorum transierant, damnati sunt;nbsp;'l'iorum pars occisa est, pars spoliata facullalibus : Pomililla tanlumraodo in Pandata-“ lam relegata est. In Epit. Diony. Nicoei in Domitian.

'-) Les chrétiens d'Orient se montrèreni un peu moins rigourcux 4 eet égard; mais n est pas ici Ie lieu d'expliquer cette diCérence de conduite. — Boldetti, lib. 11, c. xui,nbsp;P- 47i.

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98 LES TROIS ROME.

nous ofFrent k chaque page des noms païens portés par les plus glorieus enfanls de la primitive Église. Qui ne connait les sénateurs Pu-dens et Julius; les officiers et les généraux des armées impériales, Tibnrce, Marius, Maurice, Exupère; les nobles matrones Priscille,nbsp;Théodora, Justa, Plautille, Lucine, Cyriaque; les illustres viergesnbsp;Prisque, Pudentienne, Sotère, Flavie, Cécile, Balbine et tant d’autresnbsp;qui rehaussèrent de tout l’éclat des vertus chrétiennes des noms déjanbsp;fameus dans les annales de l’ancienne Rome? Faut-il s’étonner que desnbsp;noms jadis païens se retrouvent dans les Catacombes, sur les loculi desnbsp;enfants de l’Église? Je vais en citer quelques-uns, pris è dessein surnbsp;les tombes accompagnées du vase de sang ou de la palme, signes dis-tinctifs du martyre :

POPVLONIO IN PACE IDVS JVNIS.

« A Populonius en pais; Ie jour des Ides de juin. »

EÏTYXIANH

TIIXON

HAKC.

« Eutichiana, que la pais soit avec toi. »

ROMITIA IN PACE.

o Oomitia, en paix. »

Volei celui d’un martyr de quatre-vingt-six ans. Salut au saint vieil-lard, au glorieus vétéran de l’armée chrétienne!

LVCRETIO TIMOTHEO QVI VISIT ANN. LXXXVI BENEMERENTI IN PACE VXOR ET FILII.

« A Lucrétius Timothée, qui vécut quatre-vingt-six ans, blen méri-tant, dans la paix; son épouse et ses enfants. »

Les deux noms suivants appartiennent d deux héros chrétiens, dont 1’un remporta la palme de la victoire dans la force de l’ège, l’autre aunbsp;printemps de la vie :

DEP. DALMATI. PRIDIE. KAL. MAIAS. VISIT. ANNOS XXXV.

« Déposition de Dalmatius la veille des calendes de mai, il vécut quarante-cinq ans. »

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NOUVELLE ÉTUDE DES INSCRIPTIONS. 99

LEONTIYS YIXIT ANNOS XXII. M. II. D. X.

® Léontius vécut vingt-deux ans deux mois dix jours. »

Peu è peu la vénéralion profonde et la tendresse filiale qu’ils avaient Pour les Apólres firent prendre aux chrétiens les noms de leurs pèresnbsp;la foi. Ainsi on a trouvé dans les Cataeombes de Prétextat et denbsp;Sainte-Priseille plusieurs tombes de martyrs et de chrétiens appelésnbsp;Pierre el Paul :

PETRO DENEMERENTI IN PACE.

« Pierre Lien méritant, en paix. »

PAVLVS IN PACE.

« Paul, en paix. »

Dans celle de Saint-Callixte, Ie nom grec d’un martyr appelé Luc.

LOVKI.

quot; A Luc. »

Par religion ils choisirent encore pour eux-mêmes et pour leurs ®öfants les noms des vertus chrétiennes. Entre autres témoignages, onnbsp;peut citer les inscriptions suivantes des Cataeombes de Sainte-Cyria-que et de Saint-Callixte ;

PISTE SPEI SORORI DÜLCISSIME FECIT.

« Piste (on Spérat) è Espérance sa soeur chérie a fait cette tombe. »

SPES IN DEO IN D.nbsp;STEFANIS.

« Espérance en Dieu, en Dieu couronnée. »

Dans les actes des martyrs Scillitains, on voit aussi Ie nom de Spé-porté par un des plus intrépides champions de l’Évangile (i). Enfin, les martyrs changeaient quelquefois leur nom de familie pournbsp;e nom plus glorieux de chrétien. Tels furent, au rapport de saint Ba-les quarante soldats de Sébaste, pendant la persecution de Lici-

(0 Voyez Mamachi, De' Costumi de’primitivi Crisiiani, 1.1, c. ii, P- 214.

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100 LES TROIS ROME.

nius (i). Peu a peu l’usage s’établit de donner aux enfants les noms des martyrs : il était général sur la lin du iv® siècle (2).

Comme on voit, la presence des noms païens dans les inscriptions des Catacombes ne peut jeter l’ombre d’un doute sur l’origine chré-lienne et la virginité de nos vénérables cimelières. Non moins impuis-sante est la dédicace païenne qui se trouve sur quelques tombes. Plu-sieurs loculi portent en tête les lettres sacramentelles D. M. Ce doublenbsp;sigle peut s’interpréter également : par Dis Manibus, « aux Dieuxnbsp;Mftnes; » ou par ; Deo maximo, « au Dieu très-grand. » Dans ce dernier sens, il est très-orthodoxe, et rien n’empêchait les chrétiens denbsp;Ie graver sur leurs tombeaux. Qu’ils l’aient ainsi entendu, il serail biennbsp;facile de Ie prouver par un grand nombre d’exemples. Je me conten-terai d’une settle inscription incontestablement chrétienne, puisqu’ellenbsp;orne la tombe d’un martyr, oti elle se trouve accompagnée du mono-gramme de Nolre-Seigneur, de la palme, de la colombe et du vase denbsp;sang : autant de symboles parfailement inconnus des païens :

D. M. s.

CAESONIVS. SALVIVS VONE MEMOBI.*; INNOX QVInbsp;VIXIT ANNIS. XX. M. VI. ETnbsp;HOR. III. CVI FECERVNT SVCCISIAnbsp;MAIIR. II. MARINVS FRAIIR (s).

« Au Dieu très-grand, consacré. Césonius Salvius, d’beureuse mé-moire, innocent, qui vécut vingt ans six mois trois heures; auquel ont élevé cette tombe, Succisia, sa mère, et Marin, son frère. »

On voit, par eet exemple, que les chrétiens donnaient au sigle D. M. S. une signification toute autre que les païens. Mais quelquefoisnbsp;on lit en toutes lettres : Dis Manibus, « aux Dieux Mftnes. » Dans cenbsp;cas, la pensée païenne est incontestable. Faut-il en conclure que l’in-scription elle-raême, dont cette dédicace fait partie, est une inscriptionnbsp;païenne? que Ie loculus sur lequel on la trouve est un loculus païen?nbsp;Pavlout ailleurs que dans la Rome soulerraine on est en droit de Ie

(1} Homil. in 40 SS. Martyr., 49.

(2) Martyrum nomina magis, quam familiariura cuncU niorlales sciunt. Quin etiam nascenlibus filüs ea imponi curant, iia cusiodiam iiUs, lutclamque ccrUssimam compa-ranles. — Tbéodoret., Hist. Eccl., lib. iii, c. xv; el De Martyr., Ub. vin.

(s) On voit dans la dernière ügne un exemple des incorrections dont nous avons parlé plus haul: alors, comme aujourd’hui, Ie people écrivait sans doute comme il parlait:nbsp;maiir pour ma/er, el fraiir pour/rafer.

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DÉDICACE AUX DIEÜX MANES. 101

croire. Ici, Ia conséquence, loin d’être rigoureuse, serail fausse et mêtne absurde.

La santé des chrétiens, obligés de vivre dans les Catacombes, faisait une obligation rigoureuse de fermer les tombes immédiatement et avecnbsp;Ie plus grand soin. Mais, dans les jours de délresse, alors que les persecutions ajoutaient, dans une semaine, plusieurs milliers de victimesnbsp;eux décès ordinaires, les Fossoyeurs étaient évidemment débordés parnbsp;1’ouvrage. L’Église entière venait è leur aide, et s’employait avec ar-*^eur aux soins de la sépulture. Nous voyons les Papes, les prêtres, lesnbsp;'ierges, les dames romaines accomplir è l’envi ce devoir sacré, d’oünbsp;•lépendaient l’honneur des morts et la santé des vivants. C’est Ie casnbsp;*le répéter avec Tertullien, bien que dans un sens différent: Que loutnbsp;^e monde élait travailleur : In his omnis homo miles.

Pour clore les nombreuses tombes que la mort remplissait d'heure heure, on prenait lout ce qu’on trouvait sous la main. De la, dansnbsp;Catacombes, celte étonnante variété de ferraeture tumulaire ennbsp;•Harbre fin ou en albatre, en serpenlin, en jaune ou en vert antique,nbsp;marbre africain, en porta santa, en pierre ordinaire, en briquesnbsp;souvent écornées, souvent de plusieurs morceaux, quelquefois gralléesnbsp;OU couvertes de chaux, afin de faire disparaitre d’anciens caraclères.nbsp;Les lombeaux païens devaient, plus que les autres édifices, offrir unenbsp;fiche moisson. Ils étaient situés dans la campagne, ils bordaient lesnbsp;Voies romaines voisines des Catacombes; Ie temps, la négligpnce, lesnbsp;guerres civiles, mille causes différentes en avaient détaché de nom-breux débris, ou les avaient même changés en ruines.

Quoi de plus facile aux chrétiens que de prendre ces dalles de pierre OU de marbre, ces briques endommagées, et de les employer a leurnbsp;Usage? Faut-il s’élonner si quelques-unes de ces pierres torabales outnbsp;oonservé, même après leur destination chrétienne, Ie signe primitif denbsp;leur dédicace aux Dieux Manes? Oü trouver toujours, avant de les employer, Ie temps et l’outil nécessaire pour l’effacer? Peut-être Ie chré-Len qui s’en servit ne savait-il pas lire? Peut-être, travaillant dansnbsp;1 obscurité de la nuit, ne l’avait-il point aper^u? ou, enfin, sur de sonnbsp;'Utention, croyait-il sanctifier cette pierre par la destination qu’il luinbsp;donnait, et dès lors n’attachait-il pas plus d’importance a conservernbsp;^lu amp; supprimer sur la tombe de son frère ce signe de paganisme (i)?nbsp;II n est pas seulement vraisemblable, il est vrai, que les choses se

^(OFabreiti, Inscript., c. vm, Inscript. 59; hupi. Epitaph. Sever. Martyr. 105; Jacutio, el Bon., tib. xlvi; Zaccaria, InstU. Lapid., lib. ii, c. vii; Morcelli, De Stil. in-Boldelli, lib. ii, c. ix, x, xi; Buonarotti, Felcri Cimiterial., p. 16quot;, etc., elc.nbsp;T. IV.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;s

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102 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

passéren! ainsi. Les inscriptions Opistographiques en fournissent la preuve matérielle. On donne ce nom é des pierres tombales, qui portent, d’un cóté, une inscription chrélienne, et, de l’autre, une inscription païenne. Placés dans les circonstances difficiles dont nous avonsnbsp;parlé, les chrétiens prenaient, pour fermer les loculi de leurs morts,nbsp;la première dalle tumulaire qu’ils rencontraient. Ils mettaient dansnbsp;l’inlérieur Ie cóté qui portalt I’inscription païenne; et, sur Ie cóté extérieur, ils gravaient l’inscription chrétienne. Parmi une foule d’au-tres, en voici trois modèles Irouvés dans les Catacombes de Sainte-Priscille, de Gordien et de Saint-Hippolyte. Le premier présente surnbsp;Ie cóté caché dans l’intérieur du loculus, l’épitaphe suivanle :

D. M.

M. AVRELIVS PRIMOSVS. AVG. LIB.

MEMORIOLAM VETVSTATE DELAPSAM REFICIT SlBl. LIBERTIS. LIBERTABVSQ.

POSTERISQVE EORVM.

« Aux DieuxMónes. Marcus Aurélius Primosus, affranchi d’Auguste, a refait ce petit monument tombé de vétusté, pour lui, pour ses af-franchis, ses affranchies et leurs descendants. »

Cette pierre tombale, avec son inscription, prouve deux cboses : la première qu’il ne manquait pas, dans les environs de Rome, de tom-beaux en ruines, et dont il était facile de s’emparer en tout ou en par-tie; la seconde que la même pierre avait regu primitivement une inscription qui a été effacée, afin de pouvoir graver celle qu’on vient denbsp;lire : le fait est palpable pour qui a vu la pierre. Après avoir servinbsp;deux fois aux païens, nous aliens voir cette même dalle employée dansnbsp;une tombe chrétienne. Sur le cóté extérieur, on lit :

FESTVS VIT. N. XXVII.

« Festus vécut vingt-sept ans. » L’emploi de la pierre païenne, la brièveté, l’incorrection même de I’inscription chrétienne, se réunissentnbsp;ici pour montrer la pénurie, l’empressement ou le peu d’habileté dunbsp;charitable chrétien qui donna la sépulture a Festus. Toutes ces circonstances expliquent, beaucoup mieux que de longs raisonnements, lanbsp;présence des pierres avec dédicace païenne dans les Catacombes (i).

Le second modèle offre intérieurement l’inscription parfaitement

(i) Vuyez Aringhi, lib. ili, c. xii,p. 295,

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DÉDICACE AOX DIEÜX MANES. nbsp;nbsp;nbsp;103

païenne de Julia Paleslrica, et extérieurement celle d’un chrélien nointné Paul :

D. M.

JVLI.E PALESTBICE CONJVGI INCOMPABAEILInbsp;M. AVBEL. FORTIS fecit et SIBInbsp;LIBERTIS. LIBERTABVSOVE

POSTERISOVE EORVM ET JVL. IL MA VB VS. ET. HELPESnbsp;FECERVNT POSTËRISQVE EORVM

« Aux Dieux Mènes. A Julie Paleslrica, épouse incomparable, Marcus Aurelius Fortis a fait ce monument, et pour lui-même, et pour ses affranchis, et pour leurs descendants. Et Julius Maurus et Juliusnbsp;Helpes Font aussi fait pour eux-mêmes et pour leur postérilé. »

Voici maintenant l’inscription chrélienne gravée sur la partie opposes de ce marbre, lorsqu’il est devenu Ia fermelure d’un loculus des Catacombes :

PAVLVS

IN PACE

« Paul, dans la paix. »

Le Iroisième modèle confirme plus éloquemment encore Ie fait qui nous occupe. La pierre est cassée, et I’inscription chrétienne tron-quée :

...... AVG. UB. QVI. nbsp;nbsp;nbsp;*

...... IX. ANN. XXXVI.

...... EN II. CONJVGI.

...... ENEMERENTI. FE.

...... T. JVUA. JVSTA.

Pour toute inscription chrétienne, Ie Fossoyeur n’a pu graver gros-sièrement et è la hdte que le monogramme de Notre-Seigneur, la palme ct l’iraage du martyr iriomphant.

Pe lout ce qui précède, il résulte clairement que la présence des Uoms et des signes païens dans les inscriptions des Catacombes nenbsp;contredit en rien l’origine et la destination exclusivement chrétiennenbsp;de la grande Cité des martyrs. A celte connaissance précieuse il estnbsp;titile d’en joindre une autre qui, pour être d’une moindre importance,nbsp;effre cependant un vif intérêt : je veux parler de la ponctualion et denbsp;P^ge des inscriptions.

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iOi LES TROIS ROME.

Rien de plus inconstant que Torthographe et la ponctuation des anciens monuments, chrétiens et païens. La cause en est tout ensemble dans les changements de prononciation auxquels la langue latine nenbsp;fut pas moins sujette que les autres; dans l’habitude d’écrire commenbsp;on pronongait, sans repos marqué entre cbaque membre de phrase;nbsp;dans l’ignorance et Ie caprice des ouvriers; dans la douleur des parents , qui, pour donner plus de solennité h leurs regrets, séparaientnbsp;cbaque mot par un ou plusieurs points, afin d’obliger Ie lecteur i fairenbsp;aulant de pauses que l’inscription comptait de paroles et méme denbsp;lettres; enfin dans I’amour des vivants qui, pour exprimer leur ten-dresse envers les défunts, remplagaient les points par de petits coeurs;nbsp;ou par des palmes, si les morts étaient des martyrs. Voici quelques mo-dèles qui mettront sous les yeux ces différentes espèces de ponctuation.

Les objets en terre cuite, comme les briques et les figurines, pré-sentent souvent des inscriptions sans point ni séparation aucune. Exemple :

EX PRAVLPI/E ACCE

PTA PAE ET APR COS

En style ordinaire ; Ex prcediis Ulpice accepta Pcetino et Apro-niano consuUbus. « Cette urne a été faite avec la terre tirée des champs d’Ulpia, sous Ie consulat de Pétinus et d’Apronianus (i). »

Rien n’est plus commun que ces mots : bibas pour vivas, bixit pour vixit, vone pour bonx et autres semblables, ou les lettres sent écritesnbsp;comme elks étaient prononcées.

Le caprice ou I’ignorance des ouvriers se remarque dans les inscriptions suivantes, poncluées après et même avant cbaque mot :

. PAMllEW. HAVE.

. BENE.. BALE AS.

. QVI. ME.. SALVTAS.

. CVM. SOSSIA. riLIA. MEA.

« Parthenia, salut. Porte-toi bien, toi qui me salues avec Sossia, ma fille. »

J. V. V. E. N. T. 1. V. S T. 1. T. V. S.

» Juventius Titus, etc. » Je remarquerai en passant que les anciens

(i) Les fastes coiisulaires font connaitre I’êge do cette urne, en nous rappelant que Ouinius Arrius Pselinus et Caius Veranius Apronianus étaient consuls l’an 123 aprèsnbsp;Jesus-Christ.

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PONCTÜATION CES INSCRIPTIONS. 105

fflettaient les points au milieu des lettres et non point au bas, comnie nous avons coutume de Ie faire. Je remarquerai en outre que dans lesnbsp;inscriptions en bon style, la dernière ligne n’est presque jamais ponc-tuée : c’est un signe auquel Ie célèbre Maffei veut qu’on reconnaissenbsp;1’authenticité du monument (i).

Dans les suivantes, les coeurs, au lieu de points, témoignent de la douleur des parents et des amis ; on les trouve également sur les tombes païennes et sur les tombes chrétiennes :

D £5' M s £?

DIGNO FILIO CVLCISSIMOnbsp;DIGNVS PATER

VIXIT. AKN, I. M. VIII «'• I?

« Aux Dieux Mènes consacré. A Dignus fils cbéri, Dignus son père. II vécut un an buit mois trois jours. »

Nous trouvons la raême ponctualion sur la tombe d’un martyr :

JVLIA ^ STERCORIO ^ CONJVGI £?

QV. AN. XXVm. lt;J2 CVM Q. V. ANN. V. BM. IN PAGE

« Julia h Stercorius son époux, qui vécut vingt-huit ans, avec lequei elle vécut cinq ans, bien méritant, en paix. »

Avant de quitter les inscriptions des Catacombes, il resle è étudier les signes auxquels on peut reconnaitre leur ége. En volei, quelques-uns généralement admis par les plus habiles archéologues.

La brièveté. C’est un fait reconnu que la langue épigraphique des premiers chrétiens était extrêmement concise et sobre de paroles. Lanbsp;simplicité, rhumilité, Ie manque de temps, d’outils, d’habileté etnbsp;d’autres circonstances dont nous avons déja parlé, rendent raison denbsp;ce fait d’ailleurs incontesté. Vers Ie milieu du iv“ siècle, alors que l’É-glise se trouvait dans des conditions dilférentes, les inscriptions de-viennent plus longues et plus explicites. La première que nous allonsnbsp;rapporter est celle d’un martyr. Bien que très-courte, elle est cepen-dant une des plus étendues parmi les temps primitifs :

. Et. SECVNDINO. BENEMERENTI MINISTRATOBI CIIRESTIANO in PAGEnbsp;OVI ViXir. ANN. XXXVI. CP. III. NON. MAR.

(lt;) Arte critica tapid. Col. 2I2-2U.

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106 LES TROIS ROME.

« A ^lius Secundinus, bien méritant, administrateur chrétien (i), en paix, qui vécut trente-six ans, déposé Ie trois des nones de mars. »nbsp;La seconde date du milieu du iv® siècle, et justifie par son dévelop-pemenl l’observalion qui précède :

B. M.

CVBICVLVM. AVRELIJE MARTINNE CASTISSIME ADQVE PVDI CISSIME FEMIN.!: QVE FECIT I?i COIVGIO ANN XXIII DXIIIInbsp;BEEMERENTI QVE VIXIT ANN. XI M. XI. DXIII DEPOSITIOnbsp;EJVS

DEI UI NON OCT. NEPOTIANO ET FACVNBO CONSS. IN PACE.

« A bonne mémoire. Cubiculum (ou monument) pour Aurélia Martina, très-chaste et Irès-pudique femme, qui vécut en mariage vingt-trois ans quatorze jours, bien méritante, qui vécut en outre (è moins qu’il n’y ait une faute dans Tinscription) onze ans onze mois treizenbsp;jours; sa déposition Ie trois des nones d’octobre, sous Ie consulat denbsp;Népotien el de Facundus, en paix. » Geile date donnel’année 356.

Le monogramme de N. S. Nous parlerons un autre jour de l’u-sage et de la signification de eet embième vénérable; aujourd’hui nous devons le considérer simplement comme un signe chronique ou indi-cateur du temps. On le trouve formé de deux manières ; en croix denbsp;Saint-André ou en croix grecque ifi, c’est-i-dire dont les quatrenbsp;bras d'égale longueur se coupent a angle droit. Cette dernière formenbsp;est beaucoup moins ancienne que la première et dénote le courant dunbsp;IV® siècle. L’autre, au contraire, remonte aux temps apostoliques et iinbsp;la grande ère des persécutions (2). II suffira de deux exemples pournbsp;rendre sensible celte double forme. Le premier nous est offert dansnbsp;l’inscription de la célèbre mariyre sainte Faustine, retirée des Cata-combes de Saint-Callixte :

FAVSTINJ;. VIRGINI. FORTISSIM/E QVE. BIXIT. ANN. XXI

T

IN PACE.

« A Faustine, vierge intrépide, qui vécut vingt et un ans, en paix. »

Le monogramme est entouré d’une couronne de lauriers; h droite,

(i)Boldelti montre que ce litre d’administrateur chrétien ne peut designer qu’un diacre. — Lib. ii, c. vu, p. 414.

(s)Marchi, p. 101.

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CATACOMBE DE SAINTE-BALBINE. nbsp;nbsp;nbsp;107

on voit une Colombo; a gauche, une ancre : double emblème dont nous parlerons plus lard.

Le second exemple appartient au cimetière de saint Calépode, el l’écriture, moitié grecque, moilié laline, de l’inscription se trouvenbsp;J^ien en harmonie avec la date el la forme du monogramme :

SOCR^Tgs

IN P^cg.

« Socrate en paix. »

Les caraclères et ia forme des lettres, le style, les mots, l’orthogra-phe, les pensées, les choses parliculières exprimées dans le contexle, les ornements et les emblèmes du monument sont encore aulant denbsp;signes qu’il faut observer avec beaucoup de soin, pour connaitre Ianbsp;date des inscriptions. Que celle indication sulïise, car l’explicalionnbsp;nous conduirait irop loin (i).

Au sortir de la longue audience sollicitée par les inscriptions, nous reprimes la route de la porie Capena, et nous nous retrouvtlmes surnbsp;la Voie Ardéatine. La Catacombe de Sainle-Balbine et de Saint-Marcnbsp;était le but de notre visite. Siluée entre la Voie Ardéatine et la Voienbsp;Appienne, elle forme un quartier de Timmense cimetière de Prétex-tat, et doit son origine, aussi bien que son nom primilif, a l’illuslrenbsp;Balbine, vierge romaine.La première année de son Pontifical, qui étaitnbsp;la cent Irente-deuxième de Nolre-Seigneur, et la treizième du règnenbsp;d’Adrien, le pape saint Alexandre converlit plusieurs citoyens romains,nbsp;bon nombre de sénateurs et même le préfel de la ville, Hermès, avecnbsp;toule sa familie. Du palais imperial descend aussitót l’ordre d’arrêternbsp;le Pontife et les nouveaux cbréliens.

Selon l’usage suivi a l’égard des prévenus de distinction, Hermès est remis è la garde d’un tribun militaire, nomraé Quirinus, dont lanbsp;demeure devient la prison du préfet, libera custodia. Quirinus availnbsp;'löe jeune fille nommée Balbine. Soit compassion pour l’illustre pri-sonnier de son père, soit curiosité de Ie voir et de lui parler, cettenbsp;jeune vierge, alteinte d’une grave maladie, s’approche un jour du saintnbsp;ttariyr et baise ses chaines. A l’instant elle recouvre la santé. Heureuxnbsp;témoin du miracle, Quirinus devient sur-le-champ chrétien avec sanbsp;fille. Aussi brave soldat de Jésus-Christ qu’il l’était de Pempereur, ilnbsp;donne courageusement sa vie pour le Dieu qui a daigné le rendre tout

ii) \oyez Instituzione mtko-lapidaria, c. vi; Vermiglioli, t. n; Lezione v, p. 1S6 ct suiv., etc.

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108 LES TROIS ROME.

è Ia fois Ie plus heureux des hommes en l’éclairant, et Ie plus heureux des pères en sauvant sa fille.

Digne héritière du courage paternel, Balbine consacra son existence aux périlleux devoirs de charilé imposes aux femmes et aux viergesnbsp;chrétiennes, dans ces temps d’héroïque mémoire. Pleine de jours etnbsp;de mérites, elle vint après sa mort reposer auprès de son illustre père,nbsp;sur la Voie Ardéatine, dans Ie cimetière auquel elle eut la gloire denbsp;donner son nom (i).

Avant Ie milieu du iv® siècle, Ie pape saint Mare bètit, sur la Catacombe de Sainte-Balbine, une église que l’empereur Constantin dota avec sa magnificence ordinaire (s). Le saint Pape voulut êlre inhuménbsp;dans ce vénérable cimetière, oü il resta jusqu’au temps de saint Gré-goire VII. A cette époque, il fut transféré dans l’église de Saint-Marc-l’Évangéliste, au pied du Capitole. Quant è sainte Balbine, elle reposenbsp;aujourd’hui sur l’Avenlin. De la Basilique de Saint-Marc il reste bnbsp;peine quelques vestiges entre la Voie Ardéatine et la Voie Appienne,nbsp;non loin des églises de Saint-Paul et de Saint-Sébaslien.

La Catacombe elle-même, faisant, ainsi que nous l’avons remarqué, partie intégrante du cimetière voisin de Prétextat, sera décrite, lesnbsp;jours suivants, avec ce grand quariier de la Rome souterraine.

5 JANVIER.

Calacombcs de la Voie Appienne. — Lampes, — Placement. — Double destination. — Mallere. — Forme. — Emblèmes. — Catacombe de Saint-Callixte. — Origine. — Dé-couverles de Bosio. — Partie publique du cimetière de Saint-Callixte. — Souvenirsnbsp;de sainte Cécile, — de saint Philippe de Néri, Moiise du xvi® siècle. — Partie secretenbsp;du cimetière de Saint-Callixte.— Nouvelle gloire de saint Philippe de Néri. — Bosionbsp;et Baronius.

Nos visites dans les anciennes régions d’Alia-Semita et de Via-Lata nous avaient insensiblement rapprochés du Forum. Nous le franchi-mes, et, quelques instants plus tard, nous arrivflmes sur la Voie Appienne. Dans ce quariier général de l’orgueil et de la voluplé; dansnbsp;ce rendez-vous des Césars et des Dieux, s’échelonnaient, se touchaient,nbsp;se prolongaient, pendant plusieurs milles, sur deux lignes parallèles,nbsp;et des tombeaux resplendissanls de marbre et de bronze, et des tem-

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Baron. AnA'a%n. 11; Aringhi, Ub. ui, c. xvu.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Obtulit Constantinus Augustus Basilicae quant ccemeterium constituit Via Ardea-tina, fundum rosarum cum omni agro campeslri, praeslanlem solidos quadraginta. —nbsp;Anast. in S. Mar. Pap.

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CATACOMBES DE LA VOIE APPIENNE. nbsp;nbsp;nbsp;1Ö9

pies non moins somptueux, quoique peut-être plus impurs que les tombeaux. Voici d’abord Ie ruisseau A'Aqua d'Accio, dans lequel lesnbsp;prêtres de Cybèle venaient laver la statue de Ia déesse, en chantanlnbsp;*les paroles que ni la mère des Dieux, ni Ia mère des sénateurs, ni lanbsp;®ère des infómes musiciens qui les pronongaient n’auraient pu entendre sans rougir (i).

Plus loin, c’est le temple de Mars, b;\ti par Sylla, dont chaque mys-tère était, comme ceux des autres divinilés, accompagné d’un sacrilege (2). A quelques pas s’élevait le Sacrarhim de Cybèle; le temple •le la Terapête, voeu de Marcellus, sauvé d’un naufrage; le temple desnbsp;Muses, devenu, sous Auguste, le Bazar des Juifs (5); le temple denbsp;I’Honneur et de la Vertu et une foule d’autres oii chaque passion di-vinisée trouvait un encouragement et un modèle.

A raison de ses profondes souillures, la Voie Appienne deraandait wne plus abondante expiation. Reine des voies, elle était I’orgueil denbsp;la xieille Rome; elle devait l’être de la nouvelle. Ses dalles, tant denbsp;fois pressées par les chars des triomphateurs, devaient être fouléesnbsp;par les pieds de triomphateurs plus illustres; et les tombeaux minésnbsp;des maitres du monde faire place aüx tombes immortelles des vain-queurs du monde et de Rome elle-même ; il en esl ainsi. Pendant troisnbsp;siècles, des flots de sang ont inondé la Voie Appienne avec plus d’a-bondance que les autres; et,nulle part,les Catacombes ne sont ni aussinbsp;Vastes ni aussi peuplées. Afin de les visiter avec un nouvel intérêt,nbsp;nous ajoutómes è Ia connaissance des inscriptions l’étude des lampesnbsp;qui s’y trouvent par milliers.

De distance en distance, on rencontre ii droite et ii gauche de pelites niches taillées dans les parois des galeries. Qu’elles fussent destinéesnbsp;It recevoir des lampes, la preuve en est dans leur forme, dans leur position, dans la fumée qui les a noircies et dans les lampes que plusicursnbsp;conservent encore. Prés des loculi, dans les cryptes et les cuhicula,nbsp;on voit aussi des pierres saillantes, en forme de consoles ou de ta-

(*) Talia per publicum canlitabanlur a nequissiniis scenicis, qualia non dico matrem neorunijsed matrem qualiumcumquesenatorum, vel quorumlibct honestoruin viroruni,nbsp;imtno vero qualia nee matrem ipsorum scenicorum deceret audire. — Aug., de Civ. Dei,nbsp;lib. lil, c. IV.

(3) Cum nullum sit sacrum, quod suum non liabeatsacrilegiuni.—Senec.,de Benejk'.

(.I) Nunc sacri ibniis nemus et dclubra locanlur Judffiis,quorum copliinus i'cenumque supellex;

Oninis enim populo mercedeiii peiidere jussa est Arbor, et ejectis mendical silva Camoenis.

JeVÉNAL, Sat, ÏÏI.

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iio LES TROIS ROME.

bleites, appropriées au même usage; enfln, les lampes se suspendaient aux voütes des galeries et des lieux de réunion (i).

Pour dissiper les ténèbres élernelles de ces profonds souterrains, il fallait d’innombrables lumières; on Ie congoit sans peine. Mais,nbsp;outre la nécessilé physique, plusieurs raisons mystérieuses comman-daient encore cette brillante illumination. Allumer des lampes présnbsp;des tombeaux était un usage commun a tous les peuples de l’anliquité;nbsp;et eet usage continue de s’observer dans l’Église calholique. Plusieursnbsp;motifs l’avaient fait naitre et l’entretenaient parmi les païens.

Persuadés que lAme était un feu subtil qui ne s’éleignail pas en-tièrement avec Ie corps, mais qui volligeait autour des tombeaux; ils croyaient devoir y placer des lampes, comme syrabole de l’^me el denbsp;son immortalilé. Peut-être encore Ie faisaient-ils pour bonorer lesnbsp;Dieux infernaux, les Manes, auxquels les morts appartenaient etnbsp;qu’ils supposaient présents dans Ie sépulcre avec les cadavres. Deuxnbsp;autres motifs semblent expliquer plus clairement la raison de eetnbsp;usage. On voulait d’abord témoigner Ie respect pour Ie défunt et per-pétuer Ie souvenir de ses verlus, de sa fortune ou de sa noblesse. Desnbsp;fouilles exéculées dans les monuments funéraires confirmenl cettenbsp;opinion, en montrant que Ie nombre des lampes s’accroit avec l’illus-tration du défunt. Ensuite on ne voulait pas que l’ame, censée présente dans la tombe, avec Ie corps, demeurèt péniblement enveloppéenbsp;de ténèbres. De lè, ces nombreuses inscriptions, oü se trouve l’obli-gation imposée aux affranchis d’entretenir des lampes allumées auxnbsp;tombeaux de leurs anciens mailres. De lè encore, parmi Ie petit people,nbsp;qui n’avait pas Ie moyen d’allumer une lampe, l’usage, dont nousnbsp;avons déjè parlé, de souhaiter au mort la terre légère, ou l’air tran-quille, et de déposer sur sa tombe des fleurs et des parfums (2).

Ainsi Ie respect pour les morts et un hommage è la divinité, telle fut chez les païens l’origine des lampes funéraires. De ces deux motifs, Ie christianisme abolit Ie second, qui était supersiitieux, et con-sacra Ie premier, fondé sur les plus respectables sentiments de lanbsp;nature. Que dis-je? non content de Ie consacrer; il l’ennoblit.

Guidés par une philosopbie supérieure a la raison, les premiers fidèles placèrent un grand nombre de flambeaux et de lampes aux

(t) Marchi, p. 136.

(*) Ne anima, in tumulo cum cadavere cinereque manere putata, tamdiu misere ja-ceret in tenebris... cui minoris fortuna; homines, infimseque plebis, lucernam accendere nequienles, levem terram, tranquillumque aerem precabantur, et flores odoresquenbsp;tumulo imponebantur.— Lact. de Lucernis antiquorum, tit. 1, c. 54-61.

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DOCBLE DESTINATION DES LAMPES. til

tombes de leurs frères et surtoul des martyrs, pour marquer leur res-pectueuse affection envers ces illustres morls. De même que les païens accompagnaient avec des torches allumées leurs grands hommes ounbsp;leurs triomphateurs montant au Capitole; ainsi les chrétiens accompagnaient avec un norabreux luminaire leurs parents et leurs amis,nbsp;'’ainqueurs du monde, et montant au Capitole de l’éternité (i).

Cet usage était pour eux un devoir si consolant et si sacré, que la arainte même des persécutions ne pouvait les empêcher d’y satisfaire.nbsp;Entre mille exemples, je citerai celui de l’illustre matrone sainte Sophie. Ayant recueilli Ie corps précieux de saint Clément, évêque etnbsp;Biartyr d’Ancyre, elle brava tous les périls, alluma une multitude denbsp;lampes, et l’enveloppa dans des linges d’une éclatante propreté (2).nbsp;Si quelquefois Ie danger était Irop imminent et trop grave, ils senbsp;conlentaient d’un luminaire plus modeste ; mais dans ce casl’histoirenbsp;a pris soin de notifier leurs regrets (3).

Au respect religieux pour les lidèles enfants de l’Église, se joi-gnait une manifestation de la croyance è leur félicité présente dans Un monde meilleur et ^la résurrection future. Les lampes traduisaientnbsp;^ leur manière ces mots tant de fois gravés sur les tombes : In pace,nbsp;lgt;ibas in Deo, bibas in ceternum. « Nous proclamons, disaient-elles,nbsp;par ces lumières innombrables, que les saints ont quitté la vie tenantnbsp;en leurs mains la lampe de la foi, et nous les félicitons d’être entrésnbsp;dans la cité de la lumière, oü suivanl l’expression du Saint-Esprit lui-métne, ils brillent comme des astres et des soleils au firmament denbsp;l’éternité (a). »

Ce n’était pas seulement ii la sepulture des martyrs qu’on allumait des lampes et des flambeaux, Ie même hommage de respectueuxnbsp;amour, Ie même témoignage de foi ardente, se renouvelait aux joursnbsp;anniversaires de leur glorieuse mort. Lorsque la paix fut donnée anbsp;1 Eglise, on continua d’accomplir ce devoir, sinon avec plus de fidélité,nbsp;du moins avec une solennité plus grande. Le clergé et Ie peuple de lanbsp;'flle sainte, formés en grandes processions, descendaient, des flambeaux la main, dans les galeries des Catacombes magnifiquementnbsp;flluminées. Les Pontifes célébraient les saints mystères dans les cryp-^es vénérables, et les martyrs de la paix venaient se retremper dans

(i) Boldelti, p. 525.

(s) Sollicitudinem omnetn solvens et moerorem lucernarum accendit muUiiudincni, et tollens corpus, tnundis \esiibus et lint eis involvit. Apud Boiland. 23 janv.

(s) ld. 21 janv.

(4) Ad significandum lumine Hdei illustratos sanctos decessisse, et modo in superna patria, lumine gloria; splendere. — S. Hieron. Contr. Vigil, et in Vita Paulce.

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1J2 LES TROIS ROHE.

Ie sang divin et dans l’esprit des martyrs de la persecution (i). Afin d’assurer la perpétuité d’un usage si précieux, des revenus furentnbsp;assignés pour illuminer les Catacombes aux jours de dimanches, de vi-giles et de fétes des martyrs (2).

On s’explique maintenant la prodigieuse quantité de lampes de toules espèces trouvées dans les cimetières chréliens. Non moins quenbsp;leur multitude, la matière, la forme, les emblèmes qui les distinguentnbsp;témoignent éloquemment de la foi de nos pères. Sauf un petit nombrenbsp;en bronze, elles sont généralement en terre cuite, la plupart d’unnbsp;travail simple et méme grossier; mais tous affectent la forme symbo-lique d’une petite nacelle. A Tune des extrémilés se trouvent un ounbsp;deux becs pour la mèche, a l’autre une petite anse; dans Ie milieunbsp;une ou deux ouvertures pour verser l’huile : Ie tout accompagné souvent de deux anneaux d’oü part une double chainette terminée parnbsp;un crochet, et destinée h suspendre la lampe aux voütes des cryptesnbsp;ou aux parois des galeries. Get appareil se rencontre surtout dans lesnbsp;lampes des Fossoyeurs; car les autres se plagaient sur les consoles ounbsp;dans les niches. Afin de rendre palpable la description de ces objelsnbsp;trois fois vénérables, par leur Age, par les mains qui les ont touchésnbsp;et par l’usage auquel ils ont servi, nous en avons fait graver un quinbsp;se trouve dans Ie plan, ii la fin de ce volume.

Rien de plus instructif que la lampe des Catacombes. Par sa forme, elle rend palpable la destinée de l’Église, barque immortelle voguantnbsp;sur la mer orageuse du monde, vers les rivages de l’éternité. Par celanbsp;seul elle donnait au simple néophyle, i l’enfant, è la pauvre femmenbsp;Ie secret des conseils de Dieu dans Ie gouvernement du monde. Ellenbsp;lui mettait encore dans la main sa propre image, l’image de sa vie etnbsp;de sa condition terrestre. lt;f Deux choses, lui disait-elle, me composent:nbsp;la terre et Ie feu, et ces deux choses vous composent vous-même : lanbsp;terre, c’est volre corps; Ie feu, c’est volre ftrae. Comme moi vous deveznbsp;briller et échauffer, et comme moi vous consumer en brillant et ennbsp;échaulfant. Je suis remblème du chrétien, comme Ie chrétien lui-même est l’image du divin Mailre, véritable lampe oü les splendeursnbsp;de la Divinité brillent sous l’enveloppe terrestre de l’humanité (3).

(1) Feriaquarla in hebdomada qu.arta, quando clerici v.adunt cum cruce per cCEmclo-rium, ad S. Paulum et S. Anaslasium, tolum altare est clericorum. Miss. Laleran.

(i) Anast. In Joann, m, et Greg. 111.

(3) Lucerna, lumen in testa; lumen in vase; divinitas in humanitate. Vas humanitas, lumen divinilas. Pra'ccssi I Christus lerens lucernam, sequitur christianus tenens exemplinbsp;semitam. Proposuit humanilalem lucentem, ex divinilateextulit lucernam utvidearousnbsp;fide,ambulemusoperalione,diriganiur imitatione.—Hug. aS. Vict.,t.i,Atinoi. in Psalm-c. i.xxix.

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EMBLÈMES. il3

Les nombreux emblèmes dont elle est couverte développent eet en-seignement général. On y voit tour a tour Ie monograrame de Notre-Seigneur, commencenieent et fin, auteur et consommateur de Ia foi;

Ie chandelier, image de la charité; la colombe, symbole de l’inno-cence; Ie Bon Pasteur portant sur ses épaules la brebis égarée, tou-chante exhortation a la confiance et au repentir; la croix, ancre de salut au milieu des lempêtes de la persecution; enfin la palme dunbsp;marlyre, quelquefois même la figure d’un martyr triomphant, éloquent prédicateur de la récompense future. De ces détails et de beau-coup d’autres qu’il serait facile d’ajouter, il résulte que la lampe desnbsp;Catacombes élait un catéchisme oü se trouvaient expliquées d’unenbsp;manière palpable lesgrandes vérités et les grands devoirs dela religion.

Avee quel bonheur on prend dans ses mains ce catéchisme écrit U y a dix-huit siècles! Avec quel saint orgueil Ie catholique des der-niers temps y lit les dogmes immuables de sa foi! Ceite lecture étaitnbsp;achevée lorsque nous arrivSmes aux Catacombes de Saint-Callixte.nbsp;Salut! merveille de la Rome souterraine, quartier général de la gloirenbsp;et du marlyre, travail de géants, dites-nous quelles mains vous ontnbsp;bfttie, quelles mains vous ont rendue a la lumière el l’admiration denbsp;l’univers? L’héroïque matrone dont Ie nomjbrille commeun diamantnbsp;parmi tant de noms illuslres qui remplissent les annales sanglantesnbsp;de la primitive Église, sainte Lucine, disciple des Apölres, fut lanbsp;fondatrice de celle immense Catacombe. Le nom qu’elle porte au-jourd’hui lui vient du pape saint Callixte, qui, poussant les travauxnbsp;avec une ardeur proporlionnée aux ravages incessants des persécu-tions, élendit dans tous les sens les galeries primitives et en ajouta denbsp;nouvelles.

On ne saurait trop le redire; depuis qu’elle a été réhabilitée par le chrislianisme, la femme est devenue une puissance, un nouvel élémentnbsp;qui concourt i lous les grands fails de I’histoire. De la crèche aunbsp;Calvaire; du Calvaire aux Catacombes; des Catacombes sur le trónenbsp;des Gésars; du tróne des Césars a lous les Irónes du monde civilisé;nbsp;des Irónes aux chaumières, on la suit a la trace lumineuse de son dé-vouement el de son courage. Elle est associée ó tous les grands hommes et a tous les grands saints pour produire ces oeuvres el ces institutions inconnues du monde ancien, et qui sont encore Ia gloire exclusive de 1 humanité chrétienne. Honneur done a sainte Lucine et anbsp;saint Callixte, fondateurs du plus beau, du plus vaste, du plus noblenbsp;faubourg de la grande Cité des martyrs!

Mais quel est le nouveau Colomb qui découvrit ce monde souter-

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414 nbsp;nbsp;nbsp;les TROIS ROME.

rain, après une disparition douze fois séculaire? L’an du Seigneur 1593, Antoine Bosio, errant dans Ia Campagne romaine, flairait, s’ilnbsp;est permis de Ie dire, ces vastesdemeures, comme Ie navigateur génois,nbsp;voguant sur l’Atlantique, flairait les plages américaines. Sorti denbsp;Rome par la porte Capena, Bosio arrive prés de l’église de Sainte-Marie-in-Palmis, laisse a gauche la Voie Appienne et se dirige du cóiénbsp;de l’ancienne Voie Ardéatine. Dans un terrain tourmenté, apparte-nant l’hospice de Saint-Jean-de-Latran, il aper^oit a fleur de terrenbsp;quelques arcades en brique. II ne doute pas de la présence d’une Catacombe, dont ces arceaux masquent l’entrée, et il se laisse coulernbsp;dans l’étroite ouverture.

L’amour de la science lui donne des ailes; il s’avance, il s’avance encore dans ces sombres souterrains. Bientót les galeries se resserrentnbsp;et s’abaissent; il ne peut plus marcher qu’en rampant, et il rampe. Ninbsp;la dilficullé des passages, ni la crainte des éboulements ne peuventnbsp;l’arrêter; nult et jour il continue sa pénible investigation. Enfin Ienbsp;plus glorieux succès couronne ses efforts : une cité tout entière se dé-roule devant lui. Infatigable au travail, inaccessible ^ la crainte, il l’ex-plore plusieurs fois dans tons les sens, et ne peut, malgré la longueurnbsp;et Ie nombre de ses courses, parvenir é en raesurer l’étendue. Aux galeries s’ajoutent des galeries, ii l’étage supérieur se joint un étage inférieur; et telle est, d’après l’estimation commune, la dimension denbsp;cette Catacombe, qu’elle s’étend, k droite et a gauche de la Voie Ap-pieune, des portes de Rome a la Basilique de Saint-Sébastien; de la,nbsp;è Saint-Paul-hors-des-Murs, et jusqu’a Saint-Paul-Trois-Fonlai-nes (i).

A mesure que nous les visiterons, nous ferons connaitre les innora-brables monuments trouvés dans la partie du cimetière du Saint-Cal-lixte découverle par Bosio, ainsi que les Memorie de la portion plus anciennement connue (2).

C’est dans la Basilique de Saint-Sébastien que se trouve l’entrée ordinaire de Ia Catacombe. Pendant que Ie bon frère de Saint-Frangois préparait les flambeaux, nous fimes une nouvelle station è la Platonia.nbsp;C’est, comme on sait, Ie lieu oü reposèrent pendant quelque temps lesnbsp;saints apötres Pierre et Paul. Leur sépulture prit, par excellence, Ienbsp;nom de Tombes, et Ie cimetière voisin celui de Lieu auprès des tombes. Nous finissions la courte prière qu’on est heureux d’ajouter h tantnbsp;d’autres, répandues ici depuis dix-huit siècles par des milliers de

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Aringhi, lib. ut, C. xxil, p. 292-S.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Voir Ie Plan a la fin du volume.

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CIMETIÊRE DE SAINT-CALLIXTE. 115

pèlerins, lorsque Ie frère vint nous dire; Signori, alle Catacombe; et nous Ie suivimes au bas de l’église. Prés de la porie qui allait s’ouvrir,nbsp;nous lumes Pinscription suivante qui pénèlre Téme d’un sentimentnbsp;indéfinissable de respect, de joie, de frayeur et de douce mélancolie ;

HOC EST COEMETERIVM CALLISTI PAP^ ET MARTÏRISnbsp;IXCLYTI QVICVMQVE ILLVDnbsp;CONTRITVS ET COKFESSVSnbsp;ISGRESSVS FVERIT PLENAMnbsp;REMISSIONEM OMNIVM PECCATORVMnbsp;SVORVM OBTINEBITnbsp;PER MERITA GLORIOSA CENTVMnbsp;SEPTVAGINTA QVATVOR MILLIVMnbsp;SANCTORVM MARTYRVMnbsp;VNA CA'M QA'ADRAGINTA SEXnbsp;SVMMIS PONTIFICIBVSnbsp;OVORVM IBl CORPORA IN PACEnbsp;SEPVLTA SVNT.

QVI OMNES EX MAGNA TRIBVLATION'E VENERVNT ET VT II.EREDESnbsp;FIERENT IN DOMO DOMINInbsp;MORTIS SVPPLICIVM PRO CHRISTInbsp;NOMINE PERTVLERVNT.

« C’est ici Ie cimetière de Callixte, pape et martyr célèbre; quicon-que y entrera conlrit et confessé obtiendra la pleine rémisslon de tous ses péchés par les mérites glorieux des eent soixante-qualorze millenbsp;martyrs et des quarante-six Souverains Pontifes, dont les corps y reposent en paix; qui tous sont venus de la grande tribulation et qui,nbsp;pour devenir héritiers dans la maison du Seigneur, onl souffert lanbsp;mort pour Ie nom de Jésus-Chrisl. »

La grosse porte s’ouvre et nous descendons dans Ia cbapelle souter-faine de Saint-Sébastien. Nous descendons encore, et nous voilé dans nn immense labyrinlhe formé d’innombrables galeries, qui fuient ennbsp;zigzags de tous cötés. A droite et a gauche, des tombes longitudinales,nbsp;superposées les unes aux autres, tombes de vieillards, tombes de jeunesnbsp;enfants, tombes de soldats, tombes de Pontifes, tombes de martyrs denbsp;lout ége, de loute condition et de lout pays; mais tombes vides. Lanbsp;piéié calholique a retiré de leur demeure souterraine ces legions immortelles de héros et d’héroïnes, la couronne el Ie boulevartde TÉglisenbsp;militante. Placées aujourd’hui dans des temples magnifiques, sur des

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H6 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

autels étincelants d’or, de jaspe, d’albfttre et de pierres précieuses, elles attendent, au milieu des hommages de l’univers, Ie jour du réveilnbsp;général pour aller prendre leur place d’honneur dans l’Église triom-phante, dont elles seront Ie plus bel ornement.

Parmi ces loculi, qui n’auront rien è rendre, on voit avoc atlendris-sement les trois loculi de jeunes martyrs moisonnés par Ie glaive it l’aurore de la vie. A cöté, sont les tombes de leur père et de leur mère,nbsp;martyrs comme leurs enfants : heureuse familie! Plus loin est la cryptenbsp;oü fut déposée sainte Cécile. Le voyageur francais éprouve un noblenbsp;orgueil en lisant l’inscription gravée sur le lieu vénérable qui posséda,nbsp;durant quatorze siècles, le corps virginal de l’illustre martyre.

HIC QVONDAM RECONDITVM FVIT CORPVS BEATiE C^CILI.Enbsp;VIRGIJUS ET MARTÏRISnbsp;HOC OPVS FECITnbsp;FIERI REVERENDISSIMVS PATERnbsp;DOMINVS GVILLELMVSnbsp;ARCHIEPISCOPVS BITVRICE.NCISnbsp;ANNO DOMINI M. CCCC. IX.

« C'est ici qu’autrefois reposa le corps de sainte Cécile, vierge et martyre. Ce petit monument a été fait par ordre du révérendissimenbsp;père, le seigneur Guillaume, archevêque de Bourges, l'an du Seigneurnbsp;mil quatre cent neuf. »

En avanfant, on trouve l’^rea, c’est-a-dire la petite place S jamais célèbre oü saint Philippe de Néri vint pendant dix années de sa vienbsp;passer la nuit en prières. Pourquoi cette assiduité, sans exemple dansnbsp;l’histoire? Nous aimons è compléter ici la réponse è cette belle question, déjii eöleurée le 22 décembre. II y a quarante siècles, Israël étaitnbsp;en marche vers la Terre Promise; les Amalécites lui ferment le passage et jurent de l’exterminer. Leurs gros balaillons s’ébranlent, on ennbsp;vienl aux mains : Israël est menacé d’une extermination compléte.nbsp;Moïse monte sur une montagne solitaire d’oü il contemple la face dunbsp;combat. Pendant toute la durée de la lutte, il élève ses mains supplian-tes vers le Dieu des armées; et sa prière, plus puissante que les légionsnbsp;d’Amalec, fixe la victoire aux drapeaux dTsraël. Révélation mémorablenbsp;de l’ordre providentiel, type lumineux de la conduite indiquée auxnbsp;chefs des nations dans les moments solennels, l’exemple du législateiirnbsp;antique ne fut jamais oublié dans l’Église, et toujours il fut imité avecnbsp;succès par les Moïses des siècles chrétiens.

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NOÜVELLE GLOIBE DE SAINT PHILIPPE DE NÉRI, nbsp;nbsp;nbsp;117

Op, I’Eglise traversait Ie xvi® siècle. Puissant organe de toutes les passions des rois et des peuples, Luther a convoqué Ie ban et l’arrière-ban des ennemis du catholicisme: la lutte s’engage, lutte gigantesquenbsp;*pii jelte Ie sacrilége et l’apostasie jusque dans Ie sanctuaire, et quinbsp;couvre l’Europe de sang et de ruines. De son regard inspiré, Philippenbsp;de Néri, Ie saint de Rome, a vu la face du combat. II a compris quenbsp;1 homme seul est trop faible centre l’enfer. Accompagné de saintnbsp;Charles Borromée, comme Moïse de Hur et d’Aaron, il se retire dansnbsp;la profonde solitude des Catacombes. Pendant dix ans il élève sesnbsp;®ains vers Ie ciel et demande amp; l’Arbitre suprème Ie triomphe de l’É-glise. A son aide, il appelle les deux millions de martyrs qui reposentnbsp;auteur de lui; et la voix du sang, mêlée a la voix de la foi, monte aunbsp;ciel rapide comme l’éclair, puissante comme l’araour. La foudre part,nbsp;Ja division se met dans Ie camp ennemi; et, comme aux constructeursnbsp;de Ja tour de Babel, il ne reste aux réformateurs orgueilleux que lanbsp;cisée du monde.

II était juste qu’un monument rappelèt aux générations Ie théamp;tre de cette glorieuse victoire; ou, comme dirait Bossuet, Ie lieu d’oü Ienbsp;coup vainqueur était parti. Le ciseau d’Algardi et la plume du célèbrenbsp;Uondanini ont noblement rempli ce devoir. On peut voir, dans l’Égiisenbsp;de Saint-Sébastien, le bas-relief qui représente le Moïse du xvi® sièclenbsp;dans l’attitude du combat; et, dans les Catacombes, Tinscription quinbsp;chante sa victoire. En voici le commencement :

C^ECÜS IIIC LOCI SQUALOR ET ILLUSTRI MARTYRÜSI SANGUINE ADHUC STILLANS,nbsp;AT S. PHILIPPI NERII

LONGO DECEM ANNORUSI DOMICILIO ILLUSTRIOR, ETC.

« Ce sombre lieu, illustré par le sang des martyrs, dont il est encore bumide, saint Philippe de Néri l’a rendu plus illustré encore par unnbsp;Jctig séjour de dix années (i). »

La plupart des voyageurs se contentent de visiter la partie du Gime-Cère de Saint-Callixte, dont nous venons de parler. 11 en est une autre d’un difficile accès, beaucoup moins explorée que la première, et, pournbsp;cela, plus intéressante aux yeux de l’archéologue : nous y viendronsnbsp;demain.

En quitlant ces cryptes vénérables, la grande figure de saint Phi-lippe de Néri reste gravée dans l’ème du voyageur ; on marche sur le 1

1

Aringhi, lib. m, c. xii, p. 277.

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418 LES TROIS ROME.

sol de tuf qu’il a foulé de ses pieds, arrosé de ses larraes; on Ie volt, on l’entend, et tous les échos des galeries semblent répéter ses soupirs.nbsp;Mais ce qui ajoute amp; la gloire de eet illustre saint, ce qui Ie montrenbsp;vraiment comme l’homme providentiel, c’est Ie double souvenir quinbsp;vient s’ajouter au premier.

Philippe de INéri, qu’on peut appeler non-seulement Ie Moïse, mais encore Ie Josué de l’Église au xvi® siècle, ne se contente pas d’obtenir,nbsp;par ses prières, Ie triomphe immédiat de la vérité : il ordonne a sesnbsp;deux aides de camp de la consoler et de la venger pour une longuenbsp;suite de siècles. Le protestantisme jette au vent les cendres des martyrs; et, comme Rachel, les églises désolées de France, d’Angleterrenbsp;et d’Allemagne versent des larmes inconsolables. A ce premier sacri-lége le protestantisme en ajoute un autre. Les centuriateurs de Mag-debourg prennent l’Église depuis son berceau, et, la suivant pas è pasnbsp;dans ses différents Ages, la soumettent aux fouets sanglants de la ca-lomnie, puis la livrent a la dérision et aux mépris de la foule.

D’une main, Philippe de Néri montre les Catacombes A Bosio; et, sous les pas du nouveau Colomb, la grande Cilé des martyrs découvrenbsp;ses splendeurs cachées ; la Rome souterraine devlent une mine fécondenbsp;qui comble l’Eglise de richesses et de consolations jnattendues. Denbsp;leurs tombes entr’ouvertes sortent des légions de martyrs; ils rempla-cent leurs devanciers sur les autels de l’univers, et l’antique burin quinbsp;avait écrit sur leurs monuments, seize fois séculaires, les dogmes ca-tholiques, grave au front du prostestantisme les stigmates flétrissantsnbsp;de la calomnie et de la nouveauté.

De l’autre main, Philippe montre A Baronius, son disciple chéri, l’Eglise des siècles indignement outragée par la plume des novateurs.nbsp;Baronius a compris; et voilA qu’aux applaudissements de l’Europe,nbsp;s’élève un monument immortel oü sont gravés, par la main de la Vérité et du Génie, les fastes glorieux du catholicisme. L’Église est ven-gée et consolée; vengée par les Annales ecclésiastiques, consolée parnbsp;les Catacombes, double gloire de l’humble Philippe de Néri. En vainnbsp;Terreur aux abois pousse des hurlements de rage; en vain elle essaienbsp;de se débattre sous le poids qui 1 écrase : comme celle de 1’Arabe,nbsp;fugitif habitant du désert, sa main débile ne peut détacher une pierrenbsp;des immobiles pyramides qui proclament sa défaite et sa bonte.

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BÉSÉDICTION DE l’eAD POÜR LES MALADES. nbsp;nbsp;nbsp;1 i 9

6 JANVIER.

Bénédiclion de l’eau pour les malades. — Nouvelle visite aux Catacombes de Saint-Cal-lixte. — Les Cubicula, Cubiculum Clarum. — Antiquité des Cubicula. — Paroles de saint Jéröme. — Trois espèces de Cubicula. — Origine. — Soin et respect de l’Églisenbsp;pour les Cubicula. — Ordre des Cubiculaires. — Descente aux Catacombes de Saint-Callixie. — Glorieux souvenirs des persécutions, des papes et des martyrs.

Au lever de l’aurore, Ie canon du chtlteau Saint-Ange annon^ait Ie retour du jour mémorable oü Ie soleil de la vérité se leva sur les nations assises dans les ombres de la mort. Reconnaissants de ce bien-fait, dont Ie monde jouit encore, les habitants de Rome accouraientnbsp;aux églises : tout travail élait suspendu. La cbapelle de la Propagandenbsp;réunissait les prêtres de l’Orient et de l’Occident, qui célébraient surnbsp;Ie même autel, en offrant la même victime, la vocation de tous lesnbsp;peoples Ia foi. Au grand spectacle de la variété des rites dans l’uniténbsp;du sacrifice, nous voulumes ajouter celui de la variété des prières dansnbsp;l’unité d’un même usage, en attendant Ie bonheur de voir dans lesnbsp;Catacombes la variété des suppliers et des viclimes pour la défense denbsp;I3 même religion. Après Ie ciel, resplendissante demeure oü tous lesnbsp;loutes les conditions, toutes les langues, toutes les tribus, sontnbsp;couronnées dans Péternelle unité de l’amour, je doute qu’il y ait riennbsp;de plus beau que ce triple spectacle.

Conduits par cette pensée, nous nous rendimes successivement h l’église des Stigmates et é l’église de Saint-Atbanase. Dans Tune etnbsp;1’autre nous fiimes témoins de la bénédiction de Peau que, suivantnbsp;1’antique usage, l’Église de Rome bénit, chaque année, Ie jour denbsp;1’Epiphanie, pour Ie soulagement des malades. Aux Stigmates, la vé-Uérable bénédiction se fait dans Ie rit lalin; ü Saint-Alhanase, suivantnbsp;Ie rit grec. Partout se retrouve, n’importe la forme du langage, lanbsp;Pompe grave et solennelle du catholicisme, la merveilleuse poésie denbsp;chants si sublimes et si simples, la douce onclion de ses prières, Ienbsp;®ynibolisme éloquent de ses cérémonies, et son inviolable fidélité auxnbsp;S3intes traditions des temps apostoliques.

Quelle est cette bénédiction si nouvelle pour nous, et peut-être coniplétement inconnue d’un grand nombre de ebréliens? L’Évangüenbsp;Oous apprend que Notre-Seigneur fut baptisé dans Ie Jourdain, et lesnbsp;plus anciens Pères sont unanimes pour fixer l’époque de eet événementnbsp;3u sixième jour de janvier. C’est alors que Ie Fits de Dieu régénéranbsp;par son contact sanctificateur les eaux qu’il avail tirées du néant et

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120 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

que Ie mal avail souillées comme tout Ie reste de la créalion. En mé-moire de ce bienfait, l’Église bénit l’eau Ie mêrae jour, et certaine qu’elle regoit de la parole divine une vertu salulaire, elle la distribuenbsp;è ses enfants pour la guérison de leurs maux. Que sa confiance ne soitnbsp;pas vaine, d’éclatants, je dirais de perpétuels miracles Ie démontrent.nbsp;Ils sont tels que les ennemis les plus acharnés de l’Église calholiquenbsp;en reconnaissent l’authenticité (i).

Or eet usage, suivi de nos jours encore dans l’Orient, même par les sectes schismatiques, Rome, gardienne fidéle de toutes les saintes traditions de la foi, aussi bien que des inspirations de la charilé primitive, Ie conserve avec honneur et Ie pratique avec succès (s). L’incré-dulilé aurait bonne gréce de Ie révoquer en doute! Elle qui refuse amp;nbsp;Dieu Ie pouvoir de donner aux éléments et aux signes sacrés une vertunbsp;curative, ne l’avons-nous pas vue, pendant Ie choléra-morbus, porternbsp;sur soi, en guise de scapulaire, un morceau de camphre pour se pré-server du fléau ? Ne la voyons-nous pas descendre de jour en jour jus-qu’é l’idolatrie de la science médicale, et quelquefois jusqu’aux ridicules prescriptions du charlatanisme et de la magie?

Au sortir de la cérémonie, nous reprimes Ie chemin de la Voie Ap-pienne. Arrivés dans les vignes qui couvrent cette partie de la Campagne romaine, notre excellent guide nous montra plusieurs entrées des Catacorabes de Saint-Callixte. On chercha la moins difficile, etnbsp;nous disparumes dans les souterrains du vaste cimelière. Des galeriesnbsp;nombreuses fuyant dans tous les sens, des tombes vides, des éboule-ments, des places, des cryptes, des cubicula; enfin tout ce qu’on voitnbsp;dans les autres Catacombes, on Ie rencontre ici sur une plus vastenbsp;échelle. La description de chaque monument serail une répétition inutile. Conformément au plan que nous nous sommes tracé d’instruirenbsp;Ie pèlerin de Ia Rome souterraine, en lui faisant connaitre les unsnbsp;après les autres les différents objets qui s’y présentent, nous allonsnbsp;lire avec lui une nouvelle page de ce grand livre.

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Je citerai cnlre autres deux savants de premier ordre, parmi les protestants :nbsp;Casaubon, Exercil. 13, § 10; et Cave, Hist, litter, dissert. 2, de libris et officiis Grmco-rum, p. 179.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Hsec dies Gst, (ju3 bsptiz^lus Gst, Gt 3(^uiiruin nstursni sjinctifictivit. Idcirco ctistnnbsp;in liac solcmnitate sub mediam nociGtn omnes, cum aquaii fucrint, domum Latini re-ferunt, el per inlegrum annum conservanU ul pole quod hodierna die sanctificalae sintnbsp;aqutCj lilque miraculum evidens, cum nihil temporis longinquitate aquarum illarumnbsp;natura viliatur, sed integro anno, aique adeo biennio el irienno s?epe quae bodie luitnbsp;bausta, incorrupla et recens permanel ac post tantum temporis cum iis quae 1‘uerint enbsp;Ibnlibus eductae ceriat. —S. Chrys. Horn, xxiii, de Baptiste Chrisli. Id. Thomass., Dcnbsp;Festis, lib. 11, c. 7, arfnn. Christi, 29. § 7. Sandini, Hist.famiL sacrce, p. 76, etc.

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VISITE DES CATACOMBES DE SAINT-CAILIXTE.

A mesure qu’on s’enfonce dans ces sombres demeures, on Irouve *les excavations de grandeurs différentes, pratiquées dans Ie flanc desnbsp;galeries. Chambres, cubicula; groltes ou cryptes, cryptce; places,nbsp;“fe®, tels sonl les noms divers de ces lieux, doublement remarqua-ties par leur forme et par leur destination. Parlons aujourd’hui desnbsp;^ubicula, si nombreux dans les Catacombes de Saint-Callixte, de Pré-l^xtat, de Sainte-Agnès, et des Saints-Marcellin et Pierre sur la Yoienbsp;l^abicane.

Représenlons-nous une ouverture en guise de porte pratiquée dans paroi d’une galerie; franchissons cette porte quelquefois avec unnbsp;®auil, Ie plus souvent au niveau du sol, nous arrivons dans une petitenbsp;®liambre de quelques pieds de longueur, de largeur et de hauteur.nbsp;Ordinairement cette chambre représente dans son ensemble Ie sanc-^uaire en rond-point d’une petite chapelle. Cependant la forme absi-'lale n’est point invariable : on trouve des cubicula circulaires, demi-^Irculaires, carrés, iriangulaires, pentagones, hexagones et octogones.nbsp;En examinant la nature du terrain, on peut bien admettre que cettenbsp;'’ariété tient souvent è l’irrégularité des couches du tuf lithoïde ounbsp;granulaire; mais elle n’en prouve pas moins, contre quelques-uns denbsp;•aos archéologues, que la forme absidale n’était nulleraent de rigueurnbsp;que les basiliques païennes ne furent point ie modèle oblige de nosnbsp;^glises primitives.

Le fond est occupé par une tombe de martyre, exhaussée de quelques pieds, el placée dans une niche. La partie supérieure de la tombe forme une table sur laquelle on peut sans difficullé célébrer les saintsnbsp;niystères. Dans les parois latérales du cubiculum sont placés horizon-'^alement deux ou trois loculi, com me dans les galeries. Le rond-pointnbsp;cubiculum, qu’on appelle tholus, est souvent orné de peinturesnbsp;*lont nous dirons plus tard les sujets ordinaires. Donnons b toutes cesnbsp;parties la teinle noiralre de la pierre ou du tuf exposés i l’air depuisnbsp;des siècles, appliquons cette couleur h tous les objets dont il vientnbsp;d élre parlé, et nous aurons en même temps la forme et la physiono-®iie du cubiculum (i).

Les vastes Catacombes nommées ci-dessus, et dont il est fait une *nention si fréquente dans les Actes des Martyrs, ont un plus grandnbsp;nombre de cubicula que les autres. La raison en est qu’elles furentnbsp;plus fréquentées et plus longtemps habilées aux époques des persécu-L'ons (2).

(') Voir le Plan a la Un du volume.

(2) Boldetli, p. 13.

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122 LES TROIS ROMEé

Quelquefois Ie cubiculum communique avec la surface du sol par une ouverture de moyenne largeur. On lui donne alors Ie nom de cubiculum clarum, « charabre éclairée. » S’il n’a point d’ouverturenbsp;supérieure,c’est un cubiculum ordinaire; cubiculum vulgare. Commenbsp;leur nom l’indique, ces ouvertures, luminaria, étaient destinées anbsp;donner de l’air et un peu de lumière. On pense aussi qu’elles servaientnbsp;a descendre des vivres, peut-êlre mêrae les corps des martyrs, lorsquenbsp;la crainte d’être découvert ne permettait pas de recourir aux entréesnbsp;ordinaires. Telle est, ce semble. Ia première raison pour laquelle cesnbsp;ouvertures sont obliques et non point verticales comme nos cbemi-nées (i). Empêcher la pluie, les pierces, la terre et les autres objets denbsp;tomber d’aplomb dans Ie cubiculum, au risque de 1’endommager ounbsp;de blesser les fidèles, telle est la seconde. Dans Ie but de prévenir cenbsp;dernier inconvénient et de pourvoir b leur solidité, les luminairesnbsp;n’ont guère qu’un mèlre carré. S’ils traversent des coucbes de tufnbsp;granulaire ou lilhoïde, ils sont sans revêtement; quand ils rencontrentnbsp;des filons de pouzzolane ou de terre végélale, les parois sont soutenues par une maijonnerie en pierre ou en brique. L’ouverture supérieure n’est pas au ras de terre; mais elle est entourée d’un petit murnbsp;qui, l’exhaussant d’un pied environ, empêche l’eau de s’y précipiternbsp;et d’y enlrainer avec elle la terre et les pierres qui dégraderaient bien-tót Ie luminaire (a).

Les ouvertures que nous venons de décrire sont contemporaines des Calacombes. On en voit encore, notamment dans Ie cimetière desnbsp;Saints-Marcellin et Pierre, qui sont décorées a la base de peinturesnbsp;primitives. Le même cimetière présente une crypte oü I’on a irouvénbsp;cette inscription :

CVMPARAVl SATVRNmVS A SVSTO LOCVM VISOMVM AVRI SOLtDnbsp;os DVO IN LVMINARE MAJORE QVEnbsp;POSITA EST IBI QVE FVIT CVM MARITO AN XL.

« Moi, Saturninus, ai achete de Sixte une place a deux tombes, pour deux écus d’or, sous le grand luminaire, oü a été déposée celle qui futnbsp;avec son mari quarante ans. »

Cette inscription non-seulement indique 1’existence des luminaires dans les Catacombes, elle apprend encore que la même crypte en avait

(i)Ii taut en excepterles luminaires des Calacombes deSainte-Hélène, qui sont postérieurs aux persecutions.

(4) Marchi, p. 168.

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PAROLES DE SAIKT JÉUÓME. nbsp;nbsp;nbsp;125

plusieurs. La nécessilé de renouveler I’air dans ces lieux de réunion plus nombreuse explique ce fait d’ailleurs assez rare. Les Acles desnbsp;Martyrs ne sont pas moins formels. Nous voyons, sous Dioclétien,nbsp;sainte Candida et sainte Pauline précipitées vivantes dans les Cata-aombes de la Voie Aurélienne par le luminaire de la crypte (i).

Enfin, j’aime è citer, comme témoignage du même fait, les paroles si connues de saint Jéróme. On est heureux de les relire dans les pro-fondeurs des Catacombes, et de retrouver tels qu’il les a décrits lesnbsp;lieux qu’on parcourt quinze siècles après son passage ; « Quandnbsp;j’étais è Rome encore enfant et occupé de mes études littéraires, j’avaisnbsp;contracté avec d’autres jeunes gens de mon ége, livrés aux mêmes tra-''aux que moi, l’habitude de visiter tous les dimanches les tombeauxnbsp;des Apótres et des martyrs, et de parcourir assidüment les cryptesnbsp;creusées dans les profondeurs de la terre, qui olfrent de chaque cóténbsp;d’innombrables sentiers qui se croisent en tous sens, des milliers denbsp;‘^orps ensevelis è toutes les hauteurs, et oü il règne partout une obscu-fité si profonde, qu’on serait tenté d’y trouver l’accomplissement denbsp;cette parole du Prophéte: Vivants, ils sont descendus dans Fenfer. »nbsp;Ce n’est que bien parement qu’un peu de jour, pénétrant par les ouvertures laissées h la surface du sol, adoucit l’horreur de ces ténèbresnbsp;a mesure qu’on s’y enfonce en marcbant pas a pas et en rampant surnbsp;la terre; on se rappelle involontairement ces paroles de Virgile ; Partout l’obscurité profonde et le silence même épouvantent l’imagina-lion (2).

Maintenant que nous connaissons la forme des cubicula, il reste h dire un mot de leur origine et du respect dont ils furent environnés.nbsp;Sous le rapport de l’élendue, les cubicula peuvent se diviser en troisnbsp;'classes, les petits, les moyens et les grands. Afin de ne pas les confon-dre, nous laissons aux premiers le nom général denbsp;nbsp;nbsp;nbsp;les seconds

s appellent cryptes ou grottes; les troisièmes, chapelles ou églises. Les premiers doivent leur origine ii la piélé des families ou des particu-

(') Sanclam vero Candidam atque virginem Paulinam per prscipitium, id est, per btminare cryptce, jaclantes, lapidibus obruerunt. Cod. ms. Petr. el S. Cecil.

(s) Dutn essem Romse puer, el liberaiibus sludiis erudirer, solebam cum cffileris ejus-seiaiis el propositi, diebus dominicis sepulcra apostolorum et niartyrum circuire, Crebroque cryptas ingredi, qua; in terrarum profunda defossas ex ulraque parle ingre-*^*000001 per parietes habent corpora sepultorum, et ila obscura simt omnia, ut prope-biodum propheticum jllud complealur; Dcscendunt in infernum viventes; et raro desu-per lumen admissum horrorem temperel tenebrarum, ut non lam ieneslram, quamnbsp;1'oraraen demissi luminis pules. Rursumque pedetentim proceditur, etcmca node cir-eumdaiisillud virgUianum occurrit: Horror iibique animos, simul ipsa silentia terrent.nbsp;tn Ezech. c. xu. Voyez aussi Prudence,Pmstep/i. Hym. xi.

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124 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

liers. De li, ces inscriptions si fréquentes ; Cubiculum Domitiani, Cubiculum Gaudenti, Cubiculum Aurelice, Cubiculum Germulani:nbsp;Cubiculum de Domitien, de Gaudence, d’Aurelia, de Gerraulanus. Onnbsp;les trouve plus fréquemraent è la fin du iii'’ et dans Ie cours du iv® siècle, qu’aux époques anlérieures. De la encore ces inscriptions gravéesnbsp;sur de simples loculi:

DAFNEN VIDVA 0- CVN VIX.. ACLESIA NIHIL GRAVAVIT A..

« Dafnis, veuve, qui, pendant sa vie, ne fut en rien a charge a l’Église. »

REGINE VENEMERF.NTl FILIA SVA FECIT VENE REGINE MATRl VIDVE OVE SEnbsp;DIT VIDVA ANNOS. LX. ET ECLESAnbsp;NVNQVA GRAVAVIT VMBVRA QVEnbsp;VIXIT ANNOS. LXXX. MESIS. V.

DIES XXVI.

« A Reine bien méritante, sa fille a fait cette tombe, amp; la bonne Reine, sa mère, veuve, qui demeura veuve soixante ans, et qui ne futnbsp;jamais è charge b l’Église, mariée une seule fois, qui vécut quatre-vingts ans cinq mois vingt-six jours. »

Ainsi, Ie désir ardent de reposer auprès d’un martyr ou de dormir Ie sommeil du juste a cöté de leurs amis et de leurs proches, engageanbsp;les fidèles b s’imposer de généreux sacrifices pour obtenir un lieu particulier au milieu du dortoir commun è tous leurs frères dans la foi.nbsp;Les cbambres sépulcrales furent ornées avec plusou moinsde richesse,nbsp;suivant la fortune de ces pieux chrétiens.

C’est un trait de Providence que les inscriptions soient venues ré-véler l’origine de ces cubicula, dont Ie nombre est tel que Ie Père Marchi (i) en a compté plus de soixante dans la huilième partie des Ca-tacombes de Sainte-Agnès. A la vue de ces monuments plus ou moinsnbsp;dispendieux, et trop cxigus pour servir aux assemblées des fidèles,nbsp;quelque moderne Judas n’aurait pas manqué de blAmer l’Église, cettenbsp;sainte époiise du Sauveur, sous prétexte qu’elle avait, comme Madeleine, perdu en ornements inutiles un argent beaucoup raieiix employénbsp;au soulagement des pauvres. Certes, l’Église aurait pu Ie faire, et sanbsp;justification se fut trouvée dans l’éloge adressé par Ie Fils de Dieu b lanbsp;steur de Lazare; mais elle était trop sage et trop prévoyante pour l’en-treprendre. Dans ces temps de douleur el de pauvreté, elledevait pour-

(1) Page 102.

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BESPECT DE l’ÉGLISE POUR LES CUBICULA.

'oir a Ia nourriture d’un grand nombre de ses enfants dépouillés de leurs biens ou retenus dans les mines et les prisons; elle devait, ennbsp;outre, préparer dans les Catacombes des lieux pour ses grandes et pe-tites assemblées, mais rien ne l’obligeait a faire creuser, a grands frais,nbsp;de nombreux cubicula, dans Ie but unique de procurer d certainsnbsp;défunts une tombe plus distinguée.

Quoi qu’il en soit, les cubicula de la première espèce sont presque lous semblables pour les dimensions; mais ils différent sous plusieursnbsp;rapports. Les uns ont des monuments arqués, les autres n’en ont pas;nbsp;dans les uns, ces monuments sont des autels, ce qu’ils ne sont pas dansnbsp;les autres; enfin, les uns sont ornés de peinlures, dont les autres sontnbsp;privés.

II est temps de sortir des cubicula, d’autant que nous y reviendrons domain pour étudier Ie monument arqiié, monumentum arcuatum,nbsp;fiui en est la partie principale. Toutefois, nous ne les quitterons pasnbsp;sens rappeler la foi vive des simples fidèles et de l’Eglise elle-même,nbsp;dont ces vénérables édifices, quel que soit leur nom, cubiculum, grotte,nbsp;OU crypte, sont rimmorlel témoignage. Sanctuaire d’un ou de plusieurs martyrs, ces chambres, appelées aussi lieux et demeures desnbsp;martyrs, loca, sedes martyrum, élaient, pour les premiers chréiiens,nbsp;comrae Ie paradis de la terre. S’y consoler pendant la vie, y reposernbsp;_ après la mort, était toute leur ambition. Ce qu’étaitle Tabernacle pournbsp;les Hébreux, ces appartements des martyrs l’étaient pour nos pères :nbsp;ils n’en approehaient qu’avec une vénération profonde. L’Église denbsp;Rome porta la sollicitude et Ie respect jusqu’è élablir un ordre particulier de Lévites, préposés a leur garde. Du nom de leur charge, cesnbsp;ministres s’appelèrent Gardiens des cubicula, ou Gardiens des martyrs, Cubicularii, Martyrarii.

Ce poste d’honneur et de confiance était placé si haut dans l’estime du clergé et du peuple, qu’il passait avant la dignité et les fonctions,nbsp;Pourtant si relevées, du Sous-Diaconat priraitif. « Si quelqu’un veutnbsp;s cnröler dans la milice de l’Église, nous voulons, dit Ie pape saintnbsp;^ylvestre, qu’il soit d’abord Portier, ensuite Lecteur, enfin Exorciste,nbsp;pendant Ie temps déterminé par l’Évêque; puis. Acolyte, pendantnbsp;'^loq ans; Sous-Diacre, cinq ans; Gardien des martyrs, cinq ans;nbsp;l’i'étre, trois ans; et qu’il arrive, par ces degrés, a l’Épiscopat (i). »

U) Consliluit ut si quis desideraret in Ecclesia militare..., ut esset prius Ostiarius, deinde Lector, cl postea Exorcisla por tempora qu.x Episcopus staiuerit; deinde Aco-n *’ du'oque; Subdiaconus, annis quinque; Custos martyrum, annis quinque;

Presbyter, annis tribus;.....et sic ad ordinem Episcopalusascendcre. — Anasl., ƒ« Stjlv.

T. IV.

~ — 6

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126 nbsp;nbsp;nbsp;les TUOIS ROME.

Non content de maintenir ces sentinelles chargées de veiller a la garde de tons les cubicula des martyrs, saint Léon Ie Grand élablit des Cu-biculaires spéciaux pour les tombes apostoliques ; noble emploi quinbsp;subsiste encore de nos jours (i).

Reprenant notre pèlerinage dans les vastes souterrains de Saint-Callixte, nous lisions 4 la lueur de nos torches, ou nous écoutions Ie récit des événements dont celte Catacombe fut Ie théAtre. Elle a vunbsp;passer les plus pures gloires de l’Église aux jours immortels de lanbsp;grande kilte; elle a vu les Souverains Ponlifes cachés dans ses pro-fondes retraites, consacrer leurs successeurs 4 l’épiscopat et au mar-tyre, blanchir dans les eaux du baptême, nourrir du pain des forts,nbsp;abreuver du vin qui fait germer les vierges, leur bercail éperdu; ellenbsp;a vu les innocentes brebis descendre par toutes les entrées et cherchernbsp;devanl les tombes des martyrs Ie courage de soulenir avec gloire leursnbsp;terribles combats. Chaque galerie, chaque groUe, chaque cubiculumnbsp;redit un épisode de la grande tribulation, Ie nom d’un héros, un usagenbsp;sacré, un événement mémorable de ces 4ges d’héroïque mémoire. IInbsp;serait long de répéter en détail cette histoire de TÉglise primitive,nbsp;racontée par les mille échos des Catacombes de Saint-Callixte.

Parmi tant de fails écrits avec Ie sang de nos pères, et qui devraient êlre écrits en lettres d’or dans la mémoire de leurs enfants, arrêtons-nous 4 quelques-uns qui, par leur importance, composent la tramenbsp;générale de cette période historique, la plus merveilleuse que Ienbsp;monde ait jamais vue. Comme ces fleuves, descendus du flanc desnbsp;raontagnes, qui arrosent les vallées et disparaissent dans les entraillesnbsp;de la terre pour ressorlir un peu plus loin avec une nouvelle majeslé;nbsp;l’Église, descendue des hauteurs du Calvaire, coule d’abord 4 la surface du globe depuis Jérusalem jusqu’4 Rome ; mais bientót, contra-riée dans sa marche victorieuse par la perséculion, elle se cache aunbsp;sein des Catacombes, d’oü elle sortira pleine d’une vigueur nouvelle.

Au commencement du second siècle, sous l’empire d’Antonin, elle descend au cimetière de Saint-Callixte, mais elle y descend vivantenbsp;dans la personne du pape saint Télesphore. Deux illustres martyrs denbsp;Milan viennent trouver 1 auguste vieillard et Ie conjurent de donnernbsp;pour évêque a leur Église saint Caliraère leur frère dans la foi. Lenbsp;pape se rend a leurs voeux et fait couler sur le front du nouvel élunbsp;l’huile sacrée qui en fait un pontife et un martyr (2); quelle ordination!

{1} Hoc eliani constituit, et addidit supra sepulcra Apostolorum ex clero roniano Custodes, qui dicuntiir Cubicularii. — Id., In. S. Leon.; Boldetti,p. 33.

(-i) Bar., An. ad Martyr., 51 jul., et jan. 3,

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GLORIEUX SOUVENIRS DES PERSECUTIONS. 127

Voici une autre ambassade : Ie pape saint Urbain, caché dans la gt;igt;ème Catacombe, voit arriver un jour deux illustres Remains, Valé-rien et Tiburce; ils sont envoyés par sainle Cécile qui vient de lesnbsp;oonvertir a la foi. La noble vierge a dit a son époux : « Valérien, alleznbsp;jusqu’au troisième milliaire de la Voie Appienne. Li vous trouvereznbsp;des pauvres qui demandent l’auraóne aux passants; je les ai souventnbsp;assistés, et ils sont très-au courant de mon secret. Lorsque vous arri-verez, vous les saluerez, en disant : Cécile m’envoie auprès de vousnbsp;afin que vous m’indiquiez Ie saint vieillard Urbain, pour qui elle m’anbsp;chargé d’une commission secrète. » Les pauvres leur indiquent une desnbsp;entrées du vaste cimetière. Ils y descendent, et suivant les indicationsnbsp;qu’on leur a données, ils arrivent au Souverain Pontife; de ses mainsnbsp;''¦’énérables ils resolvent la robe blanche du baptéme, qu’ils rougissenlnbsp;Peu de jours après dans Ie sang du raartyre (i).

Quelques années plus tard Ie pape saint Élienne prenait Ie chemin de la même Catacombe, dont il fit longtemps sa demeure, son sérai-naire et sa catbédrale. Le lendemain de sa glorieuse mort, on envoyaitnbsp;aux frères reslés dans Rome, le pain sans lequel les chrétiens senbsp;croyaient incapables du martyre (2). L’acolyte ïarsicius est chargé denbsp;1’auguste commission. Arrivé prés des murailles de la ville, non loinnbsp;du lieu oü s’élève aujourd’hui la petite église Domine, quo vadis, ilnbsp;est rencontré par des soldats qui Tarrêtent et lui demandent ce qu’11nbsp;porte. Afin de ne pas livrer les perles aux pourceaux, ïarsicius refusenbsp;de répondre. A lïnstant il est accablé d’une grêle de coups'de pierresnbsp;et de batons; il expire martyr de son respect pour la sainte Eucharistie. Les soldats retournent son corps, fouillent ses vêtements et nenbsp;trouvent rien. Saisis de frayeur ils se dirigent vers la porte Capena,nbsp;y rencontrent une multitude de chrétiens qui se glissent dans les ci-•betières pour y célébrer les obsèques du pape Étienne, martyrisé lanbsp;'eille. Ils vont trouver Fempereur pour Finformer de ce qu’ils ontnbsp;fait et de ce qu’ils ont vu. C’est alors que Valérien publie le barbarenbsp;édit par lequel il interdit aux chrétiens Fentrée des cimelières (5).

Nonobstant la défense impériale les pasteurs et le troupeau conli-buent de chercher un asile dans les vastes Catacombes de Saint-Cal-lixte. Mais les païens en ont découvert quelques entrées, et les papes ^'xte II et Caïus arrosent de leur sang ces mêmes lieux, théatre récent

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Act. B. Coecil.

Uni,

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Idoneus esse non polest ad marlyrium, qui ab Ecclesia non armalur ad praslinbsp;et mens deficit quam non accepta Eucbarislia origil et accendit. — S. Cypr.

(^) Aringhi, lib. iii, c. ii, p. 2ü9.

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^:28 nbsp;nbsp;nbsp;I.ES TROIS ROME.

(lu marlyre de saint Étienne. Voila quelques-uns des fails accomplis dans Ie cimelière de Saint-Callixle. Ils donnent l’idée de la vie denbsp;1'ÉgIise, de la violence des perséculions, et du courage héroïque denbsp;nos pères, capables de braver, pour conserver Ie trésor de la foi,nbsp;lollies les horreurs d’une existence toujours placée entre les angoissesnbsp;de la crainte et la perspective de l’échafaud.

Leur courage et leur foi se révèlent encore dans la sépulture qu’ils donnent aux martyrs. C’est ici qu’après avoir, malgré les bourreaux,nbsp;reliré du Tibre ou enleyé des voies publiques, du grand Cirque ou dunbsp;Colisée les corps sanglants de leurs frères, ils viennent les inhumernbsp;pendant la nuit. Au premier rang des glorieuses victimes qui peuplentnbsp;les immenses Catacombes de Saint-Callixte, figurent les saints papesnbsp;Anicet, Anlère, Pontien, Fabien, Corneille, Lucius, Étienne, Sixle II,nbsp;Denys, Eutichien, Eusèbe et Melchiade, tous martyrs. On peutajouternbsp;!es autres saints pontifes Zéphirin, TJrbain, Marc et Damase; car lesnbsp;cimeiières particuliers dans lesquels ils furent déposés font partie dunbsp;cimelière de Saint-Callixte.

Sur la même ligne se place le capitaine des gardes prétoriennes, saint Sébastien. Son nom est tellement populaire, qu’il absorbe ennbsp;quelque fagon celui de saint Callixte et s’impose généralemenl auxnbsp;Catacombes de la Voie Appienne. Jelé après sa mort dans le grandnbsp;égout, il en fut reliré la nuit suivanle par sainle Lucine, et déposénbsp;au cimelière de Saint-Callixte. A taut de noms célèbres, si I’oii ajoutenbsp;ceux de sainle Cécile, de saint Maxime, de sainte Lucine et une foulenbsp;d’autres, on conviendra sans difficulté que la Voie Appienne continuenbsp;d’étre sous le christianisme ce qu’elle fut sous le paganisme, la reinenbsp;des voies, et le quarlier général de la gloire.

8 JANVIER.

Catacombes de Saint-Zéphirin, — de Sainte-Cécile, — do Saint-Sixle. — Hisloire. — Monument arqué, Arcosoliitm ou Monumentum arcuatum. — Origine. — Détails surnbsp;l’Église de Rome en 2ól. Inscription et origine des cryples et des églises.— Leurnbsp;destination rcligieuse. ¦ Preuves historiques. — Preuves archéologiques. — Autel. ¦—nbsp;Cliaire pontificale. — Presbyterium^ — Confessionnaux. — Bénitiers.

La Voie Appienne nous vit pour la troisième, mais non pour la dernière lois. Centre des vastos Catacombes qui en font la reine desnbsp;Voies, le cimelière de Saint-Callixle était exploré. Mais dans ce grandnbsp;faubourg de la ville souterraine, on distinguail plusieurs quartiers.

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CATACOMBES DE SAINT-ZËPIIIRIN. l;29

Bien que partie intégrante de la Catacombe principale, ils sont dési-gnés par des noms propres, et raériient raileniion du voyageur a cause des événements dont ils furent Ie ihéfllre. De ce nombie est Ienbsp;cimetière de Saint-Zèphirin, pape et martyr. « Le glorieux Pontife,nbsp;dit Anastase, fut déposé dans son cimetière, prés de la Catacombe denbsp;Callixte, sur la Voie Appienne (i). » Qu’il Fait fait ouvrir ou qu’il Faitnbsp;seulement honoré par sa sépulture, Zéphirin méritait de dunner sounbsp;nom a cette partie de la Rome souterraine.

Élevé en 205 sur le Iróne déjè quinze fois ensanglanlé de saint Pierre, il gouverna FÉglise pendant la persécution de Septime-Sévère.nbsp;L’orage fut tellement violent qu’on crut a Farrivée du veritable .\n-techrist et a Fapproche de la dernière heure du monde (2). Cachénbsp;dans les Catacombes, d’oü il dirigeait Ia lutte, encourageait les com-battants el leur donnait dans les eaux du baptême des successeurs aunbsp;®arlyre, le saint Pape sorlit un jour de sa retraite, afin de recevoirnbsp;dans ses bras paternels le plus grand génie de FOrient, accouru pournbsp;voir de ses yeux Fanlique Église de Rome (5). Ces bras qui veuaientnbsp;de s’ouvrir pour embrasser Origène, s’armèrent bienlöt pour frappernbsp;Proclus, FopiniAtre sectateur de Monian. Après avoir encourage lesnbsp;martyrs, affermi les apologistes et condamné les héréiiques, le Sou-verain Pasteur, devenu victime A son tour, raonta sur 1’échafaud elnbsp;signa de son sang Ia foi dont il avail re^u le dépót de saint Victor, etnbsp;qu’il transmit a saint Callixte Fan 221 (r). La Catacombe de Saint-Zéphirin fut bienlót absorbée dans celle de Saint-Callixte, en sortenbsp;qu’aujourd’hui les archéologues remains ne peuvent avec certitude ennbsp;assignee les limites (s).

II en est autrement du cimetière de Sainte-Cécile. Le quartier de la Catacombe de Saint-Callixte, oü fut déposée Fillustre vierge, conserve non-seulement le nom de Fhéroïne, mais encore ses limites par-Dculières. A la description que nous en avons donnée, il snfiit d’ajou-ter, pour le faire connaitre complétement, le récit abrégé des glorieuxnbsp;événements dont il fut le théAlre. Qu’on ne s’élonne pas du mot événement employépourdésigner la sépulture des martyrs. Si Févénementnbsp;est un fait qui sort de Fordre ordinaire, soit par son importance, soit

(0 Sepultus est in ccemeierio suo juxta coemeterium Callixli, via Appia./n S. Zéphirin.

(a) Sandini, Vitoe Pontif. roman., 1.1, p. 28.

(a) Origeneni, qui Rumam venerat, ut Romanam Ecclesiam omnium anliquissimain coram viderel, comiler excepit. ld.

(*) Bar., An. 221, n« 1.

(!) Aringhi, lib. 111, c. xiu, p. 282,

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150 LES TROIS ROME.

par Ie courage héroïque des acteurs, n’esl-on pas en droit d’appeler de ce nom l’acte a jamais glorieux qui rappelle et la mort victorieusenbsp;des martyrs, el l’intrépidilé de leurs frères qui, en dépit des bour-reaux, venaient enlever leurs dépouilles sanglanles, pour les transporter a de longues distances, malgré les dillicultés, les périls, lesnbsp;ténèbres de la nuit, dans des tombes souterraines creusées par la cha-rité la plus héroïquement patiënte qui fut jamais? Et puis ces sépul-tures de martyrs n’étaient-elles pas une profession solennelle de lanbsp;foi qui a sauvé Ie monde et créé les lumières et la civilisation rao-dernes?

Done, Ie quarlier de Sainte-Cécile vit une nuit arriver Ie saint prétre Poleraius, accompagné de courageux chréliens qui déposèrent dansnbsp;les loculi nouvellement creusés quarante martyrs, égorgés naguèrenbsp;aux applaudissements de la grande Rome. Dans une autre circonslance,nbsp;il recut neuf cents bóles non moins illustres. En rangeant autour denbsp;Cécile ces légions de martyrs, la piélé des fidèles semblait vouloirnbsp;rehausser la gloire de l’illustre vierge et lui tresser une couronne denbsp;rubis immortels (i).

Prés du quartier de Sainte-Cécile se trouve, dans la même Catacombe de Saint-Callixte, Ie ciraetière de Saint-Sixte II. L’édit de Va-lérien, qui inlerdisait aux fidèles l’entrée des Calacombes, venaii de paraitre. Plus de refuge ni a la face du soleil, ni dans les entraillesnbsp;de Ia terre, pour les brebis et les pasteurs. Dans ces circonsiancesnbsp;dilBciles, Sixte, alhénien de naissance, succède au pape saint Étienne.nbsp;Sauver de la mort les fidèles éperdus, sauver de la profanation lesnbsp;corps des martyrs, telle est la double pensée qui occupe d’abord Ienbsp;nouveau Pontife. Malgré la defense impériale, il descend aux Cata-combes, il s’y cache avec son troupeau, il Ie nourrit de la parole etnbsp;du pain qui fait les martyrs : Ie cimelière de Saint-Callixte devient sanbsp;demeure habituelle.

Pour les metlre plus en sureté, il y fait transporter les corps de saint Pierre et de saint Paul, en ménageant aux fidèles la facililé d’ynbsp;faire leurs stations avec moins de danger. Mais tel est 1’acharnementnbsp;des persécuteurs, qu’ils découvrent la retraite souterraine du Pontife.nbsp;Ils Ten arrachent et Ie conduisent en Iriomphe devant Ie temple auxnbsp;cent colonnes, consaeré par Sylla en fhonneur du dieu Mars, sur lanbsp;Voie Appienne. Ils osent lui proposer de sacrifier a l’idole. Pour toutenbsp;réponse, Ie vicaire de 1 Hornme-Dieu fait sa prière et Ie temple tombe

(i) Aringhi, id., c. xiv.

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lIlSTOlftE. 15 i

en ruines (i). Reconduit aussitót dans Ie souterrain d’oü il vient d’etre tiré, Siste est mis a mort avec quatre de ses diacres. Cela se passailnbsp;Ie huil des ides d’aout de l’an 261 (2).

Prés du Pontife viennent reposer une multitude de martyrs, ses enfants et ses disciples; et dans sa tombe Ie vénérable patriarche denbsp;la gloire ressemble au père de familie dont parle l’Écriture, qui voitnbsp;Ses fils et ses petits-fils rangés autour de sa table, comme des rejetsnbsp;d’olivier autour du vieux tronc qui leur a doiiné naissance. Pour n’ennbsp;citer que quelques-uns, je nommerai les saints prêtres Eusèbe etnbsp;Grégoire, martyrisés sous l’empire de Constance, l’apótre de l’aria-nisme. Ces nobles enfants, venus du sanctuaire, avaient été précédésnbsp;par deux martyrs sortis du palais imperial.

ün des plus cruels persécuteurs, Dèce, avail k son service deux chrétiens non moins recommandables par l’éminence de leur méritenbsp;que par leur attachemenl é la foi. Calocerus était chambellan de l’im-pératrice, et Parlhenius un des intendants du palais. Le 19 mai 235,nbsp;Dèce apprend qu’ils sont chrétiens, el veut les obliger de sacrifiernbsp;aux idoles. Menaces, promesses, tout est employé pour les séduire ounbsp;les contraindre. Vains efforts! le glaive seul peut terminer la Juttenbsp;entre le bourreau impérial et ses nobles viclimes. Une dame chré-tienne, sainte Analolie, fait enlever par ses serviteurs les corps desnbsp;martyrs; elle-même les ensevelit dans des linges blancs avec des parfums, et vient les déposer en toule hale dans la Catacombe de Saint-Sixle (5). Son zèle pieux n’en reste pas la; des colonnettes (fe porphyrenbsp;ornent le loculus des héros de la foi, qui paient par des miracles, per-pétués de génération en génération, l’empressement de leur bienfai-trice et la confiante prière des fidèles (*).

{i) Aringhi, lib. in, c. x. p. 563.

(s) Sandini, p. 47. nbsp;nbsp;nbsp;,nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.

(5) Le pape Lucius, qui vécut, ainsi que nos saints martyrs, avantle pape saintSi t,, estégalement dit; « Positus \ia Appia ad Xyslum. Sed eo polissimum nomine locus

prasnotatur, quo tunc temporis,quando ha;cscribcbanlur,omniumvocenuncupaPatur.»

— Aringhi, Hb. 111, p. 582. nbsp;nbsp;nbsp;i • „1

(4) In quo loco beneficia martyrum exuberant usque in liodierTium diem. Ariiigni, c. xvi, p. 282. — Saint Calocère est appclé : Prcepositiis cubicult iixons Dccu mpc-ratoris; ct saint Vanhenius •. Allerius miincris Primiceriiis. Quelques auteurs ont penscnbsp;que Ie litre de Primicerius désignait le premier secrclaire de i empereur; il parait p usnbsp;probable qu’il s'appUque a un officier chargé d’une intendance particuliere dansnbsp;lais. Ainsi on Irouve un primicier general, un primicier conservateurnbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.

primicierde la cassette de la masse d’or, du xestiairc sacré, des anneaux, e “Primicerius lolius oificii, primicerius scrinii canonum, primicerius scriniinbsp;massae, primicerius scrinii vesüarii sacri, primicerius scrinii annularensis, primiceriusnbsp;scrinii a pecuniis. f — Voyez Bar. An. ad martyr. 19 mail.

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132 LES TROIS ROHE.

En parcourant ces différents cimetières, ou plulöt la Catacombe de Saint-Callixte dont ils font partie, on rencontre de nombreux cubicula.nbsp;L’occasion était belle d’examiner Ie monument arqué, monumentumnbsp;arcuatum, qui en forme Ie principal ornement. Au fond du cubicu-lum est ordinairement un tombeau creusé dans l’épaisseur du tuf.nbsp;Les parties latérales sont légèrement excavées, de sorte que Ie loculusnbsp;se détache de la muraille et forme saillie. La partie supérieure, tailléenbsp;en niche circulaire, laisse complélement libre Ie dessus du tombeau (i).nbsp;Dans Ie langage ordinaire, les tombes de ce genre s’appellent monuments surmontés d’un are, monumentum arcuatum; mais leur vrainbsp;nom est arcosolium, qui exprime, du reste, la même idéé. L’inscrip-tion suivante, placée dans un cubiculum particulier, prouve l’anti-quité du mot et en donne la véritable signification :

DOMVS ETERNALIS AVR CELSI ET AVR JLARITATIS COMPARI MEESnbsp;FECIHVS NOBIS ET NOSTRIS ET AHICISnbsp;ARCOSOUO CVM PARETICVLO SVO IN PACEM.

« Deraeure éternelle d’Aurélius Celsus et d’Aurelia Jlarita, mon épouse : nous avons fait pour nous et les nótres, et nos amis eet arcosolium, avec son petit mur. En paix. »

Ce petit mur indique les différents compartiraents qui divisentl’ar-cosolium (ï). D’ordinaire, une marche élève Ie tombeau de quelques pouces au-dessus du sol; quelquefois une pierre, en forme de balustrade, en défend l’approche; et souvent les murs latéraux, ainsi quenbsp;la niche tout entière, sont couverts de peintures a fresque. Tel estnbsp;\'arcosolium. Dans les cubicula parliculiers, cette tombe principalenbsp;renferme quelquefois Ie corps d’un martyr; mais Ie plus souvent,nbsp;celui du pieux chrétien qui l’a fait élever, ou même ceux de ses pro-ches et de ses amis, comme l’indique Tinscripiion d’Aurélius Celsus.nbsp;S’il s’agit d’une grotte, ou d’une petite église destinée aux assembléesnbsp;des fidèles, VarcosoUum est toujours, comme nous allons voir, lanbsp;tombe d’un martyr.

N’oublions pas ce qui a été dit hier, savoir, que les cubicula des Catacombes se divisent en trois classes : les petits, les moyens et lesnbsp;grands. Tombeaux de familie, les premiers doivent leur origine a lanbsp;piété des fidèles. Aux preuves déja données de ce fait important, il

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Voir Ie Plan i la fin du volume.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Marchi, 85.

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DÉTAILS SÜR l’ÉGLISE DE ROME EN -251. 153

convient d’ajouler Ie témoignage du pape saint Corneille. On verra clairement, par Ie budget de 1’Église de Rome, au milieu du mquot; siècle,nbsp;qu’il eüt élé complétement impossible a la communaulé de faire facenbsp;aux dépenses extraordinaires qu’entrainait la fabrication des nom-tgt;reux cubicula, semés dans les galeries de loules les Catacombes : lesnbsp;Irésors des plus riches empereurs n’y auraient pas suffi.

L’an 2ol, saint Corneille, pape et marlyr, écrivant a Fabius, évê-que d’Antioche, lui dit : « II y a, dans l’Église de Rome, quarante-six ï*rêtres, sept Diacres, sept Sous-Diacres, quarante deux Acolytes,nbsp;i'inquante-deux Exorcisles, Lecteurs et Portiers, plus de quinze centsnbsp;Veuves et indigents, auxquels la grüce et la libéralité du Seigneurnbsp;fournit Ie nécessaire (i). » Ainsi, l’unique fonds de l’Église était lanbsp;Ijonté de Notre-Seigneur manifestée par la charité des fidèles. Si, anbsp;1’énorme dépense exigée pour nourrir, vêtir, loger les ministres sa-crés, les veuves et les impotents, on ajoute d’autres frais non moinsnbsp;indispensables pour Ie culte, pour la réception des pèlerins, pour lanbsp;sépulture a donner gratuiteraent non-seulement aux veuves et aux in-firmes entretenus par l’Église, maïs encore aux indigents, donl Ienbsp;travail sufllsait k peine a leur subsislance, et surtout aux martyrs,nbsp;dont les corps ne pouvaient que bien rarement èire inhumés aux Iraisnbsp;de leurs proches, il sera trèS'logique de conclure que tous ou presquenbsp;tous les cubicula privés sont l’ouvrage des fidèles riches ou aisés.nbsp;Satisfaire a leur piété particuliere, ouvrir des lieux pour les petitesnbsp;assemblées, sans aggraver les charges de l’Église, telle futleur noblenbsp;pensée (2). Celte origine explique pourquoi les cubicula de la première classe ne renferment pas toujours dans leur arcosolium Ie corpsnbsp;d’un martyr.

C’est a dessein que j’ai cité la lettre de saint Corneille. Elle nous fait connaitre les ressources et Ie personnel de l’Église de Rome aunbsp;milieu du 111® siècle. Du nombre des Prêtres indiqué par Ie Pape onnbsp;a conclu avec raison Ie nombre des Églises de Rome k la mème époque.

Les cubicula de la seconde et de la troisième classe, appelés cryp-tes et églises, ayant été ouverts par la communaulé pour les assem-

(1) nbsp;nbsp;nbsp;llle ergo Evangelii vindex ignorabal ununi Episcopum esse opor ere m cc esi.nbsp;caihoUca? In Qua non ci lalebal (quoniodo enini latere posset?) Pres yterosnbsp;•traginta sex, Diaconos septem, Subdiaconos septeni, Acoljthos doos etnbsp;Exorcistas autem el Leclores cum Osllariis quinquaginta duos, viduas cum l

plus mille et quingentas : quibus omnibus Domini gratia el benignitas a Peditat. —Cornel. Pap. lipisl. xi ac! Fub. Ep. Antioch., de NovUiatti Ingent ,

Epist. Hom. PonCif., edit. Petr. Constant, p. löO, n» ó.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Marchi, 100.

0.

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134 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

blees religicuses des fidèles, ont l’avantage de posséderla tombe d’im OU de plusieurs martyrs, sur laquelle une discipline rigoureuse obli-geait d’offrir exclusivement les sainls mystères. Placée au fond de lanbsp;grotte, la tombe ou VarcosoUum du martyr principal était Ie mailrenbsp;autel de l’église souterraine. Quelle que fut sa pauvreté ou sa splen-deur, son étendue ou son exiguilé, ce monument était l’objet de lanbsp;vénération profonde de tous les frères (i).

A part la différence essentielle que nous venons de signaler, les cryptes et les églises ne différent des cubicula de la première espècenbsp;que par l’étendue de leurs proportions : plus grandes que les cubi-cula, les cryptes, é leur tour, sont plus petites que les églises. Le cu-biculum est la partie, la crypte est le tout (2). De la vient qu’on trouvenbsp;des cubicula raême dans les cryptes, cornme on trouve plusieursnbsp;cbambres dans la même maison, plusieurs chapelles dans la mêmenbsp;église. Un passage d’Anastase le bibliolbécaire, ne laisse aucun doutenbsp;sur la réalité de cette distinction. « Le prêtre Marcel, dit l’ancien auteur, recueillit nuitamment le corps de Marcellin et des aulres martyrs,... et les ensevelit sur la Voie Salaria, dans la Catacombe denbsp;Priscilie, dans le cubiculum clarum, qu’on voit encore de nos jours,...nbsp;dans la crypte prés du corps de saint Crescention (5). »

Maintenant que nous sommes fixés sur la différence qui existe entre les trois espèces de cubicula, entrons dans les grottes et les églises.nbsp;Justifions aujourd’hui ce que nous avons avancé de leur destinationnbsp;religieuse; demain nous rendrons compte de l’exiguité et de la formenbsp;de ces Basiliques primitives.

Depuis les premiers jours de la propagation évangélique, l’Eglise posséda des oratoires et des temples è la face du soleil, dans Jérusa-lem et dans Rome, en Asie, en Espagne, dans les Gaules, et partoutnbsp;oü elle a formé des disciples (4). Néanmoins, les fidèles eurent aussi,nbsp;pour les jours de persécution, des Églises souterraines, oü ils te-naient leurs assemblées et accomplissaient tous les actes commandésnbsp;par la religion. Quant aux chrétiens de Rome en particulier, c’est un

(1) Et raagni solium breve confessoris adoratnbsp;Jugiter e variis congesla frequenlia terris.

S. P,vi]UN, Frag. nat. ix.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;II cubiculum è la parle, la Cripta è il luUo. — Marchi, p. 168.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Marcellus presbyter noctu collegit corpora (Marcellini et aliorum).....el sepelivit

ca in via Salaria, in coemeterio Priscillas, ineubiculo claro, quod palet usque in hodier-num diem... in crypla juxta corpus S. Crescentionis. In Marcellin. Pap.; Marchi, p. 102-Ö.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Voyez, dans Ciampini, ilonim. veter., 1.1, c. xvn et xviii, le catalogue de ces églisesnbsp;primitives.

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J55

LEUR DESTINATION EELIGIEÜSE.

fait établi avec une égale certitude par l’histoire écrite et par l’his-toire monumentale. Les Acfes des Martyrs, les ouvrages des premiers Pères nous montrent Ie petit troupeau du Sauveur disparaissant dansnbsp;les Catacombes, aussitót que l’édit sanglant était alBché; les proconsuls et les philosophes faisaient un crime a nos pères de leurs conci-liabules clandestins dans les cimetières; les empereurs leur interdi-saient, sous peine de mort, l’entrée de ces souterrains; Ie peuple ennbsp;fermait les portes, ou les comblait de pierres et de terre, afin d’ynbsp;étouffer les fidèles; et quand la violence de la persécution se ralentis-sait, Ie premier acte de cléraence consistait a laisser libre l’accès desnbsp;Catacombes (i).

Or, ce n’était pas seulement pour y cacher leur vie et leur mort que les chrétiens s’y réunissaient avec tant d’empressement. Leur butnbsp;principal était de s’y préparer aux luttes héroïques de la foi, en priantnbsp;sur les lombeaux de leurs frères déja couronnés, et en se fortifiantnbsp;par les sacrements, par la parole divine, et surtout par la merveilleusenbsp;Eucharistie, sans laquelle ils se croyaient, avec raison, incapables denbsp;vaincre. Telle est la vraie raison pour laquelle la malice infernale desnbsp;persécuteurs leur en interdisait l’entrée (2). Cette intention des fidèlesnbsp;se révèle comme un trait de lumière dans la fameuse inscription dunbsp;jeune martyr saint Alexandre, trouvée, par Severanus, dans la Cata-

(1) Cum ergo sic proposila essenl impia cdicla.....chrislianorum nemo apparebal in

publico... Per totam quippe vagantes solitudinem et in speluncis, atqu/cavernis, ul quisque laiebram invenerat, se continenies, non poterant diu tolerarp csuriem. Act.nbsp;S. TkeodoL, apud Kuinart.

Primum criminaiionis caput a Celso est, a chrislianis clanculanos convenlus haberi solescere legibus vetitos. — Orig. Cont?'. Cels., lib. i.

Prieceperunt (imperalores ValerianusetGallienus) ne in aliquibus locis conciliabula ^*ant, nec ccemeieria ingrediantur. Si quis itaque hoc lam salubre prseceptum non ob-servaverit, capile plecialur. Act. S. Cyp., apud Ruinart.

Excludebaniurnoslri a subterraneis recessibus, cum ’vehemenlior urgebat perseciuio. ^pist. Cornel. Pap. ad Lupicin.

Illud scilu dlgnum, quod cum imperator quispiam perseculionem in chrislianos in-^taurare consliiuisset, ante omnia eos a coemeteriis arcere solebat, nc in unum conve-hiendi eis 1'acuUas esset. Panvin., Dc Cosrnet., c. ii.

Êxstat

ejus conslitutio, quam ad Episcopos misit, permiltens ilUs ilia ioca reciperc, quai

Valeriano iraperaiore capto, iilius ejus Gallienus monarchiam naclus, moderaUus ^perio utitur, et confestim publicis ediclis perseculionem contra nos molam remisit...

'^oemeteria vocantur. — Euseb., Hist., lib. vii, c. xiii.

(®) Idoneus non potest esse ad marlyrium, qui ab Ecclesia non armatur ad pra3lium, ^t^ens deficit, quam non accepia EucharisUa erigit et accendil. — S. Cypr.

lo calice ebrius, iila esca saginatus, tormenta non sensit. — S. Aug., /w S. LaurenU Eusebius igitur indicat, praecipuum ejus (Gallieni imperatoris) beneficium fuisse,nbsp;quodpermiseritchristianis recuperareccemeieria; cum audimusea permilli chrislianisnbsp;ht ad sacra coire possent. — Panvin., De Ccemet., c. ii.

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156 nbsp;nbsp;nbsp;les TROIS ROHE.

combe de Sainl-Callixte oü nous sommes maintenant. La volei telle qu’elle a été publiée par Ie savant archéologue :

ALEXANDER MORTVS NON EST SED VIVIT SVPER AS TRA ET CORPVS IN HOC TVMVLO QVIESCIT VITAMnbsp;EXPLEVIT CVM ANTONINO IMP. (JVl VBI MVLTVM BENEnbsp;PICIl ANTEVENIRE PREVJDERET PRO GRATIA ODIVMnbsp;REDDIT GENVA ENIM FLECTENS VERO DEO SACRIFICAnbsp;TVRVS AD SVPPLICIA DVCITVR O TEMPORA INFAVSTAnbsp;QVIBVS INTER SACRA ET VOTA NE IN CAVERNIS QVIDEMnbsp;SALVARl POSSIMVS QVID MISERIVS VITA SED QVID MISERIVS INnbsp;MORTE CVM AB AMICIS ET PARENTIBVS SEPELIRInbsp;NEQVEANT TAMDEM IN COELO CORVSCAT PARVMnbsp;VIXIT QVI VIXIT IV. X. TEM.

« Alexandre n’est pas mort, mals 11 vit par de lli les astres, et son corps repose dans ce lombeau. II finit sa vie sous l’empereur Antonin, qui paya par la haine les bienfaits qu’il pouvait recevoir. Age-nouillé poursacrifier au vrai Dieu il est conduit au supplice. O tempsnbsp;lamentables! oü nous ne pouvons pas même offrir en süreté les saintsnbsp;mystères et nos prières dans les cavernes. Quoi de plus misérable quenbsp;la vie! mais quoi de plus misérable que la mort, puisque nous ne pouvons pas même être inhumés par nos amis ou par nos proches! Enfin ilnbsp;brille dans Ie ciel. 11 a peu vécu, celui qui n’a vécu que quatorze ans. »nbsp;Pour satisfaire aux besoins des futurs martyrs, nous voyons lesnbsp;Papes, les Prêtres et les Diacres accomplir dans les Catacombes tousnbsp;les devoirs de leur charge : offrir l’auguste victime et la distribucrnbsp;constamment aux fidèles avec Ie pain de la parole évangélique. Saintnbsp;Pierre Ie premier en donna l’exemple. Les plus anciens litres nous Ienbsp;raontrent instruisant les néophytes réunis autour de lui dans la Catacombe Vaticane (i). Ses successeurs marchent sur ses traces, et pournbsp;n’être pas trop long je n’en citerai qu’un seul. Sous l’empire de Va-lérien, Ie pape saint Étienne convoque Ie clergé de Rome, l’exhorte aunbsp;martyre, descend dans les Catacombes, y célèbre assidüment Ie saintnbsp;sacrifice, y tient les assemblées, nourrit les fidèles de la parole denbsp;Dieu et du pain sacré, et finit par arroser de son sang les lieux mémesnbsp;oii il vient de faire couler celui du Roi des martyrs (2).

(i) Ingredientes vero Romani invenerunt Apostolum in loco qui dicitur Vaticanus, docentem multas populorum lurmas. Act. S. Dlariial., apud Aringhi, lib. 11, c. iv, p. 140.

Ingravescenle imperalorum Valeriani et Gallieni persccutione, Stephanus convo-c ato clero, ad martyrium sues liortabatur, in cryptisque martyrum assidue missas t t concilia cclebrabat; etcumad Martis templum, ut sacrilicaret, adductus fuisset, tena;

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PREÜVES HISTORIQUES. 137

Or, pour offrir l’augusle sacrifice, pour tenir les assemblées des fidèles, pour annoncer la parole sainte, pour entendre les confessions,nbsp;pour administrer Ie baptême, il fallait des lieux de reunion, des cha-pelles OU des églises, des autels, c’esl-a-dire des tombes de martyrs,nbsp;des chaires, des confessionnaux el des baptistères. Voila, en elTet, cenbsp;fiue Ie voyageur du xix' siècle retrouve avec admiration dans les Ca-tacombes. Les chapelles sont très-nombreuses dans la Rome souter-raine; mais surtout dans les cimetières de Saint-Callixte, de Pré-textat et de Sainte-Agnès. Une des plus grandes se voit dans lesnbsp;Catacombes de Sainte-Priscille et peut-être la plus belle dans Ie cime-tière de Sainte-Hélène.

Grandes ou petites, loutes possèdent un ou plusieurs arcosolium, évidemment deslinés a servir d’autel. Les chaires ponlificales, ordi-naireraent prés de Tangle droit de Tautel, sont en pierre ou en mar-bre blanc, avec un dos plein, très-élevé. Assis sur ces siéges véné-rables, Tévêque adressait Tinstruction aux fidèles et conférait lesnbsp;sacrements de la Confirmation et de TOrdre. Dans la principale églisenbsp;des Catacombes de Sainte-Agnès, on trouve un presbyterium, c’est-a-dire un espace circulaire, derrière Tautel, destiné au clergé. Lanbsp;chaire du Ponlife est adossée a la muraille, ayant a droite et è gauchenbsp;des siéges moins élevés (i).

Une des cryptes de cette église présente, sur les cótés latéraux, deux autres siéges taillés dans Tépaisseur du tuf, et dont il est vrai-ment impossible de rendre raison, a moins d’y voir les (fonfession-naux primitifs. Sans doule aucune inscription n’indique eet usage;nbsp;mais, placés sur les parois lougitudinales, ils ne pouvaient servir ninbsp;^ Tévêque, ni aux autres ministres dans Taccomplissement d’unenbsp;fonction qui regardait toute Tassemblée. Peul-on supposer que c’étaitnbsp;la place du diacre et de la diaconesse chargés de la surveillance géné-1‘ale? En admettant, ce qui est loin d’être prouvé, que ces deux mi-fttstres du bon ordre, obligés d’aller et de venir sans cesse dans Té-§hse, eussent des siéges distincts, ne répugne-t-il pas au bon sens denbsp;fiser leur place dans un lieu d’oü les regards ne peuvent embrassernbsp;fiu une partie de Tassistance?

De plus, avant d’assigner des siéges distingués au Diacre et a la

oborio, omnibus aulugienlibus qui StephaimnKenebant Pontifex adsuos rever-tlur in ccEmelerium Liicinae, quos divinis praeceplis insiruens, sacramento corporis risti coinmunicavU; ibique duna niissarum sulemnia perficit, advenienlibus iteruninbsp;'niperalorum salellilibiis, ei iii sua sede caput abscinditur. Act. S. Steph.; apud Ciani-Pini, ilonim. veler., c. xvii, p. löl.

(•) Marchi, p. 185.

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138 nbsp;nbsp;nbsp;LES TBOIS ROME.

diaconesse, il aurait fallu en donner un a l’Évêque ou au Prêlre, mi-nistres d’un rang plus élevé. Or, dans la crypte qui nous occupe, il n’y en a que deux. Dira-l-on qu’ils étaient, en effet, deslinés a l’Évêquenbsp;et an Prêtre ou a son Diacre? Mais ces sieges sont vis-a-vis l’un denbsp;l’autre, a la mênae hauteur, a la même proxiniité de l’arcosolium ounbsp;de l’autel. El qui ne sait que l’esprit et les lois de la hiërarchie défen-dirent constamment de placer, pendant la célébralion des saints Mys-lères, les ministres inférieurs sur la même ligne que leurs supérieurs?nbsp;Aussi ancienne que l’Église, cette distinction de rang s’observe encorenbsp;aujourd’hui, comnie chacun peut Ie voir de ses propres yeux.

ïoules les suppositions précédentes et d’autres encore, imaginées paries archéologues séculiers, n’ont pu rendre raison des siéges dontnbsp;il s’agit. Au contraire, origine, situation, usage, lout s’explique sansnbsp;effort, en admellant qu’ils servirenl de tribunaux sacrés. Je cherchenbsp;avec le père March! sur quel fondement on pourrait nier celte destination. Dira-t-on qu’il n’y avail pas de confessionnaux dans les premiers siècles? Mais la confession auriculaire a toujours élé praliquéenbsp;dès I’originedu christianisme. Ne faut-il pas en conclure qu’il y availnbsp;dans les églises souterraines, aussi bien que dans les autres, des lieuxnbsp;et des siéges parliculiers destinés aux confesseurs, comme il y availnbsp;un siége pour l’Évêque ou le Prêlre officiant?

Ajoutera-t-on que les siéges dont on park ne ressemblent nullemeni h nos confessionnaux, pour lesquels, par con.séquent, on aurait tortnbsp;de les prendre? D’abord, quelle que fut leur forme, les confessionnaux primilifs étaient quelque part; oil les trouver, si on ne les recon-nait pas dans les siéges que nous indiquons, et dont il est impossiblenbsp;d’expliquer aulrement la position et I’usage? Quant a la forme de cesnbsp;siéges simples, ouverts de touies parts, et voisins de l’assemblée, loinnbsp;d’inlirmer I’induciion que nous avons en vue, elk la confirme admira-blement. On sait que, dans les premiers siècles, le pénitent se meltaitnbsp;è genoux direclement devant k Prêlre et non point a cóté de lui; onnbsp;sait de plus que la confession, bien que secrète, se faisait en présencenbsp;de tous les fidèks, et cela par un motif d’humilité et d’édification.

Que tel ait été I’usage primiiif, la preuve en est, d’abord, dans une atroce calomnie des païens, rapportée par Minulius Félix. Afin d’ex-citer conlre nos pères la haine du genre humain, ils les accusaienl denbsp;se meltre a genoux, dans kurs assemblées nocturnes, devant l’Évêquenbsp;ou le Prêlre, et de s’y livrer ^ un culle abominable (i). Que cet affreux

(i) Alii eos ferunt ipsius Anlislilisac Sacerdolis colere genitalia elquasi parentis ado-rare naturam. Ncscioan falsa, eerie occuUis ac noclurnis apposita suspicio. Octav.

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CONFESSIONNAÜX. nbsp;nbsp;nbsp;i 39

mensonge soit une allusion positive a la confession, les protestants eux-mêmes Ie reconnaissent avec nous (i). Du resle, il ne faut pasnbsp;s’étonner si les païens ont ainsi parlé de la confession, eux qui ne crai-gnaient pas de flétrir la sainte Communion en disant que les chréiiensnbsp;öiangeaient, dans leurs festins nocturnes, la chair palpitante d’unnbsp;enfant. Les idolitres de la Chine ne font-ils pas encore passer l’Ex-trême-Onction ponr un acte barbare, par lequel les ministres de Jésusnbsp;arrachent les yeux des malades?

L’accusalion de Cecilius suppose done que les fidèles se metlaient il genoux direetement devant l’Évêque ou Ie Prêtre assis sur un siége,nbsp;et qu’ils y restaient pendant un temps plus ou moins long. On voitnbsp;qu’il ne s’agit point ici de demander une bénédiclion, puisque, d’unenbsp;part, il eüt suffi d’un instant, el que, d’aulre part, Ie Prêtre ou l’Évê-que eiit été debout; tandis que celte prosternation prolongée, devantnbsp;ün Prêtre assis, indique parfaitemenl la confession.

Ensuite, a la preuve tirée de la calomnie païenne s’ajoute Ie témoi-gnage de Tertullien. Le grand apologisle nous a laissé du cérémonial primilif de la confession une description tellement pittoresque, qu’onnbsp;De peut douler de l’exactitude et de l’antiquilé du rit dont il s’agit.nbsp;« Nous avons une loi, dit-il, qui humilie l’homme en l’obligeant a senbsp;prosterner et ii confesser ses péchés, une loi qui régie la manière denbsp;nous vêtir, de manger, de nourrir la vertu par le jeune, par la prièrenbsp;et par les larmes; qui nous cotnmande de nous prosterner aux piedsnbsp;des Prêtres, el de nous mettre é genoux devant les ministreS les plusnbsp;agréables h Dieu (a). »

Enfin, que le cérémonial primitif de la confession fut tel que nous 1’avons décrit, le voyageur de Rome, au xix® siècle, en a la preuve sousnbsp;les yeux. Admirableraent fidéle aux anciennes traditions, la mère desnbsp;Églises fait encore administrer Ie sacrement de penitence dans la formenbsp;indiquée par Tertullien et par Cecilius. Aux jours solennels de la Se-Diaine Sainte, oü toute la liturgie respire la plus haute anliquilé, lenbsp;grand pénitencier se place non point dans un confessionnal fermé etnbsp;relégué dans un coin obscur d’une chapelle; mais sur un siége élevé,nbsp;découvert, exposé aux regards de tous les fidèles. La, il refoit les pé-Dttents agenouillés direetement devant lui et non par cóté : on se re-‘rouve aux temps de la primitive Église.

(i) Édit. de Minutius Felix, Leyde, 1652, avec Commentaires; id., Édit. de heipsick, *^48, par Chrisiophe Cellarius.

(*) Itaque exomologesis prosternendt et huniilificandi hominis disciplina est. Deipso nuoque habilii atque victu mandat, jejuniis preces alere,lacrymari, presbyleris advolvi,

caris Dei adgeniculari. Lib, de Pcenit,

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LES TROIS KOME.

Quant è la calomnie de Cecilius, il n’est pas difficile d’en deviner l’origine; mais cette origine déraontre de plus en plus la réalité dunbsp;cérémonial primitif de la confession et l’usage des siéges dont la pré-sence nous occupe. Avec l’intention vraie ou supposée d’embrasser Ienbsp;chrislianisrae, un païen sera venu dans une assemblée des fidèles, etnbsp;la cbose n’était pas rare; il aura vu l’Évêque ou Ie Prêlre assis sur unnbsp;siége particulier, et è ses pieds Ie fidéle pénitent agenouillé et la têtenbsp;penché sur ses genoux, dans l’attitude de rhumilité. Ignorant la causenbsp;et Ie but de cette cérémonie, il n’aura pas su s’il fallait y voir l’actionnbsp;d’un horame qui déplore ses fautes, qui les accuse et en demandenbsp;l’absolution, ou bien un acte d’adoration. Traiire, il n’avait aucunnbsp;intérêt i s’instruire de la raison mystérieuse d’un pared usage. Quenbsp;dis-je? Habitué lui-même aux adorations des objets et des divinilés lesnbsp;plus infómes, il aura été charmé de pouvoir dire qu’il avait vu de sesnbsp;propres yeux un nouveau mode d’idolatrie introduit par les chrétiens.

Mais pour qu’un infidèle ait été témoin du rit de la confession au-riculaire, il fallait que la confession s’accompHt en présence des chrétiens assemblés. En effet, toutes les recherches exécutées dans les Ca-tacombes, ainsi que l’esprit des premiers fidèles, établissent que les confessionnaux étaient placés dans les lieux ordinaires de réunion.nbsp;Ainsi Ie voulaient, d’une part, la prudence ecclésiaslique afin d’éloi-gner tout danger et tout soup^on, surtout lorsqu’il s’agissail de lanbsp;confession des femmes; d’autre part Tédificalion de toute la commu-nauté, Ie bien même du pénitent, et souvent sa ferveur qui Ie portaitnbsp;amp; s’humilier publiquement, afin de s’habituer aux ignominies de lanbsp;croix, et d’obtenir les prières des fidèles.

