Dit boek hoort bij de Collectie Van Buchell Huybert van Buchell (1513-1599)
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Öeographi et Itineratore#
Octavo n^ 155'
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-ocr page 9- -ocr page 10- -ocr page 11- -ocr page 12- -ocr page 13-voyage de quelques François en la Floride:amp; du inaflàcrc autant iniuftement que barbaremetexc-, cuté fur eux, par les Hefpagnols, l’an mil cinq cens foixante cinq.
P:AR C/ D E N r £ D /G E au vray par ceux lt;^ui s'e» retirèrent: amp;nbsp;maintenant reueuë(^ auf^mentee de nvuueau,P AK M. VR-BAIN CHÀWETON.
ENSEMBL E
NE REQJ/ESTE PRESEN-teeauRoy Charles neufiefme, en forme dc fiomplaintc , parles Emmes defies amp;nbsp;cnfans orphelins, parens amp;nbsp;amis de fes fuiets, qui * furent tuez audit pays de U Floride.
ESAIE XXVI.
ZJoici le Seigneur firrira tie ßn lieu, pur Vißter Cinit^uite' Jes habitons Je U terre : amp;nbsp;lors la terre reueleraßn ß^gy 0* ne couurira^lus ßs occis.
-ocr page 15-H 1 S»T o I R E D’V N
VOYAGE DE QyELQyES François en la FIoridc,qui y furent maflà-crez par les Hefpagnols.
^iM Hi^iagnnls n’ont fuiphtide droiefen la Floriilt )niJur Its autres fais tie l'indie Ocàtltntale , qu'ont les François-, quelque donation du Pape qu'lis allèguent. Q^He ration ilf m.t eue de majfatrer les François, en la Floride.
CHAP. I.
Vandi’ayaccouple ccftcpctl tcHiftoireauvcla précédente} voici les raifons que i’ay cucs.Prcmicrcmcnt elle contient prefquevn mefmefuiet quel’autrC}8c traitte d’vnfait auenu en l’vne de ces prouinecs Occidentales} dont parle noftrc Milanois- S ecódemét elle nous peut feruir pour fermer toute la bouche aux Hcf pagnols,amp; acheuer de leur öfter le beau maf quedezclc amp;dc religion,duquel ils couurct tous les aftes barbares , qu’ils ont exécutez en Indic. Car quan'donlcurdemandc} Mais venez-ça, Pourquoy aucz-vous exercé tant de cruautez fur ces pourcs Indies ? que vous ont-ils fait ? N’euft-i! pas mieux valu les a-voir par douccur,qucdclcs effaroucher par rudelfe? Ils ont incontinent ccftc répliqué en la bouche: Et qu’eufsics-vous volu que nous eufsions fait?!! falloir bien faire ainfi, ou fe laiffer mäger à ces Saunages, qui n’ont
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BRIEF DISCOVRS
la ce qu’ils allèguent pour donner quelque couleur aux carnages fangiants, qu’ils ont exécutez fur cespoures peuples Barbares.
Mais quel pretextefemblabic prendrôt-ils ici?Il n’eftpas ici queftiondes Caniba-lcs,ou de quelque autre nation fauuage, qui ait efeorebé des Hefpagnols tout vifs,amp; gril lez fur les charbons, ll eft queftion des Fr^n çois,tcnus-autrcffoispourvue des plusbu-maines nations du niondc(cÓbicn que pour leiourd’huy ils en ont beaucoup rabatu,à mon grand regret ) amp;nbsp;qui particulièrement ont toufiours fait bonne guerre aux Hefpagnols quand ils ont'cu auantage fur eux. Ce pendanty eut-il iamais Corribe ou Caniba le mangeur d’hommes plusacharnd fur quel que mifcrablc Hcfpagnol , que les Flefpa-gnols-ont cftéfarces pourcsgens ,dcfqucls la mémoire vit amp;nbsp;viura en celte Hiftoire?
Mais,ic vous prie ,cfcoutons vn peu ce qu’alléguer la delfusles Hefpagnols,de peur qu’il ne femble qu’ils foycnt deuenus beftcs fauuages ,{àns bonne raifon.Lcs François »» (d:fent-ils)fontvfurpateurs delà Floride,amp; », de toutes les coftes des Indes, où ils ont plâ „té les armes de France. Cartout ce pays-là „ eft noftre. Premièrement parce que nous l’a „ lions defeouuert amp;nbsp;occupé les premiers.Se-,, condement pourec que faSainétetc en lia „ fait donatio perpétuelle amp;nbsp;irreuocable aux „ Rois Catholiques pour eux amp;ponr les leurs, „ amp;nbsp;nous en auons dcbclîes bulles bien fi-
gnecs
-ocr page 17-ÙÏ LA FLORIDE. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;$
gnecs amp;nbsp;bicnfccllecs. Ticrccmentinonda- lt;lt;nbsp;uons culapcine d’y peupler amp;nbsp;d’acconimo- lt;« der le pays,après i’auoir conquis aux def- « pens denoftrefang:amp;mefsiçurs les Fran- «t Çois viendront ici rauimoftre bien amp;nbsp;no- « Are bien amp;nbsp;noftre peine ? nous les en garde- « rons bien. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;‘c
Itcrn,nc fait-on pas bich les maux que t« nous ont faits les Courfaifes François : amp;nbsp;lt;« Comme ils nous viennent brauer tous les lt;c ioursiufquennosiflcsdel’Hcfpagnole »de « Cuba,du Port-riche, voire iufquesfurla co « fte des Indes ? Après que nous auons bien lt;« fué amp;nbsp;trauaillé à tirer l’or des mines du Pc- u ruiSf que nous-nous en penfons retourner lt;« en noftre payspoury iouir du fruilt;ft de nos « labeurs:ilfaut rendre conte en chemin à ces lt;« maudits volleurs de Courfaircs, qui n’ont « autre peine que de branlcrfur mer en nous « Attendant.amp; ne font point de confcience de «s nous defeharger de tout l’or amp;nbsp;l’argent 'qui lt;« eft dans nos vaifleaux, fans porter non plus ‘« de refpeft au Roy Catholique, à qui nous '* le menons,qu’à vnfantofme de paille : ils en “ ont bon marché les mefehans, il ne leur cou “ fte pas tant qu’à nous. Se faut-il esbahir fi gt;* quelqucffois nous leur vendons bien cher « noftre marchandife, amp;nbsp;fi nousprenons no- “ ftrc reuenche quad nous la pouuons auoir? “ Outre cela,nosgcns qui firent cefte exe- « cution de la Floride, eftoyent bien aduerris “ que la plus part des François qui y eftoyent ‘« paffez, eftoyent Luthériens amp;nbsp;Huguenots, «
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» qui venoycnt là pour y drefler des Conucn-,, ticulcs à leur mode . amp;nbsp;faire la figue à tous 5» les Rois amp;nbsp;à tous les Princes de la terrejCom ,j me ie ne fay quels autres firent il y ha vingt JJ deux on vingt trois ans en la cofte du Bre-j, fil.Nous eufsies-vous pas eftimez de grand’s »beftes ,fi nouseufsions endure pulluler des 3j Hercficsau proprepaysgt;oùnousau6snouf-» mefmes plante la foy Chrefiienneauedapi-3, que amp;nbsp;la halcbardc? Pourquoy cft-cc, à vo-33 ftreaduis, que noßre Roy porte le titre de jj Catholique?N’cß cepas à fin qu’il défende 3gt; la foy Catholique contre les mefcreans,amp; jj qu’il le face Catholiquement, e’eß à dire à »gt; pied amp;nbsp;à chcual, la lance au poing amp;nbsp;le har-33 nois fur ledoSjS’ilcß befoin, amp;• parlemon-3j de vniuerfel? Seroit-cepas vnegrand’faute 3gt;s’ilfaifoitcela ailleurs, amp;nbsp;s’il laifioit aie fai-3gt; reçu vu pays que le Papcluy ha donc, amp;nbsp;luy 3» ha donne à condition d’y planter amp;nbsp;ampli-sgt; fier la foy Catholique?
33 Et pourtant que tels François fc donnent » garde d’y venir, s’ils font fages, amp;nbsp;qu’ils n’y 3, retournent iamais à telles enfeignes.Car au 3gt; tant qu’il yen viendra,autant il y endemeu-3, rera.Les Portugais ont dejnidre delà Fran 3, ce Antarâ;iquc(qu’on 3ppellc)tous IcsHc-gt;gt; retiques qui y efioyent. Les Caßillans (qui jj font aufsi bons C tholiques pourlc moins) 33 ne lairront pas vn Huguenot en toute la »3 Floride,ni en toute voßre belle France nou 33 uelle,s’ils pcuuent. Et quand ils n’en dcuro 33 yent iamais auoir autre profit gt;nbsp;au moins cf-perent
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percilt-ils que cela leur feruira de réfrigéra « tifpour modérer leur Purgatoire,voire ob- « tenir pleine indulgence amp;nbsp;abfolution de tât c* de mcfchancetez qu’ils ont commifes par « tout le pays des Iodes.Et font bien afleurez lt;c de l’auoirdcfaSainéleté, quivoudroit que lt;t tous les Huguenots fuffent exterminez du et monde, pource qu’ils ne font que luy tfou -..t blcrfon repos, amp;outre legrandfoing qu i! '« ha de toute l’eglife Catholique, luy croif-« fent d’autres foucis amp;nbsp;clTagrins,qui luy ren- «t uerfent tout l’cntendenacnt. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;lt;«
Voila le difeonrs amp;nbsp;la refpofe qu'en font les Hcfpagnols.En quoy ilfcmble bien que fl leur cauie n’eft fondée fur raifon amp;nbsp;fur c-quitc,au moins l’cft elle fur la force : mais quant au droit,qu’ils pretendet en ces pays là,ic croy qu’ils n’en ont gueres dauantage que ce que leur efpcc leuren dónc.Car quât à cefte fuppofee donnation du Pape Alexan dre fixiefmc,par laquelle il fait le Roy d’Hcf pagne feigneur amp;nbsp;pofleffeur abfolu de toutes les Iflcs amp;nbsp;terres fermes defeouuertes amp;nbsp;à defeouurir, aucc tous les bourgs, cha-fteaux,villesamp; iurifdiftions de l’Indie Occidentale: n’eft-ce pas vne iniuftice toutd notoire ? premièrement de donner ce qui n'eft pas ficn:fecondcmcnt d’aliéner vne cho felâns le confentement de celui à qui elle eft,voire mefme contre fa volonté? Et ft celui qui donne ainfi ,eftiniufte, celui qui le prend, vaut-il mieux ? Car c’eft bien chofe tonte certaine que les Indiens n’ont iamais
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confenti à telle donation:amp; quand les Hcf-pagnols la leur ont aUegnee, ou ils s’en font mocquez : ou s’ils ont confenti de leur faire part de leurs terres, c’ha elle à la charge que ils felairrôt tuer premièrement, amp;nbsp;puis enterrer fouslefable, fi bô leur fcmblnit:pour enprendrepoflefsion.A quel titre donceft-% • cc,ou que le Pape ha donne ces pays la, ou que l’Hcfpagnol les ha pris?
11 y ha bien dauatage.Car pofe le cas que ledroit le plus liquide amp;nbsp;le plus iufte titre que l’Hcfpagnol aye fur ces pays-la,foit fon de fur celle pretédue donation du Pape : ne perd-il pas ce droit la, s’il n'accomplit de poind en poind la côdition qui y eft appo fcc?LePapc ha donné ces pays la au Roy Catholique à la charge d’y faire prefeher l’Euangile, amp;nbsp;réduire ces peuples à l’obcif-fancc de lefus Chrift-Cependant en toute lalongucuramp;la largeur des Indes ( qui eft de trois ou de quatre mille lieues pour le moins) les Hcfpagno!s feroyent bien cm-pefehez de monftrer vn Indien qui cognoif-fc Icfus Chrift,ouvn Hefpagnol qui fanon ce purement amp;nbsp;comme il doit eftre annon-cé.Et fl dauenture il y en ha qui ofent dire qu’ils en facent le ur dcuoir,icles renuoye-rayaBenzoni amp;aiixautres quiontefteen ce pays-la, amp;nbsp;pcuuent rendre tefnioignagc de ce qui cncft.i'uisdonc qu’ils ne mettent pas en effed la condition, moyennant laquelle ce pays-la leur cfl donné :il eft tout certain que s’ils y ont quelque droit, ils le perdent
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pefdeRt:amp; fi feroyent bien esbahis qui leur mondreroit que tant s’en faut qu’ils acconi pliflent ce quils ont promis amp;nbsp;à quoy ils font tenus,s’ils en vueulét iouir : qu’ils font le contraire.
Paffons maintenant aux autres titres que ils produifent.Ils allèguent que ce font eux quiontdefeouuert les premiers ce pays-la: , ^.^ amp;nbsp;que ce qui n’eftaperfonnepayaifon na- ^^^^j jj turellc appartient à celui qui l’occupe le pre ^^.„r, rnier. Q^ât au premier poinâ;,où ils difent JamJ-uct qu’ils font les premiers defeouurans de ce j. pays la, ils l’ont bien voulu faire accroire iufqu’ici, amp;nbsp;en öfter l’honneur à qui il appartenait , amp;nbsp;pour ce faire quelques vus de leurs Hiftoriens n’ont point efpargné les menfonges amp;nbsp;les contes faits à plaifir. Mais qui leur demandera en confcience ce qui en eft,ils n’oferoyct nier que ce ne foit vn Chri ftophlc ColombGcneuois,qui s’auifa le pre mier d aller cercherlcs Ifles amp;nbsp;vne grande partie delà coftc Occidctalc de la terre ferme dcslndcs.ltcm vn Amène Vefpure Florentin,qui defeouurit la cofte du Brcûl, aux
' defpens du roy de Portugal. Vn Sebaftien Gabotto Vénitien, qui defeouurit depuis lacofte desMolijes iufqu’àla Floride,aux defpens de Henry feptieime roy d’Angleterre. Les FIcfpagnolsy font depuis allez à l’en ui l’vn de l’autre. Mais c’ha cfté grand-mer-ci à ceux qui leur auoyent rompu la glace. '
Q^ant au fécond poinél, où ils allèguent que ce qui ij’a point de maiftre, eft au pre;
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BRIEF DISCOVRS
niier qui Ic prend,comme les oyfeaux,lcsbe ftesfauuages, les Iflesnccs de quelque dei-bordement d’eaux, amp;r autres telles ebofes communesde le confefle. Mais la queftion eft,fi ces prouinccs la n’auoyent point de maiftre, quand les Hcfpagnols les occupèrent : amp;nbsp;ft e’eftpratiquer 1 Equité naturelle, ou le droid des gens, que d’exterminer les habitans naturels dvn pays pour s’en rendre maiftre, ou les afluiertir à vne feruitude pire cent fois que la mort : comme les Hef-pagnols ont fait amp;nbsp;font encore en Indic:tef moin leurs Hiftoires mefmes. Il ne faut dóe pas qu’ils allèguent pour eux le droid des gens,vcû qu’ils l’ont viole mille amp;millc fois, ayans opprime tyranniquement comme ennemis, ceux qui lesauoycnt rcccusamp; caref-fez en amis.
Il nerefte plus qu’vu titre dont ils fc puif-fent feruir,encor qu’il ne vaille gucres.C’eft ^iTtûul 1 n^æ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;P’'’® P^’’routechan
^dij. g^ ‘^c maiftre, amp;nbsp;appartient à celui qui eft vi omit, dorieux. lieft vray:mais il faut prefuppofer t^JJ^f-ld. ccqu’ilsncdifcntpas: àfauoirque tellcvi-doire amp;nbsp;telle conquefte ne peut eftre ne iu ftc ne légitime,fi premièrement la guerre ne l’eft.Car quiconque enuahit ou poUcdc autrement, eftauffi iniuftefeigneur de ce qu’il ba conquis, qu’vn brigand eft de la bourfe * d’vn marchand,à qui il hacoppé lagorgc.Et fur ce ic leur demanderoy volontiers, quelle raifoii amp;nbsp;quel titre ils ont eu de faire la guer çe auxlndiens,de les prendre pour efclaucs,
amp; COH
-ocr page 23-DE LA* FLORIDE. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;n
amp; confequemment d’occupcrleurpays.Car quât à moy ie n’en fay point,finon que d’a-uéturc ils vucillent dire, que c’eft par droift de bonne prife:comme qui prendroit vu fanglicrou vn cerf à la chafle, il eft à luy : pouree que tous animaux fauuages, qui vi~ uent en l’air,ou en terre,naturellement font communs.amp;deuicnent propres de celui qui les empoigne le premier.Ainfi,à leur cote,il ne faut point mettre ces Indiens au régdes bornes, mais entre les beftcs brutes. Et de faiâ:,ils leur ont bien monftre qu’ils les tc-noyent en ce reng-la:quand ils s’en font fer uis amp;nbsp;s’en feruent, comme vous feries d’vn Afne,ou d’vn chenal de loage : encore qu’ils les ayent f^it baptifer.Touteffois qui ferait difputer vn de ces poures barbares Indiens contre vn Hcfpagnol, (comme fait le pourceau Coryllus contre VlyfTes dans Plutarque) ie croy qu’il luy fcroit cofeHer, que les Hefpagnols qui lesdominct, tienêt plus de la befte qu’eux. Et pour verifier ce poinéf-la,il ne faut que lire ce qu’en eferit Benzoni au troificfmc liurc de fon Hiftoire.-làoii les ch/t^'^îi Indien's,fans auoir eftudie en Dialeâiquç, prouuent pertinenment amp;nbsp;categoriquemet que les Hefpagnols,qui rauagentleur pays» font plus dangereux que les belles fauua-ges,plus furieux que les vens, plus effroyables qucn’cftlefcu, ni les eaux, ni que tout ce qui eft de plus violet amp;nbsp;dcfrciglé au mon de. Anffilcs vnslcs appcllct Efeume demer: les autres les nomment du nom des plus fu-2^
-ocr page 24-11 nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;BRIEF DlSCOVRS
ncufcs belles,amp;.vivantes de proye qu’ils a-yent en lenrpays. H y en ha incfm^s qui les appellent 7«ir4, comme quidiroit,Mon-ficurlc Diable, lieft vray quee’eft parhon-c - nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;”^’-’'’CP^^^^ 4”^ ‘-^ ^ ‘^'^^ cftleur Dieuj mais
i‘‘cdcbab ^^^^^y ’^^ qu’ils rencoi trcnt mieux qu’ils ne icM jÿ^penfent, pource quefcomeoit l’vn de leurs '’0 l'ruilt propres Hiftoriens) ee nom-lacóuientfort bien à quelques vus. Caril cftalic des Hef-«pagnolsen ce pays-la, dit.il, kfqutls ay’fins ’, misleür côlacncc,amp; toute crainte de Dieu 5’ amp;nbsp;des homes,en arriéré, y ont fait des adcs, j, qui n’eftoyent point ades d’hommes, mais 3gt; de dragons amp;nbsp;d’infidèles. Et fans auoirref-3, ped à humanité quelconque, ont eftécau-gt;, fc que beaucoup d’Indiês, quifefuffent peu 3, conuertir amp;nbsp;eftre fauuez, fe font mifcrable-5, ment perdus amp;ddfaits pardiuers genres de 3, mort. Encore que ces pourcsgcns-13 ne fc 3,fulfcnt iamaisréduits, tant y ha qu’en les •, lai fiant viure,ils pounoyent eftrevtiles pour 5,lcfcruiecdcvoftrc maiefte (cela s’ad reffe à „ l’Empereur Charles cinquiefine ) amp;nbsp;pour le s.füulagemcnt mefme des Chreftiens : amp;nbsp;plu-5gt;fieurs endroits delà terre ferme neferoyent 3,pas entièrement dcfpcuplez amp;nbsp;deferts. com „me on les voit auiourd’huy.Cependât ceux „qui font caufe de ce dclgaft, nomment ce 3,paysainfi delhabité, Le pays conquis amp;nbsp;pacifié. Voila ec qu’en dit vn Chroniqueur de }fefpagnc,qui condamne par ce moyen tou te la violence dont ils ont vie pour fc rendre maiftres abfolus du paysiqu’ils s'en prc-
nent
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lient à luy s’ils veulent.
Mais lailTans apart ces Indicnsgt;pobrve-niraufuict que nous traittons ici: puifque les Hefpagnols n’ont autre titre en ces terres la que le droit d’occupation amp;nbsp;deforce: pofe le cas que ce titre foit rcccuablc;quel le occafion ont il s eu de s’attacher fi furicu fement aux François, comme nous verrons tantoft? Car fi vn pays deftituc d’habitas cft à celui qui l’occupe le premiergt; les François donc ont autant de droii^qu’eiix en la Floridcamp; autres coftes de ce Côtinent, où IcsHcfpagnols n’ont cncorebafti niforts ni villes. Mais les Hcfpagnols l’ont defeouuer-teles prcmiers.Ielenie.Carilcftbic certain que ^cbalujc Gabotto Pilote du Roy d’Angleterre la dccouuritPan mille quatre cens ^^ rionante amp;nbsp;fix ,feizc ans pour le moins auât que iamais Hcfpagnol en euft eu la veuë. Mais poufé le casqu’ainfi foit: s’enfuit-il: LesHcfpagnols ontnauiguc le longd’vne cofte : elle cft done à eux. Comme fi Dieu n’auoit fait la mer amp;nbsp;la terre que pour mef-ficurs IcsHcfpagnols amp;nbsp;les Portugais, qui les empefehet au (si tant qu’ils peuucnt que François n’aillent au Brcfil, ou à la Guinee, ou enl’Iflc de Suncatra,ou en d’autres lieux où ils trafiquent. Ne voila pasvn mcrueil-leux gouffre d’auariceamp; d’ambition en ces gens ici, de vouloir occuper mille foiî plus de pays qu’il ne leur en faut, amp;nbsp;qu'ils n’en pcuuct peupler? N’eft-cepasvneenuiefem blable à celle du Chien d’Efope? Ilsncpeu-
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plent pas en la Floridegt; ils ont alTcs d’autres lieux quifont défia peuplez amp;nbsp;ace'ômodez, amp;nbsp;fl ne vuculêt pas foutfrir que d’autres y peuplent.Si le capitaine Ribaut amp;nbsp;les François . qui Rirent là,cufrcnt prins terre en l’Hcipa-gnollcou en quelque cofte delà terre ferme des Indes, qui euft efte adudlement pofle-dec par le Roy d Hefpagne, amp;nbsp;habitée par les Hcfpagnols.amp; eulfent voulu s’habiter là inaugrccux’ils enflent eu quelqueraifon da les empcfcher,cc femblc.Mais voila vn grâd paysqui pourroit nourrir quatre fois plus * d’habitans qu’il n’y ha permettez au moins (mcfficurslcs Hefpagnols}quc les François ayent vos refles,donnez leur en vn petit coing,amp; fouffrez qu’ils le eultiuent. Nous n’en ferons rien. Aymez-vous mieux que ce
gt; pays-là demeure en friche, amp;nbsp;que les Barbares pourriflent en leur ignorance, pluftoft que d’apprendre à cognoilfrc Dieu , amp;nbsp;àvi-urc en quelque ciuilitc ? Ouy : nous le voulons bié ainfi. Mais puifquc vous n’y demen rcz pas, au moins fouffrez que d’autres y de-incurët.Nous y demciirerôs, s’il nous plaift. car elle cft noflrc : mais quant à vous,dóncz vous garde d’y mettre le picd:011 bic fi vous l’y mettez, faites quand amp;nbsp;quand vne fofle pour vous ietter dedans. Mais quel droiél y allez-vous plus que nous? Du plomb amp;du fcr:Lc bras amp;• l’cfpcc.Vous ne faunes avoir autre chofe de ces furieufesgés-ici. Et pour tantie fuis d’auis, que quad il reprendra cn-uic à nos François d’yjillcr, qu’ilsn’oublict pas
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lî
pas d’y porter leur droift Canon quand amp;nbsp;eux,fl bien monté amp;nbsp;braqué, qu’il n’y manque ricn:amp; de parler fi gros à ces gens, qu’ils leur facent entendre,
^^ teinte ce§le te^re eß comune aux vaitlau/f Corne aux poißofgltjfans les capaenes des eaux, £t les plaines de l’air font hl^es aux eifeaux. Mais il y ha encore vn traift notable, que ils gardent pourlabonncbouchc,amp;duqucl ils fc feruent non tant pour exeufer ce maf-facrc,quc pour s’en glorifier comme d’vnfa-erifice fait à Dicu.Ha,difcnt-ils, s’ils euffent efté gentilfhommes amp;nbsp;fonldars François, de mefme religion que nous. penfez-vous que nous y cuffions procédé fi rudement. Non non: nous-nous fuflions contentez de leur öfter le meilleur amp;nbsp;le plus bcau,felonla cou ftumcdcla guerre, amp;nbsp;les renuoycriolicmét en France auec vn beau bafton blanc en la main:bricf de leur faire côme ils nous fonl:. Nous auons aftezefprouue'lacourtoifiedcs François,amp; eux la noftre,à Pauic, à Ccrizo-les. amp;nbsp;en d’autres bons lieux où nous auons eu à demefler cnfemblc.Nous fanons bien quec’eft de faite bonne guerre, amp;nbsp;où il la faut fairc.Mais de nous amener desHugue-^” nots auec leurs femmes amp;nbsp;leurs enfans,pour peupler de la couuee en ce pays que nous a-uons acquis à la Cbreftienté : amp;nbsp;q ui eft-Ce qui feroit fi fol de rendurer?Et puis nous a-uionslc mot d’vn certain Cardinal,pour de pefeber tout cela'aaffi bien fa Saindete vou droit qu’il n’en reftat pas la queue d’vn ni
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en France, ni ailleurs.Äinfi donques tant s’en faut que nous penfions auoir elpandn le fang innocent, que nous croyons auoir fait vn œuure fainâ: amp;nbsp;méritoire, d’auoir prefte nos mains aü bon vouloir de fa fain-ttfté, pour extirper fcs ennemis capitaux: comme eftansProteclcurs del’Egli/c militante, Chcualicrs du faind Efprit, amp;nbsp;Mini-ftres de la fainôteamp; facree Inquifition de Hefpagne.
