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MEMOIRES DE

t

MESSIRE PHILIPPE de com-

MINES, CHEVALIER, S E I G N E V R d’ARGENTO N, SVR LES PRINCIPAVX Elids amp;nbsp;gcftes de Louis onzicfmc amp;nbsp;de Charles huidiefmc fon filz

Roys de France.

et COEJ^IG T Z E DENIS SZ^-de Fontenailles en Fric, fur 'vn Exemplaire pri^ à l'original de lAutheur^ amp;fuyuant les bons FJißoriographes Chroniqueurs.

/

Allée diftindion de liures,felon les matières:cftans auffi les Chapitres autrement diftinguez que par cy deuant : amp;nbsp;brief,le tout mieux ordonne/, ainfi que les Ledeurs pourront veoir par l’aduertiirement à eux ad-dreflé apres i’Epifirc du Roy.

A P A R I S. «. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;9

Chez Thomas Pener,rue S. lean de Beauuais.

I nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;’

M. D. LXXX.

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AV TRES-CHRESTÎEN ROY

HENRY, SECOND DE CE NOM.

L y a, deßa p-es defept ans Sire^que I'appcrceuance ijue ten da con-tentement qae recencies en ce qae ma tradu^ion des Hifloires de Naplesfafl communiquée d la 'veue de chaßcun Frdçois ßoubs I’ap-® nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;[ou^lenemen t de ^üoßre zTifCaieße ,fut de telle ter tu, que

pofi-poßant quelques autres exercices de plus grandgaing particulier ^me refolu de continuer en la levure des Hifloriens : t^n que par tdmoyen.ie donajfe d l'aduenir^chofe qui apportaß quelque plus gradplaißr nbsp;nbsp;proßßt

^tofu les Seigneurs nbsp;nbsp;peuples de Fraceßuyuant ma prome(fe,pourlorsadioußeeau co-

mundeuoir deproßßter a la patrie, [htoy ßaißntßa diuine bonté m'a tant preßdde ßes S'^’ces^que lay entièrement extrait de tous tels bons iigt;4utheurs, ce qu'ils ont efent de '^»llrepays des (yaules nbsp;nbsp;de tospredeeeßeurs Koys : tellement que leußße maintenant

^]lßreßd tous enpreßentertneaffeißionnepartie^ enflilepar-auenture nonindigne ^^idlematiereji la pitié que i'ay eue de Philippes de Commines, le plus excellent detos ^isloriographes François.toire efgal aux meilleurs de toutes autres languesyneuflper-teoir ß longuement tant corrompu qu'il eßoit., au grand des-honneur de nous ^»tres enuers les eßrangers’. qui depuis quelque temps, l'ont mieux eu en Latin nbsp;nbsp;tul-

Italien,qu'en fonpropre naturel.Si i'ay doncentrelatßßma principale en^eprinfe ^^'^oulant remettre enßon entier,ießiipplie tres-humblement toßre débonnaireté,S ire, ^Kthorißer encores que i'aye atacqué dœuure tant neceßßaire^ honorable dla nation ^^‘^»foißeß ce que tous ceux qui par cj apres enfentiront les commodite’sç^, ayentd re-^iteier toßre NaiefiéQ qui Dieu •vueille donner tout bon accroiffement)ßoubs Hautho-^ß^de laquelle ce bien leur eß faiblpar l’vn de tosplus que tres-humbles cgt; tres-obeiß-P^ßubiells jituiteurs.

Denis Savvace.

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Aduertiflement auxLeóteurs.

’Eftime tant la viuacitc de voz fains itisemens, debonnai-* O

res Lecleursjqueiemcticn toutafleuiécjuene trouiierezaucunement eftrangc qu’ayons change l’ancien tiltre de ce prc-fcntvoulume,incontinent qu’aurez entendu,pour nosrai-fons, que le pere mefmecn a efté le parrain (comme Ion dit communément) le nommant Memoires, ainfi que nous, ea plufieurs diuers paflages,que trouucrez en lifànt. Qui fait que ic pafTeray légèrement ce poinôl,pour vous dire ce qui m’a meu de le diftinguer par liiires, a efte que le fubieól y eftoit entièrement difpofe(comine pourrez veoir par les fommaires de chafeun d’eux, appofez à la fin de celle Epiflre ) que la dignité de l’hifloire en pouuoit efire mieux gardée,amp; le tout mieux en tendu. Vray eft queiefembleray auoir fitit aucunement contre l’entente de l’Autheur; veu qu’il ne fait qu’vn liure feul de tous fes Memoires fur Loyis onzicfmeamp;ftir Charles huidiefmc fon filz, felon qu’il fe voit au chapitre cinquiefme du fep-tiefme liure, amp;nbsp;au trezicfmedu dernier.-mais fi on entêd que liure fepeutpre-dre pour volume, qui contienne plufieurs liures, ie feray bien aifément excu-fé.'Coramei’efpereaufTid’eftrefuftifiimmentauoüé d’auoir fouuentesfois di-flingué les chapitres autrement qu’ils n’eftoyent. Carnonobftatqu’ilfetrou-iie,paf l?chapitredixhuiôliefmeducinquiefmcliure, que l’Autheureiill fait fon eferit par chapitres, fi elloientils le plus fouuent, tant mal à propos, qu il elloit difficile de croire que telle dillinôlion full partie de luy, ne d’autre qui eull efprit propre à telle chofe : auec ce que mon vieil Exemplaire, duquel ie vous p.arleray tantofl plus amplement,les a fur la marge du tout diuers des autres,neahtmoins qu’il faccordeauec eux en ce qu’ils font indignes de tel Au-theur fur icelle diftinôlion.Quant aux Exemplaires ou Copies, que i’ayepeii rccouurer, pour m’aider à la correôlion, l’vn eft de l’an mil cinq cens vingt amp;nbsp;cinq,par vn maiflre. 1. G. qui ne fe nomme autrement, amp;nbsp;ne dit en quel lieu il l’imprima.Le fecôd eft de mil cinq cens vingt amp;nbsp;fix,imprimé à Lion,par Claude Nourri,dióllc Prince.Le tiers de mil cinq cens quarâtefix,à Paris par Eftiê-ne Mefuiere,amp; le qu^i à Paris auffi,par Guillaume Thibout, en l’an mil cinq cens quarante neuf : mais les deux premiers de ces quatre, ne font que fur les faiéls du Roy Louis •nziefine, ayant les deux derniers pourfuiui fur Charles huiéliefme,apres l’impreffion pour Engilbert de Marnefen l’an mil cinq cens vingt amp;nbsp;neufsque nous auons femblablement rccouurée.Toutesfois ( foyent premiers foyent dcrniers)ie ne les puis prefquc compter tous cnfcmble que pour

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pourvu chafcuncn cc qu’il traióle : voyant qu’ils ont pris Ies vns furies atp ^^^s,auccpcu,ounulcl^ardde fentrc-corriger. Le vieil Exemplaire , du-Jucl nous auons touche vn mot parcydeuant, ne parlant que de Louis, eft *lîimain,amp; copié fur le vray Original de l’autheur comme le perfonnage, ^^quel il eftoit, eferit à la premiere fueillcjôcainh que i’en ay veu de gran-^^spreuucs; mais eftanteferit par quelque Praticien, peu entendu en telles Matières5 ouquinepouuoit lirefonOriginal, amp;eftant d’auantage preueu, ’ourle mettre furlaprelTc Cainfi qu’il m’appert par les marques decertaines ^’lloires ou figures, par plufieurs autres raifons)par vn prelcéleur de mef-^Cjfàns aucune punâ:uaiion,fînon quelque fois deuant les grandes lettres, Imprimeurs nomment Capitales amp;nbsp;Verfalles, pofé qu’il m’ayt bien ^ylt;lé,m’a donné grande peine auftl ; amp;nbsp;plus encor m’en euft donné, n’cuft ^Hcqiie cela que ccprelcdcur rayoit quand il ne le pouuoit lire ou enten' n’eft point tant effacé qu’vn homme ayant manié les hiftoires,n’cn puif-Icfaireiugemcnt. Ncantmoins lamodcftic , de laquelle i’ay touftours efté grand amy, ne m’a voulu permettre d’eftre fi prcfomptueuxqucdc riencor-’^‘ger, qui ne futcuidemment corrigcablc, tant par l’accord de tous Exem-phircs amp;nbsp;d’autres bons Hiftoriographes, que par la deduélion de l’Autheur ûiefnic : ainçois quand i’ay veu quelques fens diuers eftre paffables, chafeun '^nfon endroiôl, i’ay mis de l’Exemplaire vieil en marge, pour n’entrepren-^re trop fur les autres; qui fembleroyent eftre plus aurentiques au moyen leurimpreflion*. Pour lequel refpeél, i’euffe fcmblablement mis en mar-gîlesraifons de mes corrcôtions, touchant les autres lieux, fi quelque im-preffion que ce fuft , n’euft tellement efté corrompue que non feulement ) ^outclamarge,ainsautant de papier,que chafeune contient, ne les pour-^oit pas comprendre ainfi que pourra veoir chafeun qui conférera quelque peudenoftre imprcffionauec les autres. Quoy faifant, congnoiftuclaire-’’icnt, par mefme moyen,que nous luyauons remis plufieurs claufes laiflécs, amp;nbsp;quelques-fois de bien longs articles : fans que nous parlions deplufieurs telles chofes, par-auanturctranfpofces,amp;maintenant reduiéles en leurvray licu,fclon le vieil Exemplaire. Auregard du nom propredes places amp;nbsp;personnes, que ic mets quelqucs-fois diuerfement en marge , puis que le vray fens de l’Authcur n’eft aucunement empefehé pour cela, ie n’en ay rien vou-lumeflcr du mien pouflcsreftituer en leur entier, finon chofe tant euidentc qu’il ne fe puiffe dire du contraire : afin de n’attribuer aucune-fois à vnc place, ou à vnc famille, ccquiferoitàvne autre, en telle variété que ie I’ay îrouuéc del’vn àrautre,amp; dechafeun d’eux à foy-mefmes,en mes Exemplaires : de mefme forte qu’il m’eft aduenu en nos Ann.'^ftes amp;nbsp;Croniqueurs François:defquclsil fe falloir feruir, pour le plus , fur le regne de Louis: pour ce que les eftrangers ne parlent principalement en cela, que des plus in-lignes amp;nbsp;remarquables. Mais quant au temps de Charles huidiefme, les e-llrangcrs ont fait beaucoup pour moy.autant pour la reftitution d’icelles plagt; CCS amp;nbsp;perfonnes,que pour le vray fens dcl’Autheur.-cntendu que le vieil Exc-plaircme failloit là deffus , amp;nbsp;que tous les autres font ainfi deprauez que nousauons dit, amp;nbsp;que chafeunpourra fçauoir. Pourlefurplus (car iclaiffc â il)

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POrthographie aînfîquc ie Pay trouuéc,à peu pres, iufqiic-s a temps qilci’en dit mon adiiis,refpondant au feigneur lacques Peletier noilrc ami) ic ne m’amuferay longtemps a vous dire queicn’ay voulu mettre en texte, nyen marge certains vieux mots,amp; quelques pbrafes, ou maniérés de parler, pref-que autant aagées, quife rencontrent au vieil Exemplaire, ayant le plus foib uent Chaftoy pour Chafliment yenuquefut, pourQuàndilftit'venH, S: leurs femblablcszcommepareillement ien’ay voulu en öfter quelques autres, qui fepourroient mieux dire maintenan t:pour ne faire trop de compte de l’Antiquité,amp; pournela defeftimerauftipîus quederaifon; mais bien ay-ie mis fur la marge,Pinrerpretation de telles rencontres, qui pourroyent aucunement ’arrefter celuy qui n’auroit beaucoup hanté la langue Françoife, amp;nbsp;d’auantage ay interprété les paftages qui m’ont femblcles plus difficiles, ainftquepour-rezveoir fur la marge. Etfur ce poinélferay fin, apres vous auoir dit que fil diffère en aucunes chofès auec les autres Autheurs,comme il fiiic (par exemple) auec le Chronographe Carion,au dernier chapitre de noftrc fixicfmcli-urc ( là où y a que Mathias de Hongrie mourut en Pan mil quatre cens nonan te amp;nbsp;vn,au lieu que Carion amp;nbsp;celuy quia adioufté aux Croniques d’Eufebc apresPalmerius,mettent vnandcuant)ie luy laftfedirecc qu’il veut:parce qu’il ne fe contredit point aillieurs en cela, amp;nbsp;lepeut auoir efcritainfi : mais quand il Ce contrediroit, comme il faifoit aux nombres du voyage de Charles huidicfme,ic Pay racouftré par quelques lieux de fa deduétion mefme? amp;nbsp;par les autres Hiftoriens ôc Chroniqueurs fes contemporains, ou d’enuiroii fon temps.Par l’aide defquels fil ne vous fcmbic encor bien remis en fon entier,vous entendrez aufli que tous les Chirurgiens du mondc,fils auoient entrepris la cure d’vn corps autant cruellement nauré que ce liure eftoit mifera-blemcnt corrompu, n’en pourroyent venir à chef, fànsylaiffer cicatrices a toufiouB apparentes: combien que le plus du temps de dix années entières 52 continucllcs,employéà l’Hiftoire, amp;nbsp;principalement de France amp;nbsp;de fes vol-fins,me face prefque tant glorieux de me vàter que peu de chofe fy peutde-* firer denoftrcpart,qui ne tafehe plus qu'à vous tcnir,bicn toft, promeffe de noftre Hiftoire des Gaules : amp;cc pendant prie dieu vous garder en fa graccgt; me recommandant au meilleur de toutes les voftres.

SOMMAI-

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SOMMAIRE DV PREMIER LIVRE des Memoires du Seigneur d’Argenton.

premier liure traite del'occafion des guerres que furent entre le Koy Louis on-Charles Comte de (baroloys, depuis Duc de Bourgongne : delaguerre de Stance nommée le Bien public:de la iournèe de Mont-l'hery^du traiClé de (onflans lt;^fnmentpeu apres,le 7^y reprint,furfonfrerela Duché de Normandie, qu'il auoit ^^teontrainCi lujgt; laijferpar le traiclefufdicl.

Sommaire du fecoiidjCommençant pag. 40.

Lf pcond parle des guerres,queurént les Bourguignons contre les Liégeois ,aUi€7fiu ƒjubs la conduire de fharles de Bourgongne:de quelque peu de guerre, que le Roj f^dauffîau Duc de Bretaigne,allié d'iceluy Charles : de la peine en laquelle fut le Koyy, (^Mtarrefé au chafieau de 'Perone,où ilefloitallé,parfauf-coduiCi,'veoir iceluyChar^ ^(^pour lors Duc de Bourgongne,afn clappaifer leurs dijferens:du traiClé qu'il fut con-itaint accorder deuantquen fortir, par lequel lugy mefmesalla aider dprendre la^sille énLiege:^ efantd^ retour en France,commentil contenta fonfrere, pour Brie (}^‘impaigne,de la Duché de (fuienne, contre l’entente du Bourgui^on.

Sommaire du troifiefme, commençant pag.

Le troifiefme contient l'afemblée des trois eflats de France d Toursil'adiourncmcnt fid au Duc de Bourgongne,par 'vn Huiffier de Parlement:le renouuellement de guerre ^ntrelel^y nbsp;nbsp;luy,dla fufeifation des Ducs de Guienne de Bretaigne, du Con-

be^ahledafurprife d’Amiens nbsp;nbsp;de fainCl Quentin,fur le Duc de '’Bourgong^,amp;‘ tref-

prifes apres entre ces deux gras Trinces,pour ^n an. Tais entremefle quclquesguer-furent en Angleterre durant ce temps, peu deuant, nbsp;nbsp;peu apres,entre le quot;Foy

Edouard foufenu par le Duc)^;/ entre le Comte de 'Waruic, aidéduFpy. Apres il tnetvn autre renouuellement de guerre entre le foy Louise^ le Duc de Bourgongne: la ^ort du Duc de Guienne,ßrere duFpydefege de Bcauuais par le Duc de Bretaigne: itefues nouuelles entre le nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;le Duc de Bourgongneila machination de ces deux à

^‘tmortdemonfeurdefitnClFaul,ConnefabledeFrance,amp; commentleuitapour ce toup,(y^ parla au Foyy ayant vne barrière entre eux deux.

Sommaire du quatriefme,commençant pag. iio.

Le quatriefme racompte comment le Duc de Bourgongnefempara delà Duché de Bueldres, nbsp;nbsp;tint long temps lefege deuant la -ville de Nu7:ßontre lefecours de l Em-

pereurFederic,amp;^ des Allemans,^ comment cependant le F^y luyfußitoit beaucoup é'autres ennemis,prenant mefmes ftrluy plufieurs -villes de Picardie.Tuis apres il parle de ladefeente du ^y Edouard d'Angleterre contre le'Foy Louis,à l insligatton du Duc de Bourgongne:du ftege deNuT^^leué par appointement d celle occafon: de la trefuefaille pour neuf ans,entre les deux TQiys,au grand deflaifrdu Duc de Bourgongne,^^ du ^onneflable:de la veuë nbsp;nbsp;parolles qu'eurent enßntble ces deux Koys ,pres Ticquigny^

â iiij

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Cr- comment peu apresficmblable irefue de neuf ansfisît accordée entre le Key Leun le 'Ducde ^Gurgcngncuamort du Connefableiurèe detouspoinFs (ntre(uxdetx,ltiy liuré entre les mains du Roy par le Duc,pendant qu’ilefiit en fin premier fege deNa-^ executed mortpariufiiee.

Sommaire du cinquiefme,commençant pag. 145.

Le cinquiefine déduit les guerres du Duc de Bourgongne auec les Suifies'.fi defeon-fturedeuant (jranfinda perte défis allie-t^fa grande eisr- perilleufi de faite deuant FIo-raf.lefaiffement qu'il feit de la Ducheffi de Sau oiefœur du nbsp;nbsp;nbsp;: le recouuremet qu en

feit le l^oydes grandes trahifins du Comte de Campobache, contre le Duc de Bourgongnefin maiflre.La venue du Koy de Tortugal pardeuers iceluy Duc, commentée Duc de Bourgongne fut defeonft par le Duc de Lorraine,deuant Nancy,en vne batail *le,où il fut mefmement tué.zyipres il pourfuit comment le Koyfifaiftde plufieurs villes du feu Duc,tant en Ticardie,./irtois,^ Hainault quen autres defis pais -.commet ilfimaintenoit enuers ceux de Gand, qui entreprindrent legouuernement de leur Prin-cejfefdedudibî Duc,iamp; comment ilsfeirent décapiter le fhancelierde BourgongneÜ* lefiigneur d'Hymbercourt.Sn fn il fait vn logdifiours,aucunemet horsdu propos prin cipal'.toutesfois plein de fort bonne doClrine, nbsp;nbsp;dediuers exemples pris des Hißoites.

Sommaire du fixicfmejcommcnçantpag.i'jy.

Lefxiefme recite les moyens, defquels vfoit le T{oy pour garder les t^inglois de l’etn-pifeher en fis entreprifes fur la maijon de Bourgongne-.comment le mariagedelt;ié^^^l-milian ^rcheducd'Auflrichefutfaibî accompliauec la Damoifelle de Bourgongne fuedufiu Duc:^ comment le (youuerneur de la Duché de Bourgongne, pour iel{pj/f print quelques villes en la Comté. Apres il entremefle certaine guerre d’entre les Florentins amp;nbsp;le Pape,alliéde quelques autres Totentats d'Italie Tuis reprendfin propos,pat' bint de la iournée de Guinegate -.de lamaladie duKoy : du faincl homme de Calabre‘.dû mariage de monfeur le Dauphin auec Ivlarguerite de Flandres, fille de Maximilian Ù* del'heritier de Bourgongne.De là pourfuit plufieurs chofis que le T^oyfaifiit durantfa maladie, l^nt pour crainte de perdrefin authorité,que pour crainte de mourir,amp; comment neantmeins il mourut. Finalement ildificourtfur lefouciquil auoiteutoutefi vie J 6^ fur la vie df) mortdeplufieursgrans Princes defin temps.

Sommaire du fcptiefme,commençant pag. 137.

Duc T^néde Lorraine,en la Duché de Bar,Q)mtéde Prouence,^fi Koyaume de Na-pies comment le Koy,à la fufeitation de Ludouic Sforce,furnomé le More, dsn de quelques autres dudiél royaume,y alla enperfinne,Cÿ- leconquesla : comment ceLudo-uic auec les Fenitiens,le Tape Alexandre,^ plufieurs autres, feirent ligue pour empef cher le Koy en fis entreprinfes.

Sommaire du huiôlicfmc,commençant pag. 280. I nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Z- .. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;11 nbsp;nbsp;nbsp;,

l'erapefihementque hy donnèrent les Vénitiens^ ceux de la ligue à Fornoue^ oùfe liura la bataille'.l'afjîegen^nt de^ouarre, en laquelle eftoit le DucdOrleans : le retour du 7{oy enfin royaume de F rance da perte de celuy de Naples-, la mort du l^y Charles amp;nbsp;le couronnement de Louis dou';^efine du nom,par^auant Duc d’Orléans.

PO VR

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POVR SCAVOIR sommairement

QJI ESTOIT L’ARCHEVES QJV EDE VIEN-

Ne, AV QJ? EL LE S E I G N E V R D ARGENTON AD-drefle ces prefens N4emoires.Ce que nous vous donnons de mot à mot,amp; en tel ftile qu’il a cfté trouué entre les papiers de quelque bon ancien perfonnage, ftudieux, amp;nbsp;curieux de noftre

Hiftoirc.

'Sommaire de la 'viede meßire Angelo Cattho, ^rcheuefque de Vienne^quile^eut adioaßer aux Croniques de 'Mejßre Philippe de Commines.

Eflire Philippe de Commines, Chcualier Seigneur d’Argcn-^^'.?vy| ton,autheurdu prefentLiure, qui contient les Memoires de la vie du Roy Louis onziefme, que Dieu abfolue, dit par fon proèfme, iceux auoir recoligez amp;nbsp;compilez a la requefte d’vn Archeuefque de Vienne, duquel il a fait fou tient mention en pluüeurs endroiôls de fefdiôls Memoires : fans toutesfois declairer, n’autre-•iient exprimer,le nom dudid Archeuefque, ne quel perfonnage c’eftoit. Et pourcequecencpeuteftreaduenu, qu’il n’ayt çfté homme grand amp;nbsp;venerate, digne d’cflre mis en plus grande lumière, il fera icy recite ce quilt; efté recueilli amp;nbsp;entendu de luy, par le rapport de trois perfonnages de grande foy, prudence,amp;: authoritéd’vn defquels (qui eft décédé) eftoit meffire leha-Fran-Çois de Cardon ne, Cheualier, feigneur delaFoleyneamp;duPleffisdcVcr en Brctaigne,Côfeiller,amp;: Maiftre d’Hoftel des Roys Charles huidicfmé, Louis douzieftne,amp;François premier de ce nom, aulfi fouuent* allégué parledidt life punir oit fogneur d’Argenton, en la Cronique qu’il a fiicte dudiâ: Roy Charlesdc deu-riefine eft Meffire lehan Briçonnet Cheualier, feigneur duPlelFis-Rideau, Confcillcr,amp; fécond Prefident des Comptes a Paris ( qui eft encores viuant) les 8, autre ch» amp;lc tiers eftoit vn Gcntil-homme de Naples, partilàn de la maifon d’Anjou, nous en auons. appelle meflirc Renaldo d’Albiano, aufti Cheualier, qui a longuement de- tsefs“fuyTa„s meure en ce royaume, amp;nbsp;y eft mort du regne du Roy François. Lefqucls ont congncu,veu amp;nbsp;frequente lediél feigneur Archeuefque,qui de fon propre no cede, puis ^furnonajEappelloitmefiire Angelo Cattho, amp;nbsp;eftoit natif de Tarente au d'vne autre royaume de Naples, Scauoitfuuiy lapartde la maifon d’Anjou .-mefmes les ’^,Zoit”ei^l^. Ducs lehan amp;nbsp;Nicolas de Calabre, enfans amp;nbsp;heritiers de ladiéfe maifon, qui

’ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;t nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;■ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;rC' n nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;J“*

auoyent grand droiót audiól royaume : amp;nbsp;defquels mention en eft aufti fiiôle enpluficurscndroids defdiófs Memoires, amp;nbsp;eftoit lediét Archeuefque per-

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Tonnage Je bonne vie,gran de literature, modeftie, amp;nbsp;tres-fçauant es Mathématiques. Etpourceque lefdióisDucs Ichan amp;nbsp;Nicolas prétendirent fub-fccutiuement au mariage de la fille vnique du Duc Charles de Bourgongne (qui eftoit lors le plus grand mariage delà Chrefiienté) ils tindrent lediél meflire Angelo Cattho près de la pcrfonnedudidl Duc, pour conduire de leur par t, ledid mariage: lequel ne fur accompli ne pour l’vn ne pour l’autre; car ils vcfquirent peu, amp;nbsp;decederenttofl: l’vn apres l’autre;amp; apres leur . deces,lediól Duc, congnoifTant les grands fens amp;nbsp;vertu dudiól meflire Angelo, le retint enfon feruice,amp; luy donna penfion. Et eftoit pareillement . nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;au feruicedudidDuc ledidSeigneur d’Argenton, auecques lequel il con-

trada grande amitié amp;nbsp;familiarité: amp;nbsp;pendant qu’il futauecquesledidDuc, •il luy predift plufieurs des fortunes bonnes amp;nbsp;mauuaifes,qui luy aduindrent: mefm es des batailles deGranfonôc Morat. Et apres ladide bataille de Mo-rat,congnoiffimt l’obftination dudid Duc, amp;nbsp;( peut eftre) les mal-heurs qui eftoyent à aduenir à luy ôe à fit maifôn,print congé de luy honneftement, comme il pouuoit bien faire, fans pour ce eftre reproché ou calomnié : car il eftoit eftranger amp;nbsp;non fubied dudid Duc. Etfuttoft retiré par ledid Roy Louis onzielme : duquel il eftoit deuenu nouucllement fubied au moyen que le Roy René, Duc d’Anjou amp;nbsp;Roy de Naples amp;nbsp;de Sicile , auoit infti-

. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;tué ledid Roy Louis, onzicfme, fonnepucu, fou heritier efdids royaumes

tousfesbiens. Eteftantau feruicedudid Roy Louis (qui le feit toft Ar-chcucfquede Vienne) furuintlatiercebataille,donnceàNancy;cnlx'iquel-lefut tué ledid Duc, la vigile des Roys, l’an mil quatre cens foixantc 6c fei-fez : amp;nbsp;à l’heure que fe donnoit ladide bataille, amp;nbsp;à l’inftant mefme que lediét

' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Duc fut tué, ledid Roy * Louis oyoit la meife en l’Eglife monfieur faind

4. lt;/» 7 . HureMartin à Tours, diftant dudid lieu de Nancy de dix grandes iournées pout moins, amp;nbsp;àladideMciTe le feruoit d’Aumofnier ledid Archeuefque de Vienne ^lequel en baillant la paix audid Seigneur, luy dift ces parolles.

maisiem'e- S I R E, D I E V VOUS donuc kl oaix amp;c le repos. Vous les aucz Avouiez: merueille qu’it , nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;n nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;o

nepariedeeh- quia conjtimmatum ejt .Voltre ennemi le Duc de Bourgongne elt mort, oC vient d’eftre tué,amp; fon armée defconfitc. Laquelle heure cottée,futtrouucc

' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;oftfcccllccu Uquelle véritablement auoitefté tue ledid Duc. Et oyantle-

did fcigneut Icfdidcs parolles,fefbahit grandement, ôc demanda audid Archeuefque fil eftoit vray ce qu’il difoit, amp;nbsp;comme il le fçauoit. A quoy ledid Archeuefque refpondit , qu’il le fçauoit comme les autres chofes que noftre Seigneur auoit permis qu’il predift à luy amp;nbsp;au feu Duc de Bourgon-fins plus de parolles, ledid feigneur feit vœu à Dieu amp;nbsp;à monfieur f'iind Martin,que fi les nouuelles qu’il difoit eftoyent vrayes (comme de fait Tquot;*ell^sfetrouuerentbicB toft apres) qu’il feroit fiirelc treillis de la chafle de gt;,eàBnfé»et; monficurfaind Martin (quieftoit de fer) tout d’argent. Lequel vœu ledid feigneur accomplit depuis,feit faire ledid treillis valant cent mille Francs, PenÎA'itvou peu près. Semblablement ledid Archeuefque , eftant au feruice dudid ludircicdia Ro y Louis,rencontra vn iour bien matin,meflire Guillaume Briçonnet, pere d’Argenton, dudid Prefident cy deuant nommé ( qui depuis fut Cardinal, comme fera wtkrquot; ditcyapres)hommc* grand amp;nbsp;honorable de grande prudence amp;nbsp;vertu, amp;nbsp;pour

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pour lors eftoit General deLanguetîoc:Iequcî General eftoit mandé parle^ Hiâ: Roy Louis onzicfinc,pour aller deuers luy an Pleflîs à Tours. Et ayant IcdiâArcheuefque efte'quelque temps fans parler, amp;nbsp;regardé le Ciel, amp;puis apres Icdiét General,luy diftenfincesparolles: M o N s i e v R le general, ie vous ay plufieurs-fois dit que le paflage amp;nbsp;Frequentation des caucs vous font dangereux, amp;nbsp;vous en aduiendroit quelque iour vn grand peril, amp;nbsp;peut eftre la mort :ie viendu Plefïis,où vous allez. Leseauës font grandes au Pont fainél Anne,amp; eft le pont rompu,amp; y a vn mauuais bafteau. Sivousm’en croyez vous n’irez point. Toutes-fois lediôh General n’en feit fien, ne le creut:dont véritablement il fut au plus grand danger du monde deftre noyé,amp;: cheut en l’eauc, amp;nbsp;fans vne faulx,qu’il empoigna, c’eftoit faiét deluy, amp;futramenéen fonlogis , où il fut longuement malade , tant delà • frayeur que de la grande quantité d’eauc, qui luy eftoit entrée par la bouche

par le ne amp;nbsp;oreilles. Et depuis lediél Archeuefque vifita plüfieurs foisle-

General (qui eftoit fon amy) durant fadiôle maladie; lequel General pour lors eftoit marié,amp;auoit fa femme viuante (qui eftoit ieune) amp;nbsp;auoit iluelques enfans ja nez, entre lefquels eftoit lediét Prefident,amp; luy predift de rechcFqu’il feroit quelque iour vn grand perfonnage en l’Eglife, amp;nbsp;bien près lt;leftre Pape.Chofe à quoy cediél General n’auoit oneques penfé, ôc n’y auoit 2ucuneapparence. Et voyant cela làdiéte femme ( qui fappelloit Raoullctte ^sBeaune, femme de grande chafteté,d’honneur,amp; vcrtu)n’en fut trop con-^cnte:carc’cftoitàdire quelle fen iroit la premiere ( chofe que les femmes •laiincntpas volotftiers) amp;nbsp;vefquitneantmoinsladiélc femme long temps depuis,amp;feicplufieiirsenfans,amp; pour ceftecaufe,elle amp;plufieurs autres di-^oycntfouuent que lediél Archeuefquenedifoitpas touüoursvérité. Tou-Woisenfinelle deflogea la premiere, amp;nbsp;la furuefquitlediél Generalfon *^ary: lequel fe tint longuemct en viduité,(ans parler de fe Faire Homme d’E-glilc, ôc apres la mort dudiél Roy Louis onziefme, demeura au fei^iice de (Charles huiôliefme, fon filz(auquel il auoit efté fpecialement recomandé par JediftRoy Louis,fon pere) amp;nbsp;fut du confeil priué, amp;nbsp;bien pres de Fa perfon-

ôtaida amp;fauoriFa grandement l’entreprinfe que feit ledid Roy Charles pour la conquefte de Naples, tant pour le bon droiét qu’il congnoiflbit que hdiftfeigneur y auoit, que pour fatisfaire aux requeftes amp;nbsp;pourfuites du Pape Alexandre,amp; du Duc de Milan, appelle le feigneur Ludouic, qui fol-licitoientfortladiéleentreprinfe, plus toutes-fois pour la haine mortelle amp;nbsp;^3pitale,qu’ils portoyent aux Roys deNaples Alphons amp;nbsp;Ferrand, que pour !l‘ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;il’n^iVnT» /^! *^1 I /- nbsp;nbsp;gt;1 nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;1 •

oien amp;nbsp;augmentation de 1 eltat dudict Roy Charles, choie qu ils ne declai• ’^'^rentpas du commencement de ladiéle entreprinfe,audi(ft feigneur, n’a fes (eruitcurs : Sc leur fcmbloit bien aduis que quand ils fe l^oycnr aidez dudiâ: lèigneuràdeftairelcfdiélsRoys de Naples qu’ils le chafteroyent bien aifé-^ent de l’Italie, comme ils donnèrent affezàcongnoiftreparlaligue qu’ils dirent contre luy auecquesles Vénitiens,amp;: la bataille q*’ils luy donnèrent â Pornouc,!! toft qu’il euft faiâ: fadiéle conquefte. Et audid voyage de Naples Potauecques ledid Roy Charles lediél meftire Guillaume Briçonnet (qui y fdtdegransfcruiccs) amp;fut fait à Rome Homme d’Eglife, amp;nbsp;Euefque de

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ûind Malo5amp; Abbe de fainól Germain des Prez,pres Paris.-amp; depuis fut fait Cardinal par lediôt Pape Alexandre, amp;nbsp;par-apres fut Arcbeuefque dcReims amp;nbsp;de Narbonne, amp;nbsp;eut quelque voix à l’eledion du Papar, apres la mort du-J did Alexandre,fuiuant ce que luy auoit prédit ledid Arcbeuefque : amp;nbsp;depuis eftant Cardinal,durant Je regne dudid Charles, amp;nbsp;ccJuy du Roy Louis dou-2iehTie,fon fucceïrcur,a tenu grand lieu amp;grans eûats en ce royaume,iufqucs à eftre Lieutenant dudidfeigncurau gouuernementde Languedoc. Ledid meflîrc Angelo Cattho, Arcbeuefque deûufdiôt, depuis toutes ces chofes plu/jeursautres,quiontparluy cftépredides long temps auparauantquelles fulfentaduenues, efl décédé, ayant ve/cu làinéiement Sgt;i aulîerement, ßlilen fon Eglife de Vienne,

premier

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Premier livre des memoi-

D y s E 1 G N Er\ J)' Ë NT SVR LES PRINCIPAVX FAiTS ET GESTES de Louis onziefme de ce nom, Roy de France.

Prologve de l’avthevr.

* Or^feigneurl’Archeuefque de ^tenne^pour fatisfaire a la reque/le quiï vous a^fleumefaire^devousefcrire, mettre par mémoire ce que Jayfceuamp;gt;cogneudesfaiêîi duT^oy Louis on7;iefme^d qui Dieu face pardon jtiofire maiflre nbsp;nbsp;bien faiseur,Trmce digne de trefexcelle-

te memoirejiel’ayfaille plus pres de la vérité quei'ay peu feeu a-uoirfouuenance. Du temps defa ieuneffe ne[çauroye parler,fnonpar le luy en ay ouy^arler nbsp;nbsp;dire:mais depuis le temps que ie vein dßn fer nice, iuf-

^gt;((1AI heure de fin trefpas,où i'efioie prefent, ay fai^ plus continuelle refidence auec luy autre de l’efiat à quoyieleferuoie: qui pour le moins ay toufiours efé des Cham- ■ ans,ou occupe dfisgrands affaires. En luy egt; en tous autres Princes, queiay cognus '‘ftruis,ay cognu du bien nbsp;nbsp;du mab.car ils fint hommes comme nous: A Dieufeulap-

l^‘^'^iitntlaperfeélion.lyîais,quanden vn Prince la vertu amp;gt;nbsp;bonnes condition^precedet ^^’^‘ees,ileß digne de grand' louange-.veu que tels perfonnagesfont plus enclins en tou-^^^ chofesrygl^ntaires qu'autres hommes,tantpour la nourriture nbsp;nbsp;nbsp;petit chafiiement

^^'dsonteu en leurs ieuneffes,quepourcequevenansà l'aaged'homme, la plufpartdes l^ns tafehent d leur complaire,à leurs complexions conditions. Etpource que ie ^^^oudroie point metir,f€ pourrait faire qu'en quelque endroit de ceft efcritfe pourrait ^touuer quelque chofe, qui du tout neferoit àfa louange:mais i'ay efperance que ceux ^‘^ihliront,confidererontles raifonsdeffudiéles.Et tant ofe-ie bien dire de luy, en fa co-’^(ndation nbsp;nbsp;louange,qu'ilneme femble pas que lamais i'aye cogneu nul Prince, où il

y^'^flmoins de vice qu'en luy,à regarder le tout.Siay~ic eu autant de congnoiffance des l^ands P rinces,autant de communication auec eux, que nul homme qui ait efle' en t‘^tice demon temps,tant de ceux qui ont regne en ce'P^yaunJp,qu'eBretaivne,lt;^ en vefeu. ^^^h^rties de Fladres,Allemaigne,Angleterre,EF/aigne, Portugal, Italiequot;^tant Sei-l^tnr^ffrituels que teporels,?::^ deplußeurs dont ie n’ay eu la ^eue, mais congnoiffance comunicatio de leurs Ambaffades,par lettres, par leurs infruciios. Parquoy on c’eflà Jirt d information de leurs natures nbsp;nbsp;conditions.Toutes fois ie ne preten en fesVhS’cs.

’■'G le louant en ce/i endroit, diminuer ïhoneur eyr bonne renommee des autres:mais vous ^^^oye ce dont promptement m'ef fouuenu,efierant que vous le demande:^ pour mettre quelque œuure,que vous aueßntention défaire en langue Latine,,dont vous efles bien

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I- LI V RE DES MEMOIRES.

'vßte. Par laquelle œHHre fèpourra cognoiflre la^anâeuràu Prince dot vousparleray, außidevoftre entendement,Bt là oùießaudroyycj vous trouuere';^lrlonßeigneur du ^ouchage^^^autres^qui mieuxenßcaurontparler, f^le coucher en meilleur langa-fuîratafoî'nt nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;p^s-f obligation d’honneur,grandesprluautes^ biensfailîs,fans

^^t^^^ompre,iujques à la mort,quebvn ou l'autre nyßuß,nul nen deuroit auoir quant a moy, meilleureßouuenance que moy * eyy* luy:e^ außi pour les pertes nbsp;nbsp;douleurs que i’ay re-

mlux Us O- e^eu'es depuisßon tréfilas. Qui eßbienpourßaire réduire à ma mémoire les graces, quei'ay f”r\\n''ow nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;luy'.combien quecefi chofe aße'^ccouflumee,que apres ledece'^eß grands

l’autre, (/’/gt;lt;,» puilßahs Princes,les mutationsßont grandes,ont les vnspertes, nbsp;nbsp;nbsp;les autres gaing.

ou biens - Car les biens eyr les honneurs,neße départent point à l'appetit de ceux qui les demandent, fat de BoucHk Et pour vous inßormer du temps,dont i'ay eu cognoißßance, dudibl Seigneur dont ßailles force de commencer premièrement auant le temps queie vein àfon ferui-

■MatpVu?’ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ferui-

obligation teur,eyr‘ continueray iufques à fon treßas. d'bonncur.

amp;c. commeil efl au vieil teeempl.

DE L’OCCASION DES GVERRES, QJ' I F V-RENT ENTRE LOVIS ONZIESME, ET LE COMTE de Charoloys, depuis Duc de Bourgongne, QHAP.Î.

y faillir demon enfance, amp;nbsp;en l’aage de pouuoir montera chenal,ic fu amené à rifle,vers le Duc Charles deßourgon-gnejors appelle le Comtede Charoloys,lequel me print en fon fèruice, amp;nbsp;fut l’an mil quatre cens foixanre amp;nbsp;quatre. Quelques trois icLirs apres arriuerent audiót lieu de J’Iflc,les Ambafhideurs du Roy, où choit le Comte d’Eu, le Chance

lier de France,appelle Moruillier,ôc rArcheuefquedcNarbonneiamp;enlapre-fence du Duc Philippe de Bourgongne, amp;dudiâ: Comtede Charoloys,amp; de tout leur confeil,à huis ouuerrs,furent ouis Icfdicls AmbafladeLirs.’amp; parla ledit Moruillierfortarrogamment,difant que lcdiôl Comte de Charoloysa-uoit fait prendre,Iuy chant en Hollande,vn petit nauirc de guerre, qui cftoit party de Dieppe,auquel choit vn Bahard du Rubempré,amp; l’auoit fait empri-* cvjîà dire fonner,*luy donnant charge qu’il choit là venu pour le prendre,amp; qu’ainfil’a-ouacc'ufimu uoit fait publier par tout,amp; par elpecial à Bruges,où hantent toutes natios de gens ehranges,par vn Cheualier de Bourgongne, appelle mcflire Oliuicr delà Marche.Pour Icfquelles caufes le Roy,foy trouuant chargé de ce cas, contre vérité, comme il difoir,requcroit audiéf.Duc Philippe, que ce meffire Oliuier delà Marcheluy fuhenuoiéprifonnierà Paris, pour en Elire la punition telle queie cas lercqueroft. A ce point luy refpondit le Duc Philippe, quemelfi-re Oliuier de la Marche ehoit né de la Comté de Bourgongne, amp;nbsp;fonMai-ftre-d’hohel, ôcn’eftoit en rien fubiedàla Couronne: toutesfois que fil a-uoit dit,neEiit,chofc qui fuh contre l’honneur du Roy, amp;nbsp;qu’ainh le trou-uah par information, qu’il en feroit la punition telle qu’au cas appartien-droit : amp;nbsp;qu’au regardât! Bahardde Rubempré,il eh vray qu’ilehoit prins pour les fignes amp;nbsp;contenances, qu’auoit lediél Bahard amp;nbsp;fes gens à l’en-uiron

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D E P H I L I P P E D E C o M M I N E s. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;3

uirondelaHciye en Hollande , où pour lors eftoit fondiôlHIs le Comte de Charolois, amp;que fi ledidt Comte elloit fbupçonneux,il ncletenoit point de luy : ( caril ne le fut oncques) mais tenoit de fa mere , qui auoit elle iaplus foupçonneufe Dame qu’il euftiamais congneuê: mais nonobftant ^iieluy ( comme diileft)n’eull iamais eùé foupçonneuxj’ilfefufttrou-. uéaulieu de Ion fils,à l’fieureque ce Ballard de Rubempré *iegnoit es cn-.hautuit/'” uironsj’eullfiit prendre comme il auoit eflé, amp;nbsp;que fi lediôl Ballard ne le trouLioit point chargé d’auoir voulu prendre Ion fils (comme l’on difoit) ([u’incontinent le feroit deliurer,amp; le renuoyeroit au Roy, comme fes Am-balTadeurs requeroient. Apres recommença lediél Moruillier en donnant grandes amp;nbsp;dcshonncllcs charges au Duc de Bretaigne, appelle Fran-Çoys;difantque lediél Duc,amp;: le Comtede Chaiolois,làprclenr, ellant le- * diét Comte de Charoloisà Tours deuers le Roy, là où il l’clloitallé veoir, auoientbailléfeellezl’vn àrautre,enfefaifansfrercs darmes, amp;nbsp;felloient lgt;aillé lefdiéls ficeliez par la main de melhre Tanneguy du Challel, qui de; puisa cfté Gouuerneur de Roulfiillon, amp;nbsp;aeuatiéloritéenccRoyaume; amp;: làifoiHe delTufidiéE Moruillier ce cas fi enorme, amp;nbsp;fi ciimineux que nulle diofe qui fie peull dire à ce propos, pour faire honte amp;nbsp;vitupéré à vn Prince,ne fut qu’il ne dill. AquoylediólComcedeCharoloysparplufieurs fois -Voulutrefipondre,commefortpaflionnédecelleiniürc,quilediloit de fion '■* atny amp;nbsp;allé: mais lediél Moruillierluy rompoit touliours fit parolle, di-fanteesmots.-Moyleigneurde Charolois, ie neluis pas venu pour parlera vous,ains à mofieigneur voftre pere.Lediél Comte fupplia par plufieurs fois à fonperequ’il peufi: refpondrejcquel luy diflj’ay refipondupour toy,comme ilmefemblequeperedoibt relpondre pour fils.-toutes fois, fi tu en as fi gram decnuie,penles y auiourd’huy,amp; dcmain,amp;dis ceque tu voudras. Encores àifoitlcdiél Moruillier,qu’il ne pouuoit penfier qui pourroit auoir meu le-diél Comte de prendre celle alliance auec lediél Duc de Bretaigne,^non v-nepenfionque le Roy luy auoitdonneCjaüecleGouuernementde Normâ-àie,qui depuis luy auoit ellé ollé.

Le lendemain en l’alTemblée, amp;nbsp;en la compagnie des delfiufididlSjle Cora^ te de Charolois, le genouil à terre,fius vn carreau de velours, parla à fon pe-tepremier,amp; commença de ce Ballard de Rubempré: dilant les caules ellré iulles amp;nbsp;raifionnables de fia prinfie,amp; qu’il le monllreroit par le proces. Tou-tes-fois ie croy qu’il ne fen trotlua iamais rien , mais clloient les fioup-Çons grands, amp;nbsp;le vey deliurcr d’vne prifon où il auoit elle cinq ans. Apres çè propos commença à delcharger le Duc de Bictaigne,amp;: luy aulTudilànt qu’ïl eftoitvray que lediôl Duc de Bretaigne amp;nbsp;luy auoient prins alliance, amp;nbsp;a; initié enfcmble, amp;nbsp;qu’ils fiefloient faiéls freres d’armé, mais en rien n’em tendoient celle alliance au preiudice du Roy,ne de Ion Royaume, ains pour le fieruir amp;nbsp;fioullcnir, fi bcloing en auoit:amp; que toucl^nt la pcnlion quiluy auoit elldollée,iamais n’en auoiteu qu’vn quartier môtant neuf mille francs;

amp; que iamais n’auoit requis ladiélcpenfion , ne le Gouuernementde Norr mandie, amp;nbsp;que moyennant qu’il eull lagrace de fion pere, il fie pourroit bien palTer de tous autres biens-fajels. Et croy bien que fi n’eultellc la crainte

A ij

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4 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;î. LIVRE DES MEMOIRES

defondi6tpcrc,qLiilâeftoitprefent, amp;nbsp;auquel il addrcflbit laparolle, qu’il cuft beaucoup plus afprcment parlé.La conclubon dudiiSl Duc Philippe fut fort humble amp;nbsp;fage,fuppliant au Roy ne vouloir legereraent croire contre luy ne fon fils,amp; l’auoir touhours en fa bonne grace. Apres fur apporté le vin amp;nbsp;les efpiceSjôc prindrent les Ambafladcurs congé du pcre amp;nbsp;du fils.Et quad ce vint que le Comte d’Eu amp;nbsp;le Chancelier curent prinsgt;congé du Comte de Charolois,quiefcoitaflêzloingdefonpere,ildift a l’Archeuefque de Narbonne qui vint le dernier.-Recommandez raoy treshumblement à labonnc grace du Roy,amp; luy diètes qu’il m’a bien fait lauer par fon Chancelier, mais qu auant qu’il (oit vn an il fcn repentira. Lediifl: Archeuefque de Narbonne feit ce mcdage au Roy, quand il fut de retour, comme vous entendrez cy a-pres.Ces parolles engendrèrent grand’ hayne dudiót Comte de Charolois au Roy.-auec ce qu’il n’y auoitgueres que le Roy auoit racheté les villes de Somme,comme Amiens, Abbeuille, fainôl Quentin,amp; autres, baillées par le Roy Charles fepticfme au Duc Philippe deBourgongne, par le traidé qui fut fait a Arras,pour en iouir par luy amp;nbsp;fes hoirs mafles, au rachapt de quatre cens mille efeus. le ne fçay bonnement comment cela fe mena, toutesfois Ic-diélDuc eftanc en fi vieillefle,furent tellement conduits tous fes affaires par LmJ* meffeigneurs deCroy amp;nbsp;de* Chirnay,freres, amp;nbsp;autres de leur maifon , qu’il CrX°^ reprint fon argent du Roy,amp; reftitualcfdides terres: dont le Comte fon fils

fut fort troublé,car c’eftoient les frontières amp;nbsp;limites de leurs Seigneuries,amp; y perdirent beaucoup de bonnes gens pour la guerre. Il t[onnoit charge de cefte matière à cefte maifon de Croy,amp;quand ion pere fut venu à l’extreme vicilleffe,dont ja eftoit pres, il chafla hors du pais tous lefdids Seigneurs de Croy,amp; leur ofta toutes les places,ôc chofes qu’ils tenoiêt entre leurs mains.

f

Comment le Comte de Charolois,auecplußeurs gros Seigneurs de France ® drejja 'vne armee contre le Louis onT^iefmeßoubs

couleurdu^Bien public.

Qhat. il

Ien peu de iours apres le partement des Ambaffadeurs deflufdids, vint à l’Illc le Duc de Bourbon, lehan dernier mort, feignant venir veoir fon oncle le Duc Philippe de Bourgongne; lequel, entre toutes les maifons du monde, aymoit cefte maifon de Bourbon. Cedid Duc de Bourbon efloit hls de la foeur dudiét Duc Philippe.-laquclle eftoit

veufue, long temps auoit, amp;nbsp;eftoit la auec Icdiél Duc fon frere, amp;nbsp;plu-iîcurs defes cnfms,c»mmc trois filles amp;vn fils. Toutesfois l’occafiondela

venue dudid Duc de Bourbon,eftoit pour gaigner amp;nbsp;conduire lediél Duc de Bourgongne de c(»nfentir mettre fus vne armée en fon pais. Ce que fem-blablementferoient tous les autres Princes de France , pour monftrer au Roy le mauuais ordre amp;nbsp;iniuftice qu’il faifoit en fon Royaume, amp;nbsp;vou-loient eftre forts pour le contraindre, filnefe vouloir renger. Et fut celle

guerre depuis a

couleur

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couleur dedirequee’eftoie pour ie bien public du Royaume. Lcdicl Duc Philippe , qui depuis (a mort a cftéappelie, le bon Duc Philippe, confen-titeftremis (usdefes gens, mais le nœud deceile mutiere ne luy futiamâis tóouuert, amp;nbsp;il ne fattendoit point que‘les chofes vinffent iufques a la

(Voyedefajól. Incontinent le commencèrent à mettre (us fes gens, amp;nbsp;vint le Comte de fainóh Paul, depuis Conncllable de France, deuers le Comte JeCharolois a Cambray,oii pour lors elloitle Duc Philippe : amp;z. luy v-èiiti 3üdiâ lieu,aLiccleMarelchai de Bourgongne, qui cftoit de la mailôn de Neuf-cliafteLle Comte de Charolois feit vne grande aflemblcc de gens de eonfeil, autres des gens de fon perc, en l’hoftel de l’Euefqûc de Carhbray-: làdeclara tous ceux de la mailon de Croy, ennemys mortels de fon pe— de luv.nonobflant que le Comte dciainót Paul cufl: donné fa fille en

Waria2e*au fils du fciffnciirde Croy, longtemps auoit, amp;nbsp;diioity aiioir Seigneurdc J nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;-1 /' n nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i r- ■ 'i Cruuy, wef-

Qonimage; En lomme,il fallut que tous l’en fuillent des leigneurics''du n,e.

hue de Bourgongne, amp;nbsp;perdirent beaucoup de meubles. Tout ceGyidefoæ^'/'l^iquot;^'» pleut bien au Duc Philippe,lequel auoit pour premier Chambellan,

^lepuis Peft appelle monfeigneur de * Chimay,homme ieune,amp; trelbien (litionné, nepueu du feigneur de Croy; lequel fen alla fins dire Adieu à ion maillre,pourla craintede fa perfonne : autrement il eull elle tué ou Pfins, car ainlî luy auoit efté déclaré. L’ancien aagedu Duc Philippeluy^ hiteeendurer patiemmcnt:amp;toute celle declaration, qui le feit contre lès gens, fut a caule rte la relfitution de fes Seigneuries fituées fur la riuieré de Somme, que ledict Duc Philippe auoit rendues au Roy Louis, pour la lommede quatre cens mille efeus-amp;chargeoit le Comte de Charolois les gens de celle maifon de Croy, d’auoir fait confentir au Duc Philippe celle

Itellitution.

Ledièl Comte de charolois feradoubajSe rapaifiauecfon perc,lemieLix » ^u’il peut,amp; incontinent mit fes Genf-d’armes aux champs:amp; en fit ftjrapai-gniele Comte de fiinól Paul, principal conduéleur de fes alfaires, ôc le plus grand Chef de fon armée, amp;nbsp;pouuoit bien auoir trois cens Hommes d’ar-naes, amp;nbsp;quatre mille Archiers foubs lacharge,amp; y auoit beaucoup de bons

I cheualicrs Se Efcuyers des pars d’Artois,de Henault, amp;nbsp;de Flandres, foubs lediôlComte,parle commandement du Comte de Carolois. Semblables Undesôt aulli grolfes auoient monfeigneur de Rauallin, freredu Duc de Cleues,amp;: melfire Antoine, ballard de Bourgongne : Icfquels auoientelle ordónez pour les conduire. D’autres chefs y auoit,que ic ne nommeray pas, pour celle heure, pour brieueté: amp;nbsp;entre les autres y auoit deux cheualiers ^ni auoient grand credit auec ledidt Comte de Charolois , l’vn elloit le feigneur de * Hault-bourdin,ancien chcualicr, frere bfllard dudiél Comte * rie fiinél Paul, nourry és anciennes guerres de France amp;nbsp;d’Angleterre , au chamboùr-tempsqueleRoy Henry cinquiefmeRoy d’Angleter#e dece nom regnoit /’«r«»»t. en France, amp;nbsp;que le Duc Philippe elloit ioinél auec luy,amp; fon alié. L autre a-üoit nom le feigneur de Contay,qui femblablement elloit du temps de l au-tre.Ces deux elloicnt tref vaillans amp;nbsp;fages cheualiers,amp; auoient la principa-

I nbsp;nbsp;le charge de l’armée.Des ieunes il y en auoit alfez, amp;nbsp;entre les autres vn fort

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I. L I V R E D E s M E M o I R E s.

bien renommé,appelle rncflirc Philippe de Lalain, qui choit d’vne race dot peu sen effc trouué qui n’aient cfte vaillans amp;nbsp;courageux, quafi tous morts en feruant leurs Seigneurs en la guerre.L’armeepouuoit ehre de quatorze cens Hommes d’armes,mal armez amp;nbsp;mal adroits:car long téps auoict cfte ces Seigneurs en paix,amp; depuis le rraiôté d’A iras auoient peu vende guerre qui euft dure; amp;nbsp;a monaduis qu’ils auoient efté en repos plus de tren-telix ansjlaufquelques petites guerres, contre ceux de Gand, qui n auoient gueres dure. Les Hommes d’armes eftoient fort bien montez amp;nbsp;bienac-compaigncz;car peu en eulhez veu,qui n’euftent cinq ou fix grans chenaux. D Archiers y en pouuoit bien auoir huiét ou neufmille;amp;quand la monllre fut fai(fte,y eut plus à frire à les enuoyer qu’à les appeller,amp;furet choifis tous Jesmeilleurs.

Pour lors eftoient les fubiedls de cefte maifon de Bourgongne,en grand’ tLnhorfdi richefte,à caufe de la longue paix qu’ils auoient eue, pour la bonté du Prin-y viuoienr, lequel peu tailloir Ces fubie(fts:amp; mefembleque pour lors,fès terres fe pouuoient mieux dire terres de promiftjon,qne nul-°''' les autres Seigneuries qui fuflent fur la terre. Ils eftoient comblez de richef-Ies,amp; en grands repos,ce qu’ils ne furent oneques puis:amp;: y peut bien auoir vingt ôc trois ans que cecy commença. Les depenles Sc habi lemens d’horn-mesamp; de femmes, grands amp;fuperflus, lesconuisamp; banquets, plus grands amp;nbsp;plus prodigues qu’en nul autre lieu, donti’ayeeu congnoiflance. Les bai-gnoirieSjôcautresfeftoyemensauccfemmes,grands defordonnez, amp;3 peu de honte; ie parle des femmes de balle condition. En fomme ne fern-bloit pour lors aux lubieéfs de cefte maifon , que nul prince fuft fuffifant pour eux,au moins qu’il les fteuft confondre;amp; en ce monde n’en congnoy auiourd’huy vne Ci nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;doubtcquelcs pechez du temps de la profpe-

, rité, leur lacent porter cefte aduerfité;amp; principalement qu’ils ne congnoif-foient jÄs bien que toutes ces graces leur procedoient de Dieu, qui les depart là où il luy plaift.

Eftant cefte armée ainfiprene,qui fut routa vn inftant, de toutes les cho-fesdontiay icy deuant parlé, Ce mit le Comte de Charolois en chemin a-uec toute cefte armée, qui eftoient tous à cheuai, fiuf ceux qui conduy-foientfiin artillerie, qui cftoit bclleamp; grandc,£clon le temps de lors, auec fort grand nombre decharroy: Se tant qu’ils cloyoyent la plus part defon oft,feulement decequieftoitlien.Pourlecommencementrira Ion chemin deuers Noyon,amp; aftiegea vn petit chafteau où il y auoir des gens de guerre, appellé Neftc, lequel en peu de iours il print. LeMarefchal Ioachim,Ma' refchal de France, cftoit toufiours enuiron deluy,eftant party de Peronne: mais il ne luy fiiloit jBiint de dommage.-par ce qu’il auoir peu de gens, amp;nbsp;fc mit dedans Paris quand Icdiél Comte en approcha.Tout au long du chemin nefiilbit lcdiél Côre«ullegucrrc,ny ne prenoyent riens fes gens fans payer. Aufli les villes de la riuierc de Somme, Se toutes autres laifloyent entrer Ces gcnsenpetir nombre,amp; leur bailloyent ce qu’ils vouloycnr pour leur argét: amp;nbsp;lembloit bien qu’ils efeouraftent qui feroit le plus fort du RoyoudesSei-gneurs.Tant cheminalcdiél Comte, qu’il vintà/âind Denis pres Paris,ou fedeb-

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LJ jt r I I i r 1 r r l l c u m m i in l ù, ! dcbuoient trouuer tous les Seigneurs du Royaume, comme ils auoient ' promis ; mais ils ne fy trouuerencpas. Pour le Duc de Breraigne y auoit I 'lüeclediólComrejpourambanadeur, levice-Chancelier de Bretaigne, qui ' ‘quot;'uoitclcsblancsfignezdefonmaiftrc,amp; fenaydoit de renouuellez amp;nbsp;cf-1 frits,comme le cas le requeroit. Il eftoit Normand amp;nbsp;tres habil le homme, Z amp;:befoingkiy en fut, pour le murmure des gens qui fourdit contre luy. Le-' diftComte fen alla monftrer deuant Paris,amp; y eut trefgrand’ efcarmouche, I amp;iiifqiies aux portes,au defauantage de ceux de dedans De Genfd armes il ’’yauoitque ledidloachim,amp; ficompagnie,amp; monfeigneur deNâtoillet, depuis Grand Maiftre.-qui auflibien feruitleRoy en cefte armée que *ieune wieél feruit Roy de France en fon befoing,amp; â la fin en fut mal recompen- ni»isj/gt;ow ^fjpar la pourfuite de fes ennemis,plus que par le deffault du Roy : mais les ''ns,ne les autres,ne fen feauroient de tous poinéts exeufer. Il y eut du menu peuple , corne i’ay depuis fceu,fort efpouuêté ce iour iufques «a crier : Ils font dedans [ainfi le m’ont compté plufieurs depuis] mais c’eftoit * fans propos. Toutesfois monfeigneurde*Haultbourdin [dont i’ay parlécy deuant, amp;nbsp;bquelyauoiteflenourry,Iors qu’elle n’eftoit point fi forte qu’elle efl: apre-dont] eu fl: efté alTez d’opinion qu’on l’eu ft affailliCjamp;les Genfd’armes l’euflent l’ienvoulu,tous mefprifàns le peuple:car iufques à la porte efloient les efear mouches, toutesfois il eflvray femblable qu’elle n’eftoitpoint prenable.Le dift Comte fen retourna à Sainéf Denis.

Lel’endemainaii matinfe tintconfeil, fçauoir h on iroit au deuant du ' hiic deBcrry,amp;du Duc de Bretaigne, qui efloient pres, comme difoit le vice-Chancelier de Bretaigne, qui monftroit lettres d’eux : maià il les auoit ftiôles fur de blancs, amp;nbsp;autre chofè n’en fçauoit. Laconclufionfutque l’on pafleroit la riuiere deSeine,combienqueplulieurs opinèrent de retourner, puis que les autres auoientfailly à leur iour.- amp;nbsp;qu’auoir pafle la riuierc de Somme amp;nbsp;de Marne,c’efl:oitaflcz,amp; fufiifoit bien,fans panercclled^Seinc.-amp; y mettoient grandes doubles aucuns, veu qu’à leur dos n’auoient nulles daces pour euxretircr,fibefoingcn auoient. Fort murmuroit tout l’oft fur e Comte de fainôl Paul,amp;furcevice-Chancclier:tOLites-foislediôl Comte deCharolois,allapaflcrlariuiere,amp;: loger au Pont Saind Clou. Le lendemain,dés qu’il fut arriué,luy vindrentnoLiuelles d’vncDamede ce Royau-me,quiluyefcriuoitdefàmain,commeleRoy partoit de Bourbonnois, amp;nbsp;a grandes iournées alloit pour le trouuer.

Or faut vn peu parler comment le Royefloitalléen Bourbonnois : Luy donc,congnoiffant que tous les Seigneurs du Royaume fe declaroient contre luy,au moins contre fon gouuernement,fe délibéra de courre fus, le premier,au Duc de Bourbon,qui luy fembloitfeflrephil déclaré que les autres Princes:amp; pour ce quefon pais efloit foiblc,tàtofl rauroit*aftolé.Siluy * print plufieurs places,ôceuft acheué le demeurant, n’ewfleflé le fecours quilJ,^^** vint deBourgôgne,que mena le Seigneur de* Coulches,leMarquis de Rot-telin,le leigneur de Montagu,amp; autres:amp;y eltoit,portant le harnoys,Ie Cria de ce Seigneur celier de France (qui efl auioLird’huy homme bien eflimé) appelle mefiire Guillaume de Rochefort. Celle aflémbléeauoyentfaicle en Bourgongne,

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8 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I. LIVRE DES MEMOIRES

le Comte de Beaujeu,amp; le Cardinal de Bourbo,frété du Duc lehan de Bour-bon:amp; mirent les Bourguignons dedans Molins.D’antre part vindrentàl’ai-dedudiôlDuCjle Duc de Nemours 5 le Comte d’Armignac, le Seigneur d’Albert,auec grand nombre de gens:où il y auoit aucuns bons Genfd’armes de leurs païs,qui auoientlaiflé les Ordonnances, felloient retirez à eux. Legrand nombre cftoitaflez mal en poinâ:,carilsn auoient point de payement,amp; falloir qu’ils vefeufTent fur le peuple: Nonobftanttour ce nombre, le Roy leur donnoit beaucoup d’affaires.Si traiârerent aucune forme de paix amp;nbsp;par fpecial le Duc de Nemours, lequel feit ferment au Roy, luy promettant tenir fon party ; toutes fois depuis feit le contraire,dont le Roy concent celle longue bay ne qu’il auoit contre luy,comme plufieurs fois ilm’adir.Or voyant leRoy,quelànepouuoit fitoflauoir fair, amp;nbsp;que le Comte de Cha-^ rolois fapprocboitde Paris,doubtantqueles Parifiens nefeifTeiîtoLiLierture à luy,amp; à fon frere,amp; au Duc de Bretaigne,quivcnoient du collé de Brecai-gne,â caufe que tous fe coulonroiêt fur le bien public du Royaume:amp; que ce qu’euflfaitlavilledeParis, doubtoirque toutes les autres villes ne feiffent aLifemblable,fe délibéra à grandes iournées de fe venir mettre dedans Paris, amp;nbsp;de garder que ces deux grolfcs armées nefaflcmblalTent.’ amp;ne venoit point en intention de combatte, comme par plufieurs fois il m’a conté, en parlant de ces matières.

Çomment le Comte de ^jarolois vint planterfon Camp pres de Montl’herj!^amp;de U bataille qui fut faite audicl lietf^entre le 7\oy de France nbsp;nbsp;laf. fH AF.11L

int,parlaquel-llilfut aiuer-ty, ait chap, f FM Jent.

Om m e i’ay ditey delTus, quand le Comte de Charolois feeut le departement du Roy qui fefloit party du pais de Bourbonoisjôc qu’il venoit droidl à luy(au moins il le cuy-doit)fe délibéra aufli de marcher au deuant deluy.' amp;nbsp;did a-lors le contenu de les lettres,fans nommer* le perfonnage qui les cfcriuit, amp;nbsp;qu’vn chacun fedeliberall de bien faire, car il deliberoit de tenter la fortune.Sifen alla loger à vn village pres Paris, appelle Longiumeau'.ôc le Comte de fainôl Paul,à tout fon Auant-garde, a Montrhery.qui ell a deux lieues outre,Scenuoierêt cfpiesamp; cheuaucheurs aux champs pour fçauoir la venue du Roy,amp; quel chemin iltenoit.En la pre fence du Comte de fiinôl Paul fut choifi lieu amp;nbsp;place, pour combatte, au-diól Longiumeau.'amp; fut arrellécntre eux que lediôl Comte de faind Paul fe retireroit à Longiumeau,au cas que le Roy vinfl.'amp; y clloient le Seigneur de Hault-bourdin, amp;nbsp;le Seigneur de Contay prelens.

Orfaut il entendre que monfeigneur du Maine elloit auec fept ou huiél cens Hommes d’arn^s, au deuant des Ducs de Berry amp;c de Bretaigne: qui auoient en leur copagnic de fages amp;nbsp;notables cheualicrs, que le Roy Louis auoit tous defitppoii^eZjà l’heure qu’il vint à la couronne ; nonobllant qu ils euflent bien feruy fon pere,au recouurement amp;nbsp;pacification du Royaume; amp;nbsp;maintesfois apres feflrepenty dclesauoirainh traitiez, en recognoiffant fon crreur.Entre les autres y efloit le Comte de Dunoys, fort cftime en toutes chofes,le Marefchal de Loheae, le Comte de Dampmartin, le Seigneur

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I nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ü b PHlLirr th ü t t U M M I N t 5. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;9

I ‘^•^Bueiljamp;plufieursautres.'amp;eftoient partis des Ordonnances ciu Roy bie I ^inqcens Hommes d’armes5qLii tous (’ertoient retirez vers le Duc de Brctai-j EtiejSc tous clloient fubieôts amp;nbsp;nez de Ion pais, gui elloient de celle armée ’ Comte du Maine,gui alloit au deuant,comme i’ay dit,ne fe Tentant af-I ^^zfort pour les combatte,dellogeoit toufioursdeuanteux,cn rapprochant i diiRoy.'amp; chcrchoient les Ducs de Berry amp;nbsp;Bretaigne fe ioindre aux Bout- ' I guignons.Ancuns ont voulu dire gue ledidl Comte du Maine auoit intelli-I genccaucceux:maisienclefceu onegues, ócnelecroy pas.

g Lediól Comte de Ch a roi ois, c fiant logea LongiumeaUjComme iay dit,amp; * ^onAuant-gardcà Mont!’hery,futaducrty parvnprifonnier,gu on luy ame-I ^que le Comte du Maine fefloit ioinól auec le Roy,amp;: y eftoient toutes les

Ordonnances du Royaume, gui pouuoient bien eftre enuiron deux mille deux cens Hommes d’armes,amp; l’Arriereban du Daulphiné, à tout quarante ou cinquante Gentils-hommes de Sauoye,gens de bien.

Ce pendant le Roy eut confeil auec lediót Comte du Maine , 'aucc le Crand Scncfchal de Normandie, gui Tappelloit de Brezey , auecl’Admi-^îldeFrânce,guieftoitde la maifon de Montauban, amp;nbsp;auec d’autres, amp;nbsp;en oonclufion ( guclgue chofe gue luy fuft diôtc amp;c opinée)dehbera de ne com-■ l^atre point:mais feulement fe mettre dedans Parisians foy approcher de là Ouïes Bourguignons eftoient logez: amp;nbsp;à mon aduis gue fon opinion clloit tonne. 11 fefoupçonnoit de ce grand Sencfchal de Normandie; amp;nbsp;Ibÿ de-nianda, pria qiwl luy dift fil auoit baillé fon feellé aux Princes , gui îftoient contre luy, ou non. A guoy lediét Grand Senefchal refpondit que Ouy,mais qu’il leur dcmourroit,amp; que le corps feroit lien : ôc le.dill: en gau-diffantjcarainfiefloitilaccouftumé de parler. Le Roy fen contenta, ôc luy tailla charge de conduire fon Auant-gardc,amp;: aufliles Guydes; pource qu’il Vouloir euiter celle bataille, comme diôt eft. Lediôl Senefchal, vlantde volonté,dill lors à guelcun de fes priucz:lc les mettray auiourd’huy fi j^res l’vn del’autre,qu’il fera bien habille qui les pourra demefler. Etainfilefeitil,amp;:le premier homme quiy mourutjccfutluyamp;fesgens;amp;cesparolles m’a contées le Roy,car pour lors i’efloye auec le Comte de Charolois.

EnclFeÓl le vingt feptiefmeiour dcluiller, l’An mil quatre cens foixaU' Van u teamp;cinq,ccfte Auant-garde fe vint trouucr auprès de Montlhery, où leAiontl'hery, ■ Comte de Sainéb Paul elloit logé. Lediôl Comte de Sainét Paul, à toute i 4 5? diligence fignifia celle venue au Comte de Charolois,( qui elloit à deux lieues pres, amp;nbsp;au lieu qu’il auoit elle ordonné pour la bataille) luy reque-rant qu’il le vint fecourir à toute diligence.Car ia felloient mis à pied Hommes d’armes amp;nbsp;Archiers, amp;nbsp;clos de fon charroy: amp;nbsp;g^e de fe retirer à luy (comme il luy auoit eflé ordonné ) ne luy feroit pcÂible. Car s’il fe met-toità chemin, ce fembleroit élire fuyte , qui feroit grand danger pour toute la compagnie . Lcdid Comte de Charolois envoya ioindre auec luy le Ballard de Bourgongne,qui fe nommoit Antoine, auec grand nombre de gens,qu’il auoit foubs fil charge,amp; à toute diligence; amp;fedebatoic à foy-mcfmefil iroitounon; mais à la fin marcha apres les autres,amp;y arriuaenui ronfept heures de matin, amp;: défia y auoit cincj ou fixenfeigncsduRoy,qui

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IO nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;î. LIV REDES MEMOIRES

cftoientarriuécs le longd’vngrandfofie,quieRoit cntrcles deux bandes.

Encores eftoir en l’olb du Comte de Charoloisje vice-Chancelier de Bre-täigne,appelle Roiiuille,amp;vn vieil homme d’armes appellé*iMadercy,quia' ’■’oi*'^^ill^ le Pont Saind Maxencedefquels curent peur, pour le murmure ntii cRoit cotrc cux,voyâs qu’on eRoit en la bataille,ôc que les qens, dequoy 7»« .1 n n • r • r gt;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• r • lin'

ns lelfcoiet raiôls forts n’y eRoient point ioinds.Si le mirent les deiluidictsa frtfqutdèmot 1^ fuytc, allant qu’on combatiR,par le chemin où ils penfoiêt trouuerles Bre-

’•ons.LediiR Comte de Charolois trouiia le Comte de Sainôl Paul à pied, amp;: tous les autres fe mettoient a la file comme ils venoient, ôc trouuafines tous les Archiers deshoufcz,chafcun vn pal planté deuat cux,amp; y audit pluheurs ' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• plp^s de vin dcRonfces pour les faire hoire.-amp;: de ce petit que i’ay veu,nevcy

iamais gens qui euflent meilleur vouloir de côbatre,qui me fembloitvn bien bon figue amp;nbsp;grad réconfort.De prime face fut aduilé que tout fc mettroit a pied,lans nul excepter,Sc depuis muer et propos: car prelque tous les Hommes d’armes montèrent à cheual.Plufieurs bons Cheualiers amp;nbsp;Efcuycrs fti-* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;oïdonez à demourer à pied,dont monfeigneur *des Cordes Se fonfrere

^n- eRoiêtdu nombre.MeRire Philippe dcLalain fcRoit mis apied(car entre les

Boiirguignôs lors eRoient les plus honnorezeeux qui defeendoient auecles Archiers)amp; toufiours fy en metroit grade quantité de gens de bien, afin que des, g/des lepeupfe en fuR plus afl'curé,amp;côbarift mieux;amp;tenoient cela des Ançloys, Q^erdes- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 I t-C iaI i- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;-ri nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;f nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;T

man d'e- auec leiqueis le Duc Philippe,auoit fait la guerre en France,durant la icuncl-

R,qui auoit duré trente deux ans fans tréucsrmais pour catemps là le princi-p-il^fi^ portoicnt les Angloys qui eRoient riches amp;nbsp;puiRàns. llsauoiêtaiilR mlt;..t4«y?Àdes pour lors fige Roy, le Roy Henry,bel amp;nbsp;tref-vaillàt, quiauoitfages homes

amp; vaillanSjôc de trefgràds Capitaines,corne le Comte de Salbery, Talbofj autres,dont ic me tay,car cc n’eR point de mon temps,combien quei’en aye veu des rcliqucs;car quad Dieu fut las de leur bien Etire,ce fige Roy mourut au boy?dc Vincenes,amp; fon fils infenfé,fuf couronné Roy de Fràce amp;nbsp;d’Angleterre à Pariszôc ainii miiereni les autres degrez d’Angleterre, amp;nbsp;diuifion fè mit entrecux,quiaduréiufquesauiourd’huy,ou peu feu Eiut.Alors vfur-plt;^gt;‘cnt ceux de la maifon *d’Yorîh ce Royaume, ou l’eurent à bon liltre.Ic

lt;f,M«lt;Yorcb, nefçay lequel,car de telles chofes le partage fen fait au ciel.

flHtapffrochat i/l'' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;-1*^1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;/-n»

d’Eboiacutn En retournant en ma matiere,dc ce que les Bourguignons feRoientmis a pied,amp;puisremontczàchcual, leur portagrandepertedetemps, dôma-ge,amp; y mourut ccieune amp;nbsp;vaillat Cheualier meflire Philippe de Lalain, par eRremal armé. Les gens du Roy venoient à la fille par laforeR de Torfou, * tEx^fUire nbsp;nbsp;n’eRoient point quatre cens Hommes d’armes quand * nous les veifines:

quot;°* qifi euR marché incótinentjfemble à beaucoup qu’il ne fc fuRpointtrou-ué de fefiReiicc:car «eux de derriere n’y pouuoient venir qu’à [a file, com-pzjy ditjtoutesfois toufiours croiRbit leur nombre. Voyant cecy, vintcc fage Cheualier, moafeigneur de Contay, dire à fon maiRremonfeigneur deCharolois, que fil vouloir gaigner ceRc bataille , il eRoit temps qu’il marchaR:difantles raifonspourquoy,amp; que fiplustoR l’euREiit, defiafes Jamp;nnemisfuRcntdefconfits .-caril les auoit trouué en petit nombre, lequel croilPoit à veuè d’œil, amp;nbsp;la vérité eRoit telle. Etlors fe changea tout 1 ordre

ôctout

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DE PHILIPPES DE COM MINES. ii amp;nbsp;tout le confeil: car chalcun le mettoit à en dire fon adtiis. Et ja eftoit commencée vne grofle amp;nbsp;forte efcarmouche au bout du village de Montl Hery, toute d’Archiers d’vn collé amp;: d’autre.

Ceux de la part du Roy conduifoit Poncet de Riuiere.• amp;:elloyent tous Archiers d’Ordonnance, orfauerifez, amp;nbsp;bien en poinôl. Ceux du collé des Bourguignons eftoyentfans ordre amp;nbsp;fans commandement* comme volon-taires. Si commencèrent les efcarmouches, ou eftoit à pied, aucc eux, mon- J“! feignent Philippe de Lalin, Lacques du Mas, homme bien renommé, de-puis Grand-Efcuyer du Duc Charles de Bourgongne. Le nombre des Bour- eftoit àpied. guignons eftoit le plus grand; amp;: gaingnerent vne maifon, amp;nbsp;prindrent deux ou trois huys, amp;nbsp;^en leruirentde Pauoys. Si commencèrent â entrer en la tue,amp; mirent le feu en vne maifon. Le vent les -féru oit, qui pouflbitlefeu • contre ceux du Roy: lefquels commencèrent à defemparer, amp;nbsp;monter a cheual, Sgt;c àfuyr; amp;nbsp;furcc bruit amp;nbsp;cry, commença â marcher le Comte de Charoloys,laiftant, comme i’ay dit,tout ordre parauant deuifé.

Il auoit cfté diól que l’on marcheroit à trois fois ; pourcc que la diftancc des deux batailles eftoit longue. Ceux du Roy eftoientdeuers lechafteau de Montl’hcry; amp;nbsp;auoyent vne grande haye amp;vn fofléau deuant d’eux. Oultre eftoient les champs pleins de bleds, amp;nbsp;de febues,amp; d’autres grains tres-forrs; carie territoire y eftoit bon. Tous les Archiers dudiél Comte marchoyent à pied deuant Iuy,amp;: en mauuais ordre; combien que mon aduis clique la fouucrainc chofedu monde ésbatailles, font les Archiers; mais qu’ils foientàmilfiers(caren petit nombre ne vallentrien) amp;nbsp;que ce foyenc gens mal montez,à ce qu’ils n’ayent point de regret a perdre leurs cheuaux, ou que du tout n’en ayent point; valient mieux pourvu iour,en cell oftice, ceux qui iamais ne virent rien, queles bien exercirez.Etaufti telle opinion tiennent les Anglois,qui font la fleur des Archiers du monde. Il auoit cfté did que l’on fe repoferoit deux fois en chemin, pour donner alt;tinc aux Gens de pied; pourcc que le chemin eftoit long, amp;nbsp;les Iruiéls delà terre longs amp;nbsp;forts, qui les empefehoit d’aller; toutesfois tout le contraire fe feit, comme fioneuft voulu perdre à fon clcient. Et en celamonftra Dieu que les batailles font en fi main, amp;nbsp;difpofedcla viôloireàfon plailir. Et ne ni’cft pas aduis que le fens d’vn homme feeuft porter amp;nbsp;donner ordre à vn fî grand nombre de gens; ne queles chofes tinlTent aux champs comme elles font ordonnées enchambre;amp;qucceluy, qui feftimeroit iufquesla, mef-prendroit entiers Dieu, fil eftoit homme qui etift raifon naturelle ; combien qu’vnchafcuny doibt faire cequ’il peut, amp;nbsp;ce qu’il doibt ; amp;:recongnoiftre quec’eftvndesacompliflTemensdesœuuresque Dieu a commencées aucu-nesfois par petites mouuetezamp;: occahons, amp;nbsp;en dc^mant la viétoireaucu-nesfois àl’vn amp;nbsp;aucunesfois à l’autre; amp;nbsp;eft cecy myftereiigrand,quele^ Royaumes amp;nbsp;grandes Seigneuries en prennent aucunesfois fins amp;nbsp;defola-tions,amp; les autres accroiffement amp;: commencement de regner.

Pour reuenir à la declaration de ceft article, ledit Comte marcha tout d’vne l^ojatée, fans donner alaine àfes Archiers amp;nbsp;Gens de pied. Ceux du Roy palTerenc cefte haye par deux bouts tous Hommes d’armes : ôe comme

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Il I. LIVRE DES MEMOIRES

ils furent fi pres que de ietter les lances en arreft, les Hommes d’armes Bourguignons rompirent leurs propres Archiers,amp; paflerent pardeflus, fans leur donner loyfir de tirer vncoup de flefchc;qui eftoit la fleur amp;nbsp;cfpcrancc de leur armée. Carie ne croy pas que douze cens Hommes-d’armes,oii enuiron, qui y cftoient,y en euft cinquante qui euflentfeeu coucher vne lance en arreft. Il n’y en auoit pas quatre cens armez de cuyracesjôc fi n auoient pas vnfeul fer uiteurarmé. Ettoutcccy, àcaufedela longue paix , amp;nbsp;qu’en cefte maifon deBourgongne ne tenoient nulles gens de foulde, pour foulager le peuple des tailles : amp;oncques puis ce iour la, ce quartier de Bourgongne n’eut repos iufquesà cefte heure: qui eft pis que iamais. Ainfi rompirent euxmel-mes la fleur de leur armée amp;nbsp;efperance : toutesfois Dieu qui ordonne de tel • myfterc, voulut que le cofté où fc trouua lediôl Comte ( qui eftoit à main dextredeuers lechafteau) vainquift,{ànstrouucr nulle defence; amp;nbsp;metrou-

uay ce iour toufiours auec luy, aiant moins de crainte que n’eu iamais en lieu ouiemetrouuaflTedepuiSjpourlaieunefTeen quoy i’eftoie , amp;qucien’auoie nulle cognoiflancede peril : mais eftoie elbahy comme nul fofoit défendre contre tel Prince à quii’eftoie, eftimantquece fuftleplus grand de tous les autres. Ainfi font gens qui n’ont point d’expcrience,dont vient qu’ils fouftié-nent aflez d’argus,mal fondez amp;nbsp;à peu de raifon. Parquoy fait bon vfer de l’opinion de ccluy qui dit,que l’on ne fe repent iamais pour parler peu,mais bien fouuent de trop parler.

A la main feneftre eftoit le Seigneur de Rauaftin,amp;meftlre laques de Sainél Paul,amp; pluficursautrcs,àquiil lembloitqu’ils n’auoient pas alTez d’Hommes darmes pourfouftenirce qu’ils auoient deuant eux : mais dés lors eftoient fi approchez,qu’il ne faloit plus parler d’ordre nouuelle. En effeéf ceux là furet rompus à plate coufture, amp;nbsp;chalfez iufques au charroy ; amp;nbsp;la plus partfuitiuf ques en Iaforeft,qui eftoit près de demye lieue. Au charroy fe r’allicrent quelques Ge^ de pied Bourguignons. Les principaux de cefte chalîe eftoient les Nobles du Daulphiné,amp; Sauoyfiens, amp;nbsp;beaucoup de Genf-darmesaufli,amp; fattendoient d’auoir gaigné la bataille;amp; de ce cofté y eut vnegradefuitedes Bourguignons,amp; de grans perfonnages:amp; fuyoient laplufpart pour gaigner * xwfMniJe le* Pont Sainét Maxence, cuidans qu’il tint encores pour eux. Enlaforcften demourabeaucoup:amp; entreautres le Comte de Sainéf-Paul, quieftoitaffez s»£, bien accompagnéjfy eftoit retiré. Car il eftoit aflez près de ladide foreft: amp;nbsp;depuis qu’il ne tenoit pas encores la chofe pour perdue.

xencc, cvmt ftnt mtfme ail Sxtmfl.

Du danger, auejuelj'ut ie Qimte de Charoloys : comment tlftitCecourH. CH AT. UII.

E Comte de Charoloys chafla de fon cofté demye Iieuë,oul-trele ^ontl hery,amp; à bien peu de compagnie; toutesfois nul ne fedefendoitjamp;troLiuoit gens à grande quantité:amp;iacuy-doitauoirla viéloirc. Vn vieil Gentil-homme de Luxembourg,’appelle Antoine le Breto, le vint qiierir:amp; luy dift que les François feftoient ralliez fur le champ, amp;nbsp;que fil chailoit plus guercs,i!fc

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ut F tl 1 L 1 r r r, U C, M M 1 IN t ù. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;13

perdroit.ll ne farrcfta point pourluy, nonobftant qu’il luydiftpar deux ou tfois bis. Incontinant arriua monfeigneur de Cótay (dont cy dcflus eft parle) Quikiy dirt fcmblables parolles,comme auoit fait Ie vieil Gentil-bómc de Lu-^eniboiirg,amp; Ci aadacieufcment qu’il ertima fa paroHe fon fens, retourna ' totitcourt.'amp;croy q fil furt parte outre deuxtraióls d’arc,qu’il eufterté prins, come au eus autres qui chaflóyet deuant luy;amp; en partant par Ie village, trouua vneflotte de gens â pied qui fuyoiét. Il les charta, amp;nbsp;fi n’auoit pas cét cheuaulx entoui.Il ne te retourna qu’vn homme a pied,qui luy dona d’vn vouge parmy )dlotnach:amp;: au foir fen veit l’enfeigne.La plufpart des autres fe fTuuerent par ^csiardins;mais celuy là fut tué. Comme il pafloit rafibus du chaftel, veifmes ics Archiers de la garde du Roy, deuant la porte,qui ne bougeréc. 11 en fut fort efbahyzcar il ne cuidoit point qu’il y euft plus ame de deffenfc.Si tourna à co-llépour gaigner le champ:ou luy vindrent courre fus quinze ou feize Hom-•nes-darmes ou enuiron; [vnepartic des fiens feftoyent ia feparez de luy] amp;nbsp;Centrée tuerent fon Efcuyer tranchant, qui fappelloit Philippe* d’Orgues, Sz portoit vn suidon de fes armes : ôc là lediél Comte fut en tref-grand danger, Keutplufieurs coups; amp;nbsp;entre les autres, vn en lagorge dvne elpee , dont'quot;J'pquot;». hnfeigne luy efl, demeurée toute fa vie, par faute de fa bauiere qui luy ertoit oJZ^cj. cheute, amp;nbsp;auoit efté mal attachée des le matin, amp;nbsp;luy auoye veucheoir; amp;c ^oyfut mis les mains dertiis, difant; Monfeigneur rendez vous, ie vous con gnoy bien.-nevous faidespas tuer.Toufiours fedefendoit : Sgt;c fur ce débat Icfils d’vn Medecia de Paris,nommé maiftre lean Cadet (qui ertoit à luy) gros amp;nbsp;lourd amp;nbsp;fort, monté fur vn gros cheual de cefte propre taille , donna au trailers, amp;nbsp;les départit. Tous ceux du Roy fe retirèrent furie bort du forte, où ils auoyent efté le matin • carilsauoyent crainte d’aucuns qu’ils voyoyent niarcher, qui fapprochoyent; amp;luy, fort fanglant,fe retira à eux comme au milieu du champ ;amp; eftoit l’cnfeigne du Baftardde Bourgongne toute def-pecce : tellement qu’elle n’auoit pas vn pied de longueur : Scal’enftignedes Archiers du Comte, n’y auoit pas quarante hommes en tout: amp;nbsp;nous y ioi-gnifn'ies(quin’eftions pas trête)entrefgrande doubte.Il changea incontinent flecheual : 6c le luy bailla vn qui eftoit lors fon page , nommé Symon de dit «lt;»ƒ, Luy ^’tigyiqui depuis a efté bien cognu. Ledit Comte le mit par le champ, pour continent, rallier fes gens:mais ie vey telle demie heure que nous qui eftions demourez là,n’auos ’œil qu’à fuir,fil fuft marché cent hommes. Ils venoyent à nous dix “'7^™ Homes vingt homes desnoftres,tât de pied que de cheual LesGês-dc-piedble venon. ecz amp;nbsp;lafTez,!ât de l’oultrage que leur auiôs fait le matin,qu’aufli des ennemis:^hsp ƒftoit l’heure qu’il n’y auoit pas cent hommes, mais peu à peu en venoit. heoîcSS les bleds eftoyent grands, Sgt;c lapouldre la plus terrible du monde, tout le champ femé de morts amp;nbsp;de cheuaulx : ôc ne fe cognlt;Ârtbit nul homme mort amp;nbsp;» pheure A , nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;la pouldtc,

pour lapouldre. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;amp;c.

Incontinent veifmes faillir du boys le Comte de^àinâ-Paul, qui auoit bien quarante Hommes darmes auecluy,amp;fon enfeigne marchoit droit à floiiSjamp;croirtbit de gens: mais ils nous fembloyent bien loing. On luy cn-uoya trois ou quatre fois prier qu’il fe haftaft:mais il ne fe mua point , amp;nbsp;ne Venoit que fon pas: amp;nbsp;feit prendre à fes gens des lances, qui eftoyent à terre;

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14 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1. LIVRE UES MEMOIRES

amp; venoic en ordre [qui donna grand réconfort à nos gens]amp; feioignirenten-lèmbîeauec grand nombre,amp; vindrent là où nous cflions:amp; nous trouuaf mes bien huitl cens Hommes-darmes. Degens-de-piedpcu ou nuis. Ccqui garda bien le Comte qu’il n’eufl: la viôloire cntiere.-car il y auoit vn fofle,amp;vne grande baye,entre les deux batailles deflufdiótes.

De la part du Roy,fenfuyt le Comte du Maine,amp; plufieurs autres, ôc bien buiâ: cens Hommes-d’armes, Aucuns ont voulu dire que le Comte du Maine ” nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;auoit intelligence auec les Bourguignons:mais à la vérité dirc,ic croy qu’il n’ê

fut onques rien.Limais plus grande fuy te ne fut des deux coftez:mais par efpe-cial demoLirerent les deux Princes aux champs.Du cofté du Roy fut vn homme d’eftat qui fenfuyt iufqucs à Luzignan,(ans repaiftre: Sc du cofté du Comte vn autre homme de bien iniques au Qucfnoy-le- Côte.Ces deux n’auoycnt trarde de le mordre l’vn l’autre.

Eftans ainfi les deux batailles rengees l’vne deuant l’autre,fc tirerêt plufieurs coups decanons:quituerent gensd’vncofté ôc d’autre. Nul ne defiroitplus de combatre:amp; eftoic noftre bende plus groftc que celle du Roy, toutesfois fi preicnce eftoitgrand’chofe,amp; la bonne parollc qu’il tenoit aux Gês-d’armes: amp;nbsp;croy véritablement,à ce que i’ay fceu,que h n’cuft efté luy feul, tout f en fuit fuy.A*ucuns denoftre cofté defiroyent qu’on recommcnceaft, amp;nbsp;par efpecial monfeigneur de Haultbourdin,qui difoit qu’il voy oit vne file ou flore de gens qui fenFuy oient, amp;nbsp;qui euft peu trouuer Archiers au nombre de cent pour tirer au trauers de celle hay c,tout full marché de noftre cofté.

Eftans ftir ce propos amp;nbsp;fur ces penfees, amp;nbsp;fins nulle efcarmouchc, furuint l’entreedelanuiéliamp;feretiraleRoy àCorbcil, nous cuidions qu’il felo-i.t'oiàhx? geaft,amp;;*pairaftlanuiélauchamp. D’auanturefemit le feu en vn caque de pouldre,là où le Roy auoit efté,amp; fe print à aucunes charrettes, amp;nbsp;tout du log ^amp;cuidió^s de la grand’hayc : cuydoient les François que ce fulTent leurs feux. Le ^cnVamp;c.** Comtcéfe Sainél Paul, qui bien fembloit chefdc guerre, amp;nbsp;monfeigneur de jq^uLEourdin, encores plus,commandèrent qu’on amenaft lecharroy au propre lieu là où nous eftions,amp;qu’on nous cloill; amp;nbsp;ainfi fut fair. Comme nous eftionslàen bataille, amp;nbsp;ralliez, reuindrent beaucoup de gens du Roy, qui auoycnt chairé,cuydâs que tout fuftgaigné pour eux: amp;nbsp;furent cotrainâs de pafterparmy nous. Aucuns cfchapperent,amp; plufieurs fe perdit et. Des gens • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;de nom de ceux du Roy, mourut meflîre Geoflfroy de Saind-Belin, le Gr.ind

Scnefchal de Normandie, amp;nbsp;Floquet Capitaine. Du party des Bourguignons mourutmeflirePhilippe de Lalain:amp;des Gens-à pied amp;nbsp;menus gens,plus * que de ceux du Roy .-mais de Gcns-de-cheual en mourutplus du party du Roy. Deprifonniers, les gens du Roy en eurent des meilleurs de ceux qui fuyoient. Des deux jb.rties il mourut deux mille hommes du moins; amp;nbsp;fut *amp;debien laciiofebiciicombatue;amp;fetrouuades deuxeoftezdegensde bien,*Schien laiïez. Mais ce fut gra^d’ chofè,à mon aduis,de fe rallier fur le champ,amp; eftre trois ou quatre heures en cell eftat, l’vn deuant l’autre ; ôc debuoienr bien cftimer les deux Princes ceux qui leur tenoyent compagnie fi bonne .à ce befoingrmais ils en feirent comme hommes ,amp; non point comme Anges.Tel perdit fes offices amp;nbsp;eftats pour fen eftre fuy, amp;nbsp;furent donnez à d’autresqui

auojçnt

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äüoientfuy dix lieues plusloing.Vn denoftre collé perdit authoritc, amp;nbsp;fut priué de la prefence de fon maiftre:mais vn moys apres eut plus d’authorité deuant.

Quand nous fuf-nes clos de ce charroy, chafcunfe logea le mieux qu’il pfut.Nous auions grand nombre de blecezjôc laplufpart fort defcouragez -efpoLiLienteZjCraignans que ceux de Paris,auec deux cens Hommes-d’ar-’^csqu’ily auoitaueceux,amp;:leMarefchal loachim,Lieutenant du Roy en ^adióte cité, forti(rent,amp; que l’on euft affaire des deux coflez Cômé la nuiéh Hictoute clofe,on ordonna cinquante lances,pour voir où le Roy eftoit lo-g^»Il y en alla par aduenture vingt,amp; y pouuoit auoir trois ieéls d’arc,de no-ftre cap iufques ou nous cuydions que fuft le Roy. Ce pêdat niofeigneur de Charoloys beut amp;nbsp;rnagea vn peu, amp;nbsp;chafeun endroit foy;amp; luy fut adoubee • ^^playe qu’il auoit au col. Au lieu où il mangea, falut öfter quatre ou cinq gommes morts,pour luy faire place:amp; y mit l’on deux boteaux de paille, ou ƒrquot;h’' en remuant illec, vn de ces poures gens nud commença àdeman-

a boire. Onluy icttaenla bouche vn peu de tifane, dequoylediôl Seigt; ^ncutauoit beu:dont Iccœurluy reuint, amp;nbsp;fut congnu : amp;nbsp;eftoit vn Ar-filier du corpsdudiôl Seigneur,fort renommé,appclîé *Sauaric : qui fut pen-guery.

On eut en confeil qui eftoit de faire : le premier qui opina, fut le Comte ^eSainél-Paul: difant que Ion eftoit en peril, Scconleilloittirerà l’aube du iour,le chemin de B ourgongne : amp;nbsp;qu’on bruftaft vne partie du charroy : amp;nbsp;^u’onfauuaft feulement l’artillerie; que nul nemenaft charroy, fil n’a-^oitplus de dix Lances: amp;nbsp;quededemourer là fins viures entres Paris amp;: *Subftancc IfKoy. n’eftoit poffible. Apres opinamonfeisneur de Haultbourdin af- fauffçauoir’ • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• £xibl.-viea.

en cefte lentence , lans Içauoir auant que rapporteroient ceux qui fftoient dehors. Trois ou quatre autres femblablement opinèrent de mef-•He. Le dernier qui opina, fut monfeigneur de Contay: qui dift que fi toftquece bruitferoitenl’oft, tout fe mettroiten fuyte; amp;nbsp;qu’ils feroient pùns deuant qu’ils euffent fait vingt lieuè's, amp;nbsp;dift plulieurs raifons bonnes: amp;nbsp;que fon aduis eftoit, que chacunfaifift au mieux qu’il pourroit cefte nuiél, ScquclematinàTaubeduiour on aftailliftleRoy , amp;q’uil failloit là viureou mourir: amp;nbsp;trouLioit ce chemin plus feurque de prendre la fuyte.

opinion dudiétContay concludmonfeigneur deCharoloys.'ôe dift que chafeun fen allaft repofer deux heures, amp;nbsp;que l’on fuft preft quand fi trompette fonneroit :amp;parla à plufieurs particuliers pour enuoier reconforter lès gens.

Enuironminuiél reuindrentceux quiauoientefte^mis dehors:amp; pouuez penfer qu’ils n’eftoient point allez loing:amp;rapporter^t que le Roy eftoit logeaces feux qu’ils auoient veus. Incontinent on y enrenuoya d’autres; amp;vneheureaprcs fe remettoit chafeun en eftat de combatte : mais laplufpart auoit mieux enuie de fuyr. Comme vint le iour, ceux qu’on auoit mis hors du champ, rencontrèrent vn chartier qui eftoit à nous, amp;nbsp;auoit efté prins le matin* qui apportoit vne cruche de vindu village ; amp;nbsp;leur dift que * oj^’iiap-' toutfen eftoit allé. Ils enuoierent dire ces nouuelles en l’oft: amp;nbsp;allèrent

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1lt;; nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I. LIVRE DES MEMOIRES

iufques là. Ils trouucrent ce qu’il difoit, amp;nbsp;le reuindrent dire ; dont la compagnie eut grand’ ioye, amp;nbsp;y auoit afTez de gens qui difoient lors qu’il failloit aller apres,lefquels faifoient bien maigre cherc vne heure deuant. l’auoyc vn chenal extrêmement las amp;nbsp;vieil, il beut vn feau plein de vin. Par aucuns cas d’auenture il y mit le mufeau,amp; le laiflay acheucr.Iamais ne Fauoie trouué fi bon,ne fi frais.

Quand il fut grand iour,touf monta à chenal, amp;nbsp;les batailles cftoientbien efclarcies:toutesfois il rcuenoit beaucoup de gens,qui auoient cftécachezés boys. Ledicl Seigneur de Charolois feit venir vn Cordelier, ordonné par luy à dire qu’il venoit de l’ofl; des Bretons, amp;nbsp;que ce iour ils deuoient eftre là.Ce qui réconforta afiez ceux de l’oft ; mais chacun ne le creut pas. Incontinent apres enuiron dix heures du matin,arriua le vice- Chàcelicr de Bretai-gne,appellé Rouille, amp;nbsp;Madereyauec luy,dont ay parle cy de{fus:amp;amenc-*/»• rky nbsp;nbsp;nbsp;rent deux ArchiersdelagardeduDucdeBretaigne, portans fes hocquetons

[ce qui réconforta tresfort la compagnie] örfutenquis, amp;nbsp;loue'Tefafuytc [confiderant le murmure qui eftoit contre luy ] amp;nbsp;plus encor de fon retour: amp;nbsp;leur feit chafeun bonne cherc.

Tout ce iour demoura encores monfeigneur de Charolois fur le champ, fort ioycuXjcftimant la gloire eftre fiêne,ce qui depuis luy a coudé bien cher: car onques puis il n’vfa de confeil d’homme,mais du fien propre ; amp;nbsp;au lieu Srtï'ÿqn’d eftoic tref-inutile pour la guerre parauât ce iour,amp; n ay moit nulle cho-y appartint,depuis furent muées amp;nbsp;châgées les penfées. Carily acoti' nue iufques à fà mort^ßc par là fut finie fa vie,amp;: fa maifon deflruiôle;amp; fi elle ne l’cfl: du tout,fi eft elle bien delolce.Trois grans amp;nbsp;fages Princes,fcs prede-cefreurs,l’auoiét efleue'ebien hault;amp; y auoit peu de Roys[faufceluy de Fra-ce] plus puiflans que luy : amp;nbsp;pour belles amp;nbsp;grofies villes, nulnercnpaflbit. L’on ne doit trop eftimer de foy,par efpecial vn grand Prince;mais doibt co-* Ne peut gnoidreque les graces amp;nbsp;bonnes fortunes viennent de Dieu.Deux chofes di-1747 ray-iedeluy :L’vnecft,queiecroy que iamais homme * ne print plus de tra« uail qucluy,en tous endroits où il faut exerciter la perfonne : l’autre qu’àmo aduis ienecogneu onques homme plus hardy. le ne luy ouy oneques dire qu’il fuft las,ny ne luy vey iamais faire femblant d’auoir paour; amp;nbsp;fi ay efté fept années de rang en la guerre auec luyJ’Efté pour le moins, amp;nbsp;en aucunes l’Hyucr amp;nbsp;l’Efté. Ses penîees amp;nbsp;conclufions eftoient grandes-.mais nul home ne les fçauoit mettre à fin,fi Dieu n’y euft adioufté de fa puiflance.

Comment le Duc de ’Berryöftere du nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;le Duc de Bretaigne fê vindrent

ioindre auec le Comte de CharoloiSjContre iceluy Koy. QH A T.

E I^demain, qui eftoit le tiers iour de la bataille, allaf-mes coucher au village de Montl’hery : dont le peuple en partie fen eftoit fuy au clocher de l’Eglifè , Sc partie au. chalteau . Il les feit reuenir , amp;nbsp;ne perdirent pas vn denier vallant:mais payoit chafeun fon efcor,commefil euft ellé en Flandres. Lechafteau tint, ne fut point aflail-

ly.Lc tiers iour pafle,partitlediôl Seigneur, parle confeil du Seigneur de Contay

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DE PHILIPPES DE C O M M I N E S.

Contay,pour aller gaigner Eftampes(quicftbon amp;nbsp;grand logis, amp;cn bon pays amp;nbsp;fertile ) afin d’y eftre plus toft que les Bretons, qui prenoient ce chc-: afin aufli de mettre les gens las amp;blecez a couuert,amp; les autres aux I cbmps;amp; fut caufe ce bon logis,amp; le Icjour que ion y feit,dc ûuuer la vie a j l’caucoup de fes gens.Là arriuerentmelTire Charles de France, lors Duc de ßerry,feul frere du Roy,le Duc de Bretaignc,monfeigneur de Dunoys,mo-icigneurdc Dampmartin,monfeigneur de Loheac, monfeigneur deBueil, monfeigneur de Chaumont, amp;nbsp;meifire Charles d’Amboifefon fils [qui depuis a efte grand homme en ce Royaumejtouslcfquels deuant nommez le lllt;oy auoit defâppointez,amp; deffaicis de leurs eftats, quand il vint à la couronne, nonobftant qu’ils euflent bien feruy le Roy fon pere,amp; le Royaume, «s conqueftes de Normandie,amp; en plufieurs autres guerrcs.Monfeigneur de Cliaroloys,amp; tousles plus grands de là compagnie, les recueillirent amp;nbsp;leur allèrent au deuant, amp;nbsp;amenèrent leurs perfonnes loger en la ville d’Eftam-pes, où leur logis eftoit fait :amp; les Gens-d’armes demeurèrent aux champs. Enleur compaignie auoit huid cens Hommes-d’armes,de trefbonne eftof-Ec, dont il y en auoit tres-largement de Bretons, qui nouucllement auoyent lailleles Ordonnanccs(comme icy amp;nbsp;ailleurs i’ay dit)qui amendoyent bien leur compagnie: d’Archiers,amp; d’autres hommes de guerre,armez de bonnes Erigandines, auoit en trelgrand nombre, amp;nbsp;pouuoyent bien eftre fix mille EommeTa cheual,trefbien en poind.Et fembloit bien à voir la compaignie^ ^uele Duc de Brctaignc fuft vn trelgrand Seigneur.'car toute celle compaignie vi U oit fur fes coffres.

Le Roy, qui felloit retiré à Corbeil ( comme i’ay deuant dit ) ne mettoit point en oubly ce qu’il auoit à faire.Il tira en Normandie,pour alfemblcr fes gens, amp;nbsp;de paour qu’il n’y eull quelque mutation au païs:amp; mit partie de lès Gens-d’armes es enuirons deParis,làoùil voyoitqu’ilelloitnecelïairc.

Le premier foir que furent arriuez tous ces Seigneurs delTufdids Eflam-pcs,ils contèrent des nouuclles l’vn à l’autre. Les Bretons auoient prins'qucl-ques prifonniers de ceux qui fuioyent du party du Roy : amp;nbsp;quand ils eulfent eftévn peu plus auant,ils eulfent prins oudefconfitletiersdel’armee. llsa-^oyét bien tenu confeil pour enuoyer gês dehors,iugeàs que les oils elloy et près; toutesfois aucuns les deftournerent; mais.nonobflant,melïire Charles d Amboife amp;nbsp;quelques autres, fc mirent plus auàt que leur armee,pour voir fils rencontreroyent rien;amp; prindrét plufieurs prifonniers [comme i’ay dit] amp;nbsp;de l’artillerie.- lefquels prifonniers leur dirêt que pour certain le Roy elloit ïnort: car ainfi le cuidoyent ils,parce qu’ils fen elloy et fuis dés le commencement de la bataille. Les dclfufdiéts rapportèrent les nouuclles à l’oll des Bretons, qui en eurent trelgrand’ ioye, cuydans qu’aii full, amp;nbsp;elperans les biens qui leur fulfent aduenus, fi lediól monfeigneur Charles eull cfté Roy: amp;tindrent confeil[commeil m’a ellé dit depuis par vi*homme debicn,qui *Deftroüf-eftoitprefent] àfçauoircommeils pourroyentchaircrcesBourguignons,amp; eux en depefcher.-amp; elloy ent quafi tous d’opinion qu on les * defeonfift, qui pourroit. Celle ioye ne leur dura gueres,mais par cela vous pouuez voiramp; congnoillre quels font les brouillis * es Royaumes aux mutations.

* B iij

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18 I. LIVRE DES MEMO i R £ S

Pour reucnirâ mon propos de cede armée d’Eftampes, comme tous euf-fcntfoLippé,amp;qu’ily auoitJargcmcntdegens qui fe pourmenoientpar les rues,monfeigneur Charles de France, amp;nbsp;monfeigneur de Charolois ellans àvne feneftre parlans eux deux decrclgrande affeélion,en la compaR gnic des Bretons,y auoit vn homme qui prenoit plaiür à ietter en 1 air des fti-rées, qui courent parmy les gens, quand elles font tombées , amp;nbsp;rendent vn peu de flambe: amp;fappclloitmaifl:relehan Boute feu, ou maiflre lehan des Serpens,iene Içay lequel. Cefolaflre, cflant caché en quelque maifon, afin quelesgensncrapperceuflent,enietta deuxou trois enl'air, d’vn lieu haut où il efl:oit,tellementqu’vne vint donner contre lacroifee de la fcncllrc on ces deux Princes deifuîdids auoient les telles, amp;nbsp;h pres l’vn de l’autre qu’il n’y auoit pas vn pied entre deux. Tous deuxlcdrelferent amp;nbsp;lurent elbahis, ' ôefe regardoient chafeun l’vn l’autre. Si eurent fulpition que cela n’eull efté faiélexpreflement, pour leur mal faire. Le Seigneur de Contay vint parler a monfeigneur deCharolois Ibn maiflre,amp; dés qu’il luy eull dit vn mot en l’oreille, il defeendit en bas, amp;nbsp;alla faire armer tous les Gens-d’armes de fa maifon,ôc les Archiers de Ton corps,amp; autres. Incontinent le Seigneur de Charolois difl au Duc de Berry,que femblablcmcnt il feifl armer les Archiers defon corps : amp;nbsp;y cutincontinent deux ou trois cens Hommes d’armes,armez deuant la porte,à pied,amp; grandnombre d’Archiers:amp; cherchoit * Ce feu. l’on par tour,donr pouuoit venir ce* meflfirit.Ce panure homme qui l’auoit skï^i.w,i. Elit jfe vint ietter à genoux deuant eux:amp;leur difl que ç’auoitcflé luy, amp;en ictta trois ou quatre autres,amp; en ce faifint il ofla beaucoup de gens hors de fulpition qu’on auoit les vns fur les autres,amp; fen print l’on a rire, ôe fen alla chalcLin delàrmer amp;nbsp;coucher.

Le lendemain au matin fut tenu vn trefbeau confeil,oij. fe trouuerent tous les Seigneurs amp;nbsp;leurs principaux fcruitcurs, amp;nbsp;fut mis en deliberation ce . quieflÂt defaire.-amp; corne ils efloiêtdeplulieurs pieces, ôcnon pas obeiflans a vnfeul Seigneur (comme il efl bien requis en telles alfemblées) aufli eurent ilsdiuers propos.-amp;entre les autres parolles qui furent bien recueillies amp;nbsp;notées,ce furent celles de monfeigneur de Berry, qui efloit ieune amp;nbsp;n’auoitia-mais veu tels exploits.Car il fembla par ces parolles, que ja en fufl ennuyé, amp;nbsp;allégua la grande quantité des gens blecez, qu’il auoit veus de ceux de monfeigneur de Charolois,amp; monflrant par ces parolles en auoir pitié,vfoit de ces mots.-Qulil eufl mieux aymé que les chofes n’euflent iamais eflé com-mencées,que de veoir tant de maux venir par luy, amp;nbsp;parfacaufe. Ces chofes defpleurent à monfeigneur de Charolois amp;nbsp;à fes gens, comme ie diray cy a-prcs.Toutesfois cà ce confeil fut côclud qu’on tireroit vers Paris, pour eflàyer flonpourroitreduy|cla ville à vouloir entendre au bien public du Royau-me,pour lequel difoienttous eflrealTemblez: amp;nbsp;leur fembloitbien, fl ceux là leur prefloient roj^ille,que toute la refle des villes de ce Royaume feroiét le femblable. Comme i’ay dit, les parolles dides parmonfeigneur Charles Duc de Berry,enceconfeil,mirenten telle doubte monfeigneur de Charolois amp;nbsp;fes gens,qu’ils vindrentàdire: Auezvousouy parler ceflhomme?ilfc trouLie efbahi pour fept ou huiél cens hommes qu’il voit par la ville al-

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DE PHILIPPE DE COMMIMES.

lûnsbleceZjquine luy font rien,ne qu’il ne congnoiftnl fefbaliiroit Lien toft *ile cas le tOLichoic de quelque cliofcjamp;feroit homme pour appointer bien legerement, amp;nbsp;nous laifler en la fange:amp; pour les anciennes guerres qui ont die le temps pafle entre le Roy Charles fonpere, amp;le Ducde.Bourgongne nionperejaifement toutes ces deux parties ie conuertiroyent contre nous,-, parqiioy eft ncceflàiredefe pourueoird’amys.Etfurceftefeuleimaginatiô, fit enuoye Guillaume de Cluny, Proihonotaire ( qui eft mort depuis Euef, lt;]uedePoifliers)deuersleRoy Edouard d’Angleterre,qui pour lors regnoit; auquel monfeigneur de Charolois auoit touïiours eu inimitié, amp;nbsp;portoiç la inaifon deLanclaftre contre luy,dont il eftoit yflu par fa mere. Et pour l’in-lltuóhondudiótClunyjluy clloit ordonné d’entrer en pratique du mariage alafœur du Roy d’Angleterre,appellcc Marguerite,mais non pas de conclu^ • ^elcmarchc,ains feulement de l’entretenir . Car congnoilîant que.le Roy dAngleterrcl’auoitfortdehré, luy fembloitbien que pour le moins ilnçfe-loit riens cotre luy:amp; fil en auoit affaire,qu’il le gàigneroit des hens.Et çonq; lgt;ien qu’il n’euft vn feul vouloir de conclurre ce marché, amp;nbsp;que la chofç.du monde que plus il haiffoit en fon cœur,c’eftoit la maifon d’Yorda.'h fqç.tôuf-tesfois tant demenéecelle matiere,qu’apres pluheurs années elle fut cocluc, Scprintd’auantage l’ordre de la Iarretiere,amp; laporta toute fa vie. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;।

Or mainte œuurc fe fait en ce monde par iiaaagination,tel[c que cellç qffe lay cy defius dcclarée.-amp; par fpecial entre les gras Princes,qui font beaucoup dus foufpeçoneux qu’autres gens,pour les doubles amp;aduertiffemens qu’on * nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;' *

eurfait,amp; treffouuent par flaterie,(ans nul befoing qu’il en foit. J lt;-.b

Qomment le Comte de Charolois, fes auecleur armée pa/Jerent la rtüt 'e^e

deSeine^ßir'vn pont portatif,comment le Dac Jean de Calabre feiffignifauèc eux,pHisjelogerent tousdl'entoardeTaris. QHAT.

Infi comme il auoit effcé conclu,tous ces Seigneurs^ partirêc d’Eftâpes,apres y auoir feiourne quelque peu de iours, amp;nbsp;tL rerétà fain«^ Mathurin de Larchant,amp; à Moret en Gaffinois. Monfeigneur Charles amp;nbsp;les Bretons demeurerêt en ces deux petites villes, amp;nbsp;le Comte de Charolois fen alla loger en vne grande prairie, furleborddelariuieredc Seine, amp;auoitfait

crier que chafeun portail crochets pour attacher fes chcuaux.lffiifoit mener fptouhuiól petits balleaux fur charrois,amp; pluheurs pippes par pieces, en intention de faire vn pont fur la riuierc de Seine,pource que ces Seigneurs ny a-uoyet point de palfagc.Mofeigneur de Dunoys l’accopaignajluy eftat en vne litiere(carpourlagoutcequ’ilauoit,nepouuoitmonteràcheual) amp;portoic l’on fon enfeigne apres luy.Dés ce qu’ils vindrentàla^uiere, ils y feiret mettre des balleaux qu’ils auoyent apportez, ôc gaignerent vnepetiteIlîe,qui elloit comme au milieu:amp; defeendirent des Archiers, qui s’eicarmouchcrêc auecquclques gens de chenal, quideffendoyent le pallage dcl’autrepart: amp;efloientillec leMarefchal loachim amp;nbsp;Sallczard. Le lieu elloit mal auan-tageuxpoureux.-parce qu’ilselloientforthault,amp;enpaïsde vignoble, amp;nbsp;-du collé des Bourguignons,y auoit largement artillerie, conduiéhe par vn

B iiij

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10 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I. L f V R E D E s M E M o I R E s.

Canonnier fort renomméjqui auoit nom maiftre Girauld,amp; auoit efté prins en cefte bataille de Montl’hery,eftant lors du party du Roy. Fin de compte, il fallut que les deflufdióls abandonnalTent le pa(rage;amp; fe retirèrent à Paris. Ce foir fut fait vn pont iufques en cefte nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;incontinent feit le Comte de

Charolois tendre vn pauillon,amp; coucha la nuiôl dedans,amp; cinquante Hommes d’armes de fa. maifon. A l’aube du iour furent mis grand nombre de^p-ç, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;neliers en befongne, a faire pipes de mefrain, qui auoit efté apporté : amp;nbsp;a-

/ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;uant qu’il fut midy,le pont ftitdrefle iufques à l’autre part de la riuierc:amp;in

continent paflalcdiâ: Seigneur de Charolois de l’autre cofté: amp;nbsp;y feit tendre fes pauillonsjdont il auoit grand nombre,amp; feit pafter tout fon oft, amp;nbsp;toute fön artillerie par deflus ledid pont: amp;nbsp;fc logea en vn couftau pendant deuers ladide riuiere faifant trefbeau veoir fon oft,pour ceux qui eftoient encores derriere.

Tout ce iour ne peurent pafter que fes gens, le lendemain àl’aube du iour paftefent les Ducs deBerry amp;nbsp;deBrctaignc,amp; tout leur oft, qui troLiuercnt ce pont trefbeau,amp;: fait en grand’ diligence : fi pafterent vn peu oultre, amp;nbsp;fe 1 ogerent fus le hault pareillement. Incontinent que la nuidt fut venue corn -mençafmes à apperceuoir grand nombre de feux,bien loing de nous, autant que la veuc pouuoit porter. Aucuns cuidoient que ce fuft le Roy.-toutcsfois, ahant qu’il fuft minui(ft,on fut aduerty que c’eftoit le Duc lean de Calabre, du Roy René de* Cecilc,amp;auecluy bien neuf cens Hommes d’ar-Mwejjre. tTiCS dc H Duché amp;nbsp;Comte de Bourgonsne. Bien fut accompaigné de Gens

MffQnQncer nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;« nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• l rx nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• I nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;1 l'Û.

ituxsyluba de cheuauinais dcGensde picd,peu.PoLir ce petit de gens, quauoit Icditt sidk?* Duc,ie ne vey iamais fi belle compagnie , ne qui fcmblaftent mieux hommes exercitez au fait de la guerre. Il pouuoit bien auoir quelques fixvingts Hommes d’armes bardez,tousltaliens,ou autres,nourris en ces guerres d’I-talie:entre lelqucls cftoit lacques Galeot,Ic Comte de * Campobache,le Sci-gncurdÇBaudricourr,pourlcprefent Gouuerneurdc Bourgogne,amp; autres: amp;nbsp;eftoient fes Hommes d’armes bien fort adroids.-ôc pour dire vérité, qua-* fila fleur de noftreoft,au moins tant pourtant. Il auoit quatre cens* Crane-quinicrs,que luy auoit prefté le Comte Palatin,gens fort bien montez,amp; qui l^cmbloient bien Gens de Gucrre;amp; auoit cinq cens* Suyftcs apied, quifti-premiers qu’on veit en ce Royaume:amp; ont efté ceux qui ont donné cratteijuMKrs le bruyt à ceux qui font venus depuis,car ils fe gouuerncrcnt tref vaillammét en tous les lieux où ils fe trouuerent. Ceftccompagnic,quevousdy,fap-procheîcmatin,amp;pa{ra ceiour par deflus noftre pont. Et ainfi fe peut dire

Ârlquot; fâuk, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ptiiflùnce du Royaume dc France f eftoit veuë pafler par deflus

iz« ce pont, fàufceuxquicftoyent auec le Roy ; amp;nbsp;vous afleure que c’eftoit vne tref-grande amp;nbsp;bBlc compagnie, amp;nbsp;grand nombre de gens de bien, amp;nbsp;bien en poindl ; amp;nbsp;deburoit on vouloir que les amys amp;nbsp;bien-vucillans du Royaume l’euflTent veuë , afin qil’ils en euffent eu eftimation telle qu’il appartient, amp;nbsp;lêmblablement les cnnemys; car iamais il n’euft efté heure qu’ils n’en eulTent plus craintle Roy amp;nbsp;le Royaume. Le chef des Bourguignons eftoit monfeigneurdcNeuf-chaftel, Marefchal de Bourgongne, ioinâ: auccques luy Ion frere le fèigneur de Motagu, le Marquis deRotelin, amp;nbsp;grand

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ut t M 1 U 1 r F t ü t C (J M M 1 M t 5. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;2.1

^grand nombre de Cheualiers amp;c Efcuyers:dont les aucuns auoient efté en ^oiiibonnois,comme fay dit au commencement de cepropos. Le tout ensemble feftoit ioinôl pour venir plus afleurement auec mondiôl: feigneur de Calabre,comme fay ditdequclfembloitaufïibien Prince amp;nbsp;grand chef de guerrecommc nul autre que veifle en la compagnie, amp;nbsp;fengendroit grande âniitiéentreluy amp;leComtedeCharolois..

Quand toute celle compagnie fut palTée^que l’on ellimoitccnt mille che-^^,^^1 ^aux, tant bons que mauuais [ceque iecroy,] fe délibérèrent lefdiôls Sei- “ gncLirs départir pour aller deuant Paris: démirent toutes les Auant-gardes ^nfemblc.Pour les Bourguignes, les conduifoic le Comte de Sainôl-Paul. ^^ourlesDucsdeBerry amp;dcBretaigne, *Oudetde Rye, depuis Comte dc^^toad”-Comminaes.dc le Marefclial de Loheac.comme il me lemble:amp;: ainb fache-^incrcnt.Tous les Princes demeurèrent en la bataille. Lediél Comte de^'*quot;^^^ Charolois ôc le Duc de Calabre prenoient grand’peine de commander à ^turtnla tii-Sîire tenir ordre à leurs batailles,amp;cheuaucherentbien armez; amp;nbsp;lèmbloit*quot;f“^^quot;^,^2 qu’ils eulTent bon vouloir de faire leurs offices. Les Ducs de Berry amp;nbsp;‘”'”quot;^‘9^.

^cBretaignecheLiaucherentfurpetiteshacquenées,alcuraile, armez depe- ret les pertetst fitcsbrigandineSjfort legeres,pour le plus.Encores difoient aucuns qu’il n’y ƒ«».’ ^uoit que petits doux dorez par deflus le fatin,afin de moins leur pefer; tou-tesfois ienelefçay pas de vray.?Jnfi chcuauchercnt toutes ces compagnies, Jufques au pont de Charenton, pres Paris,à deux petites lieues: lequel pont toft fut gaignéfur quelque peu de Francs-Archiers qu’il y auoit dedans;

pafla toute l’armee par deflus ce pont de Charenton;amp; falla loger le Com Charolois depuis ce pont de Charenton iufques en fa maifon de Confions,pres de la, au long de la riuiere: amp;nbsp;ferma ledid Comte vn grand pais fiefon charroy amp;nbsp;de fon artillerie, amp;nbsp;mift tout fbn oft dedans ; amp;nbsp;auec luy fè Jogea le Duc de Calabre : amp;nbsp;à Sainôl Mor des foflez, fc logèrent les Ducs de Berry amp;nbsp;de Bretaignc, auec vn nombre de leurs gens; amp;nbsp;tout le demeurant nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.

cnuoierentlogeraSain6tDenis,aufliadeux lieues de Paris ; amp;là fut toutc^/,‘^quot;‘^ celle compagnie onze fepmainesjamp;aduindrent des chofes que ic diray cy apres.

Lelendcmain,au commencement,commenccrcnt les efcarmouchcs iuf ques aux portes de Paris: où eftoient dedans monfeigneur de Nantoillet, Grand Maiftre*de Francefqui bien y feruit comme fay dit ailleurs] amp;nbsp;le Ma-refchal loachim. Le peuple fe veit efpouuanté;amp; d’aucuns autres eftats euf-fent voulu les Bourguignons,^ les autres Seigneurs eftre dedans Paris, iu-geansjâleuraduis, cefte entreprinfe bonne amp;nbsp;profitable pour le Royaume. Autres y en auoit* adherens aufdióls Bourguignons, amp;nbsp;fc meflans de leurs * de ku« affaires,efperans que par leurs moycns,ils pourroiêtparfenir a quelques of- amp;Fequot;meflls’ fices oueftats,qui font plus defirez en cefte cité là qu’en nulle autre du mon-de: car ceux qui les ont,les font valoir ce qu’ils peuucnt^ amp;nbsp;non pas ce qu’ils doyuent;amp; y a offices fans gages,qui fe vendent bien huid cens cfcus:amp;: d’au tres où il y a gages bien petits, qui fe vêdcnt plus que les gages ne fçauroient fapoindie. valoir en quinze ans.* Parquoyaduient que fouuent nul ne fc defapoinde;

amp;fouftient la court de parlement ceft article. * C’eft la raifon: mais aufli il

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XX nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I. LIVRE DESM EMOIRES

touche quah tous.Entre les Confeillicrs,fe trouuent toufiours largement de bons amp;nbsp;notables perfonnages : amp;nbsp;aufliily en a aucuns bien mal conditionnez. Ainfi eft il en tous eftats.

Digreffîon ßir les eflatSyoffceSyamp;* ambitions nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;l'exemple des

tAngloys, CHAP, f^II.

E parle de ces offices amp;nbsp;audoritez par ce qu’ils font à defirer font caulc d’icelles.Ce que Ion aveu,no feulement de noftre temps,mais encores dés le temps du Charles fixiefme,quâd les guerres, quicotinuerentiiif d’Arras,commencèrent. Car cependât les An-gloys femeflerentparmy ce Royaume, fi auant qu’en taidât Jadiéle paix d’Arras(où eftoiét de la part duRoy quatre ou cinq Ducs ou Co-t.-s,cinq ou fix Prélats,amp;dix ou douze Confeilliers de Parlement:delapart du Duc Philippe grans perfonnages àl’aduenant, amp;nbsp;en beaucoup plus grad nobrezpour le Pape deux Cardinaux pour médiateurs, amp;nbsp;de grans perfonnages pour les Angiois)pour lors cftoit Regenten France,pour les Angloys le Duc de Bethfortjfrefe du Roy Henry cinquiefme,marié auec la foeur dudid Duc Philippe de Bourgôgne:amp; dcmouroiticeluy Regent à Paris, ayat vingt mille efeus par moys,pour le moindre eftat qu’il euftiamaisenceft office.Ce traiôlé dura par l’efpace de deuxmoys:amp;: defiroitfort le Duc de Bourgogne facquiter entiers les Angloys auantque foy départir d’aueceux, pour les alliances amp;nbsp;promeffies qu’ils auoientfaides enfemble; amp;nbsp;pour ces raifons fut offert au Roy d’Angleterre,pour luyamp;r les Seigneurs, les Duchez de Normandie de Guyenne,pourueu qu’il en fift hommage au Roy,comeauoiét fait fês predeceffeurs, Si qu’il rendift cequ’iltenoitau Royaume, horslcfdi-ôles Duchez. Ce qu’ils refuferent, pourtant qu’ils ne voulurent faire lediét hômagi,amp; mal leuren print apres.-carabâdonnez que furent de celle maifon deBourgongnejamp;ayansperdtile temps, Sc les intelligences du Royaume, fe prindrentiiperdre amp;nbsp;diminuer. Ils perdirent Paris, Si puis petit à petit le demourant du Royaume. Apres qu’ils furet retournez en Angleterre, nul ne vouloir diminuer fon eftat;mais les biens n’eftoient au Royaume pour fatif-faircatoLis. Ainfi guerre femeut entre eux, pour leurs authoritez, quia duré par longues annécs:amp; fut mis le Roy Henry fixiefme( qui auoit elle couronné Roy de France amp;nbsp;d’Angleterre à Paris)en prifon, au chafleau de Londres, amp;nbsp;déclaré trayftre amp;nbsp;crimineux de leze maiefté: amp;nbsp;là dedâs a vie la pluf-part de fa vie; amp;nbsp;à la fin a efté tue. Le Duc d’Y onh,pere du Roy Edouard dernier mort,f’intitula Roy. Et peu deiours apres fut defeonfit en bataille, amp;nbsp;mort.-amp; tous morts ^^lrent les telles tranchées, luy amp;nbsp;le Comte de ^Varuyc dernier mort,qui tant a eu de credit en Angleterre.Cefluy la emmena le Cote de la Marche[dep^iis appelléRoy Edouard]parla mer à Calais,auec quelque peu de genSjfuyans de la bataille. Lediél Comte de 'W'aruye fouftenoit la maifon d’Yorth.-amp; le Duc de Sombreffet la raaifon de Lanclallre. Tàt ont duré ces guerres,que tous ceux de la maifon de ''Varuye Sc de Sombreffet y ont eu les telles tranchées,ou morts en bataille.

Le Roy

lt;

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DE PHILIPPE DE C O M M I N E S. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i)

LeRoy Edouarcfeic mourir fonfrereleDucde Glarcnceen vnetpippe de ' ■^duoyfie; poLirce qu’il fe vouloir faire Roy comme on diloif. Apres que Çlt;louard fut mort, Ionfrere fécond,Duc de* Cloceftre, feit mourir les deux dsdudidEdouard;amp;déclarafes fillesbaftardes:amp;fefeiftcouronner Roy.

i incontinent apres pafia en Angleterre le Cote de Richemôt, à prefent Roy quot;pr’’' tan-I [^uipar longues années auoit efi;éprifonnicrenBretaigne]êcdefconfit,amp;tua Lançant.-

^nbataillcjCe cruel Roy Richard, quipeuauatauoitfaitmourirfcsnepueux. hainfi de ma fouuenance,fonc raorts^en ces diuifions d’Ang-leterre, biê qua-

0'1 comme n/citit

^fevingts hommes de la lignee Royalle d’Anglcterre.-dont vne partie i’ay co-^neus.'dcs autres m a efté compté par les Angloys demouransauecle Duc de tous bons ^°^*^SÔgne,radis quei’y eftoie. Ainfi cen’eftpas àParis,n’cn France feulemét, 'inonfentrebatpour les biens amp;nbsp;honneurs decemonde;amp; doiuent biêcrain-

Princes, ou ceux qui reernentaux grandes Seigneuries,de laifîerengê-'^fcrvne partialité en leur maifon.Cardclacefcucourtparla Prouince :rnais ^onaduis eft que cela ne fe fait pas que par difpofition diuine : car quand les hinccs ou Royaumes,ont efté en grand’profperité ou richefics,amp; ils ontmef ^ongnoifiancc dont procédé telle grace,Dieu leur drefle vn ennemy ou enne • ^yCjdont nul ne fe doribteroitreomme vous pourrez voir parles Roys nom-en la Bible, 6c par cequepuis peu detemps,en ce pais d’Angleterre, amp;nbsp;en Çdle maifon de Bourgongne, amp;nbsp;autres lieux, auezveu , amp;nbsp;voyez tousles jours.

Comment le nbsp;nbsp;nbsp;Louis entra dedans Paris,pendant que les Seigneurs de

France y dreffoyent leurs pratiques, CHAT. FUI.

’Ay efté long en ce propos;amp; efitéps que ie retourne art mie. Dés ce que ces Seigneurs furent arriuez deuant Paris,Ils com-B menccrent tous à pratiquer leans,amp; promettre offices amp;nbsp;biês, bWy amp;nbsp;cequi pouuoit feruirà leur matiere.Au bout de trois iours on feit grand’ affemblce en l’hoftel de la ville de Paris,amp; apres jj^randes amp;nbsp;longues paroles,amp; ouyes les requefles amp;nbsp;fomma-^'onsquelcs Seigneurs leur fiifoyent en public,amp; pour le grand bien du Roy-^ume[comme ils difoyent]fut conclu enuoyer deuers eux, amp;nbsp;entendre à paci-^cation.Ils vindrent en grand nombre de gens de bien vers les Princes deffuf ^id:s,au lieu de fainôl Mor;amp;: porta la parole maiflre GuillaumeChartier,lors Euefque de Paris,renommé trefgrand homme:amp; de la part des feigncurs,par-ioitleComtede Dunoys,lc Duc de B erry freredu Roy prefidoit affisen chai tout les autres feigneurs debout. De l’vn des cofez eftoient les Ducs ^eBretaigne amp;nbsp;de Calabre,amp; de l’autre le Comte de Charolois: qui eftoit ar-Kie de toutes pieces, fiiuflatefte, amp;nbsp;le garde-bras ,amp; vngmanteline fort riche I lutfacuirace:car il venoit de Conflans,amp; le bois-de-Vincennes tenoitpour le l Roy:amp;: y auoit beaucoup de gens, parquoy lui efloitbefoingd’eftre venu ac-I copaigne.Les requefles amp;nbsp;fins des Seigneurs eftoient, d’entrer dedans Paris, I pourauoir conuerfàtion amp;nbsp;amitié auec eux, fur le faid de la reformation du

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x4 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I. L I V Pk E D E S M E M O 1 R E S

Royaumcdequcl ils diioyent cftre mal conduiót, en donnant pluficurs grandes charges au Roy. Les refponfés eftoy ent fort doulccs, toutesfoisilsprin-dfêc quelque delay auant que refpondre-.amp; neantmoins leRoynefut depuis content dudiól; Euefque, nc de ceux qui eftoyent auec luy. Ainfi fen retournèrent,demourant en grand’pratiquc : car chafciin paria à eux en particulier,amp; croy bien qu’en leeret fut accordé par aucuns,que les Seigneurs en leur limpleeftaty entreroyent; amp;nbsp;leurs gens y pourroyent pafler oultre[ßbon leur fembloit]en petit nombre â lafoys. Celle conuerfation n’eull point elle feulement ville gaignée,mais toute l’entreprinlezcar aifément le peuple fe full tourné de leur part [pour plulieurs raifons] amp;nbsp;par confequent toutes celles du Royaume,a l’exemple de celle là.D icu donna läge confcil au Roy, amp;nbsp;ill’exe-cutabien,chant iaaduerty de toutes ces chofes.

Auantque ceux qui efloyent venus vers ces Seigneurs, euflent fait leur rapport, le Roy arriua en la ville de Paris, en l’ehat qu’on doibt venir pour réconforter vn pcuple.-car il y vint en trefgrade compagnie: amp;nbsp;mit bien deux mille Hommes-d’armes en la villc:tous les Nobles de Normandie: grand’ force de Francs Archiers:lcs gens de là maifon, penfionnaires, amp;nbsp;autres gens de bien qui le trôuuent auec tel Roy en femblables affaires. Et ainfi fut celle pratique rompue, amp;nbsp;tout ce peuple bien mué des fiens : nyne fe full trouue nomme de ceux qui parauant auoyent ehé deuers nous,qui plus euhofé parler de la marchandilè : amp;nbsp;aux aucuns en print mal.Toutesfois le Roy n’vladc nulle cruauté en cehe matière : mais aucuns perdirent leurs offices, les autres enuoya demourer ailleurs : ce que ie luy repute à louange, n’ayant vfc dautre vengeance.Car li cela,qui auoit ellécommcncé,full venu à effcél,le meilleur qui luy pouuoit venir, c’ehoit fuir hors du Royaume. Aulfi plufieurs fois m’a il dit que fil n’eull peu entrer dedans Paris,amp; qu’il cull ttouué la ville muée il fe fuh retiré vers les Suiires,ou deuers le Duc de Milan Francifque, qu’il re^utoit fon grand amy : amp;nbsp;bien luy m9nhra lediél Francifque, par lefc-cours qu’il luy enuoya: quiehoit de cinq cens Hommes-darmes, amp;nbsp;trois mille Hommes de-pied,foubz la conduire de fon fils aifné, appelé Galeas, depuis Duc:amp;vindrent iufqucsen Forells ;amp; feirent guerre à monfeigneur de Bourbon. Eta caufe de lamortdudiél Duc Francifque, il fen retournèrent: amp;nbsp;aulfi par le confcil qu’il luy donna,en traiélant la paix,appellée le trai-éle'dc Conflans : où il luy manda qu’il ncrefufall nulle chofe qu’on Juy de-mandafl,pourfeparer celle compagnie: mais que feulement fesgens luy de-raouralTent.

A monaduis, nousn’auions point elle plus de trois iours deuant Paris, quand le Roy y entra. Tantoh nous commença la guerre tresforte, amp;nbsp;par efpecial fur nos foug-ageurs : car Ion choit contrainâ: d’aller loing en fourrage, amp;nbsp;faloit beaucoup de gens à les garder.Et fault bien dire qu’en cehe illcde France ch bien alfife cehe ville de Paris, dcpouuoir fournir deux Ci puilTans ails:cariamais nous n’culmes faulte de viures : amp;nbsp;dedans Paris à grand’peiné fapperceuoyent ils qu’il y euh iamais bien enchcry que le pain, feulement d’vn denier fur le pain: car nous n’occupions point les riuiercs dau-dclfus, qui lont trois,cellalTauoir Marne,Yonne,amp; Seine, amp;nbsp;plufieurs petites

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DE PHILIPPES DE COMMIMES. ly fîtes riuieres qui entrent en celle la. A tout prendre,c’eft la Cité que iamais ie ’’evey enuironnéede meilleur pais amp;nbsp;plantureux,amp;, eft choie quafi incrcdi-We que des biens qui y arriuent.I’ay elle depuis ce temps aucc le Roy Louis, Demyan fans en bouger,logé es Tournelles,mangeant amp;nbsp;couchant auccluy j ordinairement;amp; depuis fon rrefpas,vingt_nToys {maigre mo;y)ay eile tenu prifonnieren fon Palais, oùievoyoyede mes ieneilres arriuerce qui mon-toit contre mont la riuiere de Seine du cofté de la Normandie. Du deffus en Vient aufli fans corn paraifon plus que n’euifeiamais creu,ii ieneleuife veu.

Ainfi donc tous les iours i’ailloit de Paris force gens,amp; y eiloient les efcar ■noiichesgroifes.Noilre guet eiloitdc cinquante Lances, quife tenoiét vers ^Grange aux merciers :amp;auoient des cheuaucheurs le plus pres de Paris lt;]u’ilspouuoient,quïtreilouuentcil:oicnr ramenez iniques àeux;amp;biê fou- • üentfiloitqu’ils reuinifentfurqueuëiufqucsanoitre chariot, eniererirant le pas, amp;nbsp;aucunes-fois le trot;5lt; puis on leur renuoioit des gens, quiauiïi ré-tioioient les autres iniques bië pres les portes de Paris.Et cecy eiloit a toutes heures carenla ville y auoit plus de deux mille cinq cens Hommes d’armes debonne ei1:ofFe,amp; bien logez,grand’forcc de Nobles de Normandie, amp;nbsp;de Francs A.rchiers ; amp;nbsp;puis voyoient les Dames tous les iours, qui leur don-noientenuie de fe monftrer.Denoflre coile y auoit vn rref-grand nombrede gens,mais non point tant de gens de cheual.-car il n’y auoit que les Bourgui-gnons(qui eiloient enuiron quelques deux mille Lances,que bons que mau-üais)qui n’eiloient point fi bien accouftrez que ceux de dedans Paris, pour la longue paix qu’ils auoient eue,comme i’ay dit autresfois. Encore de ce nom-brey en auoit à Laigny bien deux cens Hommes d’armes, amp;nbsp;y eiloit le Duc deCalabre.De gens à pied nous en allions grand nombre amp;nbsp;de bons. L’armée des Bretons eiloit à fitinél Denys,qui iaiioient la guerre là où ils poii-uoient:amp; les autres feigneurs eipars pour les viures. Sur la fin y vindrent le DuedeNemours,le Comte d’Armignac,amp; Icfeigncur d’Alberr, leurs gens demourans loing , pource qu’ils n’auoient point de payement, amp;nbsp;qu’ils euf-lentaifamé noilre oil,f’ils euifent prins fins paycr:amp; fçay bien que le Comte deCharoloisleurdonnadel’argentjiufquesàcinqpu iixmille francs: amp;nbsp;fut aduiféque leurs gens ne viendroient point plus auant.Ils ciloiët bien fixmil-lehommes de chenal,qui faifoient merueilleufement de maulx.

Comment Tartillerie du Comte de Charolois nbsp;nbsp;celle du 7{oy tirèrent l'vne

contre l'autre pres Charenton^ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;comment le Comte de (jjarolois

feitfaire de rechef vnpontfur baf eaux en la riuiere de Seine. QH AT. IX.

N retournant au faid de Paris, il ne iour fans perte amp;nbsp;gaigne fe paiLril tai tre.-mais des chofesgroifes n’y auoit il rien. Car le Roy ne vouloir point fouffrir que fes gens iafllüfent en grandes bà-des,ny ne vouloir rien mettre en hazard en la bataille;amp; dc-firoit paix,amp; figement départir celle aifemblce. Toutes-

£iut doubter que nul n d’vn coilé que d’au-

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fois vniourbien matin, vindrent loger droit vis à vis dcrhoftcl de Con-flans, au long delà riuiere, amp;nbsp;fur le fin bord, quatre mille Francs Archiers. Les Nobles de Normandie, amp;nbsp;quelque peu de Gens d’armes d’ordonnan-, ce , demourercnt à vn quart de lieue de là^ en vn village, amp;nbsp;depuis leurs . Gens de pied iniques là, n’y auoit qu’vne belle plaine. La riuiere de Seine cftoic entre nous amp;nbsp;eux,amp;: commencèrent ceux du Roy vne trenchée a l’endroit de Charenton, où ils feirent vn Bouleucrt de boys,amp; de terre,iuf-ques au bout de nollre ofl.-amp; paflbit lediôl fofle par deuant Conflas,lariuie-rcentre deux,commediót eft;êcaflciftercnc grand nombre d’artillerie, qui d’entrée challa toutes les gens du Duc de Calabre , hors du village de Charenton ; amp;nbsp;falloir qu’à grand’ hafte ils veinflent loger auec nous, èc y eut des • gens amp;nbsp;des chenaux tuez.Ec logea le Duc lehan en vn petit corps d’hoftel, tout droit au deuant de celuy de monfeigneur de CharoIoiSjàl’oppofite de la riuiere.

Cefte artillerie commença premièrement à tirer par noftre oft, ef-pouuenta fort la compagnie : car elle tua des gens d’entrée, amp;tiradeux coups quipaflèrent par la chambre, ouïe feigneur de Charolois eftoit logé,comme il difnoit, amp;nbsp;vint tuer vn Trompette, en apportant vn plat de viande, fur le degré.

Apres ledifnerlediól Comte de Charolois defeendit en l’eliage bas, amp;nbsp;délibéra n’en bouger :amp; le matin vindrent les feigneurs tenir confeil, amp;nbsp;ne fc tenoit point le confeil ailleurs que chez le Comte de Charolois, amp;c touf-iours apres le confeil difnoient cnfemble; amp;nbsp;fe mettoit le Duc deBerry amp;nbsp;deBretaigneau banc, le Comte de Charolois amp;lc Duc de Calabre au de-uant,amp; portoitlediél Comte honneur à tous,* comme à l’aftictte.-aulfiletle-àtoushom- uoit bien faire a aucuns,amp; a tous, puis que c eftoit chez luy. Ilfutaduilequc ^an’t ài-tC- toute l’artillerie de l’oft feroit aflortie encontre celle du Roy.Lediétfeigneur de Charolois en auoitlargementjôê le Duc deCalabre,amp;aufli auoitleDuc de Bretaigne.L’on feit de grans trous es murailles,qui font au log de la riuiere derriere lediól hoftel de Conflans:amp; y aftortit on toutes les meilleurs pie-/. ces,exceptées les Bombardes amp;nbsp;autres groftes pieces,quine tirerent point,amp; ledemourant,ou elles pouuoientferuir.Ainfieneutdu coftédes feigneurs beaucoup plus que du cofté du Roy.

Latrenchée,quelesgens du Roy auoient faiéle, eftoit fort longue, ti’ rant vers Paris, amp;nbsp;toufiours la tiroient auant, amp;nbsp;iettoient la terredeno-ftre cofte, pour foy taudir de l’artillerie; car tous eftoient dedans le fof-nul n’euft ofé monftrer la tefte. Ils eftoient en lieu plain comme la main, amp;nbsp;en belle prairie. le n’ay iamais tant veu tirer pour peu de iours: car de noftre cofté on fattendoit de les chaffer de là à force d’artillerie. Auxautres enven*tde Paris tous les iours , qui faifoient bonne diligence de leur cofté, amp;nbsp;n’efpargnoient point la pouldre.Grand’quantité de ceux de noftre oft feiretit des fofléz en terre à l’endroit de leurs logis. Encores d’auantage y en auoit beaucoup, pource que c’eftlieu où l’on a tiré de « lapierre. Ainfifetaudiflbitchafeun,amp;fe paffa trois ou quatre iours. La ' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;crainte

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DE PHILIPPES DE COMMIMES. 17 crainte fut plus grande que la perte des deux coftez,car il ne fe perdit nul ho-rnedcnom.

Q^andces feigneurs veirentqueceuxdu Roy nefefmouuoient point,il hurfeinbla honte peril,amp; que ce leroit donner cœur à ceux de Paris. Car parquelque lourde trefues,il vint tant de peuple, qu’il lèmbloit que rien ne Hiftdemouréenlaville. Il fut conclu en vnconleil, que l’on feroit vn fore grand pont fus grans bafleaux, amp;nbsp;couperoit on l’eftroit du bafteau, ne faf lèrroit le boys que fur le large, amp;nbsp;au dernier couplet y auroit de grandes ancres pour letter en terre. Auec cela furent amenez pluheurs grans bafleaux de Seine,qui euffent peu paffer la riuicre,amp;: affaillirles gens du Roy.

A maiflre Girauld,Canonnier, fut donnée la charge de cefl ouuragc: luy fembloit que pour les Bourguignons eftoit grand auantage de ce que les autres auoient lette les terres de noflre code : poureeque quand ils fe- * roientoLiltre la riuiere, ceux du Roy trouueroient leur trenchéc beaucoup siideffoubzdcsafraillans, amp;nbsp;qu’ils n’oferoient faillir dudiôlfoffé,pour crain-fede l’artillerie . Ces raifons donnèrent grand cœur aux noflres de paffer: amp;nbsp;fut lepontachcucamp;dreffé, fauf le dernier couplet, qui tournoit de co-He, preflcà dreffer, amp;nbsp;tous les bafleaux arriuez. Incontinent qu’il futdreffé, vint vn Officier d’armes du Roy, dire que c’efloit contre la trefue : car poureeque ce iour, amp;nbsp;leiour precedent, y auoit eu trefue,on venoit pour vcoir que c’efloit. A l’auenture il trouua monfieur de * Bonil let -, ôc plufieurs au-fees àquiil parla; ce foirpaffoit latrefue.il pouuoit bien paffer trois Hommes d’armes, la lance fur la cuiffe , de front, amp;nbsp;y pouuoit bien auoit fix grands bafleaux, que chafeun cufl bien paffé mille hommes à la fovs, amp;nbsp;plufîcLirs petits* à couler l’attillcrie, pour les feruir à cepaffage. Si furent* amp;futac-hiéles les bandes, amp;nbsp;les roolesde ceux qui deuoient paflcr ; amp;nbsp;cnefloient^”^?^''’^quot; Chefs le Comte de fainôl Paul, amp;:lc Seigneur de Hault-bourdin. Apres que min U ici fut paffé, commencèrent à farmer ceux qui en efloient : amp;nbsp;auant iour furent armez, amp;nbsp;ouirent les aucuns meffe en attendant teiour:amp; faifoienteeque bons Chrefliens font en tel cas. Ccflenuiôlie me trouuay en vnegrandetente, qui efloitau milieu de l’ofl, où l’on faifoitle guet; amp;nbsp;efloye du guctccflenuiôl,(car nul n’en efloit exeufé) amp;nbsp;efloit chef de ce guet monicigneur de Chaflel-Guyon , qui mourut à * Granfon depuis:* Mora«. amp;fattendoit l’heure de veoir cefl efbat. Soudainement nous ouifmes ceux^**^^' qui efloient en ces trenchécs,qui commencèrent à crier ahaultevoix,A-dieu voifîns. Adieu ; amp;nbsp;inconrinenf mirent le feu en leurs logis , amp;nbsp;retire-rent leur artillerie. Le iour commença à venir, les ordonnez à cefle en-treprinfeefloient ja fur la riuiere, au moins partie, amp;: veirent les autres ja bicnloing, lefquels feretiroient à Paris. Ainfi doneques chafeun fen alla dcfirmcr,tref-ioyeux de ce departement.Et à la veritq|:e que le Roy y auoit mis de gens , n’efloit que pour battre noflre ofl d’artillerie, amp;nbsp;non pa.s en intention de combatte ; car il ne vouloir rien mety^e en hazard , comme iay dit ailleurs : nonobflant que fa puiflance fufl tref grande pour tous tant qu il y auoit de Princes cnfemble. Mais fon intention ( comme bien lemonflra) efloitde traiéler paix,amp; départir la compagnie, fans mettre

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I. L I V R E D E S M E M O I R E S. foneftat(qLii ell ü grand amp;nbsp;fl bon que d’ellre Roy de ce grand amp;nbsp;obeiflant Royaume de Francc)cn peril de chofe li incertaine qu’vne bataille.

Chafcun iourfe menoit de petits marchez,pour louftrairegens l’vn àlati-tre:amp;y euft pluheurs iours de trefues amp;nbsp;allemblées d’vne part amp;nbsp;d’autre, pour traiôler paix;amp; fe failoit ladicteaflemblée a la Grange aux Merciers,allez pres de nollreoll.Delapart du Roy y venoitle Comte du Maine,amp; pki-ficLirs autres. De la part des feigneurs, leComtedefainél Paul, écplufieiirs autres aufli. Aflez de tous les feigneurs furent alTcmblez par beaucoup de fois fans rien faire, amp;nbsp;cependant duroit latrefue; amp;nbsp;fentre-voyoient beaucoup de gens des deux armées,vn grand folTé entre deux, qui eft commemi-chémin,les vns d’vn collé,les autres de l’autreme par la trefue nul nepouuoit palTer.Iln’eftoitiourquacaufedeces veuèsne fevinll rendre dix ou douze hommes du collé des leigneurs,amp;aucunes-fois plus,yn autre tour fenalloiét autant des nollres. Et pour celle caufefappella ce lieu depuis le Marché, poureeque telles marchandifes l’y fufoient. Et pour dire la vérité, telles af femblées amp;nbsp;communications font bien dangereufes en telles façons : ôc par efpecial pour ccluy qui cil en grande apparence de cheoir. Naturellement la plus part des gens ont l’œil ou à faccroiftre, où à fe fauuer, ce qui aifé-ment lesftit tirer des plus forts. Autres y en ali bons amp;nbsp;fi fermes qu’ils n’ont nuis de ces regards;mais peu l’en trouuc de tels.Ecpar efpeciàlell-ce danger quand ils ont Prince qui cherche gaignergens :quiellvne grand’grace que Dieu fait au Prince qui le fçait fiire:amp; ell figne qu’il n’ell point entache de ce fort vice amp;nbsp;péché d’orgueil,qui procure haine enuers toutes perfonnes. Par-quoy, comme i’aydit, quand on vient à tels marchez de traider paix, il fe doibt faire par les gens amp;nbsp;feables feruiteursqucles Princes ont, amp;nbsp;gens d’aa-gemoyen:afin que leur foiblelTene lesconduifeàfaire quelque marché def-nonnefte,n’aclpouuenter leur maiflre à leur retour plus que de bcfoing:amp;: plustolly doibucntellreempefchez ceux qui ont reccu quelque grace ou oien-faid de luy,que nuis autres:mais fur tous,fages gens,car d’vn fol ne feit iamais homme fonprofit-.amp;fedoiuent plus toll conduire ces traiélez loing quepres.Et quand les AmbalTadeurs retournent,les fault ouir feuls, ou a peu de compagnic.-afin que fi leurs paroles font pour efpouuenter les gens, qu ils leur dient les langages dont ils deuront vfer àceux qui les en requerrôt; car chafcun déliré de fçauoir des nouuelles d’iceux quand ils viennent de tels traideztS: plufieurs dient;Tel ne mecelera rien.Si feront, fils font tels comme ie dy,amp; qu’ils congnoilTent qu’ils ayent maillres fages.

'vertus du 7{oy Louis on7;iefme, C H AT. X.

Emeiûis mis en ce propos, par ce que i’ay veu beaucoupde tromperies en ce monde, amp;nbsp;de beaucoup de feruiteurs enuers leurs maillres, amp;nbsp;plus fouuent tromper les Princes amp;nbsp;lei-gneurs orgueilleux, qui peu veulent ouir parler les gens, que les humbles qui volontiers elcoLitcnt. Etentretous ceux que

i’ay iamais congnus,plus lage pour foy tirer d’vn mauuaispas, en ce temps d’aducr-

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D E F H 1 L 1 r r b U L C M M 1 iN h 5. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;X9

tiadLierfité,c’eftoit leRoy Louis onzième noftre maiftrc’lepliis hublecn paroles amp;nbsp;en habits,amp;,qui plus trauailloit à gaigner vn home quile pouuoit fer? uir,ou quiluy pouuoitnuire.Et ne s’ênuyoit point d’eflrerefufévnefois d’vn ^ómequ’il pretendoitgaigner:mais y continuoit, en Iuy promettant large-J^iêtjamp;donantpareffeólargêt amp;nbsp;eftats qu’il cögnohfoit luy plaire. Ecquâtà ceux qu’il auoit chaflez amp;nbsp;déboutez entéps de paix amp;nbsp;de profperité, il les ra-clietoitbié cher,quad il en auoit befoin, Pen feruoit,amp; ne les auoit en nulle haine pou ries chofes paflees.il eftoit naturellement amy degês de moyen ellat,amp; ennemy de tous grans quife pouuoiêt pafler de luy. Nul homme ne • pfeftaiamais tat l’oreille aux gés,n’y ne Penquift de tant de chofes,corne il fii loit,nequi vouluftiamaiscôgnoiftre tant degês.-caraufli veritablemêtilco-gnoifEoit toutes gens d’authoritc,amp; de valeur,quiefl:oient en Angleterre,en • ^lpaigne,en Portugal,en Italie,amp; es fcigneurics du Ducde Bourgogne,amp;en ^fctaisTiie.ainfî corne il faifoit fes fubieds.Et fes termes amp;nbsp;faeôs qu’il tenoir, ^onti’ay parlé cy defltiSjluy ont faune la couronne, veu les ennemys qu’il Pe-ftoitluy mefine acquis à fon aduenementau Royaume. Mais fur tout luy a Peruy fl grand’ larg^elTe.-car ainfi corne fagemêt il conduifoit l’aduerhtéja l’op-poftedés ce qu’il cuidoit eftrea feur,ou feulement en vne trefuc,fe mettoita Wcontéter lès gens,par petits moyes qui peu luy feruoient,amp; à grand’pei-^spoLiLioit endurer paix. 11 eftoit leger à parler des gens,amp;: auflî toft en leur ptelence qu’en leur abfence, fauf de ceux qu’il craignoit, qui eftoitbeau-cotip:car il eftoit alTez craintif de fa propre nature. Et quand pour parler il a -Uoit receu quelque dommage,ou en auoit Iufpiçion,amp; le vouloit reparer, il vfoit de cefte parole au perfonnage propre.-Ie fçay bien que ma langue m’a porté grand dommage,aufli ma elle fait quelques fois du plaiflr beaucoup: toutes-fois c’eftraifon que ie repare l’amende.Etn’vfoit point de fes priuées paroles,qu’il ne feift quelque bien au perfonnageàquiil parloit, amp;nbsp;n’en fii-^oit nuis petits. Encore fait Dieu grand’grace à vn Prince,quand il f^ait bien mal, amp;nbsp;par efpecial quand le bien precede,comme au Roy noftre maiftre, èeffiifdicl. Mais à mon aduisque letrauailqu’ileuten faieuneflè, quand il fitfugitifde fon pere,amp; fuit foubs le Duc Philippe de Bourgongne, où il ftc fix ans, luy valut beaucoup, car il fut contraind de complaire à ceux èont ilauoit befoing:amp; cebien(quin’eft pas petit)luy aprinr aduerfité.Conte il fetroLiua grand amp;nbsp;Roy couronné, d’entrée ne^ienfa qu’aux vengean-ces:mais toft luy en vint le dommage, amp;nbsp;quand amp;nbsp;quand la repentance, amp;nbsp;reparaceftefolie amp;nbsp;ceft erreur,en rcgaignantceuxaufquels il auoit fait tort, comme vous entendrez cy apres. Et fil n’euft eu la nourriture autre que les leigneursque i’ay veu nourrir en ce Royaume, ienccroy pas que iamais fe fill reflburs; car ils ne les nourrilTent feulement qu’afih e les fols en babil-lemens amp;nbsp;en parolles.-de nulles lettres ils n’ont congnoilEince, vn feul fi-gehomme on n’entremet à l’entour. Ils ont des Gouuerneursàquionparle de leurs affaires, amp;nbsp;deux rien, amp;ceux làdifpofentde iFurs-dicls affaires : telsfeigneursy a qui n’ont que treize liures de rente, quife glorifient de di-te.-Parlez a mes genSjCuydans par cefte parole contrefaire les tref-grans fei-gneurs.Aufliay-iebien veu fouuent leurs feruiteurs faire leur profit d’eux,

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30 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I. L I V R E D E S M E M O I R E S

en leur donnant bien a congnoUhe qu’ils ertoienc belles. Et fi d’atienture quelqu’vnl’en reuienc,amp; veult congnoilb'ecequeluyappartient,c’ellfitard qu’il ne fert plus de gueres/cacil faut noter que tous les hommes, quiiamais ont cfté grans ic Eiiil de grandes chofes,onc commencé fort ieuncs. Et cela trill à la nourriture,ou vient de la p-race de Dieu.

O nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;G

Cornent les ‘BourgHignons^eflanspres TParis^attendans la bataille^ cuyderent de chardons qu'ils 'veirent^quej-ulfent lances debout. QH AT. Xî.

R ay-ie long teps tenu ce propos,mais il efE tel queie n’é forts pas bien quand ie veux. Or pour reuenir a la guerre,vous a-Liez ouy comme ceux que le Roy auoit logez en celle tren-chée,au long de celle riuicre deSeine,fe dellogerent à l’heure que l’on les deuoit alTaillir. Latrefueneduroit iamais gueres qu’vn iour ou deux. Aux autres iours fe faifoit la guerre tant afpre qu’il clloit polî]blc:amp;: cotinuerét les efcarmouches depuis le matin iuf ques au foir.GrolTes bades ne failloiêt point de Paris, toutesfois fouuêt nous remettoiêc nollreguet,amp;puis on le rêforcoit.Ie ne vey iamais vne feule iour-née qu’il n’y cull efcarmouche,quelque petite que ce feull: amp;nbsp;croy biê que le Roy cull voulu qu’elles y eulTcnt efté plus grolTesmiais il elloit en grad foup çon,amp; de beaucoup,qui elloit fanscaufe.il m’aautres-fois dit qu’il trouuav-ne nuiôl la Ballille faint Antoine ouuertefpar la porte des châps)de nuiél. Ce qui luy donna grand’ fufpicion de melTire Charles de Melun,pource que fon pere tenoit la place. le ne dy autre chofedudiólmelfire Charles, que ce que i’en ay dit,mais meilleur feruiteur n’eut point le Roy pour celle année là.

Vn iour fut entrepris à Paris de nous venir combatte ( amp;nbsp;croy que le Roy ii’eii délibéra rien,mais les capitaines ) amp;nbsp;de nous alTaillir de trois collez. Les vns deuers Paris,qui deuoit ellre la grand’ côpagnie. Vne autre bande deuers le Pont Charenton, amp;nbsp;ceux la n’eulTent gueres feeu nuire , amp;nbsp;deux cens Hommes d’armes quideuoient venir par deuers le Boys de Vincennes. De celle conclufipn fut aduerty Toll enuiron la minuiôl, parvn Page, qui vint crier de l’autre part de la riuierc,car aucuns bos amys des feigneurs les aduer-till'oientde Tentreprinfe(qui elloit telle qu’auez ouy) amp;nbsp;en nomma aucuns, amp;nbsp;puis incontinent fen alla. Sur la fine pointe du iour vint melTire Poncet de Riuiere,deuant ledit J’ont de Charenton :amp; monfeigneur du Eau d’au-tre-part, deuers le Boys de Vincennes,iufques ànoflre artillerie, ôctuerent vn Canonnier. L’alarme fut fort grand’, cLiydant que ce full ce dont le Page auoit aduerty la nuiôl.Tolllutarmémonfeigneur de Charoloys,mais encores plus toll lehan Duc de Calabre ; car à tous alarmes c’eftoir le premier home armé,amp; detoutes^ieces,amp; fon cheualtoufioursbardé. Ilportoitvn ha-billemét,que ces codiKleurs portent en Italie, amp;nbsp;fembloit biê Prince amp;nbsp;chef de guerre.-amp; tiroir toufiours droit aux barrières de nollre oil,pour garderies gês de faillir: ôc y auoifd’obeifiance autant que monfeigneur de Charoloys, amp;nbsp;luy obeiflbit tout Toll de meilleur cœur;amp; à la vérité,il elloit digne d’ellre bon oré.En vn moment tout Toll fut en armes,amp; à pied,au log des charrettes par le dedans,fiiuf quelques deux cens chcuaux,qLiielloyent dehors au guet:

amp;

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;51

amp; (exccpréceioLir)ie ne côgnu iamais que l’on en ft efperace de côbatrc;mais acefte fois chalciin s’y attendoit.Et fur ce*poinâ: arriueiet les Ducs de Berry phire -vial. amp;de Bretaignc, lefquelsiamais ne vey armez queceiour. Le Duc de Berry cftoicarmé de toutes pieces,ils auoyent peu degens ainfi. Ils pàfterenr parle ciump,amp;; fe mirent vn peu au dehors pour trouuer inefl'eigneurs de Charo-loysdeCalahre:amp;làparloycntenfemble.Les cheuaucheurs, qui eftoyent enforcez allèrent plus pres de Paris.-amp; veirêt plusieurs cheuaucheurs, quive-noicntpoLirfçauoircebruitenroft. Noftreartillcrie auoit fort tiré, quand ceux de monfeigneur du Lau s’en eftoient approchez fi pres. Le Roy auoit bonc artillerie fur la muraille de Paris, laquelle tira plufieurs coups iufques à noftre oft, qui eft grand’chofe(car il y a deux licuësjmais iecroy que l'on a-cioitleuéle nez bien haut aux baftons. Ce bruit d’artillerie faifoiteroirede 9 tous les deux coftez quelque grad’ entreprinfe.Le temps eftoit fort ob leur amp;nbsp;tiouble amp;nbsp;noz cheuaucheurs qui s’eftoient approchez de Paris voyoient pluùeurs cheuaucheurs, amp;nbsp;bien loingoultre voyoient grande quantité de bnces dcbout,ce leur fcmbloit,amp; iugeoient que c’eftoient toutes les batailles du Roy,qui eftoiét aux champs, amp;nbsp;tout le peuple de Paris: amp;nbsp;cefteimagi-nauonleurdonna l’ôbfcuritédu temps. Ils fe reculèrent droit versceslei-^neLirs,quicftoienthors de noftre carap,amp; leur lignifièrent ces nouucllcs,amp; lesafTeurerent de la bataille.Les cheuaucheurs faillis de Paris,s’approchoienc toufioiirs pource qu’ils voyoient reculer les noftres, qui encores les fai-loit mieux croire.Lors vint le Duc de Calabre là où eftoit l’eftendart du Cô-tedeCharoloys, la plufpartdes gens de bien de fa maifon, pour laccom-?‘'gt;igner,amp; la baniere prefte à defployer,amp; le guidon de fes armes, qui eftoit vfancedeceftemaifomamp;iànousdiftàtouslediclDuc lehan ; Or ça nous lommesàcequenoLisauonstoufiours defiré , voyla le Roy amp;nbsp;tout ce peuple faiily de la ville,ôc marchent,comme dient noz cheLiaucheurs;amp; pource, lt;]uechafcun ait bon cœur. Tou tain fi qu’ils faillentde Paris nous aidnerons 'fi’aulnedela ville, qui eft à la grand’ aulne. Ainfi alla réconfortant la com-paignie.Nos cheuaucheurs auoient vn petit reprins de cœur, voyans que les autres cheuaucheurs eftoyent foibles.Si fe rapprochèrent de la ville,ôc trou-ucrent encores ces batailles où ils les auoiêt laiftees,qui leur donna nouueau ’enfement.Ilsfenapprocherét le plus qu’ils peurent:mais eftât leiourvn peu uuIféamp;L efclarcy,ils trouuerent que c’eftoyent grans chardons.Ils furent influes auprès des portes,amp; ne trouuerent rien dehors •. amp;nbsp;incontinent le mandèrent à ces feigneurs,qui s’en allèrent ouyr Mefte,amp;: di{ner:amp;: en furent hô-teux ceux qui auoient dit ces nouLielles,mais le temps les exeufa, auec ce que le Page auoit dit la nuiél de deuant.

Comme le'B^y le Comte de Charoloys parlèrent enßn^le^pour cuider moyennerlapaix. CH AT. .^11

A pratique de paixeotinuoit toufiours plus eftroite entre le Roy amp;le Comte de Charoloys qu’aillieurszpcÂirce que la force gi-foit en eux . Les demandes des Seigneurs eftoyent fort gran-des , fpecialement pource que le Duc de Berry demandoit Normandie pour fon partage , ce que le Roy ne vouloit aucunement C iiij

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3X nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1.

accorder.Le Comte de Charoloisvouloitauoir les villes affifes fur la riuic-re de Somme,comme Amyens,Abbeuille,Sainól-Quentin, Peronne, amp;nbsp;autres: lefquelles leRoyauoit rachetées de quatre cens mille efeus du Duc Philippe, n’y auoit pas trois moys;amp;les auoit eues lediâ: Duc, par la paix d’Arras,du Roy Charles ieptiefme. Lediôl Comte de Charolois difoit, que defbn viuantle Roy ne les debuoit racheter, luy ramenteuant combien il eftoit tenu à fa maifon ; car durant qu’il eftoit fugitif de fon pere le Roy CharleSjily futreceuamp;nourry hxans,ayans deniers deluypour fon viure; amp;nbsp;puis fut amené par eux iniques à Rheims amp;nbsp;à Paris à ion Sacre. Ainfi auoit prins le Comte de Charolois en trefgrand defpitcerachapt des terres def îufdiéles. Tant fut demenéeceil:epraticquedepaix,queleRoy vintvnma-• tin par eauë,iufques vis à vis de nollrc oft, ayant largement de chenaux fur leborddclariuiere; mais en fon bafteau n’cftoientque quatre ou cinqper-fonnes,hors mis ceux qui letiroient; amp;nbsp;y auoit monièigneur du Lau, mon-feigneur de Montauban, Admiral de France pour lors, monfeigneur de Nantouillet,amp; autres.Les Comtes de Charolois amp;nbsp;de fainÔt Paul eftoient fur le bord de la riuieredeleurcoftc,attendantledilt;ft feignent. Le Roy demanda àmonfeigneur deCharoloisces mors: Mon frété,m’aifenrezvous? car antres-fois lediél Comteauoit efpouféfafœur. Lediéb Comte luy rei-pondit:* Ouy,comme frere.Le Roy deftêdit à terre,auec les deiTufdifts, qui Monfieut eftoient venus auec luy.Les Comtes deflufdiôhs luy feirent grand honneur, lîRuent af- commeraifoneftoit :amp;luy,quineneftoitchiche,commença laparolle,ûi-Le\ôy,amp;i fant.-Mon frere,ie congnois que vous eftes Gêtil-homme,amp; de la maifon de

France.Lediél Comte luy demandajpourquoy/monfeigneur.’Pource (dift il) que quand i’enuoyay mes Ambaftadeutsarifle, n’a gueres, deuersmon oncle voftre pere amp;nbsp;vous, amp;nbsp;que ce fol Moruilier parla fi bien avons ,vous 'me mandaftes par l’Archeuefque de Narbône(qui eft Gentil-homme, amp;nbsp;ille monftra bien,car chacun fe contenta de luy)que ie me repétiroye des parol-les quêtons auoit dit lediôlMoruilier,auant qu’il fuft le bout de l’an. Vous m’auez tenu ptomeffe, amp;nbsp;encores beaucoup plus toft que le bourde l’an. Et dift le Roy ces parolles en bon vifage,amp; riant,cognoiflant la nature de celuy à qui il parloir, eftre telle qu’il prêdroit plaifir auîdiébes parolles; amp;nbsp;fcurcmct elles luy pleurent.Puispourfuyuitainfi: Auec tels gens veux ieauoiràbefon-gner,qui tiennent ce qu’ils promcttent.Et defauoüa lediôL Moruilier, difint ne luy auoit point donné de charge d’aucunes parolles qu’il auoit diéles. En *yayâtia£- efteôlloug temps fc poLitmenaIcRoy au milieu de ces deux Comtes.* Du gciueiu gés nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I 1 • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• 1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• 1

armez. nbsp;nbsp;colte dudict Comtc de Charolois auoit largement gens armez, qui les regar-

njuii. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;de pres. La fut demandé la Duché.de Normandie, amp;lariuiere

de Sommc,amp; plufieurs autres demandes pour chafcun,amp; aucunes ouuertu-res,ja pieça filiales pcÂr le bien du Royaume : mais c’eftoit la le moins de la queftion,car le bien public eftoit couerty en bien particulier.De Normadie, le Roy n’y vouloir entendre pour nulles chofes:mais accorda audiél Cote de Charolois fa demande,amp; offrit audiôl Cote de fainôt Paul l’office de Conne-ftable,enfaneur dudiél Comte de Charolois;amp; fut leur Adieu tref gracieux. ôcfc remitle Roy en fon bafteau,amp;retourna à Paris, amp;nbsp;les autres àCôflans-

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DE PHILIPPE DECO MM INE S. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;53

Ainfi paflerent les iours, les vns en trefuesjes autres en guerreufiais toutes patolles d’appoindlementfeftoient rompues(i’enten au lieu où les députez d’vncoftéamp; d’autre fefloientaccouftumezaflembler,quiefi:oit à la Grage aux Merciers:} mais la pratique delTufdictefentretenoit entre le Roy amp;nbsp;lediót feigneur de Cliarolois, amp;c alloient enuoyans gens de l’vn à l’autre, nonobftant qu’il fuR gLierrc-.amp; y alloitvn nommé Guillaume de Bifche,

autre appelle Guillot *Diufie,eIlans au Comte deCharolois tous deux;

toutesfois auoienc autres-fois receubiendu Roy , car le Duc Philippe les g^Iocdicu 3uoit bannis, amp;le Roy les auoit recueillis, à la requeftedudiél Seigneur de extmi,iagt;rc Charolois. Ces allées ne plaifoient à tous, amp;nbsp;commençoient ja ces fei gncLirs âfe deffier l’vn de l’autre,amp; à fe lafler:amp;: n’euft efté eequifuruint peu tleioLirs apres, ils fcnfulTenttous allez honteufement. le les ay veus tenir • troisconfeils en vne chambre, où ilseftoient tous afiemblez:amp; vey vniour qu’il en defpleut bien au Comte de Charolois, car ilEeftoitja fait deux fois

là prefence ;amp;il luyfembloit bien que la plus grande * choie, amp;nbsp;toute, celloit que de parler en là prefcnce, amp;nbsp;que fans l’appeller, ne fe deuoit point floit ficnne: hire.Et en parla au feigneur de Contay,bien fort lage homme (comme i’ay dit ailleurs) qui luy dill qu’il le portail partiemenr, car l’il les courrouçoit,ils troLiueroient mieux leur appoinôlement que luy; amp;nbsp;que comme il elloit le “oit ^oint plus fort, il fiilloit qu’il full le plus fige, amp;nbsp;qu’il les gardafldefediuifer, amp;c tticill peinea les entretenir ioinôls de tout Ion pouuoir, qu’il dilfimulaft toutes ces chofes;mais qu’â la vérité l’onfelbahifloitalfez, amp;nbsp;mefmenienc thezluy,de quoy Ci petits perfonnages,comme les deux delfufdids,fempef-thoient de h grande matière,amp; que c’efloit chofe dangéreufe,encores ayant sffaireà Roy fi liberal commccll celluy cy.Lediélde Contay hailToit lediél Guillaume de Bifche, toutes-foisil dilbit cc que pluli'eurs autrcsidifoient comme luy;amp; croy que fon affedlion ne l’en faifoit point parler, mafs feulc-uient lanecelïité delà matière. Audiélfeigneur deCharoloispleutbecon-fcil,amp;fe mill à faire plus de felle amp;nbsp;de ioyeauecces feigneijr9,que paràuant,

amp; auec meilleure cnere : eut plus de communications aucc e^ux’,, leuFs gens,qu’iln’auoitaccouflumé:amp; àmon aduis qu’il en elloitgfan'd’hcfoing, . -amp; danger qu’ils ne fefulfentfeparez. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;*

Vnfige hommefert bien en vnetelle compagnie, mais qtfon lé vueille croire:ôcnc fc pourroit trop acheter.Mais iamais ie ne cogneu PrihcejOiii ait fçeu congnoillre la difference entre les hommes, iufques à ce qü-il fefoit trouué en neceflité,amp;en affaire : amp;nbsp;fils lecongnoilfent, h ne lcùrcn_cBaulc il:amp; départent leur authorité à ceux qui plus leur font agréables, amp;nbsp;pour laage qui leur efl plus fortable,amp; pour eflre* corn prins en leurs opiniofisrou aucLines foisfont*menez par ceux qui fçauét amp;nbsp;conduifent leurs petits plai- Exi^l ■yiiil, firs. Mais ceux qui ont entendement f en reuiennent tÂl, quand il én efl be- £xe^i foing.Telay-ie veu leRoy,lediélComtede Charolois,pour le teps de-lors, amp;le Roy Edouard d’Angleterre,amp; autres plulieurs : amp;« telle heure i’ay Vèu ces trois qu’il leuren efloitbonbefoing,amp; qu’ils auoiêt faulte de ceux qu’ils auoientmefprifez.Mais depuis que lediél Comte de Charolois eut eflé Duc deBourgongne,amp; que la fortune l’eut mis plus hault que ne fut iamais hom-

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34 I. LIVRE DES MEMOIRES medeGmai(bri,amp; (i gradqu’il ne craignoit nul Prince pareil deluy. Dieu le fouifrit cheoir cn cefte gloire : amp;nbsp;tant luy diminua du fens, qu’il mefprifoit tout autre confeil du monde,fauf le fien feul:amp; aufli toft finit fa vie doulou-reufement auec grand nombre de gens,amp; de fes fubieôts,amp; defola famaifon

comme vous voyez.

I

Comment la ville de 'Rouen fut mife entre les mains du Duc de quot;Bourbon^pour le Duc de Berry ^l)ar quelques menées:!^ comment le traité de fonßans fut de tous poinCls Conclu. fH AT. XIII.

O V R c E qu’icy defTus i’ay beaucoup parlé des dangers qui font entre les traiôlezjamp;que les Princes y doibuent eftre Sic figes,amp; biê côgnoiftre quelles ges les meinent, amp;nbsp;par efpe-cial ccluy qui n’a pas le plus apparêt du jeu,maintenât fentê-dra qui m4 meu de tenir fi log cote de cefte matiere.Cepen-dât que ces traiôtez fe menoientparvoyes d’affemblées, amp;

que l’on pouuoit comuniquer les vns auec les autres:cn lieu de traider paix, '• fetraida paraucuns,quelaDuchédeNormâdicfcmettroit entre les mains du Duc de Berry feul irere du Roy :amp; que là il prêdroit fon partage, amp;nbsp;laifle-roit Berry au Roy’amp; tellemét fut côduidc cefte marchàdife, que madame la Grade Senefcbale de Normâdie,amp; aucuns à fon adueu,comme feruiteurs amp;nbsp;f)aiês,mirent le Duc khan de Bourbo au chafteau de Roué, amp;nbsp;par là entra cn a viile.daquelle ville toft fe cofentift àcefte mutation,corne trop defirât d’a-uoir Prince qui demouraft au pais dcNormandie:amp; le femblablefeirét toutes les villes amp;nbsp;places de Normâdic,ou peutfen falut.Etatoufioursbiêfem-_blé aux Normâs,amp; fait encores,que fi grand’ Duché,comme la leur,requiert bien vn Duc.-amp; à la vérité dire,elle eft de grad’ eftime,amp; fy leuc de gràds de-niersyj’enây veu leuerneufeens cinquante mille francs, aucuns difentplus. Ap^s que la ville fut tournée, tous les habitans feirent le ferment audid * nommé Dyc de Bourbon,pour ledicl Duede Berry,fauf le Baillif* ( qui auoit cfte ^xepl. •vieil. nourr.yjduRoy pourvaletdechambre,luy eftantenFladrcs, amp;nbsp;bienpriuédc appelle maiftre Guillaume * Piquart,piiis General de Normandie:

amp; auffi le Grand Senefchal deNorroandie ( quieft auiourd’huy ) ne voulut faite le fcrmenf.mais retourna vers le Roy,contre le vouloir de fi mere, la-quelleauoit conduiél cefte reduéfion,comme dit eft.

Quand cefte mutation fut venuëàlacongnoiftancedu Roy, ilfe dclibc-rad’auoir paix,voyant ne pouuoir donner remede à ce qui ja eftoit aduenu. Incontinent donc feit fçauoir à mon-diél feigneur de Charolois, qui eftoit a fon oft, qu’il vouloir parlera luy :amp;luy nomma l’heure,qu’il ferendroitaux champs,aupres diuMôI oft,eftant près Conflans;amp; faillit à l’heure dide, auec enuiron cent chenaux, dont laplufpart eftoit des Efeoflbis de fa gardc,d’au-tres gens pcu.LediétComte de Charolois ne mena gucrcs de gens, amp;nbsp;y alla fans nulle cerimonie:toutcs-fois il en furuint beaucoup,amp; tant qu’il cnauoit beaucoup plus qu’il n’en eftoit.fiilly auecle Roy.Si les feit demourer vn petit loing,amp;fepourmenercnt eux deux vnc efpace de temps ; amp;nbsp;luy dift le Roy

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IJ h, F H 1 L 1 r r b U E C (J M M 1 N E 5. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;3;

Koy quela paix eftoit Elide: amp;nbsp;kiy compta ce cas,qui cfloit aduenu à Rouen (dont ledid Comte nefçauoit encores rien)difant le Roy qu’en ce confen-tctnentn’cuftiamais baillé tel partage à fonércrc; mais puis que d’eux mef-nies les Normans en aucient fait celle nouucllcté, il en efloit content;-.amp;: paflcroitle traidé en toutes telles formes,comme il auoit eile aduifé par plti fleurs iouriieés precedentes, peu d’autres ehofes auoient â accorder, Le-diâ feigneur de Charoiois en fut fort loyeuxzcar fon ofl efloit en tref grade neceffitéde viurcSjS: principalemcntd’argenr:5i quandceçy ne full aduenu, tout autant qu’il y auoit là de feigneurs fen fulfcnt tous allez honteufemét. ' Toutes fois audid Comte arriua ce iour,ou bien peu de iours apres,vn renfort quefonpere le Duc Philippe de Bourgongne luy enuoyoit,qu’amenoit monleigneur de Saucufcs;où il y auoit fix vingts Hommes d’armes,5c qîqn- • zeceiis Archiers,amp; fix vingt mille efeus contents fur dix fommiersjamp;'grand’ quantité d’arcs amp;nbsp;traids;5c cecy pourueut alfez bien Toll des Bourguignons, dlans en deffiance que le demeurant ne faccordafl fins eux. ' , 3

Ar ' \ *«'

•'■'‘-A

Ces parolles d’appoindlement plaifoient tant au Roy,5c audid Comte’*^de Charoiois,que ie luy ay ouy copter depuis,que li afledueufement parloiçnt d’aclieuer le demeurant,qu’ils ne regardoiét point où ils alloienc, amp;nbsp;tirèrent droit deuers Paris:amp; tant allèrent qu’ils entrèrent dedans vn gi âJ Bouleuert de terre amp;nbsp;de boys,queie Roy auoit fait faire afPczloing hors de la ville , au hout d’vne trenchee,* amp;: au long de ladidfc trenchée on cnrroit dedans la vil - . le.Auccledid Comte efloicnt quatre ou cinq perfonucs feulemet, 5c quand l’on dedans ils furent dedans,ils fe trouueréc tres-efbahis;toutcsfois ledid Comte tint la iceiic.fx^-z. nieilleurc contenance qu’il peut.Il ell à croire que nul de ces deux feigneurs ne furent errans defoy depuis ce temps là, veu qu’à l’vn n’y à l’autre ne print mal.Comme les nouueîles vindrentà Poll que ledid feigneur de Charoiois dcfoy,amp;c ^ efloit entré dedans ledid Bouleuert,il y eufl tref grand murmure;5c fe mirêt ray: to«te ce-enfemble le Comte de fiind Paul,le Marcfchal deBourgongne, Iç^cigneur eàà deContay,lefeigneurdeHault-bourdin,ôc plufieursautres, donnantgrad’ charge audiél feigneur de Charoiois de celle folie, 5c aux autres qui cfloient nouuen

* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ICSa

delà compagnie; ôc alleguoient l’inconuenient aduenu à Ion grandpere,à Montereau-Faut Yonnc,prefent le Roy Charles feptielme .Incontinent foirent retirer dedans Police qui efloit dehors pourmenant aux champs: ôc vfa leMarefthal de Bourgongne(appelléNeufchaflel par fon furnom ) de celle parolle:Si ccieune Princc,fol ôc enragé,fell allé perdre,ne perdos pas fi mai-fon,ny le faiél de fon pere,ny le noflre:ôc pource ie fuis d’aduis que chacun le retire en fon logis, ôc fe tienne prell, fans loy elbahir defortune quiaduicn-ne:car nous fommes fuffifins nous tenans enfemble,de nous retirer iufques CS marches de Henault,ou de Picardie,ou de Bourgq|flgne.

Apres ces parolles monta à chenal auecle Comte de laind Paul, fe pour-naenanc hors de Poil,ôc regardant fil venoit rien deuers Paris. Apres y auoir ellévneefpacedetemps,veirent venir quarante ou cilîquante chenaux : ôc y elloitle Comte de Charoiois,ôc autres des gens du Roy qui le ramenoient, tant Archiers qn’auttes.Et quand il les veit approcher, il feit retourner ceux quiraccôpaignoient:ôc addrelTa fa parolle audiôl Marefchal,qn’il craignoit,

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id nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I. L I V R E D E S MEMOIRES

' J. carilvfoitdetres-afpres parolles,amp;eftoic bo amp;: loyal cheualierpour'fon par ty.'amp;luy ofoic bien dire :Ie ne fuis à vous que par emprunt j tant-que vollrc perc viura.Les parollesdudiól Comte furent telles : Neme tanfez point, car ie congnoy bien ma grande folie; mais ie m’en fuis apperceu fi tard queie-* Alt vieil eice ftoie près du Bouleuert.* Puis luy dift le Marefcbal,qu’il auoit ftit cela en fon abfence.Lediôlfeigneurbaiflalatefte/ànsricnrelpondre, ôc fcn reuint de-fon Oft,où tous eftoient ioyeux de le reuoir,amp; loua chafciin la foy du cnai c

piefence, Rov.toutes fois 116 retOLiina oncoues üuis ledióf Comtc CH fapuiilance. qu’il n auoit ' / nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Al nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;A

abfencc^'^” nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;CharolotS

fisallié^ Ch P. XI III.

Inalement toutes cbofes furent accordées, amp;nbsp;le lendemain feit le Comte de Charoloisvnc grande monftre,pour fçauoir quelles gens il auoit,amp; ce qu’il pouuoitauoir perdu : amp;nbsp;fans dire gare y reuint le Roy, auec trente ou quarante chenaux, amp;nbsp;alla venir toutes les côpagnieSjl’vne apres l’autre, fiufcel-le de ce Marefcbal de Bourgongnedequelne l’ayrnoit pas, a

caufe que dés pieça en Lorraine lediél feigneurluy auoit donné Pinal, amp;nbsp;depuis bfté,pourladonnerau Duc lehan de Calabre,dont grand dommageen auoit eu lediôt Marefcbal.Peu à peu rcconcilioit le Roy auec luy les bons amp;nbsp;notables cheualiers,qui auoient leruy le Roy fon pei c: Icfquels il auoit def appoinchez à fon aduenement à la couronne,amp; pour cefte caufe f’eftoiéttrou liezen cefteafremblée.amp;congnoilloitlediólleigneurfonerreur. 11 fut did: que le lendemain fe trouucroit le Roy au chafteau de Vincennes, amp;nbsp;tous les feigneurs qui auoient à luy faire hommage; amp;nbsp;pour feureté de tous, baille-roitleRoy lediét chafteau de Vincennes au Comte de Charolois.

Le l’endemain fe trouua le Roy Üc tous les Princes, fans en faillir vn , Sc cftoit le portail amp;nbsp;la porte bien garnie de gens dudiéb Comte de Charolois » Là fut le cnarmft.* Là fut leu le traiclédelapaix.MonfeigneurCharlesfeithomma-feit k*tiai-ge delà Duché de Normandie au B.oy;6lt; le Comte de Charolois des terres îx«gt;T’-v»«z. de Picardie,dont il a efté parlé,amp; autres qui en auoient àfaire. Le Comte de fiinél Paul feit le ferment de fon office de Conneftable; il n’y eut iamaisdc fi bonnes nopces qu’il n’y en euft de mal difnez. Les vns feirent cequ ils vou-loient,amp;les autres n’eurent rien. De moyens Sebons perfonnages retira le Royitoutesfois la plus grand’ part demeurèrent auec le Duc de Bretaigne amp;nbsp;le Duc nouueau de Normandie,lcfquels allèrent à Rouen prendre leur pof-feftion. Au partir du chafteau du bois de Vincennes, prindrent tous congé l’vn de l’autre,amp; fe retira chafeun en fon logis:amp; furent fai ôtes toutes lettres, pardons,amp; toutes autres chofes necefl'aires ,feruans au faiôl de la paix. Tout en vn iour partirenJe Duc de Normandie, lie le Duc de Bretaigne pour eux retirer,premièrement audiétpaïs de Normandie,amp; leDuc de Bretaignepuis apres en fonpais,amp; U Comte de Charolois pour le retirer en Flandres. Et comme lediél Comte fut en train, le Roy vint à luy, leconduifit iiifqties à Villiers le bel (quieftvn village à quatre lieues de Paris) monftrantpar cf-feétauoir vn grand defir de ramitiedudiét Comte, tous deux y logèrent cefoir: le Roy auoitpeu de gens, mais il auoit fait venir deux cens Hoir-

, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;mes

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DE P HJ LI P P E DE C O M M I N E S. n nies d’armes pour le recondiiire:dont fut aduerty le Comte de Charoloys en lècouchant,amp; entra en vne tref-grand’fufpicion, amp;nbsp;feit armer largement de gens.Ainfi pouucz veoir qu’il eft quafi impolfible que deux grâds feigneurs le piiilfen raccorder , pour les rapports amp;: fufpicions qu’ils ont a chafeuné lieure;amp; deux grands Princes, quifevoudroient bien entr’aimer,ne fedeb-üroientiamais veoir, mais enuoyer bonnes gens amp;nbsp;fàges l’vn vers l’autre, amp;nbsp;ceux les entretiendroient ou amenderoient les flutes.

L’cndemain au matin,les deux feigneurs deifufdits prindrent congé l’vn de lautrcjauec bonnes fages parolles : amp;nbsp;retourna le Roy à Paris, en lacom-paignie de ceux qui l’eftoient allé quérir; amp;nbsp;cela ofta la fufpicion qu’on pou- ƒ Hoir auoir eue de luy,amp; de leur vcnuê.Et lediél Comte de Charoloys print lé chemin de Compiegne amp;nbsp;deNoyon,amp; partout luy fut faiéteouuerture, par • IccommandcmentduRoy.Delàtiravers Amiens,où il recent leur homma-de ceux de la riuierc de Somme,amp; des terres de Picardie,qui luy efoiét aeftitLiées par celle paix:defquelles le Roy auoit payé quatre cens mille eicus d or, n’y auoit pas neufmoys, comme i’ay dit ail lieu rs cy delTus. Et incontinent pairaoutre,amp; tira au pays du Liege; pource qu’ils auoient défia fait la guerre par l’efpace de cinq ou fix mois à fonpere (luy eftant dehors) éspays *Liegéoi^ de Namur amp;nbsp;Brabant:amp; auoient défia lefliéls Liecreois fait vnedeftroufle contrceLix.ToLitesfoisacaufede Inyucr ilsnepeiirciirpas faire grand cho- Y.xepl.'vîeil. fijnonobftanty eut grand’ quâtité de villages brûliez,amp; de petites deftrouf lèsfurentfafélesfurlesLiegeoiSjamp;feirent vnepaix;amp; s’obligèrentlefdiéls liégeois de la tenir,fur peine de grand’ fomme de deniers,puis l’en retourna ledicl Comte en Brabant.