Terminons ces intéressants détails par la réponse a une dernière observation. On dit: Si les siéges dont vous parlez étaient les confessionnaux primitifs, on les trouverait dans toutes les cryptes ou églisesnbsp;des Catacombes. — II est facile de prévenir la conséquence négativenbsp;qu’on voudrait tirer de cette objection. II sufflt d’avoir visité, mêmenbsp;en passant, la Rome souterraine, pour savoir quelles énormes difficul-tés on eut a vaincre pour creuser les galeries, et a plus forte raison lesnbsp;cubicula et les cryptes. ïanlöt on manquait de temps, el tantöl d’ou-tils; Ie plus souvent la nature du terrain s’opposait a des excavationsnbsp;considérables. Cela posé, est-il étonnant de ne pas trouver partout,nbsp;taillés dans Ie tuf, des siéges fixes qu’on pouvait facilemenl remplacernbsp;par des siéges mobiles, et dont pouvaient, en cas de besoin, tenir lieunbsp;les siéges de l’Évêque et du Prêtre placés auprès de l’autel (t)?

(i) Marchi, p. 187-8-9.

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BÉNITIERS. 141

Continuons roaintenant noire inventaire, et du domaine des proba-bilités passons sur Ie terrain de la certitude : voici les bénitiers. Comme la pratique de la confession, l’usage de l’eau bénite remontenbsp;amp; la naissance de l’Église (i). 11 est tout simple de trouver des bénitiers dansles Catacorabes; mais, chose remarquable! ils ont la mênienbsp;forme, ils occupent la même place que dans nos temples actuels. Présnbsp;de la porte d’entrée, s’ouvre, dans l’épaisseur du tuf, une petite nichenbsp;è quatre pieds environ au-dessus du sol. Dans l’intérieur est un vasenbsp;OU une coquille en terre cuite d’une grande finesse, en marbre elnbsp;même en verre. Cette coquille, de six pouces de diamètre, et d’au-tant de profondeur, est fortement scellée avec de la chaux, soitnbsp;dans la muraille, soit au piëdestal qui la supporte. O sainte Églisenbsp;Romaine! qu’il est doux pour vos enfants de voir de leurs yeux, denbsp;toucher de leurs mains la preuve dix-huit fois séculaire de l’inviolablenbsp;fidélité avec laquelle vous gardez, vous perpétuez Ie palrimoine de traditions vénérables, de rites sacrés, de dogmes et de mystères sanc-tificateurs qui vous a été confié par leur divin Père! Soyez bénie denbsp;vos amis, heureux témoins de votre immuable sollicitude ; Soyez glo-rieuse devant vos ennemis : pour les confondre, en gravant sur leurnbsp;front les stigmates flétrissants de la nouveauté et du mensonge, ilnbsp;^ous suffit d’ouvrir vos tombeaux!

12 JANVIER.

Martyre de sainte Tatienne. — Pourquoi les martyrs exposés aux bêtes. — Catacombe de la Voie Appienne. Suite. — Catacombe de Prétextat. — Étendue. — Origine.—nbsp;Coup d’oeil général sur ses gloires. — Inscription du pape Damase. — Visite de la Catacombe. — Raisons de l’exiguité des églises souterraines.

Le 12 janvier l’Église Romaine honore sainte Tatienne, vierge et martyre ; heureux souvenir pour le pèlcrin des Catacombes, En lenbsp;transportant, pour alnsi dire tout vivant, au milieu de ces Sges héroï-ques de foi et de courage, cetle fête l’identifie avec les lieux qu’ilnbsp;¦Visite, avec les tombes qu’il vénère, avec les humbles chapelles qu’ilnbsp;étudie : tout s’anime et devient éloquent. II admire plus vivement lanbsp;miraculeuse puissance de la grace, et il mesure avec plus de précisionnbsp;Is hauteur effrayante d’ou nous sommes tombés, nous, derniers reje-tons des martyrs.

(!) Bar., An. 135; Bellarm., De Cullu sanct., lib. in,c. 9.

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LES TROIS ROME.

Done, Ie i2 janvier de l’an 226, la vieille Rome, encore dans l’i-vresse des Saturnales, déferlait c-omme une vague mugissante sur les larges allées de son Pomoerium. L’instinct du sang la poussail a unenbsp;nouvelle fête : il s’agissait de tortures a savourer. Le préfet de la ville,nbsp;ülpien, l’oracle de la jurisprudence, venait de condamner, avec lanbsp;froide cruauté d’un légiste, une jeune vierge aux plus horribles sup-plices. Goupable de christianisrae, ïatienne élait entre les mains desnbsp;bourreaux. Des cordes la fixent immobile a l’inslrument fatal. Armésnbsp;de peignes et d’ongles de fer, dont la vue seule fait palir, les exécu-teurs de la justice romaine lui décbirent lentement les cótés. L’héroïnenbsp;conserve avec la vie le calme et la sérénité de l’innocence.

Un peu plus de cruauté et ses tourments sont finis; mais celte cruauté serait un acte de miséricorde, et les bourreaux en sont inca-pables. D’ailleurs, le peuple n’est pas encore repu des angoisses de lanbsp;victirae. Détachée du chevalet, on la transporte a Tamphithéatre. Lanbsp;foule haletante la précède, heureuse de voir une vierge jeune et timidenbsp;exposée aux bêtes. Les animaux sont léchés, mais ils respectent l’in-nocence. Outré de fureur, ou avide de nouvelles tortures, le juge or-donne de jeter Tatienne -dans un brasier; le feu la respecte. C’estnbsp;alors seulement que le glaive du confecteur vint mettre fin a la bontenbsp;du cruel magistral, et couronner par une dernière victoire les glorieuxnbsp;combats de l’héroïne (i).

Pourquoi les chrétiens étaient-ils si souvent exposés aux bêtes? Telle est l’intéressante question h laquelle venaient de donner lieu les Actesnbsp;de sainte Tatienne, et que nous éludiftmes en nousrendant aux Cata-combes de Prétextat. En parlant de la jurisprudence romaine et de lanbsp;manière dont on l’appliquait a nos pères, nous donnerons une réponsenbsp;plus étendue. II sulïit de dire, en ce moment, que l’exposilion auxnbsp;bêtes avait un double but : amuser le peuple et flétrir la victime.

Amuser le peuple. On connait la fureur de la vieille sociélé romaine pour les spectacles du Cirque et de TAmphithéêtre, dont les combatsnbsp;de bêtes formaient une partie essentielle. Voir mourir un hommenbsp;d’un coup de hacbe ou d’épée, il n’y avait rien li d’assez divertissant.nbsp;Mais le voir pendant longtemps trembler, pftlir, jelé en l’air par unnbsp;taureau furleux, broyé par un éléphant, déchiré par un tigre; le voirnbsp;palpiter sur l’arène sanglante, et passer par toutes les phases d’unenbsp;lente agonie ; quelles jouissances! Pour les procurer au peuple sou-verain, on dépensait les richesses de l’univers, on défendait, sousnbsp;peine de mort, de tuer dans leurs solitudes brulantes les panthères et

(i) Bar., An., t. ii, an. 226, n“ 4; id., Annol. ad Martyr., Vijan.

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POÜRQUOI LES MARTYRS EXPOSÉS AUX BÊTES. nbsp;nbsp;nbsp;143

les lions d’Afrique, et dans leurs forêts glacées les ours de la Germanic; on oubliait les affaires publiques et domesliques; et l’aurore du lendemain venait trouver, sur les gradins du Colisée, les mêmes spec-tateurs qu’elle avait éclairés la veille, toujours ivres, mais jamais ras-sasiés de sang et de plaisirs.

Flétrir la victime. Suivant les lois romaines, la condamnation aux bêles ne frappait que les personnes les plus méprisables et les plusnbsp;viles. L’énormité du crime ne suffisait pas pour altirer au coupablenbsp;cette peine infamanle : il fallait qu’a la grandeur du forfait se joignitnbsp;la bassesse de la condition et de la naissance. L’empoisonneur et l’as-sassin de bonne maison avaient leur supplice réservé. Voleurs et meur-triers de bas étage, eselaves fugitifs, pour vous les bêtes de I’Amphi-théétre. Or, comme les chrétiens passaient, auxyeux du peuple, pournbsp;des hommes de vile condition, la haine qu’on leur portait n’avait riennbsp;Irouvé de plus naturel que de les confondre, par Ie genre de mort,nbsp;avec Ie rebut de la société.

Ainsi se vériGait, a l’égard des disciples, la parole du Maitre, si cruellement accomplie sur sa divine personne : Ver de terre, oppro-bre et rebut du peuple (t). Énergique oracle, traduit éloquemment parnbsp;saint Paul, qui s’appelle, lui et ses confrères, et ses néophytes : lanbsp;balayure du monde. Est-il besoin de faire remarquer que la conduitenbsp;Ges païens était ici doubleraent injuste? D’abord, les bêtes n’élaientnbsp;que pour les coupables; et les chrétiens étaient innocents. Ensuite lesnbsp;bêtes n’étaient que pour les coupables de bas étage; et, parmi lesnbsp;chrétiens qu’on leur jetait en pftlure, il y avail des fils el des Giles denbsp;sénateurs, de consuls, de chevaliers romains; et ils ne l’ignoraientnbsp;pas. Mais nous verrons qu’a l’égard des chrétiens, toutes les régiesnbsp;de la justice, comme toutes les formes de la procédure, étaient ou-Gliées (2). 11 en fut de même dans tous les temps.

Ainsi, flétrir la victime et se repaitre longtemps du spectacle de ses douleurs, tel était Ie double motif de la condamnation aux bêles.nbsp;F’aut-il s’étonner qu’elle fut réclamée par Ie peuple, et qu’un seul etnbsp;*bême cri de mort retentit a Rome et a Carthage, en Orient et en Oc-•^ident; « Les chrétiens au lion! non pas au glaive, non pas aux mines,nbsp;pas au Tibre, non pas a la roche Tarpéienne; mais au lion ;nbsp;^bristianos ad leonem! » Faut-il s’étonner qu’elle fut étendue aunbsp;dela des limiles de la loi, et gracieusement accordée par des magis-^cats courtisans?

(0 Ego aulem sum vermis et non homo, opprobrium hominum et abjectio plcbis. Ps- cxxi.

(-) Bar., Annot. ad Martyr., i febr., Aringhi, lib. 11, c. i, p. 127.

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144 LES TROIS ROME.

La Catacombe, de Prétextat, dans laquelle nous aliens descendre, rappelle, par son nom même, un exemple de cette iniquilé. Le 3 dé-cembre de I’an 298, Rome conlemplait un noble rejeton de ses anciens consuls, le saint martyr Prétextat, mis a mort comme un vilnbsp;criminel, après avoir été, conlrairemenl aux loisderempire,eondamnénbsp;au travail des mines (i). Toutefois, ce n’est pas le martyr dont nousnbsp;venons de parler qui a donné son nom au vaste cimetière de la Voienbsp;Appienne. Faut-il en attribuer I’origine a quelque descendant de cettenbsp;illustre familie, qui I’aura fail ouvrir dans ses terres? Est-ce un mem-bre de la même familie qui I’a immortalisé en y subissant le martyre,nbsp;ou bien en venant y reposer, après avoir livré les glorieux combats denbsp;la foi? Sur toutes ces questions, la science est muelte ou divisée (a).

Quoi qu’il en soit, la Catacombe de Prétextat est un des plus anciens et des plus vastes quartiers de la Rome souterraine. Déjè, en 261, sous 1’empire de Valérien, il servait d’asile aux fidèles persécutés. Lanbsp;même année, les saints Félicissime et Agapet, diacres du pape saintnbsp;Sixte, y recevaieni la sépulture, ainsi que les sous-diacres Januarius,nbsp;Magnus, Étienne et Vincent.

Plus tard, on voit les Souverains Ponlifes y faire un séjour prolongé, y consacrer des Prêtres et des Évêques, y vaquer au gouvernement denbsp;l’Église universelle. Quant ii Félendue du cimetière de Prétextat, lenbsp;Père Marchi ne craint pas fle dire : « En considérant la grandeur desnbsp;cryptes, la forme des lucernaires et le nombre des communicationsnbsp;d’un étage a l’autre, on trouve de telles dimensions, que la Catacombenbsp;de Prétextat est, aux aulres Catacorabes, ce qu’est la basilique denbsp;Saint-Pierre aux églises de Rome. Si l’on avail le temps de la déblayernbsp;et de la parcourir, on verrait le faubourg colossal de la Rome souler-raine, tandis que nous n’en connaissons encore que les petiis et lesnbsp;moyens quartiers (s). »

Celte gloire, que le moderne archéologue revendique pour le cime-lière de Prétextat, ses devanciers l’attribuent è la Catacombe de Saint-Callixte ; la différence d’opinions vient de l’incerlitude qui règne sur les limites respeclives de l’un et de l’autre. Ici, on donne au cimetièrenbsp;de Prétextat des galeries et des cryptes, regardées d’ailleurs commenbsp;partie intégranle du cimetière de Sainl-Callixte. Ce qui augmente la

(i) Bar., .4n. 298, n» 12; nbsp;nbsp;nbsp;ad Martyr., il decemb.

(ï) Annglu, lib. lu, c. xvn, p. 283-4.

(5) .... It ciinileriodi Pietestato mi è parulo in conl'ronlo degli allrieiö che èil tenipio Valicano rispello alle allre iune Basiliche el tenipj di Roma..-. Roma Sollcrranea pre-senterebbele agli studiosi la region sua colossale, dove finora non ha mostralo di se cbenbsp;le provincie piccole e mezzane. P. 174.

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COOP d’oEIL GÉNÉBAL SUR SES GLOIRES. 145

difRculté, c’est que les monuments primilifs confondent souvent, dans line appellation commune, ces deux grands quartiers de la Cité desnbsp;martyrs. Ainsi, dans les Acles de sainle Cécile, il est dit tour a tournbsp;qu’elle fut trouvée dans le cimetière de Saint-Sixte, qui fait partie denbsp;la Catacombe de Saint-Callixte, et qu’elle fut trouvée dans le cimetièrenbsp;de Prétextat (i). II en est de même d’un grand nombre d’autres martyrs. Mais ce qui ne laisse aucun doute sur cette communauté denbsp;noms, c’est un ancien manuscrit du Vatican, ou Ton trouve I’expres-sion suivanle ; « Au cimetière de. Saint-Sixte, ou de Prétextat, situénbsp;hors de la Porte Appia (2).

Au reste, la pluralité des noms s’explique facilement. Les Catacom-bes ne furent pas creusées dans un jour. Au premier étage on en ajouta un second, quelquefois un troisièrae; et le nom du chrétiennbsp;généreux qui avait conlribué h ces augmentations, ou du martyrnbsp;illustre qui vint les honorer de sa tombe, s’ajouta, dans le langagenbsp;du peuple, au nom primitif du cimetière. Les exemples n’en sontnbsp;pas rares.

Qu’elle surpasse, oui ou non, en étendue toutes les autres, il est certain que la Catacombe de Prétextat, réduile a ses frontières vérilables, offre des proportions colossales; il en devait être ainsi. D’une part, ellenbsp;est ouverte sur la voie Appienne, arrosée du sang d’un plus grandnbsp;nombre de martyrs et destinée par la Providence a rester dansla Romenbsp;chrélienne ce qu’elle fut dans la Rome païenne, la reine des voies etnbsp;le quartier général de la gloire. D’autre part, la nature du terrain senbsp;prête mieux qu’ailleurs aux excavations soulerraines. Tandis que, dansnbsp;la plupart des autres Catacombes, le Fossoyeur se trouve a chaque pasnbsp;contrarié par des couches de tuf lithoïde ou de pouzzolane, il ne rencontre ici qu’une couche homogène de tuf granulaire. Aussi ne voit-on dans le cimetière de Prétextat ni ces murs de soutènement, ni cesnbsp;irrégularités qui témoignent de la dureté extréme ou de la friabiliténbsp;sol. On y trouve au contraire les plus belles galeries et les plusnbsp;grandes cryples connues jusqu’a ce jour. Parmi ces dernières, le Pèrenbsp;Marchi vienl d'en découvrir une qui a vingt mètres de long (5).

Arrêtons-nous maintenant sur le seuil sacré, et jetons un coup d’oeil genéral sur les gloires qui ont rendu sainte et vénérable la terre que

t') In MS. quibusdam CodJ. ubi S. Ciccilise corpus in coemeterio Xysli repertum fuisso • S'lur, id Bibliothecarius in Prwtexlali ccemclerio contigisse proniinliat. — Aringhi,nbsp;i“, c.xvi, p.28.j.

(*) In coemelerio S. Xysli, sou Pra;lcxtali, silo 1'oris portam Appiam. Cod. ms. Vat,, ®Pud Aringbi, lib. 111, c. xvi, p. 284.

(=i b. 171.

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iAQ LES TUOIS ROME.

nos pieds vont fouler. Image de l’Église catholique, ou plulót image du ciel même, la Catacombe de Prétextat fut Ie rendez-vous des hérosnbsp;chrétiens de tous les éges et de tous les pays. L’ordre sacerdotal ynbsp;compte des Papes, des Prétres, des Diacres et des Lévites, martyrs denbsp;la guerre et martyrs de la paix; la vieillesse et la jeunesse; l’Orient etnbsp;rOccident; Ie raariage et la virginitéy sont présents dans un nombrenbsp;infini de glorieux ambassadeurs. L’auguste sénat est décrit dans l’an-tique inscription, placée par Ie pape Damase i l’entrée de ce ciel souterrain, trop vénérable pour que Ie Pontife vierge ait osé y marquernbsp;sa sépulture :

IIIC CONGESTA JACET QV^ERIS SI TVRBA PIORVM CORPORA SANCTORVM RETINENT VENERANDA SEPVLCIIRAnbsp;SVRLIMES ANIMAS RAPVIT SIBI REGIA COELI,

IIIC COMITÉS XISTI PORTANT QVI EX HOSTE TROPH^A.

IIIC NUMERVS PROCERVM SERVAT QVI ALTARIA CHRISTI,

IIIC POSITVS LONGA VIXIT QVI IN PACE SACERDOS,

HIC CONFESSORES SANCTI, QVOS GR.ECIA MISIT,

IIIC JVVENES, PVERIQVE, SENES, CASTIQVE NEPOTES,

QVIS MAGE YIRGINEVM PLACVIT RETINERE PVDOREM.

IIIC FATEOR DAMASVS VOLVI MEA CONDERE MEMBRA SE» CINERES TIMVI SANCTOS VEXARE PIORVM.

« Voulez-vous connaitre la multitude de saints ensevelis dans ce lieu? Ici leurs corps sacrés reposent dans de vénérables tombeaux,nbsp;tandis que leurs ames glorieuses règnent dans les cieux. Ici sont lesnbsp;compagnons de Sixte, chargés des trophées de leur victoire. Ici unenbsp;multitude de nobles défenseurs des autels du Christ. Ici Ie prêtre dontnbsp;la vie s’écoula au sein d’une longue paix. Ici les saints confesseurs quenbsp;la Grèce envoya. Ici des jeunes gens, des enfants, des vieillards, et unenbsp;génération qui brille de tout Féclat d’une pureté virginale. Ici, jenbsp;1’avoue, Damase, j’ai voulu être inhumé; mais j’ai craint de troublernbsp;les cendres sacrées des arais de Dieu. »

La Catacombe de Prétextat avail, comme les autres, plusieurs en-trées. 11 parait que la principale se irouvait a dix minutes des rem-parts de Rome, prés de 1’église, aiijourd’hui délruite, de Saint-Apol-linaire. Quoi qu’il en soit, on y pénètre par des escaliers cachés dans les vignes qui couvrent l’espace entre la Voie Ardéatine et la Voienbsp;Appienne. Le t^oyageur y rencontre les galeries, les loculi, les cubi-cula, en un mot toutes les parties déji connues des autres cimetièrcs.nbsp;ll n’y a de difference que dans la régularité, le nombre'et réiendue.

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RAISONS DE l’eXIGÜITÉ DES ÉGLISES. nbsp;nbsp;nbsp;'147

Nous regrettómes \ivemenl de ne pouvoir pousser notre visite jusque dans les profondeurs de cette ville sainte; mais des éboulements, desnbsp;attérissements naturels ou de main d’homme opposent un obstacle invincible amp; la curiosité la plus ardente. Du moins, il nous fut donné denbsp;voir la belle crypte, ou plutót l’église donl Ie Père Marchi vient denbsp;faire la découverte (i). Malheureusement elle est encombrée de ter-reaux, en sorte qu’on ne peut en décrire avec exactitude les partiesnbsp;secondaires. Dans sa forme générale, elle ressemble a toutes les autres,nbsp;sinon qu’elle offre des proportions plus développées.

L’exiguité des églises souterraines est la régie; la grandeur, l’excep-lion. A ce fait constant la science assigne plusieurs causes dont l’utile connaissance est un nouveau trait de lumière sur les diflicultés desnbsp;temps primitifs et sur la sainteté de l’Église naissante. On comprendnbsp;sans peine que la nature des lieux et des terrains opposait un obstaclenbsp;souvent insurmonlable a la construction de grandes Basiliques; mais,nbsp;en atténuant et même en écartant cette première difficulté, il en restaitnbsp;une autre beaucoup plus sérieuse : c’était la pauvreté de la commu-nauté cbrétienne. Dans ces temps de guerre et de spoliation, oü l’onnbsp;comptait par centaines les victimes abandonnées sans sépullure; oü lesnbsp;parents conduits au martyre laissaient tant d’orphelins a la charge denbsp;1’Église; oü les mines et les prisons regorgeaient de confesseurs; oünbsp;les pays éloignés se peuplaient de families entières condamnées a l’exil:nbsp;certes la charité trouvail i peine les ressources nécessaires pourdonnernbsp;du pain, des vêtemenls, les secours indispensables a tout ce peuple de

pauvres.

Telle était, en effet, la direction donnée aux aumónes des fidèles; Kous ne voyons nulle part qu’elles fussent destinées a la constructionnbsp;des temples ou des Basiliques. « Nos assemblées, dit.Tertullien, sontnbsp;présidées par des vieillards recommandables; chacun de nous apportenbsp;Une modique somme a la lin du mois, quand il Ie veut et comme il Ienbsp;'eut, en raison de ses moyens; car personne n’y est obligé, tout estnbsp;'olontaire. C’est IJi comme un dépot de piélé qui ne se consommenbsp;point en repas ni en stériles dissipations : il s’emploie a Ia nourriturenbsp;des indigents, aux frais de leur sépulture, a l’entretien des pauvresnbsp;unphelins, des domestiques épuisés par Page, des naufragés, des chré-Dens condamnés aux mines ou a l’exil, ou détenus dans les prisonsnbsp;pour la cause de Dieu (a). » Toutes ces dépenses, non point passagè- 1

1

P. 169.

(S) President probati quique seniores... Modicam unusqiiisqiie stipem menstrua die, 'e' ciun velit, et si modu velit, et si modo possit, apponil. Nam nemo coinpellitiir, sed

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148

LES TROIS ROME.

ros, mais inhérentes a l’esprit de TÉglise, laissaient è peine de quoi fournir Ie nécessaire aux ministres sacrés : nous l’avons vu par la lettrenbsp;du pape saint Corneille.

Supposons néanmoins que la nature du sol et que les ressources de la communauté permissent de construire dans les Catacombes denbsp;grandes églises, eüt-il été convenable de Ie faire? Ici encore la ré-ponse est negative. La prudence chrétienne et Ia prudence humainenbsp;Ie défendaient également.

On connait toule la sollicitude de l’Église pour conserver sans souil-lure la pureté des moeurs parmi ses enfants. Dans les premiers siècles, sa vigilance devait, s’il est possible, être plus grande et plus conti-nuelle. L’honneur des chrétiens, en butte aux plus infaines calomnies,nbsp;commandait sous ce rapport des précautions excessives. Les néophytes,nbsp;sortis du sein du paganisme, habitués dès l’enfance aux pratiques im-raorales nées avec eux, consacrées par la religion, autorisées par lesnbsp;lüis et affermies par l’exemple, devaient ressentir, même après Ie bap-lême, plus d’une atteinte de cette vieille concupiscence. Ajoutez quenbsp;les réunions des deux sexes avaient lieu dans les obscurs souterrainsnbsp;des Catacombes, a la lueur seulement des flambeaux. En faut-il davan-tage pour que l’Eglise ait repoussé de toute l’étendue de sa prudencenbsp;la construction de grandes cryptes et de grandes églises, oü, malgrénbsp;toutes les précautions, la surveillance fut devenue très-dilEcile, pournbsp;ne pas dire impossible?

A la prudence chrétienne se joignait la prudence humaine. Quel danger continuel d’être surpris en ensevelissant les morts, si Romenbsp;n’avait eu qu’une seule Catacombe? Comment, par example, transporter les martyrs de la Voie Appienne aux Catacombes Vaticanes, ou lesnbsp;martyrs de la Voie Aurélienne aux Catacombes de la Voie Nomentane,nbsp;sans courir vingt lois le risque d’être arrêté et découvert? Pour éloi-gner le danger, on ouvrit les cimelières tont autour de la ville. Denbsp;même, si on suppose quelques grandes églises seulement dans chaquenbsp;Catacombe, le danger reparait dans toute son étendue. Comment lesnbsp;fidèles, c’est-a-dire les hommes, les femmes, les vieillards, les enfantsnbsp;pourront-ils se rendre, sans exposer leur vie, ii ce lieu de grande réu-nion? Iront-ils tons ensemble? mais le péril est certain. Iront-ils iso-

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RAISONS DE l’eXIGüITÉ DES ÉGLISES. 149

lément? mais il faudra plusieurs heures pour former l’assemblée. Plus sera long leur passage au travers de la Campagne romaine, et plus lesnbsp;chances d’être apergus seront nombreuses. D’ailleurs, si l’on ne suppose que quelques églises, il faudra qu’un grand norabre d’hommes,nbsp;de femmes et d’enfants passent ensemble, ou tour a tour, par quelques chemins seulement pour s’y rendre; autre inconvénient égale-ment grave, également certain.

II n’existait qu’un seul moyen d’éviter les dangers des deux natures qui menagaient Ia vie et les moeurs des fidèles : c’était d’ouvrir un certain nombre d’entrées dans chaque Catacombe; de pratiquernbsp;des escaliers séparés pour les hommes et pour les ferames, et enfin denbsp;multiplier les peliles églises, capables seulement de contenir une as-semblée peu nombreuse. Voila ce qui a été fait.

« En considérant la petite dimension de nos églises souterraines, dit Ie Père Marchi, en les trouvant ouvertes dans chaque cimetière,nbsp;que dis-je? multipliées dans les différentes parties du raême cime-lière, je crois pouvoir affirmer, d’une part, qu’il n’y eul jamais dansnbsp;chacune de ces cryptes vénérables une assemblée de cent personnes;nbsp;taiidis que, d’autre part, leur multitude permetlait aux chrétiens denbsp;se trouver séparément il est vrai, mais en même temps, dans la mêmenbsp;Catacombe, au nombre de plusieurs mille. Par ce moyen tout se pas-sait en ordre et sans danger ; les Prêtres, les Diacres, les diaconessesnbsp;pouvaient exercer utilement leur ministère, qui avait pour but principal, non pas la tenue même de l’assemblée, mais l’ordre et la dé-cence (i).»

De ce qui précède, il ne faudrait pas conclure qu’on ne rencontre dans les Catacombes aucune église capable de contenir au delii denbsp;cinquante ou soixante personnes. L’exiguité des cryptes, avons-nousnbsp;dit, c’est la régie; mais cette régie n’est pas sans exception. Si la prudence exigeait que les lieux de réunion fussent très-nombreux etnbsp;très-peu étendus; la majesté de nos mystères demandait qu’il y eut aunbsp;Plains quelques églises dont la grandeur permit d’exercer les augustes

1*) Nel coDsiJerare Ie piccole dimcozioni di quesle chiese, nel vederle aperte in cias-cimiiero, anzi in ciascun cimilero in niolte varieta di luoghi raddoppiate, credo non quot;'gannarmi nello stabilire, che quaggiü in un medosimo luogo non si lennero mai adu-'•anze di cento persone; ma che contemporaneamenle in tante varieta di cimiierj e innbsp;‘“nta mollipiicita di chiese in ogni cimilero divisamenle si polevano i iideii raccoglierenbsp;molie migliaja. I sacerdoli, i diaconi, Ie diaconesse avevano per uflizio loro princi-l*alissimo di provveddere che ie adunanze si facessero, ma in modo che da esse ia chiesanbsp;avesse a rissenlirne danno. p. 122.

T. IV. nbsp;nbsp;nbsp;7

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150 LES TROIS ROME.

fonctions avec la dignité convenable, et en présence d’une assemblée plus nombreuse.

Les cérémonies, du Baplême et de l’Ordre, par exemple, étaient trop édifianls pour en priver les fidèles, et Irop solennelles pour êtrenbsp;dignement accomplies dans un espace resserré. On irouve en effet dansnbsp;les Catacombes des églises dont les proportions permettent de dé-ployer librement la pompe du culte divin, sous les yeux d’une grandenbsp;multitude. Je rappellerai entre autres celle de la Catacombe de Pré-textat, oü nous sommes en ce moment, et qui a donné lieu aux détailsnbsp;qui précédent. Réunies aux cryptes ordinaires, ces églises, d’unenbsp;plus grande dimension, coniplètent les avantages religieux de la Romenbsp;souterraine, et font briller avec éclat l’i-népuisable sagesse des Ponti-fes qui présidèrent amp; sa fondation. Süreté, sainteté, édification, consolation des fidèles, ils ont pourvu ii tout.

15 JANVIER.

Catacombes de la Voie Appienne (suite). — Gloire qui revient a 1’Église des Catacombes. — Catacombes de Sainte-Sotère. — Histoire. — Forme architecturale des églises sou-terraines. —Vestibule.— Tombeau du fond. — Transennes ou barrières. — Table dunbsp;tombeau servant d’aulcl. — Tombes latérales. — Places séparées pour les hommes etnbsp;pour les femmes. — École des catéchumènes. — Types de nos églises pris dans lesnbsp;Catacombes et non dans les Basiliques païennes.

Non-seulement les Catacombes révèlent la profonde sagesse de l’É-glise, elles sont encore un glorieux monument de la foi et de la cha-rité de nos pères. Vous passez, saisis de frayeur, devant les ruines gigantesques du Colisée, vous saluez avec admiration les arcadesnbsp;aériennes de 1’aqueduc de Claude; vous vous arrêtez stupéfait devantnbsp;les Pyramides d’Égypte; vous lisez avec enthousiasme la descriptionnbsp;de Ninive et de Babylone, ces merveilleuses cités de l’antique Orient;nbsp;et vous dites : Ces ouvrages étonnants sont les litres d’une immortelle gloire pour les rois et les peuples qui les fondèrent. — Votre admiration est légitime, sans doute; néanmoins, au souvenir de la ri-chesse et de la puissance des fondateurs, au souvenir des ressourcesnbsp;de tout genre qui furent entre leurs mains, on congoit la possibilité,nbsp;je dirais la facilité même de ces oeuvres colossales. Je demande donenbsp;ce que doit éprouver Ie voyageur a la vue d’une raerveille qui sur-passe en hardiesse, en solidité, en étendue, el rAmphithéiltre Flavien

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CATACOMBES DE LA VOIE APPIENNE. nbsp;nbsp;nbsp;151

el les Aqueducs de Rome, et les Pyramides d’Égyple, et Ninive et Babylone. Quel fut Ie roi, Ie peuple, la société assez riche, assez puis-sante pour exécuter un pareil ouvrage? Telle est la question qu’il s’a-dresse.

11 ne sait s’il rêve ou s’il veille, quand on lui répond que ce travail de géants est dü non point aux Césars, maitres du monde, non pointnbsp;au peuple-roi, non point au peuple père des sciences et des arts; maisnbsp;a une communaulé de pauvres dénués de ressources, de talent et denbsp;fortune, sans cesse persécutés, décimés, obligés de travailler en secret et dans l’ombre de la nuit, de peur que Ie bruit du marteaunbsp;n’appelle sur leurs traces des ennerais acharnés a leur perte. Quelnbsp;fut done Ie secret de leur puissance ? Comment sont-ils parvenus, sansnbsp;posséder aucun des moyens jusqu’alors employés pour créer des monuments immortels, amp; réaliser une merveille qui surpasse toutes lesnbsp;aulres? Voila Ie problèrae que fait naitre la vue des Catacombes ennbsp;général, el des Catacombes de la Voie Appienne en particulier. La solution est dans ce mot : la Foi!

Puissance inconnue du monde ancien, méconnue du monde moderne, la foi est ce levier qui fut donné par Ie divin Maitre pour transporter les montagnes et soulever l’univers. Ses humbles disciples en firent usage. D’une main ils bütirent dans les entrailles de lanbsp;terre une cité plus grande, plus merveilleuse, plus étonnante par lanbsp;difficullé vaincue, que Ninive, Babylone ou la Rome des Césars : et denbsp;Taulre, saisissant Ie monde païen dans 1’abime de dégradation oü ilnbsp;élait plongé, ils l’élevèrent jusqu’ii Ia vertu des anges, et Ie suspendi-rent a la croix.

Le cceur ému, I’Ame agrandie au souvenir de cetle foi primitive dont nous avions les monuments sous les yeux, nous arrivftmes auxnbsp;Catacombes de Sainte-Sotère. Ce nouveau quartier du cimetière Pré-lextat doit son origine a une jeune héroïne dont l’hisloire méritenbsp;d’être connue. Elle offre un lémoignage ajoutéè mille autres de cettenbsp;foi prodigieuse, que lout voyageur, a moins qu’il ne, soit aveugle,nbsp;sourd, muet, paralysé dans son intelligence et dans son cceur, estnbsp;forcé d’admirer et de bénir, en visitant chaque Catacombe.

Sous les empereurs Dioclélien et Maximien, vivait h Rome une jeune fille nommée Soière, qui voyait parmi ses ancêtres et ses parents desnbsp;oonsuls et des préfets, et qui devait compter au nombre de ses ne-veux une des plus brillantes lumières de l’Église, saint Ambroise,nbsp;fils du préfet du prétoire des Gaules. Sa naissance, son age, sa fortune, son exquise beauté lui assurent le plus brillant avenir; mais elle

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152 LES TROIS ROME.

oublie tous ses avantages, elle renonce ii toutes ses espérances, pour embrasser la folie de la croix (i).

Or, Ie 10 février de l’an 304, voici ce qui se passait sur la Voie Appienne. Au milieu d’un immense concours de speclateurs, Sotère,nbsp;environnée de bourreaux, est debout devanl Ie tribunal de Maximien.nbsp;Suivant l’usage des vierges chrétiennes, son visage est couvert d’unnbsp;voile; tous les yeux sont fixés sur sa personne, dont Ie maintien noblenbsp;et modeste annonce tout ensemble et la fille des palriciens et la fiancée d’un Dieu. Le silence universel est enfin rompu : d’une voix stri-dente le farouche persécuteur ordonne de frapper la jeune victime aunbsp;visage.

« Alors, écrit son illustre parent, Sotère relève son voile, et présente au martyre ce visage qu’elle avait toujours tenu caché aux regards des hommes. Elle TofTre généreusement aux ignominies des soufllets, afin de commencer son sacrifice par le même endroit parnbsp;lequel commence, pour les autres vierges, la perte de la pudeur et denbsp;l’innocence. Les sacriléges peuvent, il est vrai, couvrir de meurtrls-sures son beau visage, mais ils ne peuvent souiller la beauté de sanbsp;vertu. Votre parente, 6 ma soeur! fut élevée a la gloire du martyre,nbsp;mais elle commenga, malgré sa noblesse, è subir les supplices igno-minieux réservés aux esclaves. Enfin, le bourreau se lassa. Muette,nbsp;inlrépide, elle ne céda ni a l’injure, ni a la douleur; elle ne détournanbsp;point la têle, elle ne cacha point son visage, elle supporta l’injurenbsp;sans dire une parole, sans laisser échapper ni une larme, ni un soupir.nbsp;Victorieuse dans ce combat comme dans les autres, elle re^ut enfin,nbsp;d’un coup d’épée, cette mort qu’elle avait tant désirée, mort glorieusenbsp;qui lui donna la vie (2). »

Avant de verser son sang pour son divin Époux, Sotère avait distri-bué ses biens aux pauvres, ses frères. Elle avait, entre autres, assigné, pour leur sépulture, une de ses terres, située sur la Voie Appienne,nbsp;non loin du théatre de son triomphe : elle y fut elle-même déposée.nbsp;C’est è ce double litre que la Catacombe ou nous sommes perpétue,nbsp;de siècle en siècle, le nom, la charité, le courage et la foi de la jeunenbsp;héroïne. Le pape Élienne II restaura le vieux cimetière, et Sergius II,nbsp;l’un de ses successeurs, trausporta le corps de la glorieuse martyre anbsp;Saint-Mariin-af-Monlt;», ou il attend, au milieu des hommages desnbsp;générations, le jour de la résurrection bienheureuse.

(t) Singularis pulchriludinis, nobili gonere nala, parenlum consulatus el praifecluras nb Ctirisluna conlcmpsil. — S. Anibr., Ub. iii, De Virg.

(2) S. Ambr., lib. 111, De Virgin.

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FORME ARCHITECTURALE DES ÉGLISES. nbsp;nbsp;nbsp;155

Nous ne pouvons sorlir des Catacombes de Prétextat, saus étudier la forme architecturale des églises primitives dont nous avons dit hiernbsp;Ie nombre et les dimensions. Voici d’abord, quand la nature du terrainnbsp;Ie permet, Ie porche ou Ie vestibule qui forme un carré long. II ser-vait tout ensemble ii isoler Ie lieu saint, k recevoir les fidèles qui arri-vaient trop tard et a logcr les penitents qui n’avaient pas Ie droitnbsp;d’entrer dans l’église, ou les catéchumènes qui ne pouvaient assisternbsp;amp; la célébration du saint Sacrifice. Viennent ensuite les portes, dont onnbsp;volt encore les jambages et les gonds. Les portes elles-mêmes ont dispara, consumées sans doute par Ie temps et Thumidilé. Boldetti en anbsp;trouvé une seule, qui était en fer.

Quant ü l’intérieur de l’église, nous avons déjamp; vu, en parlant des cubicula, qu’il ne présente pas une forme invariable. Tantót c’est unenbsp;rotonde, d’autres fois un triangle, quelquefois uii carré, ordinairementnbsp;un parallélogramrae terminé en rond-point. Cette variété tient Ie plusnbsp;souvent aux difficultés du terrain; car partout on voit que les chré-tiens cherchaient d faire de l’église un prolongement du monumen-tum arcuatum.

Ce qui ne change pas, c’est la place des autels ou des tombes de martyrs. Dans Ie fond l’autel principal, a droite et k gauche quelquesnbsp;autels également surmontés de la voute circulaire et pouvanl servir anbsp;la célébration des saints Mystères. Dans un grand nombre d’églises,nbsp;les parois latérales sont remplies de plusieurs rangs de tombes ordi-naires, disposées, parallèlement, au nombre de trois ou quatre rangs,nbsp;suivant l’élévation el la capacité de la crypte. Nous avons vu que cer-taines églises ont un presbyterium derrière l’autel avec des siéges pournbsp;l’Évêque et Ie clergé; Ie plus souvent la chaire pontificale est a Tanglenbsp;de Tautel, un peu avancée vers la nef (i).

Ordinairement une marche de quelques pouces d’épaisseur isole Tautel en Télevant un peu au-dessus du sol. En avant de Tautel senbsp;trouve encore quelquefois les transennes, espèce de balustrade ou denbsp;grillage en pierre, destiné a protéger Tautel centre Tempressementnbsp;d’un zèle imprudent ou indiscret. II existe au cimetière de Saint-Cal-lixte une de ces transennes dans un état passable de conservation :nbsp;elle porte trois fois a la partie supérieure Ie monogramme du Christ,nbsp;figuré en croix de Saint-André; cetle forme indique, comme nous sa-'’ons, les temps primitifs. Les autres Catacombes, notamment cellesnbsp;de Sainte-Priscille et de Sainte-Hélène, présentent les fragments d unnbsp;grand nombre de ces galeries protectrices. De Ié, il est permis de coni') Voir Ie Plan a la lin du volume.

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154 LES TROIS ROME.

olure que l’usage en était général, du moins dans les cryplcs donl la dimension pouvait Ie permeltre.

L’aulel lui-möine est de forme carrée, corame les sarcophages anciens que nous connaissons. Souvent il est orné de bas-reliefs, distri-bucs par compartiments, dont les sujets sont empruntés a TAncien et au Nouveau Testament. Sur l’autel est une table de pierre ou de mar-bre ordinairement insérée en partie dans Ie tuf, et servant a l’oblationnbsp;des saints Mystères. Le tombeau de saint Hermès, dans la Catacombenbsp;de ce nom, sur la Voie Salaria, en est un modèle bien conservé. Quenbsp;la table du tombeau ait servi a la célébralion de I’auguste Sacrifice,nbsp;c’est un fait incontestable.

D’abord, nous savons que l’usage et la discipline de l’Église primitive faisaient une loi sacrée de n’offrir la grande Victime que sur la tombe des martyrs. Lnsuite les témoignages de l’bistoire sont tenement nombreux qu’on est embarrassé de choisir : j’en citerai seule-ment quelques-uns. Prudence parle ainsi de la pierre placée sur lanbsp;tombe de saint Hippolyte, dans la Catacombe de la Voie Tiburtine ;

lila, sacramenii donairix mensa, eademque Custos lida sui marlyris appositanbsp;Servat ad aelerni spem vindicis ossa sepulcro,

Pascit item sanclis Tybricolas dapibus.

« Cetle table donatrice du Sacrement et en mêrae temps gardienne fidéle du martyr qui lui est confié; elle conserve, en attendant la venuenbsp;du Juge éternel, ses ossements dans le sépulcre, et elle nourrit les Remains d’une nourriture sacrée (i). »

Suivi é Rome, l’usage dont nous parlons se trouve fidèlement ob-servé dans les autres parties de l’Église catholique. Le même poète chantant sainte Eulalie, la gloire des Espagnes, s’exprirae ainsi :

Sic venerarier ossa libet,

Ossibus allar et impositura.

lila Dei sila sub pedibus Prospicit hsec, populosque suosnbsp;Carmine propiliala 1'ovel.

« C’est ainsi qu’il est donné de vénérer ses ossements; un aulel est clevé sur ces ossements; elle-même les voit, placés sous les pieds denbsp;Dieu, et toucbée des hymnes chaniées en son honneur, elle se montrenbsp;favorable aux peuples qui l’invoquent (2). »

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Prud. Perisleph. de S. Hippolyt.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;ld., Hym. m.

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TABLE DU TOMBEAU SERVANT b’aUTEL. nbsp;nbsp;nbsp;loO

L’Église d’Afrique se monlre la digne émule de sa soeur et de sa mère. Son grand docteur, saint Augustin, lui rend ce témoignage :nbsp;« Vous tous, dit-il aux fidèles, qui connaissez Carthage, vous saveznbsp;qu’au lieu même oü coula, pour Ie nom du Christ, Ie sang de Cyprien,nbsp;une table a été consacrée Dieu. Cette table est aussi appelée. Ia Tablenbsp;de Cyprien, non que Cyprien s’y soit assis pour manger, mais pareenbsp;qu’il y fut immolé; et que par son immolation il a préparé cette table,nbsp;non pour y manger lui-même, ou y donner amp; manger, mais pour ynbsp;offrir le sacrifice au Dieu auquel lui-même fut immolé (i). »

Enfin, rOrient lui-même, ou plulót le Saint-Esprit par la bouche du sublime exilé de Pathmos, a révélé et consacré I’usage d’offrir I’au-guste sacrifice sur la tombe des martyrs. « J’ai vu, dit saint Jean, sousnbsp;Pautel de la Jérusalem céleste, les Ames de ceux qui ont été mis a mortnbsp;pour le Verbe de Dieu (a). » Ainsi c’est a l’Église du ciel que l’Églisenbsp;de la terre a emprunté cette coutume invariable. Sépulcre, mérnoire,nbsp;lieu du martyre, confession des martyres, table, tels étaienl il y a dix-huit siècles les noms des autels, tels ils sont encore en Italic et surloutnbsp;è Rome (5).

Quant è la raison mystérieuse de I’usage vénérable dont nous par-ions, on la trouve souvent expliquée dans les Pères de l’Église. « C’est avec raison, dit saint Grégoire le Grand, que les êmes des justes sontnbsp;placées sous l’autel, puisque le corps du Seigneur lui-même est offertnbsp;sur Pautel. Ce n’est pas en vain que les justes demandent vengeancenbsp;de leur sang, d’un lieu oü le sang de Jésus-Christ est répandu pournbsp;les pécheurs. II était done convcnable de placer la tombe des martyrsnbsp;au lieu même oü l’on célèbre chaque jour la mort du Seigneur; denbsp;réunir les martyrs ê leur chef, afin que la piété honorêt dans le mêmenbsp;lieu ceux que la mort, soufiferte pour la même cause, avait associés auxnbsp;mêrnes triomphes (*). »

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Sicut nosUs quicumque Carthaginem nostis, in eodem loco, ubi propter notnennbsp;Christi sanguis fusus est Cypriani, mensa Deo constructa est. Tarnen mensa dicilur Cy-Priani, non quia ibi est unquam Cyprianus epulatus; sed quia ibi est immolatus; etnbsp;luia ipsa immolatione sua paravit hanc mensam, non in qua pascat, sive pascatur, sednbsp;in qua sacrificium Deo, cui et ipse oblatus est, offeratur. Serm. cxxii, de Diversis.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Apocalyp. c. vi.

(s) nbsp;nbsp;nbsp;Sepulcrum, memoriae, marlyrium, confessio, mensa.

(t) nbsp;nbsp;nbsp;Recte sub altari animm justorum requiescunt, quia super altare corpus Domininbsp;offertur. Nee immerilo illic justi vindictani sanguinis postulant, ubi etiam pro pcccato-ribus Cbristi sanguis efiundiiur. Convenienler igilur et quasi proquodam consortio, ibinbsp;naariyribus sepullura decreta est, ubi mors Domini quolidie celebralur. Non immerito,nbsp;inquam, consortio quodam illic occisis tumulus constituitur, ubi occisionis Dominica;nbsp;membra ponuntur, ut quos cum Christo unius passionis causa devinxerat, unius etnbsp;loei religio copularet. — Apud Boldetti, lib. i, c. vin, p. 30.

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•156 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

Gr^ce è ce rapprochement de la \ictime du ciel el des \ictimes de la terre, l’Église réunit, dans un espace de quelques pieds, tout cenbsp;qu’il y a de plus puissant sur Ie coeur de Dien; car la vengeance quenbsp;demandent les martyrs du fond de leur tombe, est la même que solli-cita raugusle Viclime du haul de sa croix ; Ie salut de ses bourreaux.nbsp;Ainsi loutes les fois que, dans la personne de son ministre, l’Églisenbsp;catbolique monte a l’autel, savez-vous 5 qui elle ressemble? Elle res-semble a une veuve qui, a la suite d’une grande guerre, s’en iraitnbsp;trouver Ie prince, et lui présentant d’une main les ossements de sesnbsp;Ills, et de l’autre Ie sang de son époux, glorieusement tombés aunbsp;champ d’honneur pour la défense de la patrie, dirait au monarque :nbsp;« Voila mes litres a vos faveurs! » Est-il un roi dans l’univers qui nenbsp;s’empressat d’exaucer la pauvre veuve? Dieu serail done moins qu’unnbsp;honime, s’il refusait I’Eglise quand, pour obtenir ses graces, elle luinbsp;présente, dans nos saints Mystères, et Ie sang de son Époux et les ossements de ses enfants.

Rappelons-nous que les parois latérales ont aussi des arcosolia et des tombes ordinaires, puis examinons attentivement les autres partiesnbsp;de Tédilice. La tradition nous apprend que dans les réunions sacréesnbsp;les hommes étaient séparés des femmes. Cette coutume, fidèlemenlnbsp;conservée après Constantin, et, de nos jours encore, maintenue dansnbsp;un grand nombre de paroisses, était plus rigoureusement commandéenbsp;a l’époque des persécutions. Les constitutions apostoliques sont for-melles sur ce point (i). A défaut d’autres preuves, une simple observation suffirait pour établir qu’elle fut réellement établie dès I’originenbsp;du christianisme. Nous connaissons la prudence el la sollicitude denbsp;I’Eglise. Si done elle a cru devoir exiger la séparation des sexes dansnbsp;ses vasles Basiliques, alors qu’elle célébrait ses Mystères et tenait sesnbsp;synaxes au jour éclatant du soleil, peut-on douter qu’elle ne l’ait exigéenbsp;avec plus d’empire et maintenue avec plus de soin dans les églises sou-terraines des Catacombes ? S’il en est ainsi, on doit retrouver dansnbsp;nos cryptes des traces de cette sage discipline.

En effet, on remarque non-seulement des entrées et des escaliers séparés pour les hommes et pour les femmes, et l’inspection des lieux, jointe è l’inscriplion vaticane que nous avons rapportée, met ce premier fait hors de discussion. Or, pourquoi des entrées séparées,condui-sant a la même église? sinon paree que les hommes et les femmes de-vaient rester également séparés pendant la célébration des synaxes etnbsp;des saints Mystères.

(i) Const., lib. II, C. LVii.

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SÉPARATION DES HOMMES ET DES FEMMES. 157

II est intéressant de relrouver dans les cry pies la preuve inatérielle de ce point de discipline. Les Caiacombes en général, et celles denbsp;Sainte-Hélène, de Saini-Callixte, da Sainie-Agnès, de Prétextat, olfrentnbsp;un grand nombre d’églises avec un, deux et quelquefois trois cubi-cula en regard les uns des autres, dont la parlie supérieure se terminenbsp;par une fenêlre oblongue. Geile fenêlre vient aboutir a un luminairenbsp;commun par lequel tous les cubicula resolvent Ie jour. La se plagaientnbsp;les hommes et les femmes, suivant la distinction élablie par l’Église,nbsp;pour assister au saint Sacrifice, entendre les instructions et chanter lesnbsp;louanges des martyrs aux jours de leurs anniversaires (i). Le mêmenbsp;fait a été reconnu généralement par le Père Marchi, et le savant ar-chéologue déraontre que ces stanze sont inexplicables et contraires anbsp;toutes les régies de Parchiteclure, aussi bien qu’a la destination reli-gieuse des cryptes; a moins qu’on ne leur assigne 1’usage dont nousnbsp;pari ons (2).

Ce n’est pas tout. On sait que, dans la primitive Église, les calé-chumènes avaient des lieux séparés pour recevoir 1’inslruction préparatoire au baptême. Or, è c6lé de plusieurs églises souterraines, on trouve des salles avec deux chaires 5 l’extrémité. Des siéges occupentnbsp;les parois longiludinales; mais on n’y trouve point d'arcosoUum.nbsp;Est-il difficile de reconnailre dans ces chambres les écoles des calé-chumènes? Les chaires des Prêtres chargés de Tinslruclion, et aunbsp;nombre de deux ou trois, suivant la sage discipline de l’Église; le.snbsp;places des auditeurs; I’absence de Pautel : toutes ces circonstancesnbsp;n’indiquent-elles pas les lieux oü les fulurs chrétiens élaient préparésnbsp;au sacrement de la régénération, sans avoir le droit d’assister au sacrifice de l’auguste Victime (3) ?

Nous avons étudié avec amour la forme des premiers temples chrétiens. Celte nouvelle page du grand livre des Gatacombes jette une grande lumière, tant sur I’admirable fidélilé de l’Église Romaine auxnbsp;vénérables usages des temps primitifs, que sur la forme architecturalenbsp;de nos églises. Quand la paix lui fut donnée, l’épouse de PHomme-Dieu n’eut pas hesoin, pour élever ses superbes églises, de recourir a

(1) Boldelli, Ub. i, c. iv, p. 13.

(s)... Non deeimpedirmidi portare Ia mia dimosliazione colla varictaDei monumenii a quel sommo grado di evidenza di cui 6 capevole; inassime dopo che non in uno, manbsp;*u iniu i principali nostri cimilei j ho vedulo la pratica di allenersi a piccole forme e adnbsp;uniia di stanza dove traltasi dei cubicoli o sepolcri delle private famiglie; a forma ednbsp;elevazione piCi ampia e a radoppiamento di stanze, dove trattasi di cripte o chiese.nbsp;‘•161; id. p. 163-5-6-8; 176-7.

1=) ld., p. 187.

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1o8 LES TROIS ROME.

des modèles profanes; elle se eontenta de transporter sur Ie sol les monuments de son berceau : les cryptes des Catacombes devinrent Ienbsp;type obligé des Basiliques. Que ces dernières reproduisent dans leurnbsp;forme et dans leurs parties essentielles les modesles oratoires des Catacombes, c’est un fait qui saule aux yeux de l’observaleur.

Dans les cryptes, vous avez un autel principal placé vers l’extré-mité; la même chose a lieu dans les Basiliques. Dans les cryptes eet autel est Ie tombeau d’un martyr; il est légèrement élevé au-dessusnbsp;du sol, protégé par une grille et couvert d’une table de pierre ou denbsp;marbre, sur laquelle s’offre Ie divin Sacrifice. Tous ces caractères senbsp;retrouvent dans Ie maitre autel de nos églises, rigoureusement pourvunbsp;d’un corps de martyr, ou d’un loculus, appelé tombeau dans lequelnbsp;on dépose quelques reliques. Souvent même, pour mieux conservernbsp;les traces de la primitive origine, l’autel est placé dans l’église immé-diatement au-dessus de la tombe des martyrs qui se trouve dans unenbsp;crypte souterraine. Cela se voit souvent en Italië, è Rome surtout.nbsp;Comme exemple, je me contenterai de citer l’église de Sainte-Prisque,nbsp;sur Ie Mont-Aventin, et Saint-Pierre au Vatican.

On tenait tellement k conserver aux églises Ie caractère des cubi-cula, que la oü il n’y avait pas de crypte primitive on en ouvrait une sous l’autel, afin d’y déposer Ie corps des martyrs: l’église de Sainte-Cécile en ofifre un remarquable monument. L’autel des Catacombesnbsp;forme un arcosolium, c’est-a-dire un monument surraonté d’unenbsp;voute. Le rond-point de nos églises, ou l’arc absidal sous lequel nosnbsp;autels sont placés, n’est que la reproduction de la voute primitive.nbsp;A Rome, oü les traditions se conservent avec plus de fidélité, la plupart des autels des anciennes Basiliques sont environnés d’un baldaquin. Ce genre d’ornement, appelé aussi coupole, ciboire et tabernacle, rappelle plus particulièrement encore par sa forme celle de lanbsp;voute antique.

Le siége en pierre, placé en avant de l’autel et tourné vers le peu-ple, d’oü Ie Pontife instruisait les fidèles, s’est perpétué d’abord dans 1’ambon, puis dans \epalco moderne et nos chaires è prêcher. Autournbsp;de la crypte rayonuent des arcosolia semblables ü l’autel principal, etnbsp;par la forme et par la destination; tombeaux de martyrs et tables dunbsp;sacrifice : voil^ nos chapelles latérales. Cette origine parait tellementnbsp;incontestable, que les architectes des Basiliques chréliennes n’onl pasnbsp;craint de sacrifier les régies de l’art a la conservation de ce souvenirnbsp;vénérable des Catacombes.

« Un inconvénient pour l’architecture, dit M. Raoul Rochette, c’est

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LES CATACOMBES, TYPES DE NOS ÉGLISES.

la multiplicalion des pelites chapelles lalérales au sein des églises chrétiennes, en raison des confessions pariiculières ou mémoires desnbsp;martyrs, dont Ie cuUe s’associa a celui du saint principal ou patron.nbsp;Get usage, né avec l’Église elie-même dans Ie sein des Catacombes,nbsp;eut sur la disposition générale des Basiliques chrétiennes une influence plus décisive qu’aucune des circonstances puisées dans Ienbsp;génie raême du culte... 11 en résulte dans les plans, ainsi que dans lesnbsp;élévations, une interruption fréquente de ces lignes droites qui nenbsp;sont pas seulement Ie principal mérite des oeuvres de Tarchitecture,nbsp;mais encore Ie principal élément des impressions de grandeur qu’ellesnbsp;produisenl (i). »

Quelle que soit la justesse de cette observation, il faut louer les ar-chitectes chrétiens de Timperfection dont on semble vouloir leur faire un reprocbe. En dérogeant aux régies, pour ainsi dire, matérielles denbsp;Tart, afin de reproduire intégralement dans nos églises la crypte desnbsp;Catacombes dont elles ne sont que Ie développement, ils ont faitnbsp;preuve de bon sens et de tact. De même que Ie corps est fait pournbsp;rftme, et non l’éme pour Ie corps; Ia forme pour la pensée, et non lanbsp;pensée pour la forme; la musique pour les paroles, et non les parolesnbsp;pour la musique ; ils ont compris que Ie temple était fait pour Ienbsp;christianisme avec ses souvenirs, ses gloires, ses enseignements; etnbsp;non Ie christianisme pour Ie temple. Dirigés par cette régie supérieurenbsp;aux autres régies, ils ont réalisé a la face du soleil, en y ajoutant toutnbsp;ce que les arts et la richesse peuvent offrir de ressources, les vénéra-bles sanctuaires oü pendant trois siécles l’Église cacha ses mystéresnbsp;et prépara ses enfants aux luttes héroïques du martyre.

De ce qui précéde il résulte, contrairement é l’opinion de quelques archéologues francais, que les cryptes des Catacombes, et non pointnbsp;les Basiliques païennes, servirent de type a nos églises (a). D’une part,nbsp;nous avons vu que les cryptes souterraines prennent plusieurs formesnbsp;dififérentes : elles sont tour é tour oblongues, carrées, circulaires,nbsp;liexagones, etc. On peut done soutenir qu’elles ne furent point ouver-tes sur Ie modéle des Basiliques païennes, qui présentent invariable-nient une espèce de nef terminée par un rond-point. II faut done direnbsp;la même chose de nos églises qui prennent tour è tour ces dififérentes

(i) Tableau des Catacombes, p. 9t.

(*) È cerlo che queste capelleite servendoai miseri eperseguitati crisiiani per tencrv Ie loro adunanze,ecelebrarvi i divini mislerj, furono un rozzissimo abbozzo detlechiesenbsp;® delle Basiliche, edificale dipoi con tanla magnificenza sopra lerra, qiiando la religionenbsp;cristiana cominciö a godere d’una Iranquilla pace. — Boltari, t. iii, p. 7a.

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160 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS HOME.

formes. D’autre part, les Basiliques païennes n’ont iii crypte souter-raine, ni excavations latérales, deux choses inévitables dans nos anciennes églises. Ce n’est done pas sur la ressemblance qu’elles peuvent avoir avec les Basiliques profanes qu’on peut fonder l’origine païennenbsp;qu’on leur attribue. Serait-ce sur Ie nom de Basiliques coramun nosnbsp;églises et ii certains édifices païens? S’il en était ainsi, on trouveraitnbsp;dans les premiers siècles Ie nom de Basiliqne appliqué aux églises ounbsp;chapelles des Catacombes. Or, on ne connait pas une seule applicationnbsp;de ce genre dans les monuments anlérieurs a Constantin. On Ie trouvenbsp;ü peine une ou deux fois employé pour désigner, non pas les cryplesnbsp;souterraines, vérilables types de nos églises, mais des temples chré-tiens bamp;lis sur ce sol (i). »

A partir de ce prince il devint plus commun; mais, au lieu d’indi-quer que les Basiliques chrétiennes étaient formées sur Ie modèle des Basiliques païennes, il constatait seulement que ces dernières avaientnbsp;été transformées en temples chrétiens. « Constantin, dit Selvaggio,nbsp;ayant embrassé l’Évangile, donna aux évêques, pour y tenir les assem-blées saintes, un grand nombre de Basiliques païennes. De la, certai-nemenl, Ie nom de Basiliques, généralement donné aux temples ebré-tiens (2). » L’Église adopta ce nom, soit paree qu’il perpétuait Ienbsp;souvenir de son triomphe sur Ie paganisme; soit paree qu’il rappellenbsp;Ie grand Bol, auquel ces édifices royaux étaient désormais consacrés;nbsp;soit enfin paree qu’il indiquait une parlie notable du temple de Salomon, et qu’il était bon de constater que si l’Évangile était Ie vaia-queur du paganisme, il était aussi Ie vainqueur et l’héritier du judaïsme (5).

(i) II paraitrait que, pendant l’ère des persecutions, les chrétiens craignaient d’em-ployer ce nom pour désigner les églises ; « Usitaliori vocabulo dictas fuisse ab antiquis ecclesias ipsas, domos Dei ct templa sanctus Zeno, In Psalm, cxxvi, signiticare videlurnbsp;his verbis ; Convenlus quidem ecclesiarum, sine templis, quos ad secretam sacramen-torum religionem mdificiorum sepia claudunt, consuetudo nostra, vel domum Deisolilanbsp;est nuncupare, vel templa. » — Bar. Ann. ad Martyr., 5 aug. — Ils employaient encorenbsp;d’autres nonis, mais jamais celui de Basiliques;« Ecclesia, dominicum, domus columke,nbsp;oratorium, concilium, conciliabulum, synodus, martyrium, memoria, mensa martyris. »

(a) Harum multas Constanlinus imperator, christianam religionem aniplexus, Epis-copis ad sacros inibi conventus agendos concessit; alque hinc/ortassis nomen Basilica: generaliter Ecclesiis datum est: aUlui otnnino iia se res habet; praisertim cum antenbsp;Constanlini tempora vix in ullo christiano auotore illud inveniatur. Antiquit. christ.nbsp;Instil., lib. 11, c. i, n. 6.

(5) Basilica: prius vocabanlur regum habitacula, unde el nomen habent. Nunc tarnen ideo Basilica; divina templa nominantur, quia ibi regi omnium Deo cultus et sacrificianbsp;ollerunlur. — Isidor., Origin., lib. xv. — Non abhorret tarnen a pbrasi divina; Scriplune;nbsp;nam atrium illud majus templi Salomonis Basilica dicitur. IIParalip., c. tv, ct vi; Bar.nbsp;Au. ad Martyr,, 5 aug.

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CATACOMBES DES SAINTS EUSEBE ET MARCEL. 161

U JANVIER.

Catacombes des Sainls-Eusèbe el Marcel. — Histoire. — Peinlures des Catacombes. — Uülité. — Aulhenlicilé. — Concile d’Elvire expliqué. Usage de la sculpture et de lanbsp;peinture sacrées aussi ancien que Ie chrislianisme. — Peinlures des Catacombesnbsp;contemporaines des Apótrcs et des persécutions. — Adieu a Ia Voie Appienne.

Après avoir vénéré a Saint-Jean de Latran les chefs de saint Pierre et de saint Paul, qu’on découvre a l’occasion de la fête de saint Hilaire,nbsp;nous reprimes encore une fois le chemin de la Voie Appienne. Un noblenbsp;quarlier de la grande Catacombe de Prélextat nous restait a visiter :nbsp;j’ai nommé le cimetière des Sainls-Eusèbe et Marcel. Dix minutes aunbsp;dela des murailles de Rome, le voyageur sorti par la porte Capenanbsp;trouve dans les vigues l’entrée de celte Catacombe, dont l’origine remonte aux temps apostoliques. Sous Valérien, elle était déja célèbre.nbsp;Nous voyons que les chréliens s’y rendaienl en foule pour assister auxnbsp;assemblées saintes et se nourrir de la divine Eucharistie. Personne nenbsp;la fréquentait plus assidüment qu’un saint prêlre, nommé Eusèbe, unnbsp;diacre, nommé Marcel, et un citoyen romain, nommé Hippolyte. Leurnbsp;zèle courageux méritait d’etre récompensé par des faveurs signalées,nbsp;aussi bien durant leur vie qu’après leur mort.

La Providence leur ménagea des joies ineffables. Myslères d’amour et de foi, myslères régénéraieurs de Rome et du monde, accomplisnbsp;dans ces vénérables souterrains! quel bonheur pour le chrétien desnbsp;derniers öges de vous connaitre tons et de pouvoir, en recevant votrenbsp;influence, retremper son éme aux sources mémes de l’héroïsme primi-tif! Actions de gréces a l’histoire qui nous en révèle du moins quel-ques-uns. Laissons-la pariet’ dans sa simplicilé sublime : « L’an 259,nbsp;sous le consulat de Valérien et d’Acilius, Hippolyte, citoyen romain,nbsp;disciple de Jésus-Christ, menait une vie solitaire dans les Catacombes.nbsp;Sa grande science allirait sur ses pas une foule de païens qui donnaientnbsp;leur nom pour le baptême. Hippolyte les conduisait aux pieds du papenbsp;Etienne, afin qu’il les baplisat.

» Comme cela se répétait souvent, le bruit en vint aux oreilles de Memmius, préfet de la ville, qui en fit son rapport a Valérien. Hippo-'yie en ayant élé informé, vint lout raconler au pape Étienne. Le bien-heureux Pontife, prévoyant que la perséculion allail éclaler, convbquanbsp;Une grande asserablée des chréliens, exhorta tout le monde è la pa-dence, au courage, au zèle de Dieu. « Je vous prie tous, ajoula-t-il,

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162 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

d’être remplis de sollicilude non-seulement pour nous et les nótres; mais si quelqu’un d’entre vous a un ami, un parent encore païen, qu’ilnbsp;ne tarde pas de me l’amener, afin que je lui donne Ie baptême. » Anbsp;ces mots, Hippolyte se prosterne aux pieds du bienheureux évêquenbsp;Étienne et lui dit: « Mon père, j’ai un neveuetune nièce encore païens,nbsp;que j’ai nourris moi-même. Le jeune gargon a environdixans; la petitenbsp;fille en a treize. Pauline, leur mère, et Adrias, leur père, sont aussinbsp;païens; néanmoins ils m’ont envoyé ces enfants il y a quelques jours. »

» Alors le Bienheureux lui dit : « Quand on vous les enverra de nouveau, retenez-les et amenez-les-moi, afin que les parents viennent eux-mêmes, et que nous ayons occasion de les exhorter tous ensemble. » Deux jours après, les enfants se rcndirent auprès d’Hippolyte, auquelnbsp;ils apporlaient quelques aliments. 11 les relint, avertit Étienne, quinbsp;vint, embrassa les enfants et les combla de caresses. Les parents ne lesnbsp;voyant pas revenir, accoururent remplis d’inquiélude. Élienne leurnbsp;paria des terreurs du jugement dernier et du bonheur des saints, ennbsp;les pressant de quitter les idoles. Hippolyte leur fit les mêmes exhortations. « Je ne me sens pas le courage, leur répondlt Adrias, de menbsp;laisser dépouiller de mes biens et de donner ma tête au bourreau. »nbsp;Pauline, de son cóté, ennemie jurée de la religion, dissuadait son marinbsp;et se répandit en reproches contre Hippolyte, son frère, qui donnaitnbsp;de semblables conseils. La-dessus ils se retirèrent.

» Alors le bienheureux Étienne fit appeler le prêtre Eusèbe et le diacre Marcel, et les envoya auprès d’Adrias et de Pauline qu’il avaitnbsp;fait prier de revenir dans les Catacombes oü se trouvait Hippolyte.nbsp;Eusèbe les salue en disant: « Jésus-Christ vous attend pour vous fairenbsp;entrer avec lui dans le royaume des cieux. » Pauline se révolte de nouveau, et finit par remeltre sa réponse au lendemain. Pendant Ia nuit,nbsp;des parents chréliens araenèrent è Eusèbe, dans les Catacombes, leurnbsp;jeune fils atteint de paralysie afin qu’11 le baptisat. Eusèbe se mit ennbsp;prières, baptisa l’enfant qui recouvra la santé et se mit i louer Dieu (i). anbsp;Eusèbe offrit le sacrifice et tous participèrent au corps et au sang dunbsp;Seigneur. L’évêque Étienne, l’ayant appris, vint les trouver, et tousnbsp;mirent leurs joies en commun.

» Le matin Adrias et Pauline revinrent è la Catacombe. En appre-nant le miracle de la nuit, ils furent saisis d’étonnement; la componc-

tion entra dans leur coeur, et seprosternant ils demandèrentle baptême.

(i) Arrêlé quelques jours plus tard, et sommé d’abjurer sa foi, le jeune néopliyle op-posa aux menaces et aux tortures une contenance invincible, et devint Tillusire martyr qui a donné son nom a la célèbre Catacombe de la Voie de Porto : c’est saint Ponlien.

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msToiRE. nbsp;nbsp;nbsp;j65

A ce spectacle, Hippolyle rendit graces amp; Dieu et dit au bienheureux Étienne : « Père, haiez-vous de les baptiser. » Les épreuves, les interrogations, Ie jeune étant acconiplis, il les baplisa tons, et donna aunbsp;petit gar^on Ie nom de Néon, et i la petite fille celui de Marie, Tousnbsp;ces nouveaux baptisés connmencèrent a habiter dans la Catacombe avecnbsp;Hippolyle, Ie prétre Eusèbe et Ie diacre Marcel. Quant aux biens qu’ilsnbsp;possédaient dans la ville, ils les donnèrent aux pauvres.

» La chose ne tarda pasii être connue de Valérien, qui ordonna sur-le-champ de les rechercher, proraettant la moilié de leurs biens Ji celui qui les découvrirait. Une cohorte, composée de soixante soldats, se mitnbsp;i leur poursuile. Elle arrêla Eusèhe, Adrias, Hippolyle, Pauline, etnbsp;leurs deux enfants qu’ils chargèrent de chaines et qu’ils conduisirentnbsp;au Forum de Trajan. Tous furent interrogés, condamnés a mort; etnbsp;tous restèrenl inébranlahles. Marie et son frère furent égorgés sur lanbsp;Petra scelerata, en presence de leur père, et leurs corps laissés surnbsp;Ie lieu du martyre. Pendant la nuit les chrétiens vinrent les enlever,nbsp;et les déposèrent dans la Catacomhe qui leur servit de berceau ; c’étaitnbsp;Ie 8 des Calendes de novembre. A quelques jours d’intervalle leur pèrenbsp;et leur mère, ainsi que les autres martyrs, consommèrent leur sacrificenbsp;et furent ensevelis, par un diacre nommé Hippolyle, dans la mêmenbsp;Catacombe, située a un mille des murailles, sur la Voie Appienne, anbsp;laquelle ils donnèrent leur nom (i). »

J’ai rapporté, avec quelques détails, les acles de leur martyre, paree que, d’öne part, ils sont peu connus, et, d’autre part, pareenbsp;qu’ils ferment une des pages les plus instructives et les plus glorieuses de l’hisloire de celte Catacombe. Le même cimelière rappellenbsp;un autre fait qu’on eut fait redire è notre jeunesse en vers et en prose,nbsp;s’il avail eu pour auteurs quelques païens de Rome ou d’Alhènes. Eh!nbsp;n’a-t-on pas célébré sur tous les tons l’atlachement d’Agrippine pournbsp;Germanicus, donl elle rapporta les cendres en Italië? d’Artémise etnbsp;d’Arria qui demeurèrent inviolablemenl attachées hleurs maris, mêmenbsp;après la mort? Or, void un trait d’affection plus héroïque et d’autantnbsp;plus beau, qu’il rentre mieux dans les moeurs chrétiennes des pre-Uiiers siècles.

Neuf mois après le martyre d’Adrias, de Pauline et de leurs en-fanis, Rome vit arriver deux nobles voyageuses, Marlhe, née dans la Grèce, et Valérie, sa fille, toutes deux chrétiennes, et unies è Paulinenbsp;^ien moins encore par les liens du sang, que par ceux d’une amiliénbsp;u*menlée par la foi. Elies demandent de ses nouvelles; on leur ap-

h) Uar., An., t. ii, an. 230, n» 8-19.

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164 nbsp;nbsp;nbsp;les TliOIS ROME.

prend qu’elle a re^u avec toute sa familie la couronne du martyre. Heureuse Pauline! s’écrient-elles en demandant oü elle repose. Onnbsp;les conduit a la Catacombe : elles en font leur séjour; et passentnbsp;trejze ans dans la compagnie des saints martyrs. La mort vient les ynbsp;trouver et fixe la demeure de leurs corps prés de ceux qu’elles ché-rissent, tandis qu’elle réunit dans Ie ciel leurs ames saintes aux amesnbsp;de leurs glorieux parents (i).

Non-seuleraent les annales de l’histoire racontent la vie merveil-leuse des premiers chrétiens; Ie même enseignement se trouve peut-être avec plus d’éloquence dans les monuments des Catacombes. Hier nous avons vu tout ce que les cryptes souterraines, considérées dansnbsp;leur architecture, révèlent de foi vive et de pureté de moeurs. Lesnbsp;peintures qui les décorent ne sont pas moins instructives ; elles for-ment, sans nul doute, une des pages les plus intéressantes du grandnbsp;livre des Catacombes. On comprendra sans peine Ie saisissement reli-gieux du voyageur, lorsqu’il se trouve en présence de ces fresquesnbsp;dessinées, il y a dix-sept ou dix-huit siècles, par la main des martyrsnbsp;et de leurs amis, tant dans les quartiers de la Rome souterraine quenbsp;dans les cryptes royales de la Via Appia. A la lueur de la torchenbsp;dont il est armé, il peut lire sur les voütes et les parois des humblesnbsp;chapelles les dogmes, les pensees, les affections, les usages, les détailsnbsp;intimes de la vie tout a la fois si misérable et si belle de l’Églisenbsp;naissante. Ici la main du copiste n’a rien altéré : Ie texte original estnbsp;sous les yeux.

Que les fidèles, confinés dans les Catacombes, aient orné de pein-tures les parties religieuses de leur habitation souterraine; que ces peintures commeucent avec les premières perséculions et se perpé-tuent jusqu’après Constantin : c’est un double fait dont il n’est pasnbsp;même permis de douter.

D’abord, ces peintures étaient utiles, pour ne pas dire nécessaires; de plus, elles rentraient si complétement dans l’esprit du christia-nisme qu’aucune loi ne pouvait les interdire. Aux premiers jours denbsp;l’Église naissante, comme aux premiers ages du monde, l’enseigne-ment religieux se faisait de vive voix. La crainte légitime de jeter lesnbsp;perles devant les pourccaux, c’est-a-dire d’exposer au mépris et a lanbsp;calomnie la doctrine évangélique, retenait dans les mains d’un petitnbsp;norabre d’hommes éprouvés, les exemplaires encore pen nombreux

(i) Ibidem diebus el noclibus vigilantes in oralionibus permanserunt usque ad annos tredecim, reddenles in pace spiriiuni Deo. SepulUe ibidem quinto idus decembris. —nbsp;Bar. Au., i. n, an. 259,11“ 8-19.

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UTILITÉ DES PEINTÜRES. nbsp;nbsp;nbsp;i6o

des Évangiles ou des Lettres apostoliques. L’histoire a enregistré les noms glorieux d’une foule de martyrs, immolés pour avoir refusé denbsp;livrer les livres saints confiés a leur garde. II est done évident que cesnbsp;livres n’étaient pas entre les mains de tout Ie monde.

On poussait la prudence si loin, que Ie catéchumène n’avaitle texie même du Symbole en sa possession que pendant huit jours, afin qu’ilnbsp;put l’apprendre par coeur, après quoi il était obligé de Ie rendre. 11nbsp;devait élre baptisé pour être initié aux mystères intiraes de la foi; etnbsp;l’on sait quelle était la durée du catéchuménat et l’Age auquel on oc-troyait Ie bapiême dans les temps ordinaires. Enfin, rien n’est plusnbsp;célèbre que la discipline du secret qui étendait un voile impénétrablenbsp;sur une partie de la doctrine. Si quelques Pères, tels que saint Justinnbsp;et Tertullien, exposèrent publiquement les dogmes chrétiens, ils ynbsp;furent forcés par la nécessité de confondre les calomnies des païensnbsp;et de conjurer les horribles tempêtes qui mena^aient l’Église. Ce nenbsp;fut la qu’une exception; puisque nous voyons encore, dans Ie coursnbsp;du IV® siècle, saint Cyrille de Jerusalem, adresser ses catéchèses rays-lagogiques a un auditoire réservé; saint Chrysostome lui-même s’ar-rête souvent au milieu de ses discours, pour ne pas révéler des cho-ses que les initiés seuls devaient connaltre.

De tout cela il résulte que l’enseignement primitif pouvait être facilement oublié ou mal compris. Le danger dont je parie était d’au-lant plus a craindre, que dans le principe l’auditoire se composait denbsp;païens et en majorité d’hommes incultes. Pourtant jamais une instruction forte et solide ne fut plus nécessaire, puisque, d’un jour h l’au-tre, les néophytes pouvaient être appelés a rendre corapte de leur foinbsp;devant les tribunaux et a la soutenir aux dépens même de leur vie.nbsp;Or, la parole figurée suppléait merveilleusement è l’enseignementnbsp;¦vocal ; les images sont le livre des ignorants. On con^oit dès lorsnbsp;combien il était utile, pour ne rien dire de plus, de fixer par des pein-tures les dogmes fondamentaux de la nouvelle religion, ceux que Tonnbsp;pouvait sans inconvénient livrer a la connaissance publique. De ccnbsp;tiombre étaient les principaux traits de l’Ancien et du Nouveau Testament qui avaient un rapport plus marqué avec l’état présent desnbsp;fidèles (i). Nous verrons demain qu’ils forment en effet le fond de

b)... Dei rifleltersi che magior necessita aveano que^ primi fedeti delle sagre pimirc m quelle venerabili groUe ne’ tempi delle persecuzioni, di quello che avessero gli altrinbsp;du’ secoli posteriori; imperciocchè facendo allora ivi capo luUi coloro, che dal genli-iismo passavano alia nostra fede, vi era hisogno di renderli molto ben instruiti, nonnbsp;tanto colla voce, quanto ancofa colle sagre immagini. Boldelti, lib. i, c. v, p. 17.

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166 nbsp;nbsp;nbsp;les TROIS ROME.

l’immense galerie dont sont ornées les voütes et les parois des cha-pelles soulerraines.

Incontestablement utile, l’usage des peintures avait, dit on, de grands dangers, et l’on en conclut que l’Église naissante n’a pas dü Ienbsp;permeltre; conséquemment que les peintures des Calacombes ou nenbsp;sont pas l’ouvrage des ehrétiens, ou sont moins anciennes qu’on ne Ienbsp;prétend. Voyons quels étaient ces dangers? Ils venaient du cólé desnbsp;Juifs OU du cóté des païens.

Les premiers pouvaient être scandalisés en voyant l’Église se mettre en opposition avec la loi de Moïse qui défendait toute sculpture ounbsp;toute peinlure religieuse. Mais TÉglise n’avait rien plus a cceur quenbsp;de montrer qu’elle n’était pas la Synagogue. Est-ce que les Apótresnbsp;n’enseignaient pas dans loutes les assemblées que la loi ancienne, dansnbsp;sa partie cérémonielle, avait cessé pour faire place ii la loi de grace?nbsp;Que signifie la décision du concile de Jérusalem? Que nous appren-nent les Épitres de saint Paul aux Galales et aux Remains ? II suffisaitnbsp;done d’instruire les Juifs pour rassurer leur conscience.

Du cólé des païens; habitués dès 1’enfance a l’adoration des dieux en peinture ou en sculpture, ne pouvaient-ils pas adorer les imagesnbsp;que Ie ehristianisme exposait ii leur vénération? Sans doute ils Ienbsp;pouvaient; peut-être même l’auraient-ils fait si on n’avait pris soin denbsp;fixer leur croyance. Or, cetle croyance était fixée dès l’abord par Ienbsp;premier article du Symbole : Je crois en un seul Dieu. La preuvenbsp;que Ie danger dont on parle était moins grand qu’il ne parait, c’estnbsp;que les païens ont bien pu accuser nos pères d’alhéisme (i); mais jamais ils ne les ont accusés d’idoWlrie.

Cetle réponse, ajoute-t-on, est loin d’être victorieuse, puisque l’É-glise primitive a formellement défendu l’usage des peintures. Je ré-ponds en disant que s’il est une chose déplorable, c’est la facilité avec laquelle l’esprit de secte dénature les faits pour les plier a ses sys-tèmes. On veut parler de l’objection du fameux concile d’Elvire (s),nbsp;dont les iconoclastes anciens et modernes ont fait tant de bruit. Cenbsp;concile remonte ó l’an 305, et défend de peindre sur les murs desnbsp;églises lout sujet de vénération ou d’adoralion (3). II faut observer, ennbsp;premier lieu, que ce décret semble établir lout Ie contraire de ce qu’on

(1) nbsp;nbsp;nbsp;S‘ Jast, Apol. II; Arnob., Legat., lib. i, Conir. Gentes.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Et non pas d’IIlibéris, contime traduisent les savants de TUniversité et les archéo-

logues de rinstitut.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Placuit picluras esse in Ecclesia non debere, ne quod colitur et adoratur, in pa-rietibus depingatur. Conc, Illiber. c. xxxvi.

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CONCILE d’ei-viee expliquè. nbsp;nbsp;nbsp;167

veut prouver ici. Puisque les pères d’Elvire ont cru devoir défendre l’usage des peintures dans les églises, n’est-ce pas un signe qu’il exis-tail? En second lieu, ce concile n’est pas oecuménique; il ne manifestenbsp;done ni l’esprit ni la loi générale de l’Église. Bonne pour I’Espagnenbsp;oü il fut tenu, la prohibition qu’il renferme ne saurait done logique-ment s’appliquer aux églises des autres contrées, et moins encore auxnbsp;Catacombes de Rome. En troisième lieu, les actes de ce concile passentnbsp;pour très-suspects, attendu qu’ils nous ont élé conservés par des héré-tiques et même par des iconoclastes, alors très-nombreux en Espa-gne (i).

Mals, en admettant I'authenticité et l’universalité même de ce concile, voyons quel est Ie sens du canon qui nous occupe, et s’il regarde nos chapelles souterraines. D’abord, il ne défend pas les peintures ennbsp;général, mais seulement celles qui se faisaient sur les murs des églises.nbsp;Sont done exceptées les peintures portatives dont on ornait les verresnbsp;et les autres objets religieux trouvés en si grand norabre dans les Catacombes. Ensuite, il se contente d’interdire la représentation desnbsp;objets dignes d’un culte quelconque; mais il laisse subsister l’usagenbsp;des emblèmes et des figures décoratives qu’on rencontre è chaque pasnbsp;dans les cimeiières chréliens. Enfin, sans recourir è toutes ces explications, non plus qu’è celles de Bellarmin, du cardinal du Perron etnbsp;de Vasquez (2), on arrive au véritable esprit du concile en se reportantnbsp;aux circonslances.

L’Église avail joui d’une assez longue trêve; on avail bati des temples chrétiens dans les différentes parties de l’empire. Mais au moment oü les pères d’Elvire étaient assemblés, une épouvantable tempêtenbsp;mena^ait de fondre sur l’Église ; Dioclétien avait aflicbé son sanglantnbsp;édit aux murs de Nicomédie. Dans la prévision des massacres et desnbsp;sacriléges de tout genre qui allaient épouvanter Ie monde, ils défen-dirent sagement de peindre sur les murs des églises les saintes images,nbsp;3fin de ne pas les exposer è la profanation. 11 élait beaucoup plus surnbsp;d’avoir des peintures portatives sur des tablettes de bois ou d’ivoire.

(OPiace a’ piü gra\i padri della chiesa il lenersi (queslo decrelo) per affato fitlizio, c ^•^voUo fra Ie onesta degli allri d’Elvira per mera iVode degli erelid, a fine di porlarlonbsp;con crediio a sedurre i fideli, e condurli nel deieslabile errore di repulare illidia lanbsp;^Gnerazione delle imagini, E si appoggia lal persuasione sü ben sodo i'ondamanlo, stanienbsp;fossero allora Ie Spagne inondale dagl’ Iconoclasli erelici di si empia senienza, dinbsp;püi è scrito il registro de’ Canoni, che qui andiamo irascrivendo. BatlagHni. Isior.nbsp;^^iversal. di tutti i ConciL, an. 505, p. 58. Edit. Yenez., in fol.

(*) Bellarm., lib. n, c. ix, De Imagin., Du Perron, Actes de la Conférence de Fontai-97,6.; Vasquez, In Sum. D. Thomce, disp, lOo, c. ii.

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LES TROIS ROME.

qui pouvaient toujours, h la moindre apparence de trouble et de danger, s’enlever et se soustraire aux recherches des persécuteurs (i).

« C’est de la, en elïet, ajoute M. Raoul Rochelle, qu’est résulté l’usage des dyptiques, qui s’est continué, comme on sait, ii traversnbsp;tout Ie cours du moyen ftge, comme une tradition de ces temps d’é-preuves, oü les chrétiens, poursuivis d’asile en asile, transportaientnbsp;partout avec eux, en tahleltes de bois peintes ou d’ivoire sculptées,nbsp;les sacrées images du Christ, de la Vierge et des Apötres; et plus tard,nbsp;comme un efifet des persécutions causées par Ie fanatisme des Icono-clastes. C’est encore par une conséquence de ces facheuses nécessilésnbsp;de la primitive Église, que s’est éiabli, dans les temps de la Renaissance, l’usage des tableaux d’autel d volets, qui avaient la forme denbsp;dyptiques, même d’une dimension considérable, tel qu’il s’en voit encore dans tant d’églises d’Italie. La défense du Concile (d’Elvire) étaitnbsp;done teut accidentelle, toute de circonstance; el c’est certainementnbsp;ainsi qu’il faut l’entendre (2). »

Même en lui donnant plus d’autorité et d’étendue, il est certain qu’elle ne s’appliquait nullement aux Catacombes. D’une part, lesnbsp;cryptes souterraines, inconnues des païens, pouvaient, sans grave in-convénient, recevoir des peintures fixes (s); d’autre part, nous voyons,nbsp;postérieurement au Concile d’Elvire, Ie pape saint Célestin faire dé-corer de saintes images les murs de son cimelière (4).

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Celle explication, adoptee par les plus judicieux archéologues, a été formulce ennbsp;ces lermespar Tilluslre BuonaroUi, dont Ie docle BoUari i'ail précéder Ie texte des reflexions suivanlcs :« II senatore Filippo Buonarolti fa una moUa bella osservazione alnbsp;nostro proposilo in occasione di spiegare un dillico del suo museo., adornaio di sacrenbsp;imagini... Crede che tal sorla di ditlici con sacre imagini fosse adoperaia per l'uso slesso,nbsp;per quale si adoperano preseniemente Ie tavole dell’ aUare,sicchè qiiesie sieno a quellinbsp;succedule; e quindi avendo noiato,come l’uso di essi era mol to addaltalo alia necessiia,nbsp;che avevano i primi cristiani, a cagione delle persecuzioni di mulare spesso i luoghinbsp;deslinali per le sacre adunanze, soggiunge, riceverc da questo niolta chiarezza il rifej iionbsp;canone del Goncilio Illiberitano: « Poiche in queslo canone, comc ognuno a considerarlonbsp;tutto insieme puó ravvisare, si prescrive : che le imraagini sacre, venerate ed adoralcnbsp;dai cristiani, non si dipingano stabilmente su i muri dellc chiese, come per alcuni sinbsp;doveva gia fare, a cagione della longa pace geduia da’ fidcli, e ciö per una prudentenbsp;economia addaltaia ai tempi, che correvano aUoradell’ imminente persecuzione di Dio-cleziaiio, onde tornava motto acconció di avere le sacre immagini in piccoli diltici danbsp;potersi in ogni accidenle facilmente levarsi, ed ascondersi. » —Bottari, Sculture e Pit-ture sacre, etc., 1.1, p. 106. —Telle est aussi I’opinion de BattagUni, loc. sup. cit.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Tableau des Catacombes, p. 106.

(5} Cimiieri erano Inoghi per se stessi poco esposti alle persecuzioni e per ciö piü sicuramenle poteeano azzardarsi si crisz tiani di dipingere nelle volte e pareti dellenbsp;cappellelte di essi, quod colitur, aut quod adoratur. Bottari, Sculture, etc., 1.1, p. 106.

(4) S. Ccelestiniis Papa proprium suum coemeterium picturis decoravit. Epist, Adrian., i, ad, Carol. Magn.

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DE LA SCDLPTURE ET DE LA PEINTÜRE SACRÉES. 4Ö9

Reste la consequence qu’on voudrail tirer de l’objection précédente, savoir : que les peintures des Catacombes sont moins anciennes qu’onnbsp;ne Ie prétend, ou qu’elles ne sont pas l’ouvrage des chréliens. Lesnbsp;protestants ont un grand intérêt a nier Tanliquité de ces monuments.nbsp;En effet, s’ils sont authentiques, Ie protestantisme est irrévocablementnbsp;convaincu de fausseté; et cela, d’après ses propres principes, puisqu’ilnbsp;admet rincorruptibilité de l’Église Romaine, au moins pendant lesnbsp;trois premiers siècles. En bonne logique, on pourrait mépriser celtenbsp;conséquence : Ie principe, d’oü elle émane étant démontré faux, ellenbsp;ne peut être vraie. Toutefois, comme la question archéologique dontnbsp;il s’agit acquiert, en devenant religieuse, une importance extréme, onnbsp;nous saura gré d’établir, par des preuves direcles, l’authenticité desnbsp;peintures morales de nos Catacombes.

Dès l’origine, Ie christianisme connut l’usage des statues et des images sacrées : or, les fresques des cimetières remains appartiennentnbsp;a cette haute antiquité. Eusèbe, lémoin oculaire, rapporte que l’hé-inorroïsse miraculeusement guérie fit faire la statue de Notre-Seigneur.nbsp;Voici les remarquables paroles de eet historiën : « Puisque nous parlous de Césarée de Philippe, il n’est pas hors de propos de transmet-tre a la postérité un fait digne de mémoire. La tradition nous apprendnbsp;que la femme guérie d’un flux de sang par notre Sauveur, était origi-naire de celte ville, oü l’on voyait sa maison ornée d’un monumentnbsp;qui rappelaii Ie bienfail du Seigneur. Prés de la porte de Ia maisonnbsp;est une statue d’airain, placée sur un piëdestal en pierre, é genoux etnbsp;les mains étendues, dans l’attitude de la supplication : on dit que c’estnbsp;la statue de cette femme. En regard est la statue d’un homme, denbsp;inême métal, debout, vêtu d’un manteau el étendant la main. On rap-Porte qu’i ses pieds nait une plante inconnue qui, s’élevant jusqu’inbsp;la partie inférieure du manteau, possède la propriété de guérir toutesnbsp;*ories de maladies. On ajoute que cette statue représente Notre-Sei-gneur. Elle a subsisté jusqu’è nos jours, et nous 1’avons \ue de nosnbsp;yeux, en visitant cette ville. Or, il n’esl pas étonnant que les païens,nbsp;ï’econnaissants des bienfaits qu’ils avaient regus de Notre-Seigneur,nbsp;®'cnt élevé de semblables monuments; puisque nous avons vu nous-iiiémes les portraits des apotres Pierre et Paul et de Notre-Seigneurnbsp;Peints sur des tablettes, et conservés jusqu’a nos jours (t). »

haic prse-

(0 Nee vero mirandum est, Gentiles a Servatore nostro beneficiis afiectos ‘gt;luisse, cum el aposlolorum Pelri ctPauIi (:hrislif|ue ipsius pictas imagines ad nostramnbsp;'J«|ue memoriam servatas in tabulis vidcrimus. llist.Eccl., Ub. vu,c. xvni; voyez San-'ai, Ilist.farnil. sacr., c. xvm, p. 2öo-G.

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LES TBOIS ROME.

On dira peut-être que ces images étaient l’ouvrage des païens, et qu’ainsi elles ne prouvent pas l’antiquité des peintures chrétiennes.nbsp;Or, -s’oici un artiste qui appartient certainement ii l’Évangile, et qui anbsp;consacré, sous les yeux raêmes des Apótres, son talent en peinture anbsp;reproduire les traits de l’auguste Mère de Dieu. Que les madones attri-buées aujourd’hui h saint Luc soient des ouvrages originaux, ce n’estnbsp;pas ce dont il s’agit maintenant; mais bien de savoir si rÉvangélistenbsp;a réellement peint la sainte Vierge. D’une voix unanime l’Orient etnbsp;rOccident donnent une réponse affirmative, qui est confirmée, consta-tée, perpétuée par tous les plus anciens monuments. Quels titres a-t-onnbsp;découverts pour venir troubler une possession si ancienne et si univer-se.lle (i)? « II est certain, dit saint Basile, que les images sacrées denbsp;Notre-Seigneur, de la sainte Vierge et des Apótres, peintes dès Ie commencement, ont passé de main en main jusqu’a nous (2). »

L’Eglise elle-raêrae commandait de reproduire des saintes images afin d’éloigner les fidèles du culte des idoles et de les distinguer desnbsp;Juifs (5). Aussi, dès Ie temps de Tertullien, il était d’usage universelnbsp;de teprésenter sur les calices Ie Sauveur, sous la figure du bon Pasteur (4). Ces peintures vénérables et par Ie sujet et par l’óge étaientnbsp;soigneusement conservées corame un livre merveilleux qui racontaitnbsp;l’histoire du divin Maitre et des propagateurs de la religion (s). II estnbsp;done bien établi que l’usage des peintures sacrées remonte, sans interruption, jusqu’ó la naissance du christianisme. Beste ó montrer quenbsp;les fresques des Catacombes appartiennent ó cette haute antiquité.

C’est un fait connu que chaque époque de Tart a son style et son cachet particulier. D’après ce principe, la science fixe journellementnbsp;la date approximative d’un édifice, d’un tableau, d’un manuscrit, ennbsp;examinant les caractères généraux qui les dislinguent. Douteuses peut-être dans un cas particulier, ses appreciations deviennent incontesta-bles, lorsqu’elles ont pour objet un ensemble de monuments, unenbsp;période enlière de l’histoire de la sculpture, de la peinture ou de lanbsp;diplomatique. Or, ce moyen si sur et si simple n’est pas une décou-

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Voyez Lanzi, Histoire de la Peinture; Boldetli, Osservaz., etc., lib. i, c. v, p. 19.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Imagines illorura hoe enim tradilum a SS. Apostolis. Orat. contr. Julian.

(5) Ne decipianiur salvati ob idola; sed pingant ex opposito divinam humanaque manu factam, impermixlam efiigiem Dei veri ac Salvatoris nostri Jesu Christi, ipsiusque ser-vorum contra idola et ludaeos, neque errent in idolis, nee similes sint Judasis. Can.nbsp;Apost.; Conc. Nicmn. ii, act. i; V. Bar., An. 57, nquot; o.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Tcrtul., DePudicit., c. v et x.

(5) nbsp;nbsp;nbsp;Quajsivit Constantinus : Num alicubi essent hislorite illorum {Petri et Pauli)? Moxnbsp;beatus Sylvester per diaconos adferri quas habebat Apostoloruni imagines jussil. —nbsp;S. Adrian. Pap., Epi.it. ad. Carol. Maffn.

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DE LA SCULPTURE ET DE LA PEIN'TURE SACRÉES. 171

verte moderne ou parliculière è la France. II est connu depuis long-lemps, et dans tous les pays Ie monde savant en fait usage. Appliqué aux peintures des Catacombes, il fixe l’origine d’un grand nonibre ènbsp;la naissance même du christianisrae.

En effet, elles présentent les caractères distinctifs de Tart païen tels que l’histoire et les monuments contemporains, les sarcophages et lesnbsp;fresques nous Ie font connaitre. Plus correcles au commencement denbsp;l’ère chrétienne, alors que la peinture florissait encore dans la villenbsp;des Césars, on les voit s’altérer peu i peu, et suivant la décadence denbsp;Part, finir par n’être que des ébauches plus ou moins imparfaites, anbsp;l’époque de Constantin et de ses premiers successeurs. « Dans cettenbsp;variété de peintures, dit Ie savant et judicieux Boldetti, il est très-facilenbsp;de distinguer par la différence de style la différence des époques. » Onnbsp;voit que les plus belles appartiennent presque toutes aux temps lesnbsp;plus anciens, paree qu’alors la peinture et la sculpture n’avaient pointnbsp;encore dégénéré. Or, l’artiste chrétien imitait ce qui se faisait.

Au contraire, celles qui sont plus mal dessinées accusent les öges suivants, Üges de décadence non-seulement pour la peinture, maisnbsp;pour tous les arts en général. Néanmoins, je ne veux pas dire que cesnbsp;dernières sont toutes poslérieures aux persécutions. En effet, bien quenbsp;dans les premiers siècles la peinture et la sculpture fussent cultivéesnbsp;avec succès, nous sommes plus que certains qu’elles n’atteignaient pasnbsp;toujours la perfection sous Ie pinceau ou Ie ciseau de tous les artistes.nbsp;Les ceuvres de ce genre devaient êlre encore moins parfaites dans lesnbsp;Catacombes, paree que la pauvreté des fidèles ne leur permettait pasnbsp;de choisir les meilleurs artistes; que dis-je? paree que ne pouvant senbsp;servir des païens pour faire leurs peintures sacrées, il est très-vraisem-Ijlable que la plupart de ceux qui les exécutèrent, étaient beaucoupnbsp;plus habiles dans la science de la vertu que dans 1’art du dessin.

C’est une preuve évidente qu’au moins les meilleures peintures des Catacombes remontent aux temps apostoliques. En effet, dans les sièclesnbsp;postérieurs aux persécutions, alors que l’Église jouissait de la paix etnbsp;de la liberté, les Papes, les empereurs, les fidèles, malgré tout leurnbsp;empresseraent k choisir les plus habiles artistes pour décorer les Basi-'iques, n’ont pu faire mieux; que dis-je? ils ont fait beaucoup plusnbsp;’laai que ce que nous voyons dans les Catacombes. Or, esl-il vraisem-olable que pour orner des édifices publics et majestueux, ils ont employé les peintres les plus ignorants et les plus inexpérimentés; tandisnbsp;ilu’ils ont réservé les meilleurs artistes pour décorer des lieux cachésnbsp;ot des cryptes souterraines, en sorte que les bonnes peintures des Cata-

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172 LES TROIS ROME.

combes soient de la mêrae époque que les grossières ébauches de leurs Basiliqucs (i)?

L’étude comparative qui determine l’dge de nos peintures chré-tiennes se continue encore de nos jours; et, malgré les injures des temps, elle retrouve les caractères distinctifs des différentes époques.nbsp;Ainsi, pour n’en citer que deux exemples, Ie père Marchi assigne sansnbsp;contestation Ie commencement du iii® siècle pour origine a Tune desnbsp;plus belles cryptes de la Catacombe de Sainte-Agnès (%). En outre,nbsp;les plus habiles archéologues remains font remonter aux dernières an-nées du n® siècle la plupart des peintures du inême cimetière (5).

II est un autre caractère plus signifieatif peut-être, auquel on recon-nait la haute antiquité des peintures des Catacombes. Je veux parler du mélange du christianisme avec Ie paganismei Le sujet principal estnbsp;pris dans l’Ancien et le Nouveau Testament; tandis que la partie dé-corative emprunte généralement ses motifs et sa distribution généralenbsp;è Tart païen. Dans ce fait constamment reproduit on voit deux socié-tés qui existent ensemble; Tune, qui vient de naitre et qui Ure de sesnbsp;croyances le fond du tableau; l’autre, plus avancée, qui fournit lanbsp;forme et Tencadrement. La première, irop jeune encore pour avoirnbsp;une langue è soi, emprunte a la seconde, pour rendre des penséesnbsp;nouvelles, des emblèmes consacrés par l’usage, tout en leur donnantnbsp;une signification différente. La seconde prête ses types et ses décora-tions jusqu’a ce que Tart chrétien ait formé sa langue figurée, etnbsp;puisse se sufüre a lui-même.

Or, è quelle époque remonte ce mélange et pour ainsi dire cette union intime du paganisme et du christianisme, dont les peinturesnbsp;des Catacombes sont Tirrécusable témoignage? N’est-ce pas aux tempsnbsp;apostoliques, et Ji 1’ère des persécutions? Peut-on désirer une preuvenbsp;plus sensible de la haute antiquité des vénérables monuments quinbsp;nous occupent?

« Cette preuve, dit M. Raoul Rochette, devient, en quelque sorte, palpable a mesure qu’on se livre ii l’examen détaillé de ces peintures,nbsp;en commengant par celles du cimetière de Saint-Callixte, qui sont les

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Boldetti, lib. i, c. v, p. 17.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;P. 185.

(5) Le dipinture dei cubicoli iudicati nella iconografia generaledel cimilero di S. Agnesc scavali tutti un grandissima vicinanza della nostra chiesa, a giudizlo d’uomini che pro-léssando 1’arte del dipingere si sono nell’ abbondanza degli anlichi monumenli di Romanbsp;osercitati a distinguere coniparaüvamente li opere dell’ arte nella serie degli antichinbsp;secoli, giudicano che piü probabilmente agli uUimi anni del seconde secolocheai priminbsp;del lerzo queste dipinture rimontino. — Marchi, p. 184.

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AGE DES PEINTÜRES DES CATACOMBES. 475

plus anciennes dans l’ordre chronologique, et qui représentent aussi la portion la plus considérable de ce genre de monuments chrétiens.nbsp;L’exécution en est généralement plus soignée ou moins défectueuse,nbsp;l’ordonnance plus riche et plus variée, ce qui vient évidemment de cenbsp;qu’ellestouchent de plus prés a l’anliquité. Elles offrent aussi, danslesnbsp;éléments même de décoralion dont elles se composent, plus de sym-boles puisés directement dans les données antiques, et jusqu’a desnbsp;sujets purement profanes, bien qu’appropriés une institution chré-tienne : ce qui devient une nouvelle preuve de la plus haute antiquiténbsp;relative des peinlures de ce cimetière.

» Pour celles des autres cimetières, ^ mesure que rimperfection du travail y accuse de plus en plus Ie progrès de la décadence, les reminiscences antiques y deviennent aussi de plus en plus rares, et lesnbsp;sujets chrétiens s’y montrent exclusivement. II y a done, dans ces pein-tures des Catacombes, un double sujet d’observations et d’éludesnbsp;pour l’antiquaire chrélien. On y voit expirer par degré Part antiquenbsp;entre les mains chrétiennes; et l’on y voit en même temps apparaitrenbsp;les premières ébauches de ces types célestes, auxquels Part de la renaissance sut donner Ie mouvement et la couleur (i). »

Nous Ie demandons de nouveau, comment expliquer eet élrange phénomène d’une religion qui emprunle ses ornements, ses motifs denbsp;décoralion, son art a une rivale dont elle combat avec énergie lesnbsp;idéés, les mueurs et les croyances? N’est-ce pas évidemment que lesnbsp;chrétiens, ayant a rendre leurs idéés en peinture, ne pouvaient se dispenser de recourir aux types créés par Ie paganisme, pour exprimernbsp;des idéés analogues; etqu’il n’élait pas plus en leur pouvoir d’inven-ter une langue imitative qu’un idiome différent du grec et du latin?

seul changement qu’ils pouvaient faire ii des images figurées, in-Oocenles en elles-mêmes, c’était d’y supprimer ou d’y ajouler quel-'l'ies motifs, pour les faire cadrer avec leurs croyances; de même 'll! en se servant de la langue usuelle dont ils acceptaient Ie vocabulaire eniier, ils se contentaient de donner a quelques mots des accep-^ions nou velles (2).

Mais i» quelle époque Ie christianisme se trouva-t-il réduit è cetle ®*trémiié, d’être privé d’une langue, d’une peinture, d’un art è lui?

®st-ce pas évidemment aux premiers jours de son enfance? Les mo-¦auments des Catacombes oü Pon retrouve tant de vestiges du paga-^^'sroe, sont done contemporains de la naissance même de PÉglise. 11 !lt;) Tttbl. des Cat., p. 102.

(®) M. Raoul Rochelle, Tabl. des Catacombes, p. 98.

T. IV. nbsp;nbsp;nbsp;8

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174

LES TROIS ROME.

serail superflu d’insister davantage sur ce caraclère d’antiqnité, dont nos prochüines visites rendront la signification encore plus évidente.nbsp;II est temps de quitter la Voie Appienne.

Comme Ie voyageur qui parcourt aujourd’hui les champs de bataille de Marengo, d’Austerlitz on de Wagrara, contemple avec avidité tonsnbsp;les accidents de terrain oü s’accomplit quelque brillant épisode de cesnbsp;gigantesques combats; comme il salue avec enthousiasme Ie guerriernbsp;dont ils racontent la gloire ; ainsi, pèlerins sur Ie plus illustre théétrenbsp;des grandes batailles du christianisme, saluons, avant de lui direnbsp;adieu, rimmortelle Voie Appienne : aux noms déja connus ajoutons,nbsp;avec un noble orgueil, celui d’autres athlèies qui Tont rendue a jamaisnbsp;célèbre.

Sur ce champ d’honneur tombèrent en un jour quatre mille martyrs. Dans la personne d’Adrien, Ie paganisme, vaincu par leur courage,nbsp;est obligé de céder Ie terrain et de remettre dans Ie fourreau sonnbsp;glaive émoussé. Aiguisé de nouveau, ce glaive brille aux mains du terrible Valérien; il tombe et retombe encore, pour se briser sur Ie counbsp;d’une jeune vierge, nommée Lucille. Au lieu du glaive, voici Dioclé-tien qui s’arme de la bacbe. Trente vétérans de son armée re^oiventnbsp;les premiers coups et marquenl la place oü d’innombrables succes-seurs viehdront arracher, au plus redoutable persécuteur de l’Église,nbsp;la victoire si cruellement et si longtemps disputée. Enfin lorsque Ienbsp;paganisme expirant voudra rendra son dernier combat. Ia Voie Appienne verra les illustres martyrs Sempronius et Aurélien forcer Ju-lien, l’apostat couronné, a commencer Ie mot fatal qu’il achèveranbsp;bieniót dans les plaines de Ia Perse : « Tu as vaincu, Galiléen (i)! »nbsp;Salut done, reine des Voies! chemin el mausolée de tous les triompha-teurs. Salut, toi qui par un noble privilége fus eboisie de Dieu pournbsp;redire éternellement Ia vanité des héros de la vieille Rome, et l’impé-rissable gloire des vainqueurs de la Rome chréiienne!

15 JANVIER.

Catacombes de la Voie Latine.—Catacombe d’Apronien. — Hisloire.—Sainte-Eugénie.

— Peintures des Catacombes, parlie liistorique. — Adam et Ève. — Caïn et Abel.—

Noé. — Explication d’un anneau. — Catacombe des Sainls-Gordien et Epiraaque.—

Histoire.

La foule pieuse se portail a Saint-Barthélemy-en l’Ile. On célébrait, dans l’église de Benfratelli, la fête de saint Jean Calybite. Après avoir

(t) Aringlii, lib. ni, c. xxt, p- 289.

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CATACOMBES DE LA VOIE LATINE. 175

vénéré Ie corps de ce grand martyr de Thumilité, nous revinmes sur nos pas, afin de visiter les Catacombes de la voie Latine, célèbres parnbsp;les combats des martyrs de la foi. Entre les anciennes portes Capenanbsp;el Ceelimonlana, appelées aujourd’hui portes Saint-Sébasticn et Saint-Jean, se trouvent, sur Ie versant du Coelius, la porte Latine et la voienbsp;du même nom. Aux temps des Césars la Voie Latine rivalisait de célé-brité avec la Voie Valérienne et la Voie Appienne (i). Entre deuxnbsp;lignes de superbes tombeaux, elle conduisait au pays des Latins.

Aujourd’hui encore on trouve dans les vignes qui la bordent les vastes colombaires des affranchis de Pomponius Hylas et de la familienbsp;d’Auguste; mais Ie temple de la Fortune Féminine, devanl lequelnbsp;Vélurie arrêla son fils Coriolan, a disparu sous ses propres mines. IInbsp;en est de même de la superbe villa de Phyllis, nourrice de Domitien,nbsp;dans laquelle cette femme eourageuse donna la sépullure a I’indignenbsp;empereur. Protégés par la richesse et par la gloire, ces édiliccs ontnbsp;péri; tandis que I’oratoire qui marque la place oii le disciple bien-aimé fut plongé dans Fhuile bouillante, survit aux révolulions hu-maines el aux ravages du temps. Non loin de la porie Latine, aujourd’hui fermée, se trouve dans la campagne la Catacombe d’Apronien.

D’oii lui vient ce nom si glorieux dans les fastes consulaires de I’an-cienne Rome? L’histoire ne donne que des reponses incertaines..Elle a bien inscrit dans ses annales le nom d’un martyr, membre de cettenbsp;noble familie; mais elle apprend qu’il fut couronné sur Ia Voie Solaria, sans ajouter qu’il ait illustré par sa sépullure le cimetière de lanbsp;Voie Latine (2). II est plus vraisemblable que cette familie qui eut lantnbsp;de sang amp; verser pour la République, en eut encore è donner pournbsp;1’Évangile, et que le marlyre ou la charilé de quelqu’un de ses en-fants aura immorlalisé son nom en Paltachant ü la Catacombe quinbsp;nous occupe. II faut que la mort, ou la verlu de cet Apronien ail élénbsp;^ien célèbre, pour que son nom n’ait pas élé effacé par celui de lanbsp;jeune héroïne, dont la sépullure répandil tanl d’éclat sur ce quarliernbsp;la Rome souierraine.

Le 25 décemhre de Fan 262, paraissait devant le tribunal de Nicé-*''us, préfet de Rome, une jeune vierge noramée Eugénie, fille de Phi-Lppe, préfet impérial en Egypte (a). Convaincue d’être ehrétienne et

lO Praeclarissimai sunt Via; Appia, Latina, Valeria. — Strab. lib. y.

(*) Le S. martyr Apronien était commenlariensis, c’est-a-dire, intendant des prisons e Rome, sous Dioclétien. — Bar., Annot. ad Martyr., 2 febr. el 23 mart.nbsp;ƒ5) Filia Pbilippi, pratfecti augustalis in AEgypto. — Bar., An. 188, n” ö; et dn. 202,

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176 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

tl’avoir cxhorté un grand nombre de ses compagnes a la virginité, elle est condamnée i de longues tortures. Quand la rage des bourreaux estnbsp;cpuisée, quand la vieille Rome est lasse de battre des mains, Ie glaivenbsp;du confecteur vient trancher Ie dernier lil de vie qui reste amp; la jeunenbsp;victime; et comme l’oiseau échappé du filet de l’oiseleur, son ftmenbsp;victorieuse prend son essor vers Ie ciel. Claudia, sa mère, vient enle-ver Ie corps de sa fille, et Ie dépose dans un de ses jardins sur la Voienbsp;Latine, au lieu même oü Eugénie avait enseveli de ses mains virginalesnbsp;un grand nombre de martyrs (i).

Cette mère ne pouvait s’éloigner du tombeau qui renfermait son Irésor. Un jour qu’elle y répandait ses prières et ses larmes, Eugénienbsp;lui apparut et lui dit: « Réjouissez-vous, ó ma mère! Ie Seigneur m’anbsp;introduite dans les délices du ciel; vous-même vous y viendrez diman-cbe prochain. Recommandez a mes deux frères Avitus et Sergius denbsp;garder fidèlement Ie signe de la croix, par lequel ils deviendront participants de notre bonheur. » L’événement vérifia la prediction. Claudia mourut, et ses deux fils, devenus apótres de la foi, reposèrent au-près dejeur mère et de leur soeur, dans la Catacombe d’Apronien.nbsp;Les corps de sainte Eugénie et de sainte Claudia enrichissent aujour-d’hul l’Église des saints Apótres (2).

Ici, comme dans les autres cimetières, les chrétiens avaient des-siné de saintes images ; par malheur la basilique de Sainte-Eugénie, restaurée par les papes Jean VII et saint Léon III, n’existe plus. Néan-moins Ie souvenir du vénérable sanctuaire nous fit rentrer sans effortnbsp;dans Ie sujet dont nous avions commencé hier l’intéressante étude.

Outre leur physionomie générale, qui est un mélange de l’idée cbréiienne et de la forme païenne, les peintures des Catacombes pré-sentent deux parties bien distinctes : Ie fond et Uencadrement ou Ienbsp;sujet et Uornementation. Exclusivement chrétiens, les sujets pris ennbsp;eux-mémes, et dans I’intenlion de Fartiste, forment tous ensemble unenbsp;vaste galerie, ou les faits culminants de Fhistoire religieuse de l’hu-maniié, depuis la creation du monde jusqu’a Féternité, sont exposésnbsp;ó la méditation du spectateur. C’est, k nos yeux, Ie plus beau livrenbsp;d’instruction et de prières qu’on put présenter aux néophytes; commenbsp;aussi Ie plus propre a leur inspirer les sentiments convenables a lanbsp;triste position dans laquelle ils se trouvaient. Passous en revue quel-qucs-uns des tableaux de ce musée tant de fois vénérable.

(i) Non longe ab urbo, in Via quae Lalina appcllatur, in prsedioejus proprio, ubi mul-loi um ipsa sepclicrat membra. Act. ilfS. Cod. S. Petri; S. Marim ad Martyr.; S. Coscil.

(4) Act. MS. Cod. S. Petri; S. Marix ad Martyr.; S. Cxcil.; Aringhi, lib. iv, c. n; Mazzol., 1. V, p. 29t.

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ADAM ET EVE. 177

Dans une crypte des Calacombes de Sainle-Agnès, sent peints nns premiers parents au moment de leur désobéissance. Entre Adam etnbsp;Ève s’élève l’arbre défendu dont Ie serpent entoure la tige. Le démonnbsp;regarde la femme, qui étend la main pour cueillir le fruit, en mangernbsp;et le présenter è son mari. Une autre peinture du mème cimetièrenbsp;représente Adam et Ève après leur faule et cherchant a cacber leurnbsp;nudité. Le méme sujet revient très-souvent dans toutes les autres Ca-tacombes. On en congoit la raison ; le dogme du pécbé originel est lanbsp;base de la réderaplion, et par conséquent de lout le cbristianisme.nbsp;Évidemment le premier soin de l’Église devait être de bien inslruirenbsp;les fidèles de cette vérilé fondamenlale, altérée par les païens de l’O-rient et de 1’Occident.

Ajoutons que la faute primitive ne servait pas seulement a fixer la croyance de l’esprit; elle faisait encore naitre dans le coeur des premiers chrétiens les dispositions les plus propres a les soulenir parrainbsp;leurs épreuves. L’irrévocable sentence de mort, gravée par le doigtnbsp;de Dieu sur le front d’Adam et de toule sa postérité; la malice dunbsp;démon; la miséricorde de Dieu manifestée jusque dans le cbfttimentnbsp;des coupables; la promesse d’un Rédempteur; la certitude d’une ré-paration universelle qui rendrait h l’bumanité plus qu’elle n’avaitnbsp;perdu; enfin la résurrection future : voili les grandes lemons qui sor-tent du dogme de la chute originelle. De la découlent, comme consé-quences pratiques, le mépris de la mort et le courage du marlyre; lanbsp;fuite des occasions dangereuses, la confiance dans la nouvelle Ève etnbsp;le désir sérieux d’échanger les peines de la vie présente contre lesnbsp;joies de Téternilé.

Une explication verbale était nécessaire pour animer le tableau el faire jaillir lous ces enseignements, que fécondait ensuile la médita-tion. Or, les prêtres, les évêques, les Pères de l’Église devenaient lesnbsp;Cicerones éloquents du rausée souterrain. Quand on lit les Commen-taires magnifiques de Tertullien et des autres Pères de 1’Eglise sur cesnbsp;Peintures figuralives, on n’a pas de peine a conccvoir la science pro-fonde et l’énergique vertu des premiers fidèles, lecteurs assidus dunbsp;grand livre des Calacombes (t).

A la chute originelle, qui introduisit dans le monde la division et la mort, succède l’image du dualisme fatal qui en résulta parmi lesnbsp;hommes. Gain et Abel, l’un pervers et l’autre innocent; 1’un meurtrier

1 aulre viclime; l’un maudit et malheureux dans sa vie et dans sa (*) TeriuI., De Resurrect, car., c. xlvui: S. Aug., In I’s. xl; ld., De Symb., lib. m,nbsp;‘V, etc.

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LES TROIS ROME.

mort, l’autre glorifié dans réternité, donnent naissance è deux races distincles qui se perpétuent ó travers tous les siècles avec les caractè-res propres de leurs pères. L’origine de ce double fait se trouve rap-pelée dans un grand nombre de cryptes par Ie sacrifice d’Abel et denbsp;Caïn. Je citerai en particulier deux sarcophages des Catacombes denbsp;Saint-Callixte et de Sainte-Agnès.

Sur Ie premier, on voit Caïn tenant une grosse grappe de raisin, suivi d’Abel portant sur ses bras un jeune agneau. Caïn, livré auxnbsp;rudes travaux de l’agriculture, est amp; moitié vêtu; Abel, adonné auxnbsp;occupations plus douces de la vie pastorale, porte une tunique qui luinbsp;descend ii mi-jambes. Sous la figure d’un vénérable vieillard, assisnbsp;sur un tróne, Dieu bénit Ie sacrifice d’Abel et délourne les yeux denbsp;celui de Caïn (i). Pour rappeler l’époque de eet événement mémora-ble, on voit i» demi caches derrière Ie tróne divin Adam et Ève, lesnbsp;deux seuls êtres huraains qui fussent alors sur la terre.

A tous ces détails, Ie sarcophage de Sainte-Agnès en ajoute un autre: les pieds du Père Éternel reposent sur un escabeau, appelé suppeda-neum ou scabcllum. Ce meuble de luxe, réservé aux grands person-nages, désigne ici la haute majeslé du Ïout-Puissant. Nous voyonsnbsp;saint Jéróme conseiller a Euslochium de ne jamais s’en servir en public, et cela par humilité (2).

Commencée par Ie tableau d’Adam et d’Ève, l’instruction dogmati-que et morale des néophytes se continuait a l’inspection du sacrifice de Caïn et d’Abel. Quelle riebesse d’enseignements leurs maitres sa-vaient tirer de cette peinture éloquente! Les catéchumènes et les nou-veaux chrétiens voyaient de leurs yeux l’origine et Ie caractère denbsp;cette société païenne qui les persécutait a outrance, qui les dévouaitnbsp;¦a la mort, bien qu’ils fussent innocents; ils voyaient aussi la pureténbsp;de eoeur, la foi vive, l’innocence avec laquelle ils devaient, eux reje-tons d’Abel, faire Ie sacrifice de leur vie, de leurs biens, de leurs affections ; puis dans Ie lointain ils voyaient briller la récompense denbsp;leur générosilé et de leurs terribles épreuves; enfin, pour les encou-rager, on leur montrait dans Abel la personne même de l’auteur etnbsp;du consommateur de la foi, innocente victirae immolée pour Ie salutnbsp;du monde (3).

(!) Kespexit Domiiius ad Abel et ad manera ejus; ad Cain vero el ad munera illius non respexit. Oen., c. iv, i.

{2) Quando in conventum fratrum veneris, vel sororum, humilis sedeas; scabello te censeris indignam. Epist. 22, ad Eustoch.

(3) D. Ambr., De Paradis., c. ii; Tertul., S. Cypr., De Bono Patient., etc.

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?iOÉ. nbsp;nbsp;nbsp;179

Les fortes pensées et les nobles sentiments inspirés par les deux premiers tableaux s’agrandissaient avec Ie troisième sujet de l’élo-quente galerie. Noé sauvé du déluge était un symbole trop diaphanenbsp;de l’Église naissante, battue par les orages des persécutions, pour iienbsp;pas faire une impression aussi vive que consolante sur l’esprit desnbsp;premiers chrétiens. Aussi l’histoire du patriarche se reproduit souvent dans les nombreux cuhicula des Catacombes.

Au cimetière de Sainte-Priscille, un monumentum arcuatum présente, dans un compartiment de la voute absidale, Noé è moilié hors de l’arche, et tendant les mains la colombe qui se dirige vers lui,nbsp;un rameau d’olivier dans Ie bec. La figure de l’arche est fort remar-quable : au lieu d’être oblongue comme celle d’un vaisseau, elle estnbsp;carrée. On pourrait voir ici la fantaisie ou l’ignorance d’un artistenbsp;inexpérimenté, si Ie navire miraculeux n’avait la mêrae forme dans lanbsp;plupart des peintures et même des sculptures souterraines. Outre Ienbsp;monument qui nous occupe, je me contenterai de citer Ie beau sarco-phage du cimetière de Saint-Callixte, expliqué par Bottari (i).

Pourquoi Part primitif avait-il adopté ce type invraisemblable? Conduit par cette inspiration mystérieuse qui Paccompagne toujours,nbsp;il a vu dans Parche de Noé la figure de PÉglise; mais dans la réaliténbsp;il a vu quelque chose de plus que dans la figure : je veux dire Péter-nelle stabilité de PÉglise. Voila pourquoi il a reproduit Ie navire quinbsp;en est Pemblèrae sous une forme carrée, paree que Ie carré demeurenbsp;toujours ferme sur quelque c6té qu’il tombe (a).

Or, quelle foule d’lmpressions devaient éprouver les neophytes lors-que, Poeil fixé sur Parche, ils entendaient leurs vénérables interprèles disant: « L’arche est, sans contredit, la figure de la Cité de Dicu,nbsp;c’est-è-dlre de PÉglise, voyageuse en ce monde, et qui est sauvée parnbsp;Je bois auquel est suspendu Ie Médiateur de Dieu et des hommes, Ienbsp;Christ Jésus. L’épouvantable cataclysme qui Pagite vous annonce lesnbsp;affreuses persécutions qui nous pressent. Dans Ie patriarche qui gou-Verne Parche et y maintient Pordre et la vie, vous devez voir Ie Seigneur, véritable Noé, dirigeant PÉglise, qui aidée de la gn\ce s’élèvonbsp;de plus en plus vers Ie ciel, a mesure que les grandes eaux des persécutions deviennent plus abondantes. Si nul ne fut sauvé du déluge quenbsp;Noé et sa familie renfermée dans Parche, c’est pour vous apprendrenbsp;•lue hors de PÉglise il n’y a de salut pour personne. Quant a la porte

(0 T. 111, p. 183.

(*) Quadralum enim, quacumque verleris, firiniter slat. S. Aug., Contr. Faust.,

‘‘O- Xll, C. XIV.

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180 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

latérale praliquée dans l’arche, elle vous indique la plaie faite au cólé du Rédempteur. C’est la porie de TÉglise qui est son corps, puisquenbsp;de cette ouverture découlent les sacrenienls qui nous unissent è lui.

Si après Ie déluge, qui fut Ie baptême de l’ancien monde, vous voyez la colombe venir auprès de Noé, un rameau d’olivier dans Ienbsp;bec; cette messagère de la paix vous annonce qu’après Ie baptême quinbsp;a effacé vos iniquilés, la paix est faite entre vous et Dieu. Le délugenbsp;passé, Noé, chef d’un nouveau monde sauvé dans l’arche qu’il a fabri-quée lui-raême, malgré les railleries des méchants, descend sur lanbsp;terre, dont il est mis en possession avec sa familie, sans crainte d’unnbsp;nouveau cataclysme : voyez, dans toules ces circonstances, le Seigneur,nbsp;chef d’un nouveau peuple sauvé dans l’Église qu’il a établie malgrénbsp;les persécutions, et qui, k la fin des temps, lorsque toutes les épreuvesnbsp;seront passées, entrera dans le ciel dont il prendra possession avec sanbsp;familie pour toute l’éternité (i).

La scène du déluge, ce type tout è la fois si majestueux et si frappant de rÉglise dans son état présent et futur. Tart chrétien l’avait multiplié sous les yeux des fidèles. On le trouve non-seuleraent dansnbsp;les peintures el les sculptures des Calacombes; mais encore sur lesnbsp;anneaux et sur les objets d’un usage ordinaire. Je citerai en particulier la belle pierre annulaire publiée par Aringhi, paree qu’elle compléte les idéés énoncées plus haut, en réunissant dans le même sujetnbsp;l’arche de Noé et l’Église.

Cette pierre est un onyx d’une grande beauté, mais d’une dimension de quelques lignes seulement. Au milieu, on voit une barque vio-lemment agitée par les flots; les rameurs, placés sur l’avant et sur l’arrière, lultent avec énergie; une gracieuse colombe repose sur lanbsp;poupe et regarde tranquillement la manoeuvre. Du milieu du pontnbsp;s’élance un seul mét poriant au sommet une petite barque sur laquellenbsp;est perchée une autre colombe. A quelques pas de la proue, Pierrenbsp;marche sur les flots et tend la main au Sauveur debout et majestueuse-ment immobile sur les ondes agilées. Au-dessus de la lête de saintnbsp;Pierre et de Notre-Seigneur, on lit ces initiales grecque et latine ;nbsp;PET. IHC. Petrus, Jesus. Enfin, sous la qtiille du vaisseau, on voitnbsp;un monstre raarin, la gueule béanie, et dont la position exprime lanbsp;douleur et la rage.

Nul doute que ce navire ne soit l’Église; la mer agitée le monde, el surtout le monde pendant les persécutions primitives; les rameurs

(t) S. Aug., De Civit. Dei, lib. xv, c. vi; S. Cypr., Epist. ad Pomp.; id. Contra Xcval.; Tertull., lib. de Baptism.; S. Justin, CoUoq. cum Triph. Jud. circ.finem.

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NOÉ. 181

les Ap6tres; la colombe, tranquillement perchée sur la poupe, Ie Sainl-Esprit, véritable pilote de l’Église; la petite barque placée au sommet du grand in:\t, l’arche de Noé, figure de l’Église; Ie müt unique pournbsp;les deux navires, Jésus-Christ qui, élant aux siècles des siècles, sou-tient l’Église depuis Ie commencement du monde; la colombe placéenbsp;en observation sur la petite barque, la colombe de Noé, emblème dunbsp;Saint-Esprit. Saint Pierre quittant sa barque au plus fort de la tcm-pête et venant trouver Notre-Seigneur, c’est bien l’Église elle-mèmenbsp;revenant au divinMaitre parl’ardeur de ses supplications, alors qu’ellenbsp;se voit assaillie par des ennemis plus redoutables et plus nombreux.nbsp;Enfin, que voir dans ce monstre.marin gisant sous Ie navire? sinon Ienbsp;terrible Léviathan de l’Écriture, Ie démon, qui excite toules les tem-pêtes et qui cherche a faire sombrer Ie vaisseau de l’Église. Mais sanbsp;position même indique l’impuissance de ses efforts et la fureur dunbsp;désespoir (t). Nous Ie demandons ; est-il un livre plus intelligible,nbsp;plus complet, plus éloquent que cetle simple gravure?

En bénissant Part chrélien si fidéle a sa mission, nous nous diri-geftmes vers les Calacorabes des Saints-Gordien et Epimaque. Pendant la perséculion de Julien l’apostat, Rome comptait au nombre de sesnbsp;jurisconsultes, un magistrat nommé Gordien. Fort attaché au paganisme, il entreprit de Ie défendre dans une dispute avec un prêtrenbsp;nommé Januarius. Gordien fut vaincu, et, conséquent avec lui-même,nbsp;il embrassa courageusement la vérité qui venait de luire a ses yeux;nbsp;cinquante-trois personnes de sa maison imilèrent son exeraple. Bienlótnbsp;il lui fallut signer sa foi comme on la signait alors, avec du sang, et ilnbsp;la signa.