Voila de grandes raifons,amp; bien pertinentes, ce femblc. Mais ie leur demanderoy volontiers, fi ceux qu’ils malfacrcrcnt en la Floride n’eftoyent pas homme comme eux? Ceft mon ('diront-ils)ils eftoyét Homes, amp;nbsp;fi y auoit des femmes auec. Adiouftez-y encore, Et des petisenfans. Après ie leur de-maderay, Si ces hommes, ces femmes, amp;nbsp;ces petisenfans n’eftoyentpas Chreftiens? Ils s’arrefteront vn peu là auant que de rcfpon-dre : touteffoisie croy qu’ils ne diront pas quenon.Car chacun fait bien que ceux que on appelle Fluguenots en France, difent la Patenoftre, amp;nbsp;qu’ils croycntamp; confeflent legrand amp;nbsp;le petit Credo tout da long:amp; qu’ils font baptifez au nom du PcrcduFils amp;nbsp;du fainâ: Efprit.Or fus, c’eft doc vnc cho fc toute claire que ces gens-la n’eftoyent ni 1 urcs, ni Itiifs, ni Payens,mais qu’ils eftoy-ent Chreftiens. Il cft vray (ce diront-ils) ils eftoyet voircmet Clircftiens, mais deuenus Herctiques. Orbien,qu’ainfi foit,ils cftoy-ent donc Homes, Chreftiés, amp;nbsp;Hérétiques.
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Quand ils m’auront accorde tout ccla,ic les pricray de médite,S’il yha qucIqucLoy qui permette de tuer les hommes, auât que de les auoir ouis, amp;nbsp;auant que d’auoir fait leur procès,quelques toulpablcs qu’ils fern blent eftrc?Itcmie leur demanderay, s'ily ha quelque Loy qui permette à vn Chreftié de maflacrer vn Chrcfticn,mcfmcdc fang froid,fans que l’autrcl’ait ofFenfePLadoôri ncamp; la vie de nollrc feigneur Icfus Chrift chante bien tout le contraire. Car commet pcrmettroit il d’aflaillirlcs innocens, puis qu’il commande exprefle'ment de pardonnera ceux qui nous offenfent, amp;nbsp;luy mefme ha prié pour fes ennemis mortels ? Q^and tous ces poinéls-la feront vuidez, ic vicn-dray au detnier, amp;nbsp;leurferay vnc queftion: A fauoir mon fi vn Chreftien, qu’on prétend eftredeuenu hérétique,doit dire maffacré fans cognoilfancc de C3ufc:amp; où font les Loix ou les Canons qui permettent cela. lI eft bien certain, que les Ordonnances des cod./A,,. Empereurs comandent que IcsHcretiqucs H.^dcHt foyent punis: mais elles ne donent pas liccn gt;'‘^-cgt;‘-^‘t ce à quelques bouchicrs ou à des fouldars, quot;'^'’' d’enfaire l’execution,auant que les luges en aycnt cognu. Auffi ne fut-ce iamais cho-fe pratiquée en Chreftiente pendant qu’elle eft demeurée en l’obciflancc de Vérité, fc’eftà dircplus de fix cens ans durant depuis l’aduenement de noftre feigneur) de condamner amp;nbsp;punir vn Hérétique,auât que d’eftre examiné par quelques bós Euefques,
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ouyamp;conuaincu dcuantdes luges compc-tcns,fuyuant les Conftitutions Iraperiales.
Ic demande main'tenant, fi ceux que les Hcfpagnols ontmaflaercen la Floride, fous vnfaux donner à entendre qu’ils efloyent Hcretiques,ont iamais cfté conuaincus d’he rcfic,amp; où,amp; par qui, amp;nbsp;commcnt?Ha com ment,dira quelque TnquiGreur,n’cftoycnt ils pas Luthériens amp;Hngucnots?Soit. S’en fuit-il pour cela qu’ils fuflent hérétiques? Ce mot d’Huguenot n’eft autre choL qu’vn f '.’■••,.’ fobriquet vulgaire,qui n’emporte,ni erreur cnlanjy,ni foubfon de crime , ni tachelt; de (^ ■lt; confcicnçc, ni lefion de bonne renommée: mais eüre Hérétique c’eft bien autre chofe, amp;nbsp;croy qUe la plus part de ceux qui les condamnent, feroyent bien empefehez de dire que c’eft.
Là dclTus les Hcfpagnols amp;nbsp;leurs fcmbla bics qui ne vuclent pas tant difputer,coup-pent broche.Et n’eft-cc pas affeZidifent ils, que les Papes , les Conciles, amp;; les vniuerfi-tez dcLouuain amp;nbsp;de Sorbonne ont con-damnécefte nouuellcRcligion , comme erronée amp;nbsp;hcretique? qu’en faut-il tant difpu ter?Il eft vrayimais clt;?ux qui l’ont ainfi eon-damnee, ont failli aux principaux points, fans Icfqucls ils n’en pouuoyent bien iuger. Car quand ils font entrez dans leur Conclu ne pous decider de cefte matière,ils y ont ad mis ceux qui ne s’y deuoyent point trouucr: amp;nbsp;en ont exclus ceux qui y deuoyent eftre. Et qui font ceux qui y deuoyent eftre? l’Ef-
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prit cicDicu,rinuocation dcfon nom:Bônc confcicnce.Ceux de partie adntrfcjou pour Icmoins leurs députez, poureftre ouis paifi blcmentcn leurs defenfes. Ceux-là ni eftâs pasjln’cft pofliblcde bien iuger. Car qui ert le luge qui pourra prononcer vne bonne fentencc,s’il ne voit qucl’vncdes parties amp;nbsp;condamner l’autre auant que de l’ouïr? Il eft autant necefiaire à vn bon luge d’ouir toutes les deux particsjconime d’auoir deux oreilles.
Voila donc ceux qui ydeueyent eftre, amp;nbsp;qui n’y ont pas efte : parlons maintenant de ceux qui y ont efté, amp;nbsp;qui n’y deuoyent pas eftre. 11 eft certain que ceux quis’alfcm-blcntpour conférer de la Religion •• voire d* affaires qui concernent {implement la fo-cieté des hommes, doyuent élire libres, entant qu’en eux eft, de toutes les mefehantes affeéfionsquiempefehent devoir la Vérité, amp;nbsp;encore plus de la confclfcr: côme font Ignorance,Malice,Hypocri{ie,Orgueil, En uie,Auaricc, le ventre, defird’obeirpluftoft aux hommes qu’à Dieu , amp;nbsp;autres telles pc-ftes qui corrompent Iciugcment des hom-mes.Tout cela dcuoit demeurer dehors :ce pendant toutes ces nTxiditcs pafftons - la, amp;nbsp;autres, qui nevalcnt pas mieux, entrent ordinairement dans les Conclaucs de ces Vcncrablcs,qui condamnent fi legerement cefte Religion, Scs’affeyent quand amp;nbsp;eux. Neft-cc pas bien mal comenee à eux d’y admettre ce qui doit eftre exclus, amp;nbsp;de chafler
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dehors cc qui doit auoirli première voix en ChapirrePeommeG vn licutenan t criminel faifoit venirdâs fon parquet dix ou douze brigans, poiirconfcrer amp;nbsp;iuger de leur procès: amp;nbsp;en refufoit l’entrée à fes Aflef-feurs ^ ConfeiHcrs, e u aux vefues de ceux qui auroyent eu la gorge coppce.
Voila donc défia vue lourde faute qu’ils font en entrant dans leurs Condaues: mais ils font bien encore pis quand ils y font. C’eft à faire à vn bon luge,de vifter diligem ment toutes les pieces d’vn procès» auant qu’en donner fa fentcnce:Mais ceux ci font tout lcrebours : ils prononcent la fentencc, auant que d’entendre bien lacaufedont il cil queftion:ou bien s'il l’entendent,amp; font fcmb1ant d’en viftcrquclqucs pieces,ils ou blicnt la principale. La principale piece du procès, qui eft entre le Huguenots amp;nbsp;entre ceux qui les appcllët Hcrctiques,amp;laqucllc feule le peut faire gagner ou perdre, c’eft la Parole de Dieu.C’eft celle-là, felon laquelle les hommes en deuroyent iuger, ou pluftoft fouferireau droid luge,auquel fcul il appar tict d’en propremét determiner,amp; qui ha de elaré fa volonté amp;nbsp;fon Areft en icelle. Mais quad au lieu de ccfteParole-la, qui dcuroit reiglcrtous nos lugemés,Ion viendra fuppo le r l’Autorité d’vn home,la prefeription du tops, la vieilkfle de l’erreur amp;nbsp;de la couftu-me, que peut-on attendre de bon de cela?
Aufii ncfaut-il pas cfpercr, que fi ces Mcf ficursncfont rien qui vaille quand ils entrent
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trenten leurs Concilcs,r*c quand ils y font qu’ils facent mieux quand ils en fortét. Car après qu’ils ont formé leurs Décrets amp;nbsp;de-' cifionsmagiftralcs,fans ouir partie ,fans co gnoiftre de la caufe, il n’eft queftion que de lesfaire exécuter aucc toute rigucuriamp; d’y employer mefnves le glaiiie temporel fans difcretiori.Dc forte qu’il y ha grand danger, que telles gens ne foyct du nombre de ceux dont parle le ProphercîMalediftion fur les iert.ii-i. Pafteurs qui deftruifent amp;nbsp;diffipent le be- “ ftail de ma pafturc,ditle Seigneur,amp;e. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;‘‘
Mais ienem’apperçoy pas que fans y pen “ fer i’eften celle matière plus auant, qu ’à l’a-uenture le fuict le requiert. Et pourtant ie côclurray ici,que quand il eft queftion de li côfcienccamp;de la vie des bornes,il y faut peu fcrplus de trois fois: amp;nbsp;nes’auâcer pas de iu ger d’vue matière fans l’entendre, ni de con damncries homes fans lcsouir:moinsde(gai ncrlc glaiuc, ou Ie mettre entre les mains de quelques gens furieux, pour en faire des executions,nô feulement indignes de Chre-ftiens,mais de tous hommes capables de fens amp;nbsp;de raifon,auât qu’il apparoilTe du crime.El fur tout quand il eft queftion du fait de la Religion : où pluftoft que d’en venir a ces executions fanguinaircs,qui fentent leur Goth amp;nbsp;leur Vandelà pleinegorgefeomme celle dont il eft traitté en ce difeours) il vau droit mieux luyurc le confeil du Dofteur Gamaliel,;amp; fuipendrefon iugement pour va temps : ou l’exemple du boa Roy Louis
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douzicfmc,qui nc voulut procéder par voyc d’execution cotre ceux de Cabricres amp;nbsp;Mc-rindol, auant que de s tftre informe de leur vie amp;doftrinc,cóbien qu’il fuft affez impor tune par les Euefques amp;nbsp;Cardinaux de fon téps.Et quad il eut entendu corne ils fc gou uernoyct,Ôr eSme ils prioyent Dieu,rat s’en fallut qu’il les condânaft corne Hérétiques, corne tout le monde les condânoit à crédit: ains dit qu’il croyoit que lefdits de Cabric-rcs ScMcrindol cHoyent gés de bien. Tou-teffois il n’eftoit Lutberien ni Huguenot. Venons maintenant à noRre Hiftoirc.
^Par qiù la FloriJe fut premièrement licflouncrte ,ü‘gt;'»nigt;nee ainji. Les foya^es de lean Pente de lean , de Ferdinand Set le,amp; de quelques Moines {/ejft^nohieu icelle-CH A P. II.
bô de fauoir quel pays c’eft amp;nbsp;qfutle premier qui le defeou urit.il faut doc noter que la floride ell vnc cofte , ou pluftoft vnelôgue pointe de terre de cegrâd Côtinct de rindicOccidétale,du cofté qu’il fc courbe vers le Nortlnlaqucllc s’eftend comme vnc manche,amp; fc iette enui-ron cent lieues en mer dciicrs Midi: amp;nbsp;enha
cinq uate de large. Elle ell à plus de fix cens lieues de la vraye-croix,port dcIaNouuclle Hefpagnc,du cofté du Ponct, deuers le Midi
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di elle lia l’Iflc de Cuba , qui n’en eft qu'à vingt cinq lieues:délit rs le Leuât eüceften-uoilînce des Iflcsdc Bahanaamp;dcs Lucaies, ouLutoifes,qu’on appelle.La pointe de cel le terre demeure parles vingteinq decrezau deçà de l’equinoctial, tirant vers le Pole Ar ftiqucj amp;nbsp;le va eftertdant amp;nbsp;cd irgiltint peu à peu versieNorthueft.Près decellepointc ou de Cecap.il y ha force BalTcs, amp;nbsp;force petites Iflcs, qu’on appelle les ides des Martyrs,du code du Leuant.
Qi^ât àcclui qui la defeouurît le pfemicr, ^‘quot;‘J»' ^a Franeilque Lopez de Gomara, Hidoricn ^^'’^‘^^f Hefpngnol.cn donne l’honneur à vn Hefpa ^'7/j*/-gnol,nommé lean Ponce de Léon: amp;nbsp;le fait couuertt-pour verifier vne maxime qu’il tient pour ^'ß- g‘n-indubitable, amp;nbsp;Cependant cd fiude. A Ç^. hf-^'lt;^‘f’ noir que toutes les Indes ont ede defcou-uertes par les Hefpagnols, excepté ce qui qui fut troué parChridophlc Colomb.Car fuyiiantccquc i’cn av difeouru au premier ' chapit.c’ed bien chofe afTeuree que ce fut vri Pilote Vcnitien qui la dcfcouiirit ban 149(5. ainfi cornel’attede vn Gcntilhômc italien, grâd Philofophe amp;nbsp;Mathématicien, qui l’a-uoit ouy de fa propre bouche, amp;nbsp;y en auoit encore afles devinants deceux qui edoyét allez aucc luy en ce voyage,qui l’eu fient peu defmentir,s’ilcudedé autrement. Voici les nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;‘^' propresmots de ceGentiihomme, qu’il dit nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;J a quelques leigncurs de Venue lur le pro- l'Ej^utrit posées voyages de l’Efpiceric.
Ne fauezYOus poït,dit-il,à ce propos d’aller ’* BB.iiij,
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J, trouucr I’lndic Orientale par le vent de ,, Northueft, ceqfitvn.de voftre Cite de Vc-j, nifc,qui eft fi expert an fiiit de la nauigation „ amp;delaCofmograpliic,qu’i! n’ha point pour „Ie iourd’huy en Hefpagnc fon pareil. Auf-„ fi fa fuffifance l’ha tellement auance', quele „ Roy luy ha donne la fupcrintendence de „ tousles Pilotes quinauigent en I’lndic Oc-^ cidcntalc;dc forte qu’ils nepeuuenty aller, „ni fc meflerde ceft art-la fans fa licence. A „raifon dequoy ilsl’appcllcnt Legrand Pilot „ te. C’eft lefeigneur Sebaftien Gaboto, que „ ie fu voirily ha quelques années, quei’eftoy „ à Seuille : amp;lc trouuay perfonnage fort ac-„cort amp;de bonnegracc. Il me fit la plus grâd „carefte du monde , amp;mc monftra pluficurs „ fingularitez qu’il auoit : amp;nbsp;entre autres vnc „grande Mappemonde,où eftoient marquees „amp; eferites toutes les nauigations particu-„ liercs tardes Portugais que des Caftcllains. „ Et meconta, que fon pere eftât parti de Ve „nife, s’cftoitalle teniren Angleterre, pour „y faire train de marchandife, amp;nbsp;qu’il l’auoit „ mené quand amp;foyiufqu’à Londres, amp;nbsp;qu’il „cftoitlors encor bien icuneitoutcftois non „ pas tant, qu’il n’euft défia eftudié aux le très „ humaines, amp;nbsp;en la Sperc. Au refte que fon „dit pere mourut cnuironlc temps que les „nouuelles vindrent, que Chriftophlc Co--„ lomb auoi.t defcouuertla cofte des Indes: „ amp;ncf.‘ parloit d’autre chofe à la Cour du „ Roy Henri fi ptiefime qui regnoit lors en An „gletcrreîamp;difoit-on que c’eftoit yneinuen-v tion
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tion pluftoft dtuine que hunmainc d’auoir*' feu trouuer le moyen d’aller par le Ponant •* enLeuant. Ce bruit du feigneur Colomb« m’enflâma tellement le cœur, que ic delibe- *' ray de faire aufsi quelque choie figna!lcc,amp; «' dont il fuft parle à iamais.Et fachant par la « raifon du tour de la Sphere, qu'eu prenant « ma route droit vers le Northucft,i’accoar- lt;« ciroye de beaucoup le chemin pour aller« aux Indes de Lcuât,icrefo!u de le faire en- « tcndreauRoy,amp; lefi. Le Roy Henri en fut « le plus content du monde: amp;me fit equip- « per deux Carauellcs à fes defpens. Ic parti « d’Angleterre l’an mil quatre cens nonante « fix. fur le commencement de felle, amp;nbsp;fi voi- « le vers Northueft, pcnfant de ne trouuer ter « redu monde queiencfuflcàlacofiede Ca- “ tay, amp;nbsp;de là bailfcr vers l’Indic. Mais au ‘' bout de quelques iours de làdcme trouuay « bien loin de mon conte, amp;nbsp;bien presd’vnc« tcrrc,qui fuinoit la Tramontanc. Si vous vi « ftesiamais homme bienfafehe, ce fut moy. « Nonobfiant ic ndaifle pas d’aller, amp;nbsp;mon- « ter le log de la coftevers le North,pour voir « fi ie trouucroye point quelque Golfe qui « tournait vers le Northuclt,iufqu’à ccqueic « fu à cinquante fix degrez de noflrePoIe. E-« liant là, ic vi que la code s’alloit baiflant amp;nbsp;« fe tournant vers 1’Eft:dcforte que lors ie « perdi toute cfperâce de trouuer quelque c-« llroit ou palfagc de ce cone-)à;amp; commen- « çay à relafcher pour recognoidre encore la ^^ code dcuers l’Equinodiahcnintction touf «
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„ ioursd’y trouucr quelque ouuerture pouf „ trauerfer aux Indes. Et la fuiui fi longuc-„ ment,que ic vin iufqu’à celle terre,qu’on ap „ pelle auiourd’hui la Floride, le ne pafiay „ point plus auant, parce que nos viurcs ac-„ courfifToyent défia fort:amp; m’en retournay „ de là en Angleterre.
Ce fut donc ce Gaboto, qui defçonurit le premier la Floride, pour le Roy d’Anglc-tcrrc:de forte que les Anglois y ont plus de droiél que les Hcfpagnols, fi pour auoir droift fur vn pays il fuffitde l’auoir vcu le premier.Au refte ce voyage-la donna fi grâd bruit à Gaboto,qu’cftant de retour en Angleterre, amp;nbsp;Payant trounce toute pleine de troubles amp;nbsp;de guerres,il fe retira en Hefpa-gnc,làoù il fut très-bien recueilli par les Rois Catholiques Ferdinand amp;nbsp;Ifabcllc, quiluy firent cfquipper des vaiffeaux, amp;nbsp;le enuoyerent defeouurir le long de la colle du Brcfil.il y fut,amp; cingla iufqu’à la grande riuirc de la Platte, où il entra, amp;nbsp;naniga con tremonteebrasde mer bien rcfpaccdefix cens lieues :pcnfant que cefuft quelque c-flrcit amp;nbsp;quelque cncoulcurc de mer, qui le menai! de l’autre collé, amp;nbsp;luy donnaft paf-lagc pour aller aux Indes Orientales.
Le premier qui y alla après Iuy(au moins que Ion fachejee fut vn lean Pocede Leon. Ce lean Ponce eftoi t Adtlantado(c’cfl à di~ reGouucrneur)dc l’iflc de Borichen,qu’on •appelle auiourd’hui l’iHc fainél Ican du port-richecqu'il auoiteenquife amp;nbsp;pacifiée.
amp;
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amp; aiioit fait emmener prifonnier en fief-pagne vn IcanZeron amp;nbsp;Michel Diaz, quic-ftoyent deux officiers du Royen celle mef-mclflc, à caufede leurs concufsionsamp; mau vais deportemens. Ces deux firent tant mo-yenant la faucur de l’Amiral dom Diego Co lomb,fils de l’Amiral Chriftophlc,qu’ils furent réintégrez amp;nbsp;remis par le Royen leur office;amp; fi apportèrent quand amp;nbsp;eux lettres Royaux à l’Amiral, parlefquclîcs il luy c-ftoitpermis de mettre tels Otficiers en l’ifle fainéUean que bon luy fembleroit. Auffi f toft quclcâ Poeccut entedu ces nouiieUcs, il fe douta bien qu’il nefaudroit point d’e-fire ofté de là.àla pourfnite de fes ennemis-Dé forte qu’il délibéra deles preuenir, amp;nbsp;de ailcrconqucrirquclquenouucau pays. 11 e-quippa deux Caraucilesàfesdefpens,amp; partant de Borichen l’an i5ii.prit la route du North;amp; aubout dcquelquçs iours dcfcou urit les Iflcs de Bimini, lefqucllcs font au de là de rifle de Cuba,tirant verslcNorfh-
Au mefme temps il courut vn bruit par ce pays-la, qu’il y auoit certaine fontaine en ^“t'quot;“ riue Boiuque, quifaifoit reieunir les gens: ^J'®**‘quot;' amp;nbsp;iccroy que les Indiens auoyent ferne' ce bruit la pour fe moquer des Chrcftlens,qui furent bien fois de le croire : amp;nbsp;y en eut af-fez qui prindrcnt de la peine il cerchcr cefte belle Fontaine de iouuence. Entre autres le Capitaine lean Pôcc fut plus de fix mois apres,errant amp;nbsp;tracaffant d’Iflc en Iflc ; amp;nbsp;fi n’en deuiat pas plus jeune pour cela «hors
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mistic fens amp;nbsp;entendement. Touteilois en cevoyage-la il defcounrit vnc pointe de ter rcfcrmcgt; à laquelle il mitnom,la Floride, à caufe qu’il y eftoit aborde' le propre iour de Pafques florics,qu’on appelle. Mair pour lors il n’y fit autre chofe, que falucr amp;nbsp;baifer cefte terre .•amp; s’en retourna en fon Iflc de fainft lean, en intention d’y drefler vn cqui-pagepour conquerirla Floride,où il clpe-voit trouuer de grans biens,amp;d’y fonder quelqueeftat fiorifiant;mais il fc trompa.
