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COURS
D'ARCHITECTURE
CIVILE. |
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D'ARCHITECTURE,
ο υ.
TRAITÉ
De la Décoration, Dißribution & Conflruclion
DES BÂTIMENTS;.
C ON Τ EN A Ν Τ
Les Leçons donnéesfen 1750, & les années
iiiivanr.es, par J. F. Blondel , Archke&e,
dans fon École des Arts.
Publié de Haveu de ΐ Auteur, par M, Ä***.
TOME PREMIER. |
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Chez Dîsaint, Libraire, rue du Foin-S.-Jacques·
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ϊα*β^^
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M DGf L.XXL
Avec Approbation, & Privilège du Roù |
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AVIS DE L'ÉDITEUR. A près avoir obtenu de l'Auteur
la permiiïion de publier cet Ouvrage intéreifant , pour m'acquitter de la reconnoiifance que je lui dois, d'avoir bien voulu féconder, par fes foins &C avec fon défîntéreifemeiit ordinaire , mon goût pour Γ Architecture, j'avois, dans un Difcours préliminaire, faiii l'occaiîon, en faifant connoître l'utilité de fes Leçons, de parler auiïi, èC des talents reconnus de cet Architecte, &C de fon zèle infatigable pour les progrès de ce bel Art ; mais après lui avoir communiqué mon travail, fa modeftie n'a voulu me permettre aucune efpece d'éloge. « Je vous fuis très-obligé, m'a- »t-il dit, de ce que vous penfez d'a- » vantageux fur mon compte ; mais «je fuis bien éloigné de croire avoir " rempli la tâche que je me fuis im- »pofée. Quelques connoiifances que »vous ayez acquife dans nos Con- • · ·
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χ) A F Ι S
*> férences, les miennes m'y font apper-
» cevoir une infinité de fautes qui me » font échappées 3 & que les hommes » éclairés y remarqueront fans doute. » Ne perdez pas de vue , je vous » prie , que mon confentement à » vous laiiïer publier mes Leçons, n'a «eu d'autre but que l'efpoir qu'elles » pourraient être de quelque futilité » aux jeunes gens qui fe deftinent » à l'Architecture : que malgré qua- » rante années d'expérience , je n'ai » garde de vouloir prétendre à l'ap- » probation du plus grand nombre » de ceux qui, de notre temps, tien- » nent un rang diftingué parmi nous : » fongez , ajouta-t-il, que le Manufcrit » que je vous ai confié n'eft que le » réfultat de vingt années de recher- « ches ; mais qui faites dans des temps » différents 6i à diverfesreprifes, man- »quent peut-être de cette liaifon né- *> ceifaire à obferver dans un Ouvrage » qui, confié à la preife, demandoit |
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DE L'ÉDITEUR. y
* une érudition au-deiîus de mes forces.
»Donnez mon travail au Public, j'y » confens ; mais oubliez tout ce qui me » regarde &C qui pourrait déplaire à mes » Contemporains. Jeune encore lorfque » je compofai la plus grande partie des » Leçons qu'il contient , une forte » d'enthoufïafme fembloit m'être per- » mife ; aujourd'hui corrigé par l'âge , » je reconnois le danger de cet enthott- » iîafme, fur- tout lorfqu'il eft pouifé »trop loin. Je n'afpire plus qu'à h » retraite, au iilence ; ma carrière eft » remplie: ne donnez mes Obfervations » que pour ce qu'elles valent, & que » votre amitié ne s'aveugle pas fur quel- » ques talents que je dois plus à mon » zèle qu'à mes lumières ». Pour con- defcendre aux intentions de l'Auteur, & me renfermer dans fes vues patrioti- ques > je lui facrifie volontiers le plaiiîr que j'aurois eu à m'étendre fur la répu- tation qu'il s'eft acquife, èc fur fes qualités perfonnelles. Je vais donc a iv
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vîîj A VIS DE DÉDITEUR.
donner fes Leçons telles exadement que je les ai trouvées dans fon Ma- nufcrit, fans excepter même, ni fon Épitre dédicatoire , ni la Préface qu'il avoir déjà faite , n'ayant d'autre part à cet Ouvrage, que d'en avoir accéléré l'impreiTion 3 dont je me flatte que le Public me faura quelque grç. |
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ÉPITRE DÉDICATOIRE.
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C/ Έ s τ aux Perfonnes en Place, à qui
nous devons notre état , aux Amateurs d& la véritable Architecture qui ont animé notre %èle : c'eß aux Architectes célèbres qui ont dirigé nos études , aux Artifles habiles qui nous ont éclairés fur les différentes parties de notre Art : c'eß à nos Elevés, qui plus d*ujie fois nous ont fourni l'occafion de réduire en principes la plus grande partie des règles que les Manfards ont mifes en pratique dans leurs édifices : c'eß à ces divers Citoyens que nous croyons devoir dédier notre ouvrage. Cet hom- mage public r s'il efi bien reçu, fera pour nous la récompenfe la plus fiatteufe que nous piaffions efpérer du fruit de nos veilles; trop heureux β nos efforts répondent, en quelque forte , à l''attente de ceux que nous avons ici en vue : nous nous flattons du moins qu'ils voudront bien accceuillir ce qui fe trouvera de moins défectueux dans ce |
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„Jfe- 'JÊÈÈL*.
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X ÈpiTRE DÉDICATOIRE.
Cours. Ce qu'il contient de meilleur leur appar-
tient fans doute : mais nous ofons croire , qu'en faveur de l'ufage que nous avons fait de leurs avis, ils voudront bien avoir quelqu indulgence pour tout ce que nous avons tiré de notre propre fond. Quelle que piaffe être L· déci/îon du Public
fur le fort de cette entreprife affe^ importante t nous ne l'en affurons pas moins de la pléni- tude de notre reconnoiffance pour tout ce que. nous lui devons jufqu'à prêfent. |
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PRÉFACE. X>
O Ν peut dire que, jufqu'à préfent, nous
n'avons pas eu encore de Cours d'Architecture qui embraiîe toutes les parties de cet Art. Celui de d'Avilcr, eftimable à beaucoup d'égards , eft trop incomplet. François Blondel, célèbre Architecte , ne nous ä guère parlé, dans le fien, que des ordres iùivant les anciens & les modernes, des Arcs de Triomphe, des Ponts5 à quoi 'il a ajouté lesDefcriptions de quelques Édifices qu'il a fait exécuter. Il manque à cet Ouvra- ge , d'ailleurs excellent, les principes de la conilrucfcion, de la diitribution, & de la déco- ration intérieure ; ces deux dernières parties, font devenues en France, depuis ce grand Maître , un objet très-intéreiiant dans l'art de bâtir. Un Cours complet d'Architecture eft donc, pour ainfi dire , une nouvelle entreprife qui ne peut manquer de devenir utile aux différentes perfonnes qui s'inté- reffent à cet Art. Nous convenons que ce travail n'a pas été pour nous fans difficulté : il s'agiiToit de fondre en un feul corps de Leçons, tout ce qui s'eft dit d'excellent fur cet objet, &; de lier enfemble, non- feulement tout ce qui appartient à l'Ar- chitecture, mais encore tout ce qui regarde les autres Arts de goût qu'elle dirige Se fait valoir en fe les aifociant. |
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xij PRÉFACE.
Nous efpérons que le Public recevra cet
Ouvrage avec quelque plaifir , du moins nous nous rappelons avec reconnoiiTance, l'accceuil favorable qu'il a bien voulu faire à nos premiers efforts, Cependant nous avons balancé long-temps à mettre au jour ce nouveau fruit de nos occupations, les meil- leurs livres en ce genre ne pouvant feuls former d'excellents Artiiles : nous nous y fbmmes déterminés néanmoins, nous étant aperçus plus d'une fois, que l'ufage de dicter des cahiers, fait perdre aux Elevés un temps considérable qu'ils pourroient mieux em- ployer à fuivre les démonftrations des Frofeilèurs. D'ailleurs nous nous fommes prefque toujours aperçus que les copies que la plupart en faîfbient, étoient peu lifîbles pour ceux mêmes qui les avoient écrites -y que d'autres y laiiToient des lacunes qui ïnterrompoient la liaifon que les Leçons doivent avoir les unes avec les autres t qu'enfin les incorrections que nous remar- quions dans la plupart des figures, ainfi que dans le texte &: les notes, rendoienc néceifairement leurs Manufcrits très-im- parfaits. Ces motifs nous ont fait pren- dre le parti de faire imprimer cet Ou- vrage , quelque crainte que nous ayons eue de n'avoir rempli que médiocrement notre objet. Nous avouons même que |
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PRÉFACE. xiij
nous avons été fouvent embarraiîés fur le
ftyle qu'il convenoit de donner à nos Le- çons. Enfin comme il nous a paru eiTenciel d'éviter , &. les termes de l'Art, peu uiîtés dans le commerce du monde , & la féche- reiTe d'un Ouvrage purement élémentaire, nous avons cru , qu'elles dévoient être écrites de maniere que les plus foibles nous comprùTent, & que les hommes déjà éclai- rés en puflent goûter les préceptes. Au refte, au défaut d'un plus grand degré de perfection que nous aurions deiîré donner à notre travail , nous nous fommes du moins tournés du côté de l'utilité : nous avons tâché de le mettre à la portée de ceux qui défirent s'inftruire dans l'Art de l'Architecture, Se de fournir aux Profei- feurs des matériaux qu'ils pourront adop- ter dans leurs exercices publics. Pour y parvenir , nous n'avons pas héfité
de faire part à nos Le&eurs de la plus grande partie de ce que nos plus habiles Archite&es ont écrit de plus intérefiant fur cet Art. Ce n'eft donc point notre ièn- timent feul que nous leur offrons , c'eft une fuite d'obfervations faites d'après les exemples les plus approuvés , de ceux mêmes qui, fans avoir écrit fur l'Archi- te&ure, ne nous en ont pas moins laiiîé en France, des modèles dignes d'Athènes &£ |
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xiv PRÉFACE.
de Rome. Nous avons penfé que c'étoît au
gout à nous éclairer fur ce que nous de- vions adopter ou rejeter de leurs opinions, chaque Architecte appelé à Ton Art par le génie, ayant fa maniere de voir & d'appré- cier. D'ailleurs nous fommes perfuadés qu'il eft une imitation qui n'a rien de fervile, & qui nous rend propres les richeflès que nous empruntons d'autrui , foit dans les Arts, foit dans les Lettres : trop heureux iî nous avons bien iaifî ce que nous avons puifé dans les Ouvrages de différents gen- res, & lî nous ibmmes parvenus à le bien rendre à nos Elevés. Peut-être nous faura-t-on auiîî quelque
gré d'avoir joint nos propres réflexions à celles des anciens &: des modernes 5 du moins notre intention a été par-là, d'exciter les jeunes Artiltes à examiner par eux- mêmes , &c fans partialité, le bon ou le mauvais effet que peut produire fur leur eiprit, la perfection ou l'imperfection ré- pandue dans la plupart de nos bâtiments ; à apprécier ce qu'ils doivent imiter ou rejeter, & a fe mettre en état de diftinguer la belle Architecture d'avec l'Architecture médio- cre. Nous n'ofons néanmoins trop efpérer de ces moyens ; il peut nous être échappé bien dos obiervations utiles : mais pour réparer nos omiffions, nous invitons nos |
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PRÉFACE. χψ
Lecteurs à nous les faire connoître. Bien loin
que leur cenfure nous défoblige , nous iouhaitons qu'on ne nous paife rien ; nous n'avons pas la vanité de nous croire fans défauts. En publiant ce Cours , nous n'avons eu en vue que l'utilité de nos Elè- ves, &c nous profiterons avec reconnoif- iance des obfervations qu'on voudra bien nous faire. Malgré cet aveu, on ne doit pas s'atten-
dre ici à de /impies apologies 5 & quoiqu'il s'agiflè fouvent d'obfervations faites iur les productions des plus grands Maîtres, des éloges affectés nous auroient femblé plutôt un outrage pour nos illuftres Prédé- ceilèurs , qu'un hommage digne de leurs talents Ces mêmes éloges auroient peut- être auiïï paru injurieux à ceux de notre temps qui ont aiïèz d'acquis pour profiter de nos obfervations. Le ton apologéti- que nous a donc paru ne convenir que pour l'encouragement qu'on doit aux Élevés déjà avancés 5 autrement le Public en applaudiilànt au zèle de l'Écrivain , blâme tout bas, ou fon incapacité , ou fa complaifance pour les ouvrages de fes Contemporains. D'ailleurs nous avons cru qu'un Traité tel que celui - ci , devoir avoir un autre but, & qu'une critique trop auftere eil auifi peu propre à inilruire, |
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xvj PRÉFACE.
qu'une apologie outrée eil peu fatîsfaîlartte
pour les Artiltes qui en /ont l'objet. Nous préfentons donc, avec quelque
confiance , nos propres réflexions , fans nous attendre qu'elles foient toujours ado- ptées : notre ambition ne va pas juiqu'à prétendre plaire à tous 5 il nous jfuffit d'ap- prendre à la poitérité , il cet Ouvrage peut y parvenir, ce qu'auront penfé ceux qui, dans les chofes d'art &c de goût, ne font d'aucun fiecle ni d'aucun pays. Nous avons fur-tout cherché a analyfer
ce qu'on peut appeler le rationnement de Γ Architecture ; nous nous flattons même que cette partie de notre Ouvrage ne fera pas la moins intéreiîànte , nous ayant paru la plus capable de faire éclôre le germe du génie de l'Élevé, de développer, d'é- tendre iès idées, de fixer fon imagination, de préparer ion eiprit , pour recœuillir avec fruit les préceptes les plus approuvés, &: parvenir enfin à en faire une applica- tion judicieufe dans fes différentes produ- ctions. On nous a reproché plus d'une fois , que cette facilité de nous livrer aux vœux du plus grand nombre, avoit ouvert trop indiiKncfement à la multitude les moyens d'acquérir les connoiiîànces de l'Architedurej que pour quelques Citoyens dignes d'être inities dans iës myfteres , combien
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PRÉFACE. xvij
combien d'autres étoient incapables de Jes
comprendre, d'où fe font multipliés tant d'hommes médiocres ; mais nous avons vu cela autrement, perfuadés, par notre propre expérience, qu'il falloit eiîayer de tous, pour être véritablement utile à quelques-uns, fufceptibles d'approfondir , de connoître àc de fe diitinguer dans cet Art. Deiîrant donc que ce Cours devienne
utile, fut-tout aux Ecoles qui s'établiiîènc dans nos Provinces, nous n'avons pas né- gligé d'y inférer par forme dedigreiîîon les avis que nous avons été à portée de donner de temps à autre à nos Élevés , foit pour encourager les uns , /oit pour exciter l'é- mulation des autres 5 -nous avons eu inten- tion que ce corps de Leçons puiiTe fervir de guide à ceux qui, dans Ja fuite , vou- dront courir la même carrière j nous ne ferions peut-être pas entrés, dans tous ces détails, iî nous avions écrit fur l'Archite- cture , feulement pour les Artiiles déjà éclai- rés , comme nous avons eu occaiîon de Ja faire précédemment. IJ nous reite à rendre compte de Ja di~
viiîon que nous avons donnée à ce Cours. Nous avons commencé par traiter de Ja décoration, avant de parler des deux autres parties de l'Architedure qui regardent Ja Tome I. b , '■· |
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xviij PRÉFACE.
diitribution & la conitru&ion 5 parce qu'il
nous a paru néceiTaire de parler de la fcience de l'Art avant de paffer à la pratique. En effet, l'Architecte ne peut exceller dans l'ordonnance de fa décoration , que par le fecours de la théorie , qui fuppofe la connoiifance des Belles-Lettres, des Mathé- matiques Se du Deffin : connoiifances fans lefquelles il ne peut parvenir au raifonne- ment, aux proportions & au goût de l'Art. P'ailleurs nous regardons la diitribution comme une partie qui doit être intermé- diairement placée entre la décoration & la conitruction. Gomme ces différentes parties ont rap-
port entr'elles, en traitant de l'une, nous ferons quelquefois obligés de parler de l'au- tre. Par exemple, en traitant de la décora- tion des Édifices, nous parlerons non-feule- ment de la diitribution extérieure, mais auffi de la diitribution des dedans 3 on ne peut éviter la réunion de ces deux principaux objets, fans tomber dans l'inconvénient de la plupart des Architectes du dernier iîecle, qui, pour avoir négligé les commodités qui rendent aujourd'hui nos habitations ii intéreifantes, n'ont guère produit que de belles façades, tandis qu'au contraire le plus grand nombre de nos Contem- porains , il y a trente ans , ne s'étant attachés qu'à la diitribution proprement |
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PRÉFACE, xh
dite, & aux embellûTements des dedans,
ont fi ibuvent défiguré l'ordonnance des dehors, qu'ils ont, pour ainfi dire, fait ou- blier le régne des Perrault &: des Manfard. Nous avertifïons encore , qu'il ne nous fera guère polîîble, en traitant ces deux premiè- res Parties, de ne pas faire entrer dans nos obfervations, les notions préliminaires de la conftru&ion , qui terminera cet Ou- vrage , le fuccès d'un bâtiment dépendant âbfolument de la réunion de ces trois bran- ches de l'Art : réunion qui certainement rend l'étude de l'Architecture aujourd'hui plus difficile qu'elle ne i'étoît, même du temps des Grecs & des Romains. Ëxpofons fommairement ici le plan des différentes Leçons que renfermera ce Cours. La Premiere Partie, qui aura pour
objet la décoration des Edifices, contiendra une Introduction dans laquelle fe devront puifer les idées générales de l'Architecture & des Arts qui y font relatifs. Cette intro- duction fera connoître l'origine, les progrès & les révolutions arrivées dans l'Archite- cture, ainfi que dans les Arts du Jardi- nage , de la Sculpture & de là Peinture. Après cette Introduction feront traités les objets fuivants, dans autant de Chapitres particuliers. bij
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xx PRÉFACE.
Sources de l'Art, ou origine des
Ordres Grecs & Romains dans lefquels on doit puifer l'expreffion relative à la décoration des Édifices. Préceptes de l'Art , tirés de la pro-
portion de ces mêmes Ordres ? fuivant les anciens & les modernes. Raisonnement de l'Art , ou défi-
nitions des principaux membres d'Archite- cture ôc de Sculpture, utiles à la décora- tion des façades. Analyse de l'Art , ou moyens de
parvenir à diilinguer la bonne Architecture d'avec l'Architecture médiocre. Du GOUST de l'Art, ou maniere
d'éviter tout ce qui peut y être contraire. Application de l'Art, ou maniere
d'élever les Ordres les uns au-deiTus des autres, avec leurs mefures exa&es dans les différents étages de nos bâtiments, &c mis en parallele avec ceux des principaux Édi- fices anciens. Fécondité de l'Art , ou moyens de
donner à chaque Édifice le caraétere parti- culier qui lui convient. Discussions de l'Art, où l'on prouve
que les proportions obfervées dans les Édi- fices les plus célèbres, ont été puifées dans la nature. |
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PRÉFACE. xxj
Licences de l'Art, au moyens de
s'éloigner de la rigidité des préceptes, en -évitant néanmoins les abus qu'elles occa- iîonnent quelquefois dans les productions des Architectes médiocres. Perfection de l'Art , qui ièule peut
faire parvenir à la régularité abfolue dans l'ordonnance extérieure Se intérieure de nos bâtiments. Expérience de l'Art, qui amené à
démêler , par l'examen de quelques-uns de nos Édifices, leurs véritables beautés, ou les médiocrités dont plulîeurs ne font pas toujours exempts. La seconde Partie , qui aura pour
objet la diflribution, contiendra une Intro^ dudion fur l'origine de cette branche de l'Architecture : à cette Introduction fuc- cédera ce qu'on a pu dire d'intéreilanc fur les bâtiments d'habitation , de magni- ficence , d'utilité & de fureté. On obiër- vera, dans cette féconde Partie, l'ordre fuivant. De la distribution, où l'on traitera
de la difpofition générale des Palais des Rois , des Maifons royales, des Maifons de Dlaifance, des Maifons de campagne, des Châteaux, des Hôtels des grands Seigneurs, & des Maifons des riches Particuliers. b iij
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*xi] Préfacé.
Des Appartements en général,
des Appartements de parade, de fociété, & de ceux nommés Appartements parti- culiers deilinés à la demeure perfonnelle des propriétaires. De la proportion que les hauteurs des pièces de ces différents Appartements doivent avoir par rapport à leurs diamètres, &c. Des différents genres de Pièces
qui compofent les Appartements, tels que les Veiîibules, les Anti - chambres , les Salles, les Salions, les Chambres à coucher, les Cabinets & les Garderobes, De la disposition , de l'expofîtion
& de la fituation des Galleries, des Biblio- thèques , des Salions à double étage , des Chapelles particulières, & des appartements de Bains de propreté. Des différentes formes des Esca*
LIER s , de leur difpoiition , décoration , conftruéHon5 de la maniere de les éclairer, & des diverfes matières qui peuvent entrer dans leur conftru&ion. De la décoration intérieure des
différentes pièces d'un Appartement, rela- tive à leur ufage particulier, où il fera traité de la Sculpture , de la Peinture , de la Dorure, des Glaces, du Marbre, du Bronze, & généralement de toutes les parties qui contribuent à l'embelliiiement de l'intérieur des Bâtiments, |
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PRÉFACE. xxiij
De la Distribution des Cuisines
&c Fournils, des Offices, des Écuries,- des Remifes, des Logements des Officiers, de ceux des 'Domeftiques, des Colombiers, des Glacières, des Chenils, des Manéges couverts tk. découverts, de leurs dépendan- ces, &c. De la distribution des Oran-
geries , des Belveders, des Trianons , des Ménageries , des Faifanderies &: autres Bâtiments répandus dans les Jardins de propreté , 8c dans les Parcs des Maiibns de Plaifance. De la distribution des Jardins
de propreté en général, &: de toutes les parties qui concourent à leur embelliiîe- ment, tels que les Terraiîes, les Efcaliers, les Pièces d'Eau, les Parterres, les Salles de verdure, les Bofquets, les Berceaux arti- ficiels , naturels, &c. De la distribution et de l'or-
donnance des Édifices sacrés , tels que les Eglifes Cathédrales, Paroiiîiales, Conventuelles, & de celles nommées Eglifes en rotondes. De la distribution des Hôtels-
de-Ville , des Bibliothèques publiques , des Bafiliques ou Palais de la Juftice, des Collèges, des Aqueducs, des Fontaines, des Hôpitaux , des Marchés, des Manu- ιέ iv |
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xxiv PRÉFACE.
factures, des Théâtres, des Foires & des
Halles de différents genres.
De la distribution des Arsenaux,
des Cafernes, des Portes de Ville, des Places d'Armes, des Priions Militaires, des Ports, des Ponts, &c. La troisième Partie , qui aura pour
objet la conftruclion, contiendra une In- troduction , où il fera parlé de ce que les us & coutumes prefcrivent concernant les Bâtiments : de l'art de faire des Devis , du poids & des différentes qualités des matières propres à l'art de bâtir. De la Maçonnerie en général, & en
particulier de la Pierre & du Marbre, de la Brique, du Plâtre , de la Chaux, du Sable & du Mortier. DE LA MANIERE DE PLANTER UN
Bâtiment , de l'excavation des terres & des précautions qu'il faut prendre pour parvenir à ces deux objets. De la construction des Murs
de fondation, de face & de refend, mi- toyens &L de clôtures ; des différentes ma- tières qui y peuvent entrer, & des agents que l'on emploie pour les unir enfnnble. Des différentes espèces de Voû-
tes , de leurs pouifées, des vouffures, des Trompes, des Panaches, &c |
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PRÉFACE. xxv
Des Épures Se des développements utiles
à l'art du trait, pour parvenir d'une maniere pratique à la coupe des Pierres & des Bois» De la Charpenterie en général &
en particulier , des Planchers, des Pans de bois, & des différentes formes & aiTem- blages des Combles. De la Serrurerie en général & en
particulier des gros fers de la Serrurerie & de la Ferrure. De la Menuiserie , où il fera parlé
de la qualité des bois propres à cet Art, &en particulier de l'afTemblage des Portes à Placard, des Lambris de hauteur & d'appui, des Croifées, des Parquets & de toutes les parties qui contribuent à la falubrité & à l'embelliiiement des appartements. De la Couverture en Cuivre, en
Plomb, en Ardoife, en Tuile & en Bar- deaux : de la Plomberie concernant les Chaînaux, les Defcentes, les TerraiTes, les Noues, les Faîtages, les Arêtiers & autres parties d'utilité en ce genre, & de la Déco- ration qu'il procuré à nos Édifices. De la Peinture d'impreiïïon, de fes
différentes efpeces: à l'huile, au chipolin, à l'encauftique, à la grecque , en détrempe ; de la Dorure au blanc d'aprêt & à l'huile} des RehaulTés d'or , des Camaïeux , des Grifailles &c autres embelliiTements de cette efpece. |
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xxvj PRÉFACE.
Cet Ouvrage contiendra fix volumes,
Se environ deux cents planche^ néceiTaires à i'intelligence du Difcours : perfuadé qu'un deiîin bien rendu, foit qu'il repréfente un plan, une élévation, une coupe ou quelques .développements des différentes parties d'un Bâtiment, prouve mieux & plus prompte- ment que la narration la plus fatisfaifante ; les phrafes les plus claires fuppléant mal au deifin. D'ailleurs, de même qu'il eil rare que Ja premiere compoiîtion d'un projet que l'imagination fait concevoir à la hâte , fe trouve exécutée telle que d'abord elle a été conçue : de même il y a toujours une très- grande différence entre des Leçons pure- ment fpéculatives, &l celles aidées de la dcmonilration. Combien de fois n'avons- nous pas éprouvé, qu'une ou deux figures légèrement tracées fur l'ardoife, épargnoient dans nos Conférences une circonlocution que nous n'aurions pu éviter fans cefecours. Il faut en convenir, l'efprit le plus métho- dique enfante quelquefois des chimères, qu'un deiîin bien rendu détruit. Certaine- ment il faut être très-verfé dans l'Archi- tefture, pour imaginer avec quelque préci- fion , & pour rendre ies idées aux autres fans le fecours d'une figure qui parle aux yeux. Nous pouvons le dire ici : Vitruve n'a paru obfcur à fes Commentateurs, que |
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PRÉFACE. xxvij
parce que les planches dont il avoît accom-
pagné fes explications, ont été perdues pour la plupart. Cet Auteur, à qui on ne peut refufer beaucoup d'érudition & de capacité , nous paroîtroit néanmoins plus clair, h* fes deffins originaux nous étoient parvenus, & ils auroient concilié ce que des volumes de Commentaires ne peuvent accorder. Peut-être eût-il été à defirer que les
deffins des planches de notre Cours euiîènt été fur une échelle un peu plus grande ; mais il auroit fallu avoir recours à l'in-folio $ ce qui n'a pu être , & à caufe de la cherté qu'occaiîonne un tel format, & à caufe que nous avons deiîré rendre notre ouvrage portatif, pour qu'il devînt plus utile à nos Élevés, que nous avons eus principalement en vue dans la compoiîtion de cet Ouvrage. |
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V
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TABLE DES MATIERES.
INTRO DUCT ION.
■Abrège de l'Histoire de £Arch it ec-
turE. ^ page ι De tUtiàté de t Architecture. 11 g
Moyens d'acquérir les talents néceffaires à un Archi-
tecte. 131 Origine de ÎArt du Jardinage. 144 Origine de la Sculpture. 15 8 Origine de la Peinture. 173 CHAPITRE PREMIER.
Sources de £Art%
Origine des Ordres. 189
Des ordres d'Architecture en général ,. & de leur
origine. I9I CHAPITRE II.
Préceptes de l'Art.
Planche I.
Des cinq ordres en général. 216
Planche IL
Divißon generale pour les cinq ordres d'Architecture,
219
Des différentes efpeces de Moulures. 222
De la maniere de tracer géométriquement les différentes
Moulures. 225
Planche III.
Des Tores & dus Quarts de Rond. 226
Planche IV.
Des Cavets & des Scoties. 229
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DES MATIERES. xxbc
Planche V.
Des Douanes & des Talons. 233
Planche VI.
Des Moulures compofées. 236
Planche VII.
Maniere de tracer les Jets d'Eau propres aux diffé-
rentes cimaifes des corniches, & les différentes cour- bures des frifes. 241 Planche VIII.
Des Cannelures. 246
Planche IX.
Des ornements qui peuvent s'appliquer fur les Mou-'
Iure s. χ jo
Des Ornements à fujage des Moulures droites. 251
Des Ornements à l'ufage des Moulures circulaires.
254
Planche X.
Entablement Tofcan de Palladio, comparé avec le profil
dune tête humaine. ■ 2Ó0 Planche XI.
Entablement Tofcan de Scammo^i, comparé avec le profil
d'une tête humaine. 201 Planche XII.
Entablement Tofcan de Vignole, comparé au profil <£une
tête humaine. ibid. Planche XIII.
Dénombrement des divers membres attribués à tordre
Tofcan par Fignole^ 2 £3 |
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xxx TABLE
Meßires générales & particulières de l'Ordre Tofcafi ï
félon Vignole. , 26?
Mefures du Piedeßal. 266
Mefures de [Ordre ou de la Colonne. ibid.
Mefures de £ Entablement. 267
Planche XV.
De tordre Tofcan de Fignole, avec quelques ckan^
gements utiles. 268
Du Piedeßal & de la Bafe de la Colonne. ibid.
De L· Bafe du Piedeßal. 260
Du Dé du Piedeßal. 27Ο
De la Corniche du Piedeßal. 271
De la Colonne. 272.
De la bafe de la Colonne. 273
Du Fût de L· Colonne. 274
Maniere de tracer la Conchoïde. 27 j
Du Chapiteau. 278
De [Entablement. ibid.
Planche XVI.
Des ordres Tofcans de Palladio & de Scammo^i. 281
De tordre Tofcan de Palladio. ibid.
De tordre Tofcan de Scammo^i. 2.2%
CHAPITRE III.
Raisonnement de l'Art.
Planche XVII & XVIII.
Des divers Membres d'Architecture & de Sculpture. 287
Des Colonnes & des Pilaßres. 3,8g
Des Colonnes par rapport aux Ordres. 291
Des Colonnes par rapport à leur Matière. ibid.
Des Colonnes par rapport à leur Conßruclion. 293
Des Colonnes par rapport à leur Forme. 294
Des Colonnes par rapport à leur Difpoftion. 296
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DES MATIERES. xxxj
Des Arcades. 301
Des Pieds-droits. 3°2
Des Alettes. 3°4
Des Irnpojles. 3°?
Des Archivoltes. 3°**
Des Claveaux. 3^7
Des Chambranles. 3°^
Des Appuis. 3°9
Des Niches. 3l°
Des Statues. 311
Des Balufirades. 311
Des Avant-corps. 314
Des Frontons. 315
Des Acroteres, 3*7
Z?w Amortiffements. 3 * °
Des Tables. 3l9
Des Champs. 3i0
/>« Pyramides & des Obélifques. $11
Des Soubajfements. 3^3
Z>e5 A niques. 324
Z>ei Refends & des Bojfages. 3% J
jDêî Entablements décompofés. 3-i7
Z>ei Corniches architravées. 3i^
Z>ei Plinthes. ibid.
Z>£î Trumeaux. 3^9
Des Encoignures & des Écoincons. 332
Des Mélanines & autres ejpeces d'ouvertures. 333 Des Cadres. 33$
De la Sculpture 33^
Z>« différents genres ^ornements deßines à embellir
£ Architecture. ibid.
Ζ?« ^α/èi. 340
ƒ?« Trophées. 342
Z?ei Cariatides. 345
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xxxij TABLE
Des Gaines. 349
Des Clefs. 352
Des Confoles. ibid.
Des Cartouches. 3Ç7
Des Médailles & des Médaillons. 358
Des Culs -de- Lampes. 360
Des Cornes d'Abondance. 362
Des Feßons & des Guirlandes. 363
Des Entrelas. 364
Des Caßettes. 36 j
Des Pofles. 367
Des Guillochis. 368
Des Vermiculures & autres Ornements ruß'iques. 369
CHAPITRE IV.
Analyse de lArt. 373
De la f üb limité de Ρ Architecture. 377
De [admiration que peut caufer ΐ Architecture. 381
Du caractère d'originalité dans Γ Architecture. 384
De [Architecture Pyramidale. 386
Ce qu'on entend par une Architecture agréable» 3 88
De la Convenance en Architecture. 389
Duflyle vrai an Architecture. 301
De la vraisemblance en Architecture. 302
Ce qu'on entend par une belle Architecture, 304
De la nobleße des formes en Architecture. 30 e
De ΐ unité en Architecture. 39Ö
De la variété en Architecture. 300
Du caractère libre en Architecture. aq\
Ce qu'on appelh abondance dans la compoßtion d'un ouvrage d'Architecture. 403
De la nécefjité de rendre conféquentes les différentes productions de l Architecture. 405
De la nécejfité de F exactitude dans l'Architecture, 406
De
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DES MATIERES. xxxiij
Dt la nécejjitéde la f y mètrie dans l''Architecture. 408
Ce que ceß quune Architecture & une Sculpture fymbolique. 410 De la différence qu'il y a entre le caractère mâle,
ferme ou viril dans l'Architecture, 4H De la différence quon doit concevoir entre Archiu*
Bure légere , élégante ou délicate. 41"} Ce quon doit entendre par une Architecture cham-
pêtre. 417 Du caractère naïf en Architecture, 41$ Du genre féminin en Architecture, j^ia Ce quon doit entendre par une Architecture myßUieufe, AU
Ce quon peut appeler une grande Architecture. 421
Ce que ceß quune Architecture hardie. 424
Ce quon doit entendre par une Architecture terrible. 426 Ce que ceß qiiune Architecture naine. 427
Ce que ceß quune Architecture frivole. 42g
Ce que ceß qu'une Architecture licencieufe. 43 1
Ce que ceß qu'une Architecture difjemblable. 43χ
Ce que ceß. qu'une Architecture amphibologique. 434
Ce qu'op. entend par une Architecture vague, 43 c
Ce qu'on entend par une Architecture barbare. 435
De l'abus en Architecture. 437
De la mode en Architecture. 43 y
Ce que ceß qùune Architecture qui cß afferyie, qui e fi
froide ou fiérile. λύ<\
Ce queßgnifie Caltération en Architecture. 44^
Ce quon entend par une Architecture méplate. 443
Ce qu'on entend par une Architecture futile. 44«
Ce qu'on entend par une Architecture pauvre. 44^
C H A Ρ Ι Τ R Ε V.
jDu gout VE l'Art.
Tome. L e.
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»xxiv TABLE DES MATIERES.
CHAPITRE VI. APPLICATION DE L'ORDRE TOSCAN à let
décoration d'une Porte de Ville libre. 4&J
Planche XIX.
Plan du Rei-de-ckauffee & de la Plate-forme fupi-
riiure d'une Porte deflinée à fervir de limites À ΐ extrémité du Faubourg d'une Ville libre. 468 Planche XX.
Élévation de la Façade du côté du Faubourg. 47Q
Planche XXI.
Élévation du côté de la Ville. aj^
Planche XXII.
Façade latérale, & coupe prife fur la profondeur du
Bâtiment. 476 |
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COURS
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COURS .·
D'ARCHITECTURE,
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■■'I H ■,,
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INTRODUCTION.
HI ST ο ι re des Art s , dans laquelle
on doit puifer les idées générales de l'Arcki* teclure & des autres Arts libéraux qui lui font relatifs, tels que le Jardinage, la Sculpture & la Peinture. |
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ABRÉGÉ DE L'HISTOIRE
DE L'ARCHITECTURE.
i^ous nous perfuadons qu'on poura tirer
■un grand avantage de la connoiifance de l'niftoire de l'Architecture , fur-tout en com- parant lts temps & les événements qui ont amené Tes progrès & fes révolutions. En Tome I. A |
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* Î Ν Τ RO DU C Τ ϊ Ο Ν.
effet, lorfqu'on parcourt les différentes ré^
gions où l'on a élevé des Edifices d'une cer- taine importance, lorfque l'on examine les diverfes qualités des matières que le fein de la terre fournit aux hommes a/ec tant d'a- bondance , que l'on confidere le fite des lieux, les mœurs des habitants &: leur in- duftrie, la profpérité' ou la décadence des autres Arts qui y dorment tant d'éclat ; iorfqu'enfin on fe rend compte des grands Princes qui ont protégé cette fcience, ainiî que des Architectes célèbres qui nous ont frayé la route des préceptes,.& JaiiTé des exemples immortels de leur favoir ; que n'a- t-on pas droit d'efpérer d'une telle étude î Elleiatisfait & éclaire l'Amateur, elle tient lieu d'expérience au jeune Artiite; enfin, elle offre aux Elevés les moyens les plus ca- pables de fixef leur attention, & doit les amener néceifairement à puifer les principes de l'Architecture dans leur véritable fource; Parcourons donc fes différents âges, fes fuc- ces dans l'Egypte, dans la Grèce, dans l'Ita- lie ; enfuite nous verrons ce qui a occafion- né fa décadence, ëc comment elle a repris •faveur en France fous François I, & de- puis avec encore plus d'avantage fous le re- gne des Bourbons. L'origine de l'Architecture remonte juf-
qu'aux temps les plus reculés. Mais comble» |
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ïntRO&ucTioNl ,. 'y
rcet Art n'a- c—il pas acquis dans la fuite par les découvertes de l'efprit humain! Quellediffé- "rence en effet entre les Temples de la Grèce "& les toits ruiliques des premiers Hébreux! Ά ne coniîdérer l'Architecture que du côté de la néceffité, on ne fauroit douter qu'elle ne foît àuffi ancienne quâ le monde, & que perfectionnée peu à peu, elle ne foit deve- nue la jfburce des autres Artsdeftinés à em- bellir les bâtiments, à accélérer leur conûru- cHon, ou à leur procurer de la commodité, de la iblidité & de la falubrité. Da bord les hommes fe firent fans dou-
te des abris contre les intempéries des fais- ions , & les attaques des bêtes féroces. Pour cet effet, ils commencèrent par élever des huttes &î des cabanes. Les rofeaux, les can- nes, les branches des arbres, leurs feuilles, 'leur écorce (a), l'argile furent prefque les feuls matériaux qu'ils employèrent pour conilruire leurs habitations. A mefiire que les familles s'mpntntertm£i
leurs habitations informes s'agrandirent.Lts |
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(a) A la fin du quinzième fiecle & vers le commen-
cement du feizieme, la Ville de Moskou n'avoir pas une inaifon conftruite en pierres, mais feulement des huttes de bois faites de troncs d'arbres , enduites de moufle. Les maifons du Pérou font aujourd'hui bâries de la même maniere. Celles des iflandois ne font conllruites qu'avec demeùues pierres ou du roc , unis avec de la moufle SC Aij
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'4 Jntroductiok.
hommes eurent à peine fenti les befoins que
fait naître la fociété qu'ils furent fe pro- curer des afiles plus commodes & plus du- rables. Alors on vit leurs demeures jufque- Jà ifolées &c éparfes dans de vaftes déferts, ie changer en hameaux, ceux-ci devenir ibientôt des Bourgades, & ces dernières des Villes. Ici l'on ne fut pas plutôt raiîemblé, qu'il
fallut Ce prémunir contre les attaques de fts voiiîns. On leur oppofa de fortes barrières, on conftruîiit des murs, on creuia des fof- fés, on éleva des tours. Peu iatisfaits des productions qu'ils trouvoîent dans leur cli- mat , les hommes voulurent s'enrichir de ce que la nature faifoit naître dans les contrées- les plus reculées. Malgré Jes vents & les eaux, ils tentèrent de franchir ces immen- ies eipaces qui féparentles diverfes régions du monde ; &c par le fecours du bois, ils fe fabriquèrent des maifons flottantes , au moyen defquelles ils pénétrèrent jufqu'aux extrémités de la terre. Telle eft l'origine des trois fortes d'Archî-
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de la terre détrempée dans l'eau. Les Abyflîns pe font
leurs cabanes qu'avec du torchis, compofé de terre & de chaume. Au Monomotapa , les habitations font toutes de bois. Enfin il eit des Peuples, qui, l'oit pour n'avoir d'au- tres matériaux , foit parce qu'ils font privés d'une certai- ne intelligence , ne font leurs cabanes qu'avec des os §C des peaux de quadrupèdes & de monltres marins. |
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Introduction. f'
tecrures, la civile, la militaire & la navale.
Arrêtons-nous à la premiere, dont nous al- lons parcourir les différents âges. Les premières habitations des Egyptiens
lie furent donc conftruites que de ro* féaux Se de cannes entrelacées, & celles des anciens Grecs ne furent bâties qu'avec l'argile qu'ils ne favoient pas même durcir par le iècours du feu. Le fameux Temple de Delphes ne fut d'abord qu'une iimple chau- mière couverte de branches de laurierv rfM L'Aréopage dans fan origine étoît une ef-: péce de cabane enduire de terre graiïè. La premiere Ville fut, félon la Ge-
nèfe, bâtie par Caïn qui la nomma Henoc du nom de ion fils -, elle éroit en Aile où vivoient les premiers hommes. La Cal- -dée & la Phénicie eurent auffi bientôt de grandes Villes qui· reconnoiiibient Nemrod &AiFur pour leurs Fondateurs. Le premier, que l'on croit être le même que Belus, éleva Hl la Tour de Babel, & fon fils Ninus bâtie - Ninive. Cette Ville & céh de Rezeri, qui eiî: à peu près du même temps,, devinrent: célèbres par leur îmmehiè étendue. .,J&. Le bois & le torchis furent les maté^JP'
rîaux qu'on employa pour bâtir; c'eft ainiî qu'on voit encore aujourd'hui des VIÎ^'' ki dans la Perfe , dans la Turquie ià. |
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6 Introduction.
même dans la plupart de nos Provinces».
Comme les Egyptiens manquoient de bois , ils furent obligés d'avoir recours à la brique, puis à la pierre & au marbre} ils nelaiflerent pas d'employer ces différen- tes matières avec foiidité, quoiqu'ils igno- raient l'art de conitruire des voûtes, & qu'ils méconnulîènt l'ufage du fer. Après les bâtiments d'habitation, il fal-
lut des édifices publics pour les divers be- soins d'un Peuple raffemblé ; il fallut élever jles monuments qui ferviiTent d'annales à '"ion hiitoirej il en fallut d'autres qui fuflent confacrés au culte extérieur de la Religion : on vit donc s'élever des Temples, des Pa- lais, des Baiîliques, des Places publiques, '.des Tombeaux, qui excitèrent la piété des. Peuples, qui annoncèrent la magnificence des grands, embellirent les Capitales &c immortaliferent les Héros. Peu de*cemps après la fondation des Vil-
les dé Niftîve $c de Rezen, Sémiramis (£)fk élever les fuperbes murailles de Babilone , |
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(b) Sémiramis, Reine des Affyriens & veuve de Ninus,
mourut l'an du Monde 2038. Elle étendit fes conquêtes d'un côté jufque dans l'Inde , de l'autre jufqu'en Ethiopie ; &, après avoir fournis la Médie, la Lybie & l'Egypte, elle s'oecupa à faire ériger des monuments capables de rendre fon nom célèbre dans tous les iiecles , tels que le tom- beau qu'elle fit élever à Ninus fon époux, les murailles dont nous venons de parler, &c. &c. - . φ |
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Introduction, ψ
«]iii furent regardées comme la premiere
merveille du monde (c) : fçs murs étoient tout bâtis de brique & de bitume 5 ilsavoient deux cents pieds de hauteur fur trente pieds d'épaïiTèur, enforte qu'on pouvoit, au rap- port de Quint-Curfe (d), faire paflèr deiîlis deux chariots de front. Hérodote dit qu'ils étoient percés de cent portes, dont les ven- taux étoient de brpnze Se d'une grandeur extraordinaire. La hauteur des tours:furpaf- ibic de quarante pieds celle des murs. Le pourtour intérieur de la Vîlle , félon Stçg-^ bon (e), étoit de trois cent quatre-vhi ftades ( jf) ; l'Euphrate la traverfoït d toute fon étendue. Onavoit bâti les maifons éloignées les unes des autres pour laiiFer des terres labourables qui puiient nouxriiÊf "les habitants en cas de iîége. r'^H Les deferiptions que nous en ontlavfUes*
encore Pline, Diodore de Sicile & Pauià-* nias, nous donnent la plus grande idée du (c) On compte fept principales merveilles du monde i
ï" Les murs de Babylone , 20 les pyramides d'Egypte^ î° la ftatue coîoffale de Jupiter Olympien, 4° le tom- beau de Maufole , Roi de Carie , y° le Temple de Diana: à Ephèfe, 6° le Coloffe de Rhode ,7° le phare d'Alexan* drie. ■ (d) Quint-Curfe ,-lîb. ƒ , chap. 1» .....
, (e) Strabon, lib. 16.
». - - ,.-..
(ƒ) La ftade des anciens étoit de 6%j pieds, ce qui
fwoit pour les 380 ftades, environ 43^400 toifes. Ai*
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8 In- τ r o du ct ι' ο κ'.
Palais de Babylone (g), que fit conftruîre
Sénuramis, ainii que des Jardins de cette Reine, qui étoient ioutenus par des murs de vingt-deux pieds d'épaiiièur. Ce Palais étoic flanqué de tours hautes de quatre-vingts: pieds. Au milieu de Ton enceinte s'élevoit une autre tour quarrée, bâtie de briques, & à huit étages, qui, après avoir long-temps fervi d'Obiërvatoire au^Caldeens,fut ruinée par Xercès. Pline ( h ) parle avec éloge de deux Temples, bâtis dans la même encein- te , l'un dédié à Jupiter U. l'autre à Bélus. Ce dernier Temple , dit - il, ainfi que le Maufolée de ce Roi, étoit de la plus gran- de magnificence.' Nous pourions parler ici des grands ou-
vrages exécutés par les ordres de Nitocris, auili Reine de Babylone 5 elle fît rendre le cours de l'Euphrate tortueux, de droit qu'il étoit, afin de rompre J'impétuoiîté de ce fleuve, & de rendre là navigation plus com- mode. Ce fut auffi Nitocris qui bâtit dans Babylone, ce pont iliperbe qui facilitoit la communication d'une partie de la Ville à l'autre, entreprife qui nous paroîtroit in- croyable à cauie de la rapidité de l'Euphrate |
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(g) Cette Ville a donné à toute la contrée voilîne le
Jjorn de Babylonie. (h) Pline, liv. 6, chap. 26.
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Τη τ r6 r>u c τ ι ο κ'. $
<fc de fa profondeur, il Hérodote ne nous
aiîuroit que ce pont a exifté. Il ajoute de plus qu'il n'a été qu'une année à bâtir. L'Egypte à ion tour devint célèbre (ij
par la grandeur & l'immenfité de fes Edifices > mais dans cette contrée, nul Prince ne fe distingua autant que Séfoitris par le foin qu'il fmt de coniiruire des ouvrages utiles. Dans
e loiiîr de la paix que venoient de lui pro- curer Ces conquêtes, il fît élever cette belle |
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(t) L'ancienne Egypte qui a été le berceau des Arts,
il'eft connue que très-imparfaitement dans les hiftoires uni- rerfelles, telles que celles d'Hérodote,de Diodore & de plufieurs autres ; ces Auteurs néanmoins déterminent la totalité du terrein de ce Royaume autrefois fi floriffant, à |
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uatre mille cent quarante-fix lieues quarrées ; le nombre
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es habitants à fept millions , & celui de fes troupes à
quatre cent quarante mille hommes. Pendant le regne a Amafis , dit Hérodote . il y avoit en Egypte vingt-mille, Villes : Diodore cependant, n'en compte que dix-huit mille , tant Villes que Bourgs, dignes d'être remarquées ; & -elles dévoient même, en n'en comptant que dix-huit mille, être très-près les unes des autres*. Par les différents détails que nous ont donnés ces mêmes Ecrivains, nous apprenons que les terres de ce pays bien cultivées pro- . duifoient jufqu'à cent pour un, & que l'Egypte etoit tellement fertilifée par les inondations du Nil , & par I'irt- . duftrie de fes habitants, qu'elle leur, fourniffoit des recoin : tes trois fois plus abondanres que leurs befoins, filais■'; que le barbare Cambyfe,en détruifant ces Peuples pendant · cinq années d'une guerre cruelle, détruifit auifi la plus grande partie de leurs monuments qui avoient été l'ou- vrage de dix-fept fieoles, & que ce ne fut que fous Pto- · lémée Philadelphe, deux cent quatre-vingts ans avant *»trc Ere, que. l'Egypte reprit fon ancienne fplendeUï. " |
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u> Introouctiôm:
muraille de quinze cents ilades de longueur^
qui commeneoit à Pélufe, & finiiîbic à Hé-; liopolîs. Il fit creufer des canaux pour éta-» blir une communication aifée entre les Vil- les les plus éloignées, &c faciliter le tranf* ,· port des marchandifes. Une des entreprifes qui contribuèrent le
plus à immortaliièr la gloire de ce Prince, fut la conftruction des hautes levées qu'il or- donna dans toute l'étendue de Ton Royau- me , afin que dans les nouvelles Villes qu'on y bâtiroit, on fût à l'abri des débordements du Nil. Une infinité de Temples furent éle- vés ious fon regne en l'honneur des Dieux: tutélaires de l'Egypte {h)··, il enrichit fur- tout celui de Vulcain à Pélufe y en recon- noiiTance, dit-on , de la protection dont il croyoit que ce Dieu lui avoit fait reifende les effets. Les defcriptions des Temples des Egyp-
tiensparoîtroient fabuleufes, fi elles ne nous étoient atteftées par les Hiftoriens les plus —----------------------------------------.---------------------.—.
{k) Long-temps même avant Séfoftris les Egyptiens,
au rapport de Lucien, avoient bâti des Temples. Ce Peuple étoit très-religieux; les AiTyriens l'imitèrent, & furent eux-mêmes imités dans la fuite par les Grecs, chex lefquels Deucalion fut le premier qui en éleva ; le même ufage paifa des Grecs aux Romains. Janus fut, dit-on, le Îremier qui fît conftruire de ces monuments dans le pays
.jjtinj mais d'autres prétendent que ce fut Fanus, & que de fon nom on a fait celui de Fmum qui figniiïc Tcmgkv |
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Ι Ν Τ RO DU CT I O JW t%
accrédités. M. Dorigny (/), qui arecœuiliî
avec foin ces defcriptions, rapporte qu'on arrivoit dans ces Temples par un parvis qui formoit une longue &l vafte avenue , ornée de colonnes &: deftatues coloiîàles,terminée par un veilibule d'une grandeur prodigieu-* le & d'une élévation qui y étoit propor- tionnée 5 que de-là on entroit dans une pla-\ ce immenle, environnée d'un grand nom-, bre d'édifices ifolés, & dont l'ordonnance étoit variée à l'infini. Il ajoute que de cette Êlace on paiïbit,en traverfant d'autres veftl··,
ules, dans une féconde, 8c fouvent dans, une troifieme ; qu'enfin on pénétroit par- un veilibule plus vafte &: plus élevé qu& les précédents, jufqu'au parvis intérieur du»; Sanduaire , & que dans celui-ci tout étoit- d'une extrême {Implicite. Les Architectes de ces temps prétendoient fans doute , avec- beaucoup de raifon, que la préfence de la divinité èc la vénération due aux myfteres qu'on y célébroit, fuffifoient pour rendra cette partie du Temple la plus refpedable. On met ordinairement les pyramides an
nombre des plus anciens monuments des Egyptiens ; cependant, Homere qui parle —-------—--------------- ,
(/) M. Dorigny, Chevalier de l'Ordre Militaire de
S. Louis , nous a donné plufieurs Volumes fur l'Egypte j on trouve cet excellent Ouvrage à Paris chez Vincent, rucï §2int-5éveriçu , o, !
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Ψί Introduction:
iôuvént de l'Egypte, & qui en rapporte
pluiîeurs particularités intéreilantes, ne dit rien de ces vaftes entrepriiès. Quoi qu'il en ibit, perfonne n'ignore que ces pyramides étoient deflinées a imniortalifer les Souve- rains à qui elles ièrvoient de fépulture. Rien ne prouve mieux que ces monuments", le deiïr ardent qu'avoient les Egyptiens de faire paiTer leur nom à la poitérité. L'hiiloi- re nous apprend d'ailieurs un autre motif qui les avok déterminés à leur donner cet- te ltruchire étonnante ; ils les regardoienc comme une demeure ftable, au-lieu qu'ils ne coniîdéroient leur habitation ordinaire que comme un lieu de paflage de cette vie «une autre, qui devoît, félon leur opinion ? recommencer au bout de mille ans. Les trois pyramides que l'on voit enco-
re à trois lieues du Caire, font bâties fur le roc (m), & durantes l'une de l'autre d'environ trois cents pas. M. de Chazelles de l'Académie des Sciences ayant mefuré h plus haute en 165; 3 la trouva entière, & dit qu'elle avoir la forme d'un triangle éqiii- latéral, dont la perpendiculaire étoit de. foixante-dix toifes trois quarts. Sur les faces |
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(m) Les anciens choififfoient volontiers un femblable
fends pour leurs édifices, parce qu'il eft très-folide, &■ •qu'ils ambitionnoient de travailler pour les races futures* |
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7'ν τ ro du ct ι ο Η. ij
*xtérieures font des gradins qui conduifent
jufqu'au fommet terminé en platte-forme. Cette pyramide eil conitruite en pierres du- res , dont les moindres ont trois pieds de haut Se environ iîx de longueur. Au milieu de ion intérieur eft un fépulcre de trente- deux pieds de longueur fur feize de largeur & dix-neuf de hauteur : dans une des extrémi- tés de ce fépulcre étoit, dit-il, un cénotaphe ou tombeau vide, qui avoitété deftiné à con- tenir le corps du Roi Pharaon qui fut en- glouti &c perdu dans la mer Rouge. Pline aiTure que durant l'efpace de vingt années, trois cent foîxante mille hommes ne ceflê- rent de travailler à la conftruétion de cette pyramide. Les defcriptions faites par M. de Chazelles, fervent à la fois à nous donner une grande idée des moyens dont les An- ciens fe fervoient pour élever à cette hau- teur des fardeaux iî pefants, & à réfuter l'opi- nion de Diodore de Sicile, qui prétend que les Egyptiens ignoroient la mécanique. . La féconde de ces pyramides eft moins
confervée que la précédente, & a moins de diamètre. Strabon prétend que celle-ci dans fon origine avoit été plus coniîdérable qu'elle ne l'étoit de fon temps. La troifieme qui a encore moins de dia-
mètre que les deux autres, paife cepen- dant pouj· la plus bellei on remarque, eu |
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«ψ.-?ρνν..~· ■-'.*■■ i%
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¥4 Ι Ν Τ RO DV Cf Ι Ο Ν.
effet , qu'elle eit conftruite avec plus de
foin , & qu'elle eft d'ailleurs incruftée d'une
aifez belle pierre d'Arabie, nommée marbre
bai^ate.
Il eil à préfumer que ces pyramides doî-
vent,en partie,Ieur longue durée à la nature du climat, où les pluies font peu fréquen- tes; car, par l'examen qu'en ont fait plu- iîeurs Artiites éclairés, ils ont reconnu que /a pierre n'eft pas à beaucoup près auiîî dure que l'ont décrit nos Voyageurs; mais que l'air fec qui les frappe depuis tant de iîecles a pu contribuer beaucoup à leur confervation ; & quoique dans les joints des parements extérieurs ils n'ayent remarqué Jni chaux , ni plomb, ni fer, le volume immenfe de ces édifices a pufuffirefeul pour hs préiérver de l'intempérie des faifons. Les obélifques n'ont pas moins contri-
bué que les pyramides, à tranfmettre à la poitérité le fouvenir des Egyptiens. Le pre- mier fut élevé l'an 2604 de la création du monde, par les ordres du Roi Manusbar ou Seigneur de Memphis. Dans la fuite ils ornèrent d'obélifques prefque tout le pays qu'ils habitoient : non-feulement les Sou- verains &: les Princes, mais les riches par- ticuliers en faifoient élever, les uns de tren- te , les autres de foixante-dix pieds de haut |
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■s
Introduction. tf
ê£ même de cent quarante pieds. La Reli-
gion de ces Peuples leur avoir fans doute donné le gout dominant de ces fortes d'é- difices qu'ils confacroient pour la plupart au Soleil (n). On voit encore dans les carrières de la
haute Egypte de ces obéliques à demi tail- lés. Pendant les crues du Nil, des canaux conduifoient les eaux jufque dans ces car- rières où l'on enlevoit, fur des radeaux, les obélifques, les ftatues & les autres ouvrag- es coloiTaux que l'on traniportoit dans la aiTe Egypte par des faignées qui facile toient la circulation de ce fleuve. Selon Diodore de Sicile, Séibftris fie
eonilruire deux obélifques d'une pierre très- dure j ils étoient de la hauteur de cent qua- tre-vingts pieds, & furent élevés dans la ville d'Héliopolis. L'Empereur Augufte,ayant réduit l'Egyp-
te en province Romaine, voulut faire tranf porter à Rome ces deux obélifques. L'un fut briie fur la route} Augufte aima mieux ie priver de l'autre que de l'expofer au même accident. Caligula fut à cet égard plus en- treprenant & plus heureux : la troiiîeme année de fon empire, l'obélifque parvint à * '
(n) Auflî les appelloit-on doigts du folcil, parce qu'ils fer-
Voientle plus fouvenr à marquer les heures fur une grande «Pceiatcde pierres prolies dont ils formojentle centre. |
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··* è Introduction-.
Rome fans être endommagé , & fût dans la
fuite élevé au milieu du cirque de Néron, où fe faiibient les jeux publics. Quelques-uns de ces obélifques dont
l'Egypte étoit remplie, font encore, autant par leur grandeur que par leur antiquité , un des embeliuTements de la capitale du cliriitiaiiifme. Conftantin lit démolir le cir- que de Néron , & bâtit en fa place une Êglife dansles ruines de laquelle s'eiltrou- vé l'obélifque tranfporté à Rome par ordre de Caligula. Sixte-Quint le fît élever en J586, fous la conduite du Chevalier Fon- tana, fur la place publique , où on le voit encore aujourd'hui ; fa hauteur eil de douze toifes deux pieds huit pouces, fur une baie de huit pieds de largeur ; il eft d'une feule pierre de granit, & félon Tarade du poids de huit millions cent vingt - quatre mil- liers. On voit auffi à Arles un de ces obé-
lifques , qui vraifemblablement y a été tranf· porté du temps des Romains. Charles IX a commencé à le*faire tirer de deffous les ruines qui le couvroient depuis pluiîeurs iîecles, & il fè voit aujourd'hui vis-à-vis l'Hôtel-de-Ville : fa hauteur eft de cinquan- te-deux pieds, &c fa bafe de fept pieds. Près des pyramides & des obélifques de
l'Egypte , dont nous venons de parler, on remarque
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Introduction1. 17
remarque des reftes d'édifices qüadrangu-
laires que Thevenot croit avoir été des Temples. Ce Voyageur fait encore mention de pluiîeurs autres monuments dont il pré- tend que les colonnes & les ftatues fonc innombrables. On découvre, dit-il, ces for-.' tes de vertiges en diverfes parties de l'Egyp- te , & fur-tout dans la Thébaïde : là, conti- nue-t-il , on admire un Palais dont les ref-1 tes femblent n'avoir été confervés que pour' effacer les plus grands ouvrages. On y voyoiç entr'autres quatre galeries à perte de vue, terminées par des iphinx, dont la matière étoit auffi rare que leur grandeur éton- nante. Le fameux labyrinthe d'Egypte étoit, fé-
lon Hérodote, plus admirable encore que les pyramides: c'étoit moins, dit-il, un ièul édifice que douze Palais réguliers qui fe communîquoient enfemble. On n'eiî guère înftruit ni fur Je temps, ηΐ fur le motif de la conftriuiKon de ce labyrinthe (o): quel- ques-uns prétendent que le Roi Peteiucus i
(o)jDidore de Sicile, Strabon & Pline font mention
oe trois autres labyrintes ; le premier fut celui que Dédale, conftruifït dans l'île de Crête : celui-ci eft cité par Plutar- gue} & l'on e.n voit le deflin gravé d'après une ancienne- Médaille dans XArchiuâurc hiftorique 4e Ftfcker. Le cç. Jebre Architecte Théodore bâtit le' fécond » Lemnos ; k ïpifieme étoit en Etrurigt ; '. .·....·...'.- } Tgrm I, - Β
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'IÎ INTRODUCTION'.
ou Thioës le fît bâtir plus de deux mille ans
avant l'Ere chrétienne. D'autres l'attribuent au Roi Nœthéras, qui voulut, difent - ils , en faire fon Palais. Enfin , félon d'autrest le Roi Mœris ou Miris ( Hérodote lui don- ne ces deux noms) ordonna d'élever cet édifice pour lui fervir un jour de fépulture ; mais Hérodote (p) croit que plu'iîeurs Prin- ces d'Egypte eurent part à fa conftruction, & qu'il ne fut achevé que, depuis le règne de Pfamméticus : ce qui nous paroît d'autant plus vraifemblable, que ièlon Pline {q), le monument dont-il s'agit, fut dédié au So- leil. Quoi qu'il en foit, cet édifice peut être regardé comme un des plus vailes que les Rois d'Egypte ayent jamais fait conftruire. Il étoit divifé en feize quartiers. On y voyoit autant de Temples particuliers que les Egyp- tiens adoroient de divinité», Se une grande quantité d'édifices dont la réunion formoit *in enfemble merveilleux. On y remarquoit enfin des pyramides & des colonnes d'une hauteur prodigieufe. Après avoir traverfé des lieux iî varies, on arrivoit au labyrin- the proprement dit. On y entroit par des veftibules entourés de portiques élevés de quatre-vingt-dix degrés au-deiîus du rez- |
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(p) Hérodote, liv. 2.
<ΐ)Ρ1ΪΒβ, Üb. 38, wp. ly |
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Introduction: τ 9
de-chauflee : le labyrinthe étoic divife" par
une multitude de pièces, dont les portes en nombre infini empêchoient d'en reconnoî- tre l'iifue. Le Roi Nectabis y fit faire des réparations confîderables, dont le foin fut confié à Circammon, qui avoit, dit-on, de grandes connoiiiànces dans l'Architec- ture. Mais l'ouvrage des Rois d'Egypte, le plus
digne d'admiration , fut le Lac de Mœris} on fait que la fertilité des terres d'Egyp- te dépendoit de leur inondation par le Nil, & que le débordement trop ou trop peu con- iîdcrable de ce fleuve leur étoit également nuifîble. Le Roi Mœris conçut le defîein de remédier à ce double inconvénient. Pour faciliter le moyen de reconnoître les di- verfes terres que l'inondation avoit confon- dues , ce Prince avoit compofë un ouvra- ge (r) dont on a tiré les premiers éléments de la Géométrie. Le Lac auquel il donna ion nom l'a immortalifé. Quand le Nil ne débordoit point aiTez pour fertilifer les terres, les eaux qu'on fefoit écouler du Lac fup- pléoient à l'inondation. Lorfqu'on pré- voyoit au contraire que par l'effet d'un débordement exceffif, les terres demeu- reraient trop long-temps inondées, on fe- — Il" III .111 |.
{r) V^yti Newcon dans fa Chronologie.
ßij
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ΙΟ ΙNT RO DU CT I Ο Ν~ϊ
foit écouler dans le Lac une partie des eaux
du fleuve. Ce Lac fut creufé à dix ftades de Mem-
phis. Il avoit trois cents pieds de profon- deur, &: félon Pline (ƒ) vingt-cinq mille pas de pourtour. D'autres néanmoins, tel cjuePomponius-Méla,ne lui en donnent que vingt mille, ce qui fait environ dix de nos lieues. Au milieu du Lac étoit une île fur laquelle s'élevoient deux pyramides, dont chacune portoit une ftatue coloifale de mar- bre , &: aiïïfe fur un trône. Au rapport d'Hé- rodote (/) Se de Diodore («), on voyoic entre les deux pyramides un fuperbe Mau- folée qui marquoit le milieu de l'île, Se dont on trouve les deiîîns dans l'Archi- tecture hißorique de Fifcher. II paife encore pour confiant que les
Egyptiens excelloient dans les Mathémati- ques , dans l'Aitronomie, &: qu'ils perfec- tionnèrent ces feiences lî néceifaires pour accélérer les voyages de long cours. Ce qu'il y a de certain , c'eil que Ptolémée Phila- delphe fut le Prince qui s'appliqua le plus à faire fleurir les Sciences &L les Arts, & qu'il fit bâtir l'an de Rome 470, dans t ---------------------------------------------------------------- ■ 1
(ƒ) Pline , liv; ? , chap. 11} & Ιίγ. ƒ, chap. 5»,
(f) Hérodote, liv. 1.
I*) Diodore, liv. 1, chap. ie
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Introduction. %lt
l'île de Pharos à un quart de lieue d'Alexan-
drie , la fameufe tour où étoit le Fanal des- tiné à éclairer les Vaiiïèairx qui y abor- doient en foule. Cette tour, au rapport de Pline {x), étoit quarrée, chaque côté étoic de cent toifes, fa hauteur de foixante-quinze, diviiee en huit étages, terminée par une platte-forme d'où la vue s'étendoit à près de quarante lieues. Ce monument prit en- fuite le nom de l'île, de fut "nommé Ρ hare ^ .nom qui devint commun à tous les édifices du même genre. Softrate, célèbre Architec- te Gnidien , en donna les deffins, &: pré- iida à l'exécution, qui, félon l'Auteur que nous venons de citer, coûta un million huit cent mille livres. Soitrate, dit-il, touché del 'amour de la gloire, δι ne voulant pas déplaire à Ptolémée, imagina une inferip- tion toute à l'avantage de ce Prince ; mais il la fit graver fur un enduit artiftement appliqué iur une autre infeription conçue en ces termes : Soßrate Gnidien ^fils de Dexi- phane , a confacré ce monument aux Dieux nos confervateurs,& aufalutdes navigateurs. Cet- te ruiè lui réuiîit ; car la premiere inferip- tion ne dura guère qu'autant que Ptolémée vécut : enforte que l'enduit venant à fe dé- truire , l'autre infeription parut 5 & c'eil par (*) Pline, lib. 6. ch*p. i8.
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'fi In τ άο dvcti ο jv.
cet artifice que le nom de cet Architecte
eft venu jufqu'à nous.
On attribue auffi à Ptolémée Philadel-
phe une idée fort ingénieufe que rapporte Pline (y) : il chargea, dit-il, Dinocrates le plus célèbre Architecte de ce temps là , de bâtir un Temple en l'honneur dArfinoë fa fœur. La voûte de cet édifice devoit être de pierre d'aimant, à deflein de foutenir en l'air la itatue de la PrinceiTe, laquelle à cet effet, auroit été toute de fer 5 mais la mort du Roi & celle de l'Architecte empê- chèrent l'exécution de ce projet. Si les Egyptiens étonnoient l'univers par
l'étendue immenfe de leurs édifices qui fer- virent de medele aux Grecs, comme nous le dirons bientôt ; il s'éleva aulîî en Judée un Temple non moins admirable par la beauté de fa diftribution & celle des ma- tières dont il étoit enrichi. Environ neuf cent quatre-vingts ans avant notre Ere, Salomon fît conltruire à Jérufalem le Tem- ple célèbre qui porta fon nom. Pour l'exé- cution d'un fi grand projet, il pria Hiram, Roi de Tyr, de lui envoyer fon Architecte Adoniram , fous la conduite duquel ce mo- nument fut élevé. Trente mille de its fujets furent employés à la conftruction de l'édi- »----------;--------,----------------------------------------- .
(y ) Vlite, liv. 34, chap. 14..
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Introduction'. iy
Act \ parmi lefquels il y en avoit toujours dix mille occupés. Indépendamment de ceux- ci , le Roi de Tyr avoit fourni à Salomon t des Sydoniens, chargés de couper fur le Mont Liban les bois néceflaires, & de pré- parer d'autres matériaux. Les fondations du Temple furent jetées très-profondément. Des pierres d'une grandeur îmmenfe &: d'une parfaite blancheur furent employées à la conitruction des murs. La largeur de ce Temple étoit de vingt coudées ({), fa lon- gueur de foixante y &: fa hauteur le double de fa largeur : les bas côtés avoient vingt coudées d'élévation, & fervoient d'arcs- boutants; ils étoient entourés d'un corps de bâtiment compofé de trois étages, cha- cun de trente pièces. Tout cet édifice étoic de forme qüadrangulaire, conftruit en gran- |
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(ï) Au rapport de Philibert Delorme, liv. j, chap.2;
la coudée géométrique eft prife pour une toiie & demie valant fix coudées communes. Perrault fur Vitrure, liv. 3 , chap. 1«, remarque d'après Philander qu'il y avoit trois fortes de coudées : i° la grande qui étoit de 9 pieds , faifant environ 8 pieds 2 pouces de Roi : z° La moyenne de 2. pieds, revenant à peu près à 1 pied 10 pouces de Roi : 30 La petite d'un pied & demi de RoL,moins 1 pouce &demi. - , Il y a^ lieu de préfumer que la coudée dont il eft ici
queftion étoit la grande coudée, à en juger du moins par le diamètre des colonnes qui décoroient l'enceinte du? Temple, & dont il eft parlé d'après Villapande dans cette defcription. Biv
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/&4 ÏXTROIJÜCTtOftl
de partie de bois de Cedre, ÈC revêtu d'or*
Jnements d'une richelTe extreme 5 il fut ache· vé dans l'efpace de fept années : dès-lors Salomon le fit divifer en deux parties, donc J'une fut deftinée à être le iancluaire, δζ l'autre réfervéê aux facrificateurs. Celle-ci qu'on nomma le Temple fut féparée du ianctuaire par de grandes portes de bois de Cèdre, couvert de lames d'or. Villapande (a) dans la defcription qu'il
nous a donnée de ee Temple, fait monter le nombre des colonnes à quatorze cent cinquante-trois 5 il ajoute que plufieurs de ces colonnes étoient de marbre blanc & »voient fix pieds de diamêsre, & que les plus petites étoient la moitié des précé- dentes. Cet Auteur prétend auiîi que les colonnes étoient corinthiennes, en quoi il eft contredit par Vitruve qui attribue à Callinuque, poftérieur à Salomon, l'inven- tion de l'ordre corinthien (b). Le Temple demeura dans iâ iplendeur
pendant toute la durée du regne de Salo- |
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(a) Villapande, liv. 8.
(b) Il pouroit néanmoins être vrai, comme le dit Villapan-
de , que le chapiteau des colonnes du Temple de Salomon, reffemblàt aux feuilles du chapiteau corinthien de Calli-*' Uiaque } mais que l'on dut à ce Sculpteur Grec fi célèbre la perfection que nous lui connoiffons. |
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ïtf Τ Ά O D Ü C Τ î 6 m ïf
Mon , qui fut de quarante années, &: juf»
qu'à la cinquième de celui de Roboam. ion fils. Alors Sézâc, Roi d'Egypte, étant venu affiégér Jérufàlem, pilla le Temple &. en emporta toutes lès richeiTes. Depuis il s'écoula plufïeurs règnes durant lefquêls le Temple fut abandonné. Enfin Joas, Roi de Juda, le fit réparer, au moyen d'une con- tribution offerte par le Peuple; mais quatre cent ioixaate-dix ans après fa conitrucHon, Nabuchodonofor ayant Conquis Jérufàlem, ce monument fut brûlé δι tonte la Ville ré-1 duite en cendre. Soixante-dix ans après cet embrafement,'
Cyrus, Roi de Perle, permit aux Juifs, non feulement de retourner dans la Palef- tine, maïs encore de rebâtir Jérufàlem & d'y cónitruire un nouveau Temple. Ceux-ci fi- rent tous leurs efforts pour qu'il égalât le premier ; mais, félon l'hiftoire, il n'avoit que la moitié de fes dimertfions. Après la mort de Cyrus, Cambyfe fon fils, excité par les Samaritains & par les autres Nations voifines, défendit aux Juifs de continuer la réédification de leur fécond Temple. Darius plus indulgent que Cambyfe fon prédécef- ieur, fe laiiîà fléchir aux prières de Zoro- oabel, & lui permit la continuation de ce' monument, qui fut achevé la iîxieme année de fon regne. |
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StS Intro dvct ι ο κ,
Antiochus, Roi de Syrie, après avoir été
reçu dans Jérufalem, ruina cette Ville, mit le Temple au pillage, & abolit le culte du Dieu d'Ifraël. Ce Roi fut vaincu par Judas Machabée, fon armée défaite, le Temple purifié & de nouveau rétabli. Les Romains ayant voulu étendre leur domination dans la Judée, Pompée fe rendit maître du Temple. Hérode l'ayant repris, le fit démo- lir;&à ia place,il en fitélever un tçpilïeme de la même grandeur que celui deSalomon, & d'une magnificence prodigieufe. La guerre des habitants de Jérufalem
avec les Iduméens leurs voiiins>occafîonna la deftrucHon entière de la Judée ; Vefpa- lien profita de ces troubles & bloqua la Ville. Titus chargé d'en continuer le fîége, la prit & la ruina jufque dans fes fonde- ments : le feu mis aux portes du Temple Çarvint "jufqu'à la galerie, les ordres de 'itus-ne purent arrêter les effets de Γίη- cendie.Ainfî fut réduit en cendres cetroî- lîeme Temple y dont la deftrudion avoit été prédite par le Sauveur : au reite fa ruine en- tière & la contradidion qui regne parmi les Auteurs qui en ont parlé, nous laiilènt fort incertains fur la véritable ordonnance de ce monument. Nous avons vu précédemment que le*
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ÎNTRODUCTIOIÎ. î?
Egyptiens parvinrent à élever de varies édi-
fices, mais dans lefquels la grandeur & la iolidité tenoient lieu des beautés de l'art. Ils méconnurent en effet cette belle ordon- nance dont l'afpect annonce l'ufage des édi- fices qu'elle décore : l'art de conftruire des voûtes étant ignoré chez eux, ils ne iurent faire fervir les colonnes qu'à ibutenir d'énormes fardeaux. Satisfaits d'avoir pro- portionné à leurs befoins la hauteur èc la. groiïèur de ces points d'appui, ils ne fe dou- tèrent pas que l'expreffion d'un ordre, ainiî que la beauté d'une colonne, coniîfte dans le rapport de ion diamètre à la hauteur de fa tige , enforte qu'ils ignorèrent les trois expreifions folide , moyenne ôc délicate, qui caractérifenÉ les ordres Grecs. Cependant il faut convenir que les mo-
numents de l'Egypte ne contribuèrent pas peu à la mpériorité que les Grecs acquirent enfuite dans l'Architecture. Eclairés par le fentiment fur les vraies beautés de l'art, les Grecs s'attachèrent à perfectionner les ou- vrages des Egyptiens ; ils furent, en s'é- cartantdu goût dominant de ce Peuple pour le g'tganteique, affigner à leurs édifices des proportions déterminées , ôc fixer la régula- rité de leur ordonnance. Les Egyptiens n'ayant en vue que le grand & le merveil- leux, étoient venus à bout de conftruire |
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iS ÏNTRQDUCTÏÓlf'.
avec iolidicé 5 lés Grecs parvinrent à dé-
couvrir le vrai goût de l'Architecture : ceux-là brûlant du deiîf de s'immortalifer, occupés d'ailleurs des difficultés de la main d'œuvre , avoient négligé les fîneiTes de l'exécution & méconnu les grâces de l'art ; les autres donnèrent à leurs productions cette régularité , cette correction , cette jufteiîe qui fatisfait l'âme , Se préfente un concert admirable aux yeux du fpe&ateur éclairé. En un mot, on peut regarder les Grecs comme les créateurs de l'Architec- ture proprement dite, & les confidérer comme les premiers qui ayent été dignes d'avoir des imitateurs 5 auffi n'atteignirent- ils pas fans de grands efforts à ce de- gré de perfection, éc ce ne fut qu'après qu'ils eurent appris à fubftituer à leurs modèles une ordonnance plus légere, &; qu'ils fe fu- rent apperçus que la plupart des édifices Egyptiens ne préfentoient que de très- grandes maiTes chargées d'ornements, qui, félon nous,étoient plus gigantefques & plus bizarres que fatisfaifantes. Cependant, au rapport de Pline (c), les Egyptiens fe.van- toient d'avoir poifédé la Peinture 6000 ans avant «qu'elle fut connue en Grèce : ce qui prouveroit du moins que l'Egypte, ainfî que .1 -
(c) Pline, lib. 35 , cap. 3.
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Introduction. 29
nous l'avons obfervé, doit être regardée
comme le berceau des .Arts. Ce ne fut qu'après un allez long efpace
de temps que les Grecs imaginèrent de pé- trir , de façonner la brique & de la faire cuire au feu, invention qu'ils durent,félon Pline, à Lurichus & à Hyperbius, frères, habitants de l'Attique. Homere en parlant du Palais de Priam
èc d'Alcinoiis, femble n'en faire coniîiter la magnificence que dans la difpoiîtion, dans la richefTe des matières, &" lts ornements employés dans l'intérieur, &l ne dit rien -des proportions obfervées dans ces édifi- ces. Ce fut Cadmus qui apporta en Grèce
l'art de travailler les métaux. En fe ren- dant attentif à tout ce qui les avoit précé- dés, en cultivant les Arts du delîîn, delà Peinture & de la Sculpture, ainfi que les Mathématiques, les Grecs ne tardèrent pas à acquérir de grandes connoiflances dans l'Architecture. Alors on vit s'élever en diverfes contrées
de la Grèce des monuments qui par la beau- té de leur ordonnance, effacèrent les monu- ments Egyptiens. Les Ioniens en érigèrent un à Théos en l'honneur de Bacchus. Ce Temple entouré d'un rang de colonnes fut çonftruitfur les defïïns d'Hermogènes, un |
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3<5 Introduction.
des plus grands Architectes de l'antiquité,'
& dont Vitruve regardoit les ouvrages com- me la fource où l'on puifa les meilleurs pré- ceptes de l'Art. Le même Hermogènes fit bâtir uti Temple à Magnéfie, Ville de Ca- rie, en l'honneur de Diane. Parmi tant de Temples dédiés à cette Di-
vinité , perfonne n'ignore que celui d'E- phefe tient le premier rang (d), nul autre ne l'égala ni en grandeur ni en magnificence; il avoit quatre-cent-vingt cinq pied s de lon- gueur, & deux cent vingt de largeur; fon pourtour extérieur étoit environné de deux rangs de colonnes de la hauteur de ibixante pieos(e); elles étoient au nombre de cent vingt-fept, dont trente-iîx furent enrichies d'ornements admirables par hs plus habiles |
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(d) Au rapport de Vitruve , la ftatue delà Dt'eiTe étoit
de cèdre. Selon Pline, cité par le père Monfaucon, eile étoit d'ébene ; Xénophon prétend qu'elle étoit. d'y voire ; d'autres affurent qu'elle étoit faite d'un cep de vigne. Ceux-ci repréfentent cette Divinité en chaflerefîe, ceux-là entourée de bandelettes, de maniere qu'elle paroifloit em- maillotée : fur ces bandelettes étoient des attributs & des fymboles qui repréfentoient la nature:la pluf art lui donnent plufieurs mamelles pour déiigner qu'elle étoit la nourri- ce des animaux & des plantes. (f) Vitruve prétend que ce fut Ctéfiphon qui inventa
plufieurs machines pour élever des fardeaux considérables, tels que les colonnes de ce Temple qui étoient de marbre & d'un feill bloc ; il raconte auiiî comment on a trouvé la carrière d'où l'on a tiré les matériaux qui ont fervi ■4 bâtir ce Temple, |
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Introduction; $t
Sculpteurs de la Grèce 5 une entr'autres par
Scopas. Au rapport de Vitruve ( f), dePau- fanias (g) & de Pomponius-Mela (A), ce Temple fut le premier monument ou l'on jdonna des bafes aux colonnes. Nous obferverons que Spon, dans iès
voyages, dit avoir trouvé à l'endroit où Ephefe étoit fituée , il:: colonnes, reftes vraifemblablement des débris du Temple de Diane. Cependant la hauteur de ces co- lonnes , félon cet Ecrivain, avoit un peu moins de quarante pieds, fur fept pieds de diamètre, erreur qui peut provenir de la différence de la meiiire dont il s'eft iervi, a celle qui étoit alors en ufage,ou, de ce que les Ioniens ayant rebâti plufieurs fois ce Temple , la proportion des colonnes avoit varié dans ces diverfes conftnicHons; en effet Spon décrit ces fix colonnes com- me étant d'ordre dorique, tandis que, iéîon Vitruve, l'ordre étoit Ionique. Toute l'Afîe voulut contribuer à l'érec-
tion de ce Temple. On employa, félon Pline (*"), deux cent vingt années aie bâtir. Stra- |
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(f) Vitruve, liv. 4.
ig) Paufanias , liv. 4.
(A) Pomponius-Mela, liv. U
COPlwejliv. JÖ,
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«
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31 Introduction.
bon ( k ) & Vitruve ( / ) nomment pour*
premier Architecte de ce monument Cher- iiphon ou Ctéfiphon, auquel iuccéda fon fils Métagenes, èc à celui-ci plufieurs au- tres , parmi lefquels on compte Démétrius èc Péonius. Eroftrate voulant faire pafler ibn nom
à la poftérité, imagina de brûler le Tem- ple d'Ephefe, & y mit le feu la même nuit que naquit Alexandre > mais il fut relevé avec une fomptuolîté fans égale fous le ré- gne de ce Prince, & fur les deilîns de l'Ar- chitecte Chérénocrates. Néron pilla dans la fuite tous les tréfors de ce monument que les Gots achevèrent de ruiner fous le regne de Gallien. Le Temple de Junon à Samos, étoit de
la plus haute antiquité, il avoit été bâti pour la premiere fois du temps des Argo- nautes. Il fut rétabli par Ricus de Samos, Cet Architecte fut aidé dans cet ouvrage par fonfîlsThéodore qui l'acheva feul. Celui- ci puplia une defcription du Temple, con- tenant exactement tous les détails de ià, çonitru&ion ( m ). La célébrité de ce Tem- |
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(k) Strabon, liv. 14.
(/) Vitruve, liv. 7. ( m ) Au rapport de Vitruve, cette defcription fe lifoir,
ipcore du temps d'Auguftc. "· , . pie
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Introduction. 33
pie d'ordre dorique ne permet guère de
douter qu'il he fut un des plus beaux mo- numents de la Grèce 5 c'eft ainiï du moins qu'Hérodote & Paufanias nous en parlent. Le nom de Théodore (n) qui en fut l'Ar- chitecte ne peut d'ailleurs qu'en donner une grande idée, Trophonius & Agamèdes, les deux plus
anciens Architectes Grecs, dont le nom foit parvenu jufqu'à nous, s'étoient acquis iule grande réputation par le fameux Temple d'Apollon à Delphes j néanmoins ks mé- dailles qui nous reftent & qui repréfenterit la forme quarrée , entourée de portiques, nous en font concevoir une idée afîez peu avantageufe *, & Ton feroit rehté de croire que ce Temple, comme nous l'apprend le père Montfaucon \o), étoitpîus recomman- datie par l'Oracle que toute la Grèce y al- ioit confulter, & par les tréfors îmmenfes dont les Princes & lès particuliers l'avoient enrichi, que par la beauté de fon Architec- ture. Il f!it brûlé la premiere année de la cinquante-huitième olympiade, St relevé par Spintarius, Architecte de Corinthe. Péonîus, un des Architectes qui avaient
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ie laDyrmthe de Lemnos, tiré pag. 17 j Μ&. (0).
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(o) Premiere Partie, rit. 2
Tome I. |
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34 Introouction.
été chargés de la conduite du Temple de
Diane à Ephefe&: Daphnis Miléllen, firent bâtir celui d'Apollon à Milet. Celui-ci, le plus magnifique de tous ceux qui furent élevés en l'honneur de ce Dieu, étoit conf truit en marbre &l d'ordre ionique ainlî que Je Temple de Diane, & ne lui étoit infé- rieur , félon Vitruve (p ), ni en grandeur ni en beauté ; on peut voir d'ailleurs l'éloge que Pline nous a laîiîe de ce monument. Un autre Temple fut élevé en Arcadie,
près du Mont Cotytius, fous la conduite d'îétinus, en l'honneur d'Apollon le fe- courable. Ce Temple étoit voûté en pierres, félon Paufanias (g), & paiToit pour un des plus beaux monuments de l'antiquité. Les talents d'Ictinus & de Callicrates
ne contribuèrent pas peu à faire valoir, par-« mi les Athéniens ,1a magnificence de Pérî- clès dans les édifices qu'il fît élever. Ces deux Architectes conftruifirent dans la Ci- tadelle d'Athènes le Temple de Minerve , appelle Parthenon , c'eftVa-dire le Temple . de la Vierge. Ce monument d'ordre dori- que , & qui fubiïite encore en partie, eil rectangulaire par fon plan, comme étoienc prefque tous les Temples des anciens, fa |
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(p) Vitruve, Prcf. liv. 7. ,'
(q) Paufanias ,'liy. 8, |
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Introduction. ?ƒ
longueur eil de deux cent vingt-un pieds
Bors oeuvre, & fa largeur de quatre-vingt quatorze pieds dix pouces. Les colonnes extérieures font fans bafe, & ont trente- deux pieds de hauteur fin* cinq pieds huit pouces de. diamètre. Elles font couronnées d'un entablement qui a pue/que le tiers de- la hauteur des colonnes. Au reite, ce ne fut point Ictinus, mais l'Architecte Carpion, qui, félon Vitruve, féconda Callicrates dans la conitruclion du Temple de Minerve. Cet Auteur ajoure que .Pediiïce étoit d'ordre ionique : ce qui néanmoins eit contraire à ia defcripçion qu'en a faite M. le Roi dans «fes ruines de la Grèce (r). Mais Vitruve (ƒ) ainlï queStrabon (/:)reeonnoiiTènt que Mi- nus éleva le Temple célèbre de Cérès & Proferpine à Eleufis (y.) ; cependantPlutar- g.-------------1-----------------------1—.-------:--------1------------------------------------—---------------■---------------------!_,
(r) On peut voir auifi dans cet ouvrage une defcriptioiî
du Temple de Minerye Suniade, finie près du Promon- toire de 1'Attique, appelle autrefois Sunium, & auquel dix-fept colonnes doriques, refres de ce monument, qui font encore fur pied, ont fait donner le nom de Cäp-tg· Jonne. (ƒ) Vitruve , liv. 9.
:(t) Strabon, liv. o. ( u ) Le père Montfaucon,dans fa defçHo«=Ua des Tem-
ples de l'antiquité, ne fait point mention cte celui-ci. Il rätr {orte feulement une médaille de la maifon de Brande- ourg, qui,félon Bergier,repréfente une efpece de Taber- nacle , drëifé en l'honneur de Proferpine, à caufe, dit-il, .qu'on voit à coté un épi & un pavoi, ce qui dé/îgneroit flUtàf un Temple dédié à Cérès qu'à Proferpine.' Cl)
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5<î Introduction.
que en attribue le premier ordre à Corce-
bus, le fécond à Métagenes de Xipere , Bourg de l'Attique ; &; il ajoute que Xeno- clès conilruifit la lanterne ou coupole qui en couvroit le fandtuaire. Cet édifice d'or- dre dorique pouvoit contenir, ielon Stra- bon, plus de trente mille perfonnes, tel étant à peu près le nombre de ceux qui s'y trouvoient raflëmblés à l'occaiion des céré- monies pompeufes (v)qui fe pratiquoient le jour de la fête d'Eleufis. D'abord on laiila l'intérieur du Temple fans colonnes 5 mais fous le régne de Démétrius de Phalere on voulut rendre ce monument plus majef- tueux, & l'Architecte Philon (x) qui par la defcription de tous ces ouvrages mérita de tenir un rang diftingué parmi les Au- teurs Grecs, fit ajouter des colonnes au frontifpice de ce monument célèbre. Plufieurs Temples furent élevés à Tégée,
Ville d'Arcadie, fur les deifins de Chyro- iophus de l'Ile de Crête. Un de ces monu- ■ ■ ''
(v) Platon , Plutarque, Cicéron ont fait une ample
defcription des cérémonies qu'on obfervoit dans le Tem- ple d'Eleufis. Voyez auifi l'Abbé Fenel, qui a écrit fur là doctrine que l'on enfeignoit autrefois dans les myfteres de ces Divinités. ( χ ) Quelques-uns prétendent qu'il étoit le même que
Philon de Byfance, dent nous avons un traité des ma- chines de guerre. |
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Introduction. 37
ments fut confacré à Vénus Pàphienne ,
un autre à Cérès & à Proferpine* on en dédia deux à Bacchus, & un cinquième à Apollon 5 on voyoit dans ce dernier, au rapport de Paufanias {y), une ftatuè qui repréfentoit l'Architecte. Quelques-uns font remonter aux fîécles les
plus reculés l'origine du célèbre Temple de Jupiter olympien à Athènes, & pré- tendent que Deuealion en fut l'Architec- te. Ce Temple fubfïita l'efpace de 950 ans, & tomba en ruine à la cinquantième olympiade. Pififtrate entreprit de le rele- ver , & confia l'exécution de ce deiFein aux Architectes Antiftates , Antimachides , Callefchros & Perinos. Après la mort de Pinitrate ce monument fut difcontinué jufqu'au regne d'Antiochus le Grand. Ce Prince, étant monté furie trône de
Syrie, voulut faire achever le Temple de Jupiter olympien à Athènes ; le foin de le perfectionner fut confié àCofïutius, citoyen Romain , Architecte qui le premier avoic bâti a Rome félon la maniere des Grecs. Ce fuperbe édifice conftruit en marbre
& d'ordre dorique, étoit fitué dans la par- tie baffe & au feptentrion de la Citadelle d'Athènes. Sa vafte étendue le rendit auflî |
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(y) Paufanias, liy. 8.
Ciij
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À, î*Txo*irtTto»:
célèbre que les plus fameux Temples ââ
l'antiquité. Coifutius n'en ayant pas ache- vé la conftrucUon * elle fut continuée du temps d'Augufte $ mais le Temple ne reçut fon dernier degré de perfection (|) que fous Adrien, un des Empereurs Romains qui témoignèrent avoir le plus de goût poui Mrchite&ure. ι Dans l'intervalle de la mort de Piiîftrâ-
fee au regne d'Anthiochus le Grand, les habitants de Pife, où étoient célébrés les jeux olympiques,avoient élevé en l'honneur de Jupiter un autre Temple qui ne le" ce-· doit guère pour la magnificence à celui de Jupiter olympien à Athènes. Paufanias a Jaiile du Temple de Pife coiihxuit fur les deffins de Libon d'Elide , une defcrip- tion très-ample qui ne peut que donner* la plus grande idée de ce monument ; il étoit d'ordre dorique & entouré de co-> lonnes : fa longueur étoit de 230 pieds, fa largeur de 8 f , &: fa hauteur de 6S. Le comble étoit couvert de tables de marbres en forme de tuiles, invention due à Bl· /as, Sculpteur de Naxos ; Paufanias femble faire entendre que la Mythologie y étoic prefque toute repréfentée , foit en Peintu* te ibit en Sculpture. (t) Yty*\l& ruines de la Grèce par M. le Roi ,pag< 19«
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Introduction) '39
La plupart de cesTemples furent conftruits
des marbres les plus précieux, & revêtus des ornements les plus analogues au genre de ces fortes d'édifices 5 leur itruclure ad- mirable devint une nouvelle fource de gloire pour les Grecs, & des modèles pour la poftérité. Les demeures des Rois le cédèrent à pei-
ne aux Temples des Dieux : rien n'égaloit la fomptuofîté du Palais de Maufole, Roi de Carie, & la magnificence du célèbre tombeau de ce Prince ; on lit dans Vitru- ve (a) que de fon temps les murs du Palais de Maufole étoient encore en entier : Us étoient, dit-il, de briques, & couverts d'un enduit fi poli qu'ils reiTembloient à dit verre. Le même Auteur parle auiïï de ρ'ίίι- iieurs Temples que ce. Roi avoit fait éle- ver : un de ces édifices, dédié au Dieu Maïs , fut conftruit dans la partie la plus haute de fon Palais, fîtué au milieu de la Ville d'Halicarnafle. Après la mort de Maufole , fa Veuve
Artémife fe rendit célèbre par le tombeau qu'elle fit ériger dans cette Ville à la mé- moire de ion mari 5 ce monument le plus ibmptueux qu'on ait encore vu en ce gen- ~ _, .1.- II..I. I
(«) Vitruvc, liv. z, ebap. 8.
C iv
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4<5 In τ ro du c't ι ο ν.
re devint la quatrième merveille du mon-
de j de-là tous les édifices de ce genre ont pris le nom de Maufolèc. Ce tombeau, au rapport de Pline,fut le premier où l'on employa le marbre en incruitation,, & il ajoute que cette belle invention eft due aux Cariens. Chaque façade de ce monu- ment étoit décorée de 36 colonnes du mar- bre le plus précieux, & ornée de itatues & de bas reliefs d'une exécution admira- ble. Satyrus & Phyteus furent les Architec- tes de ce monument j mais Pliéthis le con- dmüi au dernier degré de perfection en élevant au-deiTus une pyramide qui avait comme le Maufolée , 140 pieds de hau- teur. A l'extrémité fupérieure de la py- ramide , on voyoit un Char dédié au Soleil. Les Sculpteurs qui enrichirent ce mo- nument de tant d'excellents ouvrages, fu- rent Léocharès, Briaxès, Scopas & Praxi- tèle , ou, félon quelques-uns, Thimothée, chacun d'eux orna une des façades , & il n'eit pas furprenant que leurs chefs-d'œuvre ayent contribué, autant que la grandeur de l'édifice , à rendre ce monument im- mortel. Enfin, il n'y eut dans la Grèce aucune
Ville un peu coniîdérable où Ton n'érigeas quelque monument, foit temple, foit pa- lais , combeau ou fontaine, tous ouvrages |
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Introduction. 4t
capables de tranfmettre à la poitérité la mé-
moire de ce Peuple, qui a pu être regardé comme poiîefTeur des beaux Arts perfection- nés. En effet, tous les Citoyens les culti- voient, les Académies établies dans tou- tes les Villes y formoient la jeuneiTe, tou- tes les fciences y étoient enfeignées par d'ex- cellents maîtres. D'ailleurs les Grecs étoient naturellement fpirituels,curieux, aimant les belles connoiflances, & s'y appliquant par goût.Enfîn l'on peut dire que laPbyfiqué & la morale ont concouru auffi à diilinguer cette Nation de toutes les Nations de l'Univers. * A l'exemple des Grecs, les Romains vou-
lurent fe iignaier par la eonftruction de leurs bâtiments. Mais, d'abord femblables ;>,ux Egyptiens, ils ignorèrent l'heureux effer des proportions en Archite&iire, & fe con- tentèrent de donner à leurs édiiîcesde la gran- deur & de la folidité. Nous apprenons des tfiftoriens que les Sciences &: les Arts firent d'abord peu de progrès chez ce Peuple ; ils ne furent cultivés que par le petit nombre, le gros de la Nation n*y prenant aucun înté- cet : enforte qu'on ne peut guère faire re- monter l'époque de l'introduétion des Arts chez les Romains plus haut que la féconde guerre Punique v environ % 18 ans avant no- tre Ere. D'après ce récit, il y a toute ap- |
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"4* Introduction?.
parence que leur profpérité ne dura qu'en-
viron deux iîéclesj encore faut-il convenir que pendant cet efpace de temps les Let- tres l'emportèrent de beaucoup fur les pro- ductions de l'Architecture qui font ici no- tre objet. Néanmoins dès le regne de Tarquin l'an-
cien , on exécuta des ouvrages importants $ il fut le premier Roi de Rome qui enferma par des murs l'enceinte de la Ville 5 mais ce qui a le plus immortalifé ce Prince, c'eir, le conduit fouterrein dont on voit encore les ruines. Ce conduit, en recevant toutes les immondices de Rome, contribuoit à la fois, à la propreté des maifons, à celle · des rues & à la falubrité de l'air, objets in- téreiTants dans les ouvrages publics. Tite- Live (b) & Denis d'HalicarnaiTe (c) nous* font concevoir une grande idée de cette? entreprife, ils exaltent fut-tout les avanta- f;es qu'en retiraient les Citoyens. Quant à,
a folidité , il efl; étonnant que ces voûtes, conduites depuis une extrémité de la Ville jufqu'au Tibre, ayent réiîfté depuis tant des fîecles à la charge immenfe des voitures? quelles n'ont ceiîë de porter : l'hiftoire que Pline ( d) raconte à ce fujet peut fervir aulîl (b) Tke-Livre, liv. premier.
(c) Denis d'HalicarnafTe, liv. 3.
(d) Pline, Jiv. $6,chap. z,
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ÎntrodùctioK'. 43'
â nous donner une idée de la folidité des édi-
fices des Romains. Scaurus, dit-il, avoit fait conftruire urt'
théâtre qui ne devoit habiliter que lîx ie- maines (e).Les fpedacles finis, Scaurus vou- lut faire transporter chez lui les matériaux qui avoient iervî à la conftruction de cet édifice : l'Entrepreneur des ouvrages publics exigea de ce riche Citoyen qu'il s'obligeât de payer le dommage que pouroit càuiér aux voûtés le tranfport de pareils fardeaux ; mais les voûtes qui depuis 800 ans étoient de- meurées entières foutinrent fans s'ébranler toutes les fecouiTes qu'occafionna le tranf port. Ce fut encore Târquin l'ancien qui jeta
les fondements du Capitole (ƒ), & qui y bâtit un Temple à Jupiter qu'il fît noinmer Temple de Jupiter Capitolin > ce monument futeniuite achevé avec beaucoup de magni- ficence fous le regne de Tarquin le Super- be, qui fit venir pour cela des ouvriers d'Ë- truries ce fut auffi ce dernier qui acheva le |
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(e) Ce théâtre étoit orné de trois ordres, dont les
Colonnes au nombre de 360 , avoient été préparées en moins d'un an. Celles du premier ordre étoient de marbre & avoient de hauteur 38 pieds; ce théâtre fe trouvoit encore embelli par un nombre prodigieux de itatues de marbre, de bronze , &c. ( f) Environ 600 ans avant notre Ere
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44 Introduction.
Capitole, & qui y fit ériger un Temple com-
mun à tous les Latins. Depuis les premiers temps de la Monar-
chie Romaine , l'Etrurie, aujourd'hui la Tofcane, s'étoit diftinguée plus qu'aucune autre partie de l'Italie, par fon goût pour l'Architecture. Porfenna, un de fes Rois (g), fit élever près de Clufium un tombeau dont la ftru&ure obtint les fufFrages des Artiftes contemporains j il étoit conftruit en pierre, $£ s'il en faut croire un pafïage de Varron (h) que Pline nous a confervé, fa forme avoit quelque reiFemblance avec celle du labyrin- the de Crête 5 mais ce qui fit le plus d'non- neur aux Etrufques, fut l'invention de l'Ordre Tofcan, qui depuis caractérifa l'Ar- chitecture Romaine. En effet les Romains ne firent long-
temps ufage que de cet Ordre, ayant une connoiflance très-imparfaite de la Sculptu- re, ne fâchant ni polir le marbre, ni l'em- föer en colonnes j en un mot, ignorant de faire des ouvrages capables d'exci- ter une jufte admiration. Mais enfin le com- merce qu'ils eurent avec les Grecs leur don- na lieu d'envier à ce Peuple les merveilles qu'il avoit enfantées. Les Romains apprirent |
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(e) Tlvivoit environ ƒ00 ans avant l'Ere Chrétienne.
(À) Varron, liy. 36, chap. 15. |
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wi-ii^WW^;
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Introduction. 45
des Grecs à rendre leurs édifices réguliers,
à y joindre la difpofition & l'ordonnance : ils mirent tout en œuvre pour mrpailer leurs maîtres, mais ils ne parvinrent qu'à deve- nir leurs rivaux 5 &: malgré tous leurs efforts pour produire de nouveaux ordres, on ne vit paroître dans l'Italie que le Tofcan per- fectionné & le Compoiîte, foibles imita- tions des ordres Grecs ; ce ne fut même qu'a- près la deftrudtion de la République que Rome fe vit embellie par des monuments dignes d'être tranfmis à la poftérité. Alors on vit s'élever le Panthéon qus
fit conftruire Agrippa ( i), gendre d'Au- gufte. Ce Temple fe nommoit ainfi, parce qu'il étoit dédié à tous les Dieux; Agrippa néanmoins le confacra particulièrement à Jupiter le Vengeur 6c à Cybele. Palladio croit que le Panthéon avoit été conftruit du temps de la République, & qu'Augufte étant monté furie trône, Agrippa fit élever feulement le portique qui manquoit à l'édifi- ce 5 cette partie du Temple paroît efFe&ive- ment avoir été ajoutée après coup. La forme du Panthéon , connue aujour-
d'hui fous le nom de Ta Rotonde, eft cir- culaire par fon plan, & fa. hauteur eil égale à fon diamètre : enforte que félon Pexpre£ ----------------—.------------------------------------------------------i-------_--------iu-----p
(i) Ce Cooiul vivoiit uft peu avant notre Eté.
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4^ Introduction.