Alors Rome put voir un de ses plus graves citoyens garrollé comme Un vil malfaiteur, meurtri et déchiré avec des lanières garnies denbsp;Plomb, puis, attaché a la colonne d’ignominie, recevoir tranquillement

Coup de hache qui lui abatlit la tête. Chose utile a médiler! ces uruautés, dignes de Néron, élaient ordonnées par Apronien, préfet denbsp;Ifonae, issu de l’illustre familie dont un des membres avail, par sounbsp;uiartyre ou par sa charilé, donné son nom i la Catacombe que nousnbsp;'enions de quitter. Pendant la nuit du 10 mai de l’an 362, les chré-Gens enlevèrent Ie corps du saint martyr et Ie déposèrent dans Ie ci-Utetière de Saint-Epimaque. Alexandrie d’Égypte avait été Ie thééirenbsp;combats de ce nouvel athlète. Mais dans sa jalousie maternelle,nbsp;ome avait voulu posséder Ie corps de son noble enfant, et Pilluslre

V, c. IX, p. 244.

t') Iloina subterr., lib.

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182 LES TROIS ROME.

léir.oin de la foi dans les regions loinlaines, venait de prendre place dans la grande cilé des martyrs, lorsque Gordien parlagea sa demeurenbsp;et la gloire de lui donner son nom (i).

Aux gloires de cetle Catacombe, dont l’origine est incertaine, il faut ajouter, suivant l’opinion bien élablie de Bosio, les illustres martyrsnbsp;Sempronius, Olympius, Exupérie et Théodulus, que Ie pape saintnbsp;Etienne, accompagné de son clergé et de nombreux fidèles, y déposanbsp;lui-même, pendant la nuit, a la lueur des flambeaux, au milieu desnbsp;chants et de la pompe que pouvail perraettre l’horrible persécution denbsp;Valérien (2).

On peut aussi nommer Ie glorieux.athlete de la foi, saint Némésius, qui re^ut des mains du même pontife une sépulture honorable dansnbsp;ce même cimetière sur lequel il avait regu la palme de la victoire. Plusnbsp;tard sou corps, ainsi que celui de sainte Lucille, sa fille, furent trans-portés, avec ceux des autres martyrs nommés plus haut, dans l’églisenbsp;de Sainte-Marie-la-Neuve, a l’extrémité du Forum. Ils y reposent au-jourd’hui, et Ie pèlerin qui vient les vénérer peut voir l’éternelle fé-condité de l’Église catholique qui, dans Ie même temple, réunit auxnbsp;martyrs des premiers êges les enfants non moins glorieux de sa vieil-lesse. Nous savons déja que Sainte-Marie-la-Neuve possède Ie corps denbsp;sainte Fran^oise Romaine, l’honneur de son sexe, la gloire de son sièclenbsp;et l'orgueil de la Ville éternelle.

17 JANVIER.

Catacombes de Ia Voic Latine (suite). — Catacombe des Saints-Simplicius et Servilien.

— nbsp;nbsp;nbsp;Histoire. — Peintures des Catacombes, partie historique. — Abraham. — Absencenbsp;de crucifix dans les Catacombes. — Difierentes espèces de croix. — Joseph. — Moïse.

— nbsp;nbsp;nbsp;Quatre circonstances de sa vie, souvent représentées. — Pharaon. — Arclie d’al-liance. — Samson. — David. — Élie. — Catacombe de Sainl-Terlullien. — Histoire.

En corrompant les pères du genre humain, Ie démon inocula son cruel venin a toute leur poslérité. Vainqueur du roi de l’univers, ilnbsp;acquit aussi une influence fatale sur les créatures soumises è son empire. Tous les peuples furent persuadés de ce dogme aussi terriblenbsp;qu’il est incontestable. De la, dans tons les lieux éclairés par Ie soleil,nbsp;des sacrifices, des expiations, des conjurations, des purifications, afin

(1) Bar., Annot. ad Martyr., 10 mai; Bosio, Roma subtetr., lib. tv, c. 111.

(ï) Eadem neinpe nocte adveniens S. Stephanus Episcopus cum clericis, et religiosis viris, hymnis ex more redditis, eorum corpora, hoe est sanctorum Sempronii et socio-rum, abstulerunt et sepelierunt juxta Viam Latinam, milUario primo. Ms. Cod. Val.

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CATACOMBE DES SAINTS-SIMPLICIUS ET SERViLIEN. 183

de soustraire les créatures k l’aclion malfaisante du prince des ténè-bres. Héritière de la vérité, l’Église catholique ne pouvait laisser périr ce dogme, d’autant plus important è conserver, qu’il est une des basesnbsp;de l’ordre providentiel. Chaque année Rome manifeste sa foi, sur cenbsp;point, en bénissant solennellement les aniraaux. Le jour de Saint-An-toine est choisi pour accomplir ce devoir; sans doute paree que Ie pa-triarche du désert sut triompher avec éclat de l’immonde ennemi quinbsp;cherche a souiller, en les corrompant, toutes les oeuvres de Dieu. Quoinbsp;qu’il en soit, pendant que la foule se portalt, partie sur l’Esquilin oinbsp;se faisait la bénédiction; partie aux églises de Saint-Antoine-af-il/ontt,nbsp;de Sainte-Marie-des-Miracles, de Saint-Jean-des-Florentins, el des re-ligieux Antoniens d-la-Colonnade-de-Saint-Pierre, pour invoquer lenbsp;puissant Thaumaturge, nous reprimes le chemin de la Voie Latine.

Un mille au dela du cimetière de Saint-Epimaque, se trouve la Catacombe des Saints-Siraplicius et Servilien. Elle fait corps avec la prédé-dente, et passe pour la plus ancienne de celte région ; son origine remonte au règne de Trajan. Citons quelques-unes de ses gloires. Lanbsp;conversion de sainte Flavie Domitille avail fait grand bruit a Rome etnbsp;h la cour impériale. On rechereba les motifs qui avaient porté la jeunenbsp;princesse a sacrifier son rang, ses espérances et sa vie, pour embrassernbsp;une religion proscrite.

Parrai ceux qui se livrèrent amp; cette étude, et qui avaient entendu de leurs oreilles les paroles de la jeune martyre, et vu de leurs yeux sesnbsp;oeuvres miraculeuses, on cite les saints Simplicius et Servilien. Con-vertis a la foi, ils refusèrent désormais aux dieux de l’empire le cultenbsp;qu’ils avaient coutume de leur rendre. Arrêtés pour ce fait, par ordrenbsp;d’Anianus, préfet de la ville, rien ne put ébranler leur resolution, etnbsp;ils eurent la tête tranchée. Les chrétiens recueillirent leurs corps et lesnbsp;déposèrent dans un jardin qui leur appartenait, situé a deux milles desnbsp;tilurailles, sur la Voie Latine. Les saints martyrs y devinrent comwenbsp;deux fontaines d’oü sortit, pendant bien des siècles, une vertu puis-sante pour la guérison de l’^me et du corps (i).

Faut-il compter parmi les glorieux habitants de la même Catacombe ies saints Quartus et Quintus, dont les corps ont été transportés b Ca-Poue? OU bien leur sépulture forme-l-elle un cimetière séparé, quoiquenbsp;¦''oisin du premier? Sur cette question secondaire, les archéologuesnbsp;i’omains ne sonl pas d’accord (2). Quoi qu’il en soit, le lieu précis oü

la Latina, miUiario se-diem. —Ado,

(0 Quorum corpora chrisliani posuerunt in pn-edio corum Via Latina, n Cundo, in quo loco exhuberal virtus marlyrii eorum usque in pra?scntem dinbsp;tn lUariyr., die 20 april; id., Martyr. Rom., 20 mail.

(») Boldetti, lib. ii, c. xvni; Bosio, lib. iv, c. iv.

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184 LES TBOIS ROHE.

ils furent inhumés, s’appelait Ad centum aulas, prés des Cent-Pavil-lons OU des Ceiit-Chambres.

Au jugement des savants, les Cent-Chambres étaient un grand édifice, divisé en nombreuses pièces servant ou d’établissement de bains ounbsp;de lieu de reunion pour les membres de quelque tribunal, peut-êtrenbsp;Ie tribunal des Cent (i). II n’en reste plus que des ruines éparses, con-fondues avec la terre végétale et cacbées par des vignes. La découvertenbsp;de cette Catacombe est due au prélat Guizzandi, un des premiers gar-diens de la Rome souterraine. La Basilique des saints martyrs, restau-rée par Ie pape Adrien P', n’existe plus. II nous fut done impossiblenbsp;d’y continuer notre étude des peintures primitives. Nous la reprimesnbsp;néanmoins a I’aide d’autres monuments, au point cbronologique ounbsp;nous I’avions laissée bier.

Un des sujets qui se reproduisent souvent dans les Catacombes, e’est le sacrifice d’Abrahara. La piété de l’Église naissante Ie voulait ainsinbsp;pour deux raisons. D’abord, Isaac innocent, et néanmoins immolé parnbsp;son père dont il était uniquement cheri, peignait avecautantd’énergienbsp;que de vérité le chrétien des Catacombes, Isaac de la loi nouvelle, ten-drement aimé de Dieu, et néanmoins livré par ses ordres au glaive etnbsp;au bucher. Quelle legon d’inelFable tendresse, de résignation, de con-fiance, de généreuse soumission devait inspirer aux néophyles la vuenbsp;de cette scène patriarcale, figure anticipée de leur état présent! En-suite, il fallait, pour soutenir leur courage parmi tant d’épreuves, leurnbsp;offrir souvent I’exemple du Dieu, prince, consolateur et soutien desnbsp;martyrs; mais les circonstances ne permettaient pas de le représenternbsp;sur la croix.

Ici se présente I’explication d’un point fort intéressant dans I’his-toire de l’archéologie primitive. Nous avons déja vu que la croix ne se trouve jamais, ou presque jamais, ni sue les tombes, ni sur les inscriptions, ni dans aucuns monuments de la plus haute antiquité. J’entendsnbsp;la croix ordinaire, et non point la croix de saint André. A plus fortenbsp;raison ne rencontre-1-on jamais le crucifix. Pourquoi I’absence de cesnbsp;signes vénérables?

Nous savons par saint Paul lui-même que la croix était un scandale pour les Juifs et une folie pour les Gentils. La peindre ou la sculpternbsp;dans les cryptes des Catacombes ou se réunissaient avec les néophylesnbsp;les catécbumènes et même des paiens et des Juifs désireux de connaitrenbsp;la religion, eut été un manque de prudence. La vue de ce signe auraitnbsp;scandalisé les Juifs, excité les railleries et le mépris des Gentils, décon-

(0 Boldctti, lib. II, c. xviii.

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DIFFÉRENTES ESPÈCES DE CROIX. 185

certé des esprits encore imbus de préjugés, et produit sur ces ^imes novices l’effet d’un aliment trop noiirrissant sur un estomac débile ounbsp;malade. C’est done par égard pour leur faiblesse qu’on ne représentaitnbsp;ni Ie crucifix, ni même la croix dans son auslère nudité (i). Toutefois,nbsp;nous l’avons dit, ces signes étaient nécessaires au coeur et a l’espritnbsp;des chréliens. Pour concilier toutes les difficultés, on se gardait denbsp;peindre ou de sculpter Ie crucifix, et on déguisait la croix et Ie raystèrenbsp;qu’elle rappelle en les enveloppant de figures et d’emblèines.

Ainsi, chez les anciens la croix affectait quatre formes dilTérentes, OU plulót il y avait quatre genres de croix : la croix simple, cruxnbsp;simplex, qui consistait en un simple poteau sur lequel on fixait lesnbsp;malfaiteurs avec des clous ou avec des cordes; la croix composée, cruxnbsp;composita, qui se divisait en trois espèces : la première était la croixnbsp;appelée crux decussa, consistent en deux pièces de bois unies par Ienbsp;milieu, représentant Ie X des Grecs ou l’X des latins, nous l’appelonsnbsp;croix de Saint-André, en mémoire de l’Apótre qui y fut attaché; lanbsp;seconde, nommée crux commissa, avait la forme du T majuscule desnbsp;Grecs ou du T des latins; la troisième, appelée crux immissa, lais-sait passer la tige au-dessus des croisillons : c’est notre croix ordinaire ¦{¦ (2).

Sous ces deux dernières formes la croix ne se rencontre pas dans les peintures de la plus haute anliquité, sans doute paree qu’il était difficile de Ia déguiser. II en est autrement de la croix de Saint-André.nbsp;Un emblème ingénieux la cachait facilement aux yeux inexpérimentésnbsp;et la faisait passer simplement pour l’initiale du nom adorable denbsp;Notre-Seigneur. En effet dans les monuments primilifs rien n’est plusnbsp;fréquent que Ie monogramme du Christ ^ qui avait Ie double avan-tage de donner sans Ie trahir Ie nom de la grande Victime, et de re-présenter sans offusquer I’instrument de son supplice. Plus tard, lors-qu’on représenta la croix dans les peintures chréliennes, on eut soinnbsp;de la couvrir de perles et de l’environner de roses. G’est la croix per-^ée, crux gemmata, si commune dans les monuments du iv“ siècle, « etnbsp;®ela, dit Ie savant Botlari, paree que l’horreur qu’inspirait ce bois,nbsp;jadis infóme et ignominieux, subsistait encore en partie dans TAraenbsp;des convertis (5). »

(0 Bosio, Roma subt., lib. v, c. x; Terlull. Conlr. Judceos, c. x; et Adv. Mardon., eb. 111, c. xviii.

(S) Voj/ez Grelser, De Cruce, lib. i, c. 1; Lipsius, De Cruce, lib. 1, c. vi, vii, vm, ix; «andini, llist.famil. sacr., p. 236.

(«) Sandini, Hist.fam. sacr., p. 173.

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186 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

Quant au crucifix, les raisons données plus haut font comprendre qu’on devait s’abstenir absolument de l’exposer aux regards des as-semblées primitives, composées quelquefois de catécbumènes, de Juifsnbsp;et de païens et toujours de néophytes. Aussi, de savoir s’il en existenbsp;un seul anlérieur amp; Constantin, c’est une question fort controverséenbsp;parmi les archéologues. Les princes de la science ne font pas difficullénbsp;de soutenir la négalive (i).

Les sentiments de foi, d’amour, de résignation, d’espérance, in-spirés par Ie sacrifice d’Abraham, les premiers chrétiens les puisaient avec non moins d’abondance dans l’histoire de Joseph. Ce quatrièmenbsp;tableau de la grande galerie souterraine développait les précédents etnbsp;convenait on ne peut mieux ii la situation des fidèles persécutés. De lènbsp;vient qu’on Ie rencontre fréquemment dans les Catacorabes. Figurenbsp;du Sauveur dans ses épreuves et dans sa gloire, Joseph Test encorenbsp;dans sa résurrection. Le transport solennel de ses ossements dans lanbsp;Terre Promise, au prés des patriarcbes, représente trop bien le retournbsp;de Phomrae dans sa patrie, parmi les bienheureux, au jour de la résurrection générale, pour que les chrétiens n’aient pas reproduit cenbsp;dogme inspirateur de leurs vertus, soutien de leur courage et sourcenbsp;de toutes leurs consolations. On le trouve en effet dans une bellenbsp;peinture d’une crypte des Catacombes de Saint-Callixte, publiée parnbsp;Aringhi (2). Avec leur eloquence ordinaire, les Pères de 1’Église don-naient aux fidèles l’explication de la touchante épopée du fils de Jacob, dans lequel ils avaient soin de montrer, et le divin Rédempteur,nbsp;et 1’Église son épouse, et les chrétiens ses enfants (s).

Après le siége de Tyr, Alexandre se porta sur Jérusalem, décidé è punir les Juifs de leur attachement i» Darius ; mais le grand-prêtre luinbsp;montra l’histoire de ses conquêtes, écrites longtemps d’avance dansnbsp;les prophéties de Daniel. A cette lecture, le vainqueur sort commenbsp;d’un profond sommeil; il grandit è ses propres yeux, la colère faitnbsp;place è l’admiration, et les Juifs deviennent pour lui 1’objet d’un attachement qui ne se démenlit jamais. Tets devaient étre, si je ne menbsp;trompe, les sentiments des premiers chrétiens lorsqu’on leur montraitnbsp;l’histoire de leur vocation, de leurs épreuves, de leurs victoires, tra-cée è grands traits dans l’histoire de 1’ancien people de Dieu.

(1) .....E queslo, perchè non per anco era dissipato dalla menie degli uomini, quan-

tunque convertiti alia fede, l’orrore, che avevano a quel ligno gia infame e ignomi-nioso. Sculture e Pittur., etc., t. ui, p. 173.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Lib. III, c.xxii, p. ötl.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Tertull., lib. Contr. Jitdmos; Origen., Homil. 1 in Exod.; S. Aug., lib. xii, Contr.nbsp;Faust., etc.

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MOÏSE. nbsp;nbsp;nbsp;187

Comme leurs idees devaient s’agrandir! avec quelle facilité ils de-vaient saisir les rapports si intimes et si complets de leur existence et de l’existence du peuple dont ils étaientles successeurs! Pour eux,nbsp;la religion devenait un livre a partie double, dont la publication com-mengait a l’origine du monde : d’un cóté la figure, de l’autre la réa-lité. Comme Ie peintre qui dessine un portrait tient sans cesse les regards fixés sur son modèle; ainsi, pendant les quatre mille ans qu’ilnbsp;avait mis i écrire ce livre magnifique, Ie Dieu de l’éternité avail eunbsp;l’oeil constamment fixé sur la réalité des figures qui sortaient de sonnbsp;pinceau; et Ie chrétien se disait avec transport : Cette réalité, c’estnbsp;l’Église, c’est moi.

Le type Ie plus complet du divin Législateur, Moïse, devait surtout lui arracher ce cri d’amour et d’admiration. Aussi l’artiste des Cata-combes multiplie avec une complaisance marquée le cinquième tableau de la grande galerie. Mais il est quatre circonstances de la vienbsp;de Moïse qu’on rencontre plus souvent : le voyage sur la montagnenbsp;d’Horeb, pour s’entretenir avec Dieu; la réception des tables de lanbsp;loi; le miracle de Peau jaillissant du rocher, et enfin la manne tom-bant du ciel. Plus que les autres, ces grands événements étaient richesnbsp;en instructions et appropriés ii la situation des neophytes.

Dans une peinture et dans un bas-relief des Catacombes de Saint-Callixte, publiés par Bosio et par Boltari, on voit le législateur hé-breu appuyant un pied sur une pierre et ötant sa chaussure. La main mystérieuse sort de la nue et annonce l’ordre et la présence de Dieu,nbsp;et Pon croit entendre cette parole ; « Olez votre chaussure, la terrenbsp;que vous foulez est une terre sainte. » Était-il difficile, a la vue de cenbsp;tableau, de faire comprendre au néophyte que la sainteté était pournbsp;lui la première condition de son initiation aux mystères de la foi (i)?

Un monumentum arcuatum du cimetière des Saints-Marcellin et Pierre représente Moïse recevant la loi. Le législateur est debout, unnbsp;bras élevé vers un nuage d’oü sort la main divine qui tient le Codenbsp;inspiré. En peignant Moïse dans cette action. Pon voulait montrernbsp;que Dieu était Pauteur de PAncien et du Nouveau Testament; quenbsp;PÉglise était une comme la religion, et que les novateurs assez hardisnbsp;pour soutenir le contraire étaient des hérétiques (2).

Deux compartiments de la méme voute nous font connaitre Patti-tude des premiers chrétiens dans la prière. En mémoire de Notre-

(lt;) S. Greg. Naz., Oral. 11, in Pascha; S. Aug., Sermo xui, de Sanctis.

(s) Vetcs Testamentbm Deus condidil. — S. Aug., Contr. daas EpisU Pelag.,\ü). iii, u. 10; Boltari, 1.11, p. 175.

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188 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

Seigneur sur la croix, ils priaient les bras étendus. lis ne croyaient pas pouvoir être plus agréables a Dieu, qu’en se présenlant devanlnbsp;lui comme la grande Victirae du Calvaire : vénérable usage observénbsp;encore de nes jours, sur tous les points du globe par Ie prétre a l’au-tel. Était-ce paree qu’ils avaient la connaissance instinctive de la ma-nière dont prierait un jour la divine Hostie, que les païens prenaientnbsp;la même attitude lorsqu’ils s’adressaient aux dieux dans leurs pressants dangers (i) ?

Quoi qu’il en soit, dans la peinture dont 11 s’agit, on voit un Chrétien priant les bras étendus. 11 est debout, Ie corps enveloppé d’un manteau qui cache la tunique dont les manches sont garnies a l’exlré-mité d’un parement de pourpre. Dans un compartiment inférieurnbsp;sont deux chrétiennes en prières : elles ont la raéme attitude, et leurnbsp;vêtement annonce une grande modeslie. On y relrouve en pratique elnbsp;les conseils des .\pótres et les régies disciplinaires des Pères de l’É-gllse (s). Leur voile est relevé et leur visage découvert, ce qui annoncenbsp;des vierges chrétiennes. En effet, il était d’usage que les vierges cou-vertes d’un voile en public, se découvrissent pour prier dans les as-semblées des lidèles : on les dlstinguait par la des veuves et des per-sonnes raariées (a), qui, voilées è l’église, allaient en public Ie visagenbsp;découvert.

Disons en passant, è la gloire du christianisme, que Ie nombre des épouses du Sauveur fut bientót si grand, au milieu d’un monde oünbsp;l’empereur Auguste avail eu peine a trouver six Vestales, que les auteurs païens s’en plaignent hautement (4). On Ie voit, dans leurs so-phismes contre Ie célibat, les philosophes modernes sont loin d’avoirnbsp;Ie mérite de l’invention. Tel était dond’usage général auquel Ie deuii.

...........El pandcre palinas

Ante Deum delubra.

Lvcret., lib. V, V. 1199.

Ipse gubernator tollens ad sidera palnias.

OviD., Trist., lib. i, v. 10.

(s) Nam verus ornatus maxime christianorum et christianarum, non tantum nullus fucus mendax, verum ne auri quidem, vestisque pompa; sed mores boni sunt.—S. Aug.,nbsp;Epist. 247.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;En exigeant que les vierges l'ussent partout voilées, Tertullien constate l'usage dontnbsp;nous parlous : « Cerle in Ecclesia virginitatera snam abscundant,quara extraecclesiamnbsp;celant. Timeant extraneos, revereantur el fralrcs ; aut constanter audeant ct in vicisnbsp;virgincs videri, sicut audent in ecclesiis. » De vcland. Virgin., c. xiii.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Et licet quocumquc oculos flexcris, feminas adiatim multas spcctare cerralas,nbsp;quibus, si niipsissent per retalem tor jam nixus polerat suppclere liberorum. Antm.nbsp;Marcell., lib. xiv, c. vi; liottari, 1.11, p. 65,174.

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QUATRE CIRCONSTANCES DE LA VIE DE MOÏSE. nbsp;nbsp;nbsp;189

en quelque circonslance extraordinaire, faisait parfois déroger. Ainsi, dans la Catacombe de Sainte-Priscille, on trouve, a la voussure d’unenbsp;crypte, une femme en prières, les bras étendus et voilée de sesnbsp;cheveux.

Pour revenir a la coutume primitive de prier les bras en croix, j’ajouterai que les protestants ont tort de dire qu’elle est inutile, puis-que Dieu ne regarde que Ie coeur et Pintention ; qu’elle est supersti-tieuse, puisque c’est une invention de TÉglise Romaine. Les peinturesnbsp;des Cataeombes sont des témoins irrécusables de l’antiquité de eetnbsp;usage qui remonte évidemment a l’époque oü, suivant les protestants,nbsp;l’Église était pure de toute innovation et de toute infidélité. lis ne peu-vent done, sans se contredire eux-mêmes, Ie traiter de superstition.nbsp;Sont-ils mieux fondés k dire qu’il est inutile? Mais les Pères de l’É-glise, pour lesquels ils professent Ie plus de vénération, leur orient, anbsp;quinze siècles de distance, que rien n’est inutile de ce qui excite dansnbsp;Ie coeur des sentiments plus vifs d’humililé, de confiance et de com-ponction : or, tel est Ie rit vénérable dont il s’agit (i).

Moïse frappant Ie rocher est la troisième circonstance de la vie du législateur hébreu que Part priraitif reproduit Ie plus souvent: on lanbsp;retrouve peinte ou sculptée dans toutes les Cataeombes. D’après lanbsp;doctrine de saint Paul lui-même, Ie rocher du désert, c’est Notre-Sei-gneur; la verge qui Ie frappe, ajoutent les Pères, c’est la croix; lesnbsp;eaux qui en découlent sont les torrents de grAce, entre autres la purification baptismale et la force du martyre, descendus des plaies denbsp;1’Homme-Dieu. L’empressement des Israélites ^ recueillir ces eauxnbsp;tant désirées est une legon pour les chrétiens (2). Et puis, quel motifnbsp;de confiance pour les fidèles perséculés, proscrits, dépouillés de toul,nbsp;que Ie souvenir de Péclatante protection de Dieu sur son peuple? Ces

(1) Le passage de S. Augustin est trop beau pour n’être pas cite : « Nam et orantes de membris sui corporis i'aciunt, quod supplicantibus congruit, cum genua figiint, cuninbsp;extendunt manus, vel etiam prosteruuntur solo, et si quid aliud visibiliter i'aciunl.nbsp;Quamvis eorum invisibilis voluntas, et cordis intentio Deo nota sit, nee ille indigentnbsp;lus indiciis, ut humanus ei pandatur animus; sed hinc magis seipsum excitat homo adnbsp;Wandum, gemendumque humilius, atque ferventius. Et ncscio quomodo, quum hinbsp;hiotus corporis fieri nisi motu animi prmcedente non possint, eisdemque rursus exte-•¦'us visibiliter lactis, ille interior invisibilis, qui eos facit, augeatur : ad per hoe cordisnbsp;®fl’ectus, qui, ut fierent ista, prajcessit, quia facia sunt, crescit. De Cura gerend, pronbsp;quot;ort., c. V, n. 7.

_ (v) Sed el fonlem baptismi nobis atque martyrii eadem pelra ostendit. De latere enim cum percussus est, sanguis el aqua processil; quod baplisma et marlyrium flgu-^avit. Hier., In Isai., c. XLViu; id., S. Justin, Colloq. cum Tryph.; Aug., Serm. 29 el 116,nbsp;^ Temp.

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190 nbsp;nbsp;nbsp;LES TBOIS ROME.

utiles enseignements expliquent la reproduction multipliée du même sujet.

Plus significatif encore et plus touchant, Ie miracle de la manne ne pouvait être oblié. N’était-ce pas un axiome de la primitive Église,nbsp;que sans PEucharistie Ie martyre était impossible? Mais, autant Ienbsp;mystère de l’amour et de la foi était nécessaire, autant il était dé-fendu de Ie révéler ouvertement. Pour en donner une idéé a ceux quinbsp;Pignoraient, comme pour en rappeler Ie souvenir amp; ceux qui Ie con-naissaient déjè, on Ie représentait sous des symboles. Un des plus vraisnbsp;était la manne tombée du ciel, satisfaisant amp; tous les gouts, soutenantnbsp;Ie peuple voyageur dans ses longues luttes contre les nations qui luinbsp;barraient Ie chemin de la Terre Promise, et ne cessant qu’au momentnbsp;oü il met Ie pied dans Phéritage promis a ses pères. Aussi dans unenbsp;des belles cryptes des Catacombes de Saint-Callixte, on voit Moïsenbsp;montrant sept paniers d’osier remplis de manne, et dans Ie compartiment voisin Notre-Seigneur tenant dans les plis de sa tunique unnbsp;certain norabre de pains marqués d’une crolx. La figure et la réaliténbsp;sont placées i» cóté Pune de Pautre, mais cachées sous des apparences ;nbsp;on voit que Part chrétien n’ose parler plus clairement (i).

Rassurés sur Ie succès de la grande lutte qu’ils soutenaient contre César et Ie monde soumis i ses ordres, les fidèles avaient besoin denbsp;connaitre Ie sort de leurs persécuteurs : Pharaon englouti dans lanbsp;mer avec son armée venait Ie leur apprendre. Sur un beau sarcophagenbsp;des Grottes Vaticanes, on voit Ie prince égyptien, monlé sur un qua-drige, agitant ses coursiers qui s’enfoncent dans les flots, au-dessusnbsp;desquels on voit encore Ia tête de quelques soldats, tandis que Moïse,nbsp;debout sur la rive opposée, étend la verge miraculeuse et commandenbsp;la destruction des Égyptiens (2).

Continuant sa magnifique mission. Part priraitif entre dans tous les détails de la vie si grande et si labourieuse de PÉglise naissante, et,nbsp;sous de nobles figures, les peint vivement aux yeux des néophytes.nbsp;C’est tour a tour Parche d’alliance, double symbole du Dieu qui lesnbsp;protégé et de la divine Mere qui leur donna Ie Rédempleur pour le-quel ils combattent (5); Samson, qui enlève les portes de Gaza et quinbsp;leur montre Ie Dieu de la vie sortant du tombeau et leur annon^antnbsp;qu’il brisera les portes de leur prison souterraine (4); c’est David

(1) Bottari, t. n, p. 3S-6; Bosio, lib. v, c. xvii.

(3) Bottari, 1.1,170.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;S. Cyrill. Alexand., De Incarnat. Verb., c. x; S. Ambr., Serm.‘25,Pro Com. con.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;S. Aug., Serm. 107; S. Grég., Hom. 21, in Evangel.

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CATACOMBE DE SAINT-TERTÜLLIEN. 191

combattant contre Goliath, dans Icquel ils contemplent leur divin chef terrassant Néron, Domitien, Valérien et tous les autres géants qui lesnbsp;insultent et les oppriment (i); c’est Élie montant au ciel sur un charnbsp;de feu, et qui leur dit : « La foi ardente est Ie char de triomphe desnbsp;martyrs;» puis jetant son manteau i son disciple Élisée, et qui ajoute :nbsp;lt;t L’esprit du Seigneur est sur vous; esprit de charité, de lumière, denbsp;prophétie et de sainteté qui n’abandonnera jamais l’Église (%).

Si nous voulons visiter la Catacombe de Saint-Tertullien, il est temps d’interrompre noire étude; aussi bien plusieurs jours encorenbsp;sulliront h peine pour lire les principales pages de Tart primiiif.nbsp;Laissant a droite la Voie Latine, on trouve dans les vignes et parmi lesnbsp;débris des mausolées païens, non loin du cimetière de Saint-Simpli-cius, l’entrée de la Catacombe de Saint-Tertullien, Ie Tobie de la primitive Église.

On était au plus fort de la persécution de Valérien. Si active qu’elle fut, la piété des fidèles ne suflisait pas a ensevelir les victimes mois-sonnées chaque jour par Ie glaive des bourreaux ou broyées par lanbsp;dent des bêtes. Un païen, touché de pilié, se mit amp; recueillir ces corpsnbsp;abandonnés, entre autres, il donna la sépulture ii douze membres dunbsp;clergé de Rome, martyrisés sur la Voie Latine, non loin de l’aqueducnbsp;de Claude. Cet acte de charité lui mérila la grSce puissante d’embras-ser rÉvangile. Baptisé par Ie pape saint Étienne, ilfut ordonné prêtre,nbsp;encore revêtu de la robe blanche des catéchumènes, et continue, surnbsp;rinvilation du Pontife, l’exercice de son charitable, mais périlleuxnbsp;ministère.

Deux jours après son baptême, Tertullien est arrêté et conduit au tribunal de l’empereur. On Ie somme de livrer les trésors de son mailrenbsp;Olympius. « Si vous voulez, dit-il a l’empereur, les trésors de monnbsp;maitrCjVous désirezla vie éternelle,quemon maitre a rcQue en échangenbsp;de ses richesses périssables. » Valérien affecta de Ie prendre pour unnbsp;fou, et ordonna de Ie meurtrir de coups de bdton et de lui brüler lesnbsp;cötés avec des torches ardentes. Satisfait de cet agréable spectacle,nbsp;ï’empereur se retire et abandonne la victime è un magistral nomménbsp;Saprice. Digne ministre de son maitre, Saprice fait dresser son tribunal sur la place Mammertine et ordonne d’étendre Ie martyr sur Ienbsp;®hevalet, de lui casser les dents et de lui couper les nerfs. Ce n’estnbsp;•Jn’après ces horribles tortures qu’il lui fait trancher la tête (s). Le

(') S. Greg., lib. xxxiv. Moral, in cap. 42 Job.

(®) S. Max. Taurin., Fest. de SS. Martyr.; Kupert, De Trinit., et Oper., lib. V, c. XV.

(3) Boldetti, lib. ii, c. xvm, p. 565.

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192 nbsp;nbsp;nbsp;1.ES TROIS ROME.

pape saint Étienne recueillit ses restes précieux et les déposa sur la Voie Latine, auprès des nombreux martyrs que Tertullien lui-mêmenbsp;avail inhumes.

Découverte en 1687 par les soins du prélat Guizzardi, la Catacombe de Tertullien ne présenta que des loculi parfaitement fermés. Cettenbsp;circonstance a fait douterque Ie saint martyr, dont Ie corps, exhuménbsp;par Ie pape saint Pascal 1®‘', repose aujourd’hui dans Téglise de Sainte-Praxède avec ceux des douze ecclésiasliques dont nous avons parlé, aitnbsp;re^u la sépullure dans ce cimetière. Mais il semble facile de fixer lesnbsp;incertitudes : on sait que la Catacombe de Saint-Terlullien est contiguenbsp;è celle de Saint-Simplicius. Or rien n’empêche de supposer que Ienbsp;glorieux martyr fut déposé dans les lirailes de celle dernière Catacombe, dont un quarlier aura pris son nom (t).

19 JANVIER.

Catacombes de la Vote Lavicane. — Calacombcs des Saints-Tiburce, MarcelUn, Pierre et Hélène. — Histoire.— Peinlures.— Partie hislorique. — Job. — Les Irois enl'anlsnbsp;dans la fournaise. — Daniel dans la losse aux lions. — Jonas. — Ézéchiel. — Catacombe des Sainls-Claude,IVicoslralc, Symphorien, Caslorius, Simplicius et des qualrenbsp;taints Couronnés. — Histoire.

La Voie Lavicane qui conduisait ^ l’ancien Labicum, aujourd’hui Colonna, située dans les montagnes, entre Frascati et Tivoli, était,nbsp;comme les autres Yoies romaines, bordée de temples et de tombeaux.nbsp;On cite, entre autres, Ie Fanum Quietis, Temple du Repos; et Ienbsp;mausolée de l’empereur Didius. L’urne sépulcrale d’Alexandre-Sévèrenbsp;et de sa mère Mamée, trouvée dans la même direction, fait supposernbsp;qu’ils avaient aussi leur tombeau sur la Voie Latine. Quoi qu’il ennbsp;soit, aux monuments somptueux des maitres du monde, comme auxnbsp;puticuU des esclaves et du petit peuple, ont succédé les glorieux tombeaux de nos martyrs. La première Catacombe qui se présente aunbsp;voyageur de Rome, sorti par la Porta Maggiore, est celle des Saints-Tiburce et Marcellin. Dans les Actes des Martyrs, elle porte souventnbsp;Ie nom Ad Duas Lauros, sans doute amp; cause de deux lauriers plantésnbsp;sur Ie lieu qu’elle occupe. II n’en est pas fait mention avant Ie règnenbsp;de Dioclétien. A cette époque elle fut immortalisée par les combats denbsp;saint Tiburce qui lui donna son nom.

Tiburce. était un jeune sénaleur romain d’une naissance illustre et

(i) Bar., Martyr., 4. aug.; id. Ann., t. ii, an. 260, n. 3.

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CATACOMBES BES SAINTS-TIBURCE ET MARCELLIN. 193

d’une beaulé remarquable. II venait d’ouvrir les yeux k la lumière de la foi, lorsqiie Ie pape Caïus, voyant l’affreuse persécution de Dioclé-tien prête a fondre sur l’É^lise, convoque un jour de dimanche, lesnbsp;chrétiens de Rome dans la maison de Ghromace, père de Tiburce, et,nbsp;conformément a l’esprit de l’Evangile, il leur donne l’option de Ie fuirnbsp;OU de rester dans Rome avec lui. Tiburce s’écrie qu’il ne veut pasnbsp;quitter l’Évêque des évêques, et qu’il est heureux de donner mille foisnbsp;sa vie pour son Rédempteur. L’assemblée se sépare, et Ie pape Caïusnbsp;avec une partie des chrétiens vient se cacher dans Ie palais même denbsp;l’empereur. Ils durent eet étrange asile ^ Castulus, intendant desnbsp;Zètes, c’est-a-dire des petits appartements, placés a la partie supérieure de la demeure impériale (i).

Mais Ie zèle de Tiburce ne peut rester inactif; il sort dans la ville et fait de glorieuses conquêtes. Un faux frère, nommé Torquatus, Ienbsp;dénonce et Ie fait arrêter. Conduit devant Fabien, préfet de Rome, Ienbsp;jeune sénateur est pressé, conjuré de ne pas déshonorer son nom parnbsp;une mort ignominieuse. « O Ie plus prudent des hommes, grave ma-gistrat des Remains! s’écrie Tiburce, paree que je refuse d’adorernbsp;Vénus l’impudique, Jupiter l’incestueux, Mercure Ie fourbe, Saturnenbsp;Ie mangeur d’enfants, je déshonore ma familie, je souille mon nom! »nbsp;Fabien coupant court a la discussion, fait apporter des charbons ar-dents et lui dit : « Ou tu vas marcher nu-pieds sur ces charbons, ounbsp;tu vas y jeter de l’encens en l’honneur des dieux; choisis. » Pournbsp;toiite réponse Tiburce óte sa chaussure, marche sur les charbons in-candescenls, et dit a Fabien : « Ils sont doux et frais comme desnbsp;roses (2). » Fabien se léve et ordonne qu’on Ie conduise sur la Voienbsp;Lavicane et qu’on lui tranche la tête. Cequi fut exécuté, Ie onze aoütnbsp;de Fan 286 (5).

Or, Tiburce comptait dans sa familie deux de ces héroïnes, si communes aux éges de la primitive Église, qui ne pouvaient quitter Ie 'ombeau de leur illustre parent : Lucilla et Firraina passaient lesnbsp;jours et les nuits dans la compagnie du martyr. Un jour Tiburce leurnbsp;opparut avec les saints Marcellin et Pierre, et leur dit d’ensevelir présnbsp;de lui ces deux martyrs immolés sur la Voie Cornélienne, au lieunbsp;ooinmé Silva nigra. Ua nuit suivanie la voiture de sainte Lucilla ame-

lib.


(0 Zelarii dicebanlur qui prajfecti erant zelis : erat quippe zeta (ut Iradit Plinius,

VI, Epist. V.} locus capax unius lecli cum dtiabus sellis, qui velis obduclis,

*^ociisinodoadjiciebalurcubiculo, mudo auferebatur, ac proïnde portatile quoddam ( ‘iiculum. — Bar., An. 286, n. 9.

(“).....Videtur quod super flores roseos gradior. — Bar., t. u, An. 286, n. 22.

(5) Bar., ibid.

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194 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

nait sur Ia Voie Lavicane les précieuses dépouilles recueillies par elle et par sa noble soeur. Telles sont les premières gloires de cette Catacombe. Avant de faire connaitre les autres, il est bon d’ajouter sur lesnbsp;saints martyrs un détail que Ie pape Damase nous a transmis.

Dans l’histoire de l’Église naissante, deux faits également incon-testables marcbent de front: Ie zèle intrépide des chrétiens a recueil-lir les corps des martyrs et Ie soin extréme des païens a les priver de cette consolation. Or, Ie bourreau des saints Marcellin et Pierre ra-contait au pape Damase, encore enfant, qu’il avait entrainé ses victimesnbsp;au milieu des buissons, et que lè il les avait exécutées, afin que leursnbsp;corps fussent perdus pour les chrétiens (i). II ne savait pas que Ienbsp;Dieu des martyrs veillait sur eux.

Le 18 aout de l’an 328, Timpératrice sainte Hélène, mère de Constantin, fut déposée auprès des saints martyrs, et a ses noras glorieux, la Catacombe de la Voie Lavicane ajouta celui de l’illustre Princesse.nbsp;Par amour pour sa mère et par vénéradon pour les saints martyrs,nbsp;Constantin fit ériger sur leurs tombeaux une magnifique Basilique,nbsp;dont on voit encore quelques restes appelés par le peuple de Rome,nbsp;Torre Pignatorra (2). Une petite église consacre la place du vénérablenbsp;monument; et d’utiles ouvrages, dont il faut rapporter la gloire aunbsp;cardinal Corsini, facilitent l’entrée de la Catacombe, une des mieuxnbsp;conservées, des plus vastes et des plus intéressantes (3).

En présence de ces lieux, témoins des souffrances de nos pères, nous reprimes l’étude des peintures qui les avaient souvent encouragés etnbsp;consolés. Un des souvenirs les plus propres è leur inspirer la sublimenbsp;résignation dont l’exemple forme une partie de leur précieux béritage,nbsp;est, sans contredit, celui du saint homme Job. « Quel est le martyr.

(l) Ifec omnia Damasus, cum lector csset, et adhuc parvulus, didicit ab eo, qui eos decollaverat, et postea factus Episcopus, in eorum sepulcro bis versiculis declaravit:

Marcelline, tuos pariter, Petre, nosce triumphos :

Percussor relulit Damaso mihi, cum puer essem.

Use sibt carnificem rabidum mandata dedisse,

Sentibus in mediis vostra ut tune colla secaret,

Ne tumulum vestrum quisquam cognoscere posset;

Vos alacres, vestris manibus mundasse sepulchra,

Candidulo occulte postquara jacuistis in antro.

Postea commonitam vostra pietate Lucillam,

Hic placuisse magis sanclissima condere membra.

BiRON, t. II, An. öOd.

(«) Pro amore matris ct voneratione sanctorum. — Anast., [n S, Sylvest.

(3) Boidetli, lib. ii, c. xviii, p. 563.

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JOB. nbsp;nbsp;nbsp;195

s’écrie un des éloquents cicerone du Musée souterrain, auquel Job ne puisse être comparé? que dis-je? combien de martyrs è la fois n’éga-lent pas ce saint horame (i). » — « Voila pourquoi, ajoute un autre,nbsp;si vous êtes dans la tristesse, dans les larmes, dans les épreuves, onnbsp;vous met sous les yeux I’histoire du prince de l’Orient (2). » Le coeurnbsp;humain est ainsi fait; si vous voulez le consoler, gardez-vous de luinbsp;présenter le riant tableau du bonheur; montrez-lui le spectacle de lanbsp;douleur, d’une douleur plus grande que la sienne. Si, de plus, il vousnbsp;est donné de faire briller un rayon d’espérance, le succès est assuré.nbsp;Or, tel était l’exemple de Job.

Au dépouillement de ses biens, la perte de ses enfants, aux repro-ches de sa femme, aux accusations de ses amis, aux douleurs physiques dont il sentait si cruellement les atteintes, toutes choses que les habitants des Catacombes partageaient avec lui, se joignait le retournbsp;de la prospérité, de la richesse et de la santé; toutes choses encorenbsp;que roeil de la foi découvrait a nos pères dans le prochain et magni-fique avenir de l’éternité. Alors du fond de leurs vivants lombeaux,nbsp;les chrétiens faisaient entendre les sublimes accents du patriarche denbsp;la douleur, assis sur son fumier ; « Je sais que mon Rédempteur estnbsp;vivant; que mes os se revêtiront de ma peau ; que je le verrai de mesnbsp;propres yeux, moi et non pas un autre; cette espérance fest cachée aunbsp;fond de mon coeur, et les mains de ceux qui me donneront la sépul-ture la déposeront avec moi dans mon loculus. »

üans les Catacombes de la Voie Latine, les peintures d’une crypte nous avaient présenté le saint Patriarche assis sur un tas de cendre etnbsp;de paille hachée : nous le trouvons au cimetière des Sainls-Marcellinnbsp;el Pierre, dans la même attitude. Une tunique sans ceinture lui couvrenbsp;è peine la moitié du corps, le reste est nu. Être assis, avoir la tête ap-puyée sur la main, telle est l’attitude que les anciens donnaient inbsp;1’homme profondéraent affligé. Dans les médailles de Vespasien, frap-pées en mémoire du sac de Jérusalera, on voit la Judée sous la figurenbsp;d’une femme assise sous un palmier, avec ces mots en exergue : Ju-dcea capta (s).

Plus on avance et plus Tart chrélien devient explicite. De même que les prophélies allèrent se développant a mesure qu’on approchaitnbsp;grand roystère auquel toutes venaient aboulir; ainsi les figures de

(') Quis enim est martyr, cui hicnon poluita:quari,imo marlyrcs innumeros hicunus ®quat— Chrysosl., Hom. ii, In Job.

(•^) Origen., lib. i, In Job.

(«) Bottari, 1.11, p. 107,157.

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196 nbsp;nbsp;nbsp;les TROIS ROME.

l’Ancien Testament, ces prophélies des yeux, expriment avec une vé-rité plus saisissante l’élat des premiers chrétiens, en approchant de l’époque oü eet élat devait être une réalité. A Job succèdent les troisnbsp;enfants dans la fournaise. lei rien ne manque a la figure pour être unenbsp;hisloire compléte.

Trois enfants innocents, ou coupables du seul crime d’adorer Ie vrai Dieu; un monarque superstitieux et farouche; un fournaise ardentenbsp;préparée aux adorateurs du vrai Dieu; un peuple entier de spectateursnbsp;avides de leur supplice; un miracle qui les conserve pleins de vie aunbsp;milieu des Hammes; la confession du nom de Dieu par Ie persécuteurnbsp;lui-même : voila bien l’histoire de chaque martyr et de toutes les per-sécutions, dans leur péripélie et dans leur dénüment. II faut entendrenbsp;les pères et les martyrs, expliquant la raison et Ie sens de ce tableaunbsp;partout offert aux regards des néopbyles. « La bonté de Dieu, disaitnbsp;saint Cyprien, a daigné vous associer è la glorieuse confession desnbsp;trois enfants, qui furent Timage de ceux qui offrent leur vie pour Ienbsp;Seigneur (t). » De Ié vint l’usage de réciter aux fêtes des martyrs Ienbsp;cantique des trois enfants dans la fournaise : usage que Ie quatrièmenbsp;concile de Tolède rendit obligatoire.

Dans une crypte des Catacorabes de Sainte-Agnès, on voit a droite d’un arcosolium, les trois enfants dans la fournaise; ils sont debout,nbsp;Ie sarabalum ou bonnet phrygien sur la tête, la tunique flottante auteur du corps et les mains étendues dans Tattitude de la prière. Cettenbsp;hisloire choisie se relrouve é chaque pas dans les peintures primitives.nbsp;Je dirai en passant que dans Ie monument dont il s’agit, elle est ac-compagnée de Daniel dans la fosse aux lions el du bon Pasteur portam la brebis sur ses épaules. Sur Ie petit loculus on lit I’inscriplionnbsp;suivante :

ABENTtVS ET MARCIA AEENT1.E FILI.E CARISSIM.E IN FACE QD^ VIXIT AN. V. M. VII. P. XVIII.

« Abentius et Marcia é Abentia, leur fille chérie, en paix, qui vécut cinq ans sept mois dix-huit jours. »

11 eiait difficile de réunir plus heureusement tons les sujets de consolation que peuvent désirer des parents chrétiens. La fresque semble leur dire : « Sortie sans péché des épreuves de la vie, comme les troisnbsp;enfants de la fournaise, comme Daniel de la fosse aux lions ; celle que

(i) Pueros etiam vobis gloriosa confessio sociavitdivinadignalio. —S. Cypr., Oral.81. — Tres pueri praelulerunl figuram sanctorum, qui corpus suum in persecutionem pronbsp;ChrisU nomine obtulerunt. — S. Isid., Alleg. in sacr. Script*

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DANIEL DANS LA FOSSE AUX LIONS. nbsp;nbsp;nbsp;497

vous pleurez a été regue sur le seuil de l’éternité par le bon Pasteur qui I’a portée joyeuse dans son bercail. a Je ferai encore remarquernbsp;I’exactitude avec laquelle les inscriptions tumulaires marquent TAgenbsp;précis du défunt, ainsi que le jour de sa mort. Consolation pour lesnbsp;parents; indication pour les siècles fulurs de l’universalité du témoi-gnage rendu a la foi par tous les èges, depuis I’enfance jusqu’a lanbsp;vieillesse; enfin, dale du jour auquel on devait chaque année se réunirnbsp;pour célébrer la mémoire du martyr : ces trois motifs me semblentnbsp;avoir déterminé ceite précision, dont il serait facile de citer millenbsp;exemples.

Je viens de parler de Daniel dans la fosse aux lions. Non moins ap-proprié que le précédent aux besoins de l’Église primitive, ce nouveau sujet s’offre sans cesse aux regards dans les Calacombes. Noé, Job, Daniel brillent comrae trois soleils de justice dans les annales dunbsp;peuple juif (i). A ce premier tilre de gloire, Daniel ajoute le don denbsp;prophétie et le courage du martyre. Dépouillé de son emploi, de sanbsp;fortune, de ses vêlements, il est jelé dans la fosse aux lions; mais lesnbsp;lions ne lui font aucun mal. Il est sans nourriture, mais un pain mi-raculeusement envoyé soutient son existence et lui donne le tempsnbsp;d’attendre le roi qui vient ouvrir sa prison, lui rendre la liberté et lenbsp;faire asseoir sur les marches du tróne. Pas un trait de ce tableau quinbsp;ne convienne au chrétien des Calacombes et a l’Église naissanle dansnbsp;ses jours d’épreuves et dans ses jours de délivrance, alors que Constantin, devenu son admirateur et son enfant, lui donna la paix et lanbsp;combla de richesses et d’honneurs ; merveilleux changement qui n’é-tait aux yeux de la foi que remblème de la résurrection future.

Dans les Calacombes de Sainte-Agnès, comme dans celles de Saint-Callixte, de Sainte-Priscille et toutes les autres, Daniel est représenté debout enlre deux lions, les mains étendues et les yeux levés vers lenbsp;ciel. Le nu complet dans lequel il se trouve est une réminiscence dunbsp;paganisme qui prouve l’antiquité des peintures souterraines. La mêmenbsp;observation s’applique ii plusieurs autres sujets, notamment au prophéte Jonas dont nous allons parler. Né au sein du vieux monde etnbsp;formé é son école. Part chrétien fut longtemps é se dégager des tradi-Dons de son enfance. Spiritualiste par l’esprit, il le devint dans lanbsp;forme, lorsqu’il put se sulïire a lui-même. On le voit, dans les mo-saïques byzantines et dans les grandes fresques de l’école ombrienne,nbsp;oonformer en tout point son magnifique langage a ses chastes pensées.

(•) Si iuerinl tres viri isti in medio ejus Noc, Daniel, et Job, ipsi justitia sua libera-

aot animas suas. Ezech., c. xiv, 14.

T. tv. nbsp;nbsp;nbsp;9

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198 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROfS ROME.

La confiance en celui qui commande aux Hots de l’Océan, qui conserve la vie partni les horreurs de la mort, qui fait servir a l’accom-plissement de ses desseins, les tempêtes, les lions, les baleines, les péchés mêmes des hommes; qui menace pour pjirdonner; qui poussenbsp;la miséricorde jusqu’è sacrifier en quelqtie sorte les droits sacrés denbsp;sa justice et Ie respect dü è ses infaillibles oracles; enfin la résurrec-tion future, après laquelle tout sera paix et bonheur pour Thommenbsp;fidéle; tels sont les sentiments et les pensées qui devaient dominernbsp;dans l’dme des premiers fidèles. Jonas en était la personnification.

Faut-il s’étonner de Ie voir é chaque pas, et dans toutes les circon-stances de sa miraculeuse mission, briller aux voütes des cryptes sou-terraines? Une belle fresque des Catacombes de Sainte-Agnès nous Ie montreau moment de la tempête, alorsque l’équipage effrayé Ie jettenbsp;dans la mer. Au-dessus de l’eau apparait la gueule béanle du monstrenbsp;marin, dont les flancs vont devenir Ie vivant tombeau du prophéte indocile. A l’autre extrémilé du navire, on voit Ie monstre rejetant Ienbsp;depót qui lui a été confié; puis dans Ie lointain, au sommet d’unenbsp;colline. Jonas, couché sous Ie fierce desséché, protégé sa têle de sesnbsp;mains contre l’ardeur du soleil (i).

Tous les sujets précédents, a partir de la chute de nos premiers parents jusqu’au prophéte Jonas, ont cela de commun qu’ils annon-cent Ie dogme consolateur de la resurrection. Ló, se trouve une des.nbsp;raisons de leur présence dans les Catacombes. Toutes ces voix éparsesnbsp;viennent se réunir dans la grande voix d'Ézéchiel dont les prophéti-ques oracles proclamérent si éloquemment Ie réveil éternel des morts,nbsp;objet capital de la foi des premiers chrétiens et fondement inébranla-ble de leurs espérances.

Quelle image plus fidéle de Rome souterraine, toute peuplée de tombeaux, que celle vaste plaine couverle d’ossemenls, sur lesquelsnbsp;passe Ie soufflé de Dieu, dont la vertu les agite, les rapproche, les réu-nit, et en forme des corps oü Tóme revient habiter (2)! Ne semble-t-ilnbsp;pas que dans cetle vision Dieu montrait au Prophéte les Catacombesnbsp;au jour solennel de la résurreclion générale? L’Église naissante nenbsp;pouvait manquer de mettre sous les yeux de ses enfants Ie grand spectacle que présenterait un jour l’immense Nécropole, alors que s’épa-nouiraient en riches épis toutes les semences de l’éternité qu’elle ca-chait dans son sein (5).

(1) BoUari, t. ui, Tavota, 149.

(j) Ezech., c. XXXV, 1.

(^) Ossa Kternilalis setnina; flos cnim rcsurrectionis est inimorlalilas.— S. Aoibr.,

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HISTOIRE. nbsp;nbsp;nbsp;d99

Un beau sarcophage en marbre, des Catacombes Vaticanes, repré-senle la scène dans ses différentes phases. Le Prophéte est debout, la main étendue, en signe de commandement; prés de lui, deux hommesnbsp;apparaissent sur leurs pieds, tandis qu’un autre est étendu par terrenbsp;sans mouvement et sans vie. A cóté, on voit deux têles, 1 une qui paraitnbsp;vivante, l’autre qui commence è se couvrir de peau (i). Le soufflénbsp;divin semble animer le marbre, l’on croit entendre le bruit des osse-ments qui se rapprochent, et assister au spectacle saisissant de lanbsp;résurrection générale. Telle est la dernière page de l’Ancien Testament, reproduite dans les peintures primitives; comrae elle est la dernière de l’histoire du genre humain qui sera lue sur la terre par lesnbsp;nations assemblées. A Tiraposante préparation évangélique, que nousnbsp;venons de parcourir, succédera, demain, l’étude du Nouveau Testament!

Conlinuons, en attendant, notre pèlerinage sur la Voie Lavicane, et visitons les Catacombes des Saints-Claude, Nicostrate, Symphorien,nbsp;Castorius, Simplicius et des quatre saints Couronnés. Ce cimetièrenbsp;parait n’être qu’un glorieux quartier de celui de Sainte-Hélène. II estnbsp;sur la même Voie et è la même distance de Rome. Ainsi, nous n’avonsnbsp;plus è nous occuper de son origine; disons un mot des héros qui Tontnbsp;immorlalisé.

L’an 303, Dioclétien faisait lutter centre les tortures quaranle-neuf soldats de son armée. Ces intrépides champions de la foi, soutenus parnbsp;l’exemple de Callistrate, chef de la troupe héroïque, et ramené plu-sieurs fois au combat, venait de recevoir la palme de la victoire. Surnbsp;la scène sanglante paraissent ensuite quatre artistes célèbres, Claude,nbsp;Nicostrate, Symphorien, Castorius, accompagnés de Simplicius qu’ilsnbsp;ont converli è la foi. Ils ont refusé de profaner leur ciseau en fabri-quant des idoles. Saisis par les bourreaux, ils sont déchirés è coupsnbsp;de scorpion, puis enfermés dans des caisses de plomb et préeipitésnbsp;dans le Tibre. Un courageux chrétien, nommé Nicodème, trouva moyennbsp;de les retirer du fleuve et vint les ensevelir sur la Voie Lavicane, anbsp;Irois milles de Rome.

Deux ans après, un général des armées de Dioclétien et un prêtre, *lui devait être un jour le Souverain Pontife, apportaient, pendant lanbsp;nuit, quatre nouveaux martyrs dans la même Catacombe. Ce généralnbsp;®tait saint Sébastien, ce prêtre saint Melchiade, et ces martyrs les

Oe Fide Resurrect. — Famosa est visio et omnium Ecctesiarum Chris» leelioue eele-wata—s. Hier., In Ezech., c. xxxvii.

(•) Bottari, t. i, 137.

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200 lES TROIS ROME.

qualre saints Couronnés. On donne ce nom amp; quatre vaillanls soldats, Sévère, Sévérien, Carpophore et Victorin, qui aimèrent mieux renon-cer ü leurs grades que de trahir les serments qu’ils avaient fails inbsp;J’Évangile (i). Leurs corps, abandonnés aux chiens devant la statuenbsp;d’Esculape, ne purent être recueillis que cinq jours après leur mar-tyre (2). Telles sont les principales gloires de cette Catacombe quinbsp;peut être appelée, avec celle de Saint-Zénon, Ie quartier général desnbsp;soldats martyrs. .

20 JANVIER.

Calacombes de la Veie Lavicane (suite). — Catacombe de Saint-Castule. — Histoire.— Peintures, partie historique (suite). — Naissance de Notre-Seigneur. —Adorationnbsp;des Mages.—Jésus au milieu des docleurs, — baplisé par sainljean. — Détails surnbsp;Ia croix stationnale. — Jésus convertissant la Samaritaine; — guérissant 1’hémor-roïsse, — Taveugle-né; — multiplianl les pains. — Détails sur les marques des pains.nbsp;— Catacombe de Sainl-Zolique. — Histoire.

Sous Ie pontifical de Clément X, Ie chanoine Guizzardi, gardien général des Catacombes, était a la recherche de plusieurs cimelièresnbsp;mentionnés dans les Acles des Martyrs. II venait de franchir la Porle-Majeure, lorsqu’i un mille de distance il trouve, sur la Voie Lavicane,nbsp;une étroite ouverture obstruée par des terres et des ronces. II la faitnbsp;déblayer, et il se voit, a sa grande satisfaction, dans la Catacombe denbsp;Saint-Castule. Les galeries étaient reraplies de pouzzolane humide, etnbsp;les lombeaux parfaitement intacts; les fouilles commencèrent et furentnbsp;d’une grande richesse. Ce ciraetière, qui avail servi pendant la terrible persécution de Dioclélien, n’avait pas été ouvert. L’humidité desnbsp;terres de remblais forme lei une exception; car les Catacombes sontnbsp;généralement irès-sèches, élant ereusées dans Ie tuf granulaire qui boitnbsp;l’eau, mais qui ne la retient pas.

Cette circonstance, ménagée par la Providence, explique la possibi-lilé d’un séjour prolongé dans ces profonds souterrains. Creusée dans un sol de même nature, la Catacombe de Saint-Castule ne doit son

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Ces saints étaient ce qu’on appelait, dansrarmée,coniiCMian'i. On donnaitce nomnbsp;aux soldats qui, par leurs exploits, avaient mérité Ie signe de rhonneur, appelé Cor-nicuium. C’éiaieni les Légiunnaires de l’empire romain. — Bar., Ann. ad Martyr.,nbsp;21 aug.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Quorum corpora in platea jussil canibus jactari, qua; jacuerunt diebus quinque.nbsp;Tune li. Sebastianus venit noctu cum Mclcbiade Episcopo, et collegit corpora, et sepe-livit in Via Labicana, milliario ab urbe Roma plus minus tertio, cum aliis sanctis innbsp;arenario. Act. SS. M.V. qnat. Coronat. Bosio, lib. iv, cap. x.

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CATACOMBE DE SAINT-CASTÜLE. nbsp;nbsp;nbsp;2Ü1

huniidité qu’au voisinage de l’aqueduc de Claude. Néanmoins les terres s’y trouvèrent lellement ramollies ii l’époque de la découverte, qu’ilnbsp;fut impossible d’empêcher les éboiilements et de lever Ie plan généralnbsp;du cimetière. On remarque seulement que les galeries sont étroiles etnbsp;forment un dédale inextricable. Faul il y voir une précaution nouvelle,nbsp;suggérée aux fidèles par la violence de la persécution? On peut Ienbsp;croire sans hésiler.

Quoi qu’il en soit, ce quartier de la Rome souterraine doit son noni a saint Castule, zétaire de l’empereur Dioclétien, que nous avons déjanbsp;nommé en parlant de saint Tiburce. Quel spectacle! Pendant que Ienbsp;terrible persécuteur poursuivait les chrétiens dans tous les lieux denbsp;l’empire, dans les cavernes et les forêls, un grand nombre logeaientnbsp;dans les combles mêmes de son palais : et il ne Ie savait pas I Cesnbsp;brebis, cachées dans l’antre du lion, eussont probablement échappé aunbsp;massacre, si un faux frère ne les avait trahies.

Torquatus, Ie Judas qui avait dénoncé Tiburce, livra de même Castule et ses compagnons. Trois fois digne de mort, et paree qu’il était attaché a la personne de l’empereur, et paree qu’il était ebrétien, etnbsp;paree qu’il donnait asile aux proscrits dans la demeure palatine, Castule fut aussi livré trois fois aux plus affreux supplices, trois fois pressénbsp;de questions, et enfin précipité tout vivant dans une fosse profonde oünbsp;il fut étouffé sous une masse de terre. Cela se passait sur la Voie La-vicane, è un mille des murailles de Rome, Ie 26 mars de l’an 286 (i).

Après avoir rendu l’hommage de notre admiCation et de notre reconnaissance au héros ebrétien ainsi qu’a ses nombreux compagnons, nous reprimes l’étude de l’art primitif. Ici la réalité commence : auxnbsp;grandes figures de l’ancienne loi succèdent les mystères du Nouveaunbsp;Testament. Les seconds sujets expliquent les premiers, et la vaste galerie souterraine devient un livre complet d’instruction, parfaitementnbsp;approprié aux besoins de l’Église naissante.

Comme Adam et Ève sont a la têle de l’Ancicn Testament, Notre-Seigneur, Ie nouvel Adam, apparait au commencement du Nouveau, line foule de peintures et de sculptures représentent sa naissance. Surnbsp;la frise d’un sarcophage en marbre, de la Catacombe V^alicane, on voit

(i) Quia lutus nullus inveniri polerat locus ad lalcbram contbdiendam, morabanlur ODines apud Castulum quemdam chrisüanum, zelarium palalii. Qui Caslulus ibidem innbsp;Palatio in superiori domo valde alle commanebat. Ideo aulem haic mansio probabalur,

luia el ipse Caslulus cum suis omnibus chrislianissimus eral.....Is teriio appensus,

leriio crucialus, addiclus esl sanclis. In conlessione ilaque Domini perseverans, missus ®st in foveam, el dimissa est super eum massa arenaria, et ipse cuiA palma martyriinbsp;niigravit ad Christum. Act. MS. Codd. Vat. S. Marite ad Martyr, et Vall.

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202 LES TROIS ROME.

Ie divin Enfant couché dans un berceau en forme de panier, il est enveloppé de langes qui ne laissent aperccvoir que la téle. Derrière Ie berceau sont la sainte Vierge et saint Joseph; l’auguste mere est assise, saint Joseph est debout, la main étendue et les yeux fixes versnbsp;I’enfant. Au pied du berceau on voit le boeuf et Têne réchauffant denbsp;leur haleine les membres du divin Rédempteur. Ce bas-relief, d’unenbsp;bonne exéculion, montre l’antiquité de la tradition qui place dans lanbsp;grotte le bceuf et l’ane, dont la presence ménagée dans les conseils éter-nels, annongait, dès l’abord, la calholicité de la Rédemption qui devaitnbsp;s’étendre aux juifs et aux genlils. Les interprètes de Tart chrétiennbsp;n’avaient garde de laisser ignorer aux néophyles ce consolant mys-tère (i).

La naissance du Sauveur se reproduit constamment, même avec les détails que nous venons d’indiquer, dans l’adoration des Mages. Cenbsp;second sujet est un de ceux qui ont exercé le plus souvent le pinceaunbsp;des artistes primitifs. On con^oit toute l’importance que devait atta-cher l’Église naissante i» rappeler sans cesse aux néophytes venus dunbsp;sein de la gentililé, que le Sauveur était né pour eux aussi bien quenbsp;pour les Juifs. D’ailleurs, la fidéliié a la gramp;ce, le courage de la vocation chrétienne, la nature des hommages demandés par le divin Enfant, la conduite i tenir après l’avoir adoré, étaient autant de le?ons,nbsp;qui tiraient des circonstances un merveilleux i-propos et une grandenbsp;utililé.

Ici encore. Tart s’est montré le fidéle écho de l’Évangile. Non-seu-lement il représente les Mages avec leurs présents de différente nature; l’étoile qui dirige leur marche, qui s’arrête sur la demeure du divinnbsp;Enfant, et Marie qui tient soa fils dans ses bras ; il reproduit encorenbsp;le nombre traditionnel des nobles adorateurs. Comme on compte troisnbsp;bergers appelés è la crèche, tous les monuments des Catacombes nousnbsp;disent qu’il y eut trois Mages favorisés du même bonheur. Quant anbsp;leur pays et è leur royauté. Tart laisse indécise ceite double questionnbsp;surlaquelle la tradition elle-même n’est pas fixée.

Dans plusieurs bas-reliefs, et notarament dans un bon sarcophage des Groltes Vaticanes, les Mages portent la tunique ordinaire, ratta-

(l) Per bovem iniellige ilium qui legis jugo subjeclus est; per asinum autem, eum qui simulacrorum cultus onustus est crimine. Cteterum commune rationis expertiumnbsp;animaiium pabulum et vita fbenum est; Producens, inquit Propheta,/euwm jameno's.nbsp;Quod autem ralione prsdilum animal vescilur pane; idcirco in praèsepe, quod est animaiium ratione vacanlium sedes, e coelo delapsus vita panis proponilur, utetomatanbsp;ratioue remota sunt animalia, rationis cibo nulrianlur, atque ita ratione decorentur.nbsp;— S. Greg. Nazian., Orat. de Christ. Nativ.

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ADORATION DES MAGES. nbsp;nbsp;nbsp;203

chée par une ceinture et surtnonlée du sagum, espèce de manteau ouvert seulement par devant. Leur têle est ornée du bonnet phrygien,nbsp;semblable è celui des enfants dans Ia fournaise et commun aux peu-ples de rOrient. II laisse les oreilles amp; découvert, descend en trianglenbsp;derrière la têle et s’élevant au-dessus du sommet, forme une poinienbsp;recourbée; ce qui lui donne presque la figure d’un casque macédo-nien; les chameaux ou dromadaires qui leur servent de monlure sontnbsp;une autre indication du pays d’oü ils venaient. Dans la chaussure denbsp;ces illustres personnages, les partisans de leur dignité royale pour-raient trouver une preuve de leur opinion. Les Mages portent lesnbsp;haut-de-chausses, c’est-a-dire une semelle qui fait corps avec Ie basnbsp;et qui joint a l’élégance de la coupe une remarquable précision denbsp;forme. Or, en examinant les statues des rois barbares qui ornent Tarcnbsp;de Constantin et Ie musée du Capitole, on leur trouve exactement lanbsp;même chaussure (i).

La crèche révélait éloquemment aux néophytes la puissante bonté du divin Enfant qui amenait è son berceau les riches et les pauvres,nbsp;les bergers et les mages, les Juifs et les Gentils. Continuant sa mission, Tart Chrétien devait suivre la vie du Rédempteur et monlrer lanbsp;Sagesse élernelle subjuguant l’intelligence humaine et se faisant ren-dre hommage par la science sacerdotale : Jésus, dans Ie temple aunbsp;milieu des docteurs, est Ie troisième sujet offert è la meditation desnbsp;fidèles. Le généreux sacrifice des affections les plus chères pour obéirnbsp;è la voix de Dieu, le zèle è s’instruire, l’humble docilité en écoutantnbsp;les maitres de la doctrine; voila quelques-unes des lemons donnéesnbsp;aux néophytes par ce nouveau mystère (2).

A la voute d’un cubiculum des Catacombes de Saint-Callixte, on voit le divin Enfant assis sur un siége élevé, semblable aux chairesnbsp;pontificales; a ses pieds est une de ces cassettes de forme ronde, ap-pelées scrinium, dans laquelle on voit plusieurs volumes, emblème denbsp;la doctrine évangélique. A droite et è gauche sont les docteurs, dansnbsp;1’aititude de l’admiration. Deux exceptés, tous sont debout, les yeuxnbsp;tournés vers le Sauveur (s). Le siége du divin Maitre offre cela de re-niarquable, que les montants et le haut du dossier sont ornés de per-les. L’artiste a suivi l’usage vénérable des premiers chréliens qui, par

(1) Boltari, 1.1, p. 88-149-158-170; t. m, 23, 24.

(*) Quasi fons sapienliae dociorutn medius sedet; sed quasi exemplar liumililalis viderc Prius et inlerrogare doctores, quam instruere quaerit indoctos. Ne etenim parvuli anbsp;senioribus erubescant discere, et ipse ob tetatis humanae congruenliam ab bominibusnbsp;auscultare non erubuit Deus. — Beda, In Evang. Luc., c. nils) Bottari, t. ii, 16.

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204 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

respect pour les Pontifes et pour la doctrine sacrée dont ils sont les organes, couvraient d’ornemenls et incrustaient de pierres précieusesnbsp;la chaire d’oü leur venaient les divins oracles.

Fronle sub adverso gi adibus sublime tribunal Tollilur, anlistes proedicat unde Deum (i).

Prudent. Peristepk., Hymn, xi, v. 22S.

Aux mystères de la vie cachée succèdent les mystères de la vie pu-blique. Tous sont choisis avec tant de discernement qu’ils instruisent, édifient, afifermissent Ie catéchumène ou Ie néophyte sans effarouchernbsp;l'esprit et sans révéler aucun des secrets dont la discipline primitivenbsp;réservait la connaissance aux initiés. Passage mystérieux de la vie cachée a la vie publique, Ie baplême de Notre-Seigneur se trouve anbsp;cheque pas dans les Catacombes. Inutile de dire combien il importaitnbsp;d’offrir sans cesse aux regards des lidèles, l’auguste Sacrement quinbsp;d’enfants de colère les faisait enfants de Dieu et héritiers du royaumenbsp;éternel. La sublimité de leur nouvelle vocation et Théroïsme des ver-tus par lequel ils devaient la faire respecter, étaient l’abrégé de toutesnbsp;les instructions : or, Ie tableau du baptême leur rappelle éloquem-raent ces grands devoirs.

Je ne répéterai point ce que j’ai dit sur ce sujet, en expliquant une des fresques du cimetière de Saint-Pontien. Je me contenterai de fairenbsp;remarquer que la croix perlée et environnée de roses qui, dans cettenbsp;Catacombe, décore Ie compartiment voisin du Baptême de Noire-Seigneur, porte sur les croisillons deux flambeaux allumés. Des croi-sillons pendent, suspendues par deux chaineltes, les lettres a et D.nbsp;Cette double particularité indique une croix stationnale, c’est-k-direnbsp;qui précédait Ie peuple et Ie clergé lorsqu’ils se rendaient aux stations. Or, pour montrer que la croix est la lumière du monde, et Ienbsp;dernier mot de toutes choses, on ornait Ie divin étendard de flambeaux, et des deux lettres mystérieuses (2).

Le grand miracle qui, suivant les Prophètes, devait distinguer Ie Messie, était la conversion des Genlils et la réunion de tous les peu-ples dans un seul bercail : Tart chrétien ne pouvait manquer d’ennbsp;montrer Paccomplisseraent. Déja nous l’avons vu dans les mystères denbsp;la nativité et de l’adoration des mages; voici la conversion de la Sa-maritaine, la guérison de Thémorroïsse, de l’aveugle-né, qui le re-

(1) Ciampini, Monim. veler., c. xx.

(s) Euseb., Hist, eccl., lib. vi, c. vm; Ciampini, Monim. veter., t. u, c. ïi; Bottari, t. 1, p.m

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JÉSÜS GüÉRISSANT l’iIÉMOBBOÏSSE. 2o.:gt;

présentent sous une autre forme. Que lel fut Ie sens mystérieux de ces bienfaisantes actions du Sauveur, les Pères de l’Église ne laissenlnbsp;aucun doute a eet égard (i).

On Irouve la Samaritaine dans la plupart des Catacombes, notam-ment dans celles de Saint-Callixte et dans les Grolles Valicanes. L’ai-titude de cetle femme, sa têle découverle contrairement amp; Fusage, je ne sais quelle désinvollure dans lout son mainlien, annoncent la pé-cheresse laquelle Ie Sauveur parle avec bonté, pendant qu’elle lirenbsp;du puits l’eau qu’il lui demande (2). La corde du puils, enroulée surnbsp;un tourillon, monle et descend au moyen d’une manivelle, et la cru-che ressemble a celles qui sont encore en usage en Italië, du cóté denbsp;Ferenlino.

Un sarcophage de Sainle-Agnès, Ji la place Navone, représenle l’hé-morroïsse et sa guérison dans tous les détails du récit évangélique. Plus souvent encore on rencontre l’aveugle-né sur les tombeaux etnbsp;dans les peintures des cubicula. Outre la signification générale in-diquée plus haut, ce dernier miracle montrait aux néophytes lesnbsp;effets du baptême. De la vient que dans les assemblées appelées Scru-tinia, oü Ton choisissait les catéchumènes, on lisait Ie passage denbsp;l’Évangile qui raconle Ie mémorable événement.

Sur uné tombe découverte prés de Saint-Sébastien, on voit Ie pauvre aveugle, son baton a la main, debout devant le Sauveur. Sanbsp;tunique lombante, sa ceinlure, indique naïvement qu’il ne pouvaitnbsp;marcher qu’avec peine. Bien qu’il fut d’un Age mur, il est représenténbsp;beaucoup plus petit que Notre-Seigneur. Dans la taille élevée du Filsnbsp;de Dieu I’artiste a voulu expriraer la majesté suprème et la vénérationnbsp;qu’elle commande. Ici le sculpteur se conforme k I’usage re§u dansnbsp;l’antiquité, de représenter avec des proportions surbumaines les

(i) Ego hanc mulierem Ecclesiam esse pulo de geniibus congregatam, quee... omnem ignominiam siiam advenienle Chrisli fonte purgavit et maculas quas adulterinis sacri-legiis coniraxeral lide Salv.atoris abstersit, ac relinqucns, sicul inanem bydriam, prio-rem palrium cuUum, universe orbi Domini nunliavit advenium. — S. Ambr., Serm. in ivnbsp;Dotn. Quad)'. —Filia archisynagogi sighiliual populum Judaionim, propter quern \ene-ral Christus, qui dixit: Non sum missus nisi ad oves qme perierunl domus Israql. Ilianbsp;vero nuilier, quae fluxum sanguinis patiebatur, Ecclesiam iigural ex geniibus ad quamnbsp;Christus per praesentiam non crat missus. Ad illam ibai, illius sanitalem inlendebat.nbsp;Hrec inicrcurrit, tangii limbriam quasi nescienlis, id est, sanatur lanquam ab absente.

D. Aug., Serm. 5, de Temp. — Cascus a nalivilale, quern Dominus poslquam unxit ad piscinam Siloe misit lavandum, signiücal genus humanum a naiiviiate, idnbsp;*^st, a pi-imo homine errorum tenebris venumdalum. Cujus oculos Dominus de sputonbsp;quia Vorbum caro faclum esl, el lavari oculos in piscina jussit, ut baplizatus innbsp;Chfislo acciperet iegeni fidei cl crcderei in eum. —,S. Isid. llisp., In Joan.

(*) lioUai'i, 1.1, p. 91.

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206 LES TROIS ROME.

Héros et les Dieux, ainsi que les mènes des morts dans lesquels on voyait ime sortc de divinité. De li Ie mot d’Énée en parlant de Créuse,nbsp;son épouse, qui lui était apparue :

Infelix simulacrum, atque ipslus umbra Creus®

Visa mihi ante oculos, et nota major imago (i).

ViRG., jEncid., lil), ii, v. 772.

Le Paralytique guéri, purifié de ses fautes, s’en retournant dans sa maison, et porlant lui-méme le grabat qui l’avait apporté, est unnbsp;témoignage authentique de la divinité et de la misérieorde du Sau-veur, ainsi qu’une vive image de la resurrection glorieuse (2). Ce nouveau sujet tient une place distinguée dans la grande galerie des Cata-combes. Sur la plupart des monuments, le grabat n’a qu’une têie,nbsp;haute et recourbée en arrière comme celle de nos lits d bateau. Quel-quefois il n’a point de pieds, d’autres fois il en a deux seulement, anbsp;la tête; en sorte qu’il ressemble un lit de camp ou a une chaisenbsp;longue. Cette forme explique très-bien comment le paralytique putnbsp;l’emporter sur ses épaules (3).

Le Sauveur multipliant les pains est un nouveau mystère souvent offert par l’art primilif aux yeux des fidèles. Si les sujeis précédentsnbsp;annoncent que le Fils de Fhorarae était venu pour guérir tout ce quinbsp;était malade, sauver tout ce qui était perdu; celui-ci montre qu’il étaitnbsp;venu, comme il le dit lui-même, pour donner au monde la vie, et unenbsp;vie plus abondante. Ici l’art suit avec fidélilé les progrès de 1’Évangile,nbsp;qui mentionne deux multiplications de pains. Dans la première, il s’agitnbsp;de pains d’orge; dans la seconde, de pains de froment. Les Pères, in-terprètes du musée souterrain, ne manquent pas de faire observer quenbsp;les pains d’orge, multipliés les premiers, indiquent les éléments de lanbsp;doctrine donnés aux commen^ants, et les pains de froment, l’inslruc-tion plus substantielle réservée aux fils ainés de la foi. Quant aux pois-sons, nourriture plus délicate et plus recherchée, ils marquent la doctrine des célestes pêcheurs (4). Enfin la multiplication même du pain

(0 Botlari, 1.11,84.

S. Ambr., In Luc., c. v.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Bottari, 1.1,126-145,163,183.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Scriptum est in Evangeliis, quod sccundo paverii lurbas; sed et illos,quos primonbsp;pascit, id est incipientes, hordeaceis panibus pascit. Postea vero, cum jam prol'ecissentnbsp;in verbo et doctrina, triticeos eis exhibet panes. — Orig., Hom. xii, in Gen., c. xxv. —nbsp;Duobus autem piscibus piscatorum libros, quibus delicatiora hominibus alimenta de-i'erantur, signilicart arbitror. Duo autem pisces sum, quia et praedicatio Christi qiiae pernbsp;Apostolos effulsit evangelica et apostolica Scriptura resplendet. — S. Cyritl. Alexand.,nbsp;/» Joan. lib. tv, c. 1, xvu.

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DÉTAILS SUR LES MARQUES DES PAINS. 207

niatériel cache, sous un voile diaphane, la multiplication du pain céleste dans la divine Eucharistie.

Les pains multipliés sont presque toujours sillonnés par des lignes transversales, en forme d’échiquier ou même de croix. Plusieurs archéo-logues y voient l’indication du pain adorable de nos autels. D’autresnbsp;croient que ces lignes conslatent simplement l’usage common auxnbsp;Juifs, aux Grecs et aux Remains de tracer des lignes profondes surnbsp;les pains, les tourtes et les gateaux {’placentae), afin de pouvoir lesnbsp;rompre, attendu qu’on n’employait jamais Ie couteau pour les diviser.nbsp;La seconde explication, justiliée par Ie témoignage des auteurs contemporains, n’exclut nullement la première ; rien n’empêche Tart chrétiennbsp;d’avoir donné a ce signe païen un sens nouveau, comme il l’a fait dansnbsp;heaucoup d’autres circonstances (i). Voici, du reste, la figure de cesnbsp;pains marqués {panes decussati), si commons dans les peintures desnbsp;Catacombes en général, et en particulier dans les cimetières de Sainte-Lucine et de Saint-Gallixte (a).

Continuant de suivre la Voie Lavicane, on arrive a l’endroit de la Campagne romaine appelé la Vallée des marts, et situé è sept millesnbsp;environ de la porte Majeure. Lè se trouve la Catacombe de Saint-Zoti-que. Sur l’indicalion de quelques bergers, Boldetti eut Ie bonheur denbsp;la découvrir en i71S. Des fouilles y furent exéculées, et donnèrentnbsp;pour résultat plusieurs corps de martyrs.

D’après un manuscrit de la Vallicella, saint Zotique fut martyrisé sous Adrien avec les saints Amantius et Hippolyte. Ordre avail éténbsp;donné de les brüler vifs; les soldats chargés de l’exécution condui-sirent les martyrs sur la Voie Lavicane et les atlachèrent è des poteauxnbsp;lu’ils entourèrent de sarments; mais Ie feu respecla ses viclimes. Pournbsp;finir promptement, les soldats arrachèrent dans les vignes voisinesnbsp;des ceps et des pieux dont ils frappërent les martyrs sur la tête jusqu’anbsp;Co qu’ils eussent expiré. Les chréiiens vinrent les ensevelir avec hon-ttour au lieu même de leur mort, appelé Ie champ de Capréolus. Aprèsnbsp;3voir honoré longtemps Ie cimetière auquel il donna son nom, saintnbsp;Zotique fut transporlé par Ie pape saint Pascal dans la basilique de

(») Bar., An., t. i an. fi8.

(s) Bosio, lib. y, c. ix.

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lt;208 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

Saiate-Praxède. De la, il est venu habiter la pieuse église de Saint-Ange in Pescheria, oü l’Église lui paie Ie Iribut d’honneur et de con-fiance, qu’il mérite par ses glorieux combats et par sa puissante protection (i).

26 JANVIER.

Catacombes de la Voie Tiburline.— Catacombe de Saint-Laurent ou de Sainte-Cyriaque.

— nbsp;nbsp;nbsp;Histoire. — Peinlures des Catacombes, parlie bistorique (suite). — Notre-Seigneurnbsp;bénissant les petits cnfants, — ressuscitant Lazare, — sous la figure du bon Pasteur,

— nbsp;nbsp;nbsp;assis sur une montagne d’oü sortent quatre fleuves, — représenté dans la fleur denbsp;i’age, — sous la figure d’un agneau porlant la croix. — Monogramme du Christ.—nbsp;Raisons de eet emblèrae.

Le sang divin coulait sur les autels de Rome en l’honneur du grand martyr de Smyrne saint Polycarpe, lorsque, franchissantla porie Saint-Laurent, autrefois Porta Gabiusa, nous arrivions amp; la Cataeombe d’unnbsp;martyr non moins célèbre en Occident. L’antique Voie Tiburtine surnbsp;laquelle nous sommes a bien des gloires païennes a raconter : commenbsp;toutes les autres elle parle au voyageur de ses tombeaux hisloriques,nbsp;de ses temples, de ses colombaires dont elle montre les débris éparsnbsp;dans les vignes et dans les champs qui la bordent. Du scandaleuxnbsp;mausolée de Pallanle, affranchi de Claude, que Pline regardait commenbsp;une des hontes du sénat et de l’empire, il ne reste plus rien : on saitnbsp;seulement qu’il s’élevait h un mille de Rome (2). II en est autrementnbsp;de la tombe de nos martyrs et du lieu de leur sépulture. Le mondenbsp;entier connait le nom de saint Laurent et de sainte Cyriaque, et ilnbsp;révère leur Catacombe.

L origine de ce quartier, l’un des plus vasles de la Rome souterraine, remonte k l’an 260, sous le règne de Valérien. Issue d’une des plusnbsp;nobles families de l’empire, Cyriaque avail vécu onze ans avec sonnbsp;mari. Devenue veuve et chrétienne, elle consacra sa personne et sesnbsp;biens aux pauvres du Seigneur. Malgré la violence de la persecution,nbsp;elle donnait sa maison du Mont-Cselius, pour les assemblées des fidèlesnbsp;et la célébralion des saints mystères. C’est lit que saint Laurent, la

(1) Bosio, lib. IV, c. XII.

(«) Ridebis, deinde indignaberis; deinde ridebis si legeris, quod nisi Icgeris, non poles credere. In via ïiburtina inira primiim lapidem, proxinie annotavi monumen-lum Patlanlis ila inscriplum : Hiiic scnalos, ob lidem pietalemque erga patrones, or-namenta prastoria decrevit, et sesterlium centies quinquagies, cujus bonore contemnsnbsp;fuit. Episl. ad Montan.

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209

HlSTOIRE.

veille de son glorieux combat, distribua aux infirmes, aux veuves et aux orphelins les trésors de l’Église.

Après sa mort, l’illustre arcbidiacre fut déposé avec une grande pompe dans Ie champ de Veran, donné par sainle Cyriaque pour lanbsp;sépulture des chrétiens et situé sur la voie Tiburtine. Elle-mêrae nenbsp;tarda pas a venir l'y rejoindre. Sans égard pour sa haute naissance ninbsp;pour son grand %e, l’empereur fait arrêler l’illustre matrone et lanbsp;soumet aux plus affreuses tortures. On lui meurtrit Ie corps, on luinbsp;déchire les chairs, et on finit par lui briser les os k coups de lanièresnbsp;garnies de plomb et de pointes acérées. Les chrétiens recueillent avecnbsp;respect son corps sacré et Ie déposent dans la partie occidentale de sanbsp;Catacombe, non loin de saint Laurent (t).

Une armée de martyrs vint successiveraent prendre place dans la vénérable Nécropole. Je citerai seulement les saints Hippolyte, Irénée,nbsp;Abbundius, Justin, Tryphonie et Cyrille, dont les loculi furent arro-sés de larmes, parfumés de prières et couronnés de roses pendant unenbsp;longue suite de siècles, par des armées entières de pèlerins. Au direnbsp;de Prudence, l’Italie tout entière, depuis les provinces les plus éloi-gnées, s’abattait périodiquement comme une avalanche sur Ie champnbsp;de Veran, pour venir honorer les corps sacrés des martyrs, qui en fai-saient un lieu de miracles et de bénédictions (2).

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Posth.-ec facerunt eam plumbatis atque scorpionibus atfligi, usque dum Dominonbsp;reddidit spirituni. Corpus martyris sepelierunt in agro Yerano non longe a corporenbsp;B. Laurentii, a parte occidentali. 3IS. Codd. Vat.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;II laiit entendre Prudence, témoin oculaire, décrivant eet enthousiasme des sièclesnbsp;de foi pour les martyrs. Puisse ce tableau faire réfléchir nos sociétés déc.rcpiles et ma~nbsp;térialisées!

Oscula perspicuo figunt impressa metallo,

Balsama dilfundunt, fielibus ora rigant.

Urbs augusla suos vomit effundilque Quiriies,

• nbsp;nbsp;nbsp;Una el patricios ambitione pari.

Confundit plebeia phalanx umbonibus xquis Biscrimen procerum, prfecipitantc fide.

Nee minus Albanis acies se Candida portis Explicat, el longis djjcilur ordinibus.

ExsuUanl fremitus variarum hinc inde viarum Indigena, et Piceni plebs et lleirusca venit.

Concurrit Samnilis atrox habilatorct allaï Campanis Capua?, jamque Nolanus adest.

Quisque sua Kxius cum conjiige, dulcibus et cum Pignoribus rapidum carpere gesliliter.

Yix capiuni paluli populorum gaudia campi,

Ilueret et in magnis densa cohors spaliis.

Anguslum lanlts iUud specus essecalervis Haud dubium est, ampla fauce, licet palcal.

Peristeph. Hymti. de S. Hipp.

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LES TROIS ROME.

Celte Catacombe avail encore l’avantage de rappeler un des plus mémorables Iriompbes de l’Évangile. Tryphonie et Cyrille, dont ellenbsp;possédait les restes précieux, étaient, la première, l’épouse, el la seconde, la fille de l’empereur Dèce, l’un des plus exécrables persécu-teurs qu’ait eus l’Église naissanle. Post hunc, dit Lactance, exsurgitnbsp;exsecrabile animat Decius (i). La jeune Cyrille, baignée dans son sang,nbsp;fut abandonnée aux chiens, sur Ie théftlre de son marlyre; mais ellenbsp;fut recueillie par Ie saint prêtre Justin el ensevelie avec sa mère dansnbsp;Vagro Verano, non loin de saint Laurent (2).

Comme lous les autres, Ie cimetière de Sainle-Cyriaque est ricbe d’inscriptions, de sculptures et de peintures sacrées dont il est tempsnbsp;de reprendre l’hisloire. Nous avons laissé Tart chrétien montrant No-tre-Seigneur au désert, oü il nourrit miraculeuseraent la multitudenbsp;fidéle. II va nous Ie représenter toujours bienfaisant, toujours accessible, appelant auprès de lui et réhabililant par ses divines caressesnbsp;l’enfance si cruellement opprimée dans Ie paganisme.

Dans un cubiculum du cimetière d’Apronien, on voit Ie Fils de Dieu deboul, couvert d’un manteau, étendant la main sur un petit enfantnbsp;dont Ie visage et I’aUitude respirent l’étonnement et l’innocence. Cenbsp;n’était pas assez pour les néophytes de savoir que Ie Sauveur appelaitnbsp;tous les hommes sans distinction, a la vie de la gramp;ce et de la foi, ilsnbsp;ne devaient pas ignorer qu’il avail la puissance de relirer leur Sme denbsp;la tombe du péché et leurs corps des liens du trépas. Et voilé que lesnbsp;monuments primitifs leur représentant é chaque pas Ie myslère deuxnbsp;fois consolant de la résurrection de Lazare. Je ne nommerai pas lesnbsp;Catacombes oü il se trouve : il faudrait les nommer loules.

Je dirai seulement que Notre-Seigneur, dans l’accomplissement du miracle, est debout, une verge é la main dont il touche la téie de Lazare emmaillottée comme un enfant au berceau. La verge signifie lanbsp;loute-puissance du divin Moïse (5). Les langes employés égalementnbsp;pour envelopper l’enfant qui entre dans la vie, el Ie vieillard qui vientnbsp;d’en sortir, indiquent Ie commencement de la double vie du temps etnbsp;de réternilé : vie du temps qui commence au berceau, pour se déve-lopper avec l'ége; vie de réternilé qui commence au tombeau pournbsp;s’épanouir au jour de la résurrection {*)¦

(1) nbsp;nbsp;nbsp;De Monib. persecut.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Bosio, lib. IV, c. xvi, n. i, 3.

(s) Bosio, lib. VI, c. xv.

(4) Cunabula sunt panni infantia;. Sed Joannes Constantinopolitanus cpiscopus scribit

Lazarum in monumenlo cunabulis involutum--Beda, De Orthog., 1.1. — Pannis se-

pullura involucrum initialus; sic initio vila; ipsius finis correspondet. — Terlull., Contr. Marcig., lib. iv. c. xxi.

I

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NOTRE-SEtGNEDR SOUS LA FIGURE DU BON PASTEUR. 2H

De même que dans les sujets de l’Ancien Testament tont gravite autour du Rédempteur, qui est la force des martyrs, la résurrectionnbsp;et la vie; de même tous les sujets évangéliques parlent de lui, Ie re-présentent aux néophytes sous ses véritables caractères de Sauveurnbsp;universe], denourricier des êmes, de pasteur, de vainqueur de la mort;nbsp;en sorte qu’il est la elef de voute de lout l’édifice, ou, corame parle saintnbsp;Paul, la pierre angulaire qui réunit la Synagogue h l’Église, l’Eglisenbsp;de la terre i l’Église du ciel, Ie temps et l’éternité. Mais ce que Tartnbsp;primilif prend a lAche de placer partout sur Ie premier plan, c’esl lanbsp;charité du divin Auteur de la loi de grêce. Pas une crypte, je diraisnbsp;pas une sculpture, pas une peinture des Catacombes qui n’offre auxnbsp;regards attendris Ie Fils de Dieu sous la figure du bon Pasteur. Plusnbsp;que tous les autres, ce sujet me semble proportionné aux besoins denbsp;FÉglise naissante. Chaque jour elle voyait venir a elle ou Ie disciplenbsp;de Moïse, esclave Iremblant du Sinaï, ou Ie païen adorateur de divi-nités qui s’abreuvaient de sang humain; tous Juifs et Gentils envelop-pés, comme dit saint Paul, dans l’iniquilé et couverts de honteusesnbsp;souillures. Or, quelle merveilleuse impression devait produiré sur cesnbsp;èmes effrayées et coupables, la vue du Dieu de TÉvangile, sous lanbsp;forme d’un berger, qui n’attend pas Ie retour de la brebis égarée, maisnbsp;qui court i sa recherche, et qui, pour lui épargner la fatigue dunbsp;voyage, la place doucement sur ses épaules et la rapporte Iriomphantnbsp;au bercail! Faut-il s’étonner si, i la vue de tant de miséricorde, lesnbsp;païens eux-mêmes se sont écriés : Qu’il est bon Ie Dieu des chrétiens!nbsp;Faut-il s’élonner davantage si les chrétiens, transformés par ces divinsnbsp;exemples, répandaient sur leurs frères et jusque sur leurs ennemis,nbsp;ces effusions d’amour qui obligeaient encore les païens ii pousser eetnbsp;autre cri d’adiniration : Corame ils s’aiment et comme ils sont prêtsnbsp;^ mourir les uns pour les autres!

Pour montrer que eet immense foyer de charité divine ferait Ie tour du monde comme Ie soleil et qu’il embraserait tous les cceurs et tousnbsp;les siècles. Tart chrélien représentail Ie Sauveur debout sur une mon-'¦agne, dont la base donnail naissance a qualre fleuves qui prennentnbsp;leurs cours vers les qualre points cardinaux. Ce beau sujet se trouvenbsp;Irès-souvent dans les fresques primitives aussi bien que dans les mo-saiques des v® et vi“ siècles. Or, les interprètes de la doctrine, en mon-Ifant eet emblème aux néophytes, ne manquaient pas de leur dire ;

La religion de la vérilé et de la charité, descendue du ciel, retour-•^ara dans Ie ciel après avoir vivifié toutes les parlies du globe (i); Ie

i') Hinc egredienlia quatuor Evangelii flumina per universum mundum regencra-

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212 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

foyer divin d’oü elle émane ne s’éleindra jamais, la source des quaire fleuves est inlarissable : Jésus-Christ est éternel. » Et voili que pournbsp;reiidre cette pensee, Tart primilif ne craint pas de faire un mystérieuxnbsp;anachronisme. Bien que Ie Sauveur fut dans sa trentième année alorsnbsp;qu’il opérait ses miracles, Ie peintre, Ie sculpteur, Ie mosaïste chré-lien Ie représenlent sous les traits d’un jeune homme dans la fleur etnbsp;la beauté de l’öge. Du reste, son langage était facilement compris.nbsp;Malgré leurs idéés iraparfaites de l’éternité, les païens représentaientnbsp;souvent leurs dieux sous la figure de jeunes hommes, afin de marquernbsp;leur immutabilité. On peut citer, entre autres, l’Apollon du Belvédèrenbsp;et cette foule de génies qui décorent- les sarcophages du Capitole ounbsp;les fresques de Pompei.

Les artistes chrétiens employèrent la niême forme pour rendre ia divinité de celui qui ne connait ni changement, ni ombre roême denbsp;vicissitude (t). Au besoin ils auraient pu trouver la même idéé chez lesnbsp;Juifs (2). Par une conséquence du même principe, on rencontre aussinbsp;dans les Catacombes les anges, les saints, les patriarches eux-mêmes,nbsp;tels que'Abraham, Noé, Moïse, sous la figure de jeunes hommes, pournbsp;marquer Pimmutabilité de leurs vertus, de leur bonheur et de leurnbsp;gloire (3). Entre autres monuments oü Ie Sauveur parait sous les trailsnbsp;de Padolescence, je nomraerai Ie célèbre sarcophage de Probus, préfetnbsp;du Prétoire; Purne sépulcrale de Sainte-Agnès, a la place Navone;nbsp;enfin, Varcosolium d’une crypte des Catacombes de Sainte-Agnès (4).

Afin de rendre plus sensible Ie grand mystère de l’amour divin dont la transformation du monde entier devait être l’heureux effet, on nenbsp;craignait pas de recourir aux types païens.

C’est ainsi qu’Orphée adoucissant les animaux et faisant mouvoir les pierres aux mélodieux accords de sa lyre, représente sur un monument parfaitement chrétien Poeuvre de la conversion du monde opérée

lionis evehunl lavacrum. —S. Cypr., JTmcL de Ablut. ped.; Thcodoret., In Psal. xiiii; S. Eucher., In C. lu Gen. — Qualuor paradis! tlumina quatuor Evangelista;,qui abununbsp;fonle vitó, id est. Domino Salvatore inspirali el consona voce gentibus cunctis lavacrumnbsp;salutis praidicant. — Bed., In Gen., c. 11, ct In Isai, c. v. — Fluvius qui de loco volup-latis cgreditur, est Evangelica pra'dicatio, quse de Domino Jesu Christo procedit, quinbsp;est tons vitagt;. — Innocent III.

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Apud quem non est Iransmutatio nee vicissitudinis obumbratio. S. Jacob., c. 1,17.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Sed a Deo nunquam scnescente,seniperque juvene, nova recentiaquebonacopiosenbsp;accipiendo discant credere, non esse quiequam vetus apud Dcum, aut omnino pratteri-luni, sed subsistero obsqne tempore noscensque, etc.— Pbilo., De Sacrijic. el Cain.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Jiislorum anima; juvenescunt, vigent, et in ipso oetalis floro semper consisltinl. —nbsp;D. Chrys., [lom. x, in Episl. ad Rom.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Bottari, 1.111, 84; Bosio, lib. vi, c. xvii.

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REFLEXIONS. nbsp;nbsp;nbsp;2)3

par le Sauveur. Ce monument est une fresque bien conservée des Ca-laeombes de Saint-Callixte, publiée par Bosio et par Botlari, et tres-bien expliquée par Boldetti, d’après un passage d’Eusèbe (i).

Mais la rédemption de I’univers, I’expiation du péché, la conquêle du genre humain a la vérité, 1» la verlu, malgré l’énergique résistancenbsp;des passions, de l’enfer et des Césars, cette grande entreprise, prés denbsp;laquelle les travaux d’Hercule ne sont que des jeux d’enfants, quelnbsp;labeur elle coütera au Héros divin! Sa vie, son sang seronl le prix denbsp;la victoire. Ici Tart chrélien rencontre une dilEculté que ne connailnbsp;pas OU beaucoup moins le docteur qui enseigne de vive voix. Lenbsp;peintre ou le sculpteur fixe sa parole; le maitre voit la sienne expirernbsp;avec le son qui l’aecompagne : l’artiste expose sa pensée aux regardsnbsp;de tous indistinctement; le prédicateur peut choisir son auditoire,nbsp;modifier, abréger, voiler, ou développer son enseignement selon lesnbsp;besoins de ceux qui l’écoutent.

Si done l’Évêque, ou le Prêtre, chargé d’instruire les néophytes ou les catéchuraènes, pouvait, en gardant certaines mesures, expliquernbsp;les terribles drames de la Passion et de la Croix, ix des hommes pournbsp;qui ce lugubre raystère était un scandale ou une folie; l’artiste étaitnbsp;dans une condition moins favorable. II fallait néanmoins qu’il remplitnbsp;sa mission. Pour atteindre ce but, en ménageant toutes les suscepti-bilités juives et païennes, il recourail é des figures assez transparentesnbsp;pour laisser deviner sa pensée, mais assez obscures pour lui ólernbsp;l’éclat qui aurait offusqué les yeux encore trop faibles des néophytes.

Ainsi, pour exprimer le. sacrifice du Calvaire, ils représentaient le sacrifice d’Abraham qui en est la plus vive image. Le bois du sacrifice, l’innocente victirae laquelle est substitué le bélier mystérieux,nbsp;embarrassé dans les épines; rien n’est oublié; tout parle de soi-même.nbsp;Un mot d’explication suflisait pour tout révéler : Tart fournissait lenbsp;thème : é l’enseignement vocal de le développer. A cette c*use il fautnbsp;certainement allribuer Ia multiplication de ce sujet dans nos monuments de la plus haute antiquilé. Peu é peu, les esprits se familiarisentnbsp;avec la folie, et le scandale de la croix. Tart devient alors plus ex-plieite.

Au commencement du iv® siècle 11 soulève un coin du voile et il nous montre la grande Victime du Calvaire, sous la forme d’un agneaunbsp;*lont la tête est environnée du nirabe crucifère. Plus tard il place une.nbsp;®roix a moitié voilée sur 1’épaule du divin Agneau. Enfin Constantin,

(lt;) Bosio, lib. VI, c. xxi; Bottari, t. n, 50; Boldelli, lib. i, c. vii; Euseb. De Laud. Coir ’‘ant., tib. xni, c. xv.

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214 LES TROIS ROME.

Ie premier, fait dessiner et sculpter Ia croix et même Ie crucifix dans toute leur yérité. Néanmoins, il croit devoir entourer Tinstrument dunbsp;supplice de couronnes de roses et de pierres précieuses, afin d’en dé-guiser l’ignominie (i).

Soit pour Ja raison précédente; soit pour perpétuer Ie souvenir de l’apparition de la croix couronnée qui apparul au premier empereurnbsp;chrétien; soit enfin pour rappeler que c’est par la croix qu’on oblientnbsp;Ia couronne, l’usage s’établit de représenter la croix environnée d’unenbsp;couronne. On la retrouve ainsi dans les Basiliques du iv® siècle et surnbsp;les médailles impériales de la même époque. Je citerai celles de l’em-pereur Zénon et des impératriees Eudoxie et Pulchérie; puis la Basi-lique de Nole, si bien décrile par saint Paulin (2). II nous reste unnbsp;vestige de cette ancienne coutume dans les croix entourees d’un cercle,nbsp;et qu’on grave sur les murs des églises consacrées par les évêques (3).

Antérieurement è Constantin, et dès la naissance même de l’Église, Tart chrétien avait trouvé Ie secret merveilleux de représenter dans unnbsp;seul emblème et la croix et Ie nom de la grande Victime qui l’avaitnbsp;arrosée de son sang. Je veux parler du monogramme du Christ. Lesnbsp;deux initiates du nom grec de Notre-Seigneur sont tellement disposéesnbsp;qu’elles forment une croix. Or, que eet emblème mystérieux soitnbsp;antérieur a l’apparition du /TV Labarum, la preuve en est qu’on Ienbsp;irouve dans les fresques, sur les verres, les inscriptions, les lampes etnbsp;les bas-reliefs des temps apostoliques; je citerai entre autres la pierrenbsp;tombale de saint Marius, martyr sous Adrien; de saint Alexandre,nbsp;martyr sous Antonin; du pape Caius, martyr sous Dioclétien; de saintnbsp;Januaries, martyr sous Alexandre Sévère.

De plus, qu’il fut exposé partout aux regards des catéchumènes et des néophyles, c’est un fait évident comme la lumière du jour pour

(i) En décrivant I'urne vaiicane de Livia Primitiva, Boltari s’exprirae en ces termes : lt; L’essere ornate tulto di gemme il salulifero segno della croce è chiaro argomenlo,nbsp;chc quest’ area non fu scolpita prima del tempo, in cui impero il gran Constantino,nbsp;poichè seconde Eusebio (Vit. Const, lib. i, cap. xxx), egU fu il primo, che introdurrenbsp;1’ornare in sifatta guisa le croci. » T. 1,139.

(s) Ardua florifera; crux cingitur orbe corona:,

' Et Domini fuso tincta cruore rubet.

Poem, xvni, in Natal, ix S. Filicis, in fine.

Cerne coronatam Domini super atria Chrisli Stare crucem, duro spondentem celsa laborinbsp;Pra;mia : tolle crucem qui vis auferre coronam.

Id., ibid.

(3) Pamelius, Liturg., 1.1, p. 302.

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CATACOMBES DE LA VOIE NOMENTANE. 215

qui a visité les Catacombes. On voit que Tart a voulu enseigner, comme il pouvait Ie faire, Ie grand mystère de la croix en pla^ant partout Ienbsp;nom et Ie signe sacré qui élaient la consolation, la force, l’espérancenbsp;de l’Église naissante, Ie salut et la vie du monde, Ie dernier mot denbsp;tout Ie symbolisme chrélien. Son enseigneraent ne fut pas vain; nousnbsp;apprenons de Terlullien et des autres Pères de l’Église, que les fidèlesnbsp;ne faisaient pas la moindre action sans graver sur leur front ce signenbsp;adorable et sans prononcer ce nom tout-puissant, devant lequel toutnbsp;genou fléchit au ciel, sur la terre et dans les enfers (i).

27 JANVIER.

Catacombes de la Voie Nomenlane.— Catacombe ad Nymphas. — Histoire de saint Ni-comède. — Histoire. — Peintures, partie historique (fin).— La sainte Vierge,— saint Pierre et saint Paul,— les Martyrs, — les Chretiens en prières, — les Agapes. — Catacombes de Saint Alexandre. — Histoire. — Catacombes des saints Primus et Féli-cien. — Histoire.

Après avoir vénéré la tête deux fois immortelle de saint Chrysos-tóme, offerte aujourd’hui dans la Basilique Vaticane aux hommages de 1’Orient et de l’Occident, nous gravlmes Ie Monte-Pincio. De 1^, fran-chissant la Porte Pie, nous entrümes sur la voie qui conduisait a No-'quot;nenium, l’antique cité des Sabins. Sur les bords de cette voie s’éle-vaient jadis des villas et des temples célèbres. A quatre milles de Romenbsp;élait la villa de Phaon, dans laquelle Néron se donna la mort; celle denbsp;Sénèque, dont les vignes sont louées par Pline et Columelle (ss); cellenbsp;du poète Martial et de Quintus Ovidius, son ami. Entre tous les autres, Ie temple de Diane, situé pres des murs de Rome, est devenu fa-tneux dans l’histoire des martyrs. De ces édifices païens il reste ii peinenbsp;*luelques ruines informes; comme tous les autres ils ont fait place auxnbsp;tnonuments immortels du christianisme. Plutarque parle de fontaines

de. marécages qui environnaient la Voie Nomentane; et l’inscription d’une jeune enfant noyée dans ces fontaines, nous apprend qu’ellesnbsp;* sppelaient les Nymphes, ou les Fontaines des Nymphes (a).

De la Ie nom de Catacombe ad Nymphas, donné au très-antique

1*) Tertull., De Coron. mitU., c. iii.

1®) Plin., lib. XIV, c. n; Columel., De Re rustica, lib. iii, c. in.

(s) E vita Nymphae l'ontanm me rapuerunt.

Forte mihi è tali gloria morle venit.

Parvula quippe alter mihi nondura effluxcrat annus,

Romano generc, sed Philesia nomine.

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216 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

cimetière que nous allons menlionner. On ignore quel en fut Ie fon-dateur; les monuments primilifs atlestent que l’apötre saint Pierre avait coutume de s’y rendre pour adminislrer Ie baplême. Je citerainbsp;entre autres les actes des saints martyrs Papias et Maurus qui souffri-rent sous Dioclétien, et qui sont les gloires de celte Catacombe dansnbsp;laquelle ils furent déposés.

La cinquième année depuis Ie commencement des Thermes, c’est-a-dire l’an 303, Ie 29 janvier, Ie préfet Laodicius, siégeant sur son tribunal, se fit amener dans Ie cirque Flaminien deux soldats, nommés Papias et Maurus. — « Je sais que vous êtes chréliens, leur dit Ie juge.nbsp;•— Oui, nous Ie sommes, répondent les martyrs. — Quittez votre er-reur, et adorez les dieux de l’Empire. — Que ceux-li les adorent quinbsp;renoncent è la vie éternelle. — Vous perdrez bientót la vie, si vousnbsp;n’adorez les dieux immortels : failes ce que je vous dis et vous vivrez.nbsp;— Sacriliez, vous, et vous vivrez dans les Hammes de l’éternité. »

A ces mots, Laodicius ordonne de les élendre par terre et de leur donner la bastonnade (i). Un centurion s’approche et les touche légè-rement avec son bdton de cep de vigne. Aussitót les soldats chargés denbsp;l’exécution déchargent une gréle de coups sur leurs braves et innocentsnbsp;camarades. Pendant ce cruel supplice, les martyrs ne faisaient entendre que ces paroles : « Christ, soutenez vos serviteurs (2). » Ensuitenbsp;Ie préfet les fait relever, attacher b des poteaux et briser a coups denbsp;lanières garnies de plomb, jusqu’i ce qu’ils aient rendu Ie derniernbsp;soupir. La nuit suivante un saint prêtre, noramé Jean, viiit recueillirnbsp;leurs corps et les transporter sur la Voie Nomentane, dans la Catacombe ad Nymphas, oü saint Pierre baptisait (3).

Soit a cause de sa situation dans un terrain humide, soit par suite des invasions des Barbaras, il ne reste plus rien aujourd’hui de ce vé-nérable cimetière. Mais Bosio vne semble avoir raison, contrairementnbsp;è l’opinion de Boldetti, d’en fixer remplacement prés des muraillesnbsp;de Rome el non point è six ou sept milles de distance. Esl-il croyablenbsp;que saint Pierre eüt fait un aussi long trajet pour aller exercer unenbsp;fonction qui devait se répéter chaque jour, lorsqu’il pouvait 1’accora-plir dans des Catacombes beaucoup plus rapprochées, notammentnbsp;dans celle de Sainte-Priscille (4) ?

(1) II faulremarquer ici la conformité parfaite des acles des marlyrs avec les usages militaires ; on sait quo la basloniiade et Ia décimalion élaient les deux supplices réservés aux soldats. — Coelius Rlioding. Lect. anliq., lib. x, c. v.

(») Christe, adjuva nos servos luos.

{3) Quorum corpora collcgil Joannes presbyter noctu et sepelivit in Via Nomentana, quarto kalend, februarii, ad JVympbas, ubi Petrus baptizabat. — Bar., An. 505, n. m.

(4) Bosio, lib. IV, c. XX; Boldetti, lib. it, c. xvii.

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mSTOIRE DE SAtNT NICOMÊDE. nbsp;nbsp;nbsp;217

A droile de la Porte Pie, non loin des murailles de Rome, se trou\e le cimetière de Saint-Nicomède, probablement contigu au précédentnbsp;PI a celui d’Ostriano, dont nous parlerons plus tard. Les carrières denbsp;pouzzolane, ouvertes dans les vignes qui couvrent cette partie de lanbsp;Campagne, ont tellement dégradé la Catacombe de Saint-Nicomèdenbsp;fiu’elle est a peine reconnaissable. Pourtant elle offre un grand souvenir au voyageur chrélien. Je veux parler du glorieux martyr qui luinbsp;donna son nom, en l’honorant de sa sépulture. Nicomède était unnbsp;prêtre de Rome, dont Ie zèle ne craignail pas d’affronter les bourreauxnbsp;pour arracher é leur fureur les restes sanglants des chrétiens. Get actenbsp;de charité devait avoir sa récompense.

Le nouveau Tobie est arrêté pap ordre de Domitien; on Ie presse de sacrifier aux idoles : « Je ne sacrifie qu’au Dieu tout-puissant quinbsp;règne dans les cieux; » telle est son unique réponse (i). Des lanièresnbsp;garnies de plomb lui déchirent le corps el lui brisent les os; mais sanbsp;bouche, a peine un instant fermée par la mort, va redire devant lenbsp;flieu de Péternité sa devise triomphale ; « Je ne sacrifie qu’au Dieunbsp;tout-puissant qui règne dans les cieux. » Pendant que le Roi des martyrs couronne son généreux soldal, un ecclésiaslique, noraraé Justus,nbsp;fecueille ses restes vénérables et va les ensevelir dans son jardin, nonnbsp;loin des murs de Rome, sur la Voie Nomentane (a). J^e corps du saintnbsp;I’rêtre y resta jusqu’au temps de saint Pascal, qui le fit transporternbsp;dans 1'églisede Sainte-Praxède, oü il repose aujourd’hui.

Continuant è marcher vers d’autres Catacombes, nous reprimes l’étude de 1’art primitif. Hier il nous avail laissés au sommet du Golgotha, en face du grand myslère de la vie et de la mort, de la rédemp-tion par le sang et de la résurrection dans les splendeurs de la gloirenbsp;«ternelle. Que les peintures et les sculptures des Catacombes soientnbsp;Une préparation amp; ce sublime dénoument, que chacune en particuliernbsp;*oit une révélation partielle, et comme une syllabe de cette parolenbsp;finale : Réscbrection ; résurrection glorieuse par Jésus-Christ; c’est unenbsp;''orité que rendent évidente et la nature même de ces figures, et 1’in-’ofprélation des maitres de la doctrine dont l’enseignement inspiraitnbsp;génie de l’artiste, et dont l’autorilé surveillait le travail (s); enfin,nbsp;1* disposition relative des sujets.

(') Ego non sacrifico nisi Deo omnipotenli, qui rognal in coelis. — Bar., Martyr., sept,

i-) Corpus vero ejus in Tibrim pr.Ticipilatum est; clericus autem ejusdem presbyter!^ quot;mine ei opere Justus, collegit corpus ejus, et posuit in biroto suo, et doxit ad hortumnbsp;suuin, juxia muros. Via Nomcnlana, et illic cum sepetivil septimo kal. ociob. SIS. Cod.nbsp;quot;'k; aptid Bosium, lib. iv, c. xxi.

(*) Aux preuves citées jusqu’ici j’ajouterai ce passage décisif des Constitutions Apos-

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218 nbsp;nbsp;nbsp;les TROIS ROME.

La voute des cryptes est ordinairement peinte aussi bien que la niche. Chaque voute se divise en plusieurs corapartiraents, remplis parnbsp;des sujels opposés, deux amp; deux, et ticés de TAncien et du Nouveaunbsp;Testament, sauf quelques exceptions assez rares oü les quatre sujelsnbsp;sont empruntés, soit la Bible, soit i l’Évangile. Cette disposition denbsp;sujets, alternativement mosaïques et évangéliques, dans Ie choix etnbsp;dans Ie rapprochement desquels règne cerlainement une intentionnbsp;symbolique, est assez générale dans les Calacombes, poury reconnailrenbsp;une vue systématique, une haute pensée qui avaient dü présider dansnbsp;Ie principe i celte décoralion. La même pensée se révèle dans la composition des sarcophages, dont les sculptures représentent générale-ment aussi, par égale moiiié, des trails de l’Ancien et du Nouveaunbsp;Testament. Or, c’est lö un trait caractéristique d’autant plus digne denbsp;fixer rattenlion, que Ie motif en est puisé dans tout un ordre d’idéesnbsp;qui se rapporlenl it la croyance de la résurrection (t).

J’aime a répéter ici ce que J’ai dit ailleurs : l’Église romaine a voulu immortaliser et montrer au grand jour ce magnifique système de Tartnbsp;chrélien, en faisant reproduire it Sainl-Jean-de-Lalran la sublime épo-pée dont l’ébauche se trouve dans les Calacombes. De son cóté, Ienbsp;moyen flge dans ses vitraux, dans ses sculptures, dans ses fresques sinbsp;variées el si poétiques,n’a fait que continuer Tart primilif dont il n’estnbsp;que Ie prolongeraent.

Toutefois, pas plus que Ie christianisme la grande épopée de Tart primitif ne finit au Calvaire. Le iriomphe que Jésus-Christ remportenbsp;sur la mort n’est pas un triomphe personnel. Le ciel dont il prendnbsp;possession ne s’ouvre pas pour lui seul: il triomphe pour l'humanité.nbsp;C’est pour elle qu’il prend possession de la bienheureuse Jérusalem,nbsp;dont il partage les délices avec ses fidèles iraitaleurs. L’art chréliennbsp;va nous montrer les premiers compagnons de sa gloire, les premiersnbsp;fruits de la rédempiion, et comme les prémices de cette régénérationnbsp;universelle qui, s’accomplissant peu è peu avec le cours des siècles.

totiques ; « Prielerea credimus rescriïectionem lore vel ob ipsain DoTaiui resurreclio-

nem. Ipse enini est qui Lazahum.... resuscitavit.....qui Jonam vivenlem..... eduxit de

ventre ceii... qui tres püeros e lornace Babylonis, et Dasielevi et ore leonis, is non ca-rebil viribus ad suscitandum nos quoque... qui paralvticum sanum in pedes statuit... et C.ECO a nativiiaie, quod deficiebat... reddidit, is ipse nos quoque ad vitam revocabit...nbsp;qui ex QUINQUE PANlnus ET DUOBUS PISCIBUS QUINQÜE MIELIA virOrUUl saliavit... et ex AQIIAnbsp;VISUM confecit... item ex morie sublatos vil.-E reddidit. » Const. Apost., Ub, iv, c. 7.—nbsp;Quoi de plus clair que ce passage, qui ranicne tous les traits reproduils le plus souventnbsp;dans les Calacombes, a une pensée commune : La Résurrection?

(i) Voyez Tableau des Calacombes, p. 114.

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LX SAINTE VIERGE. nbsp;nbsp;nbsp;219

doit placer au dernier jour du monde l’immense familie du nouvel Adam sur les trónes conquis pour elle, par son auguste chef.

Fidéle écho de la foi, Tart qui a si bien exprimé Ia longue péripétie et Ie dénoüment du drame divin, va nous en montrer les glorieusesnbsp;conséquences. La Mère de Dieu, les apótres Pierre et Paul, quelquesnbsp;martyrs, tels élaient, a 1’époque oü il composait sa galerie souterraine,nbsp;les types authentiques de l’humanité transfigurée et béatifiée parnbsp;Jésus-Christ. Aussi ne manque-t-il pas de les reproduire. Jusqu’ici ilnbsp;a montré Ie labeur et Ia souffrance; désormais il va montrer Ie triom-phe et Ie bonheur. Autant qu’il en est capable, son pinceau ou sonnbsp;burin deviendra plus gracieux et plus doux.

La sainte Vierge se trouve assez souvent dans les peintures primitives ; dans une des belles cryptes des Catacombes de Sainte-Agnès, elle forme Ie tableau principal. Au centre de la niche qui surmontenbsp;yarcosoUum, apparait l’auguste Mère de Dieu. Elle est en demi-figure, ayant sur son giron 1’Enfant Jésus. Sa têle est ornée d’un voilenbsp;relevé par-devant, tombant sur les épaules, et dont les plis viennentnbsp;reposer sur les bras. Un collier de perles entoure son cou, et se marie a un lil de perles ou d’étolïe qui va se rattacher au sommet dunbsp;front.

Cette figure a cela de très-remarquable, qu’elle porte Ie cachet de sa haute antiquité, et qu’elle montre la croyance de TÉglise nais-sante relativement a la sainte Vierge. D’abord, il est évident que lesnbsp;Pères de l’Église n’ont jamais dit aux peintres, que Marie, la plusnbsp;humble des créalures, se parait des riches ornements qu’on trouvenbsp;dans celte figure. Mais pour exprimer Ia haute idéé qu’il avait de lanbsp;gloire de la Mère de Dieu, l’artisle lui a donné les splendides atoursnbsp;des dames romaines de son temps, et surlout les colliers de pierresnbsp;précieuses. 11 n’a pu prendre que la son modèle; car les femmes chré-tiennes, fidèles aux prescriptions apostoliques, s’abstenaient, commenbsp;nous l’apprenons de Clément d’Alexandrie, des ornements d’or et denbsp;pierreries (i),

Ensuite, ce qui est encore plus intéressant, la sainte Vierge est re-Présentée les bras étendus, dans Tattilude de la prière. Ainsi, aux yeux de nos Pères comme aux nótres, la sainte Vierge prie Dieu, et nenbsp;nous accorde pas par elle-même les grftces que nous sollicitons. Lenbsp;rulte que nous lui rendons, le culle que lui rendaient les siècles apos-loliques n’est done pas un culte suprème, un culte d’adoration. Quo

(•) Pcedagog., lib. ii, c. xii; S. Hier., Epist. yu; Terlull., De Habitu mtihebri.

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220 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

peuvent opposer les protestants a ce monument dix-sept fois séculaire? Je n’en sais rien. Tout ce que je sais, c’est que s’ils avaienl mieuxnbsp;connu notre vénérable antiquité, jamais ils n’auraient osé jeter a lanbsp;face de l’Église Ie reproche absurde d’idolAtrie (i).

L’art Chrétien ne se montre pas moins exact dans la représentation des apótres saint Pierre el saint Paul. D’une part, on Ie voit copier,nbsp;aussi fidèlement que peut le permettre son inexpérience, le type tra-ditionnel des deux princes de l’Église; d’aulre part, religieux inter-prète de la foi, il assigne i chaque ap6lre la place qu’il occupe dansnbsp;la hiërarchie calholique. La suprématie de saint Pierre sur les Apótres,nbsp;et du pape son successeur sur tons les évêques ; telle est la pierre an-gulaire de I’Eglise. Ce dogme fondamenlal, sans lequel il n’y auraitnbsp;plus ni unité de ministère, ni unilé de croyances, ne pouvait être oublié par I’artiste chrélien. Si les auteurs des hérésies et des schismes,nbsp;non contents de Irouver cetle vérilé qui les condamne dans l’Évangile,nbsp;dans les écrits des Pères et dans les canons des conciles, s’étaientnbsp;donné la peine de descendre aux Gatacombes, ils I’auraient \ue gravéenbsp;naïvement par la main des martyrs sur les humbles monuments denbsp;l’Église naissante.

Ces monuments sont de quatre sortes, les verres, les peintures, les sculptures et les mosaiques. Les premiers dans I’ordre chronologiquenbsp;sent les verres et les peintures. Or, parmi cette multitude innombra-ble de verres peints, trouvés dans les Gatacombes, on n’en connait pasnbsp;un sur lequel saint Pierre soit placé a la gauche de saint Paul : par-tout il occupe la place d’honneur, la droite. Il en est de même desnbsp;peintures a fresque, des sculptures et des raosa'iques, dont les unesnbsp;remonlent au berceau de l’Église, et les autres sont des ouvrages dunbsp;quatrième siècle et des siècles suivants. Toutes perpétuent le mêmenbsp;dogme qu’elles transmellent au moyen Age, d’oü, par une traditionnbsp;artistique non interrompue, il est arrivé jusqu’a nous. Un petit nom-bre d’exceptions résultant de l’inattention ou de l’inexpérience de l’ar-tiste, ne font que confirmer la régie.

Or, d’oü peut venir, demande le savant Mamachi, cette coutume de rcprésenter toujours saint Pierre ü la droite et saint Paul a Ia gauche? Ce n’est ni du hasard ni du caprice, autrement elle n’aurait pasnbsp;élé si constante ni si universelle. 11 faut done y voir évidemment lenbsp;reflcl du dogme calholique de la suprématie de saint Pierre et l’échonbsp;des paroles du divin Maitre : a Tu es Pierre, el sur cette pierre je

(1) Boltari, t. iii, p. 83,172-176, UI, etc.

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SAINT PIERRE ET SAINT PAUL. nbsp;nbsp;nbsp;221

lgt;4tirai mon Église; pais mes agneaux, pais mes brebis, les troupeaux et les pasteurs (i). »

Ces images de saint Pierre et de saint Paul, conslamment repro-duites sur les verres des Catacombes, donnent lieu è une autre re-tnarque. Elies prouvent I’ardent amour el la vénération filiale des chrétiens de Rome pour leurs Pères dans la foi. Or, celte affection ar-dente, passionnée, est un fait attesté par 1’histoire (2). Elles prouventnbsp;encore la présence a Rome des deux Apótres; puisque leur portrait senbsp;trouve seul, è l’exclusion de celui de tous leurs collègues, conslamment rappelé au souvenir des chrétiens de la Capitale du monde.nbsp;Chose digne de remarque! au iv' siècle Ie grand historiën de l’É-glise, Eusèbe, se servait déjè de ces monuments inconlestables pournbsp;établir Ie voyage el Ie séjour a Rome des princes du collége apostoli-que (5). Comment se fail-il que les protestants ont ignoré loutes cesnbsp;choses; et s’ils les ont connues, comment ont-ils osé menlir aunbsp;monde, mentir è leur conscience, et nier, ainsi qu’ils Ie font encorenbsp;aujourd’hui dans leurs libelleSi que saint Pierre soit venu a Rome?

Le divin Rédempteur avail dit qu’il associerait a sa glorieuse resurrection non-seulement ses Apótres; mais encore ceux qui par leur ministère croiraient è sa parole. Et voilé que Tart chrélien commence,nbsp;lt;?n peignant quelques martyrs victorieux, cette longue galerie dont lenbsp;génie des siècles postérieurs couvrira les murs des Basiliques de l’O-rient et de POccident : Église triomphanle sans cesse offerte aux regards de l’Église militante, afin d’éclairer sa marche et d’exciter sonnbsp;courage. On trouve dans les Catacombes plusieurs martyrs représen-lés dans l'altilude du triomphe et de la prière.

Comme Marie leur reine, ils ont les bras étendiis, et prouvent deux points du dogme calholique : le premier, que les Bienheurehx con-Cnuenl dans le ciel de solliciter pour nous les gréces dont ils n’ontnbsp;plus besoin pour eux-mêmes; le second, qu’ils sont pour nous desnbsp;mtercesseurs et non des dieux; que nous les vénérons, mais que nous

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'i'iÜ nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

ne les adorons pas. Si, après rétablissement de l’Église, Tart n’a pas craint de représenter les saints et les martyrs dans l’attitude exclusivenbsp;du triomphe, c’est que Ie danger du scandale pour les faibles étaitnbsp;passé et Ie dogme affermi. Enlre toules les autres, les Catacombes denbsp;Sainte-Agnès et de Sainte-Priscille sont pleines de ces consolantes elnbsp;instructives peintures (i).

Autant les images des martyrs triomphants sont communes, au-tant sont rares celles des martyrs au milieu des supplices. C’est è peine si on en peut citer un exemple authentique. L’usage de représenter les alhlètes de la foi dans l’acte même de leur glorieux, malsnbsp;terrible combat, est postérieur è la première époque de Tart. Nous ennbsp;expliquerons la cause, en parlant de l’esprit général des peintures etnbsp;des sculptures des Catacombes (2).