Comment par la diuifion des Ducs de^retaigne^^ de^ormadieJeKoy reprint enßs mains ce quil auoit baillé à fonßere. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;C H A. P. XK

N retournant aux Ducs de Normandie amp;nbsp;de Bretaigne, qui cftoient allez prendre la pofleflion de la Duché de Noman-die,inconrinent que leur entrée fut fiide à Rouen, ils commencèrent à auoir diuifion enfemble, quand ce fut à départir lebutin:car encores eftoient auec eux ces cheualiers, que i’ay deuant nommcz.defquels auoient acouftumé d’auoir de

grands honneurs,amp; de grands eftats du Roy Charles : amp;nbsp;leur fembioit bien qu’ils eftoient à la fin de leur entreprinfe,6c qu’au Roy ne le pouuoient fier, amp;nbsp;Vouloir chafeun en auoir du meilleur endroiCfoy.

D’autre part le Duc de Bretaignc en vouloir difpofer en partie; car c’eftoit

1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;/Il nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;• r 1^1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 r ' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Coy.

celuy qui auoit porte la plus grand’ mile , amp;nbsp;les plus grands rrais en toutes cliofes.Tellement fe porta leur difeord, qu’il falut que^ Duc de Bretaigne, pour crainte de là perfonne , fe retirait au Mont làiiftle Katherine , pres Rouen,amp;fut leur queftioniufques là que les gens dudiôl Duc deNorman-die,auecceuxdelavilledeRouen,furentpreltsàaller Âîaillir lediél Ducde*qu-ii fetté-Bretaigne iufques au lieu deflufdiôl,amp; en effeól il filut qu’il f’é retiraftamp; prift

) ledroit chemin vers BretaiMe.Et fur celle diuifion, marcha le Roy pres dim

I pays, amp;nbsp;poLiLiez penfer * qu’il penfoit bien a fe conduire à cell affaire : car il Exß.-vieii.

D

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38 I. LIVRE DES MEMOIRES eftoit maiftre en ccfte fcience. Vne partie de ceux qui tenoient les bonnes places,commencèrent à les luy bailler,amp; en Etire leurappointemet auecluy. Icnefçaydeceschofesquccequ’il m’en aditamp; conté:car ien’eftoyepoint furies lieux. Il print vn parlement aucc le Duc de Bretaigne, qui tenoit vne partie des places de la baife Normandie, efperantdeluy faire abandonner fon frere de tous poinôts.Ils furent quelque peu de iours enfcmble à Caenjamp; feirentvn traiélé, par lequel la ville de Caen amp;nbsp;autres demeurèrent es mains * i.cfcö.Fy, de monfeigneurjde*Lefcut,aLiec quelque nombre de gens payez:mais ce trai-troublé que iecroy que l’vn ne l’autre ne l’entendit iamais bien.

Ainfi s’en alla le Duc de Bretaigne en (on pays, 6c le Roy s’en retourna tirant ^nnalifles. le chemin vers fon frere.

• Voyant lediél Duc de Normandie qu’il ne pouuoit refifter, 6c que le Roy auoit prins le Pont de L’arche, 6c autres places fur luy, fe délibéra prendre la fj“’fuite,6c de tirer en Flandres. Le Cote de Charolois choit encores à* Sainél Ocn,en vne petite ville,au pays du Liege,lequel eftoit alTez empefehé; ôc fut fon armée toute rompue 6c deffaióte,6c en temps d’hyuer, partie empefehée contre les Liegeois.-6c luy douloit bien de celle diuifion,car la chofe du mode qu’il defiroit le plus,c’elloit à veoir vn DucenNormadie.-carparcemoyé il luy fembloit le Roy ehre affoibly de la tierce partie. Il faifoit amalTer gens fur la Picardie,pour mettre dedans Dieppe : mais auant qu’ils fuflent prefts, celuy qui tenoit ladiéte ville,en feit Ion appointement auec le Roy. Ainlîre-tourna au Roy toute la Duché de Normandie, ûuf les places qui demeure-rent à monfeigneur de*Lefcut,par l’appointement fiiél à Caen.

Comment le nonneM Duc de Normandiefè retira en quot;Bretaigne^ fortpauure (ÿ* defolé de ce qu’il eßoitfrußre de fon intention. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;QH AT. X î^l.

Ediél Duc de Normandie (comme i’ay diél) s’efloit délibéré vn coup de fuir en Flandres , mais fur l’heure fe réconcilièrent le Duc de Bretaigne 6c luy,congnoiiEins tous deux leurs erreurs,6c que par diuifion fe perdent toutes les bonnes cho-fes du monde : 6c fi eft quafi impolTible que beaucoup de grands feigneurs enfemble, 6c de(èmblablc eflatfe puiflent

longuement entretenir, finon qu’il y ait chef par delTus tous : 6c fi feroit be-foingque celuy là full fige, ôc bien eflime'', pour auoir l’obeiflance de tous. I’ay veu beaucoup d’exemples de celle matière àl’ocil , 6c ne parle pas par ouyrdire: ôcfommes bien fubieéls ànous diuifer ainfianollre dommage, X î^Lioit grand tcgatd à hi confèqucnce qui en aduieht: 6c prefque ainfiay tmpi.raye», vcu aduciiir pat toutlc moudc, * OU I’ay ouy dire. Et me femble qu’vn fage aÿ- * perfonnagc,qui aura pouuoir de dix mille hommes, ôc façon deles entre-tenir,ell plus à craindre 6c eflimer que ne feroyent dix, qui en auroyent chaf-cun*fix mille tous allfcz 6c confederez enfemble : pour autant qu’ils ont tant delchofesàdemellcr 6c accorder entre eux jquelamoité du temps fe perd auant qu’il y ait rien conclu,n’accordé.

Or ainfi le retira le Duc de Normandie en Bretaigne, panure 6c deffait, ôc , abandonne

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Ht P H i L i r F h iJ b C U M iM 1 fN h 5. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;39

^Kindonne de tous ces cheualicrs qui auoient cfté au Roy Charles fon pere: ^auöient fait leur appointement aucc le Roy, amp;nbsp;mieux appointez de luy ^ueiamais n’auoient elle de fon pere. Ces deux Ducs delTuldids cfoicnt figes apres le coup(comme l’on dit des Bretons)amp; fè tenoient en Bretaigne, amp;nbsp;ledid Seigneur de Lefeut,principal de tous leurs feruiteurs.Et y auoit maintes ambaflades allans amp;venansauRoydepareux, amp;deparluyàeux': amp;nbsp;de par eux au Comte de Charolois,amp; de luy a eux:du Roy audid Duc de Bour-gongne,amp; de luy au Roy des vns pour fçauoir des nouuclles, les autres pour louftraire gens,ôe pour toutes mauuaifes marchandifes, foubs ombre de bo-tiefoy. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;*

Aucuns yallerent parbonneintention,pourcLiyderpacifier les chofès;

triais c'ertoit grand’folie à ceux qui fellimoient ii bons ti fages,que de peler que leur prefence peuft pacifier fi grands Princes, amp;fi lubtiîs comme e-ftoient ceux cy,amp;tant entendus à leurs fins:amp;veu Ipecialement que de l’vn ties collez, nede)’autre,nel’offroitnulleraifon. Mais il y a de bonnes géns epri ont celle gloire qu’il.leurlemble qu’ils * vuideront des choies Là ou ils * côjsirôt. ^entendent rien; caraucunesfois leurs maillres ne leur delcouurent point l^nrs plus fecrettes penfees. A la compagnie de tels, queie dy, aduient que lepliis fouLient ne vont que pour parer la felle,amp;: louuent à leurs delpens.’ amp;nbsp;''atoufiours quelque humblet,qui a toufiours quelque marché à part. Ainfi ^umoins l’ay-ie veupartoutes ces fiifons,dont ie parle,amp; detous les collez.

LtaulTi bien,come i’ay dit,les Princes doibuentellre figes à regarder à quels gens ils baillent leurs befongnes entre mains , auflibien deburoient penfer ceux, qui vont dehors pour eux, de fenrre mettre detelles matières : amp;nbsp;qui •'sv*»/? nbsp;nbsp;■I»'***’

l’enpour.roitexcufer, amp;nbsp;ne fen empefeher point, finon qu’on veill qu’eux /“t”' Seltnes y entendilTent bien,amp; eull'ent afFeôlion à la matière, feroit bien la-gCcarfay congneu beaucoup de gens de bien l’y trouner bien empefehez amp;: tfoublez.I’ay veu Princes de deux natures, les vns h fubtils Sgt;c Ibulpe^neux, l’on ne fçauoit commet viure auec eux,amp; leur fcmbloit toufiours qu’on les trompoitdes autres fefioycnt en leurs feruiteurs alfez, mais ils elloycntfi lourds,fi mal entendans à leurs befongnes,qu’ils ne fçauoient congnoiftre qui leur faifoit bien ou mal : Slt;. ceux là lont incontinent muez d’amour en Layne,amp;de hay ne en amour. Et combien que de toutes les deux lortes fen trouue bien peu de bons,ne là où il y ait ne grande fermeté ne grande leurc-te-.toutes-foisi’aymeroyetoufiours mieux viure loubs les lages que loubs les fols,car il y a plus de moyen de fen pouuoir efehapper, amp;nbsp;d’acquérir leur gtace.’mais auec les ignorans ne fçait on trouuer nul expedient, pource qu’a-Ueceux ne fait l’on rien,ains auec leurs feruiteurs faut auoir affiire,* lefquels ƒ lef-faitqueplufieurs efchappêt fouuêr.Toutcs-fois il faut ^uc chatû les ferue amp;nbsp;plaficurs cf-obeïlTe aux cotrées là où ils fe trouuent;car on y cil tenu, amp;nbsp;aulîi contrainéf. founenT: Mais tout bien resardé.nofirefeuleefperance doibt elf reen Dieu ; car en ce- T“” ituy lagill toute noftre fermeté,amp; toute bonte;qui en nulle chofe du mon - Jerqueisf«. denefepourroit trouLierzmais chafeun de nous la congnoift tard ,amp; apres fiewrs pim-ce que nous en auons eu befoing,toutesfois vault encore mieux tard que ia- gcLSS mais.

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' comme la 'ville de

Des guerres qui furent entre

Zfy Bourguignons les Liégeois Dinandfutprife^pillée^it^ rafee. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;QH A T. l.

E P VI s le temps que deflus,fe paflTerent aucunes années, durant lefquel les le Duc de Bourgogne auoit chafcun an guerre aucc les Liegeois;amp; lors,quâd le Roy le voyoit empefehé, il eHayoit faire quelque nouuelleté contre les Bretons,en fai-fant quelque peu de côfort aux Liégeois: amp;nbsp;aufli toil;, le Duc de Bourgongne fe tournoit cotre luy pour fecourir fes alliez: ou eux mefiites fiifoient quelque trai6lé,ou quelque trefue.En l’an mil quatre cens foixante amp;nbsp;fix fut prins Dinäd,aifife au pays du Liege, ville tres-for-tc de fil grandeur,amp; tref-riche, a eau fcd’vne marchandife qu’ils faifoientdc ces ouurages de cuyure,qu’on appelle Dinanderie ; qui font en cffed pots ôc poiiles,amp;: chofes femblables.Lc Duc de Bourgongne, Philippe (lequel tref^ paiTaau mois de Iuin,ran miljjuatre^ens foixante amp;nbsp;fept)s’y feit mener en fa grande vieillefTe en vne litiere,tant auoit de haine contre eux,pour les grades cruauteZjdont ils vfoient contre fes fubieôfs, en la Comté de Namur, amp;nbsp;par efpecial en vne petite ville,nommée Bouuines, aiTifeà vn quart de lieue pres dudicl 1^11 de Dinand, amp;nbsp;n’y auoit que la riuiere de Meufe entre deux : amp;nbsp;n’y auoit gueres que ceux de Dinand y auoient tenu le fiege, lariuiereentre-deux,refpacc de huid mois,amp; fait pluficurs cruautez es enuirons, amp;nbsp;tiroient de deux Bombardes,amp; d’autres pieces de grolfe artillerie, continuellement durant ce temps,au trauers des maifons de ladide ville de Bouuines, amp;nbsp;con-traignoient les pauures ges d’eux cacher en leurs caues,amp; y demourer.il n’cft quafi croyable a hayne qu’auoientccs deux villes l’vne contre l’autre :amp;fi ne faifoient gueres de mariages de leurs enfans, finon les vns aucc les autres, car ils eftoient loins; de toutes autres bonnes villes.

L’an precedent de ladeflrudion dudid Dinand (qui fut la fiiifonquele Comte de Charoloys eftoit venu deuat Paris,où auoit eflé aucc les feigneurs de France, comme auezouy) ils auoient faitvn appointement amp;nbsp;paix auec ledid feigneur, amp;nbsp;luy donnèrent certaine fomme de deniers, amp;nbsp;s’eftoientfe-parez delacitédu Liege,amp;faitleurfaidàpart;quieftle vray figne delà dc-ftrudion d’vn pays,quand ceux, qui fe doytient tenir enfcmble, fc feparent amp;nbsp;s’abandonnent. leledyaufTi bien pour les Princes amp;nbsp;Seigneurs alliez en-femble,commc iefay pour les villes amp;nbsp;communautez.Mais pource qu’il me femble que chafcun peut auoir veu ôc leu beaucoup de ces cxcmples,iem en dre

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COM M INES.


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tay,(lifant feulement que le Roy Louys noftre maiftre, a mieux fceu entendre cell art de feparer les gens,que nul autre Prince que faye iaraais con-gnu; amp;nbsp;n’efpargnoit l’argent , ne fes biens,ne fa peine : amp;nbsp;non point feulement cnuers Ies maiftres, mais aulTi bien entiers Ies feruiteurs. Ainfi ceux de binand fe cómencerêttoftarepëtirdeceftappoincementdeifufdiól: Ôefei-rêtcruellement mourir quatre de leurs Bourgeois principaux,quiauoiét ftit ledid traiôté; ôc recomencerenc la guerre en celle Côté ne Namur, tant que pour ces raifons,amp; pour la folicitatiÔ que faifoicnt ceux deBouuines,lc fiege y fut mis parle Duc Philippe,mais laconduicle de l’armée eftoità fon fils; amp;nbsp;yvint le Comte de fainôlPauLConneftable de France,.! leur *fccours, partat * de famaifon.ôc no pas par l’atiélorité du Roy,ny auec fes Gcs-d’armes : mais '“‘A’«quot; âmcna de ceux qu il auoit amaücz es marches de Picardie.Orgueilleufement • ferrent vne faillie ceux de dedans,à leur grand * dommage le huiôliefme tour *quot;vleilext d’apres qu’ils auoient efté fort batus:amp; n’auoient leurs amys loyfir de penfer fils leurs ayderoient.Ladiôte ville fut prinfe amp;nbsp;ralée, les prifonniers, îuf-^uesàhuiôlcensnoyczdeuantBouuincs.Ienelçay (i Dieul’auoitainfiper-liiis,pour leur grand’mauuaiflié,mais la vengeance fut cruelle fur eux. rauit aptes Le lendemain que la ville fut prinfe,arriuerent les Liégeois en grand’ côpai foitbatiis, gnie,pour les fecourir,cotre leur promeire:car ils l’elloient feparez d’eux par./î^î,*vi^ 3ppointement,comme ceux de Dinand fefloiêt feparez de la cité du Liege. f e Duc Philippe fe retira pour fon ancien aage, amp;: fon filz, amp;nbsp;toute fon ar-mee,fe retira au deuant des Liégeois; amp;nbsp;les rccontrafmes plus toll que ne pê-fions; car par cas d’auenture,noiire Auant-garde {’eigara,par faute de lès guides,amp; les rencontrafmes aucc la bataille,où elloient les principaux Chefs de l’armée.'il eftoit ja fur letard,toutesfois on f’appreftoit de les afiailIir.Sur cel-leheure vindrent gens députez de par eux au Côte de Charolois:qui requîrét qu’en rhonneurdeIaviergeMarie(dontilefloitIaveiIle)il voLilfill auoirpi-tæde ce peuple, en exculàntleur faute au mieux qu’ils peurent. Lefdifts Liégeois tenoient cotenance de gês qui defiroient Lt bataille * amp;nbsp;n’auoiét point * amp;touteop ^patollc de leurs AmbalTadeurs.Toutesfois, apres qu’ils furent allez amp;nbsp;re-tournez deux ou trois fois, fut accordé par eux entretenir la paix de l’an pre- Exe^l.vieil. eedent,amp;bailler certaine fomme d’argent: amp;nbsp;pour feurcté, pour tenir cecy tnieuxqueeequi cfloit pairé,ils promirent bailler trois cens ollages, nommez envn rooIleparl’Euefquedu Liege,amp; par autres fes feruiteurs,eflans en latmée,amp; les bailler dedas le lendemain huid heures. Celle nuid efloit Toll des Bourguignons en grand trouble amp;nbsp;doubte: car il n’eftoit en rien clos ny fort:amp; eftoient feparez,amp; en lieu propice pour les Liégeois, qui cftoiêt gens depied,amp;congnoiiroientle païs mieux que nous. Aucuns d’eux eurent defir denousalTaillir, amp;mon aduis efl qu’ils euflent euler^eilleur. Ceux qui a-tioient traidé raccord,rompirent celle entreprinfe.

Incontinent que le iour apparut, tout nollre oil falTembla, amp;nbsp;les batailles furet bien ordÔnées,amp; lenôbrc grand, corne de trois mille Homes d’armes, quebos quemauuais,amp; douze ou* quatorze mille Archiers, amp;c d’autres ges-1* de pied beaucoup du païs voifin.On tira droit à eux, pour receuoir'Ies olla-^^''quot;'®'quot;“^’ gesjou pour les côbatrc,s’il y auoit faute.Nous les troLiuafimes feparez,amp; jafc

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4x II. LIVRE DES MEMOIRES

départoient par bandeSjamp; en defordre,comme peuple mal coduid. Il eftoit ja pres d’heure de midy,amp;n’auoienc point baillé les oftages. LeComtede Charolois demanda au Marefchal de Bourgongne, qui eftoit là, s’il leur dc-uoit courre fus, ou non.Lcdiôl Marefchal refpondit qu’ouy,amp; qu’ils les poii-uoienc dcÆure fans pcril,aquoynedeuoitdiffimuler, veuque la faulte ve-noit d’eux. Apres on en demanda au feigneur de Conray (que pluficurs-fois ay nommé)qui fut de celle opinion,diiant que iamais n auroit h beau party; amp;nbsp;les luy monftra ja feparez par bandes comme ils fen alloicnt ; ôc loua fort dene tarder plus. Apres on en demanda au Conneflable, Comte de S. Paul; qui fut d’opinion contraire, dilant qu’il feroit contre fon honneur amp;pro-meffed’ainfi le faire:amp;que tant degens nepeuuent eftre firoft accordez en • telle matière,comme eft de bailler odasesjöc en fi srand nombre: loüoû de renuoyer deuers eux fçauoir leur intention. L’argu de ces trois nommez, auec lediól Comte, fut grand.amp; long fur ce différend : de l’vn codé il voyoit fes grands amp;nbsp;anciês ennemis deffaiôls,amp;: les voyoit fans nulle refiflence-.d’aii-tre codé on l’argueroit de fa promeffe. La fin fut qu’on enuoya vn Trompette vers eux, lequel rencontra les odages qu’on luy amenoit. Ainfi pafla la chofe,amp;s’en retourna chafeunen fon lieu: mais aux gens-d’armes defplcut fort le confeilqu’auoit donné lediélConnedable; car ils voyoient le beau butin deuant leurs yculx.On enuoya incontinent vne AmbafEide au Liege pour confermer cede paix. Le peuple ( qui ed incondant) leur difoit à toute heure qu’on ne les auoitofécombatre:amp;leur tirèrent couleuurines à la te-de,amp; leur feirent plufieurs rudeffes, Le Comte de Charolois fenretourna Dot Philip- en Flandres.En cede faifon mourut fon pcrc,auquel il feit tref-grand amp;fo“

Icnncl obfeque à Bruges, amp;nbsp;fignifia la mort du did Seigneur au Roy.

Qomment les Liégeois rompirent la paix au Duc de quot;Sourgongne ^parauant Comtede Charolois:^/ comment il les deceit en bataille. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;QH AT. II.

trouuoiêt nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pendant amp;nbsp;toufiours depuis fe traidoient chofes fecrettes

Exîfi. wil. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nouuelles entre ces Princes. Le Roy edoit fi iré contre le

Duc de Bretaigne amp;nbsp;le Duc de Bourgongne que merueilles: amp;nbsp;auoient ledids Ducs grand’ peine pour auoir nouuelles les vns des autres:carfouucnt leurs mcfîàgersauoiêt empefehe-ment:amp; en temps de guerre falloir qu’ils vindent par mer, amp;nbsp;pour le moins,falloir que de Bretaigne paffafTent en Angleterre, amp;nbsp;puis par terre iufques à Dou ures, amp;nbsp;pader à Calais: amp;nbsp;où ils venoient par terre le droit chemin,ils venoient en grand peril.

En toutes ces années de differens, amp;nbsp;en autres fubfëquentcs qui ont duré iufques à vingt,ou pl^,les vnes en guerre , les autres en trefues amp;nbsp;diflimuk-tions, amp;nbsp;que chafcuffdes Princes comprenoit par la trefue fes alliez , Dieu feit ce bien au Royaume de France que les guerres amp;nbsp;diuifions au pays d’Angleterre edoient enceftes en nature, amp;nbsp;fi pouuoient edre commencées quinze ans parauant, en grandes amp;nbsp;cruelles batailles, où maint homme de bien fut occis.Et tous difoiét qu’ils edoiet traidres,a caufè qu’il y auoit deux mai-fons qui pretendoienr à la courone d’Angleterre:c’ed a fçauoir lamaifon de Lanckdrc

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U h F H I L I P P L U b C U M M 1 N E bi nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;45 nbsp;nbsp;_ _

Unclaftre amp;nbsp;la maifon d’Yorth. Et ne faut pas doubter, b les Angloys euf-•' lent efté en l’eftat qu’ils auoicnt efté autres fois, que ce Royaume de France neuft eu beaucoup d’affaires. Toubours talchoit le Roy venir àfindcBrc-bigne.-car illuy fembloit quec’effoit chofe plus aifécà côquerir,amp; de moindre deffence quen’eftoit ceffc mailon de Bourgongne:amp; aüff quec effoicnt ceux qui recueilloicnt tous fes malueillans,comme ion frcre autres, qui a-noient intelligence dedans le Royaume. Et pour ceffe caufe, pratiquoit fort lcDLicdeBourgongne,pour luy faire confentir,par plubcurs offres, amp;nbsp;par pluheurs marchez,qu’il les vouliift abandonner ; amp;nbsp;par ce moyen auffi luy a-l^andonneroit les Liégeois,amp; autres malueillans,ce qui ne fe peuft accorder: niais allalediél Duc de Bourgongne de nouueau iur les Liégeois, qui luy a-noict rompu la paix, amp;nbsp;prins vnc ville appellee *Ligny,amp; chaffé fes gens de- * l^orSjSc pille ladiôte ville,nonobffat les oftages qu’ils auôient baillez l’an pre-cedent,en peine capitale,au cas qu’ils rompiffent le traiôlé, amp;: auili iur peine J 1 h nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;J’ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Tl /T I I r nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;/ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;T nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;' Zl

aegrande iomme d argent.Il ailembla ion armee enuiron Louuain qui cit au nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;fi

pais de Brabant,amp; fur les marches* du Liege. Là arriua deuers luy le Comte nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;fi-

defainôlPauljConneffable de France (qui pour lors feiloit de tous poinds reduidau Roy,amp; fetenoit auec luy)amp; le * Cardinal Balue autres: lefqucls

‘igninerenr au Duc de Bourgongne comme les Liegeois ciroient alliez du* lt;iu Liege, Roy,amp; comprins en ià trefue,raduertiiEmt qu’il les lecourroit^en cas que le- u’crUuÿ'^ lc diff Duede Bourgongne les affiilIiff.Toutesfois ils offrirent fil vouloir cô-fentir que le Roy peuft faire la guerre en Bretaigne,que ledid feigneilrle Liif *auecieCai f • J nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I r • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• T nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1- r nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;11'' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Baluc

Etûitfiirepuec les LiegeoisLeu r audience rut courte,amp; en public, amp;nbsp;ne de- amp;nbsp;autres cn-ineurerent qu’vn iour.'lcdiôl Duc de Bourgogne difoit pour exeufej, que lef- fc difts Liegeois rauoientailailly,amp;: que la roupture de la trefué venoit d’eux, ôcnon pas de luy,amp; que pour telles raifons,ne deuoit abandonner fes alliez.

Les deilufdids Àmbaffadeurs furent depefehez, comme il vouloir monter à cheual(qui eftoit le lendemain de leur venuë)leur difant tout hault,q|i’il fup-plioit au Roy ne vouloir rien entreprendre fur le païs de Bretaigne.

LedidConneftableleprefla,enluy difant: Monfeigneur,vousnechoi-fiiTezpoinbcar vous prenez tout, amp;nbsp;voulez faire laguerreà voftre plaiiîr à nos anays,amp; nous tenir en repos fans ofer courre fus à nos enhcmys,commc Vous fiides aux voftres, il ne fe peut faire, ny le Roy ne le foiiffrira point. Ledid Duc print congé d’eux, en leur difant: les Liegeois fontaffemblez, amp;nbsp;m’atten d’auoir la bataille auant qu’il foit trois iours : fi ie la perds, ie croy bien que vous en ferez a voftre guife.-maisaufti, fiiclagaigne, vous laiflerez en paix les Bretons. Et apres monta à cheual, amp;nbsp;lefdids Ambaffadeurs allèrent en leur logis fapprefter pour eux en aller. Et luy party dudiól lieu de Louuain en armes amp;nbsp;tref-groffe côpagnie, alla mettre j fiege deuat vne ville,appcllée*Sainôl:on : fon armée eftoit tref-groffe, car tout ce qui eftoit peu *^'”«'7*?''

Il nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;('n- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.*-«lt;• Saioftio,

Venir de Bourgongneji’cltoit venu lomdre auec luy : amp;nbsp;ne luy vey ïamais tat er degens enlemble,a beaucoup pres. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;L4h„,z,iCen

Vn peu auant fon partementauoit mis en deliberation f’il feroit mourir fes oftages,ou qu’il en feroit. Aucuns opinèrent qu’il les feift mourir tous; amp;nbsp;«»•

r Il d nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;n.

parelpcciallefeigneurdcContay (dont plubeurs rois lay parle) tint celte

D iiij

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44 II. LIVRE DES MEMOIRES

. vopinionjamp;iamaisnel’ouy parler fimal,nefi cruellement que celle fois. Et quot;nbsp;poLirceell bienneceflaire àvn Prince d’auoir plufieurs gens à Ion confeil: caries plus lages errent aucunes fois,amp; tres-fouuent,ou pourellrepaflióncz aux matières de quo y l’on parle, ou par amour, ou parhayne, ou pour voii- ' ^oir direfoppofite d’vnaLitre,amp; aucunes fois* par Fin difpolitiô des perfon-

■vieil. nes:car on ne doibt point tenir pour confeil ce qui fe fait apres difner. Aucuns pourroyent dire que gens faifans aucunes de ces fautes ne deuroient e-flre au confeil d’vn Prince. Aquôyfaut relpondre que nous fommes tous hommes,amp;qui les voudroit chercher tels que iamaisne faillirent à parler fagement,ne que iamais fémeulTent plus vne fois que l’autre, il les fauldroit chercher au cieil,car on ne les trouueroit pas entre les hommes ; mais enre-*ttesbiéq» compenfcaulfi,il y aura telau confeil, quiparlcra tres-fagement amp;nbsp;trop mieux qu’il n’aura accouflume d’ainh faire fou tient, amp;nbsp;atifli les vns radrel-;;'““fent les autres.

vieil. Retournons ànosopinions.Deux ou trois furentde celladuis, ellimans la grandeur ou le fens dudiôlContay; car en tel confeil fe trouue beaucoup degens, amp;nbsp;en y a alTez qui ne parlent qu’apres les autres, fans gueres entendre aux matières, amp;nbsp;défirent de côplaireà qtielqu’vn qui aura parlé, qui fera citimé Xi-, homme eftimé en audorité. Apres en fut demandé à monfeigneur d’Hym fi4ire.v,e,i. bercoLitt natif d’auprcs d’Amiens,vn des plus fages cheualicrs,amp; des plus en-tcndus,queiecongnu iamais : lequel difl quefonopinion eftoit, pourmet- lt;nbsp;treDieu defcpartdetouspoinôls, amp;nbsp;pour donnera congnoillre àtoutle monde qu’il n’elloit cruel ne vindicatif,qu’il deliuraft tous les trois cens ofta-ges.'veu encores qu’ils f y elEoient mis en bonne intention, amp;nbsp;efperans que la paix fetint.-mais qu’on leur dift au départir, la grace que leditl Duc leur fai-foitjleur priant qu’ils tafchalTent à réduire ce peuple en bonne paix : amp;nbsp;au cas qu’il n’y voulull entendre, qu’au moins eux rccongnoilfans la bonté qu’on leurfaif^t, nelè trouuaflent plus en guerre cotre luy,ne contre leiirEuefque qui eftoit en là compagnie.Cefte opinion fut tenue, amp;nbsp;feirent les pronielfes deflufdiéles lefdiéls oftages, en les deliurant. Aufti leur fut diól,quefi nul d’eux fe declaroit en guerre,amp; fuflent prins,qu’il leur coufteroit la tefte,amp; ain fi fen allèrent.

llmefemblebondedirequ’apres que lediél Seigneur deCotay eut done cefte cruelle fentence contre ces pauures oftages ( corne aucz ouy ) dont vne partie d’eux f’y eftoient mis par vray e bonté:vn eftant en ce cofeil, me dill en

, l’oreille: voyez vous bien ceft homePeombien qu’il foit bien vieil, fi eft-il de faperfonne bien fain; mais i’ofêroye bien mettre grand’chofe, qu’il ne fera point vifd’huy en vn an, amp;nbsp;le dy pour cefte terrible opinion qu’il a diéle. Et ainfi en aduint,car il nbsp;nbsp;vefquit guercs:mais auant qu’il mouruft il feruit bien

fon maiftre pour vn lour en vne bataillc,dont ie parleray cy apres.

En retournant donc à noftrepropos.-vousauez ouy comme au partir de LouuainlediólDucrffitlefiegedeuant Sainólon, amp;nbsp;là affufta fon artillerie. Dedans la ville eftoyent quelques trois mille Liégeois ,amp; vn trefnon che-ualierquiles conduifoit; amp;nbsp;eftoit celuy qui auoittraidlé la paix,quand nous les trouuafines au deuant de nous en bataille, l’an precedent. Letroifiefme iour

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DE PHILIPPE DE C O M M I N E S. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;4^

iour apres que le liege y fut mis,les Liégeois en tref-grand nombre, comme (le trente mille perfonnes amp;plus,tantdebons quemauuais, ges depiedllàuf enuiron cinq cens cheuaux)amp;grand nombre d’artillerie,vindrentpourle-Uei noftrefiegc,fur l’heure de dix heures du matin;amp; le trouuerent en vn village fort,amp; clos de marais vne partiedequel fappelloiE*Breta, à demielieuë * Rniftan . denons.-fic en leur compaignie eftoit Françoys*R,oyet, Baillil de Lyon, lors AmbalTadeur pour le Roy vers lefdióLs Liegeois.L’alarme vint tancoft en no-ftrcoft:amp; faut dire vray,qu’il auoit efté donné mauuais ordre de n’auoir mis les bons cheuaucheurs aux champs.-carl’on n en fut aduerty que par les four-rageursquifuyoient.Ienemetrouuayoneques en licu,aueclediôl: Duc de Eourgongne,où ie veilTe donner bon ordre de foy,excepté ce iour. Incontinent feit tirer toutes les batailles aux champs,fauf aucuns qu’il ordona pour • dernourer au fiege, entre les autres il y lailfacinq ou fix cens Anglois, Il mit fit les deux collez du village, bien douze cens hommes-d’armes, amp;nbsp;quant aluy,ildemouravisavis,plusloingdudiól village que les autres, auecbien lt;nbsp;l^uiél cens hommes-d’armcs:amp; y auoit grand nombre de gens de bien à pied 3UCC les Archicrs,amp; grand nombre d’hommes-d’armes. Et marcha monfei-gneurde Rauallain, auec l’auant-garde dudiél Duc, tous gens à pied, tant loiîimes-d’armes qu’Achiers, amp;nbsp;certaines pieces d’artillerie , iufques lur le hord de leurs foirez,qui elloiét grans Sgt;c profonds, amp;nbsp;pleins d’eau :amp; à coups deflefehes Sc de canons furent reculez,amp; leurs lofiez gaignez, nbsp;nbsp;leur artille

rie aiifii.Qu.ad le traiôl fut failly aux noftres,lc coeur rcuintaufdicls Liégeois ^uiauoient leurs piques longues (quifont ballons auantageux) chargèrent fur noz Archiers Sgt;i. fur ceux qui lcsconduifoicnt,amp; en vne troupe tuèrent quatre ou cinq cens hommes en vn moment : amp;nbsp;branloient toutes noz cnfcignes, comme gens prefquedefconfits.Er fur ce pas feit le Ducrnarcher les Archiers de fa bataille, que conduifoit mefiîre Philippe de Creuecœur, feigneiir des Cordes,homme fage,amp; plufieurs autres gens de bien .«qui d’vn ardantôc grand courage,afiaillirentlefdiâs Licgeois,lefquels en vn momêt furent defeonfits . Les gens de chenal ( dont i’ay parlé) qui elloicnt fur les deux collez du village,ne pouuoient mal faire auxLiegeois,n’aufii le Duc de Bourgongne de là où il elloit, à caufe des marais, mais feulement y elloicnt àl’aduanturc, afin que filefdiéls Liégeois eiifient rompu celle auant-gar-de,amp;pafieles fofiez iufques au pays plain,les peullrencontrer.Ces Liégeois fe mirent à la fuite tout au long de ces marais, amp;nbsp;n’elloient chaflez que de gens à pied. Des gens decheual qui elloicnt auec le Duc de Bourgongne, y en enuoya vne partie pour donner la chalTe, mais il failloit qu’ils prinflent Bien deux lieues de torle pour trouuer pafiage : Sclanuidlles furprint, qui fauualavie à beaucoup de Liégeois. Autres renuoyc^euant ladiéle villcj pource qu’il y ouit grand bruit, amp;doubtoit leur finllie. A la vérité ils faillirent trois foisimais toufiours furent reboLitez, amp;nbsp;sy gpuucrnerent bien les *Licgcois qui y elloient demourez.Lefdiéts Liégeois, apres qu’ils furent 10- * Angles pus,fe rallièrent vn petit à l’entour de leur charroy ,amp;y tindrentbien peu. *flx Exempt» Bien mourut quelque* neuf mille hommes, qui ferable beaucoup à toutes gens qui ne veulent point mentir.-mais depuis que ic fuis né,i’ay veu en beau-

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4Ó nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I. L I V R E D E S M E M O I R E S

coup de lieux où l’on difoit pour vn hommc,qu’ô en auoit tué ccr,ponrciii-der cornpLiire;amp; auec telles menfonges s’abidcnt bien aucunesfois les Mai-ftres : ficen’eufteftéla -nuid, il en full mort plus de quinze mille. Cellebe-longneacbcuée,amp; que ia il efloit fort tard, le Duc Bourgongne feretiraen fon oft, amp;C toute l’armée,fàuf mille ou douze cens cheuaux qui eftoient allez paftcràdeux lieues làpourchaflerlesfuyans : car autrement ne IcsculTent peu ioindre , â caufe d’vne petite riuiere. ils nefeirent pas grand exploiâ pour la nuiôlztoutcsfois aucuns en tuerent, amp;nbsp;prindrent le demeurant, amp;nbsp;la plus grâd’compaigniefe fauna en la cite.Ce iour ayda bien â donner l’ordre lefeigneurdeContaydcquel peudeioursapres mouruten laville*deHuz: amp;nbsp;eutaflez bonne fin:amp; auoit elle vaillant amp;nbsp;lage,maisil dura peu,aprescc-• fte cruelle opinion qu’il auoit donnée contre les Liégeois oftagers,dôtaLiez ouy parler cy deftus.Tantoft apres que le Duc fut defirmé, il appellavn fien Secretaire,amp; cfcriuit vne lettre au Conneftable amp;nbsp;autres,qui eftoient partis d’auec luy,amp; n’y auoit que quatre iours, àLouuain où ils eftoiét venus Am-baftadeurs, comme dicl eft,amp; leur ftgnifia cefte vidloire, priant qu’aux Bretons ne full rien demande.

Deux iours apres cefte bataille changea bien ceft orgueil de ce fol peuple, Urero»n»„ poLirpcu dc pcrtc/mais à qui que (oit,eft bien â craindre démettre fone-liurtrbaiaiilt, * nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 I 1gt; I ■ 11 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;» nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;rr nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;■ L

ftat en hazard d vne bataille, qui s en peut paner. Car pour vn petit nombre _ degens que l’on y perd, fc muent amp;nbsp;changent le courage des gens de celuy qui perd,plus qu’il n’cftàcroire, tantenefpouuentementde leurs ennemis, qu’en melpris de leur Maiftrc,amp; de fes priuez fcruitcurs ; amp;nbsp;entrent en murmures amp;nbsp;machinatiós, demandans plus hardiment qu’ils ncfouloient, courroucent quand on les refufe. Vnefeu luy feruoirplus parauant que ne feroient trois;amp; fi celuy quia perdu,eftoit fige,il ne mettroit de cellefaifon rien en hazard auec ceux qui ont fuy :mais feulement fe tiendroit fur les gardes,amp; c^ayeroit de trouuer quelque chofe de leger à vaincre, où ilspeuflent eftre lesmaiftres, pour leur faire reuenir le cœur amp;nbsp;öfter la crainte. En toutes façons vne batailleperduëatoufioursgrand’queuë,amp;mauuaifepourle perdant. ray eft que les conquerans les doiuentcercher, pour abréger leur œuure,amp; ceux qui ont les bonnes gens de pied, amp;nbsp;meilleurs que leurs voi-fins,comme nous pourrions auiourd’huy dire Anglois,ou Suiflcs.Ieneledy pas pour dcfprifer les autres nations -.mais ceux là ont eu de grandes vic1:oi-res , amp;nbsp;leurs gens ne font point pour longuement tenir les champs, fans *fE«“ -v,«7 eftre exploitez, commeferoient François ou Italiens, qui font plus fages, plus aifez à conduire. Au contraire,celuy qui gaigne deuient en repnta-tion amp;nbsp;eftime plus grande de fes gens que déliant. Son obeiflance accroill entre tous les lubiec^, on luy accorde en cefle eftime ce qu’il demande,les lesdîfpofi gens en font plus courageux amp;nbsp;plus hardis. Aulh lefdiôls Princes s’en met-«cnVdTo'i- aucuncsfois en fi grand’gloire, amp;nbsp;en fi grand orgueil, qu’il leuren mef eu, qui don- ch^,- pjp aprcs.’* ÂT dc cccy ie parle de veuc,amp; vient telle grace de Dieu feule-rc mutation t nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;t nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;O*

aux ebofes, ment.

nte o?dc' Voyans ceux qui eftoient dedans Saindon,la bataille perdue pour eux, Si eftoient enfermez tout à l’cnuiron cuydans la defeonfiture eftre trop

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DE PHILIPPE DECO xM MINE S.

’lus grande qu’elle n’auoit eftejendirent Ja ville,lailTerent les armes, amp;nbsp;bail -erent dix hommes à volonté,tels que leDucde Bourgongne voudroit ellire, Jefqnels il feit décapiter y en auoit fix de ce nombre des oftagcs quepeu deiours auant auoit deliurez, auec les conditions qu’auez entendues cy défi-Jiis.Illeuafon OU: amp;nbsp;tiraàTongres, qui attendirent le fiege. Toutcsioisla ville ne valoir gueres;amp; aufli,Iàns le lailler batre,feirentfemblablecompofi-tion,amp;baillèrent dix hommes , entre lefquels le trouua encores cinq ou fix delHióls oftages.Tous dix moururent comme les autres.

ment apres qu aucuns des Liégeois eurent compoje de redre leur villeylt;amp; les autres refuje de ce faire Jefeigrtvur d'Hymbercourt trouua moyen tîy entrer pour le

Ducdeliourgongne. QHAP. IIL

E là tira lediôt Duc deuant la cité du Liege,en laquelle ils e- . ftoient en grand murmure. Les vns vouloiêt tenir amp;nbsp;deffen-drela cité,difiins qu’ils eftoientalTez depeuple:amp;par fpecial eftoit de ccfl: aduis vn chcualier,appellé mefiire Raz de*Lai- * de Lukrc :â^'cre.D’autresaucotraire,quivoyoiêtbrulleramp;deflruiretout

le paysjvoulurét paix à quelque dommage que ce fuft. Ainfi'^^^/quot;'^ s’approchât ledit Duc dé la cité, quelque peu d’ouuerture de paix y auoit par U’enues gês,côme prifônicrs.-amp; fut côduide celle matière par aucûs des def ^ufdiéls oftages,quifaifoiêtau contraire des premiers, dont i’ay parlé.-amp; rc-congneurêt la grace qu’on leur auoit fai ôte. Ils y menèrent trois cens homes ées plus gras de la ville en chemife,les iambes nues,amp; la tefiedcfqucls apportèrent au Duc les clefs de la cité,amp; fc rendirent à luy amp;nbsp;à fon plaifir, finis rien tefcriicr,fiiufle feu amp;nbsp;lepillage.Et cciours’y trouua prefent pour Ambafla-éeurmonfeigneur de Mouy, vnSecretaire du Roy,appellé maiftre lehan heiioftiqui venoyent pour faire femblables requeftes amp;nbsp;demandes qu’auoit faitleConnellablepeudeiourau parauat.Cediél iourquela côpofj^ion fut fiiéle,cuidàt lediét Duc entrer en la cité, y enuoya monfeigneur d’Hymber-court, pour entrer le premier, pource qu’il auoit congnoiflancc en la cité, à caufe qu’il y auoit eu adminiftration par les années qu’ils auoient efté en paix. Toiitesfois l’entrée luy fut refufée pource iour, Sc fie logea en vne Abbaye, quieft auprès d’vne des portes,amp; auoit auec luy enuiron cinquante hommes d’armes.En tout pouuoitauoir quelque deux cens combatans: amp;nbsp;i’y elloye. Le Duc de Bourgogne luy feit fçauoir qu’il ne partit point de là,s’il felentoit dire feurement:mais auIli,Ii ce lieu n’eftoit fort,qu’il fe retiraft deuers luy :car le chemin eftoit trop malaifépour le fecourir, pource que ce quartier là font tous rochers. Lediéld’Hymbercourtfe délibéra de n’en partir point, carie lieu eftoittresfort,amp; retint auec foytinqoufix hommes de bien de la ville, deceux qui efloient venus rendre les clefs de la cité, ponr s’en ay der comme * Vous entendrez. Quand vindrent les neuf heures au foir, nous ouifmes fon- ■«mI. ncr la cloche; au fon de laquelle ils falTemblcrent, amp;nbsp;Âoubta lediél d’Hym-bercourt que ce full pour nous venir alfaillir : car il eftoit bien informé que nieftircRaz de’^Laitre, plufieurs autres ne vouloient confentir ceftepaix, /«»«Lutrius, amp;nbsp;,fa fufpicion eftoit bonne amp;nbsp;vraye ; car en ce propos eftoyentils prefts

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48 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I. LIVRE DES MEMOIRES.

à faillir. Lediólfeigneur d’Hymbercourt difoit .-Si nous les pouvions amufer iufques àminuiôl,nous femmes efehappez; car ils feront las, amp;nbsp;leur prendra enuie de dormir, amp;nbsp;ceux qui font mauLiais contrenous, prendront deslors Iafuyte,voyans qu’ils auront Evilly alcur entreprinfe.Et pour parueniràceft expedient,il depefehadeux de ces Bourgeois, qu’il auoit retenus,commeie vous ay dit:amp;: leur bailla certains articles affez amiables par eferit. Il lefaifoit feulement pour leur donner occalion de parler enfemble , amp;nbsp;de gaigner temps:car ils auoyent de couftume,amp; ont encores, d’aller tout le peuple en-femble au Palais de l’Euefque , quand il furiienoit matières nouuelles : amp;nbsp;y font appelez au fon d’vne cloche qui eft leans. Ain,fi noz deux Bourgeois,qui auoientefté des oflagers, amp;nbsp;des bons,vindrent a la porte (carie chemin n’e-’ • ftoitpas loingdedeux ieds d’arc) amp;nbsp;trouuerent largement peuple armé. Les au Maîàre' VUS vouloieut qu’oiiaflaillift,Ies autfcs non. *lls difoyentauMairedelacité tout haut,qu’ils apportoyent aucunes chofes bonnesparefcrir,deparlcfei-gneurd’Hymbercourt, Lieutenant du Duc de Bourgongne en celle marche; amp;: qu’il feroit bon de les aller veoir au palais.Et ainfi le feirent,amp; incontinent OLiifmes fonner la cloche dudidl Palais:à quoy nous congnufincs bien qu’ils cftoient cmbefongnez.Noz deuxBotirgeois ne vindrent point,mais au bout d’vne heure,OLiifmes plus grand bruit à la porte que parauant:amp; y vint beaucoup plus largement gens, amp;nbsp;crioyent par deifus les murailles, amp;nbsp;nous di-foient vilênies.Lors côgnut lediói feigneur d’Hymbcrcourtque le peril eftoit plus grand pour nous quedeuanr:amp; defpefcha arriéré ces quatre autres ofta-gets qu’il auoit, portans par eferit comme luy eftant gouuerneur delà cite, pour le Duc de Bourgongne,les auoit amiablemcnt traiclez : amp;nbsp;que pour rie nevoLildroitconfentiràleur perdition, car il n’y auoit gueres encores qu il * De ivnde auoit cfté*de leur meftier (qui eftoit des marefehaux amp;nbsp;des*offeures) amp;nbsp;en a-fticts nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;uoit porté robbe de liuréeiparquoy mieux pouuoient adioufter foy à ce qu’il

*Feuccsgt;. leurdifoit. En fommes’ils vouloientparuenir au bien de paix, amp;defauuer Jeyj-pays , il faloit qu’ils feiflent, apres auoir baillé l’ouuertùre de la ville, comme ils auoient promis, des chofes contenues en certain mémoire. Etin-ftruifitbien ces quatre hommes, qui allèrent à la porte comme auoient fait C nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;les autres,amp; la trouuerent toute ouuerte. Les vns les recueilloientauecgrof-

fes parolles amp;nbsp;großes menaces : les autres furent contens de ouyr leur charge, amp;nbsp;retournèrent arriéré au Palais : amp;nbsp;tout incontinent ouifmes fonner la cloche dudiél Palais,dontnoüs eufmes trefgrand’ioye,Sc s eftaignitlebruit que nous auions ouy à la porte,amp; en elTed furent long temps en ce Palais, amp;: iufques à bien deux heures apres minui(ft,amp;la conclurent qu’ils tiendroient l’appointement qu’ils auoient fait,amp; que le matin bailleroient vnc des portes audidl feigneur d’Hwibercourt : amp;nbsp;tout incontinent s’en fuit de la ville le-didmeflirc Razdcftiitrc,amp; toutefafequelle.

le n’eufle pas Ci long temps parlé de ce propos(veu que la matière n’eft guc-res grande) h cen’eul¥efté pour monftrer qu’aucunesfois auec tels expediens amp;nbsp;habilitez,qLii procèdent de grand fens,on euîte de grands perils, dommages amp;nbsp;pertes. Lerendemain,aupoint du iour, vindrent plufieurs des ofta-ges dire audiél feigneur d’Hymbercourt, qu’ils luy prioient qu’il voulfift venir

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DE PHILIPPE D E C O M M I N E S. 4^

nii'au Palais, où tout le peuple efloitaHemble; amp;nbsp;que làil voulfîft iurer les deux points,dont le peuple eftoit en doubterquiefloit le feu amp;nbsp;le pillage, amp;nbsp;qu’aptes Iuybaillcroientvnportail.il le manda au Duc de Bourgongne, amp;nbsp;alla vers eus;amp; le ferment fut fïiót, retourna à laporte,d’où ils feirent defee-dreceiix qui eftoient defrus,amp; y mit douze Hommes d’armes , amp;nbsp;des Ar-diiers,amp; vne bannière du Duc de Bourgongne fur ladiôlc porte. Et puis al-laà vne autre porte qui eftoitmurée,amp;la bailla entre les mains du Baftard de Bourgongne, qui efloit logé en ces (Quartiers; vne autre au Marefchal dcBoLirgongne,amp; vne autre à des Gentils-hommes,qui eftoient encores a-Uecluy. Ainfi furent quatre portaux bien garnis des gens du Duc de Bourgongne, amp;nbsp;fes bannières deffus. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.

Or faut il entendre qu’en ce temps là le Liege eftoit vne des plus puiffantes fur ee quvn villes de la côtréc(apres quatre ou cinq)amp; des plus peuplées:amp; y auoit grâd peuple retiré du pais d’enuiron, parquoy n’y apparoifloic en rien de la perte de la bataille. Ilsn’auoient aucune neceffité de nuis biens, amp;nbsp;fi efloitenfin tOE'jrd’hyuer,amp; les plus grandes pluyes qu’il ell: pofîiblede dire:amp; lepaïs de loy tant fangeux amp;nbsp;mol qu’à merueilles, amp;fi eftions en grand’ neceflité de viurcs d’argent, amp;nbsp;l’armée corne toute rôpuc; Si. fi n’auoit lediél feigneur l^ucde Bourgongne nulle volonté deles afheger , ScauHm’euftilfceu; Sgt;c lt;juandils eufl'entattendu deuxiours à eux rendre, par cefte voye ilfenfuft retourné. Et pourceie veux conclu rre que c’eft grand’gloire amp;nbsp;honneur * au diél Hymbercourt qu’il receut en ce voyage: amp;nbsp;luy procéda de la grace de ““’‘’A?*“'«' bien feulement contre toute raifon humaine:amp; ne luy eufl ofé demander le ^icn qui luy aduint.Etau iugement des homes,receut tous fes honneurs ôc ^icn,pour lagrace amp;nbsp;bonté dont il auoit vfé entiers les oftages, dont vous a-Uezotiy parler cy deffus.Et le dy volontiers,pource que les Princes amp;nbsp;autres ^splaignent aucunes fois comme par defeonfort, quand ils ont fait bien ou phifirà quclqu’vn.difâs que cela leur procédé de malhcur,amp;que poBr le teps nduenir ne feront fi legers à pardonncr,OLi à faire quelque hberalité,ou autre chofe de grace,qui toutes font chofes appartenantes à leurs offices.A moad-uis c’eft mal parle', amp;nbsp;procédé de lafchecoeur à ceux qtiiainfi le font: carvn Prince ou autre homme qui ne fut iamais trope, ne fçauroir cftre qu’vne be-ftcjn’y auoircongnoiffance du bien Ôt du mal,ne quclledifterenceily a. Et àauantage les gens ne font pas tous d’vue côp!exion:parquoy,par la mauuai ftiéd’vnoudedcux,nefedoit laifTcràftireplailirà pluficurs ,quandonen a letemps amp;nbsp;opportunité. Bienfèroye-je d’aduis qu’on euft bon iugement à Venir quelles font les perfonnes, car tous ne font pas dignes de fcmblables nacrites:ôc à moy prefque eftrange de croire, qu’vne perfonne fige fçeuft e-llre ingrat d’vn grand benefice, quand il lareceu de qi^lqu’vn-.ôc là fegarc-roientbien les Princes,car l’accointance d’vn fol, iamais neptofitaàlalôgue. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;-l

Et me femblc que l’vn des plus grans fens que puifTe r^onftrervn Seigneur, c’cftdefaccointer,amp;approcher de luy gens vertueux amp;nbsp;honneftes; caril fera iugé,à l’opinion des gens, d’eftre de la condition amp;nbsp;nature de ceux qu’il' tiendra les plus prochains de luy. Et pour conclu rre ceft article, mefem-ble que l’on ne fe doit iamais laffer de bien faire. Car vnfeul amp;nbsp;le moindre

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JO • II. LIVRE DES MEMOIRES

de tous ceux aufquels l’on peut auoir fait quelque bien, fera à l’aducnture vn tel feruice,amp; aura telle recongnoiflance, qu’il recompefera toutes les lafclic-tez amp;nbsp;mefchacetez qu’auoiêt fait tous les autres en cefl endroit. Et ainfi aviez vous veu de ces oftages, comme il y en eut aucuns bons amp;nbsp;recongnoiflans, amp;nbsp;les autres amp;nbsp;la plufpart,mauuais amp;nbsp;ingrats; car cinqoufîxconduifoient ceft œuure aux fins amp;nbsp;intentions du Duc de Bourgons;ne.

C/ K?

Comment le Duc de Bourgongne feit/on entrée en la 'ville du Liege'.amp;comment ceux de Gand^qu:parauant ïauoientaUe';^ma,l receuf humilie rent enuers luy. QH AP. I Ill.

E lendemain que les portes eurent eflé baillées, entra le Duc en la cité du Liege,en grand rriomphe:amp; luy fut abbatuvingt brafsées de mur, amp;nbsp;vny le foflé du long de la grand’* brefehe. A fenuiron de luy entrèrent à pied,bien deux millehommes d’armes de toutes pieces,amp; deux mille Archiers; amp;nbsp;fi demou-ra largement gens en l’oll. Luy eftantàclieual, entraauec les gés de fa maifon,amp; les plus gras de l’oftjlcs mieux parez amp;nbsp;mieux accouflrez que pourroiêteftre,amp;: ainfialladefcédreà lagrad’eglife.Et pour levons faire court,il feiourna aucuns iours en la cité, ôc y feit mourir cinq ou fix hommes de ceux quiauoientcflé fes oftages : amp;nbsp;entre les autres, le meflagerdela ville, lequel il auoit en grand’haine.Il leur donna aucunes loix amp;lt;: coiiftumes nouuelles, il impofa grans deniers fur eux, lefquels il difoir luy eftre devis ,3 caufedepaix ôc. appoinremens rôpus les ans precedens.il emporta toute leur artillerie amp;nbsp;armeures,amp; feit rafer toutes les tours ôc murailles de la cite.

Apres qu’il eut fitit tout cela, ili’en retourna en fon pais; où il fut recueil-, ‘ ly à grand’gloire grand’obtiliance : amp;r par efpecial de ceux de Gand, qui parauant qu’il entraflau pais du Liege, efloyent comme en rebellion auec aucuncs^es autres viiles;mais .à cefl e heure le recueillirent corne vainqueur; amp;nbsp;furent apportées routes les bannières, parles plus notables de la ville, avi deuant de luy,iufquesâBrucelles,amp; ceux qui les apportoienr,vindrétàpied. Ce qu’ils feirent à caufe qu’ai heuredu trefpasdefon pere, lors qu’il feit fon entree à Gand,|iremier qu’en nulle avitte villedefon pais,ayant cefleopinio quec’eftoitla ville de fon pais, où il eftoitleplus aymé, amp;nbsp;qu’à l’exemple de ceftelàfe rengeroient les autres ( comme il difoit vray en ce cas dernier) le lendemain qu’il y eur fait fon cntréc,ils femeirent en armes fur le Marche*, ôc y portèrent vn Saincl,qu’ils nomment fainôl Lieuin,amp; heurtèrent delà chaf fe dudiél Sainóh contre vue petite maifon,appeléc la maifbn de la Cueillette, où l’on leuoitaucuncs gabelles fur le bled, pour payer aucunes debtes de la ' ville,qu’ils auoient fiches pour payer le Duc Philippe de Bourgongnc,quâd * kpaix de ils fcirent*paixdelaÇuerreauecluy (car ils auoient efié en guerre deux ans contre lediét Duc)Ôc en effeôl ils dirent que lediél Saind vouloir palTer par la maifon,fans fe tor(.#e:amp; en vn moment l’abbatirent. Qupy voyant ledict Duc alla fur le Marché, amp;nbsp;monta en vne maifonpour parler a eux: amp;lors grand’partie de notables hommes, tous aimez, l’attendirent : amp;enpafl;uît luy offrirent d’aller auec luy.

Il les

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ÖIes feit demourerdeuant 1’hoftel dc Ia ville, amp;nbsp;qu’ils l’attcndiiTcht ; mais peu a peu, le menu peuple * le contraignit d’aller fur le Marché. Le Duc eftant Illec, il leur comanda qu’ils leuafTent cefte chaire,amp; qu’ils la raportaflent en l’Eglifc. Aucuns la leuoyent pour luy obeir,amp; d’autres la rcmettoient.Ils luy fcirent des demandes contre aucuns particuliers de la ville, touchant aucuns deniers, amp;nbsp;leur promift faire iuftice. Et quand il Veit qui ne les pouuoit départir, il fen retourna en fon logis, amp;nbsp;eux demeurèrent fur le Marché , par elpacedehuiéliours. Lendemain luy apportèrent articles, par Icfquels ils . Iuydcmandoient,quetoutcequelc Duc Philippe leur auoit ofté par* cefte guerre :amp; entre autres chofes, qucchaftun meftierpcuftauoirfaoanniere, cotnmcilsauoientaccouftumé, qui font feptantedeux. Pourladoubte en ^uoy il fo veiCjil fut contrainâ: de leur accorder toutes leurs ePemades, ôc tels * ptiuileges qu’ils vouloient.-amp; incontinent qu’il eut dit le mot,apres plufieurs allées amp;nbsp;venues,ils platcrent fur le Marché toutes les bannières qui ja eftoiét hides.Parquoy ils monftrerent bien qu’ils les culTent prin fes oultre fon vou luifjquand il ne les euft accordces.il auoit bonne opinion de dire quelcs autres villes prendroient exemple a fon entrée,quand il la feitpretnicr à Gand: far plufieursfeirent rebellion .a fon excmplc,commede tuer officiers,amp; au-* très cxcez.Et fil n’cuft creu le prouerbe de fon*pcuple(lcquel difoit que ceux

Gand aymoient bien le fils dc leur Prince, mais le Prince non iamais ) il ucuftpointcftédeccu.Etàla vérité dire,apres le peuple du Liege, il n’en cft-T-v»nXvX^,^^ ttui plus inconftant que ceux de Gand. Vnechofe ont ils affez honnefte, lou leur mauuaiftié.-car à la perfonne de leur Prince ne touchèrent iamais, amp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.

hs Bourgeois, amp;nbsp;les notables hommes,font trefoonnes gens, amp;nbsp;trefdeplai-hns de la folie du peuple.

Il auoit eftédcneccflité que lcdiél Duc cuftdiflimulé toutes ces defobeir lances,afin de non auoir guerre à les fubie(fts,amp; aux Liégeois enfemble:mais ilfaifoit bien fon compte que fil luy prenoit bien au voyage qu’il faifeit il les ranicneroit bien à la raifon,amp;: ainfi en aduint.Car comme i’ay défia dit,ils ap portèrent au deuant luy toutes les bannières à pied, iufques a Brucelles, amp;nbsp;tous les priuilegcs,amp; les lettres qu’ils luy auoict fait figner au partir qu’il feit Gand. Eten vne grand’aflèmbléc qu’il feit en la grand’ falle de Brucelles (ouil y auoit beaucoup d’Ambaffadeurs) luy prefenterent lefdiôhcs bannie-femblablcmcnt tous leurs priuileges,pour en faire à fon plaifir : amp;nbsp;lors fts officiers d’armes,par fon commandement ofterent les bannières des lances en quoy elles eftoient attachées,amp; furent toutes enuoy ées a Boulongnb lurlamcr,à* huid lieues de Calais:amp; encores là eftoient celles qui leur furet oftées durant le temps de fon perc le Duc Philippe, apres les guerres qu’il a-uoit eues aucc eux,où il les auoit vaincus amp;nbsp;fubiuguez nbsp;nbsp;le Chancelier du-

Hit Duc print tous leurs priuileges, amp;nbsp;en cafla vn qu’ils auoient, qui eftoit touchant leur loy. Car en toutes les autres villes de Flâdres,le Prince renou-uelle tous ceux de la loy, chafeun an, amp;nbsp;fait ouir les comptes : mais à Gand, par ce priuilegc,il ne pouuoit créer que quatre hommes:amp; ceux là faifoient le demourant qui font vingt amp;nbsp;deux:câr entout font vingt amp;nbsp;fix Efeheuins delà ville.Quand ceux qui font de laloy des villes, font bons pour le Corn-Eij

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JI IL LIVRE DES MEMOIRES

te de Eland res, il eft cede année là en paix, amp;nbsp;luy accordent volontiers Ces requeftes:amp; au contraire,quand Icfdids de la loy ne luy font bons,il yfuruiét Volontiers des nouuelletez.Outrc ils payèrent trente mille florins au Dlic,amp;: Ex mille à ceux qut ertoient'arentour delLiy.'amp; bannirent aucuns de leurvil-lc,amp;tous leurs autres priuileges furent rendus.Toutcs les autres villes fc pacifièrent pourargenr,carilsn’auoienten rien entrepris contre luy. Et à toutes ces chofes on peut bien veoir le bien qui aduient d’efl:revainqucur,amp;aLifli le dommage d eftre vaincu. Parquoy on doit bien craindre de fe mettre en hazard d vne bataille,qui n’y efi contraint.*amp; fi force eft qu’on y vienne, faut mettre auant le coup toutes les doubres dont on fe peut aduiler. Car volontiers ceux qui font les chofes en crainte,y donnent les bonnes prouilions,amp; • plus (ouuent gaignent que ceux qui y procèdent auec grand orgueihcombic

lt;jue quand Dieu y veut mettre la main,rien n’y vault.

Or eftoient les Liégeois,delqucls auons parlé cy defTuSjexcotniiniez cinq ans auoit)pour lediffercndide leur Euefquc:dont ne faifoient nulle eftinac, mais continiioicntcn leur folie amp;nbsp;mauuaife opinion, fins qu’ils euflent feeu dire qui les mouuc)it,fors trop de bien amp;nbsp;grand orgueil. Et à ce propos vfoit le Roy Louis d’vn mot à mon gré bien fige, où il difoit.-que quand orgueil cheuauche deuant, honte amp;nbsp;dommage le fuyuent de bien pres: amp;nbsp;de cc péché n’eftoit il point entaché.

Comment le '^y^voyant ce cfui eßoit aduenu aux Liégeois^feit ejuel^uepeu de guerreen ‘Bretaigne,contcelesallie-^du Duc de^Bourgongnetc^commentils ß veirent parlèrent ei'ßmble eux deux à Peronne. {ßH A P. l^.

Es chofes ainfi fiiâ-es,fe retira ledid Duc a Cad, où il luy fut faite vne bien-venue de grand’def pence: amp;nbsp;y entra en atmest faictepar ceux de la ville, vne faillie aux champs, ' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pour mettre hors de la ville,ou dedans gens à fonplaifir.Plu-

fieurs Ambaffadeursdu Roy y vindrent,amp;de luy au Roy. Semblablement luy en venoii de Breraigne,amp; aulTi y enuoyoit.Ainfi fepafla cefl hyucr, amp;nbsp;tafchoii toufiours fort le Rcy de faire côfentir lediâ Ducqii il peuft faire à fou plaifir de ce qui clfoit en Brctaigne,amp; Etire audiélDuc aucus partis en recôpenle.Ci 11 ne pouuoit accorder, dont defplaifoit au Roy, veu encores ce qui efloit aduenu aux Liégeois les alliez. Et finalement fi toflquc l’eflé fut venu,ne peut le Rcy auoir plus de patience, amp;: entra leRoy en Bre-. taigne,ou fes gés pour luy,amp; y print deux petits chafleauxtl’vnappeléChà-* Anfeni». tofle,amp; l’autre * Anceny .Incoi tinent vindret ces nouuelles au Duc de Bour-gôgiie, qui fut fort pjrflé amp;nbsp;foluitédcs Ducs de Normâdie amp;nbsp;de Bretaignc: toute diligAcc Rit Ion armée,amp;: efcriuit au Roy, luy fuppliàt qu’il ƒ«ƒ,/» An- fe voulfifl- déporter de ccflecntreprinle,veu qu’ils eftoiêt compris en la tref-ue,amp; fes alliez.-amp; voyant qu’il,n’auoit relponce à fon plaifir, fe mit aux chaps pres de la ville de Peronne,auec grand iirmibre de gens. LeRoy eftoit à Corn piegne,amp; fonarmée toufiours en Bretaignc. Cf mme le Duc eut leiourné là trois ou quatre iouis, vint de pai leRoy le Cardinal BalucAmbalTadeur,qui

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DE PHILIPPE DE COMMIMES.

peu y arrcfta;amp; feit aucunes ouuertures, difint audiôl Duc que ceux qui eftoienten Bretaigne,pourroientbien accorder fans luy.Toufiourseftoienr les fins du Roy deles fcparer.Toftfutdepefclié lediól Cardinal, luy fut laithonneuramp; bonne chere:amp; fen retournaaucc telles paroles,c’cft que le-

Duc ne fclloit point mis aux champs pour greuerleRoy, n’y luy faire guerre,mais feulement pour fccourir fes alliez : amp;, n’y auoit que doulces pa-’’ollcsd’vn colle amp;nbsp;d’autre.

Incontinent apres le partemcnt dudiél Cardinal, arriua deuers lediél Duc ''nherautjappellé Bretaigne: luy apporta lettres des Ducs de Normandie de Bretaigne, contenans comme ils auoient fait paix auecIeRoy,amp; rc-’’oncé à toutes alliances, amp;c nommément à la fienne : amp;nbsp;que pour tous parta-gcsjlediéf Duc de Normandie deuoit auoir foixante mille liures de rente Sgt;c Renoncer au partage de Normandie,qui nagucres luy auoit eftébailIé.Dece-7n’eftoit point trop content lediclmonfeigneur Charles de France ; mais lleftoit force qu’il diirimulaft. Bien fort esbahy fut le Duc de Bourgongne ^cccs nouuclles, veu qu’il ne s’eftoit mis aux Champs que pour fecourir lef diéts Ducs;amp; fut en trelgrand danger le heraut:amp; penfoit lediólDuc,pourcc ^u’il cftoit paflé par le Roy, qu’il euft contrefait fes lettres, toutesfois il eut Semblables lettres par ailleurs. Ilfembla bien lors au Roy qu’il eftoitàlafin ^efon intention, qu’aifemcnt il gaigneroit lediélDuca femblablemcnt ^bndonner les Ducs delTus nommez, amp;nbsp;commencèrent àaller meifagers lècrets de l’vn â l’autre: finalement donna le Roy audiôl Duc de Bourg.on-gne fix vingts mille efeus d’or,dont il en paya la moitié content, auant le le-^erdu Champ,pour les defpens qu’il auoit faiól a mettre fus l’armée. UdiâDucenuoyaaudiôtGigneur vnfien valet de chambre appellé lehan VobrilTet,homme fort priué de luy. Le Roy y print grand’ fiace, amp;nbsp;eut vou- »Boftife loirde parler audiólDuc,efperant de le gaigner de tous poinds à fa volonté, Vcules mauLiais tours que les deux Ducs delTufdids luy auoient fai(îs,amp; veu aufli celle grand’ fomme d’argent qu’il luy auoit donnée,amp; en mandoit quel-^uechofeaudid Ducparledid* VobrifLet, amp;nbsp;enuoya auecluy derechefle Cardinal BalLie,amp; mellireTanneguy du Challel,gouucrneurdeRouirillon, Dabofufe. nionllrans par leur paroles que le Roy auoit trcfgrand delir que celle veuë fe feift. Ils trouLierent ledid Duc à Peronne, lequel n’en auoit point trop d’en-uie,pource qu’encores les Liégeois faifoient ligne de foy vouloir rebeller, à caufe de deux Ambafiadeurs que le Roy leur auoit enuoyez (pour les folici-ter de ce faire)auant celle trefue,qui elloit prinfe, pour peu de iours, entre le Roy amp;nbsp;le Duc amp;nbsp;tous autres leurs alliez. A quoy refpondit ledid Balue,amp; autres defacQmpaignie,queleldiôls Liégeois ne roferoiÿitfaire,veu que ledit Duc de Bourgongne les auoit dellruids l’an paffe, amp;nbsp;rÄbatu leurs murailles, quand ils verroient cell appointement,11 leur en palTeroit le vouloir, s’aucun enauoient eu. Ainlî fut conclu que le Roy viendroit a^’eronne (car tel elloit fonplaifir) amp;nbsp;luyefcriuit ledidDuc vne lettre de fa main, portant feureté d’aller amp;nbsp;retourner,bien ample Ainfii partirent lefdids Ambalfadeurs, dallèrent deuers le Roy,quielloit à Noyon.

Ledid Duc cuidolt donner ordre au faid du Liege, amp;nbsp;y enuoya l’Euefquc

E iij nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;gt;

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H nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;II. LIVRE DES MEMOIRES

pour lequel eftoit ce débat audit païs.-amp; fe retira auec luy lefeigneur d’Hym-bercoLirt,Lieutenant dudid DLic,audiôl pais, amp;nbsp;plufieurs autres côpaignies.

Vous auez entendu par quelle manière auoit eflé conclu que le Roy vien-droit a Peronne. Ainfile feit,amp; n’amena nulle 2;arde : mais voulut venir de tous poinôls a la garde amp;nbsp;feuretédudidt Diic:amp; voulut quemonfeigneurdes Cordes luy vint au deuant’aucc les Archiers dudidl Duc ( à qui il elloir pour lors)pour le conduire. Ainh fut fait.Peu de gens vindret auec luy, toutesfois il y vint de grands perfonnages,comme le Duc de Bourbon,fonfrere le Cardinal,le Comte defainôl Paul,Conncftablede France, qui en rien ne feftoit meflé de cede veüe, mais luy en defplaifoit; car pour lors le cœur luy cftoit creu, ôc ne fe trouuoit point humble entiers lediél Duc corn me autresfois,amp;: pour cede catife n’y auoit nulle amour entre les deux. Audiv vint le Cardinal Balue,le Gouuerneur deRouirillon,amp;: plufieurs autres. Corne le Roy approcha de la ville de Peronne,Icdidt Duc luy alla au deuant,fort bien accom-paigné : amp;nbsp;le mena en la ville ; amp;nbsp;le logea chez le Recepueur ( qui auoit belle maifonSc pres du chadcau)car le logis du chadeau ne valoir rien, amp;nbsp;y auoit petit logis.

La guerre entre deux grans Princes edbien aifée 'a commencer, mais tref-mauuaileà appailer,pour les chofes quiy aduiennent,amp; qui en defeendenr. Car maintes diligencès fe font de chalcun codé pour grcucr fon ennemy,qui endfoubdainmométnelepeuuentr’appellcr:commeilfevoitparces deux Princes, quiauoient entreprins cede veüe fi foubdainement, fansaduertir leurs gens qui cdoient loing ; lefquels de tous les deux codez accomplidbicc les charges que leurs maidres leur auoient baillées. Le Duc deBourgongne auoit mandé l’armée de Bourgongne, où pour ce temps là auoit grand’No-blede:amp;auec euxvenoient monleigneur de Brede, l’Euefquc de Genefue, le Comte de RomÔt,tous freres amp;nbsp;enfans de la maifonde Sauoye(carSauoi-fiens amp;Bourguignonsdetous temps l’entr’aymoicnr tresfort)amp; auHîaucuns Allemans(qui confinét tant en Sauoye qu’en la Côté de Bourgongne)eftoiéc en cede bande. Et faut entendre que le Roy auoit autrefois tenu lefeigneur de Brede en prifon , à caufe de deux theu.diers qu’il auoit fait tuer en Sa-uoye.'parquoy n’y auoit pas grand’amour entre eux deux.

En cede compagnie edoit encores monleigneur du Lau (queleRoyfem-blablementauoit longtemps tenu prilonnier,apies auoirede tref prochain défiperfonne.-amp; puis fedoitefehappé de la prilbn,amp; retire en Bourgongne) amp;nbsp;medire Poncet de Riuiere,amp; le feigneur d’Vrfé, depuis Grand Efcuyerde France.Et toute cede bande,donti’ay parlé,arriua auprès dePeronne, comme le Roy cntroit.-amp; entra lediéf de Brede, amp;nbsp;les trois dont i’ay parlé, en la ville de Peronne, poi||ans la Croix Liinét André:amp; cuydoient venir à temps pour accompaiguer ledid Duc de Bourgongne, quand il iroit au deuant du Roy :mais ils arriuerc^vn peu trop tard, lis vindret tout droit en lacham'bre du Duc luy faire reuerence : amp;nbsp;porta monleigneur de Brelfc la parollc, fup-plianr au.Ducquc les trois dedus nomez vinllcnt là en fifeuretd,nonobdant la venue du Roy, ainfi comme il leur auoit edé accordé en Bourgongne, SC promis à l’heure qu’ils y arriuerent ; amp;nbsp;audi qu’ils cdoient prefts à Içferuir

entiers

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DE PHILIPPE DE C O M M I N E S. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;55

entiers tous amp;nbsp;cotre tous.Laquelle requeflc JediôL Duc leur octroya debou-les remercia. Le d( meurani de celleairuce qii’aucit couduiét IcMa-’^efchal de Bourgongne,le logea aux champs,comme il fur ordonné. L edidt ^‘'irefchal ne vouloir point moins dcmal au Roy , que les autres dont i’ay Pyle.-acaufe de la ville de Pinal,afhfe en Lorraine,qu’il auoit autresfois donnée audiót Marefchal,amp; puis luy ollapourladonnei au Duclehan de Cala-duquel alTezde fois a eÜé parlé en tes prefens memoires. 1 oft fut le Roy ^duerty de l arriuee de toutes ces t^ens delîus nommezjamp; des habille mens en ^uoy elLoient ari iuez; fi entra en grand’paour, amp;nbsp;enuoya prier au Duede ^ourgongne qu’l! peufi: loger au chafteau,amp; que tous ceux là qui elEoient ve-^us,elloienc les mal vcillans. Lediét Duc en fut tref-joyeux, ôtiuy feit faire » '( fin logis,amp; 1 alfeura fort de n’auoir nulle doubte.

^^^‘elßon,ßirl'a,uäntage eiue les nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;principalement en hi^HoiresJbnt aux

Princes grands Seigneurs. QH A P. i^l.

EsTgrâd’foIieàvn Princedefoy foubs-mettreà la puiflan-eed’vn autre, par efpecial quand ils font en guerre, *où ils ont effé en tous endroits:amp;: eft o;rand aduanta^e au x Piinecs d’auoir veu des hifloires en leur ieunelîe , elquelles le voyent largement de telles alîemblées amp;nbsp;de grandes fraudes, ti oin-peries,amp; paiiuremcns, qu’aucuns des anciens ont fait les vus ^ers les autres:amp; prins amp;nbsp;tuez ceux qui en telles feuretez feffoiêt fiez. Il ne 11 pas didl que tous en aient vlé:mais l’exemple d’vn eft allez pour en ftirc lages plulieursjamp;r leur donner vouloir de fe garder; eft, cemefemble (à ce que Liy veu plufieurs fois par experience de ce monde, où i’ay efté autour des ; binces l’efpacc de dixbuictans ou plus,ayant claire congnoilTance^cs plus grandes ôc, lecrettes matières qui le foient traiébées en ce Royaume de France amp;nbsp;Seigneuries voilinesll’vn des grands moyens de rendre vn homme läge dauoir leu les hilloircs anciennes, amp;apprédre à fe conduire amp;nbsp;garder, amp;nbsp;entreprendre figement paricclles amp;nbsp;par les exêples de nos predecelfeurs. Car ■ . nollre vie eft fi briefue qu’elle ne luffifi à auoir de tant de chofes experience. loincfaulTi que nous fommes diminuez d’aage,amp; que la vie dcs*hômes n’eft f longuecomme elle fouloit, ny les corps li puilfans. Semblablement que nous fommes alFoiblis de toute foy amp;nbsp;loyauté les vns entiers les autres;

ne fçauroïedire par quel lieu on fe puilTeafleurer les vns des autres: amp;nbsp;par cfi-pccial de's grands,qui font alTez enclins à leur volonté fans regarder autre rai-lon;amp; qui pis vault, font le plus fouuent enuironnez gens qui n’ont l’œil aaiitre choie qu’à complaire à leurs maillres, amp;nbsp;à leur Wüer toutes leurs œu-ureSjfoient bonnes ou m3nuaifes:amp; fi quelqu’vn fe trouue qui vueille mieux faire,tout fe trouuera broiüllé. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•

Encores ne me puis-je tenir de blafmer les feigneurs ignorans. Enuiron tous feigneurs Ce trouuent volontiers quelques Clercs amp;nbsp;gens de robbes longues (comme railon eff) amp;nbsp;y font bien leans,quand ils font bons ; amp;nbsp;bien dangereux, quand il$ font mauuais. A tous propos ont vne loy au bec, ou

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^6 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;IL LIVRE DES MEMOIRES

vnehin:oire;amp; la meilleure qui fepuifletrouuer,fetourneroit bien à manuals fens:mais les fages amp;nbsp;qui auroient leu, n’en feroient iamais abufez : n’y neferoient les gens G hardis, de leur faire entendre menfonges. Et croyez que Dieu n’a point eftably l’office de Roy n’y d’autre Prince, poureftre exercé par les belles,ne par ceux qui par la gloire dientue nefuis pasClerc,ie laifle faire à mon confcifie me fie en eux. Et puis, fans affigncr autre raifon,fen vôt en leurs efbats. S’ils auoient efté bien nourris en la ieuneffie, leurs raifons feroient autres,amp; auroiéc enuie qu’o n eftimaft leurs perfonnes amp;nbsp;leurs vertus, le ne veux point dire que tous les Princes fe (eruent de gens mal condition-nezzmais bien la plufpart de ceux que i’ay congnus, n’en ont pas toufiours e-• fté garnis.En temps de neceffité ay iebienveu que les aucuns fages fe font bienfeeu feruirdes plus apparens,amp; les chercher fans y rien plaindre: amp;nbsp;entre tous les Princes, donti’ay eulacongnoiffiancc,le Roynoflre maiftre l’a mieux feeu faire,amp; plus honorer amp;nbsp;eflimer les gens de Bien amp;nbsp;de valeur. Il efloit affez lettré, il aymoit à demander,amp;àentêdrc de toutes chofes.'amp;auoic le fens naturel parfaiôlement bon, lequel precede toutes autres fciences,lt;ju’o fçauroit apprendre en ce môde;amp; tous les liures qui font faicls neferuiroiet de rie,fi n’efloit pour ramener en mémoire les chofes paffiecs; amp;nbsp;qu’auffiplus on voit des chofes en vnfeul liure en trois moys, que n’en fçauroient veoira l’œil amp;nbsp;entendre par experience,vingt hommes de reg, viuans l’vn apres l’au-tre.Ainfipourconclurreceflarticle, me femble que Dieu ne peut enuoyer plus grand’playc en vn pais,que d’vn Prince peu entendmearde là procedet tous autres maux. Premièrement en vient diuifion amp;nbsp;guerre: car il met toujours en main d’autruy fon authorité, qu'il deuroit plus garder que nulle autre chofe: amp;nbsp;de celle diuifion procédé la famine amp;nbsp;mortalité, amp;les autres maux qui dependent de la guerre.Or regardez doneques, fi les fubieds d’vn Prince ne fedoibuent point bien douîoir, quand ils voyent fes enfansmal nourris,^ entre mains de gens mal conditionnez.

Comment^ amp;nbsp;pourquoy !e7{oy Lois fut arrcße\amp;^ enfermé dedans le chaßeatt de Teronne^par le Duc de Lourgongne. QH AP. 1^11.

Rauez vousouy del’arriLiécde celle armée de Bourgonrac: laquelle fut à Peronne prefquc auflitofl que le Roy : car le-didl Duc ne les eufl feeu côtremander à téps, pource que bien auant efloient en campaigne, quand la venue du Roy fe trai-toit.-amp;troublèrent affez lafelle,auec les fulpiçions qui ad-

uindrent apres. Toutesfois ces deux Princes commirent de leurs gens à eftrc enfembleamp;traiéler^ leurs affaires le plus amiablement que faire fepour-roit : amp;nbsp;comme ils efloient bien auant en befongne, amp;nbsp;ia y auoient elle par trois ou quatre iours,4î.iruindrent de tref grades nouuclles du Liege,lefquel-les ic vous diray. Le Roy, en venant à Peronne, ne s’efloit point aduifé qu’il auoit enuoyé deux Arabaffadeurs au Liege, pour les folliciter contre lediôt Duc.-amp; neantmoins lefdiéls Ambaffideurs auoient fi bien diligenté qu’ils auoient ia faievn grand amas : amp;: vindrent d’emblée les Liégeois prendre la ville

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;^7

la ville de Tongres, où edoitl Eucfquc du Liege, ôc lefeigneur d’Hymber-coLirt bien accompaigné,iidques à deux mille hommes amp;nbsp;plus : prindrent Icdid Euefquc,amp; ledidt d’Hymbercouir, mais peu de gens y furent tuez, amp;nbsp;n’en prindrentnuls queces deux,amp; aucuns particuliers de l’Euefque.Lesautres fen fuirent amp;nbsp;laiiferent tout ce qu’ils auoyentj comme gens defeonfits. Apres cela lefdids Liégeois fe mirent en chemin vers la cite du Liege alTife allez pres de ladiôle ville de Tongres, En chemin compofa lediôHcigneut d’Hymbercourtauee vn cheualier, appelle melïire Guillaume de Ville,autrement didt entre les François, le Saunage. Cediél cheualier fauua lediôh d’HymbercourtjCraigiianrque tefol peuple ne le tuaft; amp;: retint fa foy, qu’il regarda gueres, carpeu apres il fut tucluymefme. Ce peuple elloit fort loyeuxdelaprinfede leurfèigneur Euefquedu Liege: ils auoienten hayne plufeurs chanoines,qu’ils auoient prins ce ioLir,amp; à la premiere repeüe, en tuerenteinq ou nx. Entre les autres en y auoit vn, appelle maiflrc Robert, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;»,

fortpriuédudiôl Euefquc,que pluheurs fois i’auoye veu arméde toutes pièces apres fon maiftre:car telle cEl’vlance des Prélats d’Allemaigne. Ils tue-rentîediôf maiftre Robert, prefent lediôt Euefque, amp;nbsp;en feirent plufieurs pièces qu’ils fe iettoientà latertelvn dcEautre, par grand’ derifon. Auant qu’ils eulfent fait fepe ou huid lieues , qu’ils auoient à faire, ils tuèrent iuf-lt;îuesàfeize perfonnes Chanoines, ou autres gens de bien, quah tous lerui-teursdudid Euefquc.FaifanscesœuureSjlafcherent aucuns Bourguignons:

•r nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I rr n nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;■ i contens.

carjalentoyentletraictedepaixencommence;amp; euiienteire contraints de £xe(i. direque ce n’cfloit que contre leur Euefque: lequel ils menèrent prilonnier en leur cité. De ceux qui fuyoient, dont i’ay parlé, fefFraya tout le quartier paroùils palToient; êc vindrent tort ces nouLiellesau Duc, les vnsdiloient que tout eiloit mort, les autres le contraire. De telles matières ne vient point Volontiers vn meflagerlêul;mais en vindrentaucuns,qui auoient ainli veu liabillerces Chanoines,qui cuydoient que ledid Euefque fuftde^enominee,Scledid feigneurd’Hyrabercourt, amp;quetoutledemeurantfuft mort;

amp;certifioieiat auoir veu les Ambafladeurs du Roy en cede compagnie, ôc Icsnonamoyent. Et fut compté tout cecy audid Duc,quifoudainement y îidioudafoy;amp;entra en vue grand’colcre, difint que le Roy efloit venu là pour letromper,amp;:foudaincment enuoya fermer les portes de la ville,amp; du chadeau,amp; feit ferner vne alFez mauuaife raifon.'c’edoit qu’on le fiifoit pour vneboé'rtcqui eftoit perdue, où il y auoit de bonnes bagues amp;nbsp;de l’argent. Le Roy qui feveit enfermé en ce chadeau ( qui eft petit) amp;nbsp;force Archiersà laporte,n’edoit point fins double: amp;nbsp;fe voyoit logé rafibus d’vnc tour,où vn Côte de Vermàdois auoit fait mourir vn dé predecedeur Roy de francc.Pour lors cdoye encoreauec ledid Duc, amp;nbsp;le l^ruoye de Chambel-lan,amp;’^couchoyeen'fa chambre quand ie vouloye:car telle edoitl’vfince de * celte mailon. Lediél Duc,quand il veit les portes fermées, feit la il 1 ir les gens de fl chambre, amp;nbsp;did à aucuns que nous edions, queleRoy edoit venu là pour le trahir,amp; qu’il auoit dilTimulé ladiéfe venue de toute fa puidance, 5c qu’elle f’edoit fiiôlc contre fon vouloir : amp;nbsp;va compter les nouuelles du Liege,amp; comme le Roy l’auoit fût conduire par fes Ambadadeurs itc comme

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58 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;II. LIVRE DES MEMOIRES

tous fes gens auoicnt cfté tuez.-ßc eftoit terriblement cfmeu contre le Royjamp; le menaflbit fort.-amp; croy véritablement, que fi à celle heure là il euft trouue ceux à qui il f addrelToit, prefts à le conforter ou confeiller de faire au Roy vne maüuailè compagnie,!! euft efté ainfi faid;amp; pour le moins^eull elle mis en celle grolfe tour. Auec moy n’y auoit aces parolles que deux Valets de Ejipz.SX chambre;l’vn appelle Charles * de VifinjUatifde DijoUjhomme honelle, amp;nbsp;qui auoit credit enuers fon maillre.Nous n’aigrifmes rie,mais adoulcifmes à nollrc pouuoir.Toll apres tint aucunes de ces parolles à plufieurs, amp;nbsp;coururent par toute la ville, amp;iufques en la chambre où elloitleRoy: lequel fut fort effrayé,amp;fi clloit généralement chafeun, voyant grand’ apparence de mal,amp; regardant quan tes chofes y a à confidercr,pour pacifier vn différend, • quand il efl commencé entre fi grands Princcs,amp;: les erreurs qu’ils feirêt tous deux de n’aduertir leurs feruiteurs, qui elloient loing d’eux, empefehezen leurs affaires,amp; ce qui foudainement en cuy da aduenir.

fur ce que quand deux grands Princes sentre-uoient pour cuyder appaißr difer ends y telle 'ueuè efl plus damageable que profltable. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;AT. P'II1.

Rand’ folie efl à deux grands Princes, qui font corne efgaux en puilfanccjde fcntre-voir,finon qu’ils feufîént en grand’icu-ncffecqui efl le temps qu’ils n’ont autres pêfées qu’à leurs plai-firs, mais depuis le temps que l’enuie leur efl venue d’accroi-ftre les vns furies autrcs,cncorcs qu’il n’y euft nuis perils de pet

fonnes (ce qui efl quafi impoffible) fi accroift leur mal-veillancc, amp;leur enuie. Parquoy vaudroit mieux qu’ils pacifiaffent leurs différends par Cages amp;nbsp;bons feruiteurs, comme i’ay dit ailleurs plus au long en ces memoi-res-.mais encor en veux-je dire quelques experiences que i’ay vcuês amp;nbsp;feeuès de mon temps.Peu d’années apres que noftrc Roy fut couronne, amp;nbsp;auant le Bien public, fè feit vne veuê’du Roy de France amp;nbsp;du Roy de Caflille,qui font les plus alliez Princes qui foient en la Chreftienté : car ils font alliez de Roy à Roy,amp;de royaume à royaume,amp; d’homme à homme, amp;nbsp;obligez fur grandes malediélions de les bien garder. A cefte venue vint le Roy Henry de Caflille bien accorapaignéjufques à Fôtarabie,amp; le Roy eftoit à fàinél lehà de Luz,qui efl à quatreTicües, chafeun eftoit au confins de fon royaume. le n’y eftoiepas.-maislc Roy m’en a compté, amp;nbsp;monfeigneur du Lau. Auffi ' m’en a efté did en Caflille par aucuns feigneurs qui y eftoyentauee le Roy de Caflille:amp; y eftoit le Grand maillre de faind lacques, amp;nbsp;l’Archeuefquc de Tollcdo,lcs plus grands de Caflille pour lors. Auffi y eftoit leComtede Lodefme, fon mignon, en grand triomphe; amp;nbsp;toute fa garde, qui eflojent quelques trois cens ^euaux de Maures de Grenade, dont y en auoit plu-fieurs Negrins. Vray efl que le Roy Henry valoir peu de fii perfonne, amp;nbsp;(io-noit tout fon heritage, ou fe le laiffoit öfter à qui le vouloir ou pouuoit pren-dre.Noftrc Roy efloir auffi fort acompaigné,commcauczveu qu’il enauoit bien de couflume:amp; par efpecial fa garde eftoit belle. A celle veue fc trouua la Roync d’Aragon, pour quelque différend quelle auoit auec le Roy de Caflille, pourEflelle, amp;nbsp;quelques autres places affifes en Nauarre ; dccc différend

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DE PHILIPPE D E C O M M I N E S. 59

différend futic Pvoy iuge. Pour continuer ce propos que la veuë des grands Princes n’ciL point neceflaire; ces deux icy n’auoient iamais eu différend, ne rienàdepartir;amp;fe veirent vnefois ou deux ieulement, fur le bord de la ri-uiere,qui depart les deux royaumes a l’endroit d’vn petit Cdiaflcau, appelle Heurtebife:amp; paffaleRoy de Callillc du coftcdedeca.Ils *n’arrefterent gue * E’ resjfinon autant qu’il plaifoit a ce grand Maiftre de fainôl laques, amp;aceft pas fou; Archeuefque de Tolledo. Parquoy le Roy chercha leur accointance, amp;nbsp;vin-drent deuers luv àiainét lehandeLuz , amp;nbsp;print srand’intelligence ôcami-tiéaucc eux, amp;nbsp;peu eftimaleur Roy. La plus part des gens des d'eux Roys Rjpdeca-eftoient logez à Bayonne, qui d’entrée fe bâtirent trelbien, quelque allian- uoit ce qu’il y euff Auffi font-ce langues differentes. Le Comte de Lodefme paf-hlariiiicreen vn bafteau, dont la voile efeoit de drap d’or; amp;auoit des brodequins fort chargez depierreties,amp; vint vers le Roy. Ilauoit largement de l^ienSjS: depuis ie le vey duc d’Albourg,amp; tenir grand’ terre en Calhlle.Auf-ûfedreffoient moqueries entre ces deux nations fl alliées.Le Roy de Caftil-leeftoit laid,amp; feshabillemens defplaifans aux François,qui fe moquèrent. NoftrcRoy fhabilloit fort court, amp;nbsp;G mal que pis ne pouuoif.amp; aflez man uaisdrap portoit aucunes-fois:amp; portoit vn mauuais chapeau, différant des autres ,amp; vne image de plomb deffus. Les Caftillans fen moquoient, ôc di-loicnt que c’efloit par chichete'. En effect ainh fe départit cefte affemblée plci ne de moquerie amp;nbsp;de pique;amp; onqties puis ces deux Roys ne f’cntfaymerétî amp;fe drclfa de grands broüiîlis entre les feruiteurs du Roy deCaffille qui ont duré iufques à fàmort,amp;long temps apres ;amp; l’ay veule plus panure Roy, abandonné de fes feruiteurs, queievey iamais ; la Royne d’Aragon fe don- , lut de la fenteuce que le Roy donna au profit du Roy de Caftille. Elle en eut le Roy en grand’ haync,amp; le Roy d’Aragon au ffi : combien qu’vn peu faide-tent de liiy contre ceux de Barcelonne en leur neceffité; mais peu dura cede amitié, amp;nbsp;y eut dure guerre entre 1 e Roy amp;nbsp;le Roy d’Arragon plu^e feize ans,amp; encores dure ce différend.

Il faut parler d’autres. Le Duc de Bourgongne Charles feftdepuis véu(a fâgrand’reqLieffe(auecrEmpereui Federie, qui lors eftoit viuant : ôc y feit merueillcufedcfpcnce,pourmonflrerfontriomphe, amp;trai6lerent de plu-fieurs chofes à Treues,où cefte veuë fe feit:amp; entre autres chofes, du mariâ-gedeleurs enfans, qui depuis eftaduenu. Comme ils curent efté plufieurs iours enfemblc,rEmpereur fen alla fans dire Adieu, à la grand’honte amp;nbsp;folie dudiétDuc.Onques puis nef entr’ay merer,ne eux ne leurs gens; les Aile» mans mefprifoient la pompe amp;nbsp;laparolle dudid Duc,l’attribuant a orgueih Les Bourguignons mefprifoient la petite compagnie de l’Empereur, amp;nbsp;les panures habillemens. Tant fe demena laqueftion, qi^ la guerre qui fut à Nuzenaduint : ievey auftilediólDucdeBourgongne, quifeveit à fainél Paulen Artois auec le Roy Edouard d’Angleterre , do^t il auoitefpoufé la fœtir, amp;nbsp;eftoient freres d’ordre. Ils furent deux iours enfemble, les feruiteurs du Roy eftans fort bendez.Les deux parties fe plaignoient audiétDuc, lequel prefta l’oreille aux vns plus qu’aux autres, dontleurhayne faccreut. Toutes-fois ilaydaaudiôlRoy,àrccouurerfon royaume,ôe luy bailla gens.

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60 nbsp;• II. LIVRE DES MEMOIRES

i’rgent,amp; nauires.Caril en eftoit chalTé par le Comte deWarnich. Et ncn'-obftantccferLiiceldont il recouura lediâ: Royaume) iamais depuis ils ne faymeient,nc dirent bié l’vn de raiitre.Ie vey venir vers ledidl Duc, le Côte Palatin du Rhin,pour le veoir, lequel futplufieurs iours à Brucelles fortfe-Royéjrecticiliyjbonoréj amp;nbsp;logé en chambre richement tendue. Les gens du-diélDucdifoientqueccs Allemans eftoient ords, amp;nbsp;qu’ils iettoient leurs houfeaux fur ces lids fi richement parez, amp;nbsp;qu’ils n’efioient point honne-ftes comme nous, amp;: l’efiimerent moins qu’auant le congnoifti c;amp; les Allemans , comme enuieux parloient amp;nbsp;mefdifoient de celle grande Pompe.En effedonques puis nefaymerent, ny nefeirent feruicel’vnà l’autre. le vey aufii venir vers ledid Duc,le Duc Sigifmond d’Auflrithe,qui luy vendit la

• Comté de Ferrette,affife pres la Comté de Bourgongne, cent mille florins d’or,pource qu’il ne la pouuoit deffendre des Suilîes.Ces deux Seigneurs ne ; pleurent gueres l’vn à l’autre,amp; depuis fc pacifia ce Duc Sigifmond auec les Suiires,amp; oflaaudid Duc ladide Comté de Ferrctte,amp; retint fon argent; Sc en aduint des maux infinis audid DucdeBourgongne.En ce temps propre y vint le Comte de Wariiich,qui onques- puis femblablement ne fut amy du Duc de Bourgongne,ne ledid Duc le ficn.

le me trouuay prefent al’aflcmblee qui fe feit au lieu dePicquiny (pres la^ ville d’Amiens) entre noflrc Roy le Roy Edouard d’Angleterre : amp;nbsp;en . parleray plus au long où il feruira. 11 fetint bien peu déchoies entre eux qui y furent promifes.Ils befongnerent en dilfimulation, vray cil qu’ils n’eurent plus de guerre (aulTi la mer efloit entre eux deux) mais parfaide amitién’y *dcuic con- eut iamais.Et pour’'^conckifion, mefemblequeles grands Princes ne fedoi-uent iamais veoir,fils veulent demeurer atTiis,commeie l’ay dir:amp; voiey les occafions qui font les troubles . Les feruireurs ne fepeuucnt tenir de pailer des chofes paflees, les vns ou les autres le prennent en dtfpit: il nepeuteftre que les ^ens amp;. le train de l’vn ne foit mieux accouftré que ccluy de l’autre, dont {’engendrent moqueries ; qui font chofes qui defplaifênt merueil-leufementàceux qui lont moquez. Et quand ce font deux nations difleren-tesjeurs langages amp;nbsp;habillcmensfont differents: ôcce qui plaiflà l’vn, ne plaift pas à l’autre.Des deux Princes, il aduientlouuentejuel’vnale perfon-nageplus honnelle ôc plus agréable aux gens que l’autre,dont il a gloire, ôi prend plaifir qu’on le loue: amp;nbsp;ne fefait point cela fins blafraer l’autre. I/S premiers ioiirs qu’ils fe font départis, tous ces bons comptes fe dienteiiTo-

amp; bas:amp; apres par’^inaducrtence fen parle en *difant, en frappant, amp;nbsp;*'cn difnant tappotté dcs dcux coflcz.Car peu de chofes y a fccrettes en ce mon-amp; en foup- de,par efpecial de celles qui font diètes.Icy font parties de mes raifons, que gt;rSw»S.”’quot; veuès amp;nbsp;fceLiès,i)uchant ce propos de deflus.

Comment renonça à l'alliance des Liégeois^ ^/cnrfortir hors du Chaßeau de Teronne.

Chap. ix.

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DE PHILIPPEDECOMMINE s. et

’A Y beaucoup mis,auat que retourner à mon propos delar-rc{l,en quoy eftimoic le Roy eftre à Peronne dont i’ay parle, ôc en (uis failly,pour dire 4ux Princes mon aduis de telles aß W fcmblées. Ces portes ainfi fermées, amp;nbsp;gardées par ceux qui edoient coirrmis, furcntainli deux ou troisiours:amp; cependant lediél Duc de Bourgongne ne veit point le Roy , n’y n’entroit des gens du Roy au Chadeau, quepeu, amp;nbsp;par leguichetde la por-te.Nuls des gens dudiélfeigneur ne furent odez d’auprès luy; mais peu, ou nuis de ceux du Duc alloicnt parler à luy, n’en G chambre, au moins de ceux qui auoientauthoritéauec luy. Le premier iour, cefuttouteffroy Sc niurmiire par la ville , le fécond iour ledicl Duc fut vn peu refroidy : il tint confeil la plus part du iour,amp; partie de lanuiéf. Le Roy fiifoit parler a tous* ceux qu’il pouuoic penicr qui luy pourroientaider,amp; nefailloit pas à pço-nietrre,amp; ordonnadidribuer quinze milleeftus:mais celuyqui eutlachar-ge,en retint vne partie, amp;: feu acquita mal, comme le Roy iceut depuis. Le Roy craignoit fort ceux qui autres-fois l’auoient ieruy : Icfquels.edoient ve-nusaucccedearmcedcBourgongne, dont i’ay pailé, qui ja fe difoient au Duc de Normandie fon frere. A ce confeil,d’ôt i’ay parlé,y eut plu/ieurs opinions .-la plus part louèrent amp;nbsp;furent d’aduis que la feuretequ’auoit le Roy luy fud gardée; veu qu’il accordoir adez la paix en la forme qu’elle auoit ede couchée parelcrit. Autres vouloient fi prinfe rudement, lans cerimonie: aucuns autres difoient qu’à diligence on feid venir monlcigneur de Normandie fon frere,amp; qu’on feid vne paix bien auatageufe pour tous les Princes de France. Et fcmbloit bien à ceux qui failoienr cede ouucrrure,que li cl-lefaccordoit,leRoy feroit redrainéf,amp; qu’on luy bailleroitgardes:amp; qu’vit 11 grand feigneur prins , nele deliureiamaisouàpeine,*quandon luy afait 11 grand’offencc.Et en vey les chofes fi*afpres, que ie vey vn hommehoufé amp;predapartir, qui ja aiioir plufieurs lettres adrelLmtes à monfei^ieur NormandieedantenBretaigne:amp;: n’attendoir que les lettres du Duc, ^*^*-’* tesfoiscecy fut rompu.Le Roy feit faire des ouuertures, amp;nbsp;offrir de bailler’»mZ enodage le Duc de Bourbon,amp; le Cardinal fon frere,le Connedable,amp; plu-fieurs autrestôc qu’apres la paix conclue,il peud retourner iufques à Compie gne.’amp; qu’incotinent il feroit que les Liégeois repareroient tout,ou fe dccla-i’roitcontreeux.CeuxqueleRoy nommoitpour edre odages, foffrirent fort,au moins en public.Ie ne fçay l’iis difoient ainfi à part, ie mû doubte que non; amp;nbsp;à la vérité ie croy,* qui les eud laillez,ils ne fufïent pas reuenus. * qu-ii ie«y Cede nui(d,qui fut la tierce, ledicl Duenefe defpouillaonc, feulement

fe coucha par deux ou trois fois fur fon lilt;d,amp; puis fe pou rmenoit; carrelle «ucnu.t*e-i I n nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;» i z nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;m -r» ri

eltoit fa façon, quand il edoit trouble. lecouchay c^te nuict en la chambre, amp;nbsp;me pourmenay auec luy plulieurs fois. Sur le matin fe trouua en plus grand’colere que iamais,vfant de menaces, amp;nbsp;pred àgxecuter grand’ choie: toutesfoisilfereduilitenfortequefileRoyiuroit la paix, amp;nbsp;vouloir aller auecluy au Liege,pour luy ayderà fevenger,amp; monfeigneur du Liege, qui edoit fon parent, il fecontenteroir ; amp;nbsp;foudainement partit pour aller en la chambre du Roy, amp;nbsp;luy porter ces parollcs.. Le Roy eut quelque amy qui

F

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6t II. LIVRE DES MEMOIRES

l’enaduertit, l’afieurant dcn’auoirnul mal, fil accordoit ces deux poinÄs; mais fil faifoit le contraire,il fc mettroit en E grand peril, que nul plus grand neluy pourroitaduenir.

Corne le Duc arriua en fà prefence,la voix luy trêbloit,tant il eftoit cfmeu, amp;nbsp;preft de fe courroiicer.il feit humble contenance de corps,mais fa gelte amp;: parolle efloit alpre, demandât au Roy fil vouloir tenir le traidc de paix, qui auoit cité efeript amp;accordé,amp; E ainE le vouloir iurcr:amp; le Roy luyrelpôdir que ouy. A la vérité il n’y auoir rien eEé renouucllé de ce qui auoit eflé fait de liant Paris,touchant le Duc de Bourgongne,ou peu,ou moins : amp;nbsp;touchât le Duc de Normandie,* luy eftoit beaucoup amêdé.’car il eftoit did qu’il reno-ceroit à la Duché de Normandie,amp; auroit Chapaigneamp; Brie,amp; autres places • voiEnes par fon partage. Apres luy demanda lediôl Duc fil ne vouloir point venirauecluyauLicge,pouraydcràreuancherla trahilonque les Liégeois luy auoient fiide,âcau(e de luy amp;nbsp;de fâ venue: aufti luy dift la prochainc-té du lignage,qui eftoit entre le Roy amp;nbsp;l’Euefque du Licgeicar il eft de la mai« fon de Bourbon. A cefte parolle le Roy refpondit, qu’apres que la paix feroic iurée(ce qu’il defiroiOil eftoit content d’aller auec luy au Liege, amp;nbsp;de mener des gens, E petit ou Ci grâd nôbre que bo luy fembleroit.Ces parolles efioui-rent fort le Duc,amp; incontinent fut apporté le traiclé de paix : ôi fur tirée des coffres du Roy la vraye croix,que Eiincl Charlemaignc portoir,quifappellc la croix de Vidoire.-amp;iurerentla paix, amp;nbsp;tantoft furent fonnez les cloches par la vi lle.-amp; tout le monde fut fort efiouy. Autresfois a pieu au Roy me faire ceft honneur de dire,quei’auoyebienferuy â cefte pacification. Incontinent efcriuitlediôl Duc en Bretaignc ces nouuclles; nbsp;nbsp;enuoya le double du

traidé,par lequel ne fedeEoignoic,ne fedcllioit d’eux:amp; fi auoit ledid mo-fèigneur Charles partage bon, veu le traidé qu’ils auoient fait en Bretaigne, par lequel ne luy demouroit qu’vne penfion,comme vous auez ouy.

Comment le 7\oy accompaigna, le Duc de Bourgongne^ faifant la guerre Liegeoisjpar-auantfes alll/e'::;. QHAP. X.

^Ncontinent que cefte paix fut ainfi faide amp;nbsp;conclue ,lé-partirent le Roy amp;nbsp;le Duc, amp;nbsp;tirèrent vers Cambray, amp;nbsp;de la au païs du Liege:amp;eftoitâ l’entrée d’y uer, amp;nbsp;le temps eftoit tref mauuais. LcRoy auoit auecluy lesElcoftbysdcla garde,amp; Gens d’armes peu, mais il feit venir iufqucs a trois cens Hommes d’armes. L’armée dudid Duc eftoit en deux parties: Ivne menoitmonfeigneur le Marefchal de Bourgongne, ( dont vous auez ouy parler cy delfus) amp;nbsp;y^ftoient tous les Bourguignons, amp;; ces Seigneurs de Sauoye, defquels vous auez ouy parler:amp; auec eux grand nombre de gens du pais de Hainault,deLuxembourg,dcNamur, dcLambourg. L’autre partie eftoit auec ledi Duc. Et quand ils approchèrent de la cité du Liege, on tint confeil prefent le Duc,où aucuns aduiferent qu’il feroit bon de rcii', uoyerpartie del’aimée.'veu que cefte cité auoit les portes amp;nbsp;murailles ra-fces,de l’an precedent,amp; quedcnulcoftén’auoient clperancedefecours;

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. ^3 3ufïi que le Roy eftoir kl en pcrionnc contre eux:leqiiel ouuric aucuns partis pour eux,quail tels qu’on les demandoir. Celle opinion ne pleut pas au Duc, dont bien luy en printxariamais homme ne full h prell de perdre le tout; ôc ^alufpiçio, qu’il auoit du Roy,luy feit choifir ce fage party;amp; efloit tref mal 3duiléa ceux qui en patloicnt,depenferellrerropforts. C’elloitvne grande cfpccc d’orgueil ou de folie, i/. maintcsfoisi’ayouy de telles opinions, amp;lc fontaucunesfois les capitaines pour eflrecllimezdehardiene, ou pour n’a-uoiralTez congnoiflancc de ce qu’ils ont à faire : mais quand les Princes font ^’gcSjils ne fy arrellent point. Cell article entendoit bien le Roy nollre mai-qui Dieu face pardon)car il elloit tardif amp;nbsp;craintif à entreprendrezmais ^cequ’ilentreprenoitjily pouruoyoitfibîen, qu’à grand’ peine cufl il fçcLi faillir à ellre le plus fort,amp; quelamaiflrifeneluy en full demeurée. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•

Ainf fut ordonné que lediôl Marefchal de Bourgongne, amp;nbsp;tous ceux dot ^3yparlé,quicfloientenfacompaignie,iroientlogerenlacité:amp;fionlaleur ■ ^dtifoir,ils y entreroient par force, fils pouuoienticar ja y auoit gens de la ci-^eallaiis amp;nbsp;venanspourappointer:amp;vindrentlesdefTufdiélsàNamur, amp;nbsp;le lendemain le Roy amp;le Duc y arriucrct,amp; les autres en partirent. Approchas de la cicéjce Fol peuple faillie au deuant d’eux, amp;aifémentfutdefconfit, au ^oinsvnbó nóbre,le demeurant fc retirazôcefchappaleurEuefque, lequel ''intdcuersnoLis. Il y auoit vn Legat du Pape enuoyé pour pacifier, amp;pour tongnoillre du differed de l’Eucfque amp;du peuple.-car toufiours efloit enfen-tence d’excomrnuniment, pour les offences amp;nbsp;raifons deuant diôles. Cediôl Legat,excédant fi puiffance,amp; fur efperance de foy faire Euefquc de la ciré, buorifoitee peuple,amp; leur commanda prendre les armes, amp;nbsp;fedeffendrc,amp;: d’autres folies aflezdediél Legat voyat le peril où efloit cefle cité,faillit pour fuir.11 Fut prins,amp; tous fes gens,qui cfloient bien vingt cinq,bien montez.Si toll que le Duc le fçeur,ilfeit direàccux, quil’aLioicnt, qu’ils le tranfportaf-fintfans luy en rien dire, amp;nbsp;qrfils en feiffent leur proffit come d’vn Âarchâd; carfi publiquement il venoit* en fl compaignie, il ne leur pourroit tnais le feroit rendre pour l’honneur du fiege Apoflolique. Ils ne le fccurent faire,mais en eurent debat ; publiquement à l’heure du difner, luy en vin-drent parler ceux qui y difoient auoir part: amp;nbsp;incontinentl’enuoya mettre en famain,amp;IcLirofla, amp;nbsp;luy feit rendre toutes chofes, amp;: l’honora. Ce grand nombre de gens, qui efloient en cefle Auant-garde conduits parle MareF chai de Bourgongne,amp; le Seigneur d’Hy mbercourt,tirerent droit enla cité, cllimans y entrer, amp;nbsp;meus de grand’ auaricc,aymoient mieux la piller,qu’accepter appointement qui leur fufl offert : amp;nbsp;leurfernbloitn’cftre jabefoing d’attendre lé Roy amp;nbsp;le Duc de Bourgongne,qui efloient fêpt ou huiét lieues derrière cux:amp; fauancerent tant qu’ils arriucrent dedaîjs vn fauxbourg à l’é-trée de la nuidl:amp; entrèrent à l’endroit de la porte qu’ils auoient quelque peu reparée.Eu quelque parlcmêt,ils ne faccorderentpoint:la nuiôl bien obfcu-relesfîirprint, amp;nbsp;n’auoyent point fait de logis, amp;nbsp;auffi n’auoient aucun lieufuffifant,amp;: efloient en grand defôrdre.Lcs vns fepourmenoient, les autres appelloient leurs maillres,leurs compaignons,amp; les noms de leurs capi-taines. Meffire lehan de * Villettc, amp;nbsp;autres des capitaines de ces Liégeois,

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lt;74 II. LIVRE DES MEMOIRES

voyans celle folie, amp;nbsp;ce mauuais ordre, prindrent cœur, amp;nbsp;leur {eruit bien leurinconuenient, c’cft à fçauoir la ruine de leurs murailles : car ils failloienc par où ils vouloient, amp;nbsp;faillirent par les brefches de leurs murailles, Sgt;c vin-drent de front aux prcmiers;mais parles vignes amp;nbsp;petites montaignes, coti-roient fus aux pages amp;nbsp;valets ,qui eftoient au bout des faux-bourgs, par où ils efloient entrez , où ils pourmenoient grand nombre de chenaux : ôc en tuèrent tref largement , amp;nbsp;grand nombre de gens fe mirent en fuite (caria nuiôln’a point de honte) amp;nbsp;tant exploitèrent qu’ils tuèrent plus de huid cés hommes,dont y en eut cent hommes-d’armes. Les hommes de bien amp;nbsp;vertueux de celle auant-garde fe tindrent enfemble:amp; elloicnt quah tous hommes- d’armes,amp; gens de bonne maifon,amp; tirerent auec leurs enfèignes,droit • alaportejdepaourqu’ilsnefàillilTcntparlà. Les boues y efloient grandes, pour la continuelle pluye qu'il faifoit,amp; y efloient les hommes-d’armes iuf 4.r ques par deflus les cheuilles des pieds,amp; tous à pied. Vn coup tout le demeurant du peuple cuyda faillir par la porte, auec grands fallots amp;nbsp;grandes clar-tez.Les nollres,qui en efloient fort pres,auoicnt quatre bones pieces d’artillerie, qu’ils tirerent deux ou trois beaux coups, du long de la grand’rue, amp;nbsp;en tuerent beaucoup de gens.Cela les feit retirer de ce faux-bourg, amp;nbsp;fermer leurs portes : toutesfois durant le debat du long de ce faux-bourg,gaignerét ceux quiefloient faillis, aucuns chariots, amp;nbsp;s’en taudirent; (car ils efloient presdelavillc)laoùilsrcpoferentafrezmalement:carils demourerent hors la ville depuis deux heures apres minuiôl iufqucs à fix heures du matin.Tom tesfois,quand le iour fut cler,amp; qu’on fe veit l’vn l’autre,ils furent rebourez, * vuiiiUe amp;y fut blecccemclfire Ichan de*Villette, amp;nbsp;mourut deux ioursapresenîa ville, amp;nbsp;vn ou deux autres de leurs chefs.

Comment le^yarrittaenperfonnedetiantlaciteduLie^e^auecledi^l Duc 0 de’Boitrgongne. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;QHAT, XI.

Ombienqu’aucuncsfois les faillies foient bien ncceflaires,!! font elles bien dangereufès pour ceux de dedans vne place: car ce leur eft plus de perte de dix hornes qu’à ceux de dehors de ccnt:car leur nombre n’efl point pareil, amp;nbsp;fi n’en peuucnt point recouurer quand ils veullent : amp;fi peuuent perdre vn Chef ou vn conduéleur, qui efl caufe biê fouuét q le demeu

rant des compaignons amp;nbsp;gens de guerre ne demandent qu’à abandonner lesplaces.Ce tref grand effroy courut iufquesauDuc,quieftoit logé iufques à quatre ou cinq lieuës dclaville:amp; de prime-face luy fut diét que tout efloit defeonfit. Toutesfeilmontaachcual, amp;nbsp;toute l’armée , Sc commanda qu’au Roy n’en fufl Âen diél. En approchant de la cité , par vn autre en-droit,luy vindrent nouuelles que tout fe portoit bien , amp;nbsp;qu’il n’y auoit point tant de morts qîi’on auoit penfé,amp;n’y efloit mort nulhomme denora qu’vnCheualier de Flandres, appelle monfeigneur de*Sergine: mais que les gens de bien , qui y efloient, s’y trouuoicnt en grand’ neceflitc amp;nbsp;tra-uail.-car toute la nuiôl paffee auoient cflc tout debout en la fange,tout contre

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DE PHILIPPE DE CO MM IN ES. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;^5

la porte de leurs cnnemys;amp;aucc ce aucuns des fuyans quiefloienr rctour-ne2(iepar!c des Gens de picd)eftoicnt fi découragez qu’ils fcmbloyent raal-prefts à faire grandes armes: amp;nbsp;que pour Dieu ils fehaffaffçnt de marcher, a-linqu’vne partie de ceux de la ville, fiiffenr contraindls d’eux retirera leurs deffenccs,chafcun en fon cndroit:amp; auffi qu’il luy pleufl leur enuoÿer des vb lires,car ils n’en auoient point vn feul morceau . Le Duc à diligence feit partir deux ou trois cës hommes,tant que chenaux les ponnoient porter,pour les reconforter amp;nbsp;donner cœur,amp; leur feit mener ce petit de viures qu’il peut finer.Ily auoitprefquedeuxioursamp; vne nuiél, qu’ils nauoient mangé ne teUjfinon ceux qui auoient porté quelque bouteille : amp;nbsp;fi auoycnt le plus tiiauuais temps du mondejamp;dececoflé lànelenreftoitpoffible d’entrer, fi leDiic n’cmpefchoitles cnnemys par ailleurs, ils auoyent largement gens blecez, entre les antres le Prince d’Orenge( que i’auoye oublié a nommer) ^ui fc monflra home de vertn;car onques ne fevoulut bouger.Monfeigneur Lan amp;nbsp;d’Viféfy gouuernerent bien tous denx.Il f’en ertoit fuy ceflenuiét precedente plus de* deux mille hommes.

laefloir affez près de la nuiéf,quâd lediéf Duc enfl cefle nouuelle : apres auoirdepefchéles chofes defiufdiéfes, ilallalàoùefloit fon enfeigne con-terle toutau Roy.dequel en fut tref-joyeux, car lecôtraire lüy enfl peu porter dommage.incontinenton l’approtha du faux-bourg,amp; defeendir largement de cens de bien,amp; Hommes d’armes auec les Archiers, pour aller cai- , gnerlefiîux bonrg: amp;nbsp;prindrent les logis le Ballard deBourgongne,(lequel 1= logîs. û auoit fort grand’charge foubs lediét Duc)amp;: le feigneur de Ranallin,le Corn. BoufgôRn® tede Rouçy,fils du Conncftable,amp; plufieurs antres gens de bien. Aifémenr fit fait le logis en ces faux-bourgs, iufques rafibns delà porte, laquelle ils a-* lioiét*rópuêcóme l’autre; amp;nbsp;(e logealediél Ducau milieu des faux-bonres;

•aicc

le Roy demeura cefle nuiél en vne grand’cenfe ou metayrie fort grandeôc bien maifonnée,à vn quart de lieue de la ville,amp; gens largement lo^z à l’en-tiiron de luy,tant des ficns que des noflres.

La firuation de la cité, font montaignes vallées, pats fort fertille, ôc y palTc la riuicrc de Meiizc au trailers, amp;nbsp;peut bien cErede la grandeur de Rouen : amp;nbsp;pour lors efloit vnccité merueilleufement peuplée. De la por-leoù nous cflions logez,iniques à celle oùefloitnoflre Auant-gaide,y auoit peu de chemin par dedans la ville.-mais par dehors y auoit bien trois licües, üty a de Barycaues amp;nbsp;de mauuais chemins,aulE c’efloit au fin coeur d’yuer. Leurs murs eftoient tous râlez, amp;nbsp;pouuoient faillir par où ils vouloyent,amp;; yauoit feulement vnpeu dedouue,neiamais n’y eutfofiez, carlefondcll de roc tres-afprc tref-dur. Ce premier foir queleDucdeBourgongne fut logé en leur faux-bourg,furent fort foulagez ceux qui^ftoientde noflre A.-üant-garde,car la puifTance qui eftoit dedans, efloit alors ja départie endeiix. îinous vint enuiron minuiél vne alarme bien afprc.Ii^'oiinent faillit le Duc deBourgongneen la ruê,amp; peu apres y arriua le Roy amp;nbsp;leConncffable, qui feirent vne grand’ diligence à venir de fi loing. Les vns crioyent : ils faillent par vne telle porte.D’autres difoientautres parolles effrayées, amp;nbsp;le temps e-ftoit fi übfcur amp;nbsp;naatiuais,qu’il ay doit bien à cfpouucntcr les gens.Le Duc de

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71 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;IL LIVRE DES MEMOIRES

Bourgongne n’auoit point faulte de hardiefle; mais bien aucunes-fois faulte d’ordre,amp; à la vérité, il ne tint point,à l’heure que i*ay parle, fi bonne contenance que beaucoup de gens eufient bien voulu, pource que le Roy y eftoit prefent,amp; print le Roy parolles amp;nbsp;authorité de commander, amp;nbsp;dift à mon-feigneur le Conneftable: Tirez aueccc que vous auez de gens en tel endroit, car fils doiuent venir c’eft leur chemin:amp; àouïr faparolle amp;nbsp;veoir fa contenance,fembloit bien Roy de grand’vertu amp;nbsp;de grand fens, amp;: qu’autres-fois fe fufltrouuéen tel affaire.Toutesfois cenefuftriens.-amp; retourna le Roy en fon logis,amp; le Duc de Bourgongne au fien.

Lendemain au matin vint loger dedans les faulx-bourgs, en vne petite maifonnette, rafibus de celle ou eftoit logé le Duc de Bourgongne ; Ôc auoit aucc luy garde decent Efcoflbys,amp; des Gens-d’armes logezaflez pres de luy en quelque village. Le Duc de Bourgongne eftoit en grand’fufpiçion, où que le Roy n’entraft dedans la cité, ou qu’il ne f en fuift ayant qu’il euft prinfe la cité, ou qu’a luy incline ne feift quelque oultrage,eftant fi prcs.’tou-tesfois entre les deux maifons y auoit vne grande grange,en laquelle il ferra trois cens Horn mes d’armes;amp; y eftoit toute la fleur de fa maifon; amp;nbsp;rompirent les parois deladiéle gyange pour plus feurement faillir; amp;nbsp;ceuxlàauoiét l’œil fur la maifon du Roy,qui eftoit rafibus.Celle fefte dura huid iours ; car au huidielmeiour la ville fut prinfe, qucnulnefedefârma, neledidDuc, ny autre. Le foir auant la prinfc,auoitefté délibéré les affaillir le lendemain ï 4 au matin (qui eftoit à vn iour de Dimenche, trentiefme d’Odobre l’an mille quatre cens foixante liuicl: ) Slt;. prins amp;nbsp;baille enfeigneauec ceux de noftte auantgarde,que quand ils orroient tirer vn coup de Bombarde,amp; deux grof-fes SerpentineSjincontinent apres,fans autres coups,ils fàilliflent hardiment: car ledid Duc aflailliroit de fon cofté amp;nbsp;debuoit cftre fur les huid heures du matin.La veille,comme cecy auoit eftéconclu,IeDucdeBourgongnefede-fàrma(c?qu’cncores n’auoit fait) amp;nbsp;feit defarmer tous fes gens, pour eux ra-frefchir,amp;: parefpecial tous ceux qui cftoyenten ceftegrange.

Bien toll apres, comme fi ceux delà ville en euftentefté aduertis, ils délibérèrent faire vne faillie de ce cofté,aufri bien qu’ils auoy ent fait de l’autre.

Comment les Liégeoisfeirent 'vnemerueillettjèfaillie fur les gens du Duc de quot;BourgongnCy là ou luy le furent en grand danger.

Chap. xii.

R notez comme vnbien grand Prince amp;:puiflant peuttref-foudainement tomber en inconuenient, amp;nbsp;par bien peu d’en-ncmyjzparquoy toutes entrcprinfcsfedoibuent bien penfer amp;nbsp;bien debatre, auant que les mettre en effed. En tout cel-lecité^i y auoit vn feul homme de guerre, finon de leur territoire. Ils n’auoyent plus ne Cheualiers ne Gentils-hommes auec eux; car fî petit qu’ils en auoyent, au parauant, deux ou trois iours auoyent efté tuez ou blecez.Ils n’auoyent porte ne murailles,ne foffez, ny vne feule piece d’artillerie, qui rien vau 1 fift ;amp; n’y auoit rien que le peuple de la ville, amp;nbsp;fept

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I nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;D E P H I L I P P E D E C o M M I N E s.

. lepton huiól cens hommes de pied .-qui font d’vne petite môtaigne au dcr-j riete du Liege,appeléeIepajsdeFtanchcmont;amp;àîa*veritc,onttouhours * vinc Ext. i cftétrefrenommez ceux de ce quartier. Or fc voyans defefj?erez defecours

(veu que le Roy cftoit là en pei fonne contre eux ) le deliberererent de faire

1 Vnegrofle faillie,amp;de mettre toutes choies en aduenture, car aufli bien ils Eauoycnt bien qu’ils' efeoyent perdus. Leur conclulion fur,que par les trous àcleurs murailles,qui eftoient lut le derriere du logis du Duc de Bourgon-gne, ils failliroient tous les meilleurs qu’ils eulTent, qui eftoyent lix cens hommes du pais de Franchemonf.amp; auoyent pour gu y de l’bolle de la mai-Ion ou eftoit logé le Roy, amp;nbsp;aulhl’olledela maifon ou eftoit logé le Duc lt;leBourgongee:amp; pouuoicnt venir.parvn creux d’vn rocher, alFez pres de lîmaifon des deux Princes,auant qu’on les apperceuft, moyennant qu’il ne • folTent point de bruit. Et combien qu’il y eull quelques efeoutes au chemin, fileurfcmbloitil bien qu’ils les tueroient, ou qu’ils feroientaulli toll au logis comme eux.-amp; faifoient leur compte que ces deux hohes le meneroyenc tout droit en leurs maifons,ou ces deux Princes elloient logez, amp;: qu’ils ne * l^amuferoientpointaillieurs.-parquoy lesfurprendroientdeli pres qu’ils les tucroicnr,ou prendroient, auant que leurs gens fullent alfemblez.' qu’ils n’auoient point loingà fe retirer, amp;nbsp;qu’au fort l’il faloit que ils mouruflent pour exécuter vnetelle entreprinfe,qu’ils prendroient la mort bien en gré; caraulfibien ils fevoyoient de cous points dedruits^ comme diélell. Ils ordonnèrent oulcre,que tout le peuple de la ville fiilliroit par la porte, laquelle rcfpond du long delà grand’rue de nodre faux-bourg, aiicc vn grandhu, clperani defeondre tout ce qui cdoit logé en ccdiôlfiux-bourg,amp; n’edoient point hors d’efpcrance d’auoir vue bien grand’viôloire,ouà tout le moins, amp;au pisaller , vnebien glorieufefin. Quand ils eudent eu mille Fdommes d’armes auec eux, de bonne edoffe, fi edoit leur entreprinfe bien grande: toutesfois il fen falut bien peu qu’ils n’en vindent à leur intentiontEt com-meilsauoicnt conclu,faillirent CCS fix cens hommes de Franchement ,par lesbrefehes de leurs murailles;amp; croy qu’il n’edoit point encores dix heures dufoir.'amp;attrapperentlaplus part des efeoutes,amp;les tuerct:amp; entres les autres y moururent trois Gentils homes de la maifon du Duc deBourgongne, amp;nbsp;fils eudent tiré tout droit,fans eux faire ouïr, iufqucs à ce. qu’ils eudent e-ftélàoùils voLiloient aller,fans nulle difficulté,ils eudent tuez ces deux Prin-ces,couchez fur leurs héls.Derrière l’hodel du Duc de Bourgongne, y auoit vn pauillon ou edoit logé le Duc D’allençon,qui edau-iourd’huy, SiC mofei-gnetir de Cran auec 1 u y .Ils l’arrefterent vn peu,amp; donnèrent des coups de pi c]ues au trailers,amp; y tuerentquelquevalet.il enfortit bruit en l’armée; qui fut occafion que quelque peu de gens farmercnt,auirfeins fe miret debout. Ils laifïcrent ces pauillons,amp;: vindrent tout droit aux deux maifons du Roy du Duc de Bourgongne.La grangefdont i’ay parlé ) ou lediél Duc auoit mis trois cens Hommes d’armes,edoit rafibus defdiéles deux maifons, ou ils fa' muferent, amp;nbsp;à grands coups dépiqués donnèrent par ces trous quiauoient edéfaiéls pour faillir. Tous ces Gentils hommes fedoient defirmez, n’a-uoitpas deux heures (comme i’ay dit) pour eux rafrefehir pour l’afTaultdu

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6^ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;II. LIVRE DES MEMOIRES

lenlt;lemaîn.'amp; ainfi les trouueréi tous,ou peu l’eu faloit,clefaimcz:toutcsfois aucuns auoient iettez leurs cuy races fur eux,pour le bruit qu’ils auoient ouy aupauillon demonfeigneurd’Alençon: amp;nbsp;combatoienticeux âces trous/c à l’huis.-qui fut totalement la fauueté de ces deux grans Princes. Car ce delay donna elpace à pluheïns gens de foy armer,amp; de faillir en la rue.I’eftoyc cou ché en la chambre du Duc deBourgongne (qui elloit bien petite Sgt;c deux gé-tils hommes quieftoient de Ei chambre, Se au deflhs y auoit douze Archiers feulement quifaifoient le guet,amp; efloyent en habillements,amp; iotioyentaux dez.Son grand guet eftoitloing de luy,Severs la porte de la ville. En eflèél J’hoffe de Ca. maifon attira vne bande de ces Lieg;cois, Se vint afî'aillir fa mai-ion où lediôf Duc effoir dedans,Et fut tout cecy tant foubdain qu’a grand’ •peine pcufmês nous mettre audióf Duc fa cuyrace fur luy, amp;: vnefilJade en la teffe: Se incontinent defccndifmes ledegré pour cuyder faillir en la rue. Nous trouuafmes nos Archiers empefehez adeffendre l’huis, Se les feneftres contre les Liegeois.-Se y auoit vn mcrueilleux cry en la rue. Les vns,viuele Roy.-les autres,vine Bourgongne:Se les autres,viue le Roy Se tuez;Se fufmes l’efpace de plus de deux ^atenoftres auant que ces Archiers peuflent faillir de la maifon,Se nousaucc eux. Nous ne fçauions en quel eftat efloit leRoy, ne defquels il eftoit,qui nous efloit grand doubre. Et incontinent que nous fufmes hors de la maifon,atiec deux ou trois torches,en trouuafmes aucunes an tres, Se veifmes gens qui (e combatoient tout à l’enuirô de nous:mais peu dura, car il fii Holt gens de tous coflez venans au logis du Duc. Le premier boni me dés leur,qui fut tué,fut l’hofle du Duc: lequel ne mourut pas fi tofl, Si l’ouy parler.lls furent tous morts,ou bien peu fen falut.

Auffi bienaffaillirent la maifon du Roy,amp; entra fonhofle dedans, amp;nbsp;y fîic tué parles Efcoffoys.qui fe monflrerent bien bonnes gens. Ils ne bougèrent du pied de leur maiflrc,amp; tirerent largement flcfches,defquelles ilsblecercnt plus de Bt)urguignons que de Liégeois.Ceux qui efloient ordonnez.! fdllir par la porte, ftillirent; mais ils trouuercnt largement gens au guet, qui ja * afptes. clfoient afEcmblez,qui tofl les rebouterenr, ne fe monflrerent pas ß * ex-1^^ autres.Incontinent que ces gens furent ainfi reboutez, le Roy amp;nbsp;lediélDucparlerent enfemblc : ô: pource qu’on voyoit beaucoup de gens morts,ils eurét doubte que ce ne fufrentdesleur:toutcsfoispeuf’yen trou-ua, mais deblecezbeaucoup.Etnc faut point doubter que f’iis ne fe ftiflent amufez en ces deux lieux ( dont i’ay parlé ) amp;nbsp;par efpecial .à la grange, où ils troLîucrent refiflence,amp; euffent fuiuy ces deux hofles, qui efloient leurs guides,ils enflent tué le Roy amp;nbsp;le Duc de Bourgongne:amp; croy qu’ils eufTentauf-fidefconfit le demeurant de l’oft. Chafeun decesdeux feigneursfe retira en fon logis,trefefbahy^ecefle hardie entrcprinfe:amp;: tofl fe mirent en confeil a fçauoir qu’il feroit à faire le lendemain, touchant cefl affault qui efloit délibéré : amp;nbsp;entra le Roj^en grand doubte, amp;nbsp;efloit la caufe, qu’il auoit paotir que fi lediélDucfiilloit à prendre ceflecitéd’afîault,Iemal en tomberoitfur ]uy,amp; qu’il feroit en danger d’eflrearrcfle,ou prins de tous points, car lediél Ducauroitpaour,filpartoit, qu’il ne luy feifl la guerre d’autre coflé. Icy pouviez veoir la miferable condition de ces deux Princes, qui par nulle voye nefè

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 69 ncfe fceurent aflèurer l’vn de l’autre. Ces deuxicy auoient fait paix finale, n’y ■'iLioitpas quinzeioursjamp;iuréfi folennellemenc, de loyaumcnt l’entretenir, toutcsfois la fiance ne s’y pouuoit tourner par nulle voye^ ,, nbsp;nbsp;nbsp;' .

Comment la, cité du Liege fut ajfaillie,fgt;rinß nbsp;nbsp;nbsp;l^illée^e^ les E^ifes

außi. ' QH ÄP. XIIL

E Roy,pour s’oller de ces doutes, vne heure apres qu’il Ce fut retire en fon logis,amp;apres celle fail lie,dont ay parlé, manda aucuns des prochains leruiteurs dudiél Duc,amp; qui s’clloient jatrouuez au confeil,amp; leur demanda de lacodulion. Ilsluy dirent qu’il elloit arrellé dés le lendemain alEtillir la ville, en la forme amp;nbsp;maniéré qu’il auoit efté conclu. Le Roy leur feift*

Wegrandes doubtes ôc trcirages,amp; qui furent rref-greables aux gens dudilt;St Duc.'carchafcuncraignoit tresfort cell afiaut,pour le grand nombre de peuple qui elloit dedans la ville, SeaulTi pour la grand’ hardielTe qu’ils leur auoiét veu faire n’y auoit pas deux heures. Et eulTent ellé tref contens attendre encores aucuns iours,ou les rcceuoir à quelquecompofition: ôc vindrét deuers leDucluy faire ce rapport,Sc y elloyeprefent.-amp; luy dirent toutes les doutes que le Roy faifôit, amp;les leurs ; mais tous difoient venir du Roy, craignans qu’il ne l’eull prins mal d’eux. A quoy refpondit lediél Duc,que le Roy lefai-foit pour les fiuiuer,amp; le print en mauuais fés,amp; que la choie* n’iroit pas ain- *D’eftoitpa» li,veu qu’o n’y pouuoit faire nulle baterie,amp;: qu’il n’y auoit point de murait- veu que Ion le,amp;; que ce qu’ils auoient remparé aux portes,elloit ja abbatu,amp; qu’il ne fal- huVnuiîè' loir ja plus attendre,amp;qu’il ne delailTeroit point I’afEnitdii matin, comme il auoit elle coclu:mais que s’il plaifoit au Roy aller à Namur, iniques à ce que de dedans, la ville full prinfe,qu’il en elloit bien content,mais qu’il ne partiroit point de uoltamp;c.^, là iniques à ce qu’on veill I’ilTue de celle matinée,amp; ce qu’il en pourroit adue-uir.Ccllc rcfponce ne pleut à nul qui full prefent, car chafeun auoi Au paour de celle fiillie.AuRoy futfaiélelarefponce,non point fi griefue,mais lapins lionnelle que Ion peut. Il l’entendit lagement, amp;nbsp;dill qu’il ne vouloir point «aller à Namur,mais que le lendemainle trouueroit auec les autres. Mon ad-uis clique s’il eull voulu s’en aller celle nuiél, il l’eull bien faiél ; car il auoit cent archiers de fa garde,amp; aucuns gentils-hommes de fa maifon, amp;nbsp;près de là trois cens hommes-d’armes:mais fans nulle doLibte,là où il alloit de l’hon-iieiUjil n’eull point voulu ellre reprins de coüardife.

Chafeun fe repofa quelque peu,en attendant le iour, tous armez,amp; difpo-fetenr les aucuns de leurs conlciences,car l’entreprinfe elloit bien dangereu-fe.Quand Iciour fut cler,amp; que rheureapprocha,qui elloit de huiél heures du matin,comme i’ay dit,quelon deuoitalTaillir, fcit^ediélDuctirerlaBo-lgt;‘ardeamp;les deux coups de Serpentine, pour aduertirceux de l’auant-gardc, qui elloiét a l’autre part bien loing de nous(commc i’av dit)par dehors : mais par dedans la ville, il n’y auoit point grand chemin, ils entendirent l’enfei-gne,amp; incontinent fc dilpolerental’alfault . Les trompettes du Duc commencèrent à lonncr, amp;nbsp;les enfeignes d’approcher la muraille,accompaignez deceuxquilcs deuoientfuiure . Le Roy elloit emmy la rue bicnaccom^

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70 IlLIVREDESMEMOIRES

paigné.'car tous ces trois cens homme s-d’armes y eftoicnt,amp; fà garde, amp;: aucuns feigneurs amp;nbsp;gentils-hommes de fa maifon.Comme l’on vint pour cuy-der ioindre au poinct,on ne trouua vne feule deffence,amp; n’y auoit que deux ou trois homes à leur gucf.car tous eftoient allez difner,amp; eftimoient, pour-ce qu’il eftoit Dimenche,qu’on ne les aflailliroit point:amp;en chafeunemaifon trouuafmes la nappe mile.C’eft peu de chofe que du peuple,s’il n’eft coduiól: par quelque chef qu’ils ayêt en reuerence amp;nbsp;en crainte,faufqu’ileft des heures amp;nbsp;des temps,qu’cn leur fureur font bien a craindre.

la eftoient parauant l’alfault ces Liégeois fort mats , tant pourleurs gens qu’ils auoient perdus a ces deux faillies, où cfloient morts tous leurs Chefs, • qu’aulïi pour le grand trauail qu’ils auoient porté par huiôh iournées. Car il failloit que tout full au guer,pource que de tous collez ils elloiét defFermez, comme auez ouy;amp; amoaduis qu’ils cuidoient auoir ceiourderepos pour lafellc du Dimenche:mais le contraire leur ad uint, amp;nbsp;comme i’ay dit, ne le trouua nul a delFendre la ville de nollre collé,amp; moins encores du colle des BourguignonSjqui elloient nollre auat garde, auec 1 es autres quei’ay nommez, y entrèrent ceux là premiers que nous. Ils tuerent peu degens , car tout le peuple s’en fuit outre le pont de Meuze, tirant aux Ardenes, amp;nbsp;delà aux lieux où ils penloient ellre à feureté. le ne vey par là où nous cllions que trois hommes morts, amp;nbsp;vne femme;amp;croy qu’il n’y mourut point deux cens perfonnes en tour,que tout le relie ne fuift,ou fe cachaft aux Eglifes, ou aux maifons. Le Roy marchoit à loyfir: carilvoyoit bien qu’il n’y auoit nul qui refillaft,amp; que toute l’armée entra dedans par deux bouts, amp;nbsp;croyqu’ilya-uoit cjLiaranre mille hommes.Lediôl Duc, eflant plus auant en la cité, tourna tout court au deuantdu Roy,amp; le conduifitiniques au Palais, amp;inconti-* Laurens ucnt tctouma Icdiôt Duc à la grand’ Eglifc de Sainél* Lambert, où fesgens w«z. YOLiJoiept entrer par force, pour prendre des prifonniersjamp; des biens: Ôccô-bien qu^ja il eufl commis des gens de la maifon pour garder ladiéle Eglife,!! n’en pouuoit il auoir la mailliile, amp;nbsp;alfailloient les deux portes. le fçay qu’à *inain. s*- fgn atriuée il tua vn homme de la*maifon, amp;nbsp;le vcy.Toutfe départit,amp; ne W/Z. vteil. _ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ii-ni-l-r-II/ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;\ r r nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;\ nbsp;\

fut point ladicleEglile pillée, mais bien en la fin furet prins les hommes qui cfloient dedans,amp; tous leur biens. Des autres Egliles qui elloient en grand nombrefear i’ay ouy dire à monfeigneur d’Hymbercourt, qui congnoiflbit bien lacité,qu’il s’y difoitautätdcnaelfes par iour,commeilfaifoità Rome) la plufpart furent pillées foubs ombre amp;nbsp;couleur de prendre des prifonniers. le n’entray en nulle Eglife qu’en la grande:mais ainfi me fut il did, Sc en vey les enfeignes ; amp;nbsp;aulfi, long temps apes,le Pape prononça grandes cenfurcs contre tous ceux qui auoient aucunes chofes appartenantes aux Eglifes de la cité,s’ils ne les renXoient:amp; lediôl Duc députa commilTaires pour aller par tout fon pays, pour faire executer le commandement du Pape. Ainfila cité prinfc amp;nbsp;pillée enuirgn le midy, retourna le Duc au Palais. LeRoyauoitia difné, lequel monllroit ligne de grand’ioye de celle prinfe, amp;loüoitfort le grand courage amp;nbsp;hardielfe dudid Duc.-amp; entendoit bien qu’il Iny feroit rapporté, amp;nbsp;n’auoit en fon cœur autre defir que s’en retourner en fon Royaume. Apres difncr lediôl Duc amp;nbsp;luy fe veirét en grad’ chcre,amp; fi le Roy auoit loue

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DE PHILIPPE DE C O M M 1 N E S. 71 fcsœuures en derriere, encores le loua il mieux en fa prefcnce, Ôc yprehoit lediélDucplaifir.

le retourne vn peu à parler de cc pauure peuple qui fuyoic de la cite', pout confermer quelques paroles que i’aydiôles au commencement de ces Memoires,où i’ay parlé des mal-heurs que i’ay veu fuyure les gens, apres vne bataille perdue par vn Roy,ou DuCjOu autre perfonne beaucoup moindre.

Ces miferablcs gens fuyoient par le pays d’Ardenc,auecfemmes amp;nbsp;en-fans. Vn cheualier,demourât au pays,qui auoit tenu leur party iufques à celle heure, en deftroLiIfa vne bien grand’bande; amp;nbsp;pouracquerirla grace du Vainqueur, l’efcriuitauDucdeBourgongnc, faifant encores le nombre des morts amp;nbsp;prins, plus grand qu’iln’eftoit : toutesfois en y auoit largement, parlafeitfonappointement. Autres fuyoient à Mezieres furMeuze, qui eft an royaume.Deux ou trois de leurs chefs de bandes y furent prins : dontl’vn auoitnom Madoulet, amp;nbsp;furent amenez audiélDnc, lefquelsilfeit mourir. Aucuns de cc peuple moururent de faim, de froid, amp;nbsp;de fommeil.

(Comment le'E^y Louyssen retourna en Franceconsentement du Duc de quot;Fourgon-

commentée Duc acheua de traiFcr les Liégeois^ nbsp;nbsp;nbsp;ceux de

Franchemont.

QHAP. XIIII.

Vatre ou cinq iours apres cefte prinfe, commença le Roy à embefongner ceux qu’il tenoit pour Es amys, enuers lediél Duc,pour s’en pouuoiraller;amp;aulh en parla au Duc en fage Il forte,difant que s’il auoit plus affaire de luy, qu’il ne l’efpar-gnaft pointnnais s’il n’y a plus rien à faire,qu’il deiiroit aller à Paris,faire publier leurs appoinélemes en la court de Par-hnaent(pourceqLiec’eft: la couftume de France d’y publier cous accords, ou autrement ne feroient de nulle valeur , toutesfois les Rois y peuuct touE ioursbeaucoup:) amp;nbsp;d’auantage prioit audiél Duc qu’al Efté prochain ils fe peuffent entre-veoir en Bourgogne,amp; effre vn moys enfemble, faifant bonne chere.Finalement lediéf Duc s’y accorda, toufiours vn petit murmurant: amp;nbsp;voulut que le traiélé de paix fuff releu deuant leRoy,fçauoir f’il y auoit rie dont ilferepentift, offrant le mettreafon chois,de faire ou delaiffer, amp;: feit quelque peu d’exeufe au Roy de l’auoir amené là.Oultrc requifl au Roy, confentir qu’audiél traiélé fe miftvn article, en faneur de monfeigneur du Lau,d’Vrfé,amp; Pocet de Riuiere, ôc qu’il fuft diél que leurs terreseftats leur feroient rendus,comme ils auoientauant la guerre. Cefterequefte defpleuc auRoy.'car ils n’eftoiét point de fon party,parquoy deuffent cftre comprins en celle paix , ôc aufli feruoient ils monfeigneur Charles fon frere , amp;nbsp;non point luy : ôc à celle requefle refpondit le Roy eflre cotent, pourueu qu’il luy enaccordafl autant pour monfeigneur de Neuers amp;;dcCroy. Ainlile-diél Ducfè teut,amp;: fembla celle refponce bien ûgc.’cailediél Duc auoit tant de haine aux autres,amp;* les tenoit tant à cœur, que iamais ne s’y fufl confen- juVeur” ur ri. A tous les autres poinéls refpondit le Roy ne vouloir rie y*diminuer, mais confermer tout ce qui auoit eflé iuré à Peronne.Et ainfi fut accordé ce parte- * muer Ex-ment,amp; print congé le Roy dudiél Duc, lequel le conduiht enuiron demie

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7x nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;II. LIVRE DES MEMOIRES

IieLiè‘;amp; au departement d’cnfcmble,luy fcift le Roy celle demande -.Sid’ad-nenture monfrere quiell en BretaignCjne fecotentoitdu partage que ieJuy baille pour l’amour de vous,que voudriez vous queie feifle? LcdiôlDucluy relpondic foubdainement,fans y penfer.-S’il nele veultprédre,mais que vous faciez qu’il foit content,ic m’en rapporte à vous deux. De celle demande ôc refponfe fortit depuis grand’ cbole,comme vous orrez cy apres.

Ainli fen alla le Roy à fon plaifir,amp; le conduifitmonfeigneurdesCordes deMeries. * des MurSjGtaud Baillif de Henault,iufques hors des terres dudiôl Duc.

Ledid Duedemouraen la cité, il eftvray qu’en tous endroits elle fut cruellement traidlée.-aulli elle auoit cruellement vie de tous excez contre les fub-iedls dudidl Duc;amp; des le temps de fon grand pere, lans rien tenir fiable de *promell'c qu’ils feilfent, ne de nul appoindlement qui fut faidl entre eux:

eftoit la cinquiefmeannéequeieDucy efloit venu en fiperfonne, touf-iours faiél pûix,amp; rompue par eux l’an apres; amp;nbsp;ja auoiêt elle excommuniez par longues années, pourles chofes cruelles qu’ils auoyent commifes contre leurEuefque; atout lefquels commandemens del’Eglife,touchantlef-diôls dilFcrends, n’eurent iamais reuerence, n’obeillance. Incontinent que le Roy fut party,ledici Duc,aucc peu de gens,fe délibéra d’aller à Franebemot, qui ell vu peu oultrele Liege,pais demontaignes trefafpresjpleinesdeboys: amp;nbsp;de la venoient les meilleurs cembatans qu’ils eulfent, amp;nbsp;en elloient partis ceux qui auoient fiit les faillies dont i’ay parlé cydeuant. Auant qu’il partillde ladiôlecitéfurent noyez en grand nombre les pauuresgensprifon-niers qui auoient elle trouué cachez es maifons, à l’beure que celte cité fut prinfe.Oultre fut délibéré de faire brufler ladiéle ciré;laquclle en tout tenapà

• à ellé fort puplee ; amp;nbsp;fut diél qu’on la brufleroit à trois lois : amp;nbsp;furent ordon-» Labourg nez ttois OU quatre mille hommes de pied, du païs de* Luxembourg (quie-■Extpi.vML. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;voyfins amp;: alTcz d’vn habit amp;nbsp;d’vn langage) pour faire celle de-

'folation^ ôc pour deffendre les Eglifes. Premièrement, fut abbatuvn grand pont, qui eftoit au trauers de la riuiere de Meuze;amp; puis fut ordonné grand nombre de gens, pour deffendre les maifons des Chanoines : amp;: àd’enuiron de la grand’ Eglile, afin qu’il peufldemourer logis pour faire le diuinfer-uice.-femblablcment en fut ordonné pour deffendre les autres Eglifes. Et cela faiôft,partit le Duc pour aller audid païs de Franebemont, dont i’ay parlé; amp;nbsp;incontinent qu’il fut dehors de la cité, il veit le feu en grand nôbre de mai-deça^a.^E^e- ^Hs * du cofté de la riuicrc. Il alla logera quatre lieues : mais nous oyons le [itvieii, bruit comme fi nous euflionseflé fur lelieu.Ienefçay oufileventy feruoit, ou fi c’efloit à caufe que nous cflions logez fur la riuiere.Le ledcmain lcDuc partit amp;nbsp;ceux qui efloientdemourcz en la ville, continuèrent ladefolation, comme il leurauoit ^é commandé : mais toutes les Eglifes furent fiuuées, ou peu fen fallut,amp; plus de trois cens maifons pour loger les gês d’Eglife : amp;nbsp;cela a eflé caufe que fi^ofl a efle repeuplée, car grand peuple reuint demou-rer auec ces prebfires.

A caufe des grandes gelées amp;nbsp;froidures,fut force que la plus part des gens dudiôt DuCjallafTent à pied audit païs de Franchement, qui ne font que vil-lagcsjôc n’y a point de villes fermées;ôc logea cinq ou fix iours en vnc petite vallée

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DE PHILIPPE DE COMBINES. . nbsp;. 'il

vallée,en vn village qui fappelloit*Pollence. Son armée eftoit en deux ban-des,pour plus toft delhuire le païs, amp;nbsp;feit brufler toutes maifons, Sgt;c rompre tous les moulins à fer qui eftoiêt au pais; qui eft la plus grand’ ftçon de viure qu’ils ay ent, amp;nbsp;cherchèrent le peuple parmy les grandes forcfts,où ils eftoiêt cachez aucc leurs biens,amp; y en eut beaucoup de morts amp;nbsp;de prins ; amp;nbsp;y gai-gnerent les Genf d’armes de 1 argent.l’y vey choies incroyables du froid.Il y eut vn Gentil-homme qui perdit vn pied,dont oncques-puis nefayda : amp;nbsp;y eut vn page a qui il tomba deux doigts de la main. le vey vne femme morte, amp;nbsp;fon enfant dót elle eftoit accouchée de nouueau. Par trois iours fut depar-ty le vin qu’on donnoit chez le Duc pour les gens de bien,qui en demâdoiêt, a coups de coignée : car il efloitgelédedansicspippes, amp;faloic rompre le glaçon qui efloit entier, amp;nbsp;en faire des pieces, que les gens mettoient en vn chappeau ou en vn pannier, ainfi qu’ils vouloient.I’en diroie alfez d’eflrangcs choies longues àeferire; mais la faim nous feit fuir à grand halle apres y a-tioirfeiournéhuióliours:amp; tira Ledid Duc à Nainur,amp; de la en Brabant, où ilfutbienreccLi.

Comment le feit tant par fuhttls moyens que quot;Monfeigneur Charles fonfrerefe contenta de la Duché de Guy enne, pour Bneamp;^ (ham-paigne^contre Centente du Duc de Bourgongne.

retira en fon Royaume: amp;nbsp;en rien ne femeut cotre lcdiötDuc, ^^àcaufedes termes quiluyauoient efé tenus à Peronne amp;nbsp;au Liege,amp; fembloit que patiemmet le portaft;mais depuis lur-uint grand guerre entre cux,toutesfois non pas li roft: amp;nbsp;n’en fut point la caufe ce dont i’ay parle cy deuant,combien qu’il y ’eull bien ay der : car la paix eu 11 efté quafi telle qu’elle efloit, quan d le Roy ’eullfaideellantaParis-.mais lediét Duc parconfeil deces officiers voulue eflargir fes limites:amp; puis quelques habilitez furent friéles, pour y remettre bnoyfe,dontie parleray quand il en fera temps. Monfeigneur Charles de Fr3nce,lcul frere du Roy, amp;nbsp;n’aguercs Duc de Normandie ( lequel elloit informé de ce traidé faiól à Perone,amp; du partage que par iceluy deuoit auoir) enuoya incontinent deuers le Roy luy lupplier qu’il luy pleuft accomplir le' diél traióté,amp; luy bailler ce qu’il auoit promis.Le Roy enuoya deuers luy fur ces matières,amp;y eutplufieurs allées amp;nbsp;venues. Auffilediéb Duc de Bourgogne enuoya fes Ambaffiadeu rs vers 1 ediôt monfeigneur Charles, luy prier ne vouloiraccepter autre partage que celuy deCh.âpaigt^ amp;Brie:lequel luy e-ftoit accordé par fon moyé,luy remôftrant l’amour qu’il luy auoit môftré,là oijill’auoitabandôné:amp; le Duc encores n’auoit voulujaire le’ferablable,corne fon allié. Oultre luy faifoit dire comme l’affiete de Champaigne Sz Bryc leur efloit propice a tous deux:amp; que fi le Roy d’auantage les vouloir fouler du ioLir au lendemain il pouuoit auoir le fecours de Bourgogne : car les deux pais fe ioignét enfemble:amp; û auoit fon partage en aflez bonne valeur,car il y G

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7« nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;II. LIVREDES MEMOIRES

prenoit tailles amp;nbsp;aydes,amp;: n’y auoit Ic Roy ricn,quefon hommage amp;nbsp;rclTort. Ceftuy monfeigncur Charles eftoit homme qui peu ou rien faifoit deluy; * vingt amp;nbsp;mais en toutes chofes elloit manié amp;nbsp;conduid par autruy, combiê qu’il full aagé de* vingt ans ou plus.Ainfi fepaflarhyuer, qui ja elloit auancé quand le Roy partit de nous. Il y eut incclfammét gens allans amp;nbsp;vends fur ce partage; car le Roy pour rien ne deliberoit bailler celuy qu’il auoit promis à Ion frere, à raifon qu’il ne vouloir point fondiôl frere amp;nbsp;le Duc cftre fi pres voifins; amp;nbsp;* amp;nbsp;vaioit traiôloit le Roy auec fondiôl frere de luy faire prendre Guyenne, auec la ce partage Rochellc(qui elloit quafi toute Aquitaine)* plus toll que celuy de Brie amp;nbsp;de

Champaigne. Ledûâmonfeigneur Charles craignoitdefplaircaudiôlDuc de Bourgongne;amp; auoit paour aulïi que fil faccordoit,amp;le Roy ne luy tinffc vérité,il n’eull perdu fon amy Slt;. fon partage,amp; dcmourall en mauuaisparty. Le Roy qui elloit plus fige à conduire tels traiôlez, que nuis autres Princes qui ayent elle de fon temps,voyant qu’il perdoit temps, fil ne gaignoit ceux qui auoient le credit enuers fon frere, faddrelfa à Oudet de Rye, feigneurde Lefcut,amp; depuis Comte de Côminges(IequeI elloit né, amp;nbsp;marié au diôl pais de Guyenne)luypriantqu’il tint la main que Ibnmaiflre acceptall ce party (lequel elloit trop grand que celuy qu’il demandoit)amp;qu’ils fulTent bon a-mys,amp; vefqtiilTent comme frétés,amp; que luy amp;nbsp;fes feruiteurs y auroient profit,ôcfpccialcmentluy :amp; les alTcuroit bien le Roy, qu’il n’y auroit point de faute qu’il ne baillait la polTclGondudiôlpaïs. En celle façon monfeigneur Charles y fu t gaigné;amp; print lediôl partage de Guy éne, au grâd defplaifir du Duc de Bourgongne amp;nbsp;de fes AmbalTadeursquielloientfurlelieLi.EtlacâU-fepourquoy le Cardinal Baluc, Euefque d’Angers, amp;nbsp;l’Euefquede Verdun furent prins,fut poLirce que le Cardinal efcriuoit à monfeigneur de Guyenne l’enhortement de ne prendre nul autre partage, que celuy que lediélDuc de Bourgongne luy auoit procuré par la paix faiôle à Peronne,Iaquelleauoit clléproAife ôc iurée entre fes mains : amp;nbsp;luy faifoit remonllrances touchant I4 lt;gt;. cecas,qui luy fembloient necelfaires,lefquclles elloient contre le vouloir amp;: intention du Roy. Ainli lediôl monfeigneur Charles deuint Duc de Guyen-ne,ran mil quatre cens foixante amp;nbsp;neuf, amp;nbsp;eut bonne polTclhon du pais,auec le Gouuernement de la Rochelle : amp;nbsp;fe veirent le Roy amp;nbsp;luy enfcinble, amp;nbsp;y

furent longuement.

TROI-

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Comment le'R^y print nouvelle occaßon de faire guerre au Duc de Bourgongne: (y* comment il l'enuoya adiourner iufques dedans G and,par'vn Hutfier de Parlement. QH A P. I.

A N mil quatre cens feptantc,print vouloir au Roy de fc ven-ger du Duc de Bourgongne:amp;: luy fembla qu’il en elloit heu ’47®* re,amp; fecrettemcnciraiÔloitôc foufFroittraiôler,que les villes leans fur la riuierc de Somme, comme Amiens, fainôl ^^Qi^entin, amp;nbsp;Abbeuillc, fetournaflent contrelcdiôl Duc, amp;nbsp;qu’ils appellaflentfes Gens-d’armes amp;nbsp;les meifTenc dedans.

toufiours les grans IcigneurSjôc au moins les fages, vcullent chercher S^clque bonne couleur,amp; vn peu apparcnte.Et afin qu’on congnoifle les habilitez dequoy on vfe en France,veux coter corne cccy fut guydc/car le Roy lediól Duc y furent dcccus tous deux,amp; en recommëça la guerre, qui du-’^bicn treize ou quatorze ans,amp; qui depuis fut bien dure amp;nbsp;afpre. 11 eft vray S^elcRoy defiroit fort que ces villes feifsét nouuelleté:amp; print lès couleurs, filant que le Duc de Bourgongneeftendoitfes limites plusauât que le trai-^encportoit:amp; fur celle occasion,alloicnt nbsp;vcnoictAmbafl-ideurs del’vn

I autrc,amp; palToicnt amp;c. repalToicnt par ces villes, pratiquans ces marchez; ef ^uellcs n’y au oit nulles garnifons, mais y auoit paix par tout le royaume, tant collé du Duc,corne du Duc de Bretaigne;amp; elloit monfeigneur de Guyé-ficcnbonneamiticauecleRoy,cômeil Icmbloit. Toutesfotsle Royn’euR pas voulu recommencer la guerre, pour prendre vne ou deux de ces villes là lculement:mais tafchoitde pouuoirniertre vne grand’rebellion par tout le pais du Duc de Bourgogne; amp;nbsp;elperoit de tous points en venir au dclTus par cc rnoyen.Beaucoup de gens pour luy coplaire,fe mclloient de ces marchez^ amp;nbsp;luy rapportoient les chofes,beaucoup plus auant qu’ils ne trouuoienr, amp;nbsp;fevâtoientl’vn d’vne ville,amp; les autres diloiêt qu’ils luy foullrairoiet l’autre; amp;nbsp;de tout elloit vne partic.Mais quad le Roy n’eull penfé que ce qui aduint il ncull pas rompu la paix,ne recommencé la guerre (cogjibien qu’il eull caulc de fe douloir des termes qui luy auoient elle tenus a PcÂnneJcar il auoit fait publier la paix à Paris, trois mois apres qu’il fut de retour en Ibn royaume, amp;nbsp;recommençoit celle noy fe vn peu à crainte;mais l’alfcélion qu’il y auoit le feit tirer oultrc, amp;nbsp;voicy les habilitez qui y furent tenutis. LeCÔte dcfiiinét Paul,ConnellabIe de France,homme tres-fige,amp; autres feruiteurs duDuc de Guyenne,amp; aucuns autres defiroient plus toll la guerre entre ces deux Princes que paix, pour deux regards. Le premier craignoient que ces tref-grans

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q6 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;III. LIVRE DES MEMOIRES

eftats qu’ils auoicnr,ne fuflenc diminuez,fi la paix continuoit; car IcdiâCo-neftableauoit quatre cens Hommes d’armes, ou quatre cens Lances, payez â lamonftrCjamp;n’auoitpointdeContrerollcur, amp;nbsp;plus de trente mille francs tous les ans oultrcfesgaîges de fon office, amp;nbsp;les proffits de plufieurs belles places qu’il tenoit.L’autre ils vouloicnt mettre fus au Roy, amp;nbsp;difoient entre eux,fa condition eflre telle,que fil n’auoit debat par le dehors, amp;nbsp;contre les grâds,qu’il faloit qu’il l’euft auccques fes fcruitcurs domefliques amp;nbsp;officiers, âcquefoncfprit nepouuoitcftreenrcpos,amp;parccs raifons alléguées, taf-choient fort de remettre le Roy en celle guerre. Et offrit lcdiôl Conneflable prendre fainôl Quentin tous les iours qu’on vouldroit : car fes terres efloicnc à renuiron,amp; difoit encores auoir tref-grand’ intelligence en Flandres, amp;nbsp;en • Brabant,amp; qu’il feroit rebeller plufieurs villes contre le Duc.

Le Duc de Guy enne,qui efloic fur le lieu,amp; tous ces principaux Gouuer-ncLirs, offroientfortferuirleRoy en ceflcquerelle, amp;nbsp;d’amener quatre ou cinq cés Homes d’armes que lediefc Duc tenoit d’Ordonnance : mais leur fin n’efloitpas telle que le Roy entend oit, mais tout al’oppofitecomme verrez.

Le Roy vouloir toufiours procéder en grand’folennitc,parquoy feie tenir les trois cflats à Tours,es moys de Mars,amp; d’Apuril, mil quatre cens feptan-te,cc que iamais n’auoit fait,ne feit depuis; mais il n’y appella que gens nommez, amp;nbsp;qu’il penfoit qu’ils ne cotrediroient point à fon vouloir. Et là feit re; monflrer plufieurs chofes amp;nbsp;entreprinfes,quelcdiólDuc de Bourgogne fai-fbic cotre la couronne:amp; y feit venir plaintifmonfèigneur le Comte d’Eu,lequel difoitquelediól Duc luy empefehoit fàinôl Vallery, amp;nbsp;autres terres qu’il tenoit de luy àcaufe d’Abbcuille,amp; de la Comté de Pothieu, amp;nbsp;n’é vouloir faire nulle raifon audiól Côte d’Eu.Et le faifoit ledid Duc,pourcequ’vn petit nauire de guerre, de la ville d’Eu, auoir prins vn autre nauirc marchand du pais de Flandres,dont lediôf Comte d’E u offroit faire la réparation. Oul-tre voulait Iediôt Duc contraindre ledit! Comte d’Eu,de luy faire hommage enuers tous amp;nbsp;contre tousree que pour riens ne vouldroit faire : car ce feroit contre l’authorité du Roy. A ccfle afiemblée y auoit plufieurs gens de lufli-ce,tantdc Parlement que d’ailleurs, amp;nbsp;fut conclu, felon l’intention du Roy, que lcdiôl Duc feroit adiourne à comparoir en Parlement à Paris. Bien fça-uoit le Roy qu’il refpondroit orgueillcufcment,ou feroit quelque autre cho fe contre l’autorité de la Court :parquoy fon occafionde luy faire guerre en feroittoufiours plus grande.Le Ducfutadiourné.parvn Huiflier de Parlement en la ville de Gand, comme il alloit o uir meffe. Il en fut fort efoahy amp;: mal content, incontinent feit prendre Icdiél Huiflier, amp;nbsp;fut plufieurs iours gardc;àla fin on le laiffa courre. Or vous voyez Icschofès quife dreffoient pouf courre fus audilt;3: Duc de Bourgongne,lequel en fut aduerty, amp;nbsp;mit fus vn grand nôbre de gÂis payez à gages mefnagers ainfiTappelloit on.C’efloic quelque peu de chofe qu’ils auoiêt pour fe tenir prefts en leurs maifons: tou-tesfois ils faifoient mÂnflre tous les moys,fur les licux,amp; receuoient argent.

Cccy dura trois ou quatre moys, fiefennuya de celle mife,amp; rompit celle affemblée, amp;nbsp;fofla de toute crainte : car fouuent le Roy enuoyoit deuers luy. Sifen alla le Duc en Hollande, amp;nbsp;n’auoit nulles gens d’Ordonnance, qui

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;77

^uifuflent toufiours prefls, ne garnifon en fcs villes de frontières : dont mal luy en print,pource qu’on pratiquoit Amiens,Abbeuille,amp; fiind Quentin, )oiir les remettre en la main du Roy.Luy cftant en Hollande fut aduerty par efcLi Duc lehan de Bourbon, que de brief la guerre luy feroit commencée, tant en Bourgongne qu’en la Picardie, amp;nbsp;que le Royyauoit de grandes intelligences, amp;nbsp;aufli en là maifon. Lediôl Duc qui fe trouLioit defpourucu de gés(carilauoitdcparty celle aflcmblcc,dôti’ay parlé n’agueres, amp;renuoycz tous chez eux)fut bien efbahy de ces nouuellcs,parquoy incontinent paflà la tner,amp;tira en Artois, amp;nbsp;tout droit à Hefdin. Là entra en aucune fufpicion, tant1dcs feigneurs que des traiélez qu’on menoit en ces villes dont i’ay par- 1dcfcsferui lé:amp; fut vn peu long à s’apprefter,ne croyant point tout ce qu’on luydiibit: Scentioya quérir à Amiens deux des principaux delà ville lefquels ils foup-Çonnoit de ces traiélez.Ilsfexcuferent neatmoins ü bien,qu’il les lailfa aller. Incontinent partirent de la maifon aucuns de fês feruiteurs,qLii Ce tournèrent auferuice du Roy;côme le Ballard Baudouin amp;nbsp;autres,qui luy feirêtpaour, qu’il n’y eufl plus grand’ queue. Il feit crier que cliafcun fe mill fus , amp;nbsp;peu s’apprelloient.-car c’elloit au commencement de l’hyuer, ôc y auoit encores peu de iours qu’il efloit arriué de Hollande.

(Commet la ville de[ainCi QM-cnttn^c^ celle d'Amiens furet rendues entre les mains du pour quelles caufes le Conneßable^cr^ autres entretenaient laguere entre leKoy leDuedeBourgongne. QHA'P. 11.

Eux iours apres la fuite de fes feruiteurs,qui s’en clloiental-□ lez,quielloit au meys de Décembre l’an mil quatre cens fe-jl^l^Ptante , entra monfeigneur le Conneflable dedans fainél

7 QLæntin,amp;: leur feit faire le lcrment pour le Roy.Lors con-^'sneut ledit Duc que fes befongnes alloiét mal.-car il n’auoit

1

ame auec luy,mais auoit enuoye fes feruiteurs poift mettre *armée Eji-fis les gens de fon pays.Toutesfois, auec Ci petit de gens qu’il peut amalTetjil tiraàDourlans,auec quatre ou cinq cens cheuaux feulement, en intention de garder Amies de fe rctourner:amp; là fut cinq ou lix iours que ceux d’Amies marchandoient : car l’armée du Roy clloit auprès, qui fe prefentadeuantla ville, ôi. vn coup la refuferent,car vne partie de la ville tenoit pour ledit Duc, lequel y enuoya*faire fon logis; ôc s’il eull eu gens pour y ofer entrer en per-fonncjil ne l’euffc iamais perduë;mais il n’y ofoit entrer mal acompaigné,cô- '°-bien qu’il en full requis de plufîeurs de la ville.Quand ceux qui elloient con- 'vieil, îrc luy , veirent fa dilïimulation, amp;nbsp;qu’il n’efloit affez fort, ils executerent leurs entreprinfes,amp; mirent ceux du Roy dedans. Ceux d’Abbeuille cuide-rent faire le femblablc; mais monfeigneur des Cordes^'entra pour le Duc, amp;nbsp;y pourueut.D’Amiés à Dourlans n’y a que cinq petites lieues,parquoy fut force audiôl Duc de fe retirer,des ce qu’il fut aduerty chicles gens du Roye-ftoient entrez à .Amiens, amp;nbsp;alla à Arras en grand’ diligence amp;nbsp;grand paour, craignant que beaucoup de chofes femblables fe feiflent ; car il fe voy oit en-uironné des parens amp;nbsp;amis du Connellable. D’autre-part à caufe du Ba-flard Baudouin , qui s’en efloit allé , il foupçonnoic legrand Baflard de

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78 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Ill. tlVRE DES MEMOIRES

Bourgongne fon frere:toutcsfois gens luy vindrct peu à peu. Or fembloit il bien au Roy eftre au deflus de fes affaires, amp;nbsp;fc doit en ce que le Conneflable amp;nbsp;autres,luy difoient de ces intelligences qu’ils auoicnt,amp; quand n’euft efté ceftc efperance,il euft voulu auoir à commencer.

Or eft il temps que i’acheue a declarer qui mouuoit ledid Conneflable, le Duc de Guyenne,amp; de fes principaux fcruiteursfveu les bons tours,fecours, ôc grandes honnefletez que lediôl Duc de Guyenne auoit receus dudiôl Duc de Bourgongne) amp;quelgaing ils pouuoient auoir à mettre ces deux grans Princes en guerre.-qui efloient en repos*en leurs feigneuries.Iaen ay ditcjucl--»«/z. ’ que chofe,amp; que c’efloit pour maintenir plus feurcment leurs eflats, amp;nbsp;afin queleRoy nefebrouillaflparmyeux, s’ilefloit en repos: mais cela n’cfloit * point encores la principale occafion; maisefloit que le Duc de Guyenne amp;nbsp;eux auoient fort defire le mariage dudiôl Duc de Guyenne auec aucc la feule fille amp;nbsp;heritierc du Duc deBourgôgne,car il n’auoit point de filz:amp; plufieurs fois auoit efté requis lediôl Duc de Bourgongne de ce mariage, amp;nbsp;toufiours s’y efloit accordé:mais iamais ne voulut conclure,amp; en tenoit encores parot Ies à d’autres. Or regardez quel tour ces gensprenoiêt, pourcuyderparuenir à leur intention,amp; contraindre lediôl Duc de bailler fa fille : car incontinent que ces deux villes furet prinfes,amp; le Duc de Bourgongne retourné à Arras, où il amaffoit gens tant qu’il pouuoit,le Duc de Guyenne luy enuolt;ya vn ho-bié fecret,lequel luy apporta trois lignes défi main en vn loppin *de papier, amp;c.Ex.-v;«z. ployé bien menu,contenant ces mots.-Mettez peine de côtenter vosftib-ieôls,amp; ne vous fouciez.-car vous trouuercz des amys. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ê

Le Duc de Bourgongne, qui efloit en crainte tref grande du commence- ' ment,enuoya vn homme deuers le Conneflable,luy prier ne luy vouloir faire le pis qu’il pourroit bien, amp;nbsp;ne preffer point afprement celle guerre, qui j luy efloit encommencée,fans falloir deffié ny femons de rien. Lediôl Con- i neflabIcCut fort aifè de ces paroles,amp; luy fembla bien qu’il tenoit lediôt Duc en la forte qu’il demandoit.-c’efl a fçauoir en grand doute.Si luy manda pour toute rcfponce,qu’il voyoit fon faiifl en bien grand peril,amp; qu’il ne edgnoif-foit rcmede qu’vn,pour en efehapper : c’efloit qu’il dônaft fa fille en mariage au Duc de Guyenne, amp;nbsp;qu’en cefaifintilfcroitfecouru de grand nombre de gens : amp;nbsp;fe declareroit lediôt Duc de Guyenne pour luy, amp;nbsp;plufieurs autres feigneurs, amp;nbsp;que lors luy rendroit fainôl Qi^ntin, amp;nbsp;qu’il fe mettroit des leurs: mais que fans ce mariage,amp; veoir celle dcclaratiô,il ne s’y oferoitmet-tre:car le Roy elloit trop puilfant, amp;nbsp;auoit fon faiôl bien accoullré,amp; grades intelligêces es pays dudiôl Duc,amp; toutes parolles femblables de gras clpoii-uentemens.Ie ne congnu one bonne ylTuè' d’homme qui ait voulu efpouuc-*fubieaion nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;maillrc,amp; le t^rir en * fufpicion, ou vn grand Prince de quion a affai-

re,comme vous entendrez de ce Conneflable. Car combien qucleRoyfull lors fon maillre. Ci au^it il la plufpart de fon vaillant, amp;nbsp;fes enfans, foubs le-diôl Duc de Bourgongne .-mais toufiours a vfe de ces termes deles vouloir tenir en crainte tous deux,amp;l’vn par l’autre : dont mal luy encflprins. Et combien que toute perfonne cherche à le mettre hors de fubieôlion amp;nbsp;crainte, amp;nbsp;que chafeun haye ceux qui i’y tiennent, fi n’y en a il nul qui en cell ar-

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DE PHILIPPE DE C O M M I N E S.

tide approche les Princes: car ie n’en congnu onccjLics nuis qui de mortelle luine ne haiflent ceux qui les y ont voulu tenir.

Apres que le Duc de Bourgongne eut ouy la refponfe du Conriellablc, il tongnutbien qu’en luy ne trouucroit nulle amirié, amp;nbsp;qu’il elloit principal conduôleurdecefteguerre,amp;conceut vne tref merueilleufe haine contre luy,quiian’iais depuis ne luy partit du cœur, amp;nbsp;principalement que pour telles doutes le vouloir contraindre a marier fa hile. la luy efl oit rcuenu vn petit le cœur,ôcauoit recueilly beaucoup de gens. Vous entendez bien maihtc-tt'int,parcequemandalcDuc de Guyenne, amp;puis leConncftable,quece-ftechofe eftoit délibérée entre-eux: car toutes Icmblablcs parolles, ou plus cfpouuentables encores manda le Duc de Brctaigne apres : laifla amener a monfeigneurdeLefeuteent liommes-d’armes Bretons au feruicc du Roy. Ainli coucluez,que toute celle guerre le faifoit pour contraindre ledid Due confentir à ce mariage;amp; que Ion abuloit le Roy, quand on luy confeil-loit d’entreprendre cefte guerrc,amp;quc de fes intelligences, qu’on luy difoit a-üoiraupays dudiôlDuc,neftoir point vray, mais toute menfonge, ou peu s’en failloit. Toutesfois tout ce voyage fut fertiy le Roy dudiélConnellable tre{bien,amp; en grand’haine contre Icdidl Duc, congnoiffant que telle haine auoitilconccuë contre luy. Semblablement lèruit le Duc de Guyenne en celle guerre fort bien accompaigné,amp; furent les chofes fort pcrillcufes pour le Duc de Bourgongne; mais quand dés le commencement que ce différend commença (dont i’ay parlé) il cLift voulu affeurer dudiél mariage le Duc de Guycnne,Iuy le Connellable amp;nbsp;pluficurs autres, amp;nbsp;leurs fequelles fe fuf-fent tournez des fiens contre le Roy^efftyez à Etire le Roy bien foible, s’il leur eult efte poffible.-mais quelque choie que fçauent délibérer les hommes en telles matières,Dieu en conclud «tfon plaiEr.

Comment le Duc de Bourgongnegaigna Tiquigny^Ç^ apres trouua moyei^auoir trefue au nbsp;nbsp;nbsp;pour 'vn an^augrand regret du Conneßable. nbsp;CHAT, llï.

Ous deuez auoir entêdu au long, dont mouuok cefte gtier-re,amp; que les deux Princes au commencemêt y furent aueu-glez; amp;fcfaifoient la guerre fins en entendre le motif ne I vn ne l’autre. Qm eftoit vne merueilleufe habilleté à ceux quiconduifoientl’œuure;amp; leur pouuoit on bien dire, que l’vne partie du monde ne fçait point comme l’autre vit amp;nbsp;le gouuerne.Or toutes ces chofcs,dont i’ay parlé en tous ces articles precedes, aduindrent en bien peu de temps.Car apres la prinfe d’Amiens, en moins de quinze iours,lediól Duc fe mit aux champs auprès d’Arras (carilne fe retira point plus lüing)amp;puis tira versla riuiere de Somme droit a Piquigny. En chemin luy vintvn melîagcrdu DuedeBretaigne, quin’eftoitqu’vnho-me à pied, amp;nbsp;dift audit Duc,de par lo maiftre,corne le fiLoy luy auoit Elit fça-uoirpluEeurs chofcs,amp; entre autres les intelligences qu’il auoit en plulicurs großes villes,dôt entre les autres,nomoit Anuers,Bruges,amp; Brucelles. Aufli ïadueriiffoit leditDuc comme leRoy eftoit délibéré de l’aftleger en quelque yillc qu ille trouuall,ôc fuft il dedâs Gâd;amp; croy que ledit Duc de Bretaignc

G iiij

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8o ni. LIVRE DES MEMOIRES mandoit tout cecy enfaueur de Duc de Guyenne, amp;nbsp;pour mieux le faire ioindre a ce mariage .-mais le Duc de Bourgongne print tref mal en gré ces aduertiflemens queleDucdeBretaignckiy faiioit; amp;nbsp;refponditau mcflagcr incontinent amp;nbsp;fur l’heure, que fon maiftre eftoit mal aduerty , amp;quec’e-ftoient aucuns mauuais feruiteurs qu’il auoit qui luy vouloient donner ce courroux amp;nbsp;ces craintes, afin qu’il ne feift fondeuoirde le fecourir, comme il y eftoit obligé par fes alliances : amp;nbsp;qu’il eftoit mal informé quelles villes eftoient Gand, ne les villes, où il difoit que le Roy l’afliegeroit, amp;nbsp;qu’elles eftoient trop grandes pour aflieger; mais qiùl diftàlon maiftre lacom-paignieen quoy illetrouuoit, amp;nbsp;que leschofes eftoient autrement:carde luy,il deliberoitdepaflerlariuiere de Somme, amp;nbsp;de combatte le Roy, s’il • le trouuoit en fon chemin pour l’en garder, amp;nbsp;qu'il vouloir prier audid Duc

Ion maiftre de par Iiiy,qu’il fe voulfift declarer en fa faueur contre le Roy, amp;nbsp;luy eftre tel comme le Duc de Bourgongne auoit efté en faifant le traidéde Peronne.

Le lendemain s’approcha le Duc de Bourgongne d’vn lieu fur la riuiere de Somme,qui s’appelle Piquigny,vncaflietetresforte,amp; là auprès deliberoit défairevn pontdefluslariuiere,pourpafterSomme:mais par cas d’aduen-ture y auoit dedans la ville de Piquigny logé quatre ou cinq cens Francs-archiers , amp;nbsp;vn peu de nobles. Ceux là, quand ils veirent pafl'er le Duede Bourgongne,faillirentàrefcarmouchc,du longd’vnechauflee , qui eftoit longue,ôc fe mirent fi auant hors de leur place qu’ils donnèrent occafion aux gens de Duc deles chafler:amp; les fuyuirentde fi pres qu’ils en tuerentvnepartie deuant qu’ils feeuflent gaigner la ville,amp; gaignerent le faulx-bourg dé cefte chauflée,amp; puis on amena quatre ou cinq pieces d’artillerie, combien que par ce cofté la ville fuft imprenable , par ce qu’il y auoit riuiere entredeux; toutesfois CCS francs-archiers eurent paour(pource qu’on faifoit vn pont)qigt;on ne les aftiegeaft de l’autre cofté. Ainfi ils defemparerent la place, amp;nbsp;s’en fuyrent : le chafteau tint deux ou trois iours, amp;nbsp;puis s’en allèrent tous en pourpoint. Ce petit exploit donna quelque courage au Duc de Bourgongne,amp; fe logea és enuirons d’Amiens, amp;nbsp;y feit deux ou trois logis, difint qu’il tenoit les champs pour veoir fi le Roy le vouloir venir comba-tre :amp; à la fin, s’approcha fort pres de la ville, amp;nbsp;fi pres que fon artillerie tiroir à coup perdu par deflus amp;nbsp;dedans laville,amp;là fetint bien fixfepmai-nes.Enla villey auoit bien quatorze cens hommes d’armes de par le Roy, amp;nbsp;quatre mille francs-archiers; amp;nbsp;y eftoient monfeigneur le Conneftable, ô: tous les grands Chefs de ce Royaume, comme Grand maiftre. Admirai, Marefchal, Senefehaux, amp;nbsp;largement gens de bien. Le Roy fut ce pendant à Beauuais, où il feit \»ie bien grand’afremblée,amp; eftoit auec luy le Duc de Guyenne fon frere,amp; le Duc Nicolas de Calabre, filz aifné du Ducichande Calabre amp;nbsp;de Lorraine, amp;nbsp;feul heritier delamaifon d’Anjou. Auec le Roy eftoient les nobles duTkoyaume aflTcmblcz, par maniéré d’arriereban ; amp;nbsp;ne faut point doubter,à ce que depuis i’ay entendu , que ceux qui eftoienta-uec le Roy ,n’eufrent grande amp;nbsp;bonne volonté de congnoiftre défia la malice de cefte entreprinfe, voyoient bien qu’il n’auoit point encores fair,

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DE PHILIP P EDECOMMINE s. 8r rnaisefloit en guerre plus que wmais.Ceux qui eftoient en la ville d’Ainiens, feirent vne entreprinfe pourafliillir le Duede Bourgongne amp;: Ion oft,pour-üeuqueleRoy voulfifl enuoyer ioindre auec eux l’armée qu’il auoit auec luyàBeauuais.

Le Roy aduerty de celle entreprinfe,la leur enuoya deffendre, Sgt;c de tous poinds la rompre:car combien qu’elle femblalladuantageufe pour le Roy, toutes fois y auoit du hazard,pour ceux qui fail 1 oient de la ville,par efpecial: cartons lailloient par deux portes, dont l’vne elloit pres de l’olldudid Duc deBoueulî'cnc*efté contrainds d’eux retourner,veu que leur hilliecull elléà pied,ils euflent cité en danger de fe pcrdre,amp; de perdre la vil d'entrée, amp;nbsp;le.Enccscntrefaidcs,enuoyaleDuc de Bourgongne vn page, nommé Si- âie'àpïed? tnon de ’^Quincy, qui depuis a elléBaillifdeTroye:amp;eferiuit au Roy fixli-gnes de fl main,fhumiliant entiers luy:amp;fedouloit de quoy il luy auoit ain-ficotiru fus à l’appetit d’autruy; amp;nbsp;qu’il croioit que fil etill ellé bien informé detoutes chofes, qu’il ne l’eu ft pas fait.

Or* l’armée que le.Roy auoit enuoyéeen Bourgongne, auoit defeonfit * totitela puilTance de Bourgongne, quieftoit faillie aux champs, amp;nbsp;prins plulictirs prifonniers.Le nombre des morts n’efloit pas grand : mais la def- p’/Zß/w confiture y eftoit,amp; fi auoient délia alhcgé amp;nbsp;prins des places , quielbahif- honenw.y^ loit vn peu ledidDuc.'toutesfois il fiifoit ferner en fon oft tout le contrai-fc, amp;nbsp;que les liens auoient eu du meilleur. Qil?ncl le Roy eut veu ces lettres que le Duc de Bourgongne luy auoit efcrites,il en fut trcfioyeux,pour la rai-Ion qu’auez ouy cydelfus, amp;aulïi que les chofes longues luy ennuyoient:

luy feit refponfe,amp; enuoya pouuoir à auciins,qui eftoient .a Amiens,pour entrer en vne trefue,amp; fi en feit deux ou trois de quatre ou de cinq iours; amp;nbsp;a la fin finale fy en feit vned’vn an, comme il me femble : dont leConnefta-file, Comte de fiinél Paul , monftroit figne de defplaifir. Car lÿis nulle doubte(quelque chofe que les gens ayent penfé, ou fceulTent penfer au contraire) lediél Comte de fiiinól Paul eftoit lors ennemy capital du Duc de Bourgongne: *amp; eurent plufieursparolles, amp;nbsp;onqiies puis n’y eut amitié de rvnâl’autre,commeaucz veuparl’iirue: mais bien ont enuoyéles vns vers les: Ics autres, pour fe pratiquer, amp;nbsp;chafeun pour fayder de fon compaignon : nbsp;nbsp;mait il lt;ƒ rttii,

cequcle Duc en faifoit, c eftoit toufiours pourcuyder rauoirfiind Quentin. Semblab!ement,qLiand le Conneftable auoit paour ou crainte du Roy, il la luy promettoit rendre : amp;y eut desentreprinfes, où les gens du Duede Bourgongne,par le vouloir dudiét Conneftable,en approchèrent, Ôc les faifoit venir deux ou trois lieues pres, pour les mettre dedans : amp;nbsp;quand ce ve-noit àioindre,ledi6lConneftable ferepentoit, amp;nbsp;les ^ntremandoit, donc enlafinmalluy en print. Caril cuydoit, pourlafituartfcn où ileftoit, amp;nbsp;le grand nombre de gens que le Roy luy payoit, les tenir tous deux en crainte, par le moyen du difeord où ils eftoient,auquel il les eneretenoitzmais fon entreprinfe eftoit tref dâgereufe, car ils eftoient trop grands,trop forts, amp;nbsp;trop habiles tous deux.

Apres ces armées départies, le Roy fen alla en Touraine ,amp; le Duc en Guyenne en fon pais,ôc le Duc de Bourgongne au fien, amp;nbsp;demeurèrent vne

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8x III. LIVRE des MEMOIRES

piece les choies en ceft ellat;ôc tint le Duc de Bcuigongnc grand’ alTt mbiée d’eftats en fon pais, pour leur remonfticr le de mage qu’il auoit eu,de n’aiioir des Gês-d’armespreftscommeleRoy.ôequefileufteu lenôbredc cinqcés hommes prells,pour garder les ftôtietes,que iamais le Roy n’eult entreprins celle gucrrc,amp; fuflent demeurez en paix:ôe leurmettoitau deuant les dommages qui clloiét prells de leuren aducnir,amp; les prelloit fortûu’ilsluyvoul-Eflent donner le payemêt de huid cens Lances.Finalement ilsluy donnèrent fix vingts mille elcus,oultrepar delTus ce qu’ils luy donnoient.'amp; encccyn’c« Iloitpas comprinleBourgongne-.mais grand’doubte faifoient fes fubieds, amp;nbsp;pour plufieurs raifons,de ie met tre en celle fubiedion, où ils voyoient le • Royaume de France,à caufe de ces Gens-d’armes. Et à la vérité, leur grand doubte n’elloit pas fins caure:car quand il le rrouua cinq ou fix cens Homes d’armes,la volontéluy vint d’en auoir plus,amp; déplus hardiment entreprendre contre tous fes voifins.Er de fix vingts mille elcus,lcs feit monter iufques a cinq cens mille, amp;nbsp;creut des Gés-d’armes en tref-grand’quantité, amp;nbsp;en ont lès fubieds bien eu à foulfrir. Et croy bien que lesGés-d’armes de fouldefont bien employcz,foubs l’autorité d’vn fige Roy ou Prince: mais quad il eil autre, ou qu’il lailfeenfins petits, l’vfage, àquoy les emploient leurs Gouucr-neurs,n’efl pas touhours proffitablc,ne pour le Roy,ne pour fes fubieds.

Lahainenediminuoit point entre le Roy amp;nbsp;le Duc de Bourgongne,mais toLifiours continua. Et le Duc de Guyenne, ellant retourné en fon païs, ren-uoyoit fouucnt vers ledid Duc de Bourgongne,pour le mariage de fa fille,amp; continuoit celle poutluitc:amp; ledid Duc rentretcnoitjaufii fiifoit il tout home qui la demandoit.-amp; croy qu’il n’eull point voulu veoir defilz,nequeia-mais il n’eull marié fa fille tant qu’il cull vefeu : mais toufiours l’cull gardée, pour entretenir gens pour fen feruir amp;nbsp;aider, car il tafehoità tant dechofes grandesgu’il n’auoit point le temps à viure pour les mettre à fin , amp;nbsp;elloient chofes quafi impolTibles.-car la moytié d’Europe ne Feull feeu cotenter. Ila-uoit alTez de hardielfe,pour entreprendre toutes chofes.Sa perfonne pouuoit alTez porter le trauaifqui luy elloitnecelfürc.Il clloitalfezpuifiantdcgêsamp; d’argét; maisil n’auoit pointalîez de fens amp;nbsp;malice pour conduirefes entre-prinfes.Caraiiecles autres chofes propices à faire conquelles,fi le tref grand lens n’y ell, tout le demeurât n’efl rien, amp;nbsp;croy qu’il faut que cela vienne de la grace de Dieu.QuieuIl peu prédre partie dcsconditios du Roy nollre mai-îlre,amp; partie des liennes,on en eull bien lait vn Prince parfaiél.'car fins nulle doubte le Roy en lens le palToit de trop,ôc la fin l’a monllré par fes œuures.

Des gfierref qui furent entre les Trinces d' .Angleterre pendant les different du Louis de fharlesde quot;Bourgongne.

E me fi«s oublié, parlant de ces matières precedentes, de parler du Roy Edouard d’Angleterre : car ces trois feigneurs ont vcicu dvn tr mps, grands ; c’eftà fçauoirnoIlreRoy,le Roy d Angleterre,amp; le DuedeBourgongne. lenevous garderay point 1 ordre d eferire que font les Hilloriens, ny nommera/ les

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DE PHILIPPE D É C O M M IN E S. 83 les années, ny proprement le temps que les chofes (ont adueniics.ny ne vous îllegueray rien des Hiftoires paflecs pour exemple (car vous en fçauezaflez, , nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;_

amp;feroit parler Latin deuant les Cordeliers)mais feulement vous diray grof- t lemcntcequei’ay veuamp;fceujamp;ouydireaux Princes que ie vous nomme.

Vous eftes du temps que toutes ces chofes font aduenuës, parquoy n’eft ja befoing de fi tref juftement vous dire les heures ny les fiufons comme il me peutfcmbler.