ίιοη de Palladio, il femble repréienter le
globe de la terre. Au rapport de Defgo- dets qui l'avoit exactement mefuré, fon dia- mètre eft de vingt-deux toifes, Le porti- que ayant été ruiné par le tonnere, il fut réédifié fous les Empereurs Sévère & Marc Aurèle. Du temps de l'Empereur Phocas, le PapeBoniface IV (k) dédia ce Temple à la Vierge &: aux Martyrs \ Urbain VIII a fait depuis reltaurer fon portique &l appla- nir la place qui lui fert d'ilfue. C'eft cet édi- fice que l'Empereur Adrien fe propofa d'i- miter dans Athènes, lorfqu'il fît ériger à tous les Dieux le Temple qui fut appelle le Panthéon et Adrien, Nous ne devons pas oublier de parler ici
du célèbre Temple de la Fortune, élevé fur une montagne à vingt & un milles de Rome, dans la Ville de Paleibine, construite des ruines de l'ancienne Préneiïe. Ce Temple, au rapport de M. l'Abbé Barthélémy, étoit compofé d'un aifcmblage de plufieurs édi- fices, qui pofés avec régularité fur diffé- rents plans, s'élevoient les uns au-deifus des autres, & en impofoient par la majefté de leur ordonnance. Le fancluaire de ce Temple étoit, dit-il, pavé d'une mofaïque (k) Ce Pontife mourut en 614, après un regne de
fept ans, |
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Introduction. 47
d'environ dix-huit pieds de long fur qua-
torze de large (/), travail précieux qui donne une grande idée des Artiftes de ce genre en Italie. Augufte, félon Suétone (/«), fîgnalaia
magnificence par une infinité d'édifices , fruits de la paix, dont toute la terre jouif- foit fous fon Empire 5 les bâtiments fornp- tueux élevés dans Rome firent parvenir cet- te Capitale au plus haut degré de fplen- deur 5 elle changea entièrement de face : ce qui fît dire (^u'Auguße ne l'avoit trouvez que de brique, & qifd la laijjbit toute de mar- bre. Cet Empereur (λ) fit auiîi bâtir en Epire près d'Adium la Ville de Nicopolis, â def- fein de perpétuer le fouvenir de la victoire qu'il avoit remportée fur Marc- Antoine ; enfin l'on peut dire que fous ion regne les Sciences & les Arts chez les Ro- |
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(/) M. l'Abbé Barthélémy nous a donné en ij6o /a
xlefcription de -cette mofaïque d'après une planche que M. le Comte de Cailus a fait graver avec beaucoup plus de foin Se de correction que celle du P. Kirker, gravée en 1671 , & celle de M. Ciampini, gravée en iócjq, & en- fin que celle gravée en grand en 1711 par les foins du Cardinal Barberin. Les fragments de marbre qui compa- rent cette mofaïque ne font communément,dit-il , que de trois à quatre lignes en quarré ; ceux qui forment les fi- gures font encore beaucoup plus petits. (m) Suétone dans la vie d'Augufte.' ___
(72) H régna long-temps en paix, &: mourut âgé de γ f
anSj la douzième annéedeaotre Ere, |
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4§ Introduction.
mains, étoient un infiniment utile dans lès
mains de ce Peuple ambitieux, & que la Philofopliie, l'Hiftoire,l'Éloquence, la Poe- iîe , l'Architecture, la Sculpture & la Pein- ture furent portées alors au plus haut point de perfection. Parmi les divers monuments de l'antiqui-
té , l'hiftoire vante beaucoup Γ Aqueduc de Carthage ( ο ), conftruit fous le regne du mê- me Prince. Outre un nombre infini de Tem- ples, de Cirques, de Théâtres, de Ponts S: d'A quéducs dont il ordonna la conftruétion, il voulut prendre lui- même le foin du che- min de Flaminius qui conduit depuis Rome jufqu'à Rimini; fur ce chemin étoit un pont remarquable où l'on érigea un Arc de Triom- phe à fa gloire. L'hiftoire nous parle encore de quatorze
Aqueducs immenies élevés du temps des Céfars ; ils étoient foutenus fur des arcades qui conduifoient l'eau très-abondamment dans Rome, & y entretenoient continuelle- ment cent cinquante fontaines jailliiTantes, cent dix-huit bains publics, fans compter hs mers artificielles deftinées à repré- fenter les combats, connus fous le nom de Naumachics. Cette même hiftoire nous allure que cent mille ftatues, ornoient Iqs |
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(0) Foyei rArchitefturehiftoriqaede Fifcher j Jiv. S.
places
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Ι'η Τ RÔDUÇT Ι Ο Ν. 4&
P'îaces publiques, les Carrefours, les Tem-
ples, les Palais, δ: que fous ces regees mé- morables , on voyoit quatre-vingt dix co- lories élevés fur des portiques, quarante- huit obélifques de marbre' granique, tail^ lés dans la haute Egypte, ouvrages'éton- nants, qui nous lahTent à peine concevoir comment on a pu, du Tropique aux bords du Tybre , tranfporter des maiîès aulîî prodigieuiès. Qu'on ie rappelle d'ailleurs ici ce que nous avons dit en parlant de PEgypte, touchant l'obélifque relevé par Sixte-Quint, & par l'induitrie du célèbre Fontana, encore révéré a Rome par la hardiefle de cette entrepriiè {p), Le pont d'Auguile étoit bien moins éten'
du, mais plus utile que celui qui fut cons- truit fous les ordres de Caligula : celui-ci avoit de longueur une lieue & demie, û traverfoit une efpèce de Golphe, iî.tué en- tre Pouzzole & Bôles. Au reite le pont de Caligula ne ferv'it guère qu'à flatter 1'oj> gueuil de cet Empereur qui vouloît traver-» fer la mer à cheval & triompher de cet élé** ment mieux que ne l'avoient fait, difoit> il, Darius & Xercès {q). \P) y°ye\ ce que nous avons dit de ces obélifques.
f «S- M· (q) Aurel. Viftor & Xiphilin dans la vie de Calcul*,
?Qmt l D
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■ρ Introduction.
Laconitraclion du pontd'Oftie que Jules-
Céfar avoir entreprife inutilement, iè fît avec le plus heureux fuccès fous l'Empire de Claude; cet ouvrage fut d'un grand lecours aux Romains, n'y ayant auparavant vers l'embouchure du Tybre aucun lieu de fure- té pour les vauTeaux venant d'Afie &c d'Afri- que , ce qui occafionnok fouvent la famine dans toute l'Italie. Mais jamais on ne vit plus de fomptuo-
fité & de magnificence que dans le Palais que Néron fit joindre à celui des Empereurs. La Cour de ce nouveau Palais où l'on voyoit la ftatue coloifals de ce Prince, étoit ornée de portiques à trois rangs, dont cha- cun étoit de la longueur d'un mille: l'éten- due des jardins étoit immenfe , ils renfer- moient un étang entouré d'une quantité prodigieufe d'édifices ; on auroît pris, félon Suétone , l'étang pour une mer, & l'alfem- blage de ces édifices pour une Ville 5 on voyoit aulîi dans ces jardins des terres la- bourables, des vignobles, des prairies & pluiîeurs bois peuplés de différentes fortes de bêtes fauvages & d'animaux domeftiques. La grandeur du Palais répondoit à l'éten- due des jardins : l'or, l'azur, les perles, les pierreries 6c autres matières précieufes fu- rent employées dans l'intérieur avec tant de profufîon que cet édifice fut appelé la |
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TNTROUUCTTON'l· ft
iïiaîfon dorée (r); il fut détruit en partie
durant les guerres qui fuivirent la mort de Néron (ƒ). Au lieu où étoit l'étang, Vefpafien (t)
8c fon fils Titus firent élever l'amphithéâtre connu aujourd'hui fous le nom de Colijée. jjooo ouvriers avoient déjà travaillé 10 ans à là conftrudion de cet édifice avant qu'on en eût commencé la Sculpture ; fa for^· me extérieure & intérieure eil elliptique > il a de longueur hors œuvre quatre-vingt-cinq toifes fur foixante-dix de largeur. Vefpafien fit aufîî élever dans Rome le
fiiperbe Temple de la paix. On en voit en- core aujourd'hui des veitiges,dont les mefu- res nous ont été données par Defgodets (u% Parmi les ouvrages publics qui ont iîgna-
ié la gloire des Romains, les grands chemins tiennent fans doute un rang diftingué. Nul |
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(r) Suétone , dans la vie de Néron , Tacite , Pline ,
Martial de Spetlac. Epig. t. (f) Cet Empereur fe donna la mort à l'âge de 3 ζ ans,
&: la foixante-huitieme année de notre Ere après avois régné treize ans. (t) Vefpafien mourut l'an 79 de J. C. après avoir ré-
gné 10 ans. Galba, Othon & Vitellius qui avoient régné .entre Néron & lui n'avoient joui de l'Empire qu'un an .entre eux trois. Titus fon fils lui fuccéda & ne régna que deux ans. («) Defgodets, chap. 21,
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ji Introduction*.
Peuple d'ailleurs n'eft jamais "devenu aufït
recommandable par des travaux de ce gen- re. Le chemin deFlaminius, dont Augufte avoitpris un foin particulier, le cédoit à pei- ne à celui que fit conitruire Domitien (ν), & qui fut appelé du nom de cet Empe- reur Via Domitiana. Celui-ci conduifoit de- puis Pouzzolles jufqu'à Sinuéze où il fe joi- gnoit au chemin d'Appius j fa longueur étoit de 13 lieues : le terrein où il étoit conflruit étant peu folide, il fallut des dépenfes im- menfes pour l'affermir ; plufïeurs affifes de pierres y faifoient un maffif d'une largeur & d'une profondeur fî extraordinaire qu'on n'avoit encore rien vu de femblàbles de grands carreaux de pierres taillés régulière- ment furent placés avec beaucoup de foin Se de propreté fur ce maifif dans toute l'étendue du chemin 5 en le parcourant on rencontroit le pont que ce même Empereur avoit fait bâ- tir fur le fleuve Vulturne , &c un arc de triomphe qu'il s'étoit fait ériger. Le pont & l'arc de triomphe fîmes où le chemin d'Ap- puis fe réunifToit à celui de Bomitien étoient de marbre blanc & richement ornés, félon |
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( ν ) Ce Prince, frère & fucceiTeur de Titus fut le
dernier des douze Empereurs nommés Céfars, il mourut l'an 96 de notre Ere, âgé de 44 ans, Se après en avoij; régné ij. |
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Introduction. '^
les defcriptions que Stace & d'autres Auteurs
nous en ont données. Quant au chemin d'Appius ( χ ) dont nous
venons de parler, il ne lahToit pas au rapport tle Palladio d'être d'une grande beauté ; il commençok au Colifée èc fe ter min oit à Capoue. Plutarque nous apprend que Jules- Céfar (y ) le prolongea de beaucoup. Trajan ( ^} le fit réparer & le rendit plus court & plus commode en faifant applanir des montagnes, combler des vallées ôccon- ftruire des ponts. De iîmples Citoyens Romains iîgnalë-
rent auffi leur amour pour la Patrie par les chemins qu'ils firent conftruire ; un des plus remarquables étoit celui que fit faire Au- rélius :il commençoit à la porte Aurélia , aujourd'hui porte S. Pancrace, traverfoit toute la côte maritime de la Tofcane ôc fe termïnoit à Pife. Les chemins Numentan, de Prénefte &
Libican, étoient auffi en grande réputation s ce premier s'étendoit depuis la porte Vi- cinale, aujourd'hui la porte Sainte Agnès, jufqu'àNumence. Quant aux deux derniers, (ar) Claudius Appius vivoit environ 400 ans avant
jpotre fc,re. (y) Mort 43 ans avant notre Ere.
tfaan Cc Prince raonta fur Ie uônc ran 97 & m°nrul
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34 Ϊν τ ito nü er ι o if;
l'un commençait à la porte Efquiline, ou"
de S. Laurent, èi l'autre à la porte Nevia ou porte Majeure ; tous deux conduifoient à Paleftrine. Léon-Baptifte Alberty parle d'un très-
beau chemin appelé le portuofe qui con- duifoit au port d'Oftie. Il étoit divifé dans ià largeur en trois parties, dont celle du milieu étoitréfervée pour les charrois, & les deux autres fervoient, l'une pour aller de la ville au port, & l'autre pour retour- ner du port à la ville : ce qui fauvoit l'em- barras qu'eût occaiionné une foule innom- brable, dont une partie venoît de-Rome Se l'autre y retournoit. On voit encore eri divers endroits de l'Italie, fur-tout aux en- virons de Rome,, des vertiges de ces anciens chemins. Domitîen ne fe fit pas moins admirer
}>är un grand nombre de Temples, de Pa-
ais èc d'autres Edifices qu'il fît élever. On" fut étonné qu'un Prince dont les mœurs étoient corrompues, eût été capable de con- cevoir des entreprifes également recom- mandâmes par leur utilité & leur magni- ficence. Stace (a) a donné les plus grands éloges aux travaux que fit faire cet Em- pereur pour contenir Je Vulturne dans fort |
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• (a) Stace, Sylv. liv. 3, Eleg. 4»
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k
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Introduction. jy
lit , & empêcher les débordements de ce
fleuve qui ruinoit tous les lieux voiiîns. Sous l'Empire de Trajan fut conftruit le
pont du Tage, monument de ce genre le plus beau qui ioit en Efpagne {b). Ce pont, tout conftruit en pierres, eil·, élevé de deux cents pieds au defiîis de l'eau ; fa longueur eil de fix cent foixante-dix pieds > il n'eil· compofé que de fix arches, chacune de quatre-vingt-quatre pieds d'ouverture. Quant aux piles elles ont chacune environ vingt-huit pieds en quarré. Une inicription qu'on lit fur la porte de l'Eglife de Saine Julien à Alcantara, nous apprend que ce |
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F
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çjnt fut conltruit par C.Julius Lacer, Se que
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EgJife étoit un Temple que cet Architecte
avoit confacré à la gloire de Trajan. On voit encore fur le pont du Tage un arc de triomphe , élevé immédiatement après laconitrudiondu pont( c) ; les inferiptions anciennes difent expreifément que la Pro- vince qui avoit fait élever ces monuments, les dédia tous deux à. cet Empereur. Quelque remarquable que fût le pont du
Tage, il s'en falloit beaucoup qu'il appro- chât delà magnificence de celui que Trajan |
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( b ) Bergier, hiftoire des grands Chemins de TEmpi*
η, liv. 4, chap. 38. (0 Gruter, pag. ι6ζ, inicription 2 & 3. |
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$6 ÏNTRÖDUCTIOtfl
fit conftruire fur le Danube. Les pîlés d^
celui-ci, au rapport de Dion Caiîîiis, avoient' deux fois autant d'épaiffeur que celles du pont du Tage, & les arches deux fois au- tant d'ouverture 3 il étoit compofé de vingt piles éc de vingt & une arches ; chaque pile avoit d'épailTeur foixante pieds &c de hauteur cent cinquante ; la' diftance de l'une à l'autre étoit de cent foixante-dix pieds ; la hauteur de ce pont étoit d'en- viron trois cents pieds , & fa longueur de huit cents toifes , fans y compren- dre les culées. Cependant il fut conftruk à l'endroit le plus rapide & le plus profond du Danube : il étoit Împoflîbie d'y faire des batardeaux pour fonder les piles 5 on fut obligé de jeter dans le lit du fleuve une quantité prodigieufe de divers matériaux qui s'élevarit jufqu'à fa furface * formè- rent des efpècés d'empâtements fur les- quelles on affit les piles. Apollodpre de Damas, célèbre Architecte du iecond iiecle de notre Ere, conftruiiît ce grand ouvrage qui iuffiroit feul pour immortaliser Trajan. Adrien fon fucceifeur craignant que lë$ Barbares ne ië fervilTent du pont contre les Romains en lit abattre les arches : néan- moins un motif contraire àvoit déterminé , .Trajan à le faire bâtir. La bienfaifance de ce Prince & les vicloi;
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Î KT&ö nüCT ι ο Ν. 57
f és qu'il avoit remportées déterminèrent lé
Sénat &. le Peuple à lui ériger un des plus beaux monuments qui ayent été confacrés à la gloire dès Empereurs ; nous parlons de la colonne Trajane qui fubiiite encore aujourd'hui à Rome* Autour d'une grande place ou marché
-appelé du nom dé l'Empereur Forum Trajanum , l'Architecte Apollodore avoit fait conftruire pliiiîeurs édifices, parmi les- quels étoit une bafilique où fe rèndoit la fuftice &: où s'aiTembloient les Négociants j on y voyoit encore cette fafneufé biblicn thequedeTrajan , dont parlent les Hiflxv riens. La place étoit de forme quarrée â l'imitation des places grecques, & décorée d'un nombre coniîdérâblê de ftatues. Un arc de triomphe &: la colonne étoient les monu- ments confacrés à la gloire de ce Prince. Cette colonne fut élevée au milieu de
îa place. Comme elle étoit deftinée à pré- conifer un Romain, on ne voulut pas fe fervir des ordres Grecs, quoiqu'ils fuiîènt employés dès-lors en Italie. L'ordre Tofcan fut préféré , & ce monument prouve bien qu'il n'eft rien de fi fimple que l'Art ne fache embellir, & qu'un ordre ruftique en- richi par le miniftere de la Sculpture, peut offrir le plus beau chef-d'œuvre/ La hauteur de cette colonne eft de cen; treize piedsj |
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jî INTRODUCTION.
elle fut terminée par une ftatue pédeftre de
bronze dore & de dix-neuf pieds de pro- portion, qui repréfentoit l'Empereur Tra- jan. Sixte V y fubflitua une itatue de S, Pierre de treize pieds feulement (d). Nul Empereur ne montra tant de zèle
qu'Adrien pour la conftruction des édifi- ces (e), on eil étonné du nombre de ceux qu'il fit élever ou rétablir. D'abord il fît bâ- tir un Temple magnifique qui fut confacré à la mémoire de Trajan s il fît rétablir le Panthéon d'Agrippa , la bafilique de Nep- tune, la place appelée Forum Augußi, les bains d'Agrippîne &pluiîeurs autres édifices ruines ou brûlés ; il ordonna la conftruélion d'un mur de quatre-vingt milles de longueur" entre l'Angleterre&: PEcoiTe., pour arrêter les courfes des barbares. Ayant pris Jérufa- lem il la nomma ./Elia, il bâtit un Temple' à Jupiter fur le Calvaire, & plaça une ffca- tae d'Adonis fur la Crèche de Bethléem y après fa mort on conftruifît fur le Tybre près de l'on tombeau le pont ^Elius : les débris de ce Maufolée ont fervi depuis à bâtir le (</) Foysi dans le parallele de Chambray., les deifins de
la colonne if raiane, & dans Fifcher ceux de la colonne & de la placi" où elle fut élevée, qui a été gravée d'a- près une méaVUe antique. ( e ) Cet Emp\ereur nommé ^£lius Adrien, mouruc l'art
ί 3 8,, après un re^ne de zi ans, |
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ï NT rodU ότ ι oN. <;$
Cîiâteau Saint-Ange. Tous ces édifices fu-
rent élevés fur les deiïïns de l'Archite&e Détriarius. Il y avoit peu de Villes coniîdérables de
fon Empire que ce Prince n'honorât de ià préfence, &: prefque toutes fe reiTentirent: de fon amour pour les beaux Arts ; on voie encore en plufieurs endroits de l'Italie des relies des édifices qu'il fit élever: il lauTa jufques dans les Gaules des témoignages de fon goût pour l'Architecture , comme on en peut juger par le Temple de Plotine, Ce Temple, connu aujourd'hui fous le
nom de la Maifort quarrée,eiï fitué en Lan- guedoc, près des murailles de Nîmes ; Adrien en ordonna la conilruclion lorfqu'iI paifa par cette Ville pour appaifer la révol- te de la Grande-Bretagne. Six colonnes de front & onze latérales forment la décora- tion extérieure du Temple; les colonnes font corinthiennes & élevées fur autant de focles, .chacun de la hauteur de fix pieds. Leurs fûts font chargés de cannelures. Le diamètre des colonnes eil de deux pieds neuf pouces, ÔC les entre-colonnements de deux diamètres* Sur la frife de l'entablement font das rin- ceaux , fur les moulures de la corniche des ornements, & fur les cimaifes fupérieures des mufles de Lyon. Ce qui paroît fingulier. |
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£o lit τ RoütrcT ι ö tfl
c'eft que les modulons font tournés à con-
tre Cens, Au reite, l'exécution de ce monu- ment efl de la plus grande beauté. Au mi- lieu de l'édifice eil élevée aujourd'hui une Eglife moderne. Non loin du Temple de Plotine, on voit
encore des refles confidérables de celui d'I- fis, nommé auffi le Temple de Diane ; cet édifice de conflruction grecque paffe pour être de la plus haute antiquité , ion plan eft un parallélogramme dont la longueur dans œuvre eft d'environ dix toifes & demie, & la largeur de fix toifes. Trois Chapelles font au fonds du Temple, &: cinq fur les ailes 5 il eft couvert d'une feule voûte plein cintre, conltruite de grands quartiers de pierres po- fes fur leur plat. Plufieurs offements trou- vés fous terre font préfumer qu'on yfacri« fioit des victimes humaines, & les puits qu'on remarque encore, creufés fous les piéde£ taux des idoles, fervoient fans doute aux Prêtres du Paganifme à rendre leurs ora- cles. Près du Temple d'Ifis fut confiante une
fontaine en même temps Se au même ufage que cet édifice. Après la conquête des Gau- les , les Romains voulant la faire fervir de bains publics, conflruifirent pour les per- fonnes du premier rang une Nymphée, &, |
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INTRODUCTION. Ét
|sour le Peuple un grand bain découvert.
Les eaux de cette fontaine étoient conduites dans tous les quartiers de la ville baiTe , 3c fortant de Nîmes elles formulent une petite rivière, dont le baflïn creufé natu- rellement fur un rocher de trente ou qua- rante toifes de diamètre , eil d'une pro- fondeur immenfe & inconnue. La fontaine eft iîtuée au pied d'une
montagne, fur le fommet de laquelle eft le phare de Nîmes, connu fous le nom de la Tourmagne, Ce phare eft auiîî de con- ftruction grecque & de bas appareil. Selon les vertiges qui en relient, il étoit compofé de plulîeurs étages en retraite, formant des rampes allez douces δι aiTez larges pour que les voitures y puiTent monter. L'opi- nion la plus commune eft qu'il fut con- firait pour fervir aux Romains de tréfor public, lorfquela mer étoit moins éloignée de la plaine de Nîmes. Adrien fit encore ériger en Grèce plu-
sieurs édifices : ceux qu'il fît conftruire à Athênes^ou aux environs, paiferent pour les plus réguliers de ceux qui furent éle- vés par fo-s ordres dans toute l'étendue de fon empire ; c'eft à Athènes qu'il fît ache- ver le Temple célèbre de Jupiter Olym- pien ? dont nous avons parlé, |
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'6i In troductiojst'.
Sous Antonin (f) fut conilruit Ie ponfi
du Gard, deiliné à conduire les eaux du Rhône au réfervoir de la fontaine & dans l'amphithéâtre de Nîmes : ce pont qui réu- nit deux montagnes, entre lefquelles il eil contenu, eil compofé de trois rangs de voûtes l'un fur l'autre ; fous les voûtes du rang inférieur, paffe la rivière du Gardon. Le premier rang eil compofé de iix arches dont le diamètre eil de cinquante-huit pieds. Chacune de leurs piles a 18 pieds d'épai£ feur fur quatre-vingt trois de hauteur. La longueur de ce premier rang eil de quatre cent trente-huit pieds ; les piles font pour- vues d'avant-becs du côté d'Amon. Onze arches de la même largeur que les premiè- res , forment le fécond rang > elles font conilruites en retraite, & laiifent de chaque coté, fur la largeur du premier pont, le pailage d'un homme à cheval 5 leurs piles font d'ailleurs arrondies par les angles juf· ques vers l'impoile , ce qui rend ce pailage encore plus libre. Le troiiieme rang eil de trente-cinq arches, dont le diamètre eil d'environ dix-fept pieds, & celui de cha- que pile de cinq pieds & demi. Ces troiiîè-. |
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(ƒ) Ce Prince, fucceffeur d'Adrien , mourut en 138^
il régna 3 ƒ ans 3 & en avpit7jlQrfqu'ilmourut, |
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In troduction. (■>$
mes voûtes foutiennent un aqueduc ; à cha-
cun des trois rangs la retombée des voûtes eil ibutenue par des importes ; les voufloirs des arches font extradoiîès (g). |
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{g) On voit en Afîe plufîeurs ponts qui ne font pas
moins étonnants que ceux des Romains : on peut citer entr'autres le pont d'Hifpahan , nommé en Ferfe, Aliver~ dichan , du nom de celui qui le fit conftruire. La Ion» gueur de ce pont, bâti fur la rivière de Sandrud cil de jco pas , & fa largeur de 20 pas Géométriques , fans y comprendre une galerie qui regne de chique côté. Les ponts les plus confidérables qu'on voit en Europe,
ne fçauroient être comparés à ceux qui fe voient à la Chine. Le grand pont Chinois , litué entre la Capi- tale Fochcu & le Fauxbourg Naatai , eft d'une hauteur capable de lai/Ter paffer les navires à pleines voiles. Il eil compofé de cent arches, conrtruit de Pierres de taille, & terminé par une balurtrade dont les piédeiLmx font ornés de figures de lions en marbre. Fifchcr, liv. m·, plane, xin, xiv & xv. Le pont de Loyang, dans la Province So-Kien , eft
le plus furprenant dont les Voyageurs faffent mention ; il eft compofé de jod piles, jointes fans arcs. Ces piles font construites de blocs de marbre noir, chacune de 18 pas de longueur , de ζ de hauteur , &: de deux de lar- geur. Sept de ces blocs , joints enfemble fur leur largeur, forment celle du pont, terminé comme le précédent par une baluftrade ornée fur fes piédeftaux de figures de lion. On ne fçauroit trop admirer encore la hardieffe &
l'induftrie des Chinois , qui ont fu fe frayer , pour ainfi dire , une route au milieu des airs , pour aller du fommet d'une montagne à celui d'une autre ; ce qu'ils font par le moyen des ponts. Pour éviter les longs circuits des routes qui conduifent à la Capitale de la Province Xgufi , l'on a joint les fommets des deux montagnes, par un pont de trente ftades de longueur; ce pont eft foutenu, en partie par des poutres, & dans les endroits où les vallées font profondes, par des piliers |
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%4 Intro Ducti on;
Marc-Aurele (/z) fit élever en l'honneur
d'Antonin, fon prédéceiTeur, la colonne, appelée Colonne Antonine, dont la plus grande partie fubiïite encore aujourd'hui à Rome, L'édifice connu fous le nom de Thermes
de Dioctétien (i), fut commencé fous cet Empereur, continué fous Maximien & ache- vé fous Conitanthi ( k 5 ces thermes ou bains étoient compofés de plulleurs bâtiments fpacieux qui font prefque tous ruinés. La forme extérieure de l'édifice eil un paral- lélogramme d'environ foixante-treize toifes de longueur fur vingt-fept de profondeur : au milieu étoit un falon terminé en voûte d'arrêté, & foutenu par huit colonnes de granit d'une feule pièce, L'entablement, |
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d'une hauteur fi prodigieufe, qu'on ne paffe deffus qu'en
tremblant ; les côtés en font garantis par des appuis de fer ; quatre chevaux peuvent y marcher de front. Ces fortes de ponts font affez communs à la Chine j on leur donne pour bafe des chaînes de fer , attachées aux deux fommets : ils fervent pour les gens de pied, & pour les voitures légères. ( h ) Ce Prince , après avoir régné 19 ans, mouruç
l'an 180, âgé de 59 ans. (i) Ce Prince, auquel fuccéderent Maximien 8ζ
Conftantin, régna 39 ans, & mourut l'an 313} âgé de 68 ans. (A) Ce Prince qui avoit régné un an avec Liçinius,
demeura en 324 , feul maître de l'Empire , dont ij transféra le Siege à Byfancç en 330, ©à il mourut en 3 37, ainii
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Introduction. 6$
aîniî que les bafes & les chapiteaux des
colonnes étoient de marbre blanc ; quatre de ces colonnes font d'ordre corinthien, & les quatre autres d'ordre compofitej l'entablement eil commun aux huit colon- nes. D'après les anciennes fondations Ser- liu a de/îîné un plan de cet édifice ; ce plan, qui eil au cabinet du Roi, & le deiîîn des thermes de Diocletien , font gravés dans l'Architecture hiilorique de Fifcher. Ces thermes ou bains n'etoient pas les ieuls monuments considérables en ce genre 5 plu- iîeurs Auteurs prétendent que dans Rome ièule il y avoit environ 800 bains publics, compofes de pluiîeurs cours & de valres ap- partements. Lesplusiuperbes, dontquelques débris fe font encore admirer, iont ceux de Diocletien dont nous venons de parler, ceux de Paul - Emile & ceux de Titus. On voitaufïï en France quelques antiquités pareilles» comme à Arles, à Nim^s, &c. Les ruines des bains de Julien l'Apoitat ('), nommés auiïï le Palais des Thermes , fubiîftent encore à Paris, rue de la Harpe, près celle des Mathurins -, on ne peut douter que ce Palais n'ait ete deiliné dans /on origine à des bains, &; conilruit long- |
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ea ) Ce Prince mourut l'an 363, âgé de 37 ans , après
«n avoir régné 8. Tome Ι. Ε
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6$ Int ro du ct ι on.
temps avant Ie féjour de Julien en cetté
Ville ; il y a même lieu de croire que cet édifice fut bâti en même temps que l'an- cien Aqueduc d'Arcueil, deitiné à y con- duire fes eaux > ces deux monuments pa- roiifant de même ftyle & conftruits avec les mêmes matériaux (m). Nous avons dit, en parlant des Thermes
deDioclétien, que ce fut Conitantin qui les avoit achevés : on verra bientôt qu'il avoit auffi fondé la premiere baillique de Saint Pierre à Rome. Rapportons à pré- fent, à propos de cet Empereur, que peu de temps après qu'il eut transféré le fiege de l'Empire à Biiànce, nommée depuis Confiantinoplc , du nom de ce Prince, il y avoit conlacré à la fageiTe de Dieu, fous le nom de Sainte Sophie, un Temple qui précédemment avoit été deftiné aux Dieux du Paganifme., &; qu'un tremblement de terre ayant renverfé cet édifice, il l'avoit fait relever avec la plus grande magnificence. Sous l'Empire d'Arcadius, vers l'an 400, ce nouveau Temple fut prefqu'entiérement réduit en cendres dans la fédition qu'oc- (m) En 17} 1 on trouva une des rigoles , refte des
débris de cet aqueduc. M. Geofroi, de l'Académie des Sciences, après avoir examiné le fédiment qu'on voyoit fur les parties latérales de cette rigole, calcula qu'elle pouvoït avoir conduit 130 pouces d'eau au Palais dç* Thermes. |
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V
Introduct ι on. 67
caiîonna le zèle de Saint Jean Chrifoitô-
me. Ce monument éprouva encore le mcnie accident pendant la minorité de Theodofe Je jeune, qui, dans la fuite., le fît réparer $ &c il fubfifta juiqu'à la cinquième année de l'Empire de Juftinien, qu'il fut entiè- rement con/umé par les Hammes dans une autre fedition, troubles alors très-fréquents dans cet Empire. Juftinien qui aimoit les Lettres & Je$
Arts, & qui s'occupoit fans ceife à multi- plier dans Conftantinople les édifices d'u- tilité, forma auffi le projet d'un Temple qui pût furpaifer les plus ibmptueux mo- numents de ce genre , qu'eut fait élever l'antiquité païenne. Au rapport de Pro- cope, il en confia l'exécution à Arthémius de Traies, & lui donna pour fécond, I/î- dore de Milet. Les fondations de ce Tem- ple furent jetées l'an 732 de notre Ere, & la cinquième année de l'Empire de ce Prince. Vingt & un ans après , Juftinien régnant encore, un tremblement de terre fit écrouler une partie de la coupole ; il en confia la réparation à un fécond Ifidore, neveu du premier, qui augmenta ià hau- teur de vingt pieds, & rendit ià forme un peu elliptique, de fphérique qu'elle étoit. Cette Eglife, la merveille du fixieme fiecle, &. fur l'Ordonnance de laquelle les Arriftes Eij
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r6% 1"ν τ ro ό υ ct ι on.
font partagés, fut confervée telle , jufqu'eri
1453 , où Mahomet fécond la convertit en mofquée, après en avoir fait détruire feu- lement tous les attributs du Chriiiianifme. D'après le rapport de Procope , de Paul Je Silentiaire & même de l'Empereur Jufti- nien, cet édifice avoir été conitruit avec beaucoup de folidité : on n'y employa , difent les deux premiers, ni chaux, ni mortier pour joindre les pierres & les briques enfemble ■■> on fît ufage de plomb fondu verfé dans les interfbices, pour pro- curer à la maçonnerie une confiftance très- foJide cjui pût la préierver des fecouiTes auxquelles ces contrées font fréquemment expofées, & qu'elle h'auroit pu acquérir par les mortiers ordinaires. Afin de prévenir les incendies, il n'entra point de bois dans la conitruction des combles de ce Temple } il fut couvert par des tranches de marbre à recouvrement. La coupole fut conilruite de briques blanches, fpongieufes 5l îî légères que cinq de ces briques égaloient à peine le poids de celles dont nous faifons ufage ; elles furent, dit-on, travaillées par ordre de Juftinien dans l'île de Rhodes. . L'intérieur de cet édifice étoit orné d'une infinité de colonnes de marbres précieux (/z), ; ( » ) Ces colonnes , au dire des connoilTe urs 4 fam
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Int RöDucT ι öisr. è$'
tels que ie porphire, Ie verd de Lacédé-
mone & de TheiTalie, le granit orientai d'Egypte, &c. Toutes les murailles étoient auffi revêtues de marbre încruilé d'agathe & de nacre de perle ; enfin , les voûtes étoient peintes en mofaïques fur des fonds d'or, magnificence étonnante, mais aiïez mal confervée par les fréquents tremble- ments de terre qui ont forcé plus d'une fois d'y inférer des armatures de fer 5 on fut obligé de faire la même chofe aux colonnes précieufes dont nous venons de parler. Néanmoins malgré la prodigalité des
ornements répandus dans ce Temple , il n'en réfulte guère qu'une merveille gothi- que (0); encore la plupart de nos ancien- nes Cathédrales font-elles plus varies que Sainte-Sophie : quelques-unes même ont: des tours & des clochers plus hardis que la coupole d'Iiîdore 5 en forte que ce mo- nument ne doit guère iâ célébrité qu'à |
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d'une proportion bien éloignée des ordres créés par les.
Grecs & par les Romains ; les chapiteaux, pour la plu- part , font d'un goût û bizarre, qu'on ne fait à quel ordre ces colonnes appartiennent. (0) Voyez les planches de ce monument, gravées par
Grelot, &: celles inférées dans le fécond volume des Commentaires de Dom Banduri, qui donne de longueur à ce monument 260 pieds de l'occident à l'orient, & il3 de largeur du midi au nord. Eiij
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70 Introduction.
la hardieiTè de ion entreprife chez une na-
tion iî fujette aux révolutions de la nature & à l'inconftance du gouvernement poli- tique. Il ferait difficile de fixer l'époque de plu-
iieurs anciens monuments dont on voit au- jourd'hui des vertiges; tels font entr'autres l'amphithéâtre, le théâtre & les arènes d'Ar- les. Néanmoins on préfume que l'amphi- théâtre fut conftruit par Tibère > Qüelteur de Jules Céfar, lorfqu'il étoit chargé de con- duire des Colonies dans les principales villes des Gaules ; il étoit rare en effet que les Romains en envoyaiTent dans des villes un peu renommées, fans y faire bâtir un amphithéâtre : ce qu'ils faifoient dans l'intention de gagner le cœur de leurs nouveaux fujets. L'amphithéâtre d'Arles a pâlie pour un monument des plus remar- quables ; il étoit entouré de portiques à trois étages, le premier Toican, le fé- cond Corinthien , & le troiiieme Attique. Sa circonférence, dans fa partie fupérieure, étoit de cent quatre-vingt-quatorze toifes trois pieds. Le frontifpice avoit dîx-fept toifes de hauteur ; la place du milieu > appelée Arène, avoit du levant au cou- chant foixante-onze toifes trois pieds. PIu- fieurs Empereurs y firent célébrer des jeux magnifiques. |
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In t ro du ct ι ο it. fi
On n'eft guère mieux inftruit au fujet
de l'Auteur du théâtre d'Arles, que fur le temps de la conftrucKon de cet édifice > on fait feulement que Conftantin (ρ), fils de Conftantin le Grand, fejourna un hiver" entier dans cette ville, & qu'il y fit célébrer avec la plus grande magnificence les jeux du théâtre & ceux du cirque. L'empereur Gallus (q) avoit long-temps auparavant- fait auflî repréfenter à Arles les mêmes jeux ; Saint Hilaire ayant depuis rempli le Siege de cette ville, en 419 , le théâtre fut dépouillé de fes plus beaux ornements > on acheva de le détruire durant les guerres fanglantes que les habitants eurent à fou- tenir contre les Goths &c les Francs. Ceux d'Arles, qui trouvoient dans ce mo- nument des pierres toutes taillées, & pro- pres à fermer les brèches faites à leurs murailles, les employèrent à cet ufage. Le diamètre de ce Théâtre étoit de 50 toifes. La conitruction des Arènes d'Arles eil poftérieure à la conquête des Gaules par Jules-Céfar ; elles font fituées près des murs de la ville du côté du midi : les édifices, qui les entouraient étoient bâtis de gros quartiers de pierre grife de fix, dix& douze |
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(p) Ce Prince mourut en 340^ âgé de 2j ans.
{}) Mon en 153. Eiv
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7* Introduction.
pieds de largeur. Cette pierre tient de la
nature du marbre bejard. Le plan des Arènes eft une ellipfe dont les diamètres font de 50 &. 65 toifes. Le peuple pouvoits'y ra£ Îembler au nombre deieizeàdix iept mille perfonnes ; la façade intérieure a de hauteur 1 1 toifes ; elle eft décorée de deux ordres élevés les uns fur les autres, &. dont les colonnes font engagées d'un tiers: chacun de ces ordres forme un rang de portiques» compofé de foixante arcades ; l'ordre fupé- rieur eft furmonté d'un focle portant des encorbellements qui reçoivent des poteaux à mouffles. On attachoit à ces poteaux la tente qui couvroit l'Arène. Autour de I'attique regne un trottoir large de cinq pieds. De ce trottoir, qui iervoit de chemin aux ouvriers , on defcendoit au pallium par trente-trois rangs de gradins, iervant de fieges pour le peuple. La ftructure de ce monument en général étoit grofîîére- menttraitée, fans moulures, δ: feulement chanfrainée ; l'intéri jur de l'Arène étoit fermé d'un mur de 9 pieds de hauteur , au- tour duquel régnoit un grand pallier. C'eft fur ce pallier qu'ctoient les iîéges référvés pour les Sénateurs ; entre le mur d'enceinte de r*Arène, & le portique intérieur , on voit encore des voûtes qui étoient defti- nees à renfermer les bètes féroces. Au centre |
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Introduction. 75
<îe l'Arène étoit un Autel où fe faifoient
les facrifîces avant & après les jeux publics. La plus grande partie des gradins de cet édifice eft démolie, & fa façade enterrée de 8 à 9 pieds fous le pavé de la Ville. Aujourd'hui l'Arène eil couverte de mai- fons d'Artifans, qui forment deux rues, à la rencontre defquelles eil une place. On prétend que Charles Martel (r) contribua beaucoup à la deilruclion de ce monu- ment , lorfqu'il fît mettre le feu à la ville de Nîmes, où s'étoient fortifiés les Sarra- zins qu'il pourfuivoit. Malgré le ravage caulë par cet incendie , on voit encore pluiîeurs bas· reliefs antiques , où font re- Î>réiéntés un combat de Gladiateurs, une
ouve allaitant Rémus &RomuIus, & quel- ques Divinités du Paganiime. Aux combats de Gladiateurs qui fe II-
vroient fur les Arènes, les Romains vou- lurent joindre la repréfentation des combats de mer : les ouvrages qu'ils firent élever dans ce genre, ne contribuèrent pas moins à manifeiler la grandeur de ce Peuple ; ils creuferent des lacs, les remplirent d'eau , |
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( r ) Charles Martel, fils de Pépin Hénfial, comman-
doit les armées Françoifes, fous le règne de Chilpéric II, $c mourut en 741. |
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74 In t ro du ct ι on.
&L les entourèrent de portiques & d'amphi-
théâtres auffî commodes pour les fpeclateurs, que magnifiques par leur ftructures : là on faifoit combattre des vahTeaux les uns conj tre les autres. Jules-Géfar fut le premier qui donna au peuple Romain le Spectacle «l'uneNaumachie.. Les apprêts d'une pareille fête excitèrent il fort la curioiîté , qu'il fallut loger fous des tentes les étrangers qui arrivoient en foule de toute part. La naumachie de l'Empereur Claude fe fit vers l'an 50, fur le lac Fucien. On vit com- battre deux flottes, l'une de Sicile, l'autre de Rhodes, chacune de cinquante galères à trois ou quatre rangs de rames ; elles contenoient plufîeurs milliers de combat- tants , parmi lefquels étoient des hommes condamnés à mort. Un triton fortant du fond de l'eau , & mû par une machine hy- draulique, fonna du cornet pour donner le iignal du combat. Pour augmenter l'hor- reur de ces fortes de batailles , qui ne lahToient pas d'être ianglantes, Néron y mêla des monflres marins, d'une grandeur prodigieufe. La naumachie de Domitien, félon Suétone , a été regardée comme une des plus grandes entreprifes qu'on ait jamais conçues : on creuià, dit-il, un lac fi confî- dérable, qu'on pouvoit y ranger aifément des flottes entières. Ce lac étoit auiïi en~ |
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Introduction. 77
touré de portiques. On,voit dans l'Archi-
tecture hiitorique de Fifcher , la nauma- chie de Domitien, gravée d'après une an- cienne médaille. Tant de vaites monuments , tant de
grands édifices, d'ouvrages célèbres, fruits du luxe & de l'induilrie de cette Nation •florillante , contribuèrent à former des Artiftes du premier ordre. D'ailleurs les cérémonies pompeufes de la Religion des Romains , la foule d'Etrangers qu'atti- roient leurs Fêtes folennelles, la néceiîîté de conftruire de vaftes édifices pour contenir la multitude des fpectateurs qui affiftoient aux combats des athlètes , & aux autres jeux du cirque , furent autant de caufes qui concoururent aux progrès de l'Architecture ; de-là ces monuments admirables dont les veftiges nous étonnent encore. Mais enfuite l'Architecture éprouva les
mêmes revers, qui diviierent & détruifirent l'Empire Romain -, elle devint la proie de la licence δι du mauvais gout. Elle demeura plongéedanscet étatd'abaiiTement, durant tout l'intervalle que la grandeur de Rome fut éclipfée , & ne fe releva que lorfque cette fuperbe Ville fut devenue la Capitale du monde Chrétien 5 en forte que l'on peut dire avec le Père Montfaucon , que la belle |
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η& In τ ρ, ο nu ct ι ο ir'.
antiquité a prefque difparu fous le régna
de Théodofe le jeune, qui monta fur le trône vers l'an 450. Ce fut lui qui fît élever à Conflaminople la colonne appelée Théodoiîenne, chargée des trophées de fon aïeul, & où l'on a long-temps remarqué Iqs traces de l'ancienne fculpture, qui dès- lors étoit déjà dégénérée de fa perfection. Ce fut vers ce temps , que les peuples du Nord, qui vinrent inonder l'Empire, y détruiiîrent les monuments du génie : tous les Arts, & particulièrement l'Architecture, la Sculpture & la Peinture , tombèrent dans l'oubli , & relièrent enveloppés de ténèbres, fans que les Artiites fongeaiîènt à fe rappeler la fplendeur de ceux qui hs avoient précédés 5 en forte que les chefs d'œuvre qu'on a vu éclore depuis , ne doivent leur perfection qu'à ce qui a pu échapper , êc aux injures du temps, & aux infultes de ces Peuples féroces, qui n'avoient pour la plupart, nul goût pour tout ce que les Arts avoient inventé de plus excel- lent (s). Les grotefques prirent alors fa.- (s) Malgré cette obfervatîon s il faut avouer qu'on
doit à ces peuples beaucoup d'inventions inconnues juf- ψιά lors ; de ce nombre font les moulins à vent & à eau , les lunettes, les vitres , la bouflole , l'imprimerie,. Sec. découvertes qu'on n'a pu perfectionner que depuis que les Arts ont repris tout leur luftre, |
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iNTRonucTioN. 77
veur en Italie 5 hs Arriite's de cette Nation
empruntèrent de l'Egypte des fecours pour enrichir leurs compoiîtions , qui par - là devinrent beaucoup moins eilimables, que lorfqu'ils hs avoient puifés originairement chez les Grecs. A juger de ces ornements par le recœuil des Peintures d'Hercula- num , rien n'eft û biiarre que la plupart de œs productions 3 dks reiTemblent aux arabefques dont on a fait tant d'ufage en France avec auifi peu de raifon. On remar- que dans les unes comme dans les autres , <^Qs baldaquins élancés dans hs airs , & foutenus par de frcles colonnes j on y voit des monftres ferpentants autour de foibles rofeaux , des plans fans régularité , des conftrudions fans apparence de folidité, des ornements fans choix & fans dimeniion \ imitations, pour la plupart, des ouvrages des Chinois : 'Peuples qui, félon M. l'Abbé Barthélemi, a reçu plufieurs ufages des égyptiens, chez leiquels l'art n'écoit ni fixe m ioumis à la févérité des regies 3 auiïï voyons-nous qu'ils s'étoient abandonnés à tous les genres de licences, depuis fur~tout que la fervitude eut avili ces, hommes, au- trefois iï recommandables ( t ). |
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lciv} ilnfr bon d.e remarSuer ^ue Μ· rAbbé Barth£-
«my, aans ion explicatif de la raofaiejue de Paleftrine # |
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η% ÎNTRonucTionl
Les Gotlis , les Francs , les Huns, le$
/Vandales &c les autres Peuples qui fortirenc des extrémités du Nord , ayant fubjugué δί partagé entr'eux ce ν aile empire, fe firent un barbare plaifir de détruire ou de mutiler tous les monuments de fa fplendeur 5 ainiî fu- rent ruinés la plupart des édifices dont nous venons de parler : il n'en feroit pas même reflé les moindres,veiHges, fi quelques-uns de leurs Rois, épris de l'amour des Beaux- Arts, n'euiTent ordonné qu'on rétablît dans Rome de dans les Provinces voifînes, les monuments endommagés, & qu'on raiTem- blât les débris de ceux qui ne pouvoient fe réparer, Tel fut entr'autres Théodoric, Roi des Oftrogoths. Ce Prince non-feule^ ment défendit qu'on ruinât les anciens monuments , plus qu'ils ne l'étoient déjà, mais encore il fit mettre en œuvre hs dé- bris de ceux qu'on ne pouyoit reifcaurer. La plupart de ces débris furent employés à Ravenne, ou fut élevé un Temple fom- ptueux, appelé la Bafilique d'Hercule. Ce Temple fut orné d'antiques fragments de marbre qu'on y apporta de toutes parts , |
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ne propofe cette reffemblance entre les grotefques d'Italie
& les produ&ions équivoques des Chinois, que comme un foupçon, fans l'adopter, dit-il, ni le combattre ni l'approfondir, |
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Introduction. f, 79
& confirait fur les deifins de l'Architecte
Daniel, dont Caffiodore loue l'induftrie dans l'aiTemblage de ces différents com^· partiments. Théodoric fit auffi élever de rétablir à Rome pluiîeurs édifices donc il confia le foin à l'Architecte Aloïfîus. Athalaric («■}.-, fucceiTeur de Théodoric, ne fe diftingua pas moins que fon aïeul, par la protection qu'il accorda aux Beaux- Arts. Le goût de l'Architecture, loin d'être
renfermé dans les bornes de l'Italie y fe manifeita dans pluiîeurs autres contrées de l'Europe ; Arthur (x) , qui régnoit dans les Iles Britanniques , y fit conitruire des Temples &: d'autres Edifices confidérables. * Alors on vit s'élever en France quantité d'Egiifes que Clovis, Childebert, Clotaîre &c Dagobert (y), firent contraire en diver- £qs Villes du Royaume. |
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( u ) Ce Prince monta fur le trône en f 16 i & mourus
en 534. ( χ ) On n'eft pas bien certain qu'un Prince de ce
nom ait régné dans la grande Bretagne j mais les monu- ments dont nous parlons y exiftent ; & cela fuffiroît à THiftoire de l'Architecture 3 fi Ton ne devoit, autant qu3ü eft poifible, y exprimer les dates. (y) L'Hiftoire de France eft trop connue de la plus
part de nos Leiteurs, pour que nous croyons devqif fixer' les années de l'inauguration & 4e h mop de «hacun m nos Rois. |
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«
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So Introduction.
Les autres Puiifances de l'Europe , êC
fur-tout les Princes & hs Républiques d'Ita- lie , iüivirent l'exemple de ces Monarques, favoriferent l'Arcliiteclure , & iîgnalerenc leur gouvernement par des édifices publics èc particuliers. Mais nul Prince ne contribua, autant que
le reilaurateur de l'Empire d'Occident ? à relever la gloire des Arts & particuliè- rement de l'Architecture. La France, l'Alle- magne δι l'Italie , confervent encore de précieux relies des édifices.que CKariema- gne fit élever. Un des monuments qui ont Je plus fignalé le goût-de cet Empereur , c'eil l'Eglife qu'il fit conitruire à Aix, après avoir clioiiî cette Ville pour la Capitale de ion Empire. Ce Prince y fit élever cette magnifique Eglîie , qui a donné à la Ville le,'iurnom de la Chapelle. Louis le Débonnaire , fon fils, ne laïüa
pas d'avoir auffi du goût pour l'Architec- ture. Sous fon regne fut commencée l'Eglife Cathédrale de Reims , qui néanmoins ne fut achevée que durant TEpifcopat d'Hinc- mar j cette Eglife peut être regardée comme un des plus beaux monuments gothiques,: "mais les guerres civiles qui defolerent la "France fur la fin de fon regne, & fous celui de quelques-uns de fes Succeifeurs, retardè- rent confidérablement les .progrès de l'Are, Dans
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Τ Λ O J> V C Τ Ι Ο Ν. Si
Dans cet intervalle les Normands ? les
Danois &; les Sarrazins détruifirent la plu- part des Eglifes &c des Palais dont la France «toit ornée. Ce ne fut .guère que ions îe -regne de Charles le Chauve & de Robert qu'on vit rétablir quelques-uns de ces édi- fices; alors ces Princes ranimèrent mi Art dont le goût étoit change depuis la déca- dence de l'Empire Romain. Ce fut fous le regne de Robert-,' _&. pendant PEpi-ico- pat de .Fulbert, que rut bâtie -l'Egliïe de Chartres, telle-qu'on .la voit .aujourd'hui. Les Gots en s'adonnantà l'Architecture,
/entîrent peu les beautés de celle des Grecs &c des Romains. Sortis des régions du Nord, où la néceffité les avoir accoutumés .à fe précautionner contre le ravage âts torrents, les rigueurs du froid , & î'irapétuofîté des vents j ils apportèrent dans des climats plus tempérés, les même idées que leurs beioins leur «avoient fait concevoir : ils les reéliöè- rent à la vérité fur les modèles des édifice-/ Romains ; mais ces modèles étoieat déja: éloignés delà perfection de ceux élevés fous les règnes des Céfars. Depuis Sévère, l'Ar- chitecture avoit fort dégénéré : auffi vit-on chez les Gots , la prodigalité des orne- ments ^ iliccéder à la implicite noble £c majeilueufe des anciens monuments | ils s'éloignèrent même des proportions. h% Tome ƒ, E |
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§2 INTRODUCTION.
hauteur exceffive de leurs colonnes n'avoît
nul rapport avec leurs diamètres. Au-lieu d'imiter le tronc des arbres , ils n'en imi- tèrent que les branches $ en un mot, les Archite&es Gots firent confifter leur induf trie à élever des édifices folides à la vérité, mais plus étonnants que réguliers : ainil furent bâties la plupart de leurs Egliies, •que nous voyons encore. Néanmoins quel- ques-unes font conftruites avec tant de har- diefle, qu'on ne peut leur refufer une forte d'admiration. UArchiteéhire étoit livrée aux incerti-
tudes & en proie à la licence des Archi- tectes Gots, lorfque le onzième fiecle vit naître un nouveau genre d'Architedure gothique. Les fciences floriifoient depuis long-temps chez les Maures , ou Arabes > ils avoient fait des progrès dans la Philofo- phie , dans les Mathématiques, dans la Chimie & dans la Médecine. Devenus maîtres de TEipagne , ils y apportèrent ces diverfes fciences qui fe répandirent bientôt dans tout le refte de l'Europe. On lut leurs Auteurs , on imita les édifices conftruits dans le pays où ils venoient de s'établir*, & Ρ Architecture fe reiîentit du génie qui dominoit dans leurs productions* L'Arçhite&ure gothique ? proprement dite, |
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Introduction. ffy
étok maffîve &: pefante j la moderne , donc
nous parlons , fut peut-être trop légere , trop délicate & trop chargée d'ornements inutiles & de mauvais gout 3 elle créa, à la vérité , des chers-d'oeuvre d'un nouveau genre 5 mais la Sculpture à laquelle elle pré- iîdoit aurlï, ne montroit que fa foibleiîe & l'ignorance de fes Artiites. Un nombre coniïdérable de Temples , de Palais S£ de Châteaux furent confirmes dans le goût morefque. Alors Philippe-Auguile fie agrandir Paris èc y fît ajouter des embeJiiiIè- ments. Sous fon regne Thomas de Cormont & Robert de Luzarche firent bâtir i'Êgliie cathédrale d'Amiens, dont la longueur eft de 60 toifes ihr 22 toifes de hauteur5 puis on vit s'élever à Reims l'Eglife de S. Ni- caife, conftruîte fur les deiîîns de Hugues Libergier. £111351 Jean de Chelles acheva la conftrucHon de l'Eglife Cathédrale de Paris, commencée du temps de Charle- magne. Après fon retour de la terre Sainte, S. Louis rît élever fur les deiîîns de Pierre de Montreau, la Sainte-Chapelle de Paris i celiede Vincennes., ainfï que le Réfectoire, le Dortoir ? le Chapitre & la Chapelle Notre-Dame , qui font dans le Monafèere de Saint-Germain-des-Près. Ce Prince char- gea Eudes de Montreuil de conftruirë plu- fieurs autres édifices, tels que le Val des Fij *
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$4 Introduction.
Ecoliers , aujourd'hui la Culture Sainte^
Catherine, PHôtel-Dieu, Sainte-Croix de la Bretonnerie, les Blancs-Manteaux, les Quinze-Vingts, &. les Eglifes des Mathurins, dts Chartreux & dts Cordelîers de Paris ({). Cet Architecte avoit accompagné faint Louis à la Terre-Sainte, où il avoit fortifié le Port &. la ville de Joppé. JoiTeîin de Courvault, ingénieur de iaint Louis, qui avoit auffî fait le voyage d'Outremer, eut la conduite de plufieurs autres Monafteres. Il femble néanmoins qu'en bâtiiîant dans le genre de l'Archke&ure Morefque , on n'eût pas dû imiter ce qui convient plus a dts climats chauds , qu'à dits climats tempérés s cette Architecture , qu'on a de- puis appelée gothique moderne , régna en France êc en Italie, jufqu'au Pontificat, de Léon X. La fondation de la Baiilique de S, Pierre
de Rome fut l'époque de la renaiiTancc de la belle Architecture ? monument célè- bre y & qui en furpaiîant ceux de la Grèce 6c de l'ancienne Rome , devoir confirmer les merveilles publiées au fujet du Temple de Diane à Ephèfe , èc de Jupiter Olym- pien à Athènes. Excités à donner les de£ |
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(t) Voyz% Thevèta vie des Hom. Illuftres liv. a.
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Introduction. fi
fins d'un Temple plus vaite & plus beau;
que celui qu'avoît fondé le premier Empe- reur Chrétien, les Architectes d'Italie, Ce virent obligés de puifer dans la fource du vrai beau 5'ils la trouvèrent dans les modèles Grecs, & dans ceux que leur avok anciennement offerts leur Patrie. Les hom# mes de génie parurent enflammés du déiîi? de tranimettre leur nom à la poitérité , avec celui de ce fuperbe édifice. Du fein des ténèbres de l'ignorance on vît donc fortîr des Artiites fublîmes, qui rendirent à l'Ar- chitecture, à la Sculpture & à la Peinture, la perfection que ces Arts avoient perdue, depuis tant de liecles, Ainii le feizieme iiecîe fut celui du re-*
nouvellement des Arts en Italie. Pendant que le Nord , l'Allemagne, l'Angleterreêc: la France en proie à des guerres de Reli- gion , négligeoient l'Architecture, elle éle-« voit des prodiges à Rome & dans la plus! grande partie des Provinces de cet Empire., Dix Papes de fuite contribuèrent fans Inter- ruption à l'achèvement de la Baiilîque de S. Pierre > le génie fembloit alors apparte- nir à ce Peuple, aînii qu'il avoir été le par* tage de celui de la Grèce. Conftantîn avok y comme nous avons die.
ordonné la conitrudion de l'ancienne Bali-, lique de Saint Pierre, Ce Temple, feîon Fii]
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U Introbvction.
les plans qui nous en reffcent, étok Cöm-
pofé de cinq nefs , dont les voûtes étoienc ïbutenucs par cent colonnes d'ordre Co- rinthien. On y arrivoît par une grande place quarrée qu'entouroient de vaftes pé- ryitiles. Le PapeNkoias V (a),voyant que ce monument touchoit à fa ruine, conçut le deifein de faire élever une nouvelle Egli- iè, dont la magnificence furpaiïat celle de l'ancienne Baiilique. Il confia le foin de travailler aux deffins du nouveau monu- ment à Bernard RoiTelin&: à Léon-Baptifte Alberti. Ce dernier voulant fe préparer à l'exécution de ce grand projet, entreprit d'abord la conitru&ion d'une vaux tribune au chevet de l'ancienne Baiîlique , ôc fit démolir pour cet effet le temple de Probus, iïtué près du même chevet $ mais la tri- bune n'avoit encore de hauteur que trois coudées , lorfqu'Alberti mourut ·> le Pape JJNlcolas V le fuivit de près au tombeau. Ce pape n'ayant pu voir exécuter les déf- inis d'Alberti, Jules II, un de fes fuccef- jfeurs j pofa la premiere pierre de l'édifice. Après avoir chargé les plus habiles Archi- tectes de l'Italie d'un projet du nouveau Temple, il préféra ceux du Bramante. Ce-» (a) Mort en 145/.
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Introduction'. %·?
Îrendant Michel-Ange Buonaroti, nouvel-
ement arrivé à Rome , ofa blâmer haute- ment ces deiîins. Pour accélérer la con- itruction de la nouvelle Eglife 3 le Bramante avoit fait brifer les colonnes de Con£ tantin * Michel-Ange prétendit qu'on au- roit pu coniërver &c employer ces colonnes. Néanmoins le Bramante fit élever en peu de temps l'édifice jufqu'à l'entablement des principaux piliers (b). ■' Léon X, fucceileur de Jules II, donna tous
fes foins au nouveau monument, il en char- gea Julien de S. Gai, le frère Joyeux Véroneie Dominicain, & Je célèbre Raphaël d'Ur- bain , qui avoit appris l'Architecture du Bramante ( c ). Déjà ce Pontife déiefpéroit de voir l'exécution entière des deffins da Bramante, lorfque Balcliazar Péruiîus lui confeilla de faire pluiîeurs changements à {es projets j cet Architecte prétendant que le plan du Bramante étoit défectueux quant à la folidité. Il confervoit néanmoins le |
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(b) II étoit occupé à compofer fes cintres de char-
pente pour foutenir les voûtes 3 lorfqu'il mourut ert 1JI4, & fa mort ven'oit d'être précédée de celle de Jules II. V ( c) Peu de temps après, Julien & le Frère Véronefè
abandonnèrent le féjour de Rome ; le premier mourut à Florence en 15175 fa mort fut fui vie de celle de Ra^ |>hael en 1520» Fiv
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S£ Introduction.
grand dôme : maïs il donnoit à l'édifice
une forme quarrée au lieu de la forme rec-^ tangulaire que Je Bramante lui avoit aiïi- gnée : dans ces circonilances Léon X mourut en 15 h. Adrien VI ne lui furvécut que d'un an:
|es troubles dont fut agité le Pontificat de Clement VII (d) ne lui permirent pas de s'occuper de cette entrepriië. Paul III fit éclater fa magnificence par les embeliiiïe-' ments que reçut la Capitale de fes Etats „ &c témoigna beaucoup de zèle pour la eonftruclion de la nouvelle BaiïÎique 3 alors Antoine de Saint-Gai, fils de Julien, ima- gina un plan encore plus vaite que celui de Péruiîus (e). ; A ces deux Artiftes fuccéda Mîchel-Ange,
qui ne fe chargea néanmoins de cette en- treprife qu'avec beaucoup de peines car îî trouvoit leurs deiiîns d'un goût gothique & prévoyoit que l'exécution en feroit trop longue & la dépenfe immenfe : il prétendoic ..(T.·..-. ■ ■ . ■ \. _ . r,,-. ■
(i) Ce Pontife régna dix ans ; il mourut en 1/34»
Le regne de Paul III, fon fuccefîeur , fut encore plus long > il dura jufqu'en 1549. (e) Selon le ■ fils de Julien de Saînt-Gal? TEglife
auroit eu de longueur 3 mille quarante palmes , & trois, cent foixante palmes de largeur. Antoine de Saint-Gai expofa en public un modele en bois ; il avoît pour Aiîbcié dans cette entreprife 3 Laurent Florentin 3 connut fous Je nom de Lauren^et > celui-ci mourut en j 541 3 8c Antoine de Saint-Gai en 1546. - |
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Ι ν τ R o nu er 'j^EßM §£
äu contraire que fans trop s'éloigner des deiîîns du Bramante, on pouvoit élever un' Temple beaucoup plus régulier : ce qu'il prouva par un modele moins étendu | mais d'une forme plus agréable & qui of- froit un meilleur choix dans les ornements*- Le nouveau modele plut iî fort à Paul III que ce Pontife accorda à Michel'-Ange la direction entière du monument, avec pou- voir d'élever ou d'abattre à fa volonté, 6c d'employer tel nombre d'ouvriers qu'il ju- geroit convenable^ mais à peine cet excel- lent Artifte eut-il fait travailler l'efpace de trois années, à la conftrudion de cet édi- fice, que la mort enleva Paul III. Jules III lui ayant fuccédé, Michel-Ange demeura expofé aux traits de l'envie. Néanmoins le nouveau Pontife lui conferva la place que fon prédéceifeur lui avoir confiée. Peu de temps après Jules III mourut ( ƒ) j le Pon- tificat de Marcel II, qui lui fuccéda, eut encore moins de durées Paul IVfut élu pour lui fuccéder 3 alors Michel-Ange eut à eifuyer de nouveaux chagrins 5 d'autres obf- tacles lui furent oppofés, mais il fut habî- |
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(ƒ) Jules III, n'avoit occupé le faim. Siege que £
ans; Marcel II, fon fucceifeur, ne l'occupa qu'un an, faul IV-, ^qui vint enfuite, régna 3 ans, & mourut ea |
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'$Ù / jv τ RO i> ύ c:.t ι ο jv\
îement les furmonter > depuis long-temps
il méditoit la conftructîondudôme^tel qu'on le voit aujourd'hui s le modele achevé , ce Frojet fut univerfellement approuvé, mais
exécution en fut retardée par la mort de Paul IV. A ce Pontife fuccéda Pie IV, qui témoigna beaucoup d'afFedion à Michel- Ange y & renouvela les brefs que lui avoientr accordés fes prédéceiTeurs. ; Déjà s'etoient écoulés dîx-feρt ans, du- rant lefquels Michel-Ange n'avoit ceiTé de s'occuper de ce monument , lorfque la: calomnie chercha de nouveau à le traverfer» Le Pontife lui rendit juftice & punit fé-* verement fes ennemis ; mais Ces travaux pénibles, joints aux ennuis ôcaux chagrins qu'il avoit éprouvés, femblerent hâter la fnde les jours (g ). A la place de l'Artîfte qu'on venoit de
perdre, Pie IV, nomma Piro Ligofio ëc Jacques Βaro^io^ plus connu fous le nom de Vigîiole \9 èc leur recommanda très - ex- preilement de ne point s'écarter des def- îîns de Michel-Ange. Pie V (g), fon fucceiîeur , renouvela la même défenfe. Cependant Ligorio ayant voulu innover, le |
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(g) Cet Artifte mourut le 17 Février 1564.
i tÄ> Pif iy S Pie V régnèrent 13 ans, Tun 6 8è
ι autre 75 le dernier mourut en 1/71, |
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In τ Ro du er τ ο ν. $i
Pontife ordonna qu'on abatît les ouvrages
que cet Archke&e avoit fait conftruire $ &: chargea Vignole feul de la direction entière de l'édifice. Ce dernier y travailla l'efpace de neuf années, s'attachant plus aux dehors du Temple qu'à la conilruciion du grand dôme. Pie V> peu tranquille à caule des armements de Séîim,Empereur des Turcs, s'occupa uniquement du foin de faire échouer hs projets de fon ennemi. Durant fon Pontificat la coriftruâîon de ce Temple^ connu auiîi fous le nom d'Eglife du Vatican, fut fort négligée. GrégoireXIIÏ (i) ayant fuccédé à Pie V, Jacques de la Porte fut nommé à la place de Vignole, dont il avoit été Difcipie : l'Egliie fut enfin couverte* on y ajouta des Chapelles, elle fut ornée de peinture & de fculpture > mais le grand dôme étoît refté imparfait. Il étoit réfervé à Sixte-Quint (k) de furpaifer , dans l'efpace de cinq ans, la magnificence des Céfars > ce Pontiiice fit travailler fix cents Ouvriers nuit & jours pendant vingt-deux mois. En 1590 le. dôme fut entièrement conitruit ? on le revêtit enfuite de plomb, il fut orné |
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(i) Grégoire XIII fuccéda à Pie Ven 157z, &
fnourut en ijgj. " (A) Ce Pape célèbre par le bien & le mal qu'il ft'
tajit, mourut en ijoo. |
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ψΕ In trö ou cf ι ο νΊ
fous Urbain VII (/) de côtes de métai
doré. Sous Clément VIII la lanterne com4 pofée par Michel - Ange , fut exécutée &L perfectionnée par Jacques de la Porte 5 eiir fuite Paul V fit prolonger l'Eglife fur les deiîîns de Charles Madérus, $c conitruire le portail fur ceux de Michel-Ange. Tous ces ouvrages furent achevés en 1614.
Urbain VIII, Innocent X, Alexandre VII êc pluiîeurs autres Papes enrichirent ce Temple de nouvelles chapelles y de fépuk tures, de tombeaux &: d'autres embelJiiîè- ments , qui furent faits fur les deiîins des plus fameux Artiiles d'Italie .· ce qui a rendu ce monument le plus célèbre de toute la chrétienté. Enfin , ce fut encore Alexani4 dre VII qui fit conilruire , fur les deifins du Cavalier Bernin , cette belle place ,- entourée d'une fuperbe colonnade qui donne entrée à ce Temple &: au Palais du: Vatican (m). -------------------------------------------------,-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
(/) Urbain VII régna très - peu j il mourut'l'année i[
même de fon exaltation. Les Papes dont il nous refte àparlerr'ne fe fuccéderent pas immédiatement j nous n'in- diquerons pas ici les dates de leurs règnes , ces dates D'étant pas néceifaires commeTétoient les précédentes Ä pour marquer les progrès de la conftrucüon de l'Eglife 4e Saint-Pierre. (m) Ce Temple a de longueur dans œuvre, felon-
ie Chevalier Foritana', 102 toifes & demie j fa hauteur ious clef, eit de 51 toifes 2. pieds ; la largeur de.1%- |
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ϊ Ν Τ R Ο Ώ U C Τ ϊ Ο Ν. $$
ήΐ Telle eil à peu-près 1'hiitoire abrégée de
ce monument, qui mérite une attention particuliere , pouvant être regardé non- feulement comme un enfemble de perfec- tions, mais encore comme les chefs-d'œuvre des talents immortels d'un grand nombre d'Architectes célèbres, &; de tant d'autres excellents Artiiles que Rome a vu naître dans fon fein. L'Angleterre , ayant embraifé le chriilia-
nifme , ne voulut pas que le compagnon des travaux évangéliques de S. Pierre fut moins honoré que ce Prince â^s Apôtres. Londres fit élever fur les ruines d'un an- cien Temple de Diane une cathédrale en |
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nef eft de 13 toifes & demie, & fa hauteur fous clef
de 2ζ toifes & demie. Le frontifpice a de largeur fa toifes 2 pieds hors œuvre 3 & a de hauteur 67 toifes 2 pieds, en y comprenant la Croix placée fur le dôme 5 ee qui revient au double des tours de Notre-Dame de Paris : le diamètre des colonnes du frontifpice eft de 8 pieds 2 pouces , & celui de celles de la colonnade qui entoure la place, eft de 4 pieds 2 pouces. Le Chevalier Fontana nous donne auiïi une notice des
fommes auxquelles fe font montées les dépenfes de la conftruélion de ce Temple: elle montoit, dit-il 3 en 1614 a la fomme de quarante-fix millions huit cent mille quatre cent quatre*- vingt - dix - huit écus Romains , valants , monnoie de France , deux cent quatre millions cinq cent foixante quatorze mille deux cents livres ; encore dans cette fomme .ne font compris ni les frais des modèles ni le prix de la démolition des murs abattus pour donner s, la Bafilique fa forme a&uelle , ni même le prix dij. |
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f4 ΙΝ TR O DU CT I O Ν,
l'honneur de Saint Paul , qui, par fa grari-^
deur , ne le cède qu'à la Baiîlique de Rome. Erkinvald, quatrième Evêque de Londres, en 67^, employa des fonds imrnenfes à rembeililfement de cette premiere EgÜfe qui fut réduite en cendre en r 221, fous Guillaume le conquérant. Maurice dixième Evêque de la même ville , entreprît d'en faire confiai ire une féconde digne, par ia magnificence , du culte auquel elle dévoie être confacrée , & il la fît élever fur les mêmes fondations. La. charpente & le clo- cher de celle-ci , furent confumées au milieu du feizieme fiecle s après cet acci- dent δι pendant qu'on travailloit à le ré- parer, tout ce monument fut encore brûlé ,,·»-—-------------—-----------------------------------------------—y—------------------------------------------------------------------------------------------------__------------,---------------------------------------------
■?.»'■
clocher élevé fous Urbain VIII, qu'il évalue à plus
de cent mille éctts Romains. Peut être trouvera-t on que nous nous fommes trop
étendus dans la defeription de ce Monument j mais nous avons cru que fa corjftruótion étant plus près de notre fiecle 3 intérefleroit davantage les Architectes, 8è particulièrement les Elevés de France, qui vont en Italie pour y puifer les^ préceptes de la bonne Architecture. Nous aurions déliré même pouvoir nous étendre fur toutes les autres productions 3 dont nous parlons dans cet Ouvrage s ce que nous aurions fait, fi nous avions pu trouver des Mémoires fatisfaifams à cet égard, per- fuadés que nous fommes 3 que rien n'eft plus capable d'échauffer le génie de nos jeunes Architectes 3 que de les mettre à portée d'étudier 3 dans les fources, les chefs- d'œuvre qui fe font élevés depuis le temps des anciens Egyptiens jufqu*à nous. |
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V
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In tröductiö m $f
par l'incendie, connue fous le nom de feu?
de Londres. Ce fécond Temple contenoit, dit-on,
les ornements les plus précieux, on y ce- lébroit, avec la plus grande magnificence, les obfeques des Empereurs, des Rois &· ' des Princes. Les grandes Fêtes y étoient auffi folennifées avec ' beaucoup d'éclat. Après la ruine entière de ce monument cé- lèbre , pour fon temps, en chargea Chrif- tophe Wrein , Architecte Anglois d'une grande réputation , de donner les deffins d'une troîfïeme Eglife, en les aiïujettiifant aux anciennes fondations ; c'en1 après une tentative inutile de deux années qu'il dé- termina les perfonnes intéreifées à l'érec^ tion de ce nouvel édifice â les rafer entiè- rement, &■ qu'il imagina d'autres projets dignes, tout à la fois*, &: de fes talenrs iùbiirnes, Se de la nation qui l'avoit choiiî. Alors il propofa un feul ordre d'Archîtec-/ ture pour le frontifpice de ce Temple ; mais ce delîîn ne fut pas approuvé par les Evêques, qui repréfenterent à l'Archi- tede que cette ordonnance coloifale étoit peu convenable à une cathédrale (/2)5 il fe |
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( η ) Ce qui nous paroît étonnant, fî l'on peut s'en rap->
porter à ce récit, c'eii que tous les connoiifeurs regret- tent aujourd'hui que le grand ordre que Wrein avoit \
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0 ê ΙΝ TR Ο £>V'CT Î Ο Ni
détermina donc à y mettre deux ordres ait
lieu d'un, &: profita habilement de cette néceflité , pour y employer la pierre de Portland, reconnue la plus belle de l'Angle- terre , & qu'il n'auroit pu mettre en œuvre dans fon premier projet, parce que cette pierre ne peut fournir des blocs convenables a la bâthTe d'une grande Architecture > d'ail- leurs il prétendit par-là éviter les fautes que le Bramante avoit faites, difoît-il, au portail de S. Pierre de Rome , en altérant les rap- Î>orts que doit avoir l'entablement avec
'ordre , pour n'avoir pas fu faire ufage de pierres d'un volume aiTez confidéra- ble^ quoiqu'il eût la carrière de Tivoli à fa diipoiition. ., Ce monument > tel qu'on le voit aujour-
d'hui , préfente de la grandeur , de belles maifes (o) M beaucoup de dignité 5 néan- moins les connouTeurs reprochent à Wrein pluiîeurs fautes eiTencïelles, celles entr'au- tres d'avoir incorporé de petits pilairres dans les grands , de n'avoir pas élevé aiTez |
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propofé } n'ait pas eu Heu. Le module des ordres du
frontifpice aótuel ne répondant pas , difent - ils a à la grandeur de la fabrique de ce monument. { 0 ) Voyez les plans & élévations de ce monument,
gravés en 1747, & la defeription hiftorique de Guil- laume Dugdalle 3 & de Chriftophc Wrein, imprimée à Londres, -H |
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; Mr τ &o du er ï<î ik p§
fts voûtes δ£ d'avoir donné un diamètre
trop confidérable à ion dôme, relative-' ment à la grandeur de l'édifice; mais en? même temps, ils approuvent beaucoup les peintures de ce dôme , ouvrage célèbre dô Jacques Tornhill, Peintre Anglois,· qui y; a repréfeiité , en huit compartiments , les principaux événements de la vie de Saint Paul. L'Architecte avoit propofé de faire exécuter en mofàïque ces compartiments! il avok même déjà fait venir d'Italie, pour cela, quatre des plus habiles ArtifteS* en ce genre ; mais les difficultés qii'occa* fionna cette main d'oeuvre la fit rejeter ώ l'on préféra les ouvrages de Tornhill , qui fe font acquis tant de réputation. Ce Temple fut commencé en î6yy Si
fini en 1710 (p), aifez court efpace en comparaifon des cent quarante-cinq années Îjue l'on, a été à bâtir la Bafilique de Saint- Pierre jauffi la Nation Angloife fe prévautr •^Uq de cet avantage, d'avoir bâti l'Eglifë |
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'?■■'■ (p) Avant de parler des dimenfîons de rEglife de
Wrein, nous allons donner celles de la précédente élevée
„par Maurice, dixième Evêque de Londres, & qu'ilavolt
fait conitruire fur les ruines de l'Eglifë bâtie originaire-
, ment par Erkinwal, quatrième Evêque de cette Ville. <
: ^ La longueur dans œuvre de l'ancienne Cathédrale,
tetoit.de épo pieds.; .fa largeur dans la croifée 3 de 130
pieds ; la hauteur intérieure de rEglife j.ufqu'au dôme,
Terne /. Q
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jpt Jisr τάο bu er î o Ni
ile S. Paul en trente-cinq années, ious Uia'
feul Architecte & fon fils , par un feul chef· entrepreneur > &: fous un îèul Evêque de Londres, Ôc fur-tout par le fecours d'une aiTez foible impofïtion fur le charbon , tandis que la dépenfe faite à Rome pour l'Eglife de S. Pierre fe montok > félon Fon- tana, à plus de deux cents millions,. comme nous l'avons dit précédemment, dans la note rrij page 92. Ce fut fous le regne de François premier
* jque la belle Architecture commença d'être connue en France. A la voix du père des Lettres &: des Arts, les François fortirent de leur léthargie 3 leur imagination prît Pef for, &: bientôt ils égalèrent les plus grands Maîtres d'Italie. François premier avok appelé SebaiHen Serlio pour la conitruc* tion de Fontainebleau. L'ouvrage de Serlio excita l'émulation de nos Architectes 3 ils lui difputerent la gloire d'élever le Palais du Louvre 3 .& les deflins de Pierre Lef· de ijo, la hauteur extérieure de tout le monument de
520 pieds. : .-> La longueur dans œuvre de la nouvelle Cathédrale,
bâtie par Wrein , eft de 500 pieds j la largeur dans oeuvre de la croifée 3 112, pieds j le diamètre du dôme , de 108 pieds 5 la hauteur intérieure de TEglife jufqu'au dôme, de 110 pieds j la hauteur extérieure de tout \% «aonument, 440 pieds. . . j" *' ' '
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ï fî f RO Dïï ê Τ ϊ Ο Ν. $0
cot; ( q ) obtinrent la préférence fur les fiens ;
honneur dont les Architectes François ont joui plus d'une fois depuis. En effet Claude Perrault (r) fut ehoifî pour élever le frontiipice du Louvre, Philibert Deior- me :(s) pour le Palais dès Tuileries , ôc (q) Pierre Lefcoty Abbe de Qagny 3 naquit à Paris
fen ijiS , d'une familïe qui s'étoît diftinguée dans la Robe. Sur fes deifins furent conftruites, une partie de? la façade de l'intérieur de la cour du Louvre, la Salle des Antiques, & la Fontaine des Saints - Innocents. II mourut en 157&. (r) Claude Perrault, de Γ Académie R oyak des .Scien-
ces, naquit à Paris en 1618. Perfonne n'ignore que fes deifins, pour l'extérieur de la façade du Louvre , furenc préférés" à ceux du Cavalier Bernin , qui âvoit été appelé d'Italie, à grands frais , pour cet ouvrage important. Cet Architecte fit auifi élever î'Obfervatoire, Tare de triomphe du Trône, la Chapelle de Sceaux & celle de Notre- Dame de Navone dans l'Eglife des Petits-Peres , près la Place des Victoires: outre ces monuments, nous avons de lui une Traduction dé Vitruve avec des notes , Se un Traité des cinq efpeces d'ordonnances de Colonnes $ félon la méthode des anciens. Il mourut en 1688» (s) Philibert Delorme naquit à Lyon au commence*
ment du XVIe fîécle. Il fut Aumônier & Confeiller du Roi. En récompenfe de fes talents, on lui donna pluiîeurs Abbayes, quoiqu'une fût que tonfuré. Le Château d'Anet fut bâti fur fes deifins j il fit conftruire quelques édifices à Fontainebleau; mais le Palais desTuileries, dont il fut l'Ar- chitecte, mit le fceau à fa réputation. Catherine de Médicis, fit élever ce Palais, dont Philibert Delorme fut nommé le Gouverneur. Cet Architecte eft un des dix Commenta- teurs de Vitruve ; il a laiiTé deux ouvrages fort utiles, l'un fur l'Architecture. l'autre fur la coupe des pierres,; Gij
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S$o In ta ός>uctî ο.ν.
Jacques Debroile ( t ) pour celui du Luxerri^ bourg. \ La réputation dès Archite&es François
ne fut pas renfermée dans l'enceinte du "Royaume. L'Efpàgne appela Louis de Foix ( u ) pour conftruire à Madrid le Pa- lais de rÈfcurial. L'Italie même s'embellif; de leurs productions, & les crut dignes îd'être propofées pour modèles à fcs Archi- tectes. 4 Les guerres qui iuivirent le regne de
^François premier, furent de nouveaux obi* tacles au progrès des Arts qu'il avoit tirés de l'obfcurité. Enfin fous Louis XIV ils fuf .rent portés au degré de perfection, qui contribua iî fort à la gloire de ce monarque. Alors Γ Architecture fut digne d'annoncer à tous les âges la iplendeur d'un ii beau ;regne. 3|' Ce feroit une entreprife trop vafte que
*de retracer tout ce que Louis le Grand fit pour les beaux Arts en général, Se en ■■; ( t ) Le Palais du Luxembourg fut conftruit au commen-
cement du XVIIe fiécle , par ordre de Marie de Médicis s -fur les deiïins de Jacques DebroiTe. Cet Architecte
• fit encore élever le Portail Saint-Gervais ;3 & conftruire l'aquéduc d'Arcueil.
·?) («) Louis de Foix, né à Paris. Ce fut fur fes deffins
que Ton conftruifit à Bordeaux en ι ƒ 8 ƒ, le Phare 3 appelé
Jia Tour de Cordouan 3 du nom de l'Entrepreneur de cet 'édifice.-; ν ' : :,■■■;■..:. „.: : 'û l
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Intro nu στ ι om i o-s
particulier pour l'Architecture , aîhiî que tous les chefs-d'œuvre que fon regne vit élever ; il fufïïra de citer ici les bâti- ments les plus importants & les noms de leurs Auteurs, tels que le Vakie-Grace ô£ le Château de Maiibns par François Man? fard (x) 5 l'Hôtel & la nouvelle Eglife de$ Invalides, le premier par Libéral Bruant^ ' la féconde par Hardouin Manfard (y )h les écuries , Porangerie du Château dq Yerfailles &; fa façade du côté du jar- din par le même Architecte} le periilylq du Louvre & l'arc de triomphe du Trône, par Claude Perrault ( ^ ) 5 la porte S. Denis : */ ■ ■ ^''· ■ . - . ■■ :. ik \'. - ■■.■--
' '1
(* ) François Manfàrd, un des plus grands Archite&es
que nous ayons eus 3 étoit originaire d'une famille d'Italie % , mais établie en France depuis près de 800 ans : il naquit a Paris en 1589, U mourut en 1607. Il fir èonftruire le Portail de l'Eglife des Feuillans 3 fon coup d'eifai 3 le Château de Maifons, le Val-de-Grace 3 l'Egliie des Dames Sainte- Marie3 rue Sainte-Antoine.3 le Portail des Minimes ,&r plufîeurs autres édifices. (y) Jules Hardouin Manfard,. neveu du précédent,
etoit Ordonnateur général des Bâtiments , Jardins , Artf ■■M Manufactures de Louis le Grands il naquit à Paris "en 1645-. Nous avons de ce célèbre Architecte, le Châ- teau de Clagny 3 fon premier ouvrage j celui de Trianon j ;les Jardins & le Château de Marly 3 vla Place de Ven- dôme ; celle des Victoires 5 la Façade, de Verfailles du côté defs Jardins 3 la nouvelle Eglife des Invalides 3 & (fautres édifices qui font honneur à ion génie. Il mourut *en 1708.· l{ ζ ) Voyçz, la note r- pag. 99., I
f : - ' - ' - G iij ■ '
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iös Introduction.
par François Blondel (a) > hs addition?
coniîdérables faites auxTuilerîes par Louis le Veau ( b ) 5 les Jardins de ce Palais par André le Nautre. ( c ) j &: la Sorbonne par Jacques le Mercier (d) : ce font autant de monu- ments célébrés qui tranfmettront à la po£ terité la plus reculée la mémoire du regne; 4e Louis XIV. Le iîecle de Louis XV n*eit pas moins
recommandableparles édifices élevés de nos jours. En 1717, fut conilruit iùr les def- fins du Chevalier Servandoni ( e ) le fron-* (a) Français Blondel, de l'Académie Royale des
Sciences, Maréchal des Camps & Armées du Roi, & Maître des Mathématiques, de Monfeigneur le Dauphin, - Xa Porte Saint - Denis fut élevée fur fes deiïins î il fie reftaurer J4 Porte Saint - Antoine > &c celle de Saint;» Bernard. Nous avons de lui un Cours d'Architecture 3 qu*il 4i<5toit aux Elevés de l'Académie dont il étoit Profeiïeur. ( b ) Louis le Veau, Architecte de Louis XIV , eut la
direétion du bâtiment du Louvre , depuis 1653 jüfqu'en, 1670. Il donna les deflîns d'une partie du Palais des Tuileries, & fit élever le Château neuf de Vincennes ; le Château de Vau-le-Vicomte \ l'Hôtel de Lambert, 4ans l'Ile SaintTLQuis 5 celui 4e Colbert, & plufieurs autres« (c) Andre le Nautrç , célèbre par fon génie pour l'art
du Jardinage, né en 1625, & mort çn 1700. (d) Jacques 1« Mercier fit bâtir TEglife de la Sorbonne j
celle de l'Oratoire 3 le gros Pavillon de la cour du Louvre, & l'avant corps de l'ancienne façade du même Palais du côté de la rivière, le Palais Royal, l'Eglife des Dames 4e l'Annonçiade i Tours ; la Ville, le Château 8d'Eglif<$ paroiiTiaîe de Richelieu, &ç, (e) Jean Servandoni 4 Chevalier de l'Ordre de Chrift*
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1 irr Ro du err ο m. r'óf
1 tlfptee (ie la principale entrée deMïglife de S. Sulpice, un des plus grands portails d'Eglîfe qu'il y ait en France, mais qui étant compofé d'ordres d'un grand diamètre, exige d'être obfervé d'un point de diilance plus éloigné j il ne poura par cette raiibn exciter une admiration générale, qu'après la démolition du Séminaire qui fe trouve en face fc. beaucoup trop près de ce froil·- tiipice^ Peu de temps après, la ville de Paris fît'
conitruire fur les deiïïns d'Edme Bouchar- don, Sculpteur célèbre, la fontaine de L· rue de Grenelle, remarquable par la beauté de fon Architecture^ &; celle de fa Scul- pture, coniïdérées fêparément. Aux monuments de magnificence fuccé-*
tié à. Florence le ι Mai 1695". Il fut Elève de Tean-Pauf.
Pafimi pour la Peinture, & de Jean-J&fepft- de Roffî pour l'Architecture. Entre les bâtiments que nous avons de cet Artifte en France, nous citerons l'Églife Paroiflkle de Coulanges en Bourgogne, le- grand Autel de là Métro- politaine de Sens , celui dès Cßartreux de Lyon 3 &"c. C'eft auifi cet Architecte qui a bâti à Paris le Portatif de Saint-Sulpice, & l'Efcalier ingénieux de l'Hôtel d'Au- vergne. Ses talents , fupérieurs pour la décoration des; Théâtres l'ont fait appeler dans différentes parties de: l'Europe , pour y exercer cet Art. On fe rappele toujours?, avec plaifîr, les Spectacles admirables qu'il a donnés à, Paris dans Ja Salle des Machines aux Tuileries. Ce: grand Artifte eit mort à. Paris en. 1767 > u&iverfelkmeofc yegretc* G'nr
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ί ©4 Â N Τ R^O DU CT Ι Ο Ν.
dereiit bientôt les bâtiments élevés- pour
■-l'utilité publique : de ce nombre furent l'Hôpital des Enfants-Trouvés par M. Bof· /rand ( f ), & celui des Quinze-Vingts par M. de Saint - Martin , _ édifices qui , par la commodité de leur diilributîon, "leur diP ;pofition &; l'ordonnance de leurs façades^ ont mérité lefuffrage des connoiiîeurs. χ ^ Un des bâtiments qui font le plus d'hon- neur à ce iîecle, eil l'Ecole Royale Mili- taire 6c le champ de Mars, conflruits fur .les deiiîns de M. Gabriel, premier Archjr < ; te&e du Roi, pour l'éducation de la jeune NobleiTe^ qu'on y élevé dans l'étude des iciences relatives à l'art de la guerre : éta- bliiïement propre à îmmortalifer la bienfai- sance de notre augufte Monarque. Avec quels tranfports les François ne
s-■■ .......'■- ■ i ■■- ■ —-s»
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'("ƒ) Germain Boffrand, né à Nantes en Bretagne le
7 Mai 1667, mbrt à Paris le 18. Mars 1755. Il fut Eleve ^de Hardouin Manfard,· Nous avons de cet Architecte cé-
lèbre , & de cet homme de génie , pluiieurs édifices confidérables, particulièrement en Allemagne & en Lor- raine. Cell lui qui a bâti à Paris , les Hôtels de Mont- morency, d'Argenfon, les Décorations de l'Hôtel de Soubife , les Portes 4u Petit-Luxembourg, de l'Hôtel de .; Villars,' le Portail Ä Mercy 3 le Puits de Bicêtre, les
Ponts de Sens & de Montereau , &rle grand bâtiment des Enfants-Trouvés, Sur la fin de fes jours il fit graver le f ecueil de fes Ouvrages, avec un Difcours latin & fran- çois, dans lequel il y a des observations excellentes fur |
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ΙΝ Τ R OD U C ΤΙ Ο äjt tof
firent-ils pas démolir ces vieux bâtiments
qui déroboient la vue de la belle façade du Louvre élevée fur les deiîîns de Per- rault _4 & la continuation de la décoration de la Cour du même Palais > continuation que l'on doit au zèle patriotique que M. le Marquis de Marîgny témoigne pour Ja perfection des beaux Arts ! ?| Parmi les monuments qui embelliraient
déjà la capitale du Royaume , il conve- noit qu'elle en érigeât à la gloire de fon Prince. La Ville de Paris témoigna le deflr ardent qu'elle avoit de faire conilruire une place publique au milieu de laquelle feroît élevée la itatue de Louis le Bien-Aimé; Plufîeurs Architectes, & particulièrement ceux de l'Académie Royale d'Archite&ure, ^yant reçu à cet effet des ordres du Prince, s'empreiierent à donner des projets di- gnes (g) d'une telle entreprife, & relatifs à différents quartiers de Paris. >: L'emplacement qui eft à l'extrémité dii
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( S ) Voyez dans un ouvrage de M. Patt, intitulé :
Monuments érigés en France, à la gloire de Louis XV, la plus grande partie des projets faits par les Archi- tectes de l'Académie Royale d'Architecture 3 entr'autre? ceux de M. Boffrand, qui en a fait trois / un pour la Place Dauphine, un fécond entre le Louvre & les Tui1- leries , & un troifieme aux Halles : celui de M. Contanr, Quai des Théatins; de M. Chevotet, rue de la Féron- 'neriej.'de M, Souflot, entre THe Saint-Louis &: Ml |
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toê INTRODUCTION.
Jardin des Tuileries ayant paru le pfus öofti
venable , on conftruiiît, fur les deiîins de M. Gabriel, la Place que l'on y voit aujour- d'hui. De la principale entrée du Palais des Tuileries, du coté du Jardin δί dans toute la longueur de la grande allée, on apper-* •çoit au milieu de cette Place, la ftatue éqüeilre de Louis XV (h)\ qui procure <
du Palais > de M. Aubry , en face du Pont Royal j de
M. Azon, me Saint-Jacques ; de M. Rouifet, Carre- four de Buifî > & de M. de TEftrade , Quai de Conty. Plufîeurs autres Architectes du Roi, animés du même îtèle, tels que MM. TAiTurance , Blondel 3 Godeau % Manfard, &c, ont auifi donné des projets pour cette Place, qui fans doute ne font point parvenus à l'Auteur des monuments du regne de Louis XV 3 & qui un-jour devront avoir place dans cette collection intéreflante. Indépendamment dés projets des Architeot.es du Roi,
qui fe trouvent dans ce recueil , il contient encore «ceux de quelques autres Artiftes du premier mérite 3 tels, que celui que M. Servandoni , Peintre & Architecte, avoit fait pour le Pont Tournant ; jfïtuation qui avoit auifî été choifie par M. TAÎTurance y ce qui pourofe bien avoir donné lieu au choix de S. M. fur cet empla·- cement 3 où ett exécuté aujourd'hui le projet donné par M. Gabriel. Celui de M, Pitrou, Ingenieur des Ponts & Chauffées dans l'Ile du Palais j celui de M. Deftou- che, ancien Architecte de la Ville, en face du périftyle du Louvre j celui de M. Gouppi, Juré Expert, rue de Belle-ChaiTe 3 fauxbourg Saint-Germain j celui de M. Slodtz, Sculpteur & DeiTinateur du Cabinet du Roî., Quai des Théatins\\ celui de M. Polard , Infpe&eur général des Ponts & Chauffées , rue de Tournon, &e. (h) Cette ftatue a été modelée & jetée en bronze
par feu M. Bouchardon j &, des auatre figures placées aux angles dû piédeftal, deux font de cet Artifte, & les deux autres de M* Pigal, bien digne de lui avoir fuccédé. |
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Intro du er i oh. tof
im heureux point de vue à cette prome-
nade publique. Du côtéoppofé à la rivière, cette Place a été décorée de deux édifices de chacun 46 toifes de face, d'ordonnance corinthienne, à colonnes folitaires, &: éle- vés fur un foubaiïement, Cette Place , de 3 30toifes de longueur, fur 90 de largeur, entourée de foiïes & de doubles baluitrades, donne entrée aux Champs-Elifées, où une nouvelle plantation , très-bien entendue, procurera inceiTamment aux habitants une promenade champêtre, digne du faite &; de Populence de la Capitale. Ne quitons pas ce féjour enchanté, fans
parler d'une des plus belles entreprifes qui le foient faîtes en France dans ce iîecle, Se même dans les fiecles précédents, c'eft le Pont de Neuilli, dont la ligne capitale enfile l'axe de la grande allée des Champs- Eliiees, &; celle du Jardin des Tuileries : ce Pont, qui s'élève actuellement fur les deffins & fous la conduite de M. Perronet, Premier Ingénieur des Ponts & ChauiTées, peut être préfenté ici comme un ouvragé célèbre., dont l'étendue, la magnificence &; l'économie réunies, apprendront aux races futures, ce que peut le génie, le goût & l'ex- périence de ce Savant, auiïï bon Architecte qu'excellent Citoyen, Quelques progrès qu'ait fait l'Architecture |
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... - - ψ
t θδ ϊ WT RO DU CT I Ο M,
fous le regne précédent, elle étoit, ce ferrB
ble, demeurée imparfaite quant à la conf; traction des Temples $■ il étoit réfervé au fiécle de Louis le Bien-Aimé, de trank ■mettre à la poftérké de grands édifices en ce genre. Les nouvelles Eglifes de Sainte·* Geneviève par M. Soufïïot, & de la Mag- deleinepar M. Contant, fufrîront pour im? imortalifer notre Architecture. § il manquoit à Paris une Halle au Blé 5 la
Ville vient d'en faire ériger une fur les deffins |J de M. Le Camus de JVÎézieres. Cet édifice interefläiit, eft remarquable par fa forme tcirciiîaire, & par la régularité de ion apareil. Le feu ayant confumé en 1763 la Salle
de l'Opéra, fk. fort endommagé le Palais Royal^ auquel cet édifice étoit adoifé. On mem de conftruire pour le même Spectacle, .une Salle nouvelle fur les deffins de M> Moreau., Archîteéte du Roi, & Ordonna- teur des Bâtiments de la Ville (z)-*, &; dans fa reconftruction , ce Palais a reçu de nouveaux embelliiTements, qui l'ont rendu iupérieur à ia premiere dîfpoiition. |
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(i) M. Moreau a aufll donné les deffins des nou-
veaux bâtiments du Palais Royal du côté de la place> ceux du côté de la cour} legrand efcalier, la reftau ration & Ja décoration de l'intérieur des apartements font exécutés fur les deffins de M. Contant s Architecte du Roi, & Contrô- leur des Invalide*. |
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Introduction. g$|
Verfailles, déjà ii magnifique par fes
jardins $r par ies édifices ? vient auiïï d'être orné d'une Salle de Théâtre fuperbe, déftinée aux fêtes de la Cours fpe&acle qui manquoit depuis long-temps à ce bâtiment immenfè, **la demeure chérie d'un Monarque adoré. Aux bâtiments d'habitation , aux monu-
ments de magnificence &c d'utilité qui s'élè- vent à Paris fous fon regne, joignons celui de l'Hôtel des Monnoies, qui va devenir 'l'ornement d'un de nos plus beaux Quais : cet Hôtel, qui fe conftruit iùr les deffins de M. Antoine, Archite&e, ofFrira dans fon intérieur, toutes les commodités rela- tives à un pareil édifice. Nos plus grands Princes lignaient auilî
leur amour pour l'Architecture-,· par lès embelluTements de "leurs Palais , & par les nouvelles acquiiitions, qui en rendant leurs demeures plus dignes de leur naiiFance que dans les iîécles précédents, décorent la Ca- pitale êc la rendent plus întéreiïante aux Citoyens &: aux Etrangers. Avec quel goût & quelle magnificence
nos premiers Minifbes n'embelliifent-ils pas leurs demeures ! L'Hôtel deJVI. le Duc de Choifeul (k) , celui de. M. le Comte de |
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(*) On voit dans cet Hôtel une galerie peinte par
Lafoiie, & nouvellement décorée d'un excellent gerre exécute furies deffins de J'Autcur de cet OWàge. ^ |
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ΪΪΟ liï'T %*b DÜ € t ïO tfl
Saint - Florentin (/), peuvent être cité^
comme des bâtiments qui annoncent les talents des Architectes François, $l qui contiennent lés chefs d'oeuvre des plus ce-* lebres Artiftes de nos jours» Les Hôtels de Nivernois ôc d'Uzès s'atti-*
reront également les fuhrages des connoif-* feurs , par le génie & l'intelligence de leurs Architectes, Quelles eipértncés ne devons-nous pas con*
cevoir fur lés projets qu'on exécute actuelle* ment ou qu'on fe propofe d'exécuter, %éls que l'achèvement total de l'intérieur du Louvre, & le tranfport de la Bibliothèque Royale actuelle dans la partie de ce Palais qui regar- de la rivière j celui d'un Hôtel-de-Ville fur les delîîns de M. Moréau j celui d'un Arcenal furies deiîîns de l'Auteur de cQt Ouvrages celui d'une nouvelle Salle pour la Comé- die Françoife fur les deiîîns de MM, Peyre & de Wailly , Architectes du Röij celui d'un Marché qui doit occuper le terrein de J'Eglife de la Culture Sainte - Catherine , transportée aujourd'hui à l'Eglife où étoit anciennement la Maifon Profeiïe des Jéfuites j ( l'utilité de ce marché eil prouvée |
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( / ) Bâti nouvellement fur les deflins de M. Challegrin *
Architecte du Roi* |
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IntroDücf î o ν', irt
|>àf celui qu'on vient de faire, quoique
moins coniïdérable, au Prieuré de Sainte- Martin des Champs ) j celui de réunir le Quai neuf avec le Port au Blé ) ( foui cette prolongation on iè propofe de pra- tiquer des Magaiïns pour les grains) > celui de la continuation du Quai de l'Horloge à l'Hôtel des Uriîns ? celui de la démolition des maifons élevées a&uellement fur les Ponts > démolition qui, en donnant de la falubrité aux demeures des environs, détermîneroit auiîî à réédifier la plupart des maifons de l'Ile Notre-Dame dont la gothicité .& le déla- brement rendent ce féjour trifte & peu fut} celui de tranfporter les Cimetières hors de l'enceinte de Paris, projet digne de la fageiTe du gouvernement, Se déjà approuvé par la premiere Juridi&ion du Royaume j celui déplacer les Tueries &; les Boucheries aux extrémités de la Ville 5 enfin celui du redreiTement des rues , de la multiplicité des Carrefours , de Pére&ion de nouvelles Fontaines, ai de la réitération des canaux fouterreins pour l'écoulement des eaux^de la Ville dans la Seine. Terminons l'énumératîon de ces projets iî
utiles à la Nation, par un dernier non moins intéreiTant ni moins digne de l'attentiofi du Miniftere : nous voulons parier de celui propofé par feu M. Defparcieux, qui pen- |
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1 ï l. In τ r ο d uct ï ö* n.
clant fes dernières années avoit propoil d'amener à Paris , pour le bien public, les eaux de la rivière d'Yvette, reconnues , par l'analyfe chymique , pour être très- îalutaires, & dont l'idée vient d'être ac- ceptée par le Gotivernement, qui en ä charge fpécialement M. Perronet , bieri digne par fes talents d'être choiii pour la continuation de ce projet p '& pour fon exécution. De la Capitale de la France , le goût
des Beaux - Arts s'eft répandu dans les prin- cipales Villes de nos Provinces , 'A point que l'intérieur de ces Villes femblé avoir changé de face. Sous le regne de Louis XIV, àc quelque années après fa mort, oïl avoit kléja conftruit pluiïeurs Places publiques où l'on avoit élevé fa ilatue j une à Lyon en -i 7 ï 3 3 une à Montpellier en 17185 une a Dijon en 1725, & une à Rennes·en iji6 (m)-. Sous le regne de Louis XV , d'autres places ^publiques, non moins magnifiques , furent cojaiacrées à la gloire de ce Monarques une à Valencienne en 1742 > une à Bor- |
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*■'■ (m) Les ftatues élevées darts ces quatre Villes ^ font
jéqiieftres, modelées & jetées en bronze, à Lyon par 'Desjardins & les frères Gouflfcu , à Montpellier par 'Mazeline & Utrels , à Dijon par lé 'Hongre, & à Rennes *par CoyfeYQXé Μψ.....- ·-■■■: - *V -·■- a — '-ιΛ- ]%
deaux
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Î NT RObUCT ï O Ni jtij
dèâux en 1743 5 une à Rennes en 1744$
une à Nancy eil 17555 une à Reims eri 1761 (n) : autant de Villes ou ces monu- ments ont oceaiîonné la conftrudion où la rèftauration dé pluiîeurs édifices > des Alignements, dés Quais 9 des Portés de Ville, des Intendances , des Bourfes j des Juridictions, des Promenades, qui, réunies avec la beauté des grands chemins qui com- muniquent d*une Province à l'autre , ren- dent agréables toutes les routes qui amènent à la Capitale. Après tant de monuments célèbres j qui
annoncent l'amour des iujets pour leur Prince , ne négligeons pas de parler ici de quelques Provinces qui s'occupent férieu- iëment de fuivre les tracés de celles déjà citées. La Ville de Metz i anciennement em- bellie ibus le gouvernement de M. le Ma- |
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( n ) Les noms des Archîte&es & des Sculpteurs qui
ont exécuté ces monuments, font: à Bordeaux, feu M. Gabriel, premier "A rchite&e du Roi, & M. Le Moine $ la ftatue eft de bronie & éqiieftre : à Valenciénne ^ M* Sally de l'Académie de Peinture & de Sculpture j la ftatue eft de marbre , & pédeftre : à Rennes, feu M. Gabriel 8ç M. Le Moine? la ftatue eft de bronze, & pedeftte : à Nancy, M. Héré deCorny , Architecte du Roi dé Po- logne, & M. Guibal j la ftatue eft de bronze, & pé- délire : à Reims, M. Le Gendre, Infpeéteur des Ponts & Chauffées, & M. Pigalki la ftatue eft de bronzeΛ & pédeftre; Tome li H
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ïï4 I NT Ro nu er ι ο ν.
réchaldè Belle-Iile, vient de faire ériger de
nouveaux bâtiments d'utilité &c de magnifi- cence, fous celui de M. le Maréchal, Duc d'Eiirées, qui, par fe$ lumières, fa fageile &c fon économie , vient d'ordonner , fous l'adminiitration de M. le Duc de Choifeul, de nouvelles communications, une Maifon de Force, des Places, un Magaiïn Mili- taire , un Hôtel-de-Ville , un nouveau Por- tail &; des EmbellhTements pour la Cathé- drale : il vient encore de déiîgner Rem- placement du Parlement de cette Ville, celui d'un Palais Epifcopal, dont on conf- truit actuellement la façade , celui d'une Abbaye Royale pour les Dames de Saint- Louis ( o ) ·, édifices qui témoigneront a fes fucceifeurs ce que peut en moins de; douze années, une iâge atlminiftrations guidée par le patriotifme, le bien de i'humaihité Ôc la gloire du Prince. La ville de Rouen , qui en 1759 fit jeter
les fondements d'un Hôtel-de-Ville , pré- cédé d'une place, au milieu de laquelle doit être la ilatue pédeftre de Louis XV, nous laiiTe le regret que cet édifice, du deffin de M. le Carpentier , Archite&e |
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(0) Tousses bâtiments, la plupart exécutés aujour-
d'hui, ont été faits fur les deifins de VAuteur de cet Ouvrage. Plufîeurs de ces projets font partie du fécond Volume de ce Cours d'Architecture, |
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du Roi, ne fok annoncé ici que comme
un projet, la ville ayant été obligée de fufpendre , pour quelques années, cet ou- vragé important, déjà élevé à fix pieds de terre (p). La Ville de Strasbourg peut être citée îc!
comme une de celles qui ont le plus ilgiialé leur zèle par la quantité d'édifices qu'elle fe propofe de faire ériger dans fon fein -, elle èft réfoîue de faire bâtir plufieurs corps de Cazèrnes pour contenir nuit bataillons & Kuit efcadf ons, une placé d'armes, un Sénat pour les Magiitrâts, ait devant duquel & en face de la Cathédrale, doit être élevée une ftatue pédeftre de Louis le Bien-aimé avec des attributs iymboliquès, qui déiï- gneront les vertus pacifiques de ce Prince» une Salle de Spectacles, dès communica- tions ^ des places, des carrefours, ats> mar- chés , des quais, dés ponts &: autres em~ belIiiTements qui ont paru alTez importants au Màgirtrat de là ville de Strasbourg, pour qu'il s'adreiîât en 1764 à M. le Duc de Choifeul, &; le priât de lui nommer un Air~ chiteclie habile qui le dirigeât dans les en- treprifes qu'il fe propofoit de faire exécuter tJWpjJ------mi -----------ι ' - .*...· „f... } -· ■ — τ~~τ~~ l·-_-."..ΐ[τ ••..■-J.[i-i]liM_:_-^__^-l_ui--i-----*-----1-----------------1_
(p) Voyez, le Plan de cet Hôtel -de- Ville & de la
Place qui le précède dans les monuments du fiécle de, louis XV, déjà cités. Hij
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ïlél· IÎÏT Ê.0 &lf CT Î O tf.
par fuccelîion de temps: l'Auteur de cet
ouvrage, fut celui que ce MiniÎtre choilît pour ie traniporter dans cette ville. Après en avoir levé les plans , il fit en conie- quence pluiîeurs projets , qui, approuvés par Sa Majefbé, s'exécutent aujourd'hui fur tes deiîîns, & annoncent par la place d'ar- mes dt les bâtiments qui l'entourent, déjà élevés, ce que cette Cité deviendra un jour, fécondée comme elle Teil par le zèle du Magiilrat, l'amour des Citoyens , les lumières du Préteur royal, èc l'attention particuliere qu'y porte M. le Maréchal de Contades , Commandant de la haute àc BaiTe-Alface. A l'inilar de la ville de Strasbourg, celle
de Cambrai fe propofe auiïï de faire des embelliiîements dans fon intérieur, tels que des places nouvelles, le redreiTement de la plupart de les rues, des portes, des mar- chés &: des promenades. M. de Choifeul, Archevêque de Cambrai, ayant auffi choîiî l'Auteur de cet ouvrage pour bâtir fon Pa- lais Archiépîfcopal (</)$& fatisfait des plans qu'il avok faits pour Strasbourg , l'a auiîî |
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. ~(q) Le fécond volume de ce Cours contiendra les
Plans de cet Archevêché. L'irrégularité du terrein nous a fait naître l'idée d'un projet d'une forme nouvelle, qu'on poura comparer avec le Palais Epifcopal de Metz : Palais |
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s-
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Introduction. ι .17
chargé d'en donner pour les travaux que l'on defire faire dans,cette ville. Tel eil enfin ce que nous avons cru de-*
voir dire fur ce que l'Archite&ure an- cienne & moderne peut offrir de plus in- téreiîant aux amateurs & aux Aruftes qui ont deiîein de puifer les connohTances préliminaires de cet Art û recommandatie par lui-même, &iî utile à toutes les Nations civilifées. PaiTons à préfent à l'utilité de [qs diffé-
rentes productions > enfuite nous exami- nerons le degré de fupériorîté qu'il a ac- quis fur les Autres Arts libéraux qu'il a fait naître , & qu'il fait aiïocier à fes pro- ductions : nous donnerons après cela quel- ques obfervations fur la maniere d'étudier cet Art. |
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dont nous avons donné les deflîns, & qui, projeté dans-
un terrein plus régulier, offrira le contraire intéreffant des productions de Γ Architecture, dirigées Λ ou par les préceptes, ou par les reffources de l'Art.. |
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*Φ*
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M
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ji$ Introduction.