Après avoir montré Ie grand oeuvre de la Rédemption dans sa pré-paration et dans ses résultats éternels, Tart primitif nous dit par quels moyens l’Église de la terre s’efforgalt d’arriver elle-même a la glo-rieuse transfiguration. II nomme la prière et la charité. Ces deux ad-mirables secrets, qui, unissant Thomme è Dieu et Thomme a sesnbsp;semblables, préparent sur la terre la consommation universelle dansnbsp;Ie sein de l’éternité, brillent comme deux soleils dans toutes les parties de la Rome souterraine et réclairenl de leur luraière surnaturelle.nbsp;Aux voütes des chapelles, aux parols des cubicula, sur les comparti-ments des sarcophages, partout on voit les premiers chrétiens ennbsp;prières.

A eet intérêt religieux, nos monuments primitlfs ajoutent un inté-rêt historique d’une grande importance. lis rendent, sinon avec grace, du moins avec vérité Ie costume et les habitudes intimes de nos pèresnbsp;dans la foi. Ainsi, è défaut de tout autre ouvrage, nous saurions encore, grftce au grand livre des Catacombes, que les chrétiens priaientnbsp;les bras étendus, ordinairement debout, la tête nue et les yeux levésnbsp;vers Ie ciel. On les trouve partout dans cette éloquente attitude (5). Lanbsp;tunique et Ie manteau; les cheveux coupés, la barbe courte, la chaus-sure romaine; Ie voile pour les femmes, une grande sobriété d’orne-ments jointe a un air de profonde modestie : tel est l’ensemble denbsp;leur costume et de leur extérieur dans les assemblées saintes. Voilénbsp;pour la prière.

Quant a la charité réciproque, on peut dire que leur vie en était

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Boldelti, lib.i, c. v, p. 20.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Boldetli, lib. 1, c. v, p. 20.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Bosio, lib. Tl, c. XXVI.

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LES AGAPES. 225

lin acte continue!. Les Catacombes elles-mêmes en sont une preuve auibentique. Mais entre tous les actes si variés de la grande vertu denbsp;1’Évangile, il en est un que les monuments primitifs reproduisent avecnbsp;amour. J’ai nommé les Agapes. En effet, les Agapes résument de lanbsp;nianière la plus vraie Ie dogme essentiel du christianisme, celui quinbsp;devait cbanger la face du monde, je veux dire la fraternité de tous lesnbsp;hommes et leur égalité devant Dieu. Ici encore Tart se montre Ie fidélenbsp;écho de l’Évangile et des Pères (i).

La multitude des croyants n’était qu’un coeur et qu’une éme. Or, chez tous les peuples Ie signe Ie plus expressif de Tamilié, ce sont lesnbsp;repas pris en commun. S’asseoir é la mérae table, et manger Ie mêraenbsp;pain, c’est, dans la pensée commune, se mettre sur la même ligne etnbsp;participer a Ia même vie : voilé ce que Ie Paganisme ignorait. Sansnbsp;doute il avail ses repas oü les amis de cboix étaient invités. Sans doutenbsp;encore les parents mangeaient en commun sur la tombe des morts;nbsp;mais Ie cercle des invités ne s’étendait pas au delé des limites de lanbsp;familie et de l’amitié; jamais Pesclave n’y participait. Bien différentesnbsp;étaient les Agapes cbrétiennes. A ces repas donnés par la charité uni-verselle s’asseyaient tous les membres de la familie chrélienne, et celtenbsp;familie embrassait tous les bommes marqués du signe de la foi, sansnbsp;distinction de pays, de fortune et de condition.

A cette première différence il faut ajouler la modestie, la sobriélé, la piété qui distinguaient les Agapes cbrétiennes; tandis que les dé-fauls contraires semblaient Paccompagnement obligé des comessationsnbsp;païennes. Écoutons Ie témoignage d’un témoin oculaire, d’un convivenbsp;qui s’était assis tour é tour é ces tables différentes. « Le seul nom denbsp;nos repas montre ce qu’ils sont. On les appelle Agapes, ce qui signifienbsp;amour chez les Grecs. Quelle que soit la dépense qu’on y fait, c’estnbsp;Un gain que de dépenser pour faire du bien. Avec ces aliments nousnbsp;aidons les pauvres que nous n’avons garde de considérer comme cesnbsp;parasites, qui parmi vous se font gloire de vendre leur liberté pournbsp;Se rassasier é vos tables, au milieu de mille affronts; mais nous nousnbsp;conformons aux vues de Dieu qui préfère les humbles. Ainsi Ie motifnbsp;de nos repas est honnête. Jugez done du reste de notre discipline,nbsp;imisque nos repas eux-mêmes sont inspirés par la religion. Nous n’ynbsp;'¦'dmettons ni bassesse, ni immodestie. On ne se met a table qu’aprèsnbsp;s être nourri d’une prière é Dieu. On mange autant qii’il faut pournbsp;satisfaire la faim; on boit autant qu’il suffit a des hommes pudiques. 1

1

Tertull., ytpo/., c. xxxix.

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224 nbsp;nbsp;nbsp;lES TROIS ROME.

On s’y rassasie sans perdre de \ue qu’on doit adorer Dien pendant la nuit; on s’entretient sans oublier que Dieu écoute (i). »

De son eóté, saint Cyprien recommande instamment ces repas de eharité. L’Église elle-mêrae y attachait une telle importance qu’unnbsp;concile frappe d’anatlième celui qui les mépriserait ou refuserait denbsp;s'y rendre (2) ; tant il est vrai que ces réunions avaient une signification éminemment sociale et chrétienne.

Ce qui Ie prouve peut-être encore mieux, c’est Ie nom particulier donné aux difïérentes espèces d’Agapes. Dans la vie de rhomme éclairénbsp;par la foi, il y a plusieurs circonstances solennelles oü Ie coeur semblenbsp;avoir un plus pressant besoin de s’épancher, soit pour se réjouir, soitnbsp;pour se consoler, en s’unissant d’une manière plus intime aux coeursnbsp;capables de Ie comprendre. Parmi ces circonstances, Ie mariage, lanbsp;dédicace d’une église, maison de Dieu et maison de Phomme, la sepulture d’une personne chérie et la naissance des martyrs, avaient parunbsp;aux premiers chréliens les plus propres a resserrer les liens de la cha-rité mutuelle. De la quatre espèces d’Agapes appelées : connubiales,nbsp;(ledicatoriw, funerales, et natalitiw (s).

Done, après avoir célébré dans la crainte de Dieu ces alliances qui devaient donner tant de héros a 1’Église et de saints au ciel; aprèsnbsp;avoir, dans l’effusion de leur reconnaissance, chanté la bonté du Seigneur qui voulait bien se choisir une nouvelle demeure, oü ses enfantsnbsp;exiles pourraient venir lui.confier leurs angoisses et se nourrir du painnbsp;des forts; après avoir rendu les derniers devoirs au père, a la raère, anbsp;l’ami dont les verlus avaient été une consolation el dont l’absence étaitnbsp;maintenant un regret; après avoir remercié Ie Dieu des martyrs dunbsp;courage qu’il avail donné è ses serviteurs et a ses servantes, ainsi quenbsp;des exemples héroïques par lesquels les champions de la foi avaientnbsp;encouragé leurs frères : les membres de l’Église naissante raanifestaientnbsp;leur reconnaissance, leur allégresse ou leur douleur en prenant ensemble un innocent festin. Les plus riches en faisaient les frais; tandisnbsp;que la eharité y conduisait par la main et y pla^ait avec distinctionnbsp;les pauvres, les veuves, les orphelius, les amis de Dieu (*). Tel est

(1) ^po/., XXXIX. nbsp;nbsp;nbsp;*

(3) Agapen et dileclionem fralernam religiose et firmiler exercendam. — Ten., lib. ni. — Si quis despicit eos, qui fideliler Agapes, id est convivia, pauperibus exbibent, etnbsp;propter honorem Dei convocaiit i'ralres, et noluerint communicare in liujus modi vo-ealionibns, parvi pendens quod geritur; anathema sit. Conc. Gangr., c. ii.

(3) Boldetii, lib. I, c. xii.

(i) Slatis diebiis mensas faciebant communes, et peracta synaxi post sacramentorum i'ommiinionem, inibant convivium, divitibus quidcra cibos alfercntibus; pauperibusnbsp;autem, et qui nihil babobanl, eliam vocalis, el omnibus communiter vescentibus.—nbsp;D. Clti ys., In I ad Cor. 11, llomil. xxvii.

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LES AGAPES. nbsp;nbsp;nbsp;2^23

l’éloquent usage dont Tart primitif devail iransmellre Ie souvenir aux générations futures ; il n’a point failli ^ sa mission.

Les Agapes se trouvent souvent représentées dans les Catacombes. Je citerai seulement celles du cimetière de Sainte-Agnès et des Saints-Marcéllin et Pierre, publiées par Bosio et par Bottari. A la voute denbsp;Varcosolium est peinte une table en forme de fer a cheval. Six convives sont assis comrae nous, et non point couchés comme les anciens,nbsp;autour de'la table, sur laquelle on voit trois plats : plusieurs convivesnbsp;portent les aliments a leur boucbe. Devant la table on voit buit paniersnbsp;et deux vases destinés aux provisions.

Dans les Catacombes des Saints-Marcellin el Pierre on Irouve une table de la même forme que la précédeate. Elle est sans nappe, ainsinbsp;qu’une aulre table plus petite, placée dans l’espace demi-circulairenbsp;forraé par la première. Devant cette seconde table, qui est a trois pieds,nbsp;se tient deboul un jeune garden vêlu de la tunique avec des pareraentsnbsp;de pourpre. 11 porte de la main droile un grand verre è pied en formenbsp;de calice, cyathus. II vient de goüler ou il va goüter Ie contenu, ennbsp;en versant quelques goultes dans Ie creux de sa main gauche, suivantnbsp;l’usage des anciens. Sur la table on voit deux couteaux, deux plats etnbsp;Un animal tout entier, un agneau peut-êlre, étendu et prêt a élredé-coupé. De l’autre cólé de cette même table est une grande amphorenbsp;è deux anses.

L’antiquiié, avec ses usages intimes, se trouve ici comme sur les fresques de Pompéi. Nous savons maintenant ce que Varron entendaitnbsp;par la table de service qu’il appelle cibilla.m mensa escaria, sur laquelle on découpait les viandes et on préparait les boissons avanl denbsp;les présenter aux convives. Nous voyons aussi pourquoi il n’y a riennbsp;sur la grande table, sinon la main des convives qui allendent les metsnbsp;et Ie vin. lei les convives sont au nombre de cinq ; tous sont assis. Aunbsp;ntilieu est une femme qu’on reconnail a sa simple tunique et a sesnbsp;eheveux rallachés sur Ie sommet de la têle. A droite et a gauche sontnbsp;^eux hommes dont l’un porie Ie manteau par-dessus la tunique. Lesnbsp;deux extrémilés de la table sont occupées par deux femmes assises surnbsp;des fauteuils et qui paraissent assister au repas sans y prendre part.nbsp;Au-dessus de leur tête on lit les deux inscriptions sui vanles :

« Irène, donne 1’eau chaude. »

« Agape, mêle-moi de 1’eau dans Ie vin. »

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3^20 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

Les noms grecs Irênê el Agapê, c’est-i-dire Paix et Charilé, quc portent ces deux femmes, indiquent suffisamment l’objet et l’esprit denbsp;ces repas, oü elles remplissent des fonctions si caracléristiques. L’unenbsp;est chargée de donner Veau chaude; l’aulre de méler l’eau et Ie vin,nbsp;suivant les habitudes de la sociéié antique; toutes deux de représenlernbsp;de celte manière symbolique rinslilulion même des Agapes, deslinéesnbsp;a entrelenir h paix et la charité parmi les lidèles (i).

Les Agapes redisent éloquemment la charité de nos pères les lins envers les autres pendant la vie; mais celte charité, immortelle commenbsp;l’espérance et la foi, s’étendail au dela du lombeau : il fallait la mon-Irer sous ce nouveau point de vue. Or, l’image des Fossoyeurs, cesnbsp;héros de la charité primitive envers les morls, reproduile assez souventnbsp;dans les Calacombes, vient compléter Ie magnifique enseignement denbsp;Tart, et nous donner la plus belle comme la plus sublime idéé denbsp;l’Église naissante.

Avanl de quitter la Voie Nomentane, oü nous reviendrons demain, il reste a parler de deux Catacombes célèbres; celle de Saint-Alexandrenbsp;et celle des Saints-Primus et Félicien. La première, aujourd’hui cruel-lement dégradée, est située a sept milles de Rome, dans un terrainnbsp;qui, du temps de Boldetti, appartenail a l’hospice Saint-Jacques-des-Incurables. Au dernier siècle, il fut encore possible d’en extraire plu-sieurs corps de martyrs. Son origine mérite d’être connue.

L’an d3!2, sous l’empire d’Adrien, vivait a Rome un officier supérieur, nommé Aurélien, ardent ennemi des lidèles, bien qu’il eüt pour épouse une fervente chrétienne nommée Sévérina. Aurélien, appelé ènbsp;juger les chrétiens, fit mourir Ie pape saint Alexandre et les saintsnbsp;Eventius et Théodulus. Sans craindre la colère de son mari, Sévérinanbsp;recueille elle-même les corps des martyrs et va les déposer dans sanbsp;villa, située sur Ia Voie Nomentane, è sept milles de Rome. Un grandnbsp;nombre de clercs et de chrétiens assistèrent aux funérailles. La pieusenbsp;matrone se revêtit d’un cilice et voulut rester auprès des saintes reli-ques, jusqu’i ce qu’elle eüt obtenu du pape saint Sixte, successeurnbsp;d’Alexandre, un prêtre attaché ii celte Catacombe, afin d’offrir chaquenbsp;jour l’auguste sacrifice sur Ie tombeau des martyrs (2). Celte grüce luinbsp;fut accordée, et bien des générations furent témoins d’un usage quinbsp;rappelait éloquemment la confiance et la vénéralion profonde desnbsp;premiers chrétiens pour les glorieux athlètes de la foi.

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Voycz Tableau des Cat., p. 142; BoUari, t. 11, p. 17O; Bosio, lib. iv, c. xvi, p. 49;nbsp;et lib. VI, c. XXVII, p. 313.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Bosio, Ub. IV, c. XXI.

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CATACOMBES DE LA VOIE NOMENTANE. 2“2“

Sept milles au delJ» du cimetière de Saint-Alexandre, est la Cala-combe, aujourd’hui fermée, des Saints-Primus et Félicien. Elle occupe, Ie lieu appelé jadis Arcus Nomentanus. Primus et Félicien éiaientnbsp;deux vieillards, plus vénérables encore par leurs vertus que par leursnbsp;cheveux blancs. Mais ni l’age ni la sainteté ne purenl les soustraire anbsp;l’aveugle fureur des païens. L’an 503, arrélés par ordre de Dioclétien,nbsp;ils furent emmenés devant Promolus, préfet de Nomenlum. A l’exemplenbsp;de ses collègues, Promotus se fit une gloire d’invenier de nouveauxnbsp;supplices et de perfeclionner les anciens, pour tourmenter les deuxnbsp;martyrs et se concilier la faveur du prince et du peuple.

Le glaive du licteur termina ce drame sanglant, et les chrétiens, pénétrés de vénération pour les intrépides vieillards, recueillirent leursnbsp;corps sacrés et leur firent pendant trente jours de brillantes funérail-les. Une Basiiique vint plus tard consacrer leurs tombes; mais Rome,nbsp;trouvant qu’ils étaient trop éloignés de ses regards, transporta cesnbsp;glorieux enfants dans l’antique église de Saint-Étienne-le-Rond, aunbsp;Mont-Cselius, oü ils reposent encore (i).

28 JANVIER.

Calacombes de Ia Yoie Nomenlane (suite). — Calacotnbcs de Saint-Restilut. — Histoire. —¦ Catacombe de Sainte-Agnès. — Histoire. — Peintures des Catacombes, partie ddco-rative. — Coup d’oeil sur le Symbolisme primilif. — Emblèmes des premiers chré-liens ; — Ie poisson, — le dauphin.

La Voie Nomentane était couverte de pèlerins de tout rang, de lout óge, de tout sexe. Remains ou étrangers. Oü allait toule cette foule?nbsp;A. la Basiiique de Sainte-Agnès-hors-des-Murs. Pourquoi aujourd’huinbsp;plutót qu’un autre jour? Paree qu’aujourd’hui, 28 janvier, était l’an-Diversaire de l’appariiion miraculeuse de la jeune vierge, dont le nomnbsp;•^eux fois immorlel remplit ces lieux. Fidéle aux traditions antiques,nbsp;peuple Remain venait apporter au tombeau de I’illustre roartyrelenbsp;'¦ribut de sa reconnaissance. Au milieu de cette nombreuse compagnie,nbsp;®ous passdmes devant l’église de Sainte-Agnès sans nous y arrêter :

but de notre excursion était la Catacombe de Sainl-Restitul, située ^ seize milles de Rome. Prés du petit monticule appelé Monte JJofondo,nbsp;Se trouvenl le cimetière et la crypte, oü fut déposé le saint martyrnbsp;üont il faut redire en peu de mots la glorieuse histoire.

I^’an 301, Hermogéuien, préfet du préloire, venait d’oblenir de

(0 .ws. Codd. Lat. Yat. Lat., 4-8-9, Vall. i; Bosio, lib. iv, c. xxiii. Bar., An. ZOZ, n. 115.

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228 LES TROIS ROME.

Dioclétien et du Sénat l’ordre de persécuter les fidèles. Aussilót les satellites se mettent en marche, et Ie 6 mai ils araènent au tribunalnbsp;d’Hermogénien, dressé au pied du Capitole, non loin de l’arc de Titus,nbsp;un courageux chrétien nommé Restilut. Conformément Tédit impé-rial, on Ie somme de sacrifier aux dieux : il refuse. Le magistrat or-donne de lui lier les mains derrière le dos et de lui trancher la tête.nbsp;Après l’exéculion, les bourreaux jettent le corps prés de l’arc triom-phnl, non loin de Tamphithé^lre, et l’abandonnent a la dent des chiens;nbsp;mais le Dieu des martyrs veille sur son intrépide soldat.

Pendant la nuit, une des plus illustres dames Romaines, nommée Justa, vient avec quelques prêtres et plusieurs chrétiens enlever lenbsp;saint corps qu’elleemporte dans sa maison, voisine de,la MetaSudans,nbsp;par conséquent très-peu éloignée du théatre du martyre. Elle l’enve-loppe dans des linges très-fins avec des parfums, le place dans sa li-tière, et pendant la même nuit le transporte sur la Voie Nomentane.

Le convoi s’arrête non loin d’une Catacombe oü se tenait caché le Souverain Ponlife, auquel Justa fait donner avis de ce qui se passe, ennbsp;le priant de députer un certain nombre d’ecclésiastiques, de viergesnbsp;et de serviteurs de Dieu, pour accompagner le précieux dépót. Dès lanbsp;pointe du jour, on se remet en marche et on arrive è la villa de lanbsp;courageuse matrone, située sur Ia Voie Nomentane, è seize milles denbsp;Rome. La sépuUure s’accomplit au milieu des hymnes et des prièresnbsp;qui se prolongèrent pendant sepi jours. Cela se passait Ie 27 mai denbsp;I’an 301, au plus fort de la persécution de Dioclétien, h quelques lieuesnbsp;de Rome et dans la direction du camp Prétorien oü régnait le persé-cuteur. Rien n’est plus ordinaire que ces exemples d’intrépidité dansnbsp;les annales de la primitive Église (i).

De retour è Sainle-Agnès, nous fimes notre prière devant l’autel de la sainte, puis entrant dans une vigne, è gauche de Ia Voie Nomentane,nbsp;nous descendimes en nombreuse compagnie dans la célèbre Catacombe.nbsp;Trois ans après le martyre de saint Restitut, c’est-ü-dire l’an 304,nbsp;le 21 janvier, Rome enlière assistail au plus étonnant spectacle qu’ellenbsp;eül jamais contemplé. Une jeune enfant, ègée de treize ans è peine,nbsp;issue d’une noble familie,d’une beauté ravissante,augmentée de toutesnbsp;les grèces que donne la pudeur conservée sans ombre de souillure,nbsp;refuse d’épouser le ills du préfet de Rome, uniquement paree qu’ellenbsp;est ebrétienne et qu’elle a choisi le Fils de Dieu pour époux. On lanbsp;voit accepter, en échange de ce brillant avenir, les outrages, les tortures, la mort. Intrépide en face du bourreau qui tremble et qui pülit,

(0 Codd. Vat,; Bosio, lib. iv, c. xxiv; Bar., An. 301, n. 19.

I

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CATACOMBES DE SAINTE-AGNÈS. - IIISTOIRE. nbsp;nbsp;nbsp;229

elle l’encourage remplir son minislère. Le coup fatal est porlé ; l’ange est au ciel. Avec sa sceur Emérentienne, Agnès forme pour ainsinbsp;dire l’arrière-garde de la grande armee des martyrs. Son nom vole denbsp;bouche en bouche, et depuis quinze siècles il reientit avec honneurnbsp;sous les voütes de tous les temples chrétiens de l’ancien et du nouveaunbsp;monde (i).

Le mêrae jour, ses parents emportent ce corps virginal plus pré-cieux que l’or et les pierreries, et vont le déposer dans une petite terre qu’ils possédaient sur la Voie Nomentane, a quatre milles denbsp;Rome. Un grand nombre de chrétiens se font une gloire d’accompa-gner 1’héroïne : parmi eux se Irouve Emérentienne sa sceur de lait,nbsp;encore caléchumène. Au sorlir de la Catacombe, le cortege est assaillinbsp;par des païens postés en embuscade. On se disperse au milieu d’unenbsp;grêle de pierres; Emérentienne resle intrépide avec un petit nombrenbsp;et reproche aux persécuteurs leur cruelle malice. La jeune sainte, cou-verte des glorieux stigmates du martyre, tombe baplisée dans sonnbsp;sang; son corps est déposé la nuit suivante auprès de son illuslrenbsp;sceur. Depuis cette époque, la gloire de cette Catacombe ne s’est pasnbsp;obscurcie un instant. Son histoire, quinze fois séculaire, n’est que lenbsp;récit des hommages et de la vénéralion universelle dont elle fut lenbsp;constant objet, en échange des souvenirs précieux qu’elle rappellenbsp;et des miraculeuses faveurs obtenues par l’intercession de saintenbsp;Agnès (2).

Une autre gloire de cette grande Catacombe, est la belle conservation des monuments artistiques qu’elle renferme. Plusieurs fois nous l’avions visitée pour étudier la partie historique des peintures et desnbsp;sculptures primitives. II nous restait a considérer aujourd’hui la partienbsp;décorative de ces mêmes monuments. Pour la bien comprendre, il huinbsp;rappeler le principe révélaleur de toutes choses, aussi bien dans l’or-dre de Part que dans l’ordre de la nature et de la gramp;cé.

Tout a élé fait par Jésus-Christ et pour Jésus-Christ. Tous les siècles, tous les peoples, tous les élémenls, toutes les creatures spiri-tuelles et matérielles gravilent autour de lui comme les astres aulour du soleil; tous entrent comme moyens ou comme obstacles dans lanbsp;grande épopee dont il est le héros. Le Verbe éternel est l’alpha etnbsp;1’oméga, le commencement et la fin de toutes choses, le conquérant

(1) Oninium gentium litterisatque linguis prsecipue in ecclesüs Agnes viialaudala est, Qn1 et anatem vicil et lyrannum, et litulum castitatis martyrio consecravit. — S. Hier.,nbsp;He n.

10.

1

S. Agn., apud Bos., lib. iv, c. xxv.

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230 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

sublime devant lequel tout genou doit fléchir au ciel, sur la terre el dans les enfers : voila ce que I’Eglise, son inlerprè(e et son épouse, nenbsp;cesse de montrer par l’organe de ses docteurs, par Tenseignement denbsp;l’histoire, par les raisonnements péremptoires de ses apologistes.

Echo de la foi, Tart chrélien a dü redire la même vérité; et nous l’avons vu proclamant Jésus-Christ l’hérilier universel de toutes cho-ses, s’emparant a son profit du vrai, du bien, du beau parlout oü ilnbsp;Ie rencontre.

Les grandes figures de l’Ancien Testament appartiennent a Jésus-Christ; Tart les prend, les explique, et, les mettant en regard des actions du divin Rédeinpteur, il montre a Tunivers étonné qu’il en est l’ftme et Ie hut; que c’est lui qui soufTre et qui triomphe dans les pa-triarches, afin d'associer Ie genre humain i ses épreuves et a sa résur-rection.

La nature avec ses éléraents lui appartient, ainsi que la forme plus OU moins parfaile qu’ils doivent au génie de rhomme, dans les «Euvresnbsp;de Tart : Tart primitif s’empare, au profit de Jésus-Christ, des créa-lures malérielles et de la forme brillante dont les a revêlues Ie pin-ceau grec ou romain, pour en former un riche encadrement au milieunbsp;duquel resplendissent les magnificences de Thistoire chrétienne.

Les antiques croyances de l’Orient et de l’Occident, échos affaiblis de la vérité primitive, lui appartiennent; Tart les inlerroge et les re-cueille. Orphée et les sibylles rendent hommage au Rédempteur, dontnbsp;ils sont présentés comrae les prophètes et les types traditionnels.

L’enfer lui-même doit contribuer a la gloire du héros divin. Les dieux, les génies, les derai-dieux, vaincus et humiliés, seront transfor-més par Tart en simples motifs d’ornementation et serviront k rehaus-ser la puissance du vainqueur, comme les multitudes esclaves trainéesnbsp;au Capitole conlribuaient it la gloire des maitres du monde.

Toulefois, Tart primitif, formé ii l’école du paganisme, né sous Ie beau ciel dTtalie, et habitué k contempler sous des formes riantes lesnbsp;héros et les scènes de la mythologie, continuera de donner aux divini-tés chassées de leurs temples, des attitudes et des formes plus ounbsp;moins gracieuses. Puis viendront les peoples du Nord, dont Ie génienbsp;sombre et austère, s’emparant de tous ces démons vaincus, avec lanbsp;même rudesse que sa main de fer saisissait Ie vieux monde, les feranbsp;entrer dans la composition de ses raagnifiques cathédrales, sous lesnbsp;formes hideuses, avec les figures grima^antes, dans les attitudes pé-nibles et les positions humiliées qui conviennent è des rebelles auda-cieux, désorraais réduits è l’impuissance et devenus Téternelle riséenbsp;de 1'univers.

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PEINTURES DES CATACOMBES, PARTIE DECORATIVE. nbsp;nbsp;nbsp;251

Ce grand principe sert de boussole a Tart primitif. Un sujet chré-tien, que viennent embellir, sous forme d’ornements accessoires, des naotifs pris dans les scènes de la nature et mêlés de types empruntésnbsp;au paganisme : telles sont dans leur ensemble les peintures et lesnbsp;sculptures des Catacombes.

Auteur des compartimenls qui divisent la voute des cryptes ou chambres sépulcrales, règnent des guirlandes de. fleurs, des arabesques, des scènes de la vie champêtre. Orner de fleurs les tombeauxnbsp;élait un usage général parmi les païens. Comme il n’avait rien de su-perstilieux, les chrétiens Ie conservèrent, en y attachant peut-être unenbsp;signification religieuse, telle, par example, que Ie souvenir des vertusnbsp;du défunt ou de la brièveté de la vie. Quoi qu’il en soit, nous entendons Ie chantre des martyrs exhorter les fidèles a couronner de fleursnbsp;les tombes des héros de la foi (i). Se servir de fleurs peintes ou naturelles pour décorer les cryptes et les églises, est un autre usage égale-öient innocent en lui-même, et dont Ie but est de rendre les créa-lures tributaires de leur auteur, en les enrólant dans la grande épopéenbsp;chrétienne.

Les qualre Saisons, avec les attributs el les scènes qui les distin-guent, sont un nouveau motif souvent employé dansla partiedécorative des monuments primitifs. Dans une belle fresque de saint Callixle,nbsp;Ie Bon Pasteur parait environné de ce gracieux sujet. Le Printempsnbsp;est représenté sous la figure d’un homrae légèrement vêtu, et cueillantnbsp;des roses; è cóté de lui est l’Été, sous la forme d’un moissonneurnbsp;armé d’une faucille et coupant les blés. II est remarquable que la section se fait au milieu de la tige, suivanl l’usage décrit par Varron quinbsp;attribue è cette circonstance l’étymologie des mots messis et metere,nbsp;couper par le milieu. A droile du Bon Pasteur se trouvent 1’Automne

1’Hiver ; le premier sous la figure d’un homme h moitié vêtu, tenant la main gauche une corne d’abondance, et de la droite une grappenbsp;'le raisin; le second, personnifié dans un laboureur, dont la tête et lenbsp;eorps sont chaudement couverts. De la main il tienl une bêche; et anbsp;®öté de lui on voit un grand feu, puis un arbre dépouillé de ses

feuilles (2).

(1) Nos tecta fovebimus ossa Violis et fronde frequenti.

aiUeurs:

Ista comanlihus et foliis Manera virgo puerque date.

(s) Bottari, t. 11, p. 17.

PiniD., Calhem. Hymn, x, 169; Peristeph., Hymn, iii, 901

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232 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

En voyant les qualre Saisons revenir si souvent dans les fresques et sur les sarcophages, je ne serais pas éloigné d’attribuer cette répéti-tion fréquente du mêrae sujet au senschrélien qu’il présente. Rien dansnbsp;la nature n’exprime d’une manière plus solennelle Ie grand mystèrenbsp;de la résurrection, si cher aux premiers fidèles. Tertullien ne l’igno-rait pas; Ie grand Apologiste, développant la pensée de l’Apótre, quenbsp;les choses invisibles nous sont raanifestées par les créatures visibles,nbsp;appelle en témoignage de la résurrection future Ie Temps avec lesnbsp;quatre Saisons qui se succèdent, ou plutót qui meurent et qui ressus-citent sans rien perdre et sans finir (i). Saint Augustin et saint Cyrillenbsp;de Jérusalem donnent la même signification è ce phénoraène dont ilsnbsp;tirent les mêmes arguments (2).

Dans une fresque de saint Pontien, dont Ie sujet est encore Ie Bon Pasteur, les quatre Saisons de l’année paraissent aussi comme motifsnbsp;d’ornementation; raais elles y sont représentées par les quatre Génies,nbsp;dans lesquels l’art antique avait continué de les personnifier. Cecinbsp;tient évidemment, d’une part, êt la pensée chrétienne de faire servirnbsp;les types rayihologiques au triomphe de la foi; et, d’autre part, è lanbsp;nécessité d’employer, pour être compris, des emblèmes consacrés parnbsp;l'usage. Aux mêmes raisons, il faut attribuer l’emploi si fréquent desnbsp;fleurs de toule espèce tressées en guirlandes, formées en torsades, sus-pendues en festons, rassemblées dans des paniers, dans des vases,nbsp;dans des corbeilles, ou remplacées par des paniers de fruits (encarpi)nbsp;avec des oiseaux becquetant ces fruits, ou enfin éparses dans Ie champnbsp;de la peinture qu’elles émaillent comme un parterre. lei encore, pournbsp;compléter son idéé. Part chrétien met contribution la nature et lanbsp;mythologie. Ainsi, les paniers de fruits sont souvent placés sur la têtenbsp;des cariaiides, au milieu de Victoires ailées tenant une palme etnbsp;une couronne, ou portés par de pelits Génies nus et ailés; d’autresnbsp;fois les mêmes Génies tiennent une guirlande de chaque main, et .senbsp;lerminent en feuillages, sorte de caprices dont 1’art païen faisait encore tant usage è la naissance de I’EgUse : on peut s’en convaincre ennbsp;examinant des fresques de Pompéi (5).

Un autre genre d’ornements non moins communs sont des branches de vignes et des épis de blé, tantöt enroulés autour des colonnes, comme au tombeau de sainte Constance, tantöt entremêlés avec d’autres dessins sur Ie champ de la peinture, comme dans les Catacombes

(0 Terlul., Apol.

(ï) p. Aug., Serm. x, de Apost.i S. Cyril,, Catech. xviii.

(5) Botlari, t, 111, p. 139, etc., etc.

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EMBLÈMES DES PREMIERS CHRÉTIENS. nbsp;nbsp;nbsp;233

de la Voie Laline (i). II faudrait être entièrement étranger au symbolisme Chrétien pour ne pas voir dans ce double emblèmè, si souvent reproduit, l’adorable mystère que les chrétiens ne pouvaient révéler anbsp;lout Ie monde, et dont cependant ils ne pouvaient oublier la pensée.nbsp;Les plus habiles archéologues, fondés sur Ie lémoignage des Pères,nbsp;n’hésitent pas h lui donner dans les Gatacombes la mêrae significationnbsp;qu’il conserve encore dans nos églises (2). Du reste, ils croient, tou-jours d’après l’enseignement des auteurs contemporains, que, dansnbsp;leur partie décoralive aussi bien que dans leur partie historique etnbsp;principale, les peinlures et les sculptures primitives étaient entièrement, OU a peu de chose prés, figuralives de Jésus-Christ. De cettenbsp;sorle, Ie divin Rédempleur serail l’alpha et l’oméga de la Rome sou-lerraine, comme il Test des calhédrales du moycn Age et de la creation tout enlière : rien n’est plus logique. Les paroles du pape saintnbsp;Damase, sur ce point capital, sont trop belles et trop explicites pournbsp;n’être pas rapporlées. Réunissant les figures emblématiques desnbsp;Gatacombes, il en fait l’applicalion è Notre-Seigneur dans les versnbsp;suivants :

Spes, via, vita, salus, ratio, sapientla, lumen,

Judex, porta, gigas, rex, gemma, prophela, sacerdos,

Messias, Zebool, Rabbi, sponsus, mediator,

Virga, columna, manus, peira, filius, Emmanuelque,

Vinea, pastor, ovis, pax, radix, vitis, oliva,

Fons, paries, agnus, vilulus, leo, propitiator,

Verbum, homo, rete, lapis, domus, omnia Christus lesus (5).

« Espérance, Vie, Voie, Salut, Raison, Sagesse, Lumière, Juge, Porte, Géant, Roi, Perle, Prophéte, Prêtre, Messie, Zeboot, Maitre, Époux,nbsp;Médiateur, Verge, Golonne, Main, Rocher, Fils, Emmanuel, Vigne,nbsp;Pasteur, Brebis, Paix, Racine, Gep, Olivier, Fontaine, Mur, Agneau,nbsp;Veau, Lion, Propiliateur, Verbe, Homme, Filet, Pierre, Maison : toutnbsp;cela est le Ghrist Jésus. »

Dans la partie decorative on peut aussi faire entrer les emblèmes si fréquents sur les sculptures et les peintures des Gatacombes. Au mé-fite de représenler les principaux dogmes de la foi, ils ajoutent celuinbsp;de révéler les sentiments intiraes des premiers chrétiens. De mêmenbsp;que Notre-Seigneur prenait le sujet de ses paraboles dans les créaturesnbsp;®t dans les actions ordinaires de la vie, l’arl primitif, essentiellement

{*) Bott.iri, 1.11, c. m, p. 177.

(s) Büldeili, lib. i, c. vii, p. 27, etc.

(*) Bibliolh. vet. PP. carm. xii, t. viii.

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254 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

populaire, emprunte ses figures emblématiques aux êlres et aux fails de l’ordre naturel, connus de tout Ie monde.

Au premier rang de ces hiéroglyphes sacrés, il faut mettre Ie pois-son. Partout on Ie rencontre sur les fresques des cubicula, sur les sarcophages, les lampes, les anneaux, les verres et les autres monuments. Get emblème est lout ii la fois un des plus significatifs et desnbsp;plus ingénieux; car il a Ie privilége de représenter et les chrétiens etnbsp;Ie Christ lui-même. Nés amp; la foi dans les eaux du baptême, comme Ienbsp;poisson au sein de l’élément liquide, nos pères se désignaient sous Ienbsp;nom de petits poissons, |)*sctcMK. « Et de même, leur disaient avecnbsp;tant de grftce les interprètes des divins myslères, que les poissons nenbsp;peuvent vivre hors de l’eau, de même nous ne pouvons vivre de la vie.nbsp;de la grilce et nous sauver qu’en demeurant dans les ondes du baptême, oü nous avons regu la vie par Jésus-Christ (t). »

« Si done, ajoutaient-ils, vous voulez avoir des signes qui vous rap-pellent et volre origine, et les devoirs que vous devez remplir, portez avec vous l'image d’un poisson, d’une colombe, d’un navire, d’unenbsp;lyre, ou d’une ancre (2). » De celte antique el mystérieuse sentencenbsp;est venu Ie nom de Piscine, encore employé de nos jours pour désignernbsp;Ie lieu oü l’on verse Peau baptismale après Tadminislration du sacre-ment (3). Quant ü la vertu particuliere dont Ie nom et la vue du poisson devaient rappeler Ie souvenir et la pratique obligée, c’était l’inno-cence. Ici Tart chrétien se montre Ie fidéle écho d’une ancienne idéénbsp;répandue et consacrée par la philosophie de Pylhagore. Suivant cenbsp;maitre, Ie poisson était Temblème de 1’innocence, attendh qu’il n’anbsp;pas de voix pour se défendre et qu’il ne sort jamais de son élémentnbsp;pour attaquer les autres créalures. De la, dans Ie système de la mé-tempsychose, la défense de manger du poisson, de peur d’aflliger desnbsp;ümes justes (a).

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Sed nos pisciculi secundum nostrum Jesum Christum in aqua nascimur,nbsp;nee aliier quam in aqua permanendo salvi sumus. — Terlull., De Baptism., c. i, p. 224;nbsp;Hier., Epist. xriii. Ad Bonos; Clem. Alexand., lib. m Pcedag., c. xi.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Sint vobis signacula, coiumlia, piscis, vel navis, qua; celcri cursu a vento fertur;nbsp;vel lyra musica, qua usus est Polyerales; vel anchora, quam insculpebat Seleueus; etnbsp;si sit piscans atiquis, meminerit Apostoli et puerorum qui ex aqua extrahunlur.—nbsp;Clem. Alexand. ibid., lib. v, c. 11.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Hie est piscis, qui in baptismale per invocationem fontalibus undis inseritur, ut

quse aqua luerat, a pisce etiam piseina vocitelur. Cujus piseis nomen seeundum appel-lalionem graeeam in uno nomine per singulas lilteras lurbam sanetorum nominum eonlinet,nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;quod est latine Jesus Christus, Dei Filius, Salvator. — Opt. Milev., lib.

contr. Parmen., p. 62. — Voyez Mamaehi, Origin, et Antiq. chrisl., lib. 1, p. 54.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Pierius, Hieroglyph., c. xin.

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LE DOISSON. nbsp;nbsp;nbsp;255

C’était aussi, suivant quelques Pères et notamment saint Augustin, par suite d’une antique tradition, que Ie poissou élait regardé conimenbsp;1’emblème de Notre-Seigneur Jésus-Christ. L’Orient et 1’Occident re-tentissaient des oracles de la sibylle d’Erylhrée. En réunissant lesnbsp;initiales de ses vers acrostiches on a Ie nom et la grande qualilé dunbsp;Fils de Dieu, puis Ie mot grec qui veut dire poisson. Pour êirenbsp;conipris il suflit de décomposer Ie mot ; i, iiilt;roü^, ou Jesus;nbsp;Christus;®, Hu, Dei;u, unos,Filim;^, 'Zaiugt;,f,Salvator; cequi donneranbsp;pour résultat : Jesus Christus, Dei Filius, Salvator : Jésus-Christ,nbsp;Pils de Dieu, Sauveur (i). Ainsi, dans ce seul mol dont Ie sens étaitnbsp;complélement inconnu des profanes, Ie chrétien avail toute l’histoirenbsp;de sa religion et Ie résumé de ses devoirs et de ses espérances. Avec Ienbsp;temps Pemblème primitif a changé de forme, Ie nom de Jésus a rem-placé Ie mot Christ, et nous avons dans les mosaïques byzanlines, surnbsp;les dyptiques et tryptiques du moyen 4ge, les initiales IHS, qui signi-fient Jésus, et non point, comme Ie disent certains archéologues inter-prètes des armes de saint Ignace : Jesus hominum salvator.

Pour compléter ce qui regarde ce premier emblème, j’ajouterai lu’au nom figuratif de Notre-Seigneur, les premiers chréliens ajou-taient assez souvent la lettre N., initiale du mot grec qui veut dircnbsp;rinctC De ce bel usage qui a donné naissance a la devise triomphalenbsp;gravée sur nos anciennes monnaies frangaises, Boldetli rappelle unnbsp;exemple qui mérite d’être connu. C’est une inscription trouvée par Ienbsp;grand archéologue dans les catacombes de Sainte-Cyriaque ;

I. POSTUMIVS EÜTHERION. FIDELIS. QVI GRATIA X. SANCTA CONSECVTVS PRIDIE NATALI SVO SEROTINA.

HORA REDDIT DEDITVM VITE SVE QVI VIXIT.

V, ANNIS SEX ET DEPOSITVS. QVINTO IDVS JVLIAS DIE C. JOVIS QVO ET NATVS EST CVJVS ANIMMA.

N. CVM SANCTOS IN PACE FILIO BENEMERENTl POSTVMI FELICISSIMVS ET LVTKEnbsp;NIA ET FESTA AVIA IPSEIVS.

« Posthumius Eutherion, enfant de la foi, qui, ayant regu la grace ^ttnciifiante, la veille du jour anniversaire de sa naissance, sur Ie soir

(') In quo nomine myslice inlelligitur Christus, eo quod in hujus morlalilalisabyssus, in aquarnm proftinditate vivus, hoe est, sine peccalo esse potuil. — S. Aug., Denbsp;, ^ei, lib, XVIII. — Satiat ex seipso in liltore discipulos, et toti offerens se mundo :nbsp;laline piscem sacris Litleris majores inlcrprelali sunt, hoe ex sibyllinis versi-us colligenles, quod est, Jesus Christus, Dei Filius, Salvator. — S. Prosp., lib. li, C. xix.

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256 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

rendil Ie depót de sa vie; qui vécut six ans, et fut déposé Ie cinq des ides de juillet, Ie jeudi, jour oü il était né, dont Tème est avec lesnbsp;saints dans la paix; ó leur Ills bien méritant, Posthumius Félicissimenbsp;et Lutkenia, et Festa, son aïeule. »

Les lettres acrostichesforment les mots grecs nbsp;nbsp;nbsp;nxZ, piscis vindt,

Ie poisson vainqueur, el annoncenl que sa victoire a profité au petit ange dont parle l’inscriplion (i).

De tous les poissons Ie dauphin est celui qui se trouve Ie plus souvent sur les monuments primilifs. D’oü lui vient ce privilége? Tous les naturalistes, tels que Pline, Aristote, Élien, Sénèque, reconnaissentnbsp;ó ce poisson des qualités qui devaient Ie faire choisir pour emblèmenbsp;par les chréliens. Les plus saillantes sonl, d’une part, sa tendressenbsp;pour ses petits; et, d’autre part, son agililé et son calme pendant lesnbsp;tempétes. Saint Basile affirme que Ie dauphin, dans la raer, corame Ienbsp;sarigue, sur la terre, voyant sa familie en danger, l’appelle et lui oii-vre un asile dans son propre sein (2). C’était ló un touchant symbolenbsp;pour les chréliens primilifs, qui, poursnivis par les païens, cher-chaient un refuge dans les Gatacombes, c’est-a-dire, dans Ie sein de lanbsp;terre, noire première mère, et dans les enlrailles du divin poisson,nbsp;Jésus-Christ leur père.

Ensuite, on voit souvent, pendant les tempétes, des troupes de dauphins se jouer parmi les vagues, glisser légèrement sur les flots agités, et demeurer calmes au milieu des bourrasques et des rafales. N’était-cenbsp;pas une raison pour les chréliens, sans cesse hallus par les orages desnbsp;persécutions, de se rappeler et leurs propres devoirs, et Ia confianrenbsp;et la joie des martyrs au plus fort des supplices, en reproduisant par-tout l’iraage du dauphin, dont la seule vue avail Ie privilége de leurnbsp;donner ces utiles enseignements (5)?

Entre mille exemples, je me contenterai de citer l’antique inscription des Grottes Vaticanes, publiée par Aringhi (*). Aux deux exlré-milés de la pierre tombale, on volt deux dauphins qui se regardent, et dans l’espace qui les sépare on lit :

BALERIA. LXTOBIX OF. QVE VIX. ANN.

VS XLII. M. III. D.

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Boldctti, lib. I, c, xiv, p. 58.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Delphini etiam recentes adhuc et leneros calulos ex aliqiia causa consternatosnbsp;rursus venire suscipiunl, et cooiplectuntiir. Hom. vii, in Ilexcem.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Bottari, t. i, p. 76-7.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Lib. VI, c. XXXIX, p. 3ÖS.

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« Valéria Latobia, ouvrière, qui vécut quarante-deux ans Irois mois quinze jours, fut veuve douze ans; déposée Ie trois des ides de septem-bre, en paix. »

Paix a la bonne Latobia; adieu pour aujourd’hui aux Catacombes de Sainte-Agnès. II est temps de revenir sur la terre, et de regagnernbsp;la ville que la nuit commence ^ envelopper de ses ombres.

Un saint qui appartient k la France par Ie coeur et par le langage, 1’aimable évêque de Genève, Francois de Sales, recevait aujourd huinbsp;les hommages solennels de la mere des églises. Les fidèles se porlaientnbsp;aux couvents des Salésiennes all’Umiltd, a Saint-André-delIe-Fra«e,nbsp;è Ia Trinité des Monts et è Saint-Charles-ai-Caliwan : partout il ynbsp;avait affluence. La journée si bien commencée devait finir par d’au-tres actes de piété qu’on ne trouve qu’ii Rome. A l’église des Stig-mates ouvrait l’exercice du carnaval sanctifié; aux Saints-Cosme etnbsp;Ramien la retraite qui dure pendant tout le carnaval, et qui commencenbsp;chaque soir par le Chemin de la Croix au Colisée. Désireux d’assisternbsp;Rous-raêmes è cette dernière dévotion qui produit toujours une im-Pcession si profonde et si douce, nous pariimes de bonne heure pournbsp;Potre excursion souterraine : les Catacombes de la voie Salaria-Nuovanbsp;étaient le but.

Vers le nord-est de Rome se trouve la porte Salaria qui donne son Dotu k l’antique Voie qui conduit aux pays des Sabins (i). Célèbre parnbsp;temples d’Hercule, de Vénus, de l’Honneur, du Soleil, la Voie Sa-laria vit les Gaulois arriver en vainqueurs et tailler en pièces les Ro-

(') Salaria Via Romaj est appellata, quia per eam Sabini sal a mari defercbant.-bWp. et Plin., lib. xxxi, c. 7.

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238 nbsp;nbsp;nbsp;LES TllOIS ROME.

mains; puis Annibal planter sur ses bords ses lentes africaines, a trois inilles seuleraent des murailles de Rome (t); enfin Sylla, è la têle denbsp;ses troupes, attendant que sa palrie vim abdiquer la liberté entre sesnbsp;mains fumanles du sang remain (2). Comme les aulres, elle eut aussinbsp;de scandaleux tombeaux. Entre tous l’histoire a signalé celui de Ricinus, qui surpassail en magnificence les grands mausolées de la Voienbsp;Appienne : or, ce Ricinus était Ie barbier d’Auguste! Une pareillenbsp;énormité fut flétrie dans Ie fameux dystique rapporté par Varron :

Marmoreo tumulo Licinus jacet, ac Cato parvo,

Pompeius nullo : credimus esse Deos?

Traversant rapidement ces ruines et ces souvenirs païens, nous ar-rMmes aux Catacombes de Sainte-Priscille. Ici nous sommes sur Ie terrain de la plus haute antiquilé chrétienne. Arrivé è Rome pour lanbsp;première fois, neuf ans après l’ascension de Jésus-Christ, saint Pierrenbsp;descendit d’abord au dela du Tibre, dans Ie quartier des Juifs. Bientótnbsp;il vint loger dans une familie sénatoriale qui habitait prés de l’Esqui-lin. Punicus et Priscille, tels étaient les noms du père et de la mère :nbsp;ceux du fils et de la belle fille étaient Pudens et Sibinilla. Ils eurentnbsp;qualre enfanls, deux fils et deux filles également célèbres dans l’his-toire des martyrs : Novat, Timolhée, Praxède et Pudentienne {5). Ranbsp;maison de ces heureux néophytes fut pendant quelque temps la de-meure du Pêcheur galiléen. Cependant Ie feu de la persécution s’al-luma, et de nombreux chrétiens signèrent la foi de leur sang. Reursnbsp;restes sacrés devaient êlre pieusement recueillis, et la mère du séna-teur Pudens fut une des premières a se charger de ce soin coura-geux (4).

Re lieu oü elle déposa les martyrs est situé è deux milles de la porte Salaria, sur la gauche, non loin du pont deTeverone; c’est aujour-d’hui la vénérable Catacombe appelée de Sainte-Priscille, du nom denbsp;l’illustre matrone. On y descend par plusieurs escaliers, cachés dansnbsp;les vignes. Situé sur Ie penchant de la colline, ce cimetière s’estnbsp;trouvé plus que les autres exposé aux infiltrations des eaux et auxnbsp;éboulements qui en sont la suite. De la vient qu’il offre un assez grand

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Tit.-Liv., Decad. iii, lib. vi.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;A pp., De Bel. civ., lib. i.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Bar., An. 42; Martyrol. t6 jan.; Bosio, lib. iv, c. xxviii.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Dans rhisloire de la primiiive Église, on distingue trois Priscille. La première,nbsp;disciple de saint Paul, dont il est lait mention aux Actes des Apotres, c. xxviii; la seconde, celle qui nous occupe; et la troisième, qui vécut sous Dioclétien et sousnbsp;Maximien.

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Illi«T01RE. 239

nombre de galeries obstruées par des terres d’alluvion. En revanche

possède une belle et grande chapelle, d’une bonne conservation, excepté les peinlures qui ont entièremenl disparu.

Les gloires de cette Catacombe sont nombreuses comme les éloiles du firmament. Pour n’en citer que quelques-unes, c’est ici que furentnbsp;déposés, outre les membres de Tillustr^ familie du sénateur Pudens,nbsp;les saints papes Marcel, Sylvestre, Sirice et Célestin; Ie prêtre martyrnbsp;Saint Symitrius, avec vingt-deux compagnons de ses combats, par lesnbsp;soins de sainte Praxède. Toutes les persécuiions envoyèrenl leur tributnbsp;de héros au célèbre cimetière. Nous y avons vu lever Ie corps de deuxnbsp;Biartyrs de la persécution de Septime Sévère; celle de Domitien ynbsp;3vait placé, suivant toutes les probabilités, Ie corps de sainte Flavie,nbsp;jeune vierge martyre d’environ dix-huit ans, dont les reliques, plusnbsp;Précieuses que l’or, nous furent données par l’excellent sacriste, monseigneur Castellani, évêque de Porphyre, et que nous possédons iinbsp;Nevers. Cette ville se glorifie également de la présence de sainte Valentine, jeune martyre a peine adolescente, et venue comme sa soeur,nbsp;de la Catacombe de Sainte-Priscille. Enfin, sous Dioclétien, les dépótsnbsp;sacrés furent innombrables.

Le 26 avril de l’an 304, Dioclétien étant consul pour la neuvième l^els, et Maximien pour la huitième, le pape saint Marcellin, accompa-finé de Claude, de Cyrinus etd’Antonin, était conduit au suppliceaunbsp;Dailieu d’une foule avide de son sang. En face de la mort, le coura-geux Pontife se tournant vers Ie prêtre Marcel, qui devait êlre sonnbsp;successeur, lui dit : « N’obéissez jamais aux ordres sacriléges de Dio-êlétien. » Marcellin et ses compagnons eurent la tête tranchée, et,nbsp;pour effrayer les chrétiens, il fut ordonné que les corps des martyrsnbsp;1‘esieraient exposés sur la place publique jusqu’è ce qu’ils tombassent

putréfaction. lis y demeurèrent trente-six jours. Enfin Marcel par-è les enlever pendant les ténèbres de la nuit, et les déposa aux ^®lacombes de Sainte-Priscille, dans un cubiculum clarum, prés dunbsp;aaint martyr Crescention (i). Telle fut, ajoute Baronius, la violence denbsp;*a Persécution é cette époque, que Rome seule compta dix-sepl millenbsp;•Dariyrs dans un mois (a). Quel est, dans cetie armée de héros, lenbsp;itombre de ceux qui ont re§u la sépulture dans le cimetière qui nousnbsp;acciipe? Dieu le sait.

|0 Anast., ƒ« S. ü/ai c.

et nbsp;nbsp;nbsp;marlyrio coronarentur. Martyrol., 26 apr.; Ann., t. n, an. 504, n. 23

(O Quo letnpore magna fuil persecuiio, ita ut inlra mensem, decem et septem milUa t seq.

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240 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

Après avoir longtemps parcouru, tantót debout, et tantót nous trainant sur les mains, les étroites galeries de Sainte-Priseille, nousnbsp;dirigeftmes notre course vers la Catacombe de Saint-Sylveslre. Che-min faisant, nous reprimes l’étude de l’arl primilif.

Au nombre des emblèmes employés par nos pères, figure Ie bceuf, symbole des martyrs immolés a la gloire de Jésus-Christ; des Apótres,nbsp;propagateurs de l’Évangile; et des chrétiens, célestes laboureurs quinbsp;tra^aient péniblement leurs sillons arrosés de leur sang et de leursnbsp;larmes (i). Le boeuf se rencontre surtout dans les peintures primitives; il est plus rare dans les sculptures et sur les ouvrages de terrenbsp;cuite. La voute d’une crypte de Saint-Callixte, dont le sujet principalnbsp;est probablement un prédicateur de l’Évangile, présente d’un cóténbsp;Moïse frappant le rocher; de l’autre Daniel dans la fosse aux lions.nbsp;Aux angles inférieurs de la lunette, sont peints, en regard de la figurenbsp;principale, le boeuf et la colombe, éloquents symboles de la prédica-tion évangélique et des dispositions des chrétiens persécutés, commenbsp;Daniel et Moïse le sont de leurs tribulations et de leurs espérances (2).

La colombe dont je viens de parler se trouve partout. Les lampes, les verres, les pierces tombales, les peintures des cryptes et les com-partimenls des sarcophages sont couverts de l’oiseau symbolique.nbsp;Messagère de la paix el de la vérilé, emblème de I’innoeence, de lanbsp;douceur, de la simplicité, de la charité, figure du Saint-Esprit, lanbsp;colombe était a elleseule un livre de méditation,-parfaitement appro-prlé aux besoins de l’Église naissante. 11 est même probable que lesnbsp;chrétiens y voyaient Notre-Seigneur lui-raême, dont la colombe ex-primait si clairement les aimables perfections. De lè vint peut-étrenbsp;l’antique usage de conserver la sainte Eucharistie dans les tabernaclesnbsp;faits en forme de colombe (s). Sur les loculi, la colombe est ordinal-rement représentée avec un rameau d’olivier dans son bec. C’est bietinbsp;I’image la plus parfaite de I’Ame chrétienne retournant a Jésus-Christ, victorieuse dans les combats de la vie.

Le cerf est un aulre emblème fréquemment reproduit par Tart primilif. On sail que eet habitant des foréts et des montagnes solitaires

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Tauri mei et altilia occisa sunt.....Christus de figurala sanctorum suorum immo-

lationedicebat: Holocausta mcdullata offeram tibi boves cum hircis.—Cbrjs.,Hom. xi.i gt; in cap. xxii Matth. — Tauri el boves qui operantur terram, id est Apostoli et viri apos-tolici, de quibus apostolus Paulus scriptum inlerprelatur : Non alligabis os bovi trilu-ranti. — Hier., In hai., c. xxx— Quid aliud in figura per boves, quam bene operantesnbsp;accipimus? S. Greg., In Job., c. xvm.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Bosio, lib. 111, c. XXII, p. 523.

(ö) ld., lib. VI, c. 3S.

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241

PEINTÜRES DES CATACOMBES, PARTIE DÉCORATIVE.

est, en général, I’embleme de r4me exilée qui soupire après Ie repos, Ie rafraichissement et les torrents des délices éternelles. Dans l’appH-cation fréquente qu’ils en faisaient ü leur situation, les hóles des Ca-tacombes trouvaient, avec la figure de leur solitude et de leur bannis-senaent, une éloquente legon de vigilance et de charité mutuelle, ainsinbsp;fine rimage de Jésus-Christ, leur modèle et leur amour (i). Quel autrenbsp;emblème pouvait mieux exprimer leurs dispositions intérieures, relati-'ement au sacrement de la régénéralion? De ló vint que Ie cerf, senbsp;désaltérant dans les eaux du Jourdain, accompagne la belle peinturenbsp;du cimetière de Saint-Pontien, représentant Ie baptême de Notre-Seigneur (a).

Au nombre des emblèmes primilifs, il faut encore compter Ie paon. öans eet oiseau, dont l’antiquité regardait la chair comme incorruptible et comme Ie séjour des grandes ames qui avaient quitté leursnbsp;Corps, les chréliens voyaient une figure naturelle de leur dogme chéri,nbsp;la résurrection de la chair. Pour exprimer la jeunesse éternelle, ainsinbsp;‘lue l’incomparable beauté dont ils seraient un jour revêtus, ils repré-acntaient Ie mystérieux volatil dans la partie décorative de leurs pein-tures et de leurs sculptures; puis sur leurs tombes, dont les portesnbsp;devaient un jour donner passage a leurs corps glorifiés (s). Entre biennbsp;des exemples, je me conlenterai de citer Pinscription Irouvée par Bol-deiii dans Ie cimetière de Prétextat ;

.ELIA BICTORI SA POSVIT

dasi

CUjlls


(i) Cervus, venenosorum serpentium est vorax : spinosa Iranscendens, et summa agi-^èaie praeditus, liabitare diligit monies allissimos. Iluic merilo comparantur fideles,qui diabolum vorant, quando nequilias ejus, ad Domini laudem gloriamque convertunt,nbsp;'iliaque hiijus sa!culi, quasi spinas bona conversalione transiliunl; et habitant in mon-bbus, id est, Apostolis et Prophetis qui sanctis prajdicationibus suis in boe mundo solldanbsp;e^eutnina esse meruerunt. — Cassiod., In Ps. cxin.^—Est aliud etiatn,quod etdecervisnbsp;iciiu]. et in cervis videtnr. Quando enim longinquas regiones petunt aut per marenbsp;quot;ando, aut in agmine eundo, alter onus capitis superponit clunibus alterius, sieque scnbsp;'^“''icem portant, nee se descrunt, sed pronositum iter peragunt. — Bed., In Ps. xii.—nbsp;. Dei Filius in semetipso naturam quam ipse aniniantibus donavit, expressit: Quinbsp;ei bunc mundum tanquam cervus advenit, et coin bis se raira simplicitate jungebal, anbsp;‘Itubus ei parabantur insidio;; l'ertur enim bujusmodi cervoruin esse simplicitas, utnbsp;cutn bis nonnunquam societatem ineant, qui ipsos insectantur. Ita ergo Dominus Ju-dolum sibi aslruentihus miscebatur, et societatem osculo Judm proditoris ascivit,

simulatione l'unesta, usque ad cruci, laqueos, ac retia passionis accessit.

Anibr., lib. ui OJjic. c. i.

^ --) Desideral venire ad Cbristum, in quo est Ions luminis, ut ablutus baptisrao accipiat “'quot;lm remissionis. — S. Hier., In Ps. xi.i; Bottari, 1.1, p. 199.

Bottari, t. n, t2l; t. i, 52.

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242 LES TROIS ROME,

AVREH,E

PROB,«.

« Elia Victorina a fait ce loculus a Aurélia Proba (i). »

A droite de l’inscription on voit une brebis, symbole de la douceur et de la patience victorieuse des chrétiens; Si gauche, un paon, erablèmenbsp;de la résurrection; d’un cöté, la vie et ses combats; de l’autre, la ré-surreclion et ses gloires : d’un cóté la lulte, de l’autre la couronne. IInbsp;semble difficile de dire mieux ou plus en moins de mots.

Le coq figure aussi dans la partie emblématique des Catacombes. On le trouve, en général, ii la voussure des arcosolia, et même surnbsp;les pierres tombales. Placé dans les Catacombes, il prêchait aux premiers chrétiens la vigilance dont les pasteurs et les brebis avaient unnbsp;égal besoin. Aux uns, comrae aux autres, il enseigne «ncore, de nosnbsp;jours, la même vertu, du haut de la flèche élancée de nos églises. Lesnbsp;interprètes des symboles primitifs sont vraiment admirables, lorsqu’ilsnbsp;développent ce nouvel emblème a leurs auditeurs (2). J’ai dit que lenbsp;coq se rencontre sur les loculi, deux exemples tiendront lieu de beau-coup d’autres qu’il serait facile de citer. Boldetti a publié l'inscrip-tion suivante, trouvée dans les Catacombes de Saint-Callixte :

CONSTAN TI. IN PACEnbsp;CESQVE

« Constantins repose en paix. » A cóté du nom est un coq (3). II en est de même dans cette autre inscription du cimetière de Sainte-Agnès,nbsp;rapportée par Bosio :

BONATVS QVI BIXIT ANNIS XXX.

MENSIS. VI. DIES XVIII.

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Boldetti, lib. Ill, c. iv, p. 361.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Galli nomine designantur pradicatores sancti, qui inter tenebras vitae praisenlisnbsp;student venturam lucem prsedicando nuntiare. Dicunt enim: Nox praecessit, diesautemnbsp;appropinquavit, abjiciamus ergo opera tenebrarum. — S. Eucher., De Spir.form., c. v.nbsp;— Estctiam galli cantus suavis in noclibus; nee solum suavis, sed etiam ulilis, qui quasinbsp;bonus cohabitator et dormientem excitat, et sollicitum admonet, et viantem soiatur,nbsp;processum noctis canora significatlone proteslans. Hoe canente, latro suas relinquitnbsp;insidias. Hoe ipse Lucifer excitatus oritur coeiumque illuminat. Hoe canente, trepidusnbsp;nauta metum deponit. Hoe canente, devotus affectu exilit ad precandum. Hoe postremonbsp;canente, ipsa Ecclesia; Petra culpam suam diluit. Ipsius cantu, spes omnibus redil,nbsp;aigris levatur incomraodum, minuitur dolor vulnerum, febrium Bagrantia miligaiur,nbsp;revertitur fides lapsis, etc. — S. Ambr., Hexxm., lib. v, c. xxiv.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Boldetti, lib. 11, c. tv, p. 360.

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EMBLÈMES : LES ARBEES. nbsp;nbsp;nbsp;243

DEPOSIONE NOnY. KL. IMIAS OVESÖVI IN PACE.

« Donatus, qui vécut trente ans six mois dix-huit jours. Sa déposi-tion, Ie neuf des calendes de mai; il repose en paix. » On peut croire que Ie caractère dislinclif de ces deux chréliens avail élé la vigilancenbsp;tant recommandée dansl’Évangile; en sorte que leur tombe, grSce aunbsp;signe emblématique, continuait de prêcher, après leur mort, la vertunbsp;^u’ils avaient glorieusement pratiquée durant leur vie (i).

Dans un ancien sarcophage des Calacombes Vaticanes, on voit Ie coq placé sur une colonne; ce qui, du reste, est assez fréquent danslesnbsp;monuments d’une époque postérieure. « II rappelle, dit Rasponi, dansnbsp;Sa description de Saint-Jean-de-Latran, l’infirmité humaine donl lesnbsp;Pontifes eux-mêmes ne sont pas exempts (-2). »

Le règne animal n’est pas Ie seul a fournir des emblèmes a Tart primitif; le règne végétal, si gracieux et si varié dans ses productions, lui apporte un large tribut. Image de Notre-Seigneur, image denbsp;1’homme dans sa vie, dans sa mort et dans sa résurreclion, les arbresnbsp;sont souvent reproduits dans la parlie décoralive des monuments pri-milifs; quelquefois même ils occupent le champ de la peinture et denbsp;la sculpture (3); entre tous les membres de cetie grande familie, lenbsp;cyprès est Un de ceux qui revient ordinaireraent. Hélas! c est que lanbsp;pensee de la mort, symbolisée par eet arbre, élait et devait êlre sansnbsp;cesse présente aux premiers fidèles (a). Une pierre tumulaire, décou-verte par Bosio dans les cimelières de la Voie Appienne, représentenbsp;Un cyprès entre deux maisons. Ces maisons signilient le corps huraain,nbsp;qui est corame Ia demeure de l’éme détruite par Ia mort, dont lenbsp;lt;!yprès rappelle le souvenir. Du reste, les maisons se reproduisent lenbsp;plus souvent sur les loculi; c’est la place qui leur convenait (5).

Parmi nos emblèmes sacrés, ligurent aussi avec distinction le palmier et Tolivier. En parlant des martyrs, nous verrons la signification de la palme. Quant au rameau d’olivier, qu’on retrouve, a chaquenbsp;‘usiant, sur les tombes et dans les peinlures, tantót seul, lantót avecnbsp;'^Ue colombe qui le porie h son bec, ou qui est perchée dessus, onnbsp;devine sans peine les idéés dont il est le symbole. Héritiers des Iradi-

(1) Lib. VI, c. xxxvu, p. 329.

!’) Poniiiices human® imbecillilatis admonentur. De Bas. Later., lib. i, c. xiv.

(5) S. Cyril. Hieros., Catccli. xvui; S. Hier., Hom. m.In Cant.; Orig., lib. vi, In Epist. «d Hom.

lib. vï; Horat.,Od. v; Ovid., Tris(.,eleg. xiti,etc.; Bosio,lib. ïv,C.xi.n.

Bosio, ibid.; et c. xlvii, 5ü6-7.

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244 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

Uons primitives, lous les peoples anciens conservèrent, avec la con-naissance du déluge, Ie souvenir de la colombe. Myslérieuse messagère, qui, en signe de la paix rendue ii la lerre, apporta au patriarche unnbsp;raineau d’olivier. De la, chez toutes les nations, l’olivier regardé etnbsp;employé corame Ie symbole de la paix (i). Appliquant celte idéé a leursnbsp;rapports avec Dieu, les chrétiens peignirent ou gravèrent des rameauxnbsp;d’olivier toutes les fois qu’ils voulurent annoncer Ie triomphe de l’amp;menbsp;et la paix dont elle jouissait, en récompense de ses victoires. Or, cettenbsp;paix délicieuse, ils la devaient au divin Maitre, appelé notrepaix (2);nbsp;et ils avaient soin de lui en rapporter la gloire. Tel est Ie délieieuxnbsp;sentiment qu’exprime, en particulier, la pierre tombale d’un jeunenbsp;enfant, publiée par Bosio. A la partie supérieure, on lit l’inscriptionnbsp;suivanle ;

BENEMERENTI FILIO CAL.

PVRNIO PARENTES FECERVNT

QVI VIXIT ANN. v. M. VIII.

D. X. DECESSIT IN PACE xnil. KAL. IVN.

« A leur fils bien méritant Calpurnius, ses parents ont fait ce loculus; qui vécut cinq ans buit mois dix jours. II s’en est allé en paix Ie quatorze des calendes de juin. »

Au-dessous de l’inscription on voit un vase è deux anses surmonté du monogramme de Notre-Seigneur; et de chaque cölé une colombenbsp;portant a son bee un raraeau d’olivier dont les deux extrémités, senbsp;joignant au-dessus du monogramme, forment une espèce de couronne.nbsp;On ne pouvait exprimer avec plus de gr4ce et l’innocence, et Ie bon-beur éternel du jeune Calpurnius, et Ie principe auquel il en étaitnbsp;redevable. Quant au vase surmonté du monogramme, les arcbéologuesnbsp;y voient un emblème de notre corps, danslequel a résidé l’Esprit saintnbsp;avec ses dons de paix el d’innocence (3).

Éloquent symbole de Notre-Seigneur dans sa passion et dans Ie mystère adorable de l’Eucbaristie; de l’Église naissante et de cbaquenbsp;fidéle sous Ie pressoir des persécutions, la vigne avec ses ceps, ses

(() Quemadtnodum post aquas di\u-vii, quibus iniquilas anliqua purgala est, post bap-lisnuim, ut ita dixeriin, mundi pacem cceleslis iraj, per culutubam terris adnunliavit tiiinissatn ex area, et cum olea reversam; quod signum etiam apud nationes paci prte-tendilur. — Tcrtul., De Bapt.; Bosio, lib. iv, c. xuv p. 348.

(2) Ipse enim est pax nostra.

(5) Ilabemus Ihesaurum istum in vasis fictilibus. II ad Cor., c. tv, 7.

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EMBLÊMES ; LA VIGNE, LES COÜRONNES. 243

pampres et ses raisins, occupe une large place dans la partie decorative des monuments primitifs (i). On la trouve tanlót avec ses beaux fruits, disposés en guirlandes sur Ie contour des lampes sépulcrales;nbsp;tantót placés sous les pieds des vendangeurs, dans la bordure des ar-cosolia; ct partout redisant nos pères et Ie dogme générateur dunbsp;martyre, et leurs devoirs, et leurs espérances (2).

Sortons du règne végétal en disant un mot des couronnes. Get em-blème de la victoire orne souvent les sarcophages, les pierres tumu-laires et les peintures des Catacombes. La couronne se compose ordi-nairement de deux branches d’olivier qui se croisent, laissant en saillie les extrémités inférieures des tiges; d’autres fois elle forme un eerdenbsp;parfait. Dans Ie eerde se trouvent tour h tour l’inscription et la figurenbsp;raême du défunt. En void deux exemples publiés par Bosio :

NARCIANE PERIT ANNOnbsp;RVM P VS

MiNvs xni.

« Narcisane mourut ègée d’environ treize ans. » Une couronne de laurier entoure cette inscription, è cóté de laquelle se trouve unenbsp;palme.

RESPECTVS QVI VIXIT.

ANNV ET HENSES Vin DORMITnbsp;IN PACE.

K Respectus qui vécut un an huit mois dort en paix. » A c6té de l’inscription on voit, d’une part, une petite colombe; d’autre part,nbsp;Une couronne dans laquelle se trouve Ie buste du petit ange, les brasnbsp;^lendiis dans l’attitude de la prière.

L’ancre et Ie chandelier aux sept branches sont deux nouveaux em-i^lèmes fréquemment employés. Le premier indique l’espérance et la force. II se rencontre sur les pierres, sur les lampes et principalementnbsp;*ur les tombeaux oü il témoigne du dogme consolateur de la résur-^ociion future. J’en citerai deux exemples seulement. Le premier estnbsp;uue perle magnifique publiée par Mamachi. Afin de monlrer que leur

^ (') S. Hier., In Isai, c. v; S. Aug., In Ps. viii; S. Ambr., Ilexcem., lib. m, c. xiii; ' ¦ Hier., In Amos., c. ix; id., In Ps. cxxvi.

(S) Boltari, t. i, 108-tt0-126, elc., etc.; S. Hier., In Isai., c. v; S. Aug., In Ps. Tin;

• Ambr., Ilexasm., lib. in, c. xiii; S. Hier., In Amos., c. ix; id., In P*- cxxvi.

T. IV. nbsp;nbsp;nbsp;**

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¦246 LES TROIS ROME.

Constance, leur force, leur espérance avaient leur principe en Notre-Seigneur, les chrétiens accompagnèrent Ie symbole de ces différentes vertus du nom et de rembième du divin maitre : ainsi dans la pierrenbsp;qui nousoccupe,onlitau-dessus de rancre:iHcoYc,au-dessousxpeiCTOc;nbsp;de cbaque cölé est un poisson (i). L’autre exemple est l’inscriptionnbsp;déji cilée de la courageuse martyre sainte Faustine. Pour exprimernbsp;son héroïque Constance on ne s’est pas contenté d’écrire dans son épi-taphe Virgini fortissimw,on a représenté cette vertu par une ancre (a).

Le chandelier aux sept branches, emblème de Notre-Seigneur et des sept esprits qui reposent sur lui et qui éraaneut de lui, orne aussi lesnbsp;galeries de la Rome souterraine. Telle est la signification que lui don-nent posilivement les Pères de l’Église, interprètes et inspirateursnbsp;des monuments primitifs (5). Nous l’avons vu entre autres sur unenbsp;belle lampe en terre cuite publiée par Bosio (4).

Des Catacorabes de Sainle-Priscille au cimetière de Saint-Sylvestre, la distance n’est pas longue : c’est le même quarlier de la grande Citénbsp;des martyrs, sous deux noms différents. A l’exemple de ses prédéces-seurs, le glorieux Pontife qui baptisa Constantin voulut être inhuménbsp;auprès des amis de Dieu et placer sa mort comme sa vie sous leurnbsp;puissante protection (s). Bien qu’éloigné de plusieurs centaines de pas,nbsp;le célèbre cimetière de Sainle-Félicité, des saints Alexandre, Vital,nbsp;Martial, des sept vierges et des saints Chrysante et Darie, est regardénbsp;par les archéologues comme une partie intégrante des vastes Cata-combes de Sainte-Priscille (e). II en est aussi une des parties les plusnbsp;glorieuses, puisqu’il fut la sépullure des illustres martyrs que je viensnbsp;de nommer.

II est impossible de passer sous silence la noble matrone sainte Fé-licité, mère de sept fils martyrs et martyre elle-même. Arrêtée Fan 175, sous Fempire de Marc-Aurèle-Antonin, par Publius, préfet de Rome,nbsp;elle fut conduite chez ce magistrat, qui ne négligea ni politesses, ninbsp;promesses, ni belles paroles pour la faire abjurer. Félicité se contentanbsp;de répondre : « N’espérez pas, Publius, qu’une molle complaisance onnbsp;une Mche crainle fasse oublier a Félicité ce qu’elle doit è son Dieu :nbsp;vos menaces ne sauraient m’ébranler ni vos promesses me séduire. »nbsp;Le lendemain, Publius, séant sur son tribunal dans le Champ de Mars,

(1) Ol ijf, et Ant. christ.., lib. 111, p. 102; et 1.1, p. 51.

' nbsp;nbsp;nbsp;(2) Boldetli, lib. 11, c. iii, p. 359.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Clem. Alexand., Strom., lib. v.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Lib. vi, c. xivi, p. 333.

(3) Bosio, lib. IV, c. xxviii, p. 93.

(6) Boldetli, til), ii, c. xvm, p. 570; Mazzolari, t. v, 391.

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msTOiuE. 247

commanda qu’on lui amenftt Félicité et ses fils. Promesses, menaces, conseils, tout fut employé pour obtenir une apostasie : vains efforts!

Cependant un peuple immense assistait a l’interrogatoire qui dura longtemps et que rédigèrent les greffiers du tribunal. Comme il s’a-gissait de personnages d’une haute distinction, Publius renvoya Ienbsp;procès-verbal ii l’empereur, qui prononga la sentence de mort dont ilnbsp;confia l’exécution a cinq juges, libres d’y ajouler les tortures qu’il leurnbsp;plairait. L’ainé des fils, nommé Janvier, fut assommé è coups de cordesnbsp;garnies de plomb; Félix et Philippe périrent sous Ie biSton; Silvainnbsp;eut la tèle tranchée, ainsi que ses trois jeunes frères, Alexandre, Vitalnbsp;et Martial. Le dernier des juges fit endurer la même peine a la merenbsp;de ces admirables enfanls, qui par des routes différentes arrivèrent anbsp;la même gloire devant Dieu et devant les hommes (i).

Aux sept jeunes héros que nous venons de nommer se joignent, pour immortaliser la même Catacombe, sept viergesillustres, glorieusesnbsp;prémices des martyrs de la grande Rome : les saintes Pauline, Donala,nbsp;Rusticana, Serotina, Nominanda, Salurnina et Hilarie, furent inhu-mées par leurs dignes compagnes, sainte Praxède et sainte Puden-tienne (2). Quant ^ saint Chrysante et a sainte Darie, l’événementnbsp;mémorable dont leur tombeau fut le théêtre, sous l’empire de Numé-rien, leur donne un droit particulier au pieux souvenir des généra-tions chrétiennes.

Le 25 octobre de Pan 284, Numérien avait fait enterrer tout vivants les saints martyrs Chrysante et Darie, a trois milles de Rome environ,nbsp;sur la Voie Salaria. Dieu accepta cette hostie vivante, et associa a Ianbsp;même gloire et au même pouvoir ceux qui avaient partagé le mêmenbsp;supplice. Or, ce pouvoir se révéla par d’éclatantes faveurs. Au journbsp;anniversaire des martyrs, une immense multitude de chrétiens descen-dit secrètement dans leur tombeau, pour célébrer leur fête, en participant aux saints mystères. On vint en prévenir Numérien qui ordonnanbsp;de combler l’entrée de la crypte, et ces courageux chrétiens, étoulïésnbsp;tout vivants, furent associés è la gloire des martyrs dont ils étaieninbsp;''Cnus honorer la mémoire (s).

Ge fait prouve, comme nous l’avons déji indiqué, que les persécu-teurs finirent par connaitre au moins certaines enlrées des Cata-oombes.

b) Quelques auteurs placent ce marlyre 1’aii 150, sous Antonin le Pieux; nous nvons 'Uivi Baronius, An. 175, n. 3.

(2) Mazzolari, t. v, p. 592; Bosio, lib. iv, e. 28, p. 93.

b) Igilur cum mulia beneficia Deus venieniibus ad eorum sepulcr.a pixesbarei. eveuii

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LES TROIS ROME.

1quot; FEVRIER.

(;alacombes de la Voie Salaria Nuova. — Catacombes de Novella, — d'Oslriano.— His-loire. — Nouveau coup d’oeil sur I’ancbrelien. — Confirmation des vérités delafoi.— Catacombes de Sainte Hilarie et de Saint-Thrason. — Histoire.

Pendant que Rome accomplissait par une vigile sainte Ie voeu solennel renouvelé h perpétuilé en tSOS, PUniversilé célébrait un service, avec Oraison funèbre, pour Ie pape Léon X qui fonda ce bel établissement en 1513. Honneur aux peuples reconnaissanls! Cetle vertu des nobles amp;mes se manifesta pour nous dans la belle église de Sainte-Susanne, prés de laquelle nous passömes, en nous rendanl sur la Voienbsp;.Salaria. Susanne, illuslre vierge romaine, marlyrisée sous Dioclétie.nnbsp;et ensevelie par l’impératrice Séréna, est une des gloires des grandesnbsp;Latacombes de Sainte-Priscille (t). Les cimetières de Novella et d’Os-iriano, devaient d’abord nous oceuper. Le premier, fondé, selon toutenbsp;apparence, par quelque matrone dont il conserve le nom, est célèbrenbsp;par la retraite du pape saint Libère. Banni de Rome par l’empereurnbsp;Constance, le courageux Pontife eonvoqua, la veille de Piqués, tous lesnbsp;calholiques de la ville dans sa cathédrale souterraine. Le peuple s’ynbsp;rendit en foule; les sombres galeries brillèrent de mille flambeaux,nbsp;el.de sa chaire de marbre, le pape fugitif ayant a ses cötés Damasenbsp;son vicaire et son futur successeur, puis le prêtre Denys, fit h l’assem-blée un de ces discours qui font couler des ruisseaux de larmes.

Après quinze siècles, ce discours, placé dans la bouche du pape ré-gnant, serait encore la peinture fidéle des maux de l’Église : tant il est vrai que la lutte de Terreur centre la vérité, du pouvoir temporelnbsp;contre la liberté de TÉglise, peut changer de forme et de tactique;nbsp;mais elle reste éternellement la même dans son essence (a). Après lenbsp;ut die nalalis eorum infinita populi multitudo concurreret, viri simul et mulieres, pari ternbsp;et infantes, et innuptm puell® et juvenes. Hoe cum fuissel Numeriani auribus intima-lum, jussit ut in introilu, quo introierant in crypta, paries levaretur ; quod cum fuissetnbsp;impletum, desuper a sabulone super eos montem dejecit. Omnes ergo pariter, dumnbsp;communiter sacramenta pereiperent, et martyrum gloriam celebrarent, ipsi quoque adnbsp;coronara martyrii pertigerunt. Act. SS. Diod. et Mart., Cod. Vatic. S. Petr. et Vall., 3,10;nbsp;llar., Martyr., 25 oct., An. 284, n. 6.

(t) Bosio, lib. IV, c. XXIX, p. 98; Bar.,.4n., t. ii, an. 294, n. 1; an. 293, n. 6.

(s) Dies iribulationi.s et angustia; iratres carissimi,incesscrunt,in quibus navis Pelri,

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NOUVEAU COUP d’oEIL sur l’aRT CHRÉTIEN. nbsp;nbsp;nbsp;249

discours, Ie prêtre Denys pria Ie Pontife de bénir Ie saint chrêrae et 1’on administra Ie baptême solennel. Qiiel spectacle présentèrent alorsnbsp;les Catacombes de Sairile-Priscille!

Des galeries d’une médiocre longueur relient Ie cimetière de Novella a celui d’Ostriano. Ce nouveau quartier des Catacombes deSainte-Priscille doit son now, suivant Oniiphre, Bosio et Boldetti, è quelque membre de la noble familie Oslriana, dont parle Tacite. Les mêmesnbsp;auteurs nous apprennenl que saint Pierre y administra Ie Baptême (i).

Depuis que nous parcourons la Rome souterraine, nous avons montré que les Catacombes sont un grand livre dont l’éloquence égalenbsp;Pauthenlicité, et nous en avons tourné les unes après les autres lesnbsp;différentes pages : Ie temps est venu d’interroger les tombes innom-brables qui nous environnent et de leur demander quels sont leursnbsp;habitants. Toutefois, avant d’enlamer celte magnifique question, ilnbsp;n’est pas inutile de jeter un coup d’ceil rétrospectif sur Tart dont nousnbsp;avons étudié les ouvrages et de résumer les enseignements qu’il nousnbsp;donne.

Le grand fait qui domine tous les siècles, non-seulement paree qu’il commence avec le monde pour aller se perdre, sans finir, dans lesnbsp;profondeurs de l’éternité, mais encore paree qu’il aitire è lui tous lesnbsp;événements et toutes les créatures, comme le soleil attire a lui et en-traine dans son orbite tous les astres du firmament : le christianisme,nbsp;sans lequel Phomrae et le monde sont également inexplicables, se posenbsp;avec justice comme le dernier mot de toutes choses. Héritier de Piini-vers, Jésus-Christ, son divin auteur, élait hier, il est aujourd’hui, ilnbsp;sera aux siècles des siècles (a). Sa grande figure resplendit sur toutesnbsp;les époques de l’histoire; et la charité qui est l’essence de son coeurnbsp;se manifeste dans toutes ses oeuvres. Chargée de faire connaitre cenbsp;type imrauable aux générations qui passent sur la terre, l’Église ca-Iholique eut toujours un double enseignement : l’cnseignement oralnbsp;6t l’enseignement figure.

En communiquant la céleste doctrine dont elle est l’organe, elle ne cesse de répéter avec saint Paul que tout l’Ancien Testament est lanbsp;figure du Nouveau; que le peuplejuif est la préparation au peuplenbsp;®bréiien qui trouve dans les annales mosaïques l’bistoire anticipée de

'lis insurgenlibus, pciTnrbata, tanquam Christo dormientc, naal'ragium penimescii. ai el piratae undique imminent, cl interdicitur nobis guberiiandi facullas, etc.—Voyc?.

Veniis insurgenlibus, pciTnrbata. tanauam Cdiristo dormientc. naul'raeium nerliniescii.

Nam el piratae 1

ee discours dans Bosio, lib. iv, c. xxx, p. tOl.

(•) Bosio, lib. IV, c. xxxi; Boldetti, lib. ii, 571. Le P. Marchi senible élcver quelques Routes sur 1’asserlion de ses illustres devanciers, p. 79.

(^) Quem constiluit hmredem universorura, per quem fecit et smcula. H.Jr., c. i,2.

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230 LES TROIS ROME.

ce qui doit lui arriver; que tout se faisait pour Jésus-Christ, que tout I’annon^ait, Ie figurait, Ie préparait, en sorle qu’il est Tame, lanbsp;réalité, Ie but de l’ancienne loi comme de la nouvelle; qu’il est lanbsp;pierre augulaire qui unit les deux parties du grand édifice, et ennbsp;forme l’éternel monument dont la base repose d’un cóté sur Ie Sinaï,nbsp;de l'autre sur Ie Calvaire, dont Ie couronnement s’élève jusqu’au ciel.nbsp;Depuis saint Paul jusqu’a saint Augustin, depuis saint Augustin jus-qu’a saint Léon, et depuis saint Léon jusqu’a Bossuet, tous les inter-prètes des conseils divins nous montrent cette grande unité chrétienne,nbsp;dont Ie développement, commencé dans Ie paradis de la terre, ira senbsp;consommcr dans Ie paradis du ciel.

Comme Newton qui a vu Ie soleil entrainant tout Ie systèrae plané-taire dans son mouvement; comme Ie plus simple mortel qui voit tous les fleuvcs courant a l’Océan dont ils sont les tributaires ; ainsi l’É-glise a vu, ce qu’établit d’ailleurs l’histoire universelle, tous les évé-nements pivotant aulour de la rédemption humaine par Jésus-Christ,nbsp;tcndant tous é la préparer, i la propager et è la raaintenir; elle a vu,nbsp;ce que démontre la science, toutes les créations inférieures, descen-dues de Dieu, remonter a Dieu par l’intermédiaire de Jésus-Christnbsp;qui en est tout ensemble Ie Créateur, Ie Pontife et la fin; elle a vu, cenbsp;qu’annon^aient les prophèles et ce que constatenl tous les monuments anciens et modernes, les ennerais de ce Dieu venu pour recon-quérir Ie monde, vaincus, humiliés et servant d’escabeau aux piedsnbsp;du vainqueur. Elle a vu Pimmortel Vainqueur conduisant avec luinbsp;dans les splendours de l’éternilé l’humanité rachetée par son sang,nbsp;ressuscitée dans la gloire, et, pour récompense de ses épreuves passa-gères, jouissant dans Ie ciel d’un bonheur sans mélange et sans fin.

Telle est la grande épopée dont l’Église a vu la longue péripétie et Ie


sublime dénoument.

Or, ce qu’elle a vu, elle Ie dit, elle Ie rép.cte sur tous les tons h l’enfant qui vient en ce monde, a 1’adolescent qui Ie traverse, au vieil-lard qui en sort. Elle Ie dit aux peuples civilisés de l’Europe, et auxnbsp;jeunes chrétienlés de l’Océanie, comme elle Ie disait il y a dix-huitnbsp;siécles aux néophytes des Catacombes. Elle Ie dit, non-seulement parnbsp;la plume de ses docteurs, par la bouche de ses prédicateurs, et parnbsp;l’organe de la mère au foyer domeslique; mais encore par Ie langage,nbsp;tour a tour simple et sublime, de ses prières et de ses cérémonies.nbsp;Ainsi Jésus-Christ, l’alpha et l’oméga de toutes choses, Ie centre denbsp;tout, Ie dominateur de tout, Ie commencement et la fin de tout ; telnbsp;est l’enseignement oral que l’Église donne è l’humanité tout entièrenbsp;sans jamais varier ni finir.

I

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NOUVEAU COUP d’oEIL SUR l’aUT CIIRÉTIEN. 2o!

Elle dit la même chose dans son enseignement figure. Pauvre et fugitive, l’Église naissante ne pouvait, suivant le désir de son coeur,nbsp;réunir, instruire, edifier ses enfants par de longues et fréquentes instructions : I’art vint au secours de la parole. Inspiré pp ie mémenbsp;principe, il fixa sur les voiites des chapelles souterraines, sur les com-partiments des sarcophages, sur le contour des larapes ou les paroisnbsp;des verres, loutes les grandes vérilés qui devaienl être la lutnière etnbsp;la consolation des néophytes perséculés : telle est la clef de Tart auxnbsp;Catacombes. Jésus-Christ dominant le monde et les siècles, promis,nbsp;figuré, prédit, préparé, persécuté, triomphant, associant ses disciplesnbsp;a sa résurrection glorieuse et it sa victoire éternelle, après les avoirnbsp;associés è ses épreuves; 1’Ancien et le Nouveau Testament, toujoursnbsp;mis en regard, comme la figure è cóté de la réalité, l’ombre ü cólé denbsp;la lumière, I’anrore a cóté du soleil, le fleuve prés de l’Océan, dansnbsp;lequel il vient décharger le tribut de ses eaux; Marie, les Apótres,nbsp;quelques martyrs, heureux disciples de THomme-Dieu, et glorieusesnbsp;prémices de sa victoire : tel est, comme nous l’avons vu dans la partienbsp;historique, le sujet invariable de toutes les peintures et de toutesnbsp;les sculptures primitives ; lel est le premier enseignement de Tartnbsp;Chrétien.

Roi des siècles, des peoples et des événements, Jésus-Christ Test aussi des créalures. Dégradées par le péché, détournées de leur finnbsp;par les hommes et trop longtemps devenues des instruments d’ini-quité et d’idolótrie, il faut qu’elles soient régénérées ii leur tour etnbsp;rappelées a leur véritable destinée. Le divin restaurateur de tout cenbsp;qui est au ciel et sur la terre ne les a point oubliées. Dans la partienbsp;décorative de ses monuments, Tart primilif leur fait rendre au vrainbsp;Dieu le tribut de louanges el d’adoration qu’elles prostituèrent du-fant tant de siècles aux passions déifiées. Dans les modestes essais desnbsp;Catacombes, les trois règnes de la nature, les animaux de la terre, denbsp;f’air et de la mer; les arbres, les plantes, les fleurs, les saisons; lesnbsp;®étaux les plus riches et les plus simples, chantent è leur manière lanbsp;gloire du Dieu rédempteur, et redisent, sous le voile transparent dunbsp;Oiystère, les qualités adorables du Maitre qu’elles donnent aux disciples comme les modèles obligés de leur conduite : tel est le secondnbsp;®useignement de l’art primilif.

II n' 'est pas jusqu’aux démons, antiques ennemis de Dieu et de 1 homme, tyrans quarante fois séculaires de la création, qui ne doivenlnbsp;orner le char du vainqueur. L’art primilif, dont la main tremblanlenbsp;^crivait au plus fort du combat, prélude par de timides esquisses aux

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232 LES TIIOIS ROME.

magnifiques tableaux du moyen ège; alors que Ie ciseau du sculpteur représenlera, dans loutes les parties de nos immenses calhédrales, lesnbsp;démons vaincus, et constatant par leur attitude humiliée, leur figurenbsp;grima^ante, Téternel triomphe du vainqueur. C’est ainsi que Tart pri-mitif exprime celte vérité fondamentale, qu’en recompense de sesnbsp;souffrances et de ses travaux, Ie divin Auteur du christianisme a re^unbsp;un nom au-dessus de tous les noms et devant lequel tout genou fléchitnbsp;au ciel, sur la terre el dans les enfers.

De même que Tenseignement oral traverse tous les siècles; de même l’enseignemenl figuré marche sur une ligne parallèle, el des Catacom-bes s’élend, en passant par Ie moyen age, jusqu’a Saint-Pierre-de-Rome et a Saint-Jean-de-Latran. Tour amp; tour au service du génienbsp;sombre et puissant des peuples du Nord, il traduit la pensée catholi-que avec une énergie, avec une rudesse qui reflète les moeurs des filsnbsp;d’Odin et des vainqueurs de Varus; ou bien, s’inspirant aux beautésnbsp;de la Grèce et de l’Ilalie, il émaille de ses mosaïques, de ses fresques,nbsp;de ses milles ouvrages plus gracieux les uns que les autres, les églisesnbsp;d’Assise, de Padoue, de Rome et de Ravenne. Mais si la forme est différente, la pensée est partout la même. Ainsi Tart chrétien, qui, sem-blable au diamant a facettes, brille de mille reflets glorieux, est nénbsp;avec rÉglise ; les Catacombes furent son berceau. C’est li» qu’il fautnbsp;aller l’étudier pour Ie comprendre dans son esprit, dans sa missionnbsp;et dans les sujets qu’il admet et qu’il repousse.

Le considérer seulemenl depuis l’époque de la Renaissance jusqu’a nous, c’est courir le double danger de le rendre responsable d’unenbsp;foule d’anomalies cboquantes et de contre-sens ridicules dont il estnbsp;parfailement innocent, et de le condamner dans sa grande manifestation du moyen age, dont les admirateurs de la Renaissance ont ignorénbsp;le symbolisme, et, on peut le dire aujourd’hui, si malheureusementnbsp;ridiculisé la forme.

D’un autre cóté, ne pas remonter au dela du moyen ège, c’est étu-dier un livre auquel manque la première page; c’est scinder un magnifique ensemble et prendre reflet pour la cause, le développe-ment pour le principe et la virilité pour l’enfance. L’art, au moyennbsp;Sge, est fils de l’art aux Catacombes. Héritier de son père, il a fidèle-ment marché sur ses traces et conservé son esprit, tout en agrandis-sant sa succession. Comme son père, on le voit reproduisant constam-raent d’un cóté l’Ancien Testament, de l’autre Ie Nouveau, pour lesnbsp;fondre dans une même unité, répétant ainsi cette parole suprème ;nbsp;« Jésus'Christ était hier, il est aujourd’hui, il sera aux siècles des siè-

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NOUVEAU COUP d’oeIL SUIi 1,’aRT CHRÉTIEN. 255

cles; » puis inontrant dans les parties essentielles et décoratives de ses monuments toutes les créatures dii ciel, de la terre el des enfers,nbsp;entrant, ou comme moyens, ou comme obstacles, dans la grande épo-pée dont le Fils de Dieu est le héros.

Je le dis it regret, mais il semble que la Renaissance et les écoles dont elle est la mère, ont singulièi*ement oublié cette idéé fondamen-laie de Fart chrétien. Du jour ou elle est montée sur le Iróne, lesnbsp;figures de I’Ancien Testament, mises en regard des réalités de l’Evan-gile, sont devenues de plus en plus rares dans les monuments sacrés ;nbsp;c’estl^ un triple malheur. Malheur, paree que c’est une déviation denbsp;Tart : Ab initio autem non fuit sic. Malheur, paree que c’esl romprenbsp;l’harmonie qui doit toujours exister entre l’ensignement oral de la religion et l’enseignement figuré. La Bible que l’enfant lit sur les genouxnbsp;de sa mère et qui le conduit aux vérités de l’Évangile, il doit la lire,nbsp;et avec lui tous les fidèles, sur les murs du temple. Malheur, pareenbsp;que c’est tronquer la majestueuse perpétuité du christianisme; c’eslnbsp;le présenter comme un fait isolé, sans préparation dans le passé, suc-cédant è une religion vraie, en attendant lui-même un successeur,nbsp;comme le prétendent certains esprits de nos jours, amenés peut-être anbsp;cette conséquence déplorable par le vicieux enseignement dont nousnbsp;signalens le danger. Cette crainle nous parait d’autant mieux fondée,nbsp;Tue, sous l’influence moderne, le Catéchisme ou par conséquent lanbsp;Théologie des trois quarts des hommes ne présente plus le christianisme commengant avec le monde, sortant du Paradis terrestre, el po-sant un pied sur le Sinaï, et l’autre sur le Calvaire.

On le voit, les Catacombes sont un livre oü se trouvenl éerits les traits saillants de l’histoire du christianisme. Tandis que les cryptes etnbsp;les sarcophages nous donnenl cel enseignement général, les inscrip-ttons font redire aux marbres, aux luiles, aux pierres, aux verres, auxnbsp;lampes primitives, les dogmes de la foi, dont elles contiennent l’ex-Pression aussi explicite que lo permeltait la discipline du secret. Telnbsp;est pas le seul mérite des oeuvres de Part dans la Rome souterraine.nbsp;l^on-seulement elles enseignent la lettre de la religion; elles en révè-l®nt encore esprit. Patience, mansuétude, charité et miséricorde;nbsp;'’oilè bieu l’esprit du divin Rédempleur; et par conséquent l’espritnbsp;fi*^i anime son oeuvre et qui doit inspirer ses disciples.

Or, soit dans leur parlie hislorique, soit dans leur partie décora-'•ve, les monuments des Catacombes respirent tous l’esprit que nous ®'gnalons; il est facile de s’en convaincre par les sujets qui reviennenlnbsp;plus souvent. Abel tué par son frère; Isaac iramolé par son père;

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254 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

Daniel dans la fosse aux lions; les trois enfants dans la fournaise : voilJi bien, dans leur expression la plus éloquente, la patience el la mansué-lude pratiquées par Ie Mailre et enseignées aux disciples. Jonas dansnbsp;Ie sein de la baleine et couché sous Ie lierre; Notre-Seigneur sous lanbsp;figure du bon Pasteur, la colombe avec Ie rameau d’olivier : voilanbsp;bien la charité et la miséricorde sous les emblèmes les plus populairesnbsp;et les plus touchants. Les chréliens en prières, la sérénité sur Ie front,nbsp;les yeux et les mains levés vers Ie ciel; Ie Fossoyeur creusant Ie loculus de sou frère; les Agapes réunissant a la même table les enfants denbsp;l’Église naissante, sans distinction de riches et de pauvres; voilé biennbsp;la traduction caiholiquede ces deux préceptes: Aimez Dieu par-dessusnbsp;toute chose et votre prochain comme vous-même.

Je suis heureux de pouvoir confirmer celte observation capitale, par l’autorité d’un savant arehéologue de nos jours : « Les Catacom-bes, dit M. Raoul Rochette, destinées a la sépulture des premiers chréliens, longleraps peuplées de martyrs, ornées a des époques de persé-cution, et sous l’empire d’idées Iristes et de devoirs pénibles, n’offrentnbsp;cependant de loütes paris que des traits héroïques et des sujets aima-blos et gracienx ; des images du bon Pasteur, des representations denbsp;vendanges, des scènes pastorales, des agapes, des figures de chréliensnbsp;en prières, des symboles de fruits, de fleurs, de palmes, des couron-nes, des agneaux, des cerfs, des colombes; en un mot, rien que desnbsp;motifs de joie, d’innocence et de charité. J’ai montré ailleurs et jenbsp;puis certifier de nouveau, que Ie crucifix ne s’est encore rencontrénbsp;dans aucun des cimetières occupés, é partir des premiers siècles;nbsp;j’ajoute qu’on n’y a encore trouvé aucune des scènes de la Passion...nbsp;Le martyre même n’est indiqué symboliquement qu’au moyen de cesnbsp;trails héroïques de l’Ancien Testament, tels que les trois enfants dansnbsp;la fournaise, Daniel dans la fosse aux lions, Isaac sur le bücher, oü lesnbsp;chréliens de eet age, soumis aux mêmes épreuves, voyaient tout é lanbsp;fois une image de la réalité, un modèle a imiter, un motif de consolation OU d’espérance....

« Occupés seulement, au milieu des épreuves d’une vie si agitée et souvent d’une mort si horrible, de la récompense céleste qui les at-tendait, les chréliens ne voyaient dans la mort, et même dans le sup-plice, qu’une voie prompte et sure pour arriver a ce bonheur éternel.nbsp;Loin d’associer a celte image celle des tortures ou des privations quinbsp;leur ouvraient le ciel, ils se plaisaient a l’égayer de riantes couleurs,nbsp;a la présenter sous des symboles aimables, é l’orner de pourpre et denbsp;fleurs; car c’est ainsi que nous apparait l’asile de la mort dans les

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CONFIRMATION DES VÉRITÉS DE LA FOt. 2oo

Catacombes chrétiennes.... II y a la surtout un trait qui caractérise éminemment Ie christianisme, et qui est bien fait pour bonorer sonnbsp;génie : c’est que pendant une si longue période de persécutions, sousnbsp;l’influence habituelle d’iinpressions douloureuses, Ie cbrisiianisme,nbsp;réfugié dans les Catacombes, réduit a prier sur des tornbeaux, et sansnbsp;cesse occupé de devoirs tristes et sévères, n’a cependant laissé, dansnbsp;ces cimelières, parmi tant d’objets sinistres, aucune image de deuil,nbsp;aucun signe de ressentiment, aucune expression de vengeance; et quenbsp;tout, au contraire, respire, dans les monuments qu’il a produits, desnbsp;sentiments de douceur, de bienveillance et de charité. Je me trompenbsp;fort, OU cette observation qui résulte si positivement de l’examen desnbsp;peintures chrétiennes, présente Ie christianisme primitif sous unnbsp;aspect aussi propre a lui concilier Ie respect et l’amour, qu’aucun desnbsp;traits de son histoire ou des monuments de son génie (i). »

Tel est, dans les Catacombes, Tenseigneraent figuré du christianisme. Quand on a lu ce livre tout h la fois si sublime et si simple, deux sentiments naissent dans l’ame. On regrette vivement que lesnbsp;sculpteurs, les peintres, les archéologues modernes, que certains auteurs de livres d’instruction religieuse et de certains sermons, d’ail-leurs, estimables, aient trop oublié de puiser Ie véritable esprit denbsp;l’art et de la religion dans les monuments des premiers éges, alors quenbsp;la sève divine coulait ii pleins bords du pinceau de l’artiste commenbsp;de la plume de l’écrivain et de la bouche des Pères. Non moins vif estnbsp;Ie voeu qu’on forme pour Ie retour intelligent et consciencieux desnbsp;arts, des doctrines et des moeurs du monde chrétien aux exemples denbsp;son berceau.

Pénétrés de ce double sentiment nous nous dirigeames vers les cimetières de Sainle-Hilarie et de Saint-Thrason. Ces deux nouveauxnbsp;quartiers de Ia grande Catacombe de Sainte-Priseille ont aussi leursnbsp;gloires a raconter. Le premier nous parle de l’héroïne dont il portenbsp;Ie nom.

La grande Rome, qui venait de se repaitre de l’horrible supplice de Saint Chrysante et de sainte Darie ensevelis tout vivanls sur la Voienbsp;Salaria, n’attendit pas longtemps de nouvelles jouissances. Le 3 dé-cembre de l’an 284, l’empereur Numérien faisait expirer au milieunbsp;des tortures le tribun Claudius, ses deux Ills Jason et Maurus, avecnbsp;®oixante-dix soldats dignes de leur chef, et coupables comme luinbsp;d avoir cru ii l’évidence des miracles opérés par les deux illustresnbsp;Kiariyrs. Tous, excepté Claudius, sont livrés aux licteurs dont la hache

lt;') Tabl. des Cat., p. 182-3.

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“2o6 LES TROIS ROME.

fait tomber leur tête innocente. Quant au tribun, il devait épouvanter par sa mort ceux qui seraient tentés de suivre son exemple. L’empe-reur ordonne qu’on Ie traine comme Ie dernier des scélérats sur lesnbsp;bords du Tibre, qu’on lui attache au cou une pierre énorme et qu’onnbsp;Ie précipite dans Ie fleuve. Pendant ce lemps-li que fait Hilarie,nbsp;épouse et inère des martyrs? Avec Ie courage d’une matrone chré-tienne, elle vient recueillir les membres sanglants de ses lils, et Ienbsp;corps inanimé de son époux; puis, sans craindre Ie sort qui la menace, elle les dépose dans son jardin situé aux portes de Rome sur Ianbsp;Voie Salaria.

Vivre auprès de son trésor, prier comme chrétienne ceux qu’elle chérissait comme épouse et comme mère, telle était la consolante occupation de ses jours et de ses nuits. Nuraérien en est informé, et l’or-dre est donné de la saisir. « Je n’ai qu’une gramp;ce amp; vous demander,nbsp;dit la courageuse matrone aux soldals qui veulent l’entrainer, laissez-moi achever ma prière; puis vous ferez de moi ce que vous voudrez. »nbsp;Elle s’arrête, prend Ie corps du Seigneur, et étendant les mains ellenbsp;dit : « Seigneur Jésus-Christ, que je confesse de tout mon coeur, réu-nissez-moi .a mes enfants, sortis de mon sein pour aller au martyre. »nbsp;A ces mots elle tombe i» genoux et rend Ie dernier soupir. Les soldatsnbsp;la voyant raorte la laissèrent aux mains de ses deux suivantes qui l’en-sevelirenl auprès de son époux et de ses enfants (i).

La Catacombe de Saint-Thrason doit son origine a l’illustre chrétien dont il rappelle tout a la fois Ie nom, Ie courage et la charité. L’an 298,nbsp;les empereurs Dioclétien et Maximien faisaient construire leurs Ther-raes. Quarante mille chrétiens, soldats pour la plupart, travaillaientnbsp;nuit et jour è ce monument gigantesque dont la construction dura septnbsp;ans. Ce qu’avaient è soulTrir ces illustres condamnés, il est plus facilenbsp;de Ie deviner que de Ie. dire. Deux chrétiens. Maxime et Thrason, unisnbsp;par les liens d’une élroile amilié, résolurent d’apporter quelque sou-lagement è tant de souffrances. L’un et l’autre étaient a la tête d’unenbsp;grande fortune. Maxime vend la sienne en détail, et en donne Ie prixnbsp;è Thrason qui, pendant la nuit, parcourt les geóles, les carrefours etnbsp;les prisons pour secourir ses malheureux frères. Lui-mêrae ajoule sesnbsp;richesses è celles de son ami, qu’il distribue par ses mains ou par cellesnbsp;de quatre chrétiens dévoués qui re^urenl comme lui la palme du martyre en récompense de leur charité. Non content de soulager les vi-vants, Thrason prenait un soin religieux des morts. C’est lui qui, denbsp;concert avec Ie prêlre Jean, recueillit les corps du saint vieillard Sail) Bar., An., t. ii, an. 284; Martyr. 3 decemb.; Bosio, Ub. iv, c. xxxii.

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CATACOUEES DE LA VOIE SAIARIA VECCHIA. nbsp;nbsp;nbsp;2o/

turnin et du diacre Sisinius, martyrisés sur la Voie Nomenlane, et les déposa de ses propres mains dans sa villa, située sur la Voie Salaria,nbsp;oü se trouve aujourd’hui sou immortelle Catacombe (i).

3 FÉVRIER.

Calacombes de la Voie Salaria Vecchia. — Catacombes du coleau de Concombre. —

Hisloire. —Inscriptions des Catacombes. — Inscriptions sur les verres et les lasses.

— Yérités qu’elles enseignent. — Inscriptions des Calacombes.

Commencer la journée par s’unir aux exercices de la piété romaine et par vénérer les martyrs sur les aulels oü ils regoivent la glorieusenbsp;récompense de leur courage, est bien, ce nous semble, la meilleurenbsp;préparation au pèlerinage des Catacombes. De lü naissent des impressions et des lumières qu’on ne trouve pas ailleurs. Autant que les cir-constances l’avaient permis, cette méthode avait été la nótre. Pour ynbsp;demeurer fidèles nous descendimes aujourd’hui ü Sainle-Marie-m-Via-Lata. Bès la pointe du jour la vénérable Basilique était envahie.nbsp;Rome célébrait la fête de saint Blaise, évêque de Sébaste en Arménie,nbsp;dont la gorge, conservée dans Ie trésor de Sainte-Marie, est exposéenbsp;dans ce jour aux hommages des fidèles. Le marlyre du saint évêquenbsp;est une des pages les plus éloquentes de noire héroïque antiquité.

C’était en 516; Licinius continuait de persécuter en Orient la religion que Constantin faisait monter, en Occident, sur le tröne des Césars. Le troisième jour de février, Agricola, président de Ia province, fait saisir l’évêque de Sébaste, vieillard Irois fois vénérable parnbsp;ses cheveux blancs, par sa saintelé et par l’éclat de ses miracles. Aprèsnbsp;One longue flagellation, il est pendu a un arbre, et les bourreaux luinbsp;déchirent les cótés avec des peignes de fer. Ensuite on le jette en prison, puis on Ten tire pour le précipiter dans un lac. II én sort vivant,nbsp;et Agricola lui fail trancher la téte ainsi qu’a deux jeunes enfants,nbsp;Compagnons inséparables de leur père dans la foi. Quelques heuresnbsp;avant l’exécution, sept femmes chrétiennes avaient subi le derniernbsp;supplice. Pendant qu’on déchirait le corps du saint évêque, ellesnbsp;s’étaient approchées et mises en devoir de recueillir les gouttes de sonnbsp;sang ; reconnues ü ce trait, elles furent livrées aux bourreaux qui lesnbsp;firent expirer dans les plus horribles tourments (2).

Partons maintenant pour les Catacombes; le souvenir de tant d’hé-

(0 Bar., An. 305, n. HO; Bosio, lib. iv, c. xxxiii.

(2) Bar., .in. 516, n. 45; id., Martyr., 3 lev.

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2S8

LES TROIS ROME.

roïsme transporte la pensée è dix-huit siècles et vous fait entrer en quelque sorte de plain-pied dans les lieux oü vécurent les courageuxnbsp;athlètes dont on vient de relire les combats et de vénérer les restesnbsp;immortels. Bien que l’histoire profane ne connaisse qu’une Voie Sa-laria, les auteurs chréliens en distinguent deux. La première, dontnbsp;nous avons parlé, qui sortait par la porte du même nom, traversait Ienbsp;pont du Teverone et conduisait au pays des Sabins. La seconde, quinbsp;part de la porte Pinciana, tourne è gaucbe, rejoint Ie pavé de la Voienbsp;Antique, rase la villa du Collége germanique et aboutit aux Cata-combes (i).

La première que Ton rencontre sur la droite è un mille et demi des murailles, presqu’en face de la villa Borghèse, est celle du coteau dunbsp;Concombre {ad clivum cucumeris). Que ce nom lui vienne de la formenbsp;du terrain, ou des coucombres qui abondaient en ce lieu, il importenbsp;peu de Ie savoir; ce qui intéresse Ie voyageur chrétien, c’est de con-naitre les litres de cette Catacombe au souvenir de la postérité. Or, ilnbsp;serail long de les rapporter en détail : bornons-nous a quelques-uns.

Le mars de l’an 170 fut un jour de gloire pour ce noble quartier de la Rome souterraine. Irrité des progrès de l’Évangile dans les classesnbsp;élevées de Ia sociélé romaine, l’empereur Claude venait de rendre unnbsp;édit par lequel il élait ordonné de metlre a mort, sans interrogatoire,nbsp;tous les chrétiens détenus en prison, ou saisis dans les rues, sur lesnbsp;places et dans les maisons. Or, deux cent soixante chrétiens, condam-nés aux mines, travaillaient dans les arénaires de la Voie Salaria. Onnbsp;les enferme dans TamphithéAtre oü des soldats les tuent è coups denbsp;flèches : digne occupation d’une légion romaine! Après l’exécution, unnbsp;grand feu est allumé pour consumer les corps des martyrs et les privernbsp;des hommages de leurs frères; mais de courageux chrétiens, entre les-quels l’histoire nomme Marius et Marthe son épouse avec leurs filsnbsp;Audifax et Abacum venus d’Orient au tombeau des Apótres, retirentnbsp;du brasier une partie des saintes reliques et vont les déposer avec hon-neur dans la crypte de la Voie Salaria, au coteau du Concombre (ï).

Dans une autre circonstance, I’empereur, apprenant qu’un certain nombre de soldats avaient regu le baptême, ordonne d’assembler, dansnbsp;les jardins de Salluste, la légion dont ils font partie. Ordre est donnénbsp;aux néophytes de sortir des rangs, et è leurs compagnons d’armes denbsp;les conduire hors des murs, sur la Voie Salaria et de les mettre ü mort.

(i) Bosio, lib. IV, c. xxvin, p. 93.

(ï) El sepelierunt eos in crypta Via Salaria, ad clivum Cucumeris. Cod. Lal., v. 8; Yall. 1, S.

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njSTOiRE. nbsp;nbsp;nbsp;259

La sentence est exécutée; ces généreux soldats étaient au nombre de quarante-six. Deux prêlres, Jean et Justin, accompagnés d’un grandnbsp;nombre de fidèles, déposèrent leurs corps au coleau du Concombre :nbsp;c’était Ie premier novembre de l’an 269 (i). Sous Dioclélien Ie mêmenbsp;cimelière fut obligé de multiplier ses galeries et ses loculi pour rece-voir les restes satrés de mille martyrs, tous soldats, et de leur illustrenbsp;chef saint Maxime (2). Voila quelques-unes des gloires qui recoraman-dent cette Catacombe è la vénération religieuse de Ia postérité.

En parcourant les différents quartiers de la Rome soulerraine, té-moins authentiques d’un héroïsme surnaturel, on se demande quel fut Ie ressort puissant qui éleva el qui soutint cette hauteur sublimenbsp;ces millions d’hommes, de vieillards, de femmes, d’enfants, nés surnbsp;les marches du tróne impérial, dans l’humble demeure des pauvres,nbsp;OU dans les crgastula des esclaves, énervés dès l’enfance par les habitudes voluptueuses de la société païenne, ou avilis par les traitementsnbsp;ignominieux de la servitude? et de toutes les cryptes, de toutes lesnbsp;galeries, de toutes les tombes sort une voix qui répond : C’estla foi!

Quel noble orgueil pour Ie pèlerin catholique de pouvoir répondre ; Cette foi, c’est la mienne! Ses prétentions sont bien fondées. Déja,nbsp;nous avons vu l’histoire de la religion, dont nous sommes les enfants,nbsp;tracée a grands traits sur tous les monuments de la Ciié des martyrs,nbsp;il nous reste a reconnaitre chacun de nos dogmes gravés dans des inscriptions quinze et dix-huit fois séculaires. Telle est 1 intéressantenbsp;étude- è laquelle nous allons nous livrer en résumant, comme nousnbsp;l’avons fait pour les peintures, les enseignements contenus dans lanbsp;partie épigraphique des Calacombes.

Autant que Ie pouvait permettre la discipline du secret, il n’est pas un article du Symbole qu’on ne trouve dans les inscriptions de nosnbsp;¦vénérables cimelières. Je me contenterai de citer d’abord les grandesnbsp;vérités qui sont la base de lout Ie. christianisme, et ensuite cellesnbsp;qu’ont attaquées avec si peu de science les novateurs des derniersnbsp;temps.

En tête de tous les dogmes brille l’unité de Dieu; c’est Ie premier caractère qui distingue l’Église naissante et la sépare du mondenbsp;païen. Tel est aussi Ie premier acte de foi exprimé dans les inscriptions :

CAssvs. vitaI^io qvi vixit

ANN. VUI MENSIBVS XI

(') Bar., An., 1.11, an. 269, adfin.

(s) ^cl. S. Marcell. Pap.

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260 LES TKOIS ROME.

DIES. X. BENME. Fl^. FECERVST m PACI QVl. IN VNV DEVnbsp;CREDEDIT IN PACE

« Cassus Vitalius qui vécut cinquante-huit ans onze mois dix jours, bien méritant; ses fils ont fait ce monument, dans la paix; qui crutnbsp;en un seul Dieu, dans la paix. »

A l’unité de Dieu se joint la trinité des personnes :

BIC REQVIESCIT IN SOPNO PACIS AGEL PERGA ANCILLA CHRISTInbsp;QV.® VISCIT AN PL. JI. XVIII.

CREDO DEVM PATREM. CREDO DEVM FILIVM CREDO DM SPIRITVnbsp;SANCTV CREDO Q NOEISSIMOnbsp;DEI RESVRGAM

« Ici repose dans Ie sommeil de la paix, Agel Perga, servante de Jésus-Christ, qui vécut environ dix-liuit ans. Je crois Dieu Ie Père, jenbsp;crois Dieu Ie Fils, je crois Dieu Ie Saint-Esprit, je crois qu’au derniernbsp;jour je ressusciterai. »

Dans les inscriptions, comme dans les peintures et les sculptures, la divinité de Nolre-Seigneur, base de tout I’édifice du christianisme,nbsp;est exprimée de mille manières différentes. Tantöt c’est Ie mono-gramme de Nolre-Seigneur, simple, comme dans l’inscription sui-vante :

DEO SANC VNl LVCI TECVM PACE

« A Jésus-Christ, Dieu saint, unique lumière; paix avec toi. »

Tantót c’est Ie même signe entouré d’une couronne, pour marquer qu’au Dieu Rédempteur appartient l’honneur exclusif de distribuernbsp;les palmes de la victoire : il se trouve ainsi dans l’inscriplion du martyr saint Alexandre;

aXlzXNDPO RtNC MCPfNTi IN rixcE

« A Alexandre, bien méritant en paix. »

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INSCRIPTIONS DES CATACOMBES. nbsp;nbsp;nbsp;261

D’aulres fois c’est le nom du Sauveiir avec I’acclamation in pace :

^ PRIMA VIVIS IN GLORIA DEI ET IN PACE DOMIN NOSTRI

« Prima, lu vis dans la gloire de Dieu et dans la paix de Noire-Sei-gneur Jésus-Chrisl. »

PASCASO INNOCEN TI m PACE. ±-

« A Pascase innocent, dans la paix de Jésus-Christ. »

Ailleurs, c’est le nom adorable précédé et suivi de I’alpha et de l’oniéga, symbole du principe et de la fin de toutes choses ;

A ;fcG)

PATRI ET MATRl LEONI ET MA XIMILIANETI. LEOPARDVS. FILInbsp;VS BENE. MEHENTIBVS IN XPOnbsp;SANCTO FECn. PATER. DEP. VI.

IDVS. JAN

(t A son père et a sa mère, Léon et Maximilianete, Léopardus, leur fils, è ses parents bien mérilanls en Jésus-Christ, le saint a fait cenbsp;monument. Son père a été déposé le six des Ides de janvier. »

Partout c’est le repos et la vie éternelle dans le sein du Dieu fail homme pour nous associer b sa félicité ;

REGINA VISAS IN DOMINOnbsp;ZESV.

tt Regina, vis dans le Seigneur Jésus. »

VITALIANVS MAGISTER MILITVM QVIESCIT IN DOMINOnbsp;ZESV Vllll KALnbsp;APRILIS.

« Vilalien, officier de rarinée, repose dans le Seigneur Jésus, le *ieiif des calendes d’avril. »

Nul ne peut entrer dans la paix éternelle du Seigneur el avoir Dieu pour père, a moins qu’il n’ail Tliglise pour mere. Or, celte Église,

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262 LES TROIS ROJIE.

qui seule enfante et nourrit les enfants de Dieu, c’est TÉglise calho-lique. Ainsi l’entendaienl les premiers chrétiens dont la foi, gravée sur leurs tombes, condarane d’a\ance tous les novateurs :

DEPOSITVS HERILA COMES IN PACE riDEInbsp;CATHOLICS VII. KALnbsp;AVG. QVI VISIT ANNnbsp;PL, M. L. D. N. SEVEUI AVGnbsp;PRIMO CONSnbsp;ET

CONSVLATV HERCVLANI

V. C.

« Le comte Herila déposé dans la pais de la foi de TÉglise catholi-que, le sept des calendes d’aoüt, qui vécut plus ou moins de cinquante ans; sous le premier consulat de notre seigneur Sévère Auguste, etnbsp;sous le consulat d’Herculanus, homme très-célèbre. »

L’Eglise calholique s’idenlifie avec Rome qui en est le centre; en sorle que la foi de Rome est la foi calholique, la foi qui assure la paisnbsp;éternelle :

4“ EXSVPERANTIA D. XV. KAL. SEPT.

HIC DEPOSITS EST IN PACE ROME QVAS BIXIT P. M. MENSES III......

« Exsuperantia mourut le quinze des calendes de septembre. Elle est ici déposée dans la paix de Rome; elle vécut environ trois mois. »nbsp;Si Rome est Ie centre de la foi calholique, Pierre, évêque de Rome,nbsp;en est Ia personnification : pour les premiers chrétiens, êire uni ^nbsp;rÉglise calholique, è Rome ou k Pierre, c’est tout un. II était difficilenbsp;de proclamer plus solennellement la primauté et rinfaillibilité dunbsp;Vicaire de Jésus-Christ;

RVTA OMNIBVS SVBDITA ET ATFABI ^IS BIBET IN NOMINE PETRI.

IN PACE.

« Ruta, soumise et affable è tous, vit au nom de Pierre, dans la paix. » Cette inscription est celle d’une martyre des Catacombes denbsp;Sainte-Priscille.

Pour appartenir amp; l’Église, il faut être baptisé. L’inscription de

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INSCRIPTIONS DES CATACOMBES. 263

Poslhumins Eutherioo, quo nous avons citée plus haul, est un témoi-gnage aulhentique de cette croyance invariable. Contrairernent au système des anabaptistes, les premiers chrétiensadministraientlebap-lême aux enfaiits en danger de mort, et Ie croyaient très-valide, puis-qu’ils donnaient le nom de fidèles ^ ceux qui I’avaient regu :

D. M. S.

FLORENTINVS. FILIO. SVO. APRONIANO FECIT. TITVLVM. BENEMERENTl. QVl. VIXITnbsp;ANNVM. ET. MENSES. NOVEM. DIES. QVINQVEnbsp;CVM. SOLDVAMATVS. FVISSET. A. MAJOREnbsp;SVA. ET VIDIT. HVNC. MORTI. CONSTITVTVMnbsp;ESSE. ET. IVIT. DE SECVLO. VT. FIDELIS. DEnbsp;SECVLO...... RECESSISSET.

« Consacré au Dieu grand, Florentinus a fait cette tombe è son fils Apronien, bien méritant, qui vécut un an et neuf mois, cinq jours;nbsp;après avoir été tendreraenl aimé de son aieule; et il le vit réduit ènbsp;Particle de la mort, et il quilta le monde en qualité de fidéle. »

A ce jeune fidéle d’un an et demi, ajoutons une petite néophyte de frois ans, en nous souvenant que le nom de néophyte était exclusive-wient réservé é ceux qui avaient regu le baptême :

FL. JOVINA. QVE. VIXIT.

ANNIS. TRIBVS. D. XXXII. DEPOS NEOFITA. IN PACE. XI. KAL. OCTOB

« Flavia Jovina, qui vécut trois ans trente-deux jours, déposée néophyte dans la paix, le onze des calendes d’octobre. »

Si les chréliens ont eu soin de marquer le sacrement qui les faisait infants de 1’Église, pouvaient-ils oublier Faliment divin qui leur don-*iait la force du martyre; ce breuvage merveilleux, qui les enivrait denbsp;délices au milieu des tourments? 11 est vrai, la discipline du secretnbsp;lour commandait une grande réserve au sujet de l’Eucharistie; maisnbsp;leur amour trouvait moyen de se manifester sans trahir le myslère.nbsp;Parmi les monuments les plus anciens, figurent les verres ou coupesnbsp;^ boire, trouvées en entier ou par fragments dans les Catacombes. Or,nbsp;la plupart portent sur le fond ou sur les parois des inscriptions dansnbsp;losquelles I’archéologie reconnait des allusions évidentes au banquetnbsp;divin ; je laisse parler le savant Père Secchi.

* On trouve très-fréquemment, dit-il, sur les verres des cimelières,

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264 nbsp;nbsp;nbsp;les tp.ois rome.

un genre d’acclamations exprimant de chaleureuses invitations a boire. Elles se lisent sur Ie fond des verres ou des tasses découverts dans lesnbsp;tombeaux des martyrs, et représentant souvent les apótres saint Pierrenbsp;et saint Paul seuls, ou avec l’image de Marie... II y a longtemps qu’ennbsp;examinant avec attention les inscriptions qui y sont jointes, j’ai soup-Qonné que ces verres ou ces tasses n’étaient autre chose que des vasesnbsp;consacrés au serviee de Pantel, dans lequel les diacres adminislraient,nbsp;el les premiers chrétiens recevaient PEucharistie sous Pespèce du vin...nbsp;J’avoue que, si Pon pouvait confondre la religion chrétienne, ne füt-ee qu’en plaisantant, avec la religion de Bacchus, et la vie de cesnbsp;hommes vertueux avec une vie mulle et débauchée, je ne serais pasnbsp;aussi intimement persuadé quejele suisdelajustessedemesopinions;nbsp;mais quel que puisse étre Ie nombre de ces verres portant des acclamations contraires amp; la sobriété des chrétiens et ^ la tempérance desnbsp;martyrs, je répéterai toujours que ce sont tous des vases sacrés.

» En voici quelques-unes : niE zheAIh en AFAGOIh, Bois afin que tuvives de ces biens. On sait que les Pères grecs appellent la sainte Eucharistie : Ie bien, ou les biens. De li cette autre acclamation grecque :nbsp;piEZEsis,oubienzESEs, pour niE hseihs.Bois,titofyra.s,trés-fréquentenbsp;sur ces sortes de verres; si elle est écrite en caractères laiins, c’estnbsp;probablement par suite de la discipline du secret ou d’un ancien usagenbsp;de PÉglise. La vérité de notre proposition devient encore plus évidente,nbsp;en ce que cette acclamation est souvent jointe aux mots latins : digni-tas amicorum, pie zeses, auxquels on ajoute quelquefois cvm leis,nbsp;cvm caris tvis, cum tvis omnibes bibe et propina, ce qui démonlrenbsp;que quelques-unes de ces tasses avaient servi a une familie entière (i).nbsp;Je soupgonne même que, sur ces verres, les mots vivas et vivatisnbsp;n’appartiennent pas toujours au verbe vivo, et ont plutöt la mêmenbsp;signification que Ie bibas et Ie bibatis, gravés sur d’autres verres mieu.vnbsp;orlhographiés.

» De li découlent deux conséquences. La première, que ces vases de verre destines, soit au sacrifice de Paulel, soit a la communion desnbsp;chrétiens, sous Pespèce du vin, doivent être antérieurs au pape Urbain 1,nbsp;c’est-a-dire a Pan 222 de Père vulgaire. II est certain, d’une part, quenbsp;Ie pape saint Zéphirin ordonna que ces vases fussent au moins de verre,nbsp;inlerdisant les matières de moindre qualité, et conciliant ainsi unenbsp;plus grande décence avec la pauvreté. D’autre part, il est égalementnbsp;certain que Ie pape Urbain I prohiba même les vases de verre, a causenbsp;de la fragilité de cette matière (2).

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Boldetti, p. SIS.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Com. Tribur., c. xviii; Decret. part. iii, de Consec. dist. 1, c. xliv, xlv.

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INSCRIPTIONS DES CATACOMEES. nbsp;nbsp;nbsp;265

La seconde conséquence concerne ces vases de verre qui contiennent Ie sang des martyrs. Suivant Ie téraoignage de Boldetti et de Bianchini,

en a trouvé un grand nombre encore tachés de sang, qui, èi raison lt;le leurs inscriptions, doivent avoir d’abord servi a l’usage de l’Eucha-fistie; et, cela posé, ce serail une extravagance inadmissible que denbsp;Jes considérer comme des vases de parfums. Ils viennent done fortifiernbsp;les nombreux arguments qui appuient cette vérité incontestable denbsp;1’histoire ecclésiastique (i). »

Quel devail être l’effet du divin breuvage préparé par l’Église, leur mère? Les chrétiens ne l’ignoraient pas. lis connaissaient les paroles de leur bon Maitre : « Celui qui mange ma chair et qui boit monnbsp;Sang, ne mourra point, je Ie ressusciterai au dernier jour. » Ainsinbsp;1’immortalité de l’éme et la résurrection des corps étaient deux dog-öies qu’ils confondaient, dans leur amour, avec Ie dogme de la diviniténbsp;du Sauveur. Les inscriptions les redisent avec la même précision quenbsp;les peintures.