Ailleurs ay parlé de l’occafion qui meut le Duc de Bourgongne d’efpoü-firlafœur du Roy Edouard,qui principalement eftoit pourfe fortifier con-trele Roy : carautrementnereufi; iamais fait,pour la grand’ amour qu’il ' portoit à la maifon de Lanclaftre, dont il eftoit prochain parent, à caufe de hrnere, laquelle eftoit fille de Portugal, mais la mere d’elle eftoit fille du * Luc de Lanclaftre: amp;nbsp;autant qu’il aymoit parfaiétemcnt cefte diète maifon

Lanclaftre, ilhaifToitcclled’Yorth.Or «à l’heure de ce mariage, celle de Lanclaftre eftoit du tout deftruicfe: amp;nbsp;de celle d’Yorth,nefe parloit plus;car le Roy Edouard eftoit Roy Sgt;c Duc d’Yorth, eftoit tout pacifique; amp;nbsp;durant les guerres de ces deux raaifons,y auoiteu en Angleterre fept ou huiôt grofresbaraillcs,amp; morts cruellement foixanteou quatre vinc;ts Princes ou higneiirs de maifon RoyaHe,comme i’ay cy deuant dit en ces Memoires ; amp;nbsp;fequin’eftoit mort,eftoit fugitif en la maifon dudiél Duc de Bourgongne, tous Seigneurs icunes,car leurs pcrcseftoient morts en Angleterre:amp; les auoit recueillis leDuedeBourgongne enfàmaifon,comme fes parens de Lanclaftre,auant le mariage Lefquels i’ay veus en fi grand’ pauureté, auanc t]ueledicl Duc euft congnoiffance d’eux , que ceux, qui demandent l’au-inofne,nc font pas fi panures. Cari’ay veuvn Duceftre allé a pied fans*DucdeC« chaufTes,apres le train dudièt Duc, pourchaffant fà vie de maifon en maifon, fins fenommer.C’eftoit le plus prochain de la lignée de Lanclaftre, amp;nbsp;auoit efpoLifélafœurduRoy Edouard. Apres fut congnu, amp;nbsp;cutvnepdiite pen-fion pourfentretenir. Ceux de Sombreffet, amp;nbsp;autres y eftoient. Tous font morts depuis ces batailles. Leurs pcrcs amp;nbsp;leurs parens, auoyent pillé ôc éeftruit leRoyaumcde France, amp;nbsp;pofledé la plufpart par maintes années, îoiisf’en-tretuerent. Ceux qui eftoient en vie en Angleterre amp;nbsp;leurs enfans, fontfiniscommevous voyez. Et puis ondit; Dieu ne punit plusles gens, comme il fouloit du temps des enfans d'Ifrael,amp; endure les mauuais Princes amp;mauuaifes gens.Iccroy bien qu’il ne parle plus aux gens, comme il foii-loit; carilalaifîé affez d’exemples en ce monde, pour cftre creu : mais vous pouuez veoir,en lifant ces chofes auccqucs ce que vous en fçauczd’auanta-ge,que de ces mauuais Princes amp;nbsp;autres ayans authorité en ce monde, amp;nbsp;qui en vient cruellement amp;nbsp;tyranniquement,nul ou peu ei^emeurent impunis; mais ce n’eft pas toufiours à iour nommé,n’a l’heure que ceux qui fouffrent, le défirent.

En reuenant à cc Roy Edouard d’Angleterre, le principal homme d’Angleterre qui euft fouftenu la maifon d’Yorth,eftoit le Comte de Vvaruic : amp;nbsp;le Duc de Sombreftet,au contraire,celle de Lanclaftre: amp;nbsp;fe pouuoitledièt Comte de Vvaruic epafi dire pere du Roy Edouard,quàt .a feruiccs amp;nbsp;nour-

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84 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;111. L 1 V K h DhS MhMUlK.liô

ritureSjamp;aiiflifeftoit fait fort grand : car oultre ce qu’il efloit grand Sei-gneur de foy,il tenoit grandes Seigneuries par don du Roy, tant de la cou-rönne que de confifeation: amp;puis eftoit Capitaine de Calais, amp;nbsp;tenoit autres großes offices : amp;c ay ouy eftimer quatre vingts mille efeus l’an,ce qu’il tenoit en ces chofes alléguées, fans fon patrimoine. Ce Comte de W'aruic entra en différend auec (on maiftre, par aduenture vn an auant que le Duc de Bourgongne vint deuant Amiens,amp; y aida bien le Duc:car il luy defplai-foitdecefte grand’ authoritéqueleComtede'V^aruicauoit en Angleterre; amp;nbsp;ne (’accordoient point bien.-pource que ledid feigneur de AiSZaruic fente-doit toufiours auec le Roy noftre maiffre.En effedli’ay veu encctemps,oLi peu auant, le Comte de '^aruic (i fort qu’il mift le Roy fon maiftre, entre fes -veil mains:amp;: feit mourir le feigneur * de Scalles,pere de la Royne, amp;nbsp;deux de fes enfins, le tiers en grand danger ( lefquels perfonnages le Roy Edouard ‘’«y?»aimoitfort ) amp;nbsp;feit mourir encores ajneuns chcualiers d’Angleterre: ôc gar-Annale! , , nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;~ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r i nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;J - n nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;-

da le Roy (on maiftre vne elpace de teps honeftement, amp;nbsp;luy mit nouueaux feruiteursàrcntour,pour luy faire oublier les autrcs:amp;luyfembloitquefon maiftre eftoit vn peu (impie. Le Duc de Bourgongne eut grand doubtede cefte aduenture, amp;nbsp;pratiquoit lecrettement que le Roy Edouard peuft ef cliaper,amp; qu’il euft moyen amp;nbsp;façon de parlera luy;amp; tant allèrent les chofes que le Roy Edouard efcbapa,amp; affembla gens,amp; detrouffa quelques bandes de ceux dudidl Comte de 'V^aruic.ll a efté Roy bien fortuné en fes batailles: car neuf großes batailles pour le moins a gaignées , amp;nbsp;tout à pied. Lediél Comte de Vvaruic,fe trouuat le plus foible,aduertit bien fes amis (ècretsde ce qu’ils auoient à faire,amp;fe mit en lamer à fon beauloifir, auec le Duc de Clarence,quiauoit efpoufcfa Hile, amp;nbsp;tenoitfon party, nonobftantqu’ilftift frète du Roy Edouard:amp; menèrent femmes amp;nbsp;enfans, amp;nbsp;grand nombre de gens,amp; fe vint trouuer dedans Calais ; amp;nbsp;dedans eftoit fon Lieutenant en la-vaiifio^. diôtc vilie de Calais,appelle monfeigneur deVaucler, amp;nbsp;plufieurs de fes feruiteurs domeftiques:qui en lieu de le recueillir,luy tirèrent de gradscoups gt;ƒ« vuaro- nbsp;nbsp;Canon:amp;: eftant à l’ancre là deuant,accoucba la Ducheffe de Clarence, fil

le dudiôl Comte de Vvaruic,d’vn filz.Agrand’peinevoulurentilsconfentir, le feigneur de * V^aucler,qu’on luy portaft deux flafeons de vin. C’eftoic grand’rigueur d’vn feruiteurenuersfonmaiftre:carileftapenferquilpcn-foit bien auoir pourueu en cefte place:qui eft le plus grand’ threfor d’Angle-terre,amp;la plus belle Capitainerie du monde, à mon aduis, au moins de la Chreftienté.Cequeiefçay, parce quei’y fu plufieurs fois, durant ces diffe-* L’eftapie. rends:amp; pour certain me fut diet par le Maire de*Leftape,qucdelaCapitai-Calais feroit donner au Roy d’Angleterre, quinze mille efeus de ter-me.CarleCapitaine^cndtoLitleprofitdecequ’ils ont deçà lamer, amp;nbsp;des Sauf conduites,amp; met la plus part de la garnifbnà fa pofte.

Le Roy d’Angleterre fut fort content dudiót feigneur de ’^Vaucler de ce refus qu’il auoit flit à fon Capitaine,amp; luy enuoya lettres pour tenir l’office vuatoio. en Chefear il eftoit fige cheualicramp; ancien ;amp; portoit l’ordre de la lartie-iitudy J.N3.a re.Monfeigneur de Bourgongne fut fortcontentdeluy aufli,qui pour lors eftoit cà fiinCl Omer:ôc m’enuoya deuers ledidt Seigneur de Vaucler, amp;nbsp;luy donna

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DE PHILIPPE DE C O M M I N E S. 8; donnapûiîle cfciis de penfion, luy priant de vouloir continuer en l’amour C|u*il auoit monflrce au Roy d’Angleterre, leletrouuay trel-delibcré de ce , fjire,amp; feit lcrment en l’hofte! de * L’elcalle à Calais,entre mes mains, audid Roy d’Angleterre enucf s contre tous, Sgt;c fcinblablement tous ceux de la garnilbn,amp;delà ville : ôt futl’efpace de deux moys, allant amp;nbsp;venant vers luy, pour l’entretenir,amp; prcfque me tein ce téps auec luy:amp; le Duc de Bour-gongne ne bougeoir de Boulongne,amp; feit vne große armee par mer contre le Comte de \^aruic;qui print plufieurs nauiresdes fubiecis dudiél Duc de ^ourgongneau partir qu’il feit de deuant Calais, S: aida bien celle prinfc à Uous remettre en guerreicar les gens en vendirent le butin en Normandie, a loccaüon dequoy le duc de Bourgongneprint tous les marchandsFrançoys Venus à la loired’Anuers.

PoLirce qu’il ell befoing d’eftre informé aulTi bien des tromperies amp;nbsp;mau-Uaillicz de ce monde,comme du bien (non pour en vfer, mais pour l’en garder) ie veux declairer vue tromperie,ou babilitcCainli qu’on la voudra noni-uier,car elle lut fagement conduiôlt)^: aulli veux qu’on entende les tromperies de nos voilins comme les nollres,amp; que par tout il y a du bien amp;c du mal. Quand ce Comte de A^Zaruic vint deuant Calais, efperant y entrer, comme en Ion principal reluge,monfcigneur de Vaucler,qui elloit trelîage, luy mâ-daque l’il y eut roi t,i 1 lcroit perdu:car il auoit toute Angleterre contre 1 u y, ôc le DUC de Bourgogne:amp; que le peuple de la ville de Calais feroir contre luy, ^plufietirs delagarnifon:comme monleigneurde Duras,qui eftoit Maref-clul pourle Roy d’Angleterre, amp;nbsp;pluficurs autres, qui tous auoienegensen la ville; amp;nbsp;que le meilleur pour luy eftoit, qu’il lé retiraft en France ; (]ue de la place de Calais il ne l’en fouciaft , ôc qu’il luy en rendroit bon conte,quand il feroit temps.Il Icruit trcfbien Ion Capitaine,luy donnant ce con-feiljtnais tref mal fon Roy, quant à ce poinéb dudid feigneur de Waruic. la-mds homme ne tint plus grand’deftoyauté que ce Vaucler : veu qiteleRoy d Angleterre l’auoit fait Capitaine en Chefauec ce que le duc de Bourgon-gneluy donnoir.

Commentîe'R^y Louis aydußhienleComte de ^aruicyeiuilchaJlaleR.ojt d’^y^ngleterreaugranddej^laißr du Duc de Bourgong^te^qui le receutenßesgayr. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;QH AB. L'.

de'V^aruic, ôcalla delcendre en ^’^rmâdie,où il fut fort bien reçu eil 1 y du Roy, ôc le fourni fl: argent, trellargcmcnt, pour la dcfpence de les gens : amp;nbsp;or-donna le Baftard de Bourbon, Admiral^e France,bien acco-paigné,pourayder à garder ces Anglois amp;nbsp;leurs nauires contre 1 armée de mer,qu’auoit le Duc de Bourgongne, qi^i eftoit tref-grofte, ôc tellequenulnefefuftofetrouLier en ceftemer au deuant d’elle: ôc faifoit la guerreaux fubieéfs du Roy,par mer ôc par terre,ôc le mcnaftbient.Tout cecy aduintlafaifonauantquek Roy print fainól Quentin ôc Amiens:, comme ditjôc fut ladidte prinfe de ces deux places l’an mil qualité cens fcptantc.

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III. LIVREDESMEMOIRES

L’armce du Duc de Bourgongne eftoit plus forte par mer'que celle du Roy, ôc dudiól Comte cnfemblc.Car il auoit prins au port de l’Efclufe largement * knx,Ex?-J-,amp; de Portugal ,* des nauires de Gennes, ôc plu-piatrs nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;^1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I gt;nbsp;n nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;1 ** J *

iietirs Hurqiicsd Allcmaigne. Le Roy Edouard n cftoit point home degrad ordre, mais fort beau, plus quenul Prince quei’ayeiamaisvcu en ce temps là,amp; tref vaillant.line fefoucioit point tant delà defeente dudiôl Comte de Vvaruic, comme faifoit le Duc de Bourgongne, lequel fentoit des mouue-mens par Angleterre en faueur dudiôt Comte de Vvaruic, amp;nbsp;en aduertiflbit fouuentleRoy.-maisil n’auoit nulle paour(quime femble vnefoliedene craindre fonennemy,amp;: ne vouloir craindre rien ) veu l’appareil qu’il * auoit.* car le Roy arma tout ce qu’il auoit amp;nbsp;peut finer de nauires, amp;nbsp;mit largement * Toyoir, gens dedans .-*0^ feit faire parement aux Anglois.il auoit fait le mariage du ^cfcy'eflrayé Princc dc Galles,auec la fécondé fille dudid Comte de Vvaruic.Ledid Prin-ceeftoitfeulfils duRoy Henry d’Angleterre (lequel eftoit encores vif, amp;nbsp;lt;iiauoi:. prifounicr cn la Tout deLoudrcs) amp;tout ce melnagc eftoit preftà defeen-dre en Angleterre.C’eftoit effrange mariage d’auoir defFaiót amp;nbsp;deftruit lepere dudiéf Prince,amp; luy faire efpouferfafillc.-amp;puisvouloir entretenirleDuc deClarence,frereduRoy oppofite:quidebuoit craindre que cefte lignée de Lanclaftrenereuintfurfespieds. Aufti tels ouurages nefe fçauoient paffer fànsdiftimulation.

Ori’eftoye àCalais,pour entretenir monfeigneurde Vaucler, à Haeurc de ceft appareil, amp;nbsp;iufques lors n’entendy fà diflimulation, qui auoit ja dure trois moys:car ie luy requis(veu ces nouuelles qu’il oyoit)qu’il voulfift mettre hors dc la ville vingt ou trente des feruitcurs domeftiques dudid Comte dc Vvaruic, amp;nbsp;quei’eftoyeaffeuré que l’armée dudiôf Roy amp;dudi(ft Comte eftoit prefte à partir dcNormandie où ja elle eftoit :amp; que fi foubdainement il prenoit terre en Angleterre, par aduenturc viendroit mutation à Calais, à caufe des^eruiteurs dudióf Comte de Vvaruic, amp;nbsp;qu’il n’en feroit à l’aduen-ture point le maiftre:amp; luy priay fort que dés cefte heure il les mit dehors. Toufiours le m’auoit accordé iufques à celle heure,dont ie parle, qu’il me tira à part:amp; me dift qu’il demoureroitbien lemaiftre en la ville, mais qu’il ne vouloirdireautrechofe, pouraduertir monfeigneurdeBourgongne. C’eftoit,qu’il luy côfeilloit,f’il vouloir eftre amy d’Angleterre, qu’il meiftpeine de mettre la paix,non point la gucrrc:amp; le difoit pour cefte armée, qui eftoit contre monfeigneur de Vvaruic.Medift d’auàtage qu’il feroit aifé à appoin-ter.-car ce iour eftoit pafte vne Damoifclle par Calais,qui al 1 oit en France vers madame dc Clarence, qui portoit ouuerture de paix par le Roy Edouard. Il difoit vray,mais comme il abufoit les autres,il fut deceu de cefteDamoifelle: car elle ail oit pour ccwduire vn grand marehé,amp; le mit à fin,au prciudicc du-diéb Comte de Vvaruic, amp;nbsp;de toute fàfèquelle. De ces fecreltes habilitez ou tromperies,qui fe foni^aiôles en noz contrées de deça,n’entendrez vous plus véritablement de nulle autre perfbnnc,ou moins de celles qui font aduenuës depuis vingt ans.

Lefecretqueportoitceftefemme, eftoit, rcmonftrcr àmonftigncurdc Clarence , qu’il ne voulfift point eftre caufe de deftruire fa lignée, pour aide

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DE PHILIPPE DECO M MINE S. 87 aider à remettre en authorité celle de LanclaRre,amp; qu’il confideraft leurs anciennes haines amp;nbsp;offences;amp; qu’il pouuoit bien penfer, puis que ledit Comte auoit fait efpoufer fa fille au Prince de Galles , qu’il tafclieroitdclefaire Roy d’Angleterre,amp; ja luy auoit fait hommage.

Si bien exploicla cefte femme,qu’elle gaigna le feigneur de Clarence, qui promit fe tourner de la part du Roy fon frei e , mais qu’il fufi en Angleterre. Celle femme n’clloitpas folle ne trop legiere de parler. Elle eut loilir d’aller Vers fil maiflrelTe : amp;nbsp;pour celle caufe, elle y alla plulloll qu’vn homme : èc quelque habile homme que fufl monfeigneur de Vaucler, celle femme le trompa, amp;nbsp;conduifit ce myllere,dont fut deffaiól à mort le Cote de Vvaruic, amp;nbsp;toute fa fequelle. Et pour relies raifonsn’cfl pas honte d’ellrefulpicion-neux,amp; atioir l’œil fur ceux qui vont amp;nbsp;vienncnt:mais c’ell grand’ honte d’e-llretrompé, amp;; de perdre par fit faute :toutesfois les fulpicions fc doyuent prendre par moyen,car l’ellre rrop,n’ell pas bon.

levons ay dit deuant comment celle armée de monfeigneur de Vvaruic, amp;nbsp;ce que le Roy auoit apprellé pour le côduire,elloic prell à monter,amp; celle demonfeigneurdeBourgongneprelleàcombatre, quielloit*au haureau ^«7. deuant d’eux. Dieu voulut ainli difpoferdes chofes, que celle nuiôHburdit Vncgrande tourmente, amp;nbsp;telle qu’il fitlut que l’armée dudiél DuedeBour-gongne fuifl:amp; coururent les vns des nauires en Efcolfcjles autres en Hollâ-dc;amp; à peu d’heure apres, fe trouua le vent bon pour le Comte, lequel pafla fans peril en Angleterre. Lediél Duc de Bourgongne auoit bienaduerty le Roy Edouard du port,où lediél Comte deuoit defeendre, amp;nbsp;tenoit gens expres auec luy pour le foliciter de fon profit:mais il ne luy en chaloir,amp; ne falloir que chairer,amp; n’auoit nulles gens fi prochains de luy quel’Archeuelqiie d Yoi th,amp; le Marquis de Montagu,freres dudiél Comte de V varuic,qui luy auoientfait vn grand amp;: folennel ferment de le feruir contre leurfreœ amp;tous aiitresjamp;ils’yfioit.

Apres que le Comte de Vvaruicfut delccndu, grand nombre degens fe joignirent à luy, amp;nbsp;fe trouua le Roy Edouard fort efbahy. Incontinent qu’il lefeeut, il commença lors à penfer à fes befongnes, (quiefloitbien tard) amp;nbsp;Kianda au Duc de Bourgongne qu’il luy prioit qu’il eufl toufiours fon nauire pcell en la mer, afin que le Comte ne peull retourner en Fiance;amp;* d’Angle-terre il en cheuiroir bien. Ces parolles ne pleurent gueres là où elles furent diélesîcar il fembloit qu’il eull mieux valu ne luy lailTer prendre terre en Angleterre, que d’eflre contrainél de venir en vnebataille. Cinq ou fix iours,a-pres la delcéte dudiél Comte de Vvaruic,il fe trouua trefpuiflant,logé à trois lieues du Roy Edouarddequel auoit encor plus large nient gens, mais qu’ils cufTent eflé tous bons, amp;nbsp;s’attendoit à combatte lediél Comte. Il efloi-t bien logé,en vn village fortifié,au moins en vn logis où on ne pouuoit entrer que parpont (comme luy mefmes propre m’a compté) doet bien luy print,amp; le detnourant de fes gens efloient logez en d’autres villages prochains. Coin' tneil difnoit on luy vint dire foudainement que le Marquis de Montagu,frère dudiél Comte,amp; quelques autres eftoient montez à cheual,amp;: auoient fait crier ; Vine le Roy Henry,à tous leurs gens. De prime-facc ne le creut pas,

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88 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;III. LIVRE DE S MEMOIRES

mais incontinent y enuoyaplufieiirs maflagers, amp;nbsp;f’arma : amp;nbsp;mit des gens aux barrières de fon logis,pour le deffendre.il auoit là auec luy vn fage Che-ualier,appelle monfeigneur de Haftingucs , grand Chambellan d’Angleterre , le plus grand en authorité d auec luy. Il auoit pour femme la fœur du-diôt Comte de Vvaruic, toutesfois il efloit bon pour fon maiftre.il auoit en cefte armee trois mille hommes à cheual, comme luymefmes m’a compte. Vn autre y auoit, appelle monfeigneur * de Scalles, frere de la femme dudiôl comifaraJnt Roy Edouatd, amp;nbsp;plufieui's bons Cheualiers Effuy ers,qui tous congnurét n’alloitpas bien .-car les meftagers raporterent que ce qui

auoit efté rapporté amp;diôlau Roy,eftoit veritable: faffembloicntpourluy • venir courir fus.

Dieu voulut tàt de bien à ce Roy Edouard,qu’il eftoit logé pres delà mer: amp;nbsp;y auoit quelque nauire,qui le fuyuoit menant viures, amp;nbsp;deux Hurquesde Hollande, nauires marchans. Il n’eut autre loifirque de fen aller fourrer dedans. Son Chambellan demouravn peu apres, qui dift au Chef de fes gens,‘ amp;nbsp;à plulieurs particuliers de ceft Oft, qu’ils allafl’ent deuers les autres : mais qu’il leur prioit que leur volonté fuft de demourer bonne amp;nbsp;loyale enuers le Roy amp;luy : amp;i. puis fen alla mettre dedans lanauirc auec les autres, qui eftoient preftsà partir.Lcur couftume d’Angleterre eft, que quand ils font au deflus de la bataille, ils ne tuent rien, amp;nbsp;par efpecial du peuple (car ils congnoiffentqucchafcLin quiert leur complaire par ce qu’ils font les plus forts ) amp;nbsp;ne mettent nuis à finance. Parquoy tous fes gens n’eurent nul mal dés que le Roy fut party. Mais encores m’a compté le Roy Edouard , qu’en toutes les batailles qu’il auoit gaignées,que dés ce qu’il venoit au deffus,ilmo-toit à cheual, amp;crioitqu’onfauuaft le peuple, amp;nbsp;qu’on tuaft les feigneurs: carde ceux n’efehappoit nul, ou bien peu.

f»r Ainfi fuit ce Roy Edouard, l’an mil quatre cens foixantc amp;nbsp;dix , auec fes menait Ray fteux Hutqucs, amp;nbsp;vn petit nauire nen,amp; quelque fept ou huiôtcens perfon-nés auec luy, qui n’auoient autres habillemens que leurs habillemens de guerre:amp; fi n’auoient ne croix ne pille: ny ne fçauoient à grand’peine où ils alloient.Bien eftoiteftrangcàce pauure Roy (car ainfi fe pouuoit il bien appeller) d’ainfifcnfLiir,amp;eftreperfecutédefes propres fcruitcuis. Ilauoit iaacouftuméfes aifes amp;nbsp;fes plaifirs douze ou treize ans, plus que Prince qui ait vefeu de fon temps : car nulle autre chofe n’auoit en penfée qu’aux Dames , amp;nbsp;trop plus que de raifon,amp; aux chaffes, amp;nbsp;à bien traiôfer fa perfonne. Quandilalloitàlafaifonàceschaffes,il faifoit mener pluficurs pauillons pour les Dames : amp;nbsp;en effedt,!! y auoit fait grand’ chcre; amp;nbsp;aufti il auoit le per lonnageaufti propice à ce faire qu’homme queiamais ie veiffe ; car il eftoit ieune^ôc beau, autant que nul homme qui ait vefeu en fon téps, ie dy à l’heure de cefte aducrfité : car depuis s’eft fait fort gras. Or voyez cy comment il entre maintenant augt;aduerfitez de ce monde, il fuit le droit chemin vers Hollâde. Pour ce temps les Oftrelins eftoient cnnemys des Anglois, amp;nbsp;aufti des François : amp;nbsp;auoient pluficurs nauires de guerre fur la mer , amp;nbsp;eftoient fort crains des Anglois : amp;nbsp;non fans caufe ( car ils (ont fort bons combatans) amp;nbsp;leur auoient porté grand dommage en cefte armée là, amp;nbsp;prins plufieurs nauires,'

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DE PHILIPPE DE COMMINES.

üauircs. Lefdids Oflrclins appercetirent de loingces nauircs, oùeftoit ce Roy fLiyant:amp;commencèrent à Iiiy donner la chalTc fept oii Eiiiôh nauires qu’ilseftoient.ileftoit Joingdeuanteux, amp;gaigna lacoftcde Hollande, ou encores plus bas:car ilarriua en Prize, pres d’vne petite ville,appellee Alque-

amp; ancrèrent fonnauire, pource que la merfeneftoit retirée, amp;nbsp;ils pouuoient entrer au haurc,amp; Ce meirent au plus près de la ville qu’ils peurêt. Les Oftrelins vindrent femblablcment ancrer allez pres de luy, en intention deleioindreàlamarée prochaine.

Vn mal amp;vn peril ne vient iamais fcul ; la fortune de ccRoycftoit bien ‘S'f pion fur changée,amp; fes penfées.Il n’y auoit que quinze iours qu’il eu ft efte bien efoa- re hy,qui luy euft ditftiLe Comte de Vvaruic vous chalfera d’A ngicterre, nbsp;nbsp;en

onzeiour en aura la domination : car non plus ne mit ila en auoir robcib'‘^‘'''«quot;‘quot;* lance. Etauecceil Ce moquoitdu Duc deBourgongne, qui dcfpcndoitfon argent à vouloir deffendre lamer, difint que ja le vouldroit en Angleterre. htquelleexcLifeeuftil feeu trouuer d’auoirfrir celle grand’ perte,amp; par fa laultc ? linon dire; le ne penfoye que telle chofeaduint. Biendeuroit fou-* rougir, gervn Prince fil auoit aage, défaire telle exeufe; car elle n’a point de liciu Bel exemple eft en ceftuy-cy pour les Pfinces,queiamais n’ont d’oubte ne crainte de leurs ennemys, amp;le tiendroient à honte; amp;nbsp;la plul-part de leurs bruiteurs fouftiennent leurs opinions, pour leur complaire, amp;nbsp;Icurfcmble tjti’ilsen foient prifezamp; eftimez , amp;nbsp;qu’on dira qu’ils auront courageufe- • rnent parlé.Ie ne fçay que l’on dira deuant eux, mais les Pages tiendront telles parolles àgrand’folie:amp; eft honneur de craindre ce que l’on doibt, d’y bien pourueoir. C’eft grand’richefleà vnPrinced’auoirvnGgchomme en facompaignie,ôc bien leur pour luy,amp; le croire,amp; que ceftuy là ait loy de di* reverité.

D’auenture monfeigncnrdcla*GrutureGouuerneur pour loi^du Duc* crutufe» deBourgongne en Hollande, cftoitlorsau lieu où le Roy Edouard voulut defeendre,lequel incontinenten fut aduertyfcar ils mirent gés aten c)amp; fl du peril en quoy il cftoit pour les Oftrclinsdcquel enuoya incontinent deb fendre aux Oftrelins de ne luy toucher.Et alla en la nef où lediét Roy eftoir, S: le recueillit,amp; defeendit en tcrre,amp; bien quinze cens hommes auec luy.óc y eftoit le Duc de Cloceftre fon frere, qui depuis feft fait appeller le Roy Richard. Ledid Roy n’auoit ne croix ne pille , amp;nbsp;donna vne robbe fourrée de helles fnartresaumaiftredelanauire, promettant luy mieux faire le temps aduenir. Si pauure compaignie ne fut iamais, mais 1 edict feigneur de la Gru-ture feit honnorablcment:car il donna plufieurs robbes,amp; deffraya toutiuf-ques à la Haye en Hollande, où il le mena: amp;nbsp;puis adgertit monleigneur de Bourgongne de cefte aduenture, lequel fut merucillcofcmcnt effrey é de ces nouuelles,amp; euft beaucoup mieux aymé fa mort;car il cftoit en grand foucy du Comte de Vvaruic,qui eftoit fon cnnemy,amp; auoielamaiftrile en Angle-terre.Lequel toft apres fa defcente,trQuua nombre de gens infiny pour luy: car ceftoft,qLt’auoitlaifle le Roy Edouard , par amour amp;par craintefemit tout des fiens,amp; chafeun iour luy en venoit : ainfi f en alla à Londres. Grand nombre de bons Cheualiers ôcEfcuyers fenallercnt,ôcfe mirent és franchi-

À’

‘Jh-

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90 III. LIVRE DES MEMOIRES

fes qui font à Londres,qui depuis feruircnt bien le Roy Edouard:amp; auffi fcit la Royne là femme,qui accoucha d vn filz en grande pauureté.

Comment leComtede quot;^aruic tira hors de^frißn nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Henry

d’iy^ngleterre. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;(jH A T. yi.

V A N D lediôl Comte deVvaruic fut arriué en la ville de Lo-dresjil alla en laTour ( qui efi: le Chafteau ) amp;nbsp;en tira le Roy ÿ Henry, que autresfois (il y auoit bien long temps) auoit rnis luy mefmes là dedans,criant deuant luy qu’il eftoit traiftreS: crimineux de lezc maiefté;amp;à celle heure l’appclloit IcRoy^ amp;nbsp;le mena en fon Palais à V veflmontier, amp;c le mill en fon e-llat royal,en la prefence du Duc de Claréce,à qui ce cas ne plaifoit pas. Et incontinent enuoya à Calais trois ou quatre cens homes, qui coururent tout le païs de Boulenois : lefquels furent bien receus par le feigneur de Vancler,dôt i’ay tant parlé : amp;nbsp;fe peut lors côgnoiflre le bon vouloir, qu’il auoit toufiours enuers fon maillrc le Comte de Vvaruic.Le iour que le Duc de Bourgongne cutles nouuelles que le Roy Edouard elloir arriué en Hollade,i’elloyearriuc deuers luy de Calais,amp; le trouuay à Boulongne, amp;nbsp;ne Içauoye encores rie de • cecy,ncdclafuitedu Roy Edouard. Le Duc de Bourgongne eut leprcmiet nouuelles qu’il elloit mort. De cela ne luy chaloitgucres;caril aymoit mieux „ , celle lignée de Lanclallrc que celle d’Yorth :amp; puis il auoit en fil maifon les JHalmtoM, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I ». -.1 n nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;l/'l/T' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I/' nbsp;nbsp;nbsp;* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ir» tt'

TO4K U eß miI Ducs de Clocellre amp;nbsp;de Sobrellet, amp;nbsp;plulieurs autres du party du Roy He-ryipourquoy luy fembloit bien qu’ils l’appointeroiét bien aueccelle lignée: craignoit fort le Comte de Vvaruic:amp; li ne fçauoit commcntilpour-chez luy,àfçauoirleRoy Edouard, dot d’Ex il auoit efpoufé là fœur, Sgt;c fclloient faiéls frères d’ordre : car il portoit la toi* lon,amp; le^liél Duc portoit lalartiere.

Lcdicl Duc me renuoya incontinent à Calais, amp;nbsp;vn Gentil-homme ou ÄxSft/J aucemoy, qui elloicnt de celle partialité nouuelle de Henry: amp;nbsp;me wEjfexia, ’ commanda ce qu’il vouloir que iefeilfe auec ce monde neuf, encores me Sleidan 4yme pria bien fort d’y aller, difiint qu’il auoit befoing d’cllre feruy en celle ma-tiere.Ic m’en allay iufques àTournehan(qui ell vn Chafteau pres de Guynes) *'‘contenter n’ofiiy paftet oultte : pource que ie trouuay le peuple fuyantpour les An-ExtfivM. glois,qui eftoient fur les champs,amp; couroient le païs. l’enuoyay incontinent à Calais demander vnfauf-conduiél à monfeigneur de Vaucler:cari’elloie ja accouftumé d’y aller fans congé, amp;y eftoychonnorablcment rcceu; car les Anglois font fort honnorables.Toutcccy m’eftoit biennouueau:cariamais ien’aiioyefiauantvw des mutations de ce monde, l’auoyc encores celle nuiél aduerty le Duc de la crainte que i’auoy e de pairer,lans luy mander que i eulTe enuoyé quérir liureté;car ie me doubtoie bien de la relponce que i’eu. Il m’enuoy.i vne verge qu’il portoit au doigt pour enfeigne, amp;nbsp;meraada que icpalIaireoLiltre, amp;nbsp;me dculTcnt ils prendre, car il merachetéroit. line craignoit point fort à mettre en peril vn lien feruiteur, pour fen ayder, quand il en auoit befoing:mais i’y auoye bien pourueu par le moyen de cefte feureté, que

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DE PHILIPPE DE COMMIMES.

(|ué feu, auec tref gracieufes lettres de monlcigneurde Vaucler, difînt que icpouuoieallercommciauoic accoullumc.Iepaßaya Guynes,amp; trouuay le Capitaine hors du Chafteau qui me prefenta à boire, fins m’oflrir le Cha-fteau,comme il auoit accôLiftumé,amp;: feit tref-grand honneur amp;nbsp;bonne chere «àces Gentils hommes qui eftoiêcauec moy des partiiàns du Roy Henry.d’al-lay à Calais,amp; nul ne vint au dcuâtde moyjCome il auoit accouftumé. Tout homme portoit la liurée de monfeigneur de Waruic. la porte de mo logis, amp;nbsp;de ma chambre me feirent plus de cent croix blanches, amp;nbsp;des rymes, con-tenans que le Roy de France,amp; le Comte de \/aruic eftoicnc tout vn.Ie trou tiay tout cecy bien cftrage.renuoyé d’auanture à * Grauelignes(qui eft à cinq lieues de Calais ) amp;nbsp;manday qu’on arreEaft tous marchands amp;nbsp;rnarehandifes ‘ ni nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Tinl nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I ♦^'’•GrauUni

a Angleterre , a caule de ce quils auoient ainli couru. Ledict de Vau cl er nie manda a difner,qui efloit bien accompaignc;amp; auoit le RauaEre d’or fur le honnet,qui elfoit la liurée dudid Comtc,qui eftoit vn baEon noir,amp; tous les autres fcmblablement : Sc qui ne le pouuoitauoir d’or 1 auoit de drap. Et

me fut dit à ce difner, qu’incontinent que Ic^inciîatrcr fut arriué d’Analeter- Pairao-er’ re,qui leurauoit porte'cefte nouuelle,qu’en moins d’vn quart d heure chafeu portoit ladicte liurée,tant fut celle mutation haftiue loubdaine. Ce fut la premiere fois que i’eu iamais congnoilEince que les chofes de ce monde font peu Eables. Lediólde Vauclerne me dift queparolles honneEes, amp;nbsp;quelque peu d’excLifes en la faueur du Comte fon Capitaine, amp;nbsp;les biens qu’il lu y a-uoit faits: quant aux autres,qui cEoiét auec luy,iamais ne furent li delbor-dezzear ceux que ie penfoie des meilleurs pour le Roy,eEoient ceux qui plus lemenaEbicnt:amp; croy bien qu’aucuns le faifoient pour crainte, amp;nbsp;d’autres le fiifoient à bon efcient.Ccux que i’auoye voulu mettre hors de la ville le têps paflé ( qui eEoient feruiteurs domeEiques dudiéf Comte) auoient à celle heure là bon credit ; routesfois ils n’auoient iamais rien fccu que miEe parlé d'eux audiôl Vauclcr.Ieleurrefpondoycà tous propos que le Roy Edouard eEoit morr,amp;: que fen eEoyebien aHeuré, nonobEant queiefçauoie bien le contraire:amp; difoyc auEi que quand il ne le feroit,E eEoient les alliances que monfeigneur de Bourgongne auoit auec le Roy le royaume d’Angleterre telles,qu’elles ne fe pouuoiét* cEaindre pour ce qui eEoit aduenu:amp; que ce-Juy qu’ils prêdroiét pour Roy,amp; nous auEi:amp; que pour les mutatios paEées, yauoiéteEémiscesmots,AVEC LE ROY ET LE ROYAVME: amp;nous eEoient pleges les quatre principales villes d Angleterre pour l’en-tretenement des alliances.Les marchands voulurcntforr,queiefuirearreEc^ pource qu’on auoit prins plufieurs de leurs biens à Grauelignes, amp;nbsp;par mon commandementjCommeils difoient. Tellement fut appointé entre euxamp; moy,qu’ils payeroienttoutle beEail quils auoient priBS,ou qu iis les rendif-fent:car ils auoient appointementauec lamaifon de Bourgongne , depou-uoir courir certains palturages quieET)ient,amp;prend!lt;^ bcEailpourlaproui-lion de la ville, en payant certain pris,lequel ilspaierent: ôc n auoient prins nuis prifbnniers.Parquoy futaccordéentre nous, que les alliances demou-reroient cntiercs,quc nous auions faiéfes auec le royaume d Angleterre,fauf que nous nommions Henry au lieu d’Edouaru

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III. L I V R E D E s MEMOIRES

Ceft «ippointement fut bien aggrcable au Duc de Ecurccrgrc :«! le Comte de V varuic cnuoyoic quatre mille Anglois à Calais, pciii luy faire la guerre à bon efeient, amp;: ne pouuoit l’on trouucr Eicon de l’adculcir.Toutes-fois les gros marchads de Londres,dont pluficurs en y auoit à Calais,l’en de-Rourncrenr,pource que cell Eeftappede leurs laines: amp;nbsp;cft choieprefqueincroyable pour combien d’argent il y envient deux fois l’an, ô: font la arten-dans que les marchads viennent; 8c leur principale defehargeeft en Fladres, êc en Hollande.Etainfi ces marchads aidèrent bien à conduire cell appoin-tement, amp;nbsp;à faire demeurer cesgensquemonfieurde Vvaruicauoit. Cccy vint bien a.propos au Duc de Bourgongne, pource que c’cfloit proprement ÿ l’heure que le Roy auoit prins Amiens ôc lainófc Quentin : 8c li ledid Duc eulfeu guerre auec les deux royaumes à vnefois,il elloit dertruiel.il trauail-loit d’adoLîleir mofeigneur de V varuic,rat qffil pouuoir,difant qu’il ne vouloir rien faire contre le Roy Henry, 8c qu’il ertoit de celle lignée de Lancia-lire, 8c toutes telles paroi les feruantes à la matière.

Or pour retourner au Roy Edouard,il vintdeiicrslediClDucdcBourgô-gneàfainôt Paul, amp;c leprelïafort de Ion aide, pour l’en pouuoirretcuiner, ralfcurançd’auoir grandes intelligences dedans le royaume d’Angleterre: 8c que pour Dieu il ne le voulhft abandonner, veu qu’il auoit elpouféfi lœiir, amp;nbsp;qu’ils eftoient freres d’ordre.Le Duc de Sombrclîct ôc de Clocellre pref-

It -vicH cxetnji, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1t»tt nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;rl-rt nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;T

du, d’Escc- loienttoutle conn aire, 8c pour le party du Roy Henry. LedictDuc nelca-uoic aulquels complaire; 8c entiers les deux parties craignoitâ melprendre, auoit la guerre encommencée bien alpi ement alon viEiige. Finalement 5«’,/. pr„r- iJ creur pour lors lediét Duc de Sombrclfer, Sc les autres delîufdiéfs prenant certaines promefles deux contre le Comte de Vvaruic, dentils eltoientan-ciensennemis. Voyant cecy leRoy Edouard, qui ertoit lur le lieu, n'eftoit ïïquot;l«sàfon;i(e:toutesfois on luy donoit les meilleures raifonsqu’o pouuoit,di-A nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;® faifoit ces dilhmulatios pour n’auoir point îaguerreaux deux roy-

»•ai, p.lyd. aumes à vn coup ; car li lediôt Duc ertoit dertrunrt, il ne luy pourroit pas bien l aydcrapres,li bien à fon ailc.Toijtcsfois ledid Duc, voyant qu’il ne pouuoit plus retenir le Roy Edouard,qu’il ne fenallaft en Angleterre, 8c pour plu-iîeurs raifonSjOeloloit de tous pointls courroucer. Ilfaignit en public, de ne luy bailler nul fccours,8c feit crier que nul n’allaftà fon aide; inaisfoubs main,ôc fecrettement, il luy feit bailler cinquante mille Florins à la croix fainól André;8c luy feit faire finance de trois ou quatre grolTes nefs, qu’il luy feit accouftrer au port de la Vcre en Hollande,qui eft vn port où chafeun ert reccu:amp; luy fouldoya fecrettement quatorze nauircs d’Oftrelins,bien armez qui promettoyent le f^uir iufques à ce qu’il fuft parte en Angleterre,ôc quim jours apres.Ce fecouÉ^fut tref-grand felon le temps.

Comment le 'Roy^Eclouard retourna en lt;tAn^eterre^ oùildeffeiten bataille le Comtede'^aruic^^^' le Trince

de Qalles apres. QH A T. J^l I.

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PHILIPPE DECOMMINE S. p3

E Roy Edouard partit l’an mil quatre cens feptatc amp;nbsp;vn, ainii 1471. comme le Duc de Bourgongne alloit cotre le Roy à Amiens: ëc fcmbloit bie audidDuc, que le Erid d’Angleterre ne pour-roic aller mal pour luy, qu’il auoit amys aux deux collez. Incontinêc que le Roy Edouard fut à terre,il tira droit à Londres .-car il y auoit plus de deux mille hommes tenans fon party dedans les franchifes, dont il y auoit trois ou quatre cens Cheualicrs amp;nbsp;Efcuycrs,qui luy fut grand’faneur; car il ne defeendoit pas a grads gens.Tan-toft apres que le Cote de Vvaruic,lequel elloit au North auecgrad’puiflance fentit ces noLiuelIes,il fe ballade tourner vers Londres, efperant y arriucr le premier : toutesfois luy fembloit il bien que la ville tiendroit pour luy : mais autremêt en aduint. Carie Roy Edouart y fut reccu le * Lundy faind,à grad’ ioye de toute la ville qui eftoit contre l’opinion de la plulpatt des gens, car ' chafeun le tenoit pour tout perdu/ôe fils luy eulfent fermé les portes, en fon faiôl n’y auoit nul remede, veu que le Côte de Vvaruic n’efloit qu’à vnciour-néede luy. A ce qui maellé compté, trois chofes furent caufe que la ville fc tourna des liens, La premiere,les gens qu’il auoit es franchifes, amp;nbsp;la Royne là femme qui auoit fait vn filz, La fécondé,les grandes debtes, qu'il deuoit en la ville, pourquoy les marchands,à qui il deuoit,tindrent pour luy. La tierce, plulîeurs femmes d’eEat amp;nbsp;riches Bourgeoifes de la ville, dont autresfois il auoit eu grand’priuauté, amp;nbsp;grand’accointancc,Iuy gaignerent leurs maris, amp;nbsp;leurs parens. Il ne feiourna que deux iours dedans ïa vil 1 e:car il partit la vigile de Pafques,auec ce quil peut amalTer de gens,ôc tira au deuant du Comte de Vvaruic, lequel il rencontra le lendemain au matin,qui fut le iour de Paf-ques:amp; comme ils fc trouuerent l’vn deuant l’autre, fe tourna le Duc de Clarence frere dudiél Edouard auec luy,auec bien douze mille hommes, qui fut grand clhahilTemcnt au Comte de Vvaruic, amp;nbsp;grand reconfort audiôlRoy, lequelauoit peu degens. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•

Vous auez bien entendu parcy deuant, comme celle marchandife du Duc de Clarence auoit elle menée ; amp;nbsp;nonobllant tout ce, fi fut la bataille tres-af-pre amp;nbsp;tres-fortc. Tout elloit à pied, d’vn collé amp;nbsp;d’autre. L’auant-garde du Roy futfort endommagée: amp;:ioignitla'bataille du Comte de Vvaruic iuf-ques à la licnne, amp;nbsp;de fi pres que le Roy d’Angleterre combatit en fa perfon-ne autant ou pluy que nul homme qui full des deux collez.Lediél Comte de Vvaruic n’elloit iamais accoullumé de defeendre à pied .-mais auoit de cou-./ Hume, quand il auoit mis fes gens en befongne,de moter à chcual.-amp; fi la bc-fongnealloit bien pour luy,il fe trouuoit à la melléc;amp; fi elle alloit mal, il fe dellogcoit de bonne heure. A celle fois il fut contraint par fon frere le Marquis de Montagu, lequel elloit tref vaillant cheualiÇ^ de defeendre à pied, R; d’enuoier les chenaux. Tellement fe porta celle iournée, que lediél Côte mourut, amp;nbsp;fon frere le Marquis de Montagu, amp;nbsp;gr.^nd nombre degens de bien: amp;nbsp;fut la delconfiturc tref grande:car la deliberation du Roy Edouard elloit quand il partit de Flandres , qu’il n’vferoit plus de celle façon de crier qu’on làuuall le peuple, amp;nbsp;qu’on tuall les gens de bien ; comme il auoit autresfois fait en ces batailles precedentes: car il auoit conccu vne tref-grande

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lt;?4 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;III. LIVRE DES MEMOIRES

haine contre le peuple d’AnglctcrrCjpour la faneur qu’il voyoit qu’il portoit au Cote de Vvaruicjô: aulîi pour autres raifons, pourquoy à ctEe fois ils rc furent point cfpargnez. Du collé du Roy Edouard mourut quinze censho-mes,amp; fut celle bataille fort combatue.

Auiour de ladiéle bataille efloit le Duc de Bourgongne deuant Amiens;

eut lettres delà Duchelfe fà femme,que le Roy Edouard n’efloit pas content de luy,amp; que l’ayde qui luy auoit cflé faiólc,auoit eflé faide en mauuai-fe forte, amp;nbsp;à grand regret, amp;nbsp;qu’à peu tint qu’il ne l’eufl abandonné. Et pour dirclaveritc, l’amitié ne fut iamaisgrande depuis : toutesfoisil enfeitfon profit,amp;feit fort publier celle noLiuelle.I’ay oublié à dire comment le Roy fnt mené en ceflc bataille.*Le Roy Edouard le trouua à Londres. Le-•did Roy Henry efloit homme fort ignorant,amp; quafi infenfé; amp;nbsp;fi ien’enay ouy mentrr.Incontinent apres cede bataille,le Duc de Cloceflre frere dudid Roy Edouard,(lequel depuis a eflé Roy nommé Richard) tua de fa main, ou feit tuer en fàprefencc,quelque lieu à part,cc bon homme le Roy Henry.

Le Prince de Galles,dont i’ay parlé, à l’heure de cefle bataille efloitia def-*4« -oM. cendu en Angleterre; amp;nbsp;efloient ioinds auecluy les Ducs de* Cloceflre amp;: àwcor Je Sombreffet, amp;nbsp;plulieurs de fii lignée, amp;nbsp;des anciens partifàns:amp; y efloient d’Exccftie plus de quarante mille perfonnes, comme m’ont dit ceux qui y efloient : amp;nbsp;quaod le Comte de Vvaruic l’eufl voulu attendre, il y a grande apparence QLi’ils fufTcntdemourcz les feigneurs amp;nbsp;maiflres : maïs la crainte qu’il auoit de Sombreffet,dót il auoit fait mourir pere amp;nbsp;frere,amp; auffidelaRoy-ne Marguerite,mere dudid Prince,qu’il craignoit, fut caufè de le faire com-batre tout à part foy,fiins les attendre. Regardez doneques combien durent ces anciennes partialitez,amp; combien elles font à craindre, amp;nbsp;les grans dom-raagesquienaduiennent.Incontincntquele Roy Edouard eut gaigné cefle bataille, il tira au deuant dudid Prince de Galles, amp;nbsp;là y eut vue tref grofle ' bataille.-far ledid Prince de Galles auoit plus de gens que le Roy; toutesfois ledid Roy Edouard en eut la vidoire , amp;nbsp;fut le Prince de Galles tué fur le^ Champ, amp;nbsp;P lu fleurs autres grans feigneurs,amp; tref-grand nombre dépeuplé; amp;nbsp;le Duc de Sombreffet prins,lequel eut lendemain la tefle trenchée. En on-, . zeioLirs gaisnale Cote de Vvaruic tout le royaume d’Aiip-letcrre,au moins * vingt amp;vn , nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;D nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;T r» 1- t 1 , nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;* - nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;■ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• '1

Exe^ lt;nbsp;viiil, lemitenfonobciflance.LeRoy EdouardJeregaignaen vingt lours.-maisil \ y eut deux groffes batailles amp;nbsp;afpres. Ainfi voyez quelles font les mutations d’Angleterre.LedidRoy Edouard feit mourir beaucoup de peuple en plu-ficurs lieux, par efpecial de ceux qui auoient fait les affemblées contre luy.

De tous les peuples du môde,celuy d’Angleterre efl le plus enclin en fes batailles. Apres cefle iournée efl demouré le Roy Edouard pacifique en Angle-tcrre,iufquesàfà mq^l : mais non pas fans grand trauail d’efpritôc grandes penfées. le me veux ceffer de plus vous aduertirde ces faids d’Angleterre, iufquesà ce qu’ils feruent à propos en quelque autre lieu.

Comment guerre fer enouuella entre le Roy Louys^amp; le Duc Charles de Xourgongne^d la folicitation des Ducs de Quyenne nbsp;nbsp;de

Bretaigne. QH AT. yill.

Le

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UE PHILIPPE DE C U M M i N E 5, E dernier endroit oii ie me fuis reu de nos affaires deparde-•'i^^^eau parrcinent que feit le Duc de Bourgongne d« A miens, amp;nbsp;auffi du Roy, qui de foncoflé ic retira en (I nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Touraine,amp; le Duc de Guyenne fonfrere en Guyenne ; le-

quel ne ceffoit de continuer la pourfuite du mariage, où il pretendoir,aucc la fille du Duc de Bourgongne,comme i’ay cy deuant.Lediôt Duc de Bourgongne monftroit toufiours y vouloir en-^endre, maisiamaisn’eneutlevouloir, ains en vouloir entretenirchafeun, foiiime l’ay dit.* amp;nbsp;puis luy fouuenoitdes termes qu’on luyauoit tenus pour ^^côrraindre à faire ce mariage.*amp; vouloir toufiours le Comte de fainél Paul, Conneftable de France,eftre moyenneur de ce mariage.D’autre cofté le Duc ^cBretaigne vouloir que ce fuft par le fien.Le Roy eftoit d’autre part,pour le * rompre tres embefongnézmais il n’en eftoit point de befoing, pour deux raisons que i’ay diéles ailleurs.’n’auffi le Duc de Bourgongne n’euft point voulu ^efi grand gendrc:car il vouloir marchander de ce mariage par tout,comme ^3ydit:amp;ainfilcRoy fe mettoiten peine pour neant,mais il ne pouuoitfça-rroirles penfées d’autruy ; amp;nbsp;n’eftoit point de merueilles fi le Roy en auoit crgt;'unte,par ce que fon frere euft efté biêgrand,fi ce mariage euft cfté faiift.'car

Duc de Bretaigne ioind aucc 1 uy,l’eftat du Roy, amp;nbsp;de les enfans, euft efté peril.Et fur ces propresenrrefaiôEesalloicnt amp;nbsp;venoient maints Ambaffa-deurs des vns aux autres,tant fecrets que publiques.

Cen’eftpas chofetrop feurede tant dallées ne devenues d’Ambaffades, Dtgrejtim ^''irbicnfouuentfy traiôîentdemauuaifes chofes:toutcsfois il eft neceffaire rlenenuoyer amp;nbsp;d’en receuoir. Et pourroient demander ceux ejui liront ceft article, les remedes queie vouldroye qu’on y donnaft, amp;nbsp;que c eft chofeim-poffiblcd’y pouruoir. Icfcay bien qu’affez en y a, qui mieux enfçauroient parler que moy : mais voicy que ie feroye .Ceux qui viennent de vrais amis, * Scoù il n’y a point de matière de fuf picion, ie feroye d’aduis qu’on l^urfcift bonne cherc,amp; euffent permiffion de veoir le Prince allez fouuent, felon la qualité dont feroit la perfonne dudiéh Prince,i’entends qu’il foit fage amp;nbsp;hon-nefte: car quand il eft au contraire, le moins le monftrcr eft le meilleur. Et ^uand il le faut veoir,qu’il foit'bien veftu, amp;nbsp;bien informé de ce qu’il doibt dircjôc l’en retirer toft:car l’amitié qui eft entre les Princes,nc dure point tou-fiours.Siles Ambaffideurs fecrets ou publiques, viennent de par Prince où hhaine foit telle que Paye veuë continuelle entre tous ces feigneurs dót i’ay parlécy deuant (lefquels i’aycongnus amp;nbsp;hantez en mon temps ) il n’y a pas grand’feurete félon mon aduis, on les doibtbien traider amp;nbsp;honorablemêt ' recueillir-.comme enuoyer au deuant d’eux,amp; les faire bienloger, amp;nbsp;ordon ner gens feu rsamp; figes pour les accompaigner,qui eft ch^efcurc amp;hôneftc; pourcc que par là on fçait ceux qui vôt vers eux,amp; garde on les ges legers amp;nbsp;mal contens,de leur porter nouuelles : car en nulle majp3n tout n’eft cotent. D’auàtage ie les vouldroye toft ouir amp;nbsp;depefcher:car ce me femble tref mau-uaifechofe que tenir fes ennemys chez foy amp;nbsp;de les faire feftoyer, deffrayer, faireprefenSjCela n’eft qu’honefte. Encores me femble que quand la guerre feroit ja commencée , fi ne doibt l’on rompre nulle pratique n’y ouucrturc

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HI. LIVRE DES MEMO 1RES

qu’on face paix (car on ne fçait l’heure qu’on a affaire) mais les entretenir toutes, amp;nbsp;ouir tous mefl'agers, faifansles chofes defTufdidcs, amp;nbsp;faite faire bon guet, quels gens iroient parler à cux,amp;: qui leur feroient eniioyez tant de iour que de nuiôfjtnais le plus fecrettement que l’on peut.Et pour vn mcflàgeou Ambafladeur,qu’ils m’enuoiroyenr,ie leur enenuoieroyedeux; amp;nbsp;encores qu’ils fen ennuyaflent, difms qu’onn’y renuoyaft plus,fivoul-droyc-ie y enuoyer quand i’en auroye opportunité'amp; le moyen. Car vous ne fçauriez enuoyer cfpie fi bonne ne fifeure,ne qui euflfi bien loy de veoic amp;nbsp;d’entendre; amp;nbsp;fivos gens font deux ou trois, il n’eft poflibic quon fe *oufccrcttc fceijftß bien donner sarde, que l’vn ou l’autre n’ait quelques parollcs* ou nient OU au- J nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;n , nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ill

tremenc a lentement de quclqu’vn.I entends tenans termes honneitcs, comme on tient

à AmbafEideurs.Etcftdecroirequ’vn fàge Prince met toufiours pçine da-uoir quelque amy ou amys auecques partie aduerfc,amp;: fen garde comme il peut: car en telles chofes on ne fiit point comme l’on veut. On pourra dire que vofire ennemy en fera plus orgueilleux;il ne m’en chault,caraufliiefçau-*quien au- îay plus dc fcs noLiLicllcs : amp;nbsp;a la fin du compte, * i’en auray le profit amp;nbsp;honen XtaThô- neur. Et combien que les autres pourroient faire le femblable chez moy, fi »eut. nelaifferoie point ày enuoier.Et àcefle fin entretiendroietoutes pratiques, Extmp.'uieil, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• \ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;C

fans en rompre nulles,pour toufiours trouuer matieres:amp;: puis les vns nelont point toufiours fi habiles que les autres,ne fi entendus,ne n’ont tantveud’ex-pcricnce de ces matières,nyaufli n’ont tant de befoing. Et en ce cas icy, les plus fages le gaignent toufiours; ie vous en veux monftrer exemple manife-fte.Iamaisnefe mena traidé entre les François amp;nbsp;Anglois,quc le fens des François amp;nbsp;leur habilité ne fe monflrafi par deffus celle des Anglois;Sront les Anglois vn mot commun, qu’autres-fois m’ont didtraidantauec eux: qu’aux batailles,qu’ils ont eues aucc les François,toufiours ou le plus fouuêt, ils ont eu le gaing-.mais en tous traidez qu’ils ont eu à coduirc auecques eux, ils ont e^ perte amp;nbsp;dommage. Et feurcment, ace qu’il m’a toufiours femblé, i’ay congnu gens en ce royaume aufli dignes de conduire vn grand accord, que nuis autres que i’aye congnus en ce mode, amp;nbsp;par efpecial de la nourriture de noflrc Roy. Caren telles chofes faut gens complaifàns, Sequipaffent toutes chofes amp;nbsp;routes parolles, pour venir a la fin de leur maiftre, amp;nbsp;tels les vouloir il,comme i’ay dit. I’ay efté vn peu long à parler de ces AmbafTadeurs, amp;nbsp;comme on y doibt auoir l’œil.-mais ce n’a point efté fins caufe,car i’ay veu amp;fccu faire tant dc tromperies amp;mauuaiftiez, foubs telles couleurs ,queic ne m’en fuis peu taire ne pafter à moins.

Tant fut demené le mariage(dont i’ay parlé cy defius) du Duede Guyenne ôe delà fille du Duc de Bourgongne, qu’il fen feit quelque promeffe dc bouche, amp;nbsp;cncores^ielqucs mots de lettres : mais autant en ay-je veu faire auccle Duc Nicola^c Calabre, amp;nbsp;de Lorraine, filz du Ducichan deCala-bre,dont a eftéparlé cy deuant. Semblablement fen feit auec le Duc de Sa-uoie Philibert, dernier mort, amp;nbsp;puis auec le Duc Maximilian d’Auftrichc, Roy des Romains feulfilzde l’Empereure Fedcric. Ceftuy là eut lettres eferiptes de la main de la fille,par le commandement du perc,amp;vn dyamant. Toutes ces promeftes fe feirent en moins de trois ans de diftance.Et fuis bien feur

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leur qu auecques luy, nui ne l’euft accomply tant qu’il euft vcfcu, au moins lt;ie fon confentement:mais le Duc Maximilian,puis Roy des Romains, fell aydé de celle promeiTe,comme ie diraycy apres. Et ne conte pas ces chofes pour donner chargea celuy ou a ceux dont i’ay parlé , mais feulement pour dire les chofes comme ie les ay veues aducnir ; amp;nbsp;aufli ic fay mon conte que telles ne limples gens ne famuferont point à lire ces Memoires : mais Princes ou autres gens de Court,y trouueront des bons aduertilTemenSjà mon ad uis.Toufiours en parlant de ce mariage, feparloit d’cntreprinfes nouuelles contre le Roy;amp; clloientauecle Duc deBourgongnele lèigneurd’Vrfé,Pô-cetde Riuicre, amp;nbsp;plufieurs autres petits perfonnages lefquels alloient amp;nbsp;ve-floientpour leDucdeGuyenne;amp; elloit* l’Abbé de Begard, puis Euefque*AbbcdeBe de Lyon,pour le Duc de Bretaigne; amp;nbsp;rcmonllroit audiél Duc de Bourgon- uclque de gne que le Roy pratiquoit les feruiteurs dudicl Duc de Guyenne, amp;nbsp;en vou-loit retirer les vns par amour,les autres parforcc:amp;qu’il auoit ja l'ait abbatre^quot;^^^’’quot;^”' Vne place qui elloit à mofeigneur * d’EllilTac, lèruiteur du Duc de Guyenne: ^plufieurs autres voyesdefaiél elloient ja commencées , amp;nbsp;auoit le Roy* destiflac. ioubllrait aucuns feruiteurs de fa mailon,parquoy concluoient qu’il vouloir recouurerGuyenne,commeilauoitfait Normandie autresfois, apres cjci’il 1 eut baillée en partage,comme auez ouy. Le Duc de Bourgongne enuoy oit touLient deuers le Roy,pour ces matières. Le Roy refpondoit que c’eftoit le Duc Guyenne fon frcre,qui vouloir ellargir fes limites, amp;: qui commençoit toutes ces brigucs;amp; qu’au partage de fon frere ne vouloir point toucher. Or Voyez vn peu comme les affaires amp;nbsp;brouillis de ce royaume font grads, ainlî

Qu’ils fcpeuLient bien *apparoir,par aucun s temps,quand il cil en difcord,amp; * «ppc««, comme ils lont pefans amp;nbsp;mal aifez à conduire,amp; loing de fin, quand ils font nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•

commencez ; car encores qu’ils ne foient au commencement que deux ou trois Princes,ou moindres perfonnages ,auantque celle felle ait duré deux ansjtouslesvoifinsy fontconuicz. Toutesfois, quand les chofes ftmmen-cent chafeun en penfe veoir la fin en peu de temps;mais elles font bie à.crain-dre pour les raifons que verrez en contin uant ce propos. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;- c

A l’heure dont ie parle,le Duc de Guyenne,ou fès gens,amp; le Duc deBrc-taigne prioicntauDuc de Bourgongne qu’en rien il ne fèvoulfifl ayderdéS Anglois,qui elloient cnnemys du royaume: car tout ce qu’ils faifoient ëfloit pour le bien amp;nbsp;foulagcment du royaume;amp; que quand luy feroit prell ,ffs'e-floientaffez forts,amp; qu’ils auoient de tref grandes intelîigêcts auecques pîuL nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;*

fleurs Capitaines amp;nbsp;autres:vn coup me trouuay prefent que lefeigne'uVH’Vt'-fédifoitcesparolesaudiclDuc, luy priant faire diligence ßemettre^ftWroh armce:amp;lediélDucm’appellaàvnefenellre, amp;nbsp;me dill : Voyla lefeignèiit d’Vrfé, qui me preffe faire mon armée la plus groffe qd^e puis,amp; me dttque nous ferons le grand bien du royaume, vous fembleil quefii’y entre auecques la compagnie quei’y meneray,quci’y face guer^dc bieft^ Icluy'ÿefpo-dy en riant qu’il me fcmbloit que non:amp; il me dift ces mots.d’ayme mieux le

En cefte faifon,dont nons parlons,le Roy Edouard d’Angleterre, qui cui-

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P8 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;III. LIVRE DES MEMOIRES

doit véritablement que ce mariage,dót i’ay parlé,(c deuft traider,amp; eh eftoit deccu comme le Roy, trauailloit fort auecques lediólDucde Bourgongne f)our le ropre, alléguant que le Roy n’auoit point de fils, amp;nbsp;que fil mouroir, ediót Duc de Guyenne fattendoit à la couronne:amp; par ainfi,fi ce mariage fe faifoitjtout Angleterre feroit en grand peril d’eflrc deftruiôle, veu tant de fei-gneuries ioindes a la couronne;amp; prenoit mcrucilleufemcnt cefte matière â cœur,fànsbefoing qu’il eu fuft,amp;fifiiifoit tout le confeil d’Angleterre : ne Î)our exeufe qu’en fcéuft faire le Duc de Bourgongne,les Anglois ne l’cvou-oientcroire.Le Duc de Bourgongne vouloir,nonobftant les requeftes que faifoient les gens des Ducs de Guyenne amp;nbsp;de Brctaigne,qu’il n app'ellaft nuis eftrangcrs,que neantmoins le Roy d’Angleterre feift la guerre par quelque • boLif.amp;il euft fait volontiers femblant de n’en Içauoir rien, amp;dcnefenein-pefeherpoint.lamais les Anglois nereulfcnt fût, plus toft eulfent aydé au Roy,pour celle heure là,tantcraignoicnt que cefte maifondc Bourgongne ne fè ioignift à la couronne de France par ce mariage. Vousvoyez(felon mon nos)tous ces lèigneurs icy bien empefehez; amp;nbsp;auoient de tous coftez tac ges gens,amp;qui voient défi loing,que leur vie n’eftoit point fuffifanteà vcoir la moitié des chofes qu’ils preuoyoient: amp;nbsp;bien y parut, car tous font finis en ce trauail amp;nbsp;mifere,en bien peu d’elpacc de temps,les vns apres les au-tres.Chafcun a eu grand’ ioye de la mort de Ibn compaignon,quand Iccas cft aduenu,comme chofe tres-defirée.-amp; puis leurs maiftres font alleztoft apres, amp;nbsp;ont lailTez leurs fuccefleurs bien empefehez , fauf noftre Roy qui regne de prcfentdequcl a trouuélbn royaume en paix auec tous fes voifins amp;nbsp;fub-ieâ:s.-amp; luy auoitleRoy fon pcre,fait mieux que iamais n’auoit voulu ou fccLi faire pour luy.- car de mon tempsne le vey iamais fans guerre, fiuf bien peu de temps auant fon trefpas.

En ce temps (dont ie parle) eftoit le Duc de Guyenne vn peu malade : les vns difofcnt en grand danger de mort, les autres que ce n’eftoit rien. Ses gens prelToient le Duc de Bourgongne de le mettre aux champs, amp;nbsp;eftoienc fes gens deuant fain61 Ichan d’Angely, ou à Xainôles, ou es enuirons. Tant /cirent que le Duc de Bourgongne tira à Arras, ßcl’a famaflbit rarmée.-amp;puis paftoit oultre,vers Peronne,Roye,amp; Mondidicr ; amp;nbsp;eftoit l’armée puilTante, amp;nbsp;pius belle qu’il euft iamais eue ; car il y auoit douze cens Lances d’Ordonnance,qui auoient trois Archiers pour Hommes d’armes, amp;nbsp;le tout bien en poinlt;ft,amp; bien montez.Caril y auoit en chafeune compagnie dix Hommes d’armes * d’auantagc,fans le Lieutenant,amp; ceux qui portoient les enfeignes. ' Les nobles de ce pais trelbien en poinól ; car ils cftoient bien payez amp;nbsp;conduits par notables Cheualicrs amp;nbsp;Elcuycrs.-amp; cftoient ces pais fort riches en ce temps. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•

Comment la paix finale ^quife traiBoit entre le 7(py nbsp;nbsp;le Duc de ‘Bourbon-

J nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;gnefut rompue^au moyen de la mort du Duc de Cfuyenne'.

tafehoient

' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;comment ces deux grands Trinces

à fe tromper lvn tautre, CHAT. IX.

En

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DE PHILIPPE DE COM MINE S. lt;);gt; N faifànt celle armée, dont ie parle, vindrent deux ou trois fois deuersluy le feigneu r de*Cran,amp;le Chancelier de Fran- * cejappellémelTirePierre Doriöle, amp;nbsp;lecrettcment fètraióla •»»«t entre eux paix nnaJe,qui ïamais nel eltoit peu trouuer-.pour- i/i Mer des cequeledidl Duc vouloir fauoir Amiens ôc làind Quentin, deifus nommées,amp; le Roy ne les vouloir pas rêdre. Or maintenant fy accorda, voyant cell appareil, amp;nbsp;efperant venir aux fins que vous entendrez.Les conditions de cefte paix elloientquele Roy rendroit audiôl Duc,Amiens amp;nbsp;lainól Quentin auec ce dont eftoit que/lion, amp;nbsp;luy abando-neroitlcs Comtes de Neuers amp;nbsp;defainól PaufConnellable de France,amp; tou tes leurs terres pour cnfaireàfonplaifir, Sgt;c les prendre comme hennes, fil pouuoit:amp;: lediél Duc luy abandonnoit femblablement les Ducs de Guyen- w ne amp;nbsp;de Bretaigne,amp; leurs feigneurics pour faire ce qu’il pourroit.Ceftepaix iurale Duc de Bourgongne,amp; y eftoye prefent:amp; aufiî laiurerent le feigneur éeCran amp;nbsp;le Chancelier de France pour le Roy Jerquelspartirêt dauecques lediól Duc,amp; fi luy confeillerent de ne rompre point fon armée,mais l’auan-cer,afin que le Roy,leu r maillre, fuft plus enclin de bailler promptement la pofleflion des deux places dcflhs nommées:amp;: emmenercntauecques euxSi-nionde*QuinchypourveoiriurerleRoy, amp;confermerce qu’auoient fait lès AmbalTadeurs. Le Roy délaya cefte confirmation par aucuns iours, amp;nbsp;ce pendant furuint la mort de fon frere le Duc de Guy enne.Sur ces entrefaiôles amp;nbsp;comme Icdiél Duc cffcoit prefl à partir d’Arras, luy furuint des noutielles,«,. l’vnequeleDuc Nicolas de Calabre amp;nbsp;de Lorraine, heritier de la maifon tl’AnjoUjfils du Duc leha de Calabre, venoit là deuers luy, touchât le mariage de cefte fille; amp;nbsp;le recueillit lediôl Duc trelbien, ôc luy donna bonne efpe -rancedelaconclulion. L’endemainquifutlequinziefrneiourde May, mil quatre cens feptante deux, comme il me femble , vindrent lettres dudiôl Si-monde Quinchy (lequel eftoit deuers le Roy Ambafl'adeur pouric^luy Duc deBourgongnejcontenantqueleDucde Guyenne eftoit trelpaflé, 5c que ja leRoy auoit prins vne grand’partie de fes places.

Incontinenten vindrentauftimeflagersde diuers lieux, amp;nbsp;parloyent de cefte mort différemment. Peu de temps apres fen retourna mefmcment le-diél Simon,renuoyé par le Roy,auecques trefmaigres parolles, fins rie vouloir iurer:dont ledid Duc fe tint fort moqué,amp; mefprifé,amp; en eut tref grand defpit.Semblablement fes gens,en faifant la guerre,tant pour cefte caufe que pour autres que pouuezauoiraffez entendues, difoient parolles vilaines 5c incroyables du Roy :amp; ceux du Ro/ne fy faignoient de gueres.

Lediôl Duc,eftant fort defefperé de cefte mort, amp;luy enhortc par aucuns, dolens pour icelle,cfcriLiit lettres à pluficurs villes âla^arge duRoy,à qtioy profita pcu,car rien ne fen meut:mais croy bien que fi îedicl Duc de Guyenne ne fuft point mort, que le Roy euft eu beaucoup d’^aires.Car les Bretons cftoient prefts, 5c auoient beaucoup d’intelligences dedans le royaume, 5c plus queiamais n’auoient eu ; lefquelles failloient toutes à catifc de cefte mort.

Sur ce courroux fe mit aux champs lediél Duc, 5c print fon chemin vers I ij

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loo III. LIVRE DES MEMOIRES

Nefleen Vermandois ; amp;nbsp;commença exploit de guerre ord amp;nbsp;mauuais, dontil n auoit jamais vlé.-c’eftoit de faire mettre le feu par tout où ilarriuoit. Son Auant-garde allamettre le fiegedeuantlediôlNefle, quigucresneva-loit:amp; y auoit vn nombre de Francs Archiers. Ledicl Duc demoura logé à trois lieues pres delà.Ccux de dedans tuerent vn Hérault, en les allant foin-mer. Leur Capitaine faillit dehors à (cureté,pour cuider compofer,amp; nepeut accorder: amp;nbsp;comme il rentra dedans la place, ils eftoient en trefue àcaufede fa faillie,amp; efloient ceux de dedans tous defcouuers furla muraille, fans ce qu’on leur tirafl.-toutesfois ils tuerent encores deux hommes. Pour celle cau-fe fut defditela trefue;amp; manda à madame deNcfle,qui elloit dedans,qu’elle faillift amp;nbsp;Ces feruiteurs domeftiques,aucc les biens, Ainfi le feit Ôc incontinét fut la place airaillic,amp;.prinfe,amp; la plus part tuez. Ceux qui furent prins vifs, furent pcdus,laufaucuns que les Genf d’armes îailfereni courre par pitié. Vn nôbre alTez grand eurent les poings couppez II me delplait à dire celle cruan té.-mais i’eltoie fur le lieu,amp; en fiuc dire quelque chofe.Ilfiut dire que leDuc cftoit palïionné de faire li cruel adc,ou que grand’ chofe le mouuoit.il en al-Icguoit deux:rvne il parloitlapres autruy)eftrangemêt de celle mort de Guyenne.Oultre auoit vn autre defplaifir, que vous auez peu entendre : c’eft qu’il auoit vn mcrucilleux defpitd’auoir perdu Amiens amp;nbsp;fainôl Quentin,donta-uez ouy parler.

Il pourra fembler au temps aduenir à ceux qui verront cecy, qu’en ces deux Princes n’y euftpas grand’foy,ou que ie parle mal d’eux. Del’vn ne de l’autre ne vouldroye mal parler; amp;nbsp;à noftreRoy fuis tenu, comme chafeun fçait:mais pour continuer ce que vous,mon(eigncur l’Archeuefque de Vien-ne,m’auczrequis,eft force que ie die partie de ce que ie fçay,en quelque forte qu’il (oit aduenu. Mais quand on penfera aux autres Princes, on trouuera ceux cy grands amp;nbsp;nobles amp;nbsp;notables, amp;nbsp;le noltrc treftage; lequel a lailTé fon royaumÂiccrcu,amp;en paix aucc tous fes ennemis . Or voyons donc lequel de ces deux feigneurs vouloir tromper fon compaignon, afin que li pour le temps aduenir cecy tomboit entre les mains de quelque ieune Prince, qui euft à conduire (emblables affaires,!! euft mieux congnoilTance, pourl’auoir veu,amp; fe garder d’eftretrompé.Car combien que les ennemys ne les Princes, ne'foient point roulioLirs femblables,encores que les matières le feuffent,!! fait il bon d’eftre informéde.s chofes paflées. Pouren declarer monaduis,ie cuideeftre certain que ces deux Princes icy y alloient tous deux en intention de tromper fon compaignon: amp;nbsp;que leurs fins eftoient affez femblables, comme vous orrez. Tous deux auoient’leurs armées preftes,amp; aux champs. * Carton nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;auoit ji ptins plufieurs places;amp; en traiélant cede paix, preffoit fort

*Pattis£*e. fon frere.Iaeftoient^nus vers le Roy lefeigneur de* Contay,’^ Patus, Fou-im- plufieurs autrcs:amp; auoient laide le Duc de Guyenne.L’armée du Roy eftoitenuiron la Rocl|elle,S: auoit grandeintelligence dedans, marchan-doient fort ceux de la ville, tant pour ce bruit de paix que pour la maladie „ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;, qu auoit ce Duc. Et cuydel’intention du Roy telle, que fil euftacheuéfon

* ou pres de 1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;■ r nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r • n x nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;gt;1

là, ou que cutreprintc auprès de la, amp;nbsp;que (on rrerevinlt a mourir, qu li ne lureroïc point celle paix:mais auffî que fil trouuoit forte partie, il la iureroit amp;nbsp;execu teroit

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. ïbi teroitfes prôincfles pour folterde peril. Et compafla fort bien fon temps,amp; faifoic vne merueilleufe diligence : amp;nbsp;auez bien entendu comme il diflimula aSimon de Quinchy bien l’elpace de huiôl iours, amp;nbsp;que ce pendant aduint celle mort. Or fçauoit il bien que lediót Duc de Bourgongne defiroit tant la pofleflion de ces deux villes, qu’il ne l’oferoit courroucer, amp;nbsp;qu’il luy feroit couler doucement quinze ou vingt iours(comme il feit)amp; que cependant il Verroit qu’il y feroit.

Puis que nous auons parlé du Roy, amp;nbsp;des moiês qu’il auoit en penfee pour tromper le Duc, faut dire quelle efloit la penfée du Duc entiers le Roy, amp;nbsp;ce lt;ju’il luy gardoitjfi la mort defufdicle ne ftifl furuenuc. Simon de Quinchy auoit commilfion de luy, amp;nbsp;à la requefte du Roy, d’aller en Bretaigne, apres ^Li’il atiroit veu iurer la paix,amp;: receii les lettres de confirmation de ce que les Ambafladeurs du Roy auroient fait, amp;nbsp;fignifieraudiól Duc de Bretaigne, le Contenu dclapaix,amp;auflîaux AmbalEideurs du Duc de Guyéne, qui efloiét làjpour enaduertir leurmaiftre, lequel efloit à Bordeaux. Et le vouloir ainfi le Roy, pour faire plus grand efpouuentemcnt aux Bretons, de fe veoir ainfi abandonnez de ccluy où efloit leur principale efperance. En la compagnie éudiél Simon de Quinchy,y auoit vn Cheuaucheur d’Efeuirie dudiôl Duc, qui auoit nom Henry,natif de Paris, vn fige corn paignon, ôc bien entendu; lequel auoit vne lettre de creace, adreflante audid Simon, eferite de la main dudiél Duc: mais il auoit commiflion de ne la bailler point audiél Simô,iuf-ques ace qu’il fufl party d’auecleRoy, arriué à Nantes deuers le Duc:amp; a lheure luy detioit bailler ladiéle lettre, amp;nbsp;dire fa creâce; qui efloit qu’il deuil dire au Duc de Bretaigne qu’il n’eufl nulle doubte ne crainte que fon mai-ftreabandonnaflle Duc de Guycnne,ne luy,mais les fecourroit du corps ôc lt;lesbiens:amp; que ce qu’il auoit fait,efloit pour euiter la guerre,amp; pour recou-uterces deux villes, Amiens amp;nbsp;SainclQÙentin, que le Roy luy au(ÿt oflées en temps de paix amp;nbsp;contre fx promefTe. Et luy deuoit dire aufii comme ledict Duc fon maiflre enuoieroit des notables Ambaffxdeurs deuers le Roy,incô-tinent qu’il feroit faifî de ce qu’il demandoit, ce qu’il eull fait fans difficulté, pour luy demader amp;nbsp;fupplicrfc vouloir déporter de la guerre amp;nbsp;entreprinfe qu’il auoit contre ces deux Ducs, amp;nbsp;ne fe vouloir arreller aux fermens qu’il auoit faiéls:car il n’efloit délibéré de les tenir, non plus qu’il luy auoit tenu le traiélc qui auoit eflé faiél deuant Paris, qu’on appelle le traiélé de Conflans; ne celuy qu'il iura à Perone, amp;nbsp;que long têps apres il auoit côfermé : amp;nbsp;qu’il fçauoit bien qu’il auoit prins ces deux villes contre fa foyamp; en teps de paix: parquoy deuoit auoir patience qu’en femblable façon il les eufl recouurées. Etentantquetouchoitles Comtes de Sainél-Paul,Cq^neflablc de France, amp;nbsp;de Neuers, que le Roy luy auoit abandonnez,il deçla^oit que nonobflanc qu’il les haift,amp; eufl bien caufe,fi vouloir il remettre ces iniures, amp;nbsp;les laiffer en leur entier,fuppliant au Roy qu’il voulfififairelefemblablede ces deux Ducs,que le Duc de Bourgogne luy auoit abâdonnez:Ôc qu’il luy pleufl que chafeun vefquifl en paix amp;nbsp;en feureté, amp;nbsp;en la maniéré qu’il auoit efle iuré amp;nbsp;promis à Conflans, où tous efloient aflremblez:en luy déclarât qu’au cas qu’il ne voulfifl ainfi le faire, il fecourroit fes alliez,amp; deuroit défia dire logé en

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102, III. livre des MEMOIRES

champ,a I heure qu’il manderoit fes parolles. Or autrement en aduint. Ainfi 1 homme propofeamp; Dieu difpofe: car lamort qui depart toutes chofes, amp;nbsp;change toutes conclufions, en feit venir autre ouurage, comme aucz enten-j du amp;nbsp;entendrez : car le Roy ne bailla point ces deux villes, amp;nbsp;h eut la Duché de Guyenne,par la mort de ion frere,comme raiion cRoit.

Comment le Duc de Bourgon^e voyant qu'il ne pouuoitfefaißrde ‘Beau-uais y deuant laquelle il auoit q^lantéfon (amp en alladeuantT^uen nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;X.

Our retournera la guerre,dont cy deuant ay parlé,amp; corne furent traiôlez vn ras de panures Fracs-Archiers qui auoiét efte prins dedans Nefle,au partir de la,alla loger le Duc deuant Roye,où il y auoit quinze cens Francs-Archicrs,amp; vn nôbrc d’Homes d’armes d’Arrierc-ban. Si belle armée n’eut iamais le Duc de Bourgongne que lors. Le lendemain qu’il

fut arriuéjcômêccrét à auoir peur ces Fracs-Archicrs,amp;: fc ietterêrpar Ies murailles,amp; le vindrent rendre à luy. Le lendemain ceux qui cRoiet encores dedans,compofercntamp; lailTerent chenaux amp;nbsp;harnois,frufquc les Homes d’armes emmeneroient chafeun vncourtaulr. Le Duc laiflà sens en la ville, amp;nbsp;voulut faire defemparer Modidier: mais pour l’afFeéliô qu’il veit que le peu-pledc cesChaRellcnies lu y portoit il la feit reparer amp;y laifla gens.Partât delà feit Ion conte de tirer en Normâdie.-mais palfant pres de Beanuais,alla courre mofeigneur des Cordes deuant.-lequel menoit fon Anant-garde.D’entrce ils prindrent ce faux-bourg,qui eR deuant rEuefché;amp;: le print vn Bourguignon trefauaricieux,appellémeRirelaques de Montmartin, quiauoitcent Lances,amp;trois cens Archiers de l’Ordonnance dudiél Duc. Monlêigneur des Cordes aflaillitd’vn antre coRé,mais fes elchclles eRoiêt courtes amp;nbsp;n’en

* pierre». JStcèfL,

* iesfuytMnt

Balaguy.

auoit giJeres. Il auoit deux canons qui tirerent au trauers de la porte, deux coups feulement, amp;: y feirent vn grand trou:amp; fil euR eu * pieces pour con-tinuer,ilyfuR entré fans doute:mais il n’eRoit point venu fourny pour tel exploit,parquoy eRoit mal pourueu. Dedans n’y auoit que ceux de la ville au commencement,fiuf Loy fet de * Balligny, qui auoit quelque peu de gés d’Arriere-bâjlequeleRoit Capitaine de la ville,mais celanepounoitfaunerla villc;mais Dieu voulut qu’elle ne fe perdiR pas ainfi, amp;nbsp;en monRra grandes enfeignes. Car ceux de mofeigneur des Cordes cobatoientmainà main par le trou,qui auoit eRé faiâ; en la porte:amp;lur cela mâda auDuc de Bourgogne parplufieurs meRagers,qu’il vinR,amp;qu’ilponuoiteRrcfeurquelavillecRoic fienne.Ccpendant quelediél DucmiRàvenir,queIcun de ceux de dedans faduila,amp;: apportais fagots allumez pour ietter an vifage de ceuxqui fef-forçoiêt à rompre la porte.Tant en y mirent que le feu fe print au portail, amp;nbsp;qu’il faint que les aRaillans fe retirassent,iufques a ce que le feu fuR cRcinâ:.

LedidDucarrina,qui ferablablemcnt tenoit la ville prinfe, pourueu que ce feu fuR eftcin(R,qui eRoit tref grand; car tout le portail eRoit en feu. Et quad lediél Duc euR voulu loger vne partie de l’armée du coRé de Paris, la ville n eufl peu efehapper de fes mains:pontcc que nul n’y cuRpeu entrer; mais

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DE PHILIPPE DE C OMMIN ES. 103 mais Dieu voulut qu’il feiftdoubte làoù il n’y en auoit poinr.-car pourvu petit mifleau, qui eftoic â paiTer,il feit celle difficulté. Et depuis qu’il y eut largement Gens- d’armes, il le voulut faire ; qui eull ellé mettre tout Ion OH en peril, amp;nbsp;à grand’peine l’en peut on deûnouuoir, amp;: lut le vingt-huiéliefine iourdeluin, l’an mil quatre cens feptantc deux. Ce feu, donc l’ay parlé,di!-f ƒ 72. ratout le iour, amp;nbsp;y entrèrent deuers le foir dix Lances d’Ordonnance feulement,comme m’a ellé comptcCcar i’eftoye encores aucc le Duc de Bourgon-gne) mais ils ne furent point veus, pource que chafeun cfloit empelché à Ce loger, ôcauffin’y auoitnuldece collé. A l’aube du iour commença à approcher rarcilleriedudicl Duc; amp;nbsp;toll apres veifrnes entrer gens largement, au moins enuiron deux cens Hommes d’armes: amp;nbsp;croy qtiefilsne fulTcnt venus , que la ville eull mis peu à Coy coinpoCer, Mais en la colere ou elloit le • DuedeBourgongne (comme aucz peu entendre cy deffiis)il deliroità la prendre d’alfault ; amp;nbsp;fans doute, il l’euft bru fiée, li ainli fufl aduenu, qui eull eftetref-grand dommage; amp;nbsp;me femble qu’elle fut prefer née par vray miracle, amp;nbsp;non autrement. Depuis que ces gens y furent entrcz,rariilicrie dudiél Duc tira continuellement, l’elpace de quinze iours ou enuiron ; lut la place aulli bien batue que iamais place fut, iufques en l’cllat d’alTaillir. Tou-teslois aux lofiez y auoit de l’eauc; falut faire vnpont de l’vn des deux collez de la porte bruflée;amp; de l’autre coflé de ladiélc porte on pouuoit ioin-dre iufques aux murs, fans danger : faufd’vne feule canonnière , qu’on ne fccut batre,pource qu’elle elloic fort balfe.

C’eE bien grand peril, amp;nbsp;grande folie d’alTaillir li grandes gens; amp;nbsp;encores, par defitis tout, y elloit le Conneflablc(commeie croy ) ou logé pres de la ville (ie ne fçay lequel) le Marefclaal loachim, le Marefcbaldc Lobeac, vaiic'c monfeigneur de Crullol Guillaume de Vallcu, Mer y de* Croy, Salîczard, Theuenoe de Vignoles, tous anciens, cent Laces pour le moins d’Hommes “quot;‘cry'Sf-d’armes de l’Ordonnance, amp;nbsp;largement Gens de pied, amp;nbsp;beaucoup de gensf''*’quot;'''quot;'-de bien, qui fetrouuercncauec ces Capitaines. Toutesfois délibéra le Duc donner l’afiault, mais ce fut tout feul ; car ne fe trouua de celle opinion que luy ; ôc le foir, quand il fe coucha fur fonliél de camp, vclla comme il auoit acoLilluméoLi peu l’en falloir, il demanda à aucuns fil leur fembloit bien que ceux de dedans attcndilTent l’afiault. Il luy fut relpondu que ouy : veu le grand nombre de gens qui y cEoient,amp;qu’ils clloient encores fuffifans pour * ladeffendre* commehayc.il le print enmocquerie, S)C dill.Vous n’y trouue-rezdemainperfonne. Al’aubeduiourlut l’afiault trefbien afiailly , amp;trcl-hardiment, amp;: encores mieux deffendu; Grand nombre de gens palTerent par deflus ce pontjSc y fut eEouffé monfeigneur Defpiris,vn vieil Cheualier deBourgongne, qui fut le plus homme de bien qui y^aourut. De l’autre collé y en eut qui montèrent iufques delTus les murs, mWis tousnereuindrent pas. Ilscombatirent main à main longuement, ôefut l’afiault aflez long. Autres bandes efioient ordonnées pour afiaillir apÂ?s les premiers : mais voyant qu’ils perdoient leur temps, lediél Duc les feit retirer. Ceux de dedans ne faillirent point, aufii ils pouuoyent veoir largement gens prefls â *^recuî«, les * recueillir,fils fuflbnt faillis. A ceEalfiult moururent enuiron lix vingts

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104 in. LIVRE DES MEMOIRES* hommes. Le plus grand fut mcnfeigncur Dcfpiiis : aucuns en cuidoient beaucoup plus, amp;nbsp;y eut bien mille homes blcccz. La nui d’apres feirêt ceux de dedans, vne faillie .-mais ils efloient peu de gens,amp; la plulpait cftoienta cheual, qui fc mirent par le cordail des pauillons. Ils ne feirent rien de leur profit,ôc perdirent deux ou trois Gentils-hommes. Ils blecerent vn fort home de biê nommé mcflire laques d’Orfon, maiftre de l’artillerie dudiôh Duc qui peu de iours apres mourut de ladiéfebleçeure.

Sept ou huiél iours t^res ceflalfault voulut lediôl Duc aller loger à la porte vers Paris, amp;nbsp;départit (on ofi en deux. Il ne trouuanul de ccd opinion, veu ' les gens qui eftoient dedans.C'efioit au commencement qu’il le deuoit faire, car à cede heure n’en cfloit pas temps. Voyant qu’il n’y auoit autre remede •il (c leua, ôc en bel ordre. Il fattendoir bien que ceux de dedans fâilliflent af premenr, amp;nbsp;par ce moyen leur porter quelque dommage: toutes-fois ils ne faillirêt poinr.Il print de la fon chemin en Normâdie:pource qu’il auoit promis au Duc de Brctaigne aller iu (ques deuant Rouen,lequel auoit promis de fy trouuer:mais changea propos,voyant que le Duc de Guyéne edoit mort, amp;nbsp;ne bougea de fon pais. LedidDuc de Bourgongne vint deuant Eu, qui luy fut rendue,amp; Sainôf-Vallery; amp;nbsp;feit mettre le feu partout ce carrier iuf ques aux portes de Dieppe. Il print leNeuf chadel, amp;: Icfeitbruller, amp;nbsp;tout le pais de Caux,ou la plus part, iufques aux portes de Rouen : amp;nbsp;tiraenpcr-fône iufques deuat ladidl e ville de Rouen.Il perdoit fouuét de fes Fou rageurs amp;nbsp;endura fon Odtref-grand’faim, puis fe tira pour l’hyuer,qui edoit venu. Dés ce qu’il eut le dos tourné, ceux du Roy reprindrent Eu amp;Saind-Val* lery : amp;nbsp;eurent pourprifonniers (eptouhuiôldcceux qui edoyent dedans, par les compofi lions.

Comment lefeit ap^ointemet auecle Duc de Bretai^ne nbsp;nbsp;trefueaueclcDuc de

^ourgongnetii^ comment leComtedeSainCl Taul efhapapour lors 'vne macht-nation^at^e contreluy par ces deux grands Princes. nbsp;nbsp;QH AT. XL

Nuii oii CO tcmps ic veins au fcruice du Roy fut l’an mil l'authtur vint nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;01130'0 ccos fcDtantc amp;nbsp;deux'ilequel auoit recueilly des ferui-

at4 ferttia dti nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;t! nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i

reiH's delon rrerele Duc de Guyenne la plus grande part: amp;nbsp;edoitaupontdcSée,làoùiH’cdoittirécontreIeDucdeBre-taigne,amp; luy faifoit guerre, amp;nbsp;là vindrent deuers luy aucuns Ambadàdeurs de Bretaigne:amp; auifi y en alloit des fiés.Entrc lesautresyvintPhilippedes Edars feruiteur du Duc,amp;: GuillaumedeSoubs-plenuille, feruiteur de monfeigneur de Lefcut:Iequel feigneur de Lefeut fe-doit retire en Bretaigne, quand il veit fon maidre le Duc de Guyene pres de la mort: amp;nbsp;partit de Bordeaux amp;nbsp;fc mit fur la mer, craignant de tomber entre les mains du Roy.Pa^uoy partit de bone heure, amp;nbsp;emmena quand amp;nbsp;luy le confedeurdu Duc de Guyenne , amp;nbsp;vn Efcuyer d’Elcuirie ,aufquels on im-putoit la mort du Ducîle Guyenne; lefquels ont edé prifonniers en Bretai-gne par longues années. Vn peu durèrent ces allées amp;nbsp;venues de Bretaigne: amp;nbsp;en la fin fe délibéra le Roy d’auoir paix de ce codé, amp;nbsp;de tant dôner audiél feigneur de Lefeut, qu’il le rctireroit (on feruiteur, amp;nbsp;luy oderoitl’enuiede

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DhPHlLirrbUtCOMMiNtx loç

pOLirchaffer mal,pour autant qu’il n’y auoit ne fcns ne vertu en Bretaigne queceqiiiprocedoitdeluy ; mais vn fi puifïant Duc manié parvn telhom-nie,eftoic à craindre:amp; mais qu’il euft fait auec luy , les Bretons tafeheroient aviiireenpaix.Etàla vérité,la généralité du pais ne quierriamais autre choie: car toufiours y en a en ce royaume de bien traidez amp;nbsp;honnorez ; ils y ontbienferuyletempspafré.Aufiiietrouuecctrai61é,que noflrc Roy feit, tres-fage, combien qu’aucuns le blafmoient, qui ne confideroient point fiauantqucluy. Il eut bon iugement delapcrfonne^u feigneurde Lelcur, olifant qu’il ne viendroit nul perd de luy mettre entre fes mains ce qu’il y mit: amp;nbsp;l’eftimoit homme d’honneur,amp; que iamais durant ces diuifions paflées, il n’auoit voulu auoir intelligence auec les Ang!ois,ne confentir que les places

Normandie leur fufl'ent bailiées;qui fur caufe de tout le bien qu’il eut, car cela ne tint quàluy feul Pourtoutes ces raifons ildiflaudiôtdeSoubs-plen-i^illcqu’il miifpar elcrit tout ce que Icdict feigneur de Lefeut, fonmaiftre, lt;lemandoit,tantpourleDucquepourluy :ce qu’ilfeit, Ôttout luyaccor-

noflrc Roy. Et furent fes demandes quatre vingts mille francs de penfion pourle Duc, pourfonmaiftrefix mille francs de penfion,* la moytié de*’'^^°quot;quot;“' Guyenne,les deux Sencfchaucées de * Vannes amp;nbsp;de Bordcloys,la Capitaine- sxemp. ricdcl’vn des Chafleaux de Bordeaux, la Capitainerie de Blaye , des deux ntcit aJuis. Chaltcaux de Bayonne, de Dax amp;nbsp;de fundfSeuer, amp;nbsp;vingt amp;nbsp;quatre mille,^/^'J^‘l^['Vü efeus d’or content,amp;: l’ordre du Roy, amp;nbsp;la Comté de Comminges.Tout fur

•'iccordé accomply,fiufqLie la penfion du Duc, nefe payoit que la moy- tnü dura deux ans. D’auantage donna le Roy audid de Soubs-plenuille de Guyeniieti lix mille efeus. l’entcns cefl argent content, tant de luy que de fon maiftre, payéen quatre années. Etledicl de Soubs-picnuille eut douze cens francs dcpenfion,Mairc de Bayonne,Baillifdc Montargis, amp;nbsp;d’autres petits eflats en Guyenne. Le tout duraàfonmailîreamp;àluyiufques au trefpas duRoy. Philippe des Eflars fut Baillifdc Meaux, Maiftrc des eaux amp;nbsp;desfbrefis de la France , douze cens francs de penfion , amp;nbsp;quatre mille efeus. Depuis ce temps iufques au trefpas du Roy noflremaiftre, leuront duré ces eflats; ôc auffi monfeigneur de Comminges luy eft toufiours demeuré bon amp;nbsp;loyal feruitcur.

Tantofl api'es que le Roy eut appaifé ce * Duc de Bretaigne, il fe rira vers * bout£«. laPicardie.Toufiours auoientdecouflumc le Roy amp;nbsp;le Duc de Bourgon-'quot;quot;^' gne,incontinent que l’hyner venoit,de fiire trefues pour fix moys, ou pour vnan,ou plus. Ainfi en enfuyuant leur couflume , enfeirent vnc : amp;: l’a vint ftirc le Chancelier de Bourgongne,amp; autres en fil compaignie. Lafut mon-ftrée la paix finale que le Roy auoit auec le Duc de Bretaigne : par laquelle ledicl Duc renonçoit a l’alliance qu’il auoit fiiicle ancres Anglois, amp;: Duc deBourgongne: amp;nbsp;pourcc vouloir le Roy que les Ambafladeursdu Duc de Bourgongnenele nommafient point au nombre de|curs alliez. Aquoyne voulurent entendre, amp;difoient qu’il feroitàfonchois de fe declarer delà partie du Roy ou delà leur, dedans le temps accoullumé : amp;nbsp;difoient qu au-tresfois les auoit lediél Duc de Bretaigne abandonnez par lettres : mais que partant ne fcfloit point departy de leur amitié. Ils tenoient le Duc de

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IOlt;? nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;III. LIVRE DES MEMOIRES

Bretaigne pour Prince manié par autre fens que par le fien:mais qu’il fe reuc-1473. noit toufiours à la fin à ce qui luy eftoit plus neceflaire. Et fut l’an fèptante amp;nbsp;trois.

En menant ce traiélé on murmuroit des deux coftez contre le Comte de fainôl Paul, Conneftable de France: amp;nbsp;l’auoit le Roy prins à grand’haine,amp; les plus prochains de luy femblablement.Le Duc de Bourgongnele haifloit encores plus, amp;nbsp;en auoit meilleure caufe(car ie fuis informé à la vérité des rai-Ions des deux collez ) n’auoit point oublié lediél Duc que le Conneftable auoit cftéoccafion de la prinfe d’Amies amp;defainôtQuentin:amp;luy fembloit qu’il eftoitcaufe amp;nbsp;vraye nourrice de celle guerre, qui eftoit entre leRoy amp;nbsp;luy.’car en ce temps de trefucs, luy tenoit les meilleures parollcs du monde: • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;mais dés que le combat commençoit,il luy eftoit ennemv capital,amp; le Com

te l’auoit voulu contraindre a marier G fille,comme auez veu cy deuant. Encores y auoit vne autre pique: car durât que lediôl Duc eftoit deuant Amies,' Jediôl Conneftable feitvnecourfecn Hainault: amp;nbsp;entre les autres exploits qu’il feit il brufta vn Chafteau,nommcSeure,qui eftoit à vn chcualier,nora-mémeftire Baudouin de Launay. Pour le temps de lors onn’auoit point ac-couftumé de mettre le feu,ne d’vn collé ne d’autre : amp;nbsp;print le Duc Ion occa-jfion fur cela des feux qu’il mettoit, amp;nbsp;qu’il auoit en celle faifon mis. Ainfi fc commença â pratiquer la maniéré de delFaire lediôl Conneftable; amp;nbsp;du collé du Roy en furent ouuertes quelques parolles, par gens qui faddreftbient à ceux qui cftoient ennemis dudidl Conneftable,ellans au feruice dudiél Duc: amp;nbsp;n’auoient point moins de fufpiçion fur ledid Conneftable que IcdidDuc, amp;nbsp;chafeun le difoit occalion de la guerre ; amp;nbsp;fe commencèrent à dcfcouurir toutes parolles amp;nbsp;tous traidez, menez par luy, tant d’vn cofté que d’autre, pour mettre en auant fa deftruôlion.

Quelqu’vn pourra demander cy apres,lîleRoy nereuftlccufairefeul. A quoy ie réponds que non;car il eftoit alfts iuftement entre le Roy amp;nbsp;le Duc. Il tenoit fainél Quentin en VcrmandoiSjgrolTe ville amp;nbsp;forte. Il auoit Han amp;; Bohain,amp; autres tresfortes places ficnncs,toutcs près dudiôl fiinól Quentin; amp;nbsp;y pouLioit mettre gens à toute heure, amp;nbsp;de tels pais qu’il luy plaifoit. Il a-uoit du Roy quatre cens Hommes d’armes,bien payez ; dont luy mefmes e-ftoitcommilfaire , amp;nbsp;en faifoitlamonftre. Sur quoy il pouuoit pratiquer grand argent ; car il ne tenoit point le nombre. Oultre il auoit d eftator-æJ/S. dinaire quarante cinq mille * Florins : amp;nbsp;fi prenoit vn efeu pour pipe de vin qui paftoit parmy fes limites,pour aller en F1 adres ou en Hainault; amp;nbsp;fi auoic des tref grandes feigneuries fiennes, amp;nbsp;grandes intelligences au royaumede France,amp; aufli au pais dudiél Duc,où il eftoit fort apparenté.

Toute cefte anné^ue dura cefte trefue, fentretenoit cefte marchandife: amp;nbsp;faddreftbient ceux du Roy a vn Cheualier dudidl Duc , appelle monfei-gncurd’Hymbercourt^ dont ailleurs auez ouy parler en ce liure) lequel de long temps haiftbit tresfort Icdid Conneftable, amp;nbsp;la haine eftoit renouuel-lée n’y auoit gueres;car en vne aftemblée qui feftoit tenue a Roye, où ledid Conneftable amp;nbsp;autres eftoient pour le Roy, le Chancelier de Bourgongne, amp;nbsp;le feigneur d’Hymbercourt, amp;nbsp;autres, pour lediél Duc,en parlant de leurs matières

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DE PHILIPPE DE C O M M I N Ë S. toy matières enfcmblc, le Conneftable dcfinentit vilainement lediól feigneur d’Hymbercourt. Aquoy nefeitautrerefponce,*ïinon qu’il n’attribuoit point celleiniure à luy mais au Roy, à la feureté duquel il clloit venu là pour Am-baflàdcur : auflifon maiflre, duquel il reprefentoit la perfonne , amp;: qu il lureju’at-luy enferoitlcraport.Celle leule vilennieamp; oultiage,bien tolldiôle,couda point c’eft depuis la vie audiôl Connedable, amp;nbsp;fes biens perdus, comme vous orrez cy apres. Et pourceceuxquifontauxgrandesauthoritez, amp;les Princes , doi-üent beaucoup craindre à faire, ne dire tels oultrage#, amp;nbsp;regarder à qui ils les dient; carde tant qu’ils font plus grands,porter les oultrages a plus grand defplaifir amp;dueil ; carilfemble aux oultragcz qu’ils en feront plus notent, pOLirla grandeuramp;authorité du perfonnage qui les oultrage; amp;nbsp;l’il edlerir maillreou leur feigneur, ils en font delèfpcrezd’auoir honneur ne bien de ’ luy.'Sc plus de gens feruent pour l’efperance des biens aduenir, que pour les biens qu’ils ont ja receus. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;।

Pourreuenir à mon propos, on faddrelToit touliOurs audid feigneur d’Hymbercourt,amp;audi(d Chancelier, pource qu’il auoit eu quelque part à ces parolles dides à Roye:amp; aufli il edoitfort amy dudicl feigneur d’Hym-bercourt : amp;nbsp;tantfe demenacedematiere qu’on tint vne iournéeà Bouuines, qiiied pres de Namur, fur ce propos : amp;yedoient pour le Roy le feigneur de Courton, Gouuerncur du Lymolin , amp;nbsp;maidrelehan Heberge,depuis Eucfque d’Eureux : amp;: pour lediôl DuedeBourgongne, y edoient le Chancelier, dont i’ay parlé,amp;lediôl feigneur d’Hymbercourt, amp;nbsp;fut en l’an feptâ- i 4 7 4lt; te amp;nbsp;quatre.

Lediót Conncdable fut aduerty qué l’on y marchandoit à feS defpens, amp;nbsp;feit grand’diligence d’enuoyer vers ces deux Princes. A chafeun donnoit a congnoidre qu’il entendoit le tout.'felt tant pour cede fois, qu’il mit en fufniçionau Roy que lediôl Duc le vouloir tromper, amp;tirerlediólConnc-ftable des dens. Et pource à grand’diligence enuoya le Roy deuers fes Am-badadeurs, edans à Bouuines, leur mandant ne conclurre rien contre lediôt Connedable, pour les raifonsqu’il leur diroit,mais qu’on allongcadent la trefue, felon leur indruôlion, qui fut d’vn an ou fix moyspe ne fçay lequel. Comme lemcd'agerarriua,iltrouuaque tout edoitja conclu,amp; lesfeellez b.iillez déslefoir de deuant : mais les AmbalTadeurs f’entr’entendoient fi bien , amp;nbsp;edoient fi bons amis qu’ils rendirent Icfdiéls feel lez : qui con-tenoient que ledid Connedable edoit pour les raifons, qu’ils difoyent, declare' ennerny amp;nbsp;crimineux vers tous les deux Princes : ôc promettoient, iuroient l’vn à l’autre que le premier des deux , qui luy poutroit mettre la main deifus, le feroit mourir dedans huiólioursapres^ ouïe bailleroità fon* compaignon pour en fiire à fon plaifir:*ôe à fon de tr^npe il feroit declare ennerny des deux Princes amp;nbsp;parties, amp;nbsp;tous ceux qui leferuiroient amp;nbsp;por-teroient fiucurny ayde. Et dauantagepromettoit le^oy bailler audiél Duc la ville de fiiinôlQucntin,dontadeza edé parlé: amp;nbsp;luy donnoit tout l’argent, amp;nbsp;autres meubles dudiâ; Connedable, qui fepourroienttrouuer dedans le royaume, auec toutes fcigneuriestenansdudiôlDuc;amp; entre les autres,luy donna Han amp;nbsp;Bohain ( qui font places tres-fortes) amp;nbsp;à vn iour nona-

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108 III. LIVRE DES MEMOIRES méjdeuoienc leRoy amp;le DucauoirleursGcns-d’aimesdeuantHanjamp;af-fiegerlediÓl Conneftable.Toutesfois,pour les raifons qucie vous ay Sides, fut rompue cefteconclufton : amp;nbsp;fut entreprinfe vneiournéeamp;licuouleSid Conneftablefe deuoit trouuer, pourpouuoirparlerauRoy en bonne feu-rcté:car il doubtoit de fti pcrfonne,comme celuy qui fçauoit toute la conclu-fton qui auoit efté prinfe à Bouuines.Le lieu fut à trois lieues deNoyon tirât vers la Fere,fur vne petite tiuiere,amp; auoient du cofté dudid Conneftablere-leué les guez.Sur vne çhauflee,qui y eftoit,fut faide vne forte baterie.Ledid Connelîable y eftoit le premier , amp;aLiecluy tousfes Gens-d’armes, oupeu f’en failloit.'car il auoit trois cens Gentils-hommes d’armes paflez:amp;: auoit fa cuyracefoubs vne robbe defeeinte. AuecleRoy y auoit bien fix cens hom-•mes d’armcs;amp; entre les au tres y eftoit monfeigneur de Dampmartin Grand Maiftre d’hoftel de France,lequel eftoit cnnemy capital dudid Conneftable. LeRoym’enuoyadeuantfaireexeufeaudid Conneftable dequoyil l’auoit tant fait attendre.Toft apres il vint,amp; parlèrent enfemble,amp;: cftoient cinq ou lîxprefensde ceux du Roy,amp;des fiensauflî.Ledid Conneftable fexcufide quoy il eftoit venu en armes, dilànt lauoir fait pour crainte dudid Comte de Dampmartin.il fut did, en effed, que toutes chofes paftees feroient oubliées, amp;nbsp;que iamais ne f’en parleroit:amp; pafta ledid Conneftable du cofté du ' Roy,amp; fut faid l’appointement du Comte de Dampmartin amp;nbsp;de luy ,amp; vine au gifte auec le Roy àNoyô:amp; puis le lendemain fen retourna à faind Qué-tinbienreconciliéjCommeildiibit.QuandleRoy eut bien penfc amp;nbsp;ouy le murmure des gensjil luy fembla folie d’auoir efté parler à fon feruiteur, amp;nbsp;a-uoirainfitrouué vne barrière fermée au deuant de luy, amp;nbsp;accompaigné de Gens-d’armes, tous fes fiibieds, amp;nbsp;payez à fès defpcns : amp;nbsp;fi la haine y auoit efté parauant grande,elle l’eftpit encores plus:amp; du cofté du Conneftable, le cœur ne luy eftoit point appetifé.

bien appropriée en ce lieu^far la fa.gelj€ du nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;du Conne-

fiable^auec bons aduertiffemens pour ceux qui font en authorité enuers leurs Princes. (^HAP. Xll.

BiENprendrelefaid du Roy, il luy procedoit de grand fens de faire ce qu’il en fcit:car ie croy que ledid Conneftable euft efté receu dudid Duc de Bourgongne, en baillant faind ) Qucm^i’ij^Lielques promefles qu’il y euft eu au cotraire; mais pour vn fi fage feigneur,comme eftoit ce Conneftable,il pre-noit mal fon faid,ou Dieu luy oftoit la congnoiflance de ce qu’il auoit à fai-re,de fe trouucr en t^e forte, ainfi defguifé au deuant de fon Roy amp;nbsp;de fon maiftre, amp;nbsp;â qui eftoient tous ces Gens-d’armes, dont il faccompaignoit. Et aufti il fembloit bien ^fon vifàge qu’il en fuft cftonné amp;nbsp;efbahy : amp;nbsp;quand il fe trouua en fà perfonne,amp; qu’il n’y auoit qu’vne petite barrière entre deux,il ne tarda gueres qu’ilnelafeiftouurir, amp;nbsp;pafta du cofté du Roy. Ilfutceiour en grand danger.

le fay mon compte queluy, amp;nbsp;aucuns de fespriuez , eftimoienteefte œuure,

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JJ L r H 1 L 1 r r h U L C U M M 1 jN L S. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;109

ttuurc, amp;tcnoienta louange dequoy leRoylescraignoic, amp;Iercputoient pour homme crainnf:amp; eftoit vray que par temps il l’cftoit,mais il faloit biê qu’il y cuft caufèûlfeftoitdemeflé de grandes guerres qu’il auoic eues contre les feigneurs de fon royaume,par largement donner, amp;nbsp;encores plus pro-nietrre,* amp;nbsp;congnoifloit lorsqu’il auoiterréen beaucoup de paflagcs. femble'àbcaucoup de gens que peur amp;nbsp;crainte luyfaifoient faire ceschofes; zarder.fii fen font beaucoup trouueztrompez,ayans celle imagination,qui fenhar- tiouuci au-difloyent d’entreprendre des folies contre luy, quielloient foiblement ap-puyez comme le Comte d’Armignac, amp;nbsp;autres, à qui il ell mal prins : car il congnoilfoit fil efloit temps de craindre ou non. le luy ofe bien porter celle louange ( amp;nbsp;ne fçay fi ie fay dit ailleurs, amp;nbsp;quand ie l’auroyc dit, fi vaut il bien ellre dit deux fois ) que iamais ie ne congnu fi làge homme en aduerfi- * nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;lt;

te.PoLir continuer mon propos de monfeigneur le Conneftable, qui parauan tUredefiroitqueleRoy craignill (au moins iele cuide: carie nelevoudroye , ’ pas charger, amp;nbsp;n’en parle finon pour aduertir ceux qui fontaulèruicedes grands Princes,qui n’entendent pas tous d’vne forte les affaires du monde) ie tonfeilleroy e à vn mie amy,fi ie rauoyc,qu’il mill peine que fon maiflre l’ay-tnaft, amp;nbsp;non pas qu’il le craigniftxar ie ne vey onques homme ayant grand’ authorité auec fon feigneur, parle moyen deletenir en crainte, à qui il n’en tncfcheufljöc du confentement de fon maiflre mefmes. Il fen efl veu affez de noflre temps,ou peu deuant,en ce royaume, comme monfeigneur de la Trifouille amp;nbsp;autres. Au pars d’Angleterre, le Comte de Vvaruic, amp;nbsp;toute fa laquelle.l’ennommeroyc en Efpaigne, amp;nbsp;ailleurs, mais parauenture que ceux qui verront cefl article,le fçauent mieux que moy. Et aduient tres-fou-uent que ceflc audace vient d auoir bien feruy, amp;nbsp;qu’il femble à ceux qui en vfent,amp; que leurs merites font tels que l’on doibt beaucoup endurer d’eux,amp; qu’on ne fen peut paffcr.Mais les Princes au contraire, font d’opinion qu’on cil tenu à les bien feruir:amp; le tiennent bien en leur diôl, amp;nbsp;ne défilant qu’à fe àcpefeher de ceux qui les rudoient. Encores en ce pas me faut alléguer no-ftre maiflre en deux chofes,qui vne fois me difl,parlant de ceux qui fontgrâd feruice(amp; m’en allégua fon autheur, amp;nbsp;de qui il le tenoit) qu’auoir trop bien feruy pert aucunesfois les gens,amp; que le plus fouuent les grands fèruicesfont recompenfez par grande ingratitude : mais qui peut auffi bien aduenir par le deffaut de ceux qui ont fait IcfdûSls féru ices, qui trop) arrogamment veullcnt vfer de leur bonne fortune,tantcnuers leurs maiflres,que leurs compaignôs, comme de la mefcongnoiffance du Prince.Me difl d’auantage qu’à fon aduis pour auoir bien en court, c’cfl plus grand heur à vn homme,quand le Prince qu’il fert, luy a fait quelque grand bien, à peu dedefferte, parquoy illuy de-'**' incure fort obligé, que ce ne feroit filluy auoitfait^grandferuicc quele-diét Prince luy en full très-fort oblige';amp; qu’il ayme plus naturellement ceux ^ui luy font tenus,qu’il ne fait ceux à qui ilefl tenu.A^fi en tous eflats y a bié àfaire à viure en ce monde:amp; fait Dieu grand’ grace a ceux à qui il done bon fens naturel. Cefleveuc du Roy amp;nbsp;de monfieur le Conneftable, fut l’an mil quatre ce ns feptante amp;nbsp;quatre.

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gomment le Duc de Bourgongne^feßantfaißde la Duché'de Gueldres eutenuie d’entreprendre plus oultre fur les Aleniafgnes,amp;gt; comment d mit leßege deuantlavdlede nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;QH AT. 1,

N la fàifon de celle veuë, corne il me femble,Ie Duc de Bour-gongne eftoit allé prendre le païs de Gueldres, fonde fur vnc querelle,qui eft digne d’ellre racôptée, pour veoir les œuures amp;nbsp;la puiflance de Dieu. Il y auoit vn ieune Duc de Gueldres, appelle Adolf, lequel auoit pour femme vne des filles de Bourbon,fœLir de monfeigneur de Bourbon* pere,amp; l’auoit cfpoufée en celle maifon de Bourgongne; pour celle caufe en auoit quelques faneurs.Il auoit cômis vn cas treshorribleicarilauoit prins fonperepri-fonnier,àvn foir,corne il fevouloit aller coucher,amp; mené cinq lieües d’Aile-maigneà pied,lans chaulTeSjpar vn téps tresfroid,amp; lemicau fod d’vnerour, où il n’y auoit nulle clarté,que par vne bié petite lucarne-.amp; la le tint fix moys dot fut grâd’ guerre entre le Duc de Cleues (dont Icditl Duc prifonnier auoic efpoufé la fœur)amp; ce ieune Duc Adolf. Le Duc de Bourgogne plu fieu rs fois les vouloir appointcr,mais il ne peut.Le Pape amp;nbsp;l’Empereur à la fin y mirent fort la miin.-amp; fur grades peines, fut comandé audiél Duc de Bourgogne de tirer ledidl Duc Arnoul hors de prifon. Ainfi le feit,car le ieune Duc n’ofa denier le luy bailler.-poLircc qu’il voy oit tat de ges de bien qui fen empefehoiér,' amp;nbsp;Cl craignoit la force dudidl Duc. le les vey tous deux en la chabre du Duc de Bourgogne par plulicurs fois,amp;: en grade alTemblée de confeil, où ils plai-* Z« -v' »7«? nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;caufes.-ôc vey le bon home vieil prefenter le gage de bataille â

flaire, amp;nbsp;fut foii filz.Lc Duc dc Bourgogne defiroit fort les appointer, amp;nbsp;fiuorifoit le ieu« ne queued?- ne,* amp;nbsp;luy olfroit le tiltre de Gouuerneur en Bourgognede païs dc Gueldres uemeuFoÛ nbsp;nbsp;nbsp;dcmoureroit auec tout le rcuenu,(àufvne petite ville,alTife auprès de Bra

Memboutg, bât(quiano Grauc)quideuoit demeurer au pere,auec le reuenu de trois mil-dcmeuinoit le Florins amp;nbsp;autant de penfion. Ainfi le tout luy eull valu fix mille Florins, auec le tiltre deDucctftmmeraifon elloit.Auec d’autres plus fige ie fus commis à porter celle p.frolle à ce ieune Duc: lequel feit refponcc, qu’il ayme-t nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;roit mieux auoir ietté fon pere la telle deuat,en vn pLiis,amp;de fcllre ietté apres

que d’auoir fait cell appointcmêt;amp; qu’il y auoit quarante amp;nbsp;quatre ans que fon pere elloit Duc, qu il elloit bien teps qu’il le full: mais que tref volotiers il luy lailTeroit trois mille Florins par an,par codition qu’il n’entreroit iamais dedâs laDuché:amp; alTez d’autres parolles tresmal làges.Cecy aduint iuftemét corne leRoy print Amiens fur le Duc de Bourgongnc,lequel elloit auec ces deux

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DE PHILIPPE DE co MIN ES. ni

lt;ieux (dót ie parle).! Dourlans, où il fe trouiioit treCcmpclchécamp;partit foiib-. dainement pOLîr fe retirer à Hcdin, amp;nbsp;oublia celle matiere.Et ce ieune Duc ? print vn habillement dcFrâçoiSjamp; partit luy deuxiefine feulemêt pour Ce rC’-tirer en fon pais.Et paflant vn port,auprès de Namur, il paya vn Florin pour l'on paflage. Vn prcllre le veit,qui en print fufpieio, Sgt;c en parla aupalEtgcr; tegardaauvilàgeccluy qui auoit payélediôl Florin , amp;nbsp;le congnut amp;la fut prins amp;nbsp;amené à Namur ; amp;cy efl demeuré prifonnier,iufques au trefpas du Duc de Bourgôgnc,que les Gantois lemirét dehors, amp;auoient vouloir luy faire efpoufer celle qui depuis a ellé DuchelFe d’Auflriche,par force;amp;le menèrent auec eux deuant Tournay,où il fut tué mefehâment, amp;: mal accopai-gné:côme fi Dieu n’eufl pas eftc fioul de venger cell oultrage qu’il auoit fait, a fon perc.Lc pere elloit mOrtauant le trefpas duDuc de Bourgongne,eftant encores fon filz en prifon:amp; à fon trefpas laiffi audiél Duc fi fuccefiio,à eau-» fede l’ingratitude de fon filz ; amp;nbsp;fur celle querelle conquift le Duc de Bour-gongne,au temps que ie dy,la Duché de Gueldres,où il trouua refifléce;mais il elloit puiflant, amp;nbsp;en trefue auec le Roy, amp;nbsp;la pofieda iufques à la mort : encores la polTede auiourd’huy ce qui elf defeendu de luy, tant qu’il plaira 'tDieu.Et comme i’ay dit au commencement,: ien’ay compté cccy que pour tnonllrcr que telles cruautez, amp;nbsp;tels maux ne demeurent iamais impunis. * LcDuc de Bourgogne elloit retourné en fon païs,amp;:auoit le cœur tref-eleué pour celle Duché,qu’il auoit loinéle à fi crolle;amp; trouua goull en ces chofes, d’Allemaigne : poureeque l’Empereur elloit de tref petit cœur,amp; enduroit toutes chofes pour ne delpendre rien;amp; aulFi de foy,fans l’aide des autres fei-gncLirs d’Allemaigne,nc pouuoitil pas grand’chofe.Parquoy lediclDuc ra-lôgca fl trefue auec le Roy:amp; fembla a aucuns des feruitcurs du Roy,que le-diôh feigneur ne deuoit point ralonger fi trefue, ne lailTer venir audiél Duc fi grand bien.Bon fens leur faifoit dire cela, mais par fiute d’cxperieij^c amp;nbsp;d’a- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;■ -

üoirveu, ils n’entendoient point celle matière. Ily en eut quelques autres mieux entendans ce cas qu’eux, ôc qui auoient plus grande congnoillance,.

pour auoir ellé fur les lieux,qui dirent au Roy que hardiment print celle tref ue,amp;: qu’il foulfrit audiólDucfallerhurter contre les Allemaignes,( qui efl choie fi grande amp;nbsp;fi puilfinte qu’il efl prefque incroyable) difans que quand lediôl Duc auroit prins vne place,ou mené afin vne querelle,il en entrepren-droit vne autre, amp;nbsp;qu’il n’efloit pas homme pour iamais fe faoulcr d’vne en-treprinfe (enquoyilefloit aroppofitcauRoy : careflant’^embrouillé,plus f’enibrouilloit)amp;: que mieux ne fe pourroit venger de luy que de le laiffer faf re;amp; auant luy faire vn petit d’aide, amp;nbsp;ne luy donner nulle fufpiçio de luy ro-precelle trefuc.-Car à la grandeur d’Allemaigne,amp; à la ^uilfince qui y ell,n’c-lloit pas poffible que toll ne fe confommall, amp;nbsp;ne fe p^dift de tous points. Caries Princesde l’Empire, encores que l’Empereur full homme de peu de Vertus,y donneroient ordreà lafin finaleaudiót feTgneur enaduintainfi. A la querelle des deux pretédans à l’Euefché de Coulongne,dont 1 vn çlloit frerede Lantgraue de Helfen,amp; l’autre parée du Cote Palatin du Rhin,lcdiôl Duede Bourgongnetint le pxartydudiéf Palatin, amp;nbsp;entreprint de le mettre par force en celle dignité,efpeiât en auoir quelques places.-Sc mit le fiege de-

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ÏÏZ nil. LIVRE DES MEMOIRES

y/C uant NuZjpres CoLilongneJan mille quatre cens feptante amp;nbsp;quatrc.ll mit tac de choies en fon imagination,amp; fi grandes,qu’il demoura loubsleEtix.Caril vouloir en celle laifon propre faire palier le Roy Edouard d’Angleterre ( lequel auoit grade armée prelle,à la pourfujte dudiél Duc) ôc acheuer celle en-treprinfe d’Allcmaignc:qui elloit,fil eull prins Nuz,la garnir bicn,amp;: vne autre place ou deux,au dellus de Coulogne:pourquoy ladiéle cité de Coulognc diroiclcmot:amp;: que partant il monteroit contrera ot le Rhiniufques à la Coté de Ferrette,qu’il tenoit lors.'ôe ainlî tout le Rhin feroit fié iniques en Hollande,où il fine, amp;nbsp;où il y a plus de fortes villes amp;nbsp;chafteaux qu’en nul royaume delà Chrelliente,fi cen’ellen France. La trefue qu’il auoit auec le Roy,a-, ^uoit elléalongéedelix moys,amp; défia la plus part dloicntpalTez.LeRoyfol-licitoit fort de ralongcr,amp;qu’il feit à fon aile en Alleraaigne. Ce que lediél. Duc ne voulut faire,pour la promelTe qu’il auoit faiôleaux Anglois.

le me palferoiebien de parler de ce faiôl de Nuz, pourcc que ce n’ell pas le train de ma maticre(car ie n’y elloye pas)mais ie fuis forcé d’é parler pourles matières qui en dependent. Dedans la ville de Nuz, laquelle ell tresforte, fe-lloiét mis le Lantgraue de Helfen,amp; plufieurs de fes parés amp;nbsp;amisdufqucs au nombre de dix huiéleens hommes de chcual,comme il m’a elle diél, amp;nbsp;tref-' gens de bien ( amp;nbsp;aulfi ils le monllrerent) amp;c de Gens de pied ce qui leur en fiii-loit befoino;. Lediél Lantgraue, comme nous auons dit, elloit frcredel E-uefque,qui auoit cllé elleLi.-amp; qui effcoir la partie aduerle de celuy quefoullc-noit le Duc de Bourgongne. Et ainfi le Duc de Bourgongne mit le liege de-uantNuz,l’an mil quatre cens feptante amp;nbsp;quatre.

Il auoit la plus belle armee qu’il eut iamais, amp;nbsp;fpecialement pour Gens de cheuahear pour aucunes fins qu’il pretédoités Italics, il auoit retiré quelques raille Hommes d’armes Italiens, que bons que mauuais; il auoit pour Chef d’entr’et^ vn appellé leComte de Campobache, du royaume de Naples,par-tifan de la maifon d’Anjou,homme de tref mauuaife foy,amp; tref-perilleux. Il auoit aulfi lacques Galeot, Gentil-home de Naples tres-home de bié, amp;nbsp;plufieurs autres que ie palfe pour briefueté.Seblablemcnt auoit bien le nombre de trois mille Anglois,tres gens de bien, amp;nbsp;de fes fubicéls en tref grad nombre bien montez amp;nbsp;bien arrhez, ôc qui ja long téps auoient exercé le faiél de la gu erre, amp;nbsp;vne tref grande amp;nbsp;puilfante artillerie. Et tout cecy auoit il tenu pre{l,pourfcioindre auec les Anglois a leur venue, lefquels faifoiét toute diligence en Angleterre.Mais les chofes y font longues: car le Roy ne peut en-treprédre vne telle œuure,fans affembler fonParlemét, qui vaut autant corne les trois Eflats, amp;nbsp;qui ell chofe iufie amp;nbsp;fàinéle, amp;nbsp;en font les Roys plus forts cc-vgt;aexf mieux feruis,quan^ ainfi le font en fcmblables matières:’^ car l’yflue volo-'»w».* tiers n’en efh pas brilfiie.Quand les Eflats font alfemblcz, il declare fon inten tion,amp; demande aide fur fes fubieôts; car il ne fe leue nul aide en Angleterre, • ' fi ce n’eft pour paffer Äi France,ou aller en Efeoffe, ou en frais femblables : Ôc tres -volôticrsamp; bien libéralement,ils les ottroient, amp;nbsp;fpecialemét pour paffer en Francc.Et eft bien vne pratique que ces Roys d’Angleterre font,quad ils veulent amaffer argent, que faire femblant d’aller en Efeoffe ou en France,amp; faire armées ; amp;nbsp;pour leuer grand argent, ils font vn payement de trois moys,

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. ' nbsp;115

’^oys,ô-; puis rompent leur armee, amp;nbsp;fen retou ment â l’hoEel, ayans recen argent pourvu an.Et efeoit ce Pkoy Edouard tout plein de ceftepratique,ôc louuenrlcfcir. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;■ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;' I ■' gt;

Cellearmée d’Angleterre mit bien vn an à eEre prefte, amp;nbsp;lefeitfçauoir à nionfeigneur de Bourgogne, lequel au comenccmét de l’Efté efloit allé iuf^ que’s deuant Nuz.-ôc luy lembla qu’en peu deioursilauroitmis fon homme lt;^npofienion,amp; qu’il luy pourroit demeurer aucunes placeSjComeNuz nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;,

ttcSjpour paruenir aux hns que vous ay diélcs. l’eEime que cecy vint dcDieu

^üi regarda en pitié ce royaume.-car ce Duc eftoit pour y faire grand domma

gc ayant l’armée telle qu’il auoit,amp; gens accoufturnez par plulieurs années à

tenir les'champs par ce royaume, fans que nul luy prelcnraft bataille, ouf^

ttoiiuaft aux champs en puiflance contre luy, hcen’efoitengardancles vil-

Mais bien cEvray que celaproccdoitdu Roy, qui ne vouloir rien met-

tte en hazard;amp;ne le faifoit pas feulement pour la crainte du Duc de Bout-

gongne.-mais pour doubtedes defobeilfances qui pourroienr aduenir en ce

royaume,fil aduenoit qu’il perdift vne bataille:car il efimoitn’eftre pas bien de tous fes fubicéts, Sgt;c par elpecial des grands. Et fi i’oloye tout dire, il m’a niaintesfois dit qu’il congnoilToit bien fes fiibieéfs, * amp;nbsp;qu’il les trouueroit amp;quiic Hen,{ifesbefongnesleportoient mal.Erpource quand leDucdeBourgon nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1

gne entroitjil ne faifoit que fort bien garnir fes places,au deuat de luy;amp; ain- rc wa.

11 en peu de temps, l’armée du Duc deBourgongne fe deftaifoit d’elle mef-niejfans que le Roy mift fon eftat en peril aucun, ce qui me fembloit proce- *

dsr par grand fens.Toutesfois ayant le Duc lapuiffance telle,que vous di-ftc,fi l’armée du Roy d’Angleterre fiait veùüe au fin'commencement de lafii

fon,commc elle eullfaitjfans nul doubte,n’euftefté l’erreur du Duc de Bour-

gongne de fe mettre fi obftinéement deuant Nuz, il ne faut pas doubter que ce royaume euft porté de tref grâds affaires. Car iamaisRoyd’Angleterre ne oafla à fi puifïante armée pour vncoup,quefiit cefte cy, dont ie parle, ne fi nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;'

îicn dilpolecpour cobatre. Tous les grads leigneurs d’Angleterre y eftoiér,

fans en faillir vn. Ils pouuoient bien cftre quinze cens Hommes d’armes

(qui cftoit grand’ choie pour Anglois)tous fort bien en poinél,amp; bien acco-paignez,amp; quatorze mille Archiersportans arcs amp;nbsp;flelches,amp; tous a chcual, amp;nbsp;allez autres gens a pied leruans à leur Oft;amp;: en toute l’armée n’y auoit pas vn Page.En oultre debuoit le Roy d’Angleterre enuoyer trois mille hommes defeendre en Bretaigne,pour fe ioindre auec l’armée du Duc:amp; vey deux lettres eferiptes de la main de monfeigneur d’Vrfé, grand Efcuyer de France (qui pour lors eftoit feruiteur du Duc de Bretaignejl’vne addrefl'ante au Roy d Angleterre, amp;nbsp;l’autre à monfeigneur de Haftinguei, Grand Chambellan d’Angleterre,qui entre autres parolles,difoiét que le I^ic de Bretaigne feroit plus d’exploiéf en vn moys, par intelligence, que l’armee des Anglois amp;nbsp;celle du Duc deBourgongne ne feroient en fix,quelque force qu’ils culfent : ôc croy quildifoit vray, files chofes fuftenttirées oultre; mais Dieu, qui tou-lours a ayme ce royaume,conduifit les choies comme ic diraycy apres.Et les lettres dont i’ay parlé,furcnt acheptées d’vn Secretaire d’Angleterre, foixâtç Marcs dargentpar le Roy,à qui Dieu pardoint.

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Comment ceux de la ville de Nu\Jurentfecourasbar les Allem an s nbsp;nbsp;par l'Em

pereur, contre le Duc de ^ourgongne: des autres ennemis ej^ue le 7{oy luy ßtjcita. QH AT. II.

Infi corne ie vous ay dit,e(1:oitle Duc de Bourgongnejabien empefchédeuâtNuz, amp;nbsp;trouuales chofes plus dures qu’il ne penfoit.Ceux de Coulongnc, qui eftoient quatre lieücs plus haultfur leRhin , frayèrent chalcun moys cent mille Florins

d’or^pour crainte qu’ils auoéit du Duc de Bourgôgne:amp;: eux, amp;les autres villes au deflus d’eux,fur le Rhin,auoient deha mis quinze ou fei-zemille Hommes de pied iur les champs : amp;: eftoient logez fur le bord de la riuiere du Rhingt;auec grand’artillerie,du cofté oppofite du Duc dcBourgon gne,amp; tafehoient à luy ropre (es viurcs,qui vcnoict par eaué du pais de Guel-dres,contremonc la riuiere,amp; à ropre les bafteaux à coups de canon.L’Empereur,ôè les Princes Eledeurs de l’Empire, fafl'emblerent fur cefte matière, amp;c dclibererêt de faire armée: le Roy les auoit ja enuoyez folliciter par plufieurs

* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;meflagers. Audi renuoyerent vers luy vn Chanoine de Coulongne,de la mai;

de fon *dcmô(èi2neur de Bauiere,amp; vn autre Ambafl'adeur auecques luy:amp; ap-raoleigncur. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;,, p , nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;,, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• ■ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• j C • C

portèrent au Roy par roolle 1 armee que 1 Empereur auoit intention de raire, au cas que le Roy de fon code fevoulfid employer. Ils ne faillirent point à a-uoir bonne refponce,amp; promelfe de tout ce qu’ils demandoient;amp; d’auanta-gc promettoit le Roy par feeliez,tant à l’Empereur qu’à plufieurs des Princes amp;nbsp;villes,qu’incontinent que l’Empereur feroit à Coulogne, ôc. mis aux chaps, que le Roy enuoyeroitioindre auecques luy vingt mille hommes, foubs la condiiiâ:e de monfeigneur de Cran amp;nbsp;de Sallczard, Et ainfi cefte armée d’Ah iemaigne fapprcda.-quifut merueilleufèmcnt grandc,amp; tant qu’elle edpref-que incroyable. Car tous les Princes d’Allcmaigne, tàt fpirituels que tempo* rclsjamp;lesjfuefques y eurent gens, ôe. toutes les communautez, amp;nbsp;en grand nombre.Il me fut did qu e I’e u cl gu c * Minidr e, qui n’cd point des grands, y VMviiA/Vk mena fix mille Hommes de pied,quatorze cens Hommes de cheual, amp;nbsp;don-’ zc cens chariots,amp; tous vedus de verd. Il ed vray que fon Euefehe ed pres de Nuz.L’Erapcreur mit bien fept moys à faire l’armée .•amp; au bout du terme, fe vint loger à demie lieue pres du Duc de Bourgongne : ce que m’ont conté plufieurs gens dudiélDuc,rarméedu Roy d’Angleterre, nccelleduDuc de Bourgongne enfemble,ne montoient point plus du tiers que celle dont ie parle, tant en gens qu’en tentes amp;nbsp;pauillons. Oultrc l’armée de l’impereur e-doit cede armée de l’autre part de la riuiere, vis avis du Duc de Bourgongne, qui donnoit grand trauail à fon od amp;nbsp;à fes viures.

Incontinent que l’E^apcreur futdeuantNuz, amp;nbsp;ces Princes de l’Empire, * Hufebere, cnuoiereut deuers le Wby vn Doéleur qui cdoit de grand’ authorité aucc eux amp;fappclloitleDo6teur*Hefeuare, qui depuis a edé Cardinal : lequel vint folliciter le Roy de teniffii promclTe, amp;nbsp;d’enuoycr les vingts mille hommes ainfi qu’il auoit promis, ou autrement que les Allemans appointeroient.

Le Roy luy donna trefbonne efperance, amp;nbsp;luy feit doner quatre cens efeus; Axlm/'”^1’ enuoya quand amp;nbsp;luy,deuers l’Empereur, vn appelle lehan Tiercelin , fei-gneur *'de la BroIfc.Toutesfois lediélDoétcur ne f’en alla pas content; amp;fe condui-

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DE PHILIPPE DE C O M I N E S. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nj

conduifoieni: demcrueilleux marchez,durant ce hcge.Car leRoy rrâiiailloic de faire paix auecques le Duc de BoLirgougne;ou quoy queloit, d’allonger htrefue,ahn que les Anglois ne vinllenr point. LeRoy d’Angleterre d’autre cofté trauailloit de toute fa puillancc à fan e partir le Duc de Bourgongne de dcLiant Nuz,amp;qu’il luyvint tenir promeffe , amp;nbsp;ayder à faire la guerre en ce royaume, dilant que la faifonfecommençoit à perdre: amp;nbsp;fut Ambafladeur^ par deux fois, de celle matière, lelcigneurdeScalles, nepueudu Connefla-We,vn tres-gentilCheualier,amp;plulieurs autres. Le Duc de Bourgongne fe troLiLia obilmé,amp; luy auoit Dieu troublé le feus 5c l’entendement.• car toute lavie il auoit crauaillé pour frire palfer les Anglois, ôc à cePte heure, qu’ils e-ftoientprefs, 5lt; toutes choies bien difpofécs pour eux, tant en Breraignce f]u ailleurs,il demeuroit obftiné àvne choie impolïibicdepiêdre. Auec l’Em pereur auoit vn Legat Apoftolique.qui chalcû tour aPoit de l’vn oft à l’autre, pour traiéter paix:5c femblablement y eftoit le Roy de Damnemarc,!ogé en Vue petite villc,pres des deux armées,qui trauailloit pour ladióte paix:5c ain-fileDuc dcBourgongneeuftbienpeuprendrepartyhonnorablcpourfere-tirervers leRoy d’Angleterre.Il ne le feeut faire, amp;nbsp;l’exeufoit entiers les Anglois fur Ibn hôncur,qu’il leroit foulé fil leleuoit, amp;nbsp;autres maigres exeufes. Car ce n’eftoienr pas les Anglois qui auoient régné du temps de fonpere, ôc aux anciennes guerres de France : mais cftoient ceux cy tous neufs, Sgt;c igno-rans, quant aux choies de France : parquoy lediôL Duc piocedoit mal figement,l’il fen vouloir aider pour le têps adtienir. Car il euft efté beloing qu’il les euft guydez pas à pas, pour la premiere fiifon.

Eftanc le Duc de Bourgongne en celleobllination, Ipy fourditguerrepar deux ou trois bouts. L’vne fut que le Duc de Lorraine,qui eftoit en paix auec luy,’*^ amp;: encores auoit prins quelques intelligences apres la mort du Duc Nicolas de Calabre,l’enuoia defticr deuantNuz, par le* morederaofileio;neur *

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de Cran,lequel fen vouloir ayder pour le feruice du Roy :amp; ne faillit pas aluy qitei à l’éuoia promettre qu’on en feroit vn très-grand homme; amp;nbsp;incontinent fe mirée aux champs * enlemble, Sgt;c feirent grâd dommage en la Duché de Luxembourg, amp;nbsp;ralerent vue place,3ppellée Pierre forte jalfile à deux lieiies pres deNâcy, qui eftoit de la Duché de Luxembourg.D’auanrage fut conduiét par le Roy, cniembici amp;aucuns de fes feruiteurs,qu’il conuintqu’vncalliance fuft fiicle pour dix ans,entre les Suilî'cs 5e les villes de delTus le Rhin, comme Balle, Stralbourg, amp;nbsp;autres qui parauant auoient cfté en inimitié.

Encores fut fiicle vne paix entre le Duc Sigilmod d’Auftriche Scies Suifles, tendant à celle fn que lediél Du cSigilfnodvoullift reprendre la Comte' de Ferretre,laquelle il auoit engagéeau Ducdebourgo»gnepourlafommcde cét mille florins de Rhin;amp;ainli fut accordé.Il demem^vn difièréd entre luy amp;nbsp;les Sullies, qui vouloient auoir paflage par quatre villes delà Coté deFcr-rette,fors amp;nbsp;foibles, quand il leurplairoit.CepoinélfLitfoubmis fur le Roy, qui le iugea à l’intentio des SuilfcsiÔc par ce qui eft cy delTus recité pouuez en-tëdre les querelles que le Roy fulcitoit fecrettemét audit Duc de Bourgogne.

Tout aiuli, corne cecy auoit efté côclu,il fut exécuté; car en vne belle nuiôl futpnns melhre Pierre Archâbauli,Gouueriieurdupaïs de Ferrctte pour le

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nd nbsp;nbsp;nbsp;UIL LIVRE DES MEMOIRES

DLiC(leBourgongnc,auechuiólcens hemmes de guerre cju’il auoit auec îuy: leïcjuels furent tous deliurez fracs amp;nbsp;quittes, excepté luy qui fut mené aBaf-le,ouils luy feirent vn proces fur certains excez amp;nbsp;violences,qu’il auoitfiiôis audiâ:païsdeFerrete;amp;cnfindeconteluy trancherent la telle. Or fut mis tout le pais de Ferrette en la main du did Duc Sigifmond d’Auftrichc : c5-mencerent les Suifies la guerre en Bourgongne,amp; prindrent Blafmond qui cftoitauMarefchal de Bourgongne, qui eftoit delà maifon de Neuf chaftel, ôé afliegerent le chafteau de Herycourt, qui eftoit de ladide maifon de Neuf chaftel,où les Bourguignons allèrent pour les fecourir ; mais y fut defconfic deuant vn bon nombre d’iceux. Lcfdids Suiftes feirent vn grand dommage • au païs,^: puis fc retirerentpour cefte boutée.

Comment le l\py i^rintle chafleau. dtiTronquoyJ.es villes de lvlondidier,7{pyey^ Corbie^fur le Dùc de Bourgongne, (B) comment il voulut induire ïEmpereur Federic dfefaifirdes terres que lediF Duc tenoit

de lEmpire. QH T. III.

A trefue faillit entre le Roy amp;nbsp;le Duc de Bourgongne, par-euttrefgrand regret:caril eut mieux aymévna-(jg trefue-.toutesfoys voyant qu’il ne lapouuoit ti' uoir,il alla mettre le fiege deuant vn petit chafteau appelle le Tronquoy :amp; eftoit ja comencé l’an feptâte cinqrôc eftoitau ^ 4 7 5* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;plus bcau,S: au c0mcnccmctdelafaifon.il fut en peu d’heu-,

rc prins d’aftault. Lendemain le Roy m’enuoya parler à ceux qui eftoient deuant Mondidierdefquels fen allèrent leurs bagues fruucs,amp; lailfcrcnt la place. Lendemain allay parler à ceux qui eftoient dedans Roye,en la compagnie de monfeigneur l’Admirai, Baftaïd de Bourbon , amp;nbsp;femblablementmefuc rendue la0''lace;car ils n’efperoient nuîfecours.Ils n’el’euflent pas rendue,file did Duc euft efte au pais;toutcsfois contre noftrc promefte, ces deux villes furent bruflées.De la fen alla le Roy mettre le fiege deuant Corbie, ôcl’atté-dircnt:ô:y furent faides de trdbellesapproches:amp;y tira l’artillerie du Roy trois iours. Il y auoit dedans monfeigneur de ’^Contay, amp;nbsp;plufieurs autres tTntpIné'M qui la rendirent,amp; fen allèrent leurs bagues fiuucs. Deux ionrs apres la pau-urc ville fut pillée;amp; mit on le feu dedans,toutainfi commeaux deux autres. Lors le Roy cuida retirer fon armée,amp; efperoit gaigner le Duc de Bourgongne àcefte trefue, veuëlaneccflité en quoy il eftoit:mais vnefemme,que ic congnoy bien, amp;nbsp;ne la nommeray point, pourcc qu’elle eft encores viuantc, elcriuit vne lettre au Roy, qu’il feift tourner fes gens deuant Arras : amp;nbsp;és en-uirons:amp; le Roy y adieufta foy,car elle eftoit femme d’cftat.Ie ne lotie point fon oeuure,pource quelle n’y eftoitpoint teniie: mais le Roy y enuoya monfeigneur l’Admirai, Baftard de Bourbon ,accompaigné de bon nombre de gens ; lefquels bruflereftt grande quantité de leurs villes, commençans vers Abbeuilleiufques a Arras. Ceux de ladide ville d’Arras, qui de long temps n’auoiêt eu nulle aduerfite,amp; eftoient pleins de grand orgueil, cotraignirent les gens de guerre, qui eftoient en leur ville de faillir. Le nombre n’eftoit pas fufÈGnt pour les gens du Roy.-en façon qu’ils furent remis de Ii pres, que lar-

gemen

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gement en y eut de tuez, amp;nbsp;de prins, amp;nbsp;mefmes tous leurs Chefs : cjui furent nicffire lacques de fainôl Paul,frere du Connellable,lefeigneur de Contay,le lèigneurde Carency, amp;nbsp;autres: dont il fen trouua des plus prochains delà Dame,qui auoit efté caufede cefl exploiôl;amp; y eut ladidie Dame grand’ perte,mais le Roy en faueur d’elle,repara le tout par temps.

Pour lors auoit enuoyé le Roy, deuers l’Empereur, lehan Tiercelin, fei-gneur de la Brolfe, pour trauaiilcr qu’il ne fappointaft auec le Duc de Bour-gongne , amp;nbsp;pour faire exeufe de ce qu’il n’auoit enuoyé les Gens-d’armes, commeilauoitpromis,a(rcuranttoufiours le faire , Se de continuer les ex-ploidfs dom.mages,qu’il ftifoitaudidt Duc,bien grans, tant au pais amp;nbsp;mar chesde Bourgogne,que de Picardie Et oultreluy ouurir vn party nouueau, qui eftoit qu’ils afl'euralTent bien l’vn l’autre de ne faire paix l’vn lans l’autre.-Seque l’Empereur print toutes les feigneuries que ledidf Duc tenoic de l’Empire,amp; qui par raifon en deuoyent eftre tenues, amp;nbsp;qu’il les feift declarer confifquces àluy : amp;nbsp;que le Roy prendroit celles qui elloienc tenues de la ’ couronne de France,comme Flandres, Artois,Bourgongne, amp;nbsp;pluheurs autres. Combien que cell Empereur eufl efté toute fa vie homme detres-peu devenu, fi eftoit il bien entendu, amp;nbsp;pour le long temps qu’il auoit vefeu, il auoit beaucoup d’expcricnce; amp;nbsp;puis ces partis,d’entre nous amp;nbsp;luy, auoient beaucoup duré,parquoy eftoit las de la guerre, combien quelle ne luy cou-llaftrien'.car tous ces feigneurs d’Allemaigney eftoientàleurs defpens,com-nieileft decouftume quand il touche le fiidl de l’Empire. Ledid Empereur D««emxr-refpondit aux Ambafladeursdu Roy ,qu’aupresd’vneville d’Allemaigney auoit vn grand Ours,quifaifoit beaucoup de mal.Trois compaignons de la-«“«j-ehfee. diâe ville,qui hantoientlestauernes, vindrentà vntauernier, àquiils de-uoient prier qu’il leur accreuftencorvn efcot,amp;: qu’auanedeux iours lepaye-îoientdu tout:carils prendroienteeft Ours, qui faifoit tant de mal, ôc dont la peau valoir beaucoup d’argent,fans les prefens qui leurs feroientfaiélsdcs bonnes gens.Lediôthofte accomplit leur demande, amp;nbsp;quand ils eurent dif-né, ils allèrent au lieu où hantoit ceft Ours: ôe comme ils approchèrent de la caucrncjils le trouuerent plus pres d’eux qu’ils ne penloient : ils eurent peur, fl fe mirêt en fuite.L’vn gaigna vn arbre,l’autre fuit vers la ville: le tiers l’Ours le print, amp;le foula foubs luy , en luy approchant le mufeau fort pres de roreille.Lcpauurehommc eftoit couché tout plat contre terre, amp;nbsp;faifoit le mort.Or cefte befte eft de telle nature que ce qu’elle tient,foit homme ou be-fte,quand elle vcoit qu’il liefe remue plus, elle le laifïe là, cuidant qu’il foit mort : amp;nbsp;ainfi lediét Ours laifla le pauure homme, fans luy auoir fait gueres demal : amp;nbsp;fc retira en fa cauerne. Et quand le pauur^homme fe veit deliuré, il fe leua tirant vers la ville. Son compaignon qui efto^ fur l’arbre, ayant veu ce myftcre, defcend,court,amp; cria apres l’autre,qui eftoit deuant, qu’il atten* dift.-lequel fe retourna, amp;: l’attendit. Quand ils furentioinéls, celuyqui e-ftoitdeftus l’arbre, demanda à fon compaignon, par ferment, ce que l’Ours luy auoit dit en confeifque fi long temps luy auoit tenu le mufeau contre l’oreille. A quoy fon compaignon luy refpondit: il me difoit que iamais ic ne marchandafle de la peau de l’Ours, iufques à ce que la befte fuft morte.

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ii8 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;III I. LIVRE DES 'MEMOIRES

* EtauecceUefablepayal’EnipercurnoftreRoy ÛDsfaire autrcrefpoceàfon mt/ls fuyti»nt home,* ïinon en confeil.'commc fil voiiloit dire:Venez icy corne vous auez ■vied txemp, ' promis,amp; tenons cefthommefi nous pouuons,amp;: puis départons fes biens.

Qomment le Conneßable cemmença à f entrer en fußieion tant âu coße queduDucde'Sourgongne. nbsp;nbsp;QHAT. IIII,

Oys auez ouy corne meflire Lacques de faind Paul, amp;nbsp;autres auoient efté prins deuant Arras, laquelle prinfe.delpleut fort au Conneftable,car ledid meflire lacques luy eftoitbô frere. Cefte maladuenturene luy aduint pas feule: car tout en vn têpsfut prins le Cote de Roufli fon filz, gouuerncur de Bour-gongne pour 1 ediôt Duc:amp; aufli mourut la femme dudiôl Conneftable, Dame de bien :laquelle eftoit fœur de la Roync,qui luy eftoit fupport amp;nbsp;fiiueur: car toufiours fentretenoit lamarcbandfle cncommcncce contre luy(commc vous auez ouy)laquelle tint à peu à l’aflemblce qui fut faiôle à Bouuines pour cefte maticre.Oncqucs puis ne fut afleuré ledióf Conneftable, mars en fufpi-cion de deux coftcz,amp; par fpecial en doubte du Roy :amp; luy fcmbloit biêque leRoy ferepentoitd’auoir retiréfon feelléà Bouuines,Le Comte dcDamp-martin amp;c autres eftoient logez auec les Gês-d’armes, pres de fiiind Quentin. Lediôl Conneftablelescraignoitcomme fes ennemys,ôc fe tenoit dedans fàinél Qucntin.'ou il auoit mis quelques trois cens Homes de pied de fes terres, pource que de touspoinôls ne fcfioitde fes Gens-d’armes. Il viuoiten grand trauail.'car le Roy le follicitoit par plufieurs meflagers,qu’il femift aux champs,pour le fèruir du cofté de Henault; amp;nbsp;qu’il meift le fiege deuât Aliènes,a l’heure que moftigneur l’Admirai, amp;nbsp;cefte autre bande, allèrent brufler en Artois^omme i’ay dit.Ce qu’il feit en grand’crainte; car il craignoit fort. II fut deuant peu de iours,faifant faire grand guet fur fa perfonne,puis fe retira en fes places,amp; manda au Roy ( amp;nbsp;ouy moymefme fon homme par le comandement du Roy)qu’il feftoitleue, par ce qu’il eftoit certainementinfor-^ me qu’il y auoit deux hommes en l’armée, qui auoient prins charge du Roy de le tuer : amp;nbsp;dift tant d’enfeignes apparentes, qu’il ne f en falloir guercs qu’il nefuftereu; amp;nbsp;que l’vn des deux ne fut fufpiçionnc d’auoirdit au Conneftable quelque chofe qu’il deuoit taire. le n’en veux nul nommer, ne plus a-uant parler de cefte matière.Ledift Conneftable cnuoyoit fouuent en l’oftdu Duc de Bourgôgne:ic croy bien que la fin eftoit de le retirer de cefte folie: amp;nbsp;quand fes gens eftoient reuenus, il mandoit quelque chofe au Roy, dequoy iîpenfoit luy complaira, amp;nbsp;aufli l’occafionpourquoyily auoit enuoyé: amp;nbsp;penfoit entretenir le BPby par ce moyen. Aucunes fois aufli mandoit audift fèigneur que les affaires dudiâ: Duc de Bourgongne fe portoyent bien, pour luy donner quelque crainte; car il auoit tant de paour qu’on ne luy couruft fus, qu’il requift audift Duc qui luy enuoyaft fon frere meflire lacques de fàinft Paul,auantfilprinfe (carileftoitdeuant Nuz) amp;nbsp;auflilefeigneur de Fiennes,amp; autres fes parens, amp;nbsp;qu’il les peuft mettre dedans faincf Quentin, auecques leurs gens, fins porter la Croix fainft André. Et promettoit audiél

Duc

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. np

Duc tenir fàinôt Quentin pour luy , luy reftituer quelque temps apres: amp;nbsp;de ce faire luy bailleroit fon feellé. Ce que le Duc feit, amp;nbsp;quand lediôt mcflireLacques, le feigneur de Fiennes, amp;nbsp;autres defcs parens letrouuercnt par deux fois, a vne lieue ou deux pres de la ville de iainél Quentin,amp; prefts à y entrer, il Ictrouuaqueladoubte eftoit paffee, amp;. fe repentoit, amp;nbsp;les ren-üoyoit: amp;feit cccy par trois fois, tantdefiroit demeurer en ceft elfac, nageant entre les deux : car il les craignoit tous deux merueilleulement. lay fceuceschofesparplufieurs , efpecial parla bouche de mefîire lacqucs de , fainôl Paul, qui ainfi le compta au Roy quand il fut amène prifonnier ,où iln’y auoit que moy, amp;nbsp;luy valut beaucoup de quoy il rcfpondit franchement des chofes que le Roy luy detnandoit. Lcdicf feigneur luy demanda, combien il auoit de gens pour y entrer: il refpondit qu’à la troifiefme fois il * auoit trois mille hommes.Lcdidfeigneur luy demanda aufïî, fil fefufl trou-uéle plusfort,fil euff tenu pour le Roy ou pourlediôf Conncffable.Lediól meflîre Lacques de faincl Paul refpondit,que les deux premiers voyages il ne Venoit que pour reconforter fon frere:mais à la troifiefme,veu que lediél Co gongne. neflable auoit trompé fon maiflre luy par deux fois,que fil ne fe full trou-uéle plus fort il euff gardé la place pour fon maiflre, fans faireviolcceaudiót Conneflable, n’a rien qui eufl efléàfon preiudice, finon qu’il n’en fufl point failly à fon commandement. Depuis amp;nbsp;peu de temps apres , lediôl feigneur àeliura de prifon lediél melfire Lacques defàinélPaul, amp;nbsp;luy donna des Gês d’armes, beau amp;nbsp;grand cflat,amp;fcn fcruitiufquesàlamorc. Et fes rcfponfcs en furent eaufe.

Depuis quei’ay commencé à parler de Nuz,ie fuis entré en beaucoup de matières l’vne fur rautre,aufïi furuindrent elles en ce temps : car lediél fiege dura vn an.Deux chofes preffoient extrêmement lediél Duc de Bourgongne defeleuer, c’cfloit Laguerre que le Roy luy faifoit en Picardie, il luy auoit biLiflétrois belles petites villes,amp; vn quartier de plat pais d’Artois SI de Pon ihieu.La féconde, efloit la belle amp;nbsp;grand’armée que faifoit le Roy d’Angleterre à fa requefle amp;nbsp;pourfuite, à quoy il auoit trauaillé toute fa vie pour le faire pafl'cr deçà, amp;nbsp;iamais n’en efloit peu venir à bout iufques à celle heure. Lediél Roy d’Angleterre,amp; tous les feigneurs de fon royaume,fe mal conté-terent merueilleufement dequoy le Duc de Bourgongne le faifoit fi long, amp;nbsp;oultre les prières qu’ils luy faifoienr,vfoiêt de menaces,confiderée leur grad’ defpenfe, amp;quelafaifonfepalfoic. Lediél Duc tenoit à grand’gloire ccfle grand’armée d’Allemaigne, tant de Princes que de Prelatz, amp;nbsp;de commu-^ nautez, qui efloitla plus grande qui ayt eflé depuis mémoire * d’homme,ne de long temps parauant, amp;nbsp;tous enfemble ne le fçauoient leuer de là où il efloit.Cefle gloire luy coufloit bien chcr:car qui a le p^^tdelaguerre, il en al’honneur.Toutesfois ce Legat dont i’ay pari é, ail oit amp;nbsp;venoit d’vn ofl àau-tre,amp; finalement feit la paix entre l’Empereur amp;nbsp;lediélJDuc de Bourgongne. Èt fut mife cefle place de Nuz entre les mains dudiél Legat, pour en faire ce queparleS. fiege Apofloliqueenferoitordoné.En quelle extrémité fe pou-uoit trouLier lediél Duc de feveoirainfipreffé par la guerre que luy faifoit le nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;gt;

Roy, amp;prefréamp;menafrédefonamy le Roy d’Angleterre: ôc d’autre coflé ’ *

»

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1X0 nbsp;nbsp;• nil. LIVRE DES MEMOIRES

veoir la ville de Nuz en tel eftat qu’en moins de quinze ioursil les pouuoit auoir la corde au col, par famine:amp; fi euft il en dix iours, comme m’a coté vn des Capitaines qui eftoit dedans,lequel le Roy print à fon feruice. Ainfi pour ces raifons fe leua lediél Duc deBourgongncl’an feprante cinq.

Comment nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;d’Angleterre vint par deçà à toutgrojje puiffance, pourRecou

rir le Duc de Bourgongnecontrele'E^y. RH AP. K

R faut parler du Roy d'Angleterre, lequel tiroit fon armée vers Douurcs pour pafler la mer à Calais, amp;nbsp;eftoit ceftear-mée la plus grande (que palfa onques Roy d’Angleterre) amp;: toutede gensàcheual, amp;nbsp;les mieux en poind,amp; mieux armez qui vind rent iamais en France, amp;nbsp;y eftoient tous les fei-gneurs d’Angleterre,ou biêpeu fen falloit. Etyauoitquin-

ze cens Hommes d’armes bien montez, amp;laplulpart bardez, amp;nbsp;richement accouftrez à la guife de deçà,qui auoient beaucoup de chenaux de fuite. Ils e-ftoient bien quinze mille Archiers portans arcsamp; flcfches,amp; tous à chcual,amp; largement gens de pied en leur oft,amp; autres, tant pour tendre leur tentes amp;nbsp;pauillons qu’ils auoiêt en grand’ quâtité,qu’aufti pour fe feruir de leur artillerie,amp; clorre leur camp. En toute l’armée n’y auoit vn feul Page, amp;nbsp;fi auoient ordonné les Anglois trois mille hommes, pour enuoyer en Bretaigne. l’ay cecy dit par cy deuant,mais il lèrt bien encores à ce propos : c’eft que fi Dieu n’euft voulu troubler le fens audid Duc de Bourgôgne,amp; preferucr ce royaii me,à qui il a fait plus de grace iufqucsicy qu’à nul autre, eft-ilde croire que ledid Duc fe fiift allé amufer obftinément deuàt cefte forte place de Nuz ain-fi deffendueîveu que toute là vie n’auoit fçeu trouuer le royaume d’Angleter re difpofé à faire armée deçà la mer ? amp;nbsp;veu encores qu’il congnoiflbit clere-mentqu^ls eftoient comme inutiles aux guerres de France ? car fil fen euft voulu aider,il eufteftébefoing que toute vnefaifon il neles euft perdus de veüe’, pourleuraideràdreireramp;: conduire leur armée aux chofes necclTaires felon noz guerres de deçà.Car il n’eft rien plus fot,nc plus mal adroit, quand ils paftènt premierement.'mais en bien peu d’efpace, ils font trelbonnes gens de guerre,figes amp;nbsp;hardis. Il feit tout le contrairexar entre les autres maux il leur feit quafi perdre la faifon:amp; au regard de luy,il auoit fon armée fi ropuc, fi mal en poin(ft,amp; fi pauure,qu’il ne l’ofoit monftrer deuant eux : car il auoit perdu deuant Nuz,quatre mille hommes, prenans fouldes, entre lefquels y mourut des meilleures gens qu’il euft.Et ainfi verrez que Dieu le difpofa de tous poinds à faire contre la raifbn de ce que fon affaire rcqueroir, amp;nbsp;contre ce qu’il fçauoit,amp; e^ndoit mieux que nul autre, dix ans auoit.

Le Roy Edouard eftant à Douurcs,pour fon paftage luy enuoya ledid Duc deBourgongne bien^inqcens bafteaux de Holande amp;nbsp;Zelande; qui font * Sentes. plats,amp; bas de bord,amp; bien propices à porter cheuaux.-amp; fappclIent*Sertes: ce gràd nombre,amp; tout ce que le Roy d’Angleterre feeuft fai-»ƒgt; j7e,il mit plus de trois fepmaines à pafler entre Douures amp;nbsp;Calais, amp;nbsp;n’y a que fept lieuê's. Or regardez doques à quelle difficulté vn Roy d’Anglcterrepeut pafler

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. kiî pafTer en France: amp;nbsp;quand le Roy noftremaiflre cufl entendu le faidl de la mer, aufli bien qu’il entendoit le faidh de la terre, iamais le Roy Edouard ne full palTé, au moins en celle faifon: mais il ne l’entendoit point,amp; ceux a qui ildonnoit authorite, fur le faiôl de El guerre, y entendoient encores moins! Le Roy d’Angleterre mit trois fepmaines a pafTer : vn feul nauire d’Eu print deux ou trois de fès petis palTagers.

Allant que le Roy Edouard montaft ny partift de Douures, il enuoya de-tiers le Roy vn feul Hérault appelle lartiere, lequel efloir natif de Normadie. Ilapportaau Roy vne lettre de deffiace, de par le Roy d’Angleterre, en beau langage amp;nbsp;en beau ftile; amp;c croy que iamais Anglois n’y auoit mis la main*

Il requeroit au Roy qu’il luy rendift le Royaume de France, qui luy appar-tenoit, afin qu’il peufl remettre l’Eglife amp;: les nobles, amp;nbsp;le peuple en leur liberté ancienne, Sgt;c öfter des grandes charges, amp;nbsp;trauaux en quoy ils eftoient: en cas de refus, il proteftoit des maulx qui en enfuy uroient en la forme amp;nbsp;maniéré qu’il eft accouftume de faire en tel cas. Le Roy leut la lettre feul, amp;nbsp;Puis fe retira en vne garde-robbe tout fin feul : amp;nbsp;feit appel 1er ce Hérault, amp;nbsp;luy dift qu’il fçauoit bien que le Roy d’Angleterre ne venoit point à fa reque-fte,niais y eftoitcontrain«^, tant par le DuedeBourgongne, que parle commun d’Angleterrc:amp;qu’ils pouuoient bien veoir que ja la fiifoneftoit prel-lt;]ue paftee ;amp; que le Duc de Bourgogne fen rcuenoit de Nuz, côme homme defeonfit, amp;nbsp;panure en toutes chofes; amp;queau regard du Conneftable,il Lçauoitbien qu’il auoit prins quelques intelligences auccle Roy d’Angleterre, pourcequ’il auoit efpouféfaniepce,mais qu’il le trôpcroif.ôe luy compta les biens qu’ilauoit de luy, difinr:Il ne veult linon viure en fes diftimula-tions,amp; entretenir chafeû, amp;nbsp;faire fon profit; amp;nbsp;dift audiél Hérault plufieurs, autresraifons, pouradmonnefter le Roy d’.Angleterrcdeprendreappointe-mcntauecluy. Et donna audidl Hérault trois cens efeus de fii main contant: amp;nbsp;luy en promit mille'^ fi l’a^pointement fe faifoit;amp;: en public luyŸcit donner vne belle piece de veloux cramoify,contcnant trente aulnes.

Lediôl Hérault refpondit qu’il trauailleroitàceft appointement, amp;nbsp;qu’il croyoitque fon maiftre y trauailleroicvolôtiers;m«ais qu’il n’en faloit point parler iufques à ce que le Roy d’Angleterre fuft deçà la mer: amp;nbsp;quand il y fc-toit qu’on enuoyaft vn Hérault pour demander fiiuf-conduit, pour enuoyer des Ambaftadeurs dcucrsluy,amp; qu’on fadrcflliftàmonfeigneur de Hauarr, ou à monfèigneur de S^iley, amp;nbsp;auffi à luy pour aider à conduire le Hérault.

Il y auoit beaucoup de gens en la fille, ce pendant que le Roy parloir au-did Hérault qui attendoict, amp;nbsp;auoient grand’ enuie d’ouyr ce que le Roy di-foir, amp;quel vifigeil feroit, quand il fortiroit de leans.Ç^and il eut acheue, il m’appella,amp; me dift que i’entretinfte toufiours le H?Huh,iufqueà ce qu’on luy euft baillécompaignic pourle conduire, afin que nul ne parlaftàluy,amp; ^uc ie luy feifte deliurer vne piece de veloux cramoif^,contenant trente aulnes. Ainfi le fey,amp; le Roy fe mit a parler a plufieurs,amp; compter de fes lettres dedeffianceamp; enappellafept ou huiôlàpart,amp;:lafeit lire:amp; monftrabon vi-fagc,amp;: bien afléuié,fins monftrer nulle crain-te:car il cftoitbien ioyeux de cc qu’il auoit trouué audiél Hérault.

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iiA nil. LIVRE DES MEMOIRES

De lapeine^en laquelleefioit le Qonricßahle' nbsp;nbsp;nbsp;cen nicnt ilet'!ucp;a lettres âe

creance au d'Angleterre nbsp;nbsp;au Duc de Eoutgorgne^qui apt es

ßurtnt en partie caujc deßamort, nbsp;nbsp;nbsp;Q H A P. î^P

Vr ce paflage Eiult encores dire vn mot de moleigneur le C6-neflâble : lequel efioit engrâd’penlée du tour qifil auoic fait au Duc de Bourgongne,touchant Etind Quétin, ôc. (c tenoit deûa comme deffié du P\oy : carfes principaux feruiteurs l’a-Ltoiêt lailEé,comme monfeigncur de Genii, amp;nbsp;mófeigneur de ' Mouydelquels le Roy auoit défia recueillis cobiê qucmofci-gncLirde Mouy alloit amp;nbsp;venoit dcutrs luy: amp;: le Roy prefioit foit quelcdid *Conncflable vinfl deuers luy:amp; luy offroitcenaines recôpenfcs qu’ildema-doit pour la Comte de Guyfe, comme autresfois luy auoit promis. Ledicl Conneflable effoit bien content de v cnir, pourueu que le Roy feift ferment fur la croix faind Loup d’ Angiers,dç ne faire nul mal à fa petfonne,nec6fcn-tir qu’autre le feift: amp;nbsp;alleguoit qu’auffi bie luy pourroit il faire ledid fermet comme il auoit fait autresfois au feigneur de Lcfcut;amp; à cela luy refpôdit le Roy,que iamais ne feroit ce ferment à homme: mais tout autre ferment que ledidConeflable luy vouldroit demâder qu’il effoit conter de le faire.Vous pouviez bien entendre qu’en gj âd trauail d’efprit effoit le Roy, ôc aufll ledidb Conncffableicarilnepalfoit vn feul iour,pourvne efpace de tëps, qu’il n’ab laff quelcun de l’vn à l’autre, fur le faiéf de ce ferment. Et qui bien y pêferoif, c’eff miferablc vie que lanoflre,de tant prédre de peine amp;nbsp;de trauail pour breger ft vie,en difant amp;nbsp;efcriuat tât de chofcs,prefque oppofites à leurs pe-fées. Et fi ces deux,dont ic parle,elfoiec en grand trauail, le Roy d’Angleterre amp;nbsp;le Duc de Bourgongne n’en auoient pas moins de leur part.

Ce fut enviiro tout en vn teps ou peu fc falut que fut le paffage du Roy d’An-’ gletcrrcaClalais , amp;nbsp;le departement du Duc de Bourgongne de deuantNuz, lequel à grandes iournées feu retira droit à Calais,deuers le Roy d’Angleterre,à bien petite compagnie: amp;nbsp;enuoya fon armée ainfi dépccécfcomme auez OLiylpour piller le pais de Bairois de Lorraine, amp;nbsp;pour les ftireviure amp;nbsp;fe rafrelchir. Et le feit à caufe de ce que ledicf Duc de Lorraine luy comença la guerre,amp; l’auoit deffié luy effant deuant Nuz.-quieffoit bien vne grand’faul-teâluy,auccles autres que ja auoit fùftesaucc les Anglois :lcfquels fattê-doientà le trouueràlcur defeéte, auecpourlc moii^dcux mille cinq cens Hommes-d’armes bien en poinft, amp;nbsp;autre grâd nôbre de Gens de cheual, amp;nbsp;de pied (car ainfi leur audit promis le Duc deBourgôgne,pour les ftirevenir) ôcqu’il auroit comencé la guerreen France, trois moys auatleur defcente,a-fin qu’ils trouLiairentlcfllt;oy plus las amp;nbsp;plus foulé:mais Dieu pourüeutàtout commeauezouy. Le^oy d’Angleterre partit de Calais,amp;lediôt Ducen fi compaignic :amp; pafferent par Boulogne, amp;nbsp;tirerent a Peronne,où ledift Duc recueillit les Anglois anezmahear il faifoit garder les portes,amp;n’y entroient finon en petit nombre:amp; logèrent aux champs,amp; le pouuoient bien faire; car ils eftoient bien pourueus de ce qu’il leur faloic pour ce meffier.

Apres qu’ils furent venus à Peronne , iediólConncffablc enuoya deuers Jediôf

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DE PHILIPPE DE COM MI N ES» lis lediéh Duc de Bourgongne vn de fes gês appelle Louis de Creuillc,pour fex-eufer enuers le Duc de Bourgogne dequoy il ne luy auoit baillé fainól Quentin,difant que fi ainfi l’eu ft fait, il ne luy euft peu plus de rien feruir dedans le royaume de France;car de tous poinéts il euft perdu fon credit,amp; la communication des gens:mais qu a celle heure, veu qu’il voyoit le Roy d’Angleterre,cy apres feroit tout ce que lediél Duc de Bourgongne vouldroit. Et pour en eftre plus certain,baillaaudiâ: Duc vne lettre de crcace, addreflant au Roy d’Angletcrre:amp; mettoit lediót Conneftable la creâce fur lediél Duc de Bour-gongne.Oultre amp;nbsp;d’auantage,enuoya vnfeelléaudiélDuc,par lequel il luy promettoit de le feruir amp;; fecourir, amp;nbsp;tous fes amys alliez,tant le Roy d’An gletcrre,qu’autrcs, enuers tous amp;nbsp;contre tous ceux qui pourroyentviure amp;nbsp;niourir lans nul en excepter. Lediél Duc de Bourgongne bailla aü Roy d’An nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;*

gleterre fiilettrc.-amp; dift fa creance,amp; la feit vn peu plus grafle qu’elle n’eftoit: rat il affeuroit le Roy d’Angleterre que lediôt Conneftable lemettroit dedas ûinét Quentin,amp; dedans toutes fes autres places.

Le Roy lecreutafteztoft: car ilauoitefpoufe laniepee dudiél Connefta-fi luy fèmbloit en fi grand crainte du Roy de Frâce qu’il n’oferoit faillira ce qu’il promettoit audiél Duc de Bourgongne, amp;nbsp;a luy. Scmblablemêt lecroyoitlediél Duc de Bourgongnc.Mais les penfees dudiól Conneftable, ne la peur qu’il auoit duRoy, ne le conduifoient pas encores iufques là:mais luy fèmbloit encores qu’il vferoit de diftimulations, comme il auoit accou-ftuméjpour les contenter:amp;: qu’il leur meîtroit fi cuidentes raifons en auant, lt;}u’ils auroient encores patience, fans le contraindre à fe declarer» Le Roy E- , . douard ne fes gens,n’auoient fort pratiqué les faiéls de ce royaume,amp;: alloiét plusgroflementcnbefongnerparquoy ne peurent fi toft entendre les difti-inulations dont on vfe deçà 8: ailleurs.-car naturellement les Anglois, qui ne font iamaispartis d’Angletefre,font fort cholériques,comme auftifont toutes les nations du pais froid.* La noftre (comme vous voyez) eftfituée entre * n aflt les vns amp;nbsp;les autres.'Ôc cftenuironnée de Ktalie,amp; de l’Efpaigne, Catheloi- m«, gne du cofté du Leuant;amp; Angleterre, amp;nbsp;ces parties de Flandres amp;nbsp;de Hol-landc,vers le ?onant:amp; encores nous vient ioindre Allcmaigne par tout vers 3»“ laChampaignc.Ainfi nous tenons de region chaulde, amp;nbsp;aufli de la froide. PimatfartoU’ Parquoy nous auons gens de deux complexions: mais en mon aduiseft,qu’en tout le monde n’y a region mieux fituée que celle de France. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;cam-mg»«»

Le Roy d’Angletcrre,qui auoit eu grand’ioye de ces nouuelles de mon- ‘ feigneur le Conneftable(combien que défia parauant en pouuoit bien auoir • eu quelque fentiment,mais non pas fi ample)fe partit de Peronne, amp;nbsp;le Duc deBourgongne en fà compagnie ( qui n’auoit nulles ^ens ; car tous auoient tirez en Barrois amp;nbsp;Lorraine, comme ie vous ay dit,^ fapprocherent de fainél Quentin : amp;nbsp;allèrent courrir vn grand tas d’Angiois deuant, lefquels, comme i’oLiy dire peu deiours apres, fattendoient q,^’on fonnaft les cloches a leur veniie, amp;nbsp;qu’on portail la croix amp;nbsp;l’eaüe benifte au deuant. Comme ils fapprochcrent pres de la ville, l’artillerie commença à tirer : amp;nbsp;faillit des ef-carmouchesapied6càcheual,amp;y eut deux ou trois Anglois tuez, amp;nbsp;quelques vns prins. Ils eurent vntres-mauLiais lourde pluyc; amp;nbsp;en cell eftat fen

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12-4 nil. LIVRE U t 5 McMUiivrb retournèrent en leur oft,bien fort mal contcns,miirmurans contre le Co nne-ftable,amp; l’appelloient traiftre.Le lendemain au matin le Duc de Bourgogne voulut prendre congé du Roy d’Angleterre ( qui eftoitchofe bien eftrange Veu qu’il les auoit fait ainfi pafler) amp;nbsp;vouloir tirer vers fon armée en Barrois, difant qu’il feroit beaucoup de chofes en leur faucur. Les Anglois, qui font fufpiçionneux,amp; qui cftoient tous neufs par deçà amp;nbsp;cfbahis, ne fc pouuoicnt contenter de fon allée,ne croire qu’il euft nulles gens aux champs: amp;nbsp;fi ne fça uoit le Duc de Bourgongne adouber auec eux le fait du Çonneftable, non-obftant qu’il euft dit que tout ce qu’il en auoit fait eftoit pour toutes bonnes fins.’amp; fi les efbahiflbit l’hyucr qui fapprochoit, amp;nbsp;lembloit biê a les ouir parler, que leur cœur draft plus à la paix qu’à la guerre.

(gomment le7\oyl'eit veßir vn fimple feruiteur d'vne cotte d'armes dlefmatli l en^ uoyaparler au 7\œ)i d'Angleterre en fon ofi^où il euß tres-bone refpoce, QH A P. VU.

V R CCS propres parolles, amp;nbsp;corne lediél Duc vouloir partir, fut prins des Anglois vn varier d’vnGentil-hôme delà maifon quot;S du Roy,qui eftoit des vingt-Efeus, appcllé laques de Graflc:

amp; fut incórinenrlediót valet amené deuant le Roy d’Angleterre amp;nbsp;le Duc de Bourgongne,qui eftoient enfemble:amp;pui5 fut mis en vnc tente. Apres qu’ils l’eurent intcrrogué,lediôt Duc de Bourgongne print congé du Roy d’Angleterre, amp;nbsp;fë retira en Bra-h3.nr,pour aller en *Maifons, où il auoit partie de fes gens. Le Roy d’Angleterre commanda qu’on donnaft congé à ce varier, veu que c’eftoit leur premier prifonnier;amp; au départir monfeigneur deHauartamp;moleigneurdeSta ley luy donnèrent vn Noble,amp; luy direntrrecommandez nous à labonegra-cedu Roy voftremaiftre, fivouspouucz parler à luy. Lediél varier vint en grand’ diligéee deuers le Roy,qui eftoit à Côpiegnc,amp; vint pour dire ces paroles.Le^'oy entra en grand’fufpiçion de luy,doubtant que ce ne fuft vne eF-pie,àcaufe que Gilbert de Grafle,freredu maiftredudift varier, eftoit pour lors en Bretaigne, fort bien traiclé du Duc.Lediôl varier fut enfermé,amp; cftroi tement gardé cefte nuiélitoutesfois beaucoup de gens parieret à luy, par comandement du Roy; amp;fembloit à leur rapport qu’il parlaft bien afteure-ment,amp;queleRoy ledeuoit ouyr. Le lendemain bien matin le Royparlaa luy. Apres qu’il l’eut ouy , le feit defferrer, mais encores demeura garde : ôc alla le Roy pour fe mettre à table,ayant plufieurs imaginaties, pourfçauoir fil enuoyroit vers les Anglois ou non : amp;nbsp;auant que le feoir arable, m’en dift quelques parolles. Car comme vous lçauez,monfeigneur de Vicnne, noftre Roy parloir fort priuement, amp;nbsp;fouuent à ceux qui eftoient plus prochains de kiy,commci’eft(ÿ^ lors,amp; d’autres depuis:amp;: aymoit à parieren l’oreille. Il luy vint en mémoire les parolles que le Hérault d’Angleterreluy auoit di-ôles: qui fut qu’il ne fÿllift point à enuoycr quérir vn (auf-conduit pour cn-uoyer deuers le Roy d’Angleterrc,dés qu’il feroit pafte la mer, amp;nbsp;qu’on fad-dreftaftaux deftufdiéls feigneurs de Hauart amp;nbsp;de Stanley. Incontinent qu’il futafiis àtable,amp; vn peu imaginé,comme vous Içauez qu’il fiifoitCqui eftoU bieneftrangeaceuxquinelecongoiftbient; car fans le congoiftre l’euftênc iuge

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. ïxj iuge mal Gge,mais les œuures tefmoignent bien le co traire )il me dift en Fo-( rcillequeiemeleLiaflejamp;quei’allalTemangerenmachâbre, amp;nbsp;quei’enuoy-I afîe quérir vn varier, qui elloit à mofeigneur de* Halles,filz de Merichon de laRochelie,amp;queieparlaflealuy fçauoiri’iloleroiteiitreprêdre d’aller en 1 oft du Roy d’Angleterre en habit de Hérault. le fey incontinét cc que m’a-üoit cômandé,amp;: fu tres-efbahy quad ie vey ledióHcruiteurzcar il ne me fem-Woit,ny de taille ny de faço propice à vne telle œuure.-toutesfois auoit bo fens ( commei’aycongnu depuis) amp;nbsp;la parolle douce amp;nbsp;amiable. lamais le Roy n’auoic parléà luy qu’vne feule fois dédit feruiteur fut fort efbahy quad ilm’ouitparler:amp; fegetta à deux genoux deuâtmoy cômeceluy qui cuidoit dcfiacltremort.Iel’afleuroye le mieux que ie pouuoye:amp;luy promis vnc cleólió en Fille de Re5amp; de Fargent;amp; pour plus FalTeurer luy dy que cecy ve- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;*

noit des Anglois:amp; puis le fey mager aucemoy,où n’ellionsquenous deux amp;vn varlet:amp;: petit à petit le mettoye en ce quil auoit affaire.Ien’y eugue-rcseltéqueleRoy m’enuoyaquerir.-amp; luy comptay de noftre home, amp;nbsp;luy ennommay d’autres plus propres àmon entendement: mais il n’en voulut point d’autre, vint luy melme parler à luy : amp;nbsp;Fad'eura plus en vnc parolle que ien’auoye fait en cent. Aueclediól Seigneur n’entra en ladiôle chambre que monfeigneur de Villiers, lors Grand Efcuyer, amp;nbsp;depuis Baillif de Caen.Et quand il fcmbla au Roy que noftre homme fut en bo propos, il envoya, par le Grand Efcuyer,quérir vne baniere de Trompette,pour luy faire Vnc cotte d’armes; caiTedid Seigneur n’elFoit point conuoiteux,ny accompagné de Hérault ne de Trompette, comme lont pliiheurs Princes. Et ainh lediôl Grand Efcuyer,amp; vn de mes gens,feiret celte cotte d’armes,le mieux qu’ils peurent; amp;nbsp;alla Icdiôf Grand Efcuycrquerir vn efmail d’vn petit Hc-rault,qui elloit à monfeigneur l’Admirahappellé Plein-chemin,qui fut attaché à nollre home: amp;nbsp;luy apporta Ion fecrettemet fes bouleaux amp;nbsp;^n habillement; amp;nbsp;luy fut amené foncheual, de mis dellus, fans que perfonne en fceull rien:amp; luy mit on vne belle bougette à Farlon de fa felle , pour mettre fa cotte d’armes; amp;nbsp;bieninflruióldecc qu’il auoitàdire,fen alla tout droit a 1’011 des Anglois. Apres que nollre homme fut arriué à FOR des Anglois,a-uec fa cotte d’armes furledos,tantoRfutarreRé, amp;nbsp;mene dcuantla tenredu Roy d’Angleterre. Il luy fut demandé qu’il y venoit faire. Il dift qu’il venoit. de par le Roy, pour parler au Roy d’Angleterre, amp;nbsp;qu’il auoit charge de fa-drefler à mefleigneurs de Hauard amp;nbsp;de Stanley. On le mena en vne tête pour difner, amp;nbsp;luy feit on trelbonne chere. Au leuer delà table du Roy d’Angleterre,qui difnoit â l’heure que le Hérault arriua, on mena lediól Hérault de -tiers luy :amp; l’ouit.Sa creace eftoit fondée fur le defir q^e le Roy auoit des lôg temps d’auoir bonne amitié auec luy, amp;nbsp;que les deuxr^iyaumcs peufientvi-urc en paix;amp; que iamais depuis qu’il auoit eRé Roy de France,il n’auoit fait guerre ny entreprinfe contre le Roy ne le royaume d’i^ngleterrc, fexeufant de ce qu’autresfois auoit recueilly monfeigneur de Vvaruic; difoit que cen’auoiteRéfeulementquecontreleDucde Bourgongne ,amp; non point contre luy . AuRi luy faifoitrcmonRrerquelediélDuc deBourgongnene iauoitpoint appelle,finon pour en fiirevn meilleur appointement auec le

L iij

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116 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;UIL LIVRE DES MEMOIRES

Roy, fur l’occafion de fi venüe : ôc fi autres en auoit, qui y tir fltnt la inain, 4WC ce n’eftoit finon pour en amender leurs* offences, amp;nbsp;tafeher à leurs fins particuliers; amp;nbsp;dufaióldu Roy d’Angleterre ne leur chaloit au demeurant, comment il en allatl; mais qu’ils en feiffent leurs belongnes bonnes. Aufli luy faifoit remóftrer le temps,amp; que ja fapprochoit rhyuer;amp; qu’il fçaiioit bien qu’il auoit fait grand’dcïpence,amp;. quil y auoit plufieurs gens en Angle-♦row«/««- terfç qui defiroient la guerre* par deçà, tant nobles quemarchâds;amp;: quand fu( tjut taye nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;D nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;t nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;l

'uewé'j tntamfi ce viendroit que le Royd’Angleterre fe vouldroit mettre en fon deuoir d en-tendre au traidé, qucledidRoyfy meteroit tant de fon coflé, que luy fon royaume dcuroicnteftrecontens:amp;afin que mieux fut informe de ces chofes,f’il vouloir donner vn fauf conduid pour le nobre de cent cheuaulx, * que le Roy enuoy eroit deuers luy Ambafladeurs,bien informez de fon vou-loir:oufileRoy d’Angleterre aymoit mieux que ce fuft en quelque village à my-chemin des deux armces,amp; que la gens fetrouuaffentdes deux collez, que le Roy en feroic tref content,amp; enuoyroit fauf-conduid de fon colle.

Le Roy d’Angleterre,ôc vue partie de fes Princes, trouuerent ces ouuertu-rcs trefbonnes ; amp;nbsp;fut baillé vn fauf-conduid à nollre homme,tel qu’il le de-mandoit : amp;nbsp;luy fut donné quatre Nobles, amp;nbsp;vint aucc luy vn Hérault,pour venir quérir vn fauf-conduid du Roy, pareil à celuy qu’il auoit donné: amp;nbsp;le lendemain, en vn village,auprès d’Amiens, fe trouuerent les Ambaffadeurs enfcmble. De là part du Roy y efloit le Ballard de Bourbo, Admirai,mofei-gneur de faind-Pierre, Ad’Eriefique d’Eureuxappellé Heberge. Le Roy d Angleterre y enuoya monfeigneur de Hauart, vn nommé Chalagier,amp; vn Do-deur appelle Morton, qui fut depuis Chancelier d’Angleterre,ScArcheuel-quedeCantorbic.

le croy qu’à plufieurs pourroit fcmbler que le Roy f’humilioit trop,mais les fages pourront bien iuger par mes parollcs precedentes que ce royaume efloit ed^rand danger, fi Dieu n’y cull mis la main;lcquel difpofi les fens de noftreRoyàcflirc fi Gge party,amp; troubla bien celuy du Duc de Bourgogne; qui feit tant d’erreursfeomme auez vcu)en celle matière,apres auoit tant de-firé ce qu’il perdit parla faulte. Nous auions lors beaucoup de chofes fecret-tes parmy nous:dôt fulîent venus de grands maulx en ce royaumc,amp; promptement, fi cell appointement ne fe fufl trouué, amp;nbsp;bien toll,tant du collédc Bretaigne que d’ailleurs. Et croy véritablement aux chofes que i’ay vcuê's en mon temps,que Dieu auoit ce royaume en cfpecialerecommandation.

Commet trefuefut traiClèe entre le 7(oy de France le Koy d’Angleterre,nonob-fant lesem^efchemesdii fonnefable^C^ du Duc de quot;Bour^gne. C H A T. FUI.

vous auez ouy,nos Ambaffadeursfe trouucrét enfem-ble dés le lendemain de la venue de noflre Hérault ; car nous eflios ^res les vns des autres corne de quatre lieues ou moins. Noflre Hérault eut bonne chere, amp;nbsp;fon office en l’Ifle de Ré (dont efloit natif)ô«: de l’argent.Plufieursouuerturcs furet fai

d:cs entre nos Ambaffadeurs.Les Anglois demandèrent corne ils ont accou-ftumé,la couronne, ou pour le moins Normâdie amp;nbsp;Guyenne. Bien affailly, bien

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DE PHILIPPE DECOMMINES. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;lif

Bien Jeffendu. Dés celle premiere iournée furent les choies bien approchées :car les deux parties en auoient grand’enuie. Les nollres reuindrenr, ôc les autres fen retournèrent en leur Oil. Le Roy ouit leurs demandes Si deinieres conclulions :-c’eIloitIeptante amp;nbsp;deux mille Efeus tous contens, auât que partirde mariage du Roy futur auec la fille aifnée du Roy Edouard (laquelle fut depuis Royne d’Angleterre) amp;nbsp;la Duché de Guyenne, pour la nourrir, ou cinquante mille EIcus tous les ans, rendus dedans le Cnafteau de Londres iufques au bout de neuf ans: amp;nbsp;au bout du terme, debuoit le Roy ( à Içauoir Charles huidiefme )amp; la femme, iouir pacifiqûem^it du rc-iienu de Guyenne : Sgt;c aufiinollre Roy debuoit demourer quitte de ce paye-nient,enuers lcRoy d’Angleterrc.Plufieurs autres petits articles y au oit tou* chant le faid des marchands,dontie ne fay point motion : amp;nbsp;debuoit durer * celle paix neufans entre les deux royaumes : amp;nbsp;y efloient comprins tous les alliez d’vn collé amp;nbsp;d’autre : amp;nbsp;nommément, de la part du Roy d’Angleterre les Ducs deBourgongne amp;nbsp;dcBretaignc, fi comprins y vouloient ellre.Of-froitledid Roy d’Angleterre ( qui clloit chofe bien eflrangé)de nommer aucuns perfonnages, qu’il diloit dire trahillresau Roy,amp;àfa couronne, amp;delemonflrerparel'crit. Le Roy eutmerucilleufement grand’ioye de ce que fes gens luy rapportèrent.