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DE L'UTILITÉ
DE L'ARCHITECTURE,
JN ο υ S venons de voir , en parlant de
l'Origine de l'Architecture, qu'auffi-tôt que les hommes eurent commencé à fe ra/Tem- bier ? a jouir des douceurs de la fociété, Ils eurent befoin de cet Art pour fe procurer des demeures cpmmodes & durables. En effet, c'efl par fon fecours, que dans la fuite on éleva des monuments qui procurèrent des places convenables aux chefs d'oeuvre des plus habiles Sculpteurs, Se des plus grands Peintres, &: par ce moyen leur aiTurerent une durée confiante 5 c'eil encore par lui que l'Architecte éclairé fait employer lî utile- ment la pierre , le marbre a le bronze , avec îe choix ξζ avec |a prudence d'une iàge économie. Oeil lä Architecture qui fait éclore tous
les genres de talents relatifs aux befoins des hommes, qui fait naître l'émulation des Citoyens voués aux Beaux-Arts, détermine les grands Princes à encourager les talents $ajlîànts § êc à réçompenfer }§s talçnçs acquis, |
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In τr ob υctι ο Wi 11%
C'eil elle qui détermine le plus grand nom-
bre des propriétaires à élever des édifices où la folidité, la commodité & l'agrément fe trouvant réunis, fournuTent aux étran- gers tant de différents objets propres à une imitation utile &; réfléchie. Si nous confîdérons ce que nous devons
a Γ Architecture , &: tous les avantages, que nous en recevons, nous trouverons que les tréibrs de la nature ne font véritablement à nous, que parce qu'elle nous en aiïure une tranquille poiFeffion $ n'eil-ce pas elle qui procure à nos demeures la falubrité, par le choix de leur iituation? qui nous enleigne en empruntant les fecours de la mécanique de de l'hydraulique, non-feulement à élever & amener les eaux dans nos jardins de pro- preté , mais auffi dans les dépendances hs plus éloignées de nos habitations ? C'eil elle qui, dans nos Cités, confinât
des Ponts, des Ports, dus Quais, des Halles, des Marchés, des Magafins pour les grains des Arcenaux, des Cazernes y des Hôpitaux, des Aqueducs > des Fontaines, des Manu- factures , des Prifons, & enfin des Sépul- tures publiques. Tous ces monuments utiles aux Villes libres , aîniî qu'aux Villes fron- tières, quand ils font dirigés par des Artiiles du premier mérite, acquièrent chacun en particulier un caractère diftin&if ; δ: en an* H iv
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τ%ο In τ ro du ct ι ο ν.
nonçant la capacité de Archite&es qui em
ont donné les deÎRns, ils témoignent en même temps l'opulence des Citoyens. C'eil notre Art qui érigeant des Temples,
à la Divinité, met les fidèles à portée de pratiquer le culte extérieur de la Religion; il joint la grandeur Ôc la dignité à une foli- dité immuable , dans la difpoiîtion des Métropoles, des Eglifes Paroiffiales & Con- ventuelles , enfin dans tous les monuments facrés, élevés par la piété Ôc la magnificence des Têtes Couronnées : dans ceux-ci fur- tout il préfîde au choix des matières , a celui de rordonnance , & au bon goût des ornements, qui, dans tous ces diffé- rents genres d'édifices, doivent s'annoncer avec cette fupériorké que les Beaux- Arts réunis favent mettre en œuvre. C'eft l'Architecture qui commande au
courant des rivières $ c'eil par elle qu'on parvient à deiTécher les marais > que l'on convertit en campagnes fertiles , les terreins. les plus incultes, en les délivrant des vapeurs malignes qui nous cauferoient des maladies çiangereufes & peftilentielies. Elle change a ion gré 5 elle adoucit le
cours impétueux des grands fleuves , elle réprime leurs efFörts par des digues, des, levées §C autres mafTes foJides qu'elle leur- |
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M
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Introduction. ni
pppofe j 5c en les retenant dans leur lit, elle
les force de fervir utilement à la navigation., Si l'ardeur du foleil a tellement çpuifé
l'humidité de la terre, qu'elle n'en ait plus ailèz pour fournir à la nutrition des légu^ mes & des fruits, l'Archite&ure nous ap- prend à faigner les rivières, &: à. pratiquer des canaux à travers les campagnes, pour les arrofer & leur rendre cette fécondité naturelle, qu'une trop grande aridité leur avOÎt enlevée. L'Architecture Navale bâtit auiîî des
Ports y elle remplit la profondeur de la mer par des monceaux énormes de diverfes ma- tières ; elle avance des môles fur les plages découvertes, & arrête par fts travaux la violence des vagues j on fait combien ces différents ouvrages font néceifaires pour la conilrudion si la confervation, âes navires Se autres bâtiments maritimes, Ce genre d*Archite&ure nous a appris à
conftruire des vaiiTeaux qui nous ont enrichis des tréibrs du nouveau monde, & qui nous ont ouvert le commerce des pays les plus éloignés. C'eft aux travaux de l'Architede qu'on doit le tranfport des Colonies èc la- fondation de plufieurs Villes floriffantes fur des côtes où l'on n'ofoit aborder avant ('étude de ΓArchitecture nayaie.. |
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ïii Introduction.
Mais tous ces biens, tous ces avantages
nous feroient devenus înfru&ueux, iï l'Ar- chïte&ure Militaire ne nous eût appris â lts conferver. Pour cela elle nous a enfei- gné à défendre nos Villes, par des baillons, des foifès 9 des chemins couverts, des con- trefcarpes & autres ouvrages de ce genre > en forte que iî nos ennemis deviennent aifez prodigues de leur fang, pour venir nous attaquer dans nos foyers, elle nous enfeîgne à couper leurs attaques par de continuelles traverfes, &c à loger plus d'hommes & de canons dans nos flancs, qu'ils ne iauroient nous en oppofer du côté par où ils vou- droient nous forcer. Si au contraire nous croyons devoir les
attaquer dans leurs fortereiTes, elle nous apprend comment il faut conduire nos tranchées pour qu'elles ne foient point en- filées 3 & comme il convient de diipofer nos redoutes & nos places d'Armes, pour n'être point iurpris par les forties des affiégés. Si Γ Architecture à tant de part à la vic-
toire , elle n'en a pas moins à la magnifi- cence du triomphe. Elle élevé des trophées iur le champ de bataille, elle raifemble les re&es des braves Citoyens qui ont répandu leur fang pour le fervice de la patrie, à deiTein de les conferver dans des monu- ments deiïinés à faire revivre leurs noms &; |
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Introduction. 113
leurs a&ions fur le marbre bc fur l'airain $
& pour rendre encore ces monuments plus glorieux , elle y repréfente les Chefs des Nations vaincues, enchaînés & humiliés, &. leur fait porter le poids des entablements î en un mot, elle fe fert de tous les moyens que l'Art autorife, pour éterniier la récom- penfe que mérite la vertu des conquérants , ou les châtiments dûs à l'infolence ou à la témérité, L'Architedure Civile Me s'emprefle pas
moins à célébrer-le retour du vainqueur, en le faifant paiTer ious des Arcs de Triom- phe qu'elle fait ériger à fa gloire , Se qu'elle enrichit de fymboles 6c d'orne- ments exquis, par lefquels elle annonce à la poftérké le pouvoir des Princes de la terre, & les efforts du génie des Artiites. Par-tout le Monarque y confîdere., les ouvrages de génie que Ρ Architecture a enfantés pour lui offrir des fêtes, Ôc par- là manifeiter l'alégreife des peuples qu'il a fous fa domination. Il eil étonné des ftatues qu'elle a fait fondre du bronze enlevé fur l'ennemi 5 il contemple avec une fecrette admiration des colonnes triompha- les , des pyramides allégoriques , &: mille autres productions, qui toutes annoncent Péclat dé fa vicloire, de fa clémence &; de fa bienfaifance. |
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|24 ΙΝ Τ R Ο Ι>Ί7 G Τ Ι Ο 2ν\
Enfin au retour de Ja paix, l'Architec-
ture déploie de nouveaux prodiges ; c'eft alors qu'elle s'occupe pour le délafTenient des Citoyens & l'ornement des Villes, à élever des théâtres, des cirques , des porti- ques , des bains, des bibliothèques , des places publiques, des promenades qui ma- nifeftent la gloire du Prince, & la douceur d'un regne éclairé &: devenu paiiîble par (es triomphes & fes iiiccès. Tant davantages qui, en nous annonçant
l'utilité de l'Architeâure, nous annoncent auffî fa magnificence , lui donnent fans contredit la prééminence (r) fur tous les autres Arts quelle feule régît, en les aiïo- ciant à fes travaux : convaincus de cette |
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(r) Nous avions craint long-temps que f amourque
nous portons à notre Art, ne nous eut fait, au préjudice de la Peinture &: de la Sculpture , donner la prééminence à l'Architefture j cependant nous avons conçu que cette- expreflion ne pouvoir paroître ni trop forte ni trop ha·* fardée } puifqu'elle fe trouve dans les Lettres - Patentes de Sa Majefté ( p. 4. ) données à Paris au mois de Février 1717, enregiftrées au Parlement le 18 du même mois , &· dont nous avons cru pouvoir rapporter ici l'extrait../!. » £'4| » tabliflement de l'Académie de Peinture & de Sculpture », »établie dès Tannée 1648, & confirmée en 165· y , % 9> produit le bon goût Se une grande facilité pour rintelli·*. »gence & Tufage du deifin , dont beaucoup de Palais ±, », Maifons Royales & autres édifices font ornés & déco- M rés magnifiquement i & commeTArchitefture doit avoir m la prééminence fur les autres Arts, qui ne fervent, pour- » ainfî dire que d'ornement dans les 4iffér^{es.pA£tte&dç& « édifice* j; nous ayons jréfolu Mj. &&·;». |
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Ι ν τ Ro zur et ι ο ist. tij,
vérité, fans vouloir aiFoiblir l'excellence de
ia Sculpture, de la Peinture & du Jardi- nage, rendons compte à nos Elevés de la fupériorîté de l'Architecture, dans le deiTem de les exciter à fe rendre véritablement di- gnes un jour de s'illuftrer dans ce bel Art5~ qui lui feul fuppofe la plus grande partie des connohTances des fcîences > des arts utiles, des arts de goût &: des arts agréables. Si l'Architecture eit, comme nous venons
de le voir, le plus utile des arts, nous pou- vons dire ici qu'elle eil auffi le plus ancien, puifqu'eile à fervî à préferver d'abord les hommes des intempéries des faifons. Tous les Arts libéraux, & même la plus
grande partie des Sciences, n'euiTent peut- être jamais exifté fans l'Architecture. Ne paroît-il pas de la plus grande probabilité, qu'on ne peut rapporter leurs découvertes qu'à la communication réciproque des idées de l'homme. Or cet effet n'a pu fe produire que dans la fociété réunie &; par les opé- rations réitérées des facultés Pefprit humain. Sans l'Architecture, que feroit devenue la fociété ? A quoi nous ferviroit notre ma- niere de fentir ? Que feroit devenue notre induftrie, notre intelligence ? Parcourons rhiitoire, nous y verrons que lorfque l'Ar- chitecture eit parvenue à atteindre une cer- |
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i%€ Intro nu er ï o Ν*
taine conildération chez une nation, fori
goût, fa fplendeur &; fa puhTance ont acquis le plus grand éclat. Nous pouvons le dire ici : la fupérlorité
dé PArchite&ure dépend bien moins de la perfection de chacun des Arts qu'elle fait concourir à fes opérations, que du choix plus pu moins judicieux qu'elle en fait faire, & de l'habileté avec laquelle elle lel fait fervir à {qs vues. Qu'on ne s'y trompe pas 5 le génie créateur & fécond de Γ Ar- chitecte eft l'âme des Artiites qui travail- lent ibus ies ordres : quelque précieux qu'ils foîent, ils ne font entre ihs mains que des inilruments au moyen defquels il doit exé- cuter le projet qu'il médite ; ce font autant de puiifances qu'il fait calculer , '& qu'il multiplie ou modere à fon gré pour, pro- duire les plus grands effets. En un mot, les Sciences ■& Iqs Arts font des reiforts par lefquels l'Architecture fe meut &; opère : ils peuvent à la vérité agir fans elle , &c Îjroduire des chefs d'œuvre 5 mais alors
eurs productions font bornées. Ce n'eft que de leur union avec l'Architecture, que ré- fuite l'effet auquel nous devons une maniere d'être & une jouiifance plus heureufe & plus parfaite. Que ne doivent point a PArchke&ure
la plupart des Nations qui prétendent Pern- |
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Ijsrr rojoùct ι ο ν. tij
porter fur celles que la providence a placées
près des Poles ou dans des climats déferts & brûlants. Les Arts dont la vanité hu- maine s'honore le plus chez ces peuples, 6c ceux dont les preiliges flattent le plus leurs fens, fe bornent à occuper leurs loiiîrs j mais la perfection de l'Architecture feule, efl le fruit de la fage & prudente écono- mie , & de la politique des plus puiiTants Gouvernements > elle eft l'objet important de rinduftrie de leurs Citoyens > elle iadsfait à leur luxe > elle pourvoit à leurs befoins s elle donne aux plus grandes entreprifes la folidité néceifaire pour braver les temps, Se fert à faire palier a la poitérité la mémoire des Conquérants. Tous les Arts libéraux 9 fans doute, font
également eÎlimables lorsqu'ils concourent; au bien public, à l'utilité des Citoyens &: à la gloire de la Nation j ils n'augmentent d'eilime ou de valeur qu'à raifon des con- ventions établies dans la fociété. Le La- boureur qui cultive la terre , l'Artifan qui vit d'un travail pénible eft, nous ofons le dire ici, auiîî eilenciel a l'Etat que le Guer- rier qui combat l'Ennemi , & que le Magiftrat qui fait parler les Lois, S'il eil donc quelque préférence , quelque pré- dilection attachée à une de nos connoîflan^ ces, elle ne peut convenir qu'à celles qui -, |
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1*8 ϊ Ν Τ RO DU Cf ï O ft.
en devenant les plus utiles, fuppoferit lé
plus de génie ? dé dignité, &c annoncent le plus de magnificence. Si ce que nous avan- çons ri5eil pas fans fondement ? on doit con- venir de la fupériorité que l'Archite&uré doit avoir fur tous les Arts. Nous ne répé~ terons point ce qui regarde fort utilité, elle èil inconteftable. Mats nous fommes forcés de convenir que c'en: un Art difficile i & qu'un boii Archite&ë,, tel que nous l'enten- dons, ne peut être coniidéré comme uri homme ordinaire. Nous l'avons vu ailleurs, l'Archite&ure fit des progrès lents j certaine- ment les autres Arts en ont fait de plus rapides. LaPeînture & la Sculpture que nous cpftinguons ici entre hs Arts libéraux i font des Arts d'imitation 3 Γ Architecture au con- traire crée plutôt les objets qu'elle ne les imite y elle ouvre un champ ν aile à l'ima- gination & au génie de l'Architecte. D'ail- leurs la Peinture particulièrement fé par- tage en pluiîeurs clafTes. Lés hommes célè- bres* excellent chacun féparémerit dans I'Hiftoire, la marine r la décoration dés théâtres, &c, L'archite&ure eft une, il ne iuffit pas d'être décorateur, diitributeur ou conftructeur pour mériter le titre de grand lArchite&e > il faut réunir fupériéurement ces trois branches, &; leur aiTocier les con- ftoiflances de tous les autres Arts qui lui ibnt
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In TR §b? υ er ι ο ν. 129
font fubordonnës. C'eft de ces différentes
études combinées, que naît la fupériorité de l'Architecture. De tous les A rtiftes* Γ Architecte eil celui
qui, après l'opération, peut le moins re- venir iur fes pas. Avant de jeter une ftatuè en bronze, le Sculpteur conilike la nature &: fait pluiieurs modèles 3 un Peintre ha^ bile peut faire des changements utiles à fon tableau j un homme de Lettres peut corriger fon ouvrage à une féconde édition j un.Mufî- cien du premier ordre arrive à un plus haut degré de perfection par les eifais qu'il peut faire de Îqs comportions y l'Architecte eft le feul qui doit juger de l'effet de fon œuvre avant de pàifer à l'exécution. Ses ouvrages font plus étendus, la main d'oeuvre, l'écono- mie des matières apporte fouvent des chan- gements indifpenfables dans fbn projet, &c en changeant l'accord des parties au tout & du tout aux parties, lui fait employer des licences dont il ne s'apperçoit,la plupart du temps, que lorfque fon édifice eft à ia fin. Il lui faut d'autres occaiions pour ie corriger de fes premières fautes: non-feule^ ment elles font rares j mais combien d'Ar- chitectes de mérite ont fini leur carrière fans avoir eu Pavantage de fe trouver à la tête d'une de ces grandes entreprifes, qui feules font les grands hommes dans ce genre Tome L I |
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<Χ^Ο ΙΝ Τ RO DUtT I Ο Ν.
de talent? Les atteliers des meilleurs Artiftes
peuvent produire des chefs d'oeuvre pour des ibmmes peu coniidérables j les édifices de marque exigent des déf>enfes illimitées j ce ne font que les plus puhTants Princes v les Cités les plus opulentes, à qui il appar- tient de former des Architectes célèbres. Les Michel-Anges, les Bernins, en Italie j les Manfards , les Perraults, en France , ont prouvé, par leurs ouvrages, la fupériorité de leurs talents, & la prééminence de leur Art, comparé avec toutes les autres pro- ductions qui fe font faites de leur temps. Que ne pourions-nöus pas efpérer d'un tel
Art, il les feuîs véritables Architectes étoient appelés à manifefler la grandeur de nos Rois, & à élever les monuments fameux , confacrés à l'immortalité ! Aucun de nos Elevés ne doit ignorer que
la Porte Saint-Denis, lePériilyledu Louvre, le Vat-de-Grace, le Château de Maîfons >. l'Orangerie & les Ecuries de Verfailles, font autant de chefs d'oeuvre capables de prouver à tout homme impartial, que ces ■ monuments èc leurs auteurs, ont aiTuré à •l'Architecture le droit de prééminence fur tous les autres Arts qu'elle aiTujettit à fes lois. Après avoir parlé de la fupériorité de
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Intro nu er ι on. 13t
l^Archite&ure , nous croyons devoir finir
cette Introduction eiTencielle pour infpifer à nos Elevés l'amour dts Beaux-Arts, par leur indiquer les moyens de devenir un jour eux-mêmes de grands Archite&es, ainiî que les connoiilances qu'ils doivent joindre a l'étude de cet Art, Moyens d*acquérir tes talents nécejfaires à un
Architecte.
? Dans tous les temps les Archite&es ont
été néceifaires à la iociété ; ils fe font attiré les hommages publics de toutes Iqs Nations civilifées. Que de cottnouTances en effet, ne faut-il pas à un Archite&e ? Vitruve l'a dit avant nous 3 il doit connoître les mathé- matiques, fe rendre le deiîîn familier, être initruit de l'hiftoire des Belles - Lettres , s'accoutumer à obferver les hommes., à pé- nétrer leurs goûts, leursbeÎoirts, leurs rangs, leurs diftin&ions ; il doit favoir fe replier fur lui-même, &: d'après fes fenfations par- ticulières, fes obfervations àc beaucoup de tentatives , faire paifer les chefs d'œuvre delà nature Ôc les beautés de l'Art, dans les ouvrages importants, confiés à fes foins. ;-Il doit préliminairement fe rendre raifon des licences qu'occafîonne prefque toujours raifociatioii des trois branches de l'Art. |
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ij 2 Introduction,
Ceft à lui à prévoir les phénomènes de
la vue, & les lois de l'optique, a fuivre les préceptes, &; à fa voir cependant s'en écarter quelquefois, quand il s'y trouve forcé, 8c ielon le plus ou moins d'importance de ^s eiitreprifes. ' /;*é-i ii?p L'habile Architecte fait pénétrer dans les
myfteres-de l'Art ; pour cela il doit éviter dans fes comportions tout ce qui ne pré^- fente qu'une abondance itérile j il doit ap- prendre à ménager fes moyens pour ne pas confondre le caractère particulier qui convient à chaque édifice : il doit favoir paiTer par des traniitîons heureufes du grave a l'élégant, du iîmple au compoféj varier fes productions, en n'employant tantôt que des mailès fortes ou légères^ .des formes racour- ( cies ou pyramidales , rectilignes ou iînueu- Ces-·, tantôt en donnant plus ou moins de mouvement à fes plans , foit en affectant des corps continus, rfoit en préférant des corps avancés ;& des corps intermédiaires. Sans déroger à I'efprit de convenance, il doitfouvent préférer des beautés fïeres &: mâles,'à un caractère; doux & naïf 5 quelque- fois au contraire, Urem ploie les grâces légè- res, 'itk.délicates de l'Art. ; II; faut favoir que l'Architecture , ies
préceptes à part, eil un Art de goût, de génie 6c d'invention j que quelquefois même |
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Introduction. 133
©η peut & l'on doit s'affranchir de certaines
règles. Ne vouloir jamais s'en écarter, c'eft rifquer de tomber dans la féchereiîè & la île- rilîté. Il eil vrai qu'il n'eft pas toujours poiîï- ble à l'Architecte de rendre raifon de tous les ornements qu'il emploie 5 il fuffit commu- nément de les rendre vraifëmblables, & de faire en forte qu'ils puîifent fixer agréable- ment les regards : mais ce que nous difons Ici ne comprend que la Sculpture. L'Archi- tecture , proprement dite , voit autrement. Dans les édifices d'importance, elle a pour objet la diipoiïtion générale des bâtiments principaux & dé leurs dépendances. Elle voit tout en grand j elle préfère dans nos Villes, à la décoration des façades , des accès & des communications faciles.,, elle s'occupe de l'alignement des rues;, des places, des carrefours, dß la diffribution des marchés, des promenades publiques. Au reite, il eil des ornements acceptés par l'ufage que l'habitude a rendus néceffaires, quoiqu'ils n'aient d'autre autorité que le fufïrâge ùniverfel ; ils contribuent quel- quefois à donner encore plus d'éclat a. l'Architecture : de ce genre font les ilatues, les trophées, les vaies, les candélabres, qu'on place ordinairement fur les baluflra- des ou devant les attiques, fans autre motif que la magnificence > les ornements taillés lu]
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134 Introduction.
fur les moulures des façades extérieures,
richeiie néanmoins qui devroit être réfer- vée pour le dedans des appartements; les médaillons qui peut - être devroient être confacrés pour les fêtes publiques 3 les têtes humaines 3 lesmafcarons qu'on place fur les claveaux dés portes, des croifées, & aux- quels on devroit préférer les clefs, les agra- fes que pluiîeurs de nos bâtiments célèbres nous offrent pour exemple 3 les bas-reliefs, ordinairement enfermés dans des tables, &; dont la petîteiTe du module devroit porter à ne les admettre que dans l'intérieur de nos Temples, ou dans les très-grandes pièce« de nos habitations 3 enfin les blâions, les fupports que l'oftentation fait placer dans les tympans i fur les frontons de nos bâti- ments , &c quelquefois même à ceux des édifices facrés, contre toute idée de vraif- fembîance , pendant qu'ils ne devroient trouver leur place que pour fervir d'amor- tilTement fur les portes de nos Hôtels , 6c fur celles de la demeure de nos riches par- ticuliers : car cette efpece de fculpture , ainfï que les précédentes, paroîtplus tenir à l'arbitraire qu'au raifonnement. On ne l'em- ploie donc que parce que la plupart des Archite&es péfent plus communément les fufTrages de la multitude, qu'ils ne comptent ceux des grands Maîtres, qui, quoiqu'on |
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Introduction. , 13 j
petit nombre, doivent avoir la prépon- dérance fur le vulgaire. Pour parvenir à clioiiir avec goût ce que
nous devons imiter ou rejeter des produc- tions de nos prédéceileurs , nous l'avons dé}a dit, nous le répétons j il faut que les Elevés en Archite&ure regardent le deiîîn comme la baie de toutes leurs opérations, non pour devenir Peintres, Sculpteurs ou Décorateurs , chacun de ces Arts exigeant en particulier qu'on s:y livre fans réferve y mais parce que pour être bon Architecte , il leur convient de favoir aiïèz bien deiïï- ner la figure , l'ornement, le payfage, les, règles de la peripe&ive, &: l'art de modeler, afin de pouvoir devenir au moins de juiles appréciateurs des talents des Artiiles qu'ils doivent affocier un jour à leurs travaux. Que néanmoins ils foient bien perfuadés qu'il leur eil également dangereux d'igao- rer abfolument toutes ces fciences, comme de s*y livrer avec cette fougue &i cet en- thoufiafme qui les égare prefque toujours, au-delà du but qu'ils doivent fe propoièr j car, dans le premier cas, leurs compofitions froides étant dépouillées des ornements deftinés a les embellir, ils. font obligés de les faire paifer dans, de nouvelles mains,, qui fouvent en abufent j en forte que ces beautés 7 qui ne devroient être cafaccefi- I h
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x$& In tro&uction:
foires dans l'Architecture , deviennent au-
tant d'obitacles aux beautés primordiales qui en con-ftituent l'efTence. Que nos jeunes Arcliite&es évitent auffi
avec foin de fuivre aveuglément les orne- ments qu'une mode pafTagere femble auto- riièr j'que fur-tout ils fuient l'imitation des ouvrages qui n'ont aucun genre ni aucun caractère particulier , & qui fe trouvent tels, parce que leurs Auteurs îgnoroient ce qui conftitue le vrai beau Se le beau idéal. N'avons-nous pas vu les ornements frivoles des dedans paifer dans les dehors? abus qui a mbfîité long-temps. Aujourd'hui par une inconiëquenee tout auiîî condam- nable , on applique le ilyle grave des dehors ? dans l'intérieur des appartements: on donne à nos meubles , ce que 'l'expérience nous avoit appris à éviter, je veux dire , les formes quarrées dont les angles bleifent l'œuil , nuifent ·■ à la circulation des per«, fonnes afTemblées dans nos demeures, ..& fouvent on s'appuie du prétexte que ces formes font imitées des Grecs, fans réflé- chir que ces peuples ne les employaient que dans leurs Temples ^u dans la décora- tion extérieure de leurs édifices publics y & qu'elles ne conviennent jamais% ou que tres rarement, dans les choies d'agrément ou d'un ufage journalier. Quoi de plus abfurde |
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Int rob u er ι ο ν. 137
par exemple, que de charger les lambris d'un
boudoir, des mêmes feftons compofés de feuilles de chêne & de laurier , dont on décoroit à Rome les Arcs de Triomphe deftinés à faire paiTer à la poftérité les victoires du Héros ? inadvertance peut-être plus révoltante encore , que les rocailles Sc les ornements Chinois ? qu'on a prodigués pendant vingt années dans tous nos bâti- ments , & même jufques dans l'intérieur de nos Temples. Que nos Elevés y prennent garde j il faut du choix dans l'imitation : qu'ils apprennent même à douter de tout ce qui vient de leur propre fond, qu'ils confiil- tent leurs Maîtres j qu'ils s'inftruifent avec les Artiftes célèbres & avec les Citoyens qui s'intéreifent à leurs fuccès ·■> qu'ils leur faf- fent fouvent part de leurs projets.} qu'une noble émulation anime leurs travaux : utile à tous les âges, elle doit être l'apanage du jeune Artifte : qu'ils étendent beaucoup plus loin les bornes de leurs connoiiïancesj que fur- tout ils foient modeftes fans timidité, hardis fans préfomption ; qu'ils viiîtent fouvent les chefs d'œuvre du iiecle paiTé , pour les comparer avec la plupart de ceux qui s'élèr* vent de nos jours ; qu'ils évitent principale- ment l'incertitude dans laquelle marchent quelques-uns de leurs émules , qui , au mépris des véritables règles de l'Art, fem- |
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13 S Introduction,
blent, a l'cnvi les uns des autres, élever
dans cette Capitale, des bâtiments à peine dignes de la barbarie des onze & douziè- me iîecles : barbarie , nous oibns le dire ici , qui fubiîftera , tant que la plupart de ceux qui fe vouent à l'Architecture, embraiTeront l'étude de cet Art, ceux-ci par occafion, ceux-là par dus vues d'intérêt > les uns par déiœuvrernent, hs autres parce qu'il faut être quelque chofe; très-peu par goût, par inclination , &: avec la noble ardeur de devenir célèbres : d'où il refaite tant de talents manques , tant de produ- ctions informes , tant de décorations extra- vagantes , gigantefques ou puériles;, qui annoncent la décadence du goût. Ces défauts fe perpétueront, tant que la plupart dts Elevés relieront fuperfîciels , qu'ils auront recours à l'importunité , qu'ils bri- gueront par faveur , par protection , des entreprifes qui ne devroient être confiées qu'au vrai mérite, à l'expérience & à l'în*- tiégrité. Deux inconvénients également préjudi-
ciables aux progrès de l'Art, contribuent aux reproches fondés que nous ofon$¥ faire ici à pluiieurs de nos jeunes Architectes , M même à notre iîecie -, le premier, de ne pas faire affez communément entrer pour quelque chofe dans l'éducation des hommes |
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In r o du c τ τ ι ο ν. ij 9
bien nés, les connoiiTances élémentaires d'un
Art iî recommandable5 le fécond;, la pré- cipitation du début de nos Elevés. Ceux-ci contents des premières notions de l'Art, ne prévoient pas qu'il faut pour parvenir à fes /iiccès, non-feulement une profonde théo- rie , une très-grande pratique, une longue fuite d'expériences 9 mais encore l'étude des grands Maîtres , qui nous ont précédés > étude ians laquelle ils ne peuvent jamais par- venir au iîmple, ni atteindre au fublime. Ce beau, cette noble /implicite, doit fur-tout caractériiër les différents édifices qu'on érige dans cette Capitale, dans fes environs, dans nos Provinces j & il eft intérelTant que les perfonnes en place, chargées de la gloire &: des intérêts des Peuples , la connoiiTent, pour favoir au moins dîiHnguer les produ- ctions des Architectes d'un vrai mérite d'avec les comportions des Architectes fubalternes, pour fe rappeler avec étonnement la folidité immuable des monuments de l'Egypte fous Séfoftris j la beauté des proportions des édifices des Grecs fous Périclès j la perfe- ction des ouvrages de l'ancienne Rome fous les Céfars, de Rome moderne fous Léon X> enfin le goût de cet Art iî naturel à la nation Françoife, & qui s'eft manifefté il fupérieu- rement fous Louis le Grand. Si nous déiîrons que l'homme d'Etat ac-
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140 Introduction.,
qftiere des connoiifances iî utiles à tout Ci- toyen , <jne nos Elevés fentent combien il leur eil autrement important d'entrer dans tous les détails de cet Art} détails qui font feuls capables d'élever l'Artîile au-deiTus > de lui-même , lorfqu'il a fu parvenir à un certain degré de perfection : qu'ils voient combien au contraire il leur feroit humi- liant de ramper baifement dans la médio- crité , fans pouvoir jamais mériter l'eilime de leurs Contemporains , ni celle de la poniérité. Que fur - tout ils fe fouvien^ nent que dans la jeuneiîè, l'imagination prend fou vent la place des préceptes, & que dans ion premier eflor elle choiiit plutôt les beautés hafardées, que les beautés réelles 5 qu'ils fâchent que cela ne leur arrive préci- iement que parce qu'ils ne mettent pas aiTez d'ordre dans leurs idées, dans leurs études, &. que leurs diitra&ions leur font fouvent: perdre le fruit des préceptes qu'on leur enfef- gne. La plupart des jeunes gens font domi- nés par l'amour-propre; &; ce défaut leur fait oublier , qu'après la chaleur de la com- poiîtion ils doivent revenir fur leurs pas, δζ fe corriger à" loîiir 5 qu'il doit toujours y avoir une différence très - coiiiîdérable entre le premier projet & les plans iûr lefquels on doit bâtir 5 que cette der- nière idée doit les fuivre par-tout, en tout |
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ÎNTRODU CT I O Ν. 14t
temps, & dans toutes les occafions; que dans
la conception d'un projet il fuffit d'avoir en vue la difpoiition générale? mais que quand on met la main à l'œuvre, c'eit alors Îparticulièrement qu'il s'agit d'approfondir
es règles de l'Art, l'efprit de convenance èc les lois de l'économie : qu'il faut iàvoir faire des facrifices, au défaut des principes avoir recours aux reiTources de l'art 3 qu'en un mot, dans le début de fa compofition il faut de la fagacité, 8c félon l'occafion, de l'enthouiiafme * dans la fuite au contraire, du flegme, de la retenue , & des combi- naifons. lh?% Pour arriver à ces différents degrés dé
perfection , nous confeillons à nos Elevés, avant d'ofer entreprendre un vol trop ra- pide, de commencer par des comportions lîmples & faciles, de foumettre leurs pre- miers erForts à des hommes éclairés, qui puuTent leur en faire fentir les plus légers dé- fauts. Nous les exhortons à ne jamais palier i un fécond projet, que le premier ne foit entièrement retouché, 6t qu'il·n'ait été de nouveau fournis âu; jugement des Maîtres -de l'Art. Nous les engageons à ne fe paiTer rien , à ne négliger rien, à ne rien omettre} cette févérité eil le feul moyen qui punie les conduire au faîte de l'Art. Sans toutes : ees précautions, ceux qui i auroient déjà |
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142 Introduction.
donné des efpérances, & laiiTé entre-voîr des
étincelles de leur génie , ne produîroient dans la fuite que des comportions foibles \ L·. quelquefois même au-deifous du médiocre. Qu'ils fe reiÎbuviennent tous, qu'ils ont be- foin d'étudier encore pour devenir des hom- mes, qu'il n'y a qu'une étude fuivîe & appro- fondie qui puiife en faire des Archite&es du Î)remier ordre 5 qu'il eil néceifaîre de puiier es préceptes à leur fource : qu'ils s'accoutu- ment à lire les bons Auteurs,à les commen- ter, à les extraire: qu'ils vifîtentàpluiîeurs reprifes les modèles célèbres que nos plus grands Maîtres nous ont laiiTés pour exemr :plesi qu'ils s'éprouvent pluiîeurs fois dans les comportions de même genre àc de genres différents j que leurs projets foient toujours aiîùjettis à des mefures données, à des ouver- tures d'angles prefcrites, aux inégalités d'un fol qui exiite, afin de s'accoutumer de bonne heure à vaincre les entraves inféparables de certaines efpeces de conitruétions. Qu'en fui- :Vànt ces cours, enfin, nos jeunes Citoyens Tentent tout l'avantage de leur aiTociation avec les Amateurs qui fuivent nos confé- rences, de qui , par leur exemple , doi- vent leur apprendre ce que petit fur des hommes déjà initruits r le déiîr d'aug- menter la fomme de leurs connoiiïances j avec ceux qui de nos Provinces viennent |
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ƒNTMO Dl/CT ΙΟ Ν. 143
puifer dans nos leçons , le goût de l'Archi-
tecture } pour le répandre un jour chez euxj avec d'autres Artiiles, qui Tentant la néceffité indifpenfable de joindre au talent de la Peinture & de la Sculpture qu'ils exercent déjà avec fuccès, l'étude de l'Architecture, accourent fe perfectionner dans cette Ecole des Arts y avec des Artifans qui tous les hivers viennent ajouter à la pratique qu'ils ont déjà, les inftructions élémentaires que nous donnons. Pluiieurs de nos Elevés né- gligent ces éléments, parce qu'ils n'en Ten- tent pas l'utilité. Mais on a beau travail- ler , fans lts éléments de l'Art, on ne peut parvenir ni à la théorie., ni à la pratique de l'Architecture. Qu'une noble émulation ani- me donc nos Elevés j qu'ils travaillent pour leur propre gloire & pour celle de leur pa- trie. Deilinés pour la plupart à porter un jour dansles pays les plus éloignés, les mo- dèles de nos productions, que leurs progrès atteftent à ces Peuples , que la nation Fran- çoife ne le cède à aucune de celles qui fe font le plus iignalées dans ce bel Art. Finiiîons cette Introduction par l'origine
du Jardinage , de la Sculpture & de la Peinture , autant d'Arts libéraux , infépa- rables de l'Architecture &c des connoiiTances qui y font relatives. |
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144 Introduction.
O RI G I NE DE L'ART DU JARDINAGE.
JL' O e CUP ATION la plus véritablement
louable, effc fans doute l'Agriculture : auiîî cettefcience a-t-elle été long-temps la feule qui ait fait le bonheur, & fixé les travaux des hommes. Enfuite elle s'eil partagée en pluiîeurs branches, qui toutes féparément ont contribué à leur rendre la vie plus agréable &: plus commode. On eil parvenu enfin à aiTocier la culture des terres avec 1'A.rt du Jardinage, d'où font réfultées di- • verfes productions, rangées avec iimétrie,
ou difpofees avec ce beau défordre que nous préfente le fpe&acle de l'Univers. Perfonne n'ignore que dans tous Jes temps
les Chefs de famille, les Patriarches, les plus grands Princes , ont encouragé l'indu- îlrië des habitants de la campagne , & qu'ils "n'ont pas même dédaigné d'y donner leurs
foins. Nous devons à ceux-ci une partie de ce que Xénophon, Caton , Varron, Colu- nielle ont écrit fur cette fcience, Ôrà d'au- tres Ecrivains, différents Traités qui nous ont
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Ιμτ R oî>Vc τ ίο Ν. 145
ont appris à cultiver nos héritages, à rendre
nos moiiîons plus abondantes, à émonder les arbres y à les grerFer, comme on a dû depuis à le Nautre , à Baptiile &c à Le Blond ; l'art de rendre régulier un terrein montueux dans ibnibl, & inégal dans ion pourtour, à tracer des parterres, à creufer des boulingrins, à placer avec un certain ordre les rieurs, les arbultes de les ârbruTeaux de toute eipece, les grottes , les fontaines 9 les portiques na- turels & artiiîciels. Mais comme toutes ces dernières par^
ties tiennent directement à l'Art, avant d'y paiTer,difonsun mot de ce que l'on entend par Agriculture , proprement dite , d'où, eil émané le Jardinage qui fait ici notre objet. Les premiers hommes, obligés de pour-*
voira leur fubiiilance, apprirent à ouvrir, à façonner, à améliorer la terre , &; à en tirer ce qui leur étoit néceiTaire s enfuite connoître les grains, les ferner, en augmen- ter l'efpece* fut l'objet de leurs recherches: connoiflancês que le déluge même ne dé- truiiît point entièrement5 que NoépoÎfèdoit, dont il s'occupa au fortir de l'arche > Se qu'il communiqua à fes defcendants : ceux- ci , a. leur tour, perfectionnèrent les outils, s'attachèrent à la maîn d'œuvre , & ie don- nèrent" pour lès inventeurs <Jè cette feienec x ]Toni& Ι. Κ |
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îtf ΙΝ f RO DUC f I O à.
quo iqu'en cor e imparfaite, tes Egyptiens
en font honneur a Ifîs & à Çmris fon époux (s ) ; les Grecs a Cérès, êc les Romains à Saturne gù à Janus. Ge qui eii certain, c'eft que les Grecs ont eu une grande vénération pour agriculture. Hiérön Ue Siracufe, Attalus Philopator de Pergame , Archélaüs de Macédoine,&: une infinité d'autres grands hommes font loués par Xénóphon de par Pline, de l'attachement qu'ils ont témoigné pour les travaux champêtres. L'Hiftoire fait auffi mention que Γ Agriculture fut le premier objet des Légiflateurs Romains, '& qu'on a vu pendant filuiieurs iiecles les Héros de l'ancienne Rome, paifer de la culture des champs, aux premiers emplois de la République , retourner du triomphe à la charrue, & aller ainfîfe fortifier par ]es douceurs d'une vie retirée, dans l'étude de la philofophie δ£ la pratique de la vertu. Les Chinois qui difputent à tous les au- tres Peuples l'ancienneté du labourage, prétendent l'avoir appris de Chin-Ong , fucceiTeur de Fohi. Quoi qu'il en foit, c'eft de ces diverfes contrées que cette feience fut tranfportée dans les différents climats ; le Grecs conviennent la tenir de l'Egypte» de lts Romains de la Grèce. < (s) Diodorcde Scicile, liv, f y oé FÎutarqiie ,Air. lr.
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Introduction, 147
L'Agriculture fut donc honorée chez ces
Peuples, dont le plus grand nombre confacra des Temples aux Divinités qui, félon leur opinion, préiîdoient aux productions de la nature. A meiure que le goût s'épuroit, que les
connoiiîances s'augmentoient, on fongea à tirer de cette fcience des reiîburces pour les agréments de la iociété: ifïfenfîblement on voulut traniporter dans les Villes les charmes de la Campagne, & dans celle-ci la magnificence des Villes. L'Agriculture devint donc un Art particulier, ou plutôt elle vit iôrtir de ion fein plufîeurs Arts divers 5 celui de la culture des terres fut abandonné aux Laboureurs pour les beibins éiïènciels de la vie j le loin de faire croître des légumes &c des fruits devint le partage d'une cla/Ted'hommes plus inftruits > le Bo~ taniileraiTemblaavec ordre Jesfimplës utiles à la confervation du genre-humain 5 l'idée de tranfplanter lés arbres, de les ranger avec iîmétrie fut confiée à des Artiiles intelli- gents. Tous ces uiages remontent jus- qu'aux Syriens §c aux Phrygiens (r). Les Jardins de Midas étoîent renommés pour la culture des fleurs (u) 5 Homere vante |
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( t ) Pline, lir. xx,
( u ) Héf&dote, liv. y ni. Kij
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i4§ Introduction.
ceux d'Alcinoiis pour la régularité & la
diitribution des eaux : mais iàns doute ces productions étoîent encore dans l'enfance, on méconnoiiToit les moyens de fouméttre la nature par les fecours de l'Art. On tranfplantoit à la vérité des arbres 5 mais on ignoroit la méthode de les élaguer, de les greffer, fcience qui n'a été connue que depuis le temps des Auteurs déjà cités > du moins Moïfe n'en parle point dans les pré- ceptes utiles qu'il donne aux liraélites fur cet Art important. Héiîode paiîe auiîî cette pratique fous
iîlence $ en un mot, l'arrangement deftiné a l'embelliiTement des promenades, &c à relever la magnificence de la demeure des grands Princes,' eft.. due aux Artiftes de l'Europe y mais nos Architectes en ont par- ticulièrement fait une branché de leur Art, & l'objet de leurs méditations j car quoi- \ que l'Hiiloire nous apprenne que Salomon, Cyrus le jeune, Dioclétien, Probus Si Char- les-Quint , firent leurs délaiTements des foins du Jardinage, il faut convenir qu'il ne s'eil véritablement perfectionné que fous Louis XIII & Louis XIV, qui tous deux ont trouvé dans cet exercice les attraits les plus féduifants. Il eil vrai qu'en confultant l'antiquité,
elle nous parle des Jardins de Sémiramis j |
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Introduction. 149
mais n'en étoit-il pas de ceux-ci comme des
bâtiments célèbres de ces premiers ilecles. Peut-être ces Jardins, fi vantés, n'étoiènt- ils merveilleux (y)'que parce qu'ils annon* çoient dts efpèces d'amphithéâtres,difpofés fur des terraiTes fort élevées * il y a du- moins lieu de croire qu'ils manquaient eiïenciellement par la variété de l'Ordon- nancera forme &: l'élégance que nousià- vons répandre aujourd'hui dans ce genre de productions. •En voulant même remonter aux Peu-
ples ingénieux de la Chinev qui ne s'en font pas toujours tenus à la culture àçs terres > que ne rapporterions-nous pas de l'irrégularité qu'ils affectent dans leurs Jar- dins de propreté ? Cette nation aimant peu ; la promenade, on trouve rarement chez elle hs avenues & les allées fpacieufes des Jardins de, la France. Ordinairement ils font ufâge des. chemins iînueux, & diitri- buent par fcenes la plus grande partie du terrein qu'ils deftinent i orner les environs de leurs demeures. Leurs Jardiniers imitent tour à tour les objets. îes plus, riants ou |
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(>) Paufanias , Pline-,, 8c plufieurs-autres Auteurs 4
nous ont donné la defcription de ces Jardins, & rap- portent que les eaux y étaient abondantes , & qütelkfc p^roifToient autant de mervdlles Tufpendues; en l'alto ■tr · · ·
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15© Ι ν τ no D tr e τ ι e ν.
les plus terribles, ils affectent mem« de les
diipofer de maniere que par des traniitions brufques, ils préfentent un contrarie frap- pant. Comme les chaleurs de ces climats lont exceffives, ils pratiquent dans leurs Jardins des canaux & des cafcades aux- quelles ils refufent même toute eipèce de régularité, préférant le défordre pittorefque de la nature, à la iïmétrie la plus étudiée 5 ils grouppent, à la vérité, leurs arbres comme les Peintres grouppent leurs figu- res , & parviennent ainiî quelquefois à une variété intéreiïante, variété que la Nation Angloife &la plupart de celles d'Allemagne imitent d'après eux, dans l'intention de repréfènter dans leurs Jardins cette îrrégu- ' larité &: ces heureux caprices que leur offre le ipeétacle des vallées, des coteaux &: des montagnes, qu'ils préfèrent à la iîmétrie que nous apportons le plus ibuvent dans la diftribution de nos Jardins. Ces Na- tions , d'ailleurs fort éclairées, regardent la fimétrie comme une entrave au génie, & comme un aiîùjettiiîèment trop iervile aux règles de l'Art. Les Anglois fur-tout, Peuple fërieuxy
afFedent jufques dans leurs Jardins parés une /implicite, louable ians doute, mais fou- vent trifte & monotone 5 & lorfqu'ils dé- ploient leurs reiîburces dans cette partie |
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In ï RQ du er ι ο ν. iji,
de '1*Art, ils tournent leur génie à compo-
ier des, promenades dont Paiped, feul eft errrayant.Ä Denbigk, près Dorking^ clans le Comté de Surreyy on remarque un Jardin appartenant à M, Tires &; planté par us foins, le même qui en d'autres occafions %éanmoins a iu donner tant d'agréments aux Vaux-Halls de Londres,; oh remarque.,; dis- "je,un Jardin fitué fut le penchant d'une mon- tagne,, couverte de taillis , percée de pîu- Jïeurs allées qui fecroifent. Quelques-unes, jde ces allées montent iur des éniinencesy d'autres descendent dans des précipices: les premières font riantes &,bien dreflees ries fécondes font rudes, embarrafFées j les ^unes ;& Jes, auçresifaites à deiïein derepréienter 4es vicsi^udesde lavie hpmatne. Aux car- refours de ;çes différentes allées* on a placé ïdes; infoiptions morales : près de l'entrée >de cette promenade lugubre, on trouve une :efpèciv4e. Temple dédié à h mort, dans Jequel eft un monument élevé à la mémoiif du Lord Pure, & dont les revêtiiTements intérieurs font chargés de Sentences, conv >pofées par les meilleurs, Poètes Anglois, entr*autres pair le IDo&eur Voung..A l'exr irémité de cette feinde funéraire eft fune vallée, plantée, de piçs M de cyprès , à l'entrée dejaquelie on remarque deux fque- letteshumains& de kxQsdifférents, qui par |
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ï f% I isr τ Rö dît er ï o ti.
leur attitude, femblent avertir ceux qui par- courent ces trilles lieux, de la fin de l'hom- me & de Ton anéantiiîement. Mais le ipeéfca- cle le plus erïrayant qu'on obferve dans cette fombre vallée , c'eft une elpèce de grotte divîfée en deux parties s dans l'une le remarque llnçrédulîté mourante dans le plus affreux défefpoîr, & environnée de tous les attributs iiniltres des objets qui n'ont fervi qu'à ^égarer pendant fa vîej dans l'autre, au contraire, on voit l'homme croyant à la vie éternelle ,. calme & Îërein au moment même de la mort, Se ayant pour fy/mboles au tour de lui, tout ce qui a pu contribuer à le faire marcher dans le ientier de i'efpérànce & de la vertu. 'Ces deux actions\9 û oppoTées, font peintes par le célèbre Hgyman avec une force & une exprelîîan capables d'inipirer vivement au Spectateur l'amour du bien &: l'horreur du vice. Au reifte nous ne rapportons ici cette jdée funèbre que pour prouver à nos Elè- ves qu'il n'y a rien que l'Art ne puiiïè fendre, aidé du iècours de la nature , &; que ç'eft la réunion de ces deux parties qui formé feule le mérite elfenciel de l'Ar- çhîte$:e, mérite qui nëconiifte pas, comme plufieursfe l'imaginent, às'arrêter toujours a des idées agréables, mais, au contraire, à exercer de bonne heure fon génie à rendre I ■■■ Φ M. . ... "'
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ƒ NT RO DU CT I Ο Ν. Ι J3
feniîble & palpable l'objet qu'on a à traiter.
Il ieroît peut-être bien, par exemple, d'Imiter dans les promenades champêtres, qui font partie des habitations deftinées aux hommes du monde, la variété dts Jardins Chinois, èc dans celles deftinées à la mé- ditation des hommes dévoués à la religion, des objets fombres, dans le genre de ceux uqs Jardins de Denbigh, que nous venons de décrire. Enfin, il faut faire ufage de la maj· gnifîcence que procurent ordinairement les beaux Arts réunis, pour les promenades des bâtiments confacrés aux têtes cou- ronnées , aînfi que pour les Jardins des maiforis de plaîfance deftinées à la réfidence dus Grands. Mais quittons cette digreiïîbn '& conti-
nuons de parcourir ce qui peut nous inté^ relTer touchant l'Art du Jardinage} à deÎÎèîtî d'infpirer aux jeunes Artiftes le goût général de cette fcience. : Il paroîtra étonnant que les Grecs 9 qui
ont pouiTë iî loin la perfe&ion dans tous hs autres Arts, femblënt cependant n'avoir guère excellé dans celui du Jardinage j du moins i'Hiftoire ne dit-elle rien d'intérei- fant à ce fujet. Elle parle plus avantageu- fement des Jardins de Luculk & de Néron \ Cicéron parole enchanté de ceux de Tuf- culumy Pline le Conful fait de grands éloges |
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154 Introduction.
du Laurentin (χ) &; de fa maifon de Tof-
cane. Mais nî les faftueufes deferiptions qui font parvenues jufqu'à nous , ni les deffins que nous connohTons, ne préfentent aucune idée fatisfaifante fur la diitxibution &: la décoration <hs anciens ou des nou- veaux Jardins d'Italie. Ce que nous en a rapporté le Nautre ne fert qu'à nous con- firmer dans cette opinion j il avoue même que hs productions de ce genre qu'il a examinées dans fon voyage à Rome n'ont pu enrichir fon imagination , que les Jar- dins de Tivoli, de Fréfcati & des maifons de phifa.net des grands Ducs de Tofcane qu'ori vante beaucoup, ne peuvent entrer en com- Î>araifon avec ceux de nos Maifons Roya-
es î qu'à la vérité < les eaux font très- abondantes dans la plupart des Vignes d'l·- talie , mais que les Artiftes de ce pays^, n'ont jamais fu fake valoir un iî, grand avantage > que prefque toutes leurs fon- taines font d'un.genr-e, meÎquin j qu'on n'y remarque d'ailleurs que des grottes en rocailles, de petits baflins, des jeux 'd'or- fue, des chants d'oiftaux: |$4 'Mmî autres
agatelles (y) 5 qu'oaîn'y voitden de noble, |
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(x) Voyez la Defcription <jue nous ^ donnéef^Iibienj,
du Laurentin, & de la Maifon Tofcane de Pline le Confiil. (y) Nous avons tiré ce que nolus'difonsici, d'un ma-
nuferit de le Nautre 3 dont M. * $ ί iReceveur général des Finances eft poffeiTeur. . |
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Introduction. 155
de grand'/ni qui porte l'empreinte &: le caraétere du bon goût. Il nous apprend en- core que la Vigne Pamphile &; les Jardins du Palais Ludovifi les plus eiHmés, dit-il, aujourd'hui dans Rome, ont été plantés fur les deiïins qu'il en a donnés (|| D'après ce récit on pouroit donc avancer qu'à l'exception de la iituatîon heureufe des anciens Jardins d&s Romains, c'eit. chez nous que le Jardinage a proprement été réduit en Art, comme nous avons remar- qué, que l'Architecture le fut chez les Grées. Nous pouvons le dire ici,c'eft fous Louis le Grand qu'on a trouvé en France le moyen de rendre l'Art naturel dans les Jardins de Verfailles, de Trianon, de Marly:\ de parer la nature par le fecours de l'Art, dans ceux de Meudon, de Sceaux, de Chantilly, de Liàncourtj l'un &; l'autre fe prêter des fe- cours mutuels pour former ceux de Choify , |
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CM Cet Artifte, le plus grand génie de ion fiecle ea
ce genre/ mais dont les talents furpaffoient peut-être lit modeuie -■ à en juger par le dernier trait que nous venons de rapporter, obtint de Louis XIV, en 1678 , d'aller «n Italie j & c'eft pendant ce voyage que Jules Hardouin, Manfard prit occafion de préfenter a ce grand Prince., les projets des Bâtiments & du Jardin de Marly, qu'il méditoit depuis long-temps, & que Le Nautre trouva exécutés avec le plus grand iuccès , ce qu'il ne put pardonner à Hardouin j £bn humeur altiere m pouraîic fupporter de rivaux. |
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ï$6 Introduction.
de Fontainebleaus de Saint-Cloud (a), de Saint-Germain-en-Laye Se de tant d'autres lieux admirables. Tant de chefs-d'œuvre qui ne fe ren-
contrent point ailleurs, attirent en France l'étranger , pour acquérir, par de tels exem- ples,, l'art de percer des routes, de planter des bois, des parcs, &: la maniere d'ailo- cier à la diilribution des Jardins de pro- preté y la régularité, la commodité, l'agré- ment & la magnificence. En effet, rien de G ingénieufement percé que les Forêts de Compiegne, de Fontainebleau , de Chan- tilly: rien de iî intéreifant que les routes des Forêts de Saint-Germain, de Sénàr, de Verrière. Que de beautés ne remarque-ton pas dans les grandes allées champêtres Ôc parées des parcs de Rambouillet, de Sceaux, de Bagnolet, où. la culture des arbres & la hauteur des paliiTades qui les accompagnent, forment un ipeetacle &; un ombrage enchan- teurs. Ce bel ordre fournit les moyens de fe tranfporter d'un bofquet à l'autre, pour aller contempler les chefs-d'œuvre variés des charmilles , des tapis verds, du marbre, |
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(<z) Voyez les volumes IV 3 V & VI de f Archi-
tecture Françoife, où Ton trouve les plans de ces diffç- ientes Maifons. Royales x leurs Jardins, leurs Parcs & leurs envirjons, |
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Introduction, 157
du bronze & des eaux jailliiTantes, raflèrn- blées fous tant d'afpeds différents, mais quelquefois, peut-être, avec trop de pro- iufion, quoique toujours avec goût, èc avec cette régularité que nous reprochent fou- vent les amateurs des feules productions de la nature. Sentons le prix de tant de mer- veilles, èc fixons à préfent notre attention furies chefs-d'œuvre de Sculpture, qui em- belli-iient ces promenades délicieufes. |
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M. #4 HL
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158 Int ko υ υ er τ ο ν.
Ο Κ Ι G IN E DE LA SCULPTURE.
jLJe tous hs Arts utiles,la Sculpture eft
celui fur lequel on a peut-être le moins écrit : nos Sculpteurs célèbres, comme la plupart de nos grands Architectes , fe font contentés de produire des ouvrages admi- rables, &; ils ont JaiiTé le foin de vanter leurs chefs-d'œuvre aux Ecrivains de leur temps. Notre intention n'eft point ici d'interpréter le illence qu'ils ont gardé iiir leurs pro- ductions : cette tâche eft au-deiïiis de nos forces. Rapportons plutôt, avant que d'en- trer en matière, quelques notions principales tirées des Mémoires publiés par l'un acn- tr'eux , appelé aujourd'hui dans un florif fant Empire du Nord , pour y jeter en fonte la ftatue de Pierre le Grand. La Sculpture ainiî que l'Hiftoire, dit M.
Falconet, eft le dépôt le plus durable de la vertu des hommes ou de leurs foibleifes. Son but principal néanmoins eft de perpé- tuer la mémoire dts grands Princes , des Héros Se des bons Citoyens 5 elle a pour |
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Introduction* 159
objet de prendre la nature pour modele,
dans laquelle exifte un beau eifenciel, quoî- qu'épars dans les différentes parties de l'U- nivers 5 beauté qui, félon cet excellent Ar- tifte, exclut toute attitude forcée que la nature défavoue, aufli bien qu'un contrarie outré. L'un & l'autre nuifent à la belle impli- cite qui a produit les chefs-d'œuvre delaGre* ce,&: qui devra éternellement fervir de mode- le à la poftérité : modele, dit-il, de regleêc de préciiîon qu'on remarque elfenciellement dans le Gladiateur, l'Apollon, le Laocoon, l'Hercule Farnefe,le Torfe, l'Antinous, le Groupe de Caftor &: Pollux, l'Hermaphro- dite, la Vénus de Médicis, &c. Modèles excellents^qui tous ont fervi de guides dans le dernier iîécle aux Pujet, aux Sarrazin, aux Girardon, aux Auguer, aux Coyièvox. Nous en pouvons dire autant ici des Bou^· chardon, des Pigal, des Falconet, des Salis, & des le Moine de nos Jours r.Artiftes du premier ordre qui fe font particulièrement affranchis des limites que les anciens s'é^ toient tracées dans le genre du bas relief, aufli bien que de la féverité de l'antique, pour joindre à la préciiîon des chefs-d'œu- vre d'Athènes, les grâces que les Sculpteurs de notre Nation favent donner à leurs com- pqiïtions. Mais fans vouloir entrer dans les détails |
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ι So In t ro î>u ct î ο ν*
qui conitîtuent le fävoir des Statuaires Grecs
- & de ceux de notre Ecole Françoife, contenu tons-nous de parler de l'origine de cet Arc éc de i'embelliiTement qu'il procure à l'Ar- çhite&ure quand il y eit appelé par la né- çeffîté, le goût Se l'efprit de convenance/ L'homme, naturellement imitateur , a cherché de bonne heure l'art de rendre lts objets que lui offroit la nature >..les premiers Artiftes par le fecours des notions du de£ iin , s'accoutumèrent à conduire les opé- rations de la main, par le fecours de l'œuil. P'abordle charbon, enfuite la pierre tendre leur fournirent le moyen de deffiner ihr des iurfaces planes j après quelques fuccès, 6c après avoir coniîdéré la forme qu'acqué- roient certains corps mous, en s'iniinuant dans les cavités des matières folîdes,, ils parvinrent à l'idée des moules. On modela donc l'argile > mais le deiir de donner plus de folidité à leurs produ&ions leur fît pré- férer le bois , employer les minéraux & fondre les métaux $ aîniî l'art de modeler la terre, pour les befoins de la vie, devint la fource qui fit éclôre celui de faire en relief des figures en bois, en marbre , en bronze ; &; quoiqu'il parohTe que les progrès des modèles en terre, ayent eu une perfection lente, il eil prefque certain que les premiers peuples n'ont pas tardé à y parvenir. Le, culte
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1'ν f ko t)î7 etι ο φ, iêi
culte des Idoles profita le premier de ce
progrès , &i ce culte remonte à la plus haute antiquité chez les Peuples de l'Aiiè & de l'Egypte. On n'ignore pas même que les ilatues étoient colorTalês 3 celles de Sefoftris & de la Reine, placées devant Je Temple de Vulcam, félon DÎodore, étoient d'une feule pierre , ôc âvpient trente-deux cou- dées de hauteur. Les liraélites fondirent le veau d'or, Moïfe plaça aux deux extrémi- tés de l'Arche d'Alliance deux Chérubins de même matière. Selon Homerè, le Palais d'Alcinoüs contenoit phiiîeiirs itàtues de ce métal, qui'pbftoient des torches pour éclai- rer pendant la nuit l'intérieur de ce Pa- lais. Paufanias nous apprend qu'on voyoit de fon temps, dans la Ville d'Argos4 un Jupiter en bois qui paiïbk pour avoir été trouvé dans le Palais de Priam ; que l'on montroic à Athènes une ltatue de Minerve en bois, donnée à ce Peuplé par Cécrops, & que ce Souverain introduifit dans les Temples de la Grèce l'uiage des iïmulacrës.j mais malgré tant de citations,il y a toute apparence que les ouvrages de Sculpture que les Grecs firent jufqu'au temps de Dé- dale , ïerefTentireût de la maniere Egyptien- ne. Concernes de fuivreles modelés de leurs prédéceiTete, ils' ne faifoient pour la plu- part que des figures gigantefqueSj dont lel Tome I. L· |
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16ι IntrojOUCtïon,
bras attachés au corps, les jambes faits pieds
joints enfemble, étoient fans variété , iàns mouvement, fans action 5leurs iîmulacres, au rapport de Lucain, de Juitin, de Plutarque Se de Paufanias, n'étoient compofés que de pierres feulement dégrofîies &; taillées fans goût. L'idole même de Junon, fi révérée chez les Argiens, n'étoit dans ion origine qu'un morceau de bois travaillé fans art, feinblable à celles que les Lapons, les Samoyedes &; les autres Peuples utués vers les extrémités du Nord font encore aujourd'hui. En effet, leurs premières figures repréfentoient, pour ainiî dire, l'homme en bloc : on rendoit bien fon volume, maïs on négligeoit fes mem- bres & fes traits. Ce ne fût que dans là fuite qu'on parvint à l'ébauche des propor- tions 3 mais cet Art ne fe perfectionna véri- tablement que chez les Grecs, ôc Ü y parvînt 'au fublime. Après cela on voulut aller au- delà 5 mais on tomba dans la fuperfluité j alors le beau difparut, & cette perte hâta l'oubli des premiers chefs-d'eeuvre qu'on eil obligé d'aller chercher aujourd'hui dans les entrailles de Rome, par le tranfport de tant de merveilles que les Romains en firent chez eux, après avoir fubjugiié la, Grèce & s'etre enrichi de ihs dépouilles. Ce ne fut que 300 ans après Cécrops
que les Ardues Grecs commencèrent à re- |
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Ι Ν Τ R O D Ü <: Τ Ι Ο it. ϊ,ϊ>3
connoître la difformité des anciennes ila-
fues, à quitter la routine des Egyptiens i £ Imiter dans leurs ouvrages les beautés dé lajiaturé, à donner à leurs têtes cette belle expreiïïon, &c enfin à toutes leurs figures,cetté fupériorité r cette touche, cette élégance & cette fineffe inconnues jufqu'alors : ce font ces Peuples perfectionnés qui, après avoir découvert les proportions de l'Architecture^ furent aufli faire reipirer le bronze, ordon- ner la vie au marbre. Ce fut chez eux que trométhéé \b) excella . darljlcet Art divin j ce qui fit dire de lui qu'il avoit volé le feii.au Ciel i parce qu'il avoit fu faire., pour ainiî dire , un homme vivant, avec de l'argile. Ce fut encore chez eux que Dé- dale fut donner ife.s ftatiies l'attitude d'un homme qui eil·, en mouvement, ôc que Sceî- mis ou Sulmis (c) brilla dans Sanios où il- fit cette belle ftatue de Junon , l'un des 'chefs-d'œuvre de la belle antiquité. Ce lut guiîi dans cette même ville que l'on vit |
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( b ) Pomponius Ga.uricu$ de Sculpturà , cup. Xvîi , àpud
■Gronovium. Thefaur. Antiquit. Gracia, Γ. IX , col. 771. ( c ) Sculpteur auiïî favarit que Dédale, fans cependant
avoir la même réputation 3 ce qui le fit moins acccfeuillir des blois & des Grands. Dédale au contraire, fut plus intriguant, mais auiTiil fut expofé à plus de revers. Pomj?. Gauncus j Tom. Jkprà dt. cot. 771. -■ . L ij
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Ï&4 iNTRozftrcrrojst.
naître l'Apollon Pythien (d)y figure inimi-
table } & qu'enfin Athènes vit former cette admirable figure du Gladiateur (e) , en 'action de combattre ; ouvrages du premier ordre, & dont ta.nt de belles copies ornent aujourd'hui nos Maifons Royales. Néan- moins tant de beautés & de perfections n'é- toient encore que l'aurore d'un beau jour , qui'devoit briller fous le Gouvernement de Périclès (f) , génie heureux, Citoyen eili- mable, capable de difcerner ce qui devoit tranfmettre à m poftérité la gloire de fa Patrie, ôc de prévoir tous les moyens né- ceiTaires pour lui procurer cet honneur. Les circonitances favoriferent les vues
utiles de Périclès ; les victoires remportées fur les Perfes échauffèrent l'imagination des vainqueurs j l'abondance ô£ la paix, di- (d) Placée aujourd'hui à Rome dans le Belvéder du
Vatican» : (e ) Ce chef d'œuvre de la Grèce, fut trouvera un
quart de lieue de Rome, fous le Pontificat de Paul V , en faifant faire les fondations d'une Maifon de Plaifance pour ia famille^ fur le terrein où avoient été anciennement les Jardins de Néron. (f) Ce fut ce grand homme qui inftitua le premier
dans la Grèce des Maîtres pour enfeigner à la jeuneffe J'art du Deifin & celui de la Sculpture 3 prétendant fans doute que, par cette étude, on deviendroit capable de dif- cerner plus precifément la beauté des proportions 3 & qu'oji acquerrait les connoiifances des différentes partie« îles Beaux-Arts. |
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I
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iNTRönifCTIUNX l£f
gnes fruits de Ces conquêtes, amenèrent 1'ai-
iance, le loiiîr qui la fuie,, & a(fi\m%mt & jamais la gloire de la Sculpture. Dans la fuite les fucceileurs de eet illultre chef des Grecs, les Alcibiades, Sc les Paufaniasa Athènes, les Lifandre Scies Agéfilas à La-r cédemone, les Epamiiiondas à Thebes, les Denis à Siracufe, l'opprefÎèur même de la liberté de ces Peuples, Alexandre le Grand, imitèrent un fi bel exemple, encouragèrent les Arriffces & leur facilitèrent, des iucces confiants èc multipliés. : Les gymnafes , où la jeuneiîi nue y s'e-
xerçoit au pugilat δι autres jeux, foarniifanc aux Grecsl'occafîon de contempler les plus beaux objets fans obflacles & fans voile, fu- rent les écoles des Artiiles: ils y venoîent étu- dier la nature, apprendre a la copier, à l'in- terpréter 5 leur imagination s'échaufFok à l'aP pect des plus belles nudités./ De-là ils par- vinrent à la variété des formes ; les belles oppoiitions leur devinrent familières 5 en- fuite ils cherchèrent a* enter, pour ainiî dire, les parties d'un individu fur celles d'un autre, & furpaiferent par-là la perfection du corps humain 5 ce qui rend aujourd'hui leurs chefs-d'œuvre fi méceffakes aux. Ar-* tlftes,&c iî intéreiîants aux amateurs. Ces exercices alors iî fort en ufage, les
courfes de chars, d'hommes & de chevaux.., Liij
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Ι 66 ί"'Ν TR 0 Β WC Τ ΙΟ Ν.
h lutte Sc tant d'autres jeux, célébrés avec
éclatézns plufieurs villes de l'Attique & du Péiöpóneie,o.bjets de la vénération publique, fourbirent donc aux Sculpteurs de nouveaux moyens de fe perfectionner. Cypfelus, Roi d'Arcadiè,àvoit iniKtué des jeux pu l'on difpuÈoit auiîi le prix de la beauté. Depuis; on célébra ces mêmes jeux à Sparte , à Lesbos, à Paros dans le Temple de Junon, iisiritutions qui furent très-favörables a l'Art} il s'éleva 6c fé perfectionna à l'ombre de la liberté qui régnolt chez ces Peuples.1 'La Sculpture chez eux fut toujours ém-.
ployéè à' des ufages nobles M élevés > elle n'étoit deiKnée qu'aux Divinités ., adx ob- jets facrés, ou à ce qu'il y 'avoir de plus utile pour la Patrie 5 elle ne fut point cif" fervie aux caprices d^s riches particuliers. Tout ce qui s'exécutoit en ce genre, étoit digne des grandes entreprifes de la Nation : chaque Ville de la Grèce s'empreiToit à l'envi de poiTéder les plus belles itatues des Dieux, des Héros M des Artifles cé- lèbres de leur temps. Phidias par fon Jupiter Olympien & la
ibtue de Minerve, qu'on nomma la Santé, remporta le prix fur tous Îqs prédéceiTeurs &ç iès rivaux, &; ouvrit à {qs fucceilèurs lé chemin de l'immortalité. Liiippe mérita 4fêtre préféré à fes contemporains?pour avojç- |
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Introduction. i6j
modelé & jeté en fonte la ftatue du Vain-
queur de ; PÀfîe. Cette belle Vénus, qui fait une des principales curiofîtés de la Gai- lerie de Florence , fortit dts mains d'Apol- lodore. La Vénus de Gnide par Praxiteles y m celle de Scopas {g) font autant de té- moignages de l'émulation des Artiiles Grecs. Thimomachus s'eft immoréalifé par fa Mé- dée, immolée avec ies enfants , é£ dont une Epigramme Grecque nous a tranfmis la mé- moire ( h ) s le Laocoon, cette merveille de l'art confervée au Vatican, qui imprime de l'horreur au fpedateur, le laiiîe incer- tain s'il doit donner la préférence à la Sculp- ture, à la Poéfie ou à la nature ; en un mot, la defcriptîon de nos Hîflorîens, fur le tombeau de Maufole, dont les Sculptures avoîent été faites par Briaxis, Tliimothée &; Léoçhares 5 les figures coloiTales de l'A- (g) La dernière qu'on plaça à Rome dans.le Temple-
de Brütus-Callaïeus, fut, dit-on , préférée à celle de Praxiteles. Lud, Demontiofius de Sculpturavctemm t caput. i,, apud.GtonQvium. fhefaur. Antiquité ùrœc. Tom>ix jCof.788^ (k) Cette Epigramme a été' traduite en latin :
Quod rtätos feritûrà ferox Afadea moratur y
Pr&flitk hoc magni dextera Timomachi, "lardât amor facifius , ßdaiiim dolor incitât énfeikl.
Vuh, rtßii vult natas perdtré dura fuos. Vom. Garnie, T.fitpri-, col.yy^.
L iv
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j68 In τ rod u ct ι on.
polion & du Jupiter déjà citées , du Co?
IôîTq de Rhodes,f'& tant d'autres ouvrages étonnants, exécutés chez ces Peuples, nous font de surs garants que la perfection, la beauté "& rinvention ont été pouiTées chez eux à un très-grand degré de fupériorité. Ce qui eil certain , c'eil que rien ne prouve mieux la magnificence des Grecs , à cet égard y que ce qu'en rapporte Paufanias, qui dit avoir vu dans les diverfes Provinces de la Grèce qu'il parcourut , environ deux mille huit cent vinet-ièpt helles ita- tues de amérentes matières, quoique de- puis près de trois iîecjes les Romains räva- geaiTent déjà cet Empire, èç que de fon temps Néron eût déjà fait enlever de la feule ville de Delphes près de cinq cents ilatues (i). Mais fans vouloir citer ici tour- tes, les merveilles des ftatuaires Grecs, ra- prochons-noiis de notre objet, ê£ difons que Callimaque s'eft aiiùré une gloire immor-- tejle, par la découverte du chapiteau Co~ |
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(i ) Paufanias , Auteur Hont le mérite principal eft de
peindre d'une maniere vive & concife les lieux & les, monuments qu'il décrit, nous rapporte auifi qu'en par- courant les différentes Provinces de la Grèce > il a compté fept cent treize Temples, & un nombre aflez conlîdé- lable d'Autels , de Tréfors publics, de Portiques 3 de- Tombeaux, & que la Sculpture étoit en grand honneur chez ces,Peupl«s, puifqu'en parlant des Artiftes, il compte: 1$,^. Sculpteurs, contre 15 Peintres«, |
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INT RO DU CT I ΟΝ. 16}
riiithien, ouvrage admirable dans fori genre,
qui, dans la fuite , a produit d'autres chefs- d'œuvre, qui tous ont contribué à rendre. l'Architedure plus recommandable, & à nous faire fentir combien notre art doit eiïenciellement à ces Peuples ingénieux. 5 I Tant de fuccès, néanmoins ^ eurent un
regne aiïez-co.urc; les revers les plus ίφ neites éclipferent bientôt la fplendeur des Grecs : fubjugués à leur tour, comme ils avoient fubjugué les autres Nations, ils virent leur Pays confondu dans le nombre des Provinces Romaines. Rome s'enrichit de leurs, tréfors &c s'embellit de leurs travaux j efclaves alors des Romains , ils furent peu jaloux de ne travailler que pour la gloire de leurs vainqueurs : leur génie affaiiïé s'a-^ vilît avec leur émulation, &: les Arts enneè mis de la contrainte, périrent chez eux avec la liberté, m, Les Romains pofTelTeurs de tant d'excel^
lents modèles, ne firent cependant pas de grands progrès dans la Sculpture. Leur ar- deur qui s'étoit animée tant qu'ils avoient combattu les Grecs, fe ralentit bientôt, dès qu'ils s'en furent rendus maîtres. Fiers de poiTéder les découvertes d'un Peuple qu'ils avoient vaincus, contents d'en avoir décoré Jeur patrie, ils ie bornèrent à une admira- Cioii îtérile, & lçurs Artiftes ne produiûïent. |
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1J<3 I NT RO nUCT I O Ν.
plus que de foibles copies des exemples cé-
lèbres qu'ils avoient lous les yeux. Cette inaction dura chez les Romains, jufqu'à ce que cette Capitale devenue la proie des Gochs , vît détruire par la fureur de ces Peuples, ce quelle avoît enlevé aux Na- tions aiTervies. On fit à la vérité des Statues de marbre Ôc de bronze, mais.fans art,fans vie &: fans corre&ionj la Sculpture fut ré- duite pour ai'nfi dire, à la décoration des bâtiments, décoration où l'on afFe&oit de ' la légèreté ou de la délicateiTe, mais où Ton négligeoit la convenance dans la corn- pofition > Tordre dans la diitribution, l'é- légance dans les formes, on s'éloigna in- fenfiblement de l'imitation de la nature, %ç on lui fubiHtua la difparité,la bifarerie èc la fingularité. Cette révolution fit long-temps oublier
ou méconnoître les chefs cTœuvre de l'Arc qui avoient échappé à la fureur des Peuples du Nord 5 mais lorfque les diiFérents Sou- verains qui s'emparèrent de l'Europe eurent affermi leur domination, 8c établi les limi- tes de leur Empire, le goût commença à percer les ténèbres, où tant dé barbarie Ta- voit enfeveli. On fouilla les entrailles de L· terre, & on vit les ouvrages de la Grèce fortir des ruines de Rome. Les chefs-d'eeu- vrc de fculpture qu'on en tira, devinrent: 1 ' :■'.,-"
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ƒ Ν Τ R Ο DU C:J Ι Ο Ν. 17't
l*objet de l'ambition des divers Souverains
de l'Italie, qui voulurent en embellir leurs Palais &: leurs Maifons dé platfance. La France éclairée par François I, eut
les mêmes defîrs de put les fatisfaire : ce fut alors qu'on admira a Fontainebleau cetÇe bel- lé Diane chaiTereile. On acquit fous Louis XIV, la Vénus d'Arles, la Junon de Smîrne , & une infinité d'autres antiques, Ornements de Verfailles, qui font revivre dé nos jours la réputation des Anciens;. Les François % lés Italiens, pMèÎTéurs
alors àQs richeiTes des Grecs, en firent Ά meilleur ufage que les Romains > àc tandis que Michel-Ange fe faifoit admirer dans la nouvelle Rome, Jean Gougeon &. Ger- main Piilon farprenoiént Paris, par des ouvrages qui avoient été jufqu^alofs étran- gers pour la France : bientôt les célébrés A.rtiftes François en ce genre attirèrent au- tant d'Amateurs & de ConnoiiFeurs dàris cette Capitale, que lés Grecs & les Romains en avoient attiré dans Rome. Rien n'eiï plus furprenant en effet, que la rapidité des pro- grès de nos Sculpteurs depuis cette époque,&: l'on peut dire qu'ils atteignirent le but pref· qu'en entrant dans la carrière : aujourd'hui notre école Françoife, attentive à marcher fur les traces de fts prédéceifeurs &: de la |>.elle_ antiquité, décore non-feulement H |
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ψΜ Introduction.
Capitale & les pays étrangers de (es chefs-*
d'œuvre, mais Ton miniftere relevé L'éclat de l'Archite&ure. Sans la Sculpture, l'Architecture fetrou-
veroit fouvent réduite à la fureté, à l'utilité &; à la folidité. C'eft par ion fecours que nos Edifices iàcrés , nos Places publiques > nos Maiions Royales, deviennent des mo- numents dignes de la Nation. C'eft par elle qu'ils jfe trouvent embellis extérieurement par des ftatues, des groupes, des bas-reliefs, des vaiès, des grottes, des cafcades δι des fon- taines. Ces ouvrages exécutés par la plupart de nos Statuaires célèbres font autan ta objets intéreilànts qui attirent les regards, fixent l'attention, &; fymbolifent l'Architecture qui leur a donné lieu C'eft par elle enfin, Se par le miniftere des Ornernentiftes, Sculpteurs d'une claiîè particuliere &non moins eftlma- ble, quoique dans un autre genre ; quon eft parvenu à donnera l'intérieur de nos appar- tements, cette élégance enchantereife, qui plaît à tous les yeux, principalement lor£ qu'on fait la marier avec la Peinture donc nous allons parler. |
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In t ro d u c τ ι om xyy
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J O RI G I Ν Ε
DE LA PEINTURE.
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IVALES l'une de l'autre, la Peinture &
la Sculpture,- qui empruntent tant de fe- cours du deffin ont eu la même origine, &. fe font beaucoup reiTemblé dans leurs révo- lutions & leurs progrès. Point de doute que la Peinture fut en ufage chez les plus an- ciens Peuples du monde. Mais il en eil de cet Art, comme de ceux dont nous venons de parler, il aura pris naiiTance chez les Egyptiens, & ks Grecs l'auront perfec- tionné. L'Hiiloire nous apprend v que l'amour
qui a tant de fois éclairé de fon flambeau le pinceau des Peintres les plus célèbres, infpirarle premier cet Art divin, en appre- nant à une amante paiïîonnée le fecret de deffiner l'image de l'objet de fa teridreiTej de maniere que toujours pleine de cet objet, croyant le voir dans l'ombre qu'une lumière projetoitfur un mur, elle fuivit & traça avec du charbon tous les contours linéaires qu'elle remarquai la reiTemblance d'une tête |
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V Ϊ74 Int non trc f jo m
û chère, étant aihfi ébauchée par Dibutade >
(k) il fut. aifé à .ion père de fuppléèr enfuite la rondeur & le relief, dont le trait qu'elle avoit formé > n*exprimoit encore que foible- ment la reiTemblance. Après cet eiTai, oii parvint fans doute en multipliant ces mêmes lignes, à une imitation plus parfaite > &; enfin , en ajoutant de la couleur, on for- ma les premiers éléments de la Peinture ^ dont Pline (/) attribue l'invention aux Egyp- tiens fix cents ans avant les Juifs. Diodore (m) parle avec éloge du plat-fond d'Ofimandès parfemé d'étoiles fur un fond bleu > nos Voyageurs en décrivant les ruines & les Palais de la haute Egypte, vantent le colo- ris δι Tintëlligence des Peintures qu'ils y ont remarquées 5 mais n'y a-t-il pas lieu de croire que CQs productions fi exaltées, étoient déjà l'ouvrage des Grecs appelés en Egypte: elles avoient fans doute échappé à la fureur de Cambyfè, qui détruifit autant qu'il lui fut poiïîble, les monuments de l'Egypte i qui portoient l'empreinte du goût & de la magnificence. D'ailleurs à en juger par les véftiges qui nous relient des Egyptiens, cet |
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( k) Fille d'un Potier dé terré dé Sieione ^ ville du
Péloponefeé (*) Liy. vu, Se&. iyil
{m) Liv.i, pag. 56/ |
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Introduction. f75
Art fut très-imparfait chez ces Peuples, ôc
ne doit être regardé que comme un pré- liminaire qui a pu donner dans la fuite à des hommes de génie, les moyens d'atteindre à une plus grande perfection : auflî Ariilote &; Théophraile (n), d'après Pline {0), don- nent l'invention de cet Art aux Grecs, l'un avant , l'autre après la guerre de Troie 5 quoiqu'Homere qui nous a donné la des- cription des édifices de fon temps, garde le iilence iûr la Peinture des Grecs, &: qu'il parle feulement de l'Art de la Sculpture, de la Cifelure, de l'aiguille 6c de la teinture à l'uiàge de la broderie : 11 eil vrai qu'il con- vient, qu'on favoit imprimer de quelques couches, le bois &; les autres matières, &; peindre les vahTeauxen rouge, ce qui nous donneroit à ρ enfer que lors de cet Ecrivain, on ignoroit encore' PArt du mélange, l'u- nion & Toppoiition des couleurs ·, 6c qu'on méconnohToit les reflets, les ombres L· les clairs, qui confluaient la Peinture propre- ment dite : du moins eil-il certain , qu'ori ne s'eil fervi long-temps que de deux tein- tes dans un même tableau (p ), & que ce ne |
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( η ) Thevenot,, Paul Luç^s x Grätiger, &ç.
( ο ) Pline, liv. vi ι s P*g· 4*7·
(p) Le$ ancien? appeloient ce genre de peinture , mono*
cromate ? cpnnu aujpnrd'twi fous le nom 4e gn[aiUe,s οι* camaïeux. |
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17*> ΙΝ τ ko η υ c τι ο Ν.
fut que dans la fuite, que les Grecs ëni^
ployèrent quatre différentes couleurs {q)% qu'ils fondirent enfemble,.& dont ils ont compofé pendant pluiîeurs iîecles, & mémo çlu temps d'Apelles (r) , ces ouvrages cé- lèbres dont nous parle l'Hiitoire de cet Lts Romains dans la fuite, par le com-
merce qu'ils eurent avec hs Grecs, ren- chérirent encore fur leurs prédéceifeurs j mais à fon tour, Rome fe vit elle-même dépouillée de tant de tréfors par les Goths & les Lombards, qui détruiiirent prefqu'en- tiérement ce qui fe trouva de Peinture en Italie $ de maniere qu'il n'en échappa que ce que la prudence ou la crainte avoient enfeveli »dans des lieux fouterreins, pour le dérober â l'ignorance de ces Peuples féroces. On |
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(q) Le blanc de Mélos 3 le jaune d'Athènes 3 le rouge
de Synope & le noir. ( r)'< Apelles , Tun des plus célèbres Peintres de l'anti-
quité étoit de l'Ile de Cô , & floriffoit environ l'an du -monde $650, * - t (s) Les Peintres qui, félon le fentiment de Pline,
d'Èlien^ de Valere Maxime, &c. fe font le plus iîgnalés darts la Grèce après Appelles 3 font Ardias 3 Parneus 3 EuJ»MrV ftor de Gorinthe , Damon-Higion , Nicias d'Atheries, Lifnon Cléonien, Pamphile de Macédoine, PaufîasSi- 'cionien , Protogene de Caune , Théon de Samos y ;Simomachus Bizantin , Gtefides, Polignotus , Tintante, penferoic
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ItfTROÖtfCT ION. I77
penferoït même que Ie Véfuve (0 en en*
gîoutiiTant la ville d'Herculanum ( u), moins cruel que ces hommes barbares, mit à couvert quelques parties de ces productions des Arts, dans le deiTein de prévenir leur perte entière, &: d'en conferver aiïèz pour nous faire juger des talents des Arriiles dé ces temps reculés. En effet, cette ville fou- terreine nous découvre tous les jours dés ouvrages admirables qui nous font Voir en quel état étoît la Peinture fous le régné des Céiàrs, quoiqu'on ioit forcé de Con- venir que les tréfors de Sculpture qu'on retire de fes raines , foîent de beaucoup fupérieurs à la Peinture dont nous parlons» Les farouches vainqueurs des Romains 5 après avoir mutilé ou détruit ce que Rome ■'( t ) Le Véfuvé , à préfent nornrfié Monte Somma, Volcail
d'Italie dans la Terre de Labour, anciennement la Cam* panie, eft à deux lieues de Naples. C'étoit autrefois un excellent vignoble , & les environs formoient un des plus agréables pays de toute l'Italie ; mais aujourd'hui les éruptions de ce Volcan en font un lieu ftérile : les laves ou torrents, le foufre & les autres matières inflamma- bles qu'il jeté continuellement , & quelquefois avec beaucoup d'impétuofité , inondant les campagnes voul- ues, & rendant fouvent les chemins impraticables. (u) Denis d'Halicafnaffe üte l'époque de la fonda-
tion tfHerculea , appelée auffi HcracLa ou HercuLanum au débarquement d°Hercule de Grèce en Italie, 60 ans avant la guerre de Troie, ou 1342. ans avant l'Ere Chrétienne. Cette Ville, dit - il , fut fucceiïivement habitée par les Tome I. ■ M
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178 Introduction.
& hs Provinces d'Italie renfermöient de
plus admirable en ce genre, ne laiiïerent ce- pendant pas de s'exercer dans cet Art dont ils avoient anéanti les modèles j mais ils ne firent que le replonger dans l'enfance, dont les Grecs l'avoient tiré. Leurs pro- duirions furent prefqu'auiîî irrégulieres que celles qui fe firent premièrement en Afie : leurs tableaux reifem bloient à ceux qui ie font encore aujourd'hui à la Chine 5 ils étoient deftitués d'ordonnance, de perfpec- tive, de clair o'bfcur 5 ils avoient néanmoins l'avantage, comme ceux-ci , d'exprimer, quoique d'une maniere aiTez imparfaite, une vérité fage, fimple, naïve, qui plait, par la raifon que l'éfprît ne fe trouve jamais plus fatisfait que lorfqu'ii conçoit avec netteté |
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Afques , les Etrufques 3 les Pelages , les Samnites & les
Romains ; mais elle fut conlîdérablement endommagée fous l'Empire de Tibere-Néron, par le même tremb'e- ment de terre, qui détruîiït peu loin d'elle3 la ville de Pompéia , le 5 Février, l'an 65 de J. C., & dont la ruine fut entière par Féruption du Mont-Véfuve 3 qui arriva la premiere année du regne de Titus 3 conformément au fentiment de George Agricola , qui rapporte tous ces dé- faites arrivés dans la Campanie, fous le feptiemeConfu- lat de ce Prince j ainfi il eft hors de doute que Tembra- fement du Mont-Véfuve eft arrivé Tan 99 de J. G., le 24 Août j & en admettant que le fiege de Troie fut poftérieur de 60 ans à la fondation d'Herculanum, il s'en fuivroit que cette Ville a fubfîfté pendant 1410 aa- nées. ~ . ; ':>■ |
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ƒ η τ no ό π CT ι on. τη$
l'intention que le Peintre a voulu expri-
mer dans fon tableau. Nous pouvons donc dire que de même
que les Grecs prêtèrent 'une nouvelle vi@ à la Peinture , il fallut en Italie des génies auffi heureufement infpirés qu'eux, pour faire fortir des ténèbres de nouveaux chefs- d'œuvre j & c'en: le fpe&acle qu'elle nous offre dans le# feizieme iiecle. Les Léonard de Vinci, les Michel-Ange , les Raphaël ^ les Primatices, les Jules Romain, les Car- rache, les Carravaghe, les BaiTan, les Ti- tien remirent la Peinture en honneur, con- firmèrent les miracles attribués aux Zeuxis, aux Appelles , aux Parrhaiius (λ·), & éle- vèrent cet Art divin à une perfection peut- être inconnue jusqu'alors. , Bientôt l'Ecole Flamande fuivit des tra- ces iî brillantes : les Rubens, les Vandlk firent la gloire des Pays-Bas j & l'Ecole Françoife,à fon tour, formée fur les mo- dèles de tant d'hommes célèbres, ne leur céda en rien pour la régularité du defîîn, pour la force de Texpreûion, pour le bril- |
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(*) Zeuxis d'Héraclée vivoit dans la £>ƒ' olympiadct
Plaute, dans fes Poéfîes, le compare à Appelles. Parrahafîus d'Ephefe } qui vivoit Tan 3650. Voyez.
ce que Quintilien rapporte de ce Peintre célèbre, liv. iz, enap. 10, |
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Mij
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18ö Introduction,
lanc du coloris > pour l'invention, ni pour
l'imagination > les V.ouet, 1q$ le Sueur} lts Pouffin-} les Lebrun , les Mignard , ont fait douter plus d'une fois qui l'emporte de Kome, d'Anvers ou de Paris: enfin, les Ar- tiftes de nos jours > appuient l'indécifion j de par leurs progrès multipliés dans cet Art, 'ils font pencher aujourd'hui la balance en leur faveur. En effet, c'eft depuis le feizieme iîecle
que cet Art a acquis une nouvelle maniere que nos Anciens (y) avoient ignorée j nous avons vu qu'ils peignirent à frefque (f.)·, en détrempe (a), en mofaïque (b), à l'en- cauilique (c) j mais, comme le prouve M. MI
f y ) La maniere de peindre à Thuile eft due à Jean de
Bruge, Peintre Flamand , qui le premier fe fervit d'huile de noix & de lin pour broyer les couleurs. (ç) Peinture qui fe fait fur un enduit de mortier ou
de Plâtre , encore frais , avec des couleurs détrempées avec de Peau. ( a ) Qui fe fait avec des couleurs détrempées avec de
l'eau, de la colle ou de la gomme. ( b) Ouvrage compofé de plufieurs pièces de rapport
de diveries couleurs, maitiquées fur un fond de ftüc, & qui imite parfaitement les tableaux des plus grands Maîtres-,- ~ — —-........-'- r - - -.....# ■ '■ - .. - ( c ) Pline attribue à Ariftide le fecret de peindre avec
Ja cire; il eh rapporte la maniere', liv. 73 chap. 11. Cette feue de peinture dont on peignoit les navires, étoit, dit-il, fol i de , & fi fortement imprimée, qu'elle réfiftoit à l'ardeur du foleil, & à Phumidité : Qucz fiîtum in navi- bus ace fok, nu fale ventifaue cortumpitur. Ce fecret a étf |
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Τ Ν Τ R0 OU CT 1 Q Ν. l8l
le Comte de Caylus, la Peinture en émail
(i),fur verre (e) , en miniature (ƒ), en paftel (#), toutes ces façons différentes de manier le pinceau & de marier les couleurs, toutes ces méthodes diverfes d'imiter la na- ture font le fruit des recherches & des ta- lents des modernes,,& les monuments im- mortels des découvertes qu'ils ont faites dans la Peinture. Mais fans entrer dans le détail de tous
ces avantages, ni de celui qu'elle procure à Ρ Architecture en particulier, qu'il nous fuffife de nous rappeler que, par fes gri- failles, elle rend fupérieurement les bas- reliefs & les rondes-boiTes de la Sculpture & de l'Architecture5 que, tantôt elle nous |
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long-temps ienoré des modernes > mais depuis quelques
années M. le Comte de Caylus a fait revivre cette ma- niere de peindre, dont M. Bachelier & M. Vieft ont fait 1 application avec beaucoup de fuccès dans. queiques-unes de leurs productions. c y ( d ) Efpece de verre coloré, dont la matière fonda-
mentale eft rétain & le plomb, en parties egales, que l'on fait calciner au feu , à quoi on ajoute feparement des couleurs métalliques. ,,_,', (e) Qui confifte dans le moyen de faire incorporer
îa couleur dans le verre, fans en empêcher la tranfparence. ( ƒ ) Qui fe fait avec des couleurs très-fines bien broyées,
&que l'on emploie avec de l'eau & de la gomme fur du velin. , , ,, ■ ( g ) Le paftel n'eft autre chofe que des couleurs dé-
layées avec de l'eau, & réduites en pâte en forme de crayon pour peindre fur le papier* M K)
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ί$ι Introduction*
offre un point de vue heureuiement termi-
né par une perfpeéHve agréable, en nous indiquant en apparence un lieu plus vafte , qu'il n'eil réellement 5 qu'ici, des Peintu- res fuperbes ornent les nefs & les dômes de nos Eglifes j que là, des fymboles allé- goriques aiilinguent l'ufage des diveriès pièces des appartements des Souverains > qu'elle nous fait retrouver les campagnes êc les mers au fein des Villes j qu'elle prête mille agréments à. nos retraites, qui ne nous fourniroient que des beautés peu féduîfan- tes^ JÎ5 elle ne venoit, pour ainiî dire, peu- pler leur folitude j qu'elle fait le charme de nos ipeclacles, qui lui doivent tous leurs enchantements ? que c'e/l par elle, que les Palais les plus brillants fuccédent tour à tour aux déierts les plus affreux 5 que du féjour dçs morts, on fe trouve traniporté dans l'Olympe: en un mot, que cette poè'fïe muette varie tout, anime tout, & qu'elle eil, s'il eil permis de parler ainfî, le vernis 6c le co- loris de tous les Arts. Pour nous convaincre du prix ineftimable
de la Peinture, & du cas particulier qu'en ont fait toutes les Nations favantes, con- itiltons lTIilloire : elle nous apprendra que Démétrius refufa de fe rendre maître de Rhodes, dans la crainte d'occaiîonner la. defcru&lon des ouvrages célèbres de ProtQ- |
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I-N-T RO OU CT Ι Ο Ν. t$|
genes ( h ) ·■> que Parrhafius reçoit de ies Concî-'
toyens une couronne d'or , pour prix de- Γιιη de fes Tableaux ; que les Rhodîens bâ- tirent un Temple à l'un de leurs Peintres > que la Grèce & l'Italie ont élevé des itatues à ceux qui Te font iîgnalés par des ouvrages importants^ que François I, Louis XIII, Philippe III, Philippe IV, le Duc d'Orléans Régent, de quantité d'autres grands Princes, fe font appliqués à la Peinture j que tous fe font fait un plaîilr de décorer par quel- ques marques de dignité, les Artiftes les plus célèbres : que Charles-Quint fît le Ti- tien Comte Palatin $ & que François ï reçut les derniers foupirs de Léonard de Vinci: qu'enfin, les Peintres & les Sculpteurs ( de tout temps rivaux les uns des autres) jouif- fent. encore aujourd'hui à Rome, des Prl·- viléges des nobles Romains 5 qu'à Venife les Arts libéraux ont un Tribunal 5.'qu'à Flo- |
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(A) Démétrius, Roi de Macédoine, ayant affiégé Rho-
des, fit venir dans fon camp Protogenes, qui étoit dans la Ville , & lui demanda s'il fe croyoit en fureté. Ce Peintre lui répondit avec confiance : « Je fuis perfuadé 33 qu'un grand Prince comme Démétrius , en faifant la *> guerre aux Rhodiens, ne la fait point aux Beaux-Arts. » Ce Conquérant 3 fenfîble à cet éloge, ne voulut pas c|ue Ton attaquât la Ville du côté où étoit Tattelier de Pro- togenes , & aima mieux lever le fiege-, quede prendre Rhodes, qui auroit pu être forcée du côté où demeuroit cet Artirte. Miv
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184 Introduction.
rence, Corne de Médicis leur accorda des
franchifes même au-deifus de celles des gen- tilshommes 5 que dans les Provinces-Unies, ils ont droit de participer à toutes les di- gnités de l'Etat : qu'en un mot Louis XIV eut une çonfîdération particuliere pour les Peintres François j & que de nos jours notre augufte Monarque entretient à grands frais f Académie de Rome, &: permet à fes Pein* tres de rendre publique leurs productions dans l'un de fes Palais, faveur qui contribue à entretenir leur émulation & à rendre l'Eu- rope témoin des chefs-d'œuvre de Pein- ture & de Sculpture de notre Ecole Fran- çoife. Après avoir parlé de l'origine de la Pein-
ture &: de l'ellime due aux talents fupérieurs des Artiftes qui depuis tant de iîecles fe font iîgnalés dans cet Art ; dlfons combien il eft utile pour nos Elevés defe rendre ca- pables d'apprécier les différents chefs - d'œu- vre que la Peinture répand avec tant d'é- clat dans les édifices lacrés, dans les de- meures des grands, & même dans celles des particuliers. C'eft par cette appréciation lavante de la Peinture & de la Sculpture % aidée de l'étude du deiîîn & de$ conièiis des, plus grands Artiftes, que le jeune Archi- ■Cë&e peut parvenir à appeler à propos ces |
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In τ r on νc τ ι όν. 185
deux Arts à Ton fecours pour embellir its
productions ôc les faire atteindre à ce degré de fupériorité, qu'on remarque dans quel- ques-uns de nos chefs-d'œuvre François. Aucun d'eux ne doit ignorer que Perrault n'a produit le Périftyle du Louvre £c l'Arc de Triomphe du Trône, monuments admi- rables , que parce qu'il vivolt familièrement avec Leb run, Peintre célèbre > Artifte de génie, homme de goût, & dont les produc- tions font tant d'honneur au iiecle de Louis le Grand j que François Blondel n'eut peut- être pas produit le chef-d'œuvre delà porte S. Denis, fans les fréquentes conférences qu'il eut avec Desjardins quia fait les Sculp- tures de cette belle porte triomphale, û eftimée des vrais connoiiTeurs> queHardouin Manfard doit la plus grande partie de Ces productions aux entretiens qu'il eut fouvent avec les Coifevox , les Girardon, les le Nautre & autres excellents Artiftes de fou temps. L'Hiftoire nous apprend que les plus grands Peintres eux-mêmes , ont confulté les gens de Lettres 5 le Pouiîîn s'entrete- noit fouvent avec le Cavalier Marin 5 Ra- phaël avec le Comte de Caftiglione? Giotto avec le Dante 3 & qu'enfin les plus grands Artiites en ce genre depuis Léonard de Vinci, n'ont foutenu l'honneur de l'Ecole |
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i$6 Introduction.