AVFIDI CABISSIMEnbsp;VIBIS. IN Enbsp;TERNO.

« AuGdius chéri, tii vis éternellement. »

DIOSCORE VIBE IN ETERNO

« Dioscore, vis éternellement. »

Et cette éternité sera une éternité de bonheur.

ANTONIA AN IMA DVLCInbsp;S IN PACE Tnbsp;ib( DEVSnbsp;REFEICERIT

« Antonia, ème chérie en paix, Dieu te donnera Ie rafraichisse-JVLI.®. agapeni. conjvgi dvl

CtSSIME QUE VIXIT ANNIS XLV M. Hl. D. lil VID. ET MECVMnbsp;ANNIS III SEPT. LETARIS IN PACE.

(O Mariijre de St. Sabinian, Annal. de Phil, chrét., 504; et avril 1842.

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266 nbsp;nbsp;nbsp;LES TBOIS ROME.

« A Julia Agapenia, épouse très-chérie, q'ui vécut quarante-cinq ans trois mois trois jours; et vécut avec moi vingt et un ans : tu ténbsp;réjouis dans la paix. »

DPE SALONICE ISPIRITVS TVS m BONV.

« Deposition de Salonique (c’est-è-dire lieu oü a été déposée) ; ton ème est dans Ie bonheur. »

La consolante pensée qu’ils retrouveraient dans Ie sein de la bien-heureuse patrie, leurs parents, leurs amis, n’échappa ni i leur vive foi ni a leur tendresse non moins vive :

VLPIA VIVA SIS CVM FEA TRIBVS TVIS

« Ulpia, sois vivante avec tes frères. »

CRESCENS CVM TVIS

« Crescent avec les tiens. »

L’ème seule ne doit point jouir du repos éternel; Ie corps doit res-susciter et participer ^ son bonheur.

JDSTVS CVM SCIS XPO MEDIANTE RESVRGET

« Juste ressuscitera avec les saints par Jésus-Christ. »

HIC IN PACE REQVIESCIT LAVRENTIA. L. F.

QVE CREBIDIT RESVRRECTIONEM.

« Ici repose en paix Laurentia, fille de Lucius, qui a cru h la resurrection. »

Mais ces amis, ces parents si chers, qui sont maintenant dans les délices du ciel, oublieront-ils leurs frères, leurs amis, encore exilésnbsp;dans la vallée des larmes? Non; Ie dogme touchant de la communionnbsp;des saints fait partie de la foi primitive :

SABBATI. DVLCIS ANIMA PETE ET ROnbsp;GA PRO FRATRES ETnbsp;SODALES TVOS

« Sabbatius, ftroe ehérie, prie et intercède pour tes frères et tes amis. »

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INSCRIPTIONS DES CATACOMBES. 267

ATTICE SPIRITVS TVS IN BONV ORA PRO PARENnbsp;TIBVS TVIS.

» Atticus, ton Sme est dans le bonheur : prie pour tes parents. »

JOVIANE VIBAS IN DEO ET ROC.

« Jovianus, vis en Dieu et prie. »

Si les bienheureux habitants du del prient pour nous, c’est une conséquence nécessaire que nous leur exposions nos besoins, et quenbsp;nous ayons recours a leur assistance. Ainsi nous le croyons, ainsi nousnbsp;le faison^; ainsi le croyaient et le faisaient nos glorieux ancêtres ;

PETRVS ET PANCARA BOTV PO SVENT MARTVRE FELICITATI.

« Pierre et Pancara ont fait ce monument pour accomplir leur voeu a Fèlicité martyre. »

Void une dernière inscription plus explicite, et qui par sa date et par son origine montre avec éclat la perpétuité du dogme consolateurnbsp;dont nous parlous :

SANCTO AC BEATISSIMO APOSTOLO JOANNI EVANGEtlST/Enbsp;GALEA PLACIDIA AVGVSTAnbsp;CVM FILIO SVO PLACIDO VALENTINIANOnbsp;AVGVSTO

ET FILIA SVA JVSTA GRATA HONORIA AVGVSTA

IIBERATIONIS PEEICVLO MARIS VOTVM SOLVIT.

« L’impératrice Galla Placidia, avec son fils I’empereur Placide ^ a entinien, et sa fille Pimpératrice Justa Grata Honoria, a accomplinbsp;a Voeu qu elle a fait au saint et bienheureux apótre saint Jean I’Évan-Sé iste, pour être délivrée d’un naufrage. »

quot;Tels sont en abrégé les dogmes exprimés dans les inscriptions des atacombes. Ici, comme dans les peintures et dans les sculptures,nbsp;^armonie parfaite, et profession de foi catholique aussi simple dans lanbsp;que sublime dans le sujet et compléte dans l’énoncé des doctri-Supposez pour un instant, que I’enseignement oral de l’Église

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abö nbsp;nbsp;nbsp;LES TKOIS ROME.

vrenne k cesser; que TAncien et Ie Nouveau Testament soient perdus; que les livres de piété, les apologies de la Religion, Ie symbole mêmenbsp;aient disparu : tous ces trésors se retrouveraient dans les monumentsnbsp;de la Rome souterraine. Avons-nous eu tort de dire que les Catacom-bes sont un grand livre illustré par Ie pinceau et Ie burin des martyrsnbsp;OU de nos premiers aïeux? Ne sommes-nous pas en droit d’ajouternbsp;qu’elles sont Ie livre Ie plus précieux, et Ie plus vénérable qui soitnbsp;sorli de la main des hommes? Heureux si Ie peu que nous avons ex-pliqué pouvait inspirer Ie désir eflicace de l’étudier è fond!

15 MARS.

Catacombes de la Voie Salaria Vecchia (fin). — Calacombes de Saint-Hermès. — His-toire. — Habitants des Catacombes; — ils sont tons catholiques; — parmi eux il n’y a ni païen, ni juif, iii hérétique.

« A tous les coeurs bien nés, que la patrie est chère! » La patrie des émes, c’est la Religion. Si éloigné qu’il soit du pays qui l’a vu nai-tre, Ie catholique, prosterné au pied d’un autel, se retrouve au milieunbsp;des siens. Les coeurs sont lè oü est leur trésor, et l’Eucharistie est Ienbsp;irésor des vrais fidèles. En présence de ce Dieu qui voit tout, qui entend tout, qui est partout, les distances disparaissent; l’amour et la foinbsp;établissent entre lui et ses frères un rapprochement d’autant plusnbsp;doux qu’il est plus iutime. Son bonheur augmente lorsqu’un objetnbsp;sensible, une circonstance locale, une fête commune, viennent émou-voir les fibres les plus délicales de son ime, et servir de lien a ce mys-térieux rendez-vous.

Ce préambule explique la joie qu’en bons Nivernais nous éprouvéraes aujourd’hui. Saint Cyr et sainte Julitte sont les patrons de notre cathé-drale et de notre diocèse. Or, la station avait lieu aujourd’hui même,nbsp;dans l’église oü les honore la Ville éternelle. Nous retrouver iel auxnbsp;pieds de ceux que nous vénérions en France; leur parler de nos amisnbsp;et de nos proches, n’était-ce pas nous retrouver en familie? D’heureuxnbsp;moments s’écoulèrent dans la modeste Église, et sans la nécessité denbsp;reprendre la visite de la Rome souterraine, nous les aurions longtempsnbsp;prolongés au milieu de la foule pieuse.

Nous quitlftmes done Ie Forum de Nerva, et sortant de la ville par Ie Pincio, nous arrivéraes sur la Voie Salaria Vecchia, aux Calacombesnbsp;de Saint-Hermès. L entrée se trouve dans une vigne, en face de la villanbsp;du Collége germanique. Soixante marches d’escaliers conduisent a

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CATACOMBES DE SAINT-HERMÊS. nbsp;nbsp;nbsp;269

l’église souterraine, une des plus belles, sans contredh, et des plus vé-nérables des Catacombes. Le pavé de l’église est au niveau de la tpoisième galerie : on peut juger, par li», du prodigieux travail qu’anbsp;couié ce monument. Mais qui l’a construit? Qui a donné le terrainnbsp;occupé par le vaste cimelière de Saint-Hermès? qui l’a ouvert? Surnbsp;tout cela, l’histoire est muette; mais ce qu’elle nous apprend avec certitude, c’est l’antiquité de ce noble quartier de la Rome souterraine,nbsp;ainsi que les noms des grands martyrs qui Tont illustré. Suivant notrenbsp;Usage, nous allons redire au voyageur ces noms iminortels et les combats de ceux qui les ont portés. La Catacombe que nous visit'ons s’ap-pelle tour a tour dans les monuments primitifs ; cimetière de Saint-Hermès, de Sainte-Basilla, des Saints-Protus et Hyacinthe.

Hermès élait préfet de Rome sous Adrien. Converti, avec toute sa familie, par le pape saint Alexandre, il fut arrêté a la poursuite dunbsp;juge Aurélien qui lui fit trancher la têle. Sainte Théodora, sceur dunbsp;martyr, recueillit ses restes précieux, et les déposa dans la Catacombenbsp;de la Voie Salaria, en attendant que, martyre elle-même, elle vint reposer auprès de son illustré frère ; cela se passait, le 28 aoüt denbsp;1’an 432 (i). L’histoire, pour le dire en passant, n’a eu garde d’omet-Ire un fait bien glorieux pour sainte. Théodora. C’est è la courageusenbsp;fidélité de cette héroïne que fut confié, pendant quelque temps, le précieux dépót des chaines de saint 1’ierre.

Basilla, issue d’une des plus nobles families de l’empire, fut accusée par son propre mari d’être chrélienne. Le 13 des calendes de juinnbsp;(20 mai) de l’an 202, I’empereur Gallien, siégeant sur son tribunal,nbsp;interrogea Basilla; la trouvant inébranlable dans sa foi, il ordonna denbsp;la faire périr par le glaive. Elle fut a peine immolée que les chrétiensnbsp;cmportèrent son corps dans le cimetière de Saint-Hermès.

Jusqu’ici les martyrs auxquels notre Catacombe doit ses noms di-'ers, appartiennent aux classes élevées de la société; mais, dans l’É-glise, la vertu égale tous les hommes. A cölé d’Hermès et de Basilla, ''oici venir deux chrétiens d’une condition obscure, et qui vont parta-gcr avec les plus nobles la gloire de donner leur nom a l’immortelnbsp;cimetière. L’an 488, la septième du règne de Commode, TEgypie re-cevaii pour gouverneur un illustré personnage nominé Rhilippe. IInbsp;c'ait accompagné de sa femme Claudia et de sa lille Eugénie, fiancée

consul Acilius Glabrion. Cette jeune personne, ayant eu occasion fie voir les chrétiens, Irès-nombreux dans la ville d’Alexandrie, voulut

(') Caron., An. 152, n. 2; An. ad Mariyr., 28 aug., Bosio, lib. iv,c. T. IV.


XXXIV.


ta


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70

LES TROIS ROME.

partager leur foi. Devenue chrétienne, elle conserva auprès de sa per-sonne, en qualité de chambellans, deux jeunes frères, chrétiens comme elle : ils s’appelaienl Proius el Hyacinlhe. De retour a Rome avec leurnbsp;sainte maitresse, ils véeurent de longues années dans la pratique denbsp;toutes les vertus. Parvenus i l’extrême vieillesse ils furent arrêtés,nbsp;eonduits devant les magistrals et pressés de sacrifier aux idoles. Maisnbsp;conservant sous leurs cheveux blancs toute la vigueur de l’tlge mür,nbsp;les généreux alblètes opposèrent aux menaces et aux tortures la douceur de l’agneau et Ie courage du lion. Voyant ses efforts inutiles, Ienbsp;juge leur fit infliger une cruelle flagellation, prélude du dernier sup-plice. En effet, leurs têtes tombèrent bientót sous la bacbe des lic-teurs : c’était Ie onze septembre de Pan 262, sous l’empire de Gal-lien (i).

Environnés de ce glorieux cortége de martyrs, nous nous mimes a circuler dans les profondes galeries de la catacombe de Saint-Hermès.nbsp;Étudier l’origine, l’bistoire, les ornements de la Rome souterraine,nbsp;tel avail été, jusqu’ici, Ie but de nos excursions : Ie temps était venunbsp;de faire connaissance avec ses habitants. Or, sans aucune exception,nbsp;tons furent catboliques comme nous, enfants de la même Église et disciples de la même foi. Qu’il me soit permis de Ie remarquer en passant, ce fait révèle une des plus belles harmonies de la Providence.

Comme Ie Fils de Dieu fut placé, durant trois jours, dans un sé-pulere neuf, taillé dans la pierre, oü personne n’avait été mis avant lui, oü personne ne fut mis après lui; ainsi l’Église, son épouse, l’É-glise de Rome fut cachée, durant trois siècles, dans un sépulcre neuf,nbsp;taillé dans la pierre, oü personne n’avait été mis avant elle, oü personne ne fut mis après elle. De même encore que la destination exclusive de la tombe du Calvaire prouve que Ie mort qui en sorlit triom-phant était bien l’Homme-Dieu, et non pas un autre; de même lanbsp;destination exclusivement catholique des Catacombes établit victorieu-sement que les ossements sacrés qui en sorlent appartiennent auxnbsp;membres de l’Église; ou mieux encore, que c’est FÉglise elle-mêmenbsp;qui en sort dans la personne de ses enfants, pour monter sur les au-tels de la terre, jusqu’au jour oü la résurrection glorieuse, l’associantnbsp;a la gloire impérissable de son divin Époux, la fera monter sur Ienbsp;tróne de Péiernité.

Établissons maintenant que, dans les'millions de loculi qui reni-plissent les galeries, les cubicula, les cryples de l’immense cilé, ü n’en est pas un seul qui renferme ou qui ail jamais renCermé un païcu,

(i) Bar., An. 188, )i. 2; 262, n. ü6; An. ad Martyr., 11 sppt.; Bosio, lib. iv, c. xxxi'r-

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LES CATACOMBES EXCLESIVEMENT CATIIOLIQUES. 271

un juif, un hérétique. La tradition, l’hisloire, la science, la critique sont d’accord avec Ie sens commun pour rendre témoignage a ce faitnbsp;important:

1° Les Catacombes, berceau du christianisme, ne furent jamais souillées par la sépulture d'aucun païen. Si l’on admet, avec Ienbsp;P. Marchi, Torigine exclusivement chrétienne des Catacombes, la vir-ginilé de Ia Cité des martyrs est compicteraent ddraontrée. Or, iiousnbsp;avons exposé, au commencement de notre pèlerinage, les puissantesnbsp;preuves qui établissent l’opinion du savant archéologue; et Ton est anbsp;se demandcr ce que les hommes compétents peuvenl lui opposer.nbsp;Mais, afin de donner libre carrière a Ia discussion, prenons pournbsp;point de départ Ie sentiment de Bosio el de Boldetti, qui font honneurnbsp;aux païens des galeries supérieures dé quelques Catacombes. Cettenbsp;hypothèse, nous allons Ie voir, n’affaiblil en rien la certitude du faitnbsp;dont il s’agit.

De deux choses Tune ; ou les Catacombes furent des tombeaux païens; et, dans ce cas, les chrétiens en furent sévèrement exclus; ounbsp;les Catacombes sont la sépulture des premiers chrétiens; et, dans cenbsp;cas, jamais un cadavre païen ne vinl les profaner. La force victorieusenbsp;de ce dilemrae repose sur l’opposition essentielle qui séparait lesnbsp;deux religions.

Chez les Remains, la propriété des tombeaux était tellement exclusive qu’elle n’admettait a la participation de Ia mêrae sépulture que les membres de la möme familie, et ceux aiixquels des actes authenti-ques accordaient la même faveur. Le caractère général des mausoléesnbsp;et des colombaires, les ordres positifs des mourants, le soin minutieuxnbsp;Kvec lequel sont indiqués dans les inscriptions et les dimensions dunbsp;lerrain sépulcral, et le nom de ceux qui pouvaient y reposer, et lesnbsp;^mendes stipulées et les imprécations lancécs contre le téméraire quinbsp;^serail introduire dans le tombeau des cendres étrangères, sont unenbsp;Preuve sans réplique de ce fait d’ailleurs incontesté. Cet égoïsme de

tombe s’était iransformé en dogme religieux. « II importe égale-'ttent, dit Cicéron, de posséder les monuments des ancêtres, de par-l^^ger les niêmes sacrifices et les mêraes tombeaux (i). » Puis il ajoute : “ Telle est la religion des tombeaux, qu’on regarde comme un crimenbsp;d’etre inhumé hors des lieux si saints et loin de sa familie (2). » De

(0 Jla gnum esse eadem habere monumenla majoram, üsdem uli sacris, sepulcra iabere commiinia. Dc Offic., lib. 11. — Taiitam sepulcrorum rcligioneni, ut extra sacra,nbsp;*^1 gentem inlerri 1'as negarenl esse. De Legib.

P; Ila ut cliam qui peregre morerentur, illorum corpora, aiit ossa vel cineres in I’airiam referri runsueTisse. Spond. de Ccemeter., lib. 11, pars i, c. iv.

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272 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

la l’usage si cominun de rapporter dans la patrie les cendres de ceux qui en mouraient éloignés.

Telle élüit done la sévérité des Romains qu’ils excluaient de leur tombe, sous peine des plus foudroyants anathèmes, leurs amis inti-mes, et jusqu’a leurs héritiers ; el l’on voudrait supposer que cesnbsp;inemes Romains ouvrirent gracieusement leur sépullure a des hommesnbsp;qu’ils haïssaient, qu’ils méprisaient cordialement, qu’ils poursuivaientnbsp;a outrance comme des impies, des parjures, coinme les derniers desnbsp;misérables dont Ie nom seul élait celui de tous les crimes? C’est Ie cas,nbsp;OU jamais, de répéteravec Horace : Credat Judwus Apella; at non ego.

Mais quand les païeiis auraient été aussi disposés qu’ils l’élaient peu a parlager leur tombe avec les chrétiens, il faudrait de plus, pournbsp;admevtre une communaulé de sepulture, nier la répugnance et l’hor-rcur des chrétiens ou l’avoir vaincue. Mais cette répugnance était plusnbsp;invincible encore que celle des pa’iens. Nos pères tenaient a leur religion pour Ie moins autaut que les pa’iens a la leur. Or, Ia religion leurnbsp;défendait tout commerce sacré avec les idolalres.

« Qu’y a-t-il de commun, avail dit Ie grand Apölre, entre Ie temple (ie Dieu et les idoles? On ne peut boire en même temps a la coupenbsp;du Seigneur et a la coupe des démons (i). » Plutót que de participernbsp;aux sacrifices des pa’iens, a leurs superstitions et a leurs fêtes, lesnbsp;chrétiens aimaient mieux mourir au milieu des plus affreux tourments.nbsp;El l’on voudrait qu’après s’êlre raonlrés si sévères pour éviler pendantnbsp;la vie tout contact sacrilége avec les idolitres, ces mêmes chrétiens,nbsp;oubliant a la mort toutes les prescriptions de leur culte, eussent con-senti a déposer, dans des tombeaux profanés, les dépouilles sacréesnbsp;de leurs frères; a meier les cendres des martyrs avec celles des ado-rateurs des démons; a s’imposer la choquante et périlleuse obligationnbsp;de prier les saints devant la méme tombe oü les païens venaient offrirnbsp;l’eau lustrale, l’encens, les fleurs et les gateaux a leurs morts? Exposer une pareille supposition, c’est la réfuter.

Tout en s’inclinant devant cette preuve, qu’une légère connaissance de l’anliquité rendra loujours péremptoire, un jeune voyageur, des-cendu avec nous dans Ie eimetière de Saint-Hermès, disait : te Serait-il absurde de supposer que les galeries supérieures des Catacombesnbsp;servirenl primiüvemenl de sepulture aux pa’iens; el que les chrétiens,nbsp;après en avoir retiré les cendres des morts, les accommodèrent i leurnbsp;usage en les purifiant, comme ils purifièrent plus tard Ie Panthéon?nbsp;— Oui, absurde, et absurde au superlatif.

(i) 1 Cor., X, 20.

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LES CATACOMBES EXCLOSIVEMEfiT CATIIOLIQÜES. nbsp;nbsp;nbsp;27Ö

1® Absurde de supposer que les galeries supérieures-des Catacom-bes servirent primitivement de sepulture aux païens. Nous avons vu que la propriété des tombeaux était un dogme de la religion ro-maine : cbaque familie, chaque corporation avail son mausolée. sonnbsp;colombaire sévèrement fermé a lout cadavre élranger. Or, les galeriesnbsp;supérieures des Catacombes, aussi bien que les Catacombes elles-mêmes, sont un cimetière conimun : on y trouve è cóté les uns desnbsp;autres des hommes de toutes les families et de loutes les conditions (i).nbsp;II est même évident, d’après la direction des galeries supérieures etnbsp;inférieures, que l’intention des fondaleurs était de relier ensemble cesnbsp;immenses souterrains. Le caractère général des Catacombes exclutnbsp;done péremptoirement la supposition dont il s’agit.

2“ Absurde encore; paree que la forme des tombes ou loculi, ainsi que la nature des dépouilles humaines qu’elles renferment, sont unenbsp;preuve palpable de leur usage exclusivement chrétien. Les loculi nenbsp;ressemblent en rien aux niches des colombaires, ni aux urnes desnbsp;mausolées. Jamais on n’y trouve les ouvertures destinées amp; recevoirnbsp;les ollce funéraires, je veux dire les petits vases de terre cuite dansnbsp;lesquels on renferraait les cendres des morts. Ils apparaissent au contraire toujours et partout comme de véritables tombeaux; la longueur,nbsp;la largeur, la hauteur, sont évidemment déterminées par les proportions du corps humain qui doit y reposer tout entier. Que telle soitnbsp;leur destination, la preuve en est palpable ; on y trouve des squelet-tes plus OU moins conservés, et jamais de cendres.

Or, tout le monde sait que depuis le commencement de la républi-que, l’usage de brüler les morts fut général parmi les Remains. Voiei, du reste, l’histoire et les motifs de celte couturae, qu’il importe denbsp;bien constater. Nous apprenons de Servius, que, sous les rois, onnbsp;donnait la sépulture aux morts dans leur propre maison; ou bien onnbsp;les brulait suivant une loi de Numa Pompilius (2). Les tombeaux étaientnbsp;quelquefois ereusés dans le flanc ou a la base des collines. De lè vintnbsp;plus tard l’usage d’élever sur les tombes des colonnes el des pyramidesnbsp;Ou de former les tombeaux en guise de monuments, pour que tout lenbsp;monde connül la place des défuuts et se rappelat leur souvenir (5).

Mais il n’y avail aucun cimetière commun. Afin que le défunt repo-

(') Voyez Büldetli, lib. 1, c. xvi, 67; et lib. 11, c. iv, Ö60-460.

(*) Vinum rogo ne aspergilo. — Plin., Ilist., lib. xiv, c. xn.

(5) Unde natum est, ut supra cadavera, aut pyramides tierent, aut ingentes colloca-•'entur column*. Pro qualitate personarum pyr* liebanl, sepulcra ctiam majora vel ttinora fiebant. — Serv., /Eneid. u.

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274 LES rnois ROME.

sdl aupi’ès de ses proches, on Ie rapportait dans sa patrie, si éloigné que ful Ie lieu de sa mort. Ainsi, nous retrouvons, dès les temps lesnbsp;plus anciens, Ie grand caractère d’exclusion ou de propriélé qui distingue essentiellement les tombeaux païens des cimetières chrétiens,nbsp;et qui, comme nous l’avons remarqué, démontre victorieusement l’u-sage exclusivement catholique de nos Catacombes (i).

Cependant les Remains toujours en guerre avec les peuples du La-tium et de l’Italie ne tardèrent pas a s’apercevoir que leurs ennemis ne craignaient point d’exbumer les cadavres et de profaner les tombeaux. Cette circonstance fit cesser l’usage d’enterrer les morts. Lanbsp;coulume de les brüler devint bienlót tellement générale, qu’un petitnbsp;nombre seulement des families les plus illustres de la république con-servèrent Ie rit primitif. Cicéron n’en compte que trois; il cite entrenbsp;autres la familie Cornelia que Sylla, sorti de cette antique race, fitnbsp;entrer dans l’ordre commun. Craignant qu’on ne profanat son cada-vre, il ordonha de Ie brüler (2). Or, on sait que les tombeaux de cesnbsp;grandes families n’étaient point cachés dans les entrailles de la terre;nbsp;mais qu’ils s’élevaient en somptueux mausolées sur les bords desnbsp;grandes Voies roraaines. On sait, de plus, qu’ils étaient exclusivementnbsp;réservés aux personnes du même sang. Nouvelle iinpossibilité de lesnbsp;confondre avec nos Catacombes.

Devenu universel vers les derniers siècles de la république, 1'usage de brüler les morts continue parrai les païens, sauf quelques exceptions, jusqu’a la paix de l’Église. Aux raisons primitives qui l’avaientnbsp;introduit vinrent s’ajouter, pour Ie consacrer et l’étendre, les opinionsnbsp;de la philosophic, alors très-accréditées, dans les classes supérieuresnbsp;de la société. Suivant Héraclite, Ie feu était Ie principe de toutes cho-ses ; brüler les corps, c’était done les rendre a leur principe et lesnbsp;honorer. D’autres soutenaient que Ie feu, en consumant la partie ter-restre de Thomme, rendait a rüme sa liberté et lui permettait denbsp;prendre joyeusement son essor vers Ie ciel. Ceu.x-lü prétendaient que

(i) Sciendum est quod apud majores, ubi quis ubicumquo fuisset cxsünclus, ad domum suam rel'erebalur. Serv., In v jEneid. — In domibus, quas singuli incolebant,nbsp;indolüs aut \ asculis inilio sepeliebant Romani; in agris quisque suis, aut in fundo su-burbano, seu aviio et patrio solo ex senatus consulto. Cneio Duilio consule, Roma3 bu-niari consuevere. — Alex. ab Alex. Genial, dier., lib. m, c. n.

(a) Ipsum cremare apud Romanos non tuil veteris insliluü ; terra condiebantur.....

At postquam longinquis bellis obrutos, erui cognovere, tune instilutum. Et tarnen raulta; 1'amilia; priscos servavere ritus, sicut in Cornelia nemo ante Syllam dictatorcninbsp;Iraditur crematus. Idque voluisse veritum lalionem, cruto C. Marii cadavere. Plin.,nbsp;Hisi., lib. vn, c. liv; Ciccr. De Leg., lib. ti.— II ne compte quo Ia familie Cornelia,nbsp;celles de Publicola el de Tubertus.

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LES CATACOMBES EXCLUSIVEMENT CATIIOLIQUES. nbsp;nbsp;nbsp;2/0

Ie feu communiquait au défunt quelque chose d’imraortel; ceux-ci, qu’il Ie purifiait de loute souillure et lui facilitait sa réunion au principe de toutes choses. Enfin les sectaleurs de Pythagore, adraeltantnbsp;la transmigration, croyaient que Ie feu rendait l’ame plus agile et plusnbsp;prompte a passer d’un corps a l’autre (i).

De toutes ces philosophies différentes, lesRotnains avaient tiré une conséquence commune. Ils regardèrent conime un honneur insignenbsp;d’être brülés après leur mort, comme une honte et un malheur d’êtrenbsp;privés des flarnmes salutaires du bücher (2).

Afin de procurer Ie même avantage au petit peuple, trop pauvre pour subvenir aux frais d’un bucher, Ie gouvernement fit construirenbsp;des buchers publics appelés ustrince puhlicce. C’était de vastes édi-fices,composésdequatre fortes murailles, formant unparallélogramrae,nbsp;dans lesquelson brülaitsans pompeni cérémonie, mais avec une grandenbsp;quantité de boisrésineux (3), les corps des pauvres. Les ustrinw rem-placèrent les puticulida mont Esquilin; en sorte que les esclaves seuls,nbsp;placés au rang des bêtes, conlinuèrent d’être jetés pêle-mêle dans lesnbsp;puits profonds destinésdès Ie principe a leur ignominieuse sépulture (*).

Sur une ligne parallèle marchait, parmi les chrétiens, l’usage non

(lt;) Servius, jEneid., lib. ii; id. m; Ovid., Trist., lib. i, eleg. iv; Laclanl., Hb. 11, c. x; Quintilian., Declam. x.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Eo tempore,quo igndarii honor mortuis habebatur. Macrob.,Satwr., lib. vu. Pro-brum ingens visum est supremis ignibus caruisse.—Mabül.,/ter Italic., c. xxti, etc., etc.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Varro, apud Servium, in vi Mneid.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Lucain nous apprend comment on brülait les cadavres du peuple :

Sic iatus, parvos juvenis procui aspicil ignes Corpus vile suis nullo custode cremantes.

Et Ovide :

Pharsal., lib. vni.

El dare pleheio corpus inaue rogo. In ibid.

Ante Servium Tullium, putei erant extramurani, in quibus pauperculorum combu-rebantur cadavera, quos puteos cum Festus suoetiamsatculo extra Portam Exquilinam collocet; necesse est, dilatatis a Servio rauris, locum extra Exquilias ustulandis proji-ciendisque plebeiorum cadaveribus, postea destinatum fuisse, cum corpora plebeianbsp;uunquam Roma; dqsiderala sunt flammis (*).

(’) Apud Grevium, Itom. Antiq., t. tv. — Un grand nombre d’objels trouvés dans les derniers temps constatent 1’existence des ustrines, dont ils indiquent la place (”). Ellesnbsp;uevaient ètre éloignées de la ville, des mausoléesetdes edifices. Entre plusieurs autres,nbsp;* inscription suivante ne laisse aucun doute a eet égard :

AD. HOC HOXVMENTVMnbsp;VSTRIXVM. APPLICAIUnbsp;NOS. LICET. POENA. ESI

( *1 BoUletti, lib. i, c. xvii, p. 71.

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LES TROIS ROME.

moins universe!, non moins inviolable, d’enterrer les morts : c’élait un de leurs crimes aux yeux des païens (i). La Providence Ie voulaitnbsp;ainsi, afin d’élablir paria seule difference de sépulture 1’intégrité par-faite de nos vénérables cimetières. Quant aux exceptions dont j’ainbsp;parlé, elles se réduisenl ; aux tout petits enfanls, aux foudroyés, auxnbsp;suicidés et aux esclaves (2).

Les petits enfants, %és de moins de quarante jours, n’étaient point portés sur Ie bucber, ou dans Ie tombeau de leurs families, mais inhumes dans l’intérieur de la cité, dans des tombes parliculières appe-lóes suhgrundaria : pour les autres, on suivait l’usage universel {5),nbsp;PV’os cimetières chrétiens, étant placés hors de la ville, ne renfermentnbsp;done aucun enfant païen.

Quant a ceux qui avaient été tués par la foudre, ou qui s’étaient donné la mort, ils étaient également odieux aux Romains.Les premiers,nbsp;paree qu’on les regardait comme des ennemis de Jupiter; les seconds,nbsp;paree qu’on les tenait pour des impies {*), On se contentait de leurnbsp;donner la sépulture qu’on ne refuse pas même aux plus vils animaux,nbsp;et on les déposait dans la terre. Or, qui croira qu’avec de pareillesnbsp;idéés, les Remains avaient pris la peine de creuser é grands frais denbsp;vastes galeries pour y déposer, avec honneur, des hommes regardésnbsp;jtar eux comme la haine des Dieux et l’opprobre de l’humanité; qu’ilsnbsp;leur aient taillé soigneusement des loculi séparés dans leurs latomies

(t) Exsecranltir rogos, et damnant ignium sepulturaiti. — Minut. Felix, In Octav. — Loin de s'en défendre, les chrétiens répondaienl: « Nee ut creditis ullum damnum se-» pultura; timemus, sed et veterem el meliorem consuetudinem humandi frequeuta-» mus. »ld.

(2) Tacite a soin de signaler comme une exception la sépulture de Poppée; « Corpus » non igne abolilum, ut Romanis mos est. » Annul., lil), xv. — « .lEgyptii quoque con-» dienles sepeliuntcorpora : Romani vero incendunt. » — Laert., De Vit. Philos., lib. ix,nbsp;in Pijron. — Au iv« siècle, Macrohe constate la cessation de cel usage : cc Licet urendinbsp;» corpora del'unclorum usus nostro smeulo nullus sit, lectio tarnen docet, etc. »

(5) Suhgrundaria antiqui dicebant sepulcra inl'antium.qui needum quadraginla dies implessenl, quia ha;c husla dici non poterant,quia ossa qua; comburebanlur non erant,nbsp;nee lanla cadaveris immanilas, què locus tumescerel. Lnde Ruiilius Geminus Astia-nacte ail ; Melius subgrundarium misero qumreres, quam sepulcrum. — Jub. Firm.nbsp;Fulg., De Controv. Agror., lib. i.

(4) Parlant d’un fuudroyé, Pline dit:« Hominem ita exanimalum cremari fas non est; condi terra religio est. Lib. 11, c. xnv. » — Quant aux suicidés, Pbilostrale et Stacenbsp;s'expriment ainsi ¦.« Sepeiiorunt Ajacem, corpus ejus in lerram ponentes, cum Calchasnbsp;» censuisset las non esse eos igne comburi, qui se inlerfecissent. »In Heroicis.

.......Vetat igne rapi, pacemque sepulcri

Impius ignaris nequicquani inanibus arcet.

SviT., Tliebaid., lib. 111. (En parlant du roi Mcon.;

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LES CATACOMBES EXCLUSIVEMENT CAIUOLIQUES. 27:

OU leurs arénaires, et qu’ils aient environné leur ville entière de ces cadavres maudits, eomme d’un cordon d’infamie? Les jeler a la batenbsp;dans les puticuli de l’Esquilin, ou dans d’autres fosses mal famées,nbsp;n’est-ce pas la seule supposition qu’il soit possible d’admettre?

Restent les eselaves. lei nulle dilRcullé. Nous avons vu que Ie genre de sépulture usité pour ces malbeureux ne permet pas de supposer, mèmenbsp;un instant, que nos Catacombes leur servirent jamais de tombeaux.

II demeure done clairement établi que la Rome souterraine, la Né-cropole des saints et des martyrs, ne fut jamais profanée par la presence d’aucun cadavre païen. Dès lors, il est inutile d’examiner la seconde partie de la supposition, savoir ; Si les ebrétiens ont retire des Catacombes les cendres des anciens Remains, et s’ils les ont puriüéesnbsp;afin de les accommoder a leur usage? Nos pères n’ont point eu a retirernbsp;de cadavres païens des Catacombes, puisqu’il n’y en eut jamais; parnbsp;conséquent, ils n’ont rien eu h purifier. Toutefois, admettons un instant cette seconde partie de l’hypothèse, afin de la réduire en pous-sière, par deux nouvelles raisons également convaincantes.

La première est Ie silence absolu des historiéns. Rome avait des magistratures de tout genre, chargées de surveiller les rues, les aque-ducs, les voies, les temples, les édifices sacrés. Parmi ces derniers, lesnbsp;tombeaux tenaient Ie premier rang. Si les Catacombes exislaient, sinbsp;elles servaient de tombeaux, d’oü vient qu’il n’est pas question, mienbsp;seule fois, des magistrats préposés è leur garde et a leur conservation?nbsp;Certes, les Catacombes, en elles-mêmes, sont une merveille; que dis-je?nbsp;la plus grande de toutes les merveilles de la reine du monde. A cenbsp;titre seul, elles devaient être l’objet principal de l’attenlion du gouvernement. Tombeaux, elles acquéraient un caractère sacré, qui appe-lait toute la sollicitude de la ville entière ; or, pas un mot de cettenbsp;sollicitude. Tite-Live, Varron, Cicéron, Romponius, Pline, tous lesnbsp;historiéns parleut a 1’envi des édifices de Rome, qu’ils décrivent avecnbsp;de minutieux détails; ils ont un soin particulier de nous faireconnaitrenbsp;les différentes manières et les différents lieux de sépulture, pour lesnbsp;grands, pour Ie people, pour les eselaves ; sur les Catacombes, soitnbsp;comme simples souterrains, soit comme tombeaux, silence absolu.nbsp;Done les Catacombes n’exislaient pas pour eux, ou du moins n’exis-laient pas a l’état de tombeaux.

La seconde est la date des inscriptions. Si, comme on voudrait Ie supposer, les Catacombes servirent de sépulture aux Romains des pre-löiers temps, on devrait y trouver au moins quelques inscriptionsnbsp;conieinporaines. Or, parmi les myriades d’inscriplions découverles

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278 nbsp;nbsp;nbsp;I KS mois boiie.

jusqu’ici daus Ics Calaconibes, il a’ea est pas une seule dont le millé-sime ne soit postérieur a la naissance du christianisme. Done, les Ca-tacombes ne furent jamais des lombeaux païens (i).

16 MARS.

Madonc de Sainte-Maric-tfi-rraslet'ere. — Nouvelle visile aux Catacombes de Sainl-Hermes eta la Voie Salaria.— Souvenirs. — ll n’y eut jahiais ni juif, ni hcreliquc inhume dans les Catacombes. — Trois classes d’habiianls de la Rome souterraine. —nbsp;Simples fidèles. — Martyrs innommes. — Martyrs de nom propre. — Culte des martyrs. — Rome ne baptise pas les reliques-

A la fete du palais Massimi, dont j’ai parle dans la description do Rome ebrétienne, nous fimes succéder la visite de la madone de Saintc-Maris-in-Trastevere. Rendre nos hommages a la Reine du ciel dansnbsp;la première Église que la Reine du monde lui consacra, tel fut le butnbsp;principal de notre excursion. Vénérer un des plus respectables monuments de noire antiquité, tel fut I’objet secondaire de notre legitimenbsp;curiosile. Ce monument est la célcbre image de Sainte-Marie-de-la-Clémence, dont I’exposition publique remonte, suivant la tradition, anbsp;I’an 224, sous le pontifical de saint Callixte (a).

Du Traslévéré nous gagnèmes la rue Ripetta, et, gravissant le Pin-cio, nous redescendimes sur la Voie Salaria, déjè parcourue la veille. Ce qui nous ramenait en ces lieux était le désir de voir encore lesnbsp;monuments de la Catacombe de Saint-Hermès et de recueillir quel-ques-uns des grands souvenirs qui s’y ratlachent. Les noms glorieuxnbsp;des saints martyrs Autirae, Maxime, Bassus, Fabius et ses compagnons; ceux de I’illustre Marcelle avec cinq cent cinquante héros chré-tiens, de Ruffin et de cent cinquante émules de son courage, nous re-t inrent a la mémoire. Au milieu de ce noble cortége, il est bien douxnbsp;au voyageur de pouvoir se dire : Enfant de l’Église calholique je suisnbsp;en familie : les grands hommes qui m’entourent sont mes aïeux. Ar-rosés de leur sang, imraortalisés par leur courage, sanctifiés par leurnbsp;sépuliure, les lieux que je parcours furent le berceau de ma foi; berceau vénérable que la présence d’aucun pa'ien ne profana jamais. Hier,nbsp;nous avious acquis la certitude de cette intégrité de nos Catacombes.nbsp;Il était naturel d'établir aujourd’hui que la Nécropole ebrétienne

(I) Voycz Boldetti, lib. i, c. xix, p. 77 et suiv.

(s) Quella sacra imagine di Maria santissima della Clemenza, esposta alia publtca veiterazionc (in' del! anno 22{. da S. Calixio I, papa e raartire. Diario sacra.

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LES CATACOMBES EXCLUSIVEMENT CATIIOLJQUES. 279

ne reQut jamais Ie corps d’un juif, d’un hérétique ou d’un schisma-lique.

Ilquot; Différentes preuves déraontrent l’exclusion des Juifs. Si l’oppo-sition religieuse des chrétiens et des païens repousse entre eux touie communauté de sépulture, il demeure évident par la méme raison quenbsp;les seelateurs de Moïse ne partagèrent jamais la tombe des disciplesnbsp;de Jésus. Comment supposer que les Juifs, les premiers et les plusnbsp;implacables ennemis des chrétiens, aient voulu reposer dans Ie mémenbsp;lieu, partager Ia méme tombe avec des hommes dont ils avaient cru-cifié Ie Maitre; qu’ils regardaient comme des apostats, comme les des-tructeurs de leur religion et l’opprobre de la nation sainte? C’est unenbsp;hypothese qui, si elle ne tombe d’elle-mème, tombe devant Ie simplenbsp;bon sens et devant l’opiniatreté judaïque.

Non moins vive était la répulsion des chrétiens pour les Juifs, qu’ils regardaient avec raison comme un peuple obstinément aveugle, etnbsp;publiquement déicide. Tout contact religieux avec les disciples suran-nés de l’antique alliance leur était rigoureusement interdit, et l’appa-rence méme d’une communauté quelconque leur eüt été souveraine-nient dangereuse. Paruneerreurassez générale, les païens confondaient,nbsp;dans leur opinion et dans leur langage, les chrétiens avec les Juifs.nbsp;Or, les Juifs étaient un peuple odieus; et, au lémoignage de Tacite,nbsp;inquiet et toujours disposé è Ia révolte (i). De ld, les différents éditsnbsp;qui les chassèrent de Rome. Afin de ne pas s’atlirer la haine publique,nbsp;nos pères avaient done un intérêt particulier a éviter tout prétexte denbsp;les confondre avec les Juifs. Joignez-y l’opposition religieuse la plusnbsp;cordiale, et dites s’il est possible d’admettre entre ces deux peuplesnbsp;la libre et fraternelle union de la tombe?

D’ailleurs, les Juifs avaient, a Rome, un vaste cimetière, ouvert au dela du Tibre, non loin du quartier qu’ils habitaient. Oü était, pournbsp;eux, la nécessité d’aller mendier une sépulture aux chrétiens? Ce quinbsp;prouve jusqu’d la dernière évidence qu’ils ne Pont pas fait, et qu’au-cun des leurs ne repose au milieu de nos pères, c’est que, parmi plu-sieurs millions de noms trouvés dans les Catacombes, il n’en est pasnbsp;Un seul qui soit juif (2).

Ill® Restent les hérétiques. Pas plus que les païens el les Juifs, les sectaires n’eurent accès dans la Rome souterraine; et cela pour lesnbsp;uiêmes raisons. Quand les hérétiques auraient voulu déposer leursnbsp;Uiorts dans nos cimetières catholiques, ils ne 1’auraienl pas pu; et

f') Annal., lib. xv.

(*) Bosio, lib. II, c. XXIII, p. 231, et suiv.

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280 LES TROIS ROME.

quanJ ils l’auraient pu, ils ne l’auraiem pas voulu. On connait l’hor-reur profonde de la primitive Église pour les déserteurs de la foi. L’apótre saint Jean avait défendu d’avoir aucun contact avec eux, etnbsp;racine de les saluer. Entrant un jour au bain public, ce même Apólrenbsp;apprit que l’hérétique Ébion venait de l’y précéder. Se tournant aus-silót vers ses compagnons : « Sortons d’ici, leur dil-il, de peur quenbsp;nous ne soyons écrasés sous les ruines d’un édifice que l’ennemi denbsp;Dieu souille de sa presence (i). »

Les oracles et la conduite de l’Apótre bien-aimé, étaienl l’évangile des fidèles. Saint Polycarpe, rencontré par l’hérétique Marcion quinbsp;lui demande : « Nous connaissez-vous, » se contente de lui jeter ennbsp;passant cetle foudroyante réponse ; « Je te connais pour Ie premier-nénbsp;de Satan.» Un évêque arien, soutenu du pouvoir impérial, arrive dansnbsp;une ville d’Asie, et veul en prendre Ie gouvernement. Pas un seul habitant, pas un riche, pas un pauvre, pas un ouvrier, pas un domesti-que ne met Ie pied è l’église : l’intrus reste abandonné dans son temple désert. Un jour il se rend aux bains, et, pour qu’il soit seul, onnbsp;ferme les portes. La foule arrive, I’évêque ordonne d’ouvrir afin quenbsp;tout Ie monde puisse se baigner en même temps que lui ; personnenbsp;ne veut entrer. II sort; et regardant comme souillée l’eau qui avaitnbsp;été préparée pour l’hérétique, les fidèles la font vider dans l’égout etnbsp;attendent, pour prendre leur bain, de Peau nouvelle (a).

Ces exemples, qu’il serait facile de multiplier, prouvent clairement l’horreur que les catholiques avaient des sectaires et Ie soin avec le-quel ils évitaient leur contact, non-seulement dans les choses religieuses, mais encore dans les choses profanes. Telle était, du reste, lanbsp;discipline de 1’Église établie par les Apótres, et observée dans toutenbsp;sa rigueur durant une longue suite de siècles (s). On sail qu’elle sub-siste encore de nos jours, et qu’on ne peut enterrer un hérétique dansnbsp;nos ciraetières. Évidemment, de pareilles prescriptions et de pareillesnbsp;moeurs excluent toute communauté de sépulture. Mais, sur ce point,nbsp;nous n’en sommes pas réduits a des arguments généraux, nous avonsnbsp;des fails partieuliers el une défense spéciale.

Après les persécutions, les hérétiques s’emparèrent violemment de quelques-uns de nos cimetières en Orient el en Afrique. A I’insiaut

(i) Epiph., Heer., 30.

(a) Théodorel, lib. iv, c. xiv.

(5) Itnpios, hffii'CUcos non prenitentes discludile et semovele a fidelibus, el Eadesiai» Dei inlerdicile, ut omnibus modis ab eis declinent, neque ulla cum iis sit senuoiiis aulnbsp;precalionis conirauiülas. Const. Apost., lib. v, c. xviii.

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LES CATACOMBES EXCLUSIVEMENT CATHOLIQDES. nbsp;nbsp;nbsp;281

deux saints religieux, Eustrale et Hilarion s’adressent a saint Nicé-phore, patriarche de Constantinople. Ils lui demandant s’il est permis aux catholiques d'entrer dans ces cimelières afin d’y prier pendantnbsp;qu’ils étaient au pouvoir sacrilége des hérétiques. Le saint répondnbsp;qu’il n’est permis i aucun catholique d’y entrer, si ce n’est dans lenbsp;cas d’une absolue nécessité, el uniquement pour vénérer les reliquesnbsp;d’un martyr (i). Le Concile de Laodicée est encore plus explicite. IInbsp;défend absolument aux catholiques d’entrer, pour prier Dieu, dans lesnbsp;cimetières ou dans tout autre lieu choisi par les hérétiques pour lanbsp;sépulture de leurs prétendus martyrs; et il frappe d’excommunica-tion le fidéle qui oserait violer cette défense (2).

On le voit, les régies de l’Église et l’horreur des fidèles étaient une porte de fer et comme un raur d’airain qui fermaient aux hérétiquesnbsp;l’accés de nos cimetières. La violence put, il est vrai, les meltre ennbsp;possession de ces lieux sacrés, dans cerlaines provinces de l’Orienl etnbsp;de l’Afrique; mais, a Rome, jamais. Jamais, é Rome, l’hérésie n’eutnbsp;la possession ni l’usage d’une seule Catacombe (3); car jamais elle nenbsp;put jeler ses racines souillées dans le sol imbibé du sang des martyrsnbsp;et confié ii la garde immédiate du successeur de saint Pierre. Il fautnbsp;ajouter qu’elle ne tenla que faiblemeut de s’y établir. Ainsi, pendantnbsp;toute la durée des persécutions, on ne voit venir i Rome que buit hérétiques : Valentin, Cerdon, Marcion, Florin, Blastus, Théodote,nbsp;Praxéas et Proclus. Découverts par l’infatigable sollicilude des Sou-verains Pontifes, ils en furent promplement chassés. Au jugemenl denbsp;lout bomme impartial, il résulte, ce me semble, de ces raisons et denbsp;ces fails l’évidenle impossibilité, pour les hérétiques, d’enterrer leursnbsp;morts dans nos Calacombes, lors même qu’ils 1’eussenl voulu.

Mais allons plus loin, et, pour un instant, admettons cette possibi-lité. En elfet, après les persécutions, les Donalistes, les Ariens, les No-vaiiens se rendirent en grand nombre a Rome. Or, tout ce qu’on sait de leur séjour, qui, d’ailleurs, ne fut pas long, c’est qu’ils s’emparè-

(1) nbsp;nbsp;nbsp;De sanclis qui in corpore, an oporteat in eorum coemeleria ingredi, iliicque precai'inbsp;cl adurare Deum, dum ea a pollulis sacerdolibus lenenlur? Non pcrmiuit Canon, seu

regiila.....in eorum coemeleria iiilroire; nisi tone ex necessilatc ad venerandas solum-

Wodo sancli reliquias iniroilus flat. — Colelier, il/on. Grcec., 1.111, p. 452.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Non cuncedendum in coemeleria, vel qua; marlyria haireticurum dicuntiir, catlio-licos oralionis gralid, et petenda: curalionis inlrare : sed el qui ierinl, si sunl fldeles,nbsp;utcommunicabiles laclos, ad poeuitentiam usque ad aliquod tempus redigi. ConciLnbsp;^aodic., can. ix.

U) Non peri) mai in Roma n’cbbcro il posscsso, o 1’usodi alcuno. — Roldelli, lib. 1,

XX, p. 89.

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282 LES TROIS ROME.

rent de vive force de l’église de Sainte-Agathe-iW-SMamp;Mrra, qu’ils mu-lilèrent un certain nombre de monuments catholiques, et qu’ils rava-gèrent plusieurs galeries des Catacombes. Mais qu’ils en aient fait leur sepulture, on ne Ie voit nulle part. Que dis-je? il est certain qu’ilsnbsp;n’en eurent jamais la pensée : Ie silence de l’histoire est ici un témoi-gnage positif de la plus haute valeur. La haine que les sectaires dontnbsp;il s’agit portaient aux catholiques surpassait, s’il est possible, l’hor-reur qu’eux-mêmes inspiraient aux fidèles.

Cette haine universellej ils la manifestaient par tons les moyens en leur pouvoir. Haine h la foi des catholiques, dont ils étaient les per-sécuteurs infatigables, après en avoir éié les déserteurs; haine ii leursnbsp;personnes, qu’ils dépouillaient, qu’ils insultaient, qu’ils chassaient denbsp;leurs maisons et de leurs dignités; haine a leurs assemblées, qu’ilsnbsp;regardaient comme des conciliabules de Satan; haine ii leurs églises etnbsp;ü leurs monuments sacrés, qu’ils profanaient indignement, qu’ils mu-tilaient, qu’ils détruisaient avec une fureur de sauvages (i).

Or, comment supposer que ces mêmes hommes, qui fuyaient les catholiques comme la peste, ont tout a coup oublié leur fanatisme, etnbsp;sont venus mêler les cendres de leurs parents, de leurs amis, aux een-dres ahhorrées des fidèles? Comment supposer que TÉglise Romaine,nbsp;après une pareille profanation, a continué de tenir ses assembléesnbsp;saintes au milieu de ces cadavres maudits, etcontinuéd’offrirl’augustenbsp;sacrifice sur des tombes souillées par l’hérésie? Cependant elle les anbsp;tenues dans toutes les parties de la Rome souterraine; elle les y anbsp;tenues durant plusieurs siècles, alors que, de l’aveu des protestantsnbsp;eux-mêmes, elle était vierge de toute erreur; elle l’a fait sans purifiernbsp;les Catacombes. Done elle les a toujours regardées comme la sépulturenbsp;immaculée de ses enfants. Done la Rome souterraine ne renferme, nenbsp;renferma jamais ni païen, ni juif, ni hérétique.

Telle est la conclusion finale a laquelle conduit Texamen sérieux de cette importante question.

Aussi, Mabillon n’est que l’organe de la science vraiment digne de ce nom et de la critique la plus avancée, lorsqu’il formule Ie résultatnbsp;de ses longues études, en disant : « Tous les morts qui habitent lesnbsp;Catacombes sont exclusivement catholiques (2). »

(1) Venislis rabidi, veoislis irati membra laiiiantes Eedesise... De sedibus suis multos fecistis extorres, cum conducta manu venientes. Basilicas invasistis... Et cum altarenbsp;defenderent Diaconi calholici, tegulis plurimi cruentali sunt, duo occisi... et quod vobisnbsp;leve videtur, 1'adnus immane commissum est, ut omnia sacrosancta supra memoratinbsp;Episcopi vestri violarent, usserunt Eucharistiam canibus fundi, etc. — Opt. Milev.,nbsp;lib. 11.

(a) Nullos porro alios quam cliristianos in bis ccemeteriis bumatos fuisse, fidem facit

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MARTYRS INPiOMMES. 285

Certains que, dans la Rome souterraine, nous sommes en familie, il est temps de faire une connaissance plus intime avec nos pères, dontnbsp;elle fut a la fois l’ouvrage, Thabitation et Ia sepulture. Trois espècesnbsp;de morts occupent les tombes de Timmense Nécropole ; les simplesnbsp;fidèles, les martyrs innommés, les martyrs de nom propre.

Une multitude de loculi, d’ailleurs très-bien conservés, ne présen-lent aucun signe particulier de la sainteté ou du martyre de la per-sonne qu’ils renferment. On sait que cette personne est un enfant de l’Église; voila tout. Aux preuves générales exposées plus haut, vientnbsp;souvent s’ajouter, pour rendre témoignage b ce fait consolant, la simple, mais éloquente inscription tumulaire : Marciana in pace ; Tiieodorvsnbsp;IS FACE, etc., etc. : « Marciana en paix; ïbéodore en paix, etc. » Quenbsp;ces morts soient des saints et même des martyrs, la chose est possible;nbsp;mais, comme rien ne Ie prouve, Ie Fossoyeur laisse intacts leurs loculi,nbsp;et jamais l’Église en relève leurs corps, ne les donne, ni ne les exposenbsp;^ la vénération de ses enfants (i). Telle est la première catégorie denbsp;morts et de tombeaux, renfermés dans les Catacombes.

La seconde comprend les martyrs innommés. Une tombe se rencontre avec les signes aulhentiques du martyre, mais aucune inscription ne révèle Ie nom de la personne. II est certain que la repose un athlète de la foi, un de nos béroïques ancétres, qui affronta les sup-plices et la mort pour confesser la religion. Dieu seul connait Ie temps,nbsp;Ie lieu, les circonstances, Ie nom de son illustre témoin; la terre ne Ienbsp;saura qu’au jour du jugement : c’est un martyr innommé. Afin de luinbsp;procurer les hommages qui lui sont dus si juste titre, l’Église Ienbsp;retire du tombeau, et l’expose sur ses autels (2). Or, les anciens monuments établissent qu’il y a, dans les Catacombes de Rome, ainsi quenbsp;dans les autres parties de la chrétienté, une multitude de martyrs dontnbsp;Ie nom est inconnu. Les faits journaliers confirment cette assertion,nbsp;fiue justifie sans peine Ie plus vulgaire bon sens.

Le poèle des martyrs. Prudence, parle d’une multitude de tombes •Duettes, qui ne disent que le nombre des héros qu’elles renferment,

wutuum fldeles inter ac paganos (on peut ajouter avec plus de raison Judceos et hcere-licosj odium, mutuus horror, quorum neulri morluos suos aliis consepeliri, passuri tuissent. Episl. Euseb. Rom., n. 1. edit. 2.

(*) Quanto a’ corpi, cbe si trovano ne’ cimiteri senza i contrassegni speciüci et indu-Uati del loro martirio, i quali non si niegano esser moltissimi e da noi s’è sempre osservato di non eslrarli, nè da’ cimiteri nè da’ sepolcri ove si trovano, e cio oculave-Wente si puó vedere. —Boldetti, lib. I, c. xxni, t09.

(®) Ma quanto a’ (corpi) distinti co’ segni certissimi di martirio, questi appunto son Che si cslraggono, e che si concedono a’ fedeli, e gli si da quel culto di venera-*‘nne, che da’ Somini Ponlcfici si prescrive. — Id., ibid.

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284 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

sans faire connaitre leurs noms, écrils seulemenl au livre de l’éler-nilé (i). Dans les anciens Marlyrologes de Rome et de saint Jéröme, rien n’est plus ordinaire que celte phrase ou d’autres semblables ; .4nbsp;Rome, cent cinquante martyrs, dont Dieu connait Ie nom; saintnbsp;Maxime, avec cent vingt soldats, dont Dieu connait Ie nom, déposésnbsp;dans la Catacombe du coleau du Concomhre. La raême locution senbsp;rencontre, a chaque instant, dans les Actes des Martyrs (2). Chaquenbsp;année, la pioche du Fossoyeur met k découvert de nouvelles tombesnbsp;de martyrs innommés, dont la présenee vient confirmer Ie témoignagenbsp;de l’hisloire. II serait difficile de compter toutes celles qu’on a trouvéesnbsp;depuis Bosio.

Mais d’oü vient que les premiers cbrétiens, si jaloux de conserver tout ce qui appartenait aux martyrs, tout ce qui pouvait rappeler leurnbsp;mémoire, Ie temps et les circonstances de leurs glorieux combats, ontnbsp;omis si souvent d’indiquer leur nom? Cetle question se résout d’elle-même, pour qui songe aux difficullés des temps.

D’abord, les vicümes étaient parfois si nombreuses, qu’il était ab-solument impossible de savoir Ie nom de ^hacune en particulier. Comment, par exemple, connaitre Ie nom des six mille soldats de la Légion Thébaine; des quatre mille martyrs brulés Ie même jour sur la Voienbsp;Appienne; des dix mille, égorgés aux Eaux Salviennes, avec saint Zénen, leur général; de tant d’autres, tirés de diverses prisons, jetés,nbsp;Ie même jour, dans I’Amphithealre, et dévorés par centaines dans l’es-pace de quelques heures? On comprend que cela était impossible.nbsp;Aussi, saint Grégoire de Tours est Ie véridique historiën de ces sortesnbsp;de boucheries, plus fréqueutes a Rome que dans Ie reste de 1’empire,nbsp;lorsqu’il dit, en parlant des martyrs de Lyon : « Le carnage fut tel,nbsp;que les rues étaient inondéss de sang chrétien, tellement que nousnbsp;n’avons pu connaitre ni le nombre ni le nom des victimes (5). »

Ensuile, il arrivait souvent que les empereurs, les proconsuls, les juges, enfin, empêchaient les cbrétiens d’écrire non-seulement les

tl) Sant et multa tamen laoilas claudenlia lumbas Marmora, quse solum significant iiumerum.

Quanta virüm jaccanl cuiigestis corpora acervis Nosse licet, quorum nomina iiulla legas.

Sexaginla illic def'ossas mole sub una Reliquias memini me dididsse hominumnbsp;Quorum solus liabet comperta vocabiila Christus.

Peristepli., hym. 11.

(sj lioldelli, lib. 1, c. rixn, 107; Bosio, t. ii, paftsim.

(5) Ut per pialeas flumina currereul de sanguine cliristiano, quorum uec numerum, nee nomina colligere potuimus. — tlkl. Franc., lib. 1, c. xxix.

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CÜLTE DES MARTYRS. nbsp;nbsp;nbsp;285

actes, mais même Ie nom des martyrs. Leur procédé était tout i la fois simple et digne de leur cruauté. Ils jugeaient sommairement les accu-sés traduits leur tribunal; et, sans observer aucune régie de droitnbsp;ni de justice, sans interroger, sans discuter, ils les envoyaient lous anbsp;la mort. Est-il étonnant que, dans cette multitude infinie de martyrs,nbsp;on en trouve un grand nombre dont Ie nom soit perdu (i)?

Quefaisaient alors les chrétiens? Au péril de leur vie, ils emportaient dans les Catacombes les corps des victimes, leur donnaient la sépul-ture ordinaire, et, dans l’impossibilité de graver Ie nom sur Ie loculus, ils y pbiQaient les signes du marlyre. Par la, ils assuraient, autantnbsp;qu’il était possible, et Pédification des fidèles présents et futurs, et lanbsp;gloire des martyrs (2). Dès l’origine, l’Église entra pleinement dansnbsp;leurs vues, et toujours elle honora d’un culte sacré les martyrs innom-més des Catacombes, aussi bien que les martyrs de nom propre (5).

Toutefois, Ie Saint-Siége ne permet pas qu’on rende aux martyrs innommés, ni même aux martyrs de nom propre, dont la vie est com-pléteraent inconnue, un culte aussi solennel qu’aux Apótres, par exem-ple, et aux saints dont nous possédons les actes glorieux (a). D’oü vientnbsp;cette distinction? Puisque l’occasion s’en présente, je vais Ie dire, afinnbsp;de dissiper les nuages que l’ignorance ou la malignité pourrait élevernbsp;sur la conduite de Rome. Croire que cette distinction suppose unnbsp;doute quelconque de la part de I’Église sur l’authenticité des reliquesnbsp;des Catacombes, serait une grossière erreur. S’il en était ainsi, elle nenbsp;les placerait sur aucun autel et ne les offrirait ni a la vénération pu-blique, ni a la vénération privée de ses enfants. La défense dont ilnbsp;s’agit manifeste seulementl’équitable sagesse de notre mère commune.

Dans la Jérusalem céleste tous ne jouissent pas de la même gloire; ne faut-il pas qu’il en soit ainsi dans la Jérusalem terrestre? L’Églisenbsp;a des enfants dont la vie, les vertus, les travaux, les combats héroï-

(t) Quasi tumultuose, acervatira el nulla observala juris formula, martyrium consum-

^ïiarunt.....Quid mirum, si in tanta marlyrum, ct prope innumera muliiludinc, quod

*ïïultisine ulla inscriptione fucrinl? — D. Ruinart, Admonit. in Euseb., Narrat. dePcr-^ccut. Dioclel., p. 31G; id., Prcef. in Act. Martyrum, p. 17.

(2) Quorum nomina pia christianorum manus assequi non poleral, eorumdem sepuU tnartyrii signis praïnotabant, et veneranda eorumdem pignora inlra ccemelerialesnbsp;^Pelmieas, ne mcrito cuUu destiiuerenlur, condila diligenii studio posleris commen-^abani. — Bosio, lib. 111, c. xxii.

(^) Anaslase, dans la Vie du Pape Sergius 11, dit: « Cum aliis multis (martyribus)

® quorum nomina Deo soli sunt coguiia, ulrosque sub sacro altari collocavii. » — El Concile romain, lenu sous Ie pape saint Gólase : « Nos tarnen cum priedicta Ecclesianbsp;“ i^Wnes martyres, et eorum agones, qui Deo magis qiiam hominibus noti sunt, omninbsp;* i^evotione veueramur. » IPart. distinct,, 13, Can. Ill de Horn. Eccles.

U) Boldeiii, lib. 1, c. xxv, p. 109.

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286 nbsp;nbsp;nbsp;LES TUOIS ROME.

ques sont l’orgueil de son coeur et rédificalion du monde : a ceux-la un culte très-solennel. Elle en a d’aulres, comme la plupart des martyrs des Catacombes, dont Ie courage et la sainteté ne furent peut-êlrenbsp;pas moins admirables; mals les circonstances tiennent toutes ces lu-mières cachées sous Ie boisseau, en sorle que 1’imagination et Ie rai-sonnement peuvent seuls, a force d’efforts et d’inductions, les fairenbsp;reparaitre aux yeux de la piété : ^ ceux-ci un culte moins solennel.nbsp;Tel est runrque motif de la conduite du Saint-Siége. On comprend,nbsp;du reste, que, pour être privés ici-bas de certains honneurs, nos martyrs ne perdent rien de leur mérite et, par conséquent, de leur gloirenbsp;devant Dieu (i).

Comme conséquence de la première, une seconde defense concourt au maintien de l’équitable distinction dont il s’agit. On ne permet pasnbsp;de donner aux martyrs anonymes des Catacombes les noms des Apó-tres, des martyrs, des saints connus dans I’Église : cette mesure a pournbsp;but de prévenir de facheuses équivoques. Elle empêche les fidèles denbsp;confondre des reliques'étrangères avec celles de saint Pierre, par exem-ple, OU de saint Élienne, et de les honorer comme si elles appartenaientnbsp;au Prince des Apótres, ou au premier des martyrs. Aussi Rome nenbsp;baptise jamais aucune relique : elle Ie défend même en termes for-mels. Cependant il était nécessaire de désigner ces ossements vénéra-bles, brisés pour la cause de Dieu, par une dénomination quelconque.nbsp;La piété des fidèles Ie demandait; un nom sert puissamment a l’ani-mer, surtout lorsque, par les idéés qu’il exprime, il devient une legonnbsp;de vertu. Dès l’origine, la maitresse des églises a trouvé un expédientnbsp;qui satisfait tout ensemble aux désirs de la piété et aux exigences denbsp;la vérité la plus exacte.

Aux martyrs anonymes des Catacombes elle ne donne jamais de nom propre, par conséquent jamais elle ne les baptise. Elle se contente denbsp;les désigner par des attributs ou des appellations générales qui con-viennent a lous les saints. Telles sont les suivantes : Juste, Candide,nbsp;Déodat, Victor, Félix, Fortuné, Pie, et autres semblables. En effet,nbsp;tous les saints, tous les martyrs étant justes, purs, donnés de Dieu,

{i)Lesdécretsdclasacrce Congrégalion des Rites, sous la date des années 1660,1662; et de la sacrée Congregation des Reliques, de 1630,1691, défendent de dire la messe etnbsp;I’oflice des martyrs trouvés dans les Catacombes. Pour cólébrer la messe de Communi,nbsp;il laut un indult spécial— Je ne rapporlerai qu’une de ces decisions du 17 avril 1660:nbsp;« Sacra Congregatio (Rituum) respondit: Non posse recitari ofiicium de sanctis illis,nbsp;» de quibus nuila babetur mentio in Marojrologio Romano^ vel non constat de identi-» tate eorummet corporum sanctorum, de quibus mentionem facit idem Martyrolo-jgt; gium. igt; — Voyez Boldetti, lib. iii, c. xx, p. 619.

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ROME NE DAPTISE PAS LES RELIQÜES. 287

victorieux.heureux, fortunés, pieux, on peut, sans onibre de mensonge, les appeler par ces noms divers (i). Par ces dénominations communes,nbsp;on exprime uniquement leurs verlus, leurs triomphes, leur récompensenbsp;et les couronnes que Dieu leur a données pour prix du courage avecnbsp;lequel ils confessèrent Ie nom de Jésus-Christ, par Teffusion de leurnbsp;sang (2). Du reste, ce qu’elle fait aujourd’hui, l’Église Ie fit dans tousnbsp;les siècles (5). Sa devise constante est cette belle parole de saint Am-broise : a Je ne leur donne pas de nom, paree que Dieu les a déjilnbsp;nommés ; Ie privilége des saints est de recevoir leur nom de Dieu lui-même (4). »

Enfin la répétilion des inêmes noms appellatifs ne cause aucune confusion dangereuse. Comme deux et trois personnes peuvent êlrenbsp;désignées par Ie même nom; ainsi il n’y a nul inconvénient amp; ce quenbsp;plusieurs saints différents soient honorés sous la dénomination de lanbsp;même vertu. Loin de la, cette répétition étend parmi les peoples lanbsp;dévotion aux saints martyrs : précieux avantage qui n’aurait pas lieu,nbsp;du moins au même degré, si Ie corps entier d’un martyr était toujoursnbsp;envoyé sans aucun nom ou sous un nom unique. En Ie multipliant sousnbsp;des titres variés, on multiplie, suivant la belle expression de saintnbsp;Paulin, les semences de la vie éternelle (5). De même que Ie Saint desnbsp;saints est tout entier sous chaque parcelle de l’hostie consacrée; denbsp;même la vertu du martyr reside tout entière dans la moindre portionnbsp;de ses reliques (e).

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Hoe raodo cerlissimi sant (Pralati) quod non mentiuntur, neque decipiunt; cumnbsp;omnes sancli sint vere fcliccs, vere fortunati et a Deo dati, etc. — Baldel. Theol. moral,nbsp;l. II, disput. XVI.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Actum est de nominibus quse sanctorum martyrum reliquüs fere imponuntur, cumnbsp;nullibi apparent quo nomine appellarentur; et S. Congregatie dixit: In decretis; sta-tuerat enim fel. record. Clemens Papa IX ea sola nomina adbiberi, qua; omnium sanc-lorum communia sunt, atque appellativa : omnes enim et Justi et Candidi et Adeodatinbsp;et Victores, etc., vocari merite possunt. Decret. S. C. InduL et Reliq. ‘Sjunii 1670.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Boldetti, lib. i, c. xxiii, 110.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Non nos nomen eis imponimus, quia jam a Deo nomen acceperunt. Ilabent hoenbsp;®erita sanctorum, ut a Deo nomen accipiant. In Luc, lib. 11, c. 1.

(5)

MuUipiieat populis ajternae semina vitai.

Natal IX S. Felicis.

(s) Sectis itaque eorum corporibus, Integra tarnen vis et gratia perseverat, tenuesque

3c tantiUa; reliquiae toti parem liabent__Theodoret, De Curat. Grcecar. Affect., lib. vni,

ilartyrib. — Portionem reliquiaruin sumpsimus et nihil non minus possidere con-'dimug^ dum totos quadraginta in suis favillis honorantes ampleclimur. Itaque pars ’Psa, quam meruimus, plenitude est. — S. Gaudent., Ep. Brix., Serm. dedic. Basil. SS.nbsp;w Martyr.; Biblioth. PP., t. iv.

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288 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROrS home.

Maintenant que nous connaissons les deux premières espèces de tombes qui remplissent Ia Rome souterraine, savoir, celles des simplesnbsp;chrétiens et celles des martyrs innommés, il nous reste è dire un motnbsp;des loculi des martyrs de nom propre qui forment la iroisième. Onnbsp;appelle martyr de nom propre, celui dont Ie nom est gravé sur lanbsp;tombe. Souvent ce nom précieux se trouve seul et sans accompagnement propre a faire connaitre soit l’age du martyr, soit les circon-stances de sa vie ou de sa mort. Gravé a la héte, avec la pointe d’unnbsp;outil quelconque, sur la pierre, sur Ie marbre ou sur la tuile, il annonce la dilEculté des temps, la pénurie des ressources, irinexpérience.nbsp;du Fossoyeur ou du frère qui donna la sépullure; mais il montre Ienbsp;zèle admirable des chrétiens pour les martyrs. Après avoir, par Ienbsp;placement du vase de sang ou par la formation de la palme, assurénbsp;au héros de la foi les hommages religieux des générations futures,nbsp;leur premier soin est de transmettre son nom è la postérité. Son ége,nbsp;ses qualités, la date de sa mort, la nature de ses tourments, ne sontnbsp;que des circonslances d’un inlérêtsecondaire; ils les indiquent lorsquenbsp;Ie temps et les moyens d’exécution Ie permeltent.

Voici quelques exemplcs :

t5

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SAINT JOSEPH D ARIMATHIE. 289

M. VIRISSIMVS

QVI VIXIT ANNOS L». QVESQVET IN PACE

« Marcus Verissimus, qui vécut cinquante-deuxans, repose en paix.»

Ces exemples sufBsenl pour donner une idéé des tombes des martyrs de nom propre. Nous rechercherons demain les moyens employés par les fidèles pour connaitre Ie nom de leurs frères; nous examine-rons ensuite la certitude des signes du martyre ; c’est une des plusnbsp;belles questions de l’archéologie chrétienne.

17 MARS.

Saint Joseph d’Arimalhie. — Catacombes de )a Voie Flaminienne. — Calacombes dc Saint-Valenlin ou de Saint-Jules. — Histoire, — Moyens par lesquels les chrétiensnbsp;connaissaient Ie nom des martyrs. — Signes du martyre. — La palme, premier signe.

Dans ses trésors de reliques insignes, Saint-Pierre de Rome possède un bras de saint Joseph d’Arimathie. On faisait aujourd’hui la fête dunbsp;noble décurion qui donna la sepulture au Roi des martyrs. Avec unenbsp;loule pieuse nous allftmes -vénérer ce bras, plus glorieux que le brasnbsp;des conquérants et des maitres du monde. II nous était doux de penser que la charité, le courage, la piété du saint Israélite a I’égard denbsp;Notre-Seigneur, avaient servi de modèle aux héroïques Fossoyeursnbsp;dont nous allions continuer d’admirer I’ouvrage dans les vastes galeries de la Rome souterraine. Cette circonstance esl une preuve de plusnbsp;que la sépulture des premiers chrétiens de Rome a son type dans lanbsp;divine sépulture du Calvaire. Dix heures sonnaient, lorsque nous tra-versAmes la Place du People. En quelques instants, nous fumes sur lanbsp;Voie Flaminienne, dont nous avions a étudier I’antique Catacombe.nbsp;Ici, comme ailleurs, un long cortége de souvenirs accompagne le pè-lerin jusqu’au lieu, théétre de ses investigations.

Le premier est celui du consul Caius Flaminius, qui ouvrit cette Voie devenue si célèbre, et qui lui donna son nom. Elle le vit passernbsp;lui-même allant a la rencontre d’Annibal, mais elle ne le vit pas re-'enir : avec une partie de son armée, il avail perdu la vie sur lesnbsp;cives du lac de Trasimène. Plus tard, un autre membre de la mêrae


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290 LES TROIS. ROME.

familie, Ie consul Flaminius, \ainqueur de la Ligurie, conlinua cette même Voie, et la fit paver de larges dalles jusqu’a Rimini (i).

Un second souvenir est celui de Néron. Lorsque la nuit avait étendu sur Rome un voile épais, et que l’indigne empereur pouvait se cachernbsp;aux regards, il venait ici, non loin du Ponte-Molle, errer comme unenbsp;ombre sinistre, et chercher des plaisirs qui, selon l’expression d’unnbsp;historiën, faisaient pMir la lune (2). Le Ponte-Molle, qu’on traversenbsp;biehtót, redit I’horrible sacrifice dont il fut longtemps le théiUre.nbsp;Chaque année, les prêlres de Saturne.y conduisaient une victime hu-maine, qu’ils précipitaient toute vivante dans le Tibre (s). A droite etnbsp;a gauche s’élevaienl des mausolées el des villas ; mausolées d’affranchisnbsp;et d’bislrions, villas d’empereurs et d’impératrices, dont les ruines,nbsp;aujourd’hui méconnaissables, atteslent une fois de plus le néant desnbsp;richesses et des grandeurs humaines (4).

A toutes ces gloires passées succède la gloire immortelle de nos martyrs. Le plus illustre est celui qui donna son nom i la Catacombenbsp;oü nous allons descendre. On était au plus fort de la persécution denbsp;Claude second; les cbrétiens éperdus se tenaient cachés depuis deuxnbsp;mois dans les cimelières, et notamment dans les Catacombes de lanbsp;Voie Aurélienne, avee saint Callixte, lorsque l’empereur trouva moyennbsp;de faire saisir le prêtre Valentin. Chargé de fers, le futur martyr estnbsp;livré au juge Calpurnius, qui Ie remet è son collègue Astéricus, avecnbsp;ordre de le ramener au culte des idoles. Astéricus obéit; mais ses efforts demeurent inutiles. Que dis-je? un jour, sa fille, aveugle depuisnbsp;longtemps, s’approche du généreux confesseur, qui lui rend miracu-leusement la vue. Pénétré de reconnaissance et d’admiration, Astéricus tombe aux genoux de son prisonnier, demande le baptême, de-vientehrétien avec sa femme, sa fille, toute sa maison, ettous ensemble,nbsp;conduits sur les Lords du Tibre, signent la foi de leur sang. Quant anbsp;Valentin, il expie les succès de son apostolat par une longue prison;nbsp;ce n’est qu’après un an de détention et de souffrances qu’il est conduit sur la Voie Flaminienne, oü la hache du licteur lui tranche lanbsp;lête. Cela se passait le 14 février de Fan 270 (s). Une dame romaine,nbsp;nommée Sabinella, inhuma le généreux martyr, au lieu même oü ilnbsp;avait regu la mort.

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Sexl. Pomp.; et Strab., lib. v.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Pons Milviiis in 00 tempore Celebris nocturnis illocebris erat; vcntitabatque illncnbsp;Nero, quo solulius urbem extra lascivirel.— Tacit., Hist., lib. 111.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Suet., Imt. DiV; lib. i, c. de Fals. Relig.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Tit.-Liv., Hist., lib. xv, c. ult.; Suol., [n GaJb., c. n; Martial., lib. ii, Epig. n, ctnbsp;lib. vi, Epig. XXI.

(s) Bar., An., t. n, an. 270, n. 5.

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nisToiRE. nbsp;nbsp;nbsp;291

Cette circonstance fixe l’origine de la Catacombe de Saint-Valentin au milieu du troisième siècle, peut-être mêrae indique-t-elle une fon-dation plus ancienne. Quoi qu’il en soit, Ie pape saint Jules fit balirnbsp;une superbe Basilique sur Ie tombeau du martyr. Pieuse entre toutesnbsp;les autres, cette Basilique fut longtemps Ie but de la procession so-lennelle que Ie clergé de Rome fait Ie jour de saiut Mare ; aujourd’hui,nbsp;malheureusement, il n’en reste plus que des ruines. L’cntrée du ci-metière se trouve a un demi-mille de la Porte du Peuple, sur la mainnbsp;droite, prés du Ponte-Molle. Les terres dont elle est encombrée ennbsp;rendent Paccès fort difficile.

Entre les objets qui décorent la Catacombe de- Saint-Valentin, je citerai les fresques suivantes, très-curieuses pour l’histoire de Part.nbsp;Dans la lunette de Pare, qui surmonte la tombe d’un jeune enfant, oiinbsp;voit la sainte Vierge, en derai-figure, tenant Notre-Seigneur sur sonnbsp;giron, et non point penché sur Ie bras. Bien des fois nous avons eunbsp;occasion d’indiquer Ie sens doginatique de cette position de PEnfant-Dieu, qu’on retrouve surtout dans les fresques el les mosaïques pos-térieures au concile d’Éphèse. Comme celle du Sauveur, la tête denbsp;Marie est entourée du nimbe circulaire, et couverte d’un voile re-lombant de chaque c6té des joues, el ne laissant voir que Ie visage. Anbsp;droite et a gauche, on lit Pinscription suivante, dont Porlhographe etnbsp;la contexture fixent Pépoque après PAge des persécutions; écritenbsp;de haul en bas, elle est ainsi congue : sex digesetrix : Sancta Deinbsp;Genitrix.

I ne seconde peinture de la même crypte, et qui semble contemporaine de la précédente, offre aux regards Notre-Seigneur sur la croix. L’instrumenl du supplice forme une croix laline; é la partie supérieure qui dépasse la tête, est fixé Pécriteau. Au lieu d’être placé obli-fiuement, il est horizontal et porte ces mots : Jesvs, rex Jvdaeorvm.nbsp;^otre-Seigneur est debout sur Ia croix, c’esl-A-dire que ses bras s’é-'endent naturellement et suivent la direction horizontale des croisil-*t*os, landis que ses pieds reposent sur un tasscau, appelé suppeda-fieuni. Deux choses méritent surtout d’être remarquées : la première,nbsp;'-’est que Notre-Seigneur est attaché avec qualre clous, et non avecnbsp;'cois seulemenl; la seconde, c’est qu’il est revêlu d’une tunique quinbsp;‘fi-scend jusqu’aux pieds. Le temps ne me permet pas d’expliquer cettenbsp;double particularité, qui a fort utilement occupé les archéologues etnbsp;artistes (i). Une question désirée depuis longtemps et plus en rapport avec nos études réclamait notre attention.

^'oyoz Sandini. Hist, famil. sacr., c. xr.

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292 LES TROIS ROME.

Comment les premiers chrétiens parvenaient-ils a connaitre Ie nom des martyrs? Quand on songe a la multitude de fidèles qui étaienlnbsp;quelquefois égorgés ensemble, aux obstacles qu’opposaient les païensnbsp;è l’empressement des frères pour approcher des martyrs, a la dilB-culté de connaitre des prisonniers répandus dans les différents cachotsnbsp;d’une ville lelie que Rome, et amenés quelquefois des pays éloignés,nbsp;une chose étonne Ie pèlerin des Catacombes : ce n’est pas de trouvernbsp;beaucoup de martyrs innommés, c’est de n’en pas trouver davantage.nbsp;Toutefois plusieurs moyens restaient a nos pères pour connaitre Ienbsp;nom des héros qui, succombant dans un glorieus combat, acquéraientnbsp;un litre sacré aux hommages de l'Église. Au premier rang, il fautnbsp;placer Ie zèle des particuliers el la sollicilude des Ponlifes.

A peine Ie bruit s’était répandu qu’un des frères avail été arrêlé pour la cause de la foi, que tous, hommes et femmes, jeunes gensetnbsp;vieillards, accouraienl a la prison, pour Ie voir, Ie consoler, l’encou-rager, baiser ses chaines et se recommander a ses prières. Ils l’accom-pagnaient devant les juges, recueillaient ses paroles et Ie suivaientnbsp;jusqu’au lieu du supplice. Un auteur profane du second siècle, Lucien,nbsp;raconte ce qu’il a vu de ses yeux. Parlant du fameux imposteur Péré-grinus, qui se faisait passer pour Chrélien, il s’exprime en ces termes ;nbsp;« Vous auriez vu, dès Ie matin, accourir è la prison, non-seulementnbsp;des vieilles femmes, des veuves, des enfanls, mais encore des hommesnbsp;de la plus haute condition; a force d’argent, ils gagnaient les geóliers,nbsp;et obtenaient la permission d’entrer, de consoler I’imposteur et denbsp;passer la nuit avec lui (i). »

Ce qui se faisait it Rome, se renouvelait partout. Qui ne connait Padmirable charité des chrétiens d’Orient et d’Occident, de Lyon, denbsp;Vienne pour les martyrs? Le zèle alia quelquefois si loin, que lesnbsp;évêques se crurent obligés de le modérer, afin de ne pas irriler davantage les persécuteurs. Immortel comme le cbrislianisme, qui I’in-spire, le même esprit de charité a traversé lous les siècles. Ne I’a-t-onnbsp;pas vu se produire en mille traits héroïques, pendant la Révolutionnbsp;fran^aise? Ne le voil-on pas encore, dans les missions de la Cochin-chine et du ïonquin, conduire, chaque jour, aux portes des prisonsnbsp;des chrétiens empressés a consoler les captifs de la foi?

Mais indépendamment de ses communications journalières avec les prisonniers, esi-ce que la plupart des chrétiens, des fidèles de Romenbsp;surtout ne se connaissaient pas d’avance? Ne sail-on pas qu’ils se réu-nissaient très-souvent en petites assemblées; qu’ils voyageaient, rau-

(i) Dialog, de Morte Peregrmi, n. xii.


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JIOÏENS POUR RECONNAITRE LE KOM DES MARTYRS. nbsp;nbsp;nbsp;293

nis de lettres de leurs évêques; qu’ils ne formaient qu’un coeur et qu’une^me, et qu’ils assistaient courageusement au suppliee de leursnbsp;frères? Ainsi, en thèse générale, il était facile aux chrétiens de lous lesnbsp;pays de connailre Ie nora des martyrs, et de Ie graver sur leur tombe.

Dans la sollicitude des Souverains Pontifes, nous trouvons un second raoyen de connaitre les noms des martyrs de Rome et une nouvellenbsp;garantie d’authenticité. Saint Clément, troisième successeur de saintnbsp;Pierre, partagea la ville en sept régions. Dans chaque région il plaganbsp;un notaire, homme inslruit, actif, probe, chargé de recueillir tous lesnbsp;détails relatifs aux martyrs de son quarlier (i). En 238, Ie pape saintnbsp;Fabien établit dans chaque région un diacre, ayant sous ses ordres unnbsp;sous-diacre et un notaire, avec ordre de réunir et de mettre par écritnbsp;les actes de tous les martyrs qui mouraient dans Ie ressort de leurnbsp;département.

Les Papes suivants continuèrent avec un soin extréme 1’oeuvre de leurs devanciers. Ils voulurent méme que les diacres, les sous-diacresnbsp;et les notaires écrivissent fidèlement tout ce qui arrivait de remar-quable dans leurs églises (2). Quel meilleur moyen de connailre avecnbsp;certitude et Ie nom et les actes des martyrs? Pourquoi faut-il que cettenbsp;collection de monuments originauxait presque entièrement péri? Denbsp;lous les maux que l’impie Dioclétien fit a TÉglise, l’anéantissementnbsp;de ces précieuses archives est peut-être Ie plus grand, et certainementnbsp;Ie plus irréparable : Podieux persécuteur fit brüler toutes ces piècesnbsp;dans la place publique (3). Néanmoins, on put en sauver assez pournbsp;dresser les catalogues qui ont servi de base aux Marlyrologes romains.

Je dirai, en passant, que, dans les autres églises du monde, on ne prenait pas un soin moins religieux de conserver les noms et les actesnbsp;des courageux athletes du christianisme. En Afrique, nous voyons, aunbsp;temps de saint Cyprien, Ie diacre Pontius remplir la même functionnbsp;que les notaires et les diacres régionnaires de Rome; Smyrne, Viennenbsp;et Lyon nous ont laissé des preuves admirables du même zèle. L’Orientnbsp;et rOccident nous montrent des fidèles acheter au poids de Por lanbsp;permission de prendre sur les regislres des Iribunaux une copie au-

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Hic fecit septem regiones dividi Notariis fidelibus Ecclesi.-e, qui gesta marlyrutnnbsp;'‘ollicite et curiose unusquisque per regionem suam perquirerenl. — Lib. De Rom.

in Clem.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Hic regiones divisit Diaconibus el fecit septem subdiaconos qui seplem Nolariisnbsp;'mminerent, qui gesla marlvrum in inlcgrum colligerenl. — U., In Fubian. — Hic gestanbsp;Rlariyrum diligenter a notariis exquisivit et in ecclesia recondidil. — ld., 1» Anter.; el

Julio PP.

(5) Euseb., llist., lib. viii, c. 11 el ui. — Bar., De Marhjrol., c. in.

T. IV.

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:gt;!) i nbsp;nbsp;nbsp;LES TUOIS UOME.

ihentique des inlerrogatoires de leurs frères. De Ih les actes procon-sulaires, qui ferment un des monuments les plus précieux de notre anliquité chrétienne (i). Telle est, en abrégé, la double réponse a cettenbsp;intéressante question ; Comment nos pères parvenaient-ils a connaitrenbsp;Ie nom des martyrs?

Abordons mainlenant cette autre question, plus belle encore, saxoir: Quelle est la certitude des signes du marlyre? A cólé d’un grandnbsp;nombre de loculi, on trouve un vase de sang, placé extérieurementnbsp;au tombeau. II est incrusté dans une peiite ouverture pratiquée dansnbsp;Ie tuf de la galerie, et fermée par une légere couche de chaux, dont lanbsp;couleur blanche devait, dans Ie principe, se détacher vivement de Ianbsp;teinte grisamp;lre du tuf granulaire. D’autres loculi sont accompagnésnbsp;d’une palme, gravée ii la bate sur la chaux qui cimente la pierre tom-bale OU taillée plus lentement dans la pierre tumulaire. Enfin, il ennbsp;est qui présentent tout it la fois Ie vase de sang et la palme. Cela posé,nbsp;examinons la valeur de ce double signe : la palme el Ie vase de sang.

Metlons-nous un instant a la place des premiers chréliens. Nous voila, comme eux, renfermés dans les Catacombes, privés des moyensnbsp;nécessaires pour écrire de longues relations sur les martyrs. A chaquenbsp;instant on apporte de TAmphithéftire, du Cirque, des Naumachies, denbsp;tous les quarliers de Rome, des corps sanglanls et mulflés. Des loculi,nbsp;creusés a la bate, les resolvent et se ferment précipitamment. Ainsinbsp;l’exigent et la santé des vivants et la rapidité avec laquelle les bour-reaux multiplient les victimes.

Cependant nous attachons une importance extréme a conserver Ie souvenir des martyrs. Pour cela, nous voulons marquer leur tombenbsp;d'un signe distinctif; nous Ie voulons, soit afin de savoir nous-mêmes,nbsp;soit afin d’apprendre amp; la postérilé quels sont, parmi ces millions denbsp;morts rangés dans Timmense Nécropole, ceux qui ont donné leur sangnbsp;pour la foi, ceux qui ont remporté la palme de la victoire; en un mot,nbsp;ceux dont Ie courage élevé jusqu’a 1’héroïsme mérite et les brillantesnbsp;récompenses du del et les hommages religieux de la terre. Afin denbsp;' donner ces différentes indications d’une manière tout è la fois simple,nbsp;durable et aulhentique, comment nous y prendrons-nous? J’alfirraenbsp;qu’après avoir longiemps cherché, nous ne trouverons rien de mieuxnbsp;que de faire ce qui suit :

Pour nous rappeler a nous-mêmes et pour apprendre aux aulres, qu’un fidéle a versé son sang pour la foi, ou remporté la palme de lanbsp;victoire dans le plus grand des combats, comment nous y prendrons-

(i) Bar., Oe Mnrojrol., c. i; id. An., t. ii, an. 258, n. 2; Bosio, lib. i, c. xxx.

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SIGNES Dl' MARTYUE. 295

nous? Nous placerons prés de son tombeau un vase rempli de son sang, nous graverons sur sa pierre tombale une palme, embième dunbsp;iriomphe chez tous les peuples. Ces deux signes éloquents seront nécessaires et ils auront la niême valeur.

Ils seront nécessaires; si Ie héros chrétien a élé égorgé, el qu’on ait pu recueillir une partie de son sang, nous mellrons prés de lui unenbsp;partie de ce sang préeieux; mais si Ie martyr a été brülé vif, s’il a éténbsp;précipilé dans les flots, s’il a été élranglé, en un mot, s’il est mortnbsp;sans effusion de sang, Ie moyen de constaler son triomphe autrementnbsp;que par la palme de la victoire ?

Ils auront la même valeur; Ie sang exprimera Ie prix de la victoire; la palme, Ie Iriomphe ou la glorieuse issue du combat: l’un et l’autrenbsp;rediront, chacun a sa manière, Ie même fait, Ie fait du marlyre.

Ce n’est pas tout; ces signes étant établis pour fixer nos souvenirs et pour diriger la piélé des générations futures, oü les placerons-nous? Nous les placerons non dans l’intérieur du tombeau, mais ènbsp;l’extérieur. De cette manière, il suffira au pèlerin des Catacombesnbsp;d’approcher sa lampe des loculi qui remplissent les sombres galeries,nbsp;pour savoir aussilèt quelle est la tombe devant laquelle il doit se pros-terner, offrir son encens et déposer l’hommage de ses prières.

Enfin, nulle autre tombe, si chère qu’elle nous soit d’ailleurs, si elle ne renferme nn athlète de la foi, ne sera jamais accompagnée de cesnbsp;signes vénérables exclusivement réservés aux martyrs.

Cette conduite, que Ie plus vulgaire bon sens indique a tous les hommes, fut liiléralement celle des premiers chrétiens. D’abord, ilsnbsp;attachaient une importance extréme é conserver Ie souvenir des martyrs. La charité mutuelle et la religion étaient Ie double motif de cettenbsp;disposition aussi universellc qu’incontestable. Le respectueux amournbsp;que les fidèles portaient aux martyrs passe toute imagination. Les voirnbsp;dans leur prison, leur parler, les soulager, baiser leurs chaines, se re-commander a leurs prières, était, pour tous les frères, hommes, femmes, enfants, jeunes gens, vieillards, riches et pauvres, prêtres et la’i-ques, un besoin telleinent impérieux, que, pour le satisfaire, ils nenbsp;reculaient devant aucun danger, devant aucun sacrifice.

Que dis-je? ni les railleries de la foule, ni les menaces des magis-irats, ni les mauvais irailements des bourreaux, ni la crainte, souvent Irop fondée, de voir leur róle de spectateurs changé en celui de victi-mes, rien ne pouvait les empêcher d’accompagner leurs frères jus-qu’au lieu du supplice. Chaque page de l’histoire de la primitivenbsp;Église raconle quelqucs trails de cette héroüque charité (i). C’est un

(0 Voyez, entre aulres, Mamachi, De' Costumi de'primilm Cristiani, t. ni.c. i. p. 2quot;.

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496 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

fait sublime comme Ie christianisme, éclatant comme Ie soleil; Marie, les saintes femmes, Ie disciple bien-aimé, ces intrépides témoins de lanbsp;mort du Roi des martyrs, eurent, dès l’origine, a Jérusalem, a Rome,nbsp;a Srayrne, a Carthage, è Lyon, a Autun, partout, des peuples entiersnbsp;d’imitateurs.

La religion perpétuait cel héroïque et respectueux amour. Inslruits par les Apótres du divin Maitre, les chrétiens savaient que la mort nenbsp;brisait pas les liens de charité qui les unissaient aux martyrs. Loin denbsp;lit, dans chaque vainqueur, ils voyaient un ami puissant auprès denbsp;Dieu; un modele el un soutien dans les épreuves qui leur étaient ré-servées. Soit afin de s’animer au souvenir de leur courage, soit afinnbsp;de fortifier leur falblesse du secours de leurs prières, ils bravaientnbsp;tous les dangers pour se réunir assidumenl auprès de leurs tombeaux.nbsp;Lè, au milieu d’ardentes supplications, ils buvaient Ie sang généreuxnbsp;qui élève l’homme au-dessus de lui-même; et, dans ce double élément, la prière et l’Eucharistie, ils puisaient la force de monter ènbsp;leur tour surl’échafaud et de descendre dans l’arène (i). On peut jager, par la, de Textreme sollicitude avec laquelle ils marquaient denbsp;signes incommunicables la tombe révérée des martyrs.

Ges signes sonl la palrae el Ie vase de sang. Chez tous les peuples, la palme fut invariablement I’embleme de la vicloire et du trioraphe.nbsp;Vicloire dans les combats, victoire dans les Jeux Olympiques, vicloirenbsp;dans les courses du Cirque, victoire dans les luttes de la tribune et dunbsp;barreau, victoire sanglanle ou non sanglante, toujours la palme ennbsp;était Ie symbole et Ie prix (2).

(i) Mamachi, ibid., c. iv; BoldeUi, lib. i; Aringhi, lib. i.

(4) Victores utique cuncli ubique locorum painiam manu praeferunt. — Pausan., In Arcadia, lib. vm; Plularcb., Sympos., lib. vui, qua;st. iv. — Dans les jeux, on plagaitnbsp;uue palme sur une table, comme bul et recompense de la vicloire : « Palmam in medionbsp;» stadii loco eminentiore, in mensa speclandam proponebanl; » de la ce mot de Virgile ;

Seu quis olympiacm miratur prsemia palmse.

Georg, lil.

A Rome, on suspendait une palme a la maison du défenseur qui avail sauvé son Client dans une cause capitate : « Patronorum in Urbe domibus palmse apponebanlurnbsp;» honoris ergo, quoniam cives in judicio capitali servassent. » De la ces vers de Lu-cain :

.....Sicul et sine sanguinis haustu

Milia legitimo sub judice bella movere.

Hue quoque servali contingit gloria civis,

Altaque viclrices intexunt limina palm®.

Arboribus aliis laudabilior palma omnis cerlaminis est corona, et viclori® monu-inenlum babet rainum virescentera. — Liban., Soph. Enarr. Elog. Palrnm.

In certaininibus, palmam signum esse placuit viclori®. — Aul.-Gel., A’oct. Ank., lib. ut, c. tv.

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SIGNES DU MABTÏRE. 29~

Mais, quand eet usage eul élé moins universe!, il suffirait, pour comprendre et pour justifier l’intention des chrétiens, de savoir que,nbsp;chez les Romains et chez les Juifs, la palme fut Ie signe invariable denbsp;la victoire. L’histoire, les peinlures, les sculptures, les médailles dunbsp;Peuple-Roi nous montrent partout la palme comme l’emblème dunbsp;triomphe. Sur une médaille d’Auguste, on voit, entre la tête de Julesnbsp;César et d'Octave une palme qui indique la victoire remportée, ennbsp;Égypte, par Jules César. Parmi les médailles de Vespasien, on ennbsp;compte quatre qui représentent un palmier lout entier. Elies perpé-tuent Ie souvenir de la grande victoire remportée sur les Juifs par cenbsp;prince et par son fils Titus. Les inscriptions, victoria avgvsti, jvd^anbsp;CAPTA, ne laissent aucun doute è cet égard. Celles de Septime-Sévère,nbsp;de Caracalla, des Antonins, de Gallien, de Probus, de Cams, de Constantin, offrent Ie même emblème du triomphe.

Ce n’est pas tout; que la palme fut Ie symbole de la victoire, c’était une idéé tellement reQue chez les Romains, qu’un rejet de palmiernbsp;ayant poussé au pied d’une statue de Jupiter Capitolin, pendant lanbsp;guerre centre Persée, on ne douta plus de la défaite de ce prince. Aunbsp;contraire, lorsque, cinq ans plus lard, sous les consuls M. Messala etnbsp;C. Cassius, un ouragan eut arraché Ie palmier symbolique, on crut,nbsp;avec la même certitude, aux prochains revers de la république (i). Denbsp;plus, la palme était, k Rome, Ie signe incommunicable des grandsnbsp;triomphes; car l’olivier seulement était accordé au vainqueur jugénbsp;digne de l’ovalion. Enfin, la signification de la palme était si évidente,nbsp;qu’elle était connue, même du petit peuple (2).

Maintenant, je Ie demande : pour représenter Ie grand triomphe des martyrs, les chrétiens de Rome pouvaient-ils faire usage d’un emblème plus certain, plus vulgaire et plus consacré? Est-il permis denbsp;se méprendre sur leur intention? A leur place, n’aurions-nous pasnbsp;fait, ne ferions-nous pas comme eux?

Aliens plus loin, et supposons, un instant, que ni les Crecs, ni les Romains, ni les autres peoples de l’antiquité n’eussent employé lanbsp;palme comme symbole de la victoire; il aurait suffi aux premiers fi-dèles, pour la graver sur la tombe des martyrs, de savoir que Ie Saint-

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Plin., lib. XVII, c. XXV.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Oleae honorem romana majestas magnum praibuit, turmas equilum idibus juliisnbsp;ex ea coronando; ilem minoribus Iriumpbis ovantes. — Plin., lib. xv, c. iv. — Vicloria;nbsp;demum in plama significatum, ex numniis, picluris, sculpturisqiie omnibus iiniversa*nbsp;jam plebeculse manireslum est. Eaque eloculio tolies usurpala Ciceroni: Docto orator!nbsp;palma danda est,quot; in quadrigis, qui palmam primus accepcrit, etc. Pier. Valerian.,nbsp;lib. V, Hieroglyphic.


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298 LES TKOIS HOME.

Esprit lui-même l’avail désignée comme I'eaibleine du triomphe. Religieux comme ils l’élaient, leur premier soin fut toujours de senbsp;conformer, dans leurs peinlures, dans leurs sculptures, dans leursnbsp;emblènies, non raoins que dans leur langage et dans leurs mmurs, auxnbsp;enseignements sacrés : l’histoire de leur vie publique et privée, lesnbsp;monuments artistiques des Catacombes en sont une preuve péreraptoirenbsp;et mille fois répétée. Or, partout oü il en est question dans rÉcwTCRE,nbsp;la palme est prise pour Ie symbole de la victoire; je citerai seulementnbsp;quelques exemples.

Le Seigneur prescrit aux juges les régies 5 suivre dans la discussion des procés, et, pour designer la partie viclorieuse, il ordoniie de luinbsp;mettre une palme a la main (i). En témoignage de la victoire que Judasnbsp;el Simon Machabée avaient remportée sur les Gentils, le peuple vintnbsp;a leur rencontre avec des palmes a la main (2). Des palmes étaientnbsp;sculptées sur toutes les parlies du temple de Jérusalem, et les inter-prètes juifs et chrétiens s’accordent it dire qu’elles signifiaient la ré-compense promise au juste, vainqueur dans les lulles de la vie (3).nbsp;Enfin, l’Apótre saint Jean n’avail-il pas appris aux chrétiens ii se servirnbsp;de eet emblèmc, en leur monlranl les martyrs debout, devant le trónenbsp;de l’Agneau, avec des palmes a la main (/.)?

Aussi rien n’est plus commun dans les Actes des Martyrs, dans les monuments primitifs et dans les écrits des Pères que ceite expression :nbsp;la palme du martyre, obtenir la palme dumarlyre, arriver d la palmenbsp;du martyre (s).

Les chrétiens étaient done parfaitement fondés et parfaitement stirs d'êlre compris, si, pour désigner un martyr, ils gravaient une palmenbsp;sur sa tombe. Ce signe, l’ont-ils réellement employé? L’Église a-t-ellenbsp;reconnu et reconnait-elle la palme comme un témoignage irréfragablenbsp;du martyre? Telles sont les deux questions qu’il faut maintenant examiner.

Que les premiers fidèles se soient servis de la palme pour désigner les martyrs, la preuve en est, qu’ils ne Tont pas gravée indistinctementnbsp;sur tous les loculi de la Rome souterraine, que même le nombre denbsp;eeux qui en sont marqués est comparalivement très-restreint. Pourtant

(1) Si fueril causa inter aliquos, et iiiterpellaverint judic^, quem justum esse per-spexeriut, tilt justilite palmam dabunt. Deut., c. xxv, i. t (5) Macho})., lib. xin, c. x.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Phil, allegor. leg., lib. ii; Cornet, a Lapid., In Ezecli., c. xti.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Stantes ante thronum et in conspectu Agni, aoiicti stulis albis ct palm® in manibnsnbsp;eoruin. Apoc., c. vi, 9.

(3) Boldeiti, lib. i, c. xuii.

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LA PALME , PREMIEB SIGNE.

si la palme n’avait signifié que la victoire non sanglante des justes dans les combats ordinaires de la vie, on devrait la trouver sur un grandnbsp;nonibre de tombes dont elle est absente, et ne jamais la rencontrernbsp;sur d’autres qu’elle orne de sa glorieuse présence. Ainsi, elle devrait,nbsp;d'une part, êlre toujours absente de la tombe des petits enfants; et,nbsp;d’autre part, orner les innombrables locuH des adultes, c’est-è-dire,nbsp;de nos héroïques aïeux, modèles accomplis de toutes les vertus. D’oiinbsp;vient néanraoins qu’elle marque la tombe de jeunes enfants incapablesnbsp;encore, par leur Age, des lutles méritoires de l’existenee? D’oü vientnbsp;que des myriades de loculi, dépositaires de fidèles d’un Age mür, ennbsp;sont privés, et ne portent d’autre témoignage de la sainte vie et de lanbsp;précieuse mort du défunt que ces deux paroles : In pace; nn tel dansnbsp;la paix?

Comment les parents, les amis de ces admirables chrétiens, si Ü-dèles A déclarer dans de touchantes inscriptions etleurs tendres regrets et la religieuse sépuUure qu’ils ont eux-mêmes donnée A leurs bien-aimés défunts, ont-ils négligé de recoramander A l’estime de la posté-rité ceux qui leur étaient si chers, en privant leur tombe du signenbsp;distinclif de la victoire et du triomphe? Qui pouvait les empêcher denbsp;leur rendre ce devoir de charilé et möme de justice? Qiielques minutesnbsp;et Ie premier morceau de fer, de bois, de pot cassé, suflisaient pournbsp;cela. Si pressés et si pauvres qu’on les suppose, comment adraettrenbsp;que ces moyens leur raanquèrent presque toujours? Cependant, malgrénbsp;tant de motifs et tant de facilité, ils ne l’ont pas fait; il faut done ennbsp;conclure, qu’A leurs yeux la palme n’était point un signe facultatif,nbsp;mais bien l’emblème réservé d’une victoire plus excellente que toutesnbsp;les victoires spirituelles ; l’emblème d’une victoire effective, réelle, extérieure, en un mot de la victoire par excellence, la victoire du marly re (i).

Une seconde preuve vient A l’appui de la précédente. L’illustre gar-dien des Catacombes, Boldetti, a remarqué que la palme se irouve plus fréquemment dans les cimetières voisins du Tibre. Cette parlicu-larité, dont la science archéologique ne saurait rendre compte, s’ex-plique d’elle-même, en admettant que la palme est Ie signe distinctifnbsp;du martyre : en effet, on con^oit sans peine que les chrétiens ont dü

(i) Dunque è duopo aflermare che presso di loro la paltna dinolasse allra cosa n)olto maggiore, e pifi eccellenie, che la sola viltoria spirituale ed interna j e che per questonbsp;molivo si aslenessero di elïigiarvela, senza lasciarsi indurre o dall’ affezione del sangue,nbsp;o dalle leggi d’una eccedente amicizia a concederla a chi peri'eltamente non se 1’aveanbsp;meritala con la sicurezza di vera, efletiiva e reale vittoria esterna per mezzo del con-sumato martirio. — Boldetti, lib. i, c. xivni, p. 260.


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300 LES TROIS ROME.

transporter dans les Catacombes les plusrapprochéesleurs frères noyés dans Ie Tibre; el l’histoire nous dit que Ie nombre en fut grand. Maisnbsp;leurs tombes ne pouvaient être signalées par Ie vase de sang, puisqu’ilnbsp;n’y avail point eu de sang répandu. De la, sans aucun doute, la multiplication de la palme dans les galeries dont il s’agit (i).

Un dernier témoignage compléte la démonstralion. Des tombes qui sont cerlainement des tombes de martyrs, puisque l’inscription en faitnbsp;foi, n’ont d’autre signe distinctif que la palme.

En voici quelques-unes :

MARCELLA ET CHRISTI MARTYRES CCCCCL.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;:

« Marcelle et cinq cent cinquante martyrs du Christ. »

RUFFINCS ET CHRISTI MARTYRES CL. MARTYRES CHRISTI

« Ici Gordien, courrier de la Gaule, immolé pour la foi avec toute sa familie : ils reposent en paix. Théophila, leur servante, a fait cettenbsp;tombe. »

(i) Boldctli, lib. I, c. XLiv, p. .quot;33.

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LA PALME, PREMIER SIGNE. nbsp;nbsp;nbsp;50!

Celte inscription écrite en caraOères barbares provient des Cala-combes de Sainte-Agnès.

Par cela seul, il deraeure démonlré que, dans l’intention des premiers fidèles, la palme est Ie signe distinctif du marlyre. Done sur tous les loculi oü elle se trouve, elle indique la même chose, aulre-ment elle ne serait plus un signe. Telle est la réponse a cetle premièrenbsp;question : Les chrétiens ont-ils employé la palme comme signe distine-tif du martyre? Reste Ia seconde, savoir : L’Église a t-elle toujoursnbsp;reconnu la palme comme Ie témoignage irréfragable du martyre?

En parlant des peintures et des sculptures des Catacombes, nous avons constaté que Tart était un livre, une langue dont VÉglise s’élaitnbsp;servie, dès l’origine, pour enseigner a ses enfants les vérités de la foi.nbsp;Or, pas plus que l’enseignement oral, eet enseigneraent figuré ne futnbsp;laissé a l’arbitraire des particüliers et aux caprices de l’imagination.nbsp;L’ensemble des monuments priraitifs montre qu’une même penseenbsp;l’inspire, Ie domine et Ie surveille. On lui a même fait un reproche denbsp;cette reproduction constante des mêmes sujets, et de cette invariablenbsp;série de formes et d’emblèmes. Dans ce reproche, qu’on peut admet-tre au point de vue artistique, se trouve la preuve évidente du fait quenbsp;nous voulons établir.

Une pareille communauté, disons mieux, une pareille identité de types et d’emblèmes parmi l’innombrable variété de peiiitres et denbsp;sculpteurs inexpérimentés, qui se succédèrent pendant plusieurs siè-cles et qui travaiilèrent sans se connaitre dans les vastes souterrainsnbsp;des Catacombes, révèle manifestement l’existence de symboles convén-tionnels, sanctionnés et maintenus par un pouvoir régulateur. Cettenbsp;même uniformité traverse les éges suivants. Ainsi Ie concile de Trentenbsp;ne fait que proclamer la perpétuité de ce pouvoir régulateur de l’en-seignement figuré, lorsqu’il dit: « Conformémenl a l’usage de TÉglisenbsp;catholique et apostolique, regu dès les siècles primitifs, conforme è lanbsp;tradition des saints Pères et aux décrets des conciles, Ie saint Synode

ordonne h tous les évêques... d’instruire avec soin les fidèles..... de

l’usage légitime des images.....et afin que toules ces choses soient

observées avec plus d’exactitude, il défend a toute personne de placer dans un lieu ou dans une église quelconque, une image insolite, anbsp;rooins qu’elle n’ait été approuvée par l’évêque (t). »

Quant h la palme en particulier, toute la tradition nous Ia donne 1

1

Hffic ut fidelius observenlur, statuit sancla Synodus, nemini licerc ullo in loco, ''et ecclesia, ctiam quomodolibet exempla, insolilam ponere vel ponendam curareinia-g'nem, uisi ab Episcopo approbata fuerit. Sess. xv, de Purgal.

13.

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302 LES fROlS ROME.

comiiie Ie signe dislinctif du marlyre. Je regrelle \iveuient de ne pou-voir citer les innombrables témoignages des saints doeteurs sur ce fait incontestable (t). Qu’il nous sufEse d'entendre saint Grégoire Ie Grand.nbsp;Le savant Pontife nous montre dans Ie ciel l’origine de eet usage, ennbsp;sorte que toute la difïérence entre l’Église de Ia terre et l’Église dunbsp;ciel, consiste en ce que la première grave, sur la tombe dü martyr, lanbsp;palme que la seconde lui met a la main. « Que signifient les palmes?nbsp;demande l’illustre docteur, sinon le prix de la victoire? De la vientnbsp;qu’on les donne aux vainqueurs. C’est aussi pour cela qu’il est ëcritnbsp;de ceux qui ont vaincu l’antique ennemi et qui triomphent dans lesnbsp;joies de la patrie : Et des palmes sont en leurs mains (2). »

Aux témoignages écrits succède la conduite plus éloquente encore des Souverains Pontifes, dans toute la suite des siècles. Saint Pascalnbsp;extrait des Catacombes deux mille trois cents martyrs qu’il place dansnbsp;I'église de Sainle-Praxède : quel signe emploie-t-il pour désigner a lanbsp;postériléla sanglante victoire de tous ces héros de la foi? Deux magni-fiques palmes en mosaïque, gravées sur l’abside de la Basilique. Saintnbsp;Félix Hl, dans I’église des Saints-Cosme et Damien; AnastaselV, dansnbsp;I’église de Saint-Venance prés Sainl-Jean-de-Latran; Innocent II, anbsp;üamte-Uarie-in-Trastevere; Honorius III, dans la Basilique de Saint-Paul-hors-des-Murs, emploient le même symbole pour désigner Ienbsp;méme fait.

Concluons par ces paroles de l’homme le plus savant de son siècle, qui résument l’histoire emblématique de tons les ages chrétiens. « Lesnbsp;saints, dit Bellarmin, sont loujours représentés avec les emblèmes denbsp;la vertu, de la souffrance ou de la puissance. Saint Pierre avec lesnbsp;clefs; saint Laurent avec son gril, etc., les martyrs avec des palmes,nbsp;tous les saints avec la couronne. Ces emblèmes sont comnie une his-toire abrégée des actions et des souffrances de ceux que nous devonsnbsp;honorer (s). »

De même done que le concile de Trente a constaté le pouvoir per-pétuel et la vigilance constante de l’Église, sur l’enseigneraent figuré;

(t) Voir CCS passages péremploiies dans Boldetli, lib. t, c. xlii, xliii, etc.

(i) Quid per patmas? nisi praemia vicloriae designantur. Ipsae quoque dari vincenlibus solent. Unde de bis quoque qui in cei’tamine marlyrii antiquum hostem vicerunt, etnbsp;jam victores in patria gaudebant, scriptum est; Et pal/na; in manibus eorum. Homil.nbsp;xvii, in Ezech.

(3) Sancli semper cum insigni, virtutis, vel passionis, vel potestatis pingunlur; Petrus cum clavibus, Laurentius cum craticula, etc., martyres omnes cum palmis, sanctinbsp;omnes cum diademate; ex quibus signis, seu instrumenlis.dooemur quasi per compendium quid ilti, quos coUraus, cgerinl, quidve passi sunt. I)e Eccles. triumph-, Ub. 11, c. x.

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CATACOMBES DE LA VOIE FLAMLNIENNE.

de même Ie Saint-Siége n’a fait que constaler la tradition catholique sur la signification de la palme, lorsqu’il l’a solennellement déclaréenbsp;signe distinclif et sufiSsant par lui-même du martyre. Voici Ie mémo-rable décret: « Lorsqu’il fut question des signes auxquels on pourraitnbsp;distinguer les vraies et les fausses reliques des martyrs, la sacrée Congregation, ayant examiné mürement l’affaire, déclara que la palme, etnbsp;Ie vase teint de sang, devaient être regardés comme des signes irré-fragables du martyre : quant aux autres signes, elle en renvoya l’exa-men a un autre temps (i). » Ce décret décisif a toujours servi et il sertnbsp;encore de régie aujourd’hui.

Heureux d’avoir reconnu les solides fondements sur lesquels repose la conduite de TÉglise dans la question des saintes reliques aussi biennbsp;que dans toutes les autres, nous regagnames avec la nuit la Porte dunbsp;Peuple, bien disposés è la repasser demain, afin d’étudier Ie vase denbsp;sang, second signe distinctif du martyre.

18 MARS.

Catacombcs de Ia Voie Flaminienne (suite). — Catacombe de Sainte-Théodora. — Vase de sang, second signe du martyre. — Zèle des chrétiens de tous les temps pour avoirnbsp;Ie sang des martyrs.

Après avoir monté Ie Süint-Escalier et rendu nos hommages au vénérable portrait de Notre-Seigneur, qu’on y conserve et qu’on y dé-couvre aujourd’hui, nous regagnamp;mes la Voie Flaminienne. Commenbsp;toutes les autres elle fut rougie du sang de nos pères. A Saint Valentin se joignent les glorieux martyrs Abbondius, prêtre, Abbondantius,nbsp;diacre. Le 16 septembre de l’an 303, une foule immense encombraitnbsp;la Voie Flaminienne, le pont Milvius et les plaines qui s’étendent amp; dixnbsp;milles de distance. Que faisait la tout ce peuple? Un spectacle sanglantnbsp;allait être offert a son avide cruauté. Voici venir lentemenl au milieunbsp;des licteurs deux ministres de l’Évangile, chargés de chalnes et lenbsp;corps épuisé par les horribles tortures du chevalet. Ils vont subir lanbsp;mort : ainsi le veut le magnanime Dioclélien. Tout è coup un longnbsp;frémissement parcourt la foule; les uns crient au prodige, les autresnbsp;a la magie. Qu’est-il arrivé? Marcius, noble rejeton d’une des plus

{«) Cum de notis disceptarctur, ex quibus veras sanctorum martyrum reliqui® a falsis ct dubiis dignosci possint: eadem S. Congregalio, re diligentius examinata, censuitnbsp;Palmam, ct vas illorum sanguine linctum, pro signis certissimis habenda esse; aliorunanbsp;vero signorum examen in aliud tempus rejecit. Dal. Kom.; die x aprilis 1668.

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304 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

illuslres families de l’empire, s’est présenté devant les martyrs. II a eu foi au pouvoir miraculeux de Tinnocence, et il a demandé aux saintsnbsp;la résurreclion de son jeune Ills qu’il vient de perdre. Sa prière estnbsp;exaucée, son fils est entre ses bras, plein de vie. Du père et de l’enfantnbsp;la reconnaissance a fait des chrétiens; l’empereur en est immédiate-ment informé; et du Palatin revient l’ordre d’envelopper dans Ienbsp;même supplice et les apótres et les néophytes. Tous quatre continuentnbsp;leur marche et regoivent ensemble la palrae du martyre. La nuit sui-vante, une dame romaine, nomraée Théodora, vint avec ses serviteursnbsp;enlever les corps de saintes victimes, les pla^a dans sa voiture et lesnbsp;conduisil dans une de ses terres, située ii vingt-huit milles de Rome.nbsp;Elle les enveloppa précieusement de linceuls avec des parfums et lesnbsp;inhuma dans la paix (i).

Notre intention était d’aller visiter la Catacombe de Sainte-Théo-dora; mais la distance nous retint. Je dirai seulement que ce glorieux cimetière se trouve en face du Mont-Soracte, si célèbre par la retraitenbsp;de saint Sylvestre; qu’il est de forme circulaire, a deux rangs de galeries, et qu’il conserve encore quelques monuments primitifs, entrenbsp;autres l’inscriplion de sainte Théodora, qui vint elle-même partagernbsp;le tombeau des martyrs. Regagnant la Catacombe de Saint-Valenlin,nbsp;nous abordames la question du vase de sang, corame signe disrtnctifnbsp;du martyre. Les monuments que nous avions vus, ceux que nous avionsnbsp;sous les yeux, rendaient palpable Ie sujet de nos études. Or, quand onnbsp;opère sur une matière appréciable au tact et a la vue, les recherchesnbsp;sont plus agréables, l’examen plus facile, el Ie succès plus certain.

A ,cóté d’un grand nombre de loculi, se trouve, ainsi que nous l’a-vo.ns remarqué, une petite ouverture pratiquée dans Ie tuf et renfer-mant un vase de sang. Nous avons a montrer : 1” que ce vase n’est point un vase lacrymaloire, ni un vase de parfums, mais bien un vasenbsp;de sang; 2quot; qu’il est placé la pour indiquer Ie tombeau d’un martyr.

Les païens honoraienl les funérailles de leurs proches et de leurs amis par une grande abondance de larmes. Dans la crainle que lanbsp;douleur réelle n’en fit pas assez répandre, on payaitdes femmes pournbsp;en verser. Ces femmes, appelées prwficw, s’arrachaient les cheveux,nbsp;se frappaient, s’égratignaient Ie visage, chantaienl des chants lugu-bres, aSn de se faire pleurer (2). Quelquefois leurs larmes, ainsi quenbsp;celles des parents et des amis, étaient recueillies dans des vases lacry-

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Bar., 1.11, An. 303, n. 113; Mazzolari, l. v, -426; Act. SS. Abiind. et Abund., apudnbsp;Kosio, lib. IV, c. XL.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Cicer., De Legib., lib. 11.

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VASE DE SANG, SECOND SIGNE DU MARTYRE. nbsp;nbsp;nbsp;505

maloires, espèee de Boles en verre, étroites et très-longues, qu’on en-fermait, avec lescendres du mort, dansl’urne sépulcrale. De la, celle formule, assez souvent reproduite sur les tombes païennes : Ils. Vontnbsp;déposè avec des larmes (i). En cberchant la raison de eet usage, on lanbsp;trouve dans l’ignorance oü étaient les païens du dogme consolaleurnbsp;de la résurreclion. Persuadés que Ie corps de leurs amis périssait pournbsp;jamais, ils tenaient a se montrer inconsolables; et, afin d’éternisernbsp;leurs regrets, ils enfermaient des larmes avec les cendres de ceux qu’ilsnbsp;avaient perdus.

Rien de semblable n’avait lieu parmi les chrétiens. Ils pleuraient sans doute a la mort de leurs frères; mais ils ne pleuraient pas commenbsp;ceux qui n’ont plus d’espérance. Aussi, jamais ils ne connurent l’u-sage des vases lacrymaloires : histoire, tradition, monuments, loutsenbsp;tait a eet égard. Ge silence absolu acquiert la force d’une preuve positive, quand il s’agit d’hommes qui regardaient la mort comme unnbsp;sommeil, et la séparation comme une absence de quelques jours.nbsp;D’ailleurs, les vases lacrymatoires se plagaient toujours dans l’inté-rieur des monuments. Or, les millions de loculi, ouverts, jusqu’a cènbsp;jour, dans les Catacombes, n’en ont pas donné un seul. II est done dé-montré, pour qui est tant soit peu initié aux rites funéraires des anciens, que les vases trouvés auprès des tombes de la Rome souterrainenbsp;ne sont pas des vases lacrymatoires (2).

Est-il également certain qu’ils ne sont pas des vases de parfums?

C’est ce que nous allons examiner. L’usage des parfums, dans les funérailles, remonte k la plus haute antiquité. On Ie voit pratiquénbsp;chez les Égyptiens, de qui les Hébreux paraissent l’avoir regu (5). Denbsp;l’Égyple il passa dans la Grèce, de la Grèce en Italië (4). Dès les premiers temps de la république, une loi des Douze-Tables en constatenbsp;l’existence, lorsqu’elle defend d’employer des parfums dans la sepulture des esclaves (s). Dans les beaux jours de l’empire, on jetait dansnbsp;Ie bucher des Césars et des grands, une quantité considérable d'aro-

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Prius urna cum odoribus et lacrymis, qua; vitreu vasculo injecta; essent, ossa cuinnbsp;cineribus claudebantur : unde ha;c verba ; Cum lacrymis posucre. — Grutcr., De Jurenbsp;Man., lil), i, c. xxvii.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Voyez Boldetti, lib. i, c. xxxiv.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Gen., c. I..

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Plato, In Pheedon.

(5) Ut servilis unctura omnisque circumpotatio tollalur,

Tarquiiiii corpus bona l'eniina lavil et unxit.

Ennics, Apuel Serv.; Aineid., lib. iv.

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306

LES TROIS ROSIE.

mates, soit pour honorer Ie défunt, soit pour rendre plus rapide Taction du feu, soit pour empêcher toute odeur désagréable (i).

Les chrétiens imitèrent eet usage. Ils avaient pour modèle la conduite tenue par les héros du Calvaire, è Tégard du divin Maitre. Gomme on ensevelit Ie corps du Seigneur dans un linceul avec desnbsp;aroniates (2), de mêine ils enveloppaient les corps de leurs frères, etnbsp;surtout des martyrs, dans des linges avec des parfums. Ce genre denbsp;sépulture estmentionné a chaque page de nos monuments primitifs(3).

Quant ii déposer dans Tintérieur ou a Textérieur des tombeaux des vases remplis de parfums; ni les païens, ni les chrétiens ne connurentnbsp;jamais un semblable usage. Malgré les fouilles plusieurs fois séculai-res, malgré les innombrables tombeaux mis a découvert, Ie premiernbsp;vase de ce genre, placé dans les urnes des mausolées, dans les oUcenbsp;des colombaires, dans les loculi des Catacombes, est encore a trou-ver {i). Mais n’en découvre-t-on pas qui, placés amp; Textérieur des monuments, servaient comme de réchauds dans lesquels on faisait brülernbsp;des parfums en Thonneur des morts, aux jours anniversaires de leurnbsp;trépas? On peut alBrmer qu’il n’en existe aucun prés des tombes

(1)........Congesta cremantur,

ïlmrea dona, dapes, fuso craleres olivo.

ViRGiLE, Mneid., tib. vi.

Lecta ossa vino et lade perfusa, siccalaque, aromalibus et oderibus commixta in urnam reponebant. — Spond., De Coemeter., lib. 1, pars iii, c. m.

(») Acceperunt ergo corpus Jesu et ligaverunt illud linteis cum aromatibus, sicut mos est Judajis sepelire. Joan., c. xx.

(5) Boldetli, lib. I, c. xxxiv, p. 174 et suiv.

(4) Che di tali unguenli, profumi ed odori si collocassero i vasi o dentro, o 1'uor de’ sepolcri, finora non è stalo possibile rinvenirlo in vernno degli autori, che traltano de’nbsp;funerali degli antichi e specialmenle di Roma. ld., id. p. 175. — « Quant aux vases quinbsp;accompagnent quelquefois les tombeaux païens, il est d’abord reconnu qu'ils se trou-vent toujours è Tintérieur et non a Textérieur de la tombe, tandis que les fioles du sangnbsp;des martyrs sont toujours placées au dehors et jamais a Tintérieur de leur loculus. Puisnbsp;un doule assez grave s’est élevé sur la destination des vases que Ton a trouvés dansnbsp;les sépuUurcs païennes, a savoir, s’ils étaient employés pour les parfums, comme Tontnbsp;prétendu quelques archéologues raodernes, après Schoëfflin et Paciaudi, ou plutót sinbsp;ce n’étaient pas des vases lacrymatoires, ainsi que Tont présumé Chifflet, Kirmann,nbsp;Smith et d’autres écrivains. Mais quel qu’ail été Teraploi réel de ces vases. Tun et Tautrenbsp;de ces usages répugne égalemeut au caractère des sépuUures des martyrs, D’une part,nbsp;TEglise n’a jamais prié pour Ie salut des martyrs et n’a jamais non plus déploré leurnbsp;trépas, puisque c’eüt été contraire a la gloire des martyrs et de Dieu; on ne trouve pasnbsp;une larme gravee sur leur tombe. D’autre part, si elle les eül honorés avec des vasesnbsp;de parlums et de liqueurs que les païens consacraient aux dieux Manes ou d’autresnbsp;divinités infernales, TÉglise eüt alors rendu aux martyrs un honneur emprunté a cettenbsp;idoldtrie abominable, centre laquelle ils avaient proteslé par leur supplice et leur mort.nbsp;P. Sccchi, Lettres sur Ie MarUjre de saint Sabinian. »

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VASE DE SANG, SECOND SIGNE DU MAUTÏRE. nbsp;nbsp;nbsp;507

païennes. Quoi qu’il en soit, il est plus clair quo le jour que ces vases n’accompagnent jamais les tombeaux de nos Catacombes, et que ceuxnbsp;qu’on y trouve sont des vases de sang : en voici les preuves.

Ces vases sont, en général, de verre, un petit nombre en terre cuiie, quelques-uns en bronze. On eongoit sans peine que les premiers n’ontnbsp;pu servir i bruler des parfums : le moindre charbon enflaramé les au-rait fait écdater. Pas plus que les premiers, ceux de la seconde et denbsp;la troisième espèce n’ont pu êlre employés 4 un pared usage. Sansnbsp;doute, ils sont d’une matière capable de résister ii Paction du feu;nbsp;mais Pexiguité de Pouverture, semblable au cou d’une bouteille, nenbsp;permet pas d’y introduire des charbons. La simple vue de ces vasesnbsp;rend absurde la supposition qu’ils ont pu servir de réchauds.

L’expérience démontre que, dans la réalilé, ils n’en ont jamais servi. Les Catacombes sont pleines de lampes en terre cuite, destinées anbsp;éclairer les galeries. Quoique éteintes depuis quinze ou dix-buit siè-cles, ces lampes conservent la trace du feu. Le bee, fortement noirci,nbsp;attesle le passage de la fumée : nous en possédons plusieurs, recueil-lies, sous nos yeux, dans les Catacombes de Sainte-Priscille, qui portent le cachet irrécusable de leur usage primitif. Si done, les vasesnbsp;dont il s’agit avaient jamais contenu des charbons, ils conserveraientnbsp;quelque trace de feu; on devrait même y trouver des restes de charbons mêlés avec la terre dont quelques-uns sont plus ou moins rem-plis. Or, Pexamen le plus altentif el mille fois répélé n’a jamais pu ynbsp;surprendre ni trace de feu, ni résidu de charbons ou de matière car-bonisée ; ils ne servirent done ni de réchauds ni de cassolette.