Il tint confeil fur celle matière,amp; y dloye prefént. Aucuns furent d’aduis que ce n’elloitqu’vne tromperie amp;nbsp;diffimulation de la part des Anglois. Au Roy fembloit le contraire;amp; allégua la difpofition du temps amp;nbsp;la faifon, amp;nbsp;qu’ils n’auoient vnc feule place, qui fuit â eux,amp; aulïi les mauuais tours, que le Duc de Bourgongne leur auoit faids : lequel elloit ja party d’auec eux,amp;: fetenoit comme feur que le Conndlable ne bailleroit nulles places ; car à chafeune heure le Roy enuoyoitdeuers luy pour l’entretenir,amp; pour l’adoucir, amp;nbsp;pour le garder de malfaire . AulTi le Roy auoit bien congnoilTance dclaperfonne du Roy d’Angleterre,lequel aimoitfortfesaifesKfesplai-firs. A quoy fembloit qu’il parloir plus fagement que perfonncdela com-paignie, qu’il entendoit mieux ces matières, dequoy on parloir : amp;nbsp;con-clud qu’à très-grand’ diligence on chcrchaft cell argent! amp;nbsp;feit aduifer lama-nicredeletrouuer)amp;qu’ilfaloitquechafcun prellall quelque chofe pour aider foubdainement à le fournir. È concludle Roy qu’il n’eftoir chofe au monde qu’il ne feill pour ietterleRoy d’Angleterre hors de ce royaume, excepté qu’il ne confentiroit pour'rien qu’ils eulTent terre: amp;nbsp;auant quille fouffrift,mettroit routes choies en peril amp;nbsp;hazard.

Monleigncur le Conndlable commençaà foy apperceuoir de ces mar-chez ,amp; auoir paour d’auoir offenfé de tous * poinds: amp;nbsp;toufiours craignoit celle marchandilé qui auoit cuidé dire conclue conîi^luy à Bouuines :Sgt;c à celte caufe, il enuoyoit fouuent deuers le Roy ; ôc fur i heure dont ie parle vint deuersledid SeigneurvnGentil-home, appell^Louis deCrcuille,Ier-tuteur du Conndlable, ôc vn fien. Secretaire, appelle maillre*lehan Richer, idian. qui tous deux vefeurêt long têps depuis;amp; dirent leur creance à mofeigneur du Bouchage amp;nbsp;à moy, premier qu’au Roy : carie plaifir dudid Seigneur clloit tel. Ce qu’ils apportoyent pleut fort au Roy, quand il en fut aduerty

L iii j

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118 nil. LIVRE DES MEMOIRES'^

' pource qu’il auoit intention de fen feruir J comme vous orrez. Le Seigneur de Contay^ feruiteur du Duc de Bourgongne, qui auoit efté prins n’aguercs deuant Arras(comme auez ouyjalloit amp;nbsp;venoit fur fa foy deuers ledid Duc, ôeluy auoit le Roy promis donner fa finance amp;nbsp;rançon, amp;nbsp;vne tref grande fommed’argent, filpouuoittraiderlapaix. D’auenturcil eftoit arriué de-' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;uersleRoy,ceiourqu’arriuerentlcsdeuxdcflus-nommezfcruiteLU'sdudid:

Conneftable. Le Roy feit mettre ledid Seigneur de Contay dedans vn grâd amp;nbsp;vieil ofteuent, qui eftoit dedans fa'chambre, amp;moy auecluy,afin qu’il entendift peuft faire rapporta fonmaifire des parollcs, dont vfoit lediôt Conneftable, ôc fes gens,dudilt;ft Duc.Et le Roy le vint feoir fur vn efeabeau rafîbus dudiól ofteuent,afin que nous peuftions mieux entendre les parolles • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;que difoit Louis de Creuillc amp;nbsp;fon compaignon : qui commencèrent lors,

difans que leur maiftre les auoit enuoyez deuers le Duc de Bourgongne, amp;: qu’illuy auoit fait plufieursremonftranccs, pour le demouuoirde l’amitic des Anglois;amp; qu’ils l’auoient trouué en chclere, contre le Roy d’Angleterre, qu’a peu qu’ils ne l’auoientgaigncjnonpas feulement aies laiffetjinais à aider aies deftroufler en eux retournant. Eren difantces parollcs,pour

* cuider complaire au Roy, lcdiôl Louis de Crcuille commença a contrefaire gne. kxemp. le Duc de Bourgogne, amp;nbsp;à frapper du pied contre terre,amp; à iurcr S,George, amp;nbsp;qu’il appelloit le Roy d’Angleterre * Blanc-borgne, filz d’vn Archier qui portoitfon nom:amp; toutes les moqueries qu’en ce monde cftoit poflible de dire d’homme. Le Roy rioit fort,amp;luy difoit qu’il parlaft hault,amp; qu’il co-mençoit à deuenir vn peu fourd,amp; qu’il le dift encores vne fois. L’autre ne fc faignoit pas,amp; recommençoit encores de trefbon cœur.

Monfeigneur de Contay, qui cftoit auec moy, en ceft ofteuent, eftoit le ' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;plus efbahy du monde ; amp;nbsp;n’euft iamais creu, pour chofe qu’on luy euft fceii

dire, les parollcs qu’il oyoit. La conclufîon des gens dudidl Conneftable cftoit, qu’ils confèilloient au Roy,que pour euiter tous ces grands perils, *guider qu’il voyoitappareiller contreluy,il print vne trefuc; amp;nbsp;queledid Conne--yM. ftable fc faifoit fort de le*gardcr:amp; que pour contenter ces Anglois, on leur baillaft feulement vne petitevillc ou deux pour les loger l’hyuer, amp;nbsp;qu’elles ne fçauroient eftre fi mefehates qu’ils ne fen contentalfent: fembloit fans riennommer, qu’il voulfift dire Eu nbsp;nbsp;Saintft-Vallery. Et luy fembloit que

parcemoyenles Anglois fc contenteroient de luy,amp; du refus qu’il leur auoit fait de cesplaces. Le Roy à qui il fuflifoit d’auoir ioué fon perfonnage, amp;: faire entendre au Seigneur de Contay les parolles dont vfoit amp;: faifoit vfer ce Conneftable par fes gens,ne leur feit aucune mal-gracieufe rcfpon-• fe,mais feulement leur dift : l’enuoyray deuers mo frère, amp;nbsp;luy feray fçauoir de mes nouuellcs:amp;^uis leur donna congé.

L’vn feit le fèrmét en la main du Roy que fil fçauoit rien, qui touchaft le Roy de le reucler.il grlt;ua beaucoup auRoy de diftimuler de cefte parolleoù ils cofèilloiét de bailler terre aux Anglois: mais doubtât que lediét Conefta-blc nefeift pis,n’y voulut point refpôdrc,en faço qu’ils cognuftent qu il l’euft mal prins: mais enuoya deuers luy. Le chemin cftoit court, amp;nbsp;nemettoitvn home guercs à aller amp;nbsp;retourner. Le Seigneur de Contay amp;nbsp;moy partifmes de ceft

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DE PHILIPPE DE C O M I N E S.

lt;îe ceft ofteuent, quand les autres Pen furent allez : amp;nbsp;rioic le RoyjCnfii-Pïnt bien bonne chere; mais lediól de Contay efeoit comme homme fans patience d’auoirouy telles fortes de gens ainfi fe mocquerdc fon maiflre, amp;VCU encores les traiclcz qu’il menoit auec luy : amp;kiy tardoit qu’il ncfulL jaàcbeual pour l’aller dire â fondidl maiftre le Duc de Bourgongne. Sur l’heure fut depefehé ledicl feigneur de Contay , amp;nbsp;fon inflruôHon eicrite de fa main propre,amp; emporta vnelettre de creance de la main du Roy , ôc-Pen partir.

Noftre matière d’Angleterre eftoic ja accordée, comme vous auezouy.Ôc femenoient tous ces marchez en vn temps,amp; en vncoup. Ceux qui de par le Roy Pcftoienttrouuez auec les Anglois,auoient fait leur rapport, comme allez entendu, amp;nbsp;ceux du Roy d’Angleterre eftoient aulfi retournez de tiers* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;lt;

luy.Des deux coftez fut accorde amp;nbsp;délibéré par ceux qui allèrent amp;nbsp;vindrêt, que les deux Rois fe verroient ; amp;nbsp;qu’apres qu’ils feferoient veus, amp;nbsp;iuré les les traitiez pourparlez,que le Roy d’Angleterre Pen retourneroit en fon pais apresauoirreceu les feptantedeux mille Efeus, amp;nbsp;qu’il laifferoit en oftage nionfeigneur de Hauart,amp; fon grand Efcuyer meflire Ichan Chemé iufques * àcc qu’il fuftpalTé la mer.* Par apres furent promis feize mille efeus de pcn-£*?^ XX fionauxfertiiteurspriuez du Roy d’Angleterre.AmonfeigneurdeHalHn-guesdeuxmilleefeus, amp;nbsp;à monfeigneur de Hauart, au Grand Eleuyer, à Chalangier , à monfeigneur de Mont-gomery,amp;à d’autres, le demeurant: amp;nbsp;largement argent content amp;nbsp;vaiflellc fut donee aux feruiteurs dudid Roy Edouard.

Le Duc de Bourgongne, fentantees nouuelles, vint dedeuers Luxembourg,où il cfloit à très-grand’ hafte, deuers le Roy d’Angleterre, amp;nbsp;n’auoit quefeizccheuaux, quand il arriua deuers luy. Le Roy d’Angleterre fut fort elbahy de cefte vende G foubdaine;amp;: luy demanda quiramcnoit,amp; veit bien qu’il eftoit courroucé'Lediól Duc rcfpondit qu’il venoit parler à Iffy.Le Roy luy demanda fil vouloir parler à luy àpart,ouen public. Lors luy demanda le Duc fil auoit la paixzle Roy luy refpondit qu’il auoit fait vne trefuc pour neufans;en laquelle il eftoit coprins,amp; le Duc de Bretaigneiôc qu’il luy prioit qu’il fy accordaft.Lediól Duc fecourrouça,amp; parlaenAnglois(car il fçauoit le langage ) amp;nbsp;allégua pluGeurs beaux fiiôts des Roys d’Angleterre, qui e-ftoient paflez en France,amp; des peines qu’ils y auoient prinfes, pour y acquérir honneur; amp;nbsp;blafma fort cefte trefue, difant qu’il n’auoit point cherché à fairepaflerles Anglois pour befoing qu’il eneuft, mais pour recouurcr ce qui leur appartenoit; amp;nbsp;aftn qu’ils congnulfent qu’il n’auoit nul befoing de leur venue, qu’il ne prendroit trefue auec noftre Roy queiufqusàceque le Roy d’Angleterre euft efté trois moys delà la mer: amp;nbsp;^es ces parolles, part amp;nbsp;Pen va de là où il venoit. Le Roy d’Angleterre printnes-mal ces parolles, amp;nbsp;ceux de fonconfeil. Autres qui n’eftoient point contens de cefte paix louèrent ce que le Duc auoit dir.

Comment le Roy feitfeßoyer les Anglois dedans Amiens : amp;nbsp;comment ^laceßtt aßigne'e pour la vette des deuxT^j/s. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;QHAP. IX. ...

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E Roy d’Angleterre, pour conclurre ccftc paix, vint loger ' demie lieue d’Amiês.-amp; eftoitleRoy à la porte, qui de loin les pouuoit veoirarriuer.PoLir ne mentir point, il fembloit

qu’ils fcuflcnt neufs a cc meftier de tenir les champs : amp;

cheuauchoientenaflez mauuais ordre. Le Roy cnuoya au

Roy d’Angleterre trois cens chariots de vin, des meilleurs qu’il fut podible de finer;amp; fembloit ce charroy quafi vn oft aufli grand que celuy du Roy d’Angleterre.Et pource qu’il eftoit trefue, vcnoient largement Anglois en la ville, amp;nbsp;fe monftroient peu fàges, amp;nbsp;ayans peu de reuerence â leur Roy .Ils venoient tous armez, amp;nbsp;en grand’ compagnie ; amp;nbsp;quand noftre Roy y euft vouluallcramauuaifefoy, iamais ft grande compagnie ne fuft ft aifée à defeonfire-.mais fa penfée n’eftoit autre qu’à les bien feftoycr,amp; Ce met-tre en bonne paix auec eux pour fon temps.Il auoit ordonné, à l’entrée de la porte de la ville,deux grandes tables:à chafeun cofté vne, chargées de toutes bonnes viandes,qui font enuie de boire de toutes fortes; amp;nbsp;les vins les meilleurs dont fe peut aduifer, amp;nbsp;des gens pourlcs feruir. Deaüe n’eftoit noLiLielles. Achafeune defes tables auoit fait feoircinqou ftx hommes de bonne maifon fort gros amp;nbsp;gras, pour mieux plaire à ceux qui auoientenuic de boire.’amp; y eftoit le feigneur de Cran,le feigneur de Bricquebcr,îefeigneur de BrefmeSjle feigneur de Villiers, amp;: autres : amp;nbsp;dés que les Anglois fappro-choyent de la^orte , ils voyoyent cefte aftiette ; amp;nbsp;y ajLicit gens qui les * ievitilexe. prenoient àlabride amp;nbsp;les amenoient près de la table, amp;nbsp;eftoienttraidez qu’iî's'ku?quot; pour ce palTage felon raftiette,amp;en trefbonne forte, amp;; le prenoient bien en v°ejanceamp; nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Commcils cftoient en la ville, quelque part qu’ils deîcendilfent, ils ne

ks, amp;c. nbsp;nbsp;nayoient rien,*amp; eftoient fournis de ce qui leur eftoit neceftairc,où ils alloiét

rfȣamp;y auoit boire amp;nbsp;manger, amp;nbsp;demandoientcequil Icurpianoit, o: ne pay oient rien, tauernesbic duta cccy ttois OU quati'eiours.

fournie«. VoLis aucz ouy comme ccfte trefue delplailoit au Duc de Eourgongne; mais encores dcfplaifoit elleplus au Conneftable,quifcvoyoit malde tous coftez,amp;: auoir failly;amp; pource enuoya deiiers le Roy d’Angleterre fon con-feflcur,auec vne lettre de creancc;qui eftoit telle, que pour l’amour de Dieu, il n’adiouftaft foy aux parolles ny aux promeftes du Roy, mais que feulemét il voulftft prendre Eu amp;nbsp;ftiinét Vallery ; amp;fy loger pour partie de l’hyucr: carauant qu’il fuft deux moys, il feroit en façon qu’il feroit bien logé, làns luy bailler autre feu reté,mais tres-grande elperance. Et afin qu’il n’euft caufe de faire vnmefehantappointement, pour peu d’argent, luy offroitàprcftcr cinquante qiille efeus: amp;nbsp;luy faifoit beaucoup d’autres belles ouuertures, SiC ickoya- défia luy aù|oit fait bailler le Roy ces deux places, dót il parloir, à caufe que brufler cet ledid Conncftable j^y auoit confeillé les bailler aux Anglois:amp; le Roy d’An

■««;/. gleterre en eftoit aduertidequel feit refponle audiét Conncftable’que fia tref ue eftoit conclue, amp;nbsp;qp’il ne changeroit rien en cefte matière: amp;fil luy euft tenu ce qui luy auoit promis, qu’il n’euft point fait ceft appointeraent. Lors fut de tous poinéls lediôt Conncftable defefperé.

Or vous voyez comme ces Anglois 'Ce traiéloient en la ville d’AmiensJ

amp;quc

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;13t

amp; que c cïioit grand danger. Le Roy l’en courrouça à luy : ainfi chafeun Pen teut:. Le matin ertoit Iciour fcmblable celle année, qu’auoit efléles Inno cens : amp;nbsp;a teliour leRoy ne voLiloic ouir parler de nuilede ces matières ;amp; tenoic à grand mal-hciir quand on luy en parloir.- amp;nbsp;fe courrouçoit fort à cei. ceux qui l’aiioient accouftumé de hanter, amp;nbsp;congnoifl'oient fa condition: toutesfois cc matin dont ie parle, comme le Roy fe leuoit amp;nbsp;difoit fes heu-tes, quelcun me vint dire qu’il y anoit bien neuf mille Angloys en la ville. le medeliberay prendrel’aucnturedeluy dire,amp; r’entray enfon retraicl : ôc liiy dy:Sire,nonob{lant qu’il foit* le iour des Innocensjî efl il neceffiire que nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i diu

ie vous die ce que l’on ma dit, Sgt;c luy contay au long le nombre qui y elloir, toufioursen venoit, Sgt;c cous armez, amp;nbsp;que nul ne leur ofoit rcfuferlapor-

te de paour de les mefeontenter .^ediét Seigneur ne fut point obftinc, mais nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;*

toftlaiflafcs heures; amp;nbsp;me dift qu’il nefaloic point tenir la ceremonie des ïnnocens ce iour, amp;quc ie montaffe a chenal, amp;nbsp;quci’efîayaflea parler au Chefdes Angloys, pourveoirhlespourrions faire retirer,amp;: queie diffeà fes Capitaines, fi aucuns en rcncontroye, qu’ils vinrent parler â luy, amp;nbsp;qu’il viendroit incontinent àlaporte apres moy. Ainfi le fey, parlay à trois ou aquatredes Chefs des Anglois, quecongnoiffoyc, ôc leurdy ccquiferuoit àceftematière. Pourvu qu’ils renuoyoient , y en entroit vingt. Le Roy enuoya apres moy monfeigneurde Gié, a cefte heure Marcfchal de France, pour celle matière. Nous entrafmes en vne tauerne, oti ja atioient elle fiiôts cent amp;nbsp;onze efcots,amp;n’cfloitpas encores neuf heures du matin. La maifon cfloitpleine:lesvnschantoient,les autres dormoient, clloient yur.es. Quand ie congnu cela il me fembla bien qu’il n’y auoit point de peril, amp;nbsp;le lïianday au Roy: lequel vint incontinent à la porte, bien accompaigné;amp;:fe-crettementfeit armer deux ou trois cens Hommes-d’armes es maifons de leurs Capitaines, amp;nbsp;aucuns en mit fur le portail par où ils cncroient.^,e Roy feit apporter fbn difner en la maifon des Portiers, amp;nbsp;fcitdifnerplufîeurs gens de bien des Anglois aucc kiy. LeRoy d’Angleterre futaduerty de ce dcfordre,amp; en eut honte;amp; manda au Roy qu’il cômandafl qu’on ne laifTaft nulentrcr. LeRoy feit refponfe que cela ne feroit il iamais; mais fil plaifoic au Roy d’Angleterre, qu’il enuoyall de fes Archiers de la couronne,amp; qu’ils gardalfent la porte, amp;miffcnt dedans ceux qu’ils vouldroicnt; ôc ainli fut faict, amp;nbsp;beaucoup d’Anglois fen allèrent delà ville, par le commandement du Roy d’Angleterre.

Ilfutlorsdclibcrépour mcttrefinàtout,qu’iIfaloitaduifcrlcliGLi où les deuxRoysfe verroient, amp;nbsp;ordonner gens à vifiter la place. De la part du Roy y allafmes monfeigneur du Bouchage,amp; moy:amp;^ourle Roy d Angleterre, monfeigneur de Hauart, amp;nbsp;vn appelle Chanlangi^-, amp;nbsp;vn Hérault. Et apres auoir bien allé amp;nbsp;vifité la riuiere, nous arreflafmes que le plus beau licUjSc le plus feur,efloit Picquigny,àtrois lieues d’Aii^ens vn fort chafleau, quieflau Vidame d’Amiens, combien qu’il auoit eflébruflé par le Duc de Boiirgongnc. La ville efl baffe, amp;nbsp;y paffe la riuiere de Somme, laquelle n’efl pointgueable; amp;nbsp;en ce lieu n’efl point large. Par Là où venoit le Roy le pais çftoitbcau amp;nbsp;large. De l’autre coftépar où venoit le Roy d’Angleterre,

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Ijx IIIL'LIVRE DES MEMOIRES

Icpaïs eftoit trcfbcau, faufque quand il vcnoit à approcher dclariuicrcjly auoii vne chauflée de bien deux grands rraids d’arc de Ion^,qui auoit les ma-r rais d’vn collé amp;c d’autre;amp; qui ne fufl allé à la bonne foyjc’eftoit vn tref-dan-gereux chemin. Et fans point de doute (comme i’ay dit ailleurs ) les Anglois ne font pas fi fubtils en traiélez amp;nbsp;appointemens comme font les François; amp;nbsp;quelque chofe que l’on en die , ils vont allez groffement en befongne; mais il fault auoirvn peu de patience, amp;nbsp;ne débattre point choleriqucment

, aueceux.

Apres quelaconclufion denoflre lieu fut prinfe, il fut ordonné d’y faire »pwffant, vnpont,bien*pafrant amp;aflézlarge, amp;nbsp;fournifmesles Charpentiers amp;nbsp;les milieu de ce pont fur faiél vn treillis de boys, comme l’on fait aux cages de ces Lions : amp;nbsp;irefloient point lês troux entre les barreaux plus . grands qu’à y bouter vn bras à fon aife. Le de (fus efloit couuert d’aix feulement,pour la pluye,fi auât qu’ils fe pouuoiêt mettre dix ou douze perfonnes delToubs de chafeun collé: comprenoit le treillis iufqucs fur le bort du pont,à fin qu’on ne peu fl paffer de l’vn à l’autre. En la riuiere y auoit feulemét vnefentine, où il y auoit deux hommes, pour paffer ceux qui vouldroient aller d’vn coflé à l’autre.

le veux dire l’occafion qui meut le Roy que cefl entre-deux full faiél, de ’^‘^he façon que l’on ne peufl aller de l’vn coflé a l’autre ; amp;nbsp;pourroit parauen-^«■«é^.az/c ture feruir le temps aduenir âquelcun ,qui auroitàfairefemblablccas. Du temps du Roy Charlesfeptiefme, eflant en affez ieunc aage, le Royaume efloit fort perfecuté des Anglois ; amp;nbsp;efloit leRoy Henry cinquicfme,a u fie-ge deuant Rouen, amp;nbsp;le tenoit fort a deflroicl: amp;nbsp;la plufpart de ceux de dedas efloiens fubieôls, ou partifans, du Duc lehan de Bourgongne, qui pour lors regnoit.

Entre lediél Duc lehan de Bourgongne amp;nbsp;le Duc d’Orleans y auoit ja eu grand di berend, tout ce Royaume, ou la plufpart diuifé par ces deux parties; dont le faifl du Roy ne valoir pas mieux. Partialité ne commença ia-mais en pais, que la fin n’en fufl dommageufe, amp;nbsp;mal aifée à efleindre. Pour cefle queftion, dont ie parle, auoit jaeflé tué le Duc d'Orléans a Paris,vnan auoit. Ledid Duc lehanauoit grand’armee, amp;nbsp;alloit amp;nbsp;venoit en intention de leuer le fiege, qui efloit deuant Rouen; amp;nbsp;pour mieux ypouuoir parue-nir, ô«:f’afîeurcrdu Roy , auoit eflé traiélé que le Roy amp;luy feverroienta Montereau où fault Yonne : amp;nbsp;là fut faiél vn pont, amp;nbsp;vues barrières au milieu .-mais au milieu defdiôles barrières y auoit vn petit huiffet, qui fermoit des deux coflez ; parquoy on pouuoit aller de l’vn coflé à l’autre , mais que les deux parts le voulfiffent.Ainfifetrouua le Roy de l’vn coflé dupont, amp;: ledid Duc lehan de^urgongne de l’autre, accompaignez de grand nom-brede Gens-,d’armes, amp;fpecialemcnt le Duc lehan . Ils fe mirent à parlementer fur le pont: amp;^lendroit où ils parloient,n’y auoit aueclediélDLic que trois ou quatre perfonnes. Leur parlement encommencc, fut leDucfe-mons tellement ou par enuic, de foy humilier deuant le Roy, qu’il ouurit de fon coflé,amp; on luy ouurit de l’autre, amp;nbsp;paffa luy quatriefine. Incontinet fut tué, amp;nbsp;ceux qui efloient auec luy , dont efladuenu depuis affez de maux,

comme

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 133 comme chafe un fçait. Cecyn’clE pas de ma matière,parquoyie n’en dy plus âuanemais le Roy le me compta,ne plus ne moins que ic vous dy,en ordonnant celle vcuè : ôc diloit que fil n’y eufl point eu d’huys à celle veuë, dont Uy parlé,on n’eull point eu d’occalion de Icmondre ledidl Duc de paflér: ôc ce grand inconuenient ne full point aduenu, dont principalement furent caufè aucuns feruiteursdudiôl Duc d’Orléans, lequelauoit elle tué,comme le vous ay dit,amp; elloient en authorité aucc le Roy Charles leptiefme.

Comment les deux 'R^ys fentre-veiret^e!j)* iurerent la treßue^ar auant traiEléequot;. comment aucuns eflimerent quele Satn^- E^^erit defeend/tfur la tente duKo^ d’Angleterree^en ej^ece de pigeon blanc, CH AT. X.

Os barrières ainfi Eaiélcs comme vous auez ouy, vîndrent^^p^“'^ le lendemain les deux Roys:amp; fut l’an mille quai redens lep-tante cinq*le vingt amp;nbsp;neufiefmeiour d’Aoull.Le Roy auoit cnuironhuiélcens Hommes-d’armesauecluy ; amp;nbsp;arriuale premier. Du collé oùjefloit le Roy d’Angleterre ,elloit toute fon armée en bataille. Et combien que nous ne penfions point veoir le tour,fi voyons nous vn tref-grâd nombre de Gens-de cbeual.

amp; de pied enfemble. Ce que nous auionsde nollre collé ne paroifloit rien auprès d’eux. Aulfi la quarte partie de l’armée du Roy^ny elloitpas.il clloit diélqu’auecqueschafcun des Roys y auroit douze homes,qui elloiét ja ordonnez,pour eflreaux Barrières, des plus grands amp;nbsp;des plus prochains. De nollre colle allions quatre hommes du Roy d’Angleterre, pour veoir ce qui fefaifoit parmy nous : amp;nbsp;autant en auoient ils de-Icur collé, des nollres* Commeie vous ay dit, le Roy elloitarriué le premier,amp; elloit ja aux Barrieres; amp;nbsp;ellions douze près deluy, entre lefquels elloient le feu Duc lehan de Bourbon,amp; le Cardinal fon frère. Le plaihr du Roy auoit effcé que ie fulTe Vcllu pareil deluy, ce iour; Il auoit accoullumédelong temps, a en auoir quelcun qui l’habilloit pareil de luy fouuent. Le Roy d’Angleterre vint du longdelachauirée,donti’ay parlé, trelbienaccompaigné; amp;nbsp;lembloitbicn Roy. Auecques luy elloit le Duc de Clarence fon frere,le Duc de Northom-hellande, amp;nbsp;aucuns autres Seigneurs,fon Chambellan appellé monleigneur de Hallingues, fon Chancelier,amp; autres : amp;nbsp;n’y en auoit que trois ou quatre habillez de drap d’or,pareil du Roy. Lediôl Roy auoit vnc barrette de ve-loLix noir fur fa tclle;amp;y auoit vnegrâd’fleur de Lys depierrerie par delfus* C’efloit vn trclbcau prince, 8gt;c grand, mais il commençoit à fengrelTer, amp;: l’atioye veu autresfois plus beau;car ie n’ay point fouucnance d’auoit iamais veuvn plusbclhomme qu’il elloit, quand monfeigneur de Vvaruic le feit fuir d’Angleterre. Comme il approcha de la Barrier^ . a cinq pieds pree, il olla fa barrette, amp;nbsp;l’agenouilla, comme a demy pied deterre. Le Roy luy feitaulligrandereuerence; lequel elloit ja appuyé cmitrela barrière . Et à fentr’embralTer par entre les trous,feit le Roy d'Angleterre encores vne plus grande reuercnce. Le Roy commença la parolle, amp;nbsp;luy dill ; * Mon coufin, vous Ibyez le trefbien venu , Il n’y a homme au monde que ie defirafle tant à Veoir que vous ; amp;nbsp;louéfoit Dieu dequoy nousfommes cy alTéblez àfibône

M

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134 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;IUI. LIV RE DES MEMOIRES

intention. Le Roy d’Angleterre refpondit à ce propos, en alTez bon Fran-çoys . Lors ccnimençaà parler le Chancelier d’Angleterre, qui eftoit vn Prelat, appelle i'Eue{que*dc Liflc, amp;nbsp;commença par vne prophetic,dont les -Anglois ne font iamais defpourueusdaquelle difoit qu’en ce lieu de Picqui-poudore gny fc dcuoit faitc vne grande paix entre France amp;nbsp;Angleterre. Et apres fu-BiSï**quot;” rentdcfployécs les lettres, queleRoy auoit fait bailler audid: Roy d’Angleterre , touchant le traiâ:c qui efloit faid : amp;nbsp;demanda Icditl Chancelier au Roy l’illesauoit commandées telles, amp;nbsp;fil les auoit pas pour agréables. A quoy le Roy relpondit que ouy, amp;nbsp;aulTi celles qui 1 uy auoient efté baillées de lapart du Roy d’Angleterre. Et lors fut apporté amp;nbsp;ouuert le meflel, amp;nbsp;mirent les deux Roys la main deffus, amp;nbsp;les deux autres fur la lainÓte vraye * croix : amp;nbsp;iurcrent tous deux tenir ce qui auoit eftépromis entre eux. C’eft à

Pç^rjoir la trefue de neuf ans * accomplis, compiins les alliez d’vn collé amp;nbsp;d’autre,amp; d’accomplit Ic matiagc dc Icuis eiifaus , aînli qu’il efloit contenu audiéttraiélé . Apres le lcrmentfiiôh,nollreRoy qui auoit bien la parolle à commandement, commença à dire au Roy d’Angleterre, en fe riant, qu’il faloit qu’il vint a Paris, amp;nbsp;qu’il le felloy croit auec les Dames: amp;nbsp;qu’il luy bailleroitmonfei^neur le Cardinal de Bourbon, pourconfefl'eur, qui efloic cciuy qui l’ablouldroic trcl-volonriers dece péché, fi aucun yenauoitco-mis. Le Roy d’Angleterre le print à grand plaifir, amp;nbsp;parloicnt de bon vi-làige : car 11 Içauoit bien que Icdiél Cardinal elloit bon compaignon. Comme ce propos eut vn peu duré, ou femblablc, le Roy quifcmonftroit auoirauthoritéen celle compagnie, nous feit retirer amp;nbsp;ceux qui elloient auec luy :amp; nous dife qu’il vouloir parler au Roy d’Angleterre Icul . Ceux du Roy d’Angleterre le retirerent femblablcment, làns attendre qu’on leur dill. Comme les deux Roys eurent vn peu parlé, le Roy m’appella» amp;: demanda au Roy d’Angleterre fil me congnoifioit. Il luy relpondic que ouy, amp;nbsp;dift les lieux où il m’auoit veu: amp;nbsp;que d’autresfois m’elloye empefehé pour le feruir «à Calais , du temps que i’elloye auec le Duc de Bourgongne. LeRoyluy demanda, fi le Duc de Bourgongne ne vouloir point tenir la trefue (pour-ce que fi orgucilleulement en auoit rc-»offrft. fpondu ) ce qu’il luy plaifoit qu’il fcill. Le Roy d’Angleterre dit qu’il l’a EKiw/Ci.»«/. luy *offriroit encores, amp;nbsp;que fil ne la vouloir accepter , qu’il fen rappor-teroitàeux deux. Apres vint le Roy tomber fur le Duc de Bretaignc (qui elloit ce qui luy auoit lait ouurir celle parolle) amp;luy en feit fem-blabledemande. LeRoy d'Angleterreluy relpondit qu’il luy prioit qu’il nevoulfifl: point faire la guerre audidt Duc de Bretaignc, amp;nbsp;qu’en fa ne-cclfité il n auoit iamais trouué fi bon amy . Le Roy fen teut à tant; amp;nbsp;auec les plus amial^es amp;: gracieufes parolles qu’il peut en r’appellant la cornpaignie, print congé du Roy d’Angleterre: amp;nbsp;dill quelque bon mot àchafeun de fes gens^. Et ainli tous deux en vn coup, ou bien peu l’cn falut,fe retirerent de la barrière, amp;nbsp;montèrent à cheual. LeRoyfen alla à Amiens, amp;lcRoy d’Angleterre à fon OH; à qui on enuoyoit de la maifon du Roy tout ce qu’il luy faifoit befoing, iufqucs aux torches amp;nbsp;aux chandelles. A ce parlement ne fc trouua point le D uc de Cloccllre frère du

Roy

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. i3j Koy d’Angleterre amp;: aucuns autres,comme mal contens de cefte trefLie:rnais depuis ils fc reuindrent, amp;nbsp;vint depuis lediól Duc de Cloceftre vers le Roy lufques à Amiens ; amp;nbsp;luy feit le Roy de trefbeaux prefens,comme de vaifTeL le, ôc de chenaux bien accouftrez.

Quand le Roy ce fut retiré de cefte veüe, il parla à moyaulong du che-Oiin fur deux poinéls. Il trouua le Roy d’Angleterre fi près de venir à Paris, que cela ne luy auoit point pieu : Sedifoit; C’eft vn trefbeauRoy, il ayme fort les femmes. Il pourroit trouuer quelque affetee a Paris, qui luy pourroit bien dire tant de belles parollcs qu’elle luy feroit enuie de reuenir ; amp;nbsp;que fes ptedeceffeurs auoienttrop eftéà Paris amp;nbsp;en Normandie, amp;quelacompai -gnie de l’autre ne valoir rien deçà lamer: mais que delà la mer il le vouloit bien pour bon frere amp;nbsp;amy . Encores fe*douloit le Roy dequoy il lauoit^^^^^^ « trouucvn peu dur, quand il auoit parlé du Duc de Bretaigne:amp; l’eu fl vo-lontiers gaigné qu’il fefuft contenté qu’on euft fait la guerre en Bretaignc;

amp;luy en feit encore fentir par monfeigneur de Bouchage , amp;nbsp;par monfei-gneurde fainél Pierre; mais quand le Roy d’Angleterre fen voit prefTé, il Hilt, que qui feroit guerre en Bretaigne, ilrepafferoitvneautres-foispourla ilcffendre.Ouye laquelle refponce, on ne luy en parla plus. Comme Ic.Roy futarriué à Amiens, amp;nbsp;comme il voulut foupper, vindrent trois ou quatre de ceux du Roy d’Angleterre foupper auec luy , qui auoientaydéàtraiôler celle paix :amp; monfeigneur de Hauart commença à dire au Roy en l’oreille, que fil vouloit,il trouueroit bien moyen défaire venir le Roy fonmaiflre iufques a Amiens, paraduenture iufquesàParis, a faire bonne chere auec luy. Le Roy, combien que cell offre neluyplaifoitgueres, h en feitil rref-bon vifage;amp;: fe print a lauer,fans trop refpondre à propos : mais me dill en l’oreille que ce qu’il auoit penfé luy elloitaduenu, c’elloit cell offre. Encores en parlcrcntiîs apres foupper ; mais le plus figement qu’on peuft, on rompit celle entreprinfe,difint qu’il faloit que le Roy partift à grilidc diligence,pour aller contre le Duc de Bourgongne. Combien que ces matières efloienttrcs-grandes, amp;nbsp;que des deux collez on mettort peine a fage-ment les conduire, toutesfois y aduint il des choies plaifintes, qui ne lont )as à oublier, amp;nbsp;nefc doit perfonne elbahir,à veoirles grands maux que es Anglois ont fait en ce royaume, amp;nbsp;de frefehe mémoire amp;nbsp;datte, li le Roy trauailloit amp;defpendoit à les mettre hors amiablement, afin qu’il les peull encores tenir amis pour le têps aduenir, au moins qu’ils ne luy feilTent point deo-uerre.

Lelcndemaindenollreveuc vindrent grand’force d’Anglois à Amiens;

amp; nous fut compté par aucuns que le fainôl Efprit auoit faiél celle paix; cartons fefondoient en prophéties , amp;cequileur faifoit dire, elloit qu’vn Pigeon blanc felloittrouuélurlatentedu Roy d’An^terre,le iour de la veuè: amp;nbsp;pourquelquebruitqu’ily euren Voll, il nef elloit voulu bouger: mais à l’opinion d’aucuns il auoit vn peu pieu, amp;nbsp;puis il vint vn grand fol eil, amp;nbsp;ce Pigeonfe vint mettre fur celle tente, qui elloit la plus haulie , pour feffuyer. Et celle raifon delTufdiôle m’allégua vn Gentil-homme de Gaf congne, feruiteur duRoy d’Angleterre, appelle Louis de Bretailles.dequel

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13^ lin. LIVRE DES MEMOIRES eftoit tres-mal content de ceEe paix:amp; pource qu’il me congnoifioit de long temps,parla à moy prii)ément:amp; diioit quenous nous moquerions fort du Roy d’Angleterre. Etluy demanday quantes batailles le Roy d’Angleterre auoit gaignécs.-il me difl;,ncuf,où il y auoit efté en perfonne.Ie luy demanday combien il en auoit perdu : il me reipondit qu’il n’en auoit perdu qu’vne , SC que c’eRoit celle que nous luy faifions perdre, Sc qu'il reputoit cefte honte plus grande dele renuoyer en cefl. eftat,qu’il ne faifoit l’honeur qu’il auoit eu à gaigner les autres neufle comptay cecy au Roy,qui me difl que c’eftoit vn tres-mauLiais paillard, amp;nbsp;qu’il le falloir garder de parler. iH’enuoyaquerira fon difiier, Si. le feit difneraucc luy, amp;nbsp;luy offrit de trefbcaux Si bons partis, fil eufl: voulu demeurer par dcça:amp; quand il veit qu’il ne vouloir demeurer, ■*il luy dona mille Efeus contas:amp; luy promit faire des biens a des freres quil auoit par deçà: amp;nbsp;ie luy dy quelque mot en l’oreille,afin qu’il mift peine d’entretenir l’amour qui eftoit commencée entre les deux Roys.

11 n’eftoic rien au monde dont le Roy euft plus grand’peur, que de ce qu’il luy efehappaft quelque mot,parquoy les Anglois penfaftent qu’il fe moquaft d’eux :amp; d’auenture,le lendemain apres cefte veuc, comme il eftoit en fon retrait!;, que nous n’eftions que trois ou quatre,il luy efehappa quelque mot de riféc,touchant les vins amp;nbsp;les prefens qu’il auoit enuoiez à l’oft des Anglois:St en fe tournant il apperceuc vn marchand Gafcô,qui demeuroit en Angîeter-re:lequel luy eftoit venu demander vncongé, pourtirer certains quantité de vin en Gafcongnefàns rien payer du droiéï du Roy, amp;nbsp;eftoit chofequipou-uoit fort profiter audiét marchand,f’il luy eftoit accordé.Lediél feigneurfut tres-efbahy,quand il le veit, amp;nbsp;comment il pouuoit eftre entré. Il luy demada de quelle ville il eftoit en Guycnue,amp; f’il eftoit marchand amp;nbsp;marié en Angle-tcrre.Le marchant luy refpondic que ouy, mais qu’il n’y auoit gueres valant. Incontinent le Roy luy bailla vn homme auant que partir de la, qui le codui-ftt à Bord»aux.-amp; parlay a luy par le commandement du Roy:amp; eut vne tres-bonne office en la ville,dont il eftoit nay,amp; la traiéle des vins qu’il demanda,-amp; mille francs contans pour faire venir fa femme, amp;nbsp;enuoyavnfien frère en Angleterre fans ce qu’il y allaft;amp; ainfi fe condamna le Roy en cefte amende, congnoifTant qu’ilauoit trop parlé.

comment fut außi faille trefue de neuf

Comment le Conneßable taßhoit deßexeußerenuers le T^py^ai^res la trefue ßaible d b^nßois'.

ans entre le 7(oy Louis le Duc de Bour^ongne. CHAT, XI.

Eiotwdonti’ay parlé, qui fut le lendemain de noftrc veue, moÂfeigneur le Conneftable enuoya vn fien feruiteur nommé Rapine,! qui le Roy feit depuis du bien: amp;nbsp;eftoit bon fer uiteuraefon maiftre, lequel apporta lettres au Roy. Lediél feigneur voulut que monfeigneur de Ludeamp;moy ouiffios

fa creance;amp; eftoit ja venu monfeigneur de Contay de la marchandife, contre monfeigneur le Conneftable, dont vous auez ouy parler cy deffus ; amp;nbsp;ne fçauoit

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DE PHILIPPE DE COMMIMES; nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;137

fçauoitplusIeConneftableaquelfaindfevoiier, amp;nbsp;fe tenoit comme pour perdu.Les paroües que nous dift Rapine, eftoient très-humbles : amp;nbsp;que fon niaiErcfçauoitbien qu’on auoit fair beaucoup de rapports au Roy contre luy,mais qu’il auoit bien peu congnoillre par experience, qu’il n’auoit point Voulu faire de Eiure. Et pour mieux afTciircr le Roy de fon vouloir, entra en lt;Jiiclque marché de réduire monfeigneur de Bourgongne en ftçon qu’il ay-deroir a deftrouiïer le Roy d’Angleterre,amp; toute fa bande,fil vouioit:ôc fem bloit bien à fi façon de parler que fon maiftrceftoitdcfpoiirueu de toute eE perance. Nous luy difmes que nous auions bon accord auec les Anglois, Sgt;c que nous n’y voudrions point de debat:amp; faduentura monfeigneur du Ludé ’]V]i cftoit auec moy,iufques à luy demander fil ne fçauoir point où eftoit Par gent contant de fon maiftre le m’efbahy comme celle parolle luy efchappaj * Veu que ceftuy là eftoit trefbon feruiteur, amp;nbsp;qu’il ne ht fuir lcdiôt Connefta-

entendre Ion cas,amp; ce qu’on procuroit cotre luy, amp;nbsp;encores veu lepc-hlen quoy il auoitefté,n’auoit qu’vn annnais i’ay veu peu de gens en ma vie Quifcachent fuïr à temps,*n’euiter leurs malheurs,necy,n’ailîeurs;car les vns * nont point d experience d auoit veu a 1 œil leurs païs voilins.-qui cft grad tau-gt;'gt;‘gt;1^ te atout homme de bien:carauoir veu les chofes par experience, cela donnedit aihfi, ne grand fens amp;nbsp;grand’ hardielfe. Les autres ont trop d’amouràleurs biens, à p^esCn^n’ôi leurs femmes, amp;nbsp;à leurs enfans. Et cesraifons ont efte' caule de faire périr bl lance d’a-

eaucoup de gens de bien. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;uoit recucii

Quand nous eufmes fait noftre rapport au Roy, il appella Vn Secrctairc:amp; pais voifins. n’y auoit auecluy quemonfeigneur de Hauart, feruiteur du Roy d’Angle-terrc,quinefçauoitriendecequ’ongardoitaudiôlConneftable: amp;nbsp;y eftoit lefeigneur deContay,qui reuenoit d’auec le Duede Bourgongne, amp;nbsp;nous deux qui auions parlé audiél Rapine.Le Roy nomma vne lettre audidl Con-neftable, amp;nbsp;luy raandoit ce qui auoit cfté fait le iour de deuant, ^decefte trehie;amp;: qu’il eftoit empefehé en beaucoup de grands affaires, amp;nbsp;qu’il auoit bien à befongner d’vne telle tefte comme la fienne;amp; puis fe retourna deuers les Anglois, amp;nbsp;monfeigneur de Contay, amp;lcurdift: le n’entend point que nous euftions le-corps: mais i’entend que nous enflions la tefte, amp;nbsp;que le corps fuft demeuré là. Celle lettre fut baillée à Rapine, qui la troiiua tres-bonne; amp;: luy fembloit parolletres-amiabic, que le Roydifoit qu’il auoit bien à befongner d’vne telle tefte que celle de fonmaiftre, amp;nbsp;n’entendoit point la hn de cefte parolle. Le Roy d’Angleterre enuoya au Roy les deux lettres de creance,quelediélConncftable luy auoit efcrites;6c manda toutes les paroi les, qu’il luy auoit iamais mandées: ôc ainfipouuezvcoiren quel ellat il feftoit mis entre ces trois grands hommes: cai^chafcun des trois luy .Vouloir fa mort. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;_

Le Roy d’Angleterre,apres auoirreceu fon argcnt,fe mit à chemin, droit a Calais,à bonnes iournées; car il doubtoit la haine dièDuc de Bourgongne, amp;nbsp;de ceux du pais;amp; à la vérité,quand fes gens fefgaroient,quelqu vn en de-îueuroit touflours par les buiflbns: amp;; laifla ces oftages, comme il auoit promis,monfeigneur de Hauart, amp;nbsp;meflire lehan Chene, Grand Efcuyer d Angleterre, iufqucs à ce qu’il fuft pafle la mer* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;,

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1381 IIIÎ. LIVRE DES MEMOIRES

Jo» Prf-Î Vous auez ouy au commencement de celle matière d’Angleterre, com-ce Roy n’auoit point fort cefte matière à coeur: car dés ce qu’il elicit fa a Douurcs en Angleterre, amp;auant que monter au nauire pour pafler , ilen-tra en praticque auec nous. Et ce qui le railoit palier deçà, n eltoit que pour deuxHns .*1^00 que tout Ion royaume le defiroit, comme ils ont accouftu-me le temps paflé, Sgt;c laprelfe que leur en lailbit le Duc de Bourgongne. L’autre railon elloit,pour referuer vne bonne grolTc fomme d’argent de ce-kl y qu’il auoic lors en Angleterre leué pour faire ce pallage: car comme vous aviez ouy, les Roys d’Angleterre ne leuent iamais rien que leur domaine, fl ce n’ellpour celle guerre de France, Vne autre habilité auoit fait lediél Roy, pour contcnterlesfubiecls. Ilauoitmené dix ou douze hom-**mes,tant de Londres que d’autres villes d’Angleterre, gros amp;nbsp;gras, qui elloient des principaux entre les communes d’Angleterre , amp;nbsp;qui ekoient ceux qui auoient fort tenu la main à ce pallage , amp;nbsp;à mettre fus cckepuif-lante armée.Lediél Roy les faifoic loger en bonnes tentes: mais ce n’eftoit point la vie qu’ils auoient accoullumée, amp;nbsp;en furent toll las: Ôc cuyd oient qu’au bout de trois iours ils deullent auoir vne bataille, quand ilsleroient deçà la mer ;amp;le Roy d’Angleterre aidoit à leur faire des doubtes, amp;nbsp;aufli des craintes, amp;nbsp;à leur faire trouuerlapaix bonne, afin qu’ils luy aydalîénf, quand ils feroient de retour en Angleterre,à cllaindre les murmuresquipour-roientellreà caufe de Ion retour. Caroneques Roy d’Angleterre, depuis le Roy Artus, n’amena tant degens de gros perfonnages pourvu coup deçà la mer;ôc feu retourna tres-diligemmenc comme vous aviez ouy : amp;luy demeura beaucoup d’argent de celuy qu’il auoit leué en Angleterre, pour le payement de fes Gens-d’armes ; ainfi paruint à la plu (part de fes intentions. Il n’eftoit point complexionné pour porter le trauail, qui feroit necelîâireà vnRoy d’Angleterre, quivoudroit faireconquefteen France ; pour ce temps, le*ïlt;oy auoit bien pourueu à la deffence,combien que par tout n’cuft fccu bien pourueoir, aux ennemis qu’il auoit: car il en auoit trop. Vn autre grand delir auoit le Roy d’Angleterre : c’eftoit d’accomplir le mariage dvi Roy Charles huiélicfine(qui depuis fuccedaau Roy Louis onziefme)auecfa fille:amp; ce mariage luy feit diflimuler beaucoup de chofes,qui depuis tournèrent au grand proffit du Roy.

Apres que les Anglois furent repaffiez en Angleterre, fiiuflesoftages qui ekoient auec le Roy jledidfeigneurfe retira vers Laon, en vne petite ville , qui a nom Verviins, fur les marches deHaynault tamp;aAuennes en Haynauk Ce troviua le Chancelier de Bourgongne, amp;nbsp;autres Ambafiadeurs avieclefcigneurdeContay,pourleDvic de Bourgongne :amp; defiroit le Roy à ceke fois pacifier gt;tout. Ce grand nombre d’Anglois luy auoit faiél pevft-.- car en l'on td^ipsil auoit vende leurs œviures en ce royaume, amp;ne vouloir point qu’ils retournakent. Le Roy eut nouuelles dudiét Chancelier , qui difoyent que le Roy envioyakdefesgcnsavnpont,àmy-chemin d’Auennesamp; Verviins, amp;nbsp;que luy amp;nbsp;fes compagnons fy trouueroient. Le Rov leur manda qu’il fy trouucroit luy-mefme, combien qu’aucuns, à qui il le demanda,ne furent point de ceft aduis.Toutesfois il y alla, amp;nbsp;mena les oka-

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DE PHILIPPE DE C O M I N Ë S. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i35gt;

les oËages des Anglois aneckiy : amp;nbsp;furent prefens quand le Roy rcccut les AmbalLideurs.-qui vindrent trefbien accompagnez d’Artbicis, d’autres gens de guerre. Pour celle heureils n’eurent autres paroilcs auec le Roy,amp;les mena l’on difner.

L vn de les Anglois commença à fc repentir de cefl appointemenr : amp;nbsp;me did à vnc feneftre, que f’ils euHent veu beaucoup de tciies gés auec le Duc de Bourgongne, parauenturc n’euflent ils pas fait la paix. Monfeigneur de Narbonne,qui fappcllemonleigneurdeFoucz, ouït cede parolîe, öclnydift; filiez vous fl (impies de penfer que le Duc de Bouigongne n’euflgrand no-bredetels gens? Il les auoit feulementenuoyez rafi clcbir; maisvous auiez il bon vouloir de retourner,que fix cens pipes de vin, îk vue penfiô que le Roy Vous donne,vous ontrenuoyebien toflen Angleterre. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;-

L’Anglois fe courrouça,amp; did:C’eflbié ce que ebafeû nous difoit,que vous Vous moqueriez de nous,appeliez vous l’argent que le Roy nous donne,pen fion: c’ed tribut ,amp; par faincl George, vous en pourriez bien tant dire, que nous retournerions.le rôpy la parollcjSc la conuerty en moquerie-.mais l’An glois n’en demeura point content, amp;nbsp;en diflvn mot au Roy, qui merueilleu-fement l’en cou rro uca audidl feigneur de Nai bonne.

Le Roy n’eufl point grandes parolles aux delluldidls Chancelier amp;nbsp;Am-balladeurs pour cede fois : amp;nbsp;futappointé qu’ils viendroient à Veruins ; amp;nbsp;ainii le feirent,amp; vindrent auec le.Roy: amp;nbsp;quand ils furent ai riucz à Veruins, le Roy cômit meffircTanncguy du Chadcl,amp; meffire Pierre Doriole,Chancelier de France,.! befongnerauec eux,Ôc autres. De chafeun collé entrèrent en grandes remondrances, amp;nbsp;à foudenir chafeun fon party. Des dclîufdidts vindrent Elire au Roy leur rapport, didins que les Bourguignons edoiêt fiers en leurs parolles, mais qu’ils leur auoient bien riuéleclou : amp;nbsp;difoientles refponces qu’ils leur auoient Elides,dont le Roy ne fut point content:5lt; leur did que toures ces refponfes auoient edé Elides maintesfois : amp;nbsp;qe’il n’edoit point quedion de paix finale, mais de treluc feulement : ôc qu’il ne vouloir point qu’on leur vEid plus deces parolles:amp; que luy mefmc vouloir parlera eux.Si Eeid venir ledid Chancelier amp;nbsp;autres Ambaffiideurs en Ei chambre: ôc n’y demeura auec luy que feu monfeigneur l’Admirai,Badard de Bouibo, monfeigneur du Bouchage,amp; moy : amp;nbsp;conclud la trefuc pour neufans marchande,quot; reuenant chafeun au ficmmais Icfdids Ambadadeurs fupplierét au Roy qu’elle ne fud point encores criée,pour Eiuuer le ferment du Ducquia-iioiti Lire ne le Elire, que le Roy d’Angleterre n’eu d edé hors de ce royaume certain temps,afin qu’il ne femblad point qu’il eud accepté la fienne.

Le Roy d’Angleterre,qui auoit grand defpit de ce que ledid Duc n’auoic voulu accepter fa trefue, amp;nbsp;edoit aduerty que le Ro^ en traidoit vne autre, auec ledid Duc,enuoya meffire Thomas de Mont-Ggt;mcry, vn Cheualier fortpriuéde luy,deucrs le Roy a Veruins, à l’heure que le Roy traidoit cede trefue,dont i’ay parlé,auec ceux du Duc de Bourgo^e.Ledid mcffire Thomas rcquid au Roy,de par le Roy d’Angleterre, qu’il ne voulfid point prendre d’autre trefue auec le Duc,que celle qu’il auoit faide. Auffi luyprioit ne vouloir point bailler Eiinôl Quentin audid Duc: amp;nbsp;offroitauRoy que fil

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140 nil. LIVRE DES MEMOIRES

vouloir cotinucr la guerre audiót Duc,il feroit cotant de repafler la mer pour luy,amp; en fàfaueurja lailon prochaine,pourueu que le Roy reccmpenfaûdu dommage qu’il auroit à caide de la gabelle des laines à Calais,qui ne luy vau-droit rien(cefte gabelle peut bien monter à cinquante mille elcus)amp;aLiHi que le Roy payait la moitié de fon armée, amp;nbsp;Icdiét Roy d’Angleterre payeroit l’autre moytié.Le Roy mercia fort le Roy d’Angleterre:amp; donna de la vaiflcl le audiél melîire Thomas, amp;nbsp;f’excufa de la guerre,dilant que la trefue elloit ja accordée.-mais que c’eftoit celle propre qu’eux deux Roys auoient faiôte du propre terme de neufans:mais que ledicl Duc en vouloir lettres à part,amp; cx-eufa lachofe au mieux qu’il peut,pour contenter lediét Ambafladeur.-lequcl fen retourna, amp;nbsp;ceux qui clloient demeurez en ollageaulïi.Le Roy fefmer-\ieilla fort des offres que le Roy d’Angleterre leur auoit faiéles, amp;nbsp;n’y eufi: que moy prefent à les ouïr:amp;: fembla bien au Roy que ç’euft efté chofe bien perilleufc de faire repalTerleRoy d’Angleterre:amp;qu’ily apeu affaire à mettre débat efitre les François àc les Anglois,quand ils fe treuuent enfemble:amp;: qu’aifément fe fuffent accordez de nouueau les Bourguignons amp;nbsp;eux: amp;nbsp;lu/ creutl’enuie de condurre celle trefue auec les Bourguignons.

Comment lawort du Conne/lablefut de tous points iurée entrele7(oy ('ÿ^leDucde ‘BQurgi}ngne‘.amp;‘ commefeflant retiré au pays du Duc^fut par le commandemetd'i' celuydturé au quot;é^oy qui le feit mourir par lufiice. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;AP. X I L

Atrefueconclue, femitauantlapraticqueduConnellable.’ . amp;nbsp;pour n’en faire log proces,fut reprins ce qui fut faiél à BoU uines,donti’ay parlécy deuant : nbsp;nbsp;furet baillez les feellez de

i celle matière d’vn collé amp;nbsp;d’autre. Et par ce marché fut pro-!mis aLidiélDuc,fainél Quênn,Ha,ôc Bohain, amp;nbsp;tout ce que lediél Conneftable tenoit foubs le pouuoir dudiél Duc, amp;nbsp;tous fes meubles, quelque part qu’ils fuirent:amp; fut aduilé amp;nbsp;conclu de la forme de l’allîeger dedans Han,où il «lloitrôcceluy qui premier le pourroit prendre, en feroit la iullice dedans huiôliours,ou le rendroit à fon compaignon. Tantofl chafeù fe commença à doubter de celle marchandifejSc les plus gens de bien,que le-diél Conneftable eull, le commencèrent à lailfer , comme monfeigneur de Genii, amp;nbsp;plufteurs defes compaignons qu’il auoit. Lediél Conneftable,qui Içauoit bien comment le Roy d’Angleterre auoit baillé fes lettres,amp; defeou-uertcequ’ilfçauoitdeluy, amp;que fesennemys auoient efté a frire la trefue, commença à auoirtrelgrand’peur:amp; enuoyadeuersle D uedeBourgongne luy fupplier qu’il luy pleuft luy enuoicr vne Icureté, pour aller parler à luy de chofes qui fort luy touchoient. Lediôl Duc de prime-face feignit à la bailler.’ mais à la parfin la luy Bîlilla.Mainte penfée auoit ja eu ce puiflant homme,où il prendroit chemin^our fuïricar de tout eftoit informé,amp; auoit veu le dou-bledesfeellez quiauoi^nt eftébaillez contre luy à Bouuines.Vnefoisfad-dreffi à aucuns feruiteurs qu’il auoit, qui cftoient Lorrains. Auec ceux la délibéra fair en Allemaigne, amp;nbsp;y porter grand’fommed’argent( car le chemin eftoit fort feur)amp;: d’acheter vne place furlcRhin,amp;:fetenirlà iufques à ce qu’il fuft appointé de l’vn des deux coftez.Vneautrcfoisdelibera tenir fon boncha-

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DE PHILIPPE DE COMINES. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;141

bon chafteau de Han,qui rant luy auoit confié, amp;nbsp;î’anoit fait pour fe Guiicr en vue telle necenité:amp; I’anoit poiirucn de tontes choies, antât que challeau qui full en noftre congnoillance. Encores ne tronna il gens à fongréjpour de meurerauec Iny : car tons fes lernitenrs eftoient nez des feigneuries del’vn Prince on de Ta titre ; amp;: par adncnturc que fa crainte cftoit fi grande, qu’il ne f’ofa luffilàmment dcfcouurir à enx:car ie croy qn’il enfl trouné, qui ne l’enf-fentpas abandonne, à bon nombre’. Et n’efloit pas tant à craindre pour luy d’eftrealTiegcdedcnx Princes,que d'vn fenbcarc’cfloit choie impoflibleque deux armées fe fnlTent accordées. Son dernier party fut d’aller vers le Duc de Bonrgongne, fur cefle fenreté,amp; ne print que quinze on vingt cheuaulx : amp;; tira à Mós en Henault,où efloit le feignent Delmeriez,Grand Baillifdc Henault, le plus intimeamy qn’il euff;amp; Ta y feionrna, attendant nonnelles du Duc de Bourgongne:qui auoit commencé la guéri e contre le Duc deLorraine,a caufe que de luy auoit efté deffieb durant ce qu’il elfoit au liege de Nuz;

amp; aufli recent grand dommage en fon pais de Luxembourg.

Incontinent que le Roy feeut l’allée dudicl Conncflable, il aduifà d’y donner remede, amp;nbsp;pourueoirquelediélConnellable ne peut reconurer l’amitic du Duc deBourgongne:amp; tira diligemment deuers fainét Quentin , Sgt;c y feit amalTer lept ou hniél cens Hommes d’armes : amp;nbsp;anec eux y alla, bien informe de ce qui elf oit dedans. Comment il vint pres de la ville, aucuns luy vin-drent au deuanr,fe prefenter à luy. Lediéf feigneur me commanda entrer dedans la ville,amp; fii-re départir les'quartiers.Ainfi le fy, ôc y entrèrent les Gens-d’armes: apres entrale Roy, bien receu de ceux de la ville. Aucuns de ceux du Conneffable ie retirèrent en Henault Toft fut aduerty, par le Roy propre, le Duc de Bourgongne de la prinle defiiinél Qu^entin , afin de luy öfter l’cfpcrancedelacLiiderrecouurerparla main du Conneftable. Dés ce que le-diet Duc feeut ces nouuellcs, il manda au feigneur* Defiiaericz, fon Grand Baillif de Henault,qu’il feift garder la ville de Mons en façon que l^ûct Con neftablen’enpeuftlaillir,amp; qu’à luy fut deffendu, ne partir de fon hoftcllerie. LediétBaillifn’ofàrefuIer, amp;nbsp;le feituoutesfois la garde n’eftoitpas eftroiôtetout ce pour vn * tel homme,fil euft eu vouloir de fuir.

Que dirons nous icy de Fortune? Ceft homme eftoit fitué aux confins de ces deux Princes ennemys,ayant fi forte place en fès mains,quatre cens Hó- ^lt;“1. mes d’armes bien payez, dont il eftoit commifl'aire, amp;nbsp;y mcttoitquijl vou- fionfurlevtal^ loitjôt les auoit ja maniez douze ans paftez. Il eftoit fage amp;nbsp;vaillant Cheua-lier,amp;qui auoit veu beaucoup. Il auoit grand argent contant : amp;nbsp;apres tout cela le trouuer en ce danger deftitué de cœur amp;nbsp;de tous remèdes. Il faut bien dire que celte troperefte Fortune,l’auoit regardé de fon mauuais vifàge;mais pour mieux dire, il faut relpondre que tels grans myfj^rcs ne viennent point de Fortune, amp;nbsp;que Fortune n’eft rien fors feulement vn^fiétion Poétique, amp;nbsp;qu’ilfailloit queDieu reuft abandonné,à conliderertoutes ces chofes delfuf diètes, amp;nbsp;afl'ez d’autres que ien’ay point diètes. Et filappartenoitàhommc dciugcr ( ce qucnon,amp;par cfpccial àmoy) iediroye queccquiraifonnable-mcntdeuroit auoir efté caufe de là punition, eftoit que toufiours auoit tra-uaillé de toute fàpuiftancc, que la guerre durait entre le Royamp; le Duc de

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Bourgongnc : car la eftoit fondée fa grand’ auólorité amp;nbsp;fon grand ellar, y auoit peil à faire à les entretenir en ce différend,car naturellement leurs com. plexions eftoient differentes. Celuy feroit bien ignorant,qui croyroit qu’il y cufl Fortune,ne cas femblable,qui euftfçcu guider vnfîfage homme à eftre mal de ces deux Princes,â vn coup, qui en leur vie ne faccorderêt a rien qu e cccy:amp;: encores plus fort du Roy d’Angleterre, qui auoit efpoufé faniepce: amp;nbsp;qui merueilleufement aymoittous les parens de fa femme, amp;par efpecial ceux deceftemaifonde fainélPaul. lieft vray femblable, amp;nbsp;chofe certaine, qn’il eftoit eflongné de la grace de Dieu,de foy eftre mis ennemy de ces trois Princes,amp; n’auoit vn feul ami,qui l’eiift ofc loger pour vne feule nui6l:amp; autre fortune n’y auoit mis la main,que Dieu.Et ainfi en eft aducnu, amp;nbsp;aduien-hdra à plu fieurs autres,qui apres les grandes amp;nbsp;longues profperitez, tombent en grandes aduerfitcz.

Apres que le Conneftablefutarrefteen Henault par le Duc de Bourgon-gne, le Roy enuoyadeucrs ledid Ducpour enauoir ladcliurance, ou qu’il accomplift le contenu de fon feellé. Lediél Duc d ift qu ainfî le feroit:amp; feit menerlediôlConneftableà Peronne, amp;nbsp;eftroiteraent garder. Ledid Duc de Bourgogne auoitja prins plufieurs places en Lorraine amp;nbsp;Barrois:amp; eftoit au ftege deuantNancy, laquelle fedeffendoittrefbien. Le Roy auoit largement Gens'd’armes en Champaigne ; qui donnoient crainte audiâ: Duc; car il n’eftoit point diôl par la trefue qu’il d’euft deftruire le Duc de Lorraine, lequel feftoit retiré deuers le Roy. Monfeigneur de Bouchage, amp;nbsp;autres Am-bafftdeurs,preffoientfort ledidtDuc détenir fon feellé. Toufiours difoit qu’ainfi le feroit,amp; pafla de plus d’vn moys le terme de huid iours, qu’il de-uoit bailler le Conneftable,ou en faire iuftice. Se voyant ainfi preffé, amp;nbsp;d’on-tant que le Roy ne l’empefchaften fon entreprinfe de Lorraine,qu’il defiroit fortameneràfin,pourauoirlepaffagedc Luxembourg en Bourgongne, amp;nbsp;que toutes fes feigneuries fcioignifrentenfemble(car luy tenant ainfi ceftepe tite Duché,il venoit en Hollande iufques au pres de Lion toufiours fiir luy) pour ces raifons efcriuit à fon Chancelier,amp; au feigneur dHymbcrcourt)dôt i’ay affez parlé)tous deux ennemis amp;nbsp;raal-veillans dudid Conneftable, qu’ils fe retiraffent a Peronne,amp;: qu’à vn iour qu’il nomma,ils baillaffent ledid Co-neftable à ceux que le Roy y enuoieroit (car les deux deffus nommez auoient tout pouuoir pour luy en fon abfence) amp;nbsp;manda audid feigneur Defmeriez le leur bailler.

Ce pendant batoit fort la ville de Nancy le Duc de Bourgongne; il y auoit de bonnes gens dedans, qui la deffendoient bien. Vn Capitaine dudid Duc, appelle le Comte Campobache,natif amp;nbsp;banny du royaume de Naples, pour la part Angeuine, auq^t ja prins intelligence au Duc de Lorraine, prochain parent, amp;nbsp;heritierpij|[fumptifdelamaifon d’Anjou, apres la mort du Roy René,fon aïeul maternel;amp; promettoit faire durer ce liege,amp; qu’il fe trouuc-roit des deffaulxés choses ncceffaires pourlaprinfe de la ville. Il le pouuoit bien faire:car il eftoit pour lors le plus grand de l’armée, amp;, homme tres-mau-uais pour fon maiftre,comme ie diray cy apres ; amp;nbsp;cecy eftoit comme vn ap-preft des maux qui depuis aduindrentaudid Duc de Bourgongne. Iccroy que le-

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DE PHILIPPE DE C O M M I N E S. 14^ lt;5ue IcdiclDucfâtcendoiîd'auoir prins iaville,nnantque le iour full venu debviillci iedidConnelEable, amp;nbsp;puis ne le bailler point; amp;nbsp;peut eftrcd autre collé,que IiieRoyleufc eu il cufl fait plusde faneur au Duc de Lorrainequ’il Hcfiiifoit pas:caril elloit informé de la pratique qu’auoit le Comte de Capo-tacbejnais il ne l’en mcfloit point. éc G n’clloit point tenu de lailTer Etire Ic-diét Duc * de Lorraine f’tl n’eu ft voulu, pour pluficurs raifons,amp; auoit large-nient de gens près ledidl pais de Lorraine. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;deg«.gt;,/rpZi«

LediélDuc de Bourgongne ne feeut prendre Nancy ,auantle iour qu’il*”’*' * auoit baillé â fes gens,pour deliurerlediéi Conneftable.Pource pafl'equefut leiour,qui leurauoit elle ordonné, exécutèrent le commandement de leur inaiftre volontiers , pour la grand’Iiaine qu’ils auoientaudict Conneftable;

amp; le baillèrent,à laporte de Peronne,entrc les mains du Baftard de Bourbo, « Admirai de France, amp;: de monfeigneur de Sainél Pierre , qui le mcncrentà lùris.Aucuns m’ont dit que trois heures apres,vindrent melEigers à diligen-ccjde par le Duc pour commander à fes gens ne le bailler point, qu’il n’cuft bit a Nancy; mais il eftoit trop tard. A Paris fut commencé le proces dudiót Conncftable ; amp;: bailla ledict Duc tous les fêellez, qu’il auoit dudiéb Conne-lliblc amp;nbsp;tout ce qui feruoitàfon proces.Lcdiél Roy predbitfort la Court,amp; y aiioir gens pour la côduiétedu proces.Et ainfi,veu ce que le Roy d’Angleterre auoit baillé contre luy, comme auez ouy cy delTus, amp;aufli lediélDuc, toll fut condamné à mourir,amp; tous fes biens confifqucz.

ßurla faulte iji/eßeit le Duc de Bourgon^ne,liurant le Cotinefable au l^oycotrepifeureté^e^^cequilujenj^eiitefreaduenu. QHAP, XIII.

* deliuraht'e

Efte* diligence fut bien cftrangc, nbsp;nbsp;ne le dy pas pour exeufer

les fiultes dudidlConneftablc, ne pour donner charee*au ”«gt;» f-y«««» ci nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;T, O nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;J J • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;f”quot;* t’*quot;*

‘'tudict Duc(car a tous deux il tenon grad tortjmais il 4» vietl. Exe.

befoingaudiél Duc de Bourgongne, qifi eftoit û grand Prince,amp;de maifon fi renommée amp;nbsp;honorable,de luy donner vue feureté pour leprëdre:amp; fut grade cruauté le bailler où il eftoit ‘t«“* certain delà rnort,amp;: pour auarice. Apres celle grand’honte qu’il fe feit, il ne ' mit guercs à rcceuoir du dommage.Et ainfî,àveoir les chofes que Dieu a fài-éles denoftre temps, amp;nbsp;fait chafeun iour, femble qu’il ne vucille rien impu-ny.’Sepcut on veoir cuidemment qu’eftrangesouurages viennêtdeluy:car ds foi.t hors des œuures de nature,amp; font fes punitions foudaines ,amp; par ef-pccia» contre ceux qui vfent de violence amp;nbsp;de cruauté, qui communément pcuucnt eftre petits perfonnages, mais très-grands, ou de Seigneurie, ou

lt;1 audorité de Prince. Longues années auoit fleury cefte maifon de Bourgo-■gnc:amp; depuis ccntans,ou enuirô,qu’ont régné quatrlt;?de cefte maifon,auoit cité autant eftimée que maifon nulle de la Chreftienté .iCar les autres, plus gr.indes qu’elle,auoient eu des affliôlions amp;nbsp;aduerfitez,amp; cefte cy cotinuelle fclicite amp;nbsp;prolperiré. Le premier grand de cefte maifon fut Philippe Hardy, b'erc deChai les le Qmnt,Roy de France,qui elpoufa la fille deFlâdres,Con-

-dedudiclpaïs d’Artois,de Bourgongne,Neuers,amp; Rethel. Le fécond fut it'iian. Le tiers fut le bô Duc Philippe,quiioignitàfamaifon les Duchez de

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144 HH- livre DES M EM O I R* E S

Brabant,Luxembourg,LamboLjrg,Holande,ZeIandc, Henault, amp;nbsp;Namur.

Le quart a efté le Duc Charles, qui apres le trefpas de fon pere fefl: rrouué pbs^'Xhes nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;riche amp;nbsp;redoublé de la Chreftienté: amp;nbsp;qui trouua en meubles deba-

vaiflclles, de tapifleries, liures amp;nbsp;linges, plus que l’on neuft feeu trouuer en trois des plus grandes raaifons.D’argent cotant,i’en ay bien veu à d’autres maifons plus largcmêt( car lediél Duc Philippe n’auoit de long teps point leuc de tailles )toutesfois il trouua plus de trois césmilleEfcus cotant; amp;nbsp;trouua paix auec fes voy fins, qui peu luy dura. Mais ie ne luy veux point du tout imputer l’occafion de la guerre : car d’autres aH’ez y eurent part. Ses fubieôLs,incontinent apres la mort de fon pere,luy accordèrent vne ayde de bon cœur, amp;nbsp;à peu de requefte,chafcun pais à parr,pour le temps de dix ans, r qui fe pouuoit bien monter à trois cens cinquante mille Efeus l’an, fins co-prendre Bourgongne. A l’heure qu’il bailla lediôlConneftable, il en leuoic plus de trois cens mille d’auâtage ; amp;nbsp;auoit plus de trois cens mille Efeus co-tans: amp;nbsp;tout le meuble, qu’il recueillit dudid Conneftable, ne valloit point quatre vingts mille Efeus. Car en argent n’auoit que foixantefeize mille Efeus . Ainh l’occafion fut bien petite, pour faire vne fi grande faulte. Il l’eut bonne, car Dieu luy prépara vn ennemy de bien petite force, en fort ieunc aage, peu expérimenté en toutes chofes: amp;nbsp;luy feit vn feruiteur, dont plus fe fioit pour lors,deuenirfaulx amp;mauuais. amp;nbsp;le mit en fufpiciô de fes fubieéls amp;bons feruiteurs.Ne fonree pas icy-des vrais préparatifs,que Dieu fiifoit de l’ancien Teftament à ceux de qui il vouloir muerla fortune de bien en mal, ou de profperité en aduerfite? Son cœur ne famollit iamais’.mais iufques à la fin aeftime toutes fes bonnes fortunes procéder de fon fens amp;nbsp;defa vertu:amp;: auant que mourir,a elle plus grand que tous fes predeceffeurs, amp;nbsp;plus eflime par le monde.

Parauant que bailler lediélConneflablc,!! auoit ja prins grand’defîiance de fes fu^ieéls, ou les auoit à grand mcfpris. Car il auoit bien enuoyé quérir milles Lances d’Italiens, amp;y enauoit eu deuant Nuz largement auec luy. Le Comte de Campobache en auoit quatre cens armez,amp; pkis,amp; efloit fans terre:car a caufè des guerres quela maifon d’Anjou auoit menées en ce royaume de Naples, de laquelle il efloit fcruiteur,il en efloit bany, amp;nbsp;auoit perdu fa terre, amp;nbsp;toufiours f elloit tenu en Prouêce, ou en Lorraine,auec le Roy René de Cecilie,ou auec le Duc Nicolas, filz du Duc leha de Calabre; apres la mort duquel le Duc de Bourgongne auoit recueilly plufieurs de fes ferui-teurs,amp; par efpecial tous les Italiens, comme ce Comte que i’ay nomme, la-quesGaleot tref vaillant,honorable amp;nbsp;loyal Gentil-homme,amp; plufieurs autres.Cediél Comte de Campobache, dés lors qu’il alla faire fes gens en Ita-Iie,rcceut dudiél Du^quarante mille Ducats d’impreflence,pour mettre fus ficompaignie. En^affantpar Lion, faccointa d’vn Médecin,appellemai-flre’^Simonde Pauie:par lequel ilfeitfçauoir auRoy,que fil luy vouloir faire *Pierrc Ex- certaines chofes qu’il dcmandoit,il offroic a fon retour luy bailler le EÎuc de fzMZ. P ays. Bourgongne entre fes mains. Autant en diflamonfeigneur deSainct- 1 ray momroe ' cflant loi's Cil Picinôt Ambaffideur pour le Roy. Apres qu il fut retourne, amp;nbsp;fes Gens-d’armes logez en la Coté de Marie,offroit encores au Roy que des ce qu’il

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DE PHILIPPE DECOMMINES. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;14^

ce qu’il feroit en champ auec fon maiftrcjil ne Emdroit point de le tuer, ou le inencrprifonnier;amp;difoitlamaniere:C’efl:oit quelcdiólDucalloit fouuctà 1 entour de fon olElur vn petit cheual,auecpeu de gens(amp; difoit vray)amp; que h ne faudroic point de le tuer ou prêdre. Encores Eiifoit il vne autre ouucrtu-reau Roy.c’cftoitquefi le Roy amp;lediôl Duc le venoient à trouucr en bataille, l’vn deuant l’autre, qu’il fe irouueroit de fon party, auec fes Gens-d’armes, nioyênant certaines chofes qu’il demadoit. LeRoy eut la mauuaiftiéde ceffc Homme en grand inefpris , voulut monftreraudiôl Duc de Bourgongne lt;lcgrandes franchifes : ôcluy feit fçauoir tout cccy, parlefeigncurdeCon-tayjdont a efté' parlé:mais Icdifl Duc n’y adioufta point de foy,ains eflimoiü que le Roy le faifoit à autres fins^ôe en ayma beaucoup mieux ledidComte. Earquoy vous voyez que Dieu luy troubla le fens en ceft endroit, aux claires enfeignes que le Roy luy mandoit.Autant que ceftuy -cy, dont i’ay parlé, e-lloit mauuais amp;: delloyal,autant eftoit bon laques Galeot:ôc apres auoir longuement vcfcu,eft mort en grand honneur amp;nbsp;renommée.

CINQVIESME LIVRE DES MEMOIRES DV

SEIGNEVRD’ARGENTON, SVR LES PRINCIPAVX F A I C T J ET . geftes de Louis onzicGne de ce nom,Roy de France.

Comment le Duc de Bourgongne^faißint la, guerre aux Suiffes,fut chaffepar eux àl'enîréedesmontaignespres Granjon. QHAP. l, ■ R le Duc de Bourgogne aiantcoquis toute la Duché de Lorraine, amp;nbsp;rcceu du Roy S. Quentin,Han, amp;nbsp;Bohain, le meuble du Conneftablcjcftoit en parolles auec le Roy de fappoin-ter:amp;leRoy amp;;luyfcdeuoientcntre-vcoir,fLirvne riuiere amp;nbsp;femblable pot que celuy qui fut faiâ; à Picquigny, à la veüe du Roy, ÖC d Edouard Roy d’Angleterre : amp;nbsp;fur celle matière alloiet amp;nbsp;venoient gens. Et vouloir lediôl Duc laifler repofer fon armée,qui elloit fort deffaiéle, tancà caufe de Nuz,que par ce peu de guerre de Lorraine: amp;nbsp;le demeurât vou loir 11 enuoier en garnifon,en aucunes places du Coté deRomont,comme au près des villes de Berne amp;nbsp;Fribourg,aufquclles il vouloir faire la guerre, tant poiirce qu’ils laluy auoicntfaiéleeftantdeuatNuz, qp’aulîi pour auoir aidé à luy offer la Cote de Ferrette (corne auez ouy ) amp;nbsp;pource qu’ils auoient ofté audiél Comte de Romont partie de fa terre Le Roy le lolicitoit fort de celle veué,amp; qu’il lailfall en paix ces panures gens de SuilTe^ amp;c qu’il repolàft fon armée.Leldiôls SuilTéSjle fentans fi pres d’eux,luy enuoieret leur Ambalïade, Si. ollroient rendre ce qu’ils auoient prins dudiét feigneur de Romont.Lediól Comte de RomÓt le folicitoit d’autre collé de le venir lècourir en perlonne. Leditl Duc lailfa le fage con{cil,amp; celuy qui pouuoit élire le meilleur (corn-

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146 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. L I V R E D E S M E M C I RT S

me il fcmble à toutes fortes de sens) veu la faifcn l’efiat lt;nbsp;n cucy ef cit fc n armée, amp;nbsp;délibéra d’aller contre eux Entre le Roy amp;nbsp;kiy fut apy oinitmert dcbailler lettre,que pour le faiôl de Lorraine ils n’entreroient pointen debat. Le Duc partit de Lorraine auec cefte armée fort deffaide amp;nbsp;laflee,amp; entra enBourgorigne.-où lefdiéls Ambafladeurs de ces vielles ligues d Allcmaigne qu’ô appelle SuifTcSjteuindrérdcuers luy,faifant plus grades offres que deuat amp;nbsp;oultre la reftitution, luy offroient laifler toutes les alliances, qui feroient contre fon vouloir(amp; par efpecial celle du Roy,amp; deuenir les alliez,amp; le fer-uir de fix mille hommes ai mez,amp; affez petit pay ement,contre le Roy, toutes les fois qu’il les en requerroit. h rien ne voulut ledxff Duc entendre, amp;nbsp;ja le conduifoit (on mal-heur. Ceux qu’on appelle en ce quartier là les Nouueiles quot;^alliances, le lont les villes de Balle,amp; de Stralbourg,amp; autres villes Imperiales,qui font lous le bout de cefte riuicre du Rhin : lefquellcs d’anciennete a-uoient elle ennemies defdidls Suifes en faueurdu DucSigilmond d’Aiiffriche,duquel ils eftoient alliez, par le temps qu’il auoit eu guerre auec lefdiffs Suilfes. Toutes ces villes fallicrent enfemble auec iceux Suides , amp;nbsp;fut fiidte alliance pour dix ans, amp;: paix aulli auec le Duc Sigifmond. Et le feit ladidle alliance par la conduire du Roy, amp;nbsp;à Ion pourchas, à lesdef-pens, côme auez veu ailleurs,à l’heure que la Comte de Ferrette lut ollée des mains du Duc de Bourgogne, amp;nbsp;qu’à Balle leirct mourir melln e Pierre d Archambault, Gouuerneur dudicl pais pour lediét Duc : lequel Archabaultfut bien caufedeceff inconuenient,qui fut biê gràd pour lcdict Duc:car tousfes autres maux en vindrent.Vu Prince doibt bien auoir l’œil lur quels Goiiucr-neurs il met en vn pais nouuellementioindl àla feigneurie;car en lieu de trainier les fubiedls en t^rand’douceur amp;nbsp;cnboneiuffice, faire mieux qu’on ne Icurauoit faidlle temps paflé,ccftui-cifeit tout lecôtrairexar il les traiéla en grande violence,amp;. en grand’rapine;amp; mal luy en print,amp; à fon mai lire, amp;nbsp;a maint holfine de bien.Celle alliacé que le Roy conduifit,dont i’ay parle, tourna depuis à gràd profit auRoy, ôc plus quelaplufpartdes gens n’entendent: amp;nbsp;croy que ce fut vue des plus lages chofes qu’il feiff oneques en fon teps, plus au domagede tOLisfes ennemis.Car le Duc de Bourgongne deffaiôl,on-ques puis ne trouua le Roy de Frâce homme qui ofaft leuer la telle cotre luy, ne contredire à fon vouloir.I’enten deceux qui eftoient les fubiedls amp;nbsp;en fon royaume:car tous les autres nenageoyent que foubs le vêt deceftuy là.Voy-la pourquoy fut grande œuure d’allier le Duc Sigifmod d’Auftrichc, celle Nouuelle alliance auec les Suifiés, dont fi longtemps auoient cfté ennemys: ôc ne fe feit point fans defpenfe,amp; lans faire maint voyage.

Apres que le Duc de Bourgongne eut ropu aux Suiffes l’efpcrancedepou-uoirtroLiuer appoinéftmentauec luy,ils retournèrent aduertirleurs gens, amp;nbsp;fapprefter pour fe dtffendre:amp;luy approcha fon armée du pais de Vaux en Sauoye,que lefdidls Sjjiffes auoient prins fur monfeigneur de Romont, corn mcdiôleft:amp; print trois ou quatre places,qui eftoient à moleigneur deCha-ftcau-guion,quelefJiôls Suilfes tenoicnt,amp; lesdcffendirentmal:amp; delàalla mettre le fiege deuant vne place,appellécGranfon.-laquclle eftoit aulTi audiff feigneur deChafteau-guion, amp;nbsp;y auoit pour Icfdiéls Suilfes, feptouhuiôl

cens

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DÊ PHILIPPE DE CÖMMINÊS. U?

cens hommes bien c{ioîLs,pource que c’elloii auprès d’eux, amp;nbsp;la vouloienÈ bien deffendre . Lcdicb Duc auoit aflez grande armée;car de Lombardie luy VenoientatOLite heuregens, amp;nbsp;lesfubieóls de celle maifon de Sauoye;amp; ay-nioit mieux les eftrangers quefes fubiedts, dont il pouuoit finer aflez^amp; dô bons.-mais la mort du Conneilable luy aidoit bien à auoir defiiancc d’eux a-Uec d’autres imaginatios.Son artillerie elloic tres grade amp;nbsp;bonne,amp; erloit en pópe en cefl Oft, pour fe moftrer à ces Ambafiadeurs,qui venoienc d’Italie ôc d’AlIemaigne : amp;nbsp;auoit toutes fes meilleures bagues amp;nbsp;vaift'clles, amp;large-ftient autres paremens.-ôc auoit de grandes firntafies en la tefte, fur le faiôl de cefte duché de Milan,où il fattendoit d’atioir des intelligêces.Quand le Duc cutaftiegé ladidle place de Granfon,amp; tiré par aucuns iours, fe rédirent à luy ceux de dedans afiivolonté,lefquels il feit tous mourir. Les Suiftes feftoyét alfcmblez, non point en grand nôbre,corne i’ay ouy parler a plufieurs d’entre eux (carde leurs terres ne fe tiret point les gens qu’on cuide,amp;: encores moins lors que maintenât:car depuis ce temp là,la plufpart ont laifle le labeur, pour fc faire gés de guerre) amp;nbsp;de leurs alliez en auoiéc peu auec euxzcar ils cftoient contraincls defe haftcr,pourfecourirlaplace:amp; comme ils furent aux chaps ils îçeurent la mort de leurs gens.

Le Duc de Bourgongne, contre l’opinion de ceux à qui il en demandoir, délibéra d’aller audeuant d’eux,à l’entrée des montaignes où ils eftoient en cores,qui cftoit bien fon delàuantage : car il eftoit bierfen lieu aduanrageux pour les attendre, amp;nbsp;clos de fon artillerie,^ partie d’vn lac : amp;nbsp;n’y 'auoit nulle apparence qui luy enflent feeu porter dômage. Il auoit enuoyé cent Archieis garder certain pas à l’encontre de cefte montaigne, amp;nbsp;kiy (emit en chemin: amp;nbsp;rencontrèrent ces Suifles la plufpart de fon armée, eftant encores en la p'ai ne.Les premiers rangs de fes gens cliidoient retourner pour fe reioindre aiicç les autres : mais les menues gens qui eftoiét derriere, cuidans que ceux la fui(-(ent,fe mirent à la fuite/ôc peu à peu fc commença à retirer cefte armée vers le carnp,fiiifans aucuns trelbien leur dcuoir.En fin de copte ,quâd ils vindiét iniques à leur Oft,ils*ne foferent defFendre,amp; tout fe mit à la fuite; éc o-aicrneiét * les Allemans fon camp amp;nbsp;Ion artillerie,amp; toutes les tentes amp;nbsp;pauillons de, luy ^effcndix.^ Sc de fes gens(dont il y auoit grand nombre)^ d’autres biens infinis, car rien * ne fe fauua que les perfonnes ; amp;nbsp;furent perdues toutes les grades bagues dd-diél Diic:mais des gens pour cefte fois ne perdit que fept Hommes-d’aimes. Tout le demeurant fuit, amp;: luy aufli. Il fe deuoit mieux dire de luy,quai perdit honneur amp;nbsp;chcuance ce iour, quel’on ne feit du Roy lehan de France, qui vaillamment fut prins à la bataille de Poiélicrs.

Voicy la premiere male fortune, que ce Ducemiâmais en toute fa vie: déroutes fes autres cntreprinles il auoit eu l’honneur ou le profit. Quel dommage luy aduint ce iour, pour vfer de fa telle, ôc mefpriferconfeil? Quel dommage en receut fil maifon, amp;nbsp;en quel eftat en eflêelle encores, amp;nbsp;en ad-ucntured’eftred’icy à longtemps.^ Qi^antes fortes degens luy en deuindréc ennemis, amp;nbsp;fe déclarèrent qui le iour de déliant temporifoient auec luy, amp;fefiiignoient amis? Et pour quelle querelle commença cefte guerrre ? de fut pour vn chariot de peaulxde mouton, que monfeigneur de Romorit ..

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148 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. LIVRE DES M E M O î P. E S

print a vn SuiEcjCn paiïant parla terre. Si Dieu n’enE dcIaifiélecL’â Duc, il n’eft pas apparent qu’il le full mis en peril,pcur fi peu déchoie, vcii les offres qui luy auoient eûc faiôles,amp; cotre quelles gens il auoit à faire,où il n’y peu-uoit auoir nul acqueft ne nulle gloire.Car pour lors lesSuifles n’eftoièt point cftimez corne ils font pour cede hcure;amp; n’eftoit rien plus panure: amp;nbsp;ay cuy dire à vn Chcualicr des leurs, qu’il auoit eflé des premiers Ambafladeurs, qu’ils auoient enuoyez deuers lediéf Duc, qu’il luy auoit dit, cnfaiGnt leurs remonftranccs,pour ledefmouuoirdecefle guerre, que contre eux nepou-uoic rien gaigncr:car leur pais eftoittrcs-lleiile amp;nbsp;panure, amp;nbsp;qu’ils n’auoicnt nuis bons prifonniers:amp; qu’il ne croyoit pas que les clperos amp;. mords des ebe uaux de fon oft,ne vaullillent plus d’argent que tous ceux de leurs tcnitoiies 49 ^nefçauroicnr payer de finances,fils cftoient prins.

Retournant à la bataille,le Roy fut bien toft aduerty de ce qui eftoir adue-»iipiufpatt nu:car il auoit maintes efpiesamp;meflagers par païs, * la plnfpart depefebez ftràngc amp;cn patmamainiSc eneuft tref grade ioye,amp; ne luy dcfplaifoitqucdu petit no-Xi/**”’^' brede gens quianoienr eftépcrdus:amp; fè tenoit ledilt;^ feignent, pour ces matières icy àLion,pourpouuoirplus fouuent eftre aduerty, amp;nbsp;pour dónerre-mede aux cliofes que ceft homme embraftbit.Car le Roy qui eftoit fige,crai gnoit que par force ne ioignift ces Suiftes àluy.-de la maifondc Sauoy e,ledi(ft Duc en difpofoit comme fien:le Duc de Milan,eftoit fon allié, le Pvoy René de Cecile luy vouloir mettre fon païs de Prouece entre les mains:amp;fi les choies fuftentaduenueSjil tenoit du païs depuis la mer de Ponant iufqucs a celle de Leuant en fon obeiflance;amp; n’euftenteeux de noftre royaume eu faillie linon par mer,fi lcdiéf Duc n’euft voulu,tenant Sauoye,Proucnceamp;. Lorraine. Vers chafenn d eux le Roy enuoyoït:! vne eftoit la focur,madame deSauoye extreme pour lediôl Duc. L’autre eftoir flt;®n oncle,le Roy René de Cecileiqui àgrand’peineefcoutoit les meflagers ,mais enuoyoit tontauDucdcBotir-gongne. 91? Roy enuoyoït vers ces ligues d’Allemaigne: mais c’eftoitàgrade difficulté,pour les chemins,ôc y faloit enuoyer mendians,pèlerins amp;nbsp;Icmbla-bles gens.Lcldaftes villes relpondirent orgueilleufcment, difans : Diéfes au Roy que fil ne fe declare,nous nous appointerons,amp; nous déclarerons contre luy . Il craignoit qu’ainfi le feiflcnt:defe declarer contre lediéh Duc, n’a-uoit nul vouloir,mais craignoit bié encores qu’il ne fuft nouuelle de fes mef-fagers,qu’il enuoyoit par païs.

'CommentalJresUcha/JedeQranßnJe DucdelŸlilanJeT^oyT^nédeQcikyla , Ducheße de SMoye, nbsp;nbsp;autres abandonnèrent l'alliancedtt Duc de Dour-

gongne. C H AT, II.

R faut feoir maintenant comme changea lemondeaprescc-ftebataille, amp;nbsp;comme les courages du Duc de Bourgongne amp;nbsp;de fes alliez furent muez,amp; comment noftre Roy condui-fit totitTigement;amp; fera bel exemple pour ces feigneurs ieu-nes , qui folement entreprennent, fins congnoiftre ce qui leuren peutaduenir, amp;nbsp;qui atiffi ne l’ont point veu par experience, amp;mef-prifent le confcil de ceux qu’ils deulTentappeller. Premièrement lediét Duc propre

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DE PHILIPPE DE C O M M LN E S. 14^ propre ennoya le Seigneur de Conray au Roy, auechûbles amp;nbsp;gracieufes pa-rollcs,qui eftoit cotre fà couftume amp;nbsp;naturc.Regardez doncqucs comme en vne heure de temps fc mua. Il prioit au Roy luy vouloir loyaument tenir là trefuc; f exeufoit de n’auoir cfté à la veuc, qui fe deuoit faire auprès d’Au-xcrrc;amp; alfeuroitfy trouucr de brief,lâ ou ailleurs,au bon plaihr du Roy.Le Roy luy feit trefbonne cherCjI’alTcurat de tout ce qu’il demandoircar encores ne luy fembloit pas temps de faire le contraire,amp; côgnoiifoit bie le Roy laloyautédes (ubieéls dudiôlDuc,amp; quctoflferoitrcfrouls:amp;: vouloir veoir la fin de celle aduenture, fans doncr occafion à nulle des deux parties de fac-corder.Mais quelque bone chere que le Roy feift audiól feigneur de Cotay, fi ouit il maintes moqueries par la ville; car les chanços fe difoiêt publique-ment à la louange des vainqueurs,amp; à la folie du vaincu.

Dés ce que le Duc de Milan Galeas ( qui pour lors viuoit ) fccut celle ad-Uenture,il en eut grande ioye,nonobllant qu’il full allié dudi(3:Duc:car il a-Uoit faiéle celle allian ce pour crainte de ce qu’il voyoit lediél Duc de Bour-gongneauoir 11 grand’faueur en Italie . Lediél Duc de Milan enuoya à grand’ halle vers le Roy, vn homme de peu d’apparence, Bourgeois de Mi-lan;amp; parvn médiateur fut adrelTé à moy, amp;nbsp;m’apporta lettres dudiél Duc. le dy au Roy fa venue,qui me commanda l’ouir; car il n’elloit point content dudicl Duc de Milan,qui auoit lailfé fon alliance pour prendre celle du Duc de Bourgongne, amp;VCU encores que fa femme elloit lœurdclaRoyne. La creance dudiôl Ambalfadeur elloit, comme fon maillre le Duc de Milan, c-Hoit aduerty que leRoy amp;nbsp;le Duc de Bourgongne le deuoient entre-veoir,amp; faire vne tref grade paix amp;nbsp;alliance enfemble, cequilèroitau trefgranddcf-plaifirdu Duc fon maillre,amp; donnoitdes raifons pourquoy le Roy ne le deuoit faire, aufquellesy auoit peu d’apparence .Mais dilbit, à la fin de fon propos, que li le Roy fe vouloir obliger de ne faire paix ne trefuc ^ucc ledict Duc de Bourgongne, que lediéf Duc de Milan donnoit au Roy cent mille Ducats contant . Q^nd le Roy eut ouy la fubllance de la charge de cell Ambalfadeur, il le feit venir en fa prefcnce ( où il n’y auoit que moy ) amp;nbsp;luy dill en brief : V oicy monlîeur d’Argenton, qui m’a dit telle chofe, didles à vollrc maillre que ic ne veux point de fon argent, amp;nbsp;que i’en leue vne fois l’an, trois fois plus queluy;amp;:dclapaix amp;nbsp;de laguerrc,i’enferay àmonvou-loir.-mais fil fc repent d’auoir lailTc mon alliance, pour prendre celle du Duc de Bour2'onsne,ie fuis content de retourner comme nous ellions. Lediôl Ambalfadeur mercialeRoy très humblement, amp;nbsp;luy fcmblabien qu’il n’elloit pointRoyauaricieux:amp; fuppliafortau Roy qu’il voulfift faire crier lef d idles alliances en la forme quelles auoient ellé;amp; qu’il auoit pouuoir d’obliger fon maillre à les tenir. Le Roy luy accorda, amp;nbsp;apres difner furent criées;amp; incontinent depefeha vn Ambalfadeur,qui alla à Milan,où elles furent criées à grand’folennité. Ainfi voyla délia vne d*s heurtes de faduerlité, vn grand homme mué,qui auoit enuoyé vne li grande nbsp;folennelle Am-

balfade vers le Duc de Bourgogne pour faire fon alliance,n’y auoit que trois fepmaincs.

Le Roy René de Cecile traidloit de faire le Duc de Bourgongne fon heri-N iij

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Ijo nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ÎV. LIVRE DES M E M O I R‘ ÊS

ticr,amp; liiy mettreProuencc entre fcs mains :amp;pour aller prendre pofTcf-fion dudiä: pais, eftoit allé monfeigneur de Chafleau guion ( qui pour lors viuoit) Vautres en Piemont, pour le Duc de Bourgongne, pour faire gensî amp;auoient bien vingt mille Efeus contant. Incontinant que les nouuellcs vindrentjà grand’peine fe peurentils Eiuuer qu’ils nefuflent prins : amp;: monfeigneur de Brefîe fc trouua au pais, qui print Icdióf argent. La Duchefle de Sauoye, incontinant qu’elle fccut les nouuellcs de cefte bataille, le fcirfça-uoir au Roy René, exeufant la chofe , le réconfortant de cefte perte. Les mefEagers furent prins, qui efloienr Prouençeaux ; amp;nbsp;par là fc defcouurit ce traiôé du Roy de Cecile auec le Duc de Bourgongne. Le Roy enuoya incontinent des Gens-d’armes pres de Proucncc,amp; des Ambaflàdeurs vers le Roy * de Cecile, pour Icpricr de venir, en l’aifcurantdc bonne chcre , ou autrement, qu’il y pouruoyroit par force . Tant fut conduiól le Roy de Cecile, qu’il vint deuers le Roy à Lion : amp;nbsp;luy fut fàiél très-grand honneur amp;nbsp;bonne chcre.Ie me trouuay prefent à leurs premieres parollcs à rarriuée:amp; dift Icha Coffe, Senefchal de Proucncc, homme de bien amp;nbsp;de bonne maifon du royaume de Naples au Roy ; Sire,ne vous cfmerueillez pas fi le Roy mon mai-flrc,voftrc oncle a offert au Duc de Bourgongne le faire fon heritier : car il cnaefléconfcilléparfesferuitcurs, amp;: par efpecial par moy; veii que vous qui cftes filz dcGfœur, amp;nbsp;fon propre nepueu, luy auez fait les torts fi grans quedeluyauoirfurptinsleschafteauxdeBar amp;d'Angers,amp; fi mal traiâc en tous fes autres affaires. Nous auons bien voulu mettre en auant ce marché auec ledid Duc, afin que vous ouifTiczlesnouuclles, pour vous donner enuie de nous faire la raifon, amp;nbsp;congnoiftrequeleRoy mon maiftreeft voffre oncle : mais nous n’cufmcs iamais enuie de mener ce marché iufques au bout . Le Roy recueillit trefbien amp;nbsp;treffagement ces parolles, que lediét lehan Coffe dift tout au vray, car ilconduifoit cefte matière: amp;à peu de iours de la furent ces differens bien accordez, amp;nbsp;eut le Roy de Cecile de l’argent amp;nbsp;tous fes feruiteurs, amp;nbsp;le feftoy.a le R oy auec les Dames : amp;nbsp;le feit fe-ftoyer amp;nbsp;traider en toutes chofes felô fa naturc,lc plus près qu’il peut : amp;nbsp;furent bons amys,amp; ne fut ƒ lus de nouuellcs du Duede Bourgongnc,mais fut abandônnédu Roy Rene,amp; rcnoncédetoutcs parts. Voila encores vn autre malheur de cefte petite aducrfitc. Madame de Sauoye,qui long temps auoit *Mantangy cfté cftiméc cftrc couttc Ic Roy fon frcrcjcnuoya vn meffager lecrct,appcllé

-vmu Jefeigneurde*Montaigny,lequelfadreffaàmoy, pourferéconcilier auec Je Roy.-amp; allégua les raifons pourquoy elle feftoit feparec du RoyTon frere, amp;nbsp;difoit des doubtes qu’elle auoit du Roy ; toutesfois elle eftoit treffage, amp;nbsp;vraye foeur du Roy noftrc maiftre, ôc ne ioignôit point franchement a fe fe-parer dudid Duc, ne (Je fon amitié : fcmbloit qu’elle voulfift temporifer, amp;nbsp;attendre comme le Roy, ce qu’il (croit encore de l’aduenturc dudid Duc. Le Roy luy fut plus gryieux que de couftumc,amp; luy feit faire par moy toutes bônes refpôces:amp; tafehoit qu’elle vint deuers luy ,amp; luy fut renuoyé fon homme. Ainfi voila vnc autre des alliances dudid Duc, quimarchandeàlê départir de luy . De tous coftezen Allemaignefecommenccrentàdecla-rcr gens contre ledid Duc, amp;nbsp;toutes ces villes Imperiales : comme Nuremberg,

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’ DE PHILIPPE DE CO MM IN ES. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;in bergjFracforr, amp;nbsp;plufieiirs autres, qui fallieret auec ces vieilles amp;nbsp;nouuelles alliacés cotre IediôlDuc:amp; fébloit qu’il yeuft tref grâd pardô à lui mal Etire. Les defpouilles de Ion Oft enrichirent fort ces pauures gensde Suifles ;qui de prime-face ne congntir^nt les biens qu’ils eurent en leur mains, amp;nbsp;par fiott flirLiJim* cfpccial les plus ignorans. Vn des plus beaux amp;nbsp;riches pauillons du monde ƒ«, Ju iempt futdepartyenplulieurspi'eces. Ily eneut qui vendirent grand’quantité de plats, amp;nbsp;d’efcuellcs d'argent, pour deux grands blancs la piece,cuidans que Ce fuft cftaing. Son gros Diamant {qui eftoit vn des plus gros de la Chre-ftienté) où pendoit vnegrofle perle, fut leué parvn Suifle, amp;nbsp;puis remis en fon cftuy, puis rcietté foubs vn chariot,puis le rcuint quérir, amp;nbsp;l’offrit à vn Prcbftre pour vn Florin. Ceftuy là l’enuoya à leurs feigneurs, quiluy en dó-nerent trois frâcs.Ils gaignerent trois Balais pareils,appeliez les trois Freres; nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;।

vn autre grâd Balai appelléla Hotte:vn autre appelle la Balle de Flàdres(qui eftoient les plus grades amp;nbsp;les plus belles pierres,que l’ô euft Iceu trouuer)amp; d’autres biens infinis:qui depuis leur ont bien donné «à congnoiftre que l’argent vault. Car les* vidoires amp;nbsp;eftimations en quoy le Roy les mit des-lors, *

lesbiens qu’il leurafaids, leur ont fait recouufer infiny argent. Chafeun Ambaffadeur des leur, qui vint vers le Roy à ce commencement, eut grads donsdeluy, en argent ou envaiffelle; ôc parcemoyen Icscqhtcntoitdece qu’il ne feftoit déclaré pour eux:amp; les renuoyoit les bourfes pleines, amp;nbsp;reue ftusdedrapdefoye.’amp;fcprintàleur promettre penfion, qu’il paya bien depuis : mais il veit la fécondé bataille auant : amp;nbsp;leur promit quarante mille Florins de Rhin,tous les ans. Les vingt mille pour les villes,amp; les autre vingt rnillcpour les particuliers, qui auroient le gouucrncment defdidcs villes. F-t ne penfe point mentir de dire, que ie croy que depuis la premiere bataille dcGrâfon,iufquesau trefpasdenoftremaiftre,lcfdides villes amp;nbsp;particuliers dcfdids Suiffes, ont amendé d’vn million de Florins de Rhin. Etg’enten de villes que quatrc:Bernc,Luccrne,Fribourg,Surich,amp; leurs Gâtons, qui font leurs montaignes .Suifle en eft vn,qui n’eft qu’vn village. Ven ay veu dccc village vn,eftant Ambaffadeurauec autres, en bien humble habillement, qui neantmoins difoit,comme les autres,fon aduis. Soleurreôc Ondrcual pcllent les autres Cantons

Comment les Suites deffirent en bataille le Duc de Bourgongne^res de U 'vdledeZ^ltCorat. CHAT, III.

O V R reuenir au Duc de Bourgongne,il ramaflbit gens de tous coftez:amp; en trois fepmaines fen trouuafus grandno-bre,qui le lourde la bataille f eftoient efeartez. Ilfeiourna à Lofane en Sauoye:où vous monfeig^eur de Viêne, le fer-uiftes dcbonconfeil, envnc grande maladie qu’il eut de douleur amp;: de trifteffe,de cefte honte qu’il auoit receué. Et à bien dire la verité,ic croy que iamais il n’eut l’entendement fi bon qu’il a-uoit eu au parauant cefte bataille. De cefte grande aflcmblce amp;nbsp;nouuelle armée, qu’il auroit faiôlc,i’en parle par le rapport demonfeigncurlc Prince de Tarente, qui le compta au Roy en ma prefcnce. Lcdid Prince, enuiron

N iiij

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I5X nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. LI VRE DES MEMOIRES

vn an aiiant,efl:oit venu vers ledidl Duc,trefbien accompaigne, efperant d’iï-* uoir fl fille amp;nbsp;feule fieririerc:amp; fembloit bien filz de Roy, tant de fa perfon-ne que de fonaccouftrcmcntSd de fl compagnie Ie Roy de Naples, Ion pere,monfl:roitbienn’yauoirriencfpargne. Toutcsfoislcdiót Duc auoic diflimulc celle matière, amp;nbsp;entretenoit pour lors Madame de Sauoye , pour fon filz, amp;nbsp;autres. Parquoy lediélPrince de Tarente, appelle Don Federic d’Arragon,amp; aufii ceux de Ion confeil,mal contens des delays, enuoyerent dcLiers le Roy vn Officier d’armes bien entendudequel vint Iiipplier au Roy donner fauf-conduit audidl Prince, pour pafler par le Royaume, amp;nbsp;retourner vers le Roy fon pere, lequel I’auoit mandé . Le Royloólioya tref-vo-^lontiers, amp;luy fembloit bien que c’eftoit à la diminution du credit amp;nbsp;re-• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nommée dudiólDucde Bourgongne . Toutesfois auant que le meflager

full de retour, efloient ja affemblécs plufieurs des Ligues d’Àllemaigne, amp;nbsp;logées auprès d'udiél Duc de Bourgongne. Lediôl Prince print congé du-diôlDuc, lefoir deuant la bataille, en obeifTantau mandement du Roy fou • • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pere. Car à la premiere bataille f efloit trouue comme homme debien. Aulîi

difentaucuns qu’il vfa de voflreconfeil,monfeigneur de Vienne: carie luy ay ouy dire amp;nbsp;tcfmoigncr, quand ilfutdeuers leRoy arriué, amp;nbsp;au Duc d’A-fcoly,appellc le Comte Iulio,amp; à plufieurs autres:amp;: que de la premieze amp;nbsp;fécondé bataille auezeferit en Italie, ôddiâ:ce qui en aduint,plufieurs iours auant qu’elles fuffent faiéles.

Comme i’ay dit,au partement dudiél Prince, eftoient logées plufieurs de ces Alliances affez pres dudiét Duc:amp;: venoient pour le combatte, allans lener le fiege quil auoit deuant Morat,petite ville pres de Berne, qui apparte-, noit a monfeigneur de Romont. Lefdiéls alliez, comme il me fut diél par ceux qui y eftoient, pouuoient bien eftre trente amp;nbsp;vn mille Hommes de pied, bien choifis amp;nbsp;bien armez : c’eft à fçauoir onze mille Piques, dix mille Hallebardes, dix mille Couleurines , amp;nbsp;quatre mille Hommes-à-chcual. Lefdiéles Alliances n’eftoient point encores toutes aflcmblées ,amp; ne fe trouua à la bataille que ceux dont i’ay parlé, amp;: fuffifoit bien. Monfeigneur de Lorraine y arriua àpeu de gens,dont fort bien luy en print depuis : car le-diél Duc de Bourgongne tenoit lors toute fit terre. Audiél Duc de Lorraine print bien de ce qu’on fennuyoit de luy en noftre Court :amp;:croy bien qu’il ne feeut iamais la vérité : mais quand vn grand homme a tout perdu le fien, il ennuyé le plus fouucnt à ceux quilcfouftienncnt. LeRoy luy auoit donné vn petit d’argent, amp;nbsp;le feit conduire auec bon nombre de Gens-d’armes âtrauers du pais de Lorraine.Tefquels le mirent en Allemaigne, amp;nbsp;puis retournèrent. Lediél Seigneur de Lorraine n’auoit pas feulement perdu fon païs de Lorraine, la pointé de Vaudemont, amp;nbsp;la plufpart de Barroys ; car le demourantleRoyle tenoit. Ainfineluy eftoit rien demouré. Et qui pis eftoit, tous fes fubieélèauoient fait ferment audióh Duc de Bourgongne,ôi fans contrainte ;amp;iufques aux feruiteurs de fit maifon. Parquoy fembloit qu’il y euft peu d’efperance à fon faiôl; toutesfois Dieu demeure toufiours leiuge,pour determiner de telles caufes, quand il luy plaift.

Apres que le DuedeLorraine fut pafte, comme i’ay dit, amp;: quand il eut i I . nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;cheuauché

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JJ il PHILIPPE DE C O M M 1 IN E S. 153 cheuauchc aucuns iours,ilarriua vers lefdiôles /illiances, peu d’heures auant hbaraillejamp; auccpeu degens:amp;: luy porta ce voyage grand hôneur, amp;nbsp;grâd profit.'car fi autrement en full; allé, il eulltrouuc peu de recueil. Sur l’heure qu’il fut arriuémarchoient les batailles d’vn coEéamp; d’autre; car lefdiftes Alliances auoient ja elle logées, trois iours ou plus, auprès du Duc de Bourgogne en lieu fort. A peu dedeffencefut defeonfit lediôtDùc,amp; mis enfuite;amp;: ne luy print point corne de la bataille precedete, où il n’auoit perdu que fept Kornes d’armes.Et cela aduintpource que lefdiólsSuifles n’auoiét point de Gens de cheual.Mais à cefte heure cy,dôt ie parle,qui fut pres Morat,y auoit delà part defdiéles Alliances quatre mille Hommes de cheual bien montez, qui chafierent trefloing les gens dudiéf Duc de Bourgongne : amp;nbsp;fi ioignirêc leur bataille à pied auec les Gens de pied dudiéf Duc qui en auoit largement: car ûns fes fubieéfs amp;nbsp;aucuns Anglois qu’il auoit en grand nobre,il luy eftoit Venu de nouueau beaucoup de gens du pais de Piedmont, amp;nbsp;autres des fub-ieâs du Duc de Milan,côme i’ay dit:amp; me dift ledidl Prince deTarente,quad ilfutarriuédeuers IeRoy,queiamais n’auoit veu fi belle arméeiôc qu’il auoic compté amp;nbsp;fait compter l’armée en paflant fur vn pont, amp;nbsp;y auoit bien trouué vingt amp;nbsp;trois mille hommes de foLildc, fanslerefle qui fiiyuoit l’armée, amp;nbsp;qui eftoit pour le faiél de l’artillerie. A moy me femble ce nombre tref-grâd, combien que beaucoup de gens parlent de milliers, Sc font les armées plus groITes qu’elles ne font,amp; en parlent legerement.LcIcigneur de Contay, qui arriua vers le Roy, to fl: apres la bataille,confelTa au Roy, moy prefent, qu’en ladiéle bataille eftoient morts huiél mille hommes,du party du Duc prenas gages de luy,amp; d’autres menues gens afléz.Et croy, à ce quei’cn ay peu enté-dre,qu'il y auoit bien dixhuiél mille perfonnes * en tout : amp;; eftoit aife à croi-t nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I 1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;* nbsp;nbsp;nbsp;1 I J gt;nbsp;-1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;»»l'f, peUon-

te,tant pour le grand nombre de Gens de cheual, qu il y auoit, qu auoient nés mortes plufieursfeigneurs d’Allemaigne,qu’aufli pour ceux quiefloient encores au mquot;ones’7p’» hege deuant lediél Morat.Le Duc fuit iufques en Bourgongne, bi^n defolé,y^,^“^quot;«tX comme raifon cftoit;amp; fe tint en vn lieu,appellé la Riuiere, où il raircmbloir^^'’“^’^^^^/-des gens tant qu’il pouuoit.Les Allemans ne le chalferent que ce foir, amp;nbsp;puis - «-le retirèrent lans marcher apres luy. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;y«« u Tr^d».

tit»r en ltit~ lie le ^fteainjt Comment apres la bataille de Moratje Duc de ^ourgongnefefaifit de laperßnne deMadame deSauojye:e^ comment elleenßutdeliuréc, nbsp;nbsp;renuoyèeenJon

pays par le moyen du 7{oy. nbsp;nbsp;nbsp;(jH AP. 1 111.

Este aduenturedefefpera lediél Duc:amp; luy fcmblabié que tous fes amis l’abandonneroient, aux enlcignes qu’il auoic veués défia à fapremierc perte de Griffon:dôt il n’y auoit que

y trois fepmaines iufques à celle dont ie ptorle.Et pour ces dou-tes,parlecofeild’aucuns,ilfcit amener par force, la Duchef-fe de Sauoye,enBourgongne,amp; vn efe fes enfans, qui depuis futDuc deSauoye. L’aifnéfutfauué par aucuns feruiteurs de celle maifon de Sauoye:car ceux qui feirent cefte force,le feirent en craintc,amp;: furent contraints de fehaller. Ce qui fait faire cell exploid audiél Duc, fut de peur

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154 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. LIVRE DES MEMOIRES

qu’eile ne fê retirait deuers le Roy fon frere, dilànt que pour fecourir la maî-fon deSauoyeJuy eftoitaduenu toutcemal. Lediâ: Duc la feit mener au chafteau de Rouure près de Dijon, amp;nbsp;y auoit quelque peu de garde : toutes-fois il Pal loi t veoir qui vouloir,amp; entre les autres y ail oit môfeigneur de Cha fteau-guion,amp; le Marquis de Rotelin, quieftoient pour lors: defquels deux lediót Duc auoit rraidé le mariage auec deux filles de ladiôle Duchefle, combien que lors lefdióts deux mariages ne fufient point accomplis:mais ils l’ont efié depuis.Son filz ailné, appelle Philebert, lors Duc de Sauoye , fut mené à Chambery,par ceux qui le lauucrent: auquel lieu fe trouua l’Euef-que de Genefue,fils de la maifon de Sauoye : qui eftoir homme tref volontaire,amp; gouuernéparvn Commandeur de Rhodes. Le Roy feit traider auec *ledidEucfqueamp; fon Gouuerncur, Commandeur deRhodes, en maniéré qu’ils mirent entre les mains dudidfeigneur, le Duc de Sauoye, amp;nbsp;vn petit frcre,appellé le Protcnotaire,aucc le chafteau de Chambery amp;nbsp;celuy dcMót-* melian;amp; luy garda vn autre chafteau,où eftoient toutes les bagues de madi-de Dame de Sauoye.

Au piuftoft que ladidc Duchelfe fetrouua à Rouure (comme i’aydit) accompaignée de toutes fes femmes, amp;nbsp;largement feruiteurs, amp;: qu’elle veit IcDucbien empefchéàraftembler gens, êcqueceux qui la gardoient, n’a-uoientpas la crainte de leur maiftre telle qu’ils fouloicnt, amp;nbsp;aucientaccou-ftumé d’auoir,ellc fc délibérad’enuoyervers le Roy fon frere, pour traider appointement , pour fupplier qu’il la redraft. Toutesfoisclle eftoit en grande doute de tomber fous fa main, n’euftefté le lieu où elle fe voyoit: car la haine auoit cfté moult grande amp;nbsp;longue entre ledid feigneur amp;nbsp;elle. Il vint de par ladide Darne vn Gentil-homme de Piedmont,appellé Riuerol, fon maiftre d’hoftcl : lequel parquelqu’vnfutaddrcfté àmoy.Apres l’auoir ouy,amp; dit an Roy ce qu’il m’auoit dit, 1 edid feign ciirl’ou it : amp;apres l’auoir ouy,luy dift qu’à tel befoingne vouldroit auoirfailly àla lœur , nonobftant leurs différends pairez:amp; fi elle fe vouloir allier de luy, qu’il la feroit enuoyer quérir par le Gouuerneur de Champaigne,pour lors meflire Charles d’Am-boife, feigneur de Chaumont. Ledid Riuerol print congé du Roy, amp;: alla vers famaiftrefle à tref grand’ hafte.ElIefutioyeufede celle nouuelle , tou-tesfoisellerenuoyaencores vnhomme incontinent qu’elleeut ouy le premier,fuppliant au Roy qu’il luy donnaftfeureté, qu’il la lailîaft aller en Sa-uoyc,amp; qu’il luy rendift le Ducfon fils ,amp; l’autre petit, amp;c auftilcs places, amp;nbsp;qu’il l’aydaft à la maintenir en fon authorité en Sauoye : amp;nbsp;de fii part, qu’elle eftoit contente de renoncer a toutes alliances,amp; prendre la ficnne. Ledid feigneur luy bailla tout ce qu’elle demandoit : incontinent enuoya vn homme expres vers Icflid feigneur de Chaumont, pour faire l’entreprinfc: laquelle fut bien fiiide, amp;nbsp;bien executee, amp;nbsp;alla ledid feigneur de Chaumont,auec bon nombre de gens,iufquesà Rouure,fins porter dommage aupaïs: amp;nbsp;amena madame de Sauoye tout fontrain , en la plus prochaine place, en l’obeïflance du Roy. Quand ledid feigneur depefeha le dernier meffager de ladide Dame, il eftoit ja parti de Lion: où il feftoit tenu par 1 cf-pacedefixmoys,pourfagement dem effet les entreprinfes du Duc deBour-gongne,

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DE PHILIPPE DE C O M M I N E S. ny gongnc fans rompre la trcfue. Mais à bien congnoiEre la condition dudidl Duc Je Roy liiy Èiifoit beaucoup plus de guerre en le laiflant faire,amp; luy fol-licitarit ennemis en fecret, que fil le full declare contre luy .-car apres ce que ledid Duc euft veu la declaration,il le fuE retire de fon entreprinfe : parquoy tout ce qui luy aduint,ne luy fuft point aducnii.

Le Roy incontincnt,encôcinuantlon chemin,au partir de Lion fe mit fur lariuieredeLoirc àRouenne, amp;nbsp;vinta Tours. Dés ce qu’il y fut,fceutlade-liurance de la fœur,dont il fut trel]oyeux:amp; manda diligemment qu’elle vint cieuers luy,amp; ordôna delà delpencequ’ellepourroit faire en chemin. Quad cilearriua,ilenuoya largement aux gens au deuant d’elle; amp;nbsp;luy mefme l’alla recueillir a la porte du PltlTis du Parc,amp; luy leit ti tEicr. v)Dgc,cn Ii.y difant; Madame * de Bourgongne,vous loyez la trclbicn venue. Elle congnut bien* fon vilage,qu’il ne le faifoit que ioüer ; amp;nbsp;relpondit bien (agemenc qu’elle c-lloit bôneFrâçoi(c,amp;:prefted’obeïrau Roy,en ce qu’il luy plairoit luy com. mandcr.LediiTfeigneur la mena en fr chambre,amp; la feit bien traider. Vray eftqu’il aucittres-grâdeenuie d’en eßre dcpefché.Elîe ePeir treflage,amp; l’en-trecongnoilToient bien tous deux;amp;defiroit encores plus fon partement.feu la charge du Roy de ce qui eftoit à frire en cefte matière. Premier de trouuer argent pour Ion dcfFroy,amp; pour l’en retourner,^ des draps de foye:amp;: de faire mettre par elcrit leur alliance,ôc forme de viurc,pour le temps aduenir. Le Roy la voulut delmouuoir du managt (dont i’ay parlc)dc fes deux fillesiraais elle l’en exeufoit furies hiles, lelquellcs y cEoyent ohEinées:amp; à la vérité, elles n’y eEoient point mal. Quand ledicl feigneur cognent leur vouloir, il fy Cüfcntir:amp; apres que ladidcDamc eut eEéaudiôl heu du Pleffis fept ou huiôt iours, le Roy nbsp;nbsp;elle feirent ferment enfemble d’eEre bons amis perur le téps

aduenir; Sc en furent baillées lettres d’vn coEé d’autre: amp;nbsp;print congé ladi-âe Dame duRoy,quilafcic bien conduire iufques chez.elle: amp;nbsp;luy feit rendre fes enfms,amp; toutes fes places, amp;nbsp;bagues, amp;nbsp;tout ce qui luy apparçenoit. Tous deux furent bien ioyeux de départir l’vn de l’autre : amp;nbsp;font demeurez depuis comme bon frere amp;nbsp;bonne fœur iufques à la mort.

Comment le Dtic de ‘BottrgongneÇe tint (jttelqtiesJepmaines commejolitaire'. comment cepcndantleDitcde Lorraine recouarafa ville de^ancy. QH AT. V.

OvR continuer rnonpropos, faut parler du Duc de Bour-gongne: lequel apres la fuite de ceEe bataille de Morat ( qui futen l’an mil quatre cens feptante hx) f’eEoit retiré à l’en- j y trée deBourgongne,cnvnlieuap^TellélaRiuiere : auquel lieu il feiourna plus de fix fepmaincs,’%yant encores coeur de r allemblcrgens. Toutesfois il y befongnoit peu fe tenoit comme foli-taire:amp;: fembloit plus qu’il faifoit par obEination ce qu’il faifoit , qu autrement, commevous entendrez : car la douleur qu’il cuE de la perte de la premiere bataile de Granfon,fut fi grande,amp; luy troubla tant les efprits, qu’il en tomba en grande maladie: amp;nbsp;fut telle que là où fa cholerc amp;nbsp;chaleur na-

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turellc cftoit ß grande qu’il ne bcuuoit point de vin, niais le matin beuiioit ordinairement de la tifàne, amp;nbsp;mangeoitdelaconfcruedc rôles pour le ra-frefebir , ladittetriftelfe mua tant (â complexion, qu’il luy faloit faire boire le vin bien fort fans caue: amp;nbsp;pour luy faire retirer le fang au cœur, mettoient deseftouppes ardentes dedans des ventoufes; amp;les luy palfoient en celle chaleur à l’endroit du cœur. Et de ce propos,vous monfeigneur de Vienne, en fçauez mieux que moy; comme ccluy qui luy aidallcsâ palTer celle maladie ; amp;nbsp;luy feilles faire la barbe, qu’il laiflbit croillre. Et à mon aduis, on-ques puis ladidc maladie , ne fut lifage qu’au parauant, mais beaucoup diminue de fon fens. Et telles font les pallions de ceux qui apres femblables infortunes, ne cherchent les vrais rem*edcs,amp; par efpecial les Princes, qui font orgueilleuxrcar en ce cas amp;nbsp;en femblables, le premier refuge ell retourner à Dieu,amp;: penfer fi en rien onFaolfenfé, amp;nbsp;f’humilier deuantluy, amp;cÔ-gnoillrc fes melFaits : car c’cll luy qui determine de tels proces, fans ce qu’on luy puilTe propofer nul erreur. Apres cela,fait grand bien de parler à quelque amy de les priuez,amp; hardiment plaindre fes douleurs, amp;c n’auoir point de hôte de monllrer là douleurdeuantl’intimeamy : carcelaallcgelccœur,amp; le reconforte: amp;nbsp;les elprits reuiennent en leur vertu, parlant ainli à quelqu’vn en confeibou bien faut prendre autre remede,par quelque exercice Silabeur (car il ell force,puis que nous fommes hommes, que telles douleurs palfent auec paillon grandc,ou en public ou en particulier)^: nô point prédre le ehe min que print lediót Duc de le cacher,ou fe tenir folitaire: mais faire le cotrai re,amp; chalfcr toute auflerité. Car pource qu’il elloit terrible à fes gens, nul ne foloitauancerde luy donner nul confort ou confeil; mais le laillbient Elire a. fon plaifir,craignans que fi aucune chofe luy culTent remonllré, qu’il ne leur en full mal prins.

Pendaiÿ ces fix fepmaines,ou enuiron, qu’il feiourna auec peu de gens ( qui n elloit point de merucilles, apres auoir perdu deux fi grollès batailles, comme vous auez ouy ) amp;nbsp;que plulicurs nouueaux ennemis fe furent déclarez,amp; les amis refroidis,amp; les lubicôls rompus amp;nbsp;delfaióts, amp;nbsp;qui commen-çoientà entrer en murmure, amp;nbsp;auoirleur maillre en mefpris,commeell bien de coLillume, comme i’ay dit, apres telles aduerfitez plufieurs places petites,furent deffaicles amp;nbsp;prinfes fur luy en celle Lorraine; comme Vaude-mont,amp;puisEfpinal,amp; autres apres. Et de tous collez fe commencèrent à clueiller gens pour luy courre fus : amp;nbsp;les plus mefehans efloient les plus hardis.Et fur ce bruit, le Duc de Lorraine aflcmbla quelque peu de gens, amp;nbsp;de peuple: amp;fen vint loger deuant Nancy. Des petites villes d’enuiron, il en tenoitlaplufpart:tout^foisle Duc de Bourgongne tenoit encores le Pont-à-moulfon , à quat^ lieües dudiôt Nancy , ou enuiron. Entre ceux qui ‘ cftoient dedans alfiegez, elloit vnde la maifon de Croy, appelle mon fei-* Bieutet gneut de * Beures,bon Cheualier amp;nbsp;honnelle, il auoit gens de pieces; ôcen-•«»«»/. tre les autres aulTi elloit dedans vn Anglois, appelle * Cohin, tres-vaillant ♦ Colpm. , nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;/ P nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;* , , nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.-

homme,de petite ngnec:amp;:lamcnay auec autres de la garnifon de Guynes. fUirtvhH, nbsp;nbsp;nbsp;f^ryiee du Duc. Ledilt;5k Cohin auoit enuiron trois cens Anglois, foubs

luy en ladiôle place. Et combien qu’ils ne fulTcnt point prelTez de bateric, ncd’ap-

t

I;

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DE PHILIPPE DE C O M M I N E S. 157 ne d’approches, fi leur ennuyoit il de ce que ledid Duc de Bourgongne mettoit tanta les fecourir: amp;nbsp;à la vérité, il auoic grand tort quilnei’appro-choit : car làoùileftoit, c’eftoit loing du païs de Lorraine, amp;nbsp;n’y poüuoit plus de rien fèruirxar il auoit mieux befoing de defFendre ce qu’il pofledoit, que de courre fus aux SuifTcs, pour fe cuider venger de Ion dommage. Mais fon obftination luy porta grand dommage amp;nbsp;ce qu’il ne prenoit confeil que de luy: car quelque diligence qu’on feift de le folliciter de fecourir celle place, il feiourna, fans nul befoing, audid lieu de la Riuiere, fix fepmai-nes ou enuiron : amp;nbsp;fil euft fait autrement, il euft aifément fecouru ladiôlc place: car lediâ: Duc de Lorraine n’auoit point de gens deuant, amp;: en gardant le pais de Lorraine, il auoit toufiours fon paffage pour venir de fes autres feigneuries palTer par Luxembourg amp;nbsp;par Lorraine,pour aller en Bour-^ gongne. Parquoy fi laraifon euft efté enluy telle, quelleauoit efteautref-^ fois,il y debuoit faire autre diligence.

Cependant que ceux qui eftoient dedans Nancy , attendoient leur (c-cours, lediôh Cohin,dont i’ay parlé,qui eftoit chef de cefte bande d’Angloys qui eftoient dedans, fut tué d’vn canon , qui fut grand dommage audiét É)uc de Bourgongne : car la perfonne d’vn feul homme eft aucunesfois cau-fe de preferuer fon maiftre d’vn grand inconuenient, encores qu’il ne (bit de là maifori,hc de lignée grade, mais que feulement le fens amp;nbsp;lavertu y foicnr. Et en ceft article ay congnu au Roy, noftre maiftre,vn grand fcns;car iamais prince n’eut plus grande crainte de perdre fes gens que luy . Incontinent quelediélCohinfut mort, les Anglois qui eftoient (bubs luy »commencèrent à murmurer j amp;nbsp;à fe defefperer du fecours : amp;nbsp;ne congnoiftbient point bien la petite force du Duc de Lorraine, amp;nbsp;les grands moyens qu’auoit le Duc de Bourgongne de recouurer gens: mais par le long temps qu’il y auoit ■que les Angfois n’auoient eu guerres hors de leur Royaume, ils n’enten-doient point bien lefaiôldes fieges: amp;nbsp;en effcôl,fe mirent à vouloir parlementer, amp;nbsp;dirent audióh Seigneur de Beures, qui eftoit Chef en la vi 11 e,f’il n’appointoit, qu’ils appointeroient fans luy Combien qu’il fuft bon Che-ualier,fi auoit il peu de vertu, amp;nbsp;vfa de grandes prières Sgt;c de grandes remon-ftranccs : amp;nbsp;croy fi plus audacieufement il euft parlé, qu’il luy en fuft mieux prins, finon que Dieu en euft ainfi ordonné. Car il ne faloit que tenir encores trois iours, qu’ils n’euftent eu du fecours. Mais pourabregcr,ilcompleut ócfeconfcntitauxdcftufdiéls Anglois : amp;nbsp;rendit la place au Duc de Lorraine, fl U fs leurs perfonnes amp;nbsp;biens.

Le lendemain, ou pour le plus tard, deux iours apres ladide place rendue, le Duc de Bourgongne arriua auprès bien accompaigné, félon le cas: car ils luy eftoient venus quelques gens du quattief de Luxembourg, qui venoient de fes autres Seigneuriesamp; fe trouuercnt leéRél Duc de Lorraine . amp;nbsp;luy : toutesfois il n’y eut rien d’importance, par c^ que lediél Duc de Lorraine n’eft oit aflez fort . LediblDucde Bourgongne fe mit encores apres fon efteuf à remettre le fiege deuant Nancy: amp;nbsp;luy euft mieux valu n’auoir ja efté fi obftiné en (à demourée;maisDieu prepare tels vouloirs extraordinaires aux Princes, quand il luy plaift muer leur fortune. Si ledid feigpeur euft b

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158 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. LIVRE DES MEMOIRES

voulu vfcr de confeil,amp; bien garnir les petites places d’entour, il euft en peu de temps recouurc laplace:car elle eftoit tres-mal pourueüe de viurcs,amp; y a-uoit aHez amp;nbsp;trop de gens,pour la tenir à dcftroiôl, amp;nbsp;euft peu rafrefehir îon armée, amp;nbsp;la refaire:mais il le print par autre bout.

Des grandes trahijom du Comte de (ampobachc'. nbsp;nbsp;cornent il empefehate Duc

de Bourgongne d'ouir njn Genttl-homme ^ui les luy vouloitreueler deuant ^u^rependu: nbsp;nbsp;ne tint compteauj/ide taduertif^ment que luy en

donna le nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;CHAT, y L

E pendat qu’il tenoit ce fiege malheureux pour luy,amp; pour tous fes fubicôts, amp;nbsp;pour aflez d’autres, à qui la querelle ne touchoit en rien,cômencerêt plufieurs des fies à pratiquer: amp;nbsp;ja (comme i’ay dit) luy cftoiêt fours ennemis de tous co-n:cz:amp;entre les autrcs,lc Comte Nicole de Capobachc,dil royaume deNaples,dót il eftoit chafle pour la maifo d’An-joujôc l’auoit retiré le Duc apres le trefpas du Duc Nicolas de Calabre, à qui il eftoit fcruiteur,amp; plufieurs autres des feruitcurs dudiét Duc.Cc Comtee-ftoit trcfpauiire(cômc i’ay ditaillcurs)amp; de meuble amp;nbsp;d’heritage.LeDucdc Bourgongne luy bailla d’entrée quarantemillc Ducats d’impreftancc, pour aller faire fa charge en Italie,qui eftoit de quatre cens Lances qu’il pay oit pat û main:amp; dés lors comença à machiner la mort de fon maiftre (comme i’ay défia dit) amp;nbsp;continua iufques à celle heure dót ie parle : amp;nbsp;de nouueau voyât fon maiftre en aduerfité,commença à pratiquer, tant enuers môfeigneur de Lorrainc,qu’auec aucuns Capitaines amp;nbsp;feruitcurs que le Roy auoit en Cha-paigne,prcs de l’armée dudid Duc. Audid Duc de Lorraine promettoit tenir la main,que ce fiege ne fauanccroit point,amp; qu’il feroittrouucrdesdef-faulx és Aofes plus neccfïaires pour le fiege, amp;nbsp;pour la baterie : ôc il le pou-uoit bien Elire, caril en auoit la principale charge, amp;nbsp;toute rauthoritcaucc lediét Duc de Bourgongne. Aux noftres pratiquoit plus au viEcar toufiours prefentoit de tuer ou prendre fon maiftre ; ôc demandoit le payement de fes quatres cens Lances,vingt mille Ëfeus contant,amp; vnc bonne Comte.

, nbsp;nbsp;nbsp;Durant qu’il conduifoit ces marchez, vindrentaucuns Gentils-hommes

du Duc de Lorraine, pour entrer en la place. Aucuns y entrèrent, autres fu-rent prins : dont l’vn fut vn Gentil-homme de Prouence, appelle* Cifron, /ur»«». lequel conduifoit tous les marchez dudiél Comte aucc ledid DucdeLor-laine. Le Duc de Bourgongne commanda que lediôb Cifron fuft incontinent pendu : difmt que depuis qu’vn Prince a pofe fon fiege, amp;nbsp;fait tirer fon artillcriedcuaftt vnc place, fi aucuns y viennent pour y entrer, amp;nbsp;la reconfortercontrelliy ils (ont dignes de mort, par les droids de la guerre: toutesfois il ne fen vf^oint en nos guerres, qui font aflez plus cruelles que la guerre d’Italie amp;nbsp;d’^aignc,la où on vfc de cefte couftumc.Quoy qu’il y cuft,ledid Duc voulut que ccGcntil-homme mouruft : lequel quand il veit qu’en fon faid n’y auoit nul remede, amp;nbsp;qu’on le vouloir mener mourir, manda audid Duc de Bourgongne, qu’il luy pleuftl’ouir, amp;nbsp;qu’il luy «« nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ditoic

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DE PHILIPPE DE COM MIN ES. i55gt; diroitchofe quitouclioit àfi pcrfonne. Aucuns Gentils-hommes,à quiil difl ces paroiles, le vindicnt dire au Duc:amp; d’aueture le Comte de Campo-bacheferrouuadeuanc, quand iceux vindrent parler au Duc, ou bien lâchant la prinfcdudiól Citron,fy voulut bien trouuer,doLibtant qu’il ne difh de luy ce qu’il fçauoit:car il fçauoit tout le dcmené dudiól' Comte,tant d’vn codé que d’autre, Sgt;c luy auoit tout efté communiqué, amp;nbsp;eftoit ce qu’il vou-loitdire. Lediól Duc relpondit à ceux qui luy vindrent faire ce rapport, qu’il ne lefiifoit que j^urfauLier (à vie,amp; qu’il leur dift qucc’elloit. Ledicl Comte conforta celle parolle,amp; n’y auoit auec ledict Duc,que ce Comte,amp;: quelque Secretaire qui efcriuoit: car lediôl Comte auoit toute la charge de celle armée. Le prifonnier dift qu’il ne le diroit qu’aùdiôl Duc de Bourgon-gne. De rechef commanda ledidl Duc qu’on le menaft pendre, ce qui fut faiél:amp;cnlemenant,lediól Cifronrequiflapluheurs qu’lis priaffent leur niaillre pour luy,amp; qu’il luy diroit chofe qu’il ne vouldroir pourvue Duché qu’il ne efeeut. Plufieurs qui le congnoifioient, en auoient pitié; amp;nbsp;vindrent parler à leur maillre pour faire celle requefte qu’il luy pleull de l’ouir.’ mais ce mauuais Comte efloitâ l’huis delachambre de bois, en quoy lo-geoit lcdiôl Duc, amp;nbsp;gardoitquenuln’entrall; amp;refufarhuisàceuxlà,di-f'inr:Monfeigneurveult qu’on i’auance de le pendre :amp; par melEigers ha-floit le Preuoll. Et hnalernent lediél Cifron fut pendu : qui fut au grand prciudice du Duc de Bourgongne : amp;nbsp;Iiiy cufl mieux valu n’auoir elle fl cruel, amp;nbsp;humainement ouir ce Gentil-homme: parauanture que fil l’eufl fait, fufl: encores envie, amp;nbsp;fa maifon entière, amp;nbsp;beaucoup accreuë, veu les chofes furuenuës en ce Royaume depuis.

Mais il efl a croire que Dieu en auoit autrement difpofé, depuis ce def-loyaltour que lediélDucauoii fait, peu de temps para,Liant au Comte de Sainél Paul,ConnellabledeFrance, ainh qu’auez entendu ailleurs en ces Memoires jcommentill’auoir prins fur fifeureté, amp;nbsp;bailléau Ro|r pour le faire mourir, ôc d’auantage baillé tous les feelez amp;c lettres, qu’il auoit du-diclConneffable, pourferuirà Ion proces. Et combien quelediélDuc euft troLiué, amp;nbsp;eufliuftecaufedehaïr lediélConncflablc iulquesà la mort, amp;nbsp;delà luy procurer, pour beaucoup de raifons,qui feroient longues a. eferi* re, moyennant qu’il l’eufl peu faire, fans luy donner la foy : toutesfois toutes les raifons, que fçauroye alléguer en celle matière, ne fçauroient cou-urir la faulte de foy amp;nbsp;d’honneur que le Duc commit en baillant bon amp;nbsp;loyal faufconduiôl audiél Conneflable ,amp; neantmoins le prendre amp;nbsp;vendre par auarice, non point feulement pour la ville de Sainél Qi^ntin amp;nbsp;des places, heritages amp;nbsp;meubles dudiél Conneflable, mais aufli pour la doubtc de faillir de prendre la ville de Nancy quand il l’auoit affiegée la premiere fois : amp;nbsp;fut à l’heure qu’apres plufieurs dillim^lations ,il bailla le-did Conneflable, doubtant que l’armée du Roy,qui eftoit en Champaigne, ne luy empefchaflfon enrreprinfe : car le Roy le mt^alfoit pat fes Âmbat fadeurs, pource que par leur appointement, le premier des deux, qui tien-droit le Côneflable, ledebuoit rendre dedans huiéliours apres,à fon com-paignon,ou le faire mourir.Or auoit lediôl Duc paffe ce terme de beaucoup

O ij

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V. LI V R E D E S MEMOIRES deiours : Scelle feule crainte amp;nbsp;ambition de Nancy Juy feit bailler lcdiôt Conneftable, ainfi qu’auez ouy. Toutainfi comme en ce propre lieu de Nancyjil auoit commis ce crime iniuftement,apres qu’il eut remis le fécond fiege, amp;nbsp;fait mourir ledidl Cifron ( lequel il ne voulut ouir parler comme homme qui auoit ja l’ouye bouchée, amp;nbsp;l’entendement troublé) fut à celle propre place deceu amp;nbsp;trahy, par celuy auquel plus il fe fioit, amp;nbsp;par-aduen-ture iuftement payé delà deflerte, pour le cas qu’il auoit commis dudiét Conneftablc, amp;nbsp;par auarice de ladiôle ville de Nan^. Mais ce iugement appartient à Dieu, amp;nbsp;ne le dy que pour efclarcir mon propos, amp;nbsp;donner a entendre combien vn bon Princedoibt fuira confentir vn tel vilain tout amp;nbsp;defloyauté, quelqueconfeil encores qu’on luy en fçaehe donner. Erafles defoisaduicntque ceux qui leur confeillcnt, le font pour leur complaire , ou pour ne les ofer contredire, à qui il en defplaifl bien, quand le cas efl: aduenu, congnoiflant la punition qui en peu t aduenir, tant de Dieu que du monde .-toLitesfois tels confeilliersvauldroient bien mieux loing du Prince, que pres.

VoLisauezouy comme Dieu en ce monde eftablit ce Comte deCam-pobachecommiflaire à faire la vengeance de ce cas du Conneftablc, ainlî commispar le Duc deBourgongne, amp;aupropre lieu, amp;nbsp;en la propre maniéré, amp;nbsp;encores beaucoup plus cruellement. Car tout ainft que par def-fuslefauf-conduid amp;nbsp;feableté, qu’auoitenluy lediél Conneftablc, il le li-ura pour eftre mis à mort, tout ainfi par le plus feable de fon armée (c’efl à dire par celuy, en qui plus fc fioit ) fut il trahy; par celuy, dy ie, qu’il auoit reCueilIy vieil amp;nbsp;panure, amp;nbsp;fans nul party, amp;nbsp;qu’il auoit fouldoyé à cent mille Ducats l’an, dont il payoit fes Gens d’armes par fa main, d’autres grands aduantages qu’il auoit. Et quand il commença cefte mar-chandife, il fen alloit en Italie, à tout quarante mille Ducats contant, qu’il auoit rccfiLis pour imp^ft^ce( comme diéleft) qui vault adiré pour met-tre fus fes Gens-d’armes ; amp;nbsp;pour conduire cefte trahifon faddrelfa en / nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;deux lieux : le premier à vn Médecin demourant à Lion, appelle maiftre Si

mon de Pauie,amp; à vn autre de Sauoye,dont i’ay parlé, amp;nbsp;à fon retour furent logez fes Gens-d’armes en certaines petites places de la Comté de Marie, qui eft en Lannoys ; amp;nbsp;là reprint fi pratique, offrant bailler toutes les places qu’il tenoit: ou fi le Roy fetrouuoit en bataille contre fon maiftre, qu’il y auroit certain figne entre le Roy amp;nbsp;luy, qu’en luy faifant, il fe tourneroic contre fon maiftre, amp;nbsp;du party du Roy,auec toute fit bande.Ce fécond party ne pleut point fort au Roy, amp;nbsp;offrit encores que la premiere fois, que fon maiftre logeroit en champ,qu’il le prendroit, ou tueroit en allant vifiter fon Oft. Et à la vérité dire,y n’euft point failly à cefte tierce ouuerture : car lediéh Ducauoit vnecouf^mequ’incontinant qu’il eftoit defeendu de cheual, au licuoùil venoit pour loger, il oftoit le menu harnois, amp;nbsp;rctenoit le corps de û cuiracc , amp;nbsp;fe mentoit fur vn petit cheual , huiót ou dix Archiers a pied auec luy feulement. Aucunesfois le fuyuoient deux ou trois Gentilshommes de fil chambre : amp;nbsp;alloit tout à l’entour de fon Oft, par le dehors, veoir fil eftoit bien clos ; ôc ainfi ledid Comte euft fait cefte execution

auec

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DE PHILIPPE DE COM MINE S. isi

0

auec dix cheuamsCins nulle difficulté. Apres que le Roy eut veii la cotinuel-lepoLirfuitequeEiifoitcefthomme,pour trahir fon maiftrc ôc que cefte *dcmcnéc fut à l’heure d’vnc trefue,amp; qu’il ne fçauoit point de tous poinctsà «juelle fin il faifoit ces oduerturcs, il délibéra monftrer vnc grande ftanchifc au Duc deBoürgôgne;amp; luy manda parle feigneur deCotay (qui plufieurs foisaeffé nommé en ces memoircs)tout au long le demené de ce Cote; amp;nbsp;y eftoye prefcnt, amp;nbsp;fuis bien feur que ledidt feigneur de Contay fenacquita loyaument enuers fonfcaiftredequel le print tout au rebours, difant que fil euff efte vray,le Roy ne luy euff: point fiit fçauoir. Et fut cecy long temps a-uant qu’il vint à Nancy :amp; croy bien que lediéf Duc n’en dift rien audidl Co-te:car il ne changea iamais de propos.

Qomment le Duc de Lorraine accom^aignéde bon nombre d'j^llemans, ^int loger à d. ‘^icolas^pendant leßegede'^ancy : eijr cornent le 7{oy de Portugal, ijui eßoiten France,allaveoirle Duede Bourgongne,durdt eeßege.^ CHAT. FIL

R faut retourner à noRre matière principale, amp;nbsp;à ce fiege,quc ledid Duc tenoit deuant Nancy .• qui effoit au cœur d’hyuer, auec peu de gens,mal armez,mal paycz,amp; beaucoup de mala-lades,amp; des plus grands qui pratiqiioycntcontre luy(comme vous voyez)amp; tous en general murmuroient, èc melprifoiét tous les œuures,comme ellbi n de couffurne en temps d’aduerfité, comme i’ay bien dit au long icy deuant:mais nul ne pratiquoit contre fa perfonne ne contre fon effat,que ce Comte deCampobache, amp;nbsp;en fes fubiedîs ne trouua nulledcff oyauté.Eftat en ce pauure appareil, le Duc de Lorraine traidla vers €es Vieilles alliances,que i’ay nommées icy deuant d’auoirgens pour coba-tic le Duc de Bourgongnejqui efloit deuant Nancy. Toutes ces villes y furent tres-cnclines,ne reffoit que trouuer argent.Le Roy le recôforToit d’Am baffadeurs qu’il auoit enuoyez vers les Suiffes; amp;nbsp;auffi luy fournit quarante mille Francs,pour ayder à payer les Allcmans : amp;nbsp;h aüoit monfeigneur de Cran,qui effoit fon Lieutenant en Champaigne, logé en Barrois, auec fept ou huidt cens Lances,amp; des Francs-Archiers bien accôpaigné de bós Chefs. Tant feit le Duede Lorraine,auec lahiueur amp;nbsp;argent du Roy, qu’il tiragtâd nombre d’Allcmans,tant de pied que de cheuahear oultre ce qu’ilpaya,ils en fournirent à leurs defpcns.Auffi auoit auec luy largement Gentils-hommes de ce royaume:amp; puis ceffe armée du Roy effoit logée en Barrois, comme i’ay dit,laquelle ne faifoit nulleguerrc,mais voyoit qui auroit du meilleur. Etvintledidl Duede Lorraine loger à faindl Nicolas presNancy, auec ces Allemans deffufdidls.

Le Roy de Portugal effoit en ce royaume, neufmo’^s auoit ou enuiron: auquel le Roy feftoit allié contre le Roy d’Efpaignlt;i, qui effoit pour lors: lequel Roy de Portugal effoit venu, cuidant que le Roy luy bail!aff grande armée, pour faire la guerre en Caff ille, par le coff é de Bifcaye ou de Nhtuar-rc:car il tenoit largement places en Caffille,à la frontière de Portugal, amp;nbsp;en tenoit encores d’aucunes voifines de nous,comme le chaff eau de Bourgues, ) nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;O iij

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Durant ce temps fempiroient les befongnesdudid Roy de Portugal en Caftille:car a l’heure qu’il vint, prefquc tous les feigneurs du royaume de Caftillc tenoient fon parti:mais le voyant tant demeurer,peu à peu muèrent ce propos,amp; fappointerent auec le Roy Ferdinand,amp; laRoyne Yfibel, qui regnerent depuis. LcRoy fexcufoitdeccfleaide quil auoitpromisamp;ac-cordcjfur celle guerre qui efloit en Lorraine,monftrantauoir crainte que lî le Duc de Bourgogne fe relTourdoi^qu’apres ne luy vint courre lus.Ce pau-lire Roy de Portugal,qui eftoit trelbon nbsp;nbsp;iulle,mit en fon imagination qu’il

iroit.deuers le Duc de Bourgongne, qui eftoit fon coufin germain, amp;nbsp;qu’il pacifieroit tout ce différend du Roy amp;nbsp;de luy, afin que leRoyluypeullai-der.Car il auoit honte de retourner en Callille , ny en Portugal, auec celle deffaulte, amp;nbsp;de n’auoir rien fait deçà. Car legierement il auoit elle meu d’y venir,amp; oultre l’opinion de fon confcil. Ainlî fe mit à chemin le Roy dePor-tugal,en fin cœur d’hyuer:amp; alla trouuer le Duc de Bourgogne, fon coufin, déliant Nancy:ôc luy commença à remonllrer ce que le Roy luy auoit dit, pour venir à celle vnion. Il trouua que ce feroiêt choies bien mal-aifccs que de les accorder,ô: qu’é tour clloiêt differets. Ainlî n’y arrefta que deux iours qu’il ne print cógé dudiól Duc de Bourgogne fon coulin, pour fen retourner àParis,dôt il eftoit parti.Lediôl Duc de Bourgogne luy pria attendre encores,amp; qu’il voullillaller au Pont à Mouflon (quiellallez pres de Nancy) pour garder ce palEige;car ja fçauoit lediél Duc l’armée des Allemans, qui elloientlogezàlainft Nicolas. Le Roy de Portugal fexculà, difant n’ellrc point en armcs,n’accompaigné pour tel exploicl:amp; ainlî fen retourna à Pa-ris,làoùièfeit long fejour.Lafin dudiôlRoy de Portugal fut, qu’il entra en fulpiçion que le Roy le vouloir faire prendre, amp;nbsp;le bailler a fon cntlemy le Roy de Callille:amp; pourtant fe delguilaluy troilîefme, amp;nbsp;délibéra l’en aller à Romc,amp;fe mettre en vne religion auprès. En allant en cell habit dilTimu-n’apoint Ro* lé,il fut prins,par vn appelle * Robinet le Beuf,qui elloit de Normandie. Le binet. Roy nollrcmaillre fut marry :amp;eut quelque honte de ce cas, amp;nbsp;luy feit ar-Le Grec, î'^^^r plulîcurs nauiresdcCelle collcdeNormadic.’dont melîîre Georgc*Lc-charge * qu’il le meneroit en Portugal, ce qu’il entreprint de Etire. hßjnesnVoc L’occalîon de la guerre contre le Roy de Callille,elloit pour fa niepcefil-Ic dcfl fœur.daquellc clloit fcmmcdu Roy Don Henry de Callille, dernier renterpoiî E^tort : laquelleauoitvne trefbellcfille, qui pour lors viuoit, demeurant en tugai. nbsp;nbsp;nbsp;Portugal,fins élire marice.-IaquellcfillelaRoyncYfabehfirurdudiól Roy

Henry,dcboutoit d^a fuccellîon de Caflille,difinr que la mere l’auoit corn ccuëen adultere. Alfczdegcnsontellédecelleopinion , dilàntqueledicl Roy Henry neuflfçeLftngendrer, pour aucuneraifon queielailTe. Com-mentqu’ilenfoitallé,amp; nonobllant que ladiélc fille full née foubs le man-* Tnt i de mariage', toutesfois ell demeurée la couronne deCallille a laRoy-éaijît.*“ ne Ylàbcl, ôeà/bnmary leRoy d’Arragonamp;: dc* Sicile, qui toll en full in-uçily:

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DE PHILIPPE DE COMMIMES;

ueEy ; amp;nbsp;tafchoit lediôt Roy de Portugal (dont i’ay parlé) de Elire le mariage de laditle fille , la niepce , amp;nbsp;de noflre Roy Charles huiôliefme de ce nom : amp;nbsp;cfioit la carde pour laquelle lediôl Roy de Portugal cftoic Venu en France, laquelle choie luy fut à tres grand preiudice amp;nbsp;defplaifir: car toflapres (on retour en Portugal,il mourut. Et pource (comme l’ay die enuiron le commencement de ces M?moircs)vn Prince doibt bien regarder quels Ambafladeurs ilenuoyepar pais:car fi ceux qui vindrent faire^’alliâce du Roy de Çortugal de par deçà,à laquelle me trouuay prefenc, comme l’vn des députez pour leRoy,euflent efté biê figes,ils fe fufient mieux informez deschofesdedcça,auantquecon(eiller àleurmaillre cefte venue, qui tant Itiy poftadedommage.

Qomment ïe Duc de ‘Bourgongne^ riayant voulu fuyure le bon conßil de plußeurs defesgensßutdefconßt, nbsp;nbsp;tué en la bataille,^ue luy liura le Duc de

Lorraine^^res^ancy. CHAT. 1 1 1.

E me fufTe bien pafTé de ce propos,fi n’euft efiépourmôftrer que biê tard vn Prince (e doit mettre foubs la main d’vn autre,ny aller chercher fon fecours en perfonne. Etainfi pour retourner à ma principale matière,le Roy de Portugal n’eut point fait vne ioLirnee au départir qu’il (eic auec le Duc de Bourgongne,quelc Duc de Lorraine,amp; les Alltmans quie-ftoient en la côpaignie,ne dcfiogealfent de S.Nicolas, pour aller cobatre le-dicl Duc de Bourgogne. Et ce propre iour vint au deuant d’eux le Comte de Câpobachc,acheucr (on entreprin(e,amp; fe rendit des leurs,auecenuirô hiiiél vingts Homes d’armes:amp; luy defplaifoit bien que pis n’auoit peu faire à fon niai lire. Ceux de dedans Nancy elloiêt bien aduertis des traiôlez dudidl CÓ-te.-qui leur aidoir bien à dôner cœur détenir. Auec cela entravn h®nme,qui feietta aux fo(rez,quilesalleuradefecours : car autrement efioient fur le point de(e rendre, amp;nbsp;(i n’eufl eflé les difiimulations dudiéf Comte, ils neuf-lent point tenu iufqiics lorsnnais Dieu voulut acheuer ce myftere.

Le Duc de Bourgongnc,aduerty de ceflc venue,tint quelque peu de con-feil(car il ne l’auoit point fort accouftumé,mais v(oit communément de fon propre fcns)«Sc fut l’opinion de plufieurs,qu’il feretiraftau PontaMoulTon, pres de là,amp; lai(ïùfl de (es gens es places qu’il tenoit enuiron Nancy, difint quefi toflqueles Allemans auroientauitaillé Nancy, ils feniroient, amp;nbsp;fe-roit l’argent failly au Duc de Lorraine, qui de long temps ne ralTembleroit tant de gens:amp; querauitaillcmentne(çauroiteflrefigrand,qu’au3nt que la moytiède l’hyuer fur palîé,ils nefulEentaufiia deftrcgdf, comme ils eftoient lors:amp; que ce- pendant lediéf Duc ralTembleroit gens :^ar i’ay entendu par ceux qui le penloientlçauoir, qu’ils n’auoicnt point en 1'0(1 quatre mille hommes:dont il n’y en auoit que douze cens en eftat^our cobatrc.D’argcnt auoitaflez lediéf Duc:car ilauoit au chaffeau dcLuxêbourg, quieftoit pres de là,bien quatre cens cinquante mille Efcus,amp; degêscuftilalTez recouuré: mais Dieu ne luy voulut Elire celte grace que de rcceuoir ce fage confeil, ne

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164 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. LIVRE DES MEMOIRES

congnoiftre tant d’ennemis logez de tons coftez enuiron dcliiy,amp; choifit le pire parti:amp; anx parolles d’hommes inlenfez,délibéra d’attendre la fortune, nonobftanr tontes les remonftrances qn’on luv auoitfaicles du grand nom-

1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;J nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V

bre des Allemans,qui eftoit anec lediôl Duc de Lorraine, amp;nbsp;aufli de l’armée du Roy logée pres de lny;amp; conclud la bataille, anec ce petit nombre de gés cfpouuantez qu’il anoit.

A l’arrinée du Comte de Campobache vers le Duc de Lorraine, les Alle-mans luy feirent dire qu’il-fe retiraft, nbsp;nbsp;qu’ils ne vouloicnt nuis trahiftres a-

uec eux;amp; ainli Ce retii'd a Condé,vn chaftean amp;nbsp;vn pafl'age pres delà, qu’il repara de charrettes, amp;nbsp;d’autres chofeslc mieux qu’il peut, cfperant que ___ fuyant le Duc de Bourgongne amp;fes gens,il entomberoit en fa part, comme il feit aifez.Cen’eftoit pas le principal traióléqu’cuftlediéf Comte de Campobache, quecelny du Duc de Lorraine, mais peu deuant fon partement, parla à d’autres, amp;nbsp;anec ceux là conclud, pource qu’il ne voyoit point qu’il peuft mettre la main furie Duc de Bourgongne,qu’il fc tourneroit de l’autre part,quand viendroit l’heure de la bataille: car plus tort ne vouloir partir le-diéf Comte, afin de donner plus grand efpouuantemcntàtoutroftdudiâ: Düc:mais il afleuroit bien que fi le Duc de Bourgongne fuyoit qu’il n’en ef-chapperoitiamais vif:amp; qu’il laifleroit treize ou quatorzeperfonnes,qui luy feroient feurs,Ies vns pour commencer la fuite, dés ce qu’ils verroient marcher les Allemans, amp;nbsp;les autres qui auroient l’œil fur lediéf Duc , fil fuyoit pour le tuer en fuyant;amp; en cela n’y auroit point dcfaute:amp; aycongnu deux ou trois de ceux qui demeurèrent pour tuer lediéf Duc. Apres que ces grandes trahifons furent conclues,il fe retira dedans roft.’amp; puis fe retourna contre fon maifi;rc,quand il veit arriuer Icfdiéls Allemans,corne i’ay dit: Sgt;i puis, quand 11 veit que lefdiéls Allemans ne le vouloicnt en leur compagnie^ alla comme diét eft, en ce lieu de Condé.

Lcfdifts Allemans marchèrent,amp; aueceux eftoit grand nombre de Gens decheual de deçà qu’on y lailfi aller, beaucoup d’autres ferairêt aux embuf-ches,pres dulieu,pourveoir fi le Duc feroit defconfit,pour happer quelque prifonnicr ou autre butin.Etainfipouuez veoiren quel eftat f’eftoitmis cc pauureDucde Bourgongne, par faulte de croire confeil. Apres que les deux armées furent aftemblées,la fienne,qui ja auoit efté defeonfite par deux fois, amp;nbsp;qui eftoit de peu de gens, amp;nbsp;mal en poinét, fut incontinent tournée en def confiture amp;nbsp;en fuite. Largement fe fiuiierent, le demeurant y fut mort ou

Boutgongne; ôC DiMdeBour- 4^110 vcux poiut pal let de la maniere,pourtant queic n’y cftoye point: mais m’a éfté'compté de la mort dudiéf Duc par ceux qui le veirent porter par ter - re,amp; ne le peurent fec6urir,par ce qu’ils eftoiét prifonniers : mais à leur veüc ne fut point tue'.maÄ par vrie grande flotte de gens,qui y furuindrent, qui le tuerenr,_amp;: le defpouillercnt en la grande trouppefins le congnoiftre : amp;: fut 14 7 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;bataille lé cinquiefine iour de lanuier, en l’an mil quatre cens feptan-

te fix,veille des Roys.

' ' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Digreßioft

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DE PHILIPPE DE CO xM MINE S. léj fur quelques bonnes mœurs du Duc de Tiourgongne^ fur le temps quefmafon dura en pro fente. nbsp;nbsp;QH AT. IX.

'Ky depuis veu vn fignet à Milan, que maintesfois auoye veü pêdu a fon pourpoincqui eftoic vn anneau,amp; y auoit vn fuzil entaillé en vn Camayeu, ou eftoienc fes armes,lequel fut vêdu pourdeux Ducats au lieu de Milan.Celuy qui luy ort:a,luy fut mauuais varlet-de-chambre. lel’ay veu maintesfois habiller amp;nbsp;déshabiller en grande reuerence, Sgt;c par grans perfonnages: amp;nbsp;a celle derniere heure luy eftoient paflez fes hôneLirs:amp; périt luy amp;nbsp;là mai-fon,comrnc i’ay dit,au lieu où il auoit confenti par auarice de bailler le Con-neftablcjôc peu de temps apres.Dieu luy vueille pardoner fes pechez.iel’ay Veu grand amp;nbsp;honorable Prince,amp; autant eftimé, amp;nbsp;requis de fes voihns, vn temps a elle, que nul Prince qui full en Chrcflienté,ou par-auanture plus.le nay veu nulle occafio pourquoy plus tort il deufl auoir encouru l’ire de oieu que de ce que toutes les graces amp;nbsp;honneurs, qu’il auoit rcceus en ce mode,il les ellimoit tous eflre procédez de Ion fens amp;nbsp;de fa vertu, fans les attribuer à Dieu comme il deuoit.Et àla veritc,il auoit de bones amp;nbsp;vertueufes parties en luy.Nul prince ne le paflaiamais de dehrer gras gens,amp; les tenir biê reiglez. Ses bicns-faiôls n’cftoient point fort gras, pourcc qu’il vouloir que chafeun fen fentiH. lamais nul plus liberallement ne donna audience à fes feruiteurs, amp;nbsp;fubieds. Pour le temps que ie I’ay cognli,il n’cfloit point cruehmais le de-uint à fa morr(qui elloit mauuais ligne de loguc durée) amp;nbsp;elloit fort popeux en habillemês amp;nbsp;en toutes autres chofes:amp; vn peu trop. Il portoit fort grad Honneur aux Amba(fadeLirs,amp; gens eftranges.Ils eftoient bien fort feftoyez amp;nbsp;recueillis chez luy.Il defiroit grand’gloire,qui eftoit ce qui plus le mettoit en lès guerres que nulle autre chofe:amp;: euft bic voulu reftemblerâ ces anciés Princes,dont il a efté tant parlé,apres leur mort: amp;nbsp;eftoit autant hagly com-rne homme qui ait régné de fon temps.

Or font finies toutes ces penfées, amp;nbsp;le tout tourné à fon preiudice Sgt;c. hôte: car ceux qui gaignent,onttoufiours l’honneur.Ienefçauroyedire vers qui noftrefeigneurfeft môftrc plus courroucé,ou vers luy, qui mourut foudai-nemêt amp;C. en ce champ fans gucres lâguir,ou vers fes fubieóls,qui onques puis n’eurét bien ne repos,mais cotinuellement gucrre:côtre laquelle ils n’eftoiêt fuffifans de refifter,aux troubles qu’ils auoient les vus contre les autres,amp; en guerre cruelle amp;nbsp;mortelle . Et ce qui leur a efté plus fort à porter, a efté que ceux qui les deffendoient, eftoient gens eftràgers, qui nagueres auoient efté leurs ennemis,c’eftoicnt les Allemâs.Et en effeól,depuis ladiélc mortn’eurét iamais homme qui bien leur voulfift,de quelques gens qu’ils fe foient aidez. Et a femblé à vcoir leurs œuurcs, qu’ils euflent les fens aufti troublez, comme leur Prince,vn peu auant fa mort : car tout bon confeil ils ont deietté, amp;nbsp;cherche toutes voyes qui leur eftoient nuyfibles: amp;nbsp;fient en chemin que ce trou ne leur fauldra de grande piece,ou au moins la crainte d’y recheoir.

le feroye aftez de l’opinion de quelque autre que i’ay veu, c’eft que Dieu donne le Prince^eló qu’il veult punir ou chaftier les fubieéls ; amp;: aux Princes

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16^ ■ V. LIVRE DES MEMOIRES

les fubieclSjOLi leurs courages difpofer enuers luy,felon qu’il veult éleuer ou abaifler:amp; ainfi fut ceEe maifon de Bourgogne à fait tout egal;car apres leur logue félicité amp;nbsp;grandes richelfes, ôc trois grads PrinceSjbós amp;: fages, prece-d'éns cell;ui-cy,qui auoient duré fix vingts ans, ou plus, en bon fens amp;nbsp;vertu, il leur donna ce Duc Charles, qui continuellement les tint en grade guerre, trauail amp;nbsp;defpence : amp;nbsp;prefque autant aux iours d’hyuer qu’en ceux d’efté tant que beaucoup de gens riches amp;aifez,furent morts amp;nbsp;deftruiôts parpri-fon en ces guerres. Les grandes pertes commencèrent deuant Nuz, qui continuèrent par trois ou quatres batailles, iufqucs à l’heure de fa mort: amp;nbsp;tellement qu’à cefte dernierc bataille cfloit cofommée toute la force de fon païs, amp;nbsp;morts,ou deflruids,ou prins toutes fes ges,qui eulfent feeu ou voulu def-fendre l’eftat amp;nbsp;l’honneur de fa maifon.Et ainfi,comme i’ay dit, femble que cefte perte ait efté egale au temps qu’ils ont efté en félicité ; car comme ie d’y l’aLioii' veu grâd’,riche amp;nbsp;honoré,cncores puis-je dire auoir veu tout cela en fes fubieéls ; car ie cuide auoir veu amp;nbsp;cognu la meilleure part d’Europe.'tou-tesfois ie n’ay congnu nulle feigneurie, ne païs, tant pour tant, n’y de beaucoup plus grande eftcnduc encores, qui fuft tant abondant en richelTes, en meubles, amp;nbsp;en edifices, amp;nbsp;aufti en toutes prodigalitez,defpences,feftoyemés amp;nbsp;chères,comme ie les ay veus,pour le temps que i’y eftoye. Et fil femble à quelcun,qui n’y ait point efté pour le temps que ie d’y,quei’en die trop,d’atP tres, qui y eftoient comme moy ,parauenture diront que i’en d’y peu. Ora noftre feigneur tout à vn coup,fût cheoir fi grand amp;nbsp;fumptueux edifice, cefte ptiiflante maifon, qui a tant fouftenu dcgês debien,amp; nourry,amp; tant efté honorée amp;nbsp;pres amp;loing,amp;partatdcvióloires amp;nbsp;de gloires,que nul autre à i’enuiron n’en recent autant en fon temps. Et luy .a du rc cefte bonne fortune amp;nbsp;grace de Dieu l’cfpacc de fix vingts ans, que tous les voifinsont foufferr, comme Frace, Angleterre,Efpaigne,amp; tous à quelque fois, la font venns re-querir.-C(lt;nme l’auez veu par experiéce du Roy noftre maiftrc,qui en fa ieu-nefre,amp; viuant le Roy Charles feptiefrae fon pere, f’y vint retirer, fix ans, au temps du bo DucPhilippe,quiamiablcmêt le receut.-d’Angleterrey ay veu les deuxfreres du Roy Edouard,c’eft aflàuoirle Duc de Clarence, amp;nbsp;le Duc de Cloceftrc qui depuis feft fait appeller Roy Richard ; amp;nbsp;de l’autre parti du Roy Henry, qui eftoit de la maifon de Lanclaftrey ay veu toute cefte lignée, ou peu f é faloit.De tous coftez ay veu cefte maifon honoréc,amp;: puis,tout en vn coup,cheoir ce quedefltis deflbubs:amp;parlaplus defoléeamp;deftaiéle maifon tàt en Prince qu’en fubic(fts,que nul voifin qu’ils euflent.Et telles amp;nbsp;fem-blàbles œuuresafaitnoftrefeigneur, mefmcsauantque fuffions nez,amp;: fera encores apres que nous ferôs morts :car il fault tenir pour leur, que la grande profperité des Princes^ ou leurs grandes aduerfitez, procèdent de fà diuine ordonnance.

Comment

J . 1 ■* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;; ; - -1

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DE PHILIPPE DE COMMIMES.

Comment le T^yfnt aduerty de la derniere deffai^e du Duc de quot;Bourgongnex commeilconduifit [esa^aires^aj^reslamortd'iceluy. CHAT. X.

Our toujours cotinuer ma matière,le Roy quiauoit ja or-donné pofte en ce royaume, 6c parauant n’y en auoit point »«lt;/lt;lt;?«ƒ« « eu iamaisjfut bien toft aduercy de ccfte defcÔfiture du Duc £^(1*”’* de Bourgongne:amp; a cbafcunc heure,en attendoit des nou-ucllcSjà caufe des aducrtiflemcns qu’il auoit eus parauâc de l’arriuée des Allemâs, amp;c de toutes autres chofes qui en de* pcndoient:ôlt; y auoit beaucoup de gens qui auoiet les oreilles ouucrtcs à qui premier les orroit,pour les luy aller dire ; car il donnoit volontiers quelque chofe à celuy qui premier luy apportoit quelques grades nouuellcs,fans ou- 4*^ Hier les meflagers; amp;nbsp;fi prenoitplaifirà en parler, auant qu’elles fuflentve* nuës,dilant:Ie donneray tant à celuy qui m’apportera des noutielles. Monseigneur du Bouchage amp;nbsp;moy,cufmcs(eftans enfemble) lepremier meflage de la bataille de Morat, amp;:cnlemblcledifmesau Roy : lequel nous donna à chafeun deux cens Marcs d’argent.Môfeigneur du Lude qui couchoithors du Pleftisjfçeut le premier l’arriuée du Cheuaucheur, qui apporta les lettres de ccfte bataille de Nancyjdonti’ay parlé. Il demanda au Cheuaucheur lès lettres,quinclcs luy ofarefufer,pource qu’il eftoit en grande authoritéaucc IcRoy.LediôI feigneur du Lude vint fort matin(amp; eftoit à grand’ peine iour) heurteraux huis plus prochains du Roy. Onluy ouurit,amp;: bailla Icfdiélcs lettres,qu’eftriuoit monfeigneur de Crâ,amp; autres:mais nul n’acertenoir, par les premieres,de la mortanais aucuns difoient qu’on l’auoit veu fuir,amp; qu’il fcftoiclauué.Le Roy,de prime face, fut tant furprins delaioye qu’il euft de ccfte nouuelle,qu a grand’ peine fçeut il quelle contenance tenir. D’vn cofte doubtoit, fil eftoit prins des Allemans, qu’ils ne faccordaflent à luy, pour grand’fomme d’argcnt,qu’aifément lediôl Duc leur pourroit donner. D’autre cofté eftoit en foucy, fil eftoit efchappé,ainfi defeonfit. La tierce fois, fil prendroit fes feigneuries de Bourgongne ou non.-amp; luy fembloit qu’aifémêc il les pourroit prendre, veu que tous les gens de bien du païseftoient prefque tous morts en ces trois batailles.Et fur ce point eftoit farefolution ( que peu de gens,comme ic croy,ont fçeu j excepté moy ) que fi lediél Duc eftoit lain de fa perfonne,il feroit entrer fon armee qui eftoit en Chapaigne amp;nbsp;Barrois, incontinent en Bourgongne,amp;: fiifir le pais,a l’heure de ce grand efpouuan-tement,amp; dés ce qu’il feroit dedans, aduertiroit Icdiót Duc qu’il le failoit à l’intention de le luy fiuuer, 6c garder que les Allemans ne le deftruififtent; pourccqueladiéle Duché eftoit tenue en fouueraincté de luy : laquelle il n’cuft voulu pour rien tober es mains defdióts Allemjis;amp; que ce qu’il en au-roit pris, luy feroit par luy rendu. Et fans difficulté ainlj^l’cuft il fait. Ce que beaucoup de gens ne croiroient point aifément. Auffi ne fçauent ils la raifon qui l’cuft meu; mais ce propos luy mua,quand il fçeitt la mort dudid Duc.

Dés que le Roy eut reccu ces lettres,dont i’ay parlc(lefquclles,commc i’ay dit,ne difoient rien de la mort)il enuoya en la ville de Tours, quérir tous les Capitaines,amp; plufieurs autres grans pcrfbnnages,amp;:lcur monftrales lettres. Tous enfeirent ligne de grande ioyc,amp; fembloit à ceux qui regardoient les

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168 nbsp;' V. LIVRE DES MEMOIRES

chofes de bien pres, qu’il y en auoit aflez qui (y efForçoienr : amp;: nonobftant leurs gefteSjils eußet mieux ay me que le faiôl dudiôl Duc fuRallé autrcmér. La caufe en pourroit cftre par ce que parauat le Roy eftoit fort craintifjamp; ils fe doubtoyent que fil fe trouuoit tant au deliure d’ennemis,qu’il ne voulfîft muer pluiieurs cliofcs,amp; par efpecial eftat amp;nbsp;offices : car il y en auoit beaucoup en la côpagnic,lefquels en la queftio du Bien public, amp;nbsp;autres du Duc de Guyenne fon frerej’efi.oient trouuez cotre luy.Apres auoir vn peu parlé aux defTufdids il ouit la mefre,amp; puis feit mettre la table en fiichâbre, ôc les feit tous difiier auec luy :amp; y efloit fon Cbaceiier,amp; aucunes gês de côfeil:amp; en difnat parla toujours de ces matières,amp; fçay biê que moy,amp; autres, prif-mes garde corne difncroient,amp; de quel appetit,ceux qui eftoient en cefle ta-ble.-mais à la verité(ie ne fçay fi c’eftoit de ioyc ou de trifteflc) vn feul par fern blat ne magea la moitié de fon faoul : amp;nbsp;fi n’eftoient ils point hoteux de ma-gerauecle Roy:car il n’y auoit celuy d etr’eux,qui bien fouuêtn’y euft mage.

Au leuer de table le Roy fe retira à part,amp; donna à aucuns des terres qu’a-uoient pofledées le Duc de Bourgongnc,fi ainfi cftoit qu’il fuft mort:amp; def pefchale Baftard de Bourbon Admirai de Frâce amp;nbsp;moy :amp; nous bailla pou-tioirs neceffaires pour mettre en fon obcïffancc tous ceux qui fy voudroienf mcttre:amp;nous commanda partir incontinent, amp;nbsp;que nous ouuriffions toutes lettres de polies 6c melTagers,que nous rencontrerions en allant,afin qus fuflions aduertis fi ledid Duc efloit mort ou vif. Nous pattifmes amp;nbsp;fcifmcs grand’diligence,nonobftant qu’il faifoit le plus froid quci’ayc veu faire ds mon temps.Nous n’eufmes point fait vne demie iournec, que nous rencon-trafmes vnmelTager, à qui nous feifmes bailler fes lettres: quicontenoienc que lediél Duc auoit efté trouué entre les morts,amp;fpecialement par vn page Italien, amp;nbsp;par fon Médecin,appelle maiftre Louppe,natif de Portugal ; qui certifioit à monfeigneur de Cran,que c’eftoit le Duc fon maiftre lequel inco tinent en aduertit le Roy.

Qommentlc nbsp;nbsp;nbsp;apres la mort du Duc de Bourgongne^Çefaißtd'Abbeuille:

de la rejponce que luy ßrent ceux d'Arras. [HAT. XI.

SOmmenouseufmes Iceu toutes lefdiéles choies ynous tiraf mes iufques aux fauxbourgs d’Abbcuillc ; amp;nbsp;fufmes les premiers par qui en ce quartier là,ceux du parti du Duc de Bouc gogneen furent aduertis.Noustrouuaîmes que le peuple de la ville eftoit défia en traidé auec monfeigneur deTorcy.le-quel de long temps ils ay moient très-fort. Les gens de guerre amp;nbsp;ceux qui a-■ uoyent eftéOfticiers dudiéf Duc traiéfoiet auec nous, parvn meftagerqu’a-** îbmans, uioiis cuuoyé deuâtfbc fiir noftre elperance, feirent partir quatre cens *Lan-j-es qu’ils auoycnt. Maïs incontinent que le peuple veit ceux là dehors, ils ouurirent les portes à monfeigneur de Torcy,qui fut le grad dommage des Capitaines, amp;nbsp;autres officiers de ladide ville ; car ils eftoient lept ou huid,a qui nous auions promis des Efeus, amp;nbsp;aucunes penfions ( car nous auions ce pouuoir du Roy)dont ils n’eurent rien:pource que les places nefurenf point rendues

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de PHILIPPE DE COMMIMES.

rêducs par eux, La ville d’Abbeuille eftoit des terres bailléesjpar îe Roy Char les (cpticfme,à la paix d’ArrasJefquelles terres deuoient retourner en def-fault d’hoir mafle:parquoy n’eft demerueille fi Icgeremêt elle nous ouuroit.

De là nous tir afin es à Dourlans,amp;: eniioyaftnes fommer Arras, chefd’Artois,ancien patrimoine des Comtes de Flandres, Si qui de tout temps auoit accouftumé aller à fille comme à filz. M onfeigneur de Rauaftain, amp;nbsp;monfei-gneur des Cordes,qui eftôient en ladiôte ville d’Arras,entreprindrent devenir parler à nous au Mot-fainÆEloy, vnc Abbaye pres dudiól Arras,Sc auec eux ceux de la ville.Il fut aduifé que j’iroye,amp; aiicûs auec moy.-car on doub-toit bien qu’ils ne feroient point tout ce que nous vouldrions; amp;nbsp;pourcc n’y alla point Icdiôf Admirai. Apres queie fu venuaudidl^u, y arriuerent tan-toft apres les deflbfdids feigneurs de Rauaflinamp; des Œrdes,amp; plufieurs autres gens de bien auec eux, aufii aucuns delà ville d’Arras : amp;nbsp;entre les autres,eftoit pour ladiôle ville,leur penfionnaire qui parloir pour eux,mai-ftre lehan de la Vaquerie,depuis premier Prefidêt en Parlemét à Paris. Pour cefte heure là leur requifmcs l’ouuerture pour le Roy,amp;qu’ils nous receuftet en la ville, difans que le Roy la pretendoit fienne, par le moyen de confifea-tion,amp; le pais : que fils fitifoient le contraire, ils eftoient en danger d’eftre prins par force,veuë la deft'aite de leur fcigrteii r, amp;nbsp;que tout le pais eftoit def-pourucudegens dedeftence, àcaufedeces trois batailles perdues. Les Seigneurs deftlifdidls nous feirent dire,par lediót maiftre lehan de la Vaqueric, que cefteComté d’Artois appartenait à Madamoifellc de Bourgongne,fille du Duc Charles,amp;: luyvcnoic de vraye ligne, àcaufedela Cotefte Marguerite de Flandres, qui eftoit Comtefle de Flandres,d’Artois,de Bourgongne, deNeuers, amp;nbsp;de Rethel: laquelle Comtefle fut mariée au Duc Philippe de Bourgogne, le premier,lequel fut filz du Roy lehan,amp; frere maifncdu Roy Charles le Quint ; amp;nbsp;fupplioient au Roy qu’il luy pîeuft entretenir la trefue, qui eftoit entre luy amp;nbsp;le feu Duc Charles. Noz paroles ne furent^oint trop logiics.-car nous nousattédions bien d’auoir cefte refpoce. Mais la principale occafio de mon allée aufdiéts lieux , eftoit pour parler à aucûs particuliers de ceux qui eftoient là, pour les conuerrirpour IcRoy.I’en parlay à aucuns qui toft apres furent bons feruiteuis du Roy. Nous trouuafraes ce pais bien efpouuenté, amp;nbsp;non fans caufe : car ie croy qu’en huiél iours ils n’euftent feeu finer huióthommes-d’armesme d’autres gens de guerre,n en y auoit eh tout ce pais là qu’enuiron mil amp;nbsp;cinq cens hommes, tant de- pied que de-cheual: qui eftoient vers Namur,amp; en Henault: amp;nbsp;eftoient efehappez de ladiôte bataille, où eftoit mort le Duc de Bourgogne. Leurs anciens termes Ôc façons deparler eftoient bien changez : car ils parloient bien bas, amp;nbsp;en grandehu-milité:nonpasque ieles vueille charger que le temps paftéeuftent plus ar-rogammétparlé qu’ils ne deuftent:mais vray eft que d»temps quei’y èftoye^ ils fe fentoient fi forts qu’ils ne parloient point au Roy, ne du Roy, en telle reuerence qu’ils ont fiit depuis. Et files gens eftoient toufiours bien fages, ils feroient fl modérez en leurs paroles, en temps de prolperité, qu’ils ne deuroient point auoir caufe de changer leur langage en temps d’aduerfite. Icretournay vers monfeigneur l’Admirai, faire mon rapport; amp;nbsp;là'trOuuay

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170 V. L I V R E D E S M E M O I R E S nouuclles que le Roy venoic,lcquelfefi:oit mis en chemin toft apres:amp;auoit fait eferire pluûcurs lettres,tant en fon nom que de fes feruiteurs, pour faire venir gens deuers luyjparle moyen defquelsil efperoit réduire ces Scigneu* ries, dont i’ay parlé,en fon obciflance.

Discours aucunement hors du propos prindpaljîtr la ioye du nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;voyant de-

liuré de plufieurs ennemis'.Cr de la faulte quil feit en la redudion des ^ays du Ducde'Bourgongne. CHAP. XII.

AioyefuttrcfgrandcauRoy,defe vcoir au defius de tous ceux qu’il haifloit,amp; eftoiêt les principaux ennemis,Des vns fefioit vengé,corne du Coneflable de Francc,du Duc de Nc-mour^ôc de plufieurs autres. Le Duc de Guyenne,fon frere, efioit mort,dont il auoit la fucceffion.Toure la maifon d’Anjou cftoit mortc,commcle Roy René de Cecile,les Ducs le-han amp;nbsp;Nicolas de Calabre, amp;nbsp;puis leur coufin le Comte du Maine, depuis Comte de Prouence.Le Cote d’Armignac auoit efté tué à Lefl:ore;amp; de tous ceux cy auoit lediólfeigneurrecueilly lesfucceflions amp;nbsp;les meubles.Mais de rat que celle maifon de Bourgogne clloit plus grade amp;: pluspuiflànte queles autres,amp;quiauoiteujapieçagrofle guerreauccle Roy Charles lèptiefme Ion perc,trente deux ans lans trefue,auec l’ayde des Anglois, qu’ils auoiét leurs feigneuries alTilcs es lieux côfins,amp;. les lubiedls difpofcz pour faire la guerre à luy amp;nbsp;à fon royaume,dc tât luy fut lamort de leur Duc à plailîrtref grâd,amp;; plus que tous les autres enfcmble:amp;: luy fembloit bié qu’en fa vie ne trouueroit aucû cotredit en fon royaume, ny és enuirôs pres de luy. Il eftoic en paix auec les Anglois , corne aucz cntêdu ; amp;nbsp;deliroit trauailler de toute {3. puifsâce que ladiéle paix l’entretint.Mais nonobllât qu’il fut ainli hors de toute crainte. Dieu ne luy permit pas prédre celle matière qui clloit fi grade parlebout qui luy clloit neceiraire:amp; fclmbc bien que Dieu môllraft alors, amp;nbsp;ait bien môflré depuis,que rigoureufemet il vouloir perfecuter celtemai-fon de Bourgogne, tat en la perlonne du leigneur,que des fubicôls,amp; autres y ayans leurs bics.Cartourcs les guerres,cfquelles ils ont elle depuis, ne leur fufsêt point aduenuës fi le Roynollre mai lire eull prinsles chofcsparlc bout qu’il les deuoit prédre,pour en venir au deirus,amp; pour ioindreà fa courone toutes ces grandes feigneurics,où il ne poiiuoit prétendre nul bo droiél. Ce qu’il deuoit faire par quelque traiéfé de mariage, ou les attraire à Coy par vraye amp;nbsp;bone amitié:comc aifément il le pouuoit faire,veu le grand defeon-fort,pauureté,amp; debilitation en quoy ces feigneuries elloicnt.Qupy faifant il les eull tirez hors de grandes peines,amp; par mcfme moyen cull bié enforci Ion royaume, amp;nbsp;cnrictii par longue paix;en quoy il l’eull peu maintenir, Sc ce pendâtloulagerci^lufieurs façons : parefpccialdupallagedcs Gens-d’armes,quiincellamment, Sgt;c le temps palTé, letéps prefent,cheuauchent d’vn des bouts du royaiÂne à l’autre, amp;nbsp;bien fouuent lans grâd bcloing qu’il

enfoit. Quan me parla Ie Roy de ce qu’il fcroit,fi lediôh Duc venoit à mourir; amp;nbsp;parloir en grand’raifon pour lors, dilant qu’il tacheroit a faire le mariage de fon filz (qui

IS

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 17« (qui fut depuis noftre Roy ) amp;nbsp;de h fille dudid Duc (qui depuis a elie Du-chefle d’Auftriche ) amp;nbsp;fi elle n’y vouloit entendre,pource que monfeigncur' leDaulphin eftoit beaucoup plus îeune qu’elle,il cfl'aieroit à luy faire efpou-fcr quelque ieune fcigncur de ce royaume, pour tenir eile amp;nbsp;fes fubieóts en amitié,amp; recouurer fans debat ce qu’il prctendoit eftre fien:amp;encores eftoit ledidfeigneurencepropoSjhuióliours déliant qu’ilfccuft la mortdudiéh Duc.Cefiige propos,dont ie vous parle,luy commença javn peu à changer, le iour qu’il fçeuft la mort dudiól DucdeBourgongne,amp; a l’heure qu’il nous depefcha monfeigncur l’Admirai Sgt;c moy: toutesfoisil en parla peu, mais a aucuns feit aucunes promeftes de terres amp;nbsp;feigneuries.

Comment Han^Bohain^Sain^l Quentin nbsp;nbsp;PeronnefuYint liureX^ti

comment il enuoya, maigre Oliuier^fon Barbier^pour cuyderpratiquer ceux de (yand. QH A P. XIII.

Vand le Roy fe trouua en chemin, tirant apres nous, luy vin-drent nouuelles plaifantes de tous coftez.Le chafteau de Ha luy fut baillé,amp; Bohain.Ccux de fainélQuentin fe prindrent euxmcfines:amp; meirent dedans monfeigncur de Mouy, qui eftoit leur voifin. Le Roy eftoit bien acertené de la ville de *

Peronne,que tenoit meflire Guillaume * Bifche; auoit efperance par nous cdny a amp;nbsp;par autres,que monfeigncur des Cordes feroit des fiens.ll auoit enuoyé à GâdfonBarbicr,appellémaiftreOliuier,narifd’vn village aupres deladiéfe ville de Gad:amp;: en auoit enuoyé plufieurs autres en pluficurs lieux ; dont de tout auoit grâd’ e(pcrâce:mais plufieurs le leruoienr plus de parolles que de faiél.Quad le Roy futaupres dePerône,ieme vein trouuerau deuant de luy, amp;nbsp;là vint rapporter meflire Guillaume Bifche,amp; aucuns antres, l’obcifiancc de la ville de Pcrónc,dót il fut fort ioycuxdediél (eignçur y fejourna ce iour. ledifnay auec luy,cômc i’auoye accouftumé; car fon plaflir eftoit que touf-iours mâgeoiêt fept ou huiél perfonnes à fa table,pour le moins,ôr auctines-fois beaucoup plus largement. Apres qu’il euft diiné,Ic retira à part,amp; ne fut pas cotent du petit exploiôl que lediólmófeigneur l’Admirai amp;nbsp;moy auions-fai^difant qu’il auoit enuoyé maiftre Oliuier Ion Barbier à Gâd,qui luy met-troit cefte ville enfonobeiflancc:amp; Robinet Dodenfort à S. Orner,lequel y auoit desamis.’ôc qu’ils eftoient gens pour predre les clefs de la ville,amp; mettre fes gens dedans,amp; d’autres qu’il nômoit,en d’autres grandes vil les: ôc me faifoit combatte de ce propos par monfeigncur du Lude, amp;nbsp;par d’autres. Il ne m’appartenoitpas d’arguer, ny de parler contre fon plaifir ; mais luy dy, que ie doubtois que maiftre Oliuier amp;nbsp;les autres,qu’il m’auoit nommez, ne cheuiroient point fi aifément de ces grandes villes, comme ils penfoienr.