Flamande, que parce qu'ils vivoient $c con-
féroienc avec Galilée, &c. Que de tels exem- ples nous apprenoenc donc a coniuker tous les Artiftes des différents genres relatifs à l'Architecture, à examiner le fpeclacle que nous offre l'Univers .> pour imiter, non pour copier fervilement la nature. Nos Elevés veu- lent-ils puifer dans les tableaux de Raphaël-Ie goiit relatif à l'Architecture ? Qu'ils le confi- derentdans lanobleiFe &la convenance de ia compoiîtion , la pureté de fon deffin & ia R- neife de fon expreffion 5 en un mot dans cette grâce inexprimable qu'il donne à la beauté, & qui lui a mérité le fur-nom de Divin. Qu'ils examinent le Correge&; leParmefan, dignes rivaux de Raphaël dans l'Empire des grâces 5 ils s'appercevront que le pre- mier a foLivent violé les règles de la iîmétrie, & que le fécond a fouvent manqué de cor- rection , quoique fes figures parlent êi ref- pirent. Qu'ils confultent Michel-Ange, pour la profondeur du deiîîn & la maniere forte de Îqs comportions : Le Titien pour la belle nature δί pour l'intelligence du co- loris y le Carravaghe pour la magie des ombres 5 Paui Véronefe pour la richeiTe de l'invention. Qu'ils fereiTouviennent fur-tout que la Peinture comme la Poéiîe, n'eit autre chofe que l'imitation de la belle nature , |
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Introduction, ^ 187
mais réduite en Art, d'où doit naître un beau idéal. Qu'on ne s'y trompe pas, le Naturalifte & l'Hiftorien repréfentent les choies comme elles font ,. le Poëte & le Peintre, comme elles doivent être. Les chefs-d'œuvre de Policlete & de Zeuxis font dans la vraifemblance & non dans la vérité. Il s'agit donc de fe former dans l'imagination des modèles de toutes les beautés diverfes & de s'en fervir comme d'échelle pour monter à cette perfection, dont on s'eft fait un prototype idéal. ί Enfin, nous confeillons à nos Elevés de
ne pas négliger, comme la plupart le font, de s'inftruire de toutes les parties des Arts libéraux que l'Archite&ure gouverne & régit fous ion Empire, & 'fur-tout de fe nourrir de la lecture des meilleurs Auteurs qui ont écrit fur la Peinture , tel que ce que -nous a laiiTé M. de Piles , Fé- libien, & particulièrement" Dufrenoi (i), l'Abbé Marfy {h), M. Baîllet de Saint- |
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( î ) Peintre habile , né à Paris, où il eft mort en i66j,
âgé de 54 ans, a fait un excellent Poème latin , fur la Peinture. ( k ) L'Abbé Marfy, né à Paris, & mort il y a quel-
ques années , compofa, lorfqu'il étoit Jéfuite, un Poeme en latin, fort eftimé des connoiifeurs. On peut dire de ces deux Ecrivains, que le premier s'eft attaché à inftruire & à répandre dans-fon ouvrage, plus de préceptes que |
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s
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ïSS Introduction. ]'
Julien (/), Μ, Wateiet (m) \ & dernière-
ment M. le Mierre , ouvrages excellents qui ne peuvent que faire éclore le goût des jeunes Citoyens qui travaillent à pouvoir devenir un jour de grands Arcnkedes. |
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de fleurs j & que le fécond a mis dans le fîen moins
de leçons que d'images. M. de Querlon nous 1 donné une traduction de ces deux Poèmes, qu'on trouw l Paris chez Piffot, Quai de Conty. ° * r°UVe » v}JJ ¥' BDÎllet de,Saint:J?lief %(φ Paroître en i7«
1 eiiai d un Poeme françois fur la Peinture. ; (m) M. Wateiet, qui, comme Dufrenoi, a réuni k&
talents de la Poefie & de la Peinture, nous a donné en J ? u" loeme François fur la Peinture , qui a recules applaudiffements dûs à cet Amateur éclairé. |
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Fin de l'Introduction*
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CO U RS
D ' A R C H ï Τ E C TU R E.
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-aèti^ZigiS&Z:-.
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LIVRE PREMIER.
PREMIERE PARTI E.
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Τ RA Ι Τ É
DE LA DÉCORATION EXTÉRIEURE
'DES BATIMENTS-
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CHAPITRE PREMIER.
O ri g IΝ ε des Ordres. Source dans laquelle
on doitpuifer les préceptes de la décoration
extérieure des Bâtiments.
ÎL Ν parlant de l'origine de l'Architeâure, nous
en avons reconnu de trois genres ; la Civile ; la Militaire & la Navale, L'Archite&ure Civile , qui fait ici notre objet , eft connue fous différentes dénominations : Γ Antique, l'Ancienne, la Gothi- que & la Moderne. |
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190 Cours
L'Archite&uf e antique, la plus eftimée de tontes,
fut inventée par les Egyptiens, & perfectionnée par les Grecs ; enfuite elle pafla chez les Romains, &yfubiifta jufqu'à la décadence de leur Empire; enfin elle a fuccédé chez nous à la Gothique, L'Ancienne prit naiiTance dans l'Empire d'O-
rient , & fut fort en ufage à Conitantinople. La Gothique fe divifeen deux claiTés. La pre-
miere tire fon origine du Nord. Les Goths l'intro- duiiirent dans prefque toutes les parties de l'Eu- rope ; l'autre appelée Morefque ou Arabe , nous eft venue de l'Afrique, L'Eipagne & quelques Provinces Méridionales de la France, ont long- temps fait ufage de cette dernière Architeclure. La Moderne , proprement dite , eil née en France%
on peut en fixer l'époque au regne de François L En effet, c'eft fous ce grand Prince & tes fuccef- ieurs que les Lefcot, les Deiormes, les Manfard, ont élevé chez nous les premiers chefs-d'œuvre d'Architecture d'après l'antique, ν L'Architecture, comme nous l'avons déjà re- marqué , fe divife en trois branches: la conitruclion, îa décoration & la diftribution. Les Egyptiens font les Peuples qui fe font le plus fignalés par la io- lidité .de leurs monuments, les Grecs & les Ro- mains, par l'ordonnance de leurs Edifices, & enfin les Françoisjdans l'Art de diitribuer leurs Bâtiments. Pour acquérir ces différentes connoiifances avec
un certain fuccès, commençons par traiter de la Décoration, dont lés principes doivent leur origine aux ordres d'Architeclure dont nous allons parler. |
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d'Architecture. 191
Des ordres d'Architecture en général,
& de leur origine. De toutes les parties de l'Archite&ure, il n'en
eft point qui annonce plus la magnificence de l'Art, que les ordres qui décorent les Edifices ; auiîi Γ Ar- chitecture ne parvint-elle à fon dernier degré de perfection, que lorfque les proportions de ces ordres furent fixées, leurs différents caraeleres établis , & leurs divers ufages déterminés par les Grecs. Le premier pas que les hommes firent dans l'Art
de bâtir, fut, comme nous l'avons remarqué pré- cédemment , de fe creufer des afiles dans le fein des montagnes ; enfuite ils élevèrent fur la terre des huttes de forme conique, avec des branches d'arbres & de la terre grafie ; puis ils fe formèrent des cabanes qiiadrangulaires, en enfonçant per- pendiculairement des troncs d'arbres, au-defîus defquels ils en poferent d'horifontaux, & fur ceux- ci d'autres qu'ils difpoferent dans une forme trian- gulaire. Enfin on éleva des édifices plus fon- des & plus vailes, que Ton conflruhit avec àes piliers circulaires , faits à l'imitation de la tige des arbres, & avec d'autres qiiadrangulaires, imités d'a- près ceux que l'Art a voit équarris. De-là les co- lonnes & les pilaflres. On s'en fervit durant plu- fieurs iiecles , fans en connoître les avantages^ & fans fe douter que du rapport de leur groffeur à leur hauteur , il pouvoit réfulter des effets ii admirables, relativement aux divers degrés de beauté & d'élégance, réunis à une folidité réelle & apparente. Pluiieurs Auteurs prétendent, quç l'on vit po.ur
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15>2 Cours
Ia premiere fois des colonnes au Temple de Jérufa«
lern ; mais il paroît par le témoignage de l'anti- quité , que les AiTyriens s'en étoient fervis, dans celui qu'ils avoient érigé à Bélus. Les Egyptiens en avoient aulE employé dans leurs édifices, fur- tout dans ceux, où ils fe propofoient de joindre une folidité durable à une grande magnificence. Indépendamment de ces Edifices , les Egyptiens
élevèrent fur les fépultures des grands hommes, des Pyramides, des Obélifques & dautres Édifices de ce genre, d'une hauteur prodigieufe, dans Γίη- tention de rappeler le fou venir des aétions & des vertus des Héros , ce qui en aiîurant à ceux-ci l'immortalité, ne contribuoit pas peu à exciter l'émulation de leurs concitoyens. L'objet de ces grandes entreprifes, fît appeler en général Mo* numerus ^ tous les Edifices définies à conferver la mémoire des morts illuftres. Mais ces monuments reçurent enfuite, chacun félon leur forme particu- liere, diverfes dénominations que les Grecs leur conferverent. On nomma Stelles les Monuments , qui, depuis
leur bafe jufqu'à leurfommet, avoient quatre côtés égaux & paralleles. Ceux qui d'une forme circulaire dans leur bafe
alloient toujours en diminuant jufqu'à leur fommet, furent appelés flyks* On nomma Pyramides·, ceux qui étant qijarrés
par leur plan, fe rétrécifToientinfenliblement juf- qu'à leur extrémité fupérieure. Enfin, on donna le nom aOèélifques, du mot Grec
Obelos, une broche , à ceux qui ayant feulement leurs côtés oppofés égaux, s'élevoient aufl tou- jours en diminuant jufqu'à une très-grande hauteur. Parmi ces fortes de monuments * ceux qui étoient
nommés
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D'À HG H I TEC Τ URE. I93
nommés ßyles, approchoient le plus, à caiife de
leur forme circulaire , des colonnes qui fervoient de foutien aux édifices des Egyptiens. Les Grecs apperçurent k relation de ces deux productions de l'Art» L'une & l'autre devinrent l'objet de leur imitation ; mais rien ne pouvok encore leur fervir de modele pour le rapport de la hauteur de la tige de, la: colonne, à ion diamètre. Le tronc des arbres leur ayant indiqué feulement la forme des colonnes , & les fiyles des Egyptiens ne leur ayant oifert que des hauteurs indéterminées. Les monuments des Egyptiens étoient couronnés
d'une urne, qui renfermoit les cendres de ceux à la mémoire defquels on les avoit érigés. L'urne étoit couverte d'une brique «, qui la mettoit à l'abri des injures du temps* il y a tout lieu de préiumer, que ces fortes d'amortiiTements ont fait naître 'le chapiteau des colonnes , & que cette brique a donné lieu au tailloir qui le couronne. On fait d'ailleurs que ces urnes repréfentoient un vafe méplat, & que c'eil d'après fon imitation qu'on a formé les trois chapiteaux ,Tofcan, Dorique, & Ionique, qu'on a beaucoup plus élevés dans la fuite, pour les ordres Corinthien &: Compoiite, en y ap- pliquant, comme dans les précédents, les feuilles, lesgodrons, les oves> les ferons,les volutes, enri- chiffements qu'on donnqit volontiers aux urnes, placées à l'extrémité fupérieure des fépultures Egy- ptiennes, r . ; C'eil encore des monuments de ce Peuple nom**
mes fielles;, que font nés vraifemblablement les pilaftres appelés par. Vitruve colonnes Atticurges , & depuis colonnes Attiques. Enfin l'heureux gé- nie des Grecs les conduifit au point de décou- vrir certaines proportions, jufqualors Inconnues Tome l, N'' |
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194 Cours.
dans Τ Architecture : ce que nous allons reconnoître
par la recherche de l'origine des ordres Grecs, après lefquels nous parlerons de ceux des Ro- mains. " |
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Dorus , Roi d'Achâie, ayant fait élever fous des
proportions moins arbitraires , un Temple en l'honneur de Junon, on appela Dorique, du nom de ce Prince, Tordre dont on.décora ce Temple. Mais en considérant cette premiere découverte des Grecs, on ne fera pas étonné des changements qu'il a reçus dans la fuite , n'ayant d'abord été porté qu'environ à quatre diamètres de hauteur, ainû qu'on le remarque dans les ruines d'un Temple a Athènes , où les colonnes de cet ordre avoient 6 pieds de diamètre , & feulement 22 pjeds & demi de hauteur (â). Dans -un-autre Temple, trouvé dans un endroit de l'Attique, appelé anciennement par les Grecs T/wricion, les colonnes approchoient, de cinq diamètres. Gelles du Temple de Théfée, bâti environ dix ans après la bataille de Mara- thon,& celles du Temple de Minerve, élevé dans la Citadelle d'Athènes , avoient fix diamètres. Dans la même Ville on trouve , dans les ruines d'un Temple élevé à Augufte , des colonnes d'ordre Dorique, qui ont à peu prèsfept diamètres* Cette dernière proportion, à la vérité moins racourcie que les précédentes , eil cependant encore moins élevée , que Tordre Dorique des Temples érigés depuis chez les Romains par les Grecs mêmes ; & par-là ces dernières colonnes nous fembknt ap* proeher davantage des proportions reçues chez |
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( a) Ruines des plus beaux monuments de la Grèce, par
M. Le Roi, féconde Parcie, pag, 6 & /uiv. ." |
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D'ARCHITËCfUÎlËi f pf
riöüs : ce qui nous fait croire , que lorfquë dans
la fuite on eût ajouté à cet ordre une bafe , qui ne fe rencontre dans aucune des produclions de lä Grèce du temps de Périclès ; cette bafe d'un mo- dule , & la découverte d'un nouvel ordre Ionique à Ephefe, porté d'abord à huit diamètres , firent fans doute avec le temps donner à ce dernier dix-; huit modules j & fixer le Dorique à feize, tel quo nos modernes l'exécutent aujourd'hui dans la plu- part de leurs bâtiments* Cette conjecture prouvè- rent en quelque forte ia lenteur des progrès M l'Art ; qu'il a fallu des iiecles pour parvenir à ia beauté j à la régularité & à là perfection des or- dres que nous connoiiTons * & que les Grecs étoieiif d'abord bien éloignés $ pour ce qui regarde ies ordres d'ArcMtecjture i de l'élégance qu'ils ont fit leur donner depuis * après même avoir été réduits „en fervitude par les Romains * Les Grecs ayant paffe dans l'Aiie mineure fous
la conduite dlôn -, un de leurs chefs, réfoiurent de confacrer j dans leur nouvelle Patrie j des Temples aux Divinités qui les protégeoient. Ils cherchè- rent donc à imiter celui que Dorus avoit érigé à Junon; mais incertains encore fur la proportion qu'il falloit garder dans les colonnes dont ils préten- doient orner leurs édifices, ils imaginèrent de la régler lui* celle du corps humain. Ayant remarqué que la longueur du pied de l'homme eii ordioai- rement la iixieme partie de toute fa hauteur *·!!$ donnèrent à celle de leurs colonnes fix fois leur" «iïametre, proportion qui fut long-temps .fixée pour* cet ordre $ δε qui n'acquit huit diamètres, comme nous venons de le remarquer, que long-temps après la découverte de l'ordre Ionique ; mais vou* Ν ij
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ι$}6 € o υ *t s
lant enfuite fe rapprocher encore davantage de
la nature , & s'étant apperçu que la tête eil la. huitième partie du corps humain , ils donnèrent .huit diamètres à· leurs colonnes : ainii l'ordre Do- rique reçut fa proportion , & devint une forte d'image de la force .& de la beauté du corps de l'homme. Dès-lors il acquit un caraâere de viri- lité qui le rendit propre à orner les Temples des Dieux & des Héros. Une heureufe découverte conduit ordinairement
à de nouveaux fuccès ; ce premier pas en ût faire un autre. Les ioniens voulant élèvera Ephefe un Temple magnifique en l'honneur de Diane, cher- chèrent une nouvelle proportion , qui, fans être moins régulière que la Dorique , offrît néanmoins ,ιιη genre de beauté plus délicat. Comme ils ävoient déterminé le 1er ordre fur le corps de l'homme, ils imaginèrent de régler la proportion du nouvel ordre fur la taille plus dégagée des femmes Grecques, & donnèrent au diamètre de la colonne, qui fut nommée ionique , la neuvième partie de fa hauteur. Avec cette proportion ils voulurent offrir l'image des coiffures des Dames de la Grèce ; ils taillè- rent pour cet effet le chapiteau en forme de volu- tes; ils ajoutèrent aux colonnes des bafes pour repréfenter leurs chauiîiires ( b ) ; enfin voulant imiter jufqu'aux plis de leurs vêtements, ils creu- ferent des cannelures fur la longueur du fut de la colonne : en forte que les Grecs en prenant pour |
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{b) Quelques Auteurs prétendent que long-temps avant le
Temple d'Ephefe, on avoir ajouré aux colonnes, des baies qui-repréfencoient des hars ou liens enùployés dans la primi- tive Architettijre, pour ferrer le pied des arbres, qui foa- lenoieat lés demeures ruiUques des premiers hommes, |
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d'Architecture. 197
modele ce que la nature leur offrit de plus parfait;
introduifirent clans Γ Architecture la progreflion Arithmétique: l'un & l'autre font devenus des objets d'imitation , & une regle prefquinvariable pour les Artiftes* ? Un événement iingulier produint à Corinthe
une nouvelle forme de chapiteau , plus riche & plus élégant encore, qu'aucun de ceux qui l'avoienf. précédé , & fit naître la proportion du troifieme ordre Grec. Une jeune fille étant morte la veille de (es noces, fa Nourrice pofa fur fa fépukure une cor- beille en forme de vafe , contenant plufieurs bi- joux qu'elle avoit chéris pendant fa vie ; elle couvrit la corbeille d'une tuile , pour la garantir des injures de l'air. Le hafard fit placer cette corbeille fur la racine d'une Acanthe fauvage. Cette plante venant à pouffer au printemps, lés rameaux s'étendirent au tour de la corbeille : mais fe trouvant arrêtés par les angles de la tuile , ils furent obligés de fe recourber en forme de volutes. Callimaque , Scul- pteur Grec, frappé de l'heureux effet que produi- foit cet enfemble , conçut l'idée du chapiteau Corinthien, nommé ainfi, parce qu'il fut inventé près de la ville de Corinthe. On pofa d'abord ce chapiteau fur la tige de la colonne Ionique ; mais comme il acquit plus de hauteur que celui de cette colonne , & que par-là il raccourciffoit la tige de cet ordre , on imagina une nouvelle proportion , dont la légèreté répondît à la délicateffe du cha- piteau de Callimaque : pour cela ce nouvel ordre fut porté à dix diamètres , dans l'intention d'imiter la taille fvelte d'une jeune fille, pourvue de toutes les grâces de l'élégance & de la beauté. Dès-lors |
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ï9§ Cours
pet ordre, appelé par Scamozzi, l'ordre Virginal\
fut deiliné à l'embélliiTement des Temples dédiés 4 Veita, à Flore, à Hébé. L'ordre ionique qu'il appelle l'ordre Féminin , fut employé à l'ordon- nance des Temples dédiés à Junon , à Cerès , à Proferpine ; & l'ordre Dorique , nommé auiîî par cet Auteur, ordre Mafculin ou Viril, confacré à la décoration extérieure des Temples élevés en l'hon^ jieur de Jupiter, de Mars, d'Hercule, &c. Les Grecs non contents de leurs ordres Dori-
que,Tonique & Corinthien, dont ilsavoient établi j |es proportions d'après le corps humain , voulurent
fubititner à l'Art la repréfentâtîon de la nature elle- même« 1,'efpoir de rendre immortel le fouvenir de leurs victoires, & 1§ deiir d'éçernifçr la honte de ceux qu'ils avoient fubjugtiés , leur fit allier Jes trophées de leur gloire aux monuments qu'ils | Revoient dans leurs cités. Les Çariens s'étant I
révoltés contre euxfflirent punis de leur rébellion j
par une défaite çomplette , δζ leurs femmes ré-
duites en fervitude, D'un autre côté les Perfes qui étoient venus les attaquer jufques dans leurs foyers, furent vaincus à Platée, | Salamine & au pas des Terrnppyl.es.- Orgueilleux de tant d'a- vantages j les Grecs voulurent faire paffer à la poilérité les marques de leurs victoires ; pour cet e'fiet ils convertirent les colonnes qui ornoient Jeurs bâtiments en figures humaines, humiliées & aifaiiTées fous le poids immenfe qu'elles fembloient {apporter,. Celles qui repréiéntoient dés femmes > étoient l'image des» Carienries efclaves. Les Perfes captifs étoient déiignés par des figures d'hón)mes ί 4'où ces fortes de foutiens furent nommés pr.drQ Ç^riate & pjcU;e Perfique, |
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d'Arch ixe c Türe. 199
Mais Comme dételles images, quelque efama-
bies qu'elles ptiiffent être d'ailleurs-, par rapport à la Sculpture, iemblent contraires a la douceur de nos mœurs, qui ne permet pas d'afiêrvir awfi la repréfentation de nos fembkbles ; oft ne peut re- garder dans TArchiteaure une application de cette ëfpèce que comme un aeceffoire qui exige d être employé avec beaucoup de prudence ; autrement ces figurés qu'on diroit avoir âii rriouvetóent r & de ît&mi s^accorderoient mal ävecla iöudite qu on doit affeaér de faire paroître dans tous les genres d'édifices, Les exemples célèbres des Canatiaes que l'on remarque à la façade de la cour & dan^ l'intérieur du Louvre (c), ainfi qù au Bureau aes Marchands Drapiers à Paris , ne fervent qu a prouver que la fédu&on de l'art a iouvent pré- valu fur la vrâifemblance , qui doit toujours être obfervée dans les décorations extérieure* & inté- rieures des édifices. ! L'ordre Perfique lieft pas plus tolérable. Quel-
que viril que foit fon caraüere, il η offre que les marques d'un efclavage honteux, qui fait rougir l'humanité. On peut néanmois le placer aficz con- venablement dans la décoration exterieure des Portes de Villes de guerre j dans l'intention üan- noncer à l'Ennemi le fort qui l'attend, ü une lois il eil vaincu ; aux Prifons Civiles & Militaires ( d ) i |
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> ( c ) Voyez ce que nous avons dit dès Cariatides dû Louvre ,
Atèhit. îrane. quarrierae vol. pag. 19· (d)On donnera dans la fuite de ce Cours, le déifin fait
pour 1'Arfehal de Paris du côté de laBaftilie » lors du w«t général de l'Arfenai, dont le Minifterc m avoit charge ψ 1763,. Ν- iv
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200 COU R S
aux Maifons de Force & aux autres édifices de ce
genre , où il paroît convenable d'annoncer aux coupables ce qu'ils ont à craindre loriqiuls feront détenus dans ces lieux de punition & d'horreur.' Si les Cariatides peuvent auiH trouver place
dans notre Architecture, ce n'eu: que dans les dé- corations théâtrales, dont la fcène repréfenteroit quelques actions arrivées chez les Grecs , & où l'Artifte" feroit obligé de retracer l'image de certains faits hiiloriques. Elles pouroient encore tout au plus être iiipportées dans des fêtes publiques, où l'alégreiFe commune n'exige pas cette fé vérité à laquelle on eil aiTujetti dans la décoration des édifices durables, & où les attributs & les allé- gories doivent être afibrtis au genre & au cara- ctère du monument. Il eil encore un autre genre de îcuîpture, éga-
lement à éviter , ce font Tes Termes , enfants du caprice & d'une imagination fervile, autre efpece de figures humaines, qui fembîent fortir d'une gaine, & à qui fouvent on fait porter des fardeaux : tels font ceux que l'on remarque fur le Quai des Théa- tins de Paris. On en voit même pluûeurs dans les retables d'Autels de nos Temples , plus impropre- ment placés encore que par-tout ailleurs : ils ne doi- vent être jamais employés, & par tolérance feu- lement, que comme ornements dans nos Jardins de propreté, comme il s en remarque aux Tuile- ries , à Verfailles & ailleurs. Les Grecs ayant employé ces divers ornements
pour tranfmettre à tous les âges le fouvenir des victoires remportées fur les Cariens & les Perfes, leur vanité leur en fît abufer ; car ils fubilituè- rent long-temps leurs ordres Gariate & Perfique aux trois ordres précédemment découverts. Urfê |
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d'Architecture. 20 e
telle innovation les conduiiit infenfiblement à fur-
charger même le fût de leurs colonnes , d'orne- ments de différentes efpeces , dont la prodigalité fut enfuite imitée par les Romains. Au refte , ce reproche ne doit tomber que fur les Grecs des derniers temps. Voyons maintenant l'ufage que firent les Romains, des découvertes qu'avoient faites ces Peuples, i:V' '-''·''"■'■ ■■';"■"' Φ '- -
On attribue aux Romains l'origine de l'ordre
Tofcan. Bien des Auteurs ont cru qu'ils l'employè- rent pour la premiere fois au Temple de Janus , Roi d'Italie, puis à Florence, au Temple de Mars, aujourd'huiTÈglife du Baptifterede Saint-Jean, & qu'ils ne voulurent rien devoir aux ennemis qu'ils avoient vaincus, quoique les effets admirables des trois ordres Grecs ne leur fuifent pas inconnus. D'autres aifurent que cet ordre fut inventé en Etrurie, appelée aujourd'hui la Tofcane , lorfque les Grecs mettoient en œuvre les ordres qu'ils nous ont laifTés pour modèles. Quoi qu'il en foit, cette production des Etrufques ( e ) eft bien inférieure aux ordres Grecs, puifqu'elle ne pré- fente que l'ordre Dorique, rendu plus matériel, & tel que les Grecs l'avoient d'abord imaginé. Elle merite néanmoins quelque confidération, parce que cet ordre déterminé à fept diamètres , acquit un caractère qui lui fait tenir encore au- jourd'hui un rang aifez diilingué dans l'Archi- |
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( e ) L'origine des Etrufques cil fort incertaine. Diodoré de
Sicile , liv. f , psg. 316., nous apprend que ce Peuple aimoit beaucoup les Arts, & que ce goût lui vint du commerce qu'il eut avec les Egyptiens. Voyez auûl Les Ant. Etrufq, par M« h C, de Caylus, |
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202 G OURS
teclure, Enfin, d'autres Auteurs prétendent, que
dans toute l'Italie il ne reite aucun veitige de Tordre Tofcan ; que la colonne Trajane n'eit point Tofcane , puifqu'elle a huit diamètres ( ƒ ), & que les ordres employés aux Amphithéâtres de Vérone & dé Nîmes, font d'une Architecture trop ruiti- quë pour oifirir des modèles de Tordre dont il s'agit. L'invention de Tordre Compofite eil encore due
aux Romains. Quoiqu'il eût été mis en œuvre long-temps avant Vitruve, cet Auteur n'a pas jugé à propos de lui afligner uri rang parmi les ordres, non plus qu'à plnfieurs comportions de ce genre, dont la divériité étoit infinie de ion temps} pro- ductions , dit-il, qui ne coriiiitent que dans 1 af- femblage des différentes parties des ouvrages des Grecs : autrement pour qu'il portât le caraclere > d'un ordre, il auroit fallu lui donner onze dia- mètres , comme cela étoit arrivé aux premiers Ar- chitectes dltalie , & tel qu'il s'en voit encore un exemple à Rome, dans Saint-Etienne le Rond. Mais cette proportion n'a été imitée depuis par aucun Architecte; car , comme le rapporte Seamozzi, il femhle qu'on ne puiffe naturellement fouffrir cet excédent dans une colonne j» de même qu'il paroîtroit difforme à un homme d'avoir plus de mefure de tête qu'il n'en faut pour être bien pro- portionné. Cet Auteur rapporte encore * en par- lant de Tordre Tofcan , que le nombre de fept |
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(ƒ) Il eft vrai que la colonne Trajane a huit diamètres j
mais il faut confidérer que la faillie du bas-relief qui circule 'à l'entour , a faris doute obligé d'élever fori fût 3 pour mettre ëlus de rapport entre fön diamètre apparent, & fà véritable hauteur. |
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d'Architecture. 203
diamètres eil ia plus courte proportion qu1 on puiife donner à un ordre , quoiqu'il s'en trouve qui n'en bnt que iix ; mais qu'il èft auiÎî erfenciël de reje- ter cette proportion trop courte , que celle de onze pour les colonnes les plus élevées. Ce ne fut donc que depuis l'Empire d'Augtîfte 9
que l'ordre Compofite Romain que nous conhoiC- jfonsj fiit employé avec quelque fuccès $ &: fa Jiauteur fixée à dix diamètres ^ à l'exemple du Corinthien. Les Romains, éclairés par les Grecs * s'apperçurent à lors , comme nous venons de le dire d'après Scamozzys qu'un ordre dont la hau- teur ftirpafferöit dix diamètres1$ pàroîtroit ineâ* pable d'annoncer une folidité apparente; & que celui qui dans fa hauteur auroit moins de fept diamètres , h'oifriroit qu'une maffe lourde & peu digne d'entrer dans les édifices de quelque importance. Il faut donc reeoriiioître que c'eit aux Arcnl-
te&es de l'ancienne Rome que l'on doit la décou- verte: du premier terme en Archite£ture 9 favöir le rapport de 7 à 1, qui fut déterminé pour Tordre Toican j & ce font les Architectes de là nouvelle. Rome, qui ont fixé leut ordre Cörripófite au terme de ίο à ί, dont les Grecs avöiént déjà fait ufagê dans l'ordre Corinthien. néanmoins on hé faiiroit regarder Tordre Com-
pofite comme une nouvelle découverte, puifqu'iî hè difiere du 'Corinthien %ie P^r l'aifemmage deè ornements de ce dernier & de l'Ionique ; ce qui tious oblige à tiröire qu'il n'y a que quatre ordres proprement dits , δε cela malgré Tufàge que nous faifons aujourd'hui de Tordre Compôfitç * pour Varier \i dèèçiâtibn îe nos édifices, |
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204 'G Ρ u R s
D'après cette obfervation , on ne doit donc
compter que quatre ordres au lieu de cinq. Car ? fuivant le fentiment du plus grand nombre des Ar- chitectes, ce qui conititue. l'ordre proprement dit, eil le rapport de fa hauteur à fon diamètre. Or, le Compofite ayant la même proportion que le, Corinthien, il ne différé réellement de celui-ci, que par rapport à fes ornements. Il en eit arrivé de même à pluiieurs de nos Architectes , qui > ayant imaginé de nouveaux chapiteaux, ont cru, à l'exemple de Callimaque , que ces nouvelles comportions pffriroient de nouveaux ordres ; ils n'ont pas réfléchi, que l'Architecture Grecque avant Callimaque, comme nous Venons de le re- marquer , n'étoit pas arrivée à fon dernier degré de perfection , puifque ces Peuples n'avoient encore trouvé que les ordres folide & moyen , & qu'il leur manquoit l'élégance dont Tordre Corin- thien femble être le triomphe. Mais avant de parler de i'inconféquence de nos Architectes, à l'égard de l'ordre Compoiite & de plufieurs au- tres productions en ce genre, difons un mot des écarts des Romains à ce fujet, afin de faire connoître de plus en plus la nécefîité de nous raprocher des premières belles productions de l'Architecture. A l'exemple des Grecs , qui après les chefs-
d'œuvre Doriques, Ioniques & Corinthiens, vou- lurent furpaiTer la perfection de ces mêmes chefs- d'œuvre , les Romains ne s en tinrent pas à la découverte de leurs ordres Toican & Compofite. Après l'imitation des trois ordres Grecs qu'ils employèrent dans leurs bâtiments, ils tentèrent d'autres moyens d'enrichir l'ordonnance de leurs façades. En vain les principes de l'art avoient été |
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d'Architecture. 205
fixés par les grands maîtres, le titre de créateur
parut à quelques-uns de leurs émules, préférable à celui d'imitateur ; enforte que fous prétexte de faire de nouvelles colonnes, ils imaginèrent d'en fur- charger le fût par des boffages , chargés eux-mêmes d'ornements fouvent peu convenables ; ils les racour- cirent pour convertir l'ordre en Attique ; ils en tor- ferent les fûts, compoferent de nouvelles bafes, fymboliferent leurs chapiteaux, croyant fymbo- îifer leurs ordres; ils abuferent des piédeftaux , & ne craignirent même pas de tronquer leurs enta- blements : licences qui fe font, pour la plupart, introduites fous le Boromini, Architecte de génie fans doute, mais auiïi incorrect que peu févere. Si quelques Archite&es Français ontabufé à leur tour de ces licences à l'imitation de ceux d'Italie, on rieft pas moins en droit de leur reprocher d'avoir fouvent négligé d'obferver dans les attributs dont ils ont furchargé les chapiteaux , le fût de leurs colonnes , & les moulures de leurs entablements, une certaine analogie qui doit fe trouver entre le ftyle de la Sculpture & le caractère de l'ordre ; défauts qu'on remarque dans les ornements trop délicats de l'ordre Tofcan des guichets du Lou- vre du côté de la rivière, dans l'application des rudentures introduites dans les cannelures Dori- ques du veflibule du Château de Maifons, dans les boffages alternatifs, appliqués peut-être incon- fidérément aux colonnes Ioniques des avant-corps du Palais des Tuileries, &c. Ces productions efti- mables fans doute, mais non fans défauts , & qui·, ayant trouvé des imitateurs peu verfés dans les principes de l'Art , contribuent plus qu'on ne: s'imagine, à leur faire croire les préceptes incer- tains , & à leur faire imaginer des compositions |
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V
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zo6 G Q ü R s ,
peu réfléchies, parce qu'ils mëconrioiiTent les vraies
beautés des ordres Grecs , & les vains efforts des Romains dans cette partie de rArchite&ure. C'efl àinii qu'ignorant leur foibleiTe, ils tentent d'ima- giner de nouveaux ordres, tandis que l'imperfec- tion du compoiite auroit dû leur 'apprendre l'i- nutilité dune nouvelle tentative, fur-tout après le peu de iuccès des plus grands Artiiles du iiecle dernier, tels que le Brun, Perrault, Errard.( g-), le Clerc & Dolivet. Difons ici un mot de leurs efforts à cet égard. Dolivet t, Peintre qui vivoit fous le regne de
Louis XIV j conipoia un nouvel ordre dans un genre femi-gothique, & tel à peu-près que celui que M. l'abbé Laugier nous ;a décrit dernièrement dans un de (es ouvrages. Le Clerc, Grayeur célèbre j <&Γιιη des meilleurs
peiïinateurs du fieçledernier',.nous a donaéfori ordre François dans fon petit Traité fiit'£Archite- cture; mms quoique d'un aiiezbon genre, ilnèdifïere du Corinthien que par les\çri^ni'ents du chapi- teau, jpans ce même Traité il a voulu auiîi nous donner un ordre qu'il appelle Eipagnol ; mais ces deux productions, .quoiqu'affez eftimables , ainiî que celles de Perrault (A), de Je .Brun [i)X d'Er^ |
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(g) CharlesErrard, Peintre & Architecte, eft mort à Rome,
iDirç&eur de Γ Académie de France , le x$ Mai I689 , âgé de $S ans. ""'." Ça) Perrault ayoitpropofé ce prétendu or4re FrançoisF-gfotir
le deuxième étage de î'intërieur de la coVr du vieux Louvre * iâu lieu de .l'Attique jd.e PierreJLeCçQ.t/ .,(*".) Voyez le deflS» de cet ordre dans l'Architcérure Fr$n-
çoife. Le Brun l'avoit coinpofé pour lé projet d'un Aie de
"Triomphe au Trône , où celui<ïè Perrault -fut piréierë. Le
-Btun depuissa^exicuté cet ordre , jgpur la^lus .grande ga«i£>
dans la Gallerie de Yerfailles.
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d'Architecture. 207
tard (/ ) & de quelques Architectes de nos jours,
ne persuaderont jamais aux vrais Architecles que le chapiteau fait l'ordre , à moins de vouloir pren- dre la partie pour le tout. Car ii cela pouvoit être, il ny auroit certainement point d'Artifte qui eût plus mérité de considération dans cette partie que Bibiane , Peintre-Décorateur Italien, qui, dans fon Traité de la Perfpective des Théâtres , nous a donné un très-grand nombre de profils d'entable- ments & de chapiteaux fort intéreffants , mais qui néanmoins ne peuvent être régardés que comme des productions ingénieufes pour les Décorations des Fêtes publiques, de l'intérieur de nos apparte- ments , des pompes funèbres, &c. Néanmoins nous recommandons à nos Elevés l'étude de cet Auteur, parce qu'il leur fera fort utile, après la connouTance des préceptes de l'Art, d'acquérir le goût du deiîin que cet ouvrage doit leur infpirer. Rapportons auffi ce que Chambrai dit dans fort
parallele des ordres antiques & modernes au fujet des chapiteaux fymboliques des Anciens, & dont il le garde bien de conieiller l'imitation. « Cela » me fait repenfer , dit-il page io8, à la promeiTe » où je m'étois engagé de donner ici quelques »deiTms de chapiteaux extraordinaires tirés des » antiques ; & coniidérant qu'ils ne fauroient plus » avoir de place aujourd'hui en aucune forte d'é* édifices, vu qu'ils n'étoient convenables qu'aiu? »Déités du paganiime, & qu'il n'efl: plus mainte* » naht de Jupker de 'Neptune, ni d'autres fetnbla- |
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(/ ) Ces ordres François font partie d'un recceuil particulier:
qui contient le$ .profils, des ordres , â'après Jes monuments de France & d'Ipaiie , recceuil ^>pn à: parcourir ;.mais aux mesures duquel il ne faut pas s'en rapporter, n'ayant pas été çoBÎ fans doute d'après les -deJËns faits par Erçard. |
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iö8 Cours
» bles dieux de ces temps-là, aux temples deiqileîs
» tous ces chapiteaux étoient iinguliérement appro* » priés par des repréfentations fpécifïques à cha- »que fujet, j'ai cru qu'il étoit plus à propos » d'ôter ces amorces , qui ne feroient aulîibien <» que reveiller le mauvais génie des ouvriers à » les imiter » , &c. Que tous nos Architectes & le plus grand nombre de nos Artiites, n'ont - ils penfé de même ; mais revenons aux colonnes torfes, prodiiüions qui annoncent plutôt les dérè- glements du génie, que la ievérité que Γ Architecture iemble exiger* V Quoiqu'il nous paroiiie auffi qu'il faille employer
les colonnes tories avec beaucoup de difcrétion, ainn* que les colonnes fymboliques & l'ordre ap- pelé Attique ; néanmoins comme il peut arriver que dans la diverfité ldes bâtiments, ces produ- irions trouvent bien leur place : avant de termi- ner cette origine des ordres, nous dirons un mot de ces trois objets coniîdérés en particulier. • Nous n'héfitons pas à croire que les colonnes töffes , dont l'arrangement peu régulier paroît incapable de réiiiïance, devroient être rejetées de l'ordonnance de tout édifice : mais celles du Maître- Autel de Saint-Pierre à Rome , celles du Val-de- Grace & des Invalides à Paris ont donné tant de célébrité à ce , nouveau genre de colonnes »qu'il femble néceiïaire d'en connoître au moins l'origine. . Les colonnes torfes font une imitation des arbres entourés d'autres plantes ou arbuites paraiites , tels que la vigne fauvage, le chevre-feuille & le lierre, dont les rameaux & les feuillages s'étoient incorporés avec les troncs qui leur fervoient d'ap- pui. Ces arbres & ces arbuftes, ainû enlacés , pré- sentaient iine tige torfe dont les Architectes d'Italie donnèrent
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d'Architecture. 209
''donnèrent la forme aux nouveaux fûts de leurs
colonnes : en quoi il fe crurent autorifés par les exemples de plufieurs petites colonnes de cette efpèce qu'on voit à Rome, exécutées en marbre antique ; d'où nous ferions tentés de conclure que chez les Grecs, & même chez les Egyptiens , les colonnes torfes n'étoient pas inconnues. Il eil également vraifemhlable que c'eii d'après ces di£- férentes imitations de la nature & de l'art, que le Cavalier Bernin ofa faire ufage des colonnes torfes ; il devoit réfléchir qu'il faut du choix dans l'imitation de la nature & de la circonfpection lorfqu'on veut la réunir à Fart. Cependant com- me celles qu'il fît exécuter au Vatican font de- venues , pour ainii dire, des autorités en ce genre» le fuceès de Bernin en cette partie, réveilla l'é- mulation des Manfards. C'eft d'après ces grands , maîtres que d'autres Architectes ont introduit; des colonnes tprfes dans la décoration des Edi- fices facrés; mais au moins faut-il obferver qu'elles nefoient jamais que Corinthiennes ou Compofites, & que leur diamètre, lorfqu'on veut charger leur fût de quelqu'orpement, foit un peu diminué, crainte qu'elles ne deviennent trop pefantes. Enfin on ne doit jamais affecter des cannelures creuiës ou ren- foncées dans leur fût inférieur ; il vaut mieux em- ployer des ornements en relief, & referver ces cavi- tés pour la partie fupérieure de leur tige. Les Egyptiens après avoir mis en œuvre des
colonnes pour le foutien & la décoration de leurs édifices, donnèrent à quelques-unes de leurs pyra- mides ou monuments, la forme de leurs colonnes. Les Grecs imitèrent d'abord les colonnes & les Monuments des Egyptiens : mais bï^niot ils conver- Tomç L O |
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ilö ,;::? ;; C O tf R S
tirent celles-là en ordres réguliers : dès-lors ils
Commencèrent à les regarder, moins comme une partie éffencielle à la conflmclion, que comme an objet de décoration ; les Artiftes de la Grèce s'attachèrent à leur donner plus d'élégance & de variété ; les matières les plus précieufes furent même préférées à celles qui euffeht procuré une folidité plus durable ; enfin les Romains, imita- teurs des ouvrages des Grecs, portèrent la magni- ficence au point qu'on éleva des colonnes colof- fales qui furent cohfacrées à la gloire des Hommes flluitres, & ils en vinrent à imaginer des fym- boles dont ils furchargerent le fût de leurs co- lonnes. Cette application de la Sculpture à l'Ar- chitecture devint la fource de cette multitude d'ordres prétendus, auxquels on a donné diverfes dénominations , félon les ornements particuliers qu'ils ont reçus ; telles font les colonnes hiftoriques, triomphales , funéraires δε autres , dont nous pat-· leron.5 dans nos définitions. L'origine des Attiques (k) appelés par Vitruvè
ordres Atticurge , eft fort ancienne. Moïfe avoit ordonné qu'on élevât une efpece d'Attique fur les habitations des Hébreux; le motif de cette loi, puifées dans un fentiment d'humanité, eil bien digne de ce Légiflateur éclairé. Il vouloit empê- cher que les briques , les tuiles & les autres ma- |
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(k ) VitruV. liv. 4 , chap. 6 , appelle Atticurge Tordre Co-
rinthien > mais comme l'a remarqué Perrault, n° ι , pag. nf, il y a toute apparence que cet ordre étoit un ordre particu- lier , dont les colonnes, au rapport de Pline } é'toient quàr- irées-i & avoient une bafe , un chapiteau & des membres d'Archite&ure dans leur fût, qui diffère abfolument des autre* ordres. Le mot -Atticurge dérive de deux mots Grecs, qui iisni· fient ouvrage Athénien. . . |
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' d'Architecture. iii
tiéres qui couvroient les maifons des ïffaelites ,
he bleiîaiTènt les paffants , ii elles venoient à fe « détacher par les injures du temps '■■(/). . Pline fait mention des ordres Tofcan, X)öriqiie?
Ionique & Corinthien, &ne parle point du Cômpo- ike non plus que Vitruve ; mais il cite, comme nous venons de lé remarquer, un cinquième ordre qu'il nomme Ä:tiiqüe,& dit que lés tiges en étoierit quai- rées. Quoi qu'il en foit, cette efpece d'ordre efl d'une proportion trop racôurcie, pour pouvoir, entrer en parallele avec ceux que nous connomôns ; •il ëil à éroire qu'il ne fut d'abord employé que comme un couronnement continu, que les Athé- niens imaginèrent pour faire pyramider les âVant- corps dé leurs édifices. Les lloaiains «dans la fuite ie firent fervir d'amortiiTement à leurs mörrfrm%nts> 'aîhti qii'ii s'en voit encore dés veiblges à Hoirie, à la place de Nervà, 'aux arcs de triomphé de Sep- timè-Sévére , de Cohftah'tih ; &c. • Ces Moqués ëtoiènt réveùis de grandes 'tables rèhfbficëësv propres à recevoir des bas-reliefs, 'M €es ihfèriptiöns relatives à l'objet de Fediiicel; enfin on ajouta des tables ravalées dans leur pa- rement. Infenfîblement on perdit de vue l'origine & la
defKnation particuliere de ces petits étages. Les Archite&es modernes ont voulu les faire entrer dans l'ordonnance de leurs édifices, & ont eiïayé de déterminer la hauteur de l'Amque, & de don- ner à (es pilailres, une proportion qui les diftin- |
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1 (/) LorCque tu auras élevé les murs de ta msifon à leur
jufte hauteur, tu la couronneras pat un petit mur , afin qae le fang de ton procliain ne foie pas verfé devant ta maifon. Deut. cap. vi, v. 7. O ij
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ν
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212 Cours
guât des ordres d'Archite&ure. Enfin, ils lui ont
affigné d'après ce qu'enfeigne Vitruve , planche 31 , page 127, un genre & des ornements dont nous traiterons ailleurs. Nous venons de rendre compte de ce qu'il nous
a paru indifpenfable de dire au fujet de l'origine des ordres proprement dits , ainfi que fur les au- tres objets de la décoration qui ont pris leur fource dans ces mêmes ordres : nous avons cru, en rap- prochant les temps, devoir paifer fous iilence la plus grande partie des opinions de pluiieurs des Architectes anciens & modernes ; car d'un côté ? nous n'avons prétendu que faire connoître ce qui ne peut être raifonnablement ignoré fur cette ma- tière , & nous en tenir de l'autre, à ce qu'elle nous offre de plus vraifemblable. D'ailleurs une plus longue difcuiïîon n'auroit peut-être préfenté aux amateurs, que des conjectures vagues & in- certaines , & n'auroit fans doute fervi qu'à répan- dre plus de confuiion dans l'efprit de nos élevés. PaiTons maintenant au développement de la pro- portion des ordres d'Archite&ure Grecs & Romain«. |
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d'Architecture, 213,
! ^^^^^ËjÉj^==
C H AFIT.R. E I L
Préceptes de liArt> tirés de la proportion des
ordres d'Architecture Grecs & Romains. XOUR parvenir à donner généralement aux
membres d'Archite&ure qui embelliffent les faça- des de nos édifices ,1a régularité & la beauté dont ils font fufceptibles , rappelons-nous ce que nous venons de dire touchant l'origine des ordres que les Grecs nous ont lahTés pour exemple, ainii que les efforts que les Romains ont faits pour les éga- ler dans cette partie de Γ Architecture. Les fiiccèst & la connoiflance des produ&ions de ces deux- Peuples célèbres , nous feront d'un grand feeburs pour fixer auffi les rapports, que les maiTes de l'édifice doivent avoir avec les parties principales » & celles-ci avec les. détails : nous y verrons aufïi la relation qu'il faut mettre entre les avant-corps & les arrieres-corps. Cette connohTance doit nous amener encore à déterminer toutes les parties d'un bâti- ment l'une par l'autre ; car il eil aifé de s'apper- cevoir, que fi l'on néglige dans le début de fa compofition , les rapports qu'il doit y avoir entre la largeur & la hauteur des façades, & fi l'on ne prévoit d'abord la quantité d'ouverture qu'elles doivent contenir , par rapport au - dedans, il n'en réfultera tout au plus qu'une belle ordon- nance ; mais l'intérieur fe repentant de cette négli-· gence, l'édifice fera imparfait. Ο iij
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ii4 ,; ' . C o v r s ·
Combien effectivement de productions en ce
genre nous préfentent cette iniperfe&ion, parce que m plupart de leurs Arehite&es ont borné leurs études à la feule décoration : combien de licences condamnables, introduites dans la diftribution , pour n'avoir penfé qu'après coup, aux moyens de concilier les dehors avec les dedans, c'eft-à-dire, - Îà" beauté de l'ordonnance des façades, avec la commodité & l'agrément de l'intérieur. Le Château de Maifons, le Luxembourg , le Palais des Tuile- ries, font affez connoître qu'il ne fuffit pas d'élever de, belles façades ; que l'Architecture ne fouffre point de divifions dans fes parties , & que pour devenir im Architecte du premier Ordre, il faut être à la fois , bon Décorateur , Diitributeur in- telligent δε Conftrucleur confommé ; qu'en un mot, fans une profonde connoiiTance de ces trois parties, on ne peut fe flatter d'élever des chefs-d'œuvre. Commençons donc, pour acquérir Fart de déco- corer nos édifices avec préciiion δζ: avec goût, par l'étude des proportions des cinq Ordres, com- me étant la; bafe des principes qui concernent la décoration de nos bâtiments, partie de l'Architec- ture 'l qui doit être regardée, fînon comme la plus eiîenciellé, du moins comme celle qui fait le plus d'honneur à l'Architecte, tk qui contribue le plus à annoncer l'opulence des Cités. En parlant de l'origine des ordres, nous avons
regardé les Grecs , comme les Inventeurs des or- dres (m )JDorique , Ionique δι Corinthien; δζ: les Romains, comme les Auteurs des ordres Tofcan |
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':.("?) Ordre, cz mot iîgnifîe l'arrangement régulier de pîu-
iîeurs belles "parties , au moyen defquelles en parvient à com- pofçr un enfemble intéreflant. Un ordre d'Architecture pro- |
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d'Architecture. 21 f
& Compofite ; les François, & les autres Nations
çivilifées , ont accepté ces deux fortes de produc- tions , pour la décoration de leurs édifices, 8f ont reconnu que Tordre Tofcan étoit propre à ex- primer la. ruiticité ; le Dorique, la foliditéy Ποηί- que , le genre moyen; le Corinthieri & le Compo. fite, la délicateiîe. Nous dirons ici, que comme ce dernier a la même proportion que le Corinthien* on ne doit guère reconnoître que quatre Ordres proprement dits ; que du moins ç'eft l'opinion de Vitruve {n), qui n'a pas cru devoir comprendre l'ordre Compoiite dans la claüVdes précédents. Rendons-nous compte néanmoins des proportions, & des différentes expreiFions de ces cinq Ordres; en quoi nous nous conformerons au fentiment de YU gnole ( a) : commençons par le Tofcan, pour finir par te Compofite, & cela fans avoir égard au temps de leurs découvertes; autrement il faudroitdivifet les cinq ordres Grecs & Romains en deux claiTes^ |
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prementäir > doit être confideré comme 1'oppofé dudefordrc;
il peut Remployer ele deux manières , en colonnes ou eu pi- laftres- Les ordres font appelés par ffittttvfe,. ofdtnés & genera.' co/umnarum. (η) Vitruve , ingenieur d'Augufte , avpit une grande
çonuoiiTançe de la théorie, de l'Archite^ure *, & a eu pour interprètes, Vignole , Palladio , Scammo^xi* Delorme , fbl* land^Serlio, Albcru , Caijtaneo·, Barbarofic Viola. Perrault^ l'un de nos plus célèbres, Arcbiteétes, l'a auflj commenté ; les; notes importantes ont renilu l?étude de Vitruve indifpenfablc aux Architectes, ;? ·. h ; (o ) Vignole , Archite&e Italien , a fait bâtirl'Eglîfe du Jéfus
à Rome, & le Château de 'Caprarol.le, près de cette Vil'ki Cet Architecte apr& s'être rendu rçeomma-ndabie par Sis préceptes fur les cinq ordres d'Archite<&ure i cemmcHtés par/-«TA-viller & eil: dçvenu , en cette partie 3 un objet d'imitation pour nos. Arehite&es Ffâiî|ois j illmourut en i^fj , âgé de 66. ans». ; O xv
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îî6 . Cours y
ainû que l'a fait Chambrai (p); mais Comme not
Architectes François ont également adopté en ce genre les découvertes des Grecs & des Romains, au point, que plufieurs les ont réunies dans une même ordonnance ; fuivons îe plan que nous a tracé Vignole ,'& comparons-le ïouvent avec Palla- dio ( q ) & Scariimoîzi, les trois Commentateurs de Vitruve les plus généralement eitimés. Des cinq ordres en général·
.Planche Premiere. Cette Planche peut donner une idée générale des
cinq Ordres, réduits fous une hauteur commune ; ce qui fait connoître plus pofitivement la différence du diamètre de chacun d?eux , comme on le remarque par les plans qui font au-deßous de ces ordres qui indiquent £un feul coup d'œuil leurs diverfes ex-> prefions* £ .... 0 ; ... ί L'ordre Tofcan îe reconnoît par la iimplicité
de.fes membres, & par fa proportion racourcie, n'ayant que fept diamètres "ou 14 modules (r)i (p ) Chambrai, Auteur forteftimé , quoiqu'un peu partial,
jtious a donné le parallele de Γ Architecture antique avec la îttodeïnej [ voyez l'édition de 1701.] M. Errard, Directeur à Rome des Académies Royales de Peinture , Sculpture1 & Archite&ure de France , eft regardé comme l'éditeur de cet ouvrage excellent. Voye^ la-note g, pag. xo6, ( q ) Palladio, né à Viceiïce, mort en i.jSo , l'un des Com-
mentateurs de Vitruve, le plus eftimé, s'eft acquis beaucoup de célébrité eu Italie; par les bâtiments qu'il y a élevés. On a de lui d,eux volumes grand in-folio, impreiïïon de Hollande s dans lefquels on trouve d'excellents préceptes fur l'Archite-χ éture & la plupart des chefs-d'œuvre exécutés par ce grand Maître. 'I ( r ) Module du latin modulus , petite mefure $ c'eft une |
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î>* A G ïl| C UT TÜRE, lïf
nombre reconnu pour le premier terme en Archi-
tecture. Effe&ivement au-deiïbus deiept diamètres, il jfemble qu'on ne puiffe faire un ordre régulier , qui puiffe entrer pour quelque chofe dans l'or- donnance d'un édifice de marque. L'ordre Tofcan s'emploie ordinairement dans l'Architecture mili- taire, pour la décoration des portes de Ville, des Arienaux , des Cazernes, &c. : dans l'Architec- ture navale, pour la décoration des Ports , des Phares, des Corderies, &e. : dans Γ Architecture civile , pour la' décoration des Grottes, des Fon- taines , des Orangeries, des Baffes-Cours, &c. L'ordre Dorique de huit diamètres ou 16 mo-
dules de hauteur, fe reconnoît par les Triglyphes, (f) diftribués dans la frife de -ion entablement, |
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échelle quifert à prendre les grandeurs , les largeurs, lë$
hauteurs & les faillies des différentes parties de l'ordre. Palla- dio, Scammozzy & les autres .Commentateurs de VitruveJ divifent leur module en 30 minutes. Nous préférons la divifion du module de -Vignole Ç parce que divifé feulement en n pour le Tofcan & le Dorique, peu chargés de mou- lures i il femble devoir offrir une échelle divifée en moins de minutes ; Se que par la raifôn contraire," les ordres Ionique , Corinthien & Corhpoiite, plus chargés de détails . ont beibinf d'une échelle compofée d'une plus grande quantité de minutes : moyens qui rendent la pratique du deiïin plus fine'3 Se l'art de lever nos édifices plus facile. (s) Triglyphes , du Grec Triglyphos} qui a trois gravuresΛ
eft une eipece de boifagès ,■ diltribués dans la frife de l'enta- blement de l'ordre Dorique , par des ihtervales égaux. On taille fur ces boliages des glypkes ou cannaux, féparés par trois lifteaux ; ces triglyphes fe difpofent He maniere que leurs axes tombent à plomb de ceux des colonnes ou Pilaftres, de ceux des entre-colonnements des portes 3c des croifées ; ces triglyphes ont de largeur , la moitié du .diamètre de la colonne, & de hauteur, celle die la frife, qui efl: d'un module & demi. Voyez la forme de ces triglyphes^ deiÏÏnés dans la frife de l'entablement de l'ordre Dorique 'Λ planche premiere. |
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ZlB C O U R 5
& par ion expreiîîon moins ruftique que le pré-
cédent. Son cara&ere virile, & la fymétrie de fes membres ,. peuvent le faire employer quelquefois dans les ouvrages militaires, mais plus particuliè- rement dans l'Archite&ure civile, pour tous les genres d'édifices facrés, publics ou particuliers. Cet ordre doit être confidéré comme la premiere découverte des Grecs: auiîi ces Peuples ingénieux» femblent-ils avoir épuifé dans fa composition toutes Us reflburces de l'Art. L'ordre Ionique de 9 diamètres ou 18 modules
de hauteur, fe reconnoît par les volutes de fort chapiteau, & par fa proportion plus légere que l'ordre Dorique. Il peut être employé convenais blement dans la décoration extérieure des maifpns de plaifance, & dans l'intérieur des appartements. On peut auiîi l'élever quelquefois, comme fécond ordre, dans les façades extérieures des bâtiments. L'ordre Corinthien eil encore plus fvelte que
l'Ionique, ayant 10 diamètres ou 2,0 modules de hauteur ; il Té. fait reconnoitre par la délicateiFe des ornements de fon chapiteau, & par la divi- sion des membres de la corniche de fon entable- Jftent. Il eil confidéré comme le dernier terme en Architecture, car aiFezgénéralement il a. été re- connu qu'un ordre qui avbit en hauteur plus de dix fois fon diamètre , paroiiïbit incapable de porter aucun fardeau : & par la même raifoh» qu'on n'a pas voulu faire un ordre Tofcan au- derTous de fept diamètres, afin de lui çonferv^r» malgré fon expreiîion ruftique, une certaine beauté* on na: pas cru devoir donner, à Tordre délicat, une élégance qui partit contraire à ïa fplidité qu'on doit obferver dans tous les genres d'édifiées. L'ordre Corinthien, peut être employé dans la dé* |
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d'Architecture 219
cotation des Palais des Rois, dans les dedans de
nos Temples , -& généralement par-tout où Télé-* gance & la magnificence doivent être préférées à la force & à la iimplicité Enfin l'ordre Compofite, de même proportion
que le Corinthien , fe diitingue parles ornements des ordres moyens & délicats, dont fon chapiteau éft compofé. On le met en oeuvre dans les arcs de triomphe, dans la décoration de nos théâtres, dans les fêtes publiques, & par-tout où les or- nement fymboliques doivent avoir la préférence fur les ornements eiïenciellement confacrés aux; ordres Grecs. Division générale, pour les cinq
ordres d'Architecture. Planche IT, Figure I,
Un ordre d'Architecture ? félon Vignole,ei};
affez ordinairement (t, compofé de trois par- ties principales ; favoir, de la colonne {u) A> ;
( t ) Ajfe^ ordinairement ; ce qui donne à entendre que \$
piédeftal & l'entablement ne font pas néceffaires à l'ordre ; que la colonne ou le pilaftre fuffifent pour déiigner un ordre d'Architecture ; car Jorfqu'une colonne eft élevée fur un pié- deftal , & couronné d'un entablement, il nous fembîè qu'on doit appeler tout cet enlemfifè , ordonnance') & que le'mot à'ordre ne devroit indiquer que la coÎgrine ou le pilaftre. Par exemple, on dît que la colonne coloiTale de l'ancien Hôtel de SoifTons , aujourd'hui la nouvelle Halle au Blé , eft d'ordre Dorique , quoiqu'elle n'ait pas d'entablement; n'eût-elle pas oé piédeftal 3 elle feroit app'eléc de même. Les colonnes Tra- janne & Antonine à Rome, font dans le même cas î on ne res appelle pas moins colonnes Tofcanes, lorfqu'on les cite^ dans l'hiftoire. En effet, c'elt la colonne ou le pilaftre qui doit déterminer la hauteur du piédeftal, & de l'entablement. ~{u) Colonnes j o» appelle ainfi un corps fàlide, de forme |
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210 C O URS
( figure première ) qui aiîigne à tout le reilende
l'Ordonnance des meiiires confiantes & détermi- nées, dupiédeftal Β ( χ ), & de' l'entablement C (y). Ces trois parties A Β C en comprennent cha-·
cime trois autres. Le piédeital comprend le ibcle (ι) ou feaJfe ,β-ψ
le dé h, [a) & la corniche c, (b). Les parties de Tordre , font la bafe d, (c) le
fut e, (d) & le chapiteau ƒ, («.). |
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circulaire par fon pian, & compofé d'une bafe , d'un fût &
d un chapiteau. La colonne diffère du piiafrre , en ce que le plan de celui-ci eifc de forme qüadrangulaire. Le mot colonne vient du latin, columna , lequel dérive 3 félon Vitruve de eolumen, foutien. * V (x)rPiédefiaÎi on entend par pîêdefial, tout corps folide
compofé dune bafe, dun dé & d'une corniche : on le nomme auffi ftylobate, du Grec ftylobaûs , foutien; >ce font les modernes 3 qui ont ajouté aux ordres' les piédeftaux. (y) Entablement > c'eil le couronnement de l'ordre, com-
pofé d'un architrave, d'une frife ■& d'une corniche. Ce mot vient du latin, taiulatum, aifemblage d'un plancher. (l ) Socle ;. on entend par ce mot , tout corps qui cnlporte
un,MUtï? ryCf 5œPatemenc : ici il tient lieu de bafe J parce qu il elt fitué a la partie inférieure du piédeikl ; il dérive du latin foccus , qui lignifie fandale s ou de l'Italien foccolo , patin. · ' J ;;. · • (a ) Dé ou tronc j quarré ou parallélogramme , ordinaire-
ment fóutenu par un foele ou une bafe, \& couronné par une corniche, ν \\ j ίίΏΐ £?""c% Par « mot on entend la partie fupérjeure
de 1 entablement ; les moulures de cette partie different félon les cinq ordres. Au refte , le nom de corniche s'applique à toute partie taillante qui couronne un corps d Architecture ; ce mot dérive du latin corona , couronnement. (c) Bafe, du mot latin bafis , corps qui'en porte un autre
avec empâtement ; on l'appelle auffi fpiYe y du htm fvira. {d) tut du latin fuftis, baron; c'eft proprement le tronc
ou la tige de la colonne 3 non compris la bafe & le cha- piteau. .,.(.<?.) Chapiteau, du latin capitulantt Commet'? c'eft la partie
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d'Architecture. 221
Celles de l'entablement , font Tarchîtrave g,
ǃ) la frife h, (g) & la corniche i. Ces diverfes parties font compofées de plufieurs
autres , auxquelles on donne en général le nom de Moulures ( h ) ; on entend par ce mot , tous les membres (i) d'Archite&ure , qui confirment l'art de profiler (k.) , foit dans l'application des ordres , foit dans l'ordonnance de la décora- tion des bâtiments. Les moulures en général em- pruntent leur fome de l'exprefîion folide ou élé- |
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fupérieure de l'ordre : il en eft qui ne font compofés que
de membres d'Architecture, tels que ceux des ordres Tofcan & Dorique; d'autres font compofés d'Architedure & de Scul- pture , tels que les chapiteaux des ordres Ionique , Corin-? thien & Compofir.es. Voyez la difrérence qui diftingue ces chapiteaux dans la planche premiere. / ( ƒ ) Architrave , partie inférieure de l'entablement , por-
tant fur l'extrémité fupérieure des colonnes , & leur fervant de fommier. (g) Frife, du latin pkrigio , un brodeur , ou du Grec iroo-
pkoros, porte animal. C'elt la partie intermédiaire de l'enta- blement , & fur la furface de laquelle on taille des orne- ments courants en forme de broderie , Se entre--mêlés d'ani- maux de plufieurs efpeces, ou de figures en bas-relief, tels, que fe remarquent ceux deifinés dans la frife des ordres Ionique,, Corinthien & Compoiïte dé Vignol'e, ou dans celle des ordres Corinthiens du frontifpice de Néron 3 Se des termes de Dioclétien. Voyez pour ces derniers le parallele de Cham» bray. ( h ) Moulures ; on entend par ce mot 3 tous membres
d'Architecture faillants., droits, courbes, mixtes ou iînueuxj c'eft par i'aiTemblage des moulures , Se la diverfité de leurs cfpèces, qu'on parvient à çompofer, les cimaifes des corni- ches , celles des architraves, des impolies, des archivoltes } Sec. ( i ) Membres ; on entend communément par ce mot , la
partie d'un tout : en Architecture , les cimaifes 3 les larmiers, font les membres d'une corniche. Les plates-bandes, les li- fteaux. font les membres des architraves , des importes , des archivoltes , des chambranles 3 Sec. (fc) Profiler; c'eft la partie de l'Art la plus difficile; elle
neconfifte pas feulemetità/irnùer la maniere dés Anciens 5 |
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%%i Cours
gante des ordres, & fe réduifent à fept e£* j
pèces. \" -,) \ D ES D I FFÉRENt ES ES FECES \
DE Mo U LU RES. \
Planché II, Figure II.
La premiere eijpèce comprend les moulures ;
quarrées qui s'emploient de plusieurs manières : \ celles qui font marquées AB, font nommées cou- i ronnes ; elles font les plus grandes & les plus failîarités âes moulures quarrëes des corniches ; \ pnles nomme larmiers (/) ou gouttières,loriqu'oh : pratique deflbus un canal comme a, pour aider 3 faire tomber goutte-à-goutte les eaux de deiTus la faillie de la corniche, fans quoi elles couléroient . Ssjtis le plafond ou foffîtè [m ) du larmier. Quel- quefois ce plafond eil contourné en douane i com- me b. On nommé la moulure G, gros quarre ; la fail-
lie en elf moindre que celles des précédentes ; elle feft aux tablettes des baluitrades, aux chä* ferons des murs de clôture , &c. La moulure D, appelée plate-bandé, fert pour
les architraves, les archivoltes Ou les chambranles. Céâ moulurés n'ont ordinairement de relief que ce |
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mais encore à aflortir les expreflîons de chaque moulure , &
le caracïëre du profil, à l'ufage , à la grandeur Se à la de- ftination du bâtiment. , . . · ..: (.1) Larmier; membre quarré , ordinairement placé entre
4eui cimaifes; on lés appelé larmiers, minutaires ^ 'denriaa- läires ou rriodillonaires , lorfque dans les différentes corniches dés ordres on place des mutules, comme dans le Dorique: des denricules, comme dans l'Ionique j des modulons, mmitiXj jiâns lé Corinthien, f im) Süßte* de l'Italien foßto ^plafond à i'äntiqüe" i fof- |
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■;■■*■ '. '
• j
d'Architecture. ii)
<|uii eh faut pour fe détacher les unes de deffus
les autres, ou du nud du mur fur lequel elles font adaptées* Les petites moulures quarrées font les filets ou
liiteaux, comme E F : celui Ε, placé entre pluiieurs autres moulures,fe nomme filet, & lorfqu'il les couronne comme F, on lui donne le nom de îiiieau. La deuxième efpèce comprend les moulures
demi-rondës ; celles G, font appelées tores ( η ) & celles H , fe nomment baguettes; les unes δε les autres font employées communément aux bafes des colonnes & pilaftres, ainii que les filets & les liiteaux Ε F. La troifieme efpèce , font les quarts de ronds
convexes, comme ΙΚ , qui n'ont que la moitié d'un tore : on les appelle quarts de ronds , ou quarts de cercles droits , lorique leur faillie éil par le haut comme I, & quarts de ronds ren- verfés, lorfqu'elle eft par le bas comme K, CéS moulures droites ou renverfées, s'appellent auflï oves ( ο ) à caufe des ornements qu'on taille; deiTus y lorfque ces membres font appliqués à des cimaifes (p) ou à des ordonnancés d'Archite&üre fufceptiblès de quelque richeÎTe, |
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mé de poutres apparentes, diftribuées en compartiments, qui
imitent allez bien les plates-bandes Sa les caflettes qu'on obferve fous les larmiers des corniches Dorique , Corinthienne & Compofite. ( η ) Tore ? du Grec toros , un câble j on nomme auflï
cette moulure j töndin | boudin, bâton & bbzel, (o ) Voyez, lès ornements appelés oves , tracés fur la plan*
che 9 j & ce que noué en diforis eri décrivant lès différente ornements qnon applique aux moulures. ( ρ ) Cimäife , du Grec, kfymtàïoit, Utië ôiide , parce qtîé
les principales moulures qui les-çdmpôfèîrt, font i^ûettfesti» |
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224 Cours
La quatrième efpèce renferme les moulures
creufes , nommées fcoties ( q ) comme L, ou can- nelures comme M. Les premières fervent aux baies ; les fécondes à enrichir les fûts des colonnes & des pilaftres. Voyez la définition du mot cannelure , table des matières, dernier volume. La cinquième efpèce, font les quarts de rond
concaves comme Ν Ο ; ils fe nomment cavets droits , lorfque leur faillie eil par le haut, comme Ν ; & cavets renverfés, lorfque leur fail- lie efl par le bas comme O. On appelle encore cette efpèce de moulure congé, lorfqu'eîle unit un corps vertical à un corps horifontal, comme Ρ ; ou gorge, lorfqu'eîle tient du congé & du cavet, comme Q. La iixieme efpèce, comprend les moulures iî-
nueufes , nommées douanes, formées de deux portions de cercle ; on nomme douanes droites, celles dont la faillie eil par le haut, comme R; & douanes renverfées, celles dont la faillie eil par le bas, comme S. La feptieme efpèce , font enfin les moulures
finueufes , nommées talons, & formées aufli de UQUX portions de cercle, comme les précédentes, mais profilées en fens contraire : oh les nomme talons droits , quand leur faillie eil par le haut, comme Τ ; & talons renverfés, lorfqu'eîle eil par le bas comme V. Les dégagements e, placés entre deux moulures,
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ondulées. Cimaife en François , donne à entendre les premiers
membres d'une corniche, qui indique la cime de toute l'or- donnance d'une décoration d'Architecture. (q) Scotie, du mot skotos , obicurité ; on la nomme encore
jiaçdh, membre creux , ou trockile, du Grec Trockilos 3 pou- lie Λ à quoi cette moulure reifemble aiTez par fa cavité, \ . · -. ...... ......,-,..' f§
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b'ÀRGHITEGTURt £$)
le nomment grains d'orge ; leur propriété 'eft d'em-
pêcher par leurs interiïices très-peu confidérables, les moulures droites de former en apparence des fécantes avec les moulures circulaires, principale- ment lorfqu'elles font placées les unes fur les au- tres dans une corniche ou dans tout autre mem- bre d'Archltecfure. Toutes ces différentes efpeces dé 'moulures, fe
tracent ordinairement au compas ; mais après avoir acquis cette habitude, il faut s'accoutumer à les tra- cer à la main : elles acquièrent par ce moyen plus de grâce & de variété ; d'ailleurs on parvient par cet exercice à leur donner un cara&ere relatif à l'ex- preiîion de chaque efpece d'ordre , où les mêmes moulures doivent s'annoncer différemment. Pour faciliter les moyens d'acquérir prompte»
ment fart de profiler , ii néceffaire à l'Architecle, nous allons donner la maniere de tracer géomé^ triquement, non-feulement {es moulures convexes f concaves & iinueufes appliquées aux ordres d"Ar- chitecture , mais encore les moulures appelées moulures compofées, à l'ufage de la menuiferie 9 de i'ébéniilerie, du bois , du marbre , du plâ- tre, &c. De LA MANIÈRE DE TRAUER GÈoMÉ^
triquement les différentes
. Moulures. Planche ilî,
Nous rie parlerons point ici de la maniéré
de tracer les moulures qtiarréés , comprifes dans la premiere eipece dont nous venons de parier précédemment ; elles ne font autre chofe que des lignes paralleles, &: leur faillie eit pref- Tomc i. · Ρ |
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3ιβ6 C OURS
que toujours déterminée spar -des angles droits |-
à moins qu'on ne croye devoir les incliner un peu eu arrière , à deffein de donner en apparence plus de ibflite & moins de faillie réelle à la maffe des corniches, des architraves, des importes, des ar- chivoltes , &c. ainfi qu'on le remarque aux lar- miers & plates-bandes de l'entablement du petit ordre Corinthien, dans l'intérieur de TEglife de l'Oratoire à Paris, Au reite, nous croyons que malgré cène exemple allez célèbre , on ne doit uièr de ce moyen qu'avec beaucoup de circonfpeótion, les' angles aigus que préfentent ces corps inclinés étant preique toujours un abus contraire aux pré- ceptes de la bonne Architecture. Des Tores.
£ Les moulures ABC préfentent les différentes
courbures qu'on peut donner aux tores , fejon qu'ils font placés à différentes hauteurs dans les bâtiments à pluiieurs étages. Effectivement c'eit leur iituation dans Γ Architecture qui doit déter- miner l'Architecte à applatir plus ou moins les tores dans leur partie fupérieure , relativement à l'élévation de l'édifice & au point de diitance d'où ils doivent être apperçus, fi l'on veut que leur faillie malqtie, le moins qu'il eil poiîible, les mou- lures quarrées qui, ordinairement, les couron- nent. 'Maniere, de tracer le tore A , far un demi-cercle.
Le quarré A Β CD étant déterminé par la
hauteur de la moulure, divifez-le en deux parties égales par la ligne EF; partagez cette ligne en deux,'aifpoint G , duquel, comme centre, yous tra- cerez le demi cercle Ε Η F, |
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d'ÀRCH LT E tLT U R Ë« 227
Maniere Ae tracer Le tore Β-, par deux portions
I : - ^ \ de cercle. . -U
Le quarré AB CI) étant donné comme le pré-
cédent, partagez BC en cinq parties égales : de îiois de ces parties, prifes pour faillie, tirez la verticale Ε F ; portez ces mêmes trois parties de1 Ε en G , & tracez du point G , comme centre ,: le quart de cercle IE; tirez enfuitele rayon Ver-'* tical HK, en prenant fur la ligne horifontalé: IG la ligne IH, égale aux deux cinquièmes de RGf & du point H, comme centre y vous dé- crirez la portion de cercle IK. Maniere de tracer le tore C, par trois portions
de cercle.
1^-hauteur Β Ç étant partagée en fept parties
égales, on en donnera cinq à la faillie Β Ε, puis on abaijffera la verticale E E que Ton partagera auiïi en fept : on divifera en deux la dernière de ces fept parties au point F, d'où, comme centre, on décrira l'arc de cercle EH, auquel on donnera une corde de trois parties delà hauteur Β G ,qui détermi- nera fui cet arc le point H; on prendra auffi fur la bafe FÇ trois parties au pointI; on élèvera la perpendiculaire ΙΚ également de trois parties ? &. dyi point Κ, comme; centre , on tracera l'arc indéfini, J L :; portez, enfuite. ce. même* rayon de H en M; divifez cette ligne oblique en deux au pointN; puis élevez la petite perpendiculaire Ν (X, qui rencontrant le rayon H F au point Ο, donnera la direction de la ligne Ο KL , pour du point,O., comme centre , tracer l'arc LH, qui coniplëttera la courbe de ce dernier tore. ' P ij
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12& J COiii R:s:';i
Des Quarts de Rond. /
Maniere de tracer le quart de rond A , par un.
" * quart de cercle. -"--■'"■'Ρ,.r La hauteur AD & la ..faillie AB étant égales
en'tr'elles , du point A , comme centre , & de l'in- tervalle AB ou AD, tracez le quai r de cercle Β F Ρ : ce premier quart de rond déterminera les deux fuivants; mais leurs convexités ieront moins con- iidérables , à deffein d'offrir dans une même mou- lure trois quarts de rond , d'expreiïion folide y moyenne & délicate."'j .: * ï : r Maniere de tracer le quart de rond Β ^ par trois
ν points donnés. Le quart de cercle BFD étant tracé comme le
précédent, tirez la corde Β D ; divifez-la en deux parties égales en Ε , élevez fur cette corde la perpendiculaire Ε F, partagez-la en fept parties égaies, dont la fixiemëfe terminera au point ù ; tracez enfuite du point H, comme centre , un cercle qui paffe par les trois points donnés DGB: pour cela tirez la corde D G , & fur fon mi- lieu I, élevez la perpendiculaire I H ; tracez de même la corde G ß, & de fon milieu K, éle- vez la perpendiculaire Κ H ; ces deux perpendi- culaires s entrecouperont au point H,qui, comme centre.,, fervira à décrire l'arc Β G D. Maniere de tracer le quart de rond C >
par trois foyers. -■ Le quart de cercle BFD, la diagonale Β D \ &
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t>'A R.C H I TEC TURÊ.' 1Z$
Ja perpendiculaire Ε F, étant tracés comme dans
la mouluré précédente , il faut feulement placer le point G à la cinquième diviiion de Ε F\. au lieu de la fixieme ,„ puis trouver , comme on vient de le dire au point Ο , le centre d'un quart de cer- 4çle-j qui paffe par les trois points donnés DGB, enfuite tirer les perpendiculaires HO & 1 Or qui étant élevées pour trouver le centre Ο , coupe- ront la ligne AB au point K., &la ligne AD au point L ; enforte que ces deux points KL ferviront à décrire les nouvelles partions de cercle pfopofées "M K·, i.N ; de maniere que celle M^, détruira l'angle aigu qui fe rencontreroit vers Β , & que celle i S fera éviter la fécante que l'arc formeroit versD, & procurera à cette moulure un grain d'orge q, néceifoire pour Ja féparer d'avec la baguette Ρ , qui äccornpa- gne affez ordinairement les quarts de ronds. ■''' D ε s Ca ν':£ τ s, '-■'"' ·,-' '""
Ρ l a-'n;:c h ε I;V.;"·'" ';;
Maniere de tracer te cavetA', par un quart
de cerne.
Cette moulure ,rinver£é/!jdiL quart de rond ,
fe trace de même. Le quarré; AB C D,.étant donné» tracez du centre D, le quart de cercle, AEC» ou cavet demandé. ,;; · Maniere de tracer le cavet Β} par trois points
""donnés* : — -;—
Ce quart de cercle concave étant tracé comme
Pu/
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' / SE'
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Π^Ο '^ ;· 'J G O Ü R S V' «3
le précédent, tirez la diagonale AD ; élevez fur
fon milieu la perpendiculaire E F , divifez-la en «fept parties ; portez-en une de F en G ^ faites ^paf- ! fer comme dans le fécond quart de rond Β, Un arc de cercle, par trois points donnés A G D, qui détermineront le foy er Hy duquel, comme centre, vous'décrivez le cavet AGD. ; ; -? %Mamdm dé traôer U càyet C, par deux foyers.
Ce troifieme cavët n'a de faillie que les quatre
■cinquièmes de fa hauteur. Pour'le décrire,'fai- tes le parallélogramme rectangle ABC D, &. dé- crivez un quart d'ovale , A Ε C yf de, la maniere fuivahte. ."■ , y'y Sur la, ligne AD, formez un triafegle équllatéraî
A F D ; du point D, comme centre, tracez le petit arc CG, qui coupera FD au point G , enfuife tirez la ligne indéfinie ÔG Ε qui coupera F A au point E. Portez A Ε de A en H fur la ligne AD, & du foyervH> comme centre,, tracez l'arc AE; tirez en$âite la ligne Ëfit, qui étant prolongée, -couperaCD prolongé au point I..( r.), duquel, com- me centre, vous tracerez l'arc Ε G. Ces moulures concaves s'appliquent auffi aux
.parties :fupérienres :& inférieures du fut des loâïres ,colonnes ou. J>ilaïtres ; alors ces moulures s'appel- lent congésiî elles différent feulement des cavets ABC, en ce qu'elles n'ont point de fontes ou pla- fonds vers leurs extrémités inférieures, étant faites |
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(r) Ce point I, fe trouve confondu dans la figure S» pro-
che dç la lettre 0;; comiûe appartenant à la fig;· C. 9 |
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d'Architecture. 23*
pour unir la partie verticale du fût, avec les mou-
lures horifontales du chapiteau, ou de la baie de l'ordre. Voyez dans le cavet C, la ligne ponc- tuée CK,..repréfentant l'a plomb du fut, d'une cc^· lonne, d'un pilaftre, ou de tout autre corps ver- tical. D es Se ο τι es.
Communément les Scories fe tracent à la main,
feul moyen de leur procurer une cavité ou un con- tour relatif à la diverfité des baies , & à Fexpreincn de l'ordre, auquel ces bafes fervent de ioutién \ mais comme il faut un grand ufage du deffin, pour les tracer fans le fecours du compas ,.nous allons indiquer la manière de trouver les foyers par les- quels on les décrit,'afin de faciliter, la pratique par la théorie fécondée du goût de Tart. ■ Maniere de tracer la feotie A , appelée feorie
; moderne. Le quarré ABCD, étant divifé en quatorze
parties égales, du point E, placé à la neuvième clivi- iion, partant de Β, abaiiîez la ligne verticale EF, des quatre cinquièmes de EA ; formez le triangle èqui- latéral EF G ; & du centre F, décrivez l'arc Ε G : prolongez enfuite le rayon G F, d'une quatorzième partie d'un des côtés du quarré ABCD, pour avoir le point H; & dé ce point, comme centre, tracez un arc dont la corde GI foit de deux par- ties; puis tirez le rayon t H prolongé de deux par- ties eriK; tracez l'arc ï L , auquel vous donnerez nne corde de trois parties. Prolongez encore le "rayon LK de deux parties en M, la ligne oblique Piy
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%ï% Cours
MN, que vous prolongerez jufqu'à la cinquième
drviÎion de la ligne Β G: partagez cette ligne obli- que en deux également au point O ; élevez la per- pendiculaire O Ρ , qui coupera C Β prolongé en Ρ ; tirez la ligne oblique Ρ M Q; enfin du point M, décrivez l'arc LQ, & 'du point Ρ , l'arc QC , qui finira Ja courbure de cette icotie, Mankre. de tracer la f cône Β, appelée feotie
antique.
Le quarré A BCD , & la faillie A Ε feront les
mêmes que dans la figure précédente. Du point E, abaiffez la ligne verticale Ε F de trois parties; du centre F, décrivez Tare EG, dont la corde fera de deux parties; tirez le rayon GF, puis prolongez-le de trois parties au point H, duquel, comme centre, vous décrirez Tare G I , en lui donnant pour corde cinq parties : tirez enfuite le rayon 1H, que vous prolongerez de trois parties & trois quarts jufqu'au point Κ ; d'où, comme centre, vous décrirez l'arc IL, auquel vous don- nerez pour corde, fept parties, : tirez après cela le rayon LK, puis l'oblique LC ; diviiéz cette der- nière: en deux , au point M; élevez la perpendieu- Jaire MN; elle rencontrera LK , au point m , qui, comme centre, fervira à décrire la quatrième portion de cercle L C Maniere de décrirela/code C\ par'cinq foyers.
Diviiez les cotés du quarré AB CD en douze
parties égales : du point E abaiiîéz la ligne per" pendicuiaire E F, de la longueur de deux parties & trois quarts à du centré F décrivez Farç £GA er>. |
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■i:
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D Architecture. 235
lui donnant pour corde deux parties ; tirez le ravon G F, prolongez-le de trois quarts de par- ties de F en H; & du centre H, décrivez lare GI, dont la corde fera auili de deux parties ; puis tirez le rayon IH, prolongez-le de deux parties & demie en K, doù vous décrirez lare IL, en lui donnant pour corde cinq parties : tirez le rayon LK , prolongez-le de trois parties juiqu a M ; de la neuvième diviiion Β C, tirez M Ν, que vous diviierez en deux parties égales, au point Ο ; élevez la perpendiculaire Ο Ρ , qui rencon- trera la ligne CB , prolongée en Ρ ; enfin tirez la ligne Ρ MQ, qui limitera Tare L Q; & du point F, comme centre, vous décrirezTare Q C-, Des D ou cin es.
Plan che V. Manierß de tracer la doucine A , par deux
quarts de cercle, ta hauteur de la moulure étant déterminée pat
le quarté AB CD , diviiez chaque côté en deux parties égales ; tirez les lignes EF, GH, qui s'en- trecoupent au' point I; puis du point H, décri- vez le quart de cercle ΒΓ, & de G, comme cen- tre, μη autre quart de cercle PL 'Manière de tracer la douane Β ~, par deux
' triangles ifocéles. Tracez le quatre A Β C D ; tirez la diagonale
.BD,divifez-la en deux également au point I, |
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2,34 C o υ k s
& tracez deux quarts de cercle comme les précé-
dents ; enfuite divifez DI & Iß en deux, aux points L & G ; partagez les flèches KL & G H en fept parties ; & de DOI, & de ΓΡΒ, au- tant de points donnés , trouvez comme dans les "figures précédentes les foyers Q R, à deiTein de parvenir 4 tracer cette moulure moins concave cnie la précédente. Maniere, de tracer la doucine C ? par trois
■ ftf ": ifi mi foyers, Jk
Tracez le quarré A Β CD , puis le quarre
EFGD, quart du précédent: du point Ε, comme * centre, décrivez le quart de cercle FHD; tirez enfuite la corde FD; & au milieu delà flèche IH divifée en fept parties, de la cinquième Κ, ainfi que par les points FD, faites paiTer un arc de cercle , dont le centre fera L ; divifez enfuite Tire D Κ en deux au point M ; tirez la ligne M L, perpendiculaire à DK, qui coupera A D au point Ν, duquel, comme centre , & de fin- 'tervalîe NM, on décrira l'arc MO, arc qui oc- caiionnera un grain d'orge, ainii qu'on l'a cbfervë dans le quart de rond C\ planché troiiieme ; pour "tracer la partie fupérieure de cette moulure, pro- longez l'arc MKF indéfiniment vers P, portez le rayon L F dû Β en Q, tirez la ligne Q L, & fur {on milieu , tracez la perpendiculaire V Τ, *qui coupera BC au point Τ ; puis tirez la ligne LT, qui coupera l'arc F Ρ au point S; & dû centre T, décrivez Tare BS, d'où il réfultera que Ja partie fupérieure de cette doucine fera plus concave & moins élevée que fa partie inférieure* |
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d'Architecture. 23 5
Des Talons.
Manwe % tracer le talon A, par quatre foyers. La faillie AB étant fuppofée égale à la hauteur
Β G on portera de À en E, & de G en G , une faillie de la huitième partie de AB óu environ; enfuite on tracera un ^parallélogramme redangle EFG H, qu'on divifera en deux également par les "lignes IK & MN; & &r les deux lignes ΕΙ, \\ & LK, KG, on tracera deux quarts d'ovale par les foyers al·cd, qui détermineront la courbure de ce talon d'une manière très-reffentie, quoique 'méplate. f*pr*: iï3-^ïji^pm\& Maniere de tracer le talon Β ), par deux foyers.
ώ Après avoir tracé tin parallélogramme AB G D,
•tirez les diagonales A G „ Β D, qui s'entrecouperont *u point E ; divifez AE en deux parties egales au point F; élevez k perpendiculaire F G , qui cou- -pera Aß, au poiht-G, duquel, comme centre', •on tracera Tare AHE; tirez enfuite gEÏV « ;du point I , comme centre, répétez la même -opération en fens contraire : ce qui rendra cette moulure moins finuëufe que la précédente. Maniere de tracer k talon C , dont chaque
' courbure ψαβ ψαφ trois points donnés. Tracez d'abord cette moulure comme la précé-
dente ; divifez enfuite fa flèche F H en fept par- ties égales; faites paner un arc de cercle parla ,iixiëme;divinoil"& par les points donnes ; ces 'M>îs points preictiront W %er G : faites la |
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236 Cours
même opération en iens contraire, par la partie
inferieure de ce talon * qui donnera le foyer 1, 1 & déterminera la courbure de ce talon d'une ma- J niere moins reffentie encore que le talon B. Des Moulu resγυ'ο ν nomme
CO M Ρ Ο SEES,
Ρ L Α NC HE VI. ί
Sous le nom de moulures compofées, on èflr·
tend celles'qui tenant des précédentes, en différent cependant, par la maniere de les appliquer à ΓΑκ- chiteciure, foit dans les dehors, foit dans les de- dans d'un bâtiment, & félon qu'elles font exécu- tées en marbre, en pierre, en plâtre, en bois, ou en bronze : autant de coniidérations qui obligent TArchitec"te de donner à chacune d'elles un con- tour plus ou moins coulant, plus ferme, moins naïf, plus riche ou moins compofé ; nuances im- perceptibles pour le vulgaire, mais connues du véritable Artifte, qui feul peut 'donner le dernier degré de perfection à cette partie de l'Architec- ture. Au reîle une telle connoiffance ne petit s'acquérir que par l'examen des chefs-d'œuvre des Manfards en ce genre, par le fentiment, le rat- ionnement & le goût de l'art ; autant de moyens qui conduifent infeniiblement le jeune Artiite à profiler les moulures à la main, à les développer a fon gré , & à les varier à l'infini félon le be~ foin. ■ Manierede tracer par quatre foyers ta gorge A*
La hauteur A Β étant divifée en douze parties,
donnez-en neuf à la faillie de la moulure ; -.φι |
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d'Ar c h ι TECTua e. 2J7
point C , abaiffez la perpendiculaire indéfinie CEF;
portez trois parties de C en E, d'où, comme centre, vous décrirez le quart de cercle C G : prenez enfuite le rayon C F de quatre parties, & du centre F, décrivez l'arc C H, dont la corde fera de trois parties; portez enfuite la longueur; de la ligne Hl'de neuf parties , de Β en Κ , & tirez I'K : divifez cette nouvelle ligne en deux parties égales au point L, & tracez la perpendi- culaire L M, qui rencontrera BK prolongé au point M; tirez enfuite la ligne indéfinie-MIN; du point I, décrivez l'arc Ν H, & du point M» l'arc NB. Cette moulure eil d'ufage dans les cor^ niches en plâtre, dans la menuiferie , dans la mar- brerie ; & fa courbure peut fe varier à l'infini, félon le genre qui préiide dans l'ordonnance de la décoration où elle eil employée. Manien de tracer par trou foyers la douane Β\
La faillie AB étant double de la hauteur BC>
conilruifez le quarré A Ε FD; partagez le fom- met A Ε en douze parties , & le côté A D m" deux également au point I: du point G, abaiffez indéfiniment la perpendiculaire G H, puis du point I, tirez la ligne parallele IK; prolongez la ligne G H, & conilruifez le quart d'ovale IG : continuez le grand arc de l'ovale , tracé du foyer H jufqu'à ce qu'il coupe la ligne IK au point Ρ , puis tirez indéfiniment la ligne HP; portez le rayon HP de Ρ en R, & du point R, comme centre, décrivez l'arc PC. Cette doueine s'emploie affez généralement dans les cimaifes intermédiaires des corniches , & elle eil fufceptible de plus ou moins de hauteur & de,faillie, félonTappÜcacion quoi» en fait dans la décoration. |
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%38 :·■ ^C'o.Ti^s" f
Manierede tracer par trois foyers la moulure (?,
appelée bec de corbin. Le re&angle A Β C D ayant en largeur le dou-
ble de fa hauteur, divifez D C en quatre parties ; tirez la diagonale du point A au point Ê, divi- fez-la en neuf parties , prenez-en fept pour faire les côtés d'un triangle ifocéle A F E; du fom- met F, comme centre , décrivez l'arc A Ε , puis abahTez fur la ligne FE, la perpendiculaire Ε G , qui coupera BC , au point G; portez la lon- gueur G Ε de G en H, partagez en deux éga- lement l'angle Ε G H, par la ligne G I, qui cou- pera Ε F au point I, duquel, comme centre , on tracera l'arc EHK; donnez pour corde a l'arc H Κ , une dés neuf parties de AE, tirez le rayon ΓΚ, portez de Κ en L une partie & demie de AE, & du centre L, décrivez l'arc KM , qui fera terminé en M par le rayon L M, perpendi- culaire à AB. Cette moulure s'emploie commu- nément en plâtre, en bois ou en marbré, dans l'intérieur des appartements ; mais on doit éviter d'en faire ufage dans les dehors des édifices : cette efpèce de tore corrompu faifant rarement un* l>on. effet. . h Manière de tracer par cinq foyers la moulure D,
appelée boudin.
; Cette moulure, afTez fembiable à la précédente,
fie doit non plus guère être employée que dans l'intérieur des bâtiments, les Menuiiiers Fäppelent boudinfimpUoi\x_ boudin k baguette: on le nomme bou- |
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ua
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d'Architecture. 239
ein à baguette, lorfqu'on y ajoute la moulure ronde
S; & boudin fimple lorfqu'on en iupprime cette moulure. On fait quelquefois de ce boudin iimple, ou à baguette, la moulure principale des chambran- les conilruits en pierre ou en marbre ; mais il eil mieux d'y employer celle des architraves des ordres, chaque membre devant avoir un caractère diiUnclif, d'où dépend l'effet de l'ordonnance. Voici la maniere de tracer géométriquement cette moulure qui peut varier néanmoins, félon le relief ou le méplat qu'il convient de lui donner, relativement au genre de la décoration. Le fommet du re&angle A Β C D étant divifé
en quinze parties , du point Ε, abaiffez la per- pendiculaire Ε F de trois parties & demie ; tirez ï'horifontale F G, parallele à AB; de l'intervalle F G de trois parties , décrivez Tare indéfini H GI ; donnez pour corde à l'arc G H une partie δε demie, & tirez le rayon F H, fur lequel vous prendrez un nouveau rayon H Κ, de deux parties ; du centre.Κ, décrivez l'arc HL, qui fera terminé par une perpendiculaire abaiffée du point M ; donnez enfuite pour corde à Tare H GI, quatre parties, tirez le rayon FI, prolongez-le de deux parties & demie en Ν, de maniere que le rayon N,I fe trouve avoir cinq parties & demie; puis du centre Ν, décrivez l'arc ΙΟ dont la corde fera de trois parties: élevez enfuite la perpen- diculaire ON, prolongez-la de fix parties & demie vers Ρ ; enforte que la ligne Ο Ρ foit de douze parties : du centre Ρ, décrivez l'arc O Q, qui ait pour corde fept parties ; enfin prenez le rayon QR, de neuf parties , & du point R,, comme centre, décrivez l'arc Q A. '* Pour tracer la baguette lorÎqn!ôn veut l'adap-
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140 Cours
ter à cette moulure , divifez en neuf parties
les côtés du quarré qui la contiennent, & obferVez: les grains d'orge qui la féparent, d'une de fes parties, félon que le préfente cette figure. Maniere de tracer par deux triangles ifocéles,
la moulure E , appelée doucine renverfée. Cette moulure, appelée doucine renverfée,
propre aux bafes des piédeibmx, ou à tout autre membre d'Architecture, placé au-defTous de l'œuil du fpettateur , fe trace de cette maniere : fup- pofons que fa faillie foit à fa hauteur, comme 5 eil à 4 ; tirez la diagonale Β D, & la partagez en neuf parties; prenez-en quatre au point Ε , pour la partie convexe : fur le milieu F ύ de la ligne DE, élevez la perpendiculaire F G J| qui coupera AD au point G, & fur le milieu H de la ligne Β Ε, élevez de même la perpendiculaire HI, qui coupera Β C au point I, d'où, comme centre, vous tracerez l'arc Β Ε ; la Baguette Κ fera tracée comme la précédente. Manierede tracer par trois foyers la'moulure F y
appelée bouemént. . Cette moiilure eft une doucine compofée que
les Menniiiers appellent bouemcnt fimpU ou à baguette : à baguette lorfqu'on y ajoute la mou- lure ronde L ; fimple lorfqu'on en iiipprime cette baguette. Pour tracer la moulure dont il s'agit? le re&angle ABCD ayant trois parties de lar- geur , & cinq de hauteur, tirez la diagonale A C ; divifez-là en trois parties égales, tracez fur A E |
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r>*ARC Hl TÉ C Τ URE. Η*
le triangle équilatéral A Ε F ; & du point F, com-
me centre, décrivez l'arc A Ε : tracez auiîi fur EC , un triangle équilatéral ECG, & du point G, comme centre , décrivez l'arc E C ; puis divifez le côté G C en deux parties égales au point H, duquel, comme centre, on décrira Tare indé- fini CI ; enfin tirez ΚI, parallele à D C, & à la diftance de la moitié d'une des cinq parties de Β C ; cette parallele fixera le point I, qui terminera la circonvolution de cette moulure ; la baguette L > comme les précédentes. De LA MANIERE DE TRACER LES f ETS
d'Eau , propres aux différentes
cimaises des corniches. Planche VIL
Nous avons déjà dit, en parlant de la planche II; >
qu'on pratiquoit un canal ou une mouchette pen- dante fous le fofite des larmiers fupérieurs des corniches , principalement lorfque ces dernières étoient placées aux façades des édifices , & cela, avons nous dit, pour empêcher les eaux plu- viales qui tombent fur leur faillie , de fe ré- pandre, fur ces cimaifes intermédiaires, & iur les parties inférieures de l'entablement : notre attention ici s'étend plus loin, nous propofons d'ar- rêter l'écoulement des eaux qui tombent fur la faillie· des corniches, ou par un canal renfoncé comme les figures AB, ou par un fofite incliné, pratiqué immédiatement fous le lilteau, qui cou- ronne la cimaife, comme dans la figure C , foit que la principale moulure de cette cimaife foit ton quart de rond ou une douane, ou enfin un Tome I, Q |
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242- C o υ R s
talon comme dans ces trois figures AB C \ en-
forte que par ces divers moyens , non-feulement les membres inférieurs, mais encore le larmier fu- périeur feroit entièrement préfervé de l'écoule- ment des eaux du Ciel. Ce n'eft pas qu'on ne pût pratiquer à la face du larmier une pente en arrière , ou bien fur la faillie de la corniche un canal qui rejetteroit les eaux par le moyen des mufles de lion qu'on prend foin d'orner de ca- nons de métal, tels qu'on en remarque dans les exemples antiques, & qu'il s'en voit dans la cour du vieux Louvre Se ailleurs; mais ce que nous propofons, d'après quelques exemples récents, nous paroît plus fimple , moins difpendieux , & procure le même avantage que les mouchettes pendantes, fans en avoir les inconvénients. D'ail- leurs il eft bon d'obferver , que les cimaifes fupé- rieures fe font prei'que toujours en pierre dure, & qu'il eil utile pour la confervation du larmier, ordinairement de pierre tendre à caufe d'une moindre pefanteur, de placer ce canal où nous le propofons , plutôt que fous la partie inférieure du larmier ; parce que le féjour de l'eau qui s'y conferve , détruit néceiTairement les fels de la pierre, & en dégrade en peu de temps, la vive- arrête; de maniere qu'au bout de quelques années, ce larmier n'offre plus qu'une rupture défagréable à l'œiiil, ainli qu'on le peut remarquer prefque par-tout où l'on a négligé de prendre les pré- cautions que nous recommandons. Acquérons maintenant la maniere de tracer géométriquement ces trois efpèces de moulures avec leurs mou- chettes ( s ). |
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( s ) Terme d'ouvriers, pour exprimer, comme nous venons
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d'Architecture. 243
Maniere de tracer Le Jet d'Eau appliqué au quart
de rond A.