Il auoit defia beaucoup defpedu à equip ► per vneflotte à fes defpens : touteftois il fe rcfolut depourfuiure, amp;nbsp;faire voile en HeC-pagne pour demander la cÔquefte amp;nbsp;legou-uernement de ce pays tout neuf. Q^and il y fut,il fit vnc partie de ce qu’il voulut. Il prc-fenta au Roy Catholique vn Difeours de ce qu’il auoit defeouuert ; il obtint de luy le titre d’Adelantado de Bimini amp;nbsp;la conquefte delà Floridc,cn côfidcration des bôs ferui- l ces qu’il auoit faits, amp;nbsp;moyennant la faneur de fon maiftrclc grand Commandeur de Ca latraua Pierre N liguez de Guzman, gouucr-neurdc 1 Infant dom Fernand , qui fut depuis Roy des Romains.Mais l’ifluc ne lut pas telle que les comencemes , amp;nbsp;comméça fon malheurauant quciamais ilfuftarriuc cnla Floridc.Car lors qu’il cftoit encore en Hd-pagne, il venoit tous les iours nouuelies en Cour,cómc les Caribes ou Canibalcs ( oui habitent les Iflcs de Marigalantc , de Guadalupe, la Defiata, la^Domenica, Matitino, Fodos-los
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Todos-losSâtos,l’Antigua,la Barbata,rAn ncgada,rAguglia,Sombrero, San-Chrifto-uai,la Gratiofa,amp;autrcs qui font en ce quar tier-la) brauoyent tous ceux qui s’appro-eboient de'eurriuage, amp;nbsp;leur tiroient vnc infinité de flefebes. lean Ponce eftoit lors àlapourfuitc de fon Eftat d’Adelantado, amp;nbsp;luy efebappa de dire que s’il plaifoit au Roy de luy faire equipper amp;nbsp;armer quelques vafreaux,il efperoit en bref dedeffaire tous les Saunages, amp;nbsp;d’en nettoyer le pays. Le Roy le prit au mot,amp;luy fit dôner deux Carauelles fournies de gens amp;nbsp;de munitiôs, amp;nbsp;luy commanda d’aller contre les Caribes auât que de fe retirer en fon gouuernemét. Il s’y en alla l’an mil cinq cés quinzc^amp;la pre micre tcrreoùilaborda,ccfutriflcde Gua-dalupé. Aufsitoftquelcs Saunages defeou-urirent de loin ces nauircsd’Hefpagnc,ilsfe vont tapir dans vn bois aflez près du nuage aucc leurs ares bien entoifez ; en attendant les Hefpagnols de pied coy. Et ne fe mon-ftrerent pointdufqu’à ce qu’ils virent,que le Capitaine eut mis pied à terreaucc quelques compagnons. Car lean Ponce, enant venu mouiller l’ancre à la rade d’vneriuicrc» fit entrer vnc barque par l’embouchcurc, pour aller prendre de l’eau douce, amp;nbsp;fit dc-feendre quelques femmes au bord de la ri-uiare, pourylaucr le linge fale desnauircs. Luy-mefme eftoit en la compagnie, amp;nbsp;ne fe doutoit point de cefte embuftade. Cependant voici ces archers fauuagcs qui fortent
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de leurs cachettes, quand ils apperecurent que les Hcfpagnolscftoycntafl'cz loin du ri nage, amp;nbsp;les cnucloppcnt par deuant amp;nbsp;par derrière. Les pourcs lauandicres furent attrapées les premières,amp; y demeurèrent auffi la plus part de ceux qui leurfaifoyent efeor te. Le Capitaincmefmc cutvncoupdeflef-che, amp;nbsp;n’eut plus grand hafte que de regai-gner labarqucluydciixicfinc.Ccux des Ca-rauelles qui eftoyét demeures à la radc,vir?t puis apres corne ccsSauiiagcs roftifloyct fur le j^^râ^roéruls appellent ainfi leurs grilles) les femmes,amp; les côpagnons,qu’ils auoyent lardez,amp; en faifoyent de belles carbônades.
Le CapitaincIcan Ponccayant rencon-trcfi mal pourlc commencement ,vid bien qu’il y auoit bien à dire entre fe vanter erviiechofe entre les verres amp;nbsp;les tréteaux, amp;nbsp;la mettre en execunon. Touteffois fi ne fallut-il pas icttcrlc manche après la coi-gnee. Quanta luy, il prit la route de fainét lean aucc l’vnc des Caraucllcs. L’autre s’en retourna en Hefpagne,porter les nouucllcs comme les Saunages eftoyent aufsi prefts de mager des Hcfpagnols quciamais,fi onvou loit leuren enuoier. Cependant le Capitaine lean Poccamafie foudars.drelfe vn equip page à S.lean, fait degras defpes pour aller predre polfefsion de km qouucau gouuerne incnt,amp; red la peaU,corne on dit,auant qu’il euftpris l’Ours. Mais à grand peine eut-il pris terre à la Floride que voici venir vne grolfc troupe de Saunages mal auifez,lef-
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quels au lieu de carefler monficur le gou- ^can rà»-^ nerneur(côme ils deuoyent) le rcccurent à “ 'A ‘quot;^ grans coups de flefehe, amp;nbsp;le tuerent aucc
plus part de ceux qu’ilyauoit menez. Il ett vray qu’il n’en mourut pas fur le champ’: car il eut encor le loifir de fc faire porter en l’If le de Cuba,là où il dcccda.De forte qu’il ne peut prendre polfefsion de la Floride ni en fa vie ni en fa mort. Voilaeôme la Floride fut dcz-lors remarquée amp;nbsp;eflrenée du fang dcsHefpagnols,amp; nommeemet du premier Hcfpagnol quil’auoit dcfcüuuertc,amp;luy a-uoit donne ce nom-la.
Depuis les Hcfpagnols furet long temps» qu’ils n’y oferent aller, pour le mauuais bruit quien couroit,amp;pource qu’il n’y a-uoit à gaigner que des coups.Touteffois en fin il y eut vn Ferdinand de Sottogt;qui auoit cHé vn des Capitaine de François Pizarre à la conquefte du Pérou, amp;nbsp;auoit bien fait fes befongnesàla prifedu Roy Attabaliba.Ce-flui-ci penfant que la Floride fuft de mcfme Je Pérou,en demanda la conqucftc à l’Empe rc«r,amp; l’obtint.Il s’y en alla enuirpn l’an mil cinq cens trente quatre , aucc vnc flotte de4' ^ cinq cens Hcfpagnols, bien en ordre : mais n ayant autre chofe en fatefte que des mines d’or,il s’amufiiàcnccrchcrçaamp; là, (ans fe foncier de baftiramp; peupler quelque ville fur la cofte de la mer.Et voyât qu’il ne trou uoit pas ce qu’il cerchoit, il femit à tour-meter S^gchénerles petits Seigneurs de ce pays la,quand il en pounoit prendre,pour
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leur faire confefler on ihfauoyent de Tor. I inalemcntaprès seftre donneprou peine à luy amp;nbsp;aux autres,il monrut là au bout de cinq ans, amp;nbsp;prefque tous ceux qu’il y a* uoit menez.
Apres la mort de Ferdinand de Sottogt; la lt;} Cour eftant à Vallcdolid, l’an mil cinq cens quarâte quatre, quelquesgentilsbômcs demandèrent congé d’y aller pourla conquérir. Entre autres vn lulic de Samano amp;nbsp;Fier rc d’Ahumada. Mais ne l’Empereur qui c-ftoiïlorscn Alcmagne, ncfonfilslc Prince d’Hefpagne dom Philippe, ne la voulurent donner à perfonnc.'parcc que le Confeil des indes n’en eftoit pas d’auis,amp; trouuoit meil leur que l’on y enuoyaft qucIqucsRcligicux pourprefeher ces Saunages, que des Capitaines amp;nbsp;des foudarspour les faire deuenir Chrefiiensà coups de halebarde.
Gom. Un, Aufsifut ce enuiron ce temps-la qu’il y i.chjf.^^. eut des Moines qui reuindrent des Indes amp;nbsp;^^/- prefehr yont par toute l’Hcfpagnc, que Ion 3uoit grand tort de maOincr ainfi les Indiens,deles prendre cfclaucs,d’enuoycr des foudars aux Indes, qui pilloycnt,tuoycnt, rauageoyent tout, comme en pays de con-quefte. Aux lieu que ces pourcs Barbares ponrroyct venir à la cognoifianc-e de Dieu, qui les prefeheroit en leur langue. Cela fut c3ufe,qu’oncnuoyadcs Prefeheurs à la Floride amp;nbsp;ailleurs : II y cuft vn frère Loys Cancel dcBaluaftrc, qui s’offrit de pafltrcn la Floridc,au{ C quatre autres lacopins,qui de uoyent
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Boycnt conucrtir tout cc pays-la aiifsi toft qu’ils y fcroycnt arriuez.lls partirent d’Hef pagne l’an mil cinq cens quarante neuf, amp;|^ arriuez qu’ils furent là:frerc Louis met'pied’' à terre auec fes quatre compagnons.Et au lieu que les Capitaines de marine amp;nbsp;lesgou uerncursHtfpagnols auoyent accouftumé de falucr ces pays-la à coups d’artillerie pour effroyer les Saunages, ceux ci s’appro cherent tout bellement du nuage fansfon-ner mot, n’ayans autres armes que de belles croix rouges en la main. Les Saunages ne faiUent point de fc trouner là de bonne heure amp;nbsp;en bonne troupe : mais ce n’eftoit pas poiironirlc fermon- De forte que quad frere Louis commença à les prefeber, ils ne le daignèrent efeouter: ains bfflans amp;nbsp;hur-lansà leur mode, chargèrent delTusà grans coups d’efpcc de bois amp;nbsp;de maffue, dont ils frappoyent comme des fourds. Briefils cx-ploitcrcnt fi bien, que de cinq Moitiés que ilsclloycnt, ils en afTommerent les trois, amp;nbsp;autant de mariniers. Les autres deux laco-P*'^^ gagnèrent aû pied, amp;nbsp;fe fauncrent das leur nauirc,aimans mieux (comme Ion dit) fegarder encor pourConftfleurs, que d’e-Üre Martyrs de fi bonne heure.
II y eut depuis vn ieune homme (qui a«-vioit efic autreftois laquay defeu Ferdinand, de Sotto, amp;.' auoit toufiours demeurelà depuis la mort de fon maifire ) lequel fe fuma dans le nauire Fîefpagnol,amp;’ leur conta com me les Sanuages auoyent cfcorché cespo-
, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;CC.j.
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urcs Moines qu’ils auoyent tuez, amp;nbsp;en a-noyent pendu la peau amp;nbsp;le cuir de la telle a-uccla couronne amp;nbsp;tout,dans IcurtcpIc.Lcs autresqui n’eftoyct pas marris d’eftre encor dans leur peau,furent plus aifes d’ouir les nouucllcs que d’en faire rcxpcriécc:amp; quad ils furent de retour, ils diret fort bien pour leur defeharge auGencral de leur ordre,que pes Saunages de la Floride cftoyent pires qu’Heretlques, parce qu’ils ne faiioyet poît de confcicnce de manger de la chair en Ka-rcfmegt;voircdelà chaird’vn Religieux.Item qu’ils cftoyent trop lourds pour apprendre l’Hefpagnol, amp;nbsp;trop rudes pour enfeigner leur langage. Outre cela que c’eftoycnt gens de fi peu de ciuilitc, qu’ils ne portoyét non plus de rcfpcél à vu Moine qu’à vue bcftcfauu3gc:amp; de fort mauuaife grace,parte qu’ils frappoyent deuant que parler. Et qu’au refte ils eftimoyent quclcs peaux y fuffent fort chères ,fur tout les peaux de Moine,parce que tout le monde cftoit couru fur eux pourcn auoir, amp;nbsp;qu’ils auoyent eu prou d'affaire àfauucrlcs leurs. Au refte qu’ils n’auoycntgucres veu gens qui prat-tiquaflentplus volontiers le commun pro-iierbc,ne qui fiflent plus large couroyedu cuir d’autrui,que ceux-là.Quât au pays,que ils n’y cftoyent pas entrez trop auàt:mais au derneorant de ce qu’il en auoyent veu,qu’ils ne l’auoycnt pas trouucfi bon nefi fertile, pomme ion difoit, parce qu’il ni croiffoit que des coups. Touteffois quiauroit enuie d’eftre
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d vftrcbictoft Martyr, amp;nbsp;dcfpouiHerfamau uailc p-au pour entrer en gloire, qu’il ne fai luit qu’aller là.
Depuis ce temps-la ksHcfpagnolsn’yfrc quenter-nt pas fort,tant à l’occafion de CL-1a,comme aufsi poureeque ce pays-la n’a-uoit pas If-bruit d’ellre fort riche en mines d’or,ou autres fingularitez qui Valuffent la peine d’y al Ier.
fLtraij o„ ihtnamJe la Florid:'. ÿ^l:jti(iv;y.t^cs des FrM^ i^oa tn htae. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;CFI AF. 111.
\ Vanta nos François,il y ha J plus de loixante amp;nbsp;dorfzeans 9 qu’ils ont defcouncrtla co-fte des Molùes, qu’on appelle communément Bacralaoty (à caufequcceuxdu pays appellent ainfi ce poilTon'la) laquelle eft enuiron à la hauteur de Francc.Ellc fut premiercmet defeoauer-tc enuiron l’an 150^.pat les Normans amp;nbsp;les, Bretons,qui y vont percher tous les ans : à raifon de quay le Cap, où la Terre neuve commence à fe tourner du North à l’Oueft (qui eft enuiron à 800.lieues de Diepe) s’ap pcIleleCap des Bretons. Quant .à la cofte qui eff depuis le Cap des Bretons iufqùcsà laFloridc,laquelle dure enuiron 700.lieues) elle fut defcouucrtcl’an 1^24.par vit grid Pilote Florctin nome lean de Verrazano, qui y fut divers voyages au nom du grand Roy l'râçois amp;de madame la Regéte.C’eftoit vu
CC.ij.
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homme fort expert au fait de laNauigation» amp;nbsp;auoit délibère,moyennant la faucur amp;nbsp;libéralité du Roy Fraçois.de defeouurir toute cefte partie de ce Continent des Indes iufquesfousIcPolc» non feulement en fuy-uant le long de la cofte,mais mefmes en pénétrant le plus auant qu’il luy feroit pofsi-blc au dedans des terres. Et quand amp;nbsp;quad de perfuaderau Roy, d’enuoyer là des gens pour habiter en quelques endroits de la co-île,où l’air ell aufsi tempere,amp; le terroir auf fi fertile qu’on fauroit defircr:aucc fort bel-* les riuicrcsamp;fort beaux ports de menfigras amp;fi capables qu’il n’yhaflottede nauircs qui ne pend renger aifement dedâs.Mais ce gêtil Capitaine de Marine,au dernier voyage qu’il ht, ainfi comme il penfoit mettrq pied à terreaucc quelques compagnons du nauire, il fut tue amp;nbsp;mange par les Saunages.
Andre' Theuet, en dit bien dauantage. Il eft vray que ic ne m’en fuis point encore fer ui,àcaufedcs grandes vanitez Si niaiferies, que ion trouue en ccd Auteur-la, amp;nbsp;mefme ment vnc lourde ignorance en l’Hidoire amp;nbsp;en la Cofmographic aucc, dont il fait pro-fefsion- Car fans aller recerchcr curieufe-mentpour Teprefent toutes les fautes qui font dans fa Cofmographic Vniucrfcllc , ic me côtenteray d’en remarquer ici quelques
vues quiferuent à ce propos. Au premier ch.du vingttroificfmc hure de faCoimogra-phic où il deferit la Floride , il conte entre les prouinces de la Floride,tes pays de Pami -
ro
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rojdcs Auanaresjd.csAibard.'ios.Apalachcn, Ante, Xamo, amp;nbsp;cependant c’cft bien cbo-fe alîeuree fuyuant toutes les Cartes marines, amp;nbsp;le raport de ceux qui y ont voyagé a meilleuresenfeignes qucThcuct, que Pami ro cftà plus de cinq cens lieues de la Floride. Au quatorficfme chapitre du vingtdeux/ iefme liure il conte Vicaragua amp;nbsp;luraton entre les prouinces du Peru , qui eft vnc af-neric toute manifeftc.il y en a bien d’autres» que ie remarqueray à loifir quelque iour. Dieu aidant.
Quant à l’Hiftoirc il ne fait que le cerf de mentir amp;nbsp;en ce qu’il ha veu amp;nbsp;en ce qu’il ha ouy dire,corne quand il eferit au vingttroif-iefme liure de fa Cofmographic chapitre fe-ziefnie, Q^e François Pizarrc perditfesua- “ uircs chargées du butin des Rois amp;nbsp;Scilt; “ gneurs Mcxiquain,lors qu’il prenoit la fui- “ tcpourcuitcrla fureurdu feigneur de Men- “ dozc,amp; autres feigneurs Hcfpagnols'en-‘‘ noyez de l’Empereur Charles le quint, pour “ ouir les plaintes, amp;nbsp;faire iufticc dudit Pizar rcamp;autres defafuitc. Ce qui fut exécuté“ aucc le temps. Car eftant auerti des corn-“ plots amp;nbsp;entreprifes d’auoirvolu s’impatro- “ nifer, fans rccognoiftre ne Roy ne roc, fut “ condamné d’auoirla tefte trenchee • ce qui « fut fait. Voila les propres termes de ce paf-fagc-la,où il y ha autant de fautes amp;nbsp;de men fonges que de mots. Car premieremét quad il dit que Pizarre s’cnluioit du pays de Me~ xico, cela eft faux. Chacun fait que Pizarre
CC.üj.
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n’alb px;int conquérir en Mexico, niais au Royanmedu Peru, qui en eft à plus de douze cens lieucS. Apres quand il dit que Mendeze futenuoyepouriuüicier Pizarre, cela eftfaux aufsi.Cardorn Antoine de Mendo-zçfutennoye en Mexico en titre de Viceroy,du temps du Cortez. Il eft vray qu’il lut bien enuoie'depuis pourgouuemtr le Peru: mais ce fut plus de dix ans apres la mort de Er^çois Pizarre,amp;lors qu'il n’y auoit pas vn dc5 Pizarres qui portail les armes au Peru.I-te quand il dit,que François Pizarre fut con damne à auoir la telle trenchcc, il monftre bien qu’il n’ha iamais mis le nez dans les Hiftoires d'Hefpagne, ou qu’il veut demen-mentir tout le monde. Car les petits en-fans fauent queFrançois Pizarre fut tué à Lima en fa maifon par le moyen de quelques coniurez qui tenoient le parti d’Al-magro: amp;nbsp;que depuis Gonzallc Pizarre fon frere fut exécuté parle commandement du Prefident Pierre deiaCafea cômclonpeut voirau troilîcfmciiurcdela prefente Flilloi rc. Voila l’ignorance impudente de The-uet;qui cuPc mieux fait d’apprendre des autres , amp;nbsp;confefier ingenuement de qui il tientccqu’il dit, quede menrirf cuidem-rnent en Moine effronté, amp;nbsp;cependant fai-.(.»...-1 i'^.-fc- rcaccroire qu’il ha elle par rout,amp; qu’il \^y,rA( ' n’ha point voulu glci^-r fur les moifibns d’autrui.
Toureffeis quoy qu’il foit tel, fi ell-cc queie reciteray ici firaplemcntcc qu’il dit de
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delà Floride, amp;nbsp;luy fcray plus d'honneur qu’il n’ha fait aux autres. Én prcmierlieu ie ' approuuc ce qu’il dit de l etymologlc dii nom delà Floride : A faiioir qu’elle ne fut v'e^ iä pas feulement nornmee ainfi àcaufe que le ^I^ruleh4 Capitaine lean Ponce y arriua le iour def”^, ^^ i’afqucsflories : mais que l’apparence i'fi-cedecefte terre-la fut là pririctpale caulc qiicce norh-la luyfut donné. Car toute la ‘* terre voifinc de ces pays -la. dit-il, eft telle- “ ment chargée d’herbes amp;nbsp;de fleurs, amp;la mer “ fcmhlablemcnt,que quelque profonde que *'' cllcfoit fidiroit-onquec’cflvripré le plus*‘ beau amp;nbsp;verdoyant que lonvoyeici durant ‘® le Prim-terns : amp;nbsp;l’ayans veue eftre telle tant ‘' les noftres qu’autres de l’Europe, l’appelle- ‘* rent Floride, approchans plus dü nom La-“ • tin que decclui qui eft familier à chacune “ nation.Au lieu que parauant cUcs’appclIoit “ /»t^ftaza par les habitans amp;nbsp;Saunages du “ pays,amp;c. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;“
Apres venant à parler des François qui la defeouurirent du temps du Roy François’ premier, amp;nbsp;long temps auparauât : amp;nbsp;corn--mencerent dès-lors à adoucir le Saunage amp;nbsp;l’attirer à leur alliancc:voici ce qu’il àdiou-ftc;Mcfmes lean Verazze Florentin (c’eftee «é Verrazzano duquel i’ay parle n’agnercs) le tt dixlèpticfmc de Mars, l'ari I5z4.paftlt dé«« Dieppe par le commandenaent du RöyFfän «« çoisdcqucl coftoya toute îaFloride iufques « au trentequatriefme degré de hàutcûf jamp; «^ troiscens de largeur, amp;nbsp;illuftra toute Cefté*é
CC.iii^
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a, cofte, amp;y nut quelque nombre de peuple }, pour la culciucr. lefquels à la fin turent oc-,,.cis SernatTacrez par ce peuple barbare.Lors a, l’Hefpagnol ni le Portugais n’y auoy ent fait „ attainte. Et vn peu plus bas.
„ Pour retourner à noftre pointe de la Flo ,gt; ride lepeuplc y eft tout tel qu’au plat pays, a, faufqu’il n’cE du tout fi cruel J amp;nbsp;à tout le „ moins plus fot amp;nbsp;plujs finiplc.IIsfont de cou „ leur oliiiaftre,dc grande corporance amp;nbsp;bien a, proportionnez, amp;vcftus en tout temps de ^, peaux de bcRes,tant hommes que femmes, a, La plus part defqucls font peints par le a, corps, par les bras amp;nbsp;par les cuifies, de fort ,, beaux compartiments qui nefe peuuentia-, a, mais öfter, à caufc qu’ils font picquez dans j^ la chair. Ils font gratis difsimulatcurs amp;nbsp;trai „ ftres, vaiUansncantmoins de leurs perfon-, „ ncs, amp;nbsp;qui combatent fort bien. Ils n’ont
„ autres armes que l’are amp;nbsp;les flefehes, la cor-a, de defqucls ils font de boyau amp;'cuirdc Cerf: „ aufsibienaccouftrees amp;nbsp;d’aufsi differentes „ couleurs quclon fauroit Elire en France: amp;nbsp;„ ferrent leurs flefehes de dents depoiflbn, amp;nbsp;„ de pierres, qu’ils accouflrent fort propre-„ ment. Ils font exercerIcsicuncs hommes à „bien courir amp;nbsp;tirer de l’are, amp;nbsp;mettent vn „ prix entre eux, lequel eft donne à celui qui ,,ha l’halaincplus longue. Ils prenent aufsi a,grand plaifir à La chafle amp;nbsp;à la pefeherie.