Ce quifaifoit à noftre Roy me dire ces mots,eftoit pource qu’il eftoitchâ-gé de volonté,amp; que cefte bonne fortune qu’il auoit^iu commencement,luy donnoit efperance que tout fe rendroit à luy de tous cöftez; amp;fcrrouuoic confeillé par aucuns(amp; y eftoit aufli enclin de foy-mefme)a deffairc amp;: de-ftruire cefte maifon de tous poinds, amp;nbsp;en départir les Seigneuries en plufieurs mains:amp; nommoit ceux à qui il entendoit donner les Comtez, come

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vjz nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. LI V R E D E s MEMOIRES

Namur,amp; Henault,qui font fituées pies de luy: des autres grades pieces come BrabâtjHolade,il fen vouloir aider à auoir aucuns feigneurs d’Allemai-gne,quifcroient fes amis,amp; qui luy ayderoient à exécuter Ion vouloir. Son plaifir eftoit bien me dire toutes ces chofes,pource qu’autresfois luy auoye parlé amp;nbsp;confeillél’autre chemin icy delTus efcript.-amp; vouloir que i’entendifle lesrailons pourquoy ilnem’oyoit, amp;nbsp;que celle voye eftoitplusvtilepour fon royaume.-qui beaucoup au oit fouffert à caufe de la gradeur de celle mai-fondeBourgongne,amp; des grades feigneuries qu’elle pofledoit.Quat au mode,il y auoit grande apparence en ce que lediétfeigneur difoit ; mais quant a la confciêce me fembloit le cotraire.Toutesfois le fens de nollre Roy elloit li grand,que moy n’y autre qui full en la compaignie,n’eullioris fçeu veoir lî ‘ clair en fes alTaircSiCommc luy mefi-ne faifoit.’car fins nulle doubte,il eftoit vn des plus fages hommes,amp; des plus fubtils,qui ait régné en fon teps. Mais en ces grades matières, Dieu difpofe les cœurs des Roys amp;nbsp;des gras Princes (lefquelsil tient en là main) à prendre les voyes felonies œuures qu’il veut coduireapres.Car làns nulle difficulté, fi fon plailir eull eftéquenollreRoy euft continué le propos, qu’il auoit de luy mefme aduifé deuant la mort du Duc de Bourgongne, les guerres qui ont efté depuis,amp; qui font, ne fulTent point aduenuês:mais nous n’ellions encores entiers luy, tant d’vn collé que d’autre,digne de reccuoir celle longue paix,qui nous elloit appareillée:amp; de là procédé l’erreur que feit noffre Roy, amp;nbsp;non point de la faute de fon fens: car il elloit bien grand, corne i’ay dit.le dy ces chofes au long,pour monftrcr qu’au comencement,quand on veult entreprendre vne fi grande chofe,on la doit bien confulter amp;nbsp;dcbattrc,alîn de pouuoirchoifir le meilleur party ; amp;nbsp;par elpecial foy recommander à Dieu, ôc luy prier qu’il luy plaife adrelTcr le meilleur chemin:car de lavier tout, amp;nbsp;feveoit tout cela par efcript,amp;: par experience, le n’enten point blafmer nollre Roy, pour dire qu’il cull failly en celle mat^bre : car parauenture, autres qui fçauoientôc qui congnoifloient plusq^é raoy,feroient amp;nbsp;effoient lors de l’aduis qu’il elloit,combien que rie , n’y full dçtatu,ne là ny ailleurs, touchant ladidc matière. Les Croniqueurs ‘ n’efcriuent communément les chofes qu’à la louange de ceux de qui ils parlent, amp;nbsp;lailTent plu heurs chofes,ou ne les fçauent pas aucunesfois à la vérité: mais quant à moy,ic me délibéré deneparlerdechofe quinefoit vraye, amp;nbsp;que iç n’aye veiie ou fceüe de fi gras perfonnages qu’ils foient dignes de croi re,làns auoir efgard aux louanges. Car il eft bon à penfer qu’il ii’ellnul Prince fi fige,qu’il ne faille bien aucunesfois,amp; bien fouuent l’il a longue vie ; amp;nbsp;ainfi fe trouueroit de leurs fiids,fil en eftoit toufiours diôl la verité.Lesplus grans Senats ôc Confuis, qui aient iamais elle, ne qui font, ont bien erré, amp;: errent bien,comme il a efté veu,amp; fe veoit chafeun iour.

Apres le fejour qe’eutfiit le Roy en ce village pres Peronne, fe délibéra lelcndemain pour y aller faire fon entrée : car elle luy eftoit baillée, comme i’ay dit. Ledid Seigneur me tira àpart, comme il voulut partir,amp;m’cn-uoyaenPoidoUjfur les frontières de Bretaigne, amp;nbsp;me dill en l’oreille que fil’entreprinfede maiftreOliuierfiilloit, amp;nbsp;que monfeigneur des Cordes ne fe trouall des fiens,ilferoitbrullerlepais d’Artois, en vn endroid du

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DE PHILIPPE DE COMBINES. 17/ long de la riuierc du Lis( qui fappelloit la Leuée) ôc puis qu’incontinent f en retourneroit en Touraine. le luy recommanday aucuns, lefquels ï’eftoient tournez de fon party, par mon moyen,parquoy leur auoye promis penfions bicns-faiéls de luy . Il en print de moy les noms par eferit, amp;nbsp;leur tint Ic-diôh Seigneur ce que leur auoye promis : amp;nbsp;ainfi parti de luy pour ce coup. Commeie voulu monteràçheual,fetrouuapresdemoymonfeigncurdu Lude: qui cftoit fort agréable au Roy en aucunes chofes, amp;nbsp;qui fort aymoic Ibn profit particulier,^ne craignoit iamais àabufer ny a tromper perfonne; aufli legerement croyoit, amp;: eftoit trompe bien fouuent. Il auoit efté nour-ry auec leRoy en fa ieunefle,!! luyfçauoit fort bien complaire,amp; eftoithom-ine tref plailant. 11 me vint dire ces mots, comme par moqueries lagement diôles; Or vous en allez vous,à l’heure que vous deuiez faire voz befongnes, ou iamais, veu les grandes chofes qui tombent entre les mains du Roy,donc il peut agradir ceux qu’il ay me: amp;nbsp;au regard de moy,ie matten d’eftre Gou-uerneur de Flandres,amp; m’y faire tout d’or : amp;nbsp;rioit fort en ce difânt : mais ie n’eu aucune enuie de rire,pourceque ie doubtoye qu’il ne procedafi: duRoy; ôc luy refpondi que i’enferoye bien ioyeux,filaduenoit ainfi,amp; quei’auoyc cfperance que le Roy ne m’oubliroit point.

Vn Cheuaher de Henault eftoit arriué la deuers moy, n’y auoit pas demie heure; amp;nbsp;m’apportoit nouucllcs de plufieurs autres, à qui i’auoye eferit, en les priant de foy vouloir réduire au feruice du Roy. Lediól Cheualicr amp;: moy fommes parens,amp; vit encores : parquoy ne le vcuxnomer,ne ceux de qui il m’apportoit nouucllcs.il m’auoit en deux mots fait ouucrture de bailler les principales villes amp;nbsp;places de Henault; amp;nbsp;au partir que iefey du Roy, ieluy en dy deux mots c amp;incontinantl’cnuoya quérir, amp;nbsp;me dift de luy amp;nbsp;. des autres que ie luy nommoye, qu’ils n’eftoient telles gens qu’il luy fàloit. L’vn luy defplaifoit d’vn cas,l’autre de l’autre ; amp;nbsp;luy fembloit que leur oftrc eftoit nulle,amp; qu’il auroitbien tout lans eux, amp;nbsp;ainfi me parti de l^y; amp;nbsp;leit parler lediól Cheualier à monfeigneur du Ludc,dont il le trouua clbahy : Ôc fedepartitbientoft,fins entrer en grande marchandife : carlcdi(ft Seigneur du Lude amp;nbsp;luy ne le fuflent bien accordez, n’y entendus. Car il eftoit venu pourfayderôc fairefon profit, amp;fenrichir,amp; ledidtSeigneur du Lude luy demanda d’entrée quelle choie les villes luy donneroient en conduifant leur alFaire . Encore eftimé-je ce refus, que le Plt;oy feit de ces Cheualicrs, cftre venu de Dieu;cari'ay veu depuis qu’il les euft bieneftimez, fil les euft peu finer; mais paraucnturc que noftre Seigneur ne luy voulut point de tous poinélsaccomplirfondefir, pour des raifons que i’ay diètes: ou qu’il ne vouloir point qu’ft vfurpaft fur ce pais de Henault,qui cft tenu de l’Empi-tc;tant pourec qu’il n’y auoit aucun tiltre, qu’aufli pour les anciennes alliances amp;nbsp;fermens,qui font entre les Empereurs amp;nbsp;les Roygt;de France. Et mon-lira bien depuis ledièt Seigneur en auoircongnoilTance; car il tenoit Cam-btay, leOuefnoy, amp;*Boiiri en Henault. il rendit ce Boifti en Henault, amp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1

fetnit Cambray en neutralité, laquelle eft ville Imperiale.Et combien queie ne demouray fur le lieu, li fu - je informé comme les affaires le paffoiet, amp;nbsp;le pouuoye bien aifément entendre, pour la congnoiftancc amp;nbsp;nourriture que

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174 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. L I V R E D E S M E M O I R E S

i’auoyecu del’vn coftéamp; del autre; amp;nbsp;depuis l’ayfceude bouche par ceux qui les conduifoienc tant d’vn codé que d’autre.

(oinmenttnctfflre Oliuierurbier dsiT^py^n ayantbien^ai^fonproßtde ceux de la 'ü/lle de Gand^trouua moyen de mettre les Gens-d’armes

du dedans Tournay. CHAT. X1111.

Aillrc oliuier, comme auez ouy, elloit allé .a Gand, lequel portoit lettres de creàcc à madamoifelle de Bourgogne fille Charles:ôcauoit commilliô de luy faire aucunes rc’ monllranccs à part, afin qu’elle fe voullill mettre entre les mains du Roy . Cela n’elloit point fa principale charge; car il doubtoit bien qu’à grand’ peine pourroit-il parler Icul à ellc:amp; que fil y parloir, fi. la ne fçauroit il guider à ce qu’il defiroit; mais il auoit intention qu’il feroit faire à celle ville de Gand quelque grande mutation , con-gnoilTant que de tout temps elle y elloit encline,amp; que foubs les Ducs, Philippe amp;nbsp;Charles, elleauoit cfté tenue en grande crainte : amp;nbsp;leur auoient cfté ollez aucuns priuileges, par la guerre qu’ils eurent auec le Duc Philippe , en failant leur paix : Scaulfi par le Duc Charles leuren fut ofte vn, touchant la creation de leur Loy, pour vnc offence qu’ils luy feirent, luy eftant en ladiôle ville, le premier iour qu’il y entra comme Duc . l’en ay parle cy deuant, parquoy ic m’en tay . Toutes ces raifons donnèrent hardement audiólmaiflreÓliuier, Barbier du Roy (comme i’ay dit) de pourfuyure fonœuure; amp;nbsp;parla à aucuns qu’il penfoit qu’ils luy deuflentpreilcr l’oreille à faire ce qu’il defiroit, amp;nbsp;offroit leur faire rendre leurs priuileges (qu’ils auoient perdus) parle Roy, amp;nbsp;autres chofes ;mais il ne fut point en leurho-Rel de ville pour en parler en public: car il vouloir premièrement veoir ce qu’il pourroit faire auec celle ieunc PrincelTe : toutesfois il en feeut quelque choie . L^dclTufdiôl maillre Oliuier quand il eut cfté quelques peu deiours à GandjOn luy manda qu’il vint dire fi charge.-lequcl y vint en la prefence de ladiôlc Princcire:amp; elloit lcdiôl Oliuier vcllu trop mieux qu’il ne luy appar-tenoit. Il bailla fes lettres de creance. LadiôleDamoifelleclloit en fi chaire,amp; leDucdeCleuesàcofléd’elle,amp; l’Euelquedu Liege,amp;plulicursautres s:rans peifonnap:es,amp;: stand nombre de gens. Elle leut fa lettre de creance, amp;nbsp;fut ordonne audidl maillre Oliuier de dire fa crcance.-lequcl refpodit qu’il n’auoit charge, linon de parler à elle à part. On luy dill que ce n’elloit pas la coiiflumCjamp;parefpecialàcelleieuneDamoifelle, qui elloit à marier. Il continua de dire qu’il ne diroit autre chofe fino a elle. On luy dill lors qu’on luy feroit bien dire^Ôc eut paour:amp; croy qu’à l’heure qu’il vintàprclcnterfa-diéte lettre de creance, il n’auoit point encores penfcàce qu’il deuoit dire: car aulli ce n’elloit point fa charge principale, comme vous aucz ouy. Ainli fe départit pour cel^ fois lcdiôl Oliuier, lans dire autre choie. Aucuns de ce confeil le prindrent à cierifion, tant à caufe de fon petit ellat, que des termes qu’il tenoit : amp;nbsp;par cfpccial ceux de Cad ( car il elloit natif d’vn petit village, auprès deladiôte ville de Grand)amp; luy furent faiôts aucuns tours demoque-rie,amp; puis foubdainement fenfuit de ladiôle ville : car il fut aduerti que fil ne l’euft fhic,il elloit en peril d’ellre getté en la riuiere;amp; le croy ainli.

Lcdiôl

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 17$

LeJid maiftre Oliuier fe Eiifoic appclkr Comte de * Meulanc, qui cft vne petite ville pres Paris, dont il eftoit Capitaine. Il fenfuit à Tournay, à fou partement de Gand: laquelle ville eft neutre en ce quartier là,amp; eftoit fort affeôlionnecau Roy : car elle cft aucunement fienne, amp;nbsp;luy paye fix mille li-ures Parifis l’an; amp;nbsp;audemourant elle vit en toute liberté, amp;nbsp;y font receus toutes gens ;amp;eftbelleville,amp;:trcsforte, comme chafcLin en ce quatier le Içaitbien. Les Gens-d’Eglile amp;nbsp;Bourgeois de la ville, ont tout leur valiant reuenu en Henault ôc en Flandres:car elle touche à tous les deux pais def-lufdicl:s,amp;: pour celle caufe auoienr touliours accoufturaé de donner par les anciennes guerres du Roy Charles feptiefine, amp;nbsp;du Duc Philippe de Bour-gongne,dix mille hures l’an audiél Duc : amp;nbsp;autant leur en ay veu donner au Duc Charles de Bourgongne ; mais pour celle heure qu’y entra Icdiél mai-ftre Oliuier,elle ne payoit rien, amp;nbsp;eftoit en grand’aile amp;nbsp;repos.

Combien que la charge qu’auoit ledid maiftre Oliuier, full trop grande pour luy, fi n’en fut il point tant à blafmcr que ceux qui la luy baillèrent. L’exploiôt en fut tel qu’il debuoit; mais encores monftra il vertu amp;nbsp;fens en ce qu’il feit : car luy, congnoiftant que ladiéle ville de Tournay eftoit fi prochaine des deux païs, dont i’ay parlé, que plus ne pouuoit,amp;: bien aifée pour y faire grand domma'ge , pourucu qu’il y peuft mettre des gens-d’armes que le Roy auoitpresdelà(àquoy pour rien ceux de la ville ne fc fuftent, confeniis :cariamaisilsnelemonftrerent d’vn parti ne d’autre, mais neutres entre les deux Princes.) Pour les railons dcftuldiéles ledid maiftre Oliuier mandafccrettementà monfeigneurde Mouy ( dont le filzeftoitBaillif ’ de ladiéle ville, mais il ne fy tenoit point) qu’il ameuaft fa compaignie,qu’il auoit à Sainél Quentin, amp;nbsp;quelques autres gens-d’armes, qui eftoient en ccquartier là ; lequel vint à l’heure nommee à la porte, où il trouua lediél maiftreOliuier accompaigné de trente ou quarante hommes; lequel eut bien lehardiefte de faire ouurir la barrière ,dcmy par amour,lt;lemy par forcc;amp; mit les gens-d’armes dedans,dont le peuple fut aftes content; mais les Gouuerneurs de la ville,non; defquels il enuoya fept ou huicl à Paris,qui n’en font partis tant que le Roy a velcu. Apres ces gens-d’armes y en entra d’autres, quifeirent merueilleux dommages es deux païs Idefiufdióls depuis; commed’auoir pilléamp;bruflémaints beaux villages, amp;nbsp;maintes belles cen-fes, plus au dommage des habitans de Tournay, que d’autres, pour les railons que i’ay diélcs. Et tant en feirent que les Flamans vindrent deuant, amp;nbsp;tirerent leDucde Gueldres hors de prifon ( que le Duc Charles y auoit mis) pour en faire leur chef: amp;nbsp;vindrent deuant ladiéle ville de Tournay, où ils feirent peu defejour; car ils l’en retournèrent en grand defordre amp;nbsp;fuite , amp;nbsp;y perdirent beaucoup de gens : amp;nbsp;entre les autres y mourut le Duc de Gueldres, qui fe mit à la queue, pour vouloir aider à foufte^ir le faix : mais il fut marfuiuy,amp; y mourut,comme nous dirons plus amplemêt cy apres.Et par *fcruy, tant procéda cell honneur au Roy par lediél maillée Oliuier; amp;nbsp;receurent les ennemis du Roy grand dommage. Vnbien plus fage, amp;nbsp;plus grand perfonnage queluy ,euft bien failly à conduire cell œuure. I’ay alfés parlé de la charge qui fut donnée, par ce làge Roy, à ce petit perfonnage, inutile

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17^ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. LIVREDES MEMOIRES

à Ia conduire défi grande matière : amp;femble bien que Dieu auoit trouble le fens de noftre Roy, en cell endroit.'car(comme i’ay diOfil n’cuft cuidé fon Œuurecftre trop aifée à mettre à fin, amp;nbsp;il euftvn petit laiifé de la palfion amp;nbsp;vengeance qu’il auoit contre cellemaifon de Bourgongne, fans point de faulte il tinll auiourd’huy toute celle feigneurie foubs fon arbitrage.

Des AmbaJJadeurs^qne la Damotfelle de Bourgongne,fille du feu Duc Charles, en-uoya au nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;comment par le moyen de monfieurdes Cordes, la cite d’Arras,)^ les villes de Hefdin nbsp;nbsp;Boulongne, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;la‘ville d'Arras mefme furent

mifesenl'obeilfanceduB.oy. C H AT. Xî^.

Près quclcdiélfeigncureutreccu Pcronne(qLiiluy fut baillée par mclfire Guillaume Bifche,hommc de fort petit ellat natifde Moulins-Engibers enNiuernois:qui auoit elle enri-chy amp;elleuéen authorité par ledicl Duc Charles de Bourgongne, lequel luy auoit baillé celle place entre les mains; pource que là maifon,appellée Clery,elloit auprès de là: la

quelle lediétmeflircGuillaume Bifcheauoit acquife,amp; y auoit vnfort cha-lleau amp;nbsp;beau) lediélfcigneurreceutaudichlieu aucuns Ambafladeurs de la partie de ladiéle Damoifellc de Bourgongne ; où elloicnt tous les plus grands amp;nbsp;principaux perfonnages, dont elle fcpouuoitaider, qui n’elloit point trop figement faiôl, de venir tant enfemble: mais leurs defolations elloient fi grandes, amp;nbsp;leur paour, qu’ils ne fçauoient ne que dire,ne que faire. Les delTufdiôls elloient leur Chancelier, appelle meflire Guillaume Hu-gonet,tref notable perfonnalt;re,amp; fio-c-’Sc auoit eu grand credit auec ce Due Charles, amp;nbsp;en auoit eu grands biens . Le feigneur d’Hymbercourc y elloit aulfi, dont allés a cllé parlé en ces Memoires : amp;n’ay point fouuenance d’a-uoir veu plus làge Gentil-homme,ne mieux adextre pour conduire grandes *dc la Giu- niatieres .•!! y auoit le feigneur de la Vere, grand feigneur en Zelande, amp;le tuec,Exemf,i. feigneur de* Cripture, plufieurs autres, tant nobles que gens d’Eglilê, ôc tris imprimez, dcs bonncs villes.Noitrc Roy,auant les auoir ouïs,tant en general que cnai-gJipt'''tfiTe cun à part, mit grand’ peine à gaigner chafeun d’eux : amp;nbsp;en eut humbles pa-rolles, ôc rcuerentes, comme de gens ellants en crainte : toutesfois ceux qui me'deiaGtu auoicutleutstetrcsenlieucùilsl’attcndoientqueleRoy n’allall point, ne metihfi’nbi‘i- fc voulurcut cu tien obliger au Roy, finon en fa fiant le mariage de monfei-gneurleDaulphin, fonfilz, àladiôlc Damoifellc. LediôlChancelier amp;nbsp;le feigneur d’Hymbcrcourt, qui auoient ellé nourris en tref grande amp;nbsp;longue authorité, Sc qui defiroient y continuer, amp;nbsp;auoient leurs biens aux limites duRoy (l’vn en la Duché de Bourgongne, l’autre en Picardie, comme vers Amiens )prelloicnt l’oreille au Roy àfes offres : amp;nbsp;donnercntquelquecon-fentementdelefcrui#, enfaifant ce mariage, amp;nbsp;de tous poinds fe retirer loLibs luy, ledid mariage accomply.Et combien que ce chemin full le meilleur pour le Roy, toutefois il ne luy elloit point agréable ; amp;c fe mefeonten-toit d’eux , par ce que des-lors ils ne demouroient en fon feruice : mais il ne leuren feit point de femblant, car il fen vouloir aider en ccqu ilpourroit. la auoit ledid Seigneur bonne intelligence auec monfeigneur des Cordes,

amp; con-

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DE PHILIPPE DECOMMINES. 177 confeillc amp;nbsp;aduifé de kiy,qui eftoit Chef amp;nbsp;maillre dedans Arras, rcquift aufdiôls Ambafladeurs qu’ils luy feiffent faire oiiucrture, par lediôt des Cordes de la ciré d’Arras:car lors y auoir murailles amp;nbsp;folTez entre lavi 1 le amp;nbsp;la ci-réjamp; portes fermans contre ladiôle cite:amp; maintenant eft à l’oppofite, car la cité ferme cotre la ville. Apres plufieurs remôftrâces faiôfes audiéfs Ambaf-fadeurs,amp; que ce feroit pour le mieux, amp;nbsp;que plus aifémenton viendroit à paix,en faifant celle obeilïance,ils fy confentirentjamp; principalement Icfdits Chancelier amp;nbsp;lefeigneurd’Hymbercourt:amp; baillèrent lettres de delchargc audiót feis;neur des Cordes,amp; le côfentcment de bailler ladióle cité d’Arras, ce qu’il feit volontiers:amp;incontinent que le Roy fut dedans, ilfeitfaire des Bouleucrs de terre, contre la porte, amp;nbsp;autres endroits pres de la ville : amp;nbsp;par cell appointementmonlèigncur des Cordes,lè tira hors de la ville, amp;nbsp;en feit faillir les Gens de guerre,cllans auec luy;amp; fen alla chafeun àlbn plaifir, amp;c prenant tel parti qu’il luy plaifoit.

Lediôlfeigneur des Cordes, foy tenant pour defeharge' du fèruicc de là inaillrcire,parce conlèntement quauoient baillé Icfdids AmbalTadeurs, fc délibéra de faire le ferment au Roy, amp;nbsp;de venir fon feruitcur,confiderât que fon nom amp;fcs armes efloient deçà la riuierc de Somme, pres de Beauuais: car il auoit nom melïire Philippe de Creuccœur, frère fécond du feigneur de Crcuecœur:amp;auin ces terres quclamailonde Bourgongne auoit occupées fur ladiôleriuiere de Somme (dontalfczay parlé) viuans les Ducs Philippe amp;nbsp;Charles,reuenoyent fins difficulté au Roy, parles conditions dutraidé d’Arras-.par lequel furent baillées au Duc Philippe,pour luy amp;nbsp;fes hoirs mafios feulement:amp; le Duc Charles ne lailTa que celle fille dont i’ay parlé, amp;nbsp;par ainlîledidmeflire Philippe de Creuccœur deuenoit homme du Roy làns difficulté, parquoy n’eull fçeu mefprendre à fe mettre au fcruice du Roy (fi-non qu’il cull fait ferment de nouucau à ladide Damoifelle ) amp;nbsp;en luy rendant ce qu’il tenoit du lien. Il l’en cfl parlé , amp;nbsp;parlera en dfterfes façons, parquoy ic m’en rapporte à ce qui en eft. Bien fçay qu’il auoit efte nourry , amp;nbsp;accreu , amp;nbsp;mis en grand ellat par le Duc Charles , amp;nbsp;que fa mereauoitnourrie en partie ladide Damoifelle de Bourgongne, amp;nbsp;qu’il elloit Gouuerneur de Picardic,Senefch3Îl de Ponthicu, Capitaine de * Con- Its imfri-tray,Gouucrneur de Peronne,Mondidier amp;nbsp;Royc,Capitaine de Boulongne tray. appro-

de Heldin,de parle Duc Charles de Bourgongne quand il mourut; amp;nbsp;en-cores de prelent ils les tient depar le Roy, en laformeamp; manière que le Roy nollre maiflre les luy bailla. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;fardeßM tout

Apres que le Roy eut fait en la cite d’Arras, comme did ell, il fe partit de mens.

Ia;amp; alla mettre le liege douant Hefdin, où il mena ledid Seigneur des Cordes,lequel auoit tenu la place,comme did ell,il n’y auoit que trois iours : amp;nbsp;encores y elloientfes gens, qui monllrerent la vouloir tenir pour ladide Damoifelle , difans luy.auoir fait le ferment, amp;nbsp;tira l’artillerie quelques iours. Ils ouirent parler leur maillrc, amp;nbsp;à la vérité ’ceux de dehors amp;nbsp;dedans fentendoient bien: amp;nbsp;ainli ladide place fut rendue au Roy : lequel f en alla deuanpBoulongnc;où il en fut faid tout ainlî ; Ils tindrent parauen-tUre vn iour d’auantage: toutesfois celle habilité elloit dangereufe, fil y euft

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17? nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. LIVRÉ DES MEMOIRES

eu gens au païs (amp; le Royjqui depuis le me compta,l’entcndoit bien) car il y auoit gens dedans Boulongne,qui congnoiflbient bien ce cas,amp; trauailloiét d’y mettre des gens,fils en eulTent peu finer à tempSjôc la deficndrc à bon efi cient.Cepcndant que le Roy fejournoit dcuant BoLilongnc(qui fut peu d’cf pace, comme de cinq oufixiours)ccux d’Arras fetindrcnt pour deceus de fe veoirainfi enclos d’vn cofté amp;nbsp;d’autre, où il y auoit largement Gens-d’armes amp;nbsp;grand nombre d’artillerie : amp;nbsp;trauailloicnt pourtrouuer gens, pour garnir leur ville:amp;: en efcriuirét aux villes voifines,corne à l’Ifleamp;Douay.Au-diôtlicu de Douay y auoit quelque peu de Gens de cheual ; amp;nbsp;entre les au-trcs,y eftoit le Seigneur de Vergy,amp; autres dont il neme fouLiicnt;amp; eftoiet de ceux qui eftoient rcuenus de cefte bataille de Nancy: lefquels fe délibérèrent de foy venir mettre en cefte ville d’Arras;amp; feirêt amas de ce qu’ils peu-rent,comme de deux ou trois cens cheuaux, que bons que mauuais, amp;nbsp;cinq ou fix cens Hommes de pied.Ceux de Douay,qui en ce temps là eftoient encores vn petit orgueilleux,les preflerent de partir en plain midy, voulfiflent ils ou non,qui fut vnc grande folie pour eux:amp; aufti mal leur en print, car le païs de là Arras eft plain comme la main, amp;nbsp;y a enuiron cinq lieues ; amp;nbsp;fils euftent attendu la nuiót, ils euftent execute leur entreprinfe, comme ils cn-tendoient faire. Comme ils furent en chemin, ceux qui eftoient demeurez cnlacite'jCommelcfeigneurduLude, lehan du Fou, les gens duMarefchal de Loheac,furent aduertis de leur vcnLiê’:amp; delibercrent de plus toft leuren aller au deuant,amp; mettre tout à radLienture,que de les laifler entrer en lavil-Ie:car il leur fcmbloit qu’ils ne fçauroient deftendre la cité, fils y entroient. L’entreprinfe de ceux que ie dy,eftoit bien perilleufc.' mais ils l’executerent hardiment,amp; bien,amp; deftroufterent cefte bande qui eftoit partie de Douay: amp;nbsp;furent quafi tous morts ou prins , amp;nbsp;entre les autres fut prins le feigneur de Vergy.

Le R^ y arriua le lendemain, qui euft grand’ioye de cefte defeonfiture: amp;nbsp;feit mettre tous les prifonniers en fa main ; amp;nbsp;plufieurs feit mourir de ces Gens de pied,efperant efpouuanter fi petit de Gens de guerre qu’il y auoit en ce quartier; amp;nbsp;feit le Roy longtemps garder monfeigneurde Vergy, lequel ne voulut faire le ferment au Roy,pour chofe du môdc,aufti eftoit il en eftroicte garde amp;nbsp;bien enferré. A la fin fut confeillé de fa mere: amp;nbsp;apres qu’il eut efté vn an en prifon,ou plus,!! feit le bon p lai G r du Roy, dont il feit que Gge.Le Roy luy reftitua toutes fes terres, amp;nbsp;toutes celles qu’il qucreloit ; amp;: le feit poflefteur de plus de dix mille liures de rente, amp;nbsp;d’autres beaux eftats. Ceux quiefehapperent de ceftedeftroufic, qui eftoient peu, fen entrèrent en la ville. Le Roy feit approcher fon artillerie, amp;nbsp;tirer ; laquelle eftoitpuif-fânte,amp;en grand nombre:amp;fofle, ne muraille ne valoient gueres. La ha-terie fut grande, amp;4iircnt tous cipouuantez ; car ils n’auoient comme point de Gens de guerre dedans. Monfeigneurdes Cordes y auoit bonne intelligence ;amp;aufli incontinent que la cité fut rendue au Roy , la ville ne luy pouuoitefchapper.-parquoy ilsfeirent vnecompofition,en rendant la ville; laquelle compofition fut aflez mal tenue, dont lediôt feigneur du Lude eut partie de la coulpe;amp; feit Ion mourir plufieurs Bourgeois amp;nbsp;autres,amp; beaucoup

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 17p coup gens de bien : prefenticdiól Seigneur du Lude amp;maiftrc Guillaume de Ccrilày (qui y eurent grand profit; car lcdiôl Seigneur du Lude m’a dit que par ce temps il y auoit gaignc vingt mille E(cus,amp;deux pannes de Martres) amp;nbsp;feirent ceux de la ville vn preft au Koyde foixante mille EfcuSjqui cftoic beaucoup trop pour eux : toutesfois ic croy que depuis ils furent ren-dusxar ceux de Cambray en prefterent quarante mille,qui depuis pour cer-tainlcurfurcnt rendus,parquoy iecroy qu’auflifurent les autres.

Comment les Gantois quiauoient^furpe authoritépardejjus leur Princejje quandfonpereßutmort^'vindrent en Ambajjade vers le B^oy^comme de par les trois Pjlats de leur pays. nbsp;nbsp;nbsp;CH AT. X l^l

BOur l’heure de ce fiege d’Arras,Madamoifelle de Bourgon-gne efioit à Gand, entre les mains de fes gens tres-deraifon-nables:dont perte luy enfuyuit, amp;: profit au Roy : car nul ne pert,que quelcun n’y gaigne.Quand ils fccurent la mort du Duc Charles,il leur fembla qu’ils eftoiet efchappez;amp; prin-drent tous ceux de leur Loy, ( qui efioieqt vingt amp;nbsp;fix ) Sgt;e la plus part ou tous feirent mourir ; amp;prindrenc leur couleur, qu’ils auoient fait le iour de deuat defeapiter vn homme ; amp;nbsp;nonobftant qu’il reufi biê def-ferui,fi n’en auoient ils aucun pouuoir,comme ils difoicnt;car leur pouuoir efioit expiré par le trefpas dudiôfi Duc, qui les auoit creéz audiéf Gouuerne-ment. Ilsfeirent mourir auifi plufieurs bons perfonnages de la ville, qui auoient elle amis fauorablcsdudióf Duc;dontil y en auoit aucus, qui de mo temps, amp;nbsp;moy prefent,auoiét aidé à defmouuoir lediëL Duc Charles ; lequel voiiloit deftruire grand’ partie de ladiéfe ville de Gand.Ils conttaignirent ladite Damoifellc à confirmer leurs anciens priuileges: qui leur auoient cfié ofiezpar la paix de Gand(qui futfaiéfepar le Duc Philippe) amp;nbsp;autres, par le Duc Charles. Lcfdiéfspriuileges neleur-feruoient que de noife auec leur Prince: amp;nbsp;aufii leur principale inclination eft de defirer leur Prince eflre foible :amp; n’en ayment nuis depuis qu’ils font Seigneurs : mais tref-naturelle-ment les ayment,quand ils font en enfance, amp;nbsp;auant qu’ils viennent â la fei-gneurie ; comme ils auoient fait celle Damoifelle, qu’ils auoient foigneufe-ment gardée 0«: ayméc iufqucs lors qu’elle fut Dame. Aufii cil bon â entédre que fi à l’heure que lediôt Duc mourut, les gens de Gand n’eulTent fait aucun trouble, amp;nbsp;eufient voulu tafeher à garder le pais, foubdainement ils euflent poLirueu a mettre gens dedans Arras, amp;nbsp;parauenture â Peronne ; mais ils ne penferent lors qu’à ce trouble .Toutesfois le Roy ellant deuant ladiéle ville d’Arras, vindrent deuers luy aucuns AmbalTadcurs de par les trois Eftats des pais de ladiôle Damoifelle:car ils tenoient à Gand certaint députez defdiôls trois Efiats : mais ceux de Gand faifoient le tout à leur plailir, pource qu’ils tenoient ladiôte Damoifelle entre leurs mains . Le Roy les ouit, amp;nbsp;entre autres chofes , dirent que les chofes qu’ils auoient propofées, qui eftoienttendans afin de paix, procedoientdu vouloir de ladiôte Damoifel-le; laquelle en toutes chofes eftoit délibérée de foy conduire par le vouloir

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i8o nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. LIVRE DES MEMOIRES

amp; confeil des trois Eftats de fon pais : amp;nbsp;rcqueroicnt que le Roy fe vouißft déporter de la guerre qu’il faifoit, tant en Bourgongne qu’en Artois, amp;nbsp;qu’on print iournée, pour pouuoiramiablemcnt pacifier, amp;nbsp;que cependant fuft donnée furcreance de guerre.

Le Roy letrouuoit jacomme au defirus,amp; encores cuidoitil que les cho-fes vin/Tent mieux à fon plaiïir qu elles ne feirent ; car il cfloit bien informe quepluheurs Gens de guerre eftoient morts amp;nbsp;defïaiôfs par tout,amp; beaucoup d’autres deftournez du cofté de ladiôfe Damoifelle, amp;nbsp;par efpecial monfeigneur des Cordes ( dont il faifoit grand’ eftime,amp; non fans caufe: car de long temps il n’euft fait par force ce que par intelligence il feit par fon moyen,peu deiours au;int, comme aucz ouy)amp; pourtant il cfbma peu leurs requeftes demandes. AL’fli eftoir il bien informé, amp;nbsp;fentoit bien que ces gens de Gand eftoient en tel eflat, qu’ils troubler oient tant leur compai-gnie qu’ils ne fçauroient donner aucun ordre ou confeil a conduire la guerre contre luy tear nul homme de fens, ne qui euft eu authorité auec leurs Princespaffez, n’eftoitappelle en rien, touchant leurs affaires :mais eftoit perfecüte', amp;nbsp;en danger de mort : amp;nbsp;par efpecial ils auoient en grand’ haine le Bourguignons, pour lagrande authorité qu’ils auoient eue au temps paf-fé . Et d’auantage le Roy congnoifîbit bien (lequel en telles chofes voyoit aufïiclerque nul homme de fon Royaume) ce que lefdiéts Gantois fai-foient à leur Seigneur de tout temps ,amp; qu’ils defiroient le veoir appetiflé, pourueu qu’ils n’en fentiffent rien en leur pais ; amp;nbsp;pource il aduifa que fils eftoient encommencez à foy diuifer, qu’il les y mettroit encore plus auant; car ceux à qui il auoit affaire, n’eftoient que belles, amp;nbsp;gens de ville la plus part : amp;nbsp;par efpecial ne fc congnoiffoient en ces chofes fubtiles, dont lediét feigneur fe fçauoit bien aider ; ôé faifoit ce qu’il debuoit pour vaincre amp;nbsp;mener à fin fon entreprinfe.

LeRoy farreftafurlaparollc queces Ambaffadeurs auoientdiéle fqui eftoitque leur Princeffe ne feroit rien fans la deliberation amp;nbsp;confeil des trois Eftatsdefonpais) en leur difant qu’ils eftoient mal informez du vouloir d’elle, amp;nbsp;d’aucuns particuliers .-car il eftoit leur qu’elle entendoit conduire fes affaires par gens particuliers, qui ne defiroient point la paix , S: qu’eux fe trouueroient defauouez, dont lefdiéls Ambafiadeurs fe trouue-rentfort troublez: amp;:comme gens mal accouftumez de befongner en ß grandes matières ,relpondirent chauldement qu’ils eftoient bien feurs de ce qu’ils difoient, amp;; qu’ils monftreroient leurs inftruôlions, quand befoing feroit. On leur refpondit qu’on leur monftreroit lettres,quand il plairoit au Roy, eferites de telle main qu’ils les croiroient ; qui difoient que ladiâc Damoifelle ne vouloir conduire fes affaires que par quatre perfonnes . Ils répliquèrent encÂres qu’ils eftoient bien feurs du contraire ; amp;nbsp;lors le Roy leur feit monftrer vnes lettres, que le Chancelier de Bourgongne, amp;nbsp;le Seigneur d’Hymbercourt auoient apportées, à l’autre-fois qu’ils auoient elle lt;à Peronne :left]uelles eftoient eferites, partie de la main de ladiéle Damoi-felle,partie de la main de la Ducheffe de Bourgongnc,douairieTe,fcmrne du Duc Charles, amp;nbsp;fœur du Roy Edouard d’Angleterre,amp; partie de la main du

Seigneur

O

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DE P H I L I P P E DE COMMIMES. i8i

fcigneur de Ranaftin,frere du Duc de Cîeiies, amp;nbsp;prochain parent de îadidc Damoifelle.Ainfieftoit celle lettre efcrite de trois mains, toutesfois elle ne parloir qu’au nom de ladiéle Damoifelle;mais il efloit ainfi faidl, pour y ad-ioufter plus grande foy.Lc contenu de ladide lettre elloii creance lur le Cha celier amp;nbsp;Hymbercourt : amp;nbsp;d’auantage ladidle Damoifelle dcclaroit que fon intention elloit,que tous fes affaires feroient conduisis par quatresperfon-nes,qui elloiet ladióle Douairière,fa belle merc,lediôt feigneur deRauaflain les deffus Châcelier amp;nbsp;Hymbercourt; amp;nbsp;fupplioit au Roy que ce qu’il luy plairoit faire conduire enuerselle,paffdl par leurs mains amp;nbsp;qu’il luypicuft l’cn addreffer à eux,amp; à nuis autres n’en auoir communication.

Quand ces Gantois, amp;nbsp;autres députez eurent veu celle lettre, ils en furent fort marris:amp; ceux qui communiquoyent auec eux, les y aydoientbien. Fi-nalemenr ladide lettre leur fut baillée:amp; n’eurent autre depefche,qui full de grande fubftance:amp; il ne leur en chaloir gueres, car ils ne pêfoient qu’à leurs diuifions,amp; à faire vn monde neuf:amp;: ne regardoient point à plus loing, cô-bien que la perte d’Arras leur deuoit bien plus toucher au cœur: mais c’e-ftoient gens,qui n’auoient point efte nourris en grandes matières,amp; gens de ville la plus part,comme i’ay dit. Ils fe mirent «à chemin droit à Gand, où ils trouuerét ladióle Damoifclle,aucc laquelle elloit le Duc de Clcues,fon prochain parent,amp; de fa maifon de par fa mere,lequel elloit ancien,Il auoitellé nourry en celle maifon de Bourgongne;amp; de tout temps en auoit eu lix mille Florins de Rhin de penfion:parquoy oultre le parentage, il y venoit aucu-nesfois comme feruiteur.L’Euefque du Liege,amp; plufeurs autres grans per-fonnages ,y elloient pour accompaignerladidc Damoifelle, amp;nbsp;pour leurs affaires particulierstcarrEuefquedeflufdidl elloit venu pour faire quitter à fon pars trente mille Florins ou enuiron,qu’ils payoienc au Duc Charles,par appointemcntfaiÔl entre luy amp;nbsp;eux,apres les guerres qu’ils auoient eues en-femble dont i’ay parlé cydeuant:touteslefquelles guerres auoienèellépour-la querelle amp;nbsp;affaire dudidl Euefque:amp; pource il n’auoit point grâd befoing de faire ceRepourfuite, amp;nbsp;les deuoit delirereRre panures: car il neprenoit rien en fon pais qu vn petit de domaine, au regard de la grandeur amp;nbsp;richeffe du païs,amp; Ion fpirituel.Lediél Euefqne,frerc de ces Ducs de Bourbon,Ichan amp;nbsp;Pierre, qui pour lors regnoit,* homme debonnechere,amp;deplailir,peu congnoiffant ce qui luy eRoit bon ou contraire,retira à luy melRre Guillaume de la Marche, vn beau cheualier amp;: vaillat, tref cruel amp;: mal conditionné, quitoLihours auoit eRé fon enncmy,amp;de la maifon deBourgongncaiiflijCn faueur des Liegeois:amp; ladiéte Damoifelle de Bourgongne luy donna quinze mille Florins de Rhih,en faueur dudiôl Euefque du Liege amp;nbsp;de luy, pour le reduirermais toR apres,il fe tourna contre elîe,amp; contre fon maiRre lcdiôl Eucfque,à qui il eRoit,ayant entreprins de faire fon filzŒuefque par force amp;: parlafaueur du Roy ; amp;nbsp;depuis il defconfitledidlEueique en bataille, amp;le tua de fa main,amp; le feit getter en la riuiere,lequel y dtmeura trois ionrs.

LediélDucde Clcues y eRoit cfperant faire le mariage de fon filzaific auec ladiéle Damoifeille,qui luy fembloit chofe fortable pour beaucoup de raifons:amp; croy qu’il fefuR fait,ii leperfonnage euR cRé conditionné au gré

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181 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. LIVRE DES MEMOIRES

d’elle amp;nbsp;de fes feruiteurs; car il eftoit de celle propre maifon, amp;cnrcnoit fa Duché,amp; auoit cfténourry leans;amp; parauenture que la veue amp;nbsp;cognoiflan-ce qu’on auoit de luy,feit ce dommage.

Comment ceux deGand^apres le retour de leurs Amhafjadeurs/cirent mourir le (Chancelier Hupuonet d/) lefeigneur d'Hymbercourt^contre le vouloir de leurTrinceffe-.g^ comment eux^C^ autres Flamans furent deßonßts deuantTournay^C^ le Duc de (yueldres leurCheß^ tué.

Ch AP. xFii.

Our reuenir à mon proj)os, ces députez arriuerent à Gand: amp;nbsp;fut le confeil prepare,amp; celle Damoifclle mife en fon fie-ge,amp; fes feigneurs à l’enuiron d’elle,pour ouir leur rapport; amp;nbsp;comencerent à dire la charge qu’ils auoient d’elle,amp; tou« cherêt principalement le poinól,qui feruoit à ce qu’ils vou-loient frire,amp; dirent que corne ils alléguèrent au Roy que ladiôhc Damoifelleeftoit délibérée de tous poinéls fe conduire parle cofeil des trois E{lats,il leur auoit rcfpôdu qu’il efloitbiéfeur du contraire, à quoy ils auoient perfifl:é:parquoy lediélfeigneurofliit de monftrer lettres de ladi-cle Damoifclle: laquelle foudainement meue amp;nbsp;courroucée, dift fur le chap Je contraire,cuidant eJlre feure que ladiôle lettre n’euft elle veüe: amp;: incontinent celuy qui parloir,quieftoit le Penfionnaircde Gand ou deBrucclles,ti-radefon fein ladiôle lettre,deuant tout le monde,amp; laluy bailla. Il monftra bien qu’il efloit homme tres-mauuais, amp;nbsp;de peu d’honneur,de faire cede hôte à cede ieuneDamoifelle:à qui vn fl vilain tour n appartenoit pas edrefait: car fi elle auoit fait quelque erreur, le chadiement ne luy en appartenoit en public.Il«e faut pas demander fi elle eud grand’honte : car à chafeun elle a-uoit dit le contrairc.Ladiôle Douairiere,amp; le feigneur de Rauadin, le Chancelier,amp; le feigneur d’Hymbercourt cdoient prclens.

On auoit tenu parolles à ce Duc de Cleues amp;nbsp;autres de ce mariage,qui tous furent courroucez:amp; commença lors leur diuifion grande,ôe commencerét à Ce declarer.Lcdiôl Duc de Cleues auoit toufiours iufques alors,eu efperan-ceque lediôlfeigneurd’Hymbercourt tiendroit pour luy a ce mariage,le-quel fe tint pour deçeu,voyant cede lettre, amp;nbsp;luy en deuint ennemy. Lediél Éuefquc du Liege ne l’aymoit point, pour les chofespadeesdi Liege ( dont lediôl feigneur d’Hymbercourt auoit eu le gouuerncment) ne fon mefïirc Guillaume de la Marche , qui edoitauec luy. Le Comte de fiindPaul filz du Connedable de France (dont i’ay parlé ) haïffoit lediôl feigneur d’Hyin-bercourtamp; le Chan^elier:pource qu’ils liurerent fon pereaPerône entre les mains des feruiteurs du Roy, comme auez ou y au longcy deffus. Ceux de Gand les auoient en grfind’ haine, fins nulle offence qu’ils leur enflent fiiôle, mais feulement pour la grand’ authorite oii ils les auoient veus:amp; feulement ils la valoient,autant que perfonnages qui aient régné en leur temps,ne deçà ne dela:amp; auoient eflé bons amp;nbsp;loyaux feruiteurs pour leur maidre.

Finalement

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 185

Finalement la nuiól, dont la lettre auoiteftémonftrée le matin, les def-ftifdiôLs Chancelier amp;nbsp;Seigneur d’Hymbercourt, furent prins par lefdióls Gantois , nonobftant qu’ils en enflent alfcz d’aduertiflement : mais ils ne fçeurentfuirà leur male fortune,*commeiladuient à plufieurs autres. Ic*commca-croy bien que leurs ennemis,quei’ay nommez, aidèrent bienà cefte prinfe; üeursautres^ amp;nbsp;aueceux fut prins meflire Guillaume de * Clugny, Euefque de Therouen-ne,qui depuis efl mort Euefque de Poiôtiers: amp;nbsp;tous trois furent mis enfem-ble. Ceux de Gand tindrent vn peu de forme de procez ( ce qu’ils n’ont ’oint accouftumé en leur vengeance)amp; ordonnèrent gens de leur Loy,pour esinterroguer, amp;nbsp;aueceux vn de ceux de la Marche ennemy mortel du-diól Seigneur d’Hymbercourt. Au commencement ils leur demandèrent pourquoy ils auoient fait baillcr,parmonfeigneur des Cordes, la cité d’Ar-tas ; mais peu fy arrefterent, combien qu’en autre faute ne les euffent fçeu trouucr.-maislcLirpaflionnelcurtenoitpaslàicarilne leur chaloit, depri-nie face, de veoir leur Prince affoibly d’vne telle ville, ne leur fens, ne leur congnoiffance, n’eftoyent pasfuflîfantespourcongnoiftrelepreiudice qui leuren pouuoitaduenir par traiól de temps. Seulement fê vindrent arrefter fur deux poindsd’vn fur certains dons, qu’ils difoyent que par eux auoient efte''prins,amp; par efpecial pourvu proces, qu’auoientn’agueres gaigné, par leurfentcnce prononcéeparlediélChancelier,contrevn particulier ; dont les deux dclfufdiôls auoient prins vndonde la ville de Gand: amp;nbsp;à tout ce quitouchoitcefle matière de corruption,rcfpôdircnt rrefbien:amp; acepoinôt particulier, là où ceux de Gand difoient qu’ils auoient vendu iuftice amp;nbsp;prins argent d’eux pour leur adiuger leur proces, refpondirent, Qujls auoycnt gaignélediét proces,pource que leur matière efloit bonne: amp;nbsp;qu’au regard de l’argent qu’ils auoient prins, ils ne l’auoient point demandé, ne fiit de-niandcr,mais vray efl: que quand on leur prcfenta,ils le prindrent. Le iècond poinél de leur charge où farreflerent, c’eftoit que les delTufdiól^ Gantois difoient qu’en plufieurs poinfts, durant le temps qu’ils auoyent eftéauec le feu Duc Charles,leur maifl:re,amp; en Ion abfence, cftans fes Licutenans, ils auoient fait plufieurs chofes contre les priuileges deladiéte ville amp;’^flatuts * Eftat, , d’icelle: amp;nbsp;que tout homme qui faifoit contre les priuileges de Gand, de-uoit mourir. En cela n’y auoit aucun fondement contre les defliifdids; car euxn’eftôient leurs fubieôls, ne de leur ville , ôc fi n’euflènt feeu rompre leurs priuileges : amp;nbsp;fi lediét Duc,ou (on perc, leur auoit ofté aucuns de leurs priuileges, ceauoitefté par appoiniement faiél aueceux , apres plufieurs guerres amp;nbsp;diuifions: mais les autres, qui leur auoient efté lailTez (qui fontplus grands qu’il ne leur eft befoing pour leur profit ) leur auoient efté bienobfcruez. Nonobftant les exeufes deces deuxbonsôc notables per-fonnages , fur les deux charges deffufdiôtes (car de la^rincipalc,donti’ay parlé au commencement de ce propos, ils n’en parloyent point) les Efchc-uinsdela ville de Gand les condamnèrent à mourii*, en leurHoftelde ville, amp;nbsp;en leur prefcncc, amp;nbsp;fous couleur de l’infradion de leurs priuileges, amp;nbsp;qu’ils auoyent prins argent, apres leur auoir adiugé le proces,dont eft faille mention cy deflus. Ces deux Seigneurs delTufdiôls , oyans cefte cruelle

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x84 V. LIVRE DES MEMOIRES fcntcncc,furent bien elbahis,comme raifon cftoit: amp;nbsp;n’y voy oient aucun remède,pourcc qu’ils eftoient entre leurs mains ; toutesfois ils appellerent déliant le Roy en û court de Parlement,cfperans que cela pour le moins,pour-roit donner quelque delay à leur mort,amp; que cependant leurs amis les pour-roient aider à fauuer leur vie.Parauant ladidc fentence, ils les auoiét fort ge-liênez,fàns nul ordre dçiuftice.-Ôc ne dura leur proces point plus de fixiours; amp;nbsp;nonobllant ladiéle appellation, incontinent qu’ils les curent condamnez, ilsneleur donnèrent que trois heures de temps pour les confefler amp;pcnfcr a leurs affaires : amp;nbsp;le terme paffe , ils les menèrent en leur Marché furvncf-chaufïault.

Ma-damoifelle deBourgongne, qui depuis a eflcDucheffcd’Auftriche, fachant cefte condemnation, f’en alla en J’hoftel de la ville , leur faire rc-quefte amp;: fupplication pour les deux dcffufdfôls, mais rien n’y valut: ôc de là elle fen alla fur le Marché, où tout le peuple eftoit affcmblé, amp;nbsp;en armes, amp;nbsp;veit les deux dcffufdiéls fur l’efchauffault. Ladiéte Damoifelle efloiten fon habit de dueil, amp;n’auoit qu’vncouure-cheffurfatefle ( qui eftoit en habit humble amp;nbsp;fîmple, ôc pour leur faire pitié par raifon ) amp;nbsp;là fupplia au peuple, les larmes aux yeux,amp; toute efeheuelée, qu’il leur pleuft auoir pitié de fes feruiteurs,amp; les luy vouloir rendre. Vne grande partie de ce peuple vouloit quefon plaifir fuft faiôl, amp;nbsp;qu’ils ne modruffent point. Autres vouloientau contraire: amp;nbsp;baifferentles picqLies les vns contre les autres, comme pour combattre : mais ceux qui vouloient la mort, fe trouuerent les plus forts,amp; crièrent à ceux qui eftoient fur l’efchauffault, qu’ils les expe-diaffent; amp;nbsp;incontinent ils eurent tous deux les teftes tranchées.'amp; fenre-tourna cefte pauure Damoifelle encefteftat cnfi maifon, bien dolente amp;nbsp;defeonfortée : car c’eftoient les principaux perfonnages où elle auoit mis fâ fiance.

Apres ^iie ces gens de Gand curent faiél ceft cxploiéf, ils départirent d’a-uccellcmonfeigneurdeRauaftainamp;la Douairière,femme du Duc Charles :pourcc qu’ils eftoient fignez en fa lettre, que lefdiéfs feigneurs d’Hym-bcrcourt amp;nbsp;Chancelier deffuf-nommez auoient portée au Roy, amp;nbsp;qu’ils a-uoy ent baillée,comme vous auez fçeu.-amp; j/rindrent de tous poinéls l’autho-rité amp;nbsp;la maiftrife de cefte pauure amp;nbsp;ieunc Princeffe : car ainfi fe pouuoit elle bien appeller, non point feulement pour la perte, qui des-lors luy eftoit ad-uenue de tant de groffes villes qu’elle auoit perdues, qui luy eftoient irrécupérables par force, veu la forte main en quoy elles eftoient ( car par grace, amiticjouappointemcnt, elle y pouuoit auoir encores quelque cfperance) mais à fe trouuer entre les mains des vrays amp;nbsp;anciens perfecuteurs de fa maifon. Ce qui luy eftoit bien vn très grand mal-heur, encores qu’en leur faiét, . éschofes generales, y ait toufiourscu plus de folie que de malice: comme aufti fe font toufiours groffes gensdemeftier, le plus fouuent, qui y ont le credit amp;nbsp;rauthotité,«qui n’ont aucune congnoiffancc des grandes cho-fes,nc de celles qui appartiennent à gouuerncrvn eftat. Leurmalice ne gift qu’en deux chofes :rvne cft que par toutes voy es ils défirent affoiblir amp;nbsp;diminuer leur Prince.L’autre,que quand ils ont fait quelque mal ou grand erreur, amp;nbsp;qu’ils

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DE P,H I L I P P E DE COMMIMES. 185 amp;nbsp;qu’ils fevoyent les plus foibles, iamais gens ne cherchèrent leur appoin-tement en plus grande humilité qu’ils font, n’y ne donnerentplus grands dons ;amp; fiIçauentmieux trouuerles perfbnucs,à qui il faut qu’ils l’adref-fent pour conduire leur accord , que nulle autre ville que i’ayc iamais congneuë.

Apres que ceux de Gand curent prins le gouucrncmcnt par force de la-diôle DamoifclledeBourgongne, amp;nbsp;fait mourir ces deux qu’auezouy,amp; qu’ils eurent enuoyéhors ceux qucbonlcur fembla,ils commencèrent en tous endroits à öfter amp;nbsp;mettre gens a leur pofte: par cfpecial chaflerent ôc pillèrent tous ceux qui mieux auoient feruy cefte maifon de Bourgon-gne , indifteremment, fans regarder ceux qui en aucune chofe le pour-roicntauoirdefteruy: amp;cntrelt;outesgens,ilsprindrentinimitié contre les Bourguignons, amp;nbsp;les bannirent tous : amp;nbsp;prindrent aulTi grande peine pour les faire dcuenirferuitcursamp;fubicéls du Roy, comme faifbit le Roy propre, qui les follicitoit par belles amp;ïàgcsparollcs,ôcrcmonftranccs ,amp; par grands dons amp;promcflcs,amp;auflî par force qu’il auoit tref grande en leur pais. Pourcommcnccràfairecasdcnouucllctcjilsmircnthors de prifbn ( comme nous auons touche cydeuant) le Duc de Gucldrcs,qui par long temps, par le Duc Charles, y auoit efté tenu, pour les caufes qu’auez entendues cy deuant : amp;nbsp;le feirentChef d’vnc armée qu’ils feirent d’entre eux mefmes: c’eft à fçauoir de Bruges, Gand, amp;nbsp;Yprje:amp; l’cnuoycrcnt deuant Tournay, mettre le feu aux faulxbourgs, qui cftoit bien peu d’vtilité, pour la querelle de leur Seigneur. Plusluy euftieruy, amp;nbsp;à eux aufli, deux cens hommes,ou dix mille Francs contant, pour en entretenir d’autres, qui eftoient dedans Arras, quand le fiegey alla (pourueu qu’ils fuflent venus à temps propice) que dix telles armées que cefte là (qui cftoit de douze ou quinze mille hommes, amp;nbsp;la payèrent trefbicn ) car elle ne pouuoÿ rien profiter que de bruflervn petit nombre de maifons, en lieu dont il ne chaloir guercs au Roy : car il n’y leue tailles ny aides : mais leur congnoiftance n’al-loit point iufqucs là. Apres que ce Duc de Gucldrcs fut venu deuant Tournay, il feit mettre les feux iufques aux faulxbourgs deflufdids. Il y auoit dedans trois ou quatre cens Hommes-d’armes, qui faillirent, amp;nbsp;donnèrent fur laqucLiëdcfesgensàleurretraidc, amp;nbsp;incontinent cc peuple fc mit à fuir. Le Duc de Gucldrcs, qui cftoit vn tref-vaillant Prince, tourna pour*feruy, cuider donner à fes gens chemin de fc retirer : il fut mal * fuiuy, amp;nbsp;fut porté par terre, amp;nbsp;tué, amp;nbsp;affés bon nombre de cc peuple : amp;nbsp;fe trouua bien peu de gens du Roy à faire ceft exploilt;ft.-amp; l’Oft des Flamans, aucc cefte perte, fc retira: car il n’y auoiteuqu’vnebandedcffaiôlc d’entre eux. Ma-damoifellc de Bourgongne, comme Ion dit, eut tref- grande ioyc de ceft aducnturc, amp;: ceux qui Pay moient ; car Ion dit, pour certain,que lefdTóls Gantois eftoient délibérez deluy faire efpoufcr par force: car de fon confentement ne l’cuf-fent feeu faire, pour pluficursraifons, que vous aucz entendues de luy par cy deuanr.

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i8^ V. L I V R E D E S M E M O T R E S

DtJcouYsfur cetane les guerres e^diutßonsjont petmißs de Dieu.pourleck^-ßiement des Prtnces nbsp;nbsp;du,peurde mauuats’.auecplußeursbonnes rai-

fons exemples aduenus du temps de l'Autheur^pourten-doArmement des Princes CHAT. XHII.

E ne puis pefer cornent Dieu a tant preferué celle ville, dont tant de maulxfont aduenus,amp; qui cft de fi peu d’vtilité pour le païs,amp; chofe publique dudi pais,où elle eft afrifc,amp; encores beaucoup moins pour le Prince. amp;nbsp;n’eft pas cômcBru-gcs,qui eft vn lieu de grâd recueil de marcbâdife, amp;nbsp;de grad’ aflemblée de nations cftrâges ; où parauenture ,fe depefehe

plus de marchandife qu’en nulleautre ville d’Europe: amp;nbsp;feroit dommage ir-reparable qu’elle fuft deftruiôle.Au fort,il mçfcmble que Dieu n’a créé aucune chofe en ce monde,ny hômes,ny beftcs,à qui il n’ait fait à quelque chofe foil contraire,pour le tenir en crainte amp;nbsp;humilité. Et ainfi cefte ville de Gand cft bien fituée là où elle/ft:car ce font les pais delà Chreftienté plus adôncz *aefpenfes^ à tous les plaifits cn quoy l’hôme cft enclin,amp; plufieurs pompes amp;nbsp;*delices. •nation feu- Ils y font bons Chreftiens, amp;nbsp;y cft Dieu bien ferui Sc. honore. Et n’eft pas cc-* maifon de Bourgongne feu le, à qui Dieu ait donc quelque aiguillon:car au royaume de France a donné pour oppofitcles Anglois,amp; aux Anglois les Efcoflbis ; au royaume d’Efpaignc, Portugal. le ne veulx point dire Gre-nadc:car ceux là font ennemis de la foy : toutesfois iufqucs icy Icdiél pais de Grcnadea donné de grands troubles au pais de Caftillc. Aux Princes d’Italie (dont la phifpart poftedent leurs terres fans tiltre, f’il ne leur eft doné au ciel, amp;nbsp;de cela ne pouuons finon deuiner )lefqucls dominent cruellement amp;nbsp;vio-Icntemét fur leurs pcuples^quant à leurs denicrs:Dicu leur a donné pour op-pofitc les villes de communauté,qui font audiÓl pais d’Icalie:commeVenife, Florence, Gennes, quelque-fois Boulongnc, Sicnes,Pifc,Luqucs amp;nbsp;autres: Icfquclle^en plufieurs chofcs,fontoppofites aux feigneurs, amp;nbsp;Icsfeigncurs àelles:amp; chafcùal’œil que fon compaignon nefaccroiffe. Et pour en parler cn particulier, à la maifon d’Arragonadonné lamaifon d’Anjou pour op-pofite; amp;nbsp;à ceux des Sforccs, vfurpans le lieu des Vicomtes cn la Duché de Milan,la maifon d’Orléans :amp; combien que ceux de dehors foient foibles, débouté, ceux qui font fubiccls au Roy,encorcs par rois ilsen ontdoubte. Aux Veni-tiens,ces feigneurs d’Italie(commciay dir)amp; d’auantage les Florentins. Auf jTclmbi’ert diéls Florentins ceuxdeSiencs amp;nbsp;dePife,Ieurs voifins, amp;nbsp;les Geneuois.Aux Aux Gcncuoisjlcur mauuais s-ouucrncmcnt, amp;nbsp;la faulte de foy des vns enuers

Ycnitieot. , nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ô -ri nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;va»

les autres:amp; gifent leurs partialitez en ligues,comme de Fourgouze,d Ador-neôc d’Oric,amp; autres.Cecy eft tantvcu,qu’on en fçaitafîés.PourAllcmaignc vous auez, amp;nbsp;de tout temps maifon d’Auftriche amp;nbsp;de Bauicrecontraircs: amp;nbsp;cn particulier, cciex de Bauierccontraires l’vn à l’autre. La maifon d Au-ftrichc,cn particulier,lcs SuifTes: amp;nbsp;ne fut le commencement de leur diuifion qued’vn village appelle SuifTe (quinefçauroit faire fix cens homes) dont les autres portent le nom;qui fe font tant multipliez que deux des meilleures villes qu’euft ladiéte maifon d’Auftriche cn font, cômeSurich, amp;nbsp;Fribourg; amp;nbsp;ont gaigne de grades batailles, efqucllcs ont efté tuezdes Ducs d’Auftriche.

Maintes

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 187 MaintcsaLitrcsp.-irtialitezyacnccfte Allemaignc; comme ceuxdeCicucs contre ceux de Giic|drcs : amp;nbsp;les Ducs de Gueldres cotre les Ducs de lulliers. Les Oftrelins(qui font fituez tant auat en ce North)contre les Roys de Dan-nemarch. Et pour parler d’Allcmaigne en general, il y a tat de fortes places^ amp;nbsp;tant de gens enclins à mal faire,amp; à piller amp;nbsp;dcfrober,amp; quivfcnt de force amp;nbsp;violence,les vns cotre les au tres,pour petite occafion,que c’eflchofemcr-ueillcufe.Car vn homme qui n’aura que luy amp;nbsp;fon varier, deffiera vne groffe cité : amp;nbsp;vn Duc,pour mieux pouuoir defrober, aucc le port de quelque petit Chaftcau-rochcr,où il fe fera rctraiôl.y ayant vingt ou trente hommes à che-ual,qui courrot deffiera fa requefte. Ces gês icy ne font gucres de fois punis des Princes d’Allemaignc : car ils fen veulent feruir quand ils en ont affaire: mais les villes,quand elle les peuucnt tcnir,lcs punilTent cruellement,amp; fou-Ucntesfois ont biéaffiegé de tels chafleaux amp;nbsp;abbatu : auffi tiennêt lefdiôles villes ordinairement des gens-d’armes payez amp;nbsp;g^'tigez pour leur feu reté. Ainfî fcmble que ces Princes amp;nbsp;villes d’AlIemaigne viuent,comme ie dy,fai-fans charier droiâ: les vns les autres,amp; qu’il eft neceflaire qu’ainfi foit, amp;nbsp;pa-, rcillemét par tout le mode,le n’ay parlé que d’Europe:car ie ne me fuispoint informé des deux autres parts,comme d’Afie amp;nbsp;d’Afrique: mais bien oyons nous dire qu’ils ont guerres amp;nbsp;diuifions,comme nous,amp;; encores plus meca-niqucment:car i’ay feeu en cefte* pratique plufîeurs lieux où ils fe vender les vns les autres, aux Chrefliens : amp;nbsp;appert ce par les Portugalois, qui maints efclaues en ont eu,amp;ont tous les iours:mais quanta cela,ie doubte que ne le deuos point trop reprocher aux Sarrazins, amp;nbsp;qu’il y a des parties delaChre-ftienté,qui en font autant.-mais ils font fîtuez foubs le pouuoir du Turc, ou fort voilins,comme en aucune partie de la Grèce.

Ilpourroitdoncfcmblcrqueces diuifions fufTcntneccflaires par le monde, ce que ces aiguillons amp;nbsp;chofe oppofites(dont i’ay parlé defrus)que Dieu a données à chafeun eftat, amp;nbsp;quafî a chafeune perfonne, foient tecelfaires; amp;nbsp;de prime facc,amp; parlant comme home non lettré, qui ne veult tenir opinion que celle que deuons tenir, lerne femblcainh : amp;nbsp;principalement par la beflialité de plufieurs Princes, amp;nbsp;auffi par lamauuaiftié d’autres, qui ont fens affies amp;nbsp;experience, mais en veulent mal vfcncar vn Prince, ou homme, de quelque elfat qu’il foit,ayât force amp;nbsp;audorité là où il dcmeurc,amp; par def fus les autres,fil eft bien lettre,amp; qu’il ait veu ou leu,cela l’amendera ou em-pircra.-car les mauuais empirent de beaucoup fçauoir, amp;nbsp;les bons en amendent. Mais toutcsfois,il eft à croire que le fçauoir amende plus toft vn hom-me,qu’il nercmpirc;amp; n’y euft il que la honte de congnoiftre fon mal, fi eft-ce aflés pour le garder de mal faire,au moins de n’en faire pas tant :amp; f’il n’eft bon,fi vouldra il feindre de ne vouloir faire nul tort à perfonne; ’amp; en ay vAi plufieurs experiences entre les grans perfbnnagcs,amp; q^c le fçauoir les a retirez de bien mauuais propos, amp;nbsp;fouuent, amp;nbsp;auffi la crainte de la punition de Dicu,dont ils ont plus grande congnoiffiance que lês ges ignorans,qui n’ont neveu ne leu . le veux doncdirejqiicceuxquincfecongnoiftent, amp;nbsp;font mal figes,par faulte d’auoir cfté bien nourris, amp;nbsp;que leur complexion para-uenture y aide, n’ont point de congnoiffiance iufqucs là ou f’eftend le pou^ hij

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188 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. LIVRE DES MEMOIRES

uoir amp;fcigneurie que Dieu leur a donné fur leurs fubicds.-car ils ne l’ont Icii ny entendu par ceux qui le fçauent, amp;nbsp;peu les hantent qui le fçachcnt:amp; fi aucuns en y a qui le fçauent, fi ne le veulent ils dire, de paour de leur defplai-re:amp; fi aucun leur en vcult faire quelques rcmonftranccs, nul ne le fouftien-dra,amp; au mieux venir le tiendront à fol, amp;nbsp;paraucnturc fera prins au plus mauuaisfens°pourluy. Fault donc conclure que la raifon naturelle, ne no-ftre fens, ne la crainte de Dieu, ne l’amour de noftre prochainjUe nous garde point d’eftre violcns les vns contre les autres,ne de retenir lautruyjOU de luy öfter le fien par toutes voy es qui nous font pcftibles. Et fi les grans tiennent villes ou chafteaux de leurs parens ou voifins, pour nulles de ces raifonsnc les veulêt rendrezôc apres qu’vne fois ils ont leur couleur, amp;nbsp;fonde leurs rai-fonspourquoy les détiennent, chafeun des leur loue leur langagc,au moins des prochains , amp;ccux qui veulent eftre bien d’eux . Des foibles, qui ont diuifion,ien’en parlepointzcarilsontfuperieur, qui aucunesfoisfait raifon aux parties:au moins ccluy qui aura bonne caufe, amp;nbsp;la pourchafléra bien, amp;nbsp;deffendera amp;nbsp;defpendcra largement,à longueur de temps aura fa raifon, fi la »Jôceftrra ^ourtCc’eft à dire lePrince,en fonauthorité,foubs lequel il vitjn’eft cotre luy. que ek«»/./. Ainfi* doibt eftre vray femblable que Dieu cft quafi efforcé amp;nbsp;contraint, ou femons dcmonftrerplufieurs fignes, amp;nbsp;de nousbattrede plufieurs verges, par noftre beftialité amp;nbsp;par noftre mauuaiftié, que ie croy mieux : mais la bc-

*d'cux ftialité des Princcs,amp; leur ignorance, cft bien dangereufe,amp; à craindre: car *Dicu depart le mal amp;nbsp;le bien* des fcigncurs.Etdôques,fivn Prince cft fort, nombre de gens-d’armes, parl’authoritédefqucls il a grans deniers a volonté pour les payer, amp;nbsp;pour dcfpcndrc en toutes chofes volontai-res,amp; fans ncceftité de la chofcpubliquc,amp; que de celle folle amp;nbsp;outrageufe defpence ne vueillc rien diminuer, amp;nbsp;que chafeun n’entend qu’à luy com-' plaire, amp;guc touchant faire rcmonftrancc, on n’acquiert que fon indignation,amp; fi n y gaigne Ion rien,qui pourra y mettre rcmede,fi Dieu ne l’y met?

* Dieu ne parle plus aux gens, ny n’eft plus de Prophètes qui parlent par fà entendue bouchc:car fà foy eft aflez* ample amp;nbsp;cftcndLic,amp; toute notoire,à ceux qui la entendre amp;nbsp;fçauoir; amp;nbsp;ne fera nul exeufé pour ignorance, au moins de ceux qui ont eu cfpacc amp;nbsp;temps de viure,amp; qui ont eu fens naturel.Com-ront««^*' o^cotdonques*efchappcront les hommes forts, amp;nbsp;qui tiennent leurs fei-gneuries dreflees en tel ordre, que par force en Icuent à leur plaifir?par quoy maintiennent leur obeiftance, amp;nbsp;tiennent ce qui cft foubs eux en grand’fub-iedion ,amp; le moindre commandement qu’ils font, cft toufiours fur la vie? Les vns puniflent foubs ombre de iufticc,amp; ont gens de ce meftier prefts à leur complairc,qui d’vn péché veniel font vn péché mortehfil n’y a matière, ils troLiuent les façons de diftimuler à ouir les parties amp;nbsp;les tefmoings, pour tenir la perfonne, amp;nbsp;fe deftruirc en defpence, attendant toufiours fi nul ne fc veult plaindre de celuyqui cft detenu, amp;àqui ils en veulent. Si cefte voyc . ne leur cft feure aflcs,amp; bonne pour venir à leur intention,ils en ont d’autres plus foudaincs, amp;nbsp;difcnt,qu’il eftoit bien neceftairc pour doncr exemple: amp;nbsp;font les cas tels qu’ils vculêt,amp; que bon leur femblc. A d’autres qui tiennent d’eux, amp;nbsp;qui font vn peu forts, procèdent par la voyc de faid à leur dirc-.Tu defobeis,

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. ,8;gt; defobeïSjOLi fairs contre l’hommage que tu me doibs:amp; procèdent par force à kiy öfter le lien,!! ftirc le peniient ( au moins il ne tient point à eux ) amp;nbsp;le font viure en grande tribulation.Celny qui ne leur eft que voihn, fil eft fort amp;alprc,ils Iclaiftentviure.-maisfileftfoiblejilnefçaitoù Ce mettre. Ilsdi- / font qu’il a fouftenu leurs ennemis,ou ils voudront faire viure leurs gcs-d’ar-rnes en fon païs ou achèteront querelles, ou trouueront occafion de le de-ftruirc,oufoLiftiendrontIonvoilincotreluy,amp;luy prefterotgens. Delcurs fubieds,ils defipointeront ceux qui auront bienferuy leurs predcccfteurs, pour faire gens neufs,pource qu’ils mettent trop à mourir. Ils brouillerot les gens d’Eglife fur le faiôl de leurs Benefices,afin que pour le moins ils en tiret rccompenfe, pour enrichir quelqu’vn, à l’appetit le plus de fois de ceux qui ne font point defleruy,* finon en deshonneur amp;nbsp;diffame,qui en aucun temps peut beaucoup. Aux Nobles donneront trauail, amp;nbsp;defpencefàns celfe, fous quicnaucun couleur de leurs gu erres,prinfes à volôté,fàns aduis oticófeil de leurs Eftats, beaucoup,amp; amp;nbsp;de ceux qu’ils deuftent appeller,auant que les comrnencer:car ce font ceux 1“' °”' qui y ont a employer leurs perfonnes amp;nbsp;leurs biens, parquoy ils en deuftent bien fçauoir auant que l’on les comméçaft.Dc leurs peuples, à la plus part ne leur laiftent rié:amp; apres auoitpayé taillcs,trop plus grades qu’ils ne deuffent, encores ne donnent aucun ordre fur la forme de viure de leurs gens- d’armes; lefquels fans ceffe, font par le pais, fans rien payer, faifans les autres maux exces infinis quechafeun de nous fçaitxarils ne fe contentent point de la vie ordinaire,amp; de ce qu’ils trouuent chez le laboureur,dont ils font payez: ains au contraire battent les panures gens amp;nbsp;les oultragent, amp;nbsp;contraignent d’aller chercher pain, vin,amp; viurcs dehors ; amp;nbsp;fi le bon homme a femme ou fille, qui foit bel le,il fera que fiige de la bié garder.Toutesfois, puis qu’il y a pay e-ment,il feroit bien aifé a y mettre ordre:amp; que IcsGés-d’armes fuffent payez de deux moys en deux moys pour le plus tard : amp;nbsp;ainfi n’auroient point d’ex-eufe de faire les maux,qu’ils font fous couleur de n’eftrc point paytzzcar l’argent eft leué,amp;: vient au bout de l’an.le dy cecy pour noftre royaume, qui eft plus opprefte amp;: perfecuté de ce cas que nulautre royaurne,ne nulle autre fei-gneuriequeiecongnoifte, amp;ncfçauroitnul y mettre le remcdequ’vnfage Roy. Les autres païs voifins ont autre punition.

Doneques pour continuer mon propos, y a il Roy ne Seigneur fur terre, nbsp;nbsp;nbsp;Prince

quiaitpouuoir,OLiltrefon domaine,de mettre vn denier furies fubieóls,fans ottroy amp;nbsp;confentement de ceux qui le doyuent payer,finon par tyrannie ou violence?Onpourroirrefpondre qu’il y a des fiifons qu’il ne faut pas attendre raftcmbléc,amp; que la chofe feroit trop longue:à commencer la guerre, a l’entreprendre, amp;nbsp;ne fe faut point tant haftcr,amp; a Ion aftez temps.-amp; fi vous dy que les Roys amp;nbsp;Princes en font trop plus forts, quand ils l’entreprennent du confentement de leurs fubieôfs, amp;nbsp;en font plus craints de leurs ennemis. Et quand ce vient à fè deffendre, on voit venir ceftenuee de loing, amp;nbsp;fpecia-lement quand c’eft d’eftrangers ; amp;: â cela ne doiueni les bons fubicéfs rien plaindre ne refufer :amp; ne fçauroitaduenir cas fi foudain où Ion puifle bien appeller quelques perfonnages,tels que l’on puifte dire.Il n’eft point fait fans caufe, amp;nbsp;en cela n’vfcr point * d’affedion, n’y entretenir vne petite guerre à

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190 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. LI VR E D E S memoires

volonté,amp; fans propos, pour auoir caufe de leu er argent. le fçay bien qu’il faut argent pour deffendre les frontières,amp; les enuirons garder, quad il n’cft point de guerre,pourn’crtrefurprins : mais il faut faire le tout modérément, amp;nbsp;à toutes CCS choies fert le fens du iage Prince ; car s’il eft ben, il congnoift

aduis,entre toutes les feigneuries du môde,dont i’ay cognoiflance, ce qu’il doit, OU Ij cliolé puBliquc cft micLix traiôlée, amp;oü il y a moins de violence furie j} y moins d’edificesabbatus, ny defmolis pour guerre, c’eft AngIeterre.-amp; tombe le fort amp;nbsp;le mal-heur fur ceux qui font la guerre.

Q^ele Roy do Nofire Roy eft le feigneur du mondc,qui le moins a caufe d’vlcr de cemoc Tr/«« pl«* de dire ; Pay priuilege de leuer fur mes fubieôfs, ce qui me plaift : car ne luy ny autre là.-amp; ne luy font nul honneur ceux qui ainfi le dient, pourle faire eilimer plus grand,mais lefonthaïr amp;nbsp;craindreaux voifins,qui pour tienne ^Livioiiact. vouldroient eflrc fous fa Seigneurie ; *amp; mefmes aucuns du royaume s’en à Mais fl no- pafl'eroient bien qui en tiennent. Mais fi nofire Roy, ou ceux qui le veulent *‘'^euci, * louer amp;nbsp;aggrandir,difoienf.ray les fubieéfs fi bons, amp;nbsp;loyaux qu’ils neme Ekw/.-vk»/. refufeut chofe que ie leur fcache demander,amp; fuis plus crainlt;fi,obey Sgt;i. feruy de mes lubie(fi:s,quc nul autre Prince qui viuc fur la terre,amp; qui plus patiemment endurent tous maulxamp; toutes rudefles, amp;nbsp;àquimoinsilfouuicnt de leurs dommages pafiezûl mefemblequecelaluy feroit grandlosföc endyla verité)non pas dire ; le pren ce que ie veux, amp;nbsp;en ay priuilege, il le me faut bien garder. Le Roy Charles le Quint ne le difoit pas : aufii ne l’ay-ie point ouy dire aux Roys,mais ie I’ay bien ouy dire à de leurs feruitcurs,à qui il fern* bloit qu’ils faifoient bien labefongne:mais felo mon adui5,ils mefprcnoient entiers leur Seigneur,amp; ne le difoient que pour faire les bons varlets, amp;nbsp;aufli qu’ils ne fçauoyent qu’ils difoient. Et pour parler de l’experience de la bonté

hxtmf.-v,«/. J grandes amp;nbsp;horribles tailles ; qui ne furent iamais fi grandes 'a trois millions de Francs pres; i’enten à leuer tous les ans. Car iamais le Roy Charles feptiefiiic,nc leuaplusde dixhuiétcês mille Fracs par an, amp;nbsp;le Roy Louis, fon filz en leuoit à l’heure de fon trefpas, quarante amp;nbsp;fept cens mille Francs, fans l’artillerie,amp; autres chofes femblables. Et feurcment c’eftoit compaffiô de veoir

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DE PHILIPPE DE COMMINE S.

Hcveoir ou fçauoirJapauureté du peuple. Mais vu bienauoit enluynoftre bon maiftre:c’eft qu’il ne incttoic rien en threfor. Il prenoit tour, amp;nbsp;dcipen-doit toùt:amp; feit de grans edifices,à la fortificatio amp;nbsp;deffence des villes Sepla-ces de fon royaume; amp;nbsp;plus quêtons les autres Roys qui ont elle deuantluy. Il dôna beaucoup aux Eglifes, en aucunes cbofès eu fi mieux valu moins : car il prenoit des pauures,pour le donner à ceux qui n’en auoiêt aucun befoing. Au fort en nul n’a mefure parfaiôle en ce monde.

Or en ce royaume tant foible amp;nbsp;tant opprefic en mainte forte, apres la ntortdenoftreRoyy eutildiuifiondu peuplecontreceluy quirecrne ? Les «ôr Princes amp;nbsp;les fubieôEs fe meirent ils en armes cotre leur ieune Roy ?amp; en you »qu-,b feint,» Jurent ils faire vn autre?Iuy voulurent ils öfter fon authorité? amp;nbsp;le voulurent ils brider qu’il ne peuft vier d’authorité de Roy ? Certes non. Et comment aufti le pouuoient ils faire ? Si en y a il eu d aflez glorieux pour dire qu’ouy. Toutesfois ils feirent l’oppofite de tout ce que ie demande ; car tous vindrêt deuers luy,tant les Princes âc les feigncurs,que ceux des bonnes villes. Tous le rccongnurent pour leur Roy,amp;luy feirent ferment amp;nbsp;hommage : amp;nbsp;fei- * rent les Princes amp;nbsp;feigneurs* leurfoy , humblement les genoux â terre en maSw. baillant par requefte ce qu’ils demandoient;amp; drelferent confeifoii ils fe feb rent compagnons de douze qui y furet nommez ; amp;nbsp;deflors le Roy commâ-doit, qui n’auoit que treize ans, à la relation de cediôlconfeil. Aladideaf-fcmblée des Eftats dcITufdids , furent faides aucunes requeftes amp;remon-ftrances en la prefence du Roy nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;fon confeifen grand’humilité, pour le

bien du royaume,remettant toufiours tout au bon plaifir du Roy,amp; defon-didConfeil. Luyodroierent ce qu’on leur vouloir demander, amp;nbsp;ce qu’on leurmonftraparefcriteftreneceftairepourlefaidduRoy, fans rien dire â l’encontre :amp; eftoit la fomme demandée de deux millions cinq cens mille Francs(qui eftoit aficz * au cœur fioul,amp; plus trop que peu,fans autres affai-res)amp; fupplierét lefdids Eftats qu’au bout de deux ans ils fulTent rtlTemblez.

amp; que fi le Roy n’auoit aftèz argent, qu’ils luy en baillcroient à fon plaifir : amp;c que fil auoit guerres, ou quelqu’vn qui le voulfift ofFenfer, ils y mettroient leurs perfonnes leurs biés, fins rie luy refufer de ce qui luy feroit befoing, *Eftoit-ce fur tels fubieds que le Roy doit alléguer priuileges de pouuoir prendre à fon plaifir,que fi libéralement luy douent ? Ne fcroit-il pas plus iu-fte,enuers Dieu ôc le monde,de leuer par cefte forme, que par voloté defor-donnée?car nul Prince ne le peut autrement leuer, que par * autruy, comme did eft,fi ce n’eft par tyrannie,amp; qu’il foit excommunié.Mais il en’eft biê d’af fez belles pour ne fçauoir ce qu’ils pcuuent fiûre ou laifleren cell endroit. / Aulfi bien il y a des peuples qui offenlent contre leur feigneur, amp;c ne luy obcilTcnt pas, n’y lefecourentenfesneceftitez: maisenjieu de luy aider de tout leur pouuoir ainfi qu’ils y font obligez quand ce v^nt és affaires, ils les mefprifent amp;nbsp;contemnent’, fe mettent en rebellion amp;nbsp;defobeiffance contre luy, en commettant amp;nbsp;venant contre le ferment de fidelité qu’ils ’luy ont fait. Làoùie nomme Roysamp; Princes, i’entend d’eux, ou de leurs Gouucr-neurs ; amp;nbsp;pour les peuples, ceux qui ont les prééminences ôc maiftrifes fous eux.

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V. L I V Pk E des memoires

grans maux viennent volontiers des plus forts ; car les foibles ne '«c»ne«t nbsp;nbsp;cherchent que patience.Icy iccoprenles femmes,comme les hommcs^quel-

lotieriiles 1gt;Im nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;, -Il nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;-n •/'

pris, amp;nbsp;qu'ils qucrois,amp;en aucuns lieux,quand elles ont auihontc ou maiirrile , ou pour ^fZisfuTits“ l’amour de leurs maris,ou pour auoir adminiftratio de leurs affaires, ou que leurs leigneuries viennent de par elles.Et ß ie vouloye parler des moyens e-ffats de ce monde,amp; des petits,ce propos continueroit trop, ôé me fuffit alléguer les grans:car c’eft par ceux la où Ion congnoift la puiffance de Dieu, ôc iàiuffice: car pour deux cens raille mefchefs aducnus àvn pauure homme, on ne fcn aduife.-car ou attribue tout à fà pauureté,ou à auoir efté mal penlc: ou f’il fcft noyé ou rompu le col, c’eft pource qu’il eftoit feub.à grand’peine en veut on ouir parler. Quand il melchet à vne grade cité,on ne dit pas ainfi:

*** mais encore n’en parle on point tant que des Princes. Il faut doncques dire ■ pourquoy la puiffance de Dicufe monftreplus grande contre les Princes amp;nbsp;les grans,que contre les pctits,c’eft que les petits amp;nbsp;les pauures trouucntaffez qui les puniffent quand ils font le pourquoy :amp; encores fontaffez fouuêt punis fins auoir rien fait : foit pour donner exemple aux autres, ou pour auoir leurs biens, ou parauantùre par la faute du luge: amp;nbsp;aucunesfois l’ont bien defferui,amp;; faut bien que iuftice fe face. Mais des grans Princes amp;; des grandes Princeffes,de leurs grans Gouuerneurs, amp;nbsp;des Conieillers des Prouin-ces amp;nbsp;villes defordonnées,amp; defobeiffantes à leur {cigneur,amp; de leurs Gou-* leurs vies? uerncurs,qui fintormera de * leur vice?L’information faide, qui l’apportera

-usai, Iuge?C^ fera le luge qui en prendra la^ngnoiffance,amp; qui en fera lapu nition’Ie di des mauuais,amp; n’enten point des bos ; mais il en eft peu.Et quelles font les caufes pourquoy ils commettent, amp;nbsp;eux, amp;nbsp;tous autres, cous ces cas dont i’ay parlé icy deffus,amp;affez d’autres dontiemefuis tcu pourbriéuc-téjfans auoir confideration de la puiffance diuine amp;nbsp;de Iaiuftice?En cecasic faute de foy, amp;nbsp;aux ignorans fau 11e de fens amp;nbsp;de foy enfemblc: mais principalement faute de foy,dont il me lemble que procèdent tous tes maux qui font par le monde:amp; par efpecial les maux qu’ont partie de ceux qui fe plaignent d’eftre greuez amp;nbsp;foulez d’autruy,amp;: des plus forts. Car l’hô-me pauure ou riche (quel qu’il foit)quiauroit vraye amp;nbsp;bônefoy,amp; quicroi-roit fermement les peines d’Enfer eftre telles que veritablemêt elles fontiqui aufli croiroit auoir prins de l’autruy â tort,ou que fon perc ou fon grandpere l’euft prins,amp; luypoffedaft(foientDuchez, Comtez, villes ou Chafteaux, meubles,pré,eftang,ou moulin,chafeunenfiqualité) amp;nbsp;qu’il creuft fermement,comme le deuons croire,ie n’entreray iamaisen Paradis,fiie ne fay en-* d’autxuy, ticre fitisfa(ftion,amp; ß ic ne rend ce que i’ay*de tel,il n’eft croyable qu’il y euft

-v.«/. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Princeffe au monde, n’y autre perfonne quelconque, de quelque

cftat ou côdition qu’ils foienten cemonde',tant grans que petits,amp; tât hommes que femmes,geifs d’Eglife,Prelats,Euefques,Archeuefques,Abbcz,Ab-beffes,Prieurs,Curez, Receueurs des Eglifes, amp;nbsp;autres viuans lut terre, quia ftm vray amp;nbsp;bon efcicnt,commc diéb eft deffus,vouhift rie retenir de fqn fub-ieól ne de fon voißn,ne qui voulhft faire mourir nul à tort,ne le tenir en pri-ß3n,n’y öfter aux vns pour donner aux autres,amp; les enrichir;ne(qui eft le plus ord meftier qu’ils facent)procurer chofes deshonneftes contre fes parens amp;nbsp;feruiteurs

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D h PHILIPPE DE C U M M 1 N E 5.

fcruiteurs pour leurs plaifirs, corne pour femmes ou cas femblables. Par ma foy non,au moins n’eft pas croyable. Car Pils auoiet ferme foy,amp;qu’iis creuf fent ce que Dieu ôc l’Eglifenous cômandc,fur peine de damnation,côgnoif-fint les ioLirs cftre fi briefs,amp; les peines d’enfer eftre fi horribles,amp; fans nulle fin ne remiffion pour les damnez,ils ne feroient pas ce qu’ils font.Il fruc donc conclure que tous les maux viennent de faute de foy.Et pour exemple, quad vn Roy ou vn Prince eft prifonnier,amp;qu’il a peur de mourir en prifon, a il rie fl cher au mode qu’il ne bai Haft pour fortir?il baille le fien amp;nbsp;celuy de fes fub-icôls,comme vous auez vendu Roy lehande France, prins parle Prince de 7« Galles à la bataille de Poidiers,qui paya trois millions de Fracs, êr bailla tou .reSLc te Aquitaine(au moins ce qu’il en tenoit)amp; affez d’autres citez, villes amp;nbsp;places,amp; comme le tiers du royaume ; amp;nbsp;mit le royaume en fi grande pauureté qu’il y auoit long temps monoyc comme de cuir, qui auoit vn petit clou d’ar-gent.Et tout cecy bailla le Roy Iehan,amp; fon filz le Roy Charles le Sagc,poür la deliurance dudiâ: Roy Iehan:amp; quand ils n’euflent rien voulu bailler, fi ne l’euffent point les Anglois fait mourir.-mais au pis venir, l’euflcnt mis en pri-fon:amp; quand ils l’eufTent fait moiirir,fi n’euft efic la peine femblable a la cent miliefinc partie de la moindre pcined’Enfer. Pourquoy donques baiîloit il tout ce que i’ay dit, amp;nbsp;deftruifoit fes enfans,amp; fubicefs de fon roÿaumc,finô poLircequ’il croyoitee qu’il voyoit,amp;qu’il fçauoitbien qu’autrementnefe-roit deliuré ? Mais paraduenturc en commettant les cas pourquoy cefiepunition luy aduintjamp;r à fes enfans,amp; à fes fubieóls,il n’auoit point ferme foy Se creance de l’offenfe qu’il commettoit contre Dieu 5: fon commandement. Or n’eft il Prince,ou peu,s’il tient vnc ville de fon voifin, qui pour crainte de Dieu la vou Ififl. bailler,n’y pour euiter les peines d’Enfer:amp; le Roy lehâ bailla fi grand’chofe pour dcliurerfadiôle perfonne de prifon.

l’ay donc demandé,vn article precedent, qui fera information des gratis, amp;nbsp;qui l’apportera au Iuge?amp; qui fera le luge qui punira les mauuait?L’infor-mation fera la plainte amp;nbsp;clameurs du peuple qu’ils foulent amp;nbsp;opprefi'cnt en tant de maniérés,fans en auoir compafiion ne pitié.Les dotiloureufes lamentations des vefues amp;nbsp;orphelins,dont ils auront fait mourir les maris amp;nbsp;pères, dont ont foLiffert ceux qui demeurent apres:amp;gcnerallemét tous ceux qu’ils auront Perfecutez, tant en leurs perfonnes qu’en leurs biens. Cecy fera l’in-formatio parleurs grans cris,amp; par plaintes St piteufes larmes: St les prefen-teront deuant noftrc Seigneur,qui fera le vray luge.-qui parauenture ne voudra attendre à les punir en l’autre monde.-mais les punira en celluy-cy. Dont faut entendre qu’ils feront punis pour n’auoit rien voulu croire, amp;nbsp;pource qu’ils n’auront eu ferme foy amp;nbsp;croyance es commandemens de Dieu.

Ainfi faut dire qu’il eft force que Dieu raonftre de tels poinds amp;detels fignes,qu’eux amp;nbsp;tout le monde, croiront que les punitions leur aduicnnent pour leurs mauuaifes creances amp;nbsp;offenfes : amp;nbsp;que Dieu monftre contre eux là force amp;nbsp;fa vertu amp;nbsp;iuftice: car nul autre n’en a le pouuoir en ce monde que luy. De prime-face, pour les punitions de Dieu, ne fe corrigent point, de quelque grandeur quelles foyent, amp;nbsp;àtraidde temps: mais nulle n’en adulent ànulPrince, ouàceuxqui ontgouucrnementfuries affaires, ou fur

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IP4 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. L I V R E D E S MEMOIRES

, ceux qui gouLicrnentvne grande communautéjqucryfTuen’enfoitbien grade amp;nbsp;bien dailgcreufe pour les lubieds. Ie n’appelle point en eux males fór-tunesjfinon celles dont les fubieóts fc fentent ; car de tomber jus d’vn chcual, ôe fe rompre vne iambe,amp; auoir vne fleure bien afprej’on s’en guérit,amp; leur font telles chofes propices, amp;nbsp;en font plus fages. Les males aduentures font, quand Dieu eft tant oflfenfé,qu’il ne le veut plus endurer;mais veutmonftrer , nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;la forced fa diuine iuftice, amp;nbsp;alors premièrement leur diminue le fens, qui

efl: grande playe pour ceux à qui il touche. Il trouble leur maifon, amp;nbsp;la permet tomber en diuiflon amp;nbsp;en murmure. Le Prince tombe en telle indignatio entiers noflrc Seigneur,qu’il fuit les confcils amp;nbsp;compagnies des fages, amp;nbsp;eu efleue de tous neufs mal fages, mal raifonnablcs, violcns, flatcurs, amp;nbsp;quiluy complaifent a ce qu’il dit.S’il faut impofer vn denier,ils difent deux;fil menace vn homme, ils difent qu’il le faut pcndre,amp; de toutes autres chofes le fem-blable;amp; que fur tout il fe face craindre, amp;nbsp;fe móftre fler amp;nbsp;orgueilleux â eux mefmes,elperans qu’ils feront craints par ce moyen, corne fi authorité eftoit leur heritage. Ceux que tels Princes auront ainfi auec ce cofeil chalfez amp;nbsp;déboutez, amp;nbsp;qui par longues années au rot ferui, amp;nbsp;qui ont accointance amp;nbsp;amitié en là terre,font mal contens, amp;: à leur occafion quelques autres de leurs a-mis amp;nbsp;bien vucillans,amp; parauanture on les voudra tant prelTer, qu’ils feront contraints à fedeffendrCjOU de fuir vers quelque voifin, parauêtureennemy amp;nbsp;mal vueillant de celuy qui les chafl'c;amp; ainfi,par diuifion de ceux de dedas le pais, y entreront ceux de dehors. Eft-il nulle playe ne perfecution fi grande,que guerre entre les amis amp;nbsp;ceux qui fe côgnoi(fcnt,nc nulle haine fi horrible amp;nbsp;mortelle?Dcs ennemis eftrangers,quâd le dedans eft vny,on s’endef fend aifémcnt:car ils n’ot nulles intelligéces ny accointaces à ceux du royau-me.Cuidcz vous qu’vn Prince mal Qge,folemcnt accompaigné, congnoilfc venir cefte male fortune de loing,que d’auoir diuifion entre les fies ? ne qu’il penfequÂ?claluy puiffe nuire ? ne qu’il vicnedeDieu?Il nes’en trouuepoint pis difné,ne pis couché,ne moins de cheuaux,ne moins de robbes,mais oeau-*iiattireks coupmieuxaccompaignércat*iltitcIcsgcusdcIcutpauutctc, ôedepart les gens amp;nbsp;leur defpouillcs amp;nbsp;Ics cftats de ceux qu’il aura chalfez, * amp;nbsp;du ficn pourraaccroi-depTrt' nbsp;nbsp;ftre fil renomée. A I hcLirc qu’il y pèlera le moins,Dieu luy fera fourdre vn en-

*amp; dôiTdu ncmy,dôt parauature iamais il ne fc fuft aduilc. Lors luy naiftrot les pêfées amp;c amp;c nbsp;nbsp;nbsp;fufpicions de ceux qu’il aura off'enfcz:amp; aura crainte d’alfez de perfonnes,

qui ne luy veulent aucun mal faire.Il n’aura point refugcàDieu,maisprepa-7. rera fa force. Auons nous pointveudenoftrc temps tels cxeples icypres de nous? Nous auons veu le Roy Edouard d’Angleterre, le quart,mort depuis peu de têps,chef de la maifon d’Y orth. A il point deffaieh la lignée de Lancla-ftre, fous qui fon pere luy auoient longtemps vefeu, ôgt;c fait hommage au Roy Henry,feptiefme Roy d’AngIcterrc,decefte diôlelignée?Dcpuis letint lediél Edouard,par longues années, enprifon au chafteau de Londres, ville capitale dudiét royaume d’Angleterre, amp;nbsp;puis finalement l’ont fait mourir. AuonsnouspasvculcCôtedeWaruic,chefamp; principal Gouueneurdc tous les faiéfs du deftufdiélEdouardflcquel a fait mourir tous fes ennemis,amp; par efpecial les Ducs de Sobrelfct ) à la fin deuenir ennemy du Roy Edouard fon

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DJE PHILIPPE DE CO MM IN ES. 195 fon inaiflre? donner fa fille au Prince de Galles,filz du Roy Henry,amp; vouloir niettrcfiis celle lignée de Lâclallre’paflerauccluy en Anglcrerre.’eflrcdefcô-fit en bataille?^ morts fes freres amp;nbsp;parés aucc luy?amp; femLlablemct plufieurs Seigneurs d’Angleterre, qui vn temps fut qu’ils faifoient mourir leurs enne-nais ? Apres, les enfans de ceux làfereuenchoyent, quand le temps tournoit pour eux,amp; faifoient mourir les autres. Il eft à penfer que telle playe ne vient que par la diuine iuftice:mais(comme i’ay dit ailleurs)celle grace a ce royaume d’Angleterre,par deflus les autres royaumes,que le païs, ne le peuple ne l’en de{lruiôlpoint,ny nebruflent,ny nedemoliffent les edifices, amp;nbsp;tourne la fortune fur les gens de guerre, amp;nbsp;parefpccial fur les Nobles, contre lefqiiels ils font trop eniiicux ; aufli rien n’eft parfaiél en ce monde. A près que le Roy Edouard a elle au dcITus de fes affaires en fon royaume,amp;qui denollre royau wk mcauoitcinquantemilleefcusl’an,rendus enfonchafteaude Londres , Ôc qu’il efloit tant coble de richeffes que plus n’en pouuoit, tout Ibubdaincméc il cil mort,amp; comme par melâcholic du mariage de nollre Roy Charles hui-ôliefme,auecmadame Marguerite, fille du Duc d’Auflriche : amp;nbsp;tantoll apres qu’il en eut des nouuelles,il print la maladiezcar lors fe tint à deceu du mariage de fa fille qu’il faifoit appeller madame la Dau 1 pbine, amp;nbsp;fi luy fut rompue lapéfio qu’il prenoit de nous, qu’il appelloit tributunais cen’elloit nel’vn ne l’autre,ôc l ay declare cy deßus.LeRoy Edouard laiffa à (a femme deux beaux filz,l’vn appelle le Prince de Galles, l’autre le Duc d’Yort, amp;nbsp;deux filles Le DucdeClocc{lre,fon frere,print le gouuernemét de Ion nepueu le Prince de Galles,lequel pouuoit auoir dix ans,amp; luy feit hommage,comme â fon Roy amp;nbsp;l’emmena à Londrcs,feignant le vouloir couronner, pour tirer l’autre filz de la franchife de Londres,où il efioii aucc fii mere,qui aiioit quelque fufpi-çion.Fin de compte,par le moyen d’vn Euclque de *Bas(Iequel auoit clléau- 'gt;-p,tyd rir^ tresfois Confcillier du Roy Edouard,puis le defapointa, amp;nbsp;le tint en prifon, amp;nbsp;print argent de fii deliurâce)il feit l’exploiél dót vousorrez tangt;cgt;Il parler. Cefiuy Euefquc mit en auant à ce Duc de Clocellre,que ledidt Roy Edouard lt;«lt;/lt;»* cllant fort amoureux d’vne dame d’Angleterre luy promill de l’efpoufer, pourueu qu’ilcouchallauccelle.Ce qu’ellecôlentic-.Sc dift ceft Eucfque qu il îes auoit efpoufez,amp; n’y auoit que luy, amp;nbsp;eux deux. Il elloit home de Court, amp;nbsp;nele defcouLirit pas, amp;nbsp;aida à fiiire taire la Dame : amp;dcmoura ainfi celle chofc:amp; depuis efpoufa lediél Roy Edouard la fille d vn Cheualier d Angleterre appelle monfeigneur de Riuieres, femme veufuc,quiauoit deux filz, Sc aufii par amourettes. A cefte heure dont ie parle,cellEuelquedeBas defeou-urit celle matière à ce Duc de Cloceftre, dont il luy aida bien 'a executer Ibïi mauuais vouloir:amp; feit mourir ces deux nepucux,amp; le leit Roy,appelle Roy Richard.Les deux filles leit declarer Ballardts,en plain Parlement,amp;leurfeic oller les *Hcrmines:amp;feit mourir tous les bons lerui^urs de fon feu frere, * au moins ceux qu’il peut prendre.Celle cruaulté n’alla pas loing: car luy ellât en plus grand orgueil queue fin cent ans auoit Roy d Angleterre, amp;nbsp;auoit fait mourir le Duc de Boquinguan, amp;nbsp;tenoitgrand’arméepreftc, Dieu luy fourdit vn ennemy quin’auoit nulle lorce, c’eftoit le Comte deRichemont, prifonnier en Bretaigne,qui depuis fut Roy d’Angleterre,de lalignéc de Là-

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V. LIVRE DES MEMOIRES claftrc:mais non pas le prochain de la couronne(quelquc chofe que l’on die, au moins quei’entendc)lequel m’aautrcsfois compté, peu ayant qu’ilpartilt de ce royaume, que depuis l’aage de cinq ans il auoit efte garde amp;nbsp;caché corne fugitif en prifon. Ce Comte auoit efté quinze ans, ou enuiron prifonnicr en Bretaigne,du Duc François dernier mort:efquelles mains il vint par tem-pefte de mer,cuidant fuir en France, amp;nbsp;le Comte de Pennebroth, fon oncle, aucc luy.I’cftoy e pour lors deuers lediél Duc, quand ils furent prins. Lediél Duc les traiéla doulcementpour prifonniers. amp;au trcfpas du Roy Edouard, lediâ: Duc François luy bailla largement gens amp;nbsp;nauires; amp;nbsp;auecques l’intelligence dudiôl Duc de Bouquinguan,qui pour telle occafio mourut, l’êuoya pour delcendre en Angleterre. Il eut grande tourmente amp;nbsp;vent contraire, ÔC retourna à Dieppe,amp; de là par terre en Brctaigne.Quadil fut retourné en Brc taigne,il doubta d’ennuyer le Duc par fa defpcnce;car il auoit quelques cinq cens Anglois : amp;nbsp;li craignoit que lediôl Duc ne f accordaft auecques le Roy Richardjà Ion dommage:amp; aulli on le pratiquoit de deçà, parquoy fen vint auec fa bande, fans dire à Dieu audiél Duc. Peu de temps apres,on luy paya crois ou quatre mille hommes,pour le paflage feulement:amp; fut baillée par le Roy Charles viij. à ceux qui eftoient auecques luy, vnc bonne lommc d’ar-gct,amp;: quelques pieces d’artillerie:amp; ainfi fut coduiâ:, auec le nauire deNor-rnandic,pour defeendre en Gall es,dont il eftoit.CeRoy Richard marcha au deuant de luy;mais auec lediólCóte dé Richemont felloit ioincl le feigneur de Stanley,vn Cheualicr d’Angleterre,mary de la mere dudiôl Comte de Richemont qui luy amena bien vingt amp;nbsp;fix mille hommes.Ils curent la bataille amp;nbsp;fut occis, furie champ, lediôl Roy Richard, amp;nbsp;lediôl Comte de Riche-chemót couroné Roy d’Angleterre, fur lediôl champ,de la couronne dudiôt Roy Richard.Diricz vous que c’cfl cecy fortunc?c’eft vray iugemet de Dieu. Encores pour mieux le cognoiftre, tâtoft apres qu’il eut fait ce cruel meurtre deecs dei^nepueux,dont cy deuantay parlé,il perdit fa femme. Aucuns di-fent qu’il la feit mourir. Il n’auoit qu vn fils, lequel incontinent mourut. Ce propos dotie parle, eufl: mieux ferui plus en arricrc,où ic parleray du trcfpas dudiôl Roy Edouard ; car il efioit encores vif au temps dót parle mon precedent chapitre:mais ie l’ay fait pour continuer lepropos de mon incident. Sê-blablemcnt auons veu depuis peu de temps muer la courône d’Efpaigne, dc-fgt;uis ie trcfpas du Roy Dom Henry dernier mort : lequel auoit pour femme a fôeur duRoy de Portugal dernier trefpaflc,de laquelle faillit vncbellefillc.-toutesfois elle n’a point fuccedé,amp; a cftè'priuéc de la couronne,fous couleur d’adulterc commis par fii mere.'ôc fi n’efl pas la chofe palfée fins debat amp;nbsp;gra-deguerre. Car le Roy de Portugal a voulu fouftenir fa niepee, Scplufieurs autres Seigneurs du royaume de Caftillc auec luy .-toutesfois la fœur dudiôl Roy Henry, mariée aucc le filz du Roy Dom lehan d’Arragô,obtint le royaume amp;nbsp;le polTeda.-^c ainfi ce iugement amp;nbsp;ce partage fe fill au ciel, oùilfen fait aflez d’autres.VOus auez veu puis peu de téps le Roy d’EfcolTc, amp;nbsp;fon filz de l’aagc de treize ans,cn bataille l’vn contre l’autre. Le filz amp;nbsp;ceux de fa part gaignerent la bataille, ôc mourut lediôl Roy en la place. Il auoit fait mourir Ion frere, amp;nbsp;plufieurs autres cas luy elloient impofez, comme la mort de là fœur

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DE PHILIPPE DE COMMIMES.

fœur amp;nbsp;d autres.Vous voyez aufli la Duché de Gueldres hors de la lignée, amp;: auez ouy l’ingratitude du Duc dernier mort,contre fon pere. Aflez de pareils cas pourroye dire,qui aifément peuuent eftre cognus pour diuines punitiôs;

tous les maux feront commencez par rapport,amp;: puis pardiuifions; lef

quelles font fources de guerres, par leiquelles vient mortalité amp;nbsp;famine : amp;nbsp;lefqudics,»* tous ces maux procéder par faulte de foy. Il faut donques congnoiftre, veu •w/oZ tximf. la mauuaiftié des hommes amp;nbsp;par efpecial des grans qui ne fe congnoilfentjSc quinecroient point qu’ilfoitvn Dieu, qu’il eft de neceflitéquechafeun fei-gneur amp;nbsp;Prince ait fon contraire,pour le tenir en crainte amp;nbsp;humilité, ou autrement nul ne pourroit viure foubs eux, uy auprès d eux.


Comment U Duché de Bourgongnef'Ut miß entre les mains du nbsp;nbsp;nbsp;.

QH a T. L

Our retourner à ma principale matière,amp; à cotinucr le propos de ces Memoires,fiiéls à voftrc requefte, rn^nfeigneur l’Archeuefque de Vienne,ce pendant que leRoy mettoit en fa main les villes amp;nbsp;places defluldiéles es marches de Picardie,fon armée eftoit en Bourgongne:dont eftoit Chef,quâc * à la moflre, le Prince d’Orenge ( qui depuis régna longuement)natif ôc fubieól de l)i Comté de Bourgongnezmais affez nouuellement eftoit deuenu ennemy du Duc Charles,pour la deuxiefme fois. Ainh le Roy fcnaida-.pource qu’il eftoit grand Seigncur,tant en Ja Comté qu’en la Duché de Bourgongne,amp;: aulfibien apparenté amp;nbsp;aymé.Monleigneur de Craeftoit Lieutenant du Roy,amp; auoit la charge de rarmée:amp; eftoit celuy, à qui le Roy en auoit fiancc:amp; aufti il eftoit fage homme, amp;nbsp;feur pour (on maiftre, vn peu

trop *haiflant fon profit. Lediél Seigneur de Cran,quad il approcha de Bour * .«y»»’».* îin - nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i r niicuxa mo

gougne,enuoya ledict Prince d Orenge,amp; autres, deuant a Dijon, leur faire alt;gt;uis. les remonftrances neceflaires, amp;nbsp;demander obcïflanc^our le Roy, lefquels y befongnerent fi bien,amp; principalement par le moyen du Prince d’Orenge, que ladiéfe ville de Dijon, amp;nbsp;routes autres de la Duché de Bourgongne, fe Aurtbnne’amp; mirent en l’obeiftance du Roy. ’ Aufronne,amp; quelques autres chafteaux,tin-drent pour la Damoifelle deftufdiéfe. Audiéf Prince d’Orêge furentpromis fteaux. Aude beaux eftats: amp;nbsp;d’auantage de luy mettre entre fes mains toutes les places

amp;c.

R hj

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i5gt;8 VI. livredes memoires

qui efloicnt en ladiólc Comté de Bourgongnc,qui eftoient de la fuccefïió du Prince d’Orenge,fon grand pere, amp;nbsp;dót il atioit queftion cótre mefleigneurs de * Chaimergon, fes onclesdefqiicls il difoit auoir eflé fàuorilèz par Icdiót guion. Duc Charles.Car leur debat auoit elle plaidoyc dcthât luy par pluheurs fois, i.x.iuf.’oii,!. grande folennité:amp; lediól Duc eflant fortaccompaigné de Clercs,donna vnappointement contre lediôl Prince , au moins comme il difoit: pour laquelle caufe il laiffa le feruice diidicf Duc,amp; vint deuers le Roy. Nonobftanc celle promelfc, quand Icdiél Seigneur de Cran fetroiiuapofleffeurdescho-fes dclTufdiôlcs, amp;nbsp;qu’il auoit entre fes mains les meilleures places que peufl auoir lediél Prince,qui efloient de celle fuccefliô,il ne les vouloir point bailler audiôl Prince d’Orenge,pour nulle requellc qu’il luy en fçeut faire. Si luy * en referiuit le Roy par plufieurs fois,fans fiélion, congnoilfant bien que le-diôl Seigneur de Cran tenoit de mauuais termes audidî Prince d’Orége: mais encores craignoit il a delplaireaudiél Seigneur de Cran, qui auoit toute la charge du païs, amp;nbsp;necuidoit point que lediôl Prince eull cœur ne façon de rebeller lediôlpaïs deBourgongne,commeil feit, au moins vne grande partie.Mais pour celle heure,lailferay ce propos,iufques à vn autre lieu.

Qomment le Koy entretenoit les Anglais^ apres la mort de Q’arles Duc de quot;Bour-gongne^aßn quils ne l'empefeha/jent en la conquefte des pays dudiaDuc. CHAP, 11.

Eux qui verront ces Memoires,pour le téps aduenir, amp;nbsp;qui entêdrot les chofes amp;nbsp;affaires de ce royaume des voifins, mieux que raoy,fe pourront cibahir que depuis la mort du Duc Charles de Bourgongne iufques icy,où il y adillâce de pres d’vn an,ie n’aye fait nulle mention des Anglois, amp;nbsp;Cornells pouLioict foulfrir que le Roy mill en fes mains les vil-

* Ardres amp;nbsp;lesfivoilînes d’eux,côme Arras,Boulonrue,Heldinplufieurs challeaux, plufieurs amp;c. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;iz' - nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r n • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 r

amp; ellrc logc deuat lainél Orner par plufieurs iours.La caule elloic,que le lens amp;nbsp;vertu dcnoflreRoy precedoiteeluy du Roy Edouard d’Angleterre, qui pour lors regnoit,côbien que lediôl Roy Edouard efloic Prince tref-vaillant amp;nbsp;qui auoit gaigné en Angleterre huiôt ou neuf batailles,efquelles toufiours il auoit elle à pied,quielloitchofe de grande louange pour luy :mais ce fut en diffères amp;nbsp;diners iours,amp;ne faloit point que Icfens du Roy d’Angleterre labourait ne trauaillall.-car dés la bataille pallee,il elloit maillre iufques à vn autre têps.Çarincotinétqu’vndifcordfe meut en Angleterre, en dix iours, ou moins,l’vn ou l’autre ellau delfus; amp;nbsp;nos affaires deçà ne font point ainlî: mais faloit auecl’exploiól de guerre, quenollre Roy entendill en plufieurs lieux de fon royaumt,amp; aux voifins;amp; par efpecial entendoit entre tous fes autres affaires,à contenter lediôl Roy d’Angleterre,ou à l’entretenir par Am-baffadeurs prcfens,amp;belles parollcs,afin qu’il ne fempefchall point denos affaires.Car ledit fcigneurfçauoit bien qu’à toutes heures les Anglois, tant Nobles que Commune,amp; gens d’Eglife,font enclins à la guerre cotre ce royaume,tant foubs couleur de leurs querelles qu’ils y pretendent,que pour l’ef-

perance

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iDE PHILIPPE DE COMMIMES.

perancc d’y gaigner : pource que Dieu a permis a leurs prcdeceEeurs gâigncr en ce royaume plufieurs grandes batailles,amp; y auoirlogucpoflcnioujtat en Normandie qu’en Guyenne , qu’ils auoient pofledec trois cens cinquante ans a l’heure que le Roy Charles feptiefme la gaigna le premier coup,comme i’ay dit ailleurs,auquel temps ils emportoient de grandes dcfpouïlles amp;nbsp;ri-chelTcs en Angleterre,tant des Princes Seigneurs de France qu’ils auoient eus leurs prifonniers,amp; engrand nombre, comme des villes amp;nbsp;places qu’ils auoient prinfes audidlroyaume, amp;nbsp;efpererét encores toufiours le faireainli: mais a grand’peine leur fuE aduenue telle adueture du temps du Roy noEre maiErc:car il n’euE iamais bazardé Ion royaume iufques la, que de foy mettre à pied , ne toute la Noblefle dudidl royaume, pour les combatte, comme Ion feit a Agincourt : ôc y cuE bien procédé plus fagemenr fil en fuE venu • iufques la, comme auez peu veoir par la maniéré qu’il fen defpelchaà la venue du Roy Edouard . Ainfi lediél Seigneur voyoit bien qu’il faloit qu’il fentretint auec lediél Roy d’Angleterre amp;nbsp;auec fes prochains: Icfquels il ién-toit enclins à entretenir la paix,amp; à prendre de fes biens,parquoy pay oit bien la penfion de cinquante mille Efeus, qu’il leur rendoit a Londres, amp;nbsp;l’appel-loient tribut:amp; afes prochains feruiteurs en payoit quelque feizemille: c’cE àfçauoirau Chancelier, au MaiEre des Rool les (qui depuis fut Chancelier) au grand Chambellan, Seigneur de HaEingues ( homme de grand fens amp;nbsp;vertu, amp;nbsp;de grande authorité vers fon maiEre,amp;: non fans caulc.'caril l’auoit bienferuyamp; loyaument,) àmcEire Thomas de Montgomery, au feigneur de Hauart( qui depuis aeEé, auec ce mauuais Roy Richard, Duc de* Mof-le ) au Grand Efcuyer, appelle maiEre Chene, à maiEre Chalanger, au Mar-quisjfilzdc la Royned’Angleterre, d’vn precedent mariage: amp;: fiifoit de Mousfle.’ trefgrans dons àtous ceux qui venoient deuçrsluy, encores qu’ils vinflent r*/* auec commiEions* ruineufes, 5c files depefehoitauecEbonnes parolles,5c , auec fi beaux prefens, qu ils l’cn alloient contents de luy ; amp;nbsp;enecires qii au- * «goureu-cuns congneulfent qu’il le feiE pour gaigner temps amp;nbsp;faire Ion faiôt en ceEe guerre qu’il auoit commencécjfi le diflimuloient ils,pour le grad profitqu’ils en auoient.

A tous ceux cy auoit fait des dons, oultre leurs penfions;5c fuis leur qu’a ce monfeigneur de Hauart,oultre là penfion, luy donna en moins de deux ans,en argent amp;nbsp;vaiEellc, vingt amp;nbsp;quatre mille Efcus:amp; au Chambelan, feigneur de HaEingues, donna pourvu coup mille Marcs d’argent en vaiflel-le,amp;de tous ces perfonnages icy,fe trouuerent les quittances en la Chambre des Comptes à Paris,faufdudiél feigneur de HaEingues, Grand Chambelan d’Angleterre : amp;nbsp;n’y en a qu’vn, parquoy c’eE vn grand ofiicc. Cediét Chambelan fe feit fort prier à fe fiire penfionnairc du Roy, amp;nbsp;i’en fu caufe. Carie le fey amy du Duc Charles de Bourgogne, pour|p temps que i’eEoyc a luy:lcquel luy donna mille Elcusl’an de penfion,amp; l’auoye dit au Roy : au-qiiclilpleutlemblablement que ie fulfemoyen dele faire fon amy amp;nbsp;fon feruiteur: car le temps paEe luy auoit eEé toufiours grand ennemy , amp;nbsp;du temps dudicl Duc Charles, amp;nbsp;encores depuis enfaueur delaDamoifellede Bourgongne ; amp;nbsp;ne tenoit point à luy, vn temps fut, qu’Angleterre ne luy ai-

R iiij

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loo VI. lîVRE DES MEMOIRES

daft à faire la guerre cotre le Roy de Frace. Ainfî ie commençay ceftc amitié par lettres,ôe luy donna le Roy deux mille Efcus de péfion, qui eftoit le double decequeluy donnoit lediôt Duc deBourgongne: amp;c enuoyale Roy, par dcuers luy,Pierre Cleret,vn ften Maiftrc-d’l'ioftel:amp; luy enchargea fort d’en prêdre quittance,afin que pour le temps aduenir, il fe veift amp;nbsp;côgneuft comme le grand Chambelan,Chancclier,Àdmiral,Grand Efcuycr d’Angleterre, Slt;. plufieurs autres,euflbntefté penfionnaires du Roy de France. Lediôt Pierre Clcret eftoit treftage homme,amp; eut communication bien priuéc aiiec Ic-diôt Chambclan,en fa chambre «a Londres, fcul à feul : amp;nbsp;apres luy auoir dit les pârolles quieftoient ncceflaires à dire de par le Roy , il luy prefentaces deux mille Efcus en or:car en autre efpece ne donnoit iamaisà grands Sei-• gneurs effranges.Quandlediôt Chambelan eut receu ccft argent,lcdiôt Pierre Gieret luy fupplia que pour fon acquit,il luy en fîgnaft vne quittance. Lediôt Chambelâen feit difficulté. Lors luy requift derechcflediôt Gieret qu’il luy baillaft feulement vne lettre de trois lignes,addreffant au Roy,contenant comme il les auoit reccus,pour fon acquift enuers le Roy fon maiftre,amp; afin qu’il ne penfaft qu’il les cuit emblez, amp;nbsp;que lediôt Seigneur eftoit fufpiçion-neux.Lediôt Ghambelan, voyant que lediôt Gieret ne luy demâdoit que rai-fon,refpondit:Monfeigneurle Maiftre,ce que vous diôtes,elf bien raifonna-ble:mais cedonvientdubonplaifirduRoy voftremaiftre, amp;nbsp;non pas à ma requefte, fil vous plaift que ie le prenne,vous me les mettrez icy dedans ma manche:amp; n’en aurez autre lettre ne tcfmoing.-car ie ne veux point que pour moy on die que le Grand Ghambelan d’Angleterre ait efté penfîonnaire du Roy de France, ne que mes quittances foient trouuccs en fa Ghambredes Gomptes.Lediôt Gieret feteutatant,amp; luy laifrafonargent,amp; vint faire fon rapport au Roy :qui fut bien courroucé qu’il n’auoit apporté ladiôte quittan-ce:mais il en loua amp;nbsp;eftima lediôt Ghambelan, amp;nbsp;plus que 4ous le autres fer-uiteurs du^oy d’Angleterre ; amp;nbsp;depuis fut toufiours payé lediôt Ghambclâ, fans bailler quittance.

En ceftemaniéré viuoit noftre Roy auec ces Anglois, toutesfois fou-uent le Roy d’Angleterre eftoit requis amp;nbsp;preffé du cofîé de cefte leuifePrin-cefi'c,pourauoiraide/Sc tantoftenuoyoK lediôt Roy d’Angleterre dcuers le Roy,luy faire remonftrances fur cefte matière, amp;nbsp;leprefler de paix, ou au moins de trefuc.Gar ceux d’Angleterre qui fe trouuoient à fon confeil,amp; par efpecial à leur parlement ( qui cft comme trois Eftats ) où fe trouuerent plu-*q.iivoioict fleurs perfonnages,* quivenoient de loing, amp;n’auoicnt point de penfion m,eux, amlt;,n comiTie Ics auttcs, vouloicut fott, ôc encores la Gommune, que lediôt Roy d’Angleterre aidaft àbon efeient à ladiôte Damoifelle : amp;nbsp;difoient que du cofté de deçaon lestrompoit, amp;nbsp;qu’on n’acheueroit point le mariage , amp;nbsp;fepouuoitafTezveoi# : carau traiôtéfaiôtà Piquigny, entres les deux Roys y auoir efté iuré,amp; promis, que dedans l’an on deuoit enuoyer quérir la fille du R oy d’Angletcrre,que ja auoient frit intituler Madame la Daulphine, amp;nbsp;que le terme eftoit pafTé de beaucoup.Quclque rcmôftrance que fes fubieôts luy feiffentjln’y vouloir cntêdre:amp; y auoit plufieurs raifons.G’eftoitvn home pefant que ce Roy d’Angleterre, amp;nbsp;qui fort ay moit fes plaifîrs, amp;nbsp;n euft

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DE PHILIPPE DE COMMUNES. 201 fçcu porter la peine de la guerre de deçà, amp;: fe voyoit Eiilly de grandes ad-üerfitez, parquoyn’auoir cure d’y rentrer. D’autre-partl’auaricedeces cinquante mille Eicus,rendus tous les ans en fon chafteau de Londres lu y amo-liflbientlc cœur. Etaufliquandfes Ambafladeurs venoient,on leurfaiibit toute bonne chere, amp;Ieur donnoit l’on tant de beaux dons, qu’ils en par-toient contens;amp; iamais ne leur eftoit faidc rcfponce,oû il y euft refolution, pour toufiours gaigner temps : mais leur difoit on qu’en peu de iours le Roy enuoyeroit deucrsleRoy, leur maillre, bons perfonnages , quiluy donne-toient telle feureté des choies,dontils eftoient en doute, qu’il l’en deuroit bié contenter.

Ainfi quand ces Ambafladeurs eftoient partis, trois fcpmaines ou vn moys apres, aucunesfoisplus, aucunesfois moins ( qui n’eftoit point petit terme en tel cas)Ie Roy y enuoyoit,amp; toufiours perlonnages,qui n’y auoient pointcflele voyage precedent, afin queficeux là auoient fait quelque ou-Uerture, dont le fait! ne l’en full point enfuiuy, que les derniers n’enfçeuf* fent quercfpondre. Et aufliceux qui y eftoient enuoyez mettoyent peine par toutes voyes de donner telle feureté en France audidl Roy d’Angleterre,qu’il auoit encores patience,fans le mouuoir. Car il auoit tant de defir de ce mariage,amp;la Royne fafemme,quecelaaueclcs autres raifons quei’ay diètes, luy faifoient diflimuler ce que parue de ceux de fon conleil diloient eftre au grand preiudice de fon royaume; amp;nbsp;craignoit la roupturedudièl mariage, pour la moquerie qui ja l’en faifoit en’Angleterre, amp;nbsp;par cfpccial de ceux qui y defiroicntla noile amp;nbsp;difference. Pour vn peu efclarcir celle matière, le Roy noftre maiftre,n’eut iamais vouloir d’accomplir ce mariage: car les aages des deux n’eftoient point fortables, pour ce que la fille ( qui fut depuis Royne d’AngIcteri e)eftoit trop plus vieille que mofeigneur le Daul-phin ( qui depuis fut noftre Roy ). Ainfi fur ces dilfimulations, vn moys ou deux de terme gaigné,en allant amp;nbsp;venât,cftoit rôpre à fon ennemywne faifon de luy mal faire.Car fans doLibtc,fi ce n’euft efté 1 efperancc dudièl mariage, le Roy d’Angleterre n’euft iamais fouftert prendre les places fi pres de luy, fans mettre peine de les deffendre : amp;nbsp;fi d’entrée il fe full déclaré pour ladièle Damoifelle de Bourgongne , le Roy qui craignoit mettre les cho/ès en doubte, amp;nbsp;en aduentLire,n’euft point de tant affoibly celle maifon de Bourgongne , comme il a. le ne dy ces chofes, principalement que pour donner à entendre comme les chofes de ce monde^e font conduiéles , amp;nbsp;pour f en ay der, ou pour fen garder, ainfi qu’il pourra feruir à ceux qui ont ces grandes chofes en main,amp; qui verront ces Memoires : car combien que leur fens foit grand,vn peu d’aduertiflement fert aucunesfois.il eft vray que fi Mada-moifelledeBourgongne euft voulu entendre au mariage de monfeigneur deRiuieres,frcrc de laRoyne d’Angleterre, on l’euft fecouruë auec bo nombre de gens-.mais c’eftoitvn mariage bien mal Portable: car ce n’eftoit qu’vn petit Comte, amp;nbsp;elle la plus grande heritiere qui full de fon temps. Plufieurs marchez fe menèrent entre le Roy de France amp;nbsp;le Roy d’Angleterre: amp;nbsp;entre les autres, luy offroit le Roy, que fil fe vouloit ioindre auec luy,amp; venir cnperlonncenvn quartier dupais deladièle Damoifelle , amp;nbsp;en prendre fa

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101 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;VI. LIVRE DES MEMOIRES

partjlcdid feigneur cofcntoit que ledid Roy d’Angleterre euft le païs de Fia dresjôc qu’il letinRfans homage,amp; le païs dcBrabât;amp; luy ofFroitleRoy co-quérir à fes defperîs les quatre plus grofl'es villes de Btabât,amp; les mettre en la pofleflion du Roy d’Angleterre : amp;nbsp;d’auantage luy payer dix mille Anglois pour quatre moys,afin que plus aifément il portait les miles de rarmée:amp; luy V preflcroir grand nôbrc d’artillerie,amp; gens Sc charroy pour les coduire, amp;: fen aiderjamp; que le Roy d’Angleterre feift la coquefte de Flâdres, radis que lediôt feigneut les empefeheroit ailleursdeRoy d’Angleterre refpôdit que les villes de Flâdres clloiêt fortes £gt;c crades,amp; vn païs mal-aifc à carder,quad il l’auroic côqLiiSjamp; femblablcmcnt ccluy de Brabât:amp; que les Anglois n’auoiêt point fort celle guerre aggreable,àcaufe des fréquentations de leurs marchadifes: mais qu’il plcuft auRoy,puis qu’il luy plaifoit faire part delà conquefte, luy bailler quelques places de celles que jaauoitconquifes en celle Picardie,corne Boulongne amp;nbsp;autres, amp;nbsp;qu’enccfiifantil fedeclareroit pourluy, 6c en-uoyeroit gens à fon fcruicc,cn les payantgt;qui cftoii bien fige refponce.

(animent le mariage de z^ifCadamoiJelle deTiour^^ongne fut conclu nbsp;nbsp;nbsp;ac-

comply auec Maximilian ^Duc d^ ^iuflnchc^amp;' depuis

Empereur. CHAP. III.

Infi comme deuant ay dit,alloient Sgt;c venoient ces marchez entre les deux Roys,pour toufiours gaigner teps, amp;nbsp;falfoi-blifloitladidlc DamoifelledeBourgongnc:cardecepeudc Ar gens de guerre, qui luy clloicntdemeurezapres la mort de lônperc, plufieurs fc tournèrent du party du Roy: 6c par cfj^ecial apres ce que monfeigneur des Cordes s’y fut mis, qui plufieurs en amena auec luy.Les autres fe tournoient par neceflitc, pour-cc qu’ils eftoienc fituez,ou demeurans près des villes, ou dedans celles qui e-ftoient ja^n l’obeilfancc d u d iôt Seigneur,ôc aufli pour auoir de fes biens: car nul autre Prince n’en departoit fi largement à fes feruiteurs comme luy.D’a-* qui adou- ^^^^ntage les troubles des bandes croilfoient chafeun iour en ces grolTes villes, toit tout. amp;parefpccial aGand,*qu’il doubtoit tant,commeauez ouy.Enuiron dcla-w nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Damoifelle de Bourgongne cfloit parlé de plufieurs mariages pour el-

le,difant qu’il luy fail 1 oit vn mary,pour dcfFcndre le demeurant de ce qu’elle auoit,ou efpoufcr monfeigneur le DaLilphin,afin que tout luy demeurafl en paix. Aucuns defiroient fort ce mariage,ôc par efpccial ellc,auant que ces lettres qu’auoient portées Icfdiôls Seigneurs d’Hymbercourt 6c Chancelier, / fuffentbaillées. Autres alleguôyent le icune aage dudiól monfeigneur le Daulphin, qui n’efloit que de neufans, ou enuiron : Ôc alleguoient ce mariage promis en Angleterre, ôc tafehoient que ce fufl pourle fils du Duc de Cle-ues. Autres pourle nbsp;nbsp;de l’Empereur Maximilian,depuis Roy des Romains.

Ladiôle Damoifelle auoit coceu haine contre le Roy, àcaufè de fcfdiéles lettres : car il luy fcmbloit auoir efléoccafion de la mort de ces deux bons per-fonnagcsdcfrus-nommcz,ôc de la honte qu’elle receut, quand publiquement luy furent baillées,deuant tant de gens,comme auez ouy; ôcauflî que cela auoit donné hardielTc aux Gantois de luy auoir chalfé tant de ferui-

tcurs,

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DE PHILIPPE DE COMMINES. xo| leurs, amp;: Icpare Ei belle mere, amp;nbsp;le Seigneur de Rauaftain, d’aucc elle,amp; mis fes femmes en fi grand’ crainte qu’elles n’euflent ofé ouurir vnes lettres, fins les monftrer n’y parler à l’oreille à leur maifirefie. * Et commença H eflogner d’elle l’Euefquedu Liege,qui eftoitfilz de Bourbon,qui defiroic faire le ma- £*‘»’^■«'»«4 riage dudiôl mon feignent le Daulphindequeleuft eflcbien propice, amp;nbsp;grâd honneur pour ladite Damoifclle,n’eun; elle la grande ieuneffe dudiôl mon-feigneur le Daulphin : toutesfois le regard duditl Euefque n’eftoit point iufi ques la:fi fe retira au Liege,amp; chalcun fen deporta.il cull elfe bien difficile de conduire celle matière de tous les deux collez ; ôc croy que ceux qui fen fufi fent mellez, n’y eulTent point eu grandhôneurà lafin: ôcaulfi cbacûl’cn tcut: mais parauant fe tint quelque confeil fur celle matière : où le trouua Madame * de Halluin,premiere Dame de ladiéle Damoifelledaquclle dill,comme * ae Âaiie-me fut rapporté, qu’ils auoient befoing d’vn homme amp;nbsp;non pas d’vn enfant, difantquefamaiftrelTcefloit femme pour porter enfant, amp;nbsp;que de cela le pais auoit befoing. A celle opinion fe tindrent. Aucuns blalmerentladidc Dame d’auoir li franchement parlé,autres l’en louèrent,difant qu’elle ne parloir que de mariage, amp;nbsp;de ce qui efloit tres nccelTaircau païs. Ainli il ne fut plus nouuelles que de troLiuer cell homme, amp;nbsp;croy véritablement que fi le Roy eull voulu qu’elle eullefpoufé monfeigneur d’Angoulefme, qui clloic pour lors,qu’clle l’eu fl fait,tant defiroit demeurer alliée de la maifon de Fra-ce.Or Dieu voulut drelTer vn autre mariage, amp;nbsp;par-auanture ne fçauons pas encores pourquoy.finon que nous voyons par ce qui elf pairé,que de ce ma-^ riage,qui fut faiôl,font forties plufieurs grandes guerres,tant dcLl que deçà. Cequin’eullpolfiblepàs eflé, fi elle eull efpoulé mondiôl Seigneur d’An-goulcfme.'amp; en ont porte depuis les pars de Flandres amp;nbsp;de Brabât, amp;nbsp;autres, grandes perfccutions. Le Duc deCleuesefloitàGandauecladicleDamoi-felle,qLii chcrchoit fort amis leans, pour cuider conduire le mariage de fon filzauecladiôleDamoifelle; laquelle n’y efloit pas encline , amp;nbsp;nlt;tluy plai-foient point les conditions dudièlfilz deClcues, ny à ceux qui elloient auprès d’elle. Ainfi d’aucuns commencèrent à pratiquer le mariage du filz de I’Empereur,depuis Roy desRomains:dontautresfois auoit eflé parolles entre l’Empereur amp;nbsp;le Duc Charles, amp;nbsp;la chofe accordée entre eux deux. Si auoit l’Empereur vne lettre faiélede la main de ladièlc Damoifelle,da commandement de fon pere,amp; vn anneau, où il y auoit vn Diamant : amp;: contenoitladièle lettre comment,en enfuyuant le bon plaihr de fon Seigneur amp;nbsp;pere,ellc promettoit au Duc d’Aullriche, fils dndiôl Empereur, accomplir le mariage pourparlé en la maniéré, amp;nbsp;felonie bon plaifir de fon-dièl Seigneur amp;nbsp;pere.

L’Empereur enuoya certains AmbalTadeurs deuers ladièle Damoifelle, laquelle elloit à Gand :amp; apres que lefdiéls Ambaflad^irs furent arriuez à Brucelies,il leur fut eferit qu ils attendiffent là encores, amp;nbsp;qu’on enuoyeroic deuers eux : amp;nbsp;cela feit le Duc de Clcucs, qui ne defiroitpoint leur venue,amp;: tafchoitàles faire retourner mal contents: mais lefdiôls ArnbafTadeurs, qui jaauoient intelligence en lamaifon de ladide Damoifelle, amp;nbsp;parcfpecial à laDuchefTc de Bourgongne Douairière, laquelle efloit dehors ( comme

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104 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V. LIVREDES MEMOIRES

auezouy)amp; feparccdeladiéteDcimoifèllcjà caiife de ces lettres, paflcrcnt oultre:car elle les adiiertit,comme me fut diól, qu’ils marchaflent toufiours, nonobftant leurs lettres.-ßc aufli leur manda ce qu’ils deuroyent faire, quand ils feroient à Gand, amp;nbsp;comme ladióle Damoifclle cftoit bien difpofée à leur intention, amp;plufieursd’entour elle, A ce confeil fe tindrent ces AmbalTa-deurs de rEmpereur;amp;tirèrent tout droiól à Gand, nonobftant ce que leur auoit efté mandé,dont ledicl Duc de Cleucs en fut fort mal content ; toutes» fois il ne fçauoit point encores la volonté des Dames. Ilfutaduifé en leur confeil qu’ils feroyent ouys: amp;nbsp;fut did que apres qu’ils auroient dit leur creance,ladidteDamoifclle leur diroit qu’ils fuffent les trefbicn venus, amp;nbsp;quelle, mettroit en confeil ce qu’ils luy auoientdit, amp;nbsp;puis leur feroit faire rcfponfc, amp;nbsp;qu’elle ne diroit rien plus auant ; amp;: ainft le conclud ladide Da-moifelle.Les Ambafladeurs defllifdids prefenterent leurs lettres,quad il leur fut ordonné; amp;nbsp;dirent leur creance, qui cftoit comme le mariage deffufd id auoit efté conclud entre l’Empereur amp;nbsp;le Duc de Bourgongne fonperc , amp;: du fccLi amp;nbsp;confentement d’elle, comme apparoifloit par lettres eferites de fa main ; lefqucllesilsmonftrcrent, amp;: aufti le Diamant, qu’ils difoyentauoir efté enuoyéamp; donné en ligne de mariage ; amp;nbsp;requeroy ent bien fort lefdids Ambafladeurs, de par leur maiftre, qu’il pleuft à ladideDamoifelle accomplir ledid mariage, en enfuyuant le vouloir amp;nbsp;promelTc de fondid Seigneur amp;nbsp;perc,amp; la ficnne aufli:ôc la fommerent deuant les prefens de declarer fl elle auoit eferite ladide lettre ou non,amp; fl elle auoit vouloir d’entretenir fa pro mefle. A ces parolles, amp;nbsp;fins demander confeil, refpondit ladide Damoi-felle,qu’elleauoiteferit Icfdidcs lettres parle vouloir amp;nbsp;commandement de fon Seigneur amp;nbsp;pere,amp; enuoyé ledid Diamant,amp; qu’elle auoüoit le contenu.Lefdids Ambafladeurs la mercicrent bien fort ; amp;nbsp;retournèrent ioyeux en leurs logis. Le DucdeClcues fut fort mal content de ccftercfponfe, qui cftoit oppKgt;fltc de ce qui auoit efté conclud au confeil:amp; remonftra fort a ladide Damoifelle qu’elle auoit mal parlé. A-quoyclle refpondit,qu’autrc-ment ellenelepouuoit faire,amp; qucc’eftoit ebofe promife , amp;nbsp;qu’elle n’y pouuoit aller à l’encontre. Vcuè’s ces parolles, amp;nbsp;qu’il congneuft bien qu’il y en auoit plufleurs leans de l’opinion de ladide Damoifelle, fc délibéra peu deiours apres, de fe retirer en fon païs ,amp; de fe déporter de ceftepourfuite. Ainfl fcparacheua ce mariagc:car ce Duc Maximilian vint à Coulongnc, où aucuns des feruiteurs de ladide Damoifelle allèrent au deuant de luy ; amp;nbsp;croy bien qu’ils le trouucrent mal fourny d’argent, amp;nbsp;luy en portèrent; car fonperceftoitle plus parfaidement chiche homme,que Prince n’y autre qui ait efté de noftre temps. Le defllifdid filz de l’Empereur fut amené â Gand,accompaigné de fept ou huid cens chenaux; amp;nbsp;fut achcué ledid mariage, qui de prime face ne porta point grande viilité aux fubieds de ladide Damoifclle:car en lieu d’apporter argent, il leuren failloit bailler. Leur nombre n’eftoit point fuffifànt a vne telle puifTance, que celle du Roy ; amp;nbsp;ncfaccordoientpas fort leurs conditions aucc celles des fubieéls de cefte maifon de Bourgongne : lefqucls auoyent vefeu fous Princes riches, qui donnoienc de bons cftats, amp;: tenoient honnorablc maifon amp;nbsp;pompeufe,

tant

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! nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;DE PHILIPPE DE COMMIMES. iöj

tant en meuble qu’en feruice de table, amp;nbsp;habillcmens pour leurs pcrfonnes amp;nbsp;fcruiteurs. Les Allemans font fort au contraire , pour ce qu’ils font rudes ,amp; viuent rudement.

Et ne fay nul doubte qu’aucc grand amp;nbsp;fige confeil, amp;nbsp;encores aidant grace de Dieu, fut faiôle celle loy amp;nbsp;ordonnance en France, que les fiiièsnes;;::; heritcroiét point audiôl royaume,pourcuiter qu’il ne full en la main dePrin-ce de nation cllrange,amp; d’cllrangers ; car à grand’ peine les Fraçoys FeulTent peu fouffnr, amp;nbsp;aulli ne font poinr les autres nations ; amp;nbsp;à la1ongLie,iI n’eft nulle Seigneurie des grandes, donc le pais à la-fin ne demeure à ceux qui font du pais : amp;nbsp;le pourez vcoir par France, où les Anglois ont eu grande fei-gneurie depuis* quarante ans :amp; pour celle heure n’ont plus que Calais, amp;nbsp;Va'r««quot;* deux petits challeaux qui leur coullent beaucoup à garder. Le demourant «.'M' ont perdu, beaucoup plus legerement qu’ils ne le conquirent: amp;nbsp;en ont plus WC A».. perdu en vn iour qu’ils n’en gaignerent en vn an.Et aulli fe peiilc congnoiftre***'^^^Y**‘**T par le royaume de Naples, amp;nbsp;par l’ifle de Sicile, autres prouinccs, que les Françoys ont polTedées par longues années: amp;nbsp;pour toutes cnfeigncs,n’y cil mémoire d’eux que par les fepulturcs de leurs predecelfeurs. Et encores

' que Ion endurall de Prince de pais eflrange, qui feroit en petite compagnie bien reiglée, amp;nbsp;luy fage, fi ne le peult on bien ai fernen t faire de grand nombre de gens: car fil en ameine auec luy grand nombre, ou qu’il en mande pour quelque occafion de guerre, ils en ont aux fubicdls, tant pour la diuer-fité des mœurs amp;nbsp;conditions, que pour leurs violences, amp;nbsp;qu’ils n’ont l’a-rnour au pais comme ont ceux qui en font nez, amp;nbsp;fur tout quand ils veulent auoir les Offices amp;nbsp;Benefices, amp;: les grands maniemens du pais. Ainfi a bien à faire vn Prince d’ellre bien fige,quand il va en pais eftrange pour accorder toutes fes vielles :amp;fi vn Prince n’eft doué de celle vertu, qui fur toutes les autres vientdelagrace de Dieu feulement, quelque autre bien que Ion en fceult dire, rien n’eftàcllimer : amp;nbsp;fil vit aage d’homme, il aura oe grands troubles amp;nbsp;affaires, amp;nbsp;tous ceux qui viuront loubs luy, amp;nbsp;par efpecial quad il viendra fur la vieillcffe, amp;nbsp;que fes hommes amp;nbsp;lcruitcurs n’y auront nulle clperance d’amendement.

Apres que fut acheuc le mariage deffufdiél, leurs affaires n’en amendèrent de gueres: car ils elloient ieunes tous deux . Lediól Duc Maximilian n’auoit congnoilfince de rien, tant pour fa ieuneffe que pour élire en pals eftrange.-amp;auffiauoitellé mal nourry, au moins pour auoir congnoiffancc de grandes chofes: amp;nbsp;fi n’auoit point de sens pour faire de ^rand * effeól:amp; alloit ce ..

1 II ‘ n/ r nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ni- Exem/-.-w/e/Z.

pais en grand trouble,amp; a clteiulques icy,amp; eit apparent de rairc:amp; elt bien grâdinconucnientà vn pais, comme i’ay dit, quand il fault qu’il cherche Seigneur de païs eftrange ; amp;nbsp;feit Dieu grand’ grace au royaume de France de celle Ordonnance,dont i’ay parlé deffus; c’eft à fçau^ir que les filles n’he-ritent point. Vne petite maifon en peult accroiftre : mais à vn grand royaume, comme ceftui-cy, n’en peut venir que tout inconuenient. Peu de iours apres ce mariage, fe perdit ce païs d’Artois,au moins en le traiólat. Il me fuf-fit de ne faillir point â la fubftancc: amp;nbsp;fi ie faux aux termes, comme vn mois plus ou moins,les lifeurs m’exeufent fil leur plaift. Le faiôl du Roy amedoit

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VI. LIVRE DES. MEMOIRES

tOLifiours : cariln’auoit nulle partie, amp;nbsp;toufiours prenoit quelque phicc, f’il n’auoit quelque trefue, ou quelque ouuerturc d’appointemenr, qui iamais flairtriiytiuf- ne fepouLioit accorder: * car ils n’eftoient point raifonnables, pourceleur Î)u7m1- duroitla guerre. Ce Duc Maximilian, amp;nbsp;Madamoifelle de Bourgongne eurent vn filz le premier an;c’eft l’Arche-duc Philippe, qui régna depuis. Le fécond an, eurent vne fille, qui depuis fut noftre Royne, appellee Mar-' guerite. Le tiers an, vn filz appelle Françoys, au nom du Duc Françoys de Bretaigne. Le quartan, elle mourut d’vne cheutede cheual,ou d’vne fieure; mais vray eft quelle cheut. Aucuns difent qu’elle efioit groffe. Ce fut grand dommage pour les fiens : car eile cfloittres-honnefte Dame amp;nbsp;liberalle, amp;: bienayméedefesfiibieóls; amp;nbsp;luy portoientplus de reuerence amp;nbsp;de crainte mary,aullî elle efloit Dame du pars. Elle aymoit fort fondiôl mary, amp;nbsp;cfloit Dame de bonne renommée. Laquelle mort aduint l’an mil quatre W«»»**y*’**^‘*** censjquatre vingtsamp;deux. En Henault le Roy tenoit la ville de Quefnoy Je Comte, amp;nbsp;celle de Bouchain : lefquelles il rendit, dont aucuns fcfbahi-rent, veu qu’il ne cherchoit nul appointement, amp;nbsp;qu’il monftroit vouloir prendre le tout, fans rien laiffer à celle maifon : amp;nbsp;croy bien que fil euft peu tout départir amp;nbsp;donner à fon aife, amp;nbsp;de tous poindls la deflruire, qu’il l’cuft fait.- mais ce qui le meut à rendre ces places en Henault, furent deux chofes, * qu’il me diffc depuis: La premiere qu’il difoit qu’il luy fembloit qu’vn Roy foZ« nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;*ayme plus places de force amp;nbsp;de vertu en fon royaume, où il eft oingt amp;nbsp;fa-

•qu-iin’a cré,* qu’il ne fait dehors de fon royaume,amp; cecy eftoithors de fon royaume.

L’autre raifon eftoit, qu’entre les Roys de France amp;nbsp;Empereurs y a grands fermenSjôc confederations, de n’entreprendre rien l’vn fur l’autre, amp;ccs places ( dont i’ay parlé ) eftoient fituées en l’Empire : amp;nbsp;furent reftitue'es l’an mil quatre cens feptante fept. Pour caufe femblable rendit Cambray ,ou la mit en main neutre, content de la perdre : amp;nbsp;aulli ils auoient mis le Roy dedans la vilTe en feureté.

Comment le nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Louis nbsp;nbsp;nbsp;la conâuicle de Charles d’Amboißßn Lieutenant,

'Villes de Bourgongne, que le Princed'Orengeauoit reuoltées contre le Koy. CHAT. lîll.

N Bourgogne fe faifoit la guerre toufiours,n’en pouuoic leRoy auoir le bout : pource que les Allemans fùfoient quelque peu de faueur au Prince d’Orenge, Licutenât pour les fufdiéis, pourfonargent,non point pour la fiiueur du Duc Maximilian. Car iamais homme ne fe trouua pour luy audidpaïs, au moins pour le temps de lors dont ie parle;

mais eftoient compaignons de guerre de cefte Ligue de Suiftes, qui alloient àleur aduanture : ca» ils ne font point amis, ne bien vueillans delamaifon d’Auftriche. Bienpeu defecours eneutlediôl pais de Bourgongne, mais beaucoup en euft eu fil y euft eu du payement ; amp;nbsp;nul ne le pouuoit mieux faire que le Duc Sigifmond d’Auftriche , oncle dudiôl Duc Maximilian, quiauoitfes terres auprès, par efpecial la Comté de Fcrrette , qu’il auoit peu d’années deuant vendue cent mille Florins de Rhin au Duc Charles de Bourgongne

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JJb FH in F Fh Uc, C O M MI N E S. 207 Boijrgongnejamp;puis I auoit reprinfc, fans rendre l’argent, amp;la tient encores auiourd’huy à cctiltre . Il n’y eutiamais en luy grand fens, né grand hon-neur,amp;bien fouuent il aduientqu’cn tels amisfetrouuebien peu d’aide; elides Princes, donti’ay parléailleLirs,c[uine veulentfçauoir de leurs alïai— lité res, fînon ce qu’il plaifl à leurs feruiteurs leuren dire; qui font toufiours payez a la vieillieflejComme ceftuicy dont ic fay mention.- Ses feruiteurs luy ont fait tenir,durant ces guerres,tel parti qu’ils ont voulu, amp;nbsp;quafi toufîours a tenu le parti du Roynollremaiftre, contre fon nepueu. A la fin a voulu donner fon heritage ( qui eft bien grand) en maifon ellrange, amp;nbsp;l’ofterà la lienne ( car il n’eut iamais nuis cnfans,amp;fi a efté marié deux fois) amp;en la fin, depuis trois moys en ça,par autre bande de fes feruiteurs, a tranfportc toute fa feigneurie, amp;nbsp;désàprefent, à fondiâ: nepueu ce Duc Maximilian, dont • , i’ay parlé, qui fut depuis Roy des Romains: amp;nbsp;retint feulement vne penfion, comme la tierce partie,fàns y auoir autre authorité ne puiflance; amp;nbsp;plufieurs fois fen eft repenti, ce m’a Ion dit:amp; s’il n’eft vray ce que l’on m’a dit, il efl a croire; amp;nbsp;telle eft la fin des Princes qui veulent viurebeftialement . Et ce qui me les fait tant blafmer,c’eft la grande charge amp;: grand office que Dieu leur a donné en ce monde. A ceux qui fontinfenfez,on ne leur doibt rien repro-cher:mais ceuxquiont bonfens,amp;fontdclcursperfonnes bien difpofez, amp;nbsp;n’éploient point le temps à autre chofe qu’a faire les fols amp;nbsp;à eftfe oyfifs, on ne les doibt point plaindre quand mal leuraduicnt : mais ceux qui départent le temps,amp; félon leur aage, vnc fois en fens amp;nbsp;en confei!, autresfois en feftes amp;nbsp;en plaifirs,ceux là font bien à louer, amp;nbsp;les fubicéls bien heureux d’a-üoirvn tel Prince.

Cefte guerre de Bourgongne dura affez longuement, pour les raifons de ces petites faueurs d’AlIemans : toutcsfoisla force du Pvoy leur eftoit trop grande.L’argent failloit aux Bourguignons,amp; les gens qui eftoient és places, fe tournoient par intelligence. Vncouple feigneurdeCranafliqgcala ville de Dolle, chefde la Comté de Bourgongne. Il eftoit Lieutenant pour le Roy,ôcn’y auoit point de grands gens dedans, amp;nbsp;les mefprifoit: ainfimal luy en print. Car par vne faillie que feirent ceux de dedans, il fc trouua tref-foudainementfurprins :amp; perdit vnc partie de fon artillerie , ôc des gens quelque peu, qui luy fut honte amp;nbsp;charge enuers le Roy : lequel eftant marry de cefte aduenture,commcnça d’aduifer à mettre autre Gouuerncur en Bour gongnc,tant pour ce cas,que pour les grandes pilleries qu’il auoit filiales au-diél païs ; qui à la vérité eftoient cxceffiues.Toutesfois auant qued’cftre de-fapointé de cefte charge,il eut quelque aduantage fur vne bande d’AlIemans amp;nbsp;de Bourguignons : où fut prins le feigneur de Chafteauguyon, le plus grandfeigneurdeBourgongne.Le demeurant decefteiournécnc futpoinc grand’chofe. le n’en parle que par ouyr dire: mais le^iél feigneur de Cran y eut bon bruit defaperfonne. Comme i’ay commencé à dire, le Roy délibéra pour les raifons deffufdiéles,de faire Gouuerneur nouueau en Bourgongne, fiins en rien toucher aux profits amp;bicns-fai(fts dudiél feigneur de Cran, fors des Gens-d’armes, qu’il luy ofta, excepté fix Hommes-d’armes,. amp;nbsp;douze Archiers, qu’il luy lailTapour l’accompaigner. Lediét feigneur de

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2o8 VL livre des memoires

Cran eftoit homme fort gras : amp;nbsp;aflez content f’cnalla en famaifon , où il eftoit bien appointé. Le Roy ordonna en fon lieu mcflirc Charles d’Am-boyfe, feigneur de Chaumont, tref vaillant homme, amp;nbsp;fige, diligent: amp;nbsp;commença ledid feigneur à pratiquer de vouloir retirer tous les Aile-mans, qui luy faifoient la guerre en Bourgongne ( non point tant pour fen feruir, que pour plus aifément coquerir le relie du païs)amp; de les mettre en la fouldc : amp;nbsp;enuoya deuers les Suilïcs, qu’il appelloit Mefleigneurs des ligues, amp;nbsp;leur offrit de grâds amp;nbsp;beaux partis.Premieremcnt vingt mille Francs l’an, qu’il donnoit au profit des villes,qui font quatre, Berne, Lucerne, Suric, amp;nbsp;croy que Fribourg y auoit part : amp;nbsp;leurs trois Quantons ( qui font villages enuiron leurs montagnes ) Suiffe,de qui ils portent le nom’; Solleurre amp;nbsp;• Ondreualauffiy auoientpart.Item vingt milleFrancs l’an,qu’il donnoit aux particuliers,amp;aux perfonnes dequoy ilfaidoit, amp;nbsp;feruoiten fesmarchez; amp;nbsp;là fe feit leur Bourgeois ,amp; auffi leurpremierAllié,amp;en voulut lettres. A. ce poinól feirent aucune difficulte,pource que de tout temps, le Duc de Sa-uoyeefloit le premier allié; toutcsfois’ils confentirent à ces demandes ,amp; aulïide bailler au Roy fix mille hommes, continuellement en fon feruice, en les payant à quatre Florins amp;nbsp;demy d’Allemaigne, lemoys :amp;yatou-fiours ellé ce nombre, iufques au trefpas dudiél Seigneur. Vn panure Roy n’euftlceu fiirc ce tour;ôe le tour luy tourna à ion grand profit : amp;nbsp;croy qu’a la fin fera leur dommage:car ils ont tant accouilumé l’argent, dont ils auoiét petite congnoiffancc parauant,amp; fpecialementdemonnoyed’or, qu’ils ont cfté forts P refis àfe diuifer entre eux. Autrement on ne leur fçauroit nuire, tant font leurs terres afpres amp;nbsp;pauures, amp;nbsp;eux bons combatans.-parquoy peu de gens cfiayeroient à leur courre fus. Apres que ces craiélez furent faiéls,amp; que tous les Allemans qui eftoyent en Bourgongne, furent retirez au feruice amp;nbsp;gaiges du Roy,la puifftnee des Bourguignons fut de tous poinôlsrom-pue-.amp;po^abregermatière, apresplufieurs neufues chofes, faides par le Gouuerneur monfeigneur de Chaumont,il affiegeaRochefort, vn chafteau z/fjiX'tó* pres de Dolle,où eftoit me Hire Claude de * Vaudre. Il le print par compofî-X*/« [x«» ^^egt;n:amp; apres il affiegea Dolle,dont fon predcceffeur en l’office, auoitcitéIc-ué,comme i’ay dit;amp; fur prinfè d’alfault.On dit qu’aucuns Allemans, de ces nouueaux reduiôls,cuiderent entrer pour la deffendre : mais en leur compai-gnic fe mirent tant de Francs- A rchiers, fans entendre la malice, mais feulement pour gaigner ; que quand ils furent dedans,toutfeprintàpiller, amp;nbsp;fut la ville bruflée amp;nbsp;deilruide.Pcu deiours apres celte prinfe,!! affiegea Auf fonne ville tresforte : mais il y auoit bonne intelligence dedans : amp;nbsp;cfcriuoic au Roy pour les offices,pour aucuns qu’il nommoit,auanr que mettre le Sic-ge,ce que volontiers luy fut accordé. Combien queie ne fuffepointfur le lieu où ces chofès fe ftifoient, fi le fçeu- je par ce qu’on rapporcoit au Roy,amp; par lettres qu’on luy efcriuoit,lefquelles ievoyoye fouucnt, pouren faire îcsrcfponfes par le commandement du Roy. Audid^Auffonne auoit peu de gens, amp;nbsp;elloient les Chefs accordez auec ledid Gouuerneur; amp;nbsp;ainfi, au „ boutde cinq ou fix ioursjfutia place rendue. Ainfi ne relia plus rien à pren-dre en Bourgongne, que trois ou quatre Chafteaux-Rochers, comme * leu, amp;nbsp;autres,

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. zop

amp; autres, amp;nbsp;auoir l’obeifTance de Bczançon, qui eft ville Imperialle ; amp;nbsp;ne doibt rien au Comte de Bourgogne ou peu.-mais pource qu’elle eil enclaucc audiâpaïs, elle complaifoit au Prince dudiét pais. Lediôl Gouucrheur y entra pour le Roy ,amp; puis en faillit : ôe I li y feircnt tel deuoir qu’ils auoient ac-couflumé de faire aux autres Princes, qui auoient poflede Bourgogne. Ain-fi toute Bourgongne fut conquife,oii Icdiól Gouucrneur feit bonne diligence : amp;nbsp;aufli le Roy le follicitoit fort, amp;nbsp;craignoit que lcdi£t Gouuerneur ne voulbft auoir quelque place defobeilTante audid païs, afin que Ion cuR plus affaire à luy : amp;nbsp;aufli afin que le Roy ne le rcnuoyafl point de là, pour f en feruiraillieurs : car le pays de Bourgongne cft fertile, amp;nbsp;il en faifoit comme fil cuff efté ficn;amp; ledit! Seignçjjr de Cran, dont i’ay parlé, Se luy,Gouuerneur de Chaumont, y feirent bien leurs befongnes tous deux. Vn peu de- « mouralepays en paix,foubslc gouuerncment duditl Seigneur de Chau-*^ mont,toutes fois quelques places fy rebellèrent apres,cômeBeaulne,* Ver-wWMjeV«« dun amp;nbsp;autrcs(amp; eftoyc lors prefent,amp; m’y auoit enuoyé le Roy auec les Pc- semuTlt;7X-fionnaircs de la maifon:amp;fut la premiere fois qu’il bailla Chefaufdids fionnaires,ôedepuis a accouftumé celle façon iufques à celle heure)lefquel-les places furent reprinfes par le fens amp;nbsp;coduiücduditl Gouuerneur, amp;nbsp;par la faulte du fens de fes ennemis. A cela voit on la difference des hommes, qui vient de grace de Dieu : car il donc les plus fages à la part qu’il vcult lou-llenir,ou le fens de les choilir à celuy qui en a l’authorité ; amp;nbsp;a bien monllre', amp;nbsp;fait iufques icy, qu’en toutes chofes il a voulu fouflcnir nos Roys, tant celuy trcfpaffé noftre bon maillre, comme cellui cy, combien que quel-ques-fois leur ait donné des aduerfitez. Ceux qui reperdirent ces places,e-lloient gens affés, combien que promptement ne fc vindrent mettre dedans les places qui fclloient ainfi rebellées pour eux, mais donnèrent têps audit! Gouuerneur, de faire fon amas, ce que faire ne deuoient-.car ils Içaüoient affés de fonellatjVcuramou’’que le païs leur portoit‘ amp;nbsp;pourc^ils fe de-uoient mettre dedans Beauine, qui elloit forte ville, amp;nbsp;fi la pouuoicntbien garder, amp;nbsp;les autres non. Lcicur que ledit! Gouuerneur fe mit aux champs pour aller deuant vne mefchan'îe petite ville, appellee V erdun, bien'infor-mé de leur eflat, eux y entrèrent, cuidans aller à Beaulne pour fc mettre dedans : amp;nbsp;elloicnt , tant de cheual que de pied , fix cens hommes ef-leuz Allemans,amp; de la Comté de Fcrrctte,conduit!s par aucuns fages'Gen-tils hommes de Bourgongne , dont Simon de* Quinchy en elloitvn. Ils*,^é»^ farrcflcrcntjàrheurc qu’ils pouuoient bien paffcr,amp;: fe mettre audit! Beaul- ExempLvitii, ne.-qui n’eufl point cfté rcprenable fiir eux, fi vne fois ils y eufset cntré.Faul-te de bon cofeil les feit feiourner vne nuit! trop,où ils furet aflicgez, ôeprins d’affiult :amp; apres futaffiegéBeauInc,amp; tout rccouuré. Onques-puis n’eurent vigueur les ennemis enBourgongne. Pour lors i’efloye auditl pais, auec les Penfionnaires du Roy, comme i’ay dit:amp; ledi Seigneur m’en feit partir, pour quelque lettre qu’on luy efcriuit quc*i’cfpargnoye aucûs Bout- yefcHuoyc geois de Dijon, touchant le logis des Gens-d’armes. Cela auec quelque au-tre petite fufpicion, fut caufe de m’eniioyer tres-foubdainement à Florence, l’obey comme raifon eftoit, parti des que i’eu lettres.

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VI. LIVRE DES MEMOIRES


Comment le Seigneur Argentan ^durant les guerres de la conijuefledeBour* gongneut enuoyè d Florence: nbsp;nbsp;comment il receut l'hommage de la

Duché de (jennes du Duc de zSiiCilanj au nom du

CHAT. F.

E différend pourquoy m’enuoyoit le Roy, cftoit pour le dc-bat de deux grandes lignées,fort renommées pour ce temps. M L’vne eftoit celle de Medicis, l’autre celle de Pacis : lefquels *ayans le port du Pape amp;nbsp;du Roy Ferrand de Naples, cuidc-rent faire tuer Laurens de Mçdicis,amp; toute fa (equcllc. Tou-tesfois quant à luy ils faillirent; mais tuèrent fon frere Iulian


tflpw Iti Pacis. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;»

^Fwnfquin de Medicis,en la grand’Èglife de Florence, Scvnappcllé Feuginct Noble, ixemfi.-vieii, qui fc mit au deuant de Iulian,amp; cftoit fcruitcur de la maifôn de Mcdicis.Lc-bâ- Laurens fut fort blecé,amp; fe retira au Reueftiaire de l’Eglifcjdont les por-cuyurc,quc fon percauoit fait faire. Vn fcruitcur, qu’il auoit fait Flore,.tint Je dcliurer dc prifon,deux iours dcuât,luy feruii btc à ce belbing, amp;nbsp;receut plu-». nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pour luy.Et fut fait ce cas à l’heure qu’on chantoit la grad’Mcf-

fe:amp; auoient leurs lignes, pourtucrcc quieftoit ordonné, à l’heure que le Preftre, qui chantoit la grand’ Meffc, diroit leJ^wé/^^. Il en aduintautremet que n’entendoient ceux qui l’auoient entreprins : car cuidans auoir tout gai-gné,aucuns d entre eux montèrent au Palais, pour cuider tueries Seigneurs qui y cftoient : qui changent de trois moys en trois moys, amp;nbsp;font quelque ncuf,qui ont toute l’adminiftration dc la cité : mais les entrepreneurs dclIuC diets fetrouucrcnt mal fuyuis:amp; eftans mÔtczles degrez dudiét Palais,quel-qu vn ferma vn huis apres eux ; amp;nbsp;quand ils fc trouucrent en haut, ils ne fe

trouLierent que quatre OU cinq, tousefpouuantez, amp;nbsp;ncfccurcnc que dire. Quoy voj^ns les Seigneurs qui eftoienr en haut,amp; les fcruiteurs qui cftoient aueceux regardèrent par les feneftrcs,amp; veirent l’cÛTicutedelaville, amp;oui-rent mcflîre Jacques de Pacis, amp;nbsp;autres eminy la place, deuantledidPa-Iais:lefquelscrioienr,L IB erta, liberta, amp;nbsp;POPOLo,popoLo:qui cftoient mots pourcuyderefmouLioir Je peuple à leur partie, ce que lediâ: peuple ne voulut faire,mais fc tint quoy:amp; pourtant l’enfuit de ladide place lediôl de Pacis amp;fes compaignons,comme confus dcleur entreprinfe.Voyas CCS chofes ces Maiftres ôc Gouucrneurs de la ville, dont i’ay parlé qui cftoiét . cnccPalais, prindrentcnceftepropreinftance,ccscinqouJix ( quieftoient montez, donti’ay parlé, mal accompaignezamp; malfuyuis, enintentionde tuer les Gouuerneurs, pour pouuoir commander par la ciré ) lefquels ils fei-rent incontinent pendre amp;: cftranglcr aux croifées dudiéf Palais: entre lefquels fut pendu l’Archcuefquc de Pife. Lcfdiéls Gouucrneurs voyans toute la ville fe declarer pofir eux ,amp; pour la part des Medicis, efcriuirent incontinent aux piflages que Ion print tout homme que l’on trouueroit fuyant, amp;: qu’on leur amenaft, Ledi^ meflire laques de Pacis fut prins fur la propre heure, amp;nbsp;vn autre de par le Pape Sixte, qui auoit charge de Gens d’armes foubs le Comte Hieronyme, lequel eftoic de cefte entreptinfe. Incontinant fut

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DÈ PHILIPPE DE COMMIMES. iit

fut pendu lediól de Pacis, auec les autres,aufdiôles feneftres.L’autre feruiteur du Pape cuft la teftc trachée, Sc pluficurs furet prins en la ville ; lefquels furet tous pendus à la chauldc(dont *Francifquc de Pacis en fut vn, ) amp;nbsp;me femble qu’en tout eftoiet quatorze grans perfonnages pendus,amp; aucuns menus fer-uiteurs tuez par la ville.

Peu de iours apres ce cas aduenu, i’arriuay audid lieu de Florence de par leRoy,amp; ne tarday guercs, depuis queic parti de Bourgongnc,â y eftre : car ie ne feiournay que deux ou trois iours auec madame de Sauoye , qui efioit fœur de noftrc Roy, amp;nbsp;me feit bien bon recueihôc de là allay à Milan, où pareillement feiournay deux ou trois iourSjpoLir leur demander des Gens-d’armes pour fecourirlefdiéls Florentins, delquels eftoient alliez pour lors, ce que liberalemét ils accordèrent,tant à la requefte du Roy,que pour faire leur nbsp;nbsp;• J

dcuoir:amp; deflors fournirent trois cens Homes d’armes,amp; depuis en eniioyc- / têt encor d’autres.Et pour coclufion de celle matiere,le Pape enuoya excommunier les Florentins, ce cas incontinent aduenu : amp;fçit marcher l’armée, quand amp;nbsp;quand,tâc de luy que du Roy de Naplcs.Laquelle armée eftok belle amp;nbsp;grofle, amp;nbsp;en grand nombre de gens de bien. Ils meirent le hege deuant la“* Cnaflcllcnic,prcs deSicnes,amp; la prindrêt,amp;‘plufieurs autres placcs;amp; fut grand aduenture que de tous poinéls lefdiôls Florentins ne furent deftruids; car ilsauoicnteflé longtemps fans guerre, amp;nbsp;ne congnoifloient leur peril. Laurens de Mcdicis,quicftoit leur chefen lacité,eftoiticune,amp; gouuerné de ieunes gcns.On s’arrelloit fort à fon opinion propre.Ils auoiér peu de Chefs, ôc leur armée tref petite. Pour le Pape amp;nbsp;le Roy Ferrand, efloitchefle Duc d’Vrbin,grand amp;nbsp;fàge hommc,amp; bon Capitaine. AulTi y elloicnt le Seigneur Robert d’Arimini, qui depuis a elle'grand honÂme, ôi IcfcigncurConftan-^ tindcPcfaro,amp; pluheursautrcs,auccles deux fils dudiôlRoy.-c’eflaflàuoirlc Duc de Calabrc,amp; le feigneur Dó Federic(qui tous vefeuret log téps depuis) amp;nbsp;grand nombre d’autres gens de bien. Ainfi prenoiét toutes les places qu’ils airiegcoyent,mais non pas fi promptemêt qu’on feroit icy : car ils ne fçauoiét point fi bien la maniéré de prendre places,nc de les deffendre: mais de tenir vnCamp,amp; d’y mettre bon ordre, tant aux viures qu’aux autres chofes qui font nccelTaires pour tenir les champs,ils le fçauét mieux que nous.La faucur du Roy leur feit quelque chofe, amp;nbsp;non pas tant que i’eufle voulu ; carie n’a-uoye armée pour les ay der, mais feulement auoye mon train. le demouray audiél lieu de Florence vn an,ou en leurs territoires,ôc bien traidie d’eux amp;nbsp;à leurs defpcns,amp; mieux le dernier iour que le premier ; amp;nbsp;puis le Roy me ma-dam’en retourner.-^ en palfant à Milan,ie receu du Duc de Milan,quick appelle IchanGalcas,rhommagc de la Duché de Gcnnes,aumoins de madame fa mere.-qui me feit hommage pour luy au nom du Roy.’amp;t de là vein vers le Roy noftrc maiftre;qui me feit bonne chere amp;nbsp;bon recueil, amp;nbsp;m’entremit de fes affaires plus que n’auoit fait iamais,moy couchant rffiec lLiy,combicnque n’cnfuffe point digne, amp;nbsp;qu’il en auoitaffez d’autres plus idoines; mais il e-ftoit fi làge que Ion ne pouuoit faillir auec luy,mais qu’on luy obeift à ce qu’il commandoitjfans rien y adioufter du lien.

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VI. LIVRE DES MEMOIRES


Du retour de monßeur d'Argentan d'Italie en France'.t^ delà tournée

«E trouuay vn peu le Roy nofire maiftre enuieilly,amp;cômen-çoitàfedifpofer àmaladie: tou ces fois il n’y parut point fi tofl:,amp; coduifoit toutes fes chofes par grad fens : amp;nbsp;encores luy duroit la guerre de Picardie, laquelle il auoittres-fortà cœur,amp; aufliauoiét fes aducrfaircs audiôEpaïs fils en eufsêt eu le gouuernemcnt. Le * Duc d’Auftrichc, depuis Roy des Romains,ayant pour celle année là les Flamans à fon commandement, vint alficgerThcroûenne: amp;môfeigncur des Cordes,Lieutenant pour le Roy en Picardicjamalfa toute l’armée que le Roy auoit audiôl païs, amp;nbsp;en toutes les frôtieres,amp;: huid mille Fracs-Archiers,amp; l’alla fecourir. Tatofl apres que le Duc d’AufIriche le fentit approcher,il leua fon Iiegc,amp; luy alla au dcuant;amp; fe récontrerent en vn lieu appelîé Guincgatc.Ledit Duc auoit grad nôtre de peuple dudidpaj's de Flâdres,iufques à vingt mille ou plus, amp;nbsp;aufiî quelque * peu d’Allcmans,amp; quelque tjois cens Anglois,que menoit mefiirc Thomas

*Abrigan,Cheualier d’Angleterre,qui auoitferui leDucCharlcs deBourgô-gne.Lcs Gens de chenal du Roy,qui efloiêt en plus grad nôbre de beaucoup que les autres, rompirent les Gens de chenal du Dnc,amp; les chaflerét iufques à Aire,amp;: Philippe monfieur de Rauaftin, qui les mcnoit.Le Duc fe ioignit auprès de fes Gens de pied.Le Roy auoit en celle armée bien*onzc cens Ho-mes-d’armes d’ordonnance. Tous ne chafferent point,mais môfeigncurdcs Cordes,qui elloit Chef,chafla,amp; môfcigneurdeTorcy anec luy ; amp;nbsp;cobien queccfnllfiidvaillâmcnt,fi n’appartiét il point aux Chefs de l’A Liant-garde amp;nbsp;Arricrc-garde de chaffer. Auefis fe retirercnr,foubs couleur d’aller garder leurs places,amp; les autres fnyrentàbon efeient. LcsGens depieddudid Duc ne filtrent point, fi en furent ils en quelque branfie: mais ils auoiêt aucc eux bien deux cens Gentils-hommes de bonne efloffeà pied,quiles condui-foicntiôc efloicnt de ce nombre monfeigneur de Romont ,filz dclamaifon de Sauoye, amp;nbsp;le Comte de Nanflau, amp;nbsp;plufieurs autres grands feigneurs. La vertu de ceux là feit tenir bon à ce peuple, qui fut merueille, veu qu’ils voy-oient fuir les Gens de chenal.Les Francs- Archers,qui efloient pour le Roy, fe mirent à piller le charroy dudiél Dnc,amp; ceux qui le fuynoient,corne viua-diers amp;nbsp;antres. Sur eux faillirent quelques Gens de pied dudid Duc, amp;nbsp;en tuèrent quelque nombre. De la part dndiél Duc il y eut plus de perte que de la nofire,amp; degens prins amp;nbsp;morts,mais le Camp luy demoura : amp;croy bien que fil cufl en confcil de retourner deuant Theroiienne, n’cufl trouué amc dedans, ôc autant en Arras. Il nel’ofa entreprendre, qui futàfondommage; maisentelcasonn’aApastoufioursadnertidnplusnecefraire, amp;nbsp;auffi il a-uoitdes craintes defon coflé.Ic ne parle dece propos que par ouir dire* car ic n’y cfloyepas : mais pour continuer ma matière, m’en a falu dire quelque chofe. l’efloye anec le Roy,quâd les nounelles luy en vindrêt:amp; en fut tref-dolent : car il n’anoit point acconflumé de perdre : mais cfloit fi heureux en tous fes faiéls,qu’il fembloitque toutes chofes allafsét àfon plaifir:mais auffi fon

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 115 fon fens aidoit bien à luy faire venir ceft heur : car il ne mettoit rie en bazardi amp;nbsp;ne vouloir pour rien chercher les batailles,amp; cefte-cy n’elloit point adue-nüe de fon commandement. Il faifoit fes arrhées fi grofles, qu’il fe trouuoit peu de gens pour les combatre:amp; efioit bien garni d’artillerie, amp;nbsp;mieux que iamais Roy de France ;amp;auflieflayoit de foubdainementprêdre les places, amp;nbsp;par efpecial celles qu’il fentoit mal * fermécs;amp; quand il les auoitjil y met- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;virile

toit tant de gens amp;nbsp;d’artilleric,que c’eftoit chofe impoflible de les reprendre fur luy:amp; fil y auoit dedans quelque forte place vn Capitaine ou autre , qui euft pouuoir de la bailler pour argent, amp;nbsp;qu’il voulfift pratiquer auec luy, il pouuoit eftre leur qu’il auoit trouué marchad ; amp;nbsp;ne l’eu ft on feeu efpotiuen-ter a luy demander grande fomme,car libéralement l’accordoit.Il euft cftroy de prime-face de cefte bataille,cuidant qu’on ne luy euft dit la vérité,amp; qu’el-lefuftdetouspoinélsperdüe: cariliçauoitbienqueficlle euft efte perdue, qu’il auoit perdu tout ce qu’il auoit conqu is fur celle maifon de Bourgogne, amp;nbsp;en ces marches là, amp;nbsp;le demeurant en grand hazard : toutesfois, quand il fçcut la vérité, il eut patience, amp;nbsp;délibéra d’y donner ordre , en façon qu’on n’entreprendroitplus telles choies lans fon feeu; amp;nbsp;fut content de monfei-gneur des Cordes. De celle heure là, le Roy délibéra de traider paix auec le Duc d’Auftrichc,mais qu’il la peuft faire de tous poinds à fon aduantage, amp;nbsp;qu’en lafailant il bridai! fi bien Icdid Duc, par le moyen de fes fubieds propres,qu’il congnoill'oit enclins à ce qu’il cherchoit, qu’il n’euft iamais pouuoir de luy mal faire. Aulli deliroit de tout fon cœur, de pouuoir mettre vnc grand’police au royaume, amp;nbsp;principalement fur la longueur des proces : amp;nbsp;en ce palTage vint brider celle court de Parlement,non point diminuant leur nombre ne leur authorité:mais il auoit à cotre-cœur plufieurs chofes,dont il la hayoit. Aufsi deliroit fort qu’en ce royaume on vfift d’vne couftume, d’vn poix,amp; d’vne mefurc;amp; que toutes ces couftumes fulTcnt mifes en François, en vn beau liurc,pour cuiter la cautelle amp;nbsp;piilerie des Aduocars;q^i eft fi grà- /quot;»*, de en ce royaumc,quc nulle autre n’eftfemblable, amp;les Nobles d’iceluy. la'^’quot;*** doiuent bien congnoiftre.'ôc fi Dieu luy euft donné la grace de viurc encores cinq ou fix ans,làns eftre trop prelTé de maladie, il euft fait beaucoup de bien à fondid royaume. Aufsi l’auoit il opprclTé, amp;nbsp;plus que iamais Roy ne feit: mais par authorité amp;nbsp;rcmonftranccs,Ion ne luy a feeu Elire le foulager: amp;nbsp;la-loit qu’il vint de luy, comme lors euft fait, fi Dieu l’eu 11 voulu preferuer de maladie.-pourcc fait bon bon faire tandis qu’on a le loifir,amp; que Dieu donne fanté amp;nbsp;entendement aux hommes.

L’appointemêtqueleRoy deliroitfaireauec le Ducd’AuftrichcÔc làfem-mc,Sc leur païs,c’cftoit par lamaindesGâtois,de traidlcr le mariage de môfei gneur le Daulphin Ibu filz, qui fut Roy,auec la fille dcfdids Duc amp;nbsp;Duchefi fc:amp; que par ce moyen luy lailTalfent les Comtez de Bourgogne, Auxerrois^ Mafeonnois, amp;nbsp;Charolois, amp;nbsp;il leur rendroit Artois ,^etenant la cite d’Arras en l’eftat qu’il l’auoit mifexar de la ville ce n’eftoitplus rien,vcu la cloftu-re de la cité:car auant que le Roy print Arras,la ville cloy oit contre la cité, amp;nbsp;y auoit grans fofl'cz,amp; grandes murailles entre deux. Ainli la cité eftoit bien clofe,amp; tenue du Roy par l’EueEquc-.ô«: en cela,le Roy auoit fait au contraire

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114 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;VL LIVRE DES ME MOIRES

des feigneurs de cede maifon de Bciirgcrgne:car ils ont tcuf cnrs,au moins puis cétans en ça, fait EucfqLietcl cjn’il leur a pieu, amp;nbsp;avdi capitaine delà vil-îe;amp; le Roy feit roppofitc,pourangmenter fon authorité:amp; feit abbatrelcf dides murailles, amp;les faire à rebours; car pour cede heure dernierc,la cite cloyoit contre la ville à grans fodez entre les deux ; amp;nbsp;par aind il ne donnoit rienxar la ville auiourd'huy fault qu’elle obeide à la cité. De la Duché de Bourgongneamp;: delà Coté de Boulogne,amp; des villes adifcs amp;nbsp;fituées fur la liniere de Some, des Chadellcnnies de Peronne,Roye,amp;Módidicr,ne faifoiét aucune mention:amp; fe menoient ces marchez, amp;nbsp;y predoient ceux de Gand rorcille:amp; edoient fort rudesaudid Ducamp; àlaDuched'edi femme, amp;nbsp;aucuns autres des grandes villes de Flandres Sc Brabant,qui edoient adez encli-• nés à la volonté des Gantois;amp;parcfpecial Brucelles, qui edoit tat riche que mcrueillesiveu que les Ducs Philippe amp;nbsp;Charles de Bourgongne y auoient toufiours demeuréimais les aifes amp;nbsp;plaidrs qu’ils auoiét eu fous les feigneurs dedufdiôls,lcurauoicnt fait mefeongnoidre Dieu, amp;nbsp;leur feigneur, Sgt;c cher-choientquelque male-fortune,qui depuis leur cd aducnuc,cóme auez veu.

Comment le 7(oy Louis par'vne maladie perdit aucunement le [ens nbsp;nbsp;la parol-

lcjgueri[[ant nbsp;nbsp;rencheant pardtuerjes fois^amp;* comme il[e maintenoit

enJonchaßeauduTleßisle-^ours. CH AT. Tll.

y rant ce temps, qui ed l’an quatre cens foixate amp;nbsp;dix-neuf, au moys de Mars,cdoiêt trefues entre les delfuldidsjö: vou loit le Roy paix, par efpecial en ce quartier dont ie parle, mais que ce fud de tous poinéls à fon auarage, comme i’ay dit.Il començoit à vieillir,amp; deuenoit malade; amp;nbsp;luy edant aux Forges pres Chynon,â fon dilner, luy vint comme vnc

percludojigc perdit la parolle.il fut leuc de table,amp; tenu près du feu, amp;nbsp;Icsfe-nedresclofes,amp; cobien qu’il fëvoulfidapprocher,l’on l’cn garda, aucûsqui péloiêt bien fiire:amp; fut l’a mil quatre cés quatre vingts au moys de Mars que / nbsp;nbsp;nbsp;cede maladie luy print. Il perdit de'toLis poinds la parolle, amp;nbsp;toutccognoif-

fancc amp;nbsp;mémoire.Sur l’heure y arriuadeSjVo’môfeigncurdeViênc,qui pour lors edicz fon medecin:amp; à la mefmc hcurc,kiy fut baillé vn clidere,amp;feides OLiLirirles fenedres baillerair;amp; incôtinent quelque peu deparolleluy re-uinr,amp; du fens;amp;môtaàcheual,amp; retourna aux Forges : car cernai luy print en vne petite paroide,âvn quart de lieu delà, où il edoitalléouyr melTe.Le-did feigneur fut bien penfé; amp;nbsp;faifoit des lignes de ce qu’il vouloir dire. Entre les autres chofes demanda l’Official de Tours pour fcconfeder; feit figue que Ion me mandad: car i’edoye allé à Argenton : qui ed à quelques dix lieues de là. Quand i’arriuay, ie le trouuay à table ; amp;nbsp;edoit aucc luy raaidre AdâFumée,quiautresfoisauoitcdé médecin du feu Roy Charles, amp;nbsp;à cede heure dót ie parle,maidre des requedcs,amp;: vn autre médecin,appelle maidre Claudc.Il entendoit peu de ce qu’on luy difoit ; mais de douleur, il n’en fen-toit point.ll me feit figne que ie couchade en fa chambre. 11 ne formoit giic-les de mots.Ie le ferui par l’efpacc de* quarâte iours à la table,amp; àl’entour de faperfon-

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fa perfo.nne comme Varlet de chambre: que ie tenoyc à grad honneur, ôc ÿ cftoyebien tenu.Au bout de deux iours laparolleluy commêçaàreucnir ôc , le fens, amp;nbsp;luy fcmbloit que perfonne ne l’cncêdoit fi bien que moy : parquoy Vouloir que ic fufle toufiours auprès de luy,amp;; fe côfefla audiôl OHiciafmoy prcfcnt:car autrement ne fc fuflent entendus.Il n’auoit point grandes paroles à dire, car il feftoitconfeflépeu de iours au parauant: pourcc que quand les Roys de France veulent toucher les malades des efcroüellcs,ils fe confef-fcnt,amp; luy n’y failloit iamais vne fois la fcpmainc : fi les autres ne le font, ils font très-mal,car toufiours y a largement malades.Corne il fe trouua vn peu amendé, il commença à fenquerir qui eftoient ceux, qui l’atioient tenu par force qu’il n’eftoit allé a la feneftre. Il luy fut diâ:, amp;nbsp;incontinent les chafîa tous de fà maifon. A aucuns ofta leurs offices, amp;nbsp;onques puis ne les veit.Àux nbsp;nbsp;nbsp;•

autres, comme monfeigneur de Segre, amp;nbsp;Gilbert de * Graffiiy, feigneur de ‘^iltnnome'vti Champeroux,n’ofta rien, mais les enuoya.Beaucoup furent efbahis de celle CfalrlTjli fantafic,blafmans ce cas,difans qu’ils l’auoicnt fait pour le mieux -. difoiét Vray,mais les imaginations des Princes font diuerfes,amp; ne le peuuét pas en-tendre tous ceux qui fe meflent d’en parler. Il n’efloic adonques rien dont mafiutine , il eufl fi grand’ crainte,que de perdre Ion authoriié, qu’il auoit bien grande, amp;nbsp;qu’on luy defobeill en quelque chofe que ce full. D’autrepartil fçauoit que le Roy Charles,fon pcrc,quand il print la maladie, dont il mourut, entra en imagination qu’on le vouloir empoifonner,à la requefte de fon filz fy mit fi auant qu’il ne vouloir plus manger.-parquoyfutaduifé par le côfcil des médecins,amp; defes plusgrâds amp;fpcciaLixferuiteurs,qu’on le feroit manger par force:amp; ainfi fut fait,par grande deliberation amp;nbsp;ordre des perfonnes quileferuoiêt;amp;luy fut mis des couliz en labouche,amp; peu apres cefte force lediôl Roy Charles mourut. Lcdiél Roy Louis,qui de tout temps auoit beaucoup blafmé cefte façon,print tat à cœur que merucilles ce qu’ainfi on l’a-uoit tenu par force,amp; en faifoit plus dt femblant qu’il ne luy ten oft au cœur: carie principaPfaiâ: de cefte matière, qui le mouuoit,eftoit de paour qu’on * fond ne le voulfift maiftrier en toutes autres chofes,comme en expedition de fes affaires ô; matières, foubs couleur de dire que fon fens ne fuft pas bon ne fuffifant.

Qu^and il eut faiél ceft efpouuentement à ceux dont i’ay parlé /il fenquift del’expcditiondu confeil, amp;nbsp;desdepefehes qu’on auoit faiôles en dix ou douze iours qu’il auoit efté malade,dont auoiét la charge l’Euefque d’Alby, fonfrerele Gouucrneur deBourgongne,le Marefchal de Gié, Sc lefeigneur du Lude: car ceux là fc trouuercnt a l’heure que fon mal luy printjôe eftoient tous logez foubs fia chambre, en deux petites chambrettes qu’il y auoit : amp;: voulut veoir les lettres amp;: chofes qui eftoient arriuees, amp;nbsp;quiarriuoict chaf-cuneheurc. Lonluy monftroitles principales, amp;nbsp;ielos luy lifoye; ilfaifoit femblant de les entendre, amp;nbsp;les prenoit en ûi main, Sgt;c laifoit femblant de les lire, combien qu’il n’euft aucune congnoiffancê; difoit quelque mot, ou . faifoit figne des relponces qu’il vouloir qui fuflent faiôles.Nous faifionspeu ‘ d’expeditions, en attendant la fin de cefte maladie ; car il eftoit maiftre aucc lequel il faloit charier droiôl. Cefte maladie luy dura bien enuiron quinze

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jours;amp; fc reuint quât au fens amp;nbsp;a la parole,en fon premier cftat ; mais il dc-mouratres-foible,amp; en grande fufpicion de retouincr en ceft inconuenient; car naturellement il eftoit enclin à ne vouloir bien fouucnt croire le conleil des Médecins. Tantoft apres qu’il fe trouua bien à fon aife, il deliura le Cardinal Balue, qu’il auoit tenu quatorze ans prifonnier,amp; maintesfois enauoit efté requis du S. liege Apoftolique amp;nbsp;d’ailleurs; amp;nbsp;a la lin fenfeitablouldrc d’vn Bref, enuoyé par noftrc faind pere le Pape à fa requefte. Quand ce mal , luy print, ceux qui pour lors eftoientauec luy ,1e tindrent pour mort:amp;: ordonnèrent plufieurs mandemês,pour rompre vue tref- cxccftiue taille amp;nbsp;cruelle, que nouuellement il auoit mifefus-, par leconfeil de monfeigneur des mille Hommes de • pied, toufiours prcfts,amp; deux mil cinq cens pionniers:amp; f’appelloiët ces gës icy les Gens du Camp : amp;nbsp;ordonna auec eux quinze cens Hommes-d’armes de fon Ordonnance,pour defeendre a pied quand il feroit befoing, amp;nbsp;fi feit faire grand nombre de chariots, pour les clorre,amp;r des tentes amp;: paLiillons:amp; nUk'”quot; prenoit cecy fur l’Oft du Duc de Bourgongne, ôc couftoit ce camp * quinze t.inm^i.-viiii. mille Francs l’an. Quand il fut preft, il l’alla veoir mettre auprès du Pont de l’Arche en Normandie,en vne vallée qui y cft,amp; y eftoiét les fix mille SuifTes dont i’ay parlé;amp;: ce nombre iamais que cefte fois ne le veit : amp;nbsp;fen retourna àTours,auquellieu luy reprint fa maladie, amp;nbsp;de rechef perdit la parolc:amp;fut quelques deux heures qu'on cuidoit qu’il fuft mort : amp;nbsp;eftoit en vne galerie couché fur vne paillafïc,ôc plufieurs auec luy. Monfeigneur du Bouchage amp;nbsp;moy le voüafmcs à monfeigneur Sainôt Claude,ô; tous les autres qui eftoiet prefens,le vouèrent aufti. Incontinentia parole luy reuint, nbsp;nbsp;fur l’heure alla

parlamaifon tresfoible.-ôe fut cefte fécondé maladie,l’an mil quatre ces qua-1481 tre vingts amp;nbsp;vn:amp; alloit par païs comme deuant,5è alla chez moy à Argêton

(là où il fut vn moys fort malade)amp; de là àTours,où femblablementfut ma-lade:amp; là tntreprint le voyage de Sainél Claude, où il auoit efte voué, corne vous auez ouy. Il m’auoit enuoyé en Sauoye,comme il partit de Tours,contre les feigneurs de la Chambre,de Miolant, amp;nbsp;de Brcfte, combien qu’il leur DaX^hinè CH fccret,pourcc qu’ils auoient prins le feigneur dc*Lins du Daulphi-iKimp\.vit,i. né,lequelilauoitmisau gouuernementdu Duc Philebcrtfon nepucu.Sien-uoya apres moy grand’ force de gens-d’armes,quc ie menoye à Mafeon contre mofeigneur de Brefle.-toutesfois luy ôe moy nous accordafmcs en fecret, print lediéf feigneur de la Chambre * couché auec lediél Duc à Thtirin en «uché. Piedmont où il eftoit, amp;nbsp;me le fcitfçauoir.-amp; incontinent ie fey retirer les Uufionaucc Gcns-d’armcs'.car il amena le Duc de Sauoye à Grenoble,ou monfeigneur le

Jlferi Ji lu Duchtte

MarefchaldeBourgogne,Marquis deRoihelin,amp;c moyjallafmes receuoir. Le Roy mc manda venir vers luy à Beaujeu enBeaujoIois : Slt;, fuefbahy delc veoir tat maigre amp;nbsp;d^ftaiól.-amp; m’cfbahifoye cornent il pouuoit aller par païs, mais fon grand cœur le portoit. Audiól lieu de Beau jeu il recent lettres com-fne la DuchelTe d’Auftriche eftoit morte d’vne cheute de cheuabcar elle che-uauchoit vn HoBirtardantjil la feit chcoir,amp;tomba fur vne grand’ piece de bois. Aucuns'3ilent que ce ne fut point de la cheute,mais d’vne ficure.Qupy qu’il en foit,clle mourut peu de iours apres ladite chcute:amp;: fut vn tref grâd dommage

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DE PHILIPPE DE COMMINES. 217 dommage pour fes fubieéls amp;nbsp;amis, amp;nbsp;oncques-puis n’eurent bien ne paix; car ce peuple de Gand,amp; autres villes,i’auoicnt en plus grand’reuerence que le mary ,àcaufe qu’elle eftoit Dame du païs; amp;nbsp;aduintee cas l’an mil quatre 14 8 cens quatre vingts amp;nbsp;deux.Lediôl Seigneur me compta ces nouuelles, amp;nbsp;en tref-grande ioye : aufli que les deux enfans eftoient demeurez en la garde des Gantois ; lefquels il congnoiHoit enclins à noife amp;nbsp;diuifion contre ceEc maifondcBourgongne; amp;luy fembloit auoir toute l’heure, pource que le Duc d’Auftriebe eftoit ieune,amp; pource qu’il auoit encores perc,amp;rguerre par tout,amp; elloit eftranger, amp;nbsp;mal accompaigné : car l’Empereur fon pere eftoit trop extrêmement chiche,parquoy auoit moins de faneur à la vérité.