La ligne AB, fommet du quarré AB CD ,
représentant la faillie de la moulure, portez la iixieme partie de cette faillie de Β en Ε, & formez le re&angle DF, EC , dans lequel vous tracerez le .quart d'ovale Ε G D , comme dans les figures précédentes; puis du centre B, tracez le quart de cercle Ε H , qui formera le canal de cette moulure. On pourra donner plus de largeur au canal B, & plus de faillie à la mouchette HI, félon le caraétere que comportera l'ordonnance , & l'élévation où ce membre fe trouvera placé dans la façade de l'édifice. Maniere de tracer le Jet d'Eau applique à la
douane Β }
Suppofons que cette doucine ait un quart de
faillie plus que fa hauteur , tirez la diagonale BD, partagez-la en cinq parties ; les trois premières feront la corde de l'arc Β Ε ; fur le milieu F, élevez la perpendiculaire F G, qui déterminera fur la verticale B C, le centre G ; faites la même opé- ration fur DE , pour avoir le centre H , & tracez la moulure BED. Pour avoir la mouchette, |
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de le dire, le canal qu'on afrecÎe fous le larmier des corniches,
pour faciliter récoulemenc des eaux du ciel, & qu'ils appellent mouchettes pendantes , lorfqu'on y ajoute une moulure en contre-bas a comme dans la corniche Tofcane de Vigriole, Se qu'on le remarque au larmier du Luxembourg, par DebroiTç. |
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244 Cours
prenez BI, quart de AB; élevez la perpendicu-
laire I K, d'un feptieme de Β C , prolongez-la en contre-bas jufqu'à ce qu'elle coupe l'arc BE, en L ; diviiez L Β en deux parties , au point M ; & tracez du point I, la portion de cercle KM. Ce jet d'eau ou canal, comme le précédent, peut varier dans fa profondeur, comme fa mouchette, pendante dans fa largeur. -.. ■ ι ■. ■ ■' , ι ■·-..■ '.-■■; ■ ■ ■■'. ■■.,,·—"-''i' λ
'■■yj .'.>■'■ · ■' ■ ''. ■ .\-.i '<. ...,,;r:·-'" ■ '{ . ' ■
Maniere de tracer le Jet d'Eau y applique au
talon C,
Le talon .étant tracé félon la méthode précé-
dente , divifez en trois A Β, plafond ou ÎontQ du lifteau qui le couronne ; du point A au point C, tirez une ligne qui fera perpendiculaire , à une de ces trois parties ; puis tirez la ligne δε égale D C , parallele à A Β ; portez une partie & demie de AB en Ε ; tirez l'oblique DE; & de E, comme centre , décrivez le petit arc DA; enfuite tracez le fofke incliné D Β. π Maniere de tracer les
differentes courbures
des Frises Bombées,
Les frifes Verticales nous paroiflent préférables
a celles qu'on nomme bombées ; cependant comme la plupart d'entre nos modernes , tels que Palladio, Philibert Dêlorme , François Manfard 5 &c. ont bombé leurs frifes , nous donnons ici différentes manières d'en tracer la courbure à l'exemple de , ïa frife de l'ordre Ionique des Tuileries , des Iféuilkns, de Trianon, &c. |
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d'Architecture. 14 J
Maniere de tracer la courbure de la fiife A.
χ Divifez la hauteur A Β , en quatre parties éga-
les ; enfuite fur C D , comme bafe, tracez un triangle équilatéral , du fommet duquel E, & & de l'intervalle E,A » ou Ε Β , vous décrirez là courbure AB. r Maniere de tracer la courbure B.
teûe féconde frifé , moins convexe que la
précédente, fe tracera par un triangle équilatéral, dont la hauteur AB lui fervira de bafè, pouf du fommet C, comme centre, décrire la courbure A BI Maniere de tracer la courbure de lafrije C.
four tracer cette troifieme courbure, plus
compofée que celle des frifes AB , divifez k hau- teur A Β en douze parties. Du point G tirez une .horlfontale de la longueur dé deux parties & trois quarts, qui fe terminera au point D ; tracez en- fuite^ le petit quarré AF , de la grandeur de rune des^ouze parties de A Β ; tirez enfuite D F, comme bafetdun triangle équilatéral, dont le fommet Ο fera le centre de lare FP; puis tirez la hgne oblique BD, faites-en la bafe d'un triangle équilaté- ral DBE, du fommet duquel Ε, comme centre, vous décrirez l'arc D B. Q·.·
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246 C ou 11 s
Des Moulures Concaves , nommées
Cannelures. Ρ L A Ν C H £ V I I î.
En parlant de la quatrième efpece de moulures»
décrites planche II, figure II , nous y avons compris les cannelures. Entrons à préfent dans le détail de leurs différentes conitruétions, & diibns la maniere de les appliquer convenablement aux différents ordres d'Architeéture , d'après les exem- ples de celles qu'on remarque aux ordres Dorique» Ionique & Corinthien de plufieurs de nos édifices renommés. Des Cannelures de l'ordre Dorique de \ Saint-
Sulpice.
F I G U R E I.
La* colonne ayant 20 cannelures, tracez farc
GAB, de 36 degrés; divifez-le en deux égale- ment au point A » puis AB , encore en deux par- ties égales au point C, qui fera le milieu du liiteau; partagez l'arc AC, en dix »neuf parties égales; portez-en une de C en D, & une autre de C en E> pour avoir la largeur du lifteau qui ne fera ici que la dix-huitieme partie de la cannelure ; tirez la corde D F ,& prenez-en la cinquième partie, qui déterminera la profondeur de la cannelure. Des Cannelures de l'ordre Dorique des dehors
du Château de Maijons* F ï G U R Eli.
Cette colonne ayant 20 cannelures, comme la
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ι ., d'Architecture. 247
précédente, divifez l'arc AB, qui fera de 18
degrés en deux parties égales , au point C » & partagez l'arc CB , en huit parties égales; don- nez-en cinq à la moitié de la cannelure BD dont la cavité fera déterminée par un demi-cercle : pour tracer la baguette ou le rofeau,qui remplit le bas de la cannelure, portez les deux tiers de BD, de Β , en F ; partagez le même arc Β D en dix parties ; portez-en neuf de F en G, & du centre G, tracez F H , qui donnera de profondeur à l'inter- ftice DH qui fe trouve entre la cannelure & le rofeau à peu près la moitié de C D. Des Cannelures de l'ordre Dorique du Veflibuk
du Château de Maifons. ·> Figure III.
L'arc AB, étant de la vingtième partie de la
circonférence , divifez-le en deux au point C \ partagez CB & CA, chacun en dix parties; portez-en trois de C en D, & de G en Ε ; divifez le Meati ED en trois parties; donnez-en une au créneau ou renfoncement X ; faites la ligne Ε F , égale à l'une de ces trois parties , & du centre de la colonne, tracez une nouvelle circon- férence, qui? paffant par le point F, détermi- nera la faillie du liileau fur le nud de la colonne ; faites enfuite F G, égale à la moitié de Ε D, & du centre de la colonne, tracez encore une nouvelle circonférence HIG, d'où commencera le renfoncement d'une cannelure en niche. Pour tracer la cannelure Κ L Q, partagez HI en fix parties; & du centre I, tracez l'arc KLQ, égal à cinq de ces parties.
Qiv
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14" CO URS
Pour avoir la faillie de la baguette, ou rofeau
A, divifez IL en trois parties, & du point Ο, tracez Tare MPN, puis faites le renfoncement de l'interiHce KM , égal à Κ H. Des Cannelures de l'ordre Ionique des dehors
du Château de Maifons. Figure IV,
L'arc A Β étant de dix-huit degrés, partagez-
le en deux au point C ; divifez A C en fept parties égales , & faites AD & AE égales à deux de ces parties : donnez au créneau X la cinquiè- me partie de ED; faites Ε F égal à cette cin- quième partie, & tracez une circonférence pour borner la faillie des liiteaux, & celle des joncs ou baguettes qui rempliront le bas des cannelures ; faites encore D G égal à Ε F, & du centre C tracez la cannelure ; coniidérez la ligne H I, comme le petit diamètre d'un ovale ; partagez- la en deux parties égales % & donnez-en trois au grand diamètre KL; tracez l'ovale, & bornez-en le contour par un grain d'orge , placé vers le milieu du grand diamètre KL. ' * Des Cannelures de l'ordre Ionique du Palais des
Tuileries y du côte du Jardin,
Figure V.
Il y a feize cannelures à cette colonne; les
arcs AB & Β C, repréfentent chacun une feizie- me partie de fa circonférence, & ont par confé^ quent chacun vingt-deux degrés & demi; partagez* |
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d'Architecture. 249
les en deux parties égales , aux points E & D, pour
avoir le milieu des lifteaux ; divifez Tare AB en neuf parties, & portez-en une de D en G, puis une autre de E en H; des points G& H* tirez des lignes indéfinies, tendantes au centre de la colonne ; divi- fez l'arc G H en cinq parties , dont une partira du point H, & fe terminera au point K, & une autre commencera du point G , pour aboutir à L ; par tagez la niche K, L en quatre parties , dont une fera portée fur les rayons KM, LN, par les points M &N; du centre M, décrivez une cir- conférence , puis tracez le quart de rond KP: divifez M Κ en deux , au point Ο ; faites Ο S , égal à Ο K, & du centre V, tracez la cannelure SXT; portez de Β à Y, cinq quarts de KM, & du centre Y , faites paffef par le point B, un arc de cercle , qui déterminera la forme de la baguette ou du rofeau ; enfin on arrêtera la baguette par un grain d'orge, & l'un & l'autre rempliront le bas de la cannelure jufqu au tiers du fut inférieur de la colonne. Des Cannelures de ΐ ordre Corinthien des dehors
du Château de Maifons. F I G U R Ε V I.
La colonne eil ornée de dix-huit cannelures ;
ainfi Tare À Β, qui eil la diftance du milieu de la cannelure au milieu de la côte , fera de dix degrés: partagez-le en dix parties égales ; du point Β vous en porterez une au point C, & une autre à D ; puis du centre de la colonne , tracez Tare C Ε , divifez-lé en neuf parties ; prenez-en cinq pour tracer du centre Ε, la cannelure F X; |
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2J0 C O é R S
faites F G , d'une partie : par les points G & D,
faites paiTer un arc de cercle, pour former les quarts de rond , qui, en accompagnant les can- nelures , feront féparés par un créneau quarre de la grandeur Β D. - - £)es Ornements quipeu vent
s'appliquer sur les Moulures, ρ l anche ix.
Les ornements dont il s'agit, tirent leur origine
des feuilles -, des fleurs & des fruits que produit la nature. L'art de'les appliquer convenablement, eil un des premiers mérites de l'Architeûe ; δε celui de les imiter une partie efiencielle à la capa- cité du Sculpteur. Pour remplir. ces deux objets, il faut un goût exquis, & une habitude à bien voir ce que les Anciens ont produit d'excellent en ce genre. Il faut obferver mi contrarie heu- reux dans les détails, fans nuire en rien à la fymé- trie générale des formes ; il faut leur doriner un motif afforti au caractère dé l'ordonnance : enfin il faut les difpofer de maniere que dans une cor- niche, une architrave, une baie , une importe, un chambranle , il n'y ait point de moulures qui en foient accablées , & d'autres qui en foient entièrement dépourvues. Pour cet effet il ne les faut placer que fur les moulures des cimaifes:, .& rarement fur les larmiers qui les féparent f ni fui les plates - bandes & les liiteaux , dont nous avons-déja ; recommandé la fimplicité. Il faut naème que ces ornements , lorfqu'on les applique fur les moulures dès cimaifes, ibient aiïbrtis au galbe δε aü contour de chaque membre, confidéré féparément, afin que l'on puiiTe juger delà formé |
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ρ
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d'Architecture. 251
dé ces moulures avec la même facilité, que fi elles
euffent. été Mes : pour cela on doit varier le genre des ornements fur les moulures de diite- rentes efpeces, foit en préférant les feuilles deau à celles d'acanthe; celles de perfil a celles de lau- rier; celles-ci à celles d'olivier, &c. & en faifant enforte que chacun de ces feuillages., les fleurs, les fruits, en un mot toutes ces différentes Scul- ptures , foient traitées d'une touche plus ferme, ou plus légere, félon quelles feront partie dune ordonnance virile ou délicate, & qu'elles devront^ être exécutées en pierre, en plâtre ou en marbre» en fhic, en bois ou en bronze. Il faut encore avoir l'attention, non-feulement de placer toujours les axes de ces ornements , les uns au-delius des autres, mais encore de les faire correfpondre a ceux des colonnes ou piiaftres, & au milieu des des entrecolonnements & des principales ouver- tures ; en un mot, la difpofition & le choix, de • ces ornements, doivent concourir également ƒ procurer un caraaere relatif à Texpreffion de l'ordre qui préfide , foit dans, l'ordonnance exté- rieure de l'édifice, foit dans l'intérieur des appar- tements, Des ornements à ïufage des moulures droites. Les figures A, B, C, D,E, F, offrent autant d'or-
nements propres à renricmiTement des moulures quarrées ou applaties , telles que les plinthes, les gorgerins, les fofites,les tables, les caifet- tes, &c. n ■- . r x „
La figure A, repréfente des gudlochts9 eipeces
d'ornements antiques compofés de lifteaux , & ie-
parés par des champs de même largeur, qui mar-
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2?2 Cours
chent continuement à des diftances paralleles ; ces
guillochis , dont les angles doivent toujours être droits, font deirinés pour les ibriies des architra- ves, pour les plates-bandes des larmiers, les cham- branles , &c. Voyez plußeurs de ces guillochis , d'un deiÏÏn antique & de fort bon goût, rap- portés par Chambrai, dans ion parallele des ordres antiques & modernes. La figure B, repréfente des ornements, appelés
rofaces, qu'on emploie dans les caffettes diftribuées dans les fofites dès larmiers, des entablements Dori- ques, Ioniques, Corinthiens & Compoiites ; dans les arcs doubleaux des voûtes de nos Eglifes, de nos portes triomphales , & généralement par-tout où la richefTe doit avoir le pas fur la iimplicité. Ces ornements antiques ne doivent jamais fe rencon- trer dans une même ordonnance avec les orne- ments modernes : ils vont bien avec les guillo- chis, avec les canaux , les ferlons , les patenô- tres, les oves & non avec les portes, les guir- ' landes, les palmettes. Tout importe dans le choix, dans rafTortiment des ornements : ils dépendent du oyîe de l'Architecture ; mais ce ityle foutenu eit peut-être une des parties les plus négligées de nos comportions françoifes. La figure C, nous fait voir les ornements ajppelés
rudentures, qu'on place aiTez communément dans lés cannelures du fut des colonnes Ioniques, Co- rinthiennes & Compoiites, quelquefois même dans l'ordre Dorique, placé dans l'intérieur d'un'bâti- ment , comme on* le remarque dans celles du vefti- bule du Château de Maifons? dont nous avons donné les développements, planche VIII, en donnant auffi celle des ordres extérieurs du même Château, & ceux de l'ordre Ionique du Palais dés Tuile- |
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d'Architecture. 25J
ries, &c. Ces ornements, qui doivent toujours
être afîbrtis à la dignité , à la richeiTe ou à la fimplicité de l'ordre & de la décoration des bâ- timents , confiaient dans la repréfentation de joncs ou de roieaux de forme convexe, placés dans le tiers inférieur du fut des colonnes ; & c'eit de l'ex- trémité fupérieure' de ces rofeaux qu'on fait fortir des feuilles, des graines, des culots & autres or- nements traités avec plus ou moins de légèreté, félon l'application de ces rudentures aux diffé- rents ordres d'Architecture. • La figure D, repréfente des portes , ornements d'un genre moderne, & compofés de larges filets 011 lifteaux, de feuilles d'eau, de feuilles de refend & de culots à l'ufage des plates-bandes, des plinthes & des attiques de couronnements , des amortiiTe- ments, &c. fur-tout lorfque fur ces derniers on n'introduit point les baluitres ni les baluitrades. On voit dans la figure E, des canaux, ornements
antiques, concaves, féparés les uns des autres par deslifteaux, des filets, & remplis de joncs , de grai- nes , de dards & de feuilles d'eau, à l'ufage des gor- gerins, des frifes, des larmiers ou de tout autre membre vertical. Ces ornements doivent être plus fufceptibles d'enrichiitement, à raifon de l'exprefiion qui préiide dans la décoration ; mais dans tous les cas il faut en ufer avec modération, les moulures droites, deftinées à faire oppofition avec les cir- culaires , devant être prefque toujours liiTes, maP gré l'exemple antique de l'ordre Corinthien, tiré des thermes de Dioclétieii à Rome , rapporté par Chambrai dans fon parallele d'Architeâure , chap. 29, page 68. La figure F repréfente'des ornements en bas-;
reliefs, compofés de trophées, d'armes, ou de |
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254 C o ν R $
tous autres attributs terreftres ou maritimes, à
lufage des tables rentrantes, & quelquefois des tables faillantes, appliquées aux piédeftaux des ordres & des baluflrades. Ces mêmes ornements s'emploient auffi quelquefois fur les frifes des ordres Ionique & Corinthien , fur les métopes de Tordre Dorique , & généralement dans les or- donnances d'Architeaure, où trop de fimplicité fe contrediroit avec le motif qui auroit fait ériger l'édifice. Des ornements à l'ufage des moulures circulaires. ·
^ Les figures G,H,I,L,M,N,C), repréfentent autant
d'ornements propres aux moulures circulaires, tels que les faifceaux dont on enrichit les tores; les patenôtres dont on orne les baguettes ; les oves dont on enrichit les quarts de rond droits ; les godrons dont on orne les quarts de rond ren- verfés , ou les becs de corbin; les miroirs qu'on applique fur les cavets ; les feuilles de refend qu'on taille fur les douanes; enfin les rais de cœur qu'on place fur les talons. La figure G, préfente une forte d'ornement
compofé de faifceaux de plufieurs baguettes, liées & unies enfemble par des feuilles de refend ou des bandelettes, à l'ufage des tores Corinthiens ou Comportes; cette richeife ne pouvant guère s'ap- pliquer aux bafes des autres ordres. Quelquefois au lieu de ces faifceaux on applique fur les tores des feuilles de refend, féparées par des canaux & entremêlées de miroir ; mais ces fortes d'orne- ments femblent y réuifir beaucoup moins : encore faut-il que f Artiile obferve de donner aux pre- miers , différentes expreiïions, en diûribuant plus |
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d'Architecture., 255
ou moins de baguettes autour du tore, & en
rendant les feuilles de refend ou les bandelettes, plus ou moins rares, félon la grandeur du mo- dule de l'ordre. Nous croyons donc qu'on doit s'en tenir à ces fortes d'ornements pour les tores ; & penfons ici à l'égard de la Sculpture comme pour ce qui regarde les moulures, que pour être approu- vée des ConnohTeurs, elle demande d'êrre mife à fa place, & félon l'application judicieufe qu'en ont faite les plus grands Maîtres, & non les exemples que nous ont laifTés quelques Auteurs modernes, qui fouvent l'ont employée dans leurs comportions, plutôt par habitude ou par imitation que par raifonnement. Au reite, voyez Bibiam , homme de génie, qui, dans fa décoration des théâtres , nous a donné une infinité dé deflîns , de profils & d'ornements de genres différents , d'un goût admirable, mais plus propres à la Peinture qu'à Γ Architecture proprement dite. Dans la figure H, on remarque deux efpèces
d'ornements à l'ufage des baguettes, l'une nom- mée patenôtre , efpèce de grains de perles de for- mes variées , & placés alternativement les uns près des autres ; l'autre nommée auffi faifceau, mais compofée de feuilles de chêne, de laurier ou d'o- livier , entortillées de rubans. Ce dernier genre d'ornement pourroit auffi être appliqué au tore G , les deux moulures dont il s'agit étant éga- lement demi-rondes, c'eft-à-dire, compofées cha- cune d'un demi-cercle. La figure I, nous retrace des ornements de
forme elliptique , appelés oves, qui peuvent re- cevoir divers enrichiffements, félon qu'ils font appliqués aux différentes corniches en ufage dans la décoration des façades , & dans l'intérieur des |
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256 Cours
bâtiments. Ces fortes d'ornements , qui ont la for-
me d'un œuf, font ordinairement enfermés dans une coque imitée de celle d'une châtaigne; quel- quefois on leur donne la forme d'un cœur, & alors on les fépare par des dards pour fimbolifer l'amour. Ces oves font ordinairement réfervés pour orner les quarts de cercle convexes qu'on nomme atiffi oves ou échine du mot grec échinos, la coque d'une châtaigne. La figure L, fait voir des ornements, appelés
godrons, imitant la forme d'une amande qu'on emploie aiTez ordinairement fur les quarts de ronds renverfés. Ces godrons font quelquefois féparés par des canaux renfoncés qui font oppo- iition avec la faillie des godrons ; & ces canaux font ornés de fleurons, de bouquets de laurier, de graines , &c. félon la richene que l'on croit devoir procurer aux ornements de ces moulures ; mais il faut favoir que ces détails appartiennent plus au bronze qu'au marbre & à la pierre. La figure M, préfente des ornements, appelés
miroirs, à Fufage des quarts de rond concaves, nommés cavets. Ils peuvent être de forme fphéri- que ou elliptique, entourés & féparés par âes en- trelas, des lifteaux, & être ornés de feuilles de refend, ou de feuilles d'eau, félon les diverfes expreffions des moulures qui reçoivent ces efpè- ces d'ornements. La figure Ν, oiFre des ornements compofés de
feuilles de refend, à l'ufage des doucines droites & renverfées. Ces feuilles peuvent être d'olivier, de laurier, de perfil ou d'acanthe , félon que les chapiteaux des ordres feront compofés de ces divers genres de feuilles ; car un point eifençiel à obferver, c'eft de tenir tous les ornements ré- pandus |
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. D * À R Ó H I f Ë C t Ü È. Ê. 'i:jf
f}ândus dans Une même décoration , d'un ityle1
égal '&' d'une expreffion femblable : l'ordre d'Arj chiteéture tenu iimple , riche ou moyen , doit décider ie caractère des ornements ; ce cara&ere une fois choiû, oïl ne doit plus fe permettre de changement j voilà pourquoi il eil à propos que f Architecte préfide à toutes les ëfpèces de pro- ductions qui concourent à aiTurer le fuccès de fes» œuvres. La 'figure O, nous offre des ornements à i'iifage
des talons droifs & renverfés , appelés rais dé mur ou campants. Ces ornements, font fufceptibles, ainfi que lés précédents de plus oii moins d'enri-* chifTement, félon l'ordonnance à laquelle ils ap- partiennent : mais en général, pour produire mi bel effet, il faut qu'ils foient tons dii'pofés réguliè- rement & diitribués de maniere à former entr'eux une parfaite fymétrie. Pour cela, il convient de recourir à des divifions exactes-, & de faire ufage des lignes paralleles, exprimées dans ces diffé1- rentes figures par des lignes ponctuées ; autrement tous ces arrondiiTements né préfeiiteroient plus qu'un défordre révoltant , qui bien loin d'em1- bellir les membres d'Architecture qui les reçoivent, ne les rendroient fupportables ni dans les dehors», tii dans l'intérieur des édifices. Nous avons cité Bibiam & Sébairien le Clerc $
comme d'excellents Auteurs en ce genre ; mais de tous les moyens, le plus fur de parvenir à la connoiflance des ornements dont nous venons de parler, c'eit d'aller examiner ceux exécutés dans nos bâtiments; c'eit d'aller deifmer tous les chefs- d'œuvre répandus au Louvre , aux Tuileries , à Verfailles , & dont la plupart font exécutés fur les déiTms de Le Brun* de Le Pautre, des Girar- Tome X, R, |
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1$8 Cours
dons, des Coifevox, & des autres grands hóm»
mes qui fe font iignalés dans toutes les parties relatives à PArchiteâure , à la Sculpture , & à là Peinture, qui embeliiifentnos Egliiés,feos Palais1 & nos belles Maifons Royales. Après avoir parlé en général des moulures 8c
des ornements dont on les enrichit quelquefois * rappelons à nos Elevés, d'après Scammozzi, que la véritable proportion des ordres fut trouvée fut les différentes proportions du corps humain. C'eit pourquoi cet Auteur a cru devoir donner à l'ordre Dorique , le nom d'ordre Héroïque; à l'ionique, celui d'ordre Féminin; & au Corinthien, le nom d'ordre Virginal. Si ces dénominations ne font pas approuvées du plus grand nombre , nous les rapportons ici néanmoins, parce qu'elles nous paroiiTent peindre à i'efprit des idées nettes, & conformes à la nature & aux beautés de l'Art. D'après ces dénominations qui n'ont rien que de fatisfaifant ; nous avons cru que pour hâter les connoiffances de l'amateur & des jeunes Ar- îiités/, nous pouvions auifî comparer avec San- grado, Auteur efpagnol ? & avec Le Blond » mort Architecte du Czar Pierre, la relation aifez intime que peuvent avoir les dimenflons de la tête humaine, vue de profil, avec la projection dune corniche Tofeane , compofée ordinaire- ment de trois parties principales, favoir: de deux cimaifes & d'un larmier. En effet, n'entrevoit- on pas quelque reÎTemblance dans cette corniche, avec le front, le nez & le menton d'un homme robuiteî & ne pourroit-on pas , par cette com- paraifon , acquérir plus promptement , la con- nohTance de ce qui plaît ou déplaît dans un£ corniche.. |
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Ö ' Â ft e H ï t E C Τ U R Ei |||
Ëïle déplaît à coup fur aux yeux des connoifc
feurs, lorfqu'ils la trouvent trop camufe ou trop ïaillante , trop élevée ou trop éerafée ; elle piait iau contraire à tous les fpe&ateurs i lorfqu'iis re- marquent dans là proportion dé fes membres & dans la fimilitude de {es parties * une juitéffè ïjui offre à leurs yeux quelque chofe d'intéreffant j & ils font contents , quoiqu'ils ne puiilent pas toujours démêler la vraie fource de leur fatisfao tion : de même le fpe&ateur fe porte à l'admira- tion lorfqu'il examine une belle tête dans laquelle il remarque des parties henreufement combinées s mais il n'auroit que du dégoût , s'il en Voyoit une autre qui auroit le front trop bas, le nez de beaucoup trop (aillant» & la bouché extravagäm,- ment renfoncée* - . Il eit vrai qui! ne faut pouffer cette äppikätioä
trop loin, & qu'une tète peut n'être point ahfolu- mertt difforme, quoiqu'elle ne préfente pas toute la régularité quexige la févérité des rapports ; que de même auffi il fe peut rencontrer des occaiions où j fans nuire effenciellement au cara&eré de Tordre, on peut modifier, fouftraire ou augmentée quelques membres dans une corniche ■> rendre ïh faillie plus ou moins coniidérablé, félon Fefpecé* le genre ou l'importance du bâtiment. Il y a plus^ cette liberté permife en certaines occaiions, peut férvir à exprimer les divers caractères des diffé* rentes productions de l'Architedure , en retraçant aux yeux du fpeâateurj quoique dans les plus petits détails , le motif qui a donné lieu, à l'ére- ction de l'édifice ; de même que dans un tableau ν d'hiitoire ou dans un bas-relief * lé Peintre & lef tft- Söulpteutjj dansles airs dé tête dé leurs figurés * Κ ij
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i6q € o urs
indiquent, par l'expreifion de chacune d'elles 0iinâv
ge des pafiions qui caraciérifent les perfonnages repréfentés fur la toile, ou par le marbre. Ainii daris l'Architecture les corniches limples ou com- pofées/peuvent contribuera exprimer, dans la décoration, la détermination de l'ordre, fa pré- fence ou fon abfence : comme dans la Sculpture Ou la Peinture, les caractères de tète peuvent exprimer fans peine , les différents traits qu'on a dû donner aux foldats , d'une maniere diiiiiictive, lorfqu'on vient à comparer ces têtes avec celles des Héros ou des Divinités qui compofent l'or- donnance entière, ou du chef-d'œuvre du Peintre ou de celui du Sculpteur. ; Pour nous convaincre de la nécefîîté de cette
variété, fouvent indifpenfable en Architecture , nous avons aufîi tracé fur les profils exaëts des corniches des ordres Tofcans de Palladio , de Sçammozzi & de Vignole , un profil de tête humai- ne , d'après lequel nous allons examiner, fans partialité ,la différente expreiHon qu'a puproduire Je caractère de chacun de ces profils humains , engendrés pour ainû dire,, du caractère & de l'expreiîion des profils çTArchitecture, donnés à la corniche de l'entablement de l'ordre Tofcan , par 'ces trois Commentateurs de Vitruve. Ρ L A Ν C H £ X. .
Le profil' d'Architecture, tracé fur cette planche»
èft celui de l'entablement Tofcan de Palladio. Sur ce profil nous avons deifiné celui d'une tète hu- maine , dont les parues ne nous paroiuent pas faites pour aller enfemble. En 'effet , que Ton èorripare le larmier, trop peu élevé, avec l'encor- |
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d'Architecture 261
bellement inférieur & la cimaife fupérieure , on
iembîe s'appercevoir que le peu de hauteur dit larmier, a déterminé le nez d'un enfant de douze ans , foutenu par le menton d'un vieillard de quatre-vingt , & couronné par le front d'un homme de cinquante ans. Plan che X !..
Sur cette planche, nous avons tracé le profil
del' entablement Tofcan de Scammozzi, puis nous avons deiïïné, comme dans la planche précédente, le profil d'une tète humaine qui fe trouveroit dans le même cas que celle de Palladio,, û nous n'avions pas ajouté à la hauteur de fon larmier le reglet inférieur qui fe trouve placé defTous , afin de procurer un peu plus de hauteur au nez* D'ailleurs il éit aîl'é de remarquer que la partie inférieure de cette tête parok lourde & pefante, comparée avec les deux parties fupérieures qui font trop petites. Ρ L A Ν C H Ε Χ Ι I.
Enfin fur cette planche., nous avons tracé le
profil de l'entablement de Tordre Tofcan de Vi- gnole, ■& nous avons également deiïïné fur ce profil , celui d'une tête humaine, ici les trois membres de la-corniche nous paroiifent aiïïgnetr des rapports plus convenables entre le front , le nez & le menton ; d'où réfulte un caraöere d'unité, qui certainement ne fe rencontre point dans lesr deux exemples précédents. Si,ces obfervations ne font pas fans fondement»,
elles pourront fervir à juftifier , en quelque forte* nos Architectes François r d'avoir préféré en. gé*· R iij
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%fa. Cours
çéral dans leurs compositions , la do&rine de VI*
gnple * à celle de Palladio & de Scammozzi. La répartition, le rapport & le choix des membres, d'Ârçhiteaure de Vignole , principalement dans fes, ordres Tofcan, Dorique & Corinthien, nous paroiflant autant de chefs-d'œuvre. Cet Auteur n'a guère contre lui que l'élévation un peu outrée «le fes piédeitaux. On peut » fur cet objet, avoir Recours aux fentiments de Palladio & de Scania tnozzi ; le premier ne donne à fes piédeitaux r que le quart au lieu du tiers , & le dçrnier a déterminé les fiens entre le tiers & le quart. Au reite , ces profils humains que nous venons:
$e tracer fur les profils d'Archite&ure de Vignole,, de Palladio ,' de Scammozzi, ne doivent être regar-r 4és ici que comme des objets de comparaifou entre les rapports de la nature & ceux de l'Art ; ils, $ious porteront à réfléchir , que c'eft par le fecours. de. ces deux objets réunis, qu'on peut parvenir 4 h perfection ; que cependant, félon le genre de l'édifice > on peut ordinairement augmenter cer- tains membres : par exemple, fans bleffer les règles, de la bonne Architecture, on pourroit outrer la faillie du larmier d'une corniche que repréfente fë nez d'une tête, abaiiTer la cimaife fupérieure ψι'indique le front, & fortifier l'encorbellement,. repréfêntation du menton , fi Ton a intention de donner au profil d'une corniche une expreifion fout à fait ruftique, puiféç d'après l'ordre Tofcan ξ ψι contraire, dans une Archite&ure noble , on. |K>urroit- affeâter de donner plus de hauteur à |ai cimaife iupérieure,. dans l'intention que», JAP* penant plus élevée, elle prenne le cara&ere dik iront de la tête d'un Héros :. on pourroit égale-- Üfifi g^ndir le larmier ^ pour dojaner Hdee 4.uft |
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d'Architecture. i6%
mz plus aquilin , &c. qui alors détermineroit
Fexpreilion d'un profil d'ordre Dorique. Il en fe- roit de même des autres membres des corniches deitinées aux ordres Ionique , Corinthien & Corn- poiite. Enfin à ces trois profils de corniche , fur lefquels font deiîinés ces profils de tëtey nous avons ajouté le cou & les mammelles , pour faire connoître, en quelque forte, le rapport que ces trois parties doivent avoir avec l'architrave , ' là frife & la corniche de ces entablements Tofcans». Des différentes Pr ο ρ ο r τ ι ο ν s*
' ,<ΕΤ DES DIT^ER.S M.EMBRES d'ArCHI-t
tecture des ordres toscans dk
Vignole, Palladio etScammozzf* Ρ L· Α Ν C Η Ε Χ ί Ι Ι.
Dénombrement des divers membres attribués à
l'ordre Tofcan yyar Fignolé, Nous avons déjà remarqué 9 que l'ordonnance'
générale de l'ordre Tofcan , félon Vignole , étok compofée de trois parties principales* Nous ré- péterons ici,, que la partie, A, fe nomme piéde- stal ; Β, la colonne ; & C * l'entablement. Que D , s'appelle le focle ou labafe ; Ε le dé;,
& F, la corniche ouïe couronnement du piédeftaî». Que G , repréfente la bafe.-*. Ε , le fut ;, & I *
le chapiteau de la colonne.. Que Κ , s'appelle l'architrave ; L , la frifè ι &r
M?i la. corniche de, l'entablement* Enfin que&^ |
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2.64 Cou RS
fe nomme la cimaife fupérieure ; B, le larmier;
|kc, l'encorbellement ou la cimaife inférieure de la
corniche.
Nous ohferverons à préfçnt, que la cimaife #,
eil compofée d'un quart de rond h, d'une baguette ?, & d'un filet k\ que l'encorbellement ou la cimaife ç , eil cqmpqfée d'un lifteau / , & d'un talon m l que l'architrave Κ » eil compofée d'un liileau η, & d'une plate-bande <?. Que le chapiteau de. la colonne eil compoié
décrois parties principales ; favoir, du tailloir d^ de la cimaife e? & du gorgerin ƒ; qu'enfin l'arlra* gale g, eil un membre qui couronne le fût des colonnes & des pilailres ; que les autres membres qui divifent chacune de (es différentes parties ^font, pour lq tailloir ρ la plate-bande ä, & -le liileau q'r pour la cimaife e, le quart de rond r, & le filet s χ que celles de Failragaîe |, font la baguette t, & Je filet u. Que la bafe G, a pour moulure le liileau ou
h ceinture χ , le tore y, & le plinthe £. Qi\t la corniche du piédeilal F , eil compofée.
du liileau aa ^ & du talon bb. ,Quç la bafe. ou le focle du piédeilal D , eft co,m-
pqfé d'un Uileau c%c, & d'une plate-bande d^ d; de maniere qu*on peut qbfejver que? D, F, G, Ι, Κ, Μ9 font autant de membres auxquels les intermé-* diaires Ε , H, L , fervent de repos '% car il eil très- rare, fur-tout dans Tordre Tofcan , que ces par-* îies intermédiaires reçoivent des moulures & des ornements, Examinons à préfent les rapports & les me·*
fures que Vignole a données à la mafle générale & ayx. principales parties de cet Qrdrç, |
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d'Architecture. 265
Mesures générales et particu-
lières de l'ordre Toscan, selon Tig ν ο le. Planche XIV.
Le piédeftal A , [figure I] doit, félon Vigno-
îe , avoir le tiers ; & rentablement C , le quart de' la hauteur de la colonne. Pour trouver ce rapport, il faut, comme nous l'avons déjà expli- qué planche II , divifer la hauteur totale de l'ordonnance DE, en dix-neuf parties égales, en donner quatre à la hauteur du piédeftal A, douze à celle de la colonne Β , & réferver les trois parties reftantes pour celle de l'entablement C , de maniere que trois étant le quart de douze, & 'quatre *e tiers ^e ce nombre ' ces ytrois °luan"
tités , quatre, douze, trois , égales à dix-neuf, deviennent une regle générale, non - feulement pour trouver la hauteur du piédeftal & de l'enta- blement Tofcan, mais aufli le rapport des pié- deftaux & des entablements de tous les autres or-« dres. Enfuite pour déterminer l'expreiTion de la colonne Tofcane , Dorique , Ionique , Corin- thienne & Compofite , il faut divifer la hauteur, par exemple de l'ordre Tofcan , en fept parties; [ Foyei la figure I de la planche. II] du Do- rique en huit parties ; de l'Ionique , en neuf; du Corinthien & du Compofite en dix : divifions qui, réparties fous une hauteur commune, comme dans la planche I,, donneront aux ordres autant de diamètres différents que chacun d'eux devra pré- fenterd'expreffions particulières, ainfi que Γεχρπ-τ ment ici [fig.-H] les divers diamètres a9k9c9d. |
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%66 Cou n s
Cela fuppofé, chacun de ces diamètres , fera
divifé en deux, parties égales, & Tune de ces deux dernières parties formera un module, defti- ïié à mefurer la maffe, les parties principales, & les détails de Tordre. Ce module fe partage en douze minutes pour les ordres Tofcan & Do- rique » & en dix-huit pour les ordres Ionique, Corinthien & Compoiite. Nous avons déjà dit, en parlant de la planche ÎI>
que les trois parties A, B, G , font compofées dans tous les ordres de trois autres parties, principa- les : nous les avons exprimées dans la planche que, nous décrivons, parles lettres a, b> c, dye,f, g * h, /'. Enfin on doit fe rappeler encore, que la plupart de ces membres, indiqués feulement ^cï par mafles , fe fuhdivifent en une infinité d'au- tres parties qu'on appelle en général moulures*. Mefures du Piédeflal.
he foclç a, a fix minutes de hauteur, & quatre
de faillie ; le dé b , a trois modules huit minutes? , de hauteur , & deux modules neuf minutes de largeur ; la corniche e , a fix minutes de hauteur % fur quatre de faillie : donc toute la hauteur du piédeftal eft de quatre modules huit minutes % tiers de quatorze modules, hauteur de la colonne* Mefures de tordre ou de la colon&e, ,
La bafe d, a un module de hauteur, & quatre
minutes & demie de faillie (t) ;ie fiit e a douze modules de hauteur, & deux de largeur., |
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(e) Toutes les faillies dont nous parlons, doivent çtis
tpmptées du fut « & ftoa de i'a&é de &, colonne,. |
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p'Arêhitècture. 5.67
Il faut obferver néanmoins , que ces deux mo-
dules ne fe continuent paralleles , que jufque vers la ligne KL, tiers de la hauteur du »y car vers fon extrémité fupérieure, le fut fe reauit a vingt minutes : de maniere que la hauteur du bas de h colonne ι»,»,· doit être confidérée comme un cilindre ; & le refte de fa hauteur, comme un conoïde tronqué, : ;; '· ' Le chapiteau/, a un module de hauteur , &
cinq minutes de faillie : donc toute la hauteur de Tordre, c'efU-dire, la bafe , le fût & le chapiteau, çft de. quatprze modules ou fept diamètres, Mtfures d$ ÎEntahhmmu
L^arçlirtrave g, a douze minutes de hauteur »
& deux de faillie ; la frife h , a quatorze minutes; de hauteur ; fes côtés doivent être a plomb du fut iiipérieur de la colonne , & par conséquent avoir vingt minutes; la corniche ι , a= feize m*· mîtes de hauteur, U dix-huit de faillie : donc tout rentablement eft de trois modules & demi ; conféquemment l'ordonnance entière eft de vingt- deux modules deux minutes. La proereffion arithmétique qua obfervee Vi-
gnole f entre l'architrave , la frife & la corniche le fon entablement, nous prouve la préférence que cet Auteur mérite à cet égard fur les; autres Commentateurs de Vitruve («> AuffiDesbrofles, le Mercier & Manfard, ont-ils fuivi Vignole de préférence à Palladio & à Scammozzi, au Luxem« |
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U) Voyez dans les planches>ΜίΜ® fe£P$je {^»J
ment Totcan de Palladio & dç ScammoMi, que loa peut comparer ayee celui-ci. |
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%6% Co υ κ s
bourg, dans l'ancien Palais Royal, à l'Orangerie âé
Verfailles & ailleurs ; exemples affez célèbres , qui doivent fervir d'autorité à nos jeunes Artiites. Mais pour les convaincre de la néceiîîté de cette préférence, examinons fcrupuleuferaent, iî tous les membres dans Tordre Tofcan de Vignole, font véritablement relatifs à (on expreiïïon , & rendons compte des changements heureux qu'ont cru y devoir faire nos Archite&es françois les plus efiimés. De l'ordre Toscan de Vi g νο le ,
avec quelques changements utiles pour lut procurer un plus grand degré de perfec- TION. Planche X V.
Du Pièdeflal & de la Bafe de ta Colonne.
Vignole , avons -nous dit, a donné à (es pié-
deftaux, le tiers de la hauteur de la colonne.1 Cette hauteur n'eil-elle pas trop confidérable , quoique Desbrofîes, au Luxembourg , ait donné encore plus d'élévation aux fiens? N'a-t-on pas lieu de craindre même, en imitant Vignole , que plus on donnera d'élévation au piédeftal, moins la colonne acquerra de hauteur ? Palladio a reduit les* iiens au quart de l'ordre ; Scammozzi les a déterminés entre le tiers & le quart. Ce dernier ^apport nous paroît plus convenable à beaucoup d'égards; encore ferions-nous d'avis, qu'on fup- primât prefque toujours les piédeitaux (#)> "ffcfc
(x) On peut fubftitucr aux piédeftaux, fur-tout âans lm
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d'Architecture. 269
à l'exception néanmoins des Temples, des Arcs
de Triomphe, & des autres Monuments de cette efpece ; car nous penfons qu'en toute autre occa-> fion les piédeftaux, invention des modernes;, font plutôt un abus, qu'une perfection de l'Art; parce que, d'une part, les faillies de leurs bafes & de leurs corniches , retréciffent néceiTairement l'in- térieur des lieux auxquels on n'a pu donner une certaine largeur ; & de l'autre , elles produifent, dans les étages fupérieurs , clés portes-à-faux, du moins contraires à la folidité apparente. Mais fans entrer ici dans cette difcuffion, qui trouvera fa place ailleurs, examinons ii véritablement toutes les moulures dont Vignole a orné fon piédeftal, préfentent un caractère relatif à cet ordre. • ; De la Bafe. du PiedeßaL
Vignole n'a donné à la bafe de fon pîédeftalj
marqué A , (figureI ) que lix minutes de hauteur, & Fa compofée feulement d'une plate-bande & d'un liileau ; il n'a de même donné que fix mi- nutes à la hauteur de fa corniche C ; auiîi le dé Β , nous femble-fcil avoir trop d'élévation, (voyez la planche II (jk) ; ce qui donne, ce femble , à ce piédêiial une expreffion contraire —
édifices dcftinés à l'habitation , un focle , membre d'Architc-
Éture, qui repréfente le dé du piédeftal," mais "qui en" diffère néanmoins , en ce qu'il a plus d'erqpatement que le corps fupérieur , au lieu que ie dé du piédeftal a précifement là même largeur , que le corps qu'il foutierit. La hauteur du focle dont nous parlons'î peut être reduit à un diamètre } ou avoir, au plus quatre modules. --- :λ * i.y) Nous renvoyons à la planche II, pour donner à con·
aoîtte les véritables rapports 4c la largeur à la hauteur de |
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IJù C O tr ft s
au çara&ere que doit avoir le foubaitemént d*ui$
ordre Tofcan : il nous femble encore que la di~ (otte dß-s moulures de cette bafe lui ôte fana- logie qu'elle devrait avoir avec la diviiion des membres répandus dans l'ordre & dans ion enta- blement; d'ailleurs cette bafe n'à-t-elle pas trop dé iaillie, ne pouvant être mife à couvert par celle de la corniche ? Pour remédier à ces inconvé- nients nous propofons le profil de la bafe D * ( figure 11 ) qui ayant neuf minutes de hau* teur & trois parties feulement de faillie , don* lierait moins d'élévation au dé, & çaractériferoiÉ cette bafe d'une maniere plus relative à l'ordre $ont nous parlons* Cette nouvelle bafe eft com- pofée d'une plate-bande 4, dTun quart de rond £, & d'un lifîeaui:, nouvelles moulures qui nous paroiiTent plus relatives à l'ordre Tofcan ; il ferait alors moins pauvre , & placé moins près du fol, il deviendrait nécelfairemejat moins.{fujet à fe dégrader* :: JP§l Dê4u PiédzflàL Λ &!.&& c Le dé Β , e$ lhTe dans Vignole; cette -ilmplicité
éft fans doute du reifort de cet,ordre ; maiscomîàe jlpourroâtarriver; qu'on fut obligé doriier ce dé, le #t de l'ordre étant chargé dô bocages,; pour éviter le défaut qu'on remarque dans celui de la cour du Palais dii Luxembourg, "nous avons exprimé |
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chaquej partie principale , ayant été obligé, dans cette planV
jqhe XVI, de tronquer les véritables hauteurs pour poil* Voir tracer les objets plus en grand j de njême, pour,,éyit0f la multiplicité des planches i nous n'avons tracé d'un; fφφ figure J ,, que, la moitié du deijin de Vignole , ßc de Η$*€# figure ,ίί,, ;|fis:ic%9|eijaen|S;4erjft; û^mkèm 0Rxm^f |
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JD'ÂRC HI TECt UitË. Ιψί
(figure III) une table Taillante G, au lieu que
DesbroiTes a fait la fienne rentrante , quoi- qu'il ait furchargé fa colonne de boffages conti* nus, en forte que dans l'ordonnance Tofcane de ce Palais , il femble que ce foit le foible qui porte le fort contre toute idée de vraifemblance. De la Corniche, du PiédeftaL
La corniche C, de Vigriole nous paroît im·*'
parfaite, n'étant compofée que d'une cimaife, pro- prement dite. Un couronnement de cette efpèce ne peut. être.-.appelé corniche, que lorfqu'il eft corn- pofé au moins de trois parties principales; iavoir$ de deux cimaifes & d'un larmier j ce qui ne fe rencon- tre point ici : d'ailleurs cce couronnement du pié- Méfiai, comme nous l'avons déjà remarqué , doit mettre à couvert la faillie de la bafe A ; au con- traire ici ces deux membres ont une faillie égale. Pour obvier à cet inconvénient nous proposons de donner à cette corniche cinq minutes de faillie au lieu de quatre , & de la comppfer d'un lifteau d> qui tiendroit lieu de cimaife fupérieure, d'un talon/, qui lui ferviroit d'encorbellement (sQ9 & (r) On appelle encorbellement 3 toute faillie qui porte à faux
au-delà du nud d'un mur, introduit dans Γ Architecture pour foutenir un autre corps plus faillant > Se comme la dmàifc inférieure d'une corniche produit cet effet , on l'appelle en- corbellement ; néanmoins comme elle reilemble par fa forme & par la diftribution de la plupart de fes membres , à-lä cime de la corniche, on lui donne suffi le nom de eïmaiiê inférieure. Ainfi en parlant des deux membres, fupérieur Se inférieur d'une corniche, on dit cimaife fupérieure , pour de'figner celle d'en-haut , & cimaife inférieure, pour exprimer celle d'en-bas. Ces deux membres doivent toujours être fépa- féV par un larmier, Vûyï^ darjsfes notes »fatmkr ^'inma^e^ |
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«fön larmier intermédiaire e, autant de membres
qui doivent au moins caractérifer une corniche^ & dont on trouve un exemple à peu-près fem- blabîe à Tordre Tofcan de la grotte du jardin dit Luxembourg, à l'exception du canal pratique dans" le fofite du larmier qui, dans les dehors , eil toujours néceiTaire pour l'écoulement des eaux, & quelquefois dans les dedans , pour procuref plus d'élégance à ce membre. De la Colonne.
Nous avons dît plus d'une fois que la colonne
affignoit(iz), d'une maniere très^précife, les rnefures "générales & particulières de toute l'ordonnance (£),& que l'ordre dont nous parlons comme Tofcan, devoir avoir fept diamètres ; nous obfer·4· yerons ici qu'on doit donner au fût fupériëur L M > do minutes au lieu de ie> qu'on trouve marquées pat erreur dans Vignole. Auffi avons - nous côté dix minutes exprimées vers M* pour défigner le demi (d) On doit cöniidérer ici ia colonne cdirimé cOnftituàrit
l'ordrej car l'ordre Tofcan donc nous pailonSj.pourroic être également un pilaftre , comme une colonne , deux ouvrages d'Archireélure auxquels le mot, d'ordre eft commun/ il'-■;) , (o) Ordonnance', on entend par ce mot , fih''&rdmJÛ*M-
chiteéture élevé fur fou piédeftal ,"ou fur un foc'é , & cou- ronné de fon entablement. Οά comprend 'auffi fous iémot d'ordonnance, la baluftrade, qui quelquefois fert de coûron* »ement à l'entablement, de même que le vafe , lé trophée ou la ftatue qui furmonte la baluilrade i ainti il faut ie reiTouvenir que l'ordonnance eft l'ouvrage entier ,& que l'ordre, proprement dit , en eft la principale partiej '8f que .ce dernier «'eft jamais compofé que de fa bäfe , de fou fût & de fou chapiteau, foit que cet ordre foit colonne ou pi- iaftrc, ' - · ' Λ diamètre;
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ö*ArchitéctükÊs ■ 27J
diamètre Supérieur de cette colonne* né jugeant
pas convenable de diminuer le fût fupérieur d'un ordre Tofcan, plus que le rut dés autres ordres* Vignóle même paroît de ce dernier fentiment ? jmifque dans fon texte , il établit pour regle gé- nérale que tous Iqs fûts fupérieurs des ordres doivent être à leurs fûts inférieurs, comme cinq eil à fix; c'eit-à-dire 9 que le diamètre d'en haut L M, foit les cinq iixiemes du diamètre d'en bas IK. Nous croy©ns auiîî qu'il ferok bon de donner
de hauteur à l'ailragale Ρ, un quart de minuté de plus; ce membre étant deftiné ici à fervir dé ceinture à l'extrémité Supérieure d'une colonne: ruftiquei À l'égard de la maniere de fufeler {cj les colonnes, nous en allons traiter en parlant des fûts en particulier» De la Bafe de là Colonne,
Mous ne proposons aucun changement à la bafë
G H, la répartition de fes membres, nous paronTanÉ analogue a fexpreiïion de l'ordre % puifquelle n'a que trois moulures, fa voir ; un-plinthe, âun tore & un liileau ; d'ailleurs elle a prefque toujours été imitée par nos Architeéres François, ainii qu'on le remarque au Luxembourg, au Palais-Royal * à l'Orangerie de Verfailles > à i'avam>cour du Ghâ- |
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( c ) On dit fufi.hr une colonne., pour exprimer la diminu-
tion de fon fûc , & faire entendre que fa forme n'eil poinç celle d'un eilindre dans fes deux tiers fupérieurs $ on dit auifi cetce colonne eft bien ou malfufeiée , lorsqu'elle préfente une diminution trop fenfiblc ou trop peuiofeniible. Koye^ dans nos définitions ce que nousdifons des colonnes fu fêlées, chap.II|< Toms L S
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274 Cours
teau de Vincennes, au Château neuf de Saint-
Germain-en-Laie, aux guichets du Louvre, &c. 'Ou fût de la colonne.
Le mérite le plus effende! du fut d'une co-
lonne , confiite dans la maniere de la diminuer. Traitons ici de fa diminution ; ce procédé fera le même pour les fûts de tous les ordres co- lonnes. ïl y a toute apparence que les anciens , em
imitant le tronc des arbres, diminuèrent leurs co- lonnes depuis la baie jufqu'au fommet, ainft que ï exprime la ligne ponctuée 12, 13 (figure IV); qu'enfuite on fit leurs deux côtés paralleles de- puis 12 jufqu'à c , & qu'on en diminua feulement les deux tiers fupérieurs c, 13 ; de maniere que tout le fut de la colonne , depuis la baiejjuiqu'au chapiteau , c'eil-à-dire, depuis 12 jufqu'à 13 , de- vint un corps compofé d'un cilindre ( d }| A , & & d'un cône (e) tronqué B. 11 eft encore vrai- femblable qu'ayant enfuite remarqué que le cône Β , qui diminue toujours ens'élevant vers fa cîme, formoit un jarret vers la rencontre du fommet du cilindre 12. c, ils imaginèrent, pour éviter ce jarret, une courbe , nommée conchbïde ( f ), la- quelle s'uniifant beaucoup mieux avec la tige inférieure de l'ordre, convertit ce cône en co- |
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(d) Corps terminé par deux cercles égaux & paralleles.
( e ) Corps qui a un cercle pour bafe , & qui fe termine en
pointe , en forme de pyramide circulaire. On appelle cône tronqué , celui dont le fommet eft coupé parallèlement à fa bafe (ƒ ) Courbe, du troiiieme genre , inventée par Nïcomêde. On
en trace de difféi entes efpeces , félon le mouvement du fût des colonnes. François Β'iondel a reititué à Γ Architecture ^ |
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ί> ' A R C H ï Τ ECTtî RE. TJ f
noïde (g), & détermina pour toujours la .maniere
de fufeler les colonnes. Voici comme fe trace cette courbure. Maniere, de tracer la conchoïde..
De la ligne c d, toujours ( figure IV ) , tiers
inférieur du fut de îa colonne & du point g, comme centre , tracez la demi-circonférence chd± puis du point i, demi-diamêtre de la partie fupé- rieure de la colonne, abaiiTez une ligne du point 13 au point Κ ; enforte que la premiere corde Kl, ibit égale au demi-diamêtre iB ; divifez l'arc de cercle Κ Β , puis la hauteur g i en huit par- ties égales ; prenez enfuite la longueur de la deuxième corde m, portez-la de η en o j prenez la troifieme corde p, portez-la de q en r; puis la quatrième corde s, de /en #,& ainii'de toutes les cinq , fix , fept & huitièmes cordes reftan- tes , fur les quatre dernières diviiions ab χ h , pour trouver les points {^e, diaprés lefquelles & les précédentes vous tracerez la conchoïde de- mandée. Pour avoir le côté oppofé, prenez la di£* tance no, portez-la de η en & ; répétez les mê- mes procédés jufqu'enÂ, & l'opération fera ter- minée. Il n'eil pas effenciel de divifer l'arc de cercle
Κ Β en huit. Cette quantité eil arbitraire, on peut le parrager en plus ou moins de parties , félon que le diamètre de la colonne aura plus ou aux Mathématiques , non-feulement la connoiilance de la,
conchoïde ; mais encore l'inftrument que Nicoméde avoic in- venté pouj décrite cette courbe d'un feul trait. ( g ) Corps folide pyramidal, formé par la révolution d'une
courbe au tour de fon axe. Sij
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Zj6 C Ö V R S
moins de grofîeur ; pourvu toutefois qu'on ob»
Îerve le même nombre de diviiions, dans la hau- teur g i, que dans Tare Κ Β. Plufieurs modernes ont diminué leurs colonnes
vers la bafe, & n'ont fait leur diamètre de vingt- quatre minutes, que vers cd, n'ayant donné que vingt-deux minutes au diamètre inférieur; mais on doit remarquer que le bas de la colonne étant ré- duit à vingt-deux minutes tandis que le tiers cd en a. vingt-quatre 3 cette différence fembîe produire un porte-à-faux contraire à la iblidité, ainii qu'on le peut remarquer par la ligne ponctuée , ι ƒ -, 14» D'autres Architectes, encore moins ckconfpeérs,
ont laiiTé vingt-quatre minutes au fût inférieur, & en ont porté viQgt-iix vers c d, d'où font nées les colonnes renflées ; de maniere que loin de conferver la diminution qu'elles avoient déjà, elles Ont acquis plus de diamètre , δε perdu par ce moyen leur véritable beauté. Quelques-uns ont fait plus; au-lieu de porter cette augmentation au tiers, ils l'ont portée tantôt à la moitié dé la hauteur du fût, tantôt aux deux cinquièmes : ce qu'il y a de pire, c'eit que ces Architectes ont eu des imitateurs ; de forte qu'infenfiblement l'abus, a prévalu, & que les vrais préceptes fe font ou- bliés peu-à-peu , fans réfléchir que les grands Maîtres avoient originairement.étudié la nature dans fa fource , l'avoient fuîvie , & fouvenc furpaiTée par le fecours de /l'art. Tout ce que l'on peut dire fur cet objet , c'eit que toutes ces tentatives doivent être regardées comme autant d'écarts qui ne fervent qu'à corrompre les formes primitives , à égarer les jeunes Artiiles ? & à rendre incertaines les règles de la bonne Archi- teiture. |
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D 'Arc η ι τ ε e ■ TUR & vjy
Bien loin d'applaudir à de telles innovations,,
nous croyons donc qiiïl eil mieux de s'qïi tenir aux colonnes diminuées feulement dans les deux tiers de leur fut iïipérieur ; qu'il faut tenter ra- rement de les diminuer par te bas , que fur-tout il ne &udroit Jamais les renfler ; ces fortes de colonnes offrant prefque toujours au fpeâateur l'idée d'un point d'appui qui femble être aiFaiiTé' par le poids de l'entablement. Nous obferverons encore que-le fut des colon-
nes , en général, peut être Me ; qu'il peut aufïî être chargé de moulures rentrantes, de membres faiîlants & d'ornements: que les premières s'ap** pellent cannelures, les féconds boüages ,, & les, troiiieme.s rudentures : que les boffages confacrés^ à l'ordre' Tofcan , font continus ou alternatifs% comme le font ceux des ordres Tofcan & Borique du Luxembourg : que û on lesfaitakernatifs^&iàut- les diilribtier eh nombre impair ; que | daHsrîiiïi: & l'autre cas, ils ne doivent avoir qtùihmodele- de hauteur, & que leur faillie ne doit ^aere - ex*- céder le quart ou la iixieme partie de leuf hauteur; qu'au reiîe Inapplication de cette forte" d'éffiement exige de la cireonfpection, .& ne convient "qu'aux: I ordonnances tout-à-fait miliques ; tels que les ou—
vrages- Militaires & Maritimes ; qu'il eft rarement? bien placé dans Γ Architecture civile ; qu'encore?, ä faudrait toujours préférer les boiïages alterna* tifs aux continus, afin de laiiTer juger plus libres ment du rapport du- diamètre de la colonne avec: fa hauteur , ce que les. boifages. continus ne per*- mettent que -difficilement! c.et açcroiiTement à ht colonne; changeant néceiiairement la proportion de l'ordre;..'d'où il' faut conclure qu'if ne dèvroiensi ! être tolérés qu 9' dan $ la/ décoration, des a quêdjies & :; S;x% |
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278 ! Cours
des prifons, des marchés publics, & des autres
ouvrages de ce genre ; que dans ce cas il faut fup- primer le lifteau du tailloir du chapiteau Tofean, pour ne former ce membre que d'une feule plate- bande ( h ), ainii que l'exprime la figure V ; afin d'éviter par cette fuppreffion une certaine quan- tité de moulures dans le couronnement du fut d'une colonne furchargée par des corps faillants, qui, quoique confidérés comme une forte d'enri- chiffement, ne laifTent pas de lui procurer un air de pefanteur , qui ne fouffre point de petites par- ties dans tous les membres qui la foutiennent, la couronnent ou l'accompagnent. Du Chapiteau.
Nous n'eitimons aucun changement néceÎTaire
à faire au „chapiteau de Vignole Ν, ( figure I ), ni à.kjbafe de cet ordre : ce chapiteau été imité dans nos édifices François, par nos plus habiles Archite- ctes. Nous defirerions feulement que l'aftragale qui le foutient, & qui appartient au fût fiipérieur de la colonneV fut un peu plus fort, c'euVà-dire, qu'on lui donnât une partie trois quarts, au-lieu d'une partie & demie , ainfi que l'exprime le membre P. Nous penfons auffi qu'un congé qui uniroit le gorgerin avec le filet du quart de rond Ο, fe- roit un bon effet; autrement cet angle droite, fem- hle donner un air de fécherefTe aux moulures de ce chapiteau, & l'on ne doit en faire ufage, ce fem- ble, que lorfqu'on fupprime le liiieau du tailloir, comme dans la figure V. De l'Entablement.
Nous n'avons rien changé ni à l'architrave R, "' ( h ) Vitruve & Palladio font aufli de czt avis.
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d'Architecture. 279
ni àlafrife S : nous conservons auffi la proportion
qu'a donnée Vignole à la corniche Τ ; mais nous prapofons de changer quelques-unes des moulures qui la compofent,à deiîein de la rendre plus analo- gue à lamfticité de l'ordre Tofcan. Par exemple, le talon a 9 qui a quatre minutes de hauteur , nous paraît couronné peu convenablement par le filet £, oui n'a qu'une demi-minute. Que paraît figmner d'ailleurs le petit reglet c, qui fert de mouchette pendante (i)au larmier d ; puifque pour facili- ter l'écoulement des eaux pluviales, Vignole avoit déjà pris foin de placer un cavet c, aÛez éloigne de la furface de la frife S , & de l'architrave R? Ne peut-on pas remarquer que cqs deux mou- lures , fi voiiines l'une de lautre , non-leuie- ment font monotones , mais encore quelles pro- duifent trop de petites parties dans une cor- niche de l'efpece de celle dont nous parlons. Nous croyons donc que pour les éviter, il con- viendrait de convertir le cavet e, en canal con- tinu comme ƒ ( figure 11 ) ; en forte que, par la fuppreiïion du reglet e, & par la continuation du canal ƒ, on donnerait non-feulement une plus grande élévation au filet b ; mais que par la con- tinuation du canal ƒ, on procurerait plus de imi- pîicité à cette corniche , & que ce moyen plus iimple n'en faciliterait pas moins l'écoulement des eaux, & procurerait à cette corniche une fohdite réelle , quelle n'acquiert pas ordinairement en |
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(ζ) Manchettes: les Ouvriers appellent airifî le membre
qui fe place ordinairement fous le fofrke ou plafond < es larmiers , & qui defcend en concre-bas tant pour enrichir cercaines cot-aicb.es , que pour faciliter l'écoulement des eaux du ciel dans les décoxanoas extérieures. S iv
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£8α € ο υ RS
fuivant la doctrine de Vignole ; car il arrive tués«
fouvent, que la pouiliere, l'humidité & les iels de la pierre qui viennent à fe diiToudre, rempliffent 3e canal trop peu fpacienx, & en rendent fuiags inutile au bout de quelques années ; d*oii il réfulte que l'humidité qui féjourne fur l'angle faiUant du larmier 5 en détruit la vive arête: inconvénient qui feul peut difparoître par la fubititution du canal ƒ, que nous propofons , à l'exemple de -prefque tous nos bâtiments modernes ,, élsvés par les véritables Architectes, La cimaife fupérieure de cette corniche eil
çonipofée d'un quart de rondg, d'une baguette ■b'9■■'& d'un filet i : ce quarr de rond ayant quatre minutes de hauteur, ôe le larmier fix, la baguette & ce filet ne paroifîent-ils pas trop foibles, n'ayant enfemble qu'une minute & demie de hauteur?; Pour éviter ces trop petites moulures dans une corniche Tofcane, diminuons la hauteur du larmier d, d'un quart de. minute ; donnons ce. quart de minute de plus à la baguette & au filet : dès-lors cet aitrar gale ayant une minute δ? trois quarts, deviendra plus élevée , acquerra plus de faillie , & par ce moyen tous les membres de la corniche de*·, viendront mieux affortis au caractère de l'ordre. Quoiqu'il nous ait paru néceffaire de faire
quelques changements à la corniche de l'entabjle*. ment & au piédeftalde l'ordre Tofcan de Vignole·, il eü facile de concevoir que % par le fecours de ces changements , cet ordre mérite la préférence fur ceux de Palladio & de Scammozzi. Pour s'en convaincre, ilfîiffit de coniîdérer dans la planche fuivante, hs ordres Tofcans de cçs deux derniers Auteurs. Cette forte de comparaifôn notis accou-; iumera à réfléchir & à nous, faire, faifir la véâ* |
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ι d'Architecture. zH
table expreffion d'un ordre, & celle de fon ordo-
nance, en nous apprenant à eilimer véritablement les ouvrages réguliers, & les diftinguer d'avec ceux qui n'ont pas à beaucoup près la même perfection ; enfin elle nous mettra à portée d'apprécier les ouvrages d'autrui, de faire un choix judicieux des Auteurs qui ont écrit plus ou moins pertinem- ment fur cette partie de l'Architecture * ou qui nous ont laifle dans leurs productions différents objets que nous devons imiter ou rejeter. Des ordres Toscans de Palladio
et de scammozzi. Ρ L A M C H Ε X■ V I.
De l'ordre Tofcan de. Palladio*
Figure I.
Palladio, quoi qu'en dife Chambrai page 92»
qui, dans fon parallele d'Architecture, le met ait nombre des plus excellents Auteurs, peut néan- moins être regardé dans fon ordre Tofcan, comme inférieur à Vignole. Nous ne parlerons point ici du premier deflin que Palladio a donné de cet ordre ; ce deiïin eft d'un genre ii ruftique 9 qu'il ne pourroit trouver place que dans la déco- ration des Prifons , des Cachots, ou de tout autre- édifice de cette efpece. Au contraire, le fécond deflin que nous donnons ici, nous paroît compofé de trop de membres d'Ârchite&ure, & offre plutôt l'image de l'ordre Dorique que du Tofcan : auiB Palladio dit-il l'avoir compofé d'après les ordres Tome I. ß. Sv-* |
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ï&i Cours
des Arènes dé Ferora , de celles de Po/e 9 & de
plulieurs autres fragments antiques ; en forte que cet ordre ne pourroit être mis en ufage que dans le cas où il préfideroit feul dans la décoration d'un bâtiment. Cet Auteur ne donne point de piéde- ilal à fon ordre ; mais feulement un focle , tantôt d'un module , tantôt de deux. Il donne fept diamètres à la hauteur de fa colonne , & le quart à l'entablement, compofé de trois membres principaux ; fçavoir , d'un architrave , d'une frife & d'une corniche ; mais il s'en faut bien que le rapport de ces trois' membres fok auiïi heu- reufement diirxibué que dans Vignole : certaine- ment l'architrave femble avoir trop de hauteur , & la frife n'en avoir point aiTez : auiïi Palladio l'a-t-il bombée, pour lui donneren apparence plus d'élévation. Sa..corniche eil auiïi comppfée de trop de membres, & (es moulures font trop iinueu- £es pour un ordre ruilique ; d'ailleurs fon chapi- teau & fa bafe font ornés de moulures trop peu aiïbrties à cet ordre, les tores & les baguettes devant être préférés aux doucines droites & ren- verfées; moulures d'autant plus déplacées ici, qu'elles fe trouvent être les mêmes que celles des deux cimaifes de la corniche. Pour nous convaincre de la vérité de ces obfer-
vations, concernant ce profil Tofcan $ voyez le profil de tëtç humaine,, tracé fur le profil de l'entablement de Palladio, planche X , & remar- quez la différence du earaclere qu'elle produit, comparaifon faite avec celle tracée fur le profil de l'entablement de Vignole. |
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yj^à*3>é*v
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d'Architecture. 283
De l'ordre Toftan de Scammo^i.
Figure IL Scammozzi nous paroît encore inférieur àVignole,
dans la diviiion des membres de fon ordre Tofcän. Au - lieu de quatorze modules , il en a donné qua- torze & demi à la hauteur de fa colonne, & le quart au piédeftal & à l'entablement : d'ailleurs on peut remarquer que cet entablement eft ii chargé de moulures, qu'il femble plus propre à couronner un ordre Dorique denticulaire, qu'un ordre ruftiqtie : auiïi a-t-il affecté de mettre dans fa frife , des efpeces de triglyphes ; richeffe indif- crette, qui ôte à cette ordonnance l'expreffion propre à caractérifer l'ordre Tofcan, La cimaife de fon chapiteau eft encore toute Dorique ; en forte que Ton ne connoit ici fordre Tofcan, qu'au tailloir du chapiteau, & aux moulures de la bafe de la colonne , feuls membres conformes à la doctrine de Vitruve. La corniche de fon piédeftal, n'eft pas plus
Tofcane, étant non-feulement compofée dé mem- bres plus délicats que folides % mais encore défa- gréable par fon peu de faillie ; au contraire le focle de fon piédeftal paroît trop fimple , comparé à fa corniche : d'où il réfulte que cette ordonnance ne peut être imitée que dans des Comportions qui , confidérées fous un certain afpeâ, femblent ne pas exiger toute la févérité qu'on doit chercher à mettre dans la compoiition des différents membres qui compofent un ordre Tofcan proprement dit. Voyez auffi , planche XI, le profil de tête humaine, tracé d'après cet |
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%%4 Cours
entablement de Scammozzi; comparez-le avec les
profils des entablements de Vignole & de* Palla- dio, & vous vous appercevrez que tout l'avan- tage eft à Vignole. Pour confrater à cet égard la fupériorité que
nous croyons devoir donner à Vignole, nous aurions auiïi pu rapporter Tordre Tofcan de, Serlio; mais nous nous contenterons de rappeler ici qu'il nous paroît encore plus irregulier que ceux de Palladio & de Scammozzi, puisqu'il ne donne, que douze modules à cet ordre , & un module à tous içs principaux membres ; ceft-à-dire à fa bafe*. à ion chapiteau, à fon architrave , à fa frife & a fa corniche : dîvifion monotone & contraire, aux regies de l'optique, qu'il importe toujours de concilier avec les grandeurs géométrales de fon, édifice, Ofons le dire ici ., tant de variété dans la ma-:
niere de penfer des Auteurs, qui tous ont du puifer les règles de l'art dans la mêmefource, n'ont que- trop fouvent fervi à égarer la plupart de nos jeu- nes Architectes, d'où eft née le plus fouvent cette, inconféquence qu'on remarque dans la plupart;de leurs productions : exemple funefte pour ceux qui viennent après eux, & dont on ne peut arrêter le cours qu'en répétant fouvent ici les vrais pré- ceptes, de l'art, & en leur apprennant à diirin^ ^uer de bonne heure les chefs-d'œuvre des grands, Maîtres d'avec les ouvrages médiocres. Ces obfervatj^ons fur nos Auteurs ne feront peut-
être pas goûtées de tous ceux qui liront ce Traité d'Architecture ; mais notre intention eil fpéciale- ment de parler à nos Elevés , dans la vue de les accoutumer à ne rien négliger dans leurs étu- des , dans'leurs obfervations, enfin dans leurs com«: pofitions. |
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ί> * Α ît c U i f e t f V R Ë. 2§5
ïl ne fuffit pas, par exemple, qu'un Sculpteur £our faire une belle ftatue, ait obfervé les pro- portions du corps humain, il faut encore que toutes les parties foient en relation les unes avec les autres ; fans doute un œuil trop petit, un doigt trop gros feroit un léger défaut, comparaifonfaite avec la beauté de l'enfemble ; mais ce feroient tou- jours des défauts, & il nen feut fouffrir aucun dans les ouvrages de l'art, Ce que nous difons par rapport à la Sculpture, doit s'appliquer ici à rArchite&ure, Tout Architecte doit donc prévoir ' l'effet que produiront à l'œuil les différentes par- ties de fon édifice, avant de mettre la main à l'œuvre, & d'expofer fes ouvrages au grand jour. λ
Au refte,nous n'avons parlé jufqu'ä préfent des
ordres d'Architecture, que d'une maniere générale; nous ne fommes même entrés dans quelque détail que relativement à l'ordre Tofcan, dans l'inten- tion que nous avons eue de commencer par lé iimple avant d'arriver au compofé* Tout ce que nous avons dit de cet ordre & de ceux des Grecs» ne doit donc être confidéré que comme une in- troduction qui nous apprend, en quelque forte, que tous les membres qui concourent à la déco- ration de nos bâtiments, doivent puifer néceffai- rement leur fource dans la beauté, la proportion & l'exprefîion de ces mêmes ordres. Nous revien- drons dans la fuite aux détails particuliers à chacun, en faifant voir ce quiconftitue leur eflence, leur vér ritable caractère, l'emploi judicieux qu'on en doit faire dans l'ordonnance des façades & dans la déco- ration intérieure des appartements ; la maniere de les élever les uns fur les autres * leurs différents entrecölonnements j enfin ce qu'on doit entend^ |
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3.86 Cours
par leurs accouplements. Ce fera alors que nous
nous rendrons compte de l'avantage ou du défa- vantage, qui refaite de leur application dans l'Ar- chitecture. Nous fufpendons donc cette théorie pour expliquer les éléments de l'art ; c'eft-à-dire, ce que nous entendons par les ordres d'Architec- ture , colonnes ou pilaftres , confidérés, foit par rapport à leur matière, par rapport à leur forme, par rapport à leur difpofition dans la décoration, par rapport à leur ufage ; enfin la proportion & l'application qu'on doit faire de tous les mem- bres d'Architecture & des principaux ornements de Sculpture, deilinés à embellir les façades des édifices, ou l'intérieur de nos bâtiments. Nous nous perfuadoris même que cette variété répan- dra plus d'intérêt dans nos leçons , & juilifiera l'opinion où nous fommes, que tous les objets de la décoration amenés dans l'Arçhiteclure, ou par la nécefiité ou pour l'agrément , doivent être déterminés par le caractère particulier de chacun · des cinq ordres que nous connoifibns. Le Chapitre précédent n'a dû nous apprendre
que les diverfes expreflions des ordres en géné- ral, & les proportions particulières du Tofçanj cette connoiiTance préliminaire que nous avons cru indifpenfable & à l'Amateur & à l'Artiile , va nous fournir , dans le Chapitre fuivant, le moyen d'apprendre à connoitre, comment nous devons placer dans nos façades âes ouvertures de portes ou de croifées, des baluilrades, des foubafîements, des attiques,des niches, des fron- tons , &c. membres qui tous doivent fe reflentir des beautés réelles que comportent les ordres Dorique , Ionique & Corinthien des Grecs, & les ordres Tofcan & Compofite des Romains , confi- dérés chacun féparément* |
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d'architecture. 287
r~^~~a-*—-----'—Z^Jt^KZ' .....■■■■■ ______m .h. .11. ■*»--------OT
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CHAPITRE III.
Raisonnement όε l'Art, ou Défi-
nition pms, principaux Membres D'ARCHITECTURE ET DeScULPTURE
propres a l'Embellissement η es
* .
Façades* > ■;>'.
I? ä s divers Membres
d'ArCHITE C.TU RE.
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Planches XVII & XVIIL
OTRE deiTein n'a pas été de préfenter dans
cette planche une ordonnance d'Architecture ré- gulière , mais feulement de faire appercevoir d'un coup d'œiiil, la plupart des membres d'Ârchke&ure & des ornements de Sculpture dont nous allons parler. La multiplicité des parties dont elle eil remplie , ne nous ayant pas permis d'offrir une cpmpoiition, telle que nous l'aurions deiirée; ce fera, n* Ton veut, l'élévation d'un portique {k)7 efpece de frontifpice (/) , percé d'une ou de |
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(k) Un portique, chez les anciens, ctoit quelquefois un
porche, ou porte d'entrée , foutenu pat des colonnes; d'autre- fois c'étoit un avant-corps qui donnoit entrée au Veftibule ; fouvent c'étoit une galerie percée à jour. Homere appelle Portique, des chambres deftinées au logement des Etrangers» adoifées contre la porte d'entrée, Se allez éloignées du prin- cipal corps de logis. On appeloit encore ainfî l'endroit où les Phïlofophes d'A-
thènes fe raflembloient ; ce qui donna occaiîon aux Difciples 4c Zenon,de s'appeler ftoïques, du Grec floa 5 un portique. {/) On dit le Frontifpice d'un Temple, l'orfqu'on ycut pan|
foms L S yiïj * \ '
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MS Cours
piufieiirs ouvertures , fans fermeture ou aves
fermeture de menuiferie, tels que la plupart des veitibules , les périftiles, les porches, &c. Comme dans la compofition de ce portique, on a fait ufage des colonnes & des piîaitres , nous avons cru , avant d'examiner les divers membres d'Ar- chiteittire & les ornements qu'il contient, devoir traiter des diverfes efpeces de colonnes & de pi~ ïaiires, relativement à leurs différentes applica- tions dans la décoration des édifices ; objet d'au- tant plus intéreffant , que ce fera toujours d'a- près la propordon & les différentes expreflions des ordi-es , que nous déterminerons la forme & la richeiie de tous les membres d'Archite&ure , ainii que les ornements dont il fera queition dans ce? Chapitre. ί Planche. XVII.
Des Colonnes & des Pila/ires.
Nous avons déjà dit que les ordres d'Archi-
tectures s'employoient de deux manières , en- colonnes comme QS, ou en pilaftres comme R. Il s'agit maintenant de connoître les trois principales différences qu'il y a entre la colonne & le pila- ftre, quoique tous deux de mêmes proportions, |
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1er du portail d'une Eglife : on fe ferc aufïl du mot Frort"
tifpice , pour déiigner la décoration extérieure de la porte d'un Palais, d'un Edifice public , &c. Par exemple on dit , le Frontijpice du Palais du Luxembourg , du côté de la rue de Tournon : au lieu qu'on dir, la façade du Louvre du côté de Saint-Germain l'Auxerrois > car on entend communément par le mot Frontijpice, un corps particulier d'Archite&ure Λ ifolé du principal corps de logis qui "en annonce rentrée 4 îa deftination & le plus ou le moins d'importance. ' compoféç
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d'Architecture. ±%f
i&orripofés des mêmes membres, & fufceptibles
des mêmes ornements. S La premiere différence eil, que la colonne
eft circulaire , & le pilaftré quarré ; la fécondé j que les colonnes diminuent vers leur forrimetf & que les divers côtés des pilaftres font paralleles éntr'eux dans la hauteur de leur fût , comme fé remarque dans cette planche là différence des colonnes Q S au pilaitre R ; enfin la troifiemë différence eft que les colonnes doivent être ifolées & non engagées ·, ii l'on excepte néanmoins les ordonnances Tofcanes, où la rufticité de Tordre & la folidité réelle, femblent autorifer ces fortes de colonnes^ A l'égard des pilaftres, il convient au contraire de les engager (/ra) des cinq Îixiéme^ de leur diamètre dans les mûrs de face, à moins qu'on ne lés place angulairément à l'extrémité des avant-corps. Cette différence des colonnes aux pilaftres■·,eil déiignée dans la figure -1 $ de'là' planche j|CXpaont nous parlerons enfuite. Plufleurs regardent lés pilaftres comme une
médiocrité en Archite&ure ; ce genre d'ordonnancé repréfentant, difem-iîs > bien plus la contrainte de l'art \ qu'il n'imite les beautés de la nature, & ne produifant jamais , ou que rarement, une dé- coration intéréfTantë. Cela peut être vrai à certains égards ; mais ne peut-on pas auiïï cohiidérer les pilaftres comme un genre qui tient le milieu entré Tart de bâtir, & TArchiteeTiire proprement dite ? Car les pilaftres quarrés par leur plan, engagés" & ayant les côtés paralleles à leur axe j outré |
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(m) Vitruve appelle antes, les pilaftres engagés , 8C nommé
ants, les pilaftres ifolés ou angulaires. Voyez la note 2.2, de Perrault fur Vitruve t pag. 6u Τ orna U " î!
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%Cp> - C OURS V
qu'ils femblent procurer aux murs de face, une
Îblidité réelle , puiiqu'ils font ordinairement par- pain avec eux » ne contribuent-ils pas à la décora- tion des édifices ? Il eft vrai que la colonne nar tiirellemenrplus légere, paroît plus propre que lé pilailre à donner du mouvement à la décora- tion des -façades: mais c'eil précisément par ces différentes manières de varier les productions de l'art, que Ton peut parvenir à fixer dans Γ Archi- tecture un caractère diftin&if que les colonnes communiqueront aux édifices importants , les piîailres aux bâtiments particuliers , & les colon- nes réunies avec les piîailres aux Palais des Rois, &c. D'où il s'enfuivroit que les piîailres & les colonnes pourroient„ s'employer eniemble ou f<jh parément, fans bleiïer les lois de la belle Archi- tedure. L'orangerie de Vénales , Tun des por- tiques de la Cour Royale du Château-de Vin- cennes, n'offrent que des colonnes ; la façade du Louvre 1 du côté de la Rivière, n'a que des pi- laires ; le p.ériilyle du même Palais offre des co- lonnes réunies avec des piîailres : cependant cha- cune de ces diveries décorations , produit un bel eilet ; & l'on peut dire que fi le mélange des co- lonnes & des piîailres rencontre quelques diffi- cultés dans l'exécution, les licences qu'il occafipmie xlans quelques parties de détail % f°nt kieri e^a" çées par. les beautés qu'elles répandent fur les piaffes générales, & ne laiifent pas d'être préfé- rables a cette multitude. d'innovations, qui ont amené les colonnes jumelles ( η ), les, colonnes |
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·.-(«) Comme dans la cour du Vieux 'Louvre Se à la Place
de Louis le Grand. |
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Ν
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d'Arch îtec Türe. 491
ovales (<?), les pilailres doublés (/> ) les "pilailres
diminués (q)9 &c. Au refle, nous ne prétendons pas que cette
lOpinion à l'égard des pilailres ibit regardée com- me une, loi. Nous ne la propofons ici qug comme une de ces obfervations , qui excitent ordinaire- ment les jeunes Artiiies à réfléchir fur les ob- jets fufceptibles ou non d'imitation, à fe rendre compte du pourquoi & du comment ; enfin à mé- diter fur le bon ou mauvais effet qui peut réfulter des doctrines particulières des Architectes qui nous ont précédés. Çonfidérons maintenant les ordres d'Archite(äure , par rapport à leur matière , par rapport à leur conftmction, à leur forme , à lew diîpofmon, & à leurs différents ufages. %)'i$ Colonnes par rapport aux Ordres.
Les colonnes reçoivent diverfes dénominations,
félon les différentes expreifions des ordres. Nous avons déjà obfervé qu'on appelle colonne Tafcane, celle dont la hauteur eil de i'ept diamètres; colonne Dorique., celle qui a huit diamètres en hauteur ; Ionique, celle qui en a neuf; Corinthienne &l Com* poßte, celles qui en ont dix. Des Colonnes par rapport à leur Matière,
On nomme colonnes Diaphanes, celles qui font Il
(ο) Comme aux Portails de la culture Sainte -Catherine»
& de La Merci,. (p ) Comme à Trianon , en face d'un des bras du cmal de.
Y ei failles. (q) Comme aux angles du Portail de l'Eglife des Quatre
Nanons. Tij
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&91 C ö ΐτ ft $
composées d'une matière traniparente, ôorrimé Oh*
vit autrefois celles du Théâtre de Scaurus, dont parle Pline, & telles qu'on en voit, félon Boif* îard, dans fa Topographie de Rome * d'albâtre tranfparent, en TEglife de ^Saint-Marc à Vernie* Les Colonnes aEau font celles qui, par le
fecours de l'hydraulique, offrent la reprélentation d'un corps de criital, comme celles qu'on voit au Château de Commerce Les pyramides & les pila- ilres du boiquet de l'Arc de Triomphe à Ver- failles , font à peu près dans le même genre. On appelle encore colonne hydraulique, une co- lonne du haut de laquelle fort un jet ou bouillon d'eau , à qui le tailloir du chapiteau fert de coupe ou baflin , d'où l'eau retombe par une rigole qui tourne en fpirale autour du fût. Telles font les colonnes qu'on remarque à la cäfcaide de Belvedère { r) à Frefcati, & à celle de la Vigne Matthéi à Rome. On nomme colonnes métalliques , celles qui font
fondues en fer ou en bronze, comme les quatre colonnes de cuivre de Corinthe, qu'on voit à . l'Eglife de Saint Jean-de-Latran à Rome.
On donne le nom de colonnes pricieufes , à celles
qui font conitruites de jafpe oriental, comme les quatre colonnes qui fe remarquent au grand autel de la Chapelle Pauline , à Sainte-Marie-Majenre à Rome , ou généralement à celles qui, toutes faites de lapis, d'avanturine , ou autre matière "rare , comme fägathe, &c. fervent à orner les
tabernacles de nos Temples, & les cabinets de marqueterie qui fe placent dans les appartements- de nos Maifons Royales. |
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(r) Voyez d'AYiler, planche 93,
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D*A R e HITECTURE. Zfö
! tes Colonnes de rocaille font celles , dont le
noyau en pierre ou en moilon , eil revêtu de pé- trifications , de congélations , de coquillages, &c à l'ufage des grottes & des fontaines. Enfin on nomme colonnes de. treillage, celles qui»
construites d'échalas ,,, & dont les bafes & les. chapiteaux étant formés de bois de bouTeau , δε. entretenus par des armatures de fer, fervent à la décoration des portiques, fallons ou cabinets,, diftribués dans certaines parties de nos Jardins de; propreté, comme on en remarque à Chantilly, am labyrinthe de Verfailles,. à Cligny & ailleurs. Des Colonnes, par rapport à hur Confiruciion*,
J^es colonnes incmßiesfont celles qui,conftrm-
tes de pluiieurs tranches de marbre, font fcellées 8ε maitiquées fur un noyau de pierre ou de brique %. Se que l'on difpofe ainfi lorfqu'on ne peut les* faire d'un feu! bloc , à caufe du prix de. leur ma- tière.. . On appelle cotonnes jumelées, celles dont le fût
eft conftruit de trois morceaux de pierre, pofés, en délit, à l'imitation des trois jumelles de bois* qui fortifient le grand mât d'un vaiffeau. Il eft boa de canneler ces colonnes,, pour en effacer les* joints. On, voit des colonnes jumelées, d'ordres Corinthien, dans la cour du château. d'Ecouen^ bâti fur les deflins de Jean B.ullanu Les colonnes de maçonnerie font celles qui font:
faites ,de moilon ou de brique apparente. On voit ,des colonnes de cette dernière efpece au, Châ- teau de Madrid , dans le bois de. Boulogne quel^ quefois on recouvre de #uc, les colonnes de M&?* cQnnerie^ , |
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2$4 Cours
On nomme colonnes par Tambours , celtes dont
le fut eft fait de pluûeurs afliies de pierre, comme celles-du portail de Saint-Sulpice : on les appelle colonnes variées, lorsqu'on remarque alternative- ment un tambour de pierre, & un tambour de marbre, comme aux culonnes Ioniques du Palais des Tuileries. * . On donne encore îe nom de colonnes Fariéès, à
celles dont le fût, le chapiteau & la bafe font de diilërents marbres» comme les colonnes du péri- ityîe de Trianon , ou de différentes matières, comme on en voit au retable d'autel de TEglife du Val-de-Grâce , & ailleurs. On nomme colonnes par Tronçons, celles qui font
faites feulement de deux ou trois morceaux de pierre, comme celles des Ecuries du Château de Maifons. Des Colonnes par rapport à leur Forrhs.
On appelle colonnes Bandées , celles qui font
ornées de boifages * continus & liffes, comme les colonnes Toicanes du Luxembourg, ou alter- natifs & ornés de fculptures , comme celles dès guichets du Louvre. Les colonnes Cannelées font celles qiii * däfts Îâ
haureur de leur fût, font ornées de canaux, fépa- rés par'des liiteaux, & dont les cannelures font fouvent enrichies d'ornenients qu'on nomme ruden* tares ; telles font les colonnes Ioniques des pavil- lons de l'ancien- Palais des Tuileries , du côté du Jardin. Quelquefois on fait ces cannelures torfes, c'eit à-dire , contournées en fpirale autour du fût, tomme on voit celles dés colonnes des retables d'autel des Eglifes des Invalides , & du Val-de- Grâce, imitées fans doute d'après celles qui, félon |
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d'architecture. 295
Talladîo * font exécutés au Temple dé Trévi ,
près de Spolette en Italie. Voyez le plan des différentes cannelures employées dans n©s plus beaux édifices , planche VIII. On donne le nom de colonnes Cylindriques , à
ceHes qui n'ont ni renflement , ni diminution, comme font les piliers Gothiques. On appelle colonnes en Faifc&au, celles iftii font
compoféès de plufieurs petites colonnes \ réunies enfenibîe pour former un pilier ; telles qu'on en voit dans les bas côtés dé TEglife de Notre-Dame à Paris. Les colonnes Fujilées, font celles dont le renfle-
ment éft trop reiÎenti, ainfi que le remarquent celles du portail de rEglife des Dames de Sainte- Marie , près la porte Saint-Antoine* On nomme colonnes Lißes , celles dont le fut
n'a ni cannelures, ni bofTages , ni ornements» comme celles de Saint-Roch, de l'Oratoire , &c. Les colonnes Marines lotit' celles dont le fût eft
revêtu de glaçons , en forme de fouread continu , ou par intervalles, comme les colonnes de la grotte du Jardin du Luxembourg. Les colonnes font appelées Majjives^ lors qu'elles
font trop courtes, & qu'elles ont moins de hauteur que n'en exige l'ordre , comme les colonnes Όσ- riques de l'Hôtel de Rohan. On les nomme Grêles , quand elles font trop fvéltes , & que lèiir hauteur excède celle qui eiî preicrite par l'ordre comme celles du Portique, d'ordre Dorique, de la Cour Royale du Château de Vincennes. Les colonnes Paßorales font celles dont le fût éft
taillé à l'imitation de l'écorce des arbres, & qui repréfenteiit les troues dont les premiéres cabanes étoient conitruites » elles clevroient, ce fembie ? Tiv
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4&9<S Cours
toujours être Tofcanes, étant deftinées pour îes,
portes des Jardins ομ autres décorations charnu pêtres. On nomme colonnes mßiqu$s-9 celles qui font
ornées de bpffages alternatifs pu continus , ainià qu'on a vu lpng-temps celles de la Grotte de Âleudon, eonitruites fur les deffins de Philibert de Lorme. ν :*: /■. Enfin les colonnes torfes font celles qui ont leur/
fût contourné en vis par pluiieurs circonvolutions ;. on les appelle colonnes évidées lorsqu'elles font faites de pluiieurs tiges, entortillées les unes dans les autres. "Voyez ce que nous avons dit des coi lonnes torfes, chapitre I, page 2,08.Voyez aui& la maniere de les torfer, que nous donnerons ψ la fuite des ordres, dans le deuxième volume«». Des Colonnes par rapporta leurs Difpofuions..
Lorfqu'on examine les colonnes , par rapport à
leur difpofition refpeclive dans l'ordonnance des çdirlces , on appelle colonnes folitaires, celles qui difpofées par entre-cplonements , ne préfëntenjç ni approximation, ni accouplement. Telles font les colonnes des nonveaux bâtiments de la plac^ de Louis 2ÇV. On appelle encore colonnes folitaires ^ les colon*·
nes cploifales, qui, dans une place publique, fon£ érigées à la mémoire d'un héros", comme les co-. |onnes Trajane & Antonine à Rome ; ou qui font/ élevées pour fervir d'obfervatoire, comme étoit la colonne de. l'Hôtel de SpiiTons à Paris , appelé aujourd'hui la If aile au hlé. Les colonnes nichées font celles dont une partij
$ffez çonfidérable entre dansv le parement ά'ψκ |
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d'Architecture. %y?
mur de face , creufé pour cet effet circulairement,
comme fe remarquent celles de la Culture- Sainte-Catherine du coté de la rue, & celles qu'on a vues à la porte du Palais-Royal à Paris. On nomme colonnes engagées, celles qui péné-* trent un pilaitre de la moitié ou du tiers de leui? diamètre, comme les colonnes des quatre chapel·* les du dôme des Invalides ; ou qui pénétrent Γέ-* paiifeur d'un mur, comme les colonnes intérieur res du porche de l'Egliie de Saînt-Sulpiçe. On appelle colonnes adojßes, celles qui avoifi-
nent d'aifez près la furface d'un pilaitre ou d'un mur 5 pour que cette furface faife tangente, avec la circonférence de la partie inférieure de leur fût. Telles font les colonnes Doriques du portail de Saint-Gervais. Elles font nommées accouplées, lorfque leurs bafes
& leurs chapiteaux fe joignent, fans fe pénétrer » comme celles du périiiyle du Louvre, Les colonnes grouppèes forit celles , qui moins
près ks unes des autres , que les colonnes accou·* plées, ne peuvent néanmoins indiquer un entre* colonnement, qui, pour être nommé tel, doit être au moins de trois modules. , d'un fût à l'au-* tre. On appelle auffi colonnes grouppèes , celles qui faifant avant-corps » forment un grouppe fur des plans différents , comme on en remarque aux angles de l'avant-corps du périftyle du Lou-? • yre. f$ , N On nomme colonnes majeures, celles qui oecu-»
pent toute la hauteur d'un étage; & colonnes mU mures, celles qui, d'un plus petit diamètre que les précédentes, décorent feulement une porte ou une croifée, comme on le remarque au feconi màxe du portail du Val-dç-Çrâçç, |
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acjS Cours
Les colonnes colojfales, font celles qui embraffent
pluiieurs rangs de croiféés, comme celles de la façade de l'Hôpital des Enfants-Trouvés, du côté du parvis de Notre-Dame. On appelle enfin colonnes régulières, celle qui,
déterminées par la hauteur d'un étage , ne font ni coloiTales, ni naines, & dont la proportion, jointe à l'expreifion folide, moyenne, ou délicate * a indiqué le cara&ere, & les dimeniions de tous les membres répandus dans l'étage qu'elles décorent* Teiles font les colonnes qu'on remarque aux Châ- teaux de Maifons , de Clagni & ailleurs. Nous avons rapporté dans le chapitre Ier, en
parlant de l'origne des ordres, que les Grecs, après avoir vaincu les Cariens & les Perfes , avoient fubititué aux colonnes, la repréientation de ces Peuples devenus Efclaves. Nous ajouterons ici qu'ils s'accoutumèrent inieniiblement à enrichir leurs productions par des fymboles, dont le fut de leurs colonnes fe trouva furchargé. Dès-lors elles perdirent une partie de cette belle diipofi- tiôn , qui, de leurs trois ordres , avoir fait au- tant de chefs-d'œuvre. Leurs fuccefleurs , épris de la beauté de ces .nouvelles Sculptures, les em- ployèrent aufli, mais peut-être avec moins de génie , & fans donner à ces divers fymboles ni la même perfection, ni la même convenance; en- forte que ces attributs ne parurent plus que dé iimples ornements entre les mains de leurs imi- tateurs. Ceux-ci furent même aiîëz inconiidérés , pour, introduire fur des tiges de colonnes d'une proportion légere, des corps ruftiques, connus fous le nom de boßages ; ils allèrent enfuite jufqu'a y pratiquer des cannelures torfes, & enfyi des membres d'un ftyie pefaiït, qu'ils allièrent avec |
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d'Architecîure. 299
des ornements délicats : ce qui acheva d'enlever à
FArchite&Lire ce caractère naïf & cette belle iim- plicité fi propres à fatisfaire les yeux intelli- gents. Tâchons donc de faire de ces fortes de fym-
bolesun ufage prudent. Pour cet effet, examinons- en jufqu'aux moindres détails,& reiTouvenons-nous de ne les appeler dans la décoration des édifices que par néceiîité. En un mot, n'oublions pas qu'il iëroit peut-être mieux d'employer fur le fût des colonnes les feuls ornements qui leur font pro- pres , & de ne revêtir des attributs, ou des fyiö-» boles dont nous parlons , que les focles, les föu- bkifements, ou empâtements. On appelé colonne aßrononuque, celle qui a été
conftruite pour fervir d'obfervatoire, comme le fut celle de THôtel de Soiflbns, déjà citée. On nomme colonne gnomonique^ celle dont lé
fût cylindrique marque les heures par l'ombre d'un fiyle, comme la colonne qu'on voit au Jardin du Roi, à Paris. La colonne chronologique , eft celle qui élevée
dans une place publique, dans une forêt, dans le carrefour d'un grand chemin -> &c. porte quelque infcription hiftorique. La colonne hißorique -, eft celle dont le fût eft
orné de bas reliefs , divifés par bandes horifoii- tales ou fpirales, comme la colonne Trajane, à Rome. La colonne héroïque, eil celle élevée au milieu
d'une place publique , & fur le chapiteau de laquelle on voit, fur un focle, la figure pédeftre du Prince, en l'honneur duquel ce monument eft eonftfuit Ordinairement ces colonnes font dreiTées fur ttti baifement avec un fock& des piédeftaux ftir l#fqiiêi£ |
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|0Q C O F R S
quels on place des figures analogues aux vertus au
Héros.
La colonne mèmorïahy eft celle qui eft élevée
à l'occaiion de quelque événement particulier „ comme ceiie qui fut dreiTée à Londres dans le marché aux ponTons, à 1'occaüon de l'incendie de 1666.,. ou celle qui fut élevée fur le bord du, Rhin dans le Palatinat , en mémoire du paffage de ce fleuve a par Guitave. On appelé colonne funéraire, celle dont le cha-
piteau foutient une urne, & dont le fût eft chargé de flammes ou de larmes, comme on en voit plufieurs dans la chapelle dOrléans aux Céleftinsj, à Paris. On nomme colonne bellïque, celle dont le -fut
Tofcan, ou Dorique, imite la forme d'un canon 9 telles que les colonnes de pierre qu'on voit à la porte de l'Arfénal, du côté du quai des Céleftins r à Paris.. i,a colonne phofphorique s'élève fur un écœuil >
ou à l'extrémité d'un môle , pour fervir de fana! à un port. " ; La colonne r&ßrale^eii celle qui,, ornée de proues
de vaiffeau, eil élevée à l'occaiion d'une victoire navale, ou pour marquer la dignité d'un Amiral, comme les deux colonnes Doriques,, qui font partie de la décoration de la principale entrée du Château de Richelieu.. Enfin, on appelle colonne fymbalique , celle qui ?
par des, allégories particulières, déiîgne le motif de fon érection, ou les principaux attributs de la Nation qui l'a fait élever. Telles, feroiçnt, pas exemple, des colonnes , dont on auröit parfemé le fût de fleurs de lys, & orné le chapiteau d'u& £Qq, fymbole de la France. |
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b^ÀRCH î Τ ICTÜfe È. 3OÎ
Kous n'avons pas prétendu parler de tous les
îymboles appliqués jufqu aujourd'hui aux colon·*· * «es , craignant que la multiplicité de ces orne·** ments ne donnât lieu d'en abufêr. Nous renvoyons fur cet objet aux exemples qu'on trouve dans d'Aviler <, & dont nous donnerons feulement quelques-unes des compositions les plus intérêt fautes dans les volumes fuivants-. Revenons aux différents membres d'Architedture. = Des Arcades^
On donne particulièrement le nom d'arcade, à
toute ouverture terminée dans fa partie fupérieure $ par un demi-cerclé, appelé plein cintre , comme l'ouverture A* Ce genre d'ouverture M place dans les grands entre-colonements des édifices de quelque ' importance : il doit y être préféré aux ouvert tures à plate-bande, marquées Β ; ces dernières nous paroiffant mieux convenir aux croiféés, mal- gré la quantité d'exemples contraires, que nous offrent la plupart de nos bâtiments anciens δέ modernes. En général les portes & les croifées Tofcanes »
doivent avoir moins de hauteur que les Corin- thiennes, contre l'opinion de Virruve & celle de Vignole, fon Commentateur. Pour cet effet, nous penfons que les premières ne doivent avoir en hauteur que deux fois leur largeur, & que les der- nières doivent avoir en hauteur, au plus, deux fois & demie leur largeur; enforte que la hauteur des autres pourröit être déterminée par mie moyenne arithmétique, entre ces deux extrêmes. Quelquefois le iommet des ouvertures déporte,
le détermine par uii cintre furbaiiTé, & celui des |
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loi , Cour s
ouvertures des croifées, par un arc de cercle,a
caufe duquel on les nomme bomhks : mais il faut éviter d'abufer de ces deux dernières formes d'ou- vertures ; encore moins doit-on faire ufage des arcades entiers points, introduites par les Goths, & des ouvertures à pans coupés, telles que fe remarquent celles de l'avant-cour du Château de Richelieu , & qu'on en voit une du delîin de Michel-Ange dans d'Aviler » planche 7 5, page 307» dont la forme a été imitée aifez inclhcretement à l'Hôtel de Condé, à la porte du College de Louis le Grand, & ailleurs. Des Pieds - droits.
Les pieds^droits C,, font les jambages d'une
porte, ou d'une croifée, qui s'élèvent à plomb (j). & terminent la largeur de la baie. Néan- moins Vitruve , chapitre V1, page 116, parle en- core d'une efpece de porte atticurge, dont les pieds-droits font inclinés en dedans ; & il indique des proportions différentes, pour établir leur inçli- naifon, félon la hauteur des ouvertures (t). Malgré une telle autorité,il faut éviter de fuivre ces fortes d'exemples. A peine ce genre d'ouverture feroit- il tolérable dans la décoration des priions publi- |
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( s) Pied-droit, félon Vitruve, pamftaté pilier quarré, qui
diffère du pilaftre , appelé antés , qui n'a qu'une face ; au lieu que te pied-droit en a toujours deux , & Couvent même eft tout a-fait ifplé. Voyez la note 3 de Perrault fur Vitruve., pag. 104. '. '
(t) Selon d'Aviler, on voit de pareilles ouvertures à la
porte du Temple de Vefta , ou de la Sibylle à Tivoli, près de Rome. : |
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d'Architecture 303
cues , dans les magaiins à poudre , & dans les
dépôts Militaires , Terreftres ou Maritimes ; les voûtes d'un cintre , daprès lefquelles les arcades ont été imitées, devant faire oublier ces fortes d ou- vertures , dans tout édifice élevé pour la magni- ficence. , , Les Egyptiens ont pu pratiquer ians cloute des
ouvertures femblables à celles dont parle Vitruve, fondés fur la néceffité de faire leurs plates-bandes d'une feule pièce : n'ayant pas connu iart des voûtes, ils ont pu ignorer celui de conitriure des plates-bandes de pluiieurs claveaux ; mais elles ne feroient pas tolérables chez nous, qui avons fait des progrès fi confidérables, dans l'art de la coupe des pierres. .