J, Les Rois du pays fc font fort la guerre „lesvnsaux autres, laquelle ne fc mene que „ par furprinfes ; amp;nbsp;tuent tous les hommes qu’ils
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qu’ils peuuent prendre,puis après leur arra- ‘‘ chent la tefte pour auoir leur cheudurc, “ laquelle ils emportent pour en faire vu “ triomphe en leurs maifons. Touteffois ils “ fauuent les femmes amp;nbsp;les enfans, qu’ils nou “ riflent amp;nbsp;tienent toufiours auec eux. Ertans “ de retour de la guerre, ils font alfemblcr “ tous leurs fuiets, amp;nbsp;de grâd ioye qu’ils ont, “ ils font trois iours amp;nbsp;trois nuits à chanter, quot;nbsp;à danfer amp;nbsp;à fairc bonne chère. Mefmes ils “ font danfer les plus anciennes femmes du “ pays,tenans les chcuclurcs de leurs ennemis “ en la m.iin:amp; en danfant chantent louanges “ au Soleil,luy attribuansl’honncurdc la vi- “ doirc. Aufsi n’ont-ils cognoirtace de Dieu, ^eUgian ni de religion aucune, finon de ce qui leur apparoirt,comme le Soleil amp;nbsp;la Lune. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;‘quot;‘‘
Ils ont des Preftres qu’ils nomment Z^r- j^ »lt;j)'^,aurquels ils adiourtcnt du tout foy, par ,( ce qu’ils font grans Magiciens, Deuins amp;nbsp;inuocateurs de Diables, amp;nbsp;Icfqucls leur fer- ^^ uent de Médecins amp;nbsp;de Chirurgiens, d’au-tant qu’ils portent toufiours auec eux vn ^^ fac pkin d’hcrbcs,amp; de drogues pour medc ^^ einer les mala des. Tl s font fortfuietsaux fem ,j mes amp;nbsp;aux filles, qu’ils appellent filles du So leil : amp;nbsp;la plus part d’eux font Sodomitcs.il j„ pi„i. ert permis aux Rois d’auoir deux ou trois d^ms. fcmmcs:touteft'ois il n’y ha que la première “ honoree amp;nbsp;recongnuepour Roync:les en-“ fansde laquellebcritentfeuls du bien,amp;au- “ torité du pere. Les femmes font tout lemef “ nage,auec IcfqucUes ils n’habitcot point de «
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“ puis qu’elles font großes, nine mandent de » aucune viande qu’elles ayent couche, pen-„ dant qu’elles ont leurs fleurs.
jgt; Quand ils vont à la guerre,leurRoy, que «ils nomment Paraconj/i i autre Puraottiïfi ii marché le premier aueevn bafton en vne 3gt; main,amp; fon arc en l’autrcjaucc fon carquois jgt; garni de flcfchcs,amp; eft fuiui de fes gcns,aufsi 31 garnis dcleufs arcs amp;nbsp;flefehesdequel au pâli rayant que partir s’afsied en yne_Frcfcade, 33 enuirónedesRoys qui luy tiennent compa 31 gnic encefle expedition. Cefaiddettant la gt;3 veucauCiclfc meta dilcourirdc pluficurs 11 chofes, amp;nbsp;animer les fuicts à bien amp;nbsp;vaillani ’gt; met combatre,leur mettant deuant les yeux 31 l’honneur qu’ils acquerront, fi vne fois ils 31 rapportent la vidoirede leur ennemi : amp;nbsp;au 33 cótrairclahótcquc ce leur fera,s’ils font def 33 faits:amp; menaçât aueevn regard furieux que l’il iette la part que font fes ennemis, donne à 33cognoiflrc à fes fuicts l’cnuie qu’il ha de les 33fuppcditcr,amp;faifanttclsdifcours iette foü-33 uent la veue en haut, requérant le Soleil de 33 luy donner vidoire de fcfdits’aduerfaires. 3’Ce qu’ayant fait l’cfpacc de demie-beu-33rc,il verfeauee la main vne portion de l’eau «qui luy efl: apportée dansvn vaiflean, fur 3gt;lcs teftes des ParacouJ/ls^M l’cnuironncnt: 33^lquot;lcrefle illeictte comme^ar furicamp;par 33dcfpit dans vu feu, qui eft la prepare’ tout 3icxpres. Cefaifant il s’eferie par trois foisi 31 nommât le nom Je fon ennemi: ce que font »saufsiapres tous ceux qui le fuyutnt. Cefte ceremonie
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ceremonie, à ce que i’en ay peu entendre, “ ne fignihc autre chofe,finon qu’il Hipplie “ le Soleil, luy ottroycr viftoire heroique, « qu’il puiffe cfpandre le lang de fes ennemis “ comme il harefpandu celle eau afon phi- ‘‘ lir;dauantagc que les Paracauffis, arroufez “ de partie de celle cau.puilamp;nt retourner'* aucc les belles de leurs ennemis: qui oftquot; Icfcul amp;nbsp;fouucrain triomphe de leurs vi- ‘* ftoircs. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;‘*
Que s’il eft queftion de combatre ils quot;nbsp;font de grands cris amp;nbsp;degrandes exclama-quot; tions,amp; n’oferoit le Roy bouger, que la ba- quot;nbsp;taille ne foie finie: Cars’llclloit fi fol que quot;nbsp;de s’enfuir, voyant les liens lcr plus foibles, ** ceferoitfaitde luy ,amp;ne faudroyentde lequot; tnaflacrer. Si d’aduenture ils obtiennent la '‘ viéloire, ils prennent les telles de leurs en- quot;nbsp;nemis morts amp;nbsp;leur coiippcnt tout le tour quot;nbsp;dclcurs cheueux aucc vnc partie dutcft:amp; “ ce fait fc retirent rendant graces au So-‘‘ leil, amp;nbsp;chantant fes mcrueillcs. Dananta- quot;■ gc ils enuoyent deuant vn Mclfagcr en leurs quot;nbsp;maifons annoncer la vicloire à ceux qui quot;nbsp;font demeurez pour la garde d icelles,lef- quot;nbsp;quels incontinent fe prenent à plourcr: quot;nbsp;mais la nuidl venue, ils ne cclfent de danfer “ amp;nbsp;faire mille esbateraens en l’honneur d cia “ fefte, nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;quot;
l^e P‘^racot^jJîc^^2nt arriue en fa maifon, “ fait planterdeuat (a porte, tous les cheueux quot;nbsp;de tes ennemis, amp;nbsp;les fait enuirônerdebra.n quot;nbsp;chages de Laurier-.^: lors commencent le« «
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,, pleurs SigemifTemens, lefqucls, Ia nuiét ve-3g nuc,font couucrcis en dances amp;nbsp;plaifirs.Lcs „ maritimes fe contentent d’occirlcurs enner „ misfanslcs raangerda où ceux qui font bien „auanten terre ferme les mangent après les „ anoir facrifiez àleurs Idoles,citas idolâtres. ^4**'-I-J ” L^ oùles voifins de lamer nonpastous en ^,^lt;,.; **^ „general,adorent le Soleil,fansluy drelfcr • 5'« *^^ nbsp;nbsp;” ai’*^“” Autel amp;nbsp;fans luy faire facrifice.
5 „ Ils font de grande corpulence, amp;nbsp;viuent . • 1 „ vn long temps, amp;nbsp;y en ha tel qui fe trouuera
*• nbsp;nbsp;1 „ auoir£cnt cinquante anspour^moins. Et » * ,, de ce me fera tefmoin le Capitaine Laudu-1 nbsp;nbsp;1 ” niere,lequel l’an mil cinq cens foixantc qua * * „ trcpar le commandement du Roy Charles ^ 1 „dernier decede fit le voyage de la Floride ** „ pourla dernière fois,où il fit ballir le fort de rert ^e la Caroline,fur la riuicre de May,en l’honneur Carohnt. j^^ijj^Qy. Eft^nt: donques en ce pays,amp; ,, defeouurât les terres circonuoifines defon ,5fort,arriuaprcsd’vnc montagne de moycn-
„ ne hauteur : le long de laquelle il mit pied »a terre, amp;s’cftant quelque peu repofé, chc-„ mina aucc aucuns de fil troupe quelque cf-„ pace de temps par les bois,amp; tant qu’ils ar-„riuerent à vnc lonchccmarcfcagcufc.Là oii „ fe troiiuans recreus du chemin, ils fe mirent jgt;àrombr3gc d’vu grand Laurier, pour fe ra-„frefehirvn peu,amp; refoudre quelque pointé „d’entreprife.
„ Alors ils defeouurirent cinq barbares de ?!cc pays-la,dcmi cachez dans les bois, qui ne jdemonftroyent point tropalfeurcz de nos François^
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Fraçois, Icfquds les fakierct en leur Îâgagc ‘'' ( diCans,^»tipe/a Bonnafau'. afin qu’oyans tel quot;nbsp;lâgage ilsapproehaffcnt plusfcurcment, ce “ qu’ils firet aufst tort. Mais d’autant q Ion fe “ appcrçcut,quç les quatre derniers portoyét ‘‘ le dcrricrcdclapeau,dontleprcmicr cftoit reiiëllû-.ils fcdoutèrent qu’il cftoit quelque (^i»*^^^“^ chofe plus que les autrcs:iointqu’ils le nom '^p^^-j^ moyent /’4r4e«/ïz.Parquoy quelques vns de la compagnie luy allèrent au deuât, Icfquds ‘‘ culecarelfantluymonftrerentlcur Capital “ ne: auquel ils auoyent fait vnc frefeade de“ Lauriers amp;nbsp;dcPalmicrs à la mode du pays, “ afin que par tels figues ils cognuïTent que“ les François auoyent autreffois liante aucc “ delcurs femblablcs. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;“
Ce P^r^az/Hx eftant approche dudit Ca-“ J pitainc, luy commençavnc affez longue ha- “ lengucjqui ne tendoit à autre fin, finon que “ ilfupplioit les François aftedutufementde “ allervoirfa demeure amp;.' fes parens. Cc que“ luycftant accorde par Icfdits François, il“ doua audit capit.Laudunicrc pour gage de“ plusgrandc amitic'la peau mcfmcdontil c- “ ftoit vcftu;amp; ce fait, le prit parla main, s’a-“ (Cheminant droit aux marefeages, au trauers “ dcfquelsle ParaouÏÏi amp;nbsp;ledit Capitaine aucc “ quelques Fraçois furet portez furies efpau- “ les de ces .Sauuages:amp; les autres qui ne peu- “ rent palier, à caufe des fanges amp;nbsp;des boucs, “ allèrent par dedans les bois,amp; fuyuirentvn “ petit fentir cftroit, qui les guida iufqu’à ce “ qu’ils fuftent rédes à la demeure du P^mo«-“
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« fit. De laquelle fortirct cinquate de ces Sau 3, uages pour plus honorablement reccuoir jgt; les François Seles feftoyer à leur niodc.Suy-»gt; uat laquelle ils prefenterct d entree vn grad 3gt; vafc de tcrre»d’vnc aflez ellrangc façon,plein s, d’eau de fontaine claire Se fort excellente. „ De laquelle ils prefenterent à vn chacun, s, fuyuant en ce faifant vn certain ordre amp;nbsp;rc-„ ucrencc,qu’ils portoycnt aux vns Se aux au-„ très, aufqucls ils prefentoyent à boire. La ,, foif eftant cflanchcc Se les François rafrcf-,, chis, le Paraott^ltïcs conduit au logis de fon | „pcrc,rvn des plus anciens perfonnages qui „ruftviuantcn terre. Les François refpeétât J 3, fa vicllcllcjcommcncercnt à le gratifier par ! „ l’appellation de ce terme, Ami, Ami ; Dont „Icvieîlard fc monrtra fort ioyeux. Puis l’in-„ terroguerent fur le cours de fon ange. A , „ quoy il fit rcfponfc,fe monftrant eftre la 'j „première fqudiçviuantc,dc laquelle il c-^, ftoit forti cinq generations: leur monftrant ,, vnautre vieillard afsis viTi vis de luy,lc-| „ quciroutrepaffoit de beaucoup en vieillcf-1 „ Ic.Aufsi cftoit ilfon pcrc,8c qui rcfembloit „ mieux vncefcorce de bois, qu’vn homme vi J, uant. Car il auoit les nerfs, les veines, les ar-„ tcres,lc$ os, amp;nbsp;les autres parties du corps fi „apparoiffantes au deftousde la peau,qu’ai-„ fement on les euft nombrees, amp;nbsp;difeernees J ,, les vncs dcsautrcs.Aufsilavieilleffey cftoit j, fi grande,que le bon homme auoit perdu la U, veue,A ne pouuoit,qu’à grandifsime peine, », proférer vn fcul mot.
Le
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Le ficur de Lauduniere ayât veu vnc cho “ fc fi eftrange s’approcha près du icune vieil “ Iard,ie priant voulo’rrcfpôdre à ce qu’il luy ‘‘ auoit demandé touchant fon aage. Lors ce “ vieillard appclla vnc troupe de Saunages: “ puis frappât deux foisfurfacuilTcjamp;mcttât “ la main lurdcux d’iceux, luy fit entedre par « figues que ces deux cRoyent fes enfans.Puis lt;« frappât furleurs cuiffesj luy en firent cognoi « Rrc d’autres moins vieux que ces deux pre- ‘c micrs:cc qu’il continua en lamcfmc manie «c ) redufqu’à la cinquiefme generation.Or co- ‘c ' bien que ce vieillard cuR fon pere encore “f*, - ^ X |1 plus vieil que luy, fi cR-cc que,félon leur « f^'^^ -^ ƒ port naturel,ilsparoifloycntpouuoir cnco- « te viurc trente ou quarâte ans : amp;nbsp;fi le moins Satmarei vieil des deux auoit pour le moins deux cés ‘’gt;•5« lt;f‘''^ cinquante ans. -Z nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;- c^/««.
Voila ce que m’en ha difeouru ledit ca-“ , pitainc Lauduniere, lequel par fa diligence “ 1 hadefeouuert beaucoup de pays,en ccRe co *' Re de la Floride, amp;nbsp;autresfingularitcz, que i’omets poureuitcrprolixité.lls côfelfentl’a f^fi,. me cRre immortelle, amp;nbsp;qu’il y ha vn lieu de- rije, pute poor les mefehans : lequel ils difent c-“ Rrc vnc terre fort froide , à caufe que la “ plus grande incommodité qu’ils fouftrent, “ c’cR la froidure •. difans au rcRe que les “ péchez des hommes font punis en l’autre “ vic.D’aoantageilscroycntcncorc qu’il yha «« vn nombre infini d’hommes au ciel, amp;nbsp;autât « fous la terre amp;nbsp;ont mille petites folies en “ leur creance, aufqueUès ils adiouRent autât« •
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,5 dcfoy que les Turcs amp;nbsp;les Perfes à Maho-„ met.
5» Le pays le plus proche de la mer eft le }gt; plus fertil,à caufc que les habitans ayans c-jj Hé amaHez de diuerfes nations'» ont ap-5, pris à ferner du millet, qu’ils appellent 74-,, poUa, amp;nbsp;vue racine rcHcmblant au Maiz du », Pérou: amp;nbsp;ontaufsi d’vnc herbe,qu’ils appel », lent Ca/pna,qui eHcomme vnclaitue, delà ,» quelle ils font leur bruuage ,amp; le boyuent », tout chaud,aprcs que l’herbe ha boulli dâs „ Veau, di(ans que cela fait grand bien à leur », eftomac,amp; qu’il ha telle vertu , que l’ayant „beu ils deuicnnent tous en fueur,laquelle „ pan'cc,oHc la faimamp; la foif pour vii^qua-», tre heures.Ils fcmcntleur Mil deux fois Pan j, nec,c’fHàfauoir en Mars amp;nbsp;en luin,lequel », eft trois mois dans terreiq^fqu’à ce qu’ilfoit „ preft à recueillir :amp; les fix autres mois, ils „ lailfent repofer la terre, laquelle ils ne fu-,gt; ment point. Ains quand ils la vuculét enfe-», meneer,ils mettent le feu dedans les herbes „ amp;nbsp;les font brufter. Ce fait ils la labourent „ d’vn inftrument de bois fait comme vnclar »gt; gehoue, aucc laquelle les vignerons labou „ ren t les vignes en France.
ï, Quand il faut enfemencer les tcrrcs,lc », Roy bitaftemblcr tous les iours fes fuicts „pour fe trouucrau labeur:durantlequclil „ leur fait faire force bruuagcs:amp; Icsmoilfons „ cftans faites amp;nbsp;recueillies, amp;.• leur gros MiL », eft tout porte en la maifon publquc: là ou », il eft diftribuéà chacun Ulonfa qualité, de autant
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autant qu’il en peut falloir pour fix mois.“ D’autant que l’hyuerils feretirent trois ou“ quatre mois durant, dedans les bois, là ou*' ils font de petites maifons de Palmier, pour“ s’y retirer, amp;nbsp;viuent durant ledit temps, de quot;nbsp;gland,de poifTon qu’ils pcfchcnt,d’huyftrcs,“ de cerfs, polies d’Indes, amp;nbsp;autres animaux“ qu’ils prenent. Entre autres de la chair de“ crocodile,qui eft belle amp;nbsp;blanche, amp;nbsp;delà'“ quelle i’eufle fouuenteffois mange, n’eu fl e- “ fte qu’elle fient tropJcmufic.Usmangtnjt tou“ tes leurs viandes rofiies fur les charbons, amp;nbsp;“ bomauecsfquafi cuites àla fumée)nerete-“^.,, nant plus la première férocité amp;rudcfle de“ leurs predecefleurs, Icfqucls mangeoyent la “ chrircruc,amp;fucccoycntlcfiai!g,deleurscn-“ nemis. /tem vu peu plia bas. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;“
Q^nd aux Sauuagesde làjla Floride, ils “ font ainfi leur bruuage que dit eft ci deflus. “ Et c’eft aux femmes, qu’ils nomment .4/m à “ compofer amp;nbsp;faire ce bruuage,amp; en conuiét “ volontiers ceux qui les vont voir en leurs“ logettcs,qu’ils appellent 7lt;!pfco«lt;r, amp;nbsp;les au- “ très Sauuages du Brc{i\,Afortugabes'8c vous “ móftrantfigncs d’amitié,vous diront les vns“ apres les autres, ^ntipola Bouaffoutymalé de-^‘ fa, qui fignifie, le fuis ton frère, boy aucc“ nous, amp;nbsp;pren de ce que nous auôs.Et appel “ let pluftoft les François que les Hclpagnols “ à caufic qu’ils ne les aimét point, poureeque“ ils leur ont prins iadis leur femmes amp;nbsp;en-“ fans pour les faire efclaucs : amp;nbsp;les appellent « ^(»/^^«tout ainfi que ceux de l’Antartiquc “
DD.j.
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5, nomment Peros les Portugais, qui me fait s» penfer que ce foit quelque mot iniurieux.
J» Cepcuplc-ci, quihaoite près la riuitre, 35 que les notires ont appelle Seine j font fort 3, bcnins amp;nbsp;affables, aufsi bien que ceux qui 3, demeurent fur la marine, amp;nbsp;fur la riuierc de 5gt; May, où eftoit bafti le fort que les Franss çois y firent, amp;nbsp;le nommèrent la Carolinci 3» t quel fut pris amp;nbsp;faccagè par les Hefpa-a) gnois , l’an mil cin^ cens loixante cinq , le 33 iour failli Matthieu, 1*vingtwitïmc iour •' 3, du mois deSeptébre : amp;nbsp;le vingtfixiefme du '''33 mois comme les navires Françoifes vinf-
33 fcnt,foit dccourfc,ou de recognoiftre Pensa ncmi,i!s fc virent inueftis ficrucllcnjentgt;que 33 i's furent occis, maifacrez amp;nbsp;iettez en Peau. 33 Ët comme deux enflent efié deffaits amp;nbsp;mis 33 à fous ; deux iours apres le Capitaine lean 35 ivlbaut de Dieppe arriva , lequel voyant 3gt;ftsforces inégales commença à parlemcn-gt;5 terauee le chief de l’armée Hefpagnollc : à 3gt; la foy duquel s’eflant fitquot;, fut dtfloyaument 35 occis aucc fon compagnon, amp;. tout le re-53 fie de fa fuite. Ainfi par trois diuerfes def-35 faites,amp; en diners lieux, iaçoit qu’ils fuf-3, fent aucrtis de-la venue de Potizzc qui e-3,fi;oit en campagne, nos gens furent maf-33 facrez iufqu’au nombre de plus de mil-boni gt;5 mcs:Non qu’ilsfoyent tant ireprendre que 35 Ion pourroit bien dire.veu que fachans la 33 venue de leurs ennemis . ne penfans point 35 ccfi.etragcdic3ilsfurcntd’cipiiiion d’aller au 33 deuant.
Mais
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Maisignorans de la fortune, amp;nbsp;trophar- “ dis.il^ perdirent ce qui fc pouuoit bien gar- “ der, s’ils fefuffent tenus fur leurs gardes de- “ dans le lort qu’ils auoyent bafti. Lon dit “ que ce fat pour le fait de la religion, que “ les Hcfpagnols confpirerent celle deffai- ‘quot;^ tc,fuft par rufe ou autrement, deliberans “ la ruine des François, telle qu’ils l’ont exe-“ i . .- . cutee . Mais ic ne fuis pour en deuiner: “ nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;, , bienfav-ic ce que i’enay dit à pluGcurs de “ rncs amis,quientreprindrent levoyagc,amp;“ qui a mon grand regret y font demeurez: ‘‘ amp;■ comme ic leur remondray .le peril au- ‘‘ quel ils s’aloyent lancer, veu le voifinagc “ des terres : foycnt continentes,foyent infu “ laires, defqucllcs les Hcfpagnols fe van-“ tent d’eftreSeigneurs, amp;nbsp;les premiers qui “ ont donne attainted defeouuert ces pays- “ la:lcfqucls ne fouffriront qu’on leur aille “ défi pres vifiter leurs terres du Peru amp;nbsp;de“ Mexique : leur mettant .deuant ce que fi-“ rent les Portugais à l’endroit des noftres “ ,/ aufortdc la rinicre du^Ianaire, où toute!-“ fois ils ne firent pas fi grand mafiaerc, amp;nbsp;fi “ '..^1.,^. ƒ furent allez bien frottez » quoy que nos “ gens fuffent'en fort petit nombre, amp;nbsp;que “ les viures amp;nbsp;munitions leur defiiUilfent. “ Ge quieft le plus à plaindre, âpres la bon- “ nctrouppedcfoudarts,ce font les experts“ Mariniers :qui n’eftpasebofe qui fc puiiTc “ recouurertout.àloifir. ,. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;“ ^I J
Tbeuct parle ici du dcnilcr voyage que “ j j ÜH^ ' fit le Capitaine lean Ribaut cnla Floride, “»'VÔ*'''’'''
DD.ij.
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amp; en parle comme vn clerc d’armes, quand il en luge pari’eutDtmcnt;di/ant, qu’ils per dirent ce qu’ils pouiioycnt bien garder,, amp;nbsp;qu’ils forée trop hardis. le crop que ces bon nesgens-la firent tout ce que vaillans fou-dars amp;nbsp;mariniers expers pcuuent faire en vnc telle extrémité:?i que Theuet euft efté *^ aufsi empefehe qu’homme de fa robbe, s’il s’y fnft troinic en perfonne.