A ces preuves matérielles se joint une preuve morale qui, pour le pèlerin des Catacombes, remplace toutes les aulres. Elle nait de lanbsp;Mature même des lieux. A la vue des profonds souterrains, oü circulenbsp;^ peine la quanlilé d’air nécessaire è la respiration; a la vue de cesnbsp;Patiies chapelles ofi le séjour prolongé d’un certain nombre de per-aonnes joint a la fumée de lampes nombreuses épaissit et vicie promp-

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308 nbsp;nbsp;nbsp;les TROIS ROME.

lement Talmosphère ; comment admetlre la présence de rechauds remplis de charbons et dégageant, pendant des heures entières, desnbsp;nuages d’encens et de parfums? La seule pensée d’une pareille hypo-thèse sufSt pour asphyxier.

Aussi, l’histoire qui mentionne avec tant de fidélité et les offrandes de luminaires faites aux tombeaux des martyrs par les Souverainsnbsp;Pontifes, et les parfums de tout genre employés par les chrétiens dansnbsp;l’ensevelissement de leurs frères, ne dit pas un seul mot des aromatesnbsp;brülés en leur honneur sur de prétendus réchauds (i). Les vases denbsp;verre, de terre cuite ou de bronze, placés auprès des loculi des martyrs, ne sont ni des vases lacrymatoires, ni des cassolettes, ni desnbsp;réchauds è parfums : voilé un fait acquis. Que sont-ils done? Tellenbsp;est la question qu’il faut maintenant éclaircir.

L’histoire, la tradition, la science, l’Église répondent d’une voix unanime : Ces vases contiennent Ie sang des martyrs. Ici, je l’avouenbsp;avec transport, c’est une bonne fortune pour Ie pèlerin calholique desnbsp;Gataeombes, d’être conduit par les exigences de son sujet, é déroulernbsp;aux regards de ses frères une des plus magnifiques pages des annalcsnbsp;de la primitive Église.

Dans la personne des pêcheurs galiléens, Ie christianisme est enlré dans la grande Rome avec la prélention de renverser Jupiter du Ca-pitole, et d’engager une lutte a mort avec Ie paganisme. L’heure dunbsp;combat gigantesque a sonné : les lions et les tigres rugissent dansnbsp;ramphithéélre. Le Palatin, Ie Quirinal, Ie Janicule, les sept Collines,nbsp;Ie Forum, se couvrent de roues, de chevalets, d’instruments de sup-plice : sous la dent des animaux furieux, sous la hache des licteurs lenbsp;sang chrétien coule ii grands flols; durant trois siècles les victimesnbsp;périssent par millions. Un triple enthousiasme s’est emparé de lanbsp;reine du monde. Enthousiasme de la cruauté dans les empereurs, lesnbsp;magistrals et les bourreaux; enthousiasme des tortures et de la mortnbsp;dans les martyrs; enthousiasme de l’araour el de la vénéralion dansnbsp;les frères des victimes.

Regardez ce peuple entier de sénateurs, de chevaliers remains, de matrones, de jeiines lilies, d’hommes et de femmes du peuple quinbsp;veillenl aux portes du Colisée, a l’entrée du Forum, au pied des écha-fauds. Malgré les bourreaux, les soldats et les juges, de la voix et du

(i) lisdemque instiluUs disposuil, ut in ccBnictoriis circumquaque posilis Roina; in die nalalitiorum eorum (martyrum) luminaria ad vigilias iaciendas et oblationcs donbsp;patriarcliio per oblationarium deportarentur ad cclcbrandas niissas, etc. — Anaslas.,nbsp;In Greg,, iii, etc.

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ZÊLE DES CHRÉTIENS DE TOUS LES TEMPS. 500

geste ils encouragent les condamnés au milieu de léurs tortures; puis, quand de profondes blessures ont fait jaillir leur sang; quand Ie glaivenbsp;homicide ou la dent meurtrière des hyènes et des panthères Tont faitnbsp;couler par torrents; quand enfin ils ont expiré, voyez tout ce peoplenbsp;se précipiter sur l'arène ensanglantée de ramphithéatre, pénétrernbsp;hardiment sous les chevalets et les échafauds et recueillir a l’envi avecnbsp;des linges et des éponges, Ie sang dont la terre est inondée, en attendant qu’il puisse emporter précieusement, dans des eavernes incon-nues, les restes mutilés des victimes (i). Voilé Ie spectacle étrange auxnbsp;yeux de la raison, sublime aux yeux de la foi, dont Rome et Carthage,nbsp;Lyon et Smyrne, l’Orienl et l’Occident furent chaque jour témoinsnbsp;pendant trois siècles.

Malheureuseraent les limites de mon sujet ne permettent de citer qu’un petit nombre d’exemples. Comrae Jérusalem avait vu Marie etnbsp;Madeleine rester courageusement sur Ie Calvaire en face de la croix,nbsp;pendant Ie supplice de la grande Victime; de même, pendant les furieuses persécutions de Néron et de Domitien, Rome vit constamroentnbsp;au pied du gibet des martyrs deux héroïnes, deux jeunes et noblesnbsp;vierges, filles du sénateur Pudens, recueillir avec un zèle infatigablenbsp;Ie sang précieux des martyrs. Praxède et Pudentienne, les monumentsnbsp;primitifs vous attribuent la gloire incomparable d’avoir sauvé Ie sangnbsp;et les restes sacrés de trois mille victimes. Honneur au génie des artsnbsp;quiabien mérité du christianisme en vous représentant Tune et l’autrenbsp;dans l’exercice de votre héroïque charité (2).

Sous Valérien, Hippolyte, la gloire de Rome, est mis en pièce par des chevaux indomptés qui Ie trainenl dans des chemins couvertsnbsp;d’épines et de cailloux. Ses membres sont semés sur une longue éten-due, couverle de distance en distance par de flaques de sang : dix-öeuf martyrs périssent avec lui. L’horrible supplice est é peine com-niencé, que les frères, les soeurs, c’est-é-dire les chrétiens de toutnbsp;%e et de tout sexe, accourent pour récueillir et Ie sang et les membresnbsp;sacrés des victimes. Les uns ramassent la téte vénérable, dépouillée denbsp;Sa chevelure; les autres, les mains, les bras, les épaules mutilés ;

(1) Tanli faciebant sacras martyrum reliquias, ut sudoris, si possent, guttas hauri-’’eot, et stillas sanguinis etiatn persecutore vidente, atque exerto gladio minitanlc, •laalibet arte subriperent, atque reconderent. — Baron, An. 261, n. 34.

(*) Dans 1’église qui porie son nom, on voit sainte Praxède pressant une èpoiige Pleine de sang, sur Ie bord d’un puits. L’usage des éponges.pour recueillir Ie sang desnbsp;®'gt;'’lyrs, atleslé par les monuments primitifs, est devenu palpable par la découveiTenbsp;“D grand nombre de vases oü se irouvait encore 1’éponge imbibée de sang. —Voyeznbsp;^“•detti, lib. t, c. XXXI, p. 149-130.

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510 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS HOME.

ceux-Jè recueillent avec des liiiges et des éponges, jusqu’i la dernière goulte de leur sang précieux (i).

Qui ne connait l’héroïque courage des illustres matrones Priscille, Cyriaque, Lucine, Marcelle, Juste, Théodora, glorieuse lignée d’hé-roïnes, qui reproduisirent pendant trois siècles, aux regards de lanbsp;grande Rome, l’intrépidilé de leur mère et de leurs soeurs, Marie etnbsp;les sainles femmes du Calvaire? Mais ce que plusieurs ignorent, c’estnbsp;que Ie dévouement pour les martyrs, la sainte avidilé de posséder leurnbsp;sang et leurs restes précieux, régnaient en souverains dans Ie coeurnbsp;d’une impératrice; et quelleimpéralrice, grand Dieu ! La femme mêmenbsp;du plus terrible persécuteur que l’Église ait jamais eu : j’ai nomménbsp;sainte Serena, épouse de Dioclétien!

Susanne, jeune vierge, la fleur de la noblesse Romaine, vient, par ordre du tyran, d’expirer au milieu de tortures. La nuit suivante,nbsp;l’impératrice sort mystérieusement du palais, et pendant Ie sommeilnbsp;du tigre, elle vient recueillir de ses propres mains Ie corps de l’hé-roïne; avec son voile elle ramassele sang. Plus heureuse de son trésornbsp;que son mari de toutes ses conquêtes, elle enferme Ie précieux dépotnbsp;dans une cassette d’argent, l’emporte au palais, et tous les instantsnbsp;du jour et de la nuit qu’elle peut saisir, elle vient furtivement offrirnbsp;ses prières et ses voeux a son auguste amie (2).

Passons amp; Carthage. Saint Cyprien va au supplice; avec lui marchent de nombreux chrétiens. Sous les yeux des juges et des bourreaux, ilsnbsp;étendent par terre des linges et des mouchoirs, afin de recueillir Ienbsp;sang de Pillustre martyr (5).

Nicomédie contemple Ie même spectacle. Par ordre de Dioclétien, vingt-trois martyrs, a la tête desquels marche saint Adrien, non moins

(1) Ille caput niveum compleclitur, ac reverendam Canitiem molli confovet in gremio.

Hic humeros, truncasque roanus et brachia et ulnas.

El genua, et cruruni f'ragmina nuda legit.

Palliolis eliam bibulte siccantur arente,

Ne quis in infeclo pulvere ros maneat.

Si quis et in senlibus recalenli adsperginc sanguis Insidet, hunc omnem spongia pressa rapit.

Prudent., Hym. 11.

(a) Serena augusta cuni gaudio noctu veniens, collegil corpus sancue marlyris, el sanguineni ejus illic fusum suo velamine extersit, posuilque in capsa argentea palalionbsp;8U0, ubi diu nocluque furtivis vicibus orare non cessabat. Act. S. Susan., apud Sur.,

11 aug.

(3) Fralres vero flenles linleainina et oraria ante eum ponebant, ne sanctus cruor defluens absorberetur a terra. Act. S. Cyp., apud Ruinart.

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ZÊLE DES CHRÉTIEXS DE TOÜS LES TEMPS. öll

célèbr« h Rome qu’en Oriënt, soul condaninés au supplice de la roue. De leurs membres déchirés, broyés, coulent des torrents de sang. Sangnbsp;précieux que sainte Nathalie, digne épouse d’Adrien, et plusieursnbsp;dames de ses amies regoivenl avec un amour qui ne peut étre comparenbsp;qu’a leur courage. Les unes Ie recueillent dans des linges et de Ianbsp;pourpre; les autres dans leur propre sein. Ce n’est pas assez; les il-lustres matrones voient les habits des bourreaux couverts de ce sangnbsp;précieux : pour les avoir, elles leur jettent l’or, les perles, les richesnbsp;parures dont elles sont couvertes (i).

Portons encore nos regards vers l’Arménie. Les ordres cruels de Dioclélien s’y exécutent comme dans Ie reste du monde. La ville denbsp;Sébaste volt son vénérable évêque, saint Blaise, conduit au supplice.nbsp;Parmi la foule immense qui suit Ie glorieux martyr, se distinguentnbsp;sept héroïnes, qui recueillent précieusement les gouttes de sang qninbsp;tombent de ses blessures (2); et comme leurs frères et leurs soeurs denbsp;1’Orient et de l’Occident, elles marquent leur corps de ce sang précieux.

Sublime témoignage de la haute estime qu’on faisait du sang des martyrs! De méme qu’après la Communion, nos héroïques aïeux,nbsp;trempant Ie doigt dans Ie calice, s’oignaient les yeux et les oreillesnbsp;avec Ie sang adorable du Roi des martyrs; de même, par cette onctionnbsp;sanglante, ils communiaient avec ses glorieux imitateurs, soit pournbsp;s’identifier èi leur courage et è leur sacrifice, soit pour se guérir, senbsp;fortifier et s’animer au combat (s).

A qui serait tenté de révoquer en doute ces traits de foi et d’inlré-pidité, paree qu’il ne saurait les coraprendre, je dirai, en premier ^mu : Expliquez-rooi Ie courage des martyrs, et je vous expliquerai Ienbsp;courage des chrétlens. Fallait-il moins d’héroïsme aux premiers pournbsp;cepandre volontairement au milieu des tortures, jusqu’aux dernièresnbsp;gouttes de leur sang, qu’il n’en fallait aux seconds pour les recueillir?

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Suscipientes sanguinem sanclorum in linleaminibus, et purpura, qui sUllabat denbsp;®orum corporibus; aliae vero in sinu suo suscipientes abscondebant, cl veslimcnlanbsp;'tdsslionariorum, qua; erant sanguine infusa sanclorum marlyrum, clarissima; femimcnbsp;^Qiparaverunt multo auro vel gemmis et ornamentis preliosis. MSS. Cod. ex S. Mar.nbsp;^^anstyber.f p. 15.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Sepiem beatissimae mulieres limenles Deum sequebanlur eum, suscipientes guliasnbsp;*aguir,is, qua; ab eo cadebant, el se ipsas ungebaiU. Act. S. Bias., apud Bolland, 51'ebr-

w filiu

tnque perunxit. ld., etc., etc.


Sancla Natalia exlergebat sanguinem beati Adviani, et peruugebat ex eo corpus o®. S«|na. —Cum se venerando unxissenl illius sanguine, lanquam unguenlo pre-oso, consequenter ad mortem conleuderunt. Act. S. Aretce, apud Sur., 2i oct. —Mar-yru aemulaiione accensa (malrona) cilissime accurrens, martyris ipsius Aretse cruore

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512 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

Je dirai, en second lieu, que cette intrépidité sublime, quelqu’iiiex-plicable qu’elle vous paraisse, est un fait constamment reproduit dans tons les siècles, sur tons les points du globe, et que vous pouvez encorenbsp;aujourd’hui voir vous-mêraes de vos yeus. Ici, encore, je suis réduit anbsp;jalonner la demonstration, en me contentant de citer quelques faits.

Lorsqu’en 1127 Ie bienheureux Charles, comle de Flandre, fut martyrisé, un peuple entier d’hommes et de femmes, de vieillards etnbsp;d'enfants se précipitèrent sur Ie lieu oü coulait son précieux sang,nbsp;qu’ils recueillirent dans des linges, employant même des instrumentsnbsp;de fer pour enlever les gouttes qui s’étaient altachées aux pierres (i).

A la voix de saint Fran^ois-Xavier, Ie Japon se converlit, et bienlól Ie feu de la persécution s’allume avec violence. Vingt-six martyrs sontnbsp;crucifiés è la fois sur Ie sommet d’une montagne. Les satellites et lesnbsp;bourreaux forment une barrière redoutable autour des victimes ; lesnbsp;blessures, la mort peut-être seront Ie prix du téméraire qui osera lanbsp;franchir. Vaines terreurs! Comme leurs frères ainés d’Occident, lesnbsp;jeunes chrétiens d’Orient bravent les menaces et les supplices, et re-cueillent avec amour Ie sang des héros, plus précieux, pour eux, quenbsp;la soie, la pourpre, l’or et les pierreries (a).

Enfin, pour fermer la boucbe a l’incrédulité, voici qu’en plein di.x-neuvième siècle, les timides néophytes de la Cochinchine, animés tout è coup d’un courage inconnu, imitent trait pour trait la conduite desnbsp;chrétiens des Catacombes. Le 20 septembre 1837, un de nos héroï-ques missionnaires, M. Cornay, est coupé en morceaux par ordre denbsp;Minh-Mêhn. Trois cents soldats entourent le lieu du supplice,,la foulenbsp;païenne est immense. Un arrêt de mort plane sur toutes les têtesnbsp;chrétiennes. Quel fidéle osera se monteer? Voyez arriver d’abord toutnbsp;ce qu’il y a de plus faible et de plus timide : une vieille servante etnbsp;une religieuse. Les deux héroïnes portent deux nattes, afin d’y rece-voir le sang du martyr; elles osent même recueillir les lambeaux denbsp;chair épars gii et 15. Plusieurs chrétiens se joignent a elles; et commenbsp;une autre religieuse, chargée d’apporter de la chrétienié voisine desnbsp;linges préparés d’avance^ tarde trop, ils imbibent le sang dans tout cenbsp;qui se trouve sous la main, les habits du martyr, des mouchoirs, du

(i) Videres itaque continuo innumerabiles promiscui sexus diversa; ffit.ilis, viros et mulieres certatim undique occurrentcs,sanguinem ejus linteis exlergere et ferramentisnbsp;etiam de pavimento abradere.-— Apud Bolland, 5 marlii.

(4) Licuit cernere circumstaniium christianorum ardoretn, qui per medios satellites, fustuario eorum neglcclo, ad cruces accurrenles, alii, ut sudaria sua martyrum sanguine imbuerent; alii, ut ex veslium limbo aliquid detraherent; alii, ut reliquiarumnbsp;loco aliud aliquid aulerrent. —Apud Bolland, febr., p. 761, n. 100.

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AUDIENCE PONTIFICALE. 313

papier. A ce signal, la foule se précipite pour recueillir aussi quelques gouttes de ce sang précieux; on presse les chairs pour Ten exprimer,nbsp;on creuse même les endróils de la terre oü il s’était écoulé avec abondance (i).

L’empressement des chrétiens a recueillir Ie sang des martyrs est done un fait toujours ancien et loujours nouveau. Nous chercheronsnbsp;demain la raison de ce phénomène unique dans l’histoire.

19 MARS.

Audience pontificale. — Zèle des chrétiens de lous les temps. — Les vases de sang placés auprès des loculi des Catacombes, — ne sont ni des vases lacrymatoires, — ni desnbsp;vases de parfums, — mais des vases de sang. — Ce sang est celui des martyrs. — Lenbsp;vase de sang est le signe infaillible du martyre. — Lettré de M. Raoul Rochelte.

Une seconde audience du Saint-Père suspendit la visite des Cata-corabes. L’excellent Pontife daigna signer de sa main les suppliques assez nombreuses que je lui présentai. Je lui demandai, entre autres,nbsp;des indulgences pour différentes personnes. Cela ne veut pas dire,nbsp;comme le prétendait naguère certain voyageur favorisé d’un semblablenbsp;privilége, par l’enlremise du pénitencier de France, qu’il avait obtenunbsp;la remission de ses péchés et des péchés de sa familie, jusqu’d lanbsp;troisième generation ! Sorti du Vatican, je vinsreprcndre,a la Minerve,nbsp;l’étude de la belle question commencée hier aux Catacombes de Saint-Valentin.

Nous avons vu les chrétiens debout devant les chevalets de la vieille Rome, devant les croix du Japon, devant les poteaux de la Cochin-chlne, recueillant avec empressement le sang de leurs frères. D’oünbsp;vient qu’ils bravaient ainsi la mort, pour avoir le sang des martyrs (2)?nbsp;Quel prix attachaient-ils ü ce sang? Qu’en voulaient-ils faire? Pournbsp;expliquer, dans les catholiques de tous les Sges et de tous les pays,nbsp;ce courage surhumain, il faut, sous peine de folie, recourir i la mêmenbsp;grêce qui communiquait a leurs frères la force de monter gaiment

(0 Annal. de la Prop. de la Foi, n. 63, p. 2öi et suiv.

(s) On en cite un grand nombre qui furent victimes de leur courage. Je nomnierai ®eulemenl les sepl femmes qui suivaienl saint Blaise au martyre; une vierge nommóenbsp;'‘aula, qui, pour avoir voulu recueillir le sang des jeunes martyrs Claudius, Hypaiius,nbsp;Paul et Denys, mêla son sang au leur. — « Comprehensa, virgis cmsa est, et in ignemnbsp;•^onjecta; sed liberata, demum ct ipsa codem loco, ubi Lucillianus crucifixus fuerat,nbsp;‘'ecollata est. — Apud Bolland, ü junii.

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314 LES TllOIS nOME.

sur les buchers el les éebafauds, ou de descendre Iriomphants dans l’arène.

Mais pourquoi dépenser leur intrépidilé è ramasser Ie sang des vic-times? Ce sang valait-il la mort qui en était souvent Ie prix? Oui, et plus que la mort. Dans les martyrs, les chréliens voyaient, ils voientnbsp;eneore, ils verront toujours les continuateurs de la grande Victirae dunbsp;Calvaire, les corédempteurs du monde, les planteurs de l’Église, sesnbsp;soutiens éternels, sa gloire incommunicable (i). Or, dans Ie martyre,nbsp;ce qu’il y a de plus noble, c’est Ie sang; Ie sang qui est tout il la foisnbsp;Ie signe du témoignage, la marque de la rédemption et Ie gage dunbsp;triomphe.

Voili pourquoi Ie monde entier dut en être arrosé; pourquoi Rome, future métropole de la sainteté, dut en être détrempée jusque dansnbsp;ses profondeurs; pourquoi ses enfants, surtout, durent se montrer sinbsp;ardents h Ie recueillir, si soigneux a Ie conserver. Grêce è leur courage intelligent, Rome peut, jusqu’au dernier jour du monde, chanternbsp;sa gloire incomparable. Mère de plusieurs millions de martyrs, sa fé-condité lui donne la première place dans la tendresse du divin Époux,nbsp;et lui assure un titre non contestable aux suprêmes hommages denbsp;l’univers; maitresse de la vérité, elle peut, sans crainte, demandernbsp;pour son symbole, revélu de tant de signatures sanglantes, la filialenbsp;soumission de la foi; car Tintelligence la plus haute peut l’accordernbsp;sans faiblesse, ne peut la refuser sans folie (2).

Ainsi, après Ie sang du Seigneur, il n’y a pas de sang plus précieux que celui des martyrs : telle est la première raison qui explique en lanbsp;justifiant l’héroïque ardeur des chréliens pour l’oblenir. La bonté de

(t) Sanguine mundata uL Ecclesia sanguine ccepit.

Sanguine succrevit, sanguine finis eril.

X. Gruter, in Pohjant. noviss. Til. Jülartijr,

Adimpleo ea qua; desunt, passionum Christi in carne mea. Coloss.^ i, 24.

Manlaverunt Ecclesiam sanguine suo. Brev. Bom., lunoct.. Com. Apost.

(•2) ïla uiia Roma mactandis Chrisii ovibus generale quasi macellum eral, In ea aut imperalores aut prafecti urbis perpetuam christianorum carnificinam exercebanl, Neenbsp;usquam lerrarum chrisUanus sanguis uberius effusus est, quam in una urbe Roma. —nbsp;Stapleton, De Magnitud. Bom. Bedes., c. vi. — Terra ejus colorata est sanguine mar-tyrum et contexla ossibus sanctorum, — S. Brigit., lib. m.

Sancia es, sanctorum prelioso sanguine Roma,

Nunc, nunc justa meis revereniia competil annis,

Nunc Tneriio dicor venerabilis et capul orbis,

........sanctorum sanguine tincta.

Prudent., lib. ii, Contr. Symmach,

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ZÈ1.E DES CHIiÉTIENS DE TOUS LES TEMPS. öl o

Dieu i l’égard des généreux alhlèles de sa gloire, nous en fournit un autre. « Quiconque, disait Ie Roi des martyrs, m’aura confessé devantnbsp;les hommes, je Ie glorifierai devant mon Père et devant les anges (i).»nbsp;Et voilé qu’il accomplit magnifiquement sa promesse. Contrairementnbsp;é l’usage de tous les peuples dont les uns conservèrent avec honneurnbsp;Ie corps entier, les aulres Ie coeur, ceux-la les cendres, mais dont au-cun ne garda Ie sang des morts. Lui, il inspire aux chrétiens de re-cueillir avant tout, et de conserver a part, comme la relique la plusnbsp;précieuse, Ie sang des martyrs (2). Ainsi ont fait les chrétiens de tousnbsp;les pays, de Rome én particulier.

Or, c’est dans les petits vases de verre, de terre ou de bronze, pla-cés é rextérieur des tombes, que ce sang précieux fut déposé. La preuve en est, que ces vases Ie contiennent, et qu’ils Ie montrent encore quelquefois liquide et vermeil; Ie plus souvent concret et adhé-rent aux parois intacles ou brisées (5). Tous les doutes é eet égardnbsp;s’évanouissent devant les faits.

D’abord, quand Ie sang est vermeil, comment dire que ce n’est pas du sang? Ensuite, lorsque Ie sang est concret, il n’est pas un chimistenbsp;qui ne connaisse Ie moyen de Ie rendre a son élat normal, et de s’assu-rer par ses yeux que c’est du sang, et même du sang huraain : on ditnbsp;plus aujourd’hui, on assure que la science peut distinguer si ce qu’onnbsp;lui présente est du sang d’homme ou de femme. Quoi qu’il en soit,nbsp;l’expérience a été faile, je ne sais combien de fois, sur les résidus con-lenus dans nos vases tumulaires, et möme sur les croütes ou teintesnbsp;rougeétres restées aux parois des fragments, et toujours elle a donnénbsp;pour résultat du sang. Je citerai seulement l’expérience faite par unnbsp;homme placé dans les meilleures conditions pour étre cru.

Protestant, philosophe et savant de premier ordre, Leibnitz, sc trouvant a Rome, eul occasion de voir Ie célèbre prélat Fabretli, gar.-dien des Calacombes. La conversation élant tombée sur les vases denbsp;sang des martyrs, Fabretti en donna un fragment a Leibnitz, en luinbsp;disant qu’il pourrait y reconnaitre des traces de sang. Le savant phy-sicien le prit et l’emporta. De retour chez lui, il se livre é l’examen le

(1) Luc, XII, 8.

(s) Di niuna nazione, che io sappia, fu costume di serbare il sangue, fuori de’ pritoi erisliani, che usarono questa notabile dislinzione a’ maniri per alta disposizione delnbsp;vielo, perche volendolo noi, dopo tanli sccoli, ravvisar polessimo in esso il seme dcllanbsp;vauolica crisliana religione, giusia il detlo di Terlulliano : Semen est sanguis, etc. —nbsp;Mazzolari, t. ï, p. xi.

(5) Voyez Boldelti, lib. t, c. xxTiii el xxix.— II est même beaucoup de vases qui por-'ent écrit; Sa, sang. : Sa, sanguis. Id., ibid., e. xxxviu.

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316 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

plus sérieux, et, pour dissiper les doutes, il soumet Ie fragment en question a une expérience dont il raconte en ces terraes les procédésnbsp;et Ie résultat: « J’ai examiné attentivement Ie fragment du vase denbsp;verre apporlé du cimetière de Callixte et teint d’une couleur rougeft-tre, afin de bien distinguer de quelle nature était cette couleur, c’est-a-dire si, comme parlent aujourd’hui les physiciens, elle appartenaitnbsp;au règne animal, ou au règne minéral. 11 m’est venu en pensée d’em-ployer une dissolution de sel ammoniaque, avec de l’eau commune,nbsp;et d’essayer si par ce moyen je pourrais détacher quelque chose dunbsp;verre, et Ie rendre soluble. J’ai réussi sur-le champ et au dela de toutenbsp;espérance. En consequence, j’ai pensé, avec raison, que cette raatièrenbsp;était plutót sanguine que terrestre ou minérale. Celle-ci, en effet,nbsp;douée d’une grande propriété corrosive, aurait, pendant un si longnbsp;espace de temps, pénétré plus profondément dans Ie verre, et n’auraitnbsp;pas cédé si vite è un simple lavage, etc. (i). »

Et maintenant pourquoi les chrétiens ont-ils déposé Ie sang des martyrs dans des vases fixés a l’extérieur du lombeau? G’esl évidem-nieni pour achever d’accoraplir les intentions paternelles du divinnbsp;Maitre et procurer aux martyrs la gloire qui leur était annoncée dèsnbsp;cette vie : Le vase de sang est un signe. Monument authentique d’unenbsp;glorieuse confession, il fut placé extérieurement au loculus, pour dé-signer le héros de la foi a toutes les générations qui devaient venir,nbsp;des quatre coins du monde, visiter les merveilles de la Rome souter-raine : cette attente n’a pas été dégue. Après les pieux fondateurs etnbsp;les zélés habitants des Catacombes, la grande Cité des martyrs a vunbsp;tour il tour les pontifes, les rois, les évêques, les fidèles de tous lesnbsp;siècles, se prosterner par millions devant ce sang précieux. Qui diranbsp;les hommages dont il fut, dont il est environné, soit dans l’obscuriténbsp;de nos cryptes vénérables, soit au grand jour, sur les brillants autelsnbsp;de nos Basiliques? les larmes pieuses qu’il fit répandre, les noblesnbsp;sentiments qu’il inspira; en un mot, la gloire qu’il n’a cessé de procurer aux martyrs dont il signale l’auguste et sainte présence?

(i) Frustum phialse vitrese ex coemeterio Callixti allatum rubidine linctuta examinavi non nihil, ut facilius discerni posset cujus ea generts esset, el utrum, ut physici hodienbsp;loquuntur, ex regno animali,an poluis minerali essel profecla. Et venit mihi in mententnbsp;utisolutione salts ammoniaci, ut vocant,in aquacomntuni attentarc, uti ejus ope aliquidnbsp;e vitro separari, alque clui posset, ld vero subilo, et supra spem successit. Indequenbsp;nala nobis merilo suspicio esse sanguineam potius materiam, quam lerrestrem, seunbsp;mineralem, qu® vi corrosiva pratdiia, lanto tempore altius in vitrum foriassc descen-disset, nee lixivio tam subilo cessisset, etc__Apud Fabrelti, Inscript. antiq., c. vut.

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LE VASE DE SANG, SIGNE CERTAIN DU MABTYRE. nbsp;nbsp;nbsp;317

En effet, les actes primitifs des martyrs, les témoignages des saints Pères, l’histoire des fouilles exécutées dans les Catacombes, c’est-a-dipe la tradition tont entière; enfin, l’autorité de TÉglise, nous fontnbsp;connailre avee évidence l’intention des premiers chrétiens, et nous ap-prenUent que Ie vase de sang, placé auprès d’un loculus de la Romenbsp;souterraine, fut toujours regardé corome Ie signe indubitable dunbsp;martyre.

Je n’entreprendrai pas de citer les fails contenus dans les Actes qui racontent avec une candeur si touchante les interrogatoires, la mort etnbsp;la sépulture des héros de la foi. 11 faudrait pour cela répéter quel-ques-uns des renseignements déja donnés plus haut; il faudrait citernbsp;Boldetti depuis Ie chapilre xxvi, jusqu’au xxxix de son premier livre,nbsp;c’est-a-dire, quatre-vingt-sept pages in-folio; il faudrait rapporter Ienbsp;nombre infini de témoignages répandus dans les Actes publiés par lesnbsp;Bollandistes; il faudrait transcrire les Actes du martyre de saintnbsp;Cyprien, par Don Ruinart; ceux des martyrs d’Oslie, par de Maislre;nbsp;ceux de sainte Cécile, par Laderchi, el beaucoup d’aulres. Par la onnbsp;peut juger s’il est un point d’histoire appuyé sur un plus grand nombre de documents dignes de foi (i).

Quant aux Pères de l’Église, nous voyons d’abord que, bien peu de temps après les persécutions, saint Hilaire disait en général : « Par-tout OU a recueilli Ie sang des bienheureux martyrs, et leurs ossemenlsnbsp;vénérables offrent journellement un témoignage {2). Puis il rapportenbsp;les miracles qui s’opéraient aux tombeaux des martyrs.

Prudence, qui publia ses poésies en Pan 405 de notre ère, admire Ie courage des fidèles a recueillir Ie sang de leurs frères, et dit posi-tiveraent qu’ils avaient pour but de laisser a la postérité une preuvenbsp;réelle et évidente de leur martyre. Déja nous l’avons entendu révélernbsp;cette intention, en célébrant Ie triomphe de saint Hippolyte; écoutonsnbsp;ce qu’il en dit dans l’hymne de saint Vincent : « Voyez accourir denbsp;la ville Ia foule des fidèles; ils s’empressent autour de ce corps dé-chiré; les uns l’élendenl sur une couche d’herbes molles; d’autres ferment les blessures saignantes. Celui-ci parcourt de ses baisers lesnom-breux sillons placés sur ce corps par les ongles de fer; celui-lè nenbsp;répugne point a lécher la plaie sanglante du saint martyr. La plupart,nbsp;bumeclanl des linges du sang qui s’est répandu, ou qui dégoutte en-

(1) Le P. Secchi, Lettres sur Ie Martyre de saint Sabinian.

{2) Sanctus ubique bealorum martyrum sanguis exceptus est, et veneranda ossa 9Uüiidie testimonio sunt. Contr. Const, imp., c. viii, t. ii, 567.

T. IV. 44

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318 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

core, veulent Ie conserver chez eux comme une source de grice et de vertu pourleurs enfants (i). »

Saint Augustin, qui rapporte Ie même fait, est encore plus explicite : « On voit ensuite la foule des assistants s’empresser autour du corpsnbsp;lacéré, couvrir ses plaies de leurs baisers, les examiner avec compassion, recueillir avec des linges son sang, relique pour la postérité,nbsp;vénérable et tutélaire (2). »

Après saint Augustin, viennent saint Ambroise, et saint Gaudence, évêque de Brescia. Le premier, parlant de l’heureuse découverte dunbsp;tombeau et des restes mortels des deux saints martyrs Vital et Agricola, s’exprime ainsi : « Nous y avons trouvé le sang versé pour la foi,nbsp;ou plutót le sang de leur triomphe (3). Puis, lorsqu’il vient ii découvrirnbsp;les corps des saints Gervais et Protais, il aliirme également qu’il a trouvénbsp;le sang, signe de leur martyre : « J’ai trouvé tout ce qu’on pouvaitnbsp;espérer dans une telle découverte, les squelettes entiers et beaucoupnbsp;de sang (4). »

Mais afin qu’il nous soit clairement démontré que ce sang était celui qui fut recueilli it leur martyre, écoutons saint Gaudence, contemporain de cette découverte : « Nous avons les bienheureux martyrs Gervais, Protais et Nazaire qui ont daigné révéler leurs dépouilles mortellesnbsp;au saint prêtre Ambroise, dans la ville de Milan, il y a pen d’années.nbsp;Nous possédons leur sang recueilli dans un vase; ne demandons rien

(1) Coire toto ex oppido Turbam fidelem cerneres.

Mollire prafultum torum,

Siccare cruda vulnera.

Ille ungularumduplices Sulcos pererrat osculls •

Hic purpuranlem corporis Gaudet cruorem lambere.

Plerique veslem linleam,

Stillante tingunt sanguine Testamen ut sacrum suisnbsp;Domi reservent posteris.

Peristeph., hymn, v, 335.

(j) 'Vidcfis circumslanlium frequcntiam sancti vestigia certatim deosculando prolam-bere, vulnera totius laceri corporis pia curiositate palpare, sanguinem linteis excipcre sacra veneratione posteris proiuiurum. — Apud Ruinart.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Collegitnus sanguinem triumphalem. Exhort, ad Yirg.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Inveni signa convenientia, ossa omnia integra et pliirimum sanguinis. Episl.,nbsp;Fib. vn, epip. tiv.


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tE VASE »E SANG, SIGNE CERTAIN DU MARTÏRE. nbsp;nbsp;nbsp;319

de plus, car nous avons Ie sang qui est Ie tèmoignage de leur passion (»). B

II serail facile de multiplier ces témoignages; mais venous aux fouilles des Catacombes, afin de démontrer, par quelques fails locaux,nbsp;que Ie vase de sang ne peut êlre que Ie signe du martyre. Ces petitsnbsp;vases, qui annoncent souvent une extréme pauvreté, nullement en harmonie avec la dépense de parfums ou de substances balsamiques, senbsp;trouvent toujours scellés dans Ie tuf a l’extérieur du sépulcre. Or, onnbsp;neles voit qu’aux loculi des martyrs.

La preuve en est; Iquot; qu’on les a rencoiftrés prés d’un grand nombre de tombeaux qui appartiennent certainement a des martyrs. Done cesnbsp;vases de sang ont partout la même signification, autrement ils nenbsp;seraient plus un signe. Ainsi, Ie corps de saint Primilivus, sur la pierrenbsp;sépulcrale duqiiel on lit celle inscription : « post. multas, angustïas.nbsp;FORTissiMus. martyr. » fut irouvé avec Ie vase qui contenait son précieuxnbsp;sang. Le même fait s’esl reproduit en 1723, lorsque, sous Ie maitrenbsp;autel de la Basilique de Sainl-Gléraenl, on découvrit le corps de Flavius Clemens, homme consulaire et martyr chrétien. La pierre tombalenbsp;porte le litre de martyr, et l’intérieur du loculus renferme la fiole denbsp;son sang. Une autre inscription antique rapporte également que sousnbsp;I’autel de saint Alexis, sur I’Aventin, le sang du saint martyr Bonifacenbsp;est conservé dans son vase (2). Un ange étant apparu au saint évêquenbsp;Sabinus, afin de lui révéler le corps de saint Antonin martyr, lui donnanbsp;pour indice le vase rempli de sang, placé prés du généreux confes-seur (3).

On n’en finirait pas si Pon voulait rapporter tous les fitits du même genre que fournit l’histoire des Catacombes. Terminons en ajoutantnbsp;que des preuves écrites viennent se joindre h ces fails positifs. Lesnbsp;premiers chrétiens prirent quelquefois le soin, inutile alors, mais de-venu fort précieux pour nous, d’inscrire sur le ciment avec leqiiel lesnbsp;petits vases étaient scellés au tuf, le mot sanguis abrégé en sa surraonténbsp;d’un trait. On écrivait sa satvrnii pour sangvis satvrnini ; ou plus aunbsp;long SANG, qui ne peut s’interpréter que par sanguis [*). Si 1’on voulait

(1) Hahemus Gervasium, Protasium atque Nazarium beatissimos martyres, qui se aate paucos annos apud urbem Mediolanensem sanclo sacerdoti Ambrosio revelarenbsp;dignati sunl. Quorum sanguinem tenemus gypso collectum, nihil amplius requirentes;nbsp;•enemus enim sanguinem qui testis est passionis. Ser. in Dedicat. Bas. SS. 40 Martyr.

(a) Lupi, Epitaph. Ser. Martyr, xxxil.

(5) Cum capile abscisso urceum quoque ejtts sanguine plenum in testimonium, — S. Anton., pars ii,c. xiv, lit. IS.

(*) Voyet Bosio, lib. iii, o. %\i; Boldetti. lih. i, c, xxxix; Mamarhi, Origin, et An-quot;'9-. etc., t. I, p. 462.

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320 LES TROIS ROME.

y voir en abrégé Ie mot sanctcs, ce serait montrer une grande ignorance des monuments chrétiens les plus anciens, qui ne joignent jamais ce litre au nom des martyrs.

La preuve en est : 2° que Ie vase de sang ne se trouve jamais dans les galeries des Catacombes ouvertes pour la sépulture des fidèles,nbsp;postérieureraent aux persécutions. L’observateur Ie plus judicieux denbsp;la Rome souterralne, Boldeiti donne en ces termes Ie résultat de sanbsp;longue expérience : « En 1716, j’explorais les Catacombes de Sainte-\gnès. Ayant fait commencer les travaux par mes fossoyeurs, on atta-qua plusieurs galeries, rempWes de terre depuis Ie sol jusqu’a la voute.nbsp;Nous trouvames jusqu’a douze loculi superposés les uns aux autres,nbsp;tous bien fermés avec des briques ou avec des tables de marbre. Plusieurs avaient des inscriptions grecques etlatines; mais dans aucunnbsp;de ces tombeaux je ne pus trouver un vase de sang ou une palme, signesnbsp;caracléristiques du martyre.

» J’allai plus loin; afin de m’assurer pleinement si quelque vase de sang ne serait point ren ferme dans l’inlérieur des loculi, ce qui arrivenbsp;quelquefois (t), je lis ouvrir sous mes yeux, en un seul jour, environnbsp;cent de ces tombeaux. Or, il me fut impossible d’y reconnaitre aucunnbsp;signe du martyre. Je m’assurai par la que celle partie des Catacombesnbsp;était postérieure aux persécutions : l’hisloire vint confirmer mon juge-ment. Elle m’apprend, en effet, que cette partie du cimetière de Sainte-Agnès date du règne de Constantin, et méme d’une époque immédia-tement postérieure.

» De ce fait important, dont je fus téraoin oculaire, je tirai une conclusion évidente et du plus haul intérêt. Si les premiers chrétiens, qui touchaient aux persécutions, se sont abslenus si scrupuleusement denbsp;marquer cette multitude de tombeaux avec la palme ou Ie vase de sang,nbsp;comrae ils auraient pu Ie faire si fac.ilement: n’est-ce pas une preuvenbsp;péremploire que les tombes accompagnées de ces signes distinctifs,nbsp;renferment les corps des généreux athlètes qui répandirent leur sangnbsp;pour Jésus-Christ, el qui remportèrent dans un glorieux combat lanbsp;palme de l’immortalité? Si de tels signes n’étaient pas les emblèmesnbsp;du martyre, d’oü vient que les chrétiens ne les auraient pas gravés surnbsp;les tombes de le.urs amis el de leurs parents? Contemporains des persécutions, Ills et frères de martyrs, ils n’étaient pas moins religieuxnbsp;que leurs pères avec lesquels ils avaient vécu; ils connaissaient parfai-tement leurs rils et leurs usages; de plus, la paix dont ils jouissaient

(i) Come alcuna volta è succeduto riirovarvela. — Cette exception ne fait que metlre en evidence la règlc constante de placer Ie signe du martyre a l’exlêrieur du loculus.

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LE VASE DE SANG, SIGNE CERTAIN DU MARTYRE. nbsp;nbsp;nbsp;321

leur permettait de manifesler librement les témoignages de leur ten-dresse, elle leur en rendait les moyens faciles. lis ont placé sur la tombe de leurs morts des inscriptions, des tables de pierre et de mar-bre, auraient-ils manqué d’y joindre des palmes et des vases de sang,nbsp;si ce double signe n’avait été qu’iin témoignage d’affeclion et de reconnaissance? Pourtant ils ne Tont jamais fait : que conduce de la?nbsp;sinon évidemment que la palme el Ie vase de sang étaient i leurs yeuxnbsp;les signes distinclifs du marlyre (i). »

Après des preuves si solides, après tant de témoignages irrécusa-bles, ne faudrait-il pas nier l’évidence pour refuser d’admettre comme martyrs les premiers chrétiens, dont la tombe se distingue par ce signenbsp;réservé? Libre de se donner un pareil ridicule a certains hommes quinbsp;n’ont peut-être jamais vu de tombes païennes, qui n’ont pas été anbsp;même d’étudier les sépultures grecques, étrusques, romaines, et encorenbsp;moins nos Catacombes. Quant aux savants vraiment dignes de ce nom,nbsp;ils seront toujours unanimes a reconnaitre qu’en proclamant Ie vasenbsp;de sang comme Ie signe indubitable du martyre, TÉglise est Ie fidélenbsp;organe de la raison, de l’histoire, de la science, de la tradition constante de dix-huit siècles (2).

C’est ce que fit, a l’exemple de tant d’autres, Thomme Ie plus savant et Ie plus modeste du siècle de Louis XIV, Mabillon (3). C’est ce que venait de faire, quelques mois avant notre séjour a Rome, un denbsp;nos honorables compalriotes, M. Raoul-Rochetle, secrétaire perpétuelnbsp;de PAcadémie des Beaux-Arts, membre de l’Académie des Inscriptions, etc. Sa lettre, publiée depuis dans les journaux de France etnbsp;d’Italie, fait Ie plus grand honneur è ce célèbre archéologue; car ellenbsp;montre h la fois sa loyauté, son amour pour la vérité et son respectnbsp;pour l’autorité de l’Église (a).

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Boldetli, lib. 1, c. 11, p. 8.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;Voir plus haul Ie décrel du Saint-Slége, cilé en parlant de la palme; — Voir aussinbsp;Boldetti, lib. i, c. xxx, p. 145; et c. xxxi, p. 154.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Ejusmodi ampullas sanguine linclas, martyruni sacrarurnrelinquiarum certissimanbsp;indicia esse. Epist. ad Euseb., 2 edit., 49.

{4) Voici cetie lettre adressée au savant Père Secchi, de la Compagnie de Jésus :

Paris, Ie G aoüt 1841.


« Mod reverend Père,


» Je viens de recevoir d’une main amie voire Dissertation d’Archéologie chrétienne, publiée a Toccasion de la découverte du corps de saint Sabinianus, martyr, et je ne'puisnbsp;ui’empécher de vous laire part de l'intérét avec lequel j’ai lu celte nouvelle productionnbsp;de voire plume savanie. J’ai d ailleurs un autre motif pour vous faire celte communi-tution, qui vous paraitrait peut-être indiscrete, si elle n’avait pour objel que de donner

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1.ES IKOIS «OME.

25 MARS.

Lc marlyre suffit pour la canonisation. — Surveillance des Calaconibes. — Exlraclion de deux corps de martyrs dans les Catacombes de Sainte-Priscille. — Soin des rcli-ques. — Saintelé des Cauacombes. —Nombre des martyrs de 1’Église en general, denbsp;Uomc en particulier (note). — Adietix aux Catacombes et a Rome.

Une grande joie, je dirais volonliers un grand événement, nous était i'éseryée pour aujourd’hui: nous devions assister i l’extraction de deu.x

des éloges a volrc travail rc’cst l’occasion toule naturelle qu’elle mefournitde réparcr une faule que j’ai commisc, et que vous avez jusiement relevée. II s’agil du vase dcnbsp;verre, en forme de lacrymaloire, sccUé a Textérieur de la niche sépulcrale, et rcgardcnbsp;dans les Catacombes chréliennes, comine un signe indubitable du martyre. En conies-ia\ii ce point d’archéologie chréliennc,jen’avais pas suffisammenl, j’en faisraveusansnbsp;la moindre peine, pesé les circonslances qui accompagnenl ordinaircniont I’inserlionnbsp;du vase en question, et qui ne peuvent pas ne point se rapporter a une toute autre intention que celle des vases a parfums deposes dans Ie sein dc la tombe, consequemmentnbsp;dans Tintérieur de la niche, loculus. Cette distinction scule, appréciée, comme clle de'nbsp;vail rêlre,eötsuffi pour prévenir la meprise ou je suis tombé; et les lémoignages denbsp;rhistoire ecclésiaslique, sur l’usage des fidèles de recueillir, par lous les moyens quinbsp;ctaient en leur pouvoir,Ie sang des martyrs, ces lémoignages auxquels vous avez ajouténbsp;des citations nouvelles tont aussi digncs de foi, auraient dü dissiper entièrement mesnbsp;doutes.

» Maintenant, mon réyérend Père, il ne subsiste plus, apres avoir lu, aucun de ces doutes dans mon esprit; rassentiment, que je donne a vos idees est complet et sansnbsp;réserve; et c’est surtout pour vous adresser eet aveu et ceitc reparation de ma faute,nbsp;que j’ai pris la plume, encore plus que pour vous procurer la vaine satisfaction de louernbsp;Ie savoir et la sagacité qui règnenl dans toute volre Disserialion. Après cetle declaration,nbsp;qui est assurément bien spontanée de ma part, bien que, d’après quelques mots oünbsp;j’ai cru me reconnaitre, p. 12, elle fut, en quelque sorle, devenue nécessaire, vous menbsp;permetlrez, mon révérend Père, de vous dire que j’avais déja retire une opinion quinbsp;m’avait toujours laissé de grands scrupules; car voici comment je m’exprimais, p. 2oonbsp;de Tédition originale de mon Tableau des CMacombes, public a Paris en 1837. a Lesnbsp;» vases de verres peints sont au premier rang des objets d’antiquité chrétienne qu’onnbsp;» a recueillis dans les Catacombes. Sans parlor de ceux dc la forme dke vulgairementnbsp;» lacrymaloire, qui servirent, dans l’opinion commune des antiquaires romains, a re-» cueillir Ie sang des martyrs, et qui ont acquis, k ce litre, sous Ie nom d'ampolla dinbsp;» sanrjue, une si grande importance religieuse, il en est d’autres, etc. »

» J’énoncais ainsi, sans Ie contester, l’usage auquel on est convenu de rapporter les vases dont il s'agit, et, pav ces molds, je m’absienais d’en parler comme des auiresnbsp;objets d’antiquilé chrétienne dérivés plus ou moiris direciemenl d’une coulume profane, avec lesquels Vampolla di sangue, comme objctessentiellement sacré, ne pouvaitnbsp;avoir Ie moindre rapport. Telle était done déja mon opinion; mais elle avail besoinnbsp;d’etre et plus solidement élabiie au dedans de moi-méme, comme elle 1’est maintenant,nbsp;grilee a vous, mon révérend Père, et plus- fornielleinenl expiimée pour les autres,nbsp;comme je Ie fais aussi main-tenant, en vous adressant ceite déclaration, dont vous fcrez,nbsp;mon révérend Père, 1 usage que vous jugerez convenable.

» Excusez, mon révérend Père, la Uberié que j’ai prise, et veuillez agréerPhommage de mon respect.

» r\AOUL-UOCHETTE. »

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LE MAUTïRE SLTFIT 1’OLR LA CANONISATION. 325

corps de martyrs, dans les Catacombes. Avant de raconter cette déli-cieuse circonsiance de notre pèlerinage dans la Rome souterraine, il faut exposer la conséquence qui résulle de ce que nous avons dit lesnbsp;jours précédents. Deux faits ont élé constates : l’extrême sollicitudenbsp;des Souverains Pontifes pour avoir les Actes des martyrs, Ie zèle pro-digieux des fidèles a visiter les confesseurs dans leurs prisons, a lesnbsp;accompagner au lieu du supplice, et a recueillir leur sang. Quellenbsp;conclusion faut-il tirer de ce double fait? En d’aulres lerraes ; que senbsp;passait-il après la mort des victimes? Quelle autorité faisait placer lesnbsp;signes du martyre auprès de leur tombe? Comment savons-nous qu’ilnbsp;n’y eut, dans ce placement, ni fraude ni méprise, et que la palme etnbsp;Ie vase de sang sulBsent, amp; eux seuls, indépendamment de tout miracle, pour autoriser Ie culte religieux des martyrs? Répondre, par desnbsp;faits, è ces différentes questions, c’est révéler l’admirable sagesse denbsp;I’Église, en puisant, amp; pleines mains, dans les trésors, trop peu con-nus, de notre vénérable antiquité.

Lors done que les chrétiens, témoins intrépides du martyre de leurs frères, avaient recueilli leur sang avec des linges et des éponges, ilsnbsp;1’exprimaient dans de petits vaisseaux de verre, de terre ou de toulenbsp;autre matière imperméable. Les monuments primitifs vont plus loin;nbsp;ils nous les montrent, emportant eux-mêmes les restes muiilés des victimes et les déposant, de leurs proprés mains, ou les confiant aux Fos-soyeurs, pour les déposer daiis les loculi des Catacombes. Avec Ienbsp;corps du martyr, ils apportaient Ie vase de són sang; ou, s’il était mortnbsp;d’une manière non sanglante, la deposition authentique de son martyre. II n’est pas une galerie de la Rome souterraine qui ne rendenbsp;témoignage de ce fait mille et mille fois répété.

Cependant, par cela seul qu’ils avaient été témoins de la mort de leur frère, les chrétiens pouvaient-ils, de leur autorité privée, apposernbsp;sur sa tombe les signes du martyre? Non, assurémenl; un acte de cettenbsp;nature entrainait Ie culte religieux, car il était Ia canonisation du dé-funt (i). Or, Ie pouvoir ecclésiastique est seul compétent en pareillenbsp;matière. Avant de placer Ie vase de sang auprès de la tombe, ou denbsp;graver la palme sur la pierre sépulcrale, Ie pouvoir ecclésiastique pou-vait et devait done être consullé. Qu’il en fut ainsi, Ie bon sens Ie de-vine, avant que les témoignages authentiques Ie démontrent.

Le zèle des évêques d’Asie, d’Afrique, d’Orient et d’Occident, pour

(i) Honor tributus marlyribus in Ecclesia primitiva... pars quidam religionis fuil, cl quin cuhum religiosum involverit, nibii csl dubilandum. — Bini, Dissert. II, de Litter.nbsp;Encycl., c. Il, apud Bened. XIV, de Beatif., c. ni.

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524 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

avoir les Actes des Martyrs, n’est un mystère pour personne. Témoin VHistoire d’Eusèbe, les Lettres des Eglises de Vienne et de Stnyrne,nbsp;la Biographie de saint Cyprien, écrite par son diacre Pontius (i). 11nbsp;est permis de croire que ce zèle prit une nouvelle activité, lors-qu’en 238 Ie pape saint Fabien ordonna è tous ses collègues dansnbsp;1’épiscopat de s’occuper avec Ie plus grand soin de reeueillir ces pré-cieux monuments (2). D’ailleurs, en ceci, comrae dans lout Ie reste, lesnbsp;Pontifes Remains étaient les premiers a donner l’exemple. Nous avonsnbsp;vu saint Clément établir, dans les différents quartiers de Rome, desnbsp;notaires spécialement chargés de reeueillir tous les renseignementsnbsp;les plus minutieux sur les martyrs. En 237, nous voyons Ie pape saintnbsp;Antère se laisser conduire au supplice plutót que de livrer ces Actesnbsp;vénérables dont l’Église de Rome possédait la collection depuis sonnbsp;établissement (5).

Or, quel était l’objet de cette sollicitude universelle? N’est-il pas évident que tant de précautions, tant de recherches avaient pour butnbsp;de faire connaitre les vrais martyrs, d’éclairer l’autorité compétente.nbsp;et de préparer son jugement? L’histoire inlerrogée répond qu’il ennbsp;est ainsi. Dans certaines parties de la chrétienté, c’étaient les Évêquesnbsp;seuls en synode; ailleurs, c’étaient les Primats qui prononjaient lanbsp;sentence qui devait offrir un saint de plus a la vénération des fidè-les {*). Avant cette décision, il n’était permis è personne d’honorer un

(0 Testalur moribus jam receplum fuisse, ut non solum nobilium, sed eliam ple-beiorum marlyria adnolarenlur : « Ut cum majores nostri plebeiis el calechumenis mariyrium conseculis tantum honoris pro martyrii ipsius veneratione dederunt. Ut denbsp;passionibus eorum muUa, aut prope dixerim penecuncla conscripserint, uladnostramnbsp;quoque notiliam,qui nondum nati fueramus, pervenirent. — N. 1, apud Bened. XIV,nbsp;ubi supra.

(2) nbsp;nbsp;nbsp;In sua prima epistola decretali episcopos admonet ut colleclioni Acluum martyrumnbsp;invigilent; quod etiam vos ornnes agere monemus; et deinde prrecipit: et ideo fidelissi-mis hsec negolia commiiti priecipimus, ne aliqua in eis illusio invenialur, — Apudnbsp;Bened. XIV, ibid.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Acla martyrum quse a notarüs excipi et scriptis fideliier mandarj Clemens jusserat,nbsp;ab iisdem diligenter exquisivit, ac ne interirent, neve ah ethnicis corruraperentur, innbsp;Ecclesiae labulario voluit reponi. Quamobrem a Maximo praiieclo ad mortem dalusest.nbsp;— Euseb., lib. vj; Bar., An. 258; Sandini, Vit. Pontif., p. 54; Bened. XIV, ubi supra.

{4) Voyez Bellar., De sanct. Beatif., lib. i, c. viii; Lupus, In Notis ad iv ConcH. Rom., l. Ill, p. 563; Suarez, In ISolis ad S. Lini Oper., p. 703; Du Saussay, In Apol. Theolog.nbsp;pro sanct. Culm, p. 33^ calcem Martyr, gallican.—Le savant évéque s’expriraenbsp;ainsi: Verum ex seleciiori venerandie antiquitatis penu, quin et exquisitlori Palrumnbsp;testimonio, hoe jus non iia passim creditum, sed majoribus praelalis dunlaxat conccs-sum fuisse, certo liquidius apparet. Moris enim eral ut cum aliquis marlyrio occubuis-set, rem gestam scriberet Episcopus, sub cujus ditione boe accidissei, ad Primaiumnbsp;Episcopum a quo mature adhibitis in concilium Episcopis, an inter mariyres is esset

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LE MARTÏRE SÜFFIT POÜR LA CANONISATION. nbsp;nbsp;nbsp;525

maMyr d’un culte religieux, par conséquent de distinguer sa tombe des signes du triomphe. La-dessus, nous avons un témoignage qui tranche péremptoirement la question. Une dame fort riche, nommée Lucille, fut surprise par l’archidiacre noramé Cécilius, baisant, avant lanbsp;Communion, l’os d’un martyr non encore approuvé par l’autoriténbsp;compétente. Le Diacre la reprit fortement, et, dans sa colère, elle senbsp;sépara de l’Église (i).

Telle était la discipline invariable des chrétientés particulières, en Orient et en Occident. Rome tiendra-t-elle une conduite dilférente?nbsp;La maitresse des Églises foulera-t-elle aux pieds des régies si sages,nbsp;en abandonnant aux simples fidèles un droit sacré qui ne peut appar-tenir qu’é i’autorité suprème? Pour avoir l’orabre d’un doute sur cenbsp;point, il faudrait suppbser dans les Papes des trois premiers sièclesnbsp;une absence totale de bon sens, de probité, de zèle. On sait pourtantnbsp;que le monde ne connait rien de plus sage que leurs paroles, rien denbsp;plus pur que leur vie, rien de plus héroïque que leur mort.

Dès l’origine, ils établissent, dans Rome, un corps de notaires qui, de concert avec les Diacres régionnaires et les Sous-Diacres, sontnbsp;chargés de recueillir tous les renseignements sur les martyrs; plusnbsp;tard, nous les voyons eux-mêmes mourir au milieu des tortures plutótnbsp;que de livrer aux persécuteurs la collection de ces monuments véné-rables. Or, pourquoi tant de sollicitude? !N’ést-il pas évident qu’iinbsp;Rome, aussi bien que dans les autres églises, ces investigations avaieninbsp;pour but de faire connaitre la vie des martyrs et de constater leurnbsp;mort pour Ia foi? Si done, dans toutes les Églises d’Orient et d’Occi-dent, tous ces renseignements formaient les pièces du procés, dont lenbsp;jugement était réservé a l’autorité ecclésiastique, ne faut-il pas ennbsp;conclure qu’a Rome ils avaienl la même destination? Or, nous le sa-vons, le signe par lequel Rome distinguait les martyrs, c’est-d-dire.

recipiendus, decernebatur. — Saint Augustin confirme ce sentiment, In Breviculo Col-lationum cnm Donastisiis Coll. m, c. xiii. ludiquant l’ordre et la manicre suivant les-quels les Acles des martyrs devaient êlre transmis au Primal,il dit: « Recitarunteliam rescripta Secundi Tingitani ad eumdem Mensurium pacifice data, ubi el ipse narravitnbsp;in Numidia persecuiores quidegerint, el qui comprenbensi, et niulla mala passi et giwnbsp;¦vissimis suppliciis excruciali et occisi sunl, cosque honorandos pro marlyrii sui meritunbsp;commendavit, tandem eos non iradidisse Scripluras sanctas. »

(i) Cnm correptionem arcbidiaconi Caeciliani lorre non posset quse ante spiritualem cibum'el polum os nescio cujus martyris, si tarnen martyris libere dicebaiur, etcumnbsp;praiponeret os nescio cujus liominis moriui, etsi martyris, sed nondum vindicati, cor-^epta cum confusione irala recessit.— Opl. Milev., iib. i, Adv. Parmen. — Vindicatosnbsp;volebant martyres, id est ah Episcopis agnilos el approbates. — Mabill., Prt^J. innbsp;•SecM/. V, Ordin. S. Bened.; Benedict. XIV, l)e Beatif., c. ii.

14.

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3:26 nbsp;nbsp;nbsp;LES TKOis r.osiE.

les désignait au culte religieus de leurs frères, et leur assurait celui de la postérité, c’était Ie placement du \ase de sang auprès de lenrnbsp;tombe. Lh, venaient aboutir tons les renseignements, tontes les pré-cautions, toutes les recherches des Ponlifes? Et l’on pourrait snppo-ser que ces mêmes Pontifes, oubliant tout a coup leur sollicitude, ontnbsp;négligé eet acte décisif, et laissé a l’arbitraire des particuliers Ie droitnbsp;de placer auprès des tombeaux Ie signe authentique du marlyre? Oünbsp;serait leur bon sens?

II y a plus; tenir une pareille conduite, n’était-ce pas renverser toute hiérarehie, et concéder aux brebis un ministère qui ne peut ap-partenir qu’aux pasteurs? N’était-ce pas miner publiquement la foi etnbsp;la confiance aux martyrs? Tandis que tous les Évêques du monde au-raient pris tant de précautions pour s’assurer de la réalité du mar-tyre, qu’ils se seraient réservé a eux seuls Ie droit de prononcer surnbsp;cette grave question, en défendant toute espèce de culte avaut leurnbsp;décision ; les chefs et les modèles de tous les Évêques auraient aban-donné Ie jugement de la mème cause aux simples lumières de lanbsp;foule! Peut-on admeltre une pareille anomalie? N’était-ce pas exposer les fidèles contemporains è donner dans de graves méprises, et anbsp;retomber, en houorant des personnes indignes de leur culte, dans lesnbsp;superstitions pour l’abolition desquelles ils mourraient? N’était-cenbsp;pas y condamner, matériellement du moins, toutes les générationsnbsp;futures? Et les Vicaires de Jésus-Christ auraient fait cela? Oü seraitnbsp;leur probité?

Coupables d’une pareille félonie, ils auraient d’autant moins d’ex-cuse, qu’il leur était plus facile qu’aux autres Évêques de remplir ce devoir sacré de leur charge pastorale. Tont se réduisait è constater Ienbsp;fait du martyre, c’est-a-dire, la mort et la mort endurée pour la foi.nbsp;A instruire ce proces de canonisation, quelques instants suffisaient.nbsp;Les délégués de l’autorité Pontificale, les Prêtres, les Diacres, lesnbsp;Sous-Diacres, les Notaires, les Fossoyeurs, les Gardiens des Gatacom-bes, si bien nommés Cubicularn, c’est-ü-dire, chambellans des martyrs, se trouvaient habituellement, durant les persécutions, dans lesnbsp;différents quartiers de la Rome souterraine. Les Papes eux-mêmes lesnbsp;babitèrent tour è tour, et cela pendant de longues années (i).

Or, on est dans Ie feu de la persécution; des victimes viennent d’êlre immolées : les chrétiens ont recueilli leurs restes précieux. A la faveur des ténèbres, ils les descendent dans les Gatacombes. « Quel est

(t) Voyez Barr., An., depuis Van 60 a l’an 306; Sandini, Vit. Poiitif.; Bosio, lant de tuis citc dans VHistoii e des Calacombes, ctc.

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INVESTIGATIONS POUR RECONNAITRE LES MARTYRS.

celui que vous apportez, demande ou le Pape lui-mêrae, ou quelqu’on de ses représentants? — C’est un de nos frères..— Comment le savez-vous? — Nous Pavons visité dans les fers, nous I’avons suivi devantnbsp;les juges, nous I’avons accompagné au pied de l’échafaud. — L’avez-V’ous entendu condamner? — Nous avons entendu sa sentence; il anbsp;été condamné, paree qu’il élait chrélien. — Comment esCil mort?nbsp;— II ne s’est point démenti; il est mort pour la foi : voici Ie vase denbsp;son sang. » Indépendamment des détails circonstanciés, fournis parnbsp;les Notaires, les Diacres ou les Diaconesses, telle est, en peu de mots,nbsp;la deposition.

L’événement s’est passé au grand jour; les témoins sont nombreux, irréprochables. D’une part, ils ont exposé leur vie pour acquérir lanbsp;certitude du fait donl ils déposent; d’autre part, ils présentent, de cenbsp;fait même, la preuve palpable, le vase de sang. Quelle apparence qu’ilsnbsp;veuillent se rendre coupables d’une sacrilege imposture, eux qui, de-main peut-être martyrs a leur tour, paraitront devant Ie Souverainnbsp;Juge? Mais, quand ils le voudraient, le pourraient-ils? Parmi tant denbsp;voix, il ne s’en élèverait pas une pour démasquer ie mensonge? Con-venons plutót que jamais témoignage ne fut rendu dans des circon-stances plus solennelles et par des témoins plus intègres. Par la double preuve de la déposition et du vase de sang, le fait du martyre estnbsp;constaté ; l’autorité prononce. Marquée du signe triomplial, la tombenbsp;du béros chrétien sera l’autel du sacrifice, et lui-même l’objet denbsp;la vénération religieuse de ses frères jusqu’a la consommation desnbsp;siècles (i).

De cette conduite, indiquée tout a la fois par le bon sens, par la discipline générale de TÉglise et par les monuments primitifs, il ré-sulte qu'aucun vase de sang ne fut placé arbitrairement auprèsnbsp;A'aucun loculus des Catacombes; que le pouvoir légitime seul autorisa le placement de ce signe aulhentique; en d’autres termes, quenbsp;l’Église de Rome, aussi bien que les Églises d’Asie et d’Afrique, lenbsp;Pape, aussi bien que les Évêques, exercèrent, dès l’origine, sans l’a-bandonner aux simples fidèles, le droit essentiellement pontifical denbsp;canoniser leurs enfanls.

De la une seconde conséquence. Appuyés sur tous les genres dc

(i) Idcirco Ecclesiarum antistites magna semper solertia summoque studio cavcrunl, ne cui religiosuta hunc cuUum decernerent, qui suo reipsa merilo maciandus hoenbsp;honore dignus non esset, ejusque rei gratia invigilarunt ut ex cerlis indiciis mcrilanbsp;uniuseujusque dijudicarent et causam martyrii vitamque inartyris penitus iiinotesee-reni, — ISini, Disserc. II, de LiUer. linajc., c. in; apud Bened. XIV, igt;e Beatif., c. lu.

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LES TROIS ROME.

preuves géologiques, archéologiques, historiques, nous avons dit que des Gatacombes sont d’origine exclusivement chrétienne; en outre,nbsp;nous avons établi qu’ellesne servirent jamais de sepulture aux païens,nbsp;aux Juifs, aux hérétiques; qu’elles sont exclusivement peuplées de ca-tholiques. Or, en accordant et l’origine moitié païenne et moitié chré-tienne des Gatacombes; en admettant, de plus, que la vénérable Giténbsp;des martyrs fut souillée par la sépulture de quelques païens ou hété-rodoxes, il n’en resterait pas moins démontré que les reliques sacréesnbsp;dont Rome enrichit ses Basiliques et les temples du monde entiernbsp;sont parfaiteraent aulhentiques. La palrae et Ie vase de sang, places,nbsp;par l’autorité exclusive des Ponlifes, auprès de certalnes tombes, de-meurent toujours comme des monuments irréfragables de la vériténbsp;du martyre. Or, les osseraents sacrés, accompagnés de l’un ounbsp;l’autre de ces signes indubitables, sont uniquement présentés a la vé-nération religieuse des fidèles. Voila un des mille chemins par les-quels on se trouve conduit a dire de Rome ce que Bacon a dit de lanbsp;religion : « Un peu de science en éloigne, beaucoup de science ynbsp;ramène. »

Dans Ie cours de cette étude, j’ai dit que la canonisation des athlètes du christianisme était d’autant plus facile que tout se réduisait ii con-stater Ie fait méme du mai’tyre. Ici, quelques explications deviennentnbsp;nécessaires. En confirmant de plus en plus l’authenticilé des vénérablesnbsp;reliques de la Rome souterraine, elles montreront sous un nouveaunbsp;jour la profonde sagesse du Saint-Siége. Le martyre est l’héroïsmenbsp;de la charité. G’est un Baptêrae de sang, qui efface tous les péchés etnbsp;met immédiatement celui qui le regoit en possession de la glolre éter-nelle ; telle fut, dans tous les siècles, la doctrine invariable del’Églisenbsp;catholique. Dès l’instant de leur mort, elle a toujours invoqué lesnbsp;martyrs, elle n’a jamais prié pour eux. En demandant leur soulage-ment, elle aurait cru leur faire injure, ainsi qu’i Dieu lui-même (i).

a Sans doute, continue Benoit XIV, si nous parcourons les monuments de la primitive Église, si même nous consultons ceux d’une date moins ancienne, il ne sera pas difficile de trouver que, dans les causesnbsp;des martyrs, on s’est occupé non-seulement du martyre et de la causenbsp;du martyre, par conséquent, de leur sainte mort, mais encore desnbsp;vertus qu’ils praliquèrent pendant leur vie. Toutefois, on ne peut pasnbsp;en conclure la nécessité d’informer sur les vertus, dans toutes et dansnbsp;chacune des causes des martyrs, en sorte que, pour canoniser un martyr, il ne suffise pas de la mort courageusement soufferte pour Jésus-

(i) Injuriam facit marlyri qui oral pro eo. — S. Cypr., Ad Martyr.

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CE Qü’lL FAUT POUR LA CANONISATION. nbsp;nbsp;nbsp;529

Christ, mais qu’il ait encore, pendant sa vie, pratiqué les vertus théo-logiques (i). »

Après avoir cité un grand nombre d’exemples qui élablissent la pratique constante de l’Église, Ie savant Pontife rapporte, en les ap-prouvant, les paroles suivantes de Bellarrain ; « Pourvu qu’il soitnbsp;constant qn’une personne est vraiment marlyre, l’Église n’hésite pasnbsp;a la placer parmi les bienheureux et les saints, quand même, avanl Ienbsp;martyre, elle eüt été couverte de crimes. En effet, la promesse dunbsp;Seigneur est générale : Quiconque me confessera devant les hommes,nbsp;je Ie glorifierai devant mon Père (2). »

Ainsi, dans les martyrs, les vertus n’ont jamais été regardées comme une condition indispensable de ia canonisation : il en est de méme desnbsp;miracles.

« Ce qui a été dit des vertus, ajoute Benoit XIV, peut se dire des miracles. Les anciens monuments apprennent qu’il en était question, lorsqu’il s’agissait de canoniser un martyr; mais nnllement qu’ilsnbsp;étaient regardés comme une condition nécessaire de la canonisation (5). » Viennent ensuite un grand nombre de faits qui établissentnbsp;Ja constante discipline de l’Église; puis, ie grand Pape termine parnbsp;les belles paroles de saint Euloge, archevèque de Tolède, et martyrnbsp;lui-même, qui réfute victorieusement ceux qui prétendent que les miracles sont nécessaires pour canoniser les héroïques champions denbsp;la foi (4).

Ce que furent, dès 1’origine, les régies el la législation de l’Église, elles Ie sont encore. Elle peut encore canoniser les martyrs sans lesnbsp;preuves extérieures des vertus héroïques et des miracles. Toutefois,

(i) Si anliquiora Ecclesiae monumenta percurramus atque cliam si ad nonnulla non adeo antiqua manum adaioveamus, diiïioilc proléclo non erit repcrire, acium I'uisse innbsp;causis marlyrum non solum do manyrio et causa martyrii, et sic de prctiosa corumnbsp;morte; sed eliam de virtuUbus, quibus dum \ixerant fioruerunt: absque eo quod hiiicnbsp;ini'eralurnecessilasiu virtu les ipsas inquirendi in omnibus et singulis marlyrum causis;nbsp;ita ut pro martyre declarando minimc sufficiat mors pro Christo constanter recepta; sednbsp;prEelerea necesse sit, ut ante passionem martyr in virlulibus tbeologicis se consuetu-dine exercuerit. De Deatif., elc., lib. i, c. xxix, in-fol., edit. Venei. 1788.

(a) Dumniüdo consict aliquem esse vere martyrem, Ecclesia non dubitat eum inter sanclos el beams nunierare, eliainsi ante marlyrium mullis flagiliis coopertus. Promis-sio enim Domini generalis est. Matlh., x, xxxii; Omnis qui confllebitur me coram igt;o-minibus, confitebor et ego eum coram Patre meo. De Indulg., lib. i, c. ii, n.!), pars 4.

(3) nbsp;nbsp;nbsp;Qua; dicta snul de virtuiibiis in causis marlyrum, dici etiam possunt de signis etnbsp;miraculis; boe est de cis in aiuiquis Ecclesia; monumenlis babilam fuisse ralionem,nbsp;cum de marlyrio agebatnr el ejus vindieatione absque co quod binc interri possit corumnbsp;necessitas, ut quis pro martyre eolcreuir. — ld. ibid.

(4) nbsp;nbsp;nbsp;Boldetti, lib. 1, c. xxv, p. 122.

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LES TROIS ROME.

depuis Ie Pontifical d’Urbain VIII, elle s’en abstient généralement. Avec Ie fait du martyre, elle exige les \erlus et les miracles. Faut-ilnbsp;en conclure qu’elle bl4me son passé el qu’elle regarde aujourd’huinbsp;comme indispensable ce qui, durant tanl de siècles, ne lui parut qu’ac-cessoire? Nullement (i). Celte modification dans sa discipline révèlenbsp;seulement l’admirable sagesse qui la caractérise.

Écoutons-la traduisant elle-même sa pensée : « Sans doute, je suis en droit de placer au nombre des saints, mes enfants morts coura-geusement pour Ie nom de Jésus-Christ : 1’héroïsme de leur lémoi-gnage suflit pour élablir Ia certitude de leur bonheur éternel. Desnbsp;miracles aulhentiques, opérés par leur intercession, ajoutent certai-nement un nouvel éclat a leur sainteté. Ces preuves extérieures ferment la bouche aux plus audacieux détracteurs de l’Église. Or, d’unenbsp;part, la canonisation d’un martyr n’esl pas line chose nécessaire, etnbsp;je peux m’en abstenir sans violer aucun de mes devoirs. D’autre part,nbsp;les hérétiques et les impies, plus nombreux aujourd’hui que jamais,nbsp;sont toujours prêts a censurer mes actions, et a m’accuser de créduliténbsp;et de fourberie, désireux qu’ils sont de m’óler Ie respect el la confiancenbsp;des fidèles. Afin de prévenir ce malheur, je demanderai désormais,nbsp;dans les procés de canonisation, des preuves dont Ie siècles plus heu-reux ne connurent ni la nécessilé ni l’usage (2). »

Au reste, plusieurs fails récents prouvent que Ie Saint-Siége ne s’est point dépouillé de son droit ancien; et qu’il ne se croit nullement obligé de se conformer avec aigreur, et dans tous les cas auxnbsp;exigencestyranniques del’incrédulité moderne. Je citerai,entre autres,nbsp;la cause actuellement pendante des martyrs de la Chine et de la Co-chinchine.

Cependant Ie moment du départ pour les Catacombes élait arrivé.

(1) nbsp;nbsp;nbsp;Series haec monumentorum ostendit quod, licet numquam editum luerit generalenbsp;decretum de necessitate miraculorum in causis martyrum pro obiinenda beatiücaiionenbsp;aut canonizatione; nuuquam tarnen formalis beaiificationis et canonizaïionis honoresnbsp;martyribus indultos luisse a Sede Apostolica nisi ad approbalionem marlyrii miraculanbsp;accessissent,— Bencd. XIV, ibid., c. xxx, n. 9.

(2) .....Tutiorum esse senientiam quae miracula exposcit, cur erit rccedendum ab

opinione tutiore in causa non necessaria, sed arbilraria, hoe est quae non debet ex necessitate a Romano Ponlifice deliniri obloquenlibus polissimum hierelicis adversus nostrorum martyrum canonizationes, nostrisque calholicis passim adhortanlibus, utnbsp;ad eas procedatur, servalis servandis, adhibilaque quacumque diÜgenlia, nee ulla pr®-

terinissa, quae cerlitudini judicii conducere possint.....Minime culpanda, quin potius

maxime commendanda est Ecclesim Roman® consuetude, qu® crescente hominum malitia, ad obslruendum os loquenlium iniqua, in re tanti momenti nova induxil ex-perimenta, qu® antiquioribus lemporibus charitale plenis, et malitia vacuis usu nonnbsp;erant. — ïd., ibid.

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CÉRÉMONIE d’uNE LEVÉE DE CORPS. .551

Les notions précédentes, si propres h réveiller dans rème du voyageur Ie respect pour l’Église et h confirmer Faulhenticité des saintes reli-ques, nous servirent de cortége. Grace a Msquot;' Castellani, gardien desnbsp;Catacombes, nous savions qu’une levée de corps saints devait avoir lieunbsp;aujourd’hui : l’excellent Évêque avait bien voulu nous inviter ii lanbsp;cérémonie. Vers dix heures, trois voitures sortaient du Palais Conti,nbsp;Dans la première étaient les princes d’Espagne, fils de Don Carlos.nbsp;Nous occupions les deux aulres. Une quatrième arriva plus tard : ellenbsp;conduisait Ie jeune frère du roi de Naples, élevé è l’Académie desnbsp;Nobles. Sortis par la Porte Salaria, nous arrivames, après un asseznbsp;difficile trajet, au travers des vignes, a l’entrée des Catacombes denbsp;Sainte-Priscille : Msquot;' Sacriste y altendait les heureux pèlerins.

Mais poürquoi Ie digne Évêque se trouvait-il la, et comment avait-il été prévenu de la découverte d’iin tombeau de martyr? La garde générale des Catacombes est confiée au Cardinal-Vicaire. Son premiernbsp;lieutenant est Ie prélat, sacriste du Palais Apostolique. II est plus spé-cialement chargé de la surveillance et de la protection de la Romenbsp;souterraine. Sous ses ordres sont plusieurs Ecclésiastiques, nommésnbsp;Députés des Catacombes. lis désignent les cimetières oü les fouillesnbsp;doivent avoir lieu, dirigent et surveillent les travaiix des Fossoyeurs.nbsp;Ceux-ci, au nombre de vingt ou trente, sont des hommes recomman-dables par leur probité et leur expérience. Comme è toute autre per-sonne, défense leur est faite, sous peine d’excomraunication, de toucher a rien ou d’emporter aucun objet des Catacombes. Leur travail,nbsp;étant une oeuvre de piété, est payé sur les fonds provenant des dispenses de mariage.

Lorsqu’en déblayant les galeries ils découvrent un loculus, qu’ils présument être un tombeau de martyr, ils en donnent avis au Députénbsp;particulier de la Catacombe. Cet Ecclésiastique se rend aussitöt surnbsp;les lieux; examine soigneusement la tombe, s’assure qu’elle est par-faitement intacte, et constate l’existence des signes du martyre. Lenbsp;Cardinal-Vicaire et l’Évêque Sacriste sont prévenus è leur tour. Ilsnbsp;indiquent le jour oü se fera 1’ouverture du tombeau; et, je le dis avecnbsp;reconnaissance, ils ont la bonté d’en informer quelques-uns des étran-gers qui se trouvent è Rome. Le Saint-Siége saisit avec empresseraentnbsp;toutes les occasions de montrer avec quelle prudence il procédé dansnbsp;l’extraction et la reconnaissance des reliques offertes par lui èlavéné-ration des fidèles.

Ces détails expliquent la présence de Ms'' Sacriste amp; l’entrée du ciraelière de Sainte-Priscille. Notre heureuse caravane se composait de

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332 nbsp;nbsp;nbsp;lES TROIS ROME.

quinze personnes, y compris Ie Député des Catacombes, l’Évêque de Porphyre et Ie Père Marchi. Munis de torches allumées et de chan-delles de réserve, nous descendimes a cinquante pieds au-dessous dunbsp;sol. La, se trouve YEglise primitive, que j’ai décrite ailleurs. C’estnbsp;une des plus grandes et des plus belles cryptes que j’aie vues dans lanbsp;Rome souterraine. B4tie en briques romaines, elle affecte la formenbsp;d’une Basilique. Le jour lui vient par une seule ouverture carrée, quinbsp;communique avec la campagne et qui lui sert comme de coupole.

Dirigés par les Fossoyeurs, nous nous engageamp;mes ensuite dans des galeries basses et tortueuses. Plusieurs fois, nous fumes obligés denbsp;ramper sur nos mains et d’affronter la boue séculaire, formé par lesnbsp;infiltrations assez fréquentes qui ont plus ou moins dégradé les Cata-corabes de Sainte-Priscille. Après un long trajet dans ce difficile la-byrinthe, nous arrivümes a un endroit oü la galerie se relève un peu,nbsp;et permet, sinon de se tenir debout, du moins de n’être pas enlière-ment accroupi. Le Fossoyeur qui éclairait la marche s’arrêta tout ènbsp;coup et s’écria : Ecco; Voila! et il indiquait le loculus du martyr.nbsp;A ce mot, chacun reste immobile a la place qu’il occupe ; seul,nbsp;Sacriste s’avance auprès du tombeau.

II promène lenteraent sa torche sur toutes les parlies du loculus, examine avec la plus minutieuse attention la pierre tombale, le scelle-ment, les endroits présumés du vase de sang. Lorsqu’il s’est assurénbsp;que tout est parfaitement intact, il fait signe a l’un des fossoyeurs,nbsp;qui s’avance, tenant d’une main son flambeau, de l’autre un petitnbsp;outil de mineur ; ordre lui est donné de procéder ü la recherche dunbsp;vase de sang. L’ouvrier se met a l’ceuvre. Avec la pointe de son instrument, il pique légèrement la paroi de la galerie aux deux extrémitésnbsp;du loculus; puis, ayant rencontré deux taches blanchatres,il les éraillenbsp;avec précauiion; plusieurs couches de chaux tombent en mielies, etnbsp;enfin laissent entrevoir deux vases de sang.

A l’apparition des signes vénérables, je ne sais quel frisson par-courut nos membres. Jusque-la forcé par le peu d’élévation de la galerie i se tenir accroupi, les mains appuyées sur les genoux, tout le monde se prosterna.

Prêtres et laïques, pèlerins obscurs et enfanls des rois, nous réci-tames d’une voix unanime des psaumes choisies et des oraisons analogues è 1’iraposante découverte. Chanter la gloire des martyrs, féli-citer l’Église qui les enfanta et qui les retrouve, bénir le Dieu qui les soutint el qui les couronna ; tel est le sens de ces belles prières (i).

(i) Domiiie Jesu Christe, rex gloriosissime marlyrum, Icque conlUetilinm corona, qui

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CÉRÉMONIE d’uNE LEVÉE DE CORPS. 553

Cependant, les petites ampoules, moitié pleines d’un sang coagulé, étaient enlre les mains de Sacriste. 11 les avail approchées de sanbsp;torche et reconnu comme nous, a la lueur des flambeaux, des laches denbsp;sang sur les parties vides. Par ses ordres deux Fossoyeurs procédaientnbsp;a l’enlèvement de la pierre tombale. Elle était si fortement scelléenbsp;qu’elle se fendit par Ie milieu, sous reffort des leviers. Les moreeauxnbsp;précieusemenl recueillis furent confiées è recclésiastique député de lanbsp;Catacombe. En même temps un autre prétre, appelé par Ms'’ Sacriste,nbsp;avail approché de la tombe ouverte, deux longues caisses en bois, des-tinées a recevoir les ossements des martyrs. Je dis des martyrs, car Ienbsp;loculus était un Bisomum; il conlenait deux corps. Les martyrsnbsp;étaient couchés sur Ie dos, ii cóté l’un de l’autre : les chairs, les muscles, la plupart des cartilages étaient consumés; les ossements seulsnbsp;restaient dans leur intégrité, moins ceux qui avaient été violemmentnbsp;rompus par la dent des bêtes ou par les instruments de supplice. C’estnbsp;avec beaucoup de soiu que Ie prêtre dut les toucher et les prendre,nbsp;tant l’humidité les avail ramollis. Chaque corps fut déposé dans sanbsp;caisse particulière avec son vase de sang.

Après cette solennelle et délicate opération, Ms'' Sacriste, qui n'a-vait pas quitté un instant l’ouverture du loculus, ferma lui-même les deux caisses et les scella de son sceau en trois endroits différents.nbsp;Porté par des ecclésiasliques comme Parche du désert sur les bras desnbsp;lévites d’Israel, Ie précieu'x dépót prit la lête de la caravane qui Ienbsp;suivit, en continuant les hymnes et les prières, jusqu’ii l’entrée de lanbsp;Catacombe. Lè, Ms' Sacriste brisa les sceaux qu’il avail apposés etnbsp;rouvrit les caisses, afin de faire prendre Pair aux ossements et de lesnbsp;raffermir. Assis a la petite table sur laquelle les saintes reliquesnbsp;étaient placées, il dressa dans Ie plus grand détail Ie procès-verbal de cenbsp;qui avail eu lieu. Pendant ce temps-la, Ie père Marchi nous faisait examiner la pierre tombale. On se mit ii déchiffrer Pinscription. Ellenbsp;contenait Ie nom des martyrs et la date de leur mort. Le premier s’ap-pelle Heliodorus; le nom du deu.xième imparfaitement gravé ne putnbsp;être lu sur-le-champ. II en fut autrement du millésime : Pan 200 nousnbsp;apprit qu’ils furent viclimes de la grande persécution de Seplime-Sévère.

Le procès-verbal fut lu è haute voix, signé par les témoins, revêtu disposilione mirabili sacra corpora luorum milUum, qui pro tua fide ac nomine san-guinem suum profuderunl in hoe loco per sancfos Angelos luos custodire dignalus os,nbsp;illosque urbis hujus luaedilecta; Jerusalem circa muros conslituisli custodes, etc. — Exnbsp;Precib. redland, in recogn. et extract, corp. SS. MM. ex toculis in ccemeter.

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334 LES Tnois ROME.

du sceau de M*'' Sacriste et déposé dans une des caisses. Les caisses elles-mêmes, renfermées et scellées coranie la première fois, furentnbsp;placées avec la pierre dans la voiture de M8‘' Sacriste qui les emportanbsp;a la custode générale. Ce sanctuaire auguste est comme Ie quartiernbsp;général des martyrs sortis des Catacombes. Lè, ces héros, ces héroïnesnbsp;de la foi primitive, attendent les ordres du Vicaire de Jésus-Christ,nbsp;pour aller porter aux églises des différentes parties du monde Ie triplenbsp;secours de leur présence, de leurs exemples et de leurs prières. A cha-que départ on inscrit sur des registres publics Ie nom du martyr, Ienbsp;nom de la personne, du diocèse, de la ville, de l’église qui en est gra-tifiée, de cette manière, si l’authenlique particulier dont on a soinnbsp;d’accompagner toujours Ie corps du martyr vient è s’égarer, on peutnbsp;infailliblement en oblenir un nouveau. Est-il besoin d’ajouter quenbsp;tout ici est complétement gratuit ?

Telle est, en abrégé, la conduite de Rome relativement a Ia surveillance des Catacombes, a la reconnaissance des martyrs, è la conservation et è la communication de leurs reliques. En présence de cette sollicilude sans égale, reste-t-il a l’incrédulité, au sophisme, a la lé-gèreté mondaine Ie plus petit mot a dire? Je prie tout homme impartial de répondre.

Cependant nous remontémes en voiture, après avoir jeté un dernier regard sur les Catacombes : regard plein de mélancolie comme celuinbsp;du voyageur qui s’éloigne, peut-être pour toujours, des lieux chérisnbsp;oü fut placé son berceau. En ce moment la Rome souterraine, lanbsp;grande Cité des martyrs, reparut tout entière a nos yeux avec les souvenirs héroïques dont elle est pleine, et qui élèvent a leur plus hautenbsp;puissance Ie respect et l’amour pour l’Église.

Souvenirs de force. Plus merveilleuse que celle des pyramides d’Égypte, de Babylone, de Ninive, du grand égout de Tarquin, dunbsp;Colisée, de la capitale méme des Césars avec son étendue démesuréenbsp;et ses palais fabuleux, sa construction est l’ouvrage Ie plus extraordinaire qu’ait réalisé Ie génie de la foi, et que l’oeil de Thomme puissenbsp;contempler.

Souvenirs de sollicilude. Demeure trois fois séculaire de TÉglise naissante, elle montre ü chaque pas la mère des peoples chrétiens,nbsp;cachant dans les plis de sa robe ensanglantée, la foi, la liberté, les lu-mières, la civilisation, les consolations divines et les espérances immortelles qu’elle avait revues au sommet du Calvaire, et qu’elle devaitnbsp;donner au monde. Dans ses cryples vénérables, on la voit tour è tournbsp;prosternée, les mains étendues, les yeux élevés vers son divin Époux,

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DIVERS SOUVENIRS. nbsp;nbsp;nbsp;335

demandant la fin de la luUe ou la victoire pour ses enfants, aux prises avec la rage des bourreaux et les lions de Tamphithéalre; puis, debout, peignant d’une main timide sur les parois de ses cubicula, ounbsp;gravant sur la tombe de ses héros les dogmes sacrés pour lesquels ilsnbsp;mouraient : fermant ainsi la bouche a l’hérésie en léguant a la pos-térité le vrai symbole des martyrs.

Souvenirs de désinléressement. Témoins irrécusables d’une vietoute de privations, ses pauvres meubles, ses lampes et terre cuite révèlenlnbsp;son dévouement, son humilité et rehaussent l’éclat du miracle, qui luinbsp;donna la victoire sur I’orgueil tout-puissant du monde de Néron et denbsp;Dioclelien.

Souvenirs de charité. Avec leurs emblèmes mystérieux et leurs inscriptions si touchantes, ses petites coupes en verre rappellent les innocentes agapes, repas fraternels oii la sainte égalité de tous lesnbsp;hommes était pratiquée dans toute sa perfection, alors que I’Empirenbsp;romain continuait de maintenir dans toute sa rigueur la distinctionnbsp;barbare du riche et du pauvre, du fibre et de I’esclave.

Souvenirs de courage et de sainteté. De ces fresques naïves, de ces cryptes vénérables, de ces tombes si simples, pressées les unes contrenbsp;les aulres, de ces rues, de ces places tapissées d’ossements, de cettenbsp;terre détrempée de sang dans toutes ses parlies; de toutes parts, enfin,nbsp;s’exhale un parfum d'héroïque sainteté qui embaume l’öme et la faitnbsp;vivre dans le vestibule du ciel (i).

Souvenirs de foi. Pendant que le coeur s’épanouit avec délices dans une atmosphère inconnue partout ailleurs, I’esprit contemple, avec unnbsp;saisissement profond, cette nuée de témoins de toute condition, denbsp;tout sexe, de tout Age, dont chacun lui montrant, au has du Symbolenbsp;catholique, sa signature sanglante, lui dit: Credo : Je crois. Au bruitnbsp;de ce mot solennel répété plus de deux millions de fois (2), le pèlerin

(i) In mundo mulla loca sunt ubi corpora sanctorum requicscunt; sed non similia huic loco (Caiacombis). N.am si sancii nuraerarenlur quorum corpora hie fuerunt re-posita, vix crederelur. Ideo sicut homo infirmus ex hono odore et cibo reficitur, sic homines venientes ad hunc locum menie sincera recreanlur spririlualiter et recipiuntnbsp;veram peccatorum remissionem unusquisque juxta vitam suam et lidem. — S. Brigit.,nbsp;lib. IV, c. t07.

(s) Quel lullenombre total des martyrs pendant les irois premiers siècles de l’Églisc? t. est une question dont le developpement excède les limites d’ une simple nole. Je dirainbsp;seulement, qu au icmoignagede saint Ghrysostome, de saint Augustin, de saint Jcróme,nbsp;d Eusèbe, de tous les Peres el de lous les historiens, la multitude des martyrs est lel-Icment grande qu’elle est incalculable. Quand ils en parlent, tous emploient les expressions les plus générales, de manière ü laisser a Ia pensee la liberté de s’étendrenbsp;jusqu’i rinfmi. !ls appUqueut aux martyrs, glorieux enfants du-veritable Abraham, les

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336 nbsp;nbsp;nbsp;les TROIS ROME.

des Catacombes ne peut s’empêcher de répondre, lui aussi, de loule l’énergie d’une conviction désormais inébranlable : Credo : Je crois.

paroles divines quiannoncent a l'ancien palriarche son innombrable poslérité : « Bene-dicam libi et muUiplicabo semen luum sicut stellas coeli, et vclut arenam, quae est in litlore maris. Gen., xxu, 13. »

« Quis coeli stellas enumeret, s’écrie saint Theodore, ac diflusara ad maris littus arenam? Tot snnt martyres per orbein, qni adversariani potestaten! fide vicerunt, procinc-tique ad tyrannicas acies, in ignem, gladium, feras, terrores onines tetenderunt, qni supplicia ducerent pro deliciis, obtruncationem pro voluptate. » — S. Theod. Studita,nbsp;Serm. x, in omnes SS. Martyr.

Saint Grégoire continue ;« Totum mundum, 1'ratres,aspicite, martyribus plenus est. Jam pene lol qui videamus non sumus, quot veritatis testes babenius. Deo ergo nume-rabiles, per arenam multiplicati sunt, quia quanti sint a nobis comprehendi non pos-sunl. » Homil. xxvn, in Evang.

gt; Possibile non est, dit Eusèbe, numero comprehendi quanti quotidie pene per sin-gulas quasque urbes, et provincias martyres efliciebantur. » llist., lib. via, c. iv.

« Hac tempestate, ajoute saint Sulpice Severe, omnis lere sacro marlyrum cruore orbis iul'ectus est, quippe cerlatim gloriosa in certamina ruebantur. » [list., lib. n.

Telles sont les expressions des Pères, si parfaitement places pourconnaitrelavérité du fait qu'ils transmettaient a la postérité. De savantes recherches ont étó enlreprisesnbsp;pour réduire a un chitfrc approximatif lenombre des martyrs, que tous les Pères nousnbsp;donnent comma inc.alculable. Les travaux de Baronius, l. n, an. ö03; et Not. ad Mary,nbsp;rol., c. V et vu; de Fulvins Cordulus, In Notis ad passiones SS. GetuU, Amantii, etc.;nbsp;d’Arias, Ad Imit. Chrisli, lib. ni, c. xxxii ad xxxvi; de Genebrard, In Psat. rxxvii; denbsp;Perraris, Biblioth. Art. Martyr.; de Bernini, Hist. om. llmres., c. xiv, smcul. ni, p. d06;nbsp;de Mamachi, Orig. et Antiq., 1.1, p. 476; de Bosio, Rom. subter., lib. m, p.289; de Maz-zolari, Vie Sucre, t. v, p. 85, 284; de Boldetli, Osservaz. soprd i Cimiteri, etc., lib. i,nbsp;c. xxvii; et d’un grand nombre d'autres, fondés sur les monuments primitifs, portentnbsp;a o.xzE MILLIONS, ET AU DELA, Ie nombre de martyrs dans l’Église enticre, pendant les troisnbsp;premiers siècles. — « Adhibito tarnen, » dit Ie savant P. Florès, dans son grand Oavragenbsp;sur les Martyrs, « diligenli studio in sacris evolvendis annalibus, et martyrum actis,nbsp;quorum major pars deperiit, aut exarata in tabulis ecclesiasticis non luit, illud ex pro-batis auctoribus deduce : In Ecclesia numehari c.xdecim martyri'm millio.ves, eteoplures;nbsp;ila ut quolibet anni die, si in omnes distribuantur, coli possint plus quam triginta mar-tyrum mitlia. »

a Sic putat et computal Genebrardus ex aliis in Psal. ixxvni, 4. Magna, inquit, copia marlyrum qum taiua, ut aliqui in singulosanni dies numerent triginta millia martyrum.nbsp;Sic noster Francisciis Arias, vir pietate et eruditione niagnus,... rem lotam deducensnbsp;per singula smcula, provincias et persecutiones, ostendil adeo esse immensum marlyrum numerum, ut in singulis lotius anni diebus possimus nos honorare martyres tan-quam tali die coelis coronatos usque ad triginta millia. Cui exislimalioni mulli applau-dunt, el jure merilo. » De Inchjto Agon. Martyrii, lib. iv, c. iii, p. 1.

Quant aux martyrs de la ville de Rome, nous Irouvons, pour en indiquer la multi tude, la même généralité d’cxpressions dans les Pères et dans les auteurs chréliens.nbsp;Saint André, de Crèle, s’exprime ainsi;« Vidimulierem ebriam de sanguine sanctorumnbsp;el de sanguine martyrum Jesu. w .4poc., c. xvn, 6. Hanc meretricem, quidam veteremnbsp;Romam designari putant. El quidem numerum martyrum, et sanguinis modum, quinbsp;a Neronis tempore in Romana urbe et dilione effusus est usque ad Dioclelianum, quisnbsp;enumerare valeat? v Cornm. in Apoc., c. lu et lui.

Saint Léon tient Ie même langage: « Duo ista prmclara divini germinis semina (Petrus et Paulus) in quantam sobolem germinarint, bealorum millia martyrum protestantur,

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DIVERS SOUVENIRS. nbsp;nbsp;nbsp;337

L’incrédulité lui fait pitié; la poléraique saus cesse renaissante sur la divinité du christianisrae est a ses yeux une injure, un hors d’oeuvre,nbsp;un danger.

Le seul aspect de la grande cité des m.artyrs a suffi pour graver dans son coeur et placer sur ses lèvres la profonde et noble parole d’un Pèrenbsp;de l’Église : « Sachons-le bien; discuter sur la vérité d’une religion,nbsp;que nous voyons confirmée par la déposilion sanglante d’un si grandnbsp;nombre de témoins, est une chose fort périlleuse. Oui, il est fort dan-gereux, après les oracles des prophètes, après le témoignage des Ap6-tres, après les tourments des martyrs, de venir discuter la foi desnbsp;siècles, comme si elle était née d’hier... Admirable sagesse de Dieu!nbsp;qui, donnant pour motif a la foi les héroïques combats des martyrs,nbsp;fait servir les souffrances des pères a l’éducation des enfants. II lesnbsp;éprouva, afin de nous instruire; il les brisa, afin de nous conquérir :nbsp;de leurs horribles tortures il fit la base de notre foi et l’aiguillon denbsp;nos vertus (i). »

qui aposlolicorum semuli triumphorum, urbem noslram, purpuralis et longe latequo i'ulilanlibus populis ambierunt, et quasi ex multarum honore geramarum, consertonbsp;uno diademale coronarunt. » Ser. in Nat. App.

Sainte Brigitte, a qui il fut donné de lire surnalurellemenl dans les myslères du passé el de l’avenir, s’exprime comme saint Léon : « Si mensurares terram cenium pedum innbsp;longiludine cl tolidem in latiludine, et scminares eam plenam puris granis tritici, itanbsp;compresse, quod non esset distantia inter granum et graniim, nisi quasi arliculus digilinbsp;unius, quodlibet vero granum darei fructum centuplum, adhuc essent plures martyres,nbsp;et confessores Komie, a tempore illo quo Petrus venit Romam cum humilitale, usque-quo Ccleslinus discessit. » Lib. ni, c. xxvii. — Elle compare ensuitc Rome a un champnbsp;dc cent pieds dc Jong sur cent de large, tout planté de rosiers, puis elle ajoule :« Sinbsp;horti omnes de toto mundo conjuncli essent Romse, certe Roma esset leque magna denbsp;martyribus. Rosa? vero sunt martyres rubicundi sanguinis sui elï'usione. » ld.

Stapleton ajoule : « Iia una Roma maclandis Chrisli ovibus generale quasi macellum erat. In ea aut imperalores, aut praïfecti urbis perpeluam christianorum carniiicinamnbsp;exercebant. Nee usquam lerrarum orbis chrislianus sanguis uberius effusus est, quamnbsp;in una urbe Roma. » De Magnit. Rom. Eccl., c. vu

Le travail de patience et d'crudition, qui a réduiten valeur numérique les expressions des Pères sur le nombre des martyrs de l’Église tout enlière, s’est continué pour lesnbsp;martyrs de Rome. Ces recherches, appuyées sur les monuments primitifs, donnent, anbsp;Rome, deux millions el demi de martyrs; en sorle qu’elle peut célébrcr, chaque journbsp;de l’année, la Iele de sept mille de ses enfants. « Che moUiplicati ascendono a piü dinbsp;due millioni e mezzo di sanli marliri. » — Bernini, Hht. Om. Heer., 1.1, c. xiv. Saintenbsp;Brigitte, lib. iii, c. xxvir. Ferraris, Art. Martyr. Florès, De incly.Agon. Martyr., p.3^0,etc.nbsp;— C’esl le cas de s’écrier avec un des auteurs cites plus haul: « Dieu, quelle nuée danbsp;témoins vous avez rassemblés pour nous animer au combat! Comment se pout-il quenbsp;les hommes se laissenl encore appesaiuir et enlrainer après le mensonge et la vanité?nbsp;O vous, qui nous avez créés, ayez piiié de nous, que vous avez rachetés au prix deceltenbsp;mer de sang! * Qui plasmasti nos, miserere nostri, quos pretioso sanguine redemistü »

(!) Nüverimus quia non sine magno discrimine de religionis veritate dispulamus, quam lariiorum sanguine confirmatam vidcnuis. Magni periculi res, si post Prophetarum

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538 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME. '

Merci, mon Dieu! mille fois merci, de m’avoir conduit dans ces lieux les plus instructifs et les plus sanctifiants qu’il y ait au monde.nbsp;Pèlerins des derniers %es, puissent tous mes frères venir, a leur tour,nbsp;se retremper aux sources de la foi et de la charité primitives, afin denbsp;se préparer aux luttes formidables qui doivent signaler, qui signaientnbsp;déja l’approche du jour suprème 1

Et vous, gardienne dix-huit fois séculaire de l’héroïque Nécropole, sainte Église Romaine, qui protégez la tombe de vos martyrs avec lanbsp;sollicitude de la mère qui veilte sur Ie berceau de son fils endormi,nbsp;soyez aussi mille fois bénie!

Pour vous exprimer sa reconnaissance éternelle et son attachement filial, permetlez au plus obscur de vos enfants d’emprunter Ie coeurnbsp;et la voix de l’un de ses frères, qui fut tout amp; la fois rornement denbsp;votre auguste sénat, l’historien de votre gloire et Ie vivant témoignagenbsp;de votre inaltérable sainteté. « Maitresse des sciences et des moeurs,nbsp;ó Rome, cité par excellence, la gratitude me fait un devoir de dire denbsp;vous ce que Grégoire de Nazianze disait d’Athènes : Dangereuse peut-être pour quelques-uns animés de mauvaises dispositions, vous futesnbsp;toujours pour moi un trésor rempli de pierces précieuses, une sourcenbsp;de jouissances, de lumières et d’avantages de tout genre. Si je ne suisnbsp;pas devenu plus riche de science et de vertu, si je n’ai pas écrit plusnbsp;éloquemment de vous, ce n’est pas votre faute, c’est la mienne. (t). »nbsp;oracula, post Apostolorum testimonia, post Martyrum vulnera, veterem fidem quasinbsp;novellam discutere prsesumas.... Quanta circa nos Dei nostri sollicitudo, dum nobisnbsp;fidem veram duro agone martyrum commendat, aflUctionem prsecedentium, instructio-nem eflicit posterorum. Illos examinat ut nos erudiat; illos content ut nos acquirat,nbsp;eorum cruciatus nostros vult essc profeclus. Serm. de SS. Martyr.

(t) Mihi certe de ürbe illud liceat baud ingrato fateri, quod de Athenis Gregorius Naziauzenus aflirmat, nimirum Roma ipsa, elsi aliquibus 1'ortasse perniciosa fuerit,nbsp;mibj certe gemmea, omnique ex parte beata atque proiicua semper exslitit.... Sedulanbsp;magistra morum existens ac litterarum; ut plane inleUigam, quod minus in utrisquenbsp;prolecerim facultatibus, mibi cederc culpm, non ürbi. Card. Baron., In Vila, c. ti, p. 4,

rrx.

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N?l.

PIAN BE liCMCOfflE BE S^CAIUXrEf).


\ lork denlrce .

2 dfoniimails (U-Cjuós .

O Lurcrnaires oii larmiersqm cammuni -quaiejil avec la cmnpaqne'.

4 Calm CS sou IS tomheuuec^.

O Escalicr prijiapal qiii conununique au. cmielu’re. inlérieur ,

(i JTurs construiis Jacus la restaiuatiou de la, catacombe',

1 Foniatne,.

Ö Tornhc sottocnl rcmpLLe deaic.

^ lieMoypor OU l'orv descerule au/ cmieherc, it^ci'tcuu- .

10 nbsp;nbsp;nbsp;Cibmulum, oa crypte pcirtlc d-Ji'esque^

uuzos deqradèe/.

11 nbsp;nbsp;nbsp;Ouvertures quL currespoiuient d uiie/

galerie ir^érieure.

12 nbsp;nbsp;nbsp;Cubieulu -OU crqytes saus pantures.

13 nbsp;nbsp;nbsp;Gala 'LC pleine de terre et niu.réey

des dciidc cdtés.

14 nbsp;nbsp;nbsp;Mtruunmt cou vert depeinhires.

15 nbsp;nbsp;nbsp;Mónumetd arquè,peiiit, nvaia^d

drcolord.'

16 nbsp;nbsp;nbsp;Monument arqul, et orric de/

peinhtfes .

17 nbsp;nbsp;nbsp;Qdticulajn. remarquahle par ses


lt;eifiliu’es.


Secorude portie, du menie cubieutuni:

19 Monuments arqaés, peifits,mais

dèqrcudes.


t

21 Sepidcre profond au, miUea. de/

lo/ qcdet've

^^^¦22 Monument arqiié el peint .

^^^¦23 Aquedua Ivors de service .

Galeries lumwdes et, Jiuycuses,

!5 Mvnumenl arque etpciid,,

6 (idnculum./ peuit.

17 IiGm/.

8 nbsp;nbsp;nbsp;Momimenl nrquéprné de peintiu-es.

9 nbsp;nbsp;nbsp;Idemy.

pO Escidier qui descend an citneiiere in^erieiir, marqué par des......

|1 Séputcre enjbncé qui eomniunique an anu-here inferieur,

12 Pclil, escalia’ qiu conduit au menie crmetiern.

i d.veavahvti sons lornhcauir,,

i Cahrms lumndes,suns tombes lalèrales.

dreeauee et murs etablis a Icl/ rcsiaiirciiion did cimctier'C/.


20 Cihieulurrc aoec despeintarcs a, peine reconiuiissables.


cotisb'iilis pres despoi'tcM

f culficiilct' paar plus (jrande^ lid tic. .


'dlertes hasses rc/tipUes de^ lerre

ulertes qid sepivlonpentjnaU (flu sant obstrue€s\

dtlvnie^' qui se pvoIoru^eitV.


DE L'ÉGIISE SAINT-SÉBASTIES,

cf drx enfacaiji7w,y eoJitiguês.

fi-netir de /'(fdise .

fide el pordtpie^

ete el eseuJiej'pour (Lsccndre (Uuv calacoinhi


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(lesooOU 6o cimj’t'.E nbsp;nbsp;nbsp;' •

y nbsp;nbsp;nbsp;eoniGWis.TWus

S au, nous horuftt nnur // nbsp;nbsp;nbsp;*7'

«ane soutcrrauiT ' nruril, T A '•‘fgt;-oduirc In

aXkser f nbsp;nbsp;nbsp;Monies les

vastes el U-splus cittbres.


SttrEDr^--^quot;

PIMBE I'ÉGIISE SAINT-SÉBASTIEXete,

5 Tombeaa, de Sainle lacine .

Ql Jluvséleoéspoiuda '-estnxmatiou

des calaeomhes.

e Caleries comhlees.

ö Gibiadurn sauspembu-as.

9 Galeries combléesqM Conurm,dqim„t probablemeiU on fnbsp;nbsp;nbsp;nbsp;cimrtiere

de Jaint-Gdhecta-

10 loadnsde, sairde Cecile -



N? 8.



IV?10.


ISquot;? 5.


]Nquot;6.


UITE nu


IV?2.


]V?9.




N?4.




IV?5.



PEM DE I'ÉGIISE SAISl-SEBASTIEleie.


11 nbsp;nbsp;nbsp;Jnscriplioti du lombemt de saint

Jlaccime,

12 nbsp;nbsp;nbsp;J’Iscdilwr et pot^e poiu' rrn/ferdans

Vt^lASey.

13 nbsp;nbsp;nbsp;C/iapellc, de, Sauti -Fahien/.

14 nbsp;nbsp;nbsp;JijU'iefaie saenstie.

li) uiuteL atur relief ues.

16 nbsp;nbsp;nbsp;JVoiioel auiel de Saail ¦Sébastien .

17 nbsp;nbsp;nbsp;.. iidres (uitels d diapelles de l 'éylisc.

18 nbsp;nbsp;nbsp;Woiwede, sacristie/.





N? 13.




NV 2.



‘¦'r .pdS '

'quot;C l’ 'tI'

'tS'ïpBP-' nbsp;nbsp;nbsp;'Ü

tv

9



N?14.


Suite duN?2.

PIAJsDEllGlKE Sffi'T-SÉBASriEA'.etc.


19 nbsp;nbsp;nbsp;Escalia' du. couvaii,.

20 nbsp;nbsp;nbsp;Turtle du counent .

21 nbsp;nbsp;nbsp;Porie el corridors qm condiiisenl/

auoc, calaeomhes.

22 nbsp;nbsp;nbsp;Mscaleerpar oir J 'on sv rend

amv calaromhe.r,

23 nbsp;nbsp;nbsp;Gtbiculum qm précêiE l 'entree/

des cntacoinbes.

21 Elcui de.r calaroiiibes .

25 nbsp;nbsp;nbsp;dalei qiu cadie Le piulsou repo-

scrent qiielqae temps saint Kerre et saint Pant-Tej.... .indiqaaitnbsp;let, portie vide,.

26 nbsp;nbsp;nbsp;Flare vu, éiaél ïa, cliaire ponlifiecde,

de marbre sur laqiietle^ui niarlq-rise le, pope sabii Etienne 1quot;' .

27” base de lerie nutrd.

2 8 Sieqes autom' des calacornbes.

2 9 Monuments arqués.

30 nbsp;nbsp;nbsp;dutres escaliers des eatneomboT.

31 nbsp;nbsp;nbsp;Zien au niveau les corridors el qui

rtuqaide citas les catacombes.

32 nbsp;nbsp;nbsp;Jorle pat' fdicfuelle on oa du edie

de fd^Iise de Saint-Jtiul'.


^ . ó, Scpulöffed^^^as le^ calaczunhes. Ün y veuuuTpie la éorebe cfllntupepour ce/airernbsp;le souict rain. l((/ posilion (les corps (t/inslenbsp;loculus, lau^e ou ho^' rcniplie de mortier aoecnbsp;la ii'uetle poiu'cuuenler les liu'/es’ oa. la.nbsp;pier re lonibcile.


. Galrne coiipee noer lerloatL cratsamp;p dansle tu^,etapesclaccontpaymsdzd'uurcrip^nbsp;hoft et cbi oase clc. sai^-

I\?0 . losilion, des corps dans les loculi. £e loculus du, miUeu. s'fdppelle Bisomiuu^Townbsp;qu 'd renorme deirr corps.

IV?6 . (xilacomhes visiteesparlescduFhens. IL/iiul rernwyuernbsp;nbsp;nbsp;nbsp;laiihrne,,et tamp;fcalierpor

lofuel on descetui cuuepalcries üt^rieures cl on Ion ooit un, homme eclairanl avec/nbsp;wie torcite los pas de ccudc qui le suioenéd.


. lalene oti-ronpe de verre Iroiwee dans les calacornbes de dulnie-zt^nès cl dans laqueUenbsp;onJii hoire da po won. aie niar^t'Chrislantius,nbsp;qui rt'ett qir'oiwa aacuzx, mal. Ceile/ circonslancenbsp;yjll qraocr Vinscription/ siuvanle/i

yox nngt;A let.u.i5 est

AlTSA COÏ.STAXTl FERRE Ol'AH EtCL’lT FERRO COROXAIAT.


^ ?8. Fossoycur cwee les insb'wnenls der sa, projesswtv.

:V?9. lose dn sfuiq ^ sainle Flauie. ^ek' vase remph. d'un Janz/ifMmxc,nbsp;anee un/couvet'clc de menie metaL .On le'nbsp;conserme dans la chdsse de cette jeune mar-lyrc.b'oiwee daiw les ^dacomhes de Jainle-Jriscülc en i838, cj domiée au, ccUèzdiisme,nbsp;deperscoérazice delacOlbedFa^ deifeocrseni842.

^?10, Gziipe de verre j/w* laqueUe soni pdiiis deuce epowv. aveclciu'pdU eidcuü: letusnbsp;i/iles soul entourées eb' Tocdanialiori sqmbolx ^nbsp;gue. de Veucluirislit».-

PIE ZESEZ,BiBEmTS7B0IS,Tlquot;gt;Tl'RAS.


^?11. £anpe des caamp;xcomhes en terr'e caile aoec la cJiabijetlepour la por/er et 1^ erocbelnbsp;pour la, suspendre.


OT2.B .(iihicilum OU. ctnjpie deseaiacoinbes de SuiiU-lhntim. Cdrcosolujun, ou tennheaa,nbsp;sarmonié d'wi are •Hans la Iwielte de Varenbsp;est peinle l'kistoa 'C de donas. I). dept tomhesnbsp;ïatcrales cnoiroivionl Fanlel pruiripal,nbsp;^.Trois aatres locuh cui nioeau du sol .

. Ja.te de terre froiwé, au, tomieruv de solui Victvret eotileiuxui une partle,nbsp;de son .«lnq,cvmnie leproune l'i/tscriptiun,:

SANl^f sanaiiis.


IV?14. Cnpe cii verre-, OU Von remarque :

V.Je nwnvyramnu’, de JF.S. enlauré, d'mie

couronne.sqaihobe dela victoirc;2.lGtapa(j^

saint Perre d sednlTauL, le premier dqaudie, le secondd dr'citelousdeujsdtuis l’tUUliulenbsp;dela inédUcUionlgt;°laeclamatlou dcais la.-quelle leuwtyisces eM Tnispoiu-^Hsa.s,sui-vant la, manilre, d'ecrirejbrt usitèe daas lesnbsp;premiemfemps de refuse et les dernlersdr lanbsp;repubbque/.


¦Va/vdermerm,, / Kuy mv Eeu,rre..in’l Sruecl.


-ocr page 344- -ocr page 345-

TABLE DES MATIÈRES

COSTEMJES CAHS LE TOME QUATRIÊME,

Pages.

14 nbsp;nbsp;nbsp;Décemere. — Les Calacombes, ou Rome souterraine. Coup d’ceil

general. Noms et positions. Nombre des différents quarliers. Pour-quoi sur Ie bord des Voies romaines. Formes et dimensions des Catacombes.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;S

12

15 nbsp;nbsp;nbsp;— Origine des Catacombes. Opinion de Bosio et de Boldetti. Opinion du P. Marchi. Preuves hisloriques de l’origine exclusivementnbsp;chrétienne des Catacombes. Preuves physiques.

19

19 nbsp;nbsp;nbsp;— Caractères généraux des Catacombes. Les Fossoyeurs. Histoirenbsp;des Catacombes. Catacombe de Saint-Pierre. Sou origine. Sesnbsp;gloires.

20 nbsp;nbsp;nbsp;— Les Fossoyeurs. Portrait. Impression. Prière. Catacombe Va-ticane. Son origine. Ses gloires. Linceul des martyrs. Instrument

de supplice. Vénération des fidèles. Monde chrélien. nbsp;nbsp;nbsp;32

21 nbsp;nbsp;nbsp;— Histoire des Catacombes depuis leur originejusqu’au xv' siècle.

22

Pieux empressemenl des cbréiiens a reposer dans les Catacombes. Inscriptions. Trois reraarijues sur les inscriptions. Sepulture dansnbsp;les Calacombes après les persécutions. Translation des martyrsnbsp;dans les églises. Sépulture dans les églises. Histoire et descriptionnbsp;des Calacombes de la Voie Aurélienne. Cimetières de Saint-Calé-pode, de Saint-Jules, des Saints-Procès et Martinien.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;47

— nbsp;nbsp;nbsp;Histoire des Catacombes depuis Ie xvi' siècle jusqu’a nos

25

jours. Réouveriure providentielle. Saint-Pbilippe-de-Néri. Bosio. Boldetti. Marangoni. D’Agincourt. Raisons de I’encombrement desnbsp;galeries. Fouilles actuelles. Voie Cornclienne. Catacombes de lanbsp;Voie de Porto, de Saint-Pontien, de Généreuse Ad Scxlnm Philippi,nbsp;du pape saint Jules.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;37

— nbsp;nbsp;nbsp;Catacombes de la Voie d’Ostie. Double destination des Catacombes. Noms divers. Discipline primitive. Séjour des chrétiensnbsp;dans les Catacombes pendant la paix, pendant les persécutions-Pourquoi plusieurs entrées. Raison de la formedes galeries.Tombesnbsp;a deux, a trois corps. Catacombes de Sainte-Luci'ne, de Saint-Ti-mothée, des Saints-Félix, Adaucte et Comodilla, de Saint-Cyriaque. 68

2 Janvier. Catacombes de la Voie Ardéatine. Inscriptions des tom-beaux. Caractères distinctifs des inscriptions chrétiennes. Briè-veté, simplicité. Contexture. Le mot Depotitiis. Les acclamations.

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540 TABLE DES MATIÈEES.

Pages.


Catacombe des Saints-Nérée et Acliillée. Triomplie de sainle Fla-\ie. Catacombes de Saint-Damase et des Saints-Marc et Marcellin. Hisloire de leur mariyre. Leur réponse. Le pape saint Damase.

3 Jana IER. Catacombes de laVoie Ardéatine (suite). Nouvelle étude des inscriptions. Noms qui s’y trouvent. Dédicace aux Dieux Manes.nbsp;Ponctuation. Age des inscriptions. Catacombes de Sainte-Balbinenbsp;et de Sainl-Marc, pape. Histoire.

5 nbsp;nbsp;nbsp;•— Catacombes de la Voie Appienne. Lampes. Placement. Doublenbsp;destination. Matière. Forme. Emblèmes. Catacombe de Saiut-Cal-lixte. Origine. Découvertes de Bosio. Parlie publique du cimetièrenbsp;de Saint-Callixie. Souvenirs de sainte Cécile, de saint Philippenbsp;de Néri, Moïse du xvF siècle. Partie secrèle du cimetière de Saiut-Callixte. Nouvelle gloire de saint Philippe de Néri. Bosio et Ba-ronius.

6 nbsp;nbsp;nbsp;— Bénédiction de Peau pour les malades. Nouvelle visite auxnbsp;Catacombes de Saint-Callixte. Les Cubicula, Cubiculum clarum.nbsp;Antiquité des Cubicula. Paroles de saint Jéronie. Trois espèces denbsp;Cubicula. Origine. Soin et respect de l’Église pour les Cubicula.nbsp;Ordre des Cubiculaires. Descente aux Catacombes de Saint-Callixte. Glorieux souvenirs des persécutious, des Papes et des Martyrs.

8 — Catacombes de Saint-Zéphirin, de Sainte-Cécile, de Saint-Sixte. Histoire. Monument arqué, Arcosolium ou Monumenlum arcualum.nbsp;Origine. Détails sur l’Eglise de Bonte en 251. Inscription et origine des crypies et des églises. Leur destination religieuse. Preuvesnbsp;historiques. PreuA'es archéologiques. Autel.Chaire pontificale. Pm-byterium. Confessionaux. Bénitiers.

12 nbsp;nbsp;nbsp;— Martyre de sainte Tatienne. Pourquoi les martyrs exposés auxnbsp;bêtes. Catacombes de la Voie Appienne. Suite. Catacombe de Pré-textat. Etendue. Origine. Coup d’oeil général sur ses gloires. Inscription du pape Damase. Visite de la Catacombe. Raison denbsp;1’exiguitc des églises souterraines.

13 nbsp;nbsp;nbsp;—- Catacombes de la Voie Appienne (suite). Gloire qui revient a

Sainte-Sotère. Histoire.


81


93


108


119


128


141


l’Eglise des Catacombes. Catacombe de

Forme architecturale des Églises souterraines. Vestibule. Tombeau


du fond. Transenne ou barrière. Tableau du tombeau servant d’au-tel. Tombes latérales. Places séparées pour les hommes et pour les femmes. Ecole des Catécbumènes. Type de nos églises prisnbsp;dans les Catacombes et non dans les Basili'ques paiennes.

14 nbsp;nbsp;nbsp;— Catacombes des Saints-Eusèbe et Marcel. Histoire. Peinturesnbsp;des Catacombes. Utilité. Authenticité. Concile d’Elvire expliqué.nbsp;Usage de la sculpture et de la peinture sacrées aussi ancien que lenbsp;cliristianisme. Peintures des Catacombes contemporaines des Apó-tres et des persecutions. Adieu a la Voie Appienne.

15 nbsp;nbsp;nbsp;¦— Catacombes de la Voie Latine. Catacombe d’Apronien. Histoire. Sainte Eugénie. Peintures des Catacombes, partie histo-rique. Adam et Ève. Caïn et Abel. Noé. Explication d un anneau.nbsp;Catacombe des Saints-Gordien et Epimaque. Histoire.

— Catacombes de la Voie Latine (suite). Catacombes des Saints-Simplicius et Servilien. Histoire. Peintures des Catacombes, partie bistorique. Abraham. Absence de crucifix dans les Catacombes.nbsp;Différeutes espèces de croix. Joseph. Moïse. Quatre circonstances


150


Kil


174


17

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TA.BLE DES MXTIÈRES. nbsp;nbsp;nbsp;541

Pages.

de sa vie souvent représentées. Pharaon. Arche d’alliance. Samson. David. Elie. Catacombe de Saint-TerUillien. Histoire.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;182

19 nbsp;nbsp;nbsp;J.t.vviER. Catacombes de la Voie Lavicane. Catacombes des Saints-Ti-

burce, Marcellin, Pierre et Hélène. Histoire. Peintures. Partie his-torique. Job. Les trois enfants dans la fournaise. Daniel dans la fosse aux lions. Jonas. Ezéchiel. Catacombe des Saints-Claude,nbsp;Nicostrate, Sympborien, Castorius, Simplicius et des quatre Saintsnbsp;couronnés. Histoire.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;192

20 nbsp;nbsp;nbsp;— Catacombes de la Voie Lavicane (suite). Catacombe de Saint-

Castule. Histoire. Peintures, partie historique (suite). Naissance de Noire-Seigneur. Adoration des Mages. Jésus au milieu des docteurs,nbsp;baptise par saint Jean. Détails sur la croix stationnale. Jésus con-vertissaiit la Samaritaine; giiérissant 1’bémorroïsse, Taveugle-né;nbsp;muhipliant les pains. Détails sur les marques des pains. Catacombe de Saint-Zotique. Histoire.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;200

26 nbsp;nbsp;nbsp;— Catacombes de la Voie Tiburtine. Catacombe de Saint-Laurent

OU de Sainte-Cyriaque. Histoire. Peintures des Catacombes. Partie historique (suite). Notre-Seigueur bénissant les petits enfants, res-suseitant Lazare, sous la figure du bon Pasteur, assis sur une nion-tagne d’oü sortent quatre tleuves, représenté dans la fleurde I’Jge,nbsp;sous la figure d’uu agneau portant la croix. Monogramme dunbsp;Christ. Raison de cel emblème.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;208

27 nbsp;nbsp;nbsp;— Catacombes de la Voie Nomentane. Catacombe ad Nymphas.

Histoire de saint Nicomède. Histoire. Peintures, partie historique (fin). La sainte Vierge, saint Pierre et saint Paul, les Marips, les Chretiens en prières, les Agapes, les Catacombes de Saint-Alexandre. Histoire. Catacombe des Saints-Priraus et Félicien. Histoire.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;215

28 nbsp;nbsp;nbsp;— Catacombes de la Voie Nomentane (suite). Catacombe de Saint-Restitut. Histoire. Catacombe de Sainte-Agnès. Histoire. Peinturesnbsp;des Catacombes, partie decorative. Coup d’oeil sur Ie symbolismenbsp;primitif. Emblème des premiers chrétiens, Ie poisson, Ie dauphin. 227

29 nbsp;nbsp;nbsp;— Catacombes de la Voie Solaria Nuova. Catacombe de Sainte-

Priscille. Histoire. Peintures des Catacombes, partie decorative (ün). Emblèmes : Le boeuf, la colombe, Ie cerf, Ie paon, Ie coq, les ar-bres, le cyprès, le palmier, l’olivier, la vigne, les couronnés, l’an-cre, le chandelier aux sept branches. Catacombes de Saint-Sylves-tre, de Sainte-Fclicité et de Sainl-Alexandre. Histoire.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;237

1quot; Févwer. Catacombes de la Voie Solaria Nuova. Catacombes de Novella, d’Oslnano. Histoire. Nouveau coup d’oeil sur Tart Chrétien. Confirmation des vérités de la foi. Catacombes de Sainte-Hilarie et de Saint-Thrason. Histoire.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;248

5 — Catacombes de la Voie Solaria Vecchia. Catacombe du coteau du Concombre. Histoire. Inscriptions des Catacombes. Véritésnbsp;qu’elles enseignent. Inscriptions des Catacombes.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;257

16

13 Mars. Catacombes de la Voie Solaria Vecchia (fin). Catacombe de Saint-Ilermès. Histoire. Habitants des Catacombes; ils sont tousnbsp;catholiques : parmi eux, il n’y a ni paien, ni juif, ni hérétique. 268nbsp;— Madone de Sainte-Marie-iu-Trosteeerc. Nouvelle visite aux Catacombes de Sainl-Hermès et a la Voie Solaria. Souvenirs. 11 n’y eutnbsp;jamais ni juif, ni hérétique inhumé dans les Catacombes. Troisnbsp;classesd’habitants de la Rome souterraine. Simples fidèles. Martyrs

T. IT. nbsp;nbsp;nbsp;IS


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TABLE BES MATIERES.

Pages.

innommés. Martyrs de nom propre. Culte des Martyrs. Rome ne baptise pas les reliques.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;278

17 nbsp;nbsp;nbsp;Mars. Saint Joseph d’Arimathie. Catacombes de la Voie Flaminienne.nbsp;Catacombe de Saint-Valeiitin ou de Saint-Jules. Ilistoire. Moyensnbsp;par lesquels les chrétiens connaissaient Ie nom des martyrs. Signes

du martyre. La Palme, premier signe. nbsp;nbsp;nbsp;289

18 nbsp;nbsp;nbsp;— Catacombes de la Voie Flaminienne (suite)j Catacombe de Sainte-

Tliéodora. Vase de sang, second signe du martyre. Zèle des chrétiens de tous les temps pour avoir Ie sang des martyrs. nbsp;nbsp;nbsp;303

19 nbsp;nbsp;nbsp;— Audience pontificale. Les vases de sang places auprès des loculinbsp;des Catacombes ne sont ni des vases lacrymatoires ni des vases denbsp;parfums, raais des vases de sang. Ce sang est celui des martyrs. Lenbsp;vase de sang est le signe infaillible du martyre. Lettre de M. Raoulnbsp;Rochette.