Dés l’heure commença le Roy à pratiquer les Gouucrneurs de Gand, par monfeigneur des Cordes,amp;traiôler le mariage de mofeigneur le Daulphin, * ôede la filledudid Duc,depuis noftrcRoyne, appelléeMarguerire;amp;fa-drefioit-ondutoutàvnpenfionnairedeladiéfeville appelle Guillaume Ri-ue,fage homme,amp; malicieux ; amp;nbsp;à vn autre appelle * Coupe Noie,Clerc des Efchcuins,qui eftoit chauiretier,ayant grand credit auec le peuple : Car gens Emw/’-vkA de telle taille l’y ont,quand ils font ainfidefordonnez. Le Roy fen retourna à Tours, amp;nbsp;fenfermoit fort, amp;nbsp;tant que peu de gens le voyoient : amp;nbsp;entra enmerucillcufc fufpicion detoutle monde, amp;nbsp;auoit peur que Ion ne luy oftaft ou diminuaft fonauthorité. Il recula de luy toutes gens qu’ilauoitac-couftumcz,amp; les plus prochains qu’il eut iamais,fiins rien leur ofier ; amp;nbsp;allèrent en leurs Offices amp;nbsp;charges, ou en leurs maifons ; mais cecy ne dura guc-res:car il ne velquit point longuement.Et feit de bien effranges chofes, dont ceux qui le voyoient, letenoient à effre defnué de fens; mais ils ne le con-gnoifl'oient point. Quanta effre fufpicionneux,tous les grans Princes le font ,amp; par efpecial les fages, amp;ceux qni ont eu beaucoup d’ennemis, ôc ofFcnfé plufieurs,commeauoit fait ceffuy-cy.Et d’auantage,il fçauoit n’effre point aymé des grans pei fonnages de ce royaume, ne de beaucoup de menus: amp;nbsp;fi auoit plus chargé le peuple que iamais Roy ne feit, cóbien qu’il cuff: ' bon vouloir de le defchargcr,comme i’ay dit ailleurs; mais il deuoit comme-cer plus toff. Le Roy Charles feptiefme fut le premier, par le moyen de plu-fieurs fages amp;nbsp;bons Cheualiers qu’il auoit,qui luy auoyent aidé amp;nbsp;feruy à fa conqueffedeNormandie amp;nbsp;de Guyenne,que les Angloys tenoient, qui gai-gna amp;nbsp;commenç.îce point,qui eff d’impofition de tailles à fon plaifir,fans le confentement des Effats de fon royaume.-amp;pour lors auoit grandes matières, tant pour garnir les pais conquis,que pour départir les gens des compai-gnies qui pilloient le royaume: amp;à cecy fe confentirent les Seigneurs de France, pour certaines penfions quileur furent promifes, pour les deniers qu’on leueroit en leurs terres. Si ce Roy euff toufiours vefeu, amp;nbsp;ceux qui lors effoy ent auec luy en fon confeil,il l’cuff fort auancé^ celle heure: mais à ce qui eff aduenu depuis amp;nbsp;aduicndra,il chargea fort fon ame amp;nbsp;celles de fes fuccefleurs.'amp;mit vne cruelle playe fur fon royaume, qui longuement fei-gnera,amp; vne terrible bande de Gens d’armes de foulde,qu’il inffitua à la gui-fe des feigneurs d’Italie.Lediôl RoyCharles feptiefmeleuoit à l’heure de fon trefpasjdixhuiâ: cens mille FrancSjCn toutes chbfcSjfur fon royaume te-

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2.18 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;VI. LIVRE DES MEMOIRES

noit enuiron dix-fept cens hommes d’Ordonnance pour tous Gens-d’armes: amp;nbsp;ceux la en bonneiuftice,à la garde des prouincesde fon royaume; qudic long temps auant (à mort ne cheuaucherent parle royaume, qui eftoit grand repos au peuple:amp; â l’heure du trefpas du Roy noftre maiftre, il leuoit quarante fept cens mille Francs, d’FIommes-d’armes quelques quatre ou cinq mille, Gens de pied tant pour le camp, que des Mortes-payes, plus de vingt cinq mille. Ainfi ne fe faut cfbahirf’il aiioit pluheurs penfées amp;nbsp;imaginations, amp;nbsp;f?1 penfoit de n’eflre point bien voli1u:amp; fil auoit grand’ peur en celle choie,aufliauoit il eiperance en plufieurs de ceux qu’il auoit nourris, ôc quiauoientreceusbiendeluy. Deceux laeufl il trouuévn grand nombre, qui pour la mort ne luyeulfent fait faute. En premier lieu il n’entroit gueres • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;de gens dedans le Pleflis du parc (qui eftoitlelieu où life tenoit) exceptez

gens domeftiques, Sgt;c les Archiers, dont auoit quatre cens, qui en bon nombre faifoient tous les iours le guet, amp;fe pourmenoient parla place, amp;gar-doient laporte.Nul feigncur,ne grand perfonnage,ne logeoit dedans,ne ny entroit gueres compaignie de grans feigneurs. Nul n’y venoit quemonfei-gneur deBcaujeu depuis Duc de Bourbon,qui eftoit fon gendre. Toutal’é-uiron de la place dudiôl Pielïis,il feit faire vn treillis de gros barreaux de fer, amp;nbsp;planter dedans la muraille des broches de fer,ayans plufieurs poin6les,cô-me â l’entrccpar où l’oncuft peu entrer au folfezdudiâ: Pleflis. Aufli feit fai-Pyiiil/in rc quatre moyneaux defer bien elpez,amp;lieu par où l’on pouuoitbien tirera fonaife:amp; eftoit chofe bien triomphante, amp;nbsp;coufta plus de vingt mille fracs: amp;nbsp;a la fin mit quarante Arbaleftricrs, qui iouramp; nuiôheftoientences foflez, amp;:auoientcommiffion de tirer à tout homme qui en approcheroit denuiâ: iufques à ce que la porte fuft ouucrte le matin.Il luy fembloitd’auantage que fes fubieds eftoient vn peu chatouilleux à entreprendreauthorité, quand ils verroyent le temps. A la vérité il fut quelques parolles entre aucuns d’entrer cncePlcÂis, amp;nbsp;depefeher les chofes, felon leur aduis, pource que rien nefe depefehoit.-mais ils ne l’oferent entreprendre, dont ils feirent figement, car il y auoit bien pourucu.ll'changeoit louuenc de Valet dechambre amp;nbsp;de toutes autres gens,difiint que la nature s’efiouit en chofes nouuelles. Pour compagnie tenoit leans vn homme ou deux, auprès de luy,gens de petite condition, amp;nbsp;aflezmal renommez, amp;nbsp;a qui il pouuoitbien fembler,fils eftoietfa-gcs,qu’incontincnt qu’il feroit mort,ils feroient defipointez de toutes choies, poLirlemicux qui leur en fçauroit venir,amp;ainlienaduint. Ceux là ne luy rapportoientrien de quelque chofe qu’on luy elcriuift ne mandaft, de quelques affaires que ce fuft, fil ne touchoit àla preferuation de l’eftat amp;nbsp;defence du royaume : carde toute autre chofe il ne luy chaloit que d’eftre en trefue, ou eh paix ,auec chafeun. A fon Médecin donnoit tous les moys dix mille Efcus:qui en^inq moys en receut cinquante quatre mille.De terres dona grande quantité aux Eglifes; mais ce don de terres n’a point tenu, aufli ils enauoienttrop.

Comment

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DE PHILIPPE DE COMMINES. îis

(omment nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;venir àTours vn nomméleS. homme de Calahreyl^enjanr

qu'il ledeußguerir:amp;* des choses eftranges que fai fait ledi^ ßoy^pour garderfon authorité durant fa maladie. nbsp;nbsp;nbsp;C H AT. Till.

Ntre les homes renommez de deuotiô,il enuoya quérir vn home de Calabre,appellé frère Robert * le Roy:on l’appel-loit le Sainél homme, pour fa fainéle vie-.en l’honneur du quel le Roy feit faire vn monaftereau Plelfis du parc, en

B quel letvoy reit raire vn monaitereau rieins au parc, en recompenfe de la Chapelle pres du Plellis,au bout du pont. R°y Lediél Hermite en l’aage de douze ans, f elloit mis foubs

1 \ / amp;

Vn rochj où il eftoit demeuré iufques en l’aage de quarante amp;nbsp;trois ans, ou enuiron , iufques à l’heure que le Royl’enuoya quérir par vnfienMai-ftre d’hoftel, en la compaigniedu Prince de Tarente, filz du Roy de Na-ples:car il ne vouloir partir fans congé du Pape,ne de fonRoy,qui cfloit fens à celle fimple perfonne : lequel auoit faitdeuxEglifesaulieuoùildemcu-roit. lamais n’auoit mangé,ny n’a encores,depuis qu’il fe mit en celle ellroi-te vie,ne chair ne poiflOn,n’œuf,ne laidage,nc nulle grailTciamp;ne pefeiamais auoir veu home viuat de fi fainéle vie,ne où il fernblaft mieux que leS. Efprit parlall par fa bouche; car il n’elloit Clerc ne lettré, ôcn’apprint iamaisricn; vray ell que fa langue Italienne luy aidoit bien à fe faire efmcrueiller. Lediét

Hermite paifa par Naples,honoré amp;: vihtc,autât qu’vn gi âd Legat Apollo-licque,tant du Roy que de fes enfans, amp;nbsp;parloir aucc eux, comme vn home nourry en Courr.De là palEi par Rome,amp; fu t vifité de tous les Cardinaux,amp; eut audience aucc le Pape, par trois fois, leulà feul:amp; fut afiis auprès de luy, • en belle chaire, l’efpace de trois ou quatre heures, à chafeunefois ( qui elloit grand honneur à vn fi pctithomejrefpondant li figement, que chafeun fen clbahiiroit;amp; luy accorda noftre lainét Pere, faire vn ordre,appellé les Hermites $.François.De là vint deuers le Roy,honnoré corne fil eull eflé le Pa-pc,fe mettant à genoux deuant luy,afin qu’il luy pieu ft faire allô g fit vie. 11 refpondit ce que fige homme deuoit rclpondre.Ie l’ay maintesfois ouy parler deuant le Roy Charles viij. où eftoient tous les grans du royaume, amp;nbsp;encores puis deux moys ; mais il fembloit qu’il full infpiré de Dieu es chofes qu’il difoit amp;nbsp;remonllroit ; car autrement n’eufl fçeu parler des chofes dont il parloit.il vefeut encores log téps apres,parquoy fe pourroit bié châger ou en mieux ou en pis:amp; pource m’en tay. Aucuns fe moquoient de la venue de cell Hermite,qu’ils appelloiet S.home.-inais ils n’elloiêc point informez des péfées de ce fage Roy,n’y n’auoiêt veu les chofes qui luy donoiet l’occafion.

Nollre Roy eftoit en ce Plenis,auec peu de gens,fauf Archiers, amp;nbsp;en ces fufpicions dont i’ay parlé:mais il y auoit pourueu,car il ne lailîoit nuis hommes ny en la ville ny aux champs, dont il cull fufpiçion, mais par Archiers les en faifoit aller amp;nbsp;conduire. De nulle matière onr^luy parloir,quedes grandes qui luy touchoient. Il fembloit mieux à le veoir,homme mort que vif,tat elloit maigre, ne iatnais homme ne l’eu fl creu.11 fe vcfloit richement, amp;: plus que iamais n’auoit accouflumé parauant:amp; ne portoit querobbes de fatin cramoyfi,fourrées de bones Martres: amp;nbsp;en donoit à ceux qu’il vouloit fans dcmander:car nul ne luy eull ofé demander, ne parler de rien. Il faifoit

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Xio nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Vî. L I V R E D E S M E M O I R E S

d’afpres punitions,pour eftre craint,amp; de peur de perdre obcïlîanceicar ain-offkcT'’”*' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;mefme. Il*renuoyoit officiers,amp; cafloit Gens d’aimes,ron-

Extmf.-vMi, gnoitpenfiôs,amp; oftoitdetous poinôls:amp;'medill,peu de iours auât fa mort, qu’il paffoit temps a faire amp;nbsp;deffaire gens:amp; faifoit plus parler de luy parmy le royaume,que ne feitiamais Roy: amp;nbsp;lefaifoit de peur qu’on ne le tint pour mort:car,c6mei’ay dit,peu le voyoiêt.mais quadon oyoit parler des œuurcs qu’il fitifoit,chafcun auoit doubte,amp; ne pouuoit Ion à peine croire qu’il fuft malade.Hors le royaumamp;auoit gens de tous coftez ’ en Angleterre pour en- * tretenir ce mariage,amp; les pay oit bien de ce qu’il leur deuoir, tant le Roy E-* doLiard, que les particuliers. En Efpaigne auoit toutes parolles d’amitié amp;nbsp;d’entretcnemcnt:amp;prefens par tout de tous coficz. Il faifoit acheter vn bon • nbsp;nbsp;chenal,quoy qu’il couffaff,ou vne bonemule:mais c’efloit en pais ouil vou

loir qu’on le cuidaff fiimcar ce n’eftoit point en ce royaume. Des chiens, en cnuoyoit quérir par tout.-en Efpaigne, des Allans ; de petites Leurettes, en Bretaigne:Leuriers, Efpaigneux, amp;nbsp;lesachetoit cher, en Valence, de petits Chiens velus,qu’il faifoit acheter plus cher que les gens ne les vouloient ve-dre. En Sicile enuoyoit quérir quelque mule,amp; fpccialement à quelque Officier du païs.-amp; la pay oit au double. A Naples,des cheuau.x,amp; befies effranges de tous coffez:comme en Barbarie,vne efpece de peris Lyós,quine font Aduz poiïit pfis grans que petits Regnars,amp;: les appelloit * Adits. Au païs dcDan-Exemfivitii. nemarche amp;: de Suedre enuoya quérir deux fortes de befies; les vnes fappel-

loicnt Helles,amp; font de corfagede Cerfs,grandes comme Buffles, les cornes courtes amp;nbsp;groffes.Les autres f’appellét Rengiers,qui font de corfage ôe cou-IcurdeDaimSjfàufqu’ellesontles cornes beaucoup plus grandes : *car i’ay veuRengierporter corps pourauoir fix cornes. Dechafeune de ces befies chafeune, donaaux marchas quatre mille cinq cés Florins d’Allemaigne. Quad toutes ces chofes luy efloient amenées,il n’en tcncit copte: amp;nbsp;la plus part des fois, ne parloit^oint à ceux qui les amenoienr. En effeét, il faifoit tant de chofes femblables,qu’il efloit plus craint,rat de fes voifîns quedefes fubieéls, qu’il n’auoit iamais eflé:car aufli c’cfloit fa fin, amp;nbsp;le faifoit pour celle caufe.

Comment le mariage de monfeignenrle Daulphin fut conclu auec 'Marguerite de Flandres,elle amenee en France'.dont le l^oy Edouard dii^n-gle terre mourut de defflaifir. nbsp;nbsp;nbsp;C H AT. IX.

Our retourner au principal de noflre propos, ôc à la principale conclufid de tous ces memoires,amp; de tous ces affaires des perfonnages qui viuoiét du temps qu’ils ont cflé faiéls, faut venir à la conclufion du traidé du mariage, faiél entre le,Roy Charles viij. ( Sgt;i auparauant Daulphin) amp;nbsp;delà filledU Duc amp;nbsp;Ducheffed’Auflriche, par la main des Gan

tois,au grand defplaifir du Roy Edouard d’Angleterre : qui lors fc tint pour deceudcl’efperancedu mariage de fa fille auec raonfeigneurle Daulphin, depuis Roy de Frâce:Iequel mariage luy amp;nbsp;la Royne fa femme auoient plus defiré que toutes les chofes du monde;amp; iamais n’auoient voulu croire home qui les cufl aduertis au contraire,fuflênt leurs fubieôls ou autre:car le co-

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JJr, r H 1 L 1 E F t UL L U M M 1 W tx nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;21I

feil d’Angleterre luy auoic fait plufieiirs rcmoftrances, à i’hcurc que Ie Roy cóqueroit la Picardie,qui eftoit pres de Calais:amp;: luy difoit que quand il au-roit conquis cela,qu’ilpourroit bien efîayer de conquérir Calais amp;nbsp;Guyncs. Autât luy en difoientles Ambafradeurs,quicôtinuellemcntefloiêtcn Angleterre de par les Duc amp;nbsp;Ducheflc d’Auftriche,amp; les Bretós amp;nbsp;autrcs:amp; de tout ce il n’en croyoit rie,dot luy en print biémabmais ie croy bien qu’il ne luyprocedoit point tat d’ignorance côme il faifoit d’auarice,amp; pour ne perdre point cinquante mille Efcus que le Roy luydonnoit, ny aulTi nelailfer fcsaifesneiesplaifirSjOÙilefloitfortaddonnc.Surlefaiôlde ce mariase fe^„ tint vne iournée aHallots en Flandres, nbsp;nbsp;y eftoit le Duc d’Auflriche de- rlt;»gt;e,er itjftti

* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;11 flc

puis Roy des Romains,amp; gens députez par les trois eftats de Flandres, Bra-bant,Vautres terres appartenantes audicl Duc,amp;:àfes enfans.LafeirentIcs • Gantois plufieurs chofes,cotre le vouloir dudiél Duc:côme de bannir gens, d’en öfter au eu es d’auprès de fon filz:amp; puis luy dirêt le vouloir qu’ils auoiét que ce mariage, donti’ay parlé, fc feiflpourauoir paix luy feirentac-corder,voulfifl il ou non.Il eftoit fort ieune,mal pourueu de grans gens: car le tour,en cefte maifon de Bourgogne eftoit mort (comme i’ay dit)* à Tour-nay,ou peu fenfailloit.I’enten des grans pcrfonnages,qui Teuften t fccu con- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;-vM

feiller ny aider.De fon coftéil eftoit venu fort mal accôpaignc:amp; puis, pour auoir perdu fa femme,qui eftoit Princefle du pais defluldiÂ, il n’ofoit parler fi audacieufement qu’il auoit fait autresfois. Et pour abréger ce propos, le Roy en fut aduerti par le Seigneur des Cordes, amp;nbsp;enfuc trefijoyeux ; amp;nbsp;fut prins 1 e iour de luy amener la fille a Hefdin.

Peu de ioLirs auât,amp; Tan mil quatre cens quatre vingts amp;nbsp;vn,auoit efte bail- * lée Airc,audict Seigneur des Cordes,par le Seigneur de*Croy,du païs d’Ar-tois,pour vne fomme d’argent; lequel larenoitpour le Duc d’Auftriebe, amp;nbsp;pour le Seigneur de*Bcures,fon capitaine,ville tresforcc,aftifc en Artois,qui ♦ BeTrdiz. aida bien aux Flamans à auancer Tœuurc;car elle eft à l’entrée de Itur païs.Et combien qu’ils voulfiffent la diminution de leur Prince, fi n’euftent iis point voulu à leurs frotieresleRoy fi tref pres d’eux. Apres que ces ebofes furent duquiiiiMpor. accordécs(comme i’ay dit)vindrcnt deuers le Roy les A mbaflàdeurs de Fia- ßre dedal dres amp;nbsp;Brabant:mais tout dependoit de ceux de Gand,à caufe de leur force, amp;nbsp;qu’ils auoient les enfans en leurs mains, amp;nbsp;aufli les premiers prefts à com-mccerla noife.Aufti y vindrêt aucuns Cheualiers,pour le Roy des Romains; ieunes comme luyjôc mal confeillez, pour la pacification de leur pais; Mef-firelehande*Bruges en eftoit Tvn, amp;nbsp;meftire Baudouin de* Lauoye Tau-* Bercrues. tre,amp; quelques Secretaires.Le Roy eftoit ja fort bas, amp;nbsp;à grâd’peine fe vou-loitlaiflcrveoir : amp;nbsp;feit (rrandc difficulté deiurer les traidczfaids en ce-»“g«« n nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;n • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r-’Il- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Launoy.

fte matierezmais c eftoir pour n’cftre point veu, toutesrois il les lura. Ils luy Exemp.vieil, cftoient auatageuxicar il auoit plufieurs fois voulu le i^ariage,amp; ne vouloir uona^*”’ que la Comté d’Artois,ou celle de Bourgongne, Tvne des deux : mcflci-gneurs de Gadfainfi les appelloit iDles luy feirét bailler toutes deux,ôccelles deMafcônois,deCharoIois,amp; d’Auxerrois:amp; fils luy euftent peu faire bailler celle de Henault ôc de Namur, amp;nbsp;tousles fubieólsde cefte maifon, qui font de la lâgue Françoifeftls Teuflent volontiers fait,pour aftbiblir leurdiéh .

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* ixi nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ÎVI. LIVRE DES MEMOIRES

Seigncur.LeRoy noftrcmaiftre,quicfloitbien fage,cntendoitbien c'iicc’c-ftoic c]uc de Flandres, amp;nbsp;qu’vn Comte dudiôl pais de Flandres tpoit peu de caSjfans auoirlediól pais d’Artois,lt;]ni eft aïTis entre le Rcy de France amp;nbsp;eux, leur eftant comme vncbride.-car dudiôl pais d’Artois fetiroit de bonnes ges de guerre pour les cbaftier quand ils feroient les fols;amp; pcurcejcn oflant au-diôE Comte de Flandres,Icdid pais d’Artois, il lelailToitlcplus pauure Seigneur du monde,amp; fans auoir obeiflance, bnonau plaifirdeceuxdeGand, dont i’ay parlé cy defl'us. Apres que celle Ambafladc fut retournée, ladide fille fut amenéeà Hefdin,entre les mains demonfeigneurdes Cordes:amp; fut 14^3’ l’an mil quatre censquatre vingts amp;nbsp;trois: amp;nbsp;l’amena madame de Rauallain, fille Baflarde du feu Duc Philippe de Bourgongne ; amp;nbsp;l’a rcceut monfei-

• nbsp;nbsp;gncLir amp;nbsp;madame de Bourbon,le Seigneur d’Albret, amp;nbsp;autres pour le Roy:

amp; l’amenerentà Amboife, oùeftoit monfeigneur le Daulphin. Si le Duc d’Auflriche l’eufi peu öfter ceux qui la menoicnt,il l’euft volontiers fait, a-uant qu elle fortift de fa terre : mais ceux de Gand l’auoient bien accompai-gnée;amp; auffi il auoit commencé a perdre toute obeiflance, amp;nbsp;fe retournerét bcaucop de gens auec ceux de Gand,pourcc qu’ils tenoient lefiizentre leurs mains,amp; oftoient amp;nbsp;mettoientauecluy tel qu’il leur plaifoit;amp; entre les autres,fe tenoit le feigneur de Rauaftain,frcre au Duc de Cleues,principal gou uerneur dudiôl cnfiint,appellé le Duc Philippe,attendant grand’ fucccflion, fi Dieu luy preftevie. (^iconques eut ioyc dece mariage, il defplaifoitau gt;nbsp;Roy d’Angleterre amerement:car il le tint à grand’honte amp;nbsp;moquerie; amp;fe doubtoit bien auoir perdu fa penfiô,quc le Roy luy dônoit,ou tribut qu’ap-pelloient les Anglois:amp; fi fe doubra que le mefpris ne luy en fuft grâd en Angleterre, amp;nbsp;qu’ilfuft caufede rebellion cotre luy,amp; parcfpecial pource qu’il n’auoit voulu croire confeil, amp;nbsp;fi voy oit le Roy en grande force, amp;nbsp;pres de luy ; amp;: en print le dueil fi grand que des qu’il feeuft les nouuelles, il tomba malade,d#nt toft apres il mourut, aucuns dient d’vn caterre. Quoy qu’il en foit,on dit que la douleur qu’il auoit audiélmariage, fut caufe de la maladie jîo7*^Clt;»-**^ont il mourut en briefs iours: amp;nbsp;fut le trefpasl’an rail quatre censquatre x/rtftT«. nbsp;nbsp;nbsp;vingts amp;C trois,au moys d’Auril. C’eft grand’ faute à vn Prince d’eftimer plus

fon opinion, quedepluficurs : amp;nbsp;cela leur donne aucunesfois de grandes douleurs amp;nbsp;pertcs,qui ne fepeuuent recouurcr.

Tantoft apres que le Roy Edouard fut mort,le Roy noftrc maiftrc,cn fut aduerti.'ôc n’en feit nulle ioye ne femblant,quand il lefceut ;amp; peu de iours apres receut lettres duDuede Cloceftre,qui f’eftoit fait Roy d’Angleterre,ôc fefignoit Richard.-Icquel auoit fait mourir les deux fils duRoy Edouard fon frere; lequel Roy Richard requeroit l’amitié du Roy, amp;nbsp;croy qu’il euftbien voulu r’auoir cefte penfiô:raais IcRoy ne voulut refpodrc à fes lettres,n’ouir lcmefla,ge,amp;rcftima trcf-cruel amp;nbsp;mauuais ; car apres le trefpas du Roy E-douard,ledilt;ft Duc 9c Cloceftrc auoit fait hommage â fon nepueu, comme àfon Roy amp;foiiLierainSeigneur,amp;incontinent apres commit ce cas: amp;cn plain parlement d’Angleterre,feit degrader deux filles du Roy Edouard, amp;nbsp;declarer baftardes, foubs couleur de quelque cas qu’il prouuaparvn Euef-que de Bas en Angleterre, qui autresfois auoit eu grand credit auecle Roy Edouard,

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 2x3 Edouard,amp; puis le dcfappointa,amp; tint en prifon,amp; le raçonna d’vnc fomme d’argentdequel Euefque difoit que lediéE Edouard auoit promis foy de mariage à vne Dame d’Angleterre,qu’il nommoit,pourcc qu’il en eftoit amoureux, pour en auoirfonplaifir : amp;nbsp;en auoit fait la promcfTe entre lesmains dudiôî Euefque, amp;nbsp;fur celle promelfe coucha auec elle, amp;nele faifoitquc pour la tromper:toutcsfois tels jeux font bien dangereux , tcfmoings telles enfeignes.I’ay veu beaucoup de gens de court,qui n’eulTcnt pointperdu vne bonne aduenture, qui leur eull pieu'en tel cas, par faute de promettre. Ce mauuais Euefque garda celle vengeance en fon cœur,par-auâturc vingt ans; mais il luy en mefcheut,car il auoit vn filz qu’il aimoit fort,à qui le Roy Richard vouloir Elire de grads biens,amp; luy faire efpoufer l’vne de ces deux filles,dégradées de leur d ignité(l aq ij cl le depuis fut Royne d’Angleterre,amp; eut * * deux beaux enfansJlequel filz cllant en vn nauire de guerre, par le côman- * A'* demét du Roy Richard fon maillre,fut prins en celle colle de Normâdie'.Ôc par le debat de ceux qui le prindrent,fut amené en Parlement,amp; mis au petit ChallelletàParis:amp; y fut tant qu’il y mourut de Eiim amp;nbsp;de pauurcté. Lediéh Roy Richard ne le porta pas loing;car contre luy ellcua Dieu vn ennemy(ôc tout en l’inllanOqui n’auoit ne croix ne pi 11 e^,ne nul droiél,comme ie croy, à La couronne d’Angletcrre,ne cllimé rien,fors que de fa perfonne elloit hon-nelle,amp; auoit beaucoup foulFert:car la plufpari de fa vie auoit elle prifonier, amp;nbsp;mefinement en Brctaignc,és mains du Duc François,qui l’auoit bien trai-élé pour prifonier,del’aage de*vingt Sc huiélans;lequel auccquelq peu d’ar * Jixhuîôi. gêt du Roy,amp; quelques trois mille homes, prins en la Duché de Normâdie, amp;nbsp;des plus mefchâs que Ion peufl trouuetjpalfa en Galles, où fe vint ioindre fon beau perc le Seigneur de Stanley, aucebien vingt amp;nbsp;fix mille Anglois. Au bout de trois ou quatre iours,fe rencôtra aiiec ce cruel Roy Richard, lequel fut tué fur le charnp,amp; cellui-cy fut couronné Roy. Aillieurs ay parlé de celle matière: mais il feruoit encores d’en parler icy, amp;nbsp;par el^ecial pour monllrer comme Dieu apayé tout content en nollre temps telles cruautez fins attendre.Maintes autres en a punies audiét temps, qui les Içauroit toutes compter.

Comment le T{oy [e maintenoit^tant enuers fes voißns quenuers fesßtbieCisdti-rantßa maladie‘.amp;* comment on luy enuoyoit de diuers lieux diuerßs cho-ßes ^our ßaguerißon. nbsp;nbsp;nbsp;C H AP. X.

E mariage doneques de Flandres fut accomply,que leRoy auoit fort defiré:amp;tenoit les Flamans à fa poIle.Bretaigne, à qui il portoit grand’haine,efloit en paixauec luy; mais il les t enoit en grande crainte, pour le ^and nombre de gens-d’armes qu’il tenoit logez à leurs frotieres. Efpaigne elloit en repos auec luy, amp;nbsp;ne defiroiet le Roy ne la Royne d’Ef-paigne,finon qu’amitié;amp; il les tenoit en double amp;nbsp;defpcnle,à caulè du païs deRouflillô,qu’il tenoit de la maifon d’Arragô,qui luy auoit efté baillée par le Roy lean d’Arragon,pere du Roy dcCaIlille,en gages ôc par aucunes con- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;'

T iiij

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114 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;VI. LIVRE U t 5 MLMUlRLd

ditions qui encores ne font vuidées. Touchant la puiflance d’Italie, ils le vouloient bien auoir pour atniamp;, auoient quelque confederation aucc luy, amp;fouuenty enuoyoit leurs Ambaffades. En Allcmaigne auoit les Suiffes luy obeilfans,comme fes fubicéls: les Roys d’EfcofTcôè de Portugal eftoiêt

■ fes alliez, partie de Nauarre faifoit ce qu’il vouloir, fes fubicôls trembloient deuant luy, amp;nbsp;ce qu’il commandoit eftoit incontinent accomply, fans nulle difficulté n’exeufation. Touchant les chofes que Ion penfoit neceffiaires pour fl (ante de tous les collez du monde luy eftoient enuoyées. Le Pape Sixte dernier mort, cftant informé que par deuotion, le Roy defiroit auoir le Corporal, fur quoy chantoit monfeigneur Sainél Pierre, tantoft luy en-uoya auccautres pluf eurs reliques,lefqucllcs luy furent renuoyées.Lafain-• ôle Ampollc, qui eft à Reims,qui iamais n’auoit efté remuée de fon lieu, luy

fut apportée iufques en fa chambre au Pleffis.’ôc cfloit fur fon buffet,à l’heure de la mort: amp;nbsp;auoit intention d’en prendre fcmblable vnélion, qu’il en a-uoit prins en fon facre : combien que beaucoup de gens cuydoient qu’il fen voulfift oindre toutlecorps:ccquin’eff pas vray femblable,carladidefiin-élc Ampollc effort petite , amp;nbsp;n’y a pas grand’matière dedans. lelaveyà l’heure dont ie parlc,amp; auffi quand lediôl Seigneur fut mis en terre, a nofre dame de Clery.Le Turc ,.qui regnoit alors, luy enuoyavnc Ambaffade, qui rScquot;*’”* vintiufquesà*Reims enProuence:mais lediét Seigneur ne layoulut point ’Exemfl.vitil. ouyr,ne qu’elle vint plus auant.LediélAmbaffadcur luy apportoitvn grand

replie de reliques, lefquelles cftoicntencorcsàConftantinople, entre les mains dudiél Turc; lefquelles chofes il offroitau Roy, auec grande fom-me d’argent, pourucu que lediél Seigneur voulût bien faire garder le freredudiôlTurc, lequel eftoit en ce royaume entre les mains de ccuxdc Rhodes;amp; depuis fut à Rome, es mains du Pape. Par toutes les chofes def-fufdiéles Ion peut congnoiftre le fens amp;nbsp;grandeur de noftre Roy, amp;nbsp;comme il eftoit eftimé ôi honoré par le monde, amp;nbsp;comme les chofes qui font fpiri-tuelles de deuotion, amp;nbsp;de religion eftoient employées pour luy alongcr fa vie,auffibien que les chofes temporelles; toutesfoisle tout n’y feit rien, amp;nbsp;failloit qu’il paffaft par là où les autres font paffez. Vnc grace luy fit Dieu: car comme il l’auoit crée plus fàge,plus Iiberal,plus vertueux en toutes chofes que les Princes quiregnoient auecluy,amp;,de fon temps, amp;nbsp;qui eftoient fes ennemis amp;nbsp;voifins,auec ce qu’il les paffa en toutes chofes, auffi les paffail en longueur de vic:mais ce ne fut de guercs. Car le Duc de Bourgogne Char IcSjlaDucheffefàfillc, le Roy Edouard ,amp; le Duc Galeas de Milan, le Roy Ichan d’Arragon,tous ceux là eftoient morts,peu d’années parauant luy : amp;nbsp;de la Ducheffe d’Auftriche amp;nbsp;du Roy Edouard, amp;nbsp;de luy n’y eut comme rie à dire. En tous y auoit du bien amp;nbsp;du mal,car ils eftoient hommes : mais fans vfcrdcflateric, en Iq^ auoit trop plus de chofes appartenantes à Office de Roy,amp;: de Prince,qu’en nul des autres.Ic les ay prcfque tous vcüs,amp;: fçcu ce qu’ils fçauoientfaire,parquoy ie ne (^ine point.

Comment

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lent le J^y Loms onT^^ejme fett ‘venir'vers luy Charles jon jil-^peu auant famorf.amp;des commande mens nbsp;nbsp;ordonnances quilfeit, tantd

luy qua autres. QH AT. XI.

N ceftanmilquatrc cés quatre vingts amp;nbsp;trois,voulut leRoy veoir monfeigneurle Daulphin fonfilz lequel n’auoitveu de plufieurs années; car il craignoit qu’il full veudcguercs de gens,tant pour lafanté de I’enEintj que de peur que Tone Ictirafthorsdelà, amp;nbsp;que foubs ombre de luy, quelque af-(embléene fe feiften’fon royaume: carainfiauoitil efléfaic de luy contre le Roy Charles fcptiefmc,fon pere, à l’heure qu’il n’auoitque onzeans, paraucuns Seigneurs du royaume: amp;nbsp;f’appclla cede guerre la * lt;îo«2e, T) nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• Il , nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;n C nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;J nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r- °

1 raguerie,mais elle ne dura guercs,amp; ne fut qu vn débat de Court. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;,

Entre toutes chofes il recommanda* fon filz monfeigneurle Daulphin à

aucuns feruireurs ; amp;nbsp;luy commanda expreflemeur de ne changer aucuns -v/«/. Officiers, luy alléguant que quand le Roy Charles feptiefine, fon pere alla à Dieu ,amp; que luy il vint à la Couronne, il defapointa tous lesbons amp;nbsp;notables Cheualicrs du royaume , amp;qui auoyent aidé à feruir fon-diél pere, à conquérir Normandie amp;nbsp;Guyenne, amp;nbsp;chafle les Angloys hors du royaume, amp;à le mettre en paix Ôc bon ordre (car ainfi le trouuail, amp;nbsp;bien riche) dont il luy en clloit bien mal prins ; car il euft la guerre appellee le t Bien public ( dont l’ay parlé ailleurs) quicuida effre caufe de luy offer la Couronne. Bien rofl apres que le Roy eufl: parlé àmonfeigneur le Daulphin fon filz,amp; acheué ce mariage ( dont i’ay parlé) luy print maladie (dont il partit de ce monde) par vn Lundy, amp;nbsp;dura lufqucs au Samedy

pénultième d’Aouft, mil quatre cens quatre vingts amp;nbsp;trois; amp;nbsp;cfioyc pre-»fî^ lent à la fin de la maladie,parquoy en veu'x dire quelque chofe.Tatofl apres que le mal luy print, il perdit la parolle,cômeautresfois auoit fait:amp; quand elle luy fut reuenue, il le fentitplus foible queiamais n’auoitlt;^é, combien qu’au parauant il l’cfloit tant, qu’à grand’peine pouuoit il mettre la main iufquesà la bouche: amp;eftoit tant maigre amp;nbsp;dcnaiél, qu’il ftilûit pitié à tous ceux qui le voioyent. Lediél Seigneur le iugea mort, amp;nbsp;fur 1 heure il enuoya quérirmonfeigneur deBeaujeu,mari de fa fille. Duc de Bourbon;

amp; luy comanda aller au Roy fon filz qui efloit à Amboife ( ainh 1 appel la il) en luy recommandant ceux qui l’auoientfcrui; amp;nbsp;luy donna toute la charge amp;gouuernemcntdudiâ: Roy, amp;luy commanda qu’aucunes gens nen approchafrent,amp; luy en diffc plufieurs bonnes amp;nbsp;notables caufe£;amp; li en tout lediél Seigneur de Beaujeu, euft oblerué les commandemens, ou a tout le moins en partie (car il y eut quelque commandement extraordinaire,amp; qui n’eftoit de tenir ) amp;nbsp;qu’en généralité il les euff plus gardez, ie croy que ç euff cfté le profit du royaume amp;nbsp;le fien particulier, veües les chofes adtienués depuis. Apres enuoya leChancelier, amp;nbsp;toute fa fequflle, porter les Seaulx auRoyfonfilz. Luy enuoyaaufli partie des Archiers de fit garde, amp;nbsp;Capitaines, amp;nbsp;toute fa Vannerie amp;nbsp;Fauconnerie,amp;: toutes autres chofes. Et tous ceux qui le venoient veoir, il les enuoy oit à Amboife deuers le Roy (ainfi l’appclloit iDlcur priant le bien feruir,ôc par tous luy mandoii quelque cho*

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12.6 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;VI.LIVREDES MEMOIRES

fc:amp; par efpecial par Eftienne de Vers, lequel auoit nourry ledid Roy nou-ucaujôe ferui de premier Valet de chambre : amp;nbsp;l’auoit délia fait noflre Roy Baillifde Meaux,La parolle iamais neluy faillit, depuis qu’elleluy futreue-nuë,ne le fens,ne iamais ne l’eutfi bozear incefsâmétle vuidoit,quiluy oftoic toutes fumées de la tefte.Iamais en toute là maladiene fe plaignit,corne font toutes fortes degens,quâd ils fentent mal. Au moins luis-je de celle nature, amp;nbsp;en ay veu plulieurs autres,amp; aufli on dit que le plaindre allege la douleur.

Com^arailon des maux nbsp;nbsp;douleurs que fou-ff^rit le nbsp;nbsp;nbsp;Louis,4 ceux qu'ilauoit

faitfouf^rird plußeurs perfonnes\auec continuation de ce qu'il feit,fut faicl enuers luy,iufques à ßa mort, nbsp;nbsp;nbsp;CHAP. XII.

* Cotbicr, Exew^. 'vieil Gtta^uin, Quotcrus:

r J tuliett Cottier.

NcelTamment difoit quelque chofe de fcns,amp;: dura là maladie ( comme i’ay dit ) depuis le lundy,iufques au famedy au foir. Pourceie veux faire coparaifon des mauxamp; douleurs, qu’il a fait foulFrir àplulîeurs, à ceux qu’il afoufferts auant mourir; pource quei’ay elperance qu’ils l’auront mené en Paradis, amp;nbsp;que ce aura ellé partie defon Purgatoire: amp;nbsp;l’ils n’ont ellé fi grands, ne fi longs, comme ceux qu’il a lait fouftrir à pluficurs, aulfi auoit il autre amp;nbsp;plus grand Office en ce monde, qu’ils n’auoient ; amp;: fi iamais n’auoit fouffert de la perfonne, mais tant auoit cflé obey, qu’il fem-bloit quafi que toute 1 Europe ne full faicle que pour luy porter obcilfance: parquoy ce petit qu’il fouflroit contre fa nature amp;nbsp;accoullumace, luy efloit plus gricfàporter.Toufiours auoit cfperance en ce bon Hermite, quielloic au PlelIisCdont i’ay parlé)qu’il auoit fait venir de Calabre : Se incelfamment cnuoyoitdeLiersluy,difantqu’illuyalongcroitbien la vie fil vouloir:,car nonobllant toutes ces Ordonnances, qu’il auoit faiôles de ceux qu’il auoit enuoyez entiers monfeigneur le Daulpbin fon filz, fi luy reuint le cœur, amp;nbsp;auoit bien efperanced’efchapper : amp;nbsp;liainli fulladucnu,il eullbien departy raflemblée,qu’il auoit cnuoyéeà Amboile,à ce nouueau Roy. Et pour celle elj?erance qu’il auoit audiél Hermite, fut aduifé parvn certain Theologien ôcautres, qu’on luy dcclarcroit qu’il fabuloit, amp;nbsp;qu’en fon faiôl n’y auoit plus d’cfperance qu’à la milericorde de Dieu;amp; qu’à ces parolles fc trouue-roit prefent fon Médecin,maillre lacques * CoÀier,en qui il auoit toute cf-perance, amp;nbsp;à qui chafeun moys il donnoir dix mille Efcus,efperant qu’il luy alongcroit la vie. Et fut prife celle conclufion par maillre Oliuier, afin que detouspoindls il penlallàGconfcicncc, amp;nbsp;qu’il lailîàlltoutes autres pen-fées,amp; ce Sainél homme, en qui il fe fioit,amp; Icdiél maillre lacques le Médecin. Et tout ainfi qu’il auoit haullé lediél maillre Oliuier amp;nbsp;autres, trop à coup,amp; fans proposai! cllat plus grand qu’il ne leur appartenoit, aufli tout de mefine prindrentchargelànscrainte,de dire chofe àvn tel Prince, quine leur appartenoit pas ; nyne gardèrent la reuercnce amp;nbsp;humilité qu il appartenoit au cas, comme eulEentfait ceux qu’il auoit de long temps nourris,amp; lefquels peu parauant il auoit cllongnez de luy, pour fes imaginations:mais tout ainfi qu’à deux grâds perfonnages qu’il auoit fait mourir de fon temps (dontde

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DE PHILIPPE DE COM MINES. 2x7 (dont de l’vn feit confcience à fon trefpas, amp;nbsp;de l’autre non, ce fut du Duc de Nemours,amp;du Comte de SainólPaul)fut lignifiée la mort par Commifiai-rcs députez à ce faire ; lefquels Commiflaires en briefs mots leur déclarèrent leur fentence,amp; baillèrent confefieur, pour difpoferc^ leurs confciences,en f)eu d’heure qu’ils leur baillèrent à ce faire:tout ainfi fignifierent à noftreRoy es deflufdidls la mort en briefues parolles amp;nbsp;rudes, dilans : Sire, il faut que nous nous acquitions, n’ayez plus d’efperance en ce Sainôl-homme, n’en autre chole:car lèurement il ell faiôl de vous, amp;nbsp;pource penfez à voftrc confeié-ccjcaril n’y a nul remede;amp; chacun dift quelque mot alTez brief, aufquels il relpondit : l’ay clperance que Dieu m’aidera, amp;par-aueniureienefuispas fi malade comme vous penlez.

cefte noLiuclle,amp; cefte fentence?caroncqucs pour

Quelle douleur luy fut d’ouïr homme ne craignit plus la mort,amp; ne feit tant de chofes, pour y cuider met-tre remede,commc luy: amp;nbsp;auoit tout le temps de fa vie, à fes feruiteurs, amp;nbsp;à raoy comme à d’autres dit, que fi on le voyoit en necellité de mort, que Ion* ne luy dirt, * fors tant feulement, Parlez peu : amp;nbsp;qu’on l’cfmeuft feulement à que Ion l’cf, feconfefl'er, fans luy prononcer ce cruel mot de la mort : car il luy fc mb loir ment, n’auoir pas cœur pour ouïr vne fi cruelle fentenccztoLitesfois il l’endura ver-tueufcment,amp; toutes autres chofes,iufques a la mort, ôc plus que nul homme que iamaisi’aye veu mourir. Afonfilz qu’il appelloitRoy, mandaplu-fieurs chofes,amp;: fc confefla trefbien,amp; dift plufieurs Oraifons, leruans a propos , felon les Sacremens qu’il prenoir, lefquels luy-mefmes demanda :amp; comme i’ay dit,il parloir auflï fee, comme fi iamais n’euft efté malade; amp;nbsp;parloir de toutes chofes, qui pouuoient feruir au Roy fon filz, amp;nbsp;dift entre autres chofes,qu’il vouloir que le Seigneur des Cordes ne bougeaft d’auec fon-did filz, de fix moys ;amp; qu’on le priait ne mener nulle pratique fur Calais, n’y ailleurs,difint qu’il cftoit conclu auec luy de conduire telles entreprin-fes, bonne intention pour le Roy amp;nbsp;pour le royaume, mai^qu’elles e-ftoient dangereufes, amp;nbsp;par cfpecial celle de Calais, dé peur d’efmouuoir les Anglois:amp; vouloir,fur toutes chofes,qii’apres fon trefpas on tint le royaume en paix cinq ou fix ans:ce que iamais n auoit peu foufFrir enfi vie. Et à la vérité lediéf royaume en auoit bien befoing; carcombienquil fuft grand amp;nbsp;eftendu fi eftoit il bien maigre amp;nbsp;pauure, par cfpecial pour les pafTages des Gens-d’armes, qui fe remuoyent d’vnpaïsenvn autre. Il ordonna qu’on ; ne print pas debat en Bretaigne : amp;nbsp;qu’on lailfaft viure le Duc Françoys en paix, fans luy donner doubles ne craintes, ôcàtous les voifins fembla-blemcnt de tout ce royaume, afin que le Roy amp;nbsp;le royaume peuftent demeurer en paix iufques a ce que le Roy fuft grand amp;nbsp;en aage pour en difpofer àfonbonplaifir.

Voila donc comment peu diferettement luy fut fignifiée cefte mort. Ce que i’ay bien voulu reciter, pource qu’en vn autre article precedent, i’ay commencé a faire comparaison des maux qu il auoit fait foufFrir a aucuns , amp;nbsp;à pluficurs qui viuoyent foubs luy, amp;nbsp;en fon obeyftance , auec ceux qu’il foufFritauant fa mort, afin que l’onvoye, f’ilsn eftoient fi grands ne fi longs ( comme i’ay dit audióh article ) que neantmoins eftoyenc ils

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1X8 VL LIVRE DES MEMOIRES

bien grands,veüe fa natnrcjqui plus demandoitobeïïTanceqne nul autre en fon temps, amp;nbsp;qui plus l’auoit eue :parquoyvn petit mot derefponfe, con-vouloir, luy cftoit bien grande punition de l’endurer. Quelques auoit, fur cinq OU fix moysdeua^jf celle mort, auoit fufpiçion de tous hommes ; ôc larufunifr» fpeQalement dctous ceux qui eftoient dignes dauoir authorité. Il auoit crainte de fon fils, amp;nbsp;le faifoit ellroiôlement garder : ne nul homme le Voy oit, ne parloit à luy,finon par fon commandement. Il auoit doubte à la fin de fa fille, amp;nbsp;de fon gendre,Duc de Bourbon :amp; vouloir fçauoir quelles gens entroient au Pleflis quand amp;nbsp;eux. A la fin,rompit vn confeifquele Duc deBourbon, fon gendre,tenoit leans par fon commandement. A l’heure quefondiôl gendre, amp;nbsp;le Comte de Dunois reuindrentdc remener l’Am-

• baffade, quiefloit venuëauxnopces du Roy fonfilz,amp; de laRoyne,à Am-, boife, amp;nbsp;qu’ils retournèrent au Pleffis, Sgt;c entrèrent beaucoup de gens auec eux,lediél Seigneur, qui fort faifoit garder les portes, eflant en la galerie, qui regarde en la court dudiél Pleffis, feit appellcrvn de fes Capitaines des Gardes luy commanda aller tafler aux gens des Seigneurs deffufdids, veoir fils n’auoient point de Brigandines foubs leurs robes ; amp;nbsp;qu’il le feifl comme enfcdeuifànt a eux, fans trop en faire de fcmblant. Orregar- ' dez fil auoit fait beaucoup viurc de fufpiçion amp;nbsp;crainte foubs luy, f’ilen e-floit bien paye; amp;nbsp;de quelles gens il pouuoitauoir feureté, puis que de fon filz , fille amp;nbsp;gendre il auoit fufpiçion. le ne dy point pour luy feulement: mais pour tous autres feigneurs,qui défirent eflre craints, jamais ne fe /entent de la reuanchc,iufqucsàlaviellefre;car pour la penitence ils craignent touthomme.Et quelle douleur cfloit-ceàceRoy d’auoir celle paour amp;nbsp;ces paffions?

Il auoit fon Medecin,appellé maiflre lacqucs Codlicr, à qui en cinq moys il donna cinquante quatre mille Efcuscontans (quiefloit à la raifon des dix mille Efcuslt;pour moys, amp;nbsp;quatre mille par deffus ) amp;nbsp;l’Eucfché d’Amiens pour fon ncpueu,amp; autres Offices amp;nbsp;terres pöurluy,amp;pourfcsamis.Lediól Medecinluy efloitfi tres-rudc,quelonncdiroitpointavnvarier les oultra-geufes amp;nbsp;rudes parolles,qu’il luy difoir.-amp; fi le craignoit tant ledicSlScigneur, qu’il ne l’euflofcenuoyer hors d’auccluy: fifen plaignoitaccuxàquiii en parloit,maisil ne l’euft ofé châger comme il faifoit tous autres fèruiteurs, pource que lediôl Médecin luy difoit audacieufemétrle fçay bien qu’vn matin vous m’enuoyerez, comme vous faiëles d’autrcs:mais (par vn grand ferment qu’il iuroir)vous ne viurez point huid iours apres.Ce mot l’efpouuen-toitfort, amp;nbsp;tantqu’apresne lefaifoirqucflateramp;luydonner: quiluycfloit vn grand purgatoire en ce monde, veu la grande ôbeiffance qu’il auoiteue de tant de gens de bien,amp;de grands hommes.

tn plut forte Il eflvray qu’il auo^t flit de rigoureufes prifons, comme cages de fcr,amp; fte^ênt'^aucûZ auttcs dc boys,couuei'tes de * pates de fer par le dehors,amp; par le dedans,auec terribles*fermurcs,de huid pieds delargc,delahaulreurd’vnhomme,amp; vn lt;]U il auoit fuit nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r rrr r nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;-1

f*quot;‘- pied plus. Le premier qui les deuifa,fut l’Euefquedc Verdun , quienlapre-mierequi fut faide,fut mis incontinent, amp;nbsp;y a couché quatorze ans. Plu-f eurs depuis l’ont mauldit,amp;: mqyjiuf^ qui en ay tafle,fouille Roy de pre-fent.

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fe^hujó^oys.Autrcsfois auoit fait faire à des Allcmas,des fers trcs-pcfas^j’“^^'‘'pvJ terribles, pour mettre aux pieds : amp;nbsp;y eftoit vn anneau, pour mettre au nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;''

pied,fort mal aifé â ouurir,comme à vn Carquâ, la chainc grofle amp;nbsp;pefanté, amp;nbsp;vne groffe boule de fer au bout,beaucoup plus pefinte que n’eftoit de rai-fon;amp;les appelloit Ion les Fillettes du Roy. Toutesfois i’ay veu beaucoup degensdebienprifbnniersles auoir aux pieds, qui depuis en font faillis â grand honneur,amp; qui depuis ont eu de grads biens de luy.-amp; entre les autres Vn filz de monfeigneur de la * Gruture de Flandres, prins en bataille : lequel *crutuie,^ lediôt Seigneur maria,amp; feit fon Chabelan,amp; Senefchal d’Anjou,amp;luy bail-la cent Lances. Aufli au Seigneur de* Fiennes,prifonnier deguerrc:amp; au Sei-Sneur du * Verger.Tous deux ont eu Gés-d’armes de luy amp;nbsp;ont efté (es Cha-belâs, OU de fbn filz,amp; autres gros eftats:amp; autant a mofeigneur de Roche-fortjfrere du Conneftable:amp; vn appelle Roquebertin,du pais de Cathelon- * gnCjfemblablement prifonnier de gucrrc.à qui il feit de grands biens,amp;plu-^quot;quot;ne5f”’'’ fleurs autres,quiicroient trop longs à nommer, amp;nbsp;de diuerfes contrées. Ggt;r cecy n’eft pas noftre matière principale, mais faut rcuenir à dire qu’ainfi cô- ffutifirtàiuy me de fon temps furent trouuccs ces mauuaifes amp;nbsp;diuerfes prifons,toutain- ment il a n»m~ fi auant mourir il fe trouua en fêmblables Sgt;c plus grades prifons,amp;aulfi plus quot;* grâd’ peur il eut que ceux qu’il auoit tenus. Laquelle choie ie tien à treigrâd’ grace pour luy,amp; pour partie de ion Purgatoire: amp;nbsp;I’ay dit icy pourmoftrer

qu’il n’eft nul homme de quelque dignité qu’il foit, qui ne fouffre, ou en fe- les de Fritnee. cret ou en public;amp;: par eipecial ceux qui font fouffrir les autres. Lediôl Sei- lâq”« gneur,vcrslafindcicsiour^, feit clorre tout â l’entour fit maifondu PleiTis IezTours,degros barreaux de fer en forme de grofles grilles : amp;nbsp;aux quatre

coins de ià maiibn,quatrernoi^aux defer,bons,grands,amp; efpez.Lefdiélcs nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;A- f»quot;''

grilles eftoient contre le mur,du cofté de la place,de l’autre part du foiTc;car il eftoit à fons de cuuc,amp; y feit mettre plufieurs broches de fer, maftbnnées au dedans le mur, qui auoient chafeunes trois ou quatre poiniftes ; les feit mettre fort pres l’vne de l’abtre.Et d’auantage ordonna dix Arbaleftriers,dedans Icfdids foifez, pour tirer à ceux qui en approcheroient, auant que la porte fuft ouucrte:amp; entendoit qu’ils couchaflent aufdiéls foftez, amp;nbsp;fe rcti-raffent aufdiéts moineaux de fcr.Il entendoit bien que cefte fortification ne fuffifoit pas contre grand nombre de gens,ne contre vne armée.-mais de cela il n’auoit point de peur, feulement craignoit que quelque Seigneur ou plu-. ficurs,ncfciirentvneentrcprinfc de prendre la place de nuiôl, demy par a-moutjamp;demy par force, auec quelque peu d’intelligence : amp;nbsp;que ceux la prinflent l’authorité, amp;nbsp;le feiflent viure homme fans fens, amp;nbsp;indigne de gou-uerner. La porte du Pleftis ne fouuroit qu’il ne fuft huid heures de matin, n’y ne bailToit le pont iufques à ladide heure,amp; lors y entroiét les Officiers:

amp; les Capitaines des gardes mettoient les portiers ordinäres, amp;nbsp;puis ordo-noient le guet d’Archicrs,tant à la porte que parmy la court, comme en vne place de frontière eftroidemêt gardée:amp; n’y entroit nul que par le guichet, amp;nbsp;que ce ne fuft du feeu du Roy,cxceptc quelque Maiftrc d’noftel, gens de cefte forte,qui n’alloient point deuers luy. Eft il doneques poffible de tenir vn Roy,pour le garder plus honncftement,amp; en eftroideprifon,que luy

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X30 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V 1. hlVKh, JJL5 MrMUlJtvEd

mcfmcs fetenoit?Les cages où il auoit tenu les autres, auoict quelque buiót pieds en carre,amp; luy qui eftoit fi grad Roy,auoit vne petite courtde cfiafieau à fe pourmener,encores n’y venoit il gucres.-mais fe tenoit en la galerie,fans partir de là,finon par les châbrcs,amp; al 1 oit à la méfié fans pafier ladiéfe court. VoLildroit Ion dire que ce Roy ne foufirit pas aufli biê queles autrcs?quiain-fi fenfermoit,qui fe faifoit garder,qui eftoit ainfi en peur de fes cnfans,amp; de tous fes prochains pares,amp; qui changeoit amp;nbsp;muoit de iour en iour fes ferui-tcurs qu’il auoit nourris,amp; qui ne tenoiêt bien ne honneur que de luy, telle-mêt que nul deux ne fi ofoit fier,amp; fenchainoit ainfi de li efirages chaincsôC cloftures?Silelieu eftoit plus grand qued’vneprifon comune, aufiî eftoit il plus grand que prifonniers comuns. On pourroit dire que d’autres ont efté • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;plus fufpicionncux que luy: mais ce n’a pas efte de noftre têps,ne par auentu-

re homme h fage que luy,ne qui euft fi bons fubicâ:s:amp; auoient ceux là par-auenture efte cruels amp;nbsp;tyrans : mais ceftui-cy n’a fait mal à nul, qui ne luy • euft fait quelque offence. le n’ay point dit ce que deffus eft dit, pour feulement parler des fufpicions de noftre Roy : mais pour dire que la patiêcc qu’il a porté en fes pafiions, femblables à celles qu’il a fiait porter aux autres, luy , eft par moy réputée à punition, que noftre Seigneur luy a dônée en ce monde , pour en auoir moins en rautre,tant es choies dont i’ay parlé, comme en fes maladies bien grandes,amp; douloureufes pour luy,amp; qu’il craignoit beaucoup auantqu’elles luy aduinficnt.'amp;: aufii afin que ceux qifi viendront apres luy,foient vn peu plus piteux au peuple,amp; moins afpres à punir qu’iln’auoit efte : cobien que ie ne luy veux pas doner charge, ne dire auoir veu meilleur Prince:amp; fil prefibit les fuiclt;fts,toutesfois il n’euft point fouffert qu’vn autre l’euft fait,nc priuény eftrange. Apres tat de peur,amp; de fufpiçios amp;nbsp;douleurs, 4 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.t— noftrcSeigneurfeitmiraclefurluy,amp;leguerittàtderamequeducorps,cô-

me touliours a accouftumé,en faifant fes miracles : car il l’ofta de ce mifera-

Triffiat Jit /ity Louh em,ieÇm(.

Ï 4 8 3.

blc mode en grad’ fànté de fens amp;nbsp;d’entédemcnt,amp; bone mémoire,ay ant rc-ceu tous fes Sacrcmês,fians fouffrir douleur que I9 cogneuft, mais toufiours parlant iufques à vne Patenoftre auant fa mort, en ordónant de fit fepulture: amp;nbsp;nommoit ceux qu’il vouloir qu’ils l’accompaignalfent par chemin: amp;nbsp;di-foit qu’il n’efperoit à mourir qu’au Samedy, amp;nbsp;que noftre Dame luy procu-roit ccftegrace,cn qui toufiours auoit eu fiance amp;nbsp;grand’ deuotion amp;prierc: amp;nbsp;tout ainfi luy en aduint,car il décéda le famedy,pénultième iour d’Aouft, 1 an mil quatre cens quatre vingts amp;nbsp;trois, à huid heures au foir, audid lieu du Plefiis,où il auoit prins la maladie le Lundy deuant. Noftre Seigneur ait fon amc,amp; la vueillc auoir receuc en fon royaume de Paradis.

Difeours Çhï la mijere de la vie des hommes^O* l^rincipalement des Trinces^ par l'exemple de ceux du tempj detautheur^c^ premièrement du quot;Kpy

Louis. CHAT. Xlll.

Eed’efpcrancedoiuentauoirles*pauuresamp; menues gens gt;nbsp;au faid de ce monde,puis que fi grand Roy y a tant fouffert puis laiffétout, amp;nbsp;ne peut trouucrvnefeule

; nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;heure pour eflongnerfâ mort, quelque diligence qu’il y ait

feeu faire.le l ay congnu, ôc ay efté fon feruiteur à la fleur de fon

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DE PHILIPPE DE COMMINEl ijf

fon aagc,amp; en fes grades profperitez;mais ie ne le vcy oncqucs Eins peine amp;: fas foLici.PoLir tous plaiùrs il aimoit la chafle, amp;: les oifeatix en leurs Eiifons : rnaisiln’yprenoir point tant de plaifir comme aux chiens. Des Dames, il ne Pen eft point meflé, tant que i’ay elle auec luy : car à l’heure de mon arriuée^ luy mourut vn filz,dont il eufl grand dueil,amp; feit lors vn vœu à Dieu, en ma prefence, de iamais ne toucher à femme qu’à la Royne fii femme : amp;nbsp;côbicn qu’ainfi le deuoit faire felon rordonnance*de l’Eglife, fi fut-ce grand’chofe à *demanàgê en auoir tant à fon commàdement,de perfeuerer en cefte promclTe: vcii en-cores que la Royne n’efloit point de celles où deuoit prendre grand plaifir: mais au demeurant fort bonne Dame.

Encores en cefte chafleauoitqtiafi autant d’cnnuy,que de plaifir : car il y prenoit grand’peine,pourtant qu’il couroit les Cerfs à force,ôc fe Icuoit fort nbsp;nbsp;nbsp;•

matin, amp;nbsp;alloit aucunesfois loing, amp;nbsp;ne laiflbit point cela pour quel temps nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•

qu’il feift;amp; ainfi fen retournoit aucunesfois biê las,amp; quafi toufiours courroucé à quelqu’vn; car fell matière quin’eftpas conduiôlc toufiours au plaifir de ceux qui la coduifent ; toutesfois il fy congnoifibit mieux que nul home qui ait régné de fon temps, felon l’opinion de chafeun. A cefte chafTe c-’ ftoitfanscelfc, amp;nbsp;logé par les villages, iufquesà ce qu’il venoit quelques nouuclles de la guerre: car quafi tous les eftez, y auoit quelque chofe entre le Duc Charles de Bourgongne amp;nbsp;luy,amp; l’hyuer ils faifoient trefues.Aufii il eut plufieurs affaires, pour celte Comté de Rouflillon, contre le Roy lean d’Arrag,on,pere du Roy d’Efpaigne, car combien qu’ils fuffent fort panures amp;nbsp;troublez,auec leurs fubieds,commeceux de Barcelonne amp;nbsp;autres,amp; que le filz n’eut ricn(car il attendoit la fucceffion du Roy DomFcderic deCaftil-le,frerc de fa femme, laquelle depuis luy cft aduenüe ) toutesfois ils luy faifoient grande refiflance.-carilsauoient les cœurs des fubieds dudiélpais de Rouffillon,lequel couflafort cher au Roy amp;nbsp;au royaume:carily mourut,amp; fi perdit maint homme de bien,Se y dcfpendit grand argent, pou|ÿ:e que ce- -ftcguerre dura lôguement.Ainfi le plaifir qu’il prenoit, eltoitpeu de tempsj^ cnl’an, amp;nbsp;eftoiten grand trauail de fa perfonne,comme i’ay dit.Letêps qu’il., nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;'

repofoit, fon entendement trauailloit:car il auoit affaire en moult de lieux, amp;nbsp;fe full auffi volociers empefehé des affaires de fon voifin corne des fiês,amp; mis gens en leurs maifons,amp; départi les authoritez d’icelles.Quand il auoit la guerre, il defiroit paix ou trefues : quand il auoit paix ou trefues, a grand’ peine les pouuoit il endurer.Dc maintes-menuës chofes de fon royaume fc mefloitjdont il fe fufl bien paffé : mais fa complexion eftoit telle, amp;nbsp;ainfi vi-uoit.Aulïi fa mémoire efloit figrande,qu’il retenoit toutes chofes, amp;: con-gnoiffoit tout le monde, amp;nbsp;en tout pais,amp; a l’entour de luy. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;*feigne«tiet

A la vérité il fembloit mieux pour * fccourir vn monde, qu’vn royaume. le ne parle point de fii grande ieuneffe:carie n’eftoye point auec luy,mais eu autStqu’elle l’aagc d’onze ans par aucuns feigneurs amp;nbsp;autres du Poyaume, il fut em- euAquot;greu brouillé contre le Roy Charles feptiefme fonpere, envne guerre qui peu dura,appellee la Praguerie.Quand il fut homme il fut marié à vne fille d’Ef-

/r vp * 1 r 1 -r nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;— gt;nbsp;ii r ■ i nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;autat quelle

colle,alon delplaifir,amp;tant qu elle velquit il y eut regret : amp;nbsp;apres la mort vefeur,?/^« pour les bâdcs amp;nbsp;brouillis delamaifon du Roy fon pere,ilfe retira au Dau-

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2 32' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;VI. LlVKt nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;MEMOIR tb

phinc(quiefi:oit fien)où bcauconp degens de bien le fnynirent,amp; plus qu’il n’en peut nourrir. Luy eftant en Daulphiné,il Ea maria aucc la fille du Duc de Sauoyc: amp;nbsp;toft apres il eut debat auec fon beau-pcre, ôc fe feiicnt tres-afpres guerres. Le Roy Charles fon pere,voyât fon filz trop accompaignc de gens de bien,amp; de Gens-d’armes,à fon gré,délibéra d’y allerenperfonne,engrad nombre de gens, amp;nbsp;de l’en mettre dehors : amp;nbsp;femiten chemin, amp;nbsp;eut peine d’en retirer plu heurs, en leur commandant comme à fesfubicôfs, amp;nbsp;furies peines accouftumées,fe retirer deuers luy.A quoy plu fleurs obeiffoyent ,aii granddefplaifir du Roy noftremaifire; lequel voyant le courroux de fon perc, nonobftant qu’il fuftfort, délibéra partir de là, amp;nbsp;luy laifferlepaïs : amp;nbsp;f’en alla par la Bourgogne,auec peu de gés, deuers le Duc Philippe de Bour-• gongnedequel à grand honneur le recueillit, amp;nbsp;luy départit de les biens,amp; à

Tes principaux feruiteurs : comme le Comte de * Commincs, le feigneur de ‘S.xemp. 'vieil. Montauban,amp; autres,par forme de pcnfion,par chafeun an:amp; feit durant le temps qu’il y fut, dons à fes feruiteurs. Toutesfois à la defpenfc qu’il faifoic et^ßi tiuiien (Jg d’argent qu’il auoit,l’argent luy failloit fouuent,qui luy eftoit grand’ «ninge. peine amp;nbsp;louci,amp; luy en railloit chercher ou cmprunter,ou les gens 1 eullent laifré,quieft grand’angoilfe àvn Prince,qui ne l’a point accouftumé. Et par ainfi n’eftoit point fans peine en celle maifon de Bourgongne : amp;nbsp;luyfaloic entretenir le Prince öclcs principaux Gouuerneurs, de peur qu’on ne fen-nuyaft deluy,ày dire tat:caril y fut fix ans,S: incelTamincnt le Roy fonpe-re enuoyoit Ambalfadeurs pour l’en mettre hors, ou qu’il luy lull r^nuoyé. Et en cela vous pouuezpenler qu’il n’elloit point oy ht, amp;nbsp;fans grandes pen-fcesamp;fouci. Oren quel temps donc pourroit Ion dire qu’il eufl eu ioye ne plaifir,à veoir toutes les chofes defl'uldiôles?Iecroy que depuis fon enfance il n eufl iatnais que tout mal amp;nbsp;trauail iufquesà lamort. le croy que fi tous les bons iours qu’il a eu en G vie,efqucls il a eu plus de ioye amp;nbsp;de plaihr que detraua^amp; d’ennuy, elloientbien nombrez,qu’ilfentrouueroitbien peu: croy qu’il fentrouLicroit bien vingt de peine amp;de trauail, contre vn de 'w^^^.^wplaifiramp; d’aife.llvdcpiitenuironloixanteôe vnan,toutesfoisil auoit tou-fioLirs imagination de ne palferpoîntloixânte ans: amp;difoitqLie puis long temps, Roy de France ne les pafla. Aucuns veulent dire depuis Charles le grâd.-toutesfois le Roy nollre maiflrefutbieauantau foixate amp;nbsp;vnicfme.

Exemple dece Le DucChatlcs dc Bourgongnc.qucl aife,nc quel plaifirfçauroiton dire q»edejj-v! par .1 n I nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;T nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;J ‘ l- •. I/C n nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;-

le Duc de qu 11 euit eu plus grand que noltrc Roy,dot i ay parle?ll elt vray qu en la^eu-çm pçy jjç fouci: car il n’êtrcprint rien qu’il n’eufl enuirô vingt deux ans,amp; iufques à la vefquitfain fans trouble. Alors commença fe troubler auec les Gouuerneurs de fon pere ; lefquels fondiél pere fouflint,pourquoy lefilsfabfenta de fa prcfence,amp;: Pénal la tenir en Hollandc,où il tut bien rc-cucilly.-amp;print intelligence auec ceux de Gand, amp;nbsp;aucunesfois y venoit. il n’auoitriendefon^^ere, mais ce pais de Hollande etloit fort riche, amp;luy faifoit de grands dons,ôc plufieurs grotfes villes des autres pais, pourl’efpe-rance qu’ils auoient d’acquérir G grace,pour le temps aducnir:qui etl cou-flume gcncralle,que toLihoLirs on complaift plus aux gens de qui on efpere lapuifranceamp; authorité accroiflrc’, pour le temps aduenir, que l’on ne fait pour

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 135 pour celuy qui eft ja en tel degré, qu’il ne peuft monter plus haut : amp;nbsp;y ell l’amour plus grande,par efpecial entre le peuple. Et effc pourquoy le Duc Philippe, quand onluy difoit que les Gantois aymoient tant fon filz , amp;nbsp;qu’il les fçauoit fi bien conduire, refpondoit qu’ils aymoient bien toufiours leurfeigneuraduenir: mais depuis qu’il efioitfeigneur, ils le laifibient. Et ceprouerbe fut veritable: car oneques puis que le Duc Charles futzfei-gneur, ils ne l’aimerent, amp;nbsp;luy monftrerent bien 5 comme i’ay dit ailleurs, amp;aufiidcfoncofl:éne lesaimoit point; mais à ce quieftdefcendu de luy, ils ont fait plus dédommagé, qu’ils n’eu fient fçeu faire à luy. Pour continuer mon propos,depuis que le Duc Charles entreprint la guerre pour les terres de Picardie, que noftremaiftreauoitacheptées de fon pere le Duc Philippe, amp;nbsp;qu’il fe fut mis auec les autres feigneiirs du royaume, en cefte . • guerre du Bien public, quel aifeeut il depuis H1 euttoufiours trauail, fans nulplaifir, amp;nbsp;defaperfonne amp;dc l’entendement; car la gloire luy monta au cœur, amp;nbsp;l’cfincut de conquérir tout ce qui luy efioit bien feant.Tous les efiez tenoit les champs en grand peril de fa perfonne, amp;nbsp;prenoit tout le foing amp;la curederofl:, amp;nbsp;n’enauoit pas encores afiez à fon gré. Il fe Ic-uoit le premier , amp;fecouchoit le dernier, comme le plus pauure dcl’Ofl-* S’il le repofoitaucun hyuer, il faifoitfès diligences de trouucr argent. A chafeun iour il befongnoit des fix heures au matin, amp;nbsp;prenoit grand’ peine ___________

à recueillir ôc à ouir grand nombre d’Ambafladeurs;amp; en ce trauail amp;nbsp;mi- ' «a,-o-?. fere finit fes iours,amp; fut tué des Suifies deuant Nancy, comme auez veu de- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;quot;

uant.Et ne pourroit Ion dire qu’il eut iamais eu vn bon iour, depuis qu’il co- • ' * * '' ’ mença a entreprendre de fe faire plus grand, iufques àfontrefpas. Quelac-quefl: a il eu en ce labeur? QikI befoing en auoit il, luy qui efioit fi riche, auoit tant de belles villes amp;nbsp;feigneurics en fon obeifl'ancc,où il eufi cfié fi ai-fcfileufivoul«?

Apres faut parler du Roy Edouard d’Angleterre, qui a cfié fi*rand Roy amp;puifiant.En fatrcfgrâde ieuneficil veitfon pere le Ducd’Yorrh defeon- dou^rd djn^ fit, amp;nbsp;mort en bataille, amp;nbsp;auec luy le pere du Comte de W^aruic. Lcdiâ:^^“quot;quot;' Comte de Waruic gouucrnoit le Roy,dontie parle en faieunefie, Si con-duifoit fes affaires, A la vérité dire, il le feit Roy, amp;nbsp;fut caufe dedeffairefon Roy Henry, qui pluficurs ans auoit régné en Angleterre: lequel ( felon mon iugement amp;nbsp;felon le monde)efioit vray Roy.Mais de telles caufes, con^e de royaumes amp;nbsp;grandes feigneurics, nofirc Seigneur les tient en fa main, amp;nbsp;en difpofe ; car tout vient de luy. La caufe pourquoy le Comte de Waruic fer-uoit la maifbnd’Yorth, contre le Roy Henry de Lanclafire, c’efioit pour vnc bande ou partialite'qui efioit en la maifondudiél Roy Henry, quin’e-ftoitguercsfàgc: amp;laRoyne fa femme,laquelleefioit delà maifon d’Anjou,fille du Roy René de Sicile, print la partialité dy Duc de Sombrefiet contre le Comte de Waruic:car tous auoient tenu 1 ediôh Roy Henry, amp;nbsp;fon pcre,amp;grand pere, pour Roys. Ladiétc Dame eufi mieux fait beaucoup de faire office de iuge ou de médiateur entre les parties,que de dire.-Icfoufiien- *quot; ■* dray cefte part,comme il a apparu. Car ils eurent maintes batailles en An- quot;nbsp;‘ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;......

glctcrre, amp;nbsp;en dura la guerre vingt amp;nbsp;neufans ; amp;nbsp;fin de compte, le tout y

V iij

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134 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V 1. L.iVl\h JJr.d MhMUlKciJ

* deux eie«»« f^ire iimU,

mourutjquafid’vne part amp;nbsp;d’autre. Et pour parler des bandes amp;nbsp;partialitez,’ elles font tres-pcrillcufes, amp;mefmement quant aux Nobles, enclins à les nourrir amp;nbsp;entretenir. Et fi Ion dit que par là ils fçauront des nouuelles, tiendront les deux parties en crainte,ie m’accorderay aflez qu’vn ieunc Roy le face entre les Dames; carilcnauradupafre-tcmps,amp; duplaifiraffcz, ôc fçaura des nouuelles d’entre elles:mais nourrir les partialitcz entre les hom-mcsjcomme Princes amp;nbsp;gens de vertus amp;nbsp;de courage, iln’efi: rien plus dangereux. C’eftallumer vn grandfeuenfamaifon : cartantoft l’vnou l’autre dira : Le Roy eft contre nous, amp;nbsp;puis penfera de fe fortifier, amp;nbsp;de faccointec de fes ennemis. Au fort, les bandes d’Orléans amp;nbsp;de Bourgongne les en doi-uent auoir fait fages. La guerre en dura foixante amp;nbsp;* douze ans, les Anglois

• meflez parmy, qui cuiderentpoifeder tout le royaume. A reuenirànoftre Roy Edouard, il eftoit fort ieune,amp;: beau Prince entre les beaux du monde. A l’heure qu’il fut de tous points au deifus de fes affaires, il ne complèut qu’à fon plaifir amp;nbsp;aux Dames, feftes, banquets amp;nbsp;aux chaffes : amp;nbsp;fuis d’opinion que ce temps luy dura feize ans, ou enuiron, iufques à ce que le différend dudidl Comte de Waruic, amp;nbsp;de luy commença. Et combien que le-’ diôl Roy fut ietté hors du royaume, fi ne dura ledid debat gucres ; car il rc-tourna,amp; obtint la viôloirc, amp;nbsp;apres print fes plaifirs plus que deuant. Il ne craignoit perfonne,amp; fe feit fort gras amp;plcin:amp;: en fleur d’aage luy vindrent au ro^ngejes excez,amp;mourutaflezfoubdainement (commei’ay dit) d’vnc apoplexie:amp;perdit fil lignée Je royaume apres luy,comme auez ouy, quant aux enfans mafles.

En noftrc temps ont auflî régné deux vaillans amp;nbsp;fages Princes, c’eft à fça-uoirleRoy de Hongrie Mathias, amp;nbsp;Mahumet Ottoman, Empereur des Turcs. Le Roy Mathias eftoitfilzd’vntrcs-vaillant Cheualier, appçllélc Cheualier Blanc de la *Valla2:nic, Gentil-homme de grand fens amp;nbsp;vertus: •mp. a ainfi'. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;O nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Itt - nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;111

maisiiefttf- quilongütmcntgouuerna ce royaume de Hongrie, amp;nbsp;eut maintes belles va^t^^uie: viôloires contre les Turcs;qui font voifins dudiâ royaume,à caufe des Sci-5«i«AVaiia- aneuries qu’ils ontvfurpécs en Grèce, ôcEfclauonie*. Et toft apres fon dc-chia m latin, cgt; nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;4 nbsp;nbsp;nbsp;ti^i nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;isi

ces,vint en aage d’homme Je Roy Lancelot, a qui Je royaume appartenoit, mp. mettnen aucc Bchaginc ÖC Poullanie.Celtuy la le trouua conleille par aucuns ( com-ênneilÆ me Jou dit)deprendreIcs deux filz dudid Cheualier Blanc, difantquc leur pe’^c*'iuoit prins trop dcmaiftriJcamp;dcfeigncurieaudiôl royaume, durant fon enfance,amp; que les enfans(quieftoient bons perfonnages) pourroietbie ttnp. ditainfi, vouloir faire comme luy. Parquoy concJudlediólRoy L^celot,de Jesfai-hneyplt;,n°' prendre tous deux:ce qu’il fcit,amp; incontinent feit mourir l’aifn^ ôc Jediâ: pouiianie: jjatflias metttc en prifon à Bude,principale ville de Hongrie ; maifiJ n’y fut maistnappra- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i 1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;III/'« J T

ihantpiu4pra guercs,amp; pcut eltre que noltre Seigneur eut agréables les leruices de Ion pe-Ui ntmme au- rc-.car toft apres quejedid Roy Lancelot, fut cmpoiforméàPragueenBe-BoefeXec haignc,par vne femme de bonne maifon (amp; en nbsp;veu le frere) deïaquelJe il

Poioignc^ çfj-QÎt ^jYjQ,jj.eyx,ô«: elle de luy.’tellement que corne mal contente de ce qu’il hjfay nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Çç marioit en France,auec la fille du Roy Charles fcptiefmc,qui fappelJoit la

Princeffe de Vienne ( qui eftoit contre ce qu’il auoit promis ) elle l’empoi-fonna en vn baing,en luy donnant à manger d’vnc pomme ; amp;nbsp;mit la poifon

au man-

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iJ b r H 1 L 1 r F b JJ b CU M M J N b 5. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;235

atimanche du couteau. Incontinent que fut mort lediól Roy Lancelot,les Barons de Hongrie faflembicrent audiél Bude,pour faire eleôtion du Roy, felon l’vlage amp;priuilege qu’ils ont d’eflirc,quâd leur Roy meurt fans enfans; ôc eftans là en haine amp;nbsp;diuihô entre eux,pour celle dignité, furuint en la ville la veufuc dudiôl Cheualier Blanc,mere dudiôl Mathias, bien fort accom-paignée:car elle elloit riche femme d’argent contât, que fon mari auoit laif-fé:parquoy cJleauoitpeu faire grans amas foubdainemcnt,amp; croy biê qu’elle auoit bonne intelligence en celle compagnie, amp;nbsp;en la ville,veu le credit amp;nbsp;authoritc que fon mary auoit eu audiól royaume. Elle tira en la prifon, amp;nbsp;niitfonfilz dehors. Partiedes Barons amp;nbsp;Prélats, quidloientlaalfemblez, pour faire leur Roy f enfuirent de peur, les autres créèrent lediôl Mathias à Roy,lequel a régné audiâ: royaume en grand’ prolperité, amp;nbsp;autant loué amp;nbsp;nbsp;nbsp;*

prilc que nul Roy qui ait régné long temps a,amp; plus, gt;en aucunes chofes. Il a cllé des plus vaillans hommes quiayentregnéde fon temps : amp;a gaigne de grandes batailles contre les Turcs de fon temps, fins endommager fon roy-aume.'mais il l’a augmenté, tant de leur collé qu’en Behaigne ( dont il tenoit la plulpart)amp; en Vallagnie,dont il elloit,amp; en Efclauonie; amp;nbsp;du collé d’Al-Iemaignc,printlaplufpart d’Aullriche, fur l’Empereur Fedcric, quiviuoit lors, amp;nbsp;l’a polTedee iniques à fa mort, qui fut en la ville de Vienne, chef du païs d’Aullriche,en cell an mil quatre ces quatre vingts amp;nbsp;onze.Il elloit Roy j qui gouuernoit aulfi fagemet fes affaires en temps de paix,corame en temps de guerre.Sur la fin deles iours,amp;: fe voyant fans crainte d’ennemisjl eft de-iienu fort pompeux,amp; triomphant Roy en fa maifon ; amp;nbsp;feit grans amas de beaux meubles,amp; bagucs,amp; vaiffelles,pour parer fa mailôn. Toutes chofes depefehoit de foy, ou par fon commandcment.il fe faifoit fort craindre, amp;nbsp;deuint cruel:amp; puis tomba en griefue maladie incurable, en affez ieune aa-ge,comme de vingt amp;nbsp;huiôl ans ou enuiron.il eft mort ayant eu toute fa vie •f*'- '•« labeur amp;!. traûail,amp; trop plus que plulieurs. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;*

LeTurc(quedeuantay nommé) a ellé fige Sgt;c vaillant Prince,plus vlàntde fa, fens amp;decautclle,quede vaillâccSc hardieffe.Vray eft que fon pere le laiffa bien grand,amp; fut vaillant Prince,amp; print Adrianopoli, qui vaut à dire ville d’Adrian. Celuy dont ic parle,print en l’aage de vingt amp;nbsp;trois ans Confiâti-nople,quivautàdire citédeConllantin. le l ay veu peinét decellaage, fembloitbien qu’il full homme de grand efprit. Ce fut vnc grande honte à tous les Chreftiés de la laiffer perdre.Il la print d’allault,amp;; fut tué à la breche l’Empereur de rOrient,que nous appelles de Conllantinople, amp;nbsp;maints autres homes de bien : maintes femmes efforcées de grandes amp;nbsp;de nobles mai-fons,nulle cruauté ne demeura à y ellre faiôlc. Ce fut fon premier exploiél, amp;nbsp;a cotinué à faire ces grandes chofestat que iouy vne lois dire à vn Am-balladcur Venitiê,deuant le Duc Charles de Bourgogne,qu’il auoit conquis außi le •vieil deux Empires,quatre royaumes,amp;: deux cens citez. Il vouloir dire de l’Em-pire de Conllantinople,amp;de celuy deTrapezóde, les royaumes de la* Bre-fannc,Ia Surie,amp; ArmenieJe ne fçay fil prenoit laMoréc pourvu.Il a coquis g«»/ maintes belles illes de mer en cellArchipel,où efl ladióleMoréc(les Venities Vauirftainfi y tenoient encores deux places)auflirifle de Negrepont amp;deMethclin: ßc

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X56 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;VI. LIVKEDES M E M O 1 R E 5

aufti a coquis prefque toute l’Albanie amp;c l’Efclauonie. Et li les coqueftes ont cfté grandes fur les Chrcftics,aufti ont elles efté fur ceux de fa loy propre : amp;nbsp;* Caiama- 7 dcftiuit maint grand feigneur, comme le* Carnian,amp; autres. La plus part OELiures il les conduifoit de luy amp;nbsp;de fon fens.-ft faifoit noftre Roy,

q»oy,'iîmieux aufti Ic Rov dc Honsric.-ßc Ont cftéIcs ti'ois plus gtands liommcs qui ayent tntendre (tfl nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;f *

article duTurc regne depuis cent ans;mais l’honneftete forme de viure de noftre Roy,amp; ^fle^dei rires, 1^^^ bous tctmcs qu’il tenoit aux gens priuez,amp; aux gens eftrages, a efté tout meilleur’ que des deux autres:aufti eftoit il Roy tres-chrcfticn.Quat aux plaifirs du mondc,ceTurc en a prins à cœur fioul, amp;nbsp;y a vfégrâd’ partie * defc.n tcmps:amp; euft encores fût plus de maux qu’il n’a fil ne fe fuft tat occu-» Exempt «a’ pe.En nul vice de la chair ne fiilloit,ne d’eftregourmad oultrc inclure : aufti ’qu'eUeï nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;maladics luy foiit vcuucs toft, amp;nbsp;felon lavie: car il luy print vneenfleurc

|toffifoicnL d’vneiambe,comme i’ay ouy dire â ceux qui l’ont veu,amp; luy venoitau co-»euefl.vtetl. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;jç g,.Q nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;y P, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Jç corps, ôe

n’y auoit nulle ouuerture,amp; puis cela fen alloit.-ne iamaisChirurgin ne Iceut entendre ce que c’eftoit; mais bien difoit Ion que la gourmandifey aidoit bien.-ôt pouuoit cftre quelque punition de Dieu. Et ce qu’il Ce laiftbit ft peu veoir,, amp;nbsp;fe tenoit clos en fon chariot, eftoit afin que l’on ne le congneuft ft deffaid amp;: qu’à celle occafton né l’euflent en mefpris. Il eft mort enl’aa-ge de cinquante amp;nbsp;deux ans,ou enuiron,airezfoubdainement, toutesfois il

feit teftamcnt,lequel i’ay vcu : amp;nbsp;feit confcicnce d’vn impofl: que nouuclle-mentauoit mis fur fes fubicâ:s, fi Icdiól teftamcnt eftvray. Or regardez que doibt faire vn Prince Chreftien, qui n’a authoritc fondée en raifon, de rien impofcr,fans Ie congé amp;nbsp;permiflion de Ion peuple.

Conclusion de ï^ntheur.

R voyez vous la mort de tant de grands hommes,en ft peu de temps, qui tant ont trau aille pour faccroiftre, gç pour auoir gloirc,amp; tât en ont fouffert de paftios amp;nbsp;de peines, abrégé leur vie,amp; parauature leurs âmes en pourrôt foufFrir.En cccy ne parle point dudiâ Turc: car ie tien ce point pour vuidé,ôc qu’il cft loge aucc fes predecefteurs.De noftre Roy i’ay cfperance {corne i’ay dit)que noftre Seigneur ait eu mifericorde de luy, amp;nbsp;aufti aura il des autres, fil luy plaift.Mais a parler naturellement(côme homme quin’a aucune literature,mais quelque peu d’experiencc ) n’cuft il point mieux valu à eux, amp;nbsp;à tous autres Princes,amp; hommes de moyen cftat, qui ont vefeu fous ces gras, amp;nbsp;viuront fous ceux qui régnent, eflire le moyen chemin en ces chofes? C’eft a fçauoir moins fe foucicr,amp; moins fe trauailler, amp;nbsp;entrepredre moins de chofes,amp;: plus craindre d’oftenfer Dieu, amp;nbsp;àperfecuter le peuple amp;nbsp;leurs voiftns,amp; par tant de voy es cruclles,quc i’ay allez déclarées par cy deuât, amp;nbsp;prendre des aifes amp;nbsp;^laifirs honneftes? Leurs vies en feroient plus logues,les maladies en viendroient plus tard:amp; leur mort en feroit plus regrettée,amp; de fgt;lus de gens,amp; moins dclirée:amp; auroient moins à doubter lamort.Pourroit on vcoir de plus beaux exemples pour congnoiftre que c’eft peu de chofes, que de rhômc,amp; que cefte vie eft miferable amp;nbsp;briefue,amp; que ce n’eft riendes grands amp;nbsp;des petits,amp; qu’incontinent qu’ils font morts,que tout homme en alc-

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de PHILIPPE DE COMMIMES. 257 a le corps en horreur amp;nbsp;vitupéré ?* amp;nbsp;qu’il faut que l’ame fur l’heure,quelle fefepare d’eux, qu’clleailIereceuoirfoniugement?Età la vérité, en l’inftant que î’ame cfl fepai ée du corps, la fenrence en eft donne'e de Dieu, felon les ocuures amp;: merite du corps : laquelle fentence fappelle le iugement particulier.

Vipuis et lieu le 'vieil ex-emp. a four conclufion tels mots, amp;nbsp;qu’il laut que i’a-nicfurl’bcu-rc cil ellan: fcpaiéc,aillc retcuoir ion

iugement,amp; ja la lentcn-cccn cftdô-néc: felôles œuurcs amp;nbsp;mentes du

COIpS.



me de ce nom

Proposition de l’Àutheur^touchant ce qutlpretend ejerire parles’idM'emoiresßtiitam. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;‘ nbsp;nbsp;nbsp;_

( f» ni


de c4«gt;ir4',; rA'

Our continuer les Memoires par moy Philippes de Cômi-ncs encommencez, desEaicls amp;nbsp;geftes amp;nbsp;du Rcmiedu feu Roy Louis onziefme que Dieu abfolue, mantenant vous veux dire comme il aduint que le Roy Charles viij.fon filz entreprint fon voyage d’Italie,auquel ie fu. Et partit ledit feigneur de la ville de Viéne, qui cfi au Daulphiné,le vingt

•'amp; *troifiefmeiourd’Aouft,ran mil quatre ces quatre vingtsamp;:q«atorze,amp;: fut de retour dudiôl voyage,en fon royaume,enuiro le moysd’O0lobre,qua tre vingts amp;c quinze, Auâtl’êtrcprinfe duquel voyage, il eut mainte difpute fçauoir fil iroit ou non.Caf rcncreprinfc fembloità toutes gens figes amp;nbsp;ex-perimêteZjtref dangcreufe.'amp;: n’y eut que luy feufqui la trouuaft^nne : vn appelle Eflicnne de Vcrs,natifde Languedoch, homme de petne lignée, qui iamais n’auoit veu amp;nbsp;entendu nulle chofe au faiôl de la guerre. Vn autre feneftoit méfié iufqueslàjà qui le cœur faillit, homme de Finances appel-lé le General Brifibnnet;quidepuis,acaufedudi6lvoyage,a eu de grads bics en rEglife,comme d’eftre Cardinal,amp; auoir beaucoup debcnefices. L’autre auoit ja acquis beaucoup d’heritages, amp;nbsp;eftoit Senefchal de Beaucaire , amp;: Prefident des Coptes à Paris:amp; auoit feruy ledidt Roy en fon enfance, tref-bien,de Valetdc châbre:amp; cefiuy lay attira ledit^ General : amp;nbsp;eux deux furent caufe de ladiéleentreprinfe,dont peu de gens les foüoient,amp; plufieurs les blafmoyent. Car toutes chofes necefiaires a vne fi grade entreprinfe leur dcffailloiétzcar lcRqy eftoic très ieune, foible perfone,plein de fon vouloir, peu accompaigné de fàges gens,ne de bons Chefs.-amp; n’auoit nul argent contant.Car auant que partir ils empruntèrent cent mille Francs de la Baneque

* HeKergier ithonneur qui traifle amfle-met de ce ’voya ^ene dite^ueiz en l'an 14 9i-(omme a fi an efioit farauiit ’C • I

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VII. LIVRE DES MEMOIRES

Soli à Gennes,à gros intereft pour cent,de foire,en foire, en plufieurs fiinoïufi^,^'’a- lieuxjcommeiediray apres.Ils n’auoient ne tentes ne paiiillons, èc fi '«• commencèrent en hyueràcntrcren Lombardie.Vnechofeauoientilsbon-ne,c’cfioit vne gaillarde compagnie,pleine de ieLinesGentiIs-bommes,mais en peu d’obeilTance. Ainfi faut conclure que ce voyage fut códuióE de Dieu, tant à l’aller qu’au retourner:car le fens des códuóleurs que i’ay dit,n’y feruic de guercs.Toutesfois ils pouuoient bien dire qu’ils furent caufe de donner grand honneur amp;: grand’gloire a leur maiftre.

Comment le Duc 7{cné de Lorraine njeint en France demander la Duché de Bar, la Qomte de Prouence^que le nbsp;nbsp;nbsp;0jarles tenoif. nbsp;nbsp;comment ilfaillit

a entrer au royaume de L/aples,qu’ilpretendoit fien^comme le ^oy;egt; quel droit y auoient tous deux. nbsp;nbsp;nbsp;CH AT. I.

Stant le Roy,dont ie parle, en l’aage de fon couronemêt qui fut de quatorze ou quinze ans, vint vers luy le Duc de Lor-raincjdemäder la Duché de Bar,que leRoy Louis onzicfmc tenoit,amp; la Côté de Proucnce,que le Roy Chat les d’Anjou,

EntenJei,

fon coufin*gcrmain,laiiraaudiôtRoy Louis omziefmc, par fon trcfpas amp;nbsp;teflamêt:car il mourut fins enfans .Le Duc de Lorraine la vouloir dire fienne, par ce qu’il cftoit filz delà fille du RoyRené » de Sicile,Duc d’Anjou amp;nbsp;Comte de Proucncc.‘amp; difoit que le RoyRené luy auoit fait tort, amp;nbsp;que le Roy Charles d’Anjou dont ie parle n’eft oit que fon ncpueUjfilz de fon frété le Comte du Mainc,amp; luy eftoit filz de (a fille.-mais l’autre difoit,que Prouence ne pouuoit aller a fille par leurs teftaniens.En ef-feû Bar fut rendu,où le Roy ne demandoit qu’vnc îomme d’argét :amp; pour a-uoir grâdeflueur amp;nbsp;grans amis,amp; par efpecial le Duc lean de Bourbô,qui c-ftoit vieil^ßc en vouloir efpoufcr la fœur,eut eftat du Roy, amp;nbsp;cen t Lances de charge,amp; luy fut baillé trente fix mille Fracs,pour quatre années, pendat lequel téps fc côgnoiftroit du droiôE de ladide Coté. Et eftoit à cefte delibera-tio amp;nbsp;coclufion (car i’eftoye de ce confeil,qui auoit cfté lors créé', tant par les proch^îs parens du Roy, que par les trois Eftars du royaume ) Eftiennc de Vers,dowt i’ay parlé,qui ja auoit acquis quelque chofe en Prouence : amp;nbsp;feit direparle Roy,ainfi ieune qu’il eftoit (lors fitfœur Duchefte de Bourbo pre-fentc)amonfieurdeComminges,du Lau(car ces deux cftoientauflidu con-feihamp; moy,que nous tinftîons la main à ce qu’il ne perdift point cefte Comté de Prouence.Et fut auant l’appointement dont i’ay parle.

* ^utTemmt, Allât quc 1 CS quattc ans fuftent paftez fe trouuerent quelques*gens de Pro-uêce, qui vindrent mettre en auant certains teftamés du Roy Charles,le pre-mier,frerc de faind Louis.-amp; d’autres Roys de Sicile, quieftoient de lamai-fon de France : amp;nbsp;entre autres raifons, difoient que non point feulement la Comté de Prouenceappartenoit audidRoy, mais le royaume de Sicile, amp;nbsp;autres chofes polfedées parlamaifon d’Anjou,amp; que ledidDuc de Lorraine n’y auoit rié(toutesfois aucuns vouloient dire autrement) amp;nbsp;faddrcflbiét

tous ceux là audiélEftiennede VerSjquinourrilToicfon maiftre en ce langage,

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 139 gagc:amp; que le Roy Charles,dernier mort,Comte de Prouence,filz de Charles d’Anjou,Comte du Maine,amp; nepueu du Roy René,* luy auoit laide par fonteftament:carleRoy Renél’indituaenfonlieu aiiant que mourir, amp;nbsp;le f»refera deuant lediâ: Duc de Lorraine,qui edoit filz de fii fil 1 e.Et difoiêt que “««f-e Roy René feit cela à caufe^defdiôls tcilaments, faiéfs par Charles premier amp;nbsp;fil femme Comtefle de Prouence, difiins que le royaume amp;nbsp;Coté de Pro-uence, ne pouuoient eftre feparez, n’aller à fille, tant qu’il y euft filz de la li-gnéc;amp; que femblablc teftament feirent les premiers venans apres eux, corne fut Charles fécond audiót royaume.

En ce temps defdiôles quatre années, ceux qui gouuernoient ledid Roy (qui eftoient le Duc amp;nbsp;DuchelTc de Bourbô,amp; vn Chambelan,appellé le fei-gneur de Grauille,amp; autres Chambelans, qui en ce temps eurent grand re- • gne)appellercnt en Court, en authorité amp;nbsp;a credit, lediól Duc de Lorraine, ' pour en auoir fupport amp;nbsp;aide.Car il eftoit homme hardi,amp; plus qu’homme de Court: amp;nbsp;leur fembloit qu’ils f’en delchargeroient bien quand il feroit temps :comme ils feirent,quand ils fe fentirent alTez forts,amp; que la force du Duc d’Orléans, amp;nbsp;de plufieurs autres, dontauez ouy parler, fut diminuée. Aufline peurentils plustenirlediéfDucde Lorraine, les quatre ans paflez, fiins luy bailler ladite Comté,ou l’aflcurer à certain temps, amp;nbsp;par eferit, amp;nbsp;toufiours payer les trente fix mille Francs : en quoy ne fc peurent accorder: amp;nbsp;a cede caufe il partit(tref-mal content d’eux)de la Court.

Quatre ou cinq moys auant fon partement de Court, luy aduint vne bonne * ouuerture fil l’eu ft feeu entendre. Tout le royaume de Naples fé rebel- aj^ntuiT* la contre lcRoy Ferrand,pour la grand’tyrannie de luy amp;nbsp;de fes enfans;amp; fe,l,. , donnèrent tous les Barons, amp;nbsp;les trois parts du royaume a l’Eglife. Toutes-fois lediét Roy Ferrâd,qui fut fecouru des Florentins,les predoit fort: amp;nbsp;par celePapc,amp; lefdiéls feigneurs du royaume, qui fedoient rebellez, mandèrent lediét Duc de Lorraine,pour f en faire Roy ; Sz long temps l^ttendirent les galées à Gennes, amp;nbsp;le Cardinal defainét Pierre ad Vincula, cependant qu’il edoit en fes brouillis de Court, amp;nbsp;fus fon departement: amp;nbsp;auoit auec luy gens de tous les feigneurs du royaume,qui le prefToient de partir. Fin de compte,leRoy amp;nbsp;fon confeil mondroient en tout amp;par tour,de luy vouloir aider,amp;: luy fut promis foixante mille Francs,dot il en eut vingt mille, amp;nbsp;perdit le rede;amp; luy fut confenti mener les cent Lances qu’il auoit du Roy, amp;nbsp;enuoyer Ambadades par tout en fà faueur.Toutesfois le Roy edoit ja de dix nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;’

neufans,ou plus,nourry de ceux que i’ay nommez .-qui luy difoient iour-ncllement que ledicl royaume deNaplcs luy deuoit appartenir, le le dy volontiers, parce que foiiuent petites gens en menoient grande noifc:amp;ainfi le feeu par aucûs de ces Ambadadeurs,qui alloient à Rome, Florcnce,Gcn* nes,amp; ailleurs,pour lediéf Duc de Lorraine,amp; lefceu mefmement par lediól Duepropre-.quivint paderparMoulins, où lorsme^enoye,pour les dide-rês de Court,auec lediél Duc lean de Bourbo.Iafon entreprinfe edoitdemy perduc,pour la longue attente,amp; allay au deuant de luy, combic que ne luy fu de ten U-.car il m’auoit aidé à chafier de la Court auec rudes amp;nbsp;folles parol-les.Ilmefeitlaplu^rand’cheredu monde,foy doulatdeceux quidemoq-

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240 ' *’ VII. LIVRE DES MEMOIRES roientaugouuernemcnt. Ilfutdcuxiours auecqiiesleDuç lehan dc Bourbon,amp; puis tira vers Lion.En fominc,fes amis eftoiet fi las amp;nbsp;fi foulez,pour Fauoir tant attendu, que le Pape auoit appointé, amp;nbsp;les Barons du royaume auflijicfquels fur la feureté dudid appointement allèrent à Naples ; où tous furent prins,combien que le Pape, les Vénitiens, amp;nbsp;le Roy d Efpaigne,amp; les Florentins feftoient obligez de faire tenir ledid appointemét, amp;nbsp;euflent iu-ré amp;nbsp;promis leur feurcté.Le Prince de Salerne efehappa, amp;nbsp;vint par deçà, amp;nbsp;ne voulut point eftrecomprins audiót appoinólement, congnoilTant lediél Ferrand.Lcdid Duc de Lorraine fen alla bien honteux en Ion païs, n’onc-ques puis n’eut authorité vers le Roy;amp; perdît fes Gens-d’armcs,amp; les trente fix mille Francs qu’il auoit pour Prouence:amp; iufques à celle heure^qui eft l’an mil quatre cens quatre vings dixfept)eft encores en cell eftat.

(ommentleTrincedeSalernejdu royaumede^apleSy'vinten Franeexe^ comment Ludouic Sforce^Çurnommè le More^ nbsp;nbsp;luy^ tafehoient à faire que le

tnenafl guerre au quot;Roy de ‘Naples,ey* pour quelle caufe. CH AT, II.

Edid Prince de Salerne fut à Venife (par ce qu’il y auoit grade accointâce) auec trois de CCS ncueux,enfansdu Prince de Bifignanroù demandèrent côfcil(comme m’a dit ledidPrin-ce)a Iafeigncurie,où il Icurplaifoit mieux qu’ils tiralfent, ou vers Icdid Duc de Lorraine, ou deuers le Roy de France, ou

vn homme mort,amp;qu’il ne les fçauroitrcflbudre. LcRoy d’Efpaigne feroic trop grâdjfil auoit le royaume,aucc l’ifle de Sicile, amp;nbsp;les autres chofes qu’il auoit en ce gouffre de Venife, amp;nbsp;qu’il eftoit puiffant par mer : mais qu’ils luy confeilleroient aller en France, amp;nbsp;qu’auec les Roys de France, qui auoient cfté audiâ^oyaume,ils auoient eu bonne amitié amp;nbsp;bon voifin.Et croy qu’ils ne pcfoiêt point que ce qui en aduint apres, deuft aduenir. Ainfi vindrét ces Barons delfufdiéls en France, amp;nbsp;furent bien recueillis, mais pauurcmét traitiez de biês.Ils feirent grade pourfuite enuiron deux ans : amp;nbsp;du tout fadref-foient à Efliennc de Vers, lors Senefchal de Beaucaire,amp; Châbelan du Roy.

Vniourviuoicnt en cfperance,autre en contrarieté,amp; faifoyentdiligécc en Italie,amp; par fpecial à Milantoù auoit pour Duc lehan Galeas, non pas le ; grand, qui eft enterré aux Chartreux de Pauie, maisceluy qui eftoit filz du Duc Galeas,amp;: delà Duchefte Bonne,fille de Sauoyetqui eftoit de petit fens. Elle eut la tutelle de fes enfans : amp;nbsp;l’ay veuë en grande authorité eftant veuf-tie,conditie par vn appellé meflîrc * Cico,Secrctairc, nourry de long temps en ceftemaifonzquiauoit chafleamp; confiné tous les frères du Duc Galeas, pour la feurete de laditle Dame amp;nbsp;de fes enfans.Entre les autres auoit chafte vn appellé le feigneuft.udouic(qLn depuis fut Duc de Milâ)qu’ellc r’appella depuis,eftantfon ennemy, amp;nbsp;en guerre contre elle.-amp; le feigneur Robert de fàintl Scuerin, vaillât capitaine, qui pareillement auoit cfté chafte par leditt * Taffino f^tco-Eour conclufion,par le moyen d’vn ieune homme,qui trachoit deuât JHitchiainlli. cllc,natif de Ferrarc de petite lignée,appcllé Anthoine*irhcfin, elle les r’ap-

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DE PHILIPPE DE COMMIMES.

pelîa par fottifc, cuidant qu’ils nefeiflentnul malaudiôlCico : Ôc ainfi la-üoicntiuréamp;promis.Lc tiers iour apres le prindrcntamp; le pafferent dedans Vnepipe, autrauers delavillcdeMilan; carileûoitaliicparmariageauec-ques aucun des VicomtcSjamp; veut Ion dire,que fil euftefté en la ville, qu’ils nereuflentoféprendre: ôc fivouloitlefeigneur Ludouic, que le leigneur Robert de làinâ: Seuerin,qui venoit,le rcncontrafl: en cefl: eftat,pource qu’il baïflbit à merueilles lcdiôE Cico.-qui apres fut mené à Pauie en prifon au cha-fteau,ou depuis il mourut.

Ils mirent ladidc Dame en grand honneur, ce luy fembloit,amp; luy com-plaifoicnt.-amp; eux tenoient le confeil,Tans luy dire, finon ce qui leur plaifoit: amp;nbsp;plus grand plaifir ne luy pouuoicnt ils faire que deneluy parler de rien. A cell Antoine Thefin luy laifibient doner ce qu’elle vouloir; amp;nbsp;le logeoiêt pres de ûi chambre,amp; la portoit à cheual derriere luy par la ville : amp;nbsp;eftoient nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•

toutes feftes amp;nbsp;dances leans, mais ilneduragueres :p/araduenturecela que demi an.Ellc feit beaucoup de bies audiél Thefin,amp; lesbougettcsdes courriers faddreflbient a luy : y fortit grand enuie, auec le bon vouloir que le feigneur Ludouic,oncle des deux enfans, auoit de fe faire feigneur : comme

il feit apres. Vn matin luy ofterentfes deux filz, amp;nbsp;les meirent au Donjon, '

qu’ils appelloient la Rocquc:amp;à ce s’accordèrent lediôl feigneur Ludouic, IcfcigneurRobertdefainôtSeucrinjVn appelle de Palleuoifin, quigouuer-

noir la perfonnedudiôHeuneDuCjôde Capitaine de la Rocque; qui iamais nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.

depuis la mort du Duc Galeas, n’en eftoit forti, ny ne feit de longtcps apres nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;'

iufques à ce qu’il fut prins par tromperie dudiét feigneur Ludouic, amp;nbsp;par la

folie de fonmaiftre,qui tenoit la cd^ition delà mere,n’eftoitgueres fage.

Apres ces enfans mis en ladiéle Rocque par les defludióls,ils mirent la main

furie threfor(qui eftoit en ce temps le plus grand de laChreftienté) amp;: luy en

feirent rendre côpte;amp; en fut fait trois clefs,dont elle en eut l’vnc: mais one-

ques-puis n’y toucha.Ils lafeirent renôçcrà la tutelle, amp;nbsp;fut créé tty^eurle fei- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;'

gneur Ludouic.Et d’auatageefcriuft'ent en plufieurs lieux, par efpecial en

France,! ettres,que ie vey,à fa grande hontç,en la chargeant de cefl Antoine ,

Thefin;amp;autre chofèaudiéf Thefin ne fut meffaid, mais fut enuoyé; amp;nbsp;le

faulua le feigneur Robert,amp;: aufh fes bîens.En cefle Rocque n’êtroient point

fes deux grands hommcs,comme ils vouloicnt: car le Capitaine y auoit fon

frcre,amp; bien cinquante hommes à gages,amp; faifoit garder La porte quand ils

y cntroient,amp;n’y menoient iamais qu’vn homme ou deux auec eux :amp; du-

racecy longuemcnt.Cependant fortit grand différend entre Icdióf feigneur '

Ludouic amp;nbsp;Robert deûinâ:Sciierin, comme il eft bien decouflume (car

deux gros ne fcpcuuent endurer) amp;nbsp;demeura le pré au feigneur Ludouic;

amp; l’autre s’en alla au feruice des Vénitiens. Toutesfois, puis apres il reuint

deux de fes enfans au fcruicedudiél feigneur Ludouic del’eftat de Milâ,

qui furent meffire Galeas amp;nbsp;le Comte de Caiazze. Aucuns dient du feeu du-

diélpere, les autres dient que non . Mais comment que ce fuft,lediôlfei- *■ . nbsp;nbsp;'

gneur Ludouic les printen grand amour, fen efl depuis bien ferui. Et ' ' j faut entendre que leur pere le feigneur Robert de fainélSeuerin, eftoit de

lamaifbn de fainólSeuerin,faillyd’vncfillebaftarde:maisilsnefontpoinu

X

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grande dißerence au païs d’Italie d’vn enfant baftard â vn legitime.ledy ce-cy,p3r ce qu’ils ayderent à conduire noftreentrcprinfe du païs d’Italie, tant enfaueur du Prince de Salernc(dont i’ay patlé^qui eft chef de ladidemaifon de fiinâ: Seuerin,quc pour autres caufes que ie diray cy apres.

Lcdiól feigneur Ludouic commença toft à monftrer de fort vouloir tarder fon authorité : Si feit faire monnoye, où le Duc cftoit empraint d’vn coftc,amp; luy del’autrc, quifaifoitmurmurerbeaucoupdegens. LediólDuc fut marié auec la fille du Duc de Calabre,qui depuis fut Roy Alpbôfe, apres la mort de fon pere le Roy Ferrand, Roy de Naples. Ladiôbe fille eftoit fort co^urageufe,amp; euR volontiers donné credit à fon mary, fi elle euft peu : mais iln’elfoitpas gucresfiigc, amp;reueloitce qu’elle difoit. Aufli fut long temps en grande authorité le Capitaine de celle Rocque de Milan , quiiamais ne failloitdededans;amp; fy commença à engendrer des foupfçons,amp;: quand l’vn filz failloit, l’autre dcmeuroitdedans.PoLir abbreger ce propos,enuironvn anoudeuxauantqueallifiions en Italie, lediél feigneur Ludouic, venant , de dehors aucclcdidDuc,*pour luy faire dommage,ramcna pour defeen--dre à la Rocque,comme ils auoient de couIlume.Le Capitaine venoit fus le pontleuis,amp; gens à l’entour de luy, pourbaiferla main audiél Duc,comme cil leur coullume .Celle fois efloic le Duc vn peu hors du pont : amp;nbsp;fut con-trainéllcdicl Capitaine de paffer vn pasparaucnturc oudeux ,tant que ces deux en-fans de faincl Seuerin le fàiiîrenc, amp;c autres qui efloient a l’entour d’eux. Ceuxdededansleuerentlepont,amp; lediélLudouic feit allumer vn bout de ^ugie,iuranr qu’il leur feroit trancher la telle, fils ne rendoient la place auant la chandelle bruflée, ce qu’ils feirent; amp;pourueut bienjadiéle place,ôc feurement pour luy,amp; parlant toufioursau nom du Duc:amp; feitvn proces à ce bo hornme,difànr qu’il auoit voulu bailler la place à l’Empereur.’ amp;nbsp;feit arreflcr aucuns Allcmans,difant qu’ils traiéboientee marché, amp;nbsp;puis les laiffa r^ler: amp;nbsp;feit décapiter vn fien Secretaire, le chargeant d’auoir guidé ceft œuure,amp; vn autre qui difoit qu’il emauoit fait lefdits meffages.Il tint le-diél Capitaine long temps prifonnicr,à la fin le laiffa aller, difant que madame Bonne auoit vne fois gaignévnfreredudiél Capitaine , pour le tuer, en entrant enladiôle Rocque,amp; que Icdiél Capitaine l’en auoit gardé:parquoy à celle heure luy fàuuoit lavie. Toutesfois iecroy que s’il eufl eflécoulpa-bled’vn tel cas,comme d’auoir voulu bailler le chafleau de Milan à l’Empe-reur,auqucl il pourroit prétendre droiét comme Empereur,amp; aufli comme Duc d’Auflriche (car celle maifon y querelle quelque chofejil ne luy eufl point pardonné. Aulfi ç’eufleffévn grand raouuement en Italiezcartoutl’e-flat deMilan fe fut tourné en vn iounpar ce que du temps des Empereurs,ils ne payoient que demi Ducat pour feu,amp; maintenant font fort cruellement traitiez,Eglifcs,Nqbles,amp; Peuple,amp; en vrayetyrannie.

Se fentant le fei^eur Ludouic faify de ce chafleau, amp;nbsp;la force des Gens-d’armes dccefle maifon fous famain, penfiide tirer oultre: carquiaMi-”*'lan,ilafbngouuernemenr,amp; toute la feigneurie : caries principaux de toute la feigneurie y demeurent,amp; ceux qui ont la garde amp;nbsp;gouucrncment des autres places, en font. Et de ce que contient ccfle Duché, ie ne vey iamais plus

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UE r H I L 1 r P E UE COMMIMES. 243 plus belle piece de terre,ne de plus grande valeur. Car quand le feigneur fe contenteroit de cinq cens mille Ducats ran,les fubielt;Shs ne feroient que trop riches,amp; viuroit Icdiél feigneur en fèurctézmais il en leue fix cens cinquante mille,ou fepr cens mille,qui eft grand’ tyrannie : auffi le peuple ne demande que mutation de feigneur. Quoy voyant le feigneur Ludouic,auecce que did cft,amp;cftant ja marieauec la fille du Duc dcFerrare, dont il auoit plu-fieurs enfiinSjfe prépara d’acheuer fon defir: amp;meit peine degaigner amis, tant en ladideDuché,que dehors d’Italie: amp;nbsp;premièrement Pallia des Vénitiens,à lapreferuation de leurs cfiats,defquels il eftoit grand amy, au preiu-dicc de fon bcauperc,à qui les Vcnitiens auoient ofté,peu parauant, vn petit pars,appelle* Polefin:qui efi tout enuironné d’cauë,amp;: abondant a raerueil-lesen tous bicns:amp; le tiennent les Vénitiens iufques à demie lieue de Ferra-, 0 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Rônigo,

.rc,amp;y a deux bonnes petites villes,quei3y vcucs, C’eft a fçauoir Rouigue er tabadia, Labadie:amp; le perdit lors qu’il faifoit la guerre aux Vénitiens,que luy feul cfmeut,amp; durant laquelle vint depuis leDucdcCalabre,Alphonfe,à fon fe-cours,duviuantdc Ferrand fon pere,amp;le feigneur Ludouic pourMilà,auec les Florentins,lePape,amp; Boulôgne.Toutesfois, cflans les Venities prefquc au dcfroubs,au moins ayans le pire,amp; fort minez d’argêt,amp; plufîeurs autres, places perdues,appointa ledidfeigneur Ludouicà l’honneur amp;nbsp;profit des Veniticns:amp; réunit vn chafeun au fien,fors cepauure Duc de Ferrare, qui a-uoitencommencé ladideguçrrc,àlarequefledeluy amp;nbsp;du RoyFerrand,dôt ledid Duc auoit efpoufé la fille:amp; fallut qu’il laiffaftaufdids Venitics le Po-lcfàn,qu’encores tiennent : amp;difoit Ion que le feigneur Ludouic en eutfoi-xâtemille Diicats.Toutesfois ic ne fçay fil cfl vray;maisfay veu lediôl Duc deFerrareen cefte creance. Vray clique pour lors il n’auoit pas efpoufé fa fille: amp;nbsp;ainficfloit continuée celle amitié entre luy amp;nbsp;les Vénitiens.

Nul feruiteur ne parent du Duc khan Galeas de Milandonnoit empef-me dudiót Duc,qui eftoitieunc amp;nbsp;^âge, Sc fille duDucAlphonfedeCa-labrc,que par cy dtuant ay nommé , filz aifné du Roy Ferrand de Naples: *' amp;nbsp;en l’an mil quatre cens quatre vingts amp;nbsp;treize , commença lediél fei-gneur Ludouicà enuoyer deuersIeRoy Charles huiélicfine, pour le pratiquer de venir en Italie,à conquérir Icdiól royaume de Naples pour deftrui-re amp;nbsp;affoler ceux qui les pofl'edoicnt,quci’ay nommez.Car cftans ceux là en force vertu , lediél Ludouic n’euft ofé entreprendre ce qu’il feit depuis. Car en ce temps là eftoient forts amp;nbsp;riches Icdiél Ferrand Roy de* Sicile, amp;nbsp;fon filz Alphonfc,amp; fort expérimentez au mefiier de la guerre, ôeeftiraez degrand cœur, combien que le contraire feveit depuis ; amp;lediôlfcigneur Ludouic cftoit homme treflage, mais fortcraintifamp; bien fquple, quand ilauoitpeur (i’en parle comme de celuy que i’ay con^nu, amp;nbsp;beaucoup de chofes traiélé auecques luy)amp; homme fans foy,fil voyoit fon profitpour la rompre.Etainfi,comme diéteft,l’an mil quatre cens quatre vingts amp;nbsp;treize, 4 P 3« comtnêçaà faire fentir à ce ieu ne Roy Charles huiâiefme, de vingt amp;nbsp;deux anSjdes fumées amp;nbsp;gloires d’Italie.-luy remonfirant comme diôt efi, ledroid: qu’il auoit en ce beau royaume de Naples,qu’il luy fçauoit bien blafonner amp;:

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'14 Vil. LI VRE Ù ES MEMOIRES louer; amp;nbsp;fadiefloit de toutes chofes à ceft Eftiennc de Vers ( deuenu Sencf-chai de Beaucaii'e,amp; enrichyjtnais non point encores à fon gré) amp;: au General Briflonnet,homme riche,amp; entendu en finances, grand amy lors du Sc-nefchal de Beaucaire,auquel il Eiifoit confeilleraudidh Briflonnet de fe faire Prcftrc,amp;qu’il le feroit Cardinal; à l’autrecouchoitd’vne Duché. Et pour commencer à conduire toutes ces chofes, lediél feigneur Ludouic enuoya vne grande Ambaflade deuers le Roy à Paris,auditl an, dont eftoit Chefle Comte de Caiazze, filz aifné dudicl Robert de Qinôt Seuerin, dont i’ay par-lé;lequcl trouuaà Parisle Prince de Salerne, dont il eftoit coufin : carceluy là eftoit Chefde la maifon de fainótSeuerin,commcdeirus i’ay dit: amp;nbsp;eftoit en France,chalTé dudid RoyFerrand,côme auez entendu parauant,amp; pour-• chaflbit laditle entreprinfe de Naples. Auec lcdiôl Comte de Caiazze eftoit • *Bpixoiofo, le Comte Charles de* Belleioyeufe,amp; meflire Galeas,Vicomte Milannois.

Tous deux eftoient fort bien accouftrez amp;: accompaignez.Leurs parolles en public n’éftoient que vi(itatiôns,amp; parolles aflczgeneralles; amp;nbsp;eftoit la pre-ftoiredtfa» miereAmbaflradegrande,qu’ilcuftcnuoyéc deuers Icdid feigneur. Il auoit Balbianus, ' bicnenuoyéparauantvnSecretairc,pourtraiótcrqucleDucde Milan, fon ncpueu,fuft teccu à hommage de Gennes,par procureur,ce qu’il fur,amp;: contre raifon;mais bien luy pouuoit le Roy faire cefte grace que de commettre quclqu’vn à le reccuoir: car luy eftant en la tutelle de fa mere, ie Pay receu en fon chafteau de Milan, moy eftant AmbalTadeur de parle feu Roy Louis onziefme de ce nom, ayant la charge exprefle de ce faire ; mais lors Gennes eftoit hors de leurs mains,amp; la tenoit meflire Baptifte de Campefourgoufe: amp;nbsp;maintenant que ie dy, le feigneur Ludouic l’auoit recouuréc ; amp;nbsp;donna à aucuns Chambelans du Roy,huid mille Ducats, pour auoir ladidc inuefti-■ ture,lefquels feirent grand tort à leur maiftre:car ils euflbnt peu parauant a-uoir Gennes pour le Roy,s’ils enflent voulu.Si argent deuoient prêdre pour ladide ini^ftiture,ils en deuoient demander plus;car le Duc Galeas en paya vne fois au Roy Louis mon maiftre,cinquantemilleDucats,defquels i’cncti trente mille Efeus contanr,en don dudid Roy Louis,à qui Dieu face pardo: toutesfois ils diloicnt auoir prins lefdids huid mille Ducats, du confente-ment du Roy:ledid Eftienne de V ers,Sencfchal de Beaucaire, eftoit l’vn de ceux qui en print; amp;nbsp;croy bien qu’il le fiiifoit pour mieux entretenir ledid feigneur Ludouic pour cefte entreprinfe oùil entendoit. Eftans à Paris les Ambafladeurs,dont i’ay parlé en ce chapitre,^ ayans parlé en general,parla à part,aucc le Roy,ledid Comte de Caiazze,qui eftoit en grand credit à Milan,amp; encores plus fon frère meflire Galeas de fiiind Seuerin,amp; par efpccial fur le faid des Gens-d’armes:amp; commença à offrir au Roy grans feruices ôc Ao»- aides,tantdegcnsqued’argent;carja pouuoit fonmaiftredifpoferde l’eftat tion dvn Pe- de Milan,comme fil euft efté licn,amp; faifoit la chofeaifée à conduire; amp;nbsp;peu deiours apres print Angé du Roy, amp;nbsp;meffire Galeas Vicomte, amp;nbsp;s’enalle-rcnt:amp; le Comte Charles de Belleioycufe demeura pour auancer l’œuure, UnrerdaHi- lequel incontinent Ce veftit à la mode Françoife, amp;nbsp;feit de tres-erandes dili-fltira ifdiiae- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;\ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;- I n nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•

cord('ßgt;rt»„cc gcucesiSc commenccrcnt pIL)iieu ts a entedre cefte matière. Le Roy enuoya ” cnltalie,vn nommé Peron de*Bafche,nourry en la maifon d’Anjou,du Duc lean

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 245-lea de Calabre,afïeólióné à ladióle entreprinferqui fut vers le Pape innoeêr, Vcnitiês, amp;nbsp;Florétins. Ces pratiques,allées amp;nbsp;venues durèrent fept ou huiét moySjOu enuirô;amp; lè parloir de ladite entreprinfe entre ceux qui la fçauoiêt en plufieurs faços; mais nul ne croyoit que le Roy y deuft aller en perfonne.

Commet le 7(py Charles hni^iepne^feitpaix aitec le nbsp;nbsp;nbsp;des Romains, l’Âr-

ehediic d’Autriche, leur renuoyant quot;Madame Marguerite de Flandres, deuant quefairefon 'voyage de Naples. nbsp;nbsp;Q H AT. 111.

J Endant ce delay, que ie dy, fc traida paix à Senlis entre le Roy amp;nbsp;l’Archeduc d’Au Eriche, heritier de ceEe maifon de Bourgongne:amp; combien que ja y eufttrefues, fifuruintil cas demalueillancexarleRoy laiflàlafilledu Roy desRo-mainSjfœur dudi(ÉArcheduc(laquelle eftoit bien icune)amp; print pour femme la fille du Duc François de Bretaigne, pour auoir la Duché de Brctaigne pailibledaquclle il pofledoit prefque tou gt;nbsp;te à l’heure dudiéltraidCjfors la ville deRenes,amp; la fille qui elloit dedansda-quelle elloit conduiéle foubs la main du Prince d’Orcngc,fon oncle, qui en auoit fait le mariage auec le Roy des Romains,ôe elpoufc par procureur en rEglifepubliquemenr:amp; futle tout enuiro l’an mil quatre ces quatre vingts amp;nbsp;douze.Pour Icdiél Archeduc-Sc en fa faueur, grâd Amballàde vinq||le par l’Empereur Federic,voullt;ât fe faire médiateur dudictaccord.Aufiiy enuoya le Roy des Romains,lemblableracnt y enuoya le Comte Palatin,ôc les Suil-fcs,pour moyenner ôi. pacifier:car il fembloità cous que grand’ qucllion en deuoit fourdre,amp; que le Roy des Romains cftoit fort iniurié, amp;nbsp;qu’on luy o-ftoit celle qu’il tenoit pour lafemme,amp; luy rendoilon la fille,quiplufieurs années auoit efté Roy ne de France. Fin de conte, la chofe termina en paix: * car chafeun eftoit las de guerre, amp;nbsp;par efpecial les lubieéls du * ^uc Philip-^AiciuduC^ pe,quiauoient tant foulFert(tanc par la guerre du Roy, que pour leurs diui-lions particulières) qu’ils n’en pouuoiét plusfe feit vnc paix de quatre ans feulement,pourauoir reposiôe leur fille, qu’on failoicdifficulcéde leurren-dre,au moins aucuns,quieftoient à l’entour du Roy amp;nbsp;deladiélefille;amp; àla-diéle paix me trouuay prefcnt,auec les députez qui y efioient-.a fçauoir mô-feigneur Pierre Duc de Bourbon, le Prince d’Orenge, amp;nbsp;monfeigneur des Cordes, amp;nbsp;plufieurs autres grans perlônnages; lut promis rendre audicl Duc Philippe ce que le Roy tenoit de la Comté d’Artois, corne il auoit elle promis en traiélant ledid mariagc(qui fut l’an mil quatre cens quatre vingts amp;nbsp;deux)que fil ne faccompliflbitjque les terres qu’on donnoic à ladiéle fille en mariage,retourneroient auec elle,ou au Duc Philippe: mais ja d’eblcc auoientprins ceux dudiél Archeduc, Arras,ôc lainél Orner. Ainfinc reftoit à rendre que Hefdin, Aire,ôcBetune,dont des rheurc^.it baillé le reuenu amp;nbsp;feigncurie,amp; y mirctofficiers,amp;leRoy retenoitlcschafteaux: y pouuoit mettre garnifons,iufques au bout de quatre ,ansquifinircnt a la fiinél lean, l’an mil quatre cés quatre vingts amp;nbsp;dixhuiél;amp; lors les deuoit rendre le Roy à mondiét feigneur l’Archeduc.^ ainfi fut promis amp;nbsp;iuré.

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X4lt;r VII. LIVRE DES MEMOIRES'

Si lefdiéls mariages furent ainfi changez felon l’ordonnance de l’Eglife ou non,ie m’en rapporte à ce qui en eft:mais pluficurs Doôteurs en Théologie m’ont dit que non,amp;pluheurs m’ont dit que ouy : mais quelque choie qu’il en foit,toutes les Dames ont eu quelque mal-heur en leurs cnfins.La noftre a eu trois filz de râg,amp;en quatre annees.d’vn a vefeu pres de trois ans, amp;nbsp;puis rnourut:amp;les autres aufii font decedez. Madame Marguerite d Auftriebe a efté mariée au Prince de Caftillc, filz feul des Roys amp;nbsp;Royne de Caftille,amp;de plulieurs autres royaumes; lequel Prince mourut au premier an qu’il fut marié, qui fut l’an mil quatre cens quatre vingts dix-fept.Ladide Dame demeura grolfe, laquelle accoucha d’vn filz, tout incontinent apres la mort de fon mari, qui a mis en grand douleur les Roy amp;nbsp;Royne de Caftil-• lc,amp; tout leur royaume. Le Roy des Romains fcft marié, incontinent apres CCS mutations dont i’ay parlc,aueclafillcdu Duc Galeas dcMilan, fœur du Duc lean Galcas,donta eftéparlé:amp; l’eft faiél ce mariage parla main du fei-gneur Ludouic. Le mariage a fort defpleu au Princes de l’Empire, amp;nbsp;à plu-îieurs amis du Roy des Romains,pour n’cftredemaifonhnoble,commcil leur fembloit qu’il leur appartenoit.Car du collé des Vicomtes, dont fap-pellent ceux qui regnet àMila,y a peu de nobleflc,amp; moins du coftédeSfor-ce,dont eftoit fils le Duc Fraucifque deMilâ : car il cftoit filz d’vn Cordoüa-*f»/?.iZeprc. nier d’vne petite ville appellee Cotignoles • mais il fut homme ’treflomp-•»quot;’tuvvM. tucuî^Bc encores plus le filzjlcquelfe feit Duc de Milan, moyennant la fa-tueux. nbsp;nbsp;nbsp;ueur de fa femme,baftarde du Duc Philippe Marie; amp;laconqucfta, amp;nbsp;pof-

fcda,non point comme Tyran;mais comme vray amp;bonPrince:amp;:eftoitbie à eftimer la vertu amp;nbsp;bonté aux plus nobles Princes qui ayent régné de fon tcmps.le dy toutes ces chofes,pour moftrer ce qui fi eft enfuiuy de la mutation de CCS mariages,amp; ne fçay qu’il en pourra encores aduenir.

Commen^le nbsp;nbsp;nbsp;ennoya devers les Vénitiens^pour lespraticquer.^ deuant quen--

{reprendrejon voylt;i^s ded^laples'.c^ despreparatijs quife feirentpour lny,, CHAT, 11II.

Our reuenir à noftre matière principale, vous auez entédu comme leComte de Caiazzc, Vautres AmbaIEideurs,par-tiret d’auec le Roy,dc Paris,ôc cornent plufieurs pratiques le menoient par Italie, amp;nbsp;comment noftre Roy tout icune qu’il cftoir,l’auoitfortau cœur, mais à nul ne fen defeou-uroitencores,forsàcesdeux. Aux Vénitiens fut requis de

par le Roy qu’ils voulfilTcnt doner aide amp;nbsp;confeil en ladide entreprinfe: lef-quels feirent refponce qu’il fuft trefbié venu, mais qu’il ne luy pourroiét faire aide,pour la lufpiçiô duTurc(côbien qu’ils fulTcnt en paix auec luy) amp;quc de cofeiller a vn fi fige Roy,amp; qui auoit ii bon cofcil, cc feroit trop grande prefomptiô à eux,mais que pluftoft luy aideroiét que de luy faire cnnuy.Or notez qu’ils cuidoiet bien fagemét parler, amp;nbsp;aufti faifoient ils. Car pour au-iourd’huy ic croy leurs affiires plus fagemét confeille2,que de Prince ne co-munautc qui foit au modecmais Dieu veyt toufiours que Ion cognoilTe que les

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 247 les iugemêsjiie le fens des homes,ne ferner de rien là où il kiy plaiE mettre la main.Il dilpoLi l’afhrire autremét qu’ils ne cuydoiet : caril ne croioict point que le Roy y alkafr en perfonne;amp;: ii n’auoientnullepeur du Turc, quelque chofe qu’ils difét:car leTurCyqui rcgnoir,clioitde.petitcvalcur:mais il leur femblüic qu’ils fe végeroient de eeße maiion d’Arragô,qu ils auoict en giad’ haine tant le pere que le hlz , dilàns qu’ils auoient fait venir le Turc à * Scu-tary. l’entcnle peredeceEuy Turc, quiconquifr ConEantincpIe, appelle Mahumet Ottoman , êc qui feit plufieurs autres grands dommages aux Vcnitiens.Du Duc de Calabre, Aiphonle,ils diloicnt pliilieurs autres chQ_ rntiennts fcs:amp;entre les autres, qu’il auoit efté caufe delà guerre qucimçut contre eux le Duc de Ferrarc,qui merueilleufemêt leur coufta, en cuiderent ehre deftruiólsfdeladicteguerrei’enay dit quciquemot) amp;nbsp;difoientsulli que le' • Duc de Calabre auoit enuoyé home expres à Venife pour cmpoiionru'r les cilterneSjau moins celles oùilspourroiécioindre: carpluhcurs font fei ces àcletfôe audiôllieu n’vfentd’autreeauc;car ilsfontdetouspoinôhalii;jcn la mcr,amp; cft l’eauë trcfbonne,amp; en ay beu huidl moys pour vn voyage fcul, y ay eflé vne autr'esfois depuis la laifon dont ie parle) mais leur principale raifon ne venoit point de là:ains pourcequeles dclTufdiôls les gardoiêr d'ac-croiEre à leur pouuoir, tant en Italie comme en Grèce. Car des deux coEez auoient les yeux ouuerts.-toutesfois ils auoient nouucllement conqucEéle royaume de Chipre,amp;: fans nul tiltre. Pour toutes ces haines fcmbloit auf-' diéls Vénitiens,que c’eEoit leur profit que laguerrefuft entre le Roy amp;: la' dide maifon d’Arragon,e(perans qu’elle ne prendroit fi prompte conclufio qu’elle piint,amp; que ce ne feroit qu’affoiblir leurs ennemis, amp;nbsp;non point les defiruire: amp;nbsp;que au pis venir, l’vn parti ou l’autre, leur donneroit quelques villes en PouillefquieftducoftédeleurGouffre) pour les auoiràleuraide: amp;nbsp;ainfi en eftaducnu,mais il a peufailly qu’ils ne fc foyent mefeontez; amp;: puis leur fcmbloit qu’on ne les pourroit charger d’auoir fait venit le Roy en Italie,veu qu’ils ne luy en auoient donne confcil,ny aide, comme apparoif-foit par la refponfe qu’ils auoient faide à Peron de Bafche.

En l’an mille quatre cens quatre vingts amp;nbsp;quatorze tira le Roy vers Lion 1404. pour entendre à fes affaires( non point qu’on cuidaE qu’il paflaE les monts) amp;nbsp;là vint vers luy mcflire Galeas,frere au Comte de Caiazze , defaimd Se-ucrin,dont a efté parlé, fort bien accompaigné, de par le feigneur Ludouic, dont il eftoit Lieutenant amp;nbsp;principal feruiteur : amp;nbsp;amena grand nombre de beaux amp;nbsp;bons cheuaux; amp;nbsp;apporta du harnois pour courir à la ioufte:amp;y courur,amp;bien:car il eftoit ieune de gentil Cheualier. Le Roy luy feit grand honneur amp;nbsp;bonne chere,amp; luy donna fon ordre, amp;nbsp;puis f’en retourna en Italie ; amp;nbsp;demoura toufiours le Comte de Belleioyeufe Ambafladeur, pour nuancer l’allée.-amp; fe commença à apprefter vne trci'gryfte armée à Genes,amp; y eftoir,pour le Roy,le feigneur d’Vrfé, grand Efcuyer de France, amp;nbsp;autres. A la fin le Roy alla à Vienne au Dauphiné gt;nbsp;enuiron le commencement d’Aouft audidan : amp;nbsp;là venoient chafeun iour les Nobles de Genes, où fut enuoyé le Duc Louis d’Orléans, qui fut depuis Roy, homme ieune, amp;nbsp;beau pcribnnage:maisaymanÉ fon plaifir(dcluyeftaircz parlé en ceS Me-

X iiij

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X4S nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;VIL LIVRE DES MEMOIRES

moires)amp; cuidoit on lors qu’il deuft conduire l’armée par mer, pour defcen- . dre au royaume deNaples,par l’aide amp;:confeil des Princes qui en cfloicnt ' chaflez,amp; que i’ay nommez.-c’cft àfçauoir les Princes de Salerneamp; de Biß-gnan.Et furent prells iufques à quatorze nauires Gcneuois, amp;nbsp;plufieurs ga-lées,amp; gallions:amp; y efloitobey le Roy encecas,commeàParis; car ladióte cité eftoit fous l’eftat de Milan,que gouuernoit le feigncur Ludouic * amp;nbsp;n a-uoit compétiteur leans que la femme du Ducfon nepueu,que i’ay nommée, fille du Roy Alphonfe ( car en ce temps eftoit ja mort fon pere le Roy Fer-rand)mais le pouuoir de ladiéle Dame eftoit bien petit;veu qu’on voyoit le Roy preft à pafler,ou à enuoyer,amp; fo mary peu lage,qui difoit tout ce qu’elle diloitjà fon oncle, qui auoit ja fait noyer quelque meftàger, qu’elle auoit • enuoyé vers fon pere.

Ladefpcnfedecenauireeftoitfortgrande, amp;nbsp;fuisd’aduis qu-’clle coufta trois cens mille Francs , amp;nbsp;fi ne feruit de rien ; amp;nbsp;y alla tour l’argent contant que le Roy peut finer deles finances; car comme i’ay dit, il n’eftoit point pourueune de fens,ne d’argent, n’y d’aurre chofe necefiaire â telle entre-prinfe : amp;nbsp;fi en vint biê à bout,moyennant la grace de Dieu, qui clairemêt le donnaainfiâ congnoiftre.Ie neveux point dire que le Roy ne fuft fiige de fon aage:mais il n’auoit que vingt amp;nbsp;deux ans,amp; ne faifoit que faillir du nid. Ceux qui le conduifoient en ce cas,que i’ay nommez, à Icauoir Eftienne de Vers, Sencfchal de Bcaucaire, amp;nbsp;le General BrifTonnet, qui fut Cardinal de fainôlMalo,eftoicntdeux hommes de petit eftatj^c qui de nulle chofe. n’a-uoienteu experience; mais de tant monftra noftreSeigneurmicuxfipuif-lànce:carnos ennemis eftoient tenus treflages amp;nbsp;expérimentez au faiôlde la gLicrrc,riches,amp; pourucus de figes hommes,amp; bos Capitaines, amp;nbsp;en poft feftîon du royaume.le veux dire le Roy Alphonfe,de nouucau couroné par le Pape Alexandre, natifd’Arragon:qui tenoit en fon parti les Florentins,amp; bonne intelligence au Turc. Il auoit vn filz gentil perfo^rnage, nommé Dom Ferrand , de l’aagcde vingt deux ou vingt trois ans, aufti portant leharnois, amp;nbsp;bien aimé audiét royaume :amp; vn frere appelle Dom Fedc-ric, depuis Roy,apres Ferrand, durant noftre aage, homme bien fige, qui conduifoit leur armée de mer,ayant eflé nourry par deçà long temps: ôc duquel,vous monfeigneur deVienne,ra’auez maintesfois affeuréjpar Aftrolo-gie,qu’il feroitRoy:amp; me promit des lors quatre mille liures de rente au-diôl royaume,fi ainfi luy aduenqit:amp; a efté celle promefle vingt ans deuant quelccasaduint.

Or pour continuer,le Roy mua de propos,à force d’eftre prefte du Duc de Mila par lettres, amp;nbsp;parce Cote Charles deBclleioyeufe fon Ambafradcur,amp; aufti des deux que i’ay nomezitoutesfois le cœur fiillit audit General,voyat que tout home fige amp;nbsp;raifonnable blafmoit le voyage de par de là par pki-fieurs raifons,amp; parêftre là fur les champs au moys d’Aouft,fans argent, amp;c fans toutes autres chofes ncceftaires:amp; demeura lafoy audit Senefchal feul, dont i’ay parlé :amp; feit le Roy mauuaisvifigeaudiôl General, trois ou quatre iours,puis il fe remit en train. Si mourut à l’heure vn feruiteur dudiél Senefchal (comme Ion difoit) depefte:parquoy il n’ofoit aller autour du Roy, ' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;dont

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DE PHILIPPE DË COMMIMES. 2^^ dont il eftoit bien troublé:car nul ne follicitoit le cas.Monfieur de Bourbon amp;nbsp;madame cftoient là,cherchans ropre ledid voyage à leur pouu^oir:amp; leur en tenoit propos lediôt Gcneral:amp; l’vn iour eftoitl’allée rôpue, 8i l’autre re-nouuelce.A la fin leRoy fè délibéra dcpartir;amp;môtay a cbeual des premiers efperat pafler les móts en moindre côpaignie:toutcsfois ie fu remade,dilànt que tout efloit rompu: amp;nbsp;ce iour furent empruntez cinquante mille Ducats d vn marchâd de Milan:mais le feigneur Ludouic les bailla, moy ennat plci-ges,qui fobligerent vers lediôt marchant:amp; y fu,pour ma part,pour fix mille Ducats,amp; autres pour le refte:amp; n’y auoit nuis intcrefls. Au parauant on auoit emprunté delà banque de Soîy de Gennes, cent raille Francs ;qui coLifterent en quatre moys quatorze mille Francs d’intereft.-mais aucuns di-foient que des nommez auoient part à cell argent,amp; au profit. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.

/

Qomment le nbsp;nbsp;nbsp;Charles partit the tienne en Dauphiné,pour conquerir^aples

en per^onne’.amp;' de ce queßeit fon armée de mer,foubs la conduire de monfeigneur d'Orléans. CHAT. K

Out cóclufion,lc Roy partit de Vienne,le vingt-troifiefine iour d’Aoufl:,mil quatre cens quatre vingts quatorze,amp; tira droit vers Aft. A Suze vint vers luy mefiire Galeas de làinôt Scuerin,cn pofte.DelàallaleRoy à Thurin,amp;y emprunta les bagues de Madame de Sauoye, fille du feu Marquis le feigneur Guillaume de Monferrat,amp; veufue duDuc Charles de Sauoye,amp; les mit en gage pour douze mille Ducats.-amp; peu deiours a-pres futàCafal, verslaMarquifedeMontferrar, dameieune, amp;nbsp;fige, veuf-ueduMarquis deMôtferrat.EllceftoitfilIcdu Roy de Seruie.LcTurcauoic coquis fo pais: amp;nbsp;rErapcrcur,de qui elle efloit parccejl’auoit mariée là,rayâc parauenturerecueillie.-elle prcftaaufiifesbagues, quiaufiifurenoiiengagées, pour douze mille Ducats.Et pouuezveoir quel commencement de guerre c’eftoit fi Dieu n’euft guide l’œuure ; par aucuns iours fe tint le Roy en Aft. Cefte année là tous les vins d’Italie cftoient aigres, ce que nos gens ne trou-uoient point bon,ne l’air qui cftoit fi chauld.Là vint le feigneur Ludouic,amp; û femme,fort bien accompaigncz,amp; y fut deux iours; amp;nbsp;puis fc retira à Nó,. vn chafteau qui eft de la Duché de Milan,à vue lieue d’Aft,amp; chafcunioiir le confeil al loit vers luy.

Le Roy Alphonfe auoit deux armees par païsj’vne en la Romanic, vers Ferrare, qucconduifoit fon filz; amp;nbsp;auoitauec luy le feigneur VergileVr-fin,le Comte de Pethilhanc, amp;lefcigneur lean Lacques de Trcuoul, qui depuis fut des noftres. Et contre eux cftoit pour le Roy, monfeigneur d’Aubigny,vnbon amp;nbsp;fàgeCheualier, auec quelques deux censHommes-d’armcs.ïlyauoitauftidu moins cinq cens Hommes-d’armes Italiens aux dclpês du Roy, que côduifoit le Comte deGaiazze,qu’aflez aucz ouy nom-mer,quiyeftoitpour le feigneur Ludouic: amp;n’eftoitpoint fans peur que cefte bande ne fuft rompue : car nous fufttons retournez, amp;ilcuftcufur les bras fes cnncmis,qui auoient grande intelligence en cefte Duché de Milan,

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Ifo VII. LIVRE DES MEMOIRES

L’autre armée elloit parmer, que conduifoit DomFederic, freredudiét Alphonfe:amp; citoit à* Licorne amp;âPife(car les Florentins renoient encores Jtfeni, Liuoi- i nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;111/ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;n • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;/T'

no. pour eux )amp; auoient certain nombre de galecs :amp; citoit aucc luy mclhre *BrctodcFlifco,amp; autres Gencuois:au moyen delquels ils cfperoientfaire faillit qu’ils ne le feiflent à Specie amp;nbsp;àRa-palo,pres de Genes, où ils mcirent en terre quelques mille hommes de leurs partifans:amp;de faiôtjCuflent fait ce qu’ils vouloient, fi roll nculTenteftéaf faillis’.mais cc iour, ou le lendemain, y arriua le Duc Louis d’Orléans, auec quelques naues,amp; bon nombre de galées, amp;nbsp;vne groITe galeace, quieftoit mienne, quepatronifoit vn appellémclTire AlbertMely: fur laquelleelloic lediâ: Duc amp;nbsp;les principaux. En ladiôte galeace auoit grande artillerie, amp;nbsp;• groITes pieces, car elle elloit puilTantczóc fapprocha fi près de terre que l’artillerie defeonfit prefque les ennemis, qui iamais n’enauoient veudefem-blable, amp;nbsp;elloit chofe nouucllc en Italie ; amp;nbsp;defeendirent en terre ceux qui clloycntaufdiélsnauires: amp;nbsp;par la terre venoient de Genes ( où eftoitl’ar-mée) vn nombre de Suifles, que menoit le Baillifdc Dijon : amp;nbsp;aulfi y auoic des gens du Duc de Milan,que conduifoit le frère dudiél Breto,appellé mef fire Ichan Louis de Flifco,amp;meflirc lean Adorne; Icfquels ne furent point aux coupsrmais feirent bien leur deuoir,amp; gardèrent certain pas. En effeél, parce que nos gens ioignirent les ennemis, ils furent dcffaiéls, amp;nbsp;en fuite. Cent ou fix vingts en mourut : amp;nbsp;huiél ou dix furent prilonnicrs,amp;cntre les *r«|ofino, autres vnappelléle* Fourgoufin, filz du Cardinaldc Genes. Ceux qui ef-c«».lt;yz’z- chapperent,furent tous mis enchemifepar les gens du Duc de Milan:amp;au-tre mal ne leur feirent : amp;nbsp;leur efl ainfi de couflume. le vey toutes les lettres qui en vindrent, tant au Roy qu’au Duc de Milan;amp; ainfi fut cefte armée de mer reboutée qui depuis ne fapparut fi près. Au retour, les Geneuois fe cui-derent efmouuoir,amp; tucrent aucuns Allemans en la ville, ôc enfuttuéaucûs

des leurs;«iais tout fut appaifé.

goufes. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ji Eim jji-ç quelque mot des Florentins,qui auoient enuoy é vers le Roy,

auant qu’il partift de France,deLixfois,pourdiftimuler auec luy. L’vnc fois metrouuayà befongner auec ceux qui vindrent en la compagnie dudict Senefchal amp;nbsp;General : y eftoient rÉuefquc * d’Arcfc,amp; vn nommé Pierre ^^1 Sonderin. On leur demanda feulement qu’ils baillaflcnt paflage. Si cent |io,amp;pietro Hommcs d'armcs,à la foulde d’Italie(qui n’eftoit que dix mille Ducats pour vnan) euxparlans par le commandement de Pierre de Medicis, homme icune,amp; peu fagc,filz de Laurens de Medicis, qui eftoit mort, amp;nbsp;auoit efté ’des plus fages hommes de fon tcmps:amp; conduifoit cefte cité prefque comme feigneur, amp;auflifaifoit le filz:car ja leur maifon auoit ainfi vefeu, la vie

de deux hommes parauant;qui eftoient Laurens,père dudiél Pierre, amp;nbsp;Cof-me de Mcdicis.-qui fut le chefde cefte maifon,amp; la commençahomme digne d’eftre nommé entre les tref grads; amp;nbsp;en fon caSjqui eftoit de marchan-difc,eftoit la plus grand’jnaifon que ie croy qui iamais ait efléau mondexar leurs feruitcurs ont eu tant de credit,foubs couleurde ce nô deMedicis,que cc feroit mcrueilles à croire,à ce que i’en ay veu en Flandres amp;nbsp;en Angletcr-rc.I’en ay veu vn,appelle Gucrard Quanuefe,prefquc cftrc occafion de fouit cnir

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, ftenirleRoy Edouard Ie' quart en fou cHat,'eftant guerre en fon royaume d’Angleterre,amp;fournir par fois audiól Roy plus de fix vingts mille cicus, où il feit peu de profit pour fon mailf re:toutesfois il recouura fes pieces à la longue.Vn autre ay veu5nommé amp;nbsp;appelle Thomas Portunay, eifrepleigc entre ledidlRoy Edouard amp;nbsp;le Duc Charles de Bourgongne, pour cinqua-' le mille Efeus, amp;nbsp;vne autre fois, en vn lieu, pour quatre vingts mille. le ne loue point les marchands d’ainli le Elire ; maisie lotie bien à vn Prince de tenir bons termes aux marchâds,amp;: leur tenir verité.-car ils ne fçauent à quelle heure ils en pourront auoir befoing : pour ce que quelque fois peu d’argent fait grand feruice.

il fembleque'ceflc lignée vint a faillir, comme on fait aux Roy^yjmes amp;nbsp;Empires:amp; l’authoritédes predeceffeursnuifoit à ce Pierre de Medicis,co- • bien que celle de Cofme,qui auoit eftede premier, fufldoulce amp;nbsp;amiable, ’ amp;nbsp;telle qu’eftoit neceffaireà vne ville de liberté. Laurens perede Pierre, dont nous parlonsa cefte heure, pour le différend dont a cfté parlé en aucun endroit de ce *liure,qu’il euft coptrcceiixdePife amp;autres, dont plufieurs * furent pendus en ce temps la, auoit prins vingt hommes pour fc garder par conamandement amp;nbsp;congé de la feigneurie, laquelle commandoic ce qu’il vouloir : tOLitesfois modérément fe gouucrnoit en cefte grande ayjhorité Hures, ce Je-(car comme i’ay dit,il cftoit desplusfagesdefon temps)maislefilz cuidoit eß aufueiefine, que cela luy fuft deu par raifon:amp; fc faifoit craindre, moyennant cefte garde, amp;nbsp;faifoit des violences de nuiôl, amp;nbsp;des bateries lourdement ,abu(ant de leurs deniers communs, aulTi auoit fait le pere, mais fi fagement qu’ils en e-ftoient prefque contens.

A la fécondé fois enuoyalediôf Pierre a Lion, vn appelle Pierre Cappon, ô: autres : amp;: difoit pour exeufe, comme ja auoit fait, que le Roy Louis on-ziefme leur auoit commandé à Florence fe mettre en ligue auec le Roy Fer-iand,du temps du Duc Ichan d’Anjou,amp; laifler fon alliance,diftns que puis que par le commandement du Roy auoient prins ladiófe alliance,quidu-roit encores par aucunes années , ils ne pouuoient laifler l’alliance de la maifon d’Arragon: mais quefile Roy venoitiufqueslà,qu’ilsluyferoient des feruices : amp;nbsp;ne cuidoient point qu’il y allaft,non plus que les Venitiens. En toutes les deux Ambaflades y auoit toufiours quelqu’vn ennemy dudiôt de Mcdicis,amp; par efpecial cefte fois lediôt Pierre Cappon, qui maintesfois aduertiffoit ce qu’on deuoit faire pour tourner la cité de Florence contre le-did Pierre; amp;nbsp;fùfoitfa charge plus aigre qu’elle n’eftoit, amp;aufli confeil-loit qu’on bannift tous les Florentins du royaume : amp;nbsp;ainfi fut fait. Cecy ic dy pour mieux vous faire entendre ce qui aduint apres : car leRoy demeura en grand’inimitié contre lediól Pierre; amp;nbsp;lefdiéfs Senefchalamp; General a-auoient grand’intelligenceauecfes ennemis enladiéfecité, amp;nbsp;par efpecial auec ce Cappon,amp; auec deux confins germains dudi(^ Pierre,amp; de fon nom propre. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i

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zjx nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;vu. LlVKh Dbo M hMUJK

Comment le nbsp;nbsp;nbsp;cß^ant encor en Äß,ß reßoltit depaßer oultre vers ‘Naples à la l^our-

ßuitc^e Ltidotiie Sßorcequot;. nbsp;nbsp;comment meßire T’htlij^pede Comminesfut enuoyéert

Amhaßaded J^eniß^e^ delà mort du Duc de Milan,a^res laquelle Ludouicßfiit Duc,aupreiudiced'iceluj Duc. QHAT. ßl.

’Ay dit ce qui aduint à Rapalo par mer.Dom Fedcric le rcti-^ra à Pife amp;nbsp;à Ligornc:amp; depuis ne recueillit les Ges depied, qu’il auoit misa tciTc:amp;fennuyerenr fort les Florentins de luy,comme plus enclins, amp;nbsp;de tout têps,à la maifon de Fra-ce qu’à celle d’Arragon:amp; noftrc armée,qui elloit en la Romanic, combien qu’elle full la plus foible,toutesfoisfaifoit f)rofperçr nollre cas:amp; comença peu à peu à reculer Dó Ferrand Duc de Ca-abre.C^^y voiant le Roy,fe mit en opinio de paffer oultre, follicité du feigneur Ludouic,amp; des autres que i’ay nommcz:amp;luy dill le feigneur Ludouic à fon arriuée: Sire,ne craignez point celle entrcprinfe:en Italie y a trois

Malo.

puifTances que nous tenons grandes, dont vous au«z l’vnc, quicfl; Milan: l’autre ne bouge, qui font les Vénitiens,ainfn’auez affaire qu’à celle de Na- ' ples:amp; plufieurs de voz predeceffeurs nous ont batus,quenous eftions tous enfemble:quand vous me voudrez croire,ie vous aideray à faire plus gtand que ne fut iamais Charlemaignc : amp;nbsp;chafferons ce.Turc hors de celle Empire de Conllantinople aifément, quand vous aurez ce royaume de Naples. Et difqjt vray du Turc qui rcgnoit,mais que toutes cho les euffent efté bien difpofées de no lire collé. Ainfi fe mit le Roy à ordonner de fon affaire, felon le vouloir amp;nbsp;conduire dudiólfeigneur Ludouic; dont aucuns des no-fires eurent enuie: amp;nbsp;fut quelque Chambelan, amp;nbsp;quelque autre, fins propos ( car on ne fc pouuoit paffer de luy ) amp;nbsp;eftoit pour complaire à monfei-gneur d’Orleans, qui pretendoit la Duché de Milan :amp; fur.tous en eftoit enuieux ce generah.car ja fellimoit grand, amp;nbsp;y auoit quelque enuie entre le aiScfcS Sencfchal â*luy:amp; dill lediél Ludouic quelque mot au Roy, amp;: * à luy pour pout le faite le faire dcmeurer,quimouuoitlediél General à parler contre luy , amp;difoit qu’iltromperoit la compagnie : mais il elloit mieux feant qu’il s’en fell teu: car iamais n’entra amp;nbsp;ne vint en credit en chofed’eflat,amp; ne s’y congnoif-foit,amp; fi elloit homme leger en parollc,mais bien affedionné à fon maillrc; toutesfüis'il fut conclu d’êiiôyer plufieurs hommes en Ambaflade, amp;nbsp;moy,

entre les autres,à Venife. ledcmouray à partir aucuns iours, par ce que le Roy fut malade de la petite veröle, amp;nbsp;en peril de mort,par ce que la Heure fe méfia parmi:mais elle ne dura que fix ou fept iours: amp;nbsp;me mey à chemin ailleurs,amp; laiffay le Roy en Ail, amp;nbsp;croioyc fermement qu’il ne pafferoit point oultre.I’allay en fix iours à Venife,auec mulets amp;nbsp;train : car le chemin eftoit ’ Je plus beau du monde.'amp;craignoie bien à partir, doubtant que le Roy re-tournall:mais nollre^eigneur en auoit autrement difpofé. Si tira droid à Panic, amp;nbsp;paffa par Cafal,vers celle Marquifc,qui elloit bonne pour nous,amp;: bonne Dame,grandcennemie du feigneur Ludouic, amp;nbsp;luy lahaïfibit aufii. Apres que le Roy fut arriué à Pauie,commença ja quelque peu de foupçon; car on vouloir qu’il logeait en la ville,amp; nopoint au challeau, amp;nbsp;il y vouloit loger , amp;nbsp;y logea: amp;: fut renforcé le guet celle nuid (Gens me dirent,qui elloient

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eftoientpresdLidiâ:feigneur,qu’il yauoic danger)dontfefbahitJefeigneur LudouiCjamp;enparlaauRoyjdemandantfilfcfoupfçonnoitde lu y. La façon y eftoit telle des deux coflez que * la nuiólée n’y pouuoit sucres durer:

•J n. n.' nbsp;nbsp;1- nbsp;nbsp;nbsp;1^’ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;-Vr» nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•*

mars de noltre coite parlions plus qu eux : non point le Koy, mais ceux qui ^oßibiv^ eftoient prochains parens dcluy. En cechafteaude Panic eftoit le Duc de Milan,dót a cfté parlé cy deuât,appelle lea Galeas, amp;nbsp;fi femmc,fille du Roy Alphonfe,bicn piteufe;car fon mari eftoit là malade,amp; tenu en ce chafteau, comme en garde, amp;nbsp;fon filz,amp; vne fille ou deux ; ôe auoit l’enfant lors quelques cinq ans.Nul ne veit lediét Duc,mais bien l’enfant.I’y palTay trois iours auant le Roy,mais il n’y eut remede de le veoir: amp;nbsp;difoit Ion qu’il eftoit bien fort maladc.'toutesfois le Roy parla à luy,car il eftoit fon coufin germain;amp;: m’acomptélediélfeigncur leurs parollcs, qui ne furent que chofes general- nbsp;nbsp;nbsp;•

les .-car il ne vouloir en rien dcfplaire audid Ludouic : toutcsfois me’diftil qu’il l’eiift volontiers aduerti. A celle heure propre fe iettaà genoux ladidé Ducheife deuant lediél Ludouic,luy priant qu’il euft pitié de fon pcreamp; fre-re.Il luy rcfpondit qu’il ne fepouuoit faire : mais elle auoit meilleur befoing de prier pour fon mari, amp;nbsp;pour elle,qui eftoit encores belle Dame amp;nbsp;icune.

De la tira le Roy àPlaifànce, auquel lieu eut nouuellcs lediôl Ludouic que fon nepueu de Milan,fe mouroit.il print congé du Roy, pour y aller ; amp;nbsp;luy pria le Roy qu’il rctournaft,amp; il le promit. Auant qu’il fuft à Panic, ledit Duc mourut;amp; incontinent, comme en pofte,alla à Milan. le vey ces nou-uelles par la lettre de l’Ambaftadeur Vénitien,qui eftoit auec luy,qu’il eferi-uoit à Venife,amp; aduertiftbit qu’il fe vouloir faire Duc.-amp;: à la venté dire,il en deplaifbitau Duc amp;nbsp;leigneurie de Venife, amp;nbsp;me demandèrent ii le Roy tié-droit point pour l’enfant : amp;nbsp;combien que la chofe fuft raifonnable, ic leur mey en doubte,veu l’affaire que le Roy auoit dudiôl Ludouic.

Fin de compte,il fe feit receuoir pour feigneur:amp; fut la conclufion,corne plufieurs difoient.pourquoy il nous auoit fait pafter les Móts,le clgt;rgcat de la mort de fon nepueu,dont les parens amp;nbsp;amis en Italie, fe mettoient en chemin pour luy öfter le gouuernement; amp;nbsp;l’cuflent fait aifément, fe n’euft efté l’allcc du Roy:car ja eftoient en la Romanie,commc auez ouy.-mais le Com-tedeCaiazze, amp;nbsp;monfeigneurd’Aubigny,lesfiifoientreculer. Carlcdiél feigneur d’Aubigny eftoit en force de cent cinquate, ou de deux cens Horn-mes d’armes François, amp;nbsp;d’vn nombre de Suiftes : amp;nbsp;fe reculoit 1 ediôt Dom Ferrand vers leurs amis,amp; eftoit demie iournée,ou enuiron,deuant nos gês: amp;nbsp;tiradeuers*Sorly, dont eftoit Dame vne baftarde de Milan, veufue du Comte de Hieronyme,qui auoit cfte nepueu du Pape Sixte.On difoit qn’el- eflouaux an. le tenoit leur parti.-mais nos gens luyprindrent vne petite place d’aflault,qui uulj, lt;3 nefutbatuc que demy iour:parquoy elle fe tourna,auec le bô vouloir qu’el- 47,Xf” le en auoit, amp;nbsp;de tous coftez le peuple d’Italie commença à prendre cœur, defirantnouucllctez : car ils voy oient chofe qu’ils n’auoient point veue de leur temps.-car ils n’entendoient point le faid de l’artillerie,amp; en France n’a- ** uoit iamais cfté fibien entendu.Et fe tira ledit! Dom Ferrand vers*Sufanne, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;; g/

approchant du royaume,vne bonne cité qui eft au Pape,en la Marque d’An- cefena, g/ connezmais le peuple leur deftroufToit leurs fommiers ôc bagues, quand ils

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254 VII. LIVRE DES M E-MOIRES

les troLiuoicnt à part.-car par toute Italie ne defîroicnt c^u’à fe rebeller, lîJu collé du Roy les affaires fe fufleni bié códuiösjêc en ordre fans pillerie:mais tout fefaifoit au contraire,donti’ay eu grand dueil, pour 1 honneur amp;nbsp;bonne renommée,que pouuoit acquérir,en ce voyage la nation Françoife. Car le peuple nous*aduoüoit comme Sainéts,efl:imans en nous toute foy amp;nbsp;bo-*4^lt;,M»lt;/.o/?quot;^^:m3i5 ce propos ne leur dura guercs,tant pour nofire defordre amp;nbsp;pilleric, qu’auffi les ennemis prefeboient le peuple en tous cartiers, nous chargeans de prendre femmes à force,amp; l’argent, amp;nbsp;autres biens, où nous le pouuions trouucr. De plus grands cas ne nous pouuoient ils charger en Italie : car ils fontialoux amp;auaricieuxplus qu’autres. Quant aux femmes ils mentoient, mais du demeurant il en eftoit quelque chofe.

Qomment T terre de lt;iS^edicis meit quatre des princiqtales forterejjes des Florentins entre les mains du nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;comment le quot;R^y meit Fife,qui en nbsp;nbsp;nbsp;*

ejloit l’atne, enfa liberté. CH AT. FI I.

R ie laiffe le Roy à Plaifancc, felon mon propos, où il feit faire feruice folennclàfon coufin crermainleDucdeMi-

O

lan,-amp; fi croy qu’il ne fçauoit guercs autre chofe que faire, Milan, nouueau, efioit parti de luy : amp;nbsp;m’ont dit ceux qui le deuoient bien fçauoir,que lacompa-gnie fut en grand vouloirde retourner pour doiibte; amp;:fe

fentoient mal pourucus:car d’aucuns, qui auoient premier loué le voyage, le blafmoient, comme le Grand Efcuyer le feigneur d’Vrfé (combien qu’il n’y full point, mais eftoit malade à Gennes) car il efcriuitvne lettre, donnant grand foupfçon,difànt enauoir eftéaduerti -.mais cornei’ay dit en d’autres endroits, Dieu monftroit conduire l’êntreprinfe; amp;cut le Roy foub-daincs nouuelles que le Duc de Milan rctourneroit, amp;nbsp;aufii quelque fente-ment de Florence, pour les inimiticz que ie vous ay diôlcs,quicftoient contre Pierre de Medicis,qui viuoit comme s’il euft efté feigneur ; dont eftoient fes plus prochains parens, amp;nbsp;beaucoup d’autres gens de bien, comme tous * sonderini, ces Cappons, ccux dc * Fordomi, ceuxdeNcrli, amp;nbsp;prefquc toute la cite, PoLirlaquellecaufelediélfeigneurpartit, ßetiraaux autresterres 4 »«mmeJcs Florcutins pour les faire declarer pour luy,ou pour prendre de leurs vil-ijtte tjuelquet les qui eftoient foibles,pour s’y pouuoir loger pour l’hyucr, qui eftoit ja en-commencé, amp;fc tournèrentplufieurspetites places, amp;aumlacitédeLu-M»« nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;ques,ennemie des Florentins: amp;nbsp;feirent tout plaifir amp;nbsp;feruice au Roy : amp;nbsp;a-

Hommisode- uoit tou fiouts cfté Ic confcil du Duc dc Milan à ces deux fins, afin qu’on ne plus auant dc la faifon,amp; aufti qu’il cfpcroit auoir Pife (qui eft bonne amp;nbsp;grade cité)Scrzanc,amp; Pictrc-fiinólc.Les deux auoient cfté aux Geneuois, n’y auoit gueres dcfemps,amp; conquis fur eux par les Florentins,du temps de Laurens de Medicis.

* Pôtremo- Lc Roy print fon chemin par*Pontreme,qui eft au Duc de Milan, amp;nbsp;alla âfTicgerSerzanc,tresfortchafteau, amp;lc meilleurqu’euft'ent les Florentins, ÄI9H« Pon- pourueu pour leur çrand’ diuifion,amp; aufti à la vérité dire,les Florentins tncmoli. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;l nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;c? nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nul

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DE PHILIPPE DE COMM-INES. 2^ mal volontiers eftoyent contre la maifon de France, de laquelle ils ont eftéj de tout temps vrays lertiiteurs amp;parrifans, tant pour les affaires qu’ils ont en France,pour la marchandife, quepour eftrc de lapart des Guelfes:amp; fi la place euft effé bien pourueuë,l’armée du Roy eftoit rompue:car c’eft vn païs ftcrile Sgt;c entre montaignes, amp;nbsp;n’y auoit nuis viures, amp;nbsp;aiifii les neiges y e-ftoient grandes. Il ne fut que trois iours deuânt, amp;nbsp;y arriua le Duc de Milan auant la compofition:amp; pafia par Pontreme,oiï des gens de la ville garni-fon euren t vn grad debat auec nos Allemans,que conduifoit vn appelle Bu-fer, amp;nbsp;furent tuez aucuns Allemans: amp;nbsp;combien que ne fuffe prelent à ces choies,fi le m’ont compté le Roy,le DLiç,amp;autres:amp; de cc débat vint depuis grand inconuenient comme vous orrez apres. Pratique fe meut à FlorencCj amp;nbsp;députèrent gens pour enuoyerdeuers le Roy, iufquesà quinze ou feize, * difant en la cité qu’ils ne vouloient demeurer en cc grand peril d’eftre en la haine du Roy amp;nbsp;du Duc de Milan,qui toufiours auoit fonAmbaflade à Florence, amp;nbsp;cofentit Pierre^de Medicis celle allée. Aufli n’y eut il feeu remédier, aux termes en quoy les affaires eftoicntxar ils euflent effé deflruiéls, veu la petite prouifion qu’ils auoient, amp;nbsp;fi ne fçauoient que c’efloit de guerre. A-pres qu’ils furent arriuez,offrirent de recueillir le Roy à Florence, * amp;: en au-tres parties, amp;nbsp;nelcur chaloir à la plufpart, finon qu’on allaflla pour occa- Mtrespams. fion de chaffer Pierrede Medicis, amp;nbsp;fe fentoient auoir bonne intelligence auec ceux qui conduifoient lors les affaires du Roy , que plufieurs foisay nommez.

D’autre-part pratiquoit lediél Pierre, par la main d’vn fien feruiteur, appelle Laurens Spinely,qui gouucrnoit fa banque à Lion, homme de bien en fon efl:at,amp; affez nourry en France: mais des chofes de noflre Court ne pou-noit auoir congnoiffance,n’y à grand’ peine ceux qui y efloient nourris, tant y auoit de mutatiôszfi pratiquoit il auec ceux qui auoiêt l’authoritc, c’efloit monfeigncLir de Brcfrc,qui depuis a efté Duc de Sauoyc,amp; monftigneur de Myolans,qui efloit Chambclan du Roy. Toll apres les autres vindrent aucuns de la cité auec luy, pour faire refponfe des chofes qu’on leur auoit re-quifes : amp;nbsp;fe voyoient perdus en la cité, s’ils ne faifoient tout ce que le Roy vouloit.'duqucl ils cuydoient gaigner la bonne grace,amp;: faire quelque chofe plus que les autres. A fon arriuée furent cnuoyezau douant de luy, monfei-gneur de Piennes, natifdu païsde Flandres, amp;nbsp;Chambelandu Roy noflre Sirc,amp; le General Briffonnetjqui a elle icy nommé.Ils parlèrent audiél Pierre de Medicis d’auoir l’obeiffancc de la place de Serzane,ce qu’incontinent il feit.Ils luy requirent d’auanrage qu’il feift preflet au Roy Pifc,*Ligorne,Pie- *Liuornoac trcfànélcjôc Librefaélo ; lequel tout accorda,fans parler à fes compaignons, quifçauoientbienquelcRoy deuoiteflre dedans Pife, pour fe rafrefehir: mais ils n’entendoient point qu’il retint les places. Oré’efloit mis leur eflat, amp;nbsp;leur grand’force entre nos mains.Ceux qui traiéloicnt auecledid Pierre m’ont compté,amp; a plufieurs autres l’ont dit en fe raillant amp;nbsp;moquant de luy, qu’ils efloient efbahis comme fi toll accorda fi grand’ chofe,amp; à quoy ils ne fattendoient point.Pour conclufion le Roy entra dedans Pife, amp;nbsp;les deffuf-diôls retournerét à Florence, Se feit Pierre habiller le logis du Roy en fa mai-

Y ij

J

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VIL LIVRE DES MEMOIRES fon:qui eft Ia plus belle maifon de citadin on marchad^que i aye jamais veué, amp;nbsp;la mieux pourueuë,que de nul homme qui fuft au monde de fon eftar.

Or faut il dire quelque chofeduDuede Milan, qui ja euft voulu le Roy hors d’Italie,amp; auoit fait, amp;nbsp;vouloit encores faire fon profit, pour auoir les places qu’il auoit conquifes,amp; preifa fort le Roy pour auoir Serzane amp;nbsp;Pie-trefanôle, qu’il difoit appartenir aux Geneuois, amp;; preftaau Roy lors trente mille Ducats:amp; m’a dit,amp; à plufieurs autres depuis,qu’on luy promift de les 1 uy bailler ; ôt merueilleufement mal contant fe partit du Roy pour le refus, dilant que fes affaires le contraignoient de s’en retourner.'mais oneques puis le Roy ne le veit,toutcsfois il laiffa meflire Galeas de S. Seuerin auecle Roy, amp;nbsp;entendoit qu’il fuft en tous confeils auec le Côte Charles de Belleioyeufe • nbsp;nbsp;dont a efté parlé.Eftant le Roy dedans Pife, lediâ: meftire Galeas, conduiót

de fon maiftrc,feit venir en fon logis des principaux Bourgeois de la ville, leur Gonfeillafe rebeller contre les Florentins, amp;nbsp;requérir au Roy qu’il les mift en liberté, cfperanc par ce moyen que ladióle cité dePife toberoit foubs Ja main du Duc de Milan,où autresfois auoit efté,du temps du Duc Galeas, le premier de ce nom en la maifon de Milan,vn grandamp; mauuais tyran,mais honnorable.Toutesfois fon corps eft aux Chartreux à Pauie , pres du Parc, plus haut que le grand autel,amp; le m’ont monftré les Chartreux,au moins fes os(amp; y monte Ion par vnecfchelle)lefqucls fentoient comme la nature or-donne:amp; vn natif de Bourges,le m’appella fàinôt, amp;nbsp;ie luy demanday en l’oreille,pourquoy il l’appelloit fiiinól, amp;nbsp;qu’il pouuoit veoir painéfes à l’étour de luy les armes de plufieurs citez qu’il auoit vfurpées ou il n’auoit nul droit, amp;nbsp;luy amp;nbsp;fon cheual eftoient plus hauts que l’autel,amp; taillez de pierre, amp;nbsp;fon corps foubs le pied du cheual.il me refpondit bas:Nous appelions,dift il, en ce pais icy,Sainlt;fts,tous ceux quinous font du bien,amp; il feit cefte belle Egli-' fe de Chartreux.-qui à la vérité eft la plus belle que i’aye jamais veuë,amp; toute de beau nürbre.

Et pour côtinuer,ledi6l meftire Galeas auoit enuie de fe faire giad, amp;nbsp;croy qu’ainfifentcndoitleDucdeMilan, de qui il auoit efpoufé la baftarde:amp; montroit le vouloir auantager,comme fil eftéfon filz: car il n’auoit encores nuis enfins d’aage.Lefdidls Pifans eftoient cruellement traitiez des Florentins qui 1 es tenoient cfclaues ; car il les auoient conquis, il y auoit quelque cent ans,qui fut l’an que les Vénitiens conquirent Padouë : qui fut leur premier commencement en terre ferme, amp;nbsp;ces deux citez eftoient prcfque d’v-ne façon: car elles auoient efté anciennes ennemies de ceux qui les pofle-doient amp;nbsp;de bien longues années,auant qu’eftre coquifes, amp;nbsp;prcfque égales en force,amp; à cefte caufe tindrent confeil lefdicls Pifàns, amp;nbsp;fe voyâs confeil-Iczde fi grandhommc,amp; defirans leur liberté,vindrent crier au Roy, en allant à la mcfte,cn gr:y;id nombre d’hommes amp;nbsp;de femmes. Liberté, Liberté, amp;nbsp;luy fupplians les larmes aux ycux,qu’il la leur donnait: amp;nbsp;vn Maiftre des requeftes,allantdeuant luy,oufaifantl’office, quieftoitvn Confeillier au Parlement d U Daulphiné,appelle Rabotjou pour promefte, ou pour n’entendre ce qu’ils dcmandoient,dift au Roy,quc c’eftoit chofe piteufe, 5t qu’il leur deuoit ottroycr,amp; que jamais gens ne furent fi rudement traiélcz: amp;nbsp;le

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DE PHILIPPE DE COMMINES. 157 Roy qui n’entendoit pas bien que ce mot valoir, amp;nbsp;qui par raifbn ne leur pouuoit donner liberté (caria cité n’eftoic point benne : mais feulement y eftoit receu par amitié, amp;nbsp;â fon grand befoing J amp;nbsp;qui commençoit de nou-iieau â congnoiftre les pitiez d’Italie, amp;nbsp;le traidement que les Princes Ô£ Communautezfonta leurs fubieds, rcfpondit qu’il eftoitcontent; cc Confèiller,donti’ay parlé, leur dift; amp;nbsp;ce peuple commença incontinent à crier Nocl:amp; vontau bout de leur pont de la riuiere d’Arne ( qui eft vn beau pont)amp; iettent à terre vn grâd Lion,qui eftoit fur vri grand pilier de marbre^ * . qu’ilsappelloiét*Maior,reprefentant la feigneuriedeFlorencc,amp; l’emporte-rent à la riuiere, amp;nbsp;feirent faire defltis le pilier vn Roy de France, vne efpée au poing, quitenoitfoubs Icpied deibncheual ce Maior, quieftvn Lion. Depuis le Roy des Romains y eft entré, amp;nbsp;ont fait du Roy, comme ils • auoyent fait du Lion : amp;nbsp;ciya nature de ce peuple d’Italie d’ainfi complaire aux plus forts ; mais ceux la eftoient fi mal traidez,qu’on les doit exeufer.

Comment le nbsp;nbsp;nbsp;partit de la 'ville de Tife^pour aller d Florence:(^ de la faite

ruine de Ti erre de Medicis. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;CH AT. Fill.

SE Roy fepartitdelà,amp;y fciournapcu,amp; tira vers Florence: amp;nbsp;là on luy monftra le tort qu’il auoit fait aüfdids Florctins* amp;nbsp;que c’eftoit contre fa promefTe d’auoir donné liberté aux Pi fans. Ceux qu’il commit à refpondrc de cefte matière ex-cufiins la chofe, dirent qu’il ne l’auoit point entendu,amp; n’en-tendoit vn autre appointement,dont ie parleray,mais qu’vn Îgt;eu aye dit la conclufion de Pierre de Medicis,amp; aulfi de l’entrée du Roy en adide cité de Florence,amp; comme il laifTa o;arnifon dedans la cité de Pife, amp;: autres places qu’on luy auoit prefiées. Ledid Pierre,apres auoir frit bailler au Roy les places, dont i’ay parlé, dont aucuns efloient confentlt;is ,s’en retourna en la cité, penfànt que le Roy ne les tint point ; ains que des ce qu’il partiroit de Pife, où il n auroit affaire que trois ou quatre iours, la leur ren-droit.Bien croy-ie que fil y eufl voulu faire fon hyuer,qu’ils l’eufFent cofen-ti,combien que Pife leur eft plus grand’ chofe que Florence propre, fauflcs corps amp;nbsp;les meubles. Arriué que fut ledid Pierre à Florence, tout homme . luy feit mauuaisvifàge,amp;non fans caufe: car il les auoit dcflùifis de toute leur force ô^puiffance, amp;nbsp;de tout ce qu’ils auoient conquis en cent ans: amp;nbsp;fembloit que leur cœur fentift les maux , qui depuis leur font aduenus,amp; tant pour celle caufe, que iccroy la principale, combien qu’ils ne l’auoient iamais dit,quc pour la haine qu’ils luy portoient, que i’ay déclarée, amp;nbsp;pour retourner en liberté, dót ils fe cuy doient forclos:amp; fins auoir mémoire des biens-faiéls de Cofmeamp;: de Laurens de Medicis fes predeceffeurs, delibereren t de chaffer de la ville ledid Pierre de Medicis .I^diél Pierre de Medicis , fans le fçauoir, mais bien eftpit en doubtc, va vers le Palais,pour parler de l’arriuéc du Roy (qui encores cftoitàtrois mils près) amp;nbsp;auoit fa garde ac-couftuméc aucc luy, amp;nbsp;vint heurter à la porte dudiél Palaisdaquellcluy fut refufécpar vn de ceux de Ncrly (qui efloient plufieurs frétés, quei’aybicn

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258 VII. LIVRE DES MEMOIRES congnuSjS: leperctrcs-riches)difantqu’ily cntreroitluy fculjfil vouIöitjOU autrement non,amp; eftoit armeccluy qui faifoitcerefus.Incontincntretour-^ nalcdiótPierrea famaifon,amp; I’aimajuy amp;nbsp;fes feruiteurs : ö: feitaduertirvn

, appelle Paul Vrl]n,qui eftoit ala fouldedes Florentins (carlediót Pierre, de par El mere,cftoit des Vrfins, amp;nbsp;toußours lepere amp;nbsp;luy, en ancient entretenus aucûs de la maifon à leur foiilde)amp;delibera de refifter aux partifànsdelà ville. Mais tantoft on cuit crier Liberté, Liberté, amp;nbsp;vint le peuple en armes: amp;ainfi partit lediél Pierre de la ville, comme bien confeillé,à l’aide dudiôt Paul Vrfin,qui futvne pireufe départie pour luy : car en puiflance Sgt;c en biens, il auoit elîé quafi efgal aux grans princes, amp;nbsp;luy amp;nbsp;fes predecelTeurs, depuis Cofme de Medicis, qui fut le Chef; amp;nbsp;ce iour, le mit à luy courre fus

• Fortune,amp; perdit honneurs amp;nbsp;biens.I’eftoycà Venife, amp;nbsp;parl’AmbalTadeur Florentin eftant la, ie feeu ces nouuelles, qui bien me defpleurent : car i’a-uoyc aymé lepere, amp;c s’il m’euft voulu croire,il neluy full pointainfimef-aduenu : car fur l’heure quci’arriuay àVenife,luy cfcriuy,amp; oiFry appointer: car i’en auoye le pouuoir de bouche, du Senefchal de Beaucaire amp;nbsp;du General, amp;nbsp;eullefté content le Roydupafragc,ouàpisvcnir, d’auoirLigorne entre fes mains,amp; faire toutes choies que Pierre eull feeu demandertmais il me refpondit comme par moquerie,par le moyen du firç Pierre,que i’ay nommé ailleurs. Lediôl AmbalFidcur porta le lendemain lettre .a la Seigneurie, contenant comment il auoit efté chalfé, par ce qu’il fe vouloir faire feigneur de la ville, par le moyen de la maifon d’Arragon amp;nbsp;des Vriîns, amp;nbsp;alTcz autres charges, qui n’eftoient point vrayes : mais telles font les aducnrurcs du monde, que celuy qui fuit, amp;nbsp;perd ne trouue point feulement qui le chalfc:

J * nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;î

en nomme vn Antoine Soderinrqui cftoit des inges hommes qui fuITcnt en Italie. Le iour sVitdcîùif’” de deuant m’auoit parlé dudid Picrre,commc fil full fon feigneur naturel, à celle Ijeure fe déclara fon ennemi,par commandement de laSeigneurie: mais deloy ne failoitaucunc declaration.Le iourapres icfceu commentle-dit Pierre venoitâ Venife, amp;nbsp;comme le Roy elloit entré en grand triom-pheà Florence, amp;nbsp;mandoientaudid AmbalFadcurqu’ilprinlIcongedc la-diéle Seigneurie, amp;nbsp;qu’il s’en retournall, ôc qu’ilfaloit qu’il nauigallaucc ce vent, amp;nbsp;vey la lettre : car il lame monlira, amp;nbsp;s’en partit. Deux iours apres vint lediél Pierre en pourpoint, ouaueclarobbed’vn varier, amp;nbsp;en grand’

' doubtelereceurentà Venife, tant craignoient àdelplaire au Roy-.toutes-fois ils ne le pouuoicnt refulêr par railbn,amp; detiroient bien fentir de moy ce que le Roy en diloit : nbsp;nbsp;demeura,deux iours hors la ville. le defiroye luy ai

der,amp; n’auoyeeu nullelettrcdu Roy contreluy :amp; dyqueiecroioyefifuite auoir eflé pour crainte du peuple,amp; no point de celle duRoy. Ainfi ilvint amp;nbsp;l’allay veoir le lendemain qu’il euE parléà IaScigneurie:qui le feit bien loger,amp;luy permirenr^orterarmes par la ville, ôtaquinzeou vingt feruiteurs qu’il auoit;c’eftàlçauoircfpées,amp;: luy feirent très-grand honneur, combien que Cofme,dont i’ay parlé,les gardaautresfois d’auoir Milan : mais nonob-

Quand

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. '

Quand ie le vey,il me fembla bien qu’il n’eftoit point homme pour refpon-dre.Il me compta au log G fortunejamp; à mon pouuoir le reconfortay. Entre autres chofcs me compta corne il auoit perdu le toutrôc entre fes autres malheurs,qu’vn fien fadeur chant en la ville,vers qui il auoit enuoyépourauoir des draps pour fon frere amp;: luy, pour cét Ducats fculemêt,Ies luy auoit refu-fez.Qm choit grand’ chofc,vcu fon chat authorite: car foixante ans auoit duré l’authorité de cehemaifon fi grande que plus ne pouuoit.Toft apres il eut nouuejles,par le moyé de rnofeigneur de BrelTe, depuis Duc de Sauoye, amp;nbsp;luy cfcriuoit le Roy aller deuers luy;mais ja eftoit ledid feignenr parti de Florcncc,cômeie diray à cefte heure;mais vn peu m’a falu parler de ce Pierre de Medicis.

Comment le T^oyfeit fon entrée d Florence^ 6^ par quelles autres 'villes ilpaJJaiufquesà'B^me. QH AT. IX.

E Roy entra le lendemain en la cite de Florence,^: luy auoit ledid Pierre fait habiller fa maifon:amp; ja eftoit le feigneur de *BaIIaflat pour faire ledid logis,lequel quad il feeut la fuite Pierre de Medicis,fc print a piller tout ce qu’il trouua ladide maifon.difant que leur bacque à Lion luy deuoit quot;‘lt;»lt;gt;»7^« iP-grand lomme d arget,amp;: entre autres choies, il print vne Li- Mathæus corne entiere(qui valoir iix ou feptmille Ducats)amp; deux grades pieces d’v- afpLhif^t* ncautre,amp;: piufieurs autresbiens.D’autres feirentcommeluy. En vneautre maifon de la ville auoit retiré tout ce qu’il auoit vaillat. Le peuple pilla tout,

1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;‘Il nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;** flrefr jrnttjon,

La feigneurie cutpartie des plus riches bagues,ôc vingt mille Ducats cotans me l'ont nome qu’il auoit à font banc,en la ville, amp;nbsp;piufieurs beaux pots d’A gatte, amp;nbsp;iât de beaux Camayeulx bientaillez,quemerueilles,qu’autresfoisi’auoye vcus,amp;: bien trois milles medales,d’or amp;nbsp;d’argét,bienla pefanteur de quaiâteliures, amp;: croy qu’il n’y auoit point autat de belles rnedales en Italie. Ce^u il perdit ce iour en la cité valoir cent mille efcus,amp; plus.Or eftant le Roy en la cité de Florécc,corne dit eft,fe feit vn traiéfé auec eux, amp;nbsp;croy qu ils le feirent de bô cœur.Ils doncret auRoy fix vingts mille Ducats,dót ils en paierent cinquâte mille contantjôc le refte en deux payemens affez briefs:amp; prefterent au Roy toutes les places dót i’ay pa rle,amp;: chageret leurs armes,qui eftoiét la fleur du lis rçLige, amp;nbsp;en prindrent de celles que le Roy portoit; lequel les print en G proteéfion amp;nbsp;garde, Sc leur promit amp;nbsp;iura fur l’autel S. Ichan de leur rendre leurs places quatre moys apres qu’il feroit dedas Naples,ou plus toft, s il re-tournoit en Francc;mais la choie print autre train,dont fera parle cy apres.