Quant au Capitaine lean Ribaut il auoit Premier defiâ auparauant,à fauoir,l’an mil cinqcens T^-Sf'^'' foixante vn, fait vn voyage affez heureux en i^.n'^Ri- f-^^ tcrrcs-la: amp;nbsp;y auoit bafti vn fort, qu’il h.!Kt, nomma Cha'ks fort.^u nom de du roy Char Icsneuficfinc: dans lequel il auoit laifleió'. foudars fous la charge duCapiraipe Auberti Lcfquclsfc comporteret vn efpacc de teps aflez bien: mais à la fin ils entrèrent cnpar-tialitcz amp;nbsp;diffenfions : dot le commencemet procéda de la mo^rt d’vn foudart nommé Guernachc.Ctftui ci fut pendu parfonpro . ƒ. pre Capitaine, pour quelque faute qu’il a-. • 'uoit faite. Cela fut caufe que tous les com-’• pognons fcmutinercntjamp;’ firent mourir leur Capitaine. Il y eut encor vue autre chofe qui les pouffa à ce faire. Ce fut le degrade-ment d’armes que ce Capitaine auoit fait à vn autre foudard nomme Lachere , qu’il a-uoit i onfiné dans vnc Iflc.
Aprt s la mort de leur Capitaine , ils allé-,. nbsp;nbsp;• rent qucrirlcdit foudart , qui cftoit dâs tne
'' . petite Iflc diftant enuiron trois lieues de Charles-fort, là où ils le trouuerent fi mai-
S^c
-ocr page 65-DE LA FLORIDE. $i grc amp;nbsp;fi deffait, qu’il n’en pouuoit plus. E-Uans de retour dans leur fort, ils cüilcnt vil nome le Capitaine Nicolas pour leur chef, qui s’en acquita fi bien qu’ils vefeurent pai-fiblemcnt pendant qu’ils furent là.Cepcn-dant voyans que les viurcs leur aceourfif-foyent amp;nbsp;qu’ils n’auoyent aucunes nouuei-Ics de France,ils délibérèrent de faire vrt Brigantin pour s’en retourner, encore qu’il n’y euft homme entr’eux,qui en feuft l’art amp;nbsp;la façon. Touteffoisla necefsite maittrefle des arts leur apprit à le faire j en intention de repafler en France , s’ilnevenoitdu fc-couts,comme ouleleurauoitpromis.
Quand le Brigantin fut paracheue, il fallut l’equipper de ce qui eiloic ncceUairé pour le voyagc:commc de cordages, de voiles,d’ancres , amp;nbsp;autres inftrumens de nauirei amp;nbsp;fi ne fauoycnt où en prendre. Comme ils eftoyent en celle perplexité , voici arriuef deux de ces petits roys du pays Ç amp;nbsp;Afaccou fe nômoyent) auec deux cens Sau-uages* Ces foudars vont au deumt d’eux, amp;nbsp;leur font entendre la necefsite où ils eftoy-ent.'Ces roys qui ne demadoyent pas mieux que d’en vuyder le pays, leur promirent que dans deux ioürs ils apporteroyentautât de cordes qu’il en faudroit. Pendant ce temps-la ces foudars cerchcrent tous les moyens de rccouiircr delà poix raifinepât les bois, incifans les Pins amp;nbsp;les fapins ,amp; autres ar-^ bres gommeux,de tous coftez,amp; en tirèrent aflez raifonnaialement pour godronnet U
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vaiffeau : amp;nbsp;firent aufsi amas d’vnc cfpece demoufiTe, pour cftoupcr amp;nbsp;calcfeutrcr Ic vailfcau.il ncrcftoit pins lt;]uele.s voiles.cjue ils firent de leurs chemifcsamp; draps délits.
Quelques iours apres ces deux Roitelets reuindrent,comme ils auoycnt promis,aucc telle quantité de cordes, qu’il y en eut aficz pourfournir à l’equippage du nauirc.En rc compenfc de ce bien les FrançoislcurlailTc-rent toutes leurs ferpes,leurs couteaux, miroirs, amp;nbsp;toutlcrefte de marchandife qu’ils auoycnt. Et quand ils curent appareille au premier bon vent qui furuint, ils fc ietteret en mer. Mais de mal-heur ils fc troiiuerent courts de viurcs amp;nbsp;d’eau douce, parce que leur nauigation fut plus longue qu’ils ne penfoyent.Car à grand peine auoyent-ils cncorcfaitlaticrccpart de Icurroute,qu’ils furentfurprins de calmes amp;de bonaccs de mer fi cnnuieufes, qu’en trois fcmaines,ils n’auanecrentpas vingteinq lieues.
Pendant ce temps les viurcs accourciret, amp;nbsp;en vindrentiufques là qu’ils furent contraints de ne mâger que chaeû douze grains de Milpariour. Encore n’en curent-ils pat: toufiours: de forte que les viurcs ordinaires IcurcEans faillis de tout poinél, il fallut qu’ils fc iettaffent fur leurs fouliers amp;nbsp;fur leurs collets de cuir,amp; les mangèrent.Q^ât au boire , quelques vns efiayerent de taltcr de l’eau de la mcr:mais outre ce qu’elle leur brufloit la gorge, elle leur caufoitvn efeor-chementde boyaux, qui les tormentoit c-ftrange-
-ocr page 67-DE LA FOKIDÊ. j$ ftrangement fans les autres mauxfju’ils a-iioycnt : d’autres aualloyent de leur propre vrine. Outre l’extrême famine amp;nbsp;la foif qui les inolcftoycut,leur petit Vaißeau s’oburic de tous coftez:de forte qu’ils ne pouuoyent fuffire à cfpuifer l’eau qui y entfoit, amp;nbsp;per-doyent toute efperancc de îamaisretioir U France.Etpourlcs acheuerde peindre,il y eut vn flot de mer amp;nbsp;vn vent impétueux qui les vont prendre, amp;nbsp;brifent le vaiffeau d’vri cofté.Les vagues palfoyct par delfus, amp;nbsp;eux netenoyent plus conte de letter l’eau qui les fumergeoit.Touteftois il y en eut vn qui reprit vn peu fes cfprits,amp; leur rriit en anant le peu de chemin qui leur reftoit,les alfeurât qu’auant trois iours(ft le vent continuoit ) qu'ils verroyent terre. Cela les encouragea tellement,qu’apres auoir iette l’eau du bri-emtin,ils demeurèrent encors trois iours fans boire ne fans mâger. Au bout dcfqucls ils retombèrent en plus grand defefpoirque jamais,parce qu’ils ne virent aucune terre* Parquoycn cede extremite il yen eut quelques vns qui propoferent, qu’il cftoit plus expedient qu’vu feul mouruft, que tant de gens periffent. Ils arrefterent donc que ice-Juimourroit fur lequel le fort tôberoit. Ce qui tut execute en la perfonnedu Lâcherez qu’ils tucrent,amp; en partirent la chair également entr’eux tous.Laquelle ils tnangerent toute crue, apres auoir beu fon fang tory: chaud. Chofe qui pourrait faire drclfer left cheoeuxen la telle»
lîD.nij*
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BRIEF DISCOVRS
. En fin apres auoir long temps branlé fur ■ mer. noftrc Seigneur eut pitié d’eux j amp;nbsp;curent la veue de la cofte de Bretaigne : dont ils furent fi trafportez d’aile qu’ils lailferent errer lebrigatin çàamp;là, fans tenir fentier ne route.Pendant qu’ils eftoyent entelcftat,il y eut vne petite Râbcrge Angloife paflage- . re quiapperçeut le vaifleau quiflottoit, amp;nbsp;l’aborda. Il y auoit en cc nauirc va certain Matelot François,lequel auoit efté auec vn
amp; parce moyen les rccognut aifement,amp; leur fit donner à boire amp;nbsp;à manger.Les An-glois furent long temps à confultcr que c’eft qu’ils en deuoyent faire .• mais à la parfin il refolarcnt de mettre les plus debiles en terre, amp;nbsp;emmener le refte en Angleterre, amp;nbsp;les prefenteràla Roync,qui cftoitlors en délibération d’eniloycrenla nouuellcFracc.
Voila en fomme le difeours du piteux voyage de ces pourcs gens, qui experimen-rfeaii.107 terent ce qui eft dit au Pfeaume : Afauoir, que les fols font affligez à caufe de leurs péchez ; tellement qucltur amc ha en horreur toute viande ,amp; viennent iufqu’aux portes delà mort. Adonc ils crient au Seigneur en leur deftrefle, amp;nbsp;il les faune de leurs angoif-fes.
Depuis le Capitaine lean Ribaut,yfut réuoyé,après le Capitaine Laudunicrc, l’an .•«■gt; mil cinq cens feptante cinq, amp;nbsp;y fut maffa-cre villaincmcnt, ainfi comme nous verros aux difeours fuyuans.
Cc
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te
S£ lt;}ftt s'enfuitprejtjue iuf^u'à lafin,eß tire ^vn petit Dtfeours île ce ^ut aduint au liernter vaja^e du Capitaine fean Jithaut, en (repris par le commandement du Roy de France en la Floride. L’a4uteur deceUe petite FhUotrey s'intitule N.le Chaffeux, en fon Fpislre lummai reßei^uel enant de retour de là à ßiepe, d'où tle-ßott, rédigea par eferit fes auentures amp;nbsp;celles de fes compagnons,de n'y ay rien wu/u changenauf' fivaut-il^eaucoup mieux t^uece fait luy-mefme i^ut recin ce ^uil ha veu amp;nbsp;endure', que fi vn au tre le contait par ouir dire.
({te Roy de France enuoye le Capitaine telian Ribaul en la Flo ride. L’enuie vient à plafieurs de faire ce voyage. L'appareil fe fait à Dieppe. Plnfieurs changent de propos, amp;nbsp;fi retirent de rentreprifi.Cefix qu’on peut retiipuuer font ramener, amp;nbsp;con traint s de s'embarquer.
CHAP. 1111.
Sc Seigneurs en fon confeil, * *^ ^lt;^ auparauant que les troubles ? Sc tumultes de la guerre ciui-
D lefe leuaffent en ce Royaume, auoyent arrefté d’enuoyer vnbon nombre d'hommes auec plufieurs nauires en l’y- leRoym ne des contrées des Indes, nommée la Flo- »«y' yne ride, nouucllcment cognuc 8c defcouuerte ‘’™quot; fquot; par les François, Parquoy l'Edit de pacift' “ quot;’” ‘
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tionpublic de l’autorité defamaicftc.Icpro pos Ie continiia:amp; pour exécuter I’entrepri feUcan Ribaut hemme de cœur amp;nbsp;de con-fcil ,amp;granJcmentcxcrcc en la marine, fut made a la Cour,amp; reccut la cemmifsion du Roy défaire equipperfeptnauiresqui por-taflent homes,viurcs amp;’ munitions par delà, I’honorant du titre de fon Licuttnât,amp;chef de tous les gens degu- rrc,qu il auoit commande lener à l’expédition d’vue telle cn-trcprifc:amp; luy fut expreffement de ff^ndu de n’attenter aucune defeente en quelque autre pays ou Idc que ce full, linguliercment en nulle qui fcroitfouslalcigneuricduRoy d’Hefpagne, ains quefinglant lagrand’mer Gcceane,ilhll route droid à la Floride.
Les nouueHes de ce voyage à faire,furent jneórinent diuulguccs partout, amp;nbsp;pluficurs furent perfuadez à felubmettre au comman démet de ce Capitaine , amp;: fous l’autorité du Roy:mcncz touteffoisd’afl'edions diuerfes: car les vus eftoyent incitez d’vu defir honc-ffcamp; louable de s’amneer en la cognoillance dePVniuers, pouren rapporter la feiece telle que le cœur de l’homme bien afsis dc-firc naturellement ,ayans opinion qu’à cela la nauigatfon leur apporteroit grand auâta gedccautris efchaulfezencorcn leur cœur degucrrier,!t pendirent aulsi,a'mans mieux encourir la fafeherie des eaux,que pofans les arme fc rctireràhurpremterecondition.
Ce qui pounoit auf i bié fort inciter les rns Si les autres 5 c’eftoit le bruit qui cou-roit
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roit pardc^à, c’eft àfauoir, que la Floride promettoit le fuffifant contentement de tout ce que l’homme po.urroit defirer en la terre, d’autant que ce pays reccuoit du ciel vncfaucuramp; demeurefmgulicrc, quad il ne lcroit ncglacé negelé de la roidc froidure du Scptcntrion,ncroftiamp; brülle de l’ardeur duMidi:quc les chaps fans eftre labourez ou aucunement exercez, produifent allez dc-quoyfouftcniramp;fufïlfammét entretenir la vie du peuple qui y habiteroit : qu’il ftmble que pour en faire vn pays des plus fertiles amp;nbsp;riches de toute la rondeurdes terres, nefe-roit requis finon qu’hommes dingens amp;nbsp;in-duftrieux cmployalfcnt la bonté- amp;nbsp;graifle delatcrre, à Ivtilitc du genre humain; que ^^ ayant fan eftendue du Midi au Septentrion. “^ nbsp;nbsp;'quot;
quail en pareille longitude que noitre Eu-rope,amp; fa latitude de vingttrois degrez:fou beamoup uent qu’elle eftant frappée des rayons défie lt;^lgt;ofis fon haut Sole-if, reçoit en elle force chaleur, ^lfquot;/’‘quot;’ laquelle touteffois eft temperee» non feule- t,^^j,_ mcntdclafrcfchcurdelanui ou de la ro-fcc du ciel,mais aufsi de gracieufes pluyes en abondance, dont le gazon en dénient fcrti-lt;«yy , lt;. le,voirc de forte que l’herbe forte y croift en hauteur admirable, qu’elle eft riche d’or amp;nbsp;de toutes fortes d’animaux: qu’ayant les champs pleins amp;nbsp;fpaticux,cc neantmoins aufsi fcs motagnes font alfes hautes,les fleu-iiesplaifans à mcrucilles,arbres diuers, rendans la gomme odoriférante. Q^c tout cela côftderé,nc pouuoit autrement aduenir que
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BRIEF DISCOVRS
l’homme,ne trouuaft la grand plaifir amp;nbsp;fin-' gulierc delegation.
Plufieursdonc alléchez de telles promef fes,aucuns aufsi d’vn auare defir de fc faire ri ches en cc voyage,à caufede l’or,fc rendoyet par troupes en cefte ville, où la monftrefe deuoit faire, pour en choifir ceux qui au iuquot; gement du Licutenât du Roy en celle part, fc trouucroyct les plus idoines à continuer l’cntrcprifc.Or elle ne fut pas fi toft mife en eft'ect comeaucûslcdefiroyct,amp;ccux princi paiement qui auoycntrcccu ',cs foudars en leurhoftebcar ils ettoyent ennuyez d’auoir homes quifilfcnt telle chtrefans payer leur efeot, côbien qu’on leur promift auec alTcu rance qu’en bref temps ils feroyent contentez amp;nbsp;fatiffaits. Et furet quatre mois amp;nbsp;plus en celle ville à faire la piaffe, amp;nbsp;finalement ils furent obligez par ferment lolcmnel, de fc porter fidèlement auferuice duRoy,re-ccuansla paye pour fix mois: cc qui ne vint pas au contentement du Coronel. Car enui renie mois de May,qucdcrccheflc dénombrement des hommes le deuoit faire pour embarquer : aucuns de ceux raefincs qui a-uoyent touche la paye,fe formans vnc con-fcience d’vn fi long voyage, ellonnèz aufsi delà fa Ce barbare de la mer, changèrent incontinent leur propos,amp;fe retirèrentfe-cretementfans paffer plus outre«
Or pouf aller au deuant de celle dilfolu-ti'an amp;nbsp;desbauchement d’hommes qui fe pi omcttoitpls furent derechef inilamment appeliez,
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appeliez,amp; leur fut commandé que tout incontinent amp;'à la mefme heure s’embarquaf-fcnt,quifutle dixiefme lourde May: amp;nbsp;de-meurafmesen cefte rade iufques au vingt- -deuxiefme iour durnêTme mois, at tendans quelq lesbcftiails amp;farines.Lc nombre d«s hommes qui montèrent pour le voyage e-ftois de trois cens, compris aucuns artifans aucc leurs TamilIcLEt comme nousattcn-dionslc commandement amp;nbsp;commodité de noftre Lieutenant du Roy » amp;nbsp;vent fauora-b!e,h Mardi vingtdeuxiefme dudit mois nous fafmes affaiUis de vêts impétueux,fouf flans d’vnc part amp;nbsp;d’autre j de forte que les vagues s’entrerencôtroyent d’vne façon in-d)cible,amp; donnèrent telle frayeur à nos ma- • riniers , qu’ils ne tronuerent autre remède ni moyé propre, flnô couper les cables, quit tcrles ancres amp;nbsp;nous abandonner au grc du vent.Le plus violent qui fuft,flat vn vent de Norden, lequel nous chafla de tcllc'viftelfc» qu’incontinent nous volafmcs au Haute de grace, amp;nbsp;là demeurafmes trois iours, atten-dans nouuelles de Dieppe , par vn brigantin que nous y enuoyafmes cxprcs,amp; puis nous apparci'lafmes de cefte radc'le vingtfixicf-nie du tnefme mois. *
Et comme nous tendions à fingier droit à noftre route, nons trouuafmes incontinent vent contraire, amp;nbsp;nous comanda d’al-lçrtcrriramp; poferles ancres enVIfle d’Wich, l’vnc des contrées d’Angleterre, oùles An-glois voulurent cognoiftre de noftre entre-
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prifc:amp; nous ayans cognus s’oftrircta nous faire plaißr.Or du jour que nous arriuafnics là,qiiifut le ?8,dece niois5nous y demeuraf-incs ancrez iufquesau 14.de luin» amp;nbsp;le iour mefmc nous cufmcslc vét Nordeft à fouhait ^ leuafmcs les voiles pour chaffer droit à la Floride, laquelle nous appetios comme vnc nouucllc Fracc. Et demeurafrnes fnglans la grand’incr Occeanedeux moistntiers, pre mierque peufsiós auoir aucune cognoiflan-cc des terres de la Floride, refente l’vnc des la ^^‘'quot;'^jpcs des Entiles, appellees des paifansTof«-tou^HfsSien François la grand Lucoile : aucuns des noftreslavoulurct appelcrdunom de Catherine la roinc mere du Roy;amp;difct lt;iu’c!lc eft de 27'degrcz de latitude.Nous trounafmes aufsi quelque nauireà deux ces lieues de l;iversPeau, mais nousne l’appro-chafmes de plus près que de trois ou quatre lieues.
^ia poltede France arriue enta Plonile.De la moJt JefhatH kneens, les coieslutnesdes -viainlesje lgt;ruu.:ge, 11 Reli^iitn dt ceux de la Ftertde. Des Crocodiles amp;nbsp;Çei'^iens youlans qiû y font. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;C11 A P. V.
Ors que nous fufmes arriuez en la terre de la Floride , qui fut Icquatorfiefmc d’Aouft, ? nousappcrccufmeslc feu que les Indes nous fâifoyét: Nous tnuoyafmes le brigâtin qui defeouurit vnc petite riuicrc,amp; audeflus dej’emboucheu-
rc,
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rc,s'y trouurrent quelques Saunages qui troquerent quelque argent à la marchan-dife que nous anions portée de ce pays?amp; difoyent que l’argent leur cltoit demeure de . nbsp;nbsp;^^^^
vnnauire làefclioue',renenant des Entillcs.^v '‘ Mousy trotmarmes anfsivn feulHefpagnol, efehappé d’vn naufrage, il y auoit vingt ans palfcz,lequel nous recneillifmes avec nous, amp;nbsp;nous enquifmes s’ilauroit entédu quelque chofe des François, amp;nbsp;où ils pourroyce dire campez. Lequel nous refpôditne néfa uoirautre chofe q ce qu’il auoit entedu des Saunages .•c’eft qu’ilscHoycnt placez à cinquante lieues plus Nord que le lieu où nous allions terri.
Or de là nous rcfinglafmes loin an long de la code,qui nous fcmbla balle, amp;nbsp;là terre fabl0ncnfc,plantecd’arbres fort petis:amp;y font aufsi les mareesq viénent du Su filed,af fez pctitcs:amp;à mi chemin de là nous defeou urifmes vnc rinicre 4 nos gens auparanât a-uoyct appellee la riuicre de May,où incfmcs ta nuiefi ’ les marées ne font grandes, qui viennent du ^^‘y^ Nord Nordeft, amp;nbsp;peut-on voir à caille de la baffe eau la boubue des âcres,amp; auôsefprou ué qu’à trois ou quatre lieues de la terrc,n y ha que fix ou fept brafles d’eau ou enuiron.
Il me fouuient aufsi qu’entre la riuiere de May,amp;vn autre qu’on appelle d’Ay,nous en cognufmes vnc autrequi demenre Nord de Celle de May,enuiron 2.lieues. Et là mouillas l’ancre chafque nuit à huilt;9: ou neuf braf fcs d’ean, trouuiós fons de fable, aucuncfois
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BRIEF DISCOVRS
lariuitrt degrauicr,amp;: aucuneftois de vafc.Nous foil' des Dan- dafmesaufsila'riuicrc'dcsDauphinsJatrou '”‘‘ uafmes haute fur la barre de deux braffes-' niais la mer y croift de ^.qjuartiers de bralfe-' quot;nbsp;Et apres que nous eufmes le long de la cofte regarde à dcfccndre,Ie vingtfeptiefmc d’Aouft nous vinfmes mouiller a la rade de , la riuiere de May,àfept braffes d’eau,demeu rans de l’eau à la terre cnuiron deux lieues-Le Mecredivingtneufiefme du mefmcm®is ■ nous entrafmes trois des petites nauires, amp;nbsp;forte/« la j-J^gfPgß^gJ ^ J^QPJ J^ j-jyjçjp^ JppJf 2^ Pyj-f Caroline, j^ j^ Caroline, que nos gens auoyent au' parauantbafti pour leur eftre lieu d’affeu-race amp;nbsp;de retraite, place affez comode, tant pour la riuiere qu’elle a d’vn cofte amp;nbsp;lebois derautre,qui u’eftdiftant que d’vn bien petit quart de lieue, amp;nbsp;le champ entre le fort amp;nbsp;le bois, amp;nbsp;vn coftau fort plaifant tout cou uert d’herbes fort grandes amp;nbsp;cfpeffes.Et n’y a chemin au bois nnon que delà largeur de Y vn pas d’homme, que nos gens auoyent fait pour aller à la fontaine dans le bois.
Quant donc nous fufmesarriuezpres de celle placc,noftre Lieutenant fit defeharget amp;: porter les viurcs au fort, amp;nbsp;autres munitions pourrccreerla place, amp;nbsp;comanda que nous artifans,femmes amp;nbsp;pctis cnfans y allif-fîôs:amp; nous y fit côduire par le ficur (fVlly, de Beaucaire amp;nbsp;autres,aufquelsaufsiil bailla la garde de fon plus précieux bagage. Ceux qui nousattendoyent aiïFort, furent grandement rcfiouîs de noftre vcnue,car ils eftoyent
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cRoyent angoiflez amp;nbsp;troublez d’eftre fi lôg temps fans rien ouïr de la Francc:amp; qui plus augmentoitleur douleurjils cftoyent fans viures,finonqu’ils fe voulufTcnt renger à la façon deviure dcspaifansfauuages,defquels encor’nc pouuoycnt-ils rien auoirjfinon parcourfesjaueeforce amp;nbsp;violence,comme plus amplement nous dirons en fon lieu.