23 — Le martyre sufflt pour la canonisation. Surveillance des Catacombes. Extraction de deux corps de martyrs dans les Catacombes de Sainte-Priscille. Soin des reliques. Sainteté des Catacombes.nbsp;Nombre des martyrs de l’Eglise en general, de Rome en particuliernbsp;(note). Adieux aux Catacombes et a Rome.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;322

FIN DE LA TABLE DU TOME QÜATRIÈME.

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ESSAI SUR LES INSCRIPTIONS.

CIIAPITRE PREMIER.

But de eet essai. — Importance des inscriptions.

Le but de ce modeste travail sur les inscriptions est tout a la fois scien-tifique et religieus.

1. nbsp;nbsp;nbsp;ScienUfique. Les inscriptions fornient une partie essentielle de lanbsp;science archéologique (i). On sait quellcs précieuses luraières ellcs répan-dent sur la chronologie, la geographic, Thisloire, la religion, les moeurs, lesnbsp;usages des peuples de l’antiquité en general, el du Peuple-Roi en particulier. Souvent niême elles suppléent au silence des historiens, roslitueni lesnbsp;passages aliérés de leurs écriis el fixent le sens des lois. De la, I’estiinenbsp;singulière qu’en ont faite les plus savants hommes de tous les pays. Afinnbsp;de rendre a chacun ce qui lui appartient, je dirai que les élémenls de eetnbsp;Essai sont lires des grands iravaux de Maffei, de Doni, de Gruter, d’Ha-genbuch, de Gori, de Zacaria, de Fabretli, etc. De la encore, l’empresse-inent de loutes les villes de l’Europe a recueillir les inscriptions. Elles senbsp;irouvent par cenlaines dans nos Musées de France; elles abondent ennbsp;Italië. Gênes, Parme, Véronê, Florence, Pise, Naples, Rome surtout, possè-dent un peuple entier de ces fldèles organes d’un monde qui n’esl plus.nbsp;Quels trésors d’érudition elles ouvrent au voyageur! quelles nobles Jouis-sances elles lui procurent!

2. nbsp;nbsp;nbsp;Religieux. La connaissance des inscriptions païennes offre un avan-tage de plus au savant chréiien. Elle lui apprend a dislinguer les monuments d’origine païenne et d’origine chrétienne. Le sujet, le style, les mots,nbsp;les signes, la contexture des unes et des autres, sont lelleinent différents'nbsp;qu’avec un peu d’habitude, il est impossible de les confondre. Importantnbsp;par lui-même, ce résultat le devient plus encore par les conclusions au.x-quelles il conduit. La première : que les Catacombes romaines ne renferment aucun monument païen; la seconde : que les reliques tirées de cesnbsp;x'énérables ciinelières el des monuments qui s’y trouvent, sont parfaite-inent authenliques et dignes des hommages du monde chréiien. Ce faitnbsp;seul est une réponse aussi neuve que peremptoire aux objections des protestants, aux blasphèmes des impies et aux légèretés impardonnables denbsp;certains voyageurs modernes.

Mais autant les inscriptions présentent d’avantages, autant ellcs sont quelquefois difficiles a déchiffrer et a comprendre. Les notions suivanies,nbsp;joinies au Diclionnaire des Sigles, placé a la lin de eet Essai, sont de nature a lever une partie des difficultés, en rendant élémentaire une étudenbsp;dont le voyageur en Italië regretlerait vivemenl de u’avoir pas la clef.

(0 Ricercare le sigle, e le note compendiarie degli antichi momimenli scrUli,fü sempredegnaoccupazionede’ sommi eradhi.y etmigholhLeiioni element. diArcheolag.,nbsp;t. Il, p. 196.

-ocr page 350-

344 LES TROIS «OME.

Que Ie désir de lui rendre utile et agréable son pèlerinage, serve d’excuse a riraperfectiou de notre travail.

CHAPITRE II. Division des Inscriptions.

La première chose è faire pour trouver Ie sens d’une inscription, c’est de connaitre a quelle classe elle appariient. En effet, la signifieation desnbsp;sigles OU abréviations qui présenlent Ie plus de difficulté, se trouve indi-quée, au moins d’une manière générale, par l’ensemble de I’inscripiionnbsp;elle-mêrae. Or, on distingue six classes d’inscriptions:

Iquot; Les inscriptions volives. Dans cette catégorie se rangent non-seulement les inscriptions oü il est fait mention d’un veen, mais encore celles qui rap-pellent la consécration d’une chose quelconque a la Divinité, comme lesnbsp;temples, les autels, les statues, etc. Exemples des unes et des autres :

MERCVRIO V. L. s. M.nbsp;M. SC.EVILIVSnbsp;CORNEOLVS.

« Mercurio votum libens solvit merito, Marcus Scajvilius Corneolus (i). »

j. o. M.

CONSERVATORI P. POMPONIVSnbsp;CORNELIANVSnbsp;CONSVLARISnbsp;CVRATORnbsp;RERVMnbsp;PVBLICARVM.

« Jovi optimo maximo, Publius Pomponius Conservatori Cornelianus Consularis, Curator rerum publicarum. »

Ordinairement VEx-volo se trouve a la fin de l’inscription, exprimé par les sigles suivants : v. s., ou v. l. s. m. Exemple :

MINERV.E AVG. OVINTVS CASSIVSnbsp;PAPIRI. ET CLODIA

V. S.

« Minerva; Augustas, Quintus Cassius Papirius et Clodia votum solve-runt.»

On sait que les différents Césars avaient leur divinité tutélaire a la-quelle ils donnaient leur nom pour surnom : Minervee Augusim, Plutoni Nerviano, etc. Du reste, les mots un peu difficiles a comprendre sont ex-pliqués dans Ie Dictionnaire des Sigles.

(1) Notre travail élant desliné aui personnes qui savent Ie lalin, il nous a semblé siiperflu de traduire les inscriptions.

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ESSAI SUR LES INSCRIPTIONS. nbsp;nbsp;nbsp;.345 .

Quelquefois Ie nom des consuls est indiqué. Dans ce cas, il suffit, pour connaitre la date de Finscription, de consulter les fastes consulaires quenbsp;nous donnons plus loin. Exeniple :

IN H. D. D. I. o. M.

CENIO. LOCI. ET. FOR.

TVN/E. DIS. DEABVS QVE. EMERITIVSnbsp;SEXTVS. MILES.

LEGIONIS. XXII.

PR. P. F. SEVERIA N.E. BF. COS. PROnbsp;SE ET SVIS. POSVnbsp;IT. V. S. L. L. M.

MAXIMO. ET.

/ELIANO. COSS.

IDIBVS. JANV ARIIS.

« In honorem domüs divina;, Jovi optinio maximo, Genio loei et For-tunse, Dis Deabusque, Emeritius Sextus, miles Legionis XXII, primigenise piae fidelis Severiana;, beneliciarius consiilis, pro se et suis posuit votumnbsp;solvens Isetus libenter nierito; Maximo et jÉliano consulibus, idibus ja-nuariis.

En se reportant aux fastes consulaires, on trouve Ie consulat de Maxime et d’Elius, Fan 223 après Jésus-Christ. Ainsi Finscription est du 13 janvier 223.

2“ Les inscriptions yMridiqucs. Cetle classe comprend toutes les inscriptions relatives aux lois, sénatus-consultes, plebiscites, c’est-a-dire, décrets du sénat et du peuple; aux actes publics etprivés, contrats, testaments, etc.nbsp;Une ebose suriout distingue ces inscriptions, d’ailleurs fort importantes,nbsp;c’est Ie nom des consuls : il accompagne toujours la loi rendue sous leurnbsp;gouvernement. Exemple :

L. .ELIO C.ESARE. IMP. P. COELIO

P. F. BALBINO VIBVLLO PRO COSS VII ID VS OCTOBRIS

CN. DOMITIVS. VALENS. II. VIR. ID.

PRjEEUSTË. C. JVLIO SEVERO PON TIF

LEGEM. DIXIT. IN. EA. VERBA. QV.E INFRA SVNT, ETC.

« Lucio jElio Caisare imperatore, Publio Coelio Publii filio, Balbino Vi-bullo Proconsulibus, septimo idus octobris, Cneus Domitius Valens, Duumvir, Juridicando, prseeunie Caio Julio Severo Pontifice, legem dixit, etc. »

3” Les inscriptions puftKqMcs. On entend par inscriptions publiquescelles qui sont gravees sur les monuments publics, tels que les temples, les théa-tres, les murs des cités, les arcs de triomphe, les ponts, les aqueducs, lesnbsp;frontières des différents pays, les milliaires des voies, etc. Remarquons, ennbsp;passant, que les inscriptions des temples se plafaient, en général, sur Far-chltrave et sur la frise des chapiteaux des colonnes, et non point au fron-

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346 LES TROIS ROME.

lispice du temple sur des tables de marbre. Les inscriptions des murs de villes se gravaient sur les portesmêmes de la cité. On connait Tlnscriptionnbsp;du Panthéon d’Agrippa placée sur l’architrave; voici celle des murs de Yé-rone gravée sur la porte de cette ville, sous Ie règne de Gallien, l’an 263 denbsp;Notre-Seigneur :

COLONIA. AVGVSTA. VERONA. NOVA.

GALLIENIANA. VALERIANO II ET LVCI LIO. CONS. MVRI VERONENSIVM. FAnbsp;BRICATI. EX DIE. III. NON. APRILIVM.

DEDICATE PR. NON. DECEMBRIS. JVBEN TE. SANCTISSIMO GALLIENO. AVGVSTOnbsp;N. INSISTENTE AVR. MARCELLINO. V. P.

DVC. DVC. CVRANTE /VL. MARCELLINO.

« Colonia Augusta Verona nova Gallieniana, Valeriano iterum et Lucilio consulibus, Muri Veronensium fabricali ex die tertio nonarum apriliuni,nbsp;dedicati pridie nonas decerabris. Jubente Sanctissirao Gallieno Augustonbsp;nostro; insistente Aurelio Marcellino viro perfeclissimo duce ducenario;nbsp;curante Julio Marcellino. »

Si Ie monument est dédié aux empereurs on a d’autres personnages, leur uom, placé au dalif, figure en tête des inscriptions. Exemple :

TI. CyESARI. DIVI.

AVGVSTI. F. DIVI. mi NEPOTI. AVG. PONTIFIC.

MAXIMO. COS. V

IMP. VIII. TR. POL. XXXVIH AVGVRI. XV. VIR. SACR

FACIUN. VII. VIR. EPVLON L. SCRIBONIVS. L. F. VOT. CELERnbsp;iEDILIS. EX. D. D.

PRO LVDIS.

« Tiberio Csesari divi Augusti filio, divi Julii nepoti Augusto, Pontifici maximo, Consul! quintüm, Imperator! octavüin, Tribunltia potestate trige-simüm octavüm, Auguri, Quindecemviro sacris faciendis, Septeraviro epu-lonum, Lucius Scribonius, Lucii filius Votina (de la tribu Votina) Gelernbsp;öcdilis, ex decreto Decurionura, pro ludis. »

Cette belle inscription en riionneur de Tibère montre Ie soin particulier qu’avaient les Remains de nommer les personnes qui avaient élevé les édi-fices, OU qui avaient contribué a leur construction, et surtout d’indiquer lanbsp;cause OU l’occasion de l’érectioii. Quand les monuments ne sont dédiés anbsp;personne, Ie nom de ceux qui les ont édifiés se place en tête de l’inscrip-tion. Exemple:

IMP. C^SAR. DIVI. F. AVG.

PARENS. COLONIiE MVRVM ET TVRRES DEDIT

T. JVLIVS OPTATVS TVRRES VETVSTATE CONSVMPTAS. IMPENSA. SVA. RESTITVIT.

i( Imperator Catsar, divi (Catsaris) filius. Augustus, parens colonise, mu-

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ESSAI SUR LES INSCfirPTlONS. nbsp;nbsp;nbsp;347

rum et turres dedit; Titus Julius Optatus turres vetustate consumptas, iin-pensa sua restituit.»

Ceiix qui avaient donné l’ordre de construire les monuments ou qui avaient approuvé l’ouvrage n’étaient pas oubliés; ainsi, sur un temple denbsp;la déesse Matuta on trouve :

matLys. mallh's. m. f. l. ttrpilivs

L. F. nVOMVIRES. DE SENATVS SENTENTIA ^DEM FACIENDAM. COEKAVERVNT EISDEMnbsp;QVE PROBAVERE.

« Manlius Mallius Marei filius, Lucius Turpilius Lucii filius, Duumviri, de Senates sententia a3dem faciendam curaverunt iidemque probavere. »

Les monuments les plus modestes, tcls que les amphores, les briques, les vases en terre cuite, redisent égalcment et Ie nom du terrain d’oü ils ontnbsp;été tirés et de la fabrique oü ils ont été faits, quelquefois mêrae Ie nom desnbsp;consuls sous lesquels ils furent fabriqués. Exemple ;

OPVS DOL DE FIGVL PVBLLMAMS PRÉDIS .«MILI^ES SEVER^S.

* Opus doliare de figulinis Publinianis, praediis iEmiliae Severaï. a

EX

SEVERO ET ARRIANO COS. FIGL. DOM. DOMIT.

K Severe et Arriano consulibus, ex figlinis domus Domitiae. »

De la, les sigles suivants qu’on trouve d’ordinaire sur les oiivrages de ce genre :

Op. dol. OU o. p., opus do Hare.

Op. fig., opus figulinum.

O. d. V., opus doliare vinarium.

Ex. praid., ex prmdiis.

Ex. poss., ex possessione.

Ex. fig., ex ftglina.

Ex off., ex officina.

Remarquons, en passant, eet usage invariable, cliez les maitres du monde, de niarquer tous leurs monuments, tous leurs ouvrages par unenbsp;inscription qui en redit l’origine, la cause, l’époque, les auteurs, les circon-stances. Rome chrélienne l’a fidèlement conserve, et on doit Ten bénir;nbsp;sans cette attention, qu’on peut appeler providentielle, combien de faits,nbsp;de dates seraient aujourd’hui perdus? II serail bien a désirer que tous lesnbsp;autres peuples eussent suivi eet exemple.

Ne quitions pas les inscriptions publiques sans (lire un mot des tesserm gladialoricB, ou marques lionoriliques des gladiateurs. La tessera gladiato-ria élait une espèce de jeton ou de dé que recevait Ie gladiateur émérile, etnbsp;qui porlait Tindicaiion des combats dans lesquels il avail glorieusemcutnbsp;figure, ainsi que Ie nom du Laniste, Ie jour et 1’année du combat : c’étaitnbsp;la croix d’lionneur de ces soldals-la. Exemple :

FAVSTVS.

ANTONl SP. K. APRnbsp;M. LEP. L. ARR. COS.

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Ö48 LES TROIS ROME.

« Faustiis (servus vel gladiator) Antonii, spectatus (spectaculo exhibilus) kalendis aprilis, Marco Lepido, Lucio Arrio Consulibus. »

4“ Les inscriptions hüloriques. Elles ont pour but de transmettre a la postérité les fails niémorables et les norns de ceux qui les accomplireut.nbsp;A eetteclasse appartieiinent les Fasles Capilolins, Ie célèbre marbre d’Au-cyre, conlenant la vie d’Auguste, Ie voeu de Ponipée après la guerre denbsp;trente ans, etc. Une noble siinplicilé forme Ie caraclère distinctif de ces inscriptions. Comnie exemple, je citerai seulement celle du consul Appius,nbsp;fondaleur de la Voie Appienne ;

APPIVS. CLWDIVS c. F. C/ECVS

CEXSOR. COS. BIS. DICT. IXTERREX. III

PR. II. .ED. CVR. II. Q. TR. MIL. III. COM PLVRA OPPIDA. DE. SAMNITIBVS. CEPITnbsp;SABINORVM. ET. TVSCORVM. EXERCInbsp;TVM. FVDIT. PACEM. FIERI. CVM. TÏR.

RlIO (sic)

REGE. proiiibvit. in. censvra. viam

APPIANI. STRAVIT. ET. AQVAM. IN VRBEM. ADDVXIT. ^DEM BELLONAnbsp;FECIT.

« Appius Claudius Caii filius coecus, Censor, Consul bis, Dictator, In-, lerrex tertiüm, Prietor bis, yEdilis curulis bis. Quaestor, Tribunus militumnbsp;tertiüm, etc. » Au lieu de Pyrrhus, I’inscriplion porte Tyrrhus.

5° Les inscriptions honorifiques. On en distingue de deux sortes : les unes relatent Ie décret du sénat, des empereurs, des colléges, des colonies, etc.,nbsp;en veriu duquel une statue, un monument, des honneurs ont été décernésnbsp;a quelque personnage; les autres mentionnent 1’honneur, non-seulementnbsp;décerné, mais accordé. Le nom de Ia personne auquel Ie monument est élevénbsp;commence l’inscription, et se trouve au datif : cette circonstance est unenbsp;preuve d’authenticité. Exemple :

M. caïciLio NOVATILIANO C. Vnbsp;ORATORI ET POETnbsp;.E ILLVSTRI ALLEnbsp;CTO INTER CONSVnbsp;LARES PRAiSIDInbsp;PROV. MOES. SVPnbsp;JVRIDIC. APVL. ET CAnbsp;LAB. PR.ET. TRIB. PI.

Q. PROV. AFRIC SPLENDIDISSIMVSnbsp;ORDO

BENEVENTANORVM PRIVATIM ET PVBLICnbsp;PATROCINIO EJVSnbsp;S^PE DEFENSI P. D»

« Marco Csecilio Novaliliano clarissimo viro, oratori et poetae illustri,

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ESSAI SCR LES INSCRIPTIONS. nbsp;nbsp;nbsp;ö-iO

allecto inter consulares, PriEsidi provinciae Moesiae superioris, Juridico Apuliac et Calabriae, Praïtor, Tribiinus plebis, Quaestor provinciae Africae,nbsp;splendidissimus ordo Beneventanoruin privatim et publice p,itrocinio ejusnbsp;saepe defensi posuerunt decreto decurionum. »

Quelquefois on imite Ie style grec et Ie nom du personnage est a l’aecu-satif; témoin Pinscription de 1’athlète Filunienus :

FILVMENVM

DDD. ET. PRINCIPES. N. VAIENTINIAN VALENS. ET GRATIANVS SEMP. AVGGnbsp;FILVMENVM IN OMNI. ATHLETICO. CERnbsp;TAMINE. ETG .ETERNITATISnbsp;GLORIA. MGNVM ESSE. JVDICARVNT.

(( Filumenum Domini, Domini, Domini et Principes nostri, Valentinianus, Valens, et Gratianus semper Augusti, etc. »

Si Je personnage, tont en acceptant l’honneur qu’on lui fait, a remboorsé la dépense du monument; si la dépense est restée a la charge du fonda-teur, cette double circonstance est également rapportée. En général, riennbsp;n’est omis, dans ces précieuses inscriptions, de ce qui peut instruire la pos-térité sur Ia nature et la cause de la distinction honorifique, sur les litresnbsp;du personnage, sur Ie nom et les qualités des personnes qui Pont décernée :nbsp;c’est toute une page d’histoire; j’en citerai un dernier exemple :

M. HELVIO. M. F. M. N. SERG AGRIPP.®. F.

IIVIC ORD. SPLENDIDISSIMVS ROMVLENSIVM

IMPENSAM FVNERIS STATVAM LOCVM SEPVLTVR.Enbsp;DECREVIT

M. IIELVIVS. AGRIPPA. PATER IIONORE. VSVSnbsp;IMPENSAM REMISIT.

V Marco Helvio, Marei filio. Marei nepoli Sergio, Agrippte filio, huic ordo splendidissimus Romulensium impensam funeris, statuam, locum sepul-turae decrevit : Marcus Helviqs Agrippa pater, lionore usus, impensamnbsp;remisit.»

6° Les inscriptions funéraires. Placées sur les mausolées, sur les sarco-phages, sur les marbres, sur les olim des colombaires, elles sont les plus norabreuses, et méritent Pattention spéciale du voyageur. C’est en les étu-diant qu’il apprendra surtout a distinguer Ie style, la contexture, Ie cachetnbsp;païen, de la forme chrétienne, et qu’il arrivera, sans peine et sans craintenbsp;d’erreur, a cette conclusion fondamentale : que nos Catacombes ne con-liennent aucun monument païen. Or, les inscriptions funéraires des anciensnbsp;Domains sont de deux sortes ; les unes simples et communes; les autresnbsp;d’une eontexture singuliere et aceompagnées de détails sur Ie droit de sé-pulture, sur Pinviolabilité du tombeau, etc., etc.

Toutescommencent a peu prés invariablement par la formulesolennelle; D. M., Dis Manibus; ou D. M. S., Dis Manibus sacrum; ou D. I. M., Dis in-feris Manibus. D’ordinaire cette formule est seule; quelquefois on la trouve

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LES TROIS ROME.

acoompagnéê de ces mots ; qvieti jetern^, perpetv.® secvritati, ou D. S., IHs securis. Le nora du défunt, sa filiation, ses qualités, les regrets qu’ilnbsp;laisse, le nom de ceux qui lui ont élevé sa tombe, ses années de mariage,nbsp;son age, le jour précis de sa mort, sont marqués avec soin. II faut cepen-dant remarquer que, sur les tombes chrétiennes, le jour de la mort el denbsp;la sépulture sont notés avec une exactitude plus religieuse encore. Lanbsp;raison en est dans l’usage oü furent, depuis les prémiers siècles, nos pèresnbsp;dans la foi, de prier pour les morts au jour de leur anniversaire, ainsi quenbsp;nous l’apprenons de Tertullien. Citons quelques exemples :

D. H.

AVRELI.E. SPENIS. T. t.

MESIVS HERMEROS. CO JVGI. CARISSIME ET tNCONnbsp;PARAVILI. CONQ. VIXIT. ANnbsp;IS. XIII. M. V. DXXXIII. H. XI

« Dis Manibus. Aurelise Spenis, Titi liberta;, Mesius Hermeros, conjugi carissimaeet incomparabili cum qua vixit annis tredecim, mensibus quinque,nbsp;diebus viginti septem, horis undecim. »

D. M.

aSLIA. EVTHENIAS

FECIT. SIBI. ET. ACILIO

PRIMIGENIO. PETRO

CONJVGI. SVO. OVI.

VIXIT. ANN. L.

ME. rill. Dl. VI.

BENEMERENTI. FECIT

V. ANN. xxvn.

MENSIBVS. V. D. xxn.

« Dis Manibus. yElia Euthenias fecit sibi et Acilio primigenio Petro, conjugi suo, qui vixit annis quinquaginta, mensibus quatuor, diebus sex,nbsp;benemerenti fecit. Vixit (sous-entendu, in matrimonio, ou mecum) annisnbsp;viginti septem, mensibus quinque diebus viginti duobus. »

En voici une avec le digamma ou j, pour B et V, et qui accuse l’époque de Claude et les temps postérieurs jusqu’au iv“ siècle :

D. M. SACRVM

SECENDVS JIXIT. MEN. IX. D. XXVI PETRONIA. NOE. SOROR. EJVSnbsp;JIXIT. ANNVM. MENS. III. D. XH.

IIIC. SEPVLTI. SVNT

« Dis Manibus sacrum. Secendus (ou Secundus) vixit mensibus novem, diebus viginti sex; Petronia Noe, soror ejus, vixit annum, menses tres, diesnbsp;duódecim; bic sepulli simt. »

Sur la tombe des femmes se met aussi le nom de leur mari: ce nom est ordinairement au génitif, régi par le mot uxor sous-entendu. Exemple :

c^ciliaï;

METELLai CRASSI

Q. CRETICI. F

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« Fannia (lilia) Lucü Fannii, (uxor) Nazulaei. »

Le nora de la profession, de l’habilalion, de la tribu, se trouve également indiqué, et U se place après les noni et surnoin de la personne. Exemple :

AVRELIVS. 1. L.

HERMIA. L.VXIVS »E COLLE. 'VIMINALI.

« Aurelius, Lucü (Aurelii) libertus Hermise, lanlus (boucber) de colle Virainali.

P. CORSELIVS CELADVS. LIDRnbsp;AR. EXTR. PORTAnbsp;TRIGEMINA

K Publius Cornelius Celadus, librarius ab extra porta Trigemina. »

Sur les tombes militaires on lit; Miles mleranus, avec le nom de la cohorte, de la legion, de l’aile, de la centurie, de la Hotte, du vaisseau, oü il a combaltu. Mil. coh. vi, veter. leg. xv.; mil. coh. xxii urbanm; iii. Vict.; iiiinbsp;Minerva, etc.; c’est-a-dire, miles cohorlis sexlai; veteranus legionis decimce-quintas; miles cohorlis vigesimce secundm urbanm; (miles) Iriremis Victorianbsp;(nom de la galère); quadriremis Minerva, etc. Enfin les aunées de servicenbsp;sont ordinairement indiquées par les sigles suivanls : mil. an. xvi, « mili-lavit annis sexdecim; » ou bien stip. xxvii, stipendiorum (annis) vigintinbsp;septem.

Telles sont les inscriptions communes.

Quant aux inscriptions d’une contexture singulière, je n’en rapporterai que deux ou trois exemples, dont l’explication suffira pour inilier a cettenbsp;lecture;

LVPENSIA. HIC EGO SVM. IXLATA. COISSVTIAnbsp;RVFA. CVIVS. OSSA. LEVITERnbsp;TEGAT. TERRA. MATER.

« Lupensia, hic ego sum illata a Consutia Rufa, cujus ossa leviter tangat terra mater. »

AVR. TIGRIS. C. F. AVR.

FELICIANO. V. P. MARITO mCOMPARABILI. CVM. Q. VInbsp;XI. ANNIS. XI. SINE. VLLAnbsp;DISCORDIA. RENEMERENTInbsp;CVM. DOLORE. MEO.

INSCVLPI. JVSSI.

« Aurelia Tigris Caii filia, Aurelio Feliciano viro perfectissirao, raarito incomparabili cuin quo vixi annis undecim, etc. »nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.

BENE SIT. FILIS. FILIABVS MEIS nbsp;nbsp;nbsp;'nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;'

ftVl. ME. BENE. COLVERVNT.

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5c2 LES TROIS ROME.

II est un grand nombre d’inscriptions qui mentionnent des legs pour que, chaque année, au jour anniversaire de la mort du défunt ou de sou fils,nbsp;on donnea ses concitoyens des comestibles : epulum, crustulum, mulsum,,nbsp;pecuniam, oleum, panem, carnem; ou que, chaque année, on apporte desnbsp;roses sur son tombeau : ad solemnia cibi, et rosarum, quod est ut singulisnbsp;annis rosw ad monumentum deferrentur, et ibi epularentur duntaxat; ounbsp;bien ; ad munus gladiatorium edendum; ut omnibus annis sacrificio ei pa-rentarentur, id est, oleo, lade, vino el victimarum sanguine statis diebus tumulus aspergeretur, vel remudarelur.

Quant aux inscriptions qui marquent Ie droit de sepulture, dies sont très-nombreuses et révèlent, chez les païens, Ie triste caractère d’égoïsmenbsp;dont j’ai parlé dans l’histoire des Catacombes. Les formules par lesquellesnbsp;est exprimée la propriété, Ie droit ou l’exclusion du monument, sont très-variées; en voici quelques exemples:

M. STATIUS M. L. CHILO

mc

BEV8. TV. VIATOR. LAS SE. QVI. ME PR/Enbsp;TEREIS

CVM. DIV. AMBVLA REIS TAMEN. HOC VEXIVNDVMnbsp;EST TIBInbsp;IS. FR. P. X.

IN. AG. P. X.

« Marcus Statius, Marei libertus, Cbilo, bic; heus! tu viator lassc, qui me prmteris, cum Divis ambulaveris, tarnen hue veniendum est tibi. (Voicinbsp;la mesure du monument ou du terrain appartenanl a Statius;) In frontenbsp;pedes decern; in agro pedes decern. »

On va jusqu’èi indiquer le nom des personnes vivantes et mortes qui ont droit au même tombeau. Le nom des morts est précédé de la lettre grecque 6, initiale du mot Siraw, ou Utii, mors, vel defundus; le nom desnbsp;vivants, de la lettre v, vivus ou viva. II parait que, dans les registres mili-taires, on marquait d’un thèla, 6, le nom des soldats morts; cet usage au-rait donné lieu a celui qu’on remarque dans les inscriptions. Exeraple ;

s. EGNATIA. SEX. L. .AVGE V. SEX. EGNATIVS SEX. L. NEICOnbsp;V. EGNATIA SEX. L. APOLLONIOnbsp;8. P, C^CILIVS. P. L. FAVSTVS

« Defuncta, Egnatia sexti liberta auge vivus. Sextus, Egnatius Sexti libertus neico viva. Egnatia Sexti liberta Apollonio defunctus. Publius Cm-cilius Publii libertus faustus. »

D’autres fois I’inscription indique, non les indivldus, raais la classe de personnes qui a droit a la même sepulture. De la, les sigles suivants, sinbsp;comrauns sur les pierres tombales : h. m. h. n. s, hoc monumentum hwredesnbsp;non sequitur; h. m. a. h. n. p-, hoc monumentum ad hwredes non perlinel.nbsp;Si les héritiers sont ad mis dans le tombeau, I’inscription a soin de lere-marquer; h. m. h. s., hoc monumentum hwredes sequitur. Quelquefois lesnbsp;seuls héritiers naturels doivent jouir de ce privilege, a l’exclusion des liéri-


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ESSAI SUR LES IJiSCRlPTIONS. nbsp;nbsp;nbsp;353

tiers légaux, et cette distinction setrouve également spécifiée: ii. M. ii. e. n.s., hoe monumenlum hairedes exleros non sequitur.

Ordinaireinent les affranchis, les affranchies et leur postérité avaient place au colombaire de leurs patrons. Celle faveur est exprimée par la formule : LiB. LiB. 0- POSTQ. E., Ubcrtis libcrlabusque posterisque eorum.

Telle était la jalousie des païens, a l’égard de leur sepulture, qu’ils indi-quaient soigneusement la contenance du terrain concede, afin que per-sonne ne put s’en emparer, Ie diiuinuer, y batir, en faire uu usage quel-conque. De la encore, ces sigles tant de fois reproduils sur les colonibaires et les tombes isolées : in. fr. p. xv.; in a, ou ina, om in agr. p. xii, in frontenbsp;pedes quindecim, in agro pedes duodecim. Coinrae la plupart des tombeauxnbsp;regardaient les voies publiques sur les bords desquelles ils élaient places,nbsp;in fronte veut dire in latum, in lalitudinem, ante fronlem, in monurhento,nbsp;in facie a via-, et in agro signifle : in tongum, in partem posteriorem, retro,nbsp;a retro, retrorsum. Si Ie tombeau forniait un quadrilalère ou l’exprimait denbsp;cette inaiiière : ö- Q. v.; quoquoversum; ou bien : in fronte et in agro pedesnbsp;quadratos. Exemple : in. a. p. q. xv., in. fr. p. o. xv., in agro pedes qua-dratos quindecim, in fronte pedes quadratos quindecim. Ils allaicnt jiisqu’anbsp;indiquer les fractions, comnie un demi-pied et menie quelques pouces :nbsp;IN. F. p. XV., IN. AG. p. xiis., in froiilc pedes quindecim, in agro pedes duodecim semis: in. fr. p. vii. S., in fronte pedes septem triens.

Pour protéger leur tombeau contre toute espèce de profanation, ils ne se contentaient pas de Ie placer sous la protection des Dieux .Manes; les inscriptions langaient encore des maledictions, et stipulaient des amendesnbsp;contre les violateurs; exemples; ii. m. b. m. a, liuic monumenio dolus malusnbsp;abesto; ou bien : si quis hoe vendere voluerit, arkm pontificum l. ss. x. mil-lia nummum inferel; vel : si quis alienum corpus hic intuterit, poenamnbsp;supra scriptam inferet. La plus grande malediction qu’ils pouvaienl lancernbsp;contre Ie violateur de leur tombe, était qu’il fut lui-mcine privé de sépul-lure; exemple ;

L/ESERIS. nVNC. TVMVLVM. SI. QVIS QVIS. IN. TARTARA. PERGASnbsp;ATQUE. EXPERS. TVMVLI. I,.ESERIS.

IIVNC TVMVLVM.

CIL\P1TRE III.

Orthograpbe dos inscriptions; ortliographe des lettres.

La première condition pour lire une inscription, e’est de connaiire a quelle classe elle appartient, cliaque classe ayant des sigles particuliers;nbsp;mais cela ne suffit pas, il faut encore se faniiliariser avec rorlbograplie lapidaire. Or, six choses doivent fixer Tattention : les lettres, les diphthon-gues, les sigles, la poncluation et 1’ornementalion.

Des lettres. II faut d’abord s’habituera plusieurs bizarreries dans la forme des lettres. 1“ Ou trouve des inscriptions latinos en caraclères grecs; celanbsp;peut tenir a ce que les deux langues se parlaienl indistinctement a Homenbsp;et en Italië sous I’empire et sur la fin de la République. 2“ La première etnbsp;la dernière ligne de Tinscripiion sont souvent écrites en lettres majusculesnbsp;tandis que les lignes iiitermédiaires sont en texte ordinaire. 3“ Dans Ie con-lexie, des lettres majuscules sont quelquefois mêlées a des lettres plus

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534 LES TROIS ROME.

petites. Cet usage n’a d’autre motif que la fantaisie du sculpteur ou l’onie-mentation du monument; exemples : övincTivs, maTer, consvLihvs, om-xIVM, cvrIam, MVNiclriA, sïipendIIs, mvnicipIIs, sIbi, intellIgast, etc. D’au-tres fois, la lettre majuscule iudique, en la suppléant, une lettre omise; exemples ; mercuRo, eSe, argentarI, boarI, copIs, pIssisio, tvrrIs, etc.,nbsp;pour Mercurio, esse, argenlarü, Boarii, copiis, piisimo, turrets ou turres.nbsp;Enfin, dans certains cas, pour indiquer qu’une syllabe est longue on redouble la lettre; exemples ; sxils, libertiIs, pour suis et liberlis.

A s’écrit quelqueiois comnie Ie A des Grecs, d’autres fois A.i Agt; Agt; X-

B comme notre 6 ou -S-

D comme notre d.

E est souvent remplacé par deux II; exemple matIIr pour mater, d’autres fois par Ie H des Grecs ou par Ie e en demi-lune g.

F prend quelquefois cette forme

G celle-ci ff.

H celle-ci IT, ou celle de 1’esprit doux i, ou celle de l’esprit fort B ¦

I On trouve a peine quelques inscriptions avec Ie i surmonlé d’un point; mais il se rencontre eii un certain nombre surinonté d’un petit A. Cellenbsp;manière de ponctuer, dont ou trouve des exemples au siècle d’Auguste,nbsp;devient commune au iv“ siècle. I surmonlé d’une petite ligne signilie et;nbsp;exemple:

IMP AVGG DD NN MAG. MAXIMO Inbsp;FL. VICTOR

i( Imperatoribus Augustis dominis nostris raagno Maximo et Flavio vic-loribus.»

L est souvent écrit en grec Agt; d’autres fois sous cette forme E..

M comme deux aA grecs; exemple ; AA ou M, les deux lignes du milieu étant beaucoup plus courles que les jambages latéraux.

P s’écrit quelquefois P.

Q comme il suit: O ou O sans petite queue.

U Le P des Grecs rem place quelquefois 1’R des Latins.

T se trouve quelquefois sans tcte; exemple : sIaIiIia pour Statitia.

U, excepté dans les inscriptions clirétiennes, ne se trouve jamais que sous la figure du V. Quelquefois il prend cette forme bizarre of % mais icinbsp;se presente uiie remarque importante. Dans les inscriptions qui datentnbsp;du règne de Claude, le digamina des Grecs remplace le V consonne; carnbsp;on sait que cet erapereur introduisit cette lettre grecque dans l’alphabetnbsp;latin. Suet. in Claud, c. 41. Exemples ; ampliaait, termisajit, MiJI, octa qiA,nbsp;XVAIR, pour ampliavit, terminavit, Divi, Octavia, Quindecemvir.

X s’exprime souvent par deux SS ou par CS.

Y par V.

CHAPITRE IV.

Orthographe des Diphlhongues.

Des simples lettres passons aux diplitiiongiies. 1° Les sculpleurs oit-blient souvent de les expriiuer; exemples : vite, bone, pour vilagt; bonte: 2° ils en font quelquefois sans raison; exemples : /EOrum, b.eneherenti.

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ESSAI SUR LES INSCRIPTIONS. 355

s.ECUNDA, pour eorum, benemerenti, secunda.ai pour ce est fort du godt des anciens Remains; néanrnoins on trouve cette forme de diphthongiienbsp;dans les siècles postérieurs a la république, jusqu’a Constantin, oü ellenbsp;tombe en desuetude; exemples; caicilio, provinciai, romai, clodiai, etc.,nbsp;pour Caecilio, Provincial, Romai, Clodice, etc.

Les diplilhongues sont quelquefois liées, d’autres fois non; exemples ; .ERARio, fortünae; qiiclqucfois les simples lettres qui ne forinent pas lesnbsp;diphthongues sont liées ensemble; exemples; Nixf AT x/2, reden ? ornbsp;aiRARio pour vixit annos. Redemplor ah mrario. Ces ligatures qui unissentnbsp;ces lettres simples sont d’une haute aniiquité. En voici un exemple quinbsp;remonte a la onzième année de Domitien; il est d’autant plus intéressant,nbsp;qu’il nous montre une punctuation qui ne peut être attribuée qu’a la bi-zarrerie du sculpteur;

CLAUDIA ATTICA ATTICI. AVG. LIB. ARATIOlSnbsp;IN. SACRARIO. CERERIS. ANTIATiA/6nbsp;DEOS SVA. INPENSA. POSVITnbsp;SACERDOTE. JVLIA, PROCÜLAnbsp;IMP. C.ESAR. DOMiTiW

AVG. GERMANIC. XI. COS

« Claudia Attica (uxor) Attici, Augusti liberti a rationibus in sacrario Cereris antiatima; (de la ville d’Antium) Deos sua impeusa posuit, saccr-dote Julia Procula imperatore Caisare Domitiauo Augusto gcrmaiiico, un-decimüm consule.

Après avoir parlé de Ia forme malérielle des lettres, disons quelquc chose des mots, savoir ; 1“ du changement des lettres; 2“ de leur omission;nbsp;5° de leur addition ou redoublement; 4“ de leur transposition.

iquot; Du changement des lettres. Rien n’est plus commun dans les inscriptions païennes et chrétiennes que les changements suivants :

Albei pour

Alvei.

Atabis

Atavis.

Bibus

Bivus.

Bivus

Yivus.

Bixit

Vixit.

Probincia

Provincia.

Serbus

Servus.

Sibe

Sive.

Viba

Viva.

B prend encore la place du P, exemples : conlabsum pom conlapsum; OU vice versa, pleps, sup pour plebs, sub.

C s’écrit quelquefois pour Ie G, exemple : macistratvs poiir magislralus, coRCONivs pour Gorgonius; il reinplace quelquefois Ie Q, exemple: acvarionbsp;pour aquaria.

D se trouve mis pour T ; ovodannis pour quolannis.

E pour I dans un grand nombre de mots : deana, dolea, dabet phur Diana, dolia, dabil.

F pour PH, exemples : dafne, triumfalem, triümfatori pour Daphne, triumphalem, triumphalori, etc.

I pour E, exemple : camina, jiiucvrivs, ob civis servatos, turris, finis.

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35G LES TROiS ROME.

PARENTIS pour Gamena, Mcrcurius, ob cives servalos, turres, fines, parentes, etc.

K pour C : kaïso, kalenras, kanditatüs, karisslme, arkariüs, evokatüs, SAKRUM, üRTiKA pouT coisa, calcndas, candidatus, carissime, arcarius, evoca-tus, sacrum, urlica.

M se change en N. Exemples : inpensa, inconparabili, pour impensa, incomparabili.

N s’adoucit en S dans les mots messis, messibus pour mensis, mensibus.

O se tr'ouve pour U. Exemples : uoc, equom, perpetcom, inge.nuos, pour hue, equum, perpetuum, ingenuus.

P. On rencontre, mais rarement. Pil pour F, exemple : phecit pour fecit.

Q pour C : loqvs, qvram pour locus, curam.

11 se voit pour L : süperlectile \wm supellecülc.

T pour D, comme atfines, atlectüs, set, pour adfmes, adleclus, sed. A la troisième persoune du pluriel du preterit actif, il se confond avec l’Nnbsp;precedent. Exemple : comparaverüji, eecerum, som, pour comparaverunt,nbsp;fecerunt, sunt.

V rend la pareille au B et prond souvent sa place i danüvius, placavile, VENEMERENTi, poup Danubius, placabile, benemerenli.

ü usurpo aussi, surtout daiis les inscriptions du siècle d’Auguste, la place de l’I. Exemples ; lacrum.e, maxümes, optumus, ultuma, pour la-crymm, maximus, optirnus, ultima. La place de l’O : mandatuve, süboles,nbsp;nümenclator, pour mandatove, soholes, nomenclalor. Enfin, celle de l’Y,nbsp;ainsi : illuricom, süria pour Illyricum, Syria.

De romission ou relranchement des lettres. Non-sculement elle a lieu pour les lettres doubles, mais encore pour les lettres simples. Exemplesnbsp;de la première proposition : jusit, horearius, sui.a, colibertüs, pour jussit,nbsp;horrearius, Sulla, coliiberlus. Exemples de la seconde : chortis, mineva,nbsp;GALLU, viBü pour clioorlis, Minerva, gallus, vivus.

Mais de toutes les lettres, celles qui se trouvent Ie plus souvent suppri-mées dans les inscriptions sont l’M et l’N. Exemples de l’M retrauehé ;

BEU, ANNORU, AD iiONORE, ANTE FACIE, EORÜ, Dcuni, annorum, ad honorem,

ante faciem, eorum. Exemples de l’N retranché : arniesi, cresceses, mise-NEsis, AOEiLEiESis pour Arnietïsi, Crescenses, Misenensis, Aquileiensis.

3“ Du redoublement ou de l’addition des lettres. II porte principalement sur les deux lettres N et X. E.xemples : iierens, tiiensaüris, centensimüm,nbsp;NONAGENSiMüM, CONJDNX, pour hcrcs, llicsauris, centesimum, nonagesimum,,nbsp;conjux. EXSORT,E, EXSEMPLU.M, FISÜS, JIINCXIT, VICXIT, MAXSIMI, MAXSÜMOS pOUFnbsp;exortw, excmplum, fixus, junxit, vixit, maxirni, maximos.

4“ La transposition. Elie est assez rare; en voici un seul exemple ; mapiii-TilEATRl pour amphithcalri.

On se demande d’ou peut venir cette orthograplie si bizarre et si éloignée de la inanière ordinaire d’écrire Ie latin. On peut en indiquer plusieursnbsp;causes, mais entre autres rinexpérience du sculpteur et la prononciationnbsp;vulgaire. II est plus que vraisemblable que les peoples conquis, pronon-cèrent la langue des vaiiiqueurs, chacun a sa mauière, comme il nous arrive de prononcer les langiies étrangères avec notre accent national. On anbsp;écrit comme on pariait; de la rorthographe étrange des inscriptions. IInbsp;faut seulement observer que les bizarreries que nous venons de signaler nenbsp;se rencontrent pas dans les inscriptions romaines d un intérêt public et desnbsp;beaux siècles de la laliniié; par e.xemple d’Auguste a Trajan. A parlir denbsp;Gordien, la langue publique elle-même s’altère, a mesure que l’erapirenbsp;tombe en decadence.

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ESSAl SUR LES INSCRIPTIONS. 537

CH.\P1TRE V. Orlhographe des Sigles.

On appelle sigles (singulw littem), les abréviations si communes dans les inscriptions et qui en forment la principale difficulté. On distingue six ma-nières d’écrire ces abréviations.

iquot; En niettant seulement les initiales des mots : V. C., C. F., Q. L. pour vir clarissimus, Caii filius, Quincli liberlus.

2° En mettant les deux ou trois premières lettres des mots ; dec. conl.

AJVT. TABVL. ARK. AVG. UB. TABUI. AftVARUM pOUP decurio, COtllcgium, ojutOr, tabularius, arkarius, Augusli liberlus, tabularius aquarum.

5° En mettant la lettre initiale et la finale, et suppriinant les lettres in-termédiaires, ainsi : fri. pour fratri. Quand on veut marquer Ie pluriel on redouble quelquefois la lettre initiale, en ajoutant quelques-unes des lettresnbsp;intermédiaires ou finales; en voici un bel exemple dans rinscriplion denbsp;Glaucus.

D M 'Sa

T .ELIO £5quot; nbsp;nbsp;nbsp;l-I®- G. LAVCO

ET. SIBI. P. E. HOC

CVBICVLARIO STATIONIS. PR1M,Enbsp;BOSCIA. LÏDEnbsp;CONJVGI. KARISSIMOnbsp;BENEMERENTl. FECITnbsp;ET SVIS. ET LL. B. L. LIBERTnbsp;MONIMENTUM £? H. ^ N S

« Dis Manibus Tito J31io Augusti liberto Glauco, cubiculario stationis priinae, Roscia Lyde, conjugi carissimo benemerenti fecit et sibi et suis elnbsp;libeiTis libertabus posteris eoruni. Hoe monimentum haeredes non sequitur. »

4° En mettant, lorsque Ie mot est de deux syllabes, l’initiale de chaque syllabe. Exemple : BN. RP. NT pour bono reipubliew nato.

5” En mettant, si Ie mot a plus de deux syllabes, les initiales de toutes les syllabes; exeraples: B. N. M. R. TB., D. C. R. N. M. pour benemerenti-bus, decurionum.

6quot; En écrivant les nombres on fait souvent précéder Ie chiffre de la lettre N qui signifie numero, nombre; exemple ; vixiT annos lv, menses, n. xi, dies n. xxvii, pour omt annos quinquaginla quinque, menses numero un-decim, dies numero viginti septem.

7“ Quant aux sigles numériques, je vais donner les principaux, afin de reiidre mon modeste travail aussi complet que possible,

Un, I.

Deux, II, 1.

Quatre, iiii, iv.

Six, [iiii], VI.

Huit, iix, VIII.

Trenie, xxx.

Quarante, xxxx, xl.

Quatre-vingt, xxc.

Quatre-vingt-dix, lxxxx, xc.

Quatre cents, cccc, cd, c B-

Cinq cents, d, B, ©•

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3o8

LES TROIS BOUE.

Huit cents, ccoo.

Mille, C/O, CIO, oo, /5. X

Deux mille, oo oo.

Trois mille, oo oo oo, ou bien 0 0 0-

Quatre mille, oo ma, ou bien 0 0 0 0-

Cinq mille, la, ou bien A-

Neuf mille, oocciaa ou bien oo

Dix mille, cciac, ou bien ou bien

Quinze mille, ceiaiaa, ou bien

Vingt mille, ou bien (cia) (ci) ou bien xmx.

Un million, la-Seize millions, P^-

II faul reinarqucr que lorsqu’il s’agit de monnaie, la ligne tirée au-dessus du chiffre indique Ie mille; exemple ; l3€vi, soixanle mille. Souvent cetlenbsp;ligne se trouve, mais comme simple ornement, sur les chiffres qui indi-quent les années, les numéros d’ordre des legions, des magistratures; quel-quefois même elle coupe Ie chiffre indicateur saus avoir mème une valeurnbsp;spéciale; exemple de l’un et de l’autre : nip. xii, trib. potest xvi; fFH-vir,nbsp;pour imperator duodecimüm; Iribuniüa poleslatc decimüm sextüm; quatuornbsp;vir.

Les sesterces s’indiquent par les siglcs suivants : ns, iis, SS K, tt, SS. SS, et les deniers par ceux-ci: n, 3GC-Les centimes s’expriment par différents signes dont Ie plus usité estnbsp;celui-ci ; gt;, qui sert aussi a désigner Ie centurion. On trouve encore, avecnbsp;la même signification, Ie V. Ie O, Ie 2,1’E. l’OO; comme Ie fi pour indi-quer Ie beneficiarius.

CHAPITRE VI.

Ponctualion.

Je n’ajouterai que peu de cbose a ce que j’ai dit de la ponctuation dans l’histoire des Catacombes. Les accents figurent sur un certain noinbre d’in-scriptions; mais jamais on n’y trouve 1’accent circonflexe, bien qu’il futnbsp;en usage chez les Romains, ainsi que nous l’apprend Servius (i). L’origiuenbsp;des accents dans l’écriture monumentale date du siècled’Augusie. Au reste,nbsp;les accents apprennent peu de chose, excepté l’antiquité des inscriptions.nbsp;Si quelquefois ils marquent les syllabes longnes, souvent ils accompaguentnbsp;les syllabes brèves et n’accusent que la fantaisie du sculpteur.

Quant a ['interponclualion, elle donnc lieu a trois remarques d’une cer-taine importance. 1° Dans les inscriptions de la meilleure époque, chaque mot est suivi d’un point rond. II faut excepter, en general, les derniersnbsp;mots de chaque ligne. En effet, Ie point ne fut introduit que pour distin-guer les mots les uns des autres. Or, cette distinction est suflisamment in-diquée, pour Ie mot final, par la place qu’il occupe. Maffei va jusqu’a rejcternbsp;comme fausse toiite inscription dont les dernières paroles sont ponctuées.nbsp;Cette régie offre cependant des exceptions; il existe des inscriptions très-authentiqucs, dont les derniers mots sont ponctués; exemple :

A A

cA livioA cA fA sergA

(i) dineid., lib. xn, v. 575.

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ES3AI SUR LES INSCRIPTIONS.

A A nbsp;nbsp;nbsp;_

clementiA milA cohA vni

A nbsp;nbsp;nbsp;AA

Igt;rA gt; Ac A MARCiA cemellini

A A nbsp;nbsp;nbsp;A

livivsA obseq\£sA lira

VA fA

« Caio Livio Caii filio, Sergio Clementi, militi cohortis octavae, prima* centuriaj, Caius Marei Gemelliiii Livius obsequens libertus, viviis fecit. »nbsp;Ce qu’il y a de reraarquable dans cette inscription, e’est qu’elle est ponc-luée non avec le point rond, mais avec un point triangulaire : cette formenbsp;indique les temps postérieurs a Auguste.

Quelquefois chaque parole, ebaque syllabe et même chaque lettre est suivie d’uii point. Ce signe annonce les inscriptions du second siècle, biennbsp;qu’oii le trouve parfois dans les temps anterieurs. Exemples : dvm. taxat.nbsp;IN. TRA. G. LAVco. pour dunUaxat, inlra Glauco; el enfin, j. v. v. e. n. t. i.nbsp;V. s.; T. I. T. V. s. pour Juvenlius, Tilus.

3“ Par un excès oppose, on trouve des inscriptions oil ni les syllabes ni les mots ne sont séparés par aucun point. Les ouvrages en terre cuiteoffreiunbsp;souvent cette anomalie. En void un exemple enlre mille :

ex PRAVLPIiE ACCE PTA pas ET APR cos

« Ex prsediis Ulpiae accepta Poelino et Aproniano consulibus. Cette inscription dale de Pan 125 après Notre-Seigneur.

Terrainons en ajoutanl que pour séparer les périodes, ou indiquer le passage d’un sujet a un autre, les anciens se servent ou d’un point d’interro-gation? ou d’une ligne verticale : |.

CHAPITRE VII.

Ornementalion.

Quant aux ornements des Inscriptions, ils offrent un quadruple intérêt: 1“ ils font connaitre en détail les usages de l’antiquilé. Non-seulement lesnbsp;grands ouvrages, comme la colonne Antonine et la colonne Trajane, maisnbsp;encore les sarcopbages et les monuments de moindre importance, raontrentnbsp;dans les figures, dans les bas-reliefs dont ils sont ornés, la manière d’ollrirnbsp;les sacrifices, de batir, de combaltre, de se velir, de manger; d’ordonner lanbsp;pompe des triomphes, des enlerremenls, etc.; en un mot, tons les détailsnbsp;de la vie religieuse, publique el domeslique des anciens.

2“ Ils garanlissent rautbenlicité des monuments. Les fausses inscriptions, dit le sévère Maffei, ne sont presque jamais acconipaguées d ornements etnbsp;de sculptures. Gqto occurruut spuTia epipTcivfiMdtcit Quibus simulcicTü ulia-que sculplilia et ornamenta sint adnexa (i). On en congoit la raison; quoinbsp;de plus propre a découvrir la fraude que des ornements qui n’auraient pasnbsp;le gout antique, ou qui ne repondraient pas au sujet?

5° Ils indiquent 1’époque du monument. La simple coiffure d’une statue

(i) De Arte lapidaria, c. 210.

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560 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

de Pauline a fixé l’origine de cette statue au règne d’Antonin; ainsi d’un grand nombre d’ornements exclusivement propres a telle ou telle époque.

4“ Ils en facilitent Tintelligence. ün savant antiquaire avail trouvé l’in-scription suivante:

C. PVPIVS. c. L. MICVS.

PVRPVRARIVS.

et il expliquait Ie mot purpurarius par pêcheur de coquillagespurpurifères. Mais, en examinant les bas-reliefs qui acconipagnent Tinscription, on anbsp;trouvé une balance, un vase. Or, ces deux objets sont bien plutót les attri-buls d’un marchand de pourpre que d’un pêcheur ; la balance sert a pesernbsp;la pourpre, et Ie vase a la conserver. L’illustre chevalier Orsati (i) en anbsp;conclu avec beaucoup de vérité que Caius Pupius Micus était non un pêcheur de coquillages purpurifères, mais un marchand de pourpre.

Outre les figures et les bas-reliefs, on remarque souvent sur les pierres tombales et les sarcophages un ou plusieurs trous, qui révèlent un usagenbsp;célèbre parmi les païens. Ils sont destines a recevoir les larmes, les libations, Peau arferia, Ie vin, Ie sang des victimes offertes en l’honneur dunbsp;mort. On sait que les anciens altachaient un grand prix a ces marqués d’af-fection.

Je n’en citerai que deux preuves :

QÜANDOCÜMQVE LEVIS TELLVS MEA CONTAGET OSSA INCISÜM ET DVRO NOMEN ERIT LAPIDEnbsp;SI QUA TIRI FVERIT FATORVM CVRA MEORVMnbsp;NE GRAVE SIT TVMVLVM VISERE S^PE MEVMnbsp;ET QVICVMQVE TVIS HVMOR LABETVR OCELLISnbsp;PROTINUS INDE MEOS DEFLVAT IN CINERES

ÏNJICE SI PIETAS VSQIIAM EST SVSPIRIA ET IMPLE «ECVM HOSPES LACRIMIS MARMORIS IIOC VACVVM

CHAPITRE VIII.

Interpretations des inscriptions.

Voici quelques régies et quelques moyens généraux d’interprétation. II faut se rappeler que les abrévialions et les sigles exposés aux regards publics sur les monuments el les tombeaux, n’ont pas une signification mysté-rieuse et difficile a trouver. Au contraire, ils indiquent des choses que toutnbsp;Ie monde pouvait facilement deviner; c’esl la jtidicieuse remarque de Maffei:nbsp;üsilalas formulas, solemnia verba, KUerasque in oculos perpeluo incurrentesnbsp;quivis ferme tune intelligeret ac perciperel; publkas cruditionis ila fuil uni-formitas et constanlia, ut qum in Africa, in Gallia, in Dacia marmoreis aulnbsp;mreis tahulis committebantur, iisdem, ac quee Romm, contractionibus per-scripta videamus, eodenique sensu adlübitü (2). De la, une première régienbsp;d’interprétation:

(1) Marmi eruditi, pars 11, p. 230.

{2) De Arte lapidaria, p. 29.

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ESSAI SUR LES INSCRIPTIONS. 361

1° L’explication ne doit rien avoir de force, de tiré, et qui n’obtienne aussitót rassentiment des hommes instruits.

2quot; L’explication ne doit conienir ni formule inusitée, ni transposition de mots, mais être simple et d’une seule venue.

3° L’explication ne doit laisser aucun sigle sans Ie confronter avec Ie contexte et Ie corps de l’inscription.

4“ L’explication ne doit admetlre aucun sens qui répugne au genre particulier de l’inscription; exemple :

ANTONINO. XVG. PIO PONT. MAX. TRB.

POT. COS. II.

P. P. D. P

« Antonino Augusto pio, Ponlifici maximo, tribunitia potestate, consult iteralo, patri patriae, decreto publico. » On ,expliquerait mal les sigles p. p.nbsp;par ces mots pmfecto prcelorio ou patri palrum. Gelte interpretation nenbsp;serait plus en harmpnie avec I’enserable de l’inscriplion; les empereurs nenbsp;prirent jamais Ie litre de préfet du prétoire ou de Père des pères.

5° L’explication doit tenir compte de la place occupée par les sigles, et ne rien admettre, en les inierpréiant, qui soit contraire a cette place. Pre-nons, pour exemple, les sigles a. p. ; précédés d’un nom, comme dans cettenbsp;épitaphe ;

C. ALEINÜS. c. F.

OVF. MASCELLIO IIII. VIR. A. P

« Caius Albinus, Caii filius Oufentina (de la tribu Oufentina) Mascellio, quatuor vir atdiliüa potestate. » Les sigles a. p. signifient cedilitia potestate.nbsp;Dans un autre, oü ils seronl précédés de ces mots dare debent, ils signi-fleront eerario populi (Romani), ou mrario publico.

6° L’explication doit faire attention au lieu oü a été trouvée l’inscription, paree que celle-ci contieiit souvent des sigles qui indiquent Ie pays raêmenbsp;ou la ville.

7quot; L’explication doit s’éclairer, se confirmer par la comparaison des monuments ornés d’inscriplions semblables, mais plus clairement exprimées. C’est par ce moyen que fureni glorieusement inierprétés les sigles suivantsnbsp;d’une inscription trouvée a Genève, en 1753 : leg. vni. avg. p. f. c. c., parnbsp;ces mots : Legionis Oclavm Augusta) Pio) Felicis, Conslantis Commodai.nbsp;En effet, on trouve dans Gruter une aulre inscription de C. Vesnius, sur la-quelle on Ut en toutes lettres :

Ovo militante cvm liberata es

SET. NOVIA OBSIDIONE LEGIO PIA

FIDELIS. CONSTANS. COMMODA CO GNOMINATA EST. ELC.

11 en est de même de ces sigles: t. r. p. d. s. t. t. i. pour rinterpréla-lion desquels Ie savant Muraiori deinandait un OEdipe. L’inscription plus explicile de Muscilius en a donné la clef:

MVSCILIVS CARVS SVIS ANN. IIII. H. S. E. ET. TE. ROGOnbsp;PILKTERIENS. VT. LECAS. KTnbsp;IllCAS. SIT. T. T. l.

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Ö62

LES TROIS ROME.

« Muscilius earus suis, aonorum qualuor (vel quatuor antios natus) hic situs est; et te rogo prseteriens ut legas et dicas : Sit tibi terra levis. »

8° L’explicatioii doit être conforme a l’histoire. On comprend, dès lors, la iiécessité de corinaitre non-seulement les faits, les dates, les usages, lesnbsp;raagistratures, les sacerdoces, etc., de l’antiquité; niais encore les nomsnbsp;des Romains, des tribus, des legions, etc.

Je vais donner, dans les chapitres suivants, quelques notions indispen-sables sur ces derniers objets; Ie Dictionnaire desSigles coutiendra diverses explications relatives aux premiers.

CHAPITRE IX. Noms de familie.

Les noms romains jouent un grand róle dans les inscriptions. Sous peiue de rester dans un labyrintbe inextricable, il faut connaftre, au moinsnbsp;en general, Ie système de nomination en usage chez les anciens maitresnbsp;du monde.

1° Les Romains avaient plusieurs noms; cette régie est générale. Au commencement, ils se bornaient a deux, tellement que Ie manque du troi-sième nom ou du surnom est un signe presque indubitable d’antiquité,nbsp;archaismi potenlissimum indicium; il faut excepter les militaires, dont lanbsp;plupart eurent un surnom des 1’origine. Plus tard, les Romains eurent troisnbsp;noms; cela devient commun vers la fin de la République et sous I’Empire.nbsp;Reaucoup en eurent jusqu’a quatre. Or, on distingue; Ie prénom, prwno-men; Ie nom, nomen, nomen gentilitium; Ie surnom, cognomen; et Ie second surnom, agnomen.

Le prénom est Ie nom personnel de l’individu : Caius, Marcus, Lucius, Cneus, etc.; il est ordinairemeut relatif a quelque circonstance de la nais-sance de la personne.

Le nom est le nom de la race (gens): Julius, Flavius, Cornelius, e’est-a-dire, de la race Julia, Flavia, Cornelia. 11 est essentiel de le bien distin-guer. Pour cela, il suffit de se rappeler qu’il se termine toujours en lus; cette regie souffre a peine deux ou trois exceptions. Ce nom de la gens fut,nbsp;dans le principe, celui de la souche commune ou de I’aieul, de qui sorti-rent un grand nombre de descendants.

Le surnom. De la meine race étaient venus, avec le temps, plusieurs families particulières, comme des branches sorties du même tronc. 11 fallait les distinguer entre elles, tout en conservaut le-souvenir de leur communenbsp;origine. Tel fut I’objet du surnom.

L’agnomen, ou second surnom. Dans unc familie, il se trouvait quelque-fois un fils qui, par ses qualites, bonnes ou mauvaises, par ses exploits ou ses talents, se distinguait de ses frères. On lui donnait alors un nom denbsp;plus, qui le faisait reconnaitre. Tout ce qui précède va s’éclaircir au moyennbsp;de quelques exemples : Marcus Fabius Ambuslus.

Marcus, voila le prénom ou nom personnel.

Fabius, voila le nom de la race, ou nom patronimique. Aiusi, nous sa-vons que Marcus est de la race Fabia.

Ambustus, voila le surnom. De la race Fahia étaient sorties plusieurs families, telles que la familie Ambusla, Yibulana, Labeona. Nous savionsnbsp;déja, par le prénom et le nom, que Marcus était de la race Fabia; grace au

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ESSAI SÜR LES raSCBIPTIO.NS. 363

surnom, il est évident qu’il apparlienl a la branche Ambusta, sortie de la race Fabia.

Quand la gens ou race primitive n’avait pas produit plusieurs families, Ie surnom était particulier a cliaque individu. Exemple : Caius Juliusnbsp;Cwsar.

Caius, voila Ie prénom.

Julius, voila Ie nora de la race, gcns Julia,

César, voila Ie surnom donné a I’enfant, paree qu’il était venu au monde par l’opéralion césarienne.

Autre exemple : Publius Cornelius Scipio Africanus.

Publius, voila Ie prénom.

Cornelius, voila Ie nom de la race, gcns Cornelia.

Scipio, voila Ie surnom qui nous fait connailre que Ie personnage appar-lient a la branche des Scipion, sortie de la gcns Cornelia.

Africanus, voila Vagnomen ou second surnom, qui distingue Ie même personnage de tous ceux de sa familie; il Ie doit a la conquêle de Carthage.nbsp;Je dirai, en passant, que qiielques auteurs prétendent que ce dernier nomnbsp;doit être appelé cognomen, comme Ie précédent.

2“ Pour distinguer entre eux les frères que rien ne distinguait natiirelle-ment ou accidentellement, on leur dounait un surnom pris dans l’ordre de leur naissance. Exemple : primus, secundus, quarlus, sextus, etc.

3° II paralt que les femiues eurent généralement des prénoms jusqu’an temps de Varron, vers la fln du règne d’Auguste; mais, depuis cette époque, elles cessèrent d’en avoir; on les leur rendit au temps de Domitien.nbsp;Du reste, leurs prénoms ordinaires étaient Caia ou Publia, c’est-a-dire,nbsp;illuslre, ou pelüe fille : publia, de puella. Quand les prénoms leur furentnbsp;ólés, elles cOusevvèrent simplemenl Ie itom de leur race et de leur familie,nbsp;auxquels elles ajoulaient, en se mariant, Ie nom de leur mari. Exemple :nbsp;Cmcüia Melcila Cr assi.

Cmcilia; voila tout ensemble Ie prénom et Ie nom de la personne; car cela vent dire fille de la gens Ccecilia.

Metella; voila Ie surnom ou nom de la familie .sortie de la gens Caicilia.

Crassi, apparlenant a Crassus, ou épouse de Crassus. Pour marquer Ie droit de propriété du mari, son nom se mettait au génitif, en sous-enten-dant (uxor). On employait la même formule pour désigner la propriété dunbsp;maitre sur son esclave. Exemple : Arlemisia Casarü, Artémise de Césarnbsp;(sous-enlendu serva).

4“ Dans les families, on distinguait les soeurs entre elles par l’ordre de leur naissance: prima, secunda, terlia, etc., ou major et minor. Exemple :

HERREMA. L. F.

MEUVLA. MAJOR

HEBRE.MA. L. F.

MERVLA. MINOR

« Herrenia, Lucii filia, Merula major; Herrenia, Lucü fdia, Mernla minor. »

5“ Au temps de Juvénal, les esclaves et les étrangers, c’est-a-dire, ceux qui n’étaient pas citoyens remains, n’avaient pas encore Ie droit d’avoirnbsp;irois noms (t). Les affranchis pouvaient les avoir en ajoutant a leur nomnbsp;primitif ceux de leur patron. Exemple :

F. FLAVIO. SABINO C.ES. N. SERVO A. RAT.

(•) ïanquam Uebeas tria nomina. Sat. i, 127.

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364 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

VOLVPT. FECIT. T. FLAVIVS EROS. PAT. DOMITIAN.

Ca:S. SER. A CELLARIIS.

« Tilo Flavio Sabino, Ca;saris nepotis servo a rationibus voluptatum (inlmdant des plaisirs), fecit Titus Flavius Eros Pater, Domitiani Caïsarisnbsp;servus a cellariis (intendant des caves). »

6“ En cas d’adoption, Tenfaiit adopté prenait tous les noms de son père adoptif; il retenait seulement, en inémoire de sa familie d’origine, Ie nomnbsp;patroniinique, ou Ie surnom simpleou derive, Exernple : Publius Corneliusnbsp;Scipio Nasica, ayant été adopté par Quintus Cmcilius Metellus Pius, s’ap-pela : Quintus Cmcilius Metellus Pius Scipio. Voila Ie surnom simple conserve après l’adoption. Le voici dérivé: Claudius Marcellus, ayant été adopténbsp;par Cneus Cornelius Lentulus, s’appela : Cneus Cornelius Lentulus Mar-cellinus. Quelquefois même ils ne conservaient aucun des noms de leurnbsp;propre familie. Aiusi, dans l’inscription suivante, on trouve deux frères quinbsp;portent des noms totalement différents :

T. FLAVIO. AVG. LIB. CEREALl TABVLAR. REG. PICEN. PHOENIXnbsp;CJ:S. N. SER. FILIO. PIENTISS

ET. P. JVNIVS. FRONTINVS FRATRI. DVLCISSIM.

ET. CELERINA. SOROR

« Tito Flavio August! liberto Cereali, tabiilario regionis Picense, Phoenix Caesaris nepotis servus, filio pientissimo, et Publius Juiiius Frontinus fratrinbsp;dulcissiino et Celerina soror. »

7° Tel est le système géiiéral des noms romains jusqu’a la decadence de l’empire. A dater des Antonins, tout change. Ainsi, on trouve; 1° des per-sonnages avec plusieurs prénoms; 2° des surnoms deviennent preiioms;nbsp;Nero, qui était surnom, devient prénora : Nero Drusus; magnus, magnusnbsp;maximus, etc.; 3“ le prenom, qui servait a distingiier les membres d’unenbsp;familie, et qui était le nom personnel de chaque individu, est reinplacé parnbsp;le surnom qui devient nom propre. Ainsi, Titus Flavius Vespasianus; Titusnbsp;Flavius Domitianus; Titus Flavius Clemens; eurent pour noin propre Ees-pasianus, Domitianus, Clemens. On voit que la decadence n’avait pas at-tendu le règne des Antonins pour commencer; 4° non-seulement on prendnbsp;plusieurs prénoms, niais encore plusieurs prénoms de race : nomina gen-lilitia. Ainsi: Caius Ceionius Riifius Yolusianus; voila deux noms de race;nbsp;Marcus Miimmius Ceionius Annius Albinus; en voila trois.

8“ Quant a Tordre dans lequel on gravait les noms sur les monuments, il faut savoir : 1° qu’on ecrivait d’abord le prenom, puis le nom, et enfinnbsp;le surnom. Exeraple : Caius, Julius, Thamyrus; 2“ qu’on les ecrivait tantotnbsp;avec la seule lettre initiale, tantot avec plusieurs; 5“ quand plusieurs per-sonnes de la même familie se réunissaient pour élever une tombe, ou si lanbsp;tombe était élevée a plusieurs personnes de la même familie, le nom pa-tronimique se mettait au pluriel, et on redoublait I’initiale des prénoms,nbsp;lorsqu’ils étaient les mêmes. Exemplc :

D. M.

L. VALERIO. NARCISSO LL. VALERInbsp;VRSVS. ETnbsp;1nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;STASIMANVS

FIl. PATRI. PllSSiaO

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ESSAI Sim LES INfCRIPTlONS. obo

« D. M. Lucio Valerio Narcisso, Lucius Lucius Valerii Ursus el Stasima-nus fliii, patri piissimo. »

Si les prénoms étaient différents, on en meltait les iniliales devant Ie nom patroniraique qui restait au pluriel. Exemple : L. C. Octav. L. F. Mar-lialisel Maacer; pour, Lucius Octavius Lucii films MarliaUs; CmIus Octavius Lucii films Maacer; 4“ les noms patronimiques ayaiit Ic nominatif ennbsp;ius et le géniiif en ii, s’ecrivent souvent sur les tombes par un 1 long.nbsp;Exemple : JvlI. L’I long, a la fln d’un mot, lient aussi lieu de deux ii.nbsp;Exemple : MonicipIs, hilitIs, copIs; pour municipiü, mililiis, copiis;nbsp;5” entre le nom patronimique et le surnom de la personne, on trouve très-souvent le nom de son père et même de son aïeul. Exemple ; C. Veuvs.nbsp;A. F. ScAPTu; pour Caius Velius Scaptia, Auli (Velii) films; 6“ dans lesnbsp;inscriptions des affrancliis, entre le nom et le surnom de la personne, onnbsp;meltait loujours Ie nom du patron. Exemple :

JVSSV PROSEP.PIN/E L. CALVEXTIÜS L. L. FESTUS.

ARAM POSIT SACRUM

(I Jussu Proserpin®, Lucius Calventius (Festus) Lucii (Calvenlii) liberlus F’estus, aram posuit, sacrum. »

Si la personne étail I’affranchi de plusieurs patrons, on redoublait Tini-liale de leurs noms. Exemple :

VARICIA

C. C. ET. 3. L.

CALITVCHË

« Varicia duorum Caiorum et Cai* liberta Calityche; ou C. C. t. L., triuni Caiorum liberta; ou L. L. L. L., triura Luciorum liberta, etc. »

Enlln, si le prenom du patron n’était pas le même, on mettait les diffé-rentes iuitiales avani le mot affranchi. fjxemple : Vettia L. 3. L. Nerris, pour Vellia Lucii cl Caim lihertm Nebris.

Du reste, pour faciliter l’élude des inscriptions, nous allons donner le nom des families romaines avec le surnom.

CHAPITRE X.

Noms de Tribu.

Les inscriptions ne se contentent pas de marquer les noms de la personne a laquclle le monument est destine, ou qui font érigé; souvent elles indiquent encore la tribu a laquelle ces différentcs personnes appartien-nent. On sail que le peuple remain fut divise d’abord en trois, puis ennbsp;trente-cinq, et enfin en cinquante-deux tribus. Reunies ensemble, les tribusnbsp;formaient les Cornices. Les Cornices faisaienl les lois, nommaient les magistrals, décrétaient la guerre et jugeaient les crimes d’Eiat: c’etait la puissance souveraine du peuple remain. Les sujets de I’cmpire qui ayaient droitnbsp;de cite romaine pouvaicnt seuls en faire panic. Ainsi, dans une inscription,nbsp;le nom de la tribu indique clairement que le personnage était citoyennbsp;remain.

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506 nbsp;nbsp;nbsp;les TROIS ROME.

Quant a la manière de l’écrire, 1quot; Ie nom de la tribu se met toujours a l'ablatif, en sous-eniendant ex tribu; ce n’est que par une rare exceptionnbsp;qii’on Ie trouve au géiiitif; 2quot; il se place entre les degrés de parente et Ienbsp;surnom de la perso'nne; mais avant toute autre chose. Exemples :

SECUNDÜS. CLXÜDIVS. SEX. F.

PALATINA. AVSPICALIS

« Secundus ClaudiusSexti filius, Palatina (ex tribu Palatina) Auspicalis.»

M. CVSINIVS. M. F.

VEL. /ED. PL.

« Marcus Cusinius Marei fdius, Velina (ex tribu Velina) ^Eldilis plebis. »

5quot; Les affranchis étaient inscrils dans les tribus; les femmes jamais, paree qu’elles n’avaient pas voix dans les assemblees; les empereurs nonnbsp;plus, paree que ce qui était un honneur pour les simples citoyens eüt éténbsp;une sorte d’humiliation pour les maltres du monde.

Depuis que Tibère eut transporté au sénat Ie droit suprème des Cornices, on trouve rarement Ie nom des tribus dans les inscriptions. II disparaitnbsp;presque entièrement apres Ie règne de Septime-Sévère, an 211; enfin onnbsp;n’en trouve plus de trace au commencement du iv' siècle. Voici Ie nom desnbsp;tribus romaines avec les sigles qui l’expriment; celles qui sont marqueesnbsp;d’une étoile ne faisaient point partie des trente-cinq tribus anciennes ;

* nbsp;nbsp;nbsp;Jilia

^ra. J5mi. yEmil.

.\n. Ani. Anien. Aniens. Aniesis.

* nbsp;nbsp;nbsp;Ap.

Ar. Arn. Arnien. Arniese.

* nbsp;nbsp;nbsp;Avg.

* nbsp;nbsp;nbsp;Avr.

Cam. Camil.

* nbsp;nbsp;nbsp;Camp.

Cl. Cla. Clav. Clavd.

* nbsp;nbsp;nbsp;Clv. Clvent.

Clvst. Crv. Crvst.

’ Clvvia

Col. Collin.

Cor. Corn. Cornel.

* nbsp;nbsp;nbsp;Dvm.

Esq. Esquil. Exq.

Eab. Fabia.

^ FI. Flavia.

Fal.

Ga. Gal.

* nbsp;nbsp;nbsp;Ilor. Horat.

* nbsp;nbsp;nbsp;Jvl.

Cat.

Lem. Lemon.

Msec.

Men. Menen.

* nbsp;nbsp;nbsp;Ocr. Ocri.

MUa.

/Emilia.

Aniensis.

Appia.

Arniensis.

Augusta.

.Aurelia.

Camilia.

Campana.

Claudia.

Cluenlia.

Clustumina, ou Crustumina. Cluvia.

Collina.

Cornelia.

Dumia.

Esquilina.

Fabia.

Flavia.

Falerina.

Galcria.

Horalia.

Julia.

Latina.

Lemonia.

Maicia.

Menennia.

Ocriculana.


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ESSAI SÜR LES LNaCRIPTIONS. 3G7

Ovf. 0. V. f. Ovfen.

Pa. Pal. Palat.

Pap. Pp.

Papir.

* nbsp;nbsp;nbsp;Pinaria.

Po. Pob. Pop.

Pol.

Pom. Pomp. Pompt. Pont. Pontina. Pvp. Pvpin.

Qvi. Qvir. Qvirin.

Ro. Rom.

Sa. Sab. Sabbatin.

* nbsp;nbsp;nbsp;Sapina.

Sca. Scap. Scapt.

Ser. Serg.

St. Stel. Steil.

Svb. Svbvra.

Svc.

Ter. Terrentin.

* nbsp;nbsp;nbsp;Titiensis.

Tro. Trom. Troment.

Yeien.

Vel. Veil.

’ Vet.

Vo. Vol. Volt. V’^ol. Vltina. Bollinia.

Oufenlina.

Païatina.

Papia.

Papiria.

Pinaria.

Popblilia, OU Publilia, ou Popilia, on Publicia.

Pollia.

Pomplina.

Pupinia.

Quirlna.

liomilia.

Sabbatina.

Sapina.

Scaplia.

Serfjia.

Slcllalina.

Suburana.

Succurrana. [C’est la même tribu que la précédente.]

Tcrrcntina.

Titiensis.

Tromenlina.

Yeientina.

Velina.

Velaria.

Ulpia.

Vollinia, ou Votinia.


CHAPITRE XI. Noms de Pays ou de Patrie.

Au nom de la tribu s'ajoute très-fréquemment Ie nom du pays de la personae a laquelle Ie monument est érigé, surtout si la per.sonne est un sol-dat, et si elle est morte loin de sa patrie. Dans les inscriptions, il vient d’ordinaire après Ie surnom ou Ie nom patrouimique, ou les degres de parente. On te trouve : 1“ au génilif precede du mot natas (originaire). Exem-ple : Natas Veronce, natas Aqaileiw; quelqiiefois Ie mol natas est soiis-en-tendu, et 1’on dit: Un lel, de lel pays. Exeraple : Q. Sejenus, Q. F. Veronse :nbsp;Quintus Sejenus, Quinti filius Veronce (de Vérone); 2“ a l’ablalif, en ajoutantnbsp;Ie mot domo. Exemple ; Domo Eoma, domo Placentia; souvent Ie molnbsp;domus est indiqué par Ie sigle d.; d’aulres fois, on supprirne et Ie molnbsp;domus et Ie sigle n, et 1’on met simplement rablatil'. Exemple :

0. MODIO. Q. F.

POLLIA. AMO MO. PARMA

« Quinto Modio Quinti filio Pollia (de la tribu Pollia) Amomo Panna (né a Parme; Parme était inscrite dans la tribu Pollia). » Le nom de pays s’ex-prime encore par l’adjectif. Exemple ; Gallus, Germanus, Ilispanus, etc.

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368 LES TKOIS HOME.

CHAPITRE XII. Age des Inscriptions.

C'est quelque chose de savoir lire les inscriptions; mais Ie plus important est de connattre l’époque a laquelle elles reinontent. Autreinent elles per-dent la plus grande parlie de leur iutérêt et de leur utilité. En effet, quelnbsp;avantage la religion, l’histoire, la science, en un mot, peut-elle retirerd’unnbsp;monument dont la date est inconnue? Afin d’initier Ie voyageur a la chronologie des inscriptions, je vais terminer ce faible essai, en donnant quel-ques régies pour discerner l’age de ces précieux monuments.

1“ On distingue quatre époques dans l’histoire des inscriptions latines. La première commence aux rois de Rome et vient jusqu’a Auguste; la seconde part d’Auguste et s’étend jusqu’a Constantin; la troisièine date denbsp;Constantin et vient jusqu’a la destruction de l’empire romain, sous Augus-tule, en 476; la quatrième commence a la mort d’Augustule et finit a Charlemagne : nous n’avons a nous occuper que des deux premières.

2° Beaucoup d’inscriptions se trouveut accompagneesdu nom des consuls on des empereurs. Dans ce cas, rien n’est plus facile que d’en connaitrenbsp;I’epoque : il suflit de se reporter aux fasles consulaires. En voyant l’annéenbsp;oü tels personnages furent lionores du consulat ou de la puissance impériale, on trouve, par la inême, l’époque de I’inscription. Afin de faire de cenbsp;travail un manuel commode pour Ie voyageur, je place, a la suite du Dic-tionnaire des Sigles, les fastes consulaires et impériaux.

Je dirai, en passant, que Ie nom des eonsuls se place ordinairement a la tin de Tinscription, et que leur dignité s’exprime par Ie sigle cos., ou kos.,nbsp;consules. Les sigles coss. et ross, avec deux s ne datent que du règne denbsp;Volusien, au milieu du lu' siècle. Exemples :

..... SVBSCRIPSl. III NON

NOEMD. ANTIO. POLLONE ET. OPIMIANOnbsp;KOS. ORDINARIIS. SEVEROnbsp;ET. SABINIANO. COS

« Stibscripsi tertio nonas novembrisAntioPollionc etOpimiano consuli-bus ordinariis; Severo et Sabiniano consulibus. » Ces derniers sont les consuls appclés Suffecti, c’est-a-dire nommés pour remplacer les consulsnbsp;morts en charge.

PI.UTONI NERVIANIO ET PROSERPINA NERVIANIA SACRU.U. KAL. JAN.

I.. D. D. D. AMITERNENSES M. AVRELIO ET ALIANO. COSS

« Plutoni Nervianio et Proscrpinae Nervianim sacrum, calendis Januariis, locus datus decreto decurioiiuin, Amiternenses : Marco Aurelio et vElianonbsp;consulibus. »

3“ A défaut du nom des consuls, l’age des inscriptions se distingue par différents signes. Ainsi, on reconnait les inscriptions de la première époque aunbsp;style, a rorthographe, au caractère de la latinité. Ou y trouve fréquemment

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ESSAI SUR LES INSCRIPTIONS. 569

les diplilhongues .¦ sei, profiterei, utci, poslerei, pour si, profileri, uti, posten. Exemple :

SEX. ATILIUS. M. F. SARANVS. PROCOS EX. SENATE CONSULTOnbsp;INTER. ATESTINOS. ET VEICETINOSnbsp;FINES. TERMINOSÜVE STATVl. JVSIT

« Sextus Alilius Marei filius Saranus proconsul, ex senatus-consullo, inter Atestinos et Yicentinos, fines terminosque statui jwssil. » Ceite inscription est de fan 619 ax’ant Jésus-Christ.

4“ Les inscriptions de la seconde époque se distinguent tout a la fois par la majestueuse simplicité du style oü Ton ne trouve presque pas d’iii-version; jamais de mot inutile; aucuii jeu de parole; et par l’usage fréquent de fu pour fi. Exemple ; Maxumus, oplumus, pour Maximus, opli-mus; et par l’emploi nou inoins fréquent de la diplitliongue ai pour w; denbsp;l’o pour Ie v; de Yx avec I’s. Excinplcs : Cceciliai, vivos, genüivos, vixsit,nbsp;uxsor, exsemplum; pour Cxcilim, vivus, genüivus, vixit, uxor, excmpliim.nbsp;Voici line de ces belles inscriptions :

IMPERATORI. CaiSARI. DIVI. FIL.

AVG. PONTIFICI. MAXIMO. IMP.

XIV. TRIBVNICIA POTESTATE .XVII S. P. Q. R. QVOD. EJVS. DVCTV. AVSPICIISQVEnbsp;GENTES. ALP1N.E. OMNESnbsp;Q\JE. A. MARI. SVPERO. AD. INFERVMnbsp;PERTINEEANT. SVB. IMPEBIVMnbsp;POP. ROMANI. SVNT. REDACT.E

5° Peu après Ie règne d’Auguste, alors que Rome est devenue la ville de l’univers, les inscriptions privées perdent de leur élégante simplicité; onnbsp;y trouve de nombreux barbarismes. Les marbres de Pise sont des témoinsnbsp;irrécusables de 1’iiiiperfection du langage populaire, au beau siècle d’Auguste. Quant aux inscriptions publiques, elles conservèrent longtemps,nbsp;siirtout a Rome, quelque chose de leur majesté et de leur pureté primitive. Exemple;

DIVO. NERVSE. TRAJANO. PARTIIICO ET. DIV/E PLOTIN,® DIV. TRAJANl PARÏHICI VXORlnbsp;IMP. C.ESAR. TRAJANVS. HADRIANVS AVGVSTVSnbsp;PONT. MAX. TE. P. COS. III. PARENTIBVS SVIS

6° Le digamma indique fcpoque de Claude et les temps postérieurs, jusqii’au commencement du iv' siècle.

7“ Les noras en ens, enü, commeiiccnt après les Antonins.

8quot; L’indication des tribus marqué les époques antérieures a Constantin.

9° Les accents accusent le siècle d’Aiigusie et fépoque suivante.

10'' L’absence de siiriiom a un persoünage illustre denote la première époque.

11quot; Le point en forme de triangle est postérieur a Auguste.

12quot; L’absence de prénom pour les femmes indique l’époque d’Auguste a Domitieii inclusivcment.

Laquot; La qualité de vir pcrfcctissimus, v. p., date de Marc-Aurèle; cellcde

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370 nbsp;nbsp;nbsp;LES TROiS ROME.

procurator privatarum rerum, p. p. r., de Septime-Sévère; celle de vir clarüsimus, v. c., donnée aux sénaleurs, de Tibère; aux préfets du pré-toire, d’Alexandre-Sévère.

14° Les sacrifices au Dieu Milhra, Ic CriohoUum, Ie Taurobolium, rappel-leut l’époque de Commode.

15° Le mol divus, dans les inscriptions impériales, annonce que Ie rao-numenl est postérieur a la mort du prince auquel il est dédié. Rome ne connail qu’une exception a celle régie, c’est I’inscriplion de l’Arc de Tilus.nbsp;II en exisie plusieurs dans les provinces : la flatterie n’atlendait pas tou-jours la mort des maitres du monde pour faire leur apothéose.

16° Les inscriptions païennes, trouvées dans les Catacombes, et qu’on appelle opistographiques, paree qu’elles sont écrites des deux cótés denbsp;la table de marbre ou de pierre, sont contemporaines a l’ère des persécu-tions et memo anlérieures. A partir de la paix de l’Eglise, les chrétiens nenbsp;furent plus dans la nécessilé d’employer les débris des monuments païensnbsp;pour élever des tombes a leurs frères.

17° La grande régie pour connaitre l’age des inscriptions, comme pour les interpreter, c’est d’en voir beaucoup, de les comparer entre elles, d’ennbsp;étudier les caractères, le style, la forme, la contexture, sous la directionnbsp;d’une personne expérimenlée.

CHAPITRE XII.

Diclionnaire des Sigles.

On trouvera, dans ce Diclionnaire, outre l’explication des principaux sigles, des notions sur différents sujets d’aniiquité, tels que les magistra-tures, les sacerdoces, etc., qui sont de nature a faire de chaque monumentnbsp;line page d’histoire.

\ «CM AA. Annum, annos.

A. Aulus. — Prénom.

A. jEdilis.

AA. Aquis Aponis.

A. A. A. F. F. Auro, argento, ajre, flando, feriundo.

A. A. s. E. V. Alter ainbove si eis vi-debitur.—En parlanl des consuls.

A. B. F. s. s. s. Ave beneraerita fe-mina sanclissima.

A. B. PRivAT. A balneis privatis.—Intendant des bains privés.

A. cvB. A cubiculo. — Chambellan.

A. D. A. Adsignandis, dandis agris.

A. D. A. r. Adsignari, dari agri jura.

A. E. Abest.

V. F. Ara facta.

A. F. Auli flliiis.

A. F. A. x. Auli ülius, Auli nepos.

A. L. Auli libertus, August® libertó.

A. L. Animo libens. —• Dans les inscriptions votives.

A. L. F. Animo libens fecit.

A. L. p. V. Animam liquil prseter votum.

A. M. XX. Ad milliare vicesimuni.

A. M. p. Al® Macedonum prim®. — Soldat du premier escadron de cavalerie, appelé escadron des Ma-cédoniens. La cavalerie des légionsnbsp;s’appelait ala, alas, a cause de sanbsp;destination qui élait de couvrir lesnbsp;ailes de Tarniée.

V. M. A municipalis sacris. — Revêlii des fonctions sacerdotales dansnbsp;une ville municipale.

A. o. F. c. Amico optirao faciiindiim curavit.

A. p. iEdililia potestate. — Les édiles étaient des magistrals qui avamut


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ESSAl SUR LES INSCRIPTIONS. 371

ESSAl SUR LES INSCRIPTIONS. 371

I’intendance des baliraents publics et particuliers; Ie soiii d’approvi-siouiier la ville de vivres; de ré-gier tout ce qui coucenie les marches et de veiller aux próparalifsnbsp;des jeux publics. II y avait six édi-les. Deux édiles, curules, pris dansnbsp;la noblesse et distingués par lanbsp;chaise curule, la robe prétexte, ienbsp;droit de publier les édits el de preside!’ les grands jeux; deux cdilesnbsp;plébéiens, chargés de faire observer les lois et réglements; deuxnbsp;édiles cércales, élablis par César etnbsp;choisis parmi les palriciens, pournbsp;surveiller les greiiiers publics etnbsp;les distributions de blé.

A. p. B. M. F. Anians pater beneme-renti filiae.

A. p. M. Annorum plus minus. — Environ taut d’années.

APQ. /ER. /Ediliüa potestaie, quaestor mrarii. — Receveur du trésor.

A. p. R. iErario populi romani.

A. p. R. c. Anno post Ilomam con-ditam.

A. p. V. c. Anno post urbem condi-tara.

A. QV/ESTION. OFF. PR.EF. PB.ET. A

quaestionibus oflicialiuin praefecti proeiorio. — Employé chargé denbsp;nolifler les questions des asses-seurs du préfet du préloire.

A. Q. ER. pp. R. L. Aut qui erunt, proximis recte liceat.

A. R. A recta, vel A ripa.

A. R. cEjL. A ralionibus cellae. Chargé de I’intendancc de la cave.

A. RA. MIL. FRV. A ratioiiibus mililaris frumenii. — Intendant des blésnbsp;militaires.

A. RATIO. voi.upT. A ratioiiibus voltip-tatuni. — Intendant des plaisirs; charge créce par Tibère.

A. RioN. A ralionibus.

A. s. Abest, vel a solo, vel adquisivil sibi.

A SIC. A signis.

A. s. s. A sacris scriniis, vel Aram suo sumplo.

A. T. V. Amici liliilo usi.

AB. AVG. M. p. Ab Augusta miliia pas-suum.

AB. V. c. Ab urbe condita.

ABD. Abdicavit.

ABN. ABN. Abnepos.

AD. AVGVST. TE.MP. c. p. Ad augusta-le lemperaraentum, coinprobalum pondus. — Vérifié a la mesure impériale.

AD. DOL. TEST. Ad dolia testacea.

ADiAB. Adiabenicus. — litre de Tem-pereiir Sept. Sévère.

ADN. Adnepos.

ADQ. Adquiescil.

ADTR. jvD. Adtributus judicio. — Al-tribué par jugement.

/ED. AED. /Edilis.

^D. cvR. /Edilis curulis.

/E. DESiG. jEdilis designalus.

«D. poTEST. /Edilitia potestate.

.ED. PL. Jidilis plebis.

.EDD. öQ. Jidilis quinquenUalis. — En fonclion pendant cinq ans.

JEL. /Elius. — Nom de familie.

/EM. ct AIM. ASmilia. — Notu d’une tribu.

/ER. Jirum. — paie militaire.

AGR. Agrorum.

AGRip. Agrippa. — Prénom.

A. L. V. s. Animo libens votum solvit. al. Alumnus.

aijE. 1. PR. c. R. Alae primae praJlorite civiiini romanorum.— Premieres-cadron de l’armée commandé parnbsp;un préteur et composé de citoyensnbsp;roniains.

ALL. Allectus.

AN. vel. ANi. Aniensi. — Nom d’uiie tribu.

an. V. p. M. II. Annos vixit plus minus duos.

ANULA. Anularis.

AP. nbsp;nbsp;nbsp;Appius, prénom de la familienbsp;Claudia.

App. E. Appellatus est.

AQ. nbsp;nbsp;nbsp;Aqua.

AQ. PR/ET. URB. Aquilifcr pratlorii ur-bis. — Porte-aigle du préloire de la ville. — Voir co qui est dit plusnbsp;bas du préfet du préloire.

AQv. AD. M. Aqiiarum ad Minieam.

ARG. p. Argenti pondo. — Une livre d’argent.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;’

ARG. R. V. p. s. p. Argonio rudi quin-que pondo sua pecunia.

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372 LES TROIS ROME.

372 LES TROIS ROME.

d’Augusle.

et po-

POP.

AVGVST. ET

pulus.

AVR. Aurelius.

AVSP. s. Auspicante sacrum. — Fa! sant une function sacrée conformó-ment aiix auspices

B. pro V. — Prénom de femmes. Par exemple, Bibia, pour Vibia.

B. Baccho.

B. Beleno.

B. Benemerenti. — Ce mot rcvient très-souvent dans les inscriptionsnbsp;païennes et chrétiennes. Voir cenbsp;que nous en avons dit dans l’IIts-toire de la familie, t. i. De la fanbsp;mille Romainc.

B. Berna pour Verna.

B. Beneficiarius. — C’était un employé, un soldat pensionné a raison de ses services : on trouvc des bé-néflciers des consuls, des préfetsnbsp;du prétoire, des legions, des ar-mées navales, et même des vais-seaux; b. iii, Yesta.— Beneficiarius triremis Vesta. — Pensionnénbsp;de la galère a trois rames iiomméenbsp;Vesta. Autre exemple;

D. M.

Q. M/EVIO

ARK. Arkai'ius. — Caissier.

ARK. RET. p. Arclise retro positse.

ARM. nbsp;nbsp;nbsp;Arara inonilus, vel Aram mar-nioream.

AR. V. V. D. D. Aram votam volens de-dicavit.

ARN. nbsp;nbsp;nbsp;Arniensi. — Nom d’une iribu.nbsp;AVG. L. Aiigusli libertus. — Affraiicbi

d’uii Auguste.

AVGG. August! duo, augustalis gratui-tus. — Prêtre gratuit d’Auguste AUGG. August! tres.

AVG. N. V. August! nostr! verna. — Es-clave de notre Auguste, née dans sa ma!son.

AVG. p. Avgust! puer.

AVG. ET. Q. AVG. Augustaüs el quaestor Auguslaüum. — Prêtre d’Auguslenbsp;et trésor!er du collége des prêtres

Augustalis

MARCIANO

MILITI CL. PR. MIS BENEFICIAR

Dis Manibus. Qiiincto Maivio Marciano militi, classis prsetoriat Misenensis beneficiario.

B. Bivus pro Vivus.

B. Bixit pro Vixit.

B. B. Bene bene, id est Optime, feli-citer.

B. B. Beneficiarius.

B. B. Bonis bonis, id est Optimis.

B. D. Bonte Dese.

B. D. D. Bonis Diis, Deabus.

B. D. s. M. Bene de se merenti.

B. F. Beneficiarius.

B. F. A. Bobus furvis aralro junclis, vel Boiia femiiia alba.

B. F. cos. Beneficiarius consulis.

BF. PR. Beneficiarius prseloris.

BF. p. R. E. Beneficiarius proetoris.

B. G. p. Biga gratis posila.

M. Bovem niarem.

M. Bene merenti.

B. M. F. Benemerenti fecit.

B. M. F. c. Benemerenti faciendum cu-ravit.

B. M. M. R. Benemerentibus.

B. M. T. Benemerentibus.

B.N. M. Bene ineriltc.

BNF. Beneficiarius.

BNV. Benevolo.

B. p. D. Bono publico dedit.

B. R. p. N. Bono reipiiblicte nato.

B. s. D. Basi signum dedit. — Ajouia la statue au piëdestal.

B. TRIB. Beneliciarius tribuni.

B. V. s. Basiin voto soliito.^^— A fait Ie piëdestal pour accomplir son a'OCu.nbsp;BF.N. Beneficiarius.

BF. Beneliciarius.

BRi. Brilannici.

BRIT. Britannicus.

BRix. Brixia vel Brixiani. — Brescia, habitants de Brescia.

B. TE. Bene valete. — A la fin des lettres.

c. Caius. — Prénom fort conimun. c. Centurio.—Officier militaire com-


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ESSAI SBR LES INSCRIPTIONS. Öht

ESSAI SBR LES INSCRIPTIONS. Öht

c.

c.

c.

niandantunecenturie, c’est-a-dire, cent hommes,nbsp;c. Cereri.nbsp;c. Civis.nbsp;c. Cohors.nbsp;c. Conjux. — Dans les inscriptionscenbsp;mot signifie également époux elnbsp;épouse, el plus souvent époux; carnbsp;épouses’exprime par Marifa,-quelnbsp;quefois même Ie mol uxor se prendnbsp;pourmarifus. L’époux d’une viergenbsp;s’appelle oirgmius; l’épouse vierge,nbsp;virgina; non remariée, univira;nbsp;l’épouse illégitime, concubina, con-tubcrnalis, ainsi que l’époux; et cenbsp;mariage, conlubernium ;tandis quenbsp;Ie mariage légitime s’appelle connbsp;nubium.

c. Cousularis. — Personnage qui a été honoré du consulat.nbsp;c. Consulibus. — Magistrals suprè-mes du peuple Remains. Ils étaientnbsp;au nombre de deux, nomraés pournbsp;un an, et se partageaientl’autorité,nbsp;de lelie sorle qu’ils se succédaientnbsp;de mois en mois, quelqiiefois d’unnbsp;jour a l’aulre. Leurs insignes étaientnbsp;la chaire curule. Sella curuUs; Ienbsp;baton du commandement en i voire,nbsp;Scipio eburneus; la loge ornéenbsp;d’une bande de pourpre, ïogaprcB-texta. Dans toutes leurs démarchesnbsp;olïicielles, ils étaient précédés denbsp;douze lictenrs, Lictores, qui por-taient des faisceaux entourés denbsp;branches de laurier, Fasces lau-reati. Hors de Rome, ces faisceauxnbsp;étaient armés de haches. Si unnbsp;consul rnourait en charge, un autrenbsp;éiaitélu pour Iereinplacer pendantnbsp;Ie reste de l’année. Consul suH'ec-lus. Les consuls en charge s’appé-laieut consuls ordinaires, Consulesnbsp;ordinarii, et leurs successeurs,nbsp;Consules designali.nbsp;c. A. F. MED. Copia Augusta felix Mediolanum. — Noin d’uu corps d’ar-uiée résidant a Milan,nbsp;c. A. A. M. Colonia iËlia Augusta Mer-curialis. — Nom d’unecolonie fon-dée par Adrieii, sous la protectionnbsp;de Mercure.

c. Avc. PVL. Caius Auctius Pulcher.

B. Cereri Baccho.

B. Civis houus.

B. Conjugi bonae.

B. Conjugi beuemerenti.

B. Colonia Bononia.

B. M. F. Conjugi beuemerenti fecit, c. Curator civiura.nbsp;c. Curise consulto. — Décret dunbsp;Sénat, assemble dans un des palaisnbsp;appelé Curia; Curia Julia, liosli-lia, etc.

c. Dux ducenarius. — Commandant de deux cents hommes, c. c. Calumniaj cavendaj causa,nbsp;c. c. Tricenarius.

c. c. -AVG. LVGD. Colonia copia Claudia Augusta Lugdunensis.

. c. COL. LVGD. Claudia copia colonia Lugdunensis.

, c. D. Curatuni consulto Decurio-num. — Pourvu par Ie décret des Décurious.

c. L. Caiorum duorum liberlus. c. M. M. Collegium centonariorumnbsp;municipii Maivaniolae.nbsp;c. M. R. Collegium centonariorumnbsp;municipii Ravennalis.nbsp;c. M. s. Colleg. centonariorum municipii Sassinatis.nbsp;c. s. Curatum communi sumptu,nbsp;vel Curarunt cives Sassinates.

. c. V. V. Colator curiatus virginum Vestalium.

. c. V. V. Clarissimi viri.

. D. D. Creatus decreto decurionum. . F. Clarissima femina.

. F. c. N. Caii filius, Caii nepos.

. H. F. Cujus hmres fuit.

. I. 0. N. B. M. F. Civium illius omnium nomine beuemerenti fecit.

. I. p. A. Colonia Julia paterna Are-late.

• I. p. c. N. M. Colonia Julia Narboni.s Martii.

. I. p. s. Colonia Julia paterna Subu-ritana.

. K. L. c. s. L. F. c. Conjugi karis-simse loco concesso sibi libente fieri curavit.

. L. Caii libertus.

. M. F. Curavit monumentum fieri, vel Clarissima! memorise femiiue.

. M. v. Clarissima; memori® vir.


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LES TllOIS ROME.

Nom

574

c. ?«. Caii nepos.

c. p. Cum praïierito, vel Cui prasest. C. p. Clarissimus puer.nbsp;c. p. R. B. R. Comparaberunt.nbsp;c. Q. F. Cum qua 1'uit.nbsp;c. R. Civium romanorum.nbsp;e. R. Civis romanus. — Assurancenbsp;de la liberlé personnelle, Hberlas;nbsp;2“ exempüon du supplice des verges et autres réservés aux esclavesnbsp;etaux élrangers, immunitas; 5° participation au service militaire dansnbsp;les legions, militia; 4“ inscriptionnbsp;sur Ie registre indiquant la fortunenbsp;de chaque particulier, census; 5“nbsp;admission dans une des tribus,/«snbsp;tribus; 6“ droit de suffrage dansnbsp;les cornices,quiritum; 7° droitnbsp;d’etre élu aux charges publiques,nbsp;jus honorum; 8° droit de participcrnbsp;aux solennités religieuses, jus sa-crorum privatormn et publicorum;nbsp;9“ droit a tons les avantages dépeunbsp;dant de la eonstiiutioii de la familie romaine, jus gcntilitium;nbsp;10“ droit de posséder suivaiit lesnbsp;lois, jus Icgitvmi dominü; il°droilnbsp;de mariage légitime,conmibii;nbsp;12quot; droit absolu sur la vic et lesnbsp;biens de leurs enfants propres ounbsp;adoptés,jMS patrium; tellesétaienlnbsp;les prérogatives des citoyens Ro-mains.

c. R. Curarunt refici. c. R. Castris Ravennatibus.nbsp;c. s. Carus suis.nbsp;c. s. Cum suis.nbsp;c. svM. Communi sumptu, fecit factum.

c. S. n. Communi sumptu lueredum, vel Concessu suorum hmredum;nbsp;alibi, Cum semi hora.nbsp;c. s. II. s. s. s. v. T. L. Communi sc-pulcro bic siti sunt. Sit vobis terranbsp;levis.

c. V. Castris veteribus. c. v. Clarissimus vir.nbsp;c. V. Coloiiia Vieiinensis.nbsp;c. V. p. V. I). D. Communi voluntatenbsp;piiblice votum dedicaruiitnbsp;c. V. T. Curavit usus tilulo.

CES. Caesar. c.ESS. Caisares duo.

caisss. Tres Csesares.

CAM. Camillia seu Camillina. -d’une tribu.

CAP. Capitalis.

CAS. Castrorum.

CAST. Rip. Castri Ripensis.

CEV. Censores.

CEXS. Censores. — II y avait deux censeurs. Leurcharge était de fairenbsp;Ie recensement des citoyens Remains; de veiller sur les moeursnbsp;publiques : d’affermer les revenusnbsp;del’Etat; d’inspecter les batimenisnbsp;publics, les routes, les puits, lesnbsp;aqueducs. A Texception des lic-teurs, ils jouissaient des mêmesnbsp;prérogatives honoriüques que lesnbsp;consuls : ils étaient nommés pournbsp;cinq ans.

CENT. Centurio.

CERERi. I. Cereri invictm. — A moiiis que l’iine soit un l, ce qui doiine-rait Cereri legiferoe, nom douné anbsp;Cérès par Virgile.

CERioLAR. ARG. Ccriolaria argentea.

Cl. Circiter.

CL. Claudius, Claudia.

CL. Claudia.

CL. CEL. Claudia Celeia.

CL. MAi. Claudialis Major. — Un des principaux prêtres de Claude.

CL. öQ. Claudius quinquatratis.

CL. VIR. Clarissimus vir.

CLA. Claudia, nom d’une tribu.

CLASS. PR. MIS. Classis prsetoria Misenensis. — De la Holle prétorienne OU commaiidée par un préteur etnbsp;stationnée a Misèue. Les Romaiiisnbsp;avaienttrois flotles; l’uneaMisène,nbsp;1’auire a Raveniie, la dernière iinbsp;F réj u s; 1 es va i ssea u X se d isti n gu en t,nbsp;dans les inscriptions, par leursnbsp;rangs de ramos, par Ie iiom de leurnbsp;diviiiilé tuiélaire et par Ie lieu denbsp;station m min. mis; Triremis, Minerva, Misenensis.

CLv. Cliistumina.—Nom d’une tribu. CN. Cneus. — Prénom.

CN. F. Cnei filius.

CN. N. Cnei nepos.

CN. nbsp;nbsp;nbsp;Lo. Cneo Lollio.

CO. nbsp;nbsp;nbsp;Conjux.

coH. I. BR oo EQ. Coliortis primse Bri-


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ESSAI SUR LES INSCRIPTIONS. 373

lonum Milliari® equitalsc. — De la. première cohorte de cavalerie bre-tonne, appelée Milliaire.

coii. iiii. PR. p. V. Cobortis quart® pr®-torimpi® victricis, rel pi® vindicis.

COL. Collina. Nom d’iine tribu.

COL. AP. Colonia Apiilensis.

COL. .AVG. NEM. Colonia aiigiista Ne-mausum. Niines, Colonia auyustanbsp;OU impériale.

COL. Collega.

COL. FABii. Collége des artisans. Les corps de métiers formaieut tons desnbsp;associations ou colléges.

COL. JVL. Colonia Julia.

COL. JVL. AVG. APOLLINAIl. REIOR. Colo-

iiia Julia Augusta Apollinarium Reiorum.

COL. nbsp;nbsp;nbsp;NAR. Colonia Narniensis.

COM. nbsp;nbsp;nbsp;Comparatum.

COM. BOM. Comes domesticorum. —nbsp;Chef des domesiiqucs, sous lesnbsp;derniers empereurs. Le titre denbsp;comte date de Tibère; il signifianbsp;d’abord courtisan et compagnonnbsp;du prince.

COM. nbsp;nbsp;nbsp;HAD. c. Comitiorum liabendorumnbsp;causa.

coMpiTAL. LAR. AVG. Compitaütio La-rium Augustorum.

CON. nbsp;nbsp;nbsp;p. s. Coiisularis provinci® Sici-li®.

CON. SOL. D. Concedendo solum dedit.

CONC. Concordialis.

CON. o, s. p. Conjugi optim® sepul-cruni posuit.

CON. V. PRO. Conjugi viro probo.

coNi. Conjugi.

coNs. Coiiservus, conscrvo.

CONS. nbsp;nbsp;nbsp;CAP. Consularis Campani®.

CONT. nbsp;nbsp;nbsp;oo gr. Contariorum milliarianbsp;civium Romanorum.

coR. Corpus.

coR. Cornelia. — Nom d’une tribu.

coR. TR. Coruicularius tribuni.

CORR. FLAM. Corrector flamini®. — Inspecteur de la voie Flamiuienne.

CORR. MI. ET. AL SEN.- V. S. CorrCCtOS

Minici® et alimeutorum seniorum urbis sacr®.

cos. Consul.

cos. DES. Consul designatus.

cos. et coss. Consoles.

cos. et coNS. Consularis.

cüi PR. Q. ER. Cui pr®est, Quintus Erucius.

cvNc. Conjunx.

cvR. AGEN. Ciiram agente.

CVR. COL. Curator coloni®.

CVR. LAVR. LAv. Cui’ator Laurens La-vinas, vel Laurentium Lavinatium.

CVR. p. p. Curator peciini® public®.

CVR. R. Curator reipublic®.

CVR. R. Pis. ET FAN. CuralOT rcipublic® Pisaurensium et Fanestrium. —nbsp;Dc Pesaro et de Fano.

CVR. REsi. Curator Residuorum.

cvRAT. L. L. Curator Laurentium Lavinatium.

cüR. viAR. Curator viarum.

D

D. Decimus. — Prénom.

D. Decuria.

D. Decurio. — C’étaient les magistrals des villes inunicipales. Librementnbsp;choisis par leurs concitoyens, ilsnbsp;les gouvernaient a peuprès coramenbsp;les conseils municipaux gouver-nent iios communes. Leur reunionnbsp;s’appelait Collegium Decurionum;nbsp;ils élaient au nombre de dix.nbsp;Les villes muuicipales, municipia,nbsp;étaient des villes conquises et al-liées qui ne possédaient que parnbsp;faveur le droit de cité romaine. Cenbsp;droil leur élait accordé lorsqu’ellesnbsp;se gouvernaient d’après les loisnbsp;roniaines, Municipia cum suffra-gio; si elles se régissaient d’aprèsnbsp;leurs propres lois, elles n’avaientnbsp;accès qu’aux charges militaires,nbsp;Municipia sine suffragio. La plusnbsp;connue de ces dernières était lanbsp;ville de Céré en Toscane. De lanbsp;celte expression In CenrUum ta-hulasreferre, employée par les cen-seurs pour designer la privationnbsp;de quelques-uns de leurs droits,nbsp;inlliquot;éeauxcitoyensdont ils étaientnbsp;mécontenls. — Dans les inscriptions militaires, decurio, officiernbsp;subalterne qui commandait uuanbsp;décurie ou dix hommes.

D. Dedicavit, dedit.


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576 LES TROIS ROME.

D. Deo, diis.

igt;. Domo.

II. vel D. Domo. — A 1'ablalif, c’est-a-dire de loco, du lieu ou de la inai-soii, Roma, Bononia.

1). A. Dies artiflcialis.

D. A. M. Diis Avernis inanibus.

I). B. Decurio ballistaiiorura.

II. B. M. Dulcissima! benemerenti fecit.

D. c. Decurio.

[I. c. D. Decuriones colonise Dertosse.

D. c. R. M. Decurionum.

D. D. Dono dat, vel dedit, vel Donum dedit.

D. D. Dea dia.

D. D. Diis deabus.

D. D. Decreto decurionum.

B. D. c. B. Dese dise Cereri Bacebo.

D. D. n. Dono dedit donum.

D. D. D. Datus decreto decurionum.

D. D. D. Dono dedit, donurn dedicavit.

D. D. D. NNN. FFF. DominoFum nostro-rum Flaviorum.

I). D. I. I. M. Dedicavit jussus Jovis merito.

D. D. L. M. Donum dedit libens merito.

II. D. N. c. p. R. Dedicatum nomine communi populi Romani.

I). D. o. Diis deabus omnibus.

p. D. s. M. Dedit sui vel .somno mo nitus.

D. E. M. Dei ejusdem monitu.

II. F. Decimi filius.

B. F. ü. I. p. Decurionum flde divi-denda in publico.

I). G. Dies sex.

D. I. Dese Isidi, vel Diana; invict®.

p. I. M. Diis inferis manibus.

D. I. M. s. Deo invicto Mithr® sacrum

D. L. Decimi libertus. — Dans ses relations avec son maitre l’esclave affranebi s’appelait Libertus; parnbsp;opposition au citoyen né libre, ilnbsp;s’appelait Liberlinus. L’affranchinbsp;prenait Ie nom et Ie prenom de sonnbsp;patron, et y ajoutait Ie sien commenbsp;surnom, cognonem. Du reste, pournbsp;ètre affranebi, il ne cessait pasnbsp;d’etre attaché par certaines obliganbsp;tions .a son maitre dont il deveiiaitnbsp;Ie dient. En donnant Ie nom denbsp;dient, eliens, a un bomme, a une

familie, a une ville, qui confiait la tutèle de ses affaires, de ses intéréts, a un praticien, celui-ci senbsp;ebargeait de les défendre moyen-nant certainsdevoirs el hommages;nbsp;salutare, occurrere, deducere, scc-lari. Le droit du patron s’appelaitnbsp;jus patronalus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;D. Donurn liberis dedit.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Deiim matris.

M. Dis manibus.

M. Dis manibus.

M. Divino monilo.

M. Dolo Malo.

M: A. Dolus malus abest, absit, abeslo.

M. ET. JET. M. L. Düs manibus et seternse memori® Lucii.

M. J. Dis manibus inferis.

M. IN. Dis manibus inferis.

M. nbsp;nbsp;nbsp;s. Dis manibus sacrum.

51. v. Dis manibus votum.

N. nbsp;nbsp;nbsp;Decimi nepos.

N. ET I). N. Dominus noster; Domino nostro.

N. M. Q. E. Devotus numini majes-tatique ejus. — Expression de flal-terie inventée par les courtisans des Césars.

N. nbsp;nbsp;nbsp;M. s. De® Nosli® magn® sanct®.nbsp;o. M. De® optim® maxim®.

o. nbsp;nbsp;nbsp;p. Domo Osti® portu.

p. nbsp;nbsp;nbsp;Diis publicis.nbsp;p. Donurn posuit.

p. p. D. D. De propria pecunia de-dicarunt.

p. s. D. De pecunia siia dedit. p. s. T. L. Die pr®teriens ; Sit terranbsp;levis.

O. 1,. s. T. T. L. Dicite qui legiiis :nbsp;Sit libi terra levis.

li. p. M. R. Det reipublic® munici-pii Ravennalis.

R. s. De redilibus suis, vel De reditu suo.

s. B. 51. De se benemerilo.

s. J). De suo dedit.

s. D. D. De suo donurn dedit.

s. J. Diis Stygiis inferis, vel Diis

sacrum inferis.

s. j. F. De sua impensa fecit.

s. J. p. c. De sua impensa ponen-

dum curavit.



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ESSAI SUR LES INSCRIPTIONS. .')/ i

ESSAI SUR LES INSCRIPTIONS. .')/ i

E. Ergo.

D. s. J. s. L. M. De sua inipensa solvit libens merito.

D. s. p. De suo posuit, vd De sua pecunia.

D. s. p. F. c. De sua pecunia faciendum curavit.

D. s. p. p. De sua pecunia posuit.

D. s. p. V. j. s. L. M. De sua pecunia votum jure solvit libens merito.

D. nbsp;nbsp;nbsp;s. s. De suo sumptu.

u. T. Dum taxat.

DAL. wviT. Dalmatarum Divitensium.

DAL. FORT. Dalmatarum Fortensium.

DE. Defunctus.

DE. I). M. De dolo malo.

DE. vic. s. De Yicanoruin senténlia.

DEC. Decurio.

DEC. c. c. COL. Avc. LVG. Dccurio col-legii centonariorum Colonise Au-gustse Lugdunensis.

DEC. DEC. Decreto decurionum,

DEC. II. Q. I. Decurio bis, quaestor semel.

DEC. EQ. siNG. IMP. N. DecuHo cquilum singularium imperatoris noslri. —nbsp;Décurioii de la garde impériale.

DEC. ORN. Decurioni oriiaraentario, vel Decurionalibusornamentis. — Dé-curion honoraire.

DECVR. Decurio.

DE DD. Dedicavit.

DEF. Defricator, defunctus.

DEO. NEM.DeoNemauso.VoilaNiraes divinisée comrae Rome, Dea Roma.

DES. et DESiG. Dqsignatus.

DiCT. Dictatore.

DIS. Disciplinatus (est.)

Dvc. Dvc. Duce ducenario. — Commandant de deux cents hommes.

Dvp. svB. p. c. Duplaris sub prsefecto classis. — Soldat jouissant d’unenbsp;double paie.

DVPL. Duplarius.

DVPL. CL. p. MISEN. Duplaris classis prsetoriae Misenensis.

DVPL. DiVR. STiPEN. XII. Duplari diur-norum stipendiorum duodecim.— Soldat jouissant d’une double paienbsp;depuis 12 ans.

£

E. nbsp;nbsp;nbsp;Sigle indiquaut ie centurion.

T. IV.

E. Exactor.

E. A. Equis Augusti.

E. cvR. Erigi curavit.

EE. öQ. RR. Equites Romani. — Dans l’origine, les chevaliers Romainsnbsp;élaient les citoyens qui allaient anbsp;la guerre sur unchevalquileurap-partenait. Ils devinrent une classenbsp;puissante, intermédiaire entre ienbsp;peuple et Ie sénat, dont l’existencenbsp;politique fut décidément reconnuenbsp;du temps de Cicéron. Un de leursnbsp;privileges élait d’obtenir la fermenbsp;des revenus publics des provinces.nbsp;D’abord exclusif, ce privilége futnbsp;depuis Sylla partagé avec les séna-teurs. Les insignes de leur digniténbsp;élaient 1quot; un anneau d’or, annulusnbsp;aureus; 2“ une petite bordure denbsp;pourpre sur leur tunique. Augustusnbsp;davus (tunica angusliclavia); lesnbsp;quatorze degrés au-dessus du podium, leur étaient réservés dansnbsp;1’ampbiiliéaire.

E. F. Egregia femina.

E. M. V. Egregiae memorise viro.

E. p. E. E pretio.

E. p. RE. E publieis regionura.

E. s. E suo.

E. R. E. V. E republica essevidebilur. E. T. Ex teslamcnto.

E. T. F. j. s. Ex testamento fieri jus-sit sibi.

E, V. L. M. p. Ex volo libens merito posuit.

EG. Erga.

E.M. Emeritus.

Eö- AVG. N. Eques Augusti nostri.

EQ. pvR. Equo publico. — Cheval donné par Ie peuple ou 1’autoriiénbsp;publique.

EQ. R. EQ. ROM. Eques Romanus.

EQ. s. Eques singularis. — Garde du corps.

Eft. s. D. D. N. N. Eques singularis do-minorum nostrorum.

EQ. nbsp;nbsp;nbsp;iiiPL. Equili triplari. — Recevantnbsp;une triple paie.

ER. nbsp;nbsp;nbsp;LEG. Erogatorilegionis. —Payeur

de la legion. ESQ. Esquilina. —nbsp;ET. R. Et reliqua.nbsp;E. V. Egregio viro

Nom d'uiie tribu.


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578 LES TROIS ROME.

E. V. L. M. Ex voto libens merito (posiiii).

EVM. H. L. N. R. Eum {id est eorum) lisec lege nihil rogatur.

EX. ARG. u. V. p. s. p. Ex argento rudi quinqiie pondo sua pecunia.

EX. A. D. c. A. Ex auctoritate diviCse-saris Augusli.

EX. A. Q. J. R. P. V. et EX AVC. Q. JVN. RVS. PR. VR. Ex auctorilate Q. Juniinbsp;Hustici Prsetoris Urbani.

EX. B. s. Ex bonis suis.

EX. c. c. Ex consensu civitatis.

EX. coNSENsv. PU. Ex conseosu pro-vinciae.

Kx. I). D. Ex decreto decurionum.

EX. DEC. DEC. MVN. MAL. Ex dcCretO

decurionum municipii Malacencis.

EX. DEC. ORD. Ex dccreto ordinis.

EX. riG. Ex figlina, vel figulina. — Vase fait d’argile, ou dans la boutique d’un polier.

EX. jvGx. Ex jugero decimo.

EX. ORAC. Ex oraculo.

EX. PR. VRB. Ex praifecto urbis.

EX. PO. Ex praefecto prsetoris.

EXPR. Ex prsedio vel praediis.

EXPPRE. Ex prsefeclo privatarum re-munerationuin. — Intendant des bienfaits particuliers de Teinpe-reur.

EX. s. c. Ex senatusconsulto. — Le sénat se composait sous Augustenbsp;de 600 membres. II fallait être agénbsp;de 31 ans pour être sénateur, tan-dis qu’il n’en fallait que 16 pournbsp;être chevalier. Le sénat se recru-tait 1“ dans les families patri-ciennes; 2“ dans la classe des chevaliers; 3” parmi les ciloyensnbsp;distingués par leur fortune ou parnbsp;les emplois qu’ils avaieut exerccs.nbsp;Le sénat avail droit dedélibéraiionnbsp;préalable, quand il s’agissait denbsp;lois constitutives, ou de prononcernbsp;sur la paix et .sur la guerre. II availnbsp;l’inspection du tré'sor public, ilnbsp;réglait l’état militaire, était chargénbsp;de l’organisation et de Tadminisnbsp;tration des provinces, traitait avecnbsp;les ambassadeurs étrangers et choinbsp;sissait ceux de la République. Dansnbsp;les grandes crises de l’Etat, il pou-vait, sans consulter le peuple, con-fier a certains magistrals un pou-voir absolu. Les assemblees dunbsp;sénat commengaient par un sacrifice, et par la consultation des au-gures. Le prince du sénat proposaitnbsp;le sujet de la délibération; chaquenbsp;membre donuait son avis en pennbsp;de mots ou par un discours détaillé;nbsp;le président résumait les débats;nbsp;ensuite, si le nombre des suffragesnbsp;était sufiisant, le sénalus-consultenbsp;était proclamé, gravé quelquefoisnbsp;sur l’airain et déposé dans les archives ou trésor de la Républiquenbsp;in talmlis reponi, in mrarium re-ferri, condi. Les insignes des séna-teurs étaieni une chaussureen cuirnbsp;noir, calcei nigri ex aluta, ornéenbsp;d’un C en ivoire ou en argent, lunula eburnca vel argenlca, unenbsp;large bordure en pourpre sur leurnbsp;tunique latusclavus, tunica, lati-clavia; des places privilégiées leurnbsp;étaient réservées aux spectacles,nbsp;in orchestra'sedcre, adpodiumspcc-tare; leur traitement était denbsp;123,000 francs.

EX. s. c. TERMiN. Ex seuatus-consulto terminaverunt.

EX. STA. Ex stipe annua.

EX. TEST. Ex testamento.

EX. TT. SS. lilt. Ex testaraentis supra scriptorurn ha;redum.

ER. V. Ex voto, vel Ex visu.

EX. V. p. Ex voto posuit.

EX. VIS. Ex visu.

EX. H. s. N. cc. L. DXL. Ex scstercio-rum nummorum ducentis quin-quaginta millibus quingentis qua-draginta.

EXAR. NVM. DAL. DiviT. Exarchi numeri Dalmatorum Divitensium.

EXEMPL. DECT. G. F. Exemplum decreti quondam facli, vel quod factum.

EXERCiTA. N. Exercitatori numeri, id est legionis.

EXQ. Exquilina. — Nom d’une tribu.

EX. TM. Ex testamento.

F. Flamen. — Nom d’un prêtre d'un


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F.SSAI SUR LES INSCRIPTIONS. 579

seul dieu. Ville essentiellemenl re-ligieuse, et qui dut rempire du monde, 1“ au sentiment religieux;nbsp;2“ au respect pour raulorilé paler-nelle; 5quot; a I’amour de la palrie nénbsp;des, deux principes precedentsnbsp;Rome comptait un grand nombrenbsp;de sacerdoces : 1“ Le collége desnbsp;pontifes, composé de seize memnbsp;bres; il avait le droit d’inspectionnbsp;sur le culte religieux et sur sesnbsp;ministres, ordonnaii les solenniiésnbsp;publiques, etc., etc. Le présidentnbsp;de ce collége, pontifex maximus,nbsp;installait les prètres et jouissaitennbsp;outre de droits leniporelsfort étendus, pouvait arrêter, suspendre lesnbsp;délibératious du séiiat, etc. De lanbsp;vint que les empereurs se flrentnbsp;nommer souveraius pontifes. 11nbsp;remplissait ses fonctions a vie, hanbsp;bitait prés du Forum la Regia domus a vee le roi des sacrifices chargénbsp;de la celebration des sacrifices u.i-tionaux, accomplis dans le principenbsp;par les rois en personiie, rex sa-crorum, seu rcx sacrificulus, et nenbsp;pouvait jamaisquitter l’ltalie.ïousnbsp;les pontifes portaient la loge oriiéenbsp;depourpre,(og'apr®tofa,etconimenbsp;ornement principal, un bonnet conbsp;nique en peau, sabrus. 2“ Les Au-gures. L’unedes lois foiidainentalesnbsp;de la constitution Uomaine, c’étaitnbsp;de ne jamais accomplir aucun actenbsp;public, civil ou militaire, sans êtrenbsp;auparavant assure du contente-ment des Dieux. A eet effet, onnbsp;observait tous les phénomènes ex-traordinaires de la nature, et par-liculièrement le vol et le chant desnbsp;oiseaux. Les augures, au nombrenbsp;de quinze, étaient chargés de cenbsp;soin; leur chef s’appelait Augurnbsp;maximus, ou Magister collegü Au-gurum. 3“ Les Aruspices. C’étaientnbsp;des prètres ou devlns chargés d’in-terpréter les signes, les prodiges,nbsp;de chercher la volonté des Dieuxnbsp;dans les entrailles des victimes;nbsp;leur nombre s’élevait a soixante.nbsp;4“ LesQuindecemviri sacris fadun-dis. C’était un collége de quinze

prètres chargés de garder les livres sibyllins, de les consulter sur l’or-dre du sénat, et d’e.xécuter lesnbsp;prescriptions qu’ils y trouvaient.nbsp;5quot; Les Seplemviri cpulonum. C’était un collége de sept prètres, ad-joints aux pontifes pour la prépa-ration des festins solennels dansnbsp;les sacrifices, et la surveillance desnbsp;jeux publics : eet emploi ctait or-dinairement confié a des jeunesnbsp;gens de haute naissance. Excepténbsp;les Aruspices, les prètres mention-nés plus haut étaient les plus importants a Rome, Sacerdoles sum-morum collegiorum.

Parmi les prètres les uns étaient con-sacrés au service de tons les Dieux, d’autres au culte de plusieurs di-vinités, d’autres enfin n’en ser-vaient qu’une seule. Les prètresnbsp;d un senl Dieu s’appelaient Ffomi-ncs, et on les distinguait par desnbsp;surnoins empruntés a leurs divi-nités respectives. Les principauxnbsp;étaient celui de Jupiter, de Mars etnbsp;de Qiiirinius, Flamen Dialis, Mar-lialis, Quirinalis; les Césarsdéifiésnbsp;eurent aussi leurs Flamines : Flamen Augustalis, Claudialis, Adria-nalis, etc., etc. On distinguait encore : les frères Ar va les, fralresnbsp;Armies, au nombre dé douze chargés de la consecration annuelle desnbsp;terres; les Curious, Curioncs: c’c-taient trente prètres qui présidaientnbsp;aux sacrifices commuiis des diffé-renlestribus; les Féciaux, Fcctate,nbsp;chargés de prononcer solennel lenient les declarations de guerre,nbsp;les conclusions des traités d’al-liance; leur chef s’appelait Paternbsp;palratus; les Saliens, SalH, aunbsp;nombre de douze, chargés de porter une fois chaqueannéeen triom-phe les douze boucliers confiés anbsp;la garde des Vestales, et auxquelsnbsp;on croyait attaché le salut de 1’em-pire; enfin les Vestales, préposéesnbsp;a la garde du feu sacré du Palladium et des boucliers sacrés. — IInbsp;éiait utile de donner une notionnbsp;de ces différents sacerdoces dont


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380 LES TROIS ROME.

380 LES TROIS ROME.

G. c. Genio Caii.

G. F. Germin® fidelis.

GGG. FFF. German! fratres tres.

G. L. Genio loei.

G. M. V. Germina Minervia victrix.

G. p. F. Gemina pia fidelis.

G. nbsp;nbsp;nbsp;s. German!® superioris.

GAL. Galeria.

GAL. Galliarum.

GEM. Gemina.

GER. Germaniciis.

GER. p. Germania provincia.