Philibert de Lorme («) parle d'une autre eipece
d'ouvertures , qui eft l'inverie de celles dontVitruye fait mention ; c'eft-à-dire , dont les pieds-droits font inclinés en dehors ; il nous les propoie, da- près celles qu'on voit à l'EgUfe de Sainte Sabine, à Rome, qui n'ont que treize palmes \x) quatre minutes vers leur bafe, & quatorze palmes deux minutes trois quarts vers leur iommet. D après cet exemple, Philibert de Lorme conieille d éle- ver ahiii les pieds-droits, lorfque les ouvertures auront beaucoup d'élévation; à caufe, dit-il, de |
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(«) Livre 8, pag. 137.
(x ) Palme , du latin palma, la paume de la rnain.^ Les
Romains avoient deux fortes de palmes : l'une grande , de }a largeur de la main, & qui fe divifoit en douze doigts, valant 9 pouces de pied de Roi ; l'autre petitet du.travers de la main, Se de 4 doigts! ou de 3 pouces de pied de Roi. Voyez la note 3 de Perraulc fur Vitruve , pag. π > & ie Dictionnaire de d A-. viler, page 163, où il eft parlé des différentes meiures da palme. |
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|ô4 G ours
l'optique qui rétrécit les objets les pluâ éloignés
de fcëuil. Mais delà né s'eniuivroit-il pas qu'ori ne pourroit élever aucun corps d'Archite&ure à plomb > loriqu'il feroit fuÎceptiblé d'une très-grande hauteur ? Auffi François Blondel à la porte S; Denis , Perrault à l'arc dé triomphe du Trôné, dé BroiTe aux arcades de f aquédùc d'Arcueil * fe font·^ ils bien gardés de fuivre lé fentiment de Philibert4 de Lorme, qui d'ailleurs convient qu'en général les pieds-droits des ouvertures font un meilleur effet à plomb qu'inclinés, foit hors dé la baie $ foit en dedans» '- Des Aletiesi '
Lés àléttes D {y), coniidérées du côté de leur
Surface extérieure, préféntént un double pied-droit; JLeur profondeur eil ordinairement peu eojiiidé- rable j étant déterminée par la faillie des importes qu'elles contiennent ordinairement. Ce font les alet- tes qui forment les deux montants des niches quar-" jrées, dans îefquelles font contenus les pieds-droits; On les place auiîi horifontalement, lorfqu'on les fait fervir de linteau ou fommier aux niches quarrées* Cependant il faut remarquer que les alettes, qui -, iréunies avec les pieds-droits, font toujours très- bien en Architeiture, ne peuvent trouver place* qu'autant que les entre-colonnements ont une cer- taine largeur. D'un autre côté , la grande ouverture de la
porte empêché fouvent d'introduire les alettes dans la décoration des entre-colonnements, quoi" {y ) Mettes, de l'Italien Aletta t petite aile, ou côté.· \
Cite
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d'Architecture* 305
que ce membre ioit néceiTaire pour appliquer un
claveau fur la porte, & une infcription au-deiïus du linteau delà niche quarrée. Néanmoins Fran- çois Manfard» dans la nef du Val-de-Grâce, Fran- çois Blondel à la porte S. Denis , Claude Perrault à Tare de triomphe du Trône, les ont employés avec le plus grand fuccès , parce que le linteau de cette niche quarrée devenant parallele à l'ar- chitrave , amené nécèiTairement dans l'ordonnance un corps intermédiaire entre le plein cintre de l'arcade & la direction horifontale de l'architrave; ce qui ne fe rencontre pas, lorfque dans la dé- coration d'un portique ou de toute autre compo- fition, on eil obligé de fupprimer cette niche quarrée, & par conféquent fes alettes & fon fom- mier. > On donne auffi le nom d'alettes aux pieds-
droits Κ, qui foutiennent les extrémités des ta- blettes des baluitrades* Des Impofies. ...
L'importe Ε (ι) eft le couronnement du pied-
droit C , & le foutien de l'archivolte F ; en gé- néral , 1'impoite peut être regardé comme un mem- bre qui, ainii que l'architrave, a très-peu de re- lief. On le place à peu-près au tiers fupérieur de la hauteur de la colonne ; de maniere qu'il ne di- vife jamais l'ordre en deux également. On doit obferver d'ailleurs que la partie fupérieure de l'im* pofte, faffe une même ligne, avec le diamètre de |
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(^) Impofle j, ce mot vient de l'italien, tmpofio, iurchargé,
ou du latin impofitus, mis deiTus. En effet le pied-dtoic eft furchargé de l'importe. Tome I. V
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jo6 Cours
l'arc plein cintre de l'arcade, à moins que le pied-
droit qui foutient l'impoile ne foit fort élevé : car il faut alors faire defcendre la partie fupérieure de l'impoile, un peu au-deiîbus du diamètre de l'arc plein cintre ; fans quoi le rayon yifue! maf- queroit une trop grande, partie de la retombée de l'archivolte ; défaut qui rendroit néceffairemenc ce dernier membre défagréable , & le feroit pa- roître plutôt arc de cercle que plein cintre. Quoi- que hs impolies aient été principalement imagi- nés pour cacher Fimperfeclion qui fe rencontrè- rent entre là naiiTance de l'arc, & le fommet du pied-droit ; il faut les coniidérer auiîî comme le foutien delà retombée de l'archivolte.■Conféquem- ment, l'impoile doit être fupprimé dans toutes les ordonnances, où il n'y a pas d'archivoltes; ces deux membres étant, pour ainfi dire , ■ insépara- bles. " " / ' Des Archivoltes,
L'archivolte F (a) eil un membre compofe de
moulures méplattes, qui circulent au tour de la f>artie fupérieure de l'arcade plein cintre. Ses mou-
ures font allez ordinairement les mêmes que celles de l'impoile. Néanmoins on applique quelquefois les unes & les autres aux arcades furbaifiées ( b ). Mais l'archivolte, ainiî que l'impoile f iemble devoir être confacré aux ouvertures plein cintre, les refends & les boiTagçs „ cet enrichiiTement ruilique, étant plus du reiîort des portes furbaif- fées. Cette forme appîatie a eifedlivement quelque |
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( a ) Archivolte, du latin , arcus volutus, arc contournée
i&.) Comme on le remarque à l'Hôtel de Soubife. |
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;■} . ?.. ■ >
d'Arch itecture. 397
ehofe de plus ruilique que la demi-circonférence
du cercle , & femble pour cela devoir être def- tinée aux ouvrages Militaires, ou dans l'Architec- ture civile, aux dépendances des édifices impor- tants. Il faut obferver que f archivolte ait un peu moins
de faillie que l'impose ; enforte que le pied-droit G, en arriere-corps par raport à l'alette D, foit affez renfoncé pour que la faillie de Timpoile E ne défafleurant jamais l'alette, & l'archivolte ayant moins de faillie que l'impoite, il en réfulte autant de membres d'architecl;ure, détachés les uns des autres, comme on l'a pratiqué avec fuccès aux ar-> cades de la nef du Val-de-Grâce, & non dans la cour de l'Hôtel de Touloufe ni au Palais des Tui- leries du côté du Jardin , non plus qu'au portail de S. Gervais, où de même qu'à la façade des Tuileries , les impolies défafleiirent beaucoup la furface des pilailres, tandis qu'à l'Hôtel de Tou- loufe tous ces membres .s'afleurent du moins les, uns les autres. Des Claveaux.
Lé claveau G, eil une pierre en forme de coin,
qui fert de clef & tient en équilibre les vouiîbirs d'une arcade, ou ceux d'une voûte. Il peut être luTe ou orné fur fon parement, de membres d'Archite&ure ou de Sculpture, félon qu'il fait partie d'une ordonnance plus ou moins impor- tante. La largeur de l'intrados, ou bate du claveau, doit être la iixieme partie de celle de l'arcade. Sa largeur au fommet doit être déterminée par le. centre qui a fervi à décrire l'archivolte. Les mem- bres d'Archite&ure"& les ornements qu'orj' intro- V ii /
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3o§ * li £ ο ν R s
duit fur les claveaux , doivent néceffairement ert
retenir la forme. Pour cela nous croyons qu'on ne devroit jamais appliquer aux claveaux, ni mai- ques, ni têtes humaines ; celles-ci étant prefque toujours contraires à la convenance, & les autres a la vrairTemblance. Nous n'avons placé une tête iur le claveau G , que pour en faire connoirre l'abus. Les maiques ou mafcarons, qu'on remarque fur les claveaux des arcades de la cour de l'Hôtel de Carnavalet, font à la vérité des chefs-d'œuvre ; les têtes de femmes placées fur les claveaux des arcades du Château de Sceaux, font admirables fans doute : mais nous n'entendons louer que l'habileté du Sculpteur, $· nous penfons qu'une confole, une agraife, ou un cartel régulier, font les feuls or- nements qu'on doive appliquer aux claveaux. Les façades des Châteaux de Maifons & de Clagni, li fort approuvées des Connoiileurs, ne préfehtent pas d'autres ornements fur les claveaux des croîfées; encore y font-ils employés avec beaucoup de dif- crétion. Des Chambranles.
'-■■■■"■ i
Les chambranles H (c) font des membres com-
pofés de deux montants & d'une traverie iiipé- rieure. Lorfqirils ont quatre côtés , on les appelle cadres {d) ; la largeur des chambranles doit être la fixieme partie de celle des croifées, & leur faillie fur le naà du mur, la fixieme partie de la lar- |
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lc)'Ce membre eft appelé par Vitruve, ante-pagmentam ,
aflernblagçde menuiferie qui s'attache fur la pierre,&c. Voyez la noce premiere de Perrault fur Vitruve, pag, 117, (d). Cadres. Voyez ce que nous difojis des cadres dans ce
Chapitre. ; ' , |
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d'Architecture. 309
geur des chambranles. Il en eil des moulures,
qui ornent les 'chambranles , comme de celles qui ornent les impoiles & les archivoltes ; elles font ordinairement les mêmes que celles des architra- ves. Lorfque dans les „ordonnances iimpies5 on re- tranché les moulures du chambranle, il eit nom- mé bandeau , ou plate-bande , comme O ; mais û* au contraire on croit devoir Tenrichir, pour lui pro- curer plus de mouvement, alors on l'orne d'une croffette q , dont la hauteur efl le quart de celle du chambranle hors-œuvre, & Ton donne de faillie à cette croffette la fixieme partie de la largeur du chambranle, Au reile , il faut éviter de trop réi- térer ces croffettes ; leurs reffauts multipliés/ ne pouvant que nuire à la fimplicité de Γ Architecture. Des Appuis.
On appelle appui (e)le mur peu élevé au bas
d'une croifée , & qui fert d'accoudoir ; fa hauteur eil au moins de deux pieds & demi, & au plus de trois pieds & un quart, félon que le mur a plus ou moins d'épaiffeur , ou que Fappni fe trouve placé dans un bâtiment public ou particulier. On fait les appuis pleins, évidés , ou à jour. On ap- pelle appui plein , celui qui eil tout de pierre de taille ou feulement de maçonnerie, & couronné d'une tablette. Vappui èvidè eft celui où l'on a introduit dans une partie-de fa hauteur, des en- trelas ou des baluilres comme M, efpacés de ma- niere qu'ils présentent autant de pleins que de vides. On entend par appui à jour, celui qui n'eft rempli que par un balcon ,& qui par le peu de |
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( e ) Appui ; ce mot dérive du latin, peaium.
■ V "* Τ * · *·
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310 COU RS
largeur des barreaux de fer qui compofent (es
compartiments, laiffe juger de la hauteur de la croisée , depuis le bas de ίυη ouverture jufques fous ion f.immet. On fait ufage de l'appui plein q lorsqu'on eit obligé de donner peu d'élévation aux croifées, de l'appui évidé lorfqu'on en doit don- ner davantage ; enfin de l'appui à jour, lorfqu'on veut rendre les ouvertures plus élégantes : autant de reiïources qui peuvent procurer aux ouvertures un rapport effenciel avec le caraclere de l'édifice. Des Niches.
Les niches ( ƒ ) devroient être réfervées pour
la décoration des édifices facrés, pour celle des fontaines, des bains publics , &c & n'être que ra- rement employées dans les bâtiments deilinés à l'habitation. Ici leur cavité altere fouvent la fo- lidité des murs de face ; & leur application fait ra- rement un bon effet dans l'ordonnance extérieure. D'ailleurs, il faut convenir que les itatues renfer- mées dans les niches, perdent beaucoup de leur beauté, en dérobant aux yeux dufpectateur la plus grande partie du mérite de èe genre de Sculpture. On fait les niches grandes, petites ou moyen-
nes ; on les fait circulaires, par leur plan & par leur fommet comme I, ou quarrées comme S, fïgure I> planche XX; ( on fait encore à plate - bande} le fommet de ces dernières.) Celles-ci font ré- fervées pour les ouvrages/Tofcans ou Doriques; & les autres, pour les ordonnances où préfident |
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'" '( ƒ ) Niche ; ce mot dérive de l'italien nicekio , conque
marine, parce que le cul de four de la niche elt ordinaire* ment enrichi d'une coquille en bas-relief. |
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d'Architecture. 311
les ordres Ionique, Corinthien & Compofite. On
doit obferver en général de n'en faire ni de fi petites, quelles ne puiffent contenir une ftaîue dont la hauteur ibit à peu près le tiers de celle de l'ordre, ni de û grandes, que le milieu de la tête de la itatue ne' ptihTe atteindre le deifus de l'impoite , ©u diamètre du cul-de-four de la niche; c'eft pour quoi aiïez fouvent on élevé ces ilatues fur un piédouche r. Voyez dans les volumes fuivants les différents deiîins de niches que^ious donnons. Des Statues.
Ce que nous venons de dire des itatues, rela-
tivement aux niches , nous donne lieu de parler du rapport des ilatues avec les ordres d'Archi- tecture. D'abord il eft eifenciel de déterminer ce que nous entendons par fiâmes proprement dites, & ' en quoi elles different des figures également deitinées.à orner les édifices. On appelle fi atue (g), tout ouvrage defcuîpture
repréfentant \e corps humain, tenu debout ou à cheval. Celles de la premiere efpec'e font nom- mées pédefires , comme U , ou comme la ilatue de Louis le Grand à la Place des Victoires : les autres font nommées éqüefires ; telles font les ftatues de Henri IV , de Louis XIII, &c. On appelle figures > celles qui font placées fur
les deux corniches rampantes d'un fronton comme L , & comme celles du portail de Saint-Roch ; ou aiTifes , comme celles qu'on voit aux portes des |
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( g) Statue , du latin, fiatura, la taille du corps, ou de
lare, être debout. Viv
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312 Cours
Hôtels de Touloufe & de Soubife ; ou à genoux ί
comme celle du Cardinal Mazarin aux Quatre- Nations ; ou enfin couchées, comme celle du Car- dinal de Richelieu à la Sorbonne. Les figures fe font en ronde bofTe , en demi*
bofTe ou en bas-relief. Ces différentes figures f û Ton excepte celles qui font en bas-relief, lef- quelles peuvent être d'un plus petit module, doi- vent avoir de hauteur, environ le tiers de l'ordre; autrement elles feroient nommées colofTales ; parce • que, difputant de hauteur avec l'ordre, elles pa- roîtroient gigantefques ( h ). On fait les figures nues ou drapées, folitaires
ou grouppées , & fouvent accompagnées d'attri- buts , de fymboles ou d'allégories, qui contribuent avec le ityle de l'ordonnance qui préfide dans la décoration, à éclairer le fpe&ateur fur Tufage & la déftination de l'édifice. Des Balußrades,
Comme les baluftrades font afTez ordinairement
couronnées de ilatues , & qu'il doit y avoir un rapport immédiar entre celles-ci &les baluflrades, il doit auffi y avoir un rapport déterminé entre ces deux objets, & l'ordre qui préfide dans la décoration. Néanmoins on doit reconnoître deux différentes hauteurs pour les baluitradés. L'une de ces hauteurs eil pour les baluflrades deitinées à fervir d'appui aux croifées, comme M aux terrafTes , ainfi qu'aux |
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(h\ Cxil ce qu'on peut remarquer aux Portails de Sainç-
Gervais & des Feuillans, au Palais du Luxembourg & ailleurs. |
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d'Architecture. 31?
rampes & aux paliers des efcaliers : celle-ci doi-
vent être affujetties à la hauteur du corps humain : l'autre hauteur regarde les baluftrades qui fervent àe couronnement'aux -édifices-; ces dernières peuvent être plus hautes que les précédentes ; mais elles ne doivent jamais excéder la hauteur du coude des ftatues dont elles font couronnées. Ces deux fortes de baluftrades font ordinairement compofées , ainfi que les piédeftaux des ordres , d'une bafe ou d'un focle, d'un dé & d'une corniche ou tablette; c'eft dans la hauteur du de, que font contenus les baluftres ( i ), efpece de petites colonnes , qui ont donné à ces fortes d'appui ou couronnement, le nom de baluftrade. Les balu- ftres doivent le placer à plomb des entre-colon- nements ou des vides des portes & des croifees ; & les dés ou piédeftaux, à plomb des colonnes ou des trumeaux des façades. Dans tous les cas, la hauteur du dé , & par conféquent du baluftre , doit être égale aux diamètre fupérieur ou inférieur de- la colonne ; la tablette doit avoir le quart du ba- luftre ; & le focle , une hauteur indéterminée , félon que les baluftrades feront aifujetties, ou a la hauteur du corps humain, ou à celle des ftatues. Par la même raifon , les membres du baluftre, ainfi que les moulures qui ornent le focle , le de & la tablette, doivent être employés en plus ou moins grande quantité, avoir plus ou moins de relief, & recevoir plus ou moins d'ornements, félon le caraftere ou l'expreffion de l'ordre. Voyez |
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(?) Baluftres, du latin Balaufimm, dérivé du grec Ba-
lauftion, nom de la fleur de grenadier fauvage , à laquelle ïeflemble le baluftre. |
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314 ν ours
les différents genres de baluftres , que nous don-
nerons dans la fuite. Des Avant-corps.
On appelle en général, avant-corps, un corps
d7 Architecture faillant, ou fur le nud du mur de la façade , on fur le mur intérieur d'un bâtiment. On dit auffi d'un pavillon , qu'il forme avant- corps , lorfqifil faille fur le mur de face propre- ment dit, celui-ci devenant alors arrière corps, Comparé avec le pavillon. Les avant-corps font introduits dans l'Archite*
&ure, pour donner du mouvement & pour pro- curer de la richeife à tous les genres de décora- tion. Quelquefois on multiplie pluiieurs de ces corps, les uns devant les autres ; alors les colon- nes T, ( planche XX ) forment le premier avant- corps; le pilaitre V, forme le fécond ; & le nud du mur U , devient Tarriere-corps. La réitération plus ou moins coniidérable de ces
corps , dans la décoration d'un bâtiment, dépend de fon importance & de fon étendue, ainfi que du cara- ctère de Tordre. Dans les ordonnances Tofcane & Dorique, les corps faillants ou rentrants, doivent préfenter des angles droits , pour annoncer une fermeté analogue à la folidité réelle & apparente de ces ordres : au contraire, dans les ordonnances Ionique, Corinthienne & Compoiite, on peut introduire dans les avant - corps, des pans cou- pés, des tours rondes ou des tours creufes. Mais en général il faut ufer modérément de ces der- nières formes , qui femblent ne convenir que dans l'intérieur des bâtiments : les dehors deman- dent un ftyle plus grave ; les petites parties, les |
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d'Architecture. 315
fimiofités , les angles obtus, & fur-tout les angles
aigus , ne devant jamais faire partie de la décora- tion extérieure. Il faut encore que la faillie de ces différents corps , les uns à l'égard des autres , foit relative au caractère de l'ordre. Dans l'Achiteâure folide ils peuvent avoir beaucoup de faillies, afin de produire de larges ombres : on doit au contraire, dans Γ Architecture moyenne ou délicate , leur donner moins de relief, &. ne pas craindre de les multiplier. Mais dans tous les cas , on ne doit placer aucun de ces corps, qu'il ne contribue à indi- quer précifément le caracîere particulier d'un Edi- fice facré, d'un Palais ou d'une Maifon deftinée à l'habitation des Citoyens. Des Frontons.
Les frontons ( k ) fe font triangulaires, ou cir-
culaires ; ces derniers different du fronton trian- gulaire Ν, en ce que les deux corniches obliques de celui-ci, fe réunifient en une feule courbe dans le fronton circulaire , comme on lq voit aux frontons des ordres fupérieurs des Portails des Minimes , de Saint-Gervais & du Valide-Grâce. Les frontons circulaires étant d'une forme plus
pefante que les triangulaires, ne devroient jamais être placés que dans les ordonnances ruftiques ou folides ; & les frontons triangulaires dans les bâti- ments où préiident les ordres moyens & délicats ; encore faudroit-il ufer modérément de ce genre de décoration. Le trop fréquent ufage qu'en ont ( k ) Frontons , du latin frons , le front, parce que les fron-
tons font la partie fupérieure de l'édifice , comme le frone cft la partie fupérieure du corps humain. |
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3i6 C o ύ R $ , .
fait les Architectes du dernier iiecle , devroit nous
déterminer à n'employer les frontons, que lorf- qu'il s'agit de couronner un avant - corps dans le frontifpice d'un Temple, dans celui d'un Portique ifolé, ou de tout autre corps d'Architefture détâché du reite de l'Edifice : conféquemment ils ne devroient être admis que lorfque la néceffité femble autorifer ce genre de couronnement, donc la forme pyramidale peut contribuer à fixer le iîyle de l'ordonnance. Les frontons de l'une & de l'autre ibrme r doivent
avoir de hauteur la cinquième partie de leur baie. .Nous ne parlerons point ici des frontons à pans, ainiî nommés , parce que les deux corniches in- clinées font coupées horifontalement dans leur partie fupérieure ; ni de ceux qu'on appelle brifés, la cor- niche horifontale & le fommet étant interceptés ; ni de ceux dont on intercepte feulement la bafe , pour laiiTer monter une croifée ou un bas-relief, jufques dans le tympan (/) ; ni des frontons enroulés, qu'on nomme ainü, parce que leurs extrémités fupérieures font terminées en volute; ni de ceux qu'on infère, tantôt circulaires, tantôt triangulaires, les uns dans les autres, non plus que de ceux qu'on appelle à reiTaut, à croiTette, percés à jour, &:c. autant d'efpeces de comportions (/») qui annon- |
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(l) Efpace, marqué & , contenu entre les corniches du
Fronton N, & dans lequel On a placé un bas·relief. Ce mot» tympan y dérive du grec tympanon , tambour. (m) Voyez plufieurs exemples de ces formes licencieuiès
dans le recœuil des deifins du Collège de la Sapience que Boromini a fait bâtir à Rome. Voyez auiîî les deilins que nous donnons des frontons dans les volumes fuivants de ce
Cours.
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d'Architecture. 317
cent plutôt la ftérilité du génie de l'Archite&e,
que le talent de l'Attifie. Des Acrotercs.
Un acrotere (n) eft un dé de pierre qui fe
place fur les extrémités fupérieures comme V, & in- férieures des frontons. Les anciens en faifoient un fréquent ufage , pour foutenir lés itatues dont ils ornoient leurs édifices ; à leur exemple, les moder- nes en ont auiîi décoré leurs bâtiments, comme on le remarque à Marli ? à Sceaux & ailleurs. Quelques-uns donnent auiTi le nom d'acrotere
aux petits pieds-droits , placés à l'extrémité des travées des baluftrades, comme le pied-droit KL de la baluiïrade M. Nous obferverons ici qu'il eft peut-être plus effenciel qu'on ne penfe de ne pas employer indifféremment le même terme , pour défigner des membres d'Architecture d'un genre & d'un ufage différents, parce que chacun de ces membres ayant des propriétés particulières, dans l'ordonnance des édifices , il eil néceiTaire de s'exprimer différemment lorfqu'il s'agit de les énoncer , & de faire concevoir aux autres la juile application qu'on en doit faire. Cen'eil qu'en con- fultant l'étymologie des termes de l'art, en re- montant à la fource, & en fe rendant compte de la maniere judicieufe dont les anciens en ont ufé, qu'on peut employer avec choix ces différents membres, & qu'on évite de placer , au hazard , la multitude des détails, dont on furcharge fou- |
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( n) Acrotere , du grec achroterion, extrémité de toutes forte«
de -corps. |
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3iS Cours
vent fes productions. Par exemple, à propos dtt
fronton \ confultons l'étymologie de ce mot. Ne femble-t-il pas qu'on ait, jufqu'aujourd'hui, négligé d'obferver la relation que doit avoir un couron- nement de cette efpece, avec un avant-corps ou toute autre grande partie d'un édifice ? & n'eit-il pas étrange d'en voir à chaque étage d'un bâti- ment , ainfi qu'on le remarque au portail de S. Gervais , déjà cité , & ailleurs, tandis que la partie fupérieure de l'avant-corps devroit feule être ter- minée par un tel amortiiîement, ainfi qu'on vient de le pratiquer plus convenablement dans la cour du vieux Louvre? Des Amorti/Tements.
On appelle amortiffement celui marqué da ou
tout autre corps d'Architecture, qui couronne l'a- vant-corps d'un bâtiment. Les amoruffements tien- nent quelquefois la place des frontons dans l'or- donnance des façades ; mais leurs contours variés & finueux , s'accordent rarement bien avec le caractère grave de l'Architecture qui les foutient. Lorfqu'onfe trouve, forcé de faire ufage de ces fortes de couronnements, il faut du moins que les membres d'Architecture qui les compofent l'emportent de beaucoup fur les ornements. Pour cet effet , il faut que TArchitede en dirige les maffes & en donne les définis, & non le Sculp- teur,, qui très-fouvent peu févere, fait quelque- fois, à la vérité, un ouvrage de Sculpture inté- refiant, confidéré à part, mais qui produit rare- ment un bon effet avec l'Architecture. Au refte, rien de fi difficile à compofer qu'un
bel amortuTement m9 c'eft le fruit du raifonneraent |
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d'Architecture. 319
te du goût de Fart. AuiTi avons-nous peu d'e-
xemples à citer en cette partie. Le Château de Verfailles, du côté de la cour de marbre , le Manege à Chantilly, le Château de Marly , le Palais Bourbon, du côté de l'entrée , font peut-, être les meilleures compofitions en ce genre ; encore s'en faut-il beaucoup qu'ils ne laiifent rien à deiirer aux ConnoifTeurs. Quelques architectes, non contents de faire py-
ramider leurs avant-corps ,. par un fronton, ont encore furmonté telui-ci d'un amortifTemenr. Ce double emploi produit rarement un bon effet ; c'eil préfenter trop d'objets dans une feule déco- ration , c'eil peut-être offrir à la fois trop de membres d'Archite&ure & d'ornements de Sculp- ture, qui fouvent ne fervent qu'à rendre nos fa- çades plus confufes que belles, plus riches que décentes, & plus frivoles que régulières. Des Tables.
Une table (r) eil ordinairement un corps Tail-
lant ou rentrant, iimple ou orné de moulures % lifTe ou enrichie de Sculpture , qui s'étend fur la furface d'un mur. On appelle table /aillante celle qui excède le nud du mur, ou le dé d'un piédeÎlal comme. Ρ ; table rentrante, celle qui eil renfoncée ; table arrafée , celle qui afleure la furface du mur, & qui n'en eft diftinguée que par une ca- vièé pratiquée à l'entour, pour le détacher du corps qu'on a voulu enrichir ; table fimph , celle qui n'a aucune efpece de moulure qui lui ferve |
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( 0 } Du latin Tabula t planche. ,
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3*o Cour s
de cadre ; table ornée, au contraire, celle au pour-
tour de laquelle on a placé des moulures, pour laiTortir à l'ordonnance de la décoration ; table lijje , celle qui n'a fur fa furface aucun ornement de Sculpture ; enfin, table enrichie, celle où l'on a taillé un bas-relief, un trophée, &c. Il ne faut jamais dans les dehors chantourner les angles des tables en pierre, en marbre; ou du moins on ne doit en ufer ainii que très-rarement. A peine ces chantournements fe tolèrent-ils dans la Menuiferie ou dans l'Ebéniiterie , mife en œuvre dans l'intérieur d'un bâtiment. On ne fauroit trop- tôt s'accoutumer à éviter tout ce 'qui s'éloigne de la iimpiicité dans la décoration extérieure. Des Champs:
On appelle ainii la diftance ou le nud liiTe te
uni, qu'on lahTe entre une moulure & une autre moulure , entre un cadre & un autre cadre » enfin entre un corps & un autre corps, foit fail- lant, foit rentrant. Les champs font des repos & des intervalles néceifaires pour féparer les divers membres d'Architeclure , & les faire va- loir les mis par les autres , fans être obligé de recourir à la prodigalité des moulures & des ornements. On peut dire que les champs font en Architecture , ce que font daiis la lecture les di- vers repos qu'on eft obligé de garder, relative- ment aux points & aux autres fignes de la ponc- tuation. Au tour des tables P, régnent des champs /;
ces derniers ne doivent jamais être ni trop larges, ni trop étroits. Cependant rien de fi néglige , rix qui paroiiTe fi arbitraire à la plupart des jeunes Architectes
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Β* ARCHITECTURE, $Z%
architectes que les champs. Ils ont de la peine à fö
perfuader que tou t importe dans la décoration, qii'iu} champ trop étroit y donne un air de menuiferie, & la rend maigrerî§é mefqiûne ; qu'au contraire un champ trop large la rend lourde &maiïive; ils oublient que tout eit relatif, qu'il n'y a ni petiteffe ni grandeur ab- folue dans l'Architecture, qwe ce font les rapports des membres comparés les uns avec les autres qui conftituent les vraies beautés de Tart, & que ces/ rapports doivent fe puiler dans les caractères folidéj moyen ou délicat des ordres Grecs : que cette connexité eft indifpenfable, & que le plus grand nombre n'eft point allez perfuadé qu'on ne fauroit parvenir à une véritable perfe&ion, fans les cônibï- naifçns , la réflexion & l'expérience. Il faut favoir * par exemple, que les champs qui régnent ai<tour des tables placées dans les piédeftaux des baluftradesV doivent avoir la fixieme partie de Ja hautéur-du dé de ce même piédeftal, & partir de ce principe pour établir une largeur convenable aux autres" champ! répandus dans l'ordonnance de là décoration. Dès Pyramides' & des 0,bélifqués.: -
Kous avons déjà dit, en parlant de l'origine'des
ordres1, que les pyramides (/»/ étoient de formé qüaürangulaire par leur plaii, & qu'elles dimi- mioient infénfiblement en s'élevant vers leur fom- imetl Nous avons rapporté- aiifli qu'ellesfaifoient Îq prinzipal objet des monuments des Egyptiens, & ^ue4es Rois d'Egypte les Jaifoient élever pour leur fépujtures. |
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{p^ Gemot -vient; de Pyr> te £eu , parce que la pyramide
& termine en pointe comme la flamme. , , | Tomt I, ,.,..... iû »...X,..-1. ;.....:.
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fit β λ α u{jhto3i2 iirir ■ A?' "-
ê% rtous avons non-feulement corïfèrv'é
è^teförmèpoUï la décoration des tombeaux, des maülólées* des catafalque^ &e. mais nous en avons ijuelqi4e#îS orné les fröntifpices de nos Eglifes à Paris j comme à S. Nicolas du Chardonnet;, aux Fetiillans j aux Petits-Peres j près la place des Vicn toires, St ailleurs. François Blondel les a employées âiim^tttâis en bàs-relief y à la porteS. Denis; & fur cellés*ei fè remarquent des trophées de Sculpture d'une compofition δέ d'une exécution admirable^ Nous ayons auffi parlé dès obélifques (q ) ; nous
fépeteiQnÎ Ici qu'ils étoient élevés chez les Egy- ptiens pour honorer la mémoire & les hauts faits des grands hommes : que Rome eft encore : aujour- dliui embellie de quelques-uns de ces anciens mpnutoents tonftruits en Egypte y daine matière 10s'*précieuieu oV-d'itrië grahdeut étonnante; car Jolis les obéîifqnes antiques fbut de granit ou de Herre THeoaïque , & remplis pour îa plupart de càraà^jr^s hyérogliphiqlies.1 La proportion'de la hauteur llälätgeur des obéliÎques1, félon îesiécher- ches de MèSa^erien>eft d'avoir d'élévation 9 fois pu même jxifqu'à 9 Fois ck demi la largeur de leur iéfe» '^feirs fommefs ic#î ;de la moitié Ά^eutf iîafe. afouîitsfc, no|re^Natipn fa.fi peu élevé 4e -ces'/'fortes-de rnonuments-que leurs véritables pro-1 »ipoètions iont été chez :^ous &&z:ip:ég\igéQS t,^^ nqiiOn inklguere çonâdéré pour en déterminer|e ς «apport ; que ie? m®*ki de leur érje^ton., le point de |
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( q ) Le mot obêlifqtie , vient du grec oMd^i'aiJfc'fcriJciit »
à -cauiè Λα xap.poxr qu'a lûbélUaue. avec „cet inflrunient _,■ dont .les Païens fe fervoient dans les facrifiecs. les Prêtes Egyp- ψ$Εβ dtris1 tó fmt-e > cofhrfie boa« l'avons déja^dit; ,'les nommè- rent doigts jÉï« foleil y -pafced<ju ils ierVJOtEüSi iàç ityk j^uj, *flj£~ ■çjuer hs hettccs fur la tçixc. 9\ ; ,to'£ |
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©■' A R C H Ι Τ Ε C Τ V R I. $1$
idiftance d'où ils doivent être apperçus ; enfin la
qualité des matières qu'on emploie pour leur conitruûion. Voyez l'obélifque marqué b, intro- duit dans cette planche , moins parce qu'il nous y a paru convenable , que pour donner une idée de leur forme, & des ornements modernes donc on peut les revêtir. Planche XVIII.
Des Soubajfements.
On a placé dans cette planche , figure I, le plan
du portique précédent ; d'un côté , les colon- nes font ifolées , & le pilailre d'angle, faillant feu- lement d'une fixieme partie de fa largeur ; de l'autre, les colonnes font engagées de la fixiè- me partie de leur diamètre dans des pilailres ; & le pilailre d'angle V a deux faces, chacune de deux modules ; ce qui lui fait faire un grand avant-corps fur celui U. On a auiîi marqué dans ce plan une portion de niche circulaire I, & une portion de niche quarré S, pour faire voir leur différence. Au reile, il faut fe refTouvenir que la configuration de ce plan, ainfl que fori élévation dans la planche précédente, n'eit qu'une complication de membres rafiemblés fous un même point de vue, fans autre objet déterminé. On appelle foubaifement, un étage à rez de
chauffée , comme g, figure 11, fervant de pié- deilal continu à un bel étage , défigné h, & dans lequel font diflribués les grands appartements. Les foubafTements ne doivent jamais contenir d'ordre d'Architecture ( r) ; certainement leur peu m y ___________________________________________________________________________ .ι
(r) Malgré l'exemple de celui qu'on remarque dans la cou«
4e l'Hôtel de Touloufe, . -r ". Tom'I. *XiJ
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3H Co tr'R s
delévation doit apporter de f altération dans Îef
membres d'Architeciiire qui les compofent : par exemple, les ouvertures doivent avoir une pro- portion plus racourcie que celles des étages régu- liers , les corniches être plus iimples & moins faillantes. Le périffile du Louvre , la façade de Verfailles du côté des Jardins , les Piaces de Vendôme & des Victoires, ont pourfrez de chauffée un ibubaffement dans leurs façades extérieures. La hauteur des foubaffements eil d'avoir à-peu- près les deux tiers de l'étage fupérieur. Nous, traiterons ailleurs de leurs avantages & de leurs désavantages dans l'Archkeclure, & nous donne- rons les différentes mefures de ceux que nous gênons de citer. ; . Il -, Des Attiques.
Nous avons déjà dit qu'un attique étoit un
étage racourci que les Athéniens avoient imaginé, pour recevoir des infcriptions & mai quer les cou- vertures de leurs édifices. C'eil aufii chez nous un étage comme Ί /ayant peu de hauteur , m qui fert à couronner la partie Supérieure d'un bâtiment ? ' d'un avant-corps ou d'un pavillon ; les anciens ne donnoient à cet étage que le quart de la hauteur de l'ordre ou du bel étage , qui lui fervoit de foutien. Nos Architectes modernes ont fixé fa hauteur à-peu-près à la moitié 9 & y ont intro- duit des pilaffres auxquels ils n'on donné que fix diamètres. Cette proportion racourcie, attribuée feulement à ce genre d'étage, a auiîi déterminé des ouvertures & des membres d'Architeâure , qui femblent lui être confacrés , & dont nous traiterons en particulier,. en donnant les mefures £Kaâes.des tàmss du Vieux-Louvre ? des Châ- . :' teaux |
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γ d'Architecture; jz^
téaux de Maifons , de Blois, de Clagny, &c. Nous
dirons feulement ici qu'on appelle attiques conti- nus , ceux qui environnent le pourtour d'un édi-i fice, comme celui qui termine la façade de Ver-- failles, du côté des jardins ; attiques interpofés,-; ceux qui font iitués entre deux grands étages, comme % celui du gros pavillon de- l'intérieur de la cour: du Louvre ; attiques d'accotement, ceux qui flan- quant ün avant-corps, contribuent à faire pyra-/ mider ce dernier, comme aux écuries du Château de Maifons ; attiques d'âmortiflement, ceux qui, réduits à une moindre hauteur que le quart, ter- minent une porte triomphale, comme à la porte- S. Bernard; enfin, on appelleattique d'habitation*; celui qui ayant des ouvertures de croifées, fert dans la demeure des grands, pour les logements des Officiers, & d'étage fubalterne dans les bâti-; ments particuliers. Nous obferverons encore que malgré la mul-,
titude d'exemples que nous avons de ces fortes d'étages employés par les modernes, les attiques des anciens nous paroiffent préférables. Cet étage» tel qu'ils l'employoient, annonçoit un caraclere; particulier qui contribuoit à relever ïéelat de % belle Architecture ; au-lieu que les attiques modernen n'offrent, le plus fouvent, que des étages impar- faits , & peu capables de figurer dans la décora- tion des édifices publics & des Palais des Rois,. & qui pour cela ne devroient être mis en œuvre que dans les bâtiments privés ,., où l'économie· doit l'emporter fur, la magnificence*
. Des Refends & des B&Jfages.^
Les refends dans l'Architecture, font une iouV
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l·
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3&6 C o f R &
tatiori dei joints qui, dans 1'art de tótiï, ie fr#it~
Vont néceffairement entre deux pierres. On fait tifage des refends dans certaines parties d'un mur ctë ïace, pour lui procurer une efpece d'enrichifie*· ment, il y a plufieurs fortes de refends; ici com- $tie ailleurs , on doit obierver une variété, non·* feulement aux diiféren>i ordres d'Arehite&ure , ïnais encore à la richefîe ou à la {implicite qu'on peut aiFeder à chaque ordre confidéré féparément. %ti général on appelle donc refends , les interiHces :ciâe\ figure tll, & confédérés comme autant d'in- çifionS faites dans l'épaiiTeur d'un mur ; car fi ces Refends n'étoient pas renfoncés, ils deviendroient communs à fa furface, les aiîîfes feroient faillantes y & elles formeroient alors'des boffages , Comme l£. Ces boffages , ainii que les réfends, peuvent recevoir diiiérebtes moulures , comme on le re- marque en c , en d, en e , en ƒ, &c. La hau** teur dés refends qÛ communément la douzième partie de celle des aflifes ou boffages , & letif |fto£ondeur eft égale à 4ä moitié de la hauteur <ïés interftiees, felort la variété où féiégancë de l^rdre. ."■·*_■ il faut favoir que les refends & les boiîages
ioritunë tiçheffe Toi cane 8j Dorique vconféqiteöi* mérit qu'ils ne dpi ven ε guère être employés àMÈ fes* ordonnances Ionique , Corinthienne & Com^ Boitte. Étblf il s'enfuit encore qu'il né feroit nul* îfement convenable d'appliquer aux boffages une. Sculpture trop délicate s comme celle qu'on ré* parque aux colonnes TofcaâeS des guichets dti Couvre. Les vermiculures, les congélations , les pétiifîcationsi les piquures, font les feuïs enn- €h$ements que comjporrent les ouvrages rgfti- qucs, encore faut-il les employer avec choix, Sire- |
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'D'A R e ΗΊ Τ Ε. CT ÜBE. f|*É
lätivement au genrede l'édifice» & affeö.er d&nseej
fortes d'ornements, un travail large, vague, mcer-r tain, puifé dans les exemples que nous offreiM en c$ genre les prodnâions^e ,1a nature, Yoyei ce quf nous dirons dans. la. fuite en parlant des orner ments,appelésvermiculures..N'oublionspas-.de. dira ici que la hauteur des boffages , image "des aiïifes dans la conitru&ion, ne doit guçre_excéder la hauteur d'un module, devant rapporter la, dimeniion de chaque membre à celle de. l'ordre, préfenr ou. ahfent, ' . . . . ; —. ·:: w| jEtes Entablements dicompQfi's. -.... ..'Λτ
: On appelle entablement décompofé celui oit
Ton a ÎLibititué un gorgerin &un ailragale à 1% place de la frjfe, & deTarchitrave d\in entablement a:éguîie^. On fait ufage de ces fortes d'entablements, dans l'Arehite&ure, pour évites^ie donnej: trop àp Jjauteur au couronnement de l'étage fupétieur d'une •maifon particuliere , mais jamais dans la décoration d'une façade où un ordre d'Arçhite&iire préûde.-^ parce que cet entablemerit ne pouvant être confia déré que comme un décompofé des, priincipales parties d*un entablement, il feroit mal de çouronnet un corps véritablement régulier par un membre d'Architecture mutilé. Qn doit concevoir aufli | d'a- près cette obfervation, qu'il faut retrancher certains ^membres de/S moulures de la corniche,;; proprement; vdite , pour lui donner une iimplicité relative à. la. nouvelle frife Se au nouvel architrave ..% appelé Ici gorgerin & afegale. * La hauteur de ces fortes de, corniche^ fèc de-
-Tife en fèpt parties^ dont une. eft donnée,à jy^ |
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JaS Cours i
tragale, deux au gorgerin, & quatre à la corniche:
(cette dernière fe fubdtvife enfuite en trois parties, dont la premiere détermine la hauteur de Tencor* bellement ou de la cimaife inférieure ; la féconde, la hauteur du larmier ; & la troisième, celle de la cimaife fupérieure, &c. Des Corniches architmvèes.
On appelle corniche architravée, un entable-
ment dont la frife eil fupprimée , & dans l'ar- chitrave duquel on a retranché la cimaife fupé- rieure ; de maniere que ce dernier touche immé- diatement à la corniche, dont la cimaife inférieure tient lieu de couronnement à l'architrave. Nous bbferverons que cet entablement ainfi décompofé, ne devroit jamais s'appliquer dans les dehors des 'édifices, principalement quand les ordres d'Archi- te&ure y préfident, & qu'on ne devroit guère faire ufagede cette efpece d'entablement, que dans les étages attiques ou dans la décoration des ap- partements; cette mutilation dans l'Archiréclure des dehors lui ôtant fon çaraftere exprelïif, mal- gré l'exemple du Château de Montmorenci, de celui de Saint-Cloud & ailleurs JDês Plinthes. t
Ψ -, ν- . ■■.- ... , _ * * 1 «β -
Les plinthes (s), comme nous l'entendons, font
dés efpeces de corniches méplates, & où les faillies |
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," (s) Plinthes, du. grec Plinthos, briques, table ou maflîf·
qiiadrangulaire ; ce mot, au mafçulin , ne regarde que le Plinthe placé fous les bafes des ordres ,ou qui fouticnt le dé des |
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»^Architecture. 329*
des cîmaifes fupérieures & des larmiers, font'fiip-
primées , comme le fait voir le membre Z, plan- che XIX ; ce membre ainfi réduit à la faillie de la cimaife inférieure, s'emploie ^ordinairement dans la décoration ôes façades , pour déligner, dans les dehors, la divifion Ultérieure ^des planchers, ou pour couronner les pieds-droU des portes des cours, des avant-cours, & les pieds-droits des grilles de nos jardins de plaifance. Quelquefois on donne à la faillie de ces membres d'Architecture, le dou- ble de celle de la cimaife inférieure, à deffein de pratiquer dans le fofite de la plate-bande de la v plinthe, un canal par où les eaux du ciel puiC- fent s'écouler loin de la furface du mur couronné par ce membre. Des Trumeaux.
On appelle trumeaux, la partie qui, dans un
mur de face , fe trouve placée entre les ouver- tures des portes & des croifées d'un bâtiment. Les anciens fefoient les trumeaux de leurs fa-
çades fort confidérables ; ce qui leur dorinoit lieu d'enrichir l'extérieur de leurs édifices avec beau- coup de magnificence ; d'ailleurs le befoin qu'ils avoient de mettre l'intérieur des appartements à l'abri de la chaleur des dehors, félon le climat où ils bâtifîoient, ne contribuoit pas peu à les obliger de faire leurs ouvertures peu confidérables, & |
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vafes, des figures , &c. Nous croyons qu'on doit dire au
féminin une plinthe, pour défigner les membres d'Architecture "qui tiennent Heu de corniche aux différents étages des façades, parce que les plinthes , comme nous les concevons, ne font .autre chofe que des corniches Amplifiés, Se dont principale- ment on a retranché la plus grande partie de leur projedioa» j |
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33© ^ Cours
leurs imervaîes ïpacieux. Chez nous ·> quoiqu«
dans un climat affez tempéré , nous avons beau- coup imité les ufages des Anciens à cet égard,, ainfi qu'on peut le remarquer au Château de Maifons , par François Manfard \ au Château de Vincennes, par Le Veau ; au Palais du Luxem- bourg par Debroffss, &c. Plufiçurs ont imité ces Architeäes dans la pefanteur de leurs, trumeaux,, fans-trop favoir pourquoi : quelques autres depuis* plus jaloux de la beauté intérieure que de l'or- donnance des façades, ont aiFeâé.de faire la lar- geur de leurs croifées , beaucoup plus confidé- rable que les trumeaux qui les féparent ; deux excès fans contredit également à éviter ; Iq pre- mier , occaiionnant beaucoup d'obfcurité daim les dedans, & donnant un caraöere de pefan- teur à la décoration des dehors; le fécond, nuifant fouvent à la folidité, & ne permettant que diffi- cilement une décoration extérieure, véritable-, ment intéreffante. Il y auroit fans doute un moyen 4'éviter Γύη & l'autre inconvénient \ ce ferait dpbfèrver entre les pleins & les vides, un rap- port progreifif qui feroit déterminé par rexprek fion des cinq ordres ; en forte que , par cette relation de la largeur des trumeaux aux croifées , & de celles-ci aux ordres , chaque bâtiment (nous entendons parler ici des bâtiments d'habi-. tation), porteroit un caractère diftinctif de force\ d'élégance, de richeffe bu de fimphcité * puifee dans lexpreffion des ordres, & par conféquent autorifé par les préceptes fondamentaux de l'Art,. Cette réunion du tout aux parties , & des parr ties au tout, η auroit-elle pas été trop, négligée, jufqu'aujourd'hui? ·& cette même négligence ^ne. feroit-elle pas la föurce de l'imperfeaion quo«. |
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B.'ARClIl'tECTXJRE. 3?t
remarique dans la plupart de nos bâtiments, oit très-
fpuvent, fans avoir égard an flyle qu'exige chai* iÉiiê édifice conixdéré féparérne;nt, on remarque dans ces diverfes produéHons, la même empreinte; d'où eil née vraiifemblablement cette monotonie, cette aßeÖation infuportable , au lieu de cette diverhté louable, de ce caraQere diilin&if & de cette Convenance fi néceffaire , pour rendre notre Ar- chitecture françoife véritablement recommandable, Nous avons déjà vu , en parlant des portes % des croifées , que Vignoîe ailignoit la même pro- portion à toutes les ouvertures Tofcane , Dori- que, Ionique , Corinthienne & Compoiite, fans avoir égard aux différentes expreflions des ordres, fious avons combattu cette opinion d'après l'auto- rité des plus habilesÀrchiteaes de nos jours. Kous ajouterons ici» comme une fuite du même principe , que les trumeaux doivent également avoir plus ou moins dé largeur félon le caractère ïoÎide, moyen ou délicat qui préfide dans l'or- donnance de la décoration des bâtiments : pour cet effet nous croyons qu'il feroit bon de donner Siux trumeaux Tofcans , une largeur égale à celle du vide àes ouvertures ; & aux trumeaux Co- rinthiens , feulement les deux tiers de cette même largeur : qu*à regard des trumeaux des autres ordonnances Dorique & Ionique, la largeur en 'jjotirroit être fixée par une moyenne arithméti- que. Au feile, nous ne prétendons pas que ces rapports ne puiffent recevoir quelques change- ments ; mais du moins ils pourroient produire cet effet, qu'ils obîigeroient le jeune Artifte à fe tendre raifon du motif qui l'auroit déterminé à ~s*éeaftef de la regle générale, & lui impoferoient la néceiTité de ne perdre jamais de vue les Lois, |
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331 Cours
établies , ou du moins approuvées par le plus
grand nombre des Architectes modernes. Ό es Encoignures & des Ecoinçons.
On appelle écoinçons dans l'intérieur d'un bâti-
ment , la partie du mur de face , depuis l'embra- fure d'une croifée jufqu'au retour de l'angle d'un mur de refend ; on donne encore ce nom à l'angle rentrant d'un arriere-corps extérieur, qui,. tou- jours plus étroit que le trumeau, occupe Fefpace compris entre le retour d'un avant-corps, & le tableau de la premiere croifée, percée dans Far- riere-çorps. Dans ce dernier cas il faut que la largeur de
l'écoinçon puiffe contenir celle dTun chambranle, plus un intervalle, qui , en détachant ce cham- branle du retour de l'avant - corps , laiffe la liberté d'ajouter à ce même chambranle, une croflette, un contre-chambranle, & quelquefois à fon attir- que, la faillie d'une plinthe , d'une corniche, &c. Une encoignure , au contraire , doit toujours
être plus grande que la largeur d'un trumeau, comme annonçant une plus grande réiiftance, & paroiiTant fortifier les extrémités de l'avant-corps, qui femblent toujours poufler au vide. D'ailleurs il faut fe rappeler, que lorfque les ordres préïî- dent à la décoration d'un édifice , ces angles faillants font communément revêtus de deux co- lonnes ou de deux pilaftres accouplés , tandis que les trumeaux n'en ont qu'un , & que l'idée des ordres & la folidité néceiTaire dans tous les genres d'Architecture, doivent s'annoncer abfolu- ment, foit dans les ordonnances fimples, foit dans les ordonnances compofées. |
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^Architecture. 333
Des Mélanines & autres efpeces d'ouvertures
conjîdèrées comme accejfoires dans la décoration des Edifices. Nous avons parlé précédemment des portes &
des croifées, & de leur proportion; mais comme tout ce qui contribue à la commodité des dedans d'un édifice doit aufli contribuer à rendre plus parfaite fa décoration extérieure , & que les portes & les croifées ne font pas les feules ouvertures qui entrent dans l'ordonnance de la décoration des façades, il nous paroît néceifaire d'examiner ici les ouvertures appelées mézanines , celles qu'on nomme attiques , enfin les lucarne^, les ceuils de bœuf, les barbacanes, les foupiraux* Sic»
Ön appelle mézanine (t ) une ouverture m, plam
che XX, qui n'a de hauteur que les deux tiers de fe largeur; elle fe place ordinairement au-deiïiis d'une croifée, contenue dans lentrecolonnement d'un ordre qui, par fa hauteur, embrafle un étagà & demi/ comme au Château de Saint-Cloud. Une croifée, attîque η , eil: celle qui, n'ayant
pas les proportions régulières dont nous avons parlé au fujet des portes & des,. croifées > pe«c être réduite·: à la, hauteur d'une fois pç demie fe largeur, foit qu'on la place dans une étage appeM attique, qui lui donne fon nom, comme au Châ5 teau de Verfailles ? du coté-des Jardjbns ; iioè <melle fe trouve dans les entrepilaitres d'un ordre coloual ? comme a la façade du Louvre , du cjké; |
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{t) Mélanine, del'icalien Me^nhkU - ·" -.
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Hl ,. ;, "C.O Vife- S i '
de la rivière. Nous croyons qu'en général la partie
fujjerieure des inézanines & des croiiees attaques, doit être à plate-bande , & non bombée , comme à la façade du Louvre , que nous venons de citer. Les lucarnes ο , font des ouvertures pratiquées
pour éclairer les logements placés dans les com- bles; leurs proportions doivent être les mêmes ; que celles des croifées attiques ; mais leurs parties fiipérieures peuvent être à plein cintre, bombées" eu. furbaiffées ; ce genre d'ouverture ne sem* ployant guère que dans les bâtiments particuliers,' ou dans les étages fupérieurs des placés publiques^ comme on eii voit aux Placés de Vendême M des Victoires ? à Paris. -.v.' ^--^ Se S Les ceuils dé beeuf/? , font des ouvertures" citcukiîres à î'ufage des étages en galetas : on ne doit jamais les placer dans les entrecolonne- mènes d'un édifice/ tels qu'on remarque ceux du CMteasu neuf de Meudon ^ du côté des cloîtres» ; On ofefel'Vera que le diamètre de toutes ces différentes ouvertures s doit être ^moindre cfuii fixieme, que -la largeur, «fer crëiféës ÄÄriBuee^i dans le bel ·-étage du bâtiment," 4 <;'\v " '!,;■■;■' Les barbacarinës { u ) font dés oiivêrturès. fori
hautes & fort étroites : Un tei genre d'ouvëiturö É&>4evroit jamais- -entrer pour ;riën dans la déco* iâtiôri des bâïiménts de quelque * importante , malgré lexem'jïêi dësentrecólërinètrients DóricpeS dU'Portail des Minimes, & celui de' Ka^nt-cbVpS àès Ecuries du Gtiâteau de Maifons f eliesinë, j^ü* vent guère €trë àlitorifées que tîaris lés ouvrages5 Militaires, jbour donner de ràiïr à l'intérieur aès* (κ) Barèacannes,4c i'italic» barb'acahnti*. v':
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D'A R C Ή î f | CT URE. 11 j
fortifications , ou dans ΓArchitecture. Civile, pour
ïaire écouler les eaux des murs des terraffes » c'eft pour cela que dans l'un oü l'autre cas on les nomme canotiiercs ou vcntoußs. Les foupitaux ( 'x ) font dès ouvertures deitinées
à éclairer les foutèrrains d'un bâtiment. La nécëP- iité de·ces ouvertures j compriies ordinairement dans la hauteur de la retraite du bâtiment , a déterminé les Architectes à leur donner plus de largeur que de hauteur ; mais comme cette efpece 'd'ouvertures , toujoursvoifines du fol de l'édifice, fe fait alfa peu remarquer, il fuhiî d'obferver , dans leurs proportions & dans leurs formes·, traelque rapport avec l'ordonnance des façades; autrement elles onriroient autant de difformités dans la décoration; " ·- Dès Cadres.
4ît'Lés cadres different des chambranles , en ce
"que ceux-ci n'ont que trois côtés, & que les cadres proprement dits en ont" quatre. La haie d'une croifée^eut être entourée „d'un cadre j celle d'une porte fe peut recevoir qu'un chambranle. Un cadre eft^une «efpece de bordure ornée, dé moulures , dont les membres·* äinii que cënk au chambranle ; "doivent £trë relatifs à l'expreffion de l'ordonnance qui préiide dans la décoration. ÎLFn fes - réliëP;1^'öne' inÎcnptrèml, 'un médaillon , font brdiriairèmëritl entoures Jè'mne botéme y d'un 'cadré , ou ail rhoins d%ne pfete-barîde, & fervent à enrichir 'iës entrè*coIohnements ou les trumeaux (#) Soupiraux t du latin- fpiramentuni; ;'
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33*> G o ü RS
-dtïtne façade, les deffus des portes, des eroifées,"
des niches, &c. On renferme aufîi quelquefois les
cadres dans des niches quarrées » afin de donner
plus de fermeté à l'Arcbite&ure , ce qui divife
les champs & les efpaces où font placés ces ca- j
-dres, & empêche ceux-ci de devenir, ou trop
-confidérables, ou trop maififs; répartition qui,
„en amenant les confonnances dans les productions
de l'Artifte , contribue plus qu'on ne penie à
la perfèaipn de ies œuvres. u ..,.
Nous nous contentons des définitions précé-
dentes, non: que nous croyions avoir épuifé „tput ce qui regarde les membres qui compofent ÎArchiteoure : mais nous aurons occafion tant £de fois de parler de leur multiplicité dans la fuite de ce Cours , que nous avons cru devoir nous contenter des principaux objets que nous venons de traiter , pour paffer aux ornements de Sculpture dont on couronne, on accompagne ou ,Γοη enrichit affez ordinairement, la plus grande ] partie des membres d'Architecture dont nous /venons déparier. , , ;' L·^._!'"' M DE S LA "SCULÎIJ] f ί^
fies différents genres êorhemetits defiinés
■ à embélir l^Archltecïure.,''..·, . '■'■ ".'"{.'
Nous,avons parlé précécfemment, de .îorigine
de; la Sculpture,·il s'agit,ici de, ion application
: dans TArçhiteaure , & de traiter rde l'es princj-
-paies parties, relativement à la décoration des
édifices. Commençons par parler de s ftatues ; eh-
fuite noirs panerons aux ornements proprement
ditS. ' . .-...;■ ,r.r.r«x:.-.· ?■ RiM ;1 piAvièd I' v..)
En
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ï> * A R C Η Ι Τ 1 C 'Τ V ft U
Én général la Sculpture ne doit être appelée
tkns TArchiteclure, que pour embellir les iaçades extérieures des bâtiments de quelque importance » & procurer de la magnificence à l'intérieur de de leurs appartements* On entend par Sculpture ? ou l'art de mettre en œuvre des itatues qui ont- pour objet la repréfentation humaine , ou celui de faire des ornements à l'imitation des différentes productions de la nature ; l'un & l'autre peuvent également s'exécuter , en marbre, en bronzé, en. en bois , en pierre, en plâtre, &c» L'Artifte qui s'adonne au premier genre , s'appelle Statuaire ; celui qui fe charge du fécond , s'appelle commu- ïiément Omememijh* La Sculpture le fait ordinairement en ronde*
hoffe ou en bas-relief: on donne plus ou moins de faillie à ces derniers *, félon leur deitination I quelquefois même on détache quelques - unes de leurs parties, félon qu'il doit en être appliqué à la décoration d'une Architecture , dont le relief émane du mouvement donné à la diftribution ex* térieure des façades* L'application de la Sculpture dans là décoration
d'un édifice , demande beaucoup de go lit & de jugement de la part de l'Arçhiteoe : d'abord il doit fçavoir éviter la prodigalité des ornements; il faut qiie leur place loit ailignée par l'Architer £hire, que leur expreiîion foit puiiée dans celle des ordres, & que les attributs quiiacara&érifenr* foient conformes à l'efprit de contenance qui S donné lieu à l'édifice. On doit prendie garde en- core d'employer des ornements arbitraires ou in- différents ; fe reiïbuvenir qu'il eiî: des formes reçues dont il ne faut guère s'écarter; que tout ornement doit être fymbolique ; qu'autrement la richefie Tome lé Y |
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33$ ; Co ïj ms :r"
qu'il procure à la décoration, eft-indiscrete'; &
que ÎGiivent cette indifcrétion ne tend qu'à acca- bler l'Archite&ure, à la rendre confufe , à lui ôter ies ,nuds , & à la dépouiller de l'avantage qu'elle a prefque· toujours de fe fufEre à elle-même» lorsqu'elle eil belle & régulière. A ces coniidéra- rions il en eil encore une non moins effencielle» qui confiile à lui aiEgner une proportion relative à la grandeur du bâtiment, à la diitance d'où il doit être apperçu, & à la qualité âes matières qu'on eil foiivent forcé d'y employer. Combien d'Artiiles fe font trompés au fujet de la relation <lont nous panons? Combien de chefs-d'œuvre dans nos bâtiments , qui ceffent d'être tels aux yeux -des GoniioirTeurs, parce que leurs produ- irions ne préfentent que des beautés ifolées. La voûte de la nef du Val - de - Grâce ; l'attique de l'intérieur du Louvre ; la fontaine de Grenelle ; peur- être même celle des Saints - Innocents, font des preuves de ce que nous avançons ; fans parler ici du portail de Saint-Gervais, de celui des Feuil- lants , du Palais du Luxembourg , dont da pro- portion gigantefque, & la médiocrité de la Scul- pture,, fait plus de tort àf Architecture, qu'elle ne l'embellit : fenfation qu'on doit éprouver lors qu'on compare la Sculpture qui les décore , avec celles des portes S. Denis, du péryilile du Louvre, parce que le Sculpteur & TArchite&e femblent n'a- voir été qu'un feul & même Arriile dans chacun de ces édifices. Nous l'avons déjà dit, nous le répétons; la Sculpture en général, les Ordres en particulier.,, ne font autorifés dans l'Architecfure , que pour FembelliiTement des édifices iacrés, que pour dillinguer les Palais des Rois , d'avec les Maifons particulières. N'employons donc les or^ |
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ρ '* à R c Hiî ί e: τ υ R 'È. 3|.|
tirés &' la Sculpture, que pour annoncer l'opu-
lence des Cités , la magnificence des Grands ; δε étudions-nous à ne les amener fur la lcene, qu'avec choix, qu'avec difcernement, qu'avec goût : fur* tout que la Sculpture plaife par un faire exquis j par une entente admirable , & par une difpoiition que la convenance & la bienieanee ne puiiTent jamais défavouer. Nous avons parlé -, dans les articles précédents £
de la proportion que la itatue devoit aVoir avec l'Architecture. Nous ajouterons ici, qu'il eft peu d'édifices où les ilatues puirTent être placées conve- biement dans la décoration extérieure ; que celles mifes fur les baruitrades fupérieures des bâti* Inents, à l'exemple de la plus grande partie des productions de la Grèce > offrent fans doute une grande rieheffe > mais qu'elles femblent contraires a la vraiffemblance ; que celles placées für un. Ordre d'Archite&ure, & au-devant d'un àttique » ne réuiîifTent guère mieux : l'élévation de l'Ordre & le peu de largeur des corniches de leut enta- blement paroiffant peu faits pour recevoir des fta- tues qui offrent toujours à l'œiiil quelques rap- ports avec le mouvement des .figures humaines s que celles qu'on place dans les niches perdent la plus grande partie de leurs beautés» & dit travail de l'Artifte : que les figures couchées > placées fur les corniches inclinées dès frontons » annoncent encore un défaut de vraiffemblance , qui devroit les faire rejeter de toute prdonnance grave & régulière ; enfin que celles affifes ( peut être les plus tolérables de toutes) ont auiîi le défaut d'interrompre la direction horizontale de l'ordonnance de 'ΓArchitecture \ à moins que le deiïüs du ibcle ou-de la tablette des bäkiftradesa Yij
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340 Cour s
ne leur ferve de fol, comme à l'Hôtel de Soubife
, du côté de la rue, & non le deifus de la cor- niche , comme an même Hôtel du côté de la Cour ? & à l'Hôtel de Touloufe en face de la Place des yidoires. Ces différentes obfervatîons qui nous parohTent
fondées, nous perfuadent, en quelque forte, que les fhtnes & les figures ne peuvent devenir véri- tablement intéreffantes dans la décoration'de nos édifices, que lorfqu'on peut les placer fur des prédeftaux , fur le fol des perrons , comme à Verfalles au pied de l'avant - corps, en face des parterres d'eau ; ou fur des terraifes , dans les Jardins de propreté, les Parcs, &c. Et nous penfons qu'en toute autre occafion il feroit bon de leur préférer des vafes , des candélabres, des cafîblettes ou des trophées , différents genres d'ornements fufceptibles, comme les figures, d'exprimer par différents attributs, la deiHnation d'un édifice, fans avoir à beaucoup près les inconvénients des itatues dont nous venons de parler. Des Vafes.
Le mot Vafe , s'entend de tout ouvrage de Scul-
pture allié avec des membres d'Architecture, & dont la beauté coniiitedans le choix du Galbe {y)'9 dans celui des ornements , & dans l'art d'oppofer les formes variées qui conftituent leurs genres & leurs efpeces. Il fé fait de plufieurs fortes de vafes ; les uns qu'on nomme candélabres, comme s, planche XIX, défîmes aux édifices facrés ; ce font les plus élevés, on leur donne ordinairement |
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(y) Galbe» dériva de l'italien Garbo , contour, : ;
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d'Architecture. 34Î
les fm£ï de la hauteur des Ûatues. A îégard des
Vafes proprement dits, comme/, on ne leur donne de hauteur, que les deux-tiers des figures; ceux-ci fervent pour la décoration des bâtiments civils. François Manfard en a fait un très-fréquent ufage dans fes bâtiments : peut-être les formes qu'il leur a données fe reffemblent - elles un peu trop. Il eft effenciel de leur donner , non-feule- ment une richeffe ou une iimplieité relative aux différentes exprefîions des Ordres , mais encore des contours variés , qui s'affortiuent aux divers orne- ments qui préfident dans les bâtiments. Les candé- labres & les vafes dont nous parlons, le terminent par des flammes , des fleurs & des fruits , félon le genre de l'édifice. Les ornements qui ennehiffent leurs tiges, font ordinairement des godrons, des feuilles de refend, des feuilles d'eau, des guir*« landes, des fleurons, des canaux , des rofeaux, des rinceaux , des maicaroiis , &c. Lorsqu'aux vafes on ajoute des anfes, qu'on en furmonte la pance par un piédouche un peu élevé, & qu'on en refferre le col, alors on les appelle buires on bur&ms ; niais il faut obferver que ce dernier genre n'èft guère propre que pour l'intérieur des^ appartements. Dans les dehors, il faut éviter tout ce qui porte l'empreinte de la fragilité , tout g© qui ne préfente que de petites parties ; enfin tous les petits détails qui ne peuvent être apperçus que de près, & qu'une matière,commune ne pourroit rendre que très-imparfaitement. Lorfque là proportion & la forme des vafes. δε-
des candélabres ne peuvent f e concilier avec le genre de l'ordonnance , on réduit la hauteur de leur tige , à la moitié de celle des fiâmes; & alors; ces mouveaux ornements s'appellent caffolettes % |
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y#fc Co ν κ s
èfpece de vafes qui préfentent plus de largeur
que de hauteur <> h auxquels on introduit aufli des anfes, des flammes^ des fleurs ou des vapeurs, félon que l'exige le; çara&ere de la décoration. Toutes ces difiérentes fortes de Sculptures, s'ap* pliquent également aux ordres Tofcan, Dorique,, Ionique , Corinthien & Çompofite, en obfervant feulement d'y fouftraire ou. d'y ajouter une plus ou moins grande quantité de membres & d'orne-^ ments 9 félon que fexige chacun des Ordres, ou feulement leur ordonnance. Il eu encore des vaiés ^d'un volume beaucoup·
plus grand , & dont la proportion peut égaler celle des. ilatues % comme u :. ces vafes font deifo· nés à être placés au pied des façades des bâti-, ments » fur les perrons, les terrafies 3 &c. Ils fe font de marbre blanc , de bronze ou de métal doré. La véritable beauté de ces derniers vafes ,. comme des précédents,. confifte dans leur galbe >, dans le choix de leur contour, dans la diftribu-- tjion de leurs ornements , & dans 1 art de les pro-- 61er avec gout : Verfailles , Marli v Trianon, offrent une très-grande quantité de chefs-d'oeuvre - en ce genre % nous en donnerons quelques exem- ples dans la fuite, des volumes" de çç Cours 9m Irritant des jardins de propretés jj jPzs Trop Hes, : ψ
kes trophées fervent beaucoup, â rembellnTè^-
ψβηι de la décoration des bâtiments ; il s'en fait 4'ifolés , comme y >. ck en bas-relief, comme\\ cette, partie delà Sculptaire exige, une très-grande ÇQnnoiffance de rhiftoire ancienne & moderne 5; ||cçéç.& proghane,; &. une; grande habitude du. |
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d'Arc mite cru r e. 343
tleimi; elle exige le goût de Fart & cet efptitdè
convenance , Tarne de toutes les productions d'un Artiile; elle exige le raifonnement & l'applica- tion des préceptes qui enfeignent à donner à ces fortes d'ornements un cara£tere folide ou délicat, félon l'application de la Sculpture à l'Archite- cture; elle exige cette idéé de vraiiFemblance qui apprend à ne pas confondre les allégories & les fymboles d'un genre contraire, dans une ordon- nance d'Archite&ure , déterminée par Tefprit de convenance; elle veut que le peu de relief ou la faillie, la forme & la grandeur, foient aiforties à l'expreiïion de i'Architeclure , & que chaque attri- but qui le compofe, foit en relation avec la pro- portion des ftatues répandues dans les. façades * fur-tout lorfqu'il s'agit des trophées ifolées, comme y ; ceux en bas-relief ι, peuvent avoir un moins grand module, étant prefque toujours enfermés dans des tables qui autorifent là diminution de: leur volume. En général les trophées peuvent être d'un ca-*
ra&ere ruftique, folide % moyen , délicat ou com- pofe , cet ornement étant du refTort de toutes les. efpeces d'ordonnances. Il s'agit feulement de leur aiîigrter un relief, une touche , un faire analogue; à la décoration , que ces trophées doivent orner; fans cela on ne peut attendre de correfpondance entre la Sculpture & l'Ârchiteclure : combien ne voit-on pas de très-belle Sculpture, qui ceiTe de l'être y parce qu'elle pèche par ίràiTortiment qu'elle doit avoir avec le ftylç' de rArchiteilure* Cependant % qu'on y réfléchiffe 3 il ne faut que le raifonnement de l'Art, pour y parvenir; il ne faut être ni Deiïinateur, ni Sculpteur·* ni Arehiteâe % il fuffit. d'être connoiffëur, homme de goût {oMes^ |
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$44 Cour s :
vateur éclairé. Par exemple, les trophées en bas^
reliefde l'intérieur du falîon du Château d'Iify* ceux de la gaîlerie de Versailles & des fallons qui Ja précédent, ceux du bofquet des Dômes font regardés comme des chefs-d'œuvre par les hom- mes de mérite, parce qu'ils font exactement bien affortis au cara&ere de la décoration qui les re- çoit ; au contraire , ceux du foubaifement de l'in- térieur de la Chapelle de Verfailles, eeux de la croifée de l'Eghie de Saint-Roch, ceux de Fefcalier de l'hôtel de Touloufe, font moins eflimés , parce qu'ils font chargés de détails contraires à Tex- preülon de l'ordonnance de ces trois différentes eipeces de décorations. A l'égard des trophées ifqlés, ceux élevés fur l'attique de la grande façade de Verfailles du côté des Jardins, ceux qu'on vient d'appliquer nouvellement à la porte de l'hôtel de Bellifie, & à celle de l'hôtel de Richelieu ft paroiiTent trop forts , trop mafhfs & trop chargés d'inflruments & d'armoiries.; au contraire, ceux qui fe remarquent aux portes des hôtels d^e Sou- bife » de Clermont, dEitrées, font d'une jufte proportion,. d'une touche intéreiTante , & d'une correfpqndance dite&e avec les membres d'Ar- chite&ure- qui les reçoivent, qui les foutiennent & qui les accompagnent : comparaifons impartia- les de notre part, qui peuvent régler le génie de nos Elevés, aïïurer le goût de l'Amite, & lui faire· juger fçs produdÎQns avec intégrité. Quelquefois cette partie de la Sculpture, s*allîe
avec des figures aulfes, à genoux, affaiiTées & humiliées : Perrault en avoit employé à Tare de- triomphe du Trône ; il s'en voit à la place des Victoires; il s'en remarque aiifïi au Château de Jrjanon■> groupées, avec des génies : on eilpeui |
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d'Architecture. 345
taire encore entre-mêlées de vaies , dé guirlandes & de fleurs : tout cela fe peut fans doute ; cepen- dant il faut craindre que trop de parties réunies enfemble , n'apportent de la confufion : trop d'or- nements , produisent rarement un chef d'oeuvre ; trop d'ornements enfin , loin d'embellir l'Archi- te&ure, l'accablent, la décompofent & la défi- gurent au point d'en détruire les rnafies, qui feu- les peuvent corilituer fa véritable beauté. Des Cariatides,
Nous avons déjà parlé des cariatides dans l'origine
des Ordres, Sr nous avons défapprouvé l'ufage qu en ont fait la plupart de nos Architectes fran- çois : en effet cette efpece de production, fembla- ble à la plupart de celles que la Sculpture a intro- duites dans nos bâtiments fans néceiîitéf, n'a de mérite que l'imitation des ouvrages des Grecs , qui, mieux fondés que nous, avoient droit d'em- ployer les cariatides dans la décoration de leurs édifices, en faveur Aqs victoires qu'ils avoient remportées fur les Cariens ■■& les Perfes; encore faut-il convenir que cette nouvelle introduction, dans leur Archite&ure , eft peut - être ce qui leur a fait le moins d'honneur chez les Nations civi- lifées ; CQtte marque honteufe , attribuée à l'hu- manité , étant fort au-deffous de la gloire immor- telle que ces Peuples avoient d'ailleurs acquife. Si ce que nous avançons n'en: pas fans fondement, de quel œuil devons nous regarder aujourd'hui, l'application des cariatides dans nos édifices , suffi-bien que ces compofitions idéales que nous repréfentent les termes, les figures en gaines}& |
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346 Cours
tant d'autres productions fabuleufes, à peine toîé-
rables dans la décoration de nos Spe&acles ; mais qui ne devraient jamais faire partie de la décoration des monuments deilinés à l'embellifTement de nos Capitales, à la réiidence des grands, à la demeure des particuliers. Ne devrait-on pas , dans nos décorations, préférer de peindre le caractère na- tional , au-Heu d'imiter fervilement les productions des Peuples qui nous ont précédés, & tout ce que la Mithoîogie a imaginé de plus ingénieux à cet égard. Qu'eit-ceen effet que des figures de femmes fans bras , telles qu'il s'en remarque à la falle des. Antiques au. Louvre? Ces figures font néanmoins confédérées comme des chefs - <Tœuvre , parce queffeclivement elles font d'une grande. - beauté * & du cifeau de Jean Gougeon. Mais dans la réa- lité, ce n'eil autre chofe que de la belle Scul- pture mal appliquée ; ce ne font que $e belles itatues mutilées ; ce n'eft enfin que la repré- fentation de la figure humaine , deftmée, fans trop de vrairlemblance, à porter le poids d'une Tribune , qui eût fans doute été mieux fou- tenue par les tiges âes colonnes, dont on apper* çoit le chapiteau & la bafe. Ce double emploi n'échappe pas au difcernement des ConnohTeurs ; & ils jugent que Tufage de ces figures efl con- traire à la vraiffemblance. Nous croyons, donc ψις, l'habile Sculpteur n'aurait pas dû fe permettre cette licence ; parce qu'autant qu'il efl: poiîibîeV il faut rendre intelligibles fes productions , leur qrer toute efpece d'équivoque, & fe priver plutôt dune certaine variété dans fes compositions y que de s'expofér à faire paffer à la poftérité des exemples, qui, quoiqu'admirables par leur -esté* |
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d'Architecture. 347
Cüüon , ne peuvent d'ailleurs être imités par nos
fucceiTeurs, fans'bleiier la convenance & le rai- fonnement de l'Art. :. Qu'eft-ce encore que ces grandes figures coloûa-
les, qui fe voient au gros pavillon de l'intérieur- de la cour du même Palais ? elles font les chefs- d'oeuvre de Desjardin » fans doute : mais l'ordon- nonce de Γ Architecture, n'a-t-elle rien perdu à cette application? La^grandeur de Tune , n'eûVelle pas, détruite par celle de l'autre? Leurs pénétrations, provenant de celle des colonnes de deffous , ne t préfentent-elles pas des exemples dangereux à imi-
ter , & plutôt le défordre de l'imagination de l'Ar- tifte, qu'une production fage, mefurée, réfléchie, capable d'annoncer à la poftérité ce que peut pro- duire cet Art divin, quand f Archite&e fait n'ap- peler à lui le miniftere de la Sculpture , que pour * l'a plus grande perfection de fon Art. Qu'eft - ce enfin que veulent dire les cariatides
du frontifpice du Bureau des Marchands Drapiers à Paris, plus fortes de beaucoup que l'ordre Ioni- que » qui cependant leur a aifigné leur hauteur; mais qui, à l'exemple de celles de la Salle des Antiques du Louvre, font montées fur les bâfes de Tordre, & dont les têtes foutiennent le cha- piteau du même ordre? Elles ne préfententtout au plus qu'un ordonnance pittorefque , qui ne convient ni à la décoration des dehors, ni à ΓΑγ>- chite&ure proprement dite , & qui ne devroit. même être autorifée dans la Peinture , que lork qu'il .s'agit d'y représenter quelques traits hifto- riques concernant les Peuples qui ont donné occà- iibn à ces fortes d'ornements. Je crois l'avoir dit ailleurs % fouvent la féducHon de l'art prévaut |
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34$ Cours
fur la vraisemblance : on a vu des chefs-d'œuvre
d'un certain genre , on veut les imiter, & l'on ne ibnge pas que non-feulement ces objets d'imita- tion ne conviennent point au genre de l'édifice, mais que fouvent les Artiites chargés de ces com- pofitions déplacées, font des Artiites fubalternes , &: que le preitige de l'art n'ayant plus lieu, toute l'ordonnance ne préfente plus qu'une compoiition , même au-deffous de la médiocrité. Nous croyons donc, que ii l'on vouloit faire ufage des cariati- des dans l'Archite&ure, ce ne devroit être , dans les ouvrages Militaires , que pour les portes des Priions Royales, ou dans l'Architeûure Civile,/ pour les Maiibns de Force, où il convient peut- être, comme nous l'avons déjà remarqué , d'ex- pofer dès les dehors , & aux yeux du Peuple , la punition des coupables, détenus dans ces ailles * le féjour du crime & de l'inhumanité; mais par- tout ailleurs , il nous fembîe que c'eft pécher contre la vraisemblance, & que dans tous lés cas où celle-ci fe trouve violée, la décoration quelqu'ingénieufe qu'elle puifTe être d'ailleurs y oifrant une idée contraire au motif qui lui donne lieu, ne peut aufîi que donner une idée fauiïe des vrais talents de l'Ordonnateur. Vitruve * appelle Thélamon&s les figures d'hommes qui fou- tiennent quelques fardeaux , & femble vouloir, qu'à l'imitation des Grecs , on les appelle Atlas. Perrault rapporte à propos de ce pafTage de Vitruve , que Ealdus croit que le mot Thclamon , vient du grec , Tiamon, qui iignifie un Miférable qui fupporte le mal avec patience: ce qui convient, dit-il, aiTez bien à ces figures, qui portent des far- deaux. Cette opinion de Baldus juftifîe notre fen- |
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riment fur l'abus des ordres Cariâtes dans la déco-
ration des édifices, & principalement dans ceux défîmes aux habitations des grands (ξ). JDes Gaines.
Cet enrichiffement appartient autant à TArchi-
teaure qu'à la Sculpture : à Γ Architeaure, parce que ce font des corps élevés relativement à un certain diamètre, mais dont la forme femblable à une pyramide renverfée, eil plus étroite vers fa bafe que vers fon fommet : à la Sculpture, parce que ces corps font communément enrichis d'or- nements , félon l'application qu'on en veut faire dans la décoration des bâtiments. En général les gaines ne devroient être introduites dans la déco- ration , que pour porter des buftes dans l'inté- rieur des appartements ; encore la vraisemblance femble-t-elle être blefféc? , en confidérant un corps plus étroit vers fon focle que vers fa cime, & qui pour l'ordinaire eft deftiné à fervir de point d'appui à un ouvrage précieux & fou vent fragile. Nos belles Maifons Royales, l'intérieur de la demeure de nos riches Particuliers à Paris , font cependant ornés, pour la plupart, de ces fortes de foutiens, fauffement pyramidaux : mais, dun côté, on eft accoutumé à coniidérer les gaines, comme un meu- ble; de l'autre, l'habitude que nous avons à imiter ce qui s'eft fait avant nous, a fait paffer en ufage cette efpece d'ornement. Nous l'avons déjà re- marqué ; l'habitude a plus de part que le raifon- |
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(?) Voyez ce que nous avons dit ci - devant à cet égard *
dans l'origine des Ordres, pag. i?S & Uir. · ; |
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nemènt à nos comportions ; nous oublions que
tout ce qui a droit à la magnificence de la de- meure des grands doit être réfléchi & dirigé par le goût de l'art. Pouffons cette jéflexion plus loin * & difons que de cette imitation on eft parvenu à faire des pilaitres attiques en gaine .( a ), & qu'on a imaginé d'appliquer ces espèces de pyramides renverfées fur le fut des pilailres ou des colonnes de quelques-uns de nos édifices : mélange indis- cret , imitation dangereufe, qui rendent nos com- portions barbares , ou au moins qui montrent plutôt la bifarrerie du génie des Artiites, que le choix judicieux des règles de l'Art ; que cette unité de-ftyle, cette iimplicité louable , ce vrai qui cara- clériient les productions des véritables Archke&es. Evitons donc toutes ces efpeces de licences, & n'employons même les gaines dont nous parlons, que comme des meubles proprement dits, que comme des parties acceiîbires dans nos apparte- ments, ou dans nos Jardins de propreté , tel qu'il s'en remarque dans* le fallon des Maures à Meudon & dans le hoiquet de l'arc de triomphe à Vèrfailles : faifons-les de matière précieufe; ajoutons-y des ornements affortis aux objets qui les doivent couronner ; autoriibns - les encore en :'
(a) On en voit de cette efpecc dans la nouvelle Chapelle
de Saint-Jean - en-Grève , fur les fûts des piiaitrcs Tot'cans de laterraiFe de l'a vaut-cour de Meudon , où l'on a aiFetré une „gaine verticale en forme de boflage continu, qui préfe^te dans la décoration de cette ordonnance ruftiqué, une idée pppofée à la folidité réelle que doit avoir un contre- fort * fans parler d'une infinité d'autres exemples licencieux que nous condamnons nous-mêmes dans hs ouvrages Gothiques t & que aous appliquons feuvent, fans y penfér , à nos produ-1 étions. Λ '"*
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d'Architecture. 35t
pareille occafion , & toujours par tolérance,
pour foutenir les figures à-demi-corps, connues fous le nom de termes ; mais gardons - nous bien d'en faire ufage dans l'ordonnance cje nos Tem- ples , où Ton ne craint pas d'introduire des gaines portant des Vertus 9 des Anges ou autres allé- gories facrées : refîbuvenons- nous enfin , que ces caprices, ces chimères , enfants d'une imagi- nation déréglée, ne font guère admiflibles que dans nos décorations théâtrales. On appelle encore gaine oufcabellon, une efpece
de piédeftal ifolé, qui a moins de bafe que le fom- met, & dont le plan quadrangulaire» circulaire ou à pans , fert auiïi dans un cabinet, dans une gallerie a foutenir une petite figure de bronze * un buiie ou une pendule : quelquefois auiîi on leur donne la forme d'un baluftre ; mais à l'exemple des gai- nes proprements dites , il n'en faut faire ufage que pour la décoration intérieure „ malgré l'au- torité de ceux qu'on remarque, & qui font adoffés au mur de face du premier étage , fur les deux ter·* rafles du Château des Tuileries du côté des Jardins; ces fcabellons font à la vérité d'un deffin & d'une exécution admirable ; mais l'oppofition de leurs lignes obliques, avec la verticale des pieds-droits des portes , des croifées & des pilaflres 9 femble effa- cer à l'œuil ce -parallélifme, cette unité, cette rela- tion intime qui fait tout le fuccès de la bonne Ardu- tecfure- Au refte, il faut convenir qu'à tous égards ces fortes de fupports font moins chimériques , moins hafardés , quand on ne peut s'en difpenfer que l'application des confoles, des culs-de-lampes & des encorbellements, parce que du moins ce£ corps montent de fonds, & qu'on ne peut leut re- procher que le retrécifîement de leurs bafes ^ défaut |
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jfi C ο ν ft s
auquel on peut remédier en faifant leurs 'côfé4
parallèles , ne rendant oblique que leur paremenfi de devant, & plaçant un avant-corps ou un reiTaut dépendant du goût & du génie de Γ Architecte* Des Clefié
Nous avons parlé précédemment des clefs &
des claveaux, pag. 307, relativement à la folidité; nous avons auiîi dit quelque choie touchant les ornements dont on les revêt. Sans craindre de nous répéter , difons ici que par rapport aux or- nements , on appelle aufii ces claveaux , agraiFes ou conibles , genre de Sculpture qu'il convient de préférer dans tous les cas , aux têtes humaines G, ou aux maicarons que nous avons déjà con* damnés en parlant des claveaux. Ces ornements appelés clefs , confoles ou agraires , félon le galbe ou contour qu'on leur donne, doivent auiîï avoir une expreiîion de folidité ou de légèreté qui émane de l'ordonnance de l'Architecture 5 aufli bien que de la proportion * de la forme & de la richefTe des ouvertures qui les amènent fur la fcene dans la décoration des façades. Des Confoles.
Les confoles, aiTez fembîables aux culs-de-
lampes dont nous parlerons bientôt, font auilî f un ornement chantourné fur la face de devant, & dont la partie fupérieure , plus faillante que l'inférieure , eil deftinée à porter quelques mem- bres d'Archite&urë, tels que le larmier d'une cor- niche ? comme celle λ λ, placée au-deilus de • - · - · ........ * là |
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©'ARCHITECTÜR BA V//.J j^
la ports à plate-bande Β , planche 3ŒIÈE, Prefqùe
tous les Architectes ont introduit des confoles dans leurs décorations ; fans doute elles font préféra- bles dans l'Architecture , aux culs-de - lampes ; mais il faut les y placer convenablement ; il faut remonter à la fource , qui les a d'abord fait mettre en œuvre ; enfuite méditer fur l'application qu'on en doit faire dans la décoration des façades. N'en" doutons point , il en eil des ornements comme des membres d'Architecture; il s'en faut bien qu'ils doivent fe rencontrer tous enfembîe dans une même ordonnance ; mais affez ordinairement on n'a d'autre but que la routine , fans fonger qu'elle conduit fouvent à une inconféquence condam- nable , & qu'en croyant fui vre les préceptes de l'Art, on ne fuit que la mode : de maniere que les ornements répandus d'ans les Temples , les Maifons Royales, les. bâtiments particuliers fe reifemblent; d'où naît le peu d'aiTortiment, le peu de convenance qu'on remarque dans les différents genres d'édifices que nous citons. On parvient à faire riche , mais rarement parvient-on à mettre les vraies beautés dans tout leur jour : ce qu'il y a de pis, c'eil que ces productions trouvent des imitateurs ; & ceux-ci s'éloignant prefque tou- jours de l'objet qu'ils imitent, reduifent pour ainiî dire leurs imitations à la plus grande médiocrité. On ignore qu'il faut être un homme de génie , pour bien imiter, pour fentir & pour appliquer convenablement à {es productions les découvertes de fes Prédéceiieurs. Ppur éviter de tels abus, \ défîninbns les différentes efpeces de confoles dont on fait le plus communément ufage dans la déco- ration, des bâtiments, & difcutons-en l'applica- tion pour nous accoutumer à accepter ou rejeter Tomz Ι. Ζ |
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354 CO U RS
tout ornement qui a droit d'embellir ou de défi-
gurer l'Architecture. On a d'abord fenti la néceifité de donner un
certain relief à la décoration extérieure des édi- fices ; on a auffi prévu l'agrément que procureroit à la décoration des appartements, ce même relief combiné avec le diamètre & l'élévation des pièces ; de-là, lldée de foutenir de diitance à autre, des corps avancés par des mutules & des modulons, pour porter les fofites des larmiers des corni- ches ; enfuite on les a chantournés, on les a ornés de fculpture : originairement on les avoit intro- duits par nécéiîité ; d'horifoniaux qu'étoient ces fupports, on les a placés verticalement pour varier les façades; quelques-uns ont réuiTi , & l'on ι cru que par-tout ils produiroient également un bon effet, fans prendre garde que fouvent le chan- gement de iîtuation, change auffi l'effet qu'on fe propofe ; que d'ailleurs ce qui réuiiît en grand , eil rarement fait pour réunir en petit ; que les intervalles ne pouvant toujours être les mêmes, les formes de ces différents corps doivent changer làéceifairement, les grandes parties n'étant faites que pour les grands touts, & les petites par- ties paroiffant plus petites encore, lorfqu'on leur ©ppofe de grandes diilances ; qu'en un mot, tous les objets qui ont pour but de fe faire remarquer, doivent porter un caractère, une expreifion re- lative à la décoration qui leur a donné lieu ; que par exemple une confole arrafée doit différer par fa forme, d'une confole en relief; qu'une confole liffe demande une autre application qu'une confole cannelée & enrichie de fculpture ; qu'une Confole en encorbellement doit paroître porter un corps hc-rifôntal, fans effort, & ne jamais reifem- |
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D Ά Β. CU Ι ΤErp Ψ V £ E, pjgjf
bier à une confole mnvexiée , faite pour acôter
un pied-droit; mak qu'il n?en faut, jamais placer par-tout où elles ne paroiiTent. ni néceifaires ni intéreiTantes ; que la feule 'idée, de la décc ration eft infunifante, qu'il faut djes raifons, des autorités > qu'il faut néceiTairement que les confoles -portent y foutiennent quelque corps ; qu'autrement elles pa- roiiTent poûiches & ne font qu'ornement. Or qu'elt» ce en Architecture que l'ornement qui n'a pour objet que de remplir des furfaces vagues, que d'enrichir des nuds originairement trop pauvres ? Qu'eft- ce qit'une confole qui ne porte pas le larmier d'une corniche, & qui fe réitère dans toutes les croifées, les portes, les niches de nos bâtiments., telles qu'il s'en voit aux Places de Vendôme & des Victoires/? Qu'eil-ce encore que les confoles placées dans le courant d'une façade,, pour porter un buile, comme il s'en-voit au Château d'iily, à celui de V criailles du côté de l'entrée, à celui de Sceau , & ailleurs} Qu'eil-ce enfin qu'une: confole en encorbellement» qui porte un balcon, comme au Château neuf de Meudon, au bâtiment des Enfants-Trouvés, à l'hôtel de Gélifie ? Ce genre de décoration annonce plutôt une Tribune propre à nos décorations théâ- trales , qu'un ornement convenable à nos édifices d'habitation. Nous paffons fous iilence l'abus des confoles compofées de formes contraftées, déçou* pées & le plus fouvent accablées de petits orne- ments , dont Paris s'eit vu remplir pendant trente années, fans en excepter les décorations de nos Temples? Mais, dira-t-on, les confoles doivent donc être rejetées de toute décoration régulière ? A cela nous répondrons, qu'il en faut ufer avec beancop de ménagement dans les. dehors ; qu'il faut qu'elles y pârohTent amenées par la nécçflité ; qu'à cet Ζ ij
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V'. '
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igard celles des entablements de la porte Saint-
Martin , & du bâtiment des Enfants-Trouvés font bien; que par -tout ailleurs, lorfqu'elles fuppor- tent des corniches, il faut qu'elles en paroiffent foutenir le larmier; mais que néanmoins leur véri- table place eil pour lés corniches de l'intérieur des grands appartements; qu'elles y font préfé- rables à ces ornements courants & frivoles, qui ne préfentent, dans leur frife , que des arabefques, capables au plus de figurer dans de petites pièces, dans les.entre-fols , &c. Que les confoles dont nous parlons, marquent donc plus précifément à l'avenir des intervales réguliers, & des mé- topes afTortis à la diilribution des comparti- ments, des lambris ; que leur relief foutienne avec fuccès , la faillie des gorges & des corni- ches, qui étant légères, ont aurli befoin de corps légers qui leur fervent de fupports & de points d'appui; alors ces confoles pourront s'employer folitaires ou accouplées, félon le befoin qu'on aura de maifes plus ou moins confidérables dans fa décoration: par exemple celles diitribiiéess dans la corniche de la Salle des Cent-SuifTes aux Tuile- ries, celles de la gallerie. de Verfailles , celles de l'hôtel de Touloufe font un effet admirable, & font de beaucoup fupérieures aux corniches fans confo- les des appartements des hôtels de Soubife, dé Vil- lars , &. à prefque toutes les décorations intérieures de nos bâtiments; Ces paralleles nous apprendront peut-être à ne jamais déplacer cette forte d'orne- ment , & à difcerner de bonne heure le choix que nous devons faire de toutes les parties qui con- courent àTembelliffementdes façades extérieures, & à la décoration de nos appartements» A l'égard des confoles qu'on ne place que trop
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d'Architecture. 357
ordinairement dans les dehors; quand on croit
devoir les admettre, du moins faut-il éviter de les faire trop confidérabiement grandes , comme fe remarquent celles des croifées Ioniques du Lii^ xembourg; ou infiniment trop petites, comme celles placées dans les croifées fupérieures de la Place de Vendôme & des Victoires ; enfin trop confidé- rabiement faillantes & trop chantournées, comme eelles des croifées du fécond ordre des façades de l'intérieur de la cour du Louvre, & dont la partie fupérieure , ainii que la faillie de leur tailloir , défafleure de beaucoup la faillie du larmier. Nous ne faifons ces obfetvations que pour apprendre de bonne heure à nos Elevés, que rien n'eit indif- férent , & qu'ils doivent tout obferver, mefurer, \ examiner, s'ils veulent parvenir un jour à faire des chefs-d'œuvre. -■/.·:'·■ r Des Cartouches*
1 Les cartouches ( b ) font des ornements de fculptu-
re comme χ, quipréfentent une furface plane , con- cave ou ondulée,"propre à recevoir un chiffre, un blâfon ou une infeription. Ces cartouches peuvent repréfenter de grandes coquilles, des éeprees d'ar- bres , des peaux d'animaux, des enroulements, for- mer des volutes, être chantournés, contrarias ; mais il nous paroît eifenciel, qu'aumoins leurs côtés oppofés ibient femblables , ou s'ils different en quelque chofe , que ce ne ibit que dans les parties de détails : l'abus le plus condamnable eil de les incliner ; cette b'yfarrerie eft à peine tolérable daas |
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De l'Italien, Cartoccio* M „.
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3?S · Cours-
i'Örfévrerié ; mais on ne doit jamais fe la permettre
dans la décoration des bâtiments. D'ailleurs les cartouches ne conviennent pas par-tout ; il faut un motif qui les autorife ; il faut éviter fur-tout, leur répétition dans une même décoration ; il faut qu'ils marquent, à raifon de l'efpace dans lequel ils font placés; i qu'ils faifent milieu; que 1-orfqu'on eû oblige d'en diftribuer alternativement planeurs fur la même ligne, on obferve de les varier fans trop d'affectation : il faut prendre garde que leurs accompagnements nanéantifîent ni leur forme, ni ΙεμΓ capacité , ou au contraire que le cartouche ne foit trop fort, & les acceifoires trop foibles ; en un £iot, ondoitprévoir leur trop ou trop peu de faillie* pour que œt ornement puiffe fe faire applaudir. Un cartouche placé par néceiîité , plus petit que le précédent, s'appelle cartel, & ne doit être employé que dans les panneaux de menuiferie , fur les glaces , fur. les chambranles des portes , ou toute autre partie de la décoration intérieure des appartements ; encore faut-il fe reffouvenir qu'il ne faut ufer de ces fortes d'ornements qu'avec beaucoup de retenue & de circonfpeelion. Des Médailles & des Médailbfis.
Lès" médailles ( c) différent ides médaillons, en
ée que les premières fe font circulaires ,&ί les féconds de forme elliptique ; tels que fe remar- quent ceux qui ornent la pyramide b, planche XIX : les uns & les autres fervent à la déco- |
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( c ) Médaille, du grec mttallon , métal i ou de l'arabe Λ
métal. . y' -'■' i ' :'ν 'iï :ti ii
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d'Architecture, 359
ration extérieure & intérieure des bâtiments. Les
médailles contiennent ordinairement, des têtes en bas-relief; les médaillons des fujets hiitoriqiies, des devifes, des emblèmes â &c. On voit des médailles circulaires dans la cour de l'Hotel-de- Ville, & des médaillons dans les décorations des façades du Louvre à Paris. Perrault en avoit aufl* .placé dans fon arc de triomphe du Trône. , En général ce genre d'ornement nous paroît plus propre dans la décoration des Fêtes Publiques , des Théâtres , des Feux d'Artifices, des. Pompes funèbres, que par-tout ailleurs ; parce que ces ornements peuvent contenir , dans nos différents genres de décoration, des fujets entiers d'un très- petit volume , lans préfenter de.difparités , ni nuire à la correfpondan.ee des ornements répan- dus dans l'ordonnance entière ? au-lieu que dans l'Architecture proprement dite, ces médailles & médaillons, ainfi que les fujets qu'ils contiennent, n'offrent que de petites parties, qui s'accordent difficilement avec la grandeur de l'enfemble. Les médailles & médaillons doivent paroître fufpen- dus & attachés fur le nud du mur qui les reçoit, par des feitons, des guirlandes, des anneaux 9 des rubans , &c. Quelquefois , à l'exemple de ceux du périftile du Louvre, on place un mufle de lion, fur l'extrémité fupérieure de leur bor- .durë; mais ces mufles ne conviennent pas par- tout , & ne font guère tolérables , que lorfque le fujet du bas-relief repréfente la force , la valeur pu l'intrépidité ; autrement une agraffe fans pré- tention, un nœud de ruban entrelacé de feuilles de chêne, de laurier, de myrthe, de fleurs, félon /application de ces ornements à l'Archite&ure , réuiTiiTentplus ordinairement, font plus analogues à Ζΐγ
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%6o Cours
la variété des fujets appelés tour-à-toiir dans la
décoration, pour défigner les Arts , les Saifons ou les Eléments. Au reite, il ne faut jamais abufer de ces fortes d'ornements, ni dans la décoration des Fêtes Publiques, ni dans celle de nos bâti- ments : la richeiîe qu'ils procurent néceiTairement à l'ordonnance , demande qu'on neMes introduife que lorfque les ordres délicats préiident, & que lorfque les matières réelles ou feintes y font ou paroifTent précieufes ; en un mot, lorfque le monument par fa dignité femble avoir dû rece- voir , par nécelîité , tout l'éclat qui peut embellir fArchitefture, J}es Culs~de-Lampes.
On appelle cul - de - lampe, une efpece d'encor-
bellement en pierre, en marbre, en bronze ou en bois , portée en faillie au-delà du nud du mur, & deiliné à foutenir une figure, un vafe, une urne, une girandole, &c. On appelle encore culs- { de-lampe , les pendentifs où fe réuniiTenr les diffé- rentes nervures des voûtes gothiques, ainfî qu'il s'en remarque à la Sainte-Chapelle, à la Grand'- Chambre du Palais à Paris & ailleurs. Ancienne- ment on en faifait auiîi un aifez fréquent ufage, pour foutenir la retombée des voûtes qui foute- noient en l'air les rampes des efcaliers ; & alors ces culs-de-lampes étoient enrichis de membres d'Ar- chiteöure, & d?ornements de Sculpture ; mais l'on a réformé, depuis quelques années, cette forte d'en- richifTement, auiîî peu agréable à l'œuil, qu'inutile à la foîidité, On auroit dû étendre la réforme jus- qu'aux culs-de-lampes proprement dits ; ce genre «TQrnemçnts paroît poàiche à dans la décoration |
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d'Arc h itecture. 36t
de nos édifices graves & réguliers J cependant les
ftatues placées dans la nef de l'Eglife deSaint-Sul- pice , .celles qu'on voit dans le fan&uaire de l*Eglife de Notre-Dame, celles des niches de la gallerie du Château de Meudon, & de l'hôtel de Touloufe à Paris, font toutes foutenues ainfi, contre toute idée de vaiffemblanee. Une ftatue femble exiger un piédeftal qui monte de fonds pour la foutenir ; il feroit encore plus abfurde, à la vérité , de faire porter une colonne fur un cul-de-lampe, tel qu'on en remarque dans la décoration feinte de l'efcalier de l'hôtel de Soubife , & dans la plupart de nos- décorations théâtrales. Mais pour ne parler ici que des itatues, neft-ce pas vouloir bleffer la vraiiTemblarice, que de placer en porte-à-faux une figure en a&ion , fur un cul-de-lampe , fur une efpece d'encorbellement ou confole, qui, quoi- que d'un bon gont pour le defîin confidéré féparé- ment, n'annonce toujours qu'un fupport impar- fait , propre tout au plus à recevoir une petite figure en bronze ,* une porcelaine , un bijou de prix dans les moyennes pièces d'un appartement; car alors ces fortes d'ornements font regardés fans conféquence. Les culs-de-lampés peuvent encore fervir de crédencés dans les facrifties , près des retables d'autels , dans les falies à manger, & dans les appartements de bains ; enfin ils peuvent fer- •vir de pieds pour les tables de marbre ; ces der- niers occupant peu d'efpace, & éüant pofées fur le parquet, femblent porter de fonds , ou du moins leur port-à-faux racheté avec art, n'a rien qui puifTe bleifer Tœ'uil. Mais en toute autre oceâ» lion, lorfqùil èft queftion d'une figure , fouvent. plus grande que nature , c'eil avoir recours à l'erreur 3 c'eft multiplier l'abus de l'art ; de tels |
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exemples enfin , ne doivent jamais ni né peuvent
ferrir d'autorité. Des Cornes d'Abondance, , ., ,?