Orquand nous fufmesde feiour,leçon-' fideraylaforme deshabitans delà terre,qui me fcmblabonnc amp;' aflez Tiumamc: caries ^^^^j,^^ hommes font droits amp;nbsp;qnarrez,amp; d’vn teint Florae. tirant au rouge. l ay entédu qu’ils ont Rois en chafque village, amp;nbsp;pour ornement ils ontle cuirmarqueté d’vnc eftrange façon. Ils n’ont aucun accouftrctncnt.non plus les homes que les femmes : mais la femme ceint vnpetit voilede pelifle de “Ciofou d’autre ƒƒquot;'p7 animal,lenœud batant le eolte gauche iur j^j^p^i,^ lacuinc,pourcouurirla partie de fa nature làctrf. laplushontcufe.lls ne font ne camus nclip-pus,ains ont le vifage rond amp;nbsp;plein,les yeux afpres amp;v’goureux.ils nourrirent leurs ehe ueux fort longs, amp;nbsp;les trouffent propremet àlentourdt leurs telles ; amp;nbsp;celle troulfe de cheueux leurfert comme de carquois à porter leurs fl.fehes quand ils vont en guerre: c’en meruciUes que foudainement ils les ont en main pour en tirer loin, amp;nbsp;droit au polsiblc.
Q^antaux mœurs,ils font dilfolusjils n’enfeignet point leurs enfans amp;ne les cot‘‘'^^^quot; “ rigent aucunement. Ils prenent fans con-
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^OM/c/j ri»»-
fcicncc, amp;nbsp;s’attribuent tout ce qu’ils peu-iient fccrctemét emporterrehacunha fa fern me propre,amp; gardent le mariage,voire aucc toute rigueur: ils vont en guerre contre les pays frontiers,qui font de diuers langages. Leurs armes les plus infigncs , font arcs amp;nbsp;flefches;leurs demeures font de figure ronde, amp;nbsp;quafi à la façon des colombiers de ce pays, fondées amp;nbsp;eftablics de gros arbres, couuertesau deffus de fucillcs de Palmier, amp;nbsp;ne craignent point les vents amp;tcmpcftes. Ils font fouuét fafehez de petites moufebcs, lefqueilcs ils appellent en leur langage yl/4-■ nnç^ont: amp;. faut qu’ordinaircment aux mai-fonsilsfaeentfeu, amp;nbsp;expreflemet fous leurs lits, à fin d’eftre deliurez de cefte vermine. Ils difcnt qu’elles picquentfort afprement, amp;nbsp;la partie de la ebairtouebee de leur mor-fure dénient comme celle d'vn ladre. Ils n’e-ftiment rien plus riebe ou plus beau,que plu mesd’oifcaux de diuerfes couleurs.Ils ont engrâd prix petis calcules qu’ils font d’osde poi(rons,amp; autres pierres verdes amp;nbsp;rouges.
Ora!» tl Ifl FloriJt
Leurs viurcs font racines, fruits,berbes amp;' poiffons de diuerfes fortes, amp;nbsp;le poiffon leur eft fort gras qu’ils foriffent, amp;nbsp;l’appellent en Icurlanguc ßatt^uaue'.üs en tirent la graiffe amp;nbsp;s’enferuct au lieu de beurre ou de autre fauflc.lls n’ont pas du blé,mais ils ont le Mil en abôdance, {geroiftà labauteur de ’ f pt picds:ils a fon tuyau gros comme celui ' d’rnecanne, amp;nbsp;fongrain cllgros comme vn pois, l’efpylong comme d’vn pied , fa couleur
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leur ed a'infi que celle de la cire recente. Le moyen d’en vferert premieremet delcfroiC-fer amp;nbsp;refoudre en farine , puis après le def-font par mcningc,amp; en font leur Aïi^an,qui relTcmblc le ris que Ion fert en ce pays. Il le faut manger anfsi tod qu’il cd fait, pource qu’il fe cliange incontinent, amp;nbsp;n’cd point degardc, lis ont force vignes badardes,ram f^'^w pantes à l’entour des arbres, ainfi que nous voyôs en quelques cotrees de ce Royaume, mais ils n’ont point l’vfagc d’cntirerle vin. Leur boilTon qu’ils appellent Ca]finet,fc fait d’herbes compofecs : amp;nbsp;m’a femblc de telle couleur que la ccruoifc de ce pays:i’cn ay goudé,amp; nel’ay point trouuc fort edrange.
Quant au pays il mcfcmble montucux,amp; y ha beaucoup de forcds:qui peut bien edre caufe de tât de bedes fauuages, Icfquclles ils difent porter grande nuifanec à ceux qui ne fe dônent gardc.Ie lailferay à dire beaucoup de chofes des animaux cdrâgés.defquels feu leraent i’ay ouy parler. Ce m’ed allez de raconter ici ce que i’ay veu , amp;nbsp;qui mefembie digne de mémoire pour la podcritc:amp;fmgu cmcodH-liercmcnt des Crocodiles que Ion voit af- ks de la fez fouuentfortir du fable pour aller à leurflquot;'‘l'- , proye.Nous en auons veu pluficurs,mcfnics vn mort;amp; auôs mangé de fa chair,qui nous fenibla tendre amp;nbsp;blanche comme celle d’vn veau,amp;quafi demcfmcgoud.il auoit ede tué d’vn coup de harquebouzade,porté entre deux efcaillcs:quc s’iln’eudcdé là frappé,fcs efeaiUes autrement font alfcz fortes
EE-Ü.
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pourlcs garentir de tous coups.Hauoit la glide fort grande, ^ les jnafchoires rcnucr-P-es d’vne horrible façon,defqucllcs les déts s’cntrctenoyent ainfi qu’vn peigne : amp;pou-uoit ouurirla gueule alTcz grande pour dévorer vnegeniflc, ll cftoitlong de corps de douzcatrezcpiedsdl auoit lesiambes fort courtes ? la proportió du corps , fes ongles ellranges amp;nbsp;cruels,la queue forte amp;nbsp;longue, enquoygiftamp; confiftefa vicamp; fa principale dcffenle.Aufsi ien’iy veu en fa gueule aucune apparence de langue, fl ellcn’cftoit ca chee en fon palais. Car il auoit (comnie i’ay dit) la mâchoire de deflous defius, choie monftruciife, amp;nbsp;qui feulement à regarder pouuoit donner frayeuraux hommes.
l’ay vtuaufsivn ferpent mort,aircz près ^frfefn- dubois, qui auoit ehe tue par l’vn de nos ‘‘”“' gens,duquel les Saunages vindrent coupper la tef!-e,amp; 1\ mporterent avec vn grand foin amp;nbsp;diligencc;ic n’ay feu fauoir la raifonpour quoy. Il auoit ailesparlcfqucllcs il pouuoit aucunement voltiger fur la terre. Aucuns desnoftres eflimoycnt que les Saunages fai foyent cela par quclquefuperftition, amp;nbsp;à ce quei’en ay veu, ils ne font pas fans opinion de diuinite';mcfmcs aufsi ay-ic prins conic-fturc de quelques circonftances, que facilement mies pourroit dreflcr,non feulement à ciuilité amp;nbsp;honneftete , mais aufsi à fainCtetc amp;nbsp;religion, fi le decret du Seigneurie pcrmcttoit:car aufsi tort que la elo chedufort auoit fonnepour faire les prières
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(?
resells fc trouuoycnt en la place : amp;nbsp;là corn- ^‘’xi‘‘get menons drefToyent les mains au ciel, voire quot;quot;' fue rmen auec reuerence amp;nbsp;attentions nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;„ j^
^Cintj aauires eßf t^cls arrixrnt m la floriiie- tu ff/ßiagnoli fiirfrentnt le fort lits Frant^ois aaiejpourueuy ^ ßmfm horrible ma/facre de tout ceux qu'ils y trouvent.
CHAP, VL
E tempi pendant noftre Coronal eftoit après pour s’acquitter fidèlement de fa char ge,amp; donnoit ordre que la place fud tellement rempa-
ree amp;nbsp;munie, qu’elle feruift apres de faune-garde, fi d’auentureles Saunages nous euf-fcnt voulu courirfus: lofs que le Lundixrojf iefme de Septembre, arrinevent près de rio-ftre equipage cinq nanircs Hefpagnolsd’A- statte de mirai fe tnonftrant à la grandeur de quatre f^'^JP‘‘£’’^ censtonneawx,labarquede cent cinquâte, ‘iquot;'p‘i„{^^ fuinis de trois Patences qui vindrent mouil 1er l’ancre a l’enfonfcurc de nos quatre nain rcs,enuiron les neufheures defoir.Lanuift ils parlementèrent enfcmblc : amp;nbsp;fur ce que les nioftres demandèrentpourquoy amp;nbsp;à qucj le fin ils les cerchoyent : refpondirent qu’ils eftoyent ennemis,amp; que la guerre eftoit fuf-fifammentdeclarce. Lors lesnoftres regar-dansa la force des Hefpagnols, àlcurcnuiLe amp;nbsp;maunais voloir, déshabillèrent amp;nbsp;mifenf les voiles haut, amp;nbsp;IcsH cfpagnols firent chai
Ét,iij,lt;
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fc après eux : mais ils ne les pcurent auoîr à lavoile.Parquoy ihfc retirèrent en la riuie-rc des Dauphins,car là ils auoyent délibéré de faire defeente, apres auoir communiqué de noftre ruine aucc le Saunage,comme l’if-fue de leur entrcprinfcl’ha fait finaicmet co gnoiftre. Et de celle riuicrc cnuoycrent de leurs hommes par embufeades,autant qu’ils penferent dire de necefsite pour executer îcurentreprinfe. Et auôs depuis entédu des Saunages,qu’ils eftoyent en armes cnuiron fix cens homes.Toll après trois denos naui rcs reuenus àla rade,caria Trinité noftre a-miralc auoit efté emportée vers l’eaude capitaine IcâRibaut fc délibéra aucc ces trois d’aller trouner les Hcfpagnols:apres auoir refolu cnfoncôfcil qu’il eftoitnccelTaire de femóftrer contre eux furies caux,finon que nous voulufsions cncorir la perte de nos yailTcaux.Car nos homes eftans à terre,rien ne les euft empefehe d’aborder nos nauircs, amp;nbsp;de les crocher, qui nous fcmbloit vnc per te intolcrablc:ponr ce regard principalcmct c’eft à fauoir que n’aurions pour l’aducnir commodité d’enuoyer en Francc,pour faire entedre à la maieftedu Roy,de l’eftat de no lire entreprife. Parquoy le Lundy dixicfmc lourde Septembre,trois heures après midi, le Capitaine amp;nbsp;Lieutenatde Roy voulut rc noir fcs hómcs,amp; apres les auoir enhortez de bien faire pour le feruice du Roy, s’embarqua cnfcmblc aucc eux ; prenant pour fa dcfFcnfe,non feulement les Soldats qu’ils a-uoyent
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üoyent nouudlemcnt amenez, mais aufsi les plus fignalezdc ceux qui tcnoyentla place auparauant,nommément l’cnleignc. Caporal amp;fcrgcnt du capitaine Laudunicrc. Ce Capitaine ennuyé de n’auoir entédu nouucl les deFrâcc,amp; fafehé d’ettre priué deviures, vn peu auparauant que nous fufsions la arri ucz penfoità rctourncr:amp; cependant ne fa foucioitbcaucoup ficeuxdefa compagnie faifoyent chofes aux Saunages, dcquoy leur 1“ ^’•^»-bonncaffeélionfc deftoumaft des Fraçois: p^^^^’^^ ains il les permettoit forcer amp;nbsp;amener pri'^ei «wr« fonniers dans le Fort, prendre amp;raHir leur eitx. Mil amp;nbsp;autres chofes,que la necefsité laquelle ne peut eftre fous aucune loy, leur coman doit.Et d’autant que le dcflr de fe venger eft naturellement planté au cœur de l'homme, mefmes aufsi l’appétit commun à tous ani^ maux de fe deffcndrc,fon corps amp;favie,amp; de dcftournerlcs chofes qui fcmblét oppor ter quelque nuifancc, il ne faut douter que ce Saunage ne complotaft amp;pratiquaft aucC rHcfpagnol,commc il fe pourroit deliurcr de cefte gent, de laquelle il cftoit amp;nbsp;en fon corps amp;nbsp;en fes biens trauaillé.
Le Mardy onziefmede Scptcbre,àhuiâ; heures dumatin ou enuironjors que nos gens cftoyent alTcz près des Hcfpagnols, fe leua vn tourbillon de vent quicontinualôg temps,aucc grolfcs pluycs, e(clairsamp; tonnerres,de forte qu’à la fois Pair cftoit corne enfeu, amp;nbsp;les parties eftrayecs des menaces du ciel s’efcarterét;le$ noftres trois nauircs EE.üij.
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furent contraints de ponger, amp;lcs autres Amiral amp;nbsp;barque Hefpagnole,dc faire le vêt bon)amp; dura la malice de ce temps iufques au vingt troificfme lourde Septembre. Or les Hcfpagnols defeendus à terre curent af-fcs de loifirdc nous tfpionncr,amp; m.fmes de s’informer des moyens qu’ils tiendroyet poumons furprendre, cftans bien aduertis que nos forces eftoyent furies eaux', amp;nbsp;que le refte ^ui cftoitdemeure au Fort,eftoit compofe partie de malades , encore altérez de l’air de la merpartie aufsi d’artifans, de femmes amp;nbsp;petis enlâns : le tout montant au nombre de deux cens quarâte âmes,recommandées àlagarde amp;nbsp;diligence du capitaine J Laudunicre, qui ne fe doutoit aucunement qu’aucune force peuft venir parterre pour les endommager.
Parquoyla garde Icuce pours’enallerra-frefchir,à caufe du mauuais temps qui auoit côtinue toute la nuicl, vn peu deuant folcil lcuâr,la plufpart des noftres au fort dormâs amp;.'cn leurs lits le guichet ouuert, l’Hefpa-guol ayant tracaflebois, eftangs amp;nbsp;riuicres, conduit par le Sauuage, amp;nbsp;arriuc le Icudi vingticime iour de Septembre au matin , temps fort pluuiciixrentrcnt fans nulle refi-ftcncc dans le Fort,amp;font vnchorrible exe cution,dcla ragcamp; furie qu’ils auoycnt con Maffacre ccuc contrenoftre nation. C’eftoit lors à dts Frtin- . nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;• i « r- •
t.0u en la ^“’ mieux mieux elgorgcroit homes , fains flornte. ^ maladcSjlcmmcs amp;nbsp;petis enfans, de forte qu’il n’cftpoffiblc de fongervn malfacrc.
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quipniffe tftre cfgalc à ccftui-ci,cn cruauté amp;nbsp;barbarie. Aucuns des noftres les plus habiles fortans de leurs lits s’efcoulcrent, amp;nbsp;fc fauucrent de viftefTe dans leurs nauires qui eftoyent en la ri niere, lai liez du Coronal à la garde de laques Ribaut,capitaine d’vn na uite,nomme la Perle, amp;nbsp;de Louis Ballard fon Lieutenant : les autres furpris fautèrent pardeflus la pali(rade,fingulicremcnt le capitaine Laudunicre fcfauuaparlà, auec cel le qui le feruoit à la chambre.
le fu aufsi furprins allant à ma bcfongne, -le ^rmoiràla main. Carfortant delà caba- '* ne le rencontray les ennemis, amp;nbsp;ne trouuay , autre moyen d’efehapper, finon tourner le ^ doS)amp;me hafterau pofsible, dclautcraulsi par deflus la palifladexar i’eftoye aufsi pour fuiuy dcpas à pas d’vne picqucamp; pertizane, amp;ne fay comment autrement,finon de la grace de Dieu, mes forces fe redoublèrent: demoy,di -ie,pourc vieillard queiefuis ,amp; toutgris:toutcffois iefautay le rampart,ce qu’à loifr ie n’culfc peu faire en rampant, carilcftoit efleue de huift à neuf pieds, amp;nbsp;lors ie me haftaydc me fauuer au bois. Et comme i’eftoye alfez près de la riüe du bois, a la diftance d’vn bon trait d’are, ie me rc-tournay vert le fort, amp;nbsp;m’arreftay vn peu de temps fur la cofte,d’autant plus hardiment, pourcc queperfonneneme pourfuiuoit. Et comme de ccd endroit tout le fort, mefmes la balfecour mefut defcouucrtc, aufsi vi-ic làyne horrible tuerie, quifefaifoitde nos
-ocr page 86-74 BRIEF DISCOVRS gcnsgt; amp;nbsp;trois cnfcigrics de nos aduerfaireJ plantées fur Ies ramparts. Ayant donques perdu toute cfperance de voir nos gens ral' licz,ie rcf gnay tous mes fens auSeigneur.A me recommandât à fa mifcricordc gt;nbsp;grace amp;nbsp;faueur.ic me lançay dans le bois. Car il mc fcmbloit que ic ne pourroyc trouucr cruauté plus grande entre les belles fanuagcs.qiif celle des cnncmisdaquelle i’auoye vcu fe def border fur les noftrcs.
Or la mifere amp;nbsp;angoiffe en laquelle le me . trouuaylorsprelTc amp;cnfcrrc,ne voyant plus * ’* • en terre moyen de falut, fnon que le Seigneur de grace fpcciale, amp;nbsp;par dclTus toute opinion d’homme me deliuraft : me faifoit ietter foufpirs amp;nbsp;fanglots ,amp; d’vne parole rompue de triftclfe, crier ainfi au Seigneur: Ceux (jui Ç) Dieu de nos pèresgt;amp; Seigneur demiferi-'^quot;arlê^de- coi'dcjqui nous as commade de t’inuoquer, /cru crut mefmesdu profond des enfers amp;nbsp;des abyf-iw/cr^jmes de mort, promettant incontinent ton «lictir « aidefe: ton fccours:monftre-moy pourl’cl-teurcleßre peranec quci ay en toy, quel chemin ic doy dèliwede fc^ir,pour venir à fin dcccftcmiftrable vic-Inn M- illelfe,plongée au gouffre de douleur amp;nbsp;d’a-2o‘JJfs-T[i- mcrtumc:aumoin«fay quefentant l’effet de '°7- nbsp;nbsp;nbsp;la merci,l’alTcurancc que i’ay de tes promef-
5’ fes conceiic en mon cœur, ne me foit arra-
” chee, pourl’apprchcnfion de la cruauté de ” ces belles fauuagesamp; furieufes d’vn collé, amp;nbsp;” de tes ennemis amp;nbsp;les noftrcs d’autrc:q. nous ,, en vuculct plus,pour la mémoire detónom j „ quieft inuoqué fur nous, que pour autre ’ chofe:
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choft:Aide-moy,monDieu.afsiftc-moy,car “ '^ iefuis tant affligé que plus n’en puis. Et ce-“ pendant que iefaifoyc ce difeours, traucr-^ fant le bois fort cfpcs.amp; comme tiflu de ron ccsamp;cfpincs,au deffous des hauts arbres, ^ oùil n’y auoit chemin ne fentier aucun:à peine auoy-ie tracafféle chemin de demie heure,quand ievins à entendre vn bruit, ƒ comme de pleurs amp;nbsp;gemifTemens d’hommes qui cftoyent à l’entour demoy.Etm’auan-çantau nom de Dieu amp;nbsp;en la confiance de ' fon fccours,ie defeouuri l’vn des nofircs, nômé le fieur de la Blonderie, Se vn peu arrière de luy,vn autre,nômé maiftre Robert, J nbsp;alTcz cognu de nous tous, d’autant qu’il a-
uoit charge de faire les prières en nofire ' nbsp;fort.Toft apres aufsi nous trouuafmes le la
quais du fieur d’Vlly, le neuen de monficur le Beau, maiftre laques Toufe, amp;nbsp;plufieurs * autres. Et nous aflemblez côferions de nos miferes en commun,amp; deliberioms de ce '• que nous auiôs à faire pour faiiucr nos vies.
L’vn des noftres aftez eftimé, d’eftrcfort ex [ ercécnla leçon desEfcrituresfainftes, pro-pofa quafi en cefte paniere.
Freres, nous voyos en quelle extrémité “ ? nous fommes:quclque part que nous tour- “ , nions les yeux, nous ne voyons que barba- “ rie. Le ciel,la terre,la mcr,lesbois, les hona “ ‘^ mes:bref,ricn ne nous fauorifc. Que fauons ‘t nousü nous rédans à la mifericordc de l’Hcf ‘‘ pagnol, il nous fera grace? Bien encor que «t il nous tue, ce fera pour fouffrir yn peu de «
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„ temps : ils font hommes , amp;nbsp;ce peut f»gt;** ^ ,, que leur fureur appaifce,ils nousrcccuroi’'
„ à quelque compofition ; autrement qf’ „ pourrions-nous faire? Ne vaut-il pas miev’
„tomber en la main des hommes» qu’en'’ j „ gueule des belles fauuages, ou bien fe laif ,, fermourir de faim en celle terre eHrangi^ * Apres qu’il eut ainfi parlé,la plus part de n® J ftre compagnie fut de fon aduis, amp;nbsp;loua foU * confeil. Nonobllant queie rcmonUralftl’ cruauté encore toute fanglante des aduerß*
vnccaufc on debat humain qu’ils auoyen' execute' d’vue telle fureur leur entreprift' mais principalement pour raduertiflemcilt qu’on leur aurait donné, que nous feriofl* de ceux qui feferoyent reformez à la predi' cation de l’Euangile : que nous ferions laf ches de regarder pluftoft aux hommes qu’J Dieu J qui fait viurc les fiens au milieu de h mort, amp;nbsp;donne ordinairement fon afsiftcH' ce,Iors que l’cfpcrance des hommes défaut Aufsi allcguoy ie quelques exemples de rEf criture à propos, de Iofcph,dc Daniel, d’E' lie amp;nbsp;des autres Prophètes,mefmes des Apo Ares, comme de fainét Pierre amp;nbsp;de faind Paul: qui tous ont efté tirez hors d’affi' Ôinn,voircpar moyen extraordinaires amp;nbsp;t' ftranges au fens amp;nbsp;à la raifon de l’homme: fon bras,difoy-ic, n’eft amoindri ni affoibli aucunement, fa main eft toufiours vue. vousfouuicnt-il point difoy-ie, de la fuit' des Ifraclitcs deuant Pharao ? Quelleefp'' ran''
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DE LA FLORIDE.
^ rance auoit le peuple,d’efehapper des mains dI dccetyra,puiflantamp; cruel? Illeurmarchoit ( quafi fur les talons, dcuant eux ils auoycnt jj lamcrgt;aux deux coftczles montagnes inac-|j cefsiblcs. Quoy donc? Celui quihaouuert p la mer pouf faire la voyeà fon peuple, amp;nbsp;j) pourpuis apres engloutir fes ennemis,ne ^ pourroit-il nous c5duirc parles lieux chain 1^ peftresdece pays eftrange?
|1 QdPy ^^’^ ^^ tinfc tels propos, fix de la erase ^a» ^ compagnie, fuyuirent la prcmiercpropofi-‘’'”’quot;’‘ tion,amp;nous abandonnèrentpourfe reti
^( rcr a la part de nos ennemis, elpcrans trou ■ tt^mesque ,, uergracedeuant euximais ils cogneurent in à Dieu, '( continent,amp; par experience, quelle £oiicß'*^^'»quot;' ^ c’eft defefier p'us aux hommes, qu’aux pro ^‘’^ p méfies du Seigneur. Careftans fortis hors p le bois comme ils defeendoyent aufort, ils ,j furent incontinent faifis des Hcfpagnols,amp; |j traiteez à la façon des autrcsâls furent donc ^^‘^’■gez amp;nbsp;mafiacrcz,amp; puis trainez au J, bord de la riuicrcj où les autres tuez au fort
.( eftoyentparmonceaux.
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^I« Heffiaÿtiils gomment les Fram^ois qui reîîiyeutj de fi ren ^‘•^ François le refrfint.Les autres Jefilsarvtnt leur rare fur les morts. CHAP. V II.