Le Roy farreftapeu à Florence,amp; tira vers Sienes,ou il fut bien receu,amp; de là à Viterbe, ou les ennemis ( car Dom Ferrand feftoit retiré vers Rome ) a-uoient intention de venir loger,Se fy fortifier,Sc combarre, s ils y voy oient ]eurauantagc:amp; ainfi lerne difoit l’Ambalfadeur du I^oyAlphonfe,amp; ccluy du Pape,qui eftoyent à Venife-.amp; à la vérité, ie m’attendoye que le Roy Al-phonfe y vint en pcrfonne(veu qu’il eftoit eftimé de grand cœur)amp; qu il laif faft fon filz dedans le royaume deNapIes;amp;me fembloit lieu propice pour eux-.car il euft eu fon royaume,les terres du Pape,amp;les places amp;: terres des

Y iiij

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x6o nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;VII. L I VR É D E S M E M O1 R E S

Vrfïns à fon dos.-inais ie fu tont eibahy que les lettres me vindrent du Roy, comme iieftoit en Ia ville de Viterbe, amp;nbsp;puis vn Commandeur luy bailla le ehafteau,amp; Ie tout par le moyen du Cardinal Petri ad Vincula, qui en eftoit Gouuerneur,amp; les Colonnois.Lors me fembla que Dieu vouloir mettre fin * pen-Aqua à ccfie befongne,amp; me repenti qu’auoyecfcrit au Roy, amp;nbsp;confeillédepren-fcTuhîla nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;appointement:caronluy en olFroitallez.*Aqucpendantamp;i,Mon-

M. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;teflafeon luy furent rendus auant Viterbe,amp; toutes les places d’aletour, co

me ie fu aduerti par lettres du Roy,amp; celle de ladide feigneuric,qui de iour en iour eftoient aduertis de ce qui furuenoit,par leurs AmbalTadeurs, amp;nbsp;m’ê monftrerentplufîeurs lettres,oulcme faifoientdire, par vn de leurs Secre-taires.Et de là tira le Roy à Rome,par les terres des Vrlins,qui toutes luy fu-• rent rendues parlefeigneur Charles Vrfin,difintauoir ce commandement

de Ion pere(lequel eftoit lèruitcur fouldoyé du Roy Alphonfc) amp;nbsp;que d’autant que Dom Ferrand feroit alloue,amp; en la terre de l’Eglife, qu’il luy tien-droit compagnie, amp;nbsp;non plus ( ainfi viuent en Italie les feigneurs amp;nbsp;les Ca-pitaines,amp; ont fins celTc pratique auec les ennemis, amp;nbsp;grad’pcur d’eftre des * Bratiano. plus foiblcs)amp; fut teccu lediôl feigneur dedans * Brachanc, principale place

lt;^udiâ: feigneur Virgile,qui eftoit belle,forte,amp; bien garnie de viures,amp; ay piuifrei de Bien fott ouy eftimer au Roy ladiôlc place,amp; le recueil que Ion luy feit; car Home, Baca- „ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;f n ■ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;rC ' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;*-/l- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;l

Ion armee eltoit en neceftiteamp;: extrémité de viures,amp; tant que plus ne pou-uoit,amp; qui confidereroit bien quantesfois celle armée fecuida rompre,de-arriua à Vienne au Dauphiné, amp;nbsp;comment elle fe reuen oit, amp;nbsp;par wwz quelles ouucrturcs,briefondiroitqueDiculaconduifoit.

Comment le 7(pjf cnuojia le Cardinal Petri ad Vincula dedans Oflie^^ de ce quelePapefaiJoità'P^me cej}endant:(is^ commele T^ojj) entra mal-gre tous les ennemis. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;CHAT. X.

E Brachane enuoya le Roy le Cardinal S. Pierre ad Vincula 1 Ollie,dot il eftoit Euefque: amp;nbsp;eft lieu de grade importàce; amp;Ie tenoiét les Coulonois, qui l’auoiét prins fur le Pape : amp;nbsp;les gês duPape l’auoiét oftéauditCardinafn’y auoit gueres. Laplace eftoit tresfoible; maislog temps depuis tint Rome en grade fubieéliô auec ledit Cardinal lequel eftoit grad a-* Afeanio. mi dcs Colonuois, qui cftoiét noftrcs par le moyen du Cardinal * Alcaignc, iTJz’ frcreduDucdeMilan,amp; Vichacelier,amp;aulïien haine des Vrfins, dót touf-iours fontjôc ont efté côtraircs,amp;: eft toute la terre de l’Eglife troublée pour celle partialité,côme nous dirios Luce amp;nbsp;Giädmont,ou en HoIande,Houc, amp;nbsp;Caballan.'amp; quand ne feroit ce dilferend, la terre de l’Eglife ferpit la plus heureufe habitation : pour les fubieéls, qui foit en tout le monde ( car ils ne paient ne tailles,ne gueres autres chofes) amp;nbsp;lèroicnt toufiours bien coduiéls (car toufiours lesPapes font làges amp;nbsp;bien confeillcz)mais tres-foiiuet en adulent de grans ôc cruels meurtres amp;nbsp;pillerics. Depuis quatre ans en auos veu bcaucoup,tant des vns que des autres; car depuis les Colonnois ont efté co-' tre nous,à leur grâd tort:car ils auoient vingt mille Ducats de rente, amp;nbsp;plus, audiél

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DE PHILIPPE D E ' C O M M I N E S. ' lôi auditSE royaume de NaplcSjcn belles feigneuries, corne en la Coté de * Tail- *TagIiacoz-1ecoufe,amp; autreSjque parauant auoiéc tenus les Vrhns,amp; toutes autres clio- uens, les qu’ils auoientlceu demander, tant en Gens-d’aimes qu’en penfions. Ce qu’ils feirent,ils le feirent par vraye defloyauté,amp; Eins nulle occafion,amp;faut entêdre que de toute ancienneté,ils eftoiéc partifins de la maifon d’Arrago, amp;nbsp;des autres ennemis de France ; pource qu’ils eftoienr Gibelins, amp;nbsp;les Vr-fins partifans de France, comme Florentins, pour cftre de lapart des GueL fcs.

.. Auecqueslcdiól Cardinal de fiinôl Pierread VincuIa,àOfl:iefutertuoyé *Peron de la Bafche, Maiftre d’hoftel du Koy,qui trois iours parauant auoit apporté audiót fcigneurvingtmille Ducats, parmer, amp;nbsp;eftoitdefcenduà chc. Plombin, amp;nbsp;eltoitdel’argcntprcftéparleDucdeMilan;amp;; cftoit demeuré • en l’armée de mcr,qui efloit petite,le Prince de Salerne, amp;nbsp;vn appelle le fei-gneur de Sernon en Prouence,que la fortune mena en *Donferque, leufna- X- sardaigne uireforrgaftée, amp;nbsp;mirent tant à fer’abilier qu’ils neferuirent derien ;

coulla largement ladióle armée de mer, amp;nbsp;trouuercnt le Roy dedas Naples, AudiôlOftie auoit lediôt Cardinal, bien cinq cens Hommes d’armes, amp;nbsp;deux mille SuilFeSjöc y eftoit le Comte de Ligny,coufin germain du Roy,de par mere,le feigneur d’Alegre,amp; autres/ôc là cuidoient paiFer le Tybre,pour nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;p.

aller enclorrc Dom Ferrand, qui eftoit dedans Rome, aucc la faueur amp;nbsp;aide des Colonnois : dont elloient Chefs de la maifon, pour lors Profpere amp;c Fabrice Colonne, amp;nbsp;le Cardinal Coulonne, à qui le Roy paya deux mille Hommes à pied, par la main dudiôt Bafche, qu’ils auoient adcmblez à leut plaifir: faifoientlcurafl'embléeàSannefonne,quieftdeux.

Il faut entendre qu’icy viennent plufieurs propos à vn coup,ôcdechafcun faut dire quelque chofe. Auant que le Roy eufl: Viterbe, il auoit enuoyé le feigneur delaTriinouille,fon Chambelan,amp; le Prefident de* Guennay,qui auoit fon (eau,amp;le GeneralBidaut,à Rome, Guidant traiôEer atftc le Pape, GuUnaY,amp; qui touhours pratiquoit,comme eft la coullume en Italie . Eux eftans 13 3 le /o» peut nom» Pape mit de nuiól en la cité Dom Ferrand,amp; toute fl puifl'ance, ôc furet nos gens arreftez,mais petit nombre.Le iour propre les depelcha IcP^qae :mais 11 retint prifonnier le Cardinal Afcaigne, Vichancelicr, amp;nbsp;frere du Duc de Milan, amp;nbsp;Profpere Coulonne(aucuns dient que ce fut de leur vouloir)amp; de toutes ces nouuelles i’eii incontinent lettres du Roy, ôc la feigneurie encores plus amplement de leurs gens,amp; tout cecy futfaiól auant que le Roy entrai dedans Viterbe:car nulle part ne farreftoit que deux iours en vn lieu,amp; aduenoient les chofes mieux qu’il n’euflfccu penfer, auflile maiftre des fei-îîneurs fen mefloir,amp;: chafeun le consnoilToir.

Ceftearmée qui cftoit en Oftie,nc feruoit de rien, pour le mauuais temps: amp;aufli fuit entendre que les gens, qu’auoit menez^onfeigneur d’Aubi-gny, eftoient tetournez, amp;nbsp;1 uy aufti, amp;nbsp;n’en auoit plus de charge:amp;: fi auoit on donné congé aux Italiens, qui auoient cfté auec luy en la Romanie,qu’a-uoit menez le feigneur Rodolph de Mantoue, le feigneur Galeot de la Mi-randole,amp; * Fracafte, frere du feigneur Galeas de fainét Scucrin, qui furent bien pay cz: amp;nbsp;eftoient enuiron cinq cens armez,que le Roy pay oit, comme »»«« w.

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16Z VII.LIVREDES MEMOIRES ouy,amp;au paitirdeVitcrbeJeRoy alla à*Naples,qiie tenoit ïe feighcvr nvmmfntainfi nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;’ amp;nbsp;H cft Hen pliis vtay qu’àThcure quc DOS gcüs efloyent dedans

telle place, ^ue Hüftie,il tomba plus de vingt biaflées de mur de la ville de Rome, par làoù iepenfe tfire f« i nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;* t nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Z* ƒ“ 1 • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•

Ion voLiloit entrer. Le Pape voyat li louoainemcnt venir ce leune Roy, auec fortune,confent qu’il entre dedans Rome (aufli ne l’en euft il feeu gar-der)requiert lettres d’aflcurance,qu’il eut pour Dó Ferrâd, Duc de Calabre, e» Giea-i^T!» amp;nbsp;fcul filz du Roy A1 pHofezlcqucl dc uuiü: fc rctita à Njples,amp; leconduifit dant gueii, iufqucs àla porte leCardinal Alcaigne.Etle Roy entra dedans Rome en ar-»*'aijfe4»î^‘‘!' mes,comme ayât authorite de faire par tout à fon bon plaifir : ôc luy vindret audeuant plufieurs Cardinaux, amp;nbsp;les Gouucrneurs amp;nbsp;Senateursdelaville.* amp;nbsp;logea au Palais fainôl Marc(qui efl le carrier des Coulonnois, fes amis amp;:

• feruiteurs pour lors) amp;nbsp;le Pape fc retira au cbafteau fainôl Ange.

Qomment le 7{py Alphonfefeit couronnerfon ßli^^Ferrand^e^ putsßenfutt en Sicile:e^ de U mauuaife'viequauoit mené le njieux Ferrandfon

pere, luy aujf. CH AT. XI.

Stoit-il polfibledc croire que le Roy Alphonfe fi orgueil’ leux,nourri àla guerre,amp;Jon filz,amp; tousccs Vrfins,quiont figrâd’ parta Rome,n’ofaflent demeurer en la cité?encores quad ils voyoict amp;nbsp;fentoiét que le Duc de Milan brâloit,amp; les Vénitiens,amp; fe pratiquoit vne ligue qui eufi efté coclue, fi quelque reliftace cufl efté faicle à Viterbe ou à Rome,co

rne i’eftoye bien afl'euré , pourueu qu’ils culTentpeu arrefter le Roy aucuns iours. Au fort,il faloit que Dieu mofiraft que toutes chofes palToicnt le fens amp;nbsp;congnoifl'ancedesbómes:amp; fi faut bien noter qu’ainfi comme les murs de la ville cftoient tôbcz, aufli tomba bien quinze bralTées des auant-murs du chafteau faind Ange,commc m’ont copte plufieurs.-ôc entre autres,dcux Cardinaux«]uiy cftoient.Icy fautvn peu parler du Roy Alphonfe.

Si toft que le Duc de Calabre,appcllé le icune Ferrâd,dont ja pluficurs fois a cfté parlé,fut retourne à Naples,fon pere le Roy Alphonfe, fe iugea n’eftre digne d’eftre Roy,pour les maux qu’il auoit faitfts,en toutes cruautez , contre les perfonnes de plulieurs Princes amp;nbsp;Barons,qu’il auoit prins fur la feure-té de fon pere amp;nbsp;de luy,amp; blé iufqucs au nombre de vingt-quatre: amp;nbsp;les feit tous mourir,{i toft que Ion pere fut mort, qui les auoit gardez quelque téps, amp;nbsp;depuis la guerre qu’ils auoient eue contre luy, amp;nbsp;en feit aufli mourir deux Uienfâeilaà auttcs, quc Ic pcfc auoit prins fur fa feureté:dôt l’vn eftoit*Duc de Sefle, ho-pantan ejaia medc çrâde authorité,amp; l’autre Prince de Rofàne, quiauoit eu à efpoufeôc tfera di laquer nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;} r t nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.

re dt fea dquot;An femme la fœur dudiét Roy Ferrand,amp; en auoit eu vn trelbcau filz:amp;: pour mieux fafleurer deluy (carle Prince Ôclcigneur de Rofanc luyauoitbien phJej^p^- voulu faire vne grâdej:rahifon,amp;: auoit bien defl'erui toutepunitio fil n’euft ihe^^Seßa nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;aflcLirance)venant deuers luy àfon madement,le meit enmerueillcu-

fe amp;nbsp;puante prifon,amp; le filzmefme d’iceluy : puis apres eftant venu enl’aagc de quinze à (eize ans,amp; y auoit demeuré ledit pere trente quatre ans ouen-* uiron,à l’heure que lediél Roy Alphonfe eft venu àeftreRoy: amp;nbsp;lorsqu’il y itabit'f* filt parucnujfeit mener tous ces prifonniers à* Ifclc(qui cft vne petite ifle auprès

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DE PHILIPPE DE C O M M I N E S.

pres de la ville de Naples,dót vous orrez parler) amp;nbsp;La les feic tous aflommerj exceptez quelques vns,qu’il retint au chaEeau de Naples, comme le filz dii-diôh leigncur de Rofane,amp; le noble Comrede Popoli.Ie me fuis fort bié en-quis comment on les feit mourir fi crucllemcnt(carplufieursles cüidoiet’en-corcs en vie,quand le Roy entra en la bône ville amp;nbsp;cité de Naples)amp; m’a efté dit, tant par leurs principaux feruitcurs, que par vn More du pais d’Afrique, qu’il les feit alTommer vilainement amp;nbsp;horriblement : lequel incotinent apres Ion cômâdcmct fen alla audiéb pais de Barbarie, afin qu’il n’en fuft point de nouuelle,fans efpargncr ces vieux Princes:dont les aucuns auojcnt ellé gardez en prifon trente quatre ou trente cinq ans,ou enuiron. Nul homme n’a efteplu^ruel que luy,ne plus mauuais,nc plus vicieux amp;plus infeôtjiieplus gourmand que luy. Le pere eftoit plus dangereux ; car nul ne fc congnoif- * foit en luj^lfen fon courroux ; car en faifiint bonne chere, il prenoit amp;nbsp;tra-. hilToit Tes gens, comme le Comte lacques, qu’il print amp;nbsp;feit mourir vilainement amp;nbsp;horriblement,eftant Ambafladeur deuers 1 uy, de parle Duc Fia-cifque deMilan:duqucl il auoit eu à femme amp;nbsp;efpoufe la fille baftarde: mais lediól Fracifque fut cconfentant du cas:car tous deux le craignoient pour la fuite amp;nbsp;fequclle qu’il auoit en Italie, des * Braciques, amp;. eftoit filz de Nicolo Picinino.Etainfi(comme dilt;fteft)print ce Roy Ferrand tous les autres,amp;ia-mais en luy n’y auoit grace ne mifericorde,corne m’ont copte fes prochains parés amp;nbsp;amis,amp; iamais n’auoit eu aucune pitié ne compalfion de fon pauure peuple,quant aux dcniers.il faifoit tout train de marchandife en fon royau- * me, iufqucs à bailler les porccauxàgarderau peuple,amp;les leur faifoit cn-grefter^our mieux vendre: fils mouroient, faloit qu’ils les payafibnt. Aux lieux ou croift l’huyle d’oliuc,comme en la Fouille,ils l’achctoiét luy amp;nbsp;fon filz prefqueâ leur plaifir, amp;nbsp;femblablemcnt le froment, amp;auant qu’il fuft mcur,amp;le vendoient apres le plus cher qu’ils pouuoient, nbsp;nbsp;(iladiéfe mar

chandife fabaifloit de pris,contraignoient le peuple delà prendj^e: amp;nbsp;par le temps qu’ils vouloient vendre,nul ne pouuoit vendre qu’eux. Sivn feignent ou Baroneftoit bon mefnager, ou cuidoit efpargner quclquebonnechofe, ils la luy demandoient à emprunter, amp;nbsp;la leur failloit bailler par force, leurs oftoient les races des chenaux, dont ils ont plufieurs, amp;nbsp;les prenoient pour eux,amp; les faifoient gouuerner en leurs mains,amp; en li grand nobre, tant chcuaux,iumcns que poulains,qu’on les eftimoit à beaucoup de miliers, amp;nbsp;lesenuoyoiét paiftre en plufieurs lieux aux pafturages des feigncurs, amp;nbsp;autres qui en auoient grand dommage. Tous deux ont prins à force plufieurs femmes. Aux chofes ecclefiaftiques ne gardoiét nulle reuerence,n’obeiflan-cc.lls védoient Euefchez,comme celle de Tarente que vendit le pere treize mille Ducats,à vn luif,pour bailler à fon filz,qu’il diioit Chreftien. Bailloit Abbaïes à vn Faulconier,amp; à plufieurs,pour leurs enfans,difànt:vous entretiendrez tant d’oyfeaux,amp; les nicherez a vos defpens,fc tiendrez tât de gens a vos dcfpés.Le filz ne feit iamais Quarefme,ne femblanx qu’il en fuft.Main-tes années fut fans fè côfefrer,ne receuoir noftreSeigneur amp;nbsp;Rédempteur le-fus Chrift.-amp; pour conclufion, il n’eft poflible de pis faire qu’ils ont fait tous deux. Aucuns ont voulu dire que le icune Roy Ferrad euft efté le pire, com-

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2.64 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;VII.-L I VR E D E s MEMOIRES

bien qu’ileftoic humble amp;nbsp;gracieux , quand il mourut : maisaufficftoiten neccflîté.

Or pourroit fembler aux leôleurs que ie dife toutes ces cbofcs pour quelque haine particuliere que i’auroye à eux:tnais par mafoy,non fay, ains ie le dy pour continuer mes Memoires,où fè peut veoir dés le commenceinet de l’entreprinfe de ce voyage,que c’eftoit chofe impoffiblc aux gens qui le gui-doientjfil ne fuft venu de Dieu feul,qui vouloir faire fon Commiflaire de ce ieune Roy bon,fi pauurement pourucu amp;nbsp;códuiót, pour chaftier Roys fi fa-geSjfi riches, amp;nbsp;fi expérimentez, amp;nbsp;qui auoient tant de perfonnages fages a quiladeffencedu royaume touchoit,amp; quiefloient tat alliez amp;nbsp;ïbulknuz: amp;nbsp;mcfmes voyoieteefaix venir fur eux de tat loing,amp; fiiamais n’j^eurent pouruoir,ne refifter en nul lieu. Car hors le chafteau de Naples, n’y euft aucun quicmpefchaftleRoy Charles huidfiefme,vniournaturél^ commea dit le Pape Alexandre qui regnoit,!es François y font venus auec des 'cfpcrôs de bois, amp;nbsp;de la croye en la main des Fourriers,pour marquer leurs logis, fas autre pcine:amp; parloir ainfi de ces cfperons de bois,par ce tpe pour cefte heu re,quand les icunes gens de ce royaume vont par ville, leur page met vnc pe-titebrochededans lefoulieroupantoufle;amp;font furleurs mules, branlans les iambes: amp;nbsp;peu de fois ont prins les harnois nos ges, en faifant ce voyage: amp;: ne mift le Roy depuis Affc à entrer dedâsNaples que quatre moys dixncuf iours. Vn Ambaifadeur y en euft mis vne partie.Parquoy ie coclu ce propos, difiint,apres l’auoir ouy dire à plufieurs bons hommes de rcligion,amp;: de fain-éfe vie, amp;nbsp;à njainte autre forte de gens (qui efl la voix de nofi re feig ne ur le-fusChrifl,quelavoix du peuple)que noftreSeigneur lefusChrifi les vouloir punir vifiblemcnt,amp; que chafeun le congnuft, pour donner exem.ple à tous Roys amp;nbsp;Princes de bien viure,amp; felô fes commandemens.Car ces feigneurs

de la maifon d’Arragon dont ie parle,perdirent honneur amp;nbsp;royaume amp;nbsp;gr.a-* matière dcs richefr^s,amp;meubles dc toutc * nature,fi départis qu’a grand’peinefçait on qu’ils foyent deuenus,puis perdirent les corps,trois en vnan, ou peu d’a-uantage;mais i’efpere que les âmes n’ont point efié perdues. C?u le Roy Fer--a r^d,qui£ftoit_filzba^ar^du grand Alphonfe(lequel Alphôfefut fageRoy amp;nbsp;honnorable amp;nbsp;tout bon)porta grande paffion en fon coeur de veoir venir fur luy ceftearmée, amp;nbsp;qu’il n’y pouuoit remedier : amp;nbsp;voyoit que luy ôf Ion filz auoient mal vefeu, amp;nbsp;eftoient tres hais (carilefl:oitrres-fageRoy)amp;: fi * nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;hure eferit,comme m’ot certifie des plus prochains de luy,en def-

le V ray, «»la Vérité.

Zie», Il Veto, faifant vne chappelle,où y auoit deffus:’^ La vérité,auec fon confeil fecrct:amp; XyjÂveult Ion dire qu’il contenoit tout le mal qui luy efiaduenu; amp;nbsp;n’elfoiétque trois à le veoir,amp; puis le iettaau feu. Vne autre pafiiô auoit en ce qu’Alphô-fe fon filz,ne Ferrand,fiiz de fon filz,ne vouloient croire cefic venüe; amp;nbsp;par-

* Camillo Pandone.

loient en grandes menaces du Roy, amp;nbsp;en grand mcfpris, difans qu’ils vien-droientau deuatdeld^iufqucsaux Mors: amp;nbsp;il en futaucùquiprioità Dieu qu’il ne vint iamais Roy de France en Italie,amp; qu’il y auoit veu feulcmet vn pauurc homme de la maifon d’Anjou, quiluy auoit fait fouffrir beaucoup de peine,qui fut le Duc Iean,filz du Roy René.Ferrand trauailla fort par vn * ^len Ambaffadeur, nommé meffire * Cauillo Pendoifo de faire demeurer le

Roy,

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DE PHILIPPE DE COMMIMES,

Roy,l’année de deuant,auar qu’il partift de France, luy offrant fe Elire tributaire de cinquante mille Ducats ran,amp;: tenir le royaume de luy, à foy amp;nbsp;bornage, ôc voyant qu’il ne pouuoit pas paruenir à aucune paix, ny appaifer l’e-ftat de la ville dcMilâ,luy print vnc maladie dequoy il mourut;amp; en fes dou leurs eut côfcnion,amp; corne i’efperc repentance de les pecbcz.Lcblz Alpbo-fe,qui tant auoit efté terrible amp;nbsp;cruel, amp;nbsp;tant fait le meffier de la guerre,auat que le Roy partifl: de ladide ville de Rome,renonça a là couronne; amp;nbsp;entra en telle pcur,que toutes les nuiôls ne celToit de crier qu’il oy oit les François, amp;nbsp;que les arbres amp;nbsp;les pierres crioyent France; amp;iamais n’eut bardielfedc partir de Naples:mais au retour que feit fon filz de Rome,lc mit en poffeffio du royaume de Naples,amp; le feit couroner amp;nbsp;cheuaucher par la ville de Naples, accôpaigné des pluigrans qui y cfl:oiêt,cômc de Dom Fedcric fon freie,amp; du Cardinal de Genes,cftantlediólnouueau Roy au milieu,amp; accom-paigné des Ambaffadcursjqui y efi:oient,amp; luy feit faire toutes Icfdicles fo-Icnnitez,qui font rcquifes:amp; luy fe mit en fuite, amp;fen alla en Sicile auec la Royne fil belle mere: quieftoit Ibeurdu Roy Ferrand de Caflille, àquiap-partenoit Icdid royaume de Sicile, en vne place c^u’ellc y auoit,qui fut grâd’ nouuellc par le monde,amp; par clpccial à V enife ou i’cffoyc. Les vns difoient qu’il alloit au Turc ; autres difoient que c’efloit pour doner faucur à fon filz, qui n’eftoit point bay au royaume:mais mon aduis fut toufiours, quecc fut par vraye lafebeté ; car iamais bomme cruel ne fut bardy, amp;ainfifevoit par toutes Hiftoireszôc ainfi fe defefperaNeron, amp;nbsp;plufieurs autres. Brief, cefl: Alpbonfe eut fi grand’ enuie de fuir,qu’il dift à fii belle mere (corne m’ot compté ceux quieftoientà luy) le iour quelle partit, quefiellenepartoir, qu’il la laiflcroit:amp; elle luy relpondit qu’il attendifl: encores trois iours, afin qu’elle euft efté en fon royaume vn an entier;amp;: il difoit, que qui ne le laiffe-roit aller,il feietteroit par les feneftres, difans : N’oyez vous point corne vn chafcuncrie France?amp; ainfi fe mirent aux galées.Il emporta de toutes fortes de vins (qu’il auoit plus aymez qu’autre chofc)amp;: déroutes fortes de graines pourfairciardins,fansdonnernulordrelt;àfesmcubies,n’yafes biens: car la plulpart demeura au chafteau deNaples.-quclques bagues emporta,ôc quelque peu d’argent;amp; allèrent en Sicile audiél lieu : puis alla à Mefline, où il appella amp;nbsp;mena plufieurs gens de religion,voilant de n’eftreiamais du mon-de:amp; entre les autres,il aimoit fort ceux du Mont d’Oliuier, qui font vcftus de blanc(lefquels le m’ont compté à Venife, là où eft le corps Sainéfe Helene en fon monaftere) amp;nbsp;fe mit à mener la plus fainôte vie du monde: ôe feruit amp;feruoit Dieu à toutes les beures duiour ócdelanniél, auec lefdióls religieux,comme ils font en leurs couuents;amp; làfaifoit grand’s ieufnes,abftinc CCSamp; aumofnes:amp; puis luy aduint vne grande maladie de l’efcoriation amp;nbsp;de graucllc:amp;me dirent n’en auoirveu bomme fi perfecuté : amp;nbsp;portoit touren patience,délibérant vfer fa vie en vn monaftere à Valefüce la grand’, là fe veftir de religion ; mais il fut tant furprins de maladie, qu’il vefquit peu, amp;nbsp;mourut,amp; felon fii grand’ repêtancc,il eft à efpercr que fon ame eft gloricu-fe en Paradis.Sô filz demeura peu apres,amp; mourut de fiebure amp;nbsp;flux, amp;nbsp;croy qu’ils font mieux qu’ils n’eftoient en ce monde; amp;nbsp;femble que en moins de

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x66 VIL LIVRE DES MEMOIRES

deux ans,ils furent cinq Roys portans couronne a Naples : les trois que i’ay pommczjc Roy Charles de France huiôlicfme,amp; Dom Federic^frere dudit Alphonfe.

Qomment apres que le ieune Ferrandcouronné nbsp;nbsp;nbsp;de N api es,al la affeoirfon

camp d S,Germain pour rej'ifier contre la 'venue du quot;B^y : nbsp;nbsp;de l'accord que

le jl^py Charles feit auec le Pape,eflant encor à quot;Pome. CH AT. Xll,

T pour efclarcir le tour,faut dire comment,des que le Roy Ferrand fut courôné,il deuint comme vn home neuf,amp; luy fembla que toutes haines Se offences cftoiét oubliées parla fuite de fon pere:amp;: affembla tout ce qu’il peut de gens,tant de chenal que de pied, amp;nbsp;vint à fàind Germain : qui cft l’cn-trcc du royaume, amp;: lieu fort, amp;nbsp;aiféàdeffendrc, amp;nbsp;par où

les François font paflez deux ou trois fois : amp;nbsp;là mill fon camp, amp;nbsp;garnift la ville,amp; lors reuint le cœur aux amis dudiâ: Ferrand.Le lieu ertdeffendu d’v-

nc petite riuicre,quiquelque fois fe paffe à gué,amp; quelque fois non, auflîfc deffend par la montaigne qui eft: defius.

Le Roy eftoit encores à Rome,oii il feiournaenuiro vingt iours, amp;nbsp;oùplu-fieurs chofes fctraidoient. Auec luy efloientbien dixhuiét Cardinaux, amp;nbsp;d’autres qui venoient de cofte ôc d’autre : amp;■ y cftoit lediôf monfeigneurAf-caigne,Vichancelier,amp; frère du Duc de Milan, amp;nbsp;Pétri ad Vincula (quie-le tiime ft oient grans ennemis du Papc,amp;: amis l’vn de rautre)ccluy de*Guefc,fainôt Dcnis,fainólSeucrin,Sauclli,CouIonne, autres : qui tous vouloicnt fiirc en nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nouuelle,amp; qu’au Pape fut faiól proc,es,lequel eftoit audiâ: chafteau.

nomme 'vn Deux fois fut l’artillerie prefte,comme m’ont dit des plus grands : mais tou-cà il faudrait fioursleRoy par fa bonté y refifta. Le lieu n’eftpas defenfàble, car la motte eft demain d’homme,amp; petite. Or alieguoyent ils bien que ces murs far^a^nfi^dt eftoi^nt tombcz par miracle, amp;nbsp;le chargeoient d’auoir achepté cefte fainôle /^.Garfcna dignité, ôc difoientvtay :mais Icdiól Afcaigne en auoitefté le principal mar-dic auoit E- chand qui auoit tout guidé,amp; en eut grand argcnt:amp; fi eut la maifon dudiÓh GamanTi. R'ipCjluy cftaut Vichancelier,amp; les meubles quieftoicntdcdans,amp; fonofti-ce de Vichancelicr,amp; pluficurs places du patrimoine.Car eux deux eftoient à l’enuy qui feroit Pape.Toutcsfois ie croy qu’ils euffent confenti tous deux d’en faire vn nouueau au plaifir du Roy,amp; encores d’en fiire vnFrançois, amp;nbsp;nefçauroycdirefileRoy feit bien ou mal: toutesfois ie croy qu’il feit le mieux dappointer:car il eftoit ieune,amp;: mal accompagné pour côduire vnc fi gràd’ œuurequc de reformer rEglife,combien qu’il euft le pouuoir, mais qu’il l’euft feeu fairene croy que toutes gés de cognoiffance amp;;raifbn,reufrét tenu à vne bóne,gradeamp; treflainéte befongnezmais il y faudroit gràd myftc re:toutesfois le voufcir du Roy eftoit bô,ôr eft encores en ce cas, fil y eftoit aydé. Le Roy appointa auec le Pape vn appointemét,qui ne pouuoit durer; car il eftoit violent en aucun poinôt:amp; fut grand couleur, de faire vne ligue, dont apres fera parle.Par ceftuy appointement deuoit eftre paix entre le Pape amp;nbsp;fcs’Cardinaux, amp;nbsp;autres; amp;nbsp;deuoient lefdiéls Cardinaux eftre payez du droit

I

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DE PHILIPPE DE COM MINE 1 My du droit de leur chapeau,abfêns corne prefens.ll deuoic prefler au Roy quatre places,Terracine,Ciuita.Vechia,amp;Vitçrbe que tenoit le Roy,amp; Spolete auflî.-mais il ne la bailla point,cobien qu’il IVuftpromifc: amp;nbsp;fedeuoiêt redre au Pape,come le Roy partiroit de Napleszamp;s ainii le feit, cobien que le Pape l’euft trope.11 baillaau Roy parcettuy appointement,le fiere du Turc,dót il auoit foixate mille Ducats par an dudiétTurc, le tenoit en grand’crainte. Prom etoit de ne mettre aucû Legat en lieu ne place de l’Eglife,fans le cofen-tement du Roy;amp; y auoit autres articles, quitouchoiêt le tôfiftoire,ôc bail-loit en oftage fon filz le Cardinal de Valence, qui alloit auec ledidl feigneur pour Legat, amp;nbsp;luy feit le Roy l’obedience filiale, en toute humilité que Roy fçau roi t faire: amp;nbsp;luy feit le Pape deux Cardinaux, c’eil à fçauoir le General Brifionnet, qui jaelioit Euefq de S. Malo, qui a eflé fôuuët appelle General: • amp;nbsp;l’autre l’Euefque du Mans,de la maifon de Luxébourg qui eftoit par deçà.

Comment le l^oy partit de ’B^me pour aller à ^aples:de ce qui aduint ce pendant enplufieurs contrées dudi^l royaume de '^apleSjamp;’ par quelles •villes il paf/aiufquesd ladite ville de Naples. CHAT. XIII.

^Es chofes faiéles,leRoypartitdcRomeengrand’amitiéa-uecle Pape,ce fembloit:mais huid Cardinaux partiret de Rome mal contans dudidappointement : dont les fix e-^pOftoientdela fequelledudid Vichancclier,8c defaindPier-qu’on croyoit qu’Afeaigne faifoit cefte fiiinde,8c qu’au cœur eftoit cotent du Pape: mais fon frère ne feftoit encores point déclaré contre nous:8c al la le Roy à * lenefan-nc,8c de là à Beliftre,d’ou fenfuit le Cardinal de Valence.

llfanommè fdr ey deuant Sânefonne,

Le lendemain le Roy print Chaftelfortin d’affault,amp; fut tué ce qui cftoit dedansrqui cfloir à Lacques Comte, qui auoit prins l’argent du Eboy , 8c puis feftoittourné.-carles Cotes font partifans des Vrlins : puis apres alla le Roy â Valmonton,qui efldes Colonnois : puis alla loger à quatre mils du Mont tin O, f nur ces fàinéllean, vnetresforte place: laquelle fut batuefept ou huiél heures, amp;nbsp;puis fut prinfc d’aflaulc,8c tout tué ce qui clfoic dedans,ou la plus part : ôc e-ftoitau Marquis de Pefeaire, terre d’EgliCe y cftoit toute l’armée ioinéle muis bien no-enfemble. Et de là tira le Roy vers fund Germain ( 8c y pouuoit auoir feize ^i-uutrequi mils , ouenuiron) làoù leRoy Ferrand,nouueau couronne,eftoitencamp Z.fchaftd-(comme i’ay dit ailîcurs)auec tout ce qu’il pouuoit auoir finé de gês,8ceftoit le dernier remede, 8c le lieu pour combatreou iamais; carc’eftoit l’entrée du tansusuai. royaume,8c le lieu aduanrageux,tat pour le ruilfeau que pour la motaigne; 8c fi enuoya gens auec, pour garder 8c deffendre le pas de Cancello, qui cft vn pas de montaignesà fix mils de fiinÓf Germain. Auant que le Roy fuft à fainél Germain,s’en alla le Roy Ferrand en grand defordre , 8c abandonna la ville 8c paftage.Monfeigneur de Guife auoit eu ceiour la charge de l’auac-garde: monfeigneurde Rieux eftoitallé à ce pas de Cancello, contre les Ar-ragonnois,quiaufti l’abandonnercnr, ôc entra lediéf Roy audiéf fàinéf Gcr-main.LçRoy Ferrand tira droit à Capoua, où ils luy refulcrent l’entrée à fes-

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z68 vil livre des memoires

Gens-darmes : mais ils laiflerent entrerlà perfopne auec peu de gens, amp;nbsp;n’y arrefta point : ôc leur pria de tenir bon pour luy, amp;nbsp;que le lendemain rc-uicndroit; amp;nbsp;alla à Naples doublant la rebellion qui aduint. Tous fes gens, ou la plus part,le deuoient attendre à Capoua; mains quand il vint le lendemain,il trouua tout parti,amp; cftoiét allez à Nola le feigneur Virgile Vrfin, fon coufin le Comte de Petillane;où ils furent prins,amp; leurs gés, par les no-ftres.Ils vouloient maintenir qu’ils auoient fauf-conduiôl, amp;nbsp;qu’on leur fai-foit torr,amp; eftoit vray.-mais il n’eftoit point encores entre leurs mains. Tou-tesfoisils ne paicrent rien .-mais ils eurent grand perte, amp;nbsp;leur fut faidt tort, di wignlno E)e S. Germain alla le Roy à Mingamer,amp; à quot;nbsp;Triague:amp; logea à Calui, S«# nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Capoua,amp; là ceux de Capoua vindrent compofer,amp; y entrale

Roy,amp; toute rarmée:amp; de Capoua,alla le lendemain à Auerfa, my-chemin Gutfijo dit de Capoua amp;nbsp;de Naples,à cinq mils de l’vn amp;nbsp;de l’autre : amp;nbsp;là vindrent ceux de Naples,amp; compoferent,enafleurant leurs priuilegcsanciés; amp;nbsp;y enuoya /»».Thiaiio. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Je Marcfchal de Gié,le Senefchal de Beaucaire, le Prefidêt Ga-

nay,qui tenoit lefcau,amp; des fccretaircs.LcRoy Fcrrâd voyant ces chofes,le peuple,amp; nobles en armes,rebelles contre luy,amp;rquiàfa venue luy pillèrent fon Efcuirie,qui eftoir grade, mota en galée,amp;: alla en Ifcle qui elf vne ifleà dixbuiôf milsdeNaples.EtfutieceuleRoy,à grand’iQyeamp; folennitc, dedans la ville de Naples, amp;nbsp;tout le monde luy vint au deuant,amp; ceux qui plus eftoient obligez à la maifon d'Arragon,les premiers:comme tous ceux delà maifon de Caralfejqui tenoient de ladide maifon d’Arragon, quarante mille Ducats de reuenu,qu’en heritages qu’en benefices. Car les Roys y peuuét bien donner leur domaine, amp;nbsp;fi donnent bien celuy des autres, amp;neCroy point qu’il en y ait trois en tout le royaume,que ce qu’ils polTcdent ne foit de. la couronne,ou d’autruy.

lamais peuple ne monftra tant d’affeôlion à Roy,ny à nation , comme ils monftrerent au Roy,amp; penfoient tous eftre hors de tyrannic:amp;fe prenoienc euxmcfmes;car tout tourna en Calabre,où fut enuoyé monfeigneur d’Au-

tins Biundu-

(îun.

bigny,amp; Peron deBafcheauccluy,fans gés-d’armcs.Tout l’Abrouffo tourna de luy mefmc:amp; commença par la ville de l’Aquila , laquelle a toufiours cfté bonne Françoife.Tout fc tourna en Pouille,laufle chafteau de* Brandis gardé) amp;Gaufli fut gardéîaiitrcmcntje peu* -pie fuit tourné.En Calabre y eut trois places qui tindrent pour le Roy Ferrand, dont les deux furent la Mantieamp; laTurpie,anciennes Angeuines;qui auoient parauant leué les banieres du Roy Charles, mais par ce qu’il les dona à monfeigneur de Perfi,amp; ne les voulut rcceuoir au domaine, releuerent les bannières d’Arragon,amp; pour la tierce place,fut le chafieau de Reges, qui aulïi demeura Arragonnois.Mais tout ce qui tint, ne fut que par faute d’y cnuoyerrcar il n’alla pas alTez degens en Fouille amp;: Calabre pour garder vn chafteau pour le Roy. Tarente febailla,villeamp; chafl:cau,amp; tout de mefme Ottrante,Monopoli,Trani,Manfredonne,Barle, amp;nbsp;tout excepté ce quci’ay nommé.Ils venoient trois iourneesau deuanr de nos gens, des citez, pour fe rendre, amp;nbsp;tous enuoyerent à Naples : amp;nbsp;y vindrent tousles Princes amp;nbsp;fei-

gncurs duroyaume,pourfairclióinagc,cxccpcéleMarquisdcPefcaire.-mais fes frcres

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DE PHILIPPE DE C O M M IN E S. fes freres amp;: nepueux y vindrent.Le Comte d’Acri amp;nbsp;leMarquis de Squil laz-20 fuirent enSicile,par ce que le Roy donna leur terre a mofeigncur d’Aubi-gny. A Naples fe trouua auffi le Prince de Salerne,reuenu des naiiires,amp; n’a-uoit de rien fcrui.Son frere le Prince de Bifignan,amp; fes filz fy trouucrét aufli aucc le Duc de Mclfe, le Duc de Graucline, le vieil Duc de Sorafqui pieça a-uoit vendu fa Duché au Cardinal de fâinôt Pierre ad Vincula,) le Comte de Montoriojle Comte de Fondi, le Comte de Tripalda, le Comte de Celano (qui efioit allé auec le Roy,banni de long temps ) le Comte de Troye, ieu-ne,nourry en France,amp;. elloit d’Efcoire;amp; le Comte de Popoli,que Ion trou lia prifonnier à Naples.Le ieune Prince de Ro(âne,dont a eftéparlé,apres a-uoirefté longtemps prifonnierauec le pere, qui le fut trente amp;nbsp;quatre ans, auoiteftédeliuré,amp; s’en allaaiiec Dom Ferrand,ou paramour ou par force. * Semblablement fytroLiuercnt le Marquis de* Guefron, amp;nbsp;tous les Caldo-rcfquesjlc Comte de Matalon, amp;nbsp;le Comte de Merillano, ayans eux, amp;nbsp;les caifon ou leurs,toufiours gouuerné la maifon d’Arragon: amp;nbsp;généralement y vindrent tous ceux du royaume,excepté ces trois que ic vous ay nommez.

Commentle'F^y (parlesfut couronné 7{oy de Naples^ des fautes eju il feit dt entrer tenementd'^n tel royaume-.amp; cornent quot;vnc entreprmfe^quife dreffoitpour luy contre le Turc fut defcouuerte parles Tenitiens. CHAT. XIII l.

Vand le Roy Ferrâd fenfuit de Naples, il laifia au chafteau leMarquis de Pe(cairc,amp; aucuns Allcmans,amp; luy alla vers fon pere,pour auoir aide en Sicile.Dom Federic tint la mer auec quelque peu degalees,amp; vint deux fois parler auRoy à fcureté,luy requérant que quelque portion du royaume peuft demeurer à fon nepueu,auccnom deRoy, amp;nbsp;â luy le fien,amp; celuy de fafcmmc.Son cas n’eftoit point grand’ chofe : caM auoit eu petit partagc.Le Roy luy offroit des biens en Frâce,pour luy, amp;nbsp;pour fondit nepueu.’amp; croy qu’il leur euft donné vnc bonne amp;nbsp;grand’Duché: mais ils ne la voulurent accepter. Aufii ils n’euflent tenu aucun appointement qu’o leur euft feeu faire, demeurans dedans le royaume, quand ils eulTent peu vcoir leur aduatage.Deuat le chafteau deNaples fut mile l’artillerie, qui tira:amp; n’y auoit plus q des Allemas,amp; cftoit parti ledit Marquis de Pefcaire:amp; qui euft enuoyé quatre canos iufques en l’ifle, on l’euft prinfe, amp;nbsp;de là tourna le mal. Auftieuft on eu toutes les autres places qu’ils tcnoict,quin’eftoiêt que quatre ou cinq.* mais tout fe mita faire bonne chere, iouftes, amp;: feftes ; amp;nbsp;entrèrent en tant de gloire,qui ne fembloit point aux noftres que les Italiens fuf-Icnt hommcs:amp; fut le Roy couroné,amp;eftoit logé en Capoüane:amp;: quelquefois alloit au *Mot Imperial. A ux fubieéfs feit de grandes graces,fie leur rab- * pdouiu bâtit de leurs charges;ôe croy bien que le peuple de foy ne fe fuft point tour-né,combien qu’il foit muable,qui euft côtenté quelque peu de Nobles:mais ils n’eftoient recueillis de nul,fie leur faifoit on des rudeifes aux porccs:amp; les mieux traitiez furent ceux de la maifon de Carrafe, vrais Arragonnois, en- couronni pour cores leur ofta Ion quelque chofe. A nul ne fut laifte office ny eftat, mais pis CoßStint^lt,

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170 VIL LIVRE DES MEMOIRES traidez les Angcuins que les Arragônois:amp; à ceux du Comte de Mcrillano fut donné vn mandement, dot on chargea le Prelident Ganay d’auoir prins argent:amp; le Sencfchal fait nouueau Duc de Noie, amp;nbsp;grâd Châbelan du royaume. Par ce mandement chafeun fut maintenu en fa pofleflio, amp;nbsp;forclos les Angeuins de retourner au leur,finon par proces : amp;nbsp;quant à ceux qui eftoiét entre d’eux, mcfmes comme le Comte de Celano,on bailla main forte pour les en ictter.Tous eftats amp;nbsp;offices furet dônez aux François, à deux ou trois. Caftér^ ’Tous les viures,qui cftoient au * chafteau de Naples, quand il fut prins, qui uo- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;cftoient fort grans,dont le Roy eut congnoiflancc, il les dona a ceux qui les

demâdoict.En ces cntrefaiéles fe rendit le chafteau,par la pratique des A 11c-mans,qui en eurent vn monde de biens qui eftoient dedans;amp;: auffi fut prins

• le chafteau de l’Oeuf par baterie. Et par cefte coclufio fe peut veoir que ceux quiauoicntcôduit ceftegrand’ceuure,ncrauoient point fait d’eux, mais fut vraye œuure de Dieu,comme chafeun le veit:mais ces grandes fautes queie dy,eftoient œuures d’hommes,accueillis de gloire, qui ne côgnoiflbiét d’où ce bien amp;nbsp;honneur leur venoit,amp; y procédèrent felon leur nature amp;nbsp;cxpcric ce;amp;: fe vint changer la fortune aulîi promptement, amp;nbsp;auffi viliblcment co-»zemeW« mclou voit leiour en*EIolâde,ou en Auucrgne,oùlesioursd’eftéfont plus îre oftSb longs qu’ailleurs,amp; tant que quand le iour faut au foir, en vnemcfme inftâ-cc,ou peu aprcSjCotnmcd’vn quart d’heure, on voit derechef naiftre le iour uergne,'«“' à vcninôê ailffi veit tout fige homme en auffi peu d’cfpacechancrer cefte bo-1 ■ r 1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;J nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r rr f F i •

Novvcrguc. ne amp;c glorieule aducnturc.dont tant ruiient aduenus de biens amp;nbsp;d honneurs à toute la Chrefticnté,fi elle euft efté recognuëde celuy d’où elle vcnoit.Car IcTurccufteftéauffi aifé à troubler,qu’auoit efté le Roy Alphonfe ; car il e-ftoit vif,homme de nulle valeur;amp; eut le Roy,fonfrcre entre fes mains ( qui vefquit peu deiours apres la fuite du Cardinal de Valence, amp;nbsp;difoiton qu’il fut baillé empoifonné)qui eftoit l’homme du monde qu’il craignoit le plus: amp;nbsp;tant de •ailiers de Chreftiens eftoient G prefts à fe rebeller,qu’o ne le fçau-roir penfer.Car d’Ottrante iufques «à la Vaîonne, n’y a que foixante mils, amp;nbsp;de Valonne en Conftanrinople,y a enuiron dixhuiél iournées de marchans, comme me comptèrent ceux qui fouuent faifoient le chemin, n’y aaucu-ncs places fortes entre deux, au moins que deux ou trois, le refte cft abbatu: amp;nbsp;tous ces pais font Albanois,Efclauons,amp; Grecs,Sc fort peuplez, quifen-toientdesnouuelles du Roy,par leurs araisquieftoiétà Venife amp;nbsp;en Pouil-le,à qui auffi ils efcriuoienr, amp;: n’attendoient que melfages pour fe rebeller; y fut enuoyé de par le Roy vn Archeuefquc de Duras qui eftoit Albanois; mais il parla à tant de gens que merueilles prefts à tourner , eftansenfans amp;nbsp;nepueux de pluGeurs feigneurs 5c gens de bien de ces marchcs,commedc Scanderbeg, d’vnfiizde l’Empereur de Conftantinople, des nepueux du feigneur Conftantin^qui gouuernoit Monrferrat J ôc font nepueux ou cou-Gns du Roy deSeruie.EnTheftalieplus de cinq mille fuflenttourncz,amp; encores fe fuft prins Scutari, cc que ie Içauoy e par intelligence, amp;nbsp;par la main du fcigneurConftantin,qui pluGeurs tours fut cache'à Venife auecmoy:car de fon patrimoine luy appartiët la Macedoine amp;nbsp;Theftalie, qui fut le patrimoine d’Alexandre, amp;nbsp;la Valonne en cft. Scutari amp;nbsp;Croye en font pres, Ôc de fon

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DE PHILIPPE DE CO M MI N E S. 271 de fon tcpSjfon pere ou oncle les engagea aux Vcnitics,quiperdirêt Croye. Scutari baillèrent au Turc,en faifant paix ; amp;nbsp;fut ledid feigneur Coftantin à trois lieües près,amp; Ce fufl executée l’entreprinfe n’euft elle que lediól Arche-uefque de Duras demeura à Venife aucuns iours apres ledicl feigneur Con-ftâtin,S: tous les iours ie le prelToye de partir: car il me fembloit home leger en parolle,amp;difoit qu’il feroic quelque chofe dontilfèroitparlé:amp;: de male aducnturCjleiour quelcs Venitiés feeurent la mort du freredu Turc, quele Pape auoit baillé entre les mains du Roy, ils delibererenc de le faire fçauoir au Turc,par vu de leurs Secretaircs:amp; comanderent qu’aucun nauirenepaf fall la nuiôt entre les deux chafteaux,qui font l’entrée du Gouffre de Venife; amp;nbsp;y feirent faire le guetfear ils ne fc doubtoiet que des petitsnauires,comme Grips,dót il y en auoit plufieurs au port d’Albanie, amp;nbsp;de leurs ifles de Grece) car celuy qui cull porte ces nouuellcs,euft eu bô prefent. Ainfi ce panure Ar-chcuefquc,celle propre nuiél,voulut partir pour aller à celle entreprinfe du feigneur Côflantin qui rattédoit;amp; portoit force efpées,boucliers,amp; iaueli-nes,pour bailler à ceux auec qui il auoit intclligêcc(car ils n’é auoient point) mais en paflat entre les deux challeaux,il fut prins,amp; mis en l’vn defdits cha-flcaux,ôc fcsfcruitcursiamp;lenauircpalTaoultre par congé. Il luy fut trouué plufieLM's lettres qui defcouurirêt le cas,amp; m’a dit le feigneur Côflantin que les Vénitiens enuoierent aduertir les gens du Turc aux places voifines, amp;nbsp;le Turc propre,amp; n’eull efté le Grip,qui palfa oultre,dont le Patron elloit Al-banois,qui l’aduertit,!! eufl elle prins: mais il fenfuit i:n Pouïlle par mer.

OH difeours aucunement hors delà matière principale auquel Philippe de Qommines^ autheurde ceprefent liure,parle afe^ amplement de heßat gouuernement de lafeigneurie des yenitiens:amp; de ce qu'il 'veit^ C^jyfutfai^lypendant qu'il eßoit Ambadeurpour le en leur^iliede yenifè. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;C H A T. X P',

R efl il temps que ie die quelque chofe des Venitiés, amp;nbsp;pour-quoy i’y elloyeallé; car le Roy eR maintenant à Naples au deffusdefes affaires. Mon allée fut d’Aft, pour les remercier des bones refpôfes qu’ilsauoictfaiôles à deux Ambaffadeurs du Roy,amp; pour les entretenir en fon amour,s’il m’clloitpof-fible:car voyant leurs forces,leur fens, amp;nbsp;leur conduiéle, ils le pouuoient ai-fément troubler, amp;nbsp;nuis autres en Italie. Le Duc de Milan m’aida à depef-cher, amp;nbsp;efcriuit à fon Ambafradeur,qui effcoit là refident (car toufiours y en auoitvn)qu’il metinllGompagnie,amp; m’adreflàfl.-ôc auoit fondiélAmbaffa-deur cent Ducats le moys delà feigneurie, amp;: fonlogis bien accouflré, amp;nbsp;trois barques qui ne luy coufloient rien à le mener par la ville. Celuy de Ve-nife en a autant à Milan, Lauf les barques ; carony v.^àcheual, amp;nbsp;àVcnifc parcauc. le paffay en allant par leurs citez, comme Brelfe, Veronne, Vin-cence,amp; Padouc,amp; autres lieux. Par tout me fut faiél grand honneur, pour l’honneur de celuy qui m’cnuoyoic, amp;nbsp;venoient en grand nombre de gens au dcuantdcmoy ,auec leur Podeflat ou Capitaine. Ilsnefailloicnt point tous deux,mais le fécond venoit iufques à la porte.Par le dedans ils me con-

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VII.LIVREDES MEMOIRES duifoycntiufquesärhoftellcrie, amp;nbsp;ccrrmandoientàl’hoftequ abondamment ie fulTctraide: ôi me failoient deffrayer avec toutes honnorablcs pa-rollcs : mais qui compteroii bien ce qu’il fault donner aux tabourins amp;nbsp;aux trompettes,il n’y a gueres de gaing à ce deffray : mais le traitement eft hon-norablc. Ce iour que i’entray à Venife,vindrent au deuant de moy iufques * ticciao» âla“^ Cbafoufine, qui eflàcinq mils de Venife : amp;nbsp;làon lailTc lebafteau , en Lizafuhna, ’ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r

itaiùns. quoy oncltvenu de Padoüe, aLilongd’vncriuiere;amp;lemet on en petites barques bien nettes,amp; couuertes de tapifferie, amp;nbsp;beaux tapis velus dedans, pour fe feoir defl'us.-amp; iufques là v ient la mer: amp;nbsp;n’y a point de plus prochaine terre,pour arriuer à Venife.-mais la mer y eft fort plate,(’il ne fait tormen-te : ôc à ceflecaufe qu’elle eftainfi plate,fe prend grand nombre de poiflbn, • amp;nbsp;de toutes fortes:amp; fu bien efmerueillc de veoir l’afTiette de cefle cité,amp; de veoir tant de clochers, amp;nbsp;de monaftercs,amp; h grand maifonnement, ôc tout enl’cauëjamp;le peuple n’auoir autre forme d’aller qu’en ces barques; dont ie croy qu’il s’en finiroit trente mille, mais elles font fort petites. Enuiron ladite cité y a bien feptante m'onafteres, à moins de demie lieue Françoyfe, aie prendre en rondeur (qui tous (ont en illes , tant d’hommes que de femmes,fort beaux amp;nbsp;riches, tant d’edifices que de paremens, amp;nbsp;ont fort beaux iardins ) fans comprendre ceux qui font dedans la ville, où font le» quatre ordres desMendiens, bienfoixante amp;nbsp;douze parroiffes, amp;nbsp;maintes con-£rairies:amp; elf chofe effrange de veoir de fi belles amp;nbsp;h grades Eglifes fondées en la mer. Audit heu de Chafoufine vindrent au deuant de moy, vingt cinq Gentils-hommes bien ôe richement habillez , amp;nbsp;de beaux draps de foye amp;nbsp;efcarlate, amp;nbsp;lame dirent queic fufTe le bien venu : Se me conduirent iufques pres la ville, cnvneEghfe de faint André, où de rechef trouuay autant d’autres Gentils-hommes, amp;aueceux les Ambaffadeurs du Duede Milan amp;nbsp;de Ferrare:amp; là aulTi me feirent vne autre harangue, amp;■ puis me mirent en d’afftres bafleaux,qu’ils appellent plats : Sc font beaucoup plus grans que les autres:amp; y en auoit deux couuerts de fatin cramoify, amp;nbsp;le bas tapif-fé,ôc lieu pour feoir quarante perfonnes : amp;nbsp;chafeun me feit feoir au milieu deces deux ArabafTadeursfquiefH’honneur d’Italie que d’eflreau milieu)amp; me menèrent au long de la grand’rue, qu’ils appellent legrand Canal, amp;nbsp;eft bien large, les galées y paffent à traueurs : amp;nbsp;y ay veu nauire de quatre cens tonneaux ou plus, pres des maifons : amp;nbsp;eft la plus belle rué que ie croy qui foiten tout le monde, amp;nbsp;lamieuxmaifonnée, amp;nbsp;va le long de ladite ville. Les maifons font fort grandes amp;nbsp;haultes ,amp; de bonne pierre, amp;nbsp;les anciennes toutes paintes les auéres faites depuis cent ans, toutes ont le deuant de Marbre blanc, qui leurvient d’Iftrie,à centmilsde là:amp; encores ont mainte grand’piece de Porphireamp; de Sarpentine fur le deuant. Au dedans ont pour lemoi^s, pourlaplus part, deux chambres qui ont les planchez dorez, riches manteaux de cheminées de Marbre taillé, les chalis des lits dorez,amp; les ofteuents paints amp;nbsp;dorez, amp;nbsp;fort bien meublées dedans: c’eft la plus triomphante cité que i’ayeiarnaisvcué, ôc qui plus fait d’honneur à Ambaffadeurs amp;nbsp;eftrangers,amp; qui plus figement fegouuerne, amp;nbsp;ou IcferuicedeDieucft le plus folennellcment fait : ôc encores qu’il y peuft bien

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DE PHILIPPE DE COMMINES. 275 bien auoir d’autres Euitcs,!) croy-je que Dieu les a en aide, pour lareucren-ce qu’ils portent au feruieede l’Egliîe. En cede compagnie de cinquante Gentils-hommes,me conduirent iufques à lai nd George:qui ell en vne Ab-baie de moines noirs reformez,où iefu logé. Le lendemain mevindrét que-rir,amp;mener àlafeigneurie, où prclentay mes lettres au Duc, qui prefidoic en tous leurs confeils,honnoré comme vn Roy : amp;nbsp;s’addrefloient à !uy toutes lettreszmais il ne peutgueres de 1 uy feuhtoutesfois ceftuy cy a de l’autho-rité beaucoup,amp; plus que n’eut iamais Prince qu’ils cuflcntjaulli il y a des-ja douze ans qu’il efl: Duc.’ôc letrouuay homme de bien, fage bien experi-menté aux chofes d’Italie,amp;doulce amp;nbsp;amiable perfonne. Pour ce iqur ne dy autre chofe;amp; me feit on veoir trois ou quatres chambres, les planchez richement dorez, ôc les lids amp;nbsp;ofteuents ; amp;nbsp;eft beau amp;c riche le Palais de ce • qu’il contient, tout de marbre bien taillé, amp;nbsp;tout le deuant,amp; le bord des pierres dorez en largeur d’vn poulce, parauanturc : amp;: y aaudid Palais quatre belles Elles richement dorées,amp; fort grand logis:mais la court elt petite. De la chambre du Duc il peut ouïr la Mefl'e au grand Autel de la chappelle faind Marc; quieft la plus belle amp;nbsp;riche chappelledu monde, pour n’auoir que nom de chappelle, toute Elide de Mufaicq en tous endroids. Encores fevantent ils d’en auoir trouué l’art; amp;nbsp;enfontbefongnerau mefticr,amp;: l’ay veu.En cede chappelle cft leur threfor, dont Ion parle, qui font choies ordonnées pour parer l’Eglife. Il y a douze ou quatoizegros Ballays; ien’en ay veu aucun E gros.Il y en a deux, dont l’vn palfe fept cens, amp;nbsp;l’autre huid censcarras : mais ils ne font point nets. Il y en adouze autres de pierres de * cuiralTe d’or,le deuant ôc les bords bien garnis de pierrerie tres fort bonne, puirafTe/» amp;nbsp;douze couronnes d’or, dont anciennement fe paroient douze fern mes/.'’'' qu’ils appelloient Roy nés, à certaines fellcs de l’an, alloicntpar ces ifles amp;nbsp;Egides. Elles furent dcfrobées,amp; la plufpart des femmes de la cité , par larrons qui venoient d’Iltricou de Friole(quiedpres d’eux)lefqÂ^ls feftoiéc cachez derriere cesilles-.mais les maris allèrent apres, amp;nbsp;les recouurcrcnt,amp;: mirent ces chofesà EiindMarc,amp; fondèrent vne chappelle au lieu où lafei-gneurieva tous les ans, au iour qu’ils curent cede vidoire; amp;nbsp;edbien grand’ richede pour parer l’Eglife, auec maintes autres chofes d’or, qui y lonr, amp;: pour lafuite d’Amatide, d’Aguate, amp;nbsp;vn bien petit d’Efmeraude : mais ce n’ed point grand threfor pour edimer,' comme l’on fait or ou argent contant,amp; ils n’en tiennent point en thrcfor;amp; m’a dit le Duc deuant la feigneu rie,que c’ed peine capitale parmi eux de dire qu’il faille Etire threfor,amp; croy qu’ils ont raifon,pourdoubte des diuifions d’entr’eux.Apres me feirent mô-drer leur autre threfor,quiedvn Archenal,où ils eiquippent leurs galées,Ôlt;; font toutes chofes qui font neccdâircspour l’armée de mer : qui ed la plus belle chofe qui foit en tout le demeurant du mode auîpurd’huy, amp;nbsp;la mieux ordonnée pour ce cas.

En cffed,i’y feiournay huid moys,defFrayé de toutes chofes, amp;nbsp;tous autres Ambadadeurs qui edoicntlâ: ôzvous dy bien queie les ay congnusfi Eiges,amp;tant enclins d’accroidre leur feigneurie, que s’il n’yed pourucu tod,tous leurs voihns en maudiront l’heure. Car ils ont plus entendu la fa-

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174 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;VII. LIVRE DES MEMOIRES

con d’eux defFcndre amp;nbsp;garder, en la faifon que le Roy y a efté,amp; depuis plus que iainais:car encores font en guerre auec luy,amp; fi fe font bié ofez eflargir, comme d’auoir prins en Fouille fept ou huiól citez en gage ; mais ie ne fçay quand il les rendront.-amp; quand le Roy vint en Italie,ils ne pouuoient croire que l’on print ainfi les places, n’en fi peu de temps (car ce n’eftoit point leur façon)amp; ont fait,amp; font maintes places fortes depuis, ôc autres en Italie. Ils ne font point pour faccroiftre en hafte, comme feirent les Romains : car leurs perfonnes ne font point de telle vertu,amp; fi ne va nul d’entr’euxà la guer rede terre ferme, comme faifoient les Romains, fi ce ne font leurs Proui-feurs amp;nbsp;Payeurs, qui accompaignent leur Capitaine, amp;nbsp;le confeillcnt amp;nbsp;pouruoient du tout : mais toute la guerre de mer cft conduidc par leurs Gentils-hommes,en Chefs amp;nbsp;Capitaines de galées amp;nbsp;naues , amp;nbsp;paï autres leurs fubieds. Mais vn autre bien ont ils en lieu d’aller en perfonne aux armées par tcrre.-c’eft qu’il ne f’y fait nul homme de tel cœur, ne de telle vertu, pourauoir feigneuric, comme ils auoient à Rome; amp;nbsp;parcen’onrilsnul-les queftions ciuiles en la cité, quieft la plus grande prudence que ie leur voye, amp;nbsp;y ont merucilleufcment bien pourucu,amp; en maintes manières: car ils n’ont point de Tribuns du peuple comme auoient les Romains(lefqucls Tribuns furent en partie caufe de eur deftrudion ) car le peuple n’y a credit ne n’y eftappelléen rien,amp; tous Offices font aux Gentils-hornmcs,fàuf des Secretaires : ceux là ne font point Gentils-hommes. Auffi la plus part de leur peuple eft eftranger. Et fi ont bien congnoiflance,par Tirus Liuius,dcs fautes que feirent les Romains : car ils en ont 1 hiftoire, amp;nbsp;fi en font les os en leur Palais de Padouë. Et par ces raifons, amp;nbsp;par maintes autres que i’ay con-gnües en eux, iedy encores vne autre-fois qu’ils font en voyed’eftre bien grans feigneurs pour l’adiienir.

Or il faut dire quelle fut ma charge, qui fut à caufe des bonnes refpofes qu’ils auoÂnt faides à deux feruitcurs du Roy, qui auoientefté vers eux, - ôcqu’à leur fiance, il tiraft hardiment auanten celle entreprinfe ; amp;nbsp;ce fut auant qu’il partift delavilled’Aft. Auffi leur remonftraylcs longues ôcan-ciênes alliances qui auoient efté entre les Roys de France amp;nbsp;eux : amp;nbsp;d’auan-tage leur offri Brandis, amp;nbsp;la ville d’Ortrantc, par condition qu’en leur baillant mieux en Grcce,ils fufient tenus les rendre. Ils me tindrent les meilleures parolles du monde du Roy amp;nbsp;de toutes fes affaires : car ils ne croioyent point qu’il allaft gucres loing;amp; quant à l’offre que ie leur fey, ils me feirent dire qu’ils eftoient fesamis amp;nbsp;feruitcurs, amp;qu’ils ne vouloient point qu’il achetaft leur amour (auffi le Roy ne renoit point encores les places)amp;: que fils vouloient, ils fe mettroient bien en guerre : ce qu’ils ne vouloient point faire, combien qu’ilyeuft vers eux AmbafiadedeNaples, les en fuppliant tous les iours ,amp; leur^ffrant ce qu’ils voudroyent : amp;nbsp;confeffoit le Roy Al-phonfe (qui lors regnoit) auoirfailly vers eux, amp;nbsp;leurremonftroit leperii queceleurferoit, filcRoy venoit au deffusde fon cntreprinfc.LeTurcde l’autre cofté leur enuoya incotinent Ambafiadeur que ie vey plufieurs fois, qui à la requefte du Pape les menaffoit s’ils ne fe declaroient contre le Roy. À chafeun faifoient bonne refponcc ; mais ils n’auoient à ce commencemët nulle

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DE PHILIPPE DE C O MM INE S. 175 nulle crainte de nous,amp;;nePenEiifoientquerire: amp;aulïi le Duc de Milan leur Eiifoit dire par fon Ambafïadeur, qu’ils ne le fouciaflent point, amp;nbsp;qu’il Içauoitbien la façon dercnuoyer le Roy, fans qu’il tinfl rien en Italie: amp;: autant en auoit mandé «à Pierre de Medicis, qui le m’a dit. Mais quand ils veirent, amp;nbsp;le Duc de Milan aulli,que le Roy auoit les places des Florentins entre les mains,amp; parefpecial Pile, ils commencèrent à auoir peur, amp;nbsp;par-loyentde la façon de le garder de palier pluâ auant ; mais leurs conlcils cftoyent longs, amp;nbsp;ce-pendantle Roy tiroit auant; amp;nbsp;gens alloycnt amp;nbsp;ve-noyent des vns aux autres. Le Roy d’Efpaigne commençoit aulliàauoir peur, pour les illes deSicilcamp;de Sardaigne. Le Roy des Romains commença au ni à elire enuieux, luy faifoit on peur de la couronne Imperial-le, difint que le Roy la vouloir prendre, amp;nbsp;en auoit requis le Pape:(qui n’e-ftoit point yray)amp; pour ces doubtes,ces deux Roys enuoyerêt großes Am-baßadesa Vcnife,moy cßant là, commedideft. Deuanty enuoyalc,Roy des Romains:caril eßoit voißn. L’Eucfque de Trente en elloit le principal, deux Cbeualicrs, ôcvn Doéleur.-aufquels fut ftidgrand honneur ôc re-uercnce, Sgt;c leurs logis bien accoußrczcommca moy : amp;nbsp;dix Ducats pour iour,pour leurs defpcns, amp;nbsp;leurs cheuaux delfray cz, qui eßoienr demeurez à Treuis. Incontinent apres vint vn tres-honnelle Cheualier d’Efpaigne, bien accompaigné amp;nbsp;bien veßu;qui aufii fut fort honoréSc dcfbayé.Le Duc de Milan, outre l’Ambaßadeur qu’il y auoit, y enuoya l’Euefque de Corne, Ôc meßire Francifeo Bernardin 'Micomtc;amp; commencèrent lecrettement,amp;: de nuiéfjà conuenir cnlcmble,amp; premièrement par leurs Secretaires, n’o-foyent encores en public le declarer contre le Roy, par cfpecialle Duc de Milan,amp; les 'Vénitiens, qui encores ne Iça^uoient fi la ligue, dont eßoit que-fiion,feconcluroit, amp;nbsp;mevindrentvcoirceuxdc Milan, amp;nbsp;m’apportèrent lettres de leur maißre,amp;: me dirent que leur venue efloit par ce que les Vénitiens auoient enuoyé deux AmbalErdeurs a la ville de Milan,amp; ils auoient de coußume de n’y en lailfer aller qu’vn (außi ne feirent ils à la h iff ma is cecy eßoit menfonge amp;nbsp;tromperie,amp; toute deception: car tout cela eßoit aßem-blépour faire ligue cotre le bon Roy ; mais tat de villes ne fepeurenr accorder en peu de temps. Apres me demandèrent fi ie ne fçauoye point qu eßoit venu frire ccß Ambaßadeur d’Efpaigne,amp; celüy du Roy des Romains, afin qu’ils en peulfentaduertir leur maißre.Or i’eßoye jaaduerti,amp; deplufieurs lieux,tant deferuiteursd’Ambaßadeurs qu’autremcnt,quc celuy d’Efpaigne eßoit paße par Milan,deguifé,amp; que les Allemans fe conduifoient tous par ledidl Duc,ôc aulTi fçauoye qu’à toute heure l’Ambaßadeur de Naples bail-loit des paquets de lettres qui venoient de Naples(car tout cecy eßoit auant que le Roy parriß de Florence ) amp;nbsp;defpendoy e quelque chofe pour en eßre aduerti, amp;nbsp;en auoye de bons moyens;amp; fi fçauoye ja le commencement de leurs articles : qui cßoient iettez,mais non point accordez:car les Vénitiens font fort longs à telles conclufions. Et pour ces raifons,amp; voyant la ligue fi approchée, ne voulu plus faire de rignor-ant: amp;nbsp;refpondy audiél Ambaßadeur de Milan,que puis qu’ils me tenoient termes iießranges, que ie leur vouloye monßrer que le Roy ne vouloir point perdre l’amitié du Duc de

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VII. LIVRE DES MEMOIRES Milan,fil y pouuoitremedier:amp;moy,comme fciuiteur, m’en vouloyeac-qiiitcr, amp;nbsp;rcxcLifcr des mauuais rapports, cjii’cn en ponrroit auoirfaits at-did Duc leur maiftre, que ie croyoic eftre mal informé, amp;nbsp;qu’il deuoit bien pcnfer,auant que perdre la recongnoiflance de tel feruice, comme il auoit fait au Roy:amp;: que nos Roys de France ne furent iamais ingrats;amp; que pour quelque parolle qui pouuoit auoir eftédide,nc fe deuoit point départir J’a-mour d’eux deux, veu qu’elle eftoit tant feantc à chafeune dcfdiôles parties; amp;nbsp;lesprioye qu’ils me vouluflent dire leurs doléances, pour en aduertir le Roy auant qu’ils feiifent autre chofe.Ils me iurcrent tous amp;nbsp;feirent grans fer-mens qu’ils n’enauoient nul vouloir:toutcsfoisils mentoicnr,amp; eftoient venus pour rraider ladi de ligue.

Le lendemain allay à la Seigneurie leur parler de celle ligue, amp;nbsp;dire ce qu’il mefembloitferuirau cas; amp;nbsp;entre les autres cbofes,ie leur dy qu’en l’alliance qu’ils auoient auec le Roy, amp;nbsp;qu’ils auoient eueaucc le feu Roy Louis fon pere, ils ne pouuoycntfoullcnir les ennemis l’vn de l’autre, ôc qu’ils ne pouuoyent faire celle ligue, dont Ion parloir, que ce ne full aller contre leur promefle. Ils me feirent retirer, amp;nbsp;puis quand iereuein, me dill le Duc que ie ne deuoye point croire tout ce que Ion difoit par ladiólc ville: carchafeun y eftoit en liberté,amp; pouuoit chafeun dire ce qu’il vouloir ; tou-tesfois qu’ils n’auoient iamais penfé faire ligue contre le Roy, ne iamais ouy parler:mais au contraire,ils dilbicnt Elire ligue entre le Roy , amp;nbsp;ces autres deux Roys, amp;nbsp;toute Italie,amp; qu’elle full contre lediôl Turc, amp;nbsp;que ebafeun porteroit fa part de la defpenfe : amp;nbsp;s’il y auoit aucun en Italie qui ne voulull payer ce qui feroitaduifé, que le Roy amp;nbsp;eux l’y contraindroient par force: amp;c vouloicnt faire vn trelbon appointement:(;cfl que le Roy prinfl vne fom-me d’argent contant,amp; qu’eux l’auanccroient, amp;nbsp;tiendroient les places de Fouille engage, comme font à celle heure, amp;nbsp;le royaume feroit recongnu deluy,dugonfentementduPapc, amp;'par certaine fommede deniers l’an, amp;nbsp;que le Roy y tiendroit trois places ; amp;nbsp;pleull à Dieu que le Roy y eull voulu entendre lors. ledyn’ofer entrer en cell appointement, leur priant nefc liafter point de conclure celle ligue, amp;nbsp;que de tout aduertirois le Roy, leur priant,commei’auoyeEiitaux autres,me dire leurs doléances , amp;nbsp;qu’ils ne les teulfent point,comme faifoientceuxdc Milan:ils lèdouleurent des places que le Roy tenoit du Pape, amp;nbsp;encores plus de celles qu’il tenoit des Florentins, amp;nbsp;par efpecial dePife,diEins que le Roy auoit mandé par eferiten plulieurs lieux, amp;nbsp;à eux- mefmes, qu’il ne vouloir en Italie que ie royaume de Naples, amp;nbsp;aller contre le Turc,ôc qu’il monllroit à celle heure de vouloir prendre tout ce qu’il pourroit en Italie, amp;nbsp;ne demander rien au Turc: amp;nbsp;di-foient encores quemonfeigneur d’Orléans, quieftoit demeure en AU, fai-foit crainte au Duc de Milan , amp;nbsp;que fes feruiteurs difoient de grandes menaces; toutesfois qtfils neferoientrien denouueau queien’euffe refpon-fe du Roy, ou que le temps de l’auoir ne fufl paffe ; amp;nbsp;me monflrcient plus d’honneur qu’à ceux de Milan.De tout i’aduerty le Roy, amp;nbsp;eu maigre re-fponfe:amp;dcs-Iors s’alTembloyent chafeuniour, veu qu’ils fçauoient que l’cntreprinfe eftoit defcouuertc : amp;nbsp;en ce temps eftoit le Roy encores à Florence,

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fence,amp; (’il eufttrouLierefiftanceà Viteibe,comme ils cuidoient,ils enflent ennoyé des gens à Ilt;ome,amp; encores fi le Roy Ferrand fuft demeuré dedans: amp;nbsp;n’euflent ïamais penfé qu’il euft deu abandonner Rome,amp; quad ils la vei-rentabandonnée,commcncerct àauoirpenrztoutesfois les Ambaffades des deux Roys les prefToient fort de conclure, ou vouloient departir.-car ja y a-noyent effé quatre moys,chafcun iour allans à la Seigneurie: pendant ic fai-foyc le mieux que iepouuoye à l’encontre.

Voyans les Vénitiens tout cela abandonné, amp;: aduertis que le Roy efloit PiUgrandt dedans la ville de Naples, ils m’enuoyerent quérir, amp;nbsp;médirent ces nouucl-lesjtnonflranseneftreioyeux : toutesfois ils difoient que lediôl chafleau elloit bien fort garny,amp; voioye bien qu’ils auoient bonne amp;nbsp;feure efpcran-cequ’il rint:amp;confentirent que l’Ambaffadeurde Naples leuaft Gens-d’ar- • mesà Venifc,pourenuoyeràBrandis:amp; eftoientfur la conclufion dcleur ligue, quand leurs Ambafladeurs leur efcriuirent que le chafleau eftoit ren-du:ôlt; lors ils m’enuoierent quérir de rechef avn matin :amp; lestrouuay en grand nombre,comme de cinquante ou de foixante en la chambre du Prince , qui eltoit malade de la colique: amp;: là me compta ces nouuellcs,de vifàgc ioyeux: mais nul en la compagnie ne (èfçauoitfaindre fi bien comme luy. Les vns cftoient afiis fus vn marchepied de banc,amp; auoient la tefle appuyée entre leurs mains. Les autres d’vneautre forte, tous demonftrans auoirgra-de trillerte au cœur : amp;nbsp;croy que quand les nouuellcs vindrentà Rome de la bataille perdue à Cannes,contre Hannibal, les Sénateurs qui eftoient demeurez n’ertoient pas plus efbahis ne plus efpouuantez qu’ils efloyent ; car vif feul ne feit (emblant de me rcgarder,n’y neme dirt: vn mot,qucluy,amp; les regai doyc à grand’merueillc. Le Duc me demanda fi le Roy luytiendroit ce que toufiours leur auoit mandé, amp;nbsp;que leur auoye dit. le les arteuray fort qu’oL)y,amp;: ouuri les voyes pour demeurer en bonne paix, amp;nbsp;m’offroyefort à la faire renir,e(perant les ofler defoupçon,amp; puis me départi. •

Leur ligue n’cfloit encores nefaiéle ne lopuc, amp;nbsp;vouloient partir les Al-Icmans mal contens. Le Duc de Milan fefàifoit encores prier de ie ne fçay quel article: toutesfois il mandaà fesgens qu’ils pafTafTcnt tort : ôc en effeél, conclurent la ligue.Et durât que cecy fe demenoit, i’auoye fiins cefTe aduer-ji le Roy du tout,le prertant de conclure, ou à demeurer au royaume, amp;nbsp;fc / pouruoir de plus de Gens de pied amp;nbsp;d’argent,ou de bonne heure,à fe mettre en chemin pour fc retirer,amp;laiffcr les principales places bien gardécs,auant qu’ils flirtent tous affemblez. Aufii aduertifToye monfeigneur d’Orleans,qui elloit en Afl, auec les gens de fi maifon feulement (car fa compagnie efloit auec le Roy) 5c d’y mettre des gensjl’arteurant qu’incotinent iroiét luy courre fus,amp; efcriuoye à monfeigneur de Bourbon, qui efloit demeuré Lieutenant pour le Roy,en France,d’enuoyer des gens,en harte en Art,pour le garder,amp; que fi certe place efloit perdue, nul fecours ne pouuoit venir au Roy de France, amp;nbsp;aduertifToye auffi laMarquifede Montferrat,qui efloit bonne Françoife, amp;nbsp;ennemie du Duc de Milan, afin qu’elleaidaftàmonfei-gneiir d’Orléans,de gens,s’il en auoit afFaire.’car Art perdu,lesMarquifats de Montferrat amp;nbsp;Saluées cftoient perdus.

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2.78 VIII. LIVRE DES MEMOIRES

Laîi2ue fut conclue vn foir bien tard, amp;nbsp;le matin me dcmada la Seig-neu-rie,plus matin qu’ils n’auoient decouftume.Commeicfuarriuéjô: cftreaf-fis,me dift le Duc,Qu’en l’honneur de la fainéle Trinité ils auoient conclud ligue auccnoftre Gind pcrelc Pape,les Roys des Romains amp;deCaftille, eux amp;nbsp;le Duc de MilaUjà trois fins.da premiere pour deffendre la Chreftien-té contre le Turc, la fécondé à La deffenfe d’Italie, la tierce a la preferuation de leurs eftats :amp; que iele feilTe fçauoirau Roy,amp; eftoient aflemblez en grand nombre, comme de cent ou plus,amp; auoient les telles haultes, amp;fai-foient bonne chere:amp;: n’auoient point contenance femblablcs à celles qu’ils auoient le iour qu’ils me dirent la prinfe du chafteau de Naples. Me dift auf-fi, qu’ilsauoient eferit àleurs Ambafladeurs, qui eftoient deuers lcRoy, * qu’ils fen vinfténtjamp;qu’ilsprinflentconge.L’vnauoitnom meflireDomi-nique Loredand’autre meflîre Dominique Treuiftin.I’auoye le cœur ferré, amp;nbsp;eftoye en grand double de laperfonne du Roy,amp;: detoutefàcopaignie: amp;nbsp;cuidoye leur cas plus preft qu’il n’cftoit,amp; aulTi faifoient ils eux, amp;nbsp;doub-toyc qu’ils euftent des Allemans pres ; amp;nbsp;fi cela y euft efté,iamais le Roy ne fuftfailly d’Italie.le me deliberay ne dire point trop de paroles en ce cour-roux:toutcs-fois ils me tirèrent vn peu aux champs. le leur fey refponfe que des le foirauantjicl’auoye eferit au Roy, ôe plufieurs-fois,amp;que luyauftî m’auoit eferit qu’il en eftoic aduertide Rome amp;nbsp;de Milan. Il mefeit tout eftrange vifage de ce que ie difoye l’auoir eferit,le foir, au Roy : car il n’eft nulles gens au monde fi foupçonneux,nequi tiennent leurs confeilsfife-crets;amp;par foupçon feulement confinent fouucnt des gens, amp;nbsp;à cefte caufe leur difoye.OuItre ce ieleur dy Riuoiraufti eferit à monleigneur d’Orléans, amp;àmonfcigneurde Bourbon, afin qu’ils pourueuflent Aft:amp; le difoye ef-perant que cela donneroit quelque delay d’aller deuant Aft : car fils euftent efté aufli prefts comme ils fe vantoient amp;nbsp;cuidoient, ils l’cuftcnt prins fans rcmed^.- car il eftoit amp;nbsp;fut mal pourueu de long temps apres.11 fe prin-drentàmcdire qu’il n’y auoit rien contre le Roy, mais pour fe garder de luy;amp;qu’ils ne vouloient point qu’il abufaft ainfile monde de paroles,amp; de dire qu’il ne vouloir que le royaume, amp;nbsp;puis aller contrc.le Turc: amp;nbsp;qu’il monftroit tout le contraire, amp;nbsp;vouloir deftruire le Duc de Milan amp;Flo-rence,amp; tenir les terres de l’Eglife. A quoy ie refpondi, que les Roys de Frâ-ce auoient augmenté l’Eglife, amp;nbsp;accreuë amp;nbsp;dcfféduc, amp;nbsp;que ceftui cy feroit plus-toft le femblable que de rien 1 uy öfter ; mais que toutes ces raifous n’e-ftoient point cellcsqui les mouuoient,mais qu’ils auoient enuie de troubler l’Italie , amp;nbsp;faire leur profit:amp;: que iecroioye qu’aufli feroient ils,ce qu’ils prindrent vn peu à mal, cemediftlon.-mais il fe voir, (par ce qu’ils ont en Fouille en gage du Roy Ferrand, pour luy aider contre nous) que ie difoye vray.Surcepoinôt m^vouloyeleuer,pourmeretirer:maisils mefeirentraf feoir:amp;me demanda le Duc fi ienevouloye faire nulle ouuerture de paix, parcequeleiour dedeuati’enauoye parlé’.mais c’eftoit parcodition qu’ils vouluITcnt attendre à conclure la ligue,de quinze iours, afin d’enuoyer de-✓ ucrsleRoy, amp;auoir refponfe. Apres ces chofes diôles, ieme retirayâ mon logis: ôc ils maderent les Ambafladeurs l’vn apres l’autre,amp; au faillir de leur confeil

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' DE PHILIPPE DÉ COMMIMES. 2^9 coilfeiljierenconrray cekiy de Naples, qui auoit vue belle robbe neufüe,amp;: Eiifoit bonne chere,amp;: en auoit caufe : car c’eftoient grandes nouuclles pour Juy. Alapref-dinée tous les AmbafTadcursdelaliguefetrouuerent enlein-ble en barque(qui efl; Fdbat de Venifc,où chacun va,felô les gens qu’il y a, amp;: aux defpcns de la Scigncurie)amp; pouuoient eftre tes auoient pendeaux aux armes de leurs maiftres: amp;nbsp;vey toute celle compagnie pafTer par deuant mes fcnellres, amp;nbsp;y auoit force meneftriers ; amp;nbsp;ceux dé Milan,au moins l’vn d’iceux,qui m’auoit tenu compagnie beaucoup de fois, faifoit bien cont enance de ne me congnoillre plus: amp;nbsp;fu trois iours fans aller par la ville,ne mes gens, combien que iamais ne me fut diôle en la ville, ny à homme que i’cufre,vne feule mal gracieufe parolle. Le foir feirent vnc mer-ueilleufc fefle de feux,fur les clochers, force falots allumez fus les maifons deccs Ambafradeurs,amp; artillerie qui tiroit; amp;: fu fur la barque couucrte, au long des riucs,pour vcoir la feile,enuiron dix heures de nuiôl,amp; par elpecial deuant les maifons des AmbalTadeurs, où fe faifoient banquets amp;nbsp;grand’ thefe.Ce iour là n’elloit point encor la publication, ne la grand’ felle : car le Pape auoit mandé qu’il vouloir qu’on attendill encores aucuns iours, pour la faire à Pafques Fleuries, qu’ils appellent le dimanche de l’Oliue; amp;: vouloic que chacun Prince où elle feroit publiée,amp; les AmbalTadeurs qui y feroient, portalfent vn rameau d’Oliuier en la main le difent ligne de paix amp;nbsp;alliance,amp; qu’à ce ioLir elle full publiée en Efpaigne amp;nbsp;Allemaigne. A Venife feirent vn chemin de bois, haut de terre, comme ils font le iour du Sacre, bien tendu,qui prenoit du Palais iufques au bouc de la place fainél Marc’.ôc apres la mcdc.que chanta l’Ambafladeur du Pape, amp;nbsp;qui à tout homme donna ab-folution de peine amp;nbsp;de coulpe,qui feroit à la publication.ils allèrent en pro-celïion par lediél chemin,la Seigneurie amp;nbsp;AmbalTadeurs tous bien vellus,amp; plulîcurs auoient robbes de veloux cramoifi, que la Seigneurie auoit données,au moins aux Allemans,amp; à tous leurs fcruitcurs robbes nîufucs; mais elles elloicnt bien courtes. Au retour de la proceflion fe monllrcrent grand nombre de mylleres amp;nbsp;de pcrfonnages',amp;: premièrement Italie,amp; apres tous ces Roys amp;nbsp;Princes,amp; la Royne d’Efpaigne:amp; au retour à vne pierre de Por-fire, où on fait les publicatios,fcircnt publier ladiéle Iigue;amp; y auoit vn Am-bafladeur duTurc prefent, à vne fenellre,caché:amp;:clloitdepefché, lauf qu’ils vouloient qu’il veift ladiéle felle;amp; la nuiôl vint parler à moy, par le moyen d’vn Grec, amp;nbsp;fut bien quatre heures en ma chambre, amp;nbsp;auoit grand’enuie que Ion maillre full nollre amy.Ie fu inuitéà celle felle, par deux fois, mais ie m’exeufay :amp; demeuray en la ville,enuiron vn moys depuis,aulïi bien trai-élé que dcuant;amp; m’en parti, mandé du Roy, amp;nbsp;de leur congé conduiél en bonne feureté,à leurs defpcns,iufques à Ferrare. Le Duc me vinfau deuant, amp;nbsp;deux iours me feit bone chere, Ôc deffraya, ôc autawmclïire Ichean dcBé-tiuoIcàBouIongne;amp;delàm’enuoycrent les Florentins quérir, amp;nbsp;allay a Florence,pour attendre le Roy, duquel ie retourneray à parler.

quarante barques: quitou-

a ij

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2.8o


HVITiesME LIVRE DES MEMOIRES DV s E I G N E V R D'ARGENTON, $ V R LES P R I N C 1 P A V X faiéls amp;nbsp;geftes du Roy Charles huiôLicfme.

• ^ctorJ.re prouifion/juele'B^oymsitauroyaumedeNa^les^voula.nt » nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;retourner en France. CH AT. 1.

Our mieux continuer mes MemoireSjSr vous informer,me ; faut retournera pailcrdu Roy; qui depuis qu’il cntraàNa-• pies iufqucs à tât qu’il en partit,ne penfa qu’à pafTcr temps, ôc d’autres à prendre amp;nbsp;à profiter : mais fon aagel’excufoir, amp;nbsp;nul ne (çauroit exeufer les autres de leur fautc'.car le Roy ’ les croyoit de toutes chofes: amp;nbsp;s’ils luy enflent fccudire qu il euft bien pourucu trois ou quatre chafleàux audit pais : corne celuy de Caiette,ou feulcmêt celuy de Naples,dont il auoit donc les viures, corne i’ay dit,il tint encores le royaume.-car en gardant celuy de Naples, iamais la ville ne fefuflreuoltée.Il tira tous les gés d’armes à l’étour de luy,depuis lacôclu-fion de la ligue;amp; ordonna cinq cens Homes d’aimes Frâçois, amp;nbsp;deux mille cinq cens Suifles, amp;nbsp;quelque peu de gens de pied François, pour la garde du royaume,auec le reflc,il délibéra de l’cn retourner en Fiace, parle chemin qu’il cfloit venu,amp; la ligue fe preparoit à l’é garder. Le Roy d’Elpaigneauoit Âtuoyoit quelques *caraucllcs en Sicile: mais peu de gensdcfllis, aemtri -voj tOLitesfois auant que le Roy partifl,ilsauoicnt ia 2;arny Reec en Calabre,qui Zn (y a rames, j-, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;/■ r. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;gt;II

iéjqaeiiesan cit gtcs ocS icilc. Si plulicurs rojs i auoye clcritau Roy qu ils deuoiet ladef-

ccndre;car l’Ambafladeur de Naples le m’auoir dir,cuidàt que ja y fulFcnt.-Sc fi le Roy y eufl enuoy é d’hcurc,il etifl prins le chafleaincar le peuple de la ville tenoit pour luy. AufTi vindrent gens de Sicile à la Mâtia,amp; à laTurpia,par faute d’enuoyer:amp;; ceux d Otrâte,en Fouille,qui auoient Icuélesbânieresdu Roy,veuê la ligue,amp; qu’ils cftoient fituez pres de Brâdis amp;Galipoli,amp; qu’ils ne pouuoicnt finer de gens,lcuercnt les bannières d’Arragon,amp; Dom Fedc-ric,qui efloit à Brâdis,rafournit:amp;: par tout leroy aume,cômencerét à muer leur penfec,amp; fe print à changer la fortune,qui deux moys deuant auoifcflé au contraire,tant pour vcoir cefte ligue,que pour le partement du Roy, amp;nbsp;la panure prouifiô qu’ôJaifîoit,plns en chefqu’en nôbre de foldats. Four Chef y demcuramôfêigncurdcMôtpenfier,dela maifon deBourbô,bon Cheua-lier amp;nbsp;hardy,mais peu fiige.Il nefe leuoit qu’il nefuftmidy. En Calabrelaifi fàmonfeigneurd'Aubigny, de la nation d’Efeofle, bon Cheualier, fiige,amp; honnorablc,qui fut grand Côneftable du royaume:amp; luy dona le Roy (corne i’ay dit)la Côté d’Acri,amp; le Marquilàt de Squillazzo. 11 laifla au cômêcc-

menr,

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DE PHILIPPE DE C O M M I N E S. ' ‘ ment le Sencfchal de Bcaucaire,appellé Efticne de Vers capitaine de Caiette fait Duc de Noie,amp; d’autres Seigneuries amp;nbsp;grand Châbela'n:amp;paflbiêt tous les deniers du royaume par là main, amp;nbsp;auoit iccluy plus de faix qu’il ne pou-uoitne n’euft feeu porter;mais bien affeâionné eftoitàlagarde dudit roy* aume.Il laifla monfeigneur Dó Iulian,Lorrain,l’en fiifant Duc,en la ville de Sant-Angelo,où il a fait merueilles de fe bien gouuerner. A Mâfredonia laif fa meflire Gabriel de Montfaulcon,homme que le Roy cfimoit fort;amp;3 tous dôna großes terres.Celuy là s’y conduifit tref-mal, amp;nbsp;la bailla au bouc de quatre iours,par faulte de viures,amp; il l’auoit rrouuée bien garnie,amp; efloit nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;‘

en lieu abondant de bleds.Pluficurs vendirent tout ce qu’ils trouucrent aux chafteaux.-amp; dit lô que celluy pour garde,laifla là Guillaume de Villeneuf-ue,que fes variées vendirent à Dó Fedcric,qui lôg teps le tint en galée. A Tarente laifla George de Suilly,quis’y gouuerna trefbien,amp; y mourut depefte; amp;nbsp;a tenu cefte cité là pour le Roy iulqucs à ce que la famine l’ait fait tourner. En l’Aquila demeura le Baillifde Vitry,qui bien s’y conduiht : ôc mclTire Gracien* des Guerres,qui fort bien feft coduit en 1’Abruzzo. Tout demou- * Q^lques ramai fourni d’arget :amp; les aflignoit Ion lus le Royaume,amp; tous les deniers ^difan”h^2i-failloient.Le Roy laifla bien appointez les Princes de Salerne nbsp;nbsp;deBifignàn

(qui l’ont bien ferui tant qu’fis ont peu) amp;nbsp;au/Ti les Colonnois de tout ce qu’ils fçeurent dcmander.-amp; leur laifla plus de trente places pour culx,amp; les Icurs.S’ils les enflent voulu tenir pour kiy,come ils deuoienr,amp; qu’ils auoiêt iuréjilsluy euflentfaidgrand feruice, amp;nbsp;leur honneur Sc profit:car iecroy qu’ils ne furent,cent ans a,à fi grans honneurs.-mais auant fon partemenr, ils commencèrent à pratiqucr,amp;auflî ils cftoient fes feruiteurs àcaufe de Mill: car naturellement ils eftoiécdu parti Gibelin:mais cela ne leur deuoit point faire faulfer leur foy,eftaht fi grandement traiôlez.Encores feit le Roy plus pour eulx : car il amena, foLibs garde d’amy, prifonniers lefeigneur Virgile Vrfin,amp; leComtedePetillanc,aufli des Vrfins,leurs enne mis. fie qu’il feit contre raifon.’car combien qu’ils enflent cflé prins,fi fçauoicbienle'Roy, amp;nbsp;ainfi l’entcndoit, qu’il y auoit faufeonduiâ:, amp;, le monftroit bicn:car il ne les vouloir mener finon iufques en Aft, amp;nbsp;puis les renuoyer : le faifoit à la requefte des Colonnois:amp; auant qu’il y fuft,lcfdiâ:s Colonnois furenttour-nez contre luy,amp; les premiers,fans alléguer nulle caufe^

(ommentleT^oyJe partit de'NapleSj repajfàparl^me:, dont le Papefenfuit â Oruiette'.desparoUes^ueleKoy tint àmonfeigneur d'Argenton afin retour de Venifi', des deliberations de rendre aux florentins leurs places nbsp;nbsp;nbsp;despredica--

tions dignes de mémoire de fiere Hieronyme de florence. C H AT. 11.

amp; Pres que le Roy eut ordonné de fon affaire,comme ilentcn-doitjlemeit en chemin, auecce qu’il auoit de gens,que i’efti-me neuf cens Hommes-d’armes au moins, en ce comprins fil maifô,deux mille cinq cens Suiflcs,amp; croy bien fept mille homespayezentout.’ôcy poLiLioitbien auoir mille cinq cés hômes de dcfrenfe,fuiuât le trainde lacourt,comme feruiteurs. Le Comte do Petillanc (qui les auoit mieux comptez que moy)difoit qu’en tout en auoit neufmille.-amp; le me dift depuis noftre bataille,dôc fera parlé. Le Roy print fó a iij

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VUL LIVRE DES MEMOIRES


2.81


chemin vers la ville de Rome,dont le Pape parauât vouloir parrinôc venir a Padouc,fons le pouuoir des Venitics: amp;nbsp;y fut fon logis faidt. Depuis le coeur leur muajamp; luy enuoycret quelques £;ens,amp; le Duc de Milan luy enenuoya auni.-amp; combien qu’ils y fuflcntà temps,b n’ofa attendre le Papc,nonobftat que le Roy ne luy euft faióL que tout honneur amp;nbsp;feruicc:amp; luy auoit enuoyé ÂmbafEideur,pour le prier d’attendrc:mais il fe retira â Orietc,amp;: de là à Pérou Ile ;amp; lailTa les Cardinauxà Rome, qui recueillirent le Royjequeln’y arrefta point:amp; ne fut faid defplaifirànul.-amp; m’eferiuit d’aller à luy vers Sene,où ie le rrouuay, amp;nbsp;m’y feit, par fa bonté, bon iecucil:amp; me demanda,en rianr,Ii{es Vénitiens enuoioyent au deuant deluy .-car route fa compagnie cfloiét ieuncs gens,amp; ne croyoiér point qu’il fuft autres gens qui portaient ‘’’■n'^cs.Icluy dy quelafeigneuriem’auoit dit,au départir, deuantvn defes Boicrdin. Secretaires,appellé* Lourdin,quceux,amp; le Duc de Milan, mettroiétquarà-te mille hommes en vn champ,non point pour l’alfaillir, mais pour fe deffe-drc;amp;mefeirenrdireje iour que ie parti d’eux, àPadouë,parvn de leurs Prouifeurs,quivenoit contre nous, que leurs gens ne pafferoient point vne eften leurterrc,pres de Parme, amp;nbsp;me femblc qu’elle a nô*Olye, Ogiiofomzne Eßon qu’il alTaillift Ic Duc de Milan.'amp; prifmes enfeignes enfemble lediôt tal.mxiitfiant Prouifeur amp;nbsp;moy de pouuoir enuoycr l’vn vers l’autre,s’il en eftoit befoing, pour traider quelque bo appointemcnt.-amp; ne voulu rien rôpre.-car ie ne fça-eftoit prefent à ces paroles zc/.4/-5CT vnappellé meftire Louis Marcel, qui 2ouuernoit,pourcefte année là, les* leP4»,dmant »I , nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;n ' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;^I. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;’

çiuoctx di Mots viere(quiclt corne vn rrelorier)amp;lauoientenuoie pour me conduire, auffiy cftoicntIcs gçus du Marquis de Mantouë,qui luy portoient argent:

n’ouirent point ces paroles. De ceux là ou d’autres porray au Roy tor- par eferit lenobre deleurs Gens de cheual,dcpied,’amp; d’Eftradiots,amp; quien rettt,ncmmt . i i nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;» nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;î nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;‘ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;1 • r

Occ3,e»z* niioicnt les charges.Peu de gcnsgt;d entour duRoy^croyoïec cc que le diloyc.

Eftant lediftfeigneur à Sene,le preflay de partir, des ce qu’il y eut efté deux ^et^dePa^f iours,amp; Ics chenaux repofezxarfes ennemisn’cftoient point encores cafê-n'rßoitqM ble,amp; ne craignoyc linon qu’il vint des Allcmans.* car le Roy des Romains les en aflebloit largem ent:amp;: vouloir fort tirer arger contât, pour les fouldoier. n«UeHrre'.‘^“ Quclqucchofcqucicdifte,le Roy mcitdcux matières enc51eil,qui furent ^ußi briefues:L’vnefçauoir fi on deuoitrédre aux Florentins leurs places,amp;pren pasd^now. dre trente mille Ducats qu’ils deuoient encores de leur don,amp; feptâte mille fß il gt;•! zT • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;n nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r • T ti nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;f nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;iT nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;T T

exefpp. qu lis orrroient preirer,amp; leruirleKoyaionpailagc, auec trois cens Hom-^rîzjT^^Hc mes-d’armcs(foubs la charge de melfire Francifque Secco,vaillâi cheualier, deux mille Hommes de pied. le fu d’opinion que le Roy le deuoit faire, amp;nbsp;d’autres aulïi, 5lt;fculemenr retenir Ligorne, tc-vc-ebio, iufqucs a ce qu’il fuft en Aft.ll ciift bien payé les gens, amp;nbsp;encores luy full de— mouré de Target,pou^fortrairc des gés de Ces ennemis, amp;nbsp;pui.s les aller cher-ƒ/«J'vintxcre-diteurs d^ la

cher.Toutcsfois cela n’eut point de heu, amp;nbsp;Têpelchoit monfeigneurdeLi-gnylquieftoithome ieune, amp;nbsp;coufin germain du Roy) amp;nbsp;ne fçauoitpoint il fe bien pour quelle raifon,finon pour pitié des Pifins.L’autreconfeil fut celuy b^TooTa- que môfeigncur de Ligny failoit mettre en auàt, parvn appelle Gaucher de


M onùtnne.


(nmme


to Gi»nnlt;,tth TinteLiiIle,amp; par vnc partie de ceux dcScne,qui vouloiencmonfeigneurde Ligny

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. '

Lygny pour feigneurrcar la ville efl de tous têps en partialité, ôcfc gouuer ne plus follemêrq ville d Italie.ll m’en fut demâdélc premietjiedy qu’il me fêbioic que le Roy deuoit tirer à fon chemin, amp;nbsp;ne s’amufer à ces foliés offres,qui ne (çauroictdurervne fepmaine,aufliquec’eftoit ville d’Empire,ôc queceferoit mettre l’Empire cotre nous. Chafeun fut de ceftaduis : toutes-fois on feit autrement:^ le prindrêt ceux de Sene pour leur Capitaine ôcluy promirent certaine fomme d’argent l’an dont il n’eut rien ; amp;nbsp;cccy amufilc Roy fix ou fept iours,amp;luy moftrerentlesDames:amp;ylaiiïà le Roy bien trois cens homes,amp; s’afoiblit de tat:amp; de la tira à Fife, palTat par Poggibozi chafteau Florentin:amp; ceux qu’on laifia à Sene, furet chaffez auac vn mois de là.I’ay oublié à dire que moy eftant arriué à Florence,allât au deuat du P^oy, allay viliter vn frereprefcheur,appelléfrercHieronyme,dcmcurât â vn co-uent reformé,home de fiiinóle vie, corne on difoit, qui quinze ans auch demeuré audit lieu,amp; eftoitaueemoy vn Maiftre d’hoftcl du Roy, appelle leâ Frâçois fâge homme. La caufe de l’aller veoir fut parce qu’il auoit touficurs preiché en grand’ fiueur du Roy, amp;nbsp;fii parolle auoit gardé les Florentins de tourner côtrcnousxariamais prefeheur n’eut tant decrediten cité. 11 auoit toufiours aifeuré la venue du Roy (quelque chofe qu’o difi:,ne qu’ô cfcriuiil au côtraire)diiant qu’il eftoitenuoyé de Dieu,pourchaflier les Tyrans d’Ita* Iic,amp; que rie ne pouuoit refifter,ne fê defFedre cotre luy. Auoit dit aufli qu’il viédroitaPife,amp; qu’il y entreroic,amp;: queceiour mourroit l’cflar dcFloréce, amp;nbsp;ainfiaduint:car Pierre deMedicis fut chaffé ce iourjôc maintes autres cho fes auoit prefchées,auâc qu’elles aduinflent, corne la mort de Laurês de Medicis,amp; aufii difoit publiquement l’auoir par reuelatio, amp;nbsp;prefehoit qucl’e-Rat del’Egliic feroicreforméàl’efpee.Cclan’eft pas encores aduentr.mais il en fut bien pres,amp;encores le maintien. Plufieurs le blafmoient de ce qu’il difoit que Dieu luy auoit reuelé,autres yadioufterent foy. Dema particle repute bon homme. Aufli luy dcmâday (i le Roy pourroit pafi^r^ lans peril de faperfonnCjVeu la grand’alFemblée que faifoiétlcs Vcniticns,de laquelle il Içauoit mieux parler que moy,qui en venoye.Il me refpôdit qu’il auroit affaire en chemin.-mais que l’honneur luy demoureroit, amp;nbsp;n’euft il que cent homes en fa côpaignie:amp; queDieu,qui l’auoit coduit au vcnir,le conduiroit encores à fon retour-.mais pour ne s’cRrc bien acquité cà la reformatio de l’E-glilc,corne il deuoit,amp; pourauoir fouffert que les gens pillalTent amp;nbsp;defro-balTent ainfi le peuple,aulli biê ceux de Ion parti,amp; qui luy ouuroiêt portes làns cótrainte,cóme les ennemis, que Dieu auoit donc vne fentence contre luy :amp; brief, auroit vn coup de fouet.-mais que ie luy dilTe que s’il vouloir a-uoir pitié du peuple,amp; dclibcrer en foy garder fes gens de malfairc,amp; les pu nir,quâd ils le feroient,côme fon office le requiert,que Dieu rcuoqueroit fit fentêcCjOU la diminueroit; amp;nbsp;qu’il ne penfaft point e^re ex culé pour dire ie ne fay nul mal.-Seme dill que luy mcfme iroit au deuat du Roy,amp; luy diroit: amp;nbsp;ainfi le feit amp;nbsp;parla de la reftitutiô des places des Florétins. Il me cheut en penfée la mort demo feigneur le Daulphin, quad il parla de celle fentéce de Dieu'.car ie ne voioye autre chofe qleRoy peuft prêdre a cœur:amp; dis encore cecy afin q mieux on entédeq tout cedit voyage full vray myllere de Dieu.

a iiij

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184 VIII. LIVRE, DES MEMOIRES

Comment le jl(oy retint en Jês mains la 'ville de Ptß, (sr quelques autres places des Ylorentins^pendantque monßeur d'Orleans dl'un autre coflè entra dedans JSIouarre en la Duché de Milan. CHAT. III.

Ommei’aydit, leRoy eftoit entré à Pife’.amp; alors les Pifâns hommes amp;nbsp;femmes,prierét à leurs hoftes que pour Dieu ils tinflent la main entiers le Roy, qu’ils ne fuflent remis foubs la tyrannie des Florentins, qui à la vérité les traiéloient fort mal : mais ainfi font maintes autres citez en Italie, qui font fubitéles à autres.Puis Pifc amp;nbsp;Florence auoientefté trois cés

ans ennemies,auant que les Florentins la côquiflent.Ces parolles en larmes, faifoient pitié à nos gês,amp; oublicréi les promeifes amp;nbsp;ferméts q le Roy auoit • fàiéls fur l’autel S. lean à Florence:amp; toutes fortes de gens fen mefloiét, iuf-ques aux Archiers amp;nbsp;aux SuilFes,amp; menafToienreeux qu’ils pefoiet qui vou-loient que le Roy tinft fi promeflc,côme leCardinal S.Malo,lequel ailleurs i’ay appelle General de Languedoc. l’ouy vn Archierquilemenaçaiaufli en eut qui dirent groITes parolles au Marelchal de Gié.Le Prefident Gannayfut plus de trois iours qu’il n’ofoit coucher en fo logis,amp; fus tous tenoit la main à cecy le Comte de Ligny,amp; veiioient leldits Pifans à grans pleurs deuers le Roy,amp; faifoient pitié à chafcun,qui par raifon les euft peu aider. Vn iour a-pres difner falTembierent quarante ou cinquante Gentils-homes de fa mai-fon,portans leurs haches au col;amp;: vindrent trouuer le Roy en vne chambre iouant aux tables auec monleigneur de Piennes, amp;: vn varier de chambre ou deux,amp;: plus n’eftoient: amp;nbsp;porta la parollevn des enfansdeSalIezard i’aifné, enfaueurdes Pifans, chargeant aucuns de ceux queicnommoye nagueres, amp;nbsp;tous difoient qui le trahiroient : mais bien vertueufement les renuoya le Roy,amp;: autre chofe n’en-fut oneques depuis.

Bien fîx ou fept iours perdit le Roy Ion temps à la ville de Pife, puis mua la garnifon.%: mit en la Citadelle, vn appelle Entragues, homme bien mal conditionné,feruiteur du Ducd’Orleans.-amp; leluy addrefla monfeigneur de Ligny,amp;: y fut laiHe des Gens de pied de Berry. Ledit feigneur d’Entragucs feit tant qu’il eut encores entre fes mainsPietre-fande(amp; croy qu’il en bailla * Q-çi?»« argent)amp; vneautre place aupres,appelléc*Mortron.11 en eut vneautreaufli,

Ij/ T •! nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;11 nbsp;’111 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;In 11 nbsp;nbsp;111

feuucnt appellee Libreracto,pres de la ville de Luques.Le chafteaude la ville de Ser-zane,qui efloit tresfort,fut mis par le moyen dudiél Cote môleigneur de Li mc/ont »»me çrny,entrc Ics mains d’vn baftard de Roufli, feruiteur dudit Core. Vne autre appellee Serzanelle,entre les propres mains d’vn de fes autres feruiteurs ;

Deler, d’ttai. LiilFa Ic Rov dc Fraiice beaucoup de gens aufdiéles places, fi n’en aura ia-tron”* mais tant à faire,amp;rcfufi laide des Florentins, amp;nbsp;l’offre dont i’ay parlé: amp;nbsp;demeurèrent ces Florentins comme gens defefperez,amp;r fi auoit fceu,des de-uât qu’il partift de Sjeites, comme le Duc d’Orleâs auoit prins la cité de No-Liarrc fus le Duc de Milaiparquoy le Roy voyoir eftre certain que les Veni-tiês fe declareroiét.-veu que de par eux luy auoit efté dit,que fil faifoit guerre audit Duc de Milan,ils luy doneroient toute aide,à caufe de la ligue nou-uellement faiél:e,amp; auoient leurs gens prefis,amp; en grad nombre. Et faut entendre que quand la ligue fut conclue,que le Duc de Milan cuidoit prendre • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Aff amp;

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DE PHILIPPE DE COMM IN ES. ' 28; Afl,amp; n’y pen foit trouuer perfonne:mais mes lettres,dont i’ay parlé aüoicnt bien aidé à auancer des gens que le Duc de Bourbô y enuoya,amp; les premiers qui y vindrent,furent enuiron quarante Lances delà cornpaignie du MareE chai de Gic^qui eftoient demeurez en Frâce(amp;ceux là vindrent bien à point) amp;nbsp;cinq cens.Homes de pied qu’y enuoya le Marquis de Saluccs. Cecy arrella les gens du Duc de Milan,que mcnoitmefiire Galeas de S. Seuerin, amp;nbsp;fe logèrent à Non,qui eft vn chafteau que le Duc de Mila a à deux mils d’Aft.Peu apres arriuerent trois cens cinquante Homes d’armes, amp;nbsp;des Gentils-homes du Dauphiné, amp;nbsp;quelque deux mille SuiHes , amp;nbsp;des Francs Archiersdudiét Dauphiné:amp;eftoiêtcn tout, bien fept millccinq cens homes,payez qui mirent beaucoup à venir,amp; ne feruirent de rien à l’intention pour laquelle ils a-iioient crté màdez(qui eftoit pour venir fccourir le Roy)car en lieu de fecou- * rirle Roy,il les falut aller fccourir. Etauoiteftéefcritàmonfcigncur d’Or-leans,amp; aux Capitaines, qu’ils n’cntreprinflént rien cerntre le Duc de Milan, mais feulemcntentédiflcnt dcgardcrAft,amp;: à venir au deuât du Roy,iufques fur la riuiere du Thefîn,pour luy aider à paffer ; car il n’auoit aucune autre ri-uicre qui rempefehaft. Et faut cntêdre que ledidt Duc d’Orleâs n’eftoit point paflé Al’y auoit le Roy laiflc. Toutesfois, nonobftant que le Roy luy a-uoit eferit, luy vint cefte pratique fi friande, que de luy bailler cefte cité de: Nouarre(qui cft à dix lieues de Mila)amp; y fut reccu à grâd’ioyc, tat des Gucl-phes que des Gibelins, amp;nbsp;luy ayda bien à conduire cefte œuürc la Marquife de Montferrat.Le chafteau tint deux iours ou trois: mais li pendant il kiftal-lé ou enuoyé deuant Milan, où il auoit pratiqué aflez, euft efté rcceu bien à plus grand’ioye,qu’il ne fut oneques en fon chafteau de Bloys, corne me l’oc compté des plus grans de la Duché, amp;nbsp;le pouuoit faire fans danger, les trois iours premiers; par ce que les gens du Duc de Milan eftoient encors à Non, près Aft,quâd Nouarre fut prins ,qui ne vindrent que de quatre iours apres; mais peut cftre qu’il ne croyoit point les nouuclles qu’il en auo^.

Comment le 7{oy Charles pa/Ja plußeurs dangereux pas de montaignes entre Tife^ Serr^ane-.comment la ville de Tontrîmefutbrufléeparjes Allemans,^* cornent le Duc d'Orléansfe portoitd. J^ouarre ce temps pendant. C H AT. 1111,

3ijESieneIeRoyeftoitvcnuaPife,cómcvousauezveu,amp;en-, njonnou tendu ce qu’il y feit;amp; de Pife vint à Luques,où il fut biê re-ccude ceux de la vil le: amp;nbsp;y feiourna deux iours,amp; puis vint a tremen t : mail Sß Pietre-finól:c,que tenoit Entragucs,ne craignant rien fes en-nemis,nc ceux à qui*ils dónoient Ie credit,amp; trouua de mer

4 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;’ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;oâltO

Lieillcux pas de mótagncs entre Luques amp;nbsp;ledit lieu,amp; aifez

, nbsp;nbsp;. I • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;” gt;nbsp;n • ril nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• n Saut^on pa»

; de pied:mais encores n eftoient cnlewible nos ennemis.Pres dc la ccruè dudit Pietre-lanóle eft Ie pas de la*Seiere d’vn cofté,amp;lc roe taillé d’autre co-fté,marais de rperbien profonds,amp; faut paffer par vne chaiftéc,comme celle d’vncfta5;amp;: eftoitlepas,qui fuft depuis Pifeiufquesà Porreme, queiecrai- /’»«rRociu/i

. I '■ 1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 • » * 1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• n / nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Ôr n’en ay

gnoie le plus,amp; dont 1 auoyc plus ouy parler : car vne charrette lectec au tra- «« /gt;«♦ tr«»-ucrs,amp; deux bonnes pieces d’artillerie,nous euffent gardez d’y pafl'er, fans y

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M VIII. LIVRE DES MEMOIRES

trouuerremedeauccgcns en bien petit nombre.De Pierre lànéle alla leRoy àSerzanCjOÙfutmis en auantjpar le Cardinal de S.Pierre ad Vincula, de faire rebeller Genes,amp; d’y enuoyer gens.-ôe fut mife la raatieie en confcil, amp;nbsp;e-ftoye en la côpagnie de beaucoup de gens de bien,Capitaines, où fut conclu par tous qu’on n’y entedroit pointrear fi le Roy gaignoit la bataille, Genes fe ' ' viendroit prefenter d’elle mefme:amp; fil perdoit,il n’enauroit que faire:amp; fut le premier coup quei’ouy parler que Ion creuft, qu’il y deuft auoir bataille, amp;nbsp;fut frit rapport au Roy,de celle deliberation : mais nonobftant cela il en-uoya monicigneur de BrelTe,depuis Duc de Sauoye,le feigneur de Bcauraot * gaajB’-v» de Polignac,mon beau frere,amp; le feigneur * d’Ambeiou,de la mailon d’Am-

boife,auec fix vingts Homes d’armes,amp; cinq cens Arbaleftriers, venus tous frais de France, par mer. Et m’cfbahy comment il eft polTiblequ’vn fi icune beiou. Roy n’auoit quelques bons feririteurs, quiluy ofiflcnt auoir dit le peril en quoy il fe mettoit.De moy il me fembloit qu’il neme croyoit point du tout. Nous auions vue petite armée de mer,qui venoit de Naples,amp;c y efioit mon-feigneur de MioIens,Gouuerneur du Dauphiné,amp;vn Eftienne deNcues,de Montpellier : amp;nbsp;cfioient en tout enuiron huiôt galées, amp;nbsp;vindrent à Specie, amp;à Rapalo,ou ils furent deffrióls,a l’heure donc ic parle,amp; au lieu propre où nos gens auoient defrits ceux du Roy Alphonfe,au commecement du voya-ge,amp; par ceux propres, quiauoyent eftédes noftrcsa l’autre bataille ( qui efloicnt mefiire lehan Louis de Flifeo, amp;nbsp;meffire lehan Adorne ) Si fut tout menéà Genes. Il eufl: mieux valu que tout eufteftéaucc nous, amp;encorcs c-ftoit-cepeu.Monfeigneur de Brcire,amp; ce Cardinal, allèrent loger aux faux-bourgs de Genes, cuidant q leur partialité fe deuft leuer en la ville pour eux: mais leDucde Milany auoitpourueu, amp;: lesAdornes, quigouuernoicnt, amp;nbsp;meftire lehan Louis de Flifco(quieft vn fage Cheualierjamp; furent en grad peril d’eftre deffaids,comme ceux de mer, veu le petit nombre qu’ils eftoiêt, amp;nbsp;ne tint finon à la part,qui gouuernoit à Genes,qui n’ofoit fortir de la ville, depeur que les Fourgouftes liefe leuallent, amp;nbsp;leur fermaflent les portes; amp;nbsp;eurent nos gens grand’ peine à eux en venir vers Aft : amp;nbsp;ne furent point à vne / bataille,que le Roy euft,où ils euflent efté biê feans. De Serzane vint le Roy ' vers Pontremè:car il eftoit forcé d’y pafler,amp; eft l’entrée des montaigncs.La ville amp;nbsp;chafteau eftoient aflez bons,amp;en fort pais;amp; fil y euft eu bon amp;grâd nombre de gens,elle n’euft point efté prinfe : mais il fembloit bien qu’il fuft vray ce que frere Hieronyme m’auoit dit, que Dieu le codurioit par la main iiifqu.es à ce qu’il fuft en Ieureté:car il fembloit que fes ennemis fiiftcnt aueu-gles amp;nbsp;abeftis qu’ils nedelFendoicnt ce pas.Il yauoittrois ou quatre cens Hommes de pied dedans. Le Roy y enuoya fon aduant-garde,quemenoit le Marefchal de Gié,amp; auec luy eftoit meftîre lehan-Iacqucs de Treuoul, qu’il auoitrecueilly du ftruàcedu Roy Fcrrand,quand il s’enfuit de Naples, Gcn-til-homme deMilan,bien apparenté,bon capitaine,^ grâd homme de bien, grad ennemy de ce Duc de Milan,amp; chaflé par luy à Naples: amp;nbsp;parle moyen de luy,fut incontinent rendue ladiéfe place làns tirer; Si fen allèrent les gens qui eftoient dcdans,mais vn grand inconuenient y furuint : car il aduint aux Suifles comme la derniere fois que le Duc de Milan y vint.11 yeutvn debat

entre

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 187 entre ceux dé la ville,amp; aucuns Alîcmans(commci’ay dit) defqucls fut bien tué quarante:amp; pour reuanchc,nonobrtant la compoiition,cuerent tous les bommesjpillerent la ville, amp;nbsp;y mirent le feu, amp;nbsp;bruflerent les viures, amp;nbsp;toutes autres chofcs,amp; plus de dix d’entr’eux mefmeSjquieftoicnc yures ; amp;nbsp;ne fccut Icdicl Marefchal de Gié y mettre remede.Aufli afïiegerent le chafteau, pour prendre ceux qui eftoient dedans,qui cftoient feruitcurs duditl mefii-re Lacques deTreuoul,amp; lesy auoit mis quand les autres partirent, amp;nbsp;faluf que le R.oy enuoyaft vers eux, pour les faire départir. Ce fut vn grâd dôma-gedeladeftrudion de cede place,tant pour la * honte, qua caufe des grans. viures qui y eftoient,dont nous auions ja grand’fiulte,combien que le peuple ne fuft en rien contre noLis,fors a l’cntour,pour le mal qu’on leur falloir Mais fi le Roy euft voulu entendre aux ouuertures que faifoit mefiirelcar.- • ïaeques de Treuoul,pluficurs places,amp; Gêtilshomes (e fufient tourncz;car il vouloir que le Roy feifthaulfer par tout la bannière du petit Duc, que le ; feigncurLudouictenoit entre fes mains,qui eftoit filz du Duc dernier mort à Pauie,amp; dontauezouy parler dcuanr,appellé lean Galeas.-mais le Roy ne Je voulut,pour l’amour de monfeigneur d’Orléans, qui pretendoit ,amp; pretend droidtaladiólc Duché. Ainfi pafialeRoy oultre Pontremc, amp;nbsp;alla lo- , ger en vne petite valéc,où il n’y auoit point dix maifons:ôlt;: n’en fçay le nom. amp;nbsp;y demeura cinq iours(amp;: n’en fçauroy e dire la raifon) à tref grade famii-amp; à trente mils de noftreauant-gardc, qui eftoit deuant, ayant monta? ; . , tres hautes amp;nbsp;trcs-afpresàrentour,amp;oùoncqucshommcnepafl'aarciSh . grolTe,comme font Canons ôe grolTes Couleurines,qui lors y pafléi eut. 1 gt;nbsp;Duc Galeace y pafia quatre faulcons de telle groffeur qu’ils pelotent pTr auanrure cinq cens liures,au moins,dont le peuple du pais fiifoit grand t as, *durant ces iours que ie dy.

Or faut parler du Duc d’Orléans. Q^and il eut prins le chafieau de No-uarrcjil perdit temps aucûs iours,amp; puis cira vers* Vigeftie.Deux^tecitcs vil-les,qui font aupres,cnuoycrent vers luy pour le mettre dedans:mais il fut la- ’ gement confeillé de non les recueillir. Ceux de Pauieenuoyerenr pardei : fois : là deuoit il entendre.Il fetroLiua en bataille deuantladiéle ville de Vi gefue,' où eftoit l’armée du Duc de Milan toute,amp; l’a côduifoicnt les enfans defainôl:Scuerin,que tant de fois ay nommez.La ville ne vault point f.nncl Martin de Candc, qui n’eft rien: amp;nbsp;yfu peu de temps apres que le Duc ue Milan y cfioit,amp; tous les Chefs qui y eftoient : amp;nbsp;me môifrerét les lieux, ou tous deux eftoient en bataille,ralibus de la ville,amp;: dedans:amp; fi le Duc d’Or-Icans euft marché cent pas,ils pafloyent oultre la riuiere du Thefin,oùils .a-Lioient flit vn grand pont fur bafteaux,amp; eftoient fur le bord:amp;: vey deftitire vn boLileucrt de terre,qu’ils auoiét fait de l’autre part de la riuiere, pour det-fcndreIepaftage.-amp;vouloicntabandonncrladiólevill^ amp;nbsp;chafteau qui leur euft efte grad’pcrte.C’eft le lieu du mode où le Duc de Milan fe tient le plus, amp;nbsp;la plus belle demeure,pourchafles amp;voleries, entoures fortes,queiefa- nbsp;nbsp;nbsp;’

chc en nul lieu-.il fembla parauanture à moficur d’Orléans qu’ils eftoient en lieu fort, amp;nbsp;qu’il auoit afl'cz fait,amp; fe retira en vn lieu,appellé * T recas, doc le feigneur du lieu parla peu de iours apres à moy, qui auoit charge du Duc de

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188 VIII. LI VRE DES memoires

Milan. Audiól Trecas enuoicrcnt vers le Duc d’Orléans des principaux de Milan,pour le mettre dedâs,amp; offrirent enfans en oftage: amp;nbsp;l’euffent fait ai-^ fernent comme i’ay fccu par des homes de grade authorité,qui eftoient leâs, qui fçauoient cecy,amp; le m’ont copte, difant que le Duc de Milan n’euft fccu trouuer affez gens pour fe 1 ailler affieger dedans le chafteau de Milan,que Nobles amp;nbsp;peuple vouloient la deftrudion de celle maifon deSforcc. Aulïi m’a copte le Duc d’Orléans,amp; fes gens,les pratiques d’ont i’ay parlé;mais ne l’y fioient point bien:amp; auoient faute d’homme,qui les entendill mieux que eux,amp;r puis fes Capitaines n’elloicnt point vnis. A 1’011 du Duc de Milan fc ioignit deux mille Allemans, quele Roy des Romains enuoyoit, amp;nbsp;biêmille hommes a cheual, Allemans, qu’amenoit mellirc Federic Capelarc, natif • de la Coté deFerrettc:qui feit croillrc le cœur â melîireGalcas,amp; aux autres;

amp; allèrent auprès de T recas prefenter la bataille au Duc d’Orléans,amp; ne luy fut point confeillé de combatte, cobien que fa bande valull mieux que l’au-tre;amp; peut ellre que les Capitaines ne vouloient hazarder celle compagnie, craignat que fils la perdoient, que ce full la perdition du Roy dót ils ne Iça-uoient nouuellcs.-car les chemins elloient gardez. Ainli fc retira toute celle compagnie dedans Nouarre,dônant tres-mauuais ordre au faiôl de leurs vi-ures,tant à garder ceux qu’ils auoient,qu’a en mettre dedans la villc;dont affez pouuoient receuoir à l’entour fins argent,amp;: donc depuis ils curent grad’ fiLite:amp; fe logèrent leurs ennemis à demie lieue d’eux.

I nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;O

Qonjment lagroffe artillerie du nbsp;nbsp;nbsp;paffa les onts AApennins,à l'aide des Al-

lemansAu danger oùfut le Marefchal de (fié auecJon aduant-garde: comment le 7(oy arriua à Fornoue. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;CHAP. F.

’Ay laiffé â parler du Roy corne il fut en celle valée deçà Po-treme,par cinq iours en grand’famine fans nul befoing. Vn tourhonorablefeircntnos Allemans.Ceux qui auoient fait celle grand’ faute audit Pôtrcme,amp; auoient peur que leRoy les en haïll à iamais,fe vindrent mefmes offrir à paffer l’artil-lerie,en ce merueilleux chemin de môtagnes (ainli le puis ie appeller, pour ellre haultes amp;nbsp;droiéles ,amp; oùil n’y a point de chemin, amp;nbsp;ay vcLi toutes les principales montagnes d’Italie amp;nbsp;d’Elpaigne,mais trop aifees euffent elle au pris de ces monts) amp;nbsp;feirent cell offre par códitió quele Roy leur pardonnall,cc qu’il feit.Il y auoit quatorze pieces degrolfe amp;nbsp;puiffante artillerie,amp; au partir de ladicle vallée, cômêçoic Ion à moccr par vn chemin fort droid, amp;vey des mulets y paffer à tres-grâd’peine. Ces Allemasfccou-ployent deux à deux, de bonnes cordes, amp;nbsp;fy mettoyent cent ou deux cens àlafois:amp;: quandcetyçlàelloient las,ilfy enmettoitd’autres. Nonobllant cela,y elloientaulîi les chenaux de l’artillerie, amp;nbsp;toutes gens qui auoient train,delamaifon du Roy,prelloientchafcunvn cheual, pour cuider paffer plulloll.-mais lî n’euffent elle' les Allcmas, les chenaux ne l’euffét iamais paf-fée.Et à dire la verité,ils ne pafferent point l’artillerie feulement, mais toute la copaigniexar autrement lî ce n’eull ellé ce moy en,amc ne full paffe. Aulfî furent

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. xh furent ils bien aidez,de ce qu’ils auoientaulîi bon befoing,amp; auflî grad vouloir de pafler que les autres.Ils feirct beaucoup de chofes mal faiôles-.mais le bien pafloit le mal.Le plus fort n’efloit point de moterpour ce qu’incôtinent on trouuoit vne valée: car le chemin eft tel que la nature l’a faid amp;c n’y a rien adoubé, amp;nbsp;failoit mettre les cheuaux à tirer contremont, amp;nbsp;aufli les hommes, amp;eftoit de plus grande peine fans comparailbn, que le monter: Sca toute heure y faloit les charpétiers ou les marefehaux: car s’il tomboit quel-' quepieccjon auoit grand peine à la redrefler. Plufieurs eulTent efté d’aduis de rompre toute la grofle artillerie, pour pafler plus toft ; mais le Roy pouf rien ne le vouloir confentir.

Le Marefchal de Gié,qui eftoit .d trente mils de nous, preflbit le Roy de le - hafl;er,amp; mifmes trois iours à le ioindre.-amp; fi auoit les ennemis logez deuant luy,en beau cap,au moins a demie lieue pres, qui en eulfent eu bon marché, fils reuirenta(railly:amp;: apres il futlogéaPornoue (qui vault adiré vn trou nouueaLi)faifant le pied de la môtaigne,amp;: l’cntre'e de la plaine, bon village, pour garder qu’ils ne nous vinflent aflaillir en la montaigne-.mais nous auios meilleure garde que luy.Car Dieu mit autre péfee au cœur de nos ennemis, tellement que leur auarice fut fi grande, qu’ils nous vouloyent attendre au plain païs,afin que rie n’efchappafl::car il leur fembloit que des motaignesen horsjon euft peu fuir vers Pife,amp; en ces places des Florétins.-mais ils erroiêr^ carnous eftions trop loing;amp; aufli quad on les euft attedus iufques au ioin-drcjils CLiflent bien autant chafle qu’on euft feeu fuir : amp;nbsp;fi fçauoy ent mieux les chemins que nous.Encorcs iufques icy n’cft point commencée la guerre de noftre cofté;mais le Marefchal de Gié manda au Roy comme fl auoit paf fé ces montaigncs,amp; comme il enuoya quarante cheuaux courir deuâc l’Oft des ennemis,pour fçauoir des nouLiclles:lcIquclles furent bien recueillisdes Eftradiots,amp; tuerent vn Gentil-homme appelle le Beuf, amp;nbsp;luy coupperct la tefte,qu’ils pendirent a la banderole d’vne lance,amp; l’a portèrent à^eur Proui-•dadeur,pour en auoir vn Ducat. Eftradiots fot gens cômeGenetaires,veftus à pied amp;nbsp;à chenal,corne les Turcs,faufla tefte où ils ne porter cefte toile,que ils appcllétTollibâ,amp; font dures gens,amp; couchent dehors tout ran,amp; leurs cheuaux.IL cftoient tous Grecs,venus des places que les Venitiens y ont,les vns de Naples de Romanic, enlaMore^, autres d’Albanie, deuers Duras, amp;nbsp;font leurs cheuaux bons,amp; tous de Turquie.Les Venitiens fen feruent fort, amp;nbsp;fy ficnt.Ic les auoye tous veus defeendre à Venife,amp; faire leurs monftrcs en vne ifle,où eft l’Abbaïc de S.Nicolas, amp;nbsp;eftoient bien quinze cens: amp;nbsp;font vaillans hommes,amp; qui fort trauaillent vn Oft,quand il s’y mettent. Les E-ftradiots chaflerent comme i’ay dit,iufques au logis dudiâ: Marefchal où e- ' ftoient logez les Allemans,amp; en tuèrent trois ou quatre, amp;nbsp;emportèrent les teftes,amp; telle eftoit leur couftLime:carayans Venitiert« guerre cotre IcTurc pere de ceftuy-ci appelle Mahumet Otthoma, il ne vouloir point que fes gês prinflent nuis prifonniers,amp; leur donnoit vn Ducat pour tefte, amp;nbsp;les Vénitiens faifoient le femblable: amp;nbsp;croy bien qu’ils vouloicnt efpouuanter la co-pagnie,commeilsfcirent:mais lefdiéls Eftradiots fc trouucrcnt^bien efpou-uantez aufli de l’artillerie.Car vnFaulco tira vn coup qui tua vn de leurs che-

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25)0 VUL LIVRE DES MEMOIRES uaiix qui incontinent les feit retircr. car ils ncFauoient point accoufi:Lime3amp; en fèrctirant,prindrentvn Capitaine de nos Allemas qui eftoitmontc'àche-ualjpour veoirfils le retiroient, amp;nbsp;eut vn coup de lance au trailers du corps, car il eftoit de fumé. Il cftoit fageamp; fut menédeuant le Marquis de Matouë, qui eftoit Capitaine general des Vénitiens, amp;nbsp;y eftoit (on oncle le feigneur Rodolph de Mantouë, amp;nbsp;le Comte de Caiazze, qui eftoit chefpour le Duc de Milan,amp; congnoiftoit bien ledit Capitaine.

Et faut entendre que tout leur Oft eftoit aux champs, au moins tout ce qui eftoit eniemble:car tout n’eftoit point encores venu, amp;nbsp;y auoit huiôl iours qu’ils eftoientlà faifins leuraftemblée : amp;nbsp;euft eu le Roy beau fe retirer en France fans peril, h n’euftent efté fes longs feiours fans propos, dont vous auez ouy parler:mais noftre Seigneur en auoit autrement ordôné.Lc-diâ Marcfchal craignant d’eftre aflailly,monta la montaigne,amp; pouuoita-uoir enuiron huid vingts Hommes d’armes,comme il me dift lors,amp; huid cens Allcmans,amp; non plus:amp; de nous ne pouuoit il eftre fecouru : car nous n’y arriuafmes d’vn iour amp;nbsp;demi apres, à caufe de cefte artillerie, amp;nbsp;logea le Roy aux maifons de deux petits Marquis en chemin. Eftant l’Auant-gardc montée la montaigne, pour attendre ceux qu’ils voyoient aux champs, qui eftoientaftczloing, n’eftoient point fans foucy; toutesfois Dieu (quitou-fiours vouloir fauuer lacompagnie)oftalc fens aux ennemis, amp;nbsp;fut interro-gué noftre Allcmant parle Comte de Caiazze, qui feftoit qui menoitladi-de armée,Seprefente Auant-garde,il luy demanda encores le nôbre de nos Gens-d’armes:car il congnoiftoit tout,micux que nous mcfmcs : car il auoit eftedes noftres toute la fiifon.L’Allemant feit lacopagnie forte,ôtdift trois cens Homes d’armes,amp;quinze cens Suiftes :amp; ledid Comte luy refpondit qu’il mentoit,amp; qu’en toute l’armée n’auoit que trois mille Suiftes,parquoy n’en euft'ent point enuoyé la moitié là, amp;nbsp;futenuoyéprifonnierau pauillon du MarqiÂs de Mâtouë-.ôc parlèrent entre eux d’aftàillir ledid Marcfchal, creut ledid Marquis le nôbre qu’auoit dit l’Allcmant, difint qu’ils n’auoyêc point de Gens de pied h bons comme nos Allemans, ôcauftique tous leurs gens n’eftoient point arriucz,amp;: qu’on leur faftbit grand tort de côbatre fins eux: amp;nbsp;s’il y auoit quelque rebut la Seigneurie fepourroit courroucer: amp;: qu’il les valoir mieux attendre à la plaine,amp;que par ailleurs ne pouuoientils pafter que deuant eux : amp;nbsp;eftoient les deux Prouifeurs de fon aduis, contre l’opinion dcfquels ils n’euftent ofé combattre. Autres diioient qu’en rompant cefte Auât-gardcjle Roy eftoit prins:toutesfois aifément tout faccor-da d’attendre la compagnie en la plaine, amp;nbsp;leur fembloit bien que rien n’en pouuoit efcapper.Et ay feeu cecy par ceux mefines que i’ay nommez, amp;nbsp;en auons deuifé enfemble, ledid Marefchal de Giéamp; moyaùec eux depuis, nous trouuans cnfctÿblc. Et aufti fe retirèrent en leur Oft, eftas afleurez que le lendemain,ou enuiron, le Roy feroit pafte la montaignc,amp; logé en ce village,appellé Fornoue:amp; cependant arriua tout le refte de leurs gens, amp;nbsp;fi ne pouuions pafter que deuant eux,tant eftoit le lieu contraint.

Au defeendre de la montaignc,on veit le plain pais de la Lombardie, qui cft des beafix amp;nbsp;bons du mondc,amp; des plus abôdans:amp; combien qu’il fe di.c plain,

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DE PHILIPPE DE C O M M I N E S. 25)1

plain,fi efl: il jnal aifé a clicuauclier.-car il cft tout fofloyé, come eft Flandres, ou encores plusnnais il eft bien meilleur amp;nbsp;plus fertile, tat en bons fromens, qu’en bons vins amp;nbsp;fruióls,amp; ne leiournêt iamais leurs terres: amp;nbsp;nous faifoit grand bien à le veoir,pour la grand’fiim amp;nbsp;peinc’qu’on auoit enduré en ebe-min, depuis le partement de Luques;mais l’artillerie donna vn merucilleuX trauail à dcfcédre,tant y eftoit le chemin droiól amp;nbsp;mal-aifé.Il y auoit vn cap des ennemis,grand nombre de têtes amp;nbsp;pauillôs:amp; fembloitbicn cftre grad, aufti eftoit il;amp; tindrent Vénitiens ce qu’ils auoient mandé au Roy par rnoy, où ils difoient qu’eux nbsp;le Duc de Milan,mettroient quarante mille homes

en vn camp/car s’ils n’y eftoicnt,il ne s’en faloit gueres:amp;: cftoient bien trete cinq mille,prenans paye: mais des cinq,les quatre eftoient * defàinélMarc: amp;nbsp;y auoit bien deux millefix cens Hommes-d’armes bardcz,ayant chafeun def^tnife, 5»» vn Arbaleftrierâ cheual,OU autre homme en habillement auec eux,faifantj£‘y2^5* le nombre de quatre cheuaulx, pour Homme-d’armes. Ils auoient qu’en E-ftradiots qu’en autres cheuaux legers, cinq mille, le refte en Gens-de-pied: amp;: logez en lieu fort bien reparé,amp; bien garni d’artillerie.Le Roy defeendit enuiron midy delamontaigne,amp; felogeaaudid villagc'deFornoue; amp;nbsp;fut -lecinquiefmeiour de luilletjl’anmil quatre cens quatre vingts amp;nbsp;quinze, par vn Dimanche. Audiôl logis y auoit grand’quantité de farines amp;nbsp;de vins, amp;nbsp;de viures pour cheuaux. Le peuple nous faifoit par tout bonne cherefauf-fi nulle homme de bien ne leur faifoit mal) amp;nbsp;apportoient des viures,corne pain,petit amp;nbsp;bien noir,amp; le vendoient cher:amp; au vin mettoiêt les trois parts® d’caue.Ils apporteret aufti quelque peu defrui.(ft,amp; feirentplaifir à l’armée. • l’en fey achepter,quc ic laiflay deuat moy ; car on auoit grand foupço qu’ils euftent laifle là les viures,pour empoifonner roft:amp; n’y toucha Ion point de prime-facc;amp; fe tucrent deux Suiftes, à force de boire,ou prindrent froid: amp;nbsp;moururent en vne eaue,qui mit les gens en plus grand foupçon ; mais auant qu’il fuft minuiól, les cheuaux commencèrent les premiers,p^is les gens: amp;nbsp;fe tint Ion biéaife.Et en ce cas fault parler à I honeur des Italiens.-car nous n’auons point trouué qu’ils ayent vfé de nulles poifons:amp; s’ils reuflent voulu faire,àgrâd’ peine s’en fuft Ion fçcu garder en ce voyagc.Nous arriuafmes comme auez ouy,vn Dimenche midy :amp; rriaint homme de bien ne mangea qu’vn morceau de pain au lieu où le Roy defeendit amp;nbsp;beut:amp; croy que gue-res autres viures n’y auoit pour celle heure, veu qu’on n’ofoit encores manger de ceux du lieu.

Incontinent apres difner vindrent courir aucuns Eftradiots,iufques dedans l’oft: amp;nbsp;feirent vne grande alarme:amp; nos gens ne les congnoiflbient point cncorcs;amp; toute l’armée faillit aux champs,en mcrueilleufcment bon ordre,amp; en trois batailles, Auantgarde,Bataille,amp;:Arrieregarde:amp;n’y auoit point vn iedl de boule d’vne bataille à autre:amp; bien ai^mêt fe fuftent fccou-rus l’vne l’autre.Ce ncfutricn:ôconferctiraaulogis.Nous auions des tentes amp;nbsp;des pauillons en petit nombre.-amp; fe tendoit noftre logis en approchât du leur.-parquoy ne faloit que vingt Eftradiots pour nous faire vne alarme, amp;nbsp;aufti ne bougeoient ils du bout de noftre logis-.carily auoitdu boys par lequel ils venoiêt à couuert: amp;nbsp;eftios en vallée entre deux petits couftaux.-amp;: en ladiôte vallée couroit vne riuiere que Ion paflbit bien à pied,finon quand b ij

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VIII. LIVRE DES MEMOIRES

elle croiffbit en ce païs là,qui eff aifément Sc tùff:amp; auffi cllcne duregueres, Son/ne^r, nbsp;nbsp;fappellc on*Torrét.Toutc ladiôle vallée effoit grauier amp;nbsp;pierres groffes,

ro: t» Italien, mal-aifé pour cheuaux:amp; effoit ladiôle valée d’enuiron vn quart de lieue dclarge:amp; enfvndcs couffaux,qui effoit celuy de la main droióte, effoient

b teu eßre icy coYforn^»,

* fe doubte

logez nos enncmis:amp; effions contrainéfs de pafler vis à vis d’eux ( la riuierc entre deux)amp;pouuoir auoir demie lieue iufques à leur Off: Scy auoitbien vn autre chemin,à monter le couffau à .gauche (* car nous effions logez de qu'a ne faille coffé)mais il euff femblé qu’on fe fuft recule. Enuirô deux iours deuat, n’cfiiôs pas on m auoit parle que fallaffe parler a eux (caria crainte commençoita venir fuis veoir de a UX plus fages)amp;: qu’aucc moy ie menalfe'quclcun, pour bien nombrer amp;: côgnoiffre de leur affaire.Cela n’entreprenoye ie point volontiers ( amp;: auffi

Eiiifcondiiiótjie n’y pouLioyealler)mais refpondi auoir prins bon-7«»4 ne intelligence aucc les Prouilcurs amon partcment de Vcnifc,amp;au foir tfiritdectfie nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•• o nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;’1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;'

iQnrnee, amp;nbsp;enquei’arriuay a Padoue, amp;que le croyoie quils parlcroicnt bien amoy,a nii-chcmin des deux Ofts.-amp;auflifiiem’ofFroye d’aller vers eux, ie leur dó-neroye trop de cœur;amp; qu on l’atioit dit trop tard.Ce Dimanche dót ic parle,i’efcriui aux Prouifeurs(rvn fappclloitinellirc Luques Pifan, l’autre mcEi-re Melchior TreuiCan) leur prioye que à fcuretCjl’vn vint parler à moy, amp;nbsp;qu’ainfi m’auoir il offert au partir de Padouë,comme a efte dit dciiant.Ils me feirent refponfe qu’ils l’euflcnt ffiic volontiers,ff n’euft eff é la guerre encom-mcncée contre le Duc de Milan:mais que nonobffant, l’vn des deux, félon ©qu’ils aduiferoient, fe trouueroit en quelque lieu en mi-chemin : Sgt;l eu cefte refponfe le Dimanche au foir, nul ne l’eftimât de ceux qui auoient le credit, le craignoye .a trop entreprendre, amp;nbsp;qu’on le tint à couardiie, fi i’en preflbye trop,amp; laiffay ainu la chofe pour lcfoir:combien que i’euffe volontiers aidé à tirer le Roy,amp; fa compagnie de là,fi i’euffe peu fans peril.

Enuiron minuiâ: me dift le Cardinal de fainct Malo (qui venoit déparier au Roy mon pauillon cftoit près du fien ) que le Roy partiroitau matin, amp;iroit paffer au long d’eux, amp;nbsp;faire donner quelque coup de canon en off,pour faire* la gu erre, ôc puis paffer oultrc fans y arreff cr,ôc croy bien C^falnal propre, comme d’homme qui fçauoit s’enfuit a-peu parler de tel cas, amp;quinefy congnoiffbit, amp;nbsp;auffiil appartenoitbien que le Roy euff affemblé de plus figes hommes amp;nbsp;Capitaines pour fe con-feillerd’vntel affaire:mais ievey faire affemblceplufieurs fois en ce voyage dont on feit le contraire des conclufions qui y furent prinfes.Ie dy au Cardi-nafquefionapprochoitfi pres que de tirer en leur off, il n’effoit poflible qu’il ne fail lift des gens à l’efcarmouche,5c queiamais nefe pourroient retirer d’vn coff é ne d’autre,fans venir a la bataille,ôc auffi que ce feroit au contraire de ce que i’auoye commencé, amp;nbsp;me defpleut bien qu’il faloit prendre cctrainmaais miCs affaires auoient eff é tels, au commencement du regne de ce Roy,que ie n’ofoye fort m’entremettre, afin de ne me faire point cnne-my de ceux à qui il donnoit authoriiéjqui eff oit fi grande, quand il f’y met-toit,que beaucoup trop.

Ccffenuiôteufines encores deux grades alarmes,le tout pourn’auoir mis ordre contre les Effradiots,comme on deuoit, amp;nbsp;comme Ion à accouffume de faire

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DE PHILIPPE DE COMMIMES.

de Elire contre chenaux levers: cai vingt Hommes d’armes desnoflrcs.auec leurs Archiers,en arrcReroicnt toufiours deux cés,mais la chofe cfloit encores fort ncuiiclle.il y feit auliî celle nuiôl merueilleufepluye,cfclair, amp;nbsp;tonnerre,amp; h grâd qu’on ne fçauroit dire plus, amp;nbsp;Icmbloit que le ciel ôe la terre fondilTentjOu que cela fignifiaft quelque grand inconuenient aduenir. Auffi nous eftions au pied de ces grandes montaignes,amp; en pais chauld amp;nbsp;cnEfté: cobien que ce full chofenaturelle,fi elloit ce chofe efpouuâtable que d’e-llrc en ce peril,ôc veoir tant de gens au deuât,amp; n’y auoit nul remede de paffer,que par combatte,amp; veoir fi petitecompagnic.- car quebonsque mau-uais hommes,pour combattre n’y auoit point plus de neufmille hommes; dont ie compte deux mille pour la fcquelleamp;: feruiteurs des gens de bien de l’olljie ne compte point Pages,ne Varlets de Pommiers, ne telles gens.

De la iournèéde Fornoue^de la fuite det ennemis de France : nbsp;nbsp;comment le

Comte de Petillane^ qui durant ce tour rompit la prifon du F^yfeit tant qu'tl les rallia. CH AT. FI.

. r* ioumtt it * Ftrnoui.

lundy matin,enuiron fept heures, fixiefmciourdeluillct;

l’an mil quatre cens quatre vingts amp;nbsp;quinze, monta le noble 14 Roy à chenal, amp;nbsp;me feit appeller par plufieurs fois. le vein à luy,amp; le trouuay arme de toutes pieces,amp; môté fur le plus cheualq i’aye veu de mô têps,appcllé Sauoye.plufieurs diiOienc qti il eftoit cheual de Breffe, le Duc Charles de Sauoye le luy auoit

elloit noir,amp;: n’auoit qu’vn œil; amp;nbsp;eftoit moyêcheual debonegrâ-deur pour celuy qui elloit monté deffus. Et fcmbloit queceicunehome fuit t ?ur autre que la nature ne portoit,ne fa taille,ne là complexion: car il eftoit i ’ f ’tr craintîfà parler. Aufti auoit il elle nourri en grande crainte,amp; auec petites perlonnes;amp; ce chenal le monftroit grand,amp; auoit le vifiigeîion,amp;bon. ne couleur,amp; laparolleaudacieufe amp;nbsp;fiige;amp; fembloit bié nbsp;nbsp;m’en fouuiét)

que frere Hieronyme m’auoit dit vray,quand il me dift que Dieu les côdui-lôitpar la main, qu’il auroit bien affaire au chemin, mais que l’honneur lu y en dcnaeureroit.Et me dift le Roy,fi ces gens vouloient parlemétcr, que ie pai laile. S: par ce que le Cardinal eftoit prefent le nomma,amp; le Marefchal de Gie/qui eftoit mal paifible,amp; eftoit à caufed’vn différend, qui auoiteftéj» entre le* Comte de Narbonne, amp;: de Guy fe, qui quelques fois auoit mencf*^quot;-. des bandes:amp; chalcun difoit qu’à luy appartenoit de mener*rAuanr-garde. de, le luy dy,Sirc,ie le feray volontiers ; mais ie ne vey iamais deux fi greffes cô-pagnics,li près l’vne de ratitre,qui fedepartiffent fins combattre.

Toute l’armée faillit en celle gréue,amp; en bataille, ôcpresrvnderautrc,««^*^^’'^^«' comme le iourdeuant: mais à veoir la puiffance, mcifcmbloit trop petite,Ferron 'a Nar. auprès de celle que i’auoyc veuë à Charles de Bourgogne,amp; au Roy fon pc-rc;amp; iurladiélegréue nous tirafmes à part lediôt Cardinal amp;nbsp;moy, amp;nbsp;mafmcs vne lettre aux deux Prouifeurs deffufdiôls,qu’efcriuit monfeigneur RDbertet,vn Secretaire que le Roy y auoit,de qui il fe fioit, difant le Cardinal qu’à fon ofticc eftat appartenoit de procurer paix, amp;nbsp;.à moy aufti,ccm-

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Z94 VIH. LIVRE DES MEMOIRES mcceluy quidenouucau venoye de Venifc, AmbalTadeiir, amp;nbsp;quciepcu-uoye encore eftre mcdiateurdcur lignifiât, le Roy ne vouloir que pafler fon chemin,amp; qu’il ne vouloir faire dommage à nul:amp; par ce,fils vouloient ve-Parlementer,comme il aiioit eflé entrcprins le iour de deuat, que nous »n4rc/)é ^uel eftions contents, amp;nbsp;nóus cmployerios en tout bien. la cfloient efcarmour-a fias, four ac- ches de tous cofl:ez;amp;: comme nous tirions pas à pas noftre chemin, â pafler ‘tenant eux la riuiere entre deux,comme i’ay dit, y pouuoit auoir vn quart de nous deux, qui tous efloient en ordre en leur Oft: car c’eftjeur dfsians. nbsp;nbsp;nbsp;couftume qu’ils font toufiours leur camp fi grand que tous y peuuent eftre

en bataille en ordre.

Ils enuoyerent vne partie de leurs Eftradiots,amp; Arbaleftiers â chcual, amp;nbsp;aucuns Hommes-d’armes, qui vindrentdulongdu chemin aftez couuert, entrerai! village, dont nous partions,amp;là pafler cefte petite riuiere,pour venir aflaillir noftre charriage,qui eftoit aflez grâd:amp;: croy qu’il pafloit fix mille fommiers,que mulets,que chenaux,qu’afnes,amp; auoient ordonnelcur bataille fi trelbien que mieux on nefçauroit dire, amp;nbsp;plufieurs iours deuant, amp;: en façon qu’ils fe fioyent en leur grand nombre.Ils aflailloient le Roy,amp; fon armée,toutârenuiron,amp; en maniéré qu’vn fèul home n’en euftfceu efehap-per,fi nous euflions efté rompus,vcLi le païs où nous eftios: car ceux que i’ay nommez,vindrent fur noftre bagage nbsp;nbsp;à cofté gauche vint le Marquis de

*vaimoutô Mantouë, amp;nbsp;fon oncle le feigneur Rodolph, le Comte Bcarnardin de *DaI-e„zw« « ƒ mouton,amp; toute la fleur de leur Oft,cn nombre de fix cens Homes d’armes Fonfbrac' comiTie ils me comptèrent depuis : amp;nbsp;fe vindrent ictter en la gréue, droiift à noftre qiieuè,tous les Hommes d’armes bardez, bien empanachez, belles ^E’^îotu- boLirdonnafles, trelbien accompaignez d’Aibalcftiers à cheual ôc d’Èftra-^accio de diotSjamp;desGensdepied.Vis'avisduMarefchaldeGié, amp;nbsp;de noftre Auât-filai. dtJoae, garde,fe vint mettre le Comte de Caiazze, auec enuiron quatre cens Hom-, nbsp;nbsp;nbsp;mes d’arme^accompaignez comme defl'us,amp; grand nôbre deGens de pied.

Auecluy eftoit vne autre compaignie de quelque deux cens Hommes d’armes, que conduifoitlcfilzdcmeflirelehan de Bentiuoille de Boulongne,’ hommeieune, quin’auoitiamais rien veu ( amp;nbsp;auoientaufli bon befoing de Chefs que nous ) amp;nbsp;ccftuy là deuoit donner fus EAuant-gardc, apres lcdiôh Comte de Caiazzc.-amp; fcmblablement y auoit vne pareille compagnie apres leMarquis deMantouc(amp; pour femblableoccafion)quemcnoic vnappelle meflire Antoine d’Vrbin,baftard du feu Ducd’Vrbin,amp; en leur Oft demeurèrent deux grolTes compagnies. Cecy i’ay feeu par eux mcfmes: car des le lendemain,ils m’en parlercnt,amp; le vey à l’œil, amp;nbsp;ne voulurent point les Ve-nitiés eftrader tout à coup,ne dégarnir leur Oftztoutcsfois il leur euft mieux valu mettre tout aux champs,puis qu’ils commençoient.

le laifle vn peu ce psrpos pour dire que deuint noftre lettre,qu’auions en-uoyée le Cardinal amp;nbsp;moy par vn Tropettc.Elle fut receuë par les Prouifeurs, amp;nbsp;comme ils l’eurent leuë,commença à tirer le premier coup de noftre artillerie,qui encores n’auoit tiré;amp; incontinent rira la leur qui n’eftoitfibône. Leldids Prouifeurs renuoycrent incontinent noftre Trompette,amp; le Marquis vne des fiennes, amp;nbsp;mandèrent qu’ils cftoientcontens de parlementer, mais

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DE PHILIPPE DE COMMINES.

mais qu’on fcift ce (Ter l’artillerie, amp;nbsp;aufli qu’ils fcroient ccfler la leur.I’eftoyc pour lors loing du Roy,qui ail oit Sgt;c venoit, amp;nbsp;renuoya les deux T rompet-tes, dire qu’il feroit tout cefler;amp; manda au maiftre de l’artillerie ne tirer plus,amp; tout ccflades deux'coftez vn peu ; amp;puis foubdaincment eux tirerêt vn cou p,amp; la noftre recommença plus que deuant,en approchant trois pieces d’artillerie,amp; quand les deux Trompettes leur arriucreht, ils prindrent la noftre,amp; l’enuoyerent en la tente du Marquis, amp;nbsp;délibérèrent de combatte.Et dift le Comte de Caiazze(ce me dirent les prefens) qu’il n’eftoit point temps de parler,amp; que ja eftions demi vaincus : amp;nbsp;l’vn des Prouifeurs f’y accorda (qui le m’a compté)amp; l’autre non:amp; le Marquis fy accorda, amp;nbsp;fon on-cle,qui eftoit bon amp;nbsp;làge y contredift de toute là puiflance ( lequel nous ay-moir,amp;à regret eftoit contre nous)amp;à la fin tout faccorda. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;*

Orfaut entendre que le Roy auoit mis tout fon effort en fon Auant-gard e,oùpouuoitauoir trois cens cinquatc Hommes d’armes, amp;nbsp;trois mille Suifres,( qui eftoit l’cfperance de l’Oft) amp;nbsp;feit le Roy mettre à pied, auec eux trois cens Archiers de fà gardefqui luy fut * grande perte) amp;nbsp;aucuns Ar-baleftriers à cheual, des deux cens qu’il auoit de fa garde, d’autres Gens de '^5^ 'fi»“ pied y auoit peu.-mais ce qui y eftoit,y fut mis:amp; y eftoit à pied,auec les Aile mans,Engilbert,monfieurdeCleues,frereauDucdeCleues,Lornay, amp;nbsp;le Baillifde Dijon, Chef des Allcmaus, ôédeuanteux l’artillerie. Icyfeiftent bienbefoing ceux qu’on auoit laiftezaux terres des Florentins, amp;nbsp;enuoyez à Gencs, contre l’opinion de tous. Cefte Auant-gafde auoit ja marché aufli auant que leur Oft,amp; cuidoit on qu’ils deuftent commencer,amp;nos deux autres batailles n’eftoyent point fi pres, ne fi bien pour fayder, comme ils cftoient le iour deuant. Et par ce que le Marquis feftoit ja ieóté fur la gréue, , amp;nbsp;pafte la riuiere de noftre cofté, iuftement eftoit à noftre dos, quelque quart de lieue derriere l’Arriere-garde, amp;nbsp;venoient le petit pas, bien ferrez, tant qu’à meruelles les faifoit beau voir; le Roy fut contraint de tourner le dos à fon Auant-gardc, amp;nbsp;le vifàge vers fes ennemis, amp;nbsp;fapprocher de fon ArrierC'garde, amp;nbsp;reculer de l’Auant-gardc. l’eftoye lors auec monfeigneur le Cardinal attendant refponfe : amp;nbsp;luy dy que ie voioye bien qu’il n’eftoit plus temps de fy amufer ; amp;nbsp;m’en allay là où eftoit le Roy\ amp;nbsp;parti d’auprès desSuiftes: 6c perdi en allant vn Page, qui eftoit mon coufin germain, amp;nbsp;vit f Varier de chambre,ôc vn Laquais,qui me fuiuoient d’vn petit loing,6c neles vey point tuer.

le n’eu point fait cent pas, que le bruit commença de là où ie venoye, au moins vn peu derriere. C’eftoient les Eftradiots, qui eftoient parmy le bagage, ôc au logis du Roy,où y auoit trois ou quatre maifons,ôc y tuerent, ou blccerent quatre ou cinq hommes, le refte efehappa. Ils tuerent bien cent Varletsdc fommiers, 6c mirent le charriage en grawd defordre. Comme i’arriuoye là où eftoit le Roy,ie le trouuay où il faifoit des Cheualiers,6c les ennemis eftoient ja fort près de luy,6c le feit on cefler. Etouy leBaftard de Bourbon,Matthicu(àquileRoy donnadu credit)6cvn appelle Philippe du Moulin,fimple Gentil-homme, mais homme de bien, qui appcllercnt le Roy,difanc:Pafrez Sire,paflez: 6c le feirent venir deuàt fa bataille, 6c deuant

b iiij

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VIII. LIVRE DES MEMOIRES fon Enfeigne:amp; ne voyoie nuis hommes plus près des ennemis que luy, excepté ce Baftard de Bourbon, amp;nbsp;n’y auoit point vn quart d’heure quei’e-Eoyearriué, Scelloycnt les ennemis à cent pas-dii Roy qui efloitaufii mal gardé 6: conduit que fut iamais Prince negrand'feigneur :maisauforr, il cft bien gardé que Dieu garde, amp;nbsp;efloit bien vraye la Prophetie du venerable freie Hieronyme,qui difoit que Dieu leconduifoitparlamain. Son Ar-riere-garde cftoit àla main dextrc,de luy vn peu reculée,amp; la plus prochaine

* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Compagnie de luy, de ce codé efloit Robinet de * Frame2elles,quimenoit,

rrainezciics, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;d’Orleans,cnuiron quatre vingts Lances,amp; le Sire de laTri-

lïmcaje^eut O nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;’ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r rC •

tiußifrfdrtd, nloille,qui enauoit enuiron quarante Lances,amp; les cent Archiers Elcoflois

y efloicnt aufii,quife mirent en la preflecomme Hommes-d’armes. le me * troLiuaydu collegauche,où eftoient les Gentils-hommesdes-vingt-Efeus, les autres de la maifon du Roy,amp;: les penfionnaires.Ie laiffeà nommerles Capitaines, pour bricfucté,raais le Comte de Foix eftoit Chef de celle Ar-riere-garde.

Comme i’ay dit,vn quart d’heure apres que fu arriué, le Roy cllant ainlî presd’eux, les ennemis ietterent les Lances en l’arreft, fcmcircnt vnpcu aux galops:ô: en deux compagnies,donnèrent «à nos deux compagnies de la main d’eux,dcxtrc,amp; aux Archiers EfcolTois; amp;nbsp;choquèrent prelqueaul-11 tolll’vn comme rautrc,amp; le Roy comme eux. Le collé gauche, là où i’e-lloye., leur donna (us le collé, qui fut aduantage grandeiôc n’ell polTiblc au monde de plus hardiment donner que l’on donna des deux collez. Leurs Ellradiots,quielloycntàlcur queue,virent fuir mulets amp;nbsp;coffres versno-llrc Auant-garde, amp;qucleurs compagnonsgaignoient tout. Ils allèrent celle part fins fuiurc leurs Hommes d’armes, qui ne Ce trouuerent point accompagnez : mais fans double, fi vn mille cinq cens Cheuaux legers fc fuf-fent meflez parmi nous, auec leurs Cimeterres au poing ( qui font terribles clpécs)veuTe petit nombre que nous citions,nous citions defeonfits fans re-mede.Dicti nous donna celle aide:amp; tout aulïi roll comme les coups de laces furent paffez, les Italiens fc mirent tous à la fuite: amp;: leurs Gens de pied fe ietterent au collé, ou la pluljxart. A celle propre inltance, qu’ils donnèrent fus nous,donna le Comte de Caiazzc fus l’Auant-garde: mais ils ne ioignirent point fi pres:car quand vint l’heure de coucher les Lances, ils eurent peur, amp;fe rompirent d’eux mefmes,amp; quinze ou vingt en prindrent là les Allcnians,par les bandes,qu’ils tuèrent,le relie fut mal chaffé; car le Maref-chal de Gié mettoit grand’ peine à tenir fa copagnie cnfcmblc : car il voyoit encores grande compagnie affez pres de luy : toutesfois quelques vns en chafferent, amp;nbsp;partie de ces fuyant venoient le chemin où nous auions côbatu le long de la gréue,les elpees au poing pour ce que les laces elloyenc ieélées.Orvous faut ^auoirqueceux qui alTaillirent le Roy, fc mirent in-continentàla fuite,ôçfurent merueilleufemcnt amp;nbsp;viucmcnt chalTcz: car tout alla apres, les vns prindrent le chemin du village dont citions partis, les autres prenoient leplus court en leur Oll:amp; tout chalTa, excepté le Roy, qui demeura auec peu de gens, amp;femeit en grand peril, pour ne venir quand amp;nbsp;nous. L’vndes premiers hommes qui fut tue, ce fut le feigneur

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. ’ nbsp;25,^

Rbdôîph de Mantouc, oncle dudid Marquis, qui deuoit mander à ce meÊ Ere Antoined’Vrbin, quand il feroittemps qu’il marchan:,amp;: cuydoienc que la chofedeuft durer comme font leurs laids d’armes d’Italie: de cela fc.Q excufélcdid meflire Antoine,mais iecroy qu’il ne veit nuis fignes pour le Elire venir.Nous auios grade fequel le de varlers amp;: de feruiteurs qui tous eftoientàl’enuiron de CCS Hommes d’armes Italiens, Seen tuèrent la plus-parr.Prcfquc tous auoient des haches à coupper bois, en la main,dequoy ils faifoient nos logis,dont ils rompirent les vilieres des armets,amp; leur en doh-noyent de grans coups fus les teîles:car bien mal-aifcz choient à tuer, tant choient fort armez:amp; ne vey tuer nul,où il n’y euh trois ou quatre hommes drenuiron,amp;aufliles longues elpees,quauoient nos Archiers amp;nbsp;feruiteurs, feirentvn grand exploid. Le Roy demeura vn peu au licuoùlon l’auoit af- • Eiilly,difant ne vouloir point chairer,n’y aulTi tirer à rAuat-garde,quiftm-bloit ehre reculée.Il auoit ordonné fept ou huid Gentils-hommes, ieunes, pour ehre près de luy. Il eftoit bien efehappé au premier choc, veLi qu’il e^ îloit des premiers .-car ce Baflardde Bourbon fut prins, à moins de vingt pas de luy,amp; emmené en l’Oft des ennemis.

Or fetrouualeRoy en ce lieu, que iedy,en fi petite compagnie,qu’il n’a-■uoit point de toutes gens qu’vn Varier de Châbreappelle Antoine des Ambus,petit homme,mal arme : amp;nbsp;eftoient les autres vn peu efpars( comme me compta le Roy,dés lefoir,deuanteux mcfmes, qui deuoient auoirgrâd’ honte de l’auoit ainfi lailTc) toutesfois ils arriuerent encores à hcureicar vne bande petite,de quelques Hommes d’armes defrompus, qui venoiéc au lôg de la greuc,qu’ils voy oient toute nette de gens,vindrent adàillir le Roy ôece Varier de Châbre, ledid feigneur auoit le meilleur chenal pour luy du mo--de,amp;fe remuoit, amp;nbsp;fedeffendoit; amp;arriua fur l’heure quelque nombre de fes autres gens,quin’cfl;oiét gueres loingde luy, amp;nbsp;lors fe mirent les Italiens à fuïr,amp; lors le Roy creut confeil,amp; tira à rAuant-garde,qui ia«ais n’eftoit bougée,amp; au Roy vint bien à poind:mais fi elle full marché cent pas, tout l’Ofl; des ennemis fe fuit mis en fuite. Lesvns dirent qu’elle le deuoit faire, les autres au contraire.

Noflre bande,qui chafla, alla iufqucs bien pres du bout de leur Oft, tirât iulques versFornoue,amp; ne vey onques receuoir coup à homme des noftres, qu’a lulien Bourgneuf, que ie vey choir mort d’vn coup que luy donna vn Italien, en paftlint(auftiil eftoit mal armé) amp;nbsp;lâonfarrefta, diEant,allons au Roy,amp;àceftevoix s’arrefta tout, pour donner alaine aux chenaux , qui eftoientbien las:carils auoient longuement couru, amp;nbsp;par manuals chemin, amp;nbsp;parpaïs decailloux. Auprès de nous paftavne compagnie de fuyans, de quelque trente Hommes d’armes, a qui on ne demanda rien, eftions en double. Sitoftqueles chenaux eurent vn peu reprins leur alaine, nous mifmes au chemin pour aller au Roy,nefçachans oùiTeftoit, amp;nbsp;allafmcs le grand trot,amp;n’cufmes gueres alléque le veifmes dcloing, amp;nbsp;feifmes âcC-cendreles varlcts,amp; amafter des lances par le camp, dont il y auoit aflez, par efpecial de Bourdonna(rcs,qui ne valoientgueres , amp;nbsp;eftoient creufes amp;: legeres, nepefiins point vne iaueline,mais bien pcinôles ; ôc fufmesmieux

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x98 VïIî. livre des MEMOIRES

fournis de Lances que le matin, amp;tirafmcs droiól au Roy: amp;nbsp;en chemin trouuafmes vn nombre de Gens de pied des leurs,qui trauerfoient le camp, amp;nbsp;eftoient de ceux qui f eftoient cachez aux couftaux, amp;nbsp;qui auoient mené le Marquis fus le Roy. Plufieurs en furent tuez, autres efehapperent , amp;nbsp;trauerferent lariuiere; amp;nbsp;ne s’y amulà Ion point fort. Plufieurs fois auoit cftécriéparaucunsdesnofiresen combatant; fouuiennevousde Guyne-gate. C’eftoit pourvue bataille perdue, du temps du Roy Louis onziefme, en la Picardie, contre le Roy des Romains, pour foy eftrc mis â piller le ba-gage;mais il n’y eut rien prins ne pillé. Leurs Eftradiots prindrent des fom-miers ce qu’ils voulurent: mais il n’en emmenerent que cinquante cinq, tous les meilleurs amp;: mieux couuetts, comme ceux du Roy, ôçdetousfes

ha fuite de leur cofté fut grande,amp; fuirent bien trois cens Hommes d’ar-mes,amp; la plufpartdeleurs Eftradiots. Les vns fuirent à Rege (qui eft bien it Ktr^er loiug de la)les auttcsà Parmc,où y pouLioit biéauoit’huiôl lieucs:amp; àfhcu-ne confie que rc que la bataille fut ainfi meflée le matin, fuît d’auec nous le Comte de Pc-foheeuxquî' tillane, amp;nbsp;le feigneur Virgile Vrfin : mais ceftui-cy n’alla qu’en vne maifon ont fait le ehe- J’yn Gentil-hômc,amp; cftoit là fur la foy; mais vray eft qu on leur faifoit grad «iep. à is. tort. Lediâ: Comte alla droiél aux ennemis. Il eftoit homme bien congnu dcs.Gens-d’armes;car toufiours auoit eu charge, tant des Florentins que du

Roy

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DE PHILIPPE DE C O M M I N E S. ' nbsp;nbsp;^99

'^oy Ferrandjamp;: fe printâcrier PetilIane,Pctillane:amp; allaaprcs ceux quifui-rcnt,plus de trois lieuê's,criât que tout eftoit leur, amp;nbsp;qu’ils vinfTent au gaing, amp;nbsp;en ramena lapins part,amp;les afleura:amp;fi n’enfi:ilefl:é,toutfenfuftfi.ii:car ce ne leur eftoit petit reconfort d’vn tel homme, parti d’aueenons : amp;c meit cnauâtlefoir,denousafi'aillir,maisils n’y vonlurét entendre. Depuis le m’a compté,auffi le me compta le Marquis de Mâtouë, difant que ce fut luy qui meit ce parti en auant:mais à dire la vérité,fi n’euft cfté Icdiét Comte ils fufi-fent tous fuis la nuiét.

Comme tout fut aflemblé auprès du Roy,onvoyoit encores hors de leur Oft grand nombre d’hommes d’armes en bataille, amp;nbsp;fen voyoit les telles feulement, ôc les Lances, êcaufli des Gens de pied: amp;nbsp;y auoient tou-fiours eflc,mais il y auoir plus de chemin qu’il ne fembloir,amp;cu{l falu repaf-fer la riuiere,qui efloit crcuc,amp; croiffoit d’heure en heure: car tout le iour a-Lioit tonné,efclairé,amp; pieu merueilleufemcnt, amp;nbsp;parefpecial en combatant: amp;nbsp;chalfant.Le Roy meit en confeil,fil deuoit chalfer contre ceux la ou non. Auecluyauoit troisCheualicrsItaliens; l’vncflmefiire lehaii'Lacques de Treuoul(qui fc gounernabien ce iour) l’autre auoit nom meflire Francifque Sccco,tres-vaillant cheualier,fouldoyé des Florentins, homme de loixante ôc douzeansil’autrc melEre Camille Vitclly,luy amp;nbsp;trois defes frétés efloiec â la foulde du Roy;amp; vindrent de Ciuita-de-Caflello, iufques vers Serzane, pour eftre â cefle bataille, fans eftre mandez, où il y a vn grand chemin : ôc quand il veit qu’il ne pouuoitattaindre le Roy , auec fa compagnie, lediél Camille vint feul. Ces deux furent d’opinion que Ion marchaft contfe ceux que Ion voyoit encores.Les François,à qui on en demanda, ne furent point de cell aduis; mais difoient qu’on auoit aflez fait,amp; qu’il efloit fort tard, amp;nbsp;qu’il le faloit loger. Lediél melTire Francifque Sccco fouflint fort fon opinion, monftrancgens quialloientSc venoientau long d’vn grand chemin, quialloit âParme (qui elloitlaplus prochaine ville de leur^etraiéle ) amp;nbsp;alleguoitque c’efloyent fuyans, ou qui en reiienoycnt ; amp;àce que feeuf-ni'cs depuis, il difoit vray : Sgt;c. «à fa parollc contenance, efloit hardi amp;nbsp;fige Chcualier : amp;qui eufl marché , tous fuyoicnt,( ôc tous les Chefs le m’ont confcfl'é, amp;nbsp;quclqu’vndeuantleDucde Milan) quicuflcflé la plus belle Se grande viôtoire,qui ait eflé depuis dix ans, SfC la plus profitable : car qui eneullbien fceuvfer, amp;nbsp;faire fon profit, amp;nbsp;fagement s’y conduire, amp;nbsp;bien traiéler le peuple,huiéliours apres,le Duc de Milan n’eufl eu, au mieux venir pourluy,quelechafteau de Milan,âl’enuicquefesfubieéls auoyenc à fetourner:amp;: toutainfi en fufl il allé des Vénitiens, amp;nbsp;n’eufl point eflé be-foingde fe foncier de Naples.-car les Vénitiens n’euflent feeu où recouurer gens,hors Venife,Brefre Cremonne ( quin’eft qu’vne petite ville ) amp;nbsp;tout le reflc eufient perdu en Italiemaais Dieu nous auoitifait ce que me dill freie Hieronyme, l’honneur nous efloit demeuré : car veu le peu de fens amp;nbsp;ordre qui efloit parmi nous,tat de bien ne nous efloit point deu:car nous n’en euf-fions feeu vfer pour lors:mais ie croy que fi â cefle heure(quiefl l’an milqua quatre cens quatre vingts dixfept) vn tel bien aduenoic au Roy,il en fçauroit mieux ordonner.

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300 VIII. LI VRE DES MEMOIRES Eftans en ce propos la nuiôl l’approche,amp; celle copagnie qui efloit deuaht nous,fe retira en leur camp:amp; nous de l’autre collé,nous allafmes loger a vn quart de lieue de là où cftoit la bataille, nbsp;defeendit le Roy en vnc cenfe ou

métairie,pauurement edifiée;mais il fe trouua nombre infini de bled en gerbe,dont tout l’Oft fe fentit. Aucunes autres maifonnettes y auoit aupreSjqui peu feruirent:car chacuiïlogea comme il peut,fins faire nul quartienie Içay bien que ic couchay en vne vigne,bien emprelfé,fur la terre,fans autre auan-tage,amp; lans raateau:car le Roy auoit emprunté le mien le matin,amp; mes Ibm miers eftoient aflez loing, amp;nbsp;eftoit trop tard pour les chercher. Qui eut de-quoy,feit collation:mais bien peu en auoient,li ce n’eftoit quelque lopin de pain prins au fein d’vn varlet.Ic vey le Roy en là chabre,ou il y auoit des gens blecez, corne le Senefchal de Liô,amp;: autres,qu’il fiiiloit habiller,ôc faifoit bone cherc,amp; le tenoit chafeun à bon marchant, amp;nbsp;n’cllions point tat en gloire comme peu auant la bataille, par ce que nous voyons les ennemis pres de nous.Ccftenuiôlfeirentnos Allemas leguet,tous,amp; leur donaleRoy trois cens EfcuSjôe le feirent bon,amp; fonnoient bien leurs tabourins.

neur d'Argenton alla luy fèulparlementer aux ennemis quand il veit qu'autres depute';^auec luy^n'y 'voulaient aller cornent le 7{py paruetntfain fauf^auecfes gens luf-quesenlavilled'Aß. QH A P. ni.

E lendemain au matin me deliberay de continuer encores noftre pratique d’appointement,toufiours délirant le palfa-gedu Roy en feuretéimais à peine peu-je tiouuerTrompet-tc,qui vouluft aller en l’Oft des ennemis, à caufe qu’il auoit eflé tué en la bataille neuf de leurs Trompettes, qui n’a-uoyent point elté congnus, amp;nbsp;eux auoycnt prins vn des noftrcs, amp;nbsp;If en tuerent vn que i’ay nommé,que le Roy auoit enuoyé auant que la bataille commençait : toutesfois vn y alla, amp;nbsp;porta vn fauf-conduiét du Roy, amp;nbsp;m’en rapporta vn, pour parlementer à my-chemin des deux Olts.Ce qui me fembloit mal-aifé à fairc:mais ie ne vouloye rien rompre,ne faire difficile. Le Roy nomma le Cardinal de fiinct Malo , amp;nbsp;le feigneur de Gié, Marefchal de France,lefeigneur dePiennes , fon Chambelan, amp;nbsp;muy en leur compagnie: amp;nbsp;eux nommèrent le Marquis de Mantouc, Capitaine general de la Seigneurie, le Comte de CaiazzeCqui plufieurs fois a efté nommé en ces Memoires,amp; n’agueres eftoit des noftres, amp;nbsp;eftoit Capitaine des gens du Duc de Milan) amp;meffirc Luques Pifin,amp; meffire Melchior Treuifin,Prouifeurs de ladiôlc feigneurie de Venife, amp;nbsp;marchions lors fi pres d’eux quêtons les voyons; amp;nbsp;n’eftoient qu’eux quatre fur la greue,amp; lariuierecouroit entre nous amp;nbsp;eux,quieftoit bien creuë depuis le iour precedent, amp;nbsp;n’y auoit rien hors l’Oft, n’y auffi de noftre co ft e n’y auoit rien plus que nous,amp;: noftre guet qui eftoit à l’endroit. On leur enuoya vn Hérault, fçauoir s’ils vouldroient point paffer la riuiere, qui eftoit entre deLix,comme i’ay dit.le trouuay bien difficile que nouspeuffions aflembler, amp;pcnfoye

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D b P H 1 L I PP E D E C O M MIN ES. ■ sôi Sgt;: pêfoyc bien que chafcun y feroit des doubtes,amp; eux le monftrerent, ref-podans quilauoit elle dit que le parlement fe feroit en my-chemin des deux Oils,amp;qu ils auoient fait plus de la moitié du chemin, qui ne palTeroient point lariiiiere, qu’ils eftoienttousles Chefs deTOft, qu’ils nefevou-loicnt point mettre en peril. Les noftres feiret doubtc de leur cofi:é,qui auffi eftimoient leurs perfonnes, amp;nbsp;me dirent que i’y allaflc, fans me dire que i’y auoye àfaire, ny àdire.Iedy queien’iroye point feul, amp;nbsp;queie vouloye vn tefmoing; amp;: pourtant vint auec moy vn appelle Robertec Secretaire du Roy,amp;: vnmienfèruiteur,amp; vn Herault;amp; ainfi palTay lariuiere,amp;mefem-bloit que d ic ne faifoye rien, qu’aumoins ie m’acquiteroye vers eux, qui e-ftoient alfcmblez par mon moyen. Et quand ie fu arriue pres eux, ie leur re-monftray qu’ils n’elloient point venus iufques à my-chemin, comme ils a~ • uoient dit,amp; que pour le moins,ils vinlTent iufqucs fus le bord delariuiere, amp;: me fèmbloit que s’ils eftoient fi pres, ils ne parleroient point fans parle-mêter.Ils me dirent que la riuiere eftoit trop large,amp; couroit fort,parquoy ils ne fattendoient point parler de plus pres,amp; ne feeu tant faire qu’ils vou-lulTent venir plus auant,amp; me dirent que ie feifle quelque ouuerture. le n’a-uoye aucune cômiflion,amp;: leur dy que fêul ne leur diroye autre chofe : mais que fils ne vouloiét rie ouurir,i’en feroye le rapport auRoy :amp; nous efias en cepropoSjVint vndenos Heraults,qui medift que ces feigneurs delTufdiôls fenalloicntjôe quei’ouurilfece queie vouldroye, ce queie ne voulu point faire : car ils fçauoient du vouloir du Roy plus que moy, tant pour en eftre plus prochains, que pour auoir parlé à luyen l'oreille à nofirepartement; mais de fon affaire*prefent,i’en fçauoye autat qu’eux pour lors. Le Marquis * de Mâtouë me commeça fort à parler de la bataille,amp; me demada fi le Roy nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;r

l’euft fait tuer,fil suft efté prinsde luy dy que non, mais vous euft fait bonne „âu Ân chere.-car le Roy auoit caufe de l’aimer, veu qu’il luy faifoit acquérir grand honneur en l’alTaillant. Lors il me recommanda les prifonniersf amp;: par efpe-cial fon oncle,le feigneur Rodolph:amp;: le cuidoit vif,mais ie fçauoye bien le cotrairc ; toutesfois ie l’alTcuroy e que tous les prifonniers feroient bien traitiez,amp; luy recommâday leBaltard de Bourbô qu’il tenoit. Les prifonniers, par nous detenus,efl:oient bien aifez à penfer:car il n’en y auoit point,ce qui n’aduint parauenture iamaisen bataille, commei’ay dit : amp;nbsp;y auoit perdu leditl Marquis plufieurs de fes parens, amp;nbsp;iufques à fept ou huiéf,amp; de toute là compagnie bien fix vingts Hommes d’armes. Apres ces deuifes,ie prins congé d’eux,difant qu’auant la nuitl ie retourneroye, amp;nbsp;feifmes trefues iufques à la nuiéf.

Apres que ie fu retourné là où clloit le Roy,amp; ledit Secretaire auec moy, ils me demandèrent des nouuellcs, amp;nbsp;fc rneit le Roy en confcil, en vne panure chambre, amp;nbsp;nefc conclud rieojains chafcun regai^oit fon compagnon. Le Roy parla en l’oreille auCardinal,amp; puis me diffc que ie retournaffe veoir qu’ils voLildroicnt dire (or l’entreprinfe du parler venoit de moy, parquoy eftoit vray-femblable qu’ils vouloient que ie commençaffe à parler) amp;nbsp;puis me dift le Cardinal que ic ne conclude rien. Ic n’auoye garde de rien conclure : car on ne me difoit rien. le ne voulu rien répliquer, ne rompre mon’

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30X nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;VIII. LIVRE DES MEMOIRES

allée; car i’cfpcroye bien ne gafter rien,amp; pour le moins vcoir quelque cho-fe Hes cotenances de nos ennemis:quifans doubte, efloient plus cfpouuen-tez quenous,amp;parauêturc,enflent peu ouurir quelques parolles,qui euflet peu porter feureté aux deux parties. Ainfi me mei au chemimmais ja appro-choit la nuiôl, quand i’arriuay fus le borddelariuiere; amp;là me vintvnede leurs Trompettes,qui me difl que ces quatrc,dont i’ay parlé,me mandoient que ic ne viniTe point pour ce iour,à caufe que leur guet eftoit aflis des Eftra-diots,quinecongnoiiroientperfonne,amp;qu’il y pourroitauoir danger pour moy; mais vouloir demeurer ladióleTrompettc la nuiôl,pour me guider.Ic le renuoiay,difant que le matin,enuiron huiâ:, heures, ie feroye fus le bord deladideriuiere, amp;quc là il m’atendifl:,ous’ily auoit quelque mutation, • que ic leur renuoiroyevn Hérault: carie ne vouloye point qu’il congnuft, celle nuiéljiien de noEre cas, amp;nbsp;fi ne fçauoye quelle coclufion le Roy pren-droir.-car ie vey des confeils en l’oreille,qui me faifoient doubter, fi retour-nay dire ces chofes audiôl feigneur.