Les cornes d'abondance font des ornements de
faiipture, imaginés d'après la corne de la chèvre Amakhée , & qui peuvent contenir des fleurs, des fruits i des feuilles , des coquillages , des mé- dailles , &c. Ce genre d'ornement, femblable à beaucoup 'd'autres , demande à être employé con- venablement dans lArchiteûnre. Ordinairement Β réuifit mieux ifolé, qu'en bas-relief; & en grand, qa*en petit : le mouvement dont il eft fufceptible, & îes objets qu'il contient exigeant un certain détail : il s'en remarque dans plufieurs frontons de la façade extérieure de la grande; gallerie du Louvre du côté de la rivière, fur lés claveaux des arcades des avant - corps de l'intérieur de la cour du Louvre > dans la.décoration de la gallerie de Verfailles , & de celle de l'hôtel de Toulpufe ; mais cette efpece d'ornements femble n'être placé citnous le citons, que comme ornements ; il nous femble qu'il faudroit, pour qu'ils y fuffent autor ïifés , qu'ils paruiïent fymboliques : en général ilç devroient être réfervés pour caraftérifet le temple de la paix, annoncer la; fertilité des campagnes ,j l'abondance des provinces terreilres ou maritimes, & alors faire partie des amortifiements , qui cou- ronnent les portes des Villes, les arcs de triomphe, les bâtiments hydrauliques, ,&c. de-là naîtroient moins d'ornements indifférents, moins de fciilpture prodiguée au hazard dans la décoration de nos édifices ; par-là la Sculpture deviendroit le fyifl- bole de Î'Archite&ure % & contritmeroit à peindre 9 |
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D* A R G Η Ι Τ E CT U R E. 363
aux· yeux du fpeclateur > le véritablecaradere de
Pedîfice , à raifon de fon application particuliere dans l'Architeclture Givile , Militaire & Navale. ■v" Dés Fefêons & des Guirlandes.
Les ferions (i) doivent différer des guirlandes; x
celles-ci par les fleurs , ceux-là par les fruits : néan- moins il fe fait des ferlons, tous de feuilles de laurier ou de chêne, (tels que fç remarquent ceux placés fur l'archivolte f , prenant naiifarice du claveau G , planche XIX,) d'olivier, tle myrthe ou de cypïès ν félon les applications que l'on veut faire de ces ferions, dans la décoration d'un monument élevé à la gloire, à la guerre, à la paix', âîamour ou aux, funérailles des grands. Ces ferions font ordinairement attachés avec des anneaux ," " & ornés de rubans qui fervent à lier les bouquets & les chutes ,âes feuilles dont ils font compofés , tels que fê remarquent ceux bb, placés dans Famôr*/ tiiTeménjt aa ;Jatt-deiius du fronton; ce genre d'or-I-v, & hements étoit fort en ufage dans la décoration dès; édifices des Grecs δε des Romains : les Manfard, les DebrôiTes, les Mercier, les Le Veau , les François Blondel, les Bullet Sc. les Perrault, lès ont auffi employés avec fuccès dans leurs déco- rations. D'après ces grands Archite£tes, plufieurs femblent, de nos jours , vouloir les préférer dans leurs décorations-a. tout autre genre d'ornement f; |
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(d) Fefion j, du grec encarpos 3 fructueux, félon Vitruve:
félon d'Avilér, ori croit que ce mot vient de Fête, parce que ces ornements: l'emploient ordinairement dans les décoration^ dreiTées par Talégtefle publique. |
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$64 C ours
mais peut-être ferions-nous bien fondés à repro^
cher à quelques-uns de ces derniers , d'en faire un -trop fréquent ufage, de ne les pas affez varier, de leur donner un air de pefanteur, une forme trop cilindrique , qui bleiTe l'œiiil. Qu'on y prenne garde; il eil à craindre que ces répéti- tions indifcrettes , ces imitations , fouvent mal entendues, n'enfantent des modes paifageres, qui à leur tour feront abandonnées pour pafîer à d'autres nouveautés : en forte que loin de four- nir d'excellents modèles , on ne préfente que des ornements peu réfléchis, qui portent infen- fiblement le1 plus grand nombre à s'écarter du véritable goût de l'Art, & de cet efprit de con- venance , que nous recommandons ici avec tant de néceiîité. * ; Les guirlandes different des ferions, ainfi que
nous venons de le remarquer, en ce que les guirlan- des font feulement compofées de fleurs & de feuil- les; qu'en général elles préfentent plus de légèreté èiins leurs maifes, & plus de détails dans leurs parties; que pour cela elles paroiffent plus pro- pres pour la décoration intérieure : au-lieu que hs feilons paroiffent devoir être deftinés pour le« dehors. .. Des Entrdas.
Les entrelas font des ornements compofés de
membres d'Àrchiteclure '& de Sculpture, que l'on fubftitiie quelquefois à la place des baluftres, dans les appuis des rampes des efcaliers. Les en- trelas font moins graves que les baluftres; mais ils apportent de la variété dans l'ordonnance ; & leur contour moins févere , les fait admettre vo- lontiers où l'ordre délicat préfide. Perrault en |
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d'Architecture. 365
avoit fait faire des modèles en plâtre , au-deiïus
du foubaffement du périftile du Louvre. Fran- çois Manfard en a introduit dans l'efcalier du Château de Maifons. Debroffes en a fait ufage au couronnement du dôme du Luxembourg , du côté de la rue de Tournon. 11 faut favoir que les vides des entrelas doivent
être à - peu - près égaux entr'eux ; que les corps folides qui les déterminent le doivent être exacte- ment. Il faut que leurs contours foient coulants ; qu'on fache y éviter les trop petits détails ; que les ornements qui les enrichiffent foient non-feu- lement employés avec ménagement , mais paroif- fent naître de la forme des membres d'Archite&ure qui les compofent, membres qui eux - mêmes doi- vent prendre leur fource dans le caractère de l'or- donnance. Ψ On appelle encore entrelas, des ornements en
bas-relief, compofés de liiteaux, de plates-bandes droites 3 circulaires ou mixtes , dont les milieux font ornés de rofaces & de fleurons , lefquels font deftinés à la décoration des arcs doubleaux des arcades , ainfi qu'il s'en remarque fous l'intrados ou archivolte de la plus grande partie de l'inté- rieur des arcades de la cour du Louvre, & ailleurs. Des CaJJettes.
On appelle caifettes , des tables renfoncées &
ornées de moulures en forme de cadres , qui fer- vent à contenir des rofaces , dont on enrichit le -fofîte des larmiers des corniches Doriques , Co- rinthiennes & Compoutes ; & même quelquefois celui de Tordre Ionique, lorfqu'au lieu de denti- cutes on, inuoii&t 4es modulons. Les caifettes fer- |
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366 Cours
vent auflî à orner les arcs doubleaux des Voûtes
des édifices facrés & des monuments publics : ces caffettes fe font le plus fouvent qiiadrangulaires dans les entablements des ordres , principalement lorfqu'on les remplit de rofes ou rofaces, ordi- nairement circulaires ; mais lorfqu'on les applique aux arcs doubleaux, on les entre-mêle quelque- fois de caffetes oblongues, barlongues ou lofan- ges, remplies d'ornements aiïbrtis, à la forme de ' ces nouveaux compartiments ; celles qu'on remar- que fous Tare plein cintre de la porte Saint- Denis, font de ce dernier genre; celles dé la voûte de ÎEglife de la Sorbonne , font du pre- mier. En général la richefle de l'ordre détermine la quantité des moulures des caffettes, & le genre de la fculpture qu'elles doivent contenir. On né devroit même placer les caffettes dans les fofites des corniches & dans les arcs doubleaux des voû- tes , que lorfque le fût de l'ordre eit caiinelé , &il ne faudroit faire ufage de rofaces, que lorfqu'on a cru devoir orner de rudentures les cannelures des ordres. Aux Petits - Peres , à Saint - Sulpice à Saint-Roch, la richeife des arcs doubleaux eu mal affortie avec celle des ordres qui déco- rent l'intérieur de ces trois Eglifes. Nous le répé- tons , la\ relation dans l'Architedure & la Scul- ture, eil un des premiers mérites de l'Art ; il faut néceifairement, pour arriver à la perfection que lés membres, les ornements puifent leur expref- fion, leur richeife ou leur fimplicité, dans le caractère de l'ordre, & dans la convenance du bâtiment ; certainement c'eit. le feul - moyen de plaire, de perfuader aux autres, que l'Architeaure eft établie fur des principes confiants, & que fes beautés font des beautés poiitive£? qu'on ne peut raifonnablement contefter. |
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d'ârchitectura. $ö/
Des Poßes.
Lès poftes font des ornements compofés d'en-
roulements , & appelés ainii, parce qu'ils fe fuccedent les uns aux autres fans interruption , & qu'ils fe replient fuir eux-mêmes fans aucune efpece de repos. Ces ornements modernes font d'un ftyle moins grave que les guillochis dont nous allons parler ; & pour cela ils ne devroient jamais fe rencontrer enfemble dans une même décoration. Au reite, les poires, comme tous les autres ornements , doivent recevoir diverfes exprefßons pour fatifaire aux différents caracleres des ordres Ionique , Corinthien & Compofite; car il faut obferver , quelque fimplicité qu'on puiife leur donner , qu'ils ne doivent jamais faire partie de la%ichefïe des ordres ruitiques & fon- des. Nous: l'avons déjà dit, nous le répétons , tout importe dans la diitribution des ornements de nos bâtiments ; il ne fuffit pas d'y placer de la Sculpture ; c'eit leur application refléchie, qui fait beauté , qui engendre l'unité , qui détermine la convenance , qui confirme & diilingue les ou- vrages des hommes célèbres , d'avec ceux des hommes fubakernes. D'ailleurs il faut fe reiîbu- venir que les ornements ne font appelés dans Γ Architecture que pour l'embellir, la rendre agréa- ble, inféreifante. Or tout Artiite doit s'attendre à manquer ce but, quand les ornements qu'il in- troduira dans fa décoration paraîtront arbitraires , indifférents, pris au hazard , quand ils feront mal aifortis , diitribués fans goût, fans choix, fans convenance. Pour éviter un tel abus, il faut donc après avoir déterminé leur place, & leur avoir |
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368 C o Urs
aligné leur relief, leur genre , & une expref-
ίίοπ relative à toutes les parties de l'Ar©hite£ture ; il faut, dis-je , faire choix d'un Artiile habile, qui, par une belle exécution, ajoute encore au mérite réel & au ityle de l'ordonnance ; il faut enfin imiter les chefs-d'œuvre des grands maîtres en tout genre, les fuivre dans leurs procédés, dans leurs opérations ; en un mot, il faut fe ren- dre compte du degré d'exécution, de perfe&ion & de beauté qu'on remarque dans leurs différentes efpeces de productions, fi l'on veut atteindre à l'excellence de toutes les connoiiTances que nous exigeons. Des Guillachis,
Les guillochis font des ornements qui tiennent
tout à l'architecture , n'étant compófés que de liileaux qui fe diitribuent en compartiments par oppoiition , & cependant avec fimétrie. Ce genre d'enrichiflement eil fort ancien; il s'en remarque dans plufieurs monuments de la Grèce, & de l'Italie. Pluiieurs Architectes de nos jours ont fait revivre dans leurs productions cette efpece d'or- nements; néanmoins elle n'a, guère d'autre mérite que d'être recliligne, d'une facile exécution , & de procurer une richeffe à. l'Architeclure, qui, fans trop de dépenfe, fert à faire valoir certaines parties de la décoration. Ces ornements font toujours employés en bas-relief; les chemins, les fentiers ou champs qui féparent ces guillochis, doivent être d'une largeur égale aux liileaux ou plates- bandes qui les compofent; mais il faut avoir atten- tion que ces plates-bandes ne foient ni trop larges ni trop étroites relativement au caractère ferme ou délicat de l'ordonnance de l'Archke&ure ; que leur
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d'Architecture. 369
leur relief ne foitni trop ni trop peu considérable ;
que ces fortes d'ornements nefoient pas trop petits» ou qu'ils n'occupent pas trop d'efpace dans la déco- ration des façades. Au refte , il faut favoir que les guillochis ne conviennent pas par - tout ; que pour les appliquer avec convenance, il faut que le ityle de l'Architeclure foit puifée dans Fan- tique , rien n'annonçant tant Finconféquence du génie de i'Artiite, que de vouloir allier ? dans une même décoration, des ornements anciens 9 avec une Arehite&ure moderne. Peut-être qu'à l'exemple des boffages & des. refends, qui, pour ainii dire , doivent être defrinés feulement aux Ordonnances Tofcane & Dorique, de même les guillochis ne devroient être employés qu'aux ordres ruitiques & folides ; au contraire , les entrelas, les caffettes, les rofaces, les poftes, aux ordonnances moyennes & délicates. Voyez la plupart des orne- ments que nous venons de définir dans la plan- che IX de ce volume, avec quelques autres or- nements dont les exemples réunis avec ce que contiennent ces définitions1, peuvent éclairer nos Elevés fur Fapplication des ornements à FArchi- ■îeâiire«, . . . ·. -v;J'~-i. Des J^ermiciihires & autres Ornements
■rußl-cjues. > '■·;■' 1a:|ï'ö'4 *%;'
Nous avons déjà dit, en parlant des refends &
des bofîages, page 326, quelque chofe des: ver- miculures, des congélations & des pétrifications dont on enrichit aifez ordinairement ces membres d'Architecture ruitiques ,"& qui, comme tels, rie peuvent recevoir que des ornements de même genre. Ces membres & ces ornements ne peuvent ■Tome L . A a |
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Cours
&'ne doivent pas s'employer indiitin&ement dans
l'ordonnance de tous les bâtiments ; le caraûere de l'édifice a feul le droit de les amener fur la fcene, autrement il font déplacés : il faut encore, comme nous l'avons recommandé , que leur touche foit large , vague , incertaine, & éviter avec foin d'affecter , au-lieu de l'imitation libre des produ- irions de la nature en ce genre, des L couronnées fe)V des fleurs-de-lys , des hermines & autres ornements > qui tenant trop de la contrainte de l'Art, ne peuvent figurer avec une çompofition ruilique puifée dans les modèles de la plus grande antiquité, & bien avant que rArchitedure fut réduite en Art. Les I vermiculures du Château- neuf de Saint-Germain-en-Laye, ont la touche que nous exigeons , & rempliffent parfaitement l'idée quon fe propofe , lorfqu'onveut imiter ou la vermiculure des bois , ou plutôt les parties tendres de certaines pierres , qui, détruites par Thumidite de l'air, & détachées par l'ardeur du foleil qui fépare ces parties tendres des parties dures qui lai compofent , biffent entrevoir des intervales ^'une inégalité intéreffante qu'on doit chercher a imiter dans ces genres d'ornements. Nous en cite- rons de naturelles "qui fe remarquent au portail des Carmes, rue de Vaugirard , &■ aux murailles du Louvre', du côté de l'eau, d'une fmgularite qui furpaffe tout ce que l'art pourroit produire de plus admirable. Nous Tentons bien que les deux exemples que nous citons , ne peuvent être d'une grande autorité pour l'avenir ; mais |
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, (c) Telles qu'il s'en remarque dans une des façades du
bâtiment du Louvre , du côté de la rue Frorneuceau, dans la cour qui donne entrée au jardin de l'Infante. |
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t>*A REH ÎÏÈC TÜft Ëî. Jfî
äu moins ils doivent faire fentir à nos Elevés |
que rien ne leur doit échapper, qu'ils doivent tout examiner avec foin , rapporter tout ce qu'ils voient à leur Art, & chercher fur - tout à appli- quer, dans leurs productions, tout ce que leur offre la nature, avec ce difcérnemêht, & cette judiciaire qui caracÎérife le véritable Artiite. Au reite \ les vermiculurès ne fönt pas lèà
fëuls ornements qu'on puiffe appliquer à Γ Archi- tecture Tofcane : comme cet ordre peut fatis- fairè à différents genres d'édifice * il convient auiïi que les ornements qu'on veut appliquer fur les boifages, foient dé différents genres \ par exem- ple les congélations de la grote du Luxembourg y font bien appliquées, parce que cette grotte devoit être une fontaine : les piquures larges & tracées avec art qu'on remarque fur les boifages de la terraffe delà grande avant-cour du Château deMeudon , expriment très-bien une richeife rufti- que, convenablement placée dans ce lieu. Enfîrt les joints des pierres refendues dans leurs joints horifontaux & dans leurs joints montants d'une certaine partie du Vieux-Louvre, & dont les furfaces font gravées avec la pointe du marteau $ font encore une richeife analogue au genre ruf- tique ; il ne s'agit que de les bien appliquer & de ne jamais fouifjrir qite;ce foit le hafard, lé caprice ou la fingularîté <|üi les amené dans la décoration. Nous n'avons pas prétendu rendre compté ici
de tous les ornements qui fervent à embellir i'Architecture ; notre but a été feulement de parler des principaux objets de la Sculpture, qui appar- tiennent à f Architecture, & qui, réunis avec- ee que nous avons déjà dit concernant les orne* Aa ή
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s
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37i Cours
ments applicables aux différentes moulures des
ordres , nous femblent iiiffifants pour mettre nos Elevés à portée d'aller examiner dans nos édifices , la multitude des chefs-d'œuvre que nos plus habiles Architectes & nos Sculpteurs célèbres y ont ré- pandus avec tant de fuccès. Cette étude à laquelle nous renvoyons & l'Amateur & l'Elevé, eit, felori nous, le feu! moyen de puifer le vrai goût de l'Art, le choix qu'on doit faire de ces divers ornements , l'expreflion qu'on doit leur donner ; en un mot, la touche, la beauté , l'élégance. & l'agrément qu'ils peuvent procurer à l'Architecture quand ils y font difïribués avec cette convenance , ce juge- ment & cette vraiffemblance que nous avons re- commandés & que nous recommandons encore, à nos Elevés« tf'L· |
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d'Architecture; , 373
CHAPITRE I V. ;
Analyse de l'Art, ou moyen de
parvenir a distinguer la bonne Architecture , d'avec l'Archi- tecture MÉDIOCRE. k
jî"1l PRÈ s avoir parlé dit plus grand nombre des membres d'Architedure & des ornements de Scul- pture relatifs" à Γ Architecture , nous allons offrir de nouvelles obfervations non moins intéreffantes , qui ont pour objet de traiter delà maniere de re- connoître, à l'afpect de nos Edifices François, les vraies beautés répandues dans les plus célèbres d'entf eux , & les médiocrités dont quelques - au- tres ne font pas toujours exempts. Nous allons donner l'idée précife que doivent produire à l'imagination des Spectateurs tous les divers mem- bres d'Architeéture que nous, venons de définir. Enfin , nous allons difcuter les différents moyens de les raiTembler avec choix dans nos produc- tions : méthode qui peut amener à ces nuances imperceptibles qui échappent au vulgaire ..„ mais? queTArtiïte initruit fait fàifir, & qüe fAmateur éclairé fait applaudir. N'en doutons point* c*eit par le iecours de ces nuances imperceptibles qu'on parvient à mettre une diitihcHon réelle"1 dans, les projets de; deux bâtiments de. même genre, mais qui néanmoins doivent s?annoncer différemment Jt. en préférant dans l'un un ftyle fublime, noble^ élevé ; dans l'autre un caraâere na'if, iimple, vrai i, expreffions diitin&es , particulières, qu'il ne fauÊ point confondre, qui ne font point fynonimès *j$j& Aai^
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374 C o ν E s
ont befoin d'être fenties , enfuite difcutées , & qui
contribuent plus qu'on ne s'imagine ordinaire- ment à aiîigner à chaque bâtiment le caraâere qui lui eu. propre. Nous avons cru devoir pféférer ici le ftyle de
la définition à tout autre genre de narration, parce qu'il nous a paru plus propre que tout % autre à peindre nettement à l'idée , ce que .pous deiirons faire entendre nous-mêmes à nos jeunes ArcJûteOes ; d'ailleurs il femble dégager la mémoire de tous les açceiïbires étrangers ; il fépare dans chaque objet toutes les obfervations qui ne iont point de fon renort , & afligne plus préci- sément à TEleve , le degré d'attention qui lui eft néceiTaire pour parvenir à. rendre fes compo- sitions plus régulières. On trouvera peut-être dans chacune de ceslléfinitions, des trait$i de reflem- blance, qui au premier coup d'œuil feront douter de futilité' du plus grand nombre ; mais en les examinant plus attentivement, nous nous flattons qu'on y démêlera des nuances diitinôes & des idées variées , qui étant pour la plupart acconl·· jpagnée* d'expreflions différentes , &dumotpro^ pre à l'objet qu'on y traite, feront fentir combien il étoit eifenciel d'uler de répétition pour faciliter l'intelligence néeenaire à obfçrver dans la déco- ration des bâtiments, qui tous devant porter un caractère décidé , doivent néanmoins préfenter à leur afpe& un coloris qui échappe au vulgaire, mais qui n'en çonititue pas moins une beauté de fentiment pour l'homme véritablement éclairé, ; Pour rendre ces opérations plus fécondes, nous -:v kfâtîi tâché de faiïir tous les différents genres des
• produ^iQu? du reifort de f Architecture, auffi·* bien que la maniere dont ori doit les çoniidérer* lr jugemerit ψ9η en doit porter , & Γ effet qu m |
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d'Architecture. 375
doivent préfenter à l'efprit lorfqu'ils font confédé-
rés en particulier, ou raffemblés dans un ou plu* iieurs édifices. Nous nous fommes auffi quelque- fois un peu étendus, & nous n'avons pas craint d'entrer dans quelques difcuilions , qui ont dû nous amener néceifairement au raisonnement de l'Art. Nous avons fait plus ; autant que les égards que nous devons à nos contemporains ont pu nous le permettre, nous avons fait des citations utiles fur les beautés & fur les médiocrités de leurs œuvres ; citations qui pourront nous fervir d'exem- ples pour ou contre, dans l'intention que dans ces leçons , la théorie marche d'un pas égal avec la pratique: deux connoiiTances fans lesquelles on ne peut juger équitablement des ouvrages de l'Art. Faute d'avoir ufé plutôt de cette méthode, nous
avons peut-être précédemment rendu l'étude de cette fciençe plus laborieufe ; mais cette route qui n'avoit été frayée par aucun de nos pré- déceffeurs , ne s'eil préfentée à nous que tard; il nous falloit fans doute , pour y parvenir , une longue fuite d'expériences, & les conférences réi- térées que nous avons eu occaiion d'avoir avec nos plus habiles Architectes, & les Artiites célè- bres dans tous les genres de talents. Pleins de vénération pour les productions de
la Grèce & de l'Italie, épris des chefs - d'œuvre des l'Efcot, des Delorme, des DebroiTes, des Lemercier, des Mànfard, des Perrault ; iiiffi- famment inftruits des découvertes ingénieufes faites de nos jours par nos contemporains, dé- veloppons ici, s'il eft poifible, le raifonnement de notre Art; mais pour y parvenir, remon- tons fans ceffe à la fource , & n'oublions jamais l'imitation des chefs-d'œuvre des grands hommes qui nous ont précédés. A a iv |
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376 Cours
Nous ne nous diiîimulons pas la néceffité dans
laquelle nous noxis fommes trouvés, de nous répé- ter quelquefois ; mais ces répétitions nous ont paru être une fuite néceffaire de ce genre d'étude ; Hpus les avons crues indifpenfables pour y ré- pandre plus de clarté , & accoutumer nos Elevés, même ceux qui font déjà inilruirs jufqu'à un certain degré, à fentir qu'il eft eflenciel d'ofofervesr à pîulieurs reprifes & fous diirerentes faces, dans toutes les productions de notre Art, cette poéfie muette , ce colons fuave, intéreffant, ferme ou vigoureux; en un mot, cette mélodie tendre, touchante , forte ou terrible qu'on peut emprun- ter de ia Poéiie , de la Peinture ou de la Mufi- que, & qu'on peut rapporter aux diverfes cotfi» pofitions qui émanent de l'Architeélure^ Au relîe , notre maniere de raifonner, de voir * de fentir ^ ne fera peut - être pas celle de la plupart de nos Contemporains, ni de celle de nos SucceiTeurs; mais nous aurons toujours beaucoup fait, û à ïiotre exemple, nos jeunes Artiftes s'accoutument à raifonner par leur propre expérience, & s'ils fe ireiîbuviennent que la plupart des défauts que nous avons relevés ne nous ont paru tels, que parce que la plupart des productions que nous avons exami·- nées, péchoient en quelque forte contre le raifonne* ment qui fait ici notre objet; nous defiroris donc, que les définitions que nous entreprenons, neuves dans leur genre, donnent occaiion à d'autres plus verfés que nous dans l'art d'écrire, d'approfon- dir les préceptes qu'elles contiennent : ce qu'ils feront à cet égard nous apprendra ce que nous aurions dû faire, leurs fuccès nous feront utiles ; . ils deviendront pour nous des leçons , & contri- bueront à l'entière perfection de l'Art, motif qui |
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d'Architecture. 377
nous eft plu« cher que celui de nous faire un
nom. De la fublimitè de î'Architecture.
Pour fe connoître en Architecture, il faut com-
mencer par en bien apprendre les règles; enfuite acquérir Tart d'apprécier les différents genres de beauté dont elle eil iufceptible ; on rifque autre- ment de prendre pour de vraies beautés la gran- deur , l'étendue, le prix des matières ou la pro- digalité des ornements. Qu'on ne s'y trompe pas > FArchiteâ:ure Egyptienne étoit plus étonnante que belle ; l'Architecture Greque, plus régulière quin- génieufe; l'Architecture Romaine, plus favanté qu'admirable ; la Gothique, plus iblide que fatis- faifante ; notre Architecture Françoife enfin, eil peut - être plus commode que véritablement inté- reifante. Pour définir le fublime dont nous voulons par-
ler , il faudroit foi - même être fublime , & nous fommes bien éloignés de cette perfection. Au reite-, nous convenons qu'il a fes limites qu'il ne faut jamais franchir abfolument, ii l'on ne veut tomber dans le gigantefque ; celui-ci n'en impofe qu'au vulgaire. Un colorié fans proportion & compofé, pour ainfi- dire, de pièces rapportées, ne peut obte- nir les fuffrages des hommes de goût, ni des hom- mes raifonnables, quelque grande qu'en ait pu être· Fidée. Pour arriver à la fublimitè de l'Art, il faudroit réunir, dans.{esproductions, lefavoir, le génie, la" beauté, la régularité, la convenance, la folidité & la commodité ; mais cependant il faut fonger que l'efprit méthodique , la méditation", le flegme, peu- vent produire un bon Architecte, & que le génie , l'ame, l'enthoufiaime, élèvent feuls l'ArtSe aia |
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¥)% Cours
fublime : que Tefprit définit, que le fentiment
peint, & que celui - ci donne la vie à toutes les productions. En un mot, il ferok à deiirer qiuin édifice puifie, à fon afpe&, entraîner, émouvoir, & pour ainii dire, élever Tarne du fpeftateur , en le portant à une admiration contemplative, dont ii ne pQurroit lui-même fe rendre compte au pre- mier coup d'œuil, quoique iiifRfamment initruit des connoiflances profondes de l'Art. Le genre fublime dont nous voulons parler, devroit être par exemple, le propre de l'Architecture de nos Temples ; en effet, tout y doit paroître tracé par une main divine; leur ordonnance doit avoir un caractère facré qui rappelle l'homme à Dieu, à la Religion , à lui-même. Qu'on y prenne garde, certaines Eglifes gothiques modernes , portent cette empreinte : une grande hauteur de voûte qui n'a rien de vulgaire , des nefs & des bas-côtés ipacieux, une lumière modérée & analogue aux myÛeres, des façades élevées & pyramidales, une fimétrie intérieure dans les côtés refpeöifs ( ƒ) ; enfin des dimenfions qui annoncent des préceptes fuivis , quoiqu'ils nous foient pour la plupart inconnus, font autant de beautés qu'on remarque dans quelques ouvrages de ce genre ; & qui de- vroient au moins nous fervir de modèles pour la itruâure des monuments dont nous parlons. Cer- tainement c'eft dans nos Temples qu'il faut de la grandeur, de la majeité , de la dignité; par- tout ailleurs , la beauté, l'agrément peut fuffire \ dans nos Eglifes il faufun tout autre ftyle » une Architecture traitée avec limplicité , peu |
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(ƒ ) Telle eft TEglife de Sainte-Croix d'Orléans, peut-être
Un des plus merveilleux édifices dans le genre gothique. |
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■'■ ■ ■ ' f- '...■■'■■ ;. ■-.'.■.-.
d'Architecture. 379
âe Sculpture , mais admirable : une diitriburioa
fage ; en un mot, une expreiîlon, un enfern?· ble, un afped divin font les beautés qu'on doit chercher à mettre en œuvre dans nos édifices facrés. Un Artiiïe inflmit de la convenance fi bien obfervée, même du temps du Paganifme, s'effor- ceroit de produire de nos jours une ordonnance d'Archite&ure grave, décente, qu'on remarque rarement dans nos Eglifes modernes, parce que communément F Architecture en eil peu réfléchie, & les ornements y font arbitraires. Qu'eft-ce en effet que la plus grande partie des reilaura- tions qu'on remarque dans l'intérieur de pluiieurs de nos ParoiiTes , le plus fouvent du ftuc, de l'or en feuilles, du cartonnage (#) ; nos Théâtres , nos Palais , nos Hôtels offrent à-peu-près les mêmes genres d'ornement ; & à l'exception de quelques chefs-d'œuvre de Peinture & de Scul- pture qui les embellhTent, & qui peut - être fe- roient placées plus convenablement par-tout ail- leurs , on n'apperçoit prefque point dans leurs décorations , ni le Parleur éclairé , ni l'Architecïe véritablement initruit, ni l'Artiile vraiment habile. C'eit envain que Jacques le Mercier & François Manfard nous ont laifîé pour exemple la Sorbonne, le Val-de-Grâce; on veut imiter l'intérieur da dôme des Invalides, celui de la Chapelle de Verfail- les , dans ce qu'ils ont de moins propre au genre dont nous parlons, parce que leurs percés ingé- nieux , leurs formes variées , leurs détails inté- reffants font plus faciles à faifir par le plus grand |
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(g) La décoration du chœur de FEglife de Samt-Méri ,
celle de l'Eglife de Saint-Barthélemi, celle de la Chapelle do Ja Vierge de l'Eglife ds Saint-Sauveur font daas ce cas. |
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$m C o υ r,s ,. .. .
nombre des Artiftes, qui n'ayant ordinairement
d'autre but que de plaire à ceux qui les mettent en œuvre, négligent les beautés de l'Art ; au- lieu que le véritable Architecte s'occupe effen- eiellement à tâcher de faire paffer ies chefs - d'œu- vre à la poitérité. L'Architecture iublime efl encore du reiïbrt des
Bafiliques, des Edifices publics, de la fépulture des grands hommes, & généralement de tous les monuments élevés pour rappeler à la mé- moire des Citoyens, les hauts faits , les actions éclatantes, la valeur des Princes , des Héros &. des grands Gapifaines. Par les grands traits qui la caraétérifenr. elle élevé Tefprit de l'examina- teur, lefaifit, l'étonné: les vrais ConnohTeurs lä reconnoiiTent par une régularité qui n'a rien de monotone , par des accompagnements aiïbrtis ; en un mot, par un accord général, qui fe fait admirer & approuver dans tous les temps. Telle eil celle de l'intérieur du Val-de-Grâce, dupériitile du Lou- vre , de la porte de Saint - Denis, de l'orangerie de Verfailles, qui, par la beauté de leurs maiTes & l'enchaînement de leurs détails , affurent au regne de Louis XIV, à ces édifices & à leurs Au- teurs , une gloire véritablement immortelle. Nous venons de dire , qu'une Archite&üre fu-
blime excitoit dans le Spectateur une admiration muette & contemplative. Entrons à préfent dans quelques détails concernant le genre de l'admiration que doit faire naître en nous une ordonnance d'Ar- ehitedure, vraiment digne de fe faire admirer, ou dans fa totalité ou dans quelques-unes dé fes par- ties principales. |
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©'Architecture.' 381
De l'admiration, que peut caufer l'Architecture.
On pourroit appeler une Archite&ure eifen-
ciellement admirable, celle qui raifembleroit tous les différents degrés de perfections de l'Art. Peu d'édifices offrent autant de merveilles, parce que la plupart des beautés de l'Architecf ure, fes préce- ptes exceptés ? font coniidérées parle grand nom- bre des jeunes Architectes, comme des beautés de convention, qui dépendent du goût particulier de l'Artiite; enforte que par cette indépendance il leur devient difficile de parvenir à faire trouver aux autres , leurs productions véritablement admira- bles : en effet, pour qu'un édifice pût être eilimé tel, il faudroit qu'il entraînât unanimement tous les fuffrages* Or ce degré de fupériorité appar- tient rarement à l'Architecture prife en général ; on ne le trouve guère que dans quelques-unes de fes parties coniidérées féparément. ^ar exemple > la décoration d'un fallon , l'appareil d'un bâtiment, la diilribution extérieure d'un ou de pluiieufs ap- partements peuvent caufer fde l'admiration, parce que la caufe de cette admiration eil, pour ainfi dire , indépendante des beautés de l'enfemble de l'édifice. I On dira bien, La façade du coté des Jardins du
Château de Maifons eii admirable, pour exprimer la régularité de fon Architecture, & l'application dé fes ornements ; on aura raifon,: mais cette admira? tion ceffera peut-être, quand on comparera cette belle ordonnance extérieure avec la diftribution in- térieure du bâtiment, parce qu'on apercevra un défaut de relation dans l'enfemble. On pourra dire |
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j8i € Ö ij ft $
auiïi : L'avant-corps du Château de Clagny ('kjj
du côté de l'entrée', eil admirable , cela fera vrai; maison fera forcé de convenir, que c'eil de cefeul avant-corps qu'on voudra parler, les autres parties des façades de ce bâtiment lui étant de beaucoup inférieures. On dira encore : Ce fallon eil admirable, en parlant de celui du Château d'iiTy, parce que l'ordonnance de fon Architecture elt belle, & que la Sculpture qui la décore , eil de la plus grande perfection ; mais on ne pourra fe refufer de <Ée- iirer plus de hauteur à cette pièce; défaut qui détruit, en quelque forte l'admiration du Specta- teur éclairé , qui lui fait fouhaiter que l'Archi- te&e eût pu réunir dans cette pièce, lé rappôjk des dimeniions. à ces deux beautés du premier genre. Enfin on dira i la diilribution dé l'hôtel de Birön, comme maifon particuliere , eil admirable (i) ; mais l'on fera forcé de convenir de la mé- diocrité de l'ordonnance des dehors , & de la négligence de l'appareil de fa conilruclîon/ Pour qu'un édifice, ou plutôt pour que ÎAr^
chiteclure piiiiTe être trouvée véritablement admi- ι
*{h) Voyez les bâtiments cités dans cette définition, dans
les premier, quatrième & cinquième volumes de VArchite- cture Françoife. i ; (i) On donne à mie dlftributibn l'épithete d'admirable,
lorfqu'elle .raiTemble tous les bê foin s du propriétaire 5 quelle offre uji plan d'une belle forme par fa difpoiîtion générale y ides pièces principales bien proportionnées , celles d'habita- tion bien expofées, celles de commodité bien dégagées/On dit encore, cette diftribution a droit.de fe faire admirer, lorf- qii'on apperçok quëTArchiteéte a pris foin de réunir la iymé- trie des dehors, avec celle des dedans, & qu'il a obferve une variété néceiTarre dans la forme de chaque pièce, con- sidérée en particulier , en leur confervant néanmoins un? rapport exact dans leus« dimeniions. Par exemple, on dira |
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d^ArchitëCtxjïii. 3$3
table, il faut donc que la beauté de l'ordon-
nance des dehors d'un bâtiment, la commodité des dedans & la folidité de fa conilruftion , ne fe démentent jamais, & que ces trois objets y femblent réunis de maniere à ne lahTer rien à délirer abfolument. Sans doute ce que nous fem- blons exiger n'eft pas fans difficulté ? parce qu'affez communément les connohTances particulières de ces trois objets ont fait dans tous les temps l'étude féparée de quelques-uns de nos Archite&es; & que pour que l'ordonnance, la diitribution , la conitruction d'un Edifice public, d'un Palais, d'un Hôtel fuffent telles que nous le deiirons, il fau- droit qu'on eût fait d'abord, lors de (es études, des recherches profondes fur chacune de ces parties, enfuite des tentatives pour parvenir à leur parfaite conciliation ; il faudroit que leur décoration imitât d'aifez près, la beauté &l la per- fection de celle des Grecs 8ç des Romains, la ïbli- dité & la légèreté de celle des Arabes; enfin la commodité & l'agrément de notre diitribution Françoife.- - - ■ . Au reite , la décoration , la diiïribution * Pap-
pareil d'un bâtiment, pour être véritablement admi- |
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avec raifon: La diitribution des grands appartements du pre-
mier étage , & les petits appartements du rez-de-chauffée de THôtèl de T.ouloufe , font admirables ; où en dira autant de ceux du rez-de-chauffée du Château de Périgny en Bourgo- gne, & de ceux de l'f^ôtel de Ghoifeul à Paris, parce que ces appartements raiTemblcnt dans leur diitribution , / la beauté , la dignité & la convenance qu'on y doit defirer. L'on n'en pourra peut-être pas dire autant de la diftribution du Palais des Tuileries „ de celui du Luxembourg, du Château de Maifons ; parce que les commodités, la régularité, fem- blent en être exclus , & que ce dernier genre de perfection cft dû aux découvertes des Architectes de notre fieclç«: .,, :;- |
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3^4 Cours
râbles, chacun dans leur genre, ne doivent ries!
tenir d'une imitation trop fervile ; pour que les différentes parties de Γ Art puiffent acquérir ce titre, il faut que ces trois branches de l'Archi- tecture portent un certain caractère d'originalité qui les diftinguent de la claffe ordinaire. Afin d'y par- venir, expliquons féparément ce que nous croyons devoir entendre par une Architecture qui, dans ion ityle, porte ce cara&ere d'originalité dont nous voulons parler. Du caractère d'originalité dans £ Architecture*
On dit : Cette compontion e'ft. neuve, le ilyle
de fön ordonnance elf original, n'a rien de com- mun , de vulgaire, lorfque dans fa décoration -on remarque que le génie créateur de l'Annie a fu franchir les limites de l'Art, fans cependant s'être trop écarté des préceptes reçus, à deffein de -répandre, dans fa;production, des formes d'Archi- tecture intéreffantes, & certaines allégories dans les ornements ; mais les unes & les autres doivent étrepuiiées dans le motif qui a donné HeviA l'édifice. Celle dont le mouvement ohfervé dans là diitribution des corps extérieurs, s'accorde avec les parties dyrämidales des façades : celle qui n'ayant rien de trivial, montre par le caractère de fon Archite- cture, une ordonnance grave, mais noble ; agréa- ble , mais iimple ; grande , mais jamais gigantéf- qùe ; ces fortes de formes ont ^également droit ;de fe faire admirer, quand on les applique d'une maniere analogue au genre de l'édifice : perfec- tion ,- il eft vrai -y qu'on rencontre rarement dans .nos bâtiments , quoique la plupart compofés de membres d'architecture ufités dans les décorations leg
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β 'Ά R CH ITÉéTUR E. $t$
les plus approuvées , mais qui foiiventdiiiribuées
fans choix, fans goût, en un mot, d'une maniere ' oppofée à Tob jet qu'on fe pfopofe* ne préfentent qu'une ordonnance très-imparfaite; tels ont été à-péu-près les ouvrages des MefTonnier, des Op- penor , des Cuvillier , &'c. dont les exemples font plus capables de faire naître le dérèglement de l'imagination , que d'éclairer nos jeunes Àrtiiles fur la maniere de fe conduire dans les différen- tes productions de l'Ait. Au-lieu de fuivre cette xoute incertaine, & remplie decœuils, nous leur confeillons de former le plan de leurs études d'après les chefs-d'œuvre fans nombre que nous a laiffés en ce genre, Hardouin Manfard , un de nos Archi- tectes François, qui a pouffé peut-être le plus loin, ce caraâere d'originalité dont nous parions ici. On l'admire dans le Château de Clagny, à Trianon» dans le Château & les Jardins de Marly, dans les dehors de Veuilles du côté de Paris. Toutes ces comportions neuves, d'une difpoiition Si d'un genre inconnu avant lui, font autant d'exemples admira- bles qui peuvent dans la fuite doniierje ton à nos Elèves, s'ils apprennent une fois à fentir qu'il n'eft point de vraies beautés dansTArchite&ure en gé- néral ni dans un projet particulier, ii l'on n'y remarque de certains traits , que le genre feula droit de faire éclore, & qui pour être approuvés » doivent convenir au local, aux différents afoe&s du bâtiment, àia ikuation & à fon expofition. Ces différents moyens , bien envifagés de la part de l'Architeâe, le conduifent à ces écarts heureux, à cette tournure d'imagination , à ces reiTburces de l'Art, que l'homme tranfcendant fait fe per- mettre. C'eil ce caraâere d'originalité qui l'autoriTe quelquefois à donner des formes moins reftiÎir Tome ƒ,-.- Bb |
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386 Cours
gnes à fes façades, à faire céder les ailes au prin-
cipal corps de logis ; enfin à faire pyramider cer- taines parties pour leur donner la prééminence fur certaine autre ; route fûre , & peut - être la plus propre pour nous faire donner de la variété aux édifices de même genre. Voilà où peut nous con- duire l'examen réfléchi des bâtiments que nous ve- nons de citer ; on peut y ajouter ceux de Meudon 9 de Chantilly, de Sceaux , de Saint - Germain - en- Laye , & quantité d'autres > vus du côté où nous les envifageons ici. Traitons à préfent de ce que nous concevons nous-mêmes par une Ar- chitecture appelée Architecture Pyramidale pro- prement dite. De l'Arckiteciurc Pyramidale.
On dit communément, Cette Architecture eit
pyramidale , lorfquon veut exprimer que l'Ar- chiteâe a élevé pour cette raifon , un dernier étage au - deifus de ceux qui terminent la par- tie Supérieure de fon principal corps de logis; pu lorfquefans ce fecours il a prévu qu'en don- nant une affez grande faillie à fon avant-corps, fi préémineroit fuiEfamment par l'effet de Γορ- fique , quoiqu'il ait tenu les étages de fes façades à une même hauteur. Hardouin Manfard s'èftfervi avec beaucoup de fuccès, du premier moyen au Château de Clagny, & du fécond au Château de Verfailles du côté des Jardins. Nous croyons que celui-ci doit avoir la préférence dans les grands édifices , celui-là dans les bâtiments de. peu d'éten- due , parce qu'autrement il feroit à craindre qu'une trop grande faillie donnée à lavant-corps, ne divifât trop l'ordonnance de la façade, & noc- çafionnât trop de dureté dans la décoration· |
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d'architecture. 387
Les Architectes Arabes ont excellé dans les
formes pyramidales ; peut-être auiïi ont-ils pouffé îufqu'à l'excès , cette maniere de décorer leurs édifices, la plupart ayant afie&é jufques dans les plus petits détails des pyramides percées à jour » evidées, & d'une ftxudture peut-être plus éton- nante qu'admirable, Le clocher de Strasbourg, celui de la Mainte-Chapelle à Vincenrîës, celui du Palais à Paris, le portail de Reims, Saint - Ouen à Rouen , prouvent aflez ce que nous avançons; mais néanmoins ces formes pyramidales, peut- être trop réitérées , & prefque toujours mono- tones , ne fatisfont pas en ce genre, autant que • quelques-uns de nos édifices modernes, où Tort remarque que les maffes, quoique moins eonfi- dérables , & les parties plus d'accord entr'elles , femblent intéreffer beaucoup plus que ces ou- vrages gothiques aflez célèbres , mais enfants de la fingularité , & du goût dominant de leurs ordon- nateurs. ■·.· ..-./'·· .'."j:../î:v: De tous nos Auteurs modernes, Palladio eil
celui qui certainement a entendu le mieux les formes pyramidales dont nous voulons parler. Entre nos Archite£tes François, Jules Hardouin Manfard & M. BofFrand, font ceux qui s'en font acquittés avec le plus de fuccès. DebroiTe & Le Mercier ont auiTi donné des preuves de l'excel- lence de l'Art dans cette partie de l'Architecture; le premier au Luxembourg, à Saint-Gervais ; le fécond à la Sorbonne, au Château de Richelieu : aulîi rien de plus agréable que ces productions ; rien de fi charmant que celles de Palladio dans les bâtiments qu'il a fait élever à Bologne', k Vicence; en un mot, rien de fi intérefTant que les Invalides , le Château „de Clagny par Hardouin* Bb ij
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$S8 Cours
& ceux érigés par M. Boffrand , en Lorraine »
«n Allemagne & ailleurs ; mais voyons plus par> ticuliérement ce que Ton peut concevoir par une Architecture véritablement agréable. €e qu'on entend par une Architecture agréable.
Pour que la décoration d'un bâtiment ibit véri-
tablement agréable , il faut qu'elle foit fufceptible des formes pyramidales dont nous venons de parler, & qu'elle préfente dans fon ordonnance tous les agréments que peuvent permettre les règles de l'Art, & l'affociation de la Sculpture avec Γ Architecture ; que les formes élégantes puifTent entrer pour quelque ehofe dans la coril·- * poiition de {qs parties & de fes détails , & que la convenance de l'édifice puiffeles autorifer. Une maifon d'une Architecture agréable , eil encore celle où l'on apperçoit dans la diitribution exté- rieure & dans la diverfité de la hauteur des pa- villons , des avant-corps & des ailes, une variété qui offre à l'œuil du Spectateur quelque chofe d'intéreffant, & où il remarque des proportions exaftes fans fervimde , agréables fans frivolité * & enfin riches fans confiiiion. Le genre agréable eit le propre d'une Maifon de Plaifance, d'une jolie Maifon de Campagne : le petit Château de M. de la Boifïiere,, rue de Cliçhy , par M,: Le Carpentier , offre très-bien , dans les dedans & dans les dehors, limage de ce que nous voulons peindre ici ; mais il faut favoir qu'en gé- néral l'agrément dont nous parlons eil beaucoup plus du reffort de l'intérieur que. de l'extérieur des bâtiments, parce que la variété des matières dont on revêt les différentes pièces des appartements , h légèreté qui eft de leur reffort a & Taffemblage |
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d'Architecture. 3S9
des divers Arts qui s'y trouvent raffemblés, offrent
naturellement & fans avoir recours à la prodiga- lité de la Sculpture, quelque chofe d'agréable qui fatisfait l'œuil, même des moins connoiffeurs en Architecture. On doit encore favok, que dansles pièces de parades il faut que la dignité l'emporte fur l'agrément, & que la fymétrie fnffit prefque toujours dans les appartements privés; mais que fur-tout dans les dehors il faut éviter la répéti- tion déplacée ou la futilité des contours, la fri- volité ou la pefanteur des ornements, qui bien- loin de produire le genre agréable dans la déco- ration extérieure, comme quelques-uns fe le per- fuadent , ne produifent que des comportions hazardées que tout Artiile habile fait profcrire , & qu'il regarde avec la plus grande indifférence , fans vouloir s'y prêter, ni en perpétuer l'efpece ; parce que tout ce qui lui parok contraire a la convenance des lieux, des temps & des perfon- nes pour lefqueiles il bâtit, lui femble toujours produire plutôt la médiocrité de l'Art, que fes îiiccès. PaiTons maintenant à ce que nou5 appe- lons convenance en Architecture. De la Convenance, en Architecture.
On dit qu'un bâtiment a de la convenance y
lorfquon a remarqué que fa difpofition extérieure &les principales parties de fa décoration font abfo- lument relatives à l'objet quia donné lieu à ériger l'édifice , lorfque l'efprit de convenance y préfide, que la bienféance [k) γ eilexaftement obfervée, |
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(k) En Archite&ure on fe fert du terme de bienféance,
tour défigner l'aflortiment da ftyle de l'ordonnance avec lts Bbiij
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3ço Cours
que ÎOrdonnateuf a prévu dans toute fon ordon-
nance , le ftyle & le caractère dont il devoit faire choix, pour exprimer en particulier dans Fembel- liffement de nos Temples ., de la décence ; dans les Palais des Rois, de la magnificence; dans les édi- fices publics, de la grandeur ; dans les monuments élevés à la gloire des grands, de la fbmptuoiité ; dans les promenades, de l'élégance ; dans les bâ- timents érigés pour la fureté, de la folidité ; dans ceux élevés pour l'agrément, de la légèreté ; dans la demeure des riches particuliers, de la beauté ; dans les maifons à loyer, de la commodité ; dans les dedans des appartements , de la variété. Cer- tainement un Architecture convenable, telle que nous l'entendons, doit avoir pour objet de pein- dre aux yçux des étrangers , ou la dignité, ou la valeur , ou l'opulence , ou l'économie. Qu'on y prenne garde, c*eit vouloir s'en tenir à la rou- tine ; c'eft vouloir méconnoitre la poéfie de l'Art, que de négliger ce coloris de l'Architecture : un édifice doit, au premier regard, s'annoncer pour ce qu'il eft. La Porte Saint - Denis, par exemple * ■——
choix des ornements. Par exemple , c'eft manquer à la
bienféancç , que de faire ufage d'attributs prophanes dans les monuments faciès t d'ornements arbitraires ; dans les édifices publics ; de faire parade d'un ordre ruftique dans lés Palais des Rois Λ où lé comporte feroic plus convena- ble j d'employer une multitude de membres d'Architu&ure , où la {implicite doit avoir le pas ; de faire ufage des matières factices, où les matières premières doivent çtre préférées* ou parce qu'elles occaiîonnent plus d'accélération, ou parce qu'elles apportent plus d'économie dans l'entreprife, On ne peut l'ignorer, la bienféancç mené au vrai, parce qu'elle pré- fer ve néceiTairement TArtifte de tout écart $ qu'elle lui indi- que la vérirable place du fublime, du grand, du ÎÎmple ^ 4c l'élégant j perfection qui fçuje, peut Iç ÇQnduirç à l'exccl- knçc dç ΓΑ«, |
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; d'Architecture. 391
Tare de triomphe du Trône , l'intérieur de la
Sorbonne & du Val-de-Grâce, l'ancien Château de Saint-Germajn-en-Lay e,, celui de Clagny, celui de Maifons , l'Orangerie de Verfailles » les Ecuries du même Palais, s'annoncent pour ce qu'ils font ; ils pféfentent chacun féparément cet efprit de con- venance que nous recommandons , & affurent à nos Architectes François > cette réputation accor- dée à ii jufte titre , à ceux de la GLrece & de l'ancienne Rome, qui font parvenus à fe faire admirer & imiter , parce que leurs productions étoient vraies ; diitin&ion particuliere qu'il ne faut, pas confondre, & dont nous allons parler pour enfeigner Fart de démêler les expreiîions & les caractères répandus dans les divers édifices^antit· ques & modernes. * Du flyU vrai en Architeäum.
On dit métaphoriquement, Cette Architecture
eil vraie , lorfqu'on veut déiigner celle qui cône ferve dans toutes fes parties le ftyle qui lui eft propre »fans aucune efpece de mélange; celle qui préfente un caractère décidé , qui met chaque membre à fa place , qui n'appelle que les orne- ments qui lui font nécefTaïres pour l'embellir $, celle où Ton évite une variété déplacée qui tient du contraire, & où la iimétrie & la régu- larité font préférées ; enfin une Architediire vraie eft celle qui plaît aux yeux, par l'idée qu'on s'eil formée dit genre de l'édifice , & qui ne tenant ni du préjugé national ni de 1'bpinion parti- culiere de l'Artifte , paroît puifée dans le fond propre de l'Art, & qui par cette raifon ne per* inet à l'Archite&e, ni la prodigalité dans les ογβφ~ Bb iy
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3pi Cours
ments, ni l'habitude dans fes goûts, ni la futilité
dans les détails ; en un mot, celle qui dépouillée de toute équivoque, fe montre belle dans fon ordonnance, commode dans fa diitribution ? Se folide dans fa conitruction. Lorique par des considérations particulières on
eft retenu, ou par l'économie , ou par la difette des matières, ou par la néceiiité de quelques affujé- riiTements relatifs à une reitaurarion, & qu'enfin on ne peut arriver au caractère vrai dont nous voulons parler : au moins faut -il, au défaut de cette variété fi fatisfaifante dans la décoration ues façades de nos bâtiments , y fubiHtuer cette vraisemblance qui en approche , & qui feuîe peur, dédommager d'un ityle vrai, la fource des chef-- d'œuvre élevés par les grands Maîtres qui nous ont précédés. Expliquons ce que nous entendons par le vraisemblable qui peut fe fubitituer à ce caractère vrai, qui feul peut produire l'unité, & qui doit être regardé comme le premier mérite de l'Art. De la vraisemblance en Architecture*
Une Architecture vraie plaît à tous les yeux i
une Architecture vraisemblable ne plaît qu'à la raifon éclairée ; c'eft celle, qui dans fon ordon- nance ne montre rien qui ait droit de choquer le Spectateur initruit, quoique l'Architecte ait quel- quefois franchi les vrais principes de l'Art; celle où l'on s'apperçoit que fà richeife ou fa fimplicité, fa force ou (on élégance , prend fa fource de la iituation du lieu ou l'on bâtit, & de h néceiïité des matières réelles ou factices que fouvent on ci! obligé de mettre en oeuvre \ celle où l'on. |
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d'Architecture. 393
remarque que la réalité des proportions combinée
avec l'aparence de ces mêmes proportions, con- court à faire admirer le frontifpice d'un Temple, la décoration d'une place publique , ou la façade d'un bâtiment : la réalité par les grandeurs géométra- les, l'apparence par des hauteurs variées & relatives à l'effet de l'optique ; en forte qu'avec le fecours de ces moyens, mis en œuvre par la théorie de l'Art, l'édifice vu d'un point de diilance déter- miné , puiffe plaire également, & aux connoif- feurs &■ au vulgaire. Enfin une Architecture vraif- femblable , telle que nous l'entendons , eil plutôt le fruit du raifonnement & de la méditation de l'Archite&e , que l'application firi&e des préce- ptes , la vraiffemblance étant quelquefois préfé- rable à une vérité qui rebute fouvent plus qu'elle ne fatisfait : par exemple , l'angle faillant d'un avant-corps, l'encoignure d'un bâtiment, un tru- meau , un pied-droit, trop peu coniidérables en apparence, n'en offrent pas moins à la réflexion la folidité réelle de l'édifice ; mais ces différentes parties péchant contre l'a vraiffemblance, leurs apparences bleffent l'œuil de l'examinateur, & par cette raifon doivent être rejetées. Un édifice , quoique bâti avec fureté , n'en paroît pas moins choquant ; parce qu'on a cru pouvoir y négliger la vraiffemblance dont nous parlons. Cette qualité eft préférable en bien des occafions à la réalité , & à ce caraclere vrai que nous venons cependant de regarder comme le premier mérite de l'Ardu-' teclure, mais dont on peut s'écarter quelquefois pour donner encore plus de beauté à fa produ- ction. Ce mot, beauté, nous avertit de paffer à ce que nous entendons par unç belle Archite« &ure. |
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394 Cours
Ce qu'on entend par une belle Ârchiuclure.
• On dit communément qu'une Architecture eiî
belle, lorfqu'on veut exprimer aux autres le plai- iïr qu'on a reiTenti au premier afpecl: d'un édifice» où l'on a été frappé d'une heureufe difpoiitioii dans le rapport des maffes , la répartition des parties, la divifion des détails, & où l'on s'eil apperçu que l'Archite&e avoir fu marier eniëmble la Variété d'un ityle puifé dans les préceptes de l'Art, avec la vraisemblance , le fruit de fon bon goût& de fon expérience. Une belle Architecture eil encore celle dans la compoiition de laquelle on reconnoît un ftyle fage (7), & où cependant on a pris foin d'aiîbcier une excellente Sculpture , des ornements d'un beau choix, une grande per- fection dans la main d'œuvre, de la précifion dans. 1'appareiJ, & de l'attention dans la qualité de la matière ; en forte que l'Architede , les Artiites & les Artifans femblent avoir concouru les uns & les autres à élever un chef-d'œuvre. ! Les Châ- teaux de Maifons & de Blois par François Man- fard ; le périitile du Louvre , par Perrault ; la porte Saint-Denis, par François Blondel, pré- sentent ce bel effet, cette nobieiïe & cette unité dont nous allons parler. |
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, (./) On fe fert de Vépithetc fage en Architecture, pour pein-
dre à l'efprit de ceux à quiTon en veut faire la defcriprion , la retenue dont l'Architede a fait ufage Λ pour donner un caractère modefte à la décoration des lieux Saints, à l'habi- tation des personnes, qui par état font chargés de difpenier les faveurs du Prince , d'employer les. deniers publics , d'ac- corder les différents qui naiifent entre, les Citoyens, & gé- néralement dans toutes les efpeces d'édifices élevés plutôt pour l'utilité que pour l'agrément & la magnificence. |
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»'Architecture. 395
De la noblejjé des formes en Architecture.
On peut dire , cette Architecture éft d'un ftyle
noble , lorfque le choix de fon ordonnance lahTe voir dans tout fon jour une Archite&ure traitée en grand , & d'un goût impofant, vraiment digne de nos Temples , de nos édifices publics , de la réii- dence des Têtes couronnées , & de l'habitation des hommes du premier ordre ; celle qui tenant aux règles de l'Art, préfente une grande compoiition fans être coloffale , une ordonnance aflbrtie au motif qui a donné lieu à Tentreprife ; celle qui par le choix de l'ordre, tel que le Corinthien ou le Com- pofite, amené fur la fcene l'application d'une certaine quantité d'ornements , qui néanmoins n'y paroif- fent appelés que par la néceflité ; celle qui exem- pte de petites parties , grandit, pour ainfi di|e , l'imagination de l'admirateur, par le fpeclacle in- téreffant que lui offrent l'étendue des bâtiments , leur forme pyramidale , la grandeur des cours , la relation des iffues ; aiïbciation qui contribue plus qu'on ne s'imagine à embellir l'édifice , & à donner une idée avantageufe des talents de l'or* donnateur & du goût du propriétaire. La dif- pofition extérieure de Verfailles du côté Paris , îavant - cour du Château de Meudon, la régula- rité des bâtiments , & des dépendances qui pré- cédent le Château de Maifons , font certainement des beautés du premier genre, qui contribuent beaucoup à donner ce cara&ere de nobleffe & de dignité dont nous parlons, aux bâtiments de Verfailles, à celui de Meudon, & à relever l'éclat de la belle ordonnance d'Archite&ure du Châ- teau de Matfons » qui * plus qu aucune, autre, |
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396f Cours
repréfentë ce caractère d'unité dont nous allons
faire ici un article particulier. De l'unité enArckiteclure.
L'unité dans l'ordonnance d'un bâtiment eil une
des principales beautés de l'Architecture ; les Grecs ont excellé dans cette partie : ils dévoient à la vérité beaucoup aux Egyptiens ; mais ces derniers n'a- Voientpour ainii dire, qu'ébauché l'Art ; il falloir des peuples de favants, des hommes de génie, des Princes généreux pour multiplier l'efpece des monuments, pour donner oçcaiion aux dévelop- pements des règles de l'Art , pour perfectionner le bon goût de Γ Architecture. Ces beautés conf- iantes, ces découvertes heureufes, cette variété d'édifices étoient reiervées aux Citoyens d'Athènes. L'ancienne Rome a vu naître fans doute plus
d'un chef-d'œuvre ; mais ces productions , pour la plupart plus grandes que féveres, plus com- pliquées , plus chargées d'ornements , étoient au- tant d'obrlâcles pour leurs Architectes , & autant de moyens qui les écartoient des lois fondamen- tales de l'unité dont nous parlons. Les Artiiles de la nouvelle Italie ont encore dégénéré en per- dant de vue les originaux ;ils ont préféré à l'unité, à la belle fimplicité ( * ), la pénétration des corps, la mutilation des membres d'Architecture , le con- |
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(*) Une Architeéture iîmple devroit être la plas eftiraée
de toutes; la fimplicité eft le propre des ouvrages des grands Maîtres j elle porte un caractère que l'ait ne peut définir, Se que le plus habile Profefleur ne peut enfeigner 5 elle feule > peut enchanter l'ame & les yeux ; elle mené au fublirne ,. 8c eft toujours préférable t quoi qu'on en difeγ à ces conâpo-; |
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d'architecture. 397
tfafte des formes. Au Ai, à l'exception de quelques
édifices facrés élevés depuis que la chrétienté y a établi fon empire, il faut chercher l'Archite- cture Romaine dans les entrailles de Rome. Peut- être la France en imitant les procédés des Grecs & des anciens Romains , à furpaiTé les produ- ctions qui f e font élevées depuis dans cette Ville autrefois fi fuperbe ; du moins pouvons-nous dire qu'elle s'eft frayée une nouvelle route, en cher- chant à fuivre l'antique dans l'ordonnance des dehors de fes édifices ; & que non-feulement elle a perfectionné l'art de bâtit proprement dit , mais qu'elle a créé pour ainfi dire un art de la di- itribution: en forte que par cette triple unité elle s'eft acquife le droit de prééminence fur toutes les productions de ce genre , mifes en œuvre par les nations les plus floriffantes de l'Europe. En bon Citoyen , nous convenons, de cet
avantage ; mais en Artiile impartial, nous fom- mes forcés d'avouer que nous négligeons encore trop fouvent l'unité qui fait ici notre objet, malgré la quantité de chefs-d'œuvre que nous ont laiflés pour exemples les Lefcot, les Delorme, les Man* fard , les Debroffe , lés Lemercier, les François Blondd, les Perrault , les Bullet, &c. & qu'il nous refte peut-être au moins ces trois points de réunion à perfectionner , pour donner à notre Architecture ce dernier degré de fupériorité , qui t .'
fitions forcées qui décèlent l'Art, & à cette multitude d'orne-
ments dont les hommes fans doctrine furchargent leurs produ- irions ,-parce qu'il eft plus aifé de plaire au vulgaire par la confufîon des membres & la prodigalité de la Sculpture, que par la fimplicité dont nous parlons : il n'y a qu'un très-petit »pmbtç de Conjioifleurs qui fâchent la tentir & rapréciej;. |
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3<$ Cours
ïeul peut la rendre véritablement recommandabîe,
Offrons ici, s'il nous eft poiïible, les princi-
paux traits qui, félon nous, cara&érifent l'unité dans Γ Architecture. L'unité confifte dan* l'art de concilier dans fon projet la folidité , la commo- dité , l'ordonnance , fans qu'aucunes de ces trois parties fe «létruifent ; à n'admettre jamais plufieurs genres , ni différentes exprefîions dans fa décora- tion , à n'y placer aucun membre d'Architecture ni de Sculpture qui ne foit puifé dans la même fourçé, à éviter de faire parade dans un même étage, de plufieurs ordres de diamètres & de cara- ctères différents, à faire en forte que les entable- ments , commencés modillonaires, ne deviennent jamais denticulaires dans une même décoration (/ra); à n'affecter jamais d'interrompre, fans une néceffité abfolue , le niveau des architraves & des corniches des frontons, ni les différents étages apparents d'un bâtiment, à moins qu'on ait re- connu cette licence indifpenfable dans la déco- ration extérieure defon ordonnance, en faveur de quelque fujétion intérieure, tenant à la folidité ou à la commodité; à ne point abiifer de trop de richeiTe dans les avant-corps, & de trop de iimplicité dans les arrieres-corps d'un édifice; à ne point faire ufage de trop de mouvement dans les plans , lorfqué la (implicite des façades fèmble défapprouverl'abus des reffauts des avant-corps, & des arrieres-corps dans fa difpoiition générale; à éviter trop d'inégalité dans la hauteur des com- bles de la façade d'un principal corps de logis ; à ( m ) Comme à Saint-Louis du Louvre, Se aux Dames de
Saxate-Eliiabeth, tue du Tçmplç, . ;. - |
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d'Architecture. 399
ne pas croire que pour éviter k monotonie, il faille changer la forme ni la proportion des ouvertures dans le même étage d'un bâtiment ; à prendre garde de mettre trop d'inégalité dans les trumeaux des façades, quoique cette inégalité paroiffe au- torifée en apparence par la réitération des corps qui la fubdivifent ; à prendre foin dans les aîles d'un bâtiment, quoique plus baffes que le prin- cipal corps de logis , de rappeler le même genre d'Archite&ure, qui regne dans l'étage auquel celles- ci fervent de continuité ; en un mot, à faire en forte que depuis la principale*iffue jufquà la porte du veitibule on reconnoiffe le même efprit , la même expreffion , le même ityle, malgré les gradations , les nuances qu'on doit obferver né- ceffairement entre les dépendances, les parties acceffoires , & l'objet principal de l'édifice. Ces différentes parties doivent être variées ; mais l'uni- té générale que nous venons de recommander , ne doit pas fouffrir de cette variété dont nous allons parler. De la variété en Architecture.
Une Architecture variée eft appelée ainfi, lors-
que dans la façade d'un bâtiment d'habitation on apperçoit, fans déroger aux lois de l'unité, une différence louable dans les formes des ouvertures » & dans l'inégalité des encoignures , comparées avec les trumeaux, les écoinçons. Il faut que la réitération des ayant-corps & des pavillons auto- rife cette variété. Pourvu qu'elle foit toujouts foutenue par le fond du ftyle de l'ordonnance, elle eft préférable à une répétition monotone, cniç réclame fouvçnt l'égalité des vidôs & de« |
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400 Co V R 5
pleins dans l'ordonnancé d'un bâtiment public*
dont l'économie, la foîidité & la limplicité doivent décider le cara&ere; mais dans un grand Hôtel, dans la maifon d'un riche particulier, cette exacti- tude devient plutôt une ilérilité qu'une beauté de iîmétrie. Il faut, pour plaire , obferver dans les comportions des façades de ces bâtiments, un jeu, un mouvement, une variété intéreiTante, fans pour cela affe&er de placer des ordres dans les avant-corps , de les fupprimer dans les arrie- res-corps; ce feroit alors faire parade d'une variété mal entendue (/2). Il faut néceffairement dans ceux-ci des pilaitres ; dans ceux-là des colon- nes (o), par la raifon que l'entablement deve- nant commun à ces différents corps , il eit né~ ceffaire de conferver une certaine unité dans la hauteur de chaque étage ; car autrement il ieroit à craindre d'introduire plutôt une \difpa- rité frappante, que la variété que nous re- commandons ici. Au reffe , il faut fa voir que cette variété eft inconteftablement plus du reiïbrt des dedans que des dehors; parce que les dé- corations des pièces d'un appartement doivent néceifairement être différentes entr'elles, & l'or- donnance des façajdes être une. Il eil même nécef- faire que les appartements de parade , de fociété, privés, different entr'eux, & que la décoration |
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( n) Les façades des Hôtels d'Eftrées, de Rotelin , de la
Vriliere, d'Auvergne, Faubourg Saint-Germain, ont tous ces défauts. Voyez- les deifins de ces façades dans le premier volume de l'Architecture Françoife. > . ( o) Comme aux Châteaux de Maifons , de Montmorency,
de VerfailleSj que l'on peut comparer, pour l'ordonnance, avec ceux A'ïfy ; de Berry > du Palais Archiépifcopal de Bourges du côté du Jardin. extérieure
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d'Architecture. 401
antérieure de la demeure des Grands , celle des
Particuliers , celle du Prélat , du Magiiïrat, de l'Homme de guerre, fuient traités d'un ifyie ( ρ ) & d'une maniere ailbrtie à ces différents ordres de Citoyens, variété que la convenance impofe né- ceifairement , que le goût autorite , & qui eiî: préférable à beaucoup d'égards, à cette routine de l'Art, qui fait placer indiftintÎement les mêmes ornements, les mêmes fymboles & les mêmes allé- gories dans les edifkeSk.de genres différents. Cette uniformité n'annonce rien de libre dans la compofi- tion , aucune forte d'abondance dans les formes, ni cet efprit qui met chaque partie à fa place. Trai- tons en particulier de ces trois différents objets , & commençons par expliquer ce que nous enten- dons par une Architecture libre. Ou caractère libre en Architecture.
On dit : Cette compofition eil d'un ftyle libre }
aifé, facile, pour exprimer une ordonnance qui ne tient rien de la fervitude de l'art , mais où néanmoins l'on a fu éviter, dans la técoration , |
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(p ) Par flyle en Architecture * on entend le véritable genre
<Iont on doit faire choix., relativement au motif qui fait éle- ver l'édifice Le ityle dans l'ordonnance des façades., & dans la décoration des appartements, elt proprement la poé'ie de l'Architecture 3 qui ieul contiibue à rendre toutes les compo- rtions d'un Aixhnecte véruauienient întéieilantes : Veit le ftyle propre a chaque efpcce de bâtiment qui amené cette Variété infinie dans. les édifices de même genre, 6i de genres différence ; le ttyle peut peindre également le genre iacré, héroïque &c pailoial , exprimer en particulier le caractère ré- gulier ou irregulier, iimpie ou corapofé , iîmétnque ou varié; enfin par le il y le on atteint au fublime , on parvient à la convenance , a l'expreflion ; en un mot a ce degré de perfç-* ihon -m relïort de toutes les productions d'un Architecte» Tome 1. Ce
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4P* C ou R s
tout écart qui témoigne plutôt l'effort de Timagî*
nation de l'Artiite que la produ&ion d'un génie éclairé : celui-ci accoutumé à bien voir, applique fans contrainte aies beibins , les véritables beautés de TArchitedure élevées parles Architectes qui Tont précédé; il fait y ajouter ou en retrancher toutes les parties qui ne font point du reifort de fon projet. Une compofition libre éft celle qu'on exa- mine fans embarras, que l'on conçoit telle fans aucune difficulté, où Ton remarque que les mafTes ont non-feulement engendré de belles parties» mais en général une ordonnance fimple r vraie » vraiffemblable; enfin que l'on croit facile, parce que tout y eil diftindt, qu'aucun- détail n'eft fu- perflu, que les ornements y font amenés, natu- rellement, fans faite, fans efforts; en un mot», une compofition qui, par la beauté de fon en- femble, annonce la produ&ion d'un grand Maître; car rien n'eft fi difficile que de parvenir à ce degré de « perfecüon, La décoration de la porte de la 'cfcur des Feuillants offre ce cara&ere ; rien de il aifi en apparence, rien de fi difficile à imiter que: ce che£d'eeuvre de François Maiifard. Cette porte, eit bien différente du portail de l'Eglife qui lui eft oppofée : celui-cioffre plus d'abondance dans fâ compofition, plus de richefle ; mais une Archi- tecture moins vraie, moins libre & beaucoup moins bien entendue. PaiFons à préfent à ce que nous entendons par une Architecture abondante. |
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d'ArêHîtectvei. 40$
Ce £o*0/z appelle abondance dans ία compofitw/i
d'un ouvrage d'Architecture. Trop d*abondancé , c'eft-à-dire, trop de corps,
trop de reffauts » de membres & d'ornements dans la décoration, eft peut-être toute auffi préjudi- diciable au fuccès de la beile Architecture , que l'affedation d'une trop grande fimplicité. 11 faut Îavoir n'abufer de rien ; dans une maifon parti- culiere , par exemple , malgré l'économie dont on doit nier , on peut répandre une forte d'intérêt dans fa décoration extérieure & intérieure : qu'on y prenne garde, une corniche, une plinthe pla- cées à propos, un chambranle fubftitué à un ban- deau , un reifaut, une table ôtent les nus,. rem- plirent les efpaces, empêchent la décoration de paroître pauvre, il en doit être de même pour ce qui concerne la trop grande abondance dont nous voulons parler ici. Pour rendre (es compofitions riches, il ne faut pas les charger jufqu'à l'excès de membres d'Architecture & d'ornements réels ou feints ; il fuffit d'appeler à loi, tout ce qu'il eft néceiTaire de placer convenablement dans la façade d'un bâtiment d'importance, auiïi-bien que dans l'intérieur de fes appartements. Une dé- coration qui montrera tout ce que la convenance exige , fera toujours belle, toujours aifez riche; trop de diviiions , une trop grande multiplicité d'angles, de retours * de contours , de caifettes 9 de rofaces , de bas-reliefs, accablent la compofi- tion,& détournent l'attention du fpectateur ; le regne des le Brun, des le Pautre eft pafte. Malgré les chefs-d'œuvre que nous ont laiftés pour exemples ces deux Artiftes , il faut convenir que leurs deilins étoient un peu trop chargés, trop confus, Cc ij
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404 Cou R s
trop composés, trop compliqués; le propre de Ιέ
bonne Archite&ure, eil d'être de tous les temps* V % Il n'eft qu'un bon genre, dont il ne faut jamais s'écarter : on peut faireiimple, & plaire; lorfqu'on [i veut faire riche, il faut attendre les grandes entre- prifes : autrement, dans les bâtiments particuliers,
c'eil manquer fon but, que de faire coniifter la, richeffe dans la multiplicité des détails, dans la variété des contours, & dans la quantité des or- nements. La décoration extérieure du dôme des Invalides, la décoration intérieure de l'Eglife de Saint Louis du Louvre , la décoration du Chœur de Notre-Dame, l'intérieur de la Chapelle de Verfailles , la plupart des plafonds des grands appartements de ce même Palais , ceux du Cha-; teau de Vincennes, l'efcalier de l'Hôtel de; Luynes, à Paris , la gallerie du Château de Richelieu , ont un caractère d'abondance & de richeffe, peut être porté trop loin ; au contraire les façades des Hôtels de Duras, de Torcy, de Seignelai, l'efca- lier des Tuileries , l'intérieur de l'Eglife de Saint Louis dans l'Ile font plus pauvres qpe fimples., Pour éviter ces deux excès , il faudroit fans doute imiter les décorations extérieures & in- térieures des Eglifes des Dames de Sainte Marie à Çhaillot, & de l'Annonciade à Saint-Denis, les dehors de l'Hôtel de Thiers à Paris, le frontif- ♦ pice dii Noviciat des Jéfuites, l'intérieur de l'E- glife de l'Oratoire , la nef du Val-de-Grâce, fans y comprendre les compartiments de fa voûte ; l'ordonnance du périftile du Louvre , celle de la porte de S. Denis, les grands & petits apparte- ments de l'Hôtel de Touloufe. Toutes ces pro- ductions , ne préfentent de fécondité, d'abondan- ce, de richeifes?*que ce qu'il en faut, relative« , |
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D 'A R C H ï Τ Ε C T U R E. 40 f
ment à leur deitination particuliere. D'ailleurs on
n'y remarque aucune inconféquence. Comme ce défaut eft de tous les abus le plus condamnable ; nous allons traiter en particulier de ce que nous entendons par une Architecture conféquente. Z)e la néceffîté de rendre conféquente Les diffé-
rentes productions de t'Architeclure. On dit qu'une Architecture eft conféquente,.
quand toutes les parties qui la co'mpofent rendent raifondes préceptes del'art,des vues du propriétaire, & des intentions de l'Architecte ; lorfque tout y paroît réfléchi, relatif, raifonnable; que les licen- ces y font mafquées avec art ; qu'on a fu éviter d'allier dans l'ordonnance d'une même façade, le genre antique & le moderne ; que les membres d'Ar- chitecture , adoptés par les plus grands Maîtres, occupent les premières places , & fe font apper- cevoir dans tout leur jour. Une Architecture inconféquente, au contraire *
eil celle où l'on abufe de la légèreté, quand le caractère principal eil viril ; ou de l'expreflion ruilique, quand î'efprit de convenance a fait choifir l'ordre Corinthien: lorfque dans une façade qui n'a que deux étages , on fait l'un foubaifement, l'autre attique ( q j ; qu'on met en œuvre un ordre Dorique, fans autres trigliphes que ceux placés à plomb des colonnes, & non au-deiTus des entre- colonnements (ή ; qu'on donne une proportion |
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(q) Tel qu'on le remarque au Château d'Eau, en face du
Palais Royal a Paris , quoique dans le milieu de cet édifice on aie placé un avant corps d'ordre Dorique. "*(ƒ ) Tel qu'on le remarque dans les ailes du Château. d§
Saiat-Cloud, du côté de la cour, C c iij
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4o6 C o υ ft $
Tofcanè à Vordre Ionique ( * j. Enfin, lorfquoft
abuie de l'application des frontons , comme à la gallerie du Louvre du côté de l'eau; des ni- ches , comme dans l'intérieur de la Sorbonne §< des cariatides , comme au frontifpice du Bureau des Marchands Drapiers &' ailleurs ; des combles comme au Château de Meudon; des pleins à la place des vides, comme à lHôtel d'Elbœuf ; des ornements délicats appliqués à l'ordre ruiliquç comme aux guichets du Louvre, &c. en un mot, quand on néglige toute efpece d'exa&itude, fans laquelle néanmoins on ne fauroit compter fur le {uceès de fes œuvres. Mais voyons ce que nous croyons devoir entendre par une Archiçeâure exaâe proprement dite, ji J}e la néceffitê de ÎtxaSïtuL· dans
ί'Architecture-. L'Architecture exafte eft celle qui, dans fa
'décoration , nadmet rien qui ait befoin d'excufe ; celle qui, non-feulement approche le plus de la févérité des préceptes de l'art, mais encore où la qualité de la matière & la précifion de la mai« d'œuvre, contribuent à rendre toutes fes parties plus exactes encore. Cette confidération doit en·* gager TArchiteae, avant de déterminer fon projet, I prendre connoiffance des différents matériaux «juil doit employer, & à bien connoître la capa·* eité des Artiiles qui doivent travailler fous tes.
s -■■ v.j
f sïAixà qu'il s'en voit à l'Hôtel de Charat, faubourg
Çaint-Honoté Λ & daas \z çoar du fafeis ê y^Yis Ja S*«uç- C^apcllet ■ »■*; · ? ί «
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d'Architecture. 407
©rdres , pour que de-là il puiiTe parvenir à deer-
der le ftyle & l'expreiïion qu'il doit donner à fa décoration ; car fouvent la difette des matières fait la loi pour le choix du caraftere qu'on doit donner à fa compoiition. Indépendamment de la beauté des proportions & de la légèreté du ci- feau des Artiftes , combien de chefs-d'œuvre dans la Grèce 8ζ dans l'Italie ne font parvenus à notre eonnoiiTance, que par la folidité des marbres qu'on y a employés. Qu'on y réfléchiffe, ii après avoir liiivi les excellents préceptes on prend foin de n'em- ployer que des matières d'élite, fi l'on affocie à ces. matières l'art de Fapareil que nous poifédons au- jourd'hui, on élèvera bientôt chez, nous des monu- ments dignes d'entrer en parallele avec ceux d'Athè- nes. L'intérieur du dôme des Invalides, la Chapelle de Verfailles, la Fontaine de Grenelle en font des preuves certaines (r). Qu'eufTe été de la porte S» Penis, du Château de Maifons, du périftile du Louvre, fi leur itru&ure eût été de pareilles ma- tières, ou plutôt tome de marbre; puifque malgré la pierre aiïez commune avec laquelle ont été conftruits ces édifices , ils n'en font pas "moins des chefs-d'œuvre que la poilérité regrétera de n'avoir plus fous les yeux, & qui cependant ne fervent pas toujours de modèles à nos jeunes ArchicecTes ; modèles qui néanmoins devroient leur apprendre combien l'exactitude a d'attraits quand on lait allier enfemble la théorie de l'art avec la. pratique de la main .d'oeuvre, & qu'à ces deux objets fi wk |
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'(() Les deux premiers Kâtis en pierre de Liais -, le dernier
en pierre de Conflans , l'une très-dure ,, l'autre tendre , mais Lautes deux formant de beaux parements, Cciv
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'4ot Cours
tereiîants, on fait joindre une fymétrîe raifort
nable , objet de l'article fuivant.
De la nècejjitè de la fymétrie dans
C Architecture. La fymétrîe doit être regardée comme iine
des principales beautés de i'Architeâure ; elle doit être coniidérée comme l'ennemie du contraire; ou du moins elle force, pour ainii dire, les formes contraitées, quand on eil obligé d'en admettre dans les dehors, d'être régulières dans leurs côtés ορροί es. La fymétrie dédommage non-feulement d'une fimplicité néceifaire dans la ilruÛure des bâtiments particuliers, mais elle aide à faire va- loir la richeiîe répandue dans les façades d'un bâtiment d'importance. La fymétrie fans affecta- tion eil amie de Fœuil : tantôt elle rappelle les diilances les plus éloignées ; tantôt elle autorife le rapprochement d'un corps avec un autre. La fymétrie, telle que nous l'entendons , n'eil point monotone, comme quelques-uns fe le perfuadent ; elle*mené prefque toujours à la fimplicité , & nous préferve néceifairement des écarts de nôtre imagination. Combien dé bâtiments, parce qu'on y a négligé la fymétrie dont nous parlons , ne nous offrent que des productions contraires à la régu- larité qu'exige la bonne Architecture. Citons quel- ques exemples : la largeur des pavillons du Châ- teau de PaiTy, du côté des Jardins, eil difTem- blable : la hauteur des pavillons des façades laté- rales du Luxembourg eil inégale : on n'a placé qu'une aîle à l'Hôtel de Belle-iile, vue du côté de la rivière ; l'ordpnnance de la façade du Pa* |
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d'Architecture. 40^
lais des Tuileries, du côté des jardins, eft dans
fa longueur compofée de deux genres d'Architec- ture : la plus grande partie de celle des galleries du Louvre, du côté de l'eau, eil de genres diffé- rents. Tous ces édifices ont d'autres beautés fans doute ; mais il ne pèchent pas moins contre les règles de la fymétrie. On connoît à la vérité les fourcesx qui autorifent ces divers mouvements ? peut-être portent-elles chacune leur excufe légi- time ; mais ces excufes ne peuvent que fatisfaire nos contemporains ; la poftérité n'aura-t-elle pas droit d'en penfer tout autrement ? D'ailleurs il ne faut pas fe le diiTimuler, de tels exemples, fans être des au- torités , trouvent des imitateurs qui, ignorant pour la plupart les motifs des Architectes qui les ont mis en œuvre, font entrer dans leurs compositions ces erreurs de néceiîité, mais qui n'étant pas les mê- mes dans leurs nouvelles produ&ions, convertiffent en abus les excufes âes grands Maîtres. Nous di- fons plus ici, il ne fuffît pas qu'une façade foie ré- gulière ; il faut que lorfque l'édifice fe trouve ifolé, tous (es afpe&s foient fymétriques pour avoir droit de fe faire admirer; autrement, n'étant fatis- fait que de certains détails, on eft mécontent de trouver plufieurs belles parties qui, réunies enfem- bles, n'en préfentent pas moins un tout mal aiTorti, & dont fouvent le ftyle de 1'Architeclure , & les fymboles de la Sculpture, préfentent autant de difparités. Mais voyons ce que nous entendons ici par une Archke&ure & une Sculpture fymbo- Jique. if
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4ίΡ Cours
Ce que c'efi qu'une Architecture & une Sculpture
fymbolique.
On dit, en parlant d'un bâtiment, que fon Archi-
te&ure eil fymbolique , quand le ftyle qui cara- <ftérife fa décoration paroît puifé dans le motif qui a fait ériger l'édifice ; lorfque les ordres ruftiques, folides, moyens ou délicats, ou feulement f ex- preiîion de chacun d'eux s'y trouve placée con- venablement ; lorfque la Sculpture paroît appelée dans l'ordonnance des façades ou dans l'intérieur des appartements, pour fervir d'interprète à l'Ar- chitecîure, pour embellir fon ordonnance, & non dans le feul deifein de l'enrichir. Nous l'avons dit plus d'une fois, une belle Arehité&ure fe fuffit à elle-même. L'Architecte doit commencer par les nus de fa décoration & en être content, avant de chercher à placer des ornements ; ceux-ci doi- vent naître du fein propre de l'Architecture; ou autrement ils ne feront regardés que comme un ac- ceffoire importun. Un ordre Tofcan dans les ou- vrages Militaires , un Dorique dans les édifices facrés , un Ionique dans les maifons de plaifance, un Corinthien dans les Palais des Rois , enfin un Compoiite dans les Fêtes publiques, font au- tant de fymboles capables de carattérifer l'or- donnance des différents bâtiments élevés pour la fureté, l'utilité, l'agrément,l'habitation & la ma- gnificence. Qu'à chacun de ces divers eara&eres appliqués aux fins différentes de l'art de bâtir, on ajoute par le miniftere de la Sculpture, quelques ornements puifés dans l'hiftoire facrée ou profane, on parviendra àrendrefans doute rArchiteÓure plvift |
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ρ'Architecture. 41*
énergique. Au reite,. il faut fa voir n'en pas abiifer,
dans la crainte de n'introduire dans (qs productions que des ornements qui ne foient qu'ornements pro- prement dits; pour donnera ces derniers le droit de plaire, il faut que l'Architecte ait une connoif* fance fufîifante dç l'Hiftoire , qu'il foit bon deiîi- nateur, homme de goût. Cette dernière qualité lui eft néceffaire pour difcerner avec choix l'u- fage qu'il doit faire des différents genres d'Ar- çhite&ure & de Sculpture qu'il eft dans le cas de mettre en œuvre, & pour les amener fur la fcene à raifon du befoin , de la dignité & de l'opu- lence des diverfes perfonnes qui confient leurs intérêts à (es foins ; confiance qui tantôt doit lui faire choifir le ftyle mâle ou léger, le caractère naïf ou terrible ; autant de diftin&ions particulières dont nous allons parler. Qe la différence qu'il y a entre le caractère
mçle, ferme ou viril dans l'Architecture, On peut concevoir par une Architecture mâle,
celle qui, fans être pefante, conferve dans ion Ordonnance un cara&ere de fermeté afTorti à la grandeur des lieux & an genre de l'édifice ; celle qui eft fimple dans fa composition générale, fage dans Îqs formes, & peu chargée de détails dans fes ornements ; celle qui s'annonce par à&s plans çecTilignes, par des angles droits, par des corps avancés qui portent de grandes ombres ; celle quî^ fleftinée aux marchés publics , aux Foires , aux Hôpitaux & fur-tout aux Edifices Militaires v doit être compofée de belles maffes, dans lef- gue$es ojn prend fokt Cévitet les petites parties f |
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4ii Cours
le chétif & le grand ne pouvant aller enfemble.
Souvent on croit faire une Architeâure mâle, on ïa fait lourde, maffive, matérielle ; on prend le mot pour la choie. On croit faire du neuf, & l'on ne ramene fur la fcêne que la charge des belles produaions des Michel-Ange , des le Brun, des le Palitre, fans fe douter que les Debroffes, les Hardouin Manfard, les François Blondel , nous ont laiffé des exemples immortels en ce genre, dans la compofition , la grandeur & la folidité du Palais du Luxembourg, des Ecuries & de l'Orangerie de Verlailles, dans la porte triom- phale de S. Denis ; productions admirables qui, ïnconteitablement, doivent fervir d'autorités pour l'ordonnance des divers édifices qui exigent le caractère mâle dont nous voulons parler; Une Architecture ferme diffère d'une Archite£ture
mâle par fes maffes : l'Architecture ferme annonce moins de pefanteur, mais néanmoins dans fes par- ties, dans fa divifion, elle préfente des formes déci- dées dont les furfaces & les angles font droits ^par- tout elle montre une certitude, une articulation , qui impofe, qui frappe, & qui fatisfait les yeux intelligents. Les ouvrages de François Manfard, de le Veau, de le Mercier, portent affez généra- lement ce cara&ere de fermeté, dans les Châteaux de Maifons, de Vincennes & de Richelieu : pro- ductions qui moins mâles que les précédentes, ont airiîî quelque chofe de plus intéreffant, & font plus du reiTort des bâtiments d'habitation. 1 Quoiqu'il paroifle qu'une Architecture virile diffère peu des deux précédentes, il eil cependant vrai qu'on peut donner ce nom à celle dans l'or- donnance de laquelle préfide l'ordre Dorique. Une Architefture mâlç çonftdéréeSéparément ?une |
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»'Architecture; 413
Archite&ure ferme , proprement dite, n'exigent fouvent que l'expreffion ruflique ou folide, & non la préfence de Tordre dont nous parlons ; mais lorfqu'une fois cet ordre eil prélent dans la dé- coration des façades, il faut s'attendre qu'il ne to- lère aucun détail, aucun! acceffoire qui ne foit puifé dans fa virilité : lorfqu'il préfide dans l'or- donnance de l'édifice , il ne ^veut fouffrir aucune efpece de mélange, il eil même jaloux de communi- quer fon caractère aux autres ordres qu'on lui affo- cie fouvent dans les différents étages du bâtiment ; c'eil ce qu'on remarque au Palais du Luxembourg,, au Château de Maifons, au Rortail de S. Gervais ailleurs. Si donc nous croyons qu'il foit néceffaire d'ob-
ferver ces différentes nuances dans la claife des bâtiments qui doivent annoncer dans leur ilruc- ture & dans leur ordonnance, un caractère qui tienne à l'expreffion Tofcane & Dorique, voyons, fi les mêmes coniidérations ne doivent pas porter. l'Architecte à les obferver lorfqu'il s'agira d'une Architecture élégante, délicate ou légere, qui nous indique aifez précifément les expreffions Ionique V Corinthienne & Compoiite. De la différence qu'on doit concevoir entre
l'Architecture légere P élégante ou délicate.
Une Architecture légere, quoique de même genre
«rue l'élégante ou la délicate , préfente néanmoins à l'idée des nuances différentes qu'il eil bon de ne pas confondre. Par- une Architecture légere, on entend particulièrement celle dont les ordres dé- licats ont déterminé l'Architecte à donner à fon édifice un ilyle relatif à ces mêmes ordres; celle |
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4*4 Cour s
dont les profils, le faire des ornements & fex*
preiîion délicate des moulures font relatifs à î'expreiîîon Corinthienne ; celle où l'on remarque que la proportion des ouvertures des portes & des croifées s'accorde avec la plus petite lar- geur des trumeaux qui en déterminent les pleins : aiTortiment efîenciel, fans lequel une décoration de ce genre ne fauroit plaire, & paroîtra toujours conçue par un génie inconséquent* Il faut fa- voir cependant ne pas abufer de la légèreté dont nous parlons. De même qu'on prend quelquefois le lourd pour le mâle, on produit fouvent une Ar- chitecture maigre pour une Architecture légere, & Ton sJéloigne prefque toujours du but qu'on fe doit propofer. Nous pourrions citer beaucoup de bâtiments où l'on eu. tombé dans ces défauts de relation. En vain ces imperfections font-elles ba- lancées par de grandes beautés ; le ConrtoiiTeur eft toujours fâché de voir ces beautés défaiTorties ; au lieu qu'on éprouve une véritable fatisfaction quand on examine le périftile du Louvre où l'on remarque une légèreté intérefTante, non-feulement dans l'application de l'ordre Corinthien, mais enco- re dans la difpofition de fes entrecolonements, dans la diitribution de fes ornements, & dans la har- cüeiTe de fon exécution : exemple célèbre qui nous prouve bien qu'il ne faut introduire dans les corn- pofitions qu'une délicatefle réfléchie , qui' ne nuife en rien au caractère propre de l'édifice; autrement on rifqiie de ne préfenter aux yeux des fpec- tateurs qu'une Arehite&ure de fantaifie, qu'une décoration arbitraire, plus propre à la décoration de nos théâtres qu'à être appliquée dans Tordons îiance de nos édifices. Une Architecture élégante a une autre fignifi- |
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eation; on devroit entendre par ce mot une Ar-
chitecture qui, comme ia précédente, eft a la vérité relative afexpreffion de l'ordre Corinthien,mais qui offre dans fa compoikion une plus grande quantité de percés, un certain jeu, un certain mouvement dans fon ordonnance, chofes qui ne fe rencontrent point dans la précédente ; parce que l'élégance dont nous voulons parler, eft plus du reifort de la décora- tion intérieure que de celle des dehors ; que le ftyle proprement dit de l'une, n'eft pas celui de l'autre, quoique tous les deux foient puifés dans la mê- me fource. Or c'eft de cette différence d'appli- cation de l'Architecfure des dehors à celle des. dedans que doivent n'aître les différentes nuan- ces , cette fineife de goût, ce ta£t de Fart qui con- tribuent au fuccès des divers œuvres de l'Ar- tifte. Néanmoins il faut convenir que lorfque dans la décoration intérieure on ufe avec modération d'une forte d'élégance, elle peut contribuer à procurer de la variété aux différentes compofitions de TArchite&e : la décoration extérieure du Châ- teau de Trianon, par exemple, peut être confé- dérée comme une Architecture élégante, quoi- que l'ordre Ionique feul y préfide; parce que la difpofition générale de fes bâtiments, la colon- nade qui les unit, la richeife des matières dont on s'eft fervi, & la diftribution des ornements qu'on y a employés , la cara&érifent telle, & qu'il n?y manque peut-être que la fubftitution de l'ordre Compofite, pour en faire un modele parfait en ce genre. Mais il faut prendre garde que le bâti- ment que nous citons n'eft qu'une habitation ac- ceifoire à un plus grand édifice, & que ce que nous approuvons à Trianon pourvoit devenir ail- leurs un défaut de convenance ? peut -être le plue |
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ifió Co υ R s
grand de tous les défauts qu'on puhTe introduire
dans l'Archite&ure. Une Architecture délicate tient fans doute de
très-près aux deux précédentes ; cependant elle a cela de particulier, qu'elle ne regarde guère que les parties de détails. On dit, ces membres , cette moulure, cette Sculpture font délicates, lors- qu'on les voit exécutées avec foin ; quand les pre- miers font exacts ·& précis ; la dernière traitée avec efprit, & qu'on la remarque délicate, fans féchereiîe, & d'une touche moëleufe fans pefan- teur. Une Architecture délicate , coniidérée du côté de la conftru&ion, eil celle qui, femblable aux plus belles produirions gothiques, offre peu de matière dans fa ftructure ; mais une fabrique induilrieufe , propre à la conftruction des voûtes , des pannaches , des trompes, des vouiïïires def- iinées à la conftruction de nos temples , de nos édifices publics & à la refidence des grands. Une Architecture délicate , enfin, eft encore celle qui devant être vue de près dans les dedans, ou a un point de diftance peu éloigné dans; les de- hors , doit avoir peu de relief, être prononcée avec goût.,. & propre à recevoir des ornements/ méplats, coulants, doux, fuaves , àl'ufage des bas reliefs en marbre ou en bronze, aux frifes, aux chapiteaux , ou toute autre production qui appar- tient de droit à la Sculpture proprement dite, mais dont la propriété eft d'embellir l'ordonnance de nos bâtiments; ce qui contribue fouvent à féconder l'Architecte , lorfqu'il veut peindre aux yeux, félon les occafions quifepréfentent à lui, une décoration ou champêtre, ou naïve > dont nous allons traiter en particulier. |
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d'Architecture; 417
Ce qu'on doit entendre par une Architeciurê
y . Champêtre. Nous entendons par une Architecture cham-
pêtre , proprement dite, celle.qui paroît relative à Tutilité de Γ Agriculture , par les différentes matières de fa conftru&ion , par la iimplicité de fon ordonnance, par fes ornements de Sculpture fymboiifés avec les attributs de Flore, de Po- mone , ou des autres Divinités des forêts & des bois ; celle qui, riante dans fa décoration, commo- de dans 'fa diitribution, folide dans fa ilru£rure? tient du genre pailoral, & qui mariée fans affec- tation avec les différentes parties qui emheliiiïént les jardins de propreté , préfente un afpe£t agréa* ble ou ruflique, félon l'objet particulier qui donne lieu à ces différents genres d'Architeâure. Telles font les retraites que les grands font élever à l'écart dans leur maifon de plaifance, les Belve- dërs, les Kioiques & autres pareilles productions 9 qui pour la plupart confinâtes avec le blocage ? la brique ou le cailloutage, s'allient par un cou- traite heureux, avec la culture des arbres ,Teffeç féduifant des eaux, les allégories du Dieu des îardins : celle qui ayant peu d'ouvertures , de portes & dç. croifées , annonce dès les dehors un azile intérieur, recceuilii frais & tranquile* entremêlé de portiques naturels & artificiels, ainii que fe remarquent les douze pavillons de Marly , le petit Château de la Ménagerie à Ver^- failles, le pavillon de l'Aurore à Sceaux, le petit bâtiment & les Jardins de Silvie [a) à Chantilly ; (v) Nompéç ainii à çaufe 4e i'Qifc <î«e Théophile γ βρ
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4îS C g ù r s
celle enfin qui, toute compofée de treillage &
de verdure, conferve néanmoins dans fa forme générale les proportions de l'Art, & préfente à l'œuil des fpe&ateurs , cette variété enchantereffe qu'on voit répandue avec tant de choix & de goût dans les différentes maifons de campagne des an- virons de cette capitale, où fouvent un genre naïf, mais riant, annonce dans leur . composition lin caradere auquel il ne manque peut-être qu'une expreiîion plus décidée pour en faire autant de chefs-d'œuvre ; mais peignons ici ce que nous en- tendons par une Architecture naïve. Du caractère naïf en Architecture.
Par une Archite&ure naïve, on entend celle qui
par fon ordonnance, laiiTe voir une expreflïon vraie, naturelle, & fans autre prétention que celle du genre qui lui eft propre ; celle qui ne tenant, ru' de l'écart de l'imagination de l'Artiile, ni de la prodigalité des ornements, préfente une iimplicité louable, qui plaît à tous les yeux ; celle qui, belle par la diilribution de fes membres, paroît plus belle encore , parce quelle fe fuffit à elle-même , & femble n'avoir befoin du fecours de la Sculpture que pour en relever l'éclat ; celle qui, dans (es allégories , n'offre rien que de voilé, de décent, même dans l'intérieur des appartements ; car qu'on y prenne garde, nous n'entendons pas parler ici |
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intitulée la Mai/on de Sylvie , & dans laquelle il célébra fous
ce nom , Madame la Dacheife de Montmorency , Marie Félix des Urlîns , en reconnoifianc-e de la retraite que cet Écrivain avoir, trouvée à Chantilly auprès de M. le Duca de Montmo·· rciicy, après l'Arrêt rendu contre lai, le '\$ Août 1613. |
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D'À 11 C H ΪΨ'% C't tJ ft E n 4tp
ïluîénlent de l'Architecture, qui n'a pour objet que l'ordonnance des façades, mais de toutes les efpeces de décorations confiées aux foins de TAr- chite&e , qui, comme tel , doit préfider à 1& Sculpture > à la peinture, à la* cifelute * à la do* rure, aux ameublements, & généralement à tout ce que les Arts de goût peuvent procurer d'em« ^ belliffements à nos demeures. Une Architecture naïve enfin , eft celle qui, fans confufion, plait naturellement, parce que la raifon n'exige, ni plus d'intérêt, ni plus de richeffe dans fon ordonnance* La décoration d'une jolie maifon de campagne » d*un petit Triänon, d'une ménagerie, d'une làiteriet d'une fäifanderie, font autant de petits bâtiments particuliers où l'exprefilon naïve doit préfider daris l'extérieur, dans l'intérieur, dans la difpoiï- tion ,' dans la iïtûation, & dont les dehors fur- tout doivent être puifés dans le genre moyen ou féminin, & traité d'unityle analogue à leurs ufages* fans autre fecours que les règles de l'Art qu'il Faut réduire dans la plus grande fimplicité. Du genre, féminin en ArchiteBure*.