« Enevueil pas ici me taire de vn exemple d’extreme cruau-té, laques Ribaut,capitaine de la Perle, tenoit fes nauires ^ à l’ancre,à cent pas près de cefteboucherie,où ilrcceut beaucoup de
-ocr page 90-78 BRIEF DISCOVRS ceux qui efehapperent de cefte tuerie. Of les Hcfpagnols ayans 1e cœurgros à cauf^ de leur viÖ:oirc,amp; acharnez à partner le rc' fie des François, braquèrent les Canons digt; Fort contre les nauircs amp;nbsp;barreaux ; mais » caufe du temps pluuieux, amp;nbsp;que les Canon« aufsi eftoyent mal appreftez,ilsne firent au' cun dommage à nos gens:mais ils firent mal icjNefia c^‘cgt;'vue trompetteiufques-à eux pour le« ^nolsfla- fommer defe rendre. Et quad i s virent que ntksgti, cela ne lesintimidoit aucuncmct,ils enuoy ejuand Hf crent vn de leurs hommes iufques aux naui' ^ifat^T *‘^®*™®^^®quot;ff ‘f” allant l’autorité de Dom Pe quot;tir for ‘^*^‘^ *^^ Maluendo, Coronal de leur compa' foret. nbsp;nbsp;nbsp;gnic, pourcompofer auce nos gens, à telle
condition qu’ils quittaircnt les nauircs ,amp; qu’ils le rctiralFcnc auce les batteaux ,leurs bagues faunes,aux autres nauircs qui eftoy-ent bas a l’embouchure de la nuire ,diftant du Fort cnniron deux lieues. A quoy nos gens refpondirent , qu’ils n’entcndoycM qu’il y euft aucune guerre entr’eux:que de' puis fix mois ils auoyent reeen commande* ment du Roy pour faire ce voyage:quc tant s’en faut qu’il fuft entrepris ponr faire tort ou exaétion à aucun, quand il leur eftoit er prefTémétdefFendu de famaicftc,amp; mefraes de fin Amiral,de ne faire defeente en aucu* ne terre d’Hefpagne, ni mefmes en appro* 3» cher,de peur de les offenfer. Nous anosgar* 3, de amp;nbsp;obfcruéinuiolablement le commande 3, ment du Roy.Et nepounez dire c5trc nous, » que nous ayons eûc wufe du maflaerc que - - nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;vous
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DE LA FLORIDE. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;7?
VOUS auez fait de nos hommes, contre tout “ vfage de guerre : ce qui nous fait feigner le *' cœur,amp;dcquoy pourrez bien vous reden-“ tir en temps amp;lieu.Quât au nauire que vous “ demandez,vous auries pluftoft nos vies •. amp;nbsp;“ où vous nous voudriez parforcer, nous em- ‘' ploycros le moyen que Dieu amp;nbsp;nature nous “ a donné pour nous défendre. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;‘‘
L’HefpagnoI retourne' rapporta que nos gens ne fc mouuoyent pour rien, aihs qu’ils cdoyet délibérez de fe bien deffendre.Lors ceftefurieufe troupereietta fa colereamp;fan-glant defpit fur les morts, amp;nbsp;les expoferent en monftre aux François qui reftoyent fur les eaux , amp;nbsp;tafehoyent à naurer le cœur deceux,defquclsilsnc pouuoyent, comme ils euffent bien voulu,démembrer les corps. Cararrachansles yeuxdesmorts, lesfichoy ent au bout des dagues,amp; pu is aucc cris,hur lernens amp;nbsp;toute gaudificric, les iettoyent contre nos François vers l’eau.
t t ( J
^Q^^ws Frani^ii elchafipmiu ma/Jaerf ,guignent le rluàgé de la mer^ rencontrent quel^nes vns de leurs compagnon}.
CH A P. VIH.
Vanta nous qui demeuraf-mes au bois,nons continuaf-mes à traucrfer, tirans àno-ftre iugement au plus près de lamer. Et comme il pleut à Dieu conduire nos pas amp;nbsp;dreffer nos voyes.
-ocr page 92-So BRIEF DISCOVRS bien toft nous paruinfmes à la croupe d’viic montagnes amp;nbsp;de làcoinmcnçafmesàvoirla les FM«-mer-Mais il y auoit encor grande diftaneC) •^ouefebap ^ q^,j pj^ eftoit, Ic chemin que nous auions ^tMins dei^ tenir fc monftroit merucillcufcment c-Ht/f,^ ftrange amp;nbsp;difhcilc.Prcmicremcnt, la monta ^naij,com gnc,dc laquelle dcfccndre il nous eftoit ne- ; ‘^‘^‘ent Lt celFairc j eftoit dételle hauteur amp;nbsp;fi roidc» i lt;it^7imx ftu’ft'l’^ftoftpo^^iblc àhommc,cndefccn- ' ’ eîantfe tenir debout,amp; iamais n’eufsions o- j , fc nous mettre à defeendre, fans l’cfpcrancc I que nous auions de nous contretenir par J les branches des buiftons, qui eftoyent fre- ( qucns furlccoftau de la montagne, amp;nbsp;pour / fauuerla vie,n’efpargnanspoint les main’, j Icfqucllcs nous auions toutesgaftees amp;nbsp;fan- î glantes, mefmes lesiambts, amp;nbsp;quafitoutlc | corps defehiré. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;i
Ordefeendus que nousfufmcsdela mon t9gnc,nous perdifmes la veuede la mer,à caufed’vn petit boisquieftoit côtrenous» planté fur vncpetite colinc: amp;nbsp;pour allcraU ' bois il nous falloir trauerfer vnc grade pree toute devafcamp; defondricrc,couucrtexdero , féaux amp;nbsp;autres fortes d’herbes fart eftran-ges:car le tuyau eftoit dur comme bois,amp; les fucillcsnous dccoupoyent pieds amp;nbsp;iamquot; [ bcsiufqucsaüfang,eftanstoufiours cnl’caU ’ iufquesau fourc. Et qui rcdoubloit noftre mifereamp; calamité, la pluyc tomboit telle' ment du ciel fur nous, que comme en vn de-luge nous eftions tout ce temps-la entre deux caux:amp; plus nous marchions auât plus ) aufsi
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aufsi nous trouuions beau profonde.
Et lors penfans bien eftre au dernier pe^ riodenoftre vie nous cmbraHafrnes lgt;vn l’au trc,amp; d’affedion commune nous commen-çafmes àfoufpireramp; crier au Seigneur,accu i«’'gt;'*»-fans nos péchez, amp;nbsp;recognoiflas lur nous la S'”’®quot;/'* rigucurdefos iugemés ; Helas,Seigncur, di- p^„ ,„ fiOuS nous,que lommes-nous plus que po- affiidiit». lires vermifleaux de terre, nosames toutes “ altcrces de doulcurfe rôdent entre tes bras: “ ôPere de milericordc,amp;' Dieu de charité,de “ liure-nous de ce pas de la mort:ou (i tu vi_ux '* qu’en ce defert nous tirions le dernier fouf-“ pir de la vic,affifte-nous à ce que la mort,de.“ toutes chofes la plus terrible, nous w nant “ faifir, ne nous cllonne d’auantage,mais que“ nous demeurions fermes amp;nbsp;fiables au fens“-de ta faueur amp;nbsp;bien vucillancc, que nous a- “ uons tantamp;tant efprouué àicaufe de ton,“ Chrift, pour donner lieu àl’efprit de Satan,** 1 cfprit dedefefpoir amp;nbsp;de dcfhancc:carfoit “ que nous mourions, nous pVoteftonsmain-** tenant deuant ta maieftc,que nous voulons « mourir à toy: foit que nous viuions, cefera“ pour raconter tes merucHles au milieu de«* l’alTemblec de tes feruitcurs. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;*«
Nos prières faites, nous marchafmes à Dieu f^,it grand peine droit au bois, tant que nous ar- »»quot;‘^‘»re riuafmes presd’vnc groffe riuicrc qui cou roit au milieu de celle pree. Le canal cftoit5„„7 ^ allez eftroit, mais fort profond: amp;nbsp;l’eau y il n'y lia couloir de grande viflellc,d’autant que tout point de le champ pendoit vers la mer.Ccfut vne au- ‘^‘'”*?.-
EF.j’.
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trc augmentation denos angoiflesjcar iJ n’y atioit home des noftresqui ofaft entrepen-dreapafier la riuiere à nage. Mais en ceftö contufton de nos penfecs^ qiunt à tpOuuer ’ jftoyen depafler outre,il mefonuintdu bois que nous auióslaiflc derriere nous : amp;nbsp;apres au oir exhorté mes freres à patten cc,amp; à con tinuer abien efpererdu Seigneur, ieretourquot; nayau bois,amp; couppay vne longue perche, aucc vn fuft d’vu fermoir a fiez grand qui me -demeura en main,des l’hcureqùelcFort fut prisiamp;rctournay.aux autres qui m’attendoy ■‘eneen grade perplexité. Or-çi,di ie, freres, eifayOrfS fi Dieu parlemoycn de ce bafton ‘nous voudra donner quelque auantage à parfairenoftrechemin. Lors nous conenaf-tnes ta perche deffus l’eau, Tvn des noftres, amp;nbsp;chacun àfon toùr:amp; la tenat par le bout, amp;nbsp;entrant en l’eau portoit la perche quapt amp;foy.Ftau milieu du canal,comme nous en perdions laiveue, le poulTafmcs de force allez prei de l’autre riue , où il print terre,àl’aidedes cannes amp;nbsp;autres herbes qui c-ftoyent àl’autre bord-Et àfon exemple paf-fafmes ainfivn à la fois .'mais ce ne fut pas fans grand peril, amp;nbsp;fans boire beaucoup»’ deeelfeeau falee, voire amp;nbsp;tellement que notis vçna ns à l’autre bord nous allions le emur tout efpoulfeté,amp; eHions ainfi affadis, corne fi nous eufsiôs efte à demi-noyez, Apres que noue fufmes reuenus, amp;nbsp;qnous eufinesrepris courage:tcdans toufiours à ce bois,qne nous amos remarque proche de la
Picr,
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B.
mcvjhpcrclîcimcfmcnons fut neceflairç à^ paffer vn autre bras d’eau, qui ne nous dôna, pas moins defafchcriequcle premier : mais-, graces à Dieu,nous le paffafmes, amp;nbsp;entraf-v Dits le foir dedans le bois, où d meurafmes, là nuift en grande crainte amp;nbsp;tremblement, eftans debout côtre les arbres. Et combien que nous fufsions trauaillez tant amp;nbsp;plus, fi n'auions-nous pas volonté de dormir. Car quclpourroit eftre le repo« des cfprits en telle frayeur? Mefmes nous vifmes aufsi en-uironle point du iourvnc belle grade corne vài cerf,à cinquante pas pres de nous, qai a-' uoitla telle fort groffe,les yeux flamboyans, amp;nbsp;fans fillcr,lcs oreilles pendantes,ayant les. parties de derricre eminentes.Elle nous fem p,,» „. blamonftrucufc, à caufe defes yeux fort c-(,lt;»t la ftincellas,amp; grans à mcruciUesdaqueUc tou ^‘^quot; ^quot;quot;J^ teffois ne s’approcha de nous pounnousfaiT,“^^* .^^ rc aucune nuifance. nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;nbsp;’ja n^nui
Le iourvenu nous fortifmes du bois 8i rc^ent aux uifnies la mcr,à laquelle nous afpiriÔsapresAquot;*-Dieu, comme au feul moyen de fauucr nos vies. Mais nous fufmes derechef fafehez amp;• troublez: car nous apperceufmes vn pays de; mardis amp;nbsp;lieu fangeux, plein d’eau amp;nbsp;cou-ucrt de rofeaux, eSme celui que nous auios paflclc iour precedent,Nous marchafmes dôcau trauers decefteprec, amp;afft-z pres de la route que nousauions a faire,noUs appcr ceufmesparmy les rofeaux vne trouppe de gés que nous eftimions dire de prime face nos ennemis,qui fuffent l'avenus pour nous
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; foupper chemin : mais quand nous eufinef veu de pres qu’ils eftoyent defolez comme nous,nuds amp;nbsp;effrayez, nous entendifmes incontinent qu’ils eftoyent de nos gens .'auffi cftoit-ce le capitaine Laudunicrc,fa fille de chambre,laques Morgues de Dieppc,Fran-çois dq Val de Rouen,Icfils de la couronne dcferdeRoucn,Nicaife delà Crotte, Nico las le Menuizier, latrompctte du fieqr de Lauduqiere amp;nbsp;autres,qui tous enfemble fai foyent le nombre de vingtfix hommes, j
'Sur la deliberation de ce que nous auiôs àfiire, dcHx de nos gens môterent au coup peau de Tvn des arbres, le plus haut, amp;nbsp;def-couurirentlyn de nos petisnauircs, qui e-ftoit celui dp capitaine Maillard , auquel ils donnèrent le fignal,par lequel il fur aduerti que nous pulos befom de fon fecours. Lors il nous fit arriuer fa petite barque: mais, pour approcher du riua^c,il nous eftoit nc-ceflaire de traucrler des rofcaux,amp; autres deuxriüîcrcs,fcmblablcs àccllesque nous auions paffe leiourprcccdent. A quoy nous furent grandement vtiles amp;nbsp;neceffaires la percheque i’auoyc couppee l’autre,matin,amp; deux autres,dcfquellcsceux du ficur deLau dunierc auoyent fait prouifion , amp;nbsp;vin fines affez près de la barque. Mais le cœur nous fai!lit,amp; de faim amp;nbsp;de trauail,amp; fufsionsdc Coimoipe mcurczlà,finon que les matelots nous euf-^‘^'^^ prcftélamain, qui fcnionfircrent fort fi courablcs,amp; nous portèrent les vns après les autres iufques dedans la barque, amp;nbsp;nous rendirent
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rendirent tous au naiiire, ounous fufmes bien amp;nbsp;chèrement reccus.Ils nous donnèrent pain amp;nbsp;càü,amp; après auoir mangé, nous commençafmes petit à petit à. reprendre force amp;nbsp;vigueur; qui nous fut argument iref certain derccognoiftrclefalutdu Seigneur, lequel nousauoit fautiez : contre l’cfperani-ce d’vric iufinité de dangers de mort, def-quels nousauionsefté enuironnczamp; affic-gez déroutes parts, pour luy en rendre graces Si louange à iamaisiNous padafmesain-fi toute la nuift, racontans les mcrucilles du Seigneur, amp;nbsp;nous confolafmcs les vus les autres en là fouüenance de rioflrc falut.
^Ln Frani^on efcbajipeK-dit ma/Jatretb la Floride, s’en retournent en France, ils donnent la chaffe amnanirt HeJp ^gnol, amp;nbsp;arrinent « la Rochelle.
CH A P. IX.
R le loür ertant venu laques Ribaut,capitaincdcla Perle nous aborda . pour conférer auccqués nous de ce que nous p'Ourrions faire , amp;nbsp;du moyen que nous pourrions tenir pourfau-uer le reftede nos hommes amp;nbsp;les väidtaux. Et alors il fut temodré le peu de Viurcs que nous auions,rios forces rompues, nos muni lions amp;nbsp;apparats de deffenfe laids,l’incertitude del’eftat dehodre Coronal, nefaiebas s’il cftoitcfchouc'cnquclquecofic,âu loirt
Ffâip
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arriéré de nous,emporté de la tormciito N'gt;us concliifmcs done que nous ne pourrions mieux faire, que d’eflayer à retourner en France. Et furent d’auis les plus grans de ftortrecompagnie, defepirer en deux parr tiesceux qui eftoyentefehappez de laiour-nee du Fort:amp; que l’vnc demeuraft en la Pcr le,amp; l’autre ferctiraft fous la charge du capitaine Maillard.
' Or le Jeudi vingteinquiefmc iour du mois de Septembre, nouspartifmes de ce-ftccofte àlafaueur d’vn gros vent de Nord, eftnnsdélibérez de nous retirer enFranec.
rent tellement efeartez, que plus ne nous fomnlcs cntrctrouuczfurlcs eaux.
Nous cinglafmcs cinq ces lieues affezbeu rcufcmêt:amp; alors vn matin enuiron foleil le liât, fufmes aflaillis d’vn nauire Hcfpagnol, lequel nous fouflinfmes au po(siblc;amp; les ca nônafmes d’vue tcllcfortc que nous lesren-dûmes fubicts à noftrc dcuotion,amp; les batif mes tellcmct qu’on voyoit le fmg regorger parles naugeres.Nous les tenions aiofi coin me rendus^ defeendus tout bas : mais il n’y auoit aucun moyen deles crampôncr,à cau-fc du temps qui cftoit fort impctucux:car il yauoitdanger^nles cramponnans s’entre-£roifier,qui cullefté pour nous enfondrerS: faire couler bas.Eiix aufsi fc côtentans de ce fie chargenousdonnèrent congc:amp; Icslaif-fafmes ioycux,rcmcrcians Dieu, de eequ’au cun de nous ne fut blcfie en cefte efearmou-che
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ebene tuétfînoii noftre cuifinicr.
Lcreftede noftre nauigation ha eftefan? aucune rencontre d’ennemtsnnais nous auô? efté fort tgurmentez des vêts, qui nous ont mainteffois menacez denous ietterà la co-fte d’Hefpagne, qui euft efté le comble de nosmal heurs,amp;lachofc quenous luion^ enplusgrande horrcur.Nousallons auC,icii dure fur les eaux beaucoup d’autres chofes, corne froid amp;nbsp;faim ; car il fuit bien entendre qnous autres qui eftios efehappez delà terre de la Floride » n’aui03 pour tout vert cm et ^f^fß*; ou a€couftrcmcnt»tant pour le iourcoriimc *‘’5 pour la nuicl,fors que la fimplc chemffe, ou ^’^^^H^'/g quelque autre petit haillon , qui eftoit bien i, pioridè peu dechofc poumons défendre à l’yicçn-trcdcl’iniure do téps. Et qui’pis eft, le pain que nons magions, nous le mâgions fprt ef-charecment, amp;nbsp;eftou tout corrompu amp;nbsp;ga-fte, mefmement aufsi l’eau que nous allions eftoit toute empuantie , de.laquelle néant-moins nous n’auions pour tout le long de la iournec que plein vue petite taffe,
Cefte mäuuaife nourriture ha efte cayfe que nous eftâs defeedus à terre, fommes tô-bez en beaucoup dediuerfes maladies, Icf-queUes ont emporté pluheurs des hommes qui eftoyet en noftre compagnie. Et fufmes pourlahn decefte pauigation perilleulc amp;nbsp;lamctablc, rendus à la colle delà Rochelle, f^ilt;»:gt;r»'~! où nons auôsefte rccciis amp;nbsp;traitiez fort hu-maincmetamp; graciccfcincnt deshabitans du pays fe de ceux de la ville 3 nous donnaus de
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BRIEF DISCOVRS
leurs bits autant comme noftrenecefsite 1^ requeroit:^ afsiftez que nous auons eftc3c leurgracc,nousauons eu allez de quoy chi' cun retourner en fon pays. ,
^ le Capitaine lean Ribalit cerchantla flotte d' HeJpa^ne foaf la combatre, pen} la fienne.il fi rend a rHeJpa^aal auec ftf gem^qut let taent aefau^ froid.
CHAP. X.
Ous auons dit de lehan Ri-baut qu’il s’embarqua auec l’cflitcdc nos foldacs pour al lcr trouucr les Hc{pagnolsgt;amp; les ayant cercliez par i’cfpace
de cinq iours ne Icstrouua pas, mais il reu contra l’Amiralc de fon équipage, nommée la Trinitc. Et refolu de continuer à dcf tendre la cofte contre la defeente des Helpa gnols,ignorat ce qui nous cftoit adoenu au Fort,entra dedans : pour félon la difciplinc ordinaire en mer, mieux commander a tous fcs hommes. Le temps leur eltoic fort faf-cheux, d’autant quelc venteftoit nicrucil-Icufcmcnt impétueux, amp;nbsp;plouuoit incefTam ment.Le cinquicfmc iourla tempefte fc redoubla, amp;nbsp;les prefla de telle forte, qu’on-quesne fc peurent garder d'eftre efehouez Gaufra- cofte,au deflus de la riucrc de May, en-^’'‘ iiiron cinquantclicucs.Lcs vailleaux furent tous rompus,amp; leurs munitions perduesdes liômcs touteffois vindret tous à terre,refèr-uc'lc capitaine la Grange, qui feietta furvn maft»
-ocr page 101-DE LA FLORIDE. «s maft, amp;nbsp;fuft englouti des eaux: homme entre les autres lequel eft à regretter, tât pour lebonconfeil amp;nbsp;ad reffe qui e-ftoit en luy, qu’aufsipour les fruits de Ion amiable ac-cointance,tant il eftoit commode à drefler ksbommcspourlcs rendre vertueux amp;nbsp;fein blables à luy.
Nos gens alors eftansfauuez à terre de la nine des ondes, le trouucrent incontinent en vne autre fafcherie. Car à la faim qui les tenoit ils n’auoyct aucun rcmcde,finon que ils le prinUcnt tel que la terre leur prefen-toit,c’cft à falloir,herbes, racines ou autres telles chofes, dcfquclltsils penfaifent appai fer leur abbayanttftomac. Il n’y auoit aufsi dcquoy fatiftaire à leur foif Gnon des vieilles cifteincs,oit l’eau eftoit fort troublc;mef memét l’efeume qu’elle icttoit pouiioit tac feulement au regarder faire des plus fiins les plus malades. Neantmoins la rage de leur grande famine lesemportoit à tout auallcr, combien qu’il leur ftmblaft fort eftrangc:amp; furent en telle miferel’cfpacc de huid iours entiers.
Le neufiefme iourils trouuerent d’auen-ture vne barque alfez pctitc,amp; furent de cela aucunement récréez, elperans que par ce moyen ils pourroyent faire entendre leur naufrage à ceux, du Fort. Or entre eux amp;nbsp;le Fort, il y auoit diftance de douze lieues par tcrre,amp; cinquâte par mer: amp;nbsp;euft fallu qu’ils culfcnt trauerféla riuicre des Dauphins qui «ft fort profonde amp;nbsp;large,euuiron d’vn grad
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quart dclicuc.Parquoy ft ns vaiffcaii cclcuf cftoitvncchofeimpnlsiblcdc pafler outre« Quad done ils ciiret rceouurcla barque,ils Jacalfaldcrcntdc leurs chemifes tn lieu dv Houppes.
Z/ar;nj»e Je ie£ Ri-
Adonc Ic capitaine lean Ribaut.de fa g« cc amp;nbsp;modeftie accouftumec, en appclla plu-“ fieurs de fon confei'» amp;nbsp;leur fit enuiron telle remonftrance: Compagnons amp;nbsp;amis,iln’yä moyen decôtinuer la vie en telles miferes amp;nbsp;calamitezda mort nous feroit plus afouhaU
” ter,que de viurc eftâs chargez de telles affli-” cliôsjfinon quenoftrebó Dieu nous ha don ” néla foy de fa procidence,pourattédre le fc ” cours tel qu’il luy plaira nous dóncr:amp;: cepé ” dant c’eft à nous d'employer tout nofire en ” tendement, fi nous pourrons trouu.rl’iflue ” de ces angoifics. leluisd’auis,qu'il yen ait ” quelques vns d’entre nous,lefquels par cefte ” petite barque tédent par deuers IcForu,! fin ” d’aduertir nos gens qu’ils nous vicnnét don ” ner fccours en celle extrême ncccfsitc. Et furie champ iettant groUcslarmcs cômençn àinuoquer le nom deDicu,fcproftcrnât3 terre :amp; tous ccuxaulsi de fa côpagnic. Les prières eftât faites, ils comcnccrent à regarder qui feroit le plus idoine à faire le voyage, amp;nbsp;nômerent Thomas le Vallcur de Dieppe, à qui lean Ribaut donna chargc,qu’aupluf-toftilfiU entendreànos gens en quel defa* lire ils cAoyent tombez, tt allèrent aucc-queluy Vincent Simon , Michel Gouor amp;nbsp;autres iufques au nombre de feize.