Chafeun fouppa de ce qu’il auoit,amp; le coucha fur la terre,amp; toft apres mi-nuid, me trouuay en la chambre dudid Seigneur.Scs Chambelans efloient là,en eflat de monter à cheual ,amp; me dirent que leRoy deliberoit de tirer en diligence,iufques en Afl ,amp; aux terres de la Marquife de Mont- ferrât,amp; me parlèrent de demeurer derriere, pour tenir le parlement: dont ie m’exeufay, difint que ne me vouloye point faire tuer à mon e feient, amp;nbsp;que ie ne feroye point des derniers à cheual.Tantofl le Roy s’cfueilla,amp; ouït la meire,amp;: puis monta à cheual, Vne heure deuat le iour,vne Trompette lonna, Faiéles bon guet:mais autrechofe nefut fonne à fe delloger(amp; croy aufli qu’il n’en efloic aucun befoing) toutes-fois c’efloit donné effroy à l’armée,au moins aux gés de congnoiflance,amp; puis nous tournions le dos à nos ennemis, amp;nbsp;prenions le chemin de làuueté,qui efl chofe bien cfpouuêtable pourvu Ofl,amp; y auoit bien mauuaàfe faillie au partir du logis,comme chemins creuz amp;: bois, amp;nbsp;fi nous tordifmes.'car il n’y auoit point de guide pour nous guider, amp;nbsp;ouy corne on demanda la guide, à ceux qui conduifoient les enfeignes, ôc à celuy qui faifoit l’office de Grand-E(cuycr:mais chafeun refpondit, ie n’enay point. Notez qu’il ne faloit point de guide: car Dieu feul auoit guidé la compaignié au venir, amp;nbsp;en enfuiuant ce que m’auoit dit frere Hieronyme,il nous vouloir encores conduire au retour:car il n’efloit point à croire qu’vn tel Roy chcuauchafl de nuiél fins guide, là ou il en pouuoit aflez finer. Encores monflranoflre Seigneur plus grand figne de nous vouloir preferuer: car les ennemis ne s’apperceurent point de noflre partement, qu’il ne fufl midy,attendant toufiours ce parlement que i’auoye entreprins,amp;: puis la ri-uierecreut fi tres-grande qu’il fut quatre heures apres midy ,auant que nul homme s’ofaflauanturer d’y paffer pour nous fuiure,amp; lors y paffa leComtc de Caiazzc,aucc deux cens Cheuaux-legcrs Italiens, en grand peril, pour la force de reauc,amp; en paffant,!! s’y noya vn home ou deux, comme depuis il m’a coptc.Or cheminafmes nonpar chemin boffu ,amp; bois,amp; faloit aller à la file parce chemin,fix mils ou enuiron,amp; apres trouuafmes vne belle grande plaine,ou ja efloic noflre Auant-garde, artillerie amp;nbsp;bagage, qui efloic forc grand,

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 303 grand, amp;nbsp;qui de loing fembloit vne große bande; amp;: en eu (mes efFroy de prime Eice,a caille que l’cnfeignc blanche amp;nbsp;carrée de meifire lean-Iacques de Treuoul,pareille de celle quauoit porté à la bataille le Marquis de Mâtouc; ôc ladiôle Auanc-garde eut double de noftre Arricre-garde qu’ils voyoient venir de loing, hors du chemin,pour venir le plus court.Si fc mcit chafeû en eftat de combatre, mais cell effroy dura peu : car Cheuaucheurs vindrent de tous coftez, amp;nbsp;le recongneurécincontinent, amp;nbsp;delànousallafincs repaiftre au *Bourg Eain6tDenys,où Ion cria vnealarme,laide à propos,pour en tirer *ƒ les AllcmanSjdc peur qu’ils ne pillaflent la vil le.- puis allafilaes coucher à Flo-le nommeßot-renfole; le fécond iour coucher pres Plaifance,amp; palTafmes la riuiere de Tre-nino. hußi bia:mais il demeura de l’autre part deux cens lances,nos Suifles amp;nbsp;toute tillcrie,exccptc2 fix pieces que le Roy rnenoit:amp; cela feit le Roy, pour eftre mieux logé,amp;plus au large, elperant les faire bien palfer àl’aife, quand il vouldroit.-car ladide riuiere,par ordinaire,eft petite, amp;nbsp;par cfpecial en celle faifon de lors.-toutesfois enuiron dix heures de nuid, ladide riuiere creut ß fort,que nul homme n’y eull feeu palfer à pied, ny à cheuahne l’vne compagnie n’eull feeu fccourir l’autre, qui fut chofe de grande doubte,pourauoir les ennemis pres,amp; chercha Ion toute la nuid,pour trouucr le remede, d’vn cofté amp;nbsp;d’autre;mais il n’y en auoit point, infqucs à ce qu’il vint de luy-mef-me,quifut enuiron cinq heures du matin : amp;nbsp;lors on tendit des cordes d’vii bout iufqiies à l’autre, pour aider à palfer les Gens de pied, qui eftoy enten l’cauc iufques au delfus de l’eftomac. Toll apres palfercnt les Gens de che-ual,amp; l’artillerie;mais ce fut vne foubdaine amp;nbsp;perilleufe aduenture,confide-ré le lieu où nous eftions,amp; les ennemis auprès de nous'.c’eft à fçauoir la gar-nifon de Plaifiince,amp;: le Comte de Caiazzc, qui y eftoit entre : car aucuns de ladide ville pratiquoyent d’y mettre le Roy : mais ils vouloient que ce full foubs le tiltre d’vn petit filz demeuré de lehan Galeas, dernier Duc, qui n’a-gueres cftoitmort,commeauezouy.EtquâdIeRoyeuftvoulu entendrea celle pratique,plufieurs villes,amp; autres perfonncs,y eulfent entendu, par le moyen dudidmellirc lehan lacques de Treuoul : mais ledid feigneur ne voulut point faire ce defplaifir au Duc d’Orléans fon coufin, qui ja elloit de dans Nouarre,comme auez veiumais à dire vcrité,de l’autre collé il ne deli-roic point fort de veoir fon-did coufin fi grand, amp;nbsp;luy fuffifoit de palfer, amp;nbsp;iailfer aller ce dilferêd comme il pourroit.Le troificfme iour apres, le parlement du lieu où auoit elle la bataille,al 1 a le Roy difiier au Challel laind lea, amp;nbsp;coucha en vn bois.-le quatriclme,difiia à* Vo2hcra,amp; coucha à Pont-Cu- *

- 1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;■ r • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i-r-i nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;n' I • • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Il ' *c •

ro;lc cinquieimc iour coucha près Tortone:amp; paiia la riuiere,appelJee Sen nbsp;nbsp;nbsp;/eU /-

uia,queFracalfedelFendoit;carles gés,quielloicntàTorione,elloientfous làchargc,pour leDuc de Milan : amp;nbsp;aduerti qu'il fut par ceux quifaifoient le logis du Roy,quc ledid feigneur ne vouloir que paffer, le retira en la ville, amp;nbsp;manda qu’il bailleroit des viures tant que Ion voudroit,amp; ainfi le feiticar toute l’armée palfa rafibus de la porte dudidTortone, amp;nbsp;vint ledid Fracaf-le audeuantduRoy,armc:maisiln’auoitqLiedeuxperfonnes auec luy, amp;nbsp;fcxculâ fort au Roy qu’il ne le logeoit en la ville, amp;nbsp;feit mettre force viures hors ladide villeidont tout 1’011 fut bien fourni, amp;nbsp;au foir vint au coucher

' c i)

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304 VIII. LIVRE DES MEMOIRES

du Roy.Or faut entendre qu’il cftoit de ceEe maifon de S. Seucrin, amp;nbsp;frere de ce Comte de Caiazzcjôc de nie Hire Galeas: ôcauoit cfté,pcu de temps de-uantjàlafoLildedii Roy ,en la Remanie, comme il a efté diôl aillieurs. De làvintleRoy àNice-dela-paille,quieftduMarquifatde Montferrat, que nous délirions bien trouucr, pour cftre en pais d’amis, amp;nbsp;en feiircte''. Car ces Cheuaux-legers,que menoit le Comte de Caiazze, eftoient fans celTe à no-re queue,amp; les premiers iours nous feirent grand cnnuy : amp;nbsp;auionspeude gens à chenal qui fe vonk;fient mettre derriere:car plus approchions du lieu de feureté, moins monftroient les noftres qu’ils euflent vouloir de combatte. Auffi dit Ion que c’eft la nature d’entre nous François :amp; l’ont eferit les Italiens en leurs EIiftoires,diEint qu’au venir des François ils font plus qu’hommes,mais qu’à leur retraiôle font moins que fern mes,amp;ie le croy du premier poinôh.-car véritablement ce font les plus rudes gens à rencontrer, qui foient en tout le monde (i’enten les Gens de chenal) mais à la retraiôle d’vne entreprinfe,toutes gens du monde ont moins de cœur qu’au partir de leurs maifons.Ainfi pour continuer ce prefent propos, noftre queue eftoit defFendue de trois cens Allemas, qui auoient moult largement de Couleu-urincs,amp;Icurportoiton beaucoup de haquebutes à chenal, amp;nbsp;ceux là faR foient bien retirer les Eftradiots, qui n’eftoient point grand nombre, amp;nbsp;le grand Oft, qui rions auoitcombatusjvenoit tant comme il pouuoit : mais ponreftre partis vniour apres nous, amp;nbsp;pour leurs cheuaux bardez, ne nous feeurent ioindre,amp; ne perdifmes iamais vn homme au chemin, amp;nbsp;ne fut le-didtOft iamais à vn mil pres de nous : amp;nbsp;quand ils veirent qu’ils ne nous pounoientioindre ( ôc peut eftre aufli qu’ils n’en auoient point grand’en-uie)ils tirèrent deuant Nouarre, où cftoient les gens du Duc de Milan,.ôc des leurs,comme auez ony cy deuant.-mais fils nous euflent peu attaindre preTde noftre retraite,peut eftre qu’ilâ en euflent eu meilleur marché qu’ils n’eurent àlîvaleédc Fornone.

l’ay dit en plufieurs lieux comme i’auoye ouy dirc,amp; monftrer, que Dieu le créateur nous auoit guidez en ce prefent voyage: mais encores me fert il à le dire icy:car combien que depuis le iour de ladide bataille, iniques audidt licu,les logis fulTent mal départis, neantmoins fe logeoit chafeun comme il pouuoit en patience,fans trouble ou debat.De viures nous en auions grand’ neceirité:touteslois quelque peu en apportoient ceux du pais,qui aifement nous euflent empoifonneZjf’ils euflent voulu,tant en leursviures,qu’en leurs vins amp;nbsp;eauës ; qui en vn moment cftoient taries, amp;nbsp;les puits. Aufli ie ne vey que petites fontaines/mais ils n’euflént point failly, fils y euflent voulu ef-fayeq: toutesfois il eft de croire que noftre fauueur amp;nbsp;redêpteur lefus Chrift leur oftoit leur vouloir.I’ay veu la foif lî grade, qu’vn mode de Gens de pied beuuoicnt aux folfez 4e ces petites villettes ou nous pallions. Nous failions grandes traiéfes Ôc longues,amp; bcuuions eauë orde, amp;nbsp;non courate, amp;nbsp;poux boire, le fourroient dedans iufques à la ceinture; car il nous fuyuoit grand peuple, qui n’eftoientpoint gens de guerre,amp; vn bien grand nombre de fommiers.Le Roy partoitauant iour,amp; ne fccut oneques qu’il y euft guide, amp;couchoiciufquesàmidy,làoùilrcpailToit, amp;chafeunprenoitplace, amp;nbsp;fàloit

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 305 ûloit ap porter les viures des chcuaux entre les bras, amp;nbsp;que chafeun feift re-paiftre foncheua]3amp; fçay bien que ie l’ay fait deux fois,^ fu deux iours fans manger que pain, bien mefchant, amp;: Ci edoyc de ceux qui auoient moins de neceffité.D’vne chofe faut louer celle armée, cell: que iamais ie n’ouy homme foy plaindre de neceflite qu’il eull,amp; Ci fut le plus penible voyage que ie veyoneques en ma vie, amp;ficn ayveu auec le Duc Charles de Bourgon-gne , debien afpres. Nous n’allions point plus fort que ces grofles pieces d’artillerie,où fouuent y auoit à befongner à leurs alFaires,amp; grand’faute de cheuaux.-mais à toute heure qu’il en eftoit befoing,fen recouuroit en 1’011, par les gens debien, qui volontiers les bailloient, amp;nbsp;ne fe perdit vne feule pierre,ny vne lîure de pouldre.-amp; croy que iamais homme ne veit palTer artillerie de telle grolTeur, en telle diligence, parles lieux oùpaflacellecy* Et Cl i’ay parlé du defordre, qui elloit tant â noflre logis qu’aux autres cho-fes, ce ne fut pas par faute qu’il n’y eull des gens bien expérimentez en 1’011: mais le fort voulut que ceux là auoiêt le moins decredit.LeRoy elloit ieune amp;nbsp;volontaire(comme ailleurs ay dit ) amp;: pour conclure l’article, lemble que nollre Seigneur lefus Chrill ait voulu que toute la gloire du voyage ait elle attribuée à luy. Le lèptiefme iour, depuis le partement du lieu où auoit elle la bataille,partifmes deNicc-de-la-paillc,amp;: logeafincs en cap, tous enfem-ble,airez pres d’Alexandrie, amp;nbsp;fut faiél gros guet, la nuiél, amp;nbsp;du matin, déliant le iour,partifmes,amp; allalines en Ail.-c’ellàfçauoirlaperfonne du Roy, amp;nbsp;les gens de fi maifon ( les Gens-d’armes demeurèrent pres de là en camp) amp;nbsp;trouuafmes la ville d’Allbien garnie de tous viures,qui feirent grand bien ^fecoursàtoutelacompagnie,quienauoitbonbefoing.-parce queladiôle armée auoit enduré grand’faim amp;nbsp;foif,grand trauail amp;: chaleur, amp;nbsp;trefgrâd’ faute de dormir, amp;nbsp;les ha’billemens tous gallez amp;nbsp;rôpus. Si toll que le Roy fut arriué en All,amp; fur l’heure,auant que dormir, i’enuoiay vn^entil-hom-me,nommé Philippe de la Coudre(qui autresfois m’auoit fcrui, amp;nbsp;qui pour lors elloit au Duc d’Orleans)àNouarre,làoù il elloit alïiegé de fes ennemis, comme auez peu entendre. Le fiegen’elloit pas encores fi contraint qu’on ne peull aller amp;nbsp;faillir dehors : par ce qu’ils ne tafehoientfinon de l’alfamer. le luy manday,par lediél Gentil-homme,qui plufieurs traiélez Ce menoient auec le Duc de Milan,de par le Roy nollre Sire(dont i’en menoye vn, par la main du Duc de Ferrare) amp;nbsp;que pour celle caufe me fembloit qu’il fen deb-uoit venir deuers le Roy, en alTeurant bien ceux, qu’il lailTeroit dedans, de brief y retourner,ou les venir fecourir.Lefquels elloient en nombre de fept mille cinq cens hommes de foulde, la plus belle compagnie qu’on fçauroit dire, touchant le nombre, tant François que SuilTes. Apres que le Roy eut feiourne vn iour audiélAlljil fut aduerti,tant par le Duc d’Orléans que par autres,comment les deux Oils felloyent airemblez^cuantNouarre,amp;: defi-roit lediél Duc d’Orléans eflre fecouru, par ce que fes viures appetilToient: là où il auoit cllé donné mauuais’ordre au‘comrnencement:carily en auoit alTez aux villes d’alentour, amp;nbsp;par efpecial bleds, amp;nbsp;fi laprouifioneufl elle faiôle de bonne heure amp;bien pourmenéc, iamais n’eulTent rendu la ville: mais en fulTcnt faillis à leur honneur,amp; les ennemis à grand’ honte, s’ils euf-

G iij

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306 V I H. L 1 V R E DES MEMOIRES lent peu tenir encores feulement vn moys.

Comment le quot;B^yfett drejjer 'vne Atmh de mer,pour cuiderRecourir les cha~ ßeaux de Naples,comment ils nen peurent eßrefecourus.

CHAP. Pin.

8 Près que le Roy eut feiourné quelque peu deioursauditAft, il fen alla à Tliurin : amp;nbsp;au départir que Icdiót feigneur feic d’Aftjildepefcha vn Maiftre-d’boftel,nommé Peron de Baß ehe,pour faire vne armée de mer, pour aller fecourir les chateaux de Naples,qui encores tenoient. Ce qu’il feir, amp;nbsp;meit fus ladiéfearmee monfeigneur d’Aiban,Chefamp; Lieutenant d’icellc armee, verslacitéde*Pruce,oùilfutavneveuëdcs ennemis : là où «»l’uio, que vne fortune de temps le garda d’approcher,amp;feit cefte armée peu de fruiél; miirches en ht ‘ pource que ledid d’Arban retourna à Ligorne,là où la plus part de fes gens fenfuyrent en terre, ôôlaiflercnt les nauires vuides, amp;nbsp;l’aimécdes ennemis ti^de^ee- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Bougen,pres Plambinjà où elle fut bic deux moys fans

eie,,qu‘ii ^me partit,amp; Ics gciis dc noflrcaiméc fuffcut allcz legcrcmenc fecourir Icfdids chafteaux:parcequeleportdeBengon cftdenaiureque Ion n’en peutfail-monmarqlLz. quc d’vH vcntjlcqucl regne peu fouuent en hyucr. Lcdiél d’Arban ctoic

vaiHaiit hommc cxperimcnté en armée de mer.

exempl. far ce En cemefme temps,le Roy cftant arriué àThurin, fe menoientplufieurs T traiélez entre le Roy amp;nbsp;le Duc de Milan, amp;nbsp;fen empefehoie la Duchefle de Sauoye,qui cftoitfilledcMontfctrat, veufue, amp;mcred’vn petit Duc, qui fehnquot;ßin7 lors/mais par autres,fen traidoient encores. le m’en mefloye aufli, amp;c amp;u Defcri’. defiroientbien ceux de la ligue (c’effàfçauoirlesChefs, quieftoyent an z^X^r*quot; camp dcuantNouarrc) que iem’enmeflaffe, amp;nbsp;m’enuoyerent vnfaufeon-duiôi:mais (comme les enuies font entre gens de Court)le Cardinal, que tac ay nommé,fompit que ie ne m’en meflaffe point, amp;nbsp;vouloir que la pratique de Madame de Sauoy e fortift foneffeôl,que conduifoit fon hofte le Threfb-rier de Sauoye,homme fage,amp; bon feruiteur pour fa maiftreffe.Longtemps trainacefte matière, amp;nbsp;pour cefteeaufe futenuoycle Baillifde Dijon aux Suifres,Ambafîadeur,pour en leuer iufques à cinq mille.

Peu auant ay parlé comme l’armée de mer fut faiéte à Nice,pour fecourir les Chateaux de Naples. Cequincfe peut faire, pour les ratons detufdi-ôles.Incontinent monfeigneur de Montpenfier, amp;nbsp;autres gens de bien, qui etoient dedans lefdióts Chateaux, voyant lediót inconuenient, prindrent parti,amp; faillirent dehors,parfarméc de ceux qui etoient demeurez, pour le Roy Charles,en diuerfes places du royaumedaqucllc armée etoitpourlors pres defdiéls Chateaux,amp;: les laiterent fournis en nombre fuffitint pour les garder, felon les viur^, qui y etoient fi étroits que plus ne pouuoient, amp;nbsp;partirent auec deux mille cinq ces hommes, amp;nbsp;laiterent pour Chef, Ognas, amp;nbsp;deux autres gens de bien, amp;nbsp;fen alla lediôl feigneur de Montpenfier, le Prince de Salerne,le Senefchal de Bcaucaire,amp; autrcs,qui là etoient,à Saler-nc:amp; voulut dire le Roy Ferrand,qu’ils auoyent rompu l’appointement, amp;nbsp;qu’il pouuoit faire mourir les otages, qu’ils auoient bâtiez peu deioursa-uant

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 307 uantiquieftoientleleigneurd’Alegrc, vn appelle de la marche-d’Ardaine, amp;nbsp;lefcigncurdelaChapelîed’AnjoiijVnappelle Roqucbertin Cathclâ,amp;vn appelle Genly.Et faut entendrequ’enuiron trois moys parauant, ledid Roy Ferrand elloit entré dedans Naples par intelligence, amp;nbsp;par lemauuais ordre des noftresiquiefloient bien informez de tout,amp; n’y feeurent mettre reme-de.Ieparlcroyebien plus auatde ce propos,mais ien’enpuis parler que par Falloir ouy dire aux principaux, amp;nbsp;ne tien point volontiers long proces des chofes où ienay point efté prefent. Mais eflantlcdiél Roy Ferrand dedans la ville de Naples,ouit dire que le Roy cftoit mort à la bataille de Fornoue; amp;nbsp;fut certifié à nos gens qui eftoient au Chafteau, par les lettres amp;nbsp;menfon-ges que mandoit le Duc de Milan,qu’ainfi efi:oit:amp;: y adioufterent foy, amp;nbsp;fy fièrent les Colopois,qui fe tournèrent incontinent contre nous, auec le bon vouloir qu’ils auoient d’efirc toufiours des plus forts, encores qu’ils fuflenc bien tenus au Roy,comme il efi: dit ailleurs: amp;nbsp;pour ccfdiéls menfonges, ôc principalement pource que nos gens fe voyoient rctraids,en grad nombre, dedans le Chafteau,amp; peu de viures,amp; auoient perdu tous leurs chenaux ôc autres biens qu’ils auoient dedans la ville,compoferent le fixiefme d’Oélo-bre ,'mil quatre cens quatre vingts amp;nbsp;quinze ( amp;: auoient ja efté enuironnez trois moys quatorze iours, amp;nbsp;enuiron vingt iours apres partirent, comme diél eft)amp; promirent que f’ils n’eftoient fecourus dedans certain nombre de iours,qu’ils fen iroyeiit en Prouence,amp; laifleroient les Chafteaux, fins plus faire de guerre,ne par mer ne par terre,audidf royaume : ôc baillerêr les ofta-ges fufdiéfs.Toutcsfois,felon le diâ du Roy Ferrand,ils rompircc l’appoin-tementjà l’heure qu’ils partirent fans congé. Les noftrcs difoient le contrai-rc:mais Icfdiéls oftages furent en grand danger,amp; y auoit caufe:amp;croy que nos gens feirent fagement de partir,quelque appointemét qu’il y euft : mais ils euflent mieux fait de bailler les Chafteaux audid iour qu’ils partirent, Sc retirer leurs oftages : car aufti bien ne tindrentils que vingt ioiWs apres leur parlement à faute de viures,amp; qu’ils n’auoient aucune efperancc defccours, amp;nbsp;fut la totale perte du royaumc,que lediél Chafteau de Naples.

De la grande famine peine où efioitle Duc ^Orleans d J^ouarre auecfes gens:de la mort de la ÿiarquife de Montferrat, nbsp;nbsp;de celle de monfteur

de l^ando[me'.^ comment apres plufieursdeliberations^on entenditd faire paix,pourfauuer les aJpegcT;^. C H AT. 1 X.

Stat le Roy à Thurin,cômc i’ay dit,amp; àQipiers,où quelquefois alloit pour fon efbat, attendoit nouuelles des Allcmas qu’il auoit enuoyé querir,amp;:aufli eflayoit fil pourroit réduire le Duc deMilan,dont il auoit grâ(^vouloir,amp;: ne kiy chaloir point trop du fait duDuc d’Orlcas:qui comjçoit à eftre prefle à caufe de la ncccftité des viurcs,amp;: efcriuoit chafeun iour pour auoir fecours.-amp; aufti eftoient approchez les ennemis de plus pres qu’ils n’auoient efté,amp; eftoitereu l’Oft de mille homes à cheual,Allcmans,quemcnoit mef-firc Fedcric Capelarc, de la Comté de Ferrcttc, vaillant Cheualier, amp;nbsp;bien c iiij

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3c8 VÎII. LI V R E D E s MEMOIRES expérimenté,tant en France qu’en Italie. Aufli y auoit bien onze mille Alle-manSj dcs terres du Roy des Romains,amp; Lanfquencts,que conduifoit mef-

Georges * Dabecfin, vaillant Cbcualicr;amp; fut ccluy qui print S. Orner, kß.Bened. m pout Ic Rov dcs Romaius, natif d’Auftriche.Et voyant croiftre les ennemis, Georgio di amp;nbsp;que nul accord ne le pouuoit trouueralnoneuf duRoy,il luy futcofeille retirer à Verceil,pour veoir la manière de fauuer lediôl Duc d’Orléans, ôc prouifionen -vcitmtfmcscy Icuts vlutcs au commcnccmcnt qu’ils entrèrent audiôt Nouarre : Sgt;c luy euft mieux valu auoir Etidl ce que luy manday, comme il fe voit deflus,dés qu’a-riuafmes en Aft,qui eEoit de partir,amp; mettre hors toutes gês inutiles, amp;nbsp;venir deuers le Roy .-car fa prefencc euft guidé partie de ce qu’il euft voulu :au

• moins ceux qu’il euftlaiftez,n’cLiftent point fouftert fi extremeneccflitc de faim,comme ils feirent : car il euft prins parti plus toft, s’il euft veu qu’il n’y euft eu autre remede.Mais l’Archeuefque de Rouen, quiauoit eftéauecluy au commencement, audiôllieude Nouarre, pour faire feruiccaudióf Sei-gncur,eftoit venu deu ers le Roy,amp; fe trouuant prefent aux affaires, luy ma-doit toufiours ne partir point, amp;nbsp;qu’il fcroitfecouru. S: fefondoit qu’ainfilc difoit le Cardinal de fiiinôlMalo, qui auoit le credit, amp;nbsp;bonneaffeftion le faifoit parler:mais i’eftoye afteuré du contrairc:car aucun ne vouloir retourner à la bataille,fi le Roy n’y alloit,amp; celuy la n’en auoit aucune enuie : car la queftion n’eftoit que pour celle feule ville, que lediôl Duc d’Orleas vouloir retenir,amp; le Duc de Milan la, vouloir r’auoir: car elle cft à dix lieues de Mila, amp;nbsp;eftoit force que l’vn euft touf.car en ladiôle Duché deMilan font neufou dix groftes citez pres i’vne de l’autre,amp; en petit d’efpace;mais bien difoit lediôl Duc de Milan, qu’en luy laiftànt Nouarre, amp;nbsp;ne luy demandant point Genes,que toutes chofes il feroit pour le Roy.

Plufieurs fois on mena farines audiôl Nouarre,dont il s’en perdit la moy-. rie au chemifh, amp;nbsp;vn coup furent deftroulfez quelque foixante Hômes-d’ar-mcs,que menoit vn appelle Chaftillon,qui eftoit icunc Gentil-homme de la maifon du Roy.Aucuns furent prins,autres entrerent,aLitres efeapperent de grande peine, amp;nbsp;n’eftoit poftible de croire en quelle dcftrcfl'c eftoit cefte compagnie de Nouarre:car chafeun iour en mouroir de faim.Les deux parts cftoyentmalades,amp;venoit depiteufes lettres en chiffre, amp;en grand’ difficulté. Toufiours on leur donnoit réconfort, amp;nbsp;tout eftoit abus : mais ceux qui menoyent l’affaire du Roy, defiroyent la bataille, amp;ne confideroyenc point que nul ne la vouloir qu’eux:car tous les grans Chefs, comme le Prince d’Orenge, qui eftoit de nouueau arriué,à qui le Roy donnoit grand credit aux affaires de la guerre, amp;nbsp;tous autres Chefs de guerre cherchoient vnc honnefte iffiie par appointement,veu que l’hyuer approchoit, qu’il n’y auoit point d’argent,amp; qu^e nombre des François eftoit petit, amp;nbsp;plufieurs malades,amp; fcn^alloient chafeun iour fans congé,amp; d’autres à qui le Roy donnoit congcimais tous les fàges ne pouuoient garder ceux dont i’ay parlé,de mander au Duc d’Orléans qu’il ne bougcaftdefquels le mirent en grad peril,amp;fc fioientfus lenombredesAllemans, dont nous affeuroit le Baillifde Dijon: auquel aucuns auoient mandé qu’il amenaft ce qu’il pourroit, amp;nbsp;eftoit vne

compa-

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 3O5gt; compagnie mal vnie^ô: cliafcun difoit,amp;efcriuoit ce qu’il vouloit.

Ceux quinevouloyent point d’accord, ne qu’on le trouuaft cnfemble pour en parler, diloycntquelcRoy nedeuoitpoint commencer, maisdc-uoit laifler parler fes ennemis : quiaufli difoyent ne vouloir commencer les premiers,amp; toufiours fauançoic letempsenladeflrefledeceuxde No-narre, amp;: ne parloientpkis leurs lettres que de ceux quimouroient de faim, chafcuniour,amp; queplusnepouuoient tenir que dixiours, puis huidf, telle heure l(js vey àtrois:mais auantpaflerentles termes qu’ils auoient bail-lez.Brief, on n’auoit veu de long temps Ci grofles necelTitez, amp;nbsp;cent ans a-uantquefuflionsnez , nefoulfrirent gens Ci grand’ faim comme ils fouffri-rent leans.

Eftans les chofes en ce train, mourut la Marquifè de Montferrat,amp; y eut quelque diuilion leans, pour legouiieriiement que demandoitle Marquis deSaluce, amp;nbsp;d’autre part le feigneurConftantin, oncle de la feue Marqui-fe,qui eftoit Grec amp;nbsp;elle Grecque, ôc fille du Roy de Seruie tous deux de-ftruiôls par le Turc. Lediôl feigneur Conftantin feftoit mis fort au Cha-fteau de Cafal,amp;auoit en fes mains les deux filz (dontleplus grand n’auoit que neufans) du feu Marquis,amp; de celle fige amp;nbsp;belle Dame:qui elloit mor-‘ te en l’aage de vingt amp;nbsp;neufans, grande partifane des François. Autres particuliers tafehoient encores audiól gouuernercent : amp;nbsp;en efioit grand’que-llion chez Ie Roy .pour ceux qui les fouflenoient. Lediól feigneur m’ordonna y aller, pou raccorder cefle quellion,à la fcurcté des en fans, amp;nbsp;au gré dclaplufpart du pais,doubtantque le différend ne leurfcillappellerle Duc de Milan: amp;nbsp;le Seigneur deceftemaifonnous efioit bien leant. Il me def-plaifoit fort de partir,que ie ne mille en train de reprendre celle paix, veu les maux qu’ay dids,amp; que rhyuerapprochoit;amp; doubtoyequcces Prélats ne fulfent caufe de ramener le Roy à la bataille:car il elloit mal fourni,fil ne vc-noit force ellrangcrs, comme Suiires,encores fils venoient,fi lîrts comme Ion difoir,il n’y auort que danger pour le Roy de fe mettre en leurs mains,amp; elloicnt les ennemis fort puilfans, amp;nbsp;logez en lieu fort de fituation,amp; bien fortifiez.Conliderées ces chofes, m’aduéturay de dire au Roy qu’il mefem-bloit qu’il vouloit mettre faperfonne amp;: eflat en grâd hazard, pour peu d’o-calîon : qu’il luy deuoit fouuenir qu’il atioit ellé en grand peril à Fornoue; mais là auoit elle contraint, amp;nbsp;icy n’y auoit aucune contrainte, ne deuoit point lailTer à prendre quelque honnefte appointement, pour ces parollcs qu’on difoit qu’il ne deuoit point commécer:amp; que s’il vouloit, ie Icferoye bié parler en forte,que l’honeur des deux collez y feroit biê gardé. Il me re(-ponditque ie parlalfeà môfeigneur le Cardinal,ce que ie fey ; mais il me fai-foit d’ellragésrefponfeSjamp;.defiroit la bataille,amp; tenoit la viéloire Icurc àfon dirc,amp;: difoit qu’on luy auoit promis dix mille Duca«! de rentepoürvn filz, par le Duc d'Orléans,fil auoit celle Duché de Milan. Le lendemain îc vein prendre congé du Roy, pour aller àCafal,amp; y auoit enuiron iournée amp;nbsp;demie.le rencontray monfieur de laTrimouille,à qui ie comptay celle affaire, par ce qu’il elloit des prochains du Roy, dcmadantfi encores luy en deuoye parler.Il me conforta qu’ouy;car chafcundefiroitde Ce retirer.Le Roy elloij:

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510 VIU. LIVRE DËS Kî E M O I R E S en vn iardin. le reprin les parollcs dcHufdides, deuant îc Cardinal, qui dift que luy qui elloit homme d’Eglife,deuoit commencer. le luy dy que s’il ne conainençoitjic commenceroye : il me fcmbloit bien que le Roy n’en feroit point marri,ne fes plus prochains,amp; ainh parti, nbsp;nbsp;au départir, dy a monfei-

gneur le Prince d’Orengc,qui auoit la principale charge de roft,que h ie cô-mençoyc rien,ie luy adre/reroye,amp; allay a Cafal,où ic fu bien rccueilly, par tous ceux de celle maifon,Se les trouuay laplufpart rengez auec le feigneiir Conftantin,amp; fembloit à tous que c’efloit plus grâd’ feurcté pour les enfans: carilncpoLiuoitvenir âlafucceflion, amp;nbsp;le Marquis deSalucey pretendoit droit.le fey plufieurs iours aflemblée, tant deNobles que des gens d’Eglife ôc des villes, Se à leur rcquefte,ou de la plufpart,declaray que le Roy vouloit • que lediól feigneur Conftantin deineuraft en fon gouuernement:car veuë la force du Roy de là les Monts, amp;nbsp;FalFeâion que le païs porte à la maifon de France,ils ne pouuoient contredire au vouloir du Roy.

Enuiron le rroifiefine iour que feu efté là, vint leans vn màiftre-d’hollel du Marquis de Mantoue,Capitaine general des Vénitiens ; qui comme parent, enuoyoit faire dolcàce de la mort de ladideMarquifeiSc celuy là amp;nbsp;moy en-trafmes en parollcs d’appointer ces deux Oils, fans combatte : les chofes fy ' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;difpofoicnt, Sc eïloit logé le Roy en camp,pres Verceil. mais à la vérité dire,

il nepaiïa feulement que la riuicrc,amp; logea fon Oft, mal fourni de tentes Si depauillonszcarils en auoienr peu porté, amp;nbsp;encores ceux là eftoientperdus: . Sc ja eftoit le lieu moite,pource que l’hyuer approchoit,ôc que c’eft païs bas. Lediôl feigneur n’y logea qu’vnenuiôt,amp;fe tira le lédcmain en la ville; mais y demeurèrent le Prince d’Orenge, le Comte de Foix, Si le Comte de Ven-dofine; quiy print vn mal de flux, dont il mourut, qui fut dommage; car il eftoit beau perfonnage,icune Si fage,amp; y eftoit venu en pofte, par ce qu’il eftoit bruit qu’il y deuoit auoir bataille: car il n’auoit point fait le voyage en . Italie auec ItRoy.Aucc ceux là y demeurèrent le Marefchal de Gié, Siplu-lieurs autres Capitaines;mais la principale force eftoit des Allsmans, qui a-uoient fait le voyage auec le Roy;car mal volontiers y demeuroient lesFra-çois,eftans fi pres delà villc:amp; beaucoup eftoient malades,amp; plufieurs par-* ns,les vns auec congé,les autres fans congé,dudi(ft Oft.Iufques à Nouarre y auoit dix gros mils d’Italie,qui valent bien fix lieues Françoifes, fort païs Si mol(comme au pais de Flandresjà caufe des folfeZjqui font au long des che-mins,dc l’vn cofté amp;nbsp;de rautre,fort profonds, Si beaucoup plus que ceux de Flandres .L’hyuer les fanges y font fort gràdcs,Si l’Efté la pouldre.Entre no« ftre-dit Oft 6iNouarre,y auoit vne petite plaGe,appellée Bourg,vnc lieue de nous,que nous tcnions:5i eux en tenoyent vne autre qu’on appelloit Cama-rian,qui eftoit à vnc lieue de leur Oft: Si ja eftoient les eauës bien grandes, a aller d’vn Oft à l’autre^

Comme fay commencé à dirc,cemaiftre-d‘hoftel du Marquis de Man-touè',qui eftoit venu à Cafal,8i moy,côtinuafmes nos parolles;Si difoyc les railbns pourquoy fon maiftre deuoit cuiter celle bataille, Si qu’il auoit veu le peril en quoy il auoit cfté à la premiere, Si qu’il côbatoit pourgens qui ne laccreurcnt iamais pour feriiice qu’il leur feift, Si qu’il deuoit entreprendre l’appoin-

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. ' jii rappointement,amp; moy que ie luy aideroye de noftre coflé. Il merefpondic que fon maiflre le voudroitjmais ilEiudroit, comme autresfois m’auoit elle mandé,que nous parliflions les premiers, veu que leur ligue,dót eftoit le Pa-pe,les Roys des Romains amp;nbsp;d’E(paigne,amp; le Duc de Milan,eftoit plus grande chofe que le Roy, amp;nbsp;luy difoit que c’eftoit folie de mettre cefte cerimo-nie,amp; que le Roy deuoit*aller deuant,eftât la en perfonne, que les autres n’y auoient que leurs Lieutenans, amp;quemoyamp;luy, comme médiateurs, teJricfuth» commencerions fil vouloir,mais que ie fulTe feur que fon maiftre cotinuaft amp;nbsp;tint:amp;; coclumes quci’enuoyeroyc vn Trópetteen leur Oft le lendemain, amp;nbsp;eferiroyeaux deux Prouidadeurs Vénitiens,l’vn appelle meftîre Luques Pifin,l’autre meflire Melchior Treuifan, qui font Offices députez pour co-feiller leurs Capitaines,^ pourpouruoiraux affaires de leur Oft. Én enfui- • uant ce que nous auions conclud,ie leur efcriui la fubftace de ce que i’auoye ditaudiótMaiftre-d’hoftel;amp;auoyeoccafióde cótinuer l’officedebonmédiateur: car ainfi I’auoye coclud, au partir de Venife : amp;nbsp;aufti le Roy l’auoic bien agréable:amp;: fi me fembloit neceflaire:carilfeiÿrouuetoufioursaftezgés pourtroubler vn affaire:mais il s’en trouue peu qui ayentraduenturc, amp;nbsp;le vouloir cnfemble, d’accorder fi grand different, ne qui voulfiffent endurer tât de parolles, qui fe difent de ceux qui traiéfent tels affaires.'car en tels gras Ofts 11 y a maintes differêtes opinions. Lefdiôs Prouidadeurs furent ioyeux de CCS nouuelles;amp; m’eferiuirent que toft me feroient rcfponfe : amp;nbsp;par leurs poftes le feirent fçauoir à Venife;amp; toft curent refjjonfes, amp;nbsp;vint en l’Oft du Roy vn Comte, qui eftoit de Fcrrare:lequel y auoit gcns(car (on Hlx aifné y eftoit,a foulde du Duc de Milan) amp;nbsp;c’cftuy-là en eftoit : amp;nbsp;auoit ledid Duc • de Fcrrare vn autre filz auec le Roy.Lediôl Comte auoit nom le Comte Ah bertin:amp; vint veoir meffirc leâJacques de Trcuoul, foubs couleur d’vn filz qu’il auoit aueclediét meffire lean-lacques, amp;nbsp;s’adrefla’au Prince d’OrengCj ainfi qu’il auoit efté coclud entre ce Maiftre-d’hoftel, dót i’ay pailé, amp;nbsp;moy; , difàntauoir cômiffrondu Marquis de Mantouc,amp; des Prouidadeurs, amp;nbsp;autres Capitaines,eftans en leur Oft,de demander (aufcóduióE pour lediét Mar quis amp;nbsp;autres, iufques a cinquante cheuaux, àfetrouuerà parler auectels perfonnages qu’il plairoit auRoy ordonner:amp; ceux la congnoifloientbien que c’eftoit raifon qu’ils vinffent deuers le Roy, ou les fiens les premiers : ôc auffi qu’ils luy vouloicntbicn faireceft honneur. Puis demanda congé de parlér au Roy,à part.Ce qu’il feit;amp; à part confcilla de n’en Eure rien, difanc que c’eft Oft eftoit en grand paeur, amp;nbsp;que de brief deftogeroit.-amp; par ces pa-rollcs,il monftroit vouloir rompre ceffc accord,amp; no point le (aire n’y aider, combien que (a charge publique fuft telle qu’auez ouy, amp;nbsp;fut prefent à ces parolles ledict meffire lean-Iacques de Treuoul, grand ennemi du Duc de Milan,amp; volontiers euft rôpu ladiôtcpaix:amp; fus tourne maiftre dudiél Côte meffire Albertin,le Duc de Ferrate, y defiroit fort la guerre,pour la grad’ inimitié qu’il auoit aux Vénitiens,à caufe de plufieurs terres qu’ils tenoient de luy,comme le Polefan, amp;: plufieurs autres:amp;: eftoit venu en l’Oft du def^ fufdiét Duc de Milan,qui auoit fil fille pour femme. Des ce que le Roy eut ouy parler lediót Comte,il me feit appeller:amp;: eut en confeil s’il bailler oit ce

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511 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;VIIÎ. LIVRE DES MEMOIRES

faufconduióloii non. Ceux qui vouloient rompre la paix ( comme meffire leamlacqucs amp;: autreSjqui parloient enfaucurdu Ducd’Orleâs,cclcurIêm-bloit )môftroicnt vouloir la batailleCmais ils cftoient gens d’Eglife, ne s y fuflent point trouucz)difans eftrebiêafleurczquelesennemis deflogeroiêtj amp;nbsp;qu’ils moLiroientdcfaim. Autres di{oicnt(amp; i’eftoyedeceuxlà)queplus toft nous aurions faim qu’eux,qui eftoient en leurs pais, amp;nbsp;fi auoient la puifi fiince trop grande pour fen fuïr,amp; fe laificr deftruire,amp;: que ces parolles ve-noientdegens qui vouloient qu’on fe hazardaft amp;nbsp;cobatiftpour leursque-relles.Toutesfois pour abréger,le faufcoduiâ: fut accordé,amp; enuoyé,amp;diôl que le lendemain,à deux heures apres midy,lediól Prince d’Orenge, leMa-refchal de Gié,le feigneur de Pienncs,amp; moy,en leur compagnie,nous trou • lierions entre Bourg amp;nbsp;Camarian,pres d’vne tour,où ils faifoient le guet, amp;c que là parlerios enfemblc,amp; nous y trouuafmes bien accopaignez de Gens-d’armes. Ledid Marquis amp;vn Vénitien, qui auoit la charge de leurs Eftra-diots,y vindrent,amp; vferent d’honneftes parolles, difiins que de leur part ils defiroient la paixzôcfut conclud,quc pour parler plus àloifir ils viendroient le lendemain quelques gens des leurs en l’Oft, amp;nbsp;que le Roy apres enuoye-roit des fiens au leur. Ce qui fe fit, amp;nbsp;vint le lendemain deuers nous meffirc Frâcifco Bernardin, Vicôtcpourle Duc de Milan,amp; vn Secretaire du Marquis de Mantouë,amp; nous trouuafmes aucc eux,ceux que i’ay nommez,amp;lc Cardinal de S. Malo, amp;nbsp;entrafmes en praticque de la paix: amp;nbsp;demandoient Nouarre,en laquelle cité eftoit affiegé le Duc d’Orléans. Aufii demandions nous Gencs, di fans que c’eftoit fief de Roy, amp;nbsp;que lediél Duc de Milan l’a-uoit confifqué.Eux fexcufoient,difans n’auoir rien entreprins cotre le Roy, que pour fe deffendre, amp;nbsp;que ledid Duc d’OrIcans leur auoit prinfe ladite cité de Nouarre,amp; comencé la guerre, auec les gens du Roy,amp; qu’ils croy-oient que leurs maiftres neferoient rien de ce que demandiôs:mais que tou-. te autre chodevoudroient faire pour complaire au Roy. Ils furent là deux iours,amp; puis retournèrent en leur Oft,où nous allafmcs Icdiél Marcfcbal de Gié,môfeigneur dePicnnes amp;nbsp;moy, toufiours fur la demande de cefte cité, amp;nbsp;bien culfions nous cfté contensque Nouarre fefuft mile en la main des gens du Roy des Romains ( qui eftoient en leur Oft, amp;nbsp;dont eftoient Chefs \ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;meftire George de Pietrc-Plane,amp; meftire Fcdcric Capellarc, amp;nbsp;vn nomme

meftire Hancc)car nous ne le pouuions fccourir que par la bataille,que nous ne délirions point,amp; le difios parce que la Duché de Milan, eft tenue en fief derEmpereur,amp;pourhonncftemcntfen defchargcr.Plulieurs allées amp;nbsp;venues fe feirent de nous en leur Oft,ôlt;: des leurs au noftre,fans conclufiô:mais ie demeuroye toufiours au gifte en leur Oft,car tel eftoit le vouloir du Roy, qui ne vouloir rien rompre.Finalement y retournafmes ,amp; d’auatage y vint le Prefident de Gann^ pour porter la parolle en Latin, amp;nbsp;vn appelle mon-feigneur deMoruillier,Baillifd’Amiens ( car iufques à lors i’auoyc parlé en mauLiais Italien)amp; eftoient à coucher nos articles, amp;nbsp;eftoit noftre façon de procedcr,que fi toft que nous eftions arriuez au logis dudiétDuc, il venoit au deuât de nous,amp; la Duchelfe iulques au bout d’vne galerie, amp;nbsp;nous mettions tous deuant luy à l’entrée de fa chambre,ou nous trouuions deux gras

ran CS

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DE PHILIPPE DE COMMINES.

rancs de chaires l’vn denantl’auirejôe bien près l’vn de l’autre. Ils fe feoyent ' de l’vn des collez amp;nbsp;nous del’autre.PremiercftoitafTisdelbn cofté,vnpour le Roy des Romains,l’Arnbafladeur d’Efpaignc,lc Marquis de Mantouèjes dcLixProiiidadeiirs Vénitiens, vn Ambalfadeur Venicicn,amp; puis le Due de Milan,Cl femme,amp; ledernicri’AmbafladeurdeFcrrare, amp;dcleurcofte ne

parloir nul, que ledidf Duc,amp; du noftre vn ; mais noftrc codition n’eft point de parler h pofement comme ils font: cafnous parlions quelques fois deux ou troisenlcmble, amp;nbsp;ledief Duc difoit. Ho, vnâvn. Venant à coucher les articles , tour ce qui faccordoit, eftoit eferit incontinent, par vn Secretaire des noftreSjô*: auflî par vn de leur cofté,amp;au départir, le lifoyent les deux Secretaires,l’vn en Italien ôc l’autre en François:amp;: quand on fc raffem-bloir,aufli afin de vcoir fi on y auoit point rien mué,amp;: aufti pour nous abre- • gcr,amp; eft bonne forme pour expedier grand affaire. Ce traite dura enuiron quinze ioufs, amp;nbsp;pluszmais des le premier iour que commêçafmcs à traider, ' fut accordé que monfcigneurd’Orleas pourroit partir de la, amp;nbsp;feifmes vnc trefue,ceiour,qui continua iour apres autre,iufques à la paix, amp;nbsp;pourfeure-té dudiét Duc fe meit en oftage le Marquis de Mantouë, entre les mains du Comte de Foix,*quitres-volôtierslcfeir,amp; plus pour faire plaifir que pour crainte,amp; premièrement nous feirentiuret que nous procéderions, à cfcient,au traiôfédepaix,amp; que nous ne le faifios point pour deliurerlcdiôf Duc d’Orléans feulement.

tres-volontiers fc mcic en oftagc, Sc plus pour fon plaifir £]uc pour crainte nue nous euiliós delà perfon-ne de mon-ficur d’Orléans.

Comment le Dac d'Orléans fa compagniefurent deliure'^par appointanetf de la dure calamite de Nouarre^oa ils eßoient lt;tßlege':{^ amp;nbsp;de la defente des SuiJfeSjpourfecourir le 7(py nbsp;nbsp;nbsp;monfeigneur d'Orléans,

C H AT, X,

Emarefchal de Giéalla à ladiôleplace,auec d’autres du Duc de Milan, amp;nbsp;feit partir lediél Duc d’Orlcas feulement, à pe-tite compagnie, qui à grand’ioyc en faillit. CÂix de ladidle J place eftoient tant prclfez de faim amp;nbsp;de maladie, qu’il falut que ledidl marefchal laifl'aft fon nepueu, appelle mofieur de Romefort en oftage,promettant à ceux de dedans qu’ils partiroient tous dedans trois iours. Vous aucz bien entendu comme par-auant le Baillif de Dijon auoit cfté enuoy é deuers les Suifles,par tous les Cantons,pour en affem-bler iufques à cinq mille,qui à l’heure du partement du Duc d’Orleans,de la place de Nouarrc,n’eftoicnt encores venuszcar fils eulTentcfté venus, fans nulledoubte,amonaduis,oneuftcombatu, amp;nbsp;combien que Ion full bien Leur qu’il envenoitplus largement que le nombre qu’on demandoit, hn’c-Ifoit il poffible d’attendre, pour l’extremc famine qui eftoit en ladiôte place ou il mourut bien deux mille hommes que de faim que de maladie, amp;: le reffe eftoit fi maigre qu’ils fembloient mieux morts q^ievifs, amp;nbsp;croy queia-mais hommes n’endurerent plus de faim ( ie n’y voudroye alléguer le fiege de Hierufalc) amp;nbsp;fi Dieu les euft faiôls fi fages que de vouloir mettre les blez dedans,qui eftoient enuiron ladide ville,quand au premier ils la prindrenr, ils ne fulTent iamais venus en ceft inconuenient, amp;nbsp;fe fuffent leurs ennemis leuez à leur grand’ honte.

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314 VIÏI. Lî V R E D E S MEMOIRES

Troisioursjouquatre,apreslepartcmentdiididDuc dOrleansdudid Nouarre,fut accordé des deux coftez,que tous les gens de guerre pourroiet faillir,amp; furent ordonnez le Marquis de Mâtouc5amp; mefïire Galeas de fainét Scuerin,Chefs de l’armée tant des Vénitiens que du Duc de Milan, pour les conduire en fcureté,ce qu’ils feirent : amp;nbsp;demeura la place entre les mains de ceux de la ville, qui feirent ferment de n’y mettre ne François ne Italics iuf-ques â ce que le tout fuft conclud, *amp; demeurèrent trente hommes au Cha-ftcau,â qui le Duc de Milan laifToit auoir viures pour leur arger, ce qu’il leur failloitpourchafcûiourfeulcmét:amp;necroiroiton iamaisjûnsl’auoirveuë, lapauurctcdesperfonnes quien fâilloient. Bien peu dccheuaux en faillit; car tout eftoit mangé, amp;nbsp;ny auoit point fîx cens hommes quife fufTent peu • deffendre,combien qu’il en faillit bien cinq mille cinq cens. Largement en demeuroit par les chemins,à qui les ennemis propres faifoient de l’aide. le fçay bien que i’en fàuuay bien cinquante pour vn efeu, auprès du petit Cha-fteau que les ennemis tenoicnt,appellé Camarian : qui cfloient couchez en vn iardin,amp; à qui on dona de la fouppe,amp; n’en mourut qu’vn : fus le chemin en mourut enuiron quatrc:car il y auoit dix mils de Nouarreà Verceil,oùils alloient.Le Roy vfa de quelque charité vers ceux quiarriuerentaudiélVer-ceil,amp;ordonna huiél cens Francs, pour les départir en aumofnes, amp;nbsp;aufït des payemens de leurs gages,amp;: furent payez les morts amp;nbsp;lesvifs.‘amp; aufïiles SuiflcSjd ont il eftoit bien mort quatre cens: mais quelque bien qu’on leur feeuft faire,il mourut biê crois cens hommes audiél Verceil, les vns par trop manger, les autres parla maladie,amp; largement fur les fumiers delà ville.

Enuiron ce temps'que tout fut dehors, exceptez trente hommes, qu’on auoit laiftczau Chafteau,dontchafcuniouren failloitquelqu’vn,arriuercnt les Suifles, en nombre de huiôt ou de dix mille homes en noftre Oft, ou y en auoit quelque deux mille,quiauoicnt ferui le voyage de Naples. Tous les • autres dcm^rcrent auprès de Verceil,enuiron à dix mils;amp; ne fut point co-fcillé le Roy de laifter ioindre ces deux bandes, où eftoient bien vingt deux mille; amp;nbsp;croy que iamais ne fc trouuerêt tant de gens de leur pais enlembic, amp;nbsp;felon l’opinion des gens qui les congnoiftbient, il demeura peu de gens combatans en leurs pais ; amp;nbsp;vindrent la plus part, mau-gré qu’on en euft,amp;: falut deffendre l’entrée du pais de Piedmont, pour n’en laifter plus pafter,oii bien les femmes amp;nbsp;les enfans y fufTent venus.On pourroic demander ft cefte venuëproccdoit de grand amour,veu que le feu Roy Louis leur auoit fait beaucoup de biens,amp; les auoit aidez à eux mettre en la gloire du monde, amp;nbsp;â la repLitation.Vray eft,qu’aucuns vieux auoient amour au Roy Louis on-2iefmc:amp; vint beaucoup de Capitaines, qui auoient fbixante amp;nbsp;douze ans pafTez; qui auoient efté Capitaines contre le Duc Charles de Bourgongne: mais la principale caufe eftoit auaricc, ôcleurs grandes pauuretcz: carala vcrité,tout ce qu’ils auoicntde gens combatans,y vindrent. Tant de beaux hommes y auoit,que ie ne vey iamais ft belle côpagnie, amp;nbsp;me fembloit im-poflîble de les auoirfceu dcfconfire,qui ne les euft prins par faim, par froid, ou par autre necefïité.

Or faut venir au principal point de ce traiélé. Le Duc d’Orléans, qui ja

auoit

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DE PHILIPPE DE COMMIMES.

auoît elle huiel ou dix iours â fon aife,amp; quieftoit acopaigné de toutes fortes degens, amp;nbsp;à qui il ièmbloit bien qu’aucuns auoiêt parlé de ce que tant de gens,corne il auoic dedans Nouarre auec Iuy,s’eftoicnt laiflez mener à celle neceflité,parloit fort de la bataille,ôc vn ou deux auec luy, monfeigneur de Ligny,amp; rArcheuefque de Rouen,qui fe mefloit de fes befongnes : amp;nbsp;deux ou trois menus perfonnages forgèrent aucuns SuiifeSjqui venoient s’offrira combacre,amp;n’alleguoient aucune raifon:car le Duc d’Orléans n’auoitplus en la place que trente hommes au chafteau:amp;: ainfi n’y auoic plus d’occanon de combatre:car le Roy nepretêdoit aucune querelle, amp;nbsp;ne vouloit côbatrc que pour fauuer la perfonne du Duc ôc de fes feruiteurs.Les ennemis efloiéc bienforts.-amp; eiloitimpoflibledelcs prendre dedans leurOfl, tantefloient bien fermez de foifez pleins d’eauë,amp; l’afïîete propre:amp; n’auoicnt a fe deffe-drcquedenous.-cardeceuxlàdelaville n’auoient ils plus de crainte. Ilse-Roîent bien deux mille huiôl cens Hommes-d’armes bardez, Se cinq mille Cheiiaux-legers,onzc mille cinq cens Allemas,menez par bös Chefs(cömê cc meffire Georges de Piecre-plane,meffire FedericCapelarCjS^ mefîireHâ-ce) amp;nbsp;autre grand nôbre de Gens de pied,amp; lèmbloit bien parler par voloté, de dire qu’on les deufl prendre leans, ne qu’ils deuffentfuïr. Vn autre plus grand doute y auoit; c’eftoit,quefi tous les Suiffes fêtrouuoienc enfemblcj ils ne prinffenc le Roy, amp;nbsp;tous les hommes riches de là compaignie, qui e-floitbien foible,au pris d’eux,amp; qu’ils ne les menaffeneen leur païs;amp;quelque apparence s’en veit,comme verrez parlaconcluùon de la paix.

Comment la, paix fut conclue entre le nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;le Duc d’Orléans d’vn coße^

les ennemis de l'autre: des conditions articles j cj^ui furent contenus en ladite paix.

CHAP. Xd.

Stans toutes ces queilions parmi rlous,amp; qu^ledidl Duc d’Orléans en print debat auec le Prince d’Orenge,iufques à lcdefmentir, nous retournafmes,lediôlMarclchal, le Seigneur de Piennes,le Prefident Gannay,le feigneur Moruil-lier,le Vidafme de Chartres amp;nbsp;moy, en l’Oft des ennemis; amp;conclufmes vne paix, croyans bien par les fignes que voyos, qu’elle ne tiendroit point :mais nous auiôs necefiite de la faire,pour maintes raifons qu’auez entendues,amp;: pour la faifon d’hyuer, qui nous y co-traignoit, amp;nbsp;aufli par faute d’argent,amp; pour nous départir honorablement, auec vne honorable paix par eferit, qui fe pourroit enuoyer par tout, comme elle fut;amp; ainfi l’auoit conclud le Roy, en vn grâd côfêil, prefent le Duc d’Orléans. La fubftancù efloit,que le Duc de Milan feruiroit le Roy de Genes,contre tout le monde:amp; en ce fûfànr, il feroic equipper deux nauires à fes defpcns,pour aller fccourir le chafteau deNaples^ui encores tenoit ; Se l’année apres de trois,amp; de fa perfonne,feruiroit e Roy de rechef, à l’entre-prinfe du royaume, au cas que le Roy y retournaft, amp;nbsp;doneroit palfage aux gens du Roy:amp; en cas que les Vénitiens n’acceptaffent la paix dedans deux moys,amp; qu’ils vouluffentfoullenir la maifon d’Arragon,il deuoit foulle-nir le Roy contre cux,moycnnat que tout ce que le Roy prendroit de leu«

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Jiö- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;VÏII. LIVRE DES MEMOIRES

terres,luy fèroicct baillées,Ôi: ernploycroit fa perlonnc,amp; fubieds.-amp; c^nite-roit au Roy quatre vingts mille Ducats,de cent vingt quatre mille, qu’il luy auoit prcHez en ce voyage,que le Roy auoit fait : ôe dctioii bailler deux ofla-ges de Genes,pour fcuretc,amp; fut mis le Chafteict entre les mains du Duc de Ferrare,comme neutre,pour deux années entieres,amp; paieroit ledid Duc de Milan la moitié de la garde,qui eftoit audidl Chaftelet, amp;nbsp;le Roy l’autre: amp;: en cas que le Duc de Milan ne feifl: rien de Gencs contre le Roy, lediél Duc deFerrarepouuoitbaillerlediéfCbaftelet au Roy; Sedeuoit bailler deux autres oflagcs de Milan qu’il bailla,amp; aufli cufl fait ceux de Gencs, fi le Roy neuft elle fi hatifdepartir:mais dés ce qu’il leveit partir fcxculà.

Dés ce que nous fufines retournez de faire iurcr celle paix au Duc de Milan, amp;nbsp;que les Vénitiens eurent prins terme de deux moys de l’accepter ou non (car plus auant ne fe voulurent mettre j IcdiÓlfeigneuriuraaufliladiótó paix,amp; des le lendemain, délibéra de partir, comme ccluy qui auoit grand, enuie de retourner en France,amp;aufii auoit toute là compagnie:mais la nuidt les Suiires,qui elloient en nollre Oil, fc mirent en plufictirs confeils, chafeû atiec ceux de fon Canton,amp; fonnerenr leurs tabourins,amp; tindrentleur ranc qui efl la forme de leur confeil; amp;nbsp;ces choies que ie dy, me compta Lornay quielloitvn des Chefs d’entr’cux,amp;: toufiours a cftc,amp;qui entend bien lala-

gue amp;nbsp;clloit couché en rOll,amp;; vint aduertir le Roy.

Les vnsdifoicnt qu’ils prinflèntic Roy, amp;nbsp;toute fa compagnie , c’cll afçauoir les riches. D’autres ne fy conlentoicnt point, mais bien qu’on luy demandallle payement de trois moys , dilànt qu’ainfi leur auoit elle promis,parlcRoy fonpere, toutes les fois qu’ils fort iioient de leur pais, auec leurs bannières, que tel payement deuoient auoir. Autres vouloycnt qu’on ne print que les principaux,làns toucher au Roy, ôe fe dilpoloyent de rexccuter:amp; auoient ja largement gens dedans la ville;mais auant qu’ils euf-gt;eiiy ^uoitîey fcut coucluflcRoy partit, amp;. tiravers*Trin,vne villedu Marquis de Mont-î-i/?«“’?''«, ferrât. Toutesfois ils auoient tort: car il ne leur auoit promis qu’vnmoys 'Turin : mais nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;■ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;rr- n nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i

ß-uoitpÄr luy

mi

ie Kerger d’ho-

neier,^ui»om-me cefle ville Trine.

,nal lotnrne il de payement, aufh ne feruirent point.Pour fin de compte,on appointa auct eux-.maisauantilsprindrentlediél BaillifdcDijon amp;nbsp;Lornay (maiscefu-quiauoient elléauecnous à Naples ) qui toufiours auoient elle leur Chef,pour auoir vn payement de quinze iours,pour eux en aller : mais les autres furent payez de trois moys:amp;; monta bien le tout à cinq cens mille Francs,defquels ils fe fièrent en pleigcs amp;nbsp;en ollages,amp; cela aduint des François propres,qui le leur mirent en auant : car vn de leurs Capitaines en vint aduertir le Prince d’Orcnge,qui le dill au Roy ; amp;nbsp;c’elloit par dcfpit de celle

paix.

Si toll que le Roy fut arriué à Trin,il enuoya vers lcDuc de Milan, lediél Marefchaljlc Prcfidei^t de Gannay amp;: moy,afin qu’il voulull venir deuers le-diôlfeigneur, pour parler à luy : amp;nbsp;luy difmes p lufi eu rsraifons pour le faire vcnir:amp; que cela feroit la vray c confirmation de la paix. Il i\ous dill plu-fieurs raifons au contraire:amp; f exeufa fus aucunes parollcs quemonlcigneur de Ligny auoit diôbcs(c’eft à fçauoir qu’on le deuoit prendre quand il fut dc-yersle Roy à Pauie)amp; fus d’autres paroles,qu’auoit diôlcs le Cardinal,quia-

uoit

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DE PHILIPPE DE COMMÎMES. 317 uoit tout le crcdic auec leRoy.îl cfl: biê vray q plufieurs foies parolles auoieE eftédiôles.De quiq ce fur ie ne fçay:rnais pour lors,leRoy auoit enuie d’eftrc fon amy. Il eftoit en vn lieu appelle Bolie: amp;nbsp;vouloir bié parler, vue barrière entre deux Se vne riuiere.Qi^âd le Roy eut fceu celle refpôfe,il tira «a QuierSj GU il n’arrella qu’vnc nuiôl ou deux;amp; print fó chemin pour palTcr les Móts, amp;nbsp;me renuoya à Venife,amp; d’autres à Gencs, pour armer ccs deux naucs, que ledi6lDucdcuoitprefler:mais détourné feit rien, amp;nbsp;leur laifla faire grand’ defpenfe amp;nbsp;grand apprell,amp; puis les garda de partir:amp; au contraire,il en cm noya deux contre nous, en lieu de tenir promefle.

gt; *

Qomment le 7{oy renuoyalefei^eur d'Argenton à yenife^pour let conditions de la paix dejquelles ref-ujèrent les yenitiens^ O* des tromperies du . nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•

DucdeZ^^ilan, CHAP. XII.

A charge eftoit à Venife,dc fçauoir fils voudroient accepter celle paix amp;nbsp;pafter trois articles. Le premier, rendre Mono-poli,qu’ils auoient prins fus nous. L’autrc,dc retirer le Marquis deMantouë, amp;nbsp;autres qu’ils auoiët au royaume de Naples, du leruice du Roy Ferrand. Le tiers, qu’ils declaralTent queleRoy Ferrand n’eftoit de la ligue, qu’ils auoientfaille de nouueau:où eftoit nommé feulement le Pape, le Roy des Romains, le Roy d’Efpaigne,Slt;: le Duede Milan. Quandi’arriuayaudiél lieu de Venife, ils me recueillirent honorablemenf.mais non point tant qu’ils auoient fiiôt au premier coup;aufti nous ellions en inimitié déclarée, amp;nbsp;la premiere fois, nous ellions en paix. le dy ma charge au Duc de Venife ; amp;nbsp;il me dill que ic fufle le trelbien venu,amp; que de briefil me feroit refponfe,amp; qu’il fe confeil-leroitauccfon Scnat.Par trois iours ils feirent ^^ocelTions generales, amp;nbsp;grades aumofnes, amp;nbsp;fermons publiques, priantnoftrcSeigneurqu’illeurdon-naft grace de prendre bon confeil.-amp; me fut diél que fouuent fe font en cas • femblablc. Et à la vérité, cerne fcmblc lapins reucrente cité que i’aye ia-mais veuc ,aux chofes Eccleliaftiques, amp;nbsp;quiont leurs Eglifes mieux parées amp;nbsp;accouftrées,amp; en cela ie les tien aflez efgaux aux Romains:amp; croy que de làvicnt la grandeur de la Seigneurie , qui eft digne d’augmenter plus que d’appetilTer. Pour conclulion de mon affaire, i’attendy quinze iours,auant qu’auoirrefponfe-; qui fut de refus de toutes mes demandes, difins n’auoir aucune guerre auec le Roy,amp;que ce qu’ils auoyent frit, eftoit pour aider àleuralliéleDucdeMilan,quele Roy vouloir deftruire; fi feirent parler à part auec moy,le Duc qui m’offroit bon appointement : qui fut que le Roy Ferrand feroit hommage au Roy du royaume de Naples,amp;du confentemét du Pape,amp; qu’il payeroit cinquate mille Ducats l’an, de ces amp;nbsp;quelque fom-mecontantjôc qu’ils la prefteroient:amp; entcndoicnt,lt;noyennantcc preft,a-uoir entre leurs mains les places qu’ils ont en la Pouille , comme Brandis, Ottrate,Trani,amp; autres:amp; aufti bailleroit lediél Dom Ferrand, ou laifteroie au Roy, quelque place ou quartier de la Pouille pour feureté, amp;nbsp;vouloient dire Tarente,que le Roy tenoit encores; amp;nbsp;en euft baillé vne ou deux d’auâ-tage,amp; foffroyét de les bailler de ce cofté la, par ce que c’eftoit le plus loiqg

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5’8 Vin. LIVRE DES MEMOIRES

de nous: maisilsfecouuroientencetque c’eftoiten lieu pour feruir centre le Turc, dont le Roy auoit fort parle quand il entra en Italie, difant qu’à celle fin il faifoit celle entreprinfe, amp;nbsp;pour en efire plus pres, qui fut vne tres-mefehanteinuention : carc’efloitmenfonge,amp;: l’on nefçauroitceleràDieù les penfees. Oultre, m’offroit lediôl Duc de Venife, que ledilt;ft Roy vouloit entreprendre cotre le Turc,qu’il auroitaccez en ces places que iedy,amp;que toute Italiey contribueroit :amp; que le Roy des Romains feroit la guerre de fon cofléauffi : queleRoy amp;cuxtiendroyent toute l’Italie, amp;nbsp;qu’aucun necontrediroità ce qu’ils en ordonneroyent; amp;nbsp;que pour leur part, ferui-royent leRoy aucccentgalécs,à?eurs defpens, amp;nbsp;de cinq mille chenaux parterre.

le prin congé dudiél Duc amp;nbsp;Seigneurie,difiint que i’en feroye le rapport auRoy.Iereueinà Milan, amp;nbsp;trouuay IeDucdeMilanàVigefue;cu cfloit ' vn maiflre-d’hoflel du Roy appelle RigaultDorellcs,Ambafladeur pour le Roy. LediólDucvintau deuant demoy, faignant chaffer; car ils font ainß honorables aux Ambaffadeurs.Il me feit loger en fon Chafleau, entrefgrad honneur.Ielefuppliay depouuoirparlcr àluy àpartJl me difl qu’il Icferoit,

* mais il monflroitfignede ne le chercher point. Iele vouloye prefferdefes nauircs, qu’il nous auoit promis parcetraidlcde Verceil: quiefloient en eftatdepartir(amp; encor tenoit lediél Chafleau dcNaples)amp; il fiiignoitdeles lùut- bailler: amp;nbsp;efloit à Genes pour le Roy,Peron de * Bafche fon mailne- d’hoflel de^âuchei: Eflicnne dc Ncucs : quifoubdainementm’efcriuirent, dés ce qu’ils feeu-

rentma venue là,fè doulans de la tromperie du Duc de Milan, qui faignoit Baflcr çjg leur bailler les nauires,amp; au contraire, en auoit enuoyé deux cotre nous. en Guairmau nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;■’J

{nrnnantdefi L’vu ioLit tcfpondit le Gouuemeur dc Gcncs, qu’il ne fouffriroit point que nomme lefdiéles nauires fuffent arrivées des Françoys, amp;nbsp;qu’é chafeun n’en mettroit deBafchc. vingt ci^q,auec maintes autres exeufes de celle forte, difïimulant at

tendant les nouuelles que lediél chafleau de Naples fut rendu,où lediélDuc fçauoit bien qu’il n’y auoit viures que pourvu moys ou enuiron : amp;nbsp;l’armée quife faifoit en Prouence,n’efloit point fuffifiwte pour faire lediélfecours, fans lefdiéles deux nauircs:car les ennemis auoiet deuâtledit chafleau groffe armée de mer, tat d’eux que des Venities amp;du Roy d’Efpaigue. Trois iours iefuaueclediélDuc.L’vniourfemitenconfeilauec moy, fe courrouçant que ne trouuoye pas bonne la refponfe qu’il faifoit touchant lefdiéles nauires,amp; difoit que par le iraiólc de Verceil,il auoit bien promis de feruir auec deux nauircs,mais qu’il n’auoit point promis de laifler monter aucuns François deffus.A quoyierefpôdiquecefleexcufemefembloit maigre, amp;nbsp;fid’a-uentureilmeprefloit vne bonne mule pour pafler les Monts, que feroit il pour moy,de la me faire mcner,amp; que ie n’en euffe que la veuê',fans.pouuoir monter deffus? Apres4ongs débats, il me retira en vne galerie à part, là luy monflray la peine que d’autres amp;nbsp;moy auions prinfe,pour cetraiélé de Verceil, amp;nbsp;leperii en quoy il nous rnettoit d’aller ainfi au contraire, amp;nbsp;faire ainfi perdre au Roy fesChafleaux; qui efloit la totale perdition du royaume de * Sntende^liiNaples,amp; qui feroit haine perpétuelle entre le Roy amp;nbsp;luy: amp;luyoffryla

fade- nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;deTarante,aueclaDuché deBari;car ja il* latcnoit.Luy difoye

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DE PHILIPPE D E C O M M I N E S. 3^9 îe peril en quoy il fc mettoit / toute l’Italiede vouloir eonlentir que les Vénitiens enflent ces places enlaPouille. Ilconfefl'oitqueiedifoyede tout vérité, parefpccial des Vénitiens: mais pour toute concluhon, il me difl: qu’il ne pouuoit trôuuer,auec le Roy,aucune feurctc,ne fiance.

Apres ces deuifes,ie prin congé dudiél Duc de Milan, lequel me condui-fit vne lieuc:amp; au partir,aduifa vne plus belle menfonge(fi on doit ainfi parler des Princcs)qucdeuant, luy femblant bien que ic m’en alloye fort mélancolique. Ce fut qu’il me diftfoubdainement ( comme vn homme qui change propos) qu’il me vouloir monftrer vntourd’amy [afin que le Roy cLiftoccafion de me faire bonne chere)amp; que le lendemain il feroit partir meflire Galeas(qui eftoit le tout,quand il me nommoit ceftuy la ) pour aller faire partir IcfdidesnauireSjamp;ioindreauec noftre armée, amp;nbsp;qu’il vouloit faire feruice au Roy,tel que luy làuuer fon Chafteau de Naples, amp;: qu’en ce faifiint il luy (àuueroit le royaume de Naples(il difoitvray ,fil l’eufl: faiét) amp;nbsp;que quand elles feroyent parties, il m’eferiroit de fa. main, afin que par moy le Roy en feeufl: des nouuellcs le premier,amp;qu’il veifl: que ie luy auroie fait ce feruice,amp;que le Courrier me ioindroitauantqueiefulTeàLion: amp;c en celle bonne*efperance ie parti, amp;nbsp;me mei à palTer les Monts, amp;: n’ouy venir polie dcrrieremoy,que ic ne cuidalfe que ce full celuy,qui me deuoit apporter les lettres delTufdiéfes ( combien que i’enfaifoye quelque doubte, congnoiflant l’homme) amp;nbsp;vein iniques à Chambery: oùietrouuay mon-feigneur de Sauoye,qui me feit bonne chere,amp; me retint vn iour,amp; puis ie-vein a Lion (fins que mon Courrier veint) du tout faire mon rapport au Roy, qui lors elloit entendant à faire bonne chere, amp;nbsp;a ioulter, amp;nbsp;d’autre chofe ne luy chaloir. ,

Ceux qui auoient ellé courroucé de la paix de Verceil, furent fortioyeux de la tromperie,que nous auoit fait le Duc de Milan, amp;nbsp;en creut leur autho-rité;amp; me lauerent bien la telle,comme on a accoullnmé de fai?e aux Cours des Princes en femblables cas.I’elloyebien ire amp;nbsp;marry.le comptay auRoy, amp;nbsp;monllray par efcrit,roffre que les Vénitiens luy fiifoyent,qu’auez enten-dmdont il ne feit aucune ellime,amp; moins encores le Cardinal de fiinél Malo, qui elloit celuy qui conduifoit tout. Toutes-fois i’en parlay vneautre-fois,amp; me fembloit qu’il eull mieux valu accepter cell olFre, que de perdre le tout,amp;aiifliie ne voioye point gens pour conduire telle'entreprinfe, ôc amp;nbsp;n’appelloient aucun,qui leur peufl: aider,ou ie moins fouuent qu’ils pou-uoient.LeRoy l’eullbien voulu:mais il elloit craintifdedefplaire a ceux d qui il donnoit le crédit, amp;par elpccialàceux quimanioient fes Finances, comme lediél Cardinal,fesfreres,amp;fçs parens.Qui cil bel exemple pour les Princes.-car il faut qu’ils prennent la peine de conduire eux-mefmes leurs affaires,pour le moins quelques-fois,amp; enappcllcrd’aiitres, felon lesmatie-res,amp; les tenir prefque efgaux.-car fil en y a vn li grand que les autres ie crai-• gnent(comme feit le Roy Charles huiólicfme,amp; a fait iufques icy, qui tou-liOLirs en a eu vn)celluy là effc le Roy Ôc Seigneur, quant lt;àl’effeci, amp;nbsp;fe trou-ue le maillre mal lerui:comme il a efté de fes Gouuerneurs, qui ont trelbien fait leurs befongnes,amp;mal les liennes,amp; en a ellé moins ellimé. , d iiij

J

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VIII. LI VP. E DES MEMOIRES

Comment le nbsp;nbsp;nbsp;eßant retourne en France^meit en oubly ceux qui eßoyent

demeure-^^a Naples:(^ comment Monßeigneur le Dauphin mourut dont le 7{py nbsp;nbsp;nbsp;la quot;F^yne menèrent grand dueil.

CHAP. X ni.

* Pttr Miim four tout ily auoit 2.1.moys ^uitußenti^i hitn, fi Char-

On retour à Lion, fut l’an mil quatre cens quatre vingts amp;nbsp;quinze,ledouziefmeiourdeDecêbre, auquel lieu eftoitja arriué le Roy auecfon armee, amp;nbsp;auoit efté dehors, audit voyage, * vn an, amp;nbsp;enuiron deux moys, amp;nbsp;tenoient encores les chafteaux de Naples,comme i’ay dit peu plus auant,amp; e-ftoit encores, audiót royaume de Naples, monfeigneurdc ^dui49^mais hdontpenher,Lieutenant duRoy,amp; à Salerne,auecle Princedu lieu,amp; mô-esmintsmeß feigueur d’Aubigny,en Calabre ( où prcfquetoufiours il auoitefté malade: Xèiioui^Z mais bien amp;nbsp;grandement y auoit ferui}amp; meflire Gracien des Guerres eftoit rAbruzzo,Dom Iulian au Montiaind Ange, amp;nbsp;Georges de Suly à Ta-r.’^»7X*^^rente;raais le tout tant pauure, amp;nbsp;tant habandonné, que i’onnele fçauroit penfer, fans auoir, a grand’peine, vne nouuclle ou lettre , amp;nbsp;celles qu’ils auoyent,n’eftoientqucmenfonges amp;promefles lans efFed. Car (comme dit eft)de foy le Roy nefaifoit ncn:amp; quiles euft fournis des fommes d’argent à heure,donc on a defpenduftx fois le double, iamais n’euftènt perdu le royaume.Finalement leur vindrent quarante milleDucats feu1ement,qui

leur furent enuoycz,quand tout fut perdu,pour part de leur foulded vnan: iJcyaplus, que fils fuifent arriuez vnmoys plus toft, les maux amp;nbsp;hontes, qui leur aduindrent(comme entendc2)ne leur fuflent pas aduenus, ne les di-uifions, amp;nbsp;tout par faute que le maiftre n’expedioit rien de luy, ny n’efeou-toitles gens,qui en venoient:amp; Ces fèruiteurs,quifen mefloient, cftoiétpcix cxpcrimcnFcz pareireux,amp; croy que quclqu’vn auoit intelligenceauec le Pape, amp;nbsp;fembloit que Dieu laiflaft de tous poinôls à fairela grace au Roy, qu’il luy auoit faille à l’aller.

Apres que le Roy cut fcjourné a Lion deux moys, ou enuiron, luy vin-drent nouuelles comme monfieur le Dauphin,fon feul filz,cftoit en peril de mort,amp; trois iours apres luy vindrent nouuelles qu’ileftoittrefpaffé. Lediôî: leigneur en eut dueil,comme la raifon le veut; mais peu luy dura le dueil, Sc la Royne de France, Duchelfe de Bretaigne,appellée Anne ,cn mena le plus grand dueil,qu’il eft pofliblc que femme peuft faire, amp;nbsp;longuement luy dura ce dueil,amp; croy que oultre le dueil naturel que les meres ont accouftume d’auoir de la perte de leurs en fans, le cœur luy iugeoit quelque grand dommage avenir. Au Roy fon mari dura peu ce dueil (comme dit eft) amp;nbsp;la voulut reconforter de faÿje dancer deuant elle , amp;nbsp;y vindrent aucuns ieuncs Gentils-hommes, que le Roy y feit venir pour dancer, amp;nbsp;entre les autres y eftoit le Duc d’Orléans,qui pouuoit bien auoir trente quatre ans.Il luy fern- ' bloit bien qu’ilauoitioye de ladiólc mort (à caufequ’il eftoit le plus prochain de la couronne apres le Roy) amp;nbsp;furent long temps apres, fans parler cnfemble,pourceftecaufe. Ledidl.Dauphin auoit enuiron trois ans, bel • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;enfant

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UE r H 1 L i r P E DE C O M M J N E S. 521 enfant amp;nbsp;audacieux cnparol]c,amp; ne craignoic point les ebofes, que Ies au-^ très enfans ont accouftume de craindre ; amp;: vous dy que pour ces raifons, Ie pcre en pafla aifémcnt fon ducil, ayant deba doubte que tort cert enfant ne Furt grand, amp;nbsp;que continuant fes conditions, il ne luydiminuartrauthorité puirt'ancc;car lediâ: Roy ne fut iamais que petit homme de corps, amp;nbsp;peu cntendu:mais ertoit fi bon,qu’il n’ert pofliblc de veoir meilleure creature.

Or entendez quelles font les miferes des grans Roys amp;nbsp;Princes, lt;Juiont^**^^^JJJ. peur de leurs propres enfans. Le Roy Louis onziefme, fon pere, enauoit

■ r r r nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• 'i • r nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I rmect

eu peur, qui rut lilagcamp;vertueux : mais bien lagement y pourueut,amp;a- par fexemigt;ie près en l’aage de quatorze ans il le lairta Roy. Lediôl Roy Louis auoit fait ÎXT«/quot;»-p.eura fon pere le Roy Charles feptiefme: car il (è trouua en armes, amp;nbsp;en ‘quot;/“J'quot;””-artcmbice contre lLiy,aucc aucuns feigneurs Cheualiers de ce royaume, * en matière de brouillis de Cour, amp;nbsp;de gouuerncment ( ôc le m’a maintesfois compté lediól Roy Louis onziefme) ayant enuiron l’aage de treize ans:mais cclane durapoint.Mais depuis qu’il fut homme, il eut grand’diuifion auec lediél Charles feptiefme,fon pere,amp; Ce retira au Dauphiné, amp;nbsp;de la en Flan-drcs,laiflantlediôtpaïs du Dauphiné audiél Roy fon pere; amp;nbsp;eft parlé de ce propos au commencement de ces Memoires touchant le regne dudiót Roy Louys onziefme. Aucune creature n’ert exempte de pafiion, amp;nbsp;tous mangent leur pain en peine amp;: grand’ douleur.Nortre Seigneur le leur promit, des ce qu’il feit l’Homme *,amp; loyaument l’a tenu a toutes gens. Mais les peines amp;nbsp;douleurs font dirterentes;car celles du corps lont les moindres, eut enfrain amp;nbsp;celles de l’entendement les plus grandes. Celles des lages font d’vne çon, amp;cclles des fols d’vne autre .-mais trop plus de douleur ôc de palfion porte le fol que le fiige(combien qu’à plufieurs femble le contraire) amp;nbsp;fi y a moins de reconfort. Les panures gens (qui trauaillent amp;nbsp;labourent, pour nourrir eux amp;nbsp;leurs enfans, amp;c payent la taille amp;nbsp;les fubfides à leurs fei-gncurs)dcuroyent viurc en grand defconfort,fi les grands I^inces ôcfei- • gneurs n’auoycnt quetousplaifirsencc monde, amp;nbsp;eux trauail ôcmiferc: mais lachofe va bien autrement.•( car fi iemcvouloye mettreàefcrire les partions que i’ayveu porter aux grans, tant hommes que femmes, depuis trente ans feulement) i’enferoye vn gros liure ( ic n’entend point de ceux qui font des conditions de ceux qui font nommez au liure de Bocace; ’^mais * N»«« i’enten deceux amp;nbsp;celles, qu’on voit en toute richefle, finté,amp; profperitc) amp;nbsp;ceux qui ne les pratiquoyent point de fi pres comme moy,les reputoient cftre bien-heureux , ôzlî ay veu maintes-Fois leurs defplaifirs amp;nbsp;douleurs eftre fondez en fi peu de raifon,qu’à grand’peine l’eurent voulu croire les gens,qui ne les hantoyent point,amp;: la plufpart ertoient fondez en foupçons amp;nbsp;rapports: quiert vue maladie cachée ( qui regne aux maifons des grans Princes) dont maint mal en aduienr,tant à leurs perfonnes, qu’à leurs fer-uiteurs amp;nbsp;fubieds, amp;nbsp;s’en abrège tant leur vie,qu’à grand’peine fert veu au- j cun Roy en France,depuis Charleinaigne, auoir parte foixanre ans. Pour ceftefufpiçion, quand lcRoy Louis onziefme vint amp;nbsp;approcha du terme, eftant malade de certe maladie,fciugeoit défia mort. Son pereCharles feptiefme, qui tant auoit fait de belles chofes en France, crtant malade, fe

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5X1 VUL LIVRE DES MEMOIRES

rncit en fantsEe qu’en le voiiluft empoifonner, parquoy il ne vcuîut irmais inâgcr.Auircs fuîpiçiens eut le Roy Charles Exit fee,cui tlti!imfol,amp; teut par rapport.Ce qui doit eEre reputéà grand’faute aux Princes,quad ils ne les aduerent eu font aduerer,E ce /ont cho/cs qui leur touchent,encores que ne fu/Tent de trop grand’importance( car par ce moyen ils n’en auroyêt peint fi fouirent)ôc faudroit en demander aux perfonnes l’vn deuant l’autre. l’cnten del’accuEiteur de l’accu fé,amp; parce moyen nefe /croit aucun rapport, fil vcritable.Mais il en y a de /i*btfrcs,qu’ils promettét ôeiurentn’ê dire riê,amp; par cemoyéils emporter aucuncsfois ccsangoi/Tcs dont ie parle, amp;nbsp;fi bayent le plus fouirent les meilleurs,amp; les plus loyaux feruiteurs qu’ils ayêt amp;nbsp;leur font des dommages,à l’appetit Scrapport depluEcurs mefehans, ôc • par ce moyen font de grans torts,amp; de grans griefà leurs fubieôls.

Qomment les nouuelles de la perte du chafleau de Naples 'vindrent au^ytde la 'vendition des places des florentins a diherfesgens\du trai^éd’j^telle en la Pouille^augrand dommage des Françoisde la mort du

'd{oy Ferrand de Naples. CH AT. XIIII.

E trefpas de môfeigncur le Dauphin, feul Elz du Roy Char-les huidic/inc, fut enuiron le cômcncemcnt de l’an mil qua-0)5^ quatre vingts Sgt;e feize. Qui luy fut la plus grade per-l^Ljfi‘'^duenuë, ne quiluy pcufladucnir : car ianwis n’a plus eu enfant qui ait vefeu. Ce mai ne vint point feu hear en ce propre téps,kiy vindrent nouuelles quclecha-

fteau de Naples efioit rendu par ceux que mon feignent de Montpenfier y a-* famine^ uoit laiflcz,par * fiucur, 6c au/îi pout auoir les o/Iages, que ledidfcigneur de Montpcn/ier auoit baillez(qui e/loient monfieur d’Alcgre, vndes enfans Marche-d’ArdainCjôc vn appelle de la Capelle * de Loudonnois, 6c vn maisfii'-vneß appelle Ichao Roqiicbertin, Catelan ) 6c reuindrent par mer ceux qui c-(ompris deilas i-, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i • i n •« z nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 ■ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• n

tautre.tcus Itoicnt audid chalteau. Vnc autre honte ôc dommage luy aduint, ce/fc Je^x j(roye„t nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Enttagues/qui renoit la Citadelle de Pi/c, quieftoit lefort, 6c

qui tcnoîtccEe cite en ftibiedion) bailla ladide Citadelle auxPifans. Qui

ePuoit allé contre le ferment du Roy, qui deux foisiura aux Florentins de leur rendre ladiéte Citadelle,ôc autres places,commeScrzane, Serzancl-le,Pierre-finde, Librefado, amp;c. Mortron, que les Florentins auoycnt prefte audid fergneur, à fon grand befoing 5c nece/lité, à fon arriuec en Italie, amp;nbsp;donné/rxvingts millie Ducats.-dont ri n’en re/loit que trente mille à payer, quand nousrcpa/fafmes.-commeen quelque autre endroit en a efté parle. Brieftoutesces places furent vendues. Les Geneuois achepterent Serzane amp;C. Serzaneilc,6c les leifr vendit vn Ba/lard de fiind Paul. Pietre-fande vcrl-ditencores lediôl EntragucsauxLuquois, 6c Librefado aux Vénitiens; le tout â la grand’ honte du Roy,ôc de fes fubieds,6c au dommage 6c con/om-mation de la perte du royaume de Naples. Le premier ferment ( comme dit cftaillicurs) que le Roy feit la reftitutiondcfdidcs places, fut à Florence, fcs le grand Autcl,en la grande Eglifc de faind Ichan. Le fécond fut en Aft,

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DE PHILIPPE DE COMMIMES, ' nbsp;323

quand il fut retourne, prefterent les Florentins trente mille Ducats contant audidfeigneur ( qui en auoit bien grand befoing) par condition que fi Pife fe rendoitje Roy ne pay croit rien de ladiôle fomme,amp; {croient ren dus les gages amp;nbsp;bagues qu’on leur bailloitjamp; fi deuoientprefteraudiôHcigneur encores foixante mille Ducats,amp; les faire payer contant,au royaume de Naples,à ceux qui eftoiêt encores là pour le Roy, amp;nbsp;tenir audiót royaume trois cens Hommes d’armes continuellement, à leurs defpens, au feruice dudict feigneur,iufques à la fin de l’entreprifc : amp;nbsp;pour celle mauuaiflie diôle, rien ne fe feit de ces chofes,amp; falut rendre lefdiéls trente mille Ducats, que les Florentins auoient preftcz:amp; aduint tout ce dommage par faute d’obeiïfan-ce,amp; par rapports en l’orcillcxar aucuns des plus près de luy, doneréc cœur audiftEntraguesd’ainfi le faire. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;*

En ce mefine temps,deux moys plus ou moins,au commencement de ce j Ile année mille quatre cens quatre vingts amp;feize, voyans monfeigneur de Montpenfier amp;‘le feigneur de Virgile Vrfin, mefiîre Camille Vitelly, Sgt;c autres Capitaines François,que tout cftoit ainfi perdu,fe mirer aux champs, amp;nbsp;perdirent quelques petites places ; amp;nbsp;là leur vint au deuant Ic.Roy Ferrand, filz du Roy Alphonfe(quifeftoir voué de religion, comme auez veu deuât) aueclediôl Marquis de Mantouë,frcre de la femme dudicl Montpenfier, amp;nbsp;Capitaine general des Venitiensjqui trouuerent loge lediôl Montpenfier en vne ville appellee Atelle, lieu tres-auantageux pour eux,pour auoir viures, envnhault,amp;y fortifièrent leurs logis, comme ceux qui craignoient la bataillc:car Icdiél Roy Ferrand,amp; fes gens, auoient touiiours cfié batus en tous lieux,amp; lediól Marquis en venant à Fornoue, où nous auions comba-tuzamp;l’auoientles Vénitiens* preftéau Roy Ferrand jauquel ils prcfterent,y,Jj7/;''* aufii quelque (omme d’argent,qui valoir peu, pour les gages qu’ils en pii*^-drcnt.’car ils en eurent fix places en la Fouille, de grand’importance (corn- ornptM que me Brandis, Trani, Galipoli, Crana, Ottrantc amp;nbsp;Monopoli, qutlsauoyentnSwWtTtan-prinfes fus nous)amp; compterentlc feruice de leurs G es-d’arm es qu’ils auoiét^X/“X5^‘ audiét royaumc,amp; tant qu’ils tiennent Icfdiéles places pour deux cens mille Ducats, amp;nbsp;puis veullent compter ladcfpenfe deles garder, amp;nbsp;croy que leur/-«^»»«^»^^-intention n’efl: point de les rendre:car ils ne l’ont point de couftume, quand Trani et^la-elles leur font bien feantes, comme font celles cy, qui {ontducofiéde leur7,;'J7«/„X7'* Goufrede V^enife,amp;: par ce moyen fontvrays Seigneurs du Goufer (qui efi vncchofe qu’ils défirent) amp;mc fcmblequedudiâOtrante (quieft le bout galip. Poli-du Goufre)y anetifcens milsiufquesà Venife. Le Pape y a eu autres places entre deux:mais il faut que tout paye gabelle à Venife, fi on veut nager

Icdiél Goufre.Or eft-cenrand’chofeà ettXjd’auoir acquis ces places, amp;nbsp;plus f'lt;=-.1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 1 nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.1 nbsp;nbsp;nbsp;* rnien de ces Z.

cjue beaucoup degens n entendentxar ils en tirent grans bleds amp;nbsp;nuileSjqui en-vn leur font deux chofes bien feantes. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;MoU^g/

Audiéf lieu dont icparle,furinnt queflion entre les noftres, tant pour les viures(quifc commencèrent à diminuer) que pour faute d’argent ; car il e-fioitdcuaux Gens-d’armes vn an amp;nbsp;demi, amp;nbsp;plus, auoient endurégran-wManfto dcspauuretez.Aux Alemans cftoit aufiideu largement: mais non tant,car/4,f5«\^^ tout l’argent que Môfieur de Montpenfier pouuoit finer au royaume, eftoit^“*,'»«.”**”*

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3x4 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V i i i. L, 1 V iv r- V C d iVi JL Al V i IV r d

pour cuxnoutes'fois il leur cfioit dcu vn an,amp; plus,ils auoient pillé plnfienrs petites villes, dont ils cftoient enrichis. Si les quarante mille Ducats qu’on leur auoît promis enuoyer y euflent cflé, ou que Ion eufi feeu qu’ils euflent efté à Florence,le debat qui y aduint, n’y full point aduenu : mais tout eftoit fans cfpoir. Plufieurs des Chefs m’ont dit, que fi nos gens euflent efté d’accord pour cembatre,il leur fcmbîoit qu’ils eu fient gaigné la bataille,amp;quad ils l’euflent perdue,ils n’euflent point perdu les gens qu’ils perdirent, en fai* ûntvn fi vilain accord qu’ils feirenr. Montpenfier amp;{. lediôl Virgile Vrfin, qui cfioienr les deux Chefs, voulcient la bataille, ôc ceux là font morts en piifon,amp; ne leur fur point obfcruc Icdidt appointement.Ces deux queie dy, chargèrent monfeigneur de Percy, vn icune Cheualier d’Auuergne, d’auoir • efié caufe que Ion ne cembatift, amp;: qu’il eftoit vn trefm.auuais Cheualier, peu obeiflànt à fon Chef.

Ilyauoit deux foires d’Allemans enceftOft. lly pouiioitauoirquinzc censSuifies, quiyauoientcfte''dcsccqueleRoyyaIla. Ceuxlàlcferuirent loyaument iniques à la mort,amp; rat que plus on nefçauroitdire. Il y en auoit d’autres, quenous appelions communemenr Lanfqucnets, quivautautant à dire comme compagnons du pais, amp;: ceux là hayflent naturellement les Suifles. Ils font de tous païs,comme de deftiisleRhin,amp; dupais de Souaue,il y cnauoirauftidu pais de Vaulxcn*Senonic,amp; dupaisde Gueldrcs, tout cecy montoir fept ou huid cens hommes,qu’on y auoit enuoyez nouuellc-went, auecpayement de deux moys, qui eftoit mangé,amp; quand ils arriue^ ne troLiLierent autre payement. Ceuxey fc voyans en ce peril, ne jeiiaSedu- nous portercnc point l’amour que font les Suifles. Ils pratiquèrent, ôcfc dunûîf-ï» tournèrent du cofté dudid Dom Ferrand, amp;nbsp;pour cefte caufe,amp; pour la di-ïaMatapM. uifion des Chefs, nos gens feirent vn vilain appointement auec ledid Dom qui bien iura de le tcnirîcarlediift Marquis de Mantouë voulut bien i'-un afîeurcr la^erfonne de fon beau-frere monfieur de Montpenfier.

Par ledid accord ils fe rendirent tous en la main de leurs ennemis, amp;nbsp;îciit

^Mejine Imre. t]»i pQurroit, poßihle efiri

cAao. lt;/»«»- P, jillerent toute l’artillerie du Roy, amp;nbsp;leur promirent faire rendre toutes les places que le Roy auoit audid royaume, tant en Calabre, ou eftoit monfeigneur d’Aubigny , qu’en l’Abruzzo, ou eftoit meflire Gracien des Guerres auecCaiette amp;nbsp;Tarente, Si parce moyen ledid Roy Ferrand les deuoic enuoyer en Proiicnceparmer, leurs bagues faunes: lefquelles nevaloicnt gueres. Ledid Roy Ferrand les feit tous mencrà Naples, amp;nbsp;eftoient cinq ou fix mille perfonnes,où plus. Si des-honnefte appointement n’a efté faid fllt;^uoftre temps, amp;n’enay leu de fcmblablc, fors celuy qui fut faid par »»(ereDerai/e. deuxConfuls Romains (commedit * Titus Liuius j auec les Samnitiens, caudfnæ. qu’on veut dire eftre ceux de Beneuenr, en vn lieu appellé lors les * Ftirques fJX’îJr Caudines,quieftcertainpaïs demontaignes -.lequel appointementles Ro-UC voulureiit tenir, Si renuoyersn^ prifonniers les deux Confuls aux fr« ennemis.

' Quaud HOS gcus cuflcnt combatu,amp; perdu la bataille, ils n’euflent point perdu tant de morts : car les deux parts des noftres y moururent pjir famine • ou pefte,dedans les nauires,en l’iflc de Prufle.-ou ils furent enuoyez depuis, par

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DE PHILIPPE DE GOMMINES. si) par Icdiól Roy Fcrrancl,amp; mcfrncsy ^^ourLltmon^îeLlrc^cMontpenfier(au-cuns difcnt de poi(bn,amp; autres deHcbures,ce que ic çroy mieux) Ôe ne croy point que de tout ce nombrCjrcLîintianiais quinze cens perfonnes : car des Suifles, quicRoyent bien treize cens,n’en reuint point plus de trois cens cinquante, tous malades: lefquelsdoiuenteftrelouez de loyaulté: caria-mais ne voulurent prendre le parti du Roy Ferrand, amp;nbsp;cuflcnc auant enduré la mort,comme pluüeurs feirent audiét lieu de Prufl'e, tant de chaleur amp;nbsp;de maladie,comme de faim;car on les tint en ces nauires par long temps, en rigrandecxtrcmitédcviures,qu’il n’cft poflible de croire. le vey reuenir ceux qui en rcuindrenc, amp;nbsp;par efpecial les Suifles, qui rapportèrent toutes leurs cnfeigncs,amp;: monftroient bien a leurs vifàges,qu’ils auoient beaucoup foufFerc,amp;: tous eftoient malades,amp; quand ils partirent des nauires,pour vn • peu prendre l’air,on leur haulfoit les pieds. Lefeigneur Virgile fen pouuoit bien aller en fes terres par 1 edict appointcment,amp; fon filz, amp;nbsp;tous les Italics qui feruoyent le Roy;toutesfois ils le rctindrcntjamp;fondiéî: filz legitime auf-fi;car il n’en auoit qu’vn. Bien auoit vn Baftard, homme de bien,appelle le feigneurCarlo,amp;plufieurs Italiens delcurcompagnie,ledeftrouirerentcn fen allant. Si cefte male aduenture ne fuft tombée que fus ceux qui auoient fait lcdiôt appointcment,on ne les deuroit point plaindre,

Toft apres que lediélRoy Ferrand eut receu ceft honneur,dont i’ay parlé dcfiLiSjöc que de nouueau auoit efté marié auec la fille de fon grand pere lé Roy Fcrrand,qu’il auoit eue' de la feeur du Roy de Caftille, amp;nbsp;fi cfioit fœur du Roy Alphonfe fon propre pere, eftant jeune fille de treize ou quatorze ans : il print vncfieburc continue, dontcnpeudeioursmourut, amp;nbsp;vint la pofléfiion du royaume au Roy Federic oncle dudiél Ferrand. Ccmefem-ble horreur de parler d’vn tel mariage, dont en ont fait ja plufieurs en cefte maifon,defrcfche mémoire, comme depuis trente ans en ça. Ladidemort fut toft apres ledilt;^appointement,qui fut fait en la ville d’Atch#, l’an mille • quatre ces quatre vingts amp;nbsp;feize. Lediét Roy Dom Ferrand quand il viuoir, amp;nbsp;lcdiôl Dom Fedcric depuis qu’il fut Roy, f exeufoient fur ce que mofieur de Môtpcnficr ne faifoit pointredre Icfdiéfes places qu’il auoitpromifès, en ftifiint ledid traidé.-car Caiette amp;nbsp;autres,n’eftoient point en fa main. Et co-bien qu’il fuft Lieutenant du Roy,fi n’eftoient point tenus ceux qui tcnoiêc les places pour le Roy,de les rendre par fon commandement, combien que leRoy n’y euft guercs pcrdu.-car elles couftoiêt beaucoup depuis à garder amp;: , auitaillcr,amp; fi fe pcrdiret.’öc ne penfe mentir (car i’eftoye prefent à vcoir de-pefeher trois ou quatre fois ceux qui allèrent pour auitaillerôc fccourir les Chafteaux de Naples, ôcvn coup, amp;nbsp;apres iufques à trois, pour auitailler Caiette ) que ces quatre voyages couftoient plus de trois cens mille Francs;

amp; fi furent voyages perdus.

e

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viîî. LIVRE DES MEMOIRES ’

Comment queltjuespratiques menees enj-auenr àti Koy ^par aucunsfei^eùïsà'Itu--lie,tant pour Naples ^ue pour deeha^er le Duc de Milan,furent rompues,par fau^ te d'y enuoy ercomment vne autre entreprinfe contre Genes, nepeut aujf‘venir à bone ffe^. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;CHAT. XK

Epuis le retour du Roy, dudiól voyage de Naples, comme dit eftjil fc tint à Lion long temps,à faire tournois amp;nbsp;iouftes, délirant toufiours ne perdre point fes places dont i’ay parlé, amp;nbsp;ne luy chaloir qu’il luy couftaft:mais aucune peine ne voii loir prendre pour entendre à fon affaire. Pratiques luy ve-noient allez d Italie, amp;nbsp;de grandes, amp;feurcspour leroyau-, me de France, qui eff fort de gens, amp;nbsp;a largement bleds en Proucnceamp;La-guedoc,amp; autres païs pour y enuoycr argent : mais a vn autre Prince, que le Fr^ince,feroit toufiours fc mettre à l’hofpital, de vouloir * entendre au feruice des Italiens,amp; à leurs entreprinfes ôc îecours:car toufiours y mettra ce qu’il aura,amp; n’achcucra point:car ceux là ne feruent point fans argent, amp;nbsp;aufïi il s ne pourroicnt,fi ce n’effoit vn Duc de Milan, ou vnc des plus grades Seigncuries:mais vn pauure Capitain c,encores qu’il ait bonne affeôlion de feruirvn Prince delà maifon de France, qui pretendilEraifon au royaume de Naples, ou vn autre prétendantdroiél à la Duche'de Milan, quelque loyauté qu’il tinft, fi ne le vous fçauroitil feruirgucres longuement, apres le payement failli:car fes gens le laiireroyent,amp;: le pauure Capitaine auroit perdu fon vaillant : car la plufpatt n’ont rien que le crédit que leur do-nentleursGens-d’armes, lefqucislont payez de leur Capitaine, amp;nbsp;luy fc fait payer de celuy qu’il fert,amp; ne fçauroit on demander en Italie que la partialité. Mais pour Içauoir quelles ont efté ces pratiques, que i’ay diéles, fi grandes furet qu’elles commencèrent auant que Caiettefuff perdue, amp;nbsp;durèrent enco^s depuis,deux ans apres le retour du Roy,quand le Duc de Milan ne tenoit chofes qu’il euft promiles. Ce qu’il ne faifoit point du tout par tromperie,ne mal-veillàce:mais en partie de crainte:carilcraignoit fi lcRoy eftoit fi grand,qu’il ne le deffeift. A près il eftimoit aufii le Roy cftrc de peu de teniië amp;nbsp;fcurcté.Il fut entreprins finalement que le Duc d’Orleas iroit en Aft,auecvn nombre de gens,bon amp;nbsp;grand,amp; le vey prell à partir,amp; tout fon train partit.Nouseffionsaffeurezdu Duc de Ferrate, auec cinq cens Hora-mes-d’armes,amp; deux mille Hommes de pied, combien qu’il fullbeau-pcrc du Duc de Mila.-car il le faifoit pour foffer du peril où il fe voyoit effre entre les Venitiés le Duc:pourcequepieça,commeaefféautresfois veudelTus, lefdiéls Vénitiens luy auoient offé le Polcfiin,amp; ne demandoient que fa de-ffruélion.ll euff préféré la feureté,amp; de fes enfans, à l’amitié de fon gendr amp;nbsp;par-auêture luy fembloit que Icdiél Duc fappointeroit auecques le Roy, quand il fe verroken Affecrainte.Le femblable euff fait par fa main,le Marquis de Mantouc, qui n’agucres effoit Capitaine des Vénitiens, amp;nbsp;encores cffoit:mais en fiilpiçion d’eux,amp; luy mal content d’eux, feiournoit aucc fon beau-pcrele Duc de Ferrare, auec trois cens Hommes d’armes, amp;fi auoit pour femme, la lœur de la Duchefle de Milan , ôc fille du Duc de Fer-

rare.

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DE PHILIPPE DÉ COMMINES, Ferrarc.Mefîirc lehan Bentiuoillc ( qui gouqernc Boulongnc, amp;nbsp;cft comme feigneurjeuft fourni cent cinquâtc Hommes-d’armcs, amp;nbsp;deux de fes filz qui auoienr Gcns-d’armes,amp; de braucs Gcs-dc-pied, amp;nbsp;fi eft afiis au lieu où il pouuoit bien feruir contre le Duc de Milan. Les Florentins,qui fe voioiêc deftruidlsjfipar quelque grand inconuenient nefe tefouldoient,depaour d’eftre deflaifis de Pife, amp;nbsp;d’autres places dontil a efté parlé , fourniflbyent huid cens Hommes-d’armes,amp; cinq mille de pied,amp; celaà leurs delpês, amp;nbsp;auoient prouifion de leurs payemens pour fix moys. Les Vrfins, amp;nbsp;aufii le Prefed dcRome, freredu Cardinal defiiind Pierre-ad-Vincula,dontplu-licurs fois a elle parlé(car ils cftoient à la foulde du Roy) euffent bien amené mille Hommes d’armes ; mais entendez que la fuite de leurs Hommes d’armes n’eft pas telle que celle des noftres,qui ont Archiers; mais la foulde eft alTez pareille.Carvn Homme d’armes bien paye,couftecent Ducats l’an, ôc il nous faut le doublepour les Archiers.Ces gês fouldoyezfaloit bié payer,' mais aux Florentins rien. Quant au Duc de Ferrareôc au Marquis de Man-touë,amp; à Bcntiuoille,ils parloient feulement de leurs'defpens.’car ils preten-doient gaing de terrcs,aux defpcns du Duc de Mila: amp;nbsp;fil fe fuft trouuc fou-dainement allâilli de ce qu’euft mené le Duc d’Orléans, amp;nbsp;de tous ceux que i’ay nommez,ceux qui fcfuflentfceu mettre en ordïe,pourledeffendre,cô-mc les Vénitiens, n’eulTent efté prefts à moins de quatre vingts mille Efeus, deuant qu’il euft efté contraint de fe tourner du cofte du Roy, qui euft tenu • tous CCS Italiens aux champs log temps. Et de faidt, le Duc de Milan gaigné, le royaume de Naples fè recouuroit de foy-mefme.

La faute d’efprouucr celle belle aduenture,vint de ce que ledit Duc d’Or-leans mua de propos .'combien qu’onentcndoicqu’ildeuft partir du loir au matin,par ce qu’il auoit enuoyé deuant toutes chofes qui feruoient à là per-fonnc,amp; ne reftoit que luy à partir,amp; l’armée prefteôc payée: car en Aft a-uoit huiét ces Homes d’armes François,amp;bien fix raille Homes de pied,dot y en auoit quatre cens Suiflcs.LcdiólDuc d’Orleas, ayant ainlÄnuc propos, requift au Roy par deux fois, qu’il luy pleuft mettre cefte maticrç au Gôfcil. Ce qui fut fait par deux fois,amp; m’y trouuay prefent à toutes les deux fois,ôc fut concludjlàns vnc voix au contraire ( amp;nbsp;fi y auoit toufiours dix ou douze perlbnnes pour lemoins)qu’il y deuoit allenveu qu’on auoit afleuré tous les amis en Italie,qui dclTus fontnomez , lefqucls jaauoient fait grofledcfpelê, amp;nbsp;le tenoiét prefts.Lors dift ledid Duc d’Orleâs(qui eftoitdc quelqu’vn co-feillcjOU fuyoit fon partemct,par ce qu’il voy oit le Roy aflez mal difpofé de fa làntéjdot il deuoit cftrc propre heritier fil vehoit à mourir) qu’il ne parti-roit point pour y aller,pour fa propre querelle : mais que tres-voloticrs iroit cômcLieutenâtduRoy,amp;: par fon commandement;amp; ainfi finit ce confeifi Le rêdemain,amp; plufieurs autres iours apres, preflerét fort les Ambaftadeurs Florentins,amp; plufieurs autres,le Roy pour faire partir le Duc d’Orleâs;mais le Roy relpondit,qu’il ne l’enuoyeroit iamais à la guerre par force.Parquoy ce voyage fut ainfi rompu,amp;: en dcfplaifoitau Roy,qui en auoit faid grand’ delpcnfc,amp; auoit grande elperance de fe venger du Duede Milan,veu lefdi-des intelligences ôcnouuelles, qu’il pouuoit auoir eues a l’heure, d autres

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328 VIII. LIVRE DES MEMOIRES intelligences qu’aiioii niefllre Ichan-Iacques de Trciioulj qui cfloit Lieutenant general pour le Roy amp;nbsp;pour le Duc d’Orléans, amp;nbsp;natif de ceux de Mila, amp;nbsp;fort aimé amp;nbsp;apparente en ladiôlc Duché de Milan: où auoit largcmêt ges qui auoient bonne intelligence auec luy,tant de les parens comme d’autres.

Faillie ceflc entreprinfe, en furuit toft vne autre, voire deux ou trois à vn coup,de Genes,là où ils font enclins à toutes mutations.L’vne fedreflbirpar meflirc Baptillede Campcfourgoufe,qui eftoit vn grad Chef entre ces par-tialitez de Genes:mais il en eftoit banni, amp;nbsp;n’y pouuoit fi partialité rien : ne ceux d’Oric,qui font Gentils-hommes,amp; ceux de Fourgoufe non. Lefdiéls d’Orie fontpartifans defdiótsFregoufes, amp;nbsp;ne peuuenteftieDucs,à caufe qu’ils font Gentils-hommes:car vn Gentil-homme ne le peut eftre,amp; lediôt mefïire Bapcifle l’auoit elle,n’y auoit gucres,amp; auoitcflé trompé par fon on-•cle le Cardinal de Gencs,amp; cefluy là auoit mis la Seigneurie de Genes en la main du Duc de Milan (il n’y a pas encores fort longtemps ) amp;nbsp;gouucrnoict: àGenes les Adornes,qui aufîi ne font point Gentils-hommes; mais fouucnt ont cfté Ducs de Gencs,aidez par les Spinoles, qui font aufli Gentils-hom-mes:amp;ainfi les Nobles fontbienvn Duc à Genes, mais ils nelcpeuucntc-flrc.Lcdid meflire Baptific efperoit mettre en armes fa partialité, tant en la cité qu’aux champs, quelaScigneurieferoitauRoy,amp; qucluy ôc les ficns gouLierneroient amp;nbsp;chafferoient les autres dehors. L’autre entreprinfe efloit, que plufîeurs perfonnes de Sauonne fcfloyent addreflez au Cardinal fainét Pierre-ad-Vincula, afTeurant de luy pouuoir bailler ladiéfc ville de Sauone, • cfperàtcflre en 1 iberté:car elle tft foubs la ville de Genes, amp;: payent les gabel-les.C^i cuflpcù auoir ce lieu,Genes euftefléfort àdellroiél:vcu quelcRoy tient le pais de Prouence,amp; queSauoyecftà fon commandement.Pour tou tes ces nouuelles mâda le Roy à melTire lehan Jacques de Trcuoul,qu’il fcilF cfpaule audiél mcflîre Baptific de Campefourgoufe,amp;: prcflafl des gés pour Icconduireiufquesaux portes de Gencs,pour veoir fi partialité fe pourroit •Icucr. D’auti^ cofiefutempreffédu Cardinal de fainôl Pierre-ad-Vincula, qui feit tant que leRoy efcriuitaudiél meffirc lacqucs, qu’il cnuoyafl des gens auec lediél Cardinal,pour le conduireiufques à Sauonne,amp; le luy ma-* Par-Mant doit dc bouche,par le feigneur deSeruon en Prouencc,ami dudid Cardinal de Sftnon ‘amp;tres-hardiparieur. Lediél Roy mandoitaudiól meflire lehan-Iacques meifl en lieu, où il peufl faire efpaule aux deux bandes, amp;nbsp;qu’il n’en-d’if* nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;contre la paix qu’on auoit faifte, la fai-

fon deuant,auecques ledid Duc,comme l’on a peu veoir ailleurs,Or efloiéc ces côman demens bien differens : amp;nbsp;ainfi fc depefehent les affaires des gras Princes quand ils n’y font point prcfens,amp; qu’ils font foubdains à comman- -der lettres,amp; expedier gens, fins bien ouyrdebatre deuant les expeditions de Cl großes entreprinfes.Or entendez, quant à ce quedemadoit ledidl mef* fire BaptifledeCampefi^urgoufe,amp; àccque cherchoitlediéf Cardinal,que c’cfloitchofeimpoflible de fournir aux deux à vn coup : car d’aller iufques aux murs dc Genes,fans grand nombre de gens,ne fc pouuoit faire: car il y a grand peuple dedans,hardis,bien armez,amp;: vaillans gens, amp;nbsp;en baillant aufli compagnie au Cardinal,l’armée efloit départie en trois:car il failloit qu’il en . nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;demeu’

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DE PHILIPPE DE C O M M I N E S. 32.^ demeurjftaudiôlmelTirelehan-IacqueSjôHi arriuercnt a Genes, amp;nbsp;aSauó-ne,beaucoup de gens que le Duc de Milan y auoit enuoycz, nbsp;les Vénitiens

qui tous auoient bien peur que Genes tournaft, amp;nbsp;fi auoit Dom Federic le Pape.Or melfire Îeâ-Iacques auoit eu vnc tierce entrepriiixG en fon cœur, car il eufl voulu tout droiôl tirer contre le Duc de Milan, amp;nbsp;laißcr les autres entreprinfès;Slt;: qu’il l’eufl; laiflé faire,il eLift fait grandes choies,amp; commen-ça.Carfoubs couleur d’efcrire au Roy, qu’il ne pouuoit autrement garder de dommage ceux qui iroient a Genes,Ou à Sauonne,il fen alla mettre fur le grand chemin,par où Ion pouuoit venir d’Alexandrie vers Genes ( car par ailleurs que par ce chemin,ne pouuoit le Duc de Milan enuoyer gens, pour courir lus aux noflres) amp;nbsp;print ledidlmclfire lehan-Iacques trois ou quatre petites villes qu’ils luy ouurirêt: 5c diloit ne faire point de guerre audit Duc pour cela,veu qu’il eftoit necelfaire qu’il fy meill,amp; aulfi que le Roy n’entê- * doit point faire guerre audiôl Duc, pour auoir Genes ou Sauonne, fil eull peu:dilant qu’ils font tenus de luy,amp; qu’ils auoient forfait.Pour fatisfaireau Cardinal,lediól melfire lehan Lacques luy bailla partie de l’armée, pour al-leràSauonne.IltroLiualaplacc garnie,amp;fon entreprinfe rompue,amp; fen re-uint.On en bailla d’autres audiôl meflire Baptifte,pour aller à Gencs, falfeu-rant fort de ne faillir point.Quand il eu t fait trois ou quatre lieués,ccux qui alloient en fa compagnie,entrerent en aucunes doubtes de Iuy,tant Allcmâs queFrançoys : toucesfois c’eftoitàtort.'raais leur copagnie, qui n’eftoit pas grande,fe full mife en danger d’y aller,fi là partialité ne fc full leuée : amp;nbsp;ainfi faillirent toutes ces entreprinfes, 5c eftoit ja fort le Duc de Milan, qui auoit efte en grand peril, qui euft laiffé faire le feigneur lehan-Iacques, amp;luye-ftoient venus beaucoup de gens des Vénitiens.Noftre armee fe retira3amp; do- * na Ion congéaux Gens de pied ,amp; furent laiftees ces petites villes, qu’on a-uoit prinfcs,amp; ceflà la guerre,à peu de profit pour le Roy ; car fort grand argent f y eftoit dcipendu.

J)e^uel(jMes di^cntions d'entre le 7{oy nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Ferrand de Camille, dS

bajjadeurs en(toye';^de l'vn d l’autre,pour les appaißr. CH AT. X Fl,

Epuis le commencement de l’an mil quatre cens quatre vingts 5c feize, que ja le Roy eftoit deçà les Monts, trois ou quatre moys auoir, iufques en l’an mil quatre cens quatre vingts amp;nbsp;dixhuit:ne feit le Roy autre chofe en Italie, 5c me trouuray tout ce temps auec luy, Ôeeftoye prefentâ laplufpart dcschofes; ScalloitleRoy de Lion à Moulins, amp;nbsp;de Moulins à Tours, amp;nbsp;par tout faifoit des tournoys ôc des iouftes, amp;: ne penfoit à autres choies. Ceux qui auoyent plus decrédit à l’entour de luy, cftoyent tant diuifez que plus ne pouuoyent. Les ^ns vouloyent que l’en-treprinfe d’Italie continuait (c’eftoyent le Cardinal 5c leSenefchal) voyans leur profit amp;nbsp;authorité en la continuant, 5c palToit tout par eux. D’autre cofté eftoit l’Admirai, qui auoit eu toute l’authorité auec le ieune Ivoy,allant ce voyage. Ceftuy là vouloir que ces entreprinfes demeuraflent

6 iij •

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330 VÏIÎ. LIV RE DES MEMOIRES de tous poinds, amp;nbsp;y voyoit fon profit, amp;nbsp;moyen de retourner à fa premiere auihorité, amp;nbsp;les autres la perdre, amp;nbsp;ainfi paflerent les chofes vn an amp;nbsp;demi ou eniiiron.

»

Durant ce temps alloient Ambafladeurs deuers le Roy,amp; Royne de Ca-fiille: car fortdefiroitlcRoy d’appaifer ce bout, qui efioic en guerre, amp;nbsp;cfioient forts par mer amp;nbsp;par terre; combien que par la terre feifient peu d exploid, par mer auoient fort aidé au Roy Ferrand amp;nbsp;Federic : carie pais de Sicile eftvoifin au royaume de Naples, d’vnelicuë amp;: demie, a l’endroit (eux là,an j . de Reges en Calabre,amp; ’aucuns veulent dire qu’autres-fois fut toute terre; quelamcr afaitcéfte clofture, que lo appelle deprelcntlcFardeMef-fine,amp; de Sicileîdont leRoy amp;nbsp;Royne deCaftille eftoient feigneurs, viennent grans (ècours à Naples,tant de Carauelles, qu’ils auoient enuoyé d’Efi • paigne , que de gens : amp;nbsp;en Sicile mefme fe trouua quelque nombre d’Hommes d’armes, quieftoyentpalfczen Calabre,auccvnequantité de Gcnetaires,ôcfaifoicnt la guerre â ceux qui ertoient là pour le Roy: leurs nauires eftoyent fans cefle auec ceux qui cfioycnt de la ligue : Ôc ainfi quand touteftoitalfemblé, le Roy eftoit de beaucoup trop foible par la mer. Par ailleurs feit le Roy de Caftille peu de dommage au Roy. Vray eft que grand nombre de Gens de cheual entrèrent en Languedoc, amp;y feirent du pillage,couchèrent audiôl pais,amp;y en eut plufieurs qui furent fur ledid pais, deux ou trois ou quatre iours : mais autre exploiôl ne feirent ils. Monfei-gnéur de fiinót André de Bourbonnois,efi:oit à celle frontière, pour mon-feigneurleDuc de Bourbon, gouuerneur du Languedoc. Celuy-là entre-princ de prendre Saufles, vne petite ville, qui eftoit en Rouflillon : car de là ils faifoyent la guerre au Roy,deux ans deuant, amp;nbsp;leurauoitle Roy rêdu le-ditftpais deRouftillon, où eft aftis le pais de Parpignan, amp;nbsp;cefte petite ville eft du pais. L’entreprinfe eftoit grande, par ce qu’il y auoit largement gens, felon le lieu, amp;nbsp;des Gentils-hommes delà maifon du Roy de Caftille mef-•me,amp;leur armée aux champs,Iogée à vne lieue pres, qui eftoit plusgroftc que la noftre.-toutesfois lediél feigneur de fainôl André conduifit fon entre-prinfe fi figement,amp; fi fecrettement, qu’en dix heures il print ladióte place, comme ie vey,par aftault; amp;nbsp;y mourut trente ou quarante Gentils-hommes d’eftime,Efpagnols, Centre les au très, le filz de rArchcucfque de fiinct Jacques, amp;nbsp;trois ou quatre cens autres hommes; lefqucls ne fattendoyent point que fi toft on les deuft prendre : car ils n’entendoient nullement quel exploid faifoit noftrc artillerie, qui à la vérité paflbit toutes les artilleries du monde.

Voila tout l’exploidjqui fut faiôl entre ces deux Roys : mais ce fut honte amp;nbsp;defery au Roy de Caftille,veu que fon armée eftoit fi grofle ; mais quand noftre Seigneur veut commencer à punir les gens,il leur aduient volontiers de telles petites douleurs au commencement : car il en aduint bien de plus grandes audiôl Roy amp;nbsp;Royne toft apres, amp;nbsp;fi feit il a nous. Grand tort auoyentlefdidsRoy amp;nbsp;Royne d’ainfifeftrc parjurez enuers le Roy, apres cefte grande bonté qui leur auoit faiéle, de leur auoir rendu lediéà pays de Rouflillon, qui tant auoit coufte à réparer, amp;nbsp;garder, à fon pere ; lequel l’auoit

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 531 Paiioit en gage pour trois cens mille efcus, qu’il leur quitta : amp;nbsp;feit tout cecy afin qu ils ne l’empefchaflent point à la conquefie,qu’il elperoit faire dudilt;Â royaume deNaples;amp; refeirentlcs anciennes allittnces deCaftille (qui font de Roy a Royjde royaume a royaume, amp;nbsp;d’homme à homme de leurs fub-îeôls)amp;:ils promirent de ne l’empefchcrpointaladiéteconquerte, Se de ne marier aucunes de leurs filles en ladiôte maifon de Naples, d’Angleterre, ne de Flandres:amp;: celle eftroiôte offre de mariage, vint de leur coflé : amp;nbsp;enfeie l’ouuerturevn Cordelier appelle frerelchan de Mauleon, de par la Royne de Caflillc:amp; dés qu’ils veirent laguerre encommcncéc amp;nbsp;le Roy à Romej ils enuoyerent leur Ambaffadeur par tout,pour faire alliacés contre le Roy: amp;nbsp;mefmes à Vcnife,où i’efloye : amp;nbsp;là fe feit la ligue( dont i’ay tant parlé ) du Pape,du Roy des Romains,d’eux,delaSeigneuricdeVenife, amp;nbsp;du Duc de Milan;amp; incontinent commencerêt la guerre au Roy, difant que telle obligation n’efloit point de tenir: c’efl à fçauoir de ne pouuoir marier leurs filles (dont ils en auoient quatre amp;nbsp;vn filz)à ces Roys dont i’ay parlé; amp;nbsp;d’eux mef mes efloit venue cefle ouuerture, comme auez veu.

Or pour retourner à mon propos, quand toutes ces guerres d’Italie furet faillies, amp;: que le Roy ne tenoit plus que Caiette audid royaume de Naples (car encores la tenoitil, quand les pratiques de paix commecerent entre lef-diôts Roys:mais tofl apres fut perdue) amp;nbsp;aufîi ne fe faifoit plus aucune guerre du cofté de Roufïilon,mais gardoit chafeun le hen, ils enuoyerentvers le Roy Charles,vn GentiLhomme,^ des Religieux de Montferrat.-car.toutes leurs œuurcs ont fait mener amp;nbsp;conduire, par telles gens, ou par hy pocrifie, ou afin de moins dcfpcndre:car ce frere îchan de Mauleon, Cordelier, dont a efléparlé,mena le traidé de faire rendre Rouflillo.Ces AmbaffadeurSjdot i’ay parlé,prierent au Roy d’entrée, qu’il luy pieu fl de iamais n’auoir fouue-nàcedu tort que lefdiôls Roy amp;nbsp;Royne luy tenoiét(on nomme toufiours la Royne, par ce que Caflille efl de fon cofté: amp;nbsp;aufti elle en auoi^a principale authorité, Scaefté vnforthonorablc mariage,que leleur) aprescommen-çoient vne trefuc,y comprenat toute leur ligue, 6c que le Roy demeuraft en pofTeffion de Caiette,amp; autres pieces,qu’il auoit audiél royaume deNaples, amp;nbsp;qu’il les pourroit auitailIer à fon plaifir durât la trefue:6: que 16 prinft vne iournéc, oiifètrouueroycnt Ambaffadeurs de toute la ligue,Âourcraiéler paix,qui voudroit;amp; apres vouloyentcontinuer Icfdiéls Roy? en leur con-quefte ou entreprinfe,fur les Maures, amp;nbsp;pafler lamer qui eft entre Grenade amp;nbsp;Afrique, dont la terre du Roy de Fefle leur eftoit la plus prochaine : tou-tesfois aucuns ont voulu dire que leur vouloir n’y eftoit point,ôcqu’ils fe co-tenteroient de ce qu’ils auoient faiôl : qui eft d’auoir conquis le royaume de Grenade;qui à la vcrité,a efté vne belle 6: grande conquefte, 6c la plus belle qui ait efté de noftre temps, ôc que iamais leurs predecefteurs ne feeurent faire; ôc vouldroy e pour l’amour d’eux , que iamais neuftent entendu à autre chofe,amp; tenu à noftre Roy ce qu’ils auoient promis. Le Roy renuoya, aueccesdeux Ambafladeurs, le fcigneurdeClerieux,du Dauphiné:amp;taf-choit le Roy de faire paix ou trefue auec eux,fans y coprendre la ligue: mais toutesfoisjfil euft accepté leurdiót ofFre,il euft fauué Caiette: qui eftoit afTez e iiij •

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33i nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;V 111. K 1 V i\ r. JJna

bien fuflifantc,pour recouurer Ie royaume de Naples, veu les amis que lê Royyauoit. Quand lediót de Clerieux reuint, il apporta praticque nou-11 elle, amp;nbsp;ja eftoit-perduë Gaiette, auant qu’il fuft en Caftille. Celle nouuellc ouuerture fut,que leRoy amp;nbsp;eux retournaflent en leur premiere amp;nbsp;ancienne amitié,amp; qu’eux deux,à butin,entreprinflent toute la conquefte d’Italie, amp;nbsp;à communs defpens,amp; que les deux Roys y fiiflent enfemble; mais pre-mieremenc vouloyent la trefue generale , où toute la ligue fuft com-prinfe,amp; qu’vne iournée fe tint en Piedmont, ou chafeun pourroit enuoyer Ambadadeurs ; carhonneftementils fevouloient départir de ladiôlc ligue. Toute eefte ouuerture,cà mon aduis,amp; ainfi qu’on m’a depuis donné à entc-dre,n’cftoit que dHlimulation,amp;: pour gaigner temps,amp; pour laifler repofer • ce Roy Ferrand,quand encores viuoitj^ Dom Federic nouuelicment entré en ce royaume:toutesfois ils euflent bien voulu lediél royaume leur ; car ils y auoient meilleur droiél que ceux qui l’ont poftedé: mais la maifon d’An^ joUjdont le Roy ale droid,doibt aller deuant.-mais à la nature dont il cft, ôc aux gens qui y habitent, il mefemblequ’il eft âceluy quile peut pofleder: car ils ne veulent que mutation. Depuis y retourna ledid fcigneurdeClc-rieux,amp; vn appelle Michel de Grammont, fur aucunes ouucrtures. Lcdid de Clerieuxportoit quelque peu d’îiffedion à eefte maifon d’Arragon, ôc efperoitauoir IcMarquilatdeCotron (quieft en Calabre) queledidRoy d’Efpaigne tient de eefte conquefte dernicrc , que fes gens feirentaudid • pais de Calabre, amp;nbsp;ledid dcClerieuxle pretend fien,amp; cft homme bon, amp;nbsp;qui aifément croit, amp;parefpecial tels perfonnages. A la deuxiefmcfois qu’il reuint, il amena vn Ambaftàdeur defdids Roys, amp;nbsp;rapporta ledid de Clerieux qu’ils fccontenteroyent d’auoirce qui cft le plus prochain de Sicile,qui eft en Calabre,pour ledid droid qu’ils pretendoient audid royau-medeNapIes,amp; que le Roy print le refte,amp;: qu’en perfonneviendroitledid • Roy de Caliilleen ladideconquefte, amp;payeroit autant de ladcfpenfe de l’armée comme le Roy :amp; jatenoir,amp; tient quatre ou cinq places fortes en Calabre,dont Cotron eft l’vnCjqui eft cité bonne amp;nbsp;forte. le fu preferit au rapport, amp;nbsp;à pluheurs fembla que ce n’eftoit qu’abus, amp;nbsp;qu’il failloit là enuoyer quelqu’vn bien entendu,amp; qu’il ioignift eefte pratique de plus pres: parquoy fu€^ind,auec les premiersf^e feigneur du Bouchage,homme bien j[àge,amp; qui auoit eu grand credit auec le Roy Louis, amp;: encores depuis auec le Roy Charles,filzdudidfeu Roy Louis. L’Ambaftadeur, que ledid de clerieux auoit amené,ne voulut iamais confermer ce que ledid deClerieux difoit:maisdifoit qu’il croyoit que ledid de Clerieux ne le diroit pas fi fes * c'tfi'adire ScigncLirs ne luy cuITent dit * qui confîrmoit l’abuhon, amp;nbsp;aucun ne pouuoit croire que le Roy de Caftille y vint en perfonne, ne qu’il voulfift ou y peuft uiw. autant delpendre que le Roy.

Apres que ledid feigneur du Bouchage,de Clericux,amp; Michel de Gram-mont,amp; autres,furent venus deuers lefdids Roy amp;nbsp;Royne de Caftillc,ils les feirent loger en vn lieu où perfonne ne communiquoit auec eux, amp;nbsp;auoient gensquiy prenoient garde,amp; lefdids Roy amp;nbsp;Royne parlèrent auec eux par trois fois.-mais quad ce vint que ledit du Bouchage leur dift ce qu’auoit • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;rapporté

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DE PHILIPPE DE G O M MI N E S. 335 rapporte Icdid de Cîerieux amp;nbsp;ledicl Michel de Gratnmont ils feirent ref-ponfe qu’ils en auoient bien parlé par forme de dénis: mais non point autrement,amp; rres-volonticrs fe mefleroient de ladiôte paix, amp;nbsp;de la faire à l’honneur du Roy,amp; à fon profit.Lediél de Cîerieux fut bien mal content de celle refponfc,amp; non (ans caufè,amp; fouftintdcuanteux,prefentlcdiél feigneuf du Bouchage,qu’ainfi luy auoit dit.Lors fut conclud, par lediôl feigneur du Bouchage,amp; fes compagnons, vne trefne, à deux moys de deldir, fans y co-prendre la ligue ; mais bien y comprenoient ceux qui auoient efpoufé leurs filles, amp;nbsp;les peres de leurs gendres : c’ell à fçauoir les Roys des Romains amp;nbsp;d’Anglcterrezcar le Prince de Galles eftoit bien icune. Ils auoycnt quatre filles,amp; l’aifnéc eftoit veufuc,amp; auoit efpoufé le filz du Roy de Portugal, dernier trefpaflc:lequel fe rompit le colgt;deuant elle,en paflant vne carrière, fus vn Genet trois moys apres qu’il l’eut efpoufée. Ils en auoient encores vne à marier.Si toft que fut arriuc Icdiél du Bouchage,amp; eutfait fon rapport,con-gnut le Roy qu’il auoit bien fait d’y auoir enuoyé lediél du Bouchage, amp;: qu’au moins il eftoit afleuré de ce dont il eftoit en doubte, amp;nbsp;luy fembloit bien que lediél de Cîerieux auoit creu trop de leger. Oultrc luy dift leditdu Bouchage,qu’autre chofe n’auoitpcu faire que ladiôle trefue, amp;: qu’il eftoit auchoisduRoydel’arrefterourefufer. Le Roy l’arrefta , amp;aufli elle eftoit bonne:veu que c’eftoit fcparation de cefte ligue, qui tant Fauoit deftourbé en fes affaires, amp;nbsp;qu’aucune maniéré n’auoit feeu trouuer de la dcparnr,amp; fil y auoit par toutes voyes effayé. Encores luy dift 1 ediôt du Bouchage, qu’a-pres luy venoient Ambaffadeurs deuers le Roy,amp; que lefdiôls Roy amp;nbsp;Roy-ne luy auoient dit,à fon partement,qu’ils auroient pouuoir de conclure vne bien bonne paix ; ôc aufli dift lediél du Bouchage qu’il auoit laiffé malade le Prince de Caftillejeur feul filz.

f

Discoursfur les fortune s qui aduindrent d la maifon de fafille^au temps du Seigneur d'zArgenton. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;CH Â P, XHl

Ix ou douze iours apres l’arriuécdudid: du Bouchage amp;nbsp;fes compagnons,vint lettres audiél du Bouchage, d’vn des He-rauxdu Roy, qui les auoit laifte là^ pour conduire ladifte Ambaffade qui deuoit venir, amp;: difoyent ces lettres qu’il ne fefbahiftpoint, filefdids Ambaffadeurs eftoiientretardez par aucuns iours.-car c’eftoit pour le trefpas du Prince de Ca* ftille(carainfilesappellent)dontlesRoy amp;Royne faifoient fimerueillcux dueil qu’onncfçauroitcroire,amp;parefpeciallaRoync, de qui on efpcroit aufli toft la mort que la vie. Eta la vérité, ie n’ouy iamais parler deplus gräd dueil que celuy qui en a eftéfaiól par tous leurs royaumes; car toutes gens de merticr ont ceffé quarante iours (comme leurs Ambafladeurs me dirent depuis)tout homme eftant veftu de noit,de ces gros l»ureaux,amp; les Nobles, amp;nbsp;les gens de bien chargeoient leurs mulets couuerts iufques aux genoux dudi(ft drap,amp; ne leur paroiffoit que les yeux, amp;; bannières noires eftoyent par tout fur les portes des villes. Quand Madame Marguerite, fille du Roy des Romains, fœur demonficur l’Archeducd’Auftrichc, amp;nbsp;femme dudid:

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334 VIII. LI V R E D E S MEMOIRES Pnncc,fceutccftcdoulourcufenouuelle,eftant groflc moysjacccijcha d’vnc fille toute morte.Quelles'piteufes nouuellcs en celle mailon, lt;]ui tant auoit rcccii de gloire amp;nbsp;d’honncur?amp; qui plus pofledoit de terre,que ne feit iamais Prince en la Cbrcftienté,venant de lucctlTion? amp;nbsp;puis auoir fait celle belle conquefie de Grenade, amp;nbsp;fait partir vn Roy, tanthonoré par tout le monde,hors d’Italie, amp;nbsp;faillir à Ion entreprinfePee qu’ils ellimoicnt à grande chofe,amp; le Pape mcfmc,qui foubs l’ombre de la conqucllc de Grenade,leur auoit voulu attribuer le nom de tres-Chreftien, amp;nbsp;l’ollcrau Roy de France, amp;nbsp;pluficurs fois leur auoit eferit ainfi,au delTus de leurs Briefs, qu’il leur en-uoyoit.-ô: par ce qu’aucuns Cardinaux contredifoient à ce tiltre, leur en dona vn autre,en les appellat trcs-Catholiques,amp; ainfi leur eferit encores,amp; clt à croire que ce nom leu r demeurera à Rome. Quelles douleurs donc receu-rent ils de celle mort, quand ils auoient mis leur royaume en toute obeilTan-ceamp;: iullicc?amp; lors qu’il fembloitque Dieu amp;nbsp;le monde les voulull plus ho» norer que tous les autres Princes viuans, amp;nbsp;qu’ils elloy ent en bonne profpc-rité de leurs perfonnes?

Encores ne furent ils point quittes d’auoir eu telles douleurs : car leur fille aifnéc ( qui plus ils aimoyent que tout le relie de ce monde, apres leur filz le Prince dcCallille, qu’ils auoient perdu ) clloit contrainte à fe départir d’eux,ayant depuis peu de iours elle cfpoufeeauecle Roy de Portugal, appelle Emanuel,Princcicune,amp; de nouueau deuenu Roy, amp;nbsp;luy cfloitadue-nucla couronne dePorrugal, par le trefpas du Roy dernier mort: lequel cruellement feit coupper la telle au pere de fa femme, amp;nbsp;tua le frère d’elle, depuis,filz du delTufdiôljôc frereailnédeceluy qui depuis fut Roy de Portugal, qu’il a fait viure en grande paour amp;nbsp;crainte,amp; tua fon frere de fa main en difnantauecluy, fl femme prefente, parenuie défaire Roy vn lien ba-llard, amp;nbsp;depuis CCS deux cruautez, vcfquit en grande paour amp;nbsp;fuljaiçionr amp;nbsp;toll apres ces deux exploits,perdit fon feul filz, qui le rompit le col, en • courant deffusvn Genet,amp; pafîantvnc carrière,commei’ay dit; amp;nbsp;futeeluy là qui fut le premier mary de celle Dame que ie dy, qui maintenant a cfpou-lé le Roy de Portugal,amp; ainfi ell retournée deux fois en Portugal,(âge Dame amp;nbsp;honnellc ( ce dit on) entre les lages Dames du monde. Or donc pour continuer les miferables aduentures qui aduindrenten li peud’efpace, cc Royamp;Roynede Callille, qui fi glorieufemcnt amp;nbsp;hcureulcment auoient toufiours vefcuiufquesenuiron l’aagc de cinquante ans tous deux (combien que la Roy ne auoit deux ans d’auantage ) auoycnt donné leur fille à ce Roy de Portugal, pourn’auoir aucun cnnemy en Efpaigne, qu’ils te-noiét toute, excepté Nauarrc,dont ils en fiifoicnt tout ce qu’il leur plaifoir, amp;nbsp;y tenoient quatre des principales places. Aulfi l’aiioient fait pour pacifier du douaire de celle Dame,amp; de l’argent bâillé,amp;pour fubuenir à aucuns fei-gneurs de Portugal ; otr par ce mariage,ces feigneurs amp;nbsp;Cheualicrs ( qui furent bannis du pais,quand leRoy mort feit mourir ces deux Seigneurs dont i’ay parlé, amp;nbsp;qui auoyent confifqué leurs biens, parcemoyenla confil^ catiô tient de prefenf.combicn que le cas dont ils clloyent aceufez, clloit de vouloir faire celuy,qui depuis régna,Roy de Portugal) font recompefez en • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;Callille,

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de PHILIPPE DE C O M M IN E s;

Caßille, du Roy deCafcillc, ô: leurs terres lontdeineurces à la Roynede Portugalj dont ic parle : mais nonobftant telles confiderations, ces Roy amp;: Fvoy ne de Caftilîe auoycnt grand douleur de ce mariage : car il faut cntédre qu'il n’eft nation au monde que les Elpagnols bayent tant que les Portuga-loisjSc fl les mefprifent amp;nbsp;f’en moquent.Parquoy il defplaifoit bien aux def fufdiéls d’auoir baille leur fille à home qui ne feroit point agréable au royau me de Caftille, Si. à autres leurs Seigneuries, ôc fils l’eufTent eu à faire, ils ne l’eufientiàmais fait, qui leur cfloitvncameredouleur,amp; encores vneautre plus grande,en ce qu’il failloit qu’elle fe departift deux: toutesfois leurs dou leurs paflees,ils les ont menez par toutes les principales citezde leurs royau luesjôe fait receuoir le Plt;oy de Portugal pour Prince, amp;nbsp;leur fillepourPrin-cefre,amp; pour leur cftre Roys, apres leur deces. Et vn peu de reconfort leur cft venu.-c eft que ladiôle Dame,Princeflre de Caftille, amp;nbsp;Royne dePortugal, a efté n-rofle d’vn enfant bougeât : mais il leur aduint le double de leurs dou-leurs,amp; croy qu’ils euflent voulu que Dieu les euft oftez du monde : car celle Dame,que tant ils aymoient amp;nbsp;prifoyent mourut en accouchant de fou entant,amp; croy qu’il n’y auoit pas vn moys, car nous eftions en Oôlobre l’an mil quatre vingts dixliuict/mais le filz demeura vifau trauail duquel elle cft*.

O A® nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;l e 1 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;I45gt;8*

morte, amp;nbsp;cuit nom comme lepere EmanueJ.

Toutes ces grandes fortunes leur font aduenues en troys moys d’efpace: mais auant le trcfpas de celle Dame dont icparle, cft aduenu en ce royaume autre‘grand dueilamp; defeonfort: carlcRoy Charles’huiôlicfme,dont tant i’ay parle, efloit trefpafTe, comme je diray apres, amp;femblc queno-ftre Seigneur ait regardé ces deux maifons de fon vifiigc rigoureux, amp;nbsp;qu’il neveux point qu vn royaume fcmocque de l’autrercar aucune mutation ne peut cftre en vn royaume quelle ne foit bien douloureufe pour la plufpart, ôc combien qu’aucuns y gaignent, encores en y a il cent fois plus qui y perdent , amp;nbsp;finit changer mainte couftume amp;nbsp;forme de viure à cellg mutation: car ce qu’il plaid: à v n Roy defplait à l’autre. Et ( comme i’ay dit en vn autre * endroit) qui voudroit bien regarder aux* cruelles amp;nbsp;foubdaincs punitions * que Dieu a filiales fur les grans Princes,depuis trente ans en ça,on y en trou-ueroit plus qu’en deux cens au parauant, a y comprendre France, Caftille, Portugal,Angleterre, le royaume de Naples, Flandres amp;nbsp;Bretaigne : amp;nbsp;qui vouldroit eferire les cas particuliers,que tous iayveus, amp;prefquc tous les perfonnages, tant hommes que femmes,on enferoit vn grand liiire, amp;nbsp;de grande admiration,amp; n’y en euft il feulement que ce qui eft aduenu depuis dix ans:amp;par lala puidance de Dieu deuroit cftre bien congnuë amp;nbsp;entendue,amp; font les coups qu’il donne fur les grâs,amp; plus cruels amp;nbsp;plus pefans, ôc de plus longue durée que ne font ceuxqu’il donne fur les petites gens. Fi- * nalement me femble que à tout bien confiderer, ils n’ont gucres d’auantage en ce monde plus que les autres,fi!s veulent bien vecÂrôe entendre par eux, ce qu’ils voyent aduenir à leurs voifins, amp;nbsp;auoir crainte que le femblable ne leur aduicnne : car quanta eux, ils chaftient les hommes, qui viuent foubs euxlt;amp; và leurs plaifirs,ôc noftrc Seigneur difpofe d’eux à fon vouloir:car autre n’ont ils par deftus eux, ôc eft le pais, ou royaume, bien-heureux, quand

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VIIÏ. LI V R E D E S MEMOIRES il y a Roy,ou feigneur,fagc,amp; qui craint Dieu amp;: fes commandemens.

Nous auons peu veoir en peu de parolles, les douleurs qu’ont rcceu ces deux grans amp;nbsp;puiflàns royaumes, en trois moys d’efpace, qui peu par-auant eftoientfi enflambezl’vn contre l’autre , Ôc tant empefehez càfe tourmen-ter,amp; à pcnierà faccroin;i'C5amp; n’eftoienten ricniaoulsde ce qu’ilsauoict. le confcnebien(commci’ay diOquetoufiours en y a en telles mutaiiÔs,qui en ont ioy e,amp; qui en amcndent:mais encores,de prime-face,leur eft celle mort aduenuëainfifoubdainCjfort cfpouuentable.

DuJomptueux edijîce ^ue le nbsp;nbsp;nbsp;(^harles commença à baflir^ peu auantßimort :

bon 'vouloir quil auoit de reformer fE^tfe^Jes Finances Ja luflicc^eiÿ* foy~meßne'. comment il mourutfcubdainementjjur ce bon propos, enfon chajîeau d'^m--. boife. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;CHAT. XFlll.

SE veux laiflcr de tous poinds, à parler des choies d’Italie amp;nbsp;deCaflillc, amp;nbsp;retourner à parler denos douleurs amp;nbsp;pertes particulières en France, amp;nbsp;aufli dclaioycquepeuuctauoir ceuxquiyontdugaing, ôc parler du loubdain trefpasdc noftre Roy Charles,huidielme de ce nom ; lequel eftoit en fon chafteau d’Amboife, oùilauoitentreprinslcplus grad edifice que commença,cent ans a,Roy,tât au chafteau qu’à la ville,amp;: fe peut veoir par les tours,par où Ion monte à cheual, amp;nbsp;parce qu’il auoit entreprins à la ville, donc les patrons eftoyenc faids de mcrueilleufc cntrcprinic amp;: dcfpenfe,amp; qui de long temps n’eu fient prins fin, amp;nbsp;auoit amené de Naples plufieursoLiLiricrs ex cellens, en plufieurs ouurages, comme Tailleurs, Peintres: amp;fembloitbien qucce qu’ilentreprenoit, eftoitentreprinfe de Roy icune,amp; qui ne penfoit point à lamort:mais cfperoit longue vie, car il ioignoit enlèmble toutes les belles chofes,dont on 1 uy faifoit fcftc,en quelque pais qu’elles eulfcnt efté veuês,fuft en France,Italic,ou Flandres: amp;nbsp;fi a-uoit fon cœtr toufiours de faire amp;nbsp;accomplir le retour en Italie,amp; côfeflbit bien y auoir fait des fautes largemcnt,amp; les comptoit : amp;nbsp;luy fembloit que fi vne autrefois il y pouuoitretourncr,amp;recouurcr Ce qu’il auoit pcrdu,qu’il pouruoyeroit mieux à la garde du pais qu’il n’auoit fait: amp;nbsp;par ce qu’il auoit intelligence de tous coftez,penfoit bien d’y pouruoir, pour recouurer amp;: remettre en fon obeiftance le royaume de Naples,amp; d’y enuoyer quinze cens Hommes d’armes Italiens, que deuoitmener le Marquis deMantoue, les Vrfins, amp;les V.itelis, ôcle Prefed de Rome, frere du Cardinal de làind Picrre-ad-VincLila,amp;: monficur d’Aubigny, qui fi bien l’auoitferui en Calabre fenalloit à Florence, amp;ils fàifoientla moitié de ceftedcfpenfe pour Iix moys. On deuoit aufti premièrement prendre Pife,ou,au moins, les petites places d’alentour, amp;nbsp;puis tous enfcmble entrer au royaume , dont à toutes heures venoyent diuers meflagers. Le Pape Alexandre , eftoit en grande pratique,de tous poinds à ferenger des fiens, comme mal content des Vénitiens, amp;nbsp;auoit quelque meftager fccret,queie conduifienla chambre du Roy noftre Sire,pcu auant fadide mort.Les Venitiens cftoient prefts à pratiquer contre Milan. La pratique d’Efpaignc eftoit telle que 1 a-uczvcuë. Le Roy des Romains ne defiroit chofe en ce monde tant que

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DE PHILIPPE DE COMMIMES. 337 fon amitiéjamp; qu’eux deux enfemble feiEent leurs belongnes en Italiedequd Roy des RoniainSjappellé Maximilian5eftoit grand enncmy des Venitiensy aulîi ils tiennent 2:rand’choie de la maifon d’Auftriche,dontileft,amp; auflî de l’Empire.

D’auantage le Roy auoit mis de nouueau fon imagination de vouloir vi-ure felon les commandcmens de Dieu, mettre la luftice en bon ordre, amp;nbsp;rEglife,amp;aufli derenger fesFinaces,de forte qu’il neleuaû, fus fon peuple, que douze cens mille Francs, amp;nbsp;par forme détaillé, outre fon Domaine; quieftoit la fommc que les trois Eftats luy auoient accordé en la Ville de Tours,lors qu’il futRoy,amp;: vouloir ladiélefomme par oélroy,pour la def-fenfc du royaume: amp;nbsp;quant à luy, il vouloir viure de fon Domaine, comme anciennement faifoient les Roys. Ce qu’il pouuoitbien faire:carie’ • Domaine eft bien grand, s’il eftoitbien conduiâ:, comprins les gabelles, êc certaines aides: ^palTevn million de Francs. S’il I’euftfait, c’eufteftc vn grand foulagement pour le peuple, qui pay e auiourd’huy plus de deux millions amp;nbsp;demi, de Francs, de taille.Il mcttoit grand’ peine a reformer les a-bus de l’ordre de fainél-Benoifl,amp; d’autres religions.il approchoit de luy bonnes gens de religion, amp;nbsp;les oyoit parler.Il auoit bien vouloir, s’il cufl peu,qu’vn Euefquen’euft tenu que fon Euefché,s’iln’eufl:efté Cardinal, amp;nbsp;ceftuy la deux,amp;qu’ils fe fuffent allez tenir fur leurs Benefices :maisileufl: eu bien à faire àrengerles Gens-d’Eglife. Il feit de grandes aumofiies aux Me.ndians,pcu deiours auant fa mort, comme me compta fonconfefTeur, l’Euefque d’Angers, qui efioit notable Prelat.Il auoit mis fus, vne audience publique,où il efeoutoit tout le monde, amp;nbsp;par efpecial les pauures,amp; fi fai-foit de bonnes expeditions,amp; l’y vey,huiâ: iours auat fon trefpas,dcux bon nés heures,amp; oneques puis ne le vey.Il ne fe fiiifbit pas grandes expeditions à cefieaudiêcc:mais au moins,efloit-ce tenir les gens en crainte,amp; par efpc-cialfèsOfficiers:dont aucuns auoit fufpendus par pillerie. • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;•

Eftant le Roy en cefl;egrand’gloire,quant au monde, amp;nbsp;en bon vouloir, 145184 quanta Dieu,le feptiefme iour d’Apuril,l’an mil quatre cens quatre vingts dix-huid,veille de Pafques Flories, il partit de la chambre de la Royne Anne de Bretaigne,fà femme, amp;nbsp;la mena auecluy,pour veoiriouerà lapaul-mc ceux qui iouoient aux fofTez du chafteamoùil ncl’auoit iamais menée que celle fois,amp; entrèrent enfemble en vne galerie, qu’on appelloit la galerie Haquelebac,par ce que ceftuy Haquelebac l’auoitcuë autrefois en garde,^ cÈoit le plus dcf-honnefle heu de leans: car tout le monde y pifloit, amp;nbsp;efloit rompue à l’entrée, amp;nbsp;fy heurta le Roy, du front, contre l’huis, combien qu’il full bien petit,ôc puis regarda long temps les ioueurs, amp;nbsp;deuifoit à tout le monde. le n’efloye point prefent:mais fondiél confefreur,I’Euef-que d’Angers, amp;nbsp;fes prochains Chambelas,le m’ont c^mpté:car i’en efloye parti huiéî iours auant,amp; efloye allé à ma maifon. La dernière parole, qu’il prononça iamais en deuifiint en fanté,c’efloit qu’il dill qu’il auoit efperancc de ne faire iamais péché mortel, ne veniel, s’il pouuoit, amp;nbsp;en difant cefte pa-role,il cheut à renuers,amp; perdit la parole (il ne pouuoit ellre deux heures a-presmidi)amp;demouralàiufquesà onze heures denuiôl. Trois fois luy re-

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33S VIII. LIVRE DES MEMOIRES

TreJpjti dit JRoy Charlii huiChtfint.

uint la parolc:mais peu luy dura,comme me compta lediót Confefleur, qui deuxfois ccftcfcpmainel’auoitcofene.L’vnea caufedeceux qui venoicnt vers luy pour le mal des efcrouelles.Toute perfonne entroit en ladiclc galerie ,qui vouloir,ôc le trouuoit on couché fus vnc panure paillafle, dót iamais il ne partit,iufques ace qu’il eut rendu I’amejSc y fut neuf heures.Lcdid' Co-fefreur,quitoufiours y fut,me dift que lors que la parole luy reuint, a toutes les trois fois ildifoit, Mon Dieu, amp;nbsp;la glorieufe vierge Maric,monrei-gneur fainôt Claude,Ôc Monfeigneur faind Blaife,me foienten aidezôe ainfî départit de ce monde fi puifTant amp;c fi grand Roy, C: en fi mifcrablc lieu,qui tant auoitdc belles maifons, amp;nbsp;cnfaifoitvnefi belle,amp;finefceutàce be-foing finer d’vne pauure chambre. Combien donc fc peur,par ces deux exê-plescy delTus couchez, congnoiftrcla puilfancc dcDicu cftrcgrande, Ôc quec’eftpeude choie que de noftrc miferablc vie, qui tant nous donne de peine pour les chofes du monde, amp;nbsp;que les Roys n’y péuuentrefiftcr,non plus que les Laboureurs?

Comment lehomme,Frere Hteronyme,ftit bruflèù Florence, par enuie qii'oneutpirluy^tantdacofiécln Pape,(^ftedeplfißeursautres Flo-

, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;rentins Uenitiens. C H A P. XIX.

’Ay dit, en quelque endroit de ceffe matière d’Italie, corne il Iacobin,ayantdemouréàFlo-

* ' rence,parrelpacedequinzcans,renommédefortfiiinôfevie (lequel ie vey amp;nbsp;parlay à luy, en l’an mil quatre cens quatre vingt-S amp;nbsp;quinze) appelle Frere Hieronyme, quia dit beaucoup de chofes auant quelles fuffentaduenucs,comme i’ay dit cy de(rus,amp; touhours auoit fouftenu que le Roy pafferoit les Monts, amp;nbsp;leprefcha publiquement, difiint l’auoir par reuelation de Dieu, tant cela qu’autres chofes dont il parloir: Sedifoit que le Roy eftoit efleu de Dieu, pour reformer l’Eglile par force,amp; chaftier les Tyrans : à caufe de ce qu’il difoit fçauoir les chofes par reuelation, murmuroient plufieurs contreluy, amp;acquift la haine du Pape, de plufieurs de la ville de Florence. Sa vie efloit la plus belle du monde,«unfi qu’il fè pouuoit veoir,amp; fes fermos, pref-chant contre les vices, amp;areduiren icelle cité maintes gens à bien viurc, comme i’ay dit. En ce temps, mil quatre cens quatre vingts dix-huid, que le Roy Charles efi: trefpaffê amp;nbsp;fini, auffi feit Frere Hicrohyrae,àquatreou cinq ioursl’vn de l’autre, amp;vous diray pourquoy ic fay ce compte. lia touiioursprelché publiquement que le Roy retourneroit derechefenlta-lie,pouraccornplir celle commiflion,que Dieu luy auoit donnée,qui efloit de reformer l’Eglifeà l’cfpée, S.C dechalTcr les Tyrans d’Italie, amp;nbsp;queau cas qu’il ne le fcifl, Dieu le puuiroit cruellement, amp;nbsp;tous fes fermons premiers, Sc ceux de prefent, il les a fait imprimer amp;nbsp;fc vendent.' Cefternena-ce,qu’ilfaifoitaii Roy,de dire que Dieu lepuniroit cruellement, s’il ne re-tournoit,Iuy a plufieurs fois eferite lediôl Hieronyme, peu detemps auant

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DE PHILIPPE DE COMMINES.

àluy (quifut au retour d’Italie) en medifànt que lafcntcnGeeftoit donnée contre le Roy au cieljau cas qu’iln accomplift ce que Dieu luy auoit ordon-né,amp;: qu’il ne gardaftfes gens de piller. Or enuiron lediél trefpas du Roy^ cftoient Florentins en grand différend en la cité.Les vns attendoicnr encores la venue du Roy,amp; la defiroient fur l’clperance que lediéf frere Hieronyme leur donnoit,amp; fe côfommoienr,amp; deuenoient pauures à mcrueilles,a cau' fe de la defpcnfc qu’ils fouftenoient,pour cuider rccouurer Pife, amp;nbsp;les autres places qu’ils auoient baillées au Roy:dont les Venitiens tenoient Pife. Plu-neurs vouloient que l’on print le parti de la Ligue,amp; qu’on abandonnafl: de tous poinôts le Roy,difins que ce n’cfloicnt qii’abufions amp;nbsp;folies de fy atte-drc,amp; que lcdiél frere Hieronymcn’efloitqu’vn heretique amp;: vn paillard,ôc qu’on le deuoit ietter en vn fac en la riuiere:mais il eftoit tant fouftenu en là ville qu’on ne l’ofoit faire. Le Pape amp;nbsp;le Duc de Milan cfcriuoientfouucnt contre lediéf frere, affeurans lefdiéfs Florentins de leur faire rendre la cité de Pifc,amp; autres placcs,en delaiffant l’amitié du Roy, amp;nbsp;qu’ils prinffent ledit frere Hieronymejôc qu’ils en feiffent punition:amp; par cas d’auenture,fc feit à rbeurevneSeigncuriecnFlorcnce, oùily auoitbeaucoup de fes ennemis ( car ladiéfe Seigneurie fe chage amp;nbsp;fe mue de deux moys en deux moys) amp;nbsp;fe trouua vn Cordelier forgé, qui de luy-mefme print debat audiól freie Hie-* ronymcjl’appellant hérétique amp;nbsp;abufeur de peuple, de dire qu’il euft reue-lation,nc chofe femblable,amp; foffrit de le prouucr iufqucs au fcu,ôlt;; eftoient ces parollcs dides deuât la Seigneurie. Lcdiôl frere Hieronyme ne fe voulut point prefenter au feu; mais vn ficn compagnon diff, qu’il fy mettroitpoüf luy,contre lcdiôt Cordelier:amp; alors vn compagnodudicl Cordelier fe pie-fenta de l’autre colle,amp; fut prins iour qu’ils deuoient entrer dedans le feUjSi tous deux fe prefenterent,accompagnez de leurs religieux, au iour nommé/ mais le lacobin apporta le Corpus dominienfa main, ôcles Cordeliers aufli la Seigneurie vouloient qu’il l’oftaftjCe qu’il ne voulut poi«t faire. Ainli fen retournèrent en leur couuent,amp; le peuple efmeu parles ennemis dudidi: frere,parcommillion de celle Seigneurie l’allèrent prendre audidlcouuenr, luy troifiefme,amp; d’entrée le geinnerent à merueilles.Le peuple tua le principal homme de la ville,ami dudiôlfrcrc,appcIléFrancifquc Vallori. Le Pape luy enuoya pouuoir amp;nbsp;commilTion pour faire le proces. En fin de contCjils les bruflerent tous trois. Les charges n’eftoient linon qu’il mettoit difeord en la villc,amp; que ce qu’il difoit de prophetic, il le fçauoit par Ips amys qui e-Iloientdu confcil. le ne les veux point aceuferny exeufer; carie ne fçay fils ont fait biê ou maldel’auoirfait mourir:mais il a dit maintes chofes vrayes, que ceux de Florence n’culTcnt feeu luy auoir didlcs ; mais touchant le Roy, amp;nbsp;des maux qu’il dill luy deuoir aducnir,luy ell aducnu;cc que vous voyez, qui fccut premier la mort de fon filz,puis la lîenne, nbsp;nbsp;ay veu des lettres qu’il

efcriuoit audidl feigneur,

f ÿ

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VIII. LIVRE DES MEMOIRES

Des ohfeques amp;nbsp;funeraiUes du nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;(^harles Ijui^iefme du couronnement

du 'R^y Louis dow^ießne de ce nom,JonJucceJJeur: auec les genealogies des Roys de France,iufques à iceluy. CHAP. XX.

»

E mal du Roy fut vn catharrc ou apoplexie, ôr efperoient leS Médecins qu’il Juy defeendroit fur vn bras, amp;nbsp;qu’il en feroit perclus, mais qu’il n’en mourroit point; toutesfois il aduint autrement.il auoit quatre bosMedecins.-mais il n’adioufloit foy qu’au plus fol,amp; à celuy là donnoit l’authorite, tant que les autres n ofoient parler, qui volontiers l’euflent purge quatre iours auant; car ils y voyoiêt les occafios demort:quifut amp;nbsp;aduint. Tout home couroit ►vers le Duc d’Orleàs,à qui aduenoit la courone,come le plusprochain:mais les Chambelans dudiôl Roy Charles le feirent enfepuelir fort richement, amp;nbsp;fus l’heure on començaleferuicepour luy,qui duroitiour amp;nuiâ::carquâd les Chanoines auoiêt acheué,les Cordeliers commençoient, amp;nbsp;quand ils a-uoient fini,lcs Bons-homes,qu’il auoit fohdez.Il demeura huiôl iours à Am-boife,tant en vne grand’ chambre bien tédue,qu‘cn l’Eglife, Sgt;c toutes autres ebofes y furent faiéles plus richement qu’elles ne furent iamais à Roy, amp;nbsp;ne bougèrent d’auprès du corps tous fes Chambelans,amp; fes prochains, amp;nbsp;tous fes officiers:amp; dura ceferuice,amp; cefte compagnie, iufquesàccqu’ilfutmis en terre,qui dura bien l’cfpaced’vnmoys, coufla quarante mille Francs, comme me dirent les gens des Finances.l’arriuay à Amboife, deux iours a-pres fon treipas, amp;nbsp;allay dire mon oraifon, là où eEoit le corps, amp;nbsp;y fu cinq ou fix heures;amp; à la verité,on ne vei iamais femblable dueil, ne qui tant du-raft.Auffi fes prochains,come Chambelans,amp; dix ou douze Gentils homes qui eftoient en fa chambre, eftoient mieux traidez amp;nbsp;auoient plus grans e-Rats,amp; dons,que iamais Roy ne donna,amp; trop.D’auantage la plus humaine , amp;nbsp;douce patolle d’homme queiamais fut,cfl:oic la fiennc:car ic croy que iamais àhomme ne dift chofe qui luy deuft defplairc, amp;nbsp;à meilleure heure ne pouuoit iamais il mourir,pour demeurer en grâd’renommée par Fdiftoires, amp;cn regret de ceux qui l’ont ferui,amp; croy que i’ay efté l’homme du monde, à qui il a fait plus derudeffie; mais congnoiffiantquece fut en faicuneffie, amp;: qu’il ne v'enoit point de luy,ne luy en feeu iamais mauuais gré.

\ Q^andi’eu couché vnenuidà Amboife, i’allaydcuersceRoy nouueau de qui i’auoyç efté auffi pi iué que nulle autre perfonne, amp;pour luy auoyc efté en tous mes troubles amp;nbsp;pertes.-toutesfois pour l’heure ne luy ep fouuint point fort.-mais fagement fe meit en pofTeffion du royaume : car il ne mua lien des pefions,pour celle annéc,qui auoit encores fix moysàdurer. Ilofta peu d’officiers, amp;nbsp;difl: qu’il vouloir tenir tout homme en fon entier amp;nbsp;eftar, amp;nbsp;tout cela luy fut bieg feantiamp;s le plus-toft qu’il peut, il alla à fon couron-nemcntlàoùiefu, amp;nbsp;pour les Pers de France, fy trouuerentceux qui fen-fuyuent. Le premier fut le Duc d’Alençon,qui feruoit pour le Duc de Bour-gongne.Le deuxicfme,monfeigneur de Bourbon , qui feruoit pour le Duc deNormâdie.Le troifiefmefut le Duc de Lorraine,quifcruoitpourleDuc de Guyêne.Le premier Comte,Philippe,monfieur de Rauaflin,quiferuoit • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pour

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DE PHILIPPE DE COMMIN.ES. 341 pour le Comte de Flanclres:ledeuxîefmc,Engilberr,môfieur de Cleues, qui Icruoitpourle Comte de Champaignc.Le troifiefmcmonlèigncur dcFoix qui feruoit pour le Cote de Thoulouze,Ss,’ fut lediôl couronement a Reims, du Roy Louis douziefme,le vingt-feptiefmeiour de May,l’a mil quatre ces quatre vingtsamp;dixhuiél; amp;:eil lequatricfme en ligne coîlateraile. Les , deux premiers ont efté Charles Martel, ou Pepin fonhiz, amp;nbsp;Hue Cappel, tous deuxmaiftresdu Palais,ou gouLierncLîts des Roys, qui vfurperenc le royaume fur lefdióls Roys,amp; leprindrent peureux. Le tiers fut le Roy Pl^uecejoit,ie lippe de Valoys , le quart le Roy Louis douziefme. A ces deux derniers venoit le royaume iuftement loyaument. La premiere generation des Roys deFrance,eftàprendrcàMerouéc.DcuxRoys y auöit eu en France a-uant ledicl Merouéex’eft à fçauoir Pharamond(qui fut le premier efleuRoy * de France.-car les autres auoientellé appeliez Ducs, ou Roys de Gaule) amp;nbsp;vn fien filz appelle Claudio. Ledid Pharamondfutefleu Roy, l’an cccc. amp;nbsp;* vinst.ôc régna dix ans.Son filz Claudio en régna dixhuiôl. Aiafi régnèrent *

P nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;■ I . nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;X Z / nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;■ • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;’ n. • nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• CI

ces deux Roys vingt huict ans,amp; Merouee,qui vint apres,n ekoit point hiZ dudiôl Claudio,mais fon parêt.-parquoy fembleroit qu’il y eufi: eu cinq fois mutation en ces lignes Royalcs:toutesfois commei’ay dit, on prend la pre-miere generation à commencer à Merouée, quifutfaiftRoy cnl’an quatre /’«„(f-ÿw. cens quarante huid,amp; la comença cefte premiere ligne,amp; y a eu au Sacre du Roy Louis douzicfme,mil cinquante ans que commença la generation def-dids Roys de France, amp;nbsp;qui le voudra prendre a Pharamond, il y en auroit vingt amp;nbsp;huid d’auantage,quiferoit mil feptâte amp;nbsp;huid ans, que premier y a eu Roy,appelle Roy de France.Depuis Merouée iufques â Pepin, y eut trois cens trente ans, qu’auoit duré ladide ligne de Merouée. Depuis Pepin iuf-ques à Hue Cappcl,y a deux cens trente fept ans, qu’a dure ladide vraye ligne de Pépin,amp; de Charlemaigne fon filz. Celle de Hue Cappel a duré en vraye ligne,trois cens trente neufans, amp;nbsp;faillit au Roy PhilippÂle Valoys, • amp;nbsp;celle dudid Roy Philippe de Valoys a dure en vraye ligne,iufques au tref pas du Roy Charles huidiefme, qui fut l’an mil quatre cens quatre vingts dixhuid ; amp;nbsp;celuy la a cfté le dernier de cefte ligne, quia duré cent foixantc ncufans,amp; y ont regne fept Roys'.c’eft à fçauoir Philippe de Valoys, le Roy Iehan,le Roy Charles cinquicfmc,Ie Roy Charles fixicfme, le Roy Charles feptiefme,le Roy Louis onziefme,amp;: le Roy Charles huidiefme, fin de la ligne droide de Philippe de Valoys. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.

fiij

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TABLE, OV RECVEIL DES CHAPITRES

DE C H A S C V N LIVRE DV prefent volume.

Tgt;V PREMIER livre»

DEloccapon des ^^uerres, quifursnt entre Y^ouis on:!;ießne^ le comte de charoloySy depuis due de Bourgon^ne.chdpitrepremier. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pa^e j,

Comment le comte de charoloys^auec plußeursgrosßi^neurs de France^drejpt ^ne armée contre le Roy Louis on^sd^fme^foubs couleur du bien public.chap.ij.

Comment le comte de Charoloys yint planterfsn camp pres de Mont l'hery de la bataille qui fut faiéîe audiFl lieu^ entre le Roy de France Cy' Itty. chap.iij.

Du danger,auquel fut le comte de charoloys,^ comment il futfecouru.cbap.iiij.

Comment le duc de Berry^frere du Roy^Cy le duc deBretai^nefeyindrentioindreaueclecomtede Charoloys,contreiceluy ï^cy.chap.y. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-.i6

Comment le comte de charoloys Cy* fes alliequot;^^ auecleur armee^aljerent la riuiercde Seine fury n pont portatif amp;nbsp;comment le duc lean de Calabrefe ioi^nit auec eux,puisfe logèrent a l’entour de Paris, chapitre yj. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;page.i^.

Digrefion Juries eßats,ofßces,amp;^ ambitions,par l’exemple des .gt;4ngloys. chap. yij.

Comment le Roy Louis entra dedans Paris,pendant que les Seigneurs de Francey drejfoient leurs pratiques. chap.yiij.

Comment l’artillerie du comte de charoloys celle du Roy tirerent l’fne contre l’autre pres Charenton:^ comment le comte de Charoloysfeitfaire de rechef yn pontfur baßeaux en la riuiere de Sei-ne.chdp.ix. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-e.z^

Digreßion fur quelques yices nbsp;nbsp;vertus du T^oy T,ouis on‘;idefme.chapitre x.

• Comment les B^rguignons,cßans pres Paris,^ attendant la bataille, cuiderent de chardons quits yei-rent,que cefujjent lances debout.chapitre.xj, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-.^ey

Cornent le Roy nbsp;nbsp;le comte de charoloys parieret enfeble,pour cuider moyener la paix.dhap.xij. pag.^i

Comment la yillede Rouen fut mißt entre les mains du duc de Bourbon,pour le duc de Berry,par quelques mene'es, nbsp;nbsp;comment letraidîe'de Conßansfutde touspoinFis conclud.chapjeii).

DutraiFiédepaix concludentre le Roy le comte de charoloys fes allie\.chap,xitq Comment,par la diuißon des ducs de Bretaigne de Normandie, le Roy reprint enßs mains ce qu’il auoit baille'à fonfrere.chap.xy.

C omment le nouueau duc de Normandiefe retira en Bretdigne,fort paunre nbsp;nbsp;defolé,de ce qu'il efloit

fruflré defon ifitention.chap .xyj. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag. 5 8

DVSECOND LIVRE.

DEsguerres,quifurent entre les Bourgui^ons (y^les Liegecys,^ comme layilledeDinanfut prtfe,pillée,(^ rafee.chap.j. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;p‘ig.‘^Q

Comment les Ligeoys rompir^t la paix au duc de Bourgongne,par-auant comte de charoloys, nbsp;nbsp;cornent il les dejjett en bataille.chap.q. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-.^z

Comment apres qu’aucuns des Ltegeoys eurentcompoféde rendreleuryille, ^les autresrefujéde ce fatre,lefeigneur d'Hymbercourt trouua moye d’y entrer pour le duc de Bourgongne. chap.iii. pag. 4.7

Comment le duc de Bourgongnefeit fon entrée en la yille du Liege:^ comment ceux de Gand,quipa r-auant l auoient affés mal receu,s’humilièrent enuers luy.chap.iiif. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-,lt;jQ

Comment le Roy, yoyant ce qui efloit aduenu aux Liegeoysfeit quelque peu de guerre en Bretaigne,i!^

' nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;eom-

-ocr page 355-

comment ils fè yeirent^amp;'parlèrent enfemble eux deux à Peronne, chap.ÿ. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-.^zt

fur l’auantage que les lettres,^ principalement en Hißo ires font aux princes nbsp;nbsp;gransfei-

gneurs.chap.yj.

Comment,^ pourquoy leJloy Louis fut arreflé,!!^ enfermé dedans le chaßeau de Peronne, par le duc deEüurgongnc.chap.yf

liigreßionfur ce que quand deux grans princes s’ entre~yoient,pour cuider appaifer dijferens,telle yeuë cßplus dommageable queprojfitable.chap.yiij. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-, j 8

Comment le Roy renonça a éalliance des Liegeoys, pourfortir hors du chaßeau de Peronne, c^api-^feix. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pages.6i

Comment le Roy accompaigna le duc de Bourg on^efaifant lagu erre aux Liegeoys, par-auantfes a-lie^chapitre x. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag.6z

Comment le Roy arriua en perfonne deuant la cité du Liege ^auecle duc de Bourgongne.chap.xj.pag. 6jj. Comment les Liegeoysfeirentynemerueilleufe faillie ßur lesgens du duc de Bourgongne, là où luy le Roy furent engrand danger.chapitre xij. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag.é6

Comment la cité du Liege fut aßaillieprinfe,^ pillée, nbsp;nbsp;les EgUfes aufi.chap .xiij. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag. 6 x

Comment le Roy Louis s’en retourna en France, du confentement du duc de Bourgengne,^^ comment ce duc acheua detraiéler les Liegeoys,(^ ceux de Franchemont.chdp.xiiq.

Comment le Roy feit tant,parfubtils moyens, que monfteur Charles, fonfrerefe contenta de la duché de Guiennepour Brte nbsp;nbsp;champaigne,contre l’entente du duc de Bourgongne. chap.xy. nbsp;nbsp;pag. yj

D V TROISIESME LIVRE.

Comment le Roy print nouuelle occaßon defaireguerre au duc de Bourgongne,^comment U l’en-uoya adioumer iufques dedans Gandpar yn huißier de parlement.chap.).

Cornent la yille defainél-Quentin, çÿ» celle d’.^miens,fur'et rendues entre les mains du Roy, (^pour quelles caufes le conneßable,^ autres,entretenaient la guerre entre le Roy nbsp;nbsp;nbsp;le duc de Bourgogne,

chapitre f nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;P'-^^‘77

Comment le duc de Bourgongne gaigna Piquigny, çÿ* apres trouua moyen d’auoir trefue au Roy pour yn an,augrand regret du Conneßable.chapitre.iq.

Lgt;es guerres qui furent entre les princes d’.^nglet erre,pendant les différons du Roy Louis de Charles de Bourgongne.chap.iiq. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;p^o-, 8 x

Comment le Roy Louis aida fi bien le comte de nbsp;nbsp;aruic,qu’il chaffa le Roy Edouard hors d'./ino-leter-

re,augrand deßlaißr du duc de Bourgongne,quilereccutenfespaïs.chap.y. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-.8'^

Comment le comte de nbsp;nbsp;aruic tira hors deprtfon le R oy Henry d’.Angleterre.chap.'}iß pag. o

Comment le Roy Edouard retourna en ./Ingleterre,ou il deffeiten bataille le comte de^ aruic,çlër le Prince de Galles apres.chap.yf nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;p‘t«',^^

Comment guerre fe renouuella entre le Roy Louis le duc Charles de Bourgongne, à la folicitation des ducs de Gutenne de Bretaigne.chapitre yif * nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-.^ j

Comment la paix ßnale,quife traiéioit entre le Koy nbsp;nbsp;le duc de Bourgongne,fut rompue aumoyen

de la mort du duc de Guienne,i(y' commentées deux grans Princes tafehotent àfe tromper l'^ri l’autre.chapitre ix. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;palt;r.^^

Comment le duc de Bourgongne,y oyant qu’il ne pouuoitfefafir de Beauuais, deuant laquelle il auoit plantéfon camp fen alla deuant Rouen.chap.x nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;, pag.ioz

Comment le R oyfeit appoinélement auec le duc de Bretaigne,^ trefues auec le duc de Bourgono-ne: ô?

comment le comte defainéî-Paul efehappa pour lors yne machination faiFie contre luy par ces deux grans princes.chap.x). nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;p^g.

D igreßtonfort bien appropriée en ce lieu fur lafageffe du Koy^ du conneßable,auec bons auertiffe-mens pour ceux,qui font en authorité enuers leurs princes.chap.xq. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao- i o 8

DV OV.^TRIESME LI^RE

Comment le duc de Bourgon^ne/eßantfaiß de la duché de Gueldres, eut enuie d’entreprendre plus outreßir les^llemaignes,^comment il meitleße^e deuant la killedeNu^^chdp.]. pao-.wQ Comment ceux deht ~ville de Nu^ßurentßecourus pdr les ^llemdns^ nbsp;nbsp;par l’Empereur, contre le duc

de Bourgon^ne^^ des autres ennemis qu e le Koy luy ßußcitä.chäp.ij. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;päo-,11^

Comment le Koy print le chaßeau du Tronquoy^lesyillesde Mondidier^ Koye^i^ corbie fur le diitc

-ocr page 356-

deBourvongne^^comentilyoulut induirelEmpereur Federic afefdtfir des terres que lediSi duc tenait de l’Ent[gt;ire.chdlgt;Jij,

Comment le conneflable commença, a rentrer enßiJigt;icion, tant du coßeda rojgt; , que du duc de Bour-^on^ne.chaigt;.iitj. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag.i i g.

commentle Roy d’Angleterre yintfardeça^auec^rojje fgt;uijjc(nce,^ourfecourir leDucdeBourgon-gne contre le Boy.chdp.y. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pdg.tzQ

Di Idpeine,en Idquelle eßoit le conneßdble,^ comment il enuoyd lettres de crednce au Boy d'Angle-terreCy* du duc de Bourgongne,qui apres furent cduß deß mort.chap.y/t nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pdg.ïzz

Comment le Boy feit yeßir yn fimplef’.ruiteur d’yne cotte d'armes,duec yn eßndil,(^ l'enuoya parler du Roy d’Angleterre enfon oß^olt il eut tref bonne reßonfe.chap.yij. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag.izjç.

comment trefuc de neuf ans fut traidîét entre le Bcy deFrdnce nbsp;nbsp;le Boy dlAngleterreyionobßdnt les

empefchemens du connefableç^du duc de Bourgongne.chdp^yiij. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag.iz6

comment le Boy ftfeßoyer les Anglais dedans Amiens., nbsp;nbsp;comment place fut dßignee pour la yeuë

des deux Boys.chap.ix, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag.ijo

Comment les deux Boys s entreueirent,!^ iurerent la trefue par-duant trdi£iée,Cy comment ducuns e-ßimerent quelefainél ifprit defcenditfurla tente du Roy £ Angleterre, ers eßece de pigeon bldnc, chdp.x,

comment le conneßable taf choit de s'excufer enuers le Boy,apres la trefuefaiiie à 1’Anglais,comment fut aufifaille trfue de neuf ans entre le Roy Louis nbsp;nbsp;le duc de Bourgon^e.chdp.xj, pdg.ljô

comment la mort du conneßablefut de touspoinits iurée entre le Roy Csn le duc de Bourgongne,^» c?-ment,s'eßdnt retiré au pats du duc fut par le commandement d’iceluy, liuré au Boy,qui le feit mourir par iußice.chap.xq. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-,i.d^o

Digreßion fur la faulte que feit le duc de Bourgongne, liurant le conneßable au Roy, contrefa fureté, Cy* ce qui luy en peut eßre aduenu. chapitre xiij. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag, i

D V C r N QJ' I E S M E L I V B E.

Commet U duc de Bourgongnefaifant laguerre aux Suijfesfut chaffépar eux,à l'entrée des mon-taignes,pres Granfn.chap.j.

Comment apres la chajfe de Granfon,le Duc de Âîilan,le Roy René de Cecile,la duchefe de Sduoye,^^ autres,abandonnèrent l'alliance du ducdeBourgongne.chap,q. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag.j^^^

Cornent les Suijfs deffeirent enbataiüe le duc de Bourgongne,pres la yiBede Morat.chap.iii, pag.lji Comment apres la bataille de Morat,le duc de Bourgongne f faifit de laperfonne de Ma-dame de Sa-uoye,Cy' comrq^t elle en fut deliurée,ç^ renuoyèe enfn pais par le moyen du Roy,chap.iiij. pag.i

Comment le duc de Bourgongnefe tint quelques fepmaines commefolitaire, nbsp;nbsp;comment ce pendant le

duc de Lorraine recouurafayide de Nancy.chap.y.

Des grandes trahifns du comte de Campobache, Cy comment il empefha le duc de Bouro-onirne d'ouir yngentil-homme qui les luy youloit reueler, deuant qu'eßrependu,n e tint conte außi de l’ad-uertißement que luy en donna le Roy.chaf.yj. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;j jg

Comment le duc de Lorraine,accompaignéde bon nombre d'Allemas, yint loger afainél-Nicolaspedantic fege de Nancy ,Cy* comment le Roy de Portugal, qui eßoit enFrance,allayeoirle duc de Bourgongne,durant cefege.chap.yf nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-,s6t

Comment le duc d^ Bourgongne,n ayant youlu fuiure le bon confil de plufieurs defs gens,fut defcon-ft,amp;' tué en la bataille,que luy liura le duc de Lorraine,pres Nancy, chap.yiij.

Digreßion fur quelques bonnes moeurs duducdeBourgon^e,lt;!^furletemps quefamaifonduraent profperitè.chap.ix. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pâg.ï6^.

Comment le Royfut auerti de la derniere deffaiSle du duc de Bourgon^e, téy* comment il conduiftfs affaires,apres la mort dliceluy.chap.x.

Commentle Boy apres la mort du duc de Bourgongne,f fai fit d'Abbeuille,tly^dela rcfponf que luy feirent ceux d’Arras.chap.xff nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;^^f

Difcours,aucunement hors du propos principal, fur la ioye du Roy f yoyant deliuré de plufieurs ennemis ,gy* de la faute qu’il feit en la reduéiion des pais du duc de Bourgongne.chap.xif. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-,^ 70

Comment Han, Bohain,fùnél-Qwntin,Cy* Peronnefurentliurez^^^au Roy,^commentil^nuoia maißre Oliuier.fn barbier.pour cuider pratiquer ceux de Gand.chap.xiq,

comment maiflre Oliuier,barbier du Roy,n aiant pas bienfaitfon profit de ceux delà yidedeGand etrouua moien de mettre les o-ens-d'armes du Boy dedans Toumay.chao.xiiii nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;1,^0- i-fè

Des

-ocr page 357-

Des (tmbiijßideurs^queld damoißVede BourgönffiCyßlledufett duc Charles,enuoîa llu Roy,'^cdrh~ ment.par le moiert de monßeur des Cordes,la cité d'^rras,^ ks villes de Heßdin nbsp;nbsp;Boulonne,

la yide d’^rras meßne,furent mifes en Tobeifftnce du Boy.chap.xy. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pa^.i’yS

Comment les Gantoys,quiauoient yßurpe authoritépar defßis leur princejfè,lt;jHandfon perefut mort^ yindrent en ambajßtde yers le Boy,comme de par les trois Eßats de leurs pais.chap.xyj. pa^.l y 9 Comment ceux de G and,apres le retour de leurs ambajfàdeursfeirent mourir le chancelier Hu^onet, Cy* lefèivueur d^Hymbercourt,contre le youloir de leurprincefße:^ comment eux,^ autres Flamens furent defconßts deuant T ournay,^ le duc de Gueldres ,leur chß^,tue.chap.xyij. nbsp;nbsp;nbsp;pag.iiz

Difcours fur ce que les guerres nbsp;nbsp;diuifions font permifes de Dieu^ourle chafiment nbsp;nbsp;des princes,^

du peuple mauuais-.auecques plufieurs bonnes raifons nbsp;nbsp;exemples ,aduenues du temps de l’autheur^

pour l'endodlrinement des princes.chap.xyif nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag.i^é

W S IX I E S M B L IV RE

V omment la aucne ae aourgongnejut mtje entre les mains du Roy.chap.j, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag,\9^

Comment le Roy entretenoit les .Anglois, apres la mort de Charles, duc de Bourgon^e, aßn qu’ils ne rempefchaffnt en la conqueße des pais dudili duc.chap.ij. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag. 19 8

Comment le mariage de ma-damoi/elle de Bourgongne fut conclud nbsp;nbsp;accomply auec Rdaximilian^

duc d’.yIußriche,C^ depuis Empereur.chap.iif. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;palt;r.zo-z

Comment le Roy Louis,par la conduiéiede Charles d'.Amboife,fon lieutenant,regaignaplufieurs quot;Mlles de Bourgongne,que le prince d'Orengeauoit reuoltées contre le Roy.chap.iiq, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag.zoô

Comment lejeigneur d'.^rgenton,durant les guerres delà conqueße de Bourgongne fut enuoié à Florence,!!^ comment il receut l’hommage de la duché de Genes du duc de Milan, au nom du R oy.cha

pag.zlo

Du retour demofieur d'.^dlrgentond’Italie en France,^ delà tournée de Guinegate.chap.yj.pag.ziz Comment le Koy Louis,par yne maladie .perdit aucunement le fins nbsp;nbsp;nbsp;la parole, o-ueriffant ren-

cheant par diuerfisfois,comme ilfi maintenoit en fin chafieau du Plefis,lexjrours. chapitre,

pdg.tisi.

Comment le Royfeit yenir à Tours yn nommé le fain£i-homme de Calabre,penfant qu'il le deufiguérir,des chofes efiranges,quefaifiitlediél Roy, pour garder fin authorité durant fa maladie.cha-pitre,yiij. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag.zi9

Comment le mariage demonfteurle Daulphinfut conclud auec Marguerite de Flandres, cde amenée en Franceidont le Roy Edouard d'.yingleterre mourut de defplaifir. chapitre ix. pag.zzo

Comment leycoyfe maintenoit,tant enuersfis yoifins quenuersfes fubieéis, durant f^aladie, Cy* co-t ment onluy enuoyoit de diuers lieux,diuerfes chops pourfitguerifon.chap.x. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-.tz^

Comment le Roy Louis on^iefinefeit yenir yers luy Charles, fonßlei;^,peu auant fa mort, ^des com-mandemens (y* ordonnances quilfeit,tant à luy qu’à autres.chap.xj. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag, j

Comparaifon des maux cly* douleurs quefouffrit le Roy Louis,à ceux qu’il auoitfaitfiuffrir àplufieurs perfonnes’.auec cotinuation de ce quilfeit,C9'futfaiêl enuers luy,iufques à fa mort.chap.xii.pag.zz6 Difcoursfurlamiferedelayie des hommes principalement des princes,par l'exemple de ceux du temps de l’autheur,(^premièrement du Roy Louis.chap.xi f

I

DVEEPTIESME LIVRE.

Comment le duc Kené de Lorraine yint en France, demander la duché de Bar, ^la comté de Pro-uence,que le Roy Charles huiéÜefmetenoit,^ comment il faillit à entrer au Royaume de Naples,qu'il pretendoit fien,comme le Roy,quel droiéiy auoient tous deux.çhap.j. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;8

C omment le prince de Salerneyint en Trance,i!^ comment LudouicSforce,firnomméleMore nbsp;nbsp;luy

tafihoient à faire que le Tcoy menafiguerre au -^oy de Naples,iCygt; pour quelle caufe.chap.q. p\g.z.ii.o Commet le Roy Charles feit paix auec le Roy des romains,i^y* l‘.Arch^duc d'.^ußriche leur renuoiàt ma~dame Margueritte de Flandres,deuant que fairefin yoiage de Naples.chap.iq. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pag. z^^

Comment le Roy enuoia deuers les V enitiens,pour les pratiquer, deuant qu'entreprendrefon yoiao-e de

Naples,Cy nbsp;nbsp;préparatif s,quifeftirent pour iceluy.chdp.iiq. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pdg.Z2^.6

Comment le Roy Charles partit de Vienne en Daulphiné,pour conquérir Naples,en perfonne,^^ de ce quefeitfin armée de mer,fiubs la conduire de monfieur d’Or leans.chap.y.

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CommmthRoy fe refolut depäfpr outre yers Ka fles, ißant (neer er quot;^ß, à h /-cttßite nbsp;nbsp;2t:câié

Sforce,f^ comment meßirePhtli(gt;pe de Ccnimtnes Jut inuoyéen amlfjfcdeà Virnß delamcrt du duc de Milan,apres laquelle Ludouic fefeit duc ,au preiudice d'yn fix diccitj due.dapitre

Comment Pierre de Medecis meit quatre des principales forterejßes des Tlorertins entre les mams du lioy,C^ comment le Poy meit Pije,qui en eßoit Tyne en fa liberté.chapitre yß nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-.z^^,

cornent le Koy partit de la yille de Fife,pour aller à Florence,^ de lafuite^ ruine dePierredi Me^ dicis.chap.yiß nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pa^.^Sr

Comment le Poy feit fonentre'e à Florence,^par quelles autres yilles ilpaffa iufquesa Fome.chapi^ pa^.z'jy

Comment le Roy enuoyale Cardinal Petri~ad~Vincula dedans Hoßie,cly‘de ce que le Papefaifott^ Rome ce pendant,comment le Roy y entra, malgré tous fes ennemts.chap.x. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-.z6o

CommentleRoy^lphonfefeitcouronnerfinfil^i^Ferrand puis s'enfuit en Sicile^Cr- de lam'au-uaife yie qu‘auoit menéele yieil Ferrandfonpere,Cy^lty außtxhapitrexj. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-,i6z

• Comment apres que le ieune Ferrand fut couronné Riy de Naples, alla ajfeoir fon camp afainFl-Ger^ main ,pour reßßer contre la yenue du Roy,^^ de L’accord que le ^oy Charles feit aûec le Pape,eßat encor à Rome.chap.xß nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pae-.zèS

Comment le Roy partit de Rome, pour aller a Naples ; de ce qui aduint ce pendant cnplufturs centréet dudiél royaume deNaples,Cy'par quelles places ilpaßa iufquesa ladidîe yille de Naples.chapitre

Comment le Roy Charles fut couronnéRoy de Naplesides fautes qu il feit à l’^entretenement a'yn tel royaume, lt;ür comment yne entreprinfe, quije drejßoitpour luy contre le Turc,fut defcouuertepar les Venitiens.chap.xiiq.

^l^^ßl^^^^ttdifcours aucunement hors du propos principal ßir l'eßat nbsp;nbsp;^ouuernement delà/ei^neu-^

ne de Venije,Cy de ce qui y futfaiiî,durant i ambafade du fei^eur d .rdr^enton.chap.xy pa^.z'yï

D V HVICTIESME LIVRE.

De l’ordre prcuifion,qt!e le Koy meit au royaume de Naples, youlant retourneren France chalgt; pag.z^o

C omment le Royfe partit de Naples.repaya par Kome,dontle Pape s'enfuit à Oruiette,lt;amp; des predications dignes demtmoire,defrereHieronyme de Florence.chap.ij. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pav.zZl

Comment le Roy retint enfes mains la yille de Pqt, cy quelques autres places des Florentins ,pendant que monfieur ü Orleans d’yn autre coße,entra dedans Nouarreen la duché de Milan.chapitre

Comment le Rcy Charles pafßtpiufieurs dangereux pas de montai^pnes entre Pife,^ Sert^antyt^ comment la yille de Pontrtmefut brtféeparfes ./dlitmans,Cy comma le duc d Orleans feportoit à No-uarre cet imps pendant, chap.iiij. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-.z 8 y

Comment la^roffeartillerie du Roy paffa les monts.yjppennins,à l'aide des .ydUemans-.du danger^ùfut leMarefchalde Cie attecfonauant’gardt,Cy‘ comment le Riy arnua à Fornoue.chap.y .pao-.zS^

Delà tournée de Fornoueide la fuite des ennemis de France,corf,mentle comte de Petiüane, qui durant ce iour rompit la prtjon du Roy fett tant qu'il les r'ailia.chap.yj. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pao-.z^y

Comment lefeiÿoeur d ./Irgenton aialuyjcul parlimenter aux ennimis,^ comment le Roy paruint fain nbsp;nbsp;Jauj,ait^cfesgens,tufques en la yilled’.rdß.chap.yij. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;palt;r.^oo

Comment le Roy feit drefferrne armée demer.pourcuiderjecourirles chaßeauxde Naples ,amp;com-ment ils nenpeurent eflre fècourus.chap.yitj, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;p g

De la^randefamine nbsp;nbsp;peine ou tßoit le Duc d Orleans a Nouarre,auecfes trens,comment apres

plufieursdeliberations,on entenditafairepa'x,pourjauuer les aßit^e^t^.hap.ix. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;parr.'^oy

C omment le duc n Orleans fa compagnie jurent deliurett^^par appointement, de la dure calamité de Nouarre,ou ils efloientaßt^etc^, Cy- delà dtfeente dts Suijfis,pourfecourir le Roy mfieur d’Orléans.chap.x. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;.

Comment la paix fut conclue entre le Koy nbsp;nbsp;le duc ti’Orleans d'yn cofé,(y' les ennemis de fautre :

des conditions nbsp;nbsp;articles,qui furent contenues en ladiFle paix.chap.xj. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;J

Commentle noy reuoyalefeigneur d' .Argenton a Venife,pour les conditions de la paixdefquelles ils re-fuferent,lt;^ des tromperies du duc de Milan.chap.xq. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pn'r,'^ l y

Comment le Roy tßant retourné en F i ance,mat en oubli ceux qui eßoient demoure:!:^à Naples ,gt;ry% comment

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comment monseigneur le Ddiilphin mourut, dont leKoyamp; la Roÿne menèrent o-rdnddueil.cjjdpi-^ frexiij.

Comment les nouueües delà, perte du chi^edu de Naples yindrentau Royde la yendition des places des Florentins a dtuerfesgens : du traidié d’^tede en la P ouille, au grand dommage des Françoys^ de la mort du Roy Ferrand de Naples.chap,xiiij. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pa^.jzz

Comment quelques pratiques menées enfaueur du Roy par aucuns feigneurs d'Ftaliegant pour Naples^ que pour dechajjer le duc de MilanSdrentrompues^ par faute d’y enuoyer^tPy comment yne autre entreprinfencontre Genes,ne peut außi yenirabon ejfeél.chap.xy, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;pd?-.^z6

De quelques dijfen fions d'entre le Roy Charles zlP Ferrand de CafliUe,^ des ambaffideurs enuoyeo^de l’yn a l’autre pour les dppaifer,chap,xy}.

Difcours ftr les for tunes qui aduindrét 'a la maifon de Cafillè^au temps du feigneu r d'lA rgent on, chapitre,xyif, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;■

Dufomptueux edifce,que le Roy Charles commença a baßir,peu auant fa mort', du bon youlcir quil auoit de reformer l’£glifè,fes f nances fa iufice,ç^foy-mefne, nbsp;nbsp;comment il mourutfoubdaine-

ment fur ce bon propossenfin chaßeau d'.yFmboife.chdp.xyiii.

Comment lefainéi-hommefrere Hieronymefut bruße a Florencepar enuie quon eutfir luy, tant du coße'du Pape,quedeplufieHrs autres Florentins Veniticns.chap.xix.

Des obfeques (^funérailles du Roy charleshuiFliefine,(^ du couronnement du Roy Louis dou':icifme de ce nom finfucceffeur,auec les genealogies des Roys deFrance, iufques a iccluy.chdp,xx. pag.^ 40

Acheué d’imprimer par moy Claude ßruneual maiftre Imprimeur à Paris, le dix-neufiefine d’A-ouft,mil cinq cens quatre vingts.

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