On appelle une Architecture féminine > celle dont
i'expreiiion eft puiiee dans les proportions de l'or- dre Ionique ; exprefiion plus naïve, plus douce, moins robufte que celle de Tordre Dorique , & qui pour cela doit être placée convenablement & avec choix, dans la décoration des édifices* Une Architecture féminine, priié en mauvaife part, fe·* roit celle qui au - lieu d'être virile , félon que le genre de l'édifice femblerdït l'exiger > prefenteroit au contraire une ordre ionique , à la vérité , mais bien moins convenable que le précédent, à caufe £>dij
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410 C O URS
de 1'ufage & de la deitination particuliere du bâ-
timent. On appelleroit encore une Architecture féminine, priie en mauvaiié part, celle qui au- lieu d'indiquer des corps reâiïignes, parce que le iïyle de i Architecture ieroit fohde , orfriroit des avant-corps compofés de parties rlnueufes ; celle qui répandroit une incertitude dans les maiies , & dans les détails qu'on fe feroit propoié d'admirer dans l'édifice, & qui pour cet;e raifon doit être rejetée de tout monument Militaire, de tous les édifices élevés à la gloire des Héros, à la demeure des Princes, &c. Mais elle peut être appliquée convenablement à la décoration extérieure d'une jolie maifon de campagne, d'un petit Trianon; dans l'intérieur des appartements d'une Reine, d'une Impératrice, dans les bains , les fontaines & autres édifices confacrés aux Divinités Maritimes ou Ter- jreftres, dont on auroit puiie la dédicace dans l'Hit* toire facrée ou profane. Ç'eft de cette application judicieufe des ordres,
que naît le véritable caractère de la bonne Archi- tecluf e & des allégories qui en font la fuite ; les Païens n'ont pas, ou ont très-peu négligé dans leurs monuments, cette convenance intéreiTante , d'où dépend, quoi qu'on en dife, le fuccès des produc- tions d'un Architecte- Qu'on parcoure l'Hiftoire des Grecs , comme nous l'avons déjà rapporté , on verra qu'ils nç confacroient guère leur ordre Dorique» qu'à Jupiter, à Mars, à Hercule; leur ordre ionique, qu'à Çibele, à Junon, à Proferpine ; l'ordre Corinthien, qu'à Vefta, àFlpre» à Hébé'-; & que ii dans la fuite on a appliqué ces trois çr-> dres, ainii que le Tçfcan & le Compoiite, indi£ tir clement à toutes les efpeçes de bâtiments, cette inconféquençe a plus contribué qu'on ne s'imagine, |
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D'A k e Hit Eet υ ré. 4ïi
à donnera l'Archite&ure de la monotonie dans l'or*
donnance j & tout eniemble de Vindécifion dans lel détails ; défauts qui nuifént au caractère de chaque bâtiment » parce qu'alors on n'a imité Qu'imparfai- tement les chefs-d'œuvre des Grecs & des Romains, fans fe rappeler que ces Peuples de Savants avoient expreflement fait confvfter la beauté de l'ordon- nance de leurs édifices dans le ilylë, l'expreffioiî & la convenance que leur impofoient les dirTé-* rents motifs qui leur faifoient mettre la main à l'œuvre, r Pour arriver à de tels fuccès, fious recomman-3
dons à nos Elevés de remonter à la fource de l'Art, & de ne jamais oublier que lorfque Téiprit de* convenance leur aura fait faire choix d'un ordre plutôt que d'un autre, toute l'ordonnance de1 leur décoration doit y être conforme, fans en ex* ceptèr même les ornements ; qu'autrement leurs! productions déviendroient inférieures aux chefs- d'œuvre de ces grands Maîtres , & peut êtrg même fort au-deffous de celles des modernes, dont les ouvrages déjà moins parfaits que ceux d'A- thènes & de Rome, les conduiroient infenftblemeni: à la médiocrité. L'Architecture a fes myiîerës comme lès auf fei
Arts ; il faut y être initié pour les connoitre, les fuivre & les bien appliquer': tantôt il convient de les voiler, tantôt il eft bon de les expofer au grand jour ; mais pour ne pas confondre ce qu'on peut fe permettre ou ce qu'on doit fë défendre abfo- lument à cet égard , traçons dans un article par^ ticulier ce.que nous entendons par les myftereÄ de l'Art, ou plutôt par une Archite&urë myft&^ ïieufe« £> d 4
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Ç% qttan dok wtendre par urn ArchittBum
myjïèrieufi» ^
On pourrait appeler ainfi une Archite&ure om
Ton s'appercevroit que l'Architecte, loin de faire parade & d'étaler aux yeux tout ce qu'il fait, de fon Art, a pénétré dans fes myfteres, pour ne mettre en oeuvre que les règles, les plus approuvées, ou mafquer au contraire, lors de la conurucüon de fon édifice, une partie du fecret de la coupe des pierres ;. celle où l'on s'appercevroit que lorfqu'il s'agifToit d'un édifice facré, ou feulement d'une Chapelle particuliere v il a fu ménager à propos les jours, & introduire fous le voile de la dé- cence h de la retenue, les principaux myfteres de la, religion ; celle où dans l'Architecture Mili- taire, il a ufé d'adreife pour mafquer aux enne- mis la fituation des magafins à poudre, les pris- CÎpales iffues, les dégagements, les ouvertures qui auroient pu leur annoncer les endroits les plus favorables pour attaquer un pofte , une redoute * lin fort, &c. celle où dans. Γ Architecture civile % il a pris foin de placer à l'écart & loin de la fréquentation des grands appartements, les bains, & autres petites pièces deftinées au fommeil, au recœuillement ; celle où > dans la diftribution des jardins de propreté, du parc % il a fu ménager des allées couvertes qui conduifent à une petite habita-* tion folitaire ^iffuesécartées qui annoncent le û- |ence& la difcrétion. Enfin l'Architecture, eft myfté- fieufe, quand l'Architeûe fait jeter un voile ingé- nieux fur toutes les productions des Arts agréables & 4es Arts de goût, qu'il appelle à lui pour la déco- ΙaxÎQft de fes appartements, & deflein de ne préfet |
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d'Architecture 42,3
ter aux yeux aucun objet qui tienne de la licence &
du dérèglement des mœurs ; qu'en un mot, il préfère par-tout la iimplicité à la prodigalité, la grandeur à la multiplicité des détails,, rien n'étant £ véritable- ment intér-efTant que de montrer de la fermeté, de la hardieffe, quelquefois même du terrible , félon le genre de la décoration & le motif qui détermine à tel ou tel genre de bâtiment. Mais, pour pein- dre à l'idée ce que nous entendons par ces trois différentes expreiîions * traitons dans trois arti^· clés féparés ce que nous concevons par une grande Architecture, par une Architecture hardie» enfin, par ce que l'on doit concevoir par une Ar- chitecture terrible* Ce qu'on peut appeler une grande Arekite&ure*
Par une grande Architecture% on entend ordi-
nairement ceile qui comprend toute la hauteur qu'on pouvoir, lui donner, relativement à celle de l'édifice, il n'importe*de quel genre ; par exemple dans le frontifpice d'un temple , en ne faifant ufage que d'un feul ordre, comme à la nouvelle Eglife de Sainte Geneviève \ dans un bâtiment d'habitation, en ne plaçant auffi qu'un feul ordre dans lé bel étage, & convertiffant l'étage à rez-de- chauifée en foubaffement, comme au périitile cHé Louvre. On dit en général qu'une Architecture^ eil grande , lorfqu on la compare avec une autre de même genre,, mais dans laquelle on a préféré la réitération des ordres élevés les uns au-dèflus UQS autres ( x), au lieu d'un feul qui auroit grasdi. |
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(*). On pourra dire: L'Architecture dap&iftiïe· an Lom&& χ
Dam
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4H CöüH
fon ordonnance, par la fuppreffion' de plusieurs
entablements & de leurs acceflbires. On Îè trompe fouvent loriqu'on croit avoir fait une grande Ar* chitecture, parce qu'on y a obfervé de grandes tnaues, mais qui fe trouvent divifées dans leurs hauteurs par plufieurs petits ordres , & qu'on a ■àuiïi diviié mconiidérement leur largeur par une ; trop grande quantité de reiîauts. Le portail de S. Gervais, annonce fans doute un grand édifice, mais il ne préfente qu'une moyenne Archite&ure* L'Ar- chite&ure & les mafTes du portail des Minimes offrent plus d'unité ; au contraire, la maife géné- rale du bâtiment de l'Hôtel de Tingry, du côté de la cour , paroît naine ; parce que (es ordres d'Architeâure font peut-être trop coloiTaux. Sa- voir montrer de la grandeur dans fes compo- ikion, fans les rendre gigantefques , éfl le com- ble de la perfection. Le monument de la porte triomphale de S* Denis, à Paris, eil peut-être le témoignage le plus frappant de la beauté réelle que peut produire ce que nous appelons ici une grande Architecture. Ce que c'efl qu'une ArchiteUufe hardie.
-, ' ■]. : : -' J , ' - "■ '' ' ■ ■' ·.. ■ 1'Λ '" ■ * On fe iert.du terme de hardie en Architecture,
lorfqu'il s'agit de parler de la décoration des fa- çades d'un bâtiment élevé fur les defïïns d'un grand Maître, où l'on ne remarqué rien de com- mun, ni petitemaniere, ni imitation fervile ; où tout paroît tracé par un génie heureux ; où tft glande j celle de l'intérieur de la Cour du même Palais eft
petite : ces deux Architectures ne fe détruifent-«lief pas l'une l'autre en les comparant enfembie i |
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t>* Architecture. 42.5
■tout annonce de grands traits , un caractère de
fublimité qui frappe Famé & la porte à la plus grande admiration. On dit : La façade du périftiie du Louvre eft conitmite d'une grande maniere, d'une maniere hardie, en confidérant la maniere ingénieufe de fa ilrutlure. On dit encore de l'O- rangerie de Verfailles, que ce monument eft d'une , exécution hardie, principalement lorfqu'on veut parler de Fimmenfité de fon entreprife, fans avoir égard à la beauté de fon ordonnance, à fa fitua- tion & à fa difpofition. Hardie fe dit auffi d'une Architecture qui, par
rapport à fa ilrutlure, loin de cacher le myftere de l'Art, annonce au contraire toutes les reffour- ces que peut procurer dans la conftruttion la connoiflance de la coupe des pierres ,· & Π11- duftrie d'un appareil réfléchi. Une conitrutYion hardie eil encore celle qui, par rapport à l'éco- nomie de la matière, paroit élégante dans {qs points d'appuis, fvelte dans la courbure de fes voûtes , & légere dans la proportion de fon or- donnance. Néanmoins il faut favoir ne pas abu« fer de la hardieife dé l'Art jufqu'à la témérité; fouvent elle étonne plus qu'elle ne fatisfait : parti- culièrement les voûtes des rampes de nos efcaliers, celles de nos Eglifes, de nos édifices publics, les plates-bandes de nos entrecolonnements ne doivent offrir qu'une hardieife raifonnable. Pour y parvenir , il faut néceifairement, aux règles du calcul, aux loix de la pefanteur , annoncer vifiblement le foin qu'on a pris d'aflbrtir la réfif- tance des pieds-droits à la pouffée des voûtes j en forte qu'à la folidité réelle on reconnoiife une , folidité apparente qui tranquilife le vulgaire, & rende néanmoins raifon aux GonnoifTeurs de la capacité & de l'expérience de l'Archite&e. |
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4*6 Cours
■Çé ψ£οη doit entendra par une Architecture
terrible.
On peut entendre par une Archite&ure terrible*
celle dont l'expreilion forte , femble annoncer par ibn ordonnance extérieure, la fureté des dedans àe l'édifice.» parce qu'elle offre, à fon premier àfpect, une folidité réelle & apparente, non-feu- îement par la fermeté de fes membres, mais encore par le choix des matières qu'on y a employées; celle qui par de grandes faillies & de profonds enfoncements donne à connoître dans les bâti- ments militaires , les précautions que l'ingénieur a prifes pour faire échouer la témérité de l'Enne- mi; celle qui, entourée de barrions, de tours & de foiTés efcarpés, laifTe voir à peine dans fes iâçades de petites ouvertures, mais de hautes & épaiifes murailles, revêtues de membres d'Archi- tecture, portant de grandes ombres & traitées avec fierté ; celle qui, plus pefante, plus ra- courcie encore que la proportion Tofcane, parok plus propre dans nos décorations théâtrales , à peindre à l'idée le fé/our du Tartare , qu'à être mife en exécution ■', ii ce nTeir pour l'ufage des frontifpices des Maifons de Force, des Prifons, des Cachots, où une Architecture terrible contri- bue, en quelque forte, à annoncer dès les dehors, le défordre de la vie des hommes détenus dans l'intérieur, & tout enfemble la férocité néceffaire à ceux prépofés pour les tenir aux fers. Ai* refte, il ne faut pas abufer du caracfere terrible dont nous parlons : pris en bonne part , ce caractère produit aiTez fouvent une expreiîior* convenable ; mais lorfqu'il paroît contraire am |
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d'Architecture. 417
genre de l'édifice , il ne préfente plus qu'une Ar-
chitecture rebutante , que des corps ridiculement lourds, pefants, qui ne laiflent voir que des parties mal afforties , un genre foldatefque, une pefan- teur gigantefque ; enfin un ftyle où les principes de l'art femblent être anéantis fous le poids de l'ignorance de l'Artifte , pendant qu'on s'attendoit à remarquer un caractère grave, régulier, iimple , héroïque, plus capable d'annoncer l'importance du monument, que fa vafte étendue ou fon inutilité. Après avoir parlé de la maniere de reconnoître
les vraies beautés de l'Art, paiïbns à préfent aux moyens de démêler les licences employées dans quelques-uns de nos bâtiments par les Artiftes fubalternes. Ce que cyefl qu'une Architecture naine.
Ön entend ordinairement par une Archite-
cture naine, celle qui , beaucoup trop petite , relativement à la grandeur de l'édifice, préfente, plutôt le modele d'un bâtiment, que fon exécu- tion réelle ; celle dont l'Architecture ne pouvant être d'un plus grand module, à caufe de la défti- nation du bâtiment , auroit dû être fans ordres dans fes façades ».ceux-ci offrant toujours en petit ce qui ne devroit jamais être employé qu'en grand, dans les temples, les édifices publics, les palais, les grands hôtels, &c. Croira-t-ôn toujours produire de prétendus chefs - d'œuvre , parce qu'on fauta employer plufieurs colonnes & placer quelques pilaftres dans fes compofitions ? Le périt ordre de la porte de la Chambre des Comptes, celui de l'Hôtel de Bouillon , *préfentent autant d'Architectures naines h eu égard aux motifs qui |
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4^ Cours
ont fait élever ces édifices. Ne concevra * t - on
jamais que l'étude que nous .recommandons des ordres d'Archite&ure , a moins pour objet d'en xonfeiller l'application dans nos bâtiments d'habi- tation , que d'apprendre à puifer les proportions de l'Art dans leurs fources ? Croira-t-on toujours qu'ils peuvent feuls produire de vraies beautés dans nos façades ? Ceux qu'on y fait entrer font d'ailleurs pour la plupart ii .négligés dans l'exé- cution , qu'ils rebutent plutôt qu'ils ne fe font admirer. , * : Nous pouvons le remarquer ici, les ordres du
portail de Saint-Gervais , ceux du portail du Val- de-Grâce font dans ce cas. L'ordre Corinthien de la Chapelle de Verfailles, & celui du périitile du Louvre, font à la vérité d'une aiTez belle exécu- tion; mais nous fommes obligés de convenir que les feuls chefs d'ceuvre, en ce genre , font ies colonnes Ioniques d'un des pavillons des Tuile- Hes du côté du jardin; celles des trois ordres du Château de Maifons , & l'ordre pilaitre Corin- .thien de l'intérieur du Val-de-Grâce. C'eft donc aux pieds de ces feuls chefs-d'œuvre , qu'on peut apprendre chez nous à connôître tout ce que nous devons aux. découvertes des Gxecs , per- fectionnées chez les Romains', concernant les ordres d'Architecture. Ceft enûn d'après ces beau- tés du premier mérite, qu'on peut perfection- ner la partie de la décoration de nos bâtiments , quoiqu'on η ait pas toujours occafion d'y employer ces mêmes ordres , leurs différentes expreiîîons fuffifant fouvent feules , fans avoir recours à la prodigalité des ornements ni à la frivolité des dé- tails dont nous allons faire fentir l'abus dans Tar> jticle iuivant. |
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ü' Architect ure. 429
Ce que c'efl qu'une Architezlure frivoL·
Sous le nom d'Architecture frivole, on entend
celle qui eil tantôt chimérique , fans autre râifon que l'incapacité de i'Àrtifte y tantôt plus chiméri- que encore ? parce qu'elle ne laiifè voir dans £es parties, ni liailon , ni commencement, ni fin ; telle à-peu-près qu'on a vu pluùeurs années celle de nos décorations intérieures , où la frivolité de la fculpture & le chantournement de l'Architecliire ne préfentoient que des compofitions fingulieres 9 hafardées , & jamais des beautés d'enfemble qui puiffent fatisfaire i'ceuil des hommes de goût ; & telle qu'on voit encore aujourd'hui, quoique dans un autre genre à la vérité , celle compofée par quelques jeunes Artiiies, qui, faute d'une certaine expérience % & pour n'avoir puifé dans leurs voya*, ges d'Italie que les écarts du Boromini, viennent à leur retour en France 9 élever à Paris des bâ- timents qui, pour n'être pas d'une ordonnance; auffi frivole que les précédents, ne font pas moins des exemples, qui infenûblement portent atteinte aux règles de la véritable Architecture : inconfé- quence > incertitude , irrçfplution à laquelle FAr- çhiteclure ne devrpit jamais être fujette, & que les grands Maîtres ont iu éviter avec foin dans leurs productions. Le préjugé , renthoufiafme, une mode paffagere ne devroient jamais déterminer le $yle de l'ordonnance extérieure des édifices d'im- portance. Ces édifices devant être dçftinés un jour à annoncer à lapoflirité les chefs-d'œuvre d'un iiecle ^claire , la gloire de la Nation à. le favoir pro- fond des Architécles qui fleurirent dans cette Ca* pitale, exigent un tout autre faire (jue la déçoratipa |
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43$ : m.ß .Co ü a s
intérieure dés appartements ; celle-ci peut être träl*
tée avec moins de févérité que celle des dehors , mais pour cela elle ne doit jamais être, ni médiocre, ni frivole ; l'art doit confifter à placer ingénieu- fement certains contraires, fans interrompre les Haifons, qui feules peuvent mettre d'accord les parties avec le tout ; trop de retenue, trop de pefanteur dans les corps re&ilignes , détruifent îbuvent l'agrément qu'on y doit rencontrer ; il faut y apporter une variété raifonnable : certaine* ment la décoration d'un appartement de parade » d'un appartement de fociété , d'un appartement privé , doivent s'annoncer différemment ; les uns doivent être graves» ceux-ci avoir de l'élégance, ceux-là de la fimplicité. Un écart heureux dans cette partie de la décoration , peut quelquefois fe Cafarder · mais il n'en faut jamais âbufer dans les premiers : autant qu'il eft poiîible , il faut y montrer de la magnificence fans faite , dans les autres du génie fans enthouiiafme, de la retenue fans froideur..;= mais par-tout annoncer le fruit d'une étude réfléchie, & non celui d'un travail précipité ; en un mot, il faut ne s*y I permettre quelques libertés, que pour parvenir à une diver- iité imtéreffante dans les formes; encore eil - il bon d'avoir égard au fexe, aux mœurs , à la di- gnité des propriétaires, fans quoi on s'éloigne prefque toujours de Tefprit de convenance, on ne produit que des licences, ou, ce qui eft pire encore, ce genre frivole que nous condamnons & que nous ne devons regarder que comme une iingularité , une bizarrerie, permife tout au plus dans les ameublements, les porcelaines', les bronzes, &g. |
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D * A R C fi Ι Τ Ê C ? U R E. 43*
Ce que c'efl qu'une Architecture Ucenäeuß.
Nous venons de condamner la frivolité dans
Γ Architeaure ; l'Architedure licencieuie mérite le même fort. On appelle ainfi une production, lorfqu'on s'apperçoit qu'au mépris de l'Art un jeune Artifte n'imite dans fes comportions que les écarts des Architedes fubalternes f parce que les abus lui paroiiïent plus faciles à faifir « que les vraies beautés de l'Architedure ; qu'il faut une étude laborieufe, une excellente judiciaire, pour fuivre, pour connoître l'excellent, le fubli- me , & qu'il eft plus aifé, dans {es premiers eûais , d'appliquer indiftindement tout ce qu'on a vu , tout ce qu'on a remarqué : d'oii il refaite prefque toujours des projets mal conçus, fans afforri- ments , & qui s'éloignent de la véritable per- fedion, les licences étant toujours des licences. Il eft vrai que celles qu'un Artifte éclairé emploie par néceflité font toute autre choie : qu'on les examine de près , on s'apperçoit prefque tou- jours quelles émanent du fond propre de l'Art; qu'il ne les a employées que comme acceftoires , pour procurer plus de beauté aux mafles de fon édifice , de commodité aux dedans de fon bâti- ment; ou-pour des raifons effencielles defolidité qui échappent prefque toujours dans un examen précipité ; qu'enfin par-tout il prouve qu'il a fu racheter les licences qu'il a mifes en oeuvre, t>ar des beautés fans nombre , qui annoncent fon in- telligence , fa fagacité& fon expérience. Hardouin Manfard, quenous avons déjà cité avec éloge, mais qu'il ne faut pas toujours fuivre , eft peut-être celui de nos Architedes François, qui a mis le plus de |
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432. Cours
licences en œuvre ; mais auffi eil-il celui qui a
montré le plus de génie dans les productions de notre Art, pendant que la plupart de fes imitateurs, au - lieu de ces licences permifes en Certaines occaiions , ne nous ont" montré que des comppiitions difTernblabies dont nous allons parler. 'Ce que c'efl qu'une Architecture diffemhlabh.
1 On appelle une Archire&ure diiTemblable, celle
qui manquant d'une fymétrie néceffaire dans parties oppofées, ne montre qu'une irrégularité mal entendue, au lieu d'une correfpondance que le genre de l'édifice fembloit exiger ; celle où Tort remarque un caraûere particulier dans le princi- pal corps de logis, un autre dans les aîles du même bâtiment; ou , ce qui eil pire encore, entre Tavant-corps , les arrieres-corps^ & les pa- villons d'une façade, quoique tous également cou- ronnés par un même entablement, par une mê·* me bàluitrade , & par une même continuité de combles. Une Architecture diiTemblable eft encore celle où, fans aucune exçufe légitime, on n*a pas cherché à éviter d'allier enfemble le gothique, l'ancien & le moderne. Nous diions, fans excufe légitime; car il peut arriver, lorfqu'il:s'agit d'une reftauration où l'on Te trouvé forcé d'allier un nouveau genre avec Tancien, que cette difparité devienne tolérable. Nos plus grands Maîtres peu- vent nous fervir d'autorité à cet égard: François Manfard & François Blondel, par exemple, en ont uféainii,Tun à l'Hôtel de Carnavalet, l'autre à la porte S. Antoine ; mais au moins faut-il favoir qu'une pareille diffemblance ne peut jamais être regardée
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ïögardée comme un objet d'imitation , quoique ie
motif qui a déterminé cette difparité dans les reitau- rations de ces deux édifiées, raffe beaucoup d'hon- neur aux Architectes qui les ont reftaurés. Une '■ Architecture diiTemblable eft encore celle où. regne dans les membres & dans les ornements une diipanté frappante entre la Sculpture & l'Archi- tecture {y ) , ou entre le ityle grave de l'une & le genre frivole de l'autre ; diffonance qui n'eil jamais permife dans aucune efpece dOrdpnnance exté«? rieure, mais feulement dans les décorations arabef- ques , deitmées à embellir les lambris de certaines pièces particulières. On voit de ces arabefques au Château de la Ménagerie à Veriaiiies ; elles y font plus convenablement placées, fans doute, que dans les plafonds des grands appartements de Meudon & dans la plupart de nos nouveaux Hôtels élevés à Paris depuis quelques années, où l'on a négligé le choix des moulures & des ornements, qui alors ne produifent plus que des comportions de fantaiiie. Ce n'eil pas aifez de fe tranfporter fur les
lieux, ce n'eit pas aiTez de vifiter la demeure uqs grands: il faut réfléchir fur l'ordonnance des fa- çades, il en faut parcourir les dedans , reparler 'dans les dehors, fe rappeler le motif qui les a fait élever, envifager de quelle efpece elt l'édn fice,le genre d'appartement, par qui il doit être habité. On croit tout fa voir parce qu'on a par- couru & qu'on a apperçu à la hâte l'extérieur & l'intérieur de la plupart de nos bâtiments ; cependant à peine les connoît-on par leur nom ^ |
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(y) La Fontaine de Grenelle, le Palais du Luxembourg ,
le Portail des Eglifes de Saint-Gervais & des Feuillanç font peut-être dans ce cas. Tome /. E e
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434 Cours
on ie diflimule le vrai motif qui les a fait élever â
& faute d'un examen réitéré, on ignore le bon effet que doit produire leur imitation ; on ignore enfin ce que peut faire naître l'efprit de conve- nance , la belle fimplicité, la régularité & la fy- métrie. La plupart de nos jeunes Artiftes hazar- dent fo.uvent dans leurs eftais un mélange mal aiïbrti, qui bleffe plutôt les yeux qu'il ne les fa- tisfait ; ils oublient de fe dire ce que Socrate répétoit fouvent ; Ce que je fais , cefi que je ne fais rien ; cependant à entendre le plus grand nombre, ils favent tout, excepté ce que Socrate favoit ; ils fe croient la fcience infufe, & confondent l'en- thoufiafme avec ce qu'on appelle le véritable ef- prit de Fart, fans réfléchir que la plupart de leurs compofitions ne fönt que le réfultat des penfées d'autrui, & que le vrai favoir conflâe dans un enchaînement infini d'idées neuves ; qu'en un mot, c'eê la fcience qui conduit à l'imitation & que l'efprit feùl crée & invente. François Manfard étoit fans doute plus favant que Hardouin ; mais celui-ci a peut-être mis infiniment plus de génie dans (es produirions : d'où il faut conclure qu'à l'étude de l'art, il faut joindre le génie, le goût de la choie; autrement on n'orTriroit que des com- pofitions féveres, à la vérité, mais froides , ou des décorations amphibologiques, vagues ou bar- bares : nous allons parler en particulier de chacune de ces dernières. Ce que c'efl, qu'une Architecture amphihologiquCi
On appelle amphibologique, une ordonnance
dans laquelle on remarque féparement la compo- fition de l'Architecle d'avec l'ouvrage du Sculpteur, |
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îT'ÀItCHî TECTUftE. 4|f
du Mêmiiiier, du Marbrier, du Fondeur, faute d'a-
voir été conduite par le même efprit ; celle qui laiiTe, par fon caraclere équivoque, douter fi Fédifice eu: facré, public ou particulier; ii c'eft un Château, une maifon de plaifance , un Hôtel ou quelques- unes de leurs dépendances (?), parce que tous les genres y font confondus fans choix, fans difcrétion, fans convenance : celle que défaprouve l'Amateur éclairé & qui induit en erreur l'élevé ; en vain celui- ci cherche-t-il à fe rendre compte des intentions de l'Architecte ; il ne trouve rien dans fes œuvres qui puiife le guider ni lui offrir aucune autorité capable de FarTermir dans les préceptes de l'Art. Une Architecture amphibologique eil eneore celle dont le ftyle eft douteux, les fymboles obfcurs , ou celle dont l'Auteur, par une trop grande abondance d'i- dées , & ne fâchant s'arrêter à aucune, fe con- tente de tracer avec trop de célérité les pen- Îées dans le cabinet, pour parler rapidement à l'exécution, fans avoir muri fes idées, médité fon projet, & l'avoir communiqué à des yeux intel- ligents ; enfin fans l'avoir laiffé repofer dans (on porte - feuille & l'en avoir retiré à plus d'une reprife pour en retrancher les fuperfluités, les parties vagues , &c. Ce qu'on entend par une ArchiteBure vague.
On donne le nom de vague, à l'ordonnance
d'une décoration, lorfque dans fes maries l'Auteur |
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( %)■ La décoration extérieure des Ecuries du Château de
Mai ions a à-peu-près cet inconvénient, parce qu'ayant été faite pour· figurer un jour avec celle de la Chapelle qui dévoie être située en face de ce bâtiment, François Ma.nfard a cru qu'il falloit donner une parfaite fymétrie à ces deux différents genres d'édifice. _ f< |
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4$6 ' Co ν R s
a laiffé à denrer une certaine quantité de mem-
bres que le choix de cette ordonnance fembloit exiger, ou celle qui, fans néceiïité , offre des nus, des rep©s trop confidérables, démentis par le caractère de l'édifice ; celle qui dans fes détails paroiiTant indécife, n'offre rien qui puiife dédom- mager de cette mdéciiion, parce qu'on ne remar- que ni dans la compofition des façades du bâtiment, ni dans la décoration intérieure des appartements, rien qui annonce dans l'Architecte les premiers éléments de l'Art, quoiqu'il ait cru produire un chef-d'œuvre , pour avoir fuivi Vignole : il ne s'eft point douté qu'il ne fuffit pas de ces connoif- fances préliminaires, & que faute d'en avoir faifi hs préceptes, il n'en eft encore qu'à la routine de l'Art ; routine qui, fans s'en appercevoir, lui fait employer indiftin&ement, & dans tous fes projets, de petits ordres couronnés par des corniches ar6- chhravées, & élevés fur des pîédeitaux trop con- fidérables ; enfin des ouvertures d'une proportion vicieufe, trop iimple ou trop compofée, d'une mau- vaife forme ; des trumeaux fans relation avec les vides ; de petites niches , de grandes baluf- trades; en un mot, une production qui n'offre qu'un affemblage inconféquent & barbare. Ce qu'on entend par-une Architecture Barhare»
On dit ; Cette Archite&ure eil d'un ftyle
barbare , lorfque dans fes divifions on remarque des parties mal afforties, qui paroiifent étrangères au cara&ëre de l'édifice ; on donne encore ce nom à celle où au lieu d'une ordonnance puifée dans les belles productions de l'antiquité, on apper- çoit que J'Autour a préféré les ordonnances mifes |
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d'Archite ct ν R ε. 437
en œuvre par les Gots ; ou au - lieu des orne*
ments employés fi judicieufement par les Grecs, il a fait choix de ceux de l'Italie, du.temps de la décadence de cet Empire, ou des nôtres, avant/ le regne de François premier : celle qui n'oiFrant que des profils licencieux, ne préfertte que des ' entablements , dés architraves, des archivoltes , & des chambranles mutilés, tronqués, fans rap- port dans les mafïes, fans proportion dans leurs partie, & fans choix dans leurs ornements', en un mot, abfolument contraires au goût de l'Art: celle enfin où Le jeune Artifte, par un fol orgueiûl, préfère, au vrai beau une fmgularité préfomptueufe, j iingularité dont on ne peut deviner ni la raifon, ni
le motif, parce qu'elle n'annonce dans ces produc- tions ni cette judiciaire, ni ce fentiment naturel que l'étude peut perfectionner, & qui feul peut faire éviter tous les différents genres d'abus. De Îabus en Architecture.
En Archite&ure les licences peuvent quelque-
fois être regardées comme des reffources ; les abus dont nous voulons parler ne peuvent jamais être envifagés que comme les médiocrités de l'Art. Par exemple l'ordonnance d'une décoration réelle ou fa&ice eil appelée telle, quand on veut exprimer' l'abus qu'en a fait l'Architecte, parce qu'il en igno~ roit les règles, ou parce qu'il le croyoit au-defîus des préceptes. Tous les jours on dit, Cette com- pofition eft abufive, lorfquon remarque que l'Au- teur a fait un ufage immodéré de l'application de certains membres d'Àrchke&ure & de pluiieurs genres d'ornements, dans un bâtiment qui par économie & par l'abfence de$ ordres, devoit être Ëeuj
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43$ Cours
fimpîe; ou qu'au contraire il a afTe&é trop da
Simplicité dans Un édifice dé quelque importance , dans la décoration duquel les ordres auroient pu taÎfonnablement entrer pour en embellir l'ordon- nance , & lui donner un air de dignité ; lorfquon s'apperçoit que dans fes plans , il a mal-à-propos aifocié les formes circulaires avec les rectangu- laires } où un ityle tout-à-fait grave auroit dû être préféré, à caufe de l'efpece du monument ; quand on remarque que fans aucun motif effenciel il a fait pénétrer les corps les uns dans les autres , qu'il a mutilé ceux-ci, engagé ceux-là, & négligé les cor- rcipondances néceffaires à obferver entre la partie du milieu de l'édifice, fes extrémités & fes parties intermédiaires ; quand enfin, faute de goût, de jugement & d'expérience, il ne laifTe apercevoir dans fes productions qu'un affemblage bizarre qui ne préfente à fes contemporains que l'imitation d'une mode pafTagere, & à la poltérité que des exemples à éviter. - De la mode en Architecture.
La mode en Architecture eft ordinairement con-
{îdérée par les grands Maîtres comme la fource de toutes les viciiTitudes de Γ Art ; c'eft elle qui tour-à-tour pefante, frivole ou délicate, fe plie à l'opinion de l'Aniite ■& au goût fouvent niai af- furé du propriétaire ; C$}ft elle qui ne montre rien de confiant dans fes regies ^ de certain dans fes formes, ni de véritablement intéreflant dans fes détails ; TÀrchiteihire. qui lui eft foumifë n'efl que trop ordinairement dépourvue de la vraiiTembtance qui lui eft nécefTaire, & ne laifTe à l'efprit de l'exa- minateur qu'une idée vague des beautés de l'arc |
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ö'AitCHï ÏECTUiiË. 439
qu'il voudroit admirer, pendant quil ne peut tout
au plus que fourire de la singularité du génie de ■TArtiiie, parce qu'il ne remarque dans fes produc- tions que des objets futiles, dignes à peine du Théâtre. Une Architecture à la mode, eft encore celle qui d'après l'exemple de la multitude, eil au- jourd'hui maiîive fans motif, demain légere fans objet, grave fans néceffité, fimple fans conve- nance , mais feulement parce que e'eft. le ton tlit jour, & fans autre raifon déterminée de la part de l'ordonnateur que fes caprices ou fes doutes fur les règles de l'Art. Nous le prouverons ail- leurs, la mode eil le tyran du goût, & ne peut être que le partage des Artiftes fubaltemes ; mais mal- lieureufement ce font ceux -ci qui fe trouvant en plus grand nombre, contribuent par leur exemple à détruire, ou au moins à éloigner nos jeunes Elevés dé l'imitation des chefs-d'œuvre des anciens , de ce qu'ont produit de plus excellent nos mo- dernes, & de ce que produifent encore de nos joitrs nos plus habiles Architedes. Ces Artiftes peu inftruits, manquant du génie propre de l'Art, aiTerviftent leurs productions aux productions d'au- trui, & ne nous préfentent que des compositions froides & ftériles : autant d'imperfe&ions dont nous, allons parler. • * ■ *
, Ce que c'eß qu'une Architecture qui eßaßlrvic^
qui eft froide ou flifile.
Une Architecture afTervie , eft celle où l'on
remarque que l'Artifte qui Fa produite ,. pfécifé- ment afîujetti aux procédés des anciens,' femble ignorer les découvertes ingénieufes des mpder- nes ; celle où l'on reconnaît que pour réunir la E e iv
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440 o. Cö υ R s * { -
décoration extérieure de fes façades à la régu-
lante^ des dedans, il n'a fu faire aucun facnnce; que fuite de connoître les reilburces de fon Art, tout le gêne, tout lembarraffe ; que dans fa dé- coration il n'a fu parvenir à ajuiter une ouver- ture de proportion Dorique ou Corinthienne, en altérant un peu les principales dimenfions, pour les ajuder avec les entrecolonnements fixés par le véritable ftyle de l'ordonnance : celle oit Aon sapperçoit qu'initruit des préceptes de fon A« , il n'en favoit pas affez néanmoins pour les concilier avec le goût & la diverfité des moyens quon peut employer légitimement dans les diffé- rentes produöions du reiTort de rArchite£ure. ,Li* fervitude dont nous venons de parler jeté
neceffairetnent une certaine froideur dans les pro- ductions de fArdite : (es comportions font quel- quefois régulières , mais prefque toujours mono- tones; on ne peut les défaprouver abfoiument; mais elles manquent eiienciellement de l'art de plaire. Néanmoins une Architecture aiiervie peut iatisiaire le ConnoiiTeur par les règles qui s'y trouvent obfervées ; mais une compofition froide proprement dite, déplaît à tous les yeux; c'eft ceiemble celle qui généralement a trop peu de relief, relativement à retendue du bâtiment & à lexpreffion de l'ordre qui préfide dans fa déco- .. ration ; celle où l'on a introduit des pilaitres, lorique la, grandeur de l'édifice & le point de dntance d'où il devoit être apperçu, fembloit exiger 1 application des colonnes (a); celle dans -î) La nouvelle façade du Louvre, du côté de la rivière „
elr peut ecre clans ce cas, fur tout lorfqu'on la compare, vue iur 1 angle , avec le p<lriilile de «e même Palais. : |
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\] d'Architecture. 441
laquelle on a affe&é des repos δε des nus dé-
placés ; celle qui, par fon afpeft, ne préfente rien de fatisfaifant, lorfqu'on avoit lieu de s'at * tendre à rencontrer une décoration intéreffante, un certain mouvement dans la diftribution exté- rieure, une matière traitable dans la conftru&ion , & dans la main d'œuvre un faire , une touche incertaine, analogue au genre de l'édifice. Une Architecture froide ( b ) peut cependant
être régulière; une Architecture ftérile, au con- traire , nous paroît tout-à-fait à rejeter : ce feroit par exemple celle qui, pauvre dans fa compo- lition, n'orFriroit qu'une répartition indéterminée & mal entendue dans fes détails & dans fes orne- ments , noyés pour ainii dire & épars dans des maiïes trop coniidérables ; celîe qui dénuée de vraiiïemblance ne montreroit pas aiTez de mou- vement dans l'étendue de fes façades, pour an- noncer, au premier afpeit, un Palais, une Mai- fon Royale, une belle Maifon de Plaifance, &c. celle enfin qui indécife dans fes retours, dans (es angles, dans fes profils , prouverait l'inexpérien- ce de ÇArchiteae, & qu'il manque de ce fenti- tnent délicat qui détermine le fuccès des grands Maîtres, pendant que les autres , incertains fur la route qu'ils doivent tenir , prennent les parties IhTes pour des repos, les difparités pour des op- poiitions , &les altérations pour de la fimplicité. îpp
(/£) Le portail de TEglife des Petits-Peres, celui des Bar-
nabites, la maifon de .M. Croifat, rue de Richelieu , le Châ- teau de Montmorency , font dans ce cas , quoiqu'on y re- marqua une certaine févérité* qui intérefTe, |
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Ce que ßgnifie l'altération en Architecture.
On dit : Cette Architecture paroît altérée s lorf
qu'on s'apperçoit de quelques mutilations eifen- cielles dans fes parties, qui ne fembie être auto- rifée par aucune excufe légitime. Ce n'eil pas qu'on ne puiife fupprimer quelques membres dans une corniche à deiTein de la rendre plus iimple , ou pour donner moins de hauteur à un entablement ; mais fans néceffité engager une colonne , faire pénétrer fes chapiteaux , arafer un impofte, convertir un chambranle en bandeau , 'enfin retondre une bafe , ou parce que Ton craint de nuire à la voie publique dans les dehors, ou à Fefpace des lieux dans l'intérieur d^un bâtiment; c'eiï faire parade d'une incertitude dont on doit fe garantir abfolument, dût-on être obligé de chan- ger fon plan ou le ityle de fon ordonnance. On "appelle encore une Architecture altérée, celle qui par négligence ou faute de favoir les princi- pes de l'Art, manque de quelques parties effen- cielles à l'expreifion de l'ordre qui préfide dans les façades, tels que les trigliphes dans les frifes Doriques, les modulons dans la corniche Corin- thienne , les cannelures fouvent néceitaires dans les fûts des colonnes ; inadvertances rpi ne peu- vent être tolérées , & qui' , quoiqu'employées 'fouvent par nos prédéceffeurs , ne peuvent fervir d'exemples à nos Elevés, le mérite de l'Art;, ne confiilant pas dans l'imitation des chofes médio- cres, mais de celles avouées par l'autorité des temps & le fuiFrage des Connoifieurs. Autrement on s'abandonne à la licence ; on fait des membres méplats où il faudroit du relief; on préfère la |
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d'Architecture. 441
futilité au raifonnement, ou au contraire on pré-
fente une ordonnance pauvre & dénuée de vraif- feinblance, lorfqu'ori auroit dû produire quelque chofe de divin. Ce qu'on cnund par une ArchiteBurt méplate,
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On dit : Cette Archite&ure eft méplate, a trop
peu de relief, pour exprimer fon manque de faillie & le défaut qu'elle occafionne à la décoration d'un bâtiment qui doit être vu dans un certain point d'éloignement. Peut-être les deux ailes du Châ- teau de Vincennes, la décoration des galleries baffes du Château des Tuileries du côté des jar- dins , celle de la Fontaine des Saints-Innocents, font-elles dans ce cas. Il y faut prendre garde, trop peu de relief nuit au caractère de l'Architecture , lui ôte cette plénitude qui fait tout le mérite de la décoration extérieure , en lui communiquant cette certitude (jf, cette articulation (</) qui lui pro- cure tout fon effet. Dans les dedans , c'eft autre chofe ; il y faut éviter trop de dureté : une Ar- |
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( c ) On dit : Certe ArchiteAure eil prononcée avec certitude,
pour exprimer qu'elle cil précife fans féchefefle , & qu'elle préfente dans la diftriburion de fes membres & la beauté de fon exécution, une exactitude aiïonic au caractère de l'édi- fice: ' ,. (d) On dit communément : Cette Architecture eit bien ou
trop articulée; bien, quand on s'apperçoit q^ue fes membres principaux, fes profils & fes ornements font décides> precis» exacïs , & qu'ils fe détachent fans affectation fur le fondau- quel ils font adaptés; clleeft trop articulée, quand le caractère de l'édifice fembloit demander moins de. précifian , plus d in- certitude , un faire plus large , plus indéterminé a raifon de l'application des différents Cidres d'Ärchiteäure aux dîfterents-j genres d'édifices. |
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444 Cours
ehite&ute tendre, dégagée ( c ), une Sculpture
moëleufe doivent avoir la préférence : un moin- dre efpace, une lumière tempérée, ordinairement des matières plus précieufes , doivent guider le génie & le crayon de FArtifte. Les façades du Château d'Iffy ( f), les décorations de fon vefti- bule , de fon fallon , ont le relief convenable. Rien de ii bien entendu que celui qui regne dans les dehors & les dedans des Eglifes de FAn- nonciade à Saint-Denis, & de Sainte-Marie à Chaillot. Pour avoir voulu faire la plus grande partie de FArchiteaure & de la Sculpture de la Chapelle de Verfailles , tendres, douces , de peu de relief, on Fa peut-être faite maigre, féche, aride. Le grand fecret de FArchiteaure eft de fe montrer belle dans tous fes afpeäs : celui de FArchiteûe, de démêler le caraftere & Fexpref- iion qu'il convient de donner à chaque édifice ; ces connoiffances ne font pas faites pour le com- mun des Artiftes ; il η appartient qu'à FArchite&e éclaké , à l'Amateur inltruit de favoir apprécier |
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(e) Dégagée, en Architecture , s'cnteud dune ordonnance
qui, au premier coup d'œuil, fe préfente fans contulion j où l'on apperçoit des repos qui , loin de rendre la compoli- tion languiflante , mettent chaque membre a la place, öC iaiffent dans tout leur jour la beauté des formes, la propor- tion & la richeife des ouvertures , celle des avant-corps , Se généralement tous les membres répandus dans les façades dur» bâtiment. ( f) Ce Château a été bâti fur les deiTins de Bullet, dont
le nom & les chefs-d'œuvre font généralement trop ignores- de nos Elevés. C'eft à cet Architecte célèbre , que nous devons la porte Sainte-Martin, les Hôtels de Thiers &; de.Tunis , place de Vendôme , lé Palais Archiépifcopal de Bourges: au- tant d'ouvrages dont nous ne (aurions trop leur conleiiiei: l'examen Se l'imitation. , |
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d'Architecture, 445
de tels chefs-d'œuvre. Combien ignorent les four-
ces du beau ? combien ne faut-il pas d'étude pour arriver à l'excellent ? combien de propriétaires n'eftiment dans leurs Architeaes que l'adivité ? combien enfin de nos jeunes Emules ne s'attachent qu'à la multiplicité des entreprifes , & en négligent les détails , fans fe douter que de ces nuances fines & délicates, dépend le fuccès de leurs pro- duftions. Perfonne ne l'ignore ; c'en: la belle Ar- chitecture qui à illuilré la Grèce, l'Italie & la France, Ce font les monuments quelle érige en- core , qui attirent en foule l'Etranger chez les Nations où les Beaux-Arts font en vigueur. C'eii la belle Architedure enfin, qui forme les grands Artiftes , & qui éclaire la poilérité fur les moyens d'égaler de furpaffer même les grands Maîtres qui les ont précédés. Ce qu'on entend par une Architecture futile.
Une Architecture futile, femblable à l'Archite^
cïure frivole, eft celle qui, furchargée de mem- bres d'Architecture déplacés, & d'une multitude d'ornements mefquins , ne préfente dans l'Ar- tiile qu'un génie reiferré, & non cette fagacité qui enfante les chefs-d'œuvre ; celle qui aiïamée, atténuée, coudée, n'offre que les imperfe&ions de l'Art : affamée , parce qu'elle n'eft ni aiTez faillante, ni aÎTez nombreufe, que fes profils font mutilés , fes membres en général épars , & en par- ticulier ibibles & défaffortis : atténuée, parce que fes détails tiennent trop du travail de l'Artifan, & que de ferme qu'ils auroient dû paroître, ils font deve- nus maigres , décharnés, découpés, cernés : cou- dée enfin, lorfcrue/ devant être re&i%ne?elle né |
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44^ Cours
préfente rien que d'obtus ; elle n'offre que des jar-
rets , des obliquités qui choquent la vraiffemblance ; autant d'imperfe&ions qui rendent l'ordonnance de 'pluiieurs de nos bâtiments , iniipide , languif- fante, défagréable, & marquent au coin de la futi- lité , non-feulement la plus grande partie de leur décoration intérieure, mais encore leur façade, où Ton apperçoit .des ornements de Sculpture penchés , inclinés, renverfés, ondulés. Ce contra- île ne laiffe voir que les écarts d'un Artiile en fécond , & non la compoiition d'un chef éclairé, qui loin de faire parade des licences de fon Art, s'applique à ne les mettre en œuvre , que lorf- que la néceiïîté le requiert, & pour relever l'éclat des beautés de fes productions. ;. ' . . /j ■ ' .-
Ce qu'on entend par une Architecture pauvre.
On dit enfin : Cette compofition d^Architeâure
eil pauvre, pour défigner une ordonnance qui ne remplit , ni l'intention du propriétaire, ni l'objet que l'Archite&e auroit dû fe propoier; celle où l'on s'apperçoit à la vérité qu'il avoit intérêt de faire iimple, mais dont il a abufé faute de bien connoître les reffources de l'Art, & parce qu'il ignoroir qu'une décoration fimpie peut être belle. Une décoration pauvre eil toujours choquante, parce qu'elle fuppofe la fupprefïion de quelques parties effencielles au cara&ere de l'édifice. Com- bien neil-on pas forcé de convenir, à Fafpe£t de plùiieurs de nos bâtiments, que leurs arriéres- corps paroiiTent pauvres en les comparant avec les pavillons ou les avant-corps de leurs façades, & que les uns & les autres le font encore, relati- vement à la convenance de l'édifice ; que leurs |
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d'Architecture. 447
entablements , leurs corniches même , font appau-
vries , parce qu'il leur manque quelques membres utiles à leur expreffion ; qu'on eil forcé d'en dire autant de leurs croifées, de leurs niches , de leurs: baluilrades , de leurs attiques , de leurs foubaffe- ments, pour faire entendre que chacune de ctg différentes parties eit dénuée des membres princi- paux que le cara&ere de l'ordre auroit dû infpirer à l'Artille. On dit encore : Cette ordonnance eil d'une composition pauvre, quoiqu'on y ait employé des ornements ; mais comme ils y font déplacés, d'un genre trivial, d'une exécution médiocre, ils déplaifent, rebutent, & ne peuvent s'attirer au- cune efpece de coniidération de la part des hom- mes inflruits. Sans doute il eil difficile d'arriver au premier
degré de la perfection ; mais du moins ne doit* on pas négliger la relation qu'il doit y avoir entre l'Architecture & la Sculpture, & £e reifouvenir qu'il ne faut jamais confondre les genres, c'eil- à dire, le pauvre pour le fimple, le lourd pour le mâle, le décharné pour le fvelte, le difparat pour le varié, ή,l'on veut mériter un jour un rang diftingué parmi les Architecles du premier ordre. |
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Cours
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CHAPITRE V.
DU GOUT DE VART»,
Ou maniere d'éviter tout ce qui peut y être
contraire*
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C^Hagun fait que le goût eil quelque chofe
de réel : la difficulté eil de le définir. Quel eil- il en effet? En quoi confiilè~t-il ? De quoi dépend- il ? Jiil-il fufceptible, ou non, de principes ? Enfin , eil-ce une qualité de l'efprit, ou une affection de l'ame? Quoi qu'il en foit, difons qu'on fe fert du terme de goût, pour exprimer en général, le dernier degré de perfection ; que le goût, comme nous l'entendons, eil le Juge-né des beaux Arts, qui n'ont été réduits à des principes confiants & poiitifs, que pour lui plaire ; qu'en un mot, le ι goût de ces mêmes Arts n'eil point faÛice , mais naturel; qu'il eil en nous, mais qu'il fe peut per- fectionner, & qu'alors il devient le flambeau qui fert de guide aux Artifles dans toutes leurs pro- ductions. On peut divifer le gout en goût naturel & en
goût acquis. Le premier n'eil point une connoif- fance théorique, mais un fentiment des règles mêmes que l'on ne . connoît pas, ; c'eil lui qui nous caufe le plaiiir que nous éprouvons à l'af- pe& d'un bon ouvrage de l'art, fans autre fecours que le fentiment : le fécond eil celui qui procure àl'ame des fenfations dont l'efprit peut fe rendre compte. Cette dernière efpece de goût peut |
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Β * A R C H î Τ Ε C f Ü R E* 44p
être changée, modifiée ou augmentée par le goût
naturel : en forte qu'on peut dire qe le goût acquis , pour fe perfectionner, a befoin du goût naturel. -, Le goût peut auiîî fe divifer en goût aâif Se
en goût paifif ; Tun eil le partage de l'Artifte , l'autre celui de l'Amateur-: l'Artiite doit néceiTai- rement chercher, par le fecours des préceptes, à mettre dans {qs productions l'arrangement des par- ties le plus convenable ; l'Amateur n'a beibin que de favoir démêler la beauté du travail & de l'ordonnance ', connoiiîances qui lui fuffifent pour fentir le bon & le médiocre, & pour diilinguer l'un & l'autre. De-là, Ä eil aifé de conclure que le goût de l'Artifle devient plus difficile à ac- quérir, puifque les connoiiTances fuffifent à l'A- mateur, & que l'Artifte doit opérer. Mais l'on peut dire auffi que le goût féparé des préceptes eil in^· fuffifant, & que ces deux fources différentes doi- vent fe réunir dans leurs émanations. De-Ià vient qu'on les confond ordinairement, fans confidérer que c'eil cette union qui conduit à la %périorité, & que celle-ci feule a droit de fe faire fentir & approuver par les perfonnes, même les moins ver- fées dans la corinoiflance des beaux Arts. Au reile, le goût acquis s'èil établi une forte
de prééminence dans les beaux Arts, parce qu'en les perfectionnant, il s'eil perfectionné lui-même ; énforte que, fans ceffer d'être naturel, il eil de- venu plus parfait que le goût naturel ; d'où il s'en- fuit que fi tous les Artiiles s'appliquoient à dé- velopper & à étendre le goût qu'ils ont reçu de la nature, ils auroient des règles fûtes pour par- venir à l'excellence de leur Art. Il en eil peut-être du goût çooime des autres
Tome L l F f |
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450 Cour s' >
parties de Γ Art ; d'abord, la plupart des Peuples
ont aimé des productions imparfaites , parce que leur goût acquis n'éroit pas aifez perfectionné pour leur faire fentir les défauts de femblables produc- tions. Dans des iiecles plus éclairés, le goût s'eir. gâté dans plus d'un Empire, où néanmoins les Arts avoient joui d'une forte de célébrité, parce que la multitude de leurs Citoyens s'étant ennuyée d'une beauté trop uniforme, les Artiftes, pour leur plaire , ont cru devoir prendre des routes écar- tées. Enfin, l'on voit encore chez des Nations voifmes,où la Peinture & la Sculpture font né- ; gligées , les autres Arts languir ou refter dans la médiocrité ; le défaut de culture des uns nuifant nécefiairement au progrès des autres. Mais fans nous arrêter ici à citer une foule d'exemples, où nous pourrions trouver de pareilles caufes, con- traires au bon goût en général, paiïbns à ce qui regarde le goût de l'Archite&ure proprement ' dite. Le goût de l'Architeâutre ne peut s'acquérir
que par *ta comparaifon des chefs-d'œuvre des grands Maîtres. Ce n'eft point à la feule théorie qu'il faut avoir recours pour faire éclorre le génie. Il efl vrai qu'elle lui prépare la voie, mais c'eft l'enthouiiaime, qui en lui faifant franchir les obftacles, l'élevé jufqu'au comble de la perfection. Les feuls préceptes n'ont jamais fait un homme de génie. Les efprirs froids ont quelquefois produit des ouvrages réguliers: mais l'eiirhou- liafme a fait éclore des chefs-d'œuvre qui, quoi- .% que moins féveres, n'en ont pas moins mérité les éloges de la poitérité. Les feuls préceptes obfer- vés par un homme fans génie, ne produifent que de mauvaises copies j au-lieu que les ouvrages de |
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ö'Arcmïtêctühë. 451
goût perdent moins à l'imitation, parce qu'ils
forcent, pour ainii dire , l'imagination de celui qui eiîtrevok le but de FArtifte, & l'entraînent à une forte d'admiration qui lui échauffe le génie. Eu un mot, s'il faut du.goût & de fenthouiiafme pour développer aux autres les principes des beaux Arts , il en faut fans doute aufli pour fentir la juftêffe& l'étendue de ces mêmes principes. Ceft particulièrement en Archite&ure que le
goût doit donner î'ame à toutes les produirions dé- pendantes cle cet Art ; c'eft par le fecours du goût * qu'on faifit ces rapports, ces convenances, qui fatisfont la raifond'un fpeBateur éclairé. Lui feul, en donnant FeÛor au geniesde FÀrchite&e, l'élevé au-defius même des préceptes, & le conduit à ce jugement, qui eft pour les talents, le plus haut degré de perfeâàon. Il a fait naître dans l'Arclii- tecTnre ces difcuffions délicates, qui ont pour î; objet l'imitation de la nature, & d'autant plus difficiles à faifir pour î'Architetle, que la nature, en lui offrant dans fon fein les matières néceffaires a l'Art de bâtir, ne lui préfente le plus fouvemt dans fes afpeâs que des objets indéterminés è Le goût fert encore à éclaircir des doutes qui,
fans lui, lahîêroient FArtifte en fufpens. S'agit-il; de faire un choix pour la décoration ? il fixe le genre, regle la forme, afîigne les grandeurs & détermine i'exprerîion. Dans la diftribution , il fournit des moyens pour concilier l'ordonnance extérieure avec les dedans; il décrit les contours d'un parterre, d'un bofquet : enfin dans la con- itru£tion , il offre à l'Ârchite&e des reflburees pour réunir à la folidité la mieux concertée, la Beauté & la variété des formes. \ Pour acquérir ce goût, il faut iuppofer dans
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l'Architecte^la réunion du ientiment & de Tefprit,
Le premier eft excité par les objets fenfibles, &
fait fon rapport au fécond. Tous deux réunis forment dans l'Artifte le jugement qui le conduit au goût de l'Art. Or,il eft facile de concevoir que ii l'Architecle s'attache à étudier les préceptes de fon Art, le goût & les préceptes ramèneront infenfiblement à difcemer les lois de la cbnve-' venance, le choix des proportions & la beauté de l'ordonnance. Les préceptes alors allumeront le génie, qui fera nourri & entretenu par le goût. Le goût de i'Archite&ure doit donc avoir pour
bafe la connoiffance des préceptes de l'Art ; con- noiflànce qui embraûV à la fois la théorie & la *-j pratique du bâtimetit. Mais il peut arriver que l'Architecture, la mieux combinée dans fes parties, foit encore imparfaite, fi elle ne préfente aucun autre objet, diftin&if ; c'eft-à-dire, un caractère par- ticulier. En effet, que penferoit-on d'un édifice fomptueux qui n'annonceroit nullement Tufage au- quel il eft deftiné ? Les frais immenfes, comparés avec l'inutilité apparente, ne feroient concevoir qu'une composition peu réfléchie , & donneroient de l'ordonnateur une idée qui lui feroit peu favo- rable. Le goût feul,le goût peut faire valoir les pré-
ceptes les plus approuvés, & déterminer leur choix & leur application ;. autrement on pourroit pro- duire des comportions régulières, mais monoto- nes. L'œuil veut à l'afpeft d'un bâtiment, voir les rapports généraux réunis avec une fymétrie refpeâive. En un mot, le fentiment intérieur & le jugement veulent être fatisfaits de la conve- nance, du ftyle & dçs ornements: l'œuil & le |
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d'Architecture. 4fö
fentiment acquièrent par l'habitude la même préci-
iion & la même delicateffe, & deviennent fufcepti- bles des mêmes impreiïîons que l'ouïe. Le goût veut être fertilité. Pour cet effet, on
doit confulter la nature. Un Archité&e peut dif- pofer de toutes les richeffes que lui offre le fpec- tacle de l'univers, tout lui appartient; mais il en doit faire un ufage prudent, & fe reifouvenir que, généralement parlant, toutes fes produc- tions doivent retracer la dignité, ou l'opulence des perfonnes qui le mettent en œuvre ; qu'elles doivent être iimples & réfléchies ; qu'il faut qu'elles portent l'empreinte de la retenue ; que dans l'Ar- chitecture principalement, il doit y avoir un point d'union, où fe rapportent les parties les plus éloi- gnées ; enforte qu'une feule, une fois connue, indique toutes les autres. Tout ce qui fent l'ef- fort , fatigue l'efprit : un Architecte ne caufe guère impunément de l'embarras au fpectateur. Si la nature eil mal faine, l'Artiile, loin de fa-
tisfaire notre goût, n'excite que des regrets , en nous dérobant l'excellence de l'Art qu'il lui felloit concilier avec la nature. Mais pour les réu- nir, il faut favoir démêler l'analogie qu'ils ont en- tr'eux , & fe rappeler qu'elle a été le premier mo- dele des anciens , tandis que les modernes femblent avoir dégénéré ; ce qui donne à leurs productions un air de contrainte qui trahit l'art & met tout l'avantage du côté des productions qui tiennent de plus près à la nature. Il faut l'avouer, les Grecs, doués d'un heureux
génie, avoient faifi, avec jufteiTe,les traits çiÏen- ciels qui la caractérifent ; ils ne tardèrent pas à comprendre qu'il ne fuffifoit pas d'imiter, mais qu'il falloit encore choifir. Jufqurà eux, les ouvra* F f iij
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ges de l'Art n'a voient guère été recommandablef
que par l'énormité des maffes & par7 l'immeniité des entreprifes : mais ces Peuples plus éclairés , crurent qu'il valoit mieux plaire à l'efprit que d'étonner les yeux, & jugèrent que l'unité & les proportions dévoient êtse I3. bafe de tous les ou- vrages de l'Art. Aulîi, lorfque les Arts exilés de chez eux. fe
réfugièrent en Italie » on alla dans la Grèce fouiller jufques dans fes tombeaux, & l'on vit bientôt à Rome , reparaître l'antiquité dans toute fa fplen- deur. On fit plus, on étudia leurs Auteurs, on y trouva des règles établies, des principes ex^ pofés , des exemples retracés ; en un mot, Timi- tation de l'antiquité fut pour les Romains ce que la nature avoit été pour les Grecs. Ceux-là com^ prirent bientôt quel étoit le but de cette imitation x par laquelle on fe propofoit de plaire, de remuer, de toucher ; ce qui fervif de regle à leurs tra-* vaux , & de guide à leur génie. N'en doutons point, c'eft dans les anciens chefs^
d'œuvre qui nous reitent de ces deux Rations, particulièrement dans ceux de la Grèce, qu'on re-- rnarque ce vrai goût, ce je ne fais quoi de libre & d'original qui fe rencontre rarement dans les ouvrages modernes. La nature & l'antiquité ont donc feules le droit de faire, éclôre un heureux: génie, & de le conduire au terme de fon Art. Or, nous avons les mêmes moyens qu'avoient
les Romains, nous pouvons çoniulter la nature & l'antiquité. Coniîdérons la premiere, & nous y reconnoîtrons cet ordre admirable, joint à une variété infinie ; nous y remarquerons des rapports juftes entre les parties & le tout ? entre les caufes &; les effets ; nous, la, verrons finiple. dans ie$ |
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moyens , mais fans monotonie; riche dans fa pa-
rure , mais fans affe&ation ; féconde en reiTources, mais fans s'embarrafTer elle-même. Voilà comme il faut l'appliquer aux beaux Arts, particulièrement à Γ Architecture, & ne jamais l'outrer par des com- poiitions bifarres , qu'elle défavoue. Pour avoir mal connu cette vérité, combien d'Artiftes fe font abufés en faifant choix du défordre de la nature, au lieu de les beautés ? Combien n'avons-nous pas vu d'arriftes qui, pour n'avoir confuké, ni la nature, ni le climat, ont voulu bâtir au milieu de Paris, comme ón faifoit dans l'ancienne Rome ? Il faut du goût pour bien imiter; autrement les plus beaux modèles dégénèrent entre les mains des Copifles. D'ailleurs les meilleures productions demandent à être appréciées : car fans vouloir parler des Egyptiens, dont le goût pour l'Architec- ture , dans les commencements, étoit affez incer · tain ; les Grecs & les Romains , auxquels nous applaudiiïbns, ont auiîi eu, dans leur début, leurs incertitudes , quoiqu'ils aient enfuite porté l'Art à un degré de perfection, ignoré de leurs prédé- ceiTeurs. 11 jaut donc du choix dans l'imitation ! des ou-
vrages mêmes de ces Nations, autrefois ii célè- bres. Perfonne n'ignore que les premières produc- tions des Grecs , fe reffentent allez de l'enthou- iiafme de leurs Ecrivains qui, avant la conquête de l'Afie par Cyrus, n'avoient encore rien écrit en profe, qui pût donner une idée jufte de l'Âr- chite&ure: enforte que leurs Architectes, guidés par ce même enthouliafme, commencèrent par s'éloigner de cette »belle fimplicité qui, après plu- sieurs iiecles, a produit les chefs-d'œuvre α A·· iHênes. Ffiv
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Les Architectes d'Italie, d'abord plus imitateurs
que créateurs, parurenr contraints dans leurs pro- ductions, foit qu'ils n'euffent pas le génie des grecs., Kbit que ceux-ci, tranfplantés chez une Na- tion vtctorieufe , euifent perdu de vue leurs pré- ceptes avec leur liberté ; & fi l'on a vu quelque- fois chez les Romains leurs Architectes s'écarter de cette imitation, ce ne fut que pour rendre leurs monuments plus vailes, plus étendus , & non pour fuivre cette belle fimplicité s l'effence propre de la belle Architecture. Il en eit, je crois, dés ouvrages des anciens
comme de ceux des modernes : de tout temps , iî s'eil introduit des licences dans les Arts ; c'eit le propre de l'humanité, de fe croire tout permis » & il ne feroit pas furprenant que la renommée nous eut tranfmis la gloire d'anciens édifices, qui nauroient eu d'autre mérite que l'antiquité. D'ail·- , leurs,ne fait-on pas que chez prefque toutes les 'Nations, peu d'Ârtiites ont cultivé les lettres ; que îa uefcription des édifices des anciens a été le partage des Hiftöriens, & que la plupart de ceux- ci, ignorant à la fois & les préceptes & le goût de l'Art, ont négligé, "dans leurs écrits, de nous faire connoitre ce que les Architectes avoient pro- duit, fok de génie, foit d'imitation. Aujourd'hui encore, la plupart de nos jeunes Artifres ne né- gligent-ils pas tous les jours de fe rendre compte de la fource où nos prédéceffeurs ont puifé leurs, découvertes ? De-là toutes ces licences qui'pren« nent faveur chez le plus grand nombre, parce quelles iemblent donner plus de liberté aux hom- mes fans doctrine, & gêner m*oin§ ceux qui font pins éclairés : de-là le peu d'ufage qu'on fait de iefpric de comparaifon ; on applique indiftineté« |
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ment les mêmes ordonnances & les mêmes orne-
ments aux bâtiments de genres différents ; on a recours à de nouvelles inventions qui, à leur tour , fe trouvent détruites par d'autres nouveau- tés : infenfiblement nos élevés devenant incertains fur les règles, & irréfolus dans le choix des pré- ceptes , ne craignent plus de facrifïer à la va- riété des formes & à la multiplicité des détails, la "dignité Îi recommandable dans les monuments facrés, la bienféance qui doit être obfervée dans les édifices publics, & la fimplicité qui eft le par- tage des bâtiments d'habitation. Trop pen inftruits des règles fondamentales de leur Art, ils fe ré- voltent contre une imitation fage & mefurée. Par- venant enfin à oublier leur foibleffe, ils ofent tout, au-lieu de füivre de près les productions de ceux qu'ils ne peuvent atteindre. En un mot, rimpreiîlon que les ouvrages des grands Maîtres dèvroit faire fur leurs efprits, s'efface ; &lors même que FArchite&ure, par la libéralité des Grands & l'opulence des Particuliers , pourroit rentrer dans tous fes droits, elle voit fes préceptes négli- gés, la témérité prendre la place du favoir, & la plupart offrir a leurs Maîtres, au lieu des pro- ductions que le vrai goût leur infpireroit, précifé- ment ce qui lui eft le plus contraire. Pour éviter de tels inconvénients, cherchons
ces beautés qui émanent du goût, & parcourons ce qui nous eft enfeigné par la théorie & la pra- tique de l'Art; joignons-y l'étude des beautés dé la nature. N'oublions pas non plus que la meil- leure maniere de perfectionner notre goût, c'eft de comparer enfemble les édifices de même genre, enfuite ceux de genre différent. Peut-être ces divers moyens nous conduiront-ils à découvrir les vrais |
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principes du goût ; du moins fera-t-il facile de
convaincre nos jeunes Architectes qu'un édifice qui, dans fa ilru&ure , raiTembleroit toutes ces différentes parties , auroit également le droit de plaire aux connoifTeurs & au vulgaire , puifqu'au moyen"de cette réunion, on y trouvèrent d'ac- cord les maffes, les parties & les détails : le fpe&a- teur y remarqueroit auffi le foin qu'on auroit pris d'éviter la liaifon du pefant avec le délicat, ainfi que la profufion de la Sculpture dans une Archi- tecture fimple & grave, l'attention que l'on auroit eue de réunir la folidité, la commodité & la beauté: u verrok qu'à ces parties eifeneielles & primitives on a fu en allier d'autres non moins eftimables, telles que la régularité & lafymétrie, dans ladjÄribution; l'économie & la perfection des matièresu dans la conitru&ion ; la févéritéde l'exprefiion & l'enchaî- nement des rapports, dans la décoration: tous objets intéreffants fans lefquels on ne fauroit arriver à un véritable fuccès. Pour tâcher de faire mieux fen'tir en tjuoi con-
firme la nature du goût, il ne fera pas inutile de donner quelques maximes , que lui feul nous paroît avoir établies. Du moins fi nous n'avons pu le définir exactement, efTayons de développer ce qui lui eft le plus contraire. Le goût guidé par le raifonnement, exige
l'imitation de i'Architeäure antique, prèférable- ment à la gothique „la plus ingénieufe. La pre^ miere plus régulière & plus conféquente, occupe l'ame fans partager l'attention , '& ne laiffe pas d'être affez fufceptible de variété, pour obtenir le (uffrage des hommes intelligents. Ce n'eft pas que |
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d'Architecture. 4f9
îes Goths, s'ils euffent montré plus de choix dans
leurs ordonnances, & fur-tout plus de goût dans leurs ornements, if enflent mérité d'être imités par leurs fucceffeurs : mais leurs productions font pref- que toujours une forte d'énigme pour Fœuiî qui les examine ; enforte que le fpeclateur fe trouve embarraifé pour en démêler les beautés ; défaut qui certainement ne fe rencontre pas dans l'Archi- tecture des Grecs & des Romains. Le goût dont il s'agit exige que les façades
d'une certaine étendue, ainii que les lieux vaiies, foient compofés de grandes parties ; le petit & le colofïal ne pouvant aller enfemble. Ce même goût veut encore que toutes les parties d'une décoration aient du rapport entrelles & foient de même genre : il défend de placer au même étage ou dans la même pièce, des membres d'Ar- chitecture ou des ornements de Sculpture rufti- que, entremêlés d'autres ornements d'une expref- iion délicate ; quoique les u|s & les autres exa> minés féparément foient approuvés par les pré-* ceptes de l'Art. En général, il faut que les or-* donnances Tofcanes aient peu d'ornements, & que îes Corinthiennes au contraire n'en foient jamais dépourvues ; la beauté d'un édifice confiftant dans raccord des maiFes, qui forment fa décoration, & dans celui des parties qui en dépendent. En un mot, on defire dans un édifice de voir régner, avec l'ordre, une diveriité louable, fans laquelle on n'apperçoit sue monotonie, où l'on voudroit remarquer des formes aiTez iimples pour être apperçués d'un feül coup d'œujl , & aff^z variées pour être exa- minées avec plaifir. Le goût de f Architecture fe manifefte parti-
çpliérement dans la manière:.'4ç proulçr^ elle. |
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eil de tous les befoins d'un Archire£te, le plus
effenciel ; il neft. jamais difpenfé de montrer ion habileté en cette partie. Pour acquérir ce degré de perfection , la fcience des Mathémati- ques , une théorie profonde des préceptes, l'étu- de des meilleurs auteurs, toutes ces connoiffan- ces font iniûfnfantes fans le goût & l'expérience. L'art de profiler ne dépend pas du génie. Celui-ci peut bien concevoir les règles fondamentales de l'Art, & les fui vre jufqu'à un certain point ; mais le goût feul a droit de les choiiir : en un mot, G*erî ce goût qui doit être le modérateur dû, génie de PArchitecle. Il ne s'agit pas non plus d'inno- ver ? il faut le goût propre à la chofe; il faut un efprit de méditation , fans contrainte ; une Imagi- nation réglée , fans fervitude : il faut que l'Artifte fache avoir égard a la qualité de la matière, pour donner à fes profils une exprefîion qui lui foit analogue. Il faut qu'il prévoie le point de diftance d'où les moulures doivent être apperçues; qu'il confidere le volume d'air qui doit les environner» & qu'il s'attache au genre de PArchite&ure qui les amené fur la fcêne , afin de pouvoir leur procurer ce caractère de fermeté ou de légèreté» cette richeife ou cette fimplicité, fi propres à ren- dre les parties dépendantes de l'enfemble ; enfin qu'il ofe fe permettre quelquefois un ftylp parti- culier que le goût feul autorife dans cette partie de l'Architeciure. Le goût femble s'oppofer à Inapplication des
Ordres d'une expreiîion différente dans une même façade; un feul ordre paroît y funire. Il y a plus ; c'eft peut-être une erreur d'en admettre où ils ne peuvent avoir un certain diamètre ; d'ail- leurs les ordres ne doivent jamais être amenés» |
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d'Aiichitegture. 461
ce femble , que pour la décoration âes édifices
jpublics & des Palais des Rois : les bâtiments par- ticuliers n'en doivent retenir que TexpreiTion ; autrement ceil vouloir aifocier des parties qui doivent annoncer de la grandeur, avec des étages auxquels la convenance & l'économie obligent de donner peu d'élévation. Qu'on examine les ouvra- ges des grands Maîtres, on verra que tous ont été iimples, même dans leurs productions les plus importantes , & qu'il n'appartient qu'aux Artiftes médiocres, d'avoir recours à la profuiion. Orc'eft montrer la médiocrité dans tout fon jour, que d'affe&er dans des maifons de vingt toifes de face, d'élever les uns fur les autres, pluiieurs petits ordres , qui contribuent à rendre encore plus petite la décoration extérieure , fans parler de l'attention qu'un Architecte doit avoir pour l'efprit de convenance, le premier mérite 6c de Γ Archi- tecte & de rArchitecfure. Le goût femble s'oppofer encore à l'emploi
des ordres coloiTaux, dans l'ordonnance des bâti- ments deilinés à l'habitation .des particuliers, & il ne les tolère que dans la décoration des édifices facrés. Il eft d'autres moyens de parvenir à pra- tiquer pluiieurs étages les uns fur les autres , dans les maifons ordinaires^ fans fe fervir d'un ordre, qui embraife pluiieurs rangs de croifées. Les exemples connus que nous avons en ce genre, ne doivent ni ne peuvent faire loi. Le goût ionàè « fur la raifon , n'accepte ni fyilême, ni opinion particuliere ; il doit être un: & il nous femble que c'eil s'écarter de cette unité , que de faire parade , dans les dehors, d'une grande ordon- nance , que l'on fent ne pouvoir fe concilier avec , les dedans. Nous l'avons déjà obiervé ; il ne lufrir pas de faire ce que les autres ont fait i il faut |
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461 Cours
réfléchir fur ce qu'on doit imiter. On a tout tenté;
il ne s'agit plus que de chercher à approprier à nos befoins, tout ce que nos prédéceffeurs ont produit d'eitimabîe. Il ne nous reite enfin qu'à faire marcher à côté des préceptes, les lois que le goût impofe , & à faifir la nature dans (es diffé- rents afpecÎs, pour Tapproprier à l'Architeclure, & par ce moyen parvenir à l'excellence de f Art* Le goût dont nous parlons , exige que dans toute efpece de décoration, relative à Γ Archi- tecture, celle -ci tienne le premier rang , & donne le ton à toutes les productions des Arts qu'elle s'aiTocie. Certainement ce n'eil pas la quan- tité des ornements qui augmente la beauté des édifices î ce font feulement ceux qui, puifés dans la nature, offrent des beautés réelles. Tout ce qui n'eil fait que pour l'agrément , a droit de pa- roître médiocre, dès qu'il eil déplacé: le goût eft mécontent lorfqu'on lui laiffe à délirer. Ufons dpnc des ornements avec fobriété, & fouve- nons-nous que c'eit l'art de les appliquer, qui fait tout leur mérite ; qu'il en eil de £'Archite- cture comme de la Poéfie ; que tout ornement qui n'eil qu'ornement, eil de trop ; qu'ils ne doi- vent jamais paroître poftiches, ni déplacés dans un édifice, mais amenés dans la compofition de l'en- fembîe pour embellir Γ Architecture , & non pour l'accabler, l'enfevelir ou la défigurer ; qu'il faut que les ornements , pour être approuvés portent l'empreinte de la néceflité ; qu'il en eft des orne- ments des Meiffonniers, comme des ornements Gothiques ; qu'ils fatiguent les yeux par leur con- fufion, & que l'œiiil ne pouvant fe fixer fur aucun , ils dépiaifent par l'endroit même qu'on avoit chpifi pour les rendre agréable j qu'enfin ΓArchite&ure » |
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D'A RCHITECTURE. 46}
par la beauté de fes proportions & le choix de
fon ordonnance, fe luffit à elle-même; que le goût, fruit du raifonnement de l'Archite&e , doit guider fon crayon, ainfi que fon génie , pour • lui faire diftribuer fes ornements avec fobriété ; qu'il doit lui faire choiiir avec leur expreffion la plus convenable, leur relief & leurs fymboles , & lui faire établir dans fa décoration, des repos & des internales qui contribuent à faire valoir les ornements , fans nuire à la dignité de Γ Archite- cture. Le goût acquis exclut toute efpece de mode,
dans Γ Architecture , comme autant d'obftacles à fa perfection &i à fes progrès. La nouveauté femble ne devoir être permife , que pour les chofes de pur agrément. L'homme de goût, lorsqu'il s'agit des Arts utiles, fait réfifter au torrent, & abandonne au vulgaire cet efprit de vertige que l'Artiiie fuperflciel décore du nom de génie, de feu & d'invention. C'eft la mode, ( ce tyran du goût, qui a varié à l'infini l'efpece, le genre & la forme des ornements, & qui nous les a fait placer allez long-temps , indifcrétement & fans diitin&ion , dans les Edifices facrés, dans les Palais des Rois, dans les demeures du Prélat »., du Magiftrat, du Savant & de l'homme privé* C'eft la mode, la reffource des Artifans merce- naires & fans principes , qui leur a fait employer jufqu'à l'excès ce mélange confus de lignes iinueu- fes & de lignes droites, dans les plans & dans les élévations. N'en doutons point, c'eft l'excel- lence de l'Art, ou la médiocrité des produ&ions qu'entraîne la mode, qui fatisfait l'âme, ou qui lui fait éprouver ce dégoût, qu'on réffent à leur afpeft > lorfqu'on n'y remarque qu'une confufioa |
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4&4 C o υ R s
rebutante: écarts d'autant plus dangereux, qu'ils ont
eu des imitateurs pires encore que leurs modèles ; ce qui vraisemblablement fe fut perpétué à l'infini, ii de nos jours pluiieurs Archite&es célébrés n'a- voient fait tous leurs efforts, pour reftituer' à leur Art les vraies beautés que la mode & le caprice lui avoient fait perdre depuis le commencement de ce iiecle. Le bon goût défend l'application des fron-
tons , où ils ne paroiffent pas néceffaires ; il condamne leur multiplicité , & rejeté ceux qui font enroulés, coupés, interrompus, trop élevés ou trop furbaiffés. Il prononce de même fur l'emploi des niches, & femble -n'autorifer les uns & les autres, que dans la décoration <ks &οΐ1- tifpices de nos Temples. Le goût étayé des pré- ceptes de l'Art, n'admet jamais les baluftrades fur la partie fupérieure d'un bâtiment, lorfque celui-ci fe trouve couvert par des combles. Il exige une application réfléchie des étages en fonbaffement, & de ceux qu'on appelle attiques ; il fupprime les tables faillantes ou rentrantes , par-tout où la im- plicite doit être préférée : il exclut les tours ron- des ou creufes , & même la réitération des avsnt- corps 'Jk. des arrière-corps , dans les ordonnances Tofcanes ou Doriques : il veut que le mouve- ment du plan foit relatif à Texpreffion, qui· pré- iide dans la décoration des façades : il condamne axtffi toute efpece d'ornement arbitraire , indifé- rent ou profane, dans la décoration des monii" ments élevés à la piété ; il rejeté toute Sculpture qui a trait à l'aviliffement pu à la fervitude de l'humanité ; il blâme les ornements taillés fouvent fans réferve dans les moulures des entablements des façades 9 & préfère dans un édifice régulier, les balurlrades
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»'ÀRCfi LT Έ CTUÄ Ε* 4&f
baltiitrades aux balcons de fer ■; il s'.oppöie â! toits
. les encorbellements i qui: ibutiennentiiles fardeaux ^ :■&'. leur fubftituëi des colonnes oir: aiitóes coïg^ d'Architet'Hire 4 .qmimonteEt de fond; Arni de la coiumodité, il veut qu'on, entre à couvert xians les yeitibules , qu'on pratique des cours fpacieufes & aérées, qui feules peuvent proaurer.de $ß $Èk+ brité aux bâtiments d'habitation : il s'oppofe en- core à l'élévation , fouvent inutile , des portes qui donnent entrée à nos hôtels & aux mai- ions de nos riches Particuliers : il regarde comme autant de licences condamnables, l'appli- cation des colonnes jumelles , ainii que celle des colonnes ovales ; enfin il défapprouve les porter à-faux apparents , amenés dans rArchiteâute par inadvertance ou par une négligence qu'aucune beauté effencielle ne racheté. Le goût veut auiÇ , que l'intérieur du bâti-
ment foit aiTorti à l'importance des dehors ; que chaque appartement porte un caractère analogue à fon ufage ; que les, ornements foient graves dans les pièces deitinées à traiter des affaires pu-* bliques; qu'ils aient moins de févérité dans celles qui font confacrées à la fociété, & qu'ils foient encore plus riants dans celles qui font deitinées au repos ou à la retraite des Maîtres. Le domaine du goût s'étend jufqu'au choix des étoffes, à la forme des meubles, à l'efpece des matières réelles ou feintes , à l'application de la dorure, à l'unité des tons , à 1 afïbrtiment du bois , du marbre, du fhic ou du plâtre , du fer & du bronze. H s'oppofe fouvent à l'ufage des trumeaux de glace, placés entre deux croifées, & tolère à peine l'ufage de la peinture coloriée, dans les voûtes ou les plafonds dés fallons, des gallerieSj &c. Il ςοη,- Tomc IA G g |
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4^6 > G o ur us
damhe enfin expreffémentyla répétition des mêmes
allégories dans la décoration des bâtiments de genres différents ; en un mot s l'effet que produit néceffairemeiit le goût, c'eft de nous ramener,par Il voie du fentiment, aux premiers préceptes de l'Art, & de réclamer contre tout ce que la vraif- iemblance & Fefprit de convenance défavouent. |
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d'Architecture. 46*7
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CHAPITRE VI.
Application de l'ordre Τ os can t
A LA DÉCORATION D'UNE PoRTE
de Ville libre.
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OU S avons cru devoir attendre , pour faire
appliquer à nos Elevés l'ordre Toican à TArchi- ie&ure , qu'ils eufîent acquis, non - feulemeos: les connoiftances_de cet ordre dont il eft traité au commencement de ce volume, mais auffi qu'ils enflent lu avec attention les définitions ou le raifonnement de l'Art qui viennent après , & qui doivent en être regardées comme la fuite. A préfent expliquons-leur les procédés dont nous nous ibmmes iervis pour rendre l'ordonnance de cette porte, conforme à fexprefnon ruftlque de cet ordre , & difons : Que lorfqu'une fois on a. cru devoir le faire entrer dans la décoration des bâtiments Civils, Militaires ou Navals, il faut néçeffairement que la difpontion & la propor- tion générale des maifes du bâtiment foient rufti- ques, c'eft-à-dire , que la largeur, la hauteur & la faillie des avant-corps & des arriere-corps, fe reiTentént de l'expreirlon racourcie de cet ordre ; autrement on rifqueroit d'allier enfemble les con- traires , ce qui arrivèrent indifpenfablement, fi l'on plaçoit cet ordre fur des nus, qui , par leurs divifions , fembleroient appartenir plutôt aux ordres moyens & délicats, qu'au Tofcan propre- ment dit. Ce η eft donc point aifez , loriquon G gij '
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46$ Cours
veutréniîir dans un projet cle cette efpece, d'avoîf
ïait choix "de cet ordre ; il faut encore que fori cara&ere ruftique fe retrouve dans toutes les par- ' ties de la décoration , non-feulement pour ce qui concerne i'Archite&ure, mais encore pour ce qui regarde les ornements de Sculpture qui y peu- vent entrer. Pour indiquer la route qu'il convient d'obferver en pareilles circonftances, nous allons donner le plan, les élévations & la coupe du pro- jet -d'une porte , deftinée à fervir délimites à une ville libre ou de commerce, & rendre compte des précautions qu'il faut apporter pour conferyer dans fon tout ou dans fes parties, cette unité & cette analogie que nous recommandons. Plan du rez-de-chaussée et de la
plate- forme superieure d'une Porte destinée a servir de limites a l'extrémité du f au- | bourg d'une Ville libre. ρ x a nc h ε xi x.
Le plan du rez-de-chauffée, figure I, en faifant
voit l'épaiiTeur du mur F, M, qui détermine celle de ce bâtiment, indique auiïi la variété qui regne dans l'ordonnance de ces deux faces oppofées : différence qui provient de la richeffe qu'on a cru devoir donner à celle du côté du faubourg , fur celle du côté de la ville 9 parce qu'elle doit en être eonfidérée comme le frontifpice, & comme telle offrir une décoration intéreffante, Expliquons les rapports qu'ont entr'eux toutes les différentes parties de cette porte, pour que d'après ce pro- |
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β'
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d'Architecture. 469
<:êdé général, on puiffe parvenir à compqfer telle
ou telle autre ordonnance d'Architeûure en ce genre. '
Toute îétendue A, Β, longueur prefcrite par
la difpofition du lieu >, eil divifée en douze parties, -d'un toifè chacune; fix de ces parties font pour l'avant - corps CD, qui elles-mêmes font par- tagées en trois; fçavoir : une pour la largeur dé la porte Ε , & une pour chaque pile'Y', F. Les arriéres - corps A, G, D , Β, font àuffî-dmfé's chacun en trois parties : une pour les corps angu- laires G, G ; une pour la largeur des niches H', H'; & une pour chaque pied droit 1,1. Ces derniers font encore diviiés en deux, dont chaqùèmoitië détermine la largeur des renfoncements a, a qui 'contiennent la niche avec fori chambranle; ces niches H, ont de profondeur la moitiéde leur lar- geur. Dans l'avant-corps , toute l'épaifleur 'Ml ■mur F , Μ , eil égale à la largeur de la porte È, ou, ce qui eft la même chofe, égale à la fixieme partie de la longueur totale A, Β. L'épaiiTeur des murs des arrière τ corps, vers
\qs niches, n'en a que la moitié. Les colonnes Κ de l'avant-corps , pratiquées du côté du fau- bourg , font adoffées au corps intermédiaire G, ί}, .'.-■& leurs faillies déterminées par celles des retraites - qui régnent tout au pourtour & au pied du-bâti-
•ment. ; Nous n'avons point placé de colonnes du côté
de la ville, mais feulement des corps d'Archife- clure M, dont la largeur égale la moitié de celle - de la pile P, P. A la place des niches, nous
•avons pratiqué dans les afriere-corps, des tables
• ^enfoncées marques "tî ,"& dans lefquelîes nous
en avons inféré de faillantes , afin de procurai
G g ii|
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470 ;>?, ".', C ο ν R s
à cette façade un plus grand cara&ere de fermeté *,. autorifé ici par l'abfence de Tordre. •il Dans le mafllf de l'avant-corps de cette porte» nous avons, pour plus d'économie , pratiqué , d'un côté, un efpace vide marqué L, & qui peut fervir utilement pour un dépôt; de l'autre côté , nous avons placé un efcalier à noyau qui monte fur la plate-forme, fervant de couverture à la partie fupérieure de ce bâtiment, La figure II, offre le plan de cette plate-forme conirruite en dalles de pierre , & où l'on a marqué le caniveau a , qui conduit les eaux dans la defcente Ο , pratiquée dans les deux piles placées aux extrémités de cet édifice, pour de-là venir fe répandre dans une gargouille poféç furie fol du pavé du, côté du faubourg» [ ; ή ËiévATiöN de la Façade dû côte
v. ' > J
t du Faubourg.
8 . Ρ Ï$M Ν-;:C H £ XX.
Ce que nous venons de dire en décrivant la
, planche précédente, regarde également toutes les largeurs exprimées dans cette façade, c'eitTià-dire,
- celles de l'avant - corps , du corps intermédiaire ; celles des arriere-corps, de la porte & des niches ;
ttèutgs parties déterminées d'après le plan dont nous venons d'expliquer les principales dimen-
fions* Voyons à préfent lqs rapports que la hau-
vteur" 4oit avoir avec la largeur de cet édifice. Toute la hauteur de ce bâtiment, depuis F jufqu'à
s Q i efl à A Β, à-peu*-pr£s comme un en: à deux ; Ja largeur du corps intermédiaire C D, eft égaje à FQ? plus, l'attique R qui s'élève au-deffus»
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d'Architecture; '4fi
Pour parvenir enfuite au détail, & après avoir
élevé fur le plan toute la façade AB, 1'avant- corps CD,1 porte E, les niches H , les corps de réfend G, les colonnes K, &c. il faudra fixer la hauteur de la retraite F , au quart de celle de Tordre, qui ayant 3 pieds de diamètre, aura, comme Tofcan, 21 pieds de hauteur. L'entable- ment I, aura aufîi le quart de la hauteur de Tordre, & tous deux feront aiiiijettis aux mefures parti- culières de Vignole que nous avons expliquées au commencement de ce volume. < Iles niches H auront de hauteur deux fois &
un quart leur largeur ; leurs chambranles a, la frxieme partie de celle des niches ; les alètes , des niches quarrées qui les renferment £, la moi- tié du pied droit depuis Tangle de la niché H, jufqu'au corps de refend G. La porte E a de hauteur deux fois fa largeur , &c. Cette porté ^ dans fa partie fnpérieüre, eit de forme furbaiffée, au-lieu d'être plein-cintre; & à la place d\m impofle & d'un archivolte , nous n'avons fait ufage que d'une feuillure ; cette forme & ce genre d'ordonnance, ayant quelque chofe de plus ferme & de plus analogue à Tordre Tofcan qui préfide ici ; d'ailleurs il faut remarquer que le ftit des colonnes étant chargé de boifages alternatifs, ce genre fembloit exiger ce caractère fimple, qui ne pourroit guère fe fupporter dans les portés aes autres ordres. Les boffages alternatifs 'J appliqués aux colonnes, ont chacun un module de hauteur, ainfi que leurs intervales; leur faillie fur le &t9 eft-de trois minutes. La largeur de Tentreco- lonnement eft, à fa hauteur , comme neuf éft à quatorze ; cette proportion racourcie conve- nant à un ordre dont toutes les parties de Toe* G giv
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dohnanee, doivent janxioncer iiiie exfjteiîîon πιίΐί- que. ..I^a hautaur du clpveaii L ^ eil égalé à la largeur-des gieds droits- M y;& TunelÉk: lautre ont neuf douzièmes du diaiiiêtre de l'ordre. La largeur φ la feuillure Ν jdoit'avoir Ja;fixieme partie de celle .au. pied droit M, & de profondeur la moitié de fa largeur. Sur les arrière-corps de cette fa- çade nous-avons converti la, corniche de l'enta- Element, i ? en plinthe, marquée Ο ■> parce que ces arrière - corps ne fervant que d'accotement à l'a vant-corps principal - de ce bâtiment ,.: il nous a; femblé^néce-ffaire d'en iimpîifier le couronne- ment,. ^Uîd^ffus de cette" plinthe Ο, nous n'avons fait régner q-uunfode ··, J? , ^iuijetti-à 1$ hauteur de la retraite Q:i qui fontient l'attique marqué QRS;: ■cetattique fert à faire p^ramider la partie majeure, du bâtiment '%- qui, dans tous ι les. cas ti d§fï<J& faire rèmarquer,j fpit par un aiîèz grande faillie rfoit par une plus grande élévation que le jefte de la façade.;. A l'imitation des anciens y nous n'avopsc donné à la hauteur de cet attique, gueJe qujtrtr de. la>cplonne;& de l'entablement .pris enfembJe. Nous avons idivifé la ^ hauteur de cet, attiqi je eo, fanit y hous en avons donné trois à la retraite Q, quatre ΦϊιΜ R > & une à îa tablette j S* ; ; Au milieu; de Cet attique ι eil q daptée une table faiilante deitinée à recevoir lune infcri- ptioii : .cette table ^réémine: fur l'attique -> & fon ^étendue reftc;:déterminée par la largeur de Fentre- colpniieinent, Au-deiîiis ; de cette table régne un. jfocfe couronné des armes du.Rqi, ce qui s'obferve .aiiéz, .géüérslement dans ces occaiions , comme une .dédicace offerte au Prince par fes fujets. Dans, ton s les cas, il faut avoir attention: que cette Sc.ul|}ture foit pompoiëe d'un caractère mâle |
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d'architecture.' 473
analogue à l'expreiïlon de Tordre, il en doit être
de même des itatues placées dans les niches., ac- ties ornements qu'on remarque fur le claveau de la porte, qui tous doivent offrir peu de^ details, un faire, une touche vague & indéterminée. INous n'avons même indiqué pour amortiûement, que l'abrégé des fupports des Armes de France ioute- nant un écuffon de forme circulaire ; autrement les Anges , fupports des Armes de Sa Majelte, auroient offert ici un mouvement & une élégance toujours déplacés dans' une ordonnance ruiti- que. Les itatues de femmes qu'on voit tracées dansles niches, repréfentent,quoiqu'ailez impar- faitement , l'Agriculture & l'Abondance ; elles doi- vent être drapées d'une maniere large, & être ele* vées chacune fur un piédouche, d'une forme quar- te,-tel qu'il fe remarque dans cette planche. Pour claveau nous avons défigné une peau de lion, attribut de la..Force,&; de la Valeur , allegorie néanmoins qui conviendroit plutôt à une porte •de ville de Guerre, qu'à une porte de ville de "Commerce : il ne.felloit ici qu'un hoflage avec 4eux" contre - clefs , orné tout au plus _dune «grafie , d'un galbe peu reiTenti ; d ailleurs -nous devons obferver. qu'en général la Sculpture -placée ftir des corps liiTes , ne reuffit jamais 3?ien; que pour fautorifer , il faut un corps faillant , tel quim archivolte^ un chambranle, &c; Or comme on a fupprimé t ces : membres I30ur procurer plus de fimpiicité à l'édifice, on devoir par la même raifon fupprimer auiii la Sculpture de ce claveau; autrement elle ne préfente qu'une' richeife indifcrete, qui, loin ie fymbolifer l'Architeclure, la rend équivoque, .Cette remarque que nous faifons fur nous-mêmes,, |
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474. '*a ; C"o υ RS'; !
apprendra à nos jeunes A rtifles, qu'ils doivent, .
lorfqu'ils fe font trompés, revenir fur leurs pas avec cette franchife , qui honore les hommes à talents ; Au reile, les ornements que nous défignons né font pas les feuls qu'on puiffe employer ici. Mais nous periiftons à croire , que quelque choix qu'on en puiife faire , il faut que leurs formes & leurs expreffions foient non-feulement relatives à l'ordre Tofcan , mais encore aux différents motifs qui font élever les bâtiments , & que ce raisonnement appartient directement à fArchite&e : lui feul doit créer fes œuvres, & les Sculpteurs ne doi- vent qu'opérer fous fes yeux. Qu'on juge par-là, combien il faut d'étude , de connouTances. & de talents à un tel ordonnateur* ;, jm i Elévation du coté η ε la Ville.
Ρ L À Ν C H £ XX h
Les principales dimeniions de cette façade font
les mêmes que dans la précédente, & n'en dé- fèrent que; parce que l'ordre eil abfent , raifon pour laquelle on y remarque beaucoup plus de Simplicité, l'avant-corps étant feulement compófé de deux corps d'Archite&ure C , bofTagés ck ver- iniculés. Au4ieu d'un attique \ cet avant-corps eii: terminé par un fronton cintré & marqué A , beaucoup plus propre à couronner une or don* nance ruitique , qu'un fronton triangulaire : kuift obfervons - nous que c'eit/ dans ces cas feulement , qu'il en faut faire ufage , ainfi que des arcades furbaifiees , qui fe remarquent dans les deux façades de cette porte, Cette obfer- vation nous paroît vraie, malgré la multiplicité des |
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d'Architecture. 47c
édifices où Ton les a placés indiitin&ement dans les
ordonnances Ioniques Corinthiennes & Comportes. Derriere ce fronton regne le même attique dont nous avons parlé précédemment, & qui fe voit ici en B. Pour dédommager cet avant-corps de fabfence de
Tordre > nous avons fait régner des boifages alterna* tifs, δ: nous les avons chargés de vermiculures. On auroit pu ne placer ces boifages que fur les corps G, qui foutiennent les extrémités du fronton, & laiiTer liffes ceux des pieds - droits, de l'arcade & des claveaux: mais, d'un autre côté , ce genre d'ornement ruftique , continué ainfi, contribue à détacher cette partie capitale de deifus les corps intermédiaires D, où il ne regne que des refends, & qui fymétriient avec ceux des angles Ε ", placés aux extrémités de cette façade. Au-lieudes niches quarrées qui fe remarquent dans la planche XX, nous n'avons mis dans les arriere-corps de celle-ci, que de grandes tables faillantes mar- quées F, les accotements des avant-corps où lés ordres font füpprimés devant être tenus plus am- ples que lorsqu'on y fait préfider les ordres. Dans ces tables nous avons fufpendu des trophées rela- tifs au commerce ; mais il faut les favoir com- pofer de grandes parties, les charger de pende détails, ainii que le blâfon repréfentant les Armes de la Ville dé Paris, placé dans le tympan du fronton, & dont la Sculpture indéterminée doit . être traitée avec encore plus de fermeté, &, nous ] ofons le dire, plus de rudeffe que celle placée du côté du faubourg ; on ne doit jamais oublier que la préfence ou l'abfence de l'ordre doit décider les changements néceiTaires à répandre , & dans les membres de i'Arçhitefture;, & dans les orne- |
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ÊÇj6 C OURS
ments de la Sculpture défîmes à TembelMement
des façades.
Façade latérale et coupe prise sur
■··■?.'■ '
la profondeur du Bâtiment.
Planche XXI L
La figure I , offre la façade latérale de cette
porte, & fait voir le retour du mur de f arrière- corpsA, la coupe de celui de clôture Β , la faillie de Tavant-corps Ε , du coté de la ville, & celui F, placé du côté du faubourg. La préfé- rence que nous avons donnée aux boffages alter- natifs fur les boffages continus -, diftribués dans 'la hauteur du fut des colonnes, & le rapports que ces boffages doivent avoir avec le module de Tordre, ont déterminé ici la hauteur des affifes que forment les refends qui régnent au tour de ce/bâtiment ; autrement il auroit fallu, & dans , cette façade latérale & dans celle f du côté de la ville où l'ordre ne préiide pas , ne placer que quatorze refends au-lieu de quinze; parce que nous penfons que Tabfence de Tordre exige né- cessairement de donner à tous les membres de la décoration un peu plus de pefanteur; mais comme ce bâtiment fe trouve pour ainfi dire iiblé de toute part, & que par cette raifon il a fallu que les boffages & lés refends fuiTent réduits à une hauteur commune, nous avons préféré alors de faire les affifes im peu trop baffes, plutôt que de les élever aux dépens de la relation qu'elles doivent avoir avec la hauteur des boffages des colonnes, parce que le mur de clôture Β étant beaucoup moins élevé que tout le .reffe du bâti- |
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D'A R C 1 Τ Ε C Τ U R E. 477
ment, on fe feroit aperçu de cette difparjté ,
qu'il faut éviter avec foin. Si cependant ces refends ? réduits au-deffous d'un module , fe eon- tredifoient trop avec le caraclere de fermeté répandu dans la façade , il ne faudrait pas héiïter de faire les boffages des colonnes continus , parce qu'alors pouvant devenir pairs. au-lieu d'impairs , on pourroit leur donner une hauteur aiTortie au itile de l'ordonnance. Nous recommandons à nos Elevés de prendre garde à cette remarque , pour qu'ils apprennent à fentir combien il leur eft im- portant de ne négliger aucunes parties des détails, îorfqu'ils commencent à compofer ; puifque c'eiî du rapport des membres d'Architecture comparés les uns avec les autres , non-feulement que les bâtiments les plus fomptueux tiennent tout leur éclat, mais encore que les bâtiments les plus fimples tirent leur principal relief & leurs plus grandes beautés. La figure 11, nous. donne. la coupé de cette
porte, prife dans'le milieu de Tavant-corps des deux façades : on remarque dans fa partie fupé- rieure le profil des dalles en recouvrement mar- quées Β, qui fervent de couverture à l'épaifleur de ce bâtiment. Au-deiTus de ces dalles nous au- rions dû exprimer l'élévation de la lanterne qui éclaire i'efcalier pratiqué de fond en comble pour arriver fur cette terraife, & auquel la porte marquée A, donne entrée auiîi bien qu'à une pièce C, deili- née à fervir de magalïn pour des ùfteniiles à l'ufage des incendies. Non-feulement cette lan- terne auroit fait un aiTez mauvais effet dans ce jdefîin ; mais il àtiroit fallu l'exprimer auiTi dans les élévations ; ôç comme elle ne peut fe remarquer |
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£$ Cours d'Architecture.
d'én-bas, nous n'avons pas cru devoir la placer
ici; nous nous fommes feulement contentés de l'indiquer dans le plan , planche XIX, figure 11 ; cet objet d'utilité n'étant d'ailleurs fufceptible d'aucune décoration. Le magafin C , qui s'étend au-deifus de la porte dans toute la longueur du bâtiment , reçoit le jour par des barbacan- nes horifontaies , pratiquées au- defîlis de la cor- niche de l'entablement, qui ne pourroient s'ap- percevoir d'en-bas, le point de diitance Ç , étant établi à cinquante-un pieds de la façade du bâti- ment , moitié du produit de la fomme de la lon- gueur de Fédiiice» qui eil de foixante-douze pieds, avec celui de la hauteur de l'entablement élevé de trente pieds du fol : opération qui donne le rayon vifuelD,E, qui, prolongé jufqu'en F, mafque entièrement la hauteur de cette barbacarine. Nous finiiTons ici ce premier volume pour com-
prendre dans le fuivant les trois ordres Gijecs , & le Compofite Romain. Tout ce qui vient d'être dit ne doit encore être regardé par nos Elevés que comme les premiers éléments de l'Art, éléments qu'il étoit néceffaire. d'acquérir , &dont nous leur recommandons l'étude avant dev parler à la théorie dont nous allons parler. |
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Fm du premier Volume. ->
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De l'Imprimerie de Lot tin l'aîné; 1771.
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E R R ATA.
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^4h /iew <ie ,
n'avok été,
enrt'autres ,
roifieme \
fon fils ,
puplia,
quelles ,
Sq-Kien,
mortiers,
a reçu ,
confu niées,
Sainte-Antoine ,
Ïean-Paul Paiimi,
M. Patt,
l'humaimtê,
Autres Arts,
facultés l'efprit humain,
les Michel-Anges , les Ber-
nins,
de l'Hiitoiie des Belles- . Lettres,
maifon de Tofcane , 'Primatices, > » les Délótmes ,
les colonnes Trajannes, le dé h , qu'il ne faut toujours ,
le tailloir ρ , la platte- bande d , 6c le lifteau q , reduit à un diamètre, Planche XVI, du cilindre iz , c , ce chapiteau été imité , Planche XX , Planche XX, . . * beaucoup de faillies ,
Planche XIX , corniches iîmplifiés, Planche XX, laftatuene devoir, pleins , ' . les DebrofTes ,
Planche XIX , dyramidales, un Architecture, de Berty', les DebrofTes, |
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n'avoir été.
entr'autres,
rroifiçme.
fon fils 7 ^
publia.
quels.
Fo-Kien,
agens.
ont reçu.
confumés.
Saint-Antoine. .
Jean-Paul Panini.
M, Patte.
l'humanité.
autres Arts.
facultés de l'efprit humain.
les Michel-Ange, les Ber-
nin.
de l'fiiftoire , des Bclles- Lettres.
maifon Tofeane. Primatice. les Delorme. les colonnes Trajane. le dé b. qu'il ne faut pas toujours,
le tailloir d , la piatte- bande 5 , & le lifteau p. réduite à un même. Planche XV. du cilindre d , c, ce chapiteau ayant etc. Planche XVIII. Planche XVIII- beaucoup de faillie. Planche XVII. corniches Amplifiées. Planche XVIII. les ftatues ne dévoient, plein. les Debroffe.
Planche XVir. pyramidales, une Architecture. de Berci. les Debroffe. |
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Jb'Approbation & le Privilège du Roi f e trouveront
M la fin du dernier volume. |
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