Nos
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Nosgcns,côtî)c i’ay dit ci dcuant,cftoyct du coftc de la nuicre au delà du Fórt » amp;nbsp;le iourmefme virent de l’autre cofte vers le Fort vnc trouppc d’hommes en armcs,rcn-feignedcfploycc. Apres qu'ils eurent cognu parcôicâ:iircs,autât qu’ils en pcurent pren drcgt;cn telle diftance de lieu j que c’eftoyent Hefpagnols : Nos François en telle abylme d’angoilTe,pour extreme recours enuoyerét a nage quelques vns delà compagnie, pour leur faire offre de fe rendre leurs vies faunes. Les deleguez furent rcceus de prime face allez humainement.
Le Capitaine de cefte compagnie Flcfpa gnôle,lequel,fe faifoit nommer Vallcmâdc, Dcfldau-proteftacn foy de gentil- home, cheualieramp; ‘n,^‘^J* Chreftien, defabicn-vucillancc enuers les ' Frâçois,mcfincmcnt aufsi que c’eftoit la fa-çônqui auoit chedetout teps pratiquée en lagucrrc,quc l’Hcfpagnol victorieux fe con tctaft,à l’endroit du Frâçois principalemct, fanspairerplusoutrc:ex'hortât en truchemet à lin que tous fulfent petfuadez de cefte bel le promclTe, que jamais il ne votudroit faire faute en ceft endroit, dequoy les nations fe puiffenten après reflentir-Etpreftement fit accouftrervnebarque,cnlaquellc il coman da qu’il y euft cinq Hefpagnols qui entraf-fent dedans,amp; qu’ils palfalfent outre à nos gêsicc qu’ils firét.Oreftâs paifez,amp; la haran~ gue faite de lapart du capitaine Valleman-de,le capitaine lehan Ribaut entra des premiers en la barque aucc les autres gt;iufques
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au nombre de trente , qui fut reccu de Val' Icmandeaflcr humainement,mais les autres IcfqucIs eftoyent de fa compagnie furent menez adez loin arrière de luyamp;'liez toiUi deux à deux,les mains derrière le dos.
Alors le reftedes noftres paffoit »trente carrffiiiik à la fois, Cependant quc VaUcmande faifoit AeiMrJ. entretenir de paroles feintes amp;nbsp;fimulccs ce boq capitaine lean Ribaut, lequel s’attcii' doit fimplemcnt à la foy de ce Vallcmandc» à laquelle il s’eftoit rendu. Or les nollres c' Hans tous pafTez furent ainfi liez cnfcmblc deux à deux.Et comme ils eftoyent fousen-fcmblc, François amp;nbsp;Hcfpagnols, amp;nbsp;chemi' noyent vers le fortrlc capitaine lean RibaUt amp;• autres,nommément le ficur d’Ottign/i quand ils virent ainfi les noftres eftans cou-plez cnfcmblc, commencèrent à changer de couleur. amp;nbsp;derechef le recommandèrent à Ii foy dudit (leur de Vallcmandc qui les afftu roit.lcur difant, que ccslicns eftoyent feulement pour les mener iufques du fort en af-feurance, amp;nbsp;que là illeur ticndroit ce qu’il auoit promis.
Et comme ils eftoyent alfez pres du fort, il commença à s’enquérir de ceux qui eftoy ent matelots charpetiers de nauirc, canon-nit i s,amp; autres,Icfquels feroyent vtilcs aux ofticcsdcla marine :Icfquels eftans choifis le trouucrent le nombre de trente hommes. Et bien toftapres voici vne compagnie du fort,laquellecompag ievenoit à l’encontre de nos gens, lefqucls on faifoit marcher arriéré
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arriére du ficur de Vallcmande amp;nbsp;de fa com pagnic,ainG comme on ferort vn trouppeau ^^^^’”^f de beftes, lequel on chafieroit àla bouche-•t‘”^\ “ rie.Lorsaion defirrres, tabounns amp;nbsp;trompes, lahardicrte de ces furieux Hefpagnols fe desbande fur ces poures François, lefquels cftoyent liez amp;nbsp;garrottez. Là c’eftoit à qui donneroit le plus beau coup de picquegt;de hallebarde amp;nbsp;d’efpec:de forte qu’en demie heure ils gagnèrent le champ, amp;nbsp;emportèrent celle glorieufe viéloire , tuans ceux-là vaillamment qui s’eftoyent rendus, amp;nbsp;lef-quelsils auoycntreceu à leurfoyamp; faune-garde, i
Ordurât cefte cruauté'le CapitaincTcan Ribautfait quelques rcmonftranccs à Val-lemande,pour(auuer fa vie : mefmes le fieur d’Ottigny fe iettant à fes pieds ,l*appclloit defa promeffe. Mais tout cela ne leurferuit de rien, car leur tournant le dos, marcha quelques pasarricrcd’eux,amp;rvn de fcsbour reaux frappa par derrière d’vn coup de dague le Capitaine leà Ribaut,tellement qu’il le fit tomber par terre: amp;nbsp;puis bien tofta-prcs redoubla deux ou trois coups,tant que illuyeut ode la vie.
Voila quel ha efte le traittementquclcs ^^^^ j^ noftrcs(lefquels s’eftoyent rendus fous om- capitaim bredebónefoy) ont receu del’Hefpagnol. Ribaut. Etpourcombler leur cruauté' amp;nbsp;barbarie: ilsontrafeia barbe du Lieutenant du Roy, pour faire inôftre de leur cxpcdition:amp;l’ont bien toft après enuoyee àScuille, ainficom
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me aucuns de nos matelots, referuez amp;nbsp;effl' ployez pour eemefme voyage, nous ont ces jours paflez fidèlement raconte, nomme' ment Chriftofle le Breton du Haute deGra ce,lequel s’eft fccrettement retire de Seuil' leà la ville de Bordeaux ,amp; s’eft lait porter parles nau ires de Bordeaux à Dieppe. Et pour le Trophée de leur renommee amp;vi' ótoirc,defmembrerent ie corps de cc bon amp;nbsp;fidele feruiteur du Roy : amp;nbsp;firent de la te-ftc quatre quartiers, Icfquels ils fichèrent en quatre picqMes,amp; puis les plantercc aux quatre coins du Fort.
Voici où finit le petit difeoursdu voyage delà Floride, rédige au vray par ceux qui s’en retirèrent. Ce qui s’enfuit nous l’auons ouyacertener àvn Gentilhomme Gafeon, amp;nbsp;à d'antrcs,qui auoyent aufsi veu la Floride. C’eft à fauoir.que ces maflacreurs amp;nbsp;bourreaux d’Hefpagne, pourcourôner leur langlante tragedie par quelque notable exploit,firent faire vu beau grand feu deioye, tk ayans entafielà deffus tous ces corps de hommes,de femmes amp;nbsp;de pctis enfans, les re duifircntcn cendres :difans que c’eftoyent de mefehans Luthériens,qui eftoyent venus inftófercefte nouuclle Chreftienté, amp;y ferner des hcrefics. Et quant au Capitaine lean Ribaut, ils luy cfcorchcrent la peau du vifagesauec la barbe,qu’il auoit fort longue, les yeux, le nez amp;nbsp;les oreilles, amp;nbsp;enuoycrent lemafquc ainfi deffigure au Pérou, pour en' faire leurs monftres.
Au
-ocr page 107-DE LA FLORIDE. 93 ' Au rcfte il couroit lors vn bruit,que plù-fieurs tiennent encore auiourd’huy pour vc ritable;à fauoir que cede entreprife ne fut pas plaftoft faite, qu’il y eut des meflagers fccretsencampagnepouraduertir l’Hefpa-gnol qu’ii aiguifaftfes couteaux ; parecque laplufpart de ceux qui palfoyent en laFlo-wdc clloyétdcs Huguenots perturbateurs du Royaume,amp; ennemis du Roy : que ce fe-roit vne belle depefebe, amp;nbsp;que la France n’y perdroit gueres. Si cela eft vray ou non /ie m’en rapporte ace qui en eft, de aux penfio-naires d’Hefpagne.
Comment que ce foit,il eft bien certain que le feu roy Charles neufiefme importune' pas les plaintes des vefues, des orphelins amp;nbsp;des parens de ceux qui auoyent efte maf-facrez, en demanda raifon amp;nbsp;iuftiee au Roy d’Hefpagne, amp;nbsp;que ledit Roy d’Hefpagne, defauoua lefait:amp;en fiefaire informations en la nouuelle Hefpagne. Cependant ceux quieftoyent morts ,cftoyent morts :amp;les rnaflacrcurs ne lailfoyent pas de fe promener amp;nbsp;de faire; la piaffe en Hefpagne amp;nbsp;ailleurs. lufqu’à ce qu’il furuint d’autres affaires,amp; vne pluye, qui lauacc fang-la, amp;nbsp;ne s’en parla plus. Cepédât il n’ba pas efté en la puiffance des Hefp3gnols,ny ne feraiamais, d’effacer la fouuenâce de ceft aâc de la mémoire des hommes, n’y de la prefence de Dieu, auquel ce fangfi mefehamment efpan-du demande encore auiourd’huy vengeance.
Q^ntàla Floride, encore qu’elle fern-
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blé auiourl’huy perdue pour les François» tantyhaqueIcurnornamp;lcur mcmoircyeft encore tant aimce,à caufe des courtoifics qu’ils ont exercées enuers ces poures Bar barcs(tereferue la violence dont le capital' fie Laudunicre amp;nbsp;fes gens vferent par necef' fitc)quc s’il y alloycnt encore, ils y feroyent mieux venus que iamais-Et dcfaitilsenont encore li bonne fouuenancc» que quand quclqu’vn arriucà leur bord,la plus belle ca rclTe qu’ils luy fanent faire, c’eft deluy dire Du fans de ma pin fee, ou Bien-heureux eß t^ui' coni^uet fert à Dieu z/o/ontters. C’clt comme luy dcmandcrlcmocdugHCt,pourfauoirs’il eft François ou nen-.à caufe que les F ran-çoiseRans en ce pays lalcurapprcnoyent à prier Dieu , amp;nbsp;à chanter des Pfeaumes: oU bien ils ont retenu les deux ou trois mots de ces Pfcanmcs- la, pour les auoirouy fou' ucnt chanter à nos gensifi vousicn voulez fa' uoir duuantage, allez le ccrcher:car c’eft tout ce qu’ils en fauuent. Et au relie quand' ils pcuuent rencontrer quelqu’vn qui entend le mot du guet, amp;nbsp;qui parle François»! ils Iccarclfcnt commclcur allié ,amp; luy font toute la chere qu’ils pcuuent. Au lieu que quand ces Âon^lt;e:d’Hcfpagnols y vont, ib les aiment tant qu’ils les voudroyent volon tiers auoir mangez; parce qu’au lieu de leur chanter Dufans de ma pen fee,ou Enam affût ils ne fauent reipodre qu’à coups de pihole.
Requefte
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REQVESTE AV ROY, FAI-tc par les femmes vefues,eri fans orphelins, parens amp;nbsp;amis de fes fuiets, qui ont efte crucUemet maffacrez par les Hcfpagnols, en la Frâce Antartique,nómee la Floride.
Ire,il y ha vne infinite de pontes amp;nbsp;mifcrables perfonnes, femmes vefues amp;nbsp;enfans orphelins, tous vos fuiets amp;nbsp;vaf-____faux,qui fe prefentent aux pieds de voftre Maiefte, les larmes aux yeux aued’entiere obciffance amp;nbsp;naturelle fubiet dion qu’ils vous doyuent : amp;nbsp;portas en leur main deuant voftre excellence amp;nbsp;grandeur, vn pitoyable difeours de leurs tres-iuftos coplaintcs amp;nbsp;doléances : ou pluftoft le trifte fpedacle amp;nbsp;pourtrait vifible de leurs peres, leurs maris, leurs enfans .leurs frères, leurs ncueux,coufins amp;nbsp;alliez, iufques au nombre de huid ou neuf cens hommes.que femmes, amp;nbsp;enfans, quafi tous maflacrez amp;nbsp;taillez en pieces èn la terre delà Floride, par le capitaine Petremclaude, amp;nbsp;fes foldats Hcfpagnols. Et d’autant que l’outrage du faid eft affez odieux amp;nbsp;trop vilain de foy-mefme, amp;nbsp;que le fang de vos pourcs fuiets ainfi trai ftrueufement refpandu crie vengeance déliant Dieu.
C’eft à voftre Maiefte,Sire,de confidcrcr s’il vous plaift,que comme il vous ha eftabli GG.j.
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pour fouuerain Roy,amp; bailié l’obei/Tancf de tant de peuples en main ,pour les regif par bonnes loi», amp;nbsp;les maintenir amp;nbsp;defen' dre fous voftre fauuegardc » Aufsi les poures fupplians n’ont autre attente amp;nbsp;recours,(a-pres Dieu)qu’à implorer voftre aide amp;nbsp;pro-tcâion ,amp; fupplicr trcs-humblemêt voftre Alaicftc de leurtêdrela main,leslrcdrcflcramp; fouftenir,rncfmcmcnt au temps quelaplaye faigne encore de leursangoines:brcft lcura^ fiftcrauec telle douceur amp;confolation,quc l’embfaflement du pere apporte à fes propres enfansjou le bon vifage de maiftre à feS âffçCi'ionez amp;nbsp;fideles feruiteurs. Et de faid leurs plaintes ne font moins dignes de coiU miferation amp;nbsp;pitié', que la cruauté de Pe-trcmclaudc Hefpagnoi eft contraire à toutes fadjons de la guerre amp;nbsp;à toutes loix amp;nbsp;ordonnances qui iamais ayentefté recedes »dcDicu nedeshommes.
Et pour levons faire entendre en particulier, voftre Maiefte, Sire, eft bien informée, que vos fubicts ontefté par vous cn-uoyez en ladite terre de la Floride, fous voftre authorité,amp; fuyuant voftre commandcr-ment exprès, amp;nbsp;par vertu de vos lettres patentes en forme de commifsion amp;nbsp;congé', portées par lead Ribaut. Lcfdits vaflaux ar liuez audit lien de la terre de la Floride ont cfté furieufement inuahispar cinq nauircs Hcfp3gnols,dont leplusgrâtl cftoit du port de huift cens t6ncaux,amp; les autres de moyé port, les gens dcfquels ont premiciemcnt
-ocr page 111-A V R o. ŸA »^ ptisle fort qui auoit cÜéconftruicl cnvo-ftrenom, par les François, amp;nbsp;les hommes femmes amp;nbsp;enfans trouuezdedans ledicforU^ óntefte'parlefditsHefpngnols tuez amp;meur tris,fanslcs prendre à me rei : au contraire inonftroyct les corps des petis enfans tranf percez, plantczau bout de leurs picques: amp;: Îecondement ont fait tuer amp;nbsp;maffacrer leu dit Ribaut ,amp; toute fa compagnie, defept à huid cens liommcsj contre l’aùcurance amp;£ lafoy qu’ils luy auoyent promifcjdc leurfau uerla vicjles ayâs liez bras amp;nbsp;mains par derrière j appclansvos fubicts mefehans bougres,ladres,larrons François,amp; le tout en la prefence amp;nbsp;deuant les yeux dudit Ribaut. Lequel pour l’horreur dudit maflacro, fe vouloir approcher dudit Pctréclaudc,pour fe mettre en fa protection :amp; ncantmoinsle dit Petrcrhclaudc l’auoit repouffé, amp;nbsp;fait tncrä l inllant parvn de les foidats j qui luy bailla vn coup de dague dedans le corps par derrière. Duquel coup ledit Ribaut fWuba parterre ,amp;ellant tumbe,ledit foldat luy bailla encore vn coup dedans le corps,par deuant, en forte que ledit Ribaut demeura mort en la place. Et ce fait, ledit fol Jat luy couppa la tefte, luy raza le poil de la barbe, amp;nbsp;partit la tefteenquatre quartiers, qui fièrent plantez fur quatre picques au milieu de b place où les autres Fraçois eftoyét mort». Finalement ledit Capitaine Hefpagnol ent-uoya vue lettre au Roy d Hefpagne, amp;nbsp;fît en dorre dedâsladite lettre Icpoùdela barbg
ÇG.ii.
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dudit Ribaut : que Pctremclaudc auec fcs tens, faifant rcceuoir vnchontc, auec telle rauade, auxferuitcurs d’vnRoy fi puifiant amp;nbsp;renommé, veut bien qu’on entende qu’il aime peu l’honneur,amp;craint encore moins la force amp;nbsp;la rencontre du maiftre. Voftre Maiefté d’autre part n’ignoirpas que pour mieux triompher d’vne melchanccté, amp;nbsp;redoubler l’outrage de ce crime tant execrable , mefmes après la mort on s’eft loué amp;nbsp;fait comme vnc moquerie oc la tefte amp;nbsp;du pojl de ccluy qui n’eltoit rie moins que voftre Lieutenant general,amp; que le papier d’V ne mißiuc ha ferui de plat pour faire vn pre-fcnt du poil de fa barbe.
Touteffois c’eft chofe incroyable,qu’vn Roy ni Prince Chreftien, ne Payen quelcon que voluft auoer ledit Pctremclaudc pour vn faift de cruauté fi bartarc, amp;nbsp;qui furpaf-fe la rage amp;nbsp;fureur des tygres amp;nbsp;lyôs: amp;nbsp;d’au tant plus execrable que l’exécution s’encft faite en plein iour de paix,àtrefuc amp;nbsp;ap-pointement d’amitié , fans guerre ouuertc de voftre part contre autre nation ne fti-gneurie quclconquc.Etneantmoinslcs Hef pagnols y ontmhla maiu,voircfuries lieux amp;nbsp;perfonnes qni dé rien ne touchent, ni appartiennent à autre qu’à voftre Sceptre amp;nbsp;Couronne, finon que Pctremclaudc voluft dire, que la force d’vn eftranger ha lieu contre le Roy,pourvfurpercc qui cft voftre, ou s appropricrla puiftanec de commander en voftre place,ou bienfedónerl’autorité des lettres
-ocr page 113-A V R o Y. lei lettres,amp; Ic regard ou foin de chaftiment amp;nbsp;correétion fur eux,comme Dieu vous lia commis pour fubiets, auec vn lien fi eftroit de fubicótion,d’obei(Tance, Se naturelle affe ftionenuers vous,que pluHolHls mourroy cnt de mille morts, que de condefeendre à l’opinion de changer de maiftre,ni bailTcr le col fous la merci d’autre ioug à nouuclle principauté.
Si donques Petrcmclaudc eft defauouc, fonmaiftre n’a que dire , qu’il n’en tait ou vous lailfe faire la iuftice, auec fatiftadion amp;nbsp;reparation telle qu’à vous appartient; vous remettant amp;nbsp;quittant au furplus la iu -rifdlâ:ionamp; pofTeßion de ladite terre de la Floride, qui de long temps vous edoit occu pee amp;nbsp;emparee par vos fubicts en voftre nom, amp;nbsp;fous le titre amp;nbsp;authorirc de voftre Sceptre amp;nbsp;Couronne. loinâ que vofdiéls fubicts n’y ont pas efte chaifez ni rédigez comme fugitifs ou forbannis, ma/s comme ambaffadeurs, officiers amp;nbsp;minifttes de voftre Maiefté,amp; tels recognus amp;nbsp;aduouez par vos lettres patentes de commifsion du-did Ribaut,tcnu amp;nbsp;reputéen cefte part corne voftre perfonne niefrqc.Et combien que telle indignité foit atroce de foy-mcfmc, fi eft-ce qu’ellcredouble quand elle demeure impunie :amp; cela augmente le déshonneur, amp;nbsp;eftend le fcandale plus loin quand les meurtriers,violateurs delà foy publique font impuniment fouftenus amp;nbsp;nourris en leur malice,Sc authonfez.
CG.iü.
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Ceque voflrcdcbonnairctc,Sirc,nc torf dra iamais faire, ains embradera lefait amp;nbsp;I» qucrclledcfcs poiires fuicts , ainfi iniulfe-mentourragezau preindice de toutes loix. auecqnes fi grade cruauté, qu’il fcrnble qiic cefoit pourdifloudre lesliensde toutefo-cietc humaine , amp;nbsp;rompre l’ordonnance de Dieu,fi bien que ledit Pctrcmclaudc voU' droit par fa rule faire perdre toute occa-fion de modeftie, quand iufques à l’extrême • la patience eft blcflè c.
Les Cartaginois amp;nbsp;peuples Affricains ont reccu grand blafme amp;nbsp;vitupère de rompre leur foy contre tous propos, quand l’oc cafion s’eft offerte à leurs auantage. Les Ro mains ont tellement tenu la leur, quemef* mement ils la gardeyent à leurs propres en nemis. PlcuftàDieu qu’on pcnll auiourd’ huy donner telle louange à Petremclaude amp;nbsp;à ceux de fa maifon,qui fc font legercmct dilpenfez de rompre leur foyamp; promcHej iurerpar hypocrifie,enabufantdu nom de Dieu , comme pour le faire compagnon de leur traifire dénoyauté: que fi Dieu fe fert quelque fois des mefehans, amp;lcurlafclic la bride pour accomplir la mefure de leur, for-ceneric,comme les Canancens,il n’eft pourrai' t fuict à la force des hommcs;ains comme il cft plus fort que tous, aufsi il fortifie les plus foibles,èV nousfolicitcamp; pourfuit de faire nortre deuoir : à fin de n’.oublier la rigueurdefa iufticeamp;vengeance fous ombre de fa douceur Si mifericordc. Tantj ha
• que
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que comme en vh rncfmc ade les crimes amp;nbsp;forfaits des hommes fc dlt;.clarcnt,amp; la indice de Dieufe produit:ainfi l’aduertiflement leur td propre de ce qui cd dit,que Dieu be fongne aux cœurs des mefehans comme il h,y plaid,amp; neatmoins leur rend félon leur démérites.
-Sire, vous auez ony quelsgemidemens amp;nbsp;regrets,quelles larmes amp;nbsp;pludod quels derniers foufpirs accompagnent le tridc fou-uenir de nodre mifere amp;nbsp;calamité',le piteux difeours amp;nbsp;progrez de l’audacieufe amp;nbsp;fcandalcufe entreprife de Pctremclaude ƒ les marques de fon iniudiceamp; tyrânierefprou uee par toutes loix,Ies trides vediges de fon infidélité amp;nbsp;trahifon, Icmcfptis intolerable qu’il ha fait de vodreauthorité amp;nbsp;grandeur: bref,le meurtre amp;nbsp;cruauté commife à l’encontre de vos feruiteursSe fubicts,tousou la plus part vertueux amp;nbsp;vaillans Capitaines, gens d’honneur amp;nbsp;bonne renommée , gens quiedoyent pourferuirde muraille viucà l’entour de vodrc Maicdé, amp;nbsp;faire tede amp;nbsp;frontière à tous ennemis de vodrc Edat. Parquoy s’il fut iamais mémoire d’humaine compafsion amp;nbsp;mifericorde, les fupplians cfperent que Dieu par fa bonté en touchera fi viuement’vodre cœur, que vodrc Maie-dé fc voudra reflentir de nos iudes doléances amp;nbsp;pitoyables complaintes, embradera nodre fait pour en rendre indicé. Et pour çcdeftcél nous tendra la main de fa faneur amp;nbsp;protcéiion, qui fera vne œuurc de pitié.
-ocr page 116-’»4 RÊQVESTE AV ROY.
teigne de vod re vocation, amp;nbsp;vn eftLd dccM riteenucrsvos propres fuiets,poiiradou' cirl’amcrtume de leurs affligions,amp; tefmoi gner leur innocence à toute la Chreftiente-amp; par ce moyen ferez aime' amp;nbsp;reccu de toU' tes nations,non fculemét comme Roy.mais auisi comme Perc de voftre peuple.
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