GER. SVP. Germania superior.

GREG. VRB. Gregis urbani.

II

H. nbsp;nbsp;nbsp;H®res.

II. Habet.

H. Honorem.

H. A. F. c. Hanc aram faciendara curavit.

II. AQ. Ilic adquiescit.

H. A. c. H®redes amico curarunt.

H. A. c. F. e. H®redes acre communi faciundum curavere.

II. ARA. H. N. s. II®c ara hmredes non sequitur.

II. ARAM. s. Q. L. H. 3.3. Hanc aram si qiiis Imserit habeat Isidem iratarn.nbsp;II. A. 3. R. Honoré accepto impensam,nbsp;vel impendium remisil.

II. B. Homo bonus.

H. B. M. F. c. Haires benemerenti faciundum curavit.

11. c. H®res curavit.

les noms reviennent souvent sur les inscriptions.

EI. Filius, filia.

F. Fuit.

F. Figlina.

p. Flavius, Flavia.

F. Fundus.

F. AN. XIV. Filiaj annorum xiv.

FAS. Fastigium.

F. c. Faciendum curavit, vel Facere curavit.

F. c. Felix constans.

F. CL. VAL. Forum Claudii Vallen-sium.

F. D. M. Fecit Diis manibus.

FF. Fisci frumenlarii.

F. F. Flando feriundo.

F. F. F. Trium Flaviorum.

FF. OLL. Fecit ollam.

F. F. 3. L. Fecerunt Caioe liberti, vel F^ieri fecit Caise libertus.

FF. LL. Flaviis duobus.

FFF. LLL. F^laviis tribus.

F. F. p. p. F. F. Forlissimi, piissimi, felicissirai, vel Felicissimi, forlissimi principis filio, vel Florentis-simi palris pairise filio.

F. F. 3. L. Filiorum suorum Caise liberti.

F. H. F. Fieri hseredes fecerunt.

F. I. Fieri jussit, vel Fieri insiiluit.

F. J. A. Felicitas Julia Augusta.

F. i. D. p. s. Fieri jussit de pecunia sua.

F. L. L. p. s. Fecit libentissime pecunia sua.

FOCCEs. Figlina Oceana Csesaris.

F. p. Forlunse publicse.

F. p. D. D. L. M. Forlunse publica; de-derunt libenter merito.

F. p. F. Filise poni fecit.

F. s. Fratribus vel Filiis suis.

F. V. s. Fecit voto suscepto.

FAR. Fabia. — Nom d’une tribu.

FAE. Fabrum.

FAR. F'abrina. — Nom d’une tribu.

FEC. Fecit, fecerunt.

FEC. Fecialis.

FER.LAT. c. Feriarum latinarum causa. — Fête oü l’on célébrait la confé-dération commune des peoples dunbsp;Latium.

HG. Figlina vel Figülina.

FIN. POMER. TERMIN'. Fincs Pomei'ii terminarunt.

FL. Flavius, Flavia.

FL. Divi. Flamen divi.

FL. DIVI. TiT. Flamen divi ïiti.

FL. DIAL. Flamen dialis.

FL. MART. Flamen martialis.

FLAM. p. H. c. Flamen provincise His-pani® citerioris.

FOR. coR. Forum Cornelii.

FR. Frumentarius.

FR. D. Frumenti dandi.

FVG. Fugitivus.

FVL. Fulvius.


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381

ESSAI SDR LES INSCRIPTIONS.

. c. Hie condiderunt.

. c. D. D. Huic coliegio dedicarunt.

. E. E. T. F. c. Hairedes ejus ex testa-mento fieri curarunt.

. ÉT LiB. Hairedes et liberti.

. F. Honesla femina.

. F. c. Hseres faciundum curavil.

. F. s. c. A. Hairedes feceruut sumptu communi aram

. H. p. p. Hispanise proviiiciarum duarum.

. j. I. Haires jussu illorum.

. j. Hujus.

. L. Hac lege.

. L. R. Hauc lege rogatam.

. L. s. s. Hic locus sive sepulcrum.

. M. Hoe monuinentum.

. M. Honestse malroiise.

. M. A. H. N. p. Hoe nionumentum ad hseredem non perlinet.

. M. D. A. Huic monumento dolus abest.

. M. D. M. A. Huic monumento dolus malus abest.

. M. D. M. AB. Huic monumento dolus malus abest.

. M. E. Homini memorial egregiae

. M. ET. L. s. H. N. s, Hoe monumen-tum et locus sepulcri hairedes non sequitur.

. M. EXT. N. R. Hoe monumentum ex-teros non recipit.

. M. G. N. s. Hoe mi tiles non sequitur.

. M. N. s. Hoe monumentum hairedes non sequitur.

. M. H. E. N. s. Hoe monumentum haeredem exterum non sequitur.

. M. H. s. Hoe monumentum hsere-des sequitur.

. M. M. H. M. N. s. F. Humanitatis mala metuens hoe monumentumnbsp;nomine suo fecit.

. M. p. Hoe monumentum posuit.

. M. s. D. M. Hoe monumentum sine dolo malo.

. M. s. s. E. N. s. Hoe monumentum sive sepulcrum exterum (hseredem) non sequitur.

. M. V. A. N. Lic. Hoe monumentum vendere alienare non licet.

. o. V. F. F. D. S. E. M. Q. M. C. S. HiC

ollas quinque filiis de suo emit,

monumentumque merenli conjugi suai, vel Fecit fieri de suo aire;nbsp;melius : Hairedes optimo yiro fue-runt de se egregie merito quielis etnbsp;memorial caussa.

li. R. j. R. Honore recepto impensam remisit.

n. s. D. M. A. Huic sepulcro dolus malus aheslo.

u. s. E. Hic situs est, vel sita est.

H. s. E. S. T. T. L. Hic situs cst. Sit libi terra levis.

H. s. F. Hoe solus fecit, vel Hoc sacrum fecit.

u. s. F. u. T. F. Hic situs fuit. Hseres titulum fecit.

n. s. F. L. s. p. D. D. D. Hoc sibi fecit, vel Hic situs fuit locus sepulturainbsp;permissus decreto decurionum.

H. s. II. N. s. Hoc sepulcrum hseredes non sequitur.

H. s. T. N. E. Hic sita tarnen non est. H. s. s. Hic siti sunt.

H. T. D. D. Hseres titulum dedit.

H. T. F. Hunc titulum fecit.

II. T. D. D. Hunc titulum dedit.

H. T. V. p. Hunc titulum vivus posuit. H. v. Hispanise utriusque.nbsp;n. V. Honore usi.

H. V. Hsec vixit. nbsp;nbsp;nbsp;'

u. V. D. Hujus voti debitrix, vcl Her-culi victor! donum.

H. V. Hic vixit.

n. V. s. R. Honore usus sumptum remisit.

ii. V. V. Herculi valenti victori. ii. X. Horis decern.nbsp;iiERED. EX T. c. F. Hseredcs ex testa-mento fieri curarunt.

HON. vsvs. Honofe usus.

iioR. Horatia. — Nom d’une tribu.

hor. Horrearius.

uvic. M. c. Huic monumento cedit.

J. Semel.

J. Imperator.

J. Prima, prsenomen maxime soro-rum.

I. c. Judicans.

. A. p. Q. V. Incoraparabili amantis-simse, prsestantique virtute.


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382 LES TROIS ROME.

j. B. JussuDei.

j. D. Juridicundo.

j. B. N. civ. Judex designatus nomine civium.

I. nbsp;nbsp;nbsp;r. Jussu feeit.

j. F. c. H. s. Inferri concesserunt hae-redes sui.

II. nbsp;nbsp;nbsp;voT. Iterum vota.

n. M. Iteralus miles. ,

H. Secundus, cognomen.

II. viR. Duumvir. — II y avail a Rome et dans les villes municipales plu-sieurs corps ou colléges de magis-irats, dont Ie nom commence parnbsp;Ie nombre des membres et finit parnbsp;l’indication de leurs fonctions.nbsp;Duumviri, magistrals des munici-pes; Triumviri monelalcs, a. a. a.nbsp;A. F. F. Ab aere, auro, argentonbsp;flando, feriundo : chargés de la fabrication de la monnaie. Triumvirinbsp;capilales; ils couiposaient Ie tribunal de première instance, pournbsp;les causes criminelles, avaient lanbsp;surveillance des prisons et faisaieninbsp;exécuter les arrêts de mort; c’estnbsp;pour cela qu’ils avaient buit lic-teurs a leurs ordres. Triumvirinbsp;nocfwrnt, chefs des gardes de nuitnbsp;et gardiens des machines centrenbsp;l’incendie; Qualuorviri Colonim de-ducendm, commission de quatrenbsp;membres cbargée de l’établisse-ment d’une colonie; Quinquevirinbsp;minuendis publicis sumplibus, dontnbsp;la fonction élait d’arrêter 1’aug-mentationdes dépenses publiques;nbsp;ld. murü lurribusque reficicndis,nbsp;chargés de veiller a l’entretien etnbsp;a la réparation des fortifications;nbsp;Sex viri regendis civitatibus, es-pèce de conseil municipal chargénbsp;de soigner les intéréts des villes;nbsp;Sex viri augustalcs, c’étaient lesnbsp;six prêtres d’Auguste, destines aunbsp;culte de l’empereur divinisé. Onnbsp;trouve que les municipes élaieutnbsp;adminlstrées par des corps de 2,nbsp;de 4, de 5, de 6, de 10 magistrals, etc.

i-i. VIR. Duumvir.

II. V. BB. Duumviris dedicantibus.

II. VER. s. D. Duumviris juridicundo.

iH. Trioris. — Galère a irois rangs de lames.

III. F. Tertio filio.

III. Triumvir.

III. A. A. A. F. F. Triumvir auro argento, ®re flando feriundo.

III. viRO CAPiT. Triiiinviro capitali.

III. VIR. 3. D. Triumvir juri dicundo.

III. nbsp;nbsp;nbsp;VIR. R. p. c. Triumvir reipublicajnbsp;constituend®.

IV. nbsp;nbsp;nbsp;Cognomen feminse.

IV. VIR. Quatuorvir.

mi. VIR. J. D. Quatuorvir juridicundo.

nil. vm. A. p. Quatuorvir mdililia po-teslate.

nil. VIR. LEG. COR. Quatuorviro lege Cornelia.

nil. VIR. p. L. p. Quatuorvir per legem Pompeiam.

VI. VIR. Sexvir. — Sevir.

Iniil. VIR. .AVG. Sexvir Augustalis.

I. nbsp;nbsp;nbsp;L. r. lllius liberta fecit.'

3. L. II. Jus liberorum liabcns.—Voyez ce qui en est dit dans I’Histoire denbsp;la Société domestique; 1.1, de la Familie Romainc.

3. 0. In opus.

J. nbsp;nbsp;nbsp;0. M. Jovi optirao maximo.

J. 0. M. A. D. Jovi oplimo maximo adioassuritano Dolipheno.

J. 0. M. B. Jovi optimo maximo dedi-catum.

J. 0. M. D. 3. Jovis oplimi maximi di-vino jussu.

J. 0. M. II. .AVG. Jovi optimo maximo : lionori Augusti.

3. 0. M. J. M. Jovi optimo maximo Ju-noni Minervm.

3.0. M. ST.AT. Jovi optimo maximo sta-tori.

J. p. N. M. p. XV. Julia Pia Narbonensis Mania pedes quindecim.

I. nbsp;nbsp;nbsp;Q. p. Idemque probavit.

3. R. Junoni Reginae.

J. nbsp;nbsp;nbsp;s. In suo.

/• s. c. Judex sacrarum cognitionum.

3. s. 3. p. D. M. Jovi sereno Junoni pla-cidse diis magnis.

3. s. M. R. Junoni sospitaj magnae Regin*.

J. s. s. Infra scripta sunt.


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ESSAI SUR RES mCRIPTlONS. 285

j. s, V. p. Impensa sua \ivus posuit; vel ipsa sibi vivens posuit, vel Innbsp;suo vivens posuit.nbsp;j. V. E. E. R. p. F. s. V. c. Ita ut eis enbsp;republica fldeve sua videbitur, een-suere.

J. V. T. Julia victrix togata.nbsp;iD. QvoT. D. F. H. s. c. Ideiii quotaonisnbsp;det fisco sestertios centum.

iMM. II. Ho.N. IV. Immunis iterum ho-noratus quartum.

IMM. .V IV. Immunis annos quatuor. IMP. Imperator.

IMP. C.ESAR. M. Pl,AVTIO SII.VANO COS.

IMP. COM. .AVG. Impensa communi Au-gustaliuni.

IMP. iM. Imperio ipsarum. iMPO. Imperio.nbsp;iMpp. Imperatores duo.nbsp;iMppp. Imperatores tres.nbsp;iMMvx. Immunis.nbsp;i.v. A. In altum.

I. A. In agro.

iM. A. p. X. In agro pedes decern.

IX AGR. In agro.

i.N. E. L. F. E. In ejus locum faclus est. INF. ARK. PONT. Infcrct ai’k® ponti-ficum.

IN. FR. p. iix. In fronte pedes octo.

IN H. In Iionorem.

IN. u. D. D. In lionorem domus divin®.

— A l’honneur de tel temple.

IN. II. II. In hoe honore.

IN. II. i. s. E. In bac lege scriptum est. IN. II. M. In hoe magistratu.

IN. II. T. SVNT. COM. OR. II. s. In hoe

titulosuntcomprehensa ornamenla hujus sepulcri.

IN E. In latum.

IN. M. M. E. lu magistratu mortuus est. IN. M. o. E. In magistratu occisus est.nbsp;IN. PR.ET. SPEC. In (cohorte) prmtorianbsp;speculatorum.

IN. SING. H. In singulos homines.

IN. TVT. In tutelam.

IN. V. R. ET. AB. V. R. p. Intra urbem Romam et ah urbe Roma passus.nbsp;IN. V. R. p. VE. V. T. p. In urbe Romanbsp;propiusve urbem passus.

IN. V. I. s. Inlustris vel lllustris vir infra scriptus.

INC. Incolae.

iND. Indictione.

iND. FAc. Industriensis faciebat.

INF. .ER. p. p. R. Inferat mrario populi Romani.nbsp;iNL. Inlustris.

IN. FR. p XII. In fronte pedes duode-cim.

iNTR. M. I. Intra mensem unum. iT. Iterum.

JVL. Julius.

JVL. p. AREL. Julia Paterna Arelate. JDR. Juridico.

J WENT. TRIBVL. MÜTVST. JU VCntUtis tr»-

bul® inutust®.

K. Caia.

K. Kaiso vel Ca®so.—Prénom des Fa*nbsp;bius.

K. Caleud®.

K. Casa.

K. Causa, kalumni® caussa.

K. F. Kaïsonis fllius.

K. N. Kaisoiiis nepos.

K. NB. Karissimo nobis.

K. PR. Castris prioribus.

K. s. Kanis suis.

KAL. Calend®.

KARC. Carceris.

L. Sestertius numraus. L’as, Ubella,nbsp;assipundium, valait 5 centimes; Ienbsp;dupondius, valait 16 centimes; Ienbsp;scslerce, seslerlius nummas, valaitnbsp;21 centimes; Ie quinarius ou vie-lorialus, H centimes; Ie denarius,nbsp;82 centimes; \'aureus ou solidus,nbsp;20 francs 54 centimes.

L. Latum.

L. Legio. — La legion roniaine se composait d’environ 6000 hommesnbsp;d’infanterie et 400 cavaliers. L’in-fanterieétaitdiviséeendixcohortes;nbsp;chaque cohorte, en trois manipu-les;chaquemanipule,en deux centuries. La cavalerie comptait six es-cadrons, turmo!, chacun de trois dé-curies, Decuriw; les légions tiraientnbsp;leur nom de leur numéro d’ordre,nbsp;prima, primigenia, secunda, etc.;


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584 LES TROIS ROME.

584 LES TROIS ROME.

L. ir. L. D. Locus bic libentcr datus, vel Locus bic libere datus.

L. L. Laitus libens.

L. L. Laurentium Lavinatium.

L. L. L. p. o. M. s. Liberis, libertis, li-bertabus posteris omnibus monu-mento scriptorum.

L. L. p. E. Libertis libertabus posteris eorum.

L. L. Lucii libertus.

L. L. L. L. I. E. Lucius, duorum Lucio-rum libertus, jussu ejus.

L. L. M. Libentissime, vel libens laitus merito.

L. M. Libens merito.

L. M. D. Libens merito dediteej Locum monumeiiti dedit.

L. M. E. SEx. L. II. Locus monumcnti e

OU du lieu de leur séjour, Mace-donica, Hispaniensis, etc.; ou de certains événemenls, pia, viclrix,nbsp;fidclis, fulminala, etc.; ou de léursnbsp;divinités tutélaires, Marlia, Mitier-via, etc.; deux legions reunies for-maient une armée consulaire, c’é-tait Ie minimum. Le commandantnbsp;en chef était le consul, le préteur,nbsp;le dictateur, sous les ordres duquelnbsp;étaient tous les officiers qu’on ap-pelait du nom général de Lcgali.nbsp;A la tète de cliaque legion étaientnbsp;six tribuns militaires, Tribuni mi-lilum, commandant deux a deux,nbsp;et de deux jours l’un, pendant deuxnbsp;mois. Après eux venaient les eennbsp;turions, les porte-aigle, les portenbsp;enseigne, Aquiliferi, signiferi, lesnbsp;chefs des décuries, Decuriones, Decani; Primipili.

Chaque tente recevait dix soldats avec leur décurion, contubernales.nbsp;Les officiers de cavalerie se nom-maientf*r®/ectt, Decuriones, Optionee, etc.

L. Longum.

L. Lustrum.

L. Lucius.

L. Lycia;.

L. A. Libens animo, vel Libenti animo.

L. A. D. D. Locus adsignatus decreto decurionura.

L. c. Locus concessus.

L. c. PEL. PAP. Lucius Gains felices. Papiria.

L. D. Larum divinorum, id est domus divina?.

L. D. D. c. Locus datus decreto col-legii.

L. D. o. PA. Locus datus decreto pa-trum.

L. D. D. V. M. Locus datus decreto vi canorum. Minodunensium.

L. D. p. Locus datus publice.

L. D. s. Libens de suo.

L. D. s. c. Locus datus senatuscon-sulto, vel sententia collegii.

L. E. L. M. c. s. Libens et lubens, vel polius Laitus et libens cum suis.

L. F. Lucii filius.

L. F. L. N. Lucii fllius, Lucii nepos.

sextante Icgatus bairedi.

L. N. Lucii nepos.

L. N. Librarius notarius. — Copiste secrétaire.

L. p. Libens posuit.

L. p. c. D. D. Locus publice concessus decreto decurionum.

L. p. D. Locus publice datus.

L. p. D. D. D. Locus publice datus decreto decurionum, vel Locus plebi datus.

L. p. V. LAT. p. Iil. Longum pedes quinque, latum pedes tres.

L. Q. Locum quadratum.

L. s. Libens solvit.

L. s. Locus sepulcri.

L. s. A. Lucius Sextius Aurelius. — Ou un nom semblable.

L. s. M. c. Locum sibi monumento cepit.

L. ïïTv. D. p. s. Locus triumvirorum decreto publice sumptus.

L. V. s. Locum viva sibi.

L. XX. N. p. Locus sestertium vinginti millia nuramura pendel.

LAPi. Lapidum vel lapidarius.

LAT. Latin* (feri®).

LBR. Libenter.

LEG. Legatus.

LEG. Legavit.

LEG. Legio.

LEG. Legionarius, vel legatarius.

LEG. AVG. Legatus Augusli.

LEG. AUG. PR. PR. Legatus August! pro-pr®tore.

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ESSAI SUR LES INSCRIPTIONS.

lentis victricis.

SG. XXX. V. X. Legi

lentis victricis.

LEG. CR. V. Legatus gMtuilo quinquies.

LEG. LEG. Legalus legionis.

LEG. p. M. p. F. Legionis prirase Miner-vöe pias felicis.'

LEG. ir ADiv. p. F. Legio secunda ad-jutrix pia felix.

LEG. ii. TR. FOR. Legio secunda Tra jana forlis.

LEG. iiii. F. F. Legionis quartse Flavise felicis.

LEG. V. M. c. Legionis quintal Macedo-nicse Claudia;.

LEG. V. M. p. c. Legionis quintse Mace-donicse pise constantis, vel Clau-di®.

LEG. VII. F. G. Legionis septimse Feli-cis gemin®.

LEG. VII. CL. GEM. p. FIDEL. Legionc seplima Claudia gemina pia fideli.

LEG. vin. AVG. p. F. cc. Legioiiis octa-V® August® pi® felicis Constantis Comniod®.

LEG. XII. PR. p. F. Legionis duodecira® primigeni® pi® felicis, vel fidelis.

LEG. -XX. V. F. Legionis vicesiin® Ulpi® felicis.

LEG. XX. V. V. Legioni vicesim® Va

LEG. XXX. V. X. Legionis tricesim® Va-

LEG. XXX. V. V. SE. Legionis tricesi-m® Valentis victricis Severian® Alexandriu®.

LEG. SS. Legionis suprascript®.

leg. pro. Legato provinci®.

LEM. Lemonia. — Nom d’une tribu.

LG. Legionis.

LGD. Lugdunensis.

LI. Lucii.

LiB. Liburna.

LID. A. copis. CASTR. Libcptus a copiis castrensibus.

LIB. LIB. Q. posTQ. E. Libertis liberta-busque posterisque eoruni.

LIB. pRiEF. Librariiis pr®fecti.

LiBVRN. VARVAR. Libumo Varvaria.

LOC. D. EX. D. D. Locus datus ex de-creto Decurionum.

LOC. H. s. c. p. s. Locum hujus sepul-cri curavit, vel coniparavit pecunia sua.

M

M. Magister.

M. Marcus.

M. Mater.

M. Monunienlura.

M. Manibus.

M. Meinori®.

M. Marmorea.

M. ^L. CET. Municipii Jïlii Cetii.

M. K. G. s. Memor animo grato solvit.

M. B. Municipii Bergomatum ( Ber-game).

M. c. Municipii Caralitani. (Cagliari.)

M. c. Monumento cedit.

M. c. D. Memori® caussa datum.

M. c. p. M. RENO. CYR. Memori® causa posuit Marco Reno Cyrenensi.

M. CL-AVD. Municipium Claudianum.

M. coH. Miles cohortis.

ji. D. Matris Deüin.

M. D. Mililum decorum.

M. D. M. j. Magn® Deum matri Ide®.

M. E. Monumeutum vel Memoriam erexit.

MERiB. Merentibus.

M. F. Marei filius.

ji. F. Municipalibus functus.

M. F. c. Monumentura vel Memoriam fierit curaYÓt.

51. F. 51. N. Marei filius, Marei nepos.

51. II. 51. Missus houesia missione. — Pendant tout Ie temps de la Répu-blique, Ie soldat romain présentnbsp;sous les drapeaux ne pouvait senbsp;marier. L’empereiir Claude lui ac-corda la faciilté du mariage appelénbsp;conluberniuvi; inais lesenfantsquinbsp;en naissaient étaient réputés illé-gitimes et ne pouvaient hériter denbsp;leurs pères. Aliii d’obvier a ces in-convénienls, on accorda aux sol-dats qui avaient servi cinq ans etnbsp;au-dela, Ie jus connubii; c’est-a-dire qu’on légitima leur mariage,nbsp;en sorle que les enfants devenaientnbsp;citoyens romaiiis, et jouissaient denbsp;tous les biens de leur père. Cetnbsp;acte de rébabilitalion s’appelaitnbsp;honesta missio. — Les esclaves nenbsp;pouvaient se marier aux yeiix denbsp;la loi; leur union s’appelait contu-bernium, les époux concubinm etnbsp;conlubcrnales.


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386 LES TROIS ROME.

386 LES TROIS ROME.

MAG. co-NLiB. LIBERT. Magistro colli-beiTaruin, libertorumque.

MAG. EQ. Magister equitum. — Maitre ou cbef (les chevaliers, magistralnbsp;supérieur qui pendant les dictatu-res défendait les droits de la noblesse, comme les tribuns ceux dunbsp;peuple sous les consuls.

MAG. MVN. ra1£.n. Magister municipii Ravennalis.

MAG. p. sc. Magister publiciis sacro-rum.

MAG. oviNQ. COLL. FABR. TIG. Magister quinquennalitius collegii fabrorumnbsp;Tigiiariorum.

M. AR. Marmorea.

MERC. AVG. Mercurio Auguslo.

MERV. Meruit.

MIL. Miles, militavit.

MIL. CL. PR. RA. Miles classis praetoria;

Ravennatis.

MIL. FR. Miles fruinentarius.

MIL. IN coiiOR. Militavit in cohorte. MIL. LEG. s. s. Miles legionis supra-scripta;.

MINER, p. F. Minervia pia fidelis (legio).

MV. A. Municipii Apulensis.

MVL. Mulier.

MVN. SAss. Municipii Sassinatis.

N

N. nbsp;nbsp;nbsp;Nuraerarius, id esl Miles. — Simple soldat.

Natus, nata.

Nepos.

Neronis.

Naula.

Natione.

Numerius. — Prenom.

Numero.

AGR. AM. Numeratus agri ambitus. B. Numeravit bivus, pour vivus.nbsp;c. M. M. Numerius, Caius,duo Marei (hie siti sunt).

D. Nemo doluit.

D. A. N. MOR. Nullum dolorem ac-cepi nisi mortem.

I. nbsp;nbsp;nbsp;Nomine ipsius.

J. nbsp;nbsp;nbsp;D. Nummdmmilledecurionibus.nbsp;JO. T. Numini Jovis Olympii tonan-tis.

M. j. F. PETIT. Militi® jus filiis peli-tori.

uiRp.\. Sigle bizarre qu’on explique ; — Slarcus Juventius Restitutusnbsp;publiciis augur.

«. J. V. Marcus Julius Vapiscus, vel Volusus. — Ou autre nom sem-blable.

M. L. Marei libertus.

M. L. Miles legionis.

M. M. Memoria;.

M. M. Meritissimo.

M. M. Municiplum Mediolanense (Milan).

M. M. L. Marcorum duorum libertus.

M. M. M. L. Marcorum trium libertus.

M. M. 3 L. Marcorum duorum et Caise libertus.

M. M. yO OR. Magister militum per Örientem.

M. N. Marei nepos.

11. N. Millia nuinmum.

II. p. Macedonicai pioe.

M. p. Monumentum posuil.

.11. Q. II. Millia passuum duo.

M. p. V. Millia passuum quinque.

a. p. XI. Millia passuum undecim.

II. R. Municipium Ravennalium (Ra-venne).

M. R. s. F. c. Meritissimo faciendum curarunt.

M. R. T. Merenti.

M. s. Majestati.

M. s. Majsiae superioris.

M. s. Menses.

M. s. AP. Municipii Septimiani Apu-lensis.

M. s. B. M. Magistro suo bene merenti.

M. s. D. D. Municipes sui decreto de-curionum.

M. TARRAC. Municipium Tarraconense (ïarragone).

II. V. M. Marcus Valerius Maximus.

a. VIC. Municipium Vicetinum ( Vi-cence).

/W • Marcius. — Prenom.

W- F. Marcii filius.

JW- N. Marcii nepos.

iiA. Massiliani.

MACH. F. p. Machinarii fori pistorii.

MAG. Magister, magistratus.

MAG. COL. evLTO. Ejvs. Magister colle-gii cultorum ejus.

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ESSAI SÜR LES INSCRIPTIONS. 387

ESSAI SÜR LES INSCRIPTIONS. 387

OCR. Ocriculana.— Nom d’une tribu. OF. Officinarius.

OPT. CL. PR. Optio ( officier ) classis prsetori®.

opvs. DOL. Opus doliare.

ORD. RET. Ordino retrograde.

ORNAM. Ornamentario. — Fonction de I’esclave chargee de la toilette, etc.nbsp;ovF. Oufentina. — Nom d’une tribu.

o. D. Opus doliare. o. D. s. M. Optime de se meritai, rae-renti.

o. E. R. Q. c. Ossa ejus bene quiescant condita, seu potius quiescant.nbsp;o. II. M. R. s. F. Omnibus honoribusnbsp;in republica sua functo.nbsp;o. n. s. s. Ossa bic sepulta sunt.nbsp;o. M. H. Optimo Maximo Hammoni.nbsp;o. M. s. Ordo municipii Sestinatium.nbsp;o. M. T. Optimo maximo tonanti.nbsp;o. N. F. Omnium nomine faciendum,nbsp;o. p. Ossa placide quiescant.nbsp;o. p. Q. Ossa posita.nbsp;o. s. F. p. s. F. Ordo splendidissimusnbsp;fieri pecunia sua fecit.

OR. HON. Ob honorein.

OR. HER. Ob merita.

OR. AN. L. Obiit anno 50.

N. L. F. Numeri Lucü fili®.

N. M. N. s. Novum monumenlum nomine suo.

N. M. Q. E. D.Numinimajestatiqueejus devotus. — Expression d’adulationnbsp;idolatrique inventée par les flat-teurs des Césars.

N. ME. VI. Natus menses sex.

N. MONV. Novum monumentum.

N. N. Nostrorum.

N. N. Duorum Numeriorum.

N. p. c. Nomine proprio curavit.

N. R. Natione R®li. — Ou un nom semblable.

N. s. Nomine suo.

N. v. A. Naularuin vico Arilica.

N. T. M. Numini tulelari municipii.

NAT. Natione.

NAT. GALL. Nalioiie Gallus.

NAVicvLAR. MAR. AREL.Naviculario ma-ris Arelatensis.

NEP. Nepos.

NER. Nero. — Prénom.

non. tras. n. L. Non iransilias hunc locum.

NVM DAL. DiviT. Numeri Dalmatarum divitensium.

NVM. DAL. fort. Numerï Dalmatarum fortensium.

NVM. DOM. AVG. Numini domus Au-

p. Pater, p. Patria.nbsp;p. Per.nbsp;p. Perpetua.nbsp;p. Pondo.nbsp;p. Pontifex,nbsp;p. Posuit.nbsp;p. Publicus.nbsp;p. Puella.nbsp;p. Puer.nbsp;p. Puerorum.

p. AvGvs. Publicus augurum. p. c. Patrono corporis,nbsp;p. c. Patrono colonise,nbsp;c. Ponendum curavit, vel curave-runt.

c. Prsefecto corporis. — Chef de corps.

p. c. Post consulatum. p. c. N. Posuerunt communi nomine,nbsp;p. c. N. Patrono corporis nostri.nbsp;p. c. s. N. Poni curavit suo nomine,nbsp;p. CM. N. Privata Csesaris nostri.nbsp;p. D. D. Publico dedicatum, vel Posi-tum decreto Decurionum, vel Pater dedicavit.

p. D. D. E. Populo dare damnas esto. p. D. F. Publico decreto fecerunt.nbsp;p. E. Publice erexerunt.nbsp;p. F. Publici filius.nbsp;p. F. Prseeuute filio.nbsp;p. F. Pius felix. — Dans les inscriptions impériales,nbsp;p. p. Pia fidelis (legio).

p. F. Perfecerunt. p. FL. Prima Flavia.nbsp;p. F. p. N. Publii filius, Publii nepos,nbsp;p. F. V. Pio felici victori.nbsp;p. G. N. Provincial Galli® Narboncn-sis.

p. H. c. ProvinciaHispani®Citerioris.


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388 LES TROIS ROME.

388 LES TROIS ROME.

j. D. Prsefectus juri dicundo. jv. Ponijussit.

II. CO L. Pondo duarum semissis librarum.

j. s. Publica inipensn sepultus.

I. s. Pins in suos.

L. p. Per legem Pompeiani.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Publii liberlus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Plus minus.

M. Pontifex maximus.

M. Pontifex minor.

M. Post mortem.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Princeps magistrianorum.

N. nbsp;nbsp;nbsp;Publii nepos.

p. Papiria. — Nom d’une tribu. p. Pater patrise.—Dans les inscriptions impériales,nbsp;p. Pater patratus.nbsp;p. Pater Patrura.nbsp;p. Pecunia publica.nbsp;p. Pedes,nbsp;p. Perpetuus,nbsp;p. Populus.

p. Praipositus. — Dans les inscriptions relatives a la maison impériale.

p. Primi pilo. p. Pro patre.nbsp;p. Praises provincise.nbsp;p. Provincia Pannonia.nbsp;p. DED. Propria pecunia dedicavit.nbsp;p. D. p. Patri patri® decurionespo-suerunt, vel decretum publice, velnbsp;datum publice.nbsp;p. F. Pi®, pollentis felicis.nbsp;p. F. c. Pecunia publica faciun-dum curarunt.nbsp;p. F. F. Pia, Parthica, Felix, Melis.

p. H. T. Pr®ses provinci® Hispa-ni® Tarraconensis. p. iiisp. CET. Pr®ses provinci® His-pani® Citerioris.nbsp;p. I. Posuerunt propria impensa.nbsp;p. M. JVR. Publice posuit meritonbsp;jure.

p. N. M. T. Prxses provinci® Norici Mediterranei.

. p. p. Pro pietate posuit; vel Propria pecunia posuit; vel Publice poni placuit; vel Patri patri® pr®-stantissimo.nbsp;p. p. c. Patrono perpeluo coloui®.

p. p. o. D. Publica pecunia ponendum decrevit.

p. p. p. H. c. vel T. Pr®positus provin.

Hisp. Citer, vel Tarracon. p. p. s. Provinci® Pannoni® superio-ris.

p. p. X. Per provinciam decim®. p. p. XII. Pondo duodeciin.nbsp;p. p. XX. Pr®positus vicesim®.nbsp;p. p. V. p. Pro pietate vivi posuerunt.nbsp;p. POR. Publii por, id est puer. —nbsp;Esclave.nbsp;p. Q. X. Pedes quadrati decem.nbsp;p. Q. ö. L. D. Permissu quinquenna-lium locus datus.nbsp;p. R. Populus Romanus.nbsp;p. R. c. Post Romam conditam.nbsp;p. R. Q. Posterisque.nbsp;p. R. Q. Populi Romani Quiritium.nbsp;p. R. s. 0. Posterisque.nbsp;p. s. Per senilem, vel Pro salute, velnbsp;Provinci® Sicili®.nbsp;p. s. F. Pecunia sua fecit,nbsp;p. s. F. Posuit fratri.nbsp;p. s. p. Q. p. Pro se proque patria.nbsp;p. s. p. Q. R. II. PubliusSextius Publiinbsp;Quincti Romani b®res, vel simile,nbsp;p. T. Q. E. Posterisque eorum.nbsp;p. T. R. Posteris.nbsp;p. T. R. Q. Posterisque.nbsp;p. V. Pi® victricis.

p. V. Pr®stautissimo viro, vel Perfec-tissimo viro; vel Primario viro, vel Pr®fectus urbis.

p. V. A. Post victoriam Actiacam. p. V. s. L. Pedesquique semis longus.nbsp;p. V. B. p. R. Q. Publicus populi Romani Quiritium.

p. V. V. L. s. Prout voverat lubens solvit.

PAL. Palatina. — Nom d’une tribu. PAP. Papiria — ld.

PART. MAX. Parthicus Maximus.

PAT. Patricius.

PAT. COL. et PATR. COL. Patrono colo-ni®.

PEc. Pecunia.

PED. Pedes.

PED. QVAD. BEN. Pedcs quadrati bini. PER. Permissu.

PER. AVG. Perpetuus Augustus.

PL. VE. SC. s. c. Plebisve scita, sena-tusconsulta. — Le peuple était

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ESSAI SDU LES INSCRIPTIONS. 589

convoque par centuries et par tri bus. II y avait 195 centuriesnbsp;98 étaient composées des citoyensnbsp;qui possédaient au moiiis 100,000nbsp;as (l’asvalait cinq centimes). II étaitnbsp;évident que dans les assembleesnbsp;par centuries les riches avaientnbsp;presque toujours la inajorité. Lesnbsp;deliberations de ces assemblées,nbsp;Comilia Ccnluriata niajora, s’ap-pelaient populiscila. Prolitant dunbsp;procés de Coriolan, les tribuiis dunbsp;people convoquèrent les plébéiensnbsp;par tribus, au iiombre primitif denbsp;qiialre de la ville et de viogt-six denbsp;la campagne, Comilia iributa. Icinbsp;la majorilé était presque toujoursnbsp;acquise au peuple dont les resolutions, obligatoires pour tous, mal-gré les réclamalionsdespatriciens,nbsp;s’appelaientplebi'scitfl.

POB. Poblilia. — Noni d’une tribu.

POL. Pollia. — ld.

PONTiF. L. L. Pontifici Laurenlinus Lavinatium.

PONT. jLvx. Pontifex Maximus.

POP. CVM. MAGNA LACRI. FVNVS PROSEQ.

Populo cum magna lacrymatione funus prosequente.

POS. .EB. CAST. Post oedem Castoris.

poss. Possessores.

POST. Posthumus.

PR. Prmtor. — II y avait deux pré-leurs ; Ie prailor urbanus, major, maximus, honoratus, qui jugeaitnbsp;les procés ciA'ils entre les citoyensnbsp;Roraains.Quand les lois étaient in-certaines, il avait Ie droit de jugernbsp;suivant l’équité, causa bonce fideiounbsp;arbilraria; pronoiiQait les sentences et les faisait exécuter. En qua-lité de substitut des consuls, ilnbsp;convoquait Ie sénat et Ie peuple,nbsp;présidait aux affranchissementsnbsp;solennels, ordonnait certains jeuxnbsp;publics, etc. — Le prmtor pcregri-nus, OU pcrcgrinorum, jugeait lesnbsp;procés que les étrangers avaientnbsp;entre eux, ou avec des citoyensnbsp;Bomains. A Rome, le préteur étaitnbsp;precede par deux licteurs; horsnbsp;de Rome, par si.x. — Dans la suite,nbsp;les procés s’étant multiplies, onnbsp;compia jusqu’a buit préteurs nr-bains; et pour aider le préteur, pe-rcgrinus, on él^ut cliaquc annéenbsp;1Ó5 magistrats, trois de cbaquenbsp;tribu, judicium cenlumviralc. Or-dinairemeiit on choisissait parminbsp;eux line commission de dix membres, qui représentait le corps en-tier. Decemviri lilibus judicandis.

p. .ER. Prscfectus serarii.

PR. Ais. F. Praefectus argento feriendo.

PR. CER. Primo cereali.

PR. EQ. VRB. Praifeclus equitum urba-iiorum.

PR. FRVM. Prsepositus, wJ Primusfru-mentariorum.

PR. ii. c. cv. Provincia! Ilispan. Citer, curalori.

PR. j. D. Avx. Praifectus juridicaudo Aiixumi.

PR. iMM. E. coRP. Pro immunitate eo-rumdcm corporum.

PR. jvv. Prmfcctus juvenluti, vel ju-veniim.

PR. N. Pro nepos.

PR. p. F. Primigenite, pirn, lidelis (legio).

PR. PIL. Primi pillis.

PR. p. V. Prtetoria; pim, victricis, vel Practori® prajtorii urbis.

PR. PR. Pixefecto prmiorii.

PR. PR. Pro prmtorc.

PR. PR. Praifecti, vel Prtcsidis provin-ci®.

PR. PR. cv. Prmfecti prmtorio castris veteribus.

PR. PR. V. Prmfectus prmlorio iiter-que.

PR. p. R. V. Procuratorprivat® rei vir.

PR. Q. Pr®tori, qu®stori, vel prmtori quinquennalitio.

PR. SEN. Pro sentcntia.

PR. VIGIL. Prmfeclo vigilum. (Chef des gardes de nuit.)

r»n ^

pp.aï. Prmfectus. — Ce mot revient souvent, ainsi que nous 1 avonsdit,nbsp;dans les inscriptions relatives auxnbsp;emplois de la maison impériale.nbsp;— Le prwfcctus urbis était un magistral qui remplagait, a Rome, lenbsp;roi et les consuls, pendant leur absence; dans la suite, cetle charge


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390 LES TROIS ROME.

perdit bcaucoup de son importance.

PR.®F. F. Praefectus fabrüm.

PR.«. PR.E. EM. V. Pr^fecto prsetorio eininentissimo viro.

pu.EF. SACR. Prsefectus sacrorum.

PR.EF. II SACR. Prsetor ilerum sacra-rius.

PR.43F. viGVL. p. V. Pi’acfeclo Vigulum, vel Vigilum perfectissimo viro.

PRF. PRT. Praifecli prajlorio.

PR. XX. HER. Procurator vicesimajhae-reditalum.

PRO-cos. Proconsul. Jusqu’a Fan 149 avaiit Jésus-Clirist, les provincesnbsp;élaient adminislrées par des pré-teui's nommés expresséinent a celnbsp;effet. Depuis cette époque, elles Ienbsp;furent ordinairement par les consuls et les préteurs sortant denbsp;charge, proconsuics, proprailores;nbsp;de la ie nom de provinces procon-sulares el prwloriai; ces dernièresnbsp;élaient ordinairement les moinsnbsp;étendues et les plus Iranquilles.nbsp;Les provinces proconsulaires elnbsp;prétoriennes s’appelaient, sousnbsp;i’empire, provinces du peuple. 11nbsp;y en avail d’autres qui élaient gou-vcrnées par des consulaires, desnbsp;légals OU des propréleurs; ellesnbsp;s’appelaient provinces impériales,nbsp;ou auguslw, paree qu’elles rece-vaient leurs gouverneurs des Césars. Deveiiu gouverneur de province, Ie proconsul, ou Ie préteur,nbsp;se trouvait en mème temps Ie chefnbsp;de la force armee cl de l’adminis-iration des affaires publiques dans,nbsp;sa province. Régie générale, sonnbsp;gouvernement durait un an.

PRO p. Profusione parenletur.

pp.o PR. Pro prietore.

PRO s. Pro salule.

PROC. F. c. Procurator lisci Cffisarei.

PROC. K. Procurator kalendarii.

PRON. Pro nepos.

pRL. XX. LiB. Publicusvicesimaj liber-

tatis.

p. s. Publius.

pvB. Publicia. — Nom d’une tribu.

pvB. AVG. Publicus augurum-

PVB. p. R. Q. Publicus populi Romani Quiritium.

PVB. Pupinia. — Nom d’une tribu.

Q

Q. Quintus. — Prénom.

Q. Quadrali.

Q- Qui.

Q. Qusestori. — Le nombre de ces niagistrats fut porté a 40 par César.nbsp;Deux élaient destinés a la ville denbsp;Rome, Qumstores urbani, vel mra-rii. llsavaient, sous l’inspection dunbsp;sénat, radministration du trésor etnbsp;des archives; la garde des drapeauxnbsp;qu’ils remettaient aux legions al-lant en campagne. Les autres ad-ministraieut les finances auprès desnbsp;armées et dans les provinces.

Q. Quinquennalitio.

Q. A. Quaestor aedilis.

Q. Ai.iM. Quiestori alimentorum.

Q. B. Qui bixit, pour vixit.

Q. c. p. R. B. R. Quam ConiParaBe-Runt.

ö. c. R. ERVNT. Qui cives Romani eruut.

Q. D. Quinquennalis decurio.

Q. D. E. R. F. P. D. E. R. I. C. Quid dC

ea re fieri placeret, de care ita ceii-sucruut.

Q. I). SS. Qui dederunt supra scripta. Q. F. Quincti filius.

Q. F. Quod factum.

Q. F. p. D. E. R. I. c. Quod fieri placeret, de ea re ita censuerunt.

Q. F. Q. X. Quincti filius, Quincti ne-, pos.

Q. FV.NC. Quinquennalitio functus.

Q. H. II. s. s. Quihaeredesscriplisuilt. Q. I. s. s. Qui infra scripti sunt.

Q. jvvExvM. Quiuquennali juvenum. Q. K. Quptori kaudidalo.

Q. L. Quincti liberlus.

Q. N. Quincti nepos.

Q- PR. Quaestori provinciae.

QO- Quinquennalilius.

QQ- Quoque.

QQ. CORPORIS. Quinquennalilius corporis.

Q. 0- CORPOR. VIN. VRE. ET. OST. Quin-


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ESSAI sun LES INSCRIPTIONS. 591

ESSAI sun LES INSCRIPTIONS. 591

REG. Regione.

s. A. s. Saturiio augusto sacrum.

quennalis corporum vinariorum urbanorum et osliensium.

0- Q. u. Quinquennalitio ilerum.

0. Q. III. Quinquennalitio tertiuin.

Q. Q. L. II. s. Quoquoversum laliludo buic sepulcro.

Q. Q. L. L. QuinquennalisLaurenlium Lavinaliuni.

Q. 0- PEP.. Quinquennalitio perpetuo; vel Quinquennalitii perpetui.

Q. Q. SS. Quain qui supra scripti.

Q. Q. Quaquaversus.

Q. R. Quaestor Reipublica;.

Q. s. Quasi.

e. R. s. II. F. II. T. T. V. Qui retro scripti h.ieredes fecerunt bunc ti-luluin titulo usi, ml fecerunt boenbsp;testamento titulo usi.

Q. s. p. p. s. Qui sacris publicis prac-sto sunt.

Q. V. G. Quod voverat gratus.

Q. VA. I. Qui vixit annum unum.

QVANROQ. IIVMANIT. ATTIGERIT. Quando-

que humanilas altigerit.

Qvi ET QviR. Quirina. •— Noin d’ime tribu.

QVi LEGis. T. V. Quilegistitulum, vale.

QviNQ. Quinqueimalitatis.

R. Recta.

R. Retro.

R. Rarissimo.

E. Recto.

R. G. c. Rei gerundaï causa.

R. n. c. s. Rivi bujus cursus superna-tis.

R. K. Retro karinas.

R. p. Retro pedes.

R. p. Respublica; republica.

R. p. A. Respublica Astigitanorum.

R. p. c. Reipublicaï cousiituendae.

R. p. BN. Reipublicae Reneventana;.

R. p. H. V. Reipublie.e buic vigilantis-simo, vel Reipublicae bujus urbis. R. p. s. Reipublicae Sestiuaiiuiu.

R. p. s. D. D. Respublica Saguntino-rum decreto decurionum. p..\. PROx. cipp. Ruderibus rejeclisnbsp;proximo cippuni.

R. TiB. Ripae Tiberis.

R. VER. Respublica Veronensis.

RA. o. s. Rationali operum sacrorum. id est operum domus divinae, sire

RAT. s. R. Rationalis sacrarum, vel re-munerationum, vel Rationalis summae rei.

REip. TiF. TiB.Reipubl. Tifirnatura Ti-beriuorum.

REMP. N. Rempublicam nostram. REST. A. A. CAMB. M. p. XI. Resiitiie-runt a Cambidone millia passuumnbsp;uiidecim.

ROM. Romilia. — Nom d’une tribu. RVF. Rufus, Ruflus, Rufinus.

s. Sextus. — Prénom. s. Sepulcrum.

s. Après les noms propres, signitie servus, serva.nbsp;s. Singulum, singuli.nbsp;s. Solvit.

s. A. B. Sub ascia dedicaverunt. — Pour marquer l’inviolabilité d’unnbsp;monument, on y gravait une scie ;nbsp;Ie profanateur étaitaverti qu’il mé-ritait d’etre scié vif.

s. A. s. Somno oslernali sacrum.

SBTA. Subacta. s. c. Senatus coiisulto.nbsp;s. c. D. s. Sibi curavit de suo.nbsp;s. c. F. c. Senatus consultofaciundumnbsp;curaverunt.

SC. p. SaCri palalii. s. D. Sub dio.nbsp;s. i). s. Soli Deo sacrum,nbsp;s. E. T. L. Sit ei terra Icvis.nbsp;s. ET. s. Sibi et suis.nbsp;s. F. Sacris faciundis.nbsp;s. i. M. Soli invicto Mitbr.ai.nbsp;s. L. Sua laude, vel Senleiitia libciis.nbsp;s. L. M. Solvit libens raerito.nbsp;s. M. Saliitari magno.nbsp;s. M. c. SacraruM cognilionum.nbsp;s. M. A. L. s. Sacrum meraori animonbsp;libens solvit.

s. M. D. Sacrum matri Deüm. s. o. V. Sine offensa ulla.nbsp;s. p. Sanctissimse puelloe, vel Spec-tabili puclbe.


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592 LES TROIS ROME.

592 LES TROIS ROME.

s. PR. Sub prsefeclo, sub prsetore.

gt;5. pp.. Sub prcefeclo. s. p. I). D. Sua pecunia donuni dedit.nbsp;s. p. Ejvs. c. c. Q. 0. Solo privalo ejusnbsp;collegium coiiseiisu quiu(}uemianbsp;liüorum.

s. p. F. Sua pecunia fecit, s. p. F. c. Sua pecunia faciundum cu-ravit.

s. p. p. Sua pecunia posuit. s. p. p. c. Sua pecunia ponendura cu-ravit.

s.p. p. s. Sacris publicis proestosunt. s. p. Q. c. Senalus populusque Carco-litanus.

s. p. Q. L. Senalus populusque Laiiu-villus.

s. p. 0- L. V. Senalus populusque La nu Vinus.

s. p. Q. R. Senalus populusque Ro-manus.

s. p. Q. s. Sibi posterisque suis. s. p. V. T. s. Sua pecunia usus tilulonbsp;suo.

SQ. Sequitur.

s. R. Sacrarium remunerationum. s. s. Supra scriplum, supra scripli.nbsp;s. s. Sanctissiinus senalus.nbsp;s. s. Sacerdos solis.nbsp;s. s. E. Sive sepulcrum est.nbsp;s. s. p. E. 0. R. Sibi, suis, posterisquenbsp;eoruin.

s. s. s. Soli sanctissimo sacrum, s. s. s. Supra scripta: summa;,nbsp;s. s. T. N. Supra scripli luli nomine,nbsp;s. T. T. L. Sil tibi terra levis.nbsp;s. VE. c. Senaius-ve consulto.nbsp;s. V. P. Sibi vivus posuit.nbsp;s. V. Q. Sine ulla querela,nbsp;s. V. T. L. Sit vobis terra levis.nbsp;s. V. T. L. H. F. c. Sit tibi terra levis,nbsp;haired es faciundum curarunt.nbsp;s.v. R. Sacerdos Romsc.nbsp;s.vB. Sabina. — Nom d’une tribu.

SAC. Sacerdos.

SAC. VRBANO s. p. Saccpdote urbano sibi praiunte.

SAC. VG. Sacrata virgo.

SAi. Salutem.

SAL. Salariae.

SALTv.AR. Saltuarius.

SARM. Sarmaticus.

SC. D. M. Sciens dolo malo.

scA. T. Scaptia. — Nom d’une tribu. scR. A LIB. coTiniANis. Scribu a librisnbsp;quolidianis.

scRi. svL. p. Scriba; Sulmouensi posuit.

SEC. ii. A. G. Secundus haires agens gralias.

SEC. HER. Secundus haires.

SEB. s. c. Sediiiouis sedanda; caussa.

SEQ. nbsp;nbsp;nbsp;Sequanus.

SER. nbsp;nbsp;nbsp;Servia. — Nom d’une tribu.

SER. Servius. ¦— Prénoin.

SER. Servus.

SER. ACT. Servus actor.

SER. AI) AGR. Servus ad agros.

SER. .AD LYCiiN. Sei'vus ad lyclinuchos.

— Pour allumer les flambeaux. SER. OEF. Servus officiiiatoris, vel of-ücinarius.

SER. vic. Servi vicarius. — Les escla-ves en avaient d’autres sous leurs ordres; on appelait ces derniersnbsp;vicaires de lel esclave : servi vicar ii.

SERG. Sergia. — Nom d’une tribu. SEST. Sestor. — Préiiom.

SEv. AVG. Seviro augustali.

SEx. Sextus. — Préiiom.

SEX. F. Sexti filius.

SEX. L. Sexti libertus.

SEX. N. Sexti nepos.

SEX. Sexlilis. — Nom d’un inois. siG. LiB. Signum liberi.nbsp;siL. Silius.

SING. Singiliensis.

SING X II. Singulis denarios binos. — Le denier, denarius, valait 82nbsp;centimes.

SIGN. PPR. Singularis praifecti prailo-rio.

SIGN. TRiB. Singulari tribuni.

SIQ. H. PL.ANC. P. EXC. EOR. Q. S. S. S. A. D. INF. c. Si qiiis liane plancam postnbsp;excessum eorum qui supra script!nbsp;sunt, alio deferet [vel aperiens de-jiciel) inferet collegio.nbsp;sociOR. VICES. Socioruiu vicesimse.nbsp;sp. Spurius. — Prenom.nbsp;sp. (In lessens gladialoriis) Speclavit,nbsp;vel spectaius. — Donne eii spectacle.

SP. F. Spectabilis femlna.

SP. F. Spurii filius.

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liSSAI SUR I.ES INSCRIPTIONS.

colonels des legions.

svji. MAG. Surainus magister.

SP. L. Spurii libertus.

SPEC. LEG. Speclalor legionis.

SP. N. Spurii nepos.

spL. EQ. R. Splendidissimo equili Romano.

s. s. Suavissiniis.

SS. nbsp;nbsp;nbsp;Supra scripius.

ST. nbsp;nbsp;nbsp;Sextus. •— Prénom. Vel Statius.

ST. NVM. s. Stygiis nu minibus sacrum.

ST. XXXV. Stipendiorum iriginta quin-

que. — Soldat de oo' ans de service.

ST. TVRiCEN. Stationis Turicensis.

STE. STEL. Stellatina. .— Nom d’une tribu.

STIP. Stipendiorum. ^—Au lieu de dire annéc de service, les Remains di-saient aniiéc de paie, slipendiorum.

STIP. AN. VI. Stipendiorum annorum sex.

STipis ARG. Stipis argenleac.

s. Stipendiorum.

STR. A. p. R. Strator a publicis ratio-nibus, OU mieux, Strator praitoris.

SA’B. ET svc. Suburaua et Succtisana. — ïribu.

svc. Succusano (municipe).

svMPT. Sumptuarius. svo. SVMPT. Suo sumptu.nbsp;svsT. MAN. iRAT. II. Sustulepit Mauesnbsp;iratos habeat.

T. Tribunus.

T. Titus. — Prénom.

T. Tune.

T. Turma.

T. A. Taurum album.

T. AVG. Tutel® augustse.

T. c. Testament! causa.

T. F. Testamento, vel Titulum fuit.

T. F. Titi filius.

T. F. J. Testamento fieri jussit.

T. Fi. H. F. c. Testamento fieri, vel Titulum fieri hseredes fideliter cura-runt, vel Testamento fieri jussit hairedes faciundum curarunt.

T.\. Titi libertus.

T. LEG. III. Tribunus legionis tertise. — 11 y avait deux sortes de tri-buns: les tribuns du people el lesnbsp;tribuns mililaires. Les premiers,nbsp;au nombre de cinq, éiaieut des magistrals défenseurs des plébéicns,nbsp;el investis d’une grande puissance.nbsp;Ils étaienl inviolables, sacrosancH,nbsp;et avaient droil de voter dans Ienbsp;sénat. Leur maison devait reslernbsp;ouverte nuit et jour, pour servir denbsp;lieu d’asile. Au lieu de licteiirs, ilsnbsp;avaient des ajipariteurs, apparUo-res, par lesquels ils pouvaient fairenbsp;saisir quiconque s’opposait a leursnbsp;ordres. — Les tribuns mililaires,nbsp;nous l’aA'ons vu, étaient conime les

T. N. Titi nepos.

T. p. Titulum ponit, posueriint.

T. p. c. Testamento poni curavit.

T. p. j. Testamento poni jussit.

T. p. Q. VRB. Tantam pecuniam qiises-tor urbanus.

T. R. E. s. p. R. Tres provincial.

T. R. p. D. s. T. T. L. Tc rogo proile-riens, dicas : Sit tibi terra levis.

T. R. Q. L. D. s. Te rogo qui legis dicas : Sit, etc.

T. SC. EX. vu. Ejvs. B. M. p. p. Testa-mento scripii ex septima ejus bo-norum monumentum posueruul.

T. s. F. j. Testamento sibi fieri jussit. — Dans beaucoup d’inscriptions,nbsp;Ie nom du testateur est suivi denbsp;cette formule solennelle : Testa-mcnlo fieri jussit arbilratu N.; etnbsp;puis : Tels et tels probavere. Cesnbsp;mots signifient que la personnenbsp;désignée avait Ie droit de commander Ie monument a son gré, etnbsp;d’approuver l’ouvrage.

T. V. Tilulo usi, vel Tu vale.

TA. Taurum. tab. Tabularius.

TAB. F. Tabularius flsci.

TAB. p. II. c. Tabularius proviuciae Hisp. citerioris.

TAB. XX. Tabularius vicesim*.

TER. nbsp;nbsp;nbsp;Terentina. — Tribu.

TES. nbsp;nbsp;nbsp;Testamento.

TESS. Tesserarius.

TiR. Tiberius.

TI. F. Tiberii filius.

TI. L. Tiberii libertus.

TI. N. Tiberii nepos.


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394 I.ES TP.OIS ROME.

TOL. e. Tolosa Gallise.

TON. Tonsor.

TR. Trajeclus, vel iranslatus.

TR. MIL. ïribuniis militiim.

TR. PL. DESS. Tribuniplebis designaii-TRiB. Tribunus.

TRiB. LATicL. Tribuno laticlavi.

TRIB. POT. Tribunitia potestate.

TRIB. svcc. Tribus Succusana.

TRIVMP. Triumphalis.

TRO. Tromenlina. — Tribu.

TRVM. p. p. p. Trium Publiorum.

TVL. Tullus. — Préiiom.

TVR. Turnia. — Escadroa de cavalerie. ¦

V. Voluscus, Volero, Volera, Yibius. —¦ Prénoms.

V. Verna.

V. Veteranus.

V. Viarum.

V. Vivit.

V. Vivus, OU vivuni. — Dans les inscriptions funéraires.

V. üxor.

V. ^D. Viro sedilitio.

V. .A. F. Vivus arara fecit.

V. A. j. D. Vivus aram jussus dedit.

Vi A. L. Vixit armos 50.

V. B. Viro bono.

V. c. Vivus cur.Tvit.

V. c. Vir clarissimus.

V. c. ET s. Vir clarissimus et specta-bilis.

V. c. p. T. Vir consularis provincial Tarraconensis.

vcsi. ViCe sacra judicans.

V. ». D. Voto dedicaUnn.

V. D. I. M. VI. Vixit diem unum, menses sex.

IV. D. p. R. L. p. Undo, autqui de plano recte legi possit. — Chez les Domains, Ie lieu oü l’on rendait lesnbsp;jugements n’était pas rigoureuse-inent determine. De la, les expressions ; Pro tribunali, et de planonbsp;jus dicere; mais il fallait qu’il futnbsp;tel, que les parties pussent entendre la lecture de la sentence : Ubinbsp;de plano recte legi possit.

A'Dss. Viducassium.

. E. Vir egregius.

. E. D. F. Vir egregius Deciini lilius. . F. Viro fidelissimo.

. F. Vivus fecit.

. F. Verba fecit, ou fecerunt (dans les sénatus-consulles).

. F. Visum fuerit.

. F. Valerii filius.

. F. c. Victoria; felicitatis Caisaris.

. F. F. Vivus fieri fecit.

. F. s. ETS. Vivus fecit sibi et suis.

. L. s. Votum lubens solvit. — Le suppliant, voti reus, promettait anbsp;une divinité, soit de bouebe, soitnbsp;parécrit, tabula votiva, une preuvenbsp;matérielle de sa reconnaissance,nbsp;res votiva, dans le cas oü la prièronbsp;serait exaucée. Sa demande exau-cée, il était voti compos, ou dam-natus.

M. Vir magnificus.

M. Votum merito.

M. s. Votum merito solvit.

OP. Vir opiiinus. p. et V. POS. Vivus posuit.nbsp;p. Utriusque Pannonioe.nbsp;p. et V. p. Vir perfectissimus.nbsp;p. p. p. H. Vir perfectissimus praises provincial Hispanise.nbsp;p. p. p. N. M. T. Vir perfectissimusnbsp;praises provincial Norici Mediter-ranei.

Q. F. Valeat qiii fecit, s. Votum solvit, vel voto suscepto.nbsp;s. Vir spectabilis.nbsp;s. A. L. Voto suscepto animo lubens posuit.

s. c. Voto suscepto curavit. s. D. D. Voto suscepto donum dedit.nbsp;s. F. Voto suscepto fecerunt.nbsp;s. I. Vice sacra judicans.nbsp;s. 3. c. Vice sacra judiCans.nbsp;s. i. F. Voto suscepto jussit fieri,nbsp;s. L. M. Votum solvit libens merito.

s. L. M. Voto suscepto libens merito.

s. L. p. Voto suscepto libens posuit.

s. p. L. L. M. Voto suscepto posuit libens lubens, se libentissinie.nbsp;s. s. L. M. Votum susceptum solvitnbsp;libens merito.


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ESSAI SUR I.ES INSCRIPTIONS. 393

ESSAI SUR I.ES INSCRIPTIONS. 393

viL. AB ALIM. Villici ab aliinentis. viR. BIAN.E. Virgin! Dian®.nbsp;viR. SBL. Vir spectabilis.

VOL. Volina. — Tribu.

VOL. Volusius. — Prenom.

VOL. F. Volusi filius.quot;

VOL. N. Volusi nepos.

VOL. T. Voltina. — Tribu. voLER. Volerus. —r Prénom.nbsp;voT. Votina. — Tribu.nbsp;voT. E. Voti ergo (causa).

VQ. Pupilla.

VI. VIR. Sevir, Sexvir.

VI. VIR. AVG. Sexvir Augustalis. vn. VIR. EPVL. Septemvir epulonum.nbsp;VIII. VIR. Octovir.

V. S. S. L. S. D. EX. PRIM. VolUm SUS-

ceptum solvit iibens sacerdos Deae ex primis.

V. SVP. Vale supersles.

V. T. F. j. Usus tilulo fieri jussit.

V. V Votum vovit, vel voverat.

V. V. Valens victrix (Legio).

V. V. Virgiiii Vestali.

V. V. V. Vale, vale, vale.

V. VL. coR. Victor!, ultori, corusca-lori.

V. V. cc. Viri elarissimi, viro claris-sim.

vv. ccss. ONS. Viri elarissimi cousules.

V. V. E. Vestri visum erit.

V. V. s. s. F. Vivis suprascriptis fecit.

V. V. MAX. Virgin! Vestali maxima;.

VAL. Valerius.'

VAL. BYZAc. Valeri® Byzaccu®.

VE. Veteranus.

X. Decimus. — Prenom. x. ER. Deciniffi erogalor.

XV. VIR. SAC. FAC. Quindccim vir sa-eris faciendis.

XX. HER. Vicesim® b®rcditatum.

XX. LIB. Vicesim® libertatum.

XX. LIB. REG. Vicesim® libertatis Re-gionis.

XL. G. Quadragesim® Galliarum.

VE. p. p. Vertamus perpetuus.

VER. AVG. pp. Vestameii Augusti perpetuus.

VEL. Velina. — Tribu.

VET. Veturia. — Tribu.

VET. AVG. Veteranus Augusti.

VET. LEG. Veteranus Legionis.

VET. SPEC. Veteran! speculatores.

vt. R. Sexies Bom®.

VICE s. J. c. Vice sacra judex cogni-tionum.

VICE XX et xxxx. Vice vicesimarii et quadragesimarii, vel Vice (Procu-ratoris)vicesim® etquadragesim®. ze. Zephiriensium.

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59G nbsp;nbsp;nbsp;LES TROIS ROME.

CIIAPITRE XIII. Fasies consulaires.

Pour compléter, aulant que Ie permetlent les hornes d’un abrégé, ce petit nianuel d’épigraphie païenne, je donne ici les fastes consulaires par ordrenbsp;alphabétique. II faut avoir soin, pour trouver la date precise d’une inscription, de remarquer sous quel consulat de tel ou de tel personnage Ic fait anbsp;eu lieu. Or, Ie nombre et la succession des consulats est indiquée par lesnbsp;sigles connus ii, m, iv, etc., bis, tcrtium, quarlwm consul.

An de

Av.

Den.

Rome.

J.-C.

J.-C.

790

57

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6-iO

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287

467

544

410

Cn. Acerrouius Proculus. — C. Pontius Nigrinus.

M. Acilius Aviola. — C. Cornelius Pansa.

M. Acilius Balbus. — C. Porcius Cato.

Man. Acilius Faustinus. — C. Cxsonius Macer Triarinus Rufinus.

M. Acilius Glabrio. — P. Cornelius Scipio Nasica.

M. Acilius Glabrio. — C. Bellitius Torquatus.

M. V. Acilius Glabrio. — .M. Valerius Verianus Homullus. v®lius Adrianus. — Tib. Claudius Fuscus Salinator.nbsp;Jilius Adrianus II. — Q. Junius Rusticus.

M. Jïlius Aurelius Junius Commodus. — T. Sextilius La-teranus.

L. Jilius Caesar Verus II. — P. Caelius Balbinus Vibullius Pius.

Sex. .dülius Catus. — C. Sentius Saturninus.

L. iEliiis Samia. — M. Cervilius Geminus.

Q. Jülius Paetus. — M. Junius Pennus.

Q. Jilius Tubero. — Paulus Fabius Maximus. iEmilius jElianus. — L. Antistius Vetus.

Q. Jimilius Barbula. — C. Junius Bubulcus Brutus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Jümilius Barbula. — Q. Marcius Philippus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Jïmilius Barbula. — M. Junius Pera.

M. Jïmilius Lepidus. — M. Poblicius Malleolus.

M. ./Emilius Lepidus. — C. Flaminius Nepos.

M. .Emilius Lepidus. — L. Aurelius Orestes.

M. Jimilius Lepidus. — Q. Lutatius Catulus.

M. Jimilius Lepidus. — L. Volcatius Tullus.

M. iEmilius Lepidus. — L. Arruntius Nepos.

M. Jïmilius Lepidus. — ï- Slal,ilius Taurus.

M. JSmilius Lepidus Porcina. — C. Hostilius Mancinus. jEmilius Lactus 11. — Anicius Cerealis.

L. jEmilius Mamercinus. — Q- Fabius Vibulanus 11.

L. jEmilius Mamercinus 11.—C. Servilius Structus Ahala. — C. Cornelius Lentulus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;yEmilius Mamercinus IIL — P. Vopiscus Julius Julus.nbsp;T. yEmilius Mamercinus 11. — Q. Fabius Vibulanus IIL

M. nbsp;nbsp;nbsp;^milius Mamercinus. — C. Valerius Potitus Volusus.

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L. Sextius Sextinus Latcra-

PASTES CONSULAIRES.

L. iEmilius Mamercinus. nus.

L. /Emilias Mamercinus II.—Cn. GenuciusAventinensis. T. /Eniilius Mamercinus. — Q. Publiliiis Pliilo.

L. jEmilius Mamercinus Privernas II. — C. Plautius De-cianus.

L. /Einilius Papus. — C. Atlilius Regulus.

L. yEmilius Paulus. — M. Bmbius Tamphilus.

L. yEmilius Paulus. — T. Licinius Crassus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;yEmilius Paulus. — C. Claudius .Marcellas.

M. nbsp;nbsp;nbsp;/Eniilius Scaurus. — C. Cmcilius Melellus.

Afrauius llannibalianus. — M. Aurel. Asclcpiodotus.

L. Afrauius Nepos. — Q. Cecilias Melellus Celer.

P. nbsp;nbsp;nbsp;Alfinius ou Afrauius Varus. — P. Viuucius Nepos.

C. Allius Fuscianus II. — Duillius Silanus II.

L. Anicius Gallus. —M. Cornelius Celbegus.

Anicius Fauslus II.— Severus Gallus.

Annicus Bassus II. — L. Bagonius Quinclianus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Annius Fabianus. — M. Nonius Mucianus.

Annius Gralus Sabinianus. — Claudius Seleucus.

Ap. Annius Trebonius. — M. Altilius Bradua.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Annius Verius II. — L. Augur.

C. Antislius Velus. — Decimus Lailius Balbus.

C. Antislius Velus. — M. Suillius Rufus Nervilianus.

M. Antoninus Gordiauus Augustus. — M. Acillus Aviola. M. Antoninus Gordianus Augustus II. — Tit. Claud. Ci-vica Pompeianus II.

Antonius Augustus. — Q. M. Coclalinus Adventus. Antoninus Aug. Pius II. — Bruttius Praesens.

Antoninus Aug. Pius III. — M. Aurelius Cmsar. Antoninus Aug. Pius .\ug. II. — M. Aurelius Cmsar II.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Antonius. — P. Servilius Valia Isauricus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Antonius Nepos. — A. Posthumius Albinus.

M. Antonius Nepos, — L. Scribonius Libo.

Appius Claudius Pulcber. — Q. Coecilius Melellus Mace-donicus.

M. Apuleius Nepos. — P, Silius Nerva.

Q. nbsp;nbsp;nbsp;Apuleius Pansa. — M. Valerius Corvus.

M. Aquilius Julianus. — P. Nonius .\sprenas.

L. Aquilius Tuscus. — T. Siciuius Sabinus.

Q. Arrius Psetinus. — C. Veranius Aprouianus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Arrius Pudens. — M. Gravius Orfitus.

.C. Asinius Gallus. — C. Marcius Censorinus.

Q. .Asinius Marccllus. — M. Aciliiis Aviola.

C. Asinius Pollio. — C. Antislius Velus.

C. Atius Sabinus II. — Sex. Cornelius Anullinus.

A. lAtlilius Calalinus. — C. Sulpiiius Paterculus.

C. Atlilius Calatinus. — Cn. Cornelius Blasio.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Altilius Regulus. — L. Julius Libo.

C. Atlilius Regulus II. — L. Manlius Vulso.

M. Atlilius Serranus. — Q. Servilius Cmpio.

An de

Av.

597

Dep.

Rome.

J.-C.

J.-C.

588

566

591

565

115

359

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529

529

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58G

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594

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6

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239

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51

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257

187

267

501

250

618

106

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398 l.ES TIiOIS ROME.

398 l.ES TIiOIS ROME.

T.

C.

M.

M.

M.

M,

M.

M.

M,

M.

M.

M.

M.

L.

L.

L.

L

L.

L.

L.

L.

C.

L. T.

M. M.nbsp;M.

M.

C.

C.

C.

rhus.

Aurelius Commodus Augustus IV. — M. Aufidius Vic-torinus.

Aurelius Commodus Augustus V. — M. iElius Gla-brio II.

Aurelius Commodus Augustus VI. — M. Petronius Septiniianus.

Aurelius Commodus Augustus VII. — C. Ilelvius Per-tinax.

Aurelius Cotta. — P. Servilius Geminus.

Aurelius Cotta. — P. Servilius Geminus II.

Aurelius Cotta. — L. Manlius Torquatus.

Aurelius Eulvius. — A. Serapronius Atralinus.

, Aurelius Memmius Tuscns. — Pomponius Bassus. Aurelius Severus II. —^T. Claudius Pompeianus.nbsp;Aurelius Severus Ale.x. Aug. II.—C. Marcellus Quinc-lilius II.

Aurelius Severus Alexander Ang. III. — Cassius Dio III.

Aurel. Valer. Diocletianus II. — Aristobulus.

Aurel. Valer. Diocletianus III. — M. Aurel. Valer. Maximianus Ilerculius Augustus.

Aurel. Valer. Diocletianus Aug. IV.—M. Aurel. Valer. Maximianus Aug. III.

Alurius Saturninus. —Annius Trebonius Gallus. Aufidius Orestes. — P. Cornelius Leutulus Sura.

. Aurelius Anloniiius Caesar III. — L. ^lius Aurelius Verus Caesar II.

Aurelius Antoninus Aug. II. — C. Septimus Geta Caesar.

. Aurelius Antoninus Aug. III. — P. Septimius Geta Cmsar II.

, Aurelius Antoninus Aug. IV. — Caecilius Balbinus II. — M. Antonins Gordianus. — Ilelvius Perlinax.

. Aurelius Aiitonius Augustus II. — M. Aurelius Euthy-cbianus Coinaron.

Aurelius Antonins Augustus I. — Licinius sacerdos. Aurelius Antonius Augustus III. — M. Aurelius Seve-riis Alexander Caesar.

Aurelius Carinus II. — M. Aurelius Numerianus II.— Diocletianus. — Annius Bassus. — M. Aurel. Valer.nbsp;Maximianus. — M. Julius Maximus.

Aurelius Cants Augustus II. — M. Aurel. Carinus Caesar. — M. Aurel. Numerianus Caesar Matronianus.nbsp;Aurelius Claudius Augustus II. — Paternus.

Aurelius Claudius Civica Pompeianus.—Pelignianus, ou Celignus, ou Felicianus.

Aurelius Commodus Augustus.—Plautius Quinctillus. Aurelius Commodus Augustus II. — T. Annius Aurelius Varus. — P. Ilelerus Perlinax. — M. Didius Seve-rus Julianus.

Aurelius Commodus Augustus III.—L. Antistius Bur

An de

Av.

Dep.

Rome.

J.-C.

J.-C.

9.31

198

085

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9I.i

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¦ Pom-

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Rome.

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896

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148

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9’70

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246

980

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247

503

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68

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641

113

760

7

635

119

645

109

656

98

Valer. Maximianus Aug. VIII.

1'ASTES COiNSÜLAIRES.

C. Aurel. Valer. Dioclelianus Aug. V. — M. Aurel. Valer. Maxim. Here. Aug. IV.

C. Aurel. Valer. Dioclelianus Aug. VI. — Fl. Valer. Constantins Chlorus Cassar II.

C. Aurel. Valer. Dioclelianus Aug. VII. — M. Aurel. Valer. Maximianus Aug. VI.

C. Aurel. Valer. Dioclelianus Aug. VIII. — M. Aurel.

¦M. Aurel. Valer. Maximianus llerculius Aug. II.-ponius Januarius,

M. Aurel. Valer. Maximianus Aug. V.—C. Galerius Maximianus Caesar II.

C. Aurel. Valer. Maximianus Aug. VIII. — M. Aurel. V.a-ler. Maximianus Aug. VII.

M. Aurel. Valer. Probus Augustus. — M. Aurelius Paul-linus.

M. Aurel. V’aler. Probus Augustus II.— M. Furius Lupus.

M. Aurel. Valer. Probus Augustus III.—Ovinus Paiernus.

M. Aurel. Valer. Probus Augustus IV. — C. Junius Tibe-rianus.

M. Aurel. Valer. Probus Augustus V. — Pomponius Vic-lorinus.

L. Aurelius Verus III. — T. Numidius Quadratus.

B

Darbatus ou Barbaras. — Regulus.

T. Bellitus Torquatus. — T. Claudius Atticus Ilerodes.

L. Bellitus Torquatus 11. — M. Salvius Julianus Vetus.

C. Bruttius Prmsens II. — M. Antonius Buliuus.

C. Bruttius Praisens. — T. Messius Exlricatus. — Macri-nus Augustus. — Diadumenianus Cmsar.

Bruttius Prtesens.— Nummius Albinus II.

L. Cmcilius Balbinus. — Max. ^milius Jlrailianus, ou M. Nummius Albinus.

L. Cmcilius Metellus. — M. Fabius Buteo.

L. Caecilius Metellus II. — C. Furius Pacilus.

Q. Caicilius Metellus. — L. Velurius Pbilo.

IJ. Cmcilius Metellus— Q. Mullus Scmvola. ii. Cmcilius Metellus. — Q. Marcius Bex.

Q. Cmcilius Metellus Balearius.—ï. Quinlius Flaminius. L. Catcilius Metellus Calvus. — Q. Fabius Maximus Ser-vilianus.

P. nbsp;nbsp;nbsp;Cseeilius Metellus Caprarius. — Cn. Papirius Carbo.

Q. nbsp;nbsp;nbsp;Caecilius Metellus Creticus. — A. Lieinius Nerva.

L- Cmcilius Metellus Dalmaticus.— L. Aurelius Cotta. Q. Cfficilius Metellus Nepos. — T. Didius Nepos.

Q. Caecilius Metellus Numidicus. — M. Julius Silauus.

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400 LES TROIS ROME.

400 LES TROIS ROME.

A. Virgiuius Tricostus Ru-

C. Csccilius Rufus.— L. Pomponius Flaccus.

C. Ccelius Caldus. — L. Domiiius Ahenobarbus.

C. Cicsar Caligula II. — L. Apronius.

G. Caïsar Octavianus II. — L. A^olcalius Tullus.

C. Caesar Octavianus III. — M. Valerius Mcssala Corvi-nus.

C. Caïsar Octavianus IV. — Licinius Crassus. — C. An-tislius. — Marcus Tullius. — Lucius Saiuius.

C. Caisar Octavianus V. — Sex. Apuleius. — Potitus Valerius Mcssala.

C. Ca3sar Oct.avianus IV. — M. Vipsanius Agrippa II.

C. Ca;sar Octavianus Augustus VII. — M. Vipsanius Agrippa. III.

C. Caesar Octavianus Augustus VUL — T. Statilius Taurus.

C. Cffisar Octavianus Augustus IX. — M. .lunius Silanus.

C. Caesar Octavianus AugustusX.—C.NorbanusFlaccus.

G. C;csar Octavianus Augustus XL — Aulus Terentius Varro. — P. Sextius. — C. Calpurnius Piso.

C. Cicsar Octavianus Augustus XII. —L. Cornelius Sylla.

C. Caesar Octavianus Augustus XIII. — M. Plautius Sil-vaniis. — C. Caninius Gallus.

Caeso Fabius Vibulauus. — Sp. Furius Fusus

Cajso Fabius Vibulanus IL tilus.

L. Caesonius Commodus Vcrtis.— C. Cornelius Priscus.

C. Caesonius Paelus. — C. Pctronius Sabinus.

C. Caligula Caesar lil. — L. Gellius Poplicola.

C. Caligula Ctes.ar IV. — Cneius Sentius Salurninus.

C. Calpurnius Piso. — M. Popilius Laenas.

C. Calpurnius Piso. — M. Acilius Glabrio.

L. Calpurnius Piso. — M. Licinius Crassus.

C. Calpurnius Piso. — M. Velius Bolauus.

Calpurnius Piso. — M. Salvius Julianus.

L. Calpurnius Piso Caesonius. — A. Gi\binius Nepos.

L. Calpurnius Vivius Agricola. — Sex. Catius Clemen-ünus,

C. Calvisius Sabinus. — L. Passianus Rufus.

C. Calvisius Sabinus. — Cn. Cornelius Lcntuliis Cossus Getulicus.

Spur. Carvilius Maximus IL — Q. Fabius Maximus Verrucosus II.

Cassius Apronianus. — M. Attilius Metilius Bradua.

L. Cassius Longinus. — L. Cornelius Cinna.

C. Cassius Longinus. — C. Sextius Calvinus.

L. Cassius Longinus. — M. iEmilius Scaurus II. — C. Marius Nepos.

Sp. Cassius Visccllinus II. — T. Postliumius Cominius Auruncus IL

Sp. Cassius Visccllinus IlL — Proculus Virginius Tricostus.

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FASTES CONSCLAIRES.

L. Catilius Severus. — T. Aurelius Fulvus.

L. Calilius Severus. — L. Ragonius ürinaüus Quintianus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Cejonius Commodus. — Ses. Yetuleuus Civica Pom-peiauus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Cejonius Silvanus. — C. Serius Auguriniis.

P. Ceslius Capitolinus. — C. Menenius Lanalus.

C. Ceslius Gallus. — M. Servilius Geraiuiis.

T. Claudianus Civica Pompeianus. — Lolianus Avilus. Ap. Claudius Csecus. — L. Voluranius Flamina Violens.nbsp;Ap. Claudius C®cus II. —L. Volumnius Flarnma Yiolens.nbsp;Claudius Caesar IV. — L. Vitellius.

Claudius Caesar V. — Ser. Cornelius Scipio Orlitus.

C. Claudius Canina. — M. Ainiilius Lepidus ou Barbula. Ap. Claudius Caudex. — M. Fulvius fdaccus.

C. Claudius Centho. — M. Sempronius ïuditanus. Claudius Crispinus. — Solenus Orliius.

Claudius Crispinus. — Papirius iElianus.

Claudius Imperator II. — Licinius Largus.

Claudius Imperator III. — L. Vitellius.

Claudius Julianus II. ¦— Claudius Crispinius.

App. Claudius Lateranus. — M. Marius Rufinus.

M. Claudius Marcellus. — C. Valerius Potitus Flaccus. M. Claudius Marcellus. — Sp. Nautius Rulilus.

M. Claudius Marcellus. — T. Quintius Crispinus.

M. Claudius Marcellus III. — L. Valerius Flaccus.

C. Claudius Marcellus II. — L. Cornelius Lentulus. Crus. SI. Claudius Marcellus .Eserninus.—L. ArruntiusNepos.nbsp;Claudius -Maximus. — Cornelius Scipio Orfitus.

C. Claudius Nero. — SI. Liviiis Salinalor.

T. Claudius Nero. — M. Servilius Pulex Geminus. Claudius Nero Caesar. — L. Antistiiis Verus.

Claudius Nero Caesar II. — L. Calpurnius Piso.

Claudius Nero Caesar lil. — Valerius Slessala.

Claudius Nero Caesar IV. — Cossus Cornelius Lentulus. P. Claudius Piilclier. — L. Junius Pullus.

Ap. Claudius Pulcher. — L. Porcius Licinius.

P. Claudius Pulcher. — M. Sempronius.

C. Claudius Pulcher. — T. Sempronius Gracchus.

C. Claudius Pulcher. — M. Perpenna.

C. Claudius Pulcher. — M. Perpenna Nepos.

Ap. Claudius Pulcher. — C. Norhanus Flaccus. —C. Oc-tavianus Caesar. — Q. Pedius. — C. Carriuas. — Publ. Ventidius.

Ap. Claudius Sabinus. — P. Servilius Priscus.

Ap. Claudius Sabinus. — T. Quintius Capitolinus Barba lus.

C, Claudius Severus. C. Aufidius Viclorinus.

M. Claudiu-s Tacitus. M. Maeius Furius Placidianus. M. Claudius Tacitus Augustus IL—Fulvius yEmilianus.nbsp;— iFlius Corpianus.

Claudius Tiberius Nero. — Drusus Caesar II.

T. IV.

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402

LES TROIS ROME.

T. Claudius Vibius Varus. — Ap. Ann. Attilius Bradua. Cocceius Nerva III. — T. Virginius Rufus.

Cocceius Nerva Augustus IV. — Ulpius Trajanus II.

C. Cornelius Anulinus II. — M. Aufidius Fronto.

P. Cornelius Asialicus II. — Q. Vetiius Aquilinus.

M. Cornelius Celhegus. — P. Semproiiius Tudilanus.

C. Cornelius Celhegus. — Q. Minulius Rufus.

P. Cornelius Celhegus. —AI. Baihius Taniphilus.

M. Cornelius Celhegus. — C. Erucius Clarus.

L. Cornelius Cinna II. — C. Marius VII. — L. Valerius Flaccus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Cornelius Cinna III..— Cn. Papirius Carbo.

Cn. Cornelius Cinna. — L. Valerius Messala.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Cornelius Cossus. — L. Furius Medullinus.

Cn. Cornelius Cossus. — L. Furius Medullinus.

A. Cornelius Cossus Arvina 11. — Cn. Domiiius Calvinus. C. Cornelius Dolabella. — M. Fulvius Nobilior.

P. Cornelius Dolabella. — C. Julius Silanus.

P. Cornelius Dolabella Maximus. — Cn. Domitius Calvinus.

L. Cornelius Lentulus. — P. Publilius Pbilo II.

Ser. Cornelius Lentulus. — L. Genulius Aventinensis. Cn. Cornelius Lentulus. — P. Jiniilius Psetus.

L. Cornelius Lenlulus. — L. Vilius Topulus.

Cn. Cornelius Lenlulus. — L. Mummius Achaïcus.

C. Cornelius Lenlulus. — P. Licinius Crassus.

P. Cornelius Lentulus. — Cn. Cornelius Lenlulus.

Cn. Cornelius Lentulus. — M. Licinius Crassus.

Cn. Cornelius Lentulus. — M. Valerius Messalinus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Cornelius Lenlulus Caudinus. — Q. Fulvius Flaccus.nbsp;P. Cornelius Lenlulus Caudinus. — C. Licinius Varus.nbsp;C. Cornelius Lentulus Lupus. — C. Marcius Figulus 11.nbsp;Cn. Cornelius Lentulus Marcellinus. — L. Marcius Phi-

lippus.

P. Cornelius Lentulus Spinier. — Q. Csccilius Metellus Nepos.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Cornelius Maluginensis. — L. Papirius Crassus.

L. Cornelius Merula. — Q. Minutius Thermus.

A. Cornelius Palma. — C. Calvisius Tullus.

P. Cornelius Rufinus. —M. Curius Dentatus.

P. Cornelius Rufinus 11. — C. Junius Brutus Bubulcus 11. L. Cornelius Smcularis 11. — Junius Donatus.nbsp;Cornelius Scipio. — Cn. Fulvius Centuinalus.

P. Cornelius Scipio. — T. Sempronius Longus.

P. Cornelius Scipio. — P. Licinius Crassus.

L. Cornelius Scipio. — C. Lmlius Nepos.

L. Cornelius Scipio. — C. Aquilius Florus.

P. Cornelius Scipio Africanus. — T. Sempronius Longus. P. Cornelius Scipio Africanus ^Emilianus. — C. Liviusnbsp;Marnilianus Drusiis.

P. Cornelius Scipio Africanus Jimilianus II. — C. Fulvius Flaccus.

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PASTES CONSULAIRES.

L. Cornelius Scipio Asialicus. — Cn. Junius Norbanus. Cn. Cornelius Scipio Asina. —C. Duillius Nepos.

Cn. Cornelius Scipio Asina. — A. Atliliiis Calalinus.

P. Cornelius Scipio Asina. — M. Miuucius Rufus.

Cn. Cornelius Scipio Hispalus. — C. Valerius Laevinus. — Q. Pelelius Spurious.

P. Cornelius Scipio Nasica. — C. Marcius Figulus.

P. Cornelius Scipio Nasica. — M. Claudius Marcellus 11. P. Cornelius Scipio Nasica. — L. Calpurnius Piso Beslia.nbsp;P. Cornelius Scipio Nasica Serapio. — D. Junius Brutusnbsp;Callaicus.

Serg. Cornelius Scipio Orfltus. — Q. Nonnius Priscus.

P. Cornelius Sulla Faustus. — L. Salvius Olho.

L. Cornelius Sulla Felix. — Q. Poinpeius Rufus.

L. Cornelius Sulla Felix II. — Q. Caicilius Metellus Pius.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Corniticus. — Sex. Pompeius.

Cossus Cornelius Lenlulus. — L. Calpurnius Piso. Cossus Cornelius Lentulus Isauricus. — M. Asiniusnbsp;Agrippa.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Curius Dentatus II. — L. Cornelius Lentulus Cau-dinus.

M. Curius Dentatus III. — Ser. Cornelius Merenda.

L. Cuspius Rufmus. — L. Statius Quadralus.

Decimus Haterius Agrippa. — C. Sulpitius Galba.

P. Decius Mus II. — Q. Fabius Maximus Bullianus III. T. FI. Domitianus II. — M. Valerius Messalinus.

FI. Domitianus VIII. — T. Flavius Sabinus.

FI. Domitianus Aug. IX. — T. Virginius Rufus.

FI. Domitianus Aug. X. — Ap. Junius Sabinus.

FI. Domitianus Aug. XI. — T. Aurelius Fulvius.

FI. Domitianus Aug. XII. — Serv. Corn. Dolabella.

FI. Domitianus Aug. XIII. — A. Volusius Saturninus.

FI. Domitianus Aug. XIV. — L. Minutius Rufus.

FI. Domitianus Aug. XV. — M. Cocceius Nerva.

FI. Domitianus Aug. XVI. — A. Volusius Saturninus.

FI. Domitianus Aug. XVII. —T. Flavius Valens.

Cn. Domitius Ahenobarbus. — C. Faunius Strabo.

Cn. Domitius Ahenobarbus. — C. Cassius Longinus.

L. Domitius Ahenobarbus. — Ap. Claudius Pulcher.

Cn. Domitius Ahenobarbus. — C. Sosius L. Domitius Ahenobarbus. — P. Cornelius Scipio.

C, Domitius Ahenobarbus. — A. Vitellius. — M. Furius Camillus.

Cn. Domitius Calvinus. — M. Valerius Messala.

Cn. Domitius Calvinus 11. — Cn. Asinius Pollio. — L. Cornelius Balbus. — P. Caninius Crassus.

Cn. Domitius Dexter 11. — L. Valerius Messala Priscus.

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404 LES TEOIS ROME.

L. Domitius Valerius Aurelianus Aug. 11. — M. Cejonius Virius Bassus, ou Pomponius Bassus.

Drusus Caesar. — C. Norbanus Flaccus.

E

L. Eggius Marcellus. — Cn. Papirius jElianus.

Q. Elpidius Rufus Lollianus Gentianus. — Pomponius Bassus.

Sex. Eruiius Clarus II. — Cn. Claudius Severus.

Q. Fabius Ambustus. — C. Furius Pacilus.

M. Fabius Ambuslus. — C. Petilius Libo Visolus.

C. Fabius Ambuslus. — C. Plautinus Proculus.

M. Fabius Ambuslus II. — M. Popilius Lsenas II.

M. Fabius Ambustus III. — T. Quinlius Pennus Capito-linus.

M. Fabius Buteo 11. — C. Atlilius Balbus.

Q. Fabius Catulinus. — Q. Julius Balbus.

M. Fabius Dorso. — Ser. Sulp. Camerinus.

C. Fabius Dorso Licinus. — C. Claudius Canina II.

Q. Fabius Labeo. — M. Claudius Marcellus.

Q. Fabius Maximus iEmilianus. — L. Hosülius Manci-nus.

Q. Fabius Maximus Gurges. — Junius Brutus Scaeva.

C. Fabius Maximus Gurges II. — C. Genucius Clepsina. Q. Fabius Maximus Gurges III. — L. Mamilius Vitulus.nbsp;Q. Fabius Maximus Q. Fil. — T.Sempronius Gracchus II.nbsp;Q. Fabius Maximus Rullianus. — L. Fulvius Corvusnbsp;Q. Fabius Maximus Rullianus II. — C. Marcius Rutilus.nbsp;Q. Fabius Maximus Rullianus IV. — P. Decius Mus III.nbsp;Q. Fabius Maximus Rullianus V. — P. Decius Mus IV.nbsp;Q. Fabius Maximus Verrucosus. — M. Pomponius Matho.nbsp;Q. Fabius Maximus Verrucosus IV. — M. Claudius Marcellus III-

Q. Fabius Maximus Verrucosus V. — Q. Fulvius Flaccus III.

M. Fabius Piclor. — D. Junius Pera.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Fabius Septiraianus Cilo II. — M. Flavius Libo.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Fabius Vibulanus. — Ser. Cornelius Cossus Malugi-nensis.

M. Fabius Vibulanus. — L- Valerius Publicola Potiius. Q. Fabius Vibulanus V. — T. Quinlius Capitolinus Bar-batus III.

Q. Fabius Vibulanus VI, — L. Cornelius Maluainensis Cossus.

M. Fabius Vibulanus. — Posthumius Elbutius Elva Cor-nicensis.

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PASTES GONSULAIRES.

C. Fabricius Luscinus. — Q. ^railius Papus.

Q. Fabricius Luscinus II. — Q. Jimilius Papus 11.

C. Flaminius Nepos. — Furius Pliilus.

Flavius Anliochianus. — Furius Orfitus.

M. Flavius Aper. — Q. Allius Maximus.

Q. Flavius Scopula Tertullus. — Tincius Flavius Clemens.

Q. Flavius Tertullus. — Claudius Sacerdos.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Fouteius Capito. — C. Julius Rufus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Fulvius Jïmilianus II. — Junius (ou Vellius .\quili-nus.

Fulvius yEmilianus. — Pomponius Bassus II.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Fulvius Brultius Praisens II. — S. Quiniilius Condia-nus.

Q. Fulvius Flaccus. — T. Manlius Torquatus II.

Q. Fulvius Flaccus II. — Ap. Claudius Pulcher.

Ser. Fulvius Flaccus. — Q. Calpuruius Piso.

Q. Fulvius Nobilior. —T. Annius Luscus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Fulvius Perinus. — T. Manlius Torquatus. — M. Valerius Corvus.

Ser. Fulvius Poetinus Nobilior. — M. jEmilius Paulus. C. Fulvius Valens. — C. Antistius Vetus.

C. Fuudanius Fundulus. — C. Sulpitius Callus.

Furius Camillus. — Ap. Claudius Crassus.

L. Furius Camillus. — C. Maeuius.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Furius Camillus II. — D. Junius Rrutus Scaeva.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Furius Camillus. — Sex. Nonnius Quinctilianus.

L. Furius Medullinus Fusus. — M. Manlius Vulso.

C. Furius Pacilus Fusus. — M. Papirius Crassus.

P. Furius Philus. — Sext. Attilius Serranus.

L. Furius Purpureo. — M. Claudius Marcellus.

C. Furnius. — C. Julius Silanus.

Gallieanus. — Titianus.

Callus..— Flaccus.

T. Ceganius Macerinus. — P. Minucius Augurinus.

M. Ceganius Macerinus. — C. Julius Julus.

M. Ceganius Macerinus II. — T. Quinctius Capitolinus Barbatus V.

M. Ceganius Mamercinus. — L. Serg. Fidenas.

L. Cellius Poplicola. — Cn. Cornelius Lentulus Claudia-nus.

L. dSellius Poplicola. — M. Cocceius Nerva.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Cenucius Augurinus. — C. Curtius Philo.

L. Cenucius Aventinensis. — Q. Servilius Ahala.

C. Cenucius Clepsiua II. — Cn. Cornelius Blasio.

T. Germanicus Caisar. — C. Fonteins Capito. — C. Vitel-lius Varro.

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40(5 LES TROIS ROME.

40(5 LES TROIS ROME.

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Lar. Herminius Aquilinus.

CoelimoiUanus.

Hiberus. — Sisenna.

C. Horatiiis Pulvillus. — T. Menenius Lanatus. C. Horalius Pulvillus. — Q. Minutius .Augurinus.nbsp;Q. Hortensius. — Q. Caecilius Metellus Creticus.nbsp;H. Hostilius Mancinus. — A. Auilius Serranus.

Julianus Vettius Rufus. — Gavius Orfitus.

Julius Antonjus Africanus. — Q. Fabius Maximus.

C. Julius (ou Julianus) Arrianus. — Jïmilius Papus.

C. Julius Asper. — P. Asper, ou C. Julius Aper II. — C. Julius Asper.

Sext. Julius Cajsar. — L. Aurelius Orestes.

Sext. Julius Caesar. — P. Rulilius Rufus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Julius Caesar. — L. Marcius Figulus.

C. Julius Caisar. — M. Calpurnius Bibulus.

C. Julius Caesar I (dictateur). — P. Servilius Vatia Isau-ricus.— Quintius Fusius Calenus.—Publius Vatinius.

C. Julius Caesar 11 (dictateur).'—M. Antonius.

C. Julius Caesar III (consul et dictateur). — M. Jimilius Lepidus.

C. Julius Caesar IV (dictateur). — M. Lepidus. — Q. Fabius Maximus. — C. Tribonius. — Caninius Bebilus.

C. Julius Caesar (dictateur et consul). —M. Antonius. — M. iËinilius Lepidus.

C. Julius Caesar. — L. ^milius Paulus.

T. Julius Candidus. — A. Julius Quadratus.

C. Julius Jiilus. — P. Pinarius Rufus Mamercinus.

C. Julius Julus. — Q. Fabius Vibulanus 111.

C. Julius Julus. — L. Virginius Tricostus.

C. Julius Julus II. — L. Virginius Tricostus II.

P. Julius Lupus. — Maximus.

C. Julius Maximus Augustus. — C. Julius Africanus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Julius Philippus Augustus. — T. Fabius Junius Ti-tianus.

M. Julius Philippus Augustus II. — M. Julius Philippus

M. Julius Philippus Augustus HL — M. Julius Philippus Cscssr II

C. Julius Servilius. — C. Vibius Juven. Verus.

C. Julius Severus. — M. Rufinus Sabinianus.

M. Julius Silanus. — L. Norbanus Flaccus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Junius Brutus.—Sp. Lucretius Tricipitinus.—M. Ho-ratius Pulvillus. —L. Tarquinius Collatinus. — P. Valerius Publicola.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Junius Brutus. —A. Manlius Vulso.

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PASTES CONSüLAIRES.

D. Junius Brulus Lepidus. — M. ^milius Livianus.

C. nbsp;nbsp;nbsp;Junius Bubulcus Brutus III. — Q. .Emilius Barbula II.nbsp;M. Junius Maximus II. — M. Vetitus Aquilinus.

Junius Messala. — Gratus.

T. Junius Monianus. — L. Vettius Paulus.

M. Junius Pompeius Macrinus. — L. Cornelius Juventius Celsus.

Q. Junius Rusticus. — C. Vettius Aquilinus.

D. nbsp;nbsp;nbsp;Junius Silanus. — L. Licinius Murena.

Ap. Junius Silanus. — P. Silius Nerva.

M. Junius Silanus. — Q. Haterius Antonius.

Junius Silanus. — Q. Servilius Silanus. — Severus et Vi-tellius.

C. Junius Tiberianus. — Cassius Dio.

P. Juventius Celsus II. — M. Annius Libo II.

C. Lselius Sapiens. — Q. Servilius Cmpio.

Aim. Lsetus II.— Anicius Cerealis.

Sp. Lartius (ou Largius) Flavus ou Rufus. — P. Ilermi-nius Aquilinus.

T. Lartius Flavus II. — Q. Clselius Siculus.

P. Lecanius Bassus. — M. Licinius Crassus.

C. Licinius Calvus. — F. Sulpitius Pelicus 11.

P. Licinius Crassus. — C. Cassius Longinus.

L. Licinius Crassus. — Q. Mulius Scaevola.

Licinius Crassus. — Cn. Pompeius Magnus.

P. Licinius Crassus Mucianus. — L. Valerius Flaccus.

P. Licinius Gallienus Augustus IV. — L. Petronius Taurus Volusianus.

P. Licinius Gallienus Augustus V.— Ap. Pompeius Faus-tinus.

P. Licinius Gallienus Augustus VI. — Annius (ou Amu-lius) Saturninus.

P. Licinius Gallienus Augijgtus VIL — Sabinillus.

C. Licinius Geta. — L. (ou Q.) Fabius Maximus Eburnus.

L. Licinius. — A. Posthutnius .\lbinus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Licinius Lucullus. — M. Aurelius Cotta.

p. Licinius Valerianus Augustus 11. — M. Valerius Maximus.

P. Licinius Valerianus Augustus III. — P. Licinius Gallienus Augustus II.

P. Licinius Valerianus Augustus IV. — P. Licinius Gallienus Augustus III. — M. Ulpius Crinitus 11. — L. Do-rtillius Aurelianus.

P. Licinius Valerianus Cajsar IL — L. Cmsonius Macer Lucillus (ou Lucianus, ou Licinius) Rufinianus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Livius Dexter. — M. Élmilius Paulus.

M. Livius Drusus. — L. Calpurnius Piso.

M. Livius Salinalor. — L. iErailius Paulus.

An de.

Av.

407

Den.

Rome

J.-C.

J.-C.

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.302

42

212

355

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408 LES TBOIS ROME.

408 LES TBOIS ROME.

Regulus.


C. Livius Salinator. — M. Valerius Messala.

Lollianus Avitus. — C. Gavius Maximus.

M. Lollius. — Q. iEmilius Lepidus.

M. Lollius Pedius Verus. — Q. Junius Lepidus Bibulus. M. Lucius Drusus Libo. — L. Calpurnius Piso.

L. Lucretius Flavus. — Ser. Sulpilius Camerinus.

T. Lucretius Tricipitinus. — T. Velurius Geminus Cicu-rinus.

C. Lutatius Catulus. — A. Posthuraius Albinus.

M. Maïtius Fuscus, ou Rufus, om Priscus, om Priscianus.

— L. Turpillius Dexter.

C. Mamilius Turinus. —Q. Valerius Falto.

T. Manilius Modestus, om Vettius Modestus. —¦ Sergius Calpurnius Probus.

Cn. Manlius Cincinnatus. — M. Fabius Vibulanus 11.

T. Manlius Imperiosus Torquatus. — P. Decius Mus.

P. Manlius Nepos. — C. Papirius Carbo.

T. Manlius Torquatus. —-C. Attilius Bulbus 11.

T. Manlius Torquatus. — Cn. Octavius Nepos.

A. Manlius Torquatus. — Q. Cassius Longinus.

A. Manlius Torquatus Atticus. — C. Sempronius Blae-sus II.

A. Manlius Torquatus Atticus. — Q. Lutatius Cerco.

Cn. Manlius Vulso. — M. Fulvius Nobilior.

A. Manlius Vulso Longus. — Q. Csedicius. — M. Attilius

L. Manui. Acidin. Fulvianus. — Q. Fulvius Flaccus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Marcinus Censorinus. — M. Manilius Nepos.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Marcinus Butilus. — Cn. Manlius Capitolinus Imperiosus 11.

L. Marcius Censorinus. — C. Calvisius Sabinus.

Q. Marcius Pliilippus 11. C. Servilius Csepio.

L. Marcius Philippus. — Sex. Julius Caesar. ,

P. nbsp;nbsp;nbsp;Marcius Tremulus. — P. Cornelius Arvina.

Q. nbsp;nbsp;nbsp;Marius Tremulus. — P. Cornelius Arvina.

C. Marius. — Cn. Papirius Carbo III.

P. Marius Celus. — L. Asinius Gallus.

Marius Maximus. — L. Boscius Ailianus.

C. Marius Nepos 11. — C. Flavius Fimbria.

C. Marius Nepos HI. — L. Aurelius Orestes.

C. Marius Nepos IV. — Q. Lutatius Catulus.

C. Marius Nepos V. — Manilius Aquileius Nepos.

C. Marius Nepos VI. — L. Valerius Flaccus.

C. Martius Butilus. — T. Manlius Imperiosus Torquatus. C. Martius Butilus. — Q. Servilius Ahala.

Maximus II. — Ovinius Paternus.

Maximus HI. — C. Coelius Urbanus, ou Maximus, ou Uri-natius Urbanus.

An de

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Rome.

J.-C.

566

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m

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17)7)

234.

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PASTES CONSULAIRES.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Memmius Regulus. — Paulus Virgilius Rufus.

C. Messius Quiniius Trajanus Decius Aug. II. — Annius Maxim. Grains.

C. Messius Quiniius Trajanus Decius Aug. III. — Q. He-rennius Helrusus Messius Decius Caesar.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Minucius Augurinus II. — A. Sempronius Alralinus II.nbsp;M. Minucius Rufus. — Sp. Poslhumius Albinus.

P. Minucius Scievola. — L. Calpurnius Piso.

P. Mulius Scaila. — M. ^milius Lepidus II.

M. Mummius Albinus II. — Maximus Dexler.

L. Munalius Plancus. — M. JEmilius Lepidus II.

IV

Sp. Nautius Rulilus. — Sex. Furius Fusus.

C. Naulius Rulilus. — L. Minutius.

Sp. Naulius Rulilus. — M. Popilius Loenas.

Nero Claudius Drusus. — L. Quinclius Crispinus.

Q. Ninuius Hasla. — C. Manlius Vopiscus.

L. Nonius Asprenas Torqualus. — M. Aricius Clemens.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Nonius Asprenas Torqualus. — Annius Libo.nbsp;Numericus Tuscus. — Annius Corn. Anulinus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Nurnmius Annius Albinus. — Fulvius ^Emilianus.

O

S. Oclavius Ponlianus. — M. Antonius Rufinus.

Cn. Oclavius. — L. Cornelius Cinna. — L. Cornelius Merula.

Cn. Octavius. — M. Scribonius Curio.

L. Octavius. — C. Aurelius Cotta.

Cn. Octavius Nepos. — T. Annius Luscus Rufus.

Q. Ogulinus Gallus. — C. Fabius Pietor.

Q. Opirius Nepos. — L. Poslhumius Albinus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Opiniius Nepos. — Q. Fabius Maximus Allobrogicus.nbsp;Opiter Virginius Tricoslus. — S. Cassius Viscellinus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Otacilius Crassus. — M. Fabius Licinius.

Ovinius Palernus. — Arcesilaus.

Ovinius Paternus. — Marinianus.

L. Papirius J51ianus. — Junius Paslor.

Cn. Papirius Carbo II. — L. Cornelius Cina IV. C. T'apirius Crassus. — L. Julius Julus.

L. Papirius Crassus. — Coeso Duillius.

L. Papirius Crassus. — L. Plautius Venno.

L. Papirius Cursor. — C. Pelilius Libo Visolus. L. Papirius Cursor (diclateur).

L. Papirius Cursor 11. — Q. Publius Philo III.

An de

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Den.

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J.-C.

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440 LES TROIS ROME.

L. Papirius Cursor III. — Q. iEmilius (ou Aulius) Cerre-taniis.

C. Papirius Cursor IV. — Q. Publius Philo IV.

L. Papirius Cursor (ilictateur).

L. Papirius Cursor. — Sp. Carvilius Maximus.

L. Papirius Cursor II. —Sp. Carv. Maximus II.

Sex. Papirius Gallianus. — Q. Plaulius Plautianus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Papirius Miigillanus. — Sempronius Altratinus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Papirius Mugilianus. — C. Nauiius Uuülus.

M. Peduceus Priscinus. — T. Hsemius Severus. Perepinus. — A- Fulvius Jirailiauus.

C. Petitius Libo Visolus. — L. Papirius Mugilianus.

M. Petilius Libo. — C. Sulpitius Longus.

C. Petronius Mamerlinus. — Corn. Trebellius Rufns.

P. Pinarius Rufus Mamercinus. — P. Furius Fusus.

C. Plantius Hypsoeus. — T. Manlius Imperiosus Tor-qualus.

C. Plauünus Hypsaeus. — L. Aïmilius Mamercinus.

M. Plautius Hysmus. — M. Fulvicus Flaccus.

C. Plautius Proculus. — P. Cornelius Scapula.

Plaulius Quinctillus. — Statius Prisons.

M. Plautius Sylvanus. — M. Asinius Pollio Verrucocus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Plautius Venno. — M. Fossius Flaccinator.nbsp;Pompeianus Lupercus. — L. Junius Alticus Acilianus.nbsp;Sex. Pompeius. — Sex. Apuleius.

Sex. Pompeius Collega. — Cornelius Priscus.

P. Pompeius Longinus Gallus. —¦ Q. Veranius Lsetiis. Cn. Pompeius Magnus 11. — M. Licinius Crassus 11.

Cn. Pompeius Magnus III.— C. Cmcilius Melelius Scipio. Cn. Pompeius Strabo. — L. Porcius Cato.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Pomponius Matho 11. — C. Papirius Maro.

M. Popilius Lmnas. — Cn. Manlius Capitolinus Imperiosus.

M. Popilius Laenas III. — L. Cornelius Scipio.

M. Popilius Lmnas IV. — M. Valerius Corvus.

C. Popilius Lsepas. — P. ^liiis Ligus.

P. Popilius Laiiias. — P. Rupilius Nepos.

M. Porcius Cato. — L. Valerius Flaccus.

M. Porcius Cato. — L. Marcius rex.

Posthumius Albinus. — Sp. Carvilius Maximus.

L. Posthumius Albinus. — Cn. Fulvius Ceniuraalus.

Sp. Posthumius Albinus. — Q- Marcius Philippus.

Ap. PosthumiusAlbiuus.—C.CalpurniusPiso. — Q. Fulvius Flaccus.

Sp. Posthumius .\lbinus. — M. Mutius Scmvola.

L. Posthumius Albinus. — M. Popilius Lmnas.

Sp. Posthumius Albinus. — L. Capurnius Piso Cmsonius. L. Posthumius Albinus Gracchus. — T. Sempronius.nbsp;— M. Claudius Marcellus. — Q. Fabius Maximus Verrucosus III.

A.| Posthumius Albus Regillensis. — T. Virginius Tricos-tus Cmlimontanus.

An de

At.

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Rome.

J.-C.

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148

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496

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PASTES CONSULAmES.

Sp. Poslhumius Albus Regillensis. — Q. Servilius Pris-cus 11.

A. Posthumius Albus Regillensis. — Sp. Furius Medul-linus f’usus.

T. Posthumius Cominius Auruncus. — T. Lartius Flavus.

L. Poslhumius Megellus. — T. Minucius Auguriiius. — M. Fulvius Corvus Pmiinus.

L. Postliumius Megellus. — M. Altilius Regulus.

L. Poslhumius Megellus III. — D. Junius Brutus Bu-bulcus.

L. Posthumius Megellus. — Q. Mamilius Vitulus.

Posthumius Tilianus 11. — FI. Popilius Nepolianus.

P. Poslhumius Tuherlus II.—AgrippaMeneniusLanatus.

Proculus Geganius Macerinus. — L. Meneinus Lanatus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Publius Celsus II. — C. Claudius Crispinus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Puppius Piso. — M. Valerius Messala Niger.

Quietus. — Volduraianus. — Q. Faison ou Nao Falconius ou Niconiac.

C. Quiniilius Claudus. — L. Genucius Clepsina.

Sex. Quiniilius Gorgianus Candianus. — Sex. Quiniilius Maximus.

Sex. Quiniilius Varus. — P. Horatius (ou Curiatius) Ter-geminus.

T. Quiniius Capitolinus Barbalus II. — Q. Servilius Priseus.

T. Quiniius Capitolinus Barbalus IV. — Agrippa Furius Fusus. — M. Miuutius. — C. Quiniius.

T. Quiniius Capitolinus Barbalus VI. — Agrippa Mene-nius Lanatus.

T. Quiniius Capitolinus Barbalus. — Humerius Fablus Vibulanus.

C. Quiniius Crispinus. — T. Stalilius Taurus.

Ï. Quiniius Flaminius. — Sex. Jilius Pietus Catus.

L. Quiniius Flaminius. — Cn. Domitius Ahenobarbus.

L. Quiniius Flaminius. — M. Acilius Balbus.

Quiniius Niger. — T. Vipsanius Apronianus.

T. Quiniius Pennus Cincinnalus II. — A Cornelius Cossus.

T. Romilius Rocus Vaiicanus. — C. Veturius Cicurinus. Romulus Gallicanus. — Aniisiius Veins.

C. Rubellius Geminus. — C. Fusius Geminus.

C. Rulilius Rufus. — Cn. Manlius Maximus.

An de

Av.

Rome.

J.-C.

288

466

290

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61

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Dep.

J.-C.

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412 LES TROIS ROUE.

Cn. Scipio Calvinus. — M. Claudius Marcellus.

A. Sempronius Atralinus. — M. Minucius Augurinus. C. Sempronius Atratinus. — Q. Fabius Vibulatnus.

T. Sempronius Gracchus. — P. Valerius Fallo.

T. Sempronius Gracchus II. — M. Juventius Phalna.

P. Sempronius Sophus. — P. Sulpilius Saverrio.

P. nbsp;nbsp;nbsp;Sempronius Sophus. — Ap. Claudius Crassus.

C. Sempronius Tuditanus. — M. Aquilius Nepos.

C. Senlius Salurninus. — Q. Lucretius Vespillo.

C. Septimius Geta Caisar. — F. Fulvius Plaulianus II. L. Septimius Severus II. — Clod. Albinns Caisar II.

L. Septimius Severus Augustus III. — M. Aurelius Antoninus Aug.

L. Septimus Severus II. — L. Alfidius Herennianus.

L. Sergius Fidenas II. — Hostius Lucretius ïricipitinus. Serius Augurinus. — Avius Severianus.

Q. nbsp;nbsp;nbsp;Servilgt;us Ahala 11. — L. Genucius Aventinensis 11.nbsp;Cn. Servilius Ctepio. — C. Sempronius Blaesus.

Servilius Cornelius Cethegus. — L. Vitellius Varro

Cn. Servilius Geminus. — C. Flaminius Nepos 11. — M. Atlilius Regulus 11.

Q. Servilius Nepos. — Q. Pompeius Nepos.

P. Servilius Priscus. — L. Ehutius Elva.

C. Servilius Pudeus. —L. Fusidius Pollio.

C. Servilius Structus Ahala. — L. Papir. Mugillanus II. C, Servilius Tucca. — L. Coecilius Metellus ou Dexter.nbsp;P. Servilius Vatia Isauricus. — Ap. Claudius Pulcher.nbsp;C. Silius Italicus. — M. Galerius Trachanus.

Siliiis Messala. — Q. Aquilius Sabiuus.

C. Silius Nepos. — L. Munatius Plancus.

P. nbsp;nbsp;nbsp;Silius Nerva. —C. Julius Alticus Yestinus.

Q. nbsp;nbsp;nbsp;Sosius Falco. — C. Julius Erucius Clarus. — Fl.nbsp;Claudius Sulpicianus. — Fabius Cilo Septiraianus. —nbsp;JElius et Probus.

Q. Sosius Priscus. — P. Coelius Apollinaris.

C. Sosius Senecio II. — A. Cornelius Balma.

C. Sosius Senecio IIL — L. Licinius Sura.

C. Sosius Senecio IV. — C. Tutius Cerealis.

C. nbsp;nbsp;nbsp;Sosius Senecio V. — L. Tutius Cerealis.

T. Staiilius Sisenna Taurus. — L. Scribonius Libo. — Julius Pomponius Groecinus.

D. nbsp;nbsp;nbsp;Suetonius Paulinus. — L. Pontius Telesinus.

Q. Sulpilius Camerinus. — Sp. Partius Flavus.

IJ. Sulpilius Camerimus. — C. Poppseus Sabinus. Sulpitius Camerinus. — Quinlius Niger Balbus.

L. Sulpilius Cursor. — Junius Bubuleus Brutus 11.

Ser. Sulpitius Galba. — L. Aurelius Cotta.

Ser. Sulpilius Galba. — Q. Ilortensius Nepos. — M. Aurelius Scaurus.

An de

Av.

Dep.

Kome.

J.-C.

J.-C.

532

222

257

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258

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450

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24

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463

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527

427

470

284

675

79

821

68

967

214

766

13

818

65

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193

922

169

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99

855

102

859

106

860

107

769

16

819

66

264

490

762

9

891

158

441

513

610

144

646

108

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PASTES COSSULAIRES.

Ser. Sulpitius Galba. — L. Cornelius Sylla. — L. Salvius Otho. — Vibius Marcus.

C. Sulpitius Galba Caesar. — T. Vicinius Crispianus.

P. Sulpitius Galba Maximus. — C. Fulvius Centumalus. P. Sulpitius Galba Maximus. — C. Aurelius Cotta.

C. Sulpitius Gallus. —M. Claudius Marcellus.

C. Sulpitius Longus. — P. JElius Paetus.

L. Sulpitius Longus. — Q. Aulius Ceretanus.

L. Sulpitius Peticus. — C. Licinius Calvus.

C. Sulpitius Peticus III. — L. Valerius Poplicola II. C. Sulpitius Peticus IV. — M. Valerius Poplicola III.

C. Sulpitius Peticus V. — T. Quintius Pennus Cincin-natus.

Ser. Sulpitius Rufus. — M. Claudius Marcellus.

P. Sulpitius Savetrio. — P. Decius Mus.

Suranus II. — P. Neratius Marcellus.

Sp. Tarpeius Monlanus Capitolinus. — A. jEterius Fon-tilanis.

C. Terentius Varo. — L. AEmilius Paulus II.

M. Terentius Varro Lucullus. — C. Cassius Varus. Tiberius Claudius Nero. — L. Quintilius Varus.

Tiberius Claudius Nero. — Cl. Calpurnius Piso.

Cl. Tiberius Nero Caesar Augustus II. — Germanicus Caesar II.

Cl. Tiberius Nero Caesar Augustus. — L. jElius Sejanus.

— nbsp;nbsp;nbsp;C. Memmius Regulus. — Faustus Cornelius Sylla.

— nbsp;nbsp;nbsp;Sylla. Sextidius Catulinus. — L. Fulcinius Tiro. —nbsp;L. Pomponius Secundus.

P. Titius Perpetuus. — L. Ovinius Rusticus Cornelianus.

— nbsp;nbsp;nbsp;Julianus Silanus. — Enn. Messius Gallicanus. -L. Septimius Valerianus. — T. Claudius Julianus. -Celsus Jilianus.

Ulp. Trajanus. — M. Acilius Glabrio.

Ulp. Trajanus Aug. III. — M. Corn. Fronto III.

Ulp. Trajanus Aug. IV. — Sex. Articulaeus Pmtus.

Ulp. Trajanus Aug. V. — L. Appius Maximus.

Ulp. Trajanus Aug. VI. — C. Julius Africanus I. Triarius Maternus. — M. Attilius Bradua.

M. Tullius Cicero. — D. Antonius Nepos.

M^Tullius Decula. — Cn. Corn. Dolabella.

M. Tullius Longus. — Ser. Sulpitius Camerinus.

U

M. Ulpius ou Pius Crinitus. ~ Proculus Pontianus.

T. IV.

415

An de

Av.

Dep.

J.-C.

Rome.

J.-C.

786

53

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69

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337

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7

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18.5

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81

254

500

991

258

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/tii LES TROIS ROME.

/tii LES TROIS ROME.

C. Gal.

C. Gal.

Maxim. ¦ Severus

An de

Av.

Dep.

Rome.

J.-C.

J.-C.

799

46

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12

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250

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475

294

460

284

470

C. Valerius Asiaticus II. — M. Valerius Messala.

FI. Valerius Constantius Chlorus Cajsar. — C. Galerius Valer. Maximianus Caisar.

FI. Valerius Constantius Chlorus Caesar III. — C. Galerius Valer. Maximianus Caïsar III.

FI. Valerius Constantius Chlorus Caesar IV.

Maxim. Caesar IV.

FI. Valerius Constantius Chlorus Caesar V.

Maxim. Caesar. V.

FI. Valerius Constantius Aug. IV. — C. Gal.

Aug. IV. — P. Cornelius Anulinus Caesar.

Caesar.

M. Valerius Corvus. — C. Petilius Libo Visolus.

M. Valerius Corvus. -- A Corn. Cossus Arvina.

M. Valerius Corvus. — M. Attilius Regulus.

L. Valerius Domitius Aurelianus Aug. III. — C. Julius Capitolinus.

L. Valerius Domitius Aurelianus Aug. IV. — T. Nonius (ou Avonius) Marcellinus. — M. Aurelianus Gordianus.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Valerius Flaccus. — T. Otacilius Crassus.

P. Valerius Flaccus. - - M. Attilius Regulus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Valerius Flaccus. — M. Ilercnnius Nepos.

P. Valerius Laevinus. — T. Coruncianus Nepos.

M. Valerius Laevinus II. — M. Claudius Marcellus IV.

M. Valerius Largus. — M. Valerius Messalinus.

M. Valerius Maximus. — Sp. Virginius Tricostus Caeli-inontanus.

M. Valerius Maximus. — P. Decius Mus.

M. Valerius Maximus II. — M. AcUius Glabrio. — Antonins Gallus.

M. Valerius Maximus Cervinus.—Q. Caedicius Noctua.

M. Valerius Maximus Messala. — M. Otacilius Crassus.

M. Valerius Maximus Potitus. — C. iElius Pa;tus.

M. Valerius Messala. — L. Apullius FuUo.

M. Valerius Messala. — C. Fanius Strabo.

M. Valerius Messala. — P. Sulpiiius Quirinus. — Caius Valquot;ius. — Canus Cauinius Rebilus.

M. VaTcrius Messala. — M. Aurelius Cotta.

M. Valerius Messala. — C. Pompilius Parus Pedo.

L. Valerius Potitus. — M. Manlius Capitolinus.

P. Valerius Poplicola. — C. Martins Rutilus.

P. Valerius Piiblicdla II. — P- Lucretius Tricipitinus.

P. Valerius Publicola III. — M. Horatius Pulvillus 11.

P. Valerius Publicola IV. — P. Lucretius Tricipitinus 11.

P. Valerius Publicola. — C. Nautius Rufus.

P. Valerius Publicola II. — D. Clodius Sabinus Regil-iGiisis»

L. Valerius Publicola Potitus II. — T. YFinil. Mamerci-nus IV.

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415

An de

Av.

Dep,

Rome.

J.-C.

J.-C.

305

449

249

505

823

70

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71

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827

74

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554

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499

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220

7H

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57

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59

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285

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476

801

48

787

54

929

176

293

461

809

56

PASTES CONSl'LAIRES.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Valerius Publicola Politus. — M. Horatius Barbatus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Valerius Volesus. — P. Postbumius Tubertus.

T. FI. Vespasianus Csesar II.— T. Vespasianus.

T. FI. Vespasianus Csesar III. — M. Cocceius Nerva.

FI. Vespasianus Csesar IV. — T. Vespasianus Csesar II. T. FI. Vespasianus C»sar V. — T. Vespasianus Csesar III.

— nbsp;nbsp;nbsp;T. FI. Domitianus III.

FI. Vespasianus Csesar VI. — T. Vespasianus Caisar IV.

— nbsp;nbsp;nbsp;T. FI. Domitianus IV.

FI. Vespasianus Csesar VII. — T. Vespasianus Csesar V.

— nbsp;nbsp;nbsp;T. FI. Domitianus V.

FI. Vespasianus Csesar VIII. -— T. Vespasianus Csesar VI.

— nbsp;nbsp;nbsp;T. FI. Domitianus VI.

FI. Vespasianus Aug. IX. — T. Vespasianus Csesar VII.

T. Vespasianus Aug. VIII. — Fl. Domitianus VII.

C. Vettius Aufidius Atticus. — C. Asinius Prsetextatus. Vettius Balbinus II. — Venustus.

T. Veturius Calvinus. — Sp. Postbumius Albinus.

T. Veturius Calvinus II. — Sp. Postbumius Albinus II.

P. Veturius Geminus. — T. Ebutius Elva.

L. nbsp;nbsp;nbsp;Veturius Philo. — C. Lutatius Catulus.

C. Vibius Pansa. — A. Hirtius.

C. Vibius Trebonianus Augustus II. — C. Vibius Volusia-nus Csesar.

C. Vibius Volusianus Augustus II. — M. Valerius Maximus.

M. nbsp;nbsp;nbsp;Vinitius Quartinus. — M. Statilius Corvinus.

M. Vinucius Nepos. — C. Cassius Longinus.

M. Vipsanius Agrippa. — L. Caninius Gallus.

C. Vipsanius Poplicola. — L. Fonteins Capito.

A. Virginius Tricostus Coelimontanus. — T. Veturius Geminus Cicurinus.

A. Virginius Tricostus Coelimontanus. — T. Numicius Priscus.

A. Virginius Tricostus Rutilus. — C. Servilius Structus. A. Vitellius. — L. Vipsanius Poplicola.

L. Vitellius Nepos. — Paulus Fabius Persicus.

E. Vitrasius Pollio II. — M. Flavius Aper II.

P. nbsp;nbsp;nbsp;Volumnius Amiutus Gallus. — Ser. Sulpitius Cameri-nus.

Q. nbsp;nbsp;nbsp;Volusius Saturninus. — P. Cornelius Scipio.

empereurs romains.

Au^ste, jusqu’a Tan nbsp;nbsp;nbsp;\it

Tibere. nbsp;nbsp;nbsp;57

Caligula. nbsp;nbsp;nbsp;41

Claude. nbsp;nbsp;nbsp;54

Néron. nbsp;nbsp;nbsp;68

Julius Vindex, dans les Gaules;

L. Claudius Macer, eu Afri-

que; et Fonteins Capito, dans la Germanie.

Galba. nbsp;nbsp;nbsp;69

Othon. nbsp;nbsp;nbsp;69

Vitellius. nbsp;nbsp;nbsp;69

Vespasicn. nbsp;nbsp;nbsp;79

Titus. nbsp;nbsp;nbsp;8!


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416 EMPEREllRS ROUAINS.

416 EMPEREllRS ROUAINS.

96

Claude II, jusqu’a Tan

270

98

Quintille, son frère.

270

117

Aurélien.

275

138

Tacite.

276

161

Florien.

276

180

Probus.

282

170

Carus.

283

192

Carin.

285

193

Et Numérien, son frère.

284

193

Dioclétien. nbsp;nbsp;nbsp;/

195

Maximien-Her- | abdiqucnt en

505

197

ciile. nbsp;nbsp;nbsp;(

217

Constance-Chlore.

506

212

Galère.

511

218

Maxence.

511

221

Sévère II.

511

222

Maximin.

315

255

Constantin Ie Grand.

557

238

Licinius.

323

257

Constantin Ie jeune.

340

257

Constance.

561

238

Constant, frères.

350

244

Julien l’Apostat.

305

249

Jovien.

364

251

Valentinien I, en Occident.

575

Valens, en Orient.

378

253

Gratiën.

383

260

Valentien II.

392

267

Théodose Ie Grand.

595

Domitien, jusqu’a l’an Nerva.

Trajan.

Adrien.

Antonin Ie Pieux. Marc-Aurèle.

Et Lucius Verus.

Commode.

Pertinax.

Didier Julien.

Niger.

Albiri,

Septime-Sévère.

Caracalla.

Et Géta.

Macrin.

Héliogabale.

Alexandre-Sévère.

Maximien.

Gordien l’ancien.

Gordien Ie Fils.

Maxime, Pupien et Balbin. Gordien Ie jeune.

Pbilippe, père et fils.

Dèce.

Gallus; Hostilien; Volusien;

Emilien.

Valérien.

Et Gallien, son fils.

TABLE.

ESSAI SUR LES INSCRIPTIONS.

Chap. L — But de eet essai. Importance des inscriptions. nbsp;nbsp;nbsp;343

II. nbsp;nbsp;nbsp;— Division des Inscriptions.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;544

III. nbsp;nbsp;nbsp;— Orthographe des inscriptions; orthographe des lettres. 335

IV. nbsp;nbsp;nbsp;— Orthographe des diphthongues.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;554

V. nbsp;nbsp;nbsp;— Orthographe des sigles.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;557

VI. — Ponctuation.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;358

VIL — Ornementation. nbsp;nbsp;nbsp;359

VUL — Interprétations des inscriptions. nbsp;nbsp;nbsp;36O

IX. nbsp;nbsp;nbsp;— Noms de familie.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;362

X. nbsp;nbsp;nbsp;— Noms de tribu.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;365

XI. nbsp;nbsp;nbsp;— Noms de pays ou de patrie.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;567

XII. nbsp;nbsp;nbsp;— Age des inscriptions.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;368

XIII. nbsp;nbsp;nbsp;— Dictionnaire des Sigles.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;570

XIV. nbsp;nbsp;nbsp;— Fastes consulaires.nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;396

Empereurs Remains. nbsp;nbsp;nbsp;415

ns